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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le jeudi 10 octobre 1996

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LES COOPÉRATIVES

    M. Chrétien (Frontenac) 5331

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

LA LOI SUR LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

    Projet de loi C-336. Adoption des motions de présentationet de première lecture 5333

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

    Adoption de la motion d'approbation du 37e rapport 5333

PÉTITIONS

LA PARTITION DU QUÉBEC

LA FISCALITÉ

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

QUESTIONS AU FEUILLETON

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGECANADA-ISRAËL

    Projet de loi C-61. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 5334
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 5343
    Adoption de la motion; deuxième lecture du projet deloi et renvoi à un comité 5352

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

    Projet de loi C-5. Étude à l'étape du rapport 5352

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

MOTION D'AMENDEMENT

    M. Tremblay (Lac-Saint-Jean) 5352
    Report du vote sur la motion 5356

L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

    M. Chrétien (Frontenac) 5358

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LE COLLÈGE FANSHAWE

    M. O'Brien (London-Middlesex) 5363

LA MUNICIPALITÉ DE LATERRIÈRE

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

LES PRESTATIONS D'EMPLOI

LE FESTIVAL DU CANARD DU LAC BROME

JEANETTE DEAN

LE PARC DES ANCIENS COMBATTANTS

LES ORGANISMES COMMUNAUTAIRES

LA DETTE

LE GROUPE D'AMITIÉ CANADA-PORTUGAL

LA SEMAINE NATIONALE DE SENSIBILISATION AUX MALADIES MENTALES

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ MENTALE

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

LES DÉPUTÉS LIBÉRAUX

L'ÉTHANOL

LE DÉFICIT

QUESTIONS ORALES

LE DÉFICIT

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5367
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5367
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5368
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5368
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5368

L'ÉCONOMIE

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5369
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5369
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5369

LE DÉFICIT

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5370
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5370

LE DÉFICIT

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5370
    M. Martin (LaSalle-Émard) 5371

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

    M. Leroux (Shefford) 5371
    M. Leroux (Shefford) 5371

LA FISCALITÉ

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5371

LE MINISTRE DES AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

L'ÉTHIQUE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5373
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 5373

LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES

L'AGRICULTURE

LE PARC NATIONAL BANFF

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

    M. Martin (LaSalle-Émard) 5374

M. TRÂN TRIEÛ QUÂN

LA JUSTICE

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LA LOI SUR L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

    Projet de loi C-60. Reprise de l'étude de la motion 5376
    Report du vote sur la motion 5384

LOI SUR LES OCÉANS

    Projet de loi C-26. Reprise de l'étude en troisièmelecture 5384
    Report du vote sur la motion 5386

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

    Projet de loi C-29. Reprise de l'étude de la motion entroisième lecture et de l'amendement 5386

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LES MATIÈRES DANGEREUSES

MOTION D'AJOURNEMENT

LE TRAITÉ D'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES


5331


CHAMBRE DES COMMUNES

Le jeudi 10 octobre 1996


La séance est ouverte à 10 heures.

_______________

Prière

_______________

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.

* * *

LES COOPÉRATIVES

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Agriculture et Agroalimentaire, Pêches et Océans), Lib.): Monsieur le Président, pour souligner la Semaine nationale des coopératives, qui se tiendra du 13 au 19 octobre prochain, et au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, également responsable des coopératives, je tiens à rendre hommage à tous les Canadiens qui nous ont laissé en héritage un solide secteur coopératif, ainsi qu'à tous les hommes et à toutes les femmes qui continuent de le renforcer.

La coopérative est une entreprise unique en son genre qui, dans un cadre démocratique, met les meilleures ressources humaines et financières au service de la collectivité.

En tant qu'organisations communautaires et démocratiques dont les économies restent et profitent au niveau local, les coopératives contribuent depuis plus d'un siècle au renforcement de l'économie canadienne.

Les coopératives et les sociétés de crédit sont reconnues pour harmoniser les objectifs économiques et sociaux, appuyées par la solide conscience sociale des entreprises. Elles offrent un modèle de développement éprouvé, susceptible de nous aider à revitaliser le Canada rural.

Les coopératives se sont toujours distinguées dans le secteur agroalimentaire, mais je crois qu'elles peuvent jouer un rôle aussi important dans l'économie rurale en général.

Le gouvernement ayant fait du renouveau économique rural une priorité, nous avons l'intention d'établir avec les coopératives un partenariat renouvelé pour leur venir en aide dans ce domaine.

(1005)

[Français]

Le secteur des coopératives apporte une extraordinaire contribution à l'identité canadienne; il est capable autant de conférer à la communauté un profond sentiment de solidarité que de montrer la voie dans le traitement et la commercialisation de nombreux produits, de faire des percées en matière de technologie financière que de tout simplement maintenir une solide base de bénévoles enthousiastes.

Ensemble, les coopératives, caisses populaires et sociétés de crédit comptent environ 12 millions de membres, emploient 133 000 personnes et ont un actif de l'ordre de 143 milliards de dollars. On a consigné, au cours de l'année, un certain nombre d'histoires à succès parmi les coopératives pour montrer ce que peuvent accomplir des gens dévoués et intéressés qui décident des priorités, conçoivent le plan d'entreprise et orientent la réalisation d'un projet.

Le gouvernement du Canada s'est engagé à moderniser sa législation sur les coopératives. Les associations nationales de coopératives ont pris quelques années pour préciser leur exigences législatives, et des consultations sur leurs propositions se tiennent en ce moment dans tout le pays. Le ministre de l'Industrie et le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire chercheront l'appui de la Chambre pour l'adoption d'une nouvelle loi sur les coopératives avant la fin de la présente session parlementaire. Nos coopératives méritent le meilleur cadre législatif qui soit pour fonctionner dans la nouvelle économie mondiale et satisfaire leurs besoins de sources accrues de financement.

Pour conclure, j'aimerais féliciter les millions de Canadiens et de Canadiennes qui ont fait du secteur des coopératives un élément vital et grandissant de l'économie canadienne.

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de souligner en cette Chambre la Semaine nationale des coopératives.

Comme vous le savez sans doute, le mouvement coopératif existe au pays depuis le début du XIXe siècle, et la première coopérative d'ici était une compagnie mutuelle d'assurance-incendie ayant pris racine dans un milieu rural. Mais à l'aube du XXe siècle, les coopératives ne se limitaient plus seulement à ce domaine d'activité. En effet, on retrouvait nombre de coopératives dans des secteurs aussi variés que le triage des oeufs, la transformation de la crème et la commercialisation des grains. D'ailleurs, ce sont les coopérati-


5332

ves, dans les domaines de l'approvisionnement et de la commercialisation agricole, qui sont responsables principalement du développement du mouvement coopératif canadien.

Chez nous, au Québec, c'est sans aucun doute Alphonse Desjardins qui, à Lévis, en 1900, fonda la première caisse populaire. Aujourd'hui, est-il nécessaire de le préciser, le Mouvement Desjardins est un des acteurs financiers les plus importants du Québec avec plusieurs milliards d'actifs. Mais je m'en voudrais de passer sous silence toute la base, le fondement, l'esprit qui anime le mouvement coopératif. En effet, l'entraide, la démocratie, l'équité, la solidarité, l'égalité et l'autonomie sont autant de valeurs qui représentent le mouvement coopératif et les gens qui en font partie.

Aussi, en cette Semaine nationale des coopératives, je tiens à rendre hommage à tous ceux et celles qui croient, qui encouragent et qui s'impliquent dans le mouvement coopératif. Je tiens tout simplement à leur dire merci.

À la fin de l'année 1993, on dénombrait près de 10 000 organisations coopératives au pays. Dans cette perspective, il est logique d'affirmer que le mouvement coopératif façonne chaque jour davantage notre société et notre mode de vie. Que ce soit dans le domaine des coopératives de commercialisation et d'approvisionnement, des coopératives de production, de services ou des coopératives financières, l'économie s'en trouve bonifiée, et ce, grâce à la coopération.

(1010)

À cet égard, mentionnons que les coopératives de commercialisation et d'approvisionnement avaient un chiffre d'affaires de plus de 8,8 milliards de dollars en 1993. De même, ces coopératives détenaient pour environ 3,1 milliards de dollars d'actifs dont près de 1,2 milliard de dollars étaient financés personnellement par les membres. Au même moment, la solidarité et la coopération sociale généraient près de 18 000 emplois à plein temps.

En terminant, ayant moi-même été directeur du conseil d'administration de la Caisse populaire de Garthby, ainsi que celle de Disraëli et aussi président du conseil d'administration de la Société mutuelle contre les incendies du comté de Wolfe, je suis à même de saisir toute l'importance et la force du mouvement coopératif.

De plus, vous me permettrez de souligner que l'on retrouve dans la circonscription de Frontenac, que j'ai l'insigne honneur de représenter, la plus grosse coopérative de producteurs de sirop d'érable au monde. Je profite donc de l'occasion pour en saluer les membres et leur rendre hommage au nom de la population que je représente.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui au nom du Parti réformiste pour rendre hommage aux membres du mouvement coopératif.

Je voudrais profiter de l'occasion pour féliciter les pionniers du mouvement coopératif. Je sais que beaucoup d'entre nous au sein du caucus réformiste, puisqu'il y a au moins 15 députés qui exploitent actuellement une entreprise agricole dans l'Ouest, et des jeunes qui s'apprêtent à prendre la relève connaissent certains des pionniers qui ont lancé et développé le mouvement coopératif. Ce mouvement a vraiment joué un rôle important dans l'histoire de l'Ouest, comme dans celle du Québec, de l'Ontario et de tout le pays.

Les coopératives sont une composante économique essentielle de nombreuses collectivités et, dans bien des cas, elles sont des chefs de file dans leur domaine. Elles ont du succès en grande partie parce que leurs membres et leurs dirigeants sont actifs dans le secteur où la coopérative est implantée. Pour cette raison, les conseils d'administration, qui sont souvent composés de gens oeuvrant dans le domaine, connaissent bien cette activité et prennent donc de bonnes décisions.

Les coopératives agricoles remontent au tout début de l'histoire de l'Ouest. Parce que les agriculteurs dirigent le mouvement coopératif et leurs coopératives, ils prendront toujours les meilleures décisions pour l'industrie. Je souhaiterais vraiment que le ministre de l'Agriculture en prenne note.

Dans son exposé, le secrétaire parlementaire a parlé du rôle très constructif que jouent les coopératives, et ce rôle est particulièrement important dans le domaine de l'agriculture. Je souhaiterais vraiment que le ministre de l'Agriculture accorde foi à ses paroles et fasse en sorte que la Commission canadienne du blé reflète la valeur qu'on attache au mouvement coopératif.

Si on administrait la Commission canadienne du blé beaucoup plus comme une coopérative, cela répondrait vraiment davantage aux voeux des agriculteurs. En d'autres termes, elle serait dirigée par des administrateurs que les agriculteurs choisiraient eux-mêmes et elle aurait des comptes à rendre aux agriculteurs. Les agriculteurs veulent vraiment, plus que toute autre chose, qu'on transforme la Commission canadienne du blé en coopérative.

Il faut féliciter les coopératives et les coopératives de crédit pour leur contribution au développement et à l'amélioration des collectivités. Il faut également reconnaître qu'elles jouent un rôle important dans notre économie en améliorant la concurrence et en donnant un autre choix aux gens, ce qui donne son sens à la démocratie.

(1015)

C'est avec beaucoup de gratitude que je reconnais, au nom du Parti réformiste, les réalisations des coopératives et des coopératives de crédit. Je sais que tous les Canadiens vont les encourager à continuer de faire preuve d'un leadership innovateur dans leurs activités diverses.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le 37e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre au sujet de la liste


5333

des membres associés de certains comités. Si la Chambre y consent, j'ai l'intention de proposer l'adoption du 37e rapport plus tard aujourd'hui.

* * *

LA LOI SUR LA GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

M. Peter Milliken (Kingston et les Îles, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-336, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.

-Monsieur le Président, dans son rapport annuel pour l'exercice 1989-1990, la Commission des plaintes du public contre la GRC recommandait un certain nombre de modifications à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada dans le but d'assurer une plus grande équité aux participants au processus judiciaire.

Je suis heureux de présenter à nouveau un projet de loi que j'avais introduit à la dernière législature et qui tient compte des modifications qu'avait proposées cette commission. On l'avait alors recommandé à la Chambre, et je suis heureux d'offrir aux députés l'occasion de voter en faveur de ces modifications.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et l'impression en est ordonnée.)

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose que le 37e rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, présenté à la Chambre plus tôt aujourd'hui, soit adopté.

(La motion est adoptée.)

* * *

[Français]

PÉTITIONS

LA PARTITION DU QUÉBEC

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer une pétition de mes commettants d'Hamilton-Wentworth demandant au Parlement, dans l'éventualité d'un référendum québécois favorisant la séparation, de partitionner le Québec afin de permettre aux Québécois des régions où une majorité souhaite rester au Canada de rester au Canada.

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter en vertu de l'article 36 du Règlement. La première concerne la fiscalité des familles et vient de Geraldton, en Ontario.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la gestion du foyer et l'éducation d'enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société. Ils demandent donc au Parlement d'intervenir pour éliminer la discrimination fiscale dont souffrent les familles qui décident de s'occuper elles-mêmes, à la maison, de leurs enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques ou de personnes âgées.

L'ÉTIQUETAGE DES BOISSONS ALCOOLISÉES

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition concerne l'étiquetage des contenants de boissons alcoolisées et vient de Burlington, en Ontario.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées peut causer des problèmes de santé ou diminuer les capacités de ceux qui en consomment et, en particulier, que le syndrome d'alcoolisme foetal et d'autres malformations congénitales liées à l'alcool peuvent être évités dans tous les cas si la mère s'abstient de boire de l'alcool pendant sa grossesse.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement d'adopter une mesure législative qui rende obligatoire l'apposition sur les contenants de boissons alcoolisées d'étiquettes mettant en garde les futures mères et les autres consommateurs contre les risques associés à la consommation d'alcool.

(1020)

M. Zed: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement pour demander le consentement unanime pour revenir à la présentation de rapports de comités. Sauf erreur, il y aurait un autre rapport de comité à présenter, si la Chambre consentait à revenir à la présentation de rapports de comités.

Le président suppléant (M. Kilger): Y a-t-il consentement unanime de la Chambre pour revenir à la présentation de rapports de comités?

Des voix: D'accord.

* * *

LES COMITÉS DE LA CHAMBRE

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Maurizio Bevilacqua (York-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent du développement des ressources humaines sur le projet de loi C-35, Loi modifiant le Code canadien du travail (salaire minimum).

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. Kilger): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

5334

Le président suppléant (M. Kilger): J'informe la Chambre que, en raison de la déclaration du ministre, l'étude des initiatives ministérielles sera prolongée de 12 minutes.

______________________________________________


5334

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE LIBRE-ÉCHANGE CANADA-ISRAËL

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 octobre, de la motion: Que le projet de loi C-61, Loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-Israël, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, on n'a pas souvent une semaine aussi chargée en projets de loi concernant le commerce extérieur, contrairement à la situation normale où nous sommes saisis d'une mesure de ce genre à peu près une fois par année. Nous en avons eu deux en effet cette semaine.

Nous discutons maintenant du projet de loi C-61 visant à mettre en oeuvre un accord de libre-échange entre le Canada et Israël. Je dois avouer que j'ai été un peu étonné de voir ce projet de loi, car sa genèse n'a certainement pas fait grand bruit. Le ministre du Commerce international a conclu l'accord de libre-échange avec Israël au coeur de l'été, le 31 juillet, quand la plupart des gens sont à peu près aussi détachés qu'on puisse l'être de ce qui se passe sur la scène fédérale.

À part une brève annonce à cet égard, je ne me rappelle pas avoir entendu dire que l'accord de libre-échange était en voie de négociation. Je ne me rappelle pas avoir vu aucun communiqué de presse, aucun article dans les journaux ni aucune invitation à des consultations lancée aux groupements industriels qui auraient pu vouloir participer au processus.

Je tiens à dire bien clairement que nous ne nous opposons pas au projet de loi. Nous croyons qu'il faut se féliciter de chaque pas accompli dans la voie de la libéralisation des échanges. Je m'étonne simplement de la façon très discrète, frisant même le huis-clos, dont l'accord a été conclu. On aurait dû donner aux groupements industriels davantage l'occasion d'intervenir dans le processus.

Nous sommes favorables à la libéralisation des échanges. Je crois comprendre que les libéraux sont maintenant eux aussi favorables au libre-échange. Ils me font penser à des croyants régénérés. Ils ont soudain découvert les vertus du libre-échange et l'ont embrassé avec ardeur. Je m'en réjouis.

Je me rappelle qu'en 1988, ils étaient totalement opposés au libre-échange et qu'ils ont fait campagne contre le libre-échange lors des élections de 1993, mais nous voyons maintenant les libéraux opérer leur fameuse volte-face et devenir des libres-échangistes de tout coeur et de toutes leurs forces. Je crois que nous marchons dans la bonne voie et je suis heureux de constater que les libéraux ont enfin compris.

Un emploi sur trois au Canada est créé grâce aux exportations. Trente-sept pour cent de notre PIB provient du commerce extérieur. La croissance économique s'est fait sentir presque uniquement dans le secteur des exportations depuis trois ans. Le volet intérieur de notre économie a été très anémique, et c'est grâce notamment à nos exportations que nous avons réussi à nous sortir de la récession dans laquelle nous étions au début des années 1990. Nous sommes donc dans la bonne voie et j'aimerais que cela continue.

Je souhaiterais d'ailleurs que la prochaine série de pourparlers de l'Organisation mondiale du commerce soit axée sur une libéralisation commerciale accrue, car le Canada est dans une excellente position pour en tirer parti. Nous pouvons concurrencer les meilleurs dans le monde, mais nous devons avoir des règles commerciales qui nous soutiennent et qui nous donnent le poids voulu au cas où nous ferions l'objet de harcèlement commercial.

Nous avons beaucoup entendu parler du projet d'accord de libre-échange avec le Chili. Il a beaucoup été question de cet accord grandement inspiré de l'ALENA et de la possibilité que le Chili adhère à l'ALENA. Je suis en faveur de cela. Il a aussi été question d'élargir l'ALENA aux pays du Mercosur de l'hémisphère sud, de manière à former une zone de libre-échange commercial des Amériques. Nous n'avons toutefois entendu parler de l'accord avec Israël que lorsqu'il a été conclu.

(1025)

Des fonctionnaires des ministères des Affaires étrangères et du Commerce international ont eu l'amabilité de nous convier à une séance d'information sur cet accord de libre-échange commercial, mardi dernier. Ils nous ont expliqué que cet accord est fort simple. Il n'y a vraiment pas de raison de créer une structure compliquée pour des échanges commerciaux relativement limités.

Nos échanges commerciaux avec Israël sont comme une goutte dans l'océan à comparer à nos échanges avec les autres pays; ils sont néanmoins importants. Nos exportations vers Israël ont totalisé 216 millions de dollars l'an dernier, tandis que nos importations en provenance de ce pays ont atteint 240 millions de dollars.

Même si nous bénéficions actuellement d'un important excédent commercial, il est essentiellement attribuable à nos échanges avec un pays: les États-Unis, qui sont évidemment notre plus important partenaire commercial. Je déplore que nous continuions d'enregistrer des déficits commerciaux avec la plupart de nos autres partenaires. Le montant des échanges visés équivaut à peu près au montant de nos échanges avec Cuba.

Je crois comprendre que les Palestiniens bénéficieront aussi des avantages de cet accord. Normalement, les échanges commerciaux se font librement entre la Cisjordanie, la bande de Gaza et Israël. Malgré l'actuelle fermeture des frontières entre Israël et les territoires occupés, il est à espérer que cet accord commercial s'appliquera aussi le plus tôt possible aux gens qui vivent dans les territoires occupés.

Je trouve cet accord intéressant parce qu'il supprime tous les droits de douane sur la plupart des produits industriels dès la date de mise en oeuvre prévue le 1er janvier 1997. Notre accord de libre-échange avec les États-Unis prévoyait une assez longue période d'élimination progressive des droits visant certains produits. Cette


5335

période qui s'étale sur dix ans arrivera heureusement à échéance en 1998. Mais avec cet accord, tous les droits de douane seront supprimés du jour au lendemain, ce qui est extraordinaire.

Il n'y a que quelques exceptions dont je ne vois pas exactement la raison. C'est le cas des maillots de bain pour femmes, à la demande d'un fabricant canadien de maillots de bain, et de certains tissus de coton, à la demande de fabricants israéliens, où les droits de douane s'appliqueront pendant encore deux ans et demi. Les entreprises touchées pourront ainsi se préparer à soutenir la concurrence.

Il est intéressant de constater que, de façon générale, les barrières non tarifaires ne seront pas permises. Cela fait suite à l'exemple établi par l'Organisation mondiale de la santé.

En raison des réticences des deux parties, le secteur de l'agriculture a été quelque peu exclu de la suppression des droits de douane, même si le Canada a obtenu un accès accru au marché pour certains produits comme le grain, les produits de grain, les oléagineux, les légumineuses à grain, le boeuf et divers produits de poisson transformé. Je n'ai pas eu l'occasion d'analyser ce que cela signifie pour les agriculteurs qui, comme moi, produisent du canola, mais je pense que toute possibilité d'accès à ces marchés est une bonne chose pour nous.

Je trouve quand même un peu irritant que le Canada continue de protéger nos industries soumises à la gestion de l'offre, où les droits de douane s'élèvent jusqu'à 350 p. 100. Ces droits de douane ont bien mauvaise réputation partout dans le monde. Nous devons entrer dans le XXIe siècle et nous rendre compte que nous n'avons pas intérêt à maintenir ces droits de douane. Une suppression graduelle de ces droits de douane constituerait une bonne solution. Nous devons amorcer ce processus, et le mieux serait de commencer aux prochaines rondes de négociations de l'Organisation mondiale du commerce.

Une plus grande libéralisation du commerce est une bonne chose pour le Canada. Nous avons été l'un des principaux défenseurs de la libéralisation du commerce. Or, ici même, au Canada, nous continuons de restreindre l'accès à une partie de notre économie. D'autre part, les États-Unis ont recours à des tactiques semblables pour restreindre l'accès de leur marché à nos producteurs qui bénéficient de la gestion de l'offre et qui font directement concurrence aux producteurs américains.

Je crois comprendre que la raison première de la conclusion d'un accord de libre-échange avec Israël est que nos principaux concurrents dans ce pays, les États-Unis et l'Europe, ont déjà conclu des accords de libre-échange. Cela nous mettra tous sur un même pied.

Le processus de règlement des différends prévu dans l'accord est relativement simple et est, de plus, exécutoire. L'un de mes collègues, qui prendra la parole plus tard, s'intéresse de très près à toute cette question et l'examinera en détail. Il est d'avis que les procédures de règlement des différends prévues dans les ententes internationales sont bien meilleures que celles relatives aux différends entre les provinces et le Canada. Il est très intéressant que le gouvernement libéral, après avoir pris conscience des avantages du libre-échange, cherche avec tant d'ardeur à signer des accords commerciaux internationaux.

(1030)

Cependant, le gouvernement n'a pas réussi à faire adopter les mécanismes de ces accords internationaux dans le commerce entre les provinces canadiennes. Cela coûte environ huit milliards de dollars par année aux Canadiens. Il est assez contradictoire que nous ne puissions pas commercer librement à l'intérieur même de notre pays. Les accords commerciaux que nous avons signés avec nos partenaires internationaux sont meilleurs que ceux qui régissent le commerce entre nos propres provinces. Mon collègue de Végréville reviendra sur la question plus tard.

Un autre de mes collègues, un économiste réputé, fera une comparaison des accords bilatéraux et des accords multilatéraux. Je sais qu'il n'y a pas unanimité parmi les économistes sur les avantages des accords bilatéraux. Les arguments tournent autour de l'efficience et de la production. On sait, par exemple, que, à partir d'une situation où tous les droits de douane sont égaux, le producteur le plus efficient perd des clients lorsque son concurrent étranger n'a plus de droits de douane à payer. Le producteur le plus efficient qui doit malheureusement continuer de payer des droits de douane est défavorisé. Lorsqu'il vend dans un autre pays, il devient un producteur moins efficient.

Avec l'Organisation mondiale du commerce, le monde industrialisé se dirige vers le libre-échange. Les prochaines négociations commerciales auront lieu en 1998-1999. Les choses évoluent relativement lentement, mais elles évoluent.

Lors des dernières négociations, celles dites de l'Uruguay Round, les membres du GATT ont convenu d'une réduction moyenne des droits de douane de 36 p. 100 sur une période de six ans. Nous sommes maintenant au milieu de cette période. Cela n'est rien comparé à l'élimination complète des droits de douane prévue dans l'accord de libre-échange avec Israël.

Il est vrai que ces accords bilatéraux peuvent faire perdre des clients aux entreprises plus efficientes aux mains d'entreprises moins efficientes, mais ils n'en ouvrent pas moins de nouveaux marchés.

À mon avis, les accords bilatéraux sont utiles parce qu'ils nous permettent de mettre à l'essai de nouvelles règles et de nouveaux systèmes. À mon sens, le prochain accord bilatéral que signe le Canada devrait aller plus loin que ce qui est prévu dans le cadre de l'OMC. Puisque cela n'a pas été possible lors des dernières négociations des membres de l'OMC, nous devrions tenter de définir ce qu'est une subvention, un droit compensateur et d'autres concepts.

Le Parti réformiste appuie le projet de loi. Nous croyons que la libéralisation des échanges est profitable au Canada. Nous sommes un pays commerçant. Nous avons une population relativement petite. Seulement 10 p. 100 environ du PIB des États-Unis provient des exportations. Au Canada, c'est 37 p. 100. Nous avons grand besoin du commerce. Il nous faut libéraliser davantage les échanges pour rester concurrentiels.

Le Canada devrait jouer un rôle un peu plus actif lors des prochaines négociations à l'OMC. Nous aurions pu profiter des négociations avec Israël pour définir ce qu'est une subvention.


5336

C'est ce que nous devrions faire lors de nos prochaines négociations. En gros, j'appuie le projet de loi. Je suis heureux de savoir que, dans deux mois seulement, les biens circuleront quotidiennement entre nos deux pays sans droits de douanes.

Le président suppléant (M. Kilger): Nous passons maintenant à la prochaine étape du débat. Les interventions des députés seront limitées à 20 minutes, suivies de périodes de 10 minutes pour les questions et les observations.

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux que le député d'en face souscrive entièrement à l'initiative prise par le ministre du Commerce international. Son attitude démontre une profonde clairvoyance.

Soit dit sans manquer de respect pour mes vis-à-vis, mon collègue, qui siège au comité du commerce international, a applaudi depuis trois ans toutes les mesures visant à libéraliser le commerce et à accroître les débouchés pour les entreprises canadiennes à l'étranger. En général, il a accordé un ferme appui aux mesures contenues dans le projet de loi. Je suppose qu'à cet égard il est différent de ses collègues réformistes. Lui et nous voyons les choses exactement de la même façon.

(1035)

[Français]

Je voudrais souligner quelques éléments de ces relations bilatérales Canada-Israël et rappeler aux députés ici présents le discours du ministre hier soir.

Le Canada et Israël entretiennent depuis longtemps d'excellentes relations fondées sur des valeurs communes ainsi que de solides liens sur les plans bilatéral et social. Dans la conjoncture critique actuelle, nous appuyons les efforts déployés par Israël et ses voisins pour construire une paix juste, globale et durable au Moyen-Orient.

Alors que le Canada négociait l'ALENA avec les États-Unis et le Mexique, Israël multipliait ses liens commerciaux en signant des accords de libre-échange avec les États-Unis et, plus récemment, avec l'Union européenne, la Turquie, la République tchèque et la Slovaquie.

[Traduction]

Ces ententes ont sans doute été excellentes pour Israël, les Européens et le Américains, mais le Canada et les entreprises canadiennes se retrouvaient légèrement désavantagés.

[Français]

Mais le commerce entre le Canada et Israël stagnait. En novembre 1994, le premier ministre, Jean Chrétien, et feu le premier ministre Yitzhak Rabin décidaient de remédier à cet état de choses. Les deux leaders annoncèrent alors l'amorce de négociations d'un accord de libre-échange entre leurs pays.

En janvier dernier, le Canada et Israël sont parvenus à une entente provisoire que les deux gouvernements ont continué de raffiner.

[Traduction]

Bien que j'aie l'intention d'applaudir la clairvoyance du premier ministre et la diligence démontrée par le ministre du Commerce international, je ferais preuve d'une négligence impardonnable si je ne mentionnais pas le rôle des personnes qui sont à l'origine de l'idée, l'énergie qu'elles ont déployée pour en permettre la réalisation et l'apport du processus démocratique à la conclusion de l'accord.

Comme l'ont souligné des députés des deux partis d'opposition, cette entente mérite des louanges, non pas tant en raison de son ampleur car elle peut paraître limitée comparativement à la nature des échanges que nous entretenons avec les États-Unis et d'autres pays, mais parce qu'elle constitue un premier pas important et crucial. De nombreux Canadiens se sentent souvent tout petits face à l'énormité de l'appareil gouvernemental et au processus décisionnel qui leur semble inaccessible.

Je crois que cet accord commercial est né du désir des entrepreneurs canadiens d'exploiter les possibilités qui s'offrent au Proche-Orient et en particulier en Israël. Ils ont constaté qu'en dépit des difficultés que traverse cette région, Israël connaît un mini-boom économique en raison de l'afflux considérable d'immigrants sur son territoire et des initiatives prises par le gouvernement israélien pour tendre la main et obtenir la paix mais en même temps pour créer des liens économiques avec ses partenaires.

Les Européens s'en sont rendu compte les premiers. Leurs entreprises ont réussi, avec l'appui de leurs gouvernements, à créer un marché à créneaux qui a commencé avec la croissance du tourisme. La plupart des députés seront peut-être quelque peu surpris, mais l'industrie du tourisme et les industries connexes battent leur plein au Moyen-Orient, particulièrement en Israël.

Étant donné le boom que connaît l'industrie touristique, la demande est énorme et dépasse ce que la région est en mesure de fournir, par exemple, dans les domaines de l'ameublement, du textile et de l'habillement, mais aussi dans le domaine des produits chimiques et pétrochimiques.

Nos entrepreneurs des régions de Toronto et de Montréal se sont rendu compte que, peu importait la compétitivité de leurs produits, peu importait la qualité de leurs matières premières, ils n'étaient pas en mesure de faire concurrence aux Européens et aux Américains à cause de l'accord de libre-échange qu'Européens et Américains avaient conclu avec Israël. Ils ont demandé au chef de notre parti de l'époque, aujourd'hui premier ministre du Canada, de parler de cette question lors d'une assemblée publique. Ils ont demandé au futur premier ministre de parler de cette lacune de la politique du Canada en matière de commerce international. Malgré les risques que son discours présenterait pour son parti, il a promis qu'il le ferait, et il l'a fait, dès son arrivée au poste de premier


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ministre. Nous en voyons les résultats. Après deux ans de négociations, nous sommes finalement arrivés à une entente.

(1040)

Je dois ajouter qu'un grand nombre de mes électeurs qui sont à l'origine de cette accord, qui ont fait pression sur le gouvernement afin qu'il revoie sa politique étrangère et sa politique en matière de commerce extérieur de façon à tenir compte des intérêts des entrepreneurs au Canada, n'ont loupé aucune occasion de me rappeler à moi, en tant que leur député local, mais aussi à d'autres députés de Toronto et de Montréal, la nécessité de signer un tel traité. Un accord de libre-échange donnerait aux Canadiens non seulement un avantage économique, mais en plus un accès indirect à l'Union européenne. Je sais que mon collègue du Parti réformiste se rend compte de ça.

Il a fallu quelque temps pour conclure un tel accord car il fallait, bien sûr, régler des détails. Ceci est un hommage aux personnes qui ont pris part à ces efforts. Je les ai rencontrées en juillet dernier à Toronto lors de la signature de l'accord par le ministre du Commerce international et son homologue, Nathan Charansky. Des efforts assidus ont bien sûr été faits pour veiller à la conclusion d'un accord qui soit à l'avantage des deux parties.

Hier, le ministre du Commerce international a cité des chiffres que mes collègues du Bloc ont repris, de même que, ce matin, mes collègues du Parti réformiste. Dans certains secteurs, nos échanges commerciaux ont monté de 37 p. 100, et dans d'autres, de 49 p. 100, dans les 12 derniers mois. Voilà quel est l'impact de la négociation d'un tel accord. On peut s'attendre à des résultats encore plus spectaculaires quand l'accord sera ratifié. J'espère que la Chambre approuvera cette ratification aujourd'hui, après le débat.

Dans cette région cruciale qu'est le Moyen-Orient, la présence du Canada, considéré comme un pays altruiste parce qu'il envoie ses soldats de la paix partout dans le monde, serait la bienvenue. Le Canada n'a d'autre intérêt que celui d'offrir ses compétences aux pays de la région qui en ont le plus besoin. J'ai déjà mentionné l'industrie pétrochimique. Le ministre a parlé de l'électronique et de l'industrie agroalimentaire.

À propos de nos relations avec Israël, il faut se rappeler que ce pays n'est pas plus grand que l'île du Prince Édouard et que la moitié de son territoire est occupée par le désert. Là-bas, la politique se décide presque en se criant d'une ville à l'autre, comme nous le faisons ici d'un côté à l'autre de la Chambre. L'endroit est intime et la proximité des marchés est telle que la plupart d'entre nous ne réalisent pas l'impact en termes de secrets économiques.

Pourtant, la présence du Canada, qui n'est pas seulement un spécialiste du maintien de la paix mais aussi une nation d'entrepreneurs, est disposé à partager généreusement non seulement ses produits, mais aussi ses connaissances, fournira au Canada, au Moyen-Orient et particulièrement à Israël une occasion de voir comment les choses pourraient et devraient fonctionner.

Les deux partis d'opposition ont reconnu l'importance de l'initiative du Canada de promouvoir sérieusement l'accessibilité des Palestiniens aux nouveaux marchés ainsi créés. Je pense que c'est merveilleux que les Israéliens aient vu une occasion de conclure une paix durable assortie d'une présence économique et politique canadienne.

Le projet de loi répond aux attentes des entrepreneurs, car ce sont eux qui en ont lancé l'idée, qui en ont saisi leur gouvernement et qui ont collaboré avec les fonctionnaires des deux pays afin qu'une loi vienne concrétiser cette idée et cimenter les liens que les deux pays voulaient nouer.

(1045)

Nous avons déjà vu les premiers résultats de ces efforts. J'ai hâte de voir nos deux pays récolter des avantages économiques et politiques encore plus grands.

Monsieur le Président, je vous remercie et je remercie également mes collègues de leur attention et, surtout, de leur appui.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, il n'y a pas de doute que nous sommes en faveur du libre-échange et que nous appuyons les accords commerciaux bilatéraux qui sont négociés par nos représentants.

J'ai écouté avec intérêt le langage élégant et fleuri utilisé par le député du côté gouvernemental pour décrire cet accord commercial, mais je m'interroge sur la sincérité dont l'autre côté fait preuve.

Lorsque les libéraux étaient dans l'opposition et lorsqu'ils étaient dirigés par M. John Turner, ils avaient basé toute leur campagne électorale sur la défense d'une cause qui m'attristait beaucoup. J'ai dû, à mon grand regret, voter pour les conservateurs, parce que j'étais en faveur du libre-échange.

Je ne voulais pas voter pour eux et les faire réélire une fois de plus. Je ne voulais pas qu'ils fassent quatre ans de plus, parce qu'ils étaient incompétents. Ils administraient fort mal le gouvernement. Ils dépensaient trop. Ils promettaient des réductions d'impôts sans jamais les donner. Tout ce qu'ils nous ont donné, ce sont des augmentations d'impôts. Ils nous avaient promis l'intégrité au gouvernement et qu'est-ce qu'ils nous ont donné? Ils nous ont donné neuf ministres, qui ont dû quitter lors des quatre premières années.

Les libéraux, dans l'opposition, disaient que le libre-échange était contraire aux intérêts du Canada et que l'accord nord-américain de libre-échange n'était pas bon pour le Canada. Il suffit de se reporter au hansard pour s'en apercevoir.

John Turner a fait campagne contre Brian Mulroney sur le libre-échange. C'était la question et les députés d'en face, dont beaucoup ont fait cette campagne, étaient contre le libre-échange. Maintenant, tous, y compris le premier ministre, nous disent que le libre-échange est merveilleux et nous citent les statistiques commerciales.

Heureusement pour eux que nous avons le libre-échange, car c'est cela qui les sauve en ce qui concerne les emplois et la création d'emplois. La seule raison pour laquelle notre économie est en croissance, ce sont nos accords commerciaux. C'est à grâce aux exportations que nous avons de la croissance, car la croissance intérieure est nulle ou presque. Il n'y a pas d'emplois au Canada. Il y a 1,4 million de personnes en chômage. Heureusement que des


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emplois sont créés. Sur les 600 000 emplois que le gouvernement se félicite d'avoir créés, plus de la moitié sont dus au commerce.

Ce que je ne comprends pas, c'est l'hypocrisie des politiciens qui disent une chose dans l'opposition et, ensuite, font tout le contraire lorsqu'ils sont au gouvernement. Je ne sais pas si ce député en particulier a changé d'avis. Je ne l'accuse pas personnellement. Je suis sûr que, basé sur son discours, un discours fort positif, il croyait déjà au libre-échange lorsqu'il était dans l'opposition. Il croyait au libre-échange lorsque John Turner faisait campagne contre celui-ci. Il a toujours cru au libre-échange. Je suis sûr que c'est le cas, parce qu'on ne peut pas utiliser le langage qu'il a utilisé aujourd'hui après avoir été contre la chose.

Le député est pressé de se lever pour me répondre, mais je voudrais faire une observation sérieuse. Je voudrais répéter ce que je viens de dire pour que tout le monde comprenne.

Voici ce que je veux faire ressortir. Pourquoi dire que l'on est contre quelque chose lorsque l'on est dans l'opposition et ensuite, lorsque l'on est au gouvernement, dire que l'on est en faveur et agir comme si avait toujours été en faveur? Cela n'a pas de sens, à mon avis. Dieu merci, le Parti libéral a eu une merveilleuse résurrection en ce qui concerne la compréhension de l'économie du pays et je le félicite d'avoir changé d'avis.

M. Volpe: Monsieur le Président, je ne sais pas trop ce qu'il entend par «changer d'avis». Cette expression ne fait pas partie de mon vocabulaire.

Je remercie mon collègue d'avoir expliqué pourquoi les Canadiens, lors des dernières élections, ont indiqué très clairement qu'ils en avaient assez du genre de politiciens qui gouvernaient, bien mal d'ailleurs, le pays.

Je me réjouis qu'il se soit rendu compte que le gouvernement actuel, l'administration actuelle, mon parti, a adopté les mesures qui s'imposaient pour corriger les effets des mauvaises décisions prises antérieurement, pour mettre sur pied des programmes d'ajustement et pour créer un climat favorable à la conclusion d'accords commerciaux, et ce faisant, pour mettre le Canada sur la voie de la prospérité.

(1050)

Je suis heureux qu'il ait constaté que ça donnait des résultats. Il a mentionné l'impact de l'accroissement des échanges commerciaux qui se faisait déjà sentir sur notre économie. Je l'en remercie donc. Il a souligné qu'au chapitre du commerce international la politique de notre gouvernement en faveur d'une libéralisation accrue a eu des effets bénéfiques sur les finances du pays. Il a insisté sur l'importance des effets immédiats et durables d'une pareille croissance sur nos politiques financières et sur les taux d'intérêt offerts aux Canadiens. Voilà pourquoi je tenais à le remercier.

J'aimerais également le remercier d'avoir reconnu que le pays est maintenant dirigé par un gouvernement qui est conscient de l'importance de s'adapter à un monde changeant, de l'ampleur des changements en cours, de la nécessité de mettre en route des mesures pour faire face à ces changements de façon à ce que les Canadiens puissent se tailler une place dans une économie de plus en plus mondialisée et récolter ainsi les fruits de la prospérité et de la croissance.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, j'ai été heureux d'entendre les observations du secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, notamment quand il a dit que le Parti libéral avait finalement décidé que le libre-échange était un avantage qui avait permis de transformer l'économie canadienne pour l'axer sur la croissance.

Comme mon collègue de Calgary-Centre vient de le déclarer, l'économie canadienne n'est pas encore redressée. La confiance des consommateurs fait toujours défaut, mais, pour ce qui est du commerce, nous avons effectivement manifesté beaucoup de dynamisme du côté des exportations. L'excellent travail que nous avons accompli s'est soldé par une nette croissance.

Je sais que le Parti libéral a réalisé toute une conversion et qu'il voit maintenant d'un bon oeil la libéralisation des échanges. Le Canada est généralement connu comme étant un chef de file, parce qu'il essaie de concilier les accords commerciaux qui sont nécessaires. Je le répète, nous pouvons soutenir la concurrence s'il y a des règles de jeu équitables, mais cela nous est impossible quand des subventions sont versées dans les autres pays et que les droits de douane sont élevés.

Dans la dernière ronde des négociations du GATT, quand les libéraux ont pris la relève à la toute fin, ils ont appuyé la gestion de l'offre, ou l'article XI, qui doit préserver la fermeture à la frontière et empêcher l'entrée au pays de tout produit agricole assujetti à la gestion de l'offre. Le Canada s'est retrouvé isolé à la table des négociations. Notre pays a été le seul à adopter et à maintenir cette position, même si elle n'était pas propice au libre-échange et ne l'est toujours pas.

Nous avons graduellement imposé des droits de douane, qui sont aujourd'hui de 350 p. 100 dans le cas du beurre. Pour un pays qui favorise le libre-échange, ou la libéralisation du commerce, depuis la Seconde Guerre mondiale, est-ce qu'il n'y a pas là une contradiction, parce que nous préconisons le libre-échange à l'étranger, nous voulons avoir accès à leurs marchés, mais nous l'interdisons à l'industrie agricole qui est assujettie à la gestion de l'offre au Canada?

Je voudrais bien savoir ce que le secrétaire parlementaire pense de tout cela.

M. Volpe: Monsieur le Président, je tiens d'abord à féliciter le député de Peace River. Nous avons tous deux fait partie du Comité des affaires étrangères et du commerce international pendant à peu près deux ans. Il a constamment défendu les intérêts de ses électeurs, comme il croyait qu'ils le lui demandaient. Je le dis sans la moindre note d'irrespect. Il est important de garder à l'esprit les questions dont nous sommes saisis.

Au cours des débats du comité, le député est souvent revenu sur ces questions. En fait, il a participé à une série d'études que le comité a effectuées justement pour défendre sa position sur le sujet.


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Nous n'arriverons jamais à régler la question des rajustements au cours d'un seul débat à la Chambre ni, comme nous l'avons tous deux constaté, au sein d'un comité. Le député a signalé que le Canada s'était retrouvé seul à la table, mais cela fait partie du processus des négociations. Le Canada est devenu membre du GATT et de l'Organisation mondiale du commerce précisément parce que nous tenions à ce que le monde reconnaisse certaines normes, ou règles à observer dans les échanges commerciaux. Nous devions défendre nos propres intérêts tant que nous n'aurions pas trouvé une autre solution.

(1055)

En tant que membre des deux organisations, le Canada a négocié et continuera de le faire pour défendre les intérêts des Canadiens. Nous n'avons pas à présenter des excuses pour cela, peu importe la position philosophique que d'autres pays peuvent défendre.

Si les agriculteurs canadiens sont mécontents du fait que nous avons défendu leurs intérêts, j'aimerais bien qu'ils le disent. Si le député soutient que le fait de défendre nos intérêts va à l'encontre des positions philosophiques adoptées et promues par d'autres pays dans leurs propres intérêts, nous pourrions toujours en discuter. Toutefois, je n'ai aucune excuse à présenter pour cela.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, je trouve intéressant le débat que nos collègues tiennent depuis quelques minutes. Cela illustre fort bien ce à quoi mon collègue de Terrebonne faisait référence hier, à savoir qu'il est étonnant, depuis près de trois ans maintenant, de voir le gouvernement libéral faire l'apologie, en cette Chambre et sur toutes les tribunes à travers le monde, du libre-échange, alors qu'il s'y était opposé avec virulence au moment où il avait été question de conclure l'accord de libre-échange avec les États-Unis et, subséquemment, l'Accord de libre-échange nord-américain. Alors, nous sommes très heureux d'assister, nous aussi, comme nos collègues réformistes, à cette conversion tout à fait spectaculaire de la part de nos collègues libéraux.

Cela dit, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui en cette Chambre afin de débattre du projet de loi C-61, Loi portant sur la mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange entre le Canada et Israël.

D'entrée de jeu, je dois vous dire que, même si nous avons des critiques à formuler relativement à la façon très singulière dont le gouvernement libéral a exclu de toutes les étapes des négociations, aussi bien l'opposition officielle que tous les autres intervenants intéressés à faire valoir leur point de vue sur ce sujet, il pourra néanmoins compter sur l'appui du Bloc québécois, puisque nous sommes en faveur de la libéralisation des échanges et de la globalisation des marchés, qui constituent, de toute façon, une tendance irréversible du commerce mondial.

Après les États-Unis et le Mexique, voilà qu'un troisième État, situé beaucoup plus loin que nos frontières, entrera, vraisemblablement à compter de janvier 1997, dans le groupe des pays avec lesquels le Canada projette d'éliminer toutes les barrières commerciales.

Le Bloc québécois est en faveur de la création de liens plus étroits entre Israël et le Canada. Nous pensons que les populations québécoise et canadienne sortiront gagnantes d'un tel accord, puisque le libre-échange, en favorisant la libre circulation des marchandises et l'accroissement de la compétitivité, permettra à nos populations respectives d'avoir accès à un plus grand éventail de produits, et ce, à des coûts des plus intéressants. Pour ces raisons, le Bloc québécois se prononce donc en faveur de cet accord de libre-échange, puisqu'il permettra, comme je le disais, aux entreprises d'ici d'accroître leur présence en Israël et, éventuellement, dans d'autres pays du Proche et Moyen-Orient.

Cet accord de libre-échange avec l'État d'Israël a pour objectif d'éliminer la plupart des droits de douane reliés aux produits échangés entre les deux pays. L'État d'Israël, avec une population atteignant maintenant les 6 millions de personnes, soit un peu moins que la population du Québec, soit dit en passant, se rapprochera, de ce fait, du Canada, puisque les barrières tarifaires qui, jusqu'à maintenant, restreignaient la libre circulation des produits, seront bientôt levées.

Divisé en trois parties et comprenant 62 articles, cet accord permettra, entre autres, d'éliminer les droits sur tous les produits industriels dès le 1er janvier 1997, à l'exception de deux produits pour lesquels la levée des tarifs sera effectuée de façon plus graduelle, soit les maillots de bain pour dames et certains tissus de coton.

En plus de ces deux produits, l'accord prévoit également des réductions tarifaires pour la majorité des produits reliés au secteur agroalimentaire, sauf les produits laitiers et les produits à base de volaille et d'oeufs, comme en ont convenu les deux parties.

Cet accord vient à point afin de stimuler le commerce entre le Canada et Israël. Notons qu'en 1995 seulement, les échanges bilatéraux entre le Canada et Israël ont atteint quelque 450 millions de dollars, soit une hausse de 37 p. 100 par rapport à l'année précédente. Pour leur part, les exportations du Canada vers Israël se sont chiffrées à plus de 236 millions de dollars en 1995, soit pratiquement 50 p. 100 de plus qu'en 1994.

C'est ainsi que, depuis quelques années, la courbe des échanges économiques entre le Canada et Israël est continuellement en hausse.

C'est pourquoi il convient aujourd'hui de lever les entraves au commerce entre le Canada et Israël. Comme l'indiquait, en octobre 1995, le vice-premier ministre du Québec, dans une lettre adressée au ministre du Commerce international du Canada, le Québec, et je cite: «[ . . . ] a toujours activement prôné la libéralisation des échanges internationaux-il faisait référence à l'Accord de libre-échange, l'Accord de libre-échange nord-américain, l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et l'Organisation mondiale du commerce-et il soutient encore une telle libéralisation comme moteur de croissance.» Le Bloc québécois s'inscrit dans le même état d'esprit.

(1100)

Ce qui est particulier avec l'État d'Israël, c'est qu'il est situé dans un ensemble géopolitique complètement différent de celui où nous nous trouvons. Depuis sa création en 1948, l'État hébreu n'a pas connu que des jours calmes et de tranquillité, puisque depuis ce


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moment, la plupart des pays voisins arabes l'entourant sont toujours officiellement en état de guerre contre lui.

Certains événements de l'histoire récente d'Israël sont plus marquants que d'autres. Par exemple, la guerre des Six-Jours qui a eu lieu en 1967 et qui consacra la victoire d'Israël contre ses voisins eut comme conséquence malheureuse l'occupation de territoires qui perdure encore de nos jours.

Ainsi, les noms de ces territoires nous sont aujourd'hui devenus bien familiers, puisqu'ils sont toujours au centre de l'actualité mondiale. Il va sans dire que cette présence ne fait qu'exacerber les tensions entre Juifs et Arabes, puisque même si Israël s'est retiré du Sinaï en 1982 et de la bande de Gaza en 1994, il occupe toujours le secteur est de Jérusalem, le plateau du Golan et la majeure partie de la Cisjordanie.

Pourtant, malgré le processus de paix enclenché à Madrid en 1991, et suivi par la signature d'accords en 1994 entre Israël et l'Organisation de libération de la Palestine, mieux connue sous l'acronyme OLP, le processus de paix est loin d'être complété.

Le triste assassinat du premier ministre Yitzhak Rabin, le 5 novembre 1995, a eu des conséquences désastreuses sur le processus de paix. Cet homme qui, depuis plusieurs années, voulait que le peuple d'Israël puisse finalement vivre en toute tranquillité ne disait-il pas, lors de son dernier discours, quelques instants seulement avant d'être abattu par un jeune fanatique: «J'ai été un homme de guerre, mais aujourd'hui, il y a une chance de paix. Je crois qu'il faut la saisir, parce que cette aspiration est tellement profonde.»

Cet assassinat a été l'élément déclencheur d'une détérioration de la situation. Au printemps dernier, les attentats répétés du Hezbollah par le biais des commandos-suicide ont conduit l'armée israélienne à effectuer des raids aériens et des bombardements au Sud-Liban. Ces attaques ont fait plus de 150 morts du côté libanais, des civils pour la plupart.

Il y a quelques semaines encore, le nouveau gouvernement de Benjamin Netanyahu, en prenant la décision de rouvrir la galerie souterraine de Jérusalem qui aboutit à l'esplanade où se trouve la mosquée de Al Aksar, qui est, en importance, le troisième lieu saint de l'Islam, a provoqué des émeutes causant la mort de plus d'une cinquantaine de Palestiniens et d'une quinzaine d'Israéliens. Nous souhaitons vivement que le nouveau premier ministre Netanyahu réévalue la ligne dure qu'il met de l'avant actuellement, face à la question de l'autonomie palestinienne.

