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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 22 février 2001

• 1132

[Traduction]

Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Chers collègues, la séance est ouverte. Nous poursuivons notre étude du projet de loi C-2.

Avant que je présente nos témoins, je vous remercie tous des listes de témoins que vous nous avez fait parvenir. Nous essaierons d'en faire le tri. L'ordre du jour indique que nous entendrons aujourd'hui deux témoins. La Confédération des syndicats nationaux, qui tenait absolument à comparaître, ne peut pas être des nôtres aujourd'hui. Nous entendrons ses représentants plus tard. Je remercie les témoins d'avoir bien voulu comparaître devant nous aujourd'hui malgré le court préavis qui leur a été donné. Je vous remercie encore de nous avoir transmis vos listes.

On m'informe que tous les partis n'ont pas encore soumis le nom des personnes qui les représenteront au sein du comité de direction. Le Parti libéral, lui, l'a fait.

[Français]

C'est toi?

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Oui.

[Traduction]

Le président: Ce sera donc Paul Crête. Nous communiquerons avec le NPD et le Parti conservateur à ce sujet. Pour ce qui est de l'Alliance, ça va.

Quant à la réunion du comité de direction, étant donné que Val Meredith ne peut absolument pas se libérer aujourd'hui et demain, le seul jour... Le comité de direction doit se réunir lundi si nous voulons pouvoir établir le calendrier des séances de la semaine prochaine. J'ai consulté plusieurs députés et ils m'ont dit qu'il vaudrait mieux tenir la réunion aussi tard que possible dans la journée. À la demande d'au moins un député, je propose que le comité de direction se réunisse de 17 heures à 18 heures. Personne ne s'y oppose.

Le comité de direction se réunira donc à 17 heures. On fera savoir à vos bureaux où se tiendra la réunion qui devrait durer une heure. Le comité de direction n'établira pas le calendrier des travaux du comité pour toute l'année, mais seulement en ce qui a trait au projet de loi C-2.

Je remercie de nouveau les témoins d'avoir bien voulu comparaître dans ces circonstances. Vous n'ignorez pas que la Chambre des communes recevait le premier ministre du Royaume-Uni. Les députés reviennent de la Chambre.

Je dois aussi m'excuser du fait que les membres du comité déjeuneront au cours de la séance. Notre réunion se serait normalement terminée plus tôt. Nous devons passer immédiatement à autre chose et notamment à la Période des questions. Je vous invite à vous servir également.

• 1135

Nous accueillons aujourd'hui les représentants de la Chambre de commerce du Canada et du Département des métiers de la construction. Je propose que Mme Nancy Hughes Anthony de la Chambre de commerce du Canada commence, si vous n'y voyez pas d'inconvénient, messieurs. Je donnerai ensuite la parole aux représentants du Département des métiers de la construction.

Nancy, je vous prie de bien vouloir vous présenter et de présenter également vos collègues. Nous aimerions entendre les deux exposés l'un après l'autre, après quoi nous vous poserons des questions. Veuillez commencer.

Mme Nancy Hughes Anthony (présidente et chef de la direction, Chambre de commerce du Canada): Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

Comme vous l'avez dit, je m'appelle Nancy Hughes Anthony. Je suis présidente et chef de la direction de la Chambre de commerce du Canada. M. Paul Lalonde m'accompagne aujourd'hui. Il est analyste à la Chambre de commerce du Canada.

[Français]

Il me fait grand plaisir de vous présenter l'opinion de la Chambre de commerce du Canada, au nom de nos membres de tout le pays.

[Traduction]

Permettez-moi d'abord de vous remercier de nous avoir invités à comparaître devant le comité pour lui présenter la position de la Chambre de commerce du Canada sur ce projet de loi. Comme bon nombre d'entre vous le savent, étant donné qu'il y a des chambres de commerce dans vos circonscriptions, la Chambre de commerce du Canada est la plus grande et la plus représentative des associations de gens d'affaires au Canada. Nous comptons plus de 170 000 membres répartis dans toutes les industries et dans toutes les régions du Canada.

Ce qui importe encore davantage, c'est que la vaste majorité de nos membres sont des employeurs qui sont directement intéressés par le régime d'assurance-emploi. Par conséquent, la Chambre de commerce du Canada a participé activement au processus de l'assurance-emploi, surtout en ce qui concerne la Commission de l'assurance-emploi du Canada et son rôle consistant à surveiller, à évaluer et à conseiller à l'égard du programme.

Monsieur le président, la Chambre de commerce du Canada, au nom de ses membres, comparaît devant le comité aujourd'hui pour lui faire part de sa vive opposition au projet de loi C-2. Nous sommes très déçus que cette mesure législative ait été présentée sans avoir fait l'objet de consultations publiques et que des amendements importants soient proposés sans que la Commission et que les gens directement visés aient eu leur mot à dire.

La Chambre de commerce du Canada s'oppose catégoriquement au changement d'orientation que représente le projet de loi C-2. En abrogeant la règle de l'intensité et en modifiant les dispositions sur le remboursement des prestations, le projet de loi constitue un pas en arrière par rapport aux réformes progressistes adoptées en 1996 et auxquelles la Chambre avait été très favorable.

En outre, le projet de loi est incompatible avec les mesures visant à favoriser l'innovation et l'acquisition des compétences qui figurent dans le discours du Trône de 2001 et auxquelles nous souscrivons. Le projet de loi C-2 ne favorise tout simplement pas le développement des compétences ou l'entrepreneurship et ne rehausse pas la compétitivité du Canada dans l'économie mondiale. À notre avis, il s'agit d'un pas en arrière pour le Canada.

[Français]

Le récent discours du Trône a fait grand état du besoin d'innover et de promouvoir l'économie du savoir, qui est fondée sur des hommes et des femmes entreprenants et hautement qualifiés. Ce projet de loi va à l'encontre de cet esprit innovateur et n'aborde aucunement les sérieux problèmes économiques auxquels font face les nombreuses localités au Canada. En fait, il contribue à perpétuer ce cercle vicieux.

[Traduction]

En particulier, monsieur le président, nous avons de sérieuses réserves au sujet des points suivants: le rôle réduit accordé à la Commission de l'assurance-emploi du Canada, l'élimination de la règle de l'intensité et l'état du compte d'assurance-emploi. Je vous entretiendrai brièvement de chacun de ces points.

En ce qui touche la Commission de l'assurance-emploi du Canada, le projet de loi prévoit que le gouverneur en conseil établira le taux de cotisation à l'assurance-emploi pour 2002 et 2003. Les membres de la Chambre de commerce du Canada veulent que le taux de cotisation soit établi en consultation avec la Commission. Pourquoi? Parce que la Commission assure une légitimité au processus étant donné qu'elle fait appel à la participation des intervenants qui cotisent au programme d'assurance-emploi et qui touchent des prestations. La modification proposée dans le projet de loi qui ne semble absolument pas justifiée va à l'encontre du processus démocratique actuel.

• 1140

Par ailleurs, nous sommes très déçus de constater que le projet de loi C-2 propose d'éliminer la règle de l'intensité. Si le projet de loi est adopté, les problèmes qui se posaient au départ vont ressurgir et le régime favorisera de nouveau le chômage et les demandes de prestations répétitives.

[Français]

À notre avis, il aura l'effet d'une contre-incitation au travail, en plus d'aller à l'encontre de la volonté d'acquérir de nouvelles compétences et de décourager l'établissement de nouvelles entreprises dans les régions propices à cela.

[Traduction]

Les milieux internationaux ont déjà pris note des changements proposés. Ces changements auront un impact négatif sur l'idée qu'on se fait de la productivité canadienne et du marché du travail au Canada. En fait, le FMI, dans un rapport récent, a décrié l'élimination de la règle de l'intensité.

Enfin, en ce qui touche le compte d'assurance-emploi lui-même, la Chambre de commerce du Canada estime qu'il est impératif de ramener les cotisations d'assurance-emploi à un niveau soutenable à long terme. Comme vous le savez, on s'attend que l'excédent cumulatif du compte atteigne près de 35 milliards de dollars d'ici au 31 mars 2001. L'excédent annuel ou les versements excédentaires annuels représentent à entre six et sept milliards de dollars. Les cotisations d'assurance-emploi des entreprises canadiennes sont donc supérieures de plusieurs millions de dollars à ce qu'elles devraient être, ce qui n'est pas passé inaperçu. Le maintien des cotisations d'assurance-emploi à leur niveau actuel ou leur diminution insuffisante a transformé le régime d'assurance-emploi, le faisant passer d'un régime de protection du revenu à une taxe sur la masse salariale à laquelle le gouvernement a recours pour financer ses dépenses.

Notre exposé vise donc aujourd'hui à vous faire part des préoccupations de nos membres au sujet du projet de loi C-2. J'aimerais citer l'un de nos membres, la Chambre de commerce de St. John's à Terre-Neuve, qui a fait connaître publiquement son opposition aux changements proposés. Voici ce qu'a dit la Chambre concernant ces changements: «Ils ne serviront qu'à permettre que le régime d'assurance-emploi soit utilisé comme une source de revenus au lieu d'un programme d'assurance comme ce qui avait d'abord été prévu. Ces changements nuiront à l'économie et constitueront une contre-incitation au travail».

Je vous remercie beaucoup, monsieur le président. Je remercie les membres du comité de leur attention et je répondrai volontiers à leurs questions.

Le président: Je vous remercie beaucoup, Nancy.

Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je vais maintenant accorder la parole aux représentants du Département des métiers de la construction. Je demanderais à celui d'entre vous qui va prendre la parole de bien vouloir présenter son collègue.

M. Robert Blakely (directeur canadien, Département des métiers de la construction): Je m'appelle Bob Blakely. Je suis directeur des Affaires canadiennes du Département des métiers de la construction. Je suis accompagné aujourd'hui de M. Benson de notre bureau.

Je me trouve aujourd'hui dans la position inconfortable de me trouver à la droite de la Chambre de commerce pour la première fois de ma vie. Ce n'est pas ma position idéologique, mais c'est la position géographique où je me trouve du moins pour aujourd'hui.

Nous représentons l'industrie de la construction. Nous représentons 455 000 hommes et femmes qui travaillent dans cette industrie. L'industrie de la construction qui est cyclique est le plus grand employeur au Canada. Il fut un temps où notre industrie était saisonnière, mais elle est devenue cyclique. Par la force des choses, les gens dans notre secteur travaillent pour plusieurs employeurs. Ils travaillent pendant de longues heures loin de chez eux et doivent malheureusement parfois combler leur manque à gagner par des prestations d'assurance-emploi.

Nous appuyons de façon générale les réformes proposées dans le projet de loi C-2. L'une des réformes récentes, celle voulant que chaque heure travaillée soit prise en compte dans le calcul du nombre d'heures travaillées, a comporté des avantages pour notre industrie. Nous voulons cependant vous faire part de certaines de nos préoccupations au sujet du projet de loi et notamment au sujet du financement des deux premières semaines de la formation en apprentissage.

D'après les études menées par DRHC et presque tous les autres organismes s'intéressant à l'emploi, l'industrie de la construction est une industrie touchée par le phénomène du vieillissement. La majorité des travailleurs de notre industrie ont entre 40 et 60 ans. La génération du baby-boom est la plus importante au sein de l'industrie de la construction et tous les baby-boomers comme moi vont prendre leur retraite en même temps.

