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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 139 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 26 février 2019

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord. Nous allons entendre des représentants sur la question du renforcement des capacités communautaires et de la conservation des talents dans les communautés des Premières Nations.
    Avant de commencer, dans le cadre d’un processus de réconciliation initié par le Canada, nous reconnaissons que nous sommes ici, à Ottawa, sur le territoire non cédé du peuple algonquin.
    Dans la préparation de notre rapport, nous en sommes à l’étape de l’audition des témoins. Chaque groupe disposera donc d’un maximum de 10 minutes pour faire son exposé préliminaire. En approchant de la fin du temps qui vous est imparti, je vais essayer de vous indiquer, de plus en plus souvent, le temps qu’il vous reste. Je vous invite à en tenir compte. Lorsque nous aurons entendu tous vos exposés, nous passerons à la période de questions des députés. Comme tous auront des questions, je vous incite à y répondre de façon brève et directe parce que nous entendons bien produire un rapport important sur cette question.
    Cela dit, mettons-nous au travail.
    Nous avons devant nous les représentants du Manitoba First Nations Education Resource Centre, ou Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba, le CREPNM. C’est un plaisir d’accueillir, à l’heure, une équipe du Manitoba d’une telle élégance. Je ne devrais pas dire cela — vous n’êtes pas élégants. Je voulais plaisanter, mais je crois que je m’enfonce. Tant pis, que cela figure au procès-verbal.
    Bienvenue à tous.
    Nous pouvons maintenant commencer, en espérant que le groupe suivant arrivera avant que vous ayez terminé. Vous êtes libres de vous répartir votre temps de parole comme vous l’entendez.
    Bonjour. Je tiens à vous dire, au nom du Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba, le CREPNM, que mes collègues, Donald Shackel et Shirley Fontaine, et moi sommes ravis d’être ici.
    Pour remonter dans le temps, sachez que c’est dans les années 1970 que les Premières Nations du Manitoba ont commencé à exercer un contrôle local. « Wahbung: Our Tomorrows » nous a servi de phare pour guider notre action. Longtemps avant la création du CREPNM, nos chefs des Premières Nations et notre peuple ont soulevé le besoin de mettre en place un système d’éducation qui favoriserait la rétention de nos savoirs, principalement par l’enseignement de nos langues et de nos cultures ancestrales. Pour en assurer l’efficacité, l’éducation doit reposer sur la pertinence, l’engagement, la motivation et des objectifs précis. Le processus doit faire partie des activités et des progrès de la communauté. La beauté de notre système d’éducation des Premières Nations était qu’il était sans faille.
    Le CREPNM est le principal organisme de prestation des services d’éducation des Premières Nations du Canada. Nous comptons plus de 250 employés affectés à la prestation des services et plus de 340 employés dans 10 écoles des Premières Nations qui font partie de notre Réseau scolaire des Premières Nations du Manitoba récemment créé. On dénombre environ 51 écoles au Manitoba. Nous donnons présentement une formation accréditée à plus de 300 professionnels des Premières Nations dans divers domaines d’études, y compris des psychoéducateurs, des orthophonistes et un éventail d’autres professionnels cliniques.
    Comme je vous l’ai déjà indiqué, nos principes reposent sur la maxime « Wahbung: Our Tomorrows » qui traduit une pensée et une approche collectives. Notre travail se fait à la base et est axé sur la communauté. Nous collaborons avec les communautés des Premières Nations dans tout le Manitoba. Nous mettons essentiellement l’accent sur une programmation de type communautaire et sur une approche axée sur le renforcement des capacités, afin de pouvoir nous doter de notre…

  (0850)  

    Je prends donc le relais. Je m’appelle Shirley Fontaine et je suis la directrice exécutive associée du CREPNM.
    Je suis ravie d’être ici ce matin, sur le territoire non cédé du peuple algonquin. Je vous remercie de nous avoir invités à prendre la parole devant vous.
    Je tiens à vous présenter notre mandat. Il porte sur l’apprentissage continu et ne se limite pas au renforcement des capacités ni à la formation des adultes. Il inclut maintenant l’apprentissage durant la petite enfance et l’éducation de la maternelle à la 12e année. À nos yeux, l’apprentissage continu est important. Il débute dans l’utérus et se poursuit durant toute la vie d’une personne. C’est une notion très importante à nos yeux parce qu’elle est intégrée à nos principes sur l’importance de l’apprentissage continu.
    Nous avons quantité de programmes particuliers qui connaissent un succès retentissant et répondent aux besoins de chaque communauté. Actuellement, nous utilisons le nouveau programme fédéral d’apprentissage et de garde de jeunes enfants, de 0 à 6 ans. Nous aidons les Premières Nations à élaborer leurs propres stratégies au niveau local, ainsi qu’au niveau régional. C’est une tâche à laquelle nous allons nous consacrer pendant les deux ans à venir.
    Nous visons à mettre en place un organisme autonome des Premières Nations qui s’occupera de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants au Manitoba. Nous lui fournirons des appuis au programme Bon départ et de garde, ainsi que dans les domaines de l’élaboration des programmes et des documents de base, des possibilités de formation et de renforcement des capacités pour les éducateurs des jeunes enfants. Nous tenons beaucoup à concentrer nos efforts sur les méthodes traditionnelles d’éducation des enfants. De la maternelle à la 12e année, nous offrons une vaste gamme de services de soutien pédagogique pour les étudiants des Premières Nations.
    La plupart des membres de notre personnel sont de descendance autochtone. En vérité, plus de 70 % d’entre eux sont des professionnels des Premières Nations. Nous dénombrons chez eux certains des groupes les plus importants de titulaires de doctorats et de maîtrises. Nous avons l’une des capacités les plus élevées parmi tous les organismes des Premières Nations du Canada. Notre taux de rétention est réellement élevé, puisque plus de 40 % du personnel compte plus de cinq ans d’ancienneté, et que de nombreux employés travaillent au sein de notre organisme depuis sa création.
    Nous disposons également d’un outil que nous appelons le Réseau scolaire des Premières Nations du Manitoba. Il nous permet d’appuyer les administrateurs de nos 10 écoles membres dans les domaines du leadership pédagogique, du perfectionnement professionnel, de la planification de l’intervention aux crises et d’autres domaines essentiels d’une école efficace pour nos étudiants.
    Nous en sommes à notre seconde année de fonctionnement. Nous avons constaté une hausse des taux de fréquentation et de rétention des élèves. Cette hausse est attribuable, pour l’essentiel, à notre programme axé sur le territoire, les langues et les cultures.
    Bien que nous ayons été en mesure de retenir un plus grand nombre d’employés, nous sommes toujours confrontés aux difficultés du recrutement dans nos écoles des Premières Nations qui sont isolées dans le Nord. Ce sont d’ailleurs là des difficultés omniprésentes au Canada. Il est difficile de faire venir travailler des gens dans les communautés isolées.
    Nous avons également quelque chose d’unique au Canada. Il s’agit de notre collège virtuel qui offre des services aux étudiants du secondaire. Ceux-ci n’ont pas à quitter leur communauté pour obtenir les crédits dont ils ont besoin pour entrer à l’université et au collège. Nous leur offrons, entre autres, des cours de sciences, de mathématiques et de langues, qui leur sont indispensables pour s’inscrire à l’université.
    Je cède maintenant la parole à M. Shackel.

  (0855)  

