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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 22 avril 1996

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LA COMPAGNIE QUÉBEC-TÉLÉPHONE

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1735
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1741

SUSPENSION DE LA SÉANCE

    Suspension de la séance à 11 h 49 1742

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 12 heures 1742

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

    Projet de loi C-18. Reprise de l'étude de la motionde troisième lecture 1742

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES PRIX D'EXCELLENCE DU RÉSEAU YTV

LE GROUPE MUSICAL CHAVIGNY JAZZ V

LES ESPÈCES MENACÉES D'EXTINCTION

LE JOUR DE LA TERRE

LA COMMISSION DE LA VÉRITÉ ET DE LA RÉCONCILIATION

    M. Harper (Churchill) 1759

LA TORNADE

LE DÉFICIT

L'EMPLOI

    M. Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing) 1760

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

LE PARTI RÉFORMISTE

LE TERRORISME

LA JOURNÉE DE LA TERRE

LA PROVINCE DE SASKATCHEWAN

LES CONTREVENANTS DANGEREUX

LE BÉNÉVOLAT

    Mme Gagnon (Québec) 1761

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

QUESTIONS ORALES

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

LA TAXE SUR LES BIENS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1764
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1764
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1764

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1764
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1765
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1765
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1765

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1766
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1767

LES MILITAIRES FRANCOPHONES DE MOOSE JAW

    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1767
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1767

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1768
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1768

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

LA CHAMBRE DES COMMUNES

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1769
    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1769

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

    M. Chrétien (Saint-Maurice) 1770

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

    M. White (Fraser Valley-Ouest) 1770

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE JOUR DE LA TERRE

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LA LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

    Projet de loi C-29. Adoption des motions deprésentation et de première lecture 1774
    Le projet de loi est réputé avoir été agrééà l'étapedu rapport, avec des propositions d'amendement 1774

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

    Projet de loi C-30. Adoption des motions de présentationet de première lecture 1774
    Deuxième lecture du projet de loi; étude en comité; rapport, sans proposition d'amendement 1774

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Motion portant approbation du 14e rapport 1774
    Adoption de la motion 1774

PÉTITIONS

LA LOCATION AUTOMOBILE

L'IMMIGRATION

M. TRAN TRIEU QUAN

LE CODE CRIMINEL

LES PRIX DE L'ESSENCE

LE CODE CRIMINEL

L'AIDE AU SUICIDE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 1775

L'ÂGE DU CONSENTEMENT

    M. Harper (Simcoe-Centre) 1775

LES DROITS DE LA PERSONNE

    M. Harper (Simcoe-Centre) 1775

LA RÉGION DE LA CAPITALE NATIONALE

LES SOINS DE SANTÉ

LE SRI LANKA

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

    Projet de loi C-18. Reprise de l'étude de la motion detroisième lecture 1777
    Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 1788
    Report du vote sur la motion 1791

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

    Projet de loi C-19. Motion de troisième lecture 1791
    M. Leblanc (Longueuil) 1793
    M. Leblanc (Longueuil) 1796

1735


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 22 avril 1996


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LA COMPAGNIE QUÉBEC-TÉLÉPHONE

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait amender son décret sur les Sociétés habiles afin d'autoriser le CRTC à accorder à Québec-Téléphone une licence de radiodiffusion en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et ce, afin de permettre la concurrence dans le domaine de la distribution des signaux de radiodiffusion sur le territoire desservi par Québec-Téléphone.
-Monsieur le Président, je suis fière de me lever aujourd'hui en cette Chambre pour débattre une motion que j'ai déposée concernant la compagnie Québec-Téléphone dont le siège social est situé dans la ville de Rimouski, capitale régionale de la région administrative québécoise du Bas-Saint-Laurent.

Cette motion porte le numéro 102 et se lit comme suit:

Que de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait amender son décret sur les Sociétés habiles afin d'autoriser le CRTC à accorder à Québec-Téléphone une licence de radiodiffusion en vertu de la Loi sur la radiodiffusion et ce, afin de permettre la concurrence dans le domaine de la distribution des signaux de radiodiffusion sur le territoire desservi par Québec-Téléphone.
Rappelons, pour le bénéfice de nos auditeurs, que le décret sur les Sociétés habiles est un décret du gouvernement qui permet au CRTC de connaître les conditions permettant à une compagnie d'être reconnue comme compagnie canadienne.

Conformément au paragraphe 86(3) du Règlement de la Chambre, quatre collègues ont appuyé formellement cette motion que j'ai déposée dès l'ouverture de cette deuxième session: deux du Bloc québécois, le député de Portneuf et celui de Charlevoix, le député indépendant de Beauce et un député du Nouveau Parti démocratique, celui de Burnaby-Kingsway, circonscription de Colombie-Britannique.

Il est important, je crois, de comprendre le cheminement qui a mené au dépôt de cette motion. Premièrement, le CRTC et le Conseil consultatif sur l'autoroute de l'information ont recommandé aux ministres du Patrimoine et de l'Industrie de maintenir l'obligation d'être de propriété canadienne pour opérer des entreprises de radiodiffusion, et ont recommandé que la clause grand-père dont bénéficiait déjà la compagnie Québec-Téléphone en vertu de la Loi sur les télécommunications ne lui soit pas accordée dans ce domaine d'intervention. C'était empêcher Québec-Téléphone d'entrer dans le monde de la convergence et de la concurrence.

Deuxièmement, Québec-Téléphone a décidé de s'organiser pour défendre ses droits acquis et, comme entreprise, de tout mettre en oeuvre pour sauver sa peau, ce qui a amené la compagnie à poser deux gestes concrets: d'abord, organiser le lobby pour que sa cause soit entendue. Il fallait en effet à la compagnie, définir, présenter et bien expliquer sa situation pour que les représentants du gouvernement recherchent et trouvent une solution sans pour autant compromettre la souveraineté culturelle du Canada.

Il fallait également mettre sur pied un comité de survie regroupant cadres et employés syndiqués de la compagnie, afin de sensibiliser la population à l'alternative d'avenir que devait affronter la compagnie, ou bien stagner pour peut-être péricliter ou disparaître comme entité autonome, ou bien prospérer en entrant dans le monde de la convergence et, pour ce, obtenir une licence de radiodiffusion.

(1105)

Troisièmement, une fois ces décisions prises, il fallait passer à l'action. Le Comité de survie a pris en charge la signature d'une pétition qui devait finalement recevoir l'appui de 94 253 personnes habitant le territoire de Québec-Téléphone, qui va de Rimouski à Gaspé, en passant par la Côte-Nord, de Baie-Comeau à Lourdes-de-Blanc-Sablon, puis par Montmagny, la Beauce et, finalement, Donnacona.

Cette pétition, pour la majeure partie, a été déposée en Chambre et demandait au gouvernement d'accorder à Québec-Téléphone l'extension de la clause grand-père qui lui permettrait d'obtenir une licence de radiodiffusion du CRTC.

Enfin, bien sûr, les membres de la haute direction de la compagnie ont fait le lobby normal et nécessaire auprès de leur députée et de certains députés du gouvernement afin d'expliquer leur situation pour que la dynamique soit bien saisie et qu'une solution adaptée soit élaborée à la satisfaction des intervenants afférents à ce dossier.

C'est dans la foulée de ces démarches que j'ai déposé une motion en cette Chambre afin de donner toute la transparence nécessaire à ce dossier. Il y a une solution pour permettre à Québec-Téléphone d'entrer de plain-pied dans le monde de la convergence, et ce, en


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situation concurrentielle. Cette solution est politique; il ne faut donc pas s'étonner que la voie politique soit empruntée pour en parler.

En m'inspirant largement d'un mémoire préparé par Québec-Téléphone, faisons maintenant un peu d'histoire pour mieux connaître cette compagnie qui fait partie du quotidien de plusieurs Québécoises et Québécois et qui fut la plus importante entreprise de télécommunications sous juridiction québécoise jusqu'à ce que la Cour suprême du Canada en décide autrement, le 26 avril 1994.

Il faut remonter jusqu'à 1898 pour retrouver les premières traces de ce qui deviendra la compagnie Québec-Téléphone que l'on connaît aujourd'hui. En effet, c'est cette même année que leDr Ferdinand Demers fondait la Compagnie de téléphone de Métis. Toutefois, l'acte de naissance officiel de la compagnie ne viendra que le 7 juillet 1927, et elle sera connue sous le nom de Corporation de téléphone et de valeurs d'utilités publiques de Québec. Et dès le début, la compagnie sera dynamique et intégrera une grande partie des réseaux téléphoniques de la province.

Le véritable fondateur de Québec-Téléphone est l'honorable Jules A. Brillant, qui a d'abord acheté la Compagnie de téléphone nationale en 1927. Vingt ans plus tard, la compagnie recevra des lettres patentes supplémentaires et sera connue sous le nom de Corporation de téléphone de Québec. C'est le 10 février 1955, par l'adoption d'une loi spéciale, que le Parlement de Québec accorde à la compagnie le pouvoir d'expropriation et lui réserve le nom de Québec-Téléphone.

La compagnie doit se moderniser et chercher un apport de capitaux important et indispensable au développement de son infrastructure de communication. Alors, en 1966, la famille Brillant se départit des actions qu'elle détient dans Québec-Téléphone et, le 21 juillet, la Compagnie de téléphone anglo-canadienne, filiale de GTE Corporation-General Telephone and Electronics, dont le siège social est situé au Connecticut, devient actionnaire majoritaire de Québec-Téléphone à 50,4 p. 100.

Malgré cette affiliation avec une multinationale d'origine américaine, il est intéressant de noter que les présidents de la compagnie, MM. Bénéteau, Sirois et Laroche, ont été, jusqu'à ce jour, issus de la région et de l'entreprise.

D'abord, M. Bénéteau sera président de 1967 à 1974, et la croissance de la compagnie se fera sous le signe de l'excellence technologique et de l'automatisation accentuée du réseau, tout en accordant une priorité au développement du service téléphonique de la Moyenne et de la Basse-Côte-Nord. Le programme de construction pour doter la rive nord du Saint-Laurent d'infrastructures de communication était fort ambitieux, mais la compagnie était convaincue qu'il s'agissait là d'un agent puissant de développement pour ces régions non encore industrialisées.

À la fin de l'année 1968, les 2 085 milles du réseau hertzien de Québec-Téléphone en font le réseau le plus étendu de tout le Québec, qui permet également d'assurer les communications avec l'ouest du Labrador et l'île de Terre-Neuve.

Le 1er septembre 1974, M. Raymond Sirois a succédé àM. Bénéteau, et Québec-Téléphone s'engageait dans une véritable ère de changement.

Toujours à l'avant-garde, le 14 octobre 1975, Québec-Téléphone se lançait dans une expérience de convergence, achetait l'infrastructure de Cablôvision Bas-Saint-Laurent Ltée et s'engageait à desservir les abonnés de Matane et de la Vallée de la Matapédia. Pour les villes de Rimouski et sa banlieue ainsi que pour Mont-Joli, Québec-Téléphone travaillait avec Câblodistribution de l'Est. À la suite d'une décision de la Cour suprême, Québec-Téléphone a dû se départir des infrastructures reliées à la câblodistribution.

(1110)

L'évolution accélérée dans le domaine des télécommunications n'a pas empêché la compagnie de s'adapter rapidement à un environnement de plus en plus concurrentiel. Dès 1981, la compagnie débutait la numérisation de son réseau téléphonique en introduisant la fibre optique dans le réseau interurbain.

Québec-Téléphone fut la première entreprise canadienne à offrir, dès 1991, la ligne individuelle à tous ses abonnés et, dès 1993, la ligne à clavier, et ce, de façon universelle. La même année, la compagnie terminait la conversion numérique de ses installations de commutation et de transmission interurbaine sur fibre optique, prenant ainsi une longueur d'avance dans le développement de l'autoroute électronique.

Le 1er février 1992, M. Gilles Laroche est promu à la présidence de la compagnie et son arrivée marque l'ère du partenariat. La compagnie joint les membres de l'alliance Stentor, ce qui lui permet de devenir actionnaire de Télésat. L'ajout du volet satellite à sa gamme de services permet à Québec-Téléphone d'envisager des solutions efficaces et économiques pour desservir les régions très éloignées et difficiles d'accès de son immense territoire.

Québec-Téléphone doit continuer de favoriser l'équité d'accès aux services pour tous à des coûts abordables. Aussi, depuis septembre 1995, via une filiale, l'entreprise a introduit le service Internet sous sa marque de commerce GLOBE TROTTER.

Bref, pour clore ce survol historique, je voudrais citer in extenso à partir du mémoire préparé par Québec-Téléphone: «L'histoire de Québec-Téléphone est, simplement et avant tout, l'histoire de bâtisseurs et de développeurs d'une région en apparence aride, mais riche en détermination et volonté de réussir collectivement à être et à demeurer une entreprise dont le coeur bat au rythme de la vie des gens qui la représentent et qui la poussent vers l'excellence.»

Arrêtons-nous brièvement maintenant au contexte de fonctionnement de Québec-Téléphone. L'entreprise dessert un territoire de 272 000 kilomètres carrés qui représente 40 p. 100 de la surface habitée du Québec. Ce territoire est réparti sur trois régions administratives distinctes: Québec, Saint-Laurent et Côte-Nord. À l'intérieur du territoire qui lui a été attribué, Québec-Téléphone dessert


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au total 309 municipalités. Trois cent d'entre elles ont moins de 10 000 habitants et 168 de celles-ci moins de 1 000 habitants. Une seule, Rimouski, en compte plus de 35 000. Globalement, 54 p. 100 de la population desservie par Québec-Téléphone est dite rurale.

En prenant comme source de référence le recensement de 1991, la population qui bénéficie des services de télécommunication offerts par Québec-Téléphone se situe à 550 400 personnes. Si l'on ramène ce chiffre sur la base de la densité de population au kilomètre carré, on obtient le résultat de 2,2 habitants au kilomètre carré. Cette population à faible densité, répartie sur un immense territoire, a un profil démographique caractérisé par son évolution, son vieillissement et ses besoins particuliers.

En effet, entre 1981 et 1991, le nombre de ménages augmente autant sur le territoire de Québec-Téléphone que pour le Québec et le Canada, soit respectivement 1,8 p. 100 comparé à 2,2 p. 100. Par ailleurs, la population desservie par Québec-Téléphone vieillit plus rapidement, ce qui s'explique, entre autres, par l'exode des jeunes vers les grands centres urbains, à l'extérieur du territoire dévolu à Québec-Téléphone. Enfin, on ne peut passer outre à certains besoins généraux de cette population, tels que maintenir un niveau de qualité de vie, augmenter la qualité et l'efficacité des services publics, maintenir des liens actifs avec les grands centres, améliorer le réseau de transport pour en faciliter l'accès. Bref, ce que la population recherche, c'est de pallier l'isolement, compte tenu de l'éloignement.

Malgré le contexte dans lequel l'entreprise doit évoluer, Québec-Téléphone, par son implantation et ses implications régionales, a un impact économique considérable dans les régions qu'elle dessert. D'abord, elle est le premier employeur du secteur privé en importance de la ville de Rimouski et plus de la moitié des 1 700 employés y habitent. Quant à la masse salariale des employés de Rimouski, elle dépasse les 48 millions de dollars et celle de l'ensemble des employés de l'entreprise totalisait, en 1995, près de 75 millions de dollars.

(1115)

Dans le domaine des achats, les chiffres de 1993 témoignent de ceci: Québec-Téléphone a acheté pour 21 294 565 $ de biens sur son territoire d'exploitation et 64 780 435 $ à l'intérieur du Canada, ce qui signifie que 92 p. 100 des achats de l'entreprise ont été faits exclusivement au Canada.

Québec-Téléphone est bien enracinée dans son milieu et contribue au développement social et culturel de sa région. Elle contribue à la qualité de vie en appuyant de nombreux services à la collectivité. Ses principaux champs d'intervention et de mécénat se retrouvent dans les domaines de la santé, de l'éducation, des arts, de la culture et du plein air. Loin de moi l'idée de vouloir donner une liste exhaustive de toutes les interventions sociétales de Québec-Téléphone, mais voici quelques exemples de cette contribution.

Dans le domaine de la santé, 350 000 $ pour l'Association du cancer de l'est du Québec; participation à l'expérience de carte à puce pour la consultation et la mise à jour du dossier médical.

Dans le domaine de l'éducation, commandite pour cinq ans de la chaire industrielle en télécommunications optiques de l'Université Laval; en 1988, une première entente de 600 000 $, renouvelée en 1993 au montant de 1 million de dollars.

Dans le domaine des arts et de la culture, participation financière pour la tenue d'une Académie internationale d'orgue et de clavecin; participation financière pour la publication de monographies sur l'histoire du Bas-Saint-Laurent et de la Côte-Sud; depuis 26 ans, sur la couverture de l'annuaire téléphonique, la reproduction d'une oeuvre d'art d'une ou d'un peintre du Québec.

Québec-Téléphone se lance dans l'univers multimédia avec la télé-éducation à distance, le télédiagnostique, la téléjustice, le service Internet, les services de communication à large bande.

À ce stade-ci de mon exposé, je voudrais encore une fois cité un extrait du mémoire préparé par Québec-Téléphone: «Ces derniers services démontrent l'aptitude de l'entreprise à rendre disponibles, en même temps et parfois avant les autres entreprises, les services les plus évolués et en mesure de satisfaire les véritables préoccupations et besoins des habitants et des entreprises de son territoire. Québec-Téléphone entrevoit l'avenir des plus prometteurs, si l'opportunité lui est offerte de détenir une licence de radiodiffusion. De cette façon, elle s'acquittera, comme elle l'a fait pour les autres secteurs d'activité, de cette nouvelle responsabilité avec diligence. Elle s'efforcera de donner à l'universalité de ses clientèles l'accès à un réseau polyvalent. Elle demeurera à l'écoute des besoins quotidiens ou plus larges de la vie des gens, afin de leur procurer une qualité de vie à la hauteur du développement technologique des grands centres.»

Je poursuis la citation: «A contrario, le refus d'accorder une licence à Québec-Téléphone entraînera une non-disponibilité de services évolués sur une partie importante de son territoire. [. . .] Québec-Téléphone connaît bien ses habitants et les entreprises qui y font affaires et surtout, leurs besoins. Son histoire corporative est empreinte de vécu et d'expériences de collaboration avec eux [. . .] elle illustre son sens de la responsabilité, son esprit d'initiative et sa vision progressive à titre de compagnie canadienne. Si Québec-Téléphone est empêchée d'obtenir une licence de radiodiffusion, elle ne sera pas simplement privée d'un privilège que le législateur aurait pu lui accorder, mais ce sera la majorité des citoyens de son territoire qui pourront être privés du droit à des services évolués contrairement aux autres citoyens vivant dans les grands centres.»

Je cite toujours le mémoire de Québec-Téléphone: «L'énoncé de politique de 1987 et la loi de 1993 ont laissé croire qu'aucun empêchement ne serait fait à Québec-Téléphone de pouvoir participer dans toute la gamme des services de communication sur son territoire d'attribution tel qu'il sera permis de le faire pour toutes les autres entreprises de téléphone où qu'elles soient situées au Canada. Québec-Téléphone croit que cette revendication est naturelle et une extension logique des droits acquis reconnus par l'énoncé politique de 1987 et dans la Loi sur les communications. Québec-Téléphone demeure convaincu que le gouvernement saura reconnaître les efforts et la détermination déployés dans tous les domaines qui ont


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marqué sa longue expérience et ainsi, lui permettra simplement de poursuivre ce qui est déjà commencé.»

Le gouvernement a adopté, l'an dernier, des décrets beaucoup plus dangereux pour la culture canadienne que ce que nous demandons aujourd'hui. Permettre la diffusion par satellite où 75 p. 100 des émissions sont programmées par les États-Unis est un bien plus gros risque.

Une licence de radiodiffusion pour Québec-Téléphone est importante pour développer les régions touchées par la création d'emplois de qualité, rendre accessibles les nouveaux services à des coûts abordables, rendre la concurrence une réalité dans le territoire desservi par l'entreprise, promouvoir la culture en français et assurer le développement de Québec-Téléphone.

(1120)

Une licence est souhaitable pour Québec-Téléphone, sa clientèle, les populations qu'elle dessert, ses employés, ses actionnaires.

Je demeure convaincue que le gouvernement mettra tout en oeuvre pour accueillir favorablement cette motion et pour trouver une solution qui sera acceptable pour tous les intervenants, sans pour autant compromettre la souveraineté culturelle du Canada et du Québec, et ce, dans les meilleurs délais.

M. Guy H. Arseneault (secrétaire parlementaire de la vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, la question des droits de Québec-Téléphone de détenir des licences en vue d'offrir des services de radiodiffusion sur l'autoroute de l'information est cruciale pour les personnes qui résident dans l'est du Québec. Ces personnes devraient avoir droit au même type de services touchant la radiodiffusion, les télécommunications et les nouveaux secteurs de communication que celui offert dans le reste du pays.

L'autoroute de l'information est de bon augure pour l'économie de l'avenir. À mon avis, cet espoir n'est pas fondé sur des chimères. Une transition rapide se produit actuellement dans les secteurs économique, social et culturel, sous l'influence, notamment, du pouvoir de l'information.

Il est vrai que ce ne sont pas les conduits et les fils qui vont créer à eux seuls cette croissance économique. Néanmoins, ce sont eux qui offriront les possibilités de développement au chapitre des applications, de l'information et du contenu, éléments sur lesquels s'appuie toute société de l'information.

Notre gouvernement a donné l'exemple en s'attaquant aux questions qui ont trait à l'établissement de l'autoroute de l'information au Canada. Cette inforoute répondra aux besoins de la population canadienne et nous permettra de demeurer concurrentiels dans le domaine des communications à l'échelle mondiale.

Dans le processus de consultation publique visant à mettre en oeuvre des politiques dans ce domaine, le gouvernement a déterminé trois sujets d'études, soit les installations, le contenu et la compétition.

Pour ce qui est de la politique sur la concurrence, nombreux sont ceux qui ont appuyé le principe directeur selon lequel une compétition équitable et soutenable est avantageuse pour les consommateurs. Les consommateurs canadiens ont clairement indiqué qu'ils s'attendent à des choix de distribution plus compétitifs.

Des politiques de notre gouvernement ont déjà permis de préciser la façon dont la concurrence sera introduite dans les services de radiodiffusion directe à domicile par satellite. Le gouvernement a, entre autres, lancé un processus qui permettra d'assurer une saine compétition dans la prestation de services de radiodiffusion et de télécommunications sans fil à domicile.

Malgré la forte concurrence qui résultera de ces nouveaux types de systèmes de prestation des services, le développement de nos réseaux de télévision par câble et de nos réseaux téléphoniques du Canada demeurera l'un de nos plus grands atouts pour relever les défis de l'avenir dans le domaine des communications.

Ce sont des lignes directrices claires découlant de la politique du gouvernement qui donneront confiance aux industries en cause et qui les encourageront à investir dans les technologies dont bénéficieront les consommateurs canadiens.

La liberté des consommateurs de se prévaloir des services qu'ils estiment les meilleurs et d'opter pour le ou les réseaux de leur choix pourra être respectée uniquement si la compétition entre les divers intervenants est équitable et soutenable.

À cet égard, on a fait valoir au gouvernement qu'il serait préférable de ne pas avantager au départ les entreprises de télévision par câble et les compagnies de téléphone dans la fourniture de services qui, traditionnellement, étaient offerts par les unes ou par les autres. Ces conditions s'appliquent non seulement aux régions desservies par Québec-Téléphone et BC Tel, mais à l'ensemble du pays.

C'est le CRTC qui étudie les questions de réglementation, comme les conditions d'interconnexion et d'interfonctionnement des réseaux, afin d'assurer la compétition dans le secteur des services téléphoniques locaux. Pour sa part, le gouvernement déterminera l'évolution de la compétition entre ces réseaux.

(1125)

La vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien s'est dit prête à trouver des solutions qui garantiront aux résidants de l'est du Québec et de la Colombie-Britannique le même genre de services que celui offert dans le reste du Canada.

De nombreuses réunions ont déjà eu lieu entre les dirigeants de Québec-Téléphone et de BC Tel et la ministre ou ses représentants. Les discussions se poursuivent en vue de trouver des solutions qui maintiendront l'intégrité du système canadien de radiodiffusion, tout en offrant à Québec-Téléphone et à BC Tel la latitude nécessaire pour s'assurer que leurs réseaux puissent être utilisés avec efficacité et qu'ils rehaussent les services de communication dans les régions où se trouve leur clientèle.


1739

Le gouvernement annoncera bientôt la mise en oeuvre de sa politique relative à la convergence des télécommunications et de la radiodiffusion. Je suis persuadé que cette politique inclura les résidants de la Gaspésie, du Bas-Saint-Laurent, de la Côte-Nord et de toute autre région desservie par Québec-Téléphone ou encore par BC Tel.

[Traduction]

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je félicite ma collègue de Québec de nous avoir saisis de la motion no 102. C'est une excellente motion que nous serions prêts à appuyer entièrement si elle englobait B.C. Tel chaque fois qu'il est question de Québec Téléphone. En effet, B.C. Tel est confrontée aux mêmes problèmes que Québec Téléphone en ce qui concerne la réglementation du CRTC et d'autres mesures législatives.

Je félicite la députée d'avoir présenté ses arguments de façon concise. Les exemples qu'elle a donnés étaient excellents et continuent de se produire également en Colombie-Britannique, surtout en ce qui concerne B.C. Tel. La différence entre B.C. Tel et Québec Téléphone, c'est que la première société a des opérations beaucoup plus étendues, puisqu'elle couvre toute la province. Je félicite ma collègue d'avoir saisi la Chambre de cette question.

Au lieu d'énumérer toutes les bonnes choses que B.C. Tel et Québec Téléphone ont accomplies et accomplissent toujours, je voudrais plutôt attirer brièvement l'attention de la Chambre sur la raison pour laquelle il a fallu présenter une motion de ce genre. La principale raison réside dans le fait que la législation régissant la propriété étrangère de compagnies de téléphone et des choses du genre est dépassée. Permettez-moi de vous donner deux exemples de cela.

On met actuellement sur pied, dans le sud de l'Ontario, une toute petite entreprise appelée The Linc qui va essayer d'utiliser les capacités du réseau Internet pour les téléphones interurbains. Nous savons que les signaux de communication sont rapidement passés sous forme numérique. et que, dans un avenir pas trop lointain, ces signaux seront tous numérisés, ce qui s'annonce très intéressant. Il sera possible de compresser les signaux pour qu'ils prennent très peu d'espace sur l'autoroute de l'information. Ils seront donc décompressés lorsqu'ils arriveront à leur destination pour pouvoir interpréter le message de départ.

Le Conseil consultatif sur l'autoroute de l'information que le ministre a créé était composé de toutes sortes de personnes, sans allégeance politique, qui comprenaient le secteur et la technologie, en particulier la technologie touchant les communications.

Voici ce que les membres du conseil ont déclaré au sujet des limites à la participation étrangère: «En tant que moyens de faire respecter la souveraineté canadienne, la Loi sur les télécommunications, la Loi sur la radiodiffusion et la Loi sur Téléglobe Canada renferment des dispositions touchant la participation canadienne et le contrôle canadien. Dans le domaine de la radiodiffusion et des télécommunications, les règlements actuels limitent la participation étrangère à 20 p. 100.» Il semble qu'on ait fait passer cette proportion à 33 1/3 p. 100 la semaine dernière. Ils ont ajouté: «Dans le cadre des dispositions sur la participation étrangère et des exigences en matière de participation canadienne contenues dans la Loi sur les télécommunications de 1993, le Parlement a prévu des dispositions sur le maintien des droits acquis pour deux compagnies de téléphone: B.C. Tel et Québec Téléphone. Le conseil s'est penché sur la question de savoir si les droits acquis de ces sociétés devraient comprendre des permis d'exploitation octroyés à des entreprises de radiodiffusion. Je suis d'avis que oui.

(1130)

Les limites imposées à la participation étrangère visent à promouvoir le contrôle exercé par les Canadiens. Néanmoins, elles peuvent avoir pour effet de priver le Canada de l'accès aux investissements dont il a besoin pour assurer le développement de son autoroute de l'information. Mon collègue d'en face a reconnu l'importance que l'autoroute de l'information revêtait pour le développement économique, social et culturel de notre pays.

La restriction actuellement à la mode que l'on se propose de lever vise à favoriser le développement de l'autoroute de l'information, pas à le décourager. Le maintien de cette loi périmée aura justement pour effet de décourager l'émergence de que le ministre de l'Industrie appuie si ardemment.

En ce qui concerne les investissements, le conseil estime que le comportement des capitaux importe davantage que leur provenance si l'on en fait une question de principe. En premier lieu, il suscite la question extrêmement intéressante de savoir comment établir la nationalité des capitaux. Il faut souligner que les capitaux en soi sont neutres et qu'ils servent à accomplir une foule de choses. La question qui semble se poser, ce n'est pas de savoir d'où proviennent les capitaux, mais bien ce qu'ils permettent de réaliser.

Il y a des capitaux canadiens qui sont investis dans toutes sortes d'activités, y compris le trafic et la contrebande. Ces capitaux proviennent bel et bien du Canada, mais ils servent à mauvais escient. Si nous voulons vraiment contrôler les capitaux, nous devons contrôler ce qu'accomplissent les capitaux de façon à pouvoir atteindre nos objectifs sociaux, économiques et culturels.

Il nous faut une mesure législative qui régisse les capitaux de façon qu'ils contribuent à la réalisation des objectifs économiques, sociaux et culturels du Canada. À cet égard, toujours selon le conseil, la libéralisation du marché des télécommunications peut constituer l'étape capitale vers l'exploitation des avantages, pour l'ensemble de l'économie, qui découlent de l'utilisation et du développement de l'autoroute de l'information, après une période de transition devant conduire à une concurrence ouverte, durable et fondée sur les lois du marché. Tel est l'enjeu ici.

On ne saurait à la fois vanter les mérites de la concurrence et maintenir une mesure législative qui l'entrave précisément. Un fait nouveau s'est produit la semaine dernière. Le directeur du CRTC, Keith Spicer, s'est prononcé en faveur de la déréglementation des frais interurbains. En somme, le CRTC ne devrait pas disposer d'un pouvoir de réglementation sur la fixation des tarifs en la matière. C'est la première fois que l'organisme reconnaît ne pouvoir régle-


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menter ces tarifs. La concurrence est telle qu'il se trouve toujours derrière la boule no 8 dans ces secteurs.

La semaine dernière, les États-Unis ont déréglementé les tarifs du service téléphonique local, ce qui soulève une question intéressante pour les ministres visés: Quelles sont les priorités? Si les Canadiens avaient le choix entre une industrie canadienne des télécommunications à laquelle on donne l'avantage dont elle a besoin pour être un concurrent fort et un leader sur le marché mondial des communications et une industrie que l'on prive d'une chance équitable de soutenir la concurrence en la condamnant à être une industrie de troisième classe, incapable de soutenir la concurrence, de créer des emplois et de contribuer à la croissance, que choisiraient les Canadiens, de l'avis des ministres?

Nous voulons des emplois. Il est certain que, pour avoir des emplois, nous devons être concurrentiels, notamment dans le secteur de l'électronique. À discuter avec les gens de l'industrie, on constate très rapidement et clairement que, s'ils sont limités à être concurrentiels dans le contexte canadien seulement, ils ne pourront générer les bénéfices dont ils auraient besoin pour procéder à une expansion.

Il faut absolument que le gouvernement comprenne que, dans ses propres rangs et au sein du Cabinet, les avis sont partagés sur la question des intérêts étrangers dans les sociétés de téléphone et de câble. Il y a une convergence qui s'établit actuellement au Canada entre ces deux types de sociétés. Elles peuvent faire exactement la même chose et fournir des services de téléphone et de câblodistribution.

(1135)

J'invite le gouvernement à se demander s'il est efficace que, d'une part, le CRTC s'occupe des télécommunications et de la radiodiffusion et que, d'autre part, le ministère de l'Industrie s'occupe de la gestion du spectre.

Il y a actuellement trois types différents d'activités. Il y a les télécommunications et le câble d'un côté. Avec l'industrie, il y a les systèmes de communications multiples locales et les systèmes de communications personnelles.

Dans les deux derniers cas, il est question de l'attribution de licences concernant un spectre et permettant aux industries ou aux entreprise visées de gérer ce spectre et de communiquer sur celui-ci. Ces licences ont été accordées par le ministre de l'Éducation, à certaines entreprises. Je me pose beaucoup de questions sur la mise en oeuvre du processus et sur son équité et sa justice envers tous ceux qui ont présenté des demandes.

Par ailleurs, je veux comparer ce processus à ce que fait le CRTC actuellement. Le CRTC retarde les progrès technologiques. À cause de lui, il est très difficile pour les entreprises de progresser sur le plan technologique.

De plus, les systèmes de communications multiples locales et de communications personnelles, ainsi que le mode d'attribution des licences, ont accru la concurrence. Un des processus est efficace et l'autre ne l'est pas. Les deux comportent des problèmes. Le moment est venu d'examiner comment nous contrôlerons ce que font les capitaux au Canada. C'est cela qui importe, pas la provenance des capitaux.

J'invite la députée de Québec à élargir la portée de sa motion de manière à ce qu'elle englobe la B.C. Tel, ce qui nous permettra de l'appuyer sans réserve.

[Français]

M. Bernard St-Laurent (Manicouagan, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier présenté par ma collègue de Rimouski-Témiscouata, je ferai un bref résumé de quelques notes qui ont été prises pour donner un avant-goût de ce qui se passe dans les régions relativement à des dossiers importants comme ceux que présente Québec-Téléphone dans sa demande de licence de radiodiffusion.

Cette licence permettrait aux régions, dans un premier temps, comme la Côte-Nord, entre autres, d'être un peu sur le même pied d'égalité que les grands centres en ce qui a trait à la facilité des communications. Je commencerai par faire un bref historique, qu'il a été élaboré plus en profondeur par ma collègue.

Québec-Téléphone a été fondée en 1927 par M. Jules A. Brillant. Fait important, en 1966, afin d'obtenir les capitaux nécessaires à la modernisation et au développement intensif de son réseau,M. Brillant se départit de ses intérêts. GTE Corporation devient actionnaire majoritaire, ce qui permet de garder le siège social à Rimouski. C'est donc un geste posé pour conserver l'aspect régional, pour garder le dossier en région.

Dans son contexte de fonctionnement, il est important de situer l'entreprise Québec-Téléphone, afin de mieux comprendre les difficultés de fonctionnement. Le territoire couvert par l'entreprise est de 72 000 kilomètres carrés, soit 40 p. 100 de la superficie totale du Québec. L'entreprise est autonome dans la prise de décisions et dans le choix aussi de ses fournisseurs. Un détail important, à Québec-Téléphone, la langue de travail exclusive est le français.

Au cours de mon énoncé, souvent, on parlera des régions, parce que, dans le fond, Québec-Téléphone est l'image de la représentation des régions et du service qu'on peut donner et obtenir en régions. On peut mentionner que Québec-Téléphone est à la fine pointe de la technologie, offrant des services numériques à l'ensemble des clients en régions et à des prix abordables.

Naturellement, comme ils se vantent souvent eux-mêmes, équité d'accès aux services évolués comme, entre autres le Téléforum, le Vidéoforum, le Cellulaire, le 911, Inforoute-Internet, qui est très d'actualité et d'ailleurs, l'inforoute est la solution d'avenir.

(1140)

Je lisais tout à l'heure un document là-dessus qui mentionnait qu'utiliser l'inforoute, c'est en même temps placer les régions au coeur de l'activité économique. On va même jusqu'à dire donner un accès aux «cybervillages», une expression typiquement inforoute.

Quel est l'apport de Québec-Téléphone dans ce milieu sur le plan économique? On parle de salaires, pour 1995, de près de 75 millions versés à 1 700 employés répartis un peu partout sur le territoire. Malgré les difficultés à couvrir le territoire, on compte 1 700


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employés, dont 600 sont actuellement actionnaires. C'est un chiffre assez intéressant.

On compte aussi plus de 800 millions de dollars en immobilisations sur tout le territoire, et des outils modernes de communication avec sa clientèle.

Québec-Téléphone contribue au développement social et culturel par le biais, entre autres, de la promotion de la culture, notamment par le bottin téléphonique qui comprends toujours des oeuvres d'art d'artistes de la région.

Le soutien financier est un aspect très important qu'on ne retrouve pas chez d'autres entreprises en régions. Par exemple, un soutien financier de près de 100 000 $ aux musées, au théâtre et à la musique en 1995.

Une des grandes problématiques que l'on rencontre-on ne peut en vouloir à personne, mais c'est la réalité-dans les régions, c'est que lorsqu'il arrive des entreprises dans les régions, elles viennent, pour quelques-unes ou pour une bonne partie, siphonner les fonds locaux, peut-être même via l'extraction de certaines matières premières. Elles ne le font pas toutes et pas de façon indécente, mais on remarque souvent que des entreprises qui, si on regarde un peu, si on fait un rapport entre le produit sorti de la région et les sommes d'argent qui sont réinvesties dans cette même région pour la culture, par exemple, l'aide aux jeunes dans les entreprises, l'implication véritable, autrement dit, c'est un juste retour des choses. Québec-Téléphone a une très bonne cote sur ce plan, parce qu'elle n'a pas d'autres investissements à protéger et à engraisser ailleurs. Québec-Téléphone, c'est la Côte-Nord, c'est la rive sud, la Gaspésie et tous les territoire qui ont été mentionnés tout à l'heure par ma collègue de Rimouski-Témiscouata.

Donc, Québec-Téléphone est en tête de file dans le domaine des efforts qu'elle investit dans le développement culturel et social.

Pour 1995, on parle aussi d'un don de 350 000 $ pour l'Association du cancer de l'est du Québec, échelonné sur 7 ans.

De plus, ses employés sont engagés en éducation, en santé, dans la culture, dans des activités socio-communautaires, dans le sport, en économie et en politique, domaines dans lesquels ils ont redistribué plus de 26 000 heures en 1995 un peu partout sur le territoire. C'est énorme. Et je sais par expérience que l'entreprise favorise beaucoup l'extension de ces arts par ses employés. Je crois que beaucoup sont impliqués, pas seulement en politique mais sur les plans social et communautaire, un peu partout. L'entreprise est souvent souple d'ailleurs sur l'application des heures de travail pour aider les organismes dans ces domaines.

Sur le plan du développement scientifique, on parle d'une participation en recherche et développement de plus de un million par année. Québec-Téléphone possède une chaire industrielle en télécommunications optiques à l'Université Laval, ainsi qu'un Centre francophone de recherche en informatisation des organisations, etc.

J'écourterai sur mon prochain point, étant donné que le temps file, qui porte sur la situation du chômage élevé et de l'exode des jeunes dans les régions périphériques. Donc, il faut démontrer que l'entreprise désire continuer d'accroître la part du développement des régions.

Le fameux système inforoute étant relié à nos régions, cela aide les régions périphériques, la grande superficie à couvrir pour l'est du Québec. Cela facilite à tel point, qu'on peut dire que maintenant, on peut être au même rythme d'évolution au niveau des situations grâce à ces nouvelles technologies. Les régions ne sont pas nécessairement favorisées, parce que «favorisées» voudrait dire qu'on en a plus, mais cela ramène la pendule à l'heure un peu plus.

La difficulté pour tout le monde dans les régions, c'est la transmission de l'information, se mettre à jour plus rapidement. Par le biais des facilités que Québec-Téléphone veut s'accaparer, ce serait fait avec l'accent tout à fait régional, ce qui n'est pas du tout assuré par d'autres services, ce qui a tendance à mettre en péril, si on va ailleurs. Québec-Téléphone a fait ses preuves dans ce milieu et Québec-Téléphone, j'en suis convaincu, continuera à faire de même.

Je terminerai en disant que l'entreprise a fait ses preuves à ce niveau. Je pense que l'ensemble du Bloc est d'accord pour qu'on fasse un accroc à ce niveau pour favoriser, ce qui serait à mon avis, le juste retour de la pendule, tout en assurant une bonne représentativité régionale pour le développement futur de la région couverte par l'entreprise.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, je suis très contente d'avoir déposé cette motion. On m'a souvent demandé d'où venait la clause grand-père. La clause grand-père, comme plusieurs personnes le savent, vient du Quinzième amendement de la Constitution américaine qui avait accordé le droit de vote aux Noirs, mais quand ils sont venus pour voter, on leur a dit: «Vous ne savez ni lire ni écrire, mais si votre grand-père a déjà voté, cela vous donne le droit de vote». C'est par analogie avec cet amendement à la Constitution américaine, qui date de 1869, qu'on utilise la clause grand-père pour, ce qui est mieux dit en français, les droits acquis.

Je me rends volontiers à la demande de mon collègue du Parti réformiste pour étendre la motion que j'ai déposée à B.C. Tel. D'ailleurs, dans les pourparlers qui ont cours présentement entre la compagnie Québec-Téléphone et le gouvernement, leur partenaire, B.C. Tel, participe à tous les travaux et, bien entendu, la solution qui sera trouvée pour Québec-Téléphone s'appliquera également, comme d'ailleurs l'a dit l'honorable collègue du gouvernement, à B.C. Tel.

La ministre a modifié récemment le décret des Sociétés habiles, mais cela ne suffit toujours pas pour répondre aux besoins de Québec-Téléphone, puisqu'on ne se rend pas jusqu'à 50,4 p. 100 des parts qui peuvent être détenues par une compagnie étrangère. Ce qui est important dans tout ce dossier, je pense que je l'ai dit au début, la ministre du Patrimoine l'a dit, et je crois que tout le monde s'entend, ce qui est important, c'est de trouver une solution pour que Québec-Téléphone puisse, en toute légalité et en toute transparence, avec B.C. Tel, continuer à donner un service de multimédia à la population, mais en protégeant et à la culture canadienne et la culture québécoise.

1742

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Le vice-président: Alors, comme il n'y a plus de députés pour prendre la parole et que la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, la période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton.

Est-on d'accord pour que la Chambre suspende ses travaux pour quelques minutes?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 11 h 49.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 12 heures.


1742

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 avril, de la motion: Que le projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur et un privilège de prendre la parole, aujourd'hui, au sujet du projet de loi C-18 qui créera le ministère de la Santé.

Beaucoup de députés ont fait remarquer à la Chambre que les pouvoirs et fonctions en matière de santé qui sont énoncés dans la mesure législative proposée ne diffèrent pas beaucoup de ceux prévus dans la loi précédente. En fait, on pourrait dire que la vieille loi nous a bien servis au cours du demi-siècle passé.

À ce stade, je voudrais féliciter mon collègue de Fredericton-York-Sunbury de la motion qu'il a présentée. Sa proposition d'amendement réintroduit un article de l'actuelle Loi sur le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social, une loi qui remonte à 1944. Cet amendement définit explicitement les responsabilités personnelles et juridiques du ministre à l'égard de son ministère.

Je suis heureux de dire que le gouvernement a donné au député de Fredericton-York-Sunbury son appui total pour cet amendement et qu'il a été adopté à l'étape du rapport. Le ministre de la Santé désirait que le Parlement rende les choses parfaitement claires en ce qui concerne ses pouvoirs et ses fonctions.

Il y a des différences fondamentales avec la loi précédente, ce qui ne doit pas nous surprendre étant donné que la santé est un domaine fondé sur le savoir. Une de ces différences se trouve à l'alinéa 4(2)a) où on dit explicitement:

-la promotion et le maintien du bien-être physique, mental et social de la population;
C'est une amplification du renvoi du paragraphe 4(1) à la promotion et au maintien de la santé de la population qui correspond à l'article 5 de l'ancienne loi.

Qu'est-ce que cela signifie? Certains y voient une sorte de message sinistre, le signe que le gouvernement fédéral a un plan non encore déclaré pour occuper tout le domaine du bien-être physique, mental et social de la population. Une telle initiative aurait des conséquences importantes sur le partage des responsabilités en matière de santé entre le niveau fédéral et le niveau provincial.

D'autres ont observé que l'inclusion de cet article semblait plutôt curieux, étant donné que la section du bien-être social a été transférée au ministère du Développement des ressources humaines. Après tout, est-ce qu'il ne serait pas logique de réunir toutes les responsabilités fédérales face au bien-être physique, mental et social dans un ministère de la Santé beaucoup plus large?

Ma première observation, c'est que la mesure législative dit clairement que les pouvoirs et les fonctions du ministre de la Santé se limitent au domaine de compétence du Parlement fédéral. Cela signifie que l'action de Santé Canada ne peut pas et ne va pas déborder sur le mandat légal des autres entités fédérales. L'alinéa 4 (2) a) décrit bien la position du gouvernement fédéral à l'égard de la santé. Le choix des mots «bien-être physique, mental et social» n'est pas l'effet du hasard.

(1205)

Ce sont exactement les mots que l'Organisation mondiale de la Santé emploie pour décrire la santé. C'est un concept qui va bien au-delà de la santé définie par la présence ou l'absence de maladie. C'est un concept holistique. C'est un concept qui vise non seulement la durée, mais aussi la qualité de la vie. En incluant les mots «bien-être physique, mental et social» dans le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, on ne fait qu'officialiser une réalité qui existe depuis longtemps.

Avant d'être député, j'ai travaillé dans le secteur de la santé pendant 30 ans et j'ai consacré bon nombre de ces années à réunir ces trois éléments. Au lieu de diviser une personne en composantes, il faut la voir comme un tout, la regarder d'une façon holistique.

Ce n'est rien de nouveau ou d'étonnant. Cela exprime clairement que la santé va bien au-delà de l'absence de maladie. La bonne santé des membres d'une société découle de tout un ensemble de politiques publiques et de décisions personnelles.

Les déterminants de la santé forment une toile fort complexe de facteurs qui contribuent à l'état global de la santé d'une personne. Ces facteurs sont d'ordre social, économique, physique, psychologique et autres. Il n'est donc pas surprenant que les résultats des recherches prouvent que les chômeurs subissent du stress et connaissent des problèmes de santé plus nombreux. Les députés ont peut-être lu certains articles de journaux rapportant que les chercheurs ont constaté, sur le plan de la santé, des différences réelles entre les gens qui ont le sentiment de vraiment contrôler leurs vies et


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ceux qui n'ont pas cette impression. Tout ceci confirme ce que nous savons déjà.

Malgré la meilleure technologie et les progrès des médicaments et des procédures, ce qui se passe à l'extérieur du cabinet du médecin est beaucoup plus important que ce qui se passe à l'intérieur. C'est là un thème récurrent dans l'analyse des choix quant aux politiques de santé. Par exemple, Santé Canada dépense des sommes considérables chaque année pour fournir des services de santé aux Indiens inscrits et aux Inuit. Malgré cela, les statistiques concernant la santé des autochtones continuent d'être les plus navrantes au pays.

Il ne convient pas, bien sûr, de parler ici de ces statistiques, mais elles soulignent combien il est important de mettre l'accent sur le mieux-être en général. Elles mettent également en relief l'une des réalités fondamentales dans le domaine de la santé, à savoir la nécessité de renouveler le système. Quelles que soient les sommes que nous puissions investir dans le système des soins de santé, ce ne sera jamais une garantie de bonne santé.

