FAIT Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE
COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 20 novembre 2001
Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): Chers collègues, je déclare ouverte cette séance.
Je donne la parole à Mme Lalonde pour un rappel au Règlement.
[Français]
Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Merci, monsieur le président.
À la toute fin de la dernière réunion du comité, après l'étude du projet de loi C-35, nous avions le quorum et on a proposé une résolution qui n'avait pas été présentée dans les délais requis. Depuis ce temps, j'ai eu l'occasion d'en prendre connaissance et je voudrais savoir quand nous en serons saisis à nouveau.
Le président: Peut-être M. Patry me permettra-t-il de répondre à cela, même si c'est sa résolution à lui. Nous venons d'en parler; nous voulons proposer un petit amendement à cette résolution qui devrait la raffermir. Nous allons proposer qu'elle fasse référence à la Chambre plutôt qu'au comité, afin que le gouvernement rende compte directement à la Chambre à ce sujet. Donc, on est en train de taper cette nouvelle formulation de la résolution et nous allons la distribuer. Elle sera donc adoptée. Je crois que M. Patry a l'intention de présenter ce matin même cette résolution qui comportera cette modification de la procédure.
[Traduction]
Chers collègues, nous tenons aujourd'hui la première de nos audiences dans le cadre de la grande étude que nous avons décidé, vous vous en souvenez, d'entreprendre il y a quelque temps à propos des relations canado-américaines. Mais compte tenu de l'évolution de la situation à la suite des attentats du 11 septembre, il est évident que nous allons peut-être nous concentrer plus sur l'aspect sécurité de ces relations que nous ne pensions le faire initialement. Cela ne signifie pas pour autant que nous n'aborderons pas tous les sujets, et je tiens à rappeler aux membres du comité que ce sera une entreprise extrêmement complexe et importante.
• 0915
Pour ceux d'entre vous qui ont suivi le déroulement des
événements, il a été beaucoup question de savoir s'il fallait
intensifier nos relations économiques avec les États-Unis et, dans
l'affirmative, sous quelle forme. C'est une question sur laquelle
nous devrons nous pencher dans le cadre de cette étude, de même que
la question de la sécurité. Je pense que ce sera donc une
entreprise majeure pour notre comité et que nous allons devoir y
consacrer énormément d'attention au cours des six prochains mois.
Nous allons avoir un autre problème parce que notre calendrier est extrêmement chargé. Si nous réalisons ce rapport, qui sera concentré sur nos relations avec les États-Unis, aussi bien sur le plan économique que sur le plan de la sécurité, et si nous voulons proposer des lignes directrices au gouvernement sur la façon de procéder, cela va nous amener largement au printemps prochain. Mais comme vous le savez aussi, nous accueillerons l'été prochain le sommet du G-8, et il se pourrait bien que nous soyons amenés à faire une étude sur le G-8 comme nous l'avons fait pour le sommet de Québec l'an dernier. Dans ce cas, si nous voyageons, nous mènerons peut-être les deux entreprises de pair.
Je vous expose la situation pour que chacun sache bien que nous allons avoir un programme extrêmement intense et chargé. Nous n'en sommes qu'au début d'une étude qui pourrait avoir une influence considérable sur les relations entre le Canada et les États-Unis, qui sont notre partenaire économique le plus important. C'est déjà quelque chose d'important, mais ces autres questions vont encore alourdir le travail que nous allons devoir faire d'ici à juin prochain. Nous entamons donc un travail qui va nous mener jusqu'au mois de juin prochain.
Cela dit, je vais laisser la parole à M. Allen, du ministère des Affaires étrangères, mais nous accueillons aussi ce matin des représentants de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, de Citoyenneté et Immigration Canada, de Transports Canada, du ministère du Solliciteur général et d'Industrie Canada.
Monsieur Allen, je crois QUE vous aviez l'intention de commencer par une brève déclaration, après quoi nous ferons un tour de table avec tous les témoins et nous passerons aux questions.
Merci d'être venu nous rencontrer aujourd'hui.
M. Jon Allen (directeur général, Direction générale de l'Amérique du Nord, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci, monsieur le président.
Bonjour. Je m'appelle Jon Allen. Je suis directeur général de la Direction générale de l'Amérique du Nord au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international.
Comme l'a dit le président, je vais faire quelques remarques préliminaires, puis je céderai la parole à mes collègues qui pourront vous donner plus de précisions sur nos activités concernant la frontière.
La phrase «Le monde a changé depuis le 11 septembre» est certes devenue un cliché, mais elle est malheureusement vraie. Le programme d'action international et en fait de nombreux programmes nationaux se sont soudain axés sur les risques que faisait peser le terrorisme mondial sur la sécurité publique. Les Nations Unies, la plupart des pays occidentaux et nos partenaires à travers le monde se sont mobilisés dans le cadre de cette lutte contre le terrorisme.
Les événements du 11 septembre ont aussi fait clairement ressortir notre interdépendance et notre vulnérabilité, tant du point de vue économique que de celui de la sécurité, dans nos relations avec les États-Unis. Ce n'est pas étonnant. En raison des multiples liens sur le plan de l'économie, de la sécurité et de l'environnement que nous entretenons avec les États-Unis, la gestion de nos rapports avec ce pays a toujours constitué un véritable défi sur le plan de notre politique intérieure aussi bien qu'extérieure.
La sécurité publique est aujourd'hui devenue la préoccupation numéro un aux États-Unis. La nomination du gouverneur Tom Ridge au poste de directeur de la Défense du territoire, l'adoption rapide d'une loi antiterroriste par le Congrès et les sommes très importantes déjà autorisées et, dans certains cas, affectées pour le renforcement de la sécurité montrent bien l'importance de cette question pour nos voisins du Sud. Le Canada se doit de répondre à cette préoccupation, qu'il partage pleinement, tout en travaillant de concert avec les États-Unis pour protéger et effectivement renforcer notre sécurité économique.
• 0920
Le comité du Cabinet chargé de la sécurité publique et de
l'antiterrorisme que le premier ministre a demandé au ministre
Manley de présider a rapidement décidé d'un vaste éventail de
mesures, investissant notamment quelque 280 millions de dollars
pour des technologies nouvelles et des effectifs supplémentaires
dans le but de renforcer notre cadre de sécurité. Nous avons été
parmi les premiers pays à mettre en oeuvre de nouveaux règlements
financiers visant à bloquer les avoirs de terroristes et à enrayer
leurs sources de financement. Le Canada bénéfice déjà d'un système
de transport aérien comptant parmi les plus sûrs au monde, et nous
avons accru davantage la sécurité aux aéroports et dans les avions.
Le mois dernier, nous avons déposé au Parlement un projet de loi
d'omnibus antiterroriste, dont vous entendrez parler plus
abondamment, qui dotera le système d'application de la loi et
l'appareil judiciaire canadiens des outils nécessaires pour
neutraliser les organisations terroristes.
Le gouvernement a aussi entamé des contacts intensifs avec l'administration américaine, depuis le président Bush jusqu'aux échelons inférieurs, pour planifier l'avenir. Depuis le 11 septembre, le premier ministre, le vice-premier ministre et les ministres Manley, Pettigrew, MacAulay, Collenette et Martin ont rencontré leurs homologues. Le ministre Eggleton est actuellement à Washington pour des entretiens avec le secrétaire Rumsfeld, et les ministres Caplan et McLellan vont bientôt rencontrer leurs propres homologues.
Les ministres se sont rendus dans les communautés frontalières. Le ministre Pettigrew et le vice-premier ministre étaient à Windsor la semaine dernière pour rencontrer des autorités provinciales et des dirigeants du monde des affaires. Pas plus tard qu'hier, les ministres Cauchon et Tobin ont rencontré à Ottawa cinq maires de localités frontalières. De hauts fonctionnaires canadiens, dont plusieurs ici présents, sont en contact quasi quotidien avec leurs homologues américains. Jusqu'à présent, tous ces contacts ont été extrêmement positifs et productifs. Nous n'avons que très peu de désaccords avec nos homologues américains et nous n'avons reçu pratiquement aucune plainte du gouvernement américain.
Cela dit, comme vous le savez, la frontière est le système nerveux central de notre prospérité économique. Les faits sont bien connus. La relation commerciale bilatérale canado-américaine est la plus importante au monde, et de loin. Nos échanges dépassent le 1,9 milliard de dollars par jour. Au moins 85 p. 100 de nos exportations partent vers les États-Unis et, ce qui est important, 25 p. 100 des exportations américaines viennent au Canada. Le Canada est la destination numéro 1 des exportations de 38 des 50 États américains.
Avant le 11 septembre, la frontière était déjà une priorité pour les relations canado-américaines. Depuis plus de six ans, les autorités frontalières canadiennes et américaines coopéraient sur un vaste éventail de mesures novatrices destinées à faciliter le plus possible le commerce et la circulation légitimes à la frontière, tout en faisant face aux menaces à notre sécurité commune. Vous entendrez parler aujourd'hui de l'état d'avancement de certaines de ces mesures, notamment NEXUS, CANPASS, le programme PACE et l'autoévaluation des douanes.
Au cours des deux années qui ont immédiatement précédé le 11 septembre, le Canada s'est efforcé de concentrer l'attention et l'action des politiciens de haut niveau sur la frontière. Le ministère des Affaires étrangères et le Département d'État américain ont coprésidé un mécanisme intitulé Partenariat stratégique canado-américain, le PSCA, où sont regroupés les organismes responsables des frontières que vous avez devant vous aujourd'hui et des représentants des communautés frontalières, des politiciens, des hommes d'affaires et des universitaires afin d'avoir un débat à portée plus universelle sur l'avenir de la frontière. Vous avez un exemplaire du rapport du PSCA. C'est une ébauche de programme d'action.
Le 11 septembre n'a fait qu'accentuer le caractère d'urgence de cette entreprise. Aujourd'hui, les autorités frontalières restent en état d'alerte élevée. Les calendriers de livraison du «juste à temps» sont compromis et les chaînes de production sont menacées de part et d'autre de la frontière, ce qui nuit à la compétitivité du Canada. Les longues files qui ont marqué le passage à la frontière dans les heures et les jours qui ont suivi les attentats ont complètement disparu. Comme l'ont souligné les maires des villes frontalières, les voyageurs peuvent entrer facilement au Canada, mais l'attente peut être plus longue au retour. Toutefois, la bonne nouvelle de cette réduction du temps d'attente est assombrie par le fait que les volumes sont en baisse et que les effectifs et les heures supplémentaires sont en hausse. Les attentats du 11 septembre ont eu des retombées négatives importantes sur les localités frontalières, surtout compte tenu du ralentissement économique qui se faisait déjà sentir.
• 0925
Le défi que nous devons relever, et j'estime parler au nom de
tous ceux qui s'adresseront à vous aujourd'hui, consiste à regarder
plus loin qu'aujourd'hui et que demain. Notre objectif n'est pas de
revenir à la situation que nous avions au 10 septembre. Il nous
faut plutôt examiner activement, au Canada et de concert avec nos
collègues américains, les moyens qui nous permettront de veiller à
ce que la frontière ne soit pas, dans deux, dans cinq ou même dans
vingt ans, un obstacle à une relation commerciale qui ne cesse de
croître. Le mois dernier, le ministre Manley, en sa qualité de
président du Comité spécial sur la sécurité, a rencontré son
homologue, le secrétaire américain à la Défense du territoire, Tom
Ridge, et ils ont convenu qu'il était possible et urgent pour le
Canada et les États-Unis de trouver des solutions pour protéger
leurs citoyens et préserver le commerce transfrontière.
Comme vous le savez, Tom Ridge, ancien gouverneur d'un État frontalier, a dirigé des missions commerciales au Québec et en Ontario. Le président Bush et sa conseillère à la sécurité nationale, Condeleesa Rice, ont aussi indiqué clairement que nous ne pouvons, au nom de la sécurité publique, mettre notre bien-être économique en péril.
En marge de la réunion du G-20 tenue la semaine dernière, le secrétaire américain au Trésor, M. O'Neill, qui est responsable des douanes américaines, a rencontré les ministres Martin et Cauchon. Le ministre Martin a parlé de la nécessité d'avoir une frontière perméable et souveraine. Les ministres se sont engagés à coopérer afin de protéger la frontière et de la garder ouverte, et les autorités des douanes et de l'immigration des deux pays élaborent actuellement à cet effet un plan d'action orienté vers l'avenir.
Hier, le ministre Manley s'est entretenu avec les représentants de la Coalition pour une frontière sûre et facilitant le commerce, lors de la plus récente d'une série de réunions de haut niveau tenue afin que les préoccupations des milieux d'affaires canadiens soient entendues et prises en compte. Comme les Américains, nous estimons que les deux groupes, le monde des affaires et le gouvernement, peuvent jouer ensemble un rôle très positif et efficace pour ce qui est de défendre les intérêts du Canada auprès de nos homologues.
Afin d'assurer une coordination plus complète des interventions concernant la frontière, le ministre Manley, à titre de président du Comité spécial, va collaborer avec tous ses collègues pour élaborer un ensemble complet de propositions optimales pour la frontière. En même temps, notre ambassade à Washington et nos divers consulats aux États-Unis s'efforcent activement de diffuser aux médias ainsi qu'aux législateurs fédéraux, étatiques et municipaux américains, des documents visant à contrer les informations négatives et sans fondement publiées dans la presse américaine, et selon lesquelles il y aurait une quelconque connexion canadienne avec les événements du 11 septembre.
Si vous le voulez bien, je vais m'arrêter ici et laisser la parole à Paul Kennedy, sous-solliciteur général adjoint principal.
Le président: Merci, monsieur Allen.
Monsieur Kennedy, bienvenue de nouveau à notre comité.
M. Paul E. Kennedy (sous-solliciteur général adjoint principal, Secteur de la police et de la sécurité, ministère du Solliciteur général): Merci beaucoup. Ces temps-ci, je passe plus de temps avec des comités qu'à mon bureau.
Le président: Je suis sûr que c'est une très bonne chose pour vous.
M. Paul Kennedy: En tout cas, je pense que c'est une très bonne chose que le système ait réagi avec autant d'efficacité aux défis auxquels nous sommes tous confrontés.
Je vais vous faire un exposé, mais j'ai aussi un texte plus long que je vais remettre au comité. Je suis conscient du temps qui nous est alloué. Mon document n'a pas encore été traduit. Dès qu'il le sera, il sera remis au comité.
Le ministère du Solliciteur général, de pair avec d'autres ministères et organismes fédéraux représentés ici, est responsable de la sécurité des Canadiens et notamment de la frontière. Nous avons déjà depuis un certain temps des mécanismes de lutte contre le terrorisme ou toute autre activité criminelle transfrontalière, et notre coopération n'a fait que s'intensifier depuis le 11 septembre.
Le ministre MacAulay est en communication régulière avec le procureur général des États-Unis, M. John Ashcroft. Pour poursuivre sur ce que vient de dire M. Allen à propos des communications régulières entre le SCRS, la GRC et leurs homologues américains, M. Ashcroft a précisé qu'avant même qu'il ait posé la question, le Canada coopérait déjà avec les États-Unis et prenait les mesures qu'il savait devoir prendre en réaction aux attentats du 11 septembre.
Nous ne devons pas oublier que le terrorisme est une stratégie visant à commettre des actes criminels. Les efforts considérables de collaboration que le Canada et ses partenaires déploient pour combattre la criminalité transfrontalière sont tout aussi pertinents et viennent simplement renforcer nos efforts soutenus pour lutter contre le terrorisme.
Les outils que nous utilisons pour lutter contre le crime organisé peuvent aussi servir à combattre le terrorisme.
[Traduction]
Nous avons déjà des mécanismes officiels de consultation bilatérale pour lutter contre la criminalité et le terrorisme. Deux de ces mécanismes sont plus particulièrement associés au portefeuille du solliciteur général.
Le ministre MacAulay et le procureur général Ashcroft dirigent conjointement le Forum sur la criminalité transfrontalière et je copréside ce forum avec mon homologue américain, le vice-procureur général adjoint.
Ce forum encourage le partage d'information chez les organismes canadiens et américains d'application de la loi, et il est axé sur des stratégies de lutte contre la criminalité transnationale. Il se réunit tous les ans depuis sa création en 1997.
Quatre sous-groupes permanents contribuent aux travaux du forum canado-américain sur la criminalité transfrontalière, qui compte sur les organismes d'application de la loi aux frontières pour lui signaler tous les obstacles à une lutte efficace contre la criminalité. Ces sous-groupes relèvent du sous-comité et soumettent des rapports directement au ministre MacAulay et au procureur général Ashcroft. Ils sont coprésidés à titre égal par le Canada et les États-Unis.
Permettez-moi de vous donner un peu plus de détails sur l'activité concrète de ce forum. Tous les éléments d'action précisés lors de la réunion de juin 2001 ont leur justification dans la lutte contre la criminalité transfrontalière, notamment le terrorisme. Les organismes des deux côtés de la frontière que nous avons unis pour lutter contre la criminalité transnationale luttent maintenant ensemble contre le terrorisme.
Si vous me permettez de faire une petite digression, bien que ce forum soit surtout axé sur l'application de la loi, les représentants du Service canadien du renseignement de sécurité et les coordonnateurs des renseignements de sécurité du Conseil privé y sont aussi représentés et, comme vous le savez, le mandat du FBI aux États-Unis porte non seulement sur l'application de la loi mais aussi sur le maintien de la sécurité nationale.
L'un des groupes s'occupe du télémarketing frauduleux. Il s'agissait au départ de retraités américains qui se faisaient escroquer par des individus installés au Canada. Le mandat de ce groupe vient d'être élargi pour englober le marketing frauduleux de masse, en réponse à l'évolution du problème.
Nous avons un groupe chargé des poursuites qui a été constitué pour permettre aux procureurs canadiens et américains de s'informer sur leur législation mutuelle. Il y a des malentendus subtils. Nos objectifs sont très semblables, mais les outils législatifs dont nous disposons diffèrent quelque peu. Nous voulons nous assurer que chacun est parfaitement au courant de ces différences subtiles. Ces conseillers juridiques participent aussi aux autres sous-groupes auxquels ils apportent un soutien juridique.
Nous avons un groupe de coordination et de coopération qui identifie les défis et les obstacles à l'exécution du travail dans les deux pays. L'un des problèmes sur lesquels il se penche, et qu'il a défini cette année, c'est la question de l'application de la législation sur le port d'armes à feu à la frontière. Ce travail va compléter le travail accompli sur la question des gardes armés à bord des avions, et régler le problème qui se pose si vous prenez l'avion dans un pays pour aller à l'étranger en étant porteur d'une arme.
Il y a un groupe de ciblage et de renseignement. Outre l'évaluation commune de la menace, ce sous-groupe va se concentrer plus particulièrement sur la contrebande d'armes à la frontière, car c'est ainsi que la plupart des armes utilisées pour commettre des crimes au Canada entrent au pays.
Cette année, le Forum a constaté qu'il fallait créer deux nouveaux groupes. Nous nous penchons sur le problème du trafic d'étrangers. Dans son discours au Forum sur la criminalité transfrontalière en juin 2001, le procureur général américain, M. Ashcroft, a dit que ce trafic d'étrangers était un domaine fondamental sur lequel nous devions nous pencher.
L'autre concerne le crime organisé, qui reste une priorité pour les États-Unis et le ministère du Solliciteur général, qui a contribué à élaborer un programme national de lutte contre le crime organisé ratifié par la Conférence fédérale-provinciale-territoriale des ministres de la Justice en septembre 2000. Ce programme national cible la criminalité de haute technologie, la criminalité économique et d'autres questions de cette nature au niveau de la frontière. Ce sous-groupe sera coprésidé par la GRC et le FBI.
