HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Comité permanent de la santé
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 8 mai 2002
¹ | 1540 |
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)) |
¹ | 1545 |
La présidente |
¹ | 1550 |
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne) |
Mme Johanne Gélinas |
M. John Reed (directeur principal, Bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada) |
M. Rob Merrifield |
M. John Reed |
La présidente |
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.) |
M. John Reed |
¹ | 1555 |
M. Reg Alcock |
M. John Reed |
M. Reg Alcock |
M. John Reed |
M. Reg Alcock |
M. John Reed |
M. Reg Alcock |
º | 1600 |
Mme Johanne Gélinas |
M. Reg Alcock |
Mme Johanne Gélinas |
M. John Reed |
Le président |
M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ) |
Mme Johanne Gélinas |
M. Bernard Bigras |
Mme Johanne Gélinas |
M. Bernard Bigras |
Mme Johanne Gélinas |
M. John Reed |
º | 1605 |
Mme Johanne Gélinas |
M. Bernard Bigras |
Mme Johanne Gélinas |
M. John Reed |
La présidente |
M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.) |
Mme Johanne Gélinas |
M. Jeannot Castonguay |
Mme Johanne Gélinas |
M. Jeannot Castonguay |
La présidente |
M. Rob Merrifield |
º | 1610 |
Mme Johanne Gélinas |
M. John Reed |
La présidente |
M. Reg Alcock |
M. John Reed |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
Mme Johanne Gélinas |
M. Bernard Bigras |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
º | 1615 |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
La présidente |
M. Austin Leavey (président, Association québécoise de la gestion parasitaire) |
º | 1620 |
La présidente |
M. Dean Thomson (président, Comité pour la protection des cultures et de l'environnement, Conseil canadien de l'horticulture) |
º | 1625 |
º | 1630 |
La présidente |
º | 1635 |
La présidente |
M. Don McCabe (président, Comité de l'environnement, Producteurs de grains du Canada) |
º | 1640 |
º | 1645 |
La présidente |
M. Stephen King (directeur et conseiller principal, Service des parcs et des espaces naturels, Municipalité régionale de Halifax) |
º | 1650 |
La présidente |
M. Mark Goodwin (coordonnateur de la lutte antiparasitaire, Pulse Canada) |
º | 1655 |
La présidente |
M. Rob Merrifield |
» | 1700 |
M. Austin Leavey |
M. Rob Merrifield |
M. Don McCabe |
M. Rob Merrifield |
M. Don McCabe |
M. Rob Merrifield |
» | 1705 |
M. Don McCabe |
M. Rob Merrifield |
M. Don McCabe |
M. Rob Merrifield |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
M. Mark Goodwin |
M. Bernard Bigras |
M. Mark Goodwin |
M. Bernard Bigras |
M. Don McCabe |
» | 1710 |
M. Bernard Bigras |
M. Don McCabe |
La présidente |
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.) |
M. Stephen King |
Mme Yolande Thibeault |
M. Stephen King |
Mme Yolande Thibeault |
» | 1715 |
M. Austin Leavey |
Mme Yolande Thibeault |
M. Austin Leavey |
La présidente |
M. Reg Alcock |
M. Don McCabe |
M. Reg Alcock |
M. Don McCabe |
» | 1720 |
M. Reg Alcock |
M. Ken Plews |
M. Reg Alcock |
M. Ken Plews |
M. Dean Thomson |
M. Reg Alcock |
M. Dean Thomson |
La présidente |
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne) |
» | 1725 |
M. Don McCabe |
M. Dean Thomson |
Mme Carol Skelton |
M. Mark Goodwin |
Mme Carol Skelton |
M. Dean Thomson |
Mme Carol Skelton |
La présidente |
M. Bernard Bigras |
» | 1730 |
M. Austin Leavey |
M. Dean Thomson |
La présidente |
M. Dean Thomson |
» | 1735 |
La présidente |
M. Austin Leavey |
La présidente |
M. Don McCabe |
La présidente |
CANADA
Comité permanent de la santé |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 8 mai 2002
[Enregistrement électronique]
¹ (1540)
[Traduction]
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bon après-midi, mesdames et messieurs. La séance est ouverte.
Vous aurez remarqué dans l'ordre du jour corrigé qu'on vous a fait parvenir que les premiers témoins, du Bureau du vérificateur général, sont la commissaire à l'environnement et au développement durable et des représentants du Bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable. Ces personnes nous ont demandé si elles pouvaient comparaître pendant la première demi-heure et répondre à vos questions avant les autres.
Si cela vous convient tous, je céderai maintenant la parole à Mme Johanne Gélinas, la commissaire à l'environnement, pour lui demander de nous expliquer ses fonctions.
Mme Johanne Gélinas (commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général ): Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs du comité.
En bref, je fais partie du Bureau du vérificateur général et je suis le chien de garde de l'environnement au gouvernement fédéral. Je suis accompagnée de John Reed, directeur principal responsable des travaux sur les substances toxiques.
Cet après-midi, je vous parlerai brièvement de notre rôle, puis je répondrai avec plaisir à vos questions.
Mes commentaires d'aujourd'hui se fondent sur les constatations d'un rapport de vérification déposé au Parlement en mai 1999 par le commissaire à l'environnement et au développement durable. Je dois préciser que la vérification, qui avait fait l'objet de deux chapitres distincts mais connexes, portait sur l'évaluation et la gestion par le gouvernement fédéral des substances toxiques. Le chapitre 3, Comprendre les risques associés aux substances toxiques - Des fissures dans les fondations de la grande maison fédérale, ciblait la collecte des renseignements scientifiques et leur utilisation par le gouvernement fédéral pour décider quelles substances présentent des risques importants pour la santé et l'environnement. Le chapitre 4, Gérer les risques associés aux substances toxiques: Les obstacles au progrès, examinait les mesures prises par le gouvernement pour contrer les risques posés par les substances toxiques.
Il s'agissait d'une vérification vaste et complexe qui touchait un grand nombre d'activités fédérales et six ministères fédéraux. Nous avions notamment constaté des lacunes dans la coordination interministérielle de la recherche, des réseaux de surveillance environnementale incomplets, des progrès lents quant au respect des engagements, une absence de réévaluation des pesticides en fonction de nouvelles normes relatives à la santé et à l'environnement ainsi qu'un écart grandissant entre les exigences imposées aux ministères et la disponibilité des ressources pour y satisfaire. Toutes ces constatations traduisent un grave problème. Dans l'ensemble, nous avions conclu que la capacité du gouvernement fédéral à détecter, à comprendre et à prévenir les effets nuisibles des substances toxiques était fortement menacée.
Même si la vérification traitait de nombreux types de substances toxiques, dont les produits chimiques industriels gérés suivant la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, je m'attarderai ici uniquement sur les parties qui concernaient les pesticides. J'aimerais vous entretenir brièvement de quatre grands secteurs de préoccupation traités dans la vérification.
[Français]
Le premier secteur de préoccupation était l'absence de collaboration et d'échange d'information entre l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire, l'ARLA, et les ministères qui font de la recherche scientifique tels que Santé Canada, Environnement Canada et Pêches et Océans. La recherche et la surveillance sont essentielles pour comprendre la présence et l'incidence des pesticides au Canada et pour appuyer une prise de décision éclairée. Cependant, la production d'une information de qualité est discutable si cette dernière n'est pas utilisée efficacement. Lors de la vérification, l'ARLA avait acquis une réputation de club fermé et était perçue comme ne souhaitant pas collaborer avec d'autres ministères fédéraux. De plus, l'ARLA ne partageait pas l'information dont elle disposait, prétextant que la loi en vigueur l'en empêchait.
Ensuite, la vérification soulevait de graves préoccupations concernant l'absence de réévaluation et d'examens spéciaux des pesticides existants. Un grand nombre de pesticides utilisés actuellement ont été approuvés à une époque où les normes étaient beaucoup moins sévères qu'aujourd'hui. Au moment de la vérification, sur les 500 ingrédients actifs dans les pesticides homologués, au-delà de 300 avaient été approuvés avant 1981, et plus de 150 avant 1960. Pourtant, compte tenu des engagements de longue date visant à réévaluer les pesticides à l'aide de normes modernes, il était alarmant de constater la faible performance du gouvernement à cet égard. De plus, la vérification relevait que les règles de base régissant les réévaluations et les examens spéciaux n'étaient pas claires.
La troisième grande préoccupation soulevée dans le rapport était l'absence de politiques de réduction des risques et de plan stratégique au sein de l'ARLA. Dans ce contexte, la réduction des risques se rapporte à des activités visant à réduire les risques globaux pour les gens et l'environnement, y compris la réduction de l'utilisation des pesticides et l'adoption de méthodes de remplacement plus sécuritaires ou de pesticides moins toxiques. Plusieurs pays dans le monde ont adopté de tels programmes et politiques. Dès la création de l'ARLA, le gouvernement canadien lui a même demandé d'élaborer une politique de réduction des risques. Toutefois, nous avions constaté que l'agence ne l'avait pas fait.
Le dernier secteur de préoccupation était le suivi inadéquat des rejets de substances toxiques et de pesticides. Nous avions fait observer qu'il n'y avait pas de base de données nationale sur la vente des pesticides, bien qu'on eût chargé l'agence d'en établir une et qu'elle se fût engagée en ce sens. La mesure des rejets est un élément essentiel d'une saine gestion. Sans de telles données, le Canada ne peut établir précisément quels sont les types et les quantités de pesticides qui sont rejetés dans l'environnement. Cela nuit à la capacité du gouvernement de jauger l'efficacité des efforts de réduction des risques.
¹ (1545)
[Traduction]
Madame la présidente, notre rapport de 1999 contenait 27 recommandations aux ministères, dont un bon nombre à l'ARLA, pour combler les lacunes que nous avions cernées. Leurs représentants ont convenu d'y donner suite. Nous avons joint une liste de ces recommandations en annexe. Conformément à nos procédés de vérification habituels, nous faisons actuellement un suivi pour déterminer si les ministères ont fait des progrès depuis. Nous rendrons compte de ces travaux au Parlement en octobre de cette année.
Nous savons bien que les substances toxiques et les pesticides constituent une question complexe pour les nombreuses raisons mentionnées dans nos chapitres, mais je ne suis pas convaincue que les problèmes que nous avons signalés soient attribuables à la complexité des questions. Au contraire, bon nombre de ces problèmes ont une connotation «humaine» bien familière et peuvent, à mon avis, être facilement réglés par l'application des principes fondamentaux d'une saine gestion; la prise de mesures conformes aux engagements et aux politiques; l'établissement de relations de travail, de rôles et de responsabilités bien définis; l'harmonisation des mandats conflictuels et le «décloisonnement des idées»; et la préparation de mesures du rendement efficaces.
Cela dit, je crois que des lois et règlements efficaces constitueront des outils clés pour régler certains des problèmes du gouvernement et de l'ARLA. À cet égard, il est essentiel que les responsables prévoient des dispositions pour la communication et l'échange d'information, des exigences relatives aux réévaluations et aux examens spéciaux ainsi que la mise en place d'une base de données nationale sur les ventes.
[Français]
En terminant, madame la présidente, le principal message du rapport de 1999 portait sur l'écart substantiel qui existait entre le discours et l'action quant au programme fédéral en matière d'environnement et de développement durable. Je crois que c'est encore le cas aujourd'hui et que nous en payons le prix sur les plans de la santé, de l'environnement, du niveau de vie et de l'héritage que nous léguons à nos enfants et petits-enfants.
Je remercie le comité de nous avoir invités. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, madame Gélinas.
Nous commençons la période des questions avec M. Merrifield.
¹ (1550)
M. Rob Merrifield (Yellowhead, Alliance canadienne): Merci de votre visite. Vous avez illustré certains des problèmes que nous soupçonnions depuis le début de notre étude.
Lorsque nous demandons à l'ARLA pourquoi il semble y avoir tant de problèmes dans la façon dont l'agence fonctionne, on nous parle évidemment d'argent. Or, vous avez suggéré vous-même plusieurs solutions en regard des problèmes que vous avez évoqués, mais vous n'avez jamais parlé d'argent. À votre avis, est-ce un problème de ressources ou de financement qui sévit à l'ARLA, ou plutôt un problème de gestion?
Mme Johanne Gélinas: Nous avons dit qu'il se posait à l'agence des problèmes de ressources, mais qu'il y avait aussi autre chose.
Permettez-moi de demander à mon collègue de vous répondre en ce qui a trait à la réévaluation des pesticides. Il nous a semblé évident que la réévaluation des pesticides souffrait d'un problème de financement, mais qu'elle souffrait également d'autre chose.
M. John Reed (directeur principal, Bureau du commissaire à l'environnement et au développement durable, Bureau du vérificateur général du Canada): Merci, madame la présidente.
Si nous ne commentons pas l'adéquation des ressources, c'est parce que le vérificateur général évite de le faire en général. C'est en effet considéré comme une question de politique, puisque c'est la prérogative du gouvernement d'allouer les fonds.
Comme on l'explique dans le chapitre et plus particulièrement au sujet de la réévaluation, lorsque l'ARLA a été créée, ses revenus devaient provenir en partie du recouvrement des coûts. Or, au moment de la vérification, le recouvrement des coûts ne permettait pas d'obtenir les revenus qu'avait prévus l'agence, et celle-ci a fait valoir que le manque à gagner de quelque 4,5 millions de dollars était l'une des raisons de son empêchement de mener à bien tout son programme de réévaluation.
Pour reprendre ce que disait la commissaire, il en va bien plus que d'un simple problème de ressources. Quand on parle de réévaluation, le problème existe depuis au moins 16 ans, c'est-à-dire depuis l'époque où le ministère de l'Agriculture était chargé de la réévaluation. Dès 1986 on parlait de réévaluation, et pourtant rien n'avait été fait à ce moment-là. Jamais n'a-t-on évoqué le manque de ressources comme étant la cause du problème, et celui-ci est par conséquent beaucoup plus profond que cela.