Il vaut mieux aider les gens à atteindre un certain niveau de mieux-être qui se traduira pas un meilleur état de santé et un besoin moindre de soins de santé. Une meilleure connaissance des nombreux facteurs qui contribuent à la santé des Canadiens a déclenché une focalisation accrue sur les éléments constitutifs du mieux-être. Les progrès qui ont été accomplis dans ce domaine forment une base à partir de laquelle nos systèmes de soins de santé peuvent fonctionner avec plus d'efficacité. On considère, à juste titre, que c'est un investissement qui devrait conduire à la réduction des coûts des soins de santé, ce qui est extrêmement important.

Certains de ces facteurs relèvent du ministère fédéral de la Santé, de son mandat et de ses programmes. D'autres sont de la compétence d'autres organismes fédéraux, de leur mandat et de leurs programmes. D'autres encore relèvent des gouvernements provinciaux et territoriaux, alors que certains autres sont de nature privée. Telle est la réalité de la santé et du système des soins de santé au Canada. C'est une réalité qui exige la formation de partenariats et la coopération entre intervenants. C'est une réalité qui accorde une importance extrême aux éléments qui déterminent l'état de santé, ainsi qu'aux résultats et à l'efficacité des politiques et des programmes en matière de santé. Mais qui plus est, c'est une réalité qui ne nécessite pas l'expansion du mandat du fédéral dans le domaine de la santé.

(1210)

Une fois que l'idée de former des partenariats en vue de promouvoir le mieux-être des Canadiens est mise en pratique, elle apparaît comme le concept pratique qu'elle est. Prenons comme exemple notre stratégie antidrogue. L'objectif ultime du programme fédéral était de réduire au minimum, si ce n'est éliminer, la tragédie humaine qui est la conséquence courante de l'abus de drogues.

Le fait d'envisager le problème de l'abus de drogues sous cet angle nous a permis d'étudier les facteurs contributifs dans le contexte d'un éventail beaucoup plus large des éléments déterminant l'état de santé.

Beaucoup de députés se souviendront du slogan adopté par Santé Canada dans le cadre de sa stratégie antidrogue: «Les drogues, on s'en parle!» Ce message vise à évoquer la confusion quant à son identité et à son avenir qui pousse souvent un jeune à faire l'expérience de drogues dangereuses, ainsi que l'image positive qui se dégage d'une vie sans drogue.

Certes, la stratégie nationale anti-drogue, c'est beaucoup plus que des slogans et des messages, puisqu'elle s'intéresse au bien-être physique, mental et affectif du sujet.

Prenons, par exemple, le programme prénatal de nutrition mis en oeuvre par Santé Canada. Cette initiative s'inscrit dans les engagements énoncés dans le livre rouge. Elle vise à promouvoir le développement et la croissance de nouveaux-nés en bonne santé. Or, pour ce faire, il faut s'attaquer aux facteurs qui sont susceptibles de gêner ce développement.

Le fait est qu'un enfant dans le ventre de sa mère en est bonne santé en autant que l'est celle-ci. Si cette femme se nourrit mal, subit de mauvais traitements ou consomme des drogues, le bébé court de grands risques d'en souffrir.

Comme les députés le savent, ce programme seconde d'intensifs efforts communautaires en vue d'atteindre ces femmes enceintes qui sont dans le besoin. Dans un premier temps, cela consiste dans la distribution de suppléments alimentaires et la prestation de conseils dans le domaine de la nutrition et du mode de vie. Dans un deuxième temps, il s'agit d'offrir à ces mères d'autres outils pour mieux les aider à s'occuper d'elles-mêmes et de leurs nouveaux-nés.

Les mères visées par ce programme sont généralement pauvres. Elles accusent souvent un déficit de poids. Il arrive qu'elles fument, boivent ou consomment des drogues. Il arrive aussi qu'elles subissent de mauvais traitements. Elles habitent souvent les taudis de nos villes. Elles sont souvent jeunes, seules et sans instruction.

Ce sont ces facteurs décisifs en matière de santé qui font que, chaque année, 40 000 nouveaux-nés dont le poids est inférieur aux normes sont déjà handicapés à la naissance. Tels sont les problèmes que le programme en question vise à régler.

Santé Canada ne se limite pas, loin de là, à ces efforts en faveur de la santé. Ceux-ci s'étendent à la prestation des soins de santé. Il est évident que, lorsqu'on parle de qualité des soins, cela ne s'arrête pas simplement aux résultats cliniques.

La notion de qualité variera inévitablement d'une personne à une autre, non pas parce que les résultats varient sur le plan clinique, mais parce que diverses personnes peuvent percevoir de façon différente des états de santé identiques.

Prenons, par exemple, une opération chirurgicale qui risque fort d'avoir des effets secondaires connus. Pour certains, ces effets secondaires vont entraîner une baisse de la qualité de vie par rapport à celle qu'ils auraient s'ils apprenaient simplement à vivre avec la maladie en question. Pour d'autres, l'inverse sera vrai. Dans les deux cas, l'objectif de la décision clinique est de parvenir au meilleur état de santé possible pour la personne touchée.

C'est un choix que chacun d'entre nous veut avoir. Pourtant, c'est un choix qui ne s'offre pas à nous, si on n'évalue la santé qu'en fonction de la présence ou l'absence de maladie. Il est question d'une médecine holistique dans le cas présent.


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À un autre niveau, il est évident qu'il reste beaucoup à apprendre sur les facteurs qui façonnent le bien-être physique, mental et social d'une personne. Cela me rappelle que les notions de maladie dans les terminologies et les technologies médicales ont beaucoup évolué depuis 1867. Pourtant, la Constitution canadienne n'a jamais été un obstacle à la poursuite efficace de la santé.

Nous sommes maintenant à un stade où les provinces et le gouvernement fédéral comprennent et acceptent la nécessité d'insérer le bien-être des gens dans leur stratégie globale sur la santé. Les gouvernements collaborent. À ma connaissance, aucune province ne perçoit sérieusement le mandat du ministère de la Santé pour ce qui est du bien-être des gens comme une menace à ses responsabilités. Cela montre que les deux ordres de gouvernement entendent bien rétablir les bases nécessaires à la bonne santé et au bien-être des gens. Cela reflète un engagement de longue date envers la coopération qui nous sert tous bien.

(1215)

En ce qui concerne la santé des Canadiens, nous venons au deuxième rang, après le Japon, en ce qui concerne les morts néonatales. En ce qui a trait à notre bilan en matière de développement de notions de santé, 21 ans après sa publication, on considère toujours comme une percée le rapport de Marc Lalonde de 1974, qui s'intitule Nouvelle perspective de la santé des Canadiens, et ce, partout dans le monde. Le bilan de notre système de prestation de soins de santé est éloquent. C'est une source de fierté pour tous les Canadiens et il fait l'envie du monde entier.

L'inclusion de l'alinéa 4(2)a) dans la mesure habilitante envoie un message sur qui nous sommes et ce que nous défendons. Nous nous engageons à assurer le bien-être physique, mental et social des Canadiens et nous sommes prêts à travailler avec d'autres pour parvenir à cette fin. Cette disposition ne fait que reconnaître l'éventail complexe de facteurs qui influent sur la santé et dont nous devons tenir compte pour promouvoir la santé des gens.

En bref, cette disposition nous dit ce que nous savons déjà être vrai. Un ministère qui est chargé de promouvoir la santé des Canadiens doit avoir un mandat qui reflète la réalité de la vie des gens et tous les éléments qui conduisent à une bonne santé.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, je suis heureuse, une fois de plus, d'avoir l'occasion de parler du projet de loi C-18 qui est en effet le projet de loi C-95, tel qu'on l'a connu avant la récente prorogation des travaux de la Chambre. Ce projet de loi vise principalement à constituer, au niveau fédéral, le ministère de la Santé. De plus, il modifie ou abroge certaines autres lois.

Un tel projet de loi n'a absolument pas sa raison d'être. Il n'est nullement justifié, car la santé est un domaine de compétence exclusive aux provinces. C'est écrit en toutes lettres dans cette même Constitution qu'on tente de faire avaler de force aux Québécois. Je l'ai dit, je le dis encore et je le répéterai plus tard, cela a l'air difficile à comprendre, mais la santé est un domaine de compétence exclusivement provinciale.

Par son pouvoir de dépenser, le fédéral se garde la possibilité d'intervenir selon son bon vouloir et sans égard au partage des pouvoirs garantis par la Constitution dans tous les champs de compétence provinciaux. En font preuve les dires d'Alexander Galt, un des Pères de la Confédération, qui affirmait que le partage des pouvoirs, tel que décrit dans l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, n'accordait pas une part de financement assez importante aux provinces pour que celles-ci puissent s'occuper convenablement des champs de compétence sous leur juridiction.

Les propos d'Alexander Galt ne laissent aucun doute quant aux intentions initiales des Pères de la Confédération, pas plus que ceux d'un autre artisan de l'Acte de 1867 qui disait qu'à la longue, les provinces ne deviendraient rien d'autre que de grosses municipalités sous la tutelle et grandement dépendantes du fédéral.

Il est peut-être difficile, pour certains, d'admettre aujourd'hui que telle ait pu être la volonté de ceux qui ont imaginé l'Acte de l'Amérique du Nord britannique. Difficile de croire que l'acte de naissance du Canada prévoyait, même à l'état embryonnaire, une centralisation de plus en plus intense des pouvoirs vers Ottawa.

Si je me suis permis de faire une parenthèse historique, c'est pour bien montrer que, contrairement à ce que plusieurs tentent de nous faire croire, rien n'a changé. C'est encore cette vision centralisatrice et donnant une place plus que prépondérante au gouvernement actuel central qui domine, non pas les discours, Dieu les en garde, mais bien les gestes des principaux dirigeants fédéraux d'aujourd'hui. Et le meilleur exemple pour illustrer cet état de fait est sans aucun doute le domaine de la santé en général où le fédéral n'a cessé, depuis des dizaines d'années, d'intervenir de façon de plus en plus pressante. Le projet de loi C-18 dont il est question aujourd'hui en est la preuve.

(1220)

La Loi constitutionnelle attribue aux provinces la compétence générale en matière de santé sur le territoire en prévoyant généralement toutes les matières d'une nature purement locale ou privée dans la province. N'importe qui peut lire cela au paragraphe 92.16. De plus, les paragraphes 92.7, 92.13 et 92.16 de la même loi attribuent aussi aux provinces la compétence sur les hôpitaux, la profession médicale et la pratique de la médecine, de même que sur les soins de santé en général dans la province. Enfin, nous pouvons dire aussi que ce domaine est de compétence des provinces, parce que relevant de la propriété et des droits civils.

Suivant cela, il me semble évident que la santé est un domaine qui, normalement, devrait relever des provinces et non du fédéral. Toutefois, le gouvernement fédéral est intervenu dans ce domaine depuis plusieurs années et de plusieurs façons. La Loi sur l'assurance-hospitalisation et les services diagnostics, de même que la Loi sur les soins médicaux et, plus récemment, l'adoption de la fameuse Loi canadienne sur la santé qui regroupe les précédentes et cristallise les normes dites nationales, montrent bien ce que le gouvernement fédéral fait du partage des champs de compétence.

La tentation ou la volonté du gouvernement fédéral de s'ingérer dans le domaine de la santé ne date pas d'hier. En effet, il faut


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remonter jusqu'à la fin de la Deuxième Guerre mondiale pour se rappeler qu'à l'époque, le fédéral avait pris possession de tous les principaux champs de taxation, s'assurant ainsi la grande majorité des ressources fiscales normalement levées par les provinces.

À la fin de la guerre, il lui est venu une idée lumineuse: au lieu de redonner les pouvoirs de taxation aux provinces, il pourrait plutôt redistribuer l'argent à travers des subventions conditionnées à des normes décidées par le gouvernement fédéral. Façon ingénieuse de prendre encore un peu plus de place dans des champs qui ne sont pas les siens, à une époque où le Conseil privé de Londres, qui jouait alors le rôle de la Cour suprême d'aujourd'hui, semblait vouloir mettre un frein aux visées centralisatrices du gouvernement central.

Depuis, le Financement des programmes établis est le programme par lequel le gouvernement fédéral effectue des transferts aux provinces pour la santé et l'éducation postsecondaire. Le montant versé aux provinces en vertu de ce programme se compose d'une partie versée en argent comptant et d'une partie qui est un transfert de points d'impôt du fédéral aux provinces.

Les transferts étaient calculés selon les dépenses d'une année de référence, soit 1975-1976, et devaient être indexés en tenant compte de la moyenne du PNB par habitant des trois dernières années. Essentiellement, depuis sa mise sur pied en 1977-1978, l'évolution du Financement des programmes établis se caractérise par un désengagement unilatéral de la part du gouvernement fédéral.

Instauré en 1977, le Financement des programmes établis est demeuré le même dans sa structure. Par contre, le rythme de croissance prévu n'est plus respecté depuis une dizaine d'années. C'est ce qui a donné naissance à ce qu'on appelle le manque à gagner des provinces et du Québec en matière de santé. Voilà un bon exemple du tort que peut faire un gouvernement qui refuse d'accepter qu'il ne peut pas tout faire à la place des autres.

En 1986, le fédéral réduisait le taux de croissance des transferts de 2 p. 100, ce qui veut dire que l'ajustement des dépenses en santé était inférieur de 2 p. 100 à la hausse du PNB. C'était le début d'une longue série de réductions des versements.

En 1989, il y a eu une autre réduction du facteur d'indexation de 1 p. 100, ce qui veut dire que l'ajustement des dépenses en santé était maintenant inférieur de 3 p. 100 à la hausse du PNB.

En 1990, en adoptant le projet de loi C-69, on gèle les transferts au niveau de 1989-1990 pour une supposée période de deux ans, sans tenir compte de l'inflation, alors que les coûts de soins de santé continuent d'augmenter.

En 1991, le fédéral annonce qu'il prolonge le gèle de trois ans. Pendant la majorité de cette période néfaste pour l'ensemble du système de santé, le parti d'opposition criait au scandale. Il scandait haut et fort que cette façon de procéder ne pouvait que mener le système de santé à sa perte. Pourtant, c'est ce même parti, aujourd'hui au gouvernement, qui continue d'affaiblir encore plus le système.

Résultat, entre 1977 et 1994, la contribution du fédéral pour la santé est passé de 45,9 à 33,7 p. 100, une baisse de 10,6 p. 100 que le Québec et les provinces ont dû absorber tant bien que mal. Et malheureusement, les prévisions pour 1997-1998 indiquent que la part du fédéral descendra aussi bas que 28,5 p. 100 du financement.

(1225)

Avec les années, à mesure qu'Ottawa se désengageait du financement de la santé, c'est près de huit milliards de dollars qui ont manqué au Québec seulement, huit milliards que le gouvernement a dû se débrouiller pour trouver ailleurs. À cette somme, on peut ajouter les coupures prévues au titre du Transfert social canadien: 308 millions pour 1995-1996 et plus de 587 millions en 1997-1998.

Selon une étude de l'Institut C.D. Howe, de 1988 à 1992, alors que les dépenses au titre des paiements de transfert ont été stagnantes, les dépenses des autres programmes fédéraux ont augmenté de 25,5 p. 100. Les transferts aux provinces pour la santé ont ainsi supporté un délestage du déficit fédéral. Le fédéral dépensait trop tout en disant aux provinces de se serrer la ceinture.

La marge de manoeuvre que le Transfert social canadien doit amener, ce n'est en fait qu'une possibilité pour le Québec et les provinces de choisir elles-mêmes où elles couperaient pour absorber se désengagement unilatéral. C'est là la vision que l'actuel gouvernement libéral a de la décentralisation. C'est ce qu'il entend lorsqu'il parle de fédéralisme flexible. Non merci, nous ne sommes pas intéressés.

Au printemps dernier, le Conseil national du bien-être social, un organisme qui a pour mandat de conseiller le ministère fédéral de la Santé, servait cette réflexion au ministre: «Il serait extrêmement hypocrite de réduire les contributions aux provinces tout en accroissant les exigences qu'elles devraient respecter.» Pourtant, le Conseil national du bien-être social n'est pas réputé être un organisme à caractère souverainiste.

Comme je le mentionnais plus haut, les articles 92.7 et 92.16 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique attribuent la santé et les services sociaux exclusivement aux provinces. Pourtant, le fédéral a lui aussi un ministère de la Santé.

L'année prochaine, il en coûtera aux contribuables plus de un milliard de dollars, un milliard de dollars gaspillés pour faire ce que les gouvernements du Québec et des autres provinces canadiennes pourraient très bien faire eux-mêmes.

De plus, ce ministère superflu qui emploie plus de 8 000 fonctionnaires attribue des sommes importantes pour des programmes et projets qui existent déjà au Québec et dans les autres provinces. Je peux vous donner des exemples du Québec où on a des dédoublements en ce qui concerne les programmes. Je vais vous en signaler quelques-uns: la stratégie pour l'intégration des handicapés, la lutte contre la violence familiale, le programme Nouveaux Horizons, le secrétariat du troisième âge, la lutte contre le tabagisme, la stratégie antidrogue, la stratégie contre le sida, le programme sur la grossesse et le développement de l'enfant, le bureau de l'enfance, etc.


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C'est au niveau de ces dédoublements que le fédéral aurait dû couper, mais il s'entête à vouloir dire son mot partout et le résultat désastreux au niveau des finances publiques ne semble pas suffisant pour lui faire accepter la réalité. On pellette le déficit dans la cour des provinces par des coupures dans les paiements de transfert dans la domaine dans la santé et ce sont les gens qui souffrent qui écopent.

Une autre initiative du gouvernement fédéral démontre sa volonté d'intervenir dans le secteur de la santé sans le consentement des pouvoirs provinciaux: le Forum national sur la santé avec son objectif de jeter un regard critique sur l'ensemble du système de santé actuel et de proposer des solutions pour contrer l'augmentation constante des coûts dans ce domaine. Selon plusieurs analystes, le fédéral pourrait même en profiter pour resserrer les critères et les conditions de la Loi canadienne sur la santé. De plus, toutes les provinces sans exception ont ouvertement critiqué l'attitude du gouvernement fédéral qui, en agissant ainsi, reléguait ceux qui ont légalement juridiction en matière de santé au second plan.

À ce titre, le 27 septembre 1994, l'actuel ministre de l'Immigration déclarait au quotidien La Presse: «La conduite du gouvernement fédéral est aberrante. Comment peut-on envisager une révision de régime de santé sans la participation des provinces qui sont responsables de la livraison des services? Ce n'est tout simplment pas acceptable.» Aujourd'hui, je serais curieuse d'entendre la position actuelle de la ministre de l'Immigration au sujet du Forum national.

(1230)

Une autre réflexion des plus sages sur la négligence de ce gouvernement libéral quant au respect des champs de compétence nous vient cette fois de Mme Thérèse Lavoie-Roux qui, alors au Sénat, s'interrogeait comme suit: «Les provinces ne sont-elles pas les grands acteurs du domaine de la santé? Pourquoi n'ont-elles pas été invitées à participer au forum? Le leader du gouvernement trouve-t-il indiqué que le gouvernement agisse unilatéralement à l'égard d'une question de compétence provinciale?»

Maintenant, si on regarde plus précisément le projet de loi C-18, on voit bien à quel point le gouvernement fédéral, loin de vouloir faire preuve de bonne foi en se retirant de ce domaine qui ne lui appartient pas, tente, par tous les moyens, de gruger petit à petit les champs de compétence des provinces à son avantage. Ce n'est pas une bombe, ce n'est pas un mégaprojet de loi; il nous est présenté comme un simple petit projet de loi inoffensif et sans conséquence, alors que la réalité est tout autre.

À l'article 4(1), on retrouve les pouvoirs et fonctions du ministre de la Santé. Cet article propose que les pouvoirs du ministre de la Santé s'étendent à tous les domaines de compétence du Parlement liés à la promotion et au maintien de la santé de la population. On retrouvait une disposition semblable dans la loi originale concernant le ministère de la Santé et du Bien-être social. Cependant, la compétence du Parlement peut porter à confusion lorsqu'on fait référence à la santé publique. Il y aurait certainement là une place pour plus de précision.

Mais ce sont les articles suivants qui sont plus subtils. L'article 4(2) décrit les attributions du ministre de la Santé, dont la promotion et le maintien du bien-être physique, mental et social de la population. La population en question est la population canadienne, et cet article donnerait donc l'autorité et la légitimité au fédéral d'intervenir dans un domaine qui est de compétence exclusive aux provinces.

L'article 4(2) poursuit en mentionnant la protection de la population contre la propagation de la maladie et les risques pour la santé. Cela n'apparaît pas dans la loi originale que le projet de loi C-18 aspire à remplacer. Cela laisse aussi la possibilité pour le gouvernement fédéral d'invoquer l'intérêt national et le pouvoir lié à la paix, l'ordre et le bon gouvernement pour intervenir afin d'assurer la protection de la santé et de la sécurité de la population.

À l'alinéa c) de ce même article, on peut lire que les enquêtes et les recherches sur la santé publique, y compris le contrôle suivi des maladies, relèvent du fédéral.

Cette mention pose un problème, car plus loin, à l'article 12, on lit qu'aucune disposition de la présente loi ou de ses règlements n'autorise le ministre ou un fonctionnaire du ministère à exercer son autorité sur un organisme de santé régi par une loi provinciale.

Comment le ministère de la Santé entend-il assurer ce contrôle suivi des maladies sans avoir accès aux renseignements nécessaires? Les établissements de santé sont, aux termes de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, des organismes de santé régis par une loi provinciale.

Est-ce un réel problème? Est-ce que l'article 12 restreint bien le champ d'intervention du fédéral en matière de santé, ou ne veut-il pas plutôt une simple façade visant à rassurer les provinces, façade que le gouvernement fédéral traversera allégrement, selon son bon vouloir, comme il l'a si bien fait dans les dernières années?

L'article 4 peut donc être interprété de façon très large et généreuse. Il y a certainement lieu de s'interroger sur la portée réelle de cet article qu'on peut interpréter de plusieurs façons et auquel on peut prêter plusieurs intentions.

C'est de cette façon que, fidèle à ses habitudes, le gouvernement fédéral essaie d'étendre ses tentacules sur les champs de compétence provinciaux par un projet aux allures simplistes et inoffensives. Mais personne n'est dupe au point de ne pas voir ce manège qui se prépare devant nous.

Le projet de loi C-18 est un autre exemple typique de la façon de procéder du fédéral: sournoisement, silencieusement et sans faire de vague. C'est parce qu'il sait très bien que personne n'est d'accord avec sa façon de faire en matière de santé. Au lieu d'admettre ses torts et de réparer avant qu'il ne soit trop tard, il tente sournoisement de continuer, mais de façon à ce que personne ne se rende compte de ce qui s'est passé jusqu'au jour où il est trop tard.

Il est clair que l'intervention fédérale en matière de santé se solde par un bilan très négatif. Et il est aussi clair que le fédéral s'entête à ne pas reconnaître les champs de juridiction et à diminuer les


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transferts sans assouplir les normes nationales. On se dirige vers la mort du système de santé tel qu'on le connaît.

(1235)

Finies les phrases à faire pleurer voulant que le Canada ait la seule police d'assurance d'un système de santé comme le nôtre. Oui, nous sommes fiers de notre système de santé; oui, nous tenons à le garder et même à l'améliorer; non, le Canada n'est pas une bonne police d'assurance pour ce système, loin de là; et non, la souveraineté du Québec n'hypothéquera pas notre système de santé, bien au contraire.

La seule vraie menace vient du manque de vision d'un gouvernement fédéral qui n'a plus les moyens de ses ambitions centralisatrices et qui devrait, le plus tôt possible, remettre la pleine juridiction de la santé, de même que le financement, aux provinces, du moins à celles qui l'exigent. La santé des Canadiens et des Québécois ne s'en portera que mieux.

Il va de soi que pour l'ensemble de ces raisons, et pour bien d'autres que j'aurai l'occasion de soulever plus tard, il est impossible pour le Bloc québécois d'accorder le moindre appui au projet de loi C-18.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je félicite ma collègue pour la clarté de son discours. Je pense que l'élément qui en ressort le plus, c'est qu'on a essayé, depuis quelques années, de faire la démonstration claire qu'il y avait beaucoup de gaspillage et de dédoublements entre les deux paliers de gouvernement.

Souvent, les gens nous demandent ce que sont, de façon concrète, ces gaspillages. La liste des différentes stratégies, des différentes interventions que ma collègue a nommées, par exemple la stratégie pour l'intégration des personnes handicapées, la lutte contre la violence familiale, le programme antidrogue et contre le sida, on voit que politiquement, ce sont des dossiers qui peuvent être intéressants. On trouve la cause de l'implication du fédéral dans ces choses-là, d'autant plus qu'il se sert de son pouvoir de dépenser pour intervenir là-dedans.

Dans le Canada d'aujourd'hui, on n'a pas nécessairement les moyens de faire ces choses-là. La présentation de la députée a très bien précisé tout cela. Aussi, je pense que le gouvernement fédéral aurait intérêt à réfléchir encore, avant d'adopter la loi, sur la pertinence d'intervention dans ce secteur.

J'aimerais demander à la députée ce que vient faire le Forum sur la santé du côté fédéral. Je regardais tout à l'heure le mandat de ce forum. On disait qu'il a pour mandat «d'améliorer la santé de la population canadienne et d'accroître l'efficience et l'efficacité des services de santé.»

Selon ma collègue, par votre entremise, monsieur le Président, quel est le gouvernement responsable qui est le plus capable de s'occuper d'efficience et d'efficacité des services de santé? Est-ce que c'est le gouvernement fédéral qui ne donne pas de services de première ligne ou si c'est le gouvernement provincial qui a la responsabilité, qui est en première ligne, qui est sur la ligne de feu, en toutes occasions, et qui doit faire des choix difficiles en ce moment, mais cela est vrai dans toutes les provinces du Canada?

Mme Picard: Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question.

On l'a répétée maintes et maintes fois l'histoire du Forum national sur la santé. Qu'est-ce que cela vient faire, l'histoire du Forum national sur la santé? À mon avis, ce n'est que de la poudre aux yeux.

À l'heure actuelle, et on ne le répétera jamais assez, ce sont les provinces qui ont la gestion des programmes de santé dans leur propre province. Je l'ai toujours mentionné, je ne doute pas de la qualité, de l'expérience des gens qui siègent au Forum national sur la santé, mais l'expertise de ces personnes, à quoi va-t-elle servir? Il n'y a même pas un représentant des provinces qui siège au Forum national sur la santé.

Chaque province, actuellement, est en train de restructurer. On le voit au Québec, le ministre Rochon est en train de revoir et de restructurer une nouvelle façon de gérer le système de santé, une nouvelle façon d'assurer la qualité des soins de santé aux gens en tenant compte du vieillissement de la population, des nouvelles technologies et des coûts des médicaments.

Ce sont les provinces qui savent ce que sont leurs besoins. Qu'est-ce que le Forum national va pouvoir amener de plus? Encore une fois, on est en train, par le pouvoir de dépenser du fédéral, d'instaurer, de gaspiller et de perdre du temps.

(1240)

Ce n'est pas la première fois qu'on le dit, le Forum national sur la santé, selon le Bloc québécois, c'est de la poudre aux yeux pour montrer, à la face de la population québécoise et canadienne, que c'est un bon gouvernement.

M. Crête: Monsieur le Président, je pense que la démonstration était très claire. J'aimerais que la députée donne plus de détails sur un exemple qui la concerne directement. On dit que le fédéral a une stratégie pour l'intégration des personnes handicapées, alors qu'au Québec, il y a un l'Office des personnes handicapées du Québec, dont le siège social est, je crois, dans la circonscription de la députée.

N'y aurait-il pas eu intérêt à ce que le gouvernement fédéral, au lieu d'injecter des sous supplémentaires nécessitant obligatoirement de l'argent supplémentaire pour l'administration-dans la stratégie de l'intégration des handicapés, il y a sûrement des frais administratifs-cet argent, au lieu d'être dépensé par le fédéral dans un programme entrant en compétition avec l'action du gouvernement du Québec, est-ce que l'Office des personnes handicapées du Québec n'aurait pas pu tirer profit de façon beaucoup plus avantageuse d'un retrait du gouvernement fédéral et faire que les personnes handicapées du Québec aient un service encore meilleur et plus adéquat?

Mme Picard: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de cette question. Ce n'est pas la première fois qu'on parle du problème des dédoublements.

C'est vrai qu'il existe, dans ma circonscription, l'Office des personnes handicapées du Québec. Le fédéral, au lieu de tenir compte de ce qui se passe dans chacune des provinces, des programmes déjà existants dans chacune des provinces, et j'en parlais tout à


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l'heure, arrive par son pouvoir de dépenser et au nom du bon gouvernement, et dit: «Bon, il y a un problème au sujet des personnes âgées, des personnes handicapées.» Donc, pour avoir bonne conscience, on met de l'argent dans un programme, on met un programme sur pied, et bang! on vient de dédoubler des programmes qui existent déjà dans certaines provinces.

Pourquoi ne pas aider à appuyer les programmes qui existent, qui ont été mis en place par les provinces? Les provinces savent, dans chacune de leurs régions, quels seraient les besoins concernant les soins de santé. Après avoir évalué les besoins, on implante, avec des experts, avec des spécialistes de la santé, des programmes pour aider ces gens. Le gouvernement, voyant que le programme fonctionne et que ça va très bien, pour se donner, comme je le disais tout à l'heure, bonne intention, bonne conscience, injecte de l'argent dans des programmes.

S'il est si bon gouvernement que cela, pourquoi n'appuie-t-il pas ces programmes en versant des subventions, au lieu de couper dans les paiements de transfert, au lieu de serrer, au lieu de pelleter son déficit dans la cour des provinces et de couper dans les paiements de transfert?

[Traduction]

M. Lyle Vanclief (Prince Edward-Hastings, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux et fier de prendre la parole à la Chambre aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-18 concernant le ministère de la Santé.

Nous avons tous entendu les allégations selon lesquelles le gouvernement n'a aucun rôle à jouer dans le secteur de la santé. Certains soutiennent que le gouvernement devrait remettre les questions de santé aux provinces et aux territoires, qui assurent en fait les services aux Canadiens. Le gouvernement comprend parfaitement que les provinces ont un pouvoir constitutionnel en matière de soins de santé.

Les provinces sont chargées de la prestation des soins de santé, qui englobent généralement les services hospitaliers et médicaux. Les provinces planifient, gèrent et exploitent les réseaux de santé du Canada. Cependant, ces réseaux fonctionnent dans le cadre du régime national d'assurance-santé que nous connaissons tous sous le nom d'assurance-maladie. Ce régime national fait en sorte que tous les Canadiens, peu importe leur capacité de payer, aient accès à des médecins ayant reçu une bonne formation et à des hôpitaux bien dotés en matériel.

Je refuse de prêter foi au mythe voulant que le rôle du gouvernement fédéral dans le secteur de la santé se limite à l'aide financière et autre qu'il apporte au régime d'assurance-maladie du Canada. Par ailleurs, nous avons toutes les raisons d'être fiers du régime d'assurance-maladie et du soutien que le gouvernement y apporte.

Les Canadiens s'enorgueillissent avec raison de notre régime national d'assurance-maladie et de la qualité des services médicaux qui sont offerts à chacun d'entre nous. Ils savent que, peu importe où ils habitent, la langue qu'ils parlent ou leur situation professionnelle, ils sont tous assurés d'avoir accès à des services médicaux de haute qualité chaque fois que c'est nécessaire.

(1245)

Le régime d'assurance-maladie a également des retombées financières pour les entreprises canadiennes. Les entreprises appuient ce régime, car il leur offre des avantages concurrentiels sur le marché mondial. Les entreprises canadiennes ne paient pas les coûts de régimes privés d'assurance-maladie pour les services hospitaliers et médicaux qui sont nécessaires.

Même compte tenu des impôts en vigueur au Canada, il est beaucoup moins coûteux au Canada qu'aux États-Unis d'accorder des avantages aux employés. C'est certes un des facteurs qui aident à attirer des multinationales au Canada.

Le caractère national du régime accroît également la mobilité de la main-d'oeuvre. Les travailleurs n'ont pas à craindre de perdre la protection que le régime d'assurance-maladie leur offre à eux ou à leur famille s'ils changent d'emploi ou s'établissent dans une autre province pour chercher un emploi. Les Canadiens sont toujours protégés, même quand ils déménagent et perdent leur travail.

En garantissant aux Canadiens l'accès à des soins de santé de qualité, l'assurance-maladie aide à faire en sorte que notre main-d'oeuvre soit en santé et productive. Je suis aussi d'avis que notre système de soins de santé a favorisé l'unité canadienne. Nous savons tous que le multiculturalisme et la diversité caractérisent notre société, qui est toutefois très liée à la culture nord-américaine.

Il est parfois difficile pour nous, au Canada, de nous définir en citant des caractéristiques qui nous distinguent de nos voisins du Sud, mais l'assurance-maladie est sans contredit une exception. Au Canada, notre système universel de soins de santé est étroitement lié à notre identité. Nous le considérons comme étant une manifestation de nos valeurs collectives fondamentales, que sont notamment la justice, la compassion et l'équité. Comme les soins de santé ne se limitent pas à la santé proprement dit, le rôle du fédéral dans ce domaine ne se limite pas non plus à défendre les principes de la Loi canadienne sur la santé.

Seulement 25 employés voient à l'application de la Loi canadienne sur la santé. Les autres fonctionnaires du ministère assument des rôles et des responsabilités qui relèvent strictement du fédéral, autrement dit des fonctions dont les provinces ne s'occupent pas et qui sont de toute évidence de compétence fédérale.

Je décrirai brièvement le travail indispensable dont le ministère se charge. Ce travail est clairement centré sur quatre types d'activités. Le premier consiste à appuyer et à renouveler le système de santé. À cette fin, Santé Canada s'attache à préserver l'accès universel à des soins de santé convenables en allégeant les pressions financières qui s'exercent sur les secteurs public et privé.

Pour appuyer ces objectifs, le ministère voit à l'application de la Loi canadienne sur la santé et effectue des paiements de transfert pour conforter les systèmes d'assurance-maladie des provinces. Il encourage aussi la collaboration et le consensus à l'égard d'options qui font appel à l'efficacité et à l'efficience du système de santé canadien.

Un bon exemple de cela, c'est lorsque le ministère collabore étroitement avec les provinces et les territoires pour évaluer la qualité et l'efficacité de la gestion et de la prestation des services de santé partout au Canada. Les renseignements alors obtenus sont


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distribués d'un bout à l'autre du pays et aident à renouveler notre système de soins de santé.

La loi attribue au gouvernement fédéral la responsabilité de protéger la santé des Canadiens. Le ministère de la Santé assume cette responsabilité en assurant un contrôle suivi de nouvelles maladies infectieuses et d'autres menaces à la santé publique, et en évaluant les risques. Les renseignements que recueille le ministère servent à toutes les provinces et tous les organismes de santé publique au Canada.

La gestion des risques est le deuxième type d'activités du ministère, qui gère les stratégies nationales de lutte contre des maladies et garantit l'innocuité et la qualité des aliments, des drogues et des services médicaux pour tous les Canadiens. Il réglemente également les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, il contrôle la sécurité des produits biologiques et des produits cosmétiques et il assure la sécurité et la qualité nutritive des aliments destinés aux Canadiens.

Je ne saurais trop souligner à quel point la présence fédérale dans ce domaine est vitale et à quel point elle est importante pour la santé de tous les Canadiens. Le Canada ne possède, à l'heure actuelle, aucune installation d'identification et d'analyse de maladies infectieuses potentiellement mortelles comme celle du virus d'Ebola. Le ministère de la Santé est cependant en train de construire à Winnipeg un laboratoire de niveau quatre qui s'occupera justement de cela. Lorsqu'il entrera en activité, ce laboratoire emploiera une centaine de scientifiques. Leur travail contribuera à améliorer encore davantage la santé et la sécurité des Canadiens d'un océan à l'autre.

(1250)

Le troisième secteur d'activités du ministère consiste à collaborer avec ses partenaires à des stratégies liées à la santé de la population. Ces stratégies portent sur la promotion de la santé, la prévention des maladies et l'éducation publique. Elles mobilisent les efforts pour remédier à des problèmes nationaux comme le cancer, la violence familiale, le sida et la nutrition prénatale. Ces stratégies s'attaquent aux facteurs de mauvaise santé. Elles fournissent un soutien indispensable aux groupes vulnérables aux risques pour la santé, dont les enfants, les parents seuls, les familles pauvres et les personnes âgées. Elles contribuent à prévenir et à combattre les maladies cardiaques, le cancer du sein et de nombreuses autres maladies.

Ces stratégies complètent, mais sans faire double emploi, le travail effectué par les nombreux organismes nationaux de santé animés par des bénévoles. Nous devons aux nombreux bénévoles une énorme dette de gratitude pour le travail qu'ils font en faveur de notre santé à tous. Nous célébrons la Semaine nationale de l'action bénévole au Canada et nous savons que bon nombre de personnes dans toutes nos localités travaillent très fort pour le bien de tous.

En même temps, ces stratégies du ministère de la Santé en matière de promotion de la santé et de prévention des maladies contribuent à réduire la pression sur le système de santé du Canada, faisant ainsi diminuer les coûts des soins de santé.

Les soins prénataux en constituent un bon exemple. Le coût de ces soins pour un nourrisson de poids insuffisant à la naissance s'élève à environ 60 000 $. Les activités de promotion de la santé et de prévention des maladies visant à assurer un poids sain à la naissance coûtent en moyenne environ 400 $ par enfant.

Le quatrième secteur d'activités du ministère de la Santé consiste à fournir des soins de santé aux premières nations et à d'autres groupes comme le personnel militaire canadien. Certains ne savent pas que Santé Canada assure des services de santé communautaires aux Indiens inscrits qui habitent dans les réserves, ainsi qu'aux habitants du Yukon, grâce à 600 établissements situés un peu partout au Canada. Le ministère veille également à ce que les Indiens inscrits et les Inuit admissibles reçoivent une gamme de produits et de services médicaux que les provinces n'offrent pas.

Mis à part les paiements de transfert aux provinces, les deux tiers du budget de Santé Canada sont consacrés aux services de santé des autochtones et aux questions qui s'y rapportent. C'est le seul domaine où Santé Canada s'occupe directement de la prestation des soins de santé.

Le ministère doit également évaluer la santé de certains groupes comme le personnel de l'aviation civile. Il veille aussi à la sécurité du public en cas de catastrophe civile nationale.

Ces quatre champs d'intervention regroupent une série d'activités visant à maintenir et à améliorer la santé, la sécurité et le bien-être des Canadiens. Si le gouvernement fédéral ne jouait pas un rôle dynamique dans le domaine de la santé, nous n'aurions pas de normes nationales, ni les moyens de garantir la sécurité des aliments, des produits médicaux et des médicaments. Il n'y aurait pas de service national de renseignement pour nous protéger des nouvelles maladies infectieuses qui deviennent de plus en plus courantes et complexes.

Le ministère de la Santé est assurément essentiel à notre cohésion nationale et à notre vie quotidienne. Il contribue a assurer la sécurité et le bien-être des Canadiens de tout le pays et il joue un rôle important dans l'accroissement de la productivité, de la compétitivité et de la prospérité de notre pays.

C'est avec fierté que j'appuie ce projet de loi.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue. J'ai bien aimé la présentation des différents mandats du ministère fédéral de la Santé, mais il est important de se demander ce que le fédéral fait dans ce champ d'intervention. Comment se fait-il que, dans un secteur qui est de juridiction provinciale, il ait décidé d'intervenir de nouveau?

À ce sujet, j'aimerais citer deux personnes qui ne sont pas identifiées comme étant souverainistes. Il y a même une personne qui est membre du Cabine actuel, Mme Robillard, qui était ministre de la Santé du Québec et qui, à ce moment-là, le 27 septembre 1994, disait, dans le quotidien La Presse: «La conduite du gouvernement fédéral est aberrante. Comment peut-on envisager une révision du régime de santé sans la participation des provinces qui sont responsables de la livraison des services? Ce n'est tout simplement pas acceptable.»


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Aussi, Mme Thérèse Lavoix-Roux, le 31 mai 1994, disait que le gouvernement faisait fausse route en négligeant le rôle des provinces. Elle disait également: «Les provinces ne sont-elles pas les grands acteurs du domaine de la santé? Pourquoi n'ont-elles pas été invitées à participer au forum? Le leader du gouvernement trouve-t-il indiqué que le gouvernement agisse unilatéralement à l'égard d'une question de compétence provinciale?»

(1255)

Je m'interroge sur ce qui porte le gouvernement fédéral à s'obstiner à intervenir dans ce secteur? Il est évident que c'est un secteur qui peut «être payant» électoralement. Il y a des secteurs qui sont névralgiques, qui sont importants, comme l'est la question de la santé. Sauf que si le gouvernement fédéral avait le sens des responsabilités requis, il admettrait au départ que ce n'est pas à lui à dépenser des sous dans ce domaine, donc il retirerait les sommes qu'il implique là-dedans et permettrait aux provinces d'occuper ce champs-là, ce qui ferait qu'on n'aurait pas les dédoublements qu'on a aujourd'hui. Donc, comment le député peut-il justifier que le gouvernement intervienne là-dedans, sinon par calcul purement électoral?

[Traduction]

M. Vanclief: Monsieur le Président, nous n'agissons certainement pas dans le seul espoir d'acheter des votes. Le député doit reconnaître que nous parlons ici de la Loi canadienne sur la santé. Le rôle du gouvernement fédéral consiste à veiller à ce que tous les Canadiens soient traités de façon égale et aient tous accès au même traitement.

Si, dans certains cas, des provinces désirent offrir les mêmes services que le fédéral ou des services supplémentaires, notamment en matière d'information, elles sont libres de le faire. Je serais toutefois porté à me demander si cela est toujours vraiment nécessaire.

Pour ce qui est des données et des renseignements que le gouvernement fédéral transmet aux Canadiens, notre gouvernement juge certainement qu'il est de son devoir d'informer les Canadiens dans ce domaine. Quelle que soit la nature du problème, les Canadiens veulent savoir, préférablement de la même source, en quoi consistent les normes en matière de santé et de sécurité qui sont en vigueur au Canada, les normes en matière d'assurance-maladie, les services médicaux qu'ils peuvent recevoir s'ils déménagent d'une province à l'autre. Voilà le rôle que doit jouer le gouvernement fédéral.

C'est d'ailleurs la volonté des Canadiens et nous l'avons clairement montrée au fil des ans. Le gouvernement est résolu à préserver le régime en place dans l'intérêt de tous les Canadiens afin qu'ils en saisissent bien toute la valeur.

[Français]

M. Crête: Monsieur le Président, le Forum de la santé a pour mandat d'améliorer la santé de la population canadienne et d'accroître l'efficience et l'efficacité des services de santé. J'aimerais demander au député qui nous dit que le fédéral a responsabilité, dans la Loi sur la santé, d'assurer une qualité égale, est-ce qu'aujourd'hui, avec le désengagement systématique qui s'estime en millions et en milliards de dollars, le gouvernement fédéral ne gère pas, finalement, une coquille vide?

Il a imposé des normes nationales, il retire de plus en plus ses billes du financement, a de moins en moins d'argent disponible, et va exiger des provinces qui sont sur le terrain, de respecter des normes nationales sans leur donner les moyens d'occuper ce champ-là. Si le gouvernement fédéral voulait vraiment remplir son mandat par rapport à cet aspect, est-ce qu'il ne devrait pas se retirer du champ de taxation, retirer la taxation affectée à ce secteur et permettre aux provinces d'occuper ce champ, donc d'avoir plus d'argent disponible pour donner des services adéquats? Est-ce que le fait de consacrer des millions de dollars au Forum sur la santé va, d'une manière ou d'une autre, contribuer à améliorer la qualité du service aux citoyens dans le réseau de santé du Québec ou des autres provinces? J'en doute.

[Traduction]

M. Vanclief: Monsieur le Président, le député et certains de ses collègues doivent comprendre que, tant dans le domaine de la santé que dans d'autres secteurs, notre pays demeurera fort si nous continuons de travailler ensemble.

Si le député propose que les fonds fédéraux au titre de la santé soient remis à chacune des provinces pour que celles-ci puissent ensuite agir à leur guise en ce qui concerne les soins de santé, j'ai le regret de lui annoncer qu'il ne s'adresse pas au bon gouvernement. Il s'adresse à des Canadiens qui ne veulent pas entendre ce qu'il préconise.

Les Canadiens nous ont dit à tous très clairement qu'ils se rendent compte que nous n'avons pas autant d'argent que nous le croyions, qu'à l'avenir il nous faudra faire plus avec moins, ou à tout le moins, autant avec moins.

C'est seulement en participant à des forums comme le Forum national sur la santé, qui réunit des représentants du gouvernement fédéral, du secteur de la santé ainsi que des services et des travailleurs qui dispensent les soins de santé dans les provinces, que nous pouvons mettre en commun nos idées et les fonds fédéraux dont nous disposons, fonds que les provinces peuvent compléter au besoin, pour offrir ce que tous les Canadiens nous ont dit vouloir très clairement, dans toutes les régions du Canada.

(1300)

Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi C-18, qui porte sur la réorganisation de ministère de la Santé.

En tant que porte-parole du Parti réformiste sur la santé, je parlerai en faveur du projet de loi, mais avant d'entrer dans le vif du sujet, je dirai qu'il nous semble qu'il ne s'agit là que d'un autre déplacement de fonctionnaires. Cette opération pendant laquelle on retournera les écriteaux sur les portes et on déplacera les bureaux coûtera cher non seulement au Parlement en temps et en argent, mais encore, et cela importe davantage, aux contribuables. C'est un autre exemple de semblant de loi que le gouvernement citera pour montrer qu'il agit vraiment, alors qu'en réalité il n'apporte pas de véritables changements.

Certes, tous les députés admettront que les soins de santé et notre système de santé sont très importants pour tous les Canadiens. Santé Canada est sous étroite surveillance par les Canadiens. Une préoc-


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cupation très réelle de ces derniers est la viabilité de notre système d'assurance-maladie.

Le rôle du gouvernement fédéral dans le système de santé est très réel. Une partie de ce rôle consiste à fournir des fonds aux provinces. J'estime que le gouvernement fédéral n'a pas bien rempli ce rôle. Les Canadiens se ressentent des réductions. Par exemple, au Manitoba, des travailleurs de la santé sont sur le pavé et protestent contre les modifications qui sont considérées comme nécessaires et qui sont le résultat direct de la décroissance et du caractère imprévisible du financement fédéral. La Chambre s'est déchargée de sa dette au détriment des plus démunis.

Le système de santé actuel ne fonctionne pas et continuera de se dégrader. Le gouvernement refuse de reconnaître la réalité. Il refuse d'en entendre parler.

Le Parti réformiste tient à assurer aux Canadiens qu'ils auront un système d'assurance-maladie viable. Tous les Canadiens devraient avoir accès aux services de santé, quelle que soit leur capacité de payer. Nous, du Parti réformiste, nous nous préoccupons du système et nous sommes prêts à travailler avec les Canadiens pour l'améliorer.

Je voudrais soulever une préoccupation globale concernant le projet de loi et le fonctionnement du gouvernement. Un des fondements de notre système de gouvernement est le principe de la responsabilité ministérielle. La reconnaissance de ce principe est vitale. De plus, elle est essentielle à un autre principe, celui qui veut que le système doit fournir un bon gouvernement pour l'amélioration des conditions de vie des Canadiens.