• 0935
Le Canada et les États-Unis coordonnent aussi leurs efforts de
lutte antiterroriste dans le cadre du Groupe consultatif bilatéral
sur le contre-terrorisme qui réunit chaque année des représentants
des organismes et ministères participant à la lutte contre le
terrorisme.
Pour ce qui est du travail courant à la frontière, vous vous souviendrez que le 12 octobre 2001, le gouvernement a annoncé le déblocage de 54 millions de dollars au profit de mesures visant à renforcer la capacité du Canada de prévenir, détecter et contrer des menaces existantes ou potentielles à la sécurité nationale. Sur ce total, environ 9 millions de dollars ont été consacrés à des renforcements de personnel dans des services comme les équipes intégrées de sécurité nationale, les EISN, et le programme d'équipes intégrées de la police des frontières, les EIPF, ainsi naturellement qu'à d'autres priorités.
Aujourd'hui, nous avons deux équipes des EIPF sur la côte Est et sur la côte Ouest, et une troisième est en préparation pour travailler des deux côtés de la frontière à proximité de Cornwall et d'Akwesasne.
Les EIPF sont une initiative qui remonte à 1997. Il s'agissait de mettre sur pied une formule novatrice de lutte contre la criminalité transfrontalière le long des frontières terrestres et maritimes internationales de la Colombie-Britannique et de l'État de Washington, en vue de renforcer l'intégrité de cette frontière. C'est un front international uni contre la criminalité transfrontalière qui consiste à regrouper les ressources humaines et technologiques de la CRC, de Douanes Canada, du Service américain de patrouille à la frontière, du Service des douanes américain, de la Drug Enforcement Agency américaine et des services de police municipaux des deux côtés de la frontière.
À titre d'illustration du succès de cette initiative, signalons que l'équipe intégrée de la police des frontières de la côte Ouest a réalisé une moyenne de 1 million de dollars de saisies par mois. Cette équipe a réussi à démanteler divers réseaux et a confisqué des drogues illégales, des armes, de l'alcool, du tabac et des véhicules tout en procédant à de nombreuses arrestations. Elle a aussi intercepté des réseaux criminels qui essayaient de faire passer la frontière à des immigrants illégaux.
Dans la foulée du succès des EIPF, on a mis sur pied des équipes intégrées de sécurité nationale pour recueillir, échanger et analyser des informations et renforcer la capacité d'application de la loi; ces équipes s'occuperont de la sécurité nationale.
La lutte contre le terrorisme est une priorité absolue pour le Canada et les États-Unis. Nulle part ailleurs dans le monde deux pays collaborent plus étroitement à assurer la sécurité de leurs citoyens. La GRC, le SCRS, la police locale et les services des douanes, de l'immigration et des transports travaillent quotidiennement de pair avec leurs homologues américains. Évidemment, parmi les initiatives visant à renforcer cette capacité, le gouvernement a annoncé le 12 octobre un programme de mise en place d'agents de la GRC armés dans les avions à destination de l'aéroport national Reagan.
En outre, diverses initiatives sont en cours pour renforcer notre partenariat avec les États-Unis dans la lutte contre le terrorisme. Nous enquêtons ensemble sur les efforts de regroupement financier de groupes terroristes avec des éléments du groupe organisé. Nous contrôlons et modifions au besoin le plan national antiterroriste en fonction des changements, des menaces et de l'évolution des stratégies. Nous renforçons constamment la portée de notre stratégie de renforcement des capacités de réponse nationale du Canada. Évidemment, c'est devenu une question importante dans l'esprit des Canadiens depuis les affaires d'Anthrax aux États-Unis.
Nous élargissons notre coopération par le biais de réunions régulières du Groupe consultatif bilatéral canado-américain sur le contre-terrorisme et d'une foule d'autres groupes. Je ne vous en donnerai pas toute la liste.
[Français]
Il y a des efforts communs de collaboration pour la conduite d'exercices sur terre de lutte contre le terrorisme auxquels participeront des hauts fonctionnaires et des responsables de l'élaboration des politiques.
On parle aussi de la gestion conjointe de projets de recherche et développement visant à renforcer la capacité de lutter contre le terrorisme.
• 0940
Il y a également des initiatives conjointes
de formation et de
planification coordonnée des interventions.
[Traduction]
Outre ces initiatives prises par notre gouvernement, qui ont été largement diffusées, nous devons développer les mécanismes existants d'échange d'information pour les rendre plus efficaces à tous les paliers.
Nous cherchons à élargir la coopération au-delà de nos partenaires habituels. À titre d'exemple, le commissaire Zaccardelli a annoncé à la mi-octobre la création du Groupe de travail sur le renseignement financier de la GRC, qui s'appuyait sur l'expertise des unités spécialisées dans la lutte intégrée contre les produits de la criminalité.
Le Groupe de travail échange des informations avec le secteur bancaire du Canada. Au 8 novembre, il avait contribué à faire geler 26 comptes bancaires au Canada représentant des actifs d'environ 2 millions de dollars soupçonnés d'être destinés à des terroristes d'al-Qaïda. Le Groupe de travail a aussi aidé les autorités américaines, par exemple le FBI et le Service américain des douanes, à mener leurs enquêtes.
Nous devons de la même façon poursuivre le renforcement de nos relations avec nos partenaires américains.
Merci.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Kennedy.
Je suis désolé, mais je vais devoir interrompre les témoignages car nous avons une question de procédure à régler et cela nous distrait un peu.
Comme l'a dit Mme Lalonde dans son rappel au Règlement, le comité a soulevé la question du projet de loi C-35 lors de sa dernière réunion, et il faut régler cette question. Mme Carroll m'informe qu'elle va présenter le projet de loi à la Chambre pour la troisième lecture à 10 heures. Mme Lalonde devra être présente. Je crois savoir qu'elle-même et M. Casey ont l'intention de proposer des amendements à ce moment-là. Nous nous sommes dit qu'il fallait que nous adoptions notre résolution ici pour que la Chambre puisse en être informée. Je vais dons devoir présenter officiellement cette résolution, pour que les députés puissent s'en prévaloir à ce moment-là.
Vous avez devant vous l'ébauche de résolution, mais comme je l'ai dit, nous avons des propositions de modifications à son texte. Avez-vous tous la résolution et les modifications proposées? Malheureusement, je n'ai pas les modifications dans les deux langues officielles.
[Français]
Madame Lalonde, je vais vous demander si, avec votre permission... C'est que nous essayons de la traduire, mais c'est un peu difficile d'y arriver en 15 minutes. Le greffier est en train de la traduire et je crois pouvoir vous proposer une traduction d'ici peu.
[Traduction]
Avez-vous tous sous les yeux la motion et les propositions de changement?
[Français]
Mme Francine Lalonde: Mais les changements se trouvent ici, n'est-ce pas?
Le président: Les changements sont en effet sur cette page-là.
M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): À l'arrière seulement, à l'endos.
Le président: C'est seulement le dernier paragraphe qui est changé.
Mme Marlene Jennings (Notre-Dame-de-Grâce—Lachine, Lib.): C'est l'autre feuille.
Mme Francine Lalonde: C'est ce qu'on met à la place de...
M. Bernard Patry: On change le deuxième paragraphe. C'est ce que vous avez là.
Mme Marlene Jennings: C'est seulement deux phrases.
M. Bernard Patry: Oui, c'est cela.
Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, est-ce que cela veut dire qu'on enlèverait le dernier paragraphe pour le remplacer par celui-ci?
Le président: Exactement.
Mme Francine Lalonde: Est-ce que quelqu'un pourrait m'expliquer le sens de cela? Je me réserve le droit de poser des questions par la suite.
Le président: Les autres peuvent aussi répondre. Cependant, j'en comprends le sens. C'est qu'au lieu de proposer que cette affaire soit étudiée par le Comité de la justice, on propose que le gouvernement soit obligé de faire rapport directement à la Chambre après avoir étudié la question et nous avoir fait part de ses observations.
• 0945
Si on
envoie cela au Comité de la justice, il va l'étudier
avant de l'envoyer au gouvernement. Donc, on a
court-circuité le processus en
envoyant cela au gouvernement avec obligation de faire
rapport directement à la Chambre.
C'est le but de la proposition. Nous obtiendrions ainsi une réaction plus rapide et plus directe au lieu de laisser la question se prendre dans l'engrenage du fonctionnement d'un autre comité.
Mme Francine Lalonde: Monsieur le président, je trouvais et je trouve toujours qu'une étude faite par le Comité de la justice garantirait qu'elle soit plus approfondie, étant donné que ce comité a l'habitude de débattre des questions soulevées ici.
Si je comprends bien, nous tentions de faire savoir que nous avons de nombreuses craintes et, par conséquent, nous demandions au Comité de la justice d'étudier la question et de nous faire des recommandations pertinentes. Maintenant, nous demandons au gouvernement de s'y arrêter et de faire rapport à la Chambre. Est-ce bien cela?
Le président: Oui, et on parle des raisons qui justifient d'apporter des révisions à la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada. Donc, c'est exactement ce qu'aurait fait le Comité de la justice, soit une étude et un rapport au gouvernement dont celui-ci ferait rapport à la Chambre. Ici, on remet tout le problème entre les mains du gouvernement en lui laissant l'obligation de faire rapport directement à la Chambre.
On vise le même résultat, sauf qu'on retranche la référence au comité.
Mme Francine Lalonde: Excusez-moi, monsieur le président, mais je crois qu'on n'arriverait pas nécessairement au même résultat, à moins que, quel que soit le comité qui étudie ce projet de loi, les consignes ministérielles soient tellement fortes qu'il n'y ait pas moyen de faire quoi que ce soit.
Je crois qu'il est permis de penser que des recommandations précises découleraient de l'étude faite par le Comité permanent de la justice. Il me semble que selon le libellé,... Je n'ai pas eu le temps de le lire dix fois, surtout que je ne l'ai pas en français, ce dont je vais me souvenir. Si jamais je vous présente des résolutions rédigées seulement en français, allez-vous les soumettre au comité?
Le président: Si je vous lis la traduction que nous avons faite, peut-être cela pourra-t-il clarifier les choses, à moins que cela ne les embrouille. On verra.
Donc, la traduction que nous avons faite ici est la suivante:
-
Le Comité presse le gouvernement de tenir
compte des soucis légitimes
exprimés à l'égard du
libellé de l'article 5 du projet de loi.
Ceci correspond au texte déjà existant.
-
Conformément à
l'article 109 du Règlement, le Comité demande au
gouvernement de déposer une réponse globale à l'égard
des questions soulevées concernant les pouvoirs de la
GRC pour établir les paramètres de sécurité, les
autorités statutaires ou d'autres fondements pour ces
pouvoirs et la désirabilité d'établir des lignes de
conduite précises pour l'exercice de ces pouvoirs dans
la Loi sur la GRC.
Monsieur Patry.
M. Bernard Patry: Pour répondre à ma collègue, Mme Lalonde, je dirai que le fait est que notre comité peut toujours l'envoyer au Comité permanent de la justice et des droits de la personne, mais que ce comité n'a pas l'obligation de le recevoir. Disons plutôt qu'il a l'obligation de le recevoir, mais qu'en arrivera-t-il par la suite? Ce ce sera sûrement pas une de ses priorités. Nous avons peur que cela lui prenne énormément de temps. Donc, en s'adressant au gouvernement, qui devra en faire rapport à la Chambre, nous obtiendrons une réponse beaucoup plus rapidement sur la question. Merci.
[Traduction]
Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): J'aimerais ajouter à ce que vient de dire M. Patry que j'avais peur moi aussi qu'elle tombe au bas de la liste. Mais je vais demander au bureau si, après avoir obtenu la réponse du gouvernement—et nous obtiendrons ce résultat plus directement en passant par cette voie détournée—au cas où le comité, après avoir reçu cette réponse, voudrait encore exprimer le souhait que le Comité de la justice fasse une étude de la question, nous pourrons le faire le cas échéant.
Le président: D'accord.
Mme Aileen Carroll: Donc, on ne ferme pas la porte.
Le président: Rien n'empêche le comité de prendre une autre initiative ultérieurement s'il le souhaite...
Mme Aileen Carroll: C'est ce que je pense.
Le président: ... et s'il n'est pas satisfait du rapport qu'il recevra.
Mme Aileen Carroll: C'est juste, et d'ici là, comme le Comité de la justice croule sous le travail, nous allons attendre la réponse du gouvernement. Encore une fois, quand le Comité de la justice aura plus de temps, si nous ne sommes pas satisfaits, nous pourrons choisir l'autre solution.
Le président: Bon.
[Français]
Madame Lalonde.
Mme Francine Lalonde: Oui.
Le président: Le greffier vient de me dire que si nous avions proposé la résolution telle qu'elle était, il aurait fallu une motion d'agrément de la Chambre afin qu'on puisse l'approuver.
[Traduction]
Nous aurions donc eu besoin d'une motion d'approbation de la Chambre pour renvoyer la question au Comité de la justice. C'est un obstacle de procédure de plus que nous évitons en choisissant la voie directe, si je puis dire.
Personnellement, et c'est ce qu'essayait d'exprimer M. Patry, je pense que c'est une façon beaucoup plus efficace et convaincante de présenter nos problèmes.
Madame Jennings.
Mme Marlene Jennings: Lorsqu'une résolution ou un rapport est déposé à la Chambre et qu'on demande au gouvernement de répondre à une question donnée, combien de temps les règles et la procédure de la Chambre donnent-elles au gouvernement pour réagir?
Le président: D'habitude, c'est 150 jours. C'est ce que prévoit en effet la disposition réglementaire, mais nous obtenons une réponse d'habitude beaucoup plus rapidement. J'ai l'impression que l'on pourrait répondre assez rapidement à ce genre-ci de demande.
Mme Marlene Jennings: Bien, merci.
Le président: Vous partez?
[Français]
Mme Aileen Carroll: Il reste seulement cinq minutes avant que la Chambre ne commence à siéger.
[Traduction]
M. Bernard Patry: D'accord, nous allons l'adopter.
Le président: Mais nous n'avons pas le quorum.
M. Bernard Patry: Combien de membres du comité faut-il?
Le président: J'essayais de la faire adopter en ayant le quorum.
M. Bernard Patry: Trouvez quelqu'un d'autre.
Le président: Nous n'avons plus le quorum, car M. Casey vient malheureusement de quitter la salle.
Mme Marlene Jennings: Pensez-vous que quelqu'un a remarqué qu'on n'avait plus de quorum?
Le président: D'accord, puisque M. Casey était ici et que nous avions le quorum au début de la séance. Je veux bien considérer qu'il y a encore le quorum pour les fins de la résolution.
Monsieur Patry, proposez-vous la résolution?
M. Bernard Patry: Je la propose.
Le président: Nous en sommes à l'amendement.
(L'amendement est adopté [Voir le Procès-verbal])
(La motion telle qu'amendée est adoptée [Voir le Procès-verbal])
Le président: Vous vous rendez donc à la Chambre pour en discuter, et ainsi, vous pourrez expliquer ce que nous faisons, dès que cela sera porté à l'attention de la Chambre.
Mme Marlene Jennings: Puis-je proposer...
Le président: Votre autre résolution? D'accord, puisque vous êtes là, mais faites vite.
Mme Marlene Jennings: Je propose que le premier rapport du Sous-comité des droits de la personne et du développement international portant sur le voyage du comité en Colombie et adopté par le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international le 16 octobre 2001 soit modifié en remplaçant «avant le congé de Noël 2001» par «avant la fin de mars 2002».
Le président: Vous voulez changer la date d'échéance.
Mme Marlene Jennings: En effet.
(La motion est adoptée)
Le président: Merci beaucoup, madame Jennings.
Madame Carroll, désolé de vous avoir fait attendre.
Mme Aileen Carroll: Merci de votre patience.
Le président: J'espère que les témoins nous excuseront, mais nous devions régler cette affaire avant que la Chambre ne recommence à siéger à 10 heures.
• 0955
Merci beaucoup, monsieur Kennedy.
M. Jon Allen: Monsieur le président, je voudrais céder la parole à Joan Atkinson, sous-ministre adjointe de CIC.
Le président: Merci beaucoup, et bienvenue à nouveau au comité.
Pour la gouverne de mes collègues, je signale que M. Schmitz nous a expliqué que le plan national de lutte contre le terrorisme dont parlait M. Kennedy dans ses commentaires se trouve à l'onglet N du livre d'information qui vous a été distribué.
Madame Atkinson.
[Français]
Mme Joan Atkinson (sous-ministre adjointe, Développement des politiques et programmes, ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration): Merci, monsieur le président. Cela me fait plaisir
[Traduction]
d'être de retour au comité. J'aimerais vous expliquer brièvement ce qui se passe dans le secteur de l'immigration à la suite des événements du 11 septembre. D'entrée de jeu, je voudrais répéter tout comme l'ont souligné MM. Allen et Kennedy que notre collaboration avec les autorités américaines est complète, permanente et de longue date.
Avant le 11 septembre, l'accord sur la frontière commune signé par les deux gouvernements comprenait un élément secondaire appelé la «vision de la gestion de la frontière» en regard de laquelle les deux organismes chargés de l'immigration avaient établi une série d'initiatives et mis sur pied des groupes de travail dont le mandat était de se pencher sur les questions d'immigration. Donc, avant le 11 septembre, cette vision de la gestion de la frontière comportait plusieurs objectifs: trouver des solutions à des problèmes communs en matière de contrôle de l'immigration, en remontant davantage à la source de ces problèmes; utiliser des technologies de pointe efficaces dans les aéroports et le long de la frontière afin de faciliter les déplacements des voyageurs véritables, de contrôler les indésirables et d'échanger des renseignements; mieux coordonner les politiques et les opérations relativement à la délivrance de visas; et améliorer la coopération et la coordination à la frontière terrestre.
Nous avions quand même certaines réalisations à notre actif et avions réussi à atteindre certains de ces objectifs avant le 11 septembre. À preuve, nous avions signé une entente réciproque avec le gouvernement américain, avec nos homologues américains du Service de l'immigration et de la naturalisation (Immigration and Naturalization Service) et avec le Département d'État; de plus, nous échangions de l'information et des données avec nos homologues américains et continuons de le faire.
Ainsi, nous avons un accès réciproque à nos banques de données de terroristes connus et soupçonnés. Nous avons réussi à contrer les déplacements des migrants clandestins vers l'Amérique du Nord grâce à la coopération établie entre les deux pays, et nous avons réussi à mieux contrôler le recours abusif au système nord-américain de détermination du droit d'asile ou du statut de réfugié dans les deux pays, grâce à un projet pilote d'échange de données sur les empreintes digitales prélevées chez les demandeurs de statut de réfugié et les demandeurs d'asile entre le Canada et les États-Unis.
Dans la foulée du 11 septembre, comme le signalait M. Allen, nous nous sommes mis sur un pied d'alerte renforcée à tous nos points d'entrée, dans tous nos bureaux au Canada et dans toutes nos missions à l'étranger. Nous avons augmenté les échanges d'information et de renseignement avec nos homologues américains. De plus, nous avons imposé des contrôles plus sévères à l'étranger aux demandeurs de visa de visiteur, aux demandeurs de permis de travailleur temporaire, aux demandeurs de permis d'étudiant et aux demandes de visa d'immigration. Nous avons imposé un contrôle sécuritaire au début du processus de détermination du statut de réfugié au Canada. Jusqu'à maintenant, nos contrôles sécuritaires des demandeurs du statut de réfugié étaient faits une fois que ces demandeurs avaient été acceptés par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Nous avons donc décidé d'effectuer les contrôles au début du processus, c'est-à-dire à l'arrivée, pour que nous sachions dès l'arrivée au Canada de ces gens à qui nous avions affaire.