M. Rob Merrifield: L'ARLA a dit à notre comité qu'il restait à réévaluer, à l'heure qu'il est, 400 ingrédients actifs et que la démarche serait terminée d'ici 2006, sauf erreur. D'après vous et d'après ce que vous avez vu à l'agence, est-ce réaliste?
M. John Reed: Dans les chapitres, nous avons examiné certaines des réévaluations dans plusieurs études de cas. Dans l'un des cas, en particulier, la réévaluation avait été entreprise il y a presque 20 ans à la fin de notre vérification. Un examen spécial--et je ne parle pas ici de cas atypiques, mais d'une réévaluation majeure--était en cours depuis déjà huit à neuf ans. Comme aucun des deux n'est encore terminé, c'est tout un défi, à mon avis, d'entreprendre autant de réévaluations en quatre ans à peine.
La présidente: M. Alcock.
M. Reg Alcock (Winnipeg-Sud, Lib.): Je trouve un peu curieux ce que vous dites. Dans votre rapport, vous parlez de dépenses globales de quelque 100 millions de dollars par année pour ces études, et pourtant vous affirmez que le problème est dû notamment à une réduction du financement par le gouvernement, et que cette réduction empêchera l'organisation d'effectuer adéquatement la recherche nécessaire. Je suis un peu confus: vous affirmez que les 100 millions de dollars que vous dépensez actuellement ne suffiront pas. Est-ce que parce que la somme doit être réorganisée et ciblée différemment?
M. John Reed: D'abord, la somme de 100 millions de dollars représentait un chiffre global devant servir à étudier toute une gamme d'activités et pas seulement les substances toxiques. Nous n'avons pas vérifié ces chiffres, qui nous ont été fournis par les ministères, notamment parce que ceux-ci ne colligent pas l'information d'une façon qui nous permettrait de répondre à la question.
Voici ce qui s'est passé: Au milieu des années 90, au moment de l'examen des programmes, les budgets qui avaient été plus élevés avant 1997 ont été réduits. Au même moment, on imposait toutes sortes de demandes aux ministères qui ont eu pour conséquence d'augmenter les besoins en recherche et en suivi. Le rapport explique clairement que les ministères se trouvaient face à un accroissement des demandes en matière de recherche et de suivi scientifique, alors que leurs budgets diminuaient.
¹ (1555)
M. Reg Alcock: En effet, 100 millions de dollars, ce n'est pas rien. C'est beaucoup d'argent. Est-ce parce que la somme est mal répartie, que les systèmes d'évaluation des risques sont mal structurés et que l'on saupoudre ça et là les sommes?
Vous mentionnez les problèmes de coordination et de communication entre les divers ministères. Est-ce parce que les structures actuelles ne permettent pas de répondre à la tâche ou simplement parce que les fonds sont insuffisants?
M. John Reed: Nous n'avons pas vraiment abordé la question de la façon dont vous la posez, et voilà pourquoi nous ne nous sommes pas demandé si les fonds suffisaient ou pas. Ce n'est pas le genre de vérification que nous avons effectuée.
Cela dit, la vérification s'est arrêtée à la question de la coordination entre ministères et a cherché à déterminer s'ils étaient capables d'accorder leurs violons, de fixer clairement des priorités pour l'ensemble du gouvernement et de coordonner leurs efforts. Mais nous ne nous sommes pas vraiment demandé, comme vous voudriez le savoir, si l'argent était dépensé judicieusement ou pas.
M. Reg Alcock: Mais cela ne vous a pas empêchés de le mentionner. Peut-être êtes-vous prudents à l'excès? Mais puisque nous sommes entre nous, dites-nous : faut-il réorganiser l'agence de façon qu'elle utilise ces ressources de façon plus effiace?
Vous avez dit en effet que divers ministères s'intéressaient à la question de toxicité sous différents angles. L'argent ne serait-il pas mieux utilisé de façon plus efficiente si l'étude sur la toxicité était laissée entre les mains des ministères qui sont les mieux en mesure de s'en occuper?
Ce que je lis ici est assez surprenant. On parle ici de... Comment s'appelle ce truc? Oh, non, ça, c'est autre chose.
Ce rapport est troublant. On parle de ces trucs horribles qui tuent des gens un peu partout.
M. John Reed: Je ne suis que le messager.
Des voix : Oh, oh!
M. Reg Alcock: Je ne parlais pas de vous.
Vous dites ici que dès 1987, le Service canadien de la faune signalait que le carbofurane tuait les oiseaux, et qu'il a pourtant fallu 13 ans pour retirer ce produit du marché! Un telle délais d'intervention critique est tout à fait inacceptable dans le cas d'un produit que l'on sait être aussi dangereux pour la santé.
S'agit-il d'un problème de coordination et que trop de cuisiniers ont gâché la sauce? Est-ce par manque de ressources que l'on ne peut agir dès que le problème est connue? Voilà ce qu'il nous faut établir. Les changements mineurs que nous pourrions apporter à la loi pourraient ne pas suffire.
M. John Reed: Cela dépend de bien des choses. Le carbofurane n'est qu'un exemple parmi d'autres et qui n'a même pas battu tous les records. J'ai mentionné d'autres évaluations qui ont pris jusqu'à 20 ans environ.
Jamais n'a-t-on dit que le manque de ressources empêchait vraiment ces réévaluations. Je crois que c'est l'agence et ses prédécesseurs qui ont dû faire un choix et décider où ils dépenseraient leurs ressources.
Mais l'argent ne fait pas vraiment problème, particulièrement en ce qui concerne les réévaluations et les examens spéciaux. La démarche était à ce point mal définie que personne ne connaissait le plan de match, les étapes de communication des renseignements ou qui prenait la décision. Lorsque l'agence a été créée en 1990, on y a regroupé des fonctions qui étaient auparvant éparpillées dans quatre ministères différents.
Toute une panoplie de facteurs ont contribué à ralentir les évaluations, mais il y avait aussi l'absence d'un échéancier. Rien n'oblige à terminer les examens ou les rééaluations avant telle ou telle date. On décide au jour le jour.
M. Reg Alcock: À votre avis, ce projet de loi-ci résout-il les problèmes?
º (1600)
Mme Johanne Gélinas: Nous ne sommes pas en mesure de commenter. Notre rôle, c'est de faire rapport sur ce que nous vérifions, mais pas de...
M. Reg Alcock: Ainsi, vous nous laisserez nous embourber pour pouvoir nous dire après: «Je vous l'avais bien dit.» Pourquoi ne pas nous aider?
Mme Johanne Gélinas: Malheureusement, voilà le genre de questions auxquelles nous ne pouvons répondre.
M. John Reed: Il y a deux choses qui me viennent à l'esprit à la lumière de cette vérification-ci et de bien d'autres encore. Lorsque des calendriers ne sont pas imposés ou que la loi est muette à ce sujet, les chances sont fortes qu'ils ne soient pas respectés. D'après notre expérience, ce qui ne doit pas obligatoirement être fait ne sera pas fait.
Je me faisais aussi la réflexion que nous avons vu souvent des politiques et des directives ne jamais être appliquées. Si vous voulez que les vôtres soient respectées, vous devriez, d'après notre expérience, légiférer pour vous assurer que tout est contenu dans le texte de loi et que les ressources suffisantes s'ensuivront pour les ministères.
Le président: Merci, monsieur Alcock.
Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras (Rosemont--Petite-Patrie, BQ): Merci, madame la présidente. J'ai deux questions. La première porte sur les exigences relatives aux réévaluations et la deuxième, sur la politique de réduction des risques.
Au point 11 de votre mémoire, vous écrivez, et je vous cite:
...il est essentiel que les responsables prévoient des dispositions pour la communication et l'échange d'information, des exigences relatives aux réévaluations et aux examens spéciaux ainsi que la mise en place d'une base de données nationale sur les ventes. |
Donc, pour vous, il est essentiel que les responsables prévoient des exigences relatives aux réévaluations. Au fond, êtes-vous en train de nous dire que le mieux serait de prévoir dans la loi des délais quant à la fin des travaux et aux réévaluations? On sait quand les travaux commencent, mais on ne sait jamais quand ils finissent. Doit-on comprendre du point 11, où on dit qu'il serait essentiel que les responsables prévoient des exigences relatives aux réévaluations, que ces exigences devraient avoir un début et une fin et que cela devrait être inscrit dans la loi?
Mme Johanne Gélinas: Madame la présidente, je vais reprendre un peu ce que mon collègue a mentionné en répondant à la question précédente. Lorsqu'on se fonde sur la vérification que l'on possède, il semble assez évident que lorsqu'il n'y a pas de délais prescrits, les choses peuvent s'étirer en longueur. Une façon de garantir le délai serait de s'assurer, dans la loi ou autrement, qu'il y ait un début et une fin à un processus lorsqu'il est mis en place.
M. Bernard Bigras: Quel devrait être ce délai, selon vous? Est-ce qu'un délai devrait être prévu?
Mme Johanne Gélinas: Dans notre vérification, on n'a pas fait l'évaluation de ce que serait un délai raisonnable.
M. Bernard Bigras: J'ai une question sur la politique de réduction des risques. Vous mentionnez qu'il y a une absence évidente de politique de réduction des risques et de plan stratégique au sein de l'ARLA. Vous dites plus loin que plusieurs pays dans le monde ont adopté de tels programmes et politiques.
Dans vos études comparatives, avez-vous constaté que certains pays avaient adopté des politiques dans lesquelles une place prépondérante était accordée à l'approche et au principe de prudence?
Mme Johanne Gélinas: Madame la présidente, je vais laisser mon collègue John Reed répondre à la question.
[Traduction]
M. John Reed: À première vue, je ne sais si je peux répondre. Nous n'avons pas vérifié ce qui se passe dans les divers pays qui ont déjà instauré une stratégie de réduction des risques, mais nous avons beaucoup appris d'une évaluation effectuée par l'OCDE il y a trois ou quatre ans et qui comparait divers régimes. Ces études nous ont fourni beaucoup de renseignements sur la nature des divers programmes. Toutefois, je ne saurais dire plus précisément comment chaque régime abordait le principe de prudence.
Je n'en sais pas plus, mais nous pourrions faire des recherches pour vous et transmettre nos résultats à la présidence, si cela vous intéresse.
º (1605)
[Français]
Mme Johanne Gélinas: Si je peux me le permettre, madame la présidente, j'aimerais ajouter un mot. Nous n'avons pas, dans le cadre de la vérification que nous avons faite en 1999, vérifié l'application du principe de prudence; nous y avons fait allusion. Toutefois, je vous signale que dans le concept de développement durable et dans les principes de développement durable que le Canada s'est engagé à respecter, le principe de prudence est quand même clairement mentionné.
M. Bernard Bigras: Dans votre rapport de 1999, vous indiquez que le gouvernement britannique, en 1985, a adopté l'approche de prudence à l'égard de l'utilisation de ces produits et a favorisé une moindre utilisation des pesticides. Donc, en principe, vous êtes allés voir ce en quoi l'approche britannique pouvait consister en termes d'approche de prudence.
Croyez-vous que ce qu'il y a dans ce projet de loi est comparable à ce qui se fait actuellement en vertu de l'approche adoptée en 1985 par le gouvernement britannique, puisque c'est dans votre rapport de 1999?
Mme Johanne Gélinas: On ne peut pas faire la comparaison avec la façon dont le projet de loi actuel aborde la question du principe de prudence.
[Traduction]
John, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. John Reed: Merci.
Nous ne nous sommes pas penchés sur les lois qui existaient ailleurs, et c'est pourquoi je ne sais pas comment les régimes se traduisent dans les différents textes de loi. Ou peut-être ai-je vu dans votre question beaucoup plus que vous ne le vouliez au départ, étant donné que je sais que vous avez déjà traité du principe de prudence lors de vos audiences.
Vous constaterez sans doute que les stratégies de réduction des risques dans la plupart de ces pays mentionnent la «prudence», et que ces stratégies se fondent clairement sur la nécessité de prendre des mesures de prudence et de réduire le risque des pesticides. Je pense que j'ai vu dans votre question beaucoup plus que cela. Mais je ne saurais dire si le principe de prudence a été emprunté de la déclaration de Rio pour servir ensuite de pierre angulaire aux diverses stratégies.
Vos audiences vous ont sûrement appris qu'il s'agit d'un principe très louable qui exige d'être appliqué de façon spécifique. Dans notre vérification initiale, nous avons d'ailleurs mentionné qu'au début, le gouvernement ne savait pas comment appliquer de façon cohérente les principes auxquels il adhérait et que cela ne se dément toujours pas plus aujourd'hui.
La présidente: Merci, monsieur Bigras. Monsieur Castonguay, allez-y.
Je demanderais aux témoins de répondre le plus succinctement possible, car le temps file et ça commence à nous déranger.
[Français]
M. Jeannot Castonguay (Madawaska--Restigouche, Lib.): Merci, madame la présidente.
Vous nous présentez un rapport de 1999. On est en train de faire l'étude d'un projet de loi. Si je comprends bien, vous ne pouvez pas dire si le projet de loi semble répondre aux inquiétudes que vous aviez soulevées à ce moment-là. Vous parlez de quatre grands secteurs de préoccupation soulevés lors de la vérification, mais vous n'allez pas vous prononcer quant à la pertinence de ce projet pour s'attaquer à ces problèmes.
