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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 129
TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 29 septembre 2003
1105 |
Les travaux de la chambre |
Le Président |
INITIATIVES PARLEMENTAIRES |
Loi concernant les frais d'utilisation |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne) |
1110 |
1115 |
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) |
1120 |
1125 |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
1130 |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
1135 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Adoption de la motion; troisième lecture et adoption du projet de loi |
Suspension de la séance |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Suspension de la séance à 11 h 38 |
Reprise de la séance |
Reprise de la séance à 12 h 5 |
1200 |
Initiatives ministérielles |
La Loi sur la sécurité publique 2002 |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
1205 |
1210 |
1215 |
1220 |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
M. Loyola Hearn |
1225 |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
1230 |
1235 |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
1240 |
1245 |
1250 |
1255 |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
M. Richard Marceau |
1300 |
M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ) |
1305 |
1310 |
1315 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
M. Gilles-A. Perron |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
1320 |
M. Gilles-A. Perron |
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ) |
1325 |
1330 |
1335 |
1340 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
M. Claude Bachand |
1345 |
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ) |
M. Claude Bachand |
1350 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1355 |
Le vice-président |
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS |
La Société d'aide à l'enfance |
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.) |
L'Université de la Saskatchewan |
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne) |
1400 |
Les producteurs de bovins |
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.) |
Les Jeux olympiques spéciaux de 2003 |
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.) |
La violence à la télévision |
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.) |
Les catastrophes naturelles |
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne) |
Le Pakistan |
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.) |
1405 |
La ville de Drummondville |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
Le festival Centro Calabria |
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.) |
La guerre de Corée |
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne) |
Le Monument aux Canadiens tombés au champ d'honneur |
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.) |
1410 |
Le festival Collectivités en fleurs |
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC) |
Jean-Pierre Ronfard |
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) |
Hamilton Mountain |
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.) |
La guerre de Corée |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
Les Jeux olympiques spéciaux de 2003 |
Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.) |
Le Président |
Marc Ouellet |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne) |
1415 |
QUESTIONS ORALES |
L'aide gouvernementale |
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
La santé |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne) |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.) |
1420 |
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne) |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.) |
Les marchés publics |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ) |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.) |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
1425 |
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Les ressources naturelles |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
Les affaires intergouvernementales |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
La fiscalité |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.) |
L'industrie pharmaceutique |
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD) |
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.) |
1430 |
La justice |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
CINAR |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) |
La défense nationale |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne) |
1435 |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
L'environnement |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ) |
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.) |
La défense nationale |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1440 |
L'aide gouvernementale |
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
La défense nationale |
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le Président |
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
Le Président |
L'hon. John McCallum |
L'aide gouvernementale |
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD) |
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.) |
1445 |
La Loi électorale du Canada. |
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD) |
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.) |
Le gouvernement libéral |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.) |
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne) |
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.) |
Le Grand Prix du Canada |
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) |
L'hon. Claude Drouin (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.) |
1450 |
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ) |
L'hon. Claude Drouin (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.) |
La citoyenneté et l'immigration |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne) |
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) |
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne) |
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) |
Postes Canada |
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.) |
L'hon. Steve Mahoney (secrétaire d'État (Sociétés d'État déterminées), Lib.) |
La citoyenneté et l'immigration |
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne) |
1455 |
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) |
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne) |
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) |
Le harcèlement psychologique |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.) |
Le multiculturalisme |
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.) |
L'hon. Jean Augustine (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.) |
Le Président |
L'énergie |
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD) |
L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.) |
L'agriculture |
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne) |
1500 |
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.) |
L'assurance-emploi |
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ) |
Le Président |
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.) |
Présence à la tribune |
Le Président |
1505 |
Le Président |
Question de privilège |
Le rapport de la Commission de la fonction publique |
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne) |
Le Président |
1510 |
AFFAIRES COURANTES |
Réponse du gouvernement à des pétitions |
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Pétitions |
Le mariage |
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne) |
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Alliance canadienne) |
Questions au Feuilleton |
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.) |
Initiatives ministérielles |
Loi modifiant le code criminel (cruauté envers les animaux) |
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ) |
1515 |
1520 |
1525 |
1530 |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
1535 |
1540 |
1545 |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
1550 |
1555 |
1600 |
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD) |
1605 |
1610 |
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
1615 |
L'hon. Lorne Nystrom |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
L'hon. Lorne Nystrom |
1620 |
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC) |
1625 |
1630 |
1635 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
Adoption de la motion |
Le Code criminel |
L'hon. Paul DeVillers (au nom du ministre de la Justice et procureur général du Canada) |
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.) |
1640 |
1645 |
1650 |
1655 |
Le président suppléant (M. Bélair) |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
M. Paul Harold Macklin |
1700 |
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne) |
1705 |
1710 |
1715 |
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.) |
1720 |
M. Vic Toews |
1725 |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
M. Vic Toews |
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ) |
1730 |
1735 |
1740 |
1745 |
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PC) |
1750 |
1755 |
1800 |
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne) |
Le vice-président |
M. Inky Mark |
M. Rob Anders |
1805 |
M. Inky Mark |
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.) |
M. Inky Mark |
1810 |
M. Rob Anders |
M. Inky Mark |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
1815 |
1820 |
1825 |
MOTION D'AJOURNEMENT |
L'industrie automobile |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
1830 |
M. Tony Tirabassi (secrétaire parlementaire de la présidente du Conseil du Trésor, Lib.) |
M. Brian Masse |
1835 |
M. Tony Tirabassi |
Le député de LaSalle—Émard |
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC) |
1840 |
M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.) |
Le très hon. Joe Clark |
M. Rodger Cuzner |
1845 |
Le vice-président |
CANADA
Débats de la Chambre des communes |
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COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)
Le lundi 29 septembre 2003
Présidence de l'honorable Peter Milliken
La séance est ouverte à 11 heures.
Prière
* * *
[Traduction]
Les travaux de la chambre
Le Président: Conformément au paragraphe 81(14) du Règlement, j'ai le devoir d'informer la Chambre que la motion à l'étude demain durant la période réservée aux travaux des crédits sera la suivante:
Que la Chambre demande au gouvernement de tenir un référendum d'ici un an afin de déterminer si les Canadiens désirent remplacer le système électoral actuel par un système à représentation proportionnelle et, le cas échéant, de nommer une commission pour consulter les Canadiens sur le modèle préféré de représentation proportionnelle et son processus de mise en oeuvre, avec une date de mise en oeuvre n'allant pas au-delà du 1er juillet 2006. |
[Français]
Cette motion, inscrite au nom de l'honorable député de Regina—Qu'Appelle, fera l'objet d'un vote. Des copies de la motion sont disponibles au Bureau.
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[Initiatives parlementaires]
* * *
[Traduction]
Loi concernant les frais d'utilisation
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 18 septembre 2003, de la motion: Que le projet de loi C-212, Loi concernant les frais d'utilisation, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie les députés de ce côté-ci pour leur accueil chaleureux. Visiblement, les gens sont de bonne humeur ce matin.
Je suis ravi d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-212, Loi concernant les frais d'utilisation. Je dois dire que ce sujet m'intéresse. J'ai déjà, par le passé, présenté mon propre projet de loi d'initiative parlementaire sur les frais d'utilisation afin qu'il y ait une certaine obligation de rendre compte lorsqu'il s'agit de fixer des frais d'utilisation et également de voir à ce que le public, qui paie ces frais, en ait pour son argent.
Je tiens à dire pour commencer qu'il s'agit d'une question importante, soulevée antérieurement par la vérificatrice générale. Celle-ci a souligné la nécessité d'avoir une plus grande obligation de rendre compte et une plus grande transparence en ce qui concerne les frais d'utilisation. Nous appuyons entièrement cette idée.
Il m'est également agréable de me prononcer en faveur du projet de loi C-212. Mon collègue libéral d'en face a beaucoup fait pour cette mesure législative. C'est une bonne chose, et cette mesure est importante.
Il y a quelques années, une coalition d'associations d'affaires a été créée et s'est montrée réellement préoccupée par les frais d'utilisation. Elle estimait que le gouvernement n'en donnait pas aux gens pour leur argent dans les services qu'il leur procurait. À la suite d'observations présentées principalement par des entreprises sur les frais d'utilisation pour différents services, certains changements ont été apportés. Le gouvernement a tenté de réagir. La présidente du Conseil du Trésor a proposé certains changements, mais insuffisants, comme le souligne le député d'Etobicoke-Nord. Le gouvernement n'a pas fait des changements assez substantiels. Je suis entièrement d'accord avec le député.
J'aimerais traiter de certains des aspects du projet de loi proposé par le député. Je ne parlerai pas au nom de mon parti puisqu'il s'agit d'une initiative parlementaire, mais je suis convaincu qu'une grande majorité des députés de mon parti appuieraient certaines de ces mesures.
Premièrement, ce projet de loi prévoit un avis. Autrement dit, si des frais d'utilisation doivent être modifiés, il est tout à fait naturel d'en informer à l'avance les gens et les entreprises. Dans certains cas, il est critique pour une entreprise de recevoir le service qu'elle achète du gouvernement. Dans certains cas, les entreprises paient extrêmement cher en frais d'utilisation pour obtenir ces services; elles souhaitent donc être informées d'avance de tout changement dans ces frais. Évidemment, c'est le bon sens qui veut ça. Sans risque de me tromper, je puis affirmer que les députés de l'Alliance canadienne, si je peux parler en général, appuieraient sans réserve une telle mesure, moi le premier.
Un deuxième point lié à cette question concerne le fait que le public devrait avoir son mot à dire pour améliorer les services. C'est très important.
Permettez-moi de donner aux députés un exemple de service où il existe des frais d'utilisation sans que le public ait pu donner son avis à ce sujet : c'est celui des passeports. Presque tout le monde, à un moment ou à un autre de sa vie, doit détenir un passeport. Et il est certain que, avec le renforcement actuel des contrôles de sécurité à tous les échelons, dans les aéroports, pour traverser la frontière avec les États-Unis ou avec un autre pays, nous sommes à toutes fins pratiques obligés d'avoir un passeport. Les frais à payer pour obtenir un passeport sont devenus assez élevés, alors qu'il faut plus de temps qu'auparavant pour en obtenir un. Je crois que la population a une bonne raison de se demander si cela est justifié.
À mes yeux, il semble raisonnable que le public ait son mot à dire lorsqu'il s'agit de déterminer combien de temps les gens devraient attendre pour se procurer un passeport, compte tenu du fait que cela coûte, je crois, 65 dollars. Je ne saurais trop dire pourquoi cela coûte un tel prix. Il me semble que cette somme est assez élevée, mais je ne crois pas qu'il y ait de rapport entre le coût du service, les frais imposés aux usagers et la qualité du service. En l'occurrence, nous savons que le gouvernement ne respectait pas ses propres normes d'efficacité pour établir et fournir les passeports aussi rapidement que possible.
Je me souviens qu'un certain nombre de questions avaient été posées au ministre des Affaires étrangères le printemps dernier, à propos de personnes qui présentaient une demande de passeport, en payant ce service, et qui constataient qu'il fallait beaucoup plus de temps que prévu et que promis par le gouvernement pour obtenir ce passeport. Il est nécessaire que le public puisse intervenir pour améliorer ces services.
L'étude d'impact constitue une autre des recommandations contenues dans ce projet de loi d'initiative parlementaire. J'estime que c'est sensé. Si le gouvernement prévoit de hausser les frais d'utilisation, il est, de toute évidence, important qu'il établisse l'incidence de cette hausse sur les utilisateurs habituels, en général des entreprises. Si l'incidence est négative et rende les entreprises non concurrentielles, le gouvernement devrait en tenir compte. Il va sans dire que le rôle du gouvernement n'est pas de compliquer, mais bien de faciliter la tâche des entreprises et de leur permettre d'être plus concurrentielles. Le projet de loi C-212 est une proposition très sensée, et je l'appuie vivement.
Dans le projet de loi, il est demandé au gouvernement d'expliquer comment les droits sont établis. J'ai abordé cet aspect il y a quelques instants. Pourquoi en coûte-t-il 65 $ pour obtenir un passeport? Le passeport est un document sécurisé et le gouvernement a pris des dispositions pour en éviter la reproduction et une utilisation frauduleuse. Néanmoins, je ne comprends pas qu'il coûte effectivement 65 $ au gouvernement pour traiter une demande de passeport et délivrer le document en tant que tel. En fait, nous ne savons pas exactement ce qu'il en coûte parce que nous ne disposons d'aucune information à ce sujet. Ainsi, il est logique d'exiger que le gouvernement fournisse une sorte de reddition de comptes montrant ce qu'il en coûte et prouvant, par conséquent, que c'est à juste titre qu'il impose ces frais. En vertu du système actuel, il n'y a absolument aucune transparence. Or, nous devons savoir comment ces frais sont établis.
Le projet de loi présenté par le député d'Etobicoke-Nord laisse entendre qu'il devrait y avoir un mécanisme de règlement des différends. En cas de différends entre, d'une part, des gens qui utilisent un service gouvernemental et paient des frais d'utilisation et,d'autre part, le gouvernement quant au montant qui devrait être demandé pour ce service, il devrait y avoir une façon de régler la question par l'entremise d'une tierce partie indépendante. C'est important, car en l'absence de cette tierce partie indépendante, il est évident que le gouvernement, qui a le dernier mot en l'occurrence, pourrait dire aux gens qu'ils n'ont d'autre choix que d'accepter. Il ira de l'avant et imposera ces frais d'utilisation. Il pourrait le faire pour des raisons qui n'ont rien à voir avec le recouvrement seulement des coûts. Il pourrait très bien vouloir réaliser un profit.
Nous devons nous rappeler que les frais d'utilisation rapportent plus de trois milliards de dollars par année au gouvernement. Ce sont des sources importantes de revenus. Si le gouvernement utilise les frais d'utilisation non seulement pour couvrir des coûts, mais pour réaliser un profit qui va venir grossir les recettes générales, c'est inapproprié. Ce n'est pas l'objet des frais d'utilisation. Ils sont là pour couvrir les coûts assumés par le gouvernement pour assurer un service en particulier.
Ainsi, nous sommes tout à fait en faveur de l'idée d'une tierce partie indépendante qui pourrait régler les différends entre le gouvernement et ceux qui profitent des services obtenus moyennant des frais d'utilisation.
Enfin, il tombe sous le sens que ces frais soient comparables à ceux pratiqués dans d'autres pays. Le Canada doit soutenir la concurrence mondiale. Si des services sont offerts à une entreprise de transport maritime, par exemple, et que les frais soient beaucoup plus élevés ici que dans un autre pays, il se peut alors que cette entreprise s'établisse dans cet autre pays pour pouvoir profiter des frais d'utilisation moindres. Il faut également en tenir compte. Rien ne nous garantit que c'est ce qui se passe de nos jours. En fait, au contraire, le gouvernement dit que les choses vont se passer comme il l'entend, un point c'est tout. Nous sommes en faveur de cet aspect du projet de loi C-212.