De plus, nous examinons désormais tous les cas qui se trouvent dans l'inventaire actuel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié pour déterminer si, parmi tous ceux qui attendent que l'on décide de leur sort, il ne se trouverait pas des gens qui pourraient nous inquiéter pour des raisons de sécurité.
À moyen terme, les programmes d'immigration et de protection des réfugiés au Canada ont retenu beaucoup l'attention, comme l'a signalé M. Allen dans ses propos; le défi consiste donc notamment à distinguer le mythe de la réalité et à bien comprendre ce que sont effectivement les programmes d'immigration et de protection des réfugiés du Canada.
La gestion de la frontière et les mesures qui doivent être prises ont également retenu l'attention, notre objectif étant de convaincre les Canadiens tout comme les Américains que nous prenons la question de la sécurité au sérieux et que nous faisons de notre mieux pour mettre en place les mesures appropriées pour contrôler l'arrivée de gens qui pourraient être une source d'inquiétude de part et d'autre de la frontière.
Mais, monsieur le président, nous croyons qu'il faut concentrer notre attention ailleurs que sur la frontière. En effet, dans le contexte de l'immigration, la frontière n'est pas seulement une ligne. La frontière est en effet le dernier d'une série de points de contrôle permettant d'évaluer les individus et de déterminer s'ils posent ou non une menace à la sécurité des Canadiens ou des Américains. Ces points de contrôle commencent dans nos bureaux des visas à l'extérieur du Canada, c'est-à-dire là où les gens se présentent pour demander des documents leur permettant de se rendre au Canada; ils commencent aussi aux aéroports à l'étranger, puisque c'est là que les gens montent à bord d'avions pour se rendre au Canada; ils sont effectués également dans les pays de transit, s'ils changent d'avion ou s'ils quittent l'avion pour venir au Canada par d'autres moyens de transport ainsi qu'aux aéroports et ports de mer internationaux, c'est-à-dire à l'arrivée en Amérique du Nord; finalement, ils s'effectuent aussi aux postes frontaliers. Toute la réflexion que nous faisons avec nos homologues américains nous sert à examiner cette série de points de contrôle à partir de l'étranger jusqu'à nos points de contrôle au Canada.
• 1000
La sécurité des documents est un des éléments essentiels de
notre stratégie. Dans tous nos points de contrôle le long de la
chaîne, nous devons examiner l'individu et les documents qu'il
détient. Nous comparons ces documents aux renseignements que nous
possédons dans nos banques de données et toutes les données sont
jugées par des agents d'immigration et des visas.
Le 12 octobre dernier, notre ministre annonçait la mise en circulation accélérée d'une carte de résident permanent servant à remplacer le document actuel facile à falsifier utilisé actuellement par les immigrants au Canada—soit leur visa d'immigrant et leur document leur donnant droit d'établissement—documents de papier dont abusent facilement les individus cherchant à contourner nos contrôles. La ministre a donc annoncé la production accélérée de cette carte de résident permanent qui serait émise à tous les résidents permanents du Canada et leur permettrait de sortir du Canada et de pouvoir y revenir facilement. Nous espérons que cette carte pourra être distribuée dès juin.
Nous sommes en train de revoir notre régime de contrôle des visas de visiteur...
Le président: Pour le résident permanent, ne suffit-il pas d'un seul document plutôt que...
M. Bernard Patry: Oui, un long document.
Mme Joan Atkinson: C'est cela.
Le président: Il faut l'inclure dans le passeport?
Mme Joan Atkinson: Oui, en effet, et c'est...
Le président: Si on en a un.
Mme Joan Atkinson: ... en effet, si on en a un. Cela constitue la preuve qu'ils ont un statut au Canada. C'est d'ailleurs actuellement le document qui prouve que la personne en question est un résident permanent du Canada. Mais ce n'est pas un document sûr.
Le président: C'est comme le certificat de naissance au Québec qui provient d'un hôpital et est signé par un notaire. Je vous suis très bien.
Mme Joan Atkinson: C'est cela.
Mme Marlene Jennings: Ou le baptistère signé par le curé.
Mme Joan Atkinson: En second lieu, nous sommes en train de réviser avec une certaine urgence notre régime de contrôle des visas de visiteur pour revoir la liste des pays à qui nous imposons actuellement les visas de visiteur. Cette réflexion se fait avec nos collègues américains.
Enfin, notre nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés a reçu la sanction royale le 1er novembre dernier. Laissez-moi brièvement vous expliquer ce qu'est cette loi: elle nous donne de nouveaux pouvoirs qui nous aideront considérablement à accroître la sécurité aux frontières et le long de tous nos points de contrôle.
En effet, la loi porte de nouvelles interdictions de territoire qui se fondent sur la criminalité transfrontalière, la fraude et les fausses déclarations. Elle nous donne de nouveaux pouvoirs d'arrestation et de détention pour ceux qui peuvent constituer une menace pour le Canada. Elle offre des procédures simplifiées permettant d'exclure certaines personnes du processus de détermination du statut de réfugié s'il s'agit de criminels graves, de terroristes ou de criminels de guerre.
La loi prévoit des procédures simplifiées nous permettant de détenir une personne et de la renvoyer si elle constitue une menace grave à la sécurité du pays par le truchement du certificat de sécurité. En vertu de ce certificat de sécurité, le ministre de l'Immigration et le Solliciteur général présentent un certificat à un juge de la Cour fédérale dans lequel il est établi que l'individu en question constitue une menace pour la sécurité du Canada. Si le juge estime le certificat raisonnable, il nous est alors possible de placer l'individu sous garde et de le renvoyer.
La loi nous donne une capacité accrue de protéger des renseignements et des informations de sécurité délicats lors des audiences administratives. Présentement, il nous est possible de le faire par demande à une cour fédérale. La nouvelle loi nous permettra désormais de protéger ces renseignements délicats lors des audiences administratives ou lors des examens de détention devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.
Enfin, la loi nous donne le pouvoir de recueillir de l'information préalable sur les voyageurs et les dossiers des passagers auprès des compagnies aériennes transportant ces individus vers le Canada.
Je tiens à rassurer les membres du comité: il faut bien comprendre que la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés ne vise pas uniquement à interdire l'accès au Canada; elle propose aussi des mesures visant à faciliter la venue chez nous de certaines personnes.
• 1005
Dans ses règlements, la loi prévoit de nouveaux critères de
sélection des travailleurs qualifiés. Elle nous permet de choisir
de façon plus efficace et efficiente les travailleurs qualifiés qui
joueront un rôle essentiel pour la prospérité future du Canada.
Elle nous permet d'accueillir plus facilement les travailleurs
étrangers temporaires actuellement au Canada et de rendre la
transition vers le statut de résident permanent plus efficace à
partir même de notre pays.
La loi établit des exigences plus claires à l'égard des gens d'affaires immigrants, c'est-à-dire à l'égard de ceux qui viennent au Canada pour y investir et nous faire profiter de leurs compétences et de leurs talents d'entrepreneur. Elle nous permet de reconnaître la réalité familiale actuelle et les nouvelles configurations familiales canadiennes car elle élargit la catégorie de la famille pour qu'on y inclue les partenaires de même sexe et pour que les enfants à charge puissent être plus âgés.
Enfin, revenons à mes propos du début et à notre collaboration avec les Américains. Il faut évidemment trouver un équilibre dans tous les efforts que nous déployons. À notre avis, l'atteinte des objectifs visés par l'initiative sur la vision de la gestion de la frontière et l'accord frontalier avec nos collègues des douanes constituent le meilleur moyen de bien gérer les mouvements de personnes entre nos deux pays.
Nous élaborons un plan d'action en collaboration avec nos collègues des douanes et de l'immigration aux États-Unis. Il y est envisagé une collaboration entre les agences aux points d'entrée et entre ces points d'entrée de même qu'une collaboration entre les services d'immigration à la frontière dans le cadre de nos régimes de demande d'asile et de détermination du statut de réfugié pour ce qui est des mouvements clandestins de migrants, du terrorisme et de l'exécution de la loi à l'étranger. Nous accordons une importance accrue à l'échange d'information et de renseignement ainsi qu'à des initiatives conjointes. Nous visons la convergence de nos politiques sur les visas et nous cherchons à faire en sorte que nous utilisons de part et d'autre des technologies compatibles pour que notre tâche soit plus aisée.
Voilà ce que j'avais à dire. Je répondrai avec plaisir aux questions que vous pourrez avoir à la fin de tous les exposés.
Le président: Merci beaucoup, madame Atkinson.
Nous accueillons maintenant Mme Nymark.
Mme Christine Nymark (sous-ministre adjointe, Politiques, Transports Canada): Merci.
Le président: Il est rare que nous accueillions des représentants du ministère des Transports.
Mme Christine Nymark: Dans ce cas, je suis particulièrement ravie de comparaître.
Le président: C'est un grand moment pour nous...
Mme Christine Nymark: Tout à fait.
Le président: ... même si nous avons effectivement accueilli des représentants du ministère des Transports au moment où nous avons étudié le projet de loi portant sur les mesures de sécurité dans les aéroports vers les États-Unis.
Mme Christine Nymark: J'ai un très grand plaisir à être ici puisqu'il y a de cela plusieurs années, j'étais greffière de ce comité-ci. Je connais bien cette salle.
Le président: Bienvenue chez vous.
Mme Christine Nymark: Merci.
Le président: Vous pourrez venir ensuite causer avec notre greffier pour qu'il vous explique à quel point c'est de la folie ici.
Mme Christine Nymark: Je voulais vous parler aujourd'hui des améliorations apportées aux mesures de sécurité mises en oeuvre par Transports Canada dans les divers modes de transport depuis le 11 septembre. Je ferai également état de nos efforts de collaboration avec le ministère des Transports des États-Unis et les provinces. Je conclurai en discutant de l'approche de Transports Canada visant à promouvoir une frontière sûre et efficiente.
Du côté de l'aviation, le 11 septembre dernier, le ministre réagissait immédiatement à la situation de crise et fermait l'espace aérien canadien. Depuis lors, nous avons mis en oeuvre un éventail de mesures visant à accroître la sécurité aérienne et nous avons collaboré de près avec les autres ministères fédéraux et la Federal Aviation Administration du ministère des Transports des États-Unis sur divers aspects de la sécurité aérienne.
Il est bien connu que les événements du 11 septembre ont eu une incidence importante sur le volume de trafic aérien: le transport aérien intérieur a connu une diminution de 10 p. 100, alors que le trafic transfrontalier a diminué de 25 à 40 p. 100 selon les trajets. Il va de soi que cela a eu des répercussions importantes sur les transporteurs de même que sur les aéroports.
Pour compenser la fermeture de l'espace aérien, le gouvernement a établi un programme d'aide aux transporteurs aériens d'un montant de 160 millions de dollars, qui a été très bien reçu. En outre, Transports Canada a également accordé aux transporteurs aériens et aux aéroports une couverture pour la garantie pendant une période de 90 jours, devant la réaction des compagnies d'assurance aux événements. La limite de 15 p. 100 imposée aux détenteurs d'actions d'Air Canada a de plus été éliminée, ce qui aidera les compagnies aériennes à attirer les investisseurs.
Passons à la sûreté dans le domaine de l'aviation: il est très important de signaler que le Canada était considéré comme un chef de file en matière de sûreté de l'aviation avant le 11 septembre; mais nous devons demeurer vigilants et prendre les mesures nécessaires pour rehausser la sûreté et la position concurrentielle de notre industrie du transport aérien.
• 1010
Voici certaines des dispositions que nous avons prises
récemment afin de régler des problèmes de sûreté: la vérification
plus approfondie des passagers (un nombre accru de fouilles
manuelles, comme vous l'avez sans doute appris vous-mêmes); un
accès plus limité aux zones d'accès interdit; l'acquisition de
systèmes de détection d'explosifs au coût de 55 millions de
dollars; le verrouillage obligatoire des portes de cabine pilotage
et la présence policière accrue aux principaux aéroports. Des
agents de la GRC sont également postés à bord des avions à
destination de l'aéroport national Reagan à Washington,
conformément aux exigences des États-Unis. Nous continuerons à
prendre toutes les mesures raisonnables pour promouvoir la sûreté
des voyageurs canadiens. Nous sommes à étudier diverses
possibilités à cet égard et nous nous penchons sur tous les
problèmes liés à la sûreté de l'aviation.
Dans le secteur de la marine, nous évaluons constamment la menace au transport maritime en collaboration avec le SCRS et la GRC. Nous travaillons également en étroite collaboration avec la Garde côtière canadienne, la Garde côtière des États-Unis, la Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent, les administrations portuaires et les exploitants de navires afin de rehausser la sûreté de tout le système de transport maritime.
Voici certaines des mesures qui ont été prises pour accroître la sûreté: allongement de la période de notification préalable (de 24 à 96 heures) pour signaler l'arrivée de gros navires en eaux canadiennes; remise par les services de traversier de la liste des passagers aux services d'immigration et de naturalisation des États-Unis avant l'arrivée du navire; inspection accrue des navires étrangers pénétrant dans le réseau de la Voie maritime du Saint-Laurent.
La Loi sur la sûreté du transport maritime confère au ministre des Transports un fondement législatif efficace pour l'adoption des mesures de sûreté requises dans le secteur maritime.
Les mesures de sûreté pour les navires de croisière sont établies depuis un bon moment déjà. Même si la saison des croisières achève, nous allons continuer de faire preuve de vigilance.
S'agissant maintenant des postes frontaliers terrestres, le volume de trafic des véhicules commerciaux et des véhicules de tourisme a diminué immédiatement après la crise du 11 septembre. Depuis ce moment, le transport par camion semble avoir repris à un niveau légèrement inférieur à ce qu'il était l'année dernière à la même date, du moins aux postes frontaliers du sud de l'Ontario. Le volume de trafic des véhicules de tourisme demeure inférieur à ce qu'il était l'année dernière à pareille date, toutefois.
Transports Canada a constaté les retards à la frontière et la diminution du volume de trafic et le ministère est conscient de l'incidence économique que les événements du 11 septembre ont eue le long du 49e parallèle, particulièrement dans certains secteurs de l'industrie et dans certaines villes frontalières comme Windsor. En collaboration avec les transporteurs et les utilisateurs des services de transport, nous travaillons sur des aspects de la gestion des postes frontaliers et nous étudions l'incidence des retards aux frontières sur l'industrie du transport et sur certains secteurs clés de l'industrie.
Pour ce qui est de la sûreté du réseau routier et des éléments d'infrastructure, Transports Canada, les ministères provinciaux du Transport et d'autres intervenants examinent divers moyens de rehausser la sûreté du réseau routier et d'autres éléments importants de l'infrastructure routière comme les ponts. Dans un premier temps, les évaluations sont en cours afin de déterminer le degré de risque pesant sur les éléments essentiels de l'infrastructure routière.
Nous avons appris que des préoccupations de sûreté ont amené les membres de l'Association des administrations des ponts et des tunnels à stipuler que les véhicules ne seront pas autorisés à s'immobiliser en attente sur leurs ouvrages. Nous reconnaissons les problèmes que cela pourrait éventuellement amener le long de routes comme la Huron Church Road de Windsor. Nous avons donc consulté les membres de l'Association des ponts et des tunnels à cet égard et continuerons de collaborer avec eux et avec d'autres intervenants afin de trouver des moyens de régler les problèmes touchant des éléments essentiels de l'infrastructure routière.
Au chapitre des matières dangereuses, Transports Canada travaille également avec les provinces et les territoires relativement aux préoccupations liées au transport des marchandises dangereuses. Un bon nombre de préoccupations en matière de sûreté figuraient à l'ordre du jour de la réunion des 5 et 6 novembre du groupe de travail fédéral-provincial sur les marchandises dangereuses. Nos efforts relativement aux marchandises dangereuses ont porté essentiellement sur 800 transporteurs des marchandises les plus dangereuses. Tous les intéressés ont bien collaboré avec nous lors des visites que nous avons effectuées afin de nous pencher sur divers problèmes ou diverses pratiques.
Le transport ferroviaire fait meilleure figure. Nous avons collaboré étroitement avec les chemins de fer canadiens sur les questions de sécurité. L'industrie du transport ferroviaire a mis en application des mesures de sûreté accrues aux endroits stratégiques et relativement aux activités importantes. La Loi sur la sécurité ferroviaire régit la sécurité ferroviaire et les questions de sûreté. La loi fournit un fondement législatif efficace pour la prise de règlements, de normes et de règles. La bonne nouvelle, c'est que le trafic ferroviaire n'a pas été affecté de façon significative par les événements du 11 septembre, et s'est poursuivi sans changements majeurs entre le Canada et les États-Unis. Nous comprenons que les principaux chemins de fer canadiens disposent de systèmes d'échange de données informatisées fort efficaces qui inspirent confiance aux agents des services d'inspection des États-Unis et qui facilitent les déplacements transfrontaliers.
• 1015
Dans une perspective d'avenir vers une frontière terrestre
sûre et efficiente, la démarche de Transports Canada en vue de
promouvoir des postes frontaliers sûrs et efficients se concentre
sur l'accroissement de la coordination binationale, sur des
améliorations stratégiques à l'infrastructure frontalière et sur la
promotion de l'efficience du réseau des transports aux frontières
et au-delà de celles-ci. Ce qui caractérise la démarche de
Transports Canada, c'est sans nul doute l'excellente collaboration
qui existe entre le ministère, d'autres organismes du gouvernement
canadien, le ministère des Transports des États-Unis, les provinces
et les États frontaliers des États-Unis.
En ce qui a trait à la collaboration de Transports Canada avec le ministère des Transports des États-Unis, le mémoire de coopération conclu en octobre 2000 s'est avéré un mécanisme efficace pour échanger avec le MDT des États-Unis et ce mémoire continuera de servir de fondement à la collaboration binationale pour les projets ou problèmes en matière de transport de surface aux frontières. En vertu du mémoire, les deux ministères se sont engagés à accroître la collaboration dans divers secteurs: coordination relative aux projets de transport aux frontières; développement de techniques visant à accroître l'efficience des transports; stratégies intermodales; et analyses conjointes des données et échange de données.
À titre de suivi, TC et le MDT des États-Unis, en partenariat avec les États et les provinces frontaliers, sont en train de mettre sur pied un groupe de travail sur les questions frontalières de transport afin de promouvoir la collaboration binationale sur les questions de transport à la frontière. La première réunion du groupe se tiendra à Windsor les 24 et 25 janvier 2002. Cette initiative a reçu l'appui de 19 compétences frontalières.
Transports Canada a également mis de côté une somme de 65 millions de dollars en vue d'apporter des améliorations aux infrastructures des postes frontaliers dans le cadre des initiatives de transport aux passages frontaliers. Nous examinons actuellement des moyens de maximiser l'utilisation de ces fonds et de tenir compte des priorités des organismes d'inspection. Nous nous penchons sur diverses initiatives avec les provinces, l'ADRC, le MDT des États-Unis et les États frontaliers. Les systèmes intelligents de transport offrent diverses possibilités de progrès à cet égard.