    Bonjour. Je m’appelle Don Shackel et je suis le directeur adjoint de l’éducation spéciale au CREPNM.
    La dimension du renforcement des capacités des Premières Nations dont je vais vous entretenir ce matin cible les enfants des Premières Nations ayant des besoins particuliers qui vivent dans les communautés autochtones du Manitoba.
    Jusqu’à il y a peu, les étudiants handicapés des Premières Nations devaient quitter leurs communautés pour bénéficier de services adaptés ou rester dans leurs communautés sans accès à de tels services, ou encore être confiés aux bons soins du CFS pour accéder à ces services. C’est au Manitoba que les enfants sont les plus craintifs, et la majorité d’entre eux appartiennent aux Premières Nations.
    Cela fait maintenant presque trois décennies que mon travail consiste à venir en aide aux communautés des Premières Nations. Il m’arrive assez fréquemment, dans nos communautés, de rencontrer un étudiant sourd qui n’a accès à aucun moyen d’apprendre le langage signé américain.
    Afin de mieux répondre aux besoins courants de ces enfants, les directeurs de l’éducation et les chefs du Manitoba ont confié au CREPNM la mise en oeuvre de deux initiatives stratégiques uniques de par leur nature et différentes de celles appliquées dans les autres régions du Canada. Tout d’abord, nos leaders nous ont imposé de passer d’un modèle de prestation de services au cas par cas à un système collectif de services cliniques fonction de la communauté relevant des compétences des Premières Nations.
    Je suis absolument ravi de pouvoir vous dire aujourd’hui qu’au-delà de 3 000 enfants des Premières Nations du Manitoba reçoivent maintenant des services dans leurs collectivités d’origine. Ces services sont assurés par toute une gamme de salariés à plein temps parmi lesquels on peut citer des orthophonistes, des ergothérapeutes, des infirmières, des spécialistes de la santé mentale, des psychologues scolaires, des orthopédagogues en lecture, des instructeurs pour sourds et malentendants et des instructeurs du langage signé américain. Beaucoup d’entre nous écoutent aujourd’hui dans les écoles où ils travaillent.
    Le second mandat que nous ont confié nos leaders a été de nous attaquer immédiatement à la formation des membres de la communauté des Premières Nations afin que nos services spécialisés puissent faire le lien avec la langue et la culture des étudiants avec qui nous travaillons. Nous avons commencé par la formation des enseignants ressources, des assistants en éducation et en réhabilitation, des psychologues scolaires, des orthophonistes des Premières Nations, qui s’expriment dans la langue maternelle des étudiants et en anglais, des ergothérapeutes, des psychothérapeutes et des orthopédagogues en lecture des Premières Nations. Je suis très fier de pouvoir vous dire aujourd’hui qu’au-delà de 300 communautés des Premières Nations participent à ces programmes.
    Alors que des membres de nos communautés terminent ces formations, nous observons un taux de réussite supérieur à 95 %. Comment sommes-nous parvenus à un tel résultat? Nous pensons qu’un tel niveau de réussite de nos programmes d’obtention de crédits, de certificats, de diplômes et de formation de second cycle et au niveau de la maîtrise s’explique par les facteurs suivants.
    Le premier est une stratégie ciblée de recrutement et de rétention des élèves. Nous nous sommes dotés de plans stratégiques quinquennaux et décennaux. Nous avons mis en place les premiers partenariats des Premières Nations avec diverses universités canadiennes et américaines. Nous nous sommes dotés de ressources financières ciblées permettant aux membres de nos communautés de voyager à l’extérieur. Il est important de signaler ici que la plupart de nos stagiaires sont des femmes et travaillent à temps plein.
    Nous avons adopté un modèle de cohorte bénéficiant de l’appui des pairs des Premières Nations. Nous offrons une programmation souple et axée sur l’étudiant. Nous tirons tout le parti possible du financement interministériel provenant de la DGSPNI et d’AADNC, et nous appliquons une approche de mobilité verticale. Plus important que tout, nous traitons les personnes inscrites à nos programmes de formation comme des membres de notre famille.
    Je suis absolument ravi de pouvoir faire état devant vous de cette réussite.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Odjick, je vous présente mes excuses. Je vous ai englobé dans la délégation manitobaine. C’est toujours tentant de le faire.
    Des voix: Ha, ha!
    Merci d’être venu nous rencontrer.
    M. Norm Odjick est le directeur général du Conseil tribal de la Nation Algonquine Anishinabeg.
    Nous vous écoutons. La parole est à vous quand vous voulez.
    Je vous remercie, madame la présidente, et je vous salue, mesdames et messieurs les membres du Comité.
    Je tiens tout d’abord à saluer notre député, M. William Amos. Je suis ravi de vous voir siéger à ce comité. Vous avez fréquemment apporté votre aide à notre Première Nation, ainsi qu’aux autres, et je vous en remercie.
    Quant à M. Vandal, qui s’est rendu récemment dans quelques communautés anishinaabe, je tiens à lui dire combien ces communautés ont apprécié son passage.
    Je suis ravi d’être ici aujourd’hui pour vous entretenir de ces questions importantes. Je suis un Anishinaabe de la communauté de Kitigan Zibi et le directeur du Conseil tribal de la nation algonquine anishinabeg. Je compte plus de 17 ans d’expérience à la direction de la communauté et du conseil tribal. J’y ai acquis une expérience directe des défis posés par la rétention des talents et par le renforcement des capacités dans de telles communautés. Avec votre permission, j’aimerais vous entretenir des difficultés que pose le recrutement de personnel, un problème qui me semble lié à celui de la rétention. En terminant, je vous ferai part de certaines des initiatives que les directeurs des communautés, des conseils tribaux et moi-même avons mises en place au Québec.
    Sur le marché du travail d’aujourd’hui, le recrutement et la rétention de personnel qualifié posent passablement de défis. Ce phénomène me paraît être encore amplifié dans les communautés et les organismes des Premières Nations. Ma communauté se trouve à 1 h 30 d’ici, et ce n’est donc pas une communauté isolée. Elle est très bien développée, mais nous avons cependant du mal à recruter des professionnels au sein de mon organisme et dans la communauté. Je vais vous en donner quelques exemples. Dans ma communauté de Kitigan Zibi, il nous a fallu plus de deux ans pour trouver un directeur des finances. Dans une communauté encore plus petite et isolée, le recrutement est encore beaucoup plus difficile.
    De nos jours, les employés sont souvent plus intéressés par un « job » que par une carrière. J’ai parfois entendu parler d'une « économie de lâcheurs ». En plus de chercher à obtenir des salaires de départ élevés et des avantages sociaux attrayants, les employés veulent également un équilibre entre leur vie personnelle et leur vie professionnelle et pouvoir gravir rapidement les échelons. Comme nous manquons de personnel, nos employés doivent porter plusieurs chapeaux et souvent remplir des fonctions qui n’apparaissent pas dans leurs descriptions de tâches. Il est donc difficile de leur offrir un équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle, étant donné qu’ils assument les fonctions d’employés que nous n’avons pas les moyens d’embaucher. Quand vous prenez également en compte des conditions particulières comme la pénurie de logements, il peut s’avérer très difficile de faire des offres d’emploi concurrentielles.
    Il est plus facile de recruter et de conserver les employés occupant certains types de fonctions, comme les employés de bureau, les réceptionnistes et les titulaires d’autres postes comparables, qui cherchent à y rester pendant toute leur carrière, alors que les professionnels et les autres employés dont la demande est forte sont pour beaucoup plus difficiles à recruter et à conserver. Au niveau supérieur des fonctions administratives, comme pour les directeurs généraux, le taux de roulement peut surprendre. Deux fois par année, nous tenons des réunions régionales des directeurs généraux du Québec. Il est pratiquement certain qu’à chacune de ces réunions nous allons voir quantité de nouveaux visages autour de la table. Seule une trentaine de communautés participent à ces réunions, mais il est fréquent que, au bout de six mois, nous découvrions une demi-douzaine de nouveaux directeurs généraux. Ce n’est pas une bonne chose pour la stabilité et le développement de la communauté.
    En ce qui concerne la dimension des capacités, il arrive fréquemment que les employés embauchés n’aient pas reçu de formation dans le domaine précis qui va être le leur. Nombre de nos étudiants se retrouvent dans des programmes généraux d’art ou de sciences sociales pour toute une gamme de raisons. Il ne s’agit pas de critiquer ces programmes, car je suis convaincu que toute forme d’éducation est utile, et j’ai moi-même un baccalauréat en sciences sociales, mais il arrive fréquemment que le bassin de candidats ayant fait des études postsecondaires soit limité. C’est pourquoi il arrive fréquemment que les employés apprennent sur le tas et que, fort heureusement, quelqu’un puisse les encadrer. Il y a bien évidemment des postes de professionnels dans lesquels cela n’est pas possible, comme en ingénierie, en architecture, etc., mais dans de nombreuses communautés les gens ne travaillent pas dans leur domaine d’études. Avec les difficultés de recrutement que nous connaissons, c’est une réalité et nous avons dû mettre en place des programmes efficaces de renforcement des capacités.
    Je ne suis pas venu vous rencontrer pour me plaindre. Je veux vous faire part des solutions sur lesquelles nous avons travaillé et vous faire des suggestions.
    La première est que le gouvernement s’engage catégoriquement à assurer la pérennité du programme d’éducation postsecondaire. Au cours des 15 dernières années, nous avons régulièrement entendu des rumeurs voulant que le financement de ce programme soit aboli au profit d’un système de prêts et de bourses. Je suis tout à fait convaincu que ce serait une erreur. Oui, je sais que les politiques et les procédures en vigueur posent des problèmes touchant à la façon dont le programme est mis en oeuvre, mais nous devrions chercher comment l’améliorer plutôt que de l’abolir. Je crains que, si ce programme est aboli, de nombreux étudiants n’aillent jamais faire d’études postsecondaires et les capacités de nos communautés iront en s’amenuisant.
    S’il est important que vous exprimiez votre engagement envers ce programme, c’est qu’il y a des organismes désireux de mettre en place des bourses pour inciter les étudiants à faire des études dans des domaines précis. Toutefois, nous ne mettons pas en place ces bourses parce que nous ne voulons pas nuire au programme.
    Outre mes fonctions au conseil tribal, je suis le président du Régime des bénéfices autochtones, le plus important régime enregistré d’épargne-retraite autogéré des Premières Nations au Canada. Nous avons voulu instaurer des bourses pour inciter les étudiants à poursuivre des études actuarielles, en finances et en investissements. On nous a cependant suggéré de suspendre ce projet pour le cas où il nuirait au financement du programme d’éducation postsecondaire. Ce programme donne de bons résultats et il faut le préserver et l’améliorer.

  (0900)  

    Ma seconde suggestion porte sur l’amélioration du Programme de financement des conseils tribaux. J’ai été très déçu, préoccupé et voir même fâché quand j’ai appris le montant énorme qui était injecté dans le Conseil de gestion financière des Premières Nations, non pas parce que c’est à lui que cet argent allait, mais parce que je suis convaincu que les fonds alloués à cet organisme auraient mieux servi les Premières Nations s’ils avaient été versés au Programme de financement des conseils tribaux.
    Une partie de notre mandat nous impose d’aider à renforcer les capacités des communautés et à leur fournir des services consultatifs pour accroître leurs capacités. Le budget du Programme de financement des conseils tribaux a été gelé en 1996, puis vidé en 2013 ce qui a gravement amputé notre capacité à venir en aide à nos communautés. Le gouvernement s’est engagé à relever le plafond des 2 % sur le financement des programmes communautaires, mais le conseil tribal n’a eu droit à aucune indexation depuis 1996, si ce n’est ces 2 %. Notre pouvoir d’achat a diminué tous les ans et, malgré cela, on nous demande d’en faire de plus en plus. Nos communautés ont besoin de davantage d’aide, mais c’est un véritable combat pour leur fournir les services dont elles ont besoin.
    Pendant ce temps, le CGFPN s’est vu attribuer 50 millions de dollars sur 5 ans dans le budget 2018, et, par la suite, il encaissera 11 millions de dollars par année. Le Programme de financement des conseils tribaux a été en place pendant de nombreuses années et nous avons beaucoup fait, mais nous ne pouvons pas nous contenter d’être considérés comme un second couteau, alors que d’autres entités gouvernementales bénéficient d’investissements.
    Ma troisième suggestion est d’examiner les investissements faits dans le programme d’avantages sociaux afin de déterminer si son financement est adéquat. Si nous voulons recruter et conserver des employés qualifiés, il faut que nous leur offrions des avantages sociaux concurrentiels.
    Au Québec, nous avons la chance d’avoir un régime de pensions à prestations déterminées comparable à celui du gouvernement fédéral. Toutefois, son financement a été plafonné depuis au moins 10 ans maintenant et le nombre de postes financés est limité. Dans l’ensemble du Canada, il n’y a qu’une autre province à disposer d’un régime à prestations déterminées. Dans les autres provinces, cette lacune doit nuire aux efforts de recrutement et de rétention du personnel.
    L’une des variables déterminant l’efficacité de la rétention est la nature attrayante des avantages sociaux qui, elle, est fonction de la présence d’un solide régime de retraite. Si vous voulez voir comment ces éléments s’articulent, je vous incite fortement à examiner le modèle que nous avons pu élaborer avec le Régime des bénéfices autochtones.
    Ma quatrième suggestion est de chercher à tirer parti des besoins communs et des économies d’échelle.
    Il y a quelques années, j’ai fait appel au Programme de développement professionnel et institutionnel pour obtenir des fonds devant permettre de nous doter d’un espace « Dropbox » contenant des outils administratifs que les communautés du Québec pourraient utiliser conjointement. Nous avons recueilli des versions anglaises et françaises de descriptions de tâche, d’exemples de contrat d’embauche, d’ententes avec des fournisseurs, de politiques, etc. que nous avons téléversés dans cet espace, avec un répertoire pour chaque langue.
    Cette année, j’ai demandé des fonds pour conclure de nouveaux contrats d’embauche et pour nous doter de politiques sur la consommation de drogues, d’alcool et de cannabis au travail ainsi que sur l’adaptation aux nouvelles exigences en matière de droits de la personne. Nous avons également rédigé des lignes directrices sur les enquêtes à l’intention des employeurs, avec des listes des vérifications et des modèles pour les divers types d’enquêtes qu’ils peuvent être amenés à faire, comme dans les cas d’inconduite, de harcèlement et de violence en milieu de travail.
    Tous ces éléments seront à nouveau téléversés dans notre espace « Dropbox » pour permettre à tous d’y accéder, et je crois que ce serait à l’avantage de toutes les régions de disposer de quelque chose de similaire leur permettant de partager des outils. Je trouve important que le Programme de développement professionnel et institutionnel mette de côté des fonds pour permettre l’élaboration d’outils de dimension régionale.
    Ma cinquième suggestion vise la création d’un programme de mentorat et d’encadrement au niveau des directeurs généraux. Comme je l’ai indiqué précédemment, le taux de roulement du personnel à ce niveau est très élevé et cela tient à un certain nombre de facteurs, dont le stress, les capacités et l’étendue des responsabilités. En plaisantant, nous disons qu’il s’agit de postes avec « sièges éjectables ». Comme nous savons maintenant que le taux de roulement des directeurs généraux est très élevé, il faut étoffer le volet du programme les concernant. Je crois que si, au niveau de chaque conseil tribal, nous disposions d’une ressource pour venir en aide au directeur général, celui-ci ferait l’acquisition d’un plus grand nombre de compétences, se sentirait soutenu, moins surchargé et probablement plus tenté de rester à son poste.
    Ma sixième suggestion concerne l’incitation à la mise en place de programmes de téléapprentissage accessibles à partir des communautés. Comme je vous l’ai déjà dit, je suis titulaire d’un baccalauréat et d’un diplôme d’études collégiales en sciences sociales, mais j’ai aussi suivi un programme de certificat conduisant à la maîtrise à l’École nationale d’administration publique, tout en travaillant à plein temps, comme l’ont fait beaucoup de mes pairs. Cela nous a aidés à améliorer nos compétences.
    J’espère vous avoir donné une meilleure idée des défis auxquels nous sommes confrontés dans nos communautés, et j’espère que mes suggestions se révéleront utiles.
    Meegwetch.