Deuxièmement, croyez-vous que les délais prescrits peuvent être une arme à deux tranchants? Je pose la question pour la raison suivante. À un moment donné, parce qu'on a un délai à respecter, la nature humaine étant ce qu'elle est, on peut sauter des étapes dans l'évaluation d'un produit, ce qui fait qu'il pourrait être approuvé afin qu'on respecte le délai.
Mme Johanne Gélinas: Madame la présidente, il y a toujours des avantages et des inconvénients à mettre ou à ne pas mettre un délai pour faire une évaluation. On ne peut pas se prononcer sur les avantages et les inconvénients d'un tel délai. On vous dit simplement que, selon l'expérience qu'on a acquise au fil des années, quand il y a un délai, en règle générale, les choses sont mises sur pied et se réalisent. Ce n'est pas toujours une garantie, bien sûr, mais ça aide.
M. Jeannot Castonguay: Mais cela peut quand même être une arme à deux tranchants.
Mme Johanne Gélinas: Comme toute chose.
M. Jeannot Castonguay: D'accord. Vous ne savez pas si le projet de loi qu'on a devant nous semble répondre aux préoccupations qui avaient été soulevées en 1999. Vous n'avez pas d'opinion là-dessus.
Mme Johanne Gélinas: C'est exact.
M. Jeannot Castonguay: Merci.
[Traduction]
La présidente: Il nous reste à peine du temps pour une très brève question de M. Merrified et une autre aussi de M. Alcock.
M. Rob Merrifield: En fait, c'est pour faire suite à la dernière question. On a beaucoup parlé d'échéancier, et beaucoup de témoins nous ont dit que l'échéancier devrait être inscrit dans la loi. On s'est ensuite demandé quelle échéance convenait, et comment on pouvait juger si cela suffisait ou pas. Comme vous l'avez dit, allons-nous manquer de temps; faudra-t-il brûler les étapes?
Voici ma question: Puisque plusieurs témoins nous ont suggéré d'harmoniser notre loi avec celle des États-Unis--qui sont notre partenaire commercial le plus proche et dont les lois ont des répercussions sur nos pratiques agricoles et notre recours aux pesticides--, pouvez-vous nous dire si, à votre avis, il est raisonnable de nous laisser guider par ce qui se fait là-bas?
º (1610)
Mme Johanne Gélinas: Madame la présidente, mon collègue vous répondra.
M. John Reed: Merci.
Nous ne nous sommes pas penchés sur la question de l'harmonisation, mais d'un point de vue pratique, il est logique de viser un certain partage. J'imagine que les Canadiens voudront s'assurer que l'on tiendra compte de toute information spécifiquement canadienne pour réduire au minimum les risques pour notre population.
La présidente: Merci, monsieur Merrifield
Monsieur Alcock, soyez bref, car M. Bigras a également une question.
M. Reg Alcock: Brièvement, comment faites-vous pour vérifier que quelque chose d'aussi flou que le principe de prudence est bien respecté?
M. John Reed: C'est une bonne question, à laquelle j'aurais bien aimé répondre, mais je dois avouer qu'actuellement, l'application du principe n'est pas vérifiable. C'est un principe hautement théorique, et qui implique beaucoup d'activités pour qu'il se traduise de façon concrète dans les opérations. C'est ce qui fait grandement défaut. Tant que l'on ne remédie pas à ce problème, il sera difficile de vérifier quelque chose d'aussi théorique.
La présidente: Monsieur Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: J'ai une courte question, madame la présidente.
Vous avez parlé du principe de développement durable et de la Convention de Rio. Pour nous assurer que le Canada respecte ses engagements internationaux, ne serait-il pas intéressant et même souhaitable que le principe de prudence soit clairement inscrit dans le préambule du projet de loi? Je vous demande de répondre à cette question comme commissaire et comme vérificatrice, parce que votre travail est de vous assurer que le Canada respecte ses engagements internationaux. Serait-il correct d'envisager que le Canada, dans le préambule de sa loi, indique la prépondérance du principe de prudence?
Mme Johanne Gélinas: Madame la présidente, dans la mesure où l'on trouve un engagement clair et ferme dans différents documents du gouvernement fédéral, je ne vois pas pourquoi cela ne pourrait pas faire partie du préambule de toutes les nouvelles lois canadiennes qui traitent de questions environnementales et de développement durable.
M. Bernard Bigras: Merci.
[Traduction]
La présidente: Au nom du comité, je remercie M. Reed et Mme Gélinas d'avoir comparu.
Mesdames et messieurs, le greffier vous a fait parvenir une note de service hier par courrier électronique. Dans sa note, il nous explique qu'une équipe a été affectée à notre comité et que cette équipe inclut Doug Ward, conseiller législatif, qui pourra rédiger les amendements du comité ou à l'étape du rapport. On nous a également affecté Susan Baldwin, greffière aux services législatifs, qui nous suivra au cours de notre étude détaillée du projet de loi. Elle viendra nous rencontrer jeudi prochain au cours de la dernière demi-heure de notre comité, lorsque nous discuterons des amendements. Elle pourra répondre à vos questions.
Elle nous a également fait savoir que son équipe et elle-même avaient besoin d'un certain temps pour s'assurer que les amendements soumis sont formulés selon les règles de l'art. Elle nous a donc suggéré de fixer une date limite pour la réception des amendements. Comme l'a si bien dit M. Reed, sans date limite, rien ne se fait.
Par conséquent, la date limite pour soumettre vos amendements est jeudi 16 mai à 17 heures, c'est-à-dire huit jours.
M. Reg Alcock: Quand entendrons-nous les derniers témoins?
La présidente: Demain.
Après, nos gens prépareront un dossier de tous les amendements correctement libellés qui auront été proposés pour qu'ils vous soient distribués à la réunion du 21 mai, c'est-à-dire le lendemain du congé férié.
M. Reg Alcock: C'est bien un projet de loi, n'est-ce pas?
La présidente: Oui, c'est un projet de loi.
Voilà les deux choses que j'avais à dire. Le plus important, c'est que la date limite pour soumettre vos amendements est jeudi prochain, 17 heures.
Monsieur Bigras, allez-y.
[Français]
M. Bernard Bigras: Madame la présidente, pouvez-vous me rappeler à quel moment le dernier témoin va comparaître devant le comité?
La présidente: Tomorrow.
M. Bernard Bigras: Demain. Les délais sont assez serrés. Je ne sais pas si c'est la pratique normale de ce comité, mais je trouve que les délais sont relativement serrés. M. Castonguay indiquait, lors d'une séance précédente, à quel point l'horaire était chargé. Je pense qu'il faut prendre le temps de prendre connaissance de l'ensemble des mémoires pour être en mesure de formuler des amendements qui ont du sens. Il me semble que le délai est restreint. Je vous mentionne cela en passant.
º (1615)
[Traduction]
La présidente: Mais les attachés de recherche de votre parti n'ont-ils pas suivi nos délibérations? Ce sont eux qui devraient vous suggérer des amendements. Ou bien est-ce que d'habitude vous préparez...
[Français]
M. Bernard Bigras: Je ne pense pas que ce soit pour le principe. Nous sommes des parlementaires. Donc, les amendements viendront de moi, et non du service de recherche. Est-ce qu'on se comprend bien?
J'admire le travail que fait toujours le service de recherche, autant sur le plan de ma formation politique que de la Bibliothèque, mais les amendements viennent de moi. Je trouve que le délai est serré. C'est tout ce que je voulais dire.
[Traduction]
La présidente: Y a-t-il d'autres commentaires? Poursuivons donc notre séance.
Mesdames et messieurs, nous accueillons six nouveaux témoins: MM. Austin Leavey, Dean Thomson, Ken Plews, Don McCabe, Stephen King et Mark Goodwin.
Monsieur Leavey, vous avez la parole.
[Français]
M. Austin Leavey (président, Association québécoise de la gestion parasitaire): Merci beaucoup, madame la présidente.
Avant de commencer, je voudrais vous remercier de nous avoir invités à cette réunion. Vous avez eu une copie du mémoire qui a été présenté en janvier au ministère de l'Environnement du Québec.
Les points sur lesquels nous nous sommes attardés en ce qui a trait au projet de loi C-53 font l'objet des six recommandations formulées dans le mémoire, qui nous semblent importantes. Nous considérons que deux des recommandations touchent plus précisément ce nouveau projet de loi.
Le premier point est de restreindre l'usage des produits, en particulier les produits concentrés ou à usage domestique qui sont considérés, selon nous, comme un danger potentiel pour la santé des gens et l'environnement. Le produit étant concentré, on demande aux utilisateurs de faire eux-mêmes la dilution, ce qui, à notre sens, est rarement suivi à la lettre. Donc, il y a souvent une surutilisation, une mauvaise application, puisque les gens ne prennent pas le temps de lire les étiquettes, ce qui est néfaste pour la santé et l'environnement.
Au niveau du transport, ce même gouvernement considère comme matières dangereuses la plupart des produits qui sont des solutions concentrées. Plusieurs de ces produits sont de classe 9.2 et donc dangereux pour l'environnement, et certains sont même de classe 6.1, c'est-à-dire toxiques pour l'être humain.
Pour ce qui est des produits de classe 9.2, qui est l'une des classes les plus répandues au niveau des insecticides domestiques en concentration, il suffit qu'un litre en soit échappé dans l'environnement pour que l'on doive faire ce qu'on appelle un rapport de cas de danger ou un rapport immédiat, selon les termes de la future loi. C'est dire à quel point ces produits concentrés sont un danger potentiel pour l'environnement et la santé du public. Ces produits se retrouvant sur les étalages, M. et Mme Tout-le-Monde peuvent se les procurer sans aucune information, parce que les vendeurs ont rarement reçu une formation adéquate. Voilà le premier point que je voulais soulever.
Le deuxième point concerne l'uniformisation de la réglementation, ce qui est le sujet de notre sixième recommandation. Au cours de vos discussions en comité portant sur le projet de loi C-53, il a été question de limites maximales de résidus, puis d'examens spéciaux que vous pouvez faire, ainsi que de consultations publiques que vous introduisez dans votre réglementation.
Il est clair que vous redonnez par la suite aux provinces un pouvoir de légiférer en matière de certification et de tout ce qui y est relié. Mais là où nous avons certaines réticences, c'est concernant le pouvoir des municipalités de légiférer en ce qui a trait à l'utilisation des pesticides. De plus en plus, on constate que des municipalités favorisent un pesticide plutôt qu'un autre ou bannissent tout simplement, en partie ou même en totalité, l'utilisation de pesticides sur leur territoire.
À notre avis, les municipalités n'ont pas les connaissances nécessaires en matière de pesticides et n'ont pas en main toutes les études que vous possédez à l'ARLA au niveau de la santé publique, etc. Par conséquent, elles ne sont pas en mesure, selon nous, d'établir des règles adéquates pour protéger leurs citoyens. De plus, lorsqu'elles bannissent la totalité des pesticides, elles mettent en danger leurs citoyens. Ce sont les deux points que nous voulions soumettre à votre attention.
Vous mentionnez aussi, à la fin, qu'il serait préférable de favoriser la formation. Il y a un point à retenir, et c'est que le Québec pense sérieusement à implanter un DEP obligatoire pour la certification de tout utilisateur de pesticides.
º (1620)
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Leavey.
Monsieur Dean Thomson, vous avez la parole.
M. Dean Thomson (président, Comité pour la protection des cultures et de l'environnement, Conseil canadien de l'horticulture): Bonjour.
Je suis pomiculteur à St. Paul d'Abbotsford au Québec et je préside le Comité pour la protection des cultures du Conseil canadien de l'horticulture. Notre organisation représente les producteurs horticoles qui cultivent des légumes, des fruits, des plantes d'ornement et des fines herbes partout au Canada.
Nous nous sommes intéressés activement au dossier des pesticides étant donné qu'il nous touche grandement, puisque les horticulteurs sont les principaux utilisateurs de ce que l'on appelle le programme des pesticides à usage limité. Ce sont aussi eux qui ont besoin d'avoir accès à ces produits à usage limité le plus rapidement possible, et tout aussi rapidement que leurs homologues aux États-Unis.
Madame la présidente et mesdames et messieurs du comité, nous vous remercions de nous avoir invités à comparaître aujourd'hui dans le cadre de votre évaluation et mise au point du projet de loi C-53.
Je tiens à vous féliciter de l'attention que vous portez à cette loi si importante et si attendue. Nous apprécions la portée et la sincérité des questions que vous soulevez depuis quelques semaines. Nous partageons votre volonté manifeste de faire de ce projet de loi un instrument fonctionnel pour tous les Canadiens.
[Français]
Nous espérions vivement l'harmonisation des pesticides avec les États-Unis depuis la conclusion de l'Accord commercial Canada--États-Unis en 1988 et de l'ALENA par la suite. Nous avons perdu la protection relative aux tarifs douaniers saisonniers sur les fruits et légumes, mais en échange, on nous avait promis l'harmonisation de l'accès aux pesticides avec les États-Unis. Cette promesse ne s'est jamais concrétisée. Nous attendons toujours.
Nous souhaitons l'harmonisation de l'accès, ce qui est à distinguer de l'harmonisation des normes d'homologation, car nous en avons vraiment besoin.
[Traduction]
Le processus d'homologation des pesticides est important. Il est important pour les agriculteurs, pour la population et pour l'économie canadienne. Nous comptons sur l'organisme chargé de l'homologation et de la réglementation de ces produits pour avoir accès en temps opportun à de nouveaux pesticides sûrs, efficaces et rentables, et aux mêmes choix que nos partenaires commerciaux.