Outre que l'on envisage d'apporter des améliorations aux frontières, Transports Canada entend examiner des stratégies visant à atténuer la congestion aux goulots d'engorgement ailleurs que près des frontières dans les couloirs de transport clés, en collaboration avec les principaux intervenants. Nous avons également l'intention de travailler de concert avec nos collègues canadiens, nos partenaires américains et avec les principaux intervenants du secteur des transports afin de trouver des moyens technologiques pouvant faciliter les mouvements transfrontaliers sans compromettre la sûreté.
Les initiatives prises par Transports Canada visent à faire progresser l'ensemble du programme de gestion des postes frontaliers en rehaussant l'efficience des transports aux frontières et en complétant le travail des autres organismes canadiens à cet égard. Nous sommes optimistes quant aux nouvelles possibilités surtout à la lumière de la convergence des priorités des deux côtés de la frontière.
J'espère que mes propos ont pu vous donner un bon aperçu de la démarche dynamique que nous avons adoptée relativement aux mesures de sécurité ainsi qu'à la libre circulation des marchandises et des voyageurs à la frontière.
Merci.
Le président: Merci, madame Nymark.
Nous allons maintenant entendre M. Lefebvre, je crois, suivi de M. Sulzenko.
[Français]
M. Denis Lefebvre (sous-commissaire, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada): Merci, monsieur le président. Merci de m'avoir invité à participer aux débats de votre comité.
Je vais essayer d'être très bref et de ne pas répéter ce qui a déjà été dit par mes collègues. Je voudrais traiter de la question de la frontière et du point de vue des douanes sur trois aspects: premièrement, les perceptions qu'on a de la frontière, surtout depuis le 11 septembre; deuxièmement, la réalité de la frontière depuis le 11 septembre; troisièmement, nos plans pour l'avenir.
Dans plusieurs cas, surtout dans certaines communautés, on a l'impression que les délais à la frontière sont toujours excessifs et beaucoup plus longs qu'ils ne l'étaient avant le 11 septembre. On a aussi l'impression que ces délais sont la cause d'un ralentissement économique et aussi la cause du fait qu'un nombre décroissant de personnes veulent bien traverser la frontière. On a aussi l'impression que les procédures mises en place par nos collègues américains sont plus rigoureuses que les nôtres.
• 1020
La réalité est qu'effectivement, comme Jon l'a dit,
il y a eu des délais inacceptables et excessifs
dans les jours qui ont suivi immédiatement le 11
septembre. Depuis, la situation s'est améliorée, et
nous sommes maintenant à peu près au même niveau
qu'avant le 11 septembre, bien qu'il y ait encore,
surtout du côté
américain, plusieurs ports où les délais
pour entrer aux États-Unis sont excessifs.
Depuis le 11 septembre, le ministre et le gouvernement ont indiqué qu'ils investiraient 21 millions de dollars pour améliorer la technologie qu'on a à notre disposition, technologie qu'on va déployer surtout aux aéroports et aux ports d'entrée. Nous allons ajouter également des douaniers supplémentaires, principalement aux aéroports et aux ports de mer.
Depuis le 11 septembre, nous avons accru nos contacts et notre coopération avec nos collègues américains. Le ministre a rencontré l'ambassadeur Cellucci à deux reprises. Il a aussi rencontré des représentants du Trésor américain, qui est responsable des douanes, des représentants des douanes et des membres du Congrès. Également, vendredi dernier, il a rencontré le secrétaire au Trésor américain, M. Paul O'Neill, en la présence du ministre Paul Martin pour parler de coopération à la frontière.
[Traduction]
Voilà donc certains des faits et la réalité telle qu'elle existe depuis le 11 septembre. Le vrai problème à la frontière, pour nous, c'est de trouver le moyen de faire en sorte qu'elle soit sûre et ouverte aux échanges et aux déplacements légitimes dans les deux sens aujourd'hui et dans l'avenir.
Nous avons déjà beaucoup d'atouts. Nous avons de longs antécédents de collaboration avec nos voisins américains. Il existe de solides liens entre les organismes de sécurité canadiens et américains. Nos intérêts économiques sont les mêmes. Plus de 80 p. 100 de nos exportations sont destinées aux États-Unis et 25 p. 100 des exportations américaines viennent au Canada.
Malgré la réalité actuelle, il faut absolument calmer les craintes sur la façon dont nous assurons à la frontière la sécurité de la population et notre croissance économique. Depuis le 11 septembre, nous sommes en état d'alerte élevée.
Avant le 11 septembre, nous avions déjà un plan. Ce plan prévoyait d'accorder un plus grand nombre d'autorisations à l'écart de la frontière pour les voyageurs et les biens présentant peu de risques et de recourir davantage à la technologie pour transmettre à ceux qui sont en première ligne les renseignements relatifs à ces voyageurs et marchandises. Nous avons déjà entrepris des discussions avec nos collègues américains pour tester ce que nous faisons à nos frontières extérieures, c'est-à-dire nos ports et aéroports. Nous procédons déjà à des échanges d'information mais il était déjà prévu d'en échanger davantage.
Depuis le 11 septembre, nous avons revu nos plans et confirmé qu'ils conviennent à la situation depuis cette date. Nous accélérons toutefois la mise en «uvre de ces plans. Dans certains cas, nous leur donnons plus d'ampleur.
Je pense ici notamment à NEXUS, projet pilote exécuté à Sarnia et à Port Huron, qui permet de délivrer un laissez-passer aux voyageurs qui présentent peu de risques. Cette préautorisation leur permet d'emprunter une voie spéciale pour traverser la frontière dans les deux sens.
• 1025
Nous comptons instaurer un programme semblable à NEXUS dans
les aéroports. Dans le cas des marchandises, nous envisagions des
programmes dans le cadre de ce que nous appelons l'autocotisation
des douanes, qui permet de préautoriser les importateurs à faible
risque et de les laisser emprunter une voie réservée lorsqu'ils se
présentent à la frontière.
Même avant le 11 septembre et davantage encore depuis, nous avons tenu des discussions avec nos collègues américains pour réaliser des opérations conjointes le long de notre frontière commune. NEXUS en est le principal exemple. L'autocotisation des douanes pour les marchandises est un autre exemple de ce que nous voudrions faire.
Nous discutons également avec eux de programmes semblables à NEXUS pour les aéroports, que nous appelons le système de traitement accéléré des passagers. Nous envisageons également de procéder à de plus nombreux échanges de renseignements et d'instituer des pratiques mutuellement reconnues à nos frontières extérieures, c'est-à-dire les aéroports et les ports, pour que chaque pays sache que les voyageurs et les marchandises arrivés dans l'autre ne soient pas un risque pour lui. Cela aurait des conséquences directes sur la façon dont nous gérons notre frontière commune.
Monsieur le président, voilà certaines des initiatives et des activités que nous avons lancées avec nos collègues américains depuis le 11 septembre. Dans la majorité des cas, nous en avions déjà discuté avec eux avant.
[Français]
Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Lefebvre.
J'espère qu'avec toutes ces merveilles électroniques, vous aurez mieux que ces machins ridicules que l'on utilise pour INSPASS parce que, dans mon cas, ça ne marche jamais. C'est tout ce que je peux dire.
M. Denis Lefebvre: On s'en occupe.
Le président: Ce doit être à cause de ma main. Je n'ai pas les doigts qu'il faut, j'imagine.
Merci.
Monsieur Sulzenko.
M. Andreï Sulzenko (sous-ministre adjoint, Secteur politique, industriel et scientifique, Industrie Canada): Merci, monsieur le président. Je vous remercie d'avoir invité Industrie Canada à votre comité.
J'ai un tout petit exposé à faire. Des exemplaires du texte vous ont été remis, je crois.
[Français]
Il y a aussi des copies en français.
[Traduction]
Je suis ici aujourd'hui pour donner au comité un très bref aperçu de l'état actuel de l'économie canadienne et en particulier des secteurs les plus touchés par la tragédie du 11 septembre.
Tout d'abord, en ce qui concerne l'ensemble de l'économie, il est clair que tant l'économie canadienne qu'américaine connaissaient un ralentissement prononcé avant le 11 septembre. Depuis, les prévisionnistes revoient nettement à la baisse leurs perspectives pour les deux économies par rapport aux prévisions précédentes. Il est fort probable que l'économie américaine est entrée en légère récession pendant le deuxième semestre. Pour le Canada, les perspectives sont un peu plus incertaines et il faudra attendre le budget du ministre des Finances pour savoir si nous allons connaître une légère récession, comme les États-Unis.
Les indicateurs économiques actuels sont ambigus. Par exemple, l'emploi au Canada a augmenté légèrement en septembre et en octobre. Les ventes de véhicules automobiles ont régressé en septembre, mais progressé nettement en octobre, croit-on. Les mises en chantier ont augmenté de 13 p. 100 en octobre.
Le président: Mais nous consommons notre propre bois d'oeuvre.
M. Andreï Sulzenko: Oui.
Toutefois, la confiance de la population et des milieux des affaires semble être à la baisse. L'indice de confiance des entreprises attribué par le Conference Board du Canada a baissé de 30 p. 100 au troisième trimestre, son plus bas niveau depuis 1990.
Aux États-Unis, on peut dire sans crainte de se tromper que les indicateurs vont plus dans le même sens, à savoir une chute du PIB réel dans le troisième trimestre. De plus, 400 000 emplois ont disparu aux États-Unis en octobre. En revanche, les ventes au détail ont augmenté en octobre, en grande partie à cause des ventes de voitures, qui ont progressé de 26 p. 100 aux États-Unis en octobre.
En ce qui concerne les marchés boursiers, les indices avaient déjà baissé du tiers par rapport à leur sommet de la fin de l'été. Comme nous le savons tous, ils ont baissé radicalement après l'attentat, mais ont essentiellement retrouvé leur niveau d'avant le 11 septembre.
Quant aux secteurs les plus touchés, ma collègue Christine Nymark a parlé des compagnies aériennes. Les deux autres sont l'aérospatial, et le tourisme.
Dans le cas des compagnies aériennes, il y avait déjà une tendance mondiale à la baisse avant le 11 septembre. Les recettes vont de toute évidence baisser cette année, de 20 à 25 p. 100, et on ne prévoit qu'un léger redressement pour 2002. L'industrie canadienne connaîtra en outre des restructurations majeures.
Pour l'aérospatiale, des compressions d'emplois importantes avaient déjà été annoncées et d'autres sont attendues. Boeing et Bombardier ont réduit leur production et annoncé 30 000 et 6 500 licenciements dans le monde, respectivement. Pour le Canada, ces compressions se feront particulièrement sentir au Québec et en Ontario. Airbus a également réduit sa production, ce qui aura des effets sur les fournisseurs canadiens. En revanche, il existe de nouvelles possibilités d'affaires dans le domaine de la défense et de la vente d'aéronefs privés.
En ce qui concerne le tourisme, l'Association canadienne des agents de voyages prévoit une baisse de 30 à 40 p. 100 des activités de ses membres en septembre et entre 20 et 40 p. 100 en octobre. Jusqu'à 6 000 des 30 000 agents de voyages du Canada pourraient perdre leur emploi d'ici à la fin de l'année.
En ce qui concerne les hôtels dans les grands centres urbains du pays, il y a eu 500 000 annulations de réservations d'hôtel en septembre et 260 000 autres en octobre. Le tourisme ontarien, le plus important au pays, aura perdu 100 millions de dollars d'ici à la fin de l'année et les autres régions connaîtront des pertes proportionnées.
On observe des signes de reprise mais le secteur touristique demeurera atone jusqu'en 2002, surtout en ce qui concerne les vols long-courrier et les activités liées au transport aérien.
Le gouvernement vient d'annoncer une rallonge de 20 millions de dollars à la Commission canadienne du tourisme, qui lancera une campagne auprès de nos voisins du nord des États-Unis et des résidents canadiens.
Les autres secteurs... Le secteur de l'automobile est très vulnérable au Canada. Comme je l'ai déjà dit, les ventes sont restées stables grâce aux programmes d'encouragement offerts par les fabricants. Il ne faut pas oublier non plus que l'industrie canadienne de l'automobile a connu en 1999 et 2000 une production record de 3 millions de véhicules. En 2001, on s'attend à ce que la production retrouve des niveaux plus normaux, de l'ordre de 2,5 millions de véhicules. Cela représenterait néanmoins la troisième année de production en importance.
Pour ce qui est des autres secteurs, comme l'énergie, on sait que le cours du pétrole a reculé considérablement depuis le 11 septembre. C'est une bonne nouvelle pour le consommateur. À court terme, on s'attend à une grande instabilité des prix de l'énergie. À plus long terme, on s'attend à ce que le désir des États-Unis de disposer d'approvisionnements en énergie fiables sera une bonne nouvelle pour le Canada et se traduira par un relèvement de la production et des investissements dans le secteur.
• 1035
L'attentat du 11 septembre a frappé un secteur manufacturier
déjà ébranlé. Le secteur manufacturier canadien a connu
44 000 disparitions d'emplois en septembre, même avant les
attaques, et le chiffre est passé à 75 000 en octobre. De plus, en
octobre, les livraisons manufacturières ont reculé de 2,5 p. 100
par rapport à septembre. Il s'agit donc du secteur le plus touché
par les retards à la frontière et le ralentissement de l'économie
américaine.
Pour ce qui est des autres secteurs, comme les finances, le degré d'exposition est très limité. Le surintendant des institutions financières surveille le risque auquel sont exposées les institutions des secteurs les plus vulnérables, et la Banque de développement du Canada—une société d'État—a offert à certains de ses clients la possibilité de reporter le remboursement de leur capital jusqu'à quatre mois.
En ce qui concerne le secteur de la technologie de l'information, il y a eu des conséquences immédiates après les attentats puisque les réseaux ont été surchargés. Les attentats ont éveillé des inquiétudes au sujet de la sécurité et amené certains à réclamer des contrôles plus stricts sur l'accès aux systèmes de communication et à leur utilisation.
Ce qui pourrait être avantageux, c'est que l'on utilisera peut-être davantage les technologies de communication—par exemple la vidéoconférence qui remplacerait les déplacements d'affaires—et l'on sait que certaines de nos sociétés ont rempli leurs carnets de commande venant des États-Unis en particulier, comme c'est le cas pour Blackberry.
Pour conclure, monsieur le président, je dirais que les attentats du 11 septembre n'ont eu une incidence majeure que sur un petit nombre d'industries, mais des industries très importantes. Toutes en revanche seront touchées par la lenteur de la reprise en cours.
Je voudrais également corroborer ce que ma collègue a dit à propos de la frontière et des échanges bidirectionnels de 9 milliards de dollars par jour. Ce chiffre est trois fois ce qu'il était il y a 10 ans, ce qui est une augmentation phénoménale quand on songe aux moyens et aux dispositifs en place aux postes frontaliers.
Il est prioritaire pour Industrie Canada d'améliorer la circulation à la frontière non seulement pour les effets à long terme sur le commerce—surtout s'il y a relance de nos deux économies et reprise des échanges commerciaux—mais aussi pour les décisions d'investissement à moyen terme. Les investisseurs desservent le marché nord-américain, et pas seulement les marchés canadiens ou américains. La libre circulation à la frontière du trafic commercial légitime est donc un important facteur pour attirer des investissements au Canada.
Monsieur le président, je vous remercie. C'est ici que se termine ma déclaration.
Le président: Merci beaucoup.
Avant de passer aux questions, je veux vous remercier tous d'être venus. C'est une occasion très utile et même extraordinaire d'avoir un aperçu général de la situation. Il est rare que nous puissions tous vous réunir dans la même salle au même moment. Nous savons que vous êtes tous très occupés et nous vous remercions d'être venus.
Monsieur Martin.
M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président, et merci à tous ceux qui sont venus ici aujourd'hui.
Je voudrais également remercier Gerry et Jim d'avoir organisé cette rencontre. Vous avez fait du travail magnifique qui vous a obligés à travailler d'arrache-pied pendant la semaine.
Le président: Êtes-vous en train de nous dire que vous avez déjà lu tout ceci, docteur Martin? Si c'est le cas, je m'inquiète sérieusement de la façon dont vous occupez vos week-ends.
M. Keith Martin: Mon nez s'allongerait si je répondais oui, mais ils ont fait du bon travail d'après ce que j'ai vu. C'est évident et je suis certain que cela a pris beaucoup de temps.
Face à cette situation très complexe, vous avez parlé de multiples menaces. Quelqu'un d'entre vous a-t-il classé ces menaces en ordre de priorité et envisagé des solutions?
J'ai une autre question, peut-être plus théorique. Avez-vous suffisamment de fonds pour faire ce que l'on vous demande? J'aimerais savoir si vous avez besoin de davantage de moyens pour vous occuper des priorités d'après le 11 septembre.
• 1040
J'aimerais aussi savoir quels sont les organes de coordination
entre vos ministères puisque vos dossiers se recoupent.
J'ai aussi d'autres questions plus précises. Chercheriez-vous à faire adopter ici des lois semblables à la RICO aux États-Unis, pour lutter contre les produits de la criminalité?
Enfin, d'anciens commissaires de la CISR disent que la majorité des demandeurs du statut de réfugié sont en fait des réfugiés économiques et que beaucoup viennent de pays de l'OCDE. Estimez-vous que ce devrait être aux demandeurs de prouver leur identité sauf dans certains cas d'exception déjà définis? Par ailleurs, pourquoi acceptons-nous des demandeurs du statut de réfugié qui viennent de pays de l'OCDE?
J'ai une autre question à laquelle vous pourrez répondre plus tard. Je m'adresse à Mme Nymark. CAE de Toronto vend des simulateurs de vol à Khalifa Airways de l'Algérie. Elle donnait aussi accès à des Boeing 777. Madame Nymark, si vous pouviez communiquer votre réponse au comité, j'aimerais savoir si la vente de simulateurs de vol à des pays étrangers fait l'objet de contrôles. Je vous en serais reconnaissant.
Toujours au sujet des transports, dans la région de Victoria d'où je viens, les traversiers font la liaison entre l'État de Washington et Victoria. Apparemment, il n'y a aucun contrôle des voyageurs qui embarquent au Canada à destination des États-Unis. Je vous serais reconnaissant de vérifier et de nous dire ce qu'il en est.
Le président: D'accord. Merci.
Comme le groupe compte beaucoup de témoins, s'il y a beaucoup de questions—vous en aviez pour vingt minutes—il va falloir que je vous interrompe.
Essayez d'abord de répondre aux questions précises. Commençons par vous, monsieur Allen.
M. Jon Allen: Merci, monsieur le président. Je vais répondre à la question à propos de la coordination et M. Kennedy et Mme Atkinson vont répondre aux questions précises relatives à l'immigration.
Pour ce qui est de la coordination, Marc Lortie, le sous-ministre adjoint pour les Amériques, préside au moins une fois la semaine un comité de sous-ministres adjoints, comprenant tous ceux qui sont ici aujourd'hui et beaucoup d'autres venant de l'Agence canadienne d'inspection des aliments, du BCP et du ministère des Finances. Le but est de s'assurer que chacun sache ce que l'autre fait et les mesures prises avec nos homologues américains pour que nous puissions en informer nos ministres et concerter notre action.
À une échelle plus grande, le comité spécial présidé par le ministre Manley commence également—après avoir consacré beaucoup de temps à la question de la sécurité, en préparant le dispositif de sécurité dans la loi omnibus et en préparant la deuxième loi omnibus—à se pencher sur la frontière.
Il y a donc déjà des efforts de coordination pour éviter les lacunes et s'assurer que l'on n'oublie rien et pour nous permettre de faire front commun lorsque nous traitons avec les Américains.