  (0905)  

    Je vous remercie.
    Le troisième groupe inscrit à l’ordre du jour n’est pas présent aujourd’hui, et cela termine donc la période des exposés préliminaires. Nous allons ainsi pouvoir poser davantage de questions et creuser un peu plus le sujet.
    Nous allons commencer par accorder sept minutes pour poser une question et y répondre. Monsieur Robillard, la parole est à vous.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leurs témoignages.

  (0910)  

     Mes premières questions s'adressent à M. Odjick.
    La première porte sur les services de gestion des ressources humaines qu'offre votre conseil. Par le passé, ce comité a relevé des difficultés de rétention de la main-d'œuvre, surtout qualifiée, dans les communautés autochtones. Pouvez-vous nous parler de ces difficultés et de la contribution qu'apporte votre conseil aux communautés?
    Nous offrons de l'aide aux communautés en matière de ressources humaines. Concernant la rétention de la main-d'œuvre, il faut savoir que les directeurs généraux ont de la difficulté à cause, notamment, du stress qu'ils vivent et de leurs responsabilités. Je ne pense pas qu'ils soient suffisamment soutenus. Quant aux autres employés, le problème de rétention est davantage lié au fait que les jeunes ont différentes options.
    C'est pour cela que j'ai dit que nous devons offrir des salaires et des avantages compétitifs, et permettre aux employés de concilier travail et famille. Or c'est difficile d'offrir cela quand tout le monde cumule différentes fonctions. Nous les aidons en leur donnant des avis. Chaque année, j'offre de la formation aux employés pour les aider. C'est sûr que la rétention de la main-d'œuvre sera un défi à l'avenir, surtout en ce qui concerne les millénariaux.
    Dans un de vos témoignages précédents, vous avez souligné qu'il est important que le financement fédéral passe par les conseils tribaux, de façon à ce que toutes les collectivités puissent en bénéficier, peu importe leur situation. Pouvez-vous nous expliquer le rôle particulier que jouent les conseils tribaux dans l'amélioration des capacités communautaires?
    C'est encore une question d'économies d'échelle. Cela n'a aucun sens que chaque communauté ait à demander des fonds pour offrir de la formation. Quand la formation est donnée par le conseil tribal, cela aide énormément les communautés.
    C'est la même chose en ce qui concerne les experts en ressources humaines. Ce sont des postes où il y a beaucoup de roulement dans les communautés. Ces gens doivent être bien au fait des lois, des normes du travail, et tout le reste. Nous sommes là pour aider les communautés. Avant d'imposer des mesures disciplinaires à un employé ou de le congédier, la communauté m'appelle pour s'assurer qu'elle fait les choses correctement. Nous agissons comme une équipe d'experts, car il est impossible d'avoir des experts dans chaque communauté.
    Merci, monsieur Odjick.
    Mes questions s'adressent maintenant à M. Keeper.
    Depuis juillet 2017, vous avez mis en œuvre le Système scolaire des Premières Nations du Manitoba. Il s'agit du premier système scolaire financé sur les mêmes bases que les systèmes provinciaux partout au Canada.
    Pouvez-vous nous expliquer plus en détail votre structure de financement et nous dire comment ce nouveau niveau d'autonomie vous est utile?

[Traduction]

    Je n’ai saisi que la dernière partie de votre question. Portait-elle sur les finances et le financement?
    Il veut connaître la structure de vos finances.
    Bien sûr. Nous sommes financés par le gouvernement fédéral. Actuellement, notre budget annuel est d’environ 138 millions de dollars, si je ne me trompe, montant qui englobe les 10 écoles que nous gérons. Nous recevons cet argent du gouvernement fédéral au titre des opérations.
    Lorsqu’on examine notre organisme, nous sommes, pour l’essentiel, un important conseil scolaire qui assure la prestation de services à toutes les écoles des Premières Nations. Dans la réalité, c’est ainsi que nous gérons notre système. Les 10 écoles reçoivent chacune entre 17 000 et 18 000 $ par élève. Quant à la valeur du système scolaire, je ne saisis pas très bien… le montant total pour le système. Le budget de fonctionnement de notre organisme est important.

  (0915)  

[Français]

     Dans le document que vous avez fait parvenir au Comité, vous soulignez que des difficultés demeurent en matière d'attraction et de rétention du personnel scolaire. Pensez-vous que la nouvelle approche de financement de l'éducation des Premières Nations aura un effet positif à cet égard?

[Traduction]

    Je crois que le travail que nous faisons va avoir des répercussions importantes sur notre système. Par le passé, lorsque nous examinions la situation des écoles qui étaient autonomes, nous observions qu’il était très difficile pour elles de fonctionner et d’attirer des enseignants qui allaient rester.
    Nous parlons toujours du pouvoir de la collectivité, et c’est un aspect du mandat de notre centre de ressources sur lequel nous insistons. Nous voulons que les communautés collaborent entre elles plutôt que de travailler isolément. Il y a quelques communautés des Premières Nations qui sont importantes, comme celle d’Opaskwayak (Le Pas) au Manitoba, ou encore Peguis, qui se trouve à une centaine de miles au nord de Winnipeg. Celles-ci ont des systèmes suffisamment importants pour fonctionner de façon autonome, mais il y a tant de communautés qui ont besoin d’aide. C’est la raison pour laquelle nous sommes ici.

[Français]

    Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Je donne maintenant la parole au député Kevin Waugh.
    Je vous remercie, tous les quatre, d'être venus témoigner ce matin.
    Je m'intéresse tout particulièrement au Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba, parce qu'il est le tout premier du genre au pays. Je suis un ancien commissaire d'école de la Saskatchewan, et l'on constatait à l'époque passablement d'écart entre le financement de l'éducation dans les réserves, et le financement en milieu urbain ou hors réserve.
    Madame Fontaine, aimeriez-vous vous exprimer à ce sujet? Je constate que vous recevez actuellement entre 17 000 et 18 000 $ par élève. Vous ne deviez recevoir qu'entre 10 000 et 11 000 $ par élève, il y a quelques années, donc c'est un gros écart. Aimeriez-vous en parler? Je vous en prie.
    Merci.
    Avec le système scolaire des Premières Nations du Manitoba, nous avons réussi à négocier une entente financière passablement améliorée. Nous nous situons en fait plus près de 20 000 $ par élève pour l'année qui vient. Cela nous permet d'offrir de meilleurs salaires au personnel qui travaille dans nos écoles, il nous est donc plus facile de recruter pour les Premières Nations du Sud. Mais le recrutement s'avère toujours difficile dans le Nord, dans les Premières Nations isolées, mais ce sont des enjeux sur lesquels nous travaillons actuellement.
    Nous avons mis sur pied une nouvelle campagne intitulée Teach for First Nations, ou Venez enseigner pour les Premières Nations. Nous nous efforçons de promouvoir les avantages inhérents à travailler dans notre système scolaire et dans les écoles des Premières Nations du Manitoba. Nous offrons aussi un plus grand nombre de programmes axés sur la langue et la culture à nos élèves. Nous constatons une grande amélioration dans la fréquentation de nos élèves, et puisque nous sommes en mesure de les aider en leur offrant plus de cours de niveau secondaire, nous prévoyons assister à une hausse du nombre de diplômés du secondaire dans un avenir rapproché. Nous nous attendons aussi à une amélioration de la transition avec le niveau collégial et universitaire pour nos étudiants.
    Nous prévoyons assister à une grande amélioration, non seulement dans la fréquentation, mais aussi dans les taux de réussite de nos élèves. Nous en sommes à notre deuxième année de fonctionnement, aussi nous verrons notre deuxième groupe de diplômés en juin prochain.
    Nous espérons voir de grandes choses se produire, notamment grâce à l'augmentation des ressources non seulement pour les salaires des enseignants, mais aussi pour l'achat de livres de bibliothèque. Beaucoup d'élèves ont déploré dans le passé l'absence de livres de bibliothèque. Maintenant que nous avons plus d'argent, nous pouvons offrir une meilleure technologie et un soutien amélioré aux élèves sur le plan technologique. Ils ont désormais accès à des ordinateurs portables et à l'apprentissage axé sur la technologie. Le nouveau modèle de financement nous a permis d'aborder un grand nombre de difficultés et d'enjeux que devaient affronter nos collectivités auparavant.
    Les 10 Premières Nations qui font partie de notre système scolaire ont exprimé leur satisfaction parce qu'elles constatent que nous les aidons à gérer et administrer leurs écoles, et aussi parce qu'elles envisagent un avenir plus prometteur pour tous les élèves de nos écoles.

