AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 10 avril 2003
Á | 1110 |
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)) |
M. Rory McAlpine (directeur général, Direction des politiques de commerce international, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire) |
Le président |
M. Rory McAlpine |
Á | 1115 |
Mme Andrea Lyon (directrice, Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international) |
Á | 1120 |
Le président |
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne) |
M. Rory McAlpine |
Á | 1125 |
M. David Anderson |
M. Rory McAlpine |
M. David Anderson |
M. Rory McAlpine |
M. David Anderson |
M. Rory McAlpine |
Á | 1130 |
Le président |
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ) |
M. Rory McAlpine |
M. Louis Plamondon |
M. Rory McAlpine |
Mme Andrea Lyon |
Á | 1135 |
M. Louis Plamondon |
Mme Andrea Lyon |
M. Louis Plamondon |
Mme Andrea Lyon |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.) |
M. Rory McAlpine |
Á | 1140 |
M. Mike Jordan (directeur général, Direction de la politique commerciale et de l'interprétation, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada) |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Mike Jordan |
M. Ignatius Leron (gestionnaire, Unité de l'élaboration de la nomenclature internationale, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada) |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Rory McAlpine |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Rory McAlpine |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
Á | 1145 |
M. Rory McAlpine |
Le président |
M. David Anderson |
Le président |
M. David Anderson |
Le président |
Mme Andrea Lyon |
Le président |
M. David Anderson |
M. Rory McAlpine |
M. David Anderson |
Á | 1150 |
Mme Andrea Lyon |
M. David Anderson |
M. Rory McAlpine |
Le président |
M. Louis Plamondon |
Á | 1155 |
Mme Andrea Lyon |
M. Patrick Hines (économiste principal, Division de la politique commerciale internationale, ministère des Finances) |
M. Louis Plamondon |
M. Rory McAlpine |
M. Ignatius Leron |
M. Louis Plamondon |
Le président |
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.) |
 | 1200 |
M. Ignatius Leron |
M. Claude Duplain |
M. Ignatius Leron |
M. Claude Duplain |
M. Mike Jordan |
M. Claude Duplain |
M. Rory McAlpine |
M. Claude Duplain |
 | 1205 |
M. Rory McAlpine |
M. Claude Duplain |
M. Rory McAlpine |
M. Claude Duplain |
Le président |
M. Rory McAlpine |
Le président |
M. Claude Duplain |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
Le président |
M. Leo Bertoia (président, Producteurs laitiers du Canada) |
Le président |
M. Leo Bertoia |
Le président |
M. Leo Bertoia |
 | 1220 |
 | 1225 |
Le président |
M. David Anderson |
M. Leo Bertoia |
M. David Anderson |
 | 1230 |
M. Leo Bertoia |
M. David Anderson |
M. Leo Bertoia |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle (directeur exécutif, Producteurs laitiers du Canada) |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
M. David Anderson |
M. Leo Bertoia |
M. David Anderson |
M. Leo Bertoia |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
 | 1235 |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
Le président |
M. Louis Plamondon |
M. Richard Doyle |
 | 1240 |
M. Louis Plamondon |
M. Richard Doyle |
M. Louis Plamondon |
M. Richard Doyle |
Le président |
M. Claude Duplain |
 | 1245 |
M. Richard Doyle |
M. Claude Duplain |
M. Richard Doyle |
M. Claude Duplain |
M. Richard Doyle |
M. Claude Duplain |
M. Richard Doyle |
 | 1250 |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
 | 1255 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Richard Doyle |
Le président |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
M. David Anderson |
M. Richard Doyle |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 10 avril 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): La séance est ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous tenons ce matin une séance d'information sur l'importation de mélanges laitiers et les mélanges d'huile de beurre et sucre.
Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins, d'abord les représentants du ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et ensuite les Producteurs laitiers du Canada. Nous allons d'abord entendre les fonctionnaires. Merci d'être venus nous rencontrer. Nous accueillons ce matin Rory McAlpine, directeur général, Direction des politiques de commerce international, ainsi qu'Andrea Lyon, directrice des Droits de douane et de l'accès au marché au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Patrick Hines, économiste principal de la Division de la politique commerciale internationale au ministère des Finances, Mike Jordan, directeur général de la Politique commerciale et de l'interprétation à la Direction générale des douanes de l'Agence des douanes et du revenu du Canada et Ignatius Leron, gestionnaire à l'Unité de l'élaboration de la nomenclature internationale de la Direction générale des douanes.
De combien de temps prévoyez-vous avoir besoin pour votre exposé, monsieur McAlpine?
M. Rory McAlpine (directeur général, Direction des politiques de commerce international, ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire): Dix minutes suffiront.
Le président: C'est très bien.
Veuillez commencer, monsieur McAlpine.
M. Rory McAlpine: Merci, monsieur le président.
[Français]
Les mélanges d'huile de beurre et de sucre constituent une question complexe ayant de vastes répercussions économiques, internationales et juridiques. Pour cette raison, plusieurs ministères fédéraux ont participé à ce dossier au cours des dernières années. Comme vous l'avez déjà mentionné, je suis accompagné ce matin des trois autres ministères impliqués dans ce dossier.
Notre présentation d'aujourd'hui vise à vous fournir des renseignements généraux concernant les importations des mélanges d'huile de beurre et de sucre et à vous donner un aperçu de l'historique du dossier.
[Traduction]
Les mélanges d'huile de beurre et de sucre sont composés d'environ 49 p. 100 d'huile de beurre et de 51 p. 100 de sucre. On les utilise dans la fabrication de certaines marques de crème glacée. Comme vous le savez, les producteurs laitiers sont également préoccupés par les importations d'autres produits laitiers, notamment le lait aromatisé et les concentrés de protéines de lactosérum, mais les règles visant l'importation de mélanges d'huile de beurre et de sucre constituent de loin leur principale inquiétude.
J'aimerais commencer en insistant sur l'importance du système multilatéral fondé sur des règles pour le Canada. Un environnement commercial axé sur la règle de droit et non sur un rapport de force permet aux plus petits pays comme le Canada de livrer une concurrence aux acteurs de premier plan, soit les États-Unis et l'Union européenne. Comme vous le savez, le secteur agricole canadien a beaucoup profité du système commercial international; au cours des 10 dernières années, les exportations canadiennes de produits agricoles et agroalimentaires ont doublé, passant de 13 à 26 milliards de dollars. Étant donné l'importance que revêtent les règles commerciales internationales pour le Canada, nous travaillons très fort afin de veiller à ce que les autres pays respectent ces règles; nous contestons toute pratique non conforme. Bien entendu, nous devons être prudents en nous assurant que nous respectons également les règles.
J'aimerais maintenant vous expliquer les règles visant les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre au Canada. Ce type de produit n'a jamais été assujetti à des restrictions à l'importation au Canada. Par conséquent, durant le processus de conversion des contingents d'importation de produits laitiers en contingents tarifaires en 1994, aux termes de l'accord sur l'agriculture de l'Organisation mondiale du commerce, le Canada n'a appliqué aucun contingent tarifaire sur ces mélanges. À l'époque, le gouvernement et les Producteurs laitiers du Canada, qui avaient participé à toutes les étapes du processus dans le cadre du cycle d'Uruguay, n'avaient ni l'un ni l'autre cerné les mélanges d'huile de beurre et de sucre comme un problème potentiel. Toutefois, peu après 1994, les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre ont commencé à augmenter de façon importante, de 400 p. 100, passant de 2,6 millions de dollars en 1994 à 18,7 millions de dollars en 1997. Deux raisons expliquent cette importante croissance. La principale raison pour laquelle les fabricants de crème glacée en importent réside dans le fait que le coût moyen des matières grasses de ce mélange est de beaucoup inférieur à celui des matières grasses du beurre acheté au Canada. L'autre raison est la suivante : les progrès technologiques ont permis aux transformateurs d'utiliser plus facilement les mélanges d'huile de beurre et de sucre dans la fabrication de la crème glacée.
Cependant, l'utilisation de mélanges d'huile de beurre et de sucre plafonne au Canada; les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre se sont élevées à 18,7 millions en 1997 comparativement à 15,5 millions de dollars en 2002. Il s'agit d'un volume équivalant à 8 millions de kilogrammes. D'après les Producteurs laitiers du Canada, le volume des importations, soit 15,5 millions de dollars, se traduit par des pertes de ventes de l'ordre de 27 millions de dollars pour les producteurs laitiers canadiens. Cette différence représente l'écart entre le prix à l'importation et le prix du marché intérieur et se compare au revenu total des producteurs laitiers, de plus de 4 milliards de dollars. Le gouvernement collabore étroitement avec les producteurs laitiers; par ailleurs, il s'est penché sur le dossier concernant les mélanges d'huile de beurre et de sucre à plusieurs reprises au cours des six dernières années.
Á (1115)
[Français]
Je vais maintenant céder la parole à ma collègue Andrea Lyon, du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, qui vous décrira la nature de ces examens et les résultats connexes.
[Traduction]
Mme Andrea Lyon (directrice, Direction des droits de douane et de l'accès aux marchés, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci. Bonjour.
Il ne faut pas oublier que la question des mélanges laitiers a fait l'objet d'études intensives au fil des ans. L'autorité canadienne compétente, qui portait alors le nom de Revenu Canada, a examiné cette classification à plusieurs reprises. Également, en réaction aux préoccupations exprimées par les producteurs laitiers, le gouvernement du Canada a chargé en 1997 le Tribunal canadien du commerce extérieur, le TCCE, d'entreprendre une enquête sur l'importation des mélanges laitiers. Le TCCE a examiné les facteurs qui influent sur l'importation de ces produits, les effets de ces importations sur la production et la transformation des produits laitiers, ainsi que les considérations juridiques, techniques, réglementaires et commerciales pertinentes au traitement des importations. On a également demandé au tribunal de formuler des solutions conformes aux obligations internationales du Canada en matière de commerce pour régler tout problème relevé par l'enquête. Le TCCE a fait rapport de ses conclusions au gouvernement en 1998. Je vais résumer brièvement certaines de ses principales conclusions.
Tout d'abord, comme l'a signalé M. McAlpine, les facteurs qui influent sur l'importation des mélanges laitiers sont les économies de coûts, la sécurité de l'approvisionnement, la concurrence entre producteurs de crème glacée et certains avantages techniques, entre autres une plus grande durée de conservation. Le TCCE a prévu que ces importations continueraient d'augmenter, mais à un rythme plus faible. En fait, comme l'a souligné M. McAlpine, les importations annuelles se sont stabilisées à environ 8 millions de kilogrammes au cours des dernières années. Le TCCE a estimé que le taux maximum de pénétration, c'est-à-dire la proportion maximale de gras de beurre canadien qui pourrait être remplacé par le gras de beurre contenu dans les mélanges de beurre d'huile et de sucre, serait de 25 p. 100. Cela s'explique par le fait que l'utilisation de ces produits dans la fabrication de la crème glacée est limitée. Ces importations servent à produire des crèmes glacées de marques économiques. Elles ne conviennent pas à la production de crème glacée de première qualité et ne répondent pas non plus aux besoins des petits fabricants locaux spécialisés de crème glacée. Le TCCE a évalué que les revenus perdus à cause de ces importations vont de 12,8 millions de dollars à 30,9 millions de dollars, ce qui représente de 0,3 p. 100 à 0,8 p. 100 du revenu total des producteurs laitiers, qui s'élevait à 3,8 milliards de dollars en 1997.
Le TCCE a également examiné toute la gamme des droits et des obligations internationaux sous le régime de l'ALENA et de l'OMC. Il a fait remarquer qu'à cause de ces ententes, les disciplines sont maintenant plus rigoureuses, plus transparentes et plus facilement applicables. Par conséquent, le TCCE a fait remarquer que le gouvernement est limité dans le genre de mesures qu'il peut prendre. Il a signalé que «les mêmes règles s'appliquent également à tous les membres de l'OMC et offrent aux producteurs laitiers une certitude et une protection accrues».