M. Paul Kennedy: Pour ce qui est des menaces prioritaires, nous avons un plan national d'action sur le crime organisé, par exemple. Le but est que la police repère les problèmes actuels et décèle les nouvelles tendances. Nous examinons la criminalité telle qu'elle existe actuellement, ses principales formes, les tendances... cela se fait chaque année.
Quant aux solutions, un certain nombre progressent, j'espère, au Parlement. Il y a le projet de loi C-24, dont le Sénat est saisi et qui vise le crime organisé; le projet de loi C-11, qui a été mentionné, et qui porte sur l'immigration; le projet de loi S-23 qui porte sur les douanes et certains pouvoirs nécessaires et, évidemment, le projet de loi C-36, le projet de loi antiterrorisme, dont la Chambre est saisie. Voilà certaines mesures que nous avons prises.
• 1045
Il y a toute une série de mécanismes de coordination. J'ai
parlé du Forum sur la criminalité transfrontalière, qui a pour
mission de découvrir ce qui se fait à la base. Le Forum a également
un lien avec ce que l'on appelle le projet North Star, déployé tout
le long de la frontière à l'intention des corps policiers, à qui
l'on accorde maintenant une place à la table. Dites-nous quels sont
les problèmes pour que les politiques que nous élaborons
actuellement correspondent à la réalité des problèmes actuels ou à
venir.
Je préside un comité national de coordination sur la criminalité organisée. Nous allons tenir une réunion le 13 ou le 14 décembre. Elle rassemblera des représentants des provinces, des territoires, de tous les corps policiers fédéraux ainsi que des Affaires étrangères et du Développement international, et nous examinerons ce qui se fait à l'étranger et au pays. Nous coordonnons tous les aspects—les poursuites ainsi que l'élaboration des politiques et l'action policière. Nous relevons d'un groupe de sous-ministres au niveau fédéral, provincial et territorial qui, lui, soutient le travail des ministres.
Comme je l'ai déjà dit, il y a un plan d'action approuvé par les ministres de la Justice aux termes duquel les solliciteurs généraux et les procureurs généraux des provinces et des territoires nous disent: «Voici une série de questions, qu'avez-vous fait?» Nous leur répondons et ils nous donnent nos instructions pour l'année qui suit.
En outre, j'ai la chance de présider un comité directeur de SMA qui se penche sur les questions de sécurité publique. Environ 14 ou 15 ministères et organismes clés en font partie. Des collègues de l'Immigration, des Transports, du SCRS, de la GRC et de la Défense nationale sont tous membres de ce groupe, qui se réunit tous les mois. En fait, nous nous sommes réunis le 11 septembre dernier à 11 heures pour coordonner nos activités. Nous nous sommes rencontrés deux fois par jour, six jours par semaine pendant un certain nombre de semaines, et ensuite une fois par jour. Il existe donc des mécanismes de coordination des activités.
S'agissant des ressources financières, il est évident que nous avons obtenu gain de cause, puisque le gouvernement a jugé bon de nous allouer environ 250 millions de dollars il y a deux ou trois semaines. Il va sans dire que la question des ressources financières est toujours problématique. Dans l'attente du budget, nous sommes pleins d'espoir et attendons de voir si ces fonds vont être renouvelés, étant donné les défis auxquels nous sommes actuellement confrontés. Comme l'a dit M. Allen, le monde n'est certainement plus le même depuis le 11 septembre.
Quant à la dernière question, relative à une loi RICO, nous n'en avons pas au niveau fédéral mais, dans le projet C-24, on prévoit l'élargissement des dispositions relatives aux produits de la criminalité pour qu'elle s'applique à tous les actes criminels. Auparavant, il y avait une liste d'une quarantaine d'infractions. Pour n'importe quelle infraction figurant sur cette liste, si des poursuites sont intentées avec succès, il est possible de faire saisir les produits de la criminalité.
Quant aux provinces, la responsabilité dans ce domaine n'incombe pas uniquement au gouvernement fédéral; elle est partagée entre le fédéral, les provinces et les municipalités. L'immobilier est également un secteur de compétence provinciale. Je sais que l'Ontario et deux autres provinces ont adopté une loi RICO qui autorise la confiscation en vertu du droit civil. C'est également possible pour le droit pénal. Si vous considérez ce que nous avons fait pour le crime organisé, cela équivaudrait à des mesures de type RICO du côté pénal. Ces dispositions sont assez semblables.
Les mesures prises par l'Ontario sont complémentaires puisqu'elles relèvent également du droit civil. De toute évidence, on peut faire valoir que nous pourrions faire la même chose au niveau fédéral. Si vous examinez le projet de loi C-37 sur le terrorisme, il s'y trouve, relativement à la saisie de fonds destinés au financement d'activités terroristes, des dispositions semblables à ce que l'on pourrait appeler une RICO civile, outre une RICO criminelle.
Cela met fin à mes observations.
Mme Joan Atkinson: Je pourrais peut-être répondre à vos questions relatives au système de réfugiés. Auparavant, permettez-moi de souligner le niveau de coordination et de collaboration qui existe sur le plan opérationnel avec nos partenaires du gouvernement fédéral, dans le cas du programme d'immigration. Les agents des douanes sont responsables du premier interrogatoire au point d'entrée. Nous collaborons étroitement avec nos collègues des douanes aux postes frontaliers terrestres.
Nous collaborons également avec la GRC et le SCRS. Les agents de la GRC participent activement à l'application de la Loi sur l'immigration. Ils nous aident pour le filtrage et la vérification des éléments criminels et participent étroitement aux enquêtes aux termes de la Loi sur l'immigration. Le Service canadien du renseignement de sécurité participe activement au contrôle de sécurité de tous les immigrants, réfugiés et visiteurs qui arrivent au Canada.
Au niveau opérationnel, nous travaillons en collaboration très étroite et quotidiennement avec nos homologues au niveau fédéral. Le comité de coordination qui est ici à Ottawa, de concert avec les instances américaines dont nous avons parlé, s'occupe de la coordination policière avec tous nos collègues.
• 1050
Pour ce qui est du système de réfugiés, comme vous le savez,
certaines obligations nous incombent aux termes de la Convention de
Genève: toute personne qui arrive au Canada en demandant une
protection doit être entendue et pouvoir défendre sa cause lors
d'une audition équitable. Notre Charte protège ces personnes et
garantit que l'audience visant à examiner leur demande de réfugié
se fasse selon les voies de droit régulières. Nous avons énoncé nos
obligations internationales et juridiques aux termes de la Charte
dans notre législation sur l'immigration, c'est-à-dire tant dans la
loi actuelle que dans la nouvelle Loi sur l'immigration et la
protection des réfugiés.
Nous pouvons exclure du processus de détermination du statut de réfugié—et nous le faisons—les personnes qui n'ont pas droit à cette protection. Aux termes de la Convention de Genève, les personnes qui n'ont pas droit à une protection sont celles qui ont commis un crime grave de droit commun, les terroristes, les personnes ayant pris part à des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Notre loi nous permet d'exclure du système les personnes qui prennent part à ces activités.
En second lieu, il y a dans notre loi ce qu'on appelle le principe du tiers pays sûr. En vertu de ce principe, grâce à la négociation d'ententes bilatérales avec les autres pays, il nous est possible d'exclure de notre système de détermination du statut de réfugié les personnes qui auraient pu trouver une protection dans un autre pays signataire de la Convention de Genève. Cela est très important pour nous, car dans notre système actuel, près de 40 p. 100 des revendicateurs du statut de réfugié viennent en fait des États-Unis. Ils ont habité ou séjourné aux États-Unis et remontent vers le Nord, où ils revendiquent le statut de réfugié en arrivant à nos postes frontaliers.
Dans le cadre de notre activité relative à une vision de la gestion de la frontière, nous participons à des discussions avec les Américains en vue de partager les responsabilités relatives aux demandeurs d'asile en Amérique du Nord, car nous en recevons dans les deux pays. Nous examinons tous les outils existant dans notre loi relative au tiers pays sûr pour voir s'il est possible de conclure une entente avec les États-Unis en vue de partager la responsabilité des demandeurs d'asile qui sont déjà au Canada et aux États-Unis—pour voir où ils sont arrivés en premier et quel pays devrait traiter leur demande d'asile.
Le président: Merci. Nous allons devoir...
Très rapidement, monsieur Lefebvre, car nous avons déjà dépassé les 10 minutes et qu'il y a de nombreuses autres questions.
M. Denis Lefebvre: Je voudrais simplement ajouter que, comme la première question portait sur les priorités, nous accordons la priorité aux frontières internationales car nous recherchons essentiellement d'éventuels terroristes et les outils ou marchandises qu'ils essaient d'importer. À notre avis, il faut donc concentrer nos efforts aux frontières externes plutôt qu'à la frontière commune.
Le président: Merci beaucoup.
C'est à vous, monsieur Dubé.
[Français]
M. Antoine Dubé (Lévis-et-Chutes-de-la-Chaudière, BQ): Merci, monsieur le président. Je vais poser des questions courtes. Disons que je remplace Mme Lalonde ce matin.
Pour ce qui est de la question frontalière, dans l'étude des mesures dont vous avez parlé ce matin, a-t-on envisagé la possibilité d'inclure le Mexique dans ce cadre vu qu'il fait partie de l'ALENA? C'est ma première question.
J'ai peut-être mal compris, madame Atkinson. Vous avez parlé de certificats émis par le ministre ou par le ministère pour faciliter les choses. J'aimerais que vous me donniez des précisions. Si c'est le ministre, ça m'inquiète un peu, les deux ministres étant celui de l'Immigration et le solliciteur général.
Pour ce qui est de la question de l'extradition, comme certains États américains ont la peine de mort, est-ce qu'on s'est assuré qu'on n'enverrait pas automatiquement quelqu'un...? Vous comprenez l'aspect délicat de la question. J'aimerais qu'on parle de cela.
Ensuite, madame Atkinson, vous avez parlé d'une belle collaboration entre les États-Unis et le Canada depuis le 11 septembre. Est-ce à dire que la collaboration était mauvaise avant le 11 septembre?
Sur la question du transport ferroviaire, vous dites que les événements du 11 septembre peuvent affecter la situation. Je suis cela d'assez près étant donné que je réside dans le secteur de Lévis. On transporte des matières extrêmement dangereuses par train, et il arrive régulièrement des incidents. Est-ce qu'on peut nous assurer que la situation sera meilleure qu'actuellement? Je ne vous demande pas de produire la liste ici, mais j'aimerais bien savoir quelles sont les 800 marchandises dangereuses et aussi quelles sont les plus dangereuses.
Je pense avoir posé assez de questions pour l'instant.
M. Jon Allen: Monsieur le président, je pourrais peut-être répondre en premier à la question sur le Mexique et donner ensuite la parole à mes collègues.
À l'heure actuelle, la frontière canado-américaine est notre première priorité. Le gouvernement tient absolument à en assurer la sécurité et une meilleure gestion.
Pendant l'été, après l'élection du président Fox, il y a eu des entretiens au sujet d'une communauté nord-américaine. Du point de vue du gouvernement, cela ne pourra se réaliser que d'ici un certain nombre d'années.
Les Mexicains nous ont dit qu'ils souhaitent discuter d'un périmètre nord-américain. En toute franchise, ce n'est pas dans les cartes pour le moment. Le gouvernement veut focaliser son attention sur le 49e parallèle et s'occuper de la circulation des marchandises et des personnes loin de ce parallèle, dans la mesure du possible.
Nous sommes tout à fait disposés à discuter de ces questions avec les Mexicains au niveau bilatéral ou trilatéral. Mme Atkinson était à Washington hier où elle a rencontré ses homologues américains et mexicains, mais nous ne pensons pas qu'il puisse y avoir pour le moment de véritable entente trilatérale.
Merci.
Mme Joan Atkinson: Je pourrais peut-être répondre à la question concernant le processus du certificat de sécurité.
Aux termes de l'actuelle Loi sur l'immigration, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et le Solliciteur général peuvent, en se fondant sur certains éléments de preuve, préparer un certificat indiquant qu'une personne donnée présente une menace pour la sécurité nationale du Canada. Ce certificat et les éléments de preuve qui étayent sa délivrance sont soumis à un juge de la Cour fédérale. Ce dernier examine les renseignements à huis clos, en l'absence de la personne à laquelle s'applique le certificat. Si le juge de la Cour fédérale décide, en fonction des éléments de preuve dont il dispose, que le certificat est justifié, cela donne au gouvernement le pouvoir d'arrêter la personne en cause, de la détenir et d'entreprendre les mesures de renvoi à son égard.
Citoyenneté et Immigration, de concert avec la GRC, se charge généralement de l'arrestation. La personne est détenue aux termes de la Loi sur l'immigration et les mesures de renvoi sont entreprises aux termes de la même Loi.
Les renseignements sur lesquels se fonde le certificat proviennent généralement du Service canadien du renseignement de sécurité. Il s'agit généralement de renseignements plutôt confidentiels et c'est pourquoi le processus d'examen de cette information par le juge de la Cour fédérale se déroule à huis clos.
C'est la façon dont les choses se passent pour les personnes qui ne sont pas des résidents permanents. Dans la loi actuelle, un autre processus est prévu pour les résidents permanents, car ces derniers peuvent également faire l'objet d'un certificat de sécurité. Le processus est légèrement différent car il met en cause le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité.
La nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés va modifier le processus de délivrance des certificats de sécurité s'appliquant aux résidents permanents, lesquels seront désormais assujettis aux mêmes mesures que les non-résidents permanents.
Je tiens à signaler que même si la personne visée par le certificat n'a pas connaissance de tous les éléments de preuve présentés au juge de la Cour fédérale, elle obtient un résumé des motifs justifiant la délivrance du certificat. Les personnes visées savent donc pourquoi elles font l'objet de ce certificat.
[Français]
M. Antoine Dubé: Qu'en est-il de la collaboration?
[Traduction]
Mme Joan Atkinson: Si je peux répondre au nom de tous mes collègues présents aujourd'hui, notre collaboration avec les Américains était excellente avant le 11 septembre, et elle continue de l'être. Au lendemain du 11 septembre, le gouvernement américain a remercié à maintes reprises le gouvernement canadien des mesures prises immédiatement après les événements. Notre collaboration avec les États-Unis continue d'être excellente à tous les niveaux du gouvernement, depuis le 11 septembre.
[Français]
M. Antoine Dubé: J'ai une toute petite question.
Le président: Il y aura un autre tour. Gardez cela pour l'autre tour.
La parole est à Mme Jennings.
Mme Marlene Jennings: Merci, monsieur le président.
Merci beaucoup de vos exposés qui m'ont paru très instructifs. J'ai deux questions à poser.
La première s'adresse à Mme Atkinson. Vous avez parlé du tiers pays sûr et de l'initiative entreprise par Immigration Canada pour essayer d'en arriver à une entente avec les États-Unis, puisque 40 p. 100 des revendicateurs du statut de réfugié qui arrivent au Canada viennent des États-Unis. Voici ma première question. Quelle proportion de revendicateurs du statut de réfugié aux États-Unis passe par le Canada? Deuxièmement, pourquoi a-t-on tant attendu pour prendre ce genre d'initiative?
Avant d'entrer sur la scène politique, je connaissais quelques personnes qui travaillaient pour des organismes offrant des services et des programmes à l'intention des immigrants arrivés depuis peu au Québec, et j'ai eu l'occasion de me familiariser avec le programme de réfugiés et la CISR. Je sais qu'au début des années 90, les gens demandaient pourquoi le Canada n'avait pas pour politique de refuser qu'une personne provenant d'un tiers pays revendique le statut de réfugié en arrivant dans notre pays. Pourquoi a-t-on attendu si longtemps? Voilà ma question.
Monsieur Kennedy et monsieur Allen, compte tenu des événements tragiques du 11 septembre et du fait que nous savons que certaines régions du monde connaissent une grave instabilité politique et sont des viviers des groupes terroristes, combien des experts qui sont en mesure de faire une analyse politique pointue de la situation dans les autres pays—déterminer qui sont les terroristes, d'où ils viennent, où ils risquent de mener leurs activités—combien de vos analystes parlent l'urdu ou l'arabe? Cette question s'adresse à vous également, monsieur Kennedy. Je comprends que j'ai perdu la bataille à l'égard du projet de loi C-35 pour ce qui est des pouvoirs accordés à la GRC en vue d'établir des périmètres de sécurité, mais puisque vous étiez ici pour la résolution, nous pouvons encore gagner la guerre.
J'aimerais savoir autre chose: Pendant deux ans, j'ai siégé au Comité mixte permanent de l'examen de la réglementation, où l'on a examiné toute la question de la Loi sur la GRC et de son règlement relatif aux activités des membres dans le domaine politique—vous vous souvenez de M. Gaétan Delisle... Ce comité permanent était d'avis que les dispositions de ce règlement devraient en fait être intégrées à la loi proprement dite, ce à quoi les représentants de la GRC et du ministère du Solliciteur général ont déclaré que vous étiez en train de remanier fondamentalement la loi. Où en êtes-vous dans cet exercice? Cela remonte à deux ans en arrière. Vous avez donné la même réponse pour le projet de loi C-35. J'aimerais savoir où en est la GRC dans ses modifications de sa loi habilitante.
Passons à l'industrie: Lorsque j'étais membre du Comité de l'industrie, ce dernier a examiné un projet de loi qui a été adopté à la Chambre et portait sur la protection des renseignements personnels et du commerce. Parmi les principales dispositions de cette mesure concernant le secteur privé se trouvait celle concernant le chiffrage des données. De toute évidence, au lendemain des événements tragiques du 11 septembre, il faut mettre en place des mesures de sécurité accrues, tant dans le secteur privé que public—recourir davantage au chiffrage—grâce à cette nouvelle technologie de l'information, compte tenu de la société dans laquelle nous vivons.
Grâce à cette loi, quelle place le Canada occupe-t-il par rapport aux autres pays pour ce qui est de garantir la protection des renseignements du secteur privé, qu'il s'agisse de données d'ordre commercial ou de lutter contre l'espionnage industriel, et, pour le secteur public, de renseignements personnels ou politiques de nature délicate? Lors de son adoption, cette loi était à la pointe du progrès et les responsables d'Industrie Canada avaient expliqué, entre autres choses, au Comité de l'industrie que ces mesures allaient nous donner une grande avance sur nos concurrents. Comment cette mesure a-t-elle aidé, le cas échéant, le gouvernement et le secteur privé à faire face aux risques accrus pour la sécurité au lendemain du 11 septembre?
Je pense que c'est tout.
Le président: Encore heureux, car les questions ont duré cinq minutes.
Mme Joan Atkinson: Je vais commencer par la question sur le tiers pays sûr. Combien de réfugiés passent du Canada aux États-Unis? En un mot, je ne connais pas la réponse et je ne suis pas certaine que les Américains la connaissent. Leur système est assez différent du nôtre. Ils reçoivent des demandes de la part de certaines personnes à leur arrivée, mais bon nombre des revendications du statut de réfugié viennent de l'intérieur, après que les personnes aient été appréhendées par le INS, le Service d'immigration et de naturalisation des États-Unis. Le problème, c'est que les États-Unis ont, comme nous, des personnes qui n'ont pas de papiers d'identité et dont on ne connaît pas vraiment le pays d'origine. En un mot, je ne peux pas répondre à votre question, mais je ne pense pas que les Américains sachent la réponse non plus.