Il convient de rappeler que le gouvernement canadien actuel ne cesse de répéter que la promotion des droits de la personne se fait par l'intermédiaire du commerce. Pourtant, l'État d'Israël a déjà signé, en 1985, un accord de libre-échange avec les États-Unis, suivi en 1988 d'un accord du même type avec l'Union européenne et maintenant avec le Canada. Avons-nous pour autant assisté à une amélioration de la situation? Non.

Nous croyons que le gouvernement israélien devrait maintenant tenter de trouver des solutions conciliantes avec les autorités palestiniennes, car la politique n'est-elle pas l'art du compromis? Sur cette question des compromis, il serait certainement intéressant d'explorer la possibilité d'étendre cette entente de libre-échange aux Palestiniens vivant dans les territoires occupés.

Bien sûr, la première étape serait d'obtenir l'aval des autorités palestiniennes, afin d'avoir la certitude que leur inclusion dans un traité entre Israël et le Canada soit bel et bien désirée. Il est possible qu'en élargissant l'accord afin d'y inclure les Palestiniens, l'augmentation du nombre d'emplois dans les territoires occupés puisse éventuellement contribuer à stabiliser le climat social.

Les négociations ayant mené à la signature de cette entente ont eu lieu durant toute cette période trouble. Commencées en novembre 1994 et s'étant déroulées jusqu'en janvier 1996, les négociations ont abouti à l'entente qui fut signée par le ministre du Commerce international du Canada et par le ministre de l'Industrie et du Commerce de l'État d'Israël, le 31 juillet 1996.

En tant que parti formant l'opposition officielle, il est difficile d'accepter que pratiquement tout le processus ayant mené à cet accord se soit effectué en catimini et sans aucun débat public. On peut comprendre que le processus de négociations lui-même doive se faire à huis clos, c'est naturel. Nous savons que les négociateurs effectuent un travail difficile et parsemé d'embûches. Néanmoins, il serait apprécié de connaître l'évolution et l'état d'avancement des travaux relatifs aux négociations.

(1105)

Soyons clairs, nous ne demandons pas que les parlementaires soient présents à la table des négociations, mais nous croyons qu'en démocratie, il importe d'éviter l'exclusion systématique des représentants de la population.

Rappelons seulement que l'enjeu le plus important de l'élection de 1988 fut le libre-échange entre le Canada et les États-Unis, entente, je le rappelle, à laquelle s'opposaient les libéraux. Les nombreux groupes se sachant visés par l'accord ont ainsi pu prendre part au débat.

C'est en défendant leurs points de vue et en faisant des représentations auprès des autorités politiques que les intervenants concernés, les dirigeants d'entreprises, les porte-parole des groupes communautaires et environnementaux ont pu influencer la teneur des clauses incluses dans l'accord avant qu'il ne soit signé.

Lors des négociations entourant la mise en place de l'Accord de libre-échange nord-américain, les syndicats ont pris position sur les questions reliées au travail et ont manifesté les appréhensions que leur inspirait l'ALENA. Des groupes environnementaux ont aussi fait part de leurs préoccupations relativement aux questions environnementales. Même si les résultats n'ont pas satisfait tous les intervenants, il demeure qu'avant la signature de l'accord, en décembre 1992, il y avait eu un important débat sur la place publique.

Le projet de loi qui nous est présenté aujourd'hui est maintenant signé, les négociations sont complètement terminées et rien ne peut plus être modifié. N'eut été des interventions répétées de l'opposition officielle, qui a pu ainsi réussir à attirer l'attention du gouvernement sur les difficultés qu'un tel accord poserait pour l'industrie


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de la lingerie et des maillots de bain au Québec, des décisions aux effets désastreux pour ce secteur auraient pu être prises.

En effet, cette industrie aurait pu être gravement mise en danger puisque l'État d'Israël importe ses tissus de l'Union européenne en franchise de douane, ce qui lui confère un avantage concurrentiel sur les marchés québécois et canadien. Si nous n'avions soulevé cette question en Chambre au mois de novembre 1995, il n'est pas certain que les négociateurs auraient été sensibles à ce sujet. Peut-être que des centaines d'emplois auraient pu être ainsi perdus, au Québec particulièrement.

Le Canada s'est maintenant lancé dans des négociations tous azimuts de traité de libre-échange. Nous approuvons cette ouverture vers différents marchés, mais il faudrait absolument revoir le processus conduisant à la conclusion de tels accords.

Le cas des maillots de bain n'est qu'un exemple des conséquences potentiellement négatives d'un accord négocié sans consultation publique. Malgré le fait que l'accord avec Israël soit déjà signé, il est encore temps d'améliorer la procédure pour les prochains accords de libre-échange envisagés par ce gouvernement. Pensons notamment aux négociations présentement en cours entre le Canada et le Chili devant conduire à la signature d'un accord vers le 15 novembre prochain.

Des fonctionnaires des ministères des Affaires étrangères et du Commerce international nous ont assurés que l'information entourant ces négociations seraient mise à notre disposition. Nous espérons simplement que les ministres responsables des Affaires étrangères et du Commerce international consentiront eux aussi à donner leur aval à la circulation de tels renseignements.

Il est primordial que ce genre de situation ne se reproduise plus afin de permettre à l'opposition de faire adéquatement son travail. Une attitude aussi cavalière de la part du gouvernement est d'autant plus inquiétante que celui-ci savait déjà qu'il pouvait compter sur l'appui des partis d'opposition. Pourquoi s'entêter ainsi à vouloir se mettre à dos les partis d'opposition, alors qu'il est possible de présenter une puissante image d'unanimité à nos partenaires commerciaux?

Si le gouvernement souhaite véritablement des débats ouverts et éclairés, il devrait faire preuve lui-même de plus d'ouverture et de clarté. Autrement, nous devrions conclure, comme c'est le cas actuellement, qu'il préfère le secret et l'obscurité. J'entends vous démontrer à quel point ce gouvernement s'est montré mesquin et démesurément mystérieux à l'égard de l'opposition officielle dans ce dossier.

Le 25 avril dernier, à l'occasion d'une séance de travail spéciale du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international portant sur les bombardements israéliens au Sud-Liban, j'exprimais aux représentants du ministère mes réserves à l'égard de la poursuite des négociations de libre-échange avec l'État d'Israël, alors que celui-ci bombardait allégrement des populations civiles et qu'il violait ouvertement les frontières internationalement reconnues d'un autre pays indépendant.

Un fonctionnaire du ministère me répondit alors que les négociations étaient suspendues dans l'attente de l'élection d'un nouveau gouvernement en Israël. Cette déclaration semblait confortée par des réponses que nous devions par la suite obtenir de la part du cabinet du ministre du Commerce international. En effet, au cours des mois de mai et juin derniers, nous avons téléphoné à quelques reprises au cabinet du ministre, afin de savoir à quel moment les négociations seraient terminées et à quel moment l'accord devait être signé. On nous a invariablement informés que l'entente ne devait être signée qu'en janvier 1997.

(1110)

Pourtant, il y a quelques semaines, soit le 19 septembre plus précisément, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères informait les membres du comité que l'accord était prêt à être signé depuis le mois de mars et que la signature officielle, qui devait avoir lieu lors d'une visite du premier ministre israélien au Canada, avait été reportée en raison des élections en Israël. Voilà ce que nous critiquons.

Il semble que l'accord avec le Chili sera beaucoup plus exhaustif que celui qui nous est soumis aujourd'hui. L'accord avec le Chili devrait être calqué sur le modèle de l'ALENA. Puisque l'entente sera beaucoup plus englobante, il y a beaucoup de thèmes qu'il aurait été intéressant d'aborder avec le Chili avant d'en faire la promotion. Plusieurs des thèmes devraient, entre autres, traiter par exemple des normes environnementales, des normes du travail et du travail des enfants. L'accord avec Israël est limité aux produits et ne comprend ni les services, ni les investissements.

La semaine dernière, nous avons rencontré des représentants d'Oxfam Canada qui nous faisaient part de leurs vives préoccupations relativement au manque de protection en ce qui a trait aux dimensions sociales qui semble se dessiner au terme du processus de négociation de cet accord.

Selon cette organisation, l'entente, qui se révélera à nous au moment de sa signature, approximativement le 15 novembre prochain, ne fera sans nul doute pas état de règles suffisamment sévères dans les domaines de l'environnement et des conditions de travail.

Même si le Chili vit un essor économique considérable, il n'empêche qu'une partie trop importante de la population de ce pays vit dans la pauvreté en raison de la polarisation de la richesse. Il aurait donc été souhaitable, tant pour le Chili que pour le Canada, que ces questions fassent l'objet d'une attention plus poussée. Voilà pourquoi il serait important de connaître l'état des négociations avant d'avoir le texte du projet de loi de mise en oeuvre de l'accord en cette Chambre.

Le projet de loi C-61, qui fait l'objet du débat d'aujourd'hui, a au moins le mérite de stimuler les exportations et de mettre nos entreprises sur le même pied que celles des États-Unis et de l'Europe qui profitent déjà, depuis quelque temps, d'un accès privilégié au marché israélien.

Le Bloc québécois appuiera donc ce projet de loi relatif à la mise sur pied d'un accord de libre-échange avec Israël, mais il déplore le fait que toutes les négociations et les thèmes abordés lors des pourparlers aient toujours été tenus loin des élus de cette Chambre. Ce n'est pas en dissimulant chacune des étapes des négociations


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menant à la conclusion des traités de cette importance que nous pourrons sainement débattre des thèmes et des enjeux qui affecteront au quotidien la vie de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

C'est pourquoi, comme je le disais précédemment, il est souhaitable que les ministères des Affaires étrangères et du Commerce international tiennent les élus de cette Chambre informés de l'état des négociations, si nous voulons qu'elles donnent lieu à un débat éclairé et responsable. Notre position relativement au projet de loi C-61, qui va dans la même direction que celle du gouvernement, démontre encore une fois le sérieux de notre parti lorsqu'il s'agit des intérêts de nos commettants et de leur volonté d'entrepreneur-ship.

En guise de conclusion, permettez-moi de vous citer un court extrait de l'opinion dissidente que le Bloc québécois avait formulée, en novembre 1994, lors de la révision de la politique étrangère du Canada: «Les Québécoises et les Québécois ne sont pas protectionnistes. Ils l'ont démontré en appuyant fermement l'Accord de libre-échange, l'Accord de libre-échange nord-américain et le cycle de l'Uruguay du GATT. Faut-il rappeler que la volonté québécoise a été le fer de lance du combat libre-échangiste des années 1980? Loin de voir le mouvement souverainiste du Québec comme un repli sur soi, en réaction contre la mondialisation économique, nous le percevons comme une ouverture sur le monde.»

[Traduction]

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue de ses excellentes observations.

Je me permets de lui rappeler une chose que le ministre a dite hier. Je cite le compte rendu officiel. À propos de l'accord de libre-échange, le ministre a dit: «Pourquoi Israël? Nos deux pays entretiennent d'étroites relations depuis longtemps. Nos liens reposent sur des valeurs et des convictions démocratiques partagées, notamment sur la foi en la liberté et la dignité de la personne humaine.»

Pourtant, le nouveau gouvernement d'Israël, dirigé par M. Nétanyahou, a adopté une attitude très dure à l'égard du processus de paix et à l'égard des Palestiniens. La violence a éclaté en Cisjordanie.

Le député pense-t-il que, en appuyant le projet de loi C-61 qui, essentiellement, ratifie l'accord de libre-échange, nous soutenons aussi la politique de M. Nétanyahou au sujet des Palestiniens de Cisjordanie?

(1115)

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, je pense que mon honorable collègue vient de me poser une question très importante. J'en ai fait un peu état dans mon discours.

Nous avons eu, au printemps dernier, une rencontre spéciale du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international qui portait sur les bombardements israéliens au Sud-Liban. À ce moment-là, justement parce que nous étions inquiets de voir le gouvernement canadien entreprendre ou poursuivre les négociations de libre-échange avec l'État d'Israël qui, à ce moment-là, bombardait les populations civiles au Sud-Liban et qui violait ouvertement les frontières internationalement reconnues d'un autre État souverain, à savoir le Liban, parce que, disais-je, nous étions inquiets de voir le gouvernement canadien entreprendre et poursuivre des négociations de libre-échange avec Israël, nous avons posé des questions aux autorités du ministère pour savoir si on entendait suspendre ces négociations. Pour toute réponse, nous avons obtenu, à ce moment-là, la réponse suivante, c'est-à-dire: «Les négociations sont de toute façon suspendues, puisque nous attendons l'élection d'un nouveau gouvernement en Israël.»

Ce que nous avons appris subséquemment, c'est qu'il n'y avait pas de suspension des négociations, et qu'en fait, l'accord était prêt à être signé dès le mois de mars. Alors, c'est dire que le gouvernement a fait preuve de beaucoup de mépris, si je puis dire, des députés de cette Chambre et des membres du comité, puisqu'on n'aurait jamais dû nous dire à ce moment-là que les négociations étaient suspendues, l'accord étant prêt à être signé.

Nous avons effectivement exprimé des réserves à l'égard de la signature de cette entente de libre-échange avec Israël, compte tenu de l'attitude un peu intransigeante du gouvernement israélien à l'égard des populations arabes sur son territoire et à l'extérieur de son territoire.

C'est pourquoi nous demandons que cet accord soit étendu aux populations palestiniennes des territoires occupés, espérant par là que l'extension de cet accord de libre-échange aux populations palestiniennes des territoires occupés puisse éventuellement améliorer leur situation économique. Également, nous souhaitons de ce fait améliorer le climat social dans les territoires occupés en Israël.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député du Bloc.

[Traduction]

J'avais très hâte de poser une question au député, car une chose me préoccupe. Il s'agit d'un accord de libre-échange. Or, le député sait fort bien qu'il existe chez nous un régime de protection tarifaire, notamment en ce qui concerne les subventions à la production laitière au Québec.

En sus du prix le plus bas que nous pourrions obtenir sur les produits laitiers, nous payons 350 p. 100 de droits à cause de la gestion de l'offre. Nous subventionnons cette production au Québec, où elle représente une très grosse partie de l'économie.

Les électeurs du député l'ont élu pour qu'il disloque le Canada. Ils disent vouloir se débrouiller seuls, et ils veulent que le député se batte pour cette cause. Ils disent aussi qu'ils se tireront mieux d'affaire seuls, s'ils quittent la Confédération et ne paient plus les frais très lourds que le gouvernement central occasionne. Ils s'en tireront mieux seuls, et ils auront une meilleure situation économique. Les électeurs du député estiment qu'ils seront en meilleure posture après la séparation. L'industrie laitière est une partie importante de leur économie, et elle est subventionnée par les consommateurs de tout le Canada, les Québécois y compris.

Le député croit-il que, si le Québec se sépare, nous allons continuer d'acheter nos produits à un prix subventionné à raison de 350 p. 100 au Québec, au nouveau pays du Québec ou peu importe comment on l'appellera?


5343

En ce qui concerne les coûts de la séparation, toute la question du commerce, de l'économie et de la séparation peut se réduire à un simple argument qui peut devenir une réalité concrète. Est-ce qu'il n'incombe pas aux séparatistes de prouver aux Québécois que leur situation sera meilleure après la séparation?

(1120)

Le député libéral a demandé tout à l'heure: pourquoi Israël? Je demande à mon tour: après la séparation, pourquoi le Québec? Nous pouvons produire nous-mêmes ce qu'il nous faut. Nous pouvons créer l'industrie laitière du reste du Canada. Nous pouvons acheter les produits laitiers aux États-Unis. Ils deviendront un concurrent, et le marché est à son mieux lorsqu'il y a concurrence. La concurrence fera fléchir les revenus des Québécois, et ils devront faire face à la concurrence. En réalité, ils seront en moins bonne posture qu'avant. Le député a-t-il quelque chose à dire à propos de cette subvention?

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, je me demandais si mon honorable collègue allait finalement me donner l'occasion de répondre à la question qu'il se mourait de me poser depuis si longtemps. Je constate qu'il a eu plusieurs minutes pour répéter inlassablement sa question; j'espère que vous allez me laisser quelques minutes pour répéter inlassablement ma réponse.

Tout d'abord, j'aimerais dire qu'il est déplacé de se servir du débat actuel sur la question de l'Accord de libre-échange entre le Canada et Israël pour régler ses comptes sur la question constitutionnelle. Nous aurons largement l'occasion, à travers d'autres débats, dans cette Chambre et sur d'autres tribunes, de régler nos comptes sur la question constitutionnelle.

Cependant, j'aimerais répondre à sa question. Elle est non seulement déplacée, mais elle est également insidieuse et elle illustre, à mon sens, la méconnaissance du député à l'égard du système de produits agricoles contingentés au Canada et au Québec.

Bien sûr, l'industrie laitière au Québec est subventionnée en grande partie par le gouvernement fédéral, mais il doit savoir également que l'industrie des oeufs et l'industrie de la volaille sont également largement subventionnées. Et s'il est vrai que le Québec est l'un des principaux producteurs de produits laitiers, il est également vrai que le Québec n'est pas l'un des principaux producteurs d'oeufs et de volaille au Canada.

Donc, si ce système de contingentement devait être éliminé, non seulement le Québec serait perdant, mais possiblement l'Ontario et d'autres provinces du Canada.

Alors, sa question démontre, illustre une méconnaissance du système de contingentement au Canada, et je n'en ajouterai pas plus.

[Traduction]

M. Silye: Monsieur le Président, je tiens à dire que je n'ai pas une méconnaissance du système. Je le comprends très bien. Ce dont je parle, c'est des consommateurs, des gens qui achètent le produit. À l'heure actuelle, ce sont eux les perdants, et ils pourraient être des gagnants. Je comprends parfaitement le système.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, c'est un point de vue, mais un point de vue que je ne partage pas, autrement je ne serais pas ici en train de faire l'apologie, depuis trois ans, de la cause de la souveraineté. J'estime et je considère encore aujourd'hui que le Québec serait, à moyen et à long terme, avantagé par la souveraineté, et je pense que le Canada et le Québec pourraient trouver mutuellement avantage de la souveraineté du Québec.

Pourquoi continuer à dépenser tant d'énergie à se diviser sur les questions qui nous opposent, plutôt que de chercher à nous réunir et à travailler ensemble dans un nouveau partenariat sur les questions qui nous unissent? Je pose la question.

[Traduction]

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-61, qui concerne l'accord de libre-échange Canada-Israël.

Nous, du Parti réformiste, sommes en faveur des accords commerciaux bilatéraux parce qu'ils renforceront l'Organisation mondiale du commerce actuellement en place.

Je sais que mon collègue, le député de Peace River, a de très bonnes idées à ce sujet et qu'il serait certainement heureux de conseiller au gouvernement diverses mesures à prendre.

Dans une optique plus vaste à l'échelle du Moyen-Orient, disons que la question de la sécurité menace les accords commerciaux, non seulement la sécurité entre Israël et la Palestine, mais celle dans l'ensemble de la région, ce qui aura d'énormes répercussions sur l'économie mondiale.

(1125)

Actuellement, c'est la confusion la plus complète dans le processus de paix. Celui-ci risque d'échouer. Les Israéliens et les Palestiniens sont polarisés. Nous avons une chance inouïe de pouvoir aider à bâtir des ponts entre les deux groupes.

Après l'élection de M. Netanyahu, le parti du Likoud semble s'être éloigné du travail accompli par le prédécesseur de M. Netanyahu, M. Shimon Peres.

Par contre, il n'a pas fallu grand-chose pour que M. Arafat et les autorités palestiniennes se retirent de l'accord de paix.

Les deux groupes doivent comprendre que leurs destins sont étroitement liés. L'histoire, la géographie et l'avenir ne les sépareront pas.

Les conditions dans les territoires autonomes palestiniens sont absolument consternantes. La flambée de terrorisme en provenance de ces régions n'a rien d'étonnant. Elle témoigne de la grande frustration, de l'angoisse absolue et de la peur infinie que ressentent ceux qui vivent là. Ainsi, dans la bande de Gaza, le taux de chômage est supérieur à 70 p. 100. Cela engendre le désespoir, et les gens désespérés ont souvent recours à la violence.


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À mon humble avis, l'économie est partiellement responsable de cette situation. Nous avons l'occasion, par l'entremise de l'accord de libre-échange avec Israël, d'imposer des conditions aux rapports que les Israéliens entretiendront avec les Palestiniens des territoires autonomes. Nous ne devrions pas le faire maladroitement, mais de manière coercitive, dans l'intérêt des deux groupes. Il s'ensuivra de meilleures chances de paix pour tous.

Si nous pouvons faire cela, nous priverons de leurs moyens d'action les éléments radicaux du Hamas qui sont responsables des attentats à la bombe survenus à Tel-Aviv. Nous couperons, à la base, les appuis au Hezbollah et au Djihad islamique. Le seul moyen d'y parvenir consiste à offrir aux Palestiniens des régions autonomes une certaine émancipation économique. Le mouvement Hamas s'est gagné des appuis en ouvrant des écoles et des établissements de santé pour ces gens désespérés, qui réclament des améliorations dans leur situation épouvantable, ainsi qu'en leur offrant des possibilités de développement économique.

J'invite le gouvernement à trouver des moyens de travailler avec les autorités israéliennes et palestiniennes à l'amélioration de leurs ententes économiques bilatérales.

Je suis également d'avis qu'il faut rouvrir la Cisjordanie et la bande de Gaza. Il faut le faire tout en concluant avec M. Arafat et les autorités palestiniennes des ententes aux termes desquelles ils s'engageraient à prendre des mesures efficaces, décisives et rapides pour contrer le terrorisme dans leurs territoires. Ils ne peuvent gagner sur les deux tableaux. Si les autorités palestiniennes prêchent la paix, elles doivent agir d'une manière pacifique. Ce sera difficile, mais elles devront agir dans ce sens avec leur population. Ce n'est que de cette manière que les Palestiniens pourront gagner le respect et la confiance du Likoud et de M. Nétanyahou.

De son côté, M. Nétanyahou doit cesser de fermer si souvent et, parfois, de manière inéquitable, la Cisjordanie et la bande de Gaza. Cela divise les Palestiniens, de sorte que l'appui de la base diminue.

Nous devons également oeuvrer à l'amélioration du système d'éducation dans les territoires palestiniens autonomes, de même qu'aux conditions économiques et au développement des infrastructures qui seront requises. Pour ce faire, un changement radical s'impose. Cet antagonisme entre les deux peuples doit cesser.

(1130)

Il va falloir que quelques-uns des interlocuteurs clés viennent à la table de négociation. Une personnalité clé dans le processus de paix au Moyen-Orient est Hafez al-Assad, de Syrie. L'une des causes de l'échec du processus de paix, c'est que M. Assad n'a pas été convié à la table de négociation avec M. Nétanyahou ou son prédécesseur, le roi de Jordanie et avec M. Moubarak, d'Égypte.

Si l'on réussit à réunir tous ces chefs d'État à une même table, des progrès pourraient être réalisés. M. Assad contrôle la Syrie. Il a aussi une grande influence sur ce qui se passe à la frontière du nord d'Israël avec le Hezbollah. Israël ne garantira sa sécurité à sa frontière nord que si le Hezbollah y cesse ses activités, et c'estM. Assad qui est la clé à cet égard.

Les intermédiaires de M. Assad ne vont pas prendre d'initiatives. Il n'y aura pas de progrès véritables dans le processus de paix siM. Assad lui-même ne discute pas face-à-face avec M. Nétanyahou, le roi Hussein de Jordanie et M. Moubarak, sans oublier, évidemment, M. Arafat.

Un autre aspect est Jérusalem, qui est un point extrêmement sensible. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi cette ville, le siège d'autant de religions, une ville d'une beauté aussi exquise, avec laquelle nous tous à la Chambre, à l'instar de milliards de gens du monde entier, ressentons un lien si puissant, est à l'origine d'autant de rancoeur, d'animosité et de tueries. Cela va complètement à l'encontre-qu'on soit musulman, chrétien ou juif-de ce qu'a été Jérusalem et de ce qu'elle devrait être. Ce n'est pas ce que représente Jérusalem.

Puisque les différents groupes attachent tant d'importance à Jérusalem, la solution serait peut-être de placer la ville sous la protection des Nations Unies. Si les groupes en présence ne veulent pas cohabiter dans Jérusalem, comme cela semble être le cas en ce moment, je crois que les Nations Unies doivent tenter d'obtenir leur soutien tacite pour faire de cette ville une zone internationale protégée pour tous les groupes religieux rattachés à cette ville magnifique par leurs croyances.

L'autre point que je voudrais aborder est tout l'aspect des régions palestiniennes autonomes et des colonies de peuplement. Continuer de soutenir l'établissement de colons dans les régions palestiniennes autonomes constitue de la pure provocation de la part du gouvernement d'Israël. C'est rire à la face de l'autorité palestinienne et du peuple palestinien. Cette provocation ne fait que les pousser à se radicaliser.

La première chose que doivent faire les Israéliens-et le Canada pourrait jouer un rôle coercitif à cet égard-, c'est d'arrêter immédiatement toute nouvelle construction dans les colonies de peuplement israéliennes situées dans les régions palestiniennes autonomes. En deuxième lieu, ils pourraient éliminer certaines de ces colonies. Cela rétablirait dans une certaine mesure la confiance du peuple palestinien. L'autorité palestinienne doit, pour sa part, donner au gouvernement d'Israël l'assurance que les activités terroristes cesseront. Ces activités ne cesseront pas, mais l'autorité palestinienne pourrait au moins aider activement les forces de défense israéliennes à mater les groupes extrémistes qui perturbent complètement le processus de paix.

Un autre facteur dont peu de gens parlent, mais qui, à long terme, risque de compromettre les progrès futurs au Moyen-Orient est l'eau. Il reste très peu de ressources en eau potable dans cette région. Les réserves d'eau baissent d'une façon inquiétante. Le changement n'est peut-être pas spectaculaire, mais les gens ne s'installent pas dans des endroits où il n'y a pas d'eau. Là où il n'y a


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pas d'eau, il ne peut y avoir d'agriculture et, par conséquent, il n'y a pas non plus de communautés humaines. Ce problème affecte non seulement Israël et le peuple palestinien mais également la Jordanie et, dans une moindre mesure, la Syrie.

Les hydrologistes canadiens ont ici l'occasion de se joindre à leurs homologues d'autres pays pour aider le Proche-Orient à mieux utiliser ses ressources en eau et à améliorer la conservation et la mise en valeur des nappes d'eau existantes. Quoi que nous fassions, si l'eau vient à disparaître de cette région, les gens ne voudront plus y vivre.

(1135)

En terminant, il y a toujours eu une polarisation des positions dans cette région. Or, les deux parties avaient saisi ensemble une mince opportunité en engageant des négociations de paix, avec l'aide des Américains, pour le plus grand espoir du monde.

Malheureusement, depuis les dernières élections, la polarisation se manifeste à nouveau. Les parties en présence doivent comprendre que leurs sorts respectifs sont intimement liés. Peut-être ces gens ne peuvent-ils pas vivre dans le même pays. Ils vont sans doute finir par se séparer, mais espérons qu'ils pourront vivre côte à côte dans la paix et qu'ils finiront par engager une coopération économique. L'établissement de ponts économiques permettra de construire la paix. La méfiance et la haine, vieilles de plusieurs décennies, s'atténueront lentement.

Selon un dicton bien connu au Proche-Orient, lorsque les fils enterrent leurs pères, c'est qu'il y a la paix, lorsque les pères enterrent leurs fils, c'est qu'il y a la guerre. J'espère que dorénavant, de part et d'autre au Proche-Orient, il y aura bien moins de pères qui seront appelés à enterrer leurs fils. J'espère aussi que le Canada collaborera avec la communauté internationale à l'établissement de la paix dans cette région troublée du monde.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je pense que l'intervention du député de Swift Current-Maple Creek-Assiniboia manque quelque peu de pertinence, en ce sens qu'on a déjà signé l'accord de libre-échange avec Israël. Il ne reste plus au Parlement qu'à souscrire à cette entente. On ne peut pas en modifier la teneur actuelle.

Je suis très fier de notre pays, et surtout du Parlement, parce nous sommes capables d'échanger des points de vue très différents dans un esprit de tolérance à l'égard du point de vue de chacun et d'avoir un grand respect pour la dignité des droits des autres, même si certains députés peuvent chercher à briser notre pays. Pourtant, nous avons un respect réciproque pour la dignité de l'autre.

Mon problème, c'est qu'Israël a un nouveau régime qui respecte moins que jamais les droits de la personne et la dignité humaine en adoptant une ligne dure face aux Palestiniens. Comme le député l'a dit, c'est de la provocation et cela a conduit à la mort de plusieurs personnes au Moyen-Orient, surtout des Palestiniens.

Je voudrais poser à nouveau au député une question que j'avais soumise au député de Verchères qui, selon moi, n'y a pas répondu très directement. Le député croit-il que si le Parlement souscrit à cet accord de libre-échange, il va, en même temps, donner son aval à la ligne dure adoptée par M. Netanyahu face aux Palestiniens? Souscrivons-nous à son point de vue en ce qui concerne les droits de la personne et le respect de la dignité humaine?

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Monsieur le Président, je remercie mon collègue libéral de sa question très intelligente.

Nous appuyons ce projet de loi, mais je pense que le projet de loi présente un danger, en ce sens qu'on peut percevoir cela comme un appui à la ligne dure adoptée par M. Netanyahu et son parti, le Likoud, face aux Palestiniens. C'est pourquoi il est essentiel que nous apportions des éclaircissements.

Nous devrions, par l'entremise de ce projet de loi, exhorter fortement le gouvernement israélien à s'engager dans des initiatives économiques sérieuses pour améliorer la santé et le bien-être des gens qui vivent dans les régions autonomes palestiniennes et, en particulier, les conditions terribles et vraiment inacceptables qu'on retrouve dans les camps palestiniens. Il suffit de se rendre sur place pour être tout à fait bouleversé par la situation qui y règne. C'est là que réside le danger et la chance d'améliorer les choses.

(1140)

C'est pourquoi j'encourage fortement notre gouvernement à préciser clairement au gouvernement israélien que, en tant que pays, nous ne souscrivons pas à cette ligne dure, nous n'acceptons pas qu'Israël empêche des Palestiniens d'entrer en Israël à partir de la Cisjordanie et de la bande de Gaza et que nous voyons d'un mauvais oeil le maintien de conditions atroces et vraiment terribles dans les camps palestiniens et les régions autonomes palestiniennes.

Nous exigeons fermement que, de concert avec M. Arafat et les autres dirigeants du Moyen-Orient, le premier ministre Netanyahu s'engage dans des efforts de coopération pour améliorer la situation économique dans ces régions. C'est là que réside l'espoir de paix.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureux de traiter du projet de loi C-61, qui met en oeuvre l'Accord de libre-échange Canada-Israël.

Cet accord devrait être avantageux pour beaucoup d'entreprises canadiennes et de Canadiens. Il est synonyme de création d'emplois, ce qui doit être une grande priorité pour tous les députés de la Chambre. Cet accord vise particulièrement les secteurs de l'agriculture et des produits céréaliers, les communications de pointe, les ressources naturelles et le secteur de la fabrication. Il est important pour le Canada de favoriser des échanges commerciaux plus ouverts et plus équitables avec tous les pays du monde. Peu de députés de la Chambre auraient lieu de contester cette affirmation.


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Ce qui me préoccupe, c'est que le gouvernement semble en fin de compte consacrer trop d'énergie à rechercher des échanges commerciaux avec d'autres pays, et pas suffisamment à libéraliser le commerce à l'intérieur du Canada.

Le commerce international du Canada représente environ 160 milliards de dollars par année. Il est important, puisqu'il constitue une grande partie de l'économie canadienne. Je tiens à préciser clairement qu'il importe d'encourager le libre-échange avec d'autres pays. Depuis que les accords de libre-échange avec le Canada et les États-Unis sont en place, notre excédent commercial avec les États-Unis a augmenté considérablement. Les Canadiens en ont tiré profit. Bien qu'ils soient beaucoup plus modestes, des accords comme l'accord Canada-Israël sont tout de même importants.

Ce qui me préoccupe, c'est l'absence d'équilibre dans la politique du gouvernement. Bien que le commerce à l'étranger représente environ 160 milliards de dollars par année, le commerce interprovincial se chiffre à 146 milliards de dollars par année. Combien de fois avons-nous entendu le gouvernement ou l'opposition officielle parler de l'importance de supprimer les obstacles au commerce interprovincial? L'équilibre fait défaut.

Notre premier ministre fait des tournées mondiales dans des pays comme la Chine, le Chili, etc. Il fait toute une affaire de la signature de contrats dans d'autres pays. C'est probablement une façon de se faire valoir auprès des Canadiens. Je reconnais qu'il est important que le premier ministre exerce cette fonction. Mais là encore, où est l'équilibre?

Les libéraux du gouvernement actuel, dans des discours du Trône, dans des discours du budget, dans des rapports de comité-je pourrais mentionner toutes sortes de documents clés que le gouvernement a présentés à la Chambre et ailleurs-ont dit que régler le problème des obstacles au commerce intérieur, au commerce entre les provinces, constitue une grande priorité.

L'année dernière, le Comité des finances a rendu public un rapport prébudgétaire sur le commerce interprovincial qui disait: «Le commerce au Canada doit être placé sur un pied d'égalité avec le commerce entre le Canada et les États-Unis pour ce qui est de la libre circulation des produits et des services.» Je suis sûr que le comité aurait inséré dans cette déclaration les accords entre Israël et le Canada. Les députés ministériels reconnaissent que le commerce interprovincial devrait au moins être placé sur un pied d'égalité avec le commerce international. Malheureusement, leurs paroles ne sont pas conformes à leurs actions.

Le gouvernement n'a pris qu'une seule action. En 1994, il a signé l'accord sur le commerce intérieur. C'était un début certes, mais bon nombre de dispositions de cet accord devaient être mises en oeuvre ultérieurement, à des dates précises. Or, rien de tout cela n'a été fait.

(1145)

Alors qu'il s'intéresse passablement à des accords comme celui-ci, le gouvernement n'a encore rien fait qui vaille pour éliminer les barrières commerciales interprovinciales. Or, le commerce interprovincial représente presque autant que le commerce international. Où est l'équilibre dans tout cela? Il est important qu'on retrouve l'équilibre.

Faisant fi des lignes directrices qu'il s'était fixées dans ses discours du Trône et de ses discours du budget, le gouvernement n'a pas accordé au commerce interprovincial toute l'importance qu'il mérite. C'est précisément ce qui nous vaut la kyrielle de situations préoccupantes que connaît actuellement ce pays. Prenons par exemple le différend entre Québec et Terre-Neuve au sujet du contrat d'hydroélectricité des chutes Churchill.

Si les dispositions de l'accord sur le commerce intérieur relatives à l'énergie avaient été mises en oeuvre comme l'avait promis le gouvernement-même s'il ne touchait pas à l'actuel contrat d'hydroélectricité des chutes Churchill-, à tout le moins cela autoriserait le projet d'aménagement du cours inférieur du Churchill, qui est si capital pour le développement du Labrador et de Terre-Neuve. Je ne parle pas de renégocier le contrat actuellement en vigueur, mais bien d'autoriser le projet d'aménagement du cours inférieur du Churchill, un tout nouveau contrat d'hydroélectricité, qui contribuerait grandement au développement de Terre-Neuve. Des emplois dont on a tant besoin verraient ainsi le jour, car à ce projet d'aménagement s'en ajouteraient d'autres à Terre-Neuve, dont celui de la baie Voisey.

C'est le peu de cas qu'on a fait de cet accord qui nous a menés à la catastrophe. Les Québécois sont des gens équitables. Ce sont des citoyens intègres. L'idée de retarder le développement du Labrador et de Terre-Neuve ne leur sourit guère. Ils ont à coeur l'intérêt du Labrador et de Terre-Neuve. Mais, voilà, c'est un autre secteur négligé. Il n'y a pas d'équilibre entre le commerce intérieur et le commerce extérieur.

Le deuxième problème, c'est le différend qui oppose le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique concernant le transfert des employés de la société United Parcel Service au Nouveau-Brunswick. Si l'accord sur le commerce international avait été conclu à temps et si l'on avait accordé à l'accord en question l'importance qu'il méritait, ce différend ne serait jamais survenu.

Si on pouvait avoir recours à un bon mécanisme de règlement des différends, on pourrait venir à bout de tout différend susceptible de survenir, voire du problème très grave que nous avons et qui risque d'exclure tout à fait la Colombie-Britannique de l'accord. Ce serait bien triste pour le pays et pour la Colombie-Britannique.

Le troisième problème grave qui a résulté du fait que le gouvernement en place n'a rien fait pour éliminer les obstacles au commerce intérieur, c'est le différend entre le Québec et l'Ontario sur les ouvriers et les entrepreneurs qui traversent la frontière pour travailler. Ce différend persiste, s'accentue et devient de plus en plus menaçant à mesure que les mois passent. Du sable, du fumier et d'autres produits sont parfois répandus sur les ponts qui séparent les deux provinces. En ce moment même, les travailleurs de la construction sont réunis à l'hôtel Delta, à Ottawa, pour organiser un rallye-je ne sais pas exactement où il aura lieu-parce qu'ils n'ont pas l'intention de laisser ce différend s'estomper. Les travailleurs ontariens sont inquiets, car, si les travailleurs et les entrepreneurs du


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Québec peuvent venir travailler librement en Ontario, les travailleurs et les entrepreneurs ontariens n'obtiennent tout simplement pas le même accès au Québec. Il est très important que les Québécois réfléchissent à cette situation.

(1150)

Le gouvernement de l'Ontario menace de prendre des mesures commerciales très sévères qui auraient pour effet de limiter l'accès des travailleurs et des entrepreneurs québécois au marché ontarien. L'assemblée législative de l'Ontario songe sérieusement à ériger un mur de sorte que les échanges ne pourront pas se faire librement dans les deux sens. Cela signifie pour les Québécois que beaucoup d'entre eux qui travaillent actuellement en Ontario se verront refuser le droit de venir y travailler.

Comment cette très grave situation a-t-elle pu surgir? C'est parce que le gouvernement actuel n'a pas pris les initiatives nécessaires pour mener à terme l'accord sur le commerce intérieur et pour supprimer les obstacles au commerce interprovincial. Le gouvernement manque de leadership en ce domaine.

Qu'est-ce que ce manque de leadership coûte aux Canadiens? D'après le Fraser Institute et d'autres groupes d'analystes, cela coûte aux Canadiens entre 6 et 10 milliards de dollars par année en revenus perdus. C'est très grave. D'après le Fraser Institute, cela coûte annuellement à la famille canadienne moyenne environ 3 500 $ en revenus perdus, tout cela parce que le gouvernement n'a pas donné au commerce interprovincial la priorité qu'il a accordée au commerce extérieur.

Les projets de loi, comme celui dont nous sommes saisis aujourd'hui, sont importants, je le reconnais, mais pourquoi donc ne pas nous saisir demain d'un projet de loi qui s'attaque sérieusement et réellement à ces obstacles aux échanges entre les provinces? C'est très important, à tel point que la Chambre de commerce du Canada a publié un solide rapport sur la question. Elle calcule qu'une hausse de 10 p. 100 du commerce interprovincial se traduirait par la création de 200 000 emplois au Canada.

Plutôt que de prendre des mesures en ce sens, à deux ou trois coins de rue du Parlement, il se prépare une manifestation de travailleurs de la construction qui sont exaspérés par l'inaction du gouvernement qui n'a pas fait ce qu'il aurait dû faire pour supprimer les obstacles à la liberté de mouvement des travailleurs et pour que les relations commerciales puissent s'opérer ouvertement et librement entre les provinces. La situation est grave.

Je suis vraiment étonné de voir le ministre de l'Industrie, qui est responsable de l'accord sur le commerce intérieur, rester complètement silencieux alors que dans sa propre circonscription, à Ottawa, des travailleurs ontariens se voient refuser l'accès à des emplois de l'autre côté de la rivière, à Hull et à Gatineau, à cause des obstacles érigés par le Québec. Toute cette situation est très triste.

Il y a des députés libéraux qui représentent les habitants de Hull et de Gatineau. Pourquoi ne dénoncent-ils pas la situation? S'ils ne réagissent pas très rapidement et très bientôt, le gouvernement ontarien fermera la frontière, construira un mur et empêchera la libre circulation de la main-d'oeuvre et des entreprises entre l'Ontario et le Québec. On est rendu au point où cette décision pourrait être prise très bientôt. Que fait le gouvernement pour régler ce problème qui survient dans sa propre cour?

(1155)

Le gouvernement devrait avoir honte. Il doit se pencher sur cette question. Il lui faut examiner l'importance du commerce interprovincial et celle du commerce international et tenter de trouver un équilibre. Il doit comprendre que, pour l'économie canadienne, les avantages sont très similaires. Il doit dénoncer la situation, régler le problème qui est si bien illustré ici même dans cette ville et peaufiner l'accord sur le commerce interprovincial. Il doit créer un mécanisme de règlement des différends et permettre aux Canadiens de faire affaire avec les autres provinces canadiennes avec au moins la même liberté dont ils jouissent pour traiter avec d'autres pays.

Bien des gens d'affaires vivent une triste réalité, puisque pour certaines de leurs activités, il leur est plus facile de traiter avec les États-Unis que de faire affaire avec les autres provinces. C'est triste, et il faut réagir. La situation est d'autant plus urgente que les tensions semblent s'intensifier un peu partout au Canada.

Les conflits où une province se mesure à une autre ne favorisent aucunement l'unité nationale. Le conflit entre l'Ontario et le Québec n'aide en rien l'unité nationale. Le conflit entre la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick n'aide en rien l'unité nationale. Le conflit entre le Québec et Terre-Neuve et le Labrador n'aide en rien l'unité nationale.

Pourquoi n'a-t-on pas accordé à l'abolition des obstacles au commerce interprovincial toute l'importance qu'elle mérite? L'enjeu est important pour chacun des habitants de notre pays. Cela pourrait entraîner une hausse de 10 p. 100 du commerce interprovincial. Selon la Chambre de commerce du Canada, cela se traduirait par la création de 200 000 emplois ou plus, une augmentation de 3 500 $ du revenu familial et une hausse du revenu des Canadiens qui varierait entre 6 et 10 milliards de dollars. Tout cela serait possible si l'on accordait au commerce interprovincial la même importance qu'au commerce international et si les obstacles au commerce interprovincial étaient abolis dès que possible.

Je ne veux pas simplement encourager le gouvernement à agir, je veux le forcer à agir. Je veux forcer le gouvernement, et en particulier le ministre de l'Industrie, à aborder la question et à permettre la libre circulation des gens, des biens et des services entre les provinces, ce qui créerait 200 000 emplois au Canada.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je conviens avec le député qu'il est urgent de lever les barrières commerciales entre les provinces. Il y a certes là des possibilités, mais ce n'est pas le sujet du projet de loi et ce n'est pas le genre d'accord bilatéral que nous avons avec les provinces. Il est ici question d'un accord bilatéral, mais le député n'a pas vraiment beaucoup parlé du projet de loi. Si je puis me permettre, je voudrais


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présenter deux ou trois observations sur ce projet de loi et poser une question au député.

Nous discutons du projet de loi C-61 qui a été présenté par le ministre du Commerce international et qui est une loi portant mise en oeuvre de l'Accord de libre-échange Canada-Israël. Voici, en résumé, ce qu'il prévoit. D'abord, à partir du 1er janvier 1997, il n'y aura plus de tarifs douaniers sur les produits industriels d'origine canadienne ou israélienne. Ensuite, il n'y aura pas ou peu de droits sur une variété de produits agricoles et de la pêche exportés d'un pays à l'autre. Enfin, les deux pays conviennent de régler tout différend dans le cadre de l'accord au moyen d'un mécanisme exécutoire de règlement des différends.

Cet accord commercial bilatéral est extrêmement important pour le Canada. Cela fait des années que le Canada et Israël entretiennent d'excellentes relations fondées sur des valeurs communes et sur des liens politiques et sociaux. Sachez, par exemple, qu'en 1995, le commerce entre les deux pays a excédé 450 millions de dollars, soit une hausse de 37 p. 100 par rapport à 1994. Les exportations canadiennes ont atteint 216 millions de dollars, ce qui constitue une augmentation de 49 p. 100 par rapport à 1994. Dans l'autre sens, le Canada a importé pour 240,8 millions de dollars de produits israéliens en 1995, soit 32 p. 100 de plus qu'en 1994. C'est très considérable.

(1200)

Plus tôt, aujourd'hui, le député de Peace River a prononcé une allocution et, comme il fallait s'y attendre, il a reproché au gouvernement d'avoir procédé avec lenteur et dans le secret et de ne pas avoir été ouvert au sujet de cette question.

En fait, en novembre 1994, les gouvernements canadien et israélien ont annoncé l'ouverture des négociations à l'égard de cet accord de libre-échange bilatéral. Le 12 janvier 1996, des hauts fonctionnaires canadiens et israéliens ont conclu un accord préliminaire qui a mené à la signature d'un accord de libre échange, à Toronto, par les ministres israélien et canadien de l'industrie et du commerce.

Le fait est que le gouvernement s'est acharné à conclure des accords de libre-échange dans l'intérêt du Canada. Notre gouvernement a fait son travail à cet égard.

Le député ne croit-il pas que, si le commerce interprovincial est tellement important, il vaudrait mieux que nous adoptions au plus vite ce projet de loi et que nous permettions à la Chambre de se pencher sur d'autres initiatives importantes plutôt que de le négliger au profit de questions partisanes? Il est temps de mettre de l'ordre dans nos priorités. Le député pourrait-il cesser de faire perdre son temps à la Chambre et commencer à s'occuper du projet de loi à l'étude?

M. Benoit: Monsieur le Président, le député a dit que le temps de la Chambre avait été utilisé à des fins partisanes. Si ce n'est pas la déclaration la plus sectaire qu'on puisse trouver, je me demande ce qui peut l'être.

C'est un triste jour dans l'histoire de la Chambre que celui où le député dit qu'il est sectaire de demander la suppression des barrières au commerce interprovincial. C'est une question qui intéresse tous les Canadiens. Comme je l'ai déjà expliqué, nous perdons 200 000 emplois, de 6 à 10 milliards de dollars et 3 500 $ par famille parce qu'il ne se fait rien dans ce dossier. Au cours de la semaine de la famille, j'aurais souhaité que le député le reconnaisse et dise que, effectivement, la question est importante.

L'accord à l'étude est important aussi. Nous l'appuyons. Nous faisons tout pour qu'il soit accepté. Ce que dit le député ne tient pas debout.

L'importance relative de cet accord, qui représente des échanges d'un demi-milliard de dollars, est minime, comparée à celle des échanges intérieurs, évalués à 146 milliards. On ne saurait exagérer l'importance de la suppression des barrières au commerce intérieur. Il ne s'agit pas d'une question partisane, et le député n'aurait pas dû essayer de la faire passer pour telle.

M. Szabo: Monsieur le Président, je voudrais contester les affirmations du député. Je n'ai pas critiqué l'importance du commerce interprovincial et de la suppression des barrières commerciales. Il ne s'agit toutefois pas d'une entente bilatérale. Il y a dix provinces et deux territoires au Canada.

Le député a déformé mes propos. Je réitère ce que j'ai dit. Le projet de loi dont nous sommes saisis est une bonne chose pour le Canada. Il constitue un autre exemple de l'importance des ententes bilatérales et servira de fondement au développement de nouvelles relations commerciales qui profiteront à tous les Canadiens.

Je répète au député qu'il importe maintenant d'adopter rapidement ce projet de loi pour pouvoir consacrer plus de temps à des questions très importantes comme les accords sur le commerce interprovincial.

M. Benoit: Monsieur le Président, je constate avec plaisir que le député a bien reconnu l'importance de la suppression de ces barrières au commerce interprovincial. J'espère seulement qu'il pourra exercer des pressions sur le ministre de l'Industrie et d'autres membres du Cabinet pour qu'ils s'occupent de cette question.

Le député a dit, à juste titre, qu'il ne s'agissait pas d'une question bilatérale. En fait, le commerce interprovincial est du ressort du gouvernement fédéral, aux termes des articles 91, 92 et 121 de la Constitution. Il incombe clairement au gouvernement fédéral de veiller à ce qu'aucune barrière au commerce interprovincial ne soit érigée et à supprimer celles qui le sont.

(1205)

Cette obligation a été négligée par les gouvernements libéraux et conservateurs depuis plus de 125 ans. Il existe toutes sortes de barrières commerciales entre les provinces, barrières qui sont à l'origine du problème observé ici même à Ottawa et de celui mettant aux prises le Nouveau-Brunswick et la Colombie-Britannique. Ce genre de problème menace de faire éclater le pays.

Pour que le pays reste uni, nous devons favoriser l'harmonie entre les provinces sur le plan économique. Nous n'y parviendrons que si le gouvernement fédéral arrête de négliger les responsabilités que lui confère la Constitution. Il doit faire preuve de leadership


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dans cette affaire en supprimant les barrières au commerce interprovincial.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à mon collègue, le député de Végréville.

Au cours de son exposé, des libéraux ont demandé ce que son discours sur les barrières commerciales intérieures avait à voir avec l'accord de libre-échange Canada-Israël. À mon avis, il existe un lien étroit entre cette question et les accords de libre-échange commerciaux, bilatéraux et multilatéraux.

Le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a étudié les raisons pour lesquelles les petites et moyennes entreprises n'exportent pas. Pour vous donner une idée, disons qu'une centaine d'entreprises canadiennes sont à l'origine de 80 p. 100 de nos exportations. C'est triste à dire, mais nous ne donnons pas aux petites et moyennes entreprises la possibilité d'explorer ce très important secteur de croissance. L'une des principales raisons que ces entreprises mentionnent pour expliquer leur non-participation dans ce secteur, c'est qu'elles ne peuvent bâtir des économies d'échelle au Canada à cause des barrières commerciales restrictives dans notre pays. Cela les empêche de connaître une croissance suffisante qui leur permettrait de se lancer dans des activités commerciales internationales.

Mon collègue, le député de Végréville, croit-il que cela nuit beaucoup à la capacité des entreprises canadiennes d'accéder au marché des exportations?

M. Benoit: Monsieur le Président, il y a quelques semaines, on a demandé à un Canadien bien connu quel était le principal obstacle au commerce international. Cet éminent Canadien, le député de Peace River qui vient de poser la question, a dit que le principal facteur qui empêche les entreprises canadiennes de faire des affaires dans le monde entier, c'est l'absence de libre-échange interprovincial. Le député a déjà expliqué sommairement pourquoi.

Certaines entreprises canadiennes doivent pouvoir connaître une croissance. Elles doivent bénéficier d'économies d'échelle qui leur permettront d'être concurrentielles sur le marché international. Souvent, elles ne peuvent connaître cette croissance lorsqu'elles mènent leurs activités à partir d'une province. Les barrières au commerce interprovincial sont tellement nombreuses qu'elles empêchent les entreprises canadiennes de connaître la croissance qui leur permettrait de réussir sur la scène commerciale internationale.