Après avoir reçu le rapport du TCCE, le gouvernement a annoncé en août 1998 que le sous-ministre du Revenu national avait demandé au Tribunal d'examiner la classification tarifaire des mélanges laitiers. Dans le rapport qu'il a présenté en 1999, le TCCE a confirmé que cette classification est juste. Les Producteurs laitiers du Canada en ont appelé de cette décision devant la Cour fédérale d'appel, qui a rejeté le dossier. Les Producteurs laitiers du Canada n'ont pas interjeté appel de sa décision devant la Cour suprême.
L'importation de mélanges laitiers continue de préoccuper les producteurs laitiers. En août 2002, les ministres Pettigrew et Vanclief ont convenu de mettre sur pied un groupe de travail fédéral chargé d'examiner cette question et un certain nombre d'autres enjeux du secteur laitier. Ce groupe de travail était composé de fonctionnaires de plusieurs ministères, dont le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international, Agriculture et Agroalimentaire Canada, le ministère des Finances, l'Agence canadienne des douanes et du revenu et l'Agence canadienne d'inspection des aliments. Le groupe de travail a rencontré les Producteurs laitiers du Canada en novembre et en décembre 2002. Les ministres ont également rencontré à plusieurs reprises les Producteurs laitiers du Canada.
Les questions examinées par le groupe sont très complexes et elles ont des répercussions commerciales, juridiques et économiques importantes, entre autres en ce qui a trait à nos engagements internationaux avec nos principaux partenaires commerciaux. D'ailleurs, les obligations du Canada en matière d'accès au marché sont le résultat de négociations commerciales internationales, négociations qui comptent entre autres des consultations étendues auprès de tous les intervenants, y compris les producteurs laitiers.
Comme les ministres l'ont fait remarquer à la Chambre des communes, le gouvernement évalue soigneusement les options et les recommandations, y compris les propositions présentées par les Producteurs laitiers du Canada, et il prendra des décisions aussi rapidement que possible.
Merci, monsieur le président, de m'avoir donné l'occasion de vous présenter ces renseignements.
Á (1120)
Le président Merci beaucoup, madame Lyon.
Y a-t-il d'autres commentaires avant que nous passions aux questions?
Notre discussion s'annonce fort animée. Le problème existe depuis longtemps et il ne sera pas résolu de sitôt, semble-t-il.
Monsieur Anderson, vous avez sept minutes.
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Merci, monsieur le président.
Merci d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
Permettez-moi de contester une affirmation que vous avez faite tous les deux, c'est-à-dire que les importations sont demeurées relativement stables, à un volume de 8 millions de kilogrammes, au cours des dernières années. D'après le graphique que nous avons sur les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre, ces importations s'élevaient à 6,5 millions de kilos en 1998, à 6,3 millions en 1999, à 8,4 millions en 2000 et à 8,8 millions en 2001. De mes chiffres ou des vôtres, lesquels sont exacts?
M. Rory McAlpine: J'ai ici des chiffres sur les importations. Je les communiquerai avec plaisir au comité. Je ne crois pas qu'il y ait d'opposition entre nos chiffres. Ce dont nous parlons plus particulièrement, c'est de la tendance de la valeur. On constate qu'il y a eu une pointe dans les importations, lorsqu'elles ont atteint 18,7 millions de dollars en 1997, mais qu'elles ont diminué ensuite, repris un peu de nouveau et reperdu un peu de leur valeur. D'après ces chiffres, le volume a atteint son niveau maximum de 8,9 millions de kilogrammes en 2001. Il s'agit donc de voir si nous parlons du volume ou de la valeur.
Á (1125)
M. David Anderson: Ce qui préoccupe les producteurs laitiers, c'est qu'ils constatent une augmentation. Que la valeur augmente ou non, le volume des importations au Canada augmente, et cela les inquiète beaucoup.
J'aimerais connaître votre avis sur les raisons pour lesquelles ce problème perdure. Vous semblez dire que le gouvernement ne veut pas ou ne peut pas y apporter de solution. Que faudrait-il faire pour corriger la situation? Si le gouvernement ne fait rien, quelle solution de rechange peut-on offrir aux producteurs?
M. Rory McAlpine: Je tiens à souligner qu'on a déployé des efforts pour examiner le problème conformément aux engagements qu'avait pris le ministre l'an dernier. Il y a eu également des réunions très productives avec les représentants des producteurs laitiers l'automne dernier, comme le ministre Pettigrew l'a signalé dans sa réponse à une question en Chambre hier. Les questions dont le gouvernement est saisi sont certes complexes et entraînent toutes sortes de considérations et de répercussions juridiques, économiques et commerciales à l'échelle internationale. Ce sont ces questions dont le groupe de travail a traité et il reste maintenant aux ministres à prendre les décisions. Les choses ont donc progressé, et c'est là ce que nous pouvons vous dire aujourd'hui.
M. David Anderson: Voilà six ans que les fonctionnaires du gouvernement sont saisis de ce dossier. Les producteurs veulent des solutions. Ils ne seront pas satisfaits d'entendre que le dossier est maintenant sur les bureaux des ministres et qu'ils y resteront encore Dieu sait combien de temps. S'il existe des limites ou des problèmes commerciaux et internationaux qui nous empêchent de corriger la situation, que ferez-vous pour la corriger et quelles solutions de rechange pouvez-vous offrir aux producteurs? Le problème dure déjà depuis six ans et nous continuons encore d'en discuter.
M. Rory McAlpine: Les questions ont été examinées et ce sont les ministres qui ont la prérogative de rendre la décision finale. L'aide que nous pouvons peut-être offrir consiste à fournir plus d'information. Comme l'a expliqué ma collègue Andrea Lyon, plusieurs mesures ont été prises au cours des six dernières années. Le TCCE a examiné le dossier, il y a eu un recours judiciaire et il y a d'autres aspects de la question, comme les possibilités de modifier la classification tarifaire. Nous pouvons vous renseigner sur ces questions afin que vous compreniez bien tous les aspects du dossier, mais je ne suis pas en mesure de deviner ce que les ministres pourraient décider de faire.
M. David Anderson: D'énorme quantités de temps et d'énergie ont été consacrés à ce dossier, mais cela n'a fait aucune différence pour les producteurs. Il faut que cela change.
Croyez-vous que le problème va s'aggraver à l'avenir? La technologie évolue et on utilise de plus en plus certains de ces produits. On peut les utiliser et les importer malgré ces restrictions.
M. Rory McAlpine: En ce qui a trait plus précisément aux mélanges d'huile de beurre et de sucre, nous avons discuté des tendances des importations en fonction de la valeur et non du volume. Ce que je peux faire remarquer, c'est que les producteurs laitiers craignent que les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre augmentent à l'avenir et servent à la fabrication de crème glacée de luxe. Si cela se produisait, ce serait un autre élément important, mais pour l'instant nous ne croyons pas que cela se fera. Les producteurs laitiers comparaîtront devant votre comité et pourront vous expliquer cela.
Comme vous le savez peut-être, le groupe de travail a également examiné d'autres questions, compte tenu des préoccupations exprimées par les producteurs laitiers au sujet du dossier des mélanges d'huile de beurre et de sucre. Vous avez, je crois, reçu des renseignements au sujet d'autres questions, entre autres les autres substituts laitiers, les préparations de pizzas, les normes et l'étiquetage. Ces questions s'inscrivent dans le contexte général des importations de produits laitiers dont les producteurs s'inquiètent, mais en ce qui a trait plus spécialement aux mélanges d'huile de beurre et de sucre, nous n'avons pas à l'heure actuelle de nouveaux renseignements montrant qu'il y aura une augmentation rapide des importations.
Á (1130)
Le président: Monsieur Anderson, votre temps est écoulé. Vous pourrez continuer plus tard.
Monsieur Plamondon, sept minutes.
[Français]
M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Merci, monsieur le président.
De votre intervention, je retiens que s'il y a une décision à prendre, c'est une décision d'ordre politique, et c'est au ministre de la prendre suite à vos recommandations. Justement, dans ce sens-là, il y a eu formation d'un comité interministériel au mois d'août dernier, et après étude et consultation, vous dites que vous avez déposé le rapport au ministre. Pouvez-vous nous donner un résumé des recommandations que vous avez faites au ministre?
M. Rory McAlpine: Merci pour la question, monsieur le président. Nous ne sommes pas en position de vous faire part des recommandations étant donné que c'est une question de confidentialité. Les conseils qui sont donnés par les fonctionnaires au ministre sont confidentiels. Nous ne sommes donc pas en mesure de vous les communiquer.
M. Louis Plamondon: Je m'attendais à cette réponse, monsieur, mais il y a toujours des rumeurs suite au dépôt de recommandations, et une rumeur veut qu'il y ait trois possibilités, c'est-à-dire qu'on retourne devant le tribunal, ce qui ne semble pas satisfaire les producteurs laitiers.
Une autre rumeur, c'est qu'on utiliserait les mesures de sauvegarde qui sont contenues dans l'ASA, l'Accord sur l'agriculture, de l'OMC. Cela veut dire qu'on adopte un tarif temporaire, et lorsque le problème semble régler, on revient à l'ancienne réglementation. Je pense que ce sont là les mesures de sauvegarde.
Êtes-vous allés souvent devant ce tribunal, invoquant les mesures de sauvegarde? Lorsque vous y êtes allés, combien de fois avez-vous gagné?
M. Rory McAlpine: Monsieur le président, je pourrais peut-être demander à mes collègues, d'abord à Andrea Lyon, d'expliquer un peu ce qu'implique la question de sauvegarde. Je demanderais aussi à mon collègue M. Jordan d'expliquer l'autre aspect, soit le processus de l'enquête du tribunal.
[Traduction]
Mme Andrea Lyon: D'après les dispositions du droit international et nos obligations en matière de commerce international sous le régime de l'OMC, nous devons prendre des mesures de protection mondiales. Ces mesures se prennent généralement après une enquête de l'autorité nationale compétente. Dans notre cas, il s'agit du Tribunal canadien du commerce extérieur, qui est chargé d'examiner la question pour déterminer si les importations causent ou non un préjudice grave aux producteurs du pays. Le TCCE fait ses enquêtes conformément à la procédure énoncée dans la loi. Le tribunal dispose je crois d'un délai de 180 jours pour mener une enquête réclamée par les producteurs. À la fin de son enquête, le tribunal présente au gouvernement ses recommandations sur les mesures nécessaires pour remédier aux préjudices graves. S'il décide qu'il y a effectivement préjudice grave, c'est alors au gouvernement qu'il incombe de décider quelles mesures sont nécessaires.
D'après la procédure de l'OMC, ces mesures de protection peuvent s'appliquer sur une période maximale de quatre ans. Leur application peut être prolongée de quatre années supplémentaires si l'on détermine que le préjudice grave continue d'exister. Si la mesure de protection est appliquée pour une période supérieure à trois ans, le pays qui applique cette mesure doit verser une indemnisation aux pays dont les importations sont touchées par ces mesures. Voilà en résumé en quoi consiste le processus de protection.
Á (1135)
[Français]
M. Louis Plamondon: Merci. Je suis surpris de l'attitude du Canada: on marche sur du tapis, on ne veut pas faire de bruit.
Aux États-Unis, le 6 mars dernier, le projet de loi 1160 a été déposé pour établir de nouveaux contingents tarifaires pour la caséine et les concentrés et protéines de lait.
Est-ce que le système tarifaire américain serait plus flexible que le système canadien, ce qui permettrait plus facilement de faire des changements, ou y a-t-il une autre raison pour laquelle on marche toujours un peu à pas feutrés?