Même s'il ne s'agit que d'un projet de loi d'ordre administratif, les réformistes l'appuient parce qu'il a été modifié pour tenir compte de ce principe. En effet, à l'étape du rapport, nous avons appuyé un amendement tendant à inscrire ce principe dans le projet de loi. Cela ne figurait pas dans le premier projet de loi que le gouvernement a présenté à la Chambre.

Il existe une longue liste d'exemples qui démontrent la nécessité de principes pour encadrer la responsabilité ministérielle, plus particulièrement celle du ministre de la Santé. J'en donne quelques-uns.

Nous avons récemment entendu parler de la mauvaise gestion au sein de la direction générale de la protection de la santé de Santé Canada. Le Bureau de biologie a si mal géré notre système d'approvisionnement en sang que nos réserves ont été contaminées et des milliers de Canadiens ont été infectés par le VIH et le virus de l'hépatite C. La commission Krever a donc été créée pour enquêter sur cette mauvaise gestion et sur la négligence dans la gestion de notre système national d'approvisionnement en sang.

(1305)

La semaine dernière, dans une déclaration à la Chambre, j'ai critiqué le gouvernement et le ministre de la Santé pour avoir failli à la responsabilité ministérielle. On a appris que le gouvernement fédéral payait les frais juridiques de deux anciens ministres impliqués dans cette tragédie, mais qu'il n'apportait qu'un soutien juridique minimal aux victimes et aux familles qui essaient de connaître la vérité.

Quelle a été la réaction du gouvernement et du ministre de la Santé? Ils ont joint le groupe qui conteste devant les tribunaux la légitimité de l'enquête. Le ministre devrait plutôt confirmer le mandat de la commission et faciliter la production d'un rapport complet sur toutes les questions liées à cette affaire des plus importantes. Il s'acquitterait ainsi de ses responsabilités ministérielles, notamment, face à la Chambre et, plus important encore, face à la population canadienne. Il a cependant choisi une autre voie.

Mon troisième et dernier exemple a trait à la gestion financière du ministère et à la répartition des fonds de plus en plus limités dont nous disposons pour nos services de santé.

Depuis ma nomination comme porte-parole réformiste pour les questions de santé, j'ai constaté, entre autres, un déséquilibre et des injustices dans les priorités du ministère et du gouvernement en matière de dépenses au titre des services de santé. Cela est devenu évident à mes yeux lorsque j'ai participé aux travaux du cous-comité sur le VIH et le SIDA, qui a étudié la stratégie nationale sur le SIDA. J'ai constaté un déséquilibre dans la répartition des fonds fédéraux entre les différentes maladies compte tenu de leur incidence et du nombre de morts qu'elles font dans notre société.

Par exemple, en 1994-1995, le gouvernement fédéral a consacré 43,4 millions de dollars à la stratégie sur le SIDA, mais seulement 4 millions à la recherche sur le cancer du sein. Comparez ces montants à l'incidence des deux maladies et au nombre de décès qu'elles causent dans notre société. Depuis 1980, il y a eu environ 10 700 cas d'infection par le VIH au Canada et 7 400 décès attribuables au SIDA. En 1995 seulement, près de 18 000 familles ont vu un être cher touché par le cancer du sein et cette maladie a causé 5 400 décès.

J'ai reçu des lettres de tout le Canada sur la question. Le gouvernement doit être tenu responsable de l'usage qu'il fait de ses fonds. Le déséquilibre de ces chiffres en dit long.

Il est clair que le gouvernement et le ministre de la Santé doivent être tenus responsables de leurs décisions, de la gestion de notre système de santé et de la politique des services de santé. Le principe de la responsabilité ministérielle est tellement fondamental dans notre système démocratique de gouvernement que nous devrions tous rester vigilants et le soutenir. J'entends exiger du gouvernement et du ministre qu'ils rendent des comptes sur la manière dont le ministre s'acquitte de ses fonctions.

M. John Murphy (Annapolis Valley-Hants, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens et les Néo-Écossais dans ma région voudraient bien savoir quelle est la position officielle du troisième parti sur les soins de santé.

En septembre 1993, nous avons entendu le chef du troisième parti dire que son parti appuierait les frais modérateurs et les franchises et qu'il éliminerait l'universalité. Il a dit cela dans la revue Canadian Living. En octobre 1993, on pouvait lire dans le Toronto Star


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que le Parti réformiste était contre les soins de santé privés et les frais modérateurs. Le député de Macleod a dit à la Chambre le 17 octobre 1995 que l'assurance-maladie était mauvaise pour tout le monde. Le 23 novembre 1995, il a dit que l'assurance-maladie était importante pour tous les Canadiens.

Selon la députée, quelle est la responsabilité du gouvernement fédéral en ce qui concerne l'assurance-maladie?

Mme Hayes: Monsieur le Président, en tant que députée et en tant que personnalité publique, je dois dire que ce qui est rapporté dans les journaux, particulièrement dans certains journaux, ne traduit pas toujours fidèlement l'intention dans laquelle les choses ont été dites. Il est bon de pouvoir énoncer franchement nos positions sans avoir à craindre les déformations qui peuvent se produire dans les médias.

(1310)

Je voudrais répéter aujourd'hui ce que j'ai dit dans mon discours, soit que le Parti réformiste voudrait un régime qui garantisse à tous les Canadiens l'accès aux soins de santé nécessaires, sans tenir compte de leur capacité de payer. C'est ce que nous voulons en bout de ligne. C'est ce que nous recherchons. Notre régime actuel est en train de s'effondrer, et le gouvernement fédéral refuse de reconnaître cette réalité.

Il y a des gens qui sont en grève à cause des compressions budgétaires imposées par le gouvernement fédéral. Nous sommes d'avis que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer pour ce qui est de financer l'assurance-maladie et de veiller sur la santé des Canadiens. Le financement devrait toutefois être prévisible et constant. Il ne devrait pas être réduit constamment, comme c'est le cas actuellement, ce qui rend les provinces incapables de faire des plans et de prendre les mesures nécessaires pour offrir des soins de santé adéquats. Il devrait y avoir de la place pour des fonds fédéraux, mais ces fonds devraient être prévisibles et constants pour permettre aux provinces de planifier comment elles pourraient satisfaire les besoins de la population.

À part cela, nous croyons que le secteur des soins de santé doit faire l'objet d'un examen minutieux et de discussions avec les divers intervenants et les provinces afin que nous puissions créer un système dont tous les Canadiens pourront bénéficier non seulement aujourd'hui, mais aussi dans les années à venir. Ce n'est pas le cas dans le moment et ce ne sera pas le cas tant que nous n'ouvrirons pas la discussion avec les intervenants dans le secteur des soins de santé.

[Français]

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention l'exposé de ma collègue du Parti réformiste. Le projet de loi C-18, par ses articles 4(1) et 4(2), accorde des pouvoirs très larges au ministère pour agir dans tous les domaines liés à la promotion et au maintien de la santé de la population.

Ces deux dispositions donnent au gouvernement fédéral le pouvoir de s'ingérer dans un secteur qui est de la responsabilité exclusive des provinces. Comme tout le monde le sait, lorsque le gouvernement fédéral s'ingère dans des domaines de compétence des provinces, ça coûte très cher. C'est une source de gaspillage.

Par exemple, le Forum national sur la santé, que le gouvernement a décidé de tenir sans la participation des provinces, est une démarche inutile, puisque les provinces n'y participent pas. J'aimerais demander à ma collègue ce qu'elle pense de ces deux dispositions qui accordent un pouvoir très large. Et comme je l'ai dit, c'est une source de gaspillage qu'on ne peut pas se permettre actuellement.

[Traduction]

Mme Hayes: Monsieur le Président, le Parti réformiste est évidemment très préoccupé par la question du dédoublement des pouvoirs fédéraux et provinciaux. Nous sommes d'accord avec nos collègues du Bloc lorsqu'ils affirment qu'il est inutile de dépenser deux fois pour la même chose. Les champs de compétence fédéraux et provinciaux doivent être clairement délimités. L'examen des prévisions budgétaires de cette année, et notamment celles du ministère de la Santé que nous sommes en train d'examiner, montre qu'il y a de graves problèmes et que l'empiétement sur les champs de compétence provinciaux au nom de la santé va en s'aggravant.

(1315)

J'ai notamment constaté dans les prévisions budgétaires que le gouvernement fédéral semble s'ingérer dans l'éducation, par le biais de la santé, notamment dans le domaine de l'éducation sexuelle à des fins de protection de la santé. Le gouvernement a établi des lignes directrices qui s'appliquent de la maternelle à la douzième année.

La question soulevée par le député me préoccupe beaucoup. Je répète ce que j'ai dit dans mon intervention à propos de la responsabilité ministérielle. Le ministre est responsable quant à la question de savoir quelles mesures sont prises, comment elles vont être appliquées et qui va les payer. Je serais la première à dire, avec mon collègue, que les dépenses et les efforts résultant d'un dédoublement de services et, partant, d'un empiétement dans un champ de compétence provincial, sont injustifiés. Les députés doivent prendre au sérieux la question des limites des champs de compétence.

L'hon. Roger Simmons (Burin-Saint-Georges, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat en troisième lecture du projet de loi C-18. Ce projet de loi ne fait rien de révolutionnaire. Il fait cependant une chose très importante.

M. Thompson: C'est une mesure législative typiquement libé-rale.

M. Simmons: Comme d'habitude, mon collègue de Wild Rose est au courant.

Je l'informe ainsi que les autres députés que ce projet de loi crée le nouveau ministère de la Santé. Avec ce projet de loi et celui que nous avons examiné l'autre jour, l'ancien ministère de la Santé nationale et du Bien-être social devient le ministère de la Santé.

Ce projet de loi précise le mandat du ministre pour ce qui est de la promotion et du maintien de la santé des Canadiens. La santé est une question qui touche profondément les Canadiens. Notre régime


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d'assurance-maladie fait partie intégrante de l'idée que nous nous faisons de notre pays. Nous pensons que le gouvernement fédéral a un rôle essentiel à jouer à ce niveau ainsi qu'en ce qui concerne la protection de la santé de la population canadienne en général.

En cette période de réforme de notre système de santé, beaucoup de gens veulent savoir quelle est la position du gouvernement fédéral à l'égard de la santé. Le système de santé du Canada continuera de relever à la fois de la compétence du gouvernement fédéral et des gouvernements des provinces et des territoires. C'est pourquoi, dans le budget de mars, le gouvernement a pris pas mal de mesures et, afin d'assurer aux gouvernement des provinces et des territoires un financement stable et prévisible, il a établi au titre de la santé et des autres programmes sociaux un dispositif de financement sur cinq ans à raison de 25,1 milliard de dollars par an, composé-ainsi que l'avaient demandé les provinces-d'un transfert en espèces respectant un certain plancher et d'un transfert fiscal sous forme de points d'impôt.

(1320)

C'est sur Santé Canada que repose la responsabilité de protéger et de promouvoir la santé et la sécurité des Canadiens au moyen de mesures nationales de promotion et de prévention. Le ministère est chargé d'évaluer l'inocuité des médicaments et des instruments médicaux. Il traite de questions comme l'impact potentiel sur les Canadiens de virus exotiques ou de la réapparition de menaces que constituent pour la santé publique des maladies comme la tuberculose. Il encourage un mode de vie actif et plus sain.

Le ministère fédéral de la Santé appuie aussi le système de santé grâce au financement de la recherche et aux contributions financières et techniques qu'il fait aux systèmes de santé provinciaux. Il organise des programmes et des services à l'intention exclusive de certaines catégories ou de certains groupes de gens qui relèvent de la responsabilité du gouvernement fédéral, comme les Indiens inscrits et les membres des Forces canadiennes. Il ne s'occupe pas par contre de la distribution des soins. Celle-ci relève de la compétence des gouvernements des territoires et des provinces qui ont dans ce domaine une responsabilité primordiale. Ce sont les gouvernements des provinces et des territoires qui conçoivent et administrent le système auquel font appel la plupart des Canadiens. Cependant, au plan national, le gouvernement fédéral joue dans le domaine de la santé un rôle que les Canadiens estiment essentiel.

Les questions de santé occupaient aux dernières élections une place très importante dans le livre rouge du Parti libéral. Par exemple, nous avons promis la mise en place d'un programme d'aide préscolaire à l'intention des enfants des familles autochtones qui vivent dans les centres urbains et les grandes communautés du nord. Nous avons déjà financé un certain nombre de projets dans le cadre de ce programme.

Nous avons aussi promis dans le livre rouge des programmes prénataux de nutrition. Nous avons maintenant commencé à les offrir au public par l'intermédiaire du Programme d'action communautaire pour les enfants.

Le gouvernement donne également suite à d'autres engagements, mais j'en parlerai un peu plus tard. Ce qu'il y a de commun à toutes ces initiatives, c'est leur portée nationale et leur importance à l'échelle du pays.

Ce travail nécessite aussi, bien sûr, qu'on verse du financement aux provinces et aux territoires pour leur système de santé, comme je le disais il y a un moment.

Au cours des quatre dernières décennies, la forme des contributions fédérales aux services de santé a changé, passant des ententes de partage des coûts aux transferts de financement global aux provinces et aux territoires. Depuis 1984, Loi canadienne sur la santé fixe les cinq critères que doivent respecter les régimes d'assurance-maladie provinciaux et territoriaux pour être admissibles au financement fédéral.

Il vaut la peine que je rappelle ces cinq critères ici aujourd'hui. Le premier, c'est le principe de l'universalité. La Loi canadienne sur la santé appuie les régimes d'assurance-maladie provinciaux qui assurent tous les habitants admissibles.

Le deuxième principe, c'est l'accessibilité. Les services doivent être offerts sans que des charges financières n'empêchent les bénéficiaires d'y avoir accès librement. Les soins doivent être administrés en fonction des besoins, et non selon ce que les gens peuvent payer.

Le troisième principe important, c'est l'intégralité. Si une province établit qu'un service est médicalement nécessaire, ce service doit être entièrement couvert.

Le quatrième principe, c'est la transférabilité. Les Canadiens admissibles à l'assurance-maladie dans leur province ou leur territoire conservent cette couverture quand ils voyagent ou déménagent. C'est un principe très important, autant que les autres, compte tenu de la mobilité actuelle de la population de notre pays, du nombre de Canadiens qui passent d'un champ de compétence à un autre, d'une province à une autre ou d'une province à un territoire.

Le cinquième principe s'ajoute aux quatre que je viens de mentionner, soi l'universalité, l'accessibilité, la globalité et la transférabilité, et c'est la gestion publique. Cela signifie que les régimes d'assurance-maladie des provinces doivent être gérés sans but lucratif par une autorité publique. Il me semble que certaines provinces ont du mal à comprendre ou à accepter ce principe. La gestion publique est l'un des cinq principes que nous, de ce côté de la Chambre, nous sommes engagés à faire respecter.

(1325)

Le gouvernement prend ces cinq principes très au sérieux. Il a résisté à ceux qui prétendaient que la seule façon de progresser était d'affaiblir la loi. Les Canadiens veulent que soit maintenu le régime d'assurance-maladie qu'ils ont bâti. Ils ne veulent pas d'un régime à deux vitesses et je ne le veux pas non plus.

Les Canadiens comprennent que l'assurance-maladie a toujours constitué un avantage social remarquable. C'est un régime efficace et efficient pour les intervenants, les hôpitaux et les Canadiens. En


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fait, le Canadien moyen connaît la fiabilité de ce régime mieux que certains commentateurs. Nous sommes en meilleure santé grâce à notre régime d'assurance-maladie. Voilà pourquoi le gouvernement fédéral le défend si ardemment.

Le gouvernement a aussi affirmé clairement que le système devait être révisé. Les Canadiens connaissent les difficultés économiques du système de santé. D'ailleurs, elles sont les mêmes aux États-Unis et dans les autres pays développés. De nombreux pays connaissent des problèmes tels que l'augmentation du coût des soins, l'émergence de nouveaux besoins, le vieillissement des populations, l'apparition de nouvelles technologies médicales, de nouveaux médicaments et de certains autres facteurs. Nous nous demandons tous où va l'argent.

Le Canada est aussi confronté à d'autres défis en matière de santé. Par exemple, tous les Canadiens s'entendent sur l'importance des effets du tabac sur la santé. La Cour suprême du Canada affirme que, dans ce pays, la consommation de tabac cause près de 40 000 décès par an. Fumer est un exercice coûteux pour l'économie canadienne. On estime qu'il en coûte 11 milliards de dollars en soins de santé et en productivité perdue.

Le gouvernement fédéral est déterminé à travailler de concert avec ses homologues provinciaux en vue de l'adoption d'un ensemble de mesures globales pour s'attaquer au problème de la consommation de tabac.

J'ai mentionné la consommation de tabac, mais il y a d'autres problèmes comme, par exemple, celui de la santé des femmes. C'est une priorité importante pour le gouvernement et je suis sûr que ça l'est également pour les gouvernements provinciaux et autres intervenants. Il est temps de régler certaines questions clés touchant à la santé des femmes.

Citons la question des nouvelles techniques de reproduction. Ceux qui ont suivi ce dossier se souviennent que le gouvernement précédent avait constitué une commission royale d'enquête sur les nouvelles techniques de reproduction qui a fait de nombreuses recommandations. Ces dernières font maintenant l'objet d'une étude de la part du gouvernement qui espère pouvoir donner suite à un certain nombre d'entre elles. Les députés de tous les bords réclament des mesures concrètes en ce qui concerne les nouvelles techniques de reproduction, la santé des femmes, le tabac. Pressé d'agir de tous côtés, le gouvernement va de l'avant.

Il nous faut d'abord réfléchir à ce qu'il va advenir du système de soins de santé. Nous savons qu'investir davantage pour maintenir le statu quo n'est pas une possibilité et que, de toutes façons, cela ne nous donnerait pas de meilleurs résultats qu'à l'heure actuelle.

Le constat, à l'échelle internationale, est qu'investir davantage dans les soins de santé n'est pas en soi une garantie de l'amélioration de l'état de santé. Pourquoi? Parce que les soins de santé et la santé sont deux choses différentes, contrairement à ce que pensent bien des gens.

(1330)

La santé d'une personne dépend de nombreux facteurs, qui existent bien avant qu'elle ne voie un médecin ou ne soit admis à l'hôpital. Certains sont aussi fondamentaux que le patrimoine génétique. D'autres touchent les conditions économiques, sociales ou environnementales dans lesquelles la personne vit. D'autres encore résultent de choix dans le mode de vie. Tout cela, ce sont des déterminants de la santé.

Les progrès en matière de santé doivent peut-être beaucoup plus au fait de vivre dans une économie qui produit de bons emplois et de bons programmes, lesquels permettent aux gens de vivre dans un logement décent situé dans un environnement sain. Il y a des raisons pour nous d'investir dans des mesures de protection et de promotion de la santé efficaces, des raisons qui aideront les gens à faire des choix de mode de vie plus éclairés.

Les soins ne sont pas tout, mais ils sont importants. Notre question, c'est comment atteindre les meilleurs résultats possibles avec l'argent que nous avons. Ce processus de renouvellement est en cours depuis quelques années, maintenant. Le défi pour nous tous est d'échapper au mode de pensée traditionnel, d'accepter le changement. Les centres de services de santé communautaires et les équipes multidisciplinaires modifient le paysage de la prestation des services de santé.

Nous sommes de plus en plus conscients du fait qu'une bonne santé commence bien avant la visite chez le médecin et cela signifie qu'il faut accorder une importance accrue à l'éducation du consommateur et à la médecine préventive. Il faut que les gens sachent ce dont le médecin est capable et ce qui est au-delà de ses pouvoirs. Les gens ont besoin d'apprendre comment prendre soin d'eux-mêmes. Tout cela fait partie d'une évolution importante de notre régime de soins de santé.

Les Canadiens font confiance au système. Ils espèrent que le gouvernement fédéral continuera à l'appuyer et à le défendre, en particulier les principes fondamentaux sur lesquels l'assurance-santé est basée. C'est pourquoi nous avons besoin d'un ministère de la Santé fédéral fort et c'est pourquoi j'encourage les députés à appuyer ce projet de loi.

J'ai mentionné il y a un moment la question des déterminants de la santé. Au comité permanent de la santé, que j'ai l'honneur de présider, nous étudions actuellement ces déterminants tels qu'ils s'appliquent aux jeunes enfants. C'est une question importante.

Dans cette Chambre et ailleurs, tout le monde est conscient du fait que la pauvreté, par exemple, est un déterminant réel de la santé des gens. Nous avons des corrélations directes entre le niveau de pauvreté et le taux de suicide, par exemple. La pauvreté et les réalisations scolaires sont étroitement liées. Au comité de la santé, un comité ou sont représentés tous les partis de la Chambre, nous avons entrepris une étude en profondeur de la question pour voir ce qu'il faudrait faire, qui ne soit pas fait actuellement, dans le domaine de la santé des enfants.

Le projet de loi C-18 n'est pas quelque chose qui va révolutionner le monde. Toutefois, c'est une mesure législative importante. Dans le jargon de la Chambre, c'est considéré seulement comme un projet de loi technique qui met en place la loi nécessaire pour permettre au ministère de fonctionner.


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Je suis assez content que l'actuel ministre de la Santé soit mon bon ami du Cap-Breton. Déjà, pendant le peu de temps qu'il a occupé le portefeuille, j'ai constaté avec satisfaction qu'il s'était montré résolu à faire face aux défis importants que nous connaissons dans le domaine des soins et déterminé à faire quelque chose à ce sujet. C'est un excellent porte-parole pour les problèmes que nous avons. Je lui souhaite certainement beaucoup de succès ainsi qu'au secrétaire parlementaire, le député d'Eglinton, qui vient de prendre ses nouvelles responsabilités.

(1335)

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, à première vue, le projet de loi vise à créer le ministère de la Santé et on se dit que c'est un projet de loi routinier, qu'il est tout à fait normal puisqu'il y avait antérieurement un ministère qui s'occupait des affaires sociales, du bien-être social, de ce genre d'aspects. On peut aussi se dire qu'il y avait déjà une action dans ce domaine au fédéral et qu'il ne s'agit probablement que d'une mise à jour.

Mais c'est aussi l'occasion de regarder ce que le gouvernement fédéral a à faire et ce qu'il a comme responsabilité dans le secteur de la santé. Pour cela, il faut se souvenir d'où vient notre système de santé. Il faut voir que dans les années passées, à cause de son pouvoir de dépenser, le gouvernement fédéral a contribué à développer des programmes qu'on ne peut pas nier, mais qui ont souvent été menés en parallèle avec les gouvernements provinciaux.

Aujourd'hui, les années de vaches grasses sont terminées et on est devant une situation complètement différente. Le gouvernement fédéral investit de moins en moins d'argent dans la santé, ça se compte en milliards de dollars, mais il s'obstine à maintenir les normes nationales. Il veut absolument que les règles soient les mêmes à travers le Canada.

La façon que le gouvernement a trouvée pour s'en assurer est par la création de ce ministère, par la Loi sur la santé qui détermine ces normes. Mais c'est comme toute autre réalité: on ne peut pas maintenir une réalité si les sommes ne l'accompagnent pas et s'il n'y a pas moyen de les organiser en conséquence pour que cela puisse être efficace.

Je pense que le plus bel exemple du type d'intervention du fédéral qui est très inapproprié dans ce secteur est la création du Forum national sur la santé. Qu'est-ce que le Forum national sur la santé? C'est un regroupement de spécialistes que le gouvernement fédéral a nommés pour remplir le mandat suivant, c'est-à-dire améliorer la santé de la population canadienne, accroître l'efficience et l'efficacité des services de santé et formuler des recommandations en ce sens à l'intention du gouvernement. C'est un forum doté d'un budget de plusieurs millions de dollars.

Là où le bât blesse, c'est que ce forum s'occupe d'un champ de juridiction de nature provinciale, parce qu'au Canada, ce sont les provinces qui ont la responsabilité de la gestion courante de la santé. Quand il y a des problèmes dans un hôpital, quand il y a un problème dans un CLSC, quand il y a un problème de santé de quel qu'ordre que ce soit, c'est le gouvernement provincial qui en est responsable, c'est là que le citoyen a à poser des questions et à vérifier pourquoi ça ne fonctionne pas ou à applaudir quand ça fonctionne bien.

Le gouvernement fédéral, lui, se donne le droit d'intervenir dans ce secteur en donnant au forum le mandat d'améliorer la santé de la population canadienne-c'est très général-et d'accroître l'efficience et l'efficacité des services de santé. Le malheur, c'est que les provinces n'ont pas été invitées à participer à ce forum en tant que membres à part entière. Comment peut-on aujourd'hui, au Canada, faire une évaluation sur la qualité de la santé de la population canadienne sans permettre aux acteurs principaux d'être sur le terrain et de dire ce qu'ils ont à dire là-dessus? C'est un forum qui, d'ailleurs, a un budget de plusieurs millions de dollars. Aujourd'hui, quand on voit les difficultés de financement des systèmes de santé où que ce soit au Canada, on peut se dire que ces millions de dollars auraient pu être très bien utilisés autrement.

Je sais très bien que dans ma région, si on avait eu une infime partie de ces sous, on aurait très bien su où les placer. Dans un système où on est obligé de reconfigurer le réseau, de faire des transformations sur le nombre de lits pour les personnes âgées, quand on est obligé de transformer les hôpitaux, s'il y avait des sous de disponibles, si le gouvernement fédéral s'était retiré de ce champ, du secteur de la santé, et avait permis aux provinces, dont le Québec, d'y intervenir sans ajouter au poids sur le contribuable, des solutions intéressantes auraient sûrement pu être mises de l'avant.

Qu'est-ce qui fait que le gouvernement fédéral s'obstine à intervenir dans ce champ même s'il n'a plus les sous pour le faire? On peut se le demander, mais on peut aussi y répondre en partie par tout l'impact important chez le citoyen de la question de la santé. C'est sûr qu'un gouvernement ayant un pouvoir de dépenser «at large», sans limite autre que sa capacité d'emprunter, peut être très tenté d'aller dans des champs d'action qui peuvent être intéressants sur le plan électoral, qui, au niveau de l'image du gouvernement, peuvent être intéressants, mais qui, en résumé, ne sont pas de ses affaires.

Par exemple, le fédéral a une stratégie pour l'intégration nationale des handicapés, alors que le Québec a aussi l'Office des personnes handicapées du Québec. Donc, dédoublement automatique, parce qu'on ne peut pas intervenir dans un tel champ sans qu'une partie du budget serve à l'administration. Si les sous rendus disponibles pour la stratégie pour l'intégration des handicapés avaient été versés aux provinces, normalement, tout l'argent aurait pu aller directement vers la clientèle, parce que les frais administratifs sont déjà assumés en très large partie par l'appareil bureaucratique existant.

(1340)

On a aussi en même temps une politique fédérale de lutte contre la violence, une politique antidrogue, une stratégie contre le sida, le bureau de l'enfance, une strataégie sur le tabagisme, tous des secteurs d'activités dans lesquels les gouvernements provinciaux interviennent en parallèle. Ce sont toutes des places où, si on ne veut pas qu'il y ait de l'intervention en parallèle, il faut qu'il y ait concertation entre les deux paliers de gouvernement. Ça prend des comités bipartites de fonctionnaires, toutes des choses qui occasionnent des frais d'opération, mais qui ne sont pas des services directs aux clients.


1756

Cette réalité est importante aujourd'hui parce que ce que le citoyen se demande ces années-ci, c'est comment il se fait que l'appareil coûte si cher à opérer. Est-ce que ce sont les médecins qui gagnent trop, est-ce le personnel en soins infirmiers, est-ce que ce sont les préposés aux services dans les hôpitaux, parce que ce sont eux qu'on voit en première ligne, ou est-ce qu'il n'y a pas plutôt des économies certaines à faire du côté de l'appareil administratif derrière cette action?

Quand on a un gouvernement fédéral qui intervient exactement dans les mêmes secteurs que les gouvernements provinciaux, il y a une question à se poser à savoir qui, selon la Constitution, est responsable de ces secteurs. C'est clairement indiqué pour ce qui est de la santé que ce sont les provinces qui en sont responsables. Donc, sous le couvert d'un projet de loi anodin, le gouvernement fédéral vient se mêler des affaires des provinces. Dans ce sens là, il ne remplit pas le rôle pour lequel il a été créé, il continue d'intervenir dans un secteur où il n'a pas nécessairement affaire et peut même en venir à avoir des actions contradictoires avec les milieux dans lesquels il intervient.

Il y a un côté aussi qui est plus tendancieux, dans un certain sens, c'est l'intervention du gouvernement fédéral sur l'imposition des normes nationales. Cela laisse le rôle plus négatif aux provinces. Les provinces qui sont prises avec des contraintes budgétaires, qui ont à faire des choix, qui ont à tenir compte de l'évolution de la population, du vieillissement de la population, ont le client devant elles. Il faut que des choix soient faits en fonction des services directs à la clientèle et les provinces n'ont pas présentement la marge de manoeuvre qu'elles pourraient avoir ou qu'elles pourraient choisir d'avoir pour leurs concitoyens parce que c'est un autre gouvernement qui a le pouvoir de dépenser dans ce secteur et qui le fait de façon interposée.

On est aussi devant une situation qui est un peu aberrante. Comme dans les décennies passées il y a eu beaucoup d'argent mis par le gouvernement fédéral dans ce secteur, on a mis sur pied les programmes et aujourd'hui, on n'a plus nécessairement les moyens d'assumer le financement de ces programmes. Mais le gouvernement fédéral ne voudrait pas d'aucune façon dire que c'est à cause de l'argent de moins versé aux provinces qu'on ne peut plus assurer les services.

On se cache derrière le fait qu'il y a des normes nationales qui doivent être respectées à la grandeur du Canada et c'est aux provinces de se débrouiller pour les faire respecter. Cela nous place dans des situations qui peuvent être, à l'occasion, très aberrantes où en même temps, on n'a pas de sous d'un côté et de l'autre, on se rend compte qu'il y a des dépenses dans d'autres secteurs qui pourraient être comprimées et qui ne le sont pas.

Imaginez un gouvernement fédéral qui n'interviendrait que dans les champs d'activités dont il a la responsabilité. Imaginez toute la marge de ponctions fiscales que ça laisserait aux provinces pour s'occuper de leurs champs de juridiction. Le gouvernement fédéral, à ce moment-là, n'aurait plus qu'à s'occuper très directement de ses responsabilités.

Dans une situation comme celle-là, des coupures à la défense nationale par le gouvernement fédéral pourrait aller dans le sens de leurs responsabilités, mais le fait de se retirer d'un programme comme celui de la santé serait aussi une façon de diminuer la taille du gouvernement fédéral. On parle de dépenses de l'ordre de un milliard de dollars dans le domaine de la santé dans un champ de juridiction qui n'est pas de sa responsabilité.

Je répète un peu les secteurs d'activités dans lesquels on intervient. Pour étayer un peu mon propos, quand on parle de la lutte contre la violence familiale, vous savez que la violence familiale est un phénomène qui résulte d'un ensemble de situations. Le gouvernement du Québec, entre autres, a mis en place des politiques d'action à ce sujet et il n'y a pas nécessairement de concordance avec l'action du fédéral, alors qu'il y aurait des choses à améliorer dans ce domaine.

La position que le Bloc québécois défend dans ce dossier n'est pas nécessairement exclusivement celle des souverainistes du Québec, des indépendantistes qui ont toujours le même discours.

(1345)

À titre d'exemple, je vais vous citer Mme Lucienne Robillard, qui est maintenant ministre dans le gouvernement fédéral, alors qu'elle était ministre de la Santé du Québec. Le 27 septembre 1994, elle affirmait au quotidien La Presse, et je cite: «La conduite du gouvernement fédéral est aberrante. Comment peut-on envisager une révision du régime de santé sans la participation des provinces qui sont responsables, elles, de la livraison des services? Ce n'est tout simplement pas acceptable.»

Je pense que c'est un témoignage qui parle de lui-même. Cette ministre-là, qui était ministre d'un gouvernement provincial libéral, un gouvernement provincial fédéraliste, tenait ces propos-là en ce qui concerne le Forum sur la santé, le 27 septembre 1994.

Un autre témoignage du même type, celui de Mme Thérèse Lavoix-Roux, une sénatrice, qui affirmait au Sénat, le 31 mai 1994, que le gouvernement faisait fausse route en négligeant le rôle des provinces. Finalement, elle pose les questions, et je la cite: «Les provinces ne sont-elles pas les grands acteurs du domaine de la santé? Pourquoi n'ont-elles pas été invitées à participer au Forum sur la santé? Le leader du gouvernement trouve-t-il indiqué que le gouvernement agisse unilatéralement à l'égard d'une question de compétence provinciale?»

Il faut rappeler un peu comment a fonctionné la création du Forum sur la santé. Le premier ministre a invité les provinces à assister à la création de ce Forum. Il faut le faire. Dans un secteur qui est la responsabilité des provinces, on leur donnait la chaise dans la deuxième rangée, celle qui permet d'écouter mais qui ne permet pas de dire des choses, de faire des suggestions d'amélioration. Il y avait peut-être un danger. Peut-être que les provinces se seraient mises à faire des suggestions. Peut-être que les provinces auraient pu faire front commun et dire que la meilleure façon serait que le gouvernement fédéral se retire de ce secteur et rende les sommes disponibles pour que les provinces puissent les utiliser elles-mêmes.

Malgré l'opposition des provinces, malgré l'opposition par exemple de la sénatrice, malgré les dépositions qui ont été faites dans tout le Canada, le gouvernement fédéral a décidé de continuer, d'aller de l'avant avec son projet, de créer le Forum sur la santé pour remplir exclusivement la promesse électorale qui avait été faite.


1757

L'efficacité de ce Forum: est-ce qu'il y a beaucoup de gens qui jusqu'ici ont vu des solutions concrètes apportées par le Forum sur la santé? Est-ce que les millions de dollars qui ont été dépensés dans ce secteur servent effectivement à améliorer la santé des Canadiens, comme le veut le mandat donné par le gouvernement fédéral?

Qu'est-ce qu'on pourrait ajouter pour bien spécifier que le gouvernement fédéral est dans un champ d'action où il n'a pas nécessairement affaire? Dans le projet de loi, il a indiqué qu'il ne pouvait pas intervenir dans les secteurs déjà régis par les organismes de santé. Dans ce même projet de loi, il nomme les organismes de santé comme étant des intervenants que le gouvernement fédéral peut avoir.

Dans le dernier budget, le gouvernement a décidé de créer un centre de recherche dans ce domaine. Évidemment c'est encore un exemple que, à première vue, on ne peut qu'applaudir. On nous dit que faire de la recherche dans le domaine de la santé c'est vraiment très important, cela va permettre de développer de nouveaux produits pharmaceutiques, de donner une chance aux gens d'avoir une meilleure santé.

Mais quand on regarde, quand on creuse un peu, on voit que le même type de mandat est donné dans les provinces. Il y a de l'argent qui sera dépensé en double à une période où on n'a plus vraiment les moyens de faire ce genre d'action.

Quand on nous demande où couper et qu'on répond: dans les dédoublements, il faut voir que la santé est un exemple, un exemple patent, qui parle de lui-même et qui nous dit qu'il faudrait pouvoir obtenir du gouvernement fédéral qu'il se retire de ce secteur. Avant d'adopter un projet de loi qui crée le ministère tel qu'il a été créé, avant qu'on permette, comme à l'article 4, de donner un pouvoir d'intervention très large, il faut qu'on puisse s'interroger sur la portée réelle de cet article.

L'article 4 parle des attributions du ministre en matière de santé, dont:

a) la promotion et le maintien du bien-être physique, mental et social de la population;
Je pense qu'il y a des ministres provinciaux de la Santé qui doivent se demander qui est responsable de quoi lorsqu'on lit un article comme celui-là.

L'alinéa 4(2)b) dit:

b) la protection de la population contre la propagation de la maladie et les risques pour la santé;
(1350)

Dans ce cas-là, le gouvernement fédéral pourra toujours invoquer l'intérêt national et le pouvoir fédéral lié à la paix, à l'ordre et au bon gouvernement pour intervenir afin d'assurer la protection de la santé et la sécurité de la population.

Ce principe-là du bon gouvernement est intéressant mais, en même temps, il laisse place à des abus. Il aurait peut-être fallu que ce projet de loi soit mieux encadré, mieux défini, de telle façon qu'on dise clairement où le gouvernement fédéral a le droit d'intervenir et que ce soit limité à ces champs d'action.

Par exemple, quand on parle des services de santé aux autochtones, on comprend qu'il y a un lien juridique dans la Constitution qui permet de préciser des choses de ce type. Mais quand on parle d'intervention sur la santé en général des gens et qu'on se rend compte qu'au niveau de la Constitution cette responsabilité est de nature provinciale, on peut douter du bien-fondé de continuer à faire des interventions dans le secteur.

D'ailleurs, s'il n'y avait pas eu, au début, dans les années 1960 et 1970, la possibilité d'utiliser le pouvoir de dépenser, donc de taxer les citoyens et de leur redonner des services pour assurer une visibilité au gouvernement fédéral, on n'est pas certain qu'il y aurait eu ce type d'intervention.

Le gouvernement fédéral s'est rendu compte, après la Seconde Guerre mondiale, qu'avec le pouvoir de taxation qu'il avait accru par l'impôt sur le revenu, du pouvoir politique fantastique qu'il y avait derrière ce moyen financier et il a décidé d'essayer de mettre en place un système pancanadien universel, qui donne les mêmes services à la grandeur du Canada. La réalité, elle, c'est qu'à l'intérieur du Canada il y a des régions différentes et qu'il y a, dans le double palier de gouvernement, des possibilités où les gouvernements peuvent faire, et à la demande de leurs citoyens, des choix différents de ceux qui sont faits dans une autre province.

Dans le fond, le contrôle que le gouvernement fédéral s'est donné par l'imposition des normes nationales de santé lui permet tout simplement d'essayer d'imposer à tous les gouvernements provinciaux le même comportement, ce qui n'est pas nécessairement de bon aloi. Si les Québécois, si les Canadiens avaient voulu que ce type de chose se produise, eh bien ils se seraient organisés pour que, dans les pouvoirs de la Constitution, la responsabilité soit clairement indiquée au gouvernement fédéral, et ce n'est pas le cas; ce n'est pas ce qui apparaît sur le plan constitutionnel.

Beaucoup de personnes sont touchées par les programmes fédéraux et qui sont toujours devant la même réalité. Prenons par exemple le Programme nouveaux horizons. Ce programme a changé de vocation d'année en année, au bon gré des gouvernements qui passaient. Il y a des années où on a, avec ça, fait toutes sortes d'achats qui ont permis à des clubs de l'âge d'or de différentes municipalités d'obtenir des équipements qui leur servent et qui sont utiles. Soudainement, l'année passée, le programme a changé d'orientation complètement, et on n'a pas nécessairement vu le lien entre le changement d'orientation et les besoins du milieu.

Aujourd'hui le Programme nouveaux horizons vise des clientèles spécifiques qui seraient en situation de difficulté. Je ne sais pas si vous voyez le lien qu'il y a directement avec l'application locale des politiques de CLSC. Les centres locaux de services communautaires qui ont des mandats d'intervention vis-à-vis des personnes âgées qui n'ont pas les moyens financiers qui sont donnés par des programmes comme le Programme nouveaux horizons voient là en parallèle, soudainement, une intervention du fédéral qui peut souvent aller à l'encontre des actions qu'ils ont eux-mêmes prises. Il y a des champs d'activité où l'action du gouvernement fédéral peut entrer directement en contradiction avec l'action des provinces et il est très difficile de comprendre exactement l'objectif du gouvernement fédéral face à cela.

Il y a d'autres champs d'action. Par exemple, parlons de la lutte contre le sida et de la lutte antidrogue. Il y a eu des choix différents selon les gouvernements dans le passé. Il peut y avoir un gouverne-

1758

ment fédéral qui préfère une approche plus punitive. Il peut y avoir un gouvernement provincial qui préfère une attitude qui amènera des corrections de comportement. Par exemple, on a vu cela au sujet des jeunes contrevenants, où les gouvernements provinciaux ont eu des attitudes-le gouvernement du Québec, entre autres-de mettre en place des systèmes telle la Direction de la protection de la jeunesse, différents secteurs où on a amené, au Québec, une diminution importante de la criminalité. Et c'est lié directement à la question de la santé.

Si le gouvernement fédéral, lui, choisit une action complètement divergente, à ce moment-là on ne rend pas service aux citoyens et on ne permet pas que les services soient les plus efficaces possible.

(1355)

En conclusion, devant ces années au cours desquelles les sous seront de plus en plus rares, il est nécessaire de faire de très bons choix, et je pense que le gouvernement fédéral, avant de créer un ministère comme celui de la Santé pour intervenir dans des champs de juridiction provinciale, aurait intérêt à regarder s'il ne serait pas préférable de se retirer de ce champ d'action, de rendre l'argent disponible aux provinces afin que chacune des provinces puisse mener les programmes adéquats qui correspondent à sa population.

Une province ayant une très vaste répartition des gens sur son territoire, beaucoup de gens dans les milieux ruraux, peut faire des choix en termes de santé qui sont très différents d'une province où il y a de très grandes agglomérations urbaines. Essayer d'appliquer les mêmes critères à l'un et à l'autre milieu n'est pas nécessairement un choix intéressant.

C'est aussi lié très directement au choix du mode de développement qu'on veut dans une province et aux autres politiques d'intervention. Pour s'en rendre compte, la santé ne repose pas sur rien, ça ne repose pas simplement sur une dépense en produits pharmaceutiques. C'est le résultat d'une société, des différentes interventions dans cette société.

Je pense que l'action du gouvernement fédéral dans le domaine de la santé, dans les années passées, à cause de la quantité d'argent disponible, a permis de mettre en place des programmes intéressants, mais on se rend compte aujourd'hui que de vouloir en même temps avoir des normes nationales très sévères, très relevées et en même temps ne plus donner les sous aux provinces pour assurer la réalisation de ces programmes, cela place le citoyen devant un choix qui n'est pas très clair, parce que le gouvernement fédéral sera évalué sur les programmes qu'il met en place.

Les citoyens exercent des pressions pour mettre en place des programmes, par exemple, contre la violence familiale, à cause de sa capacité de dépenser, mais le gouvernement provincial qui, lui, a la responsabilité de ce secteur, ne peut pas se le permettre parce qu'on ne lui donne pas les moyens. Le contribuable ne peut pas être mis plus à contribution en termes d'impôt qu'il a à payer. Donc, tout cela, en bout de ligne, fait qu'on a un système où les citoyens ne peuvent pas bien évaluer leurs services de santé. Ils ont tendance à juger le gouvernement de première ligne, alors que souvent, les coupures faites sur ce régime de première ligne, ce système de première ligne, sont dues au fait que l'autre gouvernement qui continue de cueillir des impôts ne rend pas les services qui sont attendus en conséquence.

[Traduction]

Le Président: Chers collègues, comme il est presque 14 heures, nous passons maintenant aux déclarations de députés. Je vois que le député de Calgary-Centre a bien hâte de prendre la parole, il sera le premier à parler quand nous reprendrons le débat.

______________________________________________


1758

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES PRIX D'EXCELLENCE DU RÉSEAU YTV

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui afin de rendre hommage à 36 jeunes Canadiens qui sont les gagnants des prix d'excellence décernés pour la septième année consécutive par le réseau YTV. Je leur souhaite la bienvenue dans la région de la capitale nationale.

Ces jeunes talents ont été sélectionnés parmi 1 500 candidats de tout le pays. Chacun d'eux aurait bien des choses à raconter. Certains ont été récompensés pour leur bravoure, d'autres pour les services qu'ils ont rendus à la communauté et même pour leur esprit d'entreprise. Il y a parmi eux des écrivains, des artistes en art visuel, des danseurs, des musiciens, des chanteurs, des comédiens, des athlètes, mais tous se sont vu décerner par le réseau YTV des prix d'excellence en reconnaissance de ces talents.

En ma qualité de parlementaire représentant la Saskatchewan, je tiens à féliciter tous ces jeunes Canadiens, et notamment M. Shane Cuddington, âgé de 17 ans, de Manor, en Saskatchewan, un électeur de mon ami et collègue de Souris-Moose Mountain.

Shane a été récompensé pour les talents d'entrepreneur dont il a fait preuve en montant une entreprise paysagiste qui offre des services de plus en plus nombreux et spécialisés à quelque 200 clients.

Shane sera parmi les gagnants qui se verront attribuer des prix d'excellence dans le cadre d'une émission spéciale transmise en direct par le réseau YTV.

* * *

[Français]

LE GROUPE MUSICAL CHAVIGNY JAZZ V

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, à titre de député de Trois-Rivières, je veux rendre hommage au groupe musical Chavigny Jazz V de l'école secondaire Chavigny de Trois-Rivières-Ouest qui, en mars dernier, accumulait les honneurs au All American Music Festival, une compétition nord-américaine qui se tenait à Orlando en Floride et qui regroupait une vingtaine de groupes musicaux.

Ce groupe s'est classé au premier rang de la catégorie Jazz Band et a récolté le premier prix toutes catégories. Pour sa part, la directrice musicale du groupe, Mme Michelle Bourassa, s'est vu décerner le titre de meilleure directrice musicale.

(1400)

Ces succès surviennent après cinq années d'efforts au cours desquelles le Chavigny Jazz V a remporté la palme de façon constante sur la scène québécoise.


1759

Félicitations aux 20 membres du groupe, à Mme Bourassa et aux parents bénévoles qui ont contribué à ce grand succès qui fait honneur à tous les Québécois et à toutes les Québécoises.

* * *

[Traduction]

LES ESPÈCES MENACÉES D'EXTINCTION

M. Paul E. Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, l'année dernière, la vice-première ministre a proposé une loi concernant la protection des espèces menacées d'extinction. Elle a prétendu qu'elle allait empêcher que les espèces canadiennes ne disparaissent. Le problème, c'est que la proposition ne portait que sur 4 p. 100 de toutes les terres du Canada et qu'elle ne touchait pas l'aspect le plus important, l'habitat des espèces. La protection de cet habitat doit être la pierre angulaire de toute loi sur les espèces menacées d'extinction. C'est incontournable.

Jeudi dernier, on a ajouté 16 nouvelles espèces à la liste croissante des espèces menacées au Canada. Le nouveau ministre de l'Environnement veut nous faire croire que son gouvernement souhaite parvenir à un développement durable, mais ses paroles n'ont aucune portée, à moins qu'il ne puisse garantir aux Canadiens qu'une nouvelle Loi sur la protection des espèces menacées d'extinction empêchera que d'autres espèces ne disparaissent.

C'est aujourd'hui le Jour de la terre, une journée proposée au départ par l'environnementaliste John McConnell qui a déclaré qu'une journée de ce genre était nécessaire pour célébrer les merveilles de la vie sur notre planète.

Le ministre devrait prendre les mesures qui s'imposent pour préserver les nombreuses merveilles de la vie qu'on retrouve au Canada.

* * *

LE JOUR DE LA TERRE

M. John Maloney (Erie, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui, les Canadiens célèbrent le Jour de la terre en plantant des arbres et en tenant diverses activités environnementales dans tout notre immense pays. Plus que jamais, nous devons, à titre personnel et en tant que pays assumer la responsabilité de préserver notre planète pour les générations futures.