Les récessions qui ont eu lieu au milieu des années 80 et dans les années 90 n'ont pas encouragé les jeunes à acquérir un métier. L'âge moyen des apprentis au Canada est 30 ans. Ils sont des apprenants et pas des étudiants au sens traditionnel. Il s'agit habituellement de personnes mariées qui se débrouillent seuls et qui n'ont pas de prêt étudiant. Ces personnes ont des responsabilités familiales et gagnent un revenu peu élevé comme apprenti. Elles ne décident pas du moment où elles acquerront leur formation technique.

• 1145

Par le passé, les apprentis étaient admissibles aux prestations d'assurance-emploi pendant la durée de leur formation. Étant donné que l'industrie de la construction est cyclique et que les apprentis ne décident pas du moment où ils acquerront leur formation technique, les candidats apprentis doivent souvent quitter un emploi pour suivre leur formation technique, emploi qu'ils ne retrouveront pas nécessairement à la fin de cette formation qui peut durer six, huit ou douze semaines.

Hier même, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, association dont l'appui pour les métiers de la construction et le mouvement syndical en général est bien connu, a révélé que 67 p. 100 des entreprises ayant participé à l'un de ses sondages ont affirmé que la pénurie de travailleurs nuisait au développement économique de la petite entreprise.

La construction est une industrie qui connaît des pénuries de travailleurs. Rétablir l'admissibilité aux prestations pendant les deux premières semaines de formation en apprentissage aidera notre industrie. Un travailleur de la construction âgé de 38 ans qui est un apprenti—et il y a beaucoup d'apprentis de 28 à 38 ans—et qui a des responsabilités familiales et un emploi se trouve dans la situation difficile de devoir décider s'il va d'abord s'acquitter de ses responsabilités familiales ou s'il va suivre sa formation technique et devenir ainsi plus utile pour l'industrie. Nous demandons au comité d'envisager de recommander de rétablir l'admissibilité aux prestations pendant les deux premières semaines de la formation en apprentissage.

Nous nous préoccupons également du fonctionnement du régime. Deux travailleurs de la construction qui travaillent au même endroit pendant 10 semaines, qui gagnent le même revenu et qui vivent dans la même ville, peuvent ne pas toucher le même niveau de prestation d'assurance-emploi si l'employeur demande à l'un d'entre eux de travailler un demi-jour de plus au cours de la semaine suivante. Cela est attribuable à la règle du dénominateur. Ce résultat n'a pas été anticipé au moment de l'adoption de la réforme. Il est cependant tout à fait illogique que la personne à laquelle on demande de revenir le lundi pour nettoyer les lieux touche des prestations d'assurance-chômage moins élevées en raison de calculs mathématiques prévus dans la loi.

Vous me tenez le coude. Est-ce que j'ai dit quelque chose que je ne devais pas dire?

Une voix: Je ne pouvais pas vous entendre.

M. Robert Blakely: Très bien.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Vous lui plaisez.

M. Robert Blakely: Nous pensons qu'il est bon pour les travailleurs ainsi que pour notre industrie qu'on prenne en compte chaque heure travaillée. Il ne faudrait pas faire en sorte que les gens n'aient pas intérêt à travailler un demi-jour de plus parce que cela risque de réduire de beaucoup leurs prestations d'assurance-emploi.

Nous avons aussi des préoccupations à exprimer au sujet de la règle visant les personnes qui redeviennent membres de la population active. À notre avis, la mesure proposée ne va pas assez loin. La mesure est bonne pour ceux qui commencent une famille. À notre avis, on devrait tenir compte des antécédents de travail pendant les cinq années précédentes dans le cas également des personnes de plus de 40 ans qui ont quitté habituellement involontairement la population active pendant un certain temps.

Enfin, nous aimerions dire un mot—ma collègue de la Chambre de commerce en a déjà parlé—de l'administration du compte d'assurance-emploi. Tout avocat vous dira que l'assurance est un contrat prévoyant le versement de prestations si un événement prévisible se produit. L'assurance-emploi est un programme d'assurance dans de nombreux cas, mais c'est aussi un programme social. Tenir compte de cette dimension du régime et faire participer les intervenants à l'édification du régime profiterait à celui-ci. Nous aimerions que le régime d'assurance-emploi soit meilleur. Nous aimerions qu'il réponde davantage aux besoins des intervenants.

• 1150

Voilà ce que nous avions à dire au sujet du projet de loi au nom des travailleurs de la construction. Nous essaierons de notre mieux de répondre à vos questions.

Le président: Je vous remercie beaucoup.

[Français]

Paul et Phil, est-ce que vous avez quelque chose à ajouter? Ça va pour le moment.

[Traduction]

Voici la liste des intervenants. Dale Johnston, Joe McGuire, Paul Crête et Raymonde Folco.

M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Alliance canadienne): Je vous remercie.

Le président: Vous avez cinq minutes.

M. Dale Johnston: Cinq minutes?

Le président: C'est cela; allez-y.

M. Dale Johnston: Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

Je vous remercie de vos exposés.

Vous avez tous deux dit que le régime d'assurance-emploi devait être un véritable régime d'assurance. Ce que je ne comprends pas vraiment... Je crois que vous avez des positions légèrement différentes là-dessus. Pourriez-vous nous dire quelle est votre vision—La Chambre de commerce pourrait le faire en premier et ensuite l'industrie des métiers de la construction. À votre avis, quels seraient les avantages et les inconvénients d'un régime d'assurance-emploi qui serait essentiellement un régime d'assurance et qui ne comporterait pas d'aspects sociaux?

Le président: Si vous n'y voyez pas d'inconvénient, je propose que Nancy réponde en premier à la question parce qu'elle ne dispose pas de beaucoup de temps. Si Bob et Phil n'y voient pas d'objection, vous pourrez prendre la parole en premier, Nancy. Vous pouvez ensuite partir.

Mme Nancy Hughes Anthony: Je vous remercie.

Les membres de la Chambre de commerce savent que les gouvernements, les milieux d'affaires et les collectivités doivent collaborer dans le domaine social. Je pense qu'ils sont cependant d'avis que le régime d'assurance-emploi devrait être un programme d'assurance. Comme il avait été prévu à l'origine, ce programme doit protéger les travailleurs contre des périodes de chômage involontaires et c'est d'ailleurs ce que souhaitent les millions d'employeurs et d'employés qui participent au régime.

Un problème se pose lorsque, à un programme de ce genre, se fixent toute une gamme d'objectifs sociaux. C'est à ce moment-là que les Canadiens cessent d'avoir confiance dans l'intégrité du régime.

Nous soutenons également que le gouvernement doit constituer un compte distinct pour assurer le financement du régime d'assurance-emploi. Comme vous le savez, les cotisations sont versées au compte des recettes générales et comme je le mentionnais, les employeurs et les employés contribuent de 5 à 6 milliards de dollars de trop en cotisations au régime chaque année. Cet argent sert à financer toutes sortes d'autres dépenses.

Nos membres estiment que pour garantir une véritable confiance dans ce système, il faudrait que ce programme d'assurance, auquel tout le monde participe, soit uniquement fondé, et de manière très claire, sur les risques de chômage temporaire et involontaire.

Bob.

Le président: Permettez-moi simplement de vous rappeler que le temps de parole des députés inclut le temps des réponses.

M. Robert Blakely: Très bien, je ferai vite.

Je crois que l'aspect assurance de l'assurance-emploi est important. Dans les cas ordinaires, lorsque, en travaillant, je paie des cotisations qui pour l'essentiel me donnent droit à des prestations pour des circonstances éventuelles de ce genre, oui, je crois que l'aspect assurance est important. Peu m'importe où se trouve l'argent, à condition que les prestations soient là quand ce genre d'incident survient.

Quant à l'aspect social, je crois que le débat auquel j'ai fait allusion dans ma déclaration préliminaire est une nécessité. Comment devrait-on alimenter la politique sociale? Si l'assurance- emploi est le meilleur véhicule, pourquoi pas. Je ne veux pas de ces oubliés de la société.

Tous ceux d'entre nous qui se rendent d'une manière régulière aux États-Unis et voient tous ces gens qui campent sur les bouches de chauffage... Une telle société ne m'intéresse pas. Il faut que l'aspect de politique sociale soit pris en compte. La question reste de savoir par quel véhicule?

• 1155

Le président: Dale, brièvement.

M. Dale Johnston: Monsieur le président, s'il me reste un peu de temps, j'aimerais le donner à mon collègue, M. Peschisolido.

Le président: Très, très brièvement.

M. Joe Peschisolido (Richmond, Alliance canadienne): Très, très brièvement.

Monsieur Blakely, votre déclaration m'a rappelé mon père quand il est arrivé d'Italie. Il a travaillé pendant les 20 premières années de sa vie comme peintre. Je crois qu'il est toujours membre du local 1080, sauf erreur, du Syndicat international des peintres et travailleurs assimilés. Je conviens avec vous de l'importance d'un programme d'apprentissage. Je ne sais pas exactement comment mon père a fait. Je suppose que le travail ne lui faisait pas peur.

Pourrait-il y avoir d'autres véhicules? Je conviens avec vous, monsieur Blakely, que si c'est le meilleur véhicule, nous devrions alors l'utiliser pour le programme d'apprentissage. Pensez-vous qu'il pourrait y avoir d'autres véhicules pour répondre aux besoins en cas de pénuries de travailleurs qualifiés, surtout dans le domaine de la construction, et une forme ou une autre de programmes d'apprentissage pour donner du temps, ou offrir une période de transition pour acquérir les qualifications nécessaires à celui qui est sur le point de fonder une famille?

M. Robert Blakely: Ma réponse aux deux parties de votre question est oui.

La construction et l'apprentissage—comment dire sans froisser personne? Beaucoup de parents au Canada ne seraient pas ravis que leur fils qui en 12e année a de bonnes notes en mathématique, en sciences et en anglais leur déclare qu'il veut devenir ajusteur ou chaudronnier. Pour beaucoup de parents c'est comme s'il leur disait: «Je veux devenir journalier agricole ou trafiquant de drogue»...

M. Joe Peschisolido: Ou politicien.

M. Robert Blakely: Ou politicien. Oui. Nous appartenons tous à des espèces vilipendées, n'est-ce pas?

Le président: Bob, il faut être très bref.

Excusez-moi. Il faudrait que j'explique la situation à Joe parce qu'il est nouveau. Ce comité compte 18 membres. C'est une des raisons pour lesquelles il faut garder un certain rythme. Nous comptons plus de membres que la majorité des comités. Soyez donc très très bref.

M. Robert Blakely: La réponse est oui, il faut favoriser l'apprentissage et oui, il faut trouver de meilleurs moyens d'offrir ces possibilités d'apprentissage. Cela fait partie du partage des responsabilités entre le fédéral et les provinces. Lorsque vous avez abandonné l'apprentissage aux provinces, vous avez rendu les choses encore plus difficiles.

Le président: Joe McGuire, Paul Crête, Raymonde Folco, Yvon Godin, Diane St-Jacques, Greg Thompson, Georges Farrah, pour le moment.

M. Joe McGuire (Egmont, Lib.): Je me demande simplement si la chambre nationale reflète l'opinion des chambres régionales. Les travailleurs saisonniers ne mettent pas vraiment leur argent à la banque. Généralement, ils le dépensent dans des entreprises qui appartiennent aux chambres de commerce locales qui, en retour, leur permettent de continuer à travailler. L'argent circule dans la société, dans l'économie. S'il y avait un petit peu plus d'argent en circulation, on pourrait penser que ce sont vos membres qui en profiteraient.