Pourquoi nous avons attendu si longtemps? Comme vous le savez peut-être, nous avons entrepris des pourparlers et des négociations avec les Américains vers le milieu des années 90. En 1994-1995, nous avons commencé à négocier un accord sur le tiers pays sûr. Ces négociations ont duré deux ans et, à la fin, nous n'avons pas pu en arriver à une entente avec les États-Unis et avons décidé de laisser tomber. À cette époque, les Américains avaient inclus toutes sortes de réserves dans l'accord; il y avait un grand nombre d'exceptions—tout cela était très complexe. Il nous a semblé—à la toute dernière minute, en fait, juste avant la signature de l'accord—que cela ne nous permettrait pas d'atteindre nos objectifs. Les deux parties se sont entendues, à l'amiable, je dois l'avouer, pour dire qu'il n'était pas possible pour l'instant de conclure une entente pratique, et nous avons décidé de laisser tomber l'affaire.
Qu'est-ce qui nous permet de croire aujourd'hui que nous pourrons conclure une entente avec les Américains? Le monde a changé depuis le 11 septembre. Nos objectifs, dans le cadre de toutes les initiatives frontalières prises de concert avec les Américains, sont d'examiner nos responsabilités conjointes à l'égard des gens qui pénètrent dans nos espaces respectifs. Nos deux pays connaissent des problèmes de migrants illégaux, de gens qui revendiquent le statut de réfugié et n'ont pas vraiment besoin de protection. Nos deux pays doivent pouvoir régler ce problème de façon plus coordonnée. Nous pensons que le moment est opportun pour reprendre ces discussions avec les Américains et nous sommes assez optimistes quant à l'issue des négociations.
Mme Marlene Jennings: Si les États-Unis ne savent pas combien de revendicateurs du statut de réfugié viennent du Canada, je ne vois aucune raison pour qu'ils adoptent une plus grande ouverture d'esprit à l'égard du principe du tiers pays sûr qu'en 1994-1995. C'est la première chose.
En second lieu, la question du tiers pays sûr est distincte de celle des faux papiers ou de l'absence de papiers, car les gens munis de faux papiers ou sans papiers peuvent en fait être de véritables réfugiés au sens de la Convention. Le problème, c'est que s'ils se trouvaient dans un pays signataire de la Convention, il existe un processus reconnu dans les pays démocratiques comme étant conforme aux principes démocratiques, et il y a donc lieu de se demander pourquoi ces gens n'ont pas présenté leur demande dans ce pays-là au lieu de passer dans un autre pays.
Je vous demande instamment, lorsque vous en discutez, de ne pas soulever la question des faux papiers ou de l'absence de papiers, mais je vous remercie de ce renseignement. À moins que nous n'ayons d'autres questions à utiliser comme monnaie d'échange lors de nos discussions sur les questions transfrontalières avec les États-Unis pour les obliger à conclure une entente avec nous sur la question du tiers pays sûr, je crains que rien ne les incite à le faire.
Mme Joan Atkinson: Monsieur le président, puis-je apporter une précision au sujet des papiers?
Le président: Oui, brièvement, mais je tiens à dire à Mme Jennings que déjà huit minutes de son temps de parole sont écoulées, et que si elle souhaite obtenir d'autres réponses à ses autres questions...
Mme Marlene Jennings: M. Kennedy va être très bref, comme il l'a fait la dernière fois, ce qui n'est pas vraiment une réponse...
Mme Joan Atkinson: J'aimerais seulement apporter une précision sur la question des papiers.
Vous avez tout à fait raison: les véritables réfugiés n'ont pas de papiers d'identité. Ce que je voulais dire, et je n'ai peut-être pas été assez claire, c'est qu'il faut savoir qu'une personne a déjà résidé ou séjourné dans un tiers pays sûr. Si des gens se présentent à la frontière et revendiquent le statut de réfugié, les choses sont claires. Elles viennent des États-Unis, nous savons qu'elles viennent de ce pays. Ou elles se présentent à la frontière en provenance du Canada; c'est une chose que l'on sait. Si ces personnes présentent leur demande depuis l'intérieur et n'ont aucun papier, on ne sait pas d'où elles viennent. On ne sait pas si elles ont passé du temps au Canada et aux États-Unis, ce qui complique les choses.
M. Paul Kennedy: Je vais essayer de vous fournir une réponse à la fois succincte et exhaustive.
• 1110
Je voulais dire simplement que, dans mon exposé, j'ai parlé du
groupe de travail sur le renseignement financier de la GRC, et de
son éventuelle saisie de 2 millions de dollars, je crois que c'est
le chiffre que j'ai cité. Les journalistes m'ont dit qu'ils avaient
entendu parler plutôt d'un montant de 300 000 ou 400 000 $. Je
tiens simplement à dire que j'essaie de vérifier ce montant car je
ne veux pas induire le comité en erreur. Si c'est bien 300 000 $,
je vous le signalerai. Si je peux rétablir les faits avant mon
départ, c'est très bien, mais l'important, c'est que nous
échangeons des renseignements et que les policiers procèdent à des
saisies. C'est ce que j'ai voulu dire. Toutefois, je ne veux pas
citer de chiffre erroné et j'apporterai une correction si besoin
est.
Le président: En toute franchise, un montant de 300 000 ou 400 000 $ me paraît bien minime...
M. Paul Kennedy: C'était au sujet...
Le président: ... lorsqu'on sait ce que représente le trafic de drogues.
M. Paul Kennedy: C'est uniquement par rapport à celles qui se trouvaient sur la liste des Nations Unies, et il s'agissait en grande partie d'organisations internationales qui n'ont peut-être pas de comptes au Canada.
Quant aux questions qui ont été posées, il y avait une mention précise du projet de loi C-35, pour indiquer simplement... J'espère que le comité comprend que je suis ici pour lui venir en aide. Je n'ai rien à perdre ni à gagner. Ce n'est pas mon objectif. Je n'ai aucun intérêt en jeu.
Pour ce qui est de la refonte de la Loi sur la GRC et des progrès réalisés jusqu'ici, je suis au courant du problème dont a parlé la députée. Je ne peux pas vous répondre pour le moment. Je ne m'occupe pas de cette question. Malheureusement, je me penche actuellement sur certaines questions assez urgentes. Ces modifications sont peut-être en cours, mais je ne peux pas vous dire où elles en sont.
S'agissant du vivier d'éléments terroristes et de ce genre de choses, le gouvernement canadien et ses organismes ont un grand nombre de contacts—ce qui se comprend étant donné la réputation à l'échelle mondiale du Canada—avec les autres pays, avec lesquels il y a un échange de renseignements et d'autres activités. Nous sommes parfaitement informés et nous savons ce qui se passe. Il existe des groupes interministériels au Bureau du conseil privé, le CCR—le comité consultatif du renseignement—dont font partie des représentants de la GRC, du SCRS, du CST, du MDN et des Affaires étrangères, lesquels mettent en commun leurs connaissances et leur expérience. Nous suivons la situation.
En ce qui a trait aux compétences linguistiques, elles sont nombreuses. C'est dû à la nature du Canada, qui est un pays multiculturel très divers. C'est tout à fait surprenant. Comme vous le savez sans doute, Toronto est la ville la plus hétérogène du monde et Vancouver, j'en suis certain, la suit de près. Cela a déterminé l'ensemble de compétences exigées de la part des policiers et des agents du renseignement. Les cibles d'aujourd'hui ne sont peut-être pas celles de demain. Cela peut varier. Je pense toutefois que le service du renseignement a déposé un rapport—il s'agissait, je pense, du dernier rapport annuel du SCRS qui a été déposé au Parlement—où il indiquait que les groupes extrémistes sunnites posaient un sérieux problème. Il s'occupe donc de ce dossier.
Je ne peux pas vous dire combien d'analystes parlent arabe, mais nous avons cette capacité. En outre, lorsque des événements surgissent, il y a un échange de linguistes entre le Centre de la sécurité des communications, la Défense nationale, le MAECI et le SCRS, en fonction du volume du trafic et de la nature des problèmes. Nous avons donc les ressources voulues. Nous pourrions toujours les accroître, mais comme je l'ai dit, cela varie. Je suis certain qu'à une époque, le dossier russe était plus important qu'aujourd'hui. Les compétences linguistiques varient et ces ressources sont modifiées en fonction des priorités de l'heure, ce qui est utile.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Martin, vous avez la parole.
M. Keith Martin: Merci.
Monsieur Kennedy, si, comme vous l'avez dit, la majorité des armes utilisées pour commettre des actes criminels au Canada proviennent en contrebande des États-Unis, votre ministère prend-il des mesures pour imposer des peines consécutives? Je ne suis pas avocat, comme le prouveront de façon flagrante mes questions, mais va-t-on prendre des mesures pour imposer des peines consécutives aux personnes qui font de la contrebande d'armes au Canada et pour interdire la négociation de plaidoyer pour les auteurs de telles infractions?
Ma deuxième question s'adresse à Mme Atkinson. En renforçant notre périmètre de sécurité, votre ministère prend-il des mesures pour interdire l'entrée au Canada de personnes qui ont habité dans un pays de l'OCDE avant de revendiquer le statut de réfugié? Est-ce possible, dans le cadre de la Convention de Genève?
Cette question s'adresse à M. Allen. Étant donné que nous voulons en priorité mettre en place ce que j'appelle un «système de filtrage à toute épreuve», où nous permettons la libre circulation des marchandises et des services tout en interdisant l'accès à des personnes ou marchandises indésirables, pourquoi n'utilisons-nous pas simplement les passeports comme pièces d'identité pour permettre les va-et-vient de personnes en toute liberté? Il faudrait peut-être modifier complètement notre passeport pour qu'on ne puisse plus le falsifier.
• 1115
Ma dernière question porte sur la sécurité de nos sites
nucléaires. Que fait-on pour protéger les sites nucléaires du
Canada contre une éventuelle attaque terroriste?
Je vous remercie.
M. Paul Kennedy: Je peux peut-être répondre à la question relative au trafic d'armes et aux autres que vous avez posées, en utilisant de nombreux termes juridiques, pour un profane.
Comme vous le savez, cela représente la principale responsabilité du ministre de la Justice et Procureur général du Canada. La décision d'imposer ou non une peine consécutive dépend généralement des faits; autrement dit, si les infractions sont distinctes, elles font l'objet de peines d'emprisonnement distinctes. En temps normal, l'utilisation d'une arme pour commettre une infraction constitue une circonstance aggravante et est assujettie à une peine plus sévère. Si ma mémoire est bonne, je crois qu'il existe actuellement dans le Code certaines dispositions qui prévoient des peines minimums lorsqu'une arme est utilisée pour certaines infractions. Cette disposition existe donc.
Il y a des dispositions, dans les projets de loi C-24 et C-37 par exemple, qui prévoient précisément une situation de fait susceptible d'entraîner diverses infractions, et qui renferment une exigence précise quant à une peine consécutive. Si on se livre à une activité criminelle donnée, que l'on est membre du crime organisé et accusé d'une infraction liée au crime organisé, cette dernière s'ajoute à la première, même si les deux infractions ont eu lieu en même temps. C'est un peu la même chose pour les dispositions visant le terrorisme. Il y a donc actuellement dans le Code certaines dispositions pertinentes.
En ce qui a trait à l'étude en cours avec les Américains, le problème est dû en grande partie au manque d'énergie dont font preuve les États-Unis pour faire appliquer certaines de leurs lois; lorsque les lois seront appliquées de façon plus sévère, on assistera à une diminution de la contrebande d'armes au Canada. Lorsque nous envisageons des mesures à prendre, nous misons sur la réciprocité. Nous faisons notre part au Canada, dans l'espoir que, grâce à ce dialogue, les États-Unis feront la leur, car c'est ce qui nous pose des problèmes chez nous.
Pour ce qui est de la négociation de plaidoyer, c'est malheureusement comme cela que le système fonctionne en partie. Les procureurs ont toute discrétion pour déterminer la bonne solution, discrétion qu'ils exercent, espérons-le, de façon mûre et responsable. Mais c'est aussi quelque chose que ferait le procureur général provincial, si cela relève du Code criminel, et c'est donc lui qui s'en occuperait dans son secteur de responsabilité. J'espère que cette étude qui va paraître nous expliquera si nous devons en faire plus, et dans l'affirmative, comment.
Mme Joan Atkinson: Peut-être pourrais-je répondre à votre question sur le système des réfugiés, mais avant cela, j'aimerais aussi préciser, à propos des personnes qui passent des armes à feu en contrebande à la frontière, qu'il y a maintenant dans la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés un nouvel outil dont je vous ai parlé qui nous donne le pouvoir d'arrêter à la frontière et d'expulser du Canada quelqu'un qui commet une infraction en franchissant la frontière canado-américaine. C'est donc un instrument supplémentaire qui nous aidera si nous prenons quelqu'un en train de franchir la frontière avec des armes à feu. Nous pourrons exclure ces individus du Canada grâce à cette nouvelle disposition de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.
La Convention de Genève nous permet-elle d'avoir un traitement différent pour les demandeurs de statut en provenant de pays de l'OCDE? Oui. Plusieurs pays disposent dans leur législation d'outils tels que «la revendication manifestement non fondée», «le critère du minimum de fondement», ou dans certains pays «la disposition concernant le pays d'origine sûr». Dans l'ensemble, ces dispositions permettent aux décideurs de traiter différemment ces revendicateurs; par exemple, ils devront fournir un niveau de preuve plus élevé ou ils devront surmonter une présomption réfutable s'ils sont vraiment des réfugiés. Par conséquent, divers pays ont pris divers types de mesures face à ces questions. Nous n'avons toujours pas de disposition de ce genre dans la loi actuelle ou dans la nouvelle loi.
La raison pour laquelle nous n'avons pas suivi cette voie est que cela rajoute une étape supplémentaire dans le processus. Il faut toujours traiter avec l'individu. Il faut lui accorder une audience quelconque et la Cour fédérale peut revoir la décision. Dans notre système, bien que ce soit possible et que la Convention de Genève nous permette de le faire, nous avons pensé que cela représenterait une étape supplémentaire dans la procédure qui ralentirait le système au lieu de le rendre plus fluide.
Le président: Je vais devoir passer à la personne suivante.
Madame Augustine.
Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): Je vais vous aider à rattraper le temps perdu, monsieur le président. J'ai trois questions.
• 1120
J'ai été heureuse de vous entendre parler de cette excellente
collaboration avec vos homologues américains, mais j'aimerais vous
parler de cette collaboration ou de ce mode de communication dans
l'optique de la transparence, de la reddition de comptes
démocratique, de toutes ces choses sur lesquelles nos électeurs
s'interrogent. Comment communiquons-nous et établissons-nous des
partenariats avec le secteur des affaires, les groupes de la
société civile, etc., dans tous les domaines dont vous avez parlé?
Depuis le 11 septembre, de multiples craintes sont apparues. Les
gens à la base ont parfois l'impression qu'on va profiter de cette
occasion pour réaliser certaines choses qu'on n'aurait peut-être
pas réalisées aussi rapidement ou qu'on n'aurait peut-être pas été
prêts à réaliser autrement.
Ma deuxième question découle de la première et concerne le secteur de l'immigration, la réunion des familles, par exemple, et les efforts que l'on fait pour faire venir ici des personnes qui sont actuellement dans des endroits placés sous surveillance, faute d'un terme plus approprié. Que faisons-nous pour faciliter cela? Est-ce qu'on a ajouté du personnel? Que faisons-nous pour que les dossiers de ces personnes soient traités suivant la procédure normale et ne soient pas bloqués dans la foulée du 11 septembre?
Ma troisième question concernait la réaction conjointe du Canada et des États-Unis. Vous avez parlé de programmes et de repères conjoints. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur ces repères que nous pouvons avoir en matière de collaboration avec les Américains?
M. Jon Allen: Disons très brièvement qu'en matière de partenariat, le gouvernement a tendu la main aux entreprises et aux provinces qui s'inquiétaient toutes des retombées du 11 septembre sur la population et les entreprises et s'interrogeaient sur leur aptitude à faire face à la menace terroriste.
Notre comité a rencontré des hauts fonctionnaires provinciaux il y a une quinzaine de jours. Nous leur avons remis des documents et des notes de discussion pour qu'ils puissent expliquer les problèmes à leurs concitoyens mais aussi collaborer avec leurs homologues américains, notamment les gouverneurs et les législateurs des États, pour essayer de faire comprendre aux Américains, avec lesquels ils sont en contact quotidien, la situation du Canada.
Comme je l'ai dit dans mes remarques d'ouverture, nous avons rencontré plusieurs fois les représentants des entreprises canadiennes, la coalition frontalière, la Chambre de commerce du Canada et des représentants de PME pour écouter leurs doléances et veiller à ce que le gouvernement réponde à ces préoccupations de façon fidèle et complète.
Je vais peut-être laisser Joan poursuivre.
Mme Joan Atkinson: Dans le cas de la réunion de familles en provenance de pays qui font l'objet d'une surveillance accrue depuis le 11 septembre, nous avons maintenant une très solide procédure de présélection des immigrants potentiels. Nous n'avons pas modifié cette procédure. Disons que nous avons rafraîchi les renseignements sur lesquels nous nous appuyons. Nous nous efforçons constamment de mettre les renseignements les plus à jour à la disposition de nos décideurs. Nous n'avons pas fondamentalement modifié la façon dont nous présélectionnons les candidats à l'immigration au Canada.
La réunion des conjoints et des enfants à charge demeure la première priorité de notre sélection des immigrants à l'étranger. Cela n'a pas changé depuis le 11 septembre. Nous allons continuer à nous efforcer de traiter 80 p. 100 des dossiers des conjoints et enfants à charge dans un délai de six mois. Cette norme n'a pas changé. Je pense que nous continuons assez bien à atteindre cet objectif.
Nous sommes aussi en train de remanier la façon dont nous administrons le programme de la catégorie de la famille pour le rationaliser et nous permettre de traiter plus rapidement ces cas. Nous le faisons en regroupant la procédure de demande et la procédure de parrainage ici au Canada au Centre de traitement des cas à Mississauga pour pouvoir disposer en même temps de toutes les informations. Grâce à cela, nous espérons pouvoir rendre plus rapidement les décisions sur les immigrants relevant de la catégorie de la famille. Nous continuons cela en dépit de ce qui s'est passé le 11 septembre.
M. Denis Lefebvre: J'aurais deux remarques. Concernant les rencontres avec des hommes d'affaires, etc., nous avons eu une succession ininterrompue de visites dans les couloirs commerciaux, de rencontres avec le ministre et de rencontres avec des politiciens et des hommes d'affaires locaux. Nous avons eu aussi des réunions à Ottawa avec des hommes d'affaires et aussi, pas plus tard qu'hier, avec des maires de villes frontalières. Quand je parle de points de repère, je veux parler d'un lien direct que nous envisageons à la frontière externe et de la gestion de notre frontière partagée. Ces points de repère, cela signifie que nous nous efforçons d'avoir une reconnaissance mutuelle de nos pratiques dans les aéroports et les ports maritimes.
Nous avons déjà commencé à mettre sur pied des équipes communes pour l'immigration et les douanes. Nous avons visité des aéroports, par exemple, aux États-Unis et au Canada pour comparer nos pratiques de contrôle des passagers, nos procédures et notre formation et adopter des procédures exemplaires. Nous voulons aussi nous assurer que nos inspecteurs de première ligne au Canada comme aux États-Unis disposent de tous les renseignements nécessaires pour intercepter les personnes et les biens qui seraient susceptibles de constituer des menaces à la frontière externe.