Permettez-moi de présenter la liste des mesures essentielles à prendre pour la circonscription d'Erie que je représente. Nous devons travailler ensemble pour empêcher que les produits toxiques ne polluent notre air, notre sol et notre eau et pour éliminer toute pollution de n'importe quelle nature ailleurs. Il faut protéger les habitats marins et les stocks de poisson. On doit exploiter nos forêts prudemment en prenant soin de maintenir les peuplements vieux. Il s'agit d'extraire nos ressources minérales avec un minimum d'effets sur notre écosystème fragile. On doit prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les plantes et les animaux menacés d'extinction. Nous devons utiliser nos ressources énergétiques de façon judicieuse et efficiente. Enfin, nous devons contribuer à un plan international pour réduire le réchauffement du globe.

Nous avons tant à faire et si peu de temps. J'exhorte tous les Canadiens à faire de tous les jours le Jour de la terre.

LA COMMISSION DE LA VÉRITÉ ET DE LA RÉCONCILIATION

M. Elijah Harper (Churchill, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, l'archevêque Desmond Tutu a ouvert les audiences de la Commission de la vérité et de la réconciliation, dont le mandat découle du projet de loi sur la promotion de l'unité nationale et de la réconciliation qu'a présenté le gouvernement démocratique de l'Afrique du Sud, dirigé par le président Nelson Mandela.

La Commission de la vérité et de la réconciliation a pour objectif d'examiner les violations flagrantes des droits de la personne et les atrocités commises dans ce pays, non pas par soif de vengeance, mais pour chercher la vérité, le pardon et la réconciliation. La tâche n'est pas facile, comme l'ont montré les témoignages pénibles au sujet d'actes de torture et d'abus que la commission a entendus la semaine dernière.

Le mois dernier, j'ai eu l'honneur de rencontrer l'archevêque Tutu au Cap. Je lui ai présenté l'énoncé de principes et de priorités et la proclamation de réconciliation qu'a adoptés l'Assemblée sacrée qui s'est réunie en décembre dernier à Hull, au Québec.

J'espère que tous les Canadiens seront inspirés par cet exemple de courage du peuple sud-africain.

* * *

LA TORNADE

M. Ovid L. Jackson (Bruce-Grey, Lib.): Monsieur le Président, samedi, le 20 avril, une tornade a balayé ma circonscription de Bruce-Grey. Elle a frappé les environs de Williamsford, Holland Centre et Walters Falls. Des maisons ont été démolies et des biens détruits. J'offre mes sincères sympathies à ceux qui ont été blessés ou qui ont subi des pertes matérielles. Dieu merci, personne n'a été tué.

Tout en réconfortant les victimes, je voudrais rendre hommage à tous ceux qui n'ont pas hésité à offrir leurs efforts. Les désastres mettent souvent à l'épreuve la valeur et le courage d'une collectivité. Je suis fier de dire que les habitants de Bruce-Grey ont répondu généreusement à l'appel de leurs concitoyens qui ont subi des dommages. Je salue la communauté mennonite qui a encore une fois prouvé, par ses actions, ce que signifie vraiment la solidarité.

Les dommages causés par la tornade, même s'ils sont graves, sont temporaires. La bonne volonté, la résistance et la force de caractère que manifestent les habitants de Bruce-Grey à l'égard de ceux qui sont dans le besoin représentent les caractéristiques permanentes des gens de ma circonscription.

* * *

(1405)

LE DÉFICIT

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, pendant le week-end, je suis allé dans trois provinces discuter avec les Canadiens de bâtir un meilleur avenir et de vaincre les menaces qui guettent notre prospérité collective. Il a aussi été question du coût des programmes sociaux auxquels nous tenons tant. Par exemple, il en coûte 37 milliards de dollars au fédéral pour faire fonctionner


1760

nos systèmes de soins de santé et d'éducation, et pour aider financièrement nos personnes âgées.

Le coût global de ces programmes indispensables semble modeste cette année en comparaison des paiements d'intérêts sur la dette astronomique du fédéral. En effet, les intérêts à acquitter s'élèvent à 48 milliards de dollars et continuent d'augmenter. C'est scandaleux et le gouvernement fédéral est le seul responsable. Le gouvernement actuel a ajouté 100 milliards de dollars à la dette que nous léguons à nos enfants, ce qui signifie que les intérêts à payer ont augmenté de 10 milliards de dollars par année depuis que les libéraux forment le gouvernement.

Les Canadiens auxquels je parle se rendent compte que la principale menace pour notre prospérité future, c'est le montant que le gouvernement actuel doit recueillir pour payer des intérêts. Le gouvernement n'a encore fixé aucun délai pour équilibrer ses livres et il mène le Canada à la faillite. Honte au gouvernement!

* * *

L'EMPLOI

M. Chris Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing, NPD): Monsieur le Président, le Canada doit immédiatement prendre des mesures afin de venir en aide aux millions de Canadiens qui sont sans emploi ou qui n'ont pas un emploi à la mesure de leurs capacités et qui sont abandonnés à leur sort. Il est scandaleux que 1,4 million de Canadiens soient sans travail et que 800 000 autres soient forcés d'accepter des emplois à temps partiel.

Le gouvernement actuel n'attache aucune importance à ce problème. Ses seuls cibles concernent l'inflation. Le Canada a besoin d'objectifs réalisables en matière de revenu, de chômage, de création d'emplois et de croissance économique durable.

Il est important que le gouvernement adopte une stratégie à double volet qui, au lieu d'en créer, abatte les obstacles aux chances d'emploi des Canadiens, y compris les banques qui réalisent des profits records et qui ne réinvestissent pas ces profits dans les Canadiens ou dans nos communautés, les institutions qui pensent à court terme, et les employeurs qui n'assurent aucune formation.

Le gouvernement doit user de son pouvoir pour promouvoir le développement économique. Qu'est-il advenu de la promesse de créer des emplois, des emplois et encore des emplois faite dans le livre rouge? Ce gouvernement doit prendre de toute urgence des mesures pour redonner du travail aux Canadiens. Il a un rôle à jouer et devrait le jouer.

* * *

[Français]

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine nationale de l'action bénévole nous donne l'occasion de remercier ceux et celles qui consacrent temps et énergie pour venir en aide aux gens dans le besoin, promouvoir une bonne cause et améliorer la qualité de vie de nos collectivités.

Le bénévolat est une tradition aussi ancienne que le Canada et il a joué un rôle essentiel dans le développement de notre société. En marquant la Semaine nationale de l'action bénévole, nous reconnaissons la contribution essentielle de nos bénévoles d'aujourd'hui. En même temps, en soulignant l'exemple qu'ils donnent, nous cherchons à encourager les bénévoles de demain.

Je tiens particulièrement à remercier tous les bénévoles oeuvrant dans des centaines d'organismes de mon comté. En effet, rendons hommage aux bénévoles partout au Canada. Ils sont vraiment notre plus grande richesse nationale.

* * *

LE PARTI RÉFORMISTE

M. Ronald J. Duhamel (Saint-Boniface, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste est venu au Manitoba la semaine dernière pour essayer d'augmenter sa popularité décroissante là et ailleurs au Canada, popularité qui est à peine plus de 10 p. 100, un déclin d'environ 50 p. 100 depuis la dernière élection générale.

Selon un sondage effectué par le député réformiste d'Edmonton-Sud-Ouest, 55 p. 100 de ses commettants considèrent le Parti réformiste comme étant trop radical ou extrémiste.

M. Don Benham du Herald de Winnipeg a écrit, et je cite:

[Traduction]

«Les réformistes sont aussi séparatistes que ces bloquistes bornés. Ils s'en tiennent comme eux à cette vue étroite qui définit les peuples en fonction de la langue et la région.»

[Français]

Ce déclin est logique puisque le Parti réformiste continue à rejeter et à condamner ses députés plus stables et modérés, tels que ceux de Calgary-Sud-Est et de Calgary-Centre.

Le Parti réformiste est voué à l'échec puisqu'il insiste à agir comme un parti régional, gelé dans le passé, incapable de contribuer à l'unité. . .

Le Président: Je regrette d'interrompre l'honorable député. La parole est maintenant à la députée de Saint-Denis.

* * *

[Traduction]

LE TERRORISME

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, notre pays a été confronté aux dures réalités du terrorisme lorsque, la semaine dernière, un Canadien s'est trouvé parmi les 18 touristes massacrés par un terroriste armé à la sortie de leur hôtel au Caire.


1761

[Français]

Cet événement tragique nous rappelle que personne n'est à l'abri des actes terroristes. Le Canada doit continuer de jouer un rôle important dans la promotion de la paix et exprimer son désaccord face aux actes terroristes.

[Traduction]

Je voudrais adresser mes sincères condoléances à la famille et aux parents de Nick Petrou, de London (Ontario), ainsi qu'au gouvernement grec pour les familles des 17 ressortissants grecs qui comptaient au nombre des victimes de cette tragédie.

Les Canadiens pleureront la perte de ces victimes innocentes. Le terrorisme sous toutes ses formes doit être condamné et puni.

* * *

(1410)

[Français]

LA JOURNÉE DE LA TERRE

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de souligner aujourd'hui la Journée de la Terre, célébrée cette année partout dans le monde sous le thème de la santé.

Nous avons tous et toutes compris à nos dépens que notre santé et celle de nos enfants est irrémédiablement liée à la qualité de l'environnement qui nous entoure. La pollution urbaine, la présence de métaux lourds dans l'eau, l'amincissement de la couche d'ozone ne sont que quelques-uns des maux qui affectent nos vies.

Nous devons tous et toutes prendre conscience que les règlements, les législations et les politiques du gouvernement ne garantissent pas à eux seuls un avenir sous le signe du développement durable de notre économie et de notre société.

Chaque personne, chaque communauté et chaque entreprise doit modifier son comportement afin que nous cessions d'hypothéquer la santé des générations futures. À chacune de ces échelles, nous disposons de moyens pour agir immédiatement. Il ne nous reste donc plus qu'à joindre les actes à la parole.

* * *

LA PROVINCE DE SASKATCHEWAN

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Monsieur le Président, je suis très déçu devant le refus de ce gouvernement de reconnaître ma province natale comme société distincte.

Le ministre des Affaires intergouvernementales veut définir ma chère Saskatchewan comme «le foyer principal du fait anglais, mennonite et ukrainien du Canada». Je rejette cette notion contraire aux aspirations légitimes et aux revendications traditionnelles de chez moi.

Il est clair qu'avec nos «pick-ups» quatre par quatre rouillés, nos casquettes de baseball marquées «John Deere», nos bottes crottées et nos étiquettes de pare-chocs disant «maudit gouvernement», nous avons la société la plus distincte du Canada. Nous en demandons la reconnaissance.

* * *

[Traduction]

LES CONTREVENANTS DANGEREUX

M. Jesse Flis (Parkdale-High Park, Lib.): Monsieur le Président, jeudi dernier, j'ai assisté à une assemblée publique dans ma circonscription, Parkdale-High Park, au sujet du placement du pédophile Bobby Oatway au centre correctionnel de la rue Keele.

Oatway, qui purge sa troisième peine dans un pénitencier fédéral, une peine de dix ans pour viol, attentat à la pudeur, sodomie et bestialité, a été transféré de Colombie-Britannique à notre localité sans qu'on ait consulté notre comité de consultation populaire. En fait, ce n'est qu'une fois qu'il a été rendu que nous avons appris la nouvelle de son transfert.

Mes électeurs sont outrés que cette personne ayant commis des crimes crapuleux contre de jeunes enfants soit placée dans une installation à sécurité minimum située à proximité de cinq écoles primaires. Comme ce serait le cas dans des circonstances semblables pour tous ceux d'entre nous qui sont parents à la Chambre, ces parents s'inquiètent de la sécurité de leurs enfants. C'est comme si l'on niait à ces enfants leur droit fondamental à la vie.

Mes électeurs continueront à tenir des assemblées tous les jeudis au même endroit jusqu'à ce que tous les ordres de gouvernement prennent des mesures pour assurer la sécurité de leurs enfants.

* * *

[Français]

LE BÉNÉVOLAT

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, c'est la semaine de l'action bénévole. Une étude réalisée en août 1994 pour le compte de la Fédération des centres d'action bénévole du Québec par une maison de sondages révélait que près de 64 p. 100 de la population du Québec avait fait du bénévolat au cours des 12 derniers mois.

La Fédération invite donc les gouvernements, les institutions et les grandes entreprises à être sensibles aux besoins financiers des organismes bénévoles et les encourage fortement à investir dans l'action bénévole.

Le Bloc québécois déplore que le gouvernement ait annoncé des coupures de l'ordre de 1,5 million de dollars de subventions aux organismes communautaires. Les groupes voués à la promotion des femmes ont vu leurs fonds diminués de 31 p. 100 depuis six ans, engloutis peut-être dans des budgets considérés plus importants, comme celui du Conseil national pour l'unité canadienne ou encore le programme des drapeaux gratuits.

1762

[Traduction]

LA SEMAINE NATIONALE DE L'ACTION BÉNÉVOLE

M. Andy Mitchell (Parry Sound-Muskoka, Lib.): Monsieur le Président, à l'occasion de la Semaine nationale de l'action bénévole, je tiens à remercier les millions de bénévoles qui travaillent dans différentes communautés, d'un bout à l'autre du pays.

Durant la Semaine nationale de l'action bénévole, nous rendons hommage à des gens comme mes électeurs Marion White et Elspeth Hogg, qui ont été décorés récemment du prix Bénévolat Canada. Ces électeurs et d'innombrables autres Canadiens donnent généreusement de leur temps et de leur énergie à des gens dans le besoin.

Plus de 13 millions de Canadiens font du bénévolat. Ensemble, ils donnent pour plus de 16 milliards de dollars de services. Nos collectivités s'épanouissent grâce à ces personnes généreuses, parce que nous, Canadiens, avons à coeur d'aider notre prochain, et que nous sommes prêts à travailler fort pour le salut de nos collectivités.

(1415)

En l'honneur de la Semaine nationale de l'action bénévole, je remercie les nombreux habitants de ma circonscription qui donnent autant de leur temps aux hôpitaux, aux oeuvres des pompiers, aux écoles et aux clubs philanthropiques.

Le bénévolat, c'est une question d'engagement et de compassion. C'est aussi une manière pour chacun de nous de rendre le monde meilleur. Je félicite sincèrement tous les bénévoles.

______________________________________________


1762

QUESTIONS ORALES

[Français]

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, on a appris beaucoup de choses en fin de semaine dans les journaux concernant l'armée canadienne dans le scandale dans l'affaire de la Somalie. On apprend d'ailleurs beaucoup plus de choses dans les journaux que des réponses du ministre en cette Chambre.

Il déclarait d'ailleurs le 16 avril dernier, et je cite: «Cette question jette le discrédit sur les forces armées, sur les hommes et les femmes qui servent chaque jour avec distinction, tant chez nous qu'à l'étranger. La réputation de tous a été ternie à cause d'incidents qui sont survenus il y a trois ans.»

Comment le ministre de la Défense peut-il parler en Chambre d'événements survenus il y a plus de trois ans, alors qu'il savait, au moment où il faisait cette déclaration ici, suite à une enquête de la police militaire, que des gestes illégaux de destruction et de falsification de documents avaient été commis jusqu'au mois de septembre dernier?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, le député pousse vraiment à l'extrême le genre d'interrogation que nous avons entendu la semaine dernière. Il aborde maintenant le problème de la direction des relations publiques et celui des documents.

Comme le député le sait, la commission d'enquête sur la Somalie entamera mercredi ses audiences sur ce problème. Toutes les réponses que le député souhaite obtenir seront fournies à la commission.

[Français]

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition): Monsieur le Président, le ministre a des responsabilités et il doit exercer ses responsabilités dans cette Chambre, quand nous lui posons des questions au nom des citoyens canadiens qui veulent savoir. Il ne peut donc pas se réfugier derrière un comité, alors que lui, il a déjà les réponses.

Le 15 avril dernier, c'est le premier ministre qui déclarait que les événements qui sont sous enquête avaient été faits sous un autre gouvernement. De toute évidence, le premier ministre n'avait pas été informé par le ministre de la Défense qu'une enquête avait été menée au sein de l'armée et qu'on savait qu'il s'était passé des événements répréhensibles jusqu'en septembre.

Pourquoi le ministre de la Défense n'a-t-il pas informé son premier ministre qu'une enquête de la police militaire avait permis de démontrer que des ordres pour faire détruire et falsifier des documents avaient été donnés, sous son commandement, jusqu'au mois de septembre dernier? Pourquoi a-t-il caché cela à son premier ministre?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'ai exercé mes responsabilités par la création de la Commission d'enquête sur la Somalie, ça c'est évident. Je demande à l'honorable député d'attendre que la Commission commence ses délibérations. Après les délibérations, je pense qu'il obtiendra toutes les réponses, pour lui et pour le peuple canadien.

M. Gauthier (chef de l'opposition): Monsieur le Président, une Commission d'enquête doit normalement enquêter sur des événements qui se sont passés, qui se passent actuellement dans l'armée canadienne. Il s'en est passé, sous la responsabilité du ministre, des événements, qui méritent son action. Le ministre ne peut pas se réfugier derrière une commission pour prendre ses responsabilités à sa place. C'est maintenant qu'il se passe des choses.

Comment le ministre, depuis le début, dans cette affaire, peut-il se réfugier derrière la Commission en disant que la lumière sera faite sur toutes ces questions, alors qu'il connaît l'identité des militaires qui ont donné des ordres pour falsifier et cacher des documents, que ces militaires sont toujours en poste de responsabilité et qu'aucune sanction, jusqu'à maintenant, n'a été prise, comme ses responsabilités l'y obligeraient?


1763

(1420)

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais que le député lise le mandat de la commission d'enquête sur la Somalie.

L'énoncé du mandat, dont j'ai cité des extraits la semaine dernière, parle bien de camouflage et de disparition et d'altération de documents. Tous ces termes figuraient dans le mandat initial de la commission.

Pour répondre plus précisément à la question du député, même si le mandat de la commission lui donnait le pouvoir de faire enquête sur les incidents survenus avant le 18 novembre 1994, la commission a jugé qu'elle pouvait élargir son champ d'enquête au-delà de cette date en ce qui concerne les documents et les allégations de destruction et d'altération de documents ou de camouflage.

Si le député se pose des questions au sujet d'autres incidents qui ne se sont pas produits sous la surveillance du gouvernement précédent, tout cela sera examiné par la commission. Les commissaires obtiendront les réponses que les Canadiens espèrent recevoir et qu'ils recevront.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, il semble que les commissaires soient au courant que des documents ont été détruits. Il semble également que la police militaire soit au courant que des documents ont été détruits. Il semble que le responsable des relations publiques de l'armée, j'imagine sous les ordres du ministre-il y a peut-être un ministre dans ce ministère-là-lui aussi est au courant que des documents ont été détruits. Il semble qu'il n'y a que le ministre qui ne soit pas au courant. Il n'y a pas eu de vidéo cette fois-ci, donc, il ne sait rien.

Est-ce que le ministre peut nous déclarer ici s'il a vu, oui ou non, le rapport de la police militaire à l'effet que des documents ont été détruits? En a-t-il pris connaissance, oui ou non? C'est une question très simple.

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, on a fait des lectures sélectives de ce qui est, je présume, le rapport de la police militaire, lequel fera partie des documents présentés en preuve mercredi prochain à l'audience de la commission.

On devrait laisser la commission d'enquête déposer ce rapport pour le rendre public, et laisser tout le monde en prendre connaissance pour tirer ses propres conclusions, au lieu de me demander de répondre en citant certains passages d'un rapport, qu'il s'agisse de celui-là ou d'un autre document, à la Chambre des communes.

Si nous avons établi cette commission d'enquête, c'est précisément pour créer un processus d'enquête sérieux et bien ordonné, respectueux des droits juridiques des personnes, et qui s'exerce dans un cadre impartial, dénué de l'esprit de parti régnant à la Chambre des communes. C'est ce qu'il s'imposait de faire. C'est ce que nous réclamions quand nous étions dans l'opposition. Nous avons respecté notre engagement.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, si je comprends bien, la police militaire fait enquête sur des événements survenus en juin, en juillet, en août et en septembre 1995. Le ministre refuse d'en prendre connaissance, s'en lave les mains, remet cela aux commissaires. C'est cela, sa version.

J'ai une question bien simple. Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'on peut faire tout ce qu'on veut dans l'armée canadienne et qu'il ne s'en occupera pas, qu'il remet tout cela à des commissions ad vitam aeternam? C'est cela son attitude?

[Traduction]

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, la question est tout à fait sensée. Le député obtiendra des reponses à toutes les questions qu'il a posées aujourd'hui et à toutes les autres qui ont été posées à la Chambre au cours de la dernière quinzaine recevront une réponse.

Les députés doivent être patients et laisser la commission faire son travail. Une sous-série d'audiences sur le problème des documents débutera mercredi. Il y aura d'autres révélations et d'autres témoignages dans les mois à venir sur les incidents survenus en Somalie.

Toutes les questions recevront une réponse, je puis l'assurer aux députés. C'est pourquoi nous avons élaboré le mandat comme nous l'avons fait. Personne, à l'exception de certains députés de l'opposition, n'a critiqué le mandat. Presque tout le monde admet que le mandat est très large, englobant, et permettra de connaître la vérité.

Le gouvernement veut connaître la vérité, et les Canadiens aussi.

* * *

LA TAXE SUR LES BIENS ET SERVICES

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, dans le livre rouge, au chapitre 6 intitulé Pour restaurer l'intégrité parlementaire, les libéraux ont promis d'améliorer la qualité de nos institutions parlementaires, de mettre un terme à l'arrogance manifestée par certains élus et de rendre plus de comptes aux électeurs canadiens. Tout cela sonne un peu creux de nos jours.

Au cours de la dernière campagne électorale, les libéraux ont promis d'abolir, d'éliminer et de supprimer la TPS. Ils le savent fort bien. Les électeurs de la circonscription de York-Sud-Weston, ceux de Broadview-Greenwood et tous les autres Canadiens le savent, eux aussi.


1764

(1425)

Combien de milliards de dollars le premier ministre est-il prêt à consentir aux provinces libérales du Canada atlantique et combien de ses propres députés est-il disposé à sacrifier pour justifier la promesse qu'il rompt en ce qui concerne la TPS?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ce que dit la page 20 du livre rouge est très clair:

Nous substituerons à la TPS un dispositif qui produira des recettes tout aussi élevées, qui sera plus juste à l'égard des consommateurs et des petites entreprises, qui sera moins un casse-tête pour les PME et qui encouragera les pouvoirs publics fédéraux et provinciaux à coopérer et à harmoniser leurs politiques fiscales.
Voilà exactement ce que le ministre des Finances cherche actuellement à accomplir.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, au lieu de remplacer la TPS, le premier ministre va l'harmoniser. Maintenant, ce sont les députés qu'il va remplacer. C'est aussi simple que cela. Il a rompu une promesse et ceux qui ont fait campagne aux dernières élections savent très bien en quoi consistaient les enjeux.

En prenant des décisions intransigeantes aujourd'hui, le premier ministre exprime un mépris total envers le processus démocratique et montre que son précieux livre rouge ne veut absolument rien dire. Le premier ministre a accordé plus d'importance à son parti et à des considérations politiques qu'à ses principes et au bien de la population. Le message est clair. Si on veut tenir ses promesses électorales, on ne peut pas le faire au sein du caucus libéral.

Cela en vaut-il vraiment la peine? Cela vaut-il la peine de dépenser les milliards de dollars que le gouvernement s'apprête à consacrer à l'harmonisation pour sauver les apparences après avoir rompu la promesse concernant la TPS? Cela vaut-il la peine de punir des députés dont la seule faute est d'avoir défendu les intérêts de leurs électeurs?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les députés ont organisé leur campagne électorale en fonction du livre rouge. Il est évident que cette phrase figure dans le livre rouge; tout le monde le sait. Nous tentons actuellement de tenir notre promesse.

Je me souviens de l'époque où la députée prônait et appuyait le concept de la TPS et où elle a changé d'idée à quelques reprises. Nous l'avons promis, nous l'avons mis par écrit, c'est très clair.

Il est arrivé que certains députés votent contre le gouvernement sur certains projets de loi. Nous avons agi en conséquence. Lorsqu'un député exprime sa désapprobation à l'égard du gouvernement, c'est qu'il ne veut plus appuyer le gouvernement. Il veut devenir indépendant et c'est à titre de député indépendant qu'il doit siéger. Je lui souhaite la meilleure des chances lorsqu'il tentera de se faire réélire en tant que candidat indépendant.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le député de York-Sud-Weston mérite toute notre déférence et notre appui, mais je tiens à préciser qu'il ne désirait pas appuyer le gouvernement. «Vous avez parfaitement raison», dirait-il au gouvernement et aux Canadiens. Il sait sur quels enjeux il a fondé sa campagne électorale en 1993.

Au cours de la campagne électorale, la vice-première ministre a promis de démissionner si la TPS n'était pas abolie, mais elle siège toujours à la Chambre. Le député libéral de York-Sud-Weston, qui ne faisait que s'en tenir aux promesses électorales du livre rouge, a été chassé de son parti.

Le gouvernement peut cacher la TPS. Il peut dépenser des milliards de dollars pour tenter de l'harmoniser. Il peut laisser tomber tous les députés libéraux qui sont contre la TPS. Mais il ne réussira pas à berner les Canadiens. Les électeurs du Canada savent que les libéraux ont promis d'abolir, d'éliminer et de supprimer la TPS.

Pourquoi le premier ministre n'admet-il pas tout simplement qu'il n'a aucunement l'intention de tenir sa promesse électorale? Pourquoi ne dit-il pas tout simplement aux Canadiens qu'ils ne devraient pas croire un mot de ce qui est écrit dans le livre rouge?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je prierais la députée de relire les promesses qui ont été faites. Elle devrait écouter:

Nous substituerons à la TPS un dispositif qui produira des recettes tout aussi élevées, qui sera plus juste à l'égard des consommateurs et des petites entreprises, qui sera moins un casse-tête pour les PME et qui encouragera les pouvoirs publics fédéraux et provinciaux à coopérer et à harmoniser leurs politiques fiscales.
C'est exactement ce que le ministre des Finances fait actuellement. Nous tenons nos promesses. Voilà pourquoi la députée est si acerbe.

* * *

[Français]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, le ministre des Finances n'a pas démenti que le remplacement des taxes de vente provinciales et de la TPS par une nouvelle TPS cachée dans le prix de vente se traduirait par une compensation fédérale de un milliard de dollars versés dans les Maritimes, mais payés par l'ensemble des Canadiens.

Ma question s'adresse au premier ministre. Le premier ministre confirme-t-il que l'entente que son gouvernement s'apprête à annoncer avec les provinces Maritimes ne constitue pas une disparition de la TPS, tel qu'il l'avait promis, mais bien un camouflage coûteux d'une nouvelle TPS de 15 p. 100 dans le prix des produits et des services?

(1430)

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je viens de lire deux fois la promesse du Parti libéral dans le livre rouge, je n'ai pas besoin de la répéter. Nous avons dit que nous voulions harmoniser avec les gouvernements provinciaux de façon à ce qu'on ait une seule taxe, que les gens d'affaires n'aient qu'à faire un seul rapport sur la taxe de vente et qu'on ait un système qui soit le même pour tous les Canadiens, simplifiant les opérations de tout le monde. C'est exactement ce que le ministre des Finances est en train de faire.


1765

Lorsque les accords seront conclus, le ministre des Finances n'aura aucune difficulté à s'exprimer, comme d'ailleurs il a rarement de difficultés en cette Chambre.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, ): Monsieur le Président, j'aimerais rafraîchir un peu la mémoire du premier ministre. Il a dit, en campagne électorale, en 1995, qu'il abolirait la TPS. Il a pris cet engagement solennel qu'il abolirait la TPS et, à l'instar de ce qui s'est passé dans les nombreux scandales du ministère de la Défense, on a des vidéos.

Non seulement le premier ministre nous dit qu'il n'abolira pas la TPS, mais il confirme qu'en camouflant la nouvelle TPS dans le prix des produits, le fédéral pourra l'augmenter plus facilement, à l'insu de la population, sans que les gens ne le réalisent vraiment. Est-ce exact?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, on essaie d'apeurer le monde. Il n'est pas question d'augmenter la TPS. Il est question de changer la TPS, de mettre en place une taxe nationale qui s'appliquera à tout le monde. Il y aura plus de travail à faire en dehors du Québec, parce que la taxe est déjà harmonisée au Québec.

À ce moment-ci, le ministre des Finances veut que ce soit le même niveau de taxe pour tous les Canadiens qui paient une taxe fédérale et provinciale. C'est le travail qu'il fait avec les gouvernements provinciaux qui devront, au cours des années, perdre un certain niveau de recettes. Comme dans tous les cas, comme nous l'avons fait pour d'autres choses, nous aidons les gouvernements provinciaux, surtout ceux qui sont les plus en difficulté, comme dans les provinces les plus pauvres, à s'adapter à ce nouveau système national.

C'est une question d'équité pour tous les citoyens canadiens et c'est ce que nous voulons réussir: avoir un système clair, simple et équitable pour tout le monde.

[Traduction]

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, c'est tout simplement incroyable. En sacrifiant un membre de son caucus parce qu'il a osé exiger du premier ministre des comptes relativement à sa promesse d'abolir la TPS, le premier ministre a tourné en ridicule la démocratie parlementaire et cet endroit.

Le premier ministre a trompé le député de York-Sud-Weston, qui lui a simplement demandé des comptes et laissé une chance de respecter sa promesse et les principes qu'il a lui même défendus et qui lui ont permis d'être élu. Voilà la réalité.

Pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas procédé à une réforme parlementaire comme il l'a promis?

Le Président: Chers collègues, il y a quelques instants, j'ai demandé à tous les députés de formuler des questions portant sur les responsabilités administratives du ministre ou des ministres visés.

À mon avis, de la façon dont elle est structurée, cette question semble traiter des affaires d'un parti plutôt que des affaires du gouvernement.

Je vais autoriser le député à reformuler sa question, pas le préambule, et à l'adresser à la personne de son choix.

M. Solberg: Monsieur le Président, pourquoi le premier ministre a-t-il, de façon flagrante, manqué à sa promesse de réaliser une réforme parlementaire?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, pour la première fois, nous avons autorisé tous les députés et ministres de notre parti à voter comme bon leur semble lorsque la Chambre est saisie d'initiatives parlementaires. Cela ne s'était jamais vu dans l'histoire du Parlement et cela fonctionne bien. C'est une réforme qui est appréciée, mais qui n'est pas soulignée.

Contrairement au député, je suis ici depuis quelques années déjà, et c'est tout un changement par rapport à ce qui existait auparavant. Les députés votaient sur un projet de loi d'initiative parlementaire conformément à la ligne de leur parti. C'est un pas dans la bonne direction.

(1435)

Nous vivons toutefois dans un régime où il y a un gouvernement responsable. Lorsque le gouvernement est mis en minorité sur une question engageant la confiance, il n'a d'autre choix que de déclencher des élections. Lorsqu'un député vote d'une manière qui met en doute la confiance qu'il a dans le gouvernement, il met en doute son appartenance au parti ministériel. C'est tout.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre ne connaît strictement rien à la démocratie parlementaire. C'est un fait.

Il y a quelques années, l'ex-premier ministre Brian Mulroney a expulsé de son caucus un député qui avait voté conformément à la volonté de ses électeurs. Le premier ministre actuel a alors accueilli dans les rangs de son parti le député qui avait des principes auxquels il croyait. Quel beau paradoxe! Le premier ministre a alors dit qu'ils feraient bien mieux que les conservateurs décriés. Cela s'est avéré une bien bonne blague.

Pourquoi diable le premier ministre ne tient-il pas ses promesses au sujet de la TPS et de la réforme parlementaire et pourquoi n'est-ce pas la vice-première ministre qu'il oblige à démissionner au lieu du député de York-Sud-Weston?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Mon Dieu, monsieur le Président, le député ne peut pas lire quatre lignes du livre rouge. Je vais le répéter pour lui: «Un gouvernement libéral. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Chrétien (Saint-Maurice): Il ne veut pas que je le répète. Il l'a entendu assez souvent. C'est très bien. Lisez le livre rouge. L'engagement de notre parti y est expliqué, et nous le respectons.


1766

[Français]

LES FRANCOPHONES HORS QUÉBEC

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, pendant que le gouvernement nie l'assimilation endémique des francophones hors Québec, l'avenir de quatre écoles francophones d'Ottawa est en jeu, faute de clientèle. Parmi elles, il y a l'école Sainte-Anne, la dernière école primaire francophone de la Basse-ville, un bastion francophone de la capitale du Canada.

Ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine. Quand la ministre cessera-t-elle de nier le problème de l'assimilation des francophones au Canada, une assimilation qui entraîne la disparition de leurs institutions les plus essentielles, comme celle de la dernière école primaire de la Basse-ville.

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais d'abord souligner que nous sommes très intéressés à l'intérêt du député en ce qui concerne l'éducation. Cela va à l'encontre de la politique de son parti qui dit que l'éducation relève de la juridiction provinciale.

J'aimerais d'abord souligner qu'au Conseil scolaire d'Ottawa-Carleton, il y a présentement 60 écoles. Parmi ces écoles, où ma fille est étudiante à l'une d'entre elles, il y a l'école Gaston-Vincent, l'école Baribeau, l'école Cadieux, l'école des Pins, l'école des Villageois, l'école des Voyageurs, entre autres. Sur ces 60 écoles de langue française, pas des écoles d'immersion, il y en a actuellement 4 qui sont en danger d'être rationalisées à cause des coupures budgétaires.

Malheureusement, le gouvernement de l'Ontario a suivi le pas au gouvernement du Québec qui, lui-même, le 27 mars, a annoncé des coupures dans le domaine de l'éducation de l'ordre de 300 millions de dollars. Ces coupures faites par le premier ministre du Québec sont malheureuses, et on les déplore au niveau du gouvernement de l'Ontario, mais on respecte la juridiction dans le domaine de l'éducation qui est, quand même, selon la politique du Bloc québécois, de compétence provinciale.

M. Jean-Paul Marchand (Québec-Est, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral est intervenu au palier provincial bien des fois sur bien des problèmes, mais la ministre nie l'assimilation des francophones au Canada dans sa réponse, et personne n'ose nier l'assimilation des francophones alors que, dans la capitale du Canada, l'assimilation est de 30 p. 100.

Qu'on ait des écoles francophones, mais l'école Saint-Anne ferme. Dans la fonction publique fédérale, dans les faits, c'est la langue anglaise qui prédomine. Les francophones doivent utiliser l'anglais dans la fonction publique.

(1440)

La ministre reconnaît-elle qu'en agissant ainsi, son gouvernement pratique une politique d'assimilation qui a pour conséquence la disparition de la communauté francophone au coeur même de la capitale du Canada?

L'hon. Sheila Copps (vice-première ministre et ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, en réponse à sa question, j'ai souligné au député qu'actuellement, aujourd'hui, il y a 60 écoles de langue française dans la région d'Ottawa-Carleton. Ce qui n'existait pas auparavant. Le Conseil scolaire francophone d'Ottawa-Carleton n'existait pas il y a 30 ans.

Ses questions sont presque aussi logiques que ses commentaires aujourd'hui, des larmes de crocodile du député. L'assimilation est quasiment aussi logique que ce commentaire: «Une des raisons pour lesquelles je suis devenu souverainiste est à cause de la menace d'assimilation.»

Pense-t-il vraiment qu'une politique de séparation des francophones au Québec de ceux du reste du Canada va garder un pays bilingue? C'est exactement le contraire. C'est pour cela qu'il y 23 députés et sénateurs de langue française de l'extérieur du Québec ici. C'est pour cela que le Canada est en train de devenir un pays pour tout le monde.

* * *

[Traduction]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, quand ils étaient dans l'opposition, les libéraux ont promis de supprimer la TPS parce que cette taxe était mauvaise. Le premier ministre sait que les citations à cet effet ne manquent pas.

Maintenant qu'ils forment le gouvernement, les libéraux proposent de dépenser un milliard de dollars pour cacher cette mauvaise taxe, de récompenser par le versement d'une ristourne fédérale les gouvernements libéraux qui l'aideront à cacher la taxe, d'imposer des frais s'élevant à un milliard de dollars aux sept provinces qui ne veulent pas de la taxe et, enfin, d'expulser du caucus les députés qui s'opposent à ce que la taxe soit cachée et qui rappellent au gouvernement sa promesse électorale.

En prenant des sanctions disciplinaires, le premier ministre croit-il qu'il réussira à museler d'autres simples députés libéraux pour qu'ils gardent le silence sur la promesse du gouvernement concernant la TPS?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre parti a présenté un programme électoral que les intéressés ont sans doute lu avant de se porter candidats. S'ils s'étaient arrêtés à la page 20 du programme, ils sauraient qu'il y est question de simplification et d'harmonisation. C'est écrit noir sur blanc.

Quatre gouvernements provinciaux ont déjà opté pour l'harmonisation. Le premier a été le Québec. Il y en a maintenant trois autres, et le reste examinent la question.

Voici ce que le Leader Post de Regina recommande au gouvernement de la Saskatchewan: «Le gouvernement de la Saskatchewan aurait tout intérêt à ne pas s'opposer à l'harmonisation de la taxe. Les problèmes liés à cette dernière ne sont pas insurmontables et ne l'emportent pas sur les avantages possibles de l'harmonisation, comme la réduction du coût d'exploitation des entreprises et du fonctionnement du gouvernement en Saskatchewan, favorisant ain-


1767

si le climat des affaires et, à long terme, la création d'emplois et l'augmentation des recettes.»

Voilà l'opinion d'un très important journal en Saskatchewan, et elle est très sensée. Bien des gens seront d'accord pour dire que notre démarche est excellente.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je cite: «Je veux l'abolition de la taxe.» C'est ce que disait le chef de l'opposition libérale, l'actuel premier ministre. Cette citation figure dans l'édition du 27 septembre 1990 de la Gazette de Montréal.

Maintenant que le premier ministre a fait un exemple du député de York-Sud-Weston pour garder la bride sur le reste de son caucus, je voudrais lui rappeler une autre promesse que son parti et lui ont faite quand ils étaient dans l'opposition.

Les députés libéraux s'opposaient à ce que les imprimés soient taxés lorsque les conservateurs ont créé la TPS, et ils ont promis de les détaxer. Or, ils proposent maintenant un taux de taxe de plus de 10 p. 100 sur les imprimés, dans leur tentative improvisée et timide d'harmonisation avec les provinces de l'Atlantique.

Quand le gouvernement libéral remplira-t-il sa promesse? Où en est le premier ministre quant à cette promesse?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je répéterai au député qu'à l'époque, nous étions contre la TPS et que nous sommes toujours contre. Nous avons fait valoir à la Chambre qu'il y aurait deux taxes différentes fondées sur deux modes de comptabilité différentes. Le régime est très complexe pour les consommateurs et les entrepreneurs, qui doivent tenir une comptabilité pour la taxe. Il y aurait deux séries de livres comptables, d'inspecteurs, etc.

(1445)

Nous avons fait valoir que nous nous opposions à une telle complexité et nous avons toujours parlé d'harmonisation. Au moment des élections, nous l'avons écrit à la page 20 du livre rouge. C'est très facile à vérifier, et nous nous en tenons à ce qui est écrit dans le livre rouge.

* * *

[Français]

LES MILITAIRES FRANCOPHONES DE MOOSE JAW

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale.

Dans une enquête récente, le commissaire aux langues officielles conclut que les militaires anglophones de la base militaire de Bagotville ont accès à des services impeccables dans leur langue, alors que les militaires francophones basés à Moose Jaw en Saskatchewan sont privés des services essentiels en français comme les soins de santé et les services d'éducation.

Le ministre de la Défense nationale donnera-t-il suite à la recommandation du commissaire visant à instaurer un plan précis pour répondre aux besoins des militaires francophones basés à Moose Jaw, et ce, avant le 31 mai prochain?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, nous considérons très sérieusement les recommandations du commissaire. Nous espérons établir les mêmes normes à travers le pays.

[Traduction]

Je suis allé à Bagotville et je souscris tout à fait à ce que la députée a dit au sujet de la disponibilité des services dans les deux langues officielles.

Je suis aussi allé à Moose Jaw, dans l'ouest du Canada, et je n'ai pas été personnellement informé des choses qui ont apparemment été portées à l'attention du commissaire.

Peu importe la langue parlée par les militaires, il est évident qu'ils ont les mêmes droits que tous les autres Canadiens en matière de services, de priorités et de préalables. S'il faut améliorer certaines choses, nous le ferons.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Monsieur le Président, c'est vraiment regrettable que ce ministre, chaque fois qu'il y a quelque chose qui ne va pas, ne soit jamais informé. Il y a eu six plaintes à Moose Jaw. C'est étrange, il va à Bagotville et on lui dit que ça va très bien pour les anglophones. Il se rend à Moose Jaw et on ne lui dit rien sur la situation pénible des francophones. Je ne reprendrai pas le discours de mon collègue sur l'assimilation, mais c'est comme ça que ça se fait, l'assimilation, surtout quand un ministre ne s'intéresse même pas à la situation de la minorité en Saskatchewan.

Je ne veux pas de réponse approximative à ma question, je veux une réponse juste. Le ministre a-t-il l'intention de faire en sorte que les militaires francophones basés à Moose Jaw aient accès à une école francophone, et ce, dans les meilleurs délais?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, il est évident que l'honorable députée n'a pas écouté ma réponse. Les problèmes quant aux services dans les deux langues officielles à travers le pays m'inquiètent énormément.

[Traduction]

Pour ce qui est de l'éducation, la députée sait sans doute que, en vertu des ententes qui ont été signées par le gouvernement précédent, la Défense nationale est en train de confier ce domaine aux différentes provinces. Nous essayons de faire en sorte que, évidemment, les minorités linguistiques soient traitées équitablement.


1768

Comme je l'ai dit en réponse à la première question, nous cherchons à apporter des améliorations. La députée peut avoir l'assurance que nous ferons des améliorations dont elle sera satisfaite.

* * *

[Français]

LES TÉLÉCOMMUNICATIONS

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

Les commettants de mon comté m'ont fait part de leurs frustrations vis-à-vis des problèmes de réception de leurs antennes paraboliques causés par les changements de signaux apportés par les diffuseurs.

Le ministre peut-il assurer mes commettants que le problème avec les antennes paraboliques sera réglé, sans leur demander un investissement supplémentaire considérable?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique, ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien et ministre chargé du Bureau fédéral de développement régional (Québec) Lib.): Monsieur le Président, je peux assurer mon collègue que la technologie utilisée pour fournir des services de radiodiffusion évolue très rapidement en ce moment. La plupart des services adoptent la technologie numérique, «digital», laquelle ne fonctionne pas avec le matériel des antennes paraboliques.

(1450)

Il y a peut-être un problème potentiel pour les consommateurs. La vente des antennes paraboliques dédiées à la réception des services de télévision n'est pas réglementée du tout par le gouvernement fédéral. Comme pour tout matériel de haute technologie, il est nécessaire que les consommateurs examinent leurs options très attentivement avant d'acheter. C'est très important.

* * *

[Traduction]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, lorsque la TPS a été proposée par les conservateurs en 1990, les libéraux de l'époque ont réclamé un vote libre. Ils ont dit que le premier ministre, Brian Mulroney, avait promis qu'il y aurait plus de votes libres à la Chambre des communes. Les conservateurs ont dit qu'ils ne permettraient pas un vote libre parce que c'était une mesure financière. Évidemment, les libéraux ont été outrés par ce genre de réponse, ou ont feint de l'être.

Le premier ministre libéral refuse de permettre un vote libre sur une mesure semblable et expulse un député du caucus.

Beaucoup de Canadiens, dont un de York-Sud-Weston en particulier, voudraient bien connaître la réponse à la question suivante: étant donné que les libéraux ont déploré ce genre de discipline de fer lorsqu'ils étaient dans l'opposition, que s'est-il passé pour qu'ils changent ainsi leur fusil d'épaule une fois au pouvoir?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons beaucoup plus de votes libres qu'auparavant à la Chambre des communes.

M. Abbott: C'est faux; il n'y a eu aucun vote libre.

M. Chrétien (Saint-Maurice): Nous avons beaucoup de votes libres à la Chambre des communes.

Lorsqu'un projet de loi est présenté par un député, c'est une mesure qui est présentée au Parlement du Canada. Ces projets de loi visent à changer les lois du Canada. Nous avons accepté de nombreux votes libres. Il est même arrivé que des ministres votent différemment sur certaines mesures. Cela ne s'est jamais vu auparavant.

Je suis satisfait de l'expérience. C'était bien et cela n'a pas causé trop de problèmes. Nous aurons peut-être des votes libres à d'autres occasions. Nous en avons déjà eu au sujet de la peine de mort et de l'avortement. Nous avons eu des votes libres sur des questions morales.

Cependant, lorsqu'il s'agit d'un vote de confiance envers le gouvernement, les ministériels doivent appuyer le gouvernement qui les a aidés à se faire élire.

Le Président: Je vous inviterais à faire moins de bruit pendant qu'on pose les questions et qu'on donne les réponses, car j'ai un peu de difficulté à entendre tout ce qui se dit. Je sais que j'aurai votre collaboration pour que je puisse entendre les questions et les réponses.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, lorsque le vice-président actuel a été expulsé du caucus conservateur pour avoir voté contre la ligne du parti, il a dit que le Parti conservateur était assez dictatorial pour faire rougir le général Noriega.

Le gouvernement libéral a promis aux Canadiens que, s'il était élu, les choses seraient différentes, que les Canadiens auraient enfin des députés qui seraient libres de représenter les opinions des gens qui les ont élus. Pourquoi les libéraux ont-ils menti aux Canadiens?

Le Président: Je demande au député de retirer le mot «mentir».

M. Strahl: Monsieur le Président, pourquoi le gouvernement a-t-il mal informé les Canadiens?

Le Président: Je vous demande simplement de retirer le mot «mentir».

M. Strahl: Monsieur le Président, je retire ce mot. Est-il vrai que, dans l'esprit du gouvernement, un vote est libre seulement si le Parti libéral dictatorial dit qu'il est libre?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'il s'agit d'un vote de confiance envers le gouvernement, c'est différent. Nous avons discuté de cette question au caucus mercredi dernier, et le député a clairement exprimé ses opinions.

Le député de York-Sud-Weston a déjà présenté à la Chambre un projet de loi sur lequel nous avons permis un vote libre. Toutefois, lorsqu'il s'agit d'un vote de confiance, c'est différent. Le député


1769

aurait pu attendre et voter contre le gouvernement sur un autre projet de loi.

(1455)

Lorsqu'une personne n'a pas confiance dans l'ensemble du programme du gouvernement, elle n'a plus sa place au sein de ce gouvernement.

* * *

[Français]

LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le Comité externe d'examen de la GRC est chargé d'examiner les appels portant sur certains types de griefs qui sont présentés par des membres réguliers ou civils de la GRC contre l'état-major de ce corps policier. Ce comité, présidé depuis 1990 par Mme Jennifer Lynch, est le seul recours juridique offert aux membres de la GRC pouvant effectuer des examens indépendants au sujet de leurs préoccupations.

Le premier ministre peut-il expliquer pourquoi la GRC a octroyé à Mme Lynch un contrat d'un an au montant de 176 000 $, justement pour réviser l'actuel système de griefs? Le premier ministre ne convient-il pas que Mme Lynch est en conflit d'intérêts puisqu'elle doit recevoir, d'une part, les griefs de policiers contre l'état-major, alors qu'elle est, d'autre part, sous contrat avec ce même état-major?