Étant donné que vous vous élevez contre l'élimination de la règle de l'intensité, quel effet a-t-elle eu au cours des quatre dernières années? A-t-elle vraiment apporté les résultats escomptés? A-t-elle réduit le nombre de travailleurs saisonniers? Ces travailleurs saisonniers ont-ils abouti ailleurs? Quel a été jusqu'à présent l'effet de la règle de l'intensité?

Mme Nancy Hughes Anthony: Je crois que c'est un point excellent dont je parle d'ailleurs dans mon mémoire.

La Commission d'assurance-emploi du Canada a elle-même indiqué qu'il faudrait encore une ou deux années avant que nous ne puissions mesurer l'incidence des changements de 1996. C'est la raison pour laquelle nous avons été surpris que tout d'un coup il y ait ce besoin urgent d'imposer ces changements quand la Commission elle-même dit qu'il faudra encore au moins un an ou deux avant que l'incidence de ces changements puisse être correctement évaluée.

J'ai vécu sur l'île pendant quatre ans...

M. Joe McGuire: Nous le savons.

Mme Nancy Hugues Anthony: ... monsieur McGuire, comme vous le savez. Je connais très bien cette communauté et toutes nos chambres nous font part des difficultés qu'éprouve la population dans certaines régions, dans certaines régions économiques du pays, des problèmes du travail saisonnier, etc. Mais je me demande vraiment si se servir du programme d'assurance-emploi est la solution pour répondre à ce problème particulier.

• 1200

Comme je l'ai mentionné, dans le discours du Trône, il était beaucoup question d'encourager les Canadiens à acquérir des compétences, à en faire des battants dans l'économie du savoir. Est-ce que prolonger les prestations d'assurance-emploi est la solution? Je ne le pense pas.

Je suis d'accord avec vous lorsque vous dites que les chambres veulent voir l'argent circuler dans l'économie. Je crois qu'elles souhaitent avant tout la croissance de l'économie. Au mieux, c'est une mesure palliative.

M. Joe McGuire: Si vous êtes travailleur saisonnier dans une conserverie, ou travailleur saisonnier sur un bateau de pêche, ou encore travailleur saisonnier dans un entrepôt de pommes de terre à l'Île-du-Prince-Édouard, comment la réduction d'un revenu annuel déjà maigre peut-il améliorer votre situation? On pourrait penser que c'est un simple transfert du problème à un autre palier social...

Le président: Si vous pouviez passer par la présidence, je vous en saurais gré.

M. Joe McGuire: Bien sûr, monsieur le président.

Mme Nancy Hugues Anthony: La question est de savoir si nous mettons en place les bonnes mesures pour inciter le retour au travail, les bonnes mesures pour inciter la population à se recycler et toutes ces autres bonnes initiatives annoncées dans le discours du Trône.

M. Joe McGuire: Monsieur le président, je crois que nous mettons en place ces mesures et nous n'abandonnons pas tout le monde en attendant que ces mesures prennent effet. Il faut qu'il continue à y avoir un système pour que les travailleurs saisonniers puissent survivre. Ce n'est pas tout le monde qui travaille à plein temps dans le Canada atlantique ou dans le nord de l'Ontario ou dans le nord du Québec. Il faut qu'il y ait quelque chose qui leur permette de mettre du pain sur la table d'un emploi saisonnier à l'autre.

Mme Nancy Hugues Anthony: Je suis certainement d'accord avec vous, mais je me demande si le programme d'assurance-emploi est vraiment le bon véhicule pour cela.

M. Joe McGuire: Quel véhicule suggéreriez-vous?

Mme Nancy Hughes Anthony: Je suggérerais pour commencer un vrai dialogue avec le monde des affaires, avec plusieurs paliers de gouvernement, une véritable discussion sur toutes ces questions plutôt que l'imposition de ces changements sans l'ombre d'une consultation.

M. Joe McGuire: Mais quand nous aurons fini de dialoguer, qu'aurons-nous, monsieur le président?

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président...

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): La présidence ne pourrait-elle pas faire une petite pause?

Mme Nancy Hughes Anthony: Je ne veux absolument pas dire que j'ignore ces problèmes et ces difficultés, car il y a des chambres dans toutes ces communautés qui comprennent très bien la situation et qui cherchent un remède. Mais ce qu'elles veulent, ce sont des solutions à long terme par opposition à des palliatifs à court terme.

Le président: Paul Crête, Raymonde Folco, Yvon Godin, Diane St-Jacques.

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur le président, j'ai une remarque et deux questions. J'invite les représentants de la Chambre de commerce du Canada à lire le troisième Rapport de contrôle et d'évaluation du Régime d'assurance-emploi qui dit que la règle de l'intensité était totalement inefficace et punitive.

J'ai deux questions à poser; la première s'adresse aux deux groupes. La Chambre de commerce du Canada dit, dans un communiqué:

    Le projet de loi C-2 prévoit en outre l'élimination du processus de consultations menant à l'établissement des cotisations, ce qui aura pour effet d'y enlever sa transparence et sa prévisibilité.

C'est le communiqué émis par la Chambre de commerce.

Je pose la question aux deux groupes. Est-ce que vous souhaitez le retour au statu quo, c'est-à-dire éliminer l'article prévu présentement dans le projet de loi C-2, qui va éliminer cette transparence, ou avez-vous une proposition qui pourrait aller encore plus loin dans l'établissement d'une caisse autonome de l'assurance-emploi et qui pourrait être gérée par les employeurs et les employés, à 100 p. 100? C'est ma première question.

Ma deuxième question s'adresse particulièrement au groupe syndical. Est-ce que vous pouvez nous assurer que les deux amendements que vous demandez doivent être faits rapidement, immédiatement, étant donné que le projet de loi C-2 ne traite pas de ces problèmes—et vous en êtes conscients—et que si on applique la règle parlementaire traditionnelle, on ne peut pas apporter ce type d'amendement? Pour vous, est-ce que ce sont des amendements importants qui doivent être faits à court terme?

Mme Nancy Hughes Anthony: La réponse à la première question, monsieur le président, c'est oui. On aimerait bien retourner aux consultations comme avant parce qu'on reçoit, durant l'année, un input assez important sur la situation et l'évaluation du marché, etc., tant de l'employeur que de l'employé. À mon avis, il est logique de continuer ce processus.

• 1205

À la deuxième partie de votre question, je répondrai qu'effectivement, notre proposition d'avoir un compte autonome ne constitue pas, je pense, une chose que l'on a envisagée dans le projet de loi. Cela demanderait peut-être un peu de réflexion, au moment de faire le rapport des actuaires sur le fonds, quand il redevient équilibré.

M. Paul Crête: Monsieur le président, nous avons proposé que le projet de loi soit étudié en deux volets. Les bonifications et la question du surplus seraient incluses dans un deuxième projet de loi qui seraient déposé plus tard, après que l'on aura eu ces études-là. Est-ce que cela vous semble intéressant?

Mme Nancy Hughes Anthony: Une telle discussion serait très intéressante, oui.

[Traduction]

M. Robert Blakely: Des groupes mixtes employés/employeurs administrent des milliards de dollars de fonds de pension; nous pourrions donc également administrer l'assurance-emploi.

Pour ce qui est des amendements que nous suggérons, devraient- ils être immédiatement inscrits dans le projet de loi? Oui, bien sûr. Notre pays connaît une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée. Tous les jours il y a des emplois en Alberta et à Terre-Neuve. Dans certains cas, il s'agit d'emplois importants pour lesquels nous ne pouvons trouver de travailleurs qualifiés. Des travailleurs qualifiés dans une société à emplois qualifiés est ce qu'il nous faut.

[Français]

M. Paul Crête: Quelle serait votre réaction si, en réponse à votre proposition pour les deux amendements, le gouvernement vous disait que ce n'est pas prévu dans le projet de loi C-2, mais que ce sera prévu l'année prochaine, dans deux ans ou dans cinq ans?

[Traduction]

M. Robert Blakely: Je répondrai simplement que nous aimerions que ce soit dans le projet de loi C-2. Si c'est l'année prochaine, comme mon vieux père l'aurait dit, c'est mieux que rien.

Nous avons un problème immédiat. Quand quelqu'un se lance dans un métier de la construction, les deux premières années, pendant sa première et sa deuxième années d'apprentissage, tout ce qu'il peut faire c'est jouer les grouillots, regarder et essayer de comprendre ce qui se passe. Il nous faut des travailleurs productifs aujourd'hui car nous sommes au pied du mur.

[Français]

M. Paul Crête: Nous allons présenter un amendement pour appuyer vos propositions et nous espérons que le gouvernement acceptera d'y donner suite cette année.

[Traduction]

M. Robert Blakely: Je vous remercie. Je vous suis reconnaissant.

Le président: Yvon Godin, Diane St-Jacques, Greg Thompson, Georges Farrah.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le président, ma question s'adresse en particulier à la Chambre de commerce du Canada. J'essayais de retrouver dans votre texte l'endroit où, exactement, vous avez dit—et il me semble bien vous l'avoir entendu dire— que vous étiez contre les changements en ce qui concerne les bénéfices spéciaux. Dans le projet de loi C-2, les personnes appartenant à la catégorie des bénéfices spéciaux et celles qui demandent des bénéfices pour la première fois font l'objet de changements importants auxquels vous vous opposez. Est-ce que j'ai mal compris?

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président, on n'a pas traité de cela dans notre présentation.

Mme Raymonde Folco: J'ai mal compris. Il me semblait vous avoir entendu dire cela. Dans ce cas, est-ce que je peux vous poser cette question: êtes-vous, oui ou non, en faveur des changements qui sont apportés dans le projet de loi en ce qui concerne les personnes qui vont recevoir des bénéfices spéciaux et qui demandent des bénéfices pour la première fois? Je répète ma question.

Mme Nancy Hughes Anthony: Je m'excuse, il faut que je réévalue les propositions contenues dans le projet de loi pour bien répondre à cette question.

Mme Raymonde Folco: D'accord.

Monsieur Blakely, est-ce que vous pourriez répondre à la même question, s'il vous plaît?

[Traduction]

M. Robert Blakely: Oui. Pour les prestations spéciales, la réponse est oui. Si on considère l'objectif des prestations spéciales, c'est logique.

Mme Raymonde Folco: Pour ceux qui demandent ces prestations pour la première fois?

M. Robert Blakely: Ceux qui reviennent sur le marché?

Mme Raymonde Folco: Non. Pour la première fois.

M. Robert Blakely: Oh, pour la première fois.

Mme Raymonde Folco: Oui.

M. Robert Blakely: Oui, également.

Mme Raymonde Folco: Très bien.

[Français]

Je reviendrai à la Chambre de commerce du Canada. Il m'avait semblé vous entendre dire que vous étiez contre ces changements, qui seront peut-être apportés au projet de loi. Je vous incite, en ce qui concerne la Chambre de commerce, à bien regarder l'impact des changements au projet de loi, parce qu'en ce qui concerne les bénéfices spéciaux et, en particulier, les congés de maternité et les congés parentaux, cela nous amène à revoir les responsabilités familiales envers les très jeunes enfants. Je pense que c'est un élément extrêmement important dans notre société canadienne d'aujourd'hui, où plusieurs jeunes enfants ont des parents qui travaillent tous deux à l'extérieur.