C'est presque incroyable. La situation est telle que des gens d'affaires me disent qu'il est plus facile pour eux de faire affaire avec certains États américains qu'avec d'autres provinces. Certains m'ont dit ceci: «Nous déménageons. Nous le faisons à contrecoeur. Nous aimons ce pays, mais nous déménageons parce que si nous faisons nos affaires à partir des États-Unis, nous avons alors un libre accès à toutes les provinces canadiennes et nous n'avons pas à franchir tous les obstacles qu'il nous faudrait surmonter si nous menions nos affaires à partir d'une province canadienne.» C'est triste à dire, mais c'est la vérité.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je prends la parole pour appuyer mes collègues et le gouvernement en vue de l'adoption de ce projet de loi, qui, je crois, favorisera les échanges commerciaux entre les deux pays et, de façon générale, servira les intérêts des Israéliens et des Canadiens.

Toutefois, je veux aborder deux objections qui sont normalement soulevées chaque fois que des accords bilatéraux de libre-échange sont conclus entre des États ou entre des régions.

(1210)

La première de ces objections, c'est que de tels accords détournent les ressources de l'objectif ultime qu'est le libre-échange universel, ce qui est vrai dans un sens. Aucun gouvernement n'a à sa disposition un nombre infini d'experts capables de mener des négociations commerciales. À mon avis, la situation idéale serait que toutes les barrières commerciales entre tous les pays soient éliminées.

Cependant, je crois que ces deux objectifs, soit des réductions tarifaires bilatérales et des réductions tarifaires universelles, ne sont pas incompatibles. Par conséquent, même si je préférerais le libre-échange universel dans un monde parfait, je suis satisfait que les négociations relatives à l'Accord de libre-échange Canada-Israël n'aient pas ralenti les efforts en vue d'éliminer les barrières commerciales dans le monde entier par l'entremise de l'Organisation mondiale du commerce.

Toutefois, il y a une autre objection très intéressante et très importante qui est souvent soulevée relativement aux accords bilatéraux. Elle remonte à l'après-guerre, lorsque le Club de Rome a mené à l'intégration des économies européennes. Cette objection est fondée sur un argument contre-intuitif très subtil, mais intéressant.

Si le libre-échange est bon, est-il possible que le libre-échange entre deux pays seulement ou à l'intérieur d'une région puisse en fait être mauvais et réduise la production et le bien-être de la population à l'échelle mondiale? C'est une théorie étrange qui a été développée par Jacob Viner dans les années 1930. Elle a presque menacé de paralyser toute la recherche économique. Nous vivons dans un monde plein de règlements, de droits de douane et d'impôts, qui nuisent tous à l'allocation libre et efficiente des ressources, comme ce serait le cas dans une économie entièrement libre. Pourtant, les gens ont longtemps pensé que, si nous éliminions ces barrières lentement et graduellement, une à la fois, pour aller vers une économie entièrement libre, nous serions sur la voie d'une allocation plus efficiente des ressources et, par conséquent, d'une augmentation des niveaux de vie dans le monde.

Cependant, comme Viner l'a signalé, ce n'est pas nécessairement le cas. Son argument était le suivant. Il l'a exposé dans le contexte du commerce entre deux pays européens, mais je vais me servir du cas d'Israël comme exemple. Supposons que, dans le moment, les droits de douane auxquels sont assujetties les importations israéliennes en provenance du Maroc et du Canada sont les mêmes.


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Comme les coûts de production d'un produit particulier sont moindres au Maroc, Israël importe ce produit du Maroc et non du Canada. Si les droits de douane israéliens sur ce produit sont abolis pour les producteurs canadiens, il est possible que les acheteurs israéliens s'approvisionnent au Canada plutôt qu'au Maroc.

Par définition, si, lorsque le Maroc et le Canada payaient les mêmes droits de douane, le Maroc était le lieu de production le plus économique, celui qui servait le mieux le monde et où Israël pouvait s'approvisionner au meilleur prix, en déplaçant la production vers le Canada, le monde subit une perte d'efficience. On appelle ce phénomène un détournement des courants commerciaux. C'est un aspect négatif de l'accord bilatéral réduisant les droits de douane entre le Canada et Israël.

(1215)

Évidemment, la question a une autre dimension. Avec la réduction des droits de douane, il se peut qu'un produit qui n'était auparavant fabriqué qu'en Israël et qui n'était pas échangé entre les deux pays soit dorénavant fabriqué au Canada.

Je répète. Il se peut qu'après l'abaissement des barrières commerciales, des produits qui n'étaient auparavant pas échangés entre le Canada et Israël le soient. C'est-à-dire qu'un produit fabriqué à grands frais en Israël, mais protégé par les droits de douane, pourrait bien être produit à moindre frais au Canada et expédié en Israël. On dit que c'est là un avantage du libre-échange.

Mais une question se pose: les avantages de l'accroissement des échanges l'emportent-ils sur les effets du détournement des courants commerciaux? Les seuls arguments logiques ne permettent pas de répondre à cette question.

On comprend dès lors pourquoi les économistes ne savaient plus où donner de la tête dans l'après-guerre. Ils ne pouvaient plus se prononcer de façon catégorique sur les avantages de quelque forme que ce soit de déréglementation, comme l'élimination des barrières tarifaires, à défaut de pouvoir s'appuyer sur des exemples pratiques démontrant les perturbations créées ou les avantages produits.

L'examen de l'expérience de la Communauté économique européenne démontre que les avantages de l'accroissement du commerce l'ont nettement emporté sur les inconvénients du détournement des courants commerciaux.

Un de mes étudiants, à l'Université Simon Fraser, a rédigé sa thèse de doctorat sur le thème suivant: le gouvernement du Pakistan bénéficie-t-il davantage de la croissance accrue que connaît l'économie européenne, par suite de la création du Marché commun et de l'abolition des barrières tarifaires entre l'Allemagne, la France et l'Italie, que du fait qu'une partie de ses exportations vers l'Allemagne ait été remplacée par des exportations venant précédemment de la France?

Une étude approfondie de la structure des échanges a montré que la création d'échanges comporte ordinairement plus d'avantages que le déplacement des échanges. Je suis personnellement convaincu que ce sera le cas en Israël, comme ce fut le cas en Europe et dans presque tous les autres pays étudiés.

Cet effet est encore plus marqué si, parallèlement, les barrières commerciales sont abolies, des échanges commerciaux sont créés et la richesse s'accroit. Les pays qui s'enrichissent du fait d'une distribution plus efficace des richesses accroissent leurs échanges commerciaux. Cet effet dynamique de la création d'échanges commerciaux comporte des avantages qui dépassent de loin l'incidence d'un déplacement des échanges.

Je crois qu'il subsiste néanmoins des problèmes. J'ai d'ailleurs soulevé la question auprès du personnel des Affaires étrangères, au cours d'une séance d'information sur le projet de loi. La loi devrait comporter des dispositions très rigoureuses concernant l'attestation de l'origine des biens échangés.

Par exemple, si un accord de libre-échange lie Israël et le Canada mais qu'aucun accord semblable n'existe entre le Pakistan et le Canada, Israël pourrait recevoir des produits du Pakistan en transit sur son territoire et les envoyer au Canada pour soustraire ces produits aux restrictions imposées au Pakistan par le Canada. Personnellement, je pense que nous sommes tellement riches qu'on devrait éliminer toutes les barrières.

(1220)

Nous devons faire face au fait que, il y a plusieurs années, cette Chambre a, dans sa sagesse, dressé des barrières au commerce avec le Pakistan. Nous devons nous assurer que ces barrières soient maintenues et qu'elles ne soient pas contournées subrepticement en se servant d'Israël comme base d'expédition. Par conséquent, il faut mettre en place un mécanisme bureaucratique pour nous assurer que tous les produits exportés d'Israël au Canada sont bien des produits israéliens.

À priori, ça semble assez facile. Toutefois, la question est celle-ci: qu'est-ce qui se passe si une chemise arrive du Pakistan sans boutonnières et sans boutons et qu'une usine en Israël fait les boutonnières, coud les boutons et emballe la chemise? S'agit-il alors d'un produit pakistanais ou d'un produit israélien? C'est l'une des questions qu'il faudra régler. Des règles rigoureuses bien réfléchies doivent être mises en place, codifiées et appliquées en ce qui concerne le niveau de la valeur ajoutée dans un pays qui fait que la chemise en question peut être considérée comme un produit israélien plutôt que comme un produit pakistanais.

Comme nous pouvons le voir, tout ceci est très complexe. Certains produits peuvent venir d'Europe. Il est possible que les intrants entrant dans la fabrication d'un produit ne soient pas seulement pakistanais, mais aussi allemands. Or, nous avons un libre-échange avec l'Allemagne. Il y a toutes ces questions. L'une des choses que redoutent ceux qui sont opposés au libre-échange bilatéral, c'est toute la bureaucratie que ça exige, avec tous ces


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mécanismes d'application et de règlement des différends qui coûtent en effet très cher.

Ce que nous devons faire, c'est éliminer les tarifs discriminatoires qui existent actuellement et en vertu desquels nous accordons certaines concessions à Israël, mais non au Pakistan. Si nous avions fait bénéficier le Pakistan du libre-échange en ce qui concerne ces produits, il n'y aurait pas eu ce problème.

Après avoir examiné tous ces facteurs en cause, je crains l'expansion de la bureaucratie dans le monde, puisque le Canada a des accords bilatéraux non seulement avec Israël mais aussi avec les pays de la communauté européenne et d'Amérique latine, comme le Chili avec l'ALENA. C'est en train de devenir un cauchemar bureaucratique.

Certaines professions influentes ayant de très bons lobbyistes en tireront profit. Il y a les avocats. Il y a les organisations qui garantissent que les règles d'origine sont valables, que c'est souhaitable. Ces organisations vont s'opposer au libre-échange global et diront d'aller de l'avant avec des accords bilatéraux.

Je conteste cette sorte d'arguments et je dis que nous devrions continuer à essayer de conclure autant d'accords bilatéraux de libre-échange que nous pourrons en obtenir. Quand nous les aurons tous, le temps sera peut-être venu de nous interroger sur leur bien-fondé et de passer au libre-échange global. C'est là que je souhaite en venir et j'espère que cet accord est un pas dans la bonne direction.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, j'aimerais demander à mon collègue de Capilano-Howe Sound, qui est économiste, quels seraient les avantages du point de vue économique si on appliquait aux échanges interprovinciaux les principes du libre-échange entre pays? Dans son discours, le député de Végréville a mentionné le protectionnisme qui existe entre les provinces, la création d'emplois et les mérites de l'élimination des obstacles aux échanges interprovinciaux. Le député pourrait-il m'éclairer à cet égard.

(1225)

M. Grubel: Monsieur le Président, c'est une excellente question. Il est absolument ridicule qu'il soit avantageux pour un producteur canadien de s'installer à l'étranger pour avoir plus facilement accès à l'ensemble du marché canadien et à moindre coût que s'il était établi en Ontario ou en Colombie-Britannique. C'est scandaleux. Je ne vois pas en quoi cela peut être dans l'intérêt de qui que ce soit au Canada d'encourager les entreprises à faire ça.

Nous devons unir nos efforts et prendre conscience du fait que tout le monde y perd. Si une entreprise ontarienne spécialisée dans la production d'un bien donné peut le fabriquer à moindre coût et le vendre bon marché au gouvernement québécois, c'est mieux pour nous tous que si c'est un producteur québécois dont les coûts de production sont beaucoup plus élevés qui est choisi pour fournir ledit bien à son gouvernement. Pourquoi? Parce que nous savons qu'il y a au Québec des producteurs spécialisés dont les coûts de production sont inférieurs à ceux de quiconque en Ontario. Donc, si le gouvernement ontarien veut acheter un tel bien, lui aussi est obligé d'acheter le moins cher et non celui qui est produit en Ontario.

Ce serait à l'avantage des Ontariens et des Québécois parce que les biens consommés par leurs gouvernements respectifs seraient, dans la plupart des cas, les moins chers sur le marché. Les répercussions que cela aurait sur l'emploi dans une province seraient égales aux répercussions sur l'emploi dans l'autre province.

Que cette idée simple n'ait pas encore fait son chemin dans l'esprit des politiciens canadiens me dépasse. Et pourtant, depuis trois ans maintenant que je suis ici, je leur en ai souvent parlé.

Le vice-président: Le député possède des pouvoirs magiques que seuls les économistes ont.

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, le député de Capilano-Howe Sound est-il d'avis que le comportement d'un autre pays dans le dossier des droits de la personne devrait avoir une incidence sur la signature d'un accord de libre-échange par le Canada?

M. Grubel: Monsieur le Président, je suis économiste. Je dois dire que les gens invoquent de nombreux autres arguments pour expliquer pourquoi il faut trahir le principe du libre-échange. Il n'y a pas que les droits de la personne. Il y a toute une gamme de motifs. Par exemple, on entend continuellement certains députés affirmer en cette Chambre que nous devons protéger notre culture. La liste est très longue. J'ai toujours été très sceptique quant à la valeur de tels arguments.

Nous venons d'entendre le gouvernement déclarer que nous devrions faire affaire avec Cuba parce que la seule façon de freiner les activités de son dictateur, d'empêcher ce transgresseur impénitent des règles sur les droits de la personne de commettre ouvertement ses crimes, c'est justement d'ouvrir la société grâce au commerce et à l'augmentation des échanges.

(1230)

On critique vivement les Américains parce qu'ils affirment que cette méthode n'a jamais donné, et ne donnera jamais, de bons résultats. Selon eux, la seule chose que Castro comprend, c'est la sanction financière. Qui a raison? Je ne le sais pas. J'ai écouté pendant des heures les sénateurs et les députés américains des deux côtés présenter leurs arguments. Puisque j'ai du mal à trancher la question et à mesurer les arguments, je dis qu'il vaut mieux accepter le libre-échange et laisser les autres éléments se régler d'eux-mêmes.

[Français]

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, j'ai toujours beaucoup de plaisir et d'intérêt à écouter mon collègue de Capilano-Howe Sound sur ses exposés économiques. Tout à l'heure, j'appréciais sa façon d'expliquer que le commerce devrait être basé sur le prix le plus intéressant pour le consommateur. Il disait: «Le gouvernement de l'Ontario devrait, si le prix est plus bas au Québec, acheter au Québec, et réciproquement.»

La question que je désire lui poser est celle-ci: avec l'avènement d'un Québec souverain, maintient-il le même discours?


5352

[Traduction]

M. Grubel: Monsieur le Président, je n'ai peut-être pas toujours raison, mais je suis logique avec moi-même. Sur les questions comme celle-ci, j'aime être logique, naturellement.

À mon humble avis, la meilleure chose que le Québec puisse faire, c'est s'éloigner de son programme actuel, qui est plutôt socialiste, et se rapprocher d'une situation où le rôle du gouvernement serait réduit. Si on me demandait mon avis, je dirais que si demain le Québec devenait le Hong Kong de l'Amérique du Nord, le bien-être monterait en flèche.

Pouvez-vous imaginer ce qui se passerait s'il y avait un taux d'imposition beaucoup plus faible parce qu'on a diminué les services? Pouvez-vous imaginer ce qui se passerait si le Québec avait le taux d'imposition des sociétés le plus bas en Amérique du Nord? Les capitaux se mettraient à affluer pour profiter de ces taux d'imposition réduits et les recettes seraient beaucoup plus élevées qu'au taux actuel. En plus de cela, il y aurait un effet considérable sur l'emploi.

Je ne crains pas, pour le Québec, que le Canada impose des barrières commerciales si le Québec était suffisamment stupide pour choisir la souveraineté, ce que je crains, c'est la tradition française de dirigisme, la tradition française de gros gouvernement où tout peut être arrangé dans l'espoir d'arriver à la perfection.

Je ne suis pas optimiste, je ne crois pas que le Québec choisirait de devenir le Hong Kong de l'Amérique du Nord. Je crains au contraire qu'il choisirait de devenir l'Albanie de l'Amérique du Nord et cela m'attriste et m'inquiète beaucoup.

M. Jim Silye (Calgary-Centre, Réf.): Monsieur le Président, venant de Calgary, je crois à l'économie de marché. Je crois à la libre entreprise. Je crois à la loi de l'offre et de la demande.

Toutefois, il y a beaucoup de provinces dans notre confédération qui semblent favoriser la gestion de l'offre et les tarifs douaniers. Est-ce que le député pourrait me dire quels sont les arguments utilisés par ces provinces qui croient à la gestion de l'offre et aux tarifs pour protéger et préserver ces obstacles à la libre entreprise plutôt que de les supprimer? Quel est l'argument en faveur de leur maintien et est-ce que cela aide les Canadiens ou leur fait du tort?

Le vice-président: Je demanderais au député de Capilano-Howe Sound d'être bref.

M. Grubel: Je n'ai qu'une minute?

Le vice-président: Le député est un excellent économiste et je suis sûr qu'il peut répondre en une minute et demie.

M. Grubel: J'ai un choix, je peux renvoyer mes distingués collègues à un petit livret que j'ai publié sur ce sujet et qui, me dit-on, a été utilisé dans des cours du premier cycle universitaire au Canada. Cela m'a causé pas mal d'ennuis avec les groupes d'intérêt qui pensent que les offices de commercialisation sont une bonne chose pour le consommateur. Du moins, c'est ce qu'ils prétendent.

(1235)

Je ne peux pas croire qu'un système augmente la valeur des fermes et des quotas dans une mesure telle qu'il est maintenant plus coûteux d'acheter le droit de vendre du lait à un prix gonflé que d'acheter la terre, la ferme et les animaux. Il y a quelque chose qui ne va pas.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Une voix: Avec dissidence.

(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.)

* * *

[Français]

LA LOI SUR LA FAILLITE ET L'INSOLVABILITÉ

La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de l'impôt sur le revenu, dont le comité a fait rapport avec des amendements.

DÉCISION DE LA PRÉSIDENCE

Le vice-président: Il y a une motion d'amendement inscrite au Feuilleton des Avis en ce qui concerne l'étape du rapport du projet de loi C-5, Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de l'impôt sur le revenu.

La motion no 1 sera débattue et mise aux voix.

Je vais maintenant soumettre la motion no 1 à la Chambre.

MOTION D'AMENDEMENT

M. Stéphan Tremblay (Lac-Saint-Jean, BQ) propose:

Motion no 1
Que le projet de loi C-5, à l'article 104, soit modifié par substitution, aux lignes 26 à 33, page 62, de ce qui suit:
«104. L'article 177 de la même loi est abrogé.»
-Monsieur le Président, il me fait plaisir de parler aujourd'hui de la Loi modifiant la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, particulièrement de l'article concernant les prêts aux étudiants. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai décidé de porter l'écusson de l'université qui est tout près de mon comté, celle du comté de mon collègue de Chicoutimi, l'Université du Québec à Chicoutimi.

Lorsqu'un particulier déclare faillite, le tribunal prononce habituellement une ordonnance de libération. Cette ordonnance libère le particulier de toutes ses créances, en fin de compte de ses dettes. Toutefois, le paragraphe 178 de la loi, à l'annexe I, prévoit six catégories de créances qui peuvent être libérées par une ordonnance


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de libération. Le failli est donc tenu de rembourser ses créances malgré sa faillite.

L'article 105 du projet de loi ajoute un alinéa à l'article 178 de la loi qui stipule que: «Toute dette ou obligation découlant d'un prêt consenti ou garanti par une loi fédérale ou provinciale sur les prêts étudiants ne peut être libérée lorsque la faillite survient durant les études ou dans les deux ans suivant la fin de ces études.»

Tout le monde sait qu'aller à l'université, actuellement, c'est extrêmement coûteux. Ça augmente constamment. Plus les années vont, plus c'est coûteux pour les étudiants. Ils doivent travailler, avoir un emploi d'été. Jusque-là tout va bien, sauf que parfois, certains étudiants n'arrivent pas à joindre les deux bouts, c'est absolument impossible. Ils n'arrivent pas à rembourser des dettes d'études qui atteignent parfois les 30 000 $. Cela peut même être plus pour les gens qui vivent dans les régions éloignées, qui doivent se déplacer pour aller étudier dans des régions comme Montréal, en plus d'avoir l'appartement à payer et les frais de scolarité. Tout cela est extrêmement coûteux.

(1240)

Lorsqu'un étudiant n'est vraiment plus capable de s'en sortir, il a droit, tout comme les particuliers ou les PME, dans notre société, de faire faillite. Or, ce que la loi dit, c'est qu'ils n'auront plus droit de le faire.

Certains auront tendance à dire: «C'est ça, les étudiants vont aller à l'université, ils vont aller étudier, mais par la suite, quand il sera temps de rembourser leurs dettes d'études, ils pourront envoyer tout ça sous forme de dettes, faire faillite et c'est le gouvernement qui paiera.»

C'est sûr qu'on peut penser cela, mais personnellement, j'ai rencontré des membres d'associations étudiantes au Québec, et ce n'est pas la situation. Ce n'est pas une option valable que de faire faillite. Il ne faut pas penser que, d'un claquement de doigt, on se départit de ses dettes scolaires comme bon nous semble. C'est très délicat. C'est bien certain qu'il y a peut-être de l'abus à certains endroits, comme il y en a partout, mais quand je dis que c'est délicat, c'est parce qu'on parle de l'éducation et quand il s'agit de l'éducation, je ne vois pas cela comme une dépense pour un pays, pour nos deux pays peut-être, mais je vois ça comme un investissement. Mais c'est vrai que ça coûte cher.

Ce projet de loi nous amène certaines craintes. Est-ce que cela pourra entraîner une certaine crainte chez les étudiants de continuer les études postsecondaires? Il y a lieu de se questionner, d'autant plus qu'avant, justement, il y a dix ans, on avait le droit de faire faillite, c'était bien évident. La situation était également bien différente. On sortait de l'université et on se trouvait un emploi beaucoup plus facilement, et à partir de là, on était davantage en mesure de rembourser sa dette.

Or, actuellement, le gouvernement prétend qu'il y a un abus de faillites. Ce n'est pas un abus volontaire, c'est un abus parce qu'on n'a pas le choix, parce que les jeunes, la plupart du temps, lors des faillites, ne sont plus capables de joindre les deux bouts. Alors, cette optique est un peu dommage.

De plus, on sait qu'il y a eu une certaine dissidence dans le groupe de travail qui a fait l'étude de ce projet de loi, notamment sur l'immunité particulière accordée pour les dettes étudiantes et les effets possibles sur l'accès à l'enseignement supérieur, comme je le mentionnais plus tôt.

Donc, pourquoi suis-je contre la proposition du gouvernement? Il est clair que le gouvernement a suivi de façon aveugle la proposition du groupe de travail sans se poser les questions fondamentales sur lesquelles repose cette modification. Un simple impératif financier du gouvernement a primé sur la logique de la proposition.

Est-ce que l'éducation est une dépense ou un investissement? C'est bien certain que lorsqu'on fait la promesse de réduire le déficit, on tente de couper partout, j'en conviens, sauf que couper dans le domaine de l'éducation, actuellement, ou proposer de telles mesures, cela peut ne pas nécessairement avoir de répercussions négatives maintenant et permettre, dans deux ou trois ans, de se péter les bretelles en disant qu'on a réduit le déficit. Sauf que ce qui m'inquiète, et c'est tout à fait légitime à mon âge, je pense, c'est que cela pourra avoir des conséquences négatives à long terme. Quand on dit que l'éducation est un investissement à long terme, c'est là que mes inquiétudes naissent.

De plus, c'est une proposition discriminatoire. Le gouvernement accorde un traitement particulier pour les dettes étudiantes, ce que la loi ne fait pas pour d'autres catégories de dettes gouvernementales similaires. En effet, on peut constater que l'article 178 de la loi contient d'autres catégories de dettes qui ne peuvent faire l'objet de libérations.

Néanmoins, les autres catégories relèvent des cas spéciaux comme les fraudeurs, les condamnés pour des amendes, des mauvais payeurs de pensions alimentaires, des particuliers ayant obtenu des biens sous fausse représentation et les étudiants. Wow! On met les étudiants qui, je crois, sont l'espoir de notre société, dans la même catégorie que les condamnés pour amendes et les mauvais payeurs de pensions alimentaires.

Le gouvernement classe ainsi les étudiants parmi les catégories de particuliers qui, habituellement, ne respectent pas la loi, ne respectent pas les ordonnances des tribunaux. Catégoriser de cette façon les étudiants est complètement inacceptable et discriminatoire.

(1245)

De plus, la proposition est sans étude sérieuse. En fin de compte, ce qu'on a fait, c'est qu'on a regardé les chiffres et on a dit: «Bon, le taux de faillite chez les étudiants augmente, donc, il doit y avoir un abus. On va donc retirer aux étudiants le droit de faire faillite.» On n'a pas vraiment examiné ce qui se passait et le climat économique.

On a blâmé les jeunes en disant qu'ils font souvent des partys, ils vont en voyage, etc. Ce ne sont pas tous les étudiants qui sont dans cette situation. Oui, il y a des étudiants qui sont à l'aise, qui vont à l'université avec l'auto de leurs parents et qui n'ont aucun problème à fréquenter l'université. Mais ce qui m'inquiète, ce sont ceux pour qui ce n'est pas le cas et qui seront touchés par cette mesure. On pense qu'il y a des abus, alors on décide de couper l'aide aux étudiants, mais aucune étude ou sondage n'a été effectué pour


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examiner les raisons qui poussent les étudiants ou les diplômés à déclarer faillite.

En regard du taux de chômage et des difficultés économiques chez les jeunes, il est plutôt cynique de prétendre que les étudiants font intentionnellement faillite. Donc, sans étude sérieuse sur les raisons des étudiants ou ceux qui viennent de terminer leurs études de faire faillite, il est tout à fait irresponsable de mettre en vigueur une disposition discriminatoire, injuste et inéquitable sur la simple base d'une augmentation du nombre de faillites chez ceux ayant un prêt étudiant.

C'est une augmentation, d'ailleurs, qui est probablement due à la mauvaise situation économique des jeunes, au taux de chômage élevé chez les jeunes et aux augmentations de frais de scolarité auxquelles les coupures du gouvernement fédéral ne sont pas étrangères. On se souviendra de la réforme Axworthy suite à laquelle je suis personnellement descendu dans la rue pour dénoncer ces mesures. De tout ça, on voit les répercussions.

Je pourrais aussi parler de la dernière question que j'ai posée au ministre du Développement des ressources humaines concernant le Programme Jeunesse. Il restait 60 millions à dépenser et on ne semblait pas trop savoir où, je ne devrais pas dire les dépenser, je devrais plutôt dire, les investir. C'est cette optique qui me porte à me questionner aujourd'hui sur la situation.

À la lumière de ces faits, nous déposons aujourd'hui cet amendement visant à éliminer ce paragraphe. J'espère que le gouvernement ne fera pas la sourde oreille et qu'il demeurera connecté à la réalité. On nous avait dit qu'aller à l'université était une voie d'avenir qui nous permettrait de trouver un emploi, j'en conviens, c'est encore la solution et je la prône. Mais ce n'est plus comme dans le bon vieux temps. Alors que la situation économique est pire, on met davantage de bâtons dans les roues aux étudiants.

À la lumière de ces faits, nous voterons contre ce projet de loi à moins que notre amendement ne soit adopté.

[Traduction]

M. Morris Bodnar (secrétaire parlementaire du ministre de l'Industrie, ministre de l'Agence de promotion économique du Canada atlantique et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député a soulevés des points intéressants dans sa motion. Il a notamment parlé des faillites chez les étudiants et des problèmes qui se posent pour eux. Le gouvernement est très au courant du financement que les étudiants doivent obtenir pendant la durée des études qui les mènent à l'obtention d'un diplôme universitaire. Il arrive souvent qu'ils doivent dépenser de grosses sommes pour y parvenir.

Il n'en reste pas moins que, une fois son diplôme en poche, l'étudiant est mal venu de déclarer faillite pour se débarrasser de sa dette. Une période de grâce est prévue pour les six premiers mois qui suivent la fin des études. Aucun paiement n'est alors exigé. Au bout de ces six mois, si sa situation financière ne lui permet pas de faire des paiements et qu'il répond aux exigences de la loi, l'étudiant peut obtenir une autre période de grâce de 18 mois, de sorte qu'il n'a pas à rembourser son prêt pendant deux années entières.

Selon les statistiques, 70 p. 100 des étudiants incapables de payer déclarent faillite au cours de cette période de deux ans. Ils font faillite à un moment où aucune pression n'est exercée sur eux pour les obliger à rembourser leurs prêts. Ils disposent d'une période de grâce de six mois qu'ils peuvent faire prolonger de 18 mois.

(1250)

L'argument du député est tout à fait fallacieux. Il dit que les étudiants sont confrontés à des difficultés les deux premières années où ils terminent leurs études ou quittent l'université. Ce n'est pas de l'abus intentionnel de la part des étudiants. Mais déclarer faillite au moment où rien ne les oblige à effectuer des paiements, c'est une autre paire de manches. Voilà pourquoi il faut une période de deux ans avant qu'un étudiant ne puisse déclarer faire faillite. C'est pour cette raison qu'on a structuré les choses de cette façon dans le projet de loi.

Le député a dit que le gouvernement devait rester en contact avec la réalité. C'est exactement ce que nous faisons. La réalité, c'est que les étudiants ne devraient pas déclarer faillite et se libérer de l'obligation de rembourser leurs prêts, quand aucune pression n'est exercée sur eux pour qu'ils paient. Rien ne les force à faire des paiements durant la période de deux ans en question. Le fait est qu'ils n'ont pas à déclarer faillite pour s'en sortir. Nous mettons les choses au point.

Il est intéressant de remarquer que l'opposition à cette partie du projet de loi ne vient pas des étudiants, mais de nos vis-à-vis. Les étudiants n'ont rien contre cette période de deux ans et ils ne se sont pas élevés contre cette exigence au comité.

Je crois que de nombreux étudiants sont conscients de la réalité. Ils savent qu'ils ont certaines obligations. Beaucoup d'entre eux qui sortent de l'université avec un diplôme peuvent compter sur l'un des meilleurs actifs qu'on peut avoir, ce diplôme qui leur ouvre la porte à des emplois. Il serait tout à fait injuste de leur donner la possibilité de se libérer d'une dette de ce genre, alors qu'ils ne subissent aucune pression financière.

De plus, l'amendement abrogerait l'article 177 de la loi. Il précise que, lorsqu'on signe un contrat de mariage frauduleux, le tribunal peut refuser de libérer un failli de ses obligations. Permettez-moi de vous lire certains passages de l'article 177: «Si le disposant devient en faillite et si le tribunal juge que cette disposition, ce contrat[. . .] a été fait dans le dessein de frustrer ou de retarder ses créanciers[. . .] le tribunal peut refuser ou suspendre une ordonnance de libération ou accorder une ordonnance conditionnelle, de la même manière que dans le cas où le failli s'est rendu coupable de fraude.»

Le député ne veut certainement pas qu'on supprime cette disposition. Face à des actions frauduleuses de ce genre, les tribunaux


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devraient certes pouvoir empêcher l'individu en cause d'agir dans le but de frustrer ou de retarder ses créanciers légitimes.

La motion du député supprimerait cette condition. Cela serait tout à fait injuste si le débiteur pouvait faire faillite mais qu'il aurait pris des dispositions frauduleuses dans le cadre d'un contrat de mariage simplement pour frustrer ses créanciers. Ce n'est pas ce que nous voulons voir dans la Loi sur la faillite, dans nos textes juridiques.

Ce projet de loi va empêcher que cela ne se produise. Il va prévenir des actions frauduleuses comme celle-ci. De plus, la Loi sur la faillite va faire en sorte que les étudiants qui ne sont pas soumis à des pressions financières ne pourront pas déclarer faillite au cours des deux premières années suivant la fin de leurs études.

Je ne devrais pas m'exprimer en termes aussi catégoriques, car les étudiants peuvent déclarer faillite durant les deux années en question. Il ne serait toutefois pas possible qu'ils se libèrent de leurs prêts s'ils déclarent faillite. Ils peuvent avoir d'autres dettes, et je n'ai rien contre. Ils peuvent se libérer de celles-là, mais pas de leur prêts étudiants.

(1255)

Pour les raisons que j'ai signalées, en parlant plus particulièrement du contrat de mariage frauduleux et de l'article 177 qui permettra aux tribunaux de rejeter les dispositions en question, et pour les raisons reliées aux prêts étudiants que j'ai exposées à la Chambre, nous sommes opposés à cette motion. Nous croyons qu'elle est fallacieuse et qu'elle ne devrait pas être adoptée.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, je crois avoir besoin de vérifier les faits ici ce matin.

Le Bloc québécois présente un amendement visant à traiter du recours frauduleux au mariage, puis le premier discours porte sur les prêts aux étudiants et sur les faillites d'étudiants. Comme le secrétaire parlementaire l'a mentionné, l'amendement qui concerne la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies et la Loi de l'impôt sur le revenu traite de la représentation frauduleuse du mariage. L'amendement propose que le projet de loi C-5 abroge l'article 177 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

Le Parti réformiste s'oppose à cet amendement du Bloc. Avant d'expliquer pourquoi nous nous y opposons, il est important, à mon avis, que la Chambre comprenne l'objet de l'article 177 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. L'article 177 expose deux situations qui pourraient faire en sorte qu'un tribunal refuse ou suspende une ordonnance de libération ou accorde une ordonnance conditionnelle de faillite.

Ces situations se présentent tout d'abord si le failli a disposé de biens en fiducie avant le mariage ou en considération du mariage, lorsqu'il n'est pas, au moment où est faite la disposition, en état de solder toutes ses dettes sans l'aide des biens compris dans la disposition et, ensuite, si le failli a conclu une convention ou passé un contrat en considération du mariage en vue de la disposition future des biens qui devraient servir de garantie aux créanciers.

Si le tribunal juge que cette disposition, cette convention ou ce contrat a été fait dans le dessein de frustrer ou de retarder ses créanciers, ou était injustifiable compte tenu de l'état des affaires du débiteur à la date de la disposition, le tribunal peut refuser ou suspendre une ordonnance de libération ou accorder une ordonnance conditionnelle.

Cela me semble tout à fait convenable. Si nous abrogeons l'article 177, nous laissons à des gens la possibilité de se rendre coupables de fraude ou de jouer un double jeu avec leurs créanciers. En fait, est-ce que nous ne sommes pas en train de dire que, si nous abrogeons l'article 177, ce comportement frauduleux sera acceptable, que notre société l'accepte?

Je doute qu'il y ait même un député qui approuve un tel comportement. La fraude est un crime. Je crois que nos lois devraient de plus en plus faire valoir la manière franche et honnête de faire des affaires, pour que tous les Canadiens la comprennent, l'apprécient et l'adoptent.

On peut empêcher les gens de commettre des actes frauduleux en les dissuadant. Par la dissuasion, on empêche la répétition de ces actes frauduleux, parce que lorsque ceux qui envisagent de commettre de tels actes réfléchissent aux conséquences, ils décident que la meilleure solution consiste à acquitter leurs engagements.

L'article 177 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité dissuade ceux qui seraient tentés de traiter injustement leurs créanciers en recourant aux circonstances mentionnées dans de cette disposition de la loi. Personne ne devrait recourir au mariage pour échapper à un créancier. L'article 177 concorde avec d'autres articles de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité en ce qui a trait aux transactions qui ont lieu avant la faillite.

Par exemple, selon le paragraphe 91(1) de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, toute disposition de biens faite dans l'année qui précède une faillite reste opposable au syndic. Aux termes du paragraphe 91(2), toute disposition faite dans les cinq ans qui précèdent la faillite est inopposable au syndic, si ce dernier peut prouver que le disposant a dû inclure des biens dans la disposition pour payer ses dettes à ce moment-là.

(1300)

Ces dispositions ainsi que celles de l'article 177 traitent de circonstances où les débiteurs transfèrent des biens pour tromper leurs créanciers, les faire attendre ou s'y soustraire.

Si nous abrogeons l'article 177 de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, que faut-il faire de ces autres articles? Ce serait vraiment deux poids deux mesures. Il me semble que cela revient à recommander d'utiliser le mariage comme un moyen de protéger injustement des biens d'une faillite. Cela ne peut cependant pas se faire dans les circonstances décrites aux paragraphes 91(1) et 91(2).

L'article 177 est nécessaire pour empêcher qu'on se serve mal à propos du mariage pour commettre une fraude. Il est également nécessaire pour préserver le principe selon lequel on ne saurait


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tolérer quelque fraude que ce soit dans quelque circonstance que ce soit. L'article 177 laisse cependant une certaine discrétion au tribunal à qui il appartient de décider.

Comme le savent les députés et plus spécialement les membres du Comité de l'industrie, je suis de ceux qui croient que nos lois ne devraient pas toujours laisser de discrétion au ministre ni au surintendant des faillites. J'aimerais qu'on rende ces dispositions plus rigoureuses, mais le comité de la Chambre en a décidé autrement. Je suis cependant en faveur de cet aspect discrétionnaire de l'article 177.

Il y a des circonstances où le tribunal peut juger que ce que le débiteur a fait est parfaitement juste. Cette discrétion devrait cependant être laissée aux tribunaux, et l'article 177 devrait rester dans la loi.

Le vice-président: La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le vice-président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le vice-président: À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le vice-président: Convoquez les députés.

Mme Catterall: Monsieur le Président, je demande que le vote soit reporté à lundi, à la reprise des travaux, à la fin de la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles.

Le vice-président: Le vote est donc reporté à lundi, à la reprise des travaux, à la fin de la période réservée à l'étude des initiatives ministérielles.

[Français]

M. Laurin: Monsieur le Président, nous sommes d'accord, sauf qu'on ne peut reporter le vote deux jours plus tard; je pense qu'il faut tout simplement le reporter à la prochaine séance de la Chambre.

[Traduction]

Le vice-président: Si le député discute de cela avec son collègue, je suis sûr qu'il n'y aura pas de problème.

[Français]

On peut le faire rapidement.

[Traduction]

Il est donc entendu qu'il y a accord général pour que le vote soit reporté au lundi 21 octobre, jour de la reprise des travaux de la Chambre.

* * *

L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

L'ordre du jour appelle: Initiatives ministérielles

19 septembre 1996-Le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire-Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire du projet de loi C-60, Loi portant création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence.
L'hon. Douglas Peters (au nom du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire), Lib.) propose:

Que le projet de loi C-60, Loi portant création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence, soit renvoyé au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
(1305)

M. Jerry Pickard (secrétaire parlementaire du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole au sujet du projet de loi C-60, Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

La mise sur pied de cet organisme illustre bien l'engagement du gouvernement à assurer de meilleurs services aux Canadiens, à garantir la sécurité des aliments et à maintenir la qualité au premier rang des priorités.

Une approche intégrée au niveau fédéral, telle que la prévoit le nouveau projet de loi, améliorera notre efficience et notre efficacité globales. Le Canada jouit d'une enviable réputation internationale d'excellence dans la production et la fourniture de certains des aliments les plus sûrs et de la meilleure qualité qui soient dans le monde. Cette réputation repose en grande partie sur nos services d'inspection et de quarantaine aux normes exigeantes.

Néanmoins, à cause de pressions de plus en plus vives, notamment des importations plus abondantes, l'évolution des marchés d'exportation, les nouvelles technologies, un rythme de production accéléré et une austérité budgétaire qui dure, il nous faut trouver une nouvelle formule plus efficace, plus scientifique et plus compatible avec les pratiques internationales, pour assurer l'inspection des aliments et appliquer les programmes relatifs à la santé des animaux et des végétaux.

De nos jours, le quart de la production alimentaire du Canada est exporté et le cinquième de notre consommation est importé. Pour garantir aux Canadiens des denrées alimentaires saines, nous sommes partie à plus d'un millier d'accords, dans le monde entier, sur l'inspection et la mise en quarantaine.

Au Canada même, tout un réseau de responsabilités s'est mis en place au fil des ans qui portent sur la production, la fabrication, la distribution, la vente au détail, l'importation et l'exportation des denrées alimentaires et touchent l'industrie à tous les niveaux ainsi que le gouvernement.


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À l'échelon fédéral, trois ministères ont un rôle à jouer: Agriculture et Agroalimentaire Canada, Santé Canada et Pêches et Océans Canada. Le dépôt de ce projet de loi représente une mesure novatrice que prend le gouvernement pour corriger la situation.

Comme le ministre des Finances l'a annoncé dans le budget de 1996, le projet de loi C-60 prévoit la création d'une agence canadienne d'inspection des aliments qui sera responsable de tous les services d'inspection, de quarantaine et de protection de la santé animale et végétale relevant du gouvernement fédéral.

Cette agence, qui pourrait ouvrir ses portes dès le début de 1997, aura le statut d'un organisme indépendant relevant du ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Les responsabilités associées à l'établissement des normes concernant la salubrité des aliments et à la vérification de l'application de la réglementation en la matière seront fusionnées et améliorées au sein de Santé Canada. Cette réorganisation comportera de nombreux avantages pour tous les intervenants du secteur alimentaire: les consommateurs, les manufacturiers et les gouvernements.

Elle réduira le double emploi et les chevauchements entre les ministères fédéraux et ouvrira la voie à un service mieux intégré d'inspection et de quarantaine au Canada. Il y aura un guichet unique pour les services d'inspection des aliments et de quarantaine, ce qui permettra au gouvernement de mieux satisfaire les besoins de ses clients. Il sera ainsi possible de continuer de préserver la salubrité des aliments au Canada et la réputation que nous avons acquise au niveau international grâce à la salubrité et à la qualité de nos aliments. On pourra ainsi utiliser plus facilement des techniques d'inspection et de quarantaine plus efficaces et plus modernes et poser les bases qui donneront au Canada un meilleur accès aux grands marchés internationaux de l'importation.

À l'heure actuelle, plus de 5 000 travailleurs sont associés aux services fédéraux d'inspection des aliments et aux programmes de protection de la santé animale et végétale, qui coûtent plus de 400 millions de dollars par année. En fusionnant ces services au sein d'une même agence, on économise 44 millions de dollars par année et on facilite la vie aux représentants de l'industrie, aux autorités provinciales et aux consommateurs qui doivent aborder avec le gouvernement du Canada des questions relatives à l'inspection des aliments et à la quarantaine.

Permettez-moi de rappeler que la salubrité des aliments demeurera notre grande priorité. En fait, toute cette réorganisation repose sur un principe fondamental: la salubrité des aliments ne peut pas être et ne sera jamais menacée. Cela signifie que les Canadiens pourront compter sur des normes très élevées et l'application rigoureuse de la réglementation concernant la salubrité des aliments.

Par ailleurs, la nouvelle agence rendra possible l'application plus uniforme de la réglementation fédérale concernant l'inspection des aliments et la quarantaine et ce, dans l'ensemble du pays. L'agence aidera également les entreprises du secteur de l'alimentation à élaborer une analyse des risques et un point critique pour la maîtrise des risques pour le système d'analyse des risques-point critique pour leur maîtrise ou HACCP.

(1310)

Le Canada est un chef de file dans la mise en oeuvre du HACCP, qui est reconnu partout dans le monde comme le meilleur système visant à garantir la salubrité des produits alimentaires. Notre ministère dispose d'un fonds d'adaptation de 11 millions de dollars pour aider les petites et moyennes entreprises à s'adapter au système.

En continuant, dans le cadre de la nouvelle agence, d'adopter des systèmes scientifiques avancés comme le HACCP, nous obtiendrons une plus grande assurance de la salubrité des aliments et accroîtrons l'accès aux marchés internationaux pour les entreprises canadiennes. Cet accès accru aux marchés est un autre avantage très important que procurera la nouvelle agence.

Grâce à des accords de libéralisation des échanges comme l'ALENA et celui sur l'Organisation mondiale du commerce, et par suite de l'augmentation rapide de la population et de la hausse des revenus dans les régions en développement comme l'Asie-Pacifique, le commerce international des produits alimentaires est en pleine expansion. L'Agence canadienne d'inspection des aliments fera en sorte que les exportateurs de divers produits alimentaires soient en mesure de traiter avec un seul organisme pour l'inspection et les services de quarantaine.

En favorisant l'harmonisation des normes internationales, l'agence contribuera à accroître la compatibilité des exigences en matière d'inspection alimentaire et de quarantaine et à réduire la possibilité de l'érection de barrières commerciales artificielles pour des raisons sanitaires et phytosanitaires, un problème croissant pour les exportateurs canadiens.

Ces modifications des services fédéraux d'inspection alimentaire et de quarantaine sont le fruit de deux années de consultations poussées auprès de l'industrie et des provinces. Plus de 60 000 bulletins et de feuilles de renseignements ont été distribués aux intéressés d'un bout à l'autre du pays. Le secteur privé et les provinces ont largement appuyé la création de la nouvelle agence proposée.

À notre réunion annuelle du mois de juillet, les ministres de l'Agriculture du gouvernement fédéral, des provinces et des territoires ont donné leur accord unanime non seulement à l'établissement de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, mais encore à la mise sur pied d'un système d'inspection des aliments encore plus intégré qui compterait sur la participation de tous les paliers de gouvernement et respecterait les compétences pertinentes.

Un groupe de mise en oeuvre du système canadien d'inspection des aliments, groupe composé de représentants du gouvernement fédéral, des provinces, des territoires et des municipalités, se penche actuellement avec l'industrie sur d'autres questions dont le code national sur les produits laitiers; un code sur les aliments vendus au détail; un code sur la viande, la volaille et le poisson; et un protocole sur les méthodes de transport.

En juin dernier, les premiers ministres ont signalé que les efforts déployés pour la création d'un système canadien d'inspection des aliments, une des huit mesures adoptées pour améliorer et renforcer l'efficacité de notre fédération canadienne, étaient un excellent exemple des mesures que nous prenons pour renouveler la fédération canadienne et pour améliorer la collaboration entre les provinces et le gouvernement fédéral, dans l'intérêt de tous les Canadiens.

Alors que nous continuons de progresser dans la réorganisation des services canadiens d'inspection des aliments et de quarantaine, exercice depuis longtemps nécessaire, notre défi et notre engage-


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ment consistent à assurer, au Canada, le maintien de normes élevées quant à la salubrité et à la qualité des aliments, tout en améliorant l'efficacité de ces services et en réduisant leurs coûts pour les contribuables.

À mon avis, la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments sera un pas important dans cette direction.

[Français]

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac, BQ): Monsieur le Président, le projet de loi C-60 ou Loi portant création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments et modifiant ou abrogeant certaines lois en conséquence que nous abordons cet après-midi renferme certains éléments positifs.

L'idée de créer une agence nationale est bonne en soi. On pourra économiser en limitant les dédoublements de services de trois ministères, à savoir: Agriculture et Agroalimentaire Canada, Santé Canada et Pêches et Océans Canada.

Depuis longtemps, nous, du Bloc québécois, préconisons la fin des dédoublements de services au sein des différents ministères. Toutefois, en raison de la stratégie adoptée par les libéraux de renvoyer au comité ce projet de loi avant la seconde lecture ne nous permet pas de formuler des amendements constructifs au projet de loi C-60 à ce stade-ci.

(1315)

Par exemple, il semble y avoir du patronage latent au niveau des nominations à la direction de l'agence. En effet, à l'article 5, on parle de la nomination du président et du premier vice-président par le gouverneur en conseil.

Tout le monde sait ce que cela veut dire lorsque quelqu'un est nommé par le gouverneur en conseil. Ce sont les amis du régime, un peu comme l'ex-ministre, André Ouellet, par exemple, on peut le nommer puisqu'il a quitté cette Chambre, a été nommé à un poste de direction avec un salaire faramineux. Ça manque de transparence.

Il faudrait donc que les nominations soient effectuées selon les règles de la Chambre et étudiées au Comité de l'agriculture et de l'agroalimentaire. Il est nécessaire que le personnel soit engagé sur une base de compétence, et non sur une base de partisanerie. Ce n'est pas parce que quelqu'un a sa carte de membre du Parti libéral en poche qu'il devient automatiquement compétent. Évidemment, ce n'est pas parce qu'il a sa carte de membre du Parti libéral en poche qu'il est incompétent, mais la première ne devrait pas être une condition sine qua non.

Donc, le Bloc québécois ne peut cautionner, dans un premier temps, un nid de patronage, et, dans un deuxième temps, cela signifierait que nous acceptons l'ingérence du gouvernement fédéral dans le domaine des compétences provinciales.

Toujours sur les nominations politiques, on peut lire ceci à l'article 10 du projet de loi C-60:

10.(1) Est constitué un comité consultatif formé d'au plus douze membres nommés à titre amovible par le ministre pour un mandat renouvelable d'au plus trois ans.
Encore une fois, cet article est inacceptable, et pour deux raisons. La première est qu'ici encore, c'est le ministre qui nomme les personnes qui vont siéger au comité consultatif. La deuxième raison est que cela fait en sorte que le Québec n'a aucune garantie quant à sa représentation au sein de ce comité consultatif.

Plus loin, on peut lire, aux articles 12 et 13:

12. L'Agence est un employeur distinct au sens de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique.
Par contre, à l'article 13, on mentionne ceci:

13.(1) Le président nomme les employés de l'Agence.
Or, le président est nommé par partisanerie et c'est lui qui va nommer les employés de l'agence. Il faut voir comment se feront ces nominations et si cela entre dans l'ordre des bonnes moeurs politiques.

À l'article 16, on apprend que l'Agence peut acheter des services en dehors de la fonction publique, et ce, notamment dans le domaine des services juridiques.

Évidemment, ces projets de loi sont confectionnés par des avocats, et un bon avocat protège les membres de sa confrérie. Donc, l'organisme pourra, ici, louer des services juridiques comme bon lui semble.

Aux articles 20 et 21, deux dangers peuvent être également soulevés. Le premier, si des ententes fédérales sont conclues, alors, il faut s'assurer que le Québec ne se retrouve pas dans une position où il subventionnera indirectement les services d'inspection des aliments obtenus du fédéral par une ou des provinces.

En effet, si un service est fourni à une autre province par le gouvernement fédéral, il ne faut pas voir que ce soit des deniers publics du Québec pour que le travail soit effectué dans cette province. À cet égard, les contribuables québécois paieraient pour des services dans d'autres provinces.

(1320)

Ici, je pourrais vous donner deux exemples, dont celui de la GRC. Tout le monde sait qu'au Canada, il y a deux provinces qui ont constitué leur propre corps policier, soit le Québec et l'Ontario; l'OPP en Ontario et la SQ au Québec, alors que le gouvernement fédéral, par le biais de la GRC, offre aux municipalités ou encore aux autres provinces le service de la police. Savez-vous, mes chers amis, que le Québec paie une partie de la GRC dans les provinces Maritimes et dans l'Ouest? L'Ontario paie sa quote-part aussi.

Le gouvernement fédéral ne récupère qu'environ 75 p. 100 des vrais coûts aux provinces et aux municipalités pour le service qu'il donne à l'aide de la GRC. Les 25 p. 100 manquants, c'est l'ensemble des provinces qui les paient, dont le Québec et l'Ontario, bien entendu. À cet égard, le Québec paie 24 p. 100 des impôts fédéraux; donc, on peut supposer que nous subventionnons 24 p. 100 des25 p. 100 de la GRC qui oeuvre dans les autres provinces et territoires autres que l'Ontario et le Québec. Voilà un exemple d'injustice.