Pour revenir à ce que mentionnait le rapport du vérificateur général, au sujet de la réduction des risques, sachez que cela fait déjà plusieurs années que le Conseil canadien de l'horticulture parle d'avoir accès à des produits chimiques novateurs, à moindre risque et plus sûrs. On a déjà fait valoir que le Canada tire aujourd'hui de l'arrière, que beaucoup de nos produits chimiques les plus âgés devraient sous peu faire l'objet d'une réévaluation, alors que nous savons que, dans bien des cas, il existe des produits de remplacement novateurs. Il faut trouver un moyen pour que ces nouveaux produits chimiques plus sûrs soient distribués plus rapidement pour que nos cultivateurs puissent les obtenir.
Nous avons besoin de produits homologués par un organisme qui affirmera sans équivoque aux Canadiens et au monde entier qu'ils ont été homologués selon un système scientifique. Nous voulons que la population reçoive cette assurance à intervalles réguliers pour qu'elle continue d'avoir confiance dans nos produits.
Aux États-Unis seulement, l'industrie horticole a accès à au moins 160 pesticides de plus que nous et tous sont approuvés par l'EPA, reconnu comme un organisme scientifique de classe mondiale. Suis-je déraisonnable de m'attendre à ce que mon gouvernement fournisse un programme d'évaluation qui puisse faire le même travail, à la même vitesse et en même temps? Depuis cinq ans, l'ARLA nous dit être disposée à faire des examens conjoints et à adopter d'autres mesures destinées à accroître l'efficience. En fait de résultats, ces initiatives ont fait chou blanc. Depuis 1997, seulement 10 p. 100 des homologations faites aux États-Unis l'ont été avec l'ARLA, et ce nombre devrait nous inquiéter.
Bon an mal an, au moins 10 à 15 nouveaux produits principe actif ne sont pas soumis à l'homologation au Canada. Il y a à cela de nombreuses raisons, dont une seule concerne le facteur du marché économique.
º (1625)
[Français]
Peu importe la teneur du projet de loi, à moins que l'organisme responsable ne soit capable et désireux de donner suite à vos intentions sérieuses, nous demeurerons insatisfaits et le public canadien continuera d'y perdre au change.
[Traduction]
L'ARLA doit changer. Elle doit devenir efficiente, conviviale, bien financée et dotée d'effectifs appropriés. Le personnel doit être habilité à faire le travail. L'ARLA doit avoir la capacité de réhomologuer les produits existants à temps, de suivre le rythme des nouvelles demandes et de trouver des façons efficientes de faire le rattrapage des 160 produits accumulés.
Au sujet du projet de loi, nous avons quelques observations à faire. Comme nous avons une grande diversité de cultures, qui chacune ne représente pas nécessairement un volume considérable, tout en étant un élément très important de l'horticulture canadienne, ce qui compte le plus pour nous, c'est qu'il y ait un «nouveau contrat» pour les pesticides à emploi limité au Canada. Il s'agirait d'abord de reconnaître les «pesticides à emploi limité» comme un élément distinct et défini de la loi. Veuillez à titre d'information vous reporter à la définition des pesticides à emploi limité.
Il y a aussi l'accès aux produits à risque réduit. Nous appuyons cette initiative énoncée dans le projet de loi.
Au sujet de la réhomologation, nous appuyons cette approche, car elle devrait rassurer le public et nous aussi quant à l'innocuité de ces produits.
Au sujet de la transparence et de la responsabilisation, c'est une bonne directive. Veuillez envisager une ouverture et un accès aux données comparables à ceux de la politique de l'EPA, pour éviter que les entreprises boudent le marché canadien.
Au sujet de l'efficacité, si le but est une utilisation minime et justifiée, laissez l'expert, en l'occurrence l'agriculteur, ajuster les concentrations. Le processus actuel prend plus de temps; il est coûteux et peut-être moins efficace. Je crois qu'il faut signaler que depuis des années, on constate que l'utilisation agricole des pesticides diffère beaucoup de leur utilisation domestique. Parce que je suis agriculteur et parce que je vois comment on se sert de ces produits dans ma famille et chez ma copine, je peux certainement vous dire que l'utilisation domestique a tendance à être un peu plus libérale, parce qu'on veut que ce soit vraiment efficace et qu'en regardant l'étiquette, on se dit qu'il faut en mettre un peu plus, pour obtenir des résultats. En agriculture, c'est plutôt une question financière. S'il y a une chose que craignent les producteurs de pesticides, c'est que les agriculteurs réduisent les concentrations, ce qu'ils font le plus possible, avec des applications aussi légères que possible, parce que cela représente un coût considérable, pendant la saison de culture.
[Français]
En conclusion, nous espérons que vous, les élus, veillerez à ce que cette loi réponde aux besoins des agriculteurs canadiens, notamment par ses règlements, politiques, directives et lignes directrices. Nous voulons que l'ARLA s'adapte aux besoins de sa clientèle. Nous continuons de traîner de la patte derrière nos concurrents en matière de ressources pour la protection des cultures par une marge de 10 à 15 nouveaux produits par année. C'est inacceptable.
Veuillez inclure le principe des pesticides à l'emploi limité dans les définitions de la loi et dans l'article 7, pour habiliter le ministre à donner suite le plus rapidement possible aux demandes d'homologation de pesticides à emploi limité.
º (1630)
[Traduction]
Madame la présidente, avant de conclure pour de bon, nous avons appris que le Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire déposera son rapport sur l'ARLA à la Chambre cet après-midi. Nous croyons que bon nombre de ses recommandations cadreront bien avec ce que nous avons demandé, soit des changements à la procédure d'homologation des produits à emploi limité. Il nous tarde que ces changements aient lieu, puisque nous estimons qu'ils sont dans l'intérêt de l'ensemble des Canadiens.
Merci, au nom des producteurs horticoles du Canada.
La présidente: Merci, monsieur Thomson.
Passons maintenant au Comité fédéral-provincial-territorial sur la lutte antiparasitaire et les pesticides, représenté par M. Ken Plews.
M. Ken Plews (coprésident sortant, Comité Fédéral, Provincial et Territorial sur la lutte antiparasitaire et les pesticides): Merci, madame la présidente, mesdames et messieurs. Ce mémoire provient des membres du Comité fédéral-provincial et territorial sur la lutte antiparasitaire et les pesticides, appelé comité FPT, et concerne des modifications proposées à la Loi sur les produits antiparasitaires du Canada.
Le comité FPT a été établi afin d'améliorer la collaboration entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux en ce qui concerne les programmes, les politiques, l'échange d'information et l'harmonisation dans le domaine de la lutte antiparasitaire durable et des pesticides. À ce titre, ce groupe reconnaît que la gestion de ces éléments critiques au Canada doit être une responsabilité partagée entre des pouvoirs mandatés constitutionnellement.
Nous croyons que la réglementation fédérale des produits antiparasitaires est le moyen le plus efficace et rentable d'offrir une lutte antiparasitaire uniforme à la population canadienne. La législation provinciale/territoriale offre des pouvoirs supplémentaires de réglementation permettant de prendre des mesures compte tenu des conditions et des préoccupations régionales dans les domaines du transport, de l'entreposage, de la vente, de l'utilisation et de la destruction des pesticides. Par exemple, les organismes de réglementation provinciaux et territoriaux peuvent établir des zones tampons afin de protéger les régions sensibles comme on l'a fait à Winnipeg à la suite de l'application d'adulticide pour lutter contre les moustiques.
L'année dernière, le Groupe de travail sur les pelouses saines a été créé avec l'objectif de réduire la dépendance vis-à-vis des pesticides pour l'entretien des pelouses par l'entremise de la mise en oeuvre de principes de lutte intégrée. En particulier, il vise la prévention des organismes nuisibles, l'utilisation de produits antiparasitaires à risque réduit et l'usage de pesticides en cas de nécessité seulement. D'autres groupes de travail FPT ont visé la mise en oeuvre d'un système national de classification des pesticides au Canada, la mise à jour de la base de données nationale des ventes des pesticides, des programmes de formation et de certification et l'évaluation des méthodes d'identification des zones tampons.
Dans plusieurs cas, le recours aux pouvoirs de réglementation des provinces et des territoires sert à garantir que les limites imposées au niveau fédéral soient respectées. Par exemple, on peut exiger que les spécialistes des traitements antiparasitaires obtiennent des permis d'utilisation avant de pouvoir utiliser certaines méthodes d'épandage telles que les pulvérisations aériennes. Les provinces et les territoires ont aussi le droit d'imposer des restrictions de façon à ce que les risques soient moindres que ceux considérés acceptables par le gouvernement fédéral.
De plus, les provinces et les territoires, par l'entremise de leurs programmes de formation et de certification, garantissent que les utilisateurs de produits antiparasitaires soient capables de respecter les exigences fédérales ainsi que celles des provinces et des territoires. Il faut noter que certaines provinces ont accordé un pouvoir de réglementation à leurs municipalités urbaines et rurales afin qu'elles puissent édicter, selon leur champ de compétence locale, des règlements municipaux dans le but de restreindre encore plus l'usage des pesticides.
Le comité FPT, lors de ses délibérations précédentes et actuelles, a travaillé activement pour faire du Canada un leader de la lutte antiparasitaire durable. Afin d'arriver à cet objectif, nous avons reconnu depuis longtemps qu'on doit traiter certaines lacunes et dispositions périmées de la législation tant au niveau fédéral qu'aux niveaux provincial et territorial. En tenant compte de cela, des membres provinciaux/territoriaux travaillent avec l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire dans ses formes précédentes et actuelles sur des sujets et des programmes qui pourraient être améliorés et harmonisés si la loi habilitante était modifiée.
Ayant travaillé à ces questions depuis quelques années en tant que partenaires et coresponsables de la réglementation, nous avons reçu et analysé des réactions de plusieurs intervenants tels que des fabricants et des distributeurs de pesticides, des organisations d'agriculteurs ainsi que des secteurs sanitaires et gouvernementaux. Les provinces et les territoires prévoient que la nouvelle loi entraînera d'importants avantages dont une augmentation de la confiance vis-à-vis des décisions d'homologation du gouvernement fédéral, davantage d'occasions d'incidences sur les décisions d'homologation, un accès aux renseignements appuyant les décisions d'homologation, plus de facilité d'accès aux renseignements de sécurité, des réglementations potentiellement flexibles quant aux limites de résidus inférieures à celles prescrites sur l'étiquette, et une collaboration plus efficace en matière de conformité et d'exécution.
En ce qui concerne les préoccupations particulières, les membres provinciaux croient que les «usages limités» des pesticides sont très importants pour réduire les risques et mettre en oeuvre la lutte antiparasitaire durable. Ils sont également essentiels dans la diversification des cultures et les objectifs de gestion des ressources. Nous accueillerions avec plaisir d'autres dispositions sur les usages limités, y compris une amélioration du partage et de la création des données ainsi qu'un financement supplémentaire afin de permettre aux producteurs canadiens de faire concurrence avec leurs voisins américains.
º (1635)
Les provinces se préoccupent des déclencheurs d'examen. Elles espèrent qu'ils ne seront pas employés afin d'empêcher ou de retarder le processus normal d'homologation.
Enfin, les provinces se préoccupent des demandes et des ressources additionnelles que cette nouvelle loi pourrait engendrer.
Nous croyons que le temps est venu pour le gouvernement fédéral de mettre en oeuvre les modifications proposées et nous appuyons les objectifs du projet de loi C-53, la Loi sur les produits antiparasitaires, de 2002. Nous croyons aussi que l'impact majeur de toute loi dépend des règlements qui interprètent et appliquent une loi. Nous considérons donc qu'il serait prudent de mettre en oeuvre cette loi et que nous tous, autant les coresponsables de la réglementation que les intervenants, devrons garantir que les règlements en cours de développement répondront aux besoins du Canada.
J'ai annexé à notre mémoire une fiche technique sur la réglementation des pesticides au Canada, ainsi que le mandant de notre comité, pour ceux que cela pourrait intéresser.
Nous vous remercions de nous avoir permis de vous présenter ce mémoire.
La présidente: Merci, monsieur Plews.
Nous écouterons maintenant M. Don McCabe, des Producteurs de grains du Canada
M. Don McCabe (président, Comité de l'environnement, Producteurs de grains du Canada): Merci à vous, madame la présidente, et merci au comité.
Pour les besoins du compte rendu, je précise que je vous ai déjà rencontré le 23 avril. Ce jour-là, je représentais l'organisme AGCare. Je n'ai pas de jumeaux identiques. Heureusement, il pleut suffisamment dans le sud-ouest de l'Ontario, aujourd'hui, pour que je puisse venir ici représenter les Producteurs de grains du Canada; je suis président du Comité de l'environnement.
Les Producteurs de grains du Canada sont le seul organisme national qui se consacre à la représentation des producteurs de grains. Nous comptons parmi nos membres les producteurs des principaux grains et oléagineux, c'est-à-dire de blé, d'orge, de maïs, de canola et de soya, dans les grandes catégories de denrées, afin qu'ils mettent au point des politiques communes en vue de discussions nationales ou internationales. Plus de 80 000 producteurs de grains et oléagineux sont représentés par notre association.
J'insiste sur le fait que pour la plupart des fermes du pays, à moins d'être strictement horticoles, même lorsqu'il y a élevage, il y a probablement de la culture de céréales dans l'exploitation. La contribution de toutes ces exploitations à l'économie agroalimentaire est très substantielle, avec une valeur à la ferme de 10 milliards de dollars par an.
Tous les producteurs de grains et oléagineux reconnaissent la nécessité d'une industrie durable du point de vue environnemental autant qu'économique, qui donnera aux générations futures de Canadiens un approvisionnement alimentaire sûr et un environnement sain. On peut constater les efforts de l'industrie en faveur de la sécurité et de la durabilité notamment dans la réduction du recours aux pesticides des exploitations agricoles. Seulement en Ontario, la consommation de pesticides mesurée en termes d'ingrédients actifs a baissé de 40,7 % depuis 1983. Des réductions ont aussi été accomplies dans d'autres provinces. La réduction des dommages environnementaux qui résulte de ces changements est assortie à une plus grande sécurité et santé humaines, du fait que les limites d'exposition sont réduites, de même que les risques pour ceux qui font l'épandage de ces produits, entre autres.