• 1210

C'est un élément qui nous amène, nous au gouvernement, à jouer le rôle qu'un gouvernement devrait jouer, à mon avis, c'est-à-dire de redresser certains éléments sociaux, par exemple la situation des enfants très jeunes qui se retrouvent à la maison sans leurs parents.

Alors, j'incite la Chambre de commerce à bien regarder cet élément-là et peut-être à nous appuyer dans notre démarche à l'égard de cette catégorie de personnes. Merci.

[Traduction]

Le président: Merci beaucoup.

Je dois présenter mes excuses à certains députés et aux représentants de la Chambre de commerce. Je crois que certains députés n'ont pas d'exemplaires du mémoire de la Chambre de commerce. J'ai donné le mien. J'en avais un en anglais et en français.

[Français]

Yvon, as-tu cela?

[Traduction]

Toutes mes excuses. Nous avons entendu votre exposé, Nancy, donc nous l'avons compris, mais c'est le petit problème technique qui se pose à moi. Nous allons continuer et nous allons essayer de comprendre ce qui se passe, d'accord?

Sur ce, Yvon Godin, Diane St-Jacques et Greg Thompson.

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président, nous avons des exemplaires. Est-ce que cela vous aiderait?

Le président: Cela nous aiderait beaucoup.

Une voix: En français?

[Français]

Une voix: Oui, absolument.

[Traduction]

Le président: Merci, parce que maintenant j'ai donné le mien.

M. Paul Lalonde (analyste des politiques, Chambre de commerce du Canada): Monsieur le président, j'en ai apporté deux en français et cinq en anglais.

Le président: Très bien. Ça devrait probablement suffire, Paul.

[Français]

On en a deux en français et cinq en anglais.

Yvon.

M. Yvon Godin: Premièrement, monsieur le président, j'aimerais remercier les témoins qui sont ici aujourd'hui de leur présentation.

Je n'ai qu'un bref commentaire à l'intention des gens de la construction. Nous avons déjà eu des rencontres, et je comprends le problème des deux semaines au cours desquelles ils ne reçoivent pas d'assurance- emploi lorsqu'ils fréquentent un collège communautaire, par exemple. Je pense que cela va à l'encontre du bon sens. Si nous voulons qu'il y ait des gens de métier, nous devons les encourager. Nous ne pouvons pas tous vivre d'ordinateurs. Nous avons besoin de gens de métier pour construire des bâtiments et travailler à cet égard.

Comme le disait mon collègue ici présent, des amendements sont sur la table; personnellement, je m'attendais moi-même à proposer des amendements. Ils sont actuellement en préparation. Vous avez notre soutien. Même mon collègue de l'autre côté, M. Mahoney, a dit à la Chambre qu'il appuyait la règle des deux semaines pour les travailleurs de la construction. On peut voir, depuis hier, qu'il y a des personnes sensibles au comité. Je pense qu'on va aller de l'avant.

J'aimerais maintenant me concentrer sur la position de la Chambre de commerce. J'aimerais obtenir des réponses d'eux.

Dans votre mémoire, à la page 8, vous dites:

    L'élimination de la règle de l'intensité et la prolongation des prestations d'assurance-emploi encourageront aussi les travailleurs à demeurer dans une région du pays où le taux de chômage est historiquement élevé. Ces obstacles à la mobilité de la main-d'oeuvre présentent des coûts immédiats, mais ils comportent aussi une conséquence à long terme.

La Chambre de commerce du Canada ne laisse-t-elle pas tomber les régions comme la nôtre, qui ne font pas vraiment partie, à part entière, de la Chambre de commerce? Dites-vous que vous ne voulez plus avoir de poisson? Du poisson, vous ne prenez pas cela sur la rue Yonge à Toronto ou sur la rue Sainte-Catherine à Montréal. On a besoin de nos pêcheurs. On a besoin des personnes qui travaillent dans les usines de poisson.

Cet énoncé va complètement à l'encontre du bon sens de notre pays, de l'unité de notre pays. On ne peut pas tous demeurer à Toronto ou à Montréal. Moi, je veux demeurer chez nous, dans la péninsule acadienne. Je veux que mes enfants vivent chez nous. On a des industries et il faut se concentrer sur l'industrie de deuxième transformation, de troisième transformation, travailler dans la forêt, etc. Mais ce que vous dites là, c'est complètement... Sauf le respect que je vous dois, monsieur le président, c'est un non-sens dans notre pays que l'organisation des compagnies tourne la tête. J'appelle cela l'organisation, mais c'est pratiquement le syndicat des compagnies, des grosses sociétés qui nous arrive avec des idées comme celles-là.

La Chambre de commerce de chez nous ne croit pas ce que vous dites. Elle veut appuyer la croissance économique et créer des emplois, non pas envoyer tout le monde à Toronto. Lorsqu'on parle de la règle d'intensité, cela veut dire faire passer des gens de 50 p. 100 à 55 p. 100 pour qu'ils soient capables de vivre.

J'aimerais avoir la position de la Chambre de commerce vis-à-vis d'autres chambres de commerce de chez nous.

Mme Nancy Hughes Anthony: Je m'excuse si cela vous a insulté, parce que ce n'est pas du tout l'intention de la Chambre de commerce du Canada. Son intention est d'envisager une solution au problème du chômage que nous avons dans certaines régions, un peu partout au Canada.

• 1215

Vous avez mentionné la transformation. Y a-t-il dans ces régions, dans la vôtre, par exemple, une chambre de commerce ou une commission économique? Quant aux divers paliers de gouvernement, ils travaillent ensemble, j'espère, pour faire croître l'économie des régions.

Il est peut-être nécessaire d'avoir des programmes pour aider certaines personnes à court terme. Mais est-ce la solution à long terme? Plusieurs employeurs, comme l'a mentionné M. Blakely, sont à la recherche de personnel pour travailler dans leur usine ou leur magasin et ont beaucoup de difficulté à convaincre les travailleurs à acquérir de nouvelles connaissances, à se ressourcer. Je vous pose donc la question suivante: doit-on utiliser le programme d'assurance-emploi pour atteindre ces buts, ou n'y aurait-il pas d'autres moyens plus créatifs de le faire?

M. Yvon Godin: La Chambre de commerce propose-t-elle que les banques alimentaires soient la solution pour les gens de notre région? Il y a plus de banques alimentaires au Canada présentement que de vraies banques. C'est votre solution en réalité. Vous ne l'avouez tout simplement pas. Vous prétendez que nous avons besoin d'un autre système. Honnêtement, je me fiche du système. Ce qui m'importe, c'est ce que l'on donne à nos gens quand ils n'ont pas de travail dans les usines de poisson ou dans les forêts ou dans le secteur du tourisme. Vous dites aux populations de l'Atlantique, du nord de l'Ontario, du nord de l'Alberta et du nord de la Colombie-Britannique: nous avons besoin de vous ailleurs, déménagez.

Mme Nancy Hughes Anthony: Il y a plusieurs exemples où des initiatives ont été couronnées de succès. Par exemple, la compagnie EDS Canada Inc. a mis sur pied un centre technique à Sydney qui emploie des travailleurs qui avaient perdu espoir, car la situation des mines affaiblies était désespérée. Je pense que vous exagérez peut-être un peu. Je crois qu'il doit y avoir une incitation au travail et à la formation des travailleurs. La solution à long terme est-elle d'utiliser le programme de l'assurance-emploi? J'en doute fort.

[Traduction]

Le président: Diane St-Jacques, Greg Thompson, Georges Farrah, Dale Johnston, Steve Mahoney, Monique Guay.

Une voix: On ne va pas laisser parler Steve, n'est-ce pas?

[Français]

Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Pour commencer, je veux simplement adresser un commentaire à la Chambre de commerce du Canada. J'ai lu votre document ce matin et j'ai été surprise par ce que j'ai lu. Cela m'a donné l'impression que vous voulez le statu quo. Vous ne semblez pas souhaiter de changement à ce qui se passe présentement sauf, peut-être, au niveau du taux de cotisation. J'ai peut-être mal compris ou sauté des lignes, mais on sait qu'il y a des choses à corriger dans le système de l'assurance-emploi. Des gens sont pénalisés. Je ne sais pas si vous avez vraiment tâché de trouver d'autres solutions, mais lorsque je lis votre document, j'ai l'impression que vous souhaitez que les choses ne changent pas. Mais j'ai peut-être mal compris. Vous pourrez m'éclairer là-dessus.

Mon autre question touche la pénurie de main-d'oeuvre. On demande des assouplissements. Les gens de l'industrie de la construction demandent des assouplissements. Beaucoup de gens en demandent. A-t-on envisagé d'autres moyens? Il est facile de dire: nous ne voulons pas de ceci, on ne devrait pas faire cela, cela ne fonctionnera pas. Il faut peut-être faire preuve d'un peu d'imagination. A-t-on envisagé d'autres façons de faire? A-t-on fait des forums, cherché à en discuter? J'aimerais connaître votre démarche, ce qui vous amène à écrire ce qui est dans votre document. Je pose aussi la question aux représentants du domaine de la construction.

Mme Nancy Hughes Anthony: Je répondrai d'abord à votre première question : souhaitons-nous le statu quo? Non, nous ne voulons pas le statu quo. Notre pays a réduit son taux de chômage, il s'agit d'une excellente chose. Plus les travailleurs canadiens travaillent, mieux c'est. Certains problèmes économiques spécifiques à certaines régions ou à certaines industries requièrent sans doute une solution particulière. À notre avis, le programme d'assurance-emploi n'est pas cette solution. C'était la réponse à votre première question.

• 1220

Je répondrai maintenant à votre deuxième question. Oui, nous travaillons beaucoup à toutes sortes de propositions et de solutions. Comme vous le savez et comme il a été dit dans le discours du Trône, le fait que le Canada soit si bien branché nous donne un avantage absolument extraordinaire, actuellement, dans ce monde très concurrentiel, évidemment, où il faut faire connaître nos qualités aux autres. Voilà aussi pourquoi nous nous inquiétons un peu. Le message que les changements proposés par le projet de loi donne au reste du monde, c'est que nous ne travaillons pas à améliorer notre productivité, ce qui n'est pas du tout le cas.

Je ne sais pas si mon collègue veut ajouter quelque chose.

[Traduction]

M. Robert Blakely: Je suppose qu'il y a deux angles sous lesquels on peut envisager la formation ou le recyclage. Le premier, c'est que si tout le monde opte pour l'informatique, nous arriverons certainement à quelque chose mais le chemin sera long.

Il faut former la population active de toutes sortes de manières mais en fonction des besoins. Il faut que les industries assument une partie de la formation. Voyez-vous, dans notre groupe, les syndicats de la construction, nous consacrons énormément d'argent à la formation et cet argent vient des cotisations des employeurs et des employés. Ce genre d'initiatives est nécessaire si nous voulons atteindre la ligne de but, à mon humble avis.

Mme Diane St-Jacques: Mais comment?

M. Robert Blakely: Comment? Si des employés de Dewey, Cheatham and Howe Electric versent chacun 20c. pour chaque heure travaillée, l'employeur et le syndicat peuvent offrir une formation à un certain nombre de personnes, qu'il s'agisse de nouveaux arrivés sur le marché ou de gens qui veulent se perfectionner. Il y a toutes sortes de moyens de le faire.