M. Nick Discepola (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme on le sait, le solliciteur général est à l'hôpital cette semaine. Je vais prendre la question du député en considération, je lui en ferai part et il aura une réponse à sa question.

* * *

[Traduction]

LA CHAMBRE DES COMMUNES

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens de toutes les régions sont troublés par le peu de cas que le premier ministre fait de la démocratie au Parlement.

Si les députés ne peuvent plus s'exprimer sur des questions importantes sans être punis, notre pays est en sérieuse difficulté. On se souviendra que la vice-première ministre s'était engagée à démissionner si la TPS n'était pas abolie. C'est donc à elle que ma question s'adresse.

Comment la vice-première ministre peut-elle honnêtement continuer d'occuper son siège après avoir renié sa parole, alors qu'un de ses collègue de longue date sert de bouc émissaire et est mis au pilori pour avoir défendu ses principes?

Le Président: J'essaie de voir le lien qui existe entre cette question et les responsabilités administratives des députés. J'autorise le premier ministre à répondre, s'il le veut.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tous les députés ont la possibilité d'exprimer leur point de vue sur tout. Toutefois, en votant pour la censure du gouvernement, ils déclairent très clairement qu'ils ne lui accordent pas leur appui.

Étant originaire d'une région rurale du Québec, je dois expliquer à mon collègue, qui est né en Nouvelle-Écosse, que je défends ici le système parlementaire britannique qui est en vigueur depuis longtemps. Le vote de confiance à l'endroit du gouvernement est différent des autres votes.

M. Abbott: Les députés ont le droit de voter librement.

M. Mills (Red Dear): C'est le gouvernement qui vote librement.

M. Chrétien (Saint-Maurice): Nous avons tenu davantage de votes libres à la Chambre et le Parti réformiste n'a pas de leçon à nous donner à ce sujet.

Mme Grey: Vous parlez comme Mulroney.

M. Mills (Red Dear): Vous faites honte.

M. Chrétien (Saint-Maurice): Le problème est que les députés réformistes ne veulent pas savoir ce qu'est un gouvernement, car ils ne formeront jamais le gouvernement. Ils peuvent le demander à mes députés, qui exercent, eux, la responsabilité gouvernementale. Mes députés ont participé à plus de votes libres que jamais avant au Parlement.

Un député qui veut s'exclure lui-même de son parti n'a qu'à voter contre une motion de confiance. Cette pratique bien établie remonte aux origines du Parlement britannique, il y a de cela plusieurs siècles.

* * *

LA LOI SUR L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Travail.

En 1995, le Parlement a adopté des modifications importantes à la Loi sur l'équité en matière d'emploi, mais ces modifications n'entreront en vigueur qu'un an après la proclamation de la loi.

Jeudi dernier, pendant la réunion d'un comité, le commissaire aux droits de la personne a exhorté le gouvernement à proclamer cette loi dans les plus brefs délais. Quand la nouvelle Loi sur l'équité en matière d'emploi sera-t-elle proclamée?

[Français]

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, en ce moment, le ministère du Développement des ressources humaines prépare le projet de réglementation.

(1500)

Dès le mois prochain, les fonctionnaires du même ministère vont consulter les parties, les associations patronales, les associations

1770

syndicales et tous les autres qui sont intéressés à l'application de cette loi importante sur l'équité en matière d'emploi. Nous espérons maintenir notre engagement et j'ose espérer que vers la mi-automne, le projet de règlement sera en application.

* * *

[Traduction]

L'ENQUÊTE SUR LA SOMALIE

L'hon. Jean J. Charest (Sherbrooke, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest): On lui accorde du temps de parole qui devrait nous revenir.

M. Hermanson: Un peu d'équité, s'il vous plaît.

Le Président: Le député de Sherbrooke.

M. Charest: Ma question porte sur les nouvelles allégations concernant l'enquête sur la Somalie selon lesquelles des documents auraient été déchiquetés en septembre 1995. Ces allégations sont très graves et soulèvent une question de confiance au sein du gouvernement.

J'aimerais demander au premier ministre s'il ne pense pas qu'étant donné la gravité des allégations qui pèsent sur son ministère il serait temps de demander au ministre de la Défense de quitter son poste?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, avant de répondre au chef du Parti progressiste conservateur, j'aimerais rappeler au député de Fraser Valley-Ouest ce que c'est que la démocratie et la liberté de parole, lui qui voudrait empêcher un député de prendre la parole?

Des voix: Bravo!

M. Chrétien (Saint-Maurice): J'aimerais signaler au député de Sherbrooke que c'est la première fois depuis très longtemps, peut-être depuis que je suis ici, qu'un gouvernement, sur la recommandation du ministre de la Défense nationale, ordonne une enquête sur le fonctionnement des forces armées.

La commission étudie tous les aspects de la mission. Si des fautes ont été commises, elle en fera rapport. Nous devons cette commission au ministre qui, dans sa sagesse, a cru bon de recommander la tenue d'une enquête au gouvernement du Canada.

* * *

[Français]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Mes chers collègues, aujourd'hui nous avons le plaisir d'accueillir en cette Chambre un groupe de jeunes Canadiens et Canadiennes qui ont beaucoup apporté à leur pays.

[Traduction]

Ces jeunes hommes et ces jeunes femmes se sont distingués dans divers domaines: la musique, l'athlétisme, les arts, la bravoure, l'entrepreneuriat ou l'innovation scientifique, ou encore, ils se sont illustrés par leur engagement communautaire ou humanitaire. Malgré leur jeune âge, ils ont déjà accompli de grandes choses. Ces jeunes Canadiens personnifient l'excellence et symbolisent le talent aux services du Canada.

Veuillez vous joindre à moi pour souhaiter la bienvenue aux gagnants des prix d'excellence décernés par le réseau YTV.

Des voix: Bravo!

* * *

(1505)

RECOURS AU RÈGLEMENT

LA PÉRIODE DES QUESTIONS

M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, le premier ministre a exprimé à la Chambre certains de ses malentendus concernant la période des questions, le nombre de députés qui peuvent poser des questions et le tour de parole. Je crois qu'il tente de me faire porter le blâme parce que je n'ai pas voulu que le député là-bas, quel qu'il soit,. . .

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Chers collègues, le débat a été enflammé des deux côtés aujourd'hui. Il est bien évident que ce que le député soulève ne constitue un recours au Règlement. J'espère que nous pourrons reprendre la bataille demain.

______________________________________________


1770

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 21 pétitions.

* * *

LE JOUR DE LA TERRE

L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, il temps que le débat revienne sur terre, en ce Jour de la terre, qui est souligné non seulement au Canada, mais aussi sur toute la planète. Il est temps de mettre de côté nos divergences de vues et de faire cause commune en nous engageant à préserver, protéger et renouveler notre planète. Cette année, le Jour de la terre a pour thème la santé.

Ne nous y trompons pas: la dégradation de l'environnement nuit à la santé humaine. Cette dégradation se remarque partout, sous des formes et à des degrés très divers.


1771

J'ai fait récemment un voyage dans l'Arctique, où on m'a raconté la terrible histoire des polluants et des produits toxiques transportés par le vent et qui se retrouvent dans le lait maternel. Environnement Canada vient de publier un avertissement concernant les crèmes solaires pour l'été prochain parce que l'amincissement de la couche d'ozone demeure un problème d'une grande gravité. Nous savons tous, surtout ceux vivent dans les grandes villes, que la qualité de l'air est menacée, et qu'il y a des risques pour la santé, notamment celle de nos enfants et des personnes souffrant d'affections de l'appareil respiratoire.

En fin de compte, les mots «environnement» et «santé» désignent la même chose. Ils sont interchangeables, et les risques et les enjeux sont considérables.

Un rapport que l'ONU vient de publier souligne que, au lieu de s'améliorer, la qualité de l'air et de l'eau se dégrade. Il lance un cri d'alarme: pas moins de 150 espèces de plantes, d'animaux ou de poisson disparaissent chaque jour. C'est renversant. Toutes ces espèces sont les victimes d'un développement excessif qui touche toute la planète. C'est stupéfiant. Les limites de ce que la nature peut tolérer ne sont pas loin. Il est temps que, collectivement, nous changions nos façons de faire.

(1510)

Aujourd'hui, Jour de la terre, des individus et des collectivités des quatre coins de notre pays s'engagent résolument à agir comme intendants responsables de notre patrimoine naturel d'aujourd'hui et de demain. Nous nous engageons à préserver la nature et nous promettons d'en partager les bienfaits entre régions, entre pays et entre générations.

Les Canadiens comprennent bien, au fond, la responsabilité qu'ils ont de protéger les merveilles environnementales indissociables du Canada. Des collectivités de tout le pays ont les idées, l'énergie et la détermination voulues pour assurer la première ligne de défense. Le gouvernement national est disposé à contribuer à cet effort national grâce au programme Action 21, doté de 10 millions de dollars par année, dont le but est d'aider les groupes locaux à assainir leur propre milieu. J'ai annoncé aujourd'hui la dernière série de projets dans le cadre de ce programme. Environ 2,5 millions de dollars seront versés à quelque 84 groupes de tout le Canada qui s'efforcent de créer un environnement plus sain.

Parmi ces projets, il y a celui de l'East Toronto Green Community qui vise à réduire la contamination du cours inférieur de la rivière Don par les eaux de surface et les eaux usées, celui du Habitat Unlimited Society qui vise à restaurer la zone d'élevage et de frai dans le ruisseau Brierly, et celui d'un groupe de sud-ouest de Montréal qui se donne pour mission d'améliorer les méthodes d'entreposage des insecticides dans une localité agricole. Ce ne sont là que quelques exemples de projets innovateurs qui surgissent dans nos quartiers, à l'instigation de simples particuliers. L'initiative doit venir de la base si nous voulons réussir. Nous avons beau parler de stratégies nationales et internationales, cela ne sert à rien sans le travail de la base.

Les Canadiens savent que nous sommes les intendants du plus long littoral du monde, du cinquième des zones sauvages, du cinquième de l'eau douce et du quart des terres humides de la planète. Dans l'intimité de leur foyer, spontanément, les familles canadiennes et des voisins ont trouvé des idées pour remettre la nature en état et lui rendre sa vigueur.

Cinquante bénévoles de l'Île-du-Prince-Édouard ont adopté des plages pour protéger le pluvier siffleur, cet oiseau en péril. La Wildlands Park Development Society de Calgary réimplante la végétation sur le site d'une raffinerie de pétrole. Jack Bell, un homme âgé de Vancouver, a lancé un système de covoiturage avec des fourgonnettes afin de réduire les émissions polluantes; il en a maintenant 95 sur la route.

[Français]

Le maire de Trois-Rivières, Guy Leblanc, a fait ce qu'il fallait pour que sa ville soit plus accueillante à l'égard des cyclistes. Au cours des deux dernières années, des bénévoles ont planté 750 000 buissons et arbres indigènes le long de la Route canadienne de la nature.

[Traduction]

Il y a quelques heures, j'ai écouté des élèves de sixième année de la Rideau Valley Middle School; ils présentaient des projets de leur cru pour contribuer au nettoyage de cette voie d'eau historique qui coule à quelques pas du Parlement.

Les groupes locaux et les particuliers méritent nos félicitations pour le travail qu'ils accomplissent afin de préserver le patrimoine naturel du Canada. Ils reconnaissent que la nature fait partie intégrante de ce que nous sommes en tant que Canadiens, en tant qu'êtres humains.

Les Canadiens s'attendent et exigent, avec raison, que soient prises des initiatives nationales et internationales qui font pendant à leurs propres efforts. L'environnement du Canada est source de fierté nationale, et les Canadiens veulent que les initiatives nationales de préservation de la nature soient également une source d'inspiration.

(1515)

Je suis heureux d'annoncer que tous les gouvernements provinciaux et territoriaux au Canada se sont joints au gouvernement fédéral pour signer une déclaration par laquelle ils s'engagent à préserver la biodiversité au Canada. C'est un pas dans la bonne direction. Cette déclaration accompagne la Stratégie canadienne de la biodiversité rendue publique l'an dernier. Cette stratégie guidera les actions de tous les gouvernements afin qu'ils préservent la nature et honorent les obligations nationales et internationales du Canada.

Les documents qui font l'unanimité ne sont pas légion. Les gouvernements ont toutefois entendu la voix de la population. Les Canadiens veulent que leur pays soit un chef de file mondial dans l'utilisation, la préservation et la mise en commun des merveilles que la nature nous offre.


1772

Le 6 mai, je participerai à l'ouverture officielle du Secrétariat de la Convention sur la diversité biologique, à Montréal. En choisissant ainsi le Canada pour accueillir ce secrétariat de l'ONU, le monde a clairement témoigné de sa confiance envers le Canada, dont il attend beaucoup.

[Français]

En ce Jour de la Terre, nous faisons nôtre le principe selon lequel la conservation de la nature commence par nos propres actions. Si nous voulons changer le monde, il nous faut commencer chez nous.

[Traduction]

En ce Jour de la terre, nous faisons nôtre un principe: la préservation de la nature commence par nos propres actions. Si nous voulons changer le monde, il nous faut commencer chez nous.

[Français]

M. Gérard Asselin (Charlevoix, BQ): Monsieur le Président, nous fêtons aujourd'hui la journée de la Terre. Bien sûr, cette journée sur la conservation de la Terre est reliée principalement à l'environnement. Je pense qu'en tant que parlementaires, nous sommes prêts à rédiger des lois et à appliquer ces lois afin de conserver la santé des gens de notre milieu, autant québécois que canadien. L'environnement doit être protégé, sinon, cela causera de graves problèmes à l'ensemble de la collectivité sur le plan de l'air, de la santé et de l'eau également.

La protection de l'environnement, c'est aussi une question d'éducation et d'information. Je pense que dès le jeune âge, les enfants doivent être informés d'abord et avant tout à la maison et recevoir également de l'éducation et de l'information sur le plan scolaire. L'environnement, ça se protège aussi en milieu de travail, dans notre quotidien.

J'invite les commissions scolaires à mettre sur pied un plan d'information et d'éducation en matière d'environnement afin d'éduquer les jeunes à cette question très importante.

J'invite également les municipalités du Québec et du Canada à mettre sur pied des comités de protection de l'environnement. Permettez-moi de citer en exemple la municipalité de Baie-Comeau, dans mon comté. Elle a formé une corporation d'amélioration et de protection de l'environnement. Ce comité a été formé il y a déjà une dizaine d'années. La corporation avait et a toujours comme objectif la protection de l'eau, de l'air et de l'ensemble de l'environnement.

On sait qu'aujourd'hui les municipalités sont les maîtres d'oeuvre dans la mise sur pied de normes environnementales. Il faut que les lois en provenance du fédéral, du provincial et des municipalités ne se chevauchent pas afin de diminuer certains coûts qui pourraient être inhérents et également pour éviter d'avoir certaines lois qui seraient contradictoires et qui pourraient nuire au bon fonctionnement et à l'exécution des lois dans certains milieux.

La corporation d'amélioration et de protection de l'environnement de Baie-Comeau, dans le comté de Charlevoix, est préoccupée par le bien durable. On sait qu'aujourd'hui tout est récupérable en matière d'environnement: le papier, le carton, le plastique, le verre, le bois, le fer et ainsi de suite. Et cette corporation va même jusqu'à récupérer les meubles, qu'elle recycle, qu'elle rénove et qu'elle donne à des familles défavorisées.

(1520)

Elle recueille aussi des vêtements qu'elle répare, qu'elle lave et qu'elle entrepose pour ensuite les distribuer aux familles défavorisées et également aux personnes sinistrées lors d'un incendie par exemple. Cette corporation fait aussi la cueillette et la réparation d'appareils ménagers qui, auparavant, se seraient retrouvés au dépotoir. Aujourd'hui, plusieurs municipalités font déjà la cueillette sélective des déchets. Les municipalités peuvent, par la même occasion, diminuer leurs coûts d'enfouissement sanitaire.

Vous savez, aujourd'hui tout est recyclable. Je dirais même que les municipalités ont intérêt à mettre à exécution leur cueillette sélective et leurs salles de tri. Cela protège par le fait même les cours d'eau. Au Québec, certains cours d'eau se déversent dans le fleuve Saint-Laurent. On sait qu'auparavant, toutes les municipalités déversaient aussi leurs déchets dans des cours d'eau qui parfois se déversaient dans le Saint-Laurent. Le fleuve Saint-Laurent était considéré comme une des plus grandes fosses sceptiques à ciel ouvert au monde. On sait qu'il y a même certaines municipalités qui s'approvisionnent en eau potable à partir de ce même cours d'eau.

Je me dois quand même de féliciter le ministre. Le programme Action 21, quoi qu'étant très minime-il y a quand même un début à toute chose-est un programme pour permettre de réaliser 84 projets concernant l'environnement pour un montant de 2,4 millions de dollars. J'incite tous les paliers gouvernementaux, fédéral, provincial et municipal à faire de même.

En terminant, je peux vous assurer qu'en tant qu'adjoint parlementaire à la députée de Laurentides, je fais un travail très utile, parce que je pense que l'environnement, c'est l'avenir. Je vous remercie, monsieur le Président, et fêtons tous ensemble cette journée de la Terre.

[Traduction]

M. Paul Forseth (New Westminster-Burnaby, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir répondre à la déclaration que le ministre de l'Environnement a faite cet après-midi. Comme le ministre a beaucoup de nettoyage à faire après le passage de la vice-première ministre, quel meilleur moment pour commencer que le Jour de la terre.

Lorsque l'ex-président américain Gerald Ford a proclamé cette journée-ci Jour de la terre, il a dit: «La terre ne continuera de renouveler ses sources de vie que si nous et tous les autres peuples faisons notre part pour préserver ses ressources naturelles. C'est une responsabilité que partagent tous les êtres humains. Par une action volontaire, nous pouvons tous nous unir pour bâtir un monde productif qui soit en harmonie avec la nature.»

Il ne fait aucun doute qu'une journée comme le Jour de la terre contribue à mieux sensibiliser la population aux problèmes qui assaillent notre environnement. Cependant, cette journée ne devrait pas être la seule où nous nous penchons pour ramasser les détritus qui jonchent nos rues, nos trottoirs et nos cours. Il faut apprendre tous les jours à réduire, réutiliser et recycler dans nos collectivités.


1773

Au niveau fédéral, les Canadiens devraient pouvoir s'inspirer des actions du ministre et être confiants que ses actions contribueront à garder très propres notre air, notre terre et notre eau. Nous ne devrions pas être inquiets, mais nous devrions nous inquiéter lorsque nous examinons le bilan qu'a laissé l'ancienne ministre de l'Environnement et les projets qu'a exposés le ministre actuel.

Lorsque je suis devenu porte-parole du Parti réformiste en matière d'environnement, j'ai dû me pencher sur un certain nombre de dossiers comme le renflouage de la barge Irving Whale, le gâchis des déchets toxiques que sont les étangs bitumineux de Sydney et l'additif de l'essence, le MMT. Jusqu'ici, l'Irving Whale demeure au fond de l'océan Atlantique, au large de l'Île-du-Prince-Édouard, laissant s'écouler du mazout brut et des BPC.

L'emplacement des étangs bitumineux de Sydney est loin d'être nettoyé, puisque d'autres points chauds de BPC y ont été découverts. L'Irving Whale a coûté 18,7 millions de dollars aux contribuables et cela n'a toujours rien donné. Le nettoyage de l'emplacement des étangs bitumineux de Sydney a coûté aux contribuables plus de 55 millions de dollars, et seulement 90 des 700 000 tonnes de goudron ont été incinérées.

En ce qui concerne l'interdiction d'utiliser l'additif de l'essence, le ministre n'a toujours pas la preuve que le MMT est dommageable pour les systèmes de diagnostic intégrés. La question en litige n'est pas environnementale, elle est politique.

(1525)

Le secteur de la pêche sur la côte ouest est menacé. Le ministre a un rôle. Nous surveillons la situation. Puisse-t-il avoir le courage d'agir.

Dans son discours, le ministre a fait allusion au smog incontrôlable qu'on retrouve dans les régions urbaines et sur le risque qu'il pose pour les enfants. S'il s'inquiète tant du smog, pourquoi va-t-il interdire l'utilisation du MMT dans l'essence, alors que ses propres fonctionnaires reconnaissent que le MMT réduit les émissions d'oxyde d'azote, l'un des produits qui contribuent le plus au smog urbain.

Il semble que les ministres de l'environnement du gouvernement aient pris des décisions davantage en fonction de leur avenir politique qu'en fonction du bien de l'environnement.

Le ministre parle de divers citoyens qui, à titre privé, collaborent de diverses façons à l'assainissement de l'environnement. Tout au cours de cette Semaine de la terre, dans ma région de Burnaby, les bénévoles font ce qu'ils peuvent pour améliorer la situation.

Sur le campus de l'Institut de technologie de la Colombie-Britannique, une campagne de ramassage des déchets est en cours et elle englobera le ruisseau Guichon. D'autres personnes recueillent de l'argent pour la Société pour la protection des parcs et des sites naturels du Canada en obtenant des contributions et en marchant ou courant les cinq kilomètres que compte la boucle montagneuse de Burnaby, qui commence sur le campus de la Simon Fraser University.

On va restaurer l'habitat des poissons à New Westminster, dans le ruisseau Brunette. Les gens de tout le pays feront tout en leur pouvoir pour améliorer la situation dans leurs localités respectives. Malheureusement, cela ne suffira pas. Il y a de nombreux projets à grande échelle qui sont trop importants pour que les bénévoles puissent s'en acquitter seuls.

Jeudi dernier, le Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada a ajouté 16 nouvelles espèces à la liste de ces espèces pour le Canada. Les Canadiens voudront trouver une solution au problème des espèces menacées de disparition.

L'année dernière, l'ancienne ministre de l'Environnement a soumis une proposition. Elle a dit que c'était la solution et qu'on pourrait facilement l'adopter. La proposition laissait à désirer à tous les égards. Non seulement on ne s'attaquait pas au problème le plus grave, la préservation de l'habitat des espèces, mais la loi proposée n'aurait touché qu'à peine 4 p. 100 des terres du Canada. Si la vice-première ministre croit que les animaux respectent les frontières provinciales et fédérales, je tiens à lui dire alors qu'elle a bu trop d'eau provenant du port de Hamilton.

Si le nouveau ministre de l'Environnement, qui a parlé avec tant d'éloquence tout à l'heure du fait que les Canadiens veulent une action nationale pour conserver la nature, croit vraiment en ce qu'il dit, il n'aura alors aucun mal à garantir à la Chambre qu'une nouvelle loi sur les espèces menacées d'extinction empêchera qu'on n'ajoute d'autres espèces à la liste des espèces menacées par l'activité humaine.

Les Canadiens sont conscients du fait que l'actuel ministre de l'Environnement a beaucoup de travail devant lui. Ils savent également que la ministre précédente a créé plus de problèmes qu'elle n'en a réglé.

Aujourd'hui, en ce Jour de la terre, le ministre actuel a une occasion en or de replacer l'environnement du Canada sur la bonne voie. Ainsi, je l'exhorte à écouter ce que les gens de la base ont à lui dire et à permettre la tenue de tests scientifiques indépendants chaque fois que c'est nécessaire, ainsi qu'à utiliser ce que la science a de mieux à offrir dans le processus de prise de décisions plutôt que d'agir par simple opportunisme politique.

Nous voulons tous faire ce qu'il y a de mieux pour l'environnement. Durant le mandat du ministre, pouvons-nous nous attendre à des résultats plutôt qu'à une politique basée sur de beaux discours et de fausses promesses, qui consiste à ne donner aucune suite aux rapports présentés. Le pays attend.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 14e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la nomination de membres et de membres associés de divers comités.

Si la Chambre y consent, je proposerai l'adoption du 14e rapport plus tard aujourd'hui.


1774

LA LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

L'hon. Sergio Marchi (ministre de l'Environnement, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-29, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse.

-Monsieur le Président, je désire préciser que ce projet de loi a la même forme qu'avait le projet de loi C-94 à la prorogation de la première session de la 35e législature. Par conséquent, je demande que ce projet de loi soit rétabli, conformément à l'ordre spécial adopté le 4 mars 1996.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): La Présidence est d'avis que ce projet de loi est dans le même état qu'était le projet de loi C-94 au moment de la prorogation de la première session de la 35e législature.

En conséquence, conformément à l'ordre adopté le lundi 4 mars 1996, le projet de loi est réputé avoir été lu une deuxième fois, étudié par le Comité permanent de l'environnement et du développement durable, avoir fait l'objet d'un rapport sans amendement et adopté à l'étape du rapport avec des amendements.

* * *

(1530)

[Traduction]

LA LOI SUR LES RELATIONS DE TRAVAIL DANS LA FONCTION PUBLIQUE

L'hon. Sergio Marchi (pour le leader du gouvernement à la Chambre des communes et solliciteur général du Canada) demande à présenter le projet de loi C-30, Loi modifiant la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.

-Monsieur le Président, au nom de notre collègue, le solliciteur général du Canada, je tiens à préciser que ce projet de loi a la même forme qu'avait le projet de loi C-58 à la prorogation de la première session de la 35e législature et, par conséquent, je demande que ce projet de loi soit rétabli, conformément à l'ordre spécial adopté le 4 mars 1996.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

Le président suppléant (M. Kilger): La présidence reconnaît que cette mesure législative a la même forme que le projet de loi C-58 à la prorogation de la première session de la 35e législature.

En conséquence, conformément à l'ordre adopté le lundi 4 mars 1996, le projet de loi est réputé avoir été lu une deuxième fois et renvoyé au Comité permanent des opérations gouvernementales et que rapport en a été fait sans propositions d'amendement.

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que le 14e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

Le président suppléant (M. Kilger): Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

* * *

[Français]

PÉTITIONS

LA LOCATION AUTOMOBILE

M. René Laurin (Joliette, BQ): Monsieur le Président, je désire déposer une pétition signée par près de 250 personnes qui sont membres ou employées de l'Association des concessionnaires d'automobiles de Joliette et qui s'opposent à l'entrée des banques sur le marché de la location automobile.

Les signataires demandent au gouvernement de ne pas modifier la Loi sur les banques et de maintenir la situation actuelle, c'est-à-dire interdire aux banques l'incursion dans le domaine de la location automobile, ce qui constituerait une menace très sérieuse pour la viabilité de la majorité des concessionnaires d'automobiles et pour des centaines d'emplois liés à cette entreprise.

L'IMMIGRATION

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, je dépose une pétition désirant attirer l'attention du gouvernement sur le fait, en toxicothérapie, que l'organisme Le Patriarche Inc. connaît actuellement des difficultés à faire entrer au pays des bénévoles puisque les visas nécessaires sont soit refusés, soit accordés avec des délais trop longs.

Le fonctionnement de l'organisme s'en trouve par le fait même remis en question. Une révision des règlements d'Immigration Canada est souhaitée pour permettre aux bénévoles étrangers de venir oeuvrer en toute quiétude au Canada.

M. TRAN TRIEU QUAN

M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans, BQ): Monsieur le Président, comme vous le savez déjà, M. Tran Trieu Quan, de Ste-Foy dans la région de Québec, est actuellement détenu à vie dans une prison du Vietnam et ce depuis deux ans.

Vous trouverez ci-joint une pétition de 260 signataires du comté de Beauport-Montmorency-Orléans qui demandent au gouvernement fédéral d'intervenir le plus rapidement possible pour obtenir la libération de M. Tran Trieu Quan.


1775

J'aimerais que la Chambre des communes s'associe à moi pour soutenir sa famille, qui vit des moments très difficiles.

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions. Les deux premières rappellent que l'article 241 du Code criminel du Canada déclare que quiconque a) conseille à une personne de se donner la mort ou b) aide ou encourage quelqu'un à se donner la mort, que le suicide s'ensuive ou non, est coupable d'un acte criminel et passible d'un emprisonnement maximal de 14 ans, que la Cour suprême du Canada a récemment invoqué l'article 241 et que, si la disposition était supprimée ou modifiée, cette protection n'existerait plus.

(1535)

Les pétitionnaires prient humblement la Chambre de ne prendre aucune mesure qui aurait pour effet de modifier ou de supprimer cet article.

LES PRIX DE L'ESSENCE

M. John Cummins (Delta, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition établit que l'accès à une source énergétique d'un prix raisonnable aide les Canadiens à compenser le prix élevé du transport dans un pays aussi vaste, que la mobilité est un droit fondamental et une nécessité économique, que 52 p. 100 du prix de l'essence représentent des impôts, que le gouvernement réinvestit dans le réseau routier moins de 5 p. 100 de ses recettes fiscales et que deux comités du Parlement ont recommandé deux hausses des taxes fédérales sur l'essence de 1,5 p. 100 et de 2 p. 100.

Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de ne pas augmenter la taxe d'accise fédérale sur l'essence et envisage sérieusement de réaffecter ses recettes actuelles de manière à reconstrure le réseau routier canadien qui est dans un état lamentable.

LE CODE CRIMINEL

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour présenter au Parlement une pétition signée par 210 de mes électeurs de Red Deer.

Les pétitionnaires estiment que le Canada doit adopter une politique de tolérance zéro à l'égard des individus qui conduisent avec les facultés affaiblies par l'alcool ou les drogues, et qu'il faut accorder aux victimes la priorité que justifie la déclaration de la victime avant d'établir la peine de l'individu reconnu coupable d'avoir conduit avec les facultés affaiblies.

Par conséquent, les pétitionnaires-et je souscris à leur requête-prient humblement le Parlement d'apporter immédiatement au Code criminel des modifications qui feront en sorte que les peines imposées aux individus reconnue coupables d'avoir conduit avec les facultés affaiblies ou d'avoir blessé ou tué des gens alors qu'ils conduisaient dans cet état, reflètent bien la gravité du crime et la politique de tolérance zéro adoptée par le Canada face à ce type de crime.

L'AIDE AU SUICIDE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter au nom des électeurs de Simcoe-Centre.

La première porte sur l'euthanasie. Les pétitionnaires demandent au Parlement de n'apporter au Code criminel aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre l'aide au suicide ou l'euthanasie.

L'ÂGE DU CONSENTEMENT

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la deuxième pétition porte sur les dispositions de la loi concernant l'âge du consentement. Les pétitionnaires demandent au Parlement de fixer l'âge du contentement à 18 ans afin de protéger les enfants contre l'exploitation et les abus.

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Ed Harper (Simcoe-Centre, Réf.): Monsieur le Président, la troisième pétition, signée par 152 personnes, demande au gouvernement du Canada de ne pas modifier la loi sur les droits de la personne pour y inclure l'expression «orientation sexuelle» parmi les motifs illicites de distinction. Les pétitionnaires craignent que cela n'ait pour effet de reconnaître aux homosexuels les mêmes avantages et les mêmes privilèges sociaux qu'aux gens mariés.

LA RÉGION DE LA CAPITALE NATIONALE

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition que près de 1 000 personnes ont signée à la suite d'un événement qui est survenu dans la capitale nationale, l'an dernier, lorsque la Commission de la capitale nationale a voulu vendre des parcelles d'espaces verts et de la ceinture verte de la capitale nationale.

Les pétitionnaires signalent à la Chambre que, lorsque Jacques Gréber a rendu public son plan pour la capitale nationale en 1950, il devait, conformément aux directives du Cabinet, former le Mémorial national de guerre à la mémoire de ceux qui ont participé aux guerres et qui ont défendu le Canada.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de veiller à ce que cet engagement pris à l'époque soit respecté tout comme la vocation des espaces verts de la capitale nationale à titre de Mémorial national de guerre et que ces espaces ne soient ni cédés ni vendus.

LES SOINS DE SANTÉ

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, les signataires de ma deuxième pétition ont écrit avant le dépôt du budget pour dire que, selon eux, les prestations des régimes de soins médicaux et dentaires ne devraient pas être imposables. Je suis certaine qu'ils se sont réjouis autant que moi de la décision du ministre de ne pas les imposer.

Les pétitionnaires demandent toutefois au Parlement de n'envisager aucune modification de cet ordre avant que n'ait été effectuée une étude des répercussions que cela aurait sur la santé des Canadiens.

LE SRI LANKA

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma troisième pétition vient d'un groupe de Canadiens


1776

d'origine sri-lankaise qui demandent au Canada de rester neutre par rapport au Sri Lanka et au conflit qui le déchire, qui lui demandent d'aider au règlement du conflit opposant le gouvernement sri-lankais au LTTE, groupe représentant les Tamouls, et qui réclament notamment la libération de M. Suresh.

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter. La première vient de citoyens de Calgary, en Alberta.

Ces pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion du foyer et le soin d'enfants d'âge préscolaire sont une profession honorable qui n'a pas été reconnue à sa juste valeur dans notre société.

(1540)

Ils prient donc le Parlement de prendre des mesures pour éliminer la discrimination contre les familles qui choisissent de prendre soin, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques ou de personnes âgées.

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Ma seconde pétition vient de Sarnia, en Ontario.

Ces pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut causer des problèmes de santé ou diminuer les capacités de la personne qui en consomme. En outre, ils signalent à la Chambre que l'on peut éviter complètement le syndrome d'alcoolisme foetal et d'autres malformations congénitales causées par l'alcool en ne consommant pas d'alcool pendant la grossesse.

Ils prient donc le Parlement d'adopter une loi qui exigerait que soient apposées des étiquettes sur les contenants de boissons alcoolisées pour prévenir les femmes enceintes et les autres des risques liés à la consommation d'alcool.

Le président suppléant (M. Kilger): Je tiens à informer la Chambre que, en raison de la déclaration ministérielle, les initiatives ministérielles seront prolongées de 20 minutes.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondrons à la question no 7 aujourd'hui.

[Texte]

Question no 7-Mme Wayne:

Sur le nombre total des anciens combattants de la marine marchande qui touchent des prestations: a) combien touchent des pensions en vertu de la Loi sur les pensions, b) combien reçoivent des soins (à l'hôpital ou à la maison), c) combien ont une carte santé, d) combien reçoivent un supplément de revenu en vertu du nouveau projet de loi C-84 concernant les civils, e) comme cette loi ne comporte pas de disposition transitoire, combien d'anciens combattants de la marine marchande sont toujours couverts et touchent des prestations en vertu de l'ancienne loi, f) combien de ces anciens combattants ont fait une demande de prestations et combien de ces demandes ont été rejetées?
L'hon. Lawrence MacAulay (secrétaire d'État (Anciens combattants) (Agence de promotion économique du Canada atlantique), Lib.): a) 282 le 31 décembre 1995 (y compris les survivants); b) 2 097 le 31 décembre 1995; c) 2 097 le 31 décembre 1995; d) 483 le 31 décembre 1995 (y compis les survivants); e) les anciens combattants de la marine marchande, comme tous les anciens combattants, doivent présenter une demande de prestations avant que leur admissibilité quant à leurs états de services soit déterminée. On ne peut connaître le nombre de clients admissibles en vertu de la législation en vigueur avant 1992 et qui seraient admissibles comme anciens combattants de la marine marchande s'ils présentaient une demande aux termes de la nouvelle législation; f) des 648 demandes de pension pour invalidité reçues au 31 décembre 1995, 351 ont été rejetées. Au 31 mars 1996, il y avait 3 109 demandes d'allocations d'anciens combattants, y compris les traitements seulement, dont 756 furent rejetées. Au 31 mars 1996, il y avait 1 212 demandes à l'égard du Programme pour l'autonomie des anciens combattants, dont une a été rejetée.

[Traduction]

M. Zed: Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

M. Elwin Hermanson (Kindersley-Lloydminster, Réf.): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je souligne que les questions nos 8 et 9 sont inscrites au Feuilleton à mon nom depuis le 28 février, soit depuis 53 jours. En outre, la question no 9 est identique à une question que j'avais posée au cours de la dernière session. Elle est restée au Feuilleton pendant, je crois, plus de 150 jours sans qu'on y réponde.

Le secrétaire parlementaire précédent du leader parlementaire m'avait donné l'assurance que des agents de son ministère travaillaient d'arrache-pied à la préparation de la réponse et que je l'obtiendrais sous peu.

Plusieurs semaines ont passé et je n'ai rien obtenu. Il est inacceptable que nous ne puissions pas obtenir les renseignements dans des délais raisonnables.

Le président suppléant (M. Kilger): Le secrétaire parlementaire veut-il expliquer à la Chambre ce qui se passe dans le cas soulevé par le député de Kindersley-Lloydminster.

M. Zed: Monsieur le Président, j'essaierai, comme nous le faisons tous de ce côté-ci de la Chambre, d'obtenir les renseignements qu'il demande. Nous ferons notre possible pour obtenir les renseignements au moment opportun.

Le président suppléant (M. Kilger): Les questions sont-elles reportées?

Des voix: D'accord.

> 1777


1777

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LE MINISTÈRE DE LA SANTÉ

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois, soit lu pour la troisième fois et adoptée.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens dans le débat sur le projet de loi C-18, qui était le projet de loi C-95 avant la prorogation de la session précédente. Il n'y a pratiquement pas de différences entre les deux projets de loi. Je me demande d'ailleurs pourquoi la session a été prorogée. Cette prorogation était une farce.

Il s'agit d'un projet de loi d'ordre administratif que nous pouvons appuyer et que nous appuierons. Il ne fait que fusionner deux ministères, soit le ministère de la Consommation et des Affaires commerciales et le ministère de la Santé nationale et du Bien-être social. Le gouvernement veut maintenant appeler le nouveau ministère le ministère de la Santé.

Puisque le projet de loi concerne le nouveau ministère de la Santé, je voudrais formuler quelques observations et quelques recommandations au sujet de la santé du pays et de la santé du gouvernement, et sur ce que le gouvernement pourrait faire pour améliorer les soins de santé des Canadiens. Je crains que le nouveau ministre de la Santé fasse comme son prédécesseur et n'ait pas la situation en main, qu'il n'exerce pas la responsabilité ministérielle et qu'il laisse ses fonctionnaires décider à sa place de la ligne de conduite à adopter.

De plus en plus de gens s'inquiètent des longues périodes d'attente dans les hôpitaux et ont de la difficulté à obtenir des soins, pendant que le ministre assiste à des vins et fromages et parle de la possibilité d'interdire l'importation de fromages non pasteurisés.

C'est insensé. Les fonctionnaires avancent un argument qui est sensé avoir un fondement scientifique, mais les partis d'opposition ne savent pas où ils veulent en venir. Si ces fonctionnaires avaient raison, il y aurait de nombreux problèmes en Europe, non? Les Européens mangent des fromages fait de lait non pasteurisé depuis 500 ans et personne n'en meurt. Est-ce que les Canadiens en meurent? Où sont les faits? À quoi le ministre de la Santé essaie-t-il de jouer?

(1545)

La question du jour est le lait non pasteurisé, mais on laisse de côté celle du tabagisme et les pétitions présentées aujourd'hui au sujet de l'alcool et du cancer du sein. Ce sont pourtant là les véritables problèmes, pas le fromage fait de lait non pasteurisé. Parlons plutôt du sang contaminé. Je reviendra d'ailleurs à la commission Krever tout à l'heure.

Quand il est question de la santé et du bien-être des Canadiens, j'ai l'impression que le gouvernement fait preuve d'hypocrisie et de duplicité. Les députés ministériels parlent des cinq principes des soins de santé et de ce qu'ils entendent faire pour les protéger. Ils se croient les seuls à pouvoir le faire. Qui va payer la note? Les députés réformistes ont fait des recommandations au sujet des soins de santé, mais tout ce que les libéraux trouvent à faire, c'est de se moquer et de nous accuser de prôner une politique radicale.

J'ai accusé le gouvernement d'hypocrisie et de duplicité. Je vais tenter d'en faire la démonstration par des faits et des preuves. Je vais comparer un aspect du budget libéral à notre budget prévoyant d'éliminer le déficit en trois ans.

Sur le chapitre des dépenses gouvernementales et des dépenses non sociales, nous aurions sans doute effectué des compressions de 10 milliards de dollars, comme l'a proposé le gouvernement. En 1994-1995, le gouvernement a dépensé 17 milliards dans les programmes sociaux, c'est-à-dire le secteur du financement des programmes établis qui regroupe les soins de santé, l'éducation et le Régime d'assistance publique du Canada, autrement dit le bien-être social. Les compressions proposées dans notre budget en ce qui concerne les soins de santé, l'éducation et le bien-être social totalisaient 3,5 milliards de dollars. Le gouvernement fédéral a fait dans ces domaines des compressions de 6,6 milliards de dollars, 3,1 milliards de plus.

Qui pratique une politique radicale? Qui donne moins d'argent aux programmes les plus importants pour les Canadiens? La santé et l'éducation constituent la base essentielle de toute structure, en particulier de la structure sociale du Canada.

Quand j'ai fait du porte-à-porte, j'ai expliqué aux gens que nous devions réduire les dépenses dans tous les secteurs afin de maintenir le niveau de financement dans ceux de la santé et de l'éducation. Même au sein de notre caucus, beaucoup ont soutenu qu'il ne devrait pas y avoir de compressions dans ces secteurs. Le contre-argument consistait à montrer au public canadien que la dette et le coût élevé du service de la dette obligeaient à limiter les crédits consacrés à l'ensemble des programmes et donc également la santé et l'éducation.

Nous avons demandé aux établissements dans ces deux secteurs de voir ce qui pouvait être rationalisé de façon à éliminer les dépenses inutiles. L'idée ne plaît pas, mais le gouvernement a fait d'importantes compressions. C'est de la duplicité.

Le gouvernement a eu l'hypocrisie de dire qu'il protégerait les soins de santé pour les Canadiens. Il a promis qu'il veillerait à sa transférabilité. Il a accusé le Parti réformiste de vouloir un système à deux vitesses.

Quand il a été institué, le financement des soins de santé par le gouvernement fédéral devait être maintenu au niveau de 50 p. 100. Ce niveau a été ramené à 27 p. 100. À présent, le gouvernement dit qu'il va veiller à ce que le financement soit stable d'ici deux à trois ans. Il nous assure que 11 milliards de dollars iront aux provinces. Qu'est-ce qui garantit aux Canadiens que le gouvernement va le faire?

Pour ce qui est de la santé, j'ai pour le gouvernement fédéral une suggestion qu'il devrait étudier. Nous avons une autre solution. Nous aimons bien insister sur les autres solutions. Après tout, ce projet de loi porte sur la santé. La solution que nous proposons est un régime d'assurance-maladie amélioré. Nous voulons parler d'autres options et améliorations que le gouvernement fédéral pourrait apporter au système, plutôt que d'avoir peur de faire quelque chose. On a besoin d'idées et de débats. Ce n'est pas un projet final du Parti réformiste. Ce n'est pas une position ferme non plus, mais


1778

je crois qu'on ne devrait pas la rejeter d'emblée comme le font les libéraux, en la qualifiant de système à deux niveaux.

Nos objectifs sont d'assurer la stabilité du financement et d'affecter le gros de nos ressources aux services essentiels. Si l'Association médicale canadienne, le public et les spécialistes pouvaient nous aider à définir ce qui est essentiel, nous pourrions aller de l'avant avec des options allant plus loin que le régime d'assurance-maladie de base, options qui pourraient réduire les files d'attente actuelles.

(1550)

Le régime d'assurance-maladie est essentiel et j'y tiens. Je défendrai toujours son existence et je paierai sans rechigner tout ce qu'il faut d'impôts pour le soutenir. Toutefois, nous devons le rendre efficace et faire en sorte d'avoir de nouveau le meilleur filet de sécurité sociale du monde en matière de soins de santé.

Nous devons mettre un terme au gel de financement actuel. Si nous le pouvons, nous devons y consacrer plus d'argent et envisager le rétablissement des transferts par habitant au niveau de 1992-1993 plutôt que de faire comme les libéraux, en coupant sans que ça paraisse.

Nous devrions peut-être envisager de convertir les transferts de capitaux restants en transferts de points d'impôt. Il faudrait indexer les transferts aux tendances dans la croissance de l'économie et de la population. Il faut rester en contact avec ce qui se passe dans la société.

Une autre suggestion était de diriger les ressources. Les Canadiens doivent définir ce que sont les services de soins de santé essentiels et indispensables. Pour une même fracture, un type de plâtre pourrait coûter plus cher qu'un autre. Tâchons de garantir le prix du plâtre. Si d'autres services sont nécessaires, il pourrait y avoir d'autres moyens de les payer. Il se peut aussi que d'autres intéressés aient des suggestions à faire sur la manière dont on pourrait trouver des fonds pour ce genre de choses.

Nous pourrions faire des choix en dehors du régime public. Nous devrions envisager d'éliminer les restrictions qui existent dans la loi et qui interdisent l'accès à tout service de santé non financé par le régime public.

C'est une chose que le gouvernement fédéral s'entête à refuser. Si le régime public ne répond pas aux besoins des Canadiens, ces derniers devraient avoir la possibilité d'exercer un choix, en se trouvant des services à l'extérieur du système des services essentiels.

Si les Canadiens pouvaient avoir accès à des services privés, ils auraient la responsabilité de s'arranger pour les financer, soit par l'intermédiaire de régimes souscrits par les employeurs et les employés, soit par des assurances souscrites auprès de tierces parties, soit avec leur propre argent.

Cela donnerait de la flexibilité aux provinces. Les cinq principes de l'assurance-maladie pourraient continuer d'exister, mais, au moins, on donnerait aux provinces une certaine marge de manoeuvre. Ce sont des choses que le gouvernement refuse d'accepter et même d'envisager.

J'ai vu une copie de quelques points de discussion que le gouvernement fédéral a donnée à 177 de ses députés pour leur permettre de répondre à certaines questions: comment se vanter des révisions au régime de pensions des députés dont on parlait avec tant de fierté dans le livre rouge, comment dire qu'on a éliminé les cumuls et comment on a fait ceci et cela. Pourtant, en dépit de tous ces commentaires glorieux, le gouvernement a toujours un régime de pensions qui est quatre ou cinq fois supérieur à celui que l'on trouve dans le secteur privé et il essaie toujours de justifier les millions de dollars que les députés recevront après avoir quitté la Chambre en prétextant que le salaire de 64 000 $ que l'on touche ici est modique.

Je vais vous lire un de ces points de discussion qui montre l'hypocrisie et la duplicité du gouvernement. Je vais vous donner des exemples précis: «Il est toujours intriguant de voir la droite pratiquer ce qu'elle prêche. Les conservateurs de l'Ontario ont proposé une hausse de 5 p. 100 du traitement de leurs députés, en même temps qu'ils réduisaient le financement des hôpitaux et des programmes sociaux. Pendant ce temps, le député réformiste de Calgary-Centre propose de doubler le salaire des députés pour le porter à 150 000 $, alors que son parti préconise un système de santé à deux vitesses et la démolition des pensions des personnes âgées. Notre gouvernement a des priorités différentes.»

Les libéraux se font dicter ce qu'ils doivent dire à la population canadienne. C'est d'une telle hypocrisie et d'une telle duplicité que je me dois en parler. Je m'oppose à cette partisanerie politique et au jeu politique.

On dit que les conservateurs provinciaux ont proposé une augmentation de 5 p. 100 du traitement des députés, alors qu'ils ont simplement annoncé qu'ils avaient transformé une partie de la pension des députés en indemnité publique et imposable que les députés pourront utiliser à leur gré. Regardez vous-mêmes, vous verrez que c'est tout le contraire, c'est une réduction de 5 p. 100 du traitement des députés provinciaux, ce que confirme le ministère de la Consommation et des Affaires commerciales qui administre le régime.