  (0920)  

    Le vérificateur général s'inquiétait du fait que le ministère ne fasse pas le suivi des taux d'obtention de diplôme, ni de la littératie de la maternelle jusqu'en troisième année, et aussi du fait que le ministère n'avait pas la moindre idée des chiffres sur les élèves ayant des besoins particuliers. Comme votre division s'y prend-elle pour faire le suivi de ces renseignements?
    Nous utilisons un système appelé Maplewood. Il nous sert à recueillir un éventail de données. Nous recueillons par exemple des données...
    Est-ce que vous les partagez?
    Nous en partageons une partie. Essentiellement, nous nous concentrons sur les taux de littératie, les taux de numératie et la corrélation entre l'âge et l'année scolaire. Nous faisons également le suivi des taux d'obtention de diplômes de nos élèves, de leur transition, et de l'endroit où ils se dirigent une fois qu'ils ont terminé leurs études secondaires.
    Nous publions un rapport annuel qui est mis en ligne sur notre site Web. Certaines statistiques sont affichées sur notre site Web, elles sont donc accessibles au public, mais nous disposons également de données plus détaillées qui sont à la disposition des Premières Nations participantes, ce qui leur fournit plus de précisions sur leurs écoles respectives.
    Notre responsabilisation ne joue pas seulement à l'égard du gouvernement fédéral, qui nous finance, mais aussi à l'égard des Premières Nations qui font partie de notre système scolaire. Nous souhaitons donc nous assurer de disposer des bonnes données, et par conséquent, de recueillir les bonnes données au départ. Nous faisons également des présentations à l'échelle nationale et internationale sur les statistiques issues de notre système scolaire. Nous avons l'intention de continuer à le faire pendant quelques années encore, je veux dire, partager les renseignements que nous recueillons.
    Merci.
    En ce qui concerne la base de données sur les renseignements cliniques, le domaine clinique de l'éducation spécialisée, pour la première fois, grâce au principe de Jordan et au financement de l'éducation spécialisée très coûteuse fourni par deux ministères différents, nous avons pu créer une base de données. Cette base de données contient les noms de tous les enfants des Premières Nations affichant des besoins spéciaux actuellement, ainsi que les renseignements les concernant recueillis auprès de diverses spécialités cliniques; elle peut être consultée et partagée par les fournisseurs de services.
    Il s'agit d'une première au Canada.
    Oui, vous disposez d'un modèle qui devrait être partagé, comme je l'ai déjà mentionné ici. Le Manitoba et la Colombie-Britannique et certaines régions de la Nouvelle-Écosse semblent avoir pris une bonne longueur d'avance.
    Monsieur Odjick, c'est intéressant. Nous n'avons pas vraiment abordé la question de la grille salariale des enseignants, et ce, même si votre financement est au point mort. Quel est l'écart entre les fédérations d'enseignants du Québec et votre institution?
    Au niveau du conseil tribal, nous ne nous occupons pas vraiment des enseignants. Cette question relève de chaque collectivité. Ce sont donc les collectivités qui s'en chargent. Je pense que vous devriez poser cette question au Conseil en Éducation des Premières Nations du Québec, la CEPN.
    Est-ce que cela pose problème? Je constate que le maintien en poste est un problème. Il y a des raisons qui expliquent ces problèmes de maintien en poste, et j'essaie de comprendre les vôtres. Ce n'est pas toujours une question d'argent, je sais.
    D'après mon expertise, il s'agit surtout de questions de perfectionnement professionnel, pas nécessairement en rapport avec l'enseignement, mais plutôt avec les postes de type administratif et de gestion; il faudrait aider les collectivités à ce chapitre.
    Pour autant que je sache, concernant les enseignants, cela n'a pas été facile de demeurer concurrentiels, et cela dépend de chaque collectivité. Dans l'une de ces collectivités, en l'occurrence Long Point, une collectivité semi-isolée, on éprouve beaucoup de difficulté à recruter et à maintenir en poste des professeurs compte tenu de divers problèmes, mais désormais, la collectivité dispose d'une nouvelle école, et elle a également pu construire quelques nouvelles résidences pour les enseignants. C'est souvent en raison de problèmes comme ceux-là qu'il est difficile de recruter des enseignants.
    Quel genre d'enseignants parvenez-vous à recruter? S'agit-il d'enseignants autochtones ou en provenance d'autres régions du Canada qui viennent s'établir chez vous pour un an ou deux et qui quittent ensuite?
    Dans notre cas, cela dépend. Une collectivité qui est semi-isolée est moins susceptible de recruter des enseignants des Premières Nations parce que les élèves qui poursuivent leurs études au-delà du secondaire sont rares, mais dans une collectivité comme la mienne, qui se trouve à une heure et demie de trajet d'Ottawa, je pense que les enseignants sont à 90 % des Autochtones et des membres de la collectivité.
    La députée Georgina Jolibois prend le relais maintenant.
    Bonjour, et merci beaucoup d'être venus témoigner. J'ai appris beaucoup de choses grâce à vous.
    J'aimerais poser une question au Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba. J'ai trouvé votre exposé très sérieux et instructif, et il nous sera utile, je pense. Comme l'a dit le député Waugh, le Manitoba et la Colombie-Britannique font figure de chef de file à bien des égards, aussi je vous remercie pour le travail que vous accomplissez. Comme chacun sait, le perfectionnement professionnel et la formation de ceux qui travaillent auprès des enfants dans les réserves sont très importants pour toutes les Premières Nations du Canada.
    Quel genre d'obstacles devez-vous affronter en ce qui concerne l'accès à la technologie? J'ai également une autre question. Est-ce qu'il est faisable d'envisager la formation des jeunes dans des domaines comme les sciences et la technologie dans toutes les collectivités?

  (0925)  

    Merci pour vos deux questions. La première porte sur les obstacles à la technologie. Il est vrai que la connectivité constitue un obstacle dans bon nombre des collectivités des Premières Nations du Nord et dans les régions isolées. Nous collaborons avec l'Assemblée des chefs du Manitoba en vue d'en arriver à une stratégie destinée à améliorer la connectivité dans les Premières Nations du Nord.
    Nous pouvons compter sur le Wapaskwa Virtual Collegiate, un collège virtuel qui offre des cours de niveau secondaire à bon nombre de nos élèves des Premières Nations. Cependant, actuellement la connectivité demeure un défi dans les collectivités éloignées et isolées pour ce qui est d'avoir pleinement accès aux cours de niveau secondaire qui sont offerts. Nous tentons de régler ce problème, et nous espérons qu'avec l'aide du gouvernement et des dirigeants des Premières Nations nous parviendrons à trouver une solution pour améliorer la connectivité dans toutes les Premières Nations du Manitoba.
    Quant à votre question sur les domaines d'étude relatifs aux sciences, nous tenons l'une des expo-sciences les plus réussies des Premières Nations au Canada. En effet, le Manitoba tient une expo-sciences annuelle qui accueille un grand nombre de jeunes enfants issus des collectivités des Premières Nations du Manitoba. Ils présentent un éventail de projets scientifiques qui combinent notre savoir en tant que peuple traditionnel et des connaissances scientifiques ordinaires. Les élèves qui participent à ces expo-sciences obtiennent également de bons résultats à l'échelle nationale, et certains ont même reçu des prix pour leurs projets scientifiques. Ils sont très innovateurs. Ces élèves montrent un intérêt pour une carrière scientifique dans le futur; nous espérons donc voir davantage de médecins, de dentistes, de chercheurs et d'autres professionnels scientifiques issus des collectivités des Premières Nations du Manitoba.
    L'expo-sciences annuelle est un projet que nous avons démarré en même temps que nous avons créé notre organisme. Faire en sorte que les élèves connaissent les possibilités inhérentes à une carrière dans le domaine scientifique a toujours fait partie de nos priorités.
    Est-ce qu'il y a des programmes axés sur les aînés dans vos écoles, et dans l'affirmative, comment se présentent-ils?
    Pour nous, le savoir des aînés est l'une des choses les plus importantes que nos élèves doivent apprendre pour former leur identité. Dans bon nombre de collectivités, on a mis sur pied ce que l'on appelle des « programmes axés sur le territoire »; dans le cadre de ces programmes, les aînés et les gardiens du savoir de la collectivité participent à l'enseignement des compétences et du savoir essentiels de notre peuple. Cette initiative favorise un lien plus profond avec le territoire et les enseignements de nos ancêtres pour les membres de nos collectivités. Les aînés jouent un rôle capital, non seulement dans le cadre de l'éducation sur le territoire, mais aussi dans la transmission de nos connaissances traditionnelles par l'entremise de nos langues.
    Au Manitoba, nous utilisons cinq langues. Nos aînés les parlent couramment. Ils viennent nous aider à enseigner nos langues à de nombreux élèves dans nos écoles.
    C'est fantastique.
     Dans les 10 écoles que vous avez mentionnées, concernant les élèves qui viennent du Nord pour étudier dans les centres urbains, je suis curieuse de connaître le genre de système de soutien dont ils disposent lorsqu'ils déménagent. Pouvez-vous m'éclairer à ce sujet?
    Je vous demande pardon, les élèves qui...?
    Les élèves du Nord...
    Nous nous sommes dotés d'un programme de placement en résidence privée. Nous avons également des conseillers qui travaillent individuellement avec les élèves. Nous avons aussi mis un système de tutorat à la disposition des élèves, et nous veillons à ce que les milieux où nous les plaçons soient encourageants et les incitent à la réussite scolaire. Nous avons créé un groupe Facebook pour permettre aux élèves de communiquer entre eux et de se soutenir mutuellement.
    Nous essayons de voir à ce que nos élèves soient bien soutenus pendant leurs études secondaires. Nous savons qu'ils quittent leur collectivité à un très jeune âge. En effet, certains ne sont âgés que de 14 ou 15 ans. Ils se voient forcés de quitter leurs parents, leur famille, leur collectivité, et c'est un véritable défi pour ces jeunes de s'adapter à un environnement urbain. Mais nous avons mis en place à leur intention un programme de counselling et de soutien par les pairs.
    Nous espérons obtenir plus de succès avec notre nouveau modèle consistant à placer les élèves dans des résidences privées au Manitoba.

  (0930)  