Voilà donc ce que nous faisons en nous donnant mutuellement la satisfaction de savoir que ceux d'en face pourront intercepter à la frontière les personnes ou les biens que nous souhaiterions intercepter nous-mêmes. Ce n'est pas un programme conjoint car nous nous réservons le droit d'accepter au Canada les personnes qui, à notre avis, présentent un faible risque, et il en est de même pour eux, mais nous avons une reconnaissance mutuelle de nos pratiques.
Le président: Merci.
Monsieur Dubé.
[Français]
M. Antoine Dubé: Tout à l'heure, j'ai posé six questions et on a manqué de temps pour y répondre. Il y en a une qui est restée en suspens: c'est la question de l'extradition.
Il y a 15 jours, la France a conclu une entente avec les États-Unis. En France, on ne permet pas la peine de mort, et les États-Unis ont accepté ce principe. J'aimerais qu'on me réponde là-dessus.
Deuxièmement, sur la question des personnes à bas risque, j'aimerais qu'on me définisse ce qu'est une personne à bas risque. Je vais commencer par mon cas concret à moi. Est-ce qu'un député du Bloc québécois comme moi est une personne à bas risque?
M. Denis Lefebvre: Pas nécessairement. Permettez-moi de répondre brièvement à la dernière question.
Habituellement, dans l'évaluation du risque, il n'y a pas un seul facteur. C'est un ensemble de facteurs qui peuvent indiquer qu'il y a un risque. Dans le cas de la contrebande de drogues, par exemple, cela peut être le pays d'origine. On sait qu'à tel moment dans le temps, tel pays d'origine est un exportateur de drogues, mais il peut y avoir beaucoup d'autres indicateurs. Les forces policières ou les douanes des différents pays, qui ont appris par l'expérience, indiquent qu'il y a un risque plus ou moins élevé. C'est souvent une combinaison de ces facteurs qui fait qu'on estime qu'une personne, de la marchandise ou un conteneur est à risque ou non.
M. Antoine Dubé: Et sur la question de l'extradition?
[Traduction]
M. Paul Kennedy: Peut-être pourrais-je essayer de répondre. C'est en fait une question de justice car, comme vous le savez, c'est le ministre de la Justice qui est responsable de la Loi sur l'extradition. Je pense que dans votre question vous faites allusion à la décision de la Cour suprême dans l'affaire Burns et Rafay, où la Cour suprême a dit que si une personne risquait la peine de mort dans un autre pays, le ministre de la Justice devrait obtenir la garantie de ce pays que l'individu ne serait pas condamné à mort avant de le renvoyer. Je pense que c'est à cela que vous faites allusion. Toutefois, cette décision comporte un critère lié aux faits eux-mêmes de sorte que dans certains cas, il est possible que le tribunal n'ait pas d'objection à ce que l'individu soit renvoyé dans un pays où il risque la peine de mort. Cela dépend de la nature du crime dont l'individu est accusé.
• 1130
Néanmoins, je pense qu'on peut dire en gros que le Canada doit
chercher à obtenir ce genre d'assurance de l'autre pays. Autrement
dit, l'individu risquerait probablement, en vertu des lois de ce
pays comme celles du Canada, une condamnation à perpétuité. Je
crois que les individus en question ont été renvoyés aux États-Unis. Je ne
sais pas si leur procès a déjà eu lieu, mais s'ils sont
condamnés, ils risquent la perpétuité.
[Français]
M. Antoine Dubé: Sur un autre sujet, on sait que les ralentissements aux frontières sont surtout attribuables aux Américains. Qu'est-ce que les Américains nous reprochent pour nous ralentir comme ça? Que reprochent-ils au gouvernement canadien?
M. Denis Lefebvre: À la suite des événements du 11 septembre, je pense qu'il était tout à fait légitime pour les Américains de se sentir la cible par excellence de tout terroriste ou de toute personne qui aurait eu l'intention de commettre des actes de terrorisme. Je pense que c'était légitime étant donné les informations qu'ils avaient. Certaines informations pouvaient leur donner à penser que certaines personnes voulaient traverser la frontière ou transporter des marchandises. Ils ont donc porté une attention toute particulière à toutes leurs frontières.
Les efforts que nous déployons ont pour but d'établir un climat de confiance pour qu'à long terme, les Américains puissent avoir confiance. Souvent, ils ne savent pas ce que nous faisons. Il y a donc de l'information à échanger. Il y a aussi des pratiques à modifier pour qu'à long terme, ils sachent que le Canada n'est pas une menace pour leur pays.
M. Antoine Dubé: Ce n'est pas le cas actuellement?
M. Denis Lefebvre: Je pense qu'il faut échanger de l'information. Depuis le 11 septembre, il y a eu beaucoup d'information, et la même chose s'était passée auparavant. Après l'incident Ressam, nous avons tenu de multiples réunions à tous les niveaux pour leur faire savoir ce que nous faisions. Ce n'est pas seulement une question de faits; c'est aussi une question de perception. Il faut s'assurer qu'ils sont bien au courant des faits. Cela va nous aider pour l'avenir.
Le président: Merci.
Docteur Patry.
M. Bernard Patry: Merci, monsieur le président.
Madame Atkinson, concernant la collaboration entre Citoyenneté et Immigration Canada et le SINEU, j'aimerais que vous élaboriez sur la notion de convergence des politiques de visas du Canada et des États-Unis. De quel côté cette politique de convergence va-t-elle se faire? Est-ce que ce sont les États-Unis qui vont prendre note de ce que le Canada fait ou si ce sera l'inverse?
Selon mon expérience personnelle de député, avant le 11 septembre, il était beaucoup plus facile d'obtenir un visa pour entrer aux États-Unis que pour entrer au Canada. Très souvent, des gens allaient aux États-Unis et, de New York, ils appelaient les députés pour avoir des permis d'entrée pour des raisons humanitaires et toutes sortes de trucs comme celui-là. Cependant, depuis le 11 septembre, il est très difficile d'obtenir des visas pour le Canada, même pour des raisons humanitaires. Je ne peux pas vous parler des États-Unis, mais j'aimerais savoir de quelle façon cette convergence va se faire.
Monsieur Lefebvre, vous parlez d'étendre votre projet NEXUS à d'autres postes frontaliers et possiblement aux aéroports. Là où ça existe, c'est-à-dire entre Sarnia et Port Huron, et aussi à la frontière du Missouri, quel est le pourcentage des utilisateurs par rapport au flot de véhicules qui passent à cet endroit? Ce projet tel qu'il existe actuellement répond-il aux attentes?
M. Sulzenko nous a dit que depuis 10 ans, les échanges commerciaux avaient triplé, passant à 1,9 milliard de dollars. Dans les cinq dernières années, est-ce que cela a doublé? Quelle est la projection pour les cinq prochaines années sans tenir compte du 11 septembre? Est-ce que cela va quand même augmenter?
Merci.
[Traduction]
Mme Joan Atkinson: Peut-être pourrais-je commencer sur la question de la convergence des visas.
Nous examinons deux choses avec les Américains. Il y a tout d'abord la procédure de délivrance des visas dans les deux pays, et ensuite la question des pays pour lesquels nous émettons des visas.
En matière de procédure, je peux vous garantir que nous examinons de très près la procédure d'émission des visas américains. Dans le système américain, c'est le Département d'État à l'étranger qui émet les visas, et ce sont les agents du service extérieur du Département d'État qui sont responsables des visas à l'étranger, et non ceux du SIN. En revanche, le système canadien est un système intégré. Ce sont les agents du service extérieur de CIC à l'étranger qui émettent les visas.
• 1135
Les comités du Sénat et de la Chambre ont entendu de
nombreuses interventions et témoignages sur la procédure d'émission
des visas aux États-Unis. Les Américains veulent manifestement
resserrer leur procédure et notamment veiller à ce qu'il y ait un
meilleur échange d'informations au sein de leurs divers organismes.
Lors de nos discussions, nous avons examiné nos procédures mutuelles et notre objectif a été de nous échanger mutuellement le même type d'information. Par exemple, si les Américains ont affaire à un individu qui représente une menace et que cet individu traverse la rue pour aller faire une demande à l'ambassade canadienne, nous allons pouvoir avoir accès à cette information dans de nombreuses capitales. Nous allons avoir le même genre de renseignement quand nous allons traiter avec les mêmes individus.
La deuxième partie du processus concerne les pays pour lesquels on exige un visa. Dans bien des cas, les pays pour lesquels nous exigeons un visa sont les mêmes, mais il y a des différences. Nous revoyons actuellement notre liste de visas et les Américains examinent aussi leur liste actuelle d'exonération de visa, et nous cherchons à voir quels sont les problèmes de contrôle et de sécurité qui se posent pour chaque pays. Cela ne veut pas dire que nous finirons par avoir exactement la même liste, mais simplement que nous aurons probablement des listes convergentes, plus rapprochées. Mais naturellement, nous conserverons le droit de décider nous-mêmes à quels pays nous voulons imposer des visas, et les Américains feront la même chose de leur côté.
[Français]
M. Denis Lefebvre: NEXUS existe seulement depuis novembre 2000 et est, à notre avis, très prometteur. C'est très récent. NEXUS compte environ 4 500 membres. C'est difficile de vous donner un pourcentage parce que ces gens-là traversent fréquemment la frontière. On ne sait pas à quelle fréquence ils la traversent.
Il s'agit d'un projet-pilote à la frontière entre Sarnia et Port Huron. La technologie utilisée du côté canadien diffère de celle utilisée du côté américain. Du côté canadien, on utilise présentement une carte avec la photo de la personne et un lecteur de plaque, alors que du côté américain, on a une carte à puce qui permet d'afficher à l'écran du douanier la photo de la personne qui détient cette carte.
Avant d'étendre ce projet à d'autres frontières, nous allons évaluer laquelle des deux technologies est la meilleure. Nous sommes confiants que c'est la voie de l'avenir. Voilà pourquoi nous voulons en arriver le plus rapidement possible à une entente quant aux modalités de NEXUS avec les services canadiens et américains de l'immigration et l'étendre à tous les postes frontaliers qui sont très occupés.
M. Bernard Patry: Qui sont les utilisateurs de cela?
M. Denis Lefebvre: Les camionneurs utilisent cela. Ça fait partie de notre autocotisation des douanes. Cela permet aux importateurs à bas risque d'avoir accès à une voie qui est réservée à leurs camionneurs afin que ceux-ci passent plus rapidement aux douanes. Pour que cela se fasse, on exige que les chauffeurs de ces camions aient été approuvés au préalable par les douaniers. Pour tous les genres de commerce, s'il a été reconnu au préalable que le chauffeur, l'importateur et le transporteur présentent peu de risque, ceux-ci peuvent passer très rapidement aux douanes.
Une voix: Merci.
M. Andreï Sulzenko: Je veux ajouter un bref commentaire. À cause de la très forte croissance économique aux États-Unis, les exportations ont beaucoup augmenté au cours des cinq dernières années. Évidemment, il est difficile de prévoir comment ce sera à l'avenir, mais je doute que ce taux de croissance puisse se maintenir indéfiniment. Je crois que ça va diminuer.
M. Bernard Patry: Je vous remercie.
[Traduction]
Le président: Peut-être pourrais-je poser une ou deux questions et passer ensuite à Mme Jennings.
On a dit dans la presse après la rencontre de M. Cauchon et de M. O'Neill que le Canada et les États-Unis allaient nommer des coordonnateurs des activités frontalières. Pourriez-vous nous dire quand ces coordonnateurs seront nommés et quel sera leur mandat. C'est ma première question.
• 1140
M. Allen n'est pas là, mais peut-être quelqu'un d'autre
pourrait-il me répondre. On a cité le chiffre habituel de 1,9
milliard de dollars pour les échanges commerciaux à la frontière.
Quelle est l'exactitude statistique de ce chiffre? On parle de
1,9 milliard de dollars, mais s'agit-il strictement de denrées?
Savons-nous exactement quelle est l'importance du commerce des
services, qui compte tout autant dans l'économie contemporaine? Les
services sont devenus plus importants que les biens dans l'économie
interne, mais j'ai l'impression que les statistiques ne sont pas
très bavardes sur ce commerce des services.
Nous sommes allés récemment au Qatar pour les négociations et on nous a dit, par exemple, qu'un des problèmes venait de ce qu'une grande partie de nos exportations passe par les États-Unis et que, quand nous disons que nous avons x milliard de dollars d'exportation vers les États-Unis, ce sont en fait des exportations qui transitent simplement par les États-Unis. Avez-vous une idée concrète de cela?
Pour ce qui est des réfugiés, on parle tout le temps des demandes présentées par des réfugiés au Canada. Ce qui me dérange, c'est qu'il y a de très nombreux réfugiés légitimes qui présentent des demandes à l'étranger. Or, dans leur cas, cela prend des mois et des mois. Pendant ce temps-là, les gens qui sont ici trouvent du travail et... Est-ce qu'on essaie de rationaliser la procédure à l'étranger? Je trouve qu'il y a une apparence d'injustice, car on a l'impression que les gens qui court-circuitent la queue et arrivent directement au Canada bénéficient d'un traitement préférentiel alors que ceux qui font une demande normale à l'étranger ne sont pas aussi avantagés. Si c'est le cas, c'est une incitation à resquiller. Alors que faisons-nous?
Ma dernière question, monsieur Lefebvre, concerne toute cette idée de remonter plus loin et de procéder aux formalités de sécurité à l'avance. Évidemment, c'est quelque chose qui se négocie avec les États-Unis, mais nous allons avoir des attitudes très différentes selon les infractions criminelles et ce genre de choses. Qu'allez-vous faire des gens qui ont par exemple été condamnés pour possession de marijuana, ce qui aux États-Unis est considéré comme une infraction méritant les pires châtiments, alors qu'au Canada nous allons plutôt dans la direction inverse? En revanche, comme quelqu'un le faisait remarquer, là-bas, si vous êtes accusé d'une infraction liée à une arme à feu, on va vous dire: «Oh, vous savez, tout le monde a une arme là-bas», alors que pour nous c'est quelque chose de très grave. Comment allons-nous régler ces problèmes de différences de valeurs qui sont très importants si nous tenons à préserver nos propres valeurs? Est-ce que ce sont les Américains qui vont nous imposer les leurs? Vous avez le droit de tirer sur n'importe qui avec une arme à feu, mais vous n'avez pas le droit de fumer une cigarette de marijuana. Est-ce que c'est comme cela que les normes vont s'appliquer?
Ça sera la même chose pour le terrorisme. Dans quelle mesure envisage-t-on d'échanger les informations sur le terrorisme? Est-ce que tous les Cubains vont être des terroristes parce que les Américains sont complètement paranoïaques sur la question de Cuba alors que nous ne le sommes pas? Comment allons-nous surmonter ces divergences?
J'imagine, madame Atkinson, que, comme vous nous disiez tout à l'heure que nous avions rompu les négociations, c'était à cause de ces problèmes éminemment politiques et éminemment complexes. Vous dites qu'on pourrait maintenant les reprendre, mais j'ai plutôt l'impression que les problèmes sont encore plus complexes et délicats qu'avant, et non le contraire. Il est peut-être plus impératif sur le plan politique de trouver une solution, mais je ne suis pas convaincu que la question du terrorisme, si vous prenez l'exemple de Cuba ou quelques autres exemples analogues, va se résoudre à la satisfaction des Canadiens si ce sont les Américains qui doivent nous dicter notre politique.
Ce sont là mes questions. Je ne sais pas qui veut commencer.
M. Jon Allen: Monsieur le président, je vais peut-être répondre à votre première question.
Aux États-Unis, le président Bush a clairement nommé par une directive de la Maison-Blanche le gouverneur Ridge comme responsable de la sécurité du territoire. Quand le gouverneur Ridge a rencontré le ministre Manley, qui était là à titre de président du comité spécial, ils ont convenu de collaborer sur les questions de sécurité publique et économique, à la frontière naturellement.
• 1145
Pour ce qui est du palier suivant, au cours de cette rencontre
vendredi, le secrétaire O'Neill a nommé son sous-secrétaire à
l'exécution comme son représentant. On ne sait pas encore qui
représentera les autres volets du dispositif américain—c'est-à-dire le
SIN, qui relève du procureur général Ashcroft, et le
Département d'État, qui relève évidemment du secrétaire Powell. Je
pense que les Américains sont actuellement en train de décider si
ce sera l'adjoint de Ridge, un ancien militaire nommé Abbot, ou
quelqu'un d'autre qui aura ce rôle.
Du côté canadien, comme vous le savez peut-être, c'est Robert Fonberg, du BCP, qui a été nommé coordonnateur pour le Canada. Il travaillera en collaboration avec le ministre Manley et le comité spécial, et pour l'instant du moins, c'est lui l'homme de pointe du Canada.
Le président: Alors, il viendra sûrement bavarder avec nous.
Des voix: Bravo!
M. Jon Allen: Je crois bien que M. Manley doit de toute façon venir vous parler.
Le président: Madame Atkinson.
Mme Joan Atkinson: À propos des réfugiés, vous avez parfaitement raison de dire qu'il y a quelque 23 millions de personnes à l'étranger dont la situation est qualifiée de préoccupante par le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Toutefois, l'ONU estime que seul un très faible pourcentage de ces 23 millions de personnes doit vraiment se réinstaller dans un tiers pays. La solution préférée quand on fait face à des flux massifs de population, c'est d'aider ces personnes à retourner le plus rapidement possible et avec le moins de risques possible dans leur pays d'origine.
Quand ce n'est pas possible, la deuxième solution consiste à leur donner asile dans leur pays de premier asile et de les intégrer à la population locale. La troisième option, que les Nations Unies essaient d'éviter le plus possible, consiste à leur permettre de se réinstaller dans des tiers pays. Nous avons, comme les États-Unis, l'Australie et certains pays européens, des programmes de réinstallation.
Vous avez raison de dire que le traitement de ces cas est assez long. Parfois, le contexte est très difficile. Il y a des gens qui sont dans des camps de réfugiés, et avec lesquels nous avons de la difficulté à entrer en contact. Les membres de leurs familles sont souvent dispersés dans plusieurs pays. Nous essayons de coordonner le traitement de toutes leurs données, mais cela prend parfois du temps.
En revanche, quand des réfugiés arrivent sur nos côtes, nous sommes bien obligés de nous en occuper. S'ils débarquent sur nos côtes et demandent notre protection, nous devons entendre leur revendication et traiter leur cas. C'est un problème auquel sont confrontés tous les pays développés du monde occidental. Nous ne sommes pas les seuls à être confrontés à un nombre croissant de personnes qui demandent l'asile; tous les pays occidentaux développés ont le même problème.
L'Organisation internationale pour les migrations estime que 150 millions de personnes environ se déplacent à travers le monde. Quels que soient les dispositifs qu'on mettra en place à l'étranger pour sélectionner les réfugiés dans les camps de réfugiés, etc., elles vont continuer à affluer. Nous devons pouvoir mettre en place des processus pour nous occuper de ces personnes de façon rapide et équitable, et faire le tri entre celles qui ont besoin d'une protection et celles qui n'en ont pas besoin. C'est un défi pour nous tous.
Le président: À ce propos, un groupe confessionnel de ma circonscription s'occupe actuellement d'un réfugié kurde iraqien qui est en Turquie et dont la vie est menacée en Turquie, mais il va probablement falloir six mois pour que l'ambassade entre en fonction en Turquie. Évidemment, les petits futés lui diraient de prendre un avion et de venir directement ici en oubliant toute cette procédure. Mais les gens respectueux de la loi, comme ces groupes confessionnels, essaient de respecter la procédure. Ils sont extrêmement frustrés par cette situation, si je peux dire les choses de cette façon.
