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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 15 avril 1999

• 1524

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): La séance est ouverte.

Mesdames et messieurs les membres du comité, vous vous souviendrez que la séance d'aujourd'hui devait être consacrée au Budget principal des dépenses, mais M. Axworthy a proposé qu'elle serve à faire le point sur la situation au Kosovo. Je vais donc demander au ministre s'il compte faire une déclaration sur la situation au Kosovo, après quoi nous passerons à l'examen du Budget des dépenses.

• 1525

Le ministre a déclaré qu'il est tout disposé à discuter du Kosovo pendant l'examen du Budget; pour cette raison, nous allons faire preuve de souplesse. Certains voudront poser des questions sur le Kosovo, d'autres sur le Budget des dépenses.

[Français]

Monsieur Turp, vous invoquez le Règlement?

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Non, je voulais m'assurer qu'il soit question du budget et pas seulement du Kosovo.

Le président: On est ici pour les deux.

[Traduction]

Monsieur le ministre, je vous cède la parole.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères et du Commerce international, Lib.): M. Turp parle si doucement que je n'arrive pas à entendre ses interventions.

Le président: C'est à ce moment-là qu'il est le plus dangereux.

[Français]

M. Lloyd Axworthy: Puis-je commencer, monsieur le président?

Le président: Oui, s'il vous plaît, monsieur le ministre.

[Traduction]

M. Lloyd Axworthy: Merci.

Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis heureux de l'occasion qui m'est offerte de discuter du Budget principal des dépenses du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. Nous tâcherons d'adapter nos moyens financiers à l'atteinte des priorités de notre cadre de politique étrangère.

[Français]

C'est déjà ma troisième présentation devant le comité cette année. Ceci montre le profil et les...

[Note de la rédaction: Inaudible]

...de nos relations globales et reflète aussi l'importance et l'utilité du rôle de ce comité et de l'engagement des parlementaires dans notre politique étrangère.

Le débat en Chambre de lundi a montré encore davantage la contribution que les parlementaires peuvent et devront apporter à cet égard, et je voudrais vous remercier pour les examens sérieux faits par tous les députés et les nombreuses recommandations que j'ai reçues.

[Traduction]

Monsieur le président, en réponse à la demande que vous avez faite au nom des membres du comité, nous allons offrir régulièrement, deux fois par semaine, une séance d'information au comité, les mardis et jeudis. Je crois savoir que le comité ouvrira ces audiences à tous les parlementaires, qui pourront ainsi rester d'actualité et suivre l'évolution de la situation au Kosovo.

Avant d'aborder le Budget principal des dépenses, j'aimerais faire le point sur les événements les plus récents au Kosovo et sur la façon dont nous y réagissons.

Je n'ai pas besoin de vous dire, parce que vous pouvez le voir de vos propres yeux et pouvez obtenir les récits qui viennent de la région, que la terreur et l'épuration ethnique au Kosovo se poursuivent. On estime actuellement à plus de 660 000 le nombre de réfugiés, ce qui représentent près de 40 p. 100 de la population de la province avant le conflit.

Ce que j'ai trouvé particulièrement troublant, ce sont les propos d'Olara Otunnu, le représentant spécial des Nations Unies pour la protection des enfants. Après un séjour dans la région, il a constaté que 65 p. 100 des Kosovars expulsés sont des enfants et, chose peut-être plus troublante encore, que la moitié des familles sont séparées d'au moins un membre de leur famille, ce qui illustre la gravité des perturbations qui sont survenues.

Lucie Edwards, notre SMA... J'aurais dû vous présenter Lucie. Je pense que vous connaissez déjà Don Campbell et Jim Wright. Jim est évidemment aujourd'hui une star de la scène et du petit écran en raison des ses séances d'information quotidiennes. Lucie, qui connaît bien l'Afrique, m'a signalé que ces chiffres se comparent à ce qui est arrivé au Rwanda. On peut sans doute en tirer certaines conclusions préliminaires; quoi qu'il en soit, cela montre l'ampleur des sévices que subissent les populations civiles.

Nous sommes extrêmement inquiets pour ceux qui restent au Kosovo. Ils sont aux prises avec une situation extrêmement difficile. Il n'est pas facile de savoir exactement ce qu'il en est, vu la pénurie des sources d'information, mais s'il y a un côté positif à la chose, c'est que la communauté internationale est en train de se doter des moyens de venir en aide aux réfugiés. L'OTAN, le HCR, les organisations internationales de migration, le CICR, les organisations humanitaires oeuvrent d'arrache-pied pour offrir des abris et des produits de première nécessité. Des scènes de chaos observées la semaine dernière se dégage actuellement un peu d'ordre.

• 1530

L'OTAN accentue sa présence en Albanie à l'appui de l'effort humanitaire. Il en va de même pour l'OSCE. Comme vous le savez, le général canadien Maisonneuve est à la tête d'une équipe qui apporte de l'aide aux organisations humanitaires pour le compte de l'Organisation de la sécurité et de la coopération en Europe. L'ambassadeur Raphael Gerard est notre émissaire dans la région et il a pour tâche d'évaluer la situation des réfugiés et de rester en contact avec les autorités albanaises et macédoniennes. Des équipes du ministère des Affaires étrangères, de la Citoyenneté et de l'Immigration et de l'ACDI sont en liaison avec les autorités pour soutenir ce travail. L'ACDI a une mission active, et comme Mme Marleau l'a annoncé, quelque 15 millions de dollars d'aide humanitaire ont été fournis depuis le 30 mars.

Lors de la réunion de l'OTAN lundi, qui réunissait les ministres des Affaires étrangères, on a constaté une vive détermination et un sentiment d'unité dans l'action pour maintenir l'effort de lutte contre les activités du gouvernement yougoslave menées par Milosevic en vue de dépeupler, d'épurer et de maltraiter la population de cette région. L'évaluation donnée à ce moment-là est que la campagne aérienne est le moyen le plus approprié. Comme la déclaration du secrétaire général Solana l'a indiqué, tels sont les principes de base qui nous guident. Nous cherchons que soit immédiatement mis un terme à la violence et à la répression, le retrait du Kosovo par les forces militaires et paramilitaires yougoslaves, le déploiement d'une présence militaire internationale et le retour des réfugiés. Il importe de relever que ces principes ont été entérinés ce week-end par le secrétaire général Kofi Annan, qui a publié un communiqué et qui a rencontré hier les chefs d'État de l'Union européenne pour le confirmer.

Comme je l'ai dit à la Chambre des communes aujourd'hui, j'ai aussi eu l'occasion de m'entretenir ce matin avec le secrétaire général Annan, qui a répété qu'à son avis, ces cinq principes peuvent servir de point de départ à la négociation. Comme d'autres, il nous a exhortés à soutenir cette action. Lui-même participe activement à diverses ouvertures diplomatiques auprès de différentes parties. Nous avons le sentiment qu'il faut continuer d'exercer le plus de pression possible sur le régime Milosevic, qui est responsable de cette crise, pour qu'il comprenne que ce genre de répression de sa propre population est inacceptable au regard des normes humanitaires internationales et que l'on ne peut terroriser sa propre population impunément.

Il a beaucoup été question de la proposition allemande. Laissez-moi vous la situer. J'en ai expliqué une partie pendant la période des questions. Dans les rencontres organisées le week-end dernier entre les représentants de haut rang des pays du G-8, qui comptent le Canada et la Russie parmi leurs membres, on a sérieusement examiné des propositions susceptibles de servir de base à un règlement. Elles avaient été remises par le chancelier et le ministre des Affaires étrangères d'Allemagne aux membres de l'UE. Il s'agit d'un des éléments de cette proposition. Comme beaucoup d'entre vous le savent, il était proposé que si le régime Milosevic consentait à retirer sa police militaire et paramilitaire, il y aurait suspension conditionnelle des bombardements pendant le retrait.

L'autre élément important à mon avis, c'est de voir comment nous pouvons prêter main forte aux organisations internationales d'aide pour apporter un secours immédiat à l'intérieur même du Kosovo, puis de donner suite aux autres conditions fixées par le secrétaire général, par l'OTAN elle-même, en vue d'une forme d'accord.

Je tiens à dire clairement que nous saluons cette initiative. Ce sont des questions importantes. J'ai écouté les déclarations des députés lundi soir—enfin, je n'y étais pas, mais j'ai pris connaissance du compte rendu—je pense que cela traduit bien les positions de tous les parlementaires. C'est important.

Je souligne qu'il s'agit ici d'un processus. Je sais que certains estiment que le Parlement aurait dû entériner ce plan, mais le plan n'est qu'un plan lorsqu'il devient un accord, et à l'heure actuelle, des nuances et des variantes font l'objet de discussions dans les diverses capitales.

• 1535

Le premier ministre a déclaré aujourd'hui qu'il allait s'entretenir avec divers dirigeants de l'OTAN. J'ai eu des discussions supplémentaires ce matin avec le ministre des Affaires étrangères, M. Ivanov, ce que j'ai trouvé encore une fois très constructif. J'ai le sentiment que les Russes tiennent beaucoup à jouer un rôle positif pour trouver un règlement au conflit. Le principal problème est qu'il n'y a pas encore d'accord, sous quelque forme que ce soit avec le régime yougoslave. Tant qu'il n'acceptera pas au moins de répondre à ces ouvertures et à ces initiatives, on ne peut guère progresser. Il faut être deux pour s'entendre, et à l'heure actuelle l'autre partie est muette et a fixé des préalables inacceptables.

J'assure le comité que nous faisons ce que nous pouvons, comme d'autres pays de l'OTAN, les États-Unis, les Russes et d'autres pays. Je ne veux rien sous-estimer. Nous tenons beaucoup à faire usage des voies et contacts diplomatiques pour trouver une forme quelconque d'accord. Je pense n'avoir jamais tenu autant à trouver une solution.

Ce n'est pas facile; cela ne se fera pas du jour au lendemain. Il n'y a ni panacées ni solutions miracles. Il faudra besogner dur, et j'espère que nous réussirons dès que possible. Nous tiendrons les parlementaires au courant en permanence, et non seulement au moyen de séances d'information.

S'il survient des événements indicateurs de progrès supplémentaires, nous communiquerons avec chacun des porte-parole de parti pour les tenir au courant. S'il faut ensuite tenir une séance du comité à brève échéance, nous serons heureux de l'organiser. Voilà où nous en sommes. Je suis disposé à répondre à vos questions.

J'aimerais pendant un instant discuter du Budget principal des dépenses. Vous avez les chiffres dans le document qui est devant vous. Vous y trouverez l'ensemble de moyens que nous employons pour promouvoir la sécurité humaine. On y trouve un ensemble d'outils qui vont de la négociation, de la persuasion, de la participation et de l'initiative jusqu'à des mesures plus musclées, y compris l'option militaire, dans le cas qui nous occupe.

Nous allons continuer à raffiner et à développer les moyens et les installations du ministère, constitués essentiellement de ressources humaines. Les ministères des Affaires étrangères dépendent en fait des capacités et des talents de ceux qui y travaillent. Nous ne disposons pas d'un dispositif lourd, mais nous comptons sur des fonctionnaires très compétents et très efficaces.

Dans les secteurs où nous continuons d'être actifs, je veux signaler qu'au début du mois de mai, nous contribuerons à rassembler quelque 70 pays à Maputo au Mozambique pour échanger avec les membres fondateurs du traité sur les mines antipersonnel—les pays qui, par leur signature, ont donné effet au traité. Nous collaborons avec le gouvernement du Mozambique pour organiser cette rencontre. Ce sera une plate-forme majeure de poursuite et d'expansion de la campagne anti-mines.

Le statut de la Cour pénale internationale a fait l'objet de discussions poussées au comité préparatoire. Sachez que nous avons accompli de réels progrès. Certaines des objections de certains grands pays, comme les États-Unis, font maintenant l'objet de discussions. L'attitude est aujourd'hui beaucoup plus positive. Une campagne de ratification est en voie d'être organisée, et j'estime donc que la Cour pénale internationale commence à avoir du poids et à s'activer.

Comme vous le savez tous, nous avons été élus au Conseil de sécurité cette année. La dernière fois que j'ai comparu devant le comité, j'ai parlé des diverses activités que nous entreprenons. Nous participons actuellement à des discussions importantes sur les groupes spéciaux qui s'occupent de l'Iraq: aide humanitaire, contrôle des armements et retour des prisonniers. L'ambassadeur Fowler est en train d'organiser une grande visite en Angola à titre de président du comité des sanctions de l'Angola. Nous nous occupons aussi très activement du dossier de la Sierra Leone.

• 1540

Notre collègue, David Pratt, le député de Nepean—Carleton, est revenu la semaine dernière de la Sierra Leone, où il était notre envoyé spécial. Si je puis me permettre une suggestion, je crois qu'il serait très utile de demander à David de vous donner une séance d'information. Je crois qu'il est revenu avec des recommandations très importantes à formuler. Il sera mon représentant aux Nations unies. Je crois que le Conseil de sécurité tiendra, vendredi, une réunion sur la Sierra Leone où nous commencerons à examiner un plan d'action pour résoudre les graves problèmes humanitaires qui se posent là-bas.

Nous jouons également un rôle actif au Soudan. J'ai rencontré un certain nombre d'ONG. J'ai également rencontré Talisman Energy, un important producteur de pétrole canadien au Soudan. Nous espérons pouvoir établir un cadre politique qui pourra déboucher sur l'établissement d'une zone de paix. Nous travaillons en collaboration étroite avec le gouvernement norvégien pour négocier un règlement de paix au Soudan.

À ce propos, je vous signale que les 17 et 18 mai, il y aura une réunion du H-11, un groupe de 11 pays que nous avons organisé, avec les Norvégiens, pour examiner les questions de sécurité humaine. Nous avons établi un ordre du jour très intéressant pour entreprendre des activités conjointes dans des domaines comme la situation des enfants en temps de guerre, les armes légères, ainsi qu'un programme international de sensibilisation aux droits de la personne.