    Monsieur Odjick, concernant le maintien en poste du personnel, j'entends la même histoire d'un bout à l'autre du Canada, et plus particulièrement de la Saskatchewan. Je sais que vous avez mentionné dans votre exposé... la langue et la culture. Comment pourrions-nous établir un lien avec ce qui concerne le maintien en poste du personnel?
    Sur le plan de la langue et de la culture, ce que nous avons fait... Nous avons consacré beaucoup d'énergie à la préservation de notre langue. Cela représente un défi pour nous. On pourrait croire que les dialectes se ressemblent, mais entre sept ou huit collectivités, les dialectes sont en réalité très différents. Bientôt nous publierons une appli qui est un dictionnaire visuel. Il sera mis à leur disposition gratuitement.
    Dans nos écoles, on intègre effectivement beaucoup d'aspects linguistiques et culturels. Mais dans les collectivités, en dehors de l'école, c'est moins évident. C'est difficile d'intégrer ces aspects autrement que lors de semaines de la culture afin qu'ils puissent s'entraîner à des activités traditionnelles, mais il est difficile d'intégrer la langue et la culture dans les activités quotidiennes. Comme je le disais, tout le monde est tellement occupé à porter tant de chapeaux différents qu'il est difficile de parvenir à réaliser cette intégration.
    Merci.
    Votre temps est écoulé, madame Jolibois.
    Je cède maintenant la parole à M. Dan Vandal.
    Tout d'abord, j'aimerais vous remercier tous de vous être déplacés. C'est très apprécié, de même que vos excellents exposés.
    J'aimerais éclaircir quelque chose. Les gens du Manitoba appartiennent au Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba, mais pourriez-vous préciser votre relation avec le conseil scolaire des Premières Nations du Manitoba? Est-ce que l'un d'entre vous peut m'éclairer à ce sujet?
    Oui, je peux vous fournir des précisions. Le Centre de ressources éducationnelles des Premières Nations du Manitoba fournit des services à plus d'une cinquantaine de Premières Nations. De plus, depuis quelques années, nous travaillons en vue d'établir le système scolaire des Premières Nations du Manitoba lequel est une branche du CREPNM. Il s'agit de l'une de nos sections. Je supervise les directeurs de cette branche particulière de notre organisation. Ils ont un bureau séparé, mais ils relèvent néanmoins de notre conseil d'administration ainsi que de la haute direction de l'organisation.
    Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres membres du conseil scolaire qui sont issus des collectivités? Sont-ils nommés par vous ou par l'organisation?
    Sur le plan de la structure de gouvernance, nous avons un conseil d'administration de dix-sept membres. Deux de nos représentants, issus des 10 Premières Nations qui font partie de notre système scolaire, siègent à ce conseil. Nous travaillons également à la mise sur pied de comités consultatifs locaux au niveau communautaire afin de disposer d'un lien hiérarchique. Nous avons aussi envisagé la création d'un conseil consultatif de la gouvernance pour les 10 Premières Nations. C'est un projet sur lequel nous travaillons actuellement.
    Très bien.
    La présente étude porte sur le renforcement des capacités communautaires et la conservation des talents dans la prestation de vos services. Quelles sont les plus grandes difficultés à cet égard, à savoir la conservation des talents et le renforcement des capacités?
    L'une des difficultés avec lesquelles nous composons historiquement est notamment notre grille salariale inférieure, mais nous nous sommes attaqués à ce problème. En effet, nous nous sommes rapprochés un peu des normes provinciales pour ce qui est de la grille salariale. Cela nous aide un peu.
    Les besoins à long terme en matière de formation sont un autre facteur sur lequel nous nous sommes penchés. Nous travaillons à l'élaboration d'une stratégie décennale sur les ressources humaines en éducation pour les Premières Nations du Manitoba, et ce, parce qu'une bonne partie de nos employés sont vieillissants. Il suffit de nous regarder pour voir que nous sommes plus âgés...
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Shirley Fontaine: ... il faut donc s'atteler à la formation d'une nouvelle cohorte d'enseignants. Il faut former une nouvelle cohorte d'éducateurs de la petite enfance. Il faut aussi former les jeunes dans la vingtaine pour qu'ils puissent prendre la relève et nous remplacer parce que bon nombre des employés du centre de ressources sont dans la cinquantaine et la soixantaine, et il y en a même certains qui sont septuagénaires. Il faut donc s'attaquer à la formation d'un nouveau groupe de personnes qui pourront assumer les fonctions importantes qui sont requises pour faire fonctionner un système d'éducation pour les Premières Nations.
    C'est excellent.
    Monsieur Odjick, tout d'abord, je tiens à vous dire que j'ai visité votre région avec William Amos. Est-ce que Barriere Lake fait partie de votre conseil tribal?
    Barriere Lake fait partie du deuxième conseil tribal des Algonquins, mais nous avons tenu une réunion la semaine dernière dans le cadre du programme de reconstruction de la nation en vue de collaborer ensemble, toutes les 11 collectivités algonquines, donc, avec un peu de chance, nous allons collaborer encore plus étroitement dans un avenir rapproché.
    Donc Lac-Simon en fait partie, mais pas Barriere Lake?

  (0935)  

    Oui, c'est exact.
    Très bien.
    J'aimerais vous poser la même question, monsieur Odjick. Concernant l'objet de la présente étude qui est le renforcement des capacités, quelles sont vos plus grandes difficultés?
    Tout dépend de la collectivité. En ce qui nous concerne, au niveau du conseil tribal, il nous a fallu 16 mois, comme je l'ai déjà mentionné, pour recruter un nouvel ingénieur. Nous faisons notre possible pour offrir des salaires concurrentiels, mais en 2013, nous avons subi une réduction de 15 % en plus de nous voir imposer une indexation des salaires nulle. Nous avions travaillé à une étude d'envergure nationale pour le programme du conseil tribal afin d'examiner le financement.
    Déjà en 2007, nous tirions de l'arrière de 46 %. Je ne veux pas trop m'avancer concernant le pourcentage de notre retard actuellement, surtout que nous avons dû encaisser une autre réduction de 15 % par-dessus le marché. En ce qui nous concerne, il est important d'être dans la course et d'offrir des salaires concurrentiels. J'offre à mes employés les meilleures conditions de travail possibles. Nous leur permettons d'accumuler les heures de travail afin qu'ils puissent prendre congé le vendredi après-midi en été, et d'autres mesures de ce genre.
    C'est difficile de rester dans la course quand ton pouvoir d'achat est tellement réduit. J'espère qu'éventuellement le programme du conseil tribal fera l'objet d'un examen, parce qu'il s'est avéré efficace. Nous venons réellement en aide aux collectivités avec le renforcement des capacités, mais notre capacité de le faire actuellement s'en trouve sévèrement limitée.
    Merci, Dan.
    Je vais partager quelques minutes du temps qui était accordé à Dan.
    Au Manitoba, il y a encore de nombreuses collectivités qui sont éloignées. Par exemple, Island Lake, qui a une population de 20 000 habitants, mais sans accès routier. Dans quelle mesure cette situation influe-t-elle sur l'apprentissage?
    Vous me mentionniez un exemple de surdité permanente... occasionnée par l'éloignement, en fin de compte, et nous savons qu'en moyenne, les taux d'obtention de diplôme peuvent être inférieurs. J'ai pris connaissance de certains chiffres comme quoi ce pourcentage pourrait être aussi bas que 25 %. Peut-être pourriez-vous nous éclairer sur le lien éventuel entre l'isolement dans ces réserves éloignées et l'éducation, et sur les effets de cet isolement?
    Pour ce qui est de l'isolement, à mon avis, les conditions socioéconomiques qui prévalent dans la collectivité entraînent des conséquences énormes sur l'apprentissage. L'exemple dont je vous parlais, et qui vise uniquement la région de Island Lake... C'est difficile à croire, mais nous avons reçu la visite d'un audiologiste pour la première fois l'année dernière. Lorsque notre audiologiste s'est rendu dans ces collectivités des Premières Nations du Nord, il a constaté que jusqu'à 25 % de la population totale des élèves affichait des taux de perte auditive.
    Jusqu'à maintenant, ces enfants n'avaient jamais eu accès à des systèmes d'amplification, et bon nombre d'entre eux n'ont pas reçu de prothèse auditive. Les enfants atteints de surdité n'avaient pas eu accès au langage gestuel américain, on peut alors se demander comment réussir à l'école si on n'entend pas ce que dit l'enseignant? Pour ces enfants, toutes les possibilités de réussite dans le cadre de ce système étaient nulles. Aussi, comme l'a fait remarquer Lorne Keeper, il s'agit d'offrir des mesures de soutien, en recourant aux économies d'échelle, et en formant les personnes au sein de ces collectivités.
    J'avais l'habitude de me rendre jusque dans les collectivités de Island Lake, il y a 20 ou 25 ans de cela, et à l'époque, les seuls spécialistes qui les visitaient n'appartenaient pas aux Premières Nations. Ils procédaient à une évaluation rapide, et quittaient les lieux après avoir envoyé une facture assez salée. Nos dirigeants et notre directeur de l'enseignement ont alors déclaré, « Mettons fin à cette situation. Il suffit de renforcer les capacités au sein de la collectivité. Il faut former les gens de la localité ». Vous vous rendez dans une collectivité et vous dites, « Nous aimerions que vous ayez vos propres psychologues ». Notre programme de psychologie scolaire, qui se donne à l'Université de Calgary, est en train de former 15 psychologues scolaires des Premières Nations, et quatre de ces étudiants sont originaires de Island Lake.
    Nous en sommes tellement fiers. J'appelle St. Theresa Point, la capitale de la psychologie scolaire du Manitoba. La collectivité va bientôt avoir ses propres psychologues qui s'expriment dans sa langue et qui seront capables de déconstruire le concept occidental de la psychologie, lequel a tendance à se contenter d'accoler des étiquettes et de créer des déficits pour les apprenants des Premières Nations.
    L'isolement est effectivement un facteur capital, et pour avoir travaillé dans ces collectivités pendant des années, je sais à quel point il est important de renforcer les capacités à l'échelle locale.
    Merci.
    Je pense que nous avons épuisé le temps dont nous disposions pour cette série de questions.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Phil McColeman.
    Oh, pardon, il s'agit plutôt de Mme Cathy McLeod.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Cathy McLeod: Avant de commencer, je comprends que toutes les parties ont accepté de reporter d'une semaine la possibilité pour l'opposition de déposer un rapport sur notre plus récente étude. Je tenais seulement à m'assurer que cette décision figurerait au compte rendu étant donné qu'elle est le résultat d'une motion. Je vous en remercie d'ailleurs. Comme nous nous dirigeons vers une période de deux semaines réservée au travail en circonscription, il s'agit d'une bonne occasion de le faire. Encore une fois, j'apprécie beaucoup lorsque les comités font preuve de collaboration et d'encouragement.
    Monsieur Odjick, vous m'avez fait dresser l'oreille lorsque vous avez mentionné le conseil de gestion financière. Tout ce que j'ai entendu à son sujet a toujours été vraiment positif, qu'il s'agisse de l'excellent travail qu'il accomplit ou du renforcement des capacités tellement important qu'il favorise d'un bout à l'autre du pays.
    Peut-être cela s'explique-t-il par la tension des modèles. Dans quelles circonstances est-il préférable de remettre le financement directement aux collectivités? À quel moment devient-il nécessaire de confier à des établissements dirigés par les Premières Nations la prestation de services d'un bout à l'autre du pays? Pourriez-nous développer un peu cette question? Comme je l'ai déjà mentionné, je suis une fervente partisane du conseil, c'est pourquoi vos commentaires m'ont surprise. J'aimerais en apprendre davantage à ce sujet.

  (0940)  