Tout comme le Québec, qui a su harmoniser sa TPS avec le fédéral il y a déjà quatre ans, le Québec doit payer encore une fois24 p. 100 des 960 millions que le gouvernement fédéral a consentis aux provinces Maritimes pour que celles-ci harmonisent leur taxe de vente provinciale avec la TPS fédérale, alors que nous n'avons eu droit qu'à zéro. Rien pour harmoniser notre taxe de vente québécoise à la TPS fédérale.


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Alors voilà deux exemples d'injustice. Il ne faudrait pas qu'avec l'agence, on soit victime d'une autre injustice.

Deuxièmement, il faut s'assurer que l'article 71 n'ouvre pas la porte à toute autre forme d'ingérence du gouvernement fédéral dans les champs de compétence provinciale. Et la Fédération canadienne de l'agriculture affirme, et je cite: «Le projet de loi C-60 prévoit que la compensation versée aux propriétaires à la suite de l'élimination de leurs troupeaux ou produits, exigée par le ministre aux termes de la Loi sur la santé des animaux, provienne du Trésor.»

Par exemple, si votre troupeau est victime de la Brucellose et qu'on décide d'éliminer votre troupeau au grand complet, il faut que le Trésor public fédéral vous dédommage. Et la FCA va plus loin, puisqu'elle estime qu'on devrait ajouter la mention de compenser à une personne pour les coûts engagés pour le traitement, pour la mise en quarantaine, le nettoyage, le remplacement de propriétés endommagées ou détruites, les frais de reconstruction des stocks, etc., et les inclure dans le texte législatif, que ce soit inscrit à l'article 71. Une telle mesure ferait en sorte que les agriculteurs ne se trouvent pas en situation désavantageuse parce qu'ils déclarent une maladie à l'intérieur de leur troupeau.

Ici, à titre de critique en matière agricole dans ce Parlement, j'ai eu à travailler avec un résidant de la région de Rivière-du-Loup qui avait eu un problème de tremblante du mouton à l'intérieur de son troupeau, et la quarantaine qu'on a imposée à ce troupeau de moutons n'était pas de 40 jours, comme la majorité de nos concitoyens peuvent le penser, mais cette période a duré cinq ans. Pendant cette période de cinq ans, on ne peut pas vendre, on ne peut pas abattre, on ne peut pas manger, on ne peut pas retirer de bénéfices de son troupeau, alors, la très grande majorité des agriculteurs devaient déclarer forfait.

À cet égard, le Bloc québécois soumettra une série d'amendements au projet de loi C-60 en vue de l'améliorer. On va également inviter le parti ministériel à collaborer pour que ce projet de loi soit bénéfique à l'ensemble de la population.

(1325)

[Traduction]

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi.

S'il est adopté, il créera une agence d'inspection des aliments qui devrait, à mon avis, être rationalisée. Ce qui me fait peur, c'est que le ministre de l'Agriculture sera entièrement responsable de l'agence. Étant donné qu'il lui a fallu trois ans pour décider qu'il y aurait un référendum sur la commercialisation de l'orge et que ces trois ans ne lui ont pas suffi pour décider quelle question poser aux agriculteurs, je me demande comment il pourra gérer une grosse agence comme celle qui sera créée et à quel coût.

Lorsque cette agence verra le jour, en 1997, elle comptera 4 500 employés et aura un budget de 300 millions de dollars, ce qui en fera l'une des plus grosses bureaucraties d'Ottawa. C'est beaucoup d'argent pour un organisme de réglementation. Compte tenu de la nécessité de réduire le déficit et de la dette nationale qui s'élève à 600 milliards de dollars, j'imagine que, pour les libéraux, 300 millions de plus ce n'est pas si important que cela.

Les fonctionnaires soutiennent qu'en mettant fin aux chevauchements entre différents ministères dans les domaines de l'exécution, de la gestion des risques, des services de laboratoires, des systèmes informatiques et des communications ils feront économiser 44 millions de dollars par année aux contribuables à compter de 1998-1999. Je suis toujours stupéfait de constater que, lorsqu'on fait ce genre de projection, on s'arrange toujours pour qu'elles se réalisent en manipulant des chiffres, que ce soit par le transfert des coûts à d'autres agences ou autrement. Cependant, le gouvernement n'a pas encore donné le détail du budget de l'agence. C'est assez intéressant.

De plus, aucune décision n'a été prise au sujet des compressions d'effectifs et aucune précision n'a été donnée sur les laboratoires excédentaires de la nouvelle agence. Ces laboratoires ont coûté très cher. On ignore encore quel sort leur est réservé. J'espère que le gouvernement a enfin compris que, s'il a à se dessaisir d'actifs, il doit en obtenir un prix équivalent à leur juste valeur marchande.

Le Parti réformiste est partisan du regroupement et de la rationalisation des activités du gouvernement fédéral, mais nous craignons que le projet de loi fasse bien peu de chose sinon changer des noms et des titres. Le gouvernement devrait plutôt examiner les avantages de la privatisation d'une partie importante des services canadiens d'inspection des aliments, des végétaux et des animaux.

L'harmonisation et la privatisation sont deux de nos grands thèmes depuis trois ans. Nous savons que chaque province a ses propres services d'inspection et qu'il y a toujours des chevauchements entre les deux agences. Il est grand temps que nous comprenions qu'il faut harmoniser, sans quoi les chevauchements augmenteront et nous dépenserons plus d'argent au lieu d'en dépenser moins.

Dans le moment, seulement 40 millions ou 13,3 p. 100 du budget de 300 millions de dollars de l'agence sont récupérables. L'agence prévoit déjà augmenter ce montant à plus de 70 millions. Nous savons qui aura à payer la note. Ce sera le contribuable, le transformateur ou le producteur primaire. Il est extrêmement important que nous commencions à rationaliser et à devenir plus efficients et plus productifs dans ces agences ainsi que dans les secteurs de la transformation des aliments et de la production primaire.

Dans les cas où le Parti réformiste appuie le paiement par l'utilisateur et le recouvrement des coûts, le coût du service doit refléter ce qu'il en coûte vraiment pour offrir le service et non ce qu'il en coûte pour maintenir la bureaucratie gouvernementale. Le projet de loi devrait voir à ce qu'on accorde la plus grande priorité à l'évitement et à la réduction des coûts. Cela est important puisque l'agence que crée ce projet de loi sera chargée d'appliquer et d'administrer plusieurs lois fédérales ayant trait aux aliments et à la santé des animaux et des végétaux, notamment la Loi relative aux aliments du bétail, la Loi sur les engrais, la Loi sur la santé des animaux, la Loi


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sur l'inspection des viandes, la Loi sur la protection des obtentions végétales et la Loi relative aux semences.

(1330)

Ce projet de loi permettra également centraliser tous les pouvoirs en matière d'inspection des aliments au gouvernement fédéral. Le Parti réformiste croit que le gouvernement devrait reconnaître que, comme les provinces offrent déjà beaucoup de ces services d'ins-pection, il devrait plutôt mettre l'accent sur la décentralisation et encourager l'établissement de normes communes d'inspection.

Pour ces raisons, le Parti réformiste s'oppose au projet de loi.

En ce qui a trait aux dispositions précises du projet de loi, nous avons des réserves sur un certain nombre d'entre elles. Certains articles créent des conditions favorables à l'établissement d'un empire.

Aux termes de l'article 5, le gouverneur en conseil nomme le président et le premier vice-président de la nouvelle agence. Ces deux personnes seront responsables des activités courantes de l'agence et conseilleront le ministre sur des questions touchant le mandat de l'agence. Le projet de loi ne contient aucune précision au sujet des qualifications que devront posséder le président et le premier vice-président. Cette situation ouvre la voie au favoritisme politique.

L'article 8 stipule que le président et le vice-président reçoivent la rémunération fixée par le gouverneneur en conseil. Nous ne savons même pas quels seront les honoraires versés pour ces deux postes.

Aux termes de l'article 10, les membres du comité consultatif reçoivent les honoraires fixés par le ministre. Nous ne pouvons pas dire aux contribuables canadiens combien leur coûteront les honoraires de ces personnes.

Le cas de cette agence rappelle celui de la Commission canadienne du blé. Des membres de cet organisme ont reçu des indemnités de départ, mais nous n'en connaissons pas les montants. Certains postes comportent des régimes de pension, mais personne n'en connaît vraiment les coûts. La création de cette agence, qui me fait penser à la Commission canadienne du blé, m'inquiète beaucoup.

Au Manitoba, l'agence d'inspection des aliments est constamment en conflit avec son homologue fédérale. Cette situation nous fait perdre des emplois et des exportations. Prenons, par exemple, le cas d'un petit établissement qui produit de la saucisse dans ma circonscription. Cet établissement peut vendre ses produits partout au Manitoba, mais pas à des organismes fédéraux comme le CN ou les forces armées. Je ne vois pas en quoi ce produit représente un risque pour la santé du personnel de ces organismes fédéraux. Le reste de la population manitobaine en mange et le trouve délicieux. On m'a dit que les organismes fédéraux au Manitoba pourraient économiser un dollar le kilogramme s'ils achetaient la saucisse au Manitoba au lieu de la faire venir d'une autre province.

Si nous voulons être efficients et harmoniser nos activités, nous devons le faire non seulement avec des pays étrangers mais à l'intérieur de nos propres frontières. Nous devons établir un bon rapport coûts-efficacité et faire en sorte que les contribuables et les producteurs primaires y trouvent leur compte. Nous devrions également laisser une chance aux établissements de transformation, car ce sont eux qui créent des emplois. Les petites entreprises sont le vrai moteur de l'industrie.

[Français]

L'hon. Fernand Robichaud (secrétaire d'État (Agriculture et Agroalimentaire, Pêches et Océans), Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole aujourd'hui, au nom du ministre des Pêches et des Océans, dans le cadre de la motion demandant le renvoi devant le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire du projet de loi C-60 sur la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments avant la deuxième lecture.

(1335)

Ce projet de loi marque le début d'un voyage important. Les plans de ce voyage sont en cours d'élaboration depuis le temps où nous préparions le discours du Budget de mars 1996, lorsque notre gouvernement a énoncé pour la première fois son engagement à mettre en oeuvre un agenda visant à trouver des solutions de rechange pour la prestation des programmes, c'est-à-dire trouver le moyen le plus efficient et le moins coûteux pour la prestation des programmes et services.

Ce voyage, qui nous conduira à la création d'une agence unique d'inspection des aliments, regroupant sous un même toit les activités d'inspection des aliments menées jusqu'ici par trois ministères fédéraux différents, constitue une partie importante de cet agenda. Et notre gouvernement connaît certains des ports importants dans lesquels il devra faire escale en cours de route.

[Traduction]

Au Canada, les produits de la pêche comptent pour beaucoup dans les activités nationales d'importation et d'exportation. Outre la quantité considérable de poisson et de produits dérivés que nous consommons au Canada, il existe d'importants marchés à l'étranger pour ces produits canadiens. Le poisson et les fruits de mer pris par des Canadiens sont destinés aux marchés étrangers dans une proportion de 84 p. 100.

De la même manière, il y a des marchés au Canada pour des espèces qui ne vivent pas dans nos eaux. Environ 50 p. 100 du poisson et des fruits de mer que nous consommons au Canada est importé. Pour soutenir ces proportions élevées d'importation et d'exportation et promouvoir la confiance chez nous et à l'étranger dans la qualité du poisson destiné à la consommation humaine, le gouvernement tient à garantir que les politiques d'inspection du poisson conserveront la même importance, sous la direction de cette nouvelle agence, et qu'elles se fonderont sur les mêmes normes sévères que le ministère des Pêches et des Océans applique actuellement.

Pour que tout service d'inspection des aliments réponde aux besoins de ses nombreux groupes de clients, les consommateurs n'étant pas les moindres, il faut que la garantie de sécurité des


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aliments pour tous les Canadiens passe en premier lieu. La nouvelle agence doit reprendre à son compte la réputation d'excellence de nos services d'inspection pour garantir la sécurité des produits consommés par les Canadiens, que ces produits soient d'origine canadienne ou étrangère.

[Français]

Comme nous le savons, étant donné qu'un bon 84 p. 100 des prises des pêches canadiennes est destiné à la consommation étrangère, une nouvelle agence d'inspection devra aussi s'efforcer d'améliorer et de garantir la facilité d'accès des produits canadiens aux marchés étrangers.

Nous devons assurer à nos partenaires commerciaux à l'étranger que les produits canadiens de la mer sont des produits de qualité qui sont conformes à des exigences réglementaires strictes. Cela signifie qu'il faudra continuer l'excellent travail d'inspection du poisson qu'effectue actuellement Pêches et Océans Canada.

Enfin, pour atteindre ces objectifs dans le contexte des restrictions budgétaires, il faudra bien sûr continuer à appliquer une forme quelconque de recouvrement des coûts, afin que ceux qui bénéficient des services d'inspection assument une part de ce qu'ils coûtent.

La nouvelle agence unique d'inspection des aliments, qui verra le jour si le projet de loi est adopté, fait escale dans chacun de ces ports, c'est-à-dire qu'elle tient compte de tous ces besoins en prenant appui sur de nouvelles approches de prestation des services d'inspection, dont bon nombre ont été lancés par le ministère des Pêches et des Océans, et en créant des perspectives d'avenir.

Nous savons tous que le Programme canadien d'inspection du poisson jouit d'une réputation d'envergure mondiale. Il faut rester à la hauteur de cette réputation et nous allons le faire, puisque la nouvelle agence prendra appui sur cette base solide.

Le projet de loi enchâsse des approches politiques comme le Programme de gestion de la qualité et le nouveau Programme de gestion de la qualité pour les importateurs qui se fondent sur le principe selon lequel la sécurité des aliments est la préoccupation première.

(1340)

La nouvelle agence comptera sur un personnel d'inspecteurs du poisson hautement spécialisé qui contrôle à l'heure actuelle les systèmes de gestion de la qualité de l'industrie et en assure l'efficacité.

[Traduction]

La nouvelle agence unique d'inspection des aliments sera aussi innovatrice. Elle créera un régime d'inspection des aliments qui regroupe les activités au niveau fédéral. Elle facilitera l'accès des produits aux marchés étrangers. Elle favorisera la collaboration entre les différents gouvernements au Canada en établissant les équivalences entre les différents programmes et normes. Elle pourra à la fois éliminer les recoupements et les doubles emplois et permettre un service plus efficace et plus efficient. Le gouvernement est tout à fait conscient de la nécessité de maintenir un dialogue continu et ouvert entre les nombreux clients de la nouvelle agence, et ce sera fait.

Comme les Canadiens évoluent et que leurs besoins changent, le gouvernement évolue également pour répondre à leurs nouveaux besoins. Nous avons à coeur de faire les choses différemment, et la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliment est un changement important en ce sens.

Nous admettons tous que le moment était venu de prendre cette mesure. En tant que secrétaire d'État aux Pêches et aux Océans ainsi qu'à l'Agriculture et à l'Agroalimentaire, je demeure convaincu que cette nouvelle agence améliorera le système d'inspection du poisson.

[Français]

Notre voyage commence ici avec l'adoption de ce projet de loi important qui crée une agence canadienne d'inspection des aliments. Je crois qu'il se terminera par l'établissement d'une agence qui réalisera avec efficacité et efficience un programme d'inspection des aliments de niveau mondial.

M. Réjean Lefebvre (Champlain, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi C-60, Loi portant création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence.

La nécessité d'une agence fédérale d'inspection des aliments est née en raison des nombreuses pressions venant à la fois des gouvernements provinciaux et des municipalités, du milieu agricole, des pêches et même des consommateurs. La création d'un guichet unique en matière d'inspection des aliments était donc attendue avec beaucoup d'impatience.

Tous ceux qui doivent se mesurer au système d'inspection fédéral des aliments ne savent pas, dans bien des cas, à quel organisme ou à quelle norme se référer. En effet, la juridiction actuelle en matière d'inspection fédérale fait en sorte qu'il faut s'adresser à plusieurs ministères ou organismes, notamment Agriculture Canada, Pêches et Océans ainsi que Santé Canada. Ces trois ministères à eux seuls représentent, pour le Trésor public, plus de 340 millions en dépenses annuelles pour l'inspection des aliments.

La création d'une agence publique chargée d'offrir les services fédéraux d'inspection a été annoncée dans le budget 1996-1997. Le gouvernement fédéral a fait naître de grands espoirs par cette annonce. La présentation du projet de loi C-60 devrait maintenant répondre à toutes ces attentes. Hélas, l'agence canadienne d'inspection des aliments que le gouvernement fédéral nous propose est bien décevante si on regarde de près sa structure, sa composition et son mandat.

D'une part, il faut savoir que la future agence représente un modèle d'originalité. Aux dires des fonctionnaires chargés de mettre en place le projet, il n'existe aucun organisme du genre dans le monde. L'originalité n'est pas forcément ce que les provinces, les municipalités, les milieux agricoles et de la pêche espéraient obtenir en réponse à leurs demandes. Ces gens exigent la fin des dédoublements et surtout, de ne pas faire les frais pour un organisme dont l'efficacité reste à démontrer.

Le projet de loi C-60 précise que l'agence canadienne d'inspection des aliments est constituée «en vue du regroupement et de l'amélioration de l'efficacité des services fédéraux d'inspection des aliments, des animaux et des végétaux et-surtout-de l'intensification de la collaboration entre les gouvernements fédéral et provin-


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ciaux dans le domaine.» Tout cela, c'est du vent, des bonnes intentions et de la poudre aux yeux.

(1345)

La future agence sera, dans les faits, un nid de patronage créé pour récompenser les amis du gouvernement en place. La preuve, on la retrouve à l'article 5 du projet de loi qui précise en effet que: «. . .le gouverneur en conseil nomme le président et le premier vice-président de l'Agence pour un mandat renouvelable d'au plus cinq ans». On le voit bien, cette procédure de nomination est conçue pour assurer la loyauté politique de la haute direction envers le gouvernement. Cette façon de faire est arbitraire, injuste et hautement partisane. Cette procédure met en doute l'objectivité des décisions et des actions qui seront entreprises par la future agence fédérale d'inspection des aliments. Voilà ce à quoi il faut s'attendre de l'agence.

Ce n'est pas tout. L'organisation de l'agence sera complétée par la création d'un comité consultatif formé d'au plus douze personnes qui seront nommées, cette fois-ci, par le ministre responsable de l'agence. Ce pouvoir discrétionnaire absolu sera probablement attribué au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, puisque c'est lui qui nous a fait cadeau du projet de loi C-60.

Ce qu'il faut comprendre de tout cela, c'est que le choix des politiques relatives à la mission de l'agence sera donc déterminé par les amis du ministre. Encore une fois, cette procédure de nomination est totalement inacceptable. Elle ne répond nullement aux attentes des gouvernements provinciaux et municipaux et ceux du milieu agricole et des pêches.

Par ailleurs, la composition de ce fameux comité consultatif n'offre aucune garantie quant à la représentation du milieu agricole et des pêches au sein du comité, et encore moins la participation des provinces ou des municipalités.

Comment l'agence pourra-t-elle, comme le mentionne le projet de loi C-60, intensifier la collaboration entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans le domaine de l'inspection fédérale des aliments, si les provinces ne sont pas représentées en permanence au sein de l'agence? Les provinces ont leur mot à dire au sein de cette future agence.

Pour l'instant, rien ne garantit qu'elles auront une place pour se faire entendre, et surtout, rien ne garantit qu'elles pourront prendre une part active aux décisions qui seront prises. Ces décisions les concernent directement et il n'est pas question de passer sous silence le manque total de jugement dont fait preuve le gouvernement sur cette question.

L'examen de la mission de l'agence n'est pas plus rassurant. On y mentionne que le ministre de la Santé est chargé, entre autres, de l'élaboration des politiques et des normes relatives à la salubrité et à la valeur nutritive des aliments vendus au Canada. Cette prérogative donnée au ministre de la Santé lui permet de s'ingérer directement dans les champs de compétence des provinces en édictant des règlements et des normes qui seront appliqués partout au pays. Ces pouvoirs reviennent de droit aux provinces et non au gouvernement. Cette situation doit être dénoncée avec force.

On attendait beaucoup de la création de l'agence canadienne des aliments. Une fois de plus, le gouvernement fédéral nous déçoit. Ce qu'on nous offre aujourd'hui sent le patronage à plein nez. Les provinces sont encore mises de côté et en plus, on s'arrange pour tout contrôler en exerçant leurs propres compétences.

Personne dans le milieu agricole et des pêches, y compris les provinces et les municipalités, ne s'attendait à une telle déception. On espérait, à tout le moins, être un partenaire véritable dans la prise de décision. Il n'en est rien. Le projet de loi C-60, présenté par le ministre de l'Agriculture, a tous les défauts et il faut s'en débarrasser et le mettre au panier.

[Traduction]

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, en tant qu'agricultrice de carrière et députée de Dauphin-Swan River, il me fait plaisir de dire quelques mots sur le projet de loi C-60, ou Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

L'inspection des aliments et les services de quarantaine ont toujours constitué une priorité au Canada. Le système canadien d'inspection des aliments et de quarantaine est l'un des meilleurs au monde. En fait, la confiance des Canadiens dans la qualité et la salubrité. . .

Le vice-président: Je regrette de devoir interrompre la députée, mais la présidence s'est trompée. Elle aurait dû donner la parole non pas à la secrétaire parlementaire, mais au député de Végréville. Pardonnez-moi.

(1350)

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques commentaires au sujet du projet de loi C-60, Loi portant création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Le but déclaré du projet de loi est de constituer l'Agence canadienne d'inspection des aliments en vue du regroupement et de l'amélioration de l'efficacité des services fédéraux d'inspection des aliments, des animaux et des végétaux et de l'intensification de la collaboration entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans le domaine.

Plus particulièrement, le projet de loi établit le cadre de la mission de l'Agence, prévoit son organisation, la gestion de ses ressources humaines et financières et ses pouvoirs, et établit ses obligations. Il modifie en outre des dispositions relatives au contrôle d'application et aux peines de plusieurs lois ayant trait aux aliments et à la santé des animaux et des végétaux dont l'Agence est chargée d'assurer et de contrôler l'application.

Quand elle entrera en service en 1997, la nouvelle Agence canadienne d'inspection des aliments deviendra l'une des plus vastes entités bureaucratiques, avec 4 500 fonctionnaires et un budget de 300 millions de dollars. Les autorités fédérales prétendent que mettre fin aux chevauchements et doubles emplois qui existent entre les ministères en ce qui concerne l'application, la gestion du

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risque, les services de laboratoires, les systèmes informatiques et les communications permettra aux contribuables d'économiser 44 millions de dollars par an à compter de 1998-1999.

Toutefois, le gouvernement n'a pas fourni la répartition détaillée de ce montant estimatif. Aucune décision n'a été prise en ce qui concerne les réductions de personnel ou les laboratoires excédentaires de la nouvelle agence. On nous a vaguement dit ce que ça coûterait, on nous a vaguement dit ce que ça permettrait d'économiser, mais nous n'avons aucun détail.

Quand nous examinons une mesure législative qui va créer une nouvelle bureaucratie de 4 500 employés, avec un budget estimatif de 300 millions de dollars, nous devrions avoir beaucoup plus de détails. Je n'entends pas par là de menus détails, mais des précisions quant à la façon dont ces fonds vont être dépensés et quant aux économies qui vont être réalisées. Or, ce projet de loi ne donne aucune précision.

Selon les prévisions ministérielles, le coût estimatif est de 300 millions de dollars, mais l'expérience nous a appris que les prévisions ministérielles sont rarement exactes. Si elles l'étaient dans ce cas, ce serait l'une des rares fois. J'ai assisté à la création de nombre d'agences et, à ma connaissance, pas une n'a respecté son budget. Je me sentirais plus à l'aise si l'on nous disait comment ces fonds seront utilisés.

Je tiens à préciser que le Parti réformiste est en faveur de regrouper et de réduire les opérations du gouvernement fédéral. Ce projet de loi ne fait guère que remplacer des noms et des titres par d'autres. Au lieu de cela, le gouvernement devrait songer aux avantages de la privatisation d'une grande partie des services d'ins-pection des aliments, des plantes et des animaux au Canada, comme le demande le Parti réformiste depuis son arrivée en cette Chambre.

Nous devrions déterminer dans quelle mesure ces services peuvent être privatisés et fournis à un moindre coût à ceux qui les requièrent. En même temps, j'admets que nous devons absolument veiller à ce que le secteur privé fournisse les services privatisés en toute sécurité, de façon efficace et à un coût moindre.

L'économie de 40 millions de dollars, ou 13 p. 100 du budget de l'agence, qui s'élève à 300 millions de dollars, est réalisée à l'heure actuelle grâce au recouvrement des coûts. Le recouvrement des coûts proposé par le Parti réformiste et recommandé par de nombreux transformateurs, surtout ceux qui transforment les produits agricoles, est très différent de celui que le gouvernement propose.

(1355)

Selon le Parti réformiste les coûts recouvrés devraient être les plus bas possibles pour le service en cause, que celui-ci soit fourni par le secteur privé ou le gouvernement. Dans certains cas, le secteur privé pourra fournir un service de très grande qualité à un prix inférieur à celui demandé par le gouvernement. Dans d'autres cas, il se pourrait que le ministère demande un prix moins élevé. On ne sait pas vraiment quels services seront mieux rendus par le secteur privé ou le gouvernement. À ma connaissance, aucune étude ou analyse n'a été faite à ce sujet.

La conception du gouvernement quant au recouvrement des coûts diffère totalement de celle du Parti réformiste. Celui-ci préconise le recouvrement des coûts au prix le plus bas possible. Si quelqu'un peut rendre un service de qualité à un moindre coût, alors c'est à cette personne ou à ce groupe qu'il faut confier la tâche.

Le deuxième grand point que je veux aborder au sujet de ce projet de loi est celui du pouvoir des gouvernements provinciaux comparativement à celui du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral a décidé que, pour mettre fin aux chevauchements entre les deux paliers de gouvernements, il fallait tout centraliser au niveau fédéral. C'est tout à fait conforme à l'attitude adoptée par les gouvernements libéraux au fil des ans.

Les députés libéraux croient généralement que les Canadiens aiment les gouvernements interventionnistes. Un gouvernement interventionniste signifie des impôts élevés. Je prétends que les Canadiens désirent un gouvernement beaucoup moins interventionniste, des impôts réduits, un meilleur revenu net et, par conséquent, une situation de l'emploi beaucoup plus favorable au pays. Il y a donc deux visions du Canada. Celle des libéraux et des conservateurs témoigne de leur volonté de maintenir un gouvernement interventionniste, des impôts élevés et des revenus nets assez bas. La vision des réformistes est partagée par de nombreux Canadiens qui souhaitent un gouvernement fédéral moins interventionniste, des impôts moins élevés et des revenus disponibles plus élevés, plus rondelets.

Malheureusement, ce projet de loi montre bien que le gouvernement a choisi le grand gouvernement, les impôts élevés. Ce projet de loi imposera un lourd fardeau aux contribuables et aux transformateurs de produits, qui payeront le prix du recouvrement des coûts.

Le Président: Cher collègue, je vois que vous êtes en plein milieu de votre intervention. Au lieu de vous interrompre dans une minute et demie, j'ai pensé qu'il serait préférable de vous laisser continuer après la période des questions. Vous disposerez alors de trois minutes entières.

Comme il est 14 heures, la Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.

______________________________________________


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DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LE COLLÈGE FANSHAWE

M. Pat O'Brien (London-Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, le collège Fanshawe est un excellent collège communautaire situé dans ma circonscription, London-Middlesex.

Au mois de septembre, une équipe de ses étudiants en art culinaire représentait le Canada aux jeux olympiques culinaires internationaux de 1996 qui ont eu lieu à Berlin. Elle s'est mesurée à 30 équipes du monde entier et a remporté une médaille d'argent pour le Canada.


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Félicitations à ces six apprentis chefs: Nicholas Burrell, Julie de Vroomen, Chris Haynes, Brad Hirtzel, Adrien Melillo et Ashley Millis. Félicitations également à leurs entraîneurs, Peter Greuel et Steven Evetts, et au chef de projet, Kirk Patterson.

Ces jeunes font honneur au collège Fanshawe, à la ville de London, au Canada, et à eux-mêmes. Bravo. Nous sommes fiers de vous et nous avons hâte de goûter à vos plats sans trop tarder.

* * *

[Français]

LA MUNICIPALITÉ DE LATERRIÈRE

M. André Caron (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, la municipalité de Laterrière vient de fêter le 150e anniversaire de sa fondation.

L'occasion était donc tout indiquée pour mettre en valeur les attraits naturels, culturels et patrimoniaux de Laterrière. Sous forme de tableaux historiques se déroulant en divers endroits de la municipalité, la pièce originale La tournée folle du grand brûlé a fait revivre une partie de son histoire.

Les célébrations se sont clôturées le 6 octobre par la bénédiction d'une statue en l'honneur du fondateur de Laterrière, le père Jean-Baptiste Honorat.

La municipalité de Laterrière a été durement éprouvée par les inondations au Saguenay. Le rappel de son histoire nous rassure sur la capacité de cette vaillante collectivité à relever ce nouveau défi qui lui a été imposé.

* * *

[Traduction]

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture a une fois de plus fait la preuve qu'il n'avait pas de leçon à donner aux producteurs de grain de l'Ouest.

En effet, d'une part, il protège le monopole de la Commission canadienne du blé en remédiant aux lacunes de la Loi sur les douanes, mais d'autre part, il la laisse s'auto-détruire par manque de transparence et du fait qu'il ne l'oblige pas à rendre des comptes.

Le ministre a démontré qu'il était prêt à poursuivre les agriculteurs pour les empêcher d'avoir accès aux marchés spécialisés que la commission refuse de desservir. Par ailleurs, il permet à la commission de contourner la loi qui la régit en mettant en contact certains agriculteurs privilégiés et des consommateurs qui leur versent des primes énormes échappant au système de mise en commun.

À mon avis, si une violation de la Loi sur la Commission canadienne du blé peut valoir l'emprisonnement à un agriculteur, la même peine devrait être imposée aux cadres de la commission.

Mais après tout, nous avons un gouvernement libéral qui protège les criminels et qui ne tient pas compte des droits des victimes.

LES PRESTATIONS D'EMPLOI

M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD): Monsieur le Président, hier, devant le Comité des finances, le ministre des Finances a annoncé que le déficit pour 1995-1996 serait de 4,1 milliards de moins que l'objectif du gouvernement, lequel était de 37,2 milliards.

La raison donnée c'est que les dépenses du gouvernement et le service de la dette ont coûté moins cher que prévu, mais les chiffres du ministre pour l'assurance-chômage révèlent une autre raison pour laquelle le déficit est plus faible que prévu.

Alors que le gouvernement a réduit les prestations pour les travailleurs en chômage de 1,3 milliard en 1995-1996, il a perçu 9 milliards de plus qu'il n'a payé en prestations. La plus grande partie de cet excédent servira à réduire le déficit.

Ce n'est pas l'argent du gouvernement. C'est de l'argent qui appartient aux 13 millions de travailleurs qui ont cotisé à l'assurance-chômage. À une époque où les chômeurs ont du mal à joindre les deux bouts du fait de la réduction des prestations, il est cruel et injuste de saigner les chômeurs afin de présenter des chiffres intéressants pour le déficit.

* * *

[Français]

LE FESTIVAL DU CANARD DU LAC BROME

M. Denis Paradis (Brome-Missisquoi, Lib.): Monsieur le Président, c'était mardi le lancement de la première édition du Festival du canard du lac Brome, qui se déroule pendant un mois dans mon comté de Brome-Missisquoi. Inspiré des grandes fêtes populaires du sud-ouest de la France, cet événement permet d'attirer les touristes dans une période de l'année traditionnellement plus tranquille.

Cet événement gastronomique international, né d'une initiative locale, est un bel exemple de coopération entre la France et le Canada. Cet événement permet des échanges culinaires entre chefs gascons et québécois, mais aussi la possibilité de faire connaître l'excellence de nos produits canadiens outre-mer.

Je tiens à féliciter le président du Festival, M. Jacques Ouimette, d'avoir mis autant d'énergie à créer un événement d'une telle ampleur autour d'une des grandes richesses locales de Brome-Missisquoi: les produits du terroir. Je m'associe à la population de Brome-Missisquoi pour inviter les Canadiens et les Canadiennes à venir dans les Cantons de l'Est afin de prendre part au Festival du canard du lac Brome.

* * *

[Traduction]

JEANETTE DEAN

Mme Georgette Sheridan (Saskatoon-Humboldt, Lib.): Monsieur le Président, Jeanette Dean, de Saskatoon, a été choisie pour recevoir le certificat de mérite du prix Bénévolat Canada


5365

présenté en reconnaissance d'une contribution exceptionnelle à l'amélioration de la santé et du bien-être social de ses concitoyens.

En 1987, Mme Dean a pris sa retraite d'enseignante à l'école de Saskatoon pour les sourds. Elle n'a pas cessé de travailler pour autant. Elle a adhéré à l'UNICEF de Saskatoon et a présidé deux comités. Elle s'est occupée d'au moins trois clubs de la Fédération canadiennes des femmes diplômées des universités, a enseigné aux sourds à titre bénévole, a été directrice nationale des éducateurs pour les malentendants, et a aidé à créer le régime en vigueur en Saskatchewan pour les prothèses auditives.

Elle enseigne maintenant la lecture labiale dans des projets de logements à prix modéré, travaille avec des immigrants et des enfants à la Saskatoon Open Door Society. Elle travaille avec des réfugiés, s'occupe de théâtre amateur, de personnes âgées et de la bibliothèque.

Ce que je me demande, c'est ce que cette dame fait pendant ses loisirs?

* * *

LE PARC DES ANCIENS COMBATTANTS

M. Ron Fewchuk (Selkirk-Red River, Lib.): Monsieur le Président, le dimanche 6 octobre, j'ai eu le privilège de me rendre à West St. Paul, une municipalité rurale de la circonscription de Selkirk-Red River que je représente, pour prendre part aux manifestations marquant le 50e anniversaire de Rivercrest.

Rivercrest a vu le jour dans le cadre de la Loi sur les terres destinées aux anciens combattants. Les 56 premiers habitants étaient tous d'anciens combattants de la Seconde Grande guerre à qui on avait offert une maison à Rivercrest moyennant une petite mise de fonds et un prêt gouvernemental.

J'aimerais remercier spécialement la municipalité rurale de West St. Paul et la direction du club communautaire de Rivercrest qui ont tenu à rendre hommage à nos anciens combattants en rebaptisant le parc Rivercrest Parc des anciens combattants.

* * *

(1405)

[Français]

LES ORGANISMES COMMUNAUTAIRES

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Monsieur le Président, les organismes communautaires d'aide aux chômeurs et aux chômeuses de ma circonscription de Bourassa sont choqués des coupures financières effectuées par le ministère du Développement des ressources humaines. Dans la grande région de Montréal, le taux de chômage ne cesse d'augmenter.

Les groupes les plus durement touchés sont les femmes, les jeunes et les immigrants. Clientèles de plus en plus nombreuse et sources de financement constamment à la baisse obligent plusieurs organismes à fermer leurs portes alors que d'autres connaissent de sérieuses difficultés financières.

Des organismes comme Impulsion-Travail, Carrefour Jeunesse Emploi Bourassa et Sauvé, la Maison des jeunes «l'Ouverture» et l'Association des travailleurs haïtiens du Canada se distinguent par leur travail exceptionnel.

Le ministère du Développement des ressources humaines doit financer adéquatement ces groupes pour éviter l'incertitude perpétuelle et favoriser leur stabilité et leur viabilité.

* * *

[Traduction]

LA DETTE

M. Werner Schmidt (Okanagan-Centre, Réf.): Monsieur le Président, hier le ministre des Finances a dit aux Canadiens que «le gouvernement fédéral n'empruntera plus d'argent neuf sur les marchés» et que «le processus de rétablissement de la souveraineté du Canada en matière de politiques est amorcé.»

Il a omis de rappeler aux Canadiens que le fardeau de la dette publique est encore à ce point écrasant que l'on devra faire appel aux investisseurs étrangers. Il a également omis de reconnaître que les investisseurs canadiens auront tendance à se servir des mêmes points de repère que les investisseurs de tout marché digne de ce nom quand viendra le moment de comparer les risques et les rendements des instruments canadiens à ceux d'ailleurs. Si les investisseurs estiment que l'effort de consolidation financière du Canada laisse à désirer, ils opteront probablement pour des instruments étrangers, ce qui entraînera une hausse des taux d'emprunt au Canada.

Le ministre des Finances s'est servi d'illusions et de paroles onctueuses pour amner les Canadiens à penser que l'état de la dette nationale n'est pas bien grave. Ce n'est pas le cas.

* * *

LE GROUPE D'AMITIÉ CANADA-PORTUGAL

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le Président, à titre de présidente du Groupe d'amitié Canada-Portugal, je souhaite la bienvenue au Canada au secrétaire d'État aux communautés portugaises, M. José Lello.

Les explorateurs portugais sont arrivés en Amérique du Nord il y a 500 ans environ. Depuis l'établissement de leur collectivité, qui compte 500 000 membres de nos jours, les Canadiens d'origine portugaise ont apporté et continuent d'apporter une grande contribution au tissu social, politique et économique du Canada.

Notre adhésion commune aux Nations Unies, à l'OTAN, à l'OSCE et à l'OCDE, ainsi que l'établissement récent de liens commerciaux et technologiques ont renforcé les relations canado-portugaises.

[Français]

Ce matin j'ai assisté avec le député de Hull et le président du Conseil du Trésor à l'inauguration d'un monument dédié à toutes les personnes d'origine portugaise, à Hull. À cet effet, je veux citer l'extrait d'un poème de Jorge de Sena qui est inscrit sur la plaque:


5366

«Je ne peux qu'être de la Terre où je suis né. Même si j'appartiens au Monde. . .»

J'invite tous mes collègues cet après-midi à venir rencontrer le ministre d'État au salon Commonwealth après la période des Questions.

Benvidou ao Canada!

* * *

[Traduction]

LA SEMAINE NATIONALE DE SENSIBILISATION AUX MALADIES MENTALES

Mme Bonnie Hickey (St. John's-Est, Lib.): Monsieur le Président, la semaine du 15 au 19 octobre est la Semaine nationale de sensibilisation aux maladies mentales. Vingt pour cent des Canadiens, soit six millions de personnes, vont souffrir d'une maladie mentale à un moment donné de leur vie.

Dans le cadre de cette semaine, l'Association des psychiatres du Canada, ainsi que plusieurs autres associations, ont uni leurs efforts pour dissiper les stéréotypes et les fausses conceptions qu'on a face aux maladies mentales. Ils ont lancé une campagne nationale de sensibilisation pour aider les gens à déceler les symptômes de la maladie mentale et à mieux les comprendre.

Les maladies mentales ne touchent pas que les personnes atteintes, elles touchent également les amis, les membres de la famille et la société en général. La maladie mentale est la deuxième principale cause d'admissions dans les hôpitaux chez les gens ayant entre 22 et 44 ans.

Grâce aux soins voulus, notamment les médicaments, la psychothérapie et les groupes d'entraide et de soutien, on peut traiter avec succès la plupart des cas. Je demande aux députés de se joindre à moi pour appuyer la Semaine nationale de sensibilisation aux maladies mentales.

* * *

[Français]

LA JOURNÉE MONDIALE DE LA SANTÉ MENTALE

M. Bernard Patry (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, aujourd'hui 10 octobre a été désigné Journée mondiale de la santé mentale. Au Canada, l'Association canadienne pour la santé mentale a décidé de consacrer cette journée à la prévention et au dépistage des dépressions nerveuses.

Cinquante-quatre centres de dépistage précoce et une ligne téléphonique 1-800 ont été mis en place afin de permettre aux personnes vulnérables ou désirant en savoir plus sur cette maladie d'avoir accès directement aux services de professionnels.

(1410)

Un rapport de l'Organisation mondiale de la santé, rendu public récemment, prévoit que les dépressions nerveuses seront, vers les années 2020, le second plus important problème de santé à l'échelle planétaire.

Devant l'ampleur d'un tel phénomène appréhendé, il est heureux que de telles initiatives soient prises pour dépister les personnes qui en sont déjà atteintes et pour nous sensibiliser à la problématique de la dépression nerveuse.

* * *

[Traduction]

LA TAXE SUR LES PRODUITS ET SERVICES

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, nous célébrons ces jours-ci la Semaine de la famille et le gouvernement a oublié les familles.

Tout d'abord, il ne porte qu'un intérêt de façade aux préoccupations des familles et il consacre de l'argent à des programmes de création d'emplois à court terme pour les jeunes tout simplement pour faire bonne impression. Pire encore, on emprunte cet argent, alors que nous avons déjà une dette de près de 600 milliards de dollars.

Maintenant, après avoir fait la promesse électorale qu'il n'imposerait pas de TPS sur les livres, le gouvernement va encore de l'avant avec l'application d'une nouvelle taxe de 15 p. 100 sur les imprimés qui entrera en vigueur le 1er avril, à moins que les provinces de l'Atlantique ne soient disposées à avaler la pilule, à accepter une taxe supplémentaire de 8 p. 100, comme le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, John Savage, a dit être prêt à le faire.

Le premier ministre veut-il qu'on lui attribue le mérite de cela? Quand le gouvernement va-t-il tenir parole et supprimer la TPS sur les imprimés? Je rappelle au premier ministre qu'il a promis de le faire. Je rappelle à la vice-première ministre qu'elle a déclaré que les livres étaient une nécessité.

En cette Semaine nationale de la famille, supprimez la TPS sur les livres.

Le Président: Je vous rappelle de temps à autre que les microphones sont ouverts au pupitre près de la personne qui intervient et que parfois, par inadvertance, vos paroles peuvent être incorporées dans le hansard.

* * *

[Français]

LES DÉPUTÉS LIBÉRAUX

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, depuis la reprise de la session parlementaire, il y a près de quatre semaines, l'opposition officielle a défendu avec vigueur les intérêts des citoyens et citoyennes du Québec et du Canada. Malheureusement, nous ne pouvons pas en dire autant des députés libéraux fédéraux du Québec.

Depuis la rentrée d'automne, les députés libéraux fédéraux utilisent sans gêne la période allouée aux déclarations de députés, afin de dénigrer les politiques du gouvernement québécois, du premier ministre du Québec et de tous les porte-parole souverainistes. Cette tactique mesquine se répète à raison d'environ deux articles 31 par jour de la part des députés libéraux, soit environ 20 p. 100 de leur temps de parole.

Préoccupés qu'ils sont à frapper sur le Québec, les élus libéraux fédéraux ne jouent donc plus leur rôle de parlementaires gouvernementaux. La hauteur de leur prestation explique sans aucun doute la

5367

suggestion du chef de l'opposition à Québec, M. Daniel Johnson, à savoir que s'ils voulaient faire de la politique sur la scène. . .

Le Président: Je dois maintenant donner la parole au député de Kent.

* * *

[Traduction]

L'ÉTHANOL

M. Rex Crawford (Kent, Lib.): Monsieur le Président, il me fait extrêmement plaisir de prendre la parole aujourd'hui pour annoncer l'inauguration, vendredi prochain, des travaux de construction de l'usine d'éthanol de niveau mondial de Chatham. L'éthanol va procurer une nouvelle prospérité aux producteurs de maïs et rehausser l'économie de l'Ontario.

La première étape des travaux de construction de l'usine d'éthanol commencera la semaine prochaine, grâce aux efforts de nombreuses personnes, notamment de notre ministre de l'Agriculture.

L'éthanol constitue une solution bénéfique pour notre environnement, les agriculteurs et la croissance économique à long terme.

Je suis tout aussi fier du courage et de la détermination du gouvernement d'interdire le MMT, le détestable additif de l'essence américaine. Les carburants de remplacement représentent la solution de l'avenir. J'invite fortement tous les députés à utiliser de l'éthanol sans MMT dans leur véhicule.

* * *

[Français]

LE DÉFICIT

M. Nick Discepola (Vaudreuil, Lib.): Monsieur le Président, le ministre canadien des Finances a annoncé, pour l'année fiscale qui s'est terminée le 31 mars dernier que le déficit a été de 4,1 milliards de dollars inférieur à ce qui avait été prévu. Il appert que si les conditions se maintiennent, le déficit canadien sera complètement éliminé en l'an 2000.

En guise de réaction, le Bloc québécois a choisi de continuer à propager des demi-vérités en déclarant, et je le cite: «Encore une fois vous allez frapper les plus démunis et vous attaquer au fonds d'assurance-chômage.»

De son côté le ministre québécois, Bernard Landry, se réjouit de la nouvelle, et je le cite: «Ceci dit, l'ensemble est positif et il faut que ça continue dans cette direction.»

Comment le Bloc québécois peut-il continuer de critiquer injustement notre stratégie de lutte au déficit, alors que son chef, le PQ, nous félicite de notre travail et nous appuie publiquement. S'ils continuent comme ça, il sera difficile de justifier leur présence à Ottawa, surtout lors des prochaines élections.


5367

QUESTIONS ORALES

(1415)

[Français]

LE DÉFICIT

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, alors que le ministre des Finances prévoit une baisse de 7,3 milliards de dollars de son déficit en 1996-1997, on réalise, en fouillant un peu dans ses chiffres, que les coupures dans les transferts aux provinces comptent pour au moins 25 p. 100 de cette réduction, ainsi que ce que le ministre puise dans le surplus de la Caisse de l'assurance-emploi qui compte pour 70 p. 100 de cette réduction du déficit.

La question que je pose au ministre des Finances est la suivante: Est-ce qu'il admet que 95 p. 100 de la réduction de son déficit est financée à même la Caisse de l'assurance-emploi et à même les coupures dans les transferts aux provinces?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, d'une part, les transferts aux provinces représentent environ 20 à 25 p. 100 de nos dépenses. C'est tout à fait compréhensible, lorsqu'on fait des coupures, qu'on ne puisse mettre de côté 25 p. 100 de nos dépenses. Il fallait couper de façon équitable partout.

Cela étant dit, ce que nous avons fait, c'est qu'on a donné un préavis de deux ans aux provinces pour leur donner le temps de s'ajuster, tandis que pour notre part, on a fait des coupures immédiatement. Je vous dis en même temps qu'on a effectué beaucoup plus de coupures chez nous, dans nos opérations, qu'on a coupé dans les dépenses des provinces.

En ce qui concerne le fonds d'assurance-emploi, c'est clair que, d'une part, il faut créer une réserve pour se protéger contre un possible déclin dans l'économie et, d'autre part, comme le vérificateur général l'a dit en 1986, cela fait partie de nos revenus du Fonds consolidé. Alors, ils sont traités comme ces revenus du Fonds consolidé.

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, je remercie le ministre des Finances. C'est la première fois qu'on a l'affirmation très claire, venant du gouvernement, que le surplus de l'assurance-emploi, les cotisations des travailleurs et des entreprises, est récupéré par le gouvernement pour financer ses dépenses. Enfin, on a cette confirmation qu'on a cherché à obtenir tellement de fois dans le passé sans jamais être capable de l'avoir.

Puisque le ministre des Finances semble disposé à me donner des réponses qui sont exactes, j'aimerais lui demander s'il va admettre que s'il n'avait pas coupé dans les transferts aux provinces, actuellement, une province comme le Québec se retrouverait avec un déficit zéro, donc que le déficit du Québec est celui qu'Ottawa a pelleté au Québec?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, il se peut que lorsque les critiques en matière de finances du Bloc québécois posent des questions, le chef de l'opposition n'écoute pas toujours. J'ai souvent cité en cette Chambre le rapport


5368

du vérificateur général de 1986 où il a insisté sur le fait que le gouvernement rentre les fonds de l'assurance-chômage dans le temps-maintenant, on dit assurance-emploi-dans le Fonds consolidé. Alors, ce n'est pas une nouvelle.

De plus, en ce qui concerne le Québec, non seulement la baisse des taux d'intérêt a donné au Québec, dans les deux dernières années, 625 millions de dollars de plus que ce à quoi il s'attendait, mais cette année, j'ai donné à Bernard Landry 600 millions de plus que ce que Jean Campeau avait calculé. Alors, ça fait 1,2 milliard qu'on lui donne.

(1420)

M. Michel Gauthier (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le Président, les députés du côté gouvernemental ne devraient pas s'énerver, les chiffres sont dans les budgets. Tout le monde le sait, c'est un fait: les transferts aux provinces ont été coupées. Demandez-le au ministre des Finances, que les députés d'arrière-ban le demandent au ministre des Finances, il devra confirmer que, dans les faits, c'est vrai. C'est écrit dans les budgets: les transferts aux provinces, dont ceux au Québec, ont été coupés substantiellement avec la mise en place du Transfert social canadien. Alors avant de vous réjouir, réfléchissez. Lisez vos budgets.

Venons-en à notre question. Puisque 95 p. 100 de la réduction du déficit du ministre des Finances a été prise à même la caisse d'assurance-emploi et à même les transferts aux provinces, comme il nous l'a confirmé à la première question-le ministre ne s'en est pas caché-et puisque 95 p. 100 de cet effort de réduction du déficit est payé par les provinces, par les chômeurs, par les travailleurs et par les employeurs, quel est l'effort du gouvernement autrement que pour un pauvre 5 p. 100, c'est-à-dire 350 à 400 millions de dollars?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Malheureusement, monsieur le Président, quand le chef de l'opposition commence à parler de chiffres, il fait de petites erreurs. Il est très clair que c'est le gouvernement fédéral qui a supporté la plus grande partie des coupures.

Je peux vous donner un exemple. Pour la période de 1994 à 1997, quoique les transferts aux provinces ont diminué de 4,1 milliards de dollars en tout, on a coupé chez nous le double, c'est-à-dire 8,3 milliards de dollars.

Deuxièmement, je pense qu'en ce qui concerne le Québec il est très clair qu'en 1996-1997 les transferts au Québec s'élèveront à 10,9 milliards de dollars, plus que toute autre province. Le Québec, qui compte 25 p. 100 de la population canadienne, recevra 31 p. 100 des transferts. La péréquation seule rapportera au Québec 3,9 milliards de dollars, soit 45 p. 100 du total des transferts de péréquation.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, si l'opposition fait des petites erreurs, le gouvernement et son ministre des Finances font des grosses erreurs.

Les efforts du ministre des Finances quant à la lutte au déficit sont plus que timides. Quant à la création d'emploi, ses efforts sont nuls. Lors de la récession de 1982, trois ans seulement ont été nécessaires pour retrouver le niveau d'emploi et le taux d'activité d'avant la récession. Actuellement, 6 ans après la dernière récession, il manque encore 879 000 emplois au Canada pour retrouver les mêmes conditions du marché du travail qui existaient alors. C'est une catastrophe, et le ministre l'a reconnu, hier. Et malgré cela, il a répondu que son gouvernement ne fera rien.