Les Producteurs de grains du Canada appuient la vision du gouvernement traduite par le projet de loi C-53, qui vise à améliorer la protection de l'environnement et de la santé humaine par un recours à un régime de réglementation fondé sur des données scientifiques. Nous appuyons donc aussi une réduction plus grande des risques associés aux pesticides par l'homologation de produits à moindre risque. Ces produits offrent de nouvelles solutions pour réduire l'exposition à toutes les sources pour la santé humaine, en protégeant particulièrement les enfants, accroissent la compétitivité des producteurs tout en renseignant davantage le public sur les procédures d'homologation.
Les Producteurs de grains du Canada appuient l'innovation et la recherche nécessaires pour atteindre les objectifs, qui pourront aussi donner une gouvernance environnementale pour les terres cultivées du pays. Malheureusement, la loi ne permet pas actuellement une mise en oeuvre complète de ses principes, dans son état actuel. Ce à quoi tiennent les Producteurs de grains du Canada, c'est l'accès à des pesticides ayant des ingrédients actifs plus sûrs pour la santé et pour l'environnement, ainsi qu'une participation appropriée des intéressés au processus.
J'aimerais d'abord parler d'harmonisation. Le paragraphe 17(2) du projet de loi précise, en gros, que si un pays de l'OCDE décide d'interdire un principe actif chez lui, notre ministre doit automatiquement procéder à un examen spécial de ce principe actif. Ce paragraphe empêcherait un producteur canadien d'avoir accès ou de continuer d'avoir accès à un produit antiparasitaire plus sûr pour un environnement qui est différent de celui des pays de l'OCDE.
Par ailleurs, si l'élimination d'un principe actif résulte de la mesure prise par un pays de l'OCDE, on devrait pouvoir déduire que l'approbation d'un principe actif par un pays de l'OCDE doit automatiquement déclencher un examen d'homologation pour ce principe actif, au Canada.
Il y a aussi l'article 67. Actuellement, aux États-Unis, il y a un nombre nettement supérieur de principes approuvés de lutte anitparasitaire pour les cultivateurs. Par conséquent, les producteurs américains ont un avantage concurrentiel, de même qu'environnemental, par rapport aux producteurs canadiens.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-53 n'offre pas d'outils d'harmonisation des règles de contrôle antiparasitaire au Canada avec celles de nos partenaires, par exemple par l'élaboration de normes internationales. Par conséquent, en vertu de cet article du projet de loi, il est possible de se rapprocher davantage des normes internationales, ce qui permettrait davantage de concurrence sur le marché, pour les producteurs canadiens, sans compromettre nos normes de santé et de sécurité.
Deuxièmement, nous aimerions parler de nos craintes relatives à la transparence, pour l'accès concurrentiel. Le projet de loi C-53 donne un accès sans précédent à des renseignements détaillés et à des évaluations des pesticides. En outre, le public peut demander que le ministre ordonne un examen spécial.
º (1640)
Les Producteurs de grains du Canada s'inquiètent de ce que cette disposition permette à des particuliers d'abuser du procesus scientifique réglementaire en demandant des examens spéciaux qui pourraient avoir peu ou pas de justification scientifique.
L'ARLA a pour tâche d'avoir un personnel compétent pour bien interpréter les données scientifiques et de produire des rapports complets et exacts pour que des tiers les examinent au nom du public canadien. C'est pourquoi des mesures comparables à celles des États-Unis pourraient à notre avis répondre aux besoins du public et des entreprises, en donnant un accès concurrentiel à des produits plus sûrs, pour les agriculteurs canadiens, tout en veillant à la sécurité du public.
Notre troisième préoccupation se rapporte à la persuasion nécessaire et à l'examen des données. Au sujet du paragraphe 19(4), les Producteurs de grains du Canada reconnaissent que l'information relative au risque et à la valeur des autres produits antiparasitaires homologués pour le même usage doit être prise en compte lorsqu'on étudie un principe actif. Cela ouvre toutefois la porte à une définition appropriée de la valeur d'un produit et de l'accès nécessaire à nombre de produits qui ont le même usage mais des modes d'action différents. Des précisions sont donc nécessaires pour éviter de rejeter des principes actifs trop puissants, avant même que de nouveaux principes actifs plus sûrs soient disponibles, comme cela se produit actuellement, dans le cas de l'élimination du lindane pour le traitement des semences de maïs, alors qu'il y a peu de possibilités d'application de stratégies de gestion antiparasitaire innovatrices appliquant le principe de la rotation des pesticides.
Au sujet des pesticides à emploi limité, actuellement, au Canada, leur homologation ne répond pas aux besoins des producteurs. Le projet de loi C-53 n'offre aucune solution pour éliminer les obstacles imposés aux producteurs de grains et oléagineux dans l'ensemble, ou d'une région à l'autre, et il faut immédiatement chercher une solution. L'homologation de nouveaux principes actifs plus sûrs, pour le marché canadien, coûte cher aux entreprises, puisque nous ne représentons que 3 p. 100 de la demande mondiale. De ce marché déjà petit, le marché des pesticides à emploi limité représente une toute petite portion. Par conséquent, une harmonisation accrue des activités de l'ARLA avec celle de l'EPA américaine pourrait répondre à cette préoccupation croissante pour les producteurs canadiens.
Dans notre propre pays, il faut envisager davantage d'accorder l'accès égal à toutes les régions, sans qu'il soit nécessaire d'homologuer des produits à emploi limité, quand on dispose de données éprouvées, pour des régions semblables. Certains produits ne sont nécessaires qu'à plus petite échelle, et pour de courtes périodes de temps, en réaction à des conditions environnementales ou à des ravageurs imprévus, par exemple s'il y a une épidémie dans une région donnée. Les demandes d'harmonisation entre l'EPA et l'ARLA, pour ces domaines d'emploi limité, sont justifiées. Ce genre d'épidémie, en plus de coûter cher aux producteurs, peut compromettre la sécurité alimentaire du public, ce qui justifierait encore plus un accès rapide grâce à une collaboration et une harmonisation accrues.
Enfin, parlons de la participation des intéressés. Comme nous le disions précédemment, le projet de loi C-53 a une incidence directe sur la capacité de nos membres d'être concurrentiels tout en assurant une gérance environnementale, au nom de tous les Canadiens. C'est pourquoi les producteurs de grains du Canada demandent au ministre de mettre sur pied un comité des intéressés, pour tenir compte de tous les besoins, dans ce domaine. Ce comité non seulement conseillerait le ministre sur les nouvelles orientations à prendre, mais permettrait d'améliorer les communications sur toutes les questions relatives à la réglementation et aux mesures habilitantes du projet de loi C-53.
En terminant, les Producteurs de grains du Canada félicitent le gouvernement pour son examen de la Loi sur les produits antiparasitaires. Nous espérons une approche proactive et la possibilité de participer au processus pour répondre aux besoins de tous les Canadiens, au sujet des pesticides. Ces besoins comprennent celui de mesures qui amélioreront la santé et l'environnement pour l'ensemble de la société tout en assurant ou augmentant la viabilité économique des producteurs canadiens, pour les principales cultures que sont le blé, l'orge, le canola, le maïs et le soya.
Merci beaucoup pour le temps que vous nous avez accordé.
º (1645)
La présidente: Merci, monsieur McCabe.
Je cède maintenant la parole à M. Stephen King, de la Municipalité régionale de Halifax.
M. Stephen King (directeur et conseiller principal, Service des parcs et des espaces naturels, Municipalité régionale de Halifax): Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, c'est un honneur pour moi de venir de Halifax pour vous décrire un peu les réalisations de notre ville.
Je m'appelle Stephen King. Je suis directeur et conseiller prinicipal au Service des parcs et des espaces naturels de la Municipalité régionale de Halifax. Brièvement, je m'occupe, aux échelons supérieurs, de l'élaboration de politiques et de gestion stratégique et durable des ressources. Cela comprend l'administration de la mise en oeuvre du règlement P-800 de la Municipalité régionale de Halifax sur les pesticides, les herbicides et les insecticides et de la campagne connexe d'information et de sensibilisation du public au jardinage et à l'entretien paysagers durables et à l'utilisation de solutions de rechange aux pesticides.
Je suis horticulteur paysagiste et gestionnaire de parc de métier. Je travaille dans ce domaine depuis près de 30 ans, autant dans les secteurs public que privé. Je travaille au niveau des gestionnaires supérieurs et des surintendants au service municipal des parcs depuis plus de 20 ans. Je connais donc assez bien notre secteur.
Je suis heureux aujourd'hui de vous donner un bref aperçu des initiatives de réduction de l'usage des pesticides à Halifax et de ce qui peut être réalisé et de certaines de mes réflexions sur les outils législatifs fédéraux qui pourraient nous être utiles au niveau local.
Nous avons déposé un document intitulé «The 2001 Overview of Halifax Regional Municipality Pesticide Bylaw P-800». J'ignore s'il a été traduit ou non. S'il ne l'a pas encore été, je crois savoir qu'il le sera et qu'il vous sera alors distribué. Essentiellement, c'est un résumé de 17 pages de nos initiatives de réduction des pesticides à Halifax. Je laisse le document ici.
La Municipalité régionale de Halifax en est actuellement à la troisième année de l'interdiction des pesticides qu'elle met en oeuvre graduellement sur quatre ans et qui touche les propriétés domiciliaires et les propriétés appartenant aux municipalités, ce qui n'inclut ni les terres agricoles, ni les forêts, ni les terrains de golf, etc. Jusqu'à présent, tout va très bien. L'interdiction est appliquée graduellement sur quatre ans et nous en sommes à la troisième année.
Les efforts que nous avons déployés jusqu'à présent prouvent qu'il y a des mesures de rechange économiques et pratiques aux pesticides employés à des fins esthétiques, et que ces mesures de rechange sont efficaces. Il ne s'agit pas d'une solution miracle, mais plutôt d'un ensemble de mesures comprenant un sol sain, un entretien durable et adéquat, la diversité de l'aménagement paysager, des variétés résistantes de graminés de pelouse, d'arbres et de plantes, et le recours à des produits naturels et moins toxiques contre les parasites, y compris les savons insecticides, les organismes de contrôle biologique, les pièges collants, etc.
Voilà déjà bien des années que nous n'utilisons plus de pesticides synthétiques dans notre système de parc, depuis que nous avons adopté des pratiques d'entretien durable dans nos serres, nos parcs, nos rues et nos installations connexes. Nous estimons que les pratiques d'entretien durable permettent de créer des paysages plus sains, plus durables et plus utilisables.
Les jardins publics de Halifax, dont la renommée est mondiale et qui sont considérés comme l'un des plus beaux exemples de jardins victoriens ayant survécus en Amérique du Nord, sont entretenus ainsi depuis de nombreuses années. Nous n'y utilisons plus de produits synthétiques depuis longtemps.
Nous sommes aussi heureux de vous indiquer que le ministère de la Défense nationale a adopté la directive environnementale ED4003-4/02, qui vise l'élimination des pesticides à des fins esthétiques sur les pelouses des propriétés du MDN. Cette directive interdit, depuis le 31 mars 2002, l'application des pesticides à des fins esthétiques sur les pelouses des terres du MDN se trouvant à moins de 50 mètres d'une école, d'une garderie, d'un parc, d'un terrain de jeu, d'un hôpital ou d'une église. D'ici le 1er avril 2003, cette interdiction s'appliquera à toutes les installations du MDN. Nous sommes ravis que la base des Forces canadiennes de Halifax se conforme déjà à toutes ces conditions. Cela cadre tout à fait avec les initiatives de la municipalité.
Dans notre région, la réduction des pesticides à des fins esthétiques semble jouir d'un grand appui populaire. Les habitants de notre région veulent en savoir plus sur les mesures de rechange durables et économiques des pesticides. L'entretien paysager durable est économique, se fait assez facilement et est efficace. En dernière analyse, tout le monde y gagne.
Par ailleurs, la réduction des pesticides à des fins esthétiques pour des motifs de santé humaine et environnementale n'est pas un enjeu local mais plutôt national. Par conséquent, pour une meilleure cohérence d'ensemble, pour une meilleure protection du public, pour une meilleure compréhension et pour une meilleure durabilité environnementale, tout projet de loi fédéral sur cette question devrait comprendre la réduction de l'utilisation de pesticides à des fins esthétiques dans tout le Canada.
Conformément au principe de prudence, nous estimons que, par défaut, la loi fédérale devrait limiter l'usage des pesticides à des fins esthétiques. On pourrait prévoir des exceptions pour les cas de maladies ou d'infestations parasitaires graves, ainsi que pour les problèmes parasitaires pouvant avoir une incidence sérieuse sur la santé humaine, lorsque les pratiques durables ne sont pas assez efficaces à court terme. De plus, on pourrait prévoir la mise en oeuvre graduelle du nouveau régime qui comprendrait des échéances raisonnables et préétablies afin de permettre aux Canadiens et à l'industrie de s'adapter.
En terminant, nous vous remercions de nous avoir permis de vous décrire un peu ce que nous faisons à Halifax.
Merci.
º (1650)
La présidente: Merci, monsieur King.
Notre dernier témoin est M. Mark Goodwin, de Pulse Canada
M. Mark Goodwin (coordonnateur de la lutte antiparasitaire, Pulse Canada): Au nom de Pulse Canada et des producteurs de légumineuses à grain du Canada, je vous remercie de m'offrir l'occsaion de présenter des commentaires sur le le projet de loi C-53.