Mme Joan Atkinson: Peut-être pourrais-je vous rassurer un peu à ce sujet, car l'une des nouvelles dispositions de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, ou plus exactement du règlement qui va l'accompagner, vise précisément à moderniser notre programme de réinstallation des réfugiés étrangers et nos programmes humanitaires.
Par exemple, la procédure de protection urgente, qui est actuellement déterminée de façon ponctuelle, va être codifiée dans le règlement. Les personnes qui sont en situation de risque bénéficieront d'une procédure accélérée et leur cas sera traité en l'espace de quelques jours plutôt que de plusieurs mois. Si le HCNUR, le Haut-Commissariat pour les réfugiés, la Croix-Rouge ou une ONG quelconque sur place nous signale que telle personne ou sa famille sont en situation de danger imminent, nous aurons les instruments nécessaires pour les évacuer rapidement vers le Canada.
• 1150
Nous envisageons aussi de rationaliser la procédure de réunion
des familles. Nous espérons ainsi pouvoir faire venir au Canada
plus rapidement les membres de famille dispersés dans plusieurs
pays.
Monsieur le président, pourrais-je faire une remarque sur les différences de normes entre nos deux pays en matière de droit de l'immigration et d'interprétation de la notion de personnes non admissibles?
Nous avons déjà commencé à travailler avec le Service d'immigration et de naturalisation pour comparer nos dispositions concernant l'inadmissibilité et nos lois respectives sur l'immigration. Il y a beaucoup de similitudes. Quand nous cherchons à déterminer si quelqu'un n'est pas admissible, nous cherchons le même genre de choses. Il y a cependant des différences.
Nous n'avons certes pas l'intention d'avoir des lois rigoureusement convergentes. Il n'est pas question d'harmoniser complètement nos dispositions en matière d'immigration. Chaque pays continuera à avoir son point de vue particulier sur les personnes jugées non admissibles.
Notre objectif est naturellement de trouver la meilleure façon de détecter les personnes indésirables dans nos deux pays. C'est de cela que nous parlons quand nous évoquons ce partage de renseignements.
Le président: Merci.
M. Paul Kennedy: Monsieur le président, j'aborderai deux questions. Vous avez parlé du terrorisme et des drogues. Cela rejoint un petit peu mon domaine de prédilection.
Je pense que ce qui nous préoccupe, c'est la crainte de devoir emboîter le pas aux Américains. La réalité, c'est qu'il y a des groupes qui sont internationalement reconnus comme des groupes terroristes. On l'a vu dans le cas de la déclaration de l'ONU sur ben Laden et al-Qaïda. Il existe des groupes qui sont clairement reconnus comme terroristes dans le monde entier.
De même, depuis des années, le Département d'État des États-Unis a des listes de groupes terroristes. Nous n'avons pas ce genre de liste au Canada. Récemment, le ministre des Affaires étrangères a publié d'autres listes. Vous remarquerez qu'elles ne sont pas nécessairement identiques à celles des Américains. Si vous figurez sur une liste américaine, cela ne signifie pas nécessairement que vous allez être sur la liste canadienne. Il y a des nuances, et le Canada demeure clairement maître de ses décisions.
J'imagine qu'il y aura à un moment donné, si le projet de loi C-37 est adopté, une liste strictement canadienne. Il y aura des listes communes aux États-Unis et au reste du monde, et des différences entre les listes des États-Unis et celles du Canada. Je pense que les ministres ont jusqu'à présent maintenu l'indépendance caractéristique du Canada, et je pense que cette indépendance se poursuivra aussi au niveau de ces listes.
Pour ce qui est des drogues, je dirige une délégation du Canada auprès d'un groupe appelé la CICAD. C'est une commission de lutte contre l'abus des drogues de l'Organisation des États américains. Trente-quatre pays y sont représentés, et elle s'occupe activement de ce problème. Quelles sont les meilleures méthodes de lutte contre ce problème de la drogue, notamment à la question de la possession? Est-ce que la criminalisation est la bonne formule?
Je m'en occupe depuis plusieurs années maintenant. D'après ce que je constate, les Américains sont très ouverts sur ce sujet. Comme nous, ils essaient de trouver une solution à un grave problème de santé. Ils le décrivent de la même façon. Il y a une différence entre trafiquants et consommateurs.
Quelle est la meilleure façon de cerner le problème? La difficulté, aux États-Unis, c'est que les gouvernements municipaux, les gouvernements des États ainsi que le gouvernement fédéral ont légiféré dans le domaine. Les États ont leurs propres codes pénaux. Tout cela complique la question.
Dans certains domaines, il existe une obligation internationale. Deux comités, un comité de la Chambre ainsi qu'un comité sénatorial, étudient ici la question de l'usage non médical des drogues. Un débat est donc en cours dans de nombreux pays. Il existe aussi des mécanismes dont le mécanisme d'évaluation multilatéral qui visent à établir les progrès réalisés à l'échelle internationale.
Le président: Je vous remercie. Tous ces renseignements nous sont très utiles.
Madame Jennings et ensuite M. Paquette.
Mme Marlene Jennings: Je vous remercie, monsieur le président.
Certains de mes collègues ont dit s'inquiéter du fait que le projet de loi C-36 confère des pouvoirs accrus à la GRC et aux autres forces policières et que le projet de loi C-11, pour sa part, confère des pouvoirs accrus aux agents d'immigration. Ils craignent en particulier que les collectivités ethnoculturelles ainsi que les diverses confessions religieuses déjà représentées au Canada connaissent plus de difficultés qu'elles en connaissent déjà relativement aux services policiers, à l'immigration et parfois aux douanes. Je n'ai pas vraiment entendu beaucoup de plaintes au sujet des douanes.
• 1155
Au Canada comme aux États-Unis, une expression est courante
parmi la population noire. Cette expression: «Vous êtes coupable de
conduire étant noir», s'applique aux jeunes hommes noirs âgés de 16
à 40 ans. Le même genre d'expression a maintenant cours dans les
collectivités arabes, dans les collectivités musulmanes ou dans les
collectivités dont les membres ressemblent à des Arabes ou à des
Musulmans.
Compte tenu de cette situation, quelle somme compte-t-on affecter à la formation des agents sur le terrain? Je suis sûre, madame Atkinson et monsieur Kennedy, que vous êtes sensibilisés à la question. Vous comprenez bien la question et vous êtes en mesure de faire les distinctions qui s'imposent. Je ne suis cependant pas sûre que les agents sur le terrain l'aient toujours fait.
Ayant pendant 10 ans étudié les plaintes présentées contre les autorités policières, je constate qu'il y a encore beaucoup de travail à faire malgré tous les efforts que déploient les forces policières locales. Je songe à la situation qui existait jusqu'en 1997, mais les forces policières disposeront maintenant de pouvoirs accrus.
Quelles mesures entendez-vous prendre pour améliorer la situation?
M. Paul Kennedy: Je vais essayer de répondre à cette question très importante. Diverses compétences sont en cause.
Vous avez fait allusion au projet de loi C-36, mais il y a aussi le projet de loi C-37.
Mme Marlene Jennings: Ainsi que le projet de loi C-35.
M. Paul Kennedy: C'est juste.
Mme Marlene Jennings: Ne l'oublions pas.
M. Paul Kennedy: En fait, la même chose vaut pour tous les projets de loi.
Nous sommes tout à fait conscients des défis qui se posent. À titre d'ancien employé du ministère de la Justice qui était chargé des poursuites dans le domaine des stupéfiants, j'ai discuté avec nos collègues de l'Ontario des conclusions du rapport Cole-Gittens qui portait sur l'application de la loi dans cette province. Peut-on dire que les membres de certaines collectivités font l'objet d'une discrimination systémique?
Les divers responsables de l'application de la loi sont conscients de la situation. Le ministère de la Justice a élaboré des lignes directrices portant sur les pouvoirs discrétionnaires des procureurs de la Couronne en matière d'accusations. Les forces policières offrent de la formation continue aux agents de police. Les organismes d'application de la loi sont donc très conscients de la situation.
À mon avis, la solution au problème réside, en bout de ligne, dans le recrutement de forces policières représentatives de l'ensemble de la population canadienne. Il serait bon que neuf fois sur 10 l'agent de police auquel vous vous adressez appartienne à votre groupe ethnique ou religieux.
Il existe certaines différences culturelles dont nous ne sommes pas toujours conscients. Ainsi, dans notre culture, regarder quelqu'un dans les yeux est signe d'honnêteté. Dans d'autres cultures, les gens baissent les yeux parce que regarder quelqu'un dans les yeux, c'est lui manquer de respect. La question est vraiment complexe. Parfois, on ne cherche pas à offenser qui que ce soit, mais on le fait sans le savoir en raison de différences inter-culturelles.
Nous tâchons de sensibiliser à la question les responsables tant des enquêtes que des poursuites. Nous demandons fréquemment aux jurés de conclure si une personne est coupable du crime qu'on lui reproche ou si elle cherche à dissimuler la vérité en fonction du comportement qu'elle adopte lorsqu'elle est appelée à témoigner lors de son procès. Or, on peut interpréter de façon erronée le comportement d'une personne qui cherche à manifester son respect pour autrui et à communiquer la vérité.
C'est un phénomène auquel nous sommes tous confrontés. Le Canada est un pays d'immigration et ces immigrants amènent avec eux leurs valeurs. Le problème se résoudra peut-être de lui-même à un moment donné et toutes les cultures s'entendront sur une norme commune. Les gens sont donc sensibilisés au problème et la formation inter-culturelle existe.
La solution consiste à faire en sorte que les minorités ethniques soient davantage représentées non seulement au sein des forces policières, mais aussi au sein de la magistrature. Les membres de ces minorités auront ainsi des modèles auxquels se référer et ils estimeront faire partie de notre culture. Le problème qui se pose vient en partie du fait que certains immigrants proviennent de pays où la police et l'État abusent de leurs droits. Ils ont donc peur des autorités. C'est un réflexe chez eux. Ils doivent surmonter ce réflexe qui est attribuable à l'expérience qu'ils ont connue ailleurs.
Soit dit en passant, de nombreux pays demandent l'aide du Canada pour former leurs procureurs de la Couronne ou leurs agents de police. Le Canada a une bonne réputation à l'échelle internationale à cet égard. Il faut espérer que les pays qui sollicitent l'aide du Canada cherchent à améliorer leur réputation.
Il nous faut davantage de programmes comme les services policiers communautaires par lesquels les forces policières cherchent à sensibiliser les membres des collectivités qu'elles desservent. Nous cherchons à le faire aussi avec les jeunes en nous rendant dans les écoles, etc. Je ne prétends pas que la tâche soit facile, mais nous en sommes conscients et faisons de notre mieux pour relever ce défi.
Mme Joan Atkinson: J'aimerais simplement ajouter que les agents d'immigration reçoivent une formation analogue à celle dont parlait M. Kennedy pour les agents d'application de la loi. La sensibilisation aux différences culturelles constitue un élément essentiel de cette formation.
Je crois que M. Kennedy a tout à fait raison de dire qu'il faut s'assurer que le ministère de la Citoyenneté et de l'immigration reflète la réalité canadienne. Nous nous sommes efforcés de recruter et de conserver un nombre élevé d'employés appartenant aux minorités visibles pour que notre effectif reflète la diversité multiculturelle du Canada.
Le ministère a lancé deux ou trois importantes initiatives de formation. Nous parlons d'initiatives de formation respectueuses du milieu de travail. Ces initiatives visent à sensibiliser les employés de tous les niveaux aux différences culturelles, qu'il s'agisse de différences religieuses ou autres.
Nous nous efforçons continuellement de relever ce défi. Il s'agit d'être vigilant. La nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés s'accompagnera d'un important programme de formation.
Compte tenu du fait que les agents d'immigration pourront arrêter sans mandat des personnes qui constituent une menace pour la sécurité ou qui sont de grands criminels, nous mettrons l'accent sur la sensibilisation aux différences culturelles dans la formation qui leur sera accordée.
[Français]
Le président: Monsieur Paquette, la parole est à vous.
M. Pierre Paquette (Joliette, BQ): Comme je vois que le temps file, je serai bref.
Madame Atkinson, vous avez dit que vous étiez en discussion avec vos homologues américains au sujet de nos lois d'immigration. Étant donné qu'il existe une entente particulière au Québec, comment le Québec est-il associé à ces discussions?
J'adresse ma prochaine question à M. Allen ne sachant pas si c'est bien à lui que je dois l'adresser. D'ailleurs, M. Allen y a peut-être déjà répondu puisque l'on étudie le projet de loi C-35 en même temps.
On parle d'intégration nord-américaine. Évidemment, on se concentre beaucoup sur notre voisin américain, qui est notre premier partenaire commercial. Toutefois, le Mexique fait aussi partie de l'ALENA. Le président mexicain a d'ailleurs demandé que les partenaires de l'ALENA coopèrent pour déterminer un certain nombre de mesures communes à tous. De fait, il a fait appel à un genre de coopération. Comment le gouvernement canadien répond-il à cette invitation? On a posé des questions à ce sujet en Chambre. M. Manley a dit, dans un premier temps, que comme le Mexique compliquait un peu les choses, les Américains devaient se débrouiller avec les Mexicains. Par contre, lorsqu'on a posé la question de nouveau au premier ministre, celui-ci a dit que tous les partenaires de l'ALENA seraient impliqués dans les discussions à venir concernant la sécurité. Compte tenu de cela, j'aimerais savoir quel mandat vous avez par rapport à cela.
Mme Joan Atkinson: Je vais d'abord répondre à votre question sur l'immigration.
Comme vous le savez, nous avons un accord très détaillé avec la province de Québec.
[Traduction]
Cet accord porte surtout sur les critères économiques de sélection et ne change pas les critères d'admissibilité.
Nos discussions avec les Américains ont surtout porté sur les questions de sécurité, de criminalité et de terrorisme. L'accord Canada-Québec confère au gouvernement fédéral la responsabilité d'établir les critères d'admissibilité. Cela étant dit, nous avons mené des consultations à ce sujet auprès de tous nos homologues provinciaux.
Comme M. Allen l'a fait remarquer, le ministère des Affaires étrangères et du commerce international a organisé des séances tous avec les représentants provinciaux et territoriaux présents pour les informer des initiatives que nous comptons prendre avec les Américains dans la foulée des événements survenus le 11 septembre.
Nous tenons donc toutes les provinces et les territoires au courant de la situation. Pour ce qui est de l'accord Canada-Québec, nous sommes convaincus d'en respecter les modalités. Nos discussions avec les Américains n'ont pas trait au choix des immigrants, ce sur quoi porte l'accord avec le Québec, mais plutôt sur les critères d'admissibilité.
M. Jon Allen: Merci. J'aimerais simplement aborder la question du trilatéralisme.
Il ne fait aucun doute que le Canada appuie le gouvernement Fox et les changements qu'il propose de mettre en oeuvre au Mexique. Le premier ministre et le ministre Manley ont clairement manifesté leur soutien au gouvernement mexicain. Nous appuyons les efforts qu'il déploie au titre de la saine gestion publique, des élections, de la magistrature et de l'accès à l'information. Le bureau que je dirige est un exemple de l'intérêt que nous portons au Mexique. Le Mexique a été inclus dans le Bureau des États-Unis pour créer le Bureau de l'Amérique du Nord.
• 1205
Dès le début de son mandat, le président Fox et ses
conseillers ont soulevé la question de l'intégration économique de
l'Amérique du Nord. Ni vous ni les Amériques y étaient favorables.
Je crois qu'on estime que d'ici 10 ou 15 ans, lorsque l'économie
mexicaine se comparera aux économies canadienne et américaine,
l'Amérique du Nord adoptera un système semblable à celui que
l'Europe connaît depuis plus de 50 ans. Je ne crois cependant pas
que nous ayons encore fait beaucoup de progrès sur le plan
notamment de la mobilité des travailleurs.
Pour ce qui est de la situation qui existe depuis le 11 septembre, j'ai mentionné avant votre arrivée que nous attachions déjà beaucoup d'importance à la frontière canado-américaine. Étant donné que 87 p. 100 de nos exportations du Canada sont destinées aux États-Unis, il nous faut vraiment mettre l'accent sur la sécurité du public et la sécurité économique.
La frontière entre le Canada et les États-Unis est bien différente de la frontière entre le Mexique et les États-Unis. Le même degré de modernisation et d'efficacité n'a pas encore été atteint. Si nous devions faire participer le Mexique à nos discussions sur les douanes, l'immigration et les transports, certains craignent que cela compliquerait beaucoup la situation.
[Français]
M. Pierre Paquette: Je suis d'accord avec M. Chrétien sur le fait qu'il faut que les trois partenaires de l'ALENA discutent de ces questions.
[Traduction]
M. Jon Allen: Des discussions ont cours. Comme je l'ai dit plus tôt, Joan Atkinson était hier à Washington où elle rencontrait ses homologues mexicain et américain. Ces discussions devraient se poursuivre. Nous continuerons à rencontrer nos partenaires mexicains et à partager avec eux de l'information sur la façon dont nous gérons notre frontière avec les États-Unis et sur les mesures que nous avons prises au lendemain des événements du 11 septembre. Étant donné les grandes différences qui existent entre nos trois pays, nous ne sommes cependant pas encore en mesure d'ouvrir le Mexique à nos discussions frontalières.
Le président: Êtes-vous sûr que ce partage de l'information est conforme aux dispositions de la Loi sur la protection de la vie privée? Il semble être beaucoup question ces jours-ci de l'échange de l'information. Or, une bonne partie de ces renseignements sont confidentiels. Qu'en est-il à ce sujet?
Mme Joan Atkinson: Nous échangeons de l'information dans le cadre d'accords conclus entre les gouvernements qui, dans la majorité des cas, sont visés par la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection de la vie privée. Lorsque nous élaborons un accord avec un autre gouvernement, nous collaborons étroitement avec le Bureau du Commissaire à la vie privée—et je sais que la même chose vaut pour mes collègues—afin de veiller à ce qu'il comporte les mesures de protection voulues.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Kennedy.
M. Paul Kennedy: Je voulais simplement faire une correction. J'ai dit plus tôt qu'on avait saisi 2 millions de dollars appartenant au réseau al-Qaïda. Il s'agit plutôt de 1 million de dollars réparti dans 34 comptes bancaires.
Vous avez dit que cela ne semblait pas beaucoup, mais cette somme ne s'applique qu'au réseau al-Qaïda. Depuis qu'une loi permet la saisie des produits de la criminalité, 170 millions de dollars ont été saisis. Au total, la Couronne saisit 70 millions de dollars et entre 15 millions et 20 millions de dollars par année sont saisis en vertu de cette loi. C'est cependant une autre affaire. Je parlais du réseau al-Qaïda.
Le président: Une fois saisi, le produit de la criminalité est partagé entre les autorités canadiennes selon une formule établie.
M. Paul Kennedy: C'est juste. Si la province a participé à l'opération, sa part est fonction de son degré de participation. Cette part peut représenter 10 p. 100, 50 p. 100 ou 90 p. 100. Certaines administrations appliquent leurs propres lois et dans ce cas-là elles gardent tout pour elles.
Le président: Je vous remercie beaucoup.
Je sais que vous êtes tous très occupés et que vos responsabilités sont très lourdes. Vous avez consacré beaucoup de temps à notre comité. Nous vous en sommes reconnaissants puisque nous commençons cette étude. Je vous remercie beaucoup de votre présence.
Nous reprendrons nos travaux à 15 h 30. La séance est levée.