Il y a le prélèvement obligatoire—mot honni—pour la formation qui ne ferait pas s'écrouler notre pays. En fait, cela améliorerait grandement la situation de ceux qui ont besoin de se perfectionner.

Mme Diane St-Jacques: Très bien. Merci.

Le président: Greg Thompson.

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Merci, monsieur le président.

Pour poursuivre dans la même veine que M. McGuire, la position adoptée par la Chambre de commerce concernant les changements à la Loi sur l'assurance-emploi me pose quelques problèmes. La première question à se poser bien entendu est la suivante: quelles données statistiques utilise la Chambre pour arriver à sa conclusion?

Monsieur le président, je tiens à citer son document. À la page 4, la Chambre fait reposer, en quelque sorte, les arguments de sa position sur le rapport du 31 janvier du Fonds monétaire international. Selon ce rapport, cette décision d'éliminer la règle de l'intensité est inopportune et «a eu des effets néfastes sur le comportement et des travailleurs et des employeurs», sous- entendant, bien entendu, que cet abandon tuera l'éthique du travail. Je suis d'accord avec M. McGuire et M. Godin.

Je voudrais que vous donniez de la substance à vos remarques. Vous avez dit vous-même ce matin qu'il était hors de question de revenir à la solution de l'assurance-emploi comme palliatif. Bon. Je voudrais citer quelques statistiques pour voir si oui ou non ce risque, si vous voulez, de mise en pièces de l'éthique du travail ou du retour aux mauvaises habitudes, que personne d'entre nous ne souhaite, je suppose, existe vraiment.

Par exemple, il y a beaucoup de travailleurs dans ma région qui gagnent 8 $ de l'heure. Il y a beaucoup de travailleurs saisonniers dans ma région qui gagnent 6 $ de l'heure. Comment osez-vous prétendre qu'une différence de 5 p. 100 puisse mettre en danger l'éthique du travail? Si un travailleur dans ma région, par exemple, faisait une demande en vertu de l'ancien régime quand la règle de l'intensité était appliquée, il percevait la somme faramineuse de 120 $ de prestations par semaine. En vertu du nouveau régime, quand il changera, madame la présidente de la Chambre de commerce, il percevra un total de 132 $. Ça fait donc 12 $ de plus par semaine. Il y a beaucoup de travailleurs qui sont concernés qui gagnent 6 $ de l'heure, croyez-le ou non.

Pas une seule chambre de commerce dans ma région ne serait d'accord avec vous. En fait, certaines des plus grosses compagnies de ma région, qui ont des valeurs sociales, en reconnaissent l'iniquité et veulent que cela change.

• 1225

Vous pourrez penser que c'est une attaque personnelle, mais j'ai remarqué que le stylo avec lequel vous écrivez aujourd'hui est un Gold Cross qui coûte la moitié d'une semaine de prestations d'assurance-emploi. Ce n'est qu'un exemple. Je ne sais pas de quelle partie de l'univers vous venez, mais ce n'est certainement pas de la mienne.

Quant à l'excédent du compte d'assurance-emploi, est-ce que vous avez une idée de l'incidence de cet excédent sur ce fonds? J'aimerais que vous me le disiez si vous le savez. Mais pour être plus précis, monsieur le président, j'aimerais que la Chambre me cite les statistiques qui lui permettent de dire que la suppression de la règle de l'intensité tuera toute initiative et incitera les gens à rester couchés plutôt qu'à chercher du travail. C'est ça qui me dérange le plus.

Merci.

Le président: En deux minutes, si c'est possible. Merci.

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président, je crois que c'est une bonne question car c'est précisément ce que nous disons: rien ne permet de justifier une modification aux règles mises en place en 1996.

M. Greg Thompson: Monsieur le président, elle ne répond pas à ma question. Si vous me le permettez, monsieur le président, ma question est la suivante: pourquoi éliminer la règle de l'intensité? Sur quelles bases statistiques se fonde-t-elle pour prétendre que si nous éliminons cette règle, toute initiative de retour au travail disparaîtra?

Le président: Je vous ai entendu. Laissez au témoin la chance de répondre.

M. Greg Thompson: Nous comprenons pourquoi il y a eu des difficultés par le passé. Nous nous demandons pourquoi nous allons...

Le président: D'accord.

Nancy, c'est votre tour.

Mme Nancy Hughes Anthony: Comme je l'ai dit, il ne semble pas y avoir, à notre avis, de raison de modifier la loi—je parle en fait du Rapport de contrôle et d'évaluation du Régime d'assurance-emploi pour l'an 2000, préparé par DRHC, dans lequel on dit expressément que les résultats relatifs aux prestataires fréquents montrent qu'il ne suffit pas d'offrir aux travailleurs saisonniers un régime passif de soutien du revenu par le truchement de l'assurance-emploi pour résoudre tous leurs problèmes. Je suis d'accord avec cela. C'est la question que j'ai posée à la ministre lorsque le projet de loi a été présenté initialement: pour quelle raison statistique changerait-on l'esprit d'une règle comme celle-là?

M. Greg Thompson: Eh bien, cela a à voir avec la nécessité d'acheter des aliments et de nourrir les enfants. Croyez-vous que cela pourrait atteindre un niveau aussi personnel qu'acheter des aliments et nourrir les enfants? Cela influerait-il sur les raisons pour lesquelles on voudrait modifier cette règle? N'y a-t-il pas là un facteur humain dont vous devez tenir compte?

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président, je croyais avoir dit clairement que je comprenais cela.

M. Greg Thompson: Malgré tout le respect que je vous dois, vous ne l'avez certes pas démontré dans votre témoignage devant notre comité.

Mme Nancy Hughes Anthony: Et mon stylo n'est pas en or, je tiens aussi à le faire remarquer.

Le président: Il n'est pas en or, effectivement, merci.

Mme Nancy Hughes Anthony: Ce stylo n'est pas en or.

Le président: Georges Farrah.

[Français]

M. Georges Farrah (Bonaventure—Gaspé—Îles-de-la-Madeleine—Pabok, Lib.): J'ai bien de la difficulté à comprendre votre position sur la règle d'intensité. Beaucoup de mes collègues en ont discuté. Vous semblez dire que le fait d'éliminer la règle d'intensité pourrait être un frein à l'emploi, alors que la règle d'intensité, qui est là depuis 1996, n'a pas fait en sorte que la situation de l'emploi s'est améliorée. La règle d'intensité existe présentement, et la situation de l'emploi ne s'est pas améliorée, du moins chez nous; bien au contraire, elle s'est détériorée. Donc, à mon point de vue, cette affirmation est tout à fait inappropriée. J'ai beaucoup de difficulté à vous suivre là-dessus.

On s'entend tous pour dire qu'on doit inciter les gens à aller sur le marché du travail. C'est notre voeux le plus cher, mais il y a une réalité. Je ne veux pas répéter le discours de mes collègues, mais dans nos régions, la réalité est que les gens vivent d'activités saisonnières dans les domaines de la pêche, de la forêt et du tourisme. La situation est très alarmante. Je m'attendais à ce que vous nous proposiez des solutions pouvant générer de l'emploi dans les régions. Mais d'ici à ce que des solutions soient mises en oeuvre—et il faut travailler très fort à cela—, on ne peut pas laisser les gens dans la misère. À la lumière de ce que j'entends, je pense qu'en tant qu'entreprise, vous avez une responsabilité sociale. On doit faire en sorte que le gouvernement tienne compte des gens qui sont en difficulté dans les régions du pays.

D'autre part, comme vous travaillez au niveau économique, je m'attendais à ce que vous vous posiez des questions sur les les solutions qu'on pourrait mettre en oeuvre pour générer de l'emploi chez nous. Un problème qu'on constate de plus en plus, c'est que votre discours incite les gens à quitter les régions, comme disait M. Godin. Quand il n'y a plus de gens en région, on n'a plus de développement économique. Quelle est la situation des jeunes en région chez nous? On leur demande de faire 910 heures de travail, ce qui équivaut à environ six mois. Il leur est impossible de se qualifier pour l'assurance-emploi. Qu'est-ce qui arrive alors? Les gens s'en vont à Montréal, à Toronto, dans les grands centres. On est en train de vider nos régions et quand il n'y a plus de jeunes en région, il n'y a plus d'avenir en région.

• 1230

Je voudrais qu'on travaille ensemble pour trouver des solutions au niveau économique. Mais d'ici à ce que des solutions soient trouvées, il faut qu'il y ait des mesures pour aider ces gens-là. Vous êtes censés être des experts au niveau économique. Je voudrais que vous nous parliez de solutions qu'on pourrait mettre en oeuvre pour faire en sorte que ces gens puissent vivre chez nous. Ces gens sont fiers de rester chez nous. Leurs racines sont là. Moi, j'ai ma maison aux Îles-de-la-Madeleine, je suis un Madelinot et je suis fier de l'être. Je ne veux pas être déraciné de mon coin. Les gens de chez nous sont fiers.

Quelles solutions pourrait-on trouver au niveau économique pour que les gens restent chez nous? Et en attendant que les solutions arrivent, il faut qu'on ait des programmes pour garder ces gens dans nos régions.

Mme Nancy Hughes Anthony: Je répète une chose que j'ai déjà dite parce que je veux que ce soit très clair. Je suis tout à fait d'accord qu'il y a, dans certaines régions, des problèmes économiques qu'il faut résoudre en consultation avec les employeurs, les employés, les communautés et les divers paliers de gouvernement. Cependant, nous sommes d'avis qu'on ne doit pas utiliser le système national d'assurance-emploi à cette fin. Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'établir un autre programme qui pourrait mieux régler ce problème? Ce serait sans doute mieux que de simplement donner des prestations d'assurance-emploi aux gens. Voilà le point qu'on veut faire ressortir. Il y des millions de travailleurs et d'employeurs de tout le pays qui contribuent à ce programme. Est-il juste qu'ils doivent payer pour certains programmes sociaux dans certaines régions du pays?

M. Georges Farrah: Je vais faire une petite digression, monsieur le président. Un de nos problèmes économiques, c'est qu'on est éloignés des grands centres, où se trouve la masse critique au niveau de l'investissement. Il est plus bénéfique d'investir dans un grand centre parce qu'on est près des marchés. Seriez-vous en faveur de mesures qui permettraient d'attirer des entreprises chez nous grâce à des incitatifs fiscaux qui les dédommageraient des inconvénients de la distance des grands centres? On dévie un peu du sujet, mais je veux vous entendre là-dessus.

La Chambre de commerce serait-elle en faveur d'incitatifs fiscaux pour inciter une entreprise à investir chez nous plutôt que dans les grands centres afin qu'on atteigne un certain équilibre au niveau économique?

Mme Nancy Hughes Anthony: Monsieur le président, il faut trouver une solution durable, à long terme. Un programme comme celui que vous mentionnez inciterait une entreprise à déménager pour 12 mois, puis ensuite ce serait la fin. Cela n'aiderait pas votre région. Comme je le disais, dans la région de Moncton, la croissance économique est assez intéressante et on peut être assez optimiste. C'est aussi la situation de la région de Halifax et de Terre-Neuve. Il y a certaines régions où la transformation commence à se faire. Ce n'est pas le cas dans toutes les régions, mais on devrait être un peu plus optimiste qu'on ne l'est autour de cette table à l'égard de certaines régions.