[Traduction]
Mme Andrea Lyon: Oui, des lois ont été introduites à diverses étapes de la procédure du congrès pour appliquer des nouveaux contingents tarifaires sur les produits que vous avez mentionnés. De nombreuses propositions législatives sont déposées au Congrès et, comme vous le savez, ne sont pas toutes adoptées et c'est le cas pour cette mesure législative particulière. Je crois savoir qu'une mesure législative analogue avait été déposée lors de la législature précédente mais elle n'avait pas dépassé l'étape de l'étude en comité. Sauf erreur, cette mesure législative particulière a été déposée en janvier mais n'a pas bougé depuis. Les États-Unis tout comme le Canada doivent soumettre une telle mesure à divers critères pour s'assurer qu'elle est conforme tant à leurs obligations nationales qu'internationales avant de l'adopter.
[Français]
M. Louis Plamondon: Donc, selon vous, le dépôt du projet de loi 1160 américain n'aboutira à rien, si on se fie à l'expérience passée?
[Traduction]
Mme Andrea Lyon: Je ne peux prédire ce que le Congrès américain fera, je peux simplement vous dire ce qu'il est advenu d'efforts précédents visant à adopter des mesures de ce genre.
Le président: Merci.
Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.
Je n'arrive pas à croire que nous discutions encore de cette question après toutes ces années. Je croyais que nous mettions un peu plus de résolution à régler certaines de ces questions. L'industrie a déjà suffisamment de problèmes et nous ne faisons qu'en ajouter. Je trouve désolant que nous en soyons encore là.
Le ministère responsable était Revenu Canada et ils ont confirmé que les mélanges d'l'huile de beurre et de sucre étaient classés dans le poste tarifaire 2106.90.95. En conséquence, ce produit pouvait être importé sans licence d'importation et n'était pas assujetti à un tarif prohibitif. Plus loin, dans mon article :
Le problème posé par les mélanges contenant des produits laitiers semble être un problème d'interprétation. Lorsqu'ils passent la douane, les mélanges d'huile de beurre et de sucre sont considérés insuffisamment laitiers. Par conséquent, ils ne sont pas considérés comme un succédané du beurre, mais quand ils sont mélangés à de la crème glacée, les fabricants doivent les décrire comme des «composants du lait». |
Un miracle est arrivé ici quelque part, car les bureaucrates, aux fins tarifaires, considèrent que ce n'est pas une forme d'huile de beurre, mais une fois mélangé cela devient quand même un produit laitier. Est-ce que le problème serait qu'il y a tellement de ministères chargés de ce dossier qu'ils ne savent pas dans quelle catégorie mettre ce produit? Il faut trouver une solution. Je suis très sérieuse, il faut absolument trouver une solution.
M. Rory McAlpine: Permettez-moi d'abord d'insister sur la bonne coordination interministérielle, surtout au sein du groupe de travail. Je demanderais à M. Jordan de se charger des commentaires sur les aspects techniques de la classification tarifaire.
Á (1140)
M. Mike Jordan (directeur général, Direction de la politique commerciale et de l'interprétation, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada): Du point de vue des douanes, nous devons classifier les produits selon le conditionnement dans lequel ils sont importés. Comme cela a déjà été dit, ces produits sont importés et nous devons les classifier quand ils arrivent. Comme vous l'avez signalé à juste titre, nous avons offert une opinion et cette opinion, fondée sur le texte de la loi—encore une fois, c'est le texte de la loi—a été envoyée au TCCE puis à la Cour fédérale qui nous a donné raison.
Mme Rose-Marie Ur: Apparemment, le critère de votre ministère est que : «de tels mélanges ne peuvent être étalés ou caramélisés lorsqu'ils sont utilisés comme matière grasse de cuisson. Par conséquent, malgré leur nom, ce ne sont pas des succédanés du beurre». Est-ce votre seul critère de jugement?
M. Mike Jordan: Je demanderais à mon collègue, qui est notre spécialiste technique, de vous répondre.
M. Ignatius Leron (gestionnaire, Unité de l'élaboration de la nomenclature internationale, Direction générale des douanes, Agence des douanes et du revenu du Canada): La décision est fondée sur l'interprétation d'un tarif pour le lait, la crème et les succédanés du beurre et tout repose sur l'interprétation de «succédanés du beurre». Le terme n'est pas défini dans le tarif douanier, et comme c'est habituellement le cas dans de telles circonstances, nous nous appuyons sur la signification habituelle du mot, sur le sens donné par le dictionnaire à «succédanés du beurre». Le mot-clé, c'est le mot succédané, et le fil commun qui semble prévaloir dans toutes les définitions est que nous considérons un produit comme étant le succédané d'un autre s'il peut le remplacer. Les mélanges d'huile de beurre et de sucre peuvent-ils être considérés comme un succédané du beurre? Nous avons conclu qu'ils ne le pouvaient pas; bien qu'ils remplissent certaines des fonctions du beurre, ils ne les remplissent pas toutes. C'est notre interprétation, et cette interprétation a été confirmée par le Tribunal canadien du commerce extérieur et par la Cour fédérale.
Mme Rose-Marie Ur: Qu'ont recommandé Agriculture Canada et le ministère du Commerce international au ministre et au groupe de travail sur cette question particulière? Y a-t-il des options?
M. Rory McAlpine: Les options envisagées, comme je l'ai déjà mentionné, ont été transmises sous forme de recommandations aux ministres, mais elles sont confidentielles.
Mme Rose-Marie Ur: Depuis combien de temps? Quand va-t-il se passer quelque chose? Pendant combien de temps va-t-on les examiner?
M. Rory McAlpine: Comme nous vous l'avons expliqué, le groupe de travail a terminé son étude et ses recommandations ont été transmises aux ministres. La question est donc entre les mains des ministres. Je ne suis pas en mesure de faire des spéculations, mais je peux vous dire que les ministres ont clairement indiqué qu'ils avaient l'intention de prendre leur décision et de la faire connaître dans un proche avenir.
Mme Rose-Marie Ur: J'attendrai le deuxième tour.
Le président: Je pourrais peut-être en profiter pour poser moi-même une question. Est-ce que les mélanges d'huile de beurre et de sucre sont une invention? Est-ce que c'est quelque chose de totalement nouveau que les gens quand ils négociaient ces lignes et les produits relevant de ces lignes n'avaient pas anticipé? Est-ce que ce sont des produits qui sont arrivés sur le marché après l'accord de l'OMC ou comment cela s'est-il passé? Si les Américains peuvent proposer un projet de loi se plaignant de dégâts potentiels provoqués par l'importation d'un produit classé dans une ligne tarifaire qui, selon eux, est insuffisamment élevée, pourquoi ne le faisons-nous pas? La question demeure de savoir, comme l'ont demandé d'autres témoins, pourquoi cette lenteur? Avons-nous essayé de créer une autre ligne dans laquelle ce produit pourrait être éventuellement classé? Les agriculteurs posent la question, et c'est la raison pour laquelle nous tenons ces audiences. Il nous faut une conclusion, une conclusion positive, c'est à espérer, pour les producteurs.
Á (1145)
M. Rory McAlpine: Je crois qu'il y a des importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre depuis les années 80, mais au moment de la création des contingents tarifaires, ni le gouvernement ni l'industrie n'avaient imaginé la nécessité de prêter une attention particulière aux importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre.
Nous sommes revenus rapidement ce matin sur l'historique de l'enquête du TCCE et de ses résultats, et on vous a donné une explication sur certaines des considérations techniques concernant la classification tarifaire qui relève de l'Agence des douanes et du revenu du Canada. Il serait peut-être important de vous en dire un peu plus sur les obligations de commerce international et Andrea Lyon pourrait peut-être s'en charger.
Le président: Je ne veux pas prendre sur le temps de mes collègues. Monsieur Anderson, vous voulez poser vos questions maintenant? Je ne veux pas empiéter sur votre temps.
M. David Anderson: Si la réponse est courte, cela ne me dérange pas.
Le président: Bon. Pouvez-vous nous donner une réponse? Il serait peut-être opportun que vous répondiez à cette question.
M. David Anderson: Certaines de ces réponses n'en finissent pas. J'ai l'impression qu'ils essaient de noyer le poisson, mais...
Le président: Bon. Écoutons la réponse.
Mme Andrea Lyon: J'essaierai d'être concise.
Pour l'essentiel, comme Rory l'a déjà signalé, le produit en question entre sans tarif au Canada depuis les années 80. En conséquence, dans le contexte du Cycle d'Uruguay, nous ne l'avons pas assujetti à des restrictions d'importation, puisqu'il n'avait jamais été assujetti à des restrictions d'importation. C'est un tarif consolidé. Cela veut dire que si nous décidions de l'augmenter, en vertu de nos obligations commerciales internationales nous aurions l'obligation d'en notifier l'Organisation mondiale du commerce et d'ouvrir des négociations avec les pays qui ont un intérêt substantiel dans ce produit, la notion étant qu'il faut maintenir un équilibre global des concessions. Des négociations seraient menées avec les principaux pays fournisseurs pour calculer les compensations nécessaires. Si nous n'arrivons pas à un accord au niveau des compensations, les pays touchés ont des droits de rétorsion qui peuvent être exercés pendant une certaine période. Il y a donc une procédure à suivre.
Le président: Merci, madame Lyon.
Monsieur Anderson, cinq minutes.
M. David Anderson: Il y a un aspect de cette question qui continue à m'intéresser. Je me demande pourquoi nous faisons preuve d'autant de timidité et de réserve au sujet de certaines de ces questions commerciales. L'Union européenne et les États-Unis ont toutes sortes de programmes qui aident leurs secteurs agricoles, des programmes de développement rural, des programmes de « verdure », des programmes de fourrage, des programmes de lait pour les écoles, des programmes d'aide alimentaire et pour l'essentiel font du dumping sur certains marchés et finissent par influencer ces marchés. Pourquoi ne sommes-nous pas plus agressifs avec nos concurrents? Ils semblent constamment nous attaquer et que je sache, nous ne les avons jamais, nous, attaqués. Si nous l'avons fait, nous n'en avons certainement pas beaucoup parlé ou nous n'avons pas laissé savoir à nos producteurs que nous les protégions. Pourquoi sommes-nous si sages? Vous avez quelques gens de la division du commerce qui devraient pouvoir répondre, je pense.
M. Rory McAlpine: Sans vouloir trop entrer dans les détails, ce qui importe beaucoup pour le Canada c'est le respect par nos partenaires commerciaux des obligations commerciales. Nous pourrions citer divers incidents dans lesquels nous avons adopté cette approche. Mais ce qui est tout particulièrement important pour nous aujourd'hui, c'est de trouver une solution à ces mesures—tout particulièrement les mesures de soutien qui faussent la concurrence et les barrières qui restreignent l'accès au marché—qui affectent de manière négative le secteur agricole canadien dans le contexte des négociations agricoles de l'OMC. Comme vous le savez parfaitement, j'en suis sûr, nous consacrons d'énormes efforts à la négociation de règles supérieures et plus égales sur la scène internationale devant cette tribune, tout en reconnaissant, comme je l'ai mentionné lors de ma déclaration d'ouverture, qu'étant relativement un petit acteur sur la scène mondiale, le Canada dépend énormément de l'efficacité de ces règles multilatérales.
M. David Anderson: La Nouvelle-Zélande est aussi un petit acteur, monsieur McAlpine, mais elle est tout à fait prête à contester nos pratiques quand elle pense qu'elles contreviennent à la règle. Nous, nous restons sagement assis dans notre coin. Il me semble évident que dans de nombreux domaines les États-Unis ont des programmes d'aide de ce genre. Il doit bien y avoir des tribunes dans lesquelles nous pouvons leur dire qu'ils subventionnent leurs producteurs, que chez nous cela ne se fait pas et que nous entendons bien qu'ils cessent immédiatement. Nous ne faisons rien. Ils ont mis sur pied des programmes pour l'exportation du malt, ils s'attaquent à notre commission du blé, que certains d'entre nous ne soutiennent pas, mais ne pensent pas non plus qu'ils ont le droit d'y toucher—si quelqu'un y touche, ce sera nous—et nous, nous restons les bras croisés. Je crois qu'il est grand temps que nous fassions preuve de beaucoup plus d'agressivité. Un des secteurs auxquels nous devons nous intéresser dans les autres pays est celui de la gestion des approvisionnements, ce qu'ils font pour leur industrie laitière, par exemple. Nos témoins représentent les Finances, les Affaires étrangères et le Commerce international. J'aimerais les entendre. Je suis certain que leurs programmes ont des défauts et pourtant nous n'arrivons pas à les trouver. Si nous allons devant l'OMC, nous en aurons pour des années, nous en voulons pour preuve les négociations actuelles.