Au cours de l'année à venir, le Canada va jouer un important rôle de chef de file dans notre hémisphère. Comme vous le savez, les ministres du Commerce extérieur vont se rencontrer cet automne. L'assemblée générale de l'OEA se déroulera au Canada. Les leaders du sommet seront présents chez nous. Si vous le permettez, monsieur le président, je rappellerai aux membres du comité que Winnipeg sera l'hôte des Jeux panaméricains cet été. C'est le premier grand événement dans notre hémisphère. Vous y êtes tous invités. De nombreux leaders étrangers y seront.

Une voix: À Winnipeg?

M. Lloyd Axworthy: Étonnamment, oui. C'est déjà arrivé—je n'y étais pour rien, monsieur le président.

L'un des sujets sur lesquels je voulais remettre un document au comité est le programme de stages internationaux pour les jeunes que nous avons lancé il y a deux ans. Grâce à ce programme, chaque année, entre 300 et 400 diplômés de nos collèges et universités peuvent acquérir une expérience internationale outremer. Vous seriez certainement très fiers de ces jeunes gens et jeunes femmes. Ils accomplissent un travail extraordinaire dans le domaine de l'environnement, des droits de la personne et de la promotion du commerce. Ce programme a fourni des emplois directs à plus de 1 000 jeunes Canadiens dont 81 p. 100 occupent maintenant un emploi grâce à l'expérience ainsi acquise. Le travail qu'ils accomplissent, en collaboration avec des organisations commerciales, des ONG et autres organismes, est vraiment exemplaire.

À titre d'exemple, le projet Ploughshares a placé 26 stagiaires dans des instituts de recherche sur la sécurité en Afrique du Sud, au Costa Rica et dans le cas du programme de démilitarisation pour la démocratie. L'Université de la Saskatchewan a placé 15 stagiaires autochtones dans des organismes autochtones de Nouvelle-Zélande, de Guatemala et du Costa Rica.

À ce propos, nous avons tous suivi avec intérêt la fondation du Nunavut, il y a une huitaine de jours. Nous venons d'approuver un important programme dans le cadre duquel le Nunavut enverra des diplômés inuits en Bolivie pour travailler à la résolution de problèmes autochtones, pour partager les connaissances qu'ils possèdent de l'autonomie gouvernementale dans le Nord. Le programme de jeunes stagiaires se livre donc à ce genre d'activité.

Enfin, je voudrais parler de certaines des activités qui font partie du troisième élément. Cette année, nous avons augmenté nos contributions aux événements internationaux, culturels, artistiques et éducatifs,

[Français]

qui représenteront le Canada à l'étranger. C'est un élément essentiel du travail de notre ministère. Par exemple, nous continuerons à déployer tous nos efforts afin de refléter et de promouvoir à l'étranger la pleine diversité culturelle canadienne. Notre programme culturel nous permet d'appuyer des événements, grands et petits,

[Traduction]

cela va des tournés des orchestres symphoniques de Montréal et de Toronto à la chanteuse celtique de Nouvelle-Écosse, Mary Jane Lamond, en passant par la programmation de la Maison du Canada à Londres du Centre culturel à Paris, les spectacles donnés par le Ballet national à New York, le ténor Ben Heppner et la chanteuse Diana Krall, une grande chanteuse de jazz que je vous recommande vivement, sans oublier la tournée du théâtre Ubu de Montréal, ce printemps, et les spectacles donnés par les interprètes de chant guttural inuits en Belgique et en France, qui ont eu beaucoup de succès là-bas.

Par conséquent, dans le cadre de cette forme de diplomatie publique, nous faisons de gros efforts pour établir une présence canadienne à l'étranger et démontrer au reste du monde la richesse incroyable et la diversité de notre culture.

• 1545

Je voudrais également mentionner que nous participons activement aux préparatifs pour l'an 2000. Le premier ministre nous a chargé d'examiner nos liaisons internationales et nos relations avec les autres pays. Nous consacrons des ressources à la réduction des risques pour les Canadiens à l'étranger. C'est une question très importante. À tout moment, des centaines de milliers de Canadiens se trouvent dans divers endroits du monde. D'après votre propre expérience des services consulaires, vous savez qu'il est important de maintenir des communications et des contacts efficaces pour permettre aux Canadiens d'obtenir la protection dont ils ont besoin. Par conséquent, nous nous préparons très activement à déjouer le bogue de l'an 2000 et je crois que le sous-ministre est ici pour fournir des renseignements complémentaires.

Enfin, je voudrais mentionner qu'en ce qui concerne les ressources humaines, nous essayons d'apporter des améliorations importantes. J'ai dit au comité, l'année dernière, que le taux de départ des jeunes agents était très alarmant. Ils se laissent attirer par des salaires plus élevés ou partent simplement en raison du manque de débouchés outremer. Je peux vous dire qu'au cours des 12 derniers mois, le taux d'attrition a nettement baissé, tombant de 25 p. 100 pour les jeunes agents, l'année dernière, à 8 p. 100 cette année. Je tiens à rendre hommage à Mme Edwards et au travail qu'elle accomplit en tant que sous-ministre adjoint dans ce domaine, car je crois que c'est une question très importante.

Nous avons également entrepris un nouveau programme de recrutement assez ambitieux afin d'avoir un service extérieur beaucoup plus représentatif, d'offrir une meilleure planification de carrière et un meilleur soutien au personnel de notre administration centrale et d'apporter une formation au personnel engagé localement à l'étranger étant donnée qu'ils représentent 80 p. 100 de notre personnel outremer. Nous cherchons également à mieux soutenir les conjoints des agents du service extérieur qui sont en poste à l'étranger, car c'est là un très sérieux problème.

La charge de travail, les heures supplémentaires et l'épuisement professionnel demeurent de graves problèmes. Ces jours-ci, les lumières restent allumées très tard dans nos missions à l'étranger et elles s'allument très tôt le matin. Je peux en attester. Ce n'est pas seulement à cause du Kosovo et de ce genre de crise; c'est aussi à cause de la lourde charge de travail des consulats et des nombreuses demandes de renseignements que nous recevons, notamment des députés. Je tiens à remercier personnellement les fonctionnaires du ministère, qui font un excellent travail.

Monsieur le président, voilà qui termine mon exposé et je suis prêt à répondre à vos questions.

Le président: Merci, monsieur le ministre.

Nous ne considérerons pas votre dernier cri du coeur comme une demande d'augmentation de salaire étant donné les nombreuses questions que les députés vont vous poser.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le président, je tiens à souligner que c'est au comité d'en décider, s'il est prêt à réviser le budget des dépenses à la hausse.

Le président: Notre comité est toujours prêt à vous soutenir, mais il y a un autre comité qui siège dans cette salle et contre lequel nous devons souvent nous battre.

Monsieur Mills.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Merci.

Monsieur le ministre, moi aussi je voudrais féliciter les nombreuses personnes qui travaillent dans nos ambassades du monde entier. J'en ai rencontré un bon nombre au cours de l'année et la plupart d'entre elles font un excellent travail et méritent nos remerciements. Je ne pense pas que vous soyez venus ici pour entendre des compliments et si je continuais dans cette veine, vous vous diriez que quelque chose ne va pas.

M. Lloyd Axworthy: N'hésitez pas, monsieur Mills.

M. Bob Mills: Quoi qu'il en soit, pour commencer, je voudrais vous poser trois questions et comme j'aimerais obtenir la réponse à ces trois questions, je vous demanderais de limiter vos réponses au maximum.

Tout d'abord, je crois que nous avons tous été bouleversés par le décès tragique de civils innocents dont nous avons été témoins aujourd'hui. Nous sommes tous bouleversés par les horreurs de la guerre au Kosovo.

Comme vous êtes surtout venu ici pour parler du Budget des dépenses, je voudrais me reporter à la page 7 pour poser ma première question au sujet de la nouvelle façon d'aborder les affaires étrangères. Vous dites que le nombre de parties prenantes a largement augmenté et, au bas de la page, vous dites que «le gouvernement est déterminé à faire participer les citoyens à l'élaboration de la politique étrangère et de la politique commerciale». C'est très louable. En tant que démocrate, je suis tout à fait pour. Mais comment concilier cette déclaration et le fait que, cette semaine, nous avons demandé un vote sur une chose aussi importante aux yeux des Canadiens que l'envoi possible de troupes en Yougoslavie dans une situation de conflit... Comment pouvez-vous concilier ces deux points de vue contradictoires, le fait que vous voulez un engagement et le fait qu'il y ait davantage de parties prenantes alors qu'on ne nous permet pas de voter sur une question aussi fondamentale? Voilà ma première question.

• 1550

M. Lloyd Axworthy: La réponse est assez simple et elle sera brève.

Comme il n'y avait pas de plan prévoyant l'envoi de troupes terrestres supplémentaires au Kosovo, il n'y avait pas de raison de voter. Le seul engagement que nous avons prix est de fournir des troupes de maintien de la paix pour la mise en oeuvre d'un plan de paix. Il n'y a pas de plan. Aucune décision n'a été prise. L'OTAN n'a pris aucune décision. Le gouvernement canadien non plus.

M. Bob Mills: Et si nous le faisons? La question est là.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur Mills, le Parlement ne vote pas sur des questions hypothétiques. Il vote sur des choses concrètes, sur des choses qui se passent vraiment lorsqu'elles se présentent.

M. Bob Mills: Ce que nous voulons, c'est la garantie que si...

M. Lloyd Axworthy: Il n'est pas logique de voter sur une chose qui peut se produire à l'avenir, sans savoir ce que ce sera, ce que l'on pourrait faire, qui pourrait être impliqué.

M. Bob Mills: Mais si nous voulons envoyer des forces terrestres, allons-nous tenir un vote à la Chambre des communes? Si nous n'envoyons pas de forces terrestres, nous n'avons pas besoin de vote.

Le président: Parlez-nous du pouvoir exécutif.

M. Lloyd Axworthy: Je me réjouis du signal que me donne monsieur le président. Nous avons fait valoir que c'était au pouvoir exécutif qu'il revenait de prendre ce genre de décision dans un système parlementaire. Le premier ministre a indiqué—et je pense que nous avons respecté ce principe très activement depuis que nous formons le gouvernement—qu'il y avait eu une grande variété de débats parlementaires et de discussions en comité. Nous citons l'exemple de la Grande-Bretagne où l'on ne s'est même pas donné la peine de demander l'avis des parlementaires au sujet de ces activités.

Nous devons prendre garde de ne pas nous retrouver avec... Si vous voulez en revenir à un gouvernement de style républicain ou comme celui du Congrès, les Américains doivent faire face aux énormes limitations de la résolution Tonkin, qui impose de lourdes restrictions. Permettez-moi de vous citer un exemple. Le Canada a dû remplacer les Américains lorsque le Congrès des États-Unis a demandé au président de sortir de Haïti au bout de six mois. Il n'y avait aucune raison que les Américains partent étant donné que le travail n'était pas terminé. Le Congrès a exigé leur départ parce qu'il était sous le contrôle d'un parti autre que celui du président. Nous devrions veiller à ne pas nous retrouver avec ce genre de restriction.

Je sais que l'on tient à ce vote, mais je crois que les débats ont été très instructifs, très complets et que lorsqu'un vote est nécessaire, lorsque nous devons mettre en place une loi pour la mise en oeuvre de traités ou de questions de ce genre, il est bien entendu que nous demandons la sanction du Parlement. Je tiens toutefois à dire que nous travaillons avec le Parlement de façon très ouverte et très active. C'est ma troisième comparution devant le comité en quatre mois et c'est sans doute un record pour le ministre des Affaires étrangères. Lorsque j'étais critique de l'opposition, nous ne voyions parfois le ministre qu'une fois par an. C'est peut-être ce que vous préféreriez, je l'ignore.

M. Bob Mills: Dans ce cas, permettez-moi de vous poser ma deuxième question. À la page 23 du budget principal, voici ce qu'on lit au sujet de notre représentation au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies:

    Promouvoir la gestion efficace des crises internationales par le Conseil de sécurité et renforcer la capacité institutionnelle des Nations Unies et l'efficacité des interventions régionales en cas de crise.

Je sais que vous appuyez cet objectif et que vous êtes convaincu de sa validité. Vous avez cependant aussi dit en 1991 que le fait pour le Canada de participer à un conflit armé l'empêcherait ensuite de jouer un rôle dans le cadre des opérations de maintien de la paix.

Je vous demande donc si cela ne met pas sérieusement en doute la crédibilité du Canada. Dans les prévisions budgétaires, nous disons vouloir jouer un rôle important dans la gestion des crises internationales, ce que nous pouvons faire parce que nous occupons un poste au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies, mais vous avez reconnu que notre participation à un conflit armé nous ferait perdre toute crédibilité. Compte tenu de l'affirmation que vous faisiez en 1991, peut-on dire que vous avez changé votre conception de la politique étrangère?

M. Lloyd Axworthy: Monsieur Mills, je pourrais m'étendre longuement sur cette question, mais je me contenterai de vous expliquer la nature de l'énoncé qui figure dans les prévisions budgétaires. Les conflits internationaux ne se présentent plus du tout de la même façon que par le passé. Les agressions d'un État par un autre sont rares; les conflits sont le plus souvent internes. Dans cette perspective, le Canada a toujours insisté sur l'importance de protéger les civils, de faire respecter certaines normes en matière de sécurité des personnes et d'empêcher la victimisation des populations civiles. Nous oeuvrons activement au sein des Nations Unies à promouvoir ces objectifs comme en témoigne notamment notre appui au tribunal pénal international, l'initiative que nous avons présentée la semaine dernière au Comité des droits de l'homme des Nations Unies et les propositions que nous avons soumises au Conseil de sécurité en vue d'assurer la protection des civils.

• 1555

Le bilan des dernières années est très clair. En Bosnie, mais aussi au Rwanda et en Somalie, et maintenant au Soudan et au Sierra Leone, des gouvernements, mais parfois aussi des seigneurs de la guerre, s'en prennent aux populations civiles et commettent les pires atrocités imaginables. Je viens de vous citer des chiffres portant sur la situation des réfugiés du Kosovo. Plus de 60 p. 100 d'entre eux sont des enfants qui, nous le savons ont perdu leurs parents.