Nous appuyons le projet de loi C-212 en général, si vous me permettez de parler au nom de mes collègues. Soit dit en passant, je n'ai pas le pouvoir de faire cela étant donné qu'il s'agit d'une initiative parlementaire, mais chose certaine, je vais recommander à mes collègues d'appuyer le projet de loi C-212. Je félicite mon collègue d'Etobicoke-Nord de nous avoir saisis de cette question.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, c'est pour moi un plaisir de prendre la parole pour appuyer le projet de loi C-212, présenté par le député d'Etobicoke-Nord. Un projet de loi similaire était inscrit à mon nom au Feuilleton, mais je l'ai retiré en faveur du sien; il m'est donc difficile de faire autre chose que dire du bien de cette mesure législative.
Je dois corriger une chose. Le député de Medicine Hat n'a cessé de dire que le coût d'un passeport était de 65 $. Je vais apporter une précision. En fait, permettez-moi de dire à l'intention de toutes les personnes qui nous écoutent, s'il y en a, qu'il est de 85 $. Le tarif a été augmenté il n'y a pas très longtemps. Si le député de Medicine Hat pense qu'il n'est que de 65 $ en Alberta, il se trompe. Il est de 85 $ et c'est le même à l'échelle du pays. Je demande que mon bureau ne soit pas inondé d'appels des gens que nous avons aidés ces derniers mois à obtenir un passeport nous disant qu'il y a eu une erreur dans le tarif qu'ils ont payé. Il n'en est rien. Le tarif est de 85 $. Quoi qu'il en soit, l'enjeu reste le même: le paiement d'un droit en échange d'un service.
Théoriquement, l'idée d'un droit n'est pas quelque chose que nous ne pouvons pas accepter. C'est très courant. Nous payons un droit quand nous prenons l'autobus. Nous payons un droit quand nous allons à la piscine. Nous payons un droit en échange de toute sorte de services, que ce soit au niveau municipal, provincial ou fédéral. Théoriquement ou philosophiquement, ce n'est pas une si mauvaise chose de payer un droit.
Les personnes qui reçoivent le service devraient en fait payer un certain droit. Le passeport est un parfait exemple. Si vous ou moi, à titre individuel, désirons faire une demande de passeport, qui est, en passant, l'un des documents les plus précieux que nous puissions posséder en tant que Canadiens, nous devrions prendre en charge une partie du coût. Qu'est-ce qu'un coût équitable? Qu'est-ce qu'un droit équitable? En tant que Canadiens, en avons-nous pour notre argent quand nous payons un droit dans le cadre du système de recouvrement des coûts?
En théorie, les ministères sont censés récupérer une partie de leurs coûts. Tous les ministères ont un budget. Ils offrent des services et tentent de récupérer une partie des coûts supportés, pour rémunérer leur personnel, payer les locaux et les frais d'exploitation, ce qui est juste en soi.
Ce qui n'est pas juste, cependant, c'est de ne pas pouvoir dire aux gens qui paient les frais de services ce qu'ils obtiennent en échange, et quelle portion de la récupération des coûts est acceptable pour le ministère. C'est là que le bât blesse, et c'est la raison pour laquelle le projet de loi C-212 est absolument indispensable et nécessaire pour corriger la situation.
Il y a un avantage, mais également un énorme désavantage. Permettez-moi de vous donner un certain nombre d'exemples. L'un des exemples qui m'est le plus précieux, et qui explique la raison pour laquelle j'avais présenté mon projet de loi, concerne un service opérationnel de l'ARLA. L'agence soutenait devoir récupérer une certaine proportion de ses coûts pour exploiter ce service. Au fil des années, les coûts supportés par les utilisateurs ont considérablement augmenté.
Les utilisateurs affirment que ces coûts ont une incidence sur eux, notamment lorsqu'ils tentent d'obtenir une homologation auprès de l'actuelle Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire. L'homologation d'un produit au Canada coûte tellement cher que beaucoup de producteurs ont reculé, estimant qu'il n'est pas économiquement possible, pour eux, de se plier à toutes les modalités réglementaires et de payer des frais exorbitants pour s'assurer une part minime du marché. Ils ont décidé de ne pas avoir recours au processus, et mes électeurs, et en particulier les agriculteurs de ma région, ne bénéficient pas de ces types de produits antiparasitaires dont ils auraient besoin pour poursuivre leurs activités agricoles.
Il y a d'autres exemples. Les permis d'exploitation, en particulier dans le secteur agricole, ne sont rien de plus qu'un bout de papier. Il n'y a pas suffisamment d'inspections en ce qui concerne, par exemple, l'exportation de pommes de terre de l'Île-du-Prince-Édouard vers les États-Unis. Les gens doivent payer extrêmement cher pour un simple bout de papier, mais il n'y a pas d'inspection. En fait, il s'agit simplement d'un prétexte pour justifier une ponction fiscale et accroître les recettes du ministère. Il faut que cela cesse.
Le député d'Etobicoke-Nord précise les mesures qui doivent être prises dans le projet de loi C-212, lesquelles sont tout à fait judicieuses. En tant que parti, nous allons appuyer ce projet de loi. Celui-ci prévoit une analyse coûts-avantages afin de déterminer quels sont les services que permettent d'obtenir les coûts. C'est très simple. J'appuie ce principe et je crois que le ministère devrait le soutenir. Si nous assurons la prestation d'un service à un groupe d'individus, nous devons déterminer quels sont les services offerts en fonction du coût.
Nous devons également examiner le coût total des budgets de recouvrement afin de savoir s'il s'agit simplement de ponctions fiscales pour financer l'exploitation sans en accroître l'efficacité. Ce point est aussi important. On ne peut tolérer l'inefficacité incontrôlée, comme celle que l'on observe à l'occasion, généralement dans les ministères de nos vis-à-vis. Il faut tout d'abord améliorer notre efficacité afin de ne pas à avoir à recouvrer des coûts élevés et, par conséquent, réduire les droits de permis. Ce point est très important.
La meilleure et la pire partie du projet de loi est le fait qu'un utilisateur qui doit verser des droits auxquels il s'oppose doive faire part de ses objections aux mêmes personnes qui ont perçu ces droits. Ces dernières peuvent lui répondre qu'il a raison, que le système est inefficace, que les droits sont trop élevés et qu'ils les baisseront, mais cela ne mènera à rien. En fait, ces ministères n'aiment pas admettre qu'ils ont tort.
Le Conseil du Trésor dit qu'il faut un recours, mais qu'on doit en appeler auprès de ceux qui ont imposé les frais. C'est ridicule. Selon le projet de loi, nous devrions intercéder auprès d'un arbitre indépendant, si bien que nous aurions au moins l'impression d'être écoutés et pris au sérieux même si nous n'avions pas gain de cause et que les frais pourraient être réduits. C'est ce que prévoit le projet de loi. Je suis d'accord, et je crois que le processus législatif devrait être mené à terme.
Je crois que le Conseil du Trésor envisage de mettre de l'avant un autre énoncé de politique. Ne plions pas, allons de l'avant avec ce projet de loi d'initiative parlementaire. Mettons-le sur la table et veillons à ce que le gouvernement l'aborde, car, bien honnêtement, la nouvelle politique qu'on s'apprête à mettre de l'avant ne vaut pas mieux que l'ancienne.
À l'instar d'autres députés de ce côté-ci de la Chambre, le député d'Etobicoke-Nord a causé un peu d'inquiétude et de consternation dans les ministères. D'aucuns disent qu'il y a des feux à éteindre et que les ministères pourraient préférer avoir leur propre politique. Il n'en demeure pas moins que cette politique n'est pas meilleure que la politique actuelle.
N'utilisons pas cette idée du parti ministériel pour dire que les choses sont déjà en branle, que nous pouvons oublier ce projet de loi d'initiative parlementaire et laisser les ministères foncer. Ne tombons pas dans ce piège. Adoptons la mesure, car elle est appropriée. Selon moi, elle comporte de meilleures dispositions que les propositions des ministères. Ce n'est pas parce des fonctionnaires du ministère l'examinent qu'elle se corrigera comme par enchantement. Ne croyons pas cela. Elle ne se corrigera pas par enchantement.
Théoriquement, pour être raisonnables, les frais d'utilisation doivent répondre à deux conditions: premièrement, on doit présenter une analyse coûts-avantages du service fourni; deuxièmement, on doit reconnaître qu'une part du recouvrement des coûts dépend de l'efficacité des ministères eux-mêmes.
Le troisième point a trait à la compétitivité de notre pays au plan économique. Il faut s'assurer d'être en mesure de soutenir la concurrence à l'échelle mondiale et, pour ce faire, on doit pouvoir contrôler le coût du fonctionnement. Ces coûts sont incontrôlables. On réussit actuellement à bien s'en accommoder, mais ils demeurent inacceptables. Cela ne veut pas dire que les ministères ne vont pas pouvoir à un moment donné augmenter arbitrairement ces coûts sans que quelqu'un ait un mot à dire sur les motifs invoqués et la façon de procéder.
Prenons les passeports, par exemple. Nous traitons chaque mois à mon bureau quelque 250 demandes de passeport. Le ministère compétent a décidé un bon jour de hausser les frais d'acquisition de passeports de 65 $ à 85 $. Ce n'est qu'après coup qu'on nous a avisés de ces augmentations. Lorsque les électeurs de ma circonscription s'adressent à moi pour un service et que je leur donne un prix erroné sans savoir pourquoi on a augmenté ce prix, je trouve que le ministère a raté une belle occasion de se comporter de façon sensée.
Je me réjouis du projet de loi présenté par le député d'Etobicoke-Nord. Il ressemble à celui que j'avais déjà déposé et qui portait sur le recouvrement des coûts et les droits de permis. Je propose que mercredi, les députés des deux côtés de la Chambre démontrent fermement leur opposition aux ministères qui augmentent arbitrairement les frais d'utilisation de manière exorbitante.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux d'appuyer aujourd'hui le projet de loi à l'étude. Je pense qu'il permettra une plus grande transparence à l'égard des frais d'utilisation à tous les paliers de gouvernement, aussi bien les municipalités que les provinces ou le gouvernement fédéral, ce qui est fort nécessaire dans la société canadienne actuelle. De plus, il permettra à la population et aux entreprises de surveiller de plus près les frais qu'ils paient pour les services qu'ils reçoivent.
Je veux parler brièvement de mon expérience passée à titre de conseiller municipal, car à mon avis le projet de loi est un aspect très important de ce qui se produit déjà dans d'autres secteurs de la démocratie et il illustre bien les attentes de la population.
Une administration municipale impose souvent des frais pour les services qu'elle dispense, non seulement à la population, mais aussi aux entreprises. Il peut s'agir de frais exigés pour des permis de construction ou pour n'importe quelle forme de capacité administrative nécessaire par l'entremise du service des parcs, de celui des travaux publics ou d'un service semblable. Ces frais d'utilisation finissent par être examinés de près chaque année dans le budget.
Dans le cadre du processus budgétaire, les citoyens sont invités à venir en groupes examiner les coûts, la quantité de services offerts par la municipalité, les frais qui lui incomberont à titre d'administration et d'organisation bureaucratique, ainsi que la valeur de ce que les citoyens, les entreprises ou la communauté reçoivent en obtenant un permis, en payant des frais d'utilisation et ainsi de suite.
Cela permet à tout le monde de s'exprimer. Tous peuvent venir assister aux séances des comités du conseil municipal, certaines municipalités désignant des groupes chargés de formuler leurs recommandations à l'instance supérieure, ou ils peuvent participer au processus d'audiences sur le budget. Il est aussi prévu que des avis doivent être envoyés à la population. Conformément aux dispositions législatives régissant les municipalités, ces dernières sont tenues d'annoncer l'ordre du jour des séances de leur conseil. Les différents groupes et organisations doivent pouvoir en être informés.
Ce qui est important au sujet de ce projet de loi d'initiative parlementaire c'est qu'il crée cette atmosphère de comité, qui, à mon avis, est appropriée et assure une étude minutieuse.
Personne n'a d'objection à payer pour un service tant et aussi longtemps que le prix en est équitable. Néanmoins, ce service doit comporter une possibilité d'intervention. Une des critiques que j'ai souvent entendues à n'importe quel échelon de l'appareil gouvernemental, y compris au niveau fédéral, c'est que les utilisateurs ont l'impression d'être dénués de pouvoir, de ne pas pouvoir donner leur opinion et de simplement se faire imposer des frais, sans pouvoir rien changer. La mesure législative prévoit un processus en bonne et due forme d'intervention et de reddition de comptes, et ce serait une amélioration.
Cela permet au grand public de connaître la position de leurs politiciens à l'égard de diverses questions. Je sais qu'à l'échelon local, en ce qui concerne les frais de construction, par exemple, lorsqu'il faut des permis et tous ces éléments dont le coût augmente, si ce sont les contribuables qui paient, ils connaîtront la position des politiciens sur la question, ils sauront si c'est équitable et si les politiciens utilisent ces frais comme facteur de croissance économique. Les contribuables ont la possibilité de voir ce qui se passe et d'assister à un débat démocratique visant à établir d'où l'argent doit venir et comment il doit être utilisé.
Au cours des dix dernières années, j'ai trouvé extrêmement frustrant, en tant qu'intervenant à l'échelon local, de voir les gouvernements provinciaux et fédéral se décharger assez efficacement de leurs responsabilités. À cause de cette déresponsabilisation, des compressions dans les services et de la baisse des subventions et parce qu'il n'a pas de sources de recettes pour compenser, le secteur municipal dans son ensemble a vu sa charge augmenter de façon exponentielle. La situation est extrêmement frustrante. Le projet de loi offre l'occasion de discuter publiquement de ces questions.
Permettez-moi de donner lecture du résumé du projet de loi. C'est important pour ceux qui ne l'ont pas déjà entendu.
Le texte soumet à l'examen et à l'approbation du Parlement les frais d'utilisation imposés par les organismes de réglementation. Il assure également une plus grande transparence dans l'exercice de leurs activités de recouvrement des coûts et d'établissement des frais en exigeant des consultations participatives auprès des clients et autres bénéficiaires des services avant l'établissement ou la modification des frais d'utilisation. |
C'est là l'essentiel de la mesure, et c'est de cela que j'ai parlé. La question transcende tout esprit de parti. Il s'agit de la prise de décisions sur l'utilisation de l'argent et d'autres ressources. La population réclame la transparence. Si les contribuables doivent payer un certain pourcentage d'impôt, ils veulent savoir si leur argent va à la santé, aux services publics ou à l'infrastructure.