Á (1150)
Mme Andrea Lyon: Pour ce qui est des pratiques de nos partenaires commerciaux, comme M. McAlpine l'a rappelé, nous appuyons et nous soutenons les principes de la règle du droit. Nous cherchons à nous assurer que nos partenaires commerciaux respectent eux aussi ces obligations qu'ils ont contractées en adhérant à l'OMC, à l'ALENA, et à tout autre accord commercial régional négocié avec nous. Nous examinons avec grand soin les pratiques de nos partenaires commerciaux pour nous assurer qu'ils se conforment pleinement à leurs obligations commerciales internationales. Je me permettrais de signaler brièvement que le ministre, M. Pettigrew, a publié hier un rapport sur les priorités d'accès au marché international du Canada qui énonce les diverses priorités de politique commerciale du point de vue de l'accès au marché que le gouvernement entend appliquer tout au long de la prochaine année. Ces priorités incluent les mesures qui ont posé des problèmes au Canada et que nous continuons à examiner.
M. David Anderson: C'est frustrant pour les producteurs car nous regardons les États-Unis injecter 40 milliards de dollars dans des programmes de développement rural et d'agriculture alors que notre gouvernement se contente de 2 milliards. Censément, leurs programmes sont verts, c'est ce que vous dites, alors que dans nos 2 milliards de dollars il y a du jaune et nous courons le risque de contestation. Ils ont toute une myriade de programmes et nous n'en contestons aucun. J'ai du mal à croire que leurs programmes sont tous exempts de ces problèmes.
J'aimerais revenir à la question de la technologie et du commerce. C'est une grosse question, et elle va encore grossir. Nous avons déjà vu ce qui se passe avec les produits génétiquement modifiés, les restrictions commerciales qui sont imposées. Nous sommes en train de discuter de la question du blé génétiquement modifié. La technologie minotière du blé évolue, la technologie laitière aussi. Sommes-nous prêts à nous attaquer au problème de heurt entre la technologie et le commerce? Sommes-nous prêts à aborder ces questions dans les négociations? Notre pays est-il prêt?
M. Rory McAlpine: Ce sont des points très importants. Il est évident que l'évolution de la technologie, du comportement des consommateurs, des mesures environnementales, etc., etc., ont une énorme incidence sur le commerce agricole et sur l'accès aux marchés. Le gouvernement a pris un certain nombre d'initiatives dans ces domaines du point de vue à la fois des agences de réglementation, avec l'ACIA, par exemple, qui s'occupe de ces questions, et d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, de Santé Canada, etc.
Les barrières dites techniques au commerce sont assujetties aux clauses des accords de l'OMC, qu'il s'agisse de barrières techniques traditionnelles ou de mesures sanitaires et phytosanitaires. Le Canada est un acteur très actif au niveau de toutes ces questions qui sont étudiées par ces comités, ainsi que par un certain nombre de forums multilatéraux, comme le Codex Alimentarius qui fixe les normes en matière de sécurité alimentaire, de qualité, d'étiquetage, etc.
Comme vous le savez, dans le contexte de sa nouvelle politique agricole, le Canada entend faire monter la barre pour ce qui est des normes en matière de sécurité alimentaire, de qualité, d'innovation et d'environnement. Nous incorporerons cette initiative à nos efforts internationaux de pénétration des marchés qui érigent ce genre de barrières commerciales techniques.
Ce ne sont là que les questions techniques, mais le gouvernement s'est saisi du dossier et consacre un nouvel effort considérable à la résolution de ces problèmes.
Le président: Merci.
Monsieur Plamondon, cinq minutes.
[Français]
M. Louis Plamondon: Il y a quand même quelque chose qui me surprend. Lorsque vous avez décidé de classer ces mélanges, vous avez dit que ce ne sont pas des produits laitiers puisqu'ils ne peuvent pas être tartinés. Or, hier, il y avait la réunion de la Fédération des producteurs de lait du Québec. On a offert au secrétaire parlementaire un produit venant d'Irlande, qui se tartinait très bien. Pourtant, on le laisse entrer sans aucune restriction. On a invité le secrétaire parlementaire à déguster ce produit, mais en lui disant de faire attention, qu'on ne pouvait pas lui garantir qu'on avait respecté les normes de salubrité habituelles. Il n'a pas voulu en manger; il pourra le confirmer. Alors, comme vous voyez, c'est quand même permissif, trop permissif. Il y a quelque chose qui ne va pas.
L'autre chose, c'est que lorsque l'on passe aux douanes, on considère ces produits comme n'étant pas des succédanés de beurre. Toutefois, lorsqu'ils entrent au pays et qu'ils sont ensuite vendus, on exige du fabricant d'inscrire la mention «substances laitières». Quand ils entrent, ce ne sont pas des produits laitiers, mais dès qu'on les vend, ce sont des substances laitières. C'est sûr qu'il faut faire quelque chose pour changer cela.
Je sais qu'un de vos alignements est les mesures de sauvegarde. Dans une des questions que j'ai posées tout à l'heure, je vous ai demandé si le Canada avait déjà invoqué ces mesures de sauvegarde et, si oui, combien de fois il avait gagné. Je n'ai pas eu de réponse à cette partie de ma question.
Á (1155)
[Traduction]
Mme Andrea Lyon: Toutes mes excuses. Le Canada a invoqué des mesures de sauvegarde, à deux reprises, sauf erreur, à propos du boeuf désossé au début des années 90 et un peu plus récemment à propos de l'acier. Pour le boeuf désossé, je crois qu'il y a eu constatation de préjudice grave. Pour l'acier, je ne sais pas si mon collègue des Finances a quelque chose à dire.
M. Patrick Hines (économiste principal, Division de la politique commerciale internationale, ministère des Finances): L'affaire est en cours.
[Français]
M. Louis Plamondon: Au sujet de la première partie de ma question, comment expliquez-vous que lorsque les produits entrent, ce ne sont pas des produits laitiers, mais lorsqu'on les vend, on doit indiquer la mention «substances laitières»? Pourquoi, lorsqu'ils sont rendus ici, deviennent-ils des produits laitiers?
[Traduction]
M. Rory McAlpine: Je crois que nous pouvons dire que ce produit est considéré comme un produit laitier, mais c'est une question de classification tarifaire. Je devrais demander à mes collègues de l'ADRC s'ils ont quelque chose à vous répondre.
M. Ignatius Leron: Comme l'expliquait plus tôt M. Jordan, la décision est prise au moment de l'importation. Les produits sont donc classés au moment où ils arrivent au pays, peu importe ce qui leur arrive après leur entrée, dans le cas qui nous occupe. Notre mandat à nous, c'est d'interpréter la loi telle qu'elle est libellée, et c'est pour cela que nous intervenons au moment de l'arrivée du produit d'importation.
[Français]
M. Louis Plamondon: Je termine rapidement en vous demandant si vous accepteriez, pour déjeuner demain, de manger les tartines que M. Duplain a refusé hier?
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Plamondon.
Nous passons maintenant à M. Duplain qui aura cinq minutes.
[Français]
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Je peux ajouter qu'en tant que consommateur, quand vous parlez de préjudice grave, effectivement, ça se tartine très bien. Quand j'ai vu cette merde qu'on me fait manger dans la crème glacée, en tant que consommateur, j'ai pris cela comme un préjudice. Cela faisait longtemps que j'en mangeais, mais je n'en mange plus et je dirais aux consommateurs de ne plus jamais manger de crème glacée faite avec ce produit.
Je reviens à mes questions. Je n'étais pas ici en 1990, mais au cours de cette année, les représentants de l'Agence des douanes et du revenu ont mentionné que l'agence surveillait de près les importations de mélanges.
À quelle fréquence conduit-elle des tests pour s'assurer que les importations d'huiles de beurre respectent les normes? Est-ce qu'on fait souvent des tests et à quelle fréquence? De plus, avez-vous rejeté des mélanges qui ne satisfaisaient pas à la limite de 50 p. 100?
 (1200)
[Traduction]
M. Ignatius Leron: Pourriez-vous répéter la question, je vous prie?
[Français]
M. Claude Duplain: J'ai des notes qui disent que dans les années 1990, l'Agence des douanes et du revenu du Canada a mentionné qu'elle surveillait de près les importations de mélanges. Ma question est la suivante: à quelle fréquence l'agence conduit-elle des tests pour s'assurer que les importations d'huiles de beurre sont bien sous la ligne tarifaire 2106.90.95? De plus, avez-vous rejeté des mélanges qui ne satisfaisaient pas à la limite de 50 p. 100 d'huile de beurre?
[Traduction]
M. Ignatius Leron: Si je vous comprends bien, nous faisons effectivement le suivi des importations, et que je sache, nous n'avons rejeté aucune importation de ce produit.
[Français]
M. Claude Duplain: Les tests se font à quelle fréquence?
M. Mike Jordan: On n'a pas ces renseignements à ce moment-ci. Je n'ai pas ces chiffres. Je ne sais pas si je peux les avoir, mais je vais essayer de les obtenir.
M. Claude Duplain: Au cours des dernières années, est-ce qu'il y a eu aussi d'autres produits plus ou moins laitiers qui, comme les huiles de beurre, ont été spécialement composés pour contourner les lignes tarifaires.
On a justement l'impression que cette huile de beurre a été fabriquée pour contourner les lignes tarifaires. Cela n'existait pas auparavant. À un moment donné, il y a des restrictions, et on découvre un nouveau produit. Toutefois, la technologie d'aujourd'hui va permettre de découvrir toutes sortes de nouveaux produits de cette nature.
Est-ce qu'il y a présentement d'autres produits comme ceux-là qui risquent d'arriver sur le marché pour venir contrer les produits laitiers?
[Traduction]
M. Rory McAlpine: Bien sûr, cela peut arriver. Nous pourrions sans doute démontrer que cela s'est déjà produit dans bien des pays où des restrictions tarifaires sont imposées. Il arrive souvent que les négociateurs du secteur privé tentent de trouver des façons de contourner ces règles en proposant différents types de mélanges de produits, etc. C'est ce que le Canada a constaté devant les mesures instaurées par d'autres pays. C'est toujours une préoccupation et un défi pour les administrateurs des douanes ainsi que pour les divers ministères des Finances que d'établir des classifications tarifaires qui tiennent compte des changements technologiques et des nouveaux produits composés de façon justement à contourner des mesures. Je vous ai déjà expliqué que, dans nos démarches, nous avons pu jusqu'à ce jour en tenir compte par le truchement des enquêtes du TCCE. Mais je répète que toutes nos décisions se fondent toujours sur les doléances de l'industrie. Or, à l'époque où le Canada avait imposé ses contingents tarifaires en 1994, cela n'était pas encore un problème. C'est la meilleure explication que je puisse vous donner.
[Français]
M. Claude Duplain: J'aurais une dernière question. Quand il y a un problème--et je veux bien croire que les producteurs laitiers ont un problème--, plus on attend pour le régler, plus l'impact est grand.
Vous avez fait partie d'un comité qui a fait des recommandations. Quand vous avez fait vos recommandations, vous avez dû étudier tous les impacts possibles. Aujourd'hui, en 2003, si on changeait de ligne tarifaire et qu'on mettait une ligne tarifaire spéciale pour empêcher ces produits d'entrer, quel serait l'impact à l'extérieur du pays et quel serait l'impact à l'intérieur du pays si ces produits n'entraient plus ici? Est-ce que vous avez analysé la situation?