Comment le ministre des Finances peut-il admettre que le marché de l'emploi est dans une situation catastrophique et refuser en même temps de mettre en place de véritables mesures pour améliorer la situation de l'emploi au Canada?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous en avons discuté hier, le gouvernement a mis en place plusieurs mesures qui ont eu des effets très positifs sur la création d'emplois, que ce soit les sommes d'argent accordées par l'ex-ministre du Développement des ressources humaines en ce qui concerne la création d'emplois pour les jeunes, les emplois d'été pour les jeunes, ou que ce soit les sommes qu'on accorde en recherche et développement ou pour le commerce extérieur.

De plus, il faut le dire, la diminution des taux d'intérêt, selon la grande majorité des économistes au Canada, a eu un effet énorme sur la capacité du secteur privé à créer, depuis qu'on a pris le pouvoir, trois quarts de million de nouveaux jobs au Canada.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le Président, même le Conference Board disait récemment que la situation de l'emploi était catastrophique, que le véritable taux de chômage au Canada n'était pas de 9,4 p. 100 mais de 12,5 p. 100 parce qu'il y avait des chômeurs découragés. Même la Chambre de commerce du Canada trouve que c'est catastrophique. Il y a des moyens pour améliorer la situation, et je pose justement la question au ministre.

(1425)

Le ministre des Finances peut-il s'engager devant cette Chambre à réduire substantiellement les taux de cotisation des employeurs et des employés au fonds d'assurance-chômage et convoquer de toute urgence les provinces pour discuter avec elles de la mise en place de véritables mesures de création d'emplois? C'est une urgence nationale l'emploi. Au cas où il l'aurait oublié, je le lui rappelle.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, depuis que nous sommes au pouvoir nous avons réduit le fardeau de l'assurance-chômage, maintenant l'assurance-emploi, de 1,8 milliard de dollars. C'est énorme et c'est sans doute une des raisons pour lesquelles il y a plus de création d'emplois.

Cela étant dit, il ne fait aucun doute que la situation de l'emploi au Canada nous inquiète comme cela inquiète le gouvernement du Québec. On espère beaucoup que le sommet qui aura lieu à la fin du mois sera un succès.


5369

On a un problème, pas seulement le gouvernement fédéral, pas seulement les gouvernements provinciaux, mais tous les états industrialisés. Il faut travailler là-dessus. Je suis inquiet, moi aussi.

Le député a parlé de la récession. C'est très clair que le Canada a beaucoup souffert à cause de l'intensité et de la durée de la récession de 1989-1992. D'ailleurs, on en souffre encore. Il faudra y travailler. J'accepte avec beaucoup de bonne volonté les questions du député parce que je pense qu'on devrait travailler ensemble. Lors de la rencontre des ministres des Finances, on en a parlé. C'est une des raisons pourquoi on prolonge le programme d'infrastructures.

Cela étant dit, j'aimerais demander au critique des finances du Bloc québécois, si vous le permettez, monsieur le Président. . .

* * *

[Traduction]

L'ÉCONOMIE

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, bon nombre d'entre nous ont attendu patiemment hier durant l'exposé du ministre des Finances, mais sa mise à jour économique et financière n'a absolument pas tenu compte des principales préoccupations des Canadiens. Le ministre des Finances n'a pas tenu compte des besoins des quelque 1,4 million de chômeurs, des 2 à 3 millions de personnes sous-employées et des 25 p. 100 de Canadiens qui craignent de perdre leur emploi. Il n'a pas abordé la question de l'allégement fiscal, principale solution à adopter pour créer des emplois.

Pourquoi le ministre des Finances n'a-t-il pas fait ce que les Canadiens attendaient vraiment de lui, c'est-à-dire réduire les impôts et créer davantage d'emplois, des emplois de meilleure qualité?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, au nom de tous les députés, je voudrais tout d'abord souhaiter au chef du Parti réformiste la bienvenue à nos débats.

En fait, si le chef du Parti réformiste avait été attentif, il aurait remarqué que, dès notre arrivée au pouvoir, nous avons abordé toute la question de l'assainissement de nos finances publiques sur deux fronts. Le premier consiste certainement à redonner du travail aux Canadiens. Ainsi, le premier ministre a participé avec Équipe Canada à plusieurs missions à l'étranger qui se sont traduits par la création d'un grand nombre de nouveaux emplois au Canada. Le chef du Parti réformiste aurait aussi remarqué que nous avons étendu le financement à taux préférentiel. Nous avons investi dans la R-D. Par l'entremise du ministère du Développement des ressources humaines, nous avons prévu des fonds pour des emplois d'été pour étudiants et pour des emplois destinés aux étudiants qui réintègrent le marché du travail.

En fait, outre la baisse importante des taux d'intérêt qui est survenue grâce aux mesures prises par le gouvernement actuel, 750 000 nouveaux emplois ont été créés dans le secteur privé depuis que nous avons été portés au pouvoir. C'est une réalisation dont les Canadiens ont tout lieu d'être fiers.

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, si le ministre des Finances veut débattre de la question, il doit reconnaître des faits déplaisants.

Ce qui est déplaisant, c'est que les libéraux ont réduit les paiements de transfert de 40 p. 100. Ils ont réduit les paiements au titre des soins de santé de 3 milliards de dollars. Ils ont réduit les prestations aux personnes âgées. Ils sont en train de démanteler les programmes sociaux pour payer les intérêts sur la dette fédérale qui atteint 600 milliards de dollars. Après avoir procédé à toutes ces compressions, le ministre des Finances n'a toutefois pas réussi à accorder des baisses d'impôt et à créer davantage d'emplois pour les Canadiens.

Je réitère donc ma question: Pourquoi le ministre des Finances n'a-t-il pas accordé de baisses d'impôt aux Canadiens et pourquoi n'a-t-il pas créé à leur intention davantage d'emplois et des emplois de meilleure qualité?

(1430)

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, j'inviterais le chef du Parti réformiste à revoir le premier budget proposé par son parti. Il constatera alors que, au regard des soins de santé, des transferts aux provinces et des pensions de vieillesse, les remèdes préconisés par les réformistes avaient de quoi tuer n'importe quel patient.

C'est vraiment le comble du langage antiparlementaire d'entendre le chef du Parti réformiste prendre la parole pour nous dire ce que nous devrions faire. Je l'inviterais à pousser sa réflexion un cran plus loin. Le chef du Parti réformiste a dit que nous devrions réduire les impôts. Fort bien. Je voudrais toutefois qu'il nous explique maintenant quels programmes seraient la cible de ses compressions. Pratiquerait-il des compressions dans les programmes sociaux pour justifier une baisse d'impôt?

M. Preston Manning (Calgary-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, nous posons des questions à la Chambre, et le ministre des Finances peut fanfaronner à sa guise. Il peut éluder la question autant qu'il veut, mais il ne peut se soustraire au fait qu'il n'a pas respecté la promesse du gouvernement en matière de création d'emplois. S'il a échoué à cet égard, c'est parce qu'il n'a pas réussi à alléger les impôts.

Je vais réitérer ma question. Pourquoi le ministre des Finances n'a-t-il pas permis aux Canadiens de bénéficier d'un allégement fiscal et des emplois plus nombreux et de meilleure qualité qui en auraient découlé?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, dans chacun des quatre budgets que nous avons présentés, nous avons prévu des allégements fiscaux dans certains secteurs. Au cours des deux dernières années, nous avons réduit de 1,8 milliard de dollars les coûts de l'assurance-chômage. Nous avons consenti des crédits d'impôt aux familles pauvres qui ont des enfants. Nous avons accordé des crédits d'impôt à ceux qui étudient.

Le chef du Parti réformiste dit que, à la Chambre, les députés de son parti posent les questions. Les Canadiens voudraient bien vous entendre répondre à une question fondamentale, celle de savoir quels programmes sociaux vous charcuteriez pour tenir vos promesses en matière fiscale.

Le Président: Je vous rappelle, chers collègues, que vous devez vous adresser à la présidence.


5370

[Français]

LE DÉFICIT

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Si le gouvernement fédéral peut montrer qu'il contrôle le déficit, c'est parce qu'il en fait assumer la baisse principalement par les cotisants au régime d'assurance-chômage, en laissant s'accumuler un surplus d'au moins cinq milliards par année, constitué de taxes sur la masse salariale dont on sait qu'elle est payée principalement par les travailleurs et qu'elle grève l'emploi.

Le ministre admettra-t-il qu'en demandant aux travailleurs à faible et à moyen revenu, aux chômeurs, aux entreprises, surtout les PME, de constituer ce surplus et de payer pour le déficit, ce qu'il fait, c'est taxer dangereusement et injustement l'emploi?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, lorsqu'on a pris le pouvoir, il y avait un déficit dans le compte d'assurance-chômage d'au-delà de six milliards de dollars. Il fallait le combler, ce qu'on a fait. Cette année, nous avons un surplus de cinq milliards de dollars.

Selon l'actuaire en chef du ministère du Développement des ressources humaines, il faudra un surplus de 10 à 15 milliards de dollars pour mettre le fonds dans une situation où il pourra traverser un autre déclin économique ou une récession. Deuxièmement, il est clair que si on baisse les primes, chaque diminution de 5c. nous coûte 350 millions de dollars. Donc, il va falloir trouver l'argent.

(1435)

La question qui se pose, et je le demande en toute sincérité à la députée, il y a beaucoup de taxes sur la masse salariale, il y a certainement l'assurance-emploi, mais aussi les taxes pour la santé, pour la formation, pour la CSST. Alors si c'est vrai, j'espère que la députée va aussi demander aux gouvernements provinciaux de baisser leurs taxes sur la masse salariale.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le surplus accumulé, c'est l'actuaire en chef de la Commission qui le dit, sera d'au moins cinq milliards par année. C'est cinq milliards par année, alors qu'au plus fort de la crise, alors que les bénéfices étaient plus élevés, que le nombre de chômeurs qui avaient accès à l'assurance-chômage était plus élevé, cela a frôlé les six milliards. C'est une augmentation qui n'a aucun bon sens.

Parce que c'est là finalement que c'est important, l'emploi est important pour ceci, le ministre admettra-t-il qu'au-delà de ses belles paroles, dans les faits, les citoyennes et les citoyens canadiens sont plus pauvres, selon Statistique Canada, car leur revenu réel disponible par habitant a baissé de plus de 1 000 $ depuis 1989? Admettra-t-il qu'on s'est appauvri au Canada?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, d'une part, je crois que si la députée regarde ses chiffres, elle verra que ce que Statistique Canada a dit c'est que cet appauvrissement, et elle a raison, est arrivé avant qu'on prenne le pouvoir. Depuis qu'on a pris le pouvoir ça s'est stabilisé. Cela veut dire qu'on a grandement amélioré la situation. On voudrait bien l'augmenter, mais avant de l'augmenter il fallait la rendre stable.

Deuxièmement, oui, il va y avoir à la fin de l'année un surplus de cinq milliards. Cela ne veut pas dire que ça va monter, que ça va monter et ça va monter. Mais il faut un surplus pour se protéger contre une récession.

Ensuite, je l'ai déjà dit, selon le vérificateur général, ces fonds sont consolidés dans nos chiffres. Lorsqu'on baisse les primes comme on l'a fait l'année dernière, comme on a l'intention de faire cette année, comme on espère le faire dans les années à venir, certainement cela nous coûte de l'argent.

Cela étant dit, je veux dire à la députée, parce que je ne peux pas faire la demande à mon homologue, M. Landry, est-ce qu'elle va demander à M. Landry, est-ce qu'elle va remercier M. Landry qui a dit hier. . .

Le Président: Votre temps de parole est écoulé. La parole est au député de Capilano-Howe Sound.

* * *

[Traduction]

LE DÉFICIT

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, la mise à jour économique et financière d'hier mérite qu'on fasse la mise à jour des critiques. Il n'y a que dans le monde irréel d'Ottawa qu'on fête le constat d'un déficit de 29 milliards de dollars. Il n'y a que dans le monde irréel d'Ottawa qu'on fête la réduction du déficit après l'avoir transféré aux provinces.

Pourquoi le ministre des Finances a-t-il fait assumer aux provinces des compressions de 6 milliards de dollars dans leurs programmes de santé, d'éducation et d'aide sociale alors qu'il permet à son propre gouvernement de s'en tirer avec des compressions de moins de 2 milliards par année?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, dans l'exposé d'hier, j'ai dit très clairement que, même si nous étions très fiers d'avoir amélioré nos objectifs pour une deuxième année et même si je croyais que tous les Canadiens devaient être fiers que nous ayons maintenant repris la maîtrise des finances du pays, nous n'avions pas encore gagné la bataille et que nous avions encore un dur chemin à parcourir, mais que nous allions maintenir notre cap. Le député devrait comprendre, et j'aimerais qu'il se joigne à ce côté de la Chambre et à tous les Canadiens alors que nous maintenons le cap dans ce difficile combat que nous allons mener.

J'aimerais aussi qu'il rectifie un peu ses chiffres. Le fait est que, de 1994-1995 à 1997-1998, nous avons coupé 8,3 milliards de dollars dans les dépenses gouvernementales fédérales et non dans les transferts aux provinces qui n'ont été réduites en tout que de 4,1 milliards.


5371

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je suppose que nous devrons vérifier ce que son sous-ministre a dit hier. En date d'hier, c'était bien 6,3 milliards de dollars.

(1440)

Je me demande comment cela peut se faire. Comme je viens de Colombie-Britannique, ce genre de comptabilité créative présentée dans les mises à jour économiques et financières du gouvernement fédéral m'effraie un peu. On a usé de créativité pour améliorer le déficit fictif de l'an dernier grâce à de gros gains fortuits également fictifs. Par une très mystérieuse coïncidence, les baisses de recettes prévues correspondent au dollar près aux baisses prévues dans les frais d'intérêts.

Combien d'autres chiffres fictifs et démonstrations de comptabilité créative ont été nécessaires pour permettre au ministre de garantir à la population qu'il a atteint ses objectifs et que ceux-ci restent inchangés?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député sait qu'il n'y a pas de comptabilité fictive. Nos livres sont certifiés conformes par le vérificateur général, qui les vérifie selon des principes de comptabilité généralement acceptés. Je ne crois pas que ce soit juste, de la part du député, que de dénigrer les chiffres présentés par le gouvernement fédéral, parce qu'il sait ce qu'en seront les conséquences.

Passons maintenant à la question des transferts, que le député a abordée. Nous devons tous comprendre une chose. Quand nous coupons, que ce soit dans les transferts-loin de nous cette idée-ou dans nos propres dépenses, les provinces en subissent le contre-coup. C'est un peu faux de parler ainsi des compressions, comme si couper dans nos propres dépenses ne va pas toucher les provinces.

Si nous coupons dans nos dépenses militaires et fermons une base dans une province, c'est cette province qui subit la coupe. Le député est-il en train de dire que nous devrions couper dans les pensions de vieillesse? Nous ne le ferons pas. Toutefois, si jamais nous le faisions, le programme d'aide sociale des provinces en subirait les conséquences. Dit-il que nous devrions réduire les subventions de R-D? Si nous le faisions, les universités en souffriraient.

Il n'y a rien que le gouvernement fédéral puisse faire sans que le reste du pays en subisse les conséquences. C'est pourquoi nous ne couperons pas dans les pensions de vieillesse, nous ne couperons pas dans les subventions de recherche et développement et nous ne détruirons pas le Canada.

* * *

[Français]

LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, les scandales qui frappent l'armée s'ajoutent les uns aux autres.

Aujourd'hui, on apprend avec dégoût que plusieurs soldats d'un régiment de Chilliwack ont été photographiés en faisant des bouffonneries devant le cadavre d'un civil irakien déchiqueté par l'explosion d'une mine dans le désert du Koweit. Pas moins de 24 photos auraient été prises avec ce cadavre, sous tous ses angles.

Le ministre peut-il nous indiquer si c'est seulement ce matin qu'il a lui aussi été informé du comportement de ces soldats ou si son prédécesseur le savait depuis longtemps, et dans cette hypothèse, peut-il nous renseigner sur les sanctions qui ont été prises pour éviter qu'un tel comportement disgracieux ne se reproduise?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je suis totalement d'accord avec mon honorable collègue sur le fait que ce genre de situation est absolument inacceptable. J'ai appris que la photo serait publiée hier. J'ai demandé au général Baril de faire enquête là-dessus et je veux assurer mon honorable collègue qu'aussitôt que j'aurai eu les conclusions du général Baril, il me fera plaisir de lui transmettre cette information.

Mais je veux insister sur le fait que ceci est un autre exemple de situations, de choses qui nous arrivent comme cela, et qu'on ne peut pas tolérer. J'aimerais pouvoir dire à mon honorable collègue qu'on peut éliminer toutes les possibilités que de telles choses continuent d'être portées à l'attention du public, mais je ne voudrais pas essayer de lui faire croire une chose sur laquelle je ne peux pas livrer la marchandise.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre peut-il justifier les propos tenus par le porte-parole de l'armée pour l'ouest du pays à l'effet qu'il n'y a rien de grave là-dedans et qu'à son avis, un petit incident de ce genre ne mérite même pas d'être sanctionné?

L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je réalise que c'est souvent difficile de préparer la question supplémentaire et que la réponse, souvent, nous donne justement l'exemple qu'on doit suivre.

Dans ce cas-ci, j'ai dit à l'honorable député que la situation était intolérable. C'est une situation qui s'est produite, il y a déjà un bon bout de temps. J'ai demandé au général, qui est le commandant des forces terrestres, d'essayer de nous apporter une réponse, à savoir la raison pour laquelle c'est arrivé, comment c'est arrivé, et que les sanctions appropriées soient mises en place.

* * *

(1445)

[Traduction]

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, hier, le ministre des Finances a essayé de faire croire aux Canadiens que, en vertu du régime fiscal, les familles ayant un seul revenu ne sont pas traitées différemment des familles ayant deux revenus. Je ne peux pas croire que c'est ce qu'il pense vraiment.

Le fait est qu'une famille ayant un seul revenu de 60 000 $ paie 7 000 $ d'impôts de plus qu'une famille ayant deux revenus.

Pourquoi le ministre des Finances et le gouvernement maintiennent-ils des politiques fiscales qui obligent les familles ayant un seul revenu à payer plus d'impôts?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, ma réponse à cette question est la même qu'hier.


5372

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Réf.): Monsieur le Président, cela explique que le ministre des Finances ait des problèmes à équilibrer les comptes.

Je voudrais vous citer un passage d'un livre paru récemment: «Vous avez un avocat qui gagne beaucoup d'argent. Comme il doit payer pas mal d'impôts là-dessus, il s'arrange pour que l'étude inscrive sa femme sur la liste de paie et verse à sa femme une partie de son traitement, sauf que celle-ci n'a jamais travaillé à l'étude.» C'est ce qu'on appelle le fractionnement du revenu et l'avocat qui a profité de ce stratagème est aujourd'hui le premier ministre du Canada.

Pourquoi le ministre des Finances appuie-t-il un régime fiscal qui encourage les avocats astucieux et les riches magnats à recourir à ce genre de stratagème, alors qu'il est discriminatoire envers la famille moyenne qui ne touche qu'un revenu?

* * *

[Français]

LE MINISTRE DES AFFAIRES INTERGOUVERNEMENTALES

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Affaires intergouvernementales. Le ministre des Affaires intergouvernementales a utilisé le papier du bureau du Conseil privé, qui est son ministère, mais aussi celui de premier ministre, pour convoquer une assemblée partisane de financement dans son comté.

Doit-on comprendre qu'à l'approche des élections, on devra assister de plus en plus souvent à de tels manquements à l'éthique de la part des membres du Cabinet et qu'il faut s'attendre à ce que la morale gouvernementale devienne de plus en plus élastique?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, mes collègues veulent connaître la vérité? C'est que le bureau du ministre des Affaires intergouvernementales a émis un communiqué aux médias disant qu'à telle date, à telle place, le ministre prendrait la parole et qu'il y aurait avec lui un autre ministre ainsi que deux collègues.

C'est un communiqué comme ceux que le premier ministre, le ministre et même le chef de l'opposition et le chef du troisième parti font chaque fois qu'ils ont des activités ou qu'ils se déplacent. Je ne vois pas pourquoi la députée s'indigne tellement.

Mme Pierrette Venne (Saint-Hubert, BQ): Monsieur le Président, comment le ministre du Travail peut-il tenter de justifier la conduite inacceptable du ministre des Affaires intergouvernementales en banalisant la faute qu'il a commise?

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je répète qu'il n'y a pas de manquement ni au code d'éthique ni aux lignes directrices. C'est une pratique que tous les parlementaires utilisent. Mais peut-être devrais-je rappeler à la députée que souvent il vaut mieux regarder un peu dans notre propre cour.

J'aimerais rappeler à la députée que le député de Québec-Est a déjà utilisé le courrier électronique de la Chambre des communes pour inviter tous les députés à acheter un livre dont l'auteur était sa propre épouse, au prix de 20 $, en appelant un numéro de téléphone de la Chambre des communes, 996-4151.

Il faudrait peut-être appliquer un peu de discernement avant de tirer la pierre aux autres, comme je dis.

* * *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea-Gore-Malton, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux.

Le courrier publicitaire non adressé est une plaie, non seulement dans ma circonscription, Bramalea-Gore-Malton, mais dans tout le Canada. Quels résultats aura l'annonce de la ministre pour les Canadiens qui en ont assez de recevoir ce courrier inutile et quelles répercussions aura cette annonce sur le travail de ceux qui distribuent ce courrier?

M. John Harvard (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de sa question et de l'intérêt qu'il porte à cette affaire.

(1450)

Je voudrais répéter ce que la ministre a dit hier, c'est-à-dire que Postes Canada va se retirer du secteur de la distribution des prospectus commerciaux. Toutefois, je voudrais garantir au député que ce retrait se fera par étapes et d'une manière très ordonnée, pour créer le moins de perturbations possible. Ce sera fait là où il existe d'autres possibilités.

Je voudrais aussi faire remarquer au député que ce service de distribution sera transféré directement au secteur privé.

En ce qui concerne le courrier publicitaire de première classe, Postes Canada ne se retirera pas de ce service pour l'instant. Cela aurait des conséquences financières importantes et Postes Canada étudiera ces conséquences avant de prendre une décision.

* * *

L'ÉTHIQUE

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, aujourd'hui, les journaux rapportent de maigres détails concernant les lignes directrices plutôt nébuleuses et évasives du premier ministre en matière d'éthique. Tout porte à croire que, pour le gouvernement, l'éthique est un peu comme le jeu de colin-maillard. C'est comme si tous les Canadiens avaient les yeux bandés, mais, avec un peu de chance, ils arrivent toujours à prendre un ministre du Cabinet en faute.

Personne ne peut expliquer pourquoi le premier ministre tarde tant à déposer ses lignes directrices en matière d'éthique, ce qui permettrait à tous les Canadiens de comprendre ce dont nous parlons.


5373

Ma question s'adresse à n'importe quel ministre: s'il existe vraiment des lignes directrices, le gouvernement pourrait-il les déposer pour que nous en prenions connaissance?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a bien répondu à cette question hier. Il a dit qu'il y avait des communications directes entre le premier ministre et ses ministres, lesquelles revêtaient un caractère confidentiel, et c'est ce qui détermine certaines règles de conduite.

Les articles qui ont paru aujourd'hui dans les journaux reproduisent de simples notes que le conseiller en éthique utilise pour informer divers employés de cabinets ministériels. Il ne s'agit pas des mêmes documents. Ce sont deux choses bien différentes. Le député devrait reconnaître une différence quand il en voit une.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le Président, les Canadiens veulent savoir quelles normes de conduite le gouvernement essaie d'observer.

J'ai ici le code de conduite des ministres au Parlement britannique. C'est un document public qui compte 130 pages. Je l'ai obtenu plus tôt aujourd'hui du haut-commissariat de Grande-Bretagne.

Un autre incident vient de se produire. Le ministre des Affaires intergouvernementales a envoyé des avis concernant des événements pour lever des fonds pour le Parti libéral. Nous ne pouvons pas dire avec assurance que cela contrevient au code de conduite du gouvernement, parce que nous ne savons même pas s'il a un code de conduite.

Est-ce que quelqu'un pourrait dire aux Canadiens ce que sont les lignes directrices en matière d'éthique? Peu importe ce qu'elles sont, le gouvernement pourrait-il les déposer à la Chambre pour que les Canadiens sachent quelles normes régissent la conduite de ses ministres?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le député sera peut-être étonné d'apprendre que toute personne qui prête serment à titre de parlementaire ou de ministre accepte de ce fait un code de conduite de base.

Le député aurait peut-être avantage à revoir son propre code de conduite. Franchement, le code qui régit quotidiennement la conduite à la Chambre des députés du tiers parti est très déplorable.

Si le député veut mettre à l'épreuve le code de conduite des membres du Cabinet, il n'a qu'à examiner les décisions honorables qu'ils prennent. Si un ministre enfreint le code, il prend la décision honorable de démissionner, et c'est ce qu'a fait le ministre de la Défense nationale la semaine dernière.

Ce qui compte, c'est le résultat obtenu dans la pratique. À mon avis, les Canadiens respectent cela.

[Français]

LE MINISTRE DES AFFAIRES INDIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Décidément, monsieur le Président, les membres de ce gouvernement, particulièrement les membres du Conseil des ministres, ont des problèmes avec l'éthique.

La semaine dernière, c'était l'ex-ministre de la Défense, pour les événements que l'on connaît; hier, c'était le ministre des Affaires intergouvernementales qui se servait du papier à en-tête du Conseil privé, ministère du premier ministre, pour faire des annonces partisanes; maintenant, c'est au tour du ministre des Affaires indiennes.

Comment le ministre peut-il expliquer que, dans un document de son ministère daté du mois d'août 1996 qui s'intitule Une source de fierté, le partenariat, le ministère fasse référence directement aux engagements pris par le Parti libéral du Canada envers les autochtones dans son fameux livre rouge? Depuis quand le ministre des Affaires indiennes fait-il la promotion du livre rouge en utilisant l'argent des contribuables?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je fais la promotion du livre rouge des libéraux chaque fois que j'ai l'occasion de parler ou d'écrire.

(1455)

[Français]

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, je trouve inadmissible que le ministre tente de banaliser cela. On a une promotion ici du ministère des Affaires indiennes qui met en valeur le livre rouge, et le ministre dit qu'il n'y a pas de danger et qu'il va saisir toutes les occasions pour mettre de l'avant le livre rouge.

Le ministre devrait convenir qu'il est inapproprié pour le gouvernement d'utiliser des fonds publics à des fins politiques, pour mousser la performance de son gouvernement. Il devrait s'engager à rembourser, à même les fonds du Parti libéral, le Trésor public pour cet abus. Est-ce qu'il va rembourser le Trésor public pour cet abus?

[Traduction]

L'hon. Ron Irwin (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, si c'est là la seule question que le Bloc me pose en deux mois, je ne fais pas trop pitié.

Le livre rouge constitue notre politique. C'était une promesse à l'électorat, et c'est ensuite devenu le programme du Cabinet. Nous disons à la population que telle est notre politique, que c'est ce que nous lui avions promis et que c'est ce que nous avons fait. C'est aussi simple que cela.


5374

L'AGRICULTURE

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture. Le ministre a annoncé vendredi dernier qu'il organisera la tenue d'un référendum sur l'avenir de la commercialisation de l'orge dans l'Ouest.

Je voudrais obtenir quelques éclaircissements du ministre. Au moment où ils entreprennent la commercialisation de leur récolte d'orge de cette année, les agriculteurs de l'Ouest ont vraiment besoin de savoir si, dans le cadre de ce référendum, ils auront la possibilité de se prononcer en faveur d'un double système de commercialisation.

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà eu l'occasion de répondre à cette question à la Chambre.

Nous avons fait très clairement comprendre dans l'énoncé de politique, qui a été communiqué vendredi dernier et encore lundi dernier, que nous poserons une question très claire. Nous voudrons savoir si les agriculteurs désirent écouler toute l'orge, c'est-à-dire aussi bien l'orge fourragère que l'orge de brasserie, sur le marché complètement libre pour toutes les ventes, ou s'ils préfèrent conserver le système actuel, dans lequel la Commission canadienne du blé, modernisée par les divers changements que nous lui apportons, demeure la coopérative de vente à guichet unique pour toutes les exportations d'orge et toutes les ventes d'orge destinée à la consommation humaine. C'est très clair.

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, le ministre a répondu à la question. Il a dit que le double système de commercialisation est exclu.

Cette option est cependant acceptée par de nombreux agriculteurs canadiens de l'Ouest. Le ministre promettra-t-il aujourd'hui qu'il changera d'avis sur cette question et qu'il fera inscrire parmi les choix proposés sur le bulletin de vote le double système de commercialisation?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le Parti réformiste n'aime pas cela quand je change d'avis et il n'aime pas cela non plus quand je ne change pas d'avis. Il m'est très difficile de comprendre leur position.

Pour que leurs électeurs comprennent bien le problème, il est important que les députés réformistes expliquent que le concept de double système de commercialisation aurait pour effet d'affaiblir le système d'établissement de prix en commun. Il rendrait impossible d'offrir des garanties de paiement initial.

L'organisme canadien de commercialisation serait incapable de garantir le volume d'approvisionnement, c'est-à-dire la sécurité d'approvisionnement, sur les marchés mondiaux. Un double système de commercialisation ne permettrait pas non plus de garantir la qualité canadienne.

Voilà certaines des lacunes que le Parti réformiste devrait signaler à ceux qui préconisent cette option.

LE PARC NATIONAL BANFF

Mme Judy Bethel (Edmonton-Est, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien.

Depuis plus de 100 ans, le parc national Banff est le joyau du réseau de parcs nationaux du Canada. Il symbolise le patrimoine canadien. Sa protection est un objectif que partagent tous les Canadiens, d'un océan à l'autre.

Comment la ministre mettra-t-elle en oeuvre les recommandations de l'étude de Bow Valley? Comment parviendra-t-elle à concilier la protection de l'environnement et la viabilité à long terme de l'industrie touristique de l'Alberta?

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Madame la Présidente, je remercie la députée pour une question très réfléchie et bien formulée.

La députée n'est pas sans savoir que, le 7 octobre dernier, la ministre du Patrimoine canadien a annoncé qu'elle prendrait immédiatement des mesures pour mettre en oeuvre certaines de ces recommandations. Elle a mis un terme à l'utilisation de terres du parc national Banff à des fins commerciales. Elle a fait disparaître la piste d'atterrissage, l'enclos des bisons et le camp des cadets. Elle a également créé au nord de la ville un corridor réservé à la faune et elle a établi des réserves naturelles à l'intérieur même du parc.

Pour ce qui est du reste des recommandations, le sous-ministre adjoint des parcs mettra sur pied un comité consultatif chargé d'élaborer une stratégie de mise en oeuvre que la ministre annoncera en avril.

* * *

(1500)

LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au ministre des Finances à propos des modifications qu'on envisage d'apporter au Régime de pensions du Canada. Le ministre a dit que certaines provinces avaient proposé de réduire les prestations versées aux personnes âgées en abolissant la protection totale contre l'inflation.

Ma question est fort simple. Quelle est la position fédérale à ce sujet? Le ministre peut-il dire clairement s'il appuie cette modification ou s'il est prêt à se ranger aux côtés des gouvernements néo-démocrates de la Saskatchewan et de la Colombie-Britannique pour rejeter cette proposition rétrograde qui reviendrait à trahir la confiance des personnes âgées?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, pour commencer, il n'est pas du tout sûr que la position décrite par le député soit celle d'un quelconque gouvernement. Je puis toutefois ajouter que toutes les provinces s'entendent pour dire qu'il faudra une entente globale. Pour y parvenir, nous devrons nous résoudre à des compromis, et nous verrons alors.


5375

De plus, le gouvernement fédéral devra parvenir à un compromis avec les provinces. Il ne peut agir seul dans ce dossier. Le député devrait cependant savoir que, dans un dossier où le gouvernement central a pu agir seul, celui de la nouvelle prestation aux aînés, nous avons non seulement maintenu, mais aussi renforcé l'indexation.

* * *

[Français]

M. TRÂN TRIEÛ QUÂN

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie.

Trân Trieû Quân vient d'être transféré à un camp de travaux forcés quelque part dans la jungle vietnamienne et ce, sans que les autorités consulaires canadiennes n'aient été préalablement avisées.

Puisque le nouveau ministre de la Coopération internationale et de la Francophonie se rendra à Hanoï dans les prochains jours, le ministre s'engage-t-il à adresser, au nom du gouvernement canadien, une demande officielle visant à rapatrier M. Trân Trieû Quân et à informer la Chambre, dès son retour, des résultats de sa démarche?

L'hon. Don Boudria (ministre de la Coopération internationale et ministre responsable de la Francophonie, Lib.): Monsieur le Président, je peux confirmer à cette Chambre et à mon honorable collègue d'en face que j'ai l'intention de me rendre à Hanoï, d'ailleurs, je quitte demain, et que j'ai pleinement l'intention de faire des représentations auprès des plus hautes instances vietnamiennes.

Bien sûr, je ne peux pas négocier sur le parquet de la Chambre et la Chambre ne s'en attend pas, mais j'ai l'intention de soulever ce dossier et de demander le rapatriement de M. Trân Trieû Quân pour des raisons humanitaires.

* * *

[Traduction]

LA JUSTICE

Mme Diane Ablonczy (Calgary-Nord, Réf.): Monsieur le Président, il y a quelques semaines à peine, dans Calgary-Nord, ma circonscription, des parents ont remarqué qu'un prédateur sexuel épiait des enfants du quartier et ils l'ont fait arrêter par la police. Cet homme, qui est un pédophile notoire, était en liberté sous caution grâce à l'approche indulgente des libéraux en matière judiciaire.

Le ministre de la Justice n'ignore pas que les parents canadiens, qui s'inquiètent de la sécurité de leurs enfants, ont reçu un choc terrible, hier, lorsqu'une enfant de quatre ans a été enlevée et violée non loin de la maison du ministre lui-même.

Quand le ministre de la Justice donnera-t-il aux parents ne serait-ce qu'un outil fondamental pour protéger leurs enfants, tel un registre national des pédophiles?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, déjà l'an dernier, le solliciteur général a mis en place le registre des agresseurs sexuels d'enfants, qui fonctionne depuis quelques mois et qui, je crois, a directement contribué à améliorer la sécurité de la population.

La députée n'ignore pas non plus que, ces dernières semaines, le gouvernement a présenté le projet de loi C-55, qui prévoit des mesures précises et pratiques permettant aux juges d'imposer aux délinquants sexuels, et notamment à ceux qui s'en prennent aux enfants, non seulement une peine d'emprisonnement correspondant au délit commis, mais encore un régime de contrôle et de surveillance après leur mise en liberté afin de minimiser le risque élevé qu'ils récidivent.

J'exhorte la députée et ses collègues à appuyer ce projet de loi qui, nous en avons la ferme conviction, protégera mieux la société contre des risques aussi inacceptables.

* * *

[Français]

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais souligner la présence à la tribune d'une délégation de membres du groupe français de l'Association interparlementaire Canada-France dirigée par le sénateur Jean Delaneau.

Des voix: Bravo!

(1505)

[Traduction]

Le Président: Chers collègues, je voudrais également attirer votre attention sur la présence à notre tribune de Son Excellence José Lello, secrétaire d'État aux Communautés portugaises.

Des voix: Bravo!

* * *

[Français]

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

M. Gilles Duceppe (Laurier-Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais savoir de la part du gouvernement ce qui est prévu quant aux travaux parlementaires d'ici à deux semaines, puisque nous ne serons pas ici la semaine prochaine.

L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Aujourd'hui et demain, nous allons continuer avec le calendrier que nous avons déjà commencé. Après ce débat, nous allons retourner à la motion C-60, sur les agences d'inspection des aliments, et nous allons aussi essayer de finir le débat sur les projets de loi C-26 et C-29.

5376

[Traduction]

Nous étudierons ensuite le projet de loi C-6 sur l'extraction minière au Yukon, le projet de loi C-51 sur les ressources en eau du Nunavut, le projet de loi C-49 sur les tribunaux administratifs, le projet de loi C-47 sur les techniques de reproduction, le projet de loi C-59 sur le transport de voyageurs par mer, le projet de loi C-57 sur Bell Canada, et le projet de loi C-35 modifiant le Code du travail.

Tôt après la semaine de relâche, le gouvernement prévoit de présenter un projet de loi sur un registre des électeurs. Dès que ce sera possible du point de vue de la procédure, nous allons demander que ce projet de loi soit renvoyé à un comité avant la deuxième lecture.

Il y a quelques semaines, j'ai fait part à la Chambre de mes inquiétudes quant à l'avancement des travaux. Je voudrais remercier la Chambre de s'être effectivement penché sur cette question. Je dois maintenant demander aux comités de mettre les bouchées doubles. Dix-huit projets de loi ont déjà été renvoyés aux comités et d'autres suivront. Je compte que les comités feront preuve d'autant de diligence que la Chambre elle-même dans l'étude des projets de loi.

Je souhaite à tous les députés une bonne semaine de l'Action de grâce. J'espère les revoir tous en bonne santé à la reprise des travaux.

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5376

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR L'AGENCE CANADIENNE D'INSPECTION DES ALIMENTS

La Chambre reprend l'étude de la motion.

Mme Marlene Cowling (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, en tant qu'agricultrice de carrière et représentante des électeurs de Dauphin-Swan River, je me réjouis de cette occasion d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-60, ou Loi sur l'Agence canadienne d'inspection des aliments.

Les services d'inspection des aliments et de quarantaine ont toujours constitué une priorité au Canada. Le système canadien d'inspection des aliments et de quarantaine est l'un des plus efficaces au monde. La confiance des Canadiens dans la qualité et la salubrité de leur approvisionnement alimentaire reste inégalée. Toutefois, notre système d'inspection des aliments et de quarantaine est soumis à une foule de nouvelles pressions. Le Canada doit relever ces défis, et son efficacité à le faire aura une incidence décisive sur l'industrie alimentaire et sur tous les Canadiens.

L'agriculture et l'agroalimentaire représentent 8 p. 100 de notre produit intérieur brut et créent, directement ou indirectement, de l'emploi pour 1,9 million de Canadiens. En outre, les pêches commerciales du Canada comptent parmi les plus importantes au monde, et la production de ce secteur, aquaculture comprise, est évalué à quelque 4 milliards de dollars par année et mobilisent quelque 120 000 travailleurs.

Dans nos villes comme dans nos régions rurales comme la circonscription de Dauphin-Swan River, l'industrie alimentaire fait partie intégrante de nos vies quotidiennes et fournit la pierre angulaire de bon nombre de collectivités. Il ne faut pas tenir cet apport pour acquis. La croissance et le succès futurs de l'industrie alimentaire, depuis la pêche et l'agriculture jusqu'à la restauration et à la vente au détail, dépendront du maintien de la qualité élevée de nos produits et de la confiance inébranlable du consommateur dans la salubrité de notre approvisionnement alimentaire. Faire face aux nombreuses pressions que je viens d'évoquer exige des changements, moins de double emploi et de chevauchements, et plus de souplesse dans la recherche de nouveaux modes de fonctionnement.

(1510)

En 1994, les ministres fédéral, provinciaux et territoriaux de l'Agriculture se sont engagés à s'attaquer à ces défis en donnant leur aval à l'Ébauche du système canadien d'inspection des aliments, ou SCIA. Ce système invite tous les paliers de gouvernement à étudier la possibilité d'harmoniser leurs normes relatives aux aliments et leurs services d'inspection et de quarantaine de façon à en arriver à un système unique et intégré d'inspection des aliments et de quarantaine à la grandeur du pays. Les objectifs du SCIA consistent à protéger la santé des consommateurs canadiens, à protéger notre réputation internationale pour la qualité et la salubrité de nos aliments, et à maintenir un système efficace et efficient d'inspection des aliments et de quarantaine.

En mai de l'an dernier, le Bureau des systèmes d'inspection des aliments-le BSIA-a vu le jour; son mandat consistait notamment à évaluer la faisabilité de mettre en place un système unique d'ins-pection des aliments et de quarantaine au palier fédéral-une première étape dans l'implantation d'un système canadien d'inspection des aliments.

En juillet 1995, le BSIA a publié un document de travail intitulé: Organisation de la composante fédérale du système d'inspection des aliments-options envisageables. On y présentait quatre possibilités. Le document de travail a été largement diffusé et s'est révélé très efficace pour ce qui est de stimuler et de faire avancer le dialogue avec les partenaires sur les changements proposés. Ces discussions ont joué un rôle clé dans le processus de prise de décisions qui a mené à l'annonce de la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments dans le Budget 1996.

Le projet de loi que nous proposons aujourd'hui jouit d'un vaste appui des provinces et de l'industrie. L'agence va réduire les coûts et assurer une plus grande uniformité des méthodes et normes d'inspection et de quarantaine. La nouvelle loi définit clairement les responsabilités de l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Elles seront concentrées dans six domaines clés: les programmes de santé des animaux et de protection des végétaux; le commerce intérieur et extérieur et la fraude économique; la politique d'inspection et de quarantaine; l'évaluation et la vérification de l'inspection et des activités connexes; l'enregistrement, la certification et l'approbation; et les mesures d'application.

La nouvelle agence s'occupera aussi de faire respecter les normes et règlements en matière de salubrité des aliments. Elle jouera un rôle de premier plan pour ce qui est de cerner, d'évaluer et de recommander des options de gestion du risque pour s'attaquer aux problèmes de santé liés aux aliments.

Comme on l'a précisé en 1996, Santé Canada demeurera chargé d'établir la politique et les normes de salubrité et sera responsable de vérifier les activités d'inspection des aliments et de quarantaine de l'Agence.


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La création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments favorisera une meilleure délimitation des rôles et des responsabilités, et facilitera le processus de prise de décisions. L'agence maintiendra des liens étroits avec le BSIA pour faire en sorte que le travail d'implantation du Système canadien d'inspection des aliments soit poursuivi et intensifié.

L'agence accroîtra la souplesse du gouvernement grâce à l'adoption d'un cadre financier s'inspirant du secteur privé. Ce cadre comprend un horizon pluriannuel et une structure de vote simplifiée, concilie les besoins en information du Parlement et ceux des autres groupes clients, et réduit au minimum les coûts des systèmes administratifs et financiers. Pour des motifs de compétitivité et d'efficience, l'agence aura également la possibilité d'acheter des services dans des domaines comme la paie et les locaux.

Le fait de retirer des ministères les services d'inspection des aliments présente beaucoup d'autres avantages. Une agence autonome encouragera l'éclosion d'une nouvelle culture de l'entreprise qui ira au-delà des anciennes méthodes et qui créera de nouveaux partenariats avec le secteur privé. Le personnel va travailler dans un environnement plus souple et plus axé sur la clientèle et va produire des méthodes plus uniformes, qu'il s'agisse du pain, du chocolat, du saumon en boîte ou du ragoût de boeuf.

En outre, la nouvelle agence sera suffisamment souple pour donner suite aux accords fédéraux-provinciaux en rationalisant et en trouvant de nouvelles façons d'offrir les services, comme laisser assumer les fonctions provinciales d'inspection et de quarantaine par des inspecteurs fédéraux et des fonctions fédérales par des inspecteurs provinciaux, et charger des entreprises fédérales-provinciales d'administrer ensemble les programmes fédéraux et provinciaux d'inspection et de quarantaine.

(1515)

Toutefois, les ministres fédéraux et provinciaux demeureraient responsables de leurs obligations statutaires respectives. Cette approche plus rationalisée, efficace et attentive de l'inspection des aliments et de la quarantaine constitue manifestement une avenue importante pour assurer une confiance soutenue dans la salubrité et la qualité de notre approvisionnement alimentaire.

Non seulement cette nouvelle agence sera bénéfique pour les circonscriptions rurales, comme Dauphin-Swan River, mais elle aidera aussi tous les Canadiens. Je demande à tous les députés d'appuyer cette importante mesure législative.

[Français]

M. Jean Landry (Lotbinière, BQ): Madame la Président, le projet de loi C-60 propose la création d'une agence publique appelée Agence canadienne d'inspection des aliments. Comme son nom l'indique, cette agence sera chargée d'offrir les services fédéraux d'inspection des aliments, et des services connexes, tels que le rappel d'aliments et les enquêtes sur les toxi-injections alimentaires ainsi que la gestion des situations d'urgence liées à la salubrité des aliments.

Dans la documentation du gouvernement, on nous dit que cette nouvelle agence «permettra l'élimination du chevauchement et du dédoublement, la consolidation des ressources ainsi qu'une plus grande efficacité et une réduction d'environ 10 p. 100 des coûts globaux du fédéral associés à l'inspection des aliments».

En fait, il s'agit d'un regroupement, d'une rationalisation. L'objectif global de cette mesure est de créer un système d'inspection plus efficient et plus efficace.

La fusion des activités fédérales favorisera la mise en place d'un système d'inspection convenant à l'approche HACCP-système d'analyse des risques et maîtrise des points critiques-de la production des aliments. Protéger les consommateurs canadiens serait le mot d'ordre de la nouvelle agence.

Déjà, bon nombre d'entreprises canadiennes de transformation des aliments ont déjà adopté des éléments du HACCP. S'il s'agit actuellement d'une approche préventive, cette dernière comporte des avantages manifestes: premièrement, une garantie de salubrité exceptionnelle pour le consommateur; deuxièmement, une norme acceptée à l'échelle internationale pour les ventes à l'exportation; et, troisièmement, un moyen économique de réduire le gaspillage et les rappels.

Avec l'approche HACCP, il s'agit d'un système d'analyse des risques et de maîtrise des points critiques. En d'autres mots, il s'agit de cerner les risques, de dresser une liste des mesures préventives et d'établir seul les critiques aux différents niveaux d'évolution de la situation.

Pour revenir à l'idée de créer l'Agence canadienne d'inspection des aliments, nous sommes d'accord avec le fait qu'il n'y ait plus à l'avenir qu'un seul interlocuteur en matière d'inspection des aliments au sein du fédéral; mais, du même souffle, nous ne pouvons accepter que ce projet de loi reste dans sa forme actuelle, et je m'explique.

Veuillez noter que le projet de loi compte 94 articles au total. Le projet de loi tel que présenté par le gouvernement peut devenir un véritable nid de patronage. Lorsque le gouverneur en conseil, par l'article 5, nomme le président et le premier vice-président de l'agence à titre amovible pour un mandat renouvelable d'au plus cinq ans, le ministre serait ici tenté de nommer un ami.

Et comme si ce n'était suffisant, par l'article 10, il nomme les membres du comité consultatif de 12 membres.

L'odieux, c'est de laisser le ministre, par l'article 22, approuver le plan d'entreprise ou quinquennal de l'agence. On sait que cette dernière, dès sa constitution et à tous les cinq ans par la suite, devra préparer un plan d'entreprise ou quinquennal.

De fait, si on laisse le ministre choisir le président et le vice-président de l'agence ainsi que les 12 membres du comité consultatif, il peut, de plus, contrôler l'agence en orientant ses grandes politiques. Voilà autant de manières de procéder qui ne sont pas très rassurantes sur la transparence du gouvernement.

Ce n'est pas tout. Selon le projet de loi, le gouvernement donne à l'agence et à ses dirigeants, par l'article 17, le pouvoir de rendre disponibles, notamment par vente ou attribution de licence, les brevets, les droits d'auteur, les dessins industriels, etc. À ce chapitre, je n'ai pas vu de critères de vente ou d'attribution. Ainsi, le prix pourrait-il être moins élevé à un donateur à la caisse électorale du Parti libéral? Comme je l'ai dit précédemment, le gouvernement


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tente de mettre à sa main l'agence et d'en faire un beau nid de patronage.

(1520)

Selon le projet de loi C-60, le gouvernement veut regrouper les activités relatives à l'inspection des aliments et les services zoosanitaires et phytosanitaires, de même que des activités connexes, dont les rappels d'aliments, les enquêtes sur les toxifonctions alimentaires et la gestion des situations d'urgence liées à la salubrité des aliments. Pour remplir son mandat, l'agence, qui comptera environ 4 500 employés, aura un budget initial de 300 millions de dollars et devrait amorcer ses opérations au début de l'année prochaine, soit en 1997.

Ses 4 500 employés proviendront de trois ministères. Il y en aura environ 3 900 de Agriculture et Agroalimentaire Canada, 400 de Pêches et Océans, et 200 de Santé Canada. Pour ces quelque 4 500 employés qui joindront l'agence, ces derniers auront une garantie d'emploi de deux ans. On peut d'ores et déjà s'interroger sur l'avenir de ces gens. Et lorsqu'on parle que la nouvelle agence devra examiner le besoin d'introduire des primes de départ volontaire, j'ose espérer que l'agence va réduire son personnel uniquement par attrition, c'est-à-dire par le départ des retraités.

Actuellement, le gouvernement fédéral, pour assumer ses rôles et fonctions en matière d'inspection des aliments au pays, dépense annuellement approximativement 340 millions de dollars. Je tiens ce chiffre de l'annexe B du document de travail intitulé «Le système fédéral d'inspection des aliments-Choix organisationnels, juillet 1995». Cette dépense est répartie entre Santé Canada, Agriculture Canada et Pêches et Océans Canada.

Selon le projet de loi C-60, on compte réduire d'environ 10 p. 100 les coûts globaux, et de 44 millions de dollars annuellement à compter de 1998-1999. Avec cette réduction d'environ 10 p. 100, et de 44 millions de dollars du budget alloué à l'inspection des aliments, rien ne nous garantit le statu quo en ce qui a trait à la récupération des coûts.

La Fédération canadienne de l'agriculture appuie la création d'un organisme unique d'inspection des aliments, tel que le propose le ministre de l'Agriculture avec le présent projet de loi. Toutefois, elle a émis certaines réserves.

Elle appuie la création, à condition que cette réorganisation n'entraîne pas de nouvelles mesures de récupération des coûts. De plus, elle souhaite vivement que des producteurs soient représentés au sein du conseil consultatif. À cet égard, je pense qu'il s'agit là d'une excellente proposition.

En plus, la Fédération canadienne de l'agriculture espère fortement qu'au niveau de la compensation versée à une personne pour les coûts engagés pour le traitement, que cet article, l'article 71, inclut «et pour autres mesures». Ainsi, on pourra tenir compte des coûts additionnels, comme la mise en quarantaine, le nettoyage, le remplacement des propriétés endommagées ou détruites, les frais de reconstitution des stocks, etc.

L'impact d'un tel ajout au texte législatif ferait en sorte que les agriculteurs et agricultrices ne se trouvent pas en situation désavantageuse parce qu'ils déclarent une maladie. Comme vous le savez, la circonscription de Lotbinière que j'ai l'insigne honneur de représenter dans cette enceinte est la plus grande circonscription agricole du Québec.

Le Québec appuie la création de l'agence parce qu'elle regroupe les services d'inspection. Il n'y aura, à partir de maintenant, qu'un seul interlocuteur. Par contre, il serait contraire à la position du Québec que le fédéral, via cette nouvelle agence, fixe unilatéralement les normes nationales. Il serait grandement souhaitable de voir un nouveau partage des responsabilités administratives dans le domaine de l'inspection des aliments, et ce, sans renoncer à l'exercice de leurs compétences législatives respectives, ni modifier le partage des pouvoirs établis dans la Constitution.