Si l'on veut permettre l'émergence d'une règle de droit qui empêche ce genre d'atrocités—et nous progressons lentement à l'échelle internationale vers une nouvelle règle de droit qui reposerait sur des motifs humanitaires—il faut parfois être prêt à appliquer cette règle. Il s'agit toujours d'une décision difficile. C'est en fait une décision de dernier recours.

Monsieur Mills, comme nous en avons déjà discuté, vous savez que nous avons tout fait l'été dernier pour saisir le Conseil de sécurité de l'affaire du Kosovo. Nous ne faisions alors même pas partie du Conseil de sécurité, mais nous avons insisté pour qu'il se penche sur la situation du Kosovo parce qu'elle nous apparaissait susceptible d'enflammer toute la région. Toutes sortes d'efforts à cette fin ont été déployés par l'intermédiaire de l'OTAN et des Nations Unies. Les Nations Unies ont d'ailleurs adopté au moins deux résolutions dénonçant l'épuration ethnique et les atrocités commises au Kosovo. Il nous a fallu cependant nous rendre à l'évidence—et c'est d'ailleurs la seule position que nous pouvions prendre à titre de membre de l'OTAN—que le Conseil de sécurité était paralysé en raison du droit de veto conféré à ses membres. Par ailleurs, nous pouvons invoquer la Charte des Nations Unies, la convention de Genève et les conventions sur le génocide. Quelqu'un devait intervenir et nous avons estimé que l'OTAN était en mesure de le faire. Nous avons estimé que la seule façon d'empêcher le chaos total était d'intervenir pour faire respecter ces nouvelles normes humanitaires.

M. Bob Mills: Voilà pourquoi je me suis toujours opposé au principe de la puissance douce. Vous et moi pourrions discuter pendant plusieurs jours des conséquences de l'adoption de cette méthode dans les années 60, mais ce n'est pas la raison d'être de cette réunion.

J'aimerais maintenant poser ma troisième question. Dans la livraison d'aujourd'hui du Washington Post on lit que Kofi Annan souhaite ardemment se rendre à Belgrade pour discuter avec les autorités yougoslaves de la possibilité d'un accord négocié, mais que les dirigeants occidentaux s'y opposent. Je sais que vous avez soutenu qu'un siège au Conseil de sécurité des Nations Unies permettrait au Canada de jouer un rôle de chef de file à l'échelle internationale. J'aimerais savoir si vous pensez que Kofi Annan devrait se rendre à Belgrade et si vous essayez de convaincre les autres membres des Nations Unies et de l'OTAN à donner leur aval à son intervention.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le président, je n'ai pas eu le loisir comme M. Mills de lire le Washington Post aujourd'hui. J'étais trop occupé. J'ai cependant discuté directement de la question avec M. Kofi Annan. Notre entretien de ce matin a duré environ 20 minutes. Il ne m'a pas dit qu'il voulait se rendre à Belgrade. Nous avons discuté de la proposition en cinq points qu'il a proposé le week-end dernier. Nous avons discuté de la possibilité d'arriver à un consensus au sujet, en particulier, de la création d'une force internationale. Nous avons aussi discuté de la façon dont diverses négociations pourraient se dérouler. Il m'a encouragé à m'entretenir à ce sujet avec le ministre russe des Affaires étrangères, ce que j'ai fait environ 1 heure et demie plus tard. M. Annan ne m'a cependant pas parlé de la possibilité qu'il se rende à Belgrade.

Le secrétaire général souhaite ardemment le règlement de ce conflit. Il veut trouver une solution à la crise actuelle, mais il ne faut pas trop miser sur la diplomatie. J'essaie simplement de répondre à votre question. Si M. Annan se rend à Belgrade et qu'il n'obtient rien du gouvernement yougoslave, nous n'aurons fait aucun progrès. Le moment n'est peut-être pas indiqué pour lui de se rendre à Belgrade. Je fais cependant suffisamment confiance au jugement diplomatique du secrétaire général Annan pour penser que le moment venu, il communiquera avec les membres de l'OTAN pour obtenir leur appui.

M. Bob Mills: Par contre, le fait que le secrétaire général n'intervienne pas ne fait-il cependant pas ressortir la faiblesse des Nations Unies? Elles sont intervenues dans le cas de l'Iraq, mais elles ne l'ont pas fait dans ce cas-ci.

Le président: Bob, votre temps est écoulé.

J'accorde maintenant la parole à M. Turp. Le ministre pourra entre temps demander conseil à ses collaborateurs. Lorsque M. Annan aura lu le Washington Post, il saura qu'il doit aller à Belgrade. Jusqu'à ce qu'il l'ait fait, il devra s'en remettre à son jugement.

Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp: J'aimerais aussi souligner notre appréciation de la disponibilité du ministre. Même hier, son leader en Chambre nous disait qu'il serait disponible à la suite d'un débat qu'on n'a pas pu avoir grâce aux bons soins du Parti réformiste. Son ministère, comme il le sait, est un ministère dont j'apprécie plusieurs personnalités et fonctionnaires, notamment celui que l'on voit tous les jours, Jim Wright, dont il doit être fier. Tout à l'heure, j'aurai des choses à dire sur des personnes qui sont un peu moins fières de leur ministère et qui ont des problèmes avec lui.

• 1600

Je réserve la deuxième partie de mes questions sur le budget et les prévisions budgétaires. On doit distinguer les deux choses; il est important que vous ayez à répondre plus spécifiquement à des questions sur le budget et les prévisions budgétaires de votre ministère.

Mes premières questions porteront sur le Kosovo. Bien que vous fassiez des efforts, tout à fait appréciés, pour vous exprimer en français ces derniers temps, monsieur le ministre, cela vous joue parfois des tours. Tout à l'heure, en Chambre, vous avez utilisé l'expression d'appui qui signifie un vote; c'est pour cela que notre leader parlementaire pensait que vous aviez pris la décision qu'il y aurait un vote en Chambre sur ces questions. Je vais aussi faire un effort et vous poser ma question en anglais pour être très, très clair.

[Traduction]

Vous avez dit que vous souhaitez ardemment qu'on trouve une solution à cette crise et je crois que c'est probablement le cas. Je ne pense cependant pas que le gouvernement ou que vous-même teniez vraiment à informer le Parlement, le comité, les partis de l'opposition et la population canadienne de la situation.

Permettez-moi de vous donner un seul exemple. Cet après-midi, à la période des questions, le premier ministre a dit qu'il était possible que le Canada contribue six autres CF-18 aux opérations militaires. Le ministre de la Défense a dit qu'il songeait à envoyer plus d'appareils en Yougoslavie. Un problème se pose. Il y a manque de transparence.

Vous tenez vraiment à trouver une solution à cette crise, mais vous ne tenez pas autant à informer comme il se doit la population. Vous ne vous acquittez pas bien de vos responsabilités à cet égard.

Nous avons beaucoup apprécié recevoir des appels de Heidi Hulan au cours des trois ou quatre premiers jours du conflit, mais nous n'en avons plus reçu depuis lors. On nous a promis des séances d'information. On tiendra ces séances d'information, mais je déplore le manque de transparence du gouvernement. Vous devez le comprendre.

Que ferez-vous afin de mieux informer la population sur ce qui se passe? Vous avez vu aujourd'hui que Clinton et le secrétaire à la Défense ont dit qu'ils voulaient donner des renseignements beaucoup précis à la population. Que comptez-vous faire pour bien nous informer sur la situation?

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le président, je ne suis pas d'accord avec M. Turp. Depuis le début, nous avons été en communication quotidienne avec les porte-parole en plus de... Je ne sais pas si ça s'est terminé, nous avons déployé tous les efforts nécessaires pour rejoindre les gens. Nous avons eu aussi une séance d'information importante à laquelle M. Eggleton et moi-même avons assisté, pendant le congé parlementaire. Nous étions dans cette salle même pendant près de 3 heures. Nous avons fourni tous les renseignements dont nous nous disposions à ce moment-là. Nous avons accordé des séances d'information quotidiennes, de la manière la plus transparente qui soit. M. Wright, que vous félicitez, et les responsables du ministère de la Défense nationale étaient là pour répondre aux questions. Pendant le congé parlementaire, M. Eggleton et moi-même avons fait des apparitions publiques lorsque des décisions relatives aux politiques devaient être prises. Nous avons tous les jours la période des questions, ce qui est beaucoup plus transparent que toute situation que doit affronter M. Clinton, comme il l'a souvent dit, ou Mme Albright.

Nous avons maintenant eu au moins trois débats importants sur cette question: en octobre, en février et lundi dernier. Je pense que c'est...

M. Daniel Turp: Pas sur des choses précises, monsieur le ministre, on ne parle que de généralités pendant la période des questions et aux comités.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur Turp, qu'entendez-vous par généralités? Si vous parlez des six avions qu'on enverra ou pas, eh bien, la décision n'a pas été prise. Nous avons reçu une demande de l'OTAN. Le ministre de la Défense fait ce que doit faire un ministre de la Défense: il examine la question. Il fera ensuite une recommandation au premier ministre. Il me demandera mon avis. Il demandera aussi l'avis de certains autres ministres du comité créé par le premier ministre. La décision n'a pas encore été prise. Bien entendu, on pourrait vous donner de faux renseignements, que nous ferons ceci ou que nous ne ferons pas cela. Les ministres doivent prendre des décisions; c'est pour cela qu'ils ont été assermentés.

Je ne pense pas que quiconque vous cache quoi que ce soit. Vous avez exactement ce que l'on sait. On nous a fait une demande et nous n'avons pas encore pris de décision. Le premier ministre doit recevoir la recommandation du ministre de la Défense, qui n'a pas encore été donnée.

M. Daniel Turp: Ce n'est pas très convaincant.

M. Lloyd Axworthy: Que puis-je dire de plus? C'est ainsi que vont les choses.

M. Daniel Turp: Donnez davantage d'information. Partagez l'information, comme d'autres gouvernements le font avec leurs populations, avec leurs députés. Il est bel et bon que Jim parle aux médias, il est très important de renseigner les médias, mais les parlementaires doivent être encore mieux informés, à la Chambre comme ailleurs.

• 1605

Passons maintenant à autre chose. Au sujet des votes, vous dites que nous sommes un régime parlementaire, où l'exécutif gouverne. Vous l'affirmez toujours lorsque je parle de traités. Vous dites que nous ne sommes pas en régime républicain. Manifestement, c'est arrivé lorsque les conservateurs ont voté. Vous vouliez même que nous soyons à la Chambre pour voter, et les conservateurs ont accepté. Dans un régime républicain, il n'y a rien de républicain.

Pourquoi ne voulez pas l'appui de la Chambre au sujet de l'envoi de troupes? Pourquoi ne le voulez pas? Parce que nous sommes dans un régime où le gouvernement devrait prendre toutes les décisions, sans avoir recours à l'approbation du Parlement sur des questions importantes comme celle-ci?

M. Lloyd Axworthy: M. Turp devrait faire un petit retour en arrière, pour ce qui est de l'histoire du Parlement. Pendant la guerre du Golfe, le gouvernement canadien a envoyé des navires de guerre. C'était en août, le Parlement était en congé et n'est revenu que le 22 septembre. Il n'y a eu ni débat, ni discussion, ni séance d'information. Je m'en souviens bien puisque j'étais alors le porte-parole de mon parti. Il y a donc eu une période de six à huit semaines pendant laquelle rien ne s'est passé. Pendant cette période, je crois qu'il y a eu deux débats parlementaires, sans vote, en octobre et en novembre. Pendant une période d'environ six mois, il n'y a pas de vote. Il y en a eu un finalement en janvier, sur une motion très précise se rapportant aux Nations Unies.

Je crois que le premier ministre a déclaré qu'il était prêt à envisager ces choses. Mais quand vous revenez toujours sur cette question, bien honnêtement, vous êtes un parlementaire, vous l'avez étudiée. Je suis ici depuis près de 26 ans et le Parlement n'a jamais voté sur des hypothèses. Et toute cette question de l'envoi de troupes terrestres est pour le moment hypothétique. Nous avons eu un débat parlementaire et nous avons recueilli le point de vue des parlementaires lundi soir, mais le gouvernement n'a pas pris de décision et l'OTAN n'en a pas non plus demandé. Alors pourquoi voter sur une hypothèse? Les Canadiens diront ensuite que le gouvernement envoie des troupes pour... Si vous me demandez combien, où elles vont, ce qu'elles font, je dois dire que je ne le sais pas, que personne ne l'a demandé. Soyons réalistes, s'il vous plaît.

M. Daniel Turp: Vous engagez-vous personnellement à avoir un vote, s'il ne s'agit plus d'une simple hypothèse? Cela se fait-il dans un gouvernement par l'exécutif?

M. Lloyd Axworthy: Non, je crois que...

M. Daniel Turp: Vous ne voulez pas de vote au Parlement?

M. Lloyd Axworthy: Ce n'est pas ce que j'ai dit: J'ai dit que ces décisions seront prises par le premier ministre, au moment qu'il jugera bon. C'est ce qu'il a dit à la Chambre.

En toute honnêteté, ce qui me semble étrange, c'est que nous sommes dans une crise qui évolue de jour en jour, et nous passons tout notre temps ici, à parler de vote qu'on tiendrait ou non. Franchement, je préférerais qu'on parle de choses plus substantielles.

M. Daniel Turp: Vous savez que nous aussi nous nous intéressons au fond de la question.

M. Lloyd Axworthy: Alors posez des questions plus substantielles.

M. Daniel Turp: C'est une discussion substantielle: le Parlement doit avoir voix au chapitre, pas seulement le gouvernement, et pas seulement dans le cadre de débats. Vous savez ce que sont ces débats. Vous l'avez vu. En tant que parlementaire, je suis frustré quand je vois les débats: les gens s'adressent à la Chambre, ce qui peut-être intéressant puis, plus rien. Ce débat de lundi, vous savez comment il s'est terminé: à huit heures, quelqu'un y a mis fin, c'est tout. Le débat ne s'est pas achevé comme il aurait fallu, comme d'autres débats, soit avec un vote, sur quelque chose.

C'est pourquoi à mon avis la pratique doit changer et le Parlement, comme d'autres parlements du monde, doit être un participant. Si d'autres parlements jouent un rôle, pourquoi pas le nôtre? Pourquoi ne pas changer la pratique, ici?