Nous avons beaucoup vu cette réaction à propos de divers dossiers, comme celui de la TPS qui, au départ, devait servir à résorber le déficit. Ou encore de la taxe sur l'essence, dont le produit, soutient-on, devrait être consacré à l'infrastructure, aux routes, aux travaux de réfection, etc.
Je vais conclure en félicitant de nouveau le député d'Etobicoke-Nord d'avoir proposé ce processus qui, selon moi, contribuera à renforcer la confiance du public. Plus important encore, ce processus donnera une occasion de s'exprimer. On entend parfois de vives critiques de la part de certains qui, lorsqu'ils donnent leur point de vue, ne sont écoutés par personne. Au moins, le projet de loi donne une possibilité, et c'est un progrès.
Si les décideurs refusent d'entendre, rien ne se fait, évidemment, mais s'il n'y a pas d'arrogance et s'il y a possibilité de faire preuve d'une diligence raisonnable pour les groupes ou les particuliers intéressés, il est certain que la confiance se rétablira et qu'il y aura plus de transparence, ce dont la population canadienne a grand besoin.
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, je remercie tous ceux qui ont participé au débat sur le projet de loi C-212, la Loi concernant les frais d'utilisation. Le débat à ce sujet a été très réfléchi et productif.
[Français]
J'aimerais aussi remercier tous les députés du Comité permanent des finances de la Chambre des communes du travail qu'ils ont accompli au sujet du projet de loi, de même que tous les témoins qui ont comparu devant le comité afin de discuter de la Loi concernant les frais d'utilisation. Je veux aussi remercier le greffier du Comité permanent des finances.
[Traduction]
Plus tard cette semaine, lorsque nous voterons à l'étape de la troisième lecture du projet de loi, si nous ne votons pas aujourd'hui, les députés auront un choix très clair en ce qui concerne le régime des frais d'utilisation: soit continuer à l'assujettir à une politique établie par le gouvernement, quoique celle-ci ait améliorée grâce aux changements récemment annoncés, soit l'assujettir à la loi comme le propose le projet de loi C-212.
Je soutiens que la solution proposée par le projet de loi C-212 est de loin préférable pour les trois raisons suivantes. Premièrement, sans être véritablement des taxes, les frais d'utilisation demandés par le gouvernement fédéral, qui génèrent des recettes d'environ 4 milliards de dollars par année, sont semblables à des taxes et doivent être soumis à l'examen du Parlement.
Deuxièmement, ces frais d'utilisation sont établis par des monopoles, des fonctionnaires de ministères et d'organismes, et les représentants élus ont un très faible rôle à jouer à cet égard.
Troisièmement, l'assujettissement du régime des frais d'utilisation à une politique établie par le gouvernement n'a pas donné de bons résultats dans le passé et ne fonctionne pas à l'heure actuelle. Il est donc peu probable que cette approche donne les résultats nécessaires à l'avenir.
Certains députés ont déclaré que les utilisateurs sont en général satisfaits de la politique du gouvernement en matière de frais d'utilisation et de recouvrement des coûts. La réalité est tout autre. La grande majorité des utilisateurs sont insatisfaits et ne croient pas que la nouvelle politique du gouvernement changera vraiment la situation.
Le projet de loi C-212 prévoit d'office les conséquences lorsque l'écart entre les objectifs de rendement prévus et réels des ministères ou organismes dépasserait 10 p. 100. Dans certains pays, comme les États-Unis et l'Australie, où les frais d'utilisation et le rendement sont étroitement associés, les normes de services sont respectées dans pratiquement 100 p. 100 des cas. La même chose se produira ou Canada si nous adoptons le projet de loi C-212. Notre économie sera plus innovatrice et plus concurrentielle et les Canadiens obtiendront un meilleur service.
[Français]
Le Comité permanent des finances de la Chambre des communes a approuvé le projet de loi C-212 à l'unanimité. Il a effectué, au fil des ans, un certain nombre d'examens de la politique du gouvernement en matière de frais d'utilisation et de recouvrement des coûts. Il connaît très bien la question. Son travail devrait interpeller mes chers collègues.
[Traduction]
Soucieux d'enrichir le projet de loi, j'ai présenté des modifications à l'étape du comité en réaction aux commentaires reçus. Certaines modifications étaient d'ordre mineur et d'autres revêtaient une beaucoup plus grande importance. Je vais aborder ces dernières.
Certains craignaient que, dans sa version originale, le projet de loi C-212 mette en péril la capacité de l'organe exécutif du gouvernement de mettre en oeuvre des politiques parce que la Chambre des communes avait un pouvoir de veto sur l'adoption ou l'augmentation des frais d'utilisation.
La version modifiée du projet de loi C-212 retire ce pouvoir de veto à la Chambre des communes et le remplace cependant par un pouvoir de recommandation.Comme je l'ai souligné auparavant, au lieu de comprendre un droit de veto, le projet de loi prévoit désormais des pénalités dans le cas des ministères et organismes n'atteignant pas le niveau de rendement qui leur est fixé.
Certains ont exprimé l'inquiétude que les comités de la Chambre des communes soient inondés de demandes concernant les frais d'utilisation. Bien que tout un éventail de témoignages entendus à l'occasion des audiences du Comité des finances semblent réfuter cette crainte, on a adopté en comité une modification précisant que si un comité permanent de la Chambre des communes ne fait pas rapport à cette dernière dans les 40 jours de séances suivant la réception d'une proposition relative à des frais d'utilisation, on tiendra pour acquis que le comité a approuvé cette proposition. Grâce à cette disposition, les comités bénéficient de la latitude voulue pour gérer leur charge de travail et leurs priorités.
Le Comité des finances de la Chambre des communes a aussi adopté d'autres modifications qui améliorent le projet de loi C-212.
Comme je l'ai souligné, le gouvernement a présenté une nouvelle politique. Elle corrige beaucoup de choses et j'en remercie la présidente du Conseil du Trésor. Toutefois, selon moi, la politique révisée est loin de répondre aux attentes dans les domaines clés qui suivent. Premièrement, elle n'est toujours pas assez coercitive dans le cas des ministères et organismes ne réussissant pas à atteindre le niveau de rendement qui leur a été fixé. Le projet de loi C-212 prévoit des conséquences réelles si les normes ne sont pas atteintes.
Deuxièmement, bien que la nouvelle politique améliore le processus de résolution des différends entre les usagers et les ministères et organismes fédéraux, le processus n'en demeure pas moins d'ordre interne, alors que le projet de loi C-212 préconise la mise en place d'un mécanisme indépendant de résolution des différends.
Troisièmement, le projet de loi C-212 dit explicitement que des frais d'utilisation sont de mise lorsque des avantages personnels sont conférés; sinon, ce sont clairement des taxes. La politique gouvernementale demeure quelque peu muette à ce sujet.
[Français]
Il existe d'autres différences entre l'approche prévue par le projet de loi C-212 et la nouvelle politique gouvernementale. J'ai toutefois mis l'accent sur les principales.
[Traduction]
Je souligne de nouveau que le choix est clair. J'exhorte mes collègues à se prononcer en faveur du projet de loi C-212 et à se prononcer en faveur de la responsabilité, de la transparence et du rôle légitime des députés.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare la motion adoptée.
(La motion est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)
* * *
[Français]
Le président suppléant (M. Bélair): Puisque nous avons terminé la période pour les affaires émanant des députés, je suspends les travaux de la Chambre jusqu'à 12 h 5.
(La séance est suspendue à 11 h 38.)
* * *
La séance reprend à 12 h 5.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Traduction]
La Loi sur la sécurité publique 2002
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 mai, de la motion: Que le projet de loi C-17, Loi modifiant certaines lois fédérales et édictant des mesures de mise en oeuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxines, en vue de renforcer la sécurité publique, soit lu pour la troisième fois et adopté.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, je veux parler brièvement du projet de loi, car je ne sais pas au juste ce que je pourrais ajouter. Ce sera la sixième fois que la Chambre est saisie de ce projet de loi.
Il y a un peu plus de deux ans, nous étions à Edmonton pour assister à une réunion du caucus lorsque toute notre journée et celle de tous les Canadiens et probablement de tous les habitants de la planète a été bouleversée lorsque nous avons vu un avion s'écraser sur l'une des tours à New York. Alors que nous regardions et pensions qu'il s'agissait peut-être d'un apprenti pilote ayant perdu le contrôle de son appareil, un second avion est apparu à l'écran et il est venu s'écraser sur la seconde tour. Cette journée a changé le monde de bien des façons et il n'est pas redevenu le même depuis.
Nous parlons souvent de la perte de l'innocence. Cette innocence a été perdue pour beaucoup d'entre nous parce qu'avant les événements du 11 septembre 2001, nous vivions dans un monde différent, chose certaine lorsqu'il s'agissait de notre sécurité. Nous savions qu'il pouvait toujours y avoir un fou quelque part. N'importe quoi pouvait se produire à n'importe quel moment, mais avec les forces de sécurité que nous avions, la probabilité d'une chose de ce genre était très mince sinon inexistante. Nous venions travailler tous les jours sans nous demander qui était à bord de l'autobus, qui marchait derrière nous, ce qu'il se trouvait dans le sac à dos d'une personne et qui était à la tribune. Nous tenions notre sécurité pour acquise.
Les événements du 11 septembre 2001 ont tout changé. Il suffit de venir sur la colline pour voir tous les changements qui se sont produits. Nous voyons des clôtures, nous constatons des mesures de sécurité et d'inspection. Lorsque nous nous rendons à l'aéroport, nous sommes soumis à des mesures de sécurité très serrées qui n'existaient pas auparavant. Auraient-elles dû être là précédemment? Eh bien, peut-être, dans une certaine mesure. Cependant, nous ne devrions pas avoir une réaction excessive. En fait, personne ne voyait la nécessité de cela.
Les événements du 11 septembre sont arrivés et ont changé le monde. Les gens ont réagi. Certains ont réagi de façon excessive et chose certaine, en un sens, c'est exactement ce qui est arrivé à notre propre gouvernement. Il n'était absolument pas prêt et n'avait probablement pas le personnel voulu pour faire face à un tel problème rapidement, de façon réfléchie et bien planifiée.
Le gouvernement n'a pas tardé à réagir. Il a dit qu'il ferait adopter une loi en vue de rendre le pays plus sûr. Plus de deux années se sont écoulées, et nous étudions un projet de loi qui a fait plusieurs rebonds. Le printemps dernier, le gouvernement a suspendu ses travaux plus tôt que prévu alors que le programme législatif était très rempli. Si la mesure souhaitée en vue de rendre notre pays plus sûr avait été adéquate, elle aurait dû être adoptée il y a deux ans.
La perte de temps, les conséquences qui en ont découlé et les changements qui ont eu lieu depuis nous incitent à nous demander si même la tenue d'un débat sur une telle mesure était nécessaire.
Avons-nous besoin de resserrer la sécurité dans notre pays? La réponse est oui. Notre pays est-il sûr? La réponse est non. Toutefois, nous disposons de plusieurs mécanismes qui pourraient servir à la protection de notre pays, et ils n'ont rien à voir avec ce projet de loi. Le renforcement de ces mécanismes que nous contrôlions et que nous continuons de contrôler pourrait assurer la sécurité du pays.
Lors de la présentation du projet de loi, j'ai sonné l'alarme. Nombre d'intervenants ont dit que la mesure donnerait au gouvernement le plein contrôle, c'est-à-dire le pouvoir discrétionnaire de suspendre les droits et les libertés de gens vivant au Canada.
C'est un pouvoir sérieux dans un pays comme le nôtre, où nous défendons jalousement nos droits et nos libertés. Nous nous vantons de vivre dans un pays où les citoyens ont ces droits et ces libertés.
Y a-t-il des circonstances qui justifient la suspension des droits et libertés? Sans doute qu'il y a des circonstances qui le justifieraient dans l'intérêt de tous, à condition que les motifs soient sérieux et que le mécanisme prévu dans la loi soit valide, solide et acceptable. Cette mesure ne va pas du tout dans ce sens.
Ce projet de loi se retrouve affaibli du fait que le temps a passé, que des changements sont survenus et que certaines de ses dispositions initiales ne sont plus pertinentes. De nouveaux incidents qui se sont produits dans le monde ont causé d'autres problèmes auxquels d'autres réponses ont été données.
Une des choses dont il est question dans le projet de loi est la création de zones protégées. Voilà une belle affaire. On entourerait des endroits importants, comme des ports ou des aéroports, de mécanismes de défense qui empêcheraient quiconque de pénétrer à l'intérieur de ces zones. Notre sécurité serait ainsi garantie.
On ferait en sorte d'interdire toute contrebande par les ports de Halifax ou de Vancouver, voire celui de St. John's, quoique ce dernier ne soit pas nommé. C'est plutôt facile à dire. On nous présente ce projet de loi en vantant les mécanismes extraordinaires qui seront mis en place pour refouler les terroristes à ces endroits.
Les terroristes ne sont pas idiots. Ils savent où, quand et comment entrer dans un pays. Comme l'ont admis le ministre des Pêches et des Océans et son collègue de la Défense nationale, il y a plein de brèches dans notre propre pays. Des immigrants ont débarqué au Canada dans des endroits isolés, et personne ne s'en serait aperçu si quelqu'un n'était pas tombé sur eux par accident.
Dans ma propre circonscription, la plus à l'est du pays, un bateau a mis à la mer il y a quelques années deux ou trois canots de sauvetage remplis de Tamouls. Des pêcheurs locaux les ayant rencontrés par hasard dans un épais brouillard, les avaient pris à leur bord pour les ramener à terre. Il faut dire que cet endroit est le plus embrumé d'Amérique du Nord.
Les immigrants tamouls ont eu une veine incroyable de tomber sur ces pêcheurs. S'ils avaient continué de dériver en mer, ils auraient certainement péri. Ils doivent leur vie plus à la chance qu'à n'importe quoi d'autre. Le bateau qui les avait transportés avait sans doute aperçu les bateaux de pêche sur son écran radar et avait espéré que ceux-ci repèrent les canots de sauvetage, ce qui est arrivé.
Le capitaine du bateau de pêche est un de mes bons amis. Il m'a raconté avoir vu tout à coup émerger quelques petites têtes du brouillard. Comme le brouillard était bas ce jour-là, il ne pouvait voir que les têtes des personnes qui se tenaient debout dans les canots. Il avait ensuite trouvé les autres canots et avait ramené tout le monde à terre.
Pourquoi les a-t-on abandonnés là? Parce qu'on savait que la Garde côtière n'exerçait aucune surveillance. On savait qu'aucun radar de surveillance ne pourrait les surprendre. On entend dire que des navires remplis d'immigrants les débarquent en Colombie-Britannique. Est-ce qu'on trouve ces immigrants? Seulement une fois qu'ils sont débarqués. Pourquoi? Parce qu'on les débarque à l'extérieur des zones où il y a des radars de surveillance.