Pour l'Union des producteurs agricoles, l'UPA, elle abonde dans le même sens que le gouvernement du Québec. L'UPA ne veut pas que les provinces, et plus particulièrement le Québec, aient leur mot à dire au niveau de l'orientation des travaux de l'agence à l'avenir.

Le Bloc demande à ce que les provinces, et bien entendu le Québec, soient consultées et écoutées en ce qui a trait à la direction qu'entend prendre l'agence au cours des prochaines années. S'il est logique et plutôt normal que le gouvernement fédéral agisse en accord avec les provinces en matière d'inspection des aliments, il en va de la santé et de l'intérêt des consommateurs. Il faut que le fédéral respecte les juridictions législatives.

(1525)

Il faut réduire les chevauchements coûteux. C'est déjà un pas dans la bonne direction en regroupant les services d'inspection des ministères de l'Agriculture, de l'Agroalimentaire, Santé Canada, Pêches et Océans Canada. Je crois qu'il faut préconiser l'harmonisation et la simplification des normes afin de réduire le fardeau des exigences réglementaires et de favoriser la compétitivité des entreprises.

En terminant, je réitère qu'il faut aller dans le sens de la concertation avec les partenaires et dans un grand respect des juridictions législatives. À cet égard, je renvoie mes collègues du gouvernement à la lecture des articles 91 à 95 de la Loi constitutionnelle de 1867.

[Traduction]

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux d'ajouter ma voix à celle de mes collègues pour exprimer mon appui au projet de loi.

Comme le savent les députés, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire a présenté un projet de loi qui illustre très bien la volonté du gouvernement de protéger la santé des Canadiens. Ce projet de loi met en place un nouveau système d'inspection des aliments. Notre priorité première a toujours été et reste d'assurer la santé des Canadiens en leur garantissant que les aliments qu'ils consomment ne présentent aucun danger.

M. Pickard: C'est exact.

M. Volpe: Mon collègue de la circonscription agricole d'Essex-Kent me donne raison.


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Le nouveau système conserve le même objectif tout en étant plus efficace et moins coûteux pour tous les intervenants et, surtout, pour les consommateurs et les contribuables. Le ministre a présenté une mesure législative qui jette les bases d'un système canadien où les normes et les services d'inspection sont mieux harmonisés.

Comme il était dit dans le discours du Trône, le gouvernement est prêt à collaborer avec les provinces intéressées pour que la nouvelle agence coordonne les activités au niveau fédéral et au niveau provincial.

Je veux parler aujourd'hui du rôle de Santé Canada dans le nouveau système d'inspection des aliments. Les députés savent sans doute que Santé Canada a un rôle majeur à jouer dans la protection de la santé des Canadiens et le projet de loi est tout à fait conforme à ce rôle. Il table sur les atouts uniques du ministère.

Tout d'abord, le projet de loi éliminera les chevauchements qui existent entre Agriculture et Agroalimentaire Canada, Pêches et Océans Canada et Santé Canada en ce qui concerne l'inspection des aliments. Il ne s'agit pas d'une mesure insignifiante. L'agence sera entièrement responsable des services d'inspection des aliments et des services connexes.

Santé Canada concentrera son attention sur la politique en matière de salubrité des aliments, sur l'établissement de normes et sur la recherche nécessaire pour appuyer le système. Ce ministère évaluera l'efficacité des activités de l'agence relativement à la salubrité des aliments. Bref, Santé Canada se concentrera sur le côté scientifique, qui est le fondement d'un système d'inspection fiable et efficace.

Vous me pardonnez si j'applaudis à cette initiative parce que cette nouvelle approche est sensée. Elle cadre bien avec l'idée du gouvernement de mettre l'accent sur les principaux facteurs déterminants de la santé et il y peu de choses qui sont plus importantes que de bons aliments sains et nutritifs. Elle cadre bien aussi avec les autres fonctions de protection de la santé de Santé Canada et fournit les ressources scientifiques nécessaires pour exécuter ces fonctions.

Ces fonctions d'élaboration de politiques et d'établissement de normes feront appel aux compétences et aux ressources que le ministère a acquises au cours des années. Nous allons nous servir à la fois de notre expérience et de notre expertise.

(1530)

La nouvelle agence continuera d'utiliser une approche scientifique sensée. Elle continuera de baser ses activités sur l'évaluation des risques afin que nos priorités en matière d'inspection des aliments soient bien établies.

Ces fonctions continueront de faire appel à l'importante infrastructure de laboratoires de Santé Canada. Notre réseau national d'installations et d'experts permettra au système d'inspection des aliments de trouver les dangers et de les évaluer de façon efficace grâce à la toxicologie, à la surveillance épidémiologique et aux études des effets sur la santé humaine. Ces installations formeront la base pratique de la capacité du ministère d'établir des normes et d'élaborer des politiques. Ce genre de travail est le fondement de tout système moderne et fiable d'inspection des aliments.

Les employés de Santé Canada étudient toute une série de risques que les aliments peuvent poser pour la santé. Ses chercheurs et ses analystes évaluent les risques chimiques, par exemple la menace des allergènes. Ils évaluent aussi les risques biologiques, comme ceux que pose la salmonelle, ainsi que d'autres problèmes comme la présence occasionnelle de fragments de métal dans les produits alimentaires. Ce n'est pas une idée très réjouissante.

Ces experts sont branchés sur le système plus vaste de renseignements sur la santé publique. Ils sont en contact avec tout un réseau de personnes et d'organismes, comme le Laboratory Centre for Disease Control, ainsi qu'avec des médecins et des spécialistes de la santé dans tout le Canada. Cela veut dire que notre système national de surveillance des maladies est capable de déterminer rapidement si un nouveau problème de santé est d'origine alimentaire.

Les scientifiques et les chercheurs de Santé Canada ne travaillent pas de façon isolée dans leurs laboratoires. En vertu de ce nouveau modèle, ils seront constamment en rapport avec l'agence. Ils tiendront compte de l'intérêt que peut avoir l'industrie à respecter des normes satisfaisantes pour avoir la confiance des consommateurs canadiens et étrangers.

Santé Canada apporte un autre avantage au nouveau système d'inspection, ses contributions et ses contacts à l'échelle internationale. Dans un monde où le libre-échange devient de plus en plus la norme et où les produits alimentaires trouvent des acheteurs partout, nous avons besoin de normes cohérentes et équitables, comme on l'a dit, ce matin, au cours du débat sur l'accord bilatéral avec Israël. Mon collègue, qui vient d'une municipalité rurale très dynamique du sud-ouest de l'Ontario, Essex-Kent, corroborera la chose.

Le ministère veillera à ce que le Canada joue un rôle à part entière dans ce processus. Santé Canada est depuis longtemps connu et respecté pour assurer aux Canadiens un approvisionnement alimentaire parmi les plus sûrs et les plus sains du monde. Cette mesure législative permettra de perpétuer cette tradition. Les Canadiens auront à leur service une équipe forte et fiable d'experts médicaux, de scientifiques et de chercheurs qui travailleront dans les laboratoires et sur le terrain pour veiller à ce que les normes et les politiques soient fondées sur les meilleures recherches qui soient.

Grâce à cette mesure législative, les Canadiens pourront être sûrs d'avoir des aliments de la meilleure qualité et un système d'inspection efficace et bien organisé. Je crois que ce projet de loi a l'appui des provinces et de tous les intervenants. À mon avis, il mérite l'appui de tous les députés de la Chambre.

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la Présidente, le projet de loi C-60 s'intitule Loi portant sur la création de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, modifiant et abrogeant certaines lois en conséquence. Le texte constitue l'Agence canadienne d'inspection des aliments en vue du regroupement et de


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l'amélioration de l'efficacité des services fédéraux d'inspection des aliments, des animaux et des végétaux, de même que l'intensification de la collaboration entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans le domaine.

(1535)

Cette agence viendra prendre la relève du vétuste Comité interministériel de la réglementation des aliments, créé en 1986. Il y aura donc un seul interlocuteur dans ce domaine au niveau fédéral.

Le texte énonce aussi la mission de la future agence, prévoit son organisation, la gestion de ses ressources humaines, et établit ses obligations. Il modifie en outre des dispositions relatives au contrôle d'application et aux peines de plusieurs lois ayant trait aux aliments et à la santé des animaux et des végétaux dont l'Agence sera chargée d'assurer et de contrôler l'application.

L'objectif de simplifier le système d'inspection des aliments en vue d'en éliminer les duplications, de favoriser le commerce et d'améliorer le respect des règles visant la sécurité des aliments est tout à fait louable. Il a été énoncé dans le dernier budget fédéral et relativement bien accueilli par les gouvernements du Québec et provinciaux.

Il faut dire que le vérificateur général, dans son rapport de 1994, recommandait fortement que le système d'assurance de salubrité des aliments soit revu de façon à en corriger les nombreuses lacunes. Notamment, il pointait du doigt le Comité interministériel de la réglementation des aliments pour son manque de rigueur. Ce comité, formé conjointement de Santé Canada, Agriculture et Agroalimentaire, Pêches et Océans et Revenu Canada, n'a pas toujours rempli son mandat d'apporter des changements précis au système d'assurance de la salubrité des aliments et de promouvoir l'innovation et l'efficience des méthodes d'inspection.

De plus, le Comité aurait omis de communiquer les résultats de ses travaux, comme son mandat l'exigeait. Le vérificateur général soulignait aussi l'incapacité de Santé Canada à garantir l'application de la loi de façon efficace et intégrale. Bref, de l'avis du vérificateur général et de la majorité des intervenants, le système d'assurance de la salubrité des aliments devait être revu.

Mais aussi louable que puisse être l'objectif d'avoir un seul interlocuteur en matière d'inspection des aliments au sein du gouvernement fédéral, la façon dont s'y prend le gouvernement est tout à fait inacceptable et constitue un autre exemple de non-respect fédéral des juridictions provinciales. En ce sens, le projet de loi C-60 constitue un affront direct à la volonté souvent exprimée du Québec d'assumer toutes les responsabilités que lui confère le partage des champs de compétence.

De plus, même si la reconnaissance des champs de juridiction faisait partie du projet de loi, la formulation actuelle de plusieurs articles ferait en sorte que le projet de loi C-60 resterait un mauvais projet de loi qui ne respecterait pas les objectifs qu'il se fixe lui-même et continuerait d'être dénoncé par l'opposition officielle.

Par exemple, le gouvernement dit vouloir améliorer l'efficacité des services fédéraux d'inspection des aliments, des animaux et des végétaux. Dans un système comme le nôtre, avec des représentants élus, efficacité va souvent de pair avec transparence. Le travail réalisé derrière des portes closes profite trop souvent, on le sait, à ceux qui sont derrière la porte aux dépens de la population qui, elle, reste de l'autre côté.

Or, le projet de loi C-60 donnait de multiples occasions au gouvernement de faire preuve de cette transparence. Par exemple, à l'article 5, on peut lire que:

Le gouverneur en conseil nomme le président et le premier vice-président de l'Agence à titre amovible pour un mandat renouvelable d'au plus cinq ans.
Aucune consultation, aucune étude en comité, rien. De simples nominations unilatérales selon la bonne humeur du gouvernement.

C'est sûr que cette formulation ne peut être acceptée par l'opposition officielle. Cette façon de faire représente une porte grande ouverte à la discrimination et au patronage. Si le gouvernement fédéral avait vraiment l'intention de procéder de façon transparente, il aurait fait en sorte que les nominations visées soient faites dans le cadre des travaux du Parlement. Ces nominations auraient dû passer par l'étude du Comité parlementaire de l'agriculture et de l'agroalimentaire au minimum pour étude, sinon pour approbation finale.

Même chose à l'article 10, traitant du comité consultatif, qui se lit comme suit:

(1) Est constitué un comité consultatif formé d'au plus 12 membres nommés à titre amovible par le ministre pour un mandat renouvelable d'au plus trois ans.
(1540)

Là encore, il est inacceptable que le ministre nomme seul les personnes qui vont siéger sur le comité consultatif. Comme ce comité sera chargé de conseiller le ministre pour l'aider dans le choix de ses politiques, il est important que toutes les nominations visées par cet article passent par le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire. De cette façon, il sera impossible pour le ministre de céder à la tentation bien réelle d'y nommer des amis ou des gens qui partagent sa philosophie.

Un autre voeu pieux du gouvernement fédéral, celui de travailler en collaboration avec les gouvernements du Québec et provinciaux. Pourtant, rien dans le projet de loi C-60 ne traduit cette intention. L'occasion était pourtant belle ici. En nommant un comité consultatif chargé de conseiller le ministre, le gouvernement aurait pu inclure une garantie de représentation du Québec qui représente près de 25 p. 100 de la population canadienne, et de ce fait, s'assurer qu'au moins un membre du comité consultatif sur quatre vienne du Québec, le tout afin de s'assurer que le point de vue du Québec soit bien représenté au sein de ce comité. Aussi, ces nominations auraient pu être approuvées par les gouvernements provinciaux.

Mais, une fois de plus, les bonnes intentions annoncées tout haut ne se concrétisent pas dans l'action de ce gouvernement. À l'intérieur de ce même article, mais au paragraphe (4), il est écrit que le ministre nomme le président du comité consultatif parmi ses mem-


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bres. Encore une fois, le ministre veut mettre l'agence à sa main en nommant lui-même le président du comité consultatif.

Au lieu de laisser les gens compétents du milieu, qui ont à travailler avec des gens de l'inspection des aliments, se choisir un président entre eux, le ministre nommera probablement un de ses amis ou quelqu'un qui lui sera loyal pour que cette personne fasse valoir ou valide son point de vue en tout temps. Ce manque de transparence est évident dans la formulation de plusieurs articles au projet de loi C-60, que ce soit à l'article 22, «Plan d'entreprise», à l'article 23, «Rapport d'activités», à l'article 26, «Consultations», ou à l'article 32, «Vérification», ou partout ailleurs dans le projet de loi C-60, quand des nominations sont faites ou des rapports sont présentés.

À ces endroits, il faut que ces actions soient étudiées et approuvées par le comité permanent. Ensuite, ces nominations et modifications pourront aller à la Chambre, devant l'ensemble des députés. Cette façon de faire n'est pas déraisonnable. En démocratie, il n'y a jamais assez de transparence, il vaut donc mieux prévenir.

Mon dernier point porte sur l'article 11 qui traite de la mission de la nouvelle Agence canadienne d'inspection des aliments. Cette agence serait chargée de s'assurer de contrôler l'application d'une série de lois fédérales existantes. Jusqu'ici tout va bien.

Cependant, au paragraphe (4) du même article, on mentionne que: «Le ministre de la Santé est chargé, entre autres, de l'élaboration des politiques et des normes relatives à la salubrité et à la valeur nutritive des aliments vendus au Canada.» À ce niveau, la position du gouvernement du Québec et de l'opposition officielle est tout à fait claire.

Je ne sais pas, depuis trois ans, combien de fois j'ai cité cet article qui fait partie de la Constitution: «En vertu de la Loi de 1867, article 92, paragraphes (7) et (5), de même que de l'interprétation de nombreux tribunaux, les domaines de la santé et des services sociaux relèvent de la compétence exclusive des provinces.»

En terminant, le Bloc québécois a toujours exigé que le fédéral respecte les compétences provinciales en matière de santé et nous entendons continuer à presser les libéraux de se retirer du domaine et transférer tous les budgets fédéraux en matière de santé au Québec. Je ne pense pas que le Bloc québécois appuie le projet de loi C-60 dans sa formule actuelle.

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Madame la Présidente, permettez-moi de constater, en premier lieu, le manque d'intérêt du parti gouvernemental et du troisième parti face à ce projet de loi, puisque le Bloc québécois. . .

M. Volpe: Pourquoi dire cela? Où sont les députés du Bloc? Nous sommes ici.

M. Dubé: Il n'y a que le secrétaire parlementaire du ministre de la Santé qui semble s'y intéresser.

Il faut aussi constater que le gouvernement libéral utilise un procédé assez particulier. Il l'a fait aussi dans le cas de l'assurance-emploi, c'est-à-dire qu'il utilise le procédé de la préétude pour sauter l'étape de la deuxième lecture, une étape essentielle dans la vie démocratique, dans la vie parlementaire où on aurait pu, à ce moment-ci, proposer des amendements.

(1545)

Mais non, encore une fois, le gouvernement tente de bousculer le travail des parlementaires et de la démocratie. Comme mes collègues, je me prononcerai en faveur de la création par le fédéral d'une seule agence d'inspection des aliments.

Vous trouverez peut-être curieux qu'un souverainiste appuie la création d'une agence canadienne dans le domaine de la santé. Je m'explique. Entre 1980 et 1985, j'ai travaillé pour l'ancien ministre de l'Agriculture du Québec.

M. Crête: Le meilleur.

M. Dubé: Oui, dans le temps ça allait très bien dans le secteur de l'agriculture. Il faut rappeler que le Québec a procédé à une unification, à un fusionnement des différents services qui concernent l'agroalimentaire depuis au moins 1978. Le ministère de l'Agriculture du Québec s'appelle ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et inclut le domaine des pêches et la commercialisation.

Le fédéral qui est plus grand, plus gros, prend plus de temps à réagir et comprend en 1996, presque 18 ans plus tard, qu'il faut fusionner trois services d'inspection d'aliments de trois ministères différents. Il n'y a pas si longtemps il y avait même un tel service au ministère de l'Industrie.

On nous dit qu'il faut faire ça parce que ça représente une économie de 40 millions. Si les chiffres sont bons et qu'on additionne ça sur un ensemble d'années, disons les 10 dernières années, ça signifie que le gouvernement fédéral, à cause de son manque d'efficacité et en dédoublements à l'intérieur même de trois ministères de son gouvernement, a perdu 400 millions de dollars. Aujourd'hui on admet qu'on a été inefficace pendant au moins 18 ans, et cela est inacceptable.

Oui, on est favorable à ce que le fédéral fasse le ménage. Mais en se servant des différents articles de ce projet de loi, le gouvernement, par l'entremise du ministre de l'Agriculture, se garde, comme à l'habitude des autres ministres, d'ailleurs dans la plupart des projets de loi, la possibilité de s'ingérer dans une compétence provinciale. On dit: «[. . .] peut établir des ententes avec les provinces». Moi j'en doute, parce que la plupart de temps ça ne se fait pas.

Le gouvernement du Québec a donné son aval à l'esprit de ce projet de loi, mais en même temps le gouvernement du Québec, représenté par son ministre de l'Agriculture, a dit cet été dans une rencontre avec les autres ministres de l'Agriculture: «Les premiers ministres invitent les ministres concernés à demander au groupe de mise en oeuvre du système canadien d'inspection des aliments, d'ici 1996, une façon de mettre sur pied un système canadien d'inspection.» Oui, c'est vrai.

Lors de la conférence annuelle des ministres de l'Agriculture qui eu lieu à Victoria les 3 et 4 juillet derniers, ils ont accepté le libellé proposé par le ministre de l'Agriculture québécois qui rappelait au fédéral l'intention du Québec de collaborer en vue d'éliminer les


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chevauchements et les dédoublements. Mais cela doit se faire dans le respect des compétences du Québec.

Parce que je connais un peu l'agriculture, je sais qu'en ce moment au Québec, il y a environ 495 fonctionnaires impliqués dans l'inspection des aliments et que dans les trois ministères fédéraux touchés par ce projet de loi, il y a au moins 600 fonctionnaires fédéraux dans le domaine de l'inspection des aliments au Québec. Je prends le territoire du Québec parce que c'est le territoire que je connais le mieux.

On voit qu'au total, si on prend le provincial et le fédéral, ça fait 1 100 employés dans le domaine de l'inspection des aliments au Québec. Je comprends que le fédéral a fait un peu de ménage dans ses services. Mais il faudrait passer à une autre étape qui est le respect des compétences provinciales.

(1550)

Si le fédéral est sincère dans sa volonté de collaborer avec les provinces, il devrait négocier avec le ministère de l'Agriculture du Québec une façon d'appliquer les normes nécessaires entre les provinces, parce que les produits alimentaires voyagent non seulement entre les provinces, mais aussi à l'échelle internationale. Donc, le fédéral appliquerait des normes communes qui seraient acceptées par l'ensemble des ministres de l'Agriculture des diverses provinces ainsi que le ministre fédéral pour que ce soit le Québec, qui est déjà très bien intégré et qui, lui, a déjà procédé depuis longtemps à éliminer les dédoublements de fonctionnaires des divers services.

Un seul service d'inspection d'aliments, qui inclut également une responsabilité aux villes pour ce qui est du troisième marché, est celui de la distribution dans les villes de la Communauté urbaine de Montréal, dans la ville de Québec ou dans la ville de Sherbrooke, dans la ville de Trois-Rivières. On s'est déjà entendus avec eux pour que ces villes appliquent le règlement aux restaurants, parce que c'est plus facile que ça se fasse à l'échelle municipale.

Alors, que le fédéral fasse la même chose que le Québec a fait avec les principales villes du Québec et qu'il élabore avec le Québec un plan d'action vraiment intégré pour éviter qu'on continue d'avoir deux sortes d'inspecteurs d'aliments: des types de laboratoires de type A, de type B et de type C. C'est la confusion souvent qui prévaut et il y a des gens qui proviennent du milieu des producteurs agricoles, dépendant de quelle région ils proviennent, et qui sont affectés par cela parce que deux juridictions se confrontent.

Oui, ce projet de loi est une amélioration, mais, plutôt qu'une amélioration, je dirais une politique du moins pire, parce que le fédéral était inefficace en matière d'inspection d'aliments depuis au moins 20 ans. Nous souhaitons qu'il soit plus efficace à l'avenir, et l'idéal serait une entente de collaboration entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec pour qu'on ait un réseau complètement intégré, un réseau complètement cohérent afin de mettre fin au dédoublement.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui sur le projet de loi créant l'Agence canadienne d'inspection des aliments, pour plusieurs raisons. La première, c'est qu'il s'agit d'un bel exemple de la bonne foi que les souverainistes du Québec démontrent dans l'importance d'avoir un ensemble économique libre et ouvert dans le Canada pour l'avenir.

Du côté du gouvernement fédéral, on est devant la situation où trois ministères, Santé Canada, Agriculture Canada ainsi que Pêches et Océans interviennent depuis plusieurs années en se marchant sur les pieds régulièrement. On a d'ailleurs des histoires d'horreur à raconter qui, je l'espère, seront changées avec la nouvelle législation. En tout cas, souhaitons que ces changements contribueront à les corriger. Je vous donne un exemple.

Un agriculteur de ma circonscription, un producteur de moutons de race pure, qui, l'année passée, a été victime d'un changement de comportement complètement inexpliqué de l'appareil bureaucratique canadien.

Antérieurement, lorsqu'une maladie apparaissait dans son troupeau ou dans le troupeau de tout autre producteur, on abattait les bêtes sujettes à avoir attrapé la maladie, et on compensait le producteur en conséquence.

L'an passé, on a cherché longtemps l'explication, on a changé le règlement. Maintenant, on place les animaux affectés en quarantaine. Ça va très bien pour un ensemble où on a un très gros élevage, par exemple, dans l'Ouest canadien, où il y a de très grands éleveurs. Mais quand on a de petits élevages, comme au Québec, à ce moment, c'est l'équivalent de mettre en jeu la réputation du producteur et pour plusieurs années. Il peut y avoir eu une erreur à un moment donné, mais il ne faudrait pas qu'on tue les petites entreprises et que, parce qu'il y a eu une erreur une fois, la personne perde la possibilité de continuer son entreprise. C'était un exemple du résultat de ces chevauchements, du fait qu'il y a trop d'intervenants. Certaines politiques ne s'appliquent pas nécessairement de la même façon, ça peut être du Québec vers l'Ouest canadien, mais ça pourrait être dans les Maritimes. Ça pourrait être près des grands centres versus éloigné des grands centres. Il va falloir qu'on continue d'avoir une latitude de ce côté.

Donc, nous disons oui, si on peut simplifier la question de l'inspection des aliments et si on peut harmoniser pour permettre à nos entreprises d'être les plus compétitives possible.

(1555)

L'autre histoire d'horreur que je voudrais vous raconter concerne un petit abattoir dans ma circonscription qui fait de l'abattage d'espèces multiples. Là, il est frappé de façon systématique, je dirais presque par l'agression du ministère, qui lui demande de correspondre, du jour au lendemain, très rapidement en tout cas, exactement aux mêmes normes qu'on demanderait à une multinationale de l'abattage. Cela nous crée des problèmes, parce que ça peut faire mourir des petites entreprises et il faut qu'on trouve des solutions à ce genre de problème.

Donc, si la création d'une agence d'inspection des aliments fédérale nous permet de faire disparaître des normes tatillonnes, nous permet d'avoir un comportement plus correct de la part des inspecteurs et aussi moins de règles qui viennent embêter les organisations, c'est tant mieux.

Il ne s'agit pas d'éliminer les règles de salubrité. Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut que nos règles de salubrité soient excellentes, qu'elles correspondent exactement à ce dont on a besoin pour que les consommateurs soient satisfaits du produit qu'ils reçoivent, mais en même temps, il ne faut pas non plus placer des entreprises devant des situations qui ne peuvent pas être corri-


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gées à court terme. Il faut leur donner des délais pour s'ajuster et tenir compte du type de marché dans lequel ils sont pour ne pas nécessairement appliquer les mêmes normes à une multinationale qu'à une petite entreprise.

C'est là que le projet de loi C-60 a plus de faiblesses. C'est un projet de loi qui va remettre la gestion de l'inspection des aliments entre les mains, encore une fois-cela a l'air d'être une pratique de ce gouvernement-de gens qui ne sont pas nécessairement des experts dans le domaine. Il y a beaucoup de latitude concernant les choix partisans pour la nomination des membres du conseil qui va gérer la loi et donc, de ce côté, il y aurait une correction à apporter.

Oui, on veut s'inscrire dans cet esprit. En ce sens, je vais citer la position prise par le gouvernement du Québec lors d'une conférence des ministres concernés par la création de l'Agence fédérale d'ins-pection des aliments. Le Québec, à ce moment-là, montre sa bonne foi et dit, c'est le Québec qui a proposé cela: «Le premier ministre invite les ministres concernés à demander au groupe de mise en oeuvre du Système canadien d'inspection des aliments de recommander une façon de mettre sur pied un système canadien d'inspection des aliments qui respecte les compétences de tous les gouvernements.» Donc, il y a un geste de bonne foi.

On dit: «Oui, le fédéral, enfin, vous faites le ménage, vous allez faire en sorte qu'il n'y ait qu'une agence au lieu de trois. Donc, si vous faites cela correctement et si ça respecte les compétences de tous les gouvernements sur la base d'une entente à intervenir, on montre notre bonne foi, on est prêts à s'asseoir à la table en ce sens, entre les représentants des gouvernements fédéral, provinciaux, et territoriaux.»

Cette bonne foi s'inspire, et je trouve cela très intéressant, du modèle de la Communauté économique européenne, une espèce de base législative commune. Si ça fonctionne, ça va démontrer comment pourrait fonctionner, entre autres, le partenariat entre le Québec souverain et le Canada. Cela pourrait être un exemple très intéressant, et on l'a déjà démontré dans un autre secteur, quoi qu'en pense Mme Diane Francis du Financial Post, dans le domaine de la production laitière, où les provinces du Canada, qui sont les principales productrices à l'exception de la Colombie-Britannique, ont créé un marché ouvert. Quel que soit le statut du gouvernement du Québec là-dedans, il y aurait ce marché ouvert, il continuerait à se faire et il se développera à l'avenir pour que l'ensemble fonctionne correctement.

C'est la même option qui est sur la table présentement. Lorsqu'on dit que les souverainistes veulent contribuer à avoir un marché économique adéquat dans le Canada, cela en est un exemple concret.

Donc, oui au fait de créer seulement une agence, mais à condition qu'elle respecte les compétences de chacun des secteurs. Je pense que si le fédéral fait son ménage, mais qu'en contrepartie, il continue d'entrer dans les champs de juridiction du Québec, on n'aura rien réglé. Ce sera un problème avec lequel le gouvernement fédéral aura à jouer. Mais si la création de l'agence permettait de clarifier la situation, permettait à nos entreprises d'être plus concurrentielles, permettait de satisfaire au fait que le petit abattoir chez nous à Saint-Pascal-de-Kamouraska ne soit pas pris avec les mêmes normes tatillonnes qu'on peut appliquer dans une multinationale, ce pourrait être intéressant.

Pour faire cela, il va falloir qu'on respecte les champs de juridiction. Si le gouvernement fédéral dit que c'est mur à mur, de Vancouver à Halifax, et que ça fonctionne partout pareil, on va encore être dans la même vieille chicane que d'habitude. Mais si le gouvernement fait le ménage avec la loi en créant une agence qui va respecter les champs de juridiction de chacun, qui va permettre que, dans l'intraprovincial, on ait des normes adéquates pour cette province, peut-être qu'on atteindra un résultat intéressant.

En conclusion, à cet égard, il faudrait que le gouvernement fédéral retire l'aspect partisan de la nomination des gens qui vont gérer ce contrat.

(1600)

La commission qui va s'occuper de la gestion risque d'être très influencée par la position du gouvernement. Il pourra encore y avoir un double jeu entre une personne nommée par une province et, à l'intérieur, des gens provenant d'une province mais nommés par le gouvernement fédéral et les instances provinciales. Il faudra que les champs de juridiction soient respectés clairement.

On a sur la table une opportunité, des souverainistes du Québec qui sont ouverts à des échanges économiques avec l'ensemble du Canada, qui jouent le geste de confiance, un geste de bonne foi. Si le gouvernement fédéral changeait les aspects de sa loi, qu'il remette en question son fonctionnement, on aurait devant nous un modèle intéressant qui pourrait être exporté et qui ferait comprendre aux Canadiens que la souveraineté et le partenariat c'est l'avenir non seulement pour le Québec mais pour l'ensemble du Canada.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:


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La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Conformément aux dispositions de l'article 76 Règlement, le vote par appel nominal sur la motion est différé au lundi 21 octobre.

* * *

LOI SUR LES OCÉANS

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 9 octobre 1996, de la motion: Que le projet de loi C-26, Loi concernant les océans du Canada, soit maintenant lu une troisième fois et adopté.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Madame la Présidente, après avoir tenté vainement de faire amender ce projet de loi, après avoir tenté d'être écoutés au comité, le Bloc québécois votera contre le projet de loi pour plusieurs raisons, et je vais en énumérer certaines.

Ce projet de loi qui s'intitule Loi concernant les océans du Canada est précédé d'«attendus» qui ont de quoi surprendre. Cela surprend en effet dans un projet de loi qui est supposé être le lieu où on édicte les façons dont on agira, car ce sont plutôt des intentions qui sont dans ces «attendus», et des intentions qui figureraient mieux en préambule d'un texte de politique plutôt que d'un projet de loi.

Je vais quand même donner une bonne idée de ces «attendus» en en lisant deux. Le premier se lit comme suit:

Attendu
que le Parlement désire réaffirmer le rôle du Canada en tant que chef de file mondial en matière de gestion des océans et des ressources marines;
Sans doute ce projet de loi était-il teint par le ministre qui, alors, était son initiateur, mais inscrire dans un projet de loi, pas dans un énoncé de politique, dans un projet de loi,

que le Parlement désire réaffirmer le rôle du Canada en tant que chef de file mondial en matière de gestion des océans et des ressources marines;
nous apparaît non seulement pompeux, mais compte tenu des moyens qui ne sont pas mis à la disposition d'une telle politique nous apparaît aussi fallacieux.

(1605)

J'en cite un autre:

Que le Parlement désire affirmer, dans les lois internes, les droits souverains du Canada sur sa zone économique exclusive et les responsabilités qu'il compte assumer à cet égard.
Ce qu'il y a d'intéressant dans cet amendement, c'est que le Parlement désire affirmer sa souveraineté ou les droits souverains du Canada sur sa zone économique exclusive, alors que dans le premier attendu, on soulignait que le Parlement désire réaffirmer le rôle du Canada.

Devant le comité, le Bloc québécois a essayé de faire préciser le sens de cet «attendu» par un amendement pour faire en sorte qu'il ne signifie pas, qu'il ne veuille pas dire qu'on change par cet «attendu» la part respective de la propriété du contrôle du territoire entre les provinces et le gouvernement fédéral.

Oui, en tant que Québécois, nous sommes préoccupés par cette disposition et non, le gouvernement n'a pas donné suite aux propositions que nous faisions.

Je continue à citer:

Que le ministre des Pêches et des Océans, en collaboration avec d'autres ministres fédéraux, avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et avec les organisations autochtones, les communautés côtières, les personnes de droit public et de droit privé [. . .]encourage l'élaboration et la mise en oeuvre d'une stratégie nationale des écosystèmes estuariens, côtiers et marins.
Cet énoncé, que l'on retrouve à divers autres endroits dans ce projet de loi, en dit long quant au rôle prévu pour les provinces sur la répartition des pouvoirs et des responsabilités, tel qu'entendu par le gouvernement. Ce projet de loi, même s'il émane d'un ministère, est censé être endossé par l'ensemble du gouvernement.

Il est même bizarre qu'à ce moment-ci de l'histoire du Canada, alors qu'au moment de la conférence de Jasper, les premiers ministres provinciaux, sans le Québec, aient discuté, et se soient engagés à rediscuter de la définition de leurs pouvoirs, de leur éventuelle gestion concertée du fédéralisme canadien en matière de programmes sociaux et d'autres matières, donc au moment où au Canada il y a une large volonté, toujours sans le Québec, de revoir la dynamique des pouvoirs et des responsabilités canadiens, le gouvernement fédéral soumet un nouveau projet de loi pour adoption, dans lequel, en réalité, il traite les provinces comme des personnes privées ou des personnes morales avec lesquelles il pourrait juger bon, à certains moments, de se coordonner.

Je parle de cette question parce qu'au Canada, on a trop souvent identifié le Québec comme étant l'empêcheur de danser en rond, l'empêcheur de se concerter, alors que ce que l'on constate, c'est que sur un grand nombre de matières, sans tenir compte du Québec qui a son projet de partenariat, les provinces canadiennes, du moins un certain nombre d'entre elles, disent qu'elles veulent participer à la gestion de ce pays. C'est vrai dans le domaine social, c'est vrai dans beaucoup d'autres domaines.

(1610)

Ce projet de loi, à nos yeux, est parfaitement inacceptable parce qu'il divise le ministère de l'Environnement dont déjà les juridictions sont conflictuelles avec les provinces, il divise et semble faire du ministère de l'Environnement un ministère à panneaux sectoriels. Alors il y aurait un panneau pour les pêches, les océans et les écosystèmes, ce qui ne lasse pas de surprendre et d'inquiéter parce que, par le biais des écosystèmes, il est évident que, même si on dit dans le chapitre 2 que cette partie ne traite pas des rivières et des fleuves, on peut aussi s'ingérer partout sur le territoire.

Au moment où le ministère de l'Environnement annonce que, sur trois ans, il y aura des coupures de 30 p. 100, comment peut-on ainsi avoir l'air de multiplier ses fonctions sans donner un seul moyen.

Finalement, on a dit abondamment que le pouvoir de tarification du ministère pour la Garde côtière et le pouvoir que le ministre se donnait d'imposer l'enregistrement même des embarcations de plaisance est un abus outrageant qui laisse présager des volontés de


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centralisation qui n'ont en ce moment aucun sens, pas seulement au Québec mais partout au Canada.

Ce que nous demandions, c'était le report; ce projet de loi n'est définitivement pas à l'état d'être adopté par cette Chambre.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À l'ordre. Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera à l'heure de l'ajournement ce soir: l'honorable député de Notre-Dame-de-Grâce-Le traité d'interdiction complète des essais nucléaires.

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi concernant les océans du Canada parce qu'il s'agit d'un outil stratégique important qui échappera au Québec. On a un exemple très clair de ça. Cette loi régira toute la question des frais de déglaçage, par exemple, des frais d'aide à la navigation, comme les bouées dans le Saint-Laurent. Toute cette question a soulevé un consensus unanime au Québec contre les mesures proposées dans la loi. Parce que c'est le gouvernement fédéral qui a cette juridiction, il faut absolument qu'on fasse connaître le point de vue du Québec, qu'on fasse savoir que ce qu'il y a dans cette loi créera une diminution de la compétitivité de toutes les industries installées le long du Saint-Laurent.

Le gouvernement a fait un choix délibéré important. Il a décidé de scinder en deux l'action du gouvernement dans les transports. Transports Canada fait présentement une opération de dessaisissement des installations portuaires. Il offre aux milieux locaux de prendre en main l'avenir des installations portuaires. Ça peut en soi être un principe intéressant parce qu'ils s'en sont tellement occupés tout croche pendant tellement longtemps que, là, s'il le redonne au milieu, chacun des milieux pourra au moins avoir le contrôle sur les décisions qui les concernent.

Je qualifierais de geste malicieux le fait qu'en même temps on ait décidé que la partie qui concerne les coûts d'utilisation, les frais de service sur le fleuve sera régie par le ministère des Pêches et des Océans. Donc, d'une main on offre aux milieux locaux de prendre en main les installations on leur disant: «Assurez-vous que vous pourrez les rentabiliser et on pourra, dans l'avenir, faire quelque chose d'intéressant avec ça. Mais, de l'autre main, toute la question des frais sur le fleuve, on la gardera en augmentant les coûts de façon significative.» Cela fera que les bateaux, les arrimeurs et ceux qui ont à travailler sur la gestion des transports auront à faire des choix dans l'avenir en disant: «Est-ce que c'est toujours compétitif de passer par le Saint-Laurent? Ne serait-on pas mieux de passer par la Nouvelle-Angleterre, par les ports de l'Atlantique aux États-Unis, des choix de ce type?

(1615)

On pourrait toujours dire: «C'est le parti d'opposition qui dénonce cela, il est toujours en train de dénoncer.» C'est plutôt la position de la Société de développement économique du Saint-Laurent qui a écrit au ministre des Transports à ce sujet.

Cette société regroupe, sur la liste ici, au moins une trentaine d'organismes différents, dont les gens de l'Association de l'industrie de l'aluminium du Québec. Ce n'est pas n'importe qui: Alcan aluminium, aluminerie Alouette, etc. Elle regroupe aussi l'Association des armateurs du Saint-Laurent; l'Association des industries forestières du Québec; l'Association inter-industrielle de la Côte-Nord; l'Administration de pilotage des Laurentides; le Bateau-Mouche du Québec, toutes sortes d'intervenants de toutes sortes de secteurs.

Donc la Loi concernant les océans du Canada va donner au gouvernement fédéral, au ministère des Pêches et des Océans, un pouvoir d'augmentation de la tarification qui va mettre en question la compétitivité des installations portuaires le long du Saint-Laurent. C'est pour cela qu'il faut absolument être contre ce projet de loi, parce qu'il enlève au Québec un outil de développement important qui a aussi été un outil au niveau de toute la Voie maritime du Saint-Laurent aussi.

Il y aura peut-être des retombées négatives importantes pour tout le transport maritime vers l'Ontario. Il y a des choix derrière cela et c'est un peu un choix du gouvernement fédéral de laisser tomber le Québec de ce côté. Alors qu'on aurait pu faire un tout autre choix, aujourd'hui, dans le choix actuel, on va protéger l'appareil bureaucratique. Il y aurait une importante opération ménage à faire au niveau des brise-glace et du système fédéral de gestion du fleuve.

Il y a par exemple le fait que le port d'attache de tous les brise-glace de l'Atlantique est à Halifax. Cela peut être très intéressant pour les gens des Maritimes, mais d'un autre côté, leur travail se fait principalement dans le fleuve, et chaque fois qu'un brise-glace a besoin de faire le plein, savez-vous où il va le faire? À Halifax. C'est étonnant, parce que c'est aussi à Halifax que la compagnie Irving a un certain contrôle sur l'ensemble des opérations pétrolières.

Comment se fait-il qu'une situation comme celle-là n'est pas corrigée? Comment se fait-il que le ministère n'ait pas décidé de faire le ménage dans ses actions? Au lieu de demander une augmentation de tarification, on aurait peut-être pu faire le ménage de l'intérieur et dire: «Il faut regarder de près toute la question de la Garde côtière. Il faut voir si on ne serait pas capable d'offrir les mêmes services à moindre coût ou de faire offrir les services autrement.»

Ce n'est pas ce que fera la loi. La loi fera en sorte qu'on va nourrir l'appareil bureaucratique au détriment des entreprises qui ont à vivre avec ces réalités économiques. Là on parle de toute la question des frais de déglaçage, des frais d'aide à la navigation, on parle des bouées. Ce qui est tragique, c'est que cela met en question la réforme portuaire du Canada.

Par exemple, présentement le Comité parlementaire des transports traverse le Canada au sujet du projet de loi C-44. À tous les endroits, il va se faire dire, et on se l'est fait dire à Vancouver, et il ne s'agissait pas des frais de déglaçage, c'était des questions de dragage: «Vous êtes en train de nous occasionner des frais qui nous enlèvent le goût de prendre en main les installations que vous voulez nous offrir.»

C'est la même chose dans le golfe Saint-Laurent. Je vais donner un exemple très concret. À Cacouna, la Corporation de développement du port a déjà émis une lettre d'intention au gouvernement et est prête à poser des gestes, à négocier avec le gouvernement fédéral et les négociations sont tout près d'être entreprises et il y a déjà des communications régulières.


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Mais la plus grosse hantise des gens du milieu, ce n'est pas tant ce qui se passe à Transports Canada, parce que les communications avec les fonctionnaires concernés sont intéressantes, mais c'est plutôt quel sera l'effet sur le port des nouveaux frais qui seront encourus par la Loi sur les océans et par l'augmentation de la tarification.

Cela a tellement d'effets négatifs que ça amène souvent les gens à dire: «Avant de nous décider, on va prendre un petit peu plus notre temps.» On devrait y voir, parce que ce sont des questions que la SODES, la Société de développement économique du Saint-Laurent, a posées au ministre des Transports, parce que, semble-t-il, l'oreille peut être meilleure de ce côté.

Ils ont une vision et je pense que le gouvernement aurait eu intérêt à maintenir l'ensemble de ces services sous la même autorité. Cela aurait permis que les décisions soient plus coordonnées, plus logiques, parce que présentement ça donne une image un peu machiavélique. On a l'impression qu'on a fait la scission entre les deux ministères pour être sûrs de pouvoir passer les deux éléments, c'est-à-dire laisser les installations aux milieux locaux, mais en même temps leur refiler la facture sur la question des services afférents. Ce sont de très mauvais choix du gouvernement fédéral et ça ne donne pas une image intéressante.

(1620)

Les questions qui ont été posées et qui sont jusqu'ici restées sans réponse sont celles de la Société de développement du Saint-Laurent. Ce ne sont pas seulement les questions de l'opposition officielle. Quelles seront les incidences de ces changements sur le choix des transporteurs? Y a-t-il des risques de fermeture d'entreprises ou de secteurs industriels? Est-ce que des gens décideront d'offrir leurs services ailleurs que dans le Saint-Laurent à cause des augmentations de ces frais?

Y a-t-il des pertes financières pour ces entreprises, pas seulement les pertes dues aux fermetures, mais d'autres types de pertes financières? Y a-t-il des effets sur le potentiel d'investissements? Ça c'est une question primordiale. Les décisions qui seront prises en vertu de la loi sur les océans n'affecteront-elles pas les choix économiques du futur, dans 5, 10, 15 ou 20 ans? Lorsqu'on est dans de très grandes entreprises comme Alcan, entreprises qui sont membres de la SODES, c'est parce qu'elles les voient ces choix.

C'est ce genre de questions que les gens se posent. C'est un choix délibéré que le gouvernement fédéral a fait dans la Loi sur les océans de retirer au Québec cet outil stratégique, et c'est la raison pour laquelle il faut voter contre le projet de loi. Il faut absolument que le gouvernement refasse ses devoirs et remette la responsabilité concernant les frais d'utilisation des services sur le fleuve au ministère des Transport fédéral de façon à ce qu'il n'y ait qu'un seul décideur et qu'il tienne compte de l'ensemble des critères économiques avant de faire son choix.

C'est faux que tout ce qu'il faut faire c'est financer les brise-glace de la Garde côtière. Il faut que les choix tiennent compte de l'ensemble de la réalité économique et qu'on voit s'il n'y a pas en fin de compte plus de dommage à augmenter la tarification, plus de coûts pour l'ensemble de l'économie, plus de coûts pour les gouvernements impliqués qu'avec le résultat qu'on viserait.

En conclusion, je crois que le projet de loi doit être défait et je crois que ce n'est pas un projet de loi qui servira le Québec, et c'est pour ces raisons que l'opposition officielle est contre.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à la Chambre d'adopter cette motion?

Des voix: Oui.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés.

La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Conformément à l'article 76(8) du Règlement, le vote sera reporté au 21 octobre à la période de l'ajournement.

* * *

LOI SUR LES ADDITIFS À BASE DE MANGANÈSE

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 8 octobre 1996, de la motion: Que le projet de loi C-29, Loi régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse, soit maintenant lu une troisième fois et adopté, ainsi que de l'amendement.

M. Maurice Godin (Châteauguay, BQ): Madame la Présidente, c'est avec beaucoup d'intérêt que je prends la parole sur ce projet de loi qui se trouve maintenant en troisième lecture. Nous débattons du projet de loi C-29 qui vise à régir le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse.

Le principal produit concerné par ce projet de loi porte le sigle MMT, cet additif utilisé depuis 1976 pour remonter l'indice d'octane pour presque toutes les essences sans plomb. L'Office des normes générales du Canada a d'ailleurs établi la quantité maximale à 18 milligrammes de Mn par litre.

(1625)

Je ne suis pas un chimiste, mais je crois qu'il est tout à fait à propos et légitime que chacun d'entre nous se questionne sur la bataille que se livrent deux grandes industries, les pétrolières et les fabricants d'automobiles, sans oublier la nature et les conséquences des produits que les industries fabriquent et mettent en circulation. C'est souvent à cause d'un manque de vigilance que nous avons vu des catastrophes survenir.


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Uniquement dans mon comté, nous sommes encore à vivre les problèmes des lagunes de Mercier contaminées par l'entreposage de déchets toxiques, sans oublier la pollution de la rivière Châteauguay par les engrais chimiques.

Le Bloc québécois s'est prononcé en faveur du projet de loi, lors de la deuxième lecture. Nous voulions, de cette manière, permettre au gouvernement de pousser plus à fond l'étude de son projet de loi. Cependant, on constate que le gouvernement n'a pas profité de cette occasion. Il cherche à interdire un produit sans nous faire la démonstration qu'il s'agit d'une solution nécessaire et raisonnable à un problème réel. Il ne nous a pas du tout convaincus de son choix. Le Bloc québécois sera donc forcé de s'opposer à ce projet de loi.

On s'aperçoit que les raisons fondamentales qui guident ce projet de loi demeurent obscures. Le gouvernement et l'industrie de l'automobile soupçonnent les produits à base de manganèse d'être la cause de dommages aux systèmes antipollution des automobiles. Mais aucune preuve ne permet de telles conclusions hors de tout doute raisonnable. Des tests indépendants n'ont pas été en mesure de démontrer que le MMT cause ces dommages.

Voici ce que dit un programme de tests mené par l'EPA, Environmental Protection Agency, aux États-Unis:

En ce qui a trait aux arguments présentés par l'American Automobile Manufacturers' Association dans le but de contester la conclusion de l'APE disant que le MMT n'altère «ni en partie ni en totalité» le bon fonctionnement du système d'émissions des véhicules, la cour a jugé que ces arguments étaient absolument sans valeur. Tout d'abord, la cour a souligné que l'APE avait établi «que l'additif d'Ethyl avait réussi aisément les tests requis pour l'étude des requêtes les plus sévères jamais effectués statistiquement parlant.» De plus, la cour a noté que l'APE avait «examiné en fonction de critères plus sévères les données d'Ethyl sur l'usage de l'additif dans les véhicules issus de la technologie la plus avancée et la cour a constaté que l'APE n'avait pu déceler aucune véritable augmentation des émissions.
Enfin, lorsqu'on nous parle de problèmes à nos véhicules, je pense que les plus grands experts, c'est nous qui avons tous des véhicules. J'ai un véhicule avec lequel je viens, la semaine dernière, d'atteindre 50 000 kilomètres. Pourtant, après 50 000 kilomètres, mon parcours par kilomètre au litre est exactement le même que lorsque mon véhicule était neuf. Avec mon ancien véhicule, que j'ai changé il y a à peine 20 mois, j'avais atteint 150 000 kilomètres. Encore là, aucune réparation majeure, aucun entretien, si ce n'était que de changer l'huile du véhicule.

Je comprends très bien, lorsque les producteurs d'automobiles viennent nous dire que leurs recherches demeurent secrètes, qu'il n'y a pas possibilité de nous les transmettre, que c'est difficile de démontrer que le MMT cause des dommages aux véhicules. J'en ai vraiment la preuve. Nous sommes tous des utilisateurs d'automobiles et nous avons tous l'occasion de savoir si le MMT cause vraiment des dommages aux véhicules.

(1630)

On dit aussi qu'il pourrait s'agir d'un produit dangereux pour la santé ou pour l'environnement. Rien n'est moins sûr. Jusqu'à date, ni le ministère de l'Environnement, ni Santé Canada n'ont émis d'interdiction concernant le MMT. La compagnie Ethyl va même plus loin encore: elle prétend que le MMT aide à réduire les niveaux d'émission de bioxyde d'azote qui cause en partie le smog urbain. Si le MMT devait être interdit, cela pourrait avoir pour conséquence l'augmentation de smog dans nos centre-villes.

Voici ce que l'on dit d'une série de tests d'Ethyl Corporation. On dit que, pour satisfaire les conditions de Clean Air Act des États-Unis, visant à réintroduire le MMT dans l'essence sans plomb aux États-Unis, Ethyl Corporation a mené la série de tests la plus complète jamais entreprise avec un additif pour l'essence. Le programme de tests visait, avec l'aide de l'EPA des États-Umis et des constructeurs automobiles américains, à évaluer et à préciser les effets de l'additif de performance MMT sur les émissions automobiles polluantes et à déterminer les conséquences sur la qualité de l'air, si l'additif MMT était utilisé dans l'essence aux États-Unis.

Quatre paires assorties de voitures qui ont parcouru elles aussi 75 000 milles avec et sans le MMT, ont servi à évaluer l'efficacité du MMT dans les carburants oxygénés (MTBE et éthanol). Les tests ont montré que l'addition du MMT dans ces carburants diminue les niveaux de NOx ainsi que la réactivité toxique et chimique des HC non brûlés.

Le programme de tests d'Ethyl Corporation a surpassé largement des tests menés par les constructeurs automobiles au Canada et aux États-Unis, comme le confirme la Cour d'appel des États-Unis dans sa décision du 14 avril 1995 qui ordonne à l'EPA d'accorder une dérogation à Ethyl.

Le but du projet de loi est d'interdire les produits à base de manganèse parce que ce serait dangereux. Pourtant, ce même projet de loi permet l'utilisation de MMT dans l'essence avec plomb. Si c'est bon dans l'essence avec plomb, pourquoi ce n'est pas bon dans l'essence sans plomb?