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le président, je tiens à faire consigner ceci au compte rendu: en Belgique, pays membre de l'OTAN, aucun débat n'a encore eu lieu, il y en aura un aujourd'hui; en France, la décision de participer a été prise par le président, sans consultations parlementaires; en Allemagne, deux débats ont eu lieu jusqu'ici; en Italie, deux débats et deux votes; aux Pays-Bas, deux débats, aucun vote; au Portugal, aucun débat, aucun vote; au Royaume-Uni, aucun débat, aucun vote; aux États-Unis, la décision a été prise par le président.

Lorsque vous dites «tous les autres parlements», je peux vous dire que ce n'est tout simplement pas vrai.

M. Daniel Turp: Ce n'est pas très convaincant. Ce n'est pas parce que d'autres ne le font pas, que le Parlement ici doit s'abstenir de le faire.

M. Lloyd Axworthy: Non, mais je vous explique les raisons.

Vous devez avoir une bien piètre opinion des discours de vos collègues.

M. Daniel Turp: Non, ce n'est pas vrai.

M. Lloyd Axworthy: Ce n'est pas mon cas. J'ai lu les transcriptions et je les ai trouvées extrêmement utiles. On y trouve de bons conseils. On y voit des appuis pour ce que le gouvernement a fait jusqu'ici. Quand un député s'adresse à la Chambre, je respecte ce qu'il à dire et je l'écoute très soigneusement. Vous n'y prêtez peut-être pas attention, moi, si.

• 1610

M. Daniel Turp: Je n'en fais pas abstraction, mais si cela devait aboutir à un vote, l'affaire aurait plus de poids et cela pourrait aider notre gouvernement. Il se pourrait que votre consensus soit maintenu, ou perdu. Vous pourriez perdre du terrain parce que vous n'informez pas le Parlement de la façon appropriée et vous ne nous permettez pas de voter sur cette question des plus importantes. Vous ne semblez même pas disposé à nous laisser nous prononcer sur cette affaire, même si elle n'est même plus hypothétique.

Le président: Je dois maintenant passer à M. Assadourian.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Merci beaucoup.

Monsieur le ministre, les députés reçoivent aujourd'hui entre 200 et 300 messages électroniques—nous ne recevons plus de courrier ordinaire, car tout est électronique maintenant—et nous recevons ces messages de partout au monde. J'en ai même reçu de la Russie. Mais les Canadiens, et surtout ceux d'origine serbe, nous demandent si, une fois que tout aura été dit sur la question et que nous aurons la paix, le plus tôt possible... Sommes-nous, à votre avis, en mesure d'envoyer des troupes de maintien de la paix, même si nous avons participé à la guerre?

M. Lloyd Axworthy: Oui.

M. Sarkis Assadourian: Pourriez-vous nous expliquer pourquoi, car les Canadiens veulent sans doute savoir comment vous allez vous y prendre.

M. Lloyd Axworthy: Je pensais que des mesures avaient été prises par l'OTAN parce que l'on s'était entendu pour qu'il y ait une force de mise en oeuvre du plan de paix. Il y a une chose qui est ressortie des ententes que Holbrooke a négociées en octobre dernier, et c'était que la mission de vérification—malgré son travail acharné et son dévouement—a été simplement contournée et que sa marge de manoeuvre a même été souvent limitée. Les tentatives de protéger les civils du Kosovo étaient elles-mêmes limitées. La mission de vérification n'a pas été en mesure de fournir le suivi, le maintien de l'ordre et la mise en oeuvre nécessaires pour que l'entente donne des résultats.

Si nous pouvons éventuellement obtenir l'accord de M. Milosevic, il faudra que l'on puisse aller chercher ceux qui ont été dans le feu de l'action pour protéger la population. En effet, il est très important que les nombreux réfugiés qui ont été boutés hors de leur pays fusil aux tempes aient confiance et soient convaincus qu'on les protégera.

Mais je ne dis pas que c'est la seule façon de faire. L'une des choses utiles à être ressorties des discussions du week-end, c'est la notion d'une force internationale qui ne doit pas nécessairement être une force de l'OTAN. Il n'a pas encore été décidé qui exactement en ferait partie, car cela fait toujours l'objet des négociations en cours. Mais il est important pour les 600 000 personnes déplacées et les centaines de milliers de gens qui sont encore au Kosovo de savoir que quelqu'un fera en sorte que l'accord soit mis en oeuvre et qu'ils pourront avoir confiance en cette personne.

M. Sarkis Assadourian: Se pourrait-il que certains casques bleus viennent de Chine et de Russie? Est-ce envisagé dans les négociations?

M. Lloyd Axworthy: D'après la teneur des discussions que j'ai eues aujourd'hui avec M. Ivanov, il semble que les Russes pourraient participer au maintien de la paix. Je ne veux pas engager le gouvernement russe, mais je répète qu'à mon avis, le ministre des Affaires étrangères de la Russie et son gouvernement cherchent à jouer un rôle constructif. Mais pour l'instant, il reste sans l'ombre d'un doute que Milosevic n'a toujours pas accepté l'idée d'une présence internationale, quelle qu'elle soit. Tant qu'il ne l'aura pas acceptée, aucune des autres conditions que nous pourrions fixer ne tiendra. C'est son accord qui fera en sorte qu'il y aura ou pas une entente.

M. Sarkis Assadourian: Permettez-moi une dernière question. Le premier ministre de la Chine sera à Ottawa cette semaine...

M. Lloyd Axworthy: Il y est déjà, ou arrivera sous peu.

M. Sarkis Assadourian: Allez-vous discuter avec lui du Kosovo?

M. Lloyd Axworthy: Je sais que c'est l'intention du premier ministre. Il doit rencontrer le premier ministre chinois ce soir, et d'autres réunions sont prévues pour demain avec le premier ministre. Moi-même, je rencontrerai demain le ministre des Affaires étrangères, M. Tang. J'ai l'intention d'aborder le sujet avec ce dernier, tout comme je sais que le premier ministre a lui aussi l'intention de le faire. Puis, il y aura une réunion conjointe.

Il est très important de nous assurer l'appui de la Chine, étant donné qu'elle est membre du Conseil de sécurité avec droit de veto et qu'elle pourrait avoir un rôle très important à jouer. Le fait que le premier ministre chinois soit à Ottawa au moment où se déroulent les négociations nous donne l'occasion de jouer avec les Chinois un rôle constructif.

Le président: Merci.

Monsieur Earle.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

Je remercie le ministre de nous avoir confirmé qu'il prend très au sérieux les opinions des parlementaires, et je le crois sur parole. Je crois aussi qu'il est très sincère au sujet de toute cette crise, tout comme le sont tous les députés qui veulent, eux aussi, que le conflit se termine au plus vite. Voilà pourquoi je reviens à un sujet que j'ai soulevé à la Chambre.

• 1615

Je sais que le ministre s'occupe des affaires étrangères depuis bien plus longtemps que moi et qu'il en sait sans doute là-dessus beaucoup plus que moi. Je voudrais un éclaircissement. Le ministre a dit plus tôt que tout a été fait pour saisir de cette question le Conseil de sécurité, mais que les discussions ont achoppé à cause du droit de veto.

Je croyais avoir interprété la résolution 377(V) comme permettant justement, en cas d'absence d'unanimité, de saisir de cette question l'Assemblée générale des Nations Unies. Dans l'affaire qui nous occupe, nous disons que c'est une façon pratique de saisir la question l'Assemblée générale qui aurait ensuite le pouvoir de se pencher immédiatement sur cette crise, dans le but de recommander des mesures collectives à ses membres: on pourrait recommander notamment, s'il y avait violation de la paix ou un acte d'agression—ce qui est certainement le cas dans le conflit qui les occupe—d'avoir recours aux forces armées au besoin pour maintenir ou restaurer la paix et la sécurité internationales. C'est d'ailleurs ce que nous affirmons depuis le début, que l'Assemblée générale devrait pouvoir imposer ce type de sanction à l'agresseur.

J'aimerais savoir si j'interprète bien la résolution, et dans la négative, pourquoi vous n'avez pas envisagé cette solution? Vous avez dit à la Chambre que vous vouliez donner une chance à la proposition de l'Allemagne, mais je prétends pour ma part que les mesures auraient plus de poids si elles passaient par le truchement de la résolution 377(V). Je vous laisse maintenant me dire ce que vous en pensez.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur Earle, comme je l'ai dit à la Chambre, nous n'écartons pas cette possibilité. Il y a une dizaine de jours, je me suis rendu aux Nations Unies pour discuter des diverses options qui pourraient être envisagées. Au cours de ces réunions très poussées, il s'est dégagé le sentiment que même si on avait recours à la résolution de l'unification pour la paix pour passer du conseil à l'Assemblée générale elle-même, cela ne permettrait pas nécessairement d'obtenir un consensus sur un accord qui serait réalisable.

M. Gordon Earle: Je ne veux pas vous interrompre, mais est-ce que ce n'est pas là justement le facteur hypothétique dont vous parliez? Vous sous-entendez que cela ne sera pas utile.

M. Lloyd Axworthy: Non, ce n'était pas une supposition. Je me fondais, pour dire cela, sur des discussions très sérieuses que j'ai eues avec des représentants des différents blocs de pays ayant droit de vote aux Nations Unies. Il existe pour beaucoup d'entre eux de véritables incertitudes et plusieurs ont des points de vue divergents. Les mesures que prendront les Nations Unies doivent être crédibles, autrement dit réalisables. On a déjà adopté des résolutions qui fixaient des normes et des critères, mais pour le moment, nous cherchons une résolution qui sera exécutoire, et nous espérons en élaborer une.

Tout ce que je dis, c'est que le secrétaire général a fait valoir ses cinq arguments. Il a participé activement à des entretiens avec les dirigeants de l'Union européenne hier. Il y a eu pendant la fin de semaine une rencontre des hauts fonctionnaires du G-8. Nous essayons de voir comment en arriver à une entente, du moins à ce niveau, et ensuite comment convaincre M. Milosevic d'accepter cette entente. Même s'il y avait une entente au Conseil de sécurité ou à l'Assemblée générale, si M. Milosevic refuse de s'y plier, nous sommes confrontés à un énorme problème.

M. Gordon Earle: Je comprends bien, mais ce que je veux dire, c'est que pour l'instant nous n'avons pas l'accord de M. Milosevic. Il y a Milosevic contre l'OTAN. Si l'Assemblée générale avait adopté une résolution en vue d'autoriser la mise en place d'une force internationale, on pourrait au moins compter sur l'appui intégral de l'Assemblée contre Milosevic, au lieu que ce soit tout simplement l'OTAN qui est dominée par les États-Unis. Cela donnerait plus de crédibilité au processus. Lorsque vous dites que Kofi Annan a appuyé les principes, le fait-il à titre personnel ou de façon officielle au nom de l'Assemblée générale? C'est une autre question que je me pose.

M. Lloyd Axworthy: Non, il le fait en sa qualité de secrétaire général des Nations Unies, en tant que titulaire de ce poste. Le pouvoir que représente ce poste est important. Comme je l'ai dit en réponse à une question de M. Mills, il faut en user avec circonspection. C'est un peu comme un poste politique: on peut jouer toutes ses cartes et épuiser ses options si l'on n'intervient pas au moment opportun. C'est là que l'on se heurte, selon moi, à certain contre-courant.

• 1620

La diplomatie internationale n'est pas un domaine où les choses sont claires et nettes. Il n'existe aucun critère fixe. Parfois on agit, c'est une question de perception et de jugement, ainsi que de choix du moment. Comment peut-on dégager un consensus et en arriver à une entente sur ce genre de choses? Un processus est actuellement en cours et j'espère qu'il portera fruit; toutefois, je ne peux vous donner aucune garantie.

Je tiens à bien préciser que votre proposition est à l'étude. C'est une option, mais une option qu'il faut utiliser avec prudence. Si on retient cette option et qu'elle ne donne aucun résultat, on risque d'acculer les Nations Unies au pied du mur.

M. Gordon Earle: Très bien. Je comprends que cela a donné des résultats dans le cas du canal de Suez, et la situation en l'occurrence était très tendue. Je suppose que tant que l'on n'a pas essayé, il est difficile de rejeter cette option.

Lorsque vous dites que le secrétaire général agit en sa qualité de titulaire de ce poste, je suppose que le pouvoir qu'il détient lui vient de l'Assemblée générale. Le poste n'existe pas isolément du reste. Je comprends le juste équilibre dont vous parlez. C'est pourquoi je vous ai demandé qui il représente officiellement.

J'aimerais aborder une autre question avant que vous ne répondiez à celle-ci. Là encore, j'aimerais faire ce qui m'apparaît comme une suggestion pratique. Pas plus que les autres membres du comité, je ne suis pas le genre à rester en retrait en lançant des idées pour me convaincre que nous avons fait notre part. Nous aimons jouer un rôle chaque fois que possible. Lorsque vous parlez du gouvernement par l'exécutif, je comprends qu'il y existe là aussi des restrictions. La réalité, c'est que nous sommes confrontés à une situation très grave de guerre, et je pense que tout le monde veut offrir son aide.

Le conseil des ministres a-t-il envisagé d'élargir son conseil de guerre, si on veut l'appeler ainsi, ou élargir son conseil de personnes autres que les ministres qui sont appelés à prendre des décisions à ce sujet, de telle sorte que vous pourriez éventuellement inviter les chefs des divers partis d'opposition, comme cela s'est fait par le passé, à participer au processus décisionnaire? Il serait ainsi possible d'examiner un plus grand nombre d'idées. Nous nous sentirions mieux informés pour répondre à la préoccupation exprimée par mon collègue. Nous nous sentirions mieux informés et nous aurions moins l'impression que vous devez faire une séance d'information chaque fois qu'un nouvel événement survient, car un plus grand nombre de gens participeraient aux discussions. Cela n'empiéterait nullement sur le droit de gouverner du gouvernement, mais vous participeriez à un processus de consultation. A-t-on examiné cette possibilité?

M. Lloyd Axworthy: Ce serait au premier ministre à décider, mais je vais accepter vos propos à titre d'observation, comme on dit dans le jargon parlementaire, et je les transmettrai.