    Une bonne partie du rôle pour lequel il est financé chevauche désormais notre propre mandat. En effet, au sein des conseils tribaux, notre rôle consiste en grande partie à aider les collectivités à renforcer leurs capacités, mais on nous met à l'écart. Notre financement a été amputé. Et en même temps, on assiste à une forte injection de fonds dans le conseil. Il existe un clivage entre le conseil de gestion financière et les collectivités. Il possède des bureaux régionaux, mais ces derniers ne collaborent pas aussi étroitement que nous avec les collectivités.
    Par exemple, chaque année, je dois présenter un plan de travail qui doit être approuvé par les collectivités. Lorsque je présente mon rapport, les collectivités doivent l'approuver. J'ai des comptes à leur rendre. Mais je ne pense pas que le conseil de gestion financière ait des comptes à rendre aux collectivités. Il se prépare à assumer un rôle encore plus important. En effet, avec les ententes décennales, les collectivités devront plus au moins leur rendre des comptes.
    Nous sommes présents; nous existons. Nous sommes proches des collectivités. Nous pouvons les aider. Nous connaissons leurs besoins en matière de renforcement des capacités, mais on nous met à l'écart. C'est cet aspect qui me rebute. Je n'ai rien contre l'organisme en soi. Mais je m'insurge contre le fait que l'on nous met de côté, et que l'on accorde à une autre entité le financement dont nous avons désespérément besoin. Selon moi, les deux ont un rôle à jouer, mais il faudrait examiner quels devraient être ces deux rôles.
    Comme je l'ai déjà dit, je sais qu'ils ont offert beaucoup de soutien et qu'ils ont accompli de grandes choses, mais vous venez de soulever un point qui est nouveau pour moi, et dont je n'avais jamais entendu parler. Je vous remercie de vos commentaires.
    Ma question s'adresse à vous tous... Malheureusement, le projet de loi sur la promotion des langues autochtones ne s'est pas rendu jusqu'à ce Comité. Est-ce que vous auriez des commentaires à formuler à ce sujet? Y aviez-vous jeté un coup d’oeil? Aimeriez-vous faire des commentaires sur ce projet de loi? Je sais que bon nombre d'entre nous siègent aux deux comités, c'est pourquoi j'avais espéré que le projet se rende jusqu'ici. J'aimerais entendre vos impressions sur ce projet de loi.
    On dirait que Mme Fontaine souhaite s'exprimer sur la question.
    J'ai participé aux discussions avec l'Assemblée des Premières Nations, c'est-à-dire aux discussions techniques sur la loi sur les langues autochtones. Nous estimons que cette loi est un élément important de la réconciliation, de même que de l'application de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, et qu'elle donne aux langues autochtones leur juste place au Canada.
    Le Canada est présenté comme un pays bilingue, et il l'est, mais d'un point de vue historique, nos langues sont parlées ici depuis des milliers d'années. Le Canada doit reconnaître l'importance de nos langues et leur rôle dans la construction de l'identité de nos étudiants, dans la guérison de nos communautés et de nos familles, et dans la création d'un meilleur avenir pour notre peuple. Nous avons beaucoup d'espoir que la loi sur les langues autochtones soit adoptée. Le Canada serait ainsi à l'avant-garde... C'est l'Année internationale des langues autochtones. Si le Canada adopte ce projet de loi en particulier, je crois qu'il sera considéré comme un leader mondial dans la reconnaissance de l'importance de ces langues.
    Nous sommes préoccupés par certains éléments du libellé actuel. Par exemple, nous pensons que tout projet concernant les langues doit être dirigé par les Premières Nations. La propriété intellectuelle des Premières Nations doit être protégée. Nous ne voulons pas que les universités ou les provinces contrôlent nos langues. Elles doivent travailler en partenariat avec les Premières Nations dans la promotion du développement et de l'utilisation des langues, ainsi que dans leur revitalisation et les mesures à prendre pour que les étudiants les apprennent à l'avenir. Pour nous, elles font partie intégrante de notre identité.

  (0945)  

    D'après votre exposé, vous travaillez déjà beaucoup sur la question des langues. Selon vous, est-ce que ce que vous faites et comment vous le faites a une influence pratique? Il semblerait que vous êtes à l'avant-garde de ce qui se fait.
    Nous devons conclure très rapidement.
    Nous estimons qu'il faut former plus d'enseignants en langues. Nous définissons actuellement une stratégie à ce sujet. Nous allons préparer plus de matériel pédagogique pour l'enseignement de nos langues. Nous allons également encourager nos garderies et nos programmes d'aide préscolaire à offrir un programme de renaissance des langues autochtones — un programme de type immersion que vous connaissez peut-être —, et nous pensons aussi à des possibilités futures d'immersion linguistique de la maternelle à la 12e année.
    Je vous remercie.
    Nous avons une très brève question de M. Mike Bossio.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je remercie tous les témoins de leur présence aujourd'hui.
    Vous avez mentionné la stratégie décennale de ressources humaines que vous appliquez. Vous innovez vraiment. Je sais que Kevin a parlé plus tôt de partager le modèle et de communiquer les pratiques exemplaires que vous développez. Ce modèle est dirigé par les Premières Nations, axé sur les Premières Nations et créé par les Premières Nations. À mes yeux, il revêt donc une importance vitale.
    Est-ce que vous élargissez votre champ d'action pour partager ce modèle avec d'autres? Même Norm lui-même... Nous voyons des problèmes de capacités partout et vous, vous avez créé un modèle en matière d'enseignement qui pourrait servir dans de nombreuses autres professions.
    Je vais en parler brièvement.
    Ce que nous examinons... Les éléments de notre modèle comprennent l'enseignement par cohortes, et nous veillons aussi à ce que les bons soutiens soient en place pour les étudiants, qu'il s'agisse une aide financière pour le transport, d'allocations, de manuels ou de ressources. Notre stratégie vise aussi en partie à créer un jour notre propre université des Premières Nations. Pour l'instant, nous formons des partenariats avec différentes universités, au Canada et aux États-Unis. Ce que nous regardons maintenant, c'est qui a la formation dont nous avons besoin.
    Voilà le type de formation que nous mettons en oeuvre à travers de véritables partenariats avec des universités, et nous veillons à fournir aux étudiants les bons soutiens pour qu'ils réussissent. Comme cela a été mentionné, nous avons un taux d'obtention de diplôme de 95 % dans la plupart de nos programmes de formation postsecondaire. Nous obtenons de très bons résultats.
    Nous présentons nos modèles à des conférences nationales et internationales. Je suppose que nous devons travailler sur des types d'exposés plus théoriques aussi. Nous avons un partenariat avec des universitaires afin de publier davantage de nos travaux de recherche pour diffuser plus largement l'information.
    Je vous remercie.
    Je suis désolée, mais le temps imparti est écoulé. Nous avons d'autres témoins à entendre.
    Nous vous remercions d'être venus de si loin pour témoigner devant le comité Norm, de nouveau, merci de nous avoir exposé votre point de vue particulier. Il est évident que les députés ont apprécié de vous écouter.
    Meegwetch à toutes et à tous.
    Aux députés, nous allons suspendre la séance quelques minutes, le temps que les nouveaux groupes s'installent.

  (0945)  


  (0950)  

    Bon. Commençons, car il se peut qu'il y ait un autre vote ce matin. Si tel est le cas, nous entendrons la sonnerie. Je crois qu'elle retentit pendant 30 minutes. Commençons parce que nous voulons entendre, étant donné que vous avez parcouru tout ce chemin pour nous présenter un exposé.
    Nous avons le Council for the Advancement of Native Development Officers, représenté par Raymond et Keith. Nous avons également Daniel, du First Nations Land Management Resource Centre.
    Nous entendrons d'abord le Conseil, puis Daniel.
    Oh, bonjour, Kelly. Vous êtes des nôtres par téléconférence. Bienvenue. Nous nous assurerons que les députés précisent à qui ils posent leurs questions.
    Je vais vous demander de bien vouloir, dans la mesure du possible, raccourcir vos exposés. Normalement, nous vous accordons 10 minutes, mais je crains fort qu'on nous appelle. Faites de votre mieux.
    Nous allons commencer par le Conseil.
    Vous avez la parole.
    Je vous remercie, madame la présidente. J'aimerais saluer tous les membres du Comité.
    Cela fait plaisir de voir des visages familiers de chez nous. Cathy est la députée de Kamloops, et il y a aussi M. Hogg. Je suis content de vous voir.
    Je suis moi-même de la Colombie-Britannique. Je m'appelle Keith Matthew. Je souhaite dire quelques mots dans ma langue.
     [Le témoin s'exprime en Secwepemctsin.]
    [Traduction]
    J'appartiens à la Nation des Shuswap. Je préside actuellement le Council for the Advancement of Native Development Officers, le CANDO. Je suis accompagné de Ray Wanuch, qui est notre directeur exécutif. Nous voulons vous parler aujourd'hui du renforcement des capacités communautaires et de la conservation des talents dans la prestation de services essentiels dans les réserves.
    Nous voulons, en particulier, vous parler du CANDO, notre organisation, qui sert nos collectivités dans l'ensemble du pays. La question que nous devons poser est la suivante: est-ce que le développement économique des collectivités autochtones est un service essentiel dans les réserves? À cette question, nous répondons oui, sans aucune hésitation.
    Nous avons dans le pays plus de 400 agents de développement des collectivités autochtones qui appartiennent à notre conseil. Comme le dit le chef Clarence Louie, de la bande indienne d'Osoyoos, « le cheval économique tire le chariot social ».
    Le rôle même d'un agent de développement économique certifié par le CANDO, d'un ADE, est de travailler avec les dirigeants afin de définir une vision pour la collectivité, puis d'utiliser nos compétences en planification stratégique et opérationnelle, en gestion des terres et plus, pour créer une économie qui soutienne cette vision même. Les collectivités peuvent ensuite utiliser les bénéfices dégagés par leurs nombreuses entreprises pour compenser le financement limité de services essentiels. C'est un élément clé, parce que c'est ce que fait ma collectivité en ce moment même.
    Depuis le début des années 1990, le CANDO forme et certifie des agents de développement économique qui travaillent au coeur du développement économique des collectivités autochtones. Nous avons pour mission de renforcer les capacités, ce qui renforce les économies autochtones, en fournissant des programmes et des services aux agents de développement économique communautaire. Nous représentons les ADE des Premières Nations, des Métis et des Inuits de toutes les provinces et territoires du Canada.
    Les quatre principes directeurs de l'éducation et de la formation mentionnés dans le processus de certification du CANDO sont les suivants: être utile, accessible, abordable et certifié. À l'heure actuelle, le CANDO a certifié 202 agents techniques du développement économique autochtone et 209 agents professionnels diplômés du développement économique autochtone, soit au total 411 ADEA dans le pays.
    Nos certifications techniques des ADE sont délivrées par huit collèges et universités accrédités répartis dans tout le pays. Notre certification porte sur 11 compétences mettant l'accent sur le développement économique et la gestion des terres. La formation d'agent technique de développement économique autochtone de notre institution équivaut aux deux premières années d'un diplôme de premier cycle en commerce. Les crédits sont également accumulables et transférables entre établissements accrédités.
    Nos compétences comprennent, entre autres, la gestion organisationnelle et financière, la gouvernance et le leadership, le développement économique autochtone communautaire, le développement des entreprises autochtones et l'entrepreneuriat.
    Avec le comité de sa revue, qui est composé de membres bénévoles, dont beaucoup sont les meilleurs professeurs autochtones du pays, le CANDO produit chaque année une revue spécialisée sur le développement économique des collectivités autochtones.
    Le CANDO donne également ses cours et des ateliers de perfectionnement professionnel à sa conférence annuelle nationale et à ses nombreux événements Links to Learning proposés dans tout le Canada. Le CANDO organise ces événements et il en proposera plus cette année.
    Le CANDO inspire le succès en adhérant aux appels à l'action du rapport de la Commission de vérité et réconciliation et en organisant un sommet annuel national de la jeunesse qui réunit quatre jeunes par région pour les 13 régions du pays. Nous veillons à ce que les jeunes Métis, les jeunes Inuits, les jeunes des Premières Nations et les jeunes non autochtones soient représentés à notre conférence nationale.
    Pour ce qui est de soutenir les secteurs au sein de notre collectivité, nous soutenons les femmes autochtones par l'intermédiaire de notre groupe des femmes en affaires à notre conférence nationale et notre assemblée générale annuelle. Au moins la moitié des délégués et des membres du CANDO sont des femmes. Nous faisons remarquer par ailleurs que beaucoup de nos ADE ne sont pas autochtones.
    Le CANDO s'est associé à la Fédération canadienne des municipalités pour réaliser son initiative de développement économique communautaire, ou programme CEDI, qui encourage la collaboration entre une Première Nation et la municipalité voisine pour créer une stratégie commune de développement économique pour leur région.