(1555)

Et le gouvernement a l'audace de dire que les gouvernements provinciaux de droite sabrent dans les budgets des hôpitaux et les programmes sociaux. Désolé, mais ne sait-il pas qui leur donne l'argent? Ne sait-il pas qui est censé contribuer au financement des programmes sociaux, des hôpitaux et de l'éducation? Qui est-ce qui reçoit 7 milliards de moins pour l'éducation, les soins de santé et le bien-être? Ce sont les provinces.

Le gouvernement se vante des compressions qu'il a effectuées dans les dépenses de programmes. Le fait est qu'il a donné moins d'argent aux provinces, si bien que celles-ci doivent maintenant trouver des moyens d'offrir les mêmes services de qualité qu'auparavant, même si elles disposent de moins d'argent.

Qui se fait lancer des pierres? Qui doit affronter les rassemblements et les groupes d'intérêts spéciaux qui se plaignent de la situation? Ce sont les gouvernements de l'Alberta et de l'Ontario. Ce sont eux qui sont aux prises avec les manifestants, pas le


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gouvernement fédéral. Celui-ci a su s'y prendre en réduisant les paiements de transfert aux provinces, en obligeant celles-ci à rechercher les solutions qui s'imposent, en culpabilisant les gouvernements provinciaux, tout en augmentant les paiements de transfert aux particuliers.

C'est le gouvernement fédéral qui a sabré dans les budgets des hôpitaux et procédé à des coupes sombres dans le domaine de l'éducation, y siphonnant 6,6 milliards de dollars, alors que nous nous serions contentés de 3,5 milliards de dollars.

Le gouvernement parle de rémunération. Le gouvernement m'accuse, moi, le député de Calgary-Centre, d'avoir proposé que l'on double le traitement des députés. Voilà encore une déclaration hypocrite, ambiguë et intéressée. Tous les députés savent quel est le montant de la rémunération dont nous bénéficions à la Chambre. Ils savent que la rémunération s'élève à 64 000 $ par an. Et puis il y a les deux allocations non imposables que nous touchons tous et qui ensemble équivalent à 29 000 $. Si cet argent était imposé, comme dans le cas de tous les autres Canadiens, comme les professeurs et les enseignants, cela représenterait 120 000 $.

Je n'ai pas recommandé de doubler le salaire pour le porter à 120 000 $. Je dis que les députés reçoivent déjà un salaire qui est probablement de l'ordre de 120 000 $ à 130 000 $.

Je demande seulement de cesser de justifier ce régime de pensions des députés très généreux en fonction d'une partie de la rémunération, alors que cette dernière comprend davantage de parties que ce que le gouvernement prétend. C'est une attitude hypocrite, trompeuse et intéressée. On ne dit pas toute la vérité aux Canadiens. En ce qui me concerne, je ne l'accepterai pas.

Je pense qu'il est stupide que les députés utilisent des arguments de ce genre pour convaincre les gens des sacrifices qu'ils ont consentis, pour justifier les millions de dollars qu'ils vont recevoir après avoir quitté la Chambre. Je trouve cela offensant et je ne défendrai jamais une chose du genre.

J'ai renoncé au régime de pensions des députés. Je ne serai jamais admissible à un régime de ce genre, peu importe le nombre d'années où je siégerai ici. Je dois prendre mes propres mesures. Je suis reconnaissant au gouvernement de cela, mais, même là, il a joué un jeu stupide. Il a retiré aux futurs députés la possibilité de se retirer du régime. Il n'a donné cette chance qu'aux actuels députés réformistes honnêtes qui ont défendu un principe et ont joint l'acte à la parole, contrairement au gouvernement.

Le gouvernement dit qu'il a des priorités différentes. Vous pouvez en être certains. Le gouvernement libéral a des priorités bien différentes. Ses priorités consistent à ne pas tenir ses promesses, à dénaturer la vérité ou à l'exagérer, à se vanter auprès de la population de ses réalisations.

Il viole ses promesses. Il a promis de protéger les fonctionnaires et il en a met 44 000 à pied. Il s'est engagé à renégocier l'ALENA et il y a souscrit tel quel. Nous connaissons tous la promesse faite au sujet de la TPS. On expulse certains de nos vis-à-vis du gouvernement parce qu'ils savent ce que les ministériels ont dit lorsqu'ils ont fait du porte-à-porte. Ils n'ont pas lu alors la page 20 du livre rouge. Tous ces députés hypocrites le savent.

Lorsque le premier ministre intervient à la Chambre aujourd'hui et dit qu'il faut lire la page 20, que c'est ce que son gouvernement a dit, ce sont des inepties et il le sait. Ce n'est pas ce que les ministériels ont dit aux électeurs durant la campagne. Ce sont des promesses non tenues. C'est une attitude hypocrite, trompeuse et intéressée. On ne dit pas carrément la vérité aux Canadiens.

Pour ce qui est de déformer la vérité, le gouvernement affirme que les réformistes supprimeraient 25 milliards de dollars en un an. Ce n'est pas vrai. Nous l'aurions fait sur trois ans.

(1600)

Des voix: Oh, oh.

Le président suppléant (M. Kilger): Je signale au député de Calgary-Centre que j'ai beaucoup de mal à suivre quand tout le monde parle en même temps.La qualité du débat à la Chambre gagne beaucoup quand on entend clairement la personne qui a la parole, sans qu'il y ait d'interruption.

M. Silye: Monsieur le Président, je sais que je touche une corde sensible quand ils se mettent à chahuter. Je sais alors que je dis la vérité.

Je citais des exemples. J'essaie de m'en tenir aux faits. Je ne cherche ni à provoquer ni à exagérer. Je donne des exemples de faits dénaturés.

Qui pratique une politique radicale? Ce n'est pas nous. C'est le gouvernement qui se décharge sur les provinces et qui se vante de ses réalisations en parlant de l'élimination du déficit, de la réduction du déficit, de la victoire sur le déficit. Peut-on dire qu'on a vaincu le déficit et qu'on a mis de l'ordre dans les finances du Canada, quand on a un déficit de 30 milliards de dollars, quand on prévoit un déficit de 24 milliards de dollars pour l'année qui vient et quand on augmente la dette de 111 milliards de dollars? Nous avons vraiment besoin d'un nouveau ministre des Finances. Nous avons besoin d'un autre PDG et d'un autre vice-président aux finances parce que les gens en place servent bien mal le Canada.

Le pire, c'est que le gouvernement a des priorités différentes qui me frustrent vraiment. Il a comme priorité la tentative de camouflage du ministère de la Défense nationale concernant la mission en Somalie. Le ministre donne des instructions qui ne sont même pas suivies. Est-ce comme cela qu'on commande le respect? Il ne contrôle plus son ministère, comme le ministre de la Santé d'ailleurs.

Nous avons mis sur pied la commission Krever pour découvrir la vérité. J'ai reçu une lettre d'une femme dont le mari est mort par suite d'une transfusion de sang contaminé. La femme elle-même est atteinte aujourd'hui parce qu'on n'a pas été franc avec elle et qu'on ne lui a pas dit ce qui se passait. On ne lui a pas fourni les renseignements nécessaires pour prévenir son infection. Cette femme va mourir et que fait le gouvernement? Que fait le ministre de la Justice? Ils obéissent à tous ces groupes imbéciles qui veulent interdire la publication des constatations de la commission Krever. Est-ce comme cela qu'on sert la population canadienne?

Quelque chose a marché de travers. Les Canadiens n'ont-ils pas le droit de savoir ce qui a échoué? Nous ne voulons pas emprisonner quelqu'un, nous voulons simplement la vérité. Nous voulons savoir ce qui est arrivé et quand c'est arrivé. Le gouvernement ne devrait


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pas être embarrassé. Si les libéraux veulent un gouvernement de ce genre, si ce sont leurs priorités, ils peuvent bien les garder pour eux.

Je ne veux pas être lié à tout cela. C'est frustrant. J'ai entendu les libéraux dire une chose quand ils étaient dans l'opposition. Je l'ai lu et je l'ai entendu et je constate qu'ils sont pareils aux conservateurs. Tous ces gens font ce qu'ils veulent quand ils sont au pouvoir. C'est inadmissible.

Le Canada mérite la justice. Il mérite la franchise de ses politiciens. Il mérite plus que des paroles vides, des promesses d'élection qui se transforment, une fois la victoire obtenue, en rires et en priorités différentes. Les Canadiens méritent mieux et ils peuvent avoir mieux. Il y a plus d'intégrité au sein des simples députés qu'il y en a sur la première rangée des ministériels.

Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Monsieur le Président, il est intéressant que le député ait parlé du système d'approvisionnement en produits sanguins de notre pays. L'importante commission d'enquête Krever a été constituée parce que les libéraux, alors dans l'opposition, l'ont demandé et parce qu'ils ont jugé bon de la mettre sur pied.

La collègue du député, la députée de Port Moody-Coquitlam, a parlé longuement de l'approvisionnement en produits sanguins plus tôt dans le débat. Je tiens à donner à tous les députés l'assurance que l'existence, dans notre pays, d'un système sûr et sécuritaire d'approvisionnement en produits sanguins revêt, pour moi aussi, une importance cruciale. C'est une question que je connais assez bien. Il s'agit d'un épisode de notre histoire qui est horrible et d'un problème que nous devons régler.

Les deux députés ont oublié, ou peut-être ont-ils décidé de passer sous silence, le fait que le gouvernement fait preuve de leadership dans le dossier de l'approvisionnement en produits sanguins. Le 11 mars, le ministre de la Santé a annoncé son intention de mettre en place un plan d'action en prévision du dépôt du rapport final du juge Krever. Par ailleurs, le ministre de la Santé a déjà donné suite à un certain nombre de recommandations provisoires du juge Krever, afin d'éliminer les problèmes du système.

Voilà un dossier qui exige du leadership. C'est ce que les députés réformistes et de nombreux Canadiens ont demandé: du leadership. Dans le cadre du débat actuel, je n'ai pas entendu les réformistes expliquer ce qu'ils feraient dans ce dossier crucial. Peut-être les députés d'en face pourraient-ils dire expressément à la Chambre ce qu'ils proposent pour améliorer notre système d'approvisionnement en produits sanguins? De l'avis du député, que pouvons-nous faire pour faire preuve de leadership? Que ferait son parti, s'il était au pouvoir, à l'égard de l'approvisionnement en produits sanguins?

(1605)

M. Silye: Monsieur le Président, je félicite la députée de sa position au sujet de l'enquête sur le sang contaminé. Je ne trouve pas grand-chose à redire à ce qu'elle a dit. Une chose me tracasse cependant, et je me demande si elle a compris à quoi je faisais allusion en parlant de duplicité, en parlant de gens qui disent une chose et font tout autre chose.

La députée prend la parole et fait grand cas du fait que c'est le Parti libéral qui a ordonné la tenue de cette enquête. Elle néglige ensuite d'aller plus loin. Elle est comme le ministre des Finances; il ne fait les choses qu'à moitié et ne va jamais jusqu'au bout.

Voici l'autre moitié: pourquoi le gouvernement ne laisse-t-il pas publier l'information que recueille cette commission d'enquête sur l'affaire du sang contaminé? Pourquoi le gouvernement musèle-t-il la commission? La députée peut bien tirer gloire du fait que son parti a mis la commission sur pied, mais pourquoi ne révèle-t-on pas cette information nouvelle?

La députée demande ce que je ferais si j'étais ministre de la Santé. J'aurais besoin de réunir tous les faits avant de pouvoir prendre une décision. Il est cependant une chose que je ferais: je veillerais à mettre un programme en place avant que toutes les victimes ne soient décédées. Il y en a peut-être jusqu'à 12 000, je ne sais pas.

Un ami personnel a été infecté ainsi et est mort très jeune. Il n'était qu'un jeune garçon quand il a reçu une transfusion de sang contaminé. Quand je vois une chose pareille, cela me touche de très près. Les familles de ces victimes sont tout aussi éplorées que celles des victimes de crimes commis à l'aide d'une arme ou à cause de violences physiques. Il s'agit d'un crime grave. Je me serais au moins adressé aux victimes. Je leur aurais dit de quelle façon elles seraient indemnisées et quand, et ce qu'elles pourraient laisser à leur famille après leur décès afin d'assurer leur sécurité pour l'avenir. On n'en fait rien. On néglige de parler aux victimes. C'est cela que les victimes réclament à cor et à cri.

Je ne musèlerais pas le rapport final de la commission. Je la laisserais publier son rapport au moment opportun et je la laisserais déposer ses conclusions, quelles qu'elles soient. Dans le cas de ceux qui sont censés être responsables, ceux qui auraient accompli un bon travail seraient félicités, et ceux qui auraient accompli du mauvais travail seraient réprimandés. Ceux qui seraient coupables d'actions criminelles en paieraient le prix, ni plus ni moins. Beaucoup de gens meurent à cause de cela.

Voilà ce que je ferais. Je ne suis pas un médecin spécialiste. Je sais cependant que des doutes pèsent sur le système et sur un service tout entier du ministère. Quand je pense que j'ai toujours eu beaucoup de respect pour la Société canadienne de la Croix-Rouge. J'ai donné mon sang et je continue de le faire.

Si quelque chose s'est produit, dites-le nous de sorte qu'on ne répète pas la même erreur à l'avenir. Il n'y a rien à cacher. Pourquoi vouloir camoufler la vérité? Voilà pourquoi j'accuse le gouvernement de camouflage. C'est ce qu'il fait.

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, certains des sujets abordés par le député sont très importants. Avant d'être élue à la Chambre des communes, j'oeuvrais dans le domaine de la santé et j'ai travaillé pour la Croix-Rouge sur la scène internationale et dans des systèmes d'approvisionnement en sang partout dans le monde.

Rien ne remplace l'expérience de première main. Au début des années 1980, lorsque nous lisions les documents scientifiques sur le VIH et sur toutes les théories avancées, il fallait prendre des déci-


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sions fondées sur le jugement: la situation est-elle suffisamment grave pour effectuer des tests; les tests sont-ils assez précis pour dépister le virus, si on peut bien parler de virus? C'est un type de microbe encapsulé qui change avec le temps. Ce n'est pas un micro-organisme qui peut être dépisté avec beaucoup de précision, décrit et combattu au moyen d'une potion capable de guérir ou de prévenir la terrible maladie qu'il provoque. Au début des années 1980, les décisions faisaient intervenir beaucoup de jugement. En rétrospective, il apparaît que nous n'avons peut-être pas pris les bonnes décisions au moment où nous aurions dû.

Je rappelle au député de Calgary-Centre que la Croix-Rouge canadienne est une des institutions les plus honorables du monde. C'est une des sources d'approvisionnement en sang les plus respectées.

J'ai travaillé dans le secteur où il y a des maladies transmissibles comme l'hépatite, le SIDA et bien d'autres encore que nous ne pouvons même pas encore dépister. Nous effectuons cependant une batterie de tests suffisamment complète pour pouvoir garantir aux Canadiens et à toute personne ailleurs dans le monde qui fait appel à nos stocks de sang que nous fournissons les meilleurs produits sur le marché aujourd'hui.

(1610)

J'ai travaillé ailleurs dans le monde, pour d'autres systèmes d'approvisionnement en sang. C'est un peu comme un système de navigation aérienne ou de transport maritime. Si nous exigeons un système parfait et à toute épreuve, jamais un seul enfant ne pourrait prendre l'avion pour aller voir les merveilles de Disneyworld. Nous pouvons garantir un produit répondant à de hautes normes de sécurité. Un jour, nous pourrons faire des transfusions en utilisant du sang artificiel capable de transporter l'oxygène dans l'organisme et de garder un être humain en santé sans risquer de lui transmettre de maladies.

La Croix-Rouge canadienne n'est peut-être pas parfaite. Elle n'a peut-être pas décidé assez rapidement, comme le préconisaient des rapports scientifiques internationaux, de tester ses stocks de sang, mais les tests de l'époque n'étaient pas aussi précis et aussi fiables que maintenant.

Le député doit admettre que nous devons être reconnaissants à la Croix-Rouge pour bien des choses et que nous ne pouvons pas nier le respect dont ses produits sanguins jouissent partout dans le monde.

M. Silye: Monsieur le Président, je remercie la députée de ses observations. La passion et l'imagination avec lesquelles elle a défendu la Croix-Rouge canadienne et le système en nous relatant son expérience personnelle sont admirables. Je la complimenterai encore davantage en lui disant que son intervention était bien meilleure que le discours tout préparé qu'elle a livré pour le ministère il y a quelques semaines. Ma collègue devrait peut-être exprimer son point de vue personnel plus fréquemment. Nous pourrions tous bénéficier de sa sagesse et de sa connaissance. N'en déplaise aux députés, la Chambre en tirerait profit.

La députée sait pertinemment que je ne critique pas la Croix-Rouge, mais bien le système en place. Les renseignements doivent être regroupés et communiqués à bon nombre des personnes qui ont souffert. Les victimes du sang contaminé veulent savoir ce qui s'est passé. C'est tout ce qu'elles souhaitent. Je ne pense pas qu'elles veuillent se lancer dans une chasse aux sorcières, mais simplement connaître les faits. J'ignore pourquoi le gouvernement se plie aux exigences des anciens ministres de la santé, des organismes pharmaceutiques et des personnes qui déposent des requêtes en justice pour empêcher que le rapport ne soit rendu public. Voilà ce que je ne comprends pas.

J'ai voulu démontrer dans le débat actuel que le gouvernement fait preuve d'hypocrisie dans ses actes et de duplicité dans ses discours intéressés. J'ai essayé de le prouver par des exemples précis. Le gouvernement tient souvent de bons discours, souvent très comparables aux nôtres, au point que je jurerais qu'il nous les vole, mais ses actes ne correspondent pas à ce qu'il dit.

Le gouvernement ne rend service ni à la population ni à lui-même en agissant de la sorte. Les Canadiens sont beaucoup plus intelligents que beaucoup de politiciens ne le croient. Enfermés dans notre petit univers, nous avons tendance à croire ce que nous apprennent la télévision, les journaux et les médias nationaux. Nous croyons que c'est ce qui est important. Ce n'est pas le cas. Ce sont nos racines, nos circonscriptions, qui sont importantes. Nous devrions toujours rester en communication avec nos électeurs.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-18, Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois, présenté par le ministre de la Santé. Cette mesure a ostensiblement pour objet de remplacer l'ancien ministère de la Santé nationale et du Bien-être social par le ministère de la Santé et de le réorganiser en conséquence.

Des changements ont donc été apportés au projet de loi initial. L'un de ces changements a trait à la responsabilité ministérielle. Une importante motion a été faite afin que le projet de loi C-18 soit modifié de façon à maintenir la responsabilité ministérielle conformément aux lois du Canada.

(1615)

Le Canada a le meilleur système d'assurance-maladie du monde. C'est indéniable. La Loi canadienne sur la santé repose sur cinq principes. L'un de ces principes est l'universalité. Il a pour but de veiller à ce que tous les Canadiens aient accès aux soins de santé. Je reviendrai là-dessus un peu plus tard.

Le deuxième principe est la gestion publique. Le troisième principe est la transférabilité. Il a pour but de veiller à ce les gens puissent recevoir les soins dont ils ont besoin où qu'ils vivent ou qu'ils se déplacent au Canada. Le quatrième principe est l'accessibilité. Il a pour but de veiller à ce que les Canadiens aient un accès raisonnable aux soins importants dont ils pourraient avoir besoin.


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Le dernier principe est l'intégralité. Cela signifie que notre système d'assurance-maladie doit offrir aux Canadiens un éventail aussi large que possible de soins essentiels.

Ces cinq principes sont ceux dont le gouvernement du Canada et le ministre de la Santé n'arrêtent pas de parler aux Canadiens. Ils n'arrêtent pas non plus de parler des implications du système d'assurance-maladie pour notre pays.

Il a beaucoup été question de la possibilité d'introduire des mesures comme la facturation d'honoraires supplémentaires, le ticket modérateur, et autres. Cependant, cela ne correspond pas à la philosophie ou aux principes de la Loi canadienne sur la santé.

La Loi canadienne sur la santé et les cinq principes sur lesquelles elle est fondée sont un élément très important de l'unité canadienne. C'est ce qui, je crois, a contribué le plus à maintenir le Canada fort et uni. C'est une fibre qui transcende les politiques partisanes, et ce malgré les remarques du député qui a pris la parole avant moi.

La Loi canadienne sur la santé est la représentation des principes du gouvernement du Canada, des principes que nous voulons partager avec tous les Canadiens. Ces principes sont ce qu'il nous faut pour garantir que ceux qui ont le plus besoin de services passent en premier. Nous voulons être sûrs que, quelles que soient les circonstances, les Canadiens ne se sentiront jamais seuls quand leur santé sera en danger où qu'ils auront besoin d'aide sur le plan social.

Nous voulons nous assurer que les Canadiens comprennent que, avec notre régime d'assurance-maladie, le meilleur du monde, ils se font soigner non pas parce qu'ils ont de l'argent mais parce qu'ils sont malades. C'est un principe et une valeur dont je suis très fier, et dont la plupart des Canadiens le sont aussi.

Le député qui a pris la parole avant moi a parlé des longues files d'attente dans les hôpitaux et d'un certain nombre de choses. Je veux seulement commenter brièvement la question des files d'attente. J'ai été, durant un certain nombre d'années, membre du conseil d'administration de l'hôpital de ma collectivité, le Mississauga General Hospital, un centre de 600 lits offrant du personnel qualifié, bien formé et assurant d'excellents soins.

Au cours des dix dernières années, on a assisté à une métamorphose prodigieuse de l'assurance-maladie. Les changements apportés au régime d'assurance-maladie sont importants parce que, les faits sont là, la durée moyenne de séjour des patients dans nos hôpitaux est passée d'environ 7,2 jours à quelque 4,2 jours. C'est la preuve que l'efficacité et la productivité se sont améliorées et que l'hôpital est en mesure d'administrer des soins à moindre coût.

Au cours de cette période, l'hôpital de Mississauga a aussi réduit le nombre de lits de 600 à moins de 500. Toutefois, selon les chiffres, l'hôpital soigne maintenant plus de patients qu'il ne le faisait avec 600 lits. L'un des principaux facteurs expliquant cet état de fait est le changement d'idéologie, avec le virage ambulatoire. Autrefois, on entrait à l'hôpital une journée ou deux d'avance pour se préparer à une intervention chirurgicale, et on restait un peu plus longtemps après. Maintenant, on arrive un peu plus tard, le jour même de l'opération, et l'on s'en retourne assez tôt pour être en convalescence chez soi. Les professionnels de la santé ont constaté que cette façon de faire facilitait le processus de guérison. L'autre aspect du virage ambulatoire, c'est que les gens quittent l'hôpital dès qu'ils ont reçu les services appropriés. Tout cela a entraîné des économies considérables au titre des soins de santé au fil des ans.

(1620)

Le financement des hôpitaux est un champ de responsabilité que se partagent les gouvernements fédéral et provinciaux. Par le truchement des paiements de transfert aux provinces, le gouvernement fédéral assume une part très notable des coûts de santé, mais le régime de soins de santé est administré et géré par les gouvernements provinciaux. Par le truchement de cette administration, des fonds sont alloués pour être utilisés pour des fins d'immobilisation et servir à alimenter les budgets d'exploitation.

C'est aux provinces qu'il appartient de fournir les capitaux appropriés et de générer les revenus d'exploitation nécessaires, selon certaines lignes directrices sur lesquelles elles peuvent exercer un certain pouvoir discrétionnaire. Cependant, il en va tout autrement pour les cinq principes de la Loi canadienne de la santé.

Les économies qui ont été réalisées au cours de bien des années grâce au perfectionnement des technologies, à la prestation des soins et à la médicamentation, au virage ambulatoire et, tout simplement, aux gains de productivité dans le domaine des soins de santé ont été salutaires pour les gouvernements provinciaux. Comme l'avait annoncé le ministre des Finances dans son premier budget, il y a deux ans, des modifications ont été apportées aux paiements de transfert aux provinces, notamment pour ce qui concerne les divers éléments qui les composent. C'est ce qu'on appelle maintenant le Transfert canadien au titre de la santé et des programmes sociaux.

On n'a jamais reconnu que le gouvernement fédéral avait réalisé ces économies ou amélioré l'efficacité de notre réseau de soins de santé. En fait, on les a laissées aux provinces pour leur garantir le type d'outils nécessaires pour maintenir les principes et pour protéger et défendre les principes de la Loi canadienne sur la santé. Maintenant, le gouvernement doit continuer de faire encore mieux avec le peu d'argent dont on dispose pour la santé et le bien-être de tous les Canadiens.

Je voudrais souligner quelques caractéristiques du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Cet instrument et le financement global découlent d'une situation liée à la valeur combinée des transferts pécuniaires aux provinces et des points d'impôt, ou, si vous préférez, la capacité d'imposer au niveau provincial.

Ce qui s'est produit, c'est que la partie pécuniaire de ces transferts commençait à baisser. Dans les cas où les provinces avaient violé certains principes de la Loi canadienne sur la santé, la ministre fédérale de la Santé intervenait et, après avoir donné aux provinces intéressées le temps de prendre les mesures correctrices qui s'imposaient, elle réduisait d'un certain montant les transferts pécuniaires


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à la province tant que celle-ci ne mettait pas fin à une activité particulière.

Tant qu'il y a un élément pécuniaire dans les transferts aux provinces, le gouvernement fédéral a la possibilité de faire appliquer les principes de la Loi canadienne sur la santé. Cependant, il était très clair que, en fin de compte, cette partie pécuniaire allait disparaître. En fait, le gouvernement fédéral n'aurait pas la possibilité de faire respecter les principes de la Loi canadienne sur la santé.

Ainsi, la combinaison des divers niveaux de transfert, non seulement pour la santé, mais également pour l'enseignement postsecondaire et le Régime d'assistance publique du Canada, donne une certaine souplesse, l'argent versé au titre du financement global étant disponible pour une période prolongée.

Depuis, le ministre des Finances a aussi établi un nouvel arrangement dans le cadre du budget qui donne une solide garantie que le fonds ne descende pas sous la barre des 11 millions de dollars.

La responsabilité financière est une question à laquelle le député qui vient d'intervenir voulait consacrer beaucoup de temps. Le gouvernement fédéral s'est continuellement montré fermement engagé à l'égard des cinq principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé. De même, il a toujours été fermement engagé à faire en sorte qu'un montant en espèces serait mis à la disposition des provinces pour qu'elles continuent à gérer le système de santé des Canadiens et à respecter les cinq principes énoncés dans la Loi canadienne sur la santé.

Je voudrais faire une observation sur d'autres points, à titre de membre du Comité permanent de la santé depuis janvier 1994. Le comité a examiné diverses questions auxquelles le député s'est reporté, dont les cigarettes. Les membres du comité se sont penchés sur la question des étiquettes de mise en garde concernant la santé sur les produits du tabac, ainsi que sur la question des emballages neutres. Le comité a étudié diverses initiatives, parce que, selon les statistiques, le tabac tue 40 000 Canadiens chaque année.

(1625)

Les Canadiens jugent ces questions importantes. Ils nous demandent d'examiner diverses façons de fournir des soins de santé à un moindre coût, en insistant moins sur le traitement et plus sur la prévention. Voilà ce qui est important.

À l'heure actuelle, le Canada consacre environ 75 p. 100 des fonds pour ses soins de santé aux remèdes et aux soins, mais seulement 25 p. 100 à la prévention. Il apparaît de plus en plus impossible de maintenir un tel financement. Nous devons trouver des moyens pour faire passer ces dollars du côté des soins à celui de la prévention, ce qui nous permettra de réaliser des économies et d'éliminer les coûts de l'utilisation peu responsable de certains produits dans notre société.

Les produits du tabac en font partie. Il y en a un autre que je considère très important de nos jours et c'est l'alcool, en particulier l'alcool qui est mal utilisé. Le projet de loi C-222 que je parraine a pour objet de demander l'apposition de mises en garde concernant la santé sur les contenant de boissons alcooliques.

Certains demandent pourquoi je prends de telles mesures. La réponse saute aux yeux de bien des Canadiens. En fait, chaque année, la mort d'environ 19 000 personnes est due à des causes liées à la consommation d'alcool. L'alcool coûte au Canada environ 15 milliards de dollars au titre des soins de santé, des programmes sociaux, de la justice pénale et de la productivité. Cinquante pour cent des cas de violence familiale sont liés à l'abus d'alcool. L'éclatement d'une famille sur six est liée à l'abus d'alcool. Trente pour cent des suicides sont liés à l'abus d'alcool. Quarante pour cent des accidents d'automobiles sont liés à l'abus d'alcool. Je pourrais continuer longuement. Tout le monde sait qu'il s'agit d'un terrible fléau dans notre société. Les coûts qui s'ensuivent sont très élevés.

Les coûts directs d'environ 15 milliards de dollars qui sont liés à l'alcool ne sont qu'une parcelle de l'ensemble des coûts. L'effet d'entraînement et les répercussions sur les familles et les amis se chiffrent à bien plus que 15 milliards de dollars.

Cinq pour cent des malformations congénitales sont liés à la consommation d'alcool. Il existe un problème appelé le syndrome d'alcoolisme foetal. Durant sa vie, un enfant atteint du syndrome d'alcoolisme foetal coûtera aux Canadiens environ 1,5 million de dollars en frais médicaux. Ce syndrome coûte au Canada quelque 2,7 milliards de dollars par année. Il existe aussi un autre problème, celui des effets de l'alcool sur le foetus. Il ressemble beaucoup au syndrome de l'alcoolisme foetal, mais il n'a pas les mêmes effets physiques. Il est toutefois deux à trois fois plus fréquent que le SAF.

Voilà le genre de questions que les responsables des soins de santé doivent examiner. Parce que nous utilisons mal certains produits, que nous ne nous préoccupons pas de notre santé et que nous n'adoptons pas des modes de vie positifs, il s'ensuit des dépenses représentant des dizaines de milliards de dollars.

Les Canadiens ont à coeur certaines questions. Ils veulent que les sommes consacrées aux soins de santé soient dépensées judicieusement, que nous cherchions des façons d'économiser au chapitre des soins de santé directs et que nous réduisions la demande qui s'exerce sur le système afin de garantir sa soutenabilité à long terme pour les futures générations de Canadiens. C'est là le message important.

J'ai écouté les autres intervenants. Je comprends le rôle de l'opposition et je sais que les députés de l'opposition doivent critiquer le parti ministériel. Cependant, je conçois mal que certains puissent prononcer à la Chambre des discours sectaires où il est question d'hypocrisie, de duplicité, de promesses non tenues et de camouflage, pour ensuite prétendre parler avec éloquence de la commission chargée d'enquêter sur les approvisionnements en produits sanguins.

Cette commission a des répercussions sur de nombreux Canadiens. C'est très tragique. Je tiens à donner l'assurance à tous les Canadiens que notre actuel système d'approvisionnement en sang est sécuritaire. Des mesures immédiates ont été prises pour garantir la sécurité de ce système.


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(1630)

Toutefois, cela ne nous dispense pas de notre responsabilité de demander à une commission d'enquête, la Commission Krever, d'examiner tout ce qui s'est produit pendant cette période pour veiller à ce que nous comprenions ce qui s'est passé, à ce qu'il ne reste rien à corriger et à ce que notre système ne soit pas de nouveau mis à risque dans l'avenir. C'est ce qui importe.

Les Canadiens ont besoin d'avoir ces assurances. Ils doivent avoir le sentiment que nous faisons ce qu'il faut. Je ne pense pas que les propos du député qui vient de parler, selon qui il y aurait encore des problèmes, soient de nature à les rassurer.

Il est toujours temps de corriger les choses. S'il faut plus de temps pour garantir que tout va bien et que nous avons les renseignements exacts pour prendre les bonnes décisions, j'estime qu'il faut procéder ainsi.

La commission fait son travail. On peut en dire autant du cas de la Somalie et de la rémunération des députés dont le député a parlé. Celui-ci a fait état d'une grande insatisfaction, mais je ne veux pas tomber dans ce piège.

Je voudrais simplement réitérer à tous les députés et à tous les Canadiens que le système de soins de santé du Canada est en fait, et de loin, le meilleur du monde. Nous faisons l'envie de tous autres pays. Nous avons des principes que le gouvernement fédéral s'est engagé à défendre. Jamais nous ne laisserons qui que ce soit sans la protection de notre système de santé.

Le principe dont tous les Canadiens doivent se souvenir, c'est qu'au Canada on a accès aux soins de santé non pas parce que l'on a de l'argent, mais parce que l'on est malade. Le premier ministre a pris cet engagement. Je fais confiance au premier ministre et je sais que les Canadiens en font autant.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de Mississauga-Sud et le député de Calgary-Centre qui ont parlé d'un aspect très important du débat de la commission Krever concernant l'approvisionnement en sang. Ils n'ont cependant pas approfondi la question autant que je souhaite le faire.

Les discours nous empêchent parfois de discuter clairement des conséquences des événements qui nous entourent. Dans le cas de la commission Krever et de l'enquête sur la Somalie, la question de la destruction de documents à été soulevée à de nombreuses reprises. Cette question essentielle touche la responsabilité de tous les ministère, y compris le ministère de la Santé du Canada.

Si des fonctionnaires ont pu détruire des documents sans craindre de graves conséquences, non seulement leur geste a empêché la population de connaître la vérité mais il a fait disparaître la responsabilité ministérielle. Comment un ministre, que ce soit le ministre de la Défense ou celui de la Santé, pouvait-il savoir ce qui se passait si des fonctionnaires détruisaient des documents et empêchaient ainsi la population de connaître la vérité?

La question n'est pas de savoir si les médias, la presse ou même les députés ont accès aux documents qui relatent les faits, qui sont peut-être terribles. La vraie question est de savoir si le ou la ministre a accès à ces documents.

La Loi sur l'accès à l'information ne prévoit pas expressément de sanctions à l'endroit de fonctionnaires qui détruisent des documents. C'est une lacune grave. Le commissaire à l'information,M. John Grace, a fait de l'excellent travail en portant la question de la destruction de documents à l'attention du public.

C'est une question absolument fondamentale. Notre démocratie est en jeu dans cette question de savoir si des représentants du peuple, élus ou non, peuvent camoufler des cas accidentels d'incompétence, pour reprendre l'expression qu'utilise l'opposition officielle. Dans le cas qui nous occupe, nous parlons probablement davantage d'incompétence que de faute intentionnelle.

Malheureusement, non seulement la Loi sur l'accès à l'information ne prévoit rien qui empêche ce genre de chose, mais il n'y a qu'une seule disposition qui traite de cette question dans l'ensemble de la législation. Je ne me souviens plus du numéro de l'article, mais il y en a un dans le Code criminel qui interdit aux fonctionnaires de détruire délibérément et sciemment des documents. La peine prévue dans ce cas est toutefois de moins de deux ans.

(1635)

Les partis d'opposition, tout comme les ministériels, feraient bien de porter une attention particulière à cette lacune de la législation visant à protéger les Canadiens, à leur donner à tous, qu'ils soient représentants élus ou simples citoyens, la possibilité de savoir la vérité sur les événements qui les touchent le plus.

Je ne peux pas anticiper les conclusions de l'enquête sur les incidents survenus en Somalie ou de la commission Krever, mais je considère que l'enjeu de ces affaires n'est pas seulement de faire la lumière sur les événements, mais de savoir si l'on pourra jamais découvrir la vérité. Pour ce qui est en jeu dans tous les ministères, et certainement à Santé Canada, parce qu'on y prend des décisions qui touchent des vies humaines, les Canadiens doivent avoir la possibilité d'examiner les décisions prises.

Prenons l'exemple de la maladie de la vache folle, en Grande-Bretagne. Certaines décisions prises conjointement par le gouvernement et les fonctionnaires mettent en jeu une part de l'économie représentant quelque 11 milliards de dollars et peut-être aussi des vies humaines. Nous devons avoir la possibilité, quand d'importants ministères prennent des décisions en notre nom, de vérifier leur bien-fondé pour nous assurer que ces décisions sont prises intelligemment et sagement.

Je crois que le député de Mississauga-Sud m'appuiera si je dis qu'il serait très utile de modifier la Loi sur l'accès à l'information pour qu'elle assure la transparence que nous souhaitons trouver dans le meilleur système de santé du monde, celui que nous assure Santé Canada.


1785

M. Szabo: Monsieur le Président, le député soulève sans aucun doute des points intéressants. Il les a très bien exposés et je n'essaierai pas d'ajouter quoi que ce soit.

Je remarque, cependant, dans le hansard du 18 novembre 1992 que le député de Cap-Breton-Richmond-Est, qui se trouve aujourd'hui être le ministre de la Santé, s'adressant au ministre de la Santé nationale et du Bien-être social d'alors, avait demandé qu'une enquête publique sur la banque de sang soit menée par des Canadiens ayant toutes les compétences et qualifications souhaitables.

Compte tenu de cela, l'engagement de ce ministre de la Santé d'enquêter de façon aussi approfondie et ouverte que possible ne fait pour moi aucun doute.

Le 11 mars dernier, le ministre a annoncé qu'il entamait un processus de consultation faisant appel à l'ensemble des intervenants, y compris les utilisateurs, pour examiner avec eux les moyens d'améliorer le système d'approvisionnement sanguin. Il a réaffirmé que tous les intervenants, y compris les groupes de consommateurs, doivent travailler ensemble en vue des recommandations de la commission d'enquête sur le système d'approvisionnement sanguin.

Je ne veux pas insister, mais je sais que le ministre est entièrement d'accord avec le député sur le fait que ces renseignements doivent être déposés. Maintenant que nous avons le rapport intérimaire du juge Krever, nous sommes prêts à prendre connaissance des recommandations finales pour prendre les mesures nécessaires afin de veiller à la mise en place au Canada d'un système d'approvisionnement en sang qui soit sûr et sans danger.

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Monsieur le Président, le député de Mississauga-Sud est de toute évidence très au courant des questions de santé. Je voudrais porter la proposition suivante à son attention.

[Français]

Durant les dernières semaines, on a entendu les députés du Bloc, dont la porte-parole en matière de santé du Bloc critiquer le ministre de la Santé pour son initiative en ce qui a trait au fromage. Je suis un de ceux qui représentent une circonscription agricole. Bien sûr, prima facie, il n'y a personne qui veut des règles plus difficiles pour aucune industrie, surtout pas une industrie qu'on retrouve dans notre propre circonscription électorale.

Il n'en demeure pas moins que ce que le ministre de la Santé a fait, c'est de présenter ce dossier devant la Chambre, ou plutôt selon le processus réglementaire, pour avoir l'avis du public.

[Traduction]

Je voudrais porter ce qui suit à l'attention de la Chambre. Je le fais avec l'accord de mes électeurs. Un de mes électeurs, M. Robert Redmond, le fils de Mme Barbara et de M. J.P. Redmond, de Vankleek Hill, en Ontario, est actuellement en traitement dans un hôpital de Toronto suite à une infection par une bactérie du type Listeria. Apparemment, celle-ci venait de fromage au lait cru. Cette personne est maintenant paralysée.

(1740)

Je voudrais demander à mon collègue s'il n'est pas d'accord avec moi que, aussi difficile que cette question soit, le ministre de la Santé a raison de vouloir réglementer cet aspect de façon responsable, ce qu'il fait, et permettre à tous ceux qui le veulent de se faire entendre.

J'ai plus d'électeurs qui sont producteurs de lait que n'importe qui à la Chambre. . .

[Français]

Mme Picard: Monsieur le Président, nous sommes ici pour discuter du projet de loi C-18 et non du projet portant sur le fromage au lait cru. Je pense que le député est hors sujet.

Le président suppléant (M. Kilger): Avec tout le respect que j'ai pour la députée, la question de pertinence en est une qui est toujours très difficile. Il y a une certaine élasticité. Par contre, le débat porte sur le domaine important de la santé. Je crois quand même que le député est en droit de soulever une question de santé.

Comme je le disais tout à l'heure, malgré tout le respect que j'ai pour la députée de Drummond, c'est une question de débat et non un recours au Règlement.

[Traduction]

M. Boudria: Monsieur le Président, est-ce que mon collègue n'est pas d'avis que le ministre a agi de façon responsable en procédant à une consultation au moyen de la publication du projet de règlement dans la Gazette du Canada pour faire en sorte que, d'une part, mes électeurs qui produisent du lait soient protégés mais que, d'autre part, des gens comme M. Redmond, un jeune homme qui est aujourd'hui hospitalisé et paralysé, reçoivent également la protection de notre régime de santé, et que le ministre, sachant que ces questions sont importantes, les présente au comité?

Est-ce que mon collègue n'est pas d'avis que c'est dans les fonctions du ministre que d'agir comme il l'a fait en recourant à la publication dans la Gazettte du Canada pour consulter des Canadiens?

M. Szabo: Monsieur le Président, le whip en chef du gouvernement soulève un point très important et très opportun. Il a tout à fait raison.

Comme le ministre l'a indiqué, nous voulons connaître tous les faits et l'opinion des Canadiens avant de prendre des décisions. Voilà pourquoi il a distribué un projet de règlement en accordant une période de 75 jours à ceux qui voudraient formuler des commentaires.

Le gouvernement n'est pas prêt à prendre un risque lorsque la santé et la sécurité des Canadiens sont en jeu. Tout prouve qu'en consommant des fromages fabriqués à partir de lait cru, on pourrait augmenter les risques de maladies ou d'infections. De tout évidence, si l'on en juge d'après l'exemple du député, la question est importante et je sais que le gouvernement du Canada la traitera en conséquence pour assurer la santé de tous les Canadiens.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question


1786

qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir, à savoir: l'honorable députée de Mercier-La réforme de l'assurance-chômage.

M. Gilbert Fillion (Chicoutimi, BQ): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole sur ce projet de loi, projet de loi qui crée un ministère superflu. . .

Une voix: Superflu?

M. Fillion: Oui, je dis bien superflu. Ce projet de loi permet à cette Chambre de dépenser plus de un milliard de dollars, d'employer 8 000 personnes avant même de soigner une personne, avant même qu'une action médicale soit faite sur un patient.

Je peux comprendre nos collègues d'en face d'être un peu chatouilleux lorsqu'ils se font questionner sur la création d'un tel ministère qui n'apporte absolument rien et qui favorise davantage les chevauchements qu'autre chose.

(1645)

Ces gens, bien sûr, sont très sensibles; ils ont la peau sensible lorsqu'on parle de ça. D'autant plus qu'un débat comme celui-ci nous permet également de pouvoir mettre le doigt sur certaines promesses électorales qui ont tout de même été écrites dans le livre rouge et qui n'ont pas été respectées à ce jour. À ce moment-là, on les voit sauter un peu sur leur chaise et ça les dérange.

La volonté de créer ce ministère nous démontre encore une fois que le fédéral cherche à s'ingérer dans une juridiction qui ne lui appartient pas; encore une fois, et ce n'est pas la première fois, puisqu'on a eu à réviser la loi d'autres ministères également.

Pourtant, le ministre nous laisse croire qu'il s'agit d'une loi sans grande importance, qu'«il n'y a rien là», comme on dit dans ma région, et que le vrai but de ce projet est simplement de changer son nom. Foutaise! C'est plus que cela. Je prendrai quelques minutes pour faire la démonstration que c'est une fausseté.

Lorsqu'on lit le projet de loi et qu'on s'arrête un peu sur l'alinéa 4(2)a), où l'on fait la description des attributions du ministère dans le domaine de la santé, on doit y porter un peu attention. C'est là le gros du projet de loi.

Cet article nous dit que la promotion et le maintien du bien-être physique, mental et social de la population sera assuré par ce ministère. Tout un programme, et un beau programme! Mais je vous dirai qu'avec un tel mandat le ministre se sert du bien-être physique de ses citoyens, du bien-être physique, mental et social de cette population pour s'ingérer davantage dans le domaine de la santé. D'ailleurs, c'est à ce titre que le gouvernement fédéral considère qu'il détient l'autorité et la légitimité pour intervenir dans un domaine de compétence exclusive des provinces. Ce n'est pas la première fois que ce sujet est soulevé ici, dans cette Chambre; il l'est d'ailleurs un peu partout à travers le Canada, dans d'autres législatures.

Dans les discussions sur cette ingérence dans le domaine provincial, on nous confirme que tout le monde en a par-dessus la tête. Pourtant, la loi constitutionnelle de 1867 voit la province comme étant l'autorité générale en matière de santé. Que je sache, cette loi n'a pas été amendée. Donc l'État central, c'est-à-dire le gouvernement fédéral, ne possède donc pas d'autres pouvoirs que ceux qui dérivent de son pouvoir de dépenser. Donc c'est là ce pouvoir de dépenser. Il l'interprète en voulant créer des ministères là où il n'a pas d'affaire. Donc ce pouvoir de dépenser lui permet tout.

C'est également ce pouvoir de dépenser qui a permis à ce gouvernement-ci et à celui qui l'a précédé de nous endetter de façon disproportionnée. Tout en nous endettant et avec son pouvoir de dépenser, ce gouvernement verse actuellement des sommes moins élevées que prévu à chacune des provinces. Mais ces sommes d'argent, il les verse en les coupant, mais à certaines conditions. Les provinces doivent d'ailleurs se conformer à ces conditions sous peine de perdre les montants qui leurs sont attribués. Je rappelle d'ailleurs que ces montants sont coupés, et coupés de budget en budget.

(1650)

Je vous donne un exemple récent, celui de la Colombie-Britannique, qui avait mis en place de nouvelles mesures, de nouvelles structures concernant l'aide sociale. Comme ces structures, ces mesures n'atteignaient pas les objectifs nationaux, le ministre du Développement des ressources humaines a fait planer l'épée de Damoclès sur la province en lui disant que si elle n'allait pas vers ces normes, elle en subirait les conséquences, il y aurait des coupures.

D'ailleurs, je ne pense pas que ce soit réglé. Actuellement, il y a des négociations entre le gouvernement fédéral et le gouvernement de cette province, négociations qui prennent énormément de temps, qui coûtent énormément cher également. Pendant ce temps-là, les bénéficiaires, les gens qui ont besoin de services reçoivent des services diminués, reçoivent des services qui ne sont pas à leur mesure. Ce qui fait que dans des programmes bien déterminés, les montants qui leur sont consacrés ne retournent pas en totalité aux personnes qui en ont besoin, c'est-à-dire aux citoyens et citoyennes. Après en avoir fait l'administration, après en avoir discuté d'intervenant en intervenant, qu'est-ce qui reste à la fin? Il reste très peu, la moitié du pourcentage qui devrait être alloué aux programmes et aller directement aux citoyens.

Par contre, il y a bien des lois qui font en quelque sorte que le ministère de la Santé entre tout droit, et je dis bien tout droit, dans les juridictions des provinces, entre autres avec les lois qui découlent du Code criminel. Il y met son nez encore une fois avec les lois sur les stupéfiants, la Loi sur les aliments et drogues, où on voit le gouvernement central à l'intérieur de tout ça.

Concernant la santé, c'est bien sûr qu'il y a dédoublement. Je me suis toujours demandé pourquoi les militaires en général n'étaient pas traités par les mêmes médecins que tout le monde? Pourquoi avoir créé ce genre de médecine à l'intérieur des Forces? Vous n'êtes pas sans savoir que l'armée possède ses propres médecins, ses propres dentistes, ses psychiatres également. On pourrait en rajouter pour tous les soins hospitaliers qu'on peut trouver dans une province, mais en système parallèle.