 (1205)
M. Rory McAlpine: Je voudrais clarifier une chose. Parlez-vous de l'impact économique?
M. Claude Duplain: Je parle de l'impact économique et de l'impact socio-économique qu'il y aurait si on empêchait ces produits d'entrer au Canada.
M. Rory McAlpine: Il y a plusieurs aspects à cela, mais j'aimerais en souligner un. Un aspect important serait l'impact pour les transformateurs ou les manufacturiers de crème glacée, qui utilisent actuellement ces importations. Cela a un impact pour eux au niveau des coûts de production. Donc, s'ils n'ont plus la possibilité de faire ces importations, il y aura un impact sur les coûts de production de ce produit et, finalement, sur les consommateurs.
M. Claude Duplain: Avez-vous calculé l'impact sur les consommateurs?
[Traduction]
Le président: Notre temps est écoulé. Avez-vous une dernière chose à ajouter, monsieur McAlpine?
[Français]
M. Rory McAlpine: Nous n'avons pas de chiffres à cet égard. Peut-être que nous pouvons trouver plus d'information sur ces questions, et je suggère que l'industrie explique elle-même son point de vue sur ces questions et sur l'impact sur les coûts de production.
[Traduction]
Le président: Nous allons conclure maintenant. Nous allons entendre le secteur industriel dans un instant, et on nous donnera sans doute certaines des réponses que vous souhaitez entendre.
Monsieur Duplain, vous invoquez le Règlement?
[Français]
M. Claude Duplain: Oui, je fais un rappel au Règlement. Comme je pense que la réunion qu'on a ici est très importante et qu'on a perdu du temps au début, je me demande si on pourrait prolonger la séance, parce que je sais que Mme Ur avait, elle aussi, encore des questions. On pourrait prolonger la séance, si la salle est encore libre.
[Traduction]
Le président: Mais nous devons recevoir un autre groupe de témoins, les Producteurs laitiers du Canada. Je voudrais être équitable envers les deux groupes et diviser également le temps de séance. Or, j'ai déjà accordé plus de temps à ce groupe-ci que je ne pourrai en accorder au groupe suivant. Nous allons donc nous en tenir là, à moins que certains d'entre vous aient des commentaires pressants à faire avant que je conclue cette partie-ci de la réunion ou à moins qu'un membre du comité ait une question pressante à poser aux témoins.
Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: J'avais quelques questions à poser que je pourrais sans doute envoyer aux témoins.
Le président: Les Producteurs laitiers sont déjà ici et je voudrais être équitable envers les deux groupes.
Mme Rose-Marie Ur: Je n'ai qu'une seule chose à dire, dans ce cas. On a demandé à l'ADRC quelles étaient ses activités et quel système elle utilisait. Il semble y avoir un manque d'information sur les démarches utilisées pour faire l'identification. Il me semble que notre comité pourrait demander des détails sur ce que fait exactement le ministère.
Le président: Ce qui semble souvent frustrant aux membres du comité lorsque des groupes comme le vôtre comparaissent, c'est qu'ils veulent obtenir de l'information qu'on ne semble pas toujours vouloir leur donner. Nous, nous avons une tâche à accomplir, nous devons nous pencher sur divers dossiers, et nous devons utiliser notre temps le plus judicieusement possible. Nous nous attendrions à ce que vous, pour votre part, vous nous donniez l'information la plus exacte possible, ou à tout le moins qu'elle soit déposée sur la table juste après le début de la réunion. Ce dossier-ci est très sérieux, et le problème ne sera sans doute pas réglé sous peu, mais nous allons déployer beaucoup d'efforts pour trouver une solution à ce problème, puisque tant les producteurs que les transformateurs auront à en assumer les conséquences.
Merci beaucoup d'avoir comparu ce matin. Nous serions heureux de vous accueillir à nouveau éventuellement.
Je vais maintenant demander aux représentants des Producteurs laitiers du Canada de s'avancer à la table des témoins pour que nous puissions poursuivre nos discussions sur la question.
 (1210)
 (1216)
Le président: Nous reprenons la séance.
Merci d'être là à nouveau. Le dossier qui nous occupe est assez décourageant pour nous, les députés, qui représentons des circonscriptions rurales et des producteurs laitiers, et il l'est sans doute autant pour vous qui représentez l'industrie laitière. Nous souhaitons ardemment résoudre le problème, le plus rapidement possible. Il faut en tout cas que nous nous prononcions là-dessus à la veille de la prochaine ronde de négociations à l'OMC.
Nous accueillons aujourd'hui Richard Doyle, que le comité connaît bien, et qui est le directeur exécutif des Producteurs laitiers du Canada, ainsi que Leo Bertoia, que nous connaissons bien aussi et qui en est le président. Merci d'avoir accepté de comparaître.
Monsieur Bertoia, est-ce vous qui prendrez la parole?
M. Leo Bertoia (président, Producteurs laitiers du Canada): Oui, pour les remarques liminaires.
Le président: Pouvez-vous le faire dans au plus 10 minutes?
M. Leo Bertoia: Je ferai de mon mieux. Je pense y parvenir.
Le président: Nous voudrions avoir terminé à 13 heures. S'il reste des questions urgentes à poser, nous pourrons peut-être continuer, mais je voudrais avoir terminé à 13 heures.
M. Leo Bertoia: Merci, monsieur le président.
Je remercie le comité de nous avoir donné l'occasion de comparaître aujourd'hui et de discuter avec vous des mélanges d'huile de beurre et de sucre. Je pense qu'on vous a même montré des exemples de ce produit pour que vous sachiez exactement de quoi il retourne. Cette question remonte à loin, et je dois dire que je souscris à certains des commentaires entendus plus tôt.
En 1996, les Producteurs laitiers du Canada ont appris qu'un mélange de 49 p. 100 d'huile de beurre et de 51 p. 100 de sucre était importé au Canada sans restrictions. En 1997, le Tribunal canadien du commerce extérieur a été saisi de la question et a examiné l'impact de ces mélanges sur l'industrie laitière canadienne. En novembre de la même année, les Producteurs laitiers du Canada comparaissaient devant votre comité. En 1999, le TCCE a rendu une décision quant à la classification des mélanges, après quoi les Producteurs laitiers du Canada ont porté l'affaire devant la Cour fédérale.
En 2002, les ministres Vanclief et Pettigrew ont chargé un groupe de travail sur la gestion de l'offre des produits laitiers d'étudier les préoccupations des producteurs au sujet de l'érosion de leurs marchés. Ces ministres nous ont donné leur appui inconditionnel et ont promis aux producteurs laitiers du Canada que ce groupe de travail trouverait des solutions aux problèmes auxquels fait face l'industrie laitière canadienne. Bien sûr, l'importation des mélanges d'huile de beurre et de sucre était l'une des questions les plus importantes analysées par le groupe de travail, dont nous étions censés faire partie à l'époque. À la fin des discussions, on nous a expliqué que nous ne prendrions pas part à la rédaction du rapport, ce qui nous a laissé un goût amer. On nous avait également expliqué que le rapport viendrait sous peu, mais nous en attendons encore les résultats. On nous avait parlé de février, puis de mars, et nous sommes aujourd'hui en avril et il n'y a toujours pas de rapport.
Il faut agir dès maintenant. Les importations ont augmenté de 557 p. 100 depuis 1995 et ont déjà remplacé de 25 à 30 p. 100 du beurre du Canada dans la fabrication de la crème glacée. C'est nettement plus que l'accès au marché de la crème glacée auquel s'était engagé le Canada lors des négociations commerciales du Cycle d'Uruguay.
L'effet de l'utilisation de ces mélanges sur la transformation primaire au Canada est considérable. Au Canada, le secteur de la transformation primaire employait 20 500 travailleurs en 2001-2002, et on estime que l'importation des mélanges coûte 328 emplois à ce niveau. C'est sans compter une perte de production laitière équivalant à celle de 270 fermes, ou plus de 800 producteurs et leurs travailleurs agricoles. Mesdames et messieurs, cela équivaut à retirer complètement de la production laitière canadienne la province de la Saskatchewan. Le nombre total d'emplois perdus à cause des importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre dépasse 1 000. L'importation de ces mélanges a fait perdre à l'industrie laitière canadienne pour environ 27 millions de dollars de ventes de matières grasses du lait.
Chose encore plus alarmante, il y a une tendance récente à l'importation de mélanges de beurre et de sucre faits de 49 p. 100 de beurre et de 51 p. 100 de sucre, qui sont plus faciles à utiliser pour remplacer le beurre canadien dans la fabrication de crème glacée et de confiseries—je pense que vous trouverez une étiquette dans notre trousse. Ces mélanges menacent de remplacer une part encore plus considérable du marché canadien de la matière grasse butyrique. Si la tendance actuelle se maintient, la grosse part du marché de la crème glacée aura vite été enlevée par les mélanges importés.
Les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre sont classées dans la ligne tarifaire 2106.90.95, qui est celle des «autres préparations, contenant à l'état sec plus de 10 p. 100 de solides de lait en poids mais moins de 50 p. 100 en poids de contenu laitier». Les importations classées dans ce numéro tarifaire sont assujetties à un faible tarif de 8 p. 100 et ne sont pas soumises à un contingent tarifaire. Le problème est que l'Agence des douanes et du revenu du Canada est incapable de classer correctement ces mélanges dans un numéro tarifaire qui est assujetti à un contingent tarifaire, et en particulier dans les numéros tarifaires 2106.90.33/34, qui sont ceux des «préparations, contenant plus de 15 p. 100 en poids de matière grasse du lait mais moins de 50 p. 100 en poids de contenu laitier, pouvant servir de succédané du beurre». L'ADRC est incapable de classer les mélanges d'huile de beurre et de sucre dans ce numéro tarifaire parce que le mélange n'est actuellement pas considéré comme «pouvant servir de succédané du beurre», vu qu'il ne remplace pas le beurre dans toutes ses applications. Le classement de l'ADRC s'appuie sur la décision selon laquelle les mélanges d'huile de beurre et de sucre ne sont pas des mélanges «pouvant servir de succédané du beurre», vu que ces mélanges ne peuvent pas remplacer le beurre «à presque tous les égards et dans presque toutes les conditions».
 (1220)
Cette exigence selon laquelle un produit doit pouvoir remplacer le beurre dans toutes ses applications pour pouvoir être considéré comme «pouvant servir de succédané du beurre», ce sont les fonctionnaires de l'ADRC qui l'ont créée en l'absence de directives législatives ou ministérielles les obligeant à le définir autrement. Lors de l'examen de la question des mélanges d'huile de beurre et de sucre, le Tribunal canadien du commerce extérieur a fait observer que l'expression «pouvant servir de succédané du beurre» existe dans le Tarif des douanes du Canada, sans pourtant y être définie. L'expression ne figure même pas dans les notes explicatives ni dans les décisions de classement en vertu du Système harmonisé international de classement douanier. De fait, il n'y a pas de fondement juridique pour expliquer qu'un produit puisse servir de succédané du beurre dans la totalité, ou presque, des utilisations possibles du beurre pour que le produit soit considéré comme «pouvant servir de succédané du beurre». Les fonctionnaires de l'ADRC n'utilisent cette définition que parce qu'on ne leur a pas dit de faire autrement.
Malgré ce que l'ADRC peut en penser, les mélanges d'huile de beurre et de sucre remplacent directement la matière grasse du lait canadien. Cette interprétation mine l'intégrité du système de gestion de l'offre des produits laitiers du Canada et des engagements d'accès que le Canada a pris lors du Cycle d'Uruguay des négociations commerciales. Si la définition de «pouvant servir de succédané du beurre» était précisée par le gouvernement et englobait les « préparations pouvant servir de succédané du beurre dans une ou plusieurs utilisations », l'ADRC aurait la directive dont elle a besoin pour classer correctement les mélanges d'huile de beurre et de sucre dans le numéro tarifaire 2106.90.33/34.