  (0955)  

    En octobre dernier, le CANDO a célébré ses 25 ans d'existence et de réussite, ce qui a été une excellente occasion pour les ADE d'avoir entre eux des contacts enrichissants, avec le généreux soutien de Services aux Autochtones Canada et de Diversification de l'économie de l'Ouest. Le CANDO communique avec ses membres, avec les établissements d'enseignement, avec l'administration et avec les intervenants de l'industrie au moyen de son magazine d'actualité trimestriel, de son bulletin d'information électronique mensuel et des plateformes de médias sociaux.
    Les facteurs sociaux déterminants de la santé, comme l'emploi, sont des indicateurs directs de la santé. Le simple fait de savoir qu'on va recevoir un chèque de paie dans deux semaines est bénéfique pour la santé. Cependant, nous avons des défis à relever. De notre point de vue, il existe des possibilités de soutenir la création de bons emplois et le développement économique dans les collectivités autochtones. Nous souhaitons insister sur quatre points à ce sujet.
    Le premier est de nommer des ADE régionaux qui serviront de plus petites collectivités. Le financement annuel des objectifs de développement économique dans les collectivités des Premières Nations est discrétionnaire et repose sur une formule par habitant. En fait, les collectivités moins peuplées n'ont pas les moyens de garder un ADE certifié par le CANDO. Résultat, le poste est confié à une personne non qualifiée qui obtient peu ou pas de résultats. Il y a des économies d'échelle à réaliser quand la collectivité compte tellement peu de membres qu'il vaudrait mieux qu'elle reçoive les services d'un ADE qui s'occupe de plusieurs collectivités dans un cadre régional.
    Le deuxième point que nous souhaitons souligner est qu'il faut conserver les ADE de qualité. Bon nombre des ADE certifiés par le CANDO sont embauchés par des entreprises qui offrent des salaires plus élevés et de meilleurs avantages sociaux. Pour rectifier cette situation, il faut augmenter les salaires et les avantages sociaux. Ce n'est cependant peut-être pas tenable, étant donné le montant du financement annuel d'une collectivité donnée. On pourrait aussi créer un sentiment d'appartenance individuel, de sorte que les membres de la collectivité réalisent un dividende annuel. L'ADE bénéficie ensuite d'incitations en plus de son salaire, mais réalise aussi des dividendes en fonction des programmes et des services qu'il offre à la collectivité dans son ensemble.
    Le troisième point sur lequel nous souhaitons attirer votre attention est qu'il est nécessaire d'améliorer l'accès au capital. Nous avons demandé à Evidence Network de procéder à une analyse indépendante et impartiale de la formation et de la certification offertes aux ADE, et aussi d'analyser l'incidence des ADE sur nos collectivités. Dans ses conclusions, l'organisme Evidence Network nous accorde une note de huit sur dix. Il constate que nous manquons de capitaux. Résultat, nos ADE ne sont pas assez efficaces lorsqu'ils ont affaire à des entrepreneurs des collectivités.
    Pourquoi former des ADE efficaces si on n'a pas accès à des capitaux pour réaliser les plans stratégiques et les activités commerciales qu'ils développent? Le CANDO a conclu une entente de financement triennale avec Services aux Autochtones Canada en raison de sa cote de très faible risque. Nous devons maintenant déterminer où nous en sommes. Avec l'appui de Services aux Autochtones Canada, le CANDO mène actuellement une enquête et une analyse nationales afin de répondre à des questions essentielles pour déterminer comment nous pouvons conserver des capacités dans nos collectivités et comment nous pouvons servir nos collectivités.
    Le dernier point que j'aimerais souligner, madame la présidente, c'est que les principaux éléments du programme CEDI — notre partenariat avec les municipalités que je mentionnais — visent à utiliser des protocoles autochtones pour préparer le terrain à l'établissement de relations, puis à recourir à l'intervention d'un tiers pour qu'une Première Nation travaille aux côtés de la municipalité voisine afin de créer des stratégies communes de développement économique.
    Je vous remercie de nous accorder ce temps ce matin. Je suis très heureux de pouvoir m'adresser au Comité sur un sujet vraiment important. Nous savons que nous servons un domaine sous-représenté auprès des Autochtones dans tout le pays, et nous répondrons volontiers à toute question après l'exposé de notre collègue.
    Je vous remercie de nous donner l'occasion de nous exprimer.

  (1000)  

    Merci infiniment à vous tous. Vous êtes tous de la Colombie-Britannique. Kelly s'est levée très tôt pour témoigner devant notre comité.
    Si la sonnerie retentit, y a-t-il consensus pour qu'on permette aux témoins de présenter leur exposé?
    Des députés: Oui.
    La présidente: Très bien, poursuivons.
    Nous avons Daniel, de la Colombie-Britannique également.
    Puis-je suggérer, comme nous ne savons pas toujours si la liaison vidéo sera bonne, de toujours commencer, par sécurité, par la personne en téléconférence pour être certains, au moins, d'avoir son exposé consigné? Ensuite, nous pouvons passer aux personnes qui se trouvent ici.
    Nous ne voudrions pas perdre la liaison. Ce n'est jamais arrivé avant, mais commençons par le témoin que nous avons par téléconférence. Je vois qu'on acquiesce dans la salle.
    Kally, êtes-vous prête à présenter votre exposé?
    Kelly Shopland, directrice de l'éducation autochtone. Soyez la bienvenue.
    Je vous remercie de me donner l'occasion de parler aux membres du Comité de l'étude sur le renforcement des capacités communautaires et la conservation des talents dans la prestation de services essentiels dans les réserves, y compris de l'éducation des Autochtones.
    [Le témoin s'exprime en kwakwala.]
    [Traduction]
    Je m'appelle Kelly Shopland et je suis membre de la Première Nation des K'ómoks. Je suis directrice de l'éducation des Autochtones au North Island College de l'île de Vancouver, en Colombie-Britannique.
    J'aimerais vous expliquer aujourd'hui comment le North Island College, établissement postsecondaire public rural, s'associe activement avec des collectivités des Premières Nations pour offrir et mettre sur pied des programmes et des formations qui répondent aux besoins et aux priorités en matière de capacités de ces collectivités tels qu'ils sont définis par les nations.
    Le North Island College est un collège communautaire polyvalent qui dessert un territoire d'environ 80 000 kilomètres carrés dans le centre et le nord de l'île de Vancouver et sur une partie de la côte continentale britanno-colombienne. Avec plus 157 000 habitants dans sa région, le North Island College est le collège communautaire rural de la province qui sert le plus de monde. Il est heureux de reconnaître qu'il a des activités dans les territoires traditionnels de 35 Premières Nations, dont les territoires des Nuu-chah-nulth, des Kwakwaka'wakw et des Salish de la côte.
    Les étudiants se déclarant d'ascendance autochtone représentent 16 % des effectifs locaux du North Island College, ce qui est supérieur à la proportion d'Autochtones vivant dans la région desservie par le collège, qui est d'environ 13 %. Il y a des collectivités des Premières Nations dans toute la région et beaucoup ne se trouvent pas à distance raisonnable d'un de nos quatre campus faire la navette tous les jours.
    En tant que collège postsecondaire public, le North Island College se considère comme un partenaire actif des collectivités des Premières Nations pour ce qui est de leur fournir des possibilités et des services d'éducation déterminés par la nation. En tant que collège rural, il assume son rôle dans le renforcement des capacités communautaires et il s'efforce, en partenariat et en collaboration avec les Premières Nations, les collectivités et l'industrie, de stimuler le développement économique, social et local. Cependant, tous les programmes et initiatives sont décidés au niveau communautaire, ainsi que guidés et dirigés par les collectivités des Premières Nations dans toute notre région.
    Le North Island College souhaite saluer et remercier les représentants des 35 nations qui, ensemble, composent son conseil de l'éducation autochtone. C'est ce conseil qui est le vrai moteur des acteurs du changement et du succès des programmes et des possibilités d'éducation offertes aux apprenants des Premières Nations par l'intermédiaire du North Island College. Ensemble, ils sont la voix des étudiants et des collectivités autochtones et ils guident véritablement le travail qu'on y accomplit.
    Ce sont les collectivités, les comités consultatifs régionaux et le conseil de l'éducation des Autochtones qui décident des programmes et des services et de leur ordre de priorité. Une collaboration avec les nations permet d'être éclairé au sujet des initiatives de développement économique, qui déterminent les priorités en matière de programmes et les éclairent.
    Le conseil comprend des membres nommés par les collectivités métisses et des Premières Nations, ainsi que des organisations urbaines. Grâce à des réunions régulières, il conseille également le collège sur des questions relatives au protocole local, aux collectivités qu'il représente, aux besoins locaux en matière de formation et d'éducation, et aux objectifs et priorités. Il informe et conseille au sujet des besoins et priorités du marché du travail local, ainsi que des plans de développement économique et communautaire locaux pour lesquels des stratégies de formation et d'éducation à court, à moyen et à long terme peuvent être nécessaires. De plus, les différentes organisations et collectivités énoncent les priorités linguistiques et culturelles.
    Depuis 2014, le North Island College a offert plus de 90 programmes de formation dans la région qu'il dessert en réponse aux besoins éducatifs et sectoriels définis par les nations. Plus de 400 apprenants à distance ont été servis dans le Nord de l'île et sur la côte centrale. Le North Island College répond aux besoins de collectivités rurales et éloignées grâce à un modèle de prestation de services régionale qui se concentre sur l'exécution de programmes dans les collectivités. Pour améliorer l'accès et la pertinence pour les apprenants autochtones, le collège tient à un modèle de prestation régionale des services d'éducation dans lequel les programmes et l'instruction sont offerts en personne dans les collectivités autochtones, en partenariat avec la Première Nation.
    Au cours des 10 dernières années, le North Island College a innové avec ses programmes hors campus, dans les collectivités, où les enseignants se déplacent là où vivent les étudiants. Ces programmes portent sur la santé et les services sociaux — p. ex. l'éducation de la petite enfance, les soins de santé et l'aide à l'éducation — et des choses comme le tourisme, les langues et les compétences essentielles.
    Ce modèle de programmes offerts dans les collectivités présente beaucoup d'avantages pour les étudiants, y compris le fait qu'il permet aux apprenants de rester près de leur famille, de leur culture et de leurs soutiens. Il donne l'occasion d'apprendre au contact de la terre dans un environnement pertinent et réel. Il permet aux étudiants de faire des travaux pratiques, ainsi que des stages, et d'acquérir une expérience de travail dans leur collectivité, et de commencer à nouer des relations pour de futurs emplois. En outre, l'inclusion des aînés locaux et des membres de la collectivité en tant qu'enseignants est propice au mentorat et permet à la collectivité de jouer ses rôles traditionnels dans la formation et le renforcement des capacités.