Imaginons les coûts. Imaginons les économies qu'on pourrait faire si ces gens se servaient des services fournis par les provinces. Mais non, il a fallu bâtir une grosse structure où ça coûte terriblement cher. De plus, pour accommoder ces gens-là, ça prend également des infrastructures, donc on a construit des hôpitaux militaires un peu partout à travers le pays.


1787

Il y a également les services socio-sanitaires qui s'adressent principalement aux autochtones et à la population du nord canadien. Ce sont tous des dédoublements. Comme les autochtones relèvent du pouvoir fédéral, c'est encore le ministère de la Santé qui s'en occupe. Duplications, chevauchements, et à quel prix?

Je peux bien comprendre pourquoi la dette gonfle aussi rapidement. Les Canadiens et Canadiennes font les efforts nécessaires pour payer des impôts pour diminuer cette dette, mais on ne prend pas les moyens nécessaires. On crée des structures parallèles, ce qui fait qu'après tout ça on réussit à peine à payer les intérêts de cette dette.

(1655)

Le fédéral n'a pas le droit d'intervenir dans des domaines comme ceux-là, mais il le fait quand même. Avec ce projet de loi C-18, il veut se donner ce droit-là. Il veut se le donner. Il veut confirmer que c'est un domaine dans lequel il peut agir. C'est un instrument de plus pour déclencher des débats entre les provinces, des débats stériles, qui ne rapporteront rien. Laissons donc ces droits là où ils doivent être.

Si on regarde le financement on s'apercevra également qu'il y a beaucoup d'aberration dans ce projet de loi. On se souviendra que les transferts attribués aux provinces ne sont pas tirés du ministère de la Santé, mais sont versés par le ministre des Finances.

Cette situation en est une que j'appelle une situation grotesque. Le ministère de la Santé va fixer ses objectifs nationaux, les normes à respecter pour que les provinces reçoivent leur argent, mais c'est le ministre des Finances qui à la fin-ils n'ont pas évalué combien cela va coûter-mais c'est le ministre des Finances, dépendant de ce qu'il veut avoir comme déficit ou comme dette, qui va trancher. Il va décider si on transfère tel montant. Il fixe les montants lui-même sans évaluer les coûts des normes nationales.

En clair, cela veut dire que le ministre de la Santé dit aux provinces ce qu'elles doivent faire et le ministre des Finances verse l'argent: «Organisez-vous avec cela»; en réduisant les paiements de transfert. C'est bien sûr qu'il y a un manque de cohérence quelque part. Les objectifs demeurent les mêmes, mais on ne peut pas, faute de ressources financières, atteindre ces objectifs.

Au Québec, ce sont des points d'impôt qui sont transférés ou pas, selon la bonne humeur du ministre des Finances. Naturellement, à la suite des coupures massives dans le domaine de la santé, du transfert canadien vers les provinces, bientôt le Québec ne recevra plus de versements en espèces, seulement des points d'impôt. Qu'est-ce que cela signifie? Cela signifie que le gouvernement devra soit restreindre les services, soit augmenter les impôts pour donner des services de qualité. Par contre, ce sera avec moins d'argent.

Le ridicule de la situation c'est qu'encore une fois le fédéral continuera à dicter au Québec la conduite qu'il devra adopter, mais le fédéral ne versera pas un sou de plus.

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, le ministère de la Santé joue également un très grand rôle économique. Ce rôle économique se répercute à l'intérieur de chacune des régions. Quand il y a un manque à gagner quelque part, qu'il y a des coupures, c'est toute une population, c'est toute une région qui s'en ressent. Dans son budget des dépenses 1995-1996, Santé Canada indique des besoins financiers qui sont de l'ordre d'un peu plus d'un milliard de dollars pour son fonctionnement.

Bien souvent, comme je l'ai rappelé au début, lorsque cet argent est dépensé en infrastructures ou encore en discussions un peu partout, il y a très peu d'actes médicaux qui sont posés vis-à-vis des Canadiens et des Canadiennes.

J'aimerais également souligner le point du Forum national de la santé en octobre 1994. Nous étions ici en cette Chambre.

(1700)

On a vu exactement que ce gouvernement voulait accroître ses interventions dans le domaine de la santé publique. Ce forum s'est fait beaucoup plus sous le signe de la visibilité. Ce gouvernement essaie de sauter sur tout ce qui bouge pour se donner de la visibilité. Au lieu de se donner de la crédibilité, il se donne de la visibilité: on va répandre des drapeaux partout; on nous inonde de dépliants de chaque ministère un peu partout, et là on est visible. Mais quand vient le temps de donner des soins à une population, non, absolument pas. Des soins de qualité et de haute qualité, on n'y croit pas. On aime mieux avoir des petits drapeaux rouges sur le papier, sur des dépliants publicitaires, sur des chèques plutôt que de se donner une crédibilité.

Donc ne nous posons pas la question à savoir pourquoi tant de gens dans la population ne font plus confiance aux politiciens et aux politiciennes. C'est aussi simple que ça. C'est qu'à un moment donné, lorsqu'on n'agit pas, lorsqu'on agit simplement pour se faire voir, il ne faut pas s'attendre à d'autres résultats que ceux-là.

D'ailleurs, à propos de ce forum national, on se souvient également que toutes les provinces sans exception, non seulement le Québec, mais toutes les provinces, ont critiqué ouvertement l'attitude du gouvernement. Pourquoi? Parce que ce gouvernement les reléguait au second plan en matière de santé. À ce titre, on pourrait citer bien des gens. D'abord, le ministre conservateur de la Santé de l'Ontario a dénoncé le fédéral dans ce domaine. Il a dit que l'on devrait combattre la volonté du fédéral de dicter aux provinces son interprétation des principes qui devraient régir le système de santé.

Le premier ministre conservateur de l'Alberta n'était pas en reste non plus. Il a dénoncé cette inflexibilité du fédéral dans ce domaine.

De plus, ce gouvernement a mis en berne l'une de ses promesses bien décrite dans le livre rouge, et je cite. Il est bien indiqué qu'un gouvernement libéral mettra sur pied un forum national-jusque-là, ça va-présidé, imaginez-vous, par nul autre que notre premier ministre, donc on réduit l'importance de ceux qui devraient y participer, quoiqu'on aurait pu s'accommoder de ça aussi. Ce forum devait réunir les grands acteurs du domaine de la santé au Canada,


1788

ainsi que les parties prenantes. Donc tout le monde sur le même pied à discuter des problèmes de santé avec un animateur au centre qui s'appelle notre premier ministre.

Malgré cet engagement ferme, les libéraux, et encore une fois dans le livre rouge, le gouvernement fédéral a refusé d'accéder aux demandes des provinces qui voulaient participer de façon pleine et entière aux travaux du forum national sur la santé.

Ce gouvernement voulait offrir aux provinces uniquement un statut d'observatrices.

Comme vous me faites signe qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, je terminerai en vous disant ceci. Ce sont d'abord les provinces qui doivent agir dans le domaine de la santé. Le gouvernement central devrait revoir sa position de vouloir couper dans le Transfert social canadien en matière de soins de santé. Le pelletage dans la cour des provinces, c'est fini. Pourquoi? Parce que, par la suite, ça se reflète sur la qualité des soins médicaux et également dans le porte-monnaie de chacun des Canadiens et des Canadiennes.

(1705)

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ): Madame la Présidente, le projet de loi que je commente aujourd'hui s'inscrit à l'intérieur du temps imparti au débat en troisième lecture du projet de loi C-18, intitulé Loi constituant le ministère de la Santé et modifiant ou abrogeant certaines lois.

Il m'apparaît essentiel de rappeler à mes concitoyens et concitoyennes que la santé est un domaine de juridiction provinciale. En vertu des paragraphes 7 et 16 de l'article 92 de la Loi constitutionnelle de 1867 et de l'interprétation qu'en ont fait les tribunaux, il est clairement établi et reconnu que la santé et les services sociaux relèvent de la compétence exclusive des provinces. Or, les interventions du gouvernement fédéral dans le domaine de la santé sont légion et ne datent pas d'aujourd'hui.

Depuis le début du siècle, le gouvernement fédéral a adopté les législations suivantes en matière de santé. En 1919, il crée son ministère de la Santé et octroie ses premières subventions; en 1948, il instaure un Programme national de subventions à la santé; en 1957, il adopte la loi fédérale sur l'assurance-hospitalisation; en 1966, la Loi sur les soins médicaux; en 1984, la Loi canadienne sur la santé, qui remplace les lois de 1957 et de 1966.

De plus, cette loi a établi les principes fédéraux du système de santé canadien, édicté des normes nationales et, par les modifications qu'elle imposait, cette loi a limité l'autonomie du Québec. Ainsi, la loi C-6, qui était le numéro de la loi de 1984, précisait les obligations des provinces, soit l'universalité des services, l'accessibilité, la transférabilité interprovinciale, la gestion publique et l'intégralité, à défaut de quoi Ottawa peut retenir les paiements de transfert qu'il effectue aux provinces aux fins du financement des services de santé.

Le gouvernement du Québec a toujours dénoncé les interventions du gouvernement fédéral dans le domaine de la santé. En 1926, le gouvernement Taschereau, un bon libéral est-il besoin de le rappeler, a été le premier à s'opposer à l'ingérence du fédéral dans le domaine de la santé et toutes les administrations gouvernementales québécoises qui l'ont suivi ont fait de même.

Le mouvement de création du système socio-sanitaire peut sembler avoir été amorcé à Ottawa, mais cette manoeuvre n'a servi que de justification et d'instrument à Ottawa pour s'emparer, petit à petit, d'une compétence provinciale. Chaque intrusion du fédéral dans le domaine de la santé a entraîné, forcément, une réponse du gouvernement du Québec pour prendre le plein contrôle et affirmer sa volonté d'exercer sa compétence dans un domaine où il a l'exclusive.

À titre d'illustration de ce propos, rappelons deux grands moments dans l'histoire du Québec en ce qui concerne la santé. En réaction à la Loi fédérale sur l'assurance-hospitalisation et les services diagnostiques, adoptée par la Chambre des communes en 1957, Jean Lesage, alors premier ministre libéral du gouvernement du Québec et ancien ministre dans le gouvernement fédéral de Lester B. Pearson, a créé le Programme québécois d'assurance-hospitalisation et l'a fait adopter par l'Assemblée nationale en 1961.

Pour sa part, la Loi fédérale sur les soins médicaux, adoptée à la Chambre des communes en 1966, a été suivie au Québec par l'adoption de la Loi sur l'assurance-maladie, votée cette fois en 1970 par un autre gouvernement libéral, celui de Robert Bourassa.

Toutes ces intrusions du gouvernement fédéral ont, au fil des ans, coûté de plus en plus cher aux contribuables. Ottawa pouvait se permettre d'être prodigue, car il le faisait avec l'argent des provinces ou encore à crédit, avec son pouvoir illimité de dépenser, pouvoir qui a contribué largement à nous endetter tous et toutes.

Je rappellerai brièvement que lors de la Deuxième Guerre mondiale, le gouvernement central avait invoqué l'effort de guerre pour empiéter sur les impôts des particuliers et des compagnies qui appartenaient alors aux provinces. Cette mesure qui devait n'être que temporaire perdure toujours. Il est bien clair que le gouvernement fédéral a succombé à la tentation d'exercer plus de contrôle et de ne pas retourner aux provinces les pouvoirs fiscaux d'avant-guerre, mais plutôt des subventions conditionnées à l'établissement des programmes décidés par le gouvernement canadien.

(1710)

Ce contrôle des ressources fiscales a permis une centralisation ininterrompue du gouvernement fédéral qui s'est traduite par des dédoublements sans fin et un gaspillage éhonté de l'argent des contribuables. Mais ce qui est plus grave encore, c'est que pour se maintenir au pouvoir, des générations de politiciens fédéraux ont donné des cadeaux en endettant les générations futures de Québécoises et de Québécois, de Canadiens et de Canadiennes, et pour vous faire plaisir, madame la Présidente, d'Acadiens et d'Acadiennes.

Dans le rapport sur la Commission d'enquête concernant les services de santé et les services sociaux du Québec, en 1987, on peut lire ce qui suit, sous la plume de Thomas Dupéré, et je cite: «La mise en place des programmes fédéraux a simplement déplacé au niveau fédéral un débat déjà amorcé au niveau des provinces et qui aurait eu les mêmes résultats dans le même laps de temps, à quelques mois ou quelques années près.»

Il est donc prétentieux d'affirmer que la présence d'Ottawa dans le domaine socio-sanitaire a joué un rôle d'initiateur. Il serait plus juste de dire que l'intervention d'Ottawa a été grandement facilitée


1789

par la concentration des ressources fiscales au niveau fédéral à l'occasion de la Deuxième Guerre mondiale. Ottawa a récupéré des provinces l'idée de développer un système de santé. Avec sa volte-face de 1945 où le gouvernement fédéral a refusé de rendre aux provinces les pouvoirs de taxation qui devaient être temporaires, Ottawa se donne les moyens d'intervenir et de réaliser ses ambitions d'empiétement au détriment des pouvoirs exclusifs et dévolus aux provinces.

À l'heure actuelle, et ce malgré le fait qu'il s'agisse clairement d'un champ de compétence provinciale, Santé Canada jouit aujourd'hui d'une stature importante. Son budget de fonctionnement atteint 1,5 milliard en 1995-1996, dont 347 millions uniquement pour payer le personnel qui se retrouve de Terre-Neuve à la Colombie-Britannique pour administrer une juridiction provinciale et 703 millions de dollars pour l'achat des biens et services de ce ministère, alors que les paiements de transferts aux provinces atteignent sept milliards de dollars pour la même année.

Un budget de plus de huit milliards, pour un domaine de compétence qui relève des provinces. Huit milliards qui représentent le quart du déficit de la dernière année. Quand on songe à l'ensemble des ministères où il y a dédoublement, chevauchement, empiétement, on peut s'imaginer tout le gaspillage dans ce gouvernement, ce qui nous mène à la situation où nous sommes présentement.

Par ailleurs, le gouvernement fédéral n'a jamais démontré l'intention de relâcher son emprise sur le système canadien de la santé. Aussi, dans sa campagne électorale de 1993, le Parti libéral du Canada écrivait dans son livre rouge, et je cite: «Le gouvernement fédéral doit avoir pour mission de mobiliser les efforts en rassemblant les compétences et les connaissances dans le domaine de la santé au Canada. La santé intéresse tous les Canadiens et le gouvernement fédéral doit leur donner les moyens de s'impliquer et de s'informer pour bien comprendre les enjeux.»

Pour une fois, le Parti libéral a tenu parole. Le 29 juin dernier, malgré l'opposition de toutes les provinces canadiennes, la ministre de la Santé d'alors annonçait la création du Forum national sur la santé. Ce Forum avait pour mandat d'élaborer une vision de ce que sera le système de santé canadien au XXIe siècle, favoriser le dialogue avec les Canadiens et les Canadiennes au sujet de leur système de santé et définir les priorités pour l'avenir.

Le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec,M. Jean Rochon, écrivait alors à la ministre fédérale de la Santé le 14 octobre 1994 pour lui dire ceci, et je cite: «Le mandat de ce Forum constitue un empiétement du gouvernement fédéral dans un champ de compétence essentiellement provincial, ce qui est inacceptable. La volonté clairement exprimée par votre gouvernement de confier à ce Forum le mandat de déterminer les priorités de l'avenir en regard du renouvellement du système de santé, ainsi que les moyens à prendre pour y parvenir, représentent une intrusion directe dans les responsabilités des gouvernements des provinces que ne saurait masquer le caractère consultatif que vous prêtez aux recommandations émanant de ce Forum.»

Je me permettrai ici une parenthèse pour souligner que M. Rochon, ministre de la Santé du gouvernement du Québec, a été récemment félicité pour le courage dont il fait preuve dans la mise en place de la réforme de la santé au Québec par un de ses prédécesseurs, M. Marc-Yvan Côté, bien connu du Parti libéral du Canada, puisque ses services ont été retenus à titre d'organisateur libéral en chef pour le Québec lors de la prochaine élection fédérale.

(1715)

Le ministre Rochon ajoutait, dans la lettre qu'il adressait alors à la ministre de la Santé, que le Québec n'avait pas attendu le leadership du gouvernement fédéral pour adapter son système de santé aux besoins du jour et qu'il avait déjà tenu des consultations importantes auprès de la population.

De plus, il rappelait à la ministre fédérale que les coupures dans les transferts aux provinces en matière de santé ne constituent pas la meilleure décision qu'un gouvernement puisse prendre pour défendre et promouvoir un système de santé au Canada.

Ce sont justement ces coupures majeures qui remettent en question les principes mêmes prônés par la Loi fédérale sur la santé.

En effet, alors que le gouvernement fédéral poursuivait son offensive de mainmise sur un domaine de compétence provinciale, il diminuait unilatéralement et dramatiquement ses contributions au financement des programmes de santé des provinces canadiennes. À ce sujet, au printemps de 1995, le Conseil national du bien-être social, un organisme qui a pour mandat de conseiller le ministre de la Santé, mettait en garde le gouvernement contre une telle situation en déclarant à ce sujet, et je cite: «Il serait extrêmement hypocrite de réduire les contributions aux provinces tout en accroissant les exigences qu'elles devraient respecter.»

C'est pourtant exactement ce qui est en train de se produire. Il est opportun de rappeler que lors de la création par le ministère des Finances du programmes nommé Financement des programmes établis dans le cadre duquel se font les transferts aux provinces au chapitre des services sociaux, de la santé et de l'éducation postsecondaire, il avait été convenu que ces paiements de transfert seraient indexés en fonction de l'accroissement de l'économie canadienne.

Depuis 1986, le gouvernement fédéral puise à même ses transferts pour limiter son déficit. De manière unilatérale et sans égard à la capacité de payer des provinces, il a économisé sur le dos des Québécoises et des Québécois, entre 1982 et 1995, au seul chapitre de la santé, 8 milliards de dollars. Ce manque à gagner pour le Québec s'est traduit par une hausse d'impôt pour pallier le désengagement du gouvernement fédéral.

J'ajoute que selon une étude effectuée par l'institut C.D. Howe de 1988 à 1992, alors que les dépenses au titre du financement des programmes établis étaient stagnantes, les dépenses des autres programmes du gouvernement fédéral augmentaient de 25,5 p. 100. Autrement dit, alors que le fédéral disait aux provinces de se serrer la ceinture, il dépensait allégrement et continuait à augmenter le déficit et la dette.

Le manque de stabilité du financement fédéral dans le domaine de la santé crée un grave problème. Les montants sont tour à tour gelés, réduits, désindexés selon l'humeur du ministre des Finances et les besoins de trésorerie de son ministère. Il n'y a plus de formule


1790

de financement fixe, acceptée par tous les gouvernements. Les montants sont fixés unilatéralement et de manière arbitraire par le gouvernement fédéral, sans égard aux coûts réels des programmes provinciaux.

Cette variation constante du financement qui, je le souligne, est toujours à la baisse, est devenue le cauchemar de tous les intervenants et intervenantes du domaine de la santé. Ce qui est plus grave, c'est que le ministre des Finances ne semble même pas se rendre compte qu'il ne jongle pas uniquement avec des colonnes de chiffres, mais qu'il joue avec la santé des Canadiens et des Canadiennes.

En février dernier, le ministre des Finances a choisi de réduire une fois de plus les transferts aux provinces au chapitre de la santé dans son dernier budget. Dans ce domaine, le Québec devra absorber un autre manque à gagner de 650 millions en 1996-1997 et de 1,9 milliard en 1997-1998. Cela fait sans doute partie de ce qu'on appelle les bienfaits du fédéralisme. Il est important de noter que c'est toujours quelqu'un du fédéral qui parle du fédéralisme rentable; rentable pour le fédéral, mais hypothéquant pour les provinces qui se retrouvent de plus en plus sans marge de manoeuvre.

Au printemps 1995, le Conseil national du bien-être social commentait ainsi les coupures prévues au financement du programme de santé, et je cite: «Les projets annoncés dans ce budget auraient pour conséquence vraisemblable d'entraîner le démantèlement d'un système national des services sociaux que nous avons mis une génération à bâtir.»

Le ministre de la Santé de la Colombie-Britannique, pour sa part, déclarait, à propos de ces coupures, et je cite:

[Traduction]

«Le budget de février dernier, qui réduisait les transferts aux provinces au titre de la santé a forcé les provinces à envisager des réductions désagréables qui menacent l'assurance-maladie.»

(1720)

[Français]

Si le ministre de la Santé du Canada avait tant à coeur le système de santé du Canada, il aurait fait comme son collègue de Notre-Dame-de-Grâce et se serait opposé au dernier budget de son gouvernement, qui attaquait les programmes sociaux. Il se serait tenu debout lors des réunions du Conseil des ministres où ces décisions étaient prises et il aurait opposé aux chiffres du ministre des Finances les besoins pressants de la population canadienne pour des soins de santé de qualité. Le ministre de la Santé aurait pu suggérer au gouvernement d'aller chercher des ressources chez ceux qui ont beaucoup d'argent et qui bénéficient de nombreux abris fiscaux, en commençant par la liste des généreux bailleurs de fonds du Parti libéral, sans oublier naturellement les propres compagnies du ministre des Finances.

Mais ce n'est pas ce qu'il a fait. Aujourd'hui, il nous représente un vieux projet de loi que tous les intervenants et intervenantes ont vertement critiqué en deuxième lecture, lors de la première session de cette trente-cinquième législature. Un projet de loi qui sent le réchauffé, qui perpétue la mainmise du fédéral sur la santé, un domaine, on ne le répétera jamais assez, de compétence provinciale.

Le paragraphe 4(1) du projet de loi décrit les pouvoirs et fonctions du ministre, et le paragraphe 4(2) précise les attributions du ministre et porte sur la protection de la population contre la propagation de la maladie et des risques pour la santé. On a pu constater où cela nous a conduit avec les fromages faits à base de lait cru. Alors, on peut facilement s'imaginer que par ces articles, le gouvernement fédéral ne ne gênerait pas pour s'immiscer encore davantage dans l'administration des soins de santé au Canada.

Le projet de loi qui est devant nous pousse l'hypocrisie jusqu'à écrire à l'article 12, et je cite:

12. Aucune disposition de la présente loi ou de ses règlements n'autorise le ministre ou un fonctionnaire du ministère à exercer sa compétence ou son autorité sur un organisme de santé régi par une loi provinciale.
Lorsqu'on réduit de manière aussi draconienne le financement des services de santé des provinces, on intervient directement dans le fonctionnement des organismes soumis à l'autorité provinciale en diminuant leur capacité de continuer à offrir un niveau de services adéquat aux citoyens.

Le Bloc québécois dénonce ce projet de loi parce qu'il consacre l'ingérence du fédéral dans les domaines de compétence provinciale. Dans le domaine de la santé, le Québec a ses priorités et doit avoir le droit de les gérer par lui-même et ce conformément à la Constitution actuelle. Ce projet de loi ne parle pas d'assurer un financement adéquat et stable pour la santé. Le ministre a abdiqué ses responsabilités dans ce domaine et se soumet au diktat du ministre des Finances.

Ce projet de loi attaque tellement les provinces, sans pour autant les aider à régler les problèmes pressants auxquels elles sont confrontées, que mêmes les plus ardents fédéralistes ont décidé de combattre les initiatives du ministre de la Santé. Le ministre conservateur de la Santé de l'Ontario a déclaré, le 19 septembre dernier, que l'on devait combattre la volonté du fédéral de dicter aux provinces son interprétation des principes qui devraient régir le système de santé. Ce même jour, Ralph Klein, premier ministre conservateur de l'Alberta, dénonçait lui aussi l'inflexibilité du fédéral en parlant de la ministre d'alors.

Dans un communiqué commun, à l'occasion d'une rencontre des ministres de la Santé, les provinces déclaraient que la volonté fédérale de prendre des décisions unilatérales pour le financement de la santé, l'interprétation des normes ou la fixation de dates limites arbitraires pour la fin des consultations n'aidaient en rien à résoudre le problème.

Parce que le gouvernement fédéral n'est pas capable d'assurer adéquatement la protection de la santé des citoyens et parce que ses coupures continuelles constituent la principale menace qui pèse sur la santé du peuple du Québec et du Canada, le gouvernement fédéral devrait se retirer du domaine de la santé, en transférer les ressources fiscales aux provinces, ce qui leur permettrait de prendre la relève avec, sans aucun doute, tout au moins la même efficacité que celle du gouvernement fédéral.


1791

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que toux ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Convoquez les députés.

(1725)

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le vote est différé à mardi, à 17 h 30.

* * *

[Traduction]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD SUR LE COMMERCE INTÉRIEUR

L'hon. Ron Irwin (ministre de l'Industrie, Lib.) propose: Que le projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole pour appuyer aujourd'hui le projet de loi C-19. Il s'agit là d'une importante mesure législative qui marque un grand progrès dans la réduction des barrières au commerce entre les différentes parties du Canada et dans l'ouverture du marché intérieur à la circulation plus libre des biens et des services.

Le projet de loi C-19 est le fruit d'un long processus de consultations auquel ont participé de nombreux Canadiens: des gens qui s'inquiètent de l'avenir économique du Canada; des gens qui veulent développer les possibilités d'emploi et de création de richesse au profit de tous les Canadiens.

Depuis 1867, l'économie canadienne s'est développée et a évolué de façons que les Pères de la Confédération n'auraient jamais imaginées. Le gouvernement fédéral demeure responsable du commerce, en vertu de la Constitution. Cependant, avec le temps, chacune des provinces a assumé un rôle majeur qui a influé sur la croissance économique et elle a établi une réglementation régissant le commerce à l'intérieur de ses propres frontières. De ce fait, diverses mesures répondant à des besoins ponctuels ont été adoptées au fil des ans.

Nous avons maintenant un système d'accords et de règlements commerciaux fédéraux, provinciaux et territoriaux qui sont souvent contradictoires et parfois discriminatoires et qui peuvent placer les entreprises canadiennes dans une situation de désavantage sur le plan de la conccurrence. Ces barrières peuvent occasionner un gaspillage de ressources économiques et limiter la capacité de nos industries de tirer parti des économies d'échelle et de maintenir leur position concurrentielle sur les marchés.

Il existe de nombreux exemples de tels obstacles commerciaux au Canada. Les normes régissant les métiers et les professions varient d'une province et d'un territoire à l'autre, ce qui peut limiter la mobilité de la main-d'oeuvre. Certaines régies provinciales des alcools ont adopté des politiques d'inscription sélective des produits dans leurs catalogues, ce qui constitue de la discrimination contre les produits venant d'autres provinces. Il existe différents règlements sur les transports portant sur les codes de sécurité, les modalités d'inspection et les normes relatives aux véhicules, qui occasionnent des difficultés aux camionneurs désireux de desservir les marchés de différentes provinces.

Beaucoup d'administrations locales et d'autres organismes qui dépensent l'argent des contribuables appliquent des politiques d'achat qui privilégient les entreprises locales. Ainsi, les sources d'approvisionnement compétitives sont déterminées par des facteurs géographiques plutôt que par les normes traditionnelles du marché, telles que le prix et la qualité.

Certaines provinces cherchent à attirer de nouveaux investissements en faisant profiter l'industrie de programmes spéciaux de stimulation. Cela peut déformer les équations normales risque-récompense qui régissent le marché de l'investissement. Les normes du bâtiment et les règlements auxquels sont assujetties les méthodes de construction peuvent varier d'une province à l'autre, ce qui occasionne des difficultés tant aux entrepreneurs en construction qu'aux travailleurs.

Ce ne sont là que quelques exemples de barrières et d'obstacles qui ont un impact négatif sur la liberté commerciale au Canada. Il y en a beaucoup, beaucoup d'autres. Ainsi, nous avons au Canada un ensemble disparate de règles, de normes et d'autres obstacles au commerce interprovincial, qui se sont développés petit à petit et qui constituent une caractéristique inacceptable du marché intérieur.

Le monde des affaires est conscient des effets nuisibles de cette situation depuis un certain temps déjà. Notre gouvernement, comme d'autres gouvernements canadiens, a entendu de nombreux représentants du secteur privé qui, ayant évalué les problèmes de l'environnement commercial intérieur, ont exercé des pressions pour obtenir les changements nécessaires à la libéralisation du système.


1792

(1730)

Ces gens et beaucoup d'autres, y compris nos collègues des provinces et des territoires, ont pris conscience du fait que nous avons besoin au Canada d'un nouveau régime commercial qui soit fondé sur un régime interprovincial plus ouvert, qui ne fasse pas obstacle à la circulation des personnes et des investissements et qui comporte un mécanisme permettant de coopérer pour régler les différends commerciaux intérieurs.

L'Accord sur le commerce intérieur-qu'a négocié le Comité des ministres responsables du commerce intérieur et qu'ont signé en juillet 1994 le premier ministre du Canada et tous les autres premiers ministres canadiens-nous donne le cadre nécessaire pour établir un tel régime. Avec le projet de loi C-19, nous mettons en place les modifications législatives nécessaires à l'échelon fédéral pour que l'accord soit mis en oeuvre et que le processus de changement puisse se poursuivre.

Grâce à ces changements, nous nous assurerons que le cadre du nouveau régime sera en place et que nous pourrons continuer à oeuvrer en vue de l'élimination des barrières qui entravent les échanges interprovinciaux de biens et de services ainsi que de la réduction des obstacles à la circulation des travailleurs et des capitaux entre les provinces. Nous établirons également un forum chargé de résoudre les différends commerciaux sans recourir aux tribunaux.

En adoptant le projet de loi, la Chambre des communes fera preuve de leadership devant les Canadiens et confirmera l'intention du gouvernement fédéral d'effectuer les changements nécessaires en vue de créer au Canada un nouveau régime commercial reflétant les réalités politiques et économiques de l'heure.

Comme je l'ai dit plus tôt, le processus qui a abouti à ce projet de loi a été long, a fait intervenir beaucoup de gens et a tenu compte de nombreuses questions et perspectives tant nationales que régionales.

Au niveau des ministres, comme à celui des experts, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux ont contribué très intensément à ce processus. Je crois qu'il est important de noter que tous les partis politiques et toutes les perspectives régionales y ont été représentées. Il en est de même de nombreux représentants du secteur privé, c'est-à-dire du monde des affaires, des syndicats et des groupes de consommation.

Il y a également lieu de noter que le processus s'est caractérisé par un esprit de coopération qui n'a jamais fait défaut au cours des négociations. Toutes les parties ont fait preuve d'une bonne volonté remarquable. Tout le monde reconnaît en effet que nous avons besoin d'améliorer notre milieu commercial intérieur et qu'il incombe aux gouvernements de répondre à ce besoin.

L'accord représente un important pas vers notre objectif commun d'amélioration de l'envronnement commercial intérieur et d'élimination des obstacles qui s'opposent au commerce, à l'investissement et à la mobilité de la main-d'oeuvre au Canada. Il comporte des règles générales qui empêchent les gouvernements d'ériger de nouvelles barrières commerciales et qui leur imposent de réduire les barrières existantes dans les domaines couverts par l'accord. En outre, il prévoit des obligations précises dans dix secteurs économiques, un mécanisme officiel de règlement des différends, la rationalisation et l'harmonisation des règles et des normes et l'engagement à libéraliser davantage le commerce grâce à d'autres négociations.

Ce dernier point est important, Monsieur le Président, parce que l'adoption du projet de loi dont la Chambre est saisie ne mettra pas fin au processus. Elle donnera plutôt le signal de départ d'un processus continu de renouvellement de la politique commerciale intérieure et montrera notre détermination d'utiliser cette politique au profit de tous les Canadiens.

En fait, le Comité des ministres responsables du commerce intérieur qui a réalisé l'accord devient maintenant un organe permanent chargé justement du renouvellement de la politique commerciale intérieure. De plus, un secrétariat est établi pour donner aux ministres et aux négociateurs l'appui administratif et technique dont ils auront besoin pour mener à bien leur travail.

La méthode de règlement des diffférends qui pourraient survenir entre les signataires constitue l'un des éléments clés de cet accord, comme de tout accord commercial. Bien que les accords commerciaux internationaux nous aient donné une expérience utile, aucun ne pouvait servir directement à cet égard. Pour tenir compte de la situation particulière du Canada, nous avions besoin d'une démarche qui s'inscrive dans la cadre de notre système fédéral-provincial de partage des pouvoirs. Nous avions également besoin d'un mécanisme de règlement des différends qui permette de faire face tant aux plaintes générales relatives à la conformité, c'est-à-dire celles qui se basent sur les principes du libre-échange, qu'aux plaintes précises provenant de consommateurs et d'intérêts privés, qui ne peuvent pas être réglées par les gouvernements eux-mêmes.

(1735)

Le défi consistait à trouver des solutions permettant aux gouvernements provinciaux de conserver la flexibilité nécessaire pour atteindre leurs objectifs politiques et économiques légitimes en vertu des ententes constitutionnelles existantes sur le partage des pouvoirs, tout en établissant un mécanisme de règlement des différends qui assure un accès ouvert et un règlement économique des problèmes sans recours aux tribunaux et aux décisions exécutoires. C'était là un défi de taille et l'Accord sur le commerce intérieur établit un nouveau modèle purement canadien de système de règlement des différends.

L'Accord sur le commerce intérieur définit le cadre d'un nouveau mécanisme de règlement des différends particulièrement bien adapté à la situation canadienne de partage fédéral-provincial des pouvoirs et qui assure un accès ouvert au processus de règlement. La démarche adoptée engage toutes les parties signataires à recourir à la conciliation pour régler les problèmes qui peuvent se poser par suite de l'application des dispositions de l'accord, y compris les questions que suscite l'application de ses principes, règles et ententes sectorielles.

Dans un premier temps, les gouvernements en cause essaient eux-mêmes de régler les problèmes. Dans le cas des problèmes concernant des particuliers ou entreprises privées où les gouvernements ne peuvent pas ou ne veulent pas s'ingérer, ou lorsque les particuliers ou les entreprises ne sont pas satisfaits, la plainte peut être renvoyée directement à un groupe spécial de règlement des différends. C'est là une caractéristique importante parce que les


1793

particuliers comme les gouvernements peuvent attirer l'attention sur certaines questions.

En d'autres mots, un particulier qui s'estime lésé par une pratique ou une politique commerciale qu'il juge déloyale peut porter plainte avec ou sans l'appui du gouvernement dont la question relève.

Il importe de dire que l'Accord sur le commerce intérieur et les procédures de règlement des différends se fondent sur une coopération ouverte destinée à résoudre les plaintes recevables. Les parties sont encouragées à faire tous les efforts possibles pour s'entendre par la voie de la consultation et de la conciliation.

Lorsque la consultation échoue, les gouvernements, agissant en leur propre nom ou au nom de particuliers, ou les particuliers eux-mêmes, peuvent demander qu'une question soit renvoyée à un groupe spécial. Celui-ci examine les faits et, s'il y a lieu, recommande les changements qui s'imposent.

L'objectif sous-jacent de ce processus est de favoriser la modification des politiques ou des pratiques incohérentes grâce à des recommandations plutôt que de recourir à des sanctions ou à des réparations. Certains ont exprimé la crainte que le gouvernement fédéral ne se serve du projet de loi C-19 pour «faire la police» dans le domaine du commerce interprovincial. Au cours de l'étude du projet de loi en comité, des préoccupations ont été exprimées quant à la forme de certaines dispositions relatives aux pouvoirs du gouvernement fédéral. Le gouvernement a éclairci ces dispositions comme nous pouvons le constater dans le projet de loi qui en est maintenant à l'étape de la troisième lecture.

Il est faux de prétendre que le gouvernement fédéral essaie de faire la police dans le domaine du commerce intérieur ou que le projet de loi C-19 habilitera le gouvernement fédéral à agir unilatéralement dans les questions relatives au commerce intérieur. Le comité du commerce intérieur, formé de ministres, est le principal organe responsable de la mise en oeuvre et du fonctionnement de l'accord, y compris du règlement des différends.

Tous les gouvernements signataires, c'est-à-dire le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux, sont membres de ce comité. À l'heure actuelle, le comité est coprésidé par l'honorable James Downey, ministre de l'Industrie du Manitoba, et par le ministre fédéral de l'Industrie. Le secrétariat a été établi à Winnipeg, sous la direction de M. André Dimitrijevic, ancien sous-ministre adjoint aux relations fédérales-provinciales de la Saskatchewan. Le bureau de M. Dimitrijevic se chargera d'administrer le mécanisme de règlement des différends.

(1740)

Un certain nombre de groupes de travail ont été formés ou le seront bientôt pour évaluer les effets de l'accord sur chaque province et territoire et présenter des rapports annuels sur la question. Ces groupes suivront l'évolution de l'environnement commercial intérieur et formuleront les recommandations qui s'imposent.

C'est donc un accord reposant sur des bases larges et le mécanisme de règlement des différends prévu est aussi établi sur des bases larges. Les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux participent à cet accord, qui répond aux préoccupations exprimées par des représentants de tous les secteurs de la société canadienne.

L'Accord sur le commerce intérieur représente un important jalon dans l'évolution du développement économique du Canada. C'est un pas vers l'avant important dans le processus de création d'un marché plus ouvert et plus concurrentiel au Canada. C'est un accord flexible, qui nous fournit un cadre au sein duquel nous pourrons faire face à des situations particulières ou à des changements de priorités.

Au cours de leur conférence annuelle de l'année dernière, les premiers ministres des provinces ont réitéré l'engagement d'oeuvrer en vue de la réduction et de l'élimination des barrières qui nuisent à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des investissements entre les provinces et les territoires du Canada. Tout comme le gouvernement fédéral, ils veulent poursuivre le processus de renouveau du commerce. Comme nous l'avons réaffirmé dans le discours du Trône, le commerce interne demeure une grande priorité.

L'adoption du projet de loi C-19 établira le fondement d'un marché intérieur plus concurrentiel. La nouvelle loi viendra s'ajouter aux efforts déployés avec succès dans le cadre de l'Équipe Canada par le premier ministre du Canada et ses homologues des provinces pour élargir les marchés d'exportation de nos biens et services. Nous faisons partie de l'économie mondiale et nous devons affronter la concurrence internationale.

Les barrières commerciales intérieures affaiblissent notre compétitivité à l'échelle internationale. Nous ne sommes peut-être pas en mesure d'agir sur tous les facteurs qui interviennent dans les marchés mondiaux, mais nous pouvons sûrement nous attaquer aux problèmes qui se posent à l'intérieur de nos frontières.

C'est ce que fait le projet de loi C-19. Animé de l'esprit de coopération qui nous a permis de progresser jusqu'ici en vue d'améliorer l'environnement commercial au Canada, je suis heureux d'appuyer l'adoption de cette mesure législative. Je demande ins-tamment aux autres députés de l'appuyer, eux aussi.

[Français]

M. Nic Leblanc (Longueuil, BQ): Madame la Présidente, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-19, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord sur le commerce intérieur.

Pour nous du Québec, cela nous paraît être un projet de loi très important et très encourageant. Depuis déjà plusieurs années, je dirais même depuis plus de dix ans, nous discutons de ce projet de libéralisation des échanges entre les provinces du Canada. Aujourd'hui, on est fiers de voir que le gouvernement a agi en ce sens.

Il est très important d'harmoniser les relations commerciales, et j'expliquerai en détail un peu plus tard pourquoi nous sommes d'accord pour harmoniser ces relations commerciales avec les provinces. Tout d'abord, nous avons libéralisé les échanges commerciaux avec les États-Unis, avant de le faire entre les provinces. Vous vous imaginez combien il était pressant d'agir en ce sens.


1794

Il est aussi important d'avoir un mécanisme de règlement des différends. Ce mécanisme nous semble aussi passablement correct, excepté, comme on l'a mentionné dans les discours aux autres étapes du projet de loi, et comme nous en avons discuté avec les autorités québécoises, qu'il est un peu anormal qu'on fasse du libre-échange avec les États-Unis où les parties-le Canada et les États-Unis-doivent décider, à la fin de tout, de la façon dont on doit régler un différend entre les entreprises ou des secteurs de l'activité économique.

(1745)

Ici au fédéral, c'est par décret, à la fin de tout, qu'on va décider où on va régler les différends. Donc, unilatéralement, c'est le gouvernement fédéral qui va décider par lui-même ce qui est correct et ce qu'il ne l'est pas.

En ce sens, je pense qu'on avait proposé, nous en tout cas ainsi que mon collègue, le porte-parole de l'industrie, auparavant, qu'on prenne au moins deux jours de débat à la Chambre des communes pour informer clairement de l'importance de régler un différend. On pense, et je l'ai dit par le passé, qu'il y a peut-être des secteurs qui pourraient être affectés, par exemple, dans une province par rapport à une autre, et que le différend, s'il est réglé par décret du Conseil des ministres, cela veut dire que ça pourrait, de temps en temps, être déloyal envers un secteur d'activité économique qui est favorisé dans une province par rapport à une autre.

C'est en ce sens que nous pensons que régler un différend à la fin de tout par décret nous paraît dangereux pour certains secteurs d'activité économique et aussi pour certaines provinces, particulièrement les plus petites.

Il est bien important d'avoir un libre-échange entre les provinces. Déjà, à l'heure actuelle, les échanges commerciaux en produits et services, au Canada et au Québec, représentent 16 p. 100 du produit intérieur brut, par exemple, du Québec. Il est assez important pour le Québec d'avoir une libre concurrence avec le reste du Canada.

Par exemple, on peut dire que les produits que le Québec vend dans le reste du Canada représentent 23,3 milliards de dollars. Les achats de produits que nous faisons des autres provinces représentent 19 milliards. Cela veut dire que nous vendons un peu plus dans les autres provinces que ce que nous leur achetons.

Par contre, en ce qui a trait aux services, on vend 11 milliards de dollars de services dans les autres provinces, et on leur achète pour 14 milliards de dollars. On achète pour environ 3 milliards de dollars de plus en services que ce qu'on vend. Cela fait en sorte que, si on regarde la moyenne, ce que nous vendons et ce que nous achetons est à peu près égal.

Si le gouvernement n'avait pas agi en libéralisant les échanges commerciaux entre les provinces, le Québec aurait développé davantage ses échanges commerciaux avec les États-Unis. Nous allons continuer avec les États-Unis parce que nous avons un marché extraordinaire, particulièrement au Québec, avec les villes de New York, Boston, Buffalo, aux États-Unis, et Toronto au Canada. Nous avons un marché énorme. Dans un rayon d'environ 1 000 kilomètres, nous comptons près de 100 millions de consommateurs.

Pour le Québec, il est très avantageux de travailler à une distance la plus courte possible. Nous avons un marché extraordinaire. New York et Boston, vous savez, le nord-est des États-Unis, c'est la région la plus riche du monde où les consommateurs consomment le plus. C'est là aussi où la culture des affaires nous ressemble le plus, ce qui fait en sorte qu'il est beaucoup plus facile pour nous de faire affaires dans ce rayon. Cela demande beaucoup moins d'efforts, de recherche sur le plan du comportement humain, des cultures, etc. C'est beaucoup plus simple. Le Québec continuera à faire des efforts pour développer ces marchés qui sont beaucoup plus faciles. Les statistiques que je viens de vous donner sont basées sur l'année 1994.

Ce sont pour ces raisons-là aussi que notre grand projet souverainiste au Québec porte sur le partenariat économique avec le reste du Canada. On remercie le gouvernement pour les efforts qu'il vient de faire. C'est un pas dans le bon sens. Nous croyons, et nous l'avons proposé pendant le référendum, au fait d'avoir un partenariat économique avec le reste du Canada. Et ce que l'on vient de faire, ce qu'on est en train de faire aujoud'hui, c'est un pas en avant. Ça va nous permettre de réaliser plus facilement nos objectifs quand le Québec deviendra souverain. En ce sens, je pense que c'est un pas extraordinaire que l'on vient de faire.

Il y a également d'autres raisons. Le fait de libéraliser les échanges commerciaux avec les autres provinces ainsi qu'avec les États-Unis a un autre avantage aussi, c'est que l'économie actuelle et future, principalement future, change énormément. C'est un défi extraordinaire, c'est un défi passionnant que nous allons vivre au cours des années à venir. Il y aura une nouvelle dynamique parce qu'avec les nouvelles façons de communiquer, la haute technologie, la robotique, l'informatique, l'autoroute électronique, tout cela est en train de changer complètement la dynamique économique.

(1750)

C'est pour ces raisons que les territoires ne devraient plus exister, pour permettre à tout le monde de s'épanouir avec toutes les ressources intellectuelles et les ressources techniques que nous possédons. J'aimerais en parler brièvement, si j'en ai le temps.

Je vais parler brièvement, principalement de l'économie des dernières cinquante années. Je n'irai pas trop loin, je ne remonterai pas à Caïn et Abel, ni au temps de Jésus-Christ, mais je vais reculer un peu dans le temps pour les sceptiques qui croient que la libre concurrence, le libre marché international, le libre-échange n'est pas quelque chose de bon, que c'est quelque chose qui va nous nuire.

Pour ces sceptiques, j'aimerais faire un survol de l'économie du passé et de l'économie de l'avenir. Lorsque j'étais député du gouvernement conservateur, j'ai parlé très fort pour libéraliser les échanges avec les États-Unis. J'ai travaillé très fort en ce sens, ce qui me permet aujourd'hui de me rappeler tous les discours que nous avons faits, les études, les témoins que nous avons entendus, ce qui me permet de me convaincre que le libre-échange est une bonne chose.

Pour ces sceptiques, je vais parler de l'importance de la concurrence. Si on parle de l'économie ancienne, de l'économie passée, il faut se rappeler que dans ce temps-là, nos marchés étaient particulièrement le bois, la fourrure, le fer. On avait aussi des produits agricoles très domestiques. On produisait notre viande pour nos besoins immédiats. On avait aussi du charbon, du pétrole qui étaient très limités et tous les produits que la nature renouvelait par elle-même nous permettaient de survivre sur place.

Aussi, lorsqu'on avait de grands inventaires de produits naturels comme le charbon, le fer, le bois, etc., on s'en servait pour vendre et fonctionner avec ces produits. Il y avait des avantages relativement


1795

stables. L'économie d'autrefois était relativement stable parce que c'était surtout les ressources naturelles qui créaient notre économie.

On construisait des maisons en bois, on se servait du bois pour se chauffer, on tuait nos animaux pour se nourrir, on buvait le lait de nos vaches. Tout cela était une économie très locale. Les gens pouvaient coucher à la chaleur, se chauffer avec le bois, c'était assez simple. On n'avait pas tellement besoin de faire affaires avec l'Ontario ou les États-Unis pour pouvoir se nourrir, se loger au chaud, etc. C'était une économie strictement locale. Nos possibilités étaient énormes, ici au Québec particulièrement, et dans les autres provinces, en matériaux de toutes sortes.

Les mesures de protection étaient d'une certaine façon assez importantes. À ce moment-là, les gens avaient très peur d'être envahis par les Américains ou les Européens, qu'on vienne déranger notre économie. C'était important à ce moment-là de mettre des barrières parce qu'on avait peur de déstabiliser notre petite économie locale.

On avait tendance à être protectionnistes. On mettait des barrières. On mettait aussi des tarifs de douane de toutes sortes pour qu'on ne puisse pas déranger notre économie. Cette économie-là a été utilisée pendant des décennies, je dirais même des siècles au cours desquels il y a eu très peu de changements. Donc, on était protectionnistes, et possiblement avec raison.