Le gouvernement du Canada peut effectuer ce changement. Il faut préciser que l'expression «pouvant servir de succédané du beurre», au sens où elle est utilisée dans les positions tarifaires 2106.90.33/34, couvre les produits comme les mélanges d'huile de beurre et de sucre qui servent de succédanés du beurre dans certains produits, peu importe que le produit soit un succédané du beurre dans toutes ses utilisations. Il y a deux rajustements à faire pour arriver à ce résultat. En premier lieu, il faut modifier la description des marchandises dans les numéros tarifaires 2106.90.33/34 pour qu'elle se lise ainsi :
Préparations contenant plus de 15 p. 100 en poids de matières grasses du lait mais moins de 50 p. 100 en poids de contenu laitier, pouvant servir de succédanés du beurre dans une ou plusieurs de ses utilisations, dans les limites ou au-dessus de l'engagement d'accès. |
L'article 13 du Tarif des douanes donne au ministre des Finances le pouvoir de prendre un règlement pour modifier une description de marchandises dans un numéro tarifaire. En second lieu, il faut modifier le mémorandum des douanes D10-18-4, qui traite de l'importation de produits agricoles, et la liste de marchandises d'importation contrôlée, pour refléter cette clarification du sens de l'expression «pouvant servir de succédanés du beurre».
Au cours des réunions du groupe de travail, les fonctionnaires du ministère des Finances ont fait valoir que l'article 13 se limite à la correction d'erreurs typographiques et qu'il ne donne pas au ministre des Finances le pouvoir de modifier le numéro tarifaire comme nous l'avons affirmé. Ces fonctionnaires ont dit que l'application de notre solution reviendrait à majorer le taux de droits applicable au numéro tarifaire 2106.90.33/34—ce que l'article 13 ne donne pas au ministre le pouvoir de faire. Les Producteurs laitiers du Canada ont remis au groupe de travail des avis juridiques confirmant que la description des marchandises, dans le sens proposé par les PLC, peut se faire dans le cadre de l'article 13, et que rien dans le libellé de l'article 13 ne limite le pouvoir du ministre à la seule correction d'erreurs typographiques. De fait, le ministre des Finances a invoqué l'article 13 pour introduire d'importantes modifications non typographiques à la description de marchandises pour des numéros tarifaires. Dans au moins un cas, ces modifications ont entraîné la modification du classement tarifaire et du traitement tarifaire subséquent des marchandises. Ces avis juridiques sont dans vos trousses d'information.
Il est essentiel que le comité comprenne bien que nous ne réclamons pas une majoration du taux des droits tarifaires. Nous demandons de clarifier une définition de «pouvant servir de succédanés du beurre», l'expression utilisée dans la description d'un numéro tarifaire. Le reclassement qui s'ensuivrait relèverait de l'ADRC et serait indépendant de la mesure que prendrait le ministère des Finances en vertu du Tarif des douanes.
 (1225)
En conclusion, nous aimerions souligner que, lors du Cycle d'Uruguay des négociations commerciales, l'intention du gouvernement du Canada était de négocier un accès limité au marché canadien de la crème glacée. En permettant l'importation illimitée de mélanges d'huile de beurre et de sucre, le gouvernement du Canada a déjà renoncé à 30 p. 100 de ce marché. Les contrôles d'importation visent à protéger la gestion de l'offre. S'il y a moyen de les contourner, on mine alors un des piliers de la gestion de l'offre, et c'est tout le système qui est à risque. Dans le cas des mélanges d'huile de beurre et de sucre, ce contournement est facilité par une définition inexacte de «pouvant servir de succédanés du beurre», qui n'a pas de fondement dans le droit canadien ou international. Le gouvernement a le pouvoir de régler ce problème en mettant en oeuvre les changements que nous avons exposés ici. Ces changements sont compatibles avec la façon dont le Canada comprend ses obligations à l'égard des produits laitiers, dans le cadre de l'OMC, y compris son droit de maintenir ses systèmes fondés sur la gestion de l'offre. Les mesures efficaces à la frontière ne coûtent rien au gouvernement. En opérant les changements ici demandés, le gouvernement démontrera son appui pour la gestion de l'offre et pour les producteurs laitiers du Canada.
En terminant, j'aimerais signaler que, depuis 1995, le prix des produits laitiers au Canada a généralement augmenté de 15 . 100, soit 18 p. 100 pour le lait de consommation, 17 p. 100 pour le beurre, 10 p. 100 pour le fromage et, dans le cas de la crème glacée, l'augmentation a été de 19 p. 100. Les consommateurs canadiens ne tirent donc aucun avantage de l'importation de ce produit. Dans le cas des autres produits laitiers, la hausse a été de 14 p. 100.
Je remercie de nouveau le comité de nous avoir donné l'occasion de lui présenter cet exposé aujourd'hui. Nous serions heureux de répondre à toutes vos questions au mieux de notre connaissance. Je suis accompagné de spécialistes qui pourront m'aider à répondre aux questions plus techniques.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Bertoia. Nous pouvons maintenant entreprendre la période de questions.
Monsieur Anderson, pour sept minutes.
M. David Anderson: Merci, monsieur le président.
Monsieur Bertoia, j'ai été scandalisé d'entendre le secrétaire parlementaire dire qu'il pensait que la crème glacée canadienne était de la merde. Vous ne considérez pas que la crème glacée faite avec votre lait est de la merde, n'est-ce pas?
M. Leo Bertoia: Pas celle qui est faite avec mon lait, mais dans le cas de ce produit, je pense que l'épithète est tout à fait juste. Je n'achète plus de la crème glacée bon marché, parce que je n'en aime pas le goût.
M. David Anderson: Il y a dix ans, le Parti progressiste conservateur avait amorcé le démantèlement du système de la gestion de l'offre. Au cours des dix dernières années, les libéraux l'ont compromis encore davantage. Ils semblent prêts à le sacrifier sans prévoir d'autres solutions ou d'autres possibilités. Ils sont en train de le démanteler étape par étape, et vous ne recevez rien en échange. Je trouve intéressant que le l'Alliance soit le seul parti qui ait une politique écrite à l'appui d'un système viable de gestion de l'offre. Pourquoi le gouvernement libéral refuse-t-il d'entendre vos plaintes depuis six ans? Combien de temps pensez-vous devoir attendre encore pour que les ministres s'attaquent à ce dossier et le fassent avancer?
 (1230)
M. Leo Bertoia: Les Producteurs laitiers du Canada sont d'avis que nous attendons depuis déjà trop longtemps, et nous en sommes très frustrés. Je crois qu'on a eu la preuve hier à la réunion à Québec qu'il y a déjà trop longtemps que nous attendons d'avoir des réponses, notamment en ce qui concerne ce dossier-ci. Nous voudrions avoir des réponses. On nous avait dit à la fin des discussions avec le groupe de travail que nous aurions la réponse en janvier; nous sommes maintenant en avril, et nous attendons toujours. La frustration ne fait que s'accroître, et si quelque chose ne se produit pas très bientôt, les producteurs laitiers du pays vont passer à l'action.
M. David Anderson: Préféreriez-vous qu'on vous réponde simplement oui ou non que d'attendre indéfiniment comme vous le faites à l'heure actuelle?
M. Leo Bertoia: Nous sommes inquiets, bien sûr, parce que nous ne savons pas de quel côté la balance va pencher, mais nous préférerions certainement avoir un oui ou un non. Les déclarations du ministre du Commerce international et du ministre de l'Agriculture, qui se sont prononcés à 1 000 p. 100 en faveur de la gestion de l'offre, nous permettent toutefois d'attendre un résultat positif relativement à ce dossier.
M. David Anderson: Pensez-vous que l'actuel gouvernement devrait s'attaquer aux autres dossiers commerciaux de façon plus agressive? J'en ai parlé un peu tout à l'heure avec les fonctionnaires. Il y a peut-être un certain nombre de domaines où cela pourrait se faire. Pensez-vous qu'il devrait être plus agressif? Dans l'affirmative, quels sont certains des domaines où il devrait s'affirmer?
M. Richard Doyle (directeur exécutif, Producteurs laitiers du Canada): Il y a plusieurs dossiers auxquels le gouvernement devrait s'attaquer et où il devrait contester les règles qu'appliquent d'autres pays qui, à notre avis, ne sont pas conformes aux exigences de l'OMC. Il y a un certain nombre de dossiers dont nous discutons actuellement avec les ministères de l'Agriculture et du Commerce international en ce qui a trait notamment aux pratiques qui ont cours aux États-Unis et en Nouvelle-Zélande. Si cela intéresse votre comité, monsieur le président, nous serions heureux de revenir, particulièrement si c'est au mois de mai, pour vous exposer chacun des dossiers pour lesquels les programmes en place aux États-Unis et en Nouvelle-Zélande vont à l'encontre des obligations de ces pays à l'égard de l'OMC.
M. David Anderson: Pourriez-vous déjà nous donner une idée de ce que seraient ces dossiers? Nous allons vous rencontrer en mai.
M. Richard Doyle: Certains éléments du Farm Bill, certaines des subventions aux États-Unis et certaines pratiques en matière de tarification. En Nouvelle-Zélande, il y aurait les avantages accordés à l'industrie par voie réglementaire pour lui faciliter l'accès à certains marchés sans lesquels elle n'aurait aucune chance de pénétrer ces marchés. Il y en a pas mal.
M. David Anderson: Merci.
Il y a déjà deux ou trois ans que cette question soulève la controverse. Avons-nous une industrie de la crème glacée au Canada? Y a-t-il quelqu'un chez nous qui fabrique de la crème glacée?
M. Leo Bertoia: Non.
M. David Anderson: Les mélanges sont faits à 49 p. 100 de produits laitiers, n'est-ce pas?
M. Leo Bertoia: C'est ce qu'on dit. Je ne le sais pas. Nous n'avons pas nous-mêmes fait de vérification, et j'ai été très surpris d'entendre dire que les agents des douanes ne surveillent pas eux non plus ce produit comme ils le devraient. Nous tenions tout simplement pour acquis que les importations de ce produit devaient répondre à certains critères.
M. David Anderson: Je sais que cela vous enlève une partie de votre marché aussi, mais il y a quand même un marché de 8 millions de kilogrammes au Canada. Pourquoi votre industrie ne s'est-elle pas lancée, elle aussi, dans la fabrication de ce produit? Je sais bien que cela vous fait perdre de vos ventes, mais il y a quand même un marché pour ce produit.
M. Richard Doyle: Le produit est utilisé comme succédané du beurre. Les fabricants préfèrent fabriquer leur crème glacée à partir de crème ou de beurre, mais c'est finalement une question de prix. Il faut savoir que ces préparations alimentaires sont conçues expressément pour le marché canadien où elles servent de succédanés du beurre dans la fabrication de la crème glacée.
M. David Anderson: Oui, je sais. Je sais aussi que, si le gouvernement n'intervient pas pour mettre fin à cette pratique, vous avez quand même la possibilité de vous emparer d'une partie de ce marché. Je sais ce que vous êtes en train de faire, je sais ce que vous êtes en train de perdre, mais vous renoncez à ce marché sans prendre de mesures énergiques pour essayer de l'enlever à ceux qui envoient leur produit à des milliers de milles d'où il est fabriqué pour s'emparer de votre marché.
M. Richard Doyle: Tout ce que je dis, c'est que moi, je ne le ferais pas. Les fabricants de crème glacée préfèrent le beurre à l'huile de beurre. Le sucre fabriqué au Canada coûte moins cher que le sucre importé. Importer un mélange fait à 51 p. 100 de sucre, quand le sucre coûte moins cher au Canada, c'est donc une façon tout simplement de contourner le contingent tarifaire que nous imposons au beurre et à l'huile de beurre.