Lorsque j'en ai parlé au ministre, il a dit que la situation avait été corrigée. Il a dit que le seul problème auquel le ministère était confronté était que, lorsque les navires s'approchent des côtes, ils doivent donner un avis de 24 heures afin que nous puissions les suivre pour voir où ils se dirigent, surveiller leurs déplacements, éviter des collisions, etc. Cela a été changé. Les navires doivent maintenant donner un avis de 96 heures, ce qui donne plus de temps au ministère pour exercer une surveillance et établir un plan.
C'est très bien dans le cas des navires hauturiers dont l'équipage respecte les lois et donne les avis requis. Peut-on croire, l'espace d'un instant, qu'un appel logé 24 ou 96 heures à l'avance par un navire faisant entrer illégalement des drogues ou des personnes au pays fait une différence? Bien sûr que non. Ils vont entrer furtivement afin d'éviter la couverture radar. Si nous connaissons les failles, ils les connaissent sûrement. Il est étonnant, mais ce n'est certainement pas une coïncidence, de voir des navires procéder à un débarquement à quelques milles à peine des zones surveillées par radar.
Ce sont des professionnels. Ils savent ce qu'ils doivent faire et comment le faire. Comment les en empêcher? Par une meilleure couverture radar, par exemple. Une autre possibilité serait d'augmenter les effectifs de la Garde côtière et de la renforcer. J'admire énormément le travail qu'accomplit le personnel de la Garde côtière avec les moyens dont il dispose. Ces travailleurs ont les mains liées. Ils disent que la sécurité ne fait pas partie de leur travail, cependant, l'expression garde côtière donne en soi l'assurance qu'ils gardent nos côtes.
Je sais que leurs fonctions sont spécialisées, définies et particulières. Néanmoins, nous devrions faire en sorte que la garde côtière joue un rôle extrêmement important en ce qui concerne la protection de nos côtes, afin que les navires fréquentant celles-ci ne les polluent pas et que les pétroliers traversant nos eaux soient robustes et ne se brisent pas à la moindre tempête en endommageant gravement nos rivages.
Les employés de la garde côtière doivent également veiller à contrôler les navires qui n'ont rien à faire dans nos eaux, notamment quant au motif de leur présence. Si un navire n'a pas assez de combustible pour se rendre d'un port à un autre ou si des bateaux restent amarrés à un port parce que le gouvernement ne fournit pas les fonds nécessaires pour que le travail soit effectué, et si les gens se livrent à de la surpêche d'un côté ou tentent de débarquer des drogues ou des immigrants de l'autre, alors nous faisons face à un sérieux problème.
Depuis maintenant dix ans, le gouvernement tarde à fournir des hélicoptères à nos forces armées, des hélicoptères qui joueraient un rôle important dans la sécurité de notre pays. Nous avons dépensé trois fois le montant qu'auraient originellement coûté les appareils si le gouvernement avait accepté l'entente conclue au lieu de l'annuler en 1993.
D'un point de vue global, nos forces armées sont sous-financées et mal administrées. Notre sécurité générale nous préoccupe beaucoup. Est-ce la faute des gens qui travaillent dans ce secteur? Est-ce la faute des employés de la garde côtière qui vont à leur travail tous les matins? Est-ce la faute de nos militaires? Absolument pas. C'est la faute au gouvernement qui a totalement et gravement négligé nos forces armées et l'ensemble de la sécurité au Canada.
Nous sommes maintenant devant une réaction de panique. Au lieu de nous soumettre le projet de loi pour en débattre davantage, le gouvernement devrait le mettre à la poubelle, le retirer, refaire ses devoirs, voir de quoi on a besoin précisément pour assurer un niveau de sécurité satisfaisant au Canada et passer de la parole aux actes.
Nous ne faisons que réitérer ce qui a déjà été dit, non seulement par nous, mais par tous les partis de ce côté-ci et par de nombreux députés de l'autre côté de la Chambre. Il est temps que le gouvernement fasse quelque chose. Peut-être que lorsque le nouveau premier ministre, qui qu'il soit, sera en place, on verra quelque chose. Ce n'est toutefois pas une attente raisonnable. Les problèmes que j'ai énumérés, notamment le sous-financement de nos forces armées, les compressions dans le secteur des pêches, la Garde côtière qui essaye de fonctionner avec un budget pratiquement nul, sont la preuve d'un manque total et complet de planification. Tous ces problèmes se résument à un manque de fonds.
Les fonds viennent du ministère des Finances. La personne qui donne l'argent, la personne qui est réellement responsable de ces décisions, c'est le ministre des Finances. L'homme dont la majorité des gens pensent qu'il sera le prochain premier ministre est celui qui a été ministre des Finances pendant le plus clair des 10 dernières années. Toutefois, il ne sera pas choisi par le peuple. Il occupera automatiquement ce poste parce qu'il aura accédé à la direction de son parti. Les élections, ça pourrait être tout autre chose.
Peut-être devrions-nous nous demander qui est responsable? Peut-être qu'au lieu de s'attendre à ce que beaucoup de choses changent, les gens feraient mieux de voir que ce n'est pas une nouvelle entité, que c'est une personne qui a un passé et que ce passé devrait être examiné. Si nous voulons savoir quelque chose d'une personne, ou savoir ce qu'elle peut faire, il suffit de regarder ce qu'elle a fait. Nous ne devrions pas nous fier à ce qu'elle dit qu'elle fera.
Quand je fais campagne, je préfère dire aux gens de regarder ce que j'ai fait et de ne pas tenir compte de ce que je dis que je ferai. Tous les politiciens font de belles promesses. Ils devraient être jugés d'après leurs réalisations. Dans ce cas, comme dans bien d'autres, je crois que le passé du ministre des Finances donnera un éclairage très différent de celui que nous donnent les doreurs d'images.
Espérons que le gouvernement prendra la décision qui s'impose et proposera une mesure législative accompagnée des fonds nécessaires, une mesure qui ne privera pas les gens de leurs droits et de leurs libertés, mais qui garantira qu'ils vivront dans un pays où ils peuvent exercer leurs droits et leurs libertés et où ils sont correctement protégés.
[Français]
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter mon collègue de St. John's-Ouest pour son intervention qui m'apparaît excellente.
Comme il le mentionnait, il faut se rappeler que le projet de loi qui nous est présenté fait suite aux événements du 11 septembre. On constate que cela a été un réveil brutal pour nos sociétés. Entre autres, mon collègue parlait de la Garde côtière, et c'est le sujet sur lequel je voudrais qu'il nous parle un peu plus.
Depuis 1993, on a observé des coupures dans ce type d'organisations qui ont pour mandat d'assurer notre sécurité, entre autres en ce qui concerne les phares, les entrées sur le fleuve Saint-Laurent, dans les Maritimes et dans l'ouest du pays. On s'est rendu compte que les coupures qui ont été effectuées depuis 1993 avaient fait en sorte que l'organisation de la Garde côtière était devenue, à mon point de vue, obsolète, c'est-à-dire incapable de remplir ses mandats. Ce sont des organisations qui ont été laissées à l'abandon.
Les événements du 11 septembre 2001 nous ont permis de constater que, finalement, le gouvernement ne remplissait pas ses mandats en raison des coupures effectuées par l'ex-ministre des Finances. Ces coupures ont été tellement sévères que les organisations n'étaient pas en mesure d'offrir aux Canadiens et Canadiennes et aux Québécoises et Québécois une sécurité valable.
Je voudrais donc qu'il nous parle encore de la situation de la Garde côtière. J'aimerais qu'il nous éclaire encore davantage sur la situation qui est vécue à l'intérieur de cette organisation et sur son incapacité, dans le passé et même aujourd'hui, de remplir l'ensemble de ses mandats.
[Traduction]
M. Loyola Hearn: Monsieur le Président, je remercie mon collègue, le député bloquiste, qui a toujours porté un vif intérêt à la Garde côtière.
Je répéterai ce que je disais plus tôt. J'éprouve énormément de respect et de reconnaissance à l'égard du personnel de la Garde côtière et du ministère des Pêches et des Océans dont elle relève, et pour le dur labeur et le dévouement de leurs employés. Les compressions auxquelles ils sont constamment exposés constituent sûrement un irritant pour eux.
Pour répondre à la question de mon collègue, le personnel de la Garde côtière nous a dit que son budget n'a pas été réduit. C'est sans doute parce qu'on a dit aux skippers de naviguer moins rapidement en mer. Imaginez: aller dire aux skippers comment piloter leurs navires en mer. Ils se sont fait dire de ne sortir que lorsque c'était nécessaire, afin de conserver le carburant. J'ai vu, sur une photo, cinq bateaux de la Garde côtière attachés les uns aux autres dans le port de St. John's, alors qu'il y aurait tant à faire.
Quoi qu'il en soit, il est probablement vrai que le budget n'a pas été réduit, et certains diront que la Garde côtière reçoit autant d'argent aujourd'hui qu'en 1993 et qu'il n'y a donc pas lieu de s'en faire.
Les gens ne réfléchissent pas. Est-ce qu'un dollar d'aujourd'hui a le même pouvoir d'achat qu'en 1993? Assurément pas. Le nombre de dollars est peut-être le même, mais leur pouvoir d'achat a baissé, d'où la nécessité de lourdes compressions. C'est exactement ce qui se passe.
Notre Garde côtière, si elle est bien administrée et si elle dispose de meilleures ressources, peut faire beaucoup pour assurer notre sécurité. Elle peut aussi lutter contre de nombreux problèmes de surpêche. La Garde côtière peut exercer une vigilance accrue pour prévenir la pollution de nos océans, et notamment surveiller de plus près le type de bateaux-citernes qui naviguent le long de nos côtes, et l'état de ces navires. Il y a tant de choses importantes que la Garde côtière peut faire.
Nous frôlons souvent le désastre, que ce soit à cause d'une tempête ou d'une panne. La seule entité capable de prévenir un grave danger, qu'il s'agisse d'un bâtiment perdu à cause d'une tempête, de petits bateaux de pêche poussés de plus en plus loin en mer à cause d'un changement des conditions de pêche ou de pétroliers qui risquent de s'échouer, c'est une Garde côtière bien entretenue.
En Norvège, la garde côtière relève du ministère de la défense. La Norvège prend très au sérieux la surveillance de ses côtes. Nous avons demandé à des représentants de la Norvège s'ils avaient un budget suffisant pour assurer le fonctionnement de leur garde côtière. Ils nous ont dit qu'elle était bien financée et capable de s'acquitter de son travail, qui consiste à protéger le littoral de la Norvège et sa population.
Notre Garde côtière peut en faire autant, à condition d'avoir les ressources nécessaires.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de participer aujourd'hui au débat sur le projet de loi C-17. Je tiens à souligner que cette mesure législative est, à bien des égards, la réincarnation des projets de loi C-42 et C-55, ce qui m'amène à vous faire part de mes premières observations.
Nous savons tous ce qui s'est passé depuis le 11 septembre 2001. Nous avons non seulement changé notre façon de faire les choses dans l'exercice de nos fonctions quotidiennes, mais nous avons aussi modifié les décisions stratégiques et pratiques que nous prenons à long terme et qui ont des répercussions sur notre pays, certes, mais aussi sur le monde entier. Au moment où la tragédie s'est produite, il nous est apparu clairement qu'il existait un certain nombre de lacunes par rapport aux services mis à la disposition des administrations locales. Les services gouvernementaux provinciaux et fédéraux ont fait l'objet de réductions année après année. Je me joins à ceux qui disent que le projet de loi C-17 ne règle pas le problème du sous-financement survenu par rapport à nos services fondamentaux et à l'origine de certains problèmes évidents que nous éprouvons aujourd'hui et qui ont rendu notre situation plus précaire.
Dans ma municipalité, celle de Windsor, l'administration locale a dû faire preuve de leadership encore une fois. L'achalandage à nos frontières est parmi le plus important dans le monde. En fait, 33 p. 100 du produit intérieur brut du Canada franchit nos frontières dans le cadre de nos échanges commerciaux avec 39 États américains pour lesquels notre pays est le premier partenaire commercial en importance. Ce sont les gens au niveau local qui ont dû prendre l'initiative et à qui le gouvernement fédéral a demandé de fournir de l'aide.
Voici un exemple classique à l'appui: notre voie navigable, le long de la rivière Détroit, et nos Grands Lacs, à l'autre extrémité, n'avaient pas suffisamment de ressources. Le corps policier municipal a été invité à se servir de son bateau dans le cadre de la surveillance du secteur exercée afin de régler d'autres problèmes. C'est vraiment triste, car nous avons un bateau qui appartient à la municipalité et qui sert foncièrement à la surveillance exercée sur les eaux dans l'optique de la sécurité, mais qui ne peut s'occuper des navires de passage qui empruntent notre réseau navigable. Il est ici question d'une des voies navigables les plus fréquentées du monde, à la fois par des bateaux de plaisance et par des vraquiers. Finalement, nous avons dû participer, dans une certaine mesure, à la surveillance des vraquiers qui inspiraient des inquiétudes à ce moment-là.
Selon moi, le projet de loi C-17 nous entraîne sur une pente savonneuse. Il est ici question des libertés civiles et de l'information faisant l'objet d'un suivi et d'une divulgation tout en étant partagée avec les bureaucrates du gouvernement pour qu'ils puissent assurer le suivi des déplacements des gens. Cela pose problème.
Selon moi, le ciblage de certaines catégories de citoyens canadiens par les États-Unis est un excellent exemple d'un cas où le gouvernement n'agit pas de façon responsable. Ce sont des citoyens de notre pays depuis 1 an, 10 ans, 20 ans et 30 ans. Ces personnes sont désormais tenues de fournir leurs empreintes digitales et d'être photographiées et elles doivent signaler leur entrée aux États-Unis et leur sortie de ce pays uniquement en raison de leur pays d'origine. On compte plus de 12 pays ainsi ciblés.
Les Canadiens d'origine libanaise constituent un bon exemple de cette situation. Ils sont soumis à ces mesures, et le gouvernement n'est pas intervenu assez énergiquement à ce sujet. Il n'a pas dit que nos citoyens ne présentent pas un risque pour la sécurité. C'est un gros problème parce que cela met en cause nos échanges commerciaux ainsi que la façon dont nous communiquons. Une telle intervention montrerait aussi que nous prenons la défense de nos citoyens, ce que n'a pas fait le gouvernement. Nous n'avons toujours pas abordé cette question. Cette situation a des conséquences graves car, si le projet de loi C-17 a les répercussions prévues et que notre pays ne se porte pas à la défense de ses propres citoyens, cette mesure ne fera aucune différence. Il est important de le souligner.