En ce qui touche l'indépendance des marchés nationaux ou des marchés internationaux, on n'avait pas vraiment besoin des autres pays, comme je l'ai dit plus tôt, pour suffire à nos besoins.

(1755)

Nos entreprises multinationales allaient s'installer principalement dans des pays où il y avait beaucoup de richesses naturelles, où la main-d'oeuvre était peu dispendieuse. On fabriquait des produits, on les finissait et on les vendait. Ça, c'était l'économie du passé où les entreprises multinationales, comme je le disais, allaient s'installer dans des pays où elles pouvaient fabriquer des produits bon marché par rapport aux richesses naturelles et la main-d'oeuvre à bon compte.

Dans les années 1960, 1970 et 1980, les gouvernements s'impliquaient et quand ils se rendaient compte qu'une entreprise était en mauvaise situation financière ou avaient des difficultés au niveau de la productivité ou autres, les gouvernements s'impliquaient en donnant des subventions aux entreprises. On subventionnait facilement les entreprises. On a dépensé énormément pour subventionner l'entreprise. Je me souviens très bien, et je pense que certains députés de cette Chambre s'en souviennent très bien, ceux qui s'intéressent un peu à l'économie, on a dépensé des sommes énormes pour subventionner des entreprises pour se rendre compte, finalement, qu'on gaspillait carrément notre argent.

Les entreprises qui étaient en difficultés financières, généralement, c'était parce qu'elles n'avaient pas pris le temps nécessaire pour analyser les marchés futurs, les changements technologiques, les changements de toutes sortes au niveau de la formation de la main-d'oeuvre, de la robotisation, de toutes sortes de nouveaux moyens auxquels elles ne s'étaient pas adaptées. C'est principalement pour ces raisons que ces entreprises avaient des difficultés et les gouvernements ont subventionné un peu à gauche et à droite ces entreprises. Cela a fait en sorte que ce fut du gaspillage. On s'est rendu compte que même en subventionnant ces entreprises, elles fermaient quand même leurs portes.

On subventionnait ces entreprises parce qu'elles étaient dans des régions éloignées, mais c'était des entreprises qui n'étaient pas adéquates à la région où elles étaient, soit que les richesses naturelles étaient plus faibles qu'au moment où elles s'y sont installées, etc., alors, ces choses-là ont fait en sorte qu'on a gaspillé énormément d'argent.

Si on parle un peu de l'économie actuelle. Pour les sceptiques qui croient que le libre-échange est quelque chose de mauvais qui va nous nuire, moi, je crois exactement le contraire. J'ai toujours cru le contraire, ça fait plusieurs années que je crois le contraire. D'abord, l'économie actuelle et celle que nous allons connaître dans les années à venir sont des économies basée particulièrement sur les idées plutôt que sur les ressources naturelles.

La capacité intellectuelle va être très importante. Au Québec particulièrement, nous avons énormément de capacités intellectuelles, et les jeunes qui sortent de nos écoles, de nos cégeps, de nos universités sont extraordinaires. Nous voyons particulièrement en ce qui concerne le développement de logiciels que nous sommes quasiment classés les meilleurs au monde. C'est une économie qui sera basée beaucoup plus sur la capacité intellectuelle que sur la capacité des richesses naturelles comme dans le passé. L'autoroute électronique en est un exemple. On en parle beaucoup à l'heure actuelle.

Les personnes qui ont la capacité de développer des logiciels, de s'en servir pour faire la promotion, la vente ou informer les gens, que ce soit par Internet ou par d'autres moyens de communication, seront à l'avant-garde et réussiront très bien dans l'économie. C'est une économie d'idées, une économie qui va être basée sur la compétence intellectuelle.

(1800)

Cette nouvelle façon de faire les choses avec les idées, avec la compétence intellectuelle, va faire changer l'économie beaucoup plus rapidement. On va voir un bouleversement économique, on pourrait dire épouvantable, mais je ne dirais pas que ce sera épouvantable, je dirais plutôt que c'est une nouvelle dynamique particulièrement passionnante que nous allons vivre. Vous savez que les idées vont beaucoup plus vite que l'économie du charbon ou du fer. Les idées changent, évoluent, vont vite.

Avant, l'économie était basée sur les richesses naturelles comme le charbon et le fer. On s'assoyait sur nos richesses, on en avait pour 50 ou 100 ans. On vivait de cela, on n'avait qu'à les exploiter, les vendre, ce n'était pas compliqué.

C'est une économie beaucoup plus flexible, beaucoup plus rapide, qui va évoluer plus rapidement, qui va devenir très passionnante pour les jeunes qui auront à vivre cet avenir, à mon avis.

L'aide des gouvernements ne sera pas la même, elle sera complètement différente. L'aide des gouvernements visera plutôt à aider les gens à mieux communiquer, à mieux vendre. Elle permettra d'informer sur ce qui se passe sur le plan international, sur ce qui se passe sur les marchés internationaux. Elle devra aider à évaluer les marchés internationaux, aider par secteur d'activité économique.

Par exemple une petite entreprise pourra avoir besoin de s'informer. Il sera important que le gouvernement ait des experts un peu partout dans le monde qui puissent, par Internet, permettre aux


1796

petites et moyennes entreprises de savoir quelle est la culture en Inde, comment se comportent les Indiens, comment se comportent les Japonais, comment se comportent les Chinois, sur le plan culturel, sur les méthodes d'achat et autres. Le gouvernement aura un rôle à jouer qui sera important dans la communication de l'information nécessaire permettant aux entreprises, particulièrement les petites et moyennes entreprises, d'avoir un domaine nécessaire pour pouvoir se développer.

C'est cela l'économie future et ce sera bien important qu'on puisse en être conscients. Je pense qu'on en est conscients, mais il faudra avoir des gouvernements flexibles. C'est pour ces raisons que le Québec cherche à avoir plus d'autonomie. On veut pouvoir être flexibles pour agir rapidement. On pense que le fédéralisme, avec ses onze pouvoirs politiques, stagne. Cela empêche les gens de s'épanouir. Le gouvernement traîne toujours la patte, prend beaucoup de temps avant de réagir. C'est pour cela qu'on veut être souverains, avec un partenariat économique et politique avec le reste du Canada. C'est pour pouvoir s'épanouir en étant plus rapides, plus efficaces en tant que gouvernement de soutien dans toute cette nouvelle façon de gérer les choses.

J'ai dit tout à l'heure que les marchés plus ouverts vont faire qu'on aura énormément d'échanges, pas seulement pour des produits, mais on va échanger beaucoup de compétences. La compétence ne coûte pas cher en transport. La compétence se fait à partir des systèmes informatiques. Elle se fera à partir d'Internet, des communications qui seront beaucoup plus faciles.

On dit que dans quelque temps on va pouvoir communiquer sans appels interurbains à travers le monde. Il n'y aura plus d'appel interurbain pour appeler au Japon ou en Chine dans quelque temps, dans quelques années, près de nous. Cela veut dire qu'on pourra échanger intellectuellement des idées ou travailler ensemble dans des projets de recherche et autres avec des personnes à l'étranger, n'importe où dans le monde.

C'est pour cela que le libre-échange avec les États-Unis, le libre-échange avec les provinces, le libre-échange avec d'autres grandes régions du monde aussi sera intéressant. Tout cela nous permettra de fonctionner plus efficacement. On aura une meilleure productivité et, en bout de ligne, qui en profitera? C'est le consommateur.

On aura de bons produits de grande qualité. Nous pourrons assurément améliorer le niveau de vie des gens. Cela va loin, mais c'est pour dire que l'ouverture sur le monde, le libre-échange, la libre concurrence permettent d'améliorer la productivité. Cela améliore nos produits et a comme résultat que les consommateurs, la population en général, bénéficieront d'un meilleur niveau de vie.

(1805)

On aura de meilleures vêtements, de plus beaux vêtements. On aura de plus belles automobiles, des télévisions à programmes interactifs. On pourra se permettre toutes sortes de choses. Alors la haute technologie, on en a besoin, mais elle coûte très cher dans certains cas.

Quand on a travaillé à mettre en place le libre-échange avec les États-Unis, je sais que les grands investisseurs internationaux nous disaient: «Ça nous prend des marchés importants pour justifier nos investissements.» Il y avait deux raisons pour lesquelles les gens ne venaient plus au Canada. Premièrement, ils ne voulaient plus investir au Canada parce qu'ils disaient: «On n'a pas suffisamment de marché pour justifier nos investissements. Et deuxièmement, la dette du Canada est trop élevée, et on sera obligés de la payer. On risque que ça nous coûte trop et qu'en bout de ligne ça ne soit pas rentable d'investir au Canada.»

Alors la haute technologie a ses avantages mais, en même temps, elle est parfois coûteuse. Pour inventer un produit de très haute technologie, ça coûte cher. Alors puisque ça coûte cher, puisque les investissements sont très élevés, il faut aussi des marchés pour rentabiliser ces investissements. Alors comme on avait un marché très restreint au Canada qui était d'environ 25 millions de personnes, en plus, on n'était pas certains de pouvoir vendre ces produits d'une province à l'autre. Alors vous imaginez le marché restreint que nous avions. Alors très peu de gens étaient intéressés à investir au Canada parce que les marchés étaient beaucoup trop petits, ce qui faisait en sorte que cela ne pouvait pas justifier l'investissement. Alors les investisseurs internationaux de haute technologie s'en allaient vers l'Europe, les États-Unis, le Japon ou dans d'autres pays.

Pour ces raisons, il était bien nécessaire d'avoir le libre-échange avec les États-Unis. Ce fut dur parce qu'il y avait presque seulement le Québec qui était en faveur du libre-échange avec les États-Unis. Nous, les Québécois, avons travaillé très fort parce qu'on croyait au libre-échange avec les États-Unis. Il y avait unanimité au Québec entre le Parti libéral et le Parti québécois et la majorité des députés conservateurs québécois d'alors. On a travaillé très fort, et c'est grâce aux Québécois qu'on a réussi à signer une entente de libre-échange avec les États-Unis.

Le Parti libéral d'alors était contre le libre-échange avec les États-Unis, excepté M. Turner. Seulement M. Turner, l'ex-premier ministre, était d'accord. Il était venu ici en Chambre faire un discours disant qu'il était d'accord. Il était allé contredire le premier ministre actuel, qui était contre.

Mme Brushett: You are a wise man.

M. Leblanc (Longueuil): Oui, oui. Absolument.

Alors M. Turner état un homme sûrement très intelligent. Il avait compris. Il était avant-gardiste. Malheureusement, son parti était contre, et ce fut une guerre à ne plus finir. On a travaillé des heures.

Je me souviens avoir fait un discours à 23 h 40 environ, au mois de décembre, juste avant Noël, parce qu'il fallait adopter l'Accord de libre-échange avant la fin de l'année, parce qu'il fallait que ce soit entériné par chacun des pays, les États-Unis et le Canada. Alors on a fait de longs discours jusqu'à la fin, parce que les libéraux nous avaient complètement pas nui, mais ils avaient essayé de gagner du temps. Comme on connaît la procédure parlementaire, ils ont essayé de gager du temps jusqu'à la fin, jusqu'à tems qu'on réussisse à adopter cette entente.

Il reste tout de même que c'est grâce aux Québécois, au gouvernement du Québec, à ses députés et aux députés du Parti conservateur du Québec. On était environ une soixantaine à ce moment-là. On a réussi à convaincre le reste du Canada de faire du libre-échange.

Aujourd'hui, les libéraux sont d'accord avec le libre-échange. Ils ont gagné les élections, maintenant ils n'en ont plus besoin. Ils s'en servaient pour gagner les élections mais, en tout cas, c'est autre chose. Maintenant ils sont d'accord.


1797

Je suis également content de voir aujourd'hui qu'ils ont décidé de libéraliser les échanges entre les provinces. Je suis tout à fait d'accord, et c'est pour ces raisons que j'appuie ce projet de loi.

Tout cela pour dire que ce projet de loi permettra de simplifier les échanges, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. J'ai également mentionné plus tôt qu'avec le projet souverainiste que nous avons toujours en tête, qu'on n'oubliera pas parce qu'on y croit encore, à moins que le gouvernement canadien décide de faire des changements dans la Constitution, d'accepter tout cela.

(1810)

Enfin, ce qu'on propose, c'est un partenariat économique étroit, contrôlé. Comme je l'ai mentionné tantôt, c'est un bon départ. Cela va nous permettre de pouvoir libéraliser nos échanges commerciaux, ce qui est nécessaire.

Maintenant qu'on libéralise les échanges avec les provinces, on est très conscients, nous du Québec, qu'il faudra former nos employés, nos individus davantage. À cause de cela, encore une fois, je supplie le gouvernement fédéral d'accepter de remettre au Québec la responsabilité de la formation de la main-d'oeuvre. C'est très important pour nous. Ce n'est pas au gouvernement fédéral de décider de former ces gens, c'est de juridiction provinciale. C'est ma douzième année en tant que député à la Chambre des communes, et ça fait 12 ans qu'on supplie le gouvernement fédéral de remettre aux provinces la formation de la main-d'oeuvre. C'est très important pour nous.

On se rend compte qu'il y a beaucoup de gaspillage. C'est un gaspillage d'énergie et de temps, et les gens ne sont toujours pas formés adéquatement. On dit que la formation de la main-d'oeuvre, par le fédéral, est efficace à environ 25 p. 100. Imaginez-vous, on dépense des milliards de dollars, et c'est efficace à 25 p. 100.

C'est aussi vrai pour l'Ontario comme pour la Colombie-Britannique. La formation de la main-d'oeuvre devrait être donnée par les institutions des provinces. Ce sont les provinces qui sont maîtres des institutions d'enseignement. Pourquoi le fédéral est-il obligé d'acheter des cours dans les institutions québécoises? Souvent, on a des règles qui ne correspondent pas aux règles de nos commissions scolaires ou des institutions d'enseignement des provinces.

Il serait beaucoup plus facile de coordonner l'action de la formation de la main-d'oeuvre si elle était contrôlée par les provinces, si l'argent allait directement aux provinces pour qu'elles soient capables de donner une formation adéquate. On a des collèges, des cégeps qui s'adaptent aux besoins des entreprises et qui font des programmes très spécialisés correspondant à des secteurs d'activité économique. On regroupe les entreprises d'un même secteur et on crée des classes spécialisées pour former des gens de façon très précise pour répondre à des besoins très spécifiques.

On crée des cours spécifiquement pour les besoins de ces entreprises, mais dans bien des cas, le fédéral arrive et empiète. Je vais vous donner un exemple: quelqu'un est en chômage et il veut suivre un cours qui dure 10 mois. Son cours commence au mois de mai et se termine 10 mois plus tard. Mais comme il est en chômage, il ne peut pas avoir des jours de vacances pendant sa période de chômage, donc, il ne peut suivre ce cours-là parce qu'au Québec, les commissions scolaires ont deux mois de vacances. C'est fou et c'est inacceptable. Moi, ça me révolte ces choses-là. C'est scandaleux et c'est révoltant.

Beaucoup de gens viennent nous voir dans nos bureaux et nous disent: «Ça n'a pas de bons sens, je suis apte à recevoir un cours, mais je ne peux pas le recevoir parce que le cours commence au printemps et finit tard à l'automne.» Comme les critères de l'enseignement ne sont pas les mêmes dans nos commissions scolaires que ceux de l'assurance-chômage, cela fait en sorte que ces gens-là ne peuvent pas suivre le cours. Pour ces raisons-là, je trouve scandaleux de gaspiller de l'argent et aussi des gens qui ont les capacités de réussir. Les gens se découragent souvent, retournent à la maison et deviennent des gens comme ceux sur le bien-être social qui continuent à vivre aux crochets des gouvernements.

(1815)

Je supplie le gouvernement fédéral d'agir rapidement. Je remarque mes collègues du gouvernement qui sont près de moi, je suis convaincu qu'ils comprennent très bien le message que je donne. Je ne le dis pas avec agressivité. C'est tout simplement le gros bon sens.

J'espère que les députés libéraux qui forment le gouvernement à l'heure actuelle vont écouter encore une fois ce message et permettre que l'on soit plus efficaces, que notre personnel, ceux qui travaillent dans nos entreprises soient mieux formés pour permettre d'avoir une meilleure productivité afin de créer de meilleurs produits. Ces produits seront de meilleure qualité et on pourra faire face à la concurrence internationale. C'est cela le but de la formation de la main-d'oeuvre.

C'est pour cela que l'on travaille très fort au Québec, pour être capables d'avoir des entreprises plus efficaces. Si on ne le fait pas, c'est une grave erreur. On n'aura pas à pleurer sur notre sort si un jour les produits des autres pays rentrent en abondance chez nous et que cela crée du chômage et de l'assistance sociale. Est-ce qu'on souhaite devenir un État de bananes, un État pauvre, ou si on veut entrer dans cette ère d'économie nouvelle? Dans cette ère d'économie nouvelle, la haute technologie prendra la place des richesses naturelles.

C'est pour cela que la formation et les capacités intellectuelles sont quelque chose d'essentiel pour cette économie nouvelle que nous allons vivre dans les années à venir.

Encore une fois, je supplie le gouvernement, et je supplie particulièrement les députés du gouvernement, parce que ce sont eux qui forment le gouvernement. Souvent les députés n'osent pas. On n'est pas toujours obligés de voter contre son gouvernement pour mettre nos idées en valeur. Je pense qu'il y a lieu de travailler très fort à l'intérieur de nos caucus. Je sais qu'il y a d'excellents députés du Parti libéral qui comprennent ce que je viens de dire et je suis convaincu qu'un jour ils vont comprendre, comme ils ont pris du temps à comprendre et à accepter le libre-échange avec les États-Unis. C'est normal. On évolue tranquillement.

Il y a encore des gens au Québec qui ne sont pas souverainistes. Moi je leur dis qu'il y en a qui prennent plus de temps que d'autres à comprendre. C'est la même chose. Il y a des gens qui n'avaient pas compris que le libre-échange était une bonne chose. Maintenant on se rend compte que le libre-échange est une bonne chose, en tout cas


1798

au Québec on s'en est rendu compte parce qu'on exporte beaucoup plus aux États-Unis qu'on importe.

On se rend compte que le libre-échange est une bonne chose. Mais il y a des libéraux qui, à l'époque, pensaient que ce n'était pas bon. On ne peut pas blâmer les gens. On évolue tranquillement. Comme je viens de le dire il y en a qui prennent plus de temps que d'autres à comprendre. Cela dépend d'où on vient, quelle éducation on a reçue, cela dépend de quel milieu on vient. Tout cela est tout à fait acceptable et je ne veux pas faire de reproche à qui que ce soit.

Il reste une chose, nous vivons dans une ère de haute technologie, de très grandes communications, il va falloir faire face à cette concurrence internationale. C'est un défi extraordinaire, c'est un défi qui va être passionnant. Je suis convaincu que nous allons vivre des années passionnantes dans l'avenir, mais il faut être conscient que nos personnes doient être intellectuellement bien formées pour faire face à cela.

Je suis d'accord et le Bloc québécois est d'accord avec ce projet de loi, excepté, je le répète, en ce qui concerne la partie touchant le règlement des différends. Dans l'ensemble nous sommes d'accord quant à la formule, excepté à la fin, lorsqu'on dit que le gouvernement fédéral pourra unilatéralement, par décret, décider qui a raison ou qui a tort.

Encore une fois, ceci pourrait nuire à certaines provinces qui ont des secteurs d'activités économiques très marqués. Je donnerai l'exemple de l'Alberta.

(1820)

L'Alberta a plusieurs secteurs économiques assez importants, c'est-à-dire le pétrole, le boeuf et le blé. Ce sont ses secteurs économiques les plus importants, je dirais même presque les seuls. Si un jour il y avait des conflits avec le Québec ou l'Ontario dans ces secteurs et que le gouvernement fédéral, par décret, décidait unilatéralement de régler un conflit, ça pourrait nuire énormément à l'économie de l'Alberta. C'est possible.

Au Québec, on a un secteur très important, l'hydroélectricité. Si on a des conflits concernant les sources d'énergie et qu'on ne s'entend pas et que le gouvernement, à la fin, décide par décret de favoriser unilatéralement l'uranium ou l'énergie atomique au détriment de l'énergie du Québec, ça pourrait nuire énormément au Québec. C'est pour ces raisons que de donner l'exclusivité au gouvernement fédéral de régler par décret un conflit pourrait nuire à un secteur d'activité économique important au Québec, comme ça pourrait nuire à un secteur d'activité qui est important en Alberta, au Nouveau-Brunswick ou ailleurs. Dans ce sens, cela nous apparaît dangereux et nous ne sommes pas d'accord.

On aurait préféré qu'il y ait un débat de deux jours, un débat public à la Chambre des communes pour que les députés concernés, qui se sentent lésés dans leurs droits ou leur province, leur région ou un secteur de leur province qui se sentent lésés dans leurs droits puissent être capables d'informer publiquement la population par leurs discours, par leurs interventions, informer la population de ces dangers.

On sait très bien que de pouvoir parler publiquement est souvent un pouvoir extraordinaire. Autrement, ça se fait en catimini, souvent en secret. C'est pour ça qu'on vit dans un système démocratique, pour pouvoir parler publiquement. Je trouve très dommage qu'on ne puisse s'exprimer librement et publiquement au lieu d'un décret. On devrait pouvoir faire un petit débat pour permettre aux gens de s'exprimer. À ce moment-là, on pourrait peut-être changer complètement notre façon de voir les choses.

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir m'entretenir aujourd'hui de l'accord sur le commerce intérieur. Je vais expliquer les raisons pour lesquelles j'estime que des accords de libre échange sont une bonne chose, aussi bien à l'échelle internationale que chez nous. Suivra une brève analyse de ce que le projet de loi fait et ne fait pas, ce qui a une incidence sur le commerce intérieur au Canada. Je fournirai certaines raisons qui font que le Parti réformiste a du mal à souscrire au projet de loi. Je terminerai en touchant un mot du chapitre consacré à l'énergie, ou plutôt du chapitre qui manque sur ce sujet, car il n'a pas encore été concocté, malgré les promesses maintes fois répétées ces dernières années.

J'aimerais expliquer pourquoi l'accord sur le commerce intérieur est tellement important pour la population du Québec, ainsi que pour l'ensemble des Canadiens. J'aimerais que les séparatistes du Québec se rendent à l'évidence que l'élimination des obstacles au commerce interprovincial présuppose l'existence de provinces autour desquelles sont érigés ces obstacles. Rien ne garantit que, si une province se sépare du Canada, le mouvement en faveur du libre-échange à l'intérieur de nos frontières va se maintenir.

Certains avantages que le Québec obtient au sein de la confédération canadienne ne lui sont pas garantis en cas de séparation. L'ALENA, l'accord du GATT et l'accord sur le commerce intérieur, tout ça tombe tout à coup à l'eau pour la province, puis le pays du Québec. Je les exhorte à bien peser les conséquences de leurs options dans les années qui viennent, à y songer à deux fois.

(1825)

Ainsi, en 1989, le Québec a exporté davantage vers la Nouvelle-Écosse et le Nouveau-Brunswick que vers n'importe quel pays européen, y compris la France. Il a vendu beaucoup plus à l'Ontario qu'aux États-Unis. Voilà qui n'est pas à négliger. Le Québec possède un énorme marché à l'intérieur du Canada et les séparatistes le mettent en péril quand ils se mettent à parler de séparation. Pas étonnant que l'économie de Montréal et de tout le Québec soit dans l'ornière pendant que les séparatistes méditent sur leurs options.

Les gens d'affaires du Québec connaissent la vérité. Le fait est que le Canada est bon pour le Québec et ils devraient le savoir. Lorsqu'on commence à lancer l'idée que les Québécois pourraient très bien s'en aller de leur côté, que la situation serait formidable, qu'il n'y aurait pas lieu de s'inquiéter, on ne dit pas la vérité aux Québécois. Le Québec profite des échanges au sein du Canada. Je vais vous faire part de quelques statistiques qui montrent à quel point les échanges interprovinciaux sont avantageux pour certaines provinces.

Il est intéressant de noter que, en Colombie-Britannique, à peine 23 p. 100 de nos exportations totales découlent du commerce


1799

interprovincial. En Colombie-Britannique, nous exportons 76 à 77 p. 100 de nos produits sur le marché international. Nous ne dépendons pas totalement d'un accord sur le commerce intérieur, avec la liberté qu'il donnerait aux Canadiens, même s'il est évident que c'est une bonne chose pour tous les Canadiens. Nous exportons la majeure partie de nos produits vers d'autres pays.

Prenons le cas d'autres provinces. Au Québec, 51 p. 100 des exportations totales vont vers d'autres provinces. Les Québécois exportent donc en majorité vers les autres provinces, plutôt que vers d'autres pays, vers l'Europe ou vers les marchés naissants de l'Asie. La majeure partie de ses échanges sont intérieurs. Si les bloquistes réfléchissent à la question, ils vont se rendre compte qu'ils ne rendent pas service à leurs électeurs en proposant de faire éclater le Canada, alors que plus de la moitié des exportations du Québec sont destinées à d'autres provinces.

L'Alberta exporte 61 p. 100 de ses produits vers d'autres provinces. La province comprend l'importance de l'accord sur le libre-échange intérieur. Elle sait qu'il est essentiel de faire partie du Canada.

Qu'il s'agisse des produits laitiers, des produits manufacturés ou de je ne sais quoi d'autre, le Québec profite de sa présence dans le Canada. Les séparatistes devraient rejeter, une bonne fois pour toutes, l'idée de quitter le Canada, car cela nuit non seulement aux débouchés commerciaux du Québec, mais cela crée aussi une certaine incertitude politique qui est néfaste au reste du pays. J'espère que les Québécois seront davantage prêts à voir d'un très bon oeil les changements acceptables venant du Canada. Beaucoup d'entre nous s'attendent également à une attitude raisonnable de la part des bloquistes.

Nous voudrions que tout le monde accepte que c'est avantageux pour le Québec et le reste du Canada. Le Québec devrait faire partie du Canada. Voyez les statistiques. Nous n'allons pas nous laisser prendre en otages là-dessus. Nous sommes en très bonne position et nous ne sommes pas sur le point de laisser toute l'initiative à des gens qui disent vouloir se séparer. Je les exhorte à reconsidérer leur programme politique qui, selon moi, nuit non seulement au Québec, mais également au reste du Canada.

Si l'Ontario est le plus important partenaire commercial du Québec au Canada, le Québec a un déficit commercial avec l'Ontario et son excédent vient de ses échanges avec des provinces plus éloignées. En d'autres termes, le commerce ne concerne pas seulement l'Ontario. Le Québec a d'importants échanges avec toutes les provinces. Si on additionne tous les chiffres sur les échanges provinciaux, on s'aperçoit ils sont en fait aussi importants que les échanges internationaux. Le commerce interprovincial est la clé.

Durant la campagne électorale, le parti réformiste a défendu l'accord de libre-échange. Nous ne nous en sommes pas cachés. Nous avons déclaré que nous nous attendions à ce que le monde se dirige vers une économie de libre-échange et qu'il valait mieux que nous suivions le mouvement si nous ne voulions rester en arrière. La meilleure façon d'assurer la prospérité à tous les Canadiens consiste à participer pleinement à la nouvelle économie basée sur le libre-échange.

(1830)

Nous avons dit que le libre-échange devrait se faire. Les réformistes ont dit que nous devrions signer l'ALENA et le GATT, le cas échéant. Nous avons dit que si 150 pays, à peu près, dans le reste du monde, voulaient signer un accord de libre-échange à base de règles, nous allions être du nombre car l'avenir de notre pays repose sur le commerce international, l'exportation et l'importation.

Nous avons dit également pendant la campagne électorale qu'une chose qui pourrait rendre le libre-échange avantageux pour le Canada, bien que cela n'ait pas toujours été le cas, ce serait de commencer par abattre les obstacles au commerce intérieur. Ces barrières commerciales nous coûtent 6,5 milliards de dollars. Tout, depuis le lait jusqu'à la bière, coûte plus cher aux Canadiens à cause des barrières au commerce interprovincial. Cela n'a pas de bon sens. Si nous voulons vraiment exporter dans le monde entier, nous devrions au moins assurer également le droit d'exporter à l'intérieur de notre propre pays.

Je voudrais vous dire où cet accord nous mène. Quelle était la situation avant l'entrée en vigueur de cet accord? Pourquoi le Parti réformiste tenait-il si fermement à ce que le gouvernement fédéral renforce un pouvoir en particulier? Tout le monde dit que le Parti réformiste veut démembrer le gouvernement fédéral. Il y a bien des domaines où ce dernier il devrait cesser d'exercer ses activités. S'il est cependant un pouvoir qu'il devrait consolider, c'est celui d'abattre les obstacles au commerce intérieur. L'article 121 de l'AANB stipule, comme cela a toujours été le cas: «Tous articles du crû, de la provenance ou manufacture d'aucune des provinces seront admis en franchise dans chacune des autres provinces.» Voilà les règles que le gouvernement fédéral a laissé bafouer en laissant ériger entre toutes les provinces des barrières commerciales qui nous coûtent6,5 milliards de dollars.

Nous avons déjà discuté de cette question, mais nous nous trouvons dans une situation dans laquelle les entreprises de transport disent qu'il est plus facile de transporter des marchandises du nord au sud en traversant la frontière que ça l'est de les transporter entre les provinces. Les règles relatives à la disposition des marchandises sur les rayons des magasins stipulent que certains produits peuvent être plus visibles ou étalés de façon plus attrayante que d'autres sur les rayons. On a laissé s'ériger des barrières au commerce interprovincial qui nous coûtent 6,5 milliards de dollars, même si l'AANB stipule que les produits de toutes les provinces devraient pouvoir entrer en franchise dans chacune des autres provinces. C'est on ne peut plus clair.

Le gouvernement fédéral a le devoir et le droit reconnu par la loi d'assurer le libre accès d'une province à l'autre. Nous n'avons pas besoin d'un meilleur droit que celui-là. Il y a véritablement libre-échange quand est assuré le droit pour tous les articles du crû, de la provenance ou de la fabrication de n'importe quelle province de circuler en franchise entre les provinces. Ce qu'il faut, c'est un gouvernement fédéral assez courageux pour y veiller.

Cela ne devait pas se faire après l'ALENA ni après le GATT. Nous essayons encore d'arriver à un accord convenable sur le commerce intérieur. Entre temps, le train est passé, et l'accord de libre-échange est chose faite. Pas étonnant que certains disent que


1800

les accords internationaux de libre-échange n'ont pas été aussi bénéfiques qu'ils auraient dû l'être pour le Canada.

Je soutiens toujours que ces accords s'imposaient. Cependant, les gouvernements fédéraux d'hier et d'aujourd'hui auraient dû agir plus vite et avec plus de dynamisme pour abattre les barrières au commerce dans notre propre pays. Si le libre-échange avait commencé chez nous, les Canadiens l'auraient accepté, ils en auraient vu les avantages, et ils auraient beaucoup mieux accepté par la suite l'ALENA et le GATT.

Je dois dire un mot de ce qui s'est passé pendant la campagne électorale. Les libéraux ont promis à beaucoup de producteurs laitiers de ma circonscription qu'ils ne signeraient pas l'accord du GATT sans que le paragraphe 11.2 c) soit renforcé et clarifié. J'ai entendu des candidats libéraux jurer qu'ils ne reculeraient tout pour faire échec à l'accord. Ils allaient démissionner du caucus, ce qui, compte tenu de ce qui s'est passé aujourd'hui, n'aurait pas été une si mauvaise idée. Ils ont dit qu'ils ne signeraient jamais l'accord à moins que le paragraphe 11.2 c), sur le contingentement et la tarification du lait, ne soit renforcé et clarifié.

Le gouvernement n'a même pas pris le temps de lire le document avant de le signer. Et pendant la campagne, il savait pertinemment qu'il allait le signer. Rien n'a été renforcé ni clarifié. On est passé immédiatement à la tarification.

(1835)

Cette promesse est l'une de celles qui ont embarrassé beaucoup de libéraux pendant la campagne électorale. Ils ne l'ont pas tenue auprès des producteurs laitiers de ma région. Le conseil responsable de la publicité trompeuse devrait être saisi de ce cas.

Les libéraux ont fait des promesses extravagantes, notamment celles de la vice-première ministre concernant la TPS. Ils ont aussi promis la tenue de votes libres à la Chambre. Je ne veux pas m'en prendre à vous, madame la Présidente, mais le livre rouge promettait également que des vices-présidents de l'opposition occuperaient le fauteuil. Que sont devenues toutes ces promesses?

Le livre rouge est passé de la section des ouvrages non fictifs à celle des ouvrages de fiction, où il se trouve maintenant bien calé. J'ai vu quelqu'un sortir d'ici avec un livre rouge dont l'épaisseur était réduite de moitié. Les libéraux tentent d'en arracher des pages en marchant et essaient de faire en sorte que la population ne puisse pas l'examiner de près. Il sera intéressant de voir ce qu'ils feront de la partie réservée aux promesses.

Je rappelle aux personnes qui suivent ce débat, en particulier mes propres électeurs, que , sur cet article du GATT, les libéraux ont diffusé suffisamment de renseignements trompeurs pour laisser bouche bée même une vache laitière de ma circonscription.

À quoi aboutira cet accord sur le commerce interprovincial? Nous avions le libre-échange complet. Nous pratiquions le libre-échange sur tout ce qui était produit, cultivé ou fabriqué, à peu près tout en somme. Que prévoit l'article 101 de l'accord sur le commerce entre les provinces? Le gouvernement voudra sans doute faire renforcer cet article. L'article stipule que cet accord a pour objectif de réduire et d'éliminer dans la mesure du possible les barrières à la libre circulation des biens et des services.

Notez la transition qui n'a rien de positif. Nous allons du libre-échange de toute chose cultivée, produite ou manufacturée au libre-échange chaque fois que c'est possible selon le gouvernement. Est-ce là une amélioration? Non. Ce n'est pas un meilleur accord sur le commerce intérieur.

Que signifie «dans la mesure du possible»? Est-ce que cela veut dire que, quand un gouvernement séparatiste dit que telle barrière ne peut être éliminée, la barrière en question doit demeurer? Est-ce que ceal veut dire que, si quelqu'un retient les services d'un groupe de pression ou d'un groupe d'intérêts spéciaux qui est peut-être financé par le gouvernement pour faire activement pression sur le gouvernement, la barrière doit demeurer? Qu'est-ce que cela veut dire? Personne ne le sait vraiment, étant donné que le gouvernement éliminera les barrières au commerce intérieur «dans la mesure du possible». Ce n'est pas suffisant. C'est un des pouvoirs dont le Parti réformiste a toujours dit que le gouvernement fédéral devrait le renforcer.

Nous avons dit que beaucoup de choses pouvaient être redressées dans le système fédéral-provincial. Si les provinces pensent qu'elles peuvent faire un meilleur travail, qu'elles peuvent mieux se débrouiller, qu'elles ont les ressources nécessaires et qu'elles veulent s'occuper d'un tas de choses dont s'occupe actuellement le gouvernement fédéral, qu'on leur donne plus de pouvoirs et les jeux seront faits.

Cependant, s'il veut que le pays reste uni d'un océan à l'autre, le gouvernement fédéral doit conserver le droit d'éliminer les barrières au commerce intérieur. Il ne peut déléguer ce pouvoir aux provinces. S'il tue l'activité économique entre provinces, cela créera des dissensions qui entraîneront à leur tour des dissensions politiques, des querelles interprovinciales, des luttes entre les entreprises, un manque de concurrence, des coûts pour les consommateurs et des coûts pour les contribuables. C'est inacceptable de permettre aux gens, aux entreprises ou aux provinces de dresser des barrières commerciales dans notre propre pays, alors que nous cherchons des moyens de les faire disparaître un peu partout dans le monde.

Cette mesure est un pas dans la mauvaise direction. En mars 1994, tout juste après le premier budget fédéral, on avait fait une promesse. Un certain ministre de l'Industrie avait affirmé que le gouvernement fédéral avait à coeur d'en arriver à un accord qui soit clair et concis, qui prévoie une série de règles interdisant les mesures de protection et qui comporte un mécanisme de règlement des différends efficace et applicable.

Cet accord ne fait rien de tout cela. S'il le faisait, je serais entièrement d'accord pour qu'on fasse un essai et qu'on voie s'il peut fonctionner. Il y a des secteurs entiers que cet accord n'aborde même pas. Certains produits agricoles ne sont pas visés. Certains marchés publics et certains outils de développement régional ne sont pas visés.

1801

(1840)

Même le chapitre sur l'énergie n'y est pas. Le gouvernement nous demande de signer quelque chose qui n'est pas encore fait. Cet accord est divisé en 14 chapitres environ. Le chapitre sur l'énergie est une page blanche. C'est déjà assez grave comme ça, mais le gouvernement en a rajouté. Il a dit que le chapitre sur l'énergie s'ajouterait à l'accord en juillet 1995. Juillet passé, rien n'est venu. C'est un document sur les questions d'énergie dont nous avons besoin. C'est l'un des éléments les plus importants de l'accord. Cela devait ensuite être fait en septembre 1995, mais septembre 1995 a passé sans qu'on ajoute rien à l'accord.

Il n'y a pas d'accord sur les questions d'énergie. Le gouvernement nous demande d'appuyer un accord sur le commerce intérieur dont le chapitre sur la question qui me préoccupe est inexistant. Il n'y a rien sur ce point, c'est une page blanche.

On nous dit: «Faites-nous confiance. Nous signerons les documents plus tard et nous négocierons un accord. Donnez-nous les pouvoirs dès maintenant». C'est inacceptable. Malheureusement, cette façon de signer des accords et de négocier par la suite est typique du gouvernement actuel. Il a agit de la même façon dans le dossier du règlement des revendications territoriales au Yukon. Il fait de même dans le cas des accords sur le commerce intérieur. Il nous a demandé de l'autoriser à procéder par décrets dans plusieurs projets de lois, en déclarant: «Nous ne savons pas ce que cette mesure signifie exactement. Nous ne savons pas quand elle entrera en vigueur. Nous ne savons pas comment nous allons assurer la mise en oeuvre, mais adoptons quand même ce projet de loi.»

Je dis qu'il ne faut pas adopter ce projet de loi. La Chambre doit adopter des accords et des projets de loi seulement quand ils sont complets. Si le gouvernement a besoin de temps pour parachever le projet de loi, on doit certainement lui en accorder, mais il ne doit pas nous demander d'approuver des projets de loi incomplets. Cet accord sur le commerce intérieur pose un problème précis.

Je parle maintenant du chapitre concernant l'énergie. Ce chapitre est absent; cela témoigne de l'efficacité éventuelle de cet accord. S'il ne renferme aucun chapitre sur l'énergie, à mon avis, l'accord sur le commerce intérieur n'existe même pas.

Il manque aussi le chapitre concernant l'agriculture. Je crois que l'accord réglementera le commerce intérieur des trucs et des machins. C'est inacceptable. Le pays a besoin d'un accord sur le commerce intérieur et cet accord doit traiter des deux produits les plus importants, il doit au moins traiter d'agriculture et d'énergie. Si le gouvernement ne peut obtenir un accord sur ces points, il devrait retirer le projet de loi jusqu'à ce que les négociations aboutissent. Une fois celles-ci terminées, lorsque le gouvernement aura un véritable accord à présenter à la Chambre des communes, alors nous pourrons voter. S'il n'existe aucun accord, nous devons voter non car nous ne pouvons accorder au gouvernement la permission de signer un chèque en blanc.

J'ai déjà dit que le chapitre concernant l'énergie devait être terminé en juillet 1995. Ensuite il devait être terminé en septembre 1995. La date est passée. Maintenant, les fonctionnaires travaillent sur un nouveau projet de chapitre pour le secteur de l'énergie. Le conseil des ministres de l'énergie a de nouveau promis qu'en août de cette année, ils auraient le chapitre pour le secteur de l'énergie. Il sera terminé au moins un an plus tard que prévu.

Qu'essaie-t-on de nous faire croire au sujet de ce chapitre et de cet accord? L'histoire nous dit qu'une fois de plus la politique va nuire au bon sens, et que le chapitre du secteur de l'énergie pourrait bien ne pas voir le jour encore. On en a déjà rédigé un, mais il n'a pas reçu l'agrément des intéressés. Il est probable qu'on ne s'entendra pas, une fois de plus, sur le texte.

J'ai bien peur que cela résume les progrès réalisés à ce jour par les ministres de l'énergie sur cette importante question. Je dirais que cette page vierge est plutôt symbolique de toute cette entente. Cela montre que le gouvernement ne peut pas respecter ses promesses sur le commerce intérieur. Le gouvernement nous demande de lui faire confiance, qu'il trouvera quelque chose pour l'avenir.

Je ne suis pas de ceux qui sont prêts à lui faire confiance. Je suis surpris que les députés libéraux, par contre, soient prêts à lui faire confiance. J'aurais pensé qu'ils s'adresseraient à leur ministre et lui dirait: «Attendons d'avoir le document complet.» C'est incroyable quand on y pense. Imaginez que je veuille acheter une voiture. Je dis: «Je veux signer le contrat pour acheter la voiture. Je vois qu'elle n'a pas de roues, mais je vais l'acheter tout de même. Lorsque vous voudrez conclure le contrat, lorsque vous saurez quand viendront les roues, nous pourrons en reparler. Je serai heureux de le faire.» Personne ne signe un contrat comme ça.

(1845)

Essentiellement, ce projet de loi est un contrat entre les provinces et le gouvernement fédéral et, par suite, entre la population canadienne et toutes les provinces. C'est une entente qui n'est tout simplement pas là, et je ne suis pas prêt à signer. Les députés libéraux de l'arrière-ban devraient au moins être prêts à faire de même.

J'ai mentionné l'importance du commerce interprovincial. Il est critique pour le pays que cela se fasse correctement. Je ne veux pas trop insister là-dessus, mais je peux donner aux députés une liste des ententes que nous avons conclues. Quelqu'un a mentionné qu'il était ici depuis 12 ans. Nous avons eu la Commission Macdonald qui recommandait l'élimination des barrières commerciales en 1984. En 1987, le comité des ministres du commerce intérieur s'est dit d'avis qu'il fallait se débarrasser des obstacles interprovinciaux au commerce. En 1989, un protocole d'accord arrivait à la même conclusion. Les Maritimes ont alors signé un protocole d'accord. En 1991, six gouvernements ont tenté de se débarrasser d'un accord interprovincial sur les pratiques de commercialisation de la bière. C'est que nous aimons couper les cheveux en quatre. Six gouvernements ont tenté de se réunir pour décider de la façon de commercialiser la bière. Ils ont abouti à une sorte d'accord, mais on ne peut toujours pas vendre de la bière d'une province l'autre à moins de posséder une brasserie dans chacune d'elles.

Nous sommes arrivés à l'accord interprovincial sur les achats publics, mais son application n'est pas une sinécure. Poursuivons. En 1992, 1993 et 1994, les ministres ne sont pas allés jusqu'à éliminer complètement les obstacles interprovinciaux au commerce. En effet, il y a encore environ 11 secteurs où un règlement fait défaut et voilà qu'on nous demande de donner notre aval.

1802

J'aimerais conclure en disant que chez nous il y a tout un monde entre les promesses faites à propos des accords de commerce intérieur et leur réalisation.

Voici un cas d'une brûlante actualité. J'espère qu'à un moment donné au cours du débat sur ce projet de loi le nouveau député du Labrador se lèvera pour parler du chapitre consacré à l'énergie, du chapitre manquant qui devrait figurer dans ce accord. J'aimerais que le député déclare que la population du Labrador en a marre de constater qu'il n'y a toujours pas de chapitre sur l'énergie dans cet accord sur le commerce intérieur. J'ose espérer qu'il va se lever et tenir ces propos: «Je n'aime pas la façon dont le Labrador est traité depuis des années relativement au dossier de l'accord sur le commerce intérieur. Je suis mécontent de ce que le Labrador n'ait pas accès aux lignes d'électricité au Québec si celui-ci réalise l'aménagement du cours inférieur de Churchill. Nous sommes mécontents de ce qu'on puise dans nos poches alors que nous ne disposons même pas d'une route de gravier sur laquelle rouler.

Je voudrais que le député se lève et dise: «L'argent que nous aurions reçu si un bon accord sur le commerce intérieur avait été en place servirait à verser tous les paiements de transfert à ma province.» S'il y avait eu un accord acceptable sur le commerce intérieur, les habitants du Labrador pourraient même se passer des paiements de transfert du gouvernement fédéral.

J'espère que le député de Labrador aura le courage de se lever à la Chambre des communes pour déclarer qu'il en a assez de voir le Labrador se faire rouler chaque fois qu'il est question d'un accord.

Le Québec a toujours refusé de laisser le Labrador bâtir des lignes de transmission au Québec. De plus, il s'est constamment opposée à ce que le Labrador utilise de l'électricité venant du réseau québécois actuel. On force plutôt le Labrador à vendre l'électricité au Québec aux prix ridicules de 1989, afin que le Québec le revende aux Américains à des prix variant entre 800 millions à un milliard de dollars par année.

La population du Labrador, avec raison, en a assez de cette situation. J'espère que le nouveau député de Labrador se lèvera pour exiger que le gouvernement redresse la situation concernant le commerce intérieur. Il serait mieux de dire au ministre qu'il ne se contentera pas de vaines promesses voulant qu'un jour le Labrador soit en mesure d'exploiter ses propres sources d'électricité.

Je voudrais donc qu'il déclare publiquement: «Rien ne va plus. On a mis le Labrador dans un cercle vicieux.» Il faut trouver un contrat au Labrador avant de lui permettre de bâtir ses propres lignes, mais il ne peut bâtir des lignes de transmission tant qu'il n'a pas de contrat. On a toujours utilisé la stratégie des précédents avec le Labrador.

Incidemment, madame la Présidente, le taux de popularité du Parti réformiste est passé de zéro à 30 p. 100 aux dernières élections partielles. J'espère que le nouveau député de Labrador est à l'écoute. Il y a un mouvement séparatiste au Labrador actuellement. Un député indépendant a été élu à l'assemblée législative. La raison, c'est que la population s'est fait rouler. Les gens en ont assez. Ils ne veulent pas quitter le Canada, mais ils en ont assez de se faire raconter des mensonges et des absurdités par le gouvernement fédéral et même par leur propre gouvernement provincial, qui, rappelons-le, sont tous deux libéraux. Ils en ont assez d'être redevables à une autre région du pays ou à d'autres Canadiens alors qu'ils devraient être indépendants, comme ils ont le droit de l'être.

J'exhorte le gouvernement, lorsqu'il aura rédigé ce chapitre sur l'énergie, à soumettre de nouveau cet accord sur le commerce intérieur à la Chambre pour qu'il soit ratifié. Il devrait tenir compte des préoccupations du Labrador dans ce chapitre. Je parie que, si le gouvernement n'arrive pas à conclure une entente en ce qui concerne l'énergie, c'est parce que le Québec ne veut pas accepter l'arbitrage exécutoire. Il a peur de ce que le Labrador pourrait obtenir.

Je prie instamment le député du Labrador de faire ses devoirs, d'examiner la question et de ne pas appuyer ce projet de loi tant que le problème n'aura pas été réglé. Le Labrador mérite mieux que cela.

[Français]

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Comme il est 18 h 50, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain matin, à10 heures.

(La séance est levée à 18 h 50.)