 (1235)
M. David Anderson: J'ai parlé tout à l'heure du rôle de la technologie dans l'industrie et d'autres considérations de ce genre. D'après vous, cela va-t-il devenir un problème croissant du fait que vos produits seront remplacés par certains de ces autres produits et aussi du fait que certains pays pourront exporter chez nous en contournant les restrictions au commerce? Avez-vous des préoccupations en particulier dont vous aimeriez nous faire part à cet égard?
M. Richard Doyle: Vous avez parfaitement raison, cela va continuer à prendre de l'ampleur, et le progrès technologique ne va certainement pas ralentir, mais nous ne devrions pas non plus essayer de le ralentir. L'efficacité du système tarifaire fondé sur le contrôle douanier sera vraiment compromise par ce type de mélange qui va pouvoir servir de succédané. Nous avons, par exemple, des problèmes dans le cas des concentrés protéiques de lactosérum et des produits à base de protéine de lactosérum. Les importations de caséine ont augmenté de plusieurs centaines de pour cent, et les importations de produits à base de protéine de lactosérum, de 1 600 p. 100. Il en résulte un déplacement important du surplus structurel. Je le répète, le consommateur n'en tire aucun avantage; de toute évidence, il est faux de prétendre le contraire. Il suffit de voir quels sont les prix qu'on pratique au détail, et nous ne demanderions pas mieux que de vous faire parvenir les résultats de toutes les enquêtes que nous faisons sur les prix au détail. Le fait que ces produits sont en train de passer les nôtres ne fait que souligner l'inefficacité de certains des contrôles d'importation que nous avons mis en place. Parce que ces produits n'étaient pas un problème en 1993, quand l'accord a été conclu dans le cadre des négociations du Cycle d'Uruguay, cela ne veut pas dire qu'ils ne poseront pas de problèmes à l'avenir.
Le président: Merci.
Monsieur Plamondon, sept minutes.
[Français]
M. Louis Plamondon: Merci.
Vous avez entendu les hauts fonctionnaires qui sont passés tout à l'heure. On dit toujours que les ministres passent et que les hauts fonctionnaires demeurent. On semblait se trouver devant un mur de ciment, c'est-à-dire que chaque fois qu'on envoyait une piste de solution, il y avait un refus assez radical. L'esprit qui anime ces personnes semble axé sur la légalité plutôt que sur le service aux citoyens et aux producteurs.
Or, en ce qui concerne les pistes de solution qui seront peut-être proposées d'ici quelques semaines par le ministre, vous avez peut-être eu des insides, comme on dit, des rencontres non officielles, qui vous laissent voir vers où se dirige le ministre.
Mais une des pistes dont on entend parler et dont j'ai parlé tout à l'heure est celle des mesures de sauvegarde. Quelle est votre attitude par rapport à ces mesures de sauvegarde? Est-ce que vous les rejetez d'emblée? Chez les agriculteurs que j'ai rencontrés très tôt ce matin, qui sont des producteurs de lait en Abitibi, ce n'était pas trop bien accueilli. Je vous laisse me répondre officiellement.
M. Richard Doyle: Merci. Oui, on rejette d'emblée cette approche de mesures de sauvegarde. Premièrement, les mesures de sauvegarde sont une approche à court terme. Elles peuvent être renouvelées, mais c'est pour une période déterminée maximale, et une fois que cette période-là est terminée, on ne peut plus utiliser ces mesures pour le même produit.
Deuxièmement, il y a aussi une question technique. L'augmentation importante de l'importation des mélanges d'huile de beurre et de sucre s'est faite entre 1995 et 1997. Au cours des trois dernières années, les importations de mélanges d'huile de beurre et de sucre ont été de l'ordre de 8 millions à 9 millions de dollars, donc relativement stables à ces trois niveaux-là. Une des mesures importantes dans des actions de sauvegarde est de démontrer qu'il y a eu une augmentation rapide dans une courte période de temps. Or, si on avait adopté cette approche en 1997, peut-être qu'elle aurait eu du sens, mais en 2003, elle n'a pas de sens. L'historique des trois à quatre dernières années est que ces produits ont atteint un niveau de 25 p. 100 ou 30 p. 100 de remplacement de la matière grasse au niveau de la crème glacée. Cela avait été dit en 1997, au Tribunal canadien du commerce extérieur, par les transformateurs eux-mêmes. Ils estimaient à 30 p. 100 le taux maximal de remplacement par l'huile de beurre.
Il y a des problèmes reliés à l'huile de beurre. C'est une question de goût. Il faut cacher le goût avec de la saveur au chocolat assez forte.
Le problème qu'on a, comme M. Leo Bertoia vous le disait, c'est qu'en 2002, on a eu une étiquette d'un produit importé de l'Angleterre qui est maintenant disponible et qui est un mélange de beurre et de sucre. Ce mélange beurre-sucre n'a pas les mêmes désavantages ni les mêmes limites au niveau de la manufacture. Il pourrait donc évidemment aller jusqu'à fournir un remplacement de 100 p. 100. Il faudra attendre encore des années pour avoir d'autres statistiques, mais on a peur...
 (1240)
M. Louis Plamondon: Que cela produise.
M. Richard Doyle: Mais il est trop tard pour prendre les mesures de sauvegarde. Ce n'est pas une approche qui est viable à l'heure actuelle.
M. Louis Plamondon: Si on élimine les mesures de sauvegarde, quelles mesures le ministre peut-il prendre suite aux recommandations qui lui ont été faites? On pourrait demander au tribunal de se pencher de nouveau sur le jugement, puisque ce jugement n'était pas unanime lorsqu'il a été prononcé, en invoquant les arguments du juge dissident, mais en termes de délais, ce serait extrêmement long. Comme troisième solution, il reste celle que les producteurs suggèrent. Autrement dit, il n'y a pas des dizaines de solutions.
La solution, c'est un geste politique ferme que doit poser le Canada, comme les autres pays le font occasionnellement, d'autant plus que ce n'est pas dirigé contre les États-Unis puisque les plus grands importateurs sont la Nouvelle-Zélande, l'Australie, le Royaume-Uni, le Mexique. Ce serait donc tout à fait normal, et je me demande pourquoi l'attitude des hauts fonctionnaires tout à l'heure a été de dire qu'il faut être prudent.
Je remarque que dans les autres pays, par exemple aux États-Unis en ce qui concerne le bois d'oeuvre, on va devant les tribunaux. Cela a été comme ça pour l'acier et pour différents produits.
Alors, pourquoi le Canada n'aurait-il pas une attitude, non pas agressive, mais ferme, en décidant d'y aller? Ça prendra le temps qu'il faudra. Les tribunaux prendront cinq ou six ans pour statuer, mais pendant ce temps, nous allons bien vivre et nous allons pouvoir développer notre argumentation si jamais nous devons aller devant les tribunaux. Il faudrait au moins prendre une décision. N'est-ce pas à peu près l'idéologie qui vous anime par rapport au ministre?
M. Richard Doyle: Vous avez entièrement raison. Nous avons le même problème que vous: nous essayons, nous attendons de voir la réaction du gouvernement. On nous a dit que nous aurions une réponse d'ici deux semaines. Nous attendons impatiemment.
C'est une décision strictement interne. J'ose donc espérer que le gouvernement pourra accepter de définir ce produit-là comme une préparation pour remplacer le beurre. C'est une question de processus, que ce soit des mesures de sauvegarde ou un retour au comité sans avoir changé la réglementation. On n'a pas recommandé quelque chose qui se ferait forcément en 24 heures. On demande un changement de réglementation. Ça va prendre quelque temps; on le sait.
Ce qu'on demande au gouvernement, c'est de se décider et de dire qu'il prendra des mesures conformes à la politique qu'il défend, qui est de maintenir les systèmes de gestion, et qu'il mettra en oeuvre un travail avec l'industrie pour aller dans cette voie.
Cela doit être fait dans le respect des droits et des marges de manoeuvre qu'on a légalement et au plan international.
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Plamondon.
Nous allons passer à M. Duplain, pour sept minutes.
[Français]
M. Claude Duplain: Merci, monsieur le président.
J'aimerais seulement éclaircir un point avec mon ami de l'Alliance canadienne. D'habitude, j'aime bien ses réflexions, mais il semble avoir dit que le terme que j'ai employé concernait toute la crème glacée, et surtout pas celle avec les produits laitiers. S'il n'est pas d'accord avec moi sur le terme que j'ai employé pour le produit, je l'invite à manger sa tartine, qu'il n'a pas encore commencé à manger.
Pour avoir parlé aux ministres et à leurs adjoints, vous devez savoir que si on entreprend cette procédure, il risque d'y avoir des impacts. J'ai posé une question plus tôt. Êtes-vous en mesure de prévoir l'impact qu'il pourrait y avoir? Ça fait longtemps qu'on attend de régler le problème, et il s'amplifie de plus en plus. Quel est l'impact qui risque de venir de l'extérieur du pays si on prend une telle mesure? Quel impact pourrait venir de l'intérieur du pays?
Vous avez dit tout à l'heure que le prix de la crème glacée a augmenté de 19 p. 100, comme celui des produits laitiers, ce qui m'a surpris. Les fonctionnaires nous ont dit tout à l'heure qu'il y avait un argument selon lequel ce produit était fait parce qu'il coûtait moins cher et qu'il faisait baisser les coûts. S'il y a une augmentation des prix, c'est que quelqu'un a fait de beaux profits quelque part.
Êtes-vous en mesure de prévoir des impacts venant de l'extérieur? On est un pays qui exporte énormément, vous le savez. On nous demande pourquoi nous ne prenons pas des mesures alors que les États-Unis en prennent tout le temps, mais c'est justement parce que nous sommes un pays exportateur. C'est ce qui fait notre force dans nos négociations à l'OMC. Il faut en tenir compte. Est-ce qu'on peut s'attendre à des représailles venant de l'extérieur? À quoi pensez-vous quand on parle de représailles possibles venant de l'extérieur?
 (1245)
M. Richard Doyle: Il peut facilement y avoir un pays exportateur qui va suggérer que le gouvernement canadien, en utilisant cette approche-là, va au-delà de ses obligations. À ce moment-là, il y a un système de résolution des différends. On devra faire un panel. Le cas consistera à déterminer si le Canada avait juridiction pour poser cette action-là. Et le cas décidera.
On ne peut pas prévoir qu'il va forcément y avoir un différend international. Et s'il y en a un, il y a des mécanismes de résolution de ces différends-là. La différence, c'est qu'au lieu de se retrouver devant le Tribunal canadien du commerce extérieur, où l'industrie, les producteurs se posent d'un côté et le gouvernement de l'autre pour défendre l'accès à 30 p. 100 de remplacement de la crème glacée canadienne, on va au moins être du même côté, contre les gens de l'extérieur, pour essayer de défendre les droits que l'on a. C'est tout ce qu'on demande.
On n'a pas peur d'aller devant un tribunal ou devant un autre panel de l'Organisation mondiale du commerce. S'il le faut, on y ira, que ce soit l'ALENA ou autre chose. Ce ne sera pas l'ALENA parce que cela n'implique pas tellement les États-Unis.
Donc, il faut plutôt décider de prendre une mesure que nous avons le droit de prendre. Et si les gens de l'extérieur veulent nous attaquer, alors pour nous défendre, nous passerons par les mécanismes, qui sont très bien expliqués.
M. Claude Duplain: Et quel est l'impact possible à l'intérieur du Canada?
M. Richard Doyle: Le prix de la crème glacée n'a pas seulement augmenté au même taux que celui des autres produits laitiers, c'est le produit laitier qui a eu le taux d'augmentation le plus haut au cours des sept dernières années au niveau du détail. Je vais vous donner les chiffres. C'est Nielsen qui a donné les chiffres; ce n'est pas moi qui les invente.