Le manque de financement des infrastructures est vraiment évident. Je vais vous donner un exemple classique. Il y a entre notre municipalité et Detroit un tunnel ferroviaire. Les gens empruntent à l'heure actuelle ce tunnel à leurs propres risques. Certaines personnes viennent des États-Unis et d'autres quittent le Canada. Elles cherchent à franchir la frontière sans se faire repérer. Ce faisant, elles s'exposent à des risques très élevés. Souvent, il n'y a pas assez de place dans le corridor réservé aux trains et des gens se font tuer en cherchant à franchir la frontière. C'est la police municipale qui, en définitive, doit assurer la surveillance de ce secteur, et c'est inacceptable. C'est un tunnel appartenant au secteur privé et comprenant des mesures de sécurité qui sont cependant nettement insuffisantes. Des personnes empruntent effectivement ce tunnel à pied.
Une fois de plus, peu importe les politiques qui sont adoptées. Si nous ne disposons pas des services de base nécessaires pour répondre à la demande, ces services ne seront pas fournis. Cela représente pour nous un problème considérable.
Nous croyons que le projet de loi C-17 pourrait en pratique diluer les ressources d'un plus grand nombre de secteurs du gouvernement qui ne disposent déjà pas de ressources suffisantes. Cela concerne de nouveau l'esprit dans lequel le gouvernement remplit ses obligations. J'ai pris l'exemple du programme NSEERS, le système d'enregistrement des personnes qui entrent aux États-Unis, et celui de l'échelonnement de la citoyenneté canadienne, mais j'aurais pu prendre celui du traitement par le gouvernement des questions de souveraineté. Au cours de l'été, deux situations m'ont semblé préoccupantes parce que la ministre du Revenu national et le ministre des Affaires étrangères n'y ont pas réagi d'une manière satisfaisante.
Dans l'une de ces situations, des policiers américains de Detroit, au Michigan, ont pourchassé un individu dans le tunnel Detroit-Windsor. Ils sont entrés dans le tunnel et ont traversé le poste des agents des douanes canadiens. Ils ont immobilisé le véhicule de la personne poursuivie, ont arrêté celle-ci et l'ont ramenée aux États-Unis. Ainsi, ils se sont introduits sur notre territoire, ont dégainé leurs armes dans notre partie du tunnel, en sol canadien, et ont ramené quelqu'un dans leur pays sans même en informer les agents canadiens. Cet événement soulève des problèmes relatifs à la citoyenneté canadienne, aux visiteurs au Canada, à toute une série de questions de confiance. Qu'est-ce que le gouvernement a fait à propos de cet événement? Absolument rien.
Supposons que des agents des douanes canadiennes entrent aux États-Unis, appréhendent quelqu'un et le ramènent en territoire canadien sans en aviser les autorités américaines concernées alors qu'ils seraient intervenus au beau milieu des centres de douanes et d'immigration américains. C'est déplorable. Il s'agissait d'agents de police de Detroit.
Un autre policier de Detroit s'est rendu dans notre pays l'été dernier. Il cachait une arme. Il était censé signaler la présence de cette arme et la faire enregistrer. Il a été repéré et interpellé. Comme il essayait de cacher son arme, un coup est parti accidentellement et il s'est tiré une balle dans la jambe. Il a été sérieusement blessé. Encore une fois, le gouvernement n'a rien fait. Il n'a pas déposé une protestation officielle. Il n'a pris aucune mesure. Le gouvernement a laissé cette situation se produire sans réagir.
À quoi servent ces mesures de sécurité si nous ne tenons pas le discours approprié à l'égard de certaines personnes et notamment nos amis de l'autre côté? Si nous n'agissons pas, nous nous préparons un échec cuisant.
Encore une fois, le projet de loi C-17 propose plusieurs choses qui auront un grave impact sur les libertés civiles: combien de données seront accumulées sur une personne, comment on utilisera ces données et, surtout, où seront conservées ces données. Nous avons exprimé nos craintes à ce sujet, comme le commissaire à la protection de la vie privée d'ailleurs. Il a déclaré:
C'est, en fait, parmi les nombreuses préoccupations que vous avez entendues et que vous entendrez en tant que comité, probablement la plus simple à régler, parce qu'elle n'a absolument aucune incidence sur la sécurité des transports ou la sécurité nationale dans la lutte contre le terrorisme, qui sont, bien évidemment, l'objet de ce projet de loi. |
En outre, cette mesure traite de la même manière de nombreux Canadiens respectables, qui n'ont jamais eu de démêlés avec la justice, qui paient leurs impôts et sont respectueux des lois. La partie de ce projet de loi la plus inquiétante est celle qui concerne l'information; il faut déterminer où cette information sera conservée et utilisée.
Je termine en répétant que nous devons améliorer notre infrastructure actuelle en matière de ressources, et surtout nos mesures de sécurité pour nos agents des douanes qui se trouvent à la frontière, à Windsor et ailleurs, où ils doivent se fier aux agents locaux. Ils n'ont pas d'agents de la GRC en poste sur place, comme je le préconise pourtant depuis longtemps. Nous devons assurer la présence de ressources de la sorte sur place.
Nous n'allons pas améliorer notre sécurité en augmentant les structures bureaucratiques. Nous devons veiller à ce que ces hommes et ces femmes travaillant en première ligne disposent de ressources adéquates et de l'appui d'un gouvernement qui saura les seconder pour assurer notre sécurité. C'est ce que nous devons faire avant tout. Si nous ne prenons pas des mesures à cet effet, le projet de loi ne donnera pas les résultats escomptés.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre part au débat sur le projet de loi C-17 dont la Chambre est actuellement saisie.
Je crois qu'il est toujours à propos et essentiel de remettre dans le contexte tout débat dont la Chambre est saisie. On se souvient que ce projet de loi fait partie des mesures législatives proposées par le gouvernement à la suite des attentats terroristes du 11 septembre 2001 à New York et à Washington.
On se souvient également que dans les heures, les jours, les semaines et les mois qui ont suivi cet évènement tragique, au cours duquel près de 4 000 personnes innocentes ont perdu la vie, un des éléments qui était ressorti de tout cela, une fois la poussière retombée—sans faire de jeu de mot—, était la nécessité dans toute mesure antiterroriste proposée par législation, de toujours garder en tête la nécessité d'un équilibre entre la sécurité publique, c'est-à-dire la protection du public, et les libertés individuelles.
En effet, lorsque les avions se sont écrasés, tant au World Trade Center qu'au Pentagone, on attaquait non seulement les États-Unis et l'Occident, mais aussi un mode de vie démocratique, un mode de vie ouvert où on peut échanger des idées, par exemple dans des institutions comme celle où nous siégeons aujourd'hui.
Si le Québec et le Canada, ou l'Occident de façon générale, bénéficient de la démocratie, de la suprématie du droit, c'est parce qu'à la base même de nos sociétés, il y a les libertés individuelles. Chaque fois que le gouvernement ou que l'État, de façon plus générale, veut circonscrire ou limiter ces libertés individuelles, il faut faire attention. En effet, à trop vouloir limiter les libertés individuelles, à trop vouloir empiéter sur les libertés individuelles, on peut a posteriori donner raison à ceux et celles qui veulent attaquer ce mode de vie. C'est ce à quoi nous devons faire attention.
Il est aussi essentiel d'être très clair. Je dois donc dire dès maintenant que le Bloc québécois est contre ce projet de loi. Dès la première présentation d'un tel projet de loi—car il y a eu différentes numérotations pour ce projet de loi—nous nous sommes prononcés contre plusieurs des dispositions que l'on retrouve encore aujourd'hui dans le projet de loi maintenant appelé C-17.
Ce n'est pas par manque d'efforts, ce n'est pas par manque de volonté, ce n'est pas par manque d'arguments que nous disons que le projet de loi ne correspond pas à ce que nous voulons, car dès le départ nous l'avions dit. Nous avons remporté quelques victoires, c'est-à-dire que la population en général, grâce au Bloc, a remporté quelques victoires. Malheureusement, le gouvernement n'a pas voulu écouter tous les arguments que le Bloc avait présentés de façon la plus constructive possible.
Nous avons tenté d'atténuer plusieurs problèmes liés à ce projet de loi en déposant de nombreux amendements en comité. Malheureusement, nos amendements ont été rejetés par la majorité libérale. Je voudrais, si vous le permettez, partager avec vous les grandes lignes des amendements que nous avions déposés, car il est essentiel de bien comprendre que le travail du Bloc se voulait constructif et critique, tout en tendant la main pour faire en sorte que le projet de loi ne brise pas l'équilibre qui existe entre la sécurité publique et les libertés individuelles, dont je vous parlais au tout début.
Concernant les arrêtés d'urgence, le projet de loi dont nous sommes saisis, le C-17, prévoit que des arrêtés d'urgence peuvent être émis par différents ministres, et ce, sans vérification préalable de leur conformité avec la Charte des droits et libertés et avec la loi habilitante.
Nous avons essayé de rétablir cette vérification préalable, c'est-à-dire qu'avant qu'un arrêté d'urgence prenne effet on vérifie si c'est en respect de la Charte, mais le gouvernement a rejeté cette possibilité.
Concernant les pouvoirs de la GRC et du SCRS, ce projet de loi comporte des dispositions qui confèrent des pouvoirs étendus au commissaire de la Gendarmerie royale du Canada, ainsi qu'au directeur du Service canadien du renseignement de sécurité, en ce qui a trait aux renseignements sur les passagers des compagnies aériennes recueillis auprès de ces compagnies.
Nous avons tenté de bonne foi d'amender le projet de loi afin de limiter les pouvoirs relatifs à la conservation et à l'utilisation de ces renseignements ainsi recueillis. Pour ce faire, nous avons voulu interdire l'utilisation de ces renseignements pour les fins de l'exécution d'un mandat d'arrestation.
Nous avons aussi voulu nous assurer que les renseignements obtenus seraient détruits dans un délai de 24 heures suivant l'atterrissage de l'avion de passagers au sujet desquels ils avaient été demandés, sauf s'ils sont raisonnablement nécessaires pour les besoins de la sûreté des transports ou d'une enquête à l'égard d'une menace envers la sécurité du Canada. Dans le projet de loi, le délai pour la destruction de ces renseignements est demeuré inchangé, c'est-à-dire qu'il est resté à sept jours.
Finalement, nous avons aussi tenté d'instituer un mécanisme pour faire en sorte que le commissaire à la protection de la vie privée reçoive une copie des motifs justifiant le fait que certains renseignements soient conservés, et cela aussi a été refusé.
On a aussi tenté d'effectuer plusieurs changements, notamment aux parties concernant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, la Loi sur la mise en oeuvre de la convention sur les armes biologiques ou à toxine et la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité, soit en suggérant des amendements, soit en votant contre certains articles. Malheureusement, malgré tous les bons efforts, malgré toute notre bonne foi, malgré toute notre énergie, le gouvernement a fait la sourde oreille, et c'est dommage.
En revanche, cette énergie dépensée, ce temps consacré, ces arguments trouvés et énoncés ont quelquefois—mais pas assez souvent—été accueillis de la part du gouvernement, notamment dans le cas des zones de sécurité militaires. Le retrait des zones de sécurité militaires du projet de loi C-17 est une grande victoire pour la population en général et pour tous ceux et celles qui nous ont téléphoné, qui nous ont envoyé des courriels et des lettres nous disant combien ils étaient inquiets de ces dispositions. On peut dire avec fierté que cette victoire de la population a été remportée grâce au travail du Bloc québécois.
Quant à l'établissement de zones par décret, cette mesure nous apparaît plus raisonnable que celle qui était dans le projet de loi précédent. Toutefois, je peux dire tout de suite que nous surveillerons attentivement la question et que nous ferons preuve d'une vigilance de tous les instants afin de dénoncer tout abus éventuel.
Le Bloc québécois fera aussi tout en son pouvoir pour s'assurer qu'aucune zone de sécurité militaire ne soit créée au Québec sans le consentement explicite du gouvernement national des Québécois et des Québécoises.
Concernant les arrêtés d'urgence, le projet de loi contient toujours des dispositions qui permettent à différents ministres de prendre des arrêtés d'urgence. Les changements qui ont été apportés sont mineurs, et il reste quand même l'absence de vérification au préalable pour s'assurer de la conformité avec la Charte des droits et libertés et la loi habilitante par le greffier du Conseil privé.
En conséquence, cette absence de vérification au préalable avec la charte fait en sorte que tout ce qui touche ces arrêtés d'urgence va au cœur de notre opposition à ce projet de loi et est une des raisons majeures qui font en sorte que le Bloc s'oppose avec toute la vigueur et la force qu'on lui connaît au projet de loi C-17.
On me permettra maintenant d'aborder la problématique du droit à la vie privée. On le sait, c'est un droit fondamental dans notre société de faire en sorte que la prédiction du «big brother» ne se réalise pas. Il est entendu que, dans les sociétés démocratiques occidentales, un citoyen a droit à la protection de sa vie privée de sorte qu'elle ne soit pas soumise à l'envahissant pouvoir du gouvernement. Or, le projet de loi C-17 soulève pour nous maintes interrogations concernant le respect du droit à la vie privée, qui est—je le répète parce que c'est essentiel—un droit fondamental de notre système de droit.
En effet, le projet de loi déposé par le gouvernement permet à deux intervenants d'obtenir directement des compagnies aériennes et des exploitants de systèmes de réservation des renseignements sur les passagers. Le commissaire de la GRC peut le faire, tout comme le directeur du SCRS.
Ces renseignements peuvent être demandés s'il y a des menaces imminentes contre la sûreté des transports. Pour ce qui est du SCRS uniquement, des renseignements peuvent aussi être demandés pour des enquêtes relatives à des menaces envers la sécurité du Canada. Le projet de loi C-55, soit la mouture précédente, permettait aussi l'obtention de ces renseignements pour l'identification des individus sous le coup d'un mandat.
La règle générale est que les renseignements recueillis par la GRC et le SCRS sont détruits dans les sept jours suivant leur obtention ou réception—c'est ce dont je vous entretenais un peu plus tôt—, sauf s'ils sont raisonnablement nécessaires pour la sûreté des transports ou pour une enquête à l'égard d'une menace envers la sécurité du Canada.
Le commissaire à la protection de la vie privée est, je le répète, un officier du Parlement, c'est-à-dire qu'il ne dépend pas du gouvernement. Il est au service de la Chambre dans son entièreté, c'est-à-dire au service non pas du gouvernement, mais de la population en général.
Le 6 mai dernier, le commissaire à la protection de la vie privée faisait paraître une lettre faisant part de ses inquiétudes concernant le projet de loi C-55 en ce qui a trait à l'obtention de renseignements par la GRC et le SCRS. Je répète que le commissaire à la protection de la vie privée se veut un observateur neutre et objectif, qui pointe du doigt et nous montre les dangers à la vie privée qui peuvent survenir suite entre autres au dépôt d'un projet de loi.