En guise de préambule, je vous indique que les producteurs de légumineuses font pousser des pois, des fèves, des lentilles et des pois chiches--des aliments bien connus du Canadien moyen. Ce qu'ignore peut-être le Canadien moyen, c'est que les agriculteurs canadiens sont les premiers exportateurs mondiaux de ces merveilleux produits que nous vendons à plus de 70 pays au monde. Ici, au pays, le fait même de les inclure dans la rotation culturale a des effets positifs énormes sur le sol; cela en améliore la qualité tout en lui ajoutant des éléments nutritifs. Tous les habitants du pays y gagnent lorsque les producteurs intègrent la culture des légumineuses à leurs opérations agricoles.
Ce projet de loi aura une incidence profonde et à long terme sur la culture des légumineuses. D'entrée de jeu, je tiens à dire que nous appuyons les dispositions de ce projet de loi axées sur la transparence, l'obligation de rendre des comptes et la sécurité du public. Nous appuyons également les tentatives en vue d'harmoniser le processus d'homologation avec celui des États-Unis. Mais il existe dans le secteur agricole certaines tendances que nous voudrions mettre en lumière et qui entreront bientôt en conflit avec les intentions de ce projet de loi, et cela pourrait compromettre les progrès réalisés sur le plan de l'agriculture durable, surtout dans l'industrie des légumineuses.
Voici les trois points que j'aimerais soulever.
Premièrement, au cours de ces dernières années, il y a eu tellement de fusions d'entreprises du secteur des sciences de la vie que leur nombre a maintenant chuté de la moitié et que celles qui restent sont des géantes. Ces très grandes entreprises prennent les décisions économiques sur la viabilité de l'homologation de nouvelles techniques en fonction de vastes cultures comme celles du riz, du blé et du maïs. Même si nous considérons que notre industrie canadienne des légumineuses est un secteur dynamique et en expansion, avec ses 6 millions d'acres, il s'agit néanmoins d'une culture de petite envergure pour les entreprises des sciences de la vie.
Il est donc nécessaire pour nous que cette loi contienne une disposition claire concernant la culture sur surface réduite de façon à ne pas créer de disparité pour l'industrie des légumineuses. En vertu d'une telle disposition, on pourrait enregistrer les outils technologiques utilisés pour les légumineuses en tant que cultures en surface restreinte. Une telle approche permettrait aux associations de producteurs de travailler avec les entreprises des sciences de la vie à définir et à accélérer les processus d'examen afin qu'il n'y ait pas de discrimination à l'égard des légumineuses.
Si je puis me permettre, j'aimerais vous raconter l'une des histoires les plus intéressantes du milieu agricole d'aujourd'hui. C'est l'histoire du pois chiche en Saskatchewan.
Au cours des cinq dernières années, nos agriculteurs de la Saskatchewan ont fait preuve d'innovation dans la culture de ses végétaux. Les plantes elles-mêmes donnent de bons rendements dans les zones sèches de la Saskatchewan et offrent aux agriculteurs de ces zones une possibilité de diversification dont ils avaient grandement besoin. De quelques milliers d'acres, la production couvre maintenant 1,2 million d'acres dans la province. Mais il y aussi le fait que cette culture est bonne pour le sol en ce qu'elle permet à des micro-organismes de lui apporter des éléments nutritifs.
Les producteurs de pois chiches de la Saskatchewan sont devenus des fournisseurs de réputation mondiale. Pourtant, il y a risque de disparité de traitement. Des outils permettant de soustraire la culture aux maladies sont nécessaires. Toutefois, le succès même de cette culture peut être annonciateur de sa disparation. Avec une superficie de 1,2 millon d'acres, elle pourrait être trop vaste pour les programmes de culture sur surface réduite, mais trop petite pour attirer l'attention des entreprises des sciences de la vie. Contrairement aux cultures horticoles, il n'y a pas de grandes surfaces consacrées aux pois chiches aux États-Unis, ce qui aiderait à établir une analyse de rentabilisation pour l'homologation des nouveaux produits sans recourir au statut des surfaces réduites.
Je sais que cela va à l'encontre du gros bon sens, mais c'est un cas où l'usage sûr et efficace des pesticides nous permet de réduire les dommages que nous infligeons à la terre et à l'environnement.
Nous avons donc cette belle histoire d'innovation de la part des agriculteurs, de revenus d'exportation et d'agriculture durable en Saskatchewan, mais tout cela est menacé à cause de l'accès aux outils dont les producteurs ont besoin. La loi doit contenir une disposition sur les surfaces réduites qui tiendrait compte de ces problèmes.
Deuxièmement, nous considérons que l'harmonisation avec le système d'homologation américain est un élément important de la lutte antiparasitaire future dans le secteur des légumineuses. À l'instar de M. Thomson, j'estime que nous avons besoin d'une loi harmonisant les aspects de l'ALENA qui ont trait aux renseignements commerciaux confidentiels avec les politiques déjà en place aux États-Unis. Nous ne voulons pas que des entreprises refusent des améliorations technologiques au Canada du fait que des renseignements exclusifs sont rendus publics d'une manière incompatible avec les dispositions américaines.
º (1655)
Enfin, même si nous encourageons la transparence et l'efficience envisagées pour l'ARLA, nous voulons également que des mesures concrètes soient prises afin d'assurer cette responsabilisation à long terme. Nous appuyons l'idée, annoncée dans le rapport Speller, d'un ombudsman pour l'ARLA, afin d'instituer un recours pour le règlement des différends ou problèmes dans ce secteur complexe de la science et de la réglementation.
En terminant, je félicite aussi le gouvernement d'avoir déposé cette mesure législative.
Je vous remercie de m'avoir écouté.
La présidente: Je vous remercie de nous avoir décrit vos positions si clairement.
Il nous reste un peu plus d'une demi-heure. Les membres du comité qui souhaitent poser des questions pourraient-ils me l'indiquer afin que je puisse répartir le temps de façon équitable?
Il n'y a que quatre intervenants? Dans ce cas, chacun disposera du temps de parole habituel.
Nous commencerons par M. Merrifield.
M. Rob Merrifield: Merci à tous d'être venus.
Cette étude est des plus intéressante. Nous avons entendu des témoins des deux extrêmes, représentant les deux côtés de la médaille, mais il est intéressant de noter que les deux camps ont quand même quelque chose en commun. D'abord, personne ne semble satisfait de l'ARLA. J'ai tenté de trouver quelques remarques positives à ce sujet, mais il semble que l'insatisfaction soit généralisée. On s'entend aussi à l'unanimité pour dire qu'il est bon d'avoir dans les meilleurs délais les produits de la haute technologie les plus sûrs et les plus efficients. Que ce soit par le biais de l'harmonisation avec les États-Unis ou d'une plus grande efficience au sein de l'ARLA, quel que soit le moyen choisi, les deux camps s'entendent au moins sur le principe.
Les témoignages que nous avons entendus aujourd'hui n'ont pas beaucoup parlé des avantages de ce projet de loi. M. Leavey en a touché quelques mots. Un nombre considérable de gens s'inquiètent de l'utilisation des pesticides. Je ne connais pas un seul agriculteur qui se plaise à utiliser des pesticides. Ce n'est qu'un outil qu'on utilise quand il faut. Il faut s'en servir de façon efficace mais aussi sûre, et surtout de façon à ce que cela profite non seulement à un secteur, mais à toute la société.
J'aimerais que vous nous en disiez plus long sur les produits antivirus, les moustiques, et ainsi de suite. Pourriez-vous nous donner plus de détails sur les bienfaits des pesticides?
» (1700)
[Français]
M. Austin Leavey: Les pesticides dont vous parlez au niveau des virus, des autres petits insectes et parasites ou des prédateurs sont peu utilisés dans le domaine de l'extermination par les services antiparasitaires domestiques et commerciaux. Cela arrive tranquillement sur le marché. Nous utilisons présentement encore trop de produits chimiques, de produits de dérivés de synthèse; il y en a encore trop. Il y a une amélioration à faire et elle se fait tranquillement. Il y a beaucoup de produits appelés «appâts alimentaires» qui permettent de réduire considérablement l'utilisation de produits chimiques. Il y a beaucoup de phéromones, qui sont des pièges qui ciblent un insecte très précis, mais ça se limite à cela pour l'instant.
Je reviens à ce que nos confrères ont dit. Il y a des lenteurs au niveau de l'enregistrement de nouveaux produits dont les États-Unis bénéficient depuis longtemps. Malheureusement, nous tardons à y avoir accès.
[Traduction]
M. Rob Merrifield: Merci. Je suis heureux que vous nous souligniez à quel point il est important de faire homologuer dans les meilleurs délais les produits sûrs et bénéfiques dans ce domaine.
Monsieur McCabe, j'aimerais savoir combien de gens vous représentez. Vous avez dit que l'Association canadienne des producteurs de céréales représente 80 000 agriculteurs, n'est-ce pas?
M. Don McCabe: C'est moins que ça. Il s'agit plutôt des agriculteurs qui retirent plus de 50 p. 100 de leur revenu de la culture de céréales et d'oléagineux. Les producteurs de bétail font aussi pousser du maïs, du blé ou de l'orge sur leurs fermes pour nourrir le bétail et ils utilisent des pesticides pour ces cultures.
Les 12 groupes qui appartiennent à l'Association canadienne des producteurs de céréales sont, d'un océan à l'autre et par ordre alphabétique, la Alberta Barley Commission, l'Alberta Winter Wheat Producers Commission, l'Atlantic Grains Council, la British Columbia Grain Producters Association, la Canadian Canola Growers Association, la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec, la Manitoba Corn Growers Association, la Ontario Soybean Growers, la Commission ontarienne de commercialisation du soya, la Commission ontarienne de commercialisation du blé, la Western Barley Growers Association et la Western Canadian Wheat Growers Association.
Voilà tous les membres de notre association, monsieur.
M. Rob Merrifield: Pouvez-me dire combien de membres compte l'association, approximativement?
M. Don McCabe: Le nombre total des producteurs? Le total selon les données du dernier recensement représente le total d'agriculteurs. Nous sommes environ 200 000 à l'heure actuelle.
Comme vous l'avez dit dans votre dernière intervention, les pesticides sont pour nous un outil. Mais il est certain que moins j'en utilise, mieux c'est, car il s'agit de mon gagne-pain.
M. Rob Merrifield: Dans notre étude du projet de loi, nous nous penchons sur l'efficacité des pesticides. Croyez-vous qu'ils soient vraiment nécessaires?
» (1705)
M. Don McCabe: J'estime qu'une approche réglementaire fondée sur des données scientifiques doit prévoir des mesures d'évaluation de l'efficacité, car les entreprises, elles, nous vendent des molécules beaucoup plus ciblés et des quantités de plus en plus petites.
Lorsque je me suis lancé dans l'agriculture, on utilisait des volumes beaucoup plus importants d'ingrédients actifs. Aujourd'hui, il me suffit de faire macérer l'équivalent de quelques sachets de thé dans 500 gallons d'eau que j'épands sur la même superficie, ce qui constitue un fardeau beaucoup moins lourd pour l'environnement.
J'aimerais qu'il existe une base de données sur l'efficacité de ces produits. À partir de ces données, je pourrais faire mes recherches sur ma propre ferme pour déterminer quelles sont les quantités qui me sont nécessaires selon les degrés d'infestation.
M. Rob Merrifield: Je crois savoir qu'aux États-Unis, cela n'est pas prévu dans la loi. Est-ce que cela contribue aux difficultés que nous connaissons à mener à bien l'harmonisation?
M. Don McCabe: Je ne crois pas que cela y contribue directement. D'autres seraient mieux en mesure que moi de vous expliquer pourquoi il n'y a pas encore eu harmonisation. Toutefois, je peux vous dire que, sans disposition sur l'efficacité et en raison de certaines des mesures qui existent actuellement au Canada, les Américains ont réussi à transformer du matériel d'épandage en bouillie pour les chats en mélangeant des produits qui ne vont pas ensemble.
M. Rob Merrifield: C'est exact.
C'est tout pour moi.
La présidente: Merci. Je cède la parole à M. Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: Puis-je savoir combien de temps j'ai à ma disposition?
[Traduction]
La présidente: Les cinq minutes habituelles.
[Français]
M. Bernard Bigras: Les témoins se sont plaints du manque de temps pour faire leurs présentations. Pour ma part, j'estime que je manque de temps pour poser mes questions.
Vous avez beaucoup parlé de la question de l'harmonisation avec les politiques américaines. Je suis tout à fait d'accord avec vous, d'ailleurs. Un des constats de la commissaire à l'environnement du Canada était l'absence de politique de réduction des risques, alors qu'on sait que dans plusieurs pays, il y a actuellement des politiques et des programmes à cet égard. Je pense entre autres à l'agence de protection de l'environnement des États-Unis, où il existe un programme de gérance environnementale des pesticides qui permet de faire un partenariat volontaire des utilisateurs, des cultivateurs et des entreprises de transformation des aliments, dont l'objectif est de trouver des solutions sûres.
Croyez-vous que, dans le cadre d'une harmonisation avec les Américains, il serait souhaitable--je ne sais pas si ce programme existe au Canada--d'avoir ce type de programme au Canada?
[Traduction]
M. Mark Goodwin: Pourrais-je répondre à cette question?
Je vous donne un exemple: en juin, les producteurs de légumineuses américains viendront rencontrer leurs homologues canadiens. Ensemble, nous allons tenter de mettre en commun nos idées de recherche non seulement sur les pesticides, mais aussi sur la lutte antiparasitaire intégrée et les outils autres que les pesticides au sujet desquels nous pourrions communiquer le fruit de nos recherches. Nous avons invité des transformateurs, des producteurs, des chercheurs et des représentants des entreprises des sciences de la vie.
Voilà le genre de choses qui pourrait découler de l'harmonisation.