Vous m'avez posé également une autre question très grave, savoir comment on fait pour mettre au point un accord qui fournira une solution. Notre ancien collègue John English a écrit deux livres très intéressants sur cette question, dans lesquels il discute à fond ce qui s'est produit au cours de la crise du canal de Suez. Si vous lisez ces livres attentivement, vous constaterez que dans le cas du canal de Suez, on faisait affaire aux Britanniques et aux Français qui étaient disposés à accepter la décision prise au titre de la résolution de l'Union pour le maintien de la paix. Aujourd'hui, on fait face à M. Milosevic, qui n'a pas démontré grand respect à l'égard des recommandations de qui que ce soit. En fait, nous n'en serions pas où nous en sommes aujourd'hui, si Milosevic adhérait à quelque norme que ce soit de comportement international.

M. Gordon Earle: Je n'en doute pas, et je crois que cela constitue un facteur décisif.

Mais il se passe aussi que tout ce qui est recommandé tombe en morceaux. On a eu la suggestion de l'OTAN, celle de l'Allemagne, il y en a peut-être d'autres qui sont à venir; mais si une suggestion éventuelle était entérinée par l'assemblée générale, qui inclurait des partenaires très musclés comme la Russie, frères et soeurs slaves de Milosevic, cette suggestion venant d'une assemblée de ce genre aurait beaucoup plus de poids que si elle provenait d'une force menée par l'OTAN. Voilà ce que j'essaie de vous faire comprendre et voilà pourquoi il est important d'y parvenir.

Merci.

Le président: Merci beaucoup.

[Français]

Monsieur Bachand.

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le président, j'aimerais remercier le ministre de s'être déplacé cet après-midi. Si je comprends bien, cela deviendra une habitude du comité que de se réunir pour obtenir de l'information et consulter de façon régulière. C'est très, très apprécié.

Je ne parlerai pas, monsieur le ministre, des votes en Chambre ou d'une motion. Le Bloc québécois présentera une motion lundi et on aura alors la chance d'en parler. Je vais soumettre à votre Steve Flanagan des Affaires étrangères... Steve Flanagan était le gars à l'Hydro-Québec durant la crise du verglas. Monsieur Wright, c'est un compliment que je vous fais.

• 1625

Je vais vous rappeler rapidement la chronologie des événements de la Guerre du golfe, lors de laquelle trois votes avaient été pris. Je vous soumets cela très humblement.

Serait-il possible d'avoir la chronologie des événements et des efforts que vous-même et le gouvernement canadien avez déployés pour tenter de mettre l'Organisation des Nations unies à la première place dans l'éventualité d'une intervention? Pourriez-vous nous fournir une chronologie des événements et des interventions que vous avez faites, sans entrer évidemment dans les aspects confidentiels? Ce serait très apprécié.

Si vous êtes d'accord, monsieur le président et monsieur le ministre, je vais vous poser les questions l'une après l'autre, le temps manquant.

On sait qu'il y a présentement beaucoup de troubles au Montenegro, partie intégrante de la République yougoslave. Est-ce que l'OTAN ou le Canada a des solutions ou des scénarios pour aider d'une façon ou d'une autre, surtout militairement, le gouvernement du Montenegro à se maintenir en place dans l'éventualité de troubles civils?

Êtes-vous d'accord sur cette affirmation voulant qu'il soit maintenant clair que les frappes aériennes, sans être responsables du nettoyage ethnique, soient directement responsables de l'accélération du nettoyage ethnique au Kosovo? Êtes-vous d'accord sur cette déclaration qui provient du du secrétaire d'État américain?

À partir du début de l'intervention de l'OTAN au Kosovo jusqu'à aujourd'hui, l'effort militaire a été doublé, en arrondissant les chiffres. En trois semaines, on a doublé l'effort militaire. Certains ont l'impression que c'est une guerre ad lib, une guerre improvisée, contrairement à celle du golfe.

Je ne veux pas faire de partisanerie, mais, comme vous le savez, lors de la Guerre du golf, tout était en place et on est intervenu massivement. Aucun engagement supplémentaire n'avait été nécessaire. Tout était en place pour une force rapide, solide et crédible, et on n'a pas ajouté un petit grain de sel à chaque journée du conflit. J'aimerais avoir votre impression sur la préparation militaire du Kosovo à ce jour. A-t-on sous-estimé le conflit et Milosevic? Que pensez-vous du doublement de l'approvisionnement militaire?

Que pensez-vous de la rencontre qui a eu lieu hier à Belgrade, entre les représentants de la Yougoslavie et de la Biélorussie, à la suite de la résolution adoptée par le parlement yougoslave pour établir une union avec la Biélorussie, à des fins militaires ou pas? J'apprécierais un petit mot là-dessus.

À la page 39 de vos prévisions, une question m'a surpris. Cela n'a rien à voir avec le Kosovo. Je lis:

    Promouvoir l'unité nationale

      Veiller à ce que les gouvernements étrangers soient au fait de la souplesse et de l'évolution du fédéralisme canadien, ainsi que de l'importance du rôle international soutenu que joue un Canada fort et uni.

Avez-vous un document qui justifie cette déclaration de la page 39? Quel montant d'argent allez-vous y accorder expressément? Merci.

Le président: Tout cela en cinq minutes.

M. André Bachand: On profite de l'occasion, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur le ministre, si vous pouviez être assez concis, vous nous aideriez.

M. Lloyd Axworthy: Je répondrai à la première question de M. Bertrand par oui. Mais je ne peux pas vous dire quand exactement. Je consulterai MM. Campbell et Wright, mais j'essaierai de vous donner la chronologie la plus fidèle des événements, en commençant par l'été dernier. En fait, vous savez sans doute que M. Wright était notre envoyé spécial à Belgrade.

C'était bien en octobre, n'est-ce pas, monsieur Wright.

M. Jim Wright (directeur général, Europe centrale, de l'Est et du Sud, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Oui.

• 1630

M. Lloyd Axworthy: M. Wright était notre envoyé spécial à l'époque où nous avons essayé d'inciter le gouvernement de Belgrade à accepter certaines des conditions. Nous vous enverrons donc les détails avec plaisir.

Pour ce qui est du Monténégro, les déclarations diverses des ministres de l'OTAN et d'autres personnalités ont laissé entendre que l'on appuyait sans réserve le gouvernement démocratique du Monténégro. Nous n'avons évidemment pas de présence militaire dans ce pays. Il est intéressant de noter que l'on cherche à maintenir l'équilibre entre l'armée serbe qui existe au Monténégro et la police du Monténégro qui doit rendre des comptes aux autorités gouvernementales du Monténégro.

Personnellement, j'ai le plus grand respect pour le gouvernement monténégrin qui a réussi à maintenir sa position pendant toute cette période très difficile. Le gouvernement a maintenu l'ouverture de son système de communication à la télévision et à la radio, ce qui est bien différent de ce que l'on constate en Serbie. Le gouvernement monténégrin a gardé ses coudées franches et s'est opposé fermement à la tentative de recruter des gens sous les drapeaux et des réservistes. Le gouvernement a droit à tout notre respect.

À l'heure qu'il est, tout ce que nous puissions faire, c'est de réitérer notre appui à l'égard du gouvernement. Si jamais le régime Milosevic décidait de mettre la main sur le Monténégro, le conseil de l'OTAN serait obligé de se demander sérieusement comment il réagirait.

Pour ce qui est de l'effort militaire. Vous vous rappelez que l'automne dernier, lorsque nous en avions débattu à la Chambre des communes, le comité militaire de l'OTAN avait eu pour tâche de préparer toute une série d'options. Le SACEUR, qui est le bras de l'OTAN dans cette région-là, avait préparé ce qui lui semblait être la façon la plus efficace du point de vue militaire d'obtenir une résolution du conflit. D'après ce que nous a signalé le SACEUR à la réunion de lundi, on a l'impression d'être sur la bonne voie. Le SACEUR a évidemment éprouvé quelques problèmes en raison des conditions atmosphériques, et pendant presque une semaine... Vous savez sans doute tous que l'on fait très attention pour que les bombes tombent au bon endroit.

Puis il y a eu l'événement tragique d'hier, que M. Mills nous a signalé. Mais les pilotes de l'OTAN ont l'ordre très strict de ne pas larguer leurs munitions s'ils ne sont pas sûrs de pouvoir frapper la cible qu'on leur a fixée. Voilà pourquoi certains journalistes... Lorsque les avions reviennent sans avoir rempli leur mission, c'est ce qui arrive.

Le mauvais temps a empêché de faire bien des choses. Étant donné que les munitions sont dirigées sur les cibles par laser, il faut que le temps soit raisonnablement clair pour que l'on puisse repérer avec la plus grande exactitude la cible identifiée. Je crois que le rappel vise simplement à signaler que l'on vient d'entrer dans la deuxième phase de l'opération, la deuxième phase active, qui vise à attaquer l'infrastructure, les systèmes de communications, les systèmes énergétiques, les systèmes d'alimentation en carburant et de retirer ainsi tout support à l'armée et à la police serbe au Kosovo. Il faut pour cela énormément de...

M. André Bachand: Permettez-moi de vous interrompre.

[Français]

Vous dites qu'on passe à la deuxième phase, mais cette phase, si je comprends bien...

[Traduction]

M. Lloyd Axworthy: Nous en sommes à la seconde phase.

[Français]

M. André Bachand: D'accord. Dans quelle phase se situe l'envoi des six autres appareils canadiens ou des 300 avions américains? Cet envoi ne se situait sûrement pas dans une phase déjà préparée. Pourquoi? Parce que le ministre prend le temps d'y penser et de réagir. Il semble donc que les six autres appareils qui nous sont demandés et les 300 autres appareils américains ne faisaient pas partie d'une planification de différentes phases. Est-ce vrai ou faux? Pouvez-vous m'éclairer? Merci.

[Traduction]

M. Lloyd Axworthy: Nous en sommes encore à la deuxième phase. Ce que les ministres de l'OTAN ont demandé lundi dernier, c'est d'identifier cette phase dans le but de mieux concentrer ces activités. Vous savez sans doute que les véritables efforts visent à attaquer les troupes terrestres de l'armée et de la police serbes au Kosovo même. Nous avons été très affligés par le sort des personnes déplacées à l'intérieur du Kosovo, de telle sorte que les ministres de l'OTAN ont affirmé à l'époque qu'ils envisageraient la possibilité d'intensifier certaines de ces attaques sur le terrain même au Kosovo.

Voilà où nous en sommes, c'est-à-dire que nous cherchons à attaquer directement l'infrastructure serbe au Kosovo même, c'est-à-dire les ponts, les moyens de transport et de communications et l'alimentation en carburant. Ainsi, je crois que le chef du SACEUR a fait savoir que presque 60 p. 100 de toutes les réserves de carburant ont été détruites, ce qui réduit clairement la mobilité des forces serbes à l'intérieur du Kosovo. Voilà où nous en sommes là-dessus.

• 1635

Puisque vous avez mentionné la guerre du Golfe, rappelez-vous que les bombardements ont duré pendant trois ou quatre mois jusqu'à ce que l'on choisisse d'opter pour une mobilisation plus poussée, alors que nous en sommes encore qu'à deux semaines et demie de frappe aérienne. Je sais bien que l'on voudrait que la crise soit dénouée. Je le voudrais bien, moi aussi. Mais la guerre du Golfe a duré longtemps avant que l'on ne s'estime près à bouger et à agir directement sur le terrain.

Quant aux réunions qui ont eu lieu hier, il s'agit surtout de réunions de parlementaires en vue de former éventuellement une union parlementaire entre le président de la Douma russe, les représentants de Belgrade et le Bélarus. Je ne crois pas que ces réunions reflètent nécessairement ce que le gouvernement russe tente de faire à l'heure qu'il est. En fait, au cours de mes discussions avec M. Ivanov, j'ai eu l'impression que le ministre des Affaires étrangères de la Russie s'était engagé très sérieusement, je le répète, à travailler... Évidemment, je n'irais pas jusqu'à réfuter que les Russes ont parfois des points de vue très différents des nôtres. Ils ne souscrivent pas aux mesures prises par l'OTAN, et ils ne sont pas gênés le dire catégoriquement. Mais ils reconnaissent, par la même occasion, qu'ils doivent être partie prenante à la solution, et ils sont bien disposés à le faire.

Le président: Merci, monsieur le ministre. Comme nous avons dépassé depuis longtemps le temps imparti, je passerai maintenant...

M. Lloyd Axworthy: Si vous me permettez, monsieur le président, je voudrais ajouter que nous n'avons pas de document spécifique.

J'ai dit plus tôt que notre politique prévoit un troisième pilier pour appuyer toute une gamme de programmes d'études canadiennes à l'étranger. Ainsi, lorsque les ambassadeurs canadiens rentrent de leurs affectations, nous leur demandons de visiter les diverses régions du Canada pour faire comprendre aux Canadiens ce que notre pays peut faire à l'étranger. Nous offrons également des programmes qui permettent d'exprimer la diversité du Canada par le truchement de divers événements culturels à l'étranger. Il est important que le reste du monde comprenne à quel point notre pays est riche dans sa diversité culturelle, et voilà pourquoi nous offrons ces programmes qui font partie de notre troisième pilier.

Ce que nous pourrions peut-être faire, et je pourrais peut-être demander au sous-ministre, c'est de préparer une certaine évaluation des diverses activités qui sont entreprises à ce moment-ci.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Cannis.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, bienvenue. C'est aimable à vous d'être venu nous rencontrer.

Il est regrettable que la situation au Kosovo monopolise tout l'ordre du jour, car je pense que nous aurions aimé parler surtout du budget des dépenses principal et du programme de stage qui, je pense, est important. Malheureusement, je devrais moi aussi limiter mes questions à la situation au Kosovo, situation vraiment déplorable.

Tout d'abord, j'aimerais faire une déclaration et vous pourrez peut-être ensuite y répondre.

Étant donné ce qui s'est produit au cours des dernières 24 heures et que des innocents ont perdu la vie à la suite des bombardements et tout le reste, je me rappelle, monsieur le ministre, il y a environ une semaine et demie j'écoutais CNN et j'ai entendu le vice-premier ministre serbe déclarer: «s'il vous plaît, arrêtez les bombardements et négocions.»