Quand une personne aussi objective, aussi indépendante qu'un commissaire à la protection de la vie privée—c'est la même chose pour la vérificatrice générale—nous dit quelque chose, il est du devoir des parlementaires, et surtout du gouvernement, de bien l'écouter et de bien prendre en compte ce que cet officier nous dit.
Lorsque le commissaire à la protection de la vie privée exprimait ses réserves, il le faisait sur les deux dispositions suivantes. D'abord, il soulignait le problème avec la GRC, qui peut utiliser les renseignements personnels de tous les voyageurs aériens pour repérer des individus recherchés en vertu d'un mandat pour toute infraction passible d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Deuxièmement, il soulignait le pouvoir qu'ont la GRC et le SCRS de conserver les renseignements personnels des passagers à des fins comme celle de l'analyse d'habitudes de voyage suspectes. On voit que c'est en effet très large.
Concernant le premier point dont je faisais mention, plusieurs dispositions posaient problème. Il s'agissait de la définition de «mandat», la disposition qui permettait à la GRC de faire la cueillette de renseignements dans le but de trouver des individus sous le coup d'un mandat, ainsi que la disposition qui permettait à la GRC de communiquer des renseignements concernant les personnes sous le coup d'un mandat d'arrestation.
Le commissaire à la protection de la vie privée suggérait de supprimer ces éléments du projet de loi. Notre compréhension est à l'effet que le gouvernement a tenté de resserrer les dispositions qui faisaient problème à l'époque, mais a manqué son coup. Il n'y a pas de surprise; il a manqué son coup.
En effet, bien que la GRC n'ait plus le pouvoir de faire la cueillette d'informations dans le but de trouver une personne sous le coup d'un mandat, elle a toujours le pouvoir de communiquer à un agent de la paix des renseignements obtenus par le biais des dispositions du projet de loi C-17 si elle a des motifs de croire qu'ils seront utiles pour l'exécution d'un mandat.
Or, dans les faits, c'est la GRC elle-même qui décide à quel moment une situation menace la sûreté des transports, ce qui lui permet de demander à une compagnie aérienne des informations sur les passagers. Il n'y a aucun mécanisme de contrôle de cette disposition. Cela constitue, vous en conviendrez, une carte blanche à la GRC. De plus, une fois l'information obtenue, il n'y a rien qui empêche de la conserver, en autant que les motifs de conservation soient consignés.
Aussi, avec le projet de loi C-17, le gouvernement a resserré la définition de «mandat». En effet, dans la version précédente, il pouvait s'agir d'un mandat délivré au Canada à l'égard d'une personne pour la commission d'une infraction punissable, aux termes d'une loi fédérale, d'une peine d'emprisonnement de cinq ans ou plus. Maintenant, la définition précise qu'un règlement précisera quels crimes sont visés exactement.
Concernant le deuxième point dont je faisais mention un peu plus tôt, le commissaire à la protection de la vie privée exprimait d'importantes réserves quant à la conservation des renseignements recueillis.
Premièrement, le délai de sept jours durant lesquels la GRC et le SCRS peuvent conserver les informations est excessif; un délai de 48 heures serait suffisant. Le fait que la GRC et le SCRS peuvent conserver indéfiniment ces informations par mesure de sûreté est inquiétant. J'espère que vous conviendrez avec moi qu'il faudrait baliser tout cela. Aucune de ces deux modifications suggérées par le commissaire à la protection de la vie privée, cet officier indépendant du gouvernement, n'a été retenue.
En conséquence, le 1er novembre 2002, le commissaire à la protection de la vie privée rendait public un communiqué de presse concernant le projet de loi C-17 dans lequel il mentionne que les modifications apportées au projet de loi sont mineures. Il estimait donc, et je cite:
Les dispositions en question, que renferme l’article 4.82 des deux projets de loi, permettraient à la GRC et au SCRS d’avoir un accès sans restriction aux renseignements personnels de tous les Canadiens et Canadiennes voyageant sur des vols intérieurs ou internationaux. |
Il ajoutait:
[...] je m’inquiète du fait que la GRC serait habilitée de façon expresse à utiliser ces renseignements pour repérer toute personne à l’égard de laquelle un mandat aurait été délivré pour une infraction pénale qui serait sans aucun rapport avec le terrorisme, la sécurité des transports ou la sécurité nationale [...] |
Au Canada, il est bien établi que les citoyens n'ont pas à fournir leur identité à la police à moins d'être arrêtés ou d'exercer une activité nécessitant un permis, comme la conduite d'un véhicule. Le droit à l’anonymat face à l’État est un droit fondamental en matière de protection de la vie privée. Puisque les voyageurs aériens canadiens sont tenus de faire connaître leur identité aux sociétés aériennes, et puisque l'article 4.82 donne à la GRC un accès sans restriction aux renseignements que les sociétés aériennes obtiennent sur leurs passagers, créerait un précédent d’ingérence—un précédent obligeant, à toutes fins utiles, les citoyens à décliner leur identité à la police. |
Ce n'est pas nous qui disons cela, c'est le commissaire à la protection de la vie privée, un représentant du Parlement, indépendant du gouvernement. Écoutons-le!
Finalement, ce même commissaire affirmait que les modifications proposées sont une insulte à l'intelligence des Canadiens et des Canadiennes. Je cite encore:
Les amendements qui ont été apportés dans le cadre du nouveau projet de loi n’apportent aucune solution aux enjeux fondamentaux liés au principe en question. |
Le gouvernement se propose maintenant d’établir un règlement visant à limiter les mandats liés à des infractions au Code criminel en vertu desquels la GRC peut effectuer des recherches. Toutefois, une telle mesure ne prend pas en compte le principe fondamental voulant que la police ne devrait pas pouvoir recourir à un accès sans restriction aux renseignements personnels pour rechercher des personnes visées par un mandat par suite d’une infraction sans rapport avec le terrorisme. |
Par ailleurs, dans le nouveau projet de loi, le gouvernement a supprimé «la recherche de personnes à l’égard desquelles un mandat a été émis» en tant que «finalité» visant à permettre l’accès à des renseignements sur les voyageurs aériens en vertu de la loi. Or, une telle mesure est vide de sens—voire sournoise—en raison du fait que la GRC serait toujours habilitée à rapprocher ces renseignements d’une banque de données de personnes sujettes à un mandat et à se prévaloir d’une telle mesure pour effectuer des arrêts. C’est une insulte à l’intelligence des Canadiens et Canadiennes que de suggérer, comme l’a fait le gouvernement dans son communiqué sur le projet, que la GRC peut «à l’occasion» intercepter des individus recherchés en vertu d’un mandat pour infraction au Code criminel—si la police devait comparer les noms des passagers aux noms des individus recherchés en vertu d’un mandat pour infraction au Code criminel d’une banque de données—on ne peut certes qualifier «à l’occasion» de fruit du hasard. |
Finalement, le commissaire à la protection de la vie privée nous lance un appel, à nous parlementaires, car il dit:
Il revient maintenant au Parlement d’expliquer à ces personnes que la vie privée est un droit fondamental pour les Canadiens et les Canadiennes—un droit qui doit être respecté au lieu d’être traité avec apathie par le gouvernement. |
Donc, le Bloc québécois prend au vol cet appel du commissaire à la protection de la vie privée, ce représentant indépendant du Parlement, indépendant du gouvernement. Il nous interpelle en tant que parlementaires. Il nous dit: «Vous parlementaires, vous avez un devoir fondamental, celui de protéger le droit fondamental des Québécois et des Canadiens à la protection de la vie privée. Ce gouvernement, par le projet de loi C-17, essaye de circonscrire cette liberté et vous avez le devoir de vous y opposer.» C'est ce que nous faisons.
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement mon collègue de Charlesbourg—Jacques-Cartier.
Dans le domaine auquel il vient de faire allusion, c'est-à-dire les pouvoirs que l'on confère à la GRC, permettez-moi de m'inquiéter également. Comme le commissaire à la vie privée, j'aimerais que mon collègue approfondisse le sujet.
Pour avoir vécu personnellement une expérience assez douloureuse qui aurait pu me coûter la vie dans les années 1970, je peux vous dire que lorsqu'on donne trop de pouvoir à la GRC ou à un corps de police, quand on travaille à supprimer le respect de la vie privée, cela peut devenir dangereux.
Personnellement, il m'est arrivé une aventure dans les années 1970 où pendant une heure, à cause d'une méprise commise par un corps de police, il s'en est fallu d'un cheveu que j'y laisse la vie. Par la suite, la seule compensation qu'on m'a offerte, ce sont des excuses.
Quand on donne des pouvoirs à un corps de police, pour lui permettre de faire à peu près n'importe quoi, je suis d'accord avec mon collègue quand il dit qu'il faut y penser à deux reprises.
De plus, on dit que le passé est le garant de l'avenir. Je me souviens également que dans les année 1970 au Québec, la GRC s'est permis des choses qui n'auraient jamais dû être permises. Il y a non seulement eu atteinte à la vie privée, mais il y a eu atteinte aux droits d'une collectivité. Vous vous souvenez certainement des méfaits commis par la GRC et des crimes pour lesquels d'autres ont été tenus responsables, notamment des manifestants bruyants des années 1970.
Par conséquent, je voudrais demander à mon collègue d'élaborer davantage, car il faut que la population ait connaissance des pouvoirs que nous sommes en train de donner à la GRC. Mon collègue a demandé à la population d'être vigilante, le gouvernement, lui, ne veut pas l'être. Le commissaire à la vie privée s'inquiète également et j'aimerais que mon collègue élabore un peu sur les exagérations de la GRC dans le passé.
M. Richard Marceau: Monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue de Champlain pour ses questions. D'abord, vous conviendrez sûrement avec moi qu'il aurait été tragique pour la vie politique du Québec de perdre, dans les années 1970, un homme de la qualité du député de Champlain. C'est un homme qui a donné maintes années de sa vie aux affaires publiques. Il a été député du gouvernement de René Lévesque à Québec et il a humblement repris du service. Il n'avait pas besoin de le faire, mais il a décidé de se mettre au service de ses concitoyennes et concitoyens, et au service de l'idée qui l'habite de façon permanente, soit de faire du Québec un pays. Il aurait été fort dommage pour le Québec, dans les années 1970, de perdre le député de Champlain dans la fleur de l'âge. C'est le premier point que je voulais soulever.
Le deuxième point est que malheureusement, nous vivons dans une société où il y a plus de gens qui pensent qu'Elvis est encore vivant que de gens qui font confiance aux hommes et aux femmes politiques. C'est dommage, mais c'est ainsi. C'est la raison pour laquelle j'ai cité, en long et en large, ce rapport d'un observateur neutre de la chose. C'est un observateur indépendant de tout parti politique, que ce soit du gouvernement ou des quatre—ou peut-être bientôt trois—partis d'opposition. Cet observateur neutre mais engagé, bien au courant des tenants et aboutissants du débat, mentionne que toute société qui brise l'équilibre nécessaire entre sécurité publique et libertés individuelles va dans une direction potentiellement fort dangereuse.
Mon collègue a soulevé les abus qui ont été faits dans les années 1970 par la police fédérale. En effet, tout le monde est au courant de ces abus. C'est une raison de plus pour faire en sorte de ne pas donner trop de pouvoirs discrétionnaires au bras policier de l'État. En effet, comme disait Nietzsche: «L'État est un monstre froid».
Il est du devoir des parlementaires, nous qui sommes les mandataires élus de la population, de restreindre les pouvoirs de l'État, de contrôler l'appétit toujours grandissant de l'État de vouloir contrôler, de gérer nos vies, et je dirai, d'empiéter sur notre droit à la vie privée.
Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration disait récemment qu'il voulait instituer une carte d'identité nationale. C'est aussi un empiètement sur notre droit à la vie privée.
Nous devons être les mandataires de la population pour défendre ce droit le plus fondamental qu'est la protection à la vie privée. Ce mandat, le Bloc québécois l'accepte de la façon la plus urgente et la plus véhémente.
Finalement, je demande à mes collègues libéraux de faire la même chose et dire au Commissaire à la vie privée qu'ils acceptent ce mandat que leur a donné la population et qu'ils se battront pour que le droit à la protection de la vie privée de nos concitoyennes et nos concitoyens soit protégé. C'est leur devoir et j'espère qu'ils le feront.
M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Monsieur le Président, permettrez-moi de faire un impair en témoignant de ma joie d'apprendre par les médias que l'état de santé de votre fils s'améliore de jour en jour. Cela me fait énormément chaud au cœur et je suis convaincu qu'il en est de même pour votre cœur de père.
Je vous remercie de m'accorder l'opportunité de prendre la parole sur le projet de loi C-17. C'est un projet de loi qui a été présenté à la Chambre il y a belle lurette, soit immédiatement après les attentats dont nous avons malheureusement été témoins le 11 septembre 2001.
Je me souviens, à l'époque, de la première chose que ce gouvernement ait faite: il a adopté à toute vitesse le projet de loi S-23, la Loi modifiant la Loi sur les douanes et d'autres lois en conséquence. Même à cette époque, nous nous posions des questions. La principale question était: où s'arrête la sécurité et où commence la vie privée ou la Charte des droits et libertés? C'était une grande préoccupation que nous gardons encore à ce jour.
Permettez-moi de vous faire un peu l'historique du projet de loi que nous débattons aujourd'hui. Rappelons-nous le premier projet de loi, le projet de loi C-42. Tout le monde s'y opposait. Cela a permis au gouvernement de reculer un peu, de le modifier, de le travailler, de le changer et d'essayer d'y camoufler des choses. Ainsi est né le projet de loi C-55. Ce dernier projet de loi a effectivement connu quelques modifications, mais pas au goût de l'opposition, notamment du Bloc québécois.
Finalement, en ce début d'après-midi, nous faisons l'étude du projet de loi C-17. Heureusement, à cause du Bloc québécois, le gouvernement a renoncé à plusieurs points. Malheureusement, il n'a pas renoncé à suffisamment de points.
Ma première préoccupation quant à ce projet de loi concerne les fameuses zones de sécurité militaires. Nous avons obtenu du gouvernement qu'il établisse trois zones d'accès contrôlé—c'est ainsi qu'on les appelle aujourd'hui—aux ports d'Halifax, d'Esquimalt et de Nanoose Bay. Malheureusement, nous croyons que ce n'est pas assez, puisque le projet de loi permet au Conseil des ministres d'établir d'autres zones considérées pour des questions de sécurité ou autres. Cela laisse encore la porte ouverte pour l'établissement d'autres zones, si le Conseil des ministres le désire vraiment.