[Français]
M. Bernard Bigras: Est-ce une politique ou un programme canadien, ou si ce sont des échanges qui se font dans un cadre...?
[Traduction]
M. Mark Goodwin: Nous espérons que nous ferons des émules dans d'autres secteurs agricoles. Que ce soit un programme qui relève d'un mandat ou une initiative de vulgarisation, c'est là le genre d'activité que nous recherchons.
[Français]
M. Bernard Bigras: J'ai une autre petite question, et vous pourrez y répondre ensuite.
Toujours dans un objectif d'harmonisation avec les Américains, on sait que le ministère de l'Agriculture des États-Unis avait fixé un objectif national qui était de soumettre 75 p. 100 du territoire agricole américain à la lutte intégrée au plus tard en l'an 2000. Ce sont des annonces qui ont été faites par le passé. Je voudrais savoir ce que vous pensez de ce type de politique ou d'objectif national, qui pourrait exister au Canada.
[Traduction]
M. Don McCabe: À mon avis, la lutte antiparasitaire intégrée existe déjà au Canada, parce que les producteurs qui n'ont pas encore abandonné l'agriculture travaillent dans des conditions économiques si difficiles que même les économies de bout de chandelle comptent. Ils envisagent déjà de modifier le moment où les différents pesticides sont épandus, la réduction optimale des quantités de pesticides utilisés et diverses autres méthodes.
Les producteurs de céréales, par exemple, en raison du chevauchement important des cultures entre les deux pays, s'intéressent beaucoup aux stratégies de lutte antiparasitaire intégrée. Au Canada, nous les avons déjà adoptées en suivant l'exemple des pays européens et nous tentons d'employer diverses autres stratégies.
L'ennui, lorsqu'on a recours à des méthodes européennes, c'est que les méthodes européennes ne s'accompagnent pas des mesures de sécurité sociale qui existent en Europe. Nous ne sommes pas en mesure, comme les Européens, de récupérer les coûts qu'entraînent ces mesures de lutte antiparasitaire.
En ce qui concerne les États-Unis, les boeufs sont enfin devant la charrue. J'imagine que les producteurs américains ont beaucoup d'avance sur nous en matière de lutte antiparasitaire intégrée, encore une fois, parce que les producteurs doivent obtenir le meilleur rendement dans la production d'aliments sûrs qui comportent des avantages pour l'environnement et la société.
» (1710)
[Français]
M. Bernard Bigras: Vous ne visez pas nécessairement une harmonisation environnementale. Ce sont davantage des conditions d'échanges économiques que vous souhaiteriez voir en termes de renseignements harmonisés, par exemple, mais pas nécessairement une harmonisation environnementale sur la base de ce que peut faire l'agence américaine.
Vous parlez de l'Europe. Que pensez-vous de la présence d'incitatifs financiers aux agriculteurs qui décideraient d'éliminer l'usage des pesticides, comme cela se fait en Suisse, par exemple?
[Traduction]
M. Don McCabe: Si cela se faisait ici, le gouvernement me devrait déjà beaucoup d'argent. En ce qui concerne votre autre question sur les normes environnementales par opposition aux normes économiques, la distinction entre les deux n'est pas si clairement définie.
L'expérience de l'Ontario, qui a réduit son empreinte écologique de 40,7 p. 100 depuis 1983, soit en 19 ans, a fait la preuve que la réduction de l'usage des pesticides ne peut qu'entraîner une amélioration du bilan financier.
Lorsque nous parlons d'harmonisation, nous voulons l'harmonisation des données, des données scientifiques et non pas des restrictions économiques ou environnementales. Nous voulons l'harmonisation des données scientifiques à la base de la réglementation pour nous assurer qu'il nous sera toujours possible de bien faire notre travail.
La présidente: Merci, monsieur Bigras.
Madame Thibeault, vous avez la parole.
[Français]
Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Merci, madame la présidente.
Monsieur King, vous avez parlé de la ville d'Halifax. Dois-je comprendre que la Ville d'Halifax a banni complètement l'usage des pesticides à des fins esthétiques?
[Traduction]
M. Stephen King: Oui, c'est exact. Nous en sommes à la troisième année d'une interdiction graduelle sur quatre ans; l'an dernier et cette année constituent ce que nous appelons la période de transition. À l'heure actuelle, l'interdiction s'applique aux installations médicales, aux parcs, aux terrains de jeu et à d'autres propriétés publiques. Toutes les propriétés à moins de 50 mètres de ces installations font l'objet d'une interdiction.
Dès le 1er avril 2003, l'interdiction complète s'appliquera aux propriétés domiciliaires et municipales, mais ne s'appliquera pas aux terres agricoles, aux forêts, et ainsi de suite.
[Français]
Mme Yolande Thibeault: Justement, dans votre liste d'exceptions, vous avez parlé de parcours de golf qui ne devraient pas suivre ces règles-là. Pourquoi?
Il y a une quinzaine d'années, j'ai lu dans un magazine de l'industrie du golf qu'en Floride, par exemple, où il y a une concentration de parcours de golf qui est de un parcours de golf par 10 milles carrés, l'État de la Floride était déjà extrêmement inquiet puisque les produits toxiques étaient déjà rendus dans les couches d'eau souterraines. Pourquoi faire une exception pour les parcours de golf?
[Traduction]
M. Stephen King: Vous soulevez deux points très importants concernant les terrains de golf. Premièrement, la loi habilitante qu'a adoptée la province de la Nouvelle-Écosse ciblait précisément les propriétés domiciliaires et municipales. Peut-être qu'à l'avenir nous pourrions appliquer notre interdiction aux terrains de golf, mais la loi habilitante ne nous le permet pas encore en raison de l'usage commercial qui en est fait.
Dans la région de l'Atlantique, en Nouvelle-Écosse surtout, le secteur du golf vient de rendre public un document sur certaines mesures qu'il a déjà prises pour rendre les terrains de golf plus durables—réduction de l'usage des pesticides, des eaux de ruissellement, ce genre de chose. Il ne fait aucun doute que certains des produits qu'on utilise depuis des années, surtout sur les verts... Certains de ces produits contiennent du mercure, entre autres choses. Ce secteur semble néanmoins vouloir faire un effort de sa propre initiative. Mais la principale raison qui nous empêche d'assujettir les terrains de golf à notre interdiction, c'est que la loi habilitante ne nous le permet pas.
[Français]
Mme Yolande Thibeault: C'est assez surprenant. Je ne sais pas si vous le savez, mais dans la région du Grand Montréal, il y a des parcours de golf qui ont décidé de faire la transition eux-mêmes, dont le Royal Montréal, qui n'est pas le moindre des parcours au Canada.
C'est personnel, mais je ne peux plus jouer au golf parce qu'à chaque fois, mes mains enflent à cause des pesticides qu'il y a partout; je ne peux plus tenir mon bâton. Passons à autre chose.
Monsieur Leavey, vous faites des recommandations au sujet de la vente de pesticides aux consommateurs. En lisant vos recommandations, je me demande si vous allez vraiment assez loin. Si mon voisin va acheter des produits extrêmement toxiques au coin de la rue chez quelqu'un qui vend des fleurs, je ne suis pas convaincue, premièrement, qu'il va savoir comment s'en servir et, deuxièmement, qu'il va prendre la précaution de bien lire et de suivre la recette suggérée.
Ne verriez-vous pas plutôt des compagnies licenciées qui seraient autorisées, le cas échéant, à faire ces épandages de produits toxiques seulement si c'était vraiment nécessaire?
» (1715)
M. Austin Leavey: Bien sûr, ce serait vraiment excellent. Ce serait ce qu'il y a de mieux. Présentement, au niveau des données, après le secteur de l'agriculture, qui utilise énormément de pesticides, c'est le secteur domestique qui est en deuxième position. C'est celui où on achète le plus de pesticides partout au Canada. Au niveau du centre antipoison--malheureusement, je n'ai que des données pour le Québec et je m'en excuse--, on calcule que 68 p. 100 des intoxications aux pesticides sont liées à un usage domestique. Donc, il est clair que la population doit savoir, premièrement, utiliser adéquatement ces produits et, deuxièmement, quand elle doit les utiliser.
On parlait d'essayer d'éviter au maximum d'utiliser les produits concentrés, de favoriser les produits prêts à l'utilisation ou, autrement, d'obliger les gens, lorsqu'ils veulent faire une application, à la faire faire par des gens certifiés à cette fin par l'industrie. La Ville de Montréal a un règlement au niveau de son territoire en vertu duquel seul l'occupant d'une résidence peut faire une application chez lui, ce qui empêche le propriétaire de faire un traitement sur le terrain de sa voisine et limite les risques d'intoxication.
Mme Yolande Thibeault: Pensez-vous que ce serait au gouvernement fédéral de légiférer pour carrément bannir l'usage des pesticides à des fins non essentielles, entre autres esthétiques?
M. Austin Leavey: C'est une chose qu'il faut examiner. Il faut faire attention à ce qu'on englobe dans le mot « esthétique », afin de s'assurer que ça soit uniquement de l'esthétique. S'il y a lieu de bannir cela, je crois que ce sont les autorités compétentes qui doivent le faire. Selon moi, ça devrait être le fédéral ou le provincial.
[Traduction]
La présidente: Merci, madame Thibeault.
Je cède la parole à monsieur Alcock.
M. Reg Alcock: J'aimerais d'abord poser quelques questions générales. La première fait suite à celle de Mme Thibeault sur l'usage des pesticides à des fins esthétiques.
En ce qui a trait à l'usage à des fins agricoles, peu importe qu'il s'agisse d'emplois limités ou sur une grande échelle. Il existe certains problèmes tels que ceux que vous avez mentionnés, notamment la façon dont le système fonctionne et comment les produits chimiques sont réglementés et utilisés. La question de l'usage à des fins esthétiques est celle qui ressort le plus. Vous savez de quoi il s'agit. L'interdiction des pesticides à des fins esthétiques pose-elle un problème pour l'agriculture. Est-ce une perspective qui vous inquiète?
M. Don McCabe: En tant qu'agriculteur ontarien, ce qui m'inquiète, c'est l'urbanisation effrénée qui, à l'avenir, viendra gruger nos terres agricoles très rapidement. Nous assistons déjà à l'arrivée d'un nombre important de citadins dans nos collectivités rurales.
Dans les années 50, 60 et 70, lorsque les citadins venaient à la campagne, ils comprenaient qu'ils étaient dans une région agricole. De nos jours, ils viennent accompagnés d'un avocat ou ils sont eux-mêmes avocats et les problèmes commencent alors pour nous.
M. Reg Alcock: Décririez-vous les citadins comme des parasites?
Des voix: Oh, oh!
M. Don McCabe: Vous avez déjà adopté des mesures législatives pour contrôler certains de ces aspects, et cela devrait probablement faire l'objet d'une autre série d'audiences.
Revenons-en à l'usage à des fins esthétiques. Je m'inquiète de ce qu'il arrivera des mauvaises herbes qui se répandront sur les emprises de chemin de fer. Que fera-t-on aussi sur les terres publiques où passent les lignes de transmission hydroélectrique, par exemple? Celui qui permet aux pissenlits de pousser est pour moi un parasite, parce qu'il me cause une augmentation des coûts d'exploitation de ma ferme.
Moi, je peux travailler le sol, je peux employer différents herbicides, mais cela ne supprimera pas cette nouvelle source de semences de mauvaises herbes qui proviennent des villes empiétant sur les terres agricoles.
» (1720)
M. Reg Alcock: Monsieur Plews, vous avez parlé des moustiques à Winnipeg. Voudriez-vous nous en dire plus long?
M. Ken Plews: Que voulez-vous savoir au juste?
M. Reg Alcock: Êtes-vous d'accord pour qu'on interdise l'usage des pesticides à des fins esthétiques? La valeur esthétique des moustiques n'a pas encore été établie, mais...
M. Ken Plews: Avant de répondre à cette question, madame la présidente, j'aimerais préciser aux fins du compte rendu que nous appuyons l'ARLA. Je travaille à la réglementation des pesticides depuis 1974, et je peux vous garantir que nous avons réalisé de grands progrès avec l'ARLA. La communication entre les provinces et le gouvernement fédéral s'est beaucoup améliorée, et ce n'est pas négligeable.
Pour ce qui est du terme «esthétique», vous devez comprendre que notre comité se compose de professionnels, que ce soit des agronomes, des ingénieurs, des biologistes, des forestiers, etc.; nous devons donc nous fier aux critères fondés sur les données scientifiques et prendre nos décisions en fonction des risques et des avantages.
Je ne sais trop ce que je pourrais ajouter concernant l'usage à des fins esthétiques. C'est difficile, car c'est une expression qui n'a pas le même sens pour tout le monde.
M. Dean Thomson: Je pourrais peut-être dire une chose à ce sujet. En ce qui concerne le secteur de l'horticulture, nous aimerions certainement avoir des garanties selon lesquelles toute décision prise en ce qui concerne l'utilisation commerciale à des fins esthétiques s'appuie sur des principes scientifiques solides.
Ce qui nous préoccupe avec bien des choses que nous constatons dans le secteur domestique c'est que souvent les émotions entrent en jeu. Un grand nombre de facteurs interviennent. Nous pouvons songer à l'exemple d'un endroit où l'utilisation du 2,4-D est interdit sur les pelouses et pourtant à 50 mètres de là, son utilisation est autorisée à des fins agricoles. Il existe de nombreux endroits où les champs se situent dans de telles limites dans n'importe quelle petite ville.
Que fait-on dans un tel cas? Comment explique-t-on aux gens pourquoi ceux-là sont autorisés à utiliser ce produit mais pas moi? Cela devient toujours une source de préoccupation pour ceux qui doivent tâcher de commercialiser leur produit. Il ne faut pas grand-chose pour répandre la rumeur qu'un produit est toxique si tous les renseignements n'ont pas été correctement communiqués.