La situation n'est pas claire. Aux États-Unis, l'interdiction du MMT a fait l'objet d'une guerre juridique avec l'agence américaine de protection de l'environnement qui souhaitait son interdiction définitive. La Cour américaine en a décidé autrement, ce qui me laisse penser qu'on n'a pas encore démontré que le MMT est un produit dangereux pour la santé ou l'environnement.

Synthèse de la décision rendue par la Cour d'appel ordonnant à l'Agence américaine de protection de l'environnement d'émettre un avis levant l'interdiction du MMT:

Le 14 avril 1995, la Cour d'appel des États-Unis pour la circonscription du district de Columbia a rendu sa décision dans l'affaire opposant l'Ethyl Corporation et l'Agence de protection de l'environnement des États-Unis, affaire dans laquelle Ethyl contestait le refus prononcé par l'APE, le 13 juillet 1994, en réponse à la requête soumise par Ethyl visant à faire lever l'interdiction du MMT dans l'essence sans plomb.

La Cour a établi que «l'administrateur avait enfreint les conditions clairement stipulées à la section 211, en refusant à Ethyl la levée de l'interdiction du MMT pour des raisons de santé publique.» Selon la Cour, «parce que le Congrès a confié à l'APE le mandat d'évaluer uniquement en termes d'émissions ce qu'impliquent les requêtes d'abandon d'interdiction, et parce que Ethyl a rempli les


5388

exigences prescrites, nous croyons que l'administrateur de l'APE a outrepassé son pouvoir en rejetant la requête d'Ethyl visant la levée d'interdiction du MMT.» Compte tenu de ces faits, la Cour a adressé un ordre direct à l'APE qui devra accéder à la requête d'Ethyl en levant l'interdiction pesant sur son additif pour carburant.

(1635)

Tout cela démontre les deux points majeurs qu'on tente de nous faire croire et qui sont les raisons pour lesquelles on a présenté ce projet de loi, soit les dommages qui peuvent être causés aux automobiles ou les problèmes de santé qui peuvent survenir. Dans les deux cas, ni les producteurs d'automobiles ni certaines cours des États-Unis n'ont démontré que la preuve était faite.

On est toutefois en droit de se demander ce qui anime le gouvernement à tant vouloir remplacer le MMT. L'acharnement des libéraux fédéraux à vouloir bannir le MMT coûtera plusieurs dizaines de millions de dollars de plus aux Québécois et aux Canadiens. Ce pourrait même dépasser 100 millions de dollars. Et ce sont les consommateurs d'essence qui vont défrayer la facture, en grande partie avec des augmentations du coût de l'essence à la pompe qu'on peut estimer facilement à 1c. le litre.

Les coûts de ce projet de loi pourraient encore grimper de façon spectaculaire. Le 10 septembre dernier, la société américaine Ethyl Corporation a déposé une notification d'intention de soumettre une plainte, et ce, en vue d'obtenir une indemnité de 201 millions de dollars américains, ce qui signifie 275 millions de dollars canadiens, en vertu de l'article 1116 de l'Accord de libre-échange nord-américain signé par le gouvernement canadien. Cette compagnie prétend que le projet de loi C-29 viole certaines dispositions de l'ALENA. Ce faisant, sa filiale, Ethyl Canada, subira des dommages lors de l'entrée en vigueur du projet de loi.

Dans ces circonstances, il est étonnant de voir le gouvernement poursuivre sa démarche. La question divise, le débat n'est pas clos, même au sein du caucus de l'aile gouvernementale. Et il semble bien qu'avec ce projet de loi, le gouvernement canadien s'est exposé, en connaissance de cause, à la poursuite juridique qui lui pend aujourd'hui au bout du nez.

En février dernier, le ministre du Commerce international avertissait le ministre de l'Environnement par lettre de cette possibilité de poursuite juridique. Avec le projet de loi C-29, le Canada cherche à interdire les importations de MMT, sans restreindre d'aucune manière la production nationale, la vente ou l'utilisation de ce produit. Voilà un autre exemple qui nous démontre le peu de sérieux de cette loi.

Le gouvernement poursuit malgré tout sa démarche parce que de gros intérêts sont en jeu. Ce qui est en jeu, en fait, c'est aussi l'éthanol. On sait que l'Ontario et l'Ouest canadien, avec un budget de recherche de 70 millions de dollars venant du fédéral, veulent s'emparer de la production d'éthanol et remplacer, par le fait même, le MMT. Les problèmes que cela peut causer, sur le plan de l'emploi, sont bien secondaires pour le gouvernement fédéral. Nous, du Québec, avons déjà goûté à sa médecine par le passé.

Le gouvernement fédéral a déjà provoqué un véritable désastre à l'industrie pétrochimique dans l'est de Montréal au profit de l'Ouest canadien. L'établissement de la ligne Borden, en 1963, a eu pour effet de faire perdre à Montréal, au cours des années 1970 et 1980, quatre des six raffineries. On a perdu près de 8 000 emplois à cause de cela. J'en profite d'ailleurs pour relancer l'invitation que faisait M. Bernard Landry, ministre des Finances du gouvernement du Québec, à son homologue fédéral et au premier ministre du Canada, de venir visiter régulièrement l'est de Montréal pour se souvenir des dégâts causés par le fédéral et des conséquences qui se poursuivent encore aujourd'hui.

Ce fut la même chose avec le Pacte de l'automobile en 1965. Il a permis la concentration de l'industrie automobile dans le sud de l'Ontario afin de favoriser son rapprochement avec l'industrie automobile américaine. Je sais que le fédéral n'admettra pas que ce maraudage industriel est la cause des difficultés économiques présentement du Québec, mais moi, je vous dis que c'est l'élément numéro un qui motive vers la souveraineté du Québec, les Québécois et les Québécoises.

(1640)

Un autre exemple de désinformation: 76 000 emplois perdus au Québec en juillet et août. C'était à cause de l'incertitude politique, disait-on. Le premier ministre du Canada a pris la peine, cet été, de se déplacer dans la Beauce pour prétendre que les problèmes économiques du Québec étaient dus à l'incertitude politique. Mais en août, lorsque le Québec a produit 41 000 emplois, soit 50 p. 100 de tout l'ensemble canadien, on ne voit plus personne du fédéral venir au Québec nous parler de l'incertitude politique.

Concernant le triste sort des autres provinces, il ne vint à l'idée d'aucun député libéral de crier à l'incertitude politique. En plus de fonctionner à deux poids deux mesures, le gouvernement poursuit sa démarche sans se soucier de ses partenaires de la fédération. Déjà six provinces, soit une majorité, ont fait valoir leur opposition au projet de loi C-29 et dans ce dossier des additifs dans l'essence, les provinces ont leur mot à dire.

En légiférant sur le commerce interprovincial, le gouvernement s'ingère à nouveau dans les champs de compétence des provinces. Où est-il rendu, ce fédéralisme décentralisateur, promis lors de la campagne référendaire? C'est toujours l'éternelle centralisation des pouvoirs et des décisions au niveau fédéral.

Depuis le retour au pouvoir des libéraux à Ottawa, le respect de la loi fondamentale du pays est le dernier souci du gouvernement. Par exemple, il a systématiquement refusé de donner suite à la demande de l'Alberta d'inclure le sujet du MMT à l'ordre du jour de la Conférence des ministres des Ressources naturelles qui s'est tenue à Yellowknife récemment.


5389

En résumé, nous sommes en présence d'une bataille de fond où deux grosses industries, l'industrie de l'automobile et l'industrie pétrolière, ne s'entendent pas sur l'utilisation de leurs produits. Qui va céder? Qui a raison? Qui va gagner?

Qui va payer? Je sais que ce sera l'utilisateur. Mais je suis persuadé que si on allait voir qui met le plus d'argent dans la caisse électorale, je pense que nous serions en mesure de prédire l'avenir.

En conclusion, nous allons, de ce côté-ci de la Chambre, nous opposer au projet de loi C-29. Il représente davantage le résultat de lobbyistes et d'intérêts personnels corporatifs plutôt qu'un intérêt vraiment public. Sur le fond, rien ne permet de conclure à l'interdiction du MMT et des produits à base de manganèse. Sur la forme, il s'agit d'un travail bâclé qui jette tout simplement de l'essence sur le feu.

[Traduction]

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la Présidente, aujourd'hui, j'ai eu l'occasion de rencontrer des représentants de l'Association canadienne des concessionnaires d'automobiles. J'ai conversé longuement avec M. Douglas R. Leggat, président de la Fédération des associations de concesionnaires d'automobiles du Canada, et je peux affirmer que le MMT les intéresse vivement.

Il m'a rappelé que General Motors, Ford, Chrysler, Toyota, Honda, BMW, Jaguar, Hyundai, Mazda, Nissan, Rolls Royce, Subaru, Volvo et je pourrais poursuivre l'énumération, tous ces fabricants d'automobiles ont manifesté leur appui à l'interdiction du MMT. En outre, un sondage national révèle que la majorité des Canadiens veulent aussi que l'on interdise l'utilisation du MMT.

Comment le député peut-il dire que le gouvernement ne présente pas ce projet de loi dans un but sérieux et qu'il n'agit pas dans le meilleur intérêt des Canadiens, conformément à leur volonté? La question est importante et le gouvernement veut sérieusement faire adopter ce projet de loi. C'est pourquoi il l'a présenté à la Chambre.

[Français]

M. Godin: Madame la Présidente, je remercie mon confrère de cette question. Pour moi et pour le Bloc québécois, il n'y a pas d'erreur possible que la question est très sérieuse.

J'ai fouillé tous les documents qu'on a mis à notre disposition, que ce soit ceux provenant du ministère de la Santé ou d'autres, et j'ai cité tout à l'heure deux ou trois exemples concrets, je ne vais pas les reprendre.

(1645)

Il me fera cependant plaisir de remettre une copie de ces données au député, s'il ne les a pas à sa disposition.

Alors, que ce soit au niveau de la santé ou au niveau des producteurs d'automobiles, on ne peut pas nous transmettre présentement aucun exemple, aucune vérification ou étude qui nous démontre vraiment les dangers du MMT. Prenons le fait, dans le cas de l'automobile, que ça endommage vraiment les véhicules. Encore une fois, comme je disais tout à l'heure, je pense que les personnes les mieux placées pour constater si vraiment cela endommage les véhicules sont les utilisateurs.

Nous sommes tous des utilisateurs. J'en suis un. Cela fait des années que j'ai des automobiles, et moi, quand je parcours 150 000 kilomètres avec une automobile sans aucune réparation, j'ai des doutes lorsque les fabricants d'automobile viennent me dire que ça cause des problèmes.

En ce qui concerne la partie de la santé, encore là, c'est plus difficile, naturellement, de démontrer, de trancher vraiment pour dire quel produit est dangereux et quel produit ne l'est pas. J'ai fait référence à une série de cas présentés devant les tribunaux américains puis, encore là, on n'a pas pu faire la preuve devant les tribunaux américains que c'était vraiment dangereux.

Troisièmement, si c'était extrêmement dangereux, je ne comprends pas comment il se fait que le Canada, pas un autre pays, nous permettrait de continuer d'en produire, d'en exporter et d'en mettre dans l'essence sans plomb. Si c'est si dangereux que ça, ça n'a pas de sens. Ça n'a pas de sens de venir nous dire que c'est extrêmement dangereux et permettre ensuite d'en ajouter à l'essence.

En ce qui concerne le sondage, encore là, je dois vous dire sincèrement, si quelqu'un m'appelait chez moi pour me demander si j'étais d'accord ou non, avec les connaissances techniques que je peux avoir dans la production du MMT, je serais obligé d'écouter tout simplement le préambule. Et dans le préambule, lorsqu'on dit aux gens: «C'est dangereux», les gens disent: «Si c'est dangereux, enlevez-le.»

Dans mon cas à moi, je suis d'accord pour dire avec l'honorable député que c'est une question vraiment sérieuse, mais le gouvernement n'a pas démontré le sérieux nécessaire pour me permettre de voter en faveur de cette loi.

[Traduction]

M. Szabo: Madame la Présidente, le député soulève un point important. Nous ne pouvons prouver sans l'ombre d'un doute l'existence de problèmes. Les recherches qui ont été faites sèment le doute et font ressortir un élément de risque. Cela me fait penser à ce qui s'est passé avec l'urée-formaldéhyde. Utilisée sur une grande échelle comme isolant, cette substance s'est plus tard révélée nocive.

Si on légifère et si on se trompe, il vaut mieux que ce soit par excès de prudence. On se pose des questions. Je pense que le député conviendra que si on s'aperçoit à la longue qu'on a fait une erreur, il vaut mieux que ce soit en ayant fait preuve de trop de prudence pour protéger la santé des Canadiens face à l'éventualité d'un risque pour l'environnement et pour le fonctionnement des véhicules automobiles.

Le député n'en convient-il pas?

[Français]

M. Godin: Madame la Présidente, comme je le disais tout à l'heure, il n'y a pas d'erreur, c'est une question vraiment sérieuse.


5390

(1650)

Là où je pense qu'on mélange un peu les problèmes, c'est que ce n'est pas un produit nouveau qu'on met sur le marché, c'est un produit qu'on utilisait et qu'on veut retirer. C'est complètement différent d'un nouveau produit qu'on introduit sur le marché auquel on doit souscrire et avec lequel on doit être beaucoup plus prudent.

Mais je pense que là n'est pas le problème. Le problème, c'est que l'Ontario, surtout l'Ontario, avec une subvention qui, je crois, se chiffre à 70 millions de dollars, veut produire de l'éthanol, veut s'emparer du marché. Je pense que c'est là vraiment le problème. Si on vient de l'Ontario, je les comprends, on veut s'acquérir immédiatement de la production de l'éthanol et le but de l'élimination du MMT vise à le remplacer par l'éthanol.

M. Osvaldo Nunez (Bourassa, BQ): Madame la Présidente, je vous suis reconnaissant de me permettre de parler immédiatement puisque, peu après 18 heures, je prends un avion pour Winnipeg, afin de remplacer un collègue du Bloc québécois au Comité de la justice qui mène des consultations sur les jeunes délinquants. Je remercie également mon collègue du Parti réformiste qui me permet de prendre la parole avant lui.

Il me fait plaisir de prendre part au débat en troisième lecture du projet de loi C-29 régissant le commerce interprovincial et l'importation à des fins commerciales de certaines substances à base de manganèse. Ce projet vise à interdire l'utilisation des produits à base de manganèse, dont le MMT. Depuis 1977, cet additif est ajouté à l'essence sans plomb au Canada. Cependant, il est important de mentionner que le projet de loi C-29 n'interdit pas la production, la vente ou l'utilisation du MMT au pays.

À mon avis, et à l'instar de tous mes autres collègues bloquistes qui ont pris la parole en cette Chambre, ce projet de loi soulève plusieurs interrogations. En effet, les retombées économiques et environnementales, de même que son impact sur le commerce entre les provinces canadiennes et avec nos voisins du Sud, les États-Unis, méritent mûre réflexion avant de l'adopter avec l'empressement que démontre le gouvernement libéral.

Fondamentalement, je m'interroge sur la pertinence et le bien-fondé d'un tel projet de loi dans une perspective où ce gouvernement devrait théoriquement et prioritairement s'intéresser au bien commun de ce pays. Je dis théoriquement parce que, dans les faits et suivant l'esprit du projet de loi C-29, le parti au pouvoir semble agir comme s'il accordait plus d'attention aux intérêts d'un petit groupe d'individus au détriment de la population canadienne et québécoise.

Par conséquent, il m'est impossible d'appuyer le projet de loi C-29 dont le rapport entre les coûts et ses bienfaits sur la population m'apparaît disproportionné. Je suis également incapable de l'endosser, parce que je juge que ce projet de loi est inéquitable, en ce sens qu'il favorise principalement les mieux nantis de notre société, soit les géants de l'industrie de l'automobile concentrés de plus en plus dans la très libérale province de l'Ontario.

Permettez-moi de profiter de cette occasion pour saluer les 26 000 travailleurs de General Motors présentement en grève dans les usines de Boisbriand au Québec, d'Oshawa, de St. Catharines, de Windsor, de London et de Woodstock en Ontario.

(1655)

Ces grévistes luttent pour la sauvegarde de leurs emplois et contre la volonté de cette compagnie multinationale de vendre deux usines de pièces en Ontario, usines qui emploient environ 3 800 syndiqués. Ces travailleurs en grève se battent également contre le recours exagéré de General Motors à la sous-traitance pour la fabrication des pièces. Dans la plupart des cas, les sous-contractants emploient de la main-d'oeuvre non syndiquée qui accepte des salaires plus bas.

J'exprime ma solidarité avec les grévistes de TCA, les Travailleurs canadiens de l'automobile, et je leur souhaite bon succès. J'espère qu'ils signeront bientôt une bonne convention collective avec leur employeur.

Parce que j'ai oeuvré longtemps dans le mouvement syndical, je sais que ce n'est pas facile de traverser une période de grève; c'est difficile, et je souhaite qu'ils puissent en arriver à une entente dans les plus brefs délais.

Une des raisons qui motive le gouvernement libéral à adopter ce projet de loi tient à l'argument selon lequel le MMT fait beaucoup de dommages à l'environnement. Par conséquent, il serait nocif pour la santé publique. Ce sont surtout les constructeurs d'automobiles qui allèguent de telles affirmations. Ils soutiennent que le MMT contenu dans l'essence encrasse et dérègle les systèmes antipollution des voitures, ce qui aurait pour effet, entre autres, d'augmenter le prix des voitures, de diminuer les garanties et de déconnecter le système de détection. La ministre de l'époque écoutait avec sérieux ces pressions qui ressemblent davantage à du chantage qu'à de véritables mises en garde contre les effets nocifs d'un produit.

Du chantage, en effet, car en même temps d'autres voix s'élevaient pour décrier cette mesure. S'appuyant sur des études de Santé Canada, dont une réalisée le 6 décembre 1994, les porte-parole de l'industrie pétrolière et les distributeurs du produit, notamment Ethyl Canada, soutiennent que le MMT n'est pas dangereux pour la santé publique. Les résultats de plusieurs tests scientifiques démontrent également que l'ajout d'une quantité de MMT à l'essence entraîne une diminution des émissions atmosphériques, qui contribuent à la formation de la couche d'ozone et du smog urbain. Contrairement aux déclarations du lobby de l'automobile, avec l'interdiction du MMT, le smog urbain devient plus important.

Si on retire le MMT de l'essence, il faudra bien lui trouver un substitut. Présentement, il apparaît que le gouvernement libéral favorise l'éthanol, mais la production d'éthanol est coûteuse financièrement et écologiquement. Sa fabrication à partir du maïs pollue l'environnement, beaucoup plus que la production du MMT.

Le MMT nécessite un traitement moins intensif que l'éthanol, ce qui signifie une diminution dans l'atmosphère du gaz carbonique, d'oxyde d'azote, de monoxyde de carbone et d'anhydride sulfureux provenant des cheminées des usines qui fabriquent l'essence. Quant


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à l'éthanol, les fertilisants et les pesticides utilisés dans la culture du maïs dégradent les sols. Si les arguments environnementaux et sociaux en faveur de cette législation ne tiennent pas, il en va de même pour ce qui est de l'aspect économique.

Il est démontré que les coûts reliés aux changements proposés par le projet de loi C-29 sont exorbitants. Le Canada n'a tout simplement pas les moyens de se payer de telles dépenses un peu irrationnelles.

(1700)

Le substitut proposé au MMT, soit l'éthanol, implique des investissements de plusieurs millions de dollars. D'ailleurs, le gouvernement a déjà lancé un programme d'investissement de l'ordre, comme mon collègue le disait tout à l'heure, de 70 millions de dollars dans le développement de l'éthanol. Comme par hasard, une usine d'éthanol de Chatham, en Ontario, une forteresse libérale, a reçu l'aide du gouvernement fédéral.

Décidément, ce projet de loi est empreint de partisanerie, et ce n'est pas un hasard si le gouvernement veut l'adopter, coûte que coûte. En cédant aux pressions du lobby de l'industrie de l'automobile, concentrée notamment dans la circonscription de la ministre de l'époque, dans Hamilton-Ouest, et dans le sud-ouest de l'Ontario, et en favorisant l'industrie de l'éthanol, il fait des gains politiques.

En tant payeurs de taxes, les Canadiens et les Québécois perdront beaucoup dans ce projet. On estime qu'il en coûtera plus de 100 millions de dollars en capital, dont sept millions au Québec seulement, en plus des frais d'exploitation des raffineries, qui devront omettre l'additif du MMT dans leur essence. L'éventualité que les pétrolières menacent soit de procéder à des mises à pied ou d'augmenter le prix de l'essence est à envisager avec l'adoption d'une telle législation.

À ces coûts de production et de transfert du produit, il faut ajouter ceux reliés aux multiples recours en justice que pourraient intenter les compagnies américaines et canadiennes qui se sentiront lésées par cette politique. Car, il est d'une importance capitale de le mentionner, le projet de loi C-29 viole certaines dispositions des ententes commerciales internationales, dont l'ALENA, et des traités régissant le commerce entre les provinces canadiennes. Ce faisant, le gouvernement libéral bafoue encore une fois certains articles de la Constitution canadienne qui garantissent le respect par la Confédération des champs de compétence de ses provinces.

La compagnie américaine Ethyl, la seule à fabriquer du MMT et à exporter son produit au Canada, a déposé, le 10 septembre dernier, une poursuite de 275 millions de dollars canadiens contre le gouvernement fédéral. Ethyl se base sur un article de l'ALENA pour soutenir que ses droits au commerce sont brimés par cette législation que le gouvernement s'apprête à adopter. Cette multinationale allègue ainsi que sa réputation est entachée par les propos que tient le ministre de l'Environnement au sujet du MMT.

Le ministre du Commerce international a d'ailleurs écrit en février dernier à son collègue de l'Environnement pour l'avertir du fait que, et je le cite: «Prohiber l'importation du MMT serait contraire aux obligations du Canada selon les termes de l'Organisation mondiale du commerce et de l'ALENA (. . .), et cela ne pourrait être justifié pour des raisons de santé ou d'environnement, compte tenu des preuves scientifiques disponibles.»

Le premier ministre de la Saskatchewan a aussi fait part au premier ministre du Canada de ses réserves quant aux effets du projet de loi C-29. Dans une lettre datée du 16 septembre dernier, il écrivait que «cette loi n'est aucunement justifiée en ce moment.» C'est le gouvernement de la Saskatchewan qui dit cela. Il faudrait prendre en considération l'avis de ce gouvernement provincial.

La Saskatchewan n'est pas la seule province à s'opposer au projet de loi C-29. En effet, en voulant légiférer dans le domaine du commerce interprovincial, le gouvernement fédéral envahit, encore une fois, un champ de compétence provinciale.

(1705)

En mai dernier, l'Assemblée nationale du Québec a adopté à l'unanimité une motion demandant au gouvernement fédéral de surseoir à l'adoption du projet de loi C-29. Évidemment, et comme dans plusieurs autres dossiers, le gouvernement fédéral continue de faire la sourde oreille aux provinces qui s'opposent à ses législations. La coopération entre le gouvernement fédéral et les provinces devient ici encore un enjeu important.

Pour toutes ces raisons, il m'est impossible d'appuyer un tel projet de loi. Le fondement scientifique militant en faveur d'une interdiction du MMT est extrêmement faible, les considérations environnementales et économiques ne sont pas prises en compte. Pour moi, ces aspects influencent la qualité de vie de la population du Canada et du Québec. C'est pourquoi il faut les aborder avec plus de sérieux et de rigueur que ne le démontre ce gouvernement.

[Traduction]

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, le député soulève des points semblables à ceux que d'autres de ses collègues du Bloc ont soulevés, et cela revient essentiellement à une condamnation du lobby de l'automobile.

Comme je l'ai mentionné plus tôt, j'ai eu l'occasion aujourd'hui de rencontrer le président de l'association canadienne des concessionnaires d'automobiles, M. Douglas R. Leggat, de Burlington, en Ontario. La question du MMT est très importante pour son association.

Les effets négatifs du MMT résultent du fait qu'environ 80 p. 100 des produits de combustion de l'additif restent dans la chambre de combustion du moteur et dans le convertisseur catalytique, ce qui nuit à l'équipement de contrôle de la pollution et accroît la pollution atmosphérique. Il y a donc des conséquences pour la santé.

Ma question au député se résume à ceci: est-ce que l'on s'inquiète d'un éventuel problème de lobbying ou est-ce que l'on s'inquiète du risque pour l'environnement et la santé des Canadiens? Je voudrais que le député me dise ce que l'industrie de l'automobile a à gagner de cela, à part avoir des produits qui réduisent la pollution de l'environnement canadien.


5392

[Français]

M. Nunez: Monsieur le Président, pour nous, il est évident que le lobbying de l'industrie automobile est très fort dans ce dossier. La plupart de ceux qui s'opposent, parmi les députés du gouvernement, viennent de l'Ontario, comme mon collègue, où se concentre l'industrie automobile.

Si vous étiez si certain de vos affirmations, vous pourriez en discuter avec votre collègue, député de l'Ontario également, mais ministre du Commerce international, qui a adressé une lettre au ministre de l'Environnement pour lui dire à quel point il était préoccupé des conséquences de ce projet de loi.

Si vous aviez tellement raison, pourquoi le gouvernement de la Saskatchewan a-t-il mentionné des réserves très sérieuses à l'égard de ce projet de loi? Le gouvernement du Québec l'a fait également; l'Assemblée nationale du Québec a adopté une résolution unanime pour s'opposer à ce projet de loi.

Je pense qu'il serait bon pour les Canadiens et les Québécois de ne pas procéder avec ce projet de loi, surtout en ce moment où il y a une divergence au gouvernement, au sein même du Cabinet. Je pense que cela mériterait encore un peu plus d'étude avant de revenir avec un tel projet de loi qui est très controversé.

(1710)

[Traduction]

M. Szabo: Monsieur le Président, je voudrais souligner au député que c'est le groupe de travail sur les véhicules et les carburants non polluants du Conseil canadien des ministres de l'Environnement qui a estimé que les avantages pour la santé pourraient atteindre 31 milliards de dollars sur une période de 23 ans, si l'on introduisait des carburants plus propres et des normes d'émissions plus strictes pour les véhicules vendus sur le marché canadien.

Comme il y a une certaine incertitude, un certain risque, un certain désaccord, est-ce qu'il ne serait pas prudent d'aller de l'avant et de pécher par excès de prudence en faveur de la protection des Canadiens et de la protection de l'environnement?

[Français]

M. Nunez: Monsieur le Président, avec tout mon respect, je ne pense pas que la santé des Canadiens ou des Québécois soit tellement en danger. C'est pour ça que je ne crois pas que ce projet de loi soit justifié dans les circonstances actuelles. Il y a des études scientifiques qui vont dans le même sens que mes affirmations.

Je pense que le gouvernement a un défi énorme parce que s'il n'y a pas d'entente au sein même du Cabinet et parmi sa députation, il serait plus sage de ne pas procéder avec ce projet de loi tellement critiqué et discuté.

[Traduction]

Mme Karen Kraft Sloan (secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, tout d'abord, je tiens à signaler que les études scientifiques dont le député du Bloc a parlé, viennent de la société qui fabrique le MMT. On peut essayer de voir si ces études sont bien objectives.

L'Université de Waterloo, une excellente université canadienne avec une bonne réputation nationale et internationale, a effectué elle aussi des études. Elle a laissé entendre que les études faites par la société Ethyl n'étaient pas valides et qu'on n'avait pas procédé de façon rigoureusement scientifique. Je prétends que les études auxquelles le député a fait allusion ne sont pas tout à fait justes.

Le député parle de beaucoup de choses dans son discours. Le débat porte maintenant sur l'amendement qui a pour objectif de reporter de six mois un vote sur ce projet de loi. Je trouve cet amendement tout à fait intolérable et inacceptable. Je pense qu'il en va de même des Canadiens qui nous regardent aujourd'hui.

Les Canadiens ne peuvent accepter que les bloquistes et les réformistes s'associent dans ce cas-ci. Ils sont la proie d'un intense effort de lobbying de la part d'une entreprise multinationale américaine. Si nous devons défendre les intérêts du Canada, si nous devons veiller à la santé des Canadiens et leur assurer un environnement sain, nous n'allons pas répondre aux désirs et aux souhaits d'une multinationale américaine. Nos vis-à-vis devraient avoir honte.

En ce qui concerne les préoccupations de mon vis-à-vis, je tiens à dire que dans son rapport sur des véhicules et des carburants moins polluants, le groupe de travail du Conseil canadien des ministres de l'Environnement, qui regroupe des ministres de toutes les provinces, reconnaît qu'on doit traiter les carburants et la technologie de contrôle des émissions comme un système intégré de réduction des émissions des véhicules automobiles. Les ministres se sont entendus également pour exiger l'utilisation obligatoire de carburants plus propres dans tous les véhicules automobiles. L'interdiction du MMT est tout à fait conforme à cette approche.

Je siégeais au comité lorsque nous avons entendu les témoins de la société Ethyl. J'ai demandé au représentant de la société si c'était à la population, au gouvernement, au secteur automobile ou aux raffineries qu'il incombait de s'assurer que nous réduisons bien les émissions inacceptables. Il m'a répondu que toutes ces autres personnes avaient des responsabilités, mais que les raffineries et les fabricants de MMT n'en avaient aucune. Je pense que les Canadiens vont trouver cela tout à fait inacceptable. Les arguments que les bloquistes avancent et que les réformistes appuient sont inacceptables.

(1715)

Le député de ce côté-ci de la Chambre qui a gardé tout son bon sens dans cette affaire, et je pense qu'il faut beaucoup de bon sens dans cette affaire. . .

M. Calder: C'est un libéral.

Mme Kraft Sloan: C'est un libéral. Parfaitement.


5393

Le député a posé au député d'en face pourquoi tous ces fabricants d'automobiles se mettent à prétendre que le MMT est mauvais pour leurs systèmes diagnostiqueurs de bord? Ils sont plus d'une vingtaine de fabricants d'automobiles qui sont en concurrence les uns contre les autres. Ils ont dépensé des millions de dollars pour effectuer des essais scientifiques. Pourquoi dépenseraient-ils tout cet argent sur un marché où la concurrence est féroce s'ils n'avaient pas l'intention de chercher la vérité?

Je voudrais justement exposer d'autres vérités au sujet du projet de loi C-29 afin de réfuter certaines faussetés répandues par les députés d'en face. La vérité, c'est que le MMT endommage le dispositif antipollution. Si vous désirez connaître la formulation de l'essence, vous devriez consulter un expert en raffinage. Si vous voulez comprendre les effets que cette substance a sur un véhicule, allez voir les ingénieurs et les spécialistes qui ont conçu et testé les automobiles.

Tout le monde admet que plus de 80 p. 100 du manganèse qui est ajouté à l'essence canadienne reste dans le moteur et le dispositif antipollution du véhicule. Qu'arrive-il ensuite? Ça encrasse les pièces. Ça empêche les divers dispositifs de bien fonctionner. Et il devient alors impossible d'assurer la surveillance de toutes les autres émissions du véhicule.

Le député d'en face a évoqué les coûts que devront assumer les consommateurs. Mais pour enlever le MMT de l'essence il n'en coûtera que 5 $ par an au consommateur, au lieu des milliers et des milliers de dollars en frais de réparation. Voilà pourquoi l'Association canadienne des automobilistes, le plus important groupe de défense des droits des automobilistes au Canada, appuie ce projet de loi.

La vérité, c'est aussi que si le MMT était aussi bon pour le rendement des automobiles et des systèmes antipollution que son fabricant le prétend, les fabricants d'automobiles de la Californie, par exemple, l'auraient adopté. Or, le MMT a été banni en Californie. Si lesdéputés sont déjà allés en Californie, ils savent quels genres de problèmes y pose le smog.

Les organismes chargés de chercher des moyens de réduire les émissions ont travaillé avec d'éminents ingénieurs et autres spécialistes du monde entier afin de trouver des mesures destinées à réduire la pollution créée par l'automobile. Personne n'est parvenu à la conclusion que le MMT constituait la solution.

La vérité, c'est que le Canada est le seul pays du monde industrialisé à utiliser le MMT à l'échelle nationale. Or, malgré une décision d'ordre purement technique rendue par un tribunal américain et qui a forcé l'Agence américaine de protection de l'environnement à accorder une dispense à la société Ethyl, l'utilisation du MMT est toujours interdite dans plus d'un tiers des États des États-Unis. Un bon nombre de raffineries refusent d'inclure du MMT dans leur programme de reformulation de leurs essences.

Il est une autre vérité que j'aimerais invoquer pour réfuter ce qu'ont dit des députés. En vertu de l'ALENA, le gouvernement canadien a le pouvoir d'adopter une mesure législative comme le projet de loi C-29. Il soupçonne que les députés d'en face sont affolés et qu'ils ont peur de cette grosse multinationale américaine. Ils ont peur d'affirmer leur souveraineté. Je trouve cela très intéressant, étant donné le nombre d'interventions au sujet de la souveraineté à la Chambre

L'ALENA comporte une disposition qui nous permet d'assurer la protection de la vie et de la santé des êtres humains, des animaux ou des plantes. On a inséré cette garantie dans l'ALENA pour que le gouvernement fédéral puisse protéger l'environnement et la santé des Canadiens sans crainte de voir ses efforts bloqués par des mesures commerciales adoptées, pour des motifs frivoles, comme celle qu'on a annoncée récemment.

(1720)

J'ai une autre vérité à présenter. Je tiens à dire que les États-Unis veulent interdire le MMT autant que le Canada. La contestation que la société se propose d'intenter est une contestation privée contre le projet de loi C-29. Cela montre clairement que sa position n'a pas l'appui du gouvernement américain. Ce dernier n'a pas hésité à formuler des plaintes dans le cadre de l'ALENA dans le passé, mais dans ce cas-ci, l'Agence américaine de protection de l'environnement joue un rôle de chef de file, tout comme le gouvernement du Canada le fait en s'opposant à l'utilisation de cet additif.

Je voudrais dire clairement, et peut-être lentement pour que mon vis-à-vis et les autres députés d'en face le comprennent bien, que Carol Browner, directrice de l'EPA aux États-Unis, a dit plus tôt cette année que l'Agence américaine de protection de l'environnement croyait qu'on ne devrait pas vérifier l'innocuité du MMT en prenant les Américains comme cobayes.

Je félicite le gouvernement d'avoir adopté une position semblable. Les Canadiens ne serviront pas à tester le MMT. Voudriez-vous que je le répète? Les Canadiens ne serviront pas. . .

Le vice-président: Je demande à notre collègue de bien vouloir se rasseoir. Je comprends que la députée ne soit pas la seule à le faire, mais je l'invite à ne pas s'adresser directement à ses vis-à-vis et à passer plutôt par la présidence.

Mme Kraft Sloan: Oui, merci beaucoup, monsieur le Président. C'est simplement que je me laisse emporter par la passion incroyable que m'inspire cette question et je ne peux comprendre que nos vis-à-vis ne saisissent pas cela.

Le ministère de la Santé a confirmé en juillet 1996 qu'il appuyait pleinement l'interdiction proposée du MMT. Cette interdiction a également l'appui des services de santé publique des villes de Toronto et de North York. Ces collectivités et d'autres ne connaissent que trop bien les problèmes de santé associés à la mauvaise qualité de l'air et elles attendent avec impatience qu'on interdise le MMT. On ne connaît pas grand-chose des effets à long terme sur la santé de l'exposition chronique à faible dose à des composés du manganèse qui se forment lorsque le MMT est utilisé comme additif dans l'essence.


5394

Comme je l'ai dit au début de mon discours, il est tout à fait absurde de prétendre que nous cédons à un groupe de pression. Lorsqu'on regarde les choses en face, qui défend l'intérêt public? Il y a, d'un côté, les bloquistes et les réformistes qui ont plié devant les efforts de lobbying d'une seule multinationale américaine qui, je pourrais ajouter, s'est opposée à la suppression du plomb dans l'essence.

De l'autre côté, il y a ceux qui parlent au nom de l'intérêt public, de la santé des Canadiens, de la protection de l'environnement. Ce sont des organisations comme l'Association d'information sur l'allergie et l'asthme, l'Association canadienne des automobilistes, le plus important groupe de défense des conducteurs canadiens d'automobiles, l'Institut canadien de la santé infantile, le Conseil des Canadiens, l'Environmental Defence Fund, Troubles d'apprentissage-Association canadienne, l'Association pour la santé publique de l'Ontario, Pollution Probe et le Sierra Club du Canada.

(1725)

Je pense avoir défendu mon point de vue très clairement et je m'attends à ce que la Chambre se prononce rapidement sur l'amendement et sur le projet de loi.

M. Philip Mayfield (Cariboo-Chilcotin, Réf.): Monsieur le Président, en écoutant les observations sur le MMT, il m'est apparu que les libéraux s'apprêtaient à interdire cette substance alors que les États-Unis ont levé une telle interdiction il y a environ un an. Je voudrais bien comprendre quelle est la stratégie des libéraux dans ce dossier.

L'interdiction du MMT comme additif provoquera une augmentation de 20 p. 100 des émissions d'oxyde nitreux, autrement dit du «smog» que nous voulons éviter dans nos villes. Ce que la députée vient de dire ne fait pas grand sens. Je me demande quelles observations elle ferait, si elle tenait compte de ces deux faits.

Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, le député n'a peut-être pas entendu mon discours. Je vais parler un peu plus lentement.

En ce qui concerne le premier commentaire du député, j'ai clairement dit que la Cour suprême des États-Unis avait rejeté la cause pour des raisons techniques. L'organisme américain Environmental Protection Agency va de l'avant. J'ai également rappelé que Carol Browner, qui dirige l'EPA, avait déclaré que les Américains ne devraient pas servir de cobayes si l'on voulait prouver l'innocuité du MMT. J'ai ajouté que la Californie, ainsi que 16 autres États américains, a interdit le MMT. La plupart des raffineries aux États-Unis n'utilisent pas le MMT. On refuse de l'utiliser.

Quant au dernier commentaire du député d'en face, les renseignements qu'il a défendus à la Chambre viennent d'une étude réalisée par la société qui produit le MMT et, si je peux me permettre de l'ajouter, c'est la seule à le faire dans le monde entier. Ce renseignement vient de l'étude, qui a d'ailleurs été démentie par l'Université de Waterloo, réputée à l'échelle internationale.

M. Murray Calder (Wellington-Grey-Dufferin-Simcoe, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à la secrétaire parlementaire. Le député du troisième parti a parlé d'oxyde nitreux, d'oxyde de manganèse et le reste. Il y a un autre additif que nous pourrions ajouter à l'essence. Il s'agit de l'alcool. Le mélange de l'essence et de l'alcool est appelé éthanol. On n'accule pas ainsi une raffinerie à la faillite. Elle pourrait faire ce mélange également.

En Ontario, nous allons créer un nouveau débouché intérieur pour les producteurs de maïs, de l'ordre de 15 millions de boisseaux, grâce à l'usine d'éthanol qui entrera en production l'an prochain. Nous pouvons réduire les émissions de monoxyde et de dioxyde de carbone. Nous pouvons résoudre le problème des systèmes de diagnostic de bord dont les fabricants d'automobiles se préoccupent tant. Mieux encore, cela donne un sous-produit. Il s'agit du grain de brasserie. Le grain de brasserie a été transformé par des enzymes. Il est éminemment digeste. On peut en nourrir les bovins, les vaches laitières et les cochons. Tout cela donne un sous-produit appelé engrais. Certains des amendements dont parle le porte-parole du troisième parti évoquent un sous-produit provenant des boeufs. Cela peut aller dans le sol. Les cultures peuvent s'en nourrir. Cela ne cause absolument pas de pollution. C'est de la biomasse fraîche. J'aimerais que la secrétaire parlementaire nous dise ce qu'elle en pense.

(1730)

Mme Kraft Sloan: Monsieur le Président, comme toujours, mon honorable collègue a une façon intéressante de parler de certains problèmes très complexes.

Un des aspects qui ont été soulevés à la Chambre, spécialement par les députés d'en face, c'est que cela sera bénéfique uniquement pour les producteurs de maïs de l'Ontario. Je ferai remarquer qu'il n'y a pas que l'éthanol qui peut remplacer le MMT, mais beaucoup d'autres substances encore.

Les députés du Bloc québécois oublient qu'il existe au Québec une organisation productrice d'éthanol qui en fabrique à partir de produits du bois.

Il existe de nombreux débouchés. Il y a des installations de raffinage en Alberta, la province dont proviennent plusieurs députés réformistes.

Quand on parle d'interdire le MMT et de le remplacer, on parle d'une grande variété de substances qui pourraient être utilisées de façons dont toutes les régions du pays pourraient bénéficier plutôt que de faire en sorte que tout cet argent aille à une entreprise américaine.

Une voix: Et c'est bon pour la santé, n'est-ce pas?

Mme Kraft Sloan: C'est bon pour la santé.

Le vice-président: Reprise du débat. Mes excuses au député de Mississauga-Sud. À moins qu'il n'y ait consentement unanime pour lui accorder plus de temps.

M. Chatters: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je dois normalement participer à ce débat depuis un certain temps. J'ai


5395

eu l'obligeance de céder ma place au député bloquiste qui devait prendre l'avion, mais je voudrais pouvoir dire un mot avant la fin.

Le vice-président: Il n'y a donc pas consentement unanime pour prolonger le temps de parole de la secrétaire parlementaire.

M. Robinson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais des précisions sur le prolongement de la séance. Le débat sur les initiatives parlementaires doit normalement commencer à17 h 30. Nous n'avons aucune objection à une brève prolongation, mais il est évident que nous voulons étudier la motion.

Le vice-président: Je remercie le député. Le débat est prolongé jusqu'à 17 h 42 à cause de la déclaration ministérielle.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Monsieur le Président, je tiens à parler de cette question parce que les députés libéraux utilisent les données sans aucune rigueur. Nous avons discuté de quelques-unes d'entre elles. Ils sont revenus sans cesse à la question de l'éthanol.

Je m'occupe de cette question depuis le tout début. J'ai écouté les témoignages aux comités. Les représentants des raffineries ont dit et répété que l'éthanol ne peut pas remplacer le MMT dans l'essence. Mais les députés reviennent sans cesse à cette fausse solution. C'est une question qui n'a absolument rien à voir.

Il s'agit de savoir qui défend les intérêts financiers de qui. La députée d'Essex-Windsor a rappelé que l'industrie canadienne de l'automobile était importante, qu'elle donnait 465 000 emplois et qu'elle représentait 7 p. 100 de notre PIB, et que sais-je encore. Je ne vois pas ce que cela a à voir dans le débat, à moins que le député ne fasse du lobbying pour l'industrie automobile.

M. Szabo: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Sauf votre respect, quand un député en nomme un autre et l'accuse de recevoir de l'argent d'autrui, de jouir d'un avantage particulier, il lui prête des intentions et salit sa réputation à la Chambre.

(1735)

Je trouve cela révoltant et je demande au député qu'il retire ses paroles.

Le vice-président: Si les députés avaient à occuper ce fauteuil, ils constateraient que, parfois, des propos tenus sont assez troublants. Je me demande si, pour rendre l'atmosphère plus agréable, le député voudrait bien reformuler ses propos.

M. Chatters: Monsieur le Président, je retirerai avec plaisir l'accusation si les députés d'en face sont prêts à retirer également la même accusation qu'ils ont portée contre mon parti.

Le vice-président: Je n'ai pas dit que le terme était antiparlementaire. À la lumière de ce que le député a dit, je conclus que les propos du député n'étaient pas antiparlementaires et permets au député de continuer.

M. Chatters: Merci, monsieur le Président. Certes, je ne m'oppose pas à ce que la députée d'Essex-Windsor se porte à la défense des intérêts de l'industrie automobile parce qu'il s'agit, après tout, de ses électeurs. Venant d'une circonscription où on exploite beaucoup le pétrole et le gaz, je défendrais moi aussi les entreprises de ce secteur.

Cependant, je poserais comme condition, si je prenais leur défense, qu'ils me fournissent des preuves dignes de foi à l'appui de leur cause. J'ai siégé au comité et j'ai écouté les témoignages; seul un imbécile aurait ajouté foi aux preuves fournies. Les témoins nous ont dit que cette substance encrassait les bougies des voitures. Or, les bougies qu'ils ont produites n'étaient même pas de la même marque ni du même modèle. Les libéraux ont tout pris cela pour argent comptant.

J'ai écouté les deux parties, soit les fabricants de voitures, les raffineurs et la société Ethyl, je les ai rencontrées et je leur ai parlé, ce qui est bien plus que ce que les libéraux étaient prêts à faire, si vous voulez mon avis. Après tout ce débat, les porte-parole de la société Ethyl ont dit aux membres du comité qu'ils voulaient être raisonnables et équitables dans cette affaire et que si les libéraux permettaient simplement la tenue d'une étude non partisane à laquelle tous les groupes intéressés pourraient participer et où les témoignages seraient impartiaux et irréfutables, ils retireraient volontairement le produit. Comment peut-on être plus raisonnable? Je dis que c'est impossible.

À mon avis, l'hypocrisie qui entoure toute cette question est inconcevable. Le député de York-Simcoe a pris la parole hier, durant les déclarations, et il a dit ceci: «Les pays du monde entier s'entendent pour dire que c'est l'intervention de l'homme qui est la cause du réchauffement de la planète et des changements climatiques. Nous en subirons tous les conséquences économiques et sociales négatives.»

Le même jour, l'après-midi, le député d'Elgin-Norfolk a dit ceci: «Je félicite la ville de Chatham et la société Commercial Alcohols qui ont annoncé récemment la construction d'une installation de production d'éthanol de 153 millions de dollars.» Cela nous donne une bonne idée de ce qui se passe en l'occurrence. On ne peut jouer sur les deux tableaux.

Une voix: Ça commence à sentir pas mal mauvais.

M. Chatters: Je ne vous le fais pas dire, et ce n'est pas l'odeur du maïs qui fermente.

Les arguments invoqués à propos des liens entre l'éthanol et le MMT ne sont tout simplement pas rationnels parce que l'éthanol ne remplace pas le MMT et ne sera pas un substitut à celui-ci. Je pense que quiconque examine cet argument en conviendra.

5396

Comme le temps file, je fais un peu de coq-à-l'âne. Je voudrais citer un passage du Sunday Daily News de Halifax où le premier ministre de la Nouvelle-Écosse, M. Savage, dit qu'il ne peut appuyer ce projet de loi parce que son adoption entraînerait la fermeture de la raffinerie d'Imperial Oil dans sa province.

Une voix: C'est de la foutaise.

M. Chatters: C'est écrit ici.

(1740)

L'industrie automobile veut se débarrasser du MMT pour camoufler un défaut du système technologique qu'elle doit installer sur ses véhicules. Le MMT est interdit depuis 20 ans aux États-Unis, mais le système OBD-II y a le même taux de défaillance qu'au Canada, où le MMT est présent dans l'essence. Le problème, c'est que l'industrie automobile a dû demander d'être exemptée de certaines normes pour faire homologuer le système OBD-II parce qu'il a des défaillances. La technologie n'est pas au point et les fabricants d'automobiles ne pouvaient pas respecter les normes. Puisqu'il leur faut un bouc émissaire, ils ont choisi le MMT. C'est pour cette simple raison que nous devons aujourd'hui nous pencher sur le projet de loi.

Les preuves sont là. Le MMT a été étudié comme aucun autre additif à l'essence ne l'a été. La question a été portée à deux reprises devant la Cour suprême des États-Unis et Ethyl Corporation a remporté sa cause à deux reprises. Aucun élément de preuve scientifique vérifiable ne démontre que le MMT provoque une défaillance du système OBD-II. Il n'y a tout simplement aucune preuve.

Nous avons entendu raconter à maintes reprises les histoires de manganèse destructeur de cellules du cerveau humain et autres. Le ministre de la Santé du gouvernement libéral lui-même a étudié le produit à fond et, en dépit de tout ce que nous avons entendu dire, Santé Canada a déclaré que l'ajout de MMT à l'essence n'avait aucun effet néfaste sur la santé des Canadiens.

Encore une fois, on a recours à des tactiques de peur pour cacher la faiblesse des arguments. Voilà ce que j'avais à dire.

Le vice-président: Comme il est 17 h 52, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.

______________________________________________


5396

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LES MATIÈRES DANGEREUSES

M. Svend J. Robinson (Burnaby-Kingsway, NPD) propose:

Que, de l'avis de la Chambre, le ministre des Transports devrait procéder rapidement à l'établissement d'un emplacement d'essai pour Operation Respond, une base de données informatisée de matières dangereuses qui améliorerait la sécurité des pompiers et contribuerait à sauver des vies et des biens.
-Monsieur le Président, depuis 1991, les pompiers et d'autres intervenants dans des situations d'urgence tentent d'obtenir l'établissement d'un emplacement d'essai pour Operation Respond, un système nord-américain d'information d'urgence informatisé qui permet aux pompiers d'obtenir instantanément des renseignements précis sur les lieux d'un incident mettant en cause des matières dangereuses. Je signale que ce système peut également s'appliquer au trafic ferroviaire de passagers.

Au fil des ans, les pompiers et les autres intervenants dans des situations d'urgence ont reçu l'appui de nombreux députés des deux côtés de la Chambre en faveur d'une action rapide du gouvernement concernant Operation Respond.

Je saisis l'occasion pour signaler que ce projet a reçu l'appui des députés du caucus libéral, du Bloc québécois, du Parti réformiste et du Parti conservateur.

Hier, je me suis entretenu avec la moitié du caucus conservateur, c'est-à-dire la députée de Saint John, et elle m'a confirmé son appui ferme et indéfectible à cette motion.

Je remercie également tous les députés qui ont écrit ou téléphoné pour manifester leur appui à la motion, bien que certains ne puissent pas être présents à la Chambre pendant la première journée de débat.

On comprendra également que je désire rendre un hommage particulier aux députés de mon parti qui ont appuyé énergiquement ces propositions de changement au fil des années, notamment le député de The Battlefords-Meadow Lake qui a appuyé la motion aujourd'hui et tous mes autres collègues qui ont également accordé leur appui à la motion présentement à l'étude. Je remercie en particulier le député de Winnipeg Transcona, un ardent champion de cette motion. En juin 1995, il a lui-même saisi la Chambre d'une motion inscrite sous les initiatives parlementaires, dans laquelle il pressait le gouvernement de donner suite à ce projet très important.

En fait, dès 1992, des collègues comme Ian Angus, de Thunder Bay, et Joy Langan, de Mission-Coquitlam, se sont prononcés en faveur de ces changements. À l'avant-scène de cette campagne se trouvent les pompiers eux-mêmes, d'un bout à l'autre du Canada, par l'intermédiaire de l'Association internationale des pompiers.