Quant à savoir sur quelles données de base les ministres prendront leur décision, nous ne sommes aucunement au courant. C'est un avocat du ministère de la Défense nationale, qui nous disait cela lors d'un briefing. C'est ce qu'il croyait. De plus, cet avocat affirme aussi qu'il y «aurait des restrictions à des poursuites civiles pour dommages», comme c'était le cas auparavant. Mais les changements à ce sujet ne paraissent pas dans le projet de loi.
La position du Bloc québécois quant au retrait des zones de sécurité militaires du projet de loi nous apparaît comme une victoire d'une certaine importance. Quant à l'établissement de zones par décret, cette mesure nous apparaît beaucoup plus raisonnable que la précédente.
Toutefois, nous allons surveiller attentivement ces nouvelles zones. Nous demandons qu'aucune zone ne soit créée dans les provinces, principalement au Québec—puisque je suis un représentant d'un comté du Québec—, sans au moins l'avis et le consentement des gouvernements provinciaux, principalement celui du Québec.
L'autre préoccupation qui me vient à l'esprit concernant ce nouveau projet de loi C-17 sur le contrôle et la sécurité aérienne, ce sont les arrêtés d'urgence. Encore une fois, les arrêtés d'urgence nous apparaissent beaucoup trop longs, même s'ils ont passé de 45 jours qu'ils étaient au début, à 14 jours. Nous croyons que ces derniers devraient être beaucoup moins longs.
Là où le bât blesse vraiment, c'est quand se rend compte de l'absence de vérification au préalable de la conformité à la Charte des droits et libertés et à loi habilitante par le greffier du Conseil privé. Cette absence de vérification est un problème majeur. Cela laisse aux ministres ou à autre toute personne la possibilité de décréter des arrêts d'urgence sans vérifier si on respecte la Charte des droits et libertés.
L'autre problème majeur—et je fais mienne la préoccupation exprimée par mon collègue, le député de Champlain—, c'est le rôle que le commissaire de la GRC et le directeur du SCRS auront à jouer dans la collecte de renseignements sur les passagers de tel ou tel vol auprès des compagnies aériennes ou de toute agence de voyage—c'est-à-dire auprès de personnes qui s'occupent de réserver ou de vendre des billets—, au nom de la sécurité.
Je ne suis pas contre la sécurité, mais qu'allons-nous faire des renseignements obtenus. La position du Bloc est qu'ils devraient être détruits dans les 48 heures suivant leur obtention. Mais non, on les gardera pendant sept jours et on donne la permission à la GRC de faire des arrestations en vertu de mandats et de transmettre ces renseignements à d'autres personnes. C'est de la bouillie pour les chats. Ce que je dis là ne sont pas les propos et les idées du Bloc, cela vient du commissaire à la protection de la vie privée.
Ce commissaire, comme mon collègue de Charlesbourg—Jacques-Cartier le disait, est un haut fonctionnaire du gouvernement. Il ne s'agit pas du dernier venu. Cette personne est à la disposition tant du gouvernement que des partis de l'opposition. Il veille à ce que la vie privée des gens soit respectée. Il n'a pas de parti pris, il n'est ni souverainiste, ni provincialiste ou fédéraliste. Il est chargé de surveiller les droits de la vie privée des gens. Par conséquent, il faudrait l'écouter.
À maintes reprises il a écrit, envoyé des lettres et cherché à engager le dialogue. Malheureusement, il dit lui-même que cela n'a pas eu l'air de faire réfléchir le gouvernement en place puisque ce dernier fait fi de ce qu'il dit.
Au nom de tous les citoyens de mon comté et de tous les citoyens du Québec et des autres provinces, je demande à ce gouvernement et aux promoteurs du projet de loi C-17 de bien vouloir prendre en considération les préoccupations qu'exprimait M. Radwanski, qui était le commissaire à la protection de la vie privée. Le commissaire est une personne qui travaille pour les contribuables et est là pour protéger leur vie privée.
En terminant, comme vous le voyez, ce projet de loi est encore très loin de faire l'unanimité. Ce projet de loi est encore beaucoup trop flou. Il ne contient pas assez de mordant, pas assez de réglementations et n'est pas assez clair pour déterminer exactement quels sont les droits qu'il devrait contenir, surtout eu égard à la GRC et au SCRC.
Concernant la GRC, le projet de loi ne permet aucun contrôle sur celle-ci et sur ce qu'elle fera avec les renseignements qu'elle obtiendra. On dit que c'est pour protéger la sécurité des Canadiens et que c'est pour ne pas avoir des personnes indésirables au pays. Cette banque de données amassées par la GRC et par le SCRC pourra aller s'harmoniser à celle qui existe présentement et qui a été créée par l'Agence des douanes et du revenu. C'est un autre scandale, une autre chose anormale dont fait état le commissaire à la protection de la vie privée dans les nombreux textes émis à ce sujet.
En terminant, je demande à mes collègues d'en face de bien vouloir discuter avec le ministre des Transports et de bien vouloir essayer de le convaincre qu'il faut non pas abolir le projet de loi C-17, mais le bonifier. Ce projet de loi n'est pas encore mûr pour faire l'objet d'un vote. Ce projet de loi devrait être bonifié. Il faudrait surtout porter une attention très spéciale à la vie privée de tous les citoyens de ce pays, principalement ceux du Québec.
[Traduction]
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, le député a parlé des banques de données à maintes reprises et a rappelé indirectement les questions de sécurité. Selon lui, un équilibre est-il requis relativement aux banques de données afin d'avoir les renseignements nécessaires pour veiller à la sécurité et à la souveraineté du Canada?
De fait, cela revient à la question de savoir comment nous devons réagir aux réalités que le 11 septembre a imposées au monde, afin de garantir la sécurité de tous les Canadiens.
[Français]
M. Gilles-A. Perron: Monsieur le Président, j'apprécie la question de mon collègue. Oui, il faut avoir un contrôle pour assurer la sécurité. Oui, il faut obtenir certaines informations pour assurer la sécurité du pays et la contribution du Canada à la sécurité internationale.
Toutefois, ma préoccupation et celle du commissaire à la protection de la vie privée, ce n'est pas l'obtention des informations, mais ce qu'on fera avec celles-ci. Là est le problème. Va-t-on les distribuer à tous vents? La GRC pourra-t-elle prendre ces informations, comme la loi le laisse sous-entendre, et les envoyer à un corps policier en soutenant qu'une personne a contre elle un mandat d'arrestation, et ainsi de suite?
Le problème est là. Le problème n'est pas dans la collecte de données, mais dans la durée pendant laquelle on les garde, ce qu'on en fait et comment on les utilisera, d'où la nécessité d'assurer la protection de la vie privée des gens.
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, je profite encore de l'occasion pour poser une question, parce que c'est, à mon point de vue, un problème majeur, celui qui me touche le plus, soit la question de la protection de la vie privée. Ce n'est pas vrai que sous prétexte de protéger l'humanité, on doit mettre en danger la vie privée des gens.
Je vous l'ai dit tantôt, pour comprendre il faut avoir vécu des moments tels que cela m'est arrivé. On peut, pendant une demi-heure ou une heure—dans mon cas, cela a été court, dans d'autres cas, cela a été plus long—se retrouver entre deux armes, sans jamais savoir ce que vous avez fait pour mériter cela. Pendant une heure, qui m'a paru une éternité, je me suis vraiment demandé si ma vie était finie. Dans mon cas, c'était une erreur de la police.
Plus on donne de pouvoirs à la police ou à la GRC, moins on les balise, plus il risque d'arriver des incidents graves relatifs à la protection de la vie privée. Il me semble qu'il serait possible de trouver le moyen de baliser dans la loi le pouvoir qu'on donne à la GRC. Je voudrais demander à mon collègue de revenir là-dessus. Ce n'est pas la dernière fois que je vais en parler, car le jour où cela m'est arrivé, je me suis promis que lorsque je serais député, je ne laisserais jamais passer une loi donnant la possibilité de brimer la vie privée des individus, comme cela a été le cas pour moi à ce moment-là.
Je voudrais demander à mon collègue s'il voit un moyen de demander à la GRC de nous protéger, tout en l'obligeant à agir de façon responsable pour le respect de la vie privée?
M. Gilles-A. Perron: Monsieur le Président, je vois dans l'intervention de mon charmant collègue de Champlain, qu'il fait référence à la Loi sur les mesures de guerre, ce que nous avons malheureusement vécu au Québec en octobre 1970. Je dois ajouter aux commentaires de mon ami, que moi aussi j'ai passé une fin de semaine dans la cafétéria et le gymnase du Collège de Saint-Laurent. Aujourd'hui c'est un cégep, mais dans à cette époque c'était un collège.
Nous avions été emmenés par l'armée, je ne sais pas pour quelle raison et je ne l'ai jamais su, sans aucun mandat, sans rien. On était un groupe qui sortait d'un dîner à Ville-Saint-Laurent. Tout à coup, nous voici dans un camion de l'armée et au collège pour passer une fin de semaine. Le lundi, ils sont arrivés et nous ont dit de retourner chez nous. Il n'était pas possible de prendre de douche, ni de se raser, ni de faire quoi que soit durant toute la fin de semaine.
Non, je n'aimerais pas que les gens d'aujourd'hui vivent cet évènement-là. C'était malheureux, parce qu'au Québec, il se passait des évènements qui ont été tragiques.
Dans le projet de loi C-17, ce qui nous fatigue, c'est qu'il n'y a aucune balise entourant les actions de la Gendarmerie royale, du SCRS, de l'armée ou de tout autre corps de police habilité. On nous parle d'informations qu'ils peuvent recueillir. Qu'est-ce qu'ils vont faire avec ces informations, comment vont-ils les obtenir? Est-ce que ce sera par les compagnies aériennes, par exemple? Que vont-ils faire avec?
Le commissaire à la protection de la vie privée le mentionne dans l'un de ses articles. Le projet de loi nous fait penser que tous les Canadiens sont une gang de dupes, de débiles intellectuels ou quelque chose comme cela. Il le dit très bien. J'essaye de trouver le terme exact. Il dit que «c’est une insulte à l’intelligence des Canadiens et Canadiennes».
Je suis convaincu que la majorité des Canadiens et des Canadiennes, des Québécois et des Québécoises ont les mêmes préoccupations que vous et moi. Il n'y a rien dans le projet de loi pour s'assurer qu'un autre octobre 1970 ne se reproduira pas. Il n'y a rien dans le projet de loi à cet effet.
Donc, oui, il faudrait prendre en considération l'expérience déjà vécue et ne pas répéter les erreurs qui se sont produites dans notre jeune temps.
M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, ce n'est pas la première fois que j'ai l'occasion de m'exprimer sur le projet de loi C-17. On peut considérer qu'un certain nombre de projets de loi ont été soumis en réaction aux attentats du 11 septembre, et surtout en réaction aux démarches de lobbyistes américains de très haut niveau qui sont venus à Ottawa à plusieurs reprises. Que ce soit Tom Ridge ou John Ashcroft, plusieurs secrétaires d'État américains sont venus à Ottawa, quelques mois après les attentats. Ils nous reprochaient que notre frontière était trop facile à traverser, que nos lois n'étaient pas assez solides et restrictives, et nous demandaient de renforcer le contrôle au moyen de lois.
Nous sommes finalement en train de tomber dans le piège dans lequel nous ne voulions pas tomber. En effet, je me rappelle qu'une ou deux semaines après les attentats du 11 septembre, la Chambre des communes a repris ses travaux et nous étions encore traumatisés par ce qui était survenu à New York. Les gens disaient que la vie ne serait plus jamais pareille.
Cependant, il y avait une valeur fondamentale pour les Canadiens et les Québécois: il fallait faire attention à protéger nos droits et libertés. Il ne fallait pas que les terroristes aient réussi à restreindre les droits et libertés de l'ensemble des Canadiens et des Québécois. On disait qu'il fallait avoir des projets de loi, qu'il fallait revoir certaines choses mais certainement pas tomber dans le piège que les terroristes nous avaient tendu, soit de restreindre nos droits et libertés.
D'ailleurs, un des objectifs poursuivis par les terroristes n'était pas seulement de tuer 3 000 personnes, mais de porter un coup dur aux grandes démocraties occidentales. Ils se sont attaqués aux symboles de cette démocratie, les tours du World Trade Center.
La réaction ne s'est pas fait attendre. Je ne parle pas de la réaction guerrière qui, en légitime défense, autorisait les Américains à partir à la poursuite d'Al-Qaïda. Je parle plutôt des suites de restriction des droits fondamentaux des Canadiens et des Québécois.
Nous avions initialement décidé de faire deux lois de ce projet de loi. Nous nous sommes toujours objectés à la partie que nous étudions aujourd'hui. Nous nous y sommes objectés en deuxième lecture, nous nous y sommes aussi objectés en comité et avons tenté d'améliorer le projet de loi en proposant des amendements, justement pour ne pas restreindre les droits et libertés des Québécois et des Canadiens.
D'ailleurs, nous n'étions pas les seuls, le commissaire à la protection de la vie privée, à l'époque, avait fait plusieurs sorties publiques. Il disait: «Il faut modifier ce projet de loi, car il porte atteinte à la vie privée des Canadiens et des Québécois.» Cela représente une petite victoire pour nous, car je me rappelle que cette loi-là était encore pire. Comme vous le savez je suis le porte-parole de mon parti en matière de défense nationale. On faisait des zones de sécurité militaire dans plusieurs endroits au Canada et on pouvait donner le mandat au gouvernement d'en créer.
C'était extrêmement dangereux pour nous. Comme vous le savez, mon comté est ce qu'on pourrait appeler un comté très militaire: il y a une base militaire et un ancien collège militaire. Des dispositions du projet de loi original permettaient d'étendre le pouvoir du Conseil des ministres. Par exemple, s'il y avait un danger à la base militaire de Saint-Jean, sa superficie pouvait être étendue à toute la ville de Saint-Jean. C'était une chose envisageable. Des dispositions du projet de loi permettaient au ministre et au Conseil des ministres d'étendre ces zones.
À l'époque, j'avais aussi donné l'exemple de la réserve navale du port de Québec. On pouvait décider d'étendre cette réserve à une large partie de la ville de Québec, en incluant probablement l'Assemblée nationale du Québec.
On pouvait étendre la juridiction du fédéral et c'est lui qui contrôlait ce qui se passait. On pouvait aller jusqu'à interdire l'accès à une grande zone autour de la réserve de Québec ou à une grande zone dans le comté de Saint-Jean, donnant ainsi une protection maximale aux infrastructures militaires.
Cela allait tellement loin que des gens qui se trouvaient à l'intérieur de cette zone pouvaient être arrêtés sans mandat, mis en prison, tout simplement parce qu'ils se trouvaient dans une zone militaire.