[Traduction]

Le président: Chers collègues, nous avons terminé notre premier tour. Nous n'avons que deux témoins. Je propose que nous accélérions le rythme. Chaque parti a participé au premier tour de table et nous passerons donc à des périodes de quatre minutes. Si vous pouvez partager ces quatre minutes... La même chose s'applique aux témoins, il faudrait abréger un peu les réponses—mais vous pouvez partager le temps, deux minutes chacun, ou alors trouver des solutions innovatrices. Nous devons continuer la discussion. Nous allons donc continuer. Je sais qu'il faut continuer à discuter, mais il faut voir à quel point.

Oui, Nancy.

Mme Nancy Hughes Anthony: Excusez-moi, monsieur le président, mais j'ai déjà fait savoir à votre greffier que je dois partir et vous laisser aux bons soins de mon collègue, M. Lalonde.

Le président: Paul Lalonde restera avec nous. Chers collègues, vous avez entendu. Mme Anthony doit partir parce qu'elle doit prendre l'avion ou quelque chose de ce genre.

Dale Johnston, quatre minutes.

M. Dale Johnston: Merci, monsieur le président. J'ai une petite question, puis je demanderai à Joe s'il veut poser une autre question.

Dans le domaine de la construction, vous dites que la période de carence de deux semaines applicable aux apprentis devrait être abandonnée. Croyez-vous que cela pourrait servir de précédent à l'abandon de cette carence de deux semaines pour tous les prestataires ou dites-vous que cela ne s'appliquerait qu'aux apprentis?

• 1235

M. Robert Blakely: Cela ne s'appliquerait qu'aux apprentis. En fait, c'est ce qu'on a trouvé dans la loi pendant près de 50 ans, jusqu'à la réforme de 1996.

M. Dale Johnston: Vous seriez donc un chaud partisan du remplacement de cette règle?

M. Robert Blakely: Oui, monsieur. Les autres étudiants ont la chance d'obtenir un prêt étudiant, mais ceux qui veulent obtenir une formation technique de six semaines n'ont pas ce recours.

M. Dale Johnston: D'accord, merci.

Le président: Joe.

[Français]

M. Joe Peschisolido: Ma question s'adresse à M. Lalonde. Si on n'élimine pas la règle de l'intensité, est-ce qu'il y a d'autres moyens pour encourager les travailleurs à rester au Nouveau-Brunswick ou dans certaines régions du Québec ou ailleurs au Canada?

[Traduction]

Le président: Paul Lalonde.

M. Paul Lalonde: Monsieur le président, nous disons clairement dans notre mémoire que nous nous sommes fondés sur le troisième rapport de la Commission d'assurance-emploi, dans lequel on dit que l'assurance-emploi est une solution à court terme aux problèmes de chômage, surtout dans certaines régions, mais que—et vous avez raison à ce sujet—il faudra mettre en place des initiatives de regroupement économique régional.

Je ne suis toutefois pas en mesure de commenter les initiatives que notre organisme ou les chambres locales mettent sur pied—et je ne dis pas cela pour éviter de répondre à votre question.

Le président: Steve Mahoney, puis Monique Guay, Alan Tonks, Yvon Godin.

M. Steve Mahoney: Merci, monsieur le président. J'ai trois questions auxquelles peut-être les deux témoins voudront essayer de répondre.

Vous conviendrez probablement que de 1990 à 1995 nous avons connu une récession assez forte—certains ont parlé de crise, ou d'autre chose. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais durant ces années il y a eu un sérieux déficit dans le compte d'assurance- emploi. Si vous acceptez donc le fait que durant les périodes de récession le compte d'assurance-emploi doit être complété ou soutenu par le contribuable en général, pourquoi ne pas accepter le fait qu'en cas d'excédent on puisse faire l'une des deux choses suivantes?

Premièrement, ramener les cotisations de plus de 3 $ à 2,25 $, deuxièmement utiliser cet argent pour d'autres actions gouvernementales importantes, puisque du fait de la nature cyclique de l'économie, nous nous retrouverons un jour en période de récession—certains diront probablement plus tôt qu'on ne le pense, espérons que non—et qu'il faudra que le gouvernement compense tout manque à gagner dans l'assurance-emploi. C'est la première chose.

Deuxièmement: j'aimerais que nos deux témoins me disent s'ils sont favorables à ce que—je ne les ai pas entendus en parler—la récupération fiscale repasse de 39 000 à 48 750 $. On parle beaucoup de la région de l'Atlantique mais la réalité est qu'il y a de graves problèmes en Ontario chez Chrysler, Nortel et dans le secteur de la construction. Ce peut être saisonnier, il peut y avoir des mises à pied. L'assurance-emploi ne touche pas simplement les provinces de l'Atlantique même si c'est un gros problème dans cette région du pays aussi. Alors, est-ce que vos deux groupes sont favorables à ce changement concernant la récupération fiscale?

Enfin, la question des deux semaines d'apprentissage est telle que nous avons des personnes de 35 et 40 ans qui viennent nous dire qu'elles quittent une carrière dans le secteur de la haute technologie pour devenir plombier, menuisier, ou autre. Ce ne sont pas des jeunes de 18 ans qui n'ont pas forcément les besoins financiers de ceux qui ont une famille et peut-être une hypothèque à payer ou des enfants à nourrir. Sachant que l'âge moyen des apprentis a considérablement augmenté ces dernières années, pourquoi est-il juste que nous les obligions à ne recevoir aucun revenu pendant deux semaines pendant qu'ils se recyclent, si vous voulez, dans le cadre d'un nouveau programme d'apprentissage?

Le président: Je crois que vous m'avez entendu dire que j'aimerais que vous soyez très brefs pour ce tour.

Paul Lalonde.

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

• 1240

À propos du compte d'assurance-emploi, nous en avons beaucoup discuté et il est certain qu'une des questions dont nous avons discuté, puisqu'il y avait un déficit au début des années 90, c'était de savoir s'il ne serait pas bon de ménager un certain excédent en ce moment, pendant que l'économie est prospère? Le gouvernement nous assure que cet excédent est tel qu'une réduction des cotisations serait tout à fait acceptable et que l'on a plus qu'il ne faut pour gérer le programme. Nous estimons qu'on a peut- être oublié les principes d'une assurance, si l'on considère l'importance de l'excédent.

Le président: Vous voulez essayer les deux autres très rapidement, Paul? Parce que je ne pense pas qu'on reviendra à vous. Pouvez-vous être très, très rapide pour que Bob puisse également répondre?

M. Paul Lalonde: Monsieur le président, je pense que la réponse serait probablement non.

M. Robert Blakely: À propos du fonds pour les mauvis jours, nous avons dit que peu importe où l'on conserve l'argent—il faut qu'il y en ait quand on est mis à pied. Pour la récupération fiscale, c'est un gros problème dans le secteur de la construction. Ce qui se produisait, quand on a réduit la récupération fiscale, c'est que les gens surveillaient leur chèque de paye et quand ils en arrivaient à un certain niveau, ils disaient: «eh, je suis d'accord pour une mise à pied».

Le système est bien meilleur, nous sommes tout à fait favorables à cela. Quant aux deux semaines d'apprentissage, si j'avais à choisir la seule chose que je voulais, j'accepterais cela.

Le président: Monique Guay.

[Français]

Mme Monique Guay (Laurentides, BQ): Merci, monsieur le président. Ma pression a monté tout à l'heure. C'est tant mieux, parce qu'il commençait à faire froid ici, dans la pièce.

Il y a deux citations dans le mémoire de la Chambre de commerce, qui m'ont fait... Enfin, je ne dirai pas le mot.

Vous dites ici:

    Deuxièmement, le régime d'assurance-chômage était de plus en plus utilisé à des fins contraires à celles prévues à l'origine.

Comment peut-on dire une chose pareille?

    Le régime d'assurance-chômage se voulait un régime d'aide aux travailleurs appelés à faire face à un chômage temporaire, et non un régime qui subventionne les travailleurs saisonniers dans certaines régions ou industries particulières.

Il y a une autre citation ici. Je tiens à les mentionner, monsieur le président, parce que j'aurai des questions à poser ensuite:

    Ainsi l'assurance-emploi aura l'effet d'une contre-incitation au travail, elle encouragera les travailleurs à rechercher, autant que possible, un emploi saisonnier et à avoir recours à l'assurance-emploi pour combler la différence jusqu'à la saison suivante.

Je trouve cela absolument aberrant, parce que lorsqu'on regarde le pourcentage que l'on reçoit quand on fait une demande d'assurance-emploi, ça n'a aucun sens. On ne peut pas vivre avec cela. C'est vraiment une question de dépannage. D'ailleurs, des études qui ont été faites démontrent que les gens qui font des demandes de chômage ne le font pas pour frauder, c'est parce qu'ils sont dans le besoin.

Aujourd'hui, en 2001, on n'a plus des carrières comme il y en avait auparavant, où les gens travaillaient pendant 40 ans ou 50 ans au même endroit. Ils pouvaient travailler là toute leur vie. Aujourd'hui, les gens ont deux, trois et parfois quatre carrières différentes. Eh bien, il y a des creux entre ces carrières-là! Il y a souvent des programmes de formation pour qu'ils retournent sur le marché du travail, etc.

Alors, je ne peux pas comprendre une position comme celle-là. Je ne sais pas si la Chambre de commerce du Canada est prête à avoir une certaine ouverture d'esprit, mais j'aimerais bien entendre vos commentaires.

Je vais poser mes questions à M. Blakely, et il me répondra ensuite. Monsieur Blakely, vous qui avez oeuvré dans le domaine de la construction pendant des années, vous savez très bien, comme moi, que dans ce domaine—d'ailleurs, mon mari y a travaillé pendant 30 ans; il a eu sa propre entreprise—, il y a aussi des creux. Il y a des saisons dans le domaine de la construction. On ne peut pas nécessairement construire partout, à tous les hivers.

Pensez-vous qu'il y a eu de l'abus à un point tel qu'on puisse comprendre qu'il y ait aujourd'hui des positions extrêmes, comme celle-là? Merci.

[Traduction]

Le président: Paul Lalonde, puis M. Blakely.

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

Je ferai simplement une petite observation. Nous disons très clairement que nous considérons que le programme d'assurance-emploi est un élément précieux de la politique canadienne du travail et qu'il fait partie d'un système nécessaire si l'on veut avoir une population active saine et stable. Toutefois, vous avez raison de dire qu'il y a eu des problèmes dans l'administration de ce programme. Surtout, nous nous inquiétons de l'orientation de cette politique.

M. Robert Blakely: Saisonnier ou cyclique—cela dépend du secteur. S'il y a des creux, l'assurance-emploi est là pour les combler.

• 1245

Si vous considérez le dernier rapport de DRHC, vous constaterez que les ouvriers de la construction vont verser 1,6 milliard de dollars de plus qu'ils n'en ont tiré. Ils ont cotisé. Quand les gens cotisent et paient une assurance, cette assurance doit pouvoir les couvrir. Lorsque des gens sont fréquemment au chômage et qu'on les punit parce qu'ils le sont, je ne suis pas sûr que ce soit normal dans un pays comme le nôtre.

Le président: Alan Tonks, Yvon Godin, Anita Neville, Greg Thompson.