Je suis perplexe, et je veux obtenir votre avis quant aux raisons pour lesquelles nous ne l'avons pas fait. Peut-être qu'ils voulaient nous induire en erreur; peut-être qu'ils voulaient nous manipuler. Peut-être que ce n'était qu'une machination pour essayer de nous induire en erreur. Je l'ignore, mais étant donné que depuis ce moment-là, des innocents ont malheureusement perdu la vie, pourquoi ne les avons-nous pas amener à table pour entendre effectivement ce qu'ils avaient à nous dire? Ils avaient peut-être une proposition et peut-être que nous aurions pu éviter tout ce carnage.

Je me rappelle au cours des entretiens initiaux pour la paix en France on ne savait pas vraiment quels représentants seraient à la table, c'est-à-dire l'ALK ou d'autres groupes, etc. En fin de compte, un comité a été mis sur pied, et une entente devait être supposément ratifiée, mais tout est tombé à l'eau. À votre avis, est-ce que tout est tombé à l'eau parce qu'ils demandaient l'autonomie, l'indépendance du Kosovo? Est-ce ce que les médias nous disent? Qu'est-ce que nous préconisons? Est-ce que nous préconisons un Kosovo indépendant à ce moment-ci, ou est-ce que nous préconisons un Kosovo autonome au sein de la Yougoslavie?

• 1640

[Note de la rédaction: Inaudible]

Une voix: ...

M. John Cannis: J'ai perdu le fil de ma pensée.

Le président: Vous avez encore des mots sur les lèvres, monsieur Cannis. Ne les laissez pas vous décourager.

M. John Cannis: Heureusement que je n'écoute pas le Bloc.

Le président: C'est bien.

M. John Cannis: Je m'arrête ici, monsieur le ministre. Je suis désolé, j'ai perdu le fil de ma pensée.

M. Lloyd Axworthy: Eh bien, John, en ce qui concerne ces deux questions, nous n'avons cessé de dire que tout cela pourrait s'arrêter demain si le régime de Milosevic cessait cette répression contre les Kosovars. Lorsqu'il a fait cette offre, le vice-premier ministre n'était pas prêt à mettre fin à toutes ces atrocités qui sont signalées, et à retirer ses troupes afin qu'il règne un certain sens de sécurité.

Naturellement, nous aimerions que le conflit se règle, mais il est important de ne pas tomber dans le piège de simplement permettre au régime de Milosevic de poursuivre son programme d'épuration ethnique au Kosovo.

Je vous recommande de lire—je n'en ai pas d'exemplaires ici, mais je me ferai un plaisir de prêter le mien aux membres du comité—un article du journal préféré de M. Mills, le Washington Post, qui a été imprimé lundi, et qui donne une évaluation historique très complète des initiatives entreprises par le régime pour éliminer les Kosovars albanais, depuis des années, mais plus particulièrement depuis les sept ou huit derniers mois. Tout cela n'est pas le fruit du hasard. C'est un programme cruel extrêmement bien préparé, et c'est ce à quoi nous devons faire face à l'heure actuelle. C'est cette cruauté que nous devons...

M. John Cannis: Ce que je dis en réalité, de façon très simpliste, c'est que lorsqu'ils ont fait cette proposition, si l'OTAN ou la communauté internationale avait immédiatement entamé un dialogue, je crois qu'ils auraient également été en mesure, en même temps, d'observer quelles atrocités, s'ils... Et s'ils étaient engagés en même temps dans ce qu'on appelle un génocide et une épuration ethnique tout en tentant d'établir la paix, alors je pense que nous aurions eu un avantage par rapport à eux.

M. Lloyd Axworthy: Eh bien, le problème c'est qu'aucune présence internationale n'était prévue au Kosovo afin de pouvoir déterminer tout cela. En réalité, c'était une proposition à sens unique, et je pense que c'est ce à quoi nous devons faire face. Je ne veux pas constamment revenir là-dessus. Nous en avons déjà parlé.

Le régime Milosevic a commis certains des pires actes de répression qu'un gouvernement ait commis depuis 50 ans. Vous demandez ce qui s'est produit à Rambouillet. C'est parce qu'ils ont refusé de signer. Ce n'était pas la question d'autonomie tant que, encore une fois, le fait d'accepter une forme de présence internationale. Je comprends que cela crée un précédent, mais j'ai fait valoir que nous sommes en train d'établir de nouveaux précédents car nous sommes dans un monde très différent, et si nous voulons protéger les gens contre de tels actes de répression, qui dépassent de loin toute norme acceptable, alors nous devons être prêts à intervenir. Voilà où nous en sommes, et c'est de ce côté que la balance penche.

M. John Cannis: Je suis heureux, monsieur le ministre, et, à mon humble avis, si vous me le permettez, je voudrais dire que le message que nous devons transmettre à la communauté internationale, c'est que nous sommes là pour protéger les innocents des deux côtés, et que nous ne devons pas oublier les atrocités commises par le régime de Milosevic, comme vous l'avez clairement souligné. Je suis d'accord avec vous. Je dois dire que mon collègue du Parti réformiste sait quelle est ma position à cet égard. Je pense que c'est le genre de message que nous devons transmettre. Merci.

Le président: Merci.

M. Lloyd Axworthy: Si je peux faire une observation, car je sais qu'il reste encore quelques minutes à M. Cannis...

Le président: Non, je pense que M. Cannis a dépassé de loin le temps qui lui était alloué avec sa dernière intervention, mais si vous voulez rapidement...

M. Lloyd Axworthy: Un autre aspect des propositions dont on parle depuis deux ou trois jours, qui n'a pas beaucoup reçu d'attention mais, qui à mon avis, mérite qu'on lui en accorde, et je pense que le comité en prendra note, est le fait que l'on est en train d'examiner des propositions en vue d'un programme de reconstruction dans toute la région, reconnaissant le fait que la fragmentation dans les Balkans est en partie à l'origine du problème. Il y a eu une fragmentation de l'exercice du pouvoir, une fragmentation du bien-être économique, notamment en Serbie comme telle, dans cette partie de la Yougoslavie.

• 1645

Je pense que l'une des mesures d'incitation, une façon pour nous d'offrir un avantage aux Kosovars, aux Serbes ou aux Bosniens, serait de dire que la paix est importante et qu'il y a également un dividende à en retirer, notamment la reconstruction de la région. Je pense que cela fera partie de l'engagement que nous devrons prendre.

Le président: Merci, monsieur le ministre. Je vais maintenant donner la parole à Mills.

M. Bob Mills: Merci.

Cela me répugne lorsque les gens le font, mais tant pis, c'est la politique, alors je vais le faire de toute façon. Permettez-moi de citer encore une fois un commentaire au sujet de la crédibilité canadienne, question qui a été soulevée par M. Assadourian. Il s'agit d'un commentaire qui a été fait au sujet du premier ministre qui a dit que nous pouvions bombarder et envoyer ensuite des gardiens de la paix. Voici ce qu'on a dit le 15 janvier 1991:

    Quelle sorte de logique compliquée utilise le premier ministre? Dans quel pays de fous va-t-il chercher ses idées? On ne peut devenir un gardien de la paix si on a été de l'autre côté de la ligne de tir.

Je n'ai pas vraiment besoin de dire qui a dit cela, mais je pense en avoir dit suffisamment en réponse à la question de M. Assadourian.

Ma question concerne ce qui se passe avec l'OTAN. De toute évidence, des réunions très importantes auront lieu à la fin du mois, et nous parlons ici de l'orientation de l'OTAN, du concept stratégique de tout cela. Ce que nous avons signé, naturellement, était une alliance de défense. À la fin de la guerre froide, naturellement, nous avons joué un nouveau rôle en Bosnie, et nous jouons maintenant un rôle très différent au Kosovo. Je suis réellement préoccupé et j'aimerais que le ministre me dise à l'approche de ces rencontres qui auront lieu à Washington, ce qu'il pense exactement en ce moment-ci du nouveau rôle de l'OTAN, et s'il va demander l'approbation du Parlement avant d'accepter un nouveau mandat, un nouveau rôle, que pourrait se donner l'OTAN alors qu'il repense son rôle.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le président, tout d'abord, pour en revenir à la proposition initiale, je pense qu'il importe de rappeler aux membres du comité que dans l'histoire récente de la Bosnie, il y a eu des frappes aériennes. Le Canada a participé à ces frappes aériennes et il participe également au maintien de la paix en Bosnie, avec 40 autres pays. Le logarithme, je pense est clair. C'est en partie en réponse à M. Assadourian, car c'est dans le cadre de l'accord Dayton que nous tentions de protéger les civils innocents en Bosnie. Nous avons également réussi à conclure une entente. Je ne dis pas que l'on peut utiliser une réplique exacte de ce modèle au Kosovo, mais cela montre qu'il est possible de participer à des frappes aériennes, comme nous l'avons fait en Bosnie, tout en changeant de rôle en cours de route pour devenir gardien de la paix.

Pour ce qui est des réunions de l'OTAN, je pense que nous avons eu une séance au cours de laquelle il a été question de l'OTAN comme tel, mais initialement, nous devions parler d'un nouveau concept stratégique. La préparation d'un document est en cours. Naturellement, on est en train de définir le rôle de l'OTAN en ce moment-ci au Kosovo comme tel. Je pense que ce que nous sommes en train de déterminer ici, c'est le fait que cet organisme de sécurité collective a été mis sur pied dans le contexte de la guerre froide pour protéger contre les agressions transfrontalières mais elle est maintenant devenue une organisation qui tente de protéger la sécurité des êtres humains en Europe. C'est une définition qui n'a pas encore été jetée sur papier, mais je pense qu'elle fera l 'objet d'un débat très animé entre les dirigeants lors du sommet de Washington. De quelle façon cela sera formulé, les mots exacts qui seront utilisés, se retrouveront sous forme d'un communiqué.

Il y a d'autres questions plus strictes. Je ne voudrais pas lancer un autre débat, mais il y aura des entretiens au sujet du rôle que l'OTAN joue dans le domaine nucléaire. Nous jouons un rôle actif dans ce domaine. Nous aborderons des questions concernant la force d'identité européenne. Mais la question clé au sujet du rôle que jouera l'OTAN, c'est que l'alliance a franchi une étape très importante en disant que lorsqu'il y a preuve claire d'actes de répression extrême en Europe, l'OTAN est prête à offrir une protection aux civils contre cette répression.

• 1650

Je pense que cela sera très important, et nous sommes dans une période de transition. Écoutez, nous n'avons rien sur quoi nous baser. La plupart des manuels que nous utilisons sont désuets, franchement. C'est l'un des problèmes que nous constatons dans nos universités—ils travaillent tout simplement avec de vieux manuels.

En cette période de transition, c'est l'une des choses auxquelles nous devrions travailler. Je serais très heureux, franchement, et je me réjouirais d'avoir l'occasion, peut-être pas nécessairement lors d'une séance officielle comme celle-ci, de m'entretenir avec les membres du comité sur la façon de protéger la sécurité humaine. Comme protéger les particuliers...

M. Bob Mills: En ce moment même, il y a 21 pays où on se livre à ce genre de purification ethnique. Faut-il en déduire que l'OTAN pourrait envisager...

M. Lloyd Axworthy: Non, de toute évidence... l'OTAN est un organisme régional, axé sur l'Europe.

M. Bob Mills: Par conséquent, la Tchéchénie...

M. Lloyd Axworthy: Mais puis-je vous donner un autre exemple, monsieur Mills? J'aimerais vous donner un exemple.

Dans ma déclaration d'ouverture, j'ai dit que vous devriez parler à David Pratt. David est revenu du Sierra Leone, en disant qu'Ecomog, une force de maintien de la paix qui regroupe plusieurs pays d'Afrique occidentale avait subi des pertes de 1 400 soldats depuis janvier en essayant de restaurer l'ordre et de protéger la population du Sierra Leone. La perspective de pertes de vie humaine nous rend extrêmement nerveux, et à juste titre, mais les casques bleus, des Canadiens, des Nigériens, des Togolais, qui font partie d'Economog, ont essuyé 1 400 pertes. Il y a actuellement 6 000 réfugiés à la frontière du Sierra Leone, des gens qui sont là depuis des années et non pas des semaines, à l'intérieur du pays, il y a des centaines de milliers de personnes déplacées, on ne sait même pas combien.

Je suis donc entièrement d'accord avec vous et c'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles j'ai envoyé David au Sierra Leone, à un moment où nous essayons de nous impliquer. Ce vendredi, il va y avoir une réunion aux Nations Unies. Nous allons en parler lors des réunions du Commonwealth car nous éprouvons une certaine responsabilité dans ce cas-là également. Je suis donc tout à fait d'accord avec vous.

Ce n'est pas facile, mais en revanche, si nous n'intervenons pas, si nous n'essayons pas de soutenir les Africains occidentaux dans leurs efforts... Mais cela vous donne une idée de ce qui se passe au Kosovo. Les mères ou les pères nigériens n'apprécient pas plus que les Canadiens lorsque leur enfant soldat leur revient dans un sac à dépouilles, pas plus que les Américains, les Britanniques ou les Français, mais s'ils le font, c'est pour restaurer l'ordre public dans la région.

M. Bob Mills: Vous pouvez ajouter le Soudan à cette liste, une situation sur laquelle le comité se penche depuis un an et demi.

Le président: Merci. Nous passons maintenant à Mme Augustine.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur le ministre, chaque semaine à la Chambre nous avons pour habitude de reposer la même question, et j'ai également une question que je pose systématiquement chaque année, au moment du budget. La voici: l'année dernière, on m'a dit que des objectifs mesurables avaient été arrêtés; j'aimerais savoir quelle place les minorités occupent dans les missions canadiennes à l'étranger, et également parmi les agents du service étranger.

J'en profite pour poser mes deux autres questions, peut-être pendant que vous cherchez ces statistiques.

Le président: Mme Edwards est prête à vous répondre puisque l'année dernière...

Mme Jean Augustine: Ah, elle est prête.