  (1005)  

    Une certaine souplesse est nécessaire pour adapter le contenu, le programme et la prestation aux besoins de la collectivité. Les politiques internes, les procédures et les services doivent donc être réimaginés. Pour le faire efficacement et pour aider les étudiants à réussir, les modèles de financement doivent laisser une certaine latitude et permettre de face faire aux coûts généralement plus élevés des programmes hors campus.
    Je vais vous donner un exemple de programme mis sur pied pour répondre au besoin de renforcement de capacités communautaires cerné par le conseil de l'éducation des Autochtones. Nous avons créé et proposons actuellement pour la première fois un certificat en leadership autochtone. Il est conçu pour donner aux étudiants des outils et des connaissances pratiques pour travailler dans la gestion et l'administration d'organisations autochtones et dans la gouvernance des nations.
    La Première Nation des K’ómoks s'est adressée au North Island College pour une formation au leadership nécessaire pour renforcer ses capacités communautaires en mettant tout particulièrement l'accent sur le travail pour et avec les Premières Nations. Il s'agissait de préparer des employés à des postes de direction au sein d'organisations autochtones.
    Le collège a travaillé de concert avec le conseil de l'éducation des Autochtones et organisé une série de consultations communautaires afin de réunir des avis sur ce qui devrait être inclus pour répondre aux besoins des Premières Nations de la région. L'élaboration a été communautaire et axée sur les collectivités. Toutes les collectivités des Premières Nations étaient différentes du point de vue économique, social et culturel, mais elles avaient en commun un besoin d'apprentissage dans la collectivité qui respecte les connaissances locales et fasse appel à la sagesse des aînés. Le certificat vient en complément à la connaissance traditionnelle et héréditaire de la gouvernance et de l'autochtonisation.
    Nous avons également un programme awi'nakola d'apprentissage sur le terrain comprenant la langue qui associe un programme de base en mathématiques et en anglais à une approche plus holistique liée à la terre et qui met les étudiants en contact avec elle tous les jours. Nous continuons d'entendre parler de l'importance de la langue dans le renforcement des capacités, car la langue aide à éliminer les obstacles pour les étudiants, y compris ceux qui en ont une connaissance passive, et leur permet d'amorcer un cheminement éducatif d'une façon culturellement sécuritaire. En réponse au besoin de la collectivité de voir les étudiants entamer leur cheminement éducatif, le North Island College a préparé une série de cours de langue gratuits.
    Ces programmes communautaires sur mesure présentent un ensemble de difficultés. Il faut savoir s'adapter et nous continuons de dépendre de sources de financement ponctuel, souvent annuel. Le collège respecte les compétences des nations pour ce qui est de déterminer leurs besoins et leurs priorités. Nous aimons travailler en collaboration en nous adaptant sous leur direction. Le financement pluriannuel limité pour élaborer et offrir des programmes novateurs qui mènent au succès est toujours problématique.
    On ne peut pas aller trop vite dans ces types de programmes. Il est important de veiller à ce que les étudiants aient assez de temps pour se préparer à des études, pour trouver les instructeurs qui conviennent et qui connaissent la collectivité, et pour respecter les échéances de financement des aides aux étudiants. Les modèles de financement d'une année créent des stress et des obstacles supplémentaires. Les échéances et les paramètres de financement ne concordent pas lorsqu'il y a une demande de financement pour offrir ou élaborer des programmes. Souvent, les décisions et les affectations arrivent trop tard pour répondre aux besoins des étudiants. Ils ont laissé passer la date limite pour faire une demande de financement par l'intermédiaire de leur nation, comme le prévoit le programme d'aide aux étudiants du niveau postsecondaire. C'est un obstacle de taille auquel nous sommes confrontés tous les ans. Il continue de créer des obstacles, au lieu de favoriser l'accès et la réussite.
    Je souhaite conclure en saluant encore le rôle des nations, des collectivités et du conseil de l'éducation des Autochtones en tant que leaders et organes directeurs dans le travail qu'accomplit le North Island College pour offrir des possibilités éducatives aux étudiants, afin d'accroître l'accès, le maintien et la réussite qui conduisent au renforcement des capacités communautaires. Les nations sont les experts lorsqu'il s'agit de déterminer les besoins et les priorités de leurs collectivités respectives, et de repérer les lacunes dans les évaluations des besoins, et nous respectons le travail qu'elles accomplissent dans leur planification communautaire détaillée.
    Le North Island College est toujours honoré d'être choisi comme partenaire dans l'éducation pour améliorer les possibilités offertes aux membres de continuer de renforcer les collectivités.
    Nous remercions tout le monde de nous avoir invités à nous exprimer aujourd'hui et d'avoir écouté ce que nous faisons au North Island College.

  (1010)  

    Tout le monde sait que nous avons un vote dans 25 minutes.
    Nous voulons cependant entendre l'exposé suivant, celui de M. Daniel Millette.
    Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître devant le Comité aujourd'hui. Je vais entrer tout de suite dans le vif du sujet.
    Je vais parler de l'Accord-cadre sur la gestion des terres des Premières Nations, qui est un accord novateur de gouvernement à gouvernement signé à l'origine en 1996 par 13 Premières Nations et le Canada. Il reconnaît le droit inhérent des Premières Nations de gérer leurs terres, leur environnement et leurs ressources conformément à leurs propres lois. Le même accord prévoit la possibilité pour les Premières Nations de rétablir leur compétence et leur pouvoir de gouvernance, ainsi que de commencer à démanteler la Loi sur les Indiens à la fois coloniale et dépassée.
    Les Premières Nations utilisent la possibilité conférée par l'Accord-cadre en le signant et en travaillant avec leurs membres de concevoir et ratifier un code foncier. Une fois ratifié par la Première Nation, le code foncier remplace 33 articles de la Loi sur les Indiens qui concernent les terres. Cela correspond à un quart environ de la Loi.
    Deux principales organisations des Premières Nations aident les collectivités dans les phases de manifestation d'intérêt, d'élaboration et d'application de l'Accord-cadre sur la gestion des terres des Premières Nations.
    La première est le Conseil consultatif des terres des Premières Nations, ou CCT, qui est une organisation composée de membres élus appartenant à des Premières Nations qui ont adopté un code foncier. Le CCT a principalement pour rôle de conseiller en matière de politique et de planification au niveau politique, en ce qui concerne les relations intergouvernementales et dans la défense d'intérêts politiques des Premières Nations signataires et intéressées. Les responsabilités du CCT au nom de toutes les Premières Nations signataires sont prescrites par l'Accord-cadre, telles qu'entérinées par la Loi sur la gestion des terres des Premières Nations, la LGTPN.
    À des fins techniques et administratives, le CCT a créé, en décembre 2001, le Centre de gestion des ressources foncières des Premières Nations. Ce centre doit s'acquitter des responsabilités du CCT. Par conséquent, le CCT et le centre entendent tous deux soutenir les Premières Nations opérationnelles dans le développement de la capacité de gestion des terres, de l'environnement et des ressources nécessaires pour parvenir durablement à une autodétermination réelle et appropriée, conformément à l'Accord-cadre.
    Le CCT et le Centre de gestion des ressources ont pour rôle de fournir de manière continue des services de conseil et de soutien technique de haut niveau, à la demande des Premières Nations. Le moment et la séquence du respect de ces obligations sont déterminés principalement par les Premières Nations. Notre rôle est consultatif, pas normatif, ce qui est essentiel.
    Chaque collectivité se voit offrir une possibilité motivante, qui s'étale sur de nombreuses années d'activité de transition et qui mène au plein exercice de ses pouvoirs de gestion des terres, de l'environnement et des ressources, avec les responsabilités qui vont de pair avec.
    Une fois qu'elles ont entériné leurs codes fonciers et ratifié leurs ententes individuelles, les Premières Nations sont confrontées à la difficulté de définir un système personnalisé de gestion des terres, de l'environnement et des ressources afin de concrétiser les valeurs et les aspirations de leurs collectivités. À cet égard, les Premières Nations diffèrent d'administrations locales comparables hors réserves qui gèrent des terres dans un cadre législatif et de gouvernance provincial bien défini en vigueur.
    Qui plus est, le rétablissement contemporain de cadres de gestion des terres autochtones par les Premières Nations, après 100 années d'application imposée de la Loi sur les Indiens, peut se révéler long et compliqué. Ce processus est considéré comme un acte de décolonisation, Première Nation par Première Nation. Tel est notre point de vue. D'après les Premières Nations opérationnelles, la période de transition peut aller de plusieurs années à plus de 10 ans.
    Les Premières Nations dotées d'un code foncier exercent une autonomie gouvernementale sur leurs terres. Cela comprend le pouvoir de décider quels systèmes et quel personnel répondent le mieux à leurs besoins. Les Premières Nations sont les mieux placées pour décider de la meilleure façon de renforcer leurs capacités avec le temps et de conserver les employés qualifiés.
    Nous recommandons que les programmes du gouvernement fédéral, de même que le financement qui aide à développer les capacités, restent souples et adaptables aux besoins individuels des Premières Nations. Le gouvernement fédéral ne devrait pas imposer d'approche unique ou d'objectifs fédéraux en matière de capacités. Non seulement le faire serait inefficace, mais ce serait une approche coloniale de la question importante du renforcement des capacités.
    Nous adoptons également une approche très souple pour répondre aux besoins et aux priorités des différentes Premières Nations. Notre but n'est pas de certifier ou d'imposer un modèle d'éducation unique à des collectivités dont les codes fonciers, les besoins, la culture et les structures sont différents et qui ne se trouvent pas au même endroit, mais d'augmenter et d'améliorer les compétences établies.

  (1015)  

    Nous travaillons avec le personnel, les dirigeants et les collectivités des Premières Nations afin de proposer des possibilités habituelles ou sur mesure d'accroître la formation, le mentorat et le perfectionnement professionnel. La mise en oeuvre du code foncier ne peut pas et ne devrait pas être confiée à une seule personne. Autrement dit, beaucoup de membres de la collectivité doivent prendre part au renforcement des capacités. L'Accord-cadre n'a pas été conçu pour cela.
    En outre, une formation complète de A à Z tout en occupant un emploi n'est pas toujours la meilleure solution pour une Première Nation dotée d'un plan de travail ambitieux et qui effectue des transactions foncières compliquées.
    Nous avons aussi recommandé vivement que les Premières Nations utilisent leur financement opérationnel pour offrir des salaires concurrentiels aux directeurs chargés de la gestion des terres et à d'autres employés participant à la mise en oeuvre d'un code foncier.
    Les Premières Nations opérationnelles sont sur le point de rétablir leur gouvernance dans un contexte postérieur à la Loi sur les Indiens. Il n'existe pas de manuel d'instruction pour procéder, mais nous avons réussi à créer un vaste réseau de collectivités dont les expériences, les défis et les réussites sont semblables. Ce modèle commun d'innovation est ce qui motive le programme de formation que nous offrons aux Premières Nations.
    La pertinence du sujet, associée à des instructeurs venant des Premières Nations qui ont une expérience de l'élaboration et de la mise en oeuvre d'un code foncier, est essentielle à l'efficacité de notre stratégie. Nous travaillons également avec d'autres organisations des Premières Nations, régionales et locales, afin d'offrir de meilleures possibilités et de meilleures combinaisons de formation encore.
    Pouvons-nous en faire plus? Certainement. Nous cherchons continuellement à élargir notre stratégie, à améliorer notre programme de formation et à former des partenariats avec d'autres organisations afin de mieux soutenir les Premières Nations.
    Je vous remercie de votre temps.
    Nous tenons à nous excuser de ne pas pouvoir approfondir vos exposés et vous poser des questions, mais tous les députés doivent se rendre à la Chambre immédiatement.
    La séance est levée.
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