(1745)

Dans ma propre ville, le vice-président de cette association au Canada, M. Terry Ritchie, le président de la section locale 323, M. Mark Fletcher, la section locale de Burnaby de l'AIP et un représentant de la section locale 18, M. Robert Hall, de Vancouver, ont travaillé particulièrement fort à la réalisation de ce projet. J'ajoute qu'ils ont remarqué certaines préoccupations particulières au Lower Mainland. En tant que ville portuaire, Vancouver a eu plus que sa part d'accidents liés à la présence de matières dangereuses, et la


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circulation enregistrée dans nos ports et nos rues continue à augmenter rapidement.

Tous les corridors de transport vers le Lower Mainland traversent Burnaby, qu'il s'agisse des routes, des chemins de fer, des lignes aériennes ou des voies navigables. En fait, toutes les matières dangereuses acheminées à Vancouver par camion passent sur des routes qui traversent Burnaby. Les principaux transporteurs ferroviaires traversent Burnaby. Quatre des six quais réservés à la manutention de produits pétrochimiques dans le district régional du Grand Vancouver sont aussi situés à Burnaby.

Les pompiers de Burnaby ont remarqué que le système actuel, le système CANUTEC, est en place depuis 1979. Il fonctionne bien quand les pompiers savent exactement à quelle matière ils ont affaire. Il y a un problème quand on ne sait pas à quel produit chimique ou autre matière dangereuse on a affaire. Comme le faisait remarquer M. Fletcher, dans la lettre qu'il m'a adressée: «On perd souvent un temps précieux, tout en courant de grands risques, à essayer de déterminer quelle matière est en cause. Un système de repérage informatisé nous prévenait quand des wagons de train ou des camions-citernes transportaient des chargements mixtes. On sait bien sûr que des produits chimiques relativement sans danger en soi peuvent devenir extrêmement dangereux lorsqu'ils entrent en contact avec d'autres produits.»

Operation Respond pourrait permettre de sauver bien des vies dans la ville de Burnaby, la vie des membres de notre service d'incendie, mais aussi la vie de nos concitoyens. Le système permettrait aux pompiers de rester en zone sûre, de se protéger contre un accident dû à la présence de matières dangereuses, et leur éviterait d'avoir à réagir avant de savoir à quoi ils ont affaire, de manière à pouvoir prendre les mesures de prudence qui s'imposent.

Je voudrais signaler le rôle clé qu'a joué le directeur canadien de l'Association internationale des pompiers, M. Doug Coupar, qui a tant fait pour faire connaître aux députés et à d'autres l'importance de ce dossier et l'importance d'agir vite.

Je tiens à remercier spécialement mon adjointe Catherine Meaden qui s'est fort bien acquittée de la tâche de préparer cet important débat.

L'objectif de la motion est clair.

[Français]

C'est d'établir un emplacement d'essai pour Operation Respond, une base de données informatisée de matières dangereuses, qui améliorerait la sécurité des pompiers et contribuerait à sauver des vies et des biens.

[Traduction]

Il faut savoir que l'aspect le plus dangereux du métier de pompier est de répondre à ces situations où l'on trouve des matières dangereuses. Les pompiers canadiens souffrent d'un manque d'informations de ce genre, tout particulièrement au cours des premières minutes, très critiques, de leur arrivée sur les lieux. Ce qui est absolument essentiel, ce sont des données exactes, facilement accessibles. C'est essentiel pour sauver des vies et des biens en pareilles circonstances. Le comportement qui convient face à telle matière dangereuse pourrait se révéler catastrophique ou très dangereux en présence d'une autre substance.

[Français]

Il existe toute une gamme de systèmes technologiquement avancés qui permettraient aux pompiers de connaître exactement la nature des matières dangereuses auxquelles ils s'exposent et d'avoir les conseils dont ils ont besoin pour réagir. Ces systèmes peuvent être conçus pour le traitement de matières dangereuses qui se trouvent sur un site donné, ainsi que pour celles qui sont transportées soit par train, par transport aérien, routier ou encore maritime.

[Traduction]

Non seulement les renseignements que ces systèmes fournissent aident à déceler la présence de matières dangereuses, mais ils permettent de savoir quelle technique de réponse d'urgence il convient d'utiliser. Dans certains cas, ils peuvent servir de lignes de conduite quand il s'agit d'évacuer une localité.

Grâce à un tel système d'identification des matières dangereuses, les pompiers disposeraient de l'information dont ils ont besoin pour répondre efficacement à toute situation et, partant, sauver des vies et des biens. Les pompiers ont certainement le droit de savoir exactement quelles matières dangereuses peuvent être présentes. Ils ont le droit de le savoir sur-le-champ. Ils ne devraient pas devoir attendre pendant des minutes ou parfois des heures avant d'obtenir cette information vitale.

(1750)

Dans le cas d'accidents impliquant des trains de passagers, Operation Respond aidera les pompiers à sauver des vies, en les informant sur les points d'entrée, les systèmes électriques et mécaniques et les mesures à prendre pour éviter les situations dangereuses.

Les députés ont peut-être remarqué l'annonce qui est parue dans le numéro de cette semaine du Hill Times. Dans cette annonce, on souligne qu'un colis peut être retracé rapidement où qu'il soit au Canada, voire même dans le monde. La technologie moderne et perfectionnée existe, mais les pompiers n'y ont toujours pas accès pour identifier des matières pouvant être dangereuses. Il faut absolument modifier cette situation et nous devons le faire sans tarder.

Il existe bien des exemples illustrant qu'il faut immédiatement établir ce système. Les députés se souviennent sans doute qu'en 1979, 24 wagons d'un train qui transportait du chlore gazeux ont déraillé à Mississauga. Deux wagons remplis de propane ont explosé formant une énorme boule de feu. Bien des habitants ont dû quitter leurs maisons.

Je sais que la députée de Mississauga-Ouest, qui incidemment appuie fermement cette motion, se souvient clairement de cet accident. De même, le secrétaire parlementaire du ministre des Trans-


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ports, député de Hamilton-Ouest, qui a lui aussi déjà fait savoir qu'il appuyait cette motion, se souvient très bien de l'accident de Mississauga. En fait, en tant que jeune reporter de la télévision de Hamilton, il a été chargé de couvrir cette tragédie.

Dans une situation comme celle-là, il est absolument essentiel que les pompiers aient accès au plus tôt aux techniques les plus modernes afin de savoir à quels matériaux au juste ils ont affaire.

Les exemples ne manquent pas. Dans la petite ville de Linwood, en Ontario, un camion servant à pulvériser de l'uréthane a pris en feu. Arrivés sur les lieux, les pompiers n'ont pas pu trouver la plaque étiquette de danger, qui doit évidemment être affichée, nous dit-on. Un pompier a pu obtenir le manifeste du chauffeur et la liste des marchandises transportées et déterminer à partir de cela les produits dangereux qui étaient à bord du camion. Consulté, CANUTEC leur a dit de cesser d'essayer d'éteindre le feu. En fait, il était dangereux pour eux d'essayer d'éteindre le feu.

Dans la campagne manitobaine, des pompiers ont mis 13 heures à déterminer le contenu d'un train qui avait déraillé. Ils se sont finalement servis de lunettes d'approche pour lire le numéro d'identification.

Un autre incident s'est produit plus tôt, cette année, sur la rive nord de la rivière Eramosa, à Guelph, à l'extérieur de l'usine chimique de la Huntsman et on a fait appel aux pompiers de Guelph. C'était le chaos. Quelque 56 000 litres de phényl chimique liquide ont été accidentellement déversés au cours du remplissage d'un réservoir. Il s'agissait d'un produit extrêmement toxique et inflammable qui brûlait au contact. Les pompiers n'ont pas pu bien accomplir leur travail parce qu'ils n'ont pas obtenu à temps l'information dont ils avaient besoin. Il leur a fallu attendre deux heures avant de l'avoir.

Il ne suffit pas de compter sur le système CANUTEC qui a été mis sur pied. Operation Respond emploie un numéro unique qui est clairement désigné et affiché, non seulement à un endroit, mais sur tous les conteneurs et à divers endroits.

Il est essentiel que nous allions de l'avant. Il est essentiel que le ministre des Transports fasse de l'établissement au Canada d'un emplacement d'essai pour Operation Respond une priorité de son ministère et qu'il engage le personnel et les ressources nécessaires à cette fin.

La Chambre se demande peut-être comment il se fait que le Canada n'a pas encore pris de dispositions pour faire l'essai d'Operation Respond. Transports Canada nous dit que le système du CANUTEC qui est actuellement en place n'a pas besoin d'être amélioré. Les exemples où le système du CANUTEC n'est pas efficace sont trop nombreux. Les retards et l'utilisation manuelle d'un téléphone sont tout simplement inacceptables, notamment lorsque la technologie informatique existe à cet égard. On dit qu'il n'y a pas eu de perte de vie humaine directe à la suite d'accidents. Jusqu'à maintenant, nous avons eu de la chance.

Que ferions-nous, par exemple, si une catastrophe majeure survenait au centre-ville de Toronto? Le CANUTEC interviendrait-il assez vite pour éviter des pertes de vie? On peut en douter sérieusement.

(1755)

Le CANUTEC et ses défenseurs ne tiennent pas compte non plus de ceux qui ont été exposés à la contamination, aux inconvénients d'une évacuation inutile et à la perte de biens qui auraient pu être évités.

Transports Canada dit aussi que les coûts seront trop élevés. Nous entendons des évaluations astronomiques, de l'ordre de millions de dollars. Ces chiffres sont tout à fait insensés. Nous ne voulons pas éliminer CANUTEC et le remplacer par un tout nouveau système. Ce que nous voulons, c'est partir du système CANUTEC, le renforcer et l'améliorer au moyen des dernières innovations technologiques.

Je souligne que la majorité des services professionnels de lutte contre l'incendie possèdent déjà le matériel nécessaire.

Operation Respond n'est pas un organisme à but lucratif. Le système est déjà utilisé à beaucoup d'endroits aux États-Unis et son personnel est prêt à collaborer avec nous pour l'implanter au Canada. D'ailleurs, nous avons reçu aujourd'hui même d'Operation Respond une estimation provisoire des coûts d'implantation. Selon les responsables, cela coûterait entre 40 000 $ et 50 000 $. Si nous voulions ajouter les trains de passagers, les coûts s'élèveraient entre 65 000 $ et 70 000 $. C'est de cela dont nous parlons. Je suis convaincu que tous les députés admettront que ce n'est pas payer cher pour mieux protéger les pompiers et les collectivités du Canada.

L'idée de base est très simple. Les pompiers veulent un accès direct par ordinateur portable à une base de données lorsqu'ils en sont aux toutes premières étapes critiques d'identification du produit auquel ils ont affaire. Le système CANUTEC ne suffit pas. En ce moment, les pompiers doivent se servir du téléphone pour passer par un intermédiaire de CANUTEC en dépit du fait que la majorité des services professionnels de lutte contre l'incendie possèdent des ordinateurs et des modems.

Améliorons le système CANUTEC. Associons-nous aux grands transporteurs qui ont manifesté leur volonté de collaborer. Il ne faut pas que Transports Canada laisse passer une si belle occasion. Faisons en sorte que le ministère joue un rôle de premier plan dans cette initiative majeure.

La motion a reçu l'appui des pompiers et de nombreuses collectivités du Canada, mais aussi d'organismes de secours d'urgence. L'Association canadienne des policiers, par exemple, qui représente 40 000 policiers de première ligne, m'a informé par lettre de son appui à la création d'une ressource supplémentaire, comme celle que propose la motion, pour faciliter l'entreposage, la manutention et l'expédition sûrs de matières dangereuses au Canada.


5399

Le syndicat des Travailleurs unis des transports, qui représente plus de 8 000 employés de l'industrie des transports par train et autobus, appuie la proposition sans réserve. Ce syndicat poursuit ses efforts pour que les secouristes opérationnels aient accès sur place et immédiatement à des renseignements sûrs et faibles concernant les matières dangereuses. Les membres des Travailleurs unis des transports connaissent très bien les dangers que comportent les incidents mettant en cause des matières dangereuses. En tant qu'employés des chemins de fer, ils ont eux-mêmes été témoins d'incidents semblables. Ils affirment que le système CANUTEC comporte de raisons non quantifiables pour lesquelles le système Operation Respond doit être mis en place immédiatement.

Imaginez que quelqu'un doive attendre jusqu'à trois heures pour obtenir des renseignements. C'est tout à fait inacceptable.

J'exhorte tous les députés à appuyer cette motion. Je demande que le Comité permanent des transports, qui est présidé par le député de Winnipeg-Sud, tienne des audiences. Ce député n'a pu être présent pour le débat d'aujourd'hui. Je lui ai cependant parlé et il m'a dit qu'il appuyait entièrement la motion. Je suis également heureux qu'il m'ait dit être favorable à ce que le Comité permanent des transports tienne des audiences au sujet de la motion présentement à l'étude.

Les pompiers et autres secouristes de partout au Canada vont suivre de près le débat actuel et son résultat. Je crains qu'un député, en particulier un ministériel, tente de diluer la motion ou d'y apporter un amendement proposant de l'examiner plus en profondeur ou de poursuivre la réflexion sur la question. C'est le moment ou jamais d'établir un emplacement d'essai. Nous n'avons pas besoin de plus d'études.

Cette semaine est la Semaine de la prévention des incendies au Canada. Dans deux jours, soit le 12 octobre, ce sera la journée désignée pour rendre hommage au personnel de sécurité incendie.

(1800)

Quand le ministre du Travail a pris la parole, cette semaine, au sujet de cette journée, il a fait remarquer que nos pompiers à plein temps ou volontaires mettaient souvent leur propre vie en péril pour sauver celle des autres. Il a dit: «Nous voulons donc profiter de cette journée pour exprimer notre appréciation et notre reconnaissance à tous les membres de nos services d'incendie à travers le Canada.»

En terminant, je me permets d'ajouter qu'il ne pourrait pas y avoir de meilleur moyen, au Canada, de rendre hommage au dévouement et à l'engagement manifestés par les pompiers et d'autres intervenants en situation d'urgence que d'adopter cette motion et d'établir un emplacement d'essai pour Operation Respond, afin d'améliorer la sécurité des pompiers et contribuer à sauver des vies et des biens.

M. Joseph Volpe (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, les membres du gouvernement se font bien évidemment l'écho des éloges adressés par le député de Burnaby-Kingsway aux membres des équipes d'intervention d'urgence.

[Français]

C'est avec plaisir que je prends part au débat sur la motion présentée par le député de Burnaby-Kingsway au sujet de l'implantation d'un lieu d'essai de l'opération Respond.

Cette motion stipule que le gouvernement fédéral devrait établir sans délai un lieu d'essai pour le programme Opération Respond. L'opération Respond est un système d'intervention d'urgence établi à l'origine dans la région de Houston, aux États-Unis, mais fonctionnant maintenant dans des municipalités choisies du même pays.

L'opération Respond fournit des renseignements de base aux personnes et aux organismes établis à ces endroits choisis, et équipés du logiciel approprié. Son promoteur est l'opération Respond Incorporated, un organisme sans but lucratif qui commercialise un système informatique d'intervention d'urgence, comme les procédures, le logiciel et le contenu.

[Traduction]

Le principal objectif de la Loi sur le transport des marchandises dangereux est de promouvoir la sécurité publique durant le transport de telles marchandises. Le programme concernant les marchandises dangereuses a deux dimensions. La première est de prévenir un largage ou un déversement accidentel. La deuxième est d'assurer une intervention adéquate en cas de déversement accidentel ou de risque apparent et imminent de déversement.

Les mesures de prévention des accidents incluent l'identification en bonne et due forme des marchandises dangereuses, des moyens appropriés de confinement, et le marquage approprié des contenants. En outre, un document de transport décrivant les marchandises dangereuses doit accompagner ces expéditions.

Pour une intervention adéquate en cas de largage ou de déversement de produits dangereux, on doit savoir de quel produit il s'agit, ses propriétés et les mesures qui devraient être prises. Le Canada a en place un service national d'intervention d'urgence qui s'appelle le Centre canadien d'urgence transport ou CANUTEC.

CANUTEC est équipé pour faire face à ce genre de situations. Operation Respond est limité dans ses activités. En fait, je ferai remarquer que les informations fournies par Operation Respond sont essentiellement celles qui figurent dans le guide intitulé «North American Emergency Responds» rédigé par CANUTEC et le département américain des Transports.

Mon collègue de l'autre côté sait que ce guide a été conçu afin de fournir aux équipes d'intervention des conseils sur les mesures à prendre sur le site d'un accident et est seulement une introduction au programme de CANUTEC. Entre parenthèses, je voudrais faire remarquer que Transports Canada a mis cet été un nombre suffisant d'exemplaires de la version 1996 de ce guide pour distribution gratuite à toutes les voitures de pompiers et à toutes les voitures de police qui patrouillent sur les routes au Canada.


5400

En plus, le ministère a également distribué cette année, sous la forme d'un vidéo, à tous les services de pompiers du Canada les résultats de travaux de recherche sur les explosions associées au gaz liquéfié. Ce vidéo renvoit à l'accident tragique qui s'est produit au Québec où plusieurs pompiers ont perdu la vie en raison de l'explosion provoquée pas l'inflammation des vapeurs de gaz liquéfié en ébullition.

Je parle de cela et de l'appui que CANUTEC apporte aux pompiers, pour souligner le fait que le ministère a beaucoup de respect pour les pompiers et reconnaît que leur accorder une aide efficace est l'une des activités les plus importantes que le ministère puisse entreprendre en matière d'interventions d'urgence.

(1805)

Je suis également certain que le député de Burnaby-Kingsway connaît CANUTEC. Ce centre fonctionne 24 heures par jour, sept jours par semaine. Son objectif principal es de fournir des renseignements, des conseils et des avis.

CANUTEC fournit également un service de communication et d'information sur les produits chimiques et les règlements, dans les deux langues officielles, pour ceux qui répondent aux urgences dans l'industrie. Ces gens peuvent être des pompiers bénévoles, des pompiers à plein temps, des agents de police ou des équipes d'intervention de l'industrie, comme celles dont disposent les principaux producteurs de produits pétroliers et de produits chimiques.

CANUTEC emploie des chimistes professionnels, formés aux situations critiques, qui sont capables de fournir des renseignements et des conseils à n'importe quel niveau de détail qu'exigent ceux qui répondent aux appels d'urgence.

[Français]

Il reçoit environ 30 000 appels téléphoniques par année dont 600 sont considérés comme des appels relatifs à des accidents graves. En vertu de la Loi sur le transport des marchandises dangereuses, un rejet accidentel de matières dangereuses doit être signalé immédiatement à la police locale. Toutefois, si l'accident met en cause un train, c'est Canutec qui doit en être avisé le premier.

[Traduction]

Dans le cadre des efforts constants de Transports Canada pour fournir un service de transport sûr et efficace, deux représentants de Transports Canada sont actuellement aux États-Unis pour observer Operation Respond. Leur rôle est d'assister aux réunions qui se tiennent à propos de cette base de données et d'identifier toute nouvelle activité qui pourrait être considérée comme un outil efficace pour les équipes d'intervention d'urgence au Canada.

Finalement, je peux garantir à tous les députés que Transports Canada continuera à surveiller étroitement Operation Respond et envisagera l'adoption de toutes les initiatives qui se révèlent efficaces pour aider ceux qui répondent aux urgences.

Mon collègue d'en face a déjà indiqué son appui à ce genre d'initiatives et mentionné que les membres du Comité des transports ont déjà manifesté leur appui aux initiatives du ministère. Je laisse le soin à mes collègues de ce comité de parler de cette question lorsqu'elle sera à nouveau discutée pendant les initiatives parlementaires. Je ne prétends pas parler en leur nom, mais je sais qu'ils sont d'accord avec ce que je viens de dire, non seulement de leur point de vue, mais du point de vue du ministère.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, je suis très heureux de prendre la parole aujourd'hui sur cette motion du député de Burnaby-Kingsway qui m'apparaît comme étant une motion intéressante. On pourrait même dire que c'est une belle occasion de signaler où le travail des parlementaires peut influencer l'action des ministères lorsqu'un ministère est un peu lent à mettre en place quelque chose.

On a un député qui vient dire à un ministre, à un ministère où il y a plusieurs milliers de fonctionnaires qu'ils auraient peut-être pu faire quelque chose plus tôt, le dossier est sur la table depuis déjà 1991. Certaines choses auraient pu être faites et la motion présentée est certainement intéressante sous plusieurs aspects.

Il faut noter qu'il s'agit d'établir un banc d'essai, c'est un projet expérimental qui assurera que des données informatisées concernant les matières dangereuses puissent être disponibles très rapidement pour les pompiers qui interviennent lors d'accidents.

C'est assez complexe comme situation parce que ça fait intervenir aussi des juridictions provinciales. Il y a le système SIMDUT au Québec qui concerne la gestion de toutes les matières dangereuses et il faut que ces différents programmes soient mis en relation pour que le système informatisé soit adéquat et que pour tout se fasse légalement et en respectant la juridiction des provinces.

On peut comprendre pourquoi le député de Burnaby-Kingsway a mis le mot «rapidement» dans sa motion parce que Transport Canada est en retard dans ce dossier. On l'a vu par les lettres d'appui qu'il a reçues de l'Association internationale des pompiers, de l'Association canadienne des policiers. C'est quelque chose que les gens attendent.

(1810)

Ceux qui interviennent depuis longtemps, ceux qui ont une expertise dans ce domaine, notamment, parce que, dans le cas des matières dangereuses, il est important que l'information soit disponible dans les cinq premières minutes après le moment où ils ont été mis au courant de l'intervention à faire.

Il est également important d'avoir de l'information très précise, par exemple, sur les systèmes électriques, les systèmes mécaniques, tout ce qui peut être disponible pour s'assurer qu'il n'y ait pas un geste inapproprié qui crée plus de problème que s'il n'y avait pas eu d'intervention.

Transports Canada s'est reposé, depuis quelque temps, sur le système CANUTEC, un système d'information par téléphone. Mais aujourd'hui, on se rend compte que ce système n'est pas suffisant, qu'il faut vraiment une intervention plus rapide, plus adéquate, plus précise et qui met à notre service les outils informatiques qu'on a développés dans les dernières années. On n'a pas de raison d'être en


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retard, d'agir un peu comme une société dinosaure, surtout dans des secteurs où il y a des interventions importantes et rapides à faire.

Cela m'apparaît d'autant plus important que, dans le domaine du travail des pompiers, il y a des pompiers professionnels, mais il y a aussi des pompiers volontaires. Cet été, j'assistais au concours des pompiers du KRTB, Kamouraska, Rivière-du-Loup, Témiscouata, Basques, une dizaine de corps de pompiers qui faisaient des compétitions. On pouvait voir combien il était important d'avoir de l'adresse, du courage, de la ténacité et de l'endurance pour faire le métier de pompier.

Je me disais, en lisant la motion du député de Burnaby-Kingsway, que ces gens qui remplissent la fonction de façon volontaire et qui auraient besoin de ce type de service, n'est-il pas important qu'on puisse le mettre à leur disposition rapidement?

On peut dire que les pompiers de paroisse ne rencontreront pas de grandes déflagrations, de grands problèmes. Mais on fait le lien tout de suite avec le réseau ferroviaire. Il suffit qu'il y ait un accident de train, car il traverse toute la région, pour qu'on ait devant nous un déversement de matière dangereuse, sans qu'on ait l'information adéquate, ce qui nous placerait dans une situation très difficile et devant des gestes irréparables qui peuvent mettre en péril la vie de pères de famille et de mères de famille qui, en plus, remplissent les fonctions de pompier bénévolement.

On peut juger notre société sur les services de protection qu'elle assure. Ceux qui sont là pour intervenir dans une situation dangereuse doivent obtenir le maximum d'information efficace et rapide pour pouvoir offrir un service adéquat.

Il s'agit d'une motion intéressante et elle obligera le gouvernement à bouger, à partir du moment où on l'aura adoptée. Il y a déjà une sensibilisation de faite grâce au débat d'aujourd'hui et au vote qui aura lieu afin que cette motion puisse être mise en vigueur.

Pour le Bloc québécois, il est aussi important que l'établissement de ce plan d'essai se fasse dans le respect des juridictions des provinces, afin de tenir compte des aspects pratiques de fonctionnement, de l'intervention rapide, mais pour que les banques d'information soient mises à la disposition de ceux qui géreront le réseau pour que les informations soient disponibles, pour que le service puisse être offert correctement, il faudra qu'on soit assuré du libre accès aux informations et que ce libre accès se fasse dans le respect de la législation.

Il ne sera pas le temps de se rendre compte, après avoir expérimenté le banc d'essai, par exemple, en Colombie-Britannique, que, soudainement, lorsqu'il y aura application Québec, on aura un retard de six mois, d'un an ou de deux ans dans la réalisation, parce qu'on n'aurait pas tenu compte des juridictions provinciales. Il est important que cet élément soient parmi ceux qu'on considérera dans la mise en place de ce banc d'essai pour qu'on puisse, le plus tôt possible au Canada, être doté d'un système semblable qui a déjà été mis en application aux États-Unis. Il assurera un service adéquat qui nous permettra d'éviter des accidents importants qui impliquent des humains, causant parfois des pertes de vie ou des pertes financières. Ce service viendra en aide à des gens qui sont déjà au service de la population, qui acceptent de faire face au danger dans leur vie quotidienne.

En ce sens, le Parlement a intérêt à appuyer une telle motion, d'autant plus que le gouvernement canadien a l'air de s'être traîné un peu les pieds là-dessus. Il n'est pas mauvais de brasser la cage pour s'assurer que ce projet puisse aboutir.

(1815)

On peut se demander si vraiment, si on était dans un système où les juridictions étaient claires, où chacun aurait des responsabilités clairement identifiées, ce genre d'action n'aurait pas pu être réalisé plus rapidement, parce qu'il y aurait un seul responsable. On ne pourrait pas se retourner la responsabilité l'un à l'autre. J'espère qu'un jour on aura, à l'avantage des Québécois et des Canadiens, un tel système.

Mais entre-temps, la motion du député de Burnaby-Kingsway est très intéressante. Je pense qu'elle mérite d'être appuyée. En terminant mon discours, je propose:

Que l'on modifie la motion en ajoutant après le mot «devrait» ce qui suit: «, en accord avec les provinces,»
Donc, que le processus expérimental soit fait en tenant compte des responsabilités de chacun des paliers de gouvernement et avec le résultat qu'en bout de ligne, nous aurons un meilleur service de protection et pour les pompiers et pour tous ceux qui peuvent être impliqués dans les désastres résultant d'accidents un peu partout au Canada.

Le vice-président: La motion est recevable.

[Traduction]

Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de participer à ce très important débat.

Je tiens d'abord à féliciter le député de Burnaby-Kingsway de nous avoir soumis cette question pour que nous en discutions et que, espérons-le, nous l'approuvions.

Les initiatives parlementaires sont à la source de nombreux débats utiles et intéressants. Aussi difficile que cela puisse nous paraître parfois, il arrive que la Chambre adopte des projets de loi et des motions. S'il n'y avait pas les initiatives parlementaires, nous n'aurions probablement pas ce débat ce soir.

La motion de mon collègue demande une chose relativement simple et peu coûteuse. En l'adoptant, nous allons envoyer au ministre des Transports un message qui l'invitera à établir rapidement un emplacement d'essai pour Operation Respond. Nous lui demandons de vérifier l'efficacité du logiciel élaboré en vue de déterminer si on peut vraiment identifier les matières dangereuses et améliorer ainsi la sécurité des pompiers et d'autres personnes pouvant être confrontés à un incendie d'origine chimique.

Tous les députés et tous les Canadiens ont une dette à l'égard des pompiers pour le travail courageux qu'ils accomplissent. Je suis persuadée que nous nous rappelons tous nous être rendus un jour à la caserne de pompiers locale pour voir les gros camions rouges et les


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hommes courageux-et il y a maintenant aussi des femmes-qui, à chaque heure du jour, mettent leur vie en danger pour protéger nos vies et nos biens. Je suis toujours renversée par la capacité de nos pompiers de répondre rapidement et efficacement à toutes les formes de crise.

Dans cette motion, il est question d'une situation rendue particulièrement dangereuse par la présence de certains produits chimiques ou autres sur les lieux d'un incendie. Nous sommes rendus à un point de notre histoire où, face à la présence de matières très complexes, le pompier doit posséder des connaissances bien supérieures à ce qu'il devait savoir dans le passé.

Le pompier doit connaître la combustibilité particulière des composés, la réaction de divers produits chimiques quand ils se trouvent en présence les uns des autres et, bien sûr, les moyens à employer pour maîtriser l'incendie.

Il y a environ 25 ans, le ministère des Transports a mis au point le système actuellement en vigueur, le CANUTEC. C'est un excellent système qui nous a rendu de grands services dans le passé. Je crois savoir qu'il consiste à poser sur les camions ou les wagons transportant des matières dangereuses des plaques de danger décrivant ce qu'ils contiennent. Une fois qu'il a relevé la présence d'une telle plaque, le pompier appelle le personnel du CANUTEC pour l'en informer. Au bout de huit à dix minutes, on rappelle les pompiers pour les renseigner quant au contenu et à la façon de combattre les flammes.

Comme je l'ai mentionné, c'est un bon système, mais peut-être pas assez rapide. C'est là qu'intervient cette motion. C'est là qu'intervient Operation Respond.

(1820)

Selon ce système, que le député de Burnaby-Kingsway a expliqué avec éloquence, chaque camion, navire, wagon ferroviaire ou tout autre mode de transport de marchandises qui adhère au programme Operation Respond porte un numéro distinctif.

Les pompiers doivent tout simplement trouver ce numéro qui, si je comprends bien, apparaît à bon nombre d'endroits sur le conteneur, et l'inscrire sur un ordinateur portatif qui est transporté dans une brique réfractaire.

En un instant, le contenu du conteneur apparaîtra sur l'écran de l'ordinateur portatif. Les sources de renseignements pour Operation Respond sont les bases de données tenues par les transporteurs. Ce système est non seulement rapide, mais il contourne également le problème posé par CANUTEC, car la plaque-étiquette indiquant les renseignements pertinents au sujet du contenant est parfois détruite dans l'écrasement ou brûlée dans l'incendie.

Le système Operation Respond peut servir pour le transport ferroviaire de voyageurs, car il indiquerait, entre autres, les points d'entrée et les systèmes électriques sur les voitures à voyageurs. Le logiciel de ce programme a été conçu aux États-Unis et appartient au gouvernement américain. On m'informe que les États-Unis sont disposés à le partager gratuitement avec nous. Ils ont déjà présenté cette offre au Mexique, qui l'a acceptée et est en train de faire l'essai et la mise en oeuvre d'Operation Respond.

L'équipement nécessaire pour utiliser le logiciel est un ordinateur portatif. La plupart des postes d'incendie en possèdent déjà, du moins selon l'Association internationale des pompiers. Il faut un endroit pour procéder aux essais, et le gouvernement peut sûrement trouver des terrains vagues. Il y a, entre autres, les bases des Forces canadiennes qui sont déjà fermées. Pourquoi pas? Nous n'avons rien à perdre.

Pourquoi le Canada n'a-t-il pas déjà procédé aux essais du système Operation Respond? Il y a quelques raisons. Transports Canada est d'avis qu'il faut améliorer le système CANUTEC déjà en place. D'innombrables exemples montrent que ce n'est pas nécessaire. Le système CANUTEC fonctionne, mais il n'est ni aussi rapide ni aussi sûr que le système Operation Respond.

Les fonctionnaires font valoir que pendant qu'on utilisait le système actuel, il n'y a eu aucun décès directement causé par des incidents qui impliquaient des matières dangereuses. Ne serait-ce pas dû tout simplement à la chance? Si jamais il y avait un énorme déversement au centre-ville de Toronto, est-ce que le système CANUTEC serait assez rapide pour prévenir des morts? On ne tient pas compte de ceux qui ont été exposés à la contamination, aux difficultés que soulève une évacuation inutile ou à la perte de biens qui auraient pu être prévenues.

L'obstacle, apparemment, c'est l'ego de ceux qui, à Transports Canada, ont conçu le premier système de détection et ne veulent pas y renoncer. Ils refusent le progrès. Disons dans ce cas qu'il faut utiliser Operation Respond parallèlement à CANUTEC pour satisfaire les caprices de Transports Canada. Mettons le système à l'essai pour voir comment il fonctionne. Les coûts sont minimes. En adoptant cette motion, signifions clairement à Transports Canada qu'il doit établir les critères des essais.

Quelle est la position de l'Association internationale des pompiers? Elle est évidemment en faveur d'un emplacement d'essai pour Operation Respond. Elle dit que les pompiers ont le droit de savoir exactement quelles matières dangereuses peuvent être présentes sur les lieux d'un incident. Ils ont besoin d'obtenir des renseignements sûrs dans les trois ou quatre premières minutes suivant leur arrivée sur les lieux. Des vies seront sauvées, car les pompiers pourront utiliser les méthodes les plus efficaces lorsqu'il y a des matières dangereuses.

Dans les urgences ferroviaires, Operation Respond aidera les pompiers à sauver des vies, car ils connaîtront les points d'entrée, les systèmes électriques et mécaniques, et les dispositifs de contournement.

L'Association internationale des pompiers prie instamment le ministre des Transports de faire de l'emplacement d'essai pour Operation Respond une absolue priorité dans son ministère en affectant du personnel et des ressources à ce projet immédiatement.


5403

Faisons comprendre à nos braves pompiers que les députés les appuient dans leurs efforts. Je sais que les pompiers de ma circonscription et de tout le Canada ont besoin du système Operation Respond, et je sais qu'ils nous regardent ce soir. Faisons comprendre aux Canadiens que nous tenons par-dessus tout à leur sécurité. Adoptons la motion.

M. Rey Pagtakhan (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que j'interviens dans le débat de la motion à l'étude qui invite la Chambre à recommander au ministre des Transports de procéder rapidement à l'établissement d'un emplacement d'essai pour Operation Respond, une base de données informatisées de matières dangereuses qui améliorerait la sécurité des pompiers et contribuerait à sauver des vies et des biens.

C'est une heureuse coïncidence que nous débattions cette motion pendant la Semaine de prévention des incendies. Je profite de l'occasion pour rendre hommage aux pompiers professionnels et bénévoles faisant partie des 4 061 services des incendies d'un bout à l'autre du pays; leur dévouement et leurs services contribuent à assurer la sécurité des Canadiens et de leurs biens. Ils ont accompli un travail très louable.

(1825)

Il y a chaque année environ 27 millions d'expéditions de matières dangereuses dont le poids totalise 2 milliards de tonnes. Pourtant, moins de 0,002 p. 100 de ces expéditions donnent lieu à des situations d'urgence mettant en danger des gens, des biens et l'environnement en attendant une intervention efficace.

Les Canadiens peuvent êtres fiers de la législation actuelle. C'est à la Loi sur le transport des marchandises dangereuses ainsi qu'au programme canadien concernant le transport des marchandises dangereuses que l'on doit la proportion extraordinairement faible d'accidents donnant lieu à des fuites de substances dangereuses.

Nous continuons de vouloir faire mieux. Nous aimerions réduire ce pourcentage déjà infime d'accidents à un minimum irréductible; pour cela, nous devons continuer de rechercher un meilleur instrument, un meilleur système s'il existe.

Un peu plus tôt, le secrétaire parlementaire du ministre de la Santé a parlé des deux objectifs du programme canadien concernant le transport des marchandises dangereuses, à savoir prévenir les fuites accidentelles de substances dangereuses pendant leur transport et veiller à ce qu'on possède une capacité d'intervention adéquate en cas d'accident.

En cherchant constamment à remplir ce dernier objectif, le Canada s'est doté en 1979 d'un service général d'intervention en cas d'urgence appelé CANUTEC, le Centre canadien d'urgence transport.

Ce centre d'urgence opère à l'échelle nationale et est offert par Transports Canada 24 heures sur 24 et tous les jours de l'année; il fournit un précieux service d'information et de communication à ceux qui sont chargés d'intervenir en cas d'urgence, notamment les pompiers, les ambulanciers et les policiers. Il est composé de professionnels, formés pour faire face aux situations d'urgence, qui sont en mesure de fournir immédiatement des renseignements sur les propriétés chimiques, physiques et toxiques des marchandises dangereuses, sur les dangers pour la santé et les premiers soins, sur les dangers d'incendie, d'explosion, de déversement ou de fuite, sur les mesures à prendre pour protéger les vies, les biens et l'environnement, sur les distances d'évacuation et sur les vêtements protecteurs que doit porter le personnel d'intervention.

Selon la réglementation fédérale, CANUTEC doit être avisé dès qu'il y a fuite de matière radioactive ou infectieuse au cours d'un accident ou d'un incident.

Pour veiller à ce que les services de qualité qu'ils offrent évoluent constamment, les scientifiques de CANUTEC examinent les nouvelles technologies d'intervention d'urgence et lisent toute la documentation publiée sur les substances dangereuses. Ils conçoivent des projets de recherche internationaux auxquels ils participent.

Je suis heureux d'informer la Chambre que les agents de Transports Canada, toujours fidèles à leur engagement de maintenir des services de qualité, ont observé l'aménagement de l'emplacement d'essai Buffalo, au Texas, y compris les essais les plus récents d'Operation Respond, qui ont eu lieu il y a à peine un mois.

Permettez-moi de vous faire part de certaines de leurs observations. Cela exige énormément de coordination entre les divers services d'urgence, les policiers, les pompiers, les ambulanciers. Cela ne compense pas les lacunes des secouristes qui connaissent mal les procédures à suivre pour manipuler les substances dangereuses. Un pays a été cité en exemple. L'équipement de communication n'a pas permis au service d'un pays de s'adresser facilement à celui d'un autre pays.

La plupart des transporteurs routiers n'ont pas de banque informatique indiquant ce que transportent leurs véhicules à un moment bien précis. Operation Respond a dû négocier avec les entreprises de camionnage pour avoir accès à leurs banques de données au moyen d'un modem, ce qui exigeait que les systèmes soient compatibles.

Operation Respond fonctionne mieux pour le transport ferroviaire. Il n'a pas pu dire quel genre de vêtement protecteur était nécessaire pour un test. Il n'a pas pu dire au responsable des opérations sur place comment déterminer s'il fallait faire évacuer l'usine vers laquelle se dirigeait la fumée de l'accident. Je dois dire que le service CANUTEC aurait pu répondre à cette question, si l'accident s'était produit au Canada.

Mais mon but n'est pas ici de critiquer. Loin de là. Aucun système n'est parfait. Les essais du programme Operation Respond, à mon avis, n'ont fait que révéler certaines lacunes du programme. Ces lacunes devront être comblées pour que tout système de sécurité puisse être efficace, qu'il s'agisse d'Operation Respond ou de tout autre programme.


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(1830)

Je voudrais aller un peu plus loin et affirmer respectueusement qu'une étude comparative attentive des possibilités des deux systèmes, Operation Respond c. CANUTEC, du côté canadien ou américain ou des deux, pourrait bien être la meilleure démarche à entreprendre pour déterminer quel est le meilleur système auquel j'ai fait allusion plus tôt. Je suis d'accord pour que la recherche se poursuive afin de trouver un meilleur système. Cette recherche devrait être faite rapidement.

Nos pompiers et nos services d'intervention d'urgence méritent que nous les respections, que nous les aidions et que les appuyions. Ils représentent la première ligne de défense des Canadiens en cas d'accident. En notre qualité de députés, il nous incombe de leur fournir toute l'information dont ils ont besoin pour protéger le public et se protéger eux-mêmes. Nous allons leur fournir les outils qui leur permettront d'atteindre leur objectif.

Nous devons faire preuve de la prévoyance et de l'imagination nécessaires pour envisager de nouveaux usages de nouvelles technologies de manière à aider nos pompiers et tous les autres travailleurs des services d'intervention d'urgence.

Operation Respond ouvre certainement de nouveaux horizons. Par conséquent, nous devons continuer de soumettre ce système à des tests et à en surveiller le fonctionnement. Nous devrions examiner la possibilité de permettre à la société américaine, Operation Respond Institute Incorporated, si elle le voulait, de tester le système au Canada. Ces tests pourraient être réalisés dans le cadre d'un programme international mixte.

Même si nous devons éviter les décisions hâtives qui nous mèneraient dans une direction opposée à celle que nous souhaitons, nous ne devons pas hésiter à accepter un outil si, après des recherches approfondies, sa supériorité est clairement démontrée et s'il peut accroître notre sécurité à tous.

Comme j'ai une certaine expérience des essais cliniques de médicaments, je sais qu'il peut arriver qu'un traitement considéré comme le meilleur il y a 15 ans ne le soit plus maintenant. Nous devons écouter attentivement et examiner avec soin toutes les données. Nous ne devons certes pas prendre de décisions hâtives, mais il reste que nous ne devons pas hésiter à agir rapidement s'il peut être prouvé qu'il existe un meilleur système.

Notre objectif consiste finalement à accroître notre sécurité à tous, y compris celle des travailleurs des services d'intervention d'urgence sur les lieux d'accidents, notamment si des substances dangereuses sont présentes.

Je voudrais réitérer l'idée selon laquelle le fait que l'on présente un système censé être meilleur ne nous dispense pas de l'examiner. Évidemment, lorsque nous examinons un système, des coûts sont en cause, mais nous devons soupeser ces coûts en regard des avantages réels qui en découleront. Nous devons les évaluer en regard des vies qui seront sauvées, des biens qui seront perdus et de l'environnement qui sera à jamais menacé.

Je félicite le député de Burnaby-Kingsway d'avoir présenté cette motion. Nous devons l'étudier soigneusement, car un meilleur système exige un examen minutieux. Nous ne pouvons conclure qu'un système est meilleur alors que nous devons en faire l'essai. Fondamentalement, si nous faisons l'essai d'un système, c'est que nous n'en sommes pas encore arrivés à une conclusion finale sur la qualité de ce système. Je pense donc que nous devons examiner cette question avec un esprit très ouvert, car ce sont les vies et les biens des Canadiens qui sont en jeu, en l'occurrence.

(1835)

Le vice-président: Le député de Burnaby-Kingsway invoque le Règlement. Le député sait sans doute qu'il empiète sur le temps de parole du député de Lévis.

M. Robinson: Monsieur le Président, je serai très bref. Je me demande si le député accepterait que je lui pose une brève question, s'il y a, bien entendu, consentement unanime.

Le vice-président: Acceptez-vous de prolonger le débat de deux ou trois minutes pour permettre au député de poser sa question?

M. Pagtakhan: Monsieur le Président, nous devons être prudents lorsque nous examinons les répercussions de toute politique sur les. . .

Le vice-président: Les choses deviennent trop compliquées. Je suis désolé. Le député de Lévis a la parole.

[Français]

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, on voit par l'attitude du gouvernement qu'on ne veut pas entendre de questions, même si de ce côté-ci nous étions d'accord.

J'ai été ici tout l'après-midi et je vois des contradictions dans l'attitude gouvernementale. Par exemple, sur la question d'une agence unique d'inspection des aliments, le gouvernement fédéral a pris 18 ans de plus que le gouvernement du Québec pour résoudre un problème de dédoublement entre ses ministères dans l'instauration du processus pour remplacer le manganèse par l'éthanol. Et ça presse dans ce cas-là, parce que l'impact pour l'Ontario est important. C'est urgent et ça presse.

On a ici une proposition du député de Burnaby-Kingsway qui est fort intéressante et peu coûteuse. Je me suis informé auprès de lui car il avait fait évaluer la question. Le coût d'instauration de cette nouvelle mesure serait de 50 000 $ pour le gouvernement fédéral et 60 000 $ de plus si on l'étendait au domaine ferroviaire. Pour 110 000 $ le gouvernement fédéral demande du temps, plus de temps pour étudier. C'est pourtant quelque chose qui est utilisé aux États-Unis, quelque chose qui est prouvé scientifiquement, quelque chose qui va améliorer la situation.

Une fois de plus, ce gouvernement démontre qu'il est «incapable de se virer sur un trente sous» comme on dirait au Québec. C'est effrayant le temps qu'il prend pour une petite mesure qui serait pourtant très avantageuse au plan de la sécurité des citoyens. Imaginez que cela permettrait, dans les cinq minutes de l'appel, de fournir

5405

aux pompiers l'information à savoir s'il y a dans une entreprise des produits dangereux.

Je peux vous donner un cas qui s'est produit dans une entreprise de mon comté. En raison des produits qui s'y trouvaient il ne fallait pas arroser le feu car, au contraire, cela créait une réaction amplifiant le feu. Il aurait été important d'avoir ce type d'information. La partie gouvernementale, comme toujours, tergiverse, demande du temps pour intervenir.

Je sais que le député de Burnaby-Kingsway est d'accord avec l'amendement proposé par le député de Kamouraska-Rivière-du-Loup. Il serait d'accord. Ce qu'il propose c'est un amendement qui dit «en accord avec les provinces». Pourquoi propose-t-il cela? C'est simple, c'est que les pompiers relèvent du municipal en général, et le municipal relève de l'autorité des provinces.

Tout ce qu'on demande au fédéral c'est d'adopter un système qui serait utilisé d'un océan à l'autre visant à améliorer l'information pour les pompiers, afin de faciliter leur travail.

(1840)

Comme vous le savez, dans les grosses municipalités, la connaissance et l'information des services de pompiers sont peut-être assez avancées. Mais au Québec, et je sais aussi que c'est la même chose ailleurs, dans les petites municipalités, le service de pompiers est souvent assuré par des pompiers volontaires. Ils ont besoin d'un instrument facile d'accès et d'opération et pouvant leur donner une information compilée. Ce ne sont pas des gens qui occupe cet emploi de façon permanente, donc, ils ont besoin d'avoir un outil de référence permettant de faciliter et d'améliorer leur travail.

Le gouvernement tergiverse, étudie, considère, suppose, et je répète, pour 110 000 $. C'est incroyable. On fait tout ça et pendant l'heure qu'on vient de consacrer à ce sujet, le fonctionnement de la Chambre a coûté plus cher que ça. Et on veut encore étudier, regarder, analyser. C'est inacceptable.

Je tenais à faire cette intervention pour appuyer l'initiative du député de Burnaby-Kingsway et l'amendement de mon collègue de Kamouraska-Rivière-du-Loup.

Le vice-président: La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.

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5405

MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LE TRAITÉ D'INTERDICTION COMPLÈTE DES ESSAIS NUCLÉAIRES

L'hon. Warren Allmand (Notre-Dame-de-Grâce, Lib.): Monsieur le Président, le 26 septembre dernier, j'ai pris la parole à la Chambre pour souligner un événement historique. En effet, cette semaine-là, 80 pays, dont le Canada, ont signé, aux Nations Unies, le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Je signale que, en date d'aujourd'hui, 111 pays ont signé ce traité. Ce traité réduira le développement de nouvelles armes nucléaires parce que, sans essais, on ne peut pas développer de nouvelles armes nucléaires.

Le 26 septembre, j'ai aussi fait remarquer que plusieurs pays clés qui sont sur le point de développer des armes nucléaires avaient refusé de signer le traité. Ce sont des pays qui ont un programme d'armes nucléaires et qui essaient de développer cette capacité. L'Inde et le Pakistan sont parmi ces pays importants qui n'ont pas signé. Je dois signaler que le Pakistan était disposé à signer le traité à condition que l'Inde le signe aussi, mais l'Inde a refusé de signer.

Il convient de mentionner aussi que, pour que ce traité entre en vigueur, il faut que 44 pays qui ont une capacité nucléaire le ratifient et déposent cette ratification aux Nations Unies.

La signature de ce traité historique, particulièrement par les cinq puissances nucléaires, est une grande réalisation pour la sécurité de notre planète et de l'humanité. Je dois dire aussi que c'est une grande réalisation pour ceux d'entre nous qui travaillent depuis de nombreuses années pour l'interdiction des de toutes les armes nucléaires.

Ce traité vient s'ajouter au traité de non-prolifération des armes nucléaires, qui a été reconduit indéfiniment il y a plusieurs mois.

Toutefois, la signature de ce traité ne suffit pas. Le travail n'est pas terminé. Non seulement il est essentiel d'obtenir les 44 ratifications pour que le traité entre en vigueur, mais il est aussi essentiel de convaincre les pays comme l'Inde, qui n'ont pas encore signé le traité, de le faire. Nous ne ferons pas de progrès sur le plan de la sécurité mondiale si les anciennes puissances nucléaires cessent leurs essais et réduisent leurs armes nucléaires pendant que d'autres pays continuent de faire des essais et deviennent de nouvelles puissances nucléaires.

L'argument de l'Inde selon lequel les puissances nucléaires actuelles devraient d'abord s'engager à respecter un calendrier de réduction et d'élimination de toutes leurs armes nucléaires est valable, mais il ne justifie pas la non-signature du traité par ce pays pas plus qu'il ne justifie tout essai nucléaire futur ou toute tentative en vue de développer de nouvelles armes nucléaires.

Des pays comme l'Allemagne, le Japon et le Brésil, qui sont tous de grands pays puissants qui n'ont pas d'armes nucléaires, ne bloquent pas le traité et ne posent pas les mêmes conditions que l'Inde.

Encore une fois, je demande au gouvernement ce que le Canada peut faire pour convaincre l'Inde et les autres non-signataires de signer et pour assurer la mise en oeuvre de cet important traité.

5406

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureux de répondre à la question du député.

Grâce au Canada, on prévoit la tenue, vers la fin de 1999, d'une conférence où l'on discutera de la situation du CTBT. Cette conférence est exigée dans le traité, à l'initiative du Canada. À cette conférence, les pays signataires examineront la situation du traité et, s'il n'est pas encore en vigueur, ils chercheront des moyens d'obtenir rapidement sa mise en oeuvre.

C'est clair qu'il serait prématuré de préciser quelles mesures pourraient être prises, parce que cela dépendra alors de l'état des choses. En outre, les politiques des pays signataires et les positions qu'ils défendent peuvent changer d'ici-là.

Nous espérons que les pays qui ont dit qu'ils ne signeraient pas ce traité réfléchiront et le signeront éventuellement, ainsi que les autres traités de non-prolifération qu'ils n'ont peut-être pas encore signés. Le Canada utilisera tous les moyens diplomatiques dont il dispose pour obtenir l'adhésion universelle à ce traité.

En plus du Canada, plus de 90 pays auront signé le traité d'ici la fin de la semaine, dont les cinq États détenteurs d'armes nucléaires: les États-Unis, le Royaume-Uni, la Russie, la France et la Chine. Le nombre des pays signataires augmente tous les jours et on compte déjà parmi ceux-ci un des États qui sont au seuil de la possession, Israël.

Le traité exige que 44 pays figurant dans le texte signent et ratifient le traité pour que celui-ci entre en vigueur. Entre-temps, en vertu du droit international courant, les pays qui ont déjà signé un traité sont tenus de ne rien faire qui irait à l'encontre des dispositions de ce traité.

Mais qu'en est-il des pays qui ne désirent pas signer le traité? Le Canada respecte la décision des nations souveraines de prendre les mesures qui leur sied, y compris ne pas signer un traité qui a l'appui général de la communauté internationale. Le Canada estime que ce traité, vu l'énorme soutien qu'il a obtenu, conduira à une norme internationale exécutoire contre les essais et sera une force morale et politique importante, même pour les États non signataires.

[Français]

Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne est maintenant réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures.

(La séance est levée à 18 h 48.)