M. Alan Tonks (York-Sud—Weston, Lib.): Monsieur le président, je ferai une observation plutôt que d'interroger nos témoins car c'est la première fois que je siège à ce comité.

Il semble que, malgré la position de la Chambre, un certain consensus soit apparu quant aux amendements touchant la récupération fiscale et la règle de l'intensité. On a soulevé des questions à propos d'une solution pour le soutien du revenu ou le complément de revenu qui serait différente des programmes avec participation aux résultats techniques.

Mon observation découle de rencontres que j'ai eues avec les syndicats de la construction dans ma région à propos de la formation et de l'apprentissage et d'autres secteurs qui relèvent de la compétence de ce comité. Il semble dans vos deux exposés que vous fassiez allusion à d'autres programmes que nous pourrions envisager.

Je sais, monsieur le président, que nous étudions les modifications à apporter à l'assurance-emploi et ce projet de loi. Je me demande toutefois si, lorsque des témoins viennent nous parler du projet de loi et des lacunes qu'il comporte, ils ne devraient pas en profiter pour informer le comité de ce qui permettrait d'atteindre le but ultime, à savoir des programmes qui soient moins punitifs, plus progressistes et qui régleraient les problèmes qui ont été soulevés par mon collègue M. Godin et d'autres.

Par exemple, je ne sais certainement rien des programmes de salaire garanti, des suppléments de revenu annuel reposant sur des critères progressistes, etc. Il y a probablement des gens qui en savent beaucoup plus long là-dessus. Toutefois, quand on cherche à s'informer et à s'orienter, je pense que la Chambre et d'autres spécialistes et associations pourraient nous donner une indication de ce que nous pourrions faire dans le sens de ces programmes complémentaires.

Le président: Des observations?

M. Robert Blakely: C'est exactement la question que m'a posée Mme St-Jacques. Il faut absolument examiner ce que nous faisons et réfléchir à d'autres solutions. C'est le temps d'avoir un débat national sur la formation et ce que l'on fait à ce sujet.

Le président: Monsieur Lalonde?

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

Le seul commentaire que je ferai est que, en tant que très grande organisation nationale, nous avons en effet des moyens et les contacts nécessaires pour entreprendre ce genre d'examen. Si cela intéresse M. Tonks, nous pouvons y travailler, présenter des idées—je répète que nous avons 170 000 membres dont beaucoup sont des entreprises—sur d'autres programmes ou d'autres moyens que l'on pourrait envisager.

M. Alan Tonks: J'espère que notre personnel prend note de cela.

Le président: En tant que président, d'ailleurs, j'espère qu'au cours de nos audiences, toutes sortes d'idées pourront être avancées. Nous avons une tâche spécifique ou une série de tâches qui nous incombent, mais cela ne joue que lorsque nous en arrivons à l'étape de l'étude article par article du projet de loi.

Yvon Godin, puis Anita Neville, Greg Thompson et Judi Longfield.

[Français]

M. Yvon Godin: Tout d'abord, pour les gens de la construction, je peux comprendre, en tant qu'ancien mineur ayant fait tous les métiers sous la terre et à la surface de la mine Brunswick, que le système d'avant était là avant 1996. J'ai travaillé sous la terre et avec les gars de métier à la mine Brunswick, entre autres, avec les gars de la construction. Ce que j'ai trouvé chez nous, non pas avec les gars de la construction, mais avec les gars de métier—et c'est la même chose si ce n'est que les uns travaillent dans la construction et les autres, les gars de métier, les mécaniciens, les électriciens travaillent sous la terre—, c'est que quand la coupure des deux semaines est faite sur la paie, c'est comme si ensuite, les gens étaient restreints. Ils disent: pourquoi irais-je au collège communautaire pour m'améliorer dans mon métier si je vais perdre ma paie?

J'aimerais savoir si vous, dans le domaine de la construction, voyez la même chose. C'était juste le contraire du bon sens. On n'a pas vraiment abusé du système. Le système est là pour aider les travailleurs et les travailleuses. C'est un système pour les travailleurs et les travailleuses. J'aimerais connaître votre opinion là-dessus et ensuite, j'aimerais entendre M. Lalonde.

• 1250

Vous dites que le système, dans le passé, n'était pas là pour les mêmes fins qu'aujourd'hui. C'est drôle, je me rappelle du temps où je parlais avec mon père. J'étais bien jeune et je ne pense pas l'avoir vu aller dans les bois, mais dans ce temps-là, les gens qui travaillaient dans la forêt travaillaient l'été et l'hiver. Ils étaient dans des camps et ils travaillaient, mais aujourd'hui, ce n'est pas ce qui se passe. Il n'y a pas que le système qui ait changé; les emplois aussi ont changé.

Je me rappelle que mes frères ont travaillé dans le nord de l'Ontario, à White River, à Manitouwadge et dans le bout de Wawa. Ils travaillaient à l'année longue. Aujourd'hui, en hiver, ils sont mis à pied. Les emplois ont changé; il faut que le système change et évolue avec la vie, lui aussi.

Alors, qu'est-ce qu'on a pour remplacer cela, si ce n'est l'assurance-emploi? L'assurance-emploi a pris un écart, mais aujourd'hui, on leur dit qu'on les élimine, et après cela, on se retrouve avec des personnes qui n'ont pas de revenu. C'est là qu'est le problème.

[Traduction]

Le président: Bob Blakely.

M. Robert Blakely: Ce qui décourage le plus les gens d'aller chercher de la formation technique en apprentissage, c'est le fait qu'ils ne reçoivent rien les deux premières semaines. Les gens se disent que tant pis, ils ont déjà un emploi et ils ne vont pas affamer leur famille pendant qu'ils retournent à l'école et attendent d'être payés. Il faut huit semaines avant que la Commission envoie le premier chèque.

Le président: Paul Lalonde, s'il vous plaît.

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

Permettez-moi de répéter une réponse semblable que j'ai déjà faite, nous avons dit clairement dans notre mémoire que nous appuyons chaudement le programme d'assurance-emploi, comme nous l'avons toujours fait. Nous reconnaissons à quel point ce programme est important dans la politique de main-d'oeuvre du Canada. Mais comme nous le disons dans notre mémoire, ce qui nous préoccupe, c'est l'orientation du projet de loi C-2 et le message qu'il envoie au sujet de certains éléments du programme.

Le président: Merci beaucoup.

Chers collègues, excusez-moi, mais nous avons un problème technique. Je sais que le système pose toujours des problèmes dans cette salle—et j'espère qu'il sera réparé—mais les interprètes viennent de me dire que lorsque nous bougeons ces micros, il faut tenir la base en même temps que l'on tourne. Il semble que nous ayons mal tourné les micros et que l'un d'entre eux ne fonctionne plus. Excusez-moi d'interrompre la discussion.

[Français]

Yvon, je te remercie.

[Traduction]

Passons maintenant à Anita Neville, Greg Thompson et Judi Longfield pour terminer.

Mme Anita Neville (Winnipeg-Centre-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci également à nos deux témoins.

Ce travail est nouveau pour moi et je suis très intéressée tant par vos présentations que par la façon de procéder. Les représentants de la Chambre de commerce ont dit qu'ils étaient déçus de la façon dont le projet de loi avait été présenté, sans qu'il y ait eu de consultations publiques au préalable. J'aimerais savoir deux choses: premièrement, parlez-moi des consultations que vous avez tenues avant de venir ici pour témoigner et, deuxièmement, y aura-t-il des consultations sur l'établissement des cotisations pour faire suite à la présentation de ce projet de loi? J'aimerais savoir quel conseil vous donneriez au comité, à la ministre, au gouvernement et à tous les autres sur la forme que pourraient prendre ces consultations.

Le président: Paul Lalonde.

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

Pour répondre à votre première question, nous consultons toujours la base dans l'élaboration de nos politiques en ce que les chambres de commerce locales et les bureaux de commerce de tout le Canada soumettent leurs questions relatives aux politiques au personnel de notre bureau d'Ottawa. Ces questions sont débattues et, dans le cadre d'une réunion annuelle sur les politiques à laquelle participent des délégués qui ont droit de vote, la Chambre adopte ses positions. Ces positions servent ensuite de plate-forme à la Chambre de commerce du Canada. Nous avons donc des mécanismes importants de consultation en place et un système unique qui nous permet de faire rapport à l'échelle nationale des préoccupations de la base, d'un océan à l'autre.

• 1255

Deuxièmement, nous participons également chaque année aux consultations de la Commission de l'assurance-emploi du Canada, consultations pour lesquelles nous avons notre propre processus d'élaboration de politiques. Nous présentons chaque année des recommandations sur l'établissement des cotisations d'assurance-emploi. L'an dernier, notre processus a été court-circuité par la présentation du projet de loi C-44 et l'établissement d'un nouveau taux de cotisation peu après.

Notre recommandation, pour l'établissement du taux de cotisation, serait de conserver le régime de la Commission de l'assurance-emploi du Canada, auquel participent les employeurs et les employés, et de continuer d'entretenir les excellentes relations que nous avons toujours eues avec la Commission.

Mme Anita Neville: Puis-je poser une autre question dans la même veine? Ce qui m'intéresse, c'est le résultat, pas le moyen de l'obtenir. Que recommanderiez-vous au comité pour ce qui est de décider de la façon d'établir les cotisations?

Mais je m'exprime peut-être mal.

M. Paul Lalonde: Je suis désolé, monsieur le président.

Mme Anita Neville: Je ne veux pas connaître votre résultat. Ce que je veux savoir, c'est quel processus nous devrions adopter, à votre avis, pour examiner l'établissement des cotisations. Nous savons que pour les deux prochaines années, c'est le gouverneur en conseil qui s'en chargera...

M. Paul Lalonde: Oh, je vois.

Mme Anita Neville: ... et qu'il y aura durant cette période des consultations.

M. Paul Lalonde: Oui.

Mme Anita Neville: Quelle ampleur devraient avoir ces consultations? Comment devrait-on procéder? Vous dites que vous communiquez avec un grand nombre de membres des chambres de commerce. Je viens du Manitoba et je suppose que vous parlez pour le Manitoba. Chaque chambre devrait-elle participer au processus? Y participerez-vous? Quelle ampleur devraient avoir ces consultations?

Le président: Soyez brève.

Mme Anita Neville: Désolée, je parle trop.

M. Paul Lalonde: Pour répondre brièvement, monsieur le président, les consultations devraient être très étendues. Comme nous l'avons constaté au comité, les préoccupations des diverses chambres varient selon les régions. Bon nombre de nos membres sont gravement préoccupés par des questions semblables. Je conseillerais donc de tenir des consultations aussi étendues que possible.

Le président: Nous allons entendre Greg Thompson, puis Judi Longfield.

M. Greg Thompson: Merci, monsieur le président.

Nous sommes tous d'accord, je crois, monsieur le président, sur le fait que nous ne voulons pas un régime d'assurance-emploi qui soit trop généreux ni trop punitif. Nous voulons un programme équilibré.

Je suis inquiet du ton adopté par la Chambre dans son mémoire, monsieur le président. Je tiens à y revenir car cela me trouble. On peut lire à la page 9 du mémoire, dans les conclusions—à la troisième ou quatrième ligne des conclusions—:

    Bien que ce projet de loi puisse être présenté comme une solution «moins punitive» au problème du chômage répétitif, il n'arrive toujours pas à régler le problème fondamental du chômage au Canada. Ainsi, il ne renferme aucune disposition visant à dissuader les travailleurs d'adopter des stratégies de chômage volontaire...