M. Reg Alcock: Donc, même si vous craignez de mécontenter votre petite amie, vous n'êtes pas partisan d'interdire l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques.
M. Dean Thomson: Que je ne serais pas favorable à une interdiction? Je ne suis pas en mesure de répondre oui ou non à cette question. Personnellement, je crois que je pourrais probablement m'en accommoder. Je n'utilise aucun produit domestique commercial sur ma pelouse. En ce qui concerne mon organisation, nous n'avons pas adopté la politique nécessaire à cet égard parce que cela ne nous touche pas directement.
La présidente: Je vous remercie, monsieur Alcock.
J'ai deux autres personnes qui veulent poser des questions. M. Bigras a une brève question et Mme Skelton n'a pas encore eu de tour.
Madame Skelton, vous avez la parole.
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Tout d'abord, j'aimerais parler aux trois messieurs qui s'occupent de culture—M. Thomson, M. McCabe et M. Goodwin.
Convenez-vous avec moi que la technologie utilisée de nos jours par la plupart des agriculteurs—par exemple le GPS, le système d'analyse du sol—et les conditions économiques en vigueur dans le secteur agricole aujourd'hui ont vraiment diminué l'utilisation des produits chimiques, des pesticides?
» (1725)
M. Don McCabe: Je crois qu'il est possible de prévoir une réduction encore plus importante des pesticides. Par exemple, l'Association des producteurs de maïs en Ontario fait de la recherche sur les niveaux d'engrais utilisés pour le maïs et leur influence sur les espèces de mauvaises herbes. Ils tâchent donc de combiner ces deux aspects pour obtenir le taux optimal d'azote qui existe pour assurer la culture du maïs ,mais aussi pour s'assurer que nous n'avons pas à faire concurrence aux mauvaises herbes qui sont présentes ni à en favoriser la croissance.
En ce qui concerne le GPS proprement dit, je ne dirais pas qu'il permet à proprement parler l'analyse du sol, mais qu'il sert plutôt de capteur de rendement qui permet de noter la position de la batteuse, de façon à délimiter une superficie précise au sein de votre exploitation agricole. En raison de la nature de l'agriculture contemporaine, le bloc de mémoire ne vous permet pas de mémoriser la surface entière que vous devez peut-être parcourir, donc ce type de technique permet effectivement de délimiter les surfaces où vous n'avez qu'à utiliser une petite quantité d'un produit chimique en particulier pour régler un problème.
M. Dean Thomson: Je pourrais peut-être faire une observation personnelle d'après mon expérience comme pomiculteur. Il est bien connu que nous devons utiliser beaucoup de pesticides pour produire des pommes, parce qu'elles sont attaquées par une trentaine ou une quarantaine d'insectes nuisibles et 10 à 15 insectes vecteurs de maladies. Il faut donc les contrôler.
Depuis que j'ai repris la ferme familiale au cours des 15 dernières années, j'ai probablement réduit d'au moins 40 p. 100 l'utilisation des pesticides dans notre exploitation. Je suppose que c'est comme perdre du poids; les 10 premières livres sont faciles à perdre et par la suite cela devient plus difficile. Je constate maintenant que nous connaissons des problèmes que nous n'avons jamais peut-être connus auparavant, parce qu'on a probablement forcé sur les pesticides par le passé. Je crois maintenant que nous nous approchons de la limite voulue, parce que nous constatons un plus grand nombre de problèmes, ce qui nous indique que nous sommes maintenant sur le point d'atteindre cette limite où nous devrons tâcher d'établir un équilibre.
La technologie nous permet d'adopter toutes sortes de mécanismes de contrôle. Comme M. Leavey l'a indiqué, les pièges au bouquet phéromonal et toutes sortes de mesures qui perturbent les mécanismes de reproduction offrent des possibilités extrêmement intéressantes. Je crois que la frustration qu'éprouve le secteur de l'horticulture à l'heure actuelle comme on l'a indiqué ici assez souvent, c'est que l'on sait qu'il existe de nouvelles technologies, qu'il s'agisse... Et nous pouvons parler des problèmes d'homologation, pas uniquement en ce qui concerne les pesticides chimiques proprement dits, mais même en ce qui concerne entre autres les phéromones à l'heure actuelle. Nous avons eu des problèmes à les faire homologuer par l'ARLA.
Donc, nous voulons adopter aussi rapidement que possible toutes les nouvelles technologies utilisées par nos voisins du Sud et en Europe, mais nous éprouvons des problèmes à y accéder.
Mme Carol Skelton: Monsieur Goodwin.
M. Mark Goodwin: Le plus grand changement ne se situe pas au niveau de la technologie du GPS, mais au niveau des ressources humaines. Les cultivateurs qui ont survécu à la puissance conjuguée des trésors de l'Union européenne et des États-Unis savent comment réduire les coûts.
Mme Carol Skelton: Et ce que nous constatons en Saskatchewan cette année avec la sécheresse, c'est l'effet résiduel des produits chimiques. Donc, les agriculteurs dont les anciennes exploitations ont fait l'objet d'analyses du sol ont vraiment dû se réadapter.
Enfin, croyez-vous que la culture commerciale des fleurs comporte une utilisation à des fins esthétiques...? La culture commerciale des fleurs...? Il me reste une question ici. Faudrait-il englober l'utilisation des pesticides à des fins esthétiques? Devrait-on utiliser les fleurs?
Est-ce que vous comprenez ce que je vous demande?
M. Dean Thomson: Je comprends tout à fait.
Mme Carol Skelton: Très bien.
M. Dean Thomson: Non, c'est une très bonne question sociétale et qui déborde mes compétences. Je ne pourrais vous donner que mon opinion personnelle, ce que je n'ai pas l'intention de faire.
Des voix: Oh, oh!
M. Dean Thomson: C'est une question avec laquelle doit se débattre notre société ainsi qu'avec un certain nombre d'autres aspects parce qu'il s'agit de déterminer s'il s'agit d'une utilisation à des fins commerciales ou à des fins esthétiques, et comment la société envisage-t-elle la chose?
C'est une bonne question.
Mme Carol Skelton: Rob ne sera pas content, mais je vous remercie.
La présidente: Je vous remercie, madame Skelton.
Nous avons une autre question de M. Bigras.
[Français]
M. Bernard Bigras: Monsieur Leavey, pour revenir à la réponse que vous avez faite à Mme Thibeault, j'aimerais savoir si, à votre avis, ce serait au gouvernement fédéral ou au gouvernement provincial d'agir, dans le cas où on envisagerait l'interdiction de certains pesticides. J'aimerais que vous clarifiiez votre position. Pour ma part, ce que j'en ai saisi, de façon générale, c'est que le gouvernement fédéral avait la responsabilité de la mise en marché et de l'homologation, alors que les provinces avaient la responsabilité de la vente, de l'usage et de la distribution des produits homologués.
Vous avez indiqué plus tôt que, selon vous, les municipalités n'avaient pas la compétence pour réglementer dans ce domaine. J'ai tendance à être un peu d'accord avec vous, mais il faut se rappeler qu'un jugement mettant en cause la Ville de Hudson a été rendu, donnant aux municipalités la possibilité d'agir. Ainsi, il existe maintenant une contrainte d'ordre juridique.
Ma question vise à savoir si la solution pourrait passer par l'adoption de votre recommandation no 6, qui consiste à uniformiser la réglementation à travers le Québec par l'application de ce que le groupe de réflexion du Québec a proposé, à savoir un code de gestion des pesticides dont les provinces auraient l'entière responsabilité?
» (1730)
M. Austin Leavey: Je suis d'accord sur cette idée. Nous considérons que si le Canada a la compétence pour faire l'homologation et la vérification et peut s'assurer de la sécurité d'un produit, seules les provinces peuvent en interdire ou en accepter l'utilisation.
Maintenant, vous donnez aux provinces le pouvoir d'encadrer ou de surveiller cette utilisation par le biais de la certification, de la formation et ainsi de suite. Or, je crois que ça doit s'arrêter là. Je crois que les municipalités ne devraient pas avoir le pouvoir de dire si vous avez ou non le droit d'utiliser un produit, puisque leur position est basée sur le fait qu'un groupe de pression est contre l'utilisation d'un tel type de produit. Mais en réalité, les études ont été faites au Canada, et non dans la ville de Hudson ou encore dans la ville de Baie-d'Urfée, où toute utilisation de pesticides, autant à l'extérieur qu'à l'intérieur, est présentement interdite. On se retrouve avec des problèmes terribles.
Maintenant, les gens qui ont des problèmes de puces, de poux ou d'autres insectes qui se logent sur la peau ne peuvent obtenir de traitement sur le territoire de la Ville puisqu'elle a banni l'utilisation des pesticides. La Ville de Hudson a interdit tout ce qui est traitement esthétique. Or, si on fait abstraction de cet aspect esthétique, nous considérons, face à une telle situation, qu'une municipalité ne devrait pas avoir le droit de légiférer en matière de pesticides.
M. Dean Thomson: J'aimerais faire un commentaire. Je me demande pourquoi on a donné un pouvoir aux municipalités alors que ce pouvoir existait déjà au niveau fédéral. En fin de compte, ça veut dire qu'on ne fait pas confiance à notre agence nationale. Je trouve cette situation très bizarre.
En plus, si on parle d'emploi limité des pesticides, il faut dire qu'il est déjà assez difficile d'intéresser des compagnies à venir au Canada. Comment peut-on penser que les compagnies vont arriver et dépenser de grosses sommes d'argent pour homologuer un produit, sans garantie de pouvoir le vendre, puisqu'il est possible qu'une municipalité l'interdise éventuellement? Il n'y a pas de logique dans tout ça. Il faut trouver une politique qui sera uniforme partout au pays.
[Traduction]
La présidente: Je vous remercie, monsieur Bigras.
D'après la présentation que vous avez faite plus tôt, monsieur Thomson, je me demandais si en fait les municipalités semblent avoir pris l'initiative à cet égard parce que les règles pouvaient être rendues conformes à leurs règlements administratifs en matière de zonage.
Autrement dit, dans les limites d'une municipalité, il peut exister un zonage à des fins agricoles, un zonage à des fins résidentielles et un zonage pour des terrains de golf par exemple. Il me semblerait qu'elles ont les cartes et les délimitations pour prendre ces décisions quant à ce qui peut être autorisé et ce qui ne le peut pas. Mais si l'utilisation à des fins agricoles avait des répercussions sur les quartiers, c'est le zonage agricole qui prévaudrait pour permettre à l'agriculteur de prendre les mesures nécessaires pour protéger sa récolte.
M. Dean Thomson: Je suis d'accord avec cela, mais pour celui qui doit commercialiser son produit, ce n'est pas l'aspect législatif qui pose problème. Comme je l'ai déjà dit, ce sont les pressions qui peuvent être exercées par ceux qui disent que ce produit est interdit là-bas, mais qu'il est acceptable pour eux de l'utiliser, et désormais vous allez acheter ce produit.
Car il ne s'agit pas d'une opinion qui se fonde sur des données scientifiques ou sur des lois, mais d'une opinion publique selon laquelle quelqu'un croit que parce que ce produit est nocif là-bas, il doit l'être ici. Il suffit qu'une personne fasse ce genre de déclaration. C'est une situation que j'ai vécue souvent dans le secteur de la pomiculture. Il suffit qu'on fasse une déclaration de ce genre, peu importe qu'elle soit fondée ou non. S'ils ont un seul petit argument à faire valoir, alors je dois m'en préoccuper.
Je ne dis pas que c'est bien ou mal; tout ce que je dis, c'est que cela me préoccupe.
» (1735)
La présidente: Donc, vous n'êtes pas trop heureux des risques de vive critique. Je vous suggérerais alors de ne pas entrer en politique.
M. Leavey voulait faire une observation.
[Français]
M. Austin Leavey: Merci. J'ai aussi un commentaire à faire là-dessus. Souvent, au niveau des plus petites municipalités, on retrouve, au sein du conseil d'administration, le propriétaire du garage municipal du coin avec, comme trésorier, celui qui s'occupe de la caisse du IGA. Souvent, ces gens-là n'ont pas les compétences nécessaires. Je reviens toujours à la question des compétences. Ces gens n'ont pas les compétences pour légiférer adéquatement. On va retrouver un propriétaire de terrain de golf qui va faire en sorte que dans sa municipalité, il aura le droit d'utiliser des produits pour son terrain de golf, alors qu'il n'en voudra pas sur son terrain ni sur ceux de ses voisins. Ce sont de telles règles ou lois farfelues qui apparaissent de plus en plus. Il faut faire quelque chose.
[Traduction]
La présidente: M. McCabe, le dernier intervenant.
M. Don McCabe: Je vous remercie, madame la présidente.
Je voulais simplement ajouter qu'il est très bien que le zonage municipal indique qu'il s'agit d'une zone qui doit servir à des fins agricoles, mais vous pouvez aussi avoir un zonage agricole qui est...[Note de la rédaction : Difficulté technique]...des activités agricoles, et si les municipalités ne disposent pas des services des spécialistes voulus, elles risquent de faire l'objet de poursuites très coûteuses sur des aspects scientifiques et réglementaires qui devraient relever du gouvernement fédéral.
La présidente: Merci beaucoup, messieurs. Je vous remercie de vos présentations et de votre intérêt pour le sujet que nous étudions aujourd'hui. Nous nous réservons le droit de faire appel à vous si nous avons besoin de précisions ou si nous voulons que vous répondiez à des questions auxquelles nous n'avons pas songé aujourd'hui. Je tiens donc à vous remercier à nouveau.
La séance est levée.