Le président: Apparemment, elle est arrivée bien armée. Quoi qu'il en soit, vous aviez deux autres questions à poser, allez-y.

Mme Jean Augustine: J'ai été heureuse de vous entendre parler de la responsabilité que nous éprouvons en ce qui concerne l'Afrique. En effet, je vous assure que je suis profondément préoccupée par toutes sortes de questions. Notre réaction, la réaction du monde, face aux Kosovars, et également face à la crise des réfugiés au Rwanda, tous ces gens qui parcourent les routes avec des paquets sur la tête, portant des bébés... il me semble que dans les deux cas on a réagi un peu différemment.

Quoi qu'il en soit, voilà les deux questions que je voulais vous poser; premièrement, quelle est l'incidence de vos dépenses au Kosovo sur l'ensemble de votre budget pour 1999-2000? D'autre part, le premier ministre a annoncé une remise de dette: quelle est l'incidence de cette décision sur vos dépenses?

La troisième question que je veux vous poser porte sur votre programme en ce qui concerne la sécurité humaine et la proportion des dépenses destinées à régler ce qu'on pourrait appeler les «problèmes de pauvreté», cette pauvreté qui ne fait qu'augmenter l'instabilité dans beaucoup de régions du monde.

• 1655

D'autre part, il y a quelques minutes, en feuilletant ce document j'ai vu que nous augmentions nos contributions aux organisations internationales de 20,3 millions de dollars environ. Et pourtant, quand on écoute beaucoup d'organismes de développement et d'APD, on entend que la proportion de notre PIB qui est consacrée à l'APD diminue alors que nos contributions aux organisations internationales augmentent. Y a-t-il un lien entre notre participation aux organisations internationales et la diminution de notre engagement individuel?

M. Lloyd Axworthy: Je vais demander à Mme Edwards de répondre à la première partie de votre question.

Mme Lucie Edwards (sous-ministre adjointe, Services ministériels, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, et je remercie également Mme Augustine.

Chaque année, c'est ce que nous appelons notre examen de conscience, nous préparons un bulletin sur nos réalisations dans ce domaine particulièrement important. Je vous avouerais que je serais déçue si on ne nous posait pas la question, car pour nous c'est un élément important de notre travail, tout comme il est important de rendre des comptes chaque année au Conseil du Trésor sur l'accès à l'information.

Les réalisations du ministère en ce qui concerne l'équité en matière d'emploi, et je parle ici des groupes qui sont systématiquement sous-représentés au gouvernement, les femmes, les minorités visibles, les Autochtones et les personnes handicapées, sont comparables à celle du reste du groupe du gouvernement, à plus ou moins 1 p. 100 près, mais avec une exception importante, celle des femmes.

En effet, à l'heure actuelle il y a maintenant 50 p. 100 de femmes dan la fonction publique. Au ministère des Affaires étrangères, la proportion n'est que de 44 p. 100, ce qui nous place à 7 p. 100 en dessous des autres, et la disparité est particulièrement notable dans les échelons supérieurs où les femmes sont chefs de mission dans 15 p. 100 des cas et détiennent un poste de direction dans 13 p. 100 des cas. Dans l'ensemble du gouvernement, cette proportion est de 22 p. 100. Nous avons donc encore beaucoup à faire sur le plan de la représentation des femmes.

Je sais que vous aimez entendre des chiffres; l'année dernière nous avons recruté 68 personnes, en provenance de toutes les régions du pays. Parmi ces 68 personnes, 50 p. 100 étaient des femmes, 9 p. 100 des Autochtones, 20 p. 100 appartenaient à des minorités visibles, enfin, 30 p. 100 étaient francophones et 70 p. 100 anglophones.

Dans l'ensemble de la population canadienne, il y a 8 p. 100 de minorités visibles dans la population active. C'est donc un domaine où nous nous faisons des progrès importants.

L'année dernière, le premier ministre a nommé un chef de mission autochtone, et également un chef de mission appartenant à une minorité visible. À l'heure actuelle, nous avons 19 chefs de mission du sexe féminin, et nous faisons également des efforts dans les paliers supérieurs de la hiérarchie.

En général, à notre siège, la proportion de femmes est comparable à ce qu'elle est dans l'ensemble de la fonction publique, mais il est plus difficile de recruter des femmes pour le service étranger car c'est un secteur où les gens ont plus de mal à trouver un équilibre entre leur vie privée et leur travail. Lorsqu'une famille doit se rendre à l'étranger, cela représente des sacrifices importants.

À notre avis, il ne s'agit plus à l'heure actuelle d'un problème de recrutement. Des candidats existent, l'année dernière nous en avons eu près de 6 000 de toutes les couches de la société, de toutes les régions du pays. Le véritable problème, c'est de garder les gens.

Jusqu'à tout récemment, nous perdions 25 p. 100 de nos jeunes recrues, hommes et femmes, au bout de sept ans de service. Il est certain que de meilleurs salaires et un système de promotion accéléré ont amélioré cette situation, mais nos jeunes agents nous disent qu'ils se heurtent à de véritables problèmes. La nécessité de trouver un emploi pour leur conjoint, la garde des enfants, la nécessité de s'occuper des membres âgés de leur famille, sont des problèmes.

Je peux vous citer une statistique particulièrement révélatrice: au ministère, 76 p. 100 des hommes sont mariés alors que 57 p. 100 des femmes sont célibataires. Il reste donc particulièrement difficile pour les femmes de trouver un équilibre entre leur famille et leur carrière au ministère.

À l'heure actuelle, nous continuons à mettre l'accent sur le recrutement, comme nous le faisons depuis plusieurs années, mais en même temps, nous faisons des efforts pour garder les gens. C'est une tâche qui ne sera pas facile, et je peux vous dire que le ministre nous incite très fort à agir dans ce domaine.

Nous faisons des progrès; depuis 1993, nous avons réussi à recruter 50 p. 100 de femmes au premier échelon. Un peu plus haut, au niveau des cadres moyens, nous avons promu 33 p. 100 de femmes dans notre liste de promotion. Ce printemps, nous espérons recruter 75 jeunes agents pour le service étranger et pour l'administration consulaire.

Le président: Merci.

Monsieur le ministre je suis désolé mais il ne nous reste pas beaucoup de temps, nous avons dépassé l'heure de cinq minutes. Nous avons des périodes de cinq minutes qui durent six minutes et demi, et je ne sais pas si vous avez le temps de parler très vite de la sécurité humaine et...

M. Lloyd Axworthy: Non.

Le président: ...de toute cette question de la pauvreté. Je suis tout à fait d'accord avec la question, elle me semble parfaitement justifiée.

M. Lloyd Axworthy: Peut-être une courte observation pour compléter ce que Mme Edwards a dit.

Pour commencer, je m'attends à ce qu'il y ait de nouvelles améliorations cette année au niveau des chefs de mission. Je ne peux pas vous expliquer exactement comment, car nous travaillons toujours sur ce dossier avec le premier ministre, mais je m'attends à voir des améliorations.

• 1700

Lucie vous a parlé de la vie de famille et des problèmes que cela posait, mais d'un autre côté, j'aimerais attirer votre attention sur les problèmes auxquels les gens que nous envoyons en poste à l'étranger se heurtent de plus en plus, des problèmes d'environnement. En effet, la détérioration de certains environnements est telle que cela devient un gros problème pour certains postes.

En ce qui concerne les répercussions des dépenses au Kosovo sur nos activités, dans la plupart des cas, c'est le ministère de la Défense et l'ACDI qui consacrent des fonds aux efforts humanitaires. Pour notre ministère, la seule conséquence est que nous avons dû fermer notre ambassade à Belgrade, et également ouvrir des missions temporaires à Tirana et Skopje pour continuer à offrir nos services aux autres ministères qui sont sur place et également à nos représentants diplomatiques. Il y aura donc des coûts supplémentaires et le sous-ministre vous a dit que cela pourrait être de l'ordre de 1 ou 2 millions de dollars, ce qui peut sembler négligeable, mais je peux vous assurer que pour notre ministère, ce n'est pas rien.

Quant à la sécurité humaine, si on considère les aspects fondamentaux, les risques sont aujourd'hui des risques transcendants. Cela va du terrorisme au trafic des drogues, de la dégradation environnementale à des conflits qui font de nombreuses victimes parmi les civils. Ce genre de problèmes, les États nations ne peuvent plus les résoudre seuls. La seule solution réside dans la coopération internationale. C'est la raison pour laquelle nous sommes au Kosovo, c'est aussi simple que cela.

La raison pour laquelle cela s'applique également à la pauvreté, Jean, c'est que le manque de sécurité peut mettre en péril ou menacer une grande partie des investissements que nous faisons dans le domaine du développement. Je me souviens particulièrement d'un représentant d'une ONG en Afrique occidentale qui me disait à quel point il est difficile de penser à la prochaine récolte quand un enfant de 13 ans armé d'un AK-47 vous regarde entre les deux yeux. En fait, c'est la raison pour laquelle on arme les enfants, ils deviennent, en quelque sorte, des machines à tuer. Le ministère des Affaires étrangères assiste donc l'ACDI dans ses efforts de développement en essayant d'offrir aux gens une certaine sécurité.

C'est une chose qui intéresse également nos citoyens à nous. Nous ne devons pas oublier que les Canadiens font probablement 20 millions de visites à l'étranger chaque année. M. Mills était jadis agent de voyage, il doit savoir à quel point les risques ont augmenté quand on se rend à l'étranger. La seule façon de protéger les gens contre le terrorisme, c'est d'y mettre fin grâce à la coopération internationale. La seule façon de mettre fin au trafic des drogues au Canada, c'est également de faire appel à la coopération internationale. Nous n'arriverons jamais à fermer nos frontières sans une telle coopération.

Pour cette raison l'orientation de notre politique devient de plus en plus importante. Les concepts traditionnels demeurent, mais aujourd'hui, pratiquement aucun gouvernement n'y échappe, tous doivent faire face à la situation. C'est la raison pour laquelle la collaboration internationale prend de plus en plus d'importance, c'est la raison pour laquelle notre participation aux organismes internationaux est une priorité.

Monsieur le président, il serait difficile de vous donner un résumé plus court.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre. C'était certainement excelent en si peu de temps.

[Français]

Monsieur Laurin.

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le président, si vous le voulez bien, je vais partager le temps qui m'est alloué avec mon collègue.

Le président: Si vous avez cinq questions, ...

M. René Laurin: Je n'ai qu'une question, mais j'aimerais que mon collègue pose les deux siennes avant que M. le ministre y réponde.

Monsieur le ministre, nous sommes en guerre au Kosovo. Jsqu'à maintenant, nous avons toujours justifié la présence du Canada au Kosovo par des considérations d'ordre humanitaire. Or, lorsque dans le passé le Canada a été présent dans d'autres pays pour des raisons d'ordre humanitaire ou pour participer à des opérations de maintien de la paix, il connaissait la limite de ses engagements financiers et il pouvait arrêter son intervention lorsque cette limite avait été atteinte. Nous agissons de la même façon lorsque se produit une catastrophe naturelle: on aide les gens dans la mesure de nos capacités financières et on fixe des montants maximaux.

Dans le cas du Kosovo, il s'agit d'une guerre. Une guerre ne se termine que lorsqu'on l'a gagnée ou perdue. Elle peut être courte, tout comme elle peut être longue. Dans ce cas-ci, on ne sait pas combien de temps la guerre va durer. Est-ce que le ministre pourrait nous expliquer clairement la position du Canada face au Kosovo? Est-ce qu'on participe à la guerre jusqu'à la victoire ou jusqu'à la défaite, ou si, dans le cadre de notre engagement envers l'OTAN, nous pourrons nous retirer n'importe quand, c'est-à-dire au moment où nous jugerons que nous avons suffisamment dépensé et que le Canada a atteint la limite de ce qu'il peut faire?

• 1705

M. Daniel Turp: Monsieur le ministre, j'aimerais poser deux questions très brèves au sujet du Budget des dépenses. À la page 56 de la version anglaise où l'on traite du Canadian Business Centre in Mexico, on dit prévoir des revenus de l'ordre de 100 000 $ par année au cours des quatre prochaines années, alors que j'avais cru comprendre que ce centre était fermé. Pourriez-vous nous dire s'il est fermé et, si oui, pourquoi on prévoit des revenus au cours des quatre prochaines années?

Ma deuxième question porte sur l'ambassade à Berlin. Je ne veux pas trop vous inquiéter, car on continue nos recherches, mais il y a une chose qui me préoccupe au sujet de l'ambassade à Berlin. Il semble que vous vouliez que l'ambassade soit construite avec l'aide du secteur privé, qui serait un partenaire au niveau du financement, de la construction et de la gestion, ce qui est contraire à la Loi sur la gestion des finances publiques. Ce sont mes deux questions.

[Traduction]

M. Lloyd Axworthy: Pour commencer, monsieur Laurin, nous n'avons pas déclaré la guerre à la Serbie. Nous prenons part aux opérations de l'OTAN. Dans ce cas particulier, je considère qu'il n'y aura pas de gagnant ou de perdant au sens traditionnel. Comme je l'ai dit en réponse à une autre question, parmi les anciennes définitions et les concepts utilisés par le passé, il y en a qui ne s'appliquent tout simplement pas parce que nous luttons contre des guerres internes, contre des actes de répression, contre des atrocités, et par conséquent, nous essayons d'élever des barrières contre ces répressions.

Je considérerais que nous avons gagné lorsque nous réussirons à trouver un gouvernement au Kosovo, qui protégera les droits et l'intégrité du peuple du Kosovo. À mon avis, voilà ce qui constituerait une victoire. Que l'OTAN gagne ou perde, là n'est pas la question, l'important c'est que les Kosovars aient le droit de vivre sur leur propre territoire, leurs droits étant pleinement protégés. À mon avis, voilà ce qui constituerait une victoire dans ce cas.

[Français]

M. René Laurin: À quel prix?

M. Lloyd Axworthy: À quel prix? Je ne le connais pas exactement. Comme je l'indiquais, le ministère des Affaires étrangères prévoit dépenser 1 ou 2 millions de dollars, mais le ministère de la Défense dépensera sans doute une somme plus importante. Je crois qu'on parle actuellement d'une somme de 15 millions de dollars, bien que je ne connaisse pas les chiffres exacts.