Et cetera.

Monsieur le président, cela me trouble et j'espère que notre témoin de la Chambre de commerce pourra nous rassurer en ce qui a trait à cette subtile référence à la dissuasion de travailler ainsi que sur le manque d'appréciation des gens qui travaillent en marge, des gagne-petit de ce pays. C'est un terme que nous n'utilisons pas souvent, monsieur le président. C'est comme si nous avions honte de parler de pauvreté. Mais il faut tenir compte de ces gens-là et nous avons besoin, je le répète, d'un programme équilibré. Le témoin peut peut-être répondre à cela, monsieur le président.

M. Robert Blakely: Je n'ai qu'une observation. Il semble exister au Canada une culture dans laquelle on considère comme des tricheurs ceux qui reçoivent des prestations d'indemnisation des accidents de travail, d'invalidité prolongée, d'aide sociale ou d'assurance-emploi. En fait, il y a au Canada beaucoup de pauvres qui ont davantage besoin de recevoir de l'aide qu'un coup de pied au derrière.

M. Paul Lalonde: Merci.

Ces conclusions de la Chambre de commerce du Canada remettent en cause la règle de l'intensité dont nous avons parlé dans notre mémoire. Nous avons constaté qu'il n'existe à peu près pas de preuves à l'appui de l'idée que cette règle ne fonctionne pas. Nous avions recommandé qu'elle soit conservée jusqu'à ce qu'on ait davantage de preuves importantes. Sans cette règle...

M. Greg Thompson: Permettez-moi une interruption, monsieur le président. Les preuves présentées sont de l'ordre de l'anecdote et non de la statistique. On n'a pas réussi à fournir de vraies preuves, des statistiques, à l'appui de cette allégation. Tout cela, ce sont des anecdotes.

• 1300

M. Paul Lalonde: Les preuves que nous fournissons viennent de diverses sources légitimes, et dans bien des cas, c'est l'absence de données statistiques qui nous amène à tirer ces conclusions. Les études qu'on a mises à notre disposition au sujet des effets de la règle de l'intensité montrent qu'il n'y a pas suffisamment eu d'études longitudinales, qu'il n'existe pas de preuves déterminantes. En fait, s'il y a une conclusion à en tirer, c'est qu'il faut davantage d'études et de données pour évaluer les effets de cette règle.

Le président: Merci beaucoup.

C'est maintenant le tour de Judi Longfield. Son intervention sera la dernière.

Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Si le temps le permet, j'aimerais donner le reste de mon temps à Mme Folco.

On peut dire que notre objectif commun est d'aider les gens à ne plus avoir besoin de l'assurance-emploi. Personne ne veut être bénéficiaire de l'assurance-emploi. Les gens préfèrent de loin avoir un emploi, du moins de l'avis du gouvernement et de l'industrie.

Je suis un peu étonnée. Il ne semble pas y avoir une pénurie d'emplois. Dans les journaux de ce matin, par exemple, on pouvait lire en gros titres «250 emplois spécialisés encore vacants». C'était le titre d'un article du Calgary Herald. Dans le National Post, on pouvait également lire «Les travailleurs spécialisés sont fort recherchés» et «Ottawa essaie de combler une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée». Je trouverais la même chose dans tous les journaux du pays.

Je comprends que pour la construction, cette question de l'apprentissage et de la carence de deux semaines est très grave, et je crois que nous devons l'examiner très sérieusement.

Je sais que ma question n'est pas directement liée au projet de loi sur l'assurance-emploi, mais comment peut-on combler ces postes de travailleurs spécialisés? Quels programmes devons-nous mettre en place en conjonction avec l'assurance-emploi, qui est une mesure à court terme, pour fournir aux entreprises et à l'industrie la main-d'oeuvre spécialisée dont elles ont besoin?

M. Robert Blakely: La construction est un secteur de produits. Les matériaux sont des produits, tout comme, malheureusement, la main-d'oeuvre.

Mme Judi Longfield: Bien sûr.

M. Robert Blakely: C'est un secteur de produits dont nous ne connaissons pas à l'avance les sources d'approvisionnement. Nous ne savons pas d'où viendra la main-d'oeuvre, de combien de gens nous aurons besoin l'an prochain et quel est le marché actuel.

Dans le cas de la construction et d'autres industries où la main-d'oeuvre ne fait que passer, nous avons besoin d'une stratégie nationale et d'une analyse nationale des besoins de façon à déterminer notre orientation et ce que nous allons créer. Comme je l'ai déjà dit, si tout le monde s'engage sur l'autoroute de l'information, il ne restera plus de place pour nous dans les restoroutes. Nous devons donc examiner cette question.

Lorsqu'on a adopté la règle de l'intensité, il y a quelques années, on n'a fait aucune recherche pour voir si cette règle inciterait les gens à travailler. Il s'agissait simplement d'une mesure punitive pour réduire le montant des prestations des prestataires à répétition de l'assurance-emploi. Ce n'est pas une approche de ce genre dont nous aurons besoin si nous voulons vraiment résoudre toutes ces pénuries de travailleurs spécialisés.

Dans la province d'où je viens, l'Alberta, il y a une pénurie de travailleurs dans tous les métiers spécialisés. Il y a également des pénuries de main-d'oeuvre dans les métiers techniques et le secteur de la haute technologie. Et pourtant, nous avons un problème de chômage chez les jeunes. Il y a de toute évidence quelque chose qui ne va pas.

Mme Judi Longfield: Je suis d'accord avec vous.

Le président: Judi, vous avez dit que vous vouliez partager votre temps. Il reste un peu plus d'une minute à Raymonde. J'en suis désolé. Raymonde Folco.

Mme Raymonde Folco: Merci, et merci beaucoup, Judi.

[Français]

Ma question s'adresse à M. Lalonde, de la Chambre de commerce du Canada.

Je reviens un peu à ce que j'ai dit tout à l'heure. Vous écrivez, à la page 8 de votre texte français:

    L'élimination de la règle de l'intensité [...] encourageront aussi les travailleurs à demeurer dans une région du pays où le taux de chômage est historiquement élevé.

Je reviens au commentaire de mon collègue Yvon Godin. Il y a des membres de la Chambre de commerce qui, justement, oeuvrent dans ces régions éloignées.

Tout à l'heure, vous avez répondu à Mme Neville que vous avez un processus de consultation élaboré et qui tient compte de toutes les chambres de commerce, partout au pays. Je vous demande ceci: n'est-il pas un peu self-defeating, comme on dit en anglais, pour une Chambre de commerce qui représente la petite et moyenne entreprise dans une région rurale éloignée, d'appuyer votre position? Cela voudrait dire qu'elle n'aurait plus du tout de clients pour son entreprise dans sa région.

Pouvez-vous me répondre?

[Traduction]

Le président: Vous devrez être très bref, Paul.

M. Paul Lalonde: Merci, monsieur le président.

• 1305

Merci de poser cette question. Vous avez mis le doigt sur l'un des problèmes clés de l'administration d'une...nous croyons que nous sommes une confédération également. Je peux comprendre vos préoccupations, mais je ne suis pas en mesure d'y répondre au nom de la Chambre de commerce.

Le président: Merci à nos témoins de la Chambre de commerce du Canada et du Département des métiers de la construction. Nous vous sommes très reconnaissants d'être venus nous rencontrer, surtout compte tenu des circonstances dans lesquelles nous nous trouvons aujourd'hui.

Chers collègues, deux choses avant que nous ne partions. Premièrement, il y aura une réunion du comité de direction à 17 heures lundi, et le greffier vous enverra un message à vos bureaux pour vous indiquer dans quelle pièce cette réunion aura lieu. Je propose que la réunion dure une heure.

Yvon, nous avons besoin des noms de... Serez-vous présent à la réunion du comité de direction?

M. Yvon Godin: Oui, monsieur.

[Français]

Le président: Très bien.

M. Yvon Godin: Si ce n'est pas moi, ce sera Libby.

Le président: D'accord, excellent.

[Traduction]

Et si nous n'avons pas ces noms, j'en ai besoin.

Troisièmement, Paul Crête m'a demandé de discuter de la liste des témoins pour la semaine prochaine. Nous avons une longue liste. Nous l'examinerons avec soin et nous ferons un tri. Ce sera le principal sujet de discussion à la réunion du comité de direction. Mais d'après moi, si nous n'arrivons pas à nous entendre sur les noms des témoins, nous devrions nous entendre pour que notre personnel invite certains témoins la semaine prochaine, plus particulièrement le mardi. Il s'agirait des témoins qui sont disponibles, qui représenteraient probablement de grands organismes nationaux et qui pourraient facilement se présenter. Au besoin, nous pourrions exercer notre veto le lundi.

Paul Crête.

[Français]

M. Paul Crête: Je suis d'accord, parce que si nous voulons inviter des groupes à venir mardi prochain, il est déjà un peu tard.

[Traduction]

Mme Judi Longfield: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: Un instant, quelqu'un invoque le Règlement.

Mme Judi Longfield: J'ai l'impression que nous avons entamé une discussion qui relève du comité de direction.

Le président: Oui, Judi, mais c'est quelque chose qu'on m'a signalé précédemment, malheureusement.

Allez-y.

[Français]

M. Paul Crête: Nous devons commencer tout de suite, sinon, si on décide de cela au Sous-comité du programme lundi après-midi, il sera trop tard. Peut-être que le premier groupe à se présenter à la première demi-heure pourrait être formé de fonctionnaires qui connaissent bien la loi. Nous avons reçu la ministre au début de la semaine, mais nous aurons peut-être des questions d'ordre technique sur la loi. Le sous-ministre et d'autres fonctionnaires pourraient former le premier groupe. Nous pourrions recevoir ensuite, comme vous l'avez suggéré, les groupes nationaux ou les gens qui sont disponibles mardi.

[Traduction]

Le président: J'aimerais y réfléchir, ainsi qu'à cette autre idée que des groupes importants seraient prêts à venir témoigner. Si je pouvais juger ces...

Enfin, j'allais dire qu'il y aura à la réunion du comité de direction un greffier à la procédure—si c'est l'expression exacte—qui informera le comité de ses tâches et de ses fonctions en ce qui a trait aux mesures législatives de ce genre.

On me dit qu'il faut parler plutôt de greffier législatif.

Paul Crête.

[Français]

M. Paul Crête: J'ai une autre question. Pourrait-on vérifier le plus rapidement possible, si nous pouvons tenir notre séance dans un des locaux où il y a la télévision? Après tout, il s'agit du premier projet de loi déposé par le gouvernement et c'est un projet de loi d'importance. Il pourrait être intéressant que les débats soient télédiffusés. J'aurais bien aimé, par exemple, que la présentation d'un mémoire comme celui de la Chambre de commerce du Canada soit télévisée.

[Traduction]

Le président: Oui, et je ne m'y oppose pas. J'en serais content. Comme vous le savez, je vais présenter la demande et nous verrons ce qui nous sera attribué.

Chers collègues, y a-t-il autre chose pour l'instant? Merci de votre patience. Le comité de direction se réunira à 17 heures lundi et le reste du comité, à 11 heures mardi.

La séance est levée.

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