Donc, c'est évident que ça réduit les coûts. Ce qu'on essaie de démontrer, c'est que ça réduit les coûts, mais que cet avantage n'est pas transféré aux consommateurs, pas du tout. Donc, si les prix des autres produits laitiers qui sont faits avec de la matière première comme du beurre ont pu n'augmenter que de 14 p. 100 entre 1995 et 2002, pourquoi le prix de la crème glacée a-t-il augmenté de 19 p. 100?
M. Claude Duplain: On entend toutes sortes de choses depuis qu'on est dans ce débat-là.
Une réflexion que j'ai entendue pas plus tard que ce matin, c'est que si on ne laisse plus entrer les huiles de beurre, les quotas de lait vont se remettre à grimper encore parce que justement, on aura plus de demandes de produits laitiers. Les quotas vont encore augmenter et alors, le transfert des fermes sera encore plus difficile.
Que répondez-vous à cet argument?
M. Richard Doyle: On vient d'augmenter, le 1er février, le contingent, et le prix du quota a baissé. Donc, si les gens disent ça, c'est parce qu'ils ne comprennent pas les valeurs qui régissent le fonctionnement des quotas.
Je ne pense pas du tout que de reconquérir le marché domestique ait un impact sur les valeurs de contingentement.
M. Claude Duplain: Vous avez parlé d'un nouveau produit qui venait d'Angleterre. Est-ce qu'il y a beaucoup d'autres produits comme ça qui pourraient venir?
M. Richard Doyle: Comme je vous l'ai dit, je pense que ces deux produits-là sont faits spécifiquement pour satisfaire un besoin. La question de savoir si ces lignes tarifaires de préparations alimentaires peuvent avoir d'autres mélanges pour remplacer exactement les produits laitiers dans le fromage et commencer à avoir un déplacement, ça nous fait peur, même si nous ne les connaissons pas.
C'est tellement large, et si la flexibilité d'interprétation est telle qu'on permet des formulations dans les fromages... On a comparu devant votre comité la semaine dernière au sujet de la question des compositions et on a donné une bonne explication de tout ce débat-là, je pense. J'entendais les témoins précédents qui disaient que le nouveau cadre de l'agriculture va permettre d'avoir une plus haute qualité, une plus haute salubrité, etc., alors que lorsqu'on regarde la réglementation sur les compositions, on voit exactement l'inverse.
C'est évident que plus on va laisser de flexibilité, plus on va utiliser de produits d'importation dans les préparations alimentaires, parce que c'est ce que c'est. On va avoir de plus en plus de substances laitières modifiées et autres qui vont apparaître sur les listes d'ingrédients parce que, justement, les gens ne font plus de produits laitiers traditionnels avec du lait, mais ils les font avec des formules.
 (1250)
[Traduction]
Le président: Merci, monsieur Doyle. Merci, monsieur Duplain.
Madame Ur, pour une question ou deux.
Mme Rose-Marie Ur: Corrigez-moi si je me trompe, monsieur Doyle, mais nous ne fabriquons pas ou nous ne produisons pas de mélanges d'huile de beurre et de sucre ici au Canada. Si la demande est si importante, pourquoi l'industrie laitière n'essaie-t-elle pas d'y répondre?
M. Richard Doyle: Comme je l'ai expliqué à M. Anderson, la demande de mélanges d'huile de beurre et de sucre ne vise que les produits dans lesquels ils sont destinés à se substituer au beurre. Ce sont des succédanés du beurre. Quoi qu'on en dise, ces produits sont destinés à remplacer le beurre.
Mme Rose-Marie Ur: Mais on les utilise dans la fabrication de la crème glacée.
M. Richard Doyle: On les utilise au lieu du beurre dans la fabrication de la crème glacée, non pas parce qu'on aime ces produits, mais parce qu'ils coûtent moins cher.
Mme Rose-Marie Ur: Le fait est cependant que la demande existe, car cela coûte moins cher que de mettre du beurre dans la crème glacée, n'est-ce pas?
M. Richard Doyle: Mais pourquoi voudrais-je fabriquer un produit qui viendrait concurrencer à un prix d'importation un produit de très grande qualité qu'on fabrique déjà chez nous? On remplacerait alors la totalité des matières grasses du beurre pour fabriquer un produit de moins bonne qualité qui se vendrait à un prix moins élevé, et il faudrait que les producteurs se résignent à perdre toutes les matières grasses du beurre qui sont utilisées dans le produit de qualité supérieure.
Mme Rose-Marie Ur: Êtes-vous sûr que le produit est utilisé uniquement dans la crème glacée de qualité inférieure?
M. Richard Doyle: C'est ce qu'on a dit devant le TCCE, en juillet je crois. Il est clair d'après les discussions que nous avons eues avec les fabricants que l'utilisation de mélanges d'huile de beurre et de sucre dans la crème glacée de première qualité se traduirait par des économies encore plus grandes parce que la teneur en matières grasses est généralement plus élevée dans ce type de crème glacée.
Mme Rose-Marie Ur: Je vois.
Quand vous avez parlé des négociations du Cycle d'Uruguay, vous avez dit qu'il n'y avait pas lieu de les inclure à ce moment-là, mais que la situation a changé ces dernières années avec l'arrivée massive de mélanges d'huile de beurre et de sucre au Canada. Dans votre exposé, vous avez insisté sur le fait que l'intention du gouvernement du Canada lors des négociations commerciales du Cycle d'Uruguay était de négocier un accès limité au marché canadien de la crème glacée. Y avait-il des indications à ce moment-là que cela pourrait se produire? Les Producteurs laitiers du Canada étaient-ils à ces négociations? Pourquoi n'avez-vous pas fait connaître vos vues? Pourquoi n'avez-vous pas sonné l'alarme à cet égard?
M. Richard Doyle: J'y étais, alors je peux répondre à la question.
Mme Rose-Marie Ur: Je suis heureuse de le savoir. Nous n'aurons pas à nous contenter de ouï-dire.
M. Richard Doyle: Je tiens à préciser quelque chose qu'a dit un des témoins précédents. En 1993, aux négociations du Cycle d'Uruguay à Genève, les listes qui ont été déposées étaient exhaustives : on y retrouvait tous les produits. Dans le cas des produits laitiers, on y trouvait les principaux produits, le beurre, le fromage, la crème glacée, etc., et les contingents tarifaires qui y s'appliquaient. Toute cette question des ingrédients n'a été abordée en fait qu'entre janvier et la signature de l'accord de Marrakech en avril 1994. C'était donc un laps de temps très court. L'industrie a eu des discussions très vives avec le négociateur commercial et les ministères qui étaient là tout à l'heure en ce qui concerne les mélanges, les préparations alimentaires, etc. On ne connaissait pas à ce moment-là l'existence des mélanges d'huile de beurre et de sucre. Nous nous inquiétions des mélanges de matières grasses du lait à d'autres ingrédients.
Avant 1994, on s'inquiétait surtout des mélanges à base de protéine, des mélanges de sucre et de poudre de lait écrémé, des mélanges de sel et de poudre de lait écrémé que l'on tamisait et que l'on réexpédiait en remplacement des protéines. Nous avions demandé à l'époque si les produits semblables destinés à remplacer les matières grasses du lait étaient couverts, et on nous avait répondu qu'ils étaient englobés au 0404.90. Or, quand nous avons comparu devant le TCCE en 1994 et en 1995, nous étions tous les deux préoccupés, les Producteurs laitiers du Canada et les importateurs. À l'époque, ces mélanges d'huile de beurre et de sucre étaient visés au 0404.90. La correspondance de l'époque en témoigne d'ailleurs, car les importateurs eux-mêmes se plaignaient auprès du MAECI du fait qu'ils ne pouvaient plus importer ces produits parce qu'ils étaient visés au 0404.90. Il y avait donc beaucoup de confusion. Or, cette ligne tarifaire ne vise pas expressément les mélanges d'huile de beurre et de sucre importés, mais bien toutes les préparations alimentaires. Elle est donc d'une application générale. Nous avons finalement découvert ce qu'il en était vraiment en 1996.
 (1255)
Mme Rose-Marie Ur: Alors, ce n'était pas un mélange connu à l'époque. Avez-vous soulevé cela comme argument?
M. Richard Doyle: Au TCCE?
Mme Rose-Marie Ur: Oui.
M. Richard Doyle: Absolument. Nous savions qu'il y avait des mélanges. J'ai entendu quelqu'un dire qu'on les importait déjà en 1980—on ne nous l'a pas dit. Quand nous avons demandé la liste des ingrédients, nous savions qu'il y avait un certain nombre de préparations alimentaires qui ne seraient pas incluses. Nous nous sommes retrouvés dans une très mauvaise situation à l'époque, car le Canada, après 10 années de querelles, avait décidé que la liste des importations contrôlées ne devait pas inclure que les produits dont la teneur était de 50 p. 100. Le ministère persistait à croire qu'elle ne devait s'appliquer qu'aux produits dont la teneur était de 50 p. 100. Dans les faits, cependant, le Canada a laissé tomber la teneur à 50 p. 100 quand il a établi les listes pour les négociations du Cycle d'Uruguay, puisqu'il y a maintenant des produits dont la teneur est de 15 p. 100 qui sont visés par des contingents tarifaires, lesquels sont censés être une mesure de transition pour le contrôle des importations.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Anderson, vous avez la dernière question.
M. David Anderson: Je voulais simplement obtenir un éclaircissement au sujet de la question qu'a soulevée Rose-Marie. Vous avez dit que l'huile de beurre remplacerait partout le beurre si cela était possible. Je suppose que je serais d'accord avec Rose-Marie si j'ai bien compris ses propos, à savoir que cela ne serait pas le cas s'il s'agissait du produit de qualité inférieure. Y a-t-il un marché pour ces produits de qualité inférieure, et pourriez-vous quand même maintenir vos ventes de beurre pour les produits de première qualité? Y aurait-il aussi un marché d'exportation pour ce produit? Sommes-nous en train de rater une occasion parce que nous ne fabriquons pas ce produit et que nous ne sommes pas dans la course? Si d'autres exportent ce produit aux quatre coins du monde et nous enlèvent notre part de marché, ne pourrions-nous pas les concurrencer sur leur terrain?
M. Richard Doyle: Les producteurs laitiers produisent de la matière grasse butyrique. L'huile de beurre est composée à 99,5 p. 100 de matière grasse butyrique, et le beurre est constitué à 82 p. 100 de cette même matière grasse butyrique, de sorte que si vous demandez au producteur d'offrir de la matière grasse butyrique à moindre prix en vue de la fabrication d'huile de beurre, cela reviendra à lui demander d'intégrer le même gras dans un produit en vue de remplacer la matière grasse butyrique dans le beurre. Tout cela est strictement question de prix. Vendre de la matière grasse butyrique sur le marché mondial en deçà du prix canadien reviendrait à accorder une subvention d'exportation. Cela ne nous aiderait en rien, à moins que je ne fasse descendre le prix de la matière grasse butyrique pour tous les produits laitiers, ce qui serait farfelu.
M. David Anderson: Mais en même temps, il existe bien un énorme marché au Canada que quelqu'un d'autre est en train de combler, à la place des producteurs canadiens.
M. Richard Doyle: Je ne crois pas que nos producteurs puissent faire la concurrence à ceux qui distribuent ces produits au prix mondial, car ces produits arrivent ici subventionnés.
Le président: Merci beaucoup, monsieur Doyle.
C'est un dossier extrêmement complexe que beaucoup de gens de votre propre industrie ne comprennent pas à fond—même si vous, vous le comprenez parfaitement—et que nous ne comprenons certainement pas nous non plus. Mais c'est une simple question de prix. C'est une façon de faire entrer au Canada de la matière grasse butyrique à un tarif subventionné, car c'est bien ce que font d'autres pays : ils subventionnent. Donc, ce produit arrive ici et déplace un produit que nous vendons ici plus cher. Merci infiniment de votre contribution. Nous devons exercer des pressions sur ceux qui pourraient peut-être changer les choses, car la situation est extrêmement complexe et perturbe grandement l'industrie laitière. Merci de votre comparution.
La séance est levée.