M. René Laurin: Mais nous n'avons aucun moyen de contrôler ces sommes que nous dépenserons.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur le député, soyez assuré que le ministère des Finances contrôle chaque dépense effectuée par chaque ministère.

[Traduction]

Monsieur Turp, vous m'avez posé une question au sujet du Centre canadien des affaires à l'ambassade de Mexico. On me dit que nous avons fermé ce centre, mais que ses activités se poursuivent dans le cadre de l'ambassade proprement dite. Il ne s'agit donc plus d'un centre séparé, mais ses activités se poursuivent.

Madame Edwards, pouvez-vous répondre à la question au sujet de l'ambassade, des appels d'offres?

[Français]

Mme Lucie Edwards: Monsieur Turp, si j'ai bien compris votre question, vous voulez savoir si nous pouvons demander au secteur privé de collaborer à la construction de la chancellerie.

M. Daniel Turp: Est-ce que cela est conforme aux dispositions de la Loi sur la gestion des finances publiques?

Mme Lucie Edwards: Le projet de construction de la chancellerie à Berlin a fait l'objet de longues consultations avec le ministère de la Justice et le Conseil du Trésor en vue de déterminer si la méthode de financement proposée, laquelle est un joint-venture, était conforme à la loi. Nous avons repris le modèle de financement de la chancellerie de Tokyo. Il y a donc un précédent, et le Conseil du Trésor et le ministère de la Justice nous ont confirmé que ce joint-venture était conforme à toutes nos lois canadiennes.

Le président: D'accord, merci beaucoup. Monsieur Bertrand.

• 1710

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le ministre, depuis le début des bombardements, nous n'avons presque rien entendu au sujet des membres de l'Armée de libération du Kosovo. Pouvez-vous me dire s'ils sont encore actifs?

[Traduction]

Certains journalistes ont suggéré que nous armions l'ALK pour que ce groupe puisse lutter contre les attaques serbes. J'aimerais savoir ce que vous en pensez.

M. Lloyd Axworthy: Monsieur Bertrand, c'est un groupe qui continue à agir de façon limitée. Vous savez que depuis environ une semaine il y a eu des conflits aux frontières; je ne peux pas vous dire exactement en quoi consiste leurs effectifs, il s'agit d'un groupe de guérilleros et par conséquent, ils interviennent de façon assez désordonnée.

Je peux vous assurer qu'à l'exception de certains membres du Congrès américain, personne n'envisage de réarmer l'ALK. Cela irait à l'encontre de tout ce que nous souhaitons accomplir. Cela enfreindrait l'accord sur les armements et tous les autres principes. Je suis convaincu que ce serait une grave erreur.

On me rappelle que l'accord de Rambouillet mentionne spécifiquement le désarmement de l'ALK. À mon avis, cela doit figurer dans n'importe quel accord. Je reviens à ce que M. Assadourian disait tout à l'heure: certains de ces problèmes ne sont pas causés par un seul camp, l'ALK a également une certaine responsabilité. Raison de plus pour assurer une présence internationale, pour s'assurer que les deux camps respectent un accord de paix, quel qu'il soit.

[Français]

Le président: Monsieur Bachand.

M. André Bachand: Merci, monsieur le président. Je ne pensais pas pouvoir poser une autre question et j'aimerais simplement faire un commentaire.

À la page 48 de la version française, vous dites vouloir étendre les services de passeports dans les régions où le Bureau des passeports n'est pas encore présent. Je vous invite, monsieur le ministre, à aller rapidement dans cette direction. Tous les bureaux de députés offrent actuellement le service de passeports à leurs commettants et nous apprécierions grandement que vous puissiez rapprocher certains services des régions.

Comme vous le savez, le Canada a connu quelques problèmes reliés aux passeports avec un certain pays. À la page 49, vous parlez d'une refonte des procédures de demande de passeport et dites que les nouveaux formulaires seront simplifiés. Votre ministère investira une somme assez importante au plan technologique en vue de mettre en oeuvre son système de production automatisée. On sait que chaque million de dollars est important pour votre ministère et vous le disiez très bien. Les formulaires de demande de passeport me semblaient déjà assez simples et j'aimerais savoir ce qu'on se propose de simplifier davantage.

[Traduction]

M. Don Campbell (sous-ministre, Affaires étrangères et Commerce international): Pour commencer, le nombre des guichets qui donnent accès à des services de passeports augmente. Les bureaux de passeports sont plus nombreux mais également, depuis l'année dernière, nous nous sommes mis d'accord avec le service des postes et les gens trouveront des formulaires de passeport dans certains bureaux de poste. Dans ces bureaux-là, les employés pourront examiner les demandes de passeport, ce qui permettra aux gens de corriger leurs erreurs immédiatement.

Les formulaires seront également simplifiés. Évidemment, nous sommes sur le point de changer le type de passeport, mais cela n'est pas encore prêt.

• 1715

Le président: M. Mills a une question supplémentaire, je crois au sujet des passeports.

M. Bob Mills: Oui, c'est au sujet de la sécurité des passeports, et plus particulièrement au niveau des bureaux de poste. Pendant longtemps, c'était les agents de voyage qui, en un premier temps, examinaient les demandes de passeport. C'était une des premières choses que mon personnel devait apprendre: comment bien remplir le formulaire, joindre l'extrait de naissance, la somme requise, etc. Je pense que ce serait une bonne idée de continuer à faire appel aux agents de voyage—je suis en train de défendre mes anciens collègues—car ils en sont tout à fait capables, et d'autre part, ils ont tout intérêt à ce que les gens puissent voyager sans forcément devoir se rendre deux fois à Calgary, comme c'est notre cas à nous. Il y a d'autres personnes, donc, qui pourraient élargir le réseau.

Vous avez déjà répondu en partie, mais je voulais vous parler de la nécessité de protéger nos passeports par tous les moyens. En effet, cela continue à être une préoccupation car il y a un véritable commerce des passeports. J'ai fait quelques recherches et je me suis aperçu que dans beaucoup d'endroits, on pouvait acheter des passeports canadiens. Que ces passeports soient légitimes ou pas, ce n'est pas toujours évident. Quoi qu'il en soit, il y a beaucoup d'endroits dans le monde où on peut acheter un passeport canadien. Beaucoup de travailleurs du secteur pétrolier, entre autres, me disent que les passeports canadiens sont disponibles librement dans certains pays. C'était une simple observation, Don.

D'autre part, je serais bref car je sais que tout le monde est fatigué, en ce qui concerne la radiation de la dette d'un pays étranger, où en sont les choses? Jusqu'où pensez-vous que cela ira, quel montant cela suppose? Ce sera ma seule autre question.

M. Don Campbell: En ce qui concerne la dette étrangère, M. Martin a annoncé que le ministère des Finances travaillait sur ce dossier. En effet, il s'agit d'élargir l'initiative prise dans le cas des pays lourdement endettés. La plupart des pays du G-8 ont maintenant fait des déclarations à ce sujet. Je m'attends à ce qu'on prenne une initiative concernant la dette au sommet qui aura lieu à Cologne en juin prochain.

Je peux dire que le Canada devance déjà presque tous les autres pays du G-8, et lorsque la plupart des autres pays du G-8, y compris l'Allemagne et le Japon, auront terminé cet exercice, la norme que nous avons adoptée sera générale. Toutefois, nous avons l'intention d'accorder des remises de dette supplémentaires. Je n'ai pas de chiffres précis à ce sujet, mais comparé à d'autres pays qui sont loin d'être à notre niveau sur le plan de cette initiative, ce sera très différent.

Le président: Monsieur Campbell, vous devez savoir—je suis certain que le ministre en est conscient—que le public est tout à fait en faveur de ces initiatives.

M. Lloyd Axworthy: Une dernière note qui pourra être utile aux députés: j'ai parlé à M. Martin et il m'a dit qu'il avait commencé des démarches auprès de la Banque mondiale et du FMI pour qu'on accorde à la Macédoine et à l'Albanie des remises de dette importantes, pour essayer d'atténuer les difficultés qu'ils rencontrent actuellement. Cela fait donc partie de l'entreprise de reconstruction dont j'ai parlé.

M. Bob Mills: Est-ce que vous pourriez nous donner ces chiffres?

M. Lloyd Axworthy: Oui. Le premier ministre les a mentionnés dans un discours qu'il a fait la semaine dernière.

Le président: Cela nous serait très utile, monsieur le ministre. Comme vous le savez, c'est une question qui intéresse au plus haut point un grand nombre de Canadiens. Nous sommes heureux de voir le Canada à l'avant-garde de cette action, et en particulier les initiatives en ce qui concerne les pays lourdement endettés.

Monsieur Assadourian, vous aviez une observation.

M. Sarkis Assadourian: Une question très courte, monsieur le ministre, au sujet du partenariat pour la paix au sein de l'OTAN. Pouvez-vous nous faire un court rapport sur cette situation, nous dire où nous en sommes?

M. Lloyd Axworthy: C'est un domaine où nous avons beaucoup fait. Par exemple, nous avons signé plusieurs accords pour entraîner les soldats à l'aide militaire. Plusieurs pays qui font partie du Partenariat pour la paix de l'OTAN font entraîner leurs soldats au Canada, au Centre Pearson pour le maintien de la paix et ailleurs. Je crois que nous avons des accords avec les Ukrainiens, les Polonais, entre autres, pour ce genre d'entraînement. Il y a également plusieurs entreprises en coopération dans le cadre desquelles nous fournissons de l'aide à certains pays pour entraîner leurs troupes sur leur propre territoire. Par exemple, l'OTAN a posté des officiers de liaison en Ukraine pour recueillir des informations sur la sécurité, l'entraînement militaire, etc.

En matière de contacts lorsque le conseil de l'OTAN se réunit, les Partenaires pour la paix sont toujours invités. Ils présentent les questions auxquelles ils accordent le plus d'importance. Évidemment, il y a toujours la possibilité, dans les corridors et pendant les repas, de discuter avec tous ces gens. Cela nous a permis de nouer des contacts nombreux, des contacts qui nous sont très utiles car, grâce à ces réunions périodiques, nous connaissons les gens directement, les fonctionnaires supérieurs, les ministres, et cela nous permet de collaborer étroitement.

M. Saskis Assadourian: Ce sera le cas également à la prochaine conférence, à Washington.

M. Lloyd Axworthy: Oui, absolument.

M. Saskis Assadourian: Merci.

• 1720

Le président: Avant que vous nous quittiez, monsieur le ministre, j'aimerais faire une ou deux observations, mais je vous promets de ne pas poser de questions. J'ai deux choses à annoncer et également une ou deux observations à faire.

Je tiens à dire à quel point nous avons été heureux de vous entendre parler de reconstruction dans cette région. Quelques mois avant que toute cette situation ne se développe, le journal Le monde et plusieurs publications ont publié un article particulièrement intéressant de M. Soros. Dans cet article, il disait que si nous ne nous attaquons pas aux racines du problème dans la région... Pour cette raison, l'autre soir dans un discours que j'ai fait à la Chambre j'ai dit que si après avoir tout fait sauter dans cette région, nous quittons les lieux en laissant tout en ruine, nous ne ferons que semer le germe d'un désastre humanitaire future. J'espère que nous réussirons à convaincre nos alliés de signer un chèque d'un million de dollars chaque fois que les États-Unis envoient un missile de croisière d'un million de dollars vers cette région, un chèque qui servira à réparer les dommages causés. En effet, c'est vraiment ce que nous allons devoir faire. Ce que vous nous avez dit m'a donc fait particulièrement plaisir.

Je regrette que M. Turp ne soit pas ici, mais j'aimerais vous faire part de mon opinion personnelle au sujet de cette question d'un vote. Moi aussi, j'ai été élu au Parlement fédéral. Je ne veux pas vous obliger à mettre cette question aux voix. À mon avis, si nous n'avons jamais voté sur ce genre de question, c'est pour une bonne raison, et pas seulement constitutionnelle, mais également pratique. À mon avis, les Canadiens élisent un gouvernement pour qu'il agisse efficacement dans toutes les circonstances. Ils ne voudraient probablement pas d'un régime présidentiel qui vous empêche d'agir et qui nous empêche d'agir dans l'intérêt du Canada lorsque cela est nécessaire. À mon avis, c'est pour cela que nous avons été élus, et c'est la raison pour laquelle nous sommes ici pour vous soutenir dans vos efforts.

Donc, lorsqu'avec vos collègues du cabinet vous discuterez de la possibilité de voter sur cette question, je vous demanderais de réfléchir très sérieusement avant de céder aux pressions et d'accepter ce qui constitue en fait un amendement constitutionnel, un amendement qui ne va certainement pas dans le sens des intérêts de la population canadienne. Personnellement, j'y résisterais pour cette raison, pas seulement pour des motifs constitutionnels obscurs, mais surtout dans l'intérêt du bon fonctionnement du gouvernement de notre pays. Voilà donc les arguments que je voulais vous soumettre.

En terminant, je rappelle aux membres du comité que M. Pratt, dont le ministre a parlé à plusieurs reprises, doit comparaître devant le Sous-comité des droits de la personne. Il fait un travail très utile, ce dont nous lui sommes reconnaissants.

Nous avons demandé au ministère de la Défense de nous préparer une séance d'information pour mardi matin, de 10 h 15 à 11 h 45. Évidemment, la participation des membres du comité est facultative. Le comité ne siégera pas ce matin-là et nous espérons pouvoir nous rendre au ministère de la Défense pour une séance d'information comme celle que nous avons eue au moment du conflit du Golfe. Je sais que les responsables du ministère de la Défense accéderont à notre demande avec plaisir.

Monsieur le ministre, encore une fois je vous remercie. Je sais que vous avez été surchargé de travail et nous vous sommes très reconnaissants du temps que vous nous avez consacré cet après-midi.

M. Bob Mills: Si vous voulez que M. Graham et moi-même discutions de cette question du vote, j'ai autant de bons arguments dans l'autre sens, des arguments pour justifier un vote dans ce cas.

Le président: Il m'a semblé que quelqu'un devait mentionner la position inverse car nous entendons toujours la même chose.

La séance est levée.