De plus—tenez-vous bien—, le gouvernement était tenu d'en informer la population seulement une semaine ou deux après l'avoir décrété ici, à Ottawa. Des gens pouvaient se trouver dans cette zone à leur insu, pensant bien faire, et pouvaient se faire arrêter sur-le-champ.
Le Bloc québécois avait livré toute une bataille à ce sujet. C'est avec grand plaisir qu'on a vu que lorsqu'on est revenus avec le projet de loi C-17, cela avait disparu.
Je pense qu'il y a deux ou trois endroits, comme Nanoose Bay, le port de Halifax et un autre endroit, qu'on dit être effectivement décrétés «zones militaires controlées». À l'époque, le ministre nous parlait, de l'attentat perpétré contre le USS Cole, au Yémen. Soutenant que c'était devenu dangereux dans les ports, il a voulu décréter, une zone d'exclusion militaire pour certains ports. Finalement, on est heureux d'avoir limité cela. Je pense que c'est une grande victoire pour la démocratie et les libertés et pour le Bloc québécois d'avoir fait retirer cela.
Beaucoup d'autres aspects du projet de loi ne font pas notre affaire. Ce n'est pas la première fois que vous entendez parler des arrêtés d'urgence; mes collègues viennent d'en parler. Je trouve qu'on va un peu loin eu égard aux arrêtés d'urgence. Un ministre peut décider qu'il fait un arrêté d'urgence, et un certain délai peut s'écouler avant que le Parlement en soit saisi.
On nous a toujours dit que s'il y a une urgence et que le Parlement est en relâche, il faut procéder. C'est ce qu'on est venu nous dire devant le comité permanent. Par contre, j'ai déjà vu le Parlement être rappelé pendant la relâche, entre autres pour la grève des chemins de fer. Je ne suis pas certain, mais je pense que nous avions également été rappelés lors de la grève dans le port de Vancouver alors que nous étions en période de relâche.
Les arrêtés d'urgence présentent un problème. Encore une fois, on donne beaucoup trop de pouvoirs à des ministres et au gouverneur en conseil, qui est le Conseil des ministres.
On est aussi en mesure de s'interroger même avant l'application de cette loi. Je sais que le gouvernement a parfois l'habitude de demander un avis à la Cour suprême. On renvoie à la Cour suprême une disposition d'une loi ou une loi complète avec des questions précises afin de lui demander si cela peut passer le test de la Charte des droits et libertés.
Concernant cette disposition sur les arrêtés d'urgence du projet de loi qui est devant nous, on peut s'interroger si elle respecte la Charte des droits et libertés. Je trouve qu'il est trop facile pour le gouvernement de réunir le Conseil des ministres et de dire qu'on fait un arrêté d'urgence pour telle chose. Cela sera connu plusieurs jours plus tard. On a tenté de ramener de 15 à cinq jours le délai avant que ce soit référé au Parlement. Les dispositions actuelles de la loi permettent d'ailleurs d'échapper à la Charte des droits et libertés, ce qui est assez grave. On ne peut pas dire que c'est rien.
D'ailleurs, j'entends continuellement mes collègues libéraux dire que la Charte des droits et libertés est extrêmement importante. D'ailleurs, on vient de l'invoquer il n'y a pas tellement longtemps dans le dossier des mariages entre conjoints de même sexe. On veut respecter la Charte des droits et libertés dans plusieurs lois. C'est bizarre que dans le projet de loi C-17, on semble l'ignorer.
Si, de l'avis d'un ministre, il y a urgence, on ne demandera pas au ministère de la Justice d'étudier la portée sur la Charte des droits et libertés. On va procéder immédiatement et on remettra à plus tard l'étude de la portée sur la Charte des droits et libertés. À notre avis, cela est extrêmement grave.
On a un Parlement composé de 301 élus qui viennent de tous les comtés du Canada, dont 75 du Québec. En nous élisant, les gens nous ont investis de la légitimité pour siéger au Parlement. C'est nous qui avons le pouvoir législatif de changer des choses, de voter pour ou contre des mesures législatives.
C'est sûr que j'ai reproché à plusieurs reprises à ce gouvernement de ne pas nous faire voter. Entre autres, la nouvelle trouvaille de ce gouvernement depuis quelque temps, ce sont les fameux débats exploratoires. Je me rappelle entre autres de l'envoi de troupes en Irak, où on était justement en relâche parlementaire. Quelques semaines après, on est revenus au Parlement pour apprendre que les troupes étaient parties et on nous a dit aux qu'on allait débattre de la pertinence d'envoyer nos troupes dans ce pays.
Mais les amarres ont été larguées, les troupes sont parties et elles ont presque fait la moitié du chemin. Alors qu'est-ce qu'on peut faire? On s'objecte. Je pense que comme parlementaires, nous devons prendre notre place lorsqu'il est question de sujets aussi importants que l'envoi de troupes. Ce sont des jeunes soldats, les enfants, les filles et les fils des Canadiens qui vont participer dans un théâtre d'opération dangereux.
C'est la même chose pour le projet de loi C-17. Comme parlementaires, nous voulons que le Parlement ait le plus grand contrôle possible sur ce type de loi. Si dans le projet de loi il y a des dispositions qui font en sorte que le Parlement soit seulement un «rubber stamp» ou un faire-valoir, intervenant quelques semaines après la décision, nous pensons que c'est illégitime pour les parlementaires de se retrouver dans cette situation-là.
On dirait même que cela frôle l'illégalité en ce qui concerne la Charte des droits et libertés. Nous ne sommes pas les seuls dans l'opposition à l'avoir dit et manifesté. J'ai entendu dire qu'il y a même des collègues libéraux qui contestaient ce projet de loi, disant que la Charte des droits et libertés était laissée de côté pendant certaines périodes de temps. Je pense que c'est dangereux.
L'autre aspect concerne justement la collecte d'informations. Chaque fois qu'on veut donner un peu plus de pouvoir au SCRS ou à la GRC, c'est un peu normal que nous, du Bloc québécois, réagissions en voulant regarder cela d'un peu plus près.
Plus tôt, des collègues ont raconté qu'ils avaient été arrêtés et mis en prison—probablement sans mandat—, et on n'en connaît pas la raison. Ils ont été en prison pendant plusieurs jours sans avoir le droit de consulter un avocat. On parle de contrevenir directement à la Charte des droits et libertés. Peut-être que cela n'existait pas dans ces années, mais cela existe aujourd'hui.
Nous savons aussi ce qui s'est passé. Je ne veux pas remettre en cause le travail de la GRC et du SCRS, mais je peux vous dire que durant la crise d'Octobre, il s'est passé pas mal de choses. Il y a d'ailleurs eu des communiqués qui ont été lus à la télévision de Radio-Canada, disant que ce n'était même pas le FLQ qui avait fait ces choses. La Commission McDonald a démontré par la suite que c'était la GRC qui les avait faites.
Tout le monde se rappelle des granges incendiées. C'était terrible. Le FLQ «incendiait des granges, posait des bombes, etc.» La Commission McDonald nous a appris que ce n'était pas le FLQ qui avait fait cela, mais la GRC. Peut-être l'avait-elle fait suite à des ordres politiques leur disant qu'il fallait envenimer la situation au Québec, qu'il fallait vraiment que les Québécois pensent que ce qui se passait était très grave. Donc, on a peut-être demandé à la GRC de le faire?
Naturellement, personne ne nous le dira jamais. Personne ne nous dira que le Solliciteur général de l'époque a dit à la GRC d'y aller. Personne n'a pu le démontrer. Par contre, on sait que dans la réalité, après la Commission McDonald, il y a certainement quelque part des gens qui ont pris des décisions pour que cela se passe comme cela.
Quand dans un projet de loi, il y a une disposition qui donne plus de pouvoirs à la GRC et au SCRS pour recueillir des informations sur des individus, on peut s'interroger et vouloir absolument freiner cette action afin qu'elle ne prenne pas trop de place dans un projet de loi.
D'ailleurs, j'étais membre du comité législatif concernant le projet de loi C-17 que vous avez très bien présidé, monsieur le Président. J'ai posé beaucoup de questions. Disons par exemple que je suis assis à côté d'une personne dans l'avion et que je lui parle durant tout le trajet. Si la GRC connaît un détail ou une information au sujet de cette personne, est-ce qu'ils se demanderaient quel lien je pourrais avoir avec cette personne? Est-ce qu'ils se demanderaient qui est le gars à côté de cette personne à qui il a parlé tout le long du voyage? Il doit y avoir quelque chose là-dedans. C'est là que la machine peut se mettre en branle.
Bien sûr, étant député du Bloc québécois, je ne pense pas qu'ils oseraient dire que je suis un terroriste parce que je suis assis à côté d'un terroriste. Je ne pense pas qu'ils iraient jusque là. Ils ont une certaine décence. De plus, ils savent que nous avons des moyens pour nous défendre.
Mais le pauvre voyageur, l'homme d'affaires qui est très sociale, qui parle avec l'individu et qui ne sait pas à qui il a affaire, qu'est-ce qui nous dit qu'en débarquant de l'avion, il n'aura pas déjà des policiers sur les talons, en train de chercher qui il est, pourquoi il a parlé si longtemps avec son voisin et essayer de savoir s'il a un passé judiciaire, s'ils ont fait des transactions ensemble ou s'ils se sont déjà rencontrés avant aujourd'hui? Vous avez là un pauvre innocent qui ne sait même pas que des gens sont en train d'enquêter à son sujet.
De plus, après avoir fait cette collecte de renseignements, ils peuvent les garder pendant sept jours. On voudrait que cela soit réduit à 24 heures. D'ailleurs, que ce soit à cet égard ou à l'égard des arrêtés en conseil, le Bloc québécois a fait son travail. En effet, on a proposé bon nombre d'amendements qui vont dans le sens de la défense des droits et libertés des Québécois et des Canadiens. Tous ces amendements ont été rejetés du revers de la main par la majorité libérale.
Ainsi, à l'étape de la troisième lecture, on ne peut pas être favorables à un projet de loi comme celui-ci. Cela a trop de conséquences. Nous, les gens du Québec, avons trop de mémoire collective pour permettre de donner au gouvernement encore plus d'instruments pour contrôler la population et les individus. Nous ne sommes pas les seuls à avoir dit cela. Les différents témoins qui se sont présentés devant le comité ont continuellement tenu ces propos.
Je m'explique mal que mes collègues libéraux, après avoir entendu des témoignages si éloquents et si précis, n'abondent pas dans leur sens et disent: «Non, on s'en tient au projet de loi.»
C'est là qu'on s'aperçoit que parfois, la solidarité dans un parti va un peu loin, surtout quand c'est du côté du gouvernement. Les gens s'assoient ensemble, voient devant eux les témoins qui leur disent toutes sortes de choses, mais se tournent de côté et disent: «Ce n'est pas cela. Ce ne sont pas eux qu'on veut écouter.» C'est un peu comme une parodie.
Pourtant, les comités permanents de la Chambre des communes, comme les commissions parlementaires à Québec sont faits pour écouter les citoyens. D'ailleurs, dans les différents livres de procédure parlementaire, tout le monde s'entend pour dire que c'est important d'écouter les témoins et la population.
Est-ce que c'est devenu une parodie? Est-ce que c'est devenu une comédie? Est-ce que c'est devenu de la fiction? On est en mesure de s'interroger. Nous, les députés, siégeons tous à différents comités et on voit que la trame est toujours la même: quand le gouvernement a décidé d'adopter un projet de loi, même si on écoutait 500 témoins qui sont contre ce projet de loi, le gouvernement s'en tient à sa ligne de conduite et laisse de côté tous les témoignages et tous les groupes et individus qui se sont déplacés.
C'est sûr qu'il y en a toujours—et le gouvernement s'arrange pour qu'il y en ait un ou deux— qui disent comme lui. C'est sur cela qu'il va mettre l'accent, laissant dans l'ombre les autres témoins qui ne sont pas d'accord avec lui.
On est donc en mesure de s'interroger très sérieusement sur le projet de loi C-17. On a eu plusieurs témoignages. C'est un projet de loi qui a fait l'objet de plusieurs discussions en cette Chambre. Cependant, on ne peut pas dire que le gouvernement ait passé le bâillon à cet égard, bien qu'il n'écoute pas davantage.
Quant au bâillon, c'est une autre chose. En effet, quand le gouvernement ne veut pas nous écouter, qu'il trouve qu'on va trop loin et qu'on parle trop, il impose un bâillon. Jusqu'à maintenant, concernant le projet de loi C-17, cela n'a pas trop indisposé le gouvernement, car il n'a pas imposé de bâillon. Mais il n'a pas davantage écouté pour autant. C'est ce qui se passe.
Il faudrait que ce gouvernement laisse son arrogance et sa majorité de côté et écoute les gens de l'opposition. Dans une démocratie s'il n'y a pas de gens dans l'opposition, cela peut déraper. On n'est pas dans une dictature. Si on a un gouvernement qui est majoritaire et qui n'écoute jamais l'opposition, il y a un problème. C'est comme une dictature. C'est la dictature de la majorité, même s'ils sont 10 de plus contre la minorité.
Nous, on est laissés de côté, et le gouvernement fait ce qu'il veut avec les témoins lors des comités parlementaires, comme cela a été le cas dans le projet de loi C-17. En effet, il a écouté, il a entendu les témoins et, par la suite, il a décidé de passer outre et d'inclure exactement ce qu'il voulait dans le projet de loi. Ainsi, dans les comités parlementaires, mes collègues libéraux ont suivi. J'espère qu'il y en a qui, pour la cause de la démocratie et celle des droits et libertés, lorsque viendra le temps de voter en troisième lecture, vont se tenir debout. Je l'espère. On va les surveiller, bien qu'on ne se fasse pas d'illusions.
Toutefois, de notre côté, ce projet de loi est allé beaucoup trop loin. C'est pour cela que, comme lors de la deuxième lecture, lors du vote en troisième lecture, on devrait voter de la même façon, c'est-à-dire contre le projet de loi C-17.
[Traduction]
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, pendant son discours, le député a affirmé qu'il ne fallait pas donner d'autres instruments au gouvernement pour exercer un contrôle sur la population. Il est malheureux que nous en venions à nous arrêter davantage sur la question de contrôle tout en négligeant la nécessité réelle de veiller à la sécurité du Canada et de sa population.
Je voudrais poser une question similaire à la précédente au député. Je veux, à nouveau, lui demander s'il faut un équilibre entre la sécurité des Canadiens et leur droit collectif à la protection de la vie privée. Si la sécurité au pays n'est pas garantie, la souveraineté disparaît, et sans souveraineté, il ne nous reste rien. Il y a des pour dans les deux cas. Au fond, cela renvoie directement au fait que nous ne pouvons pas tout avoir. Toutefois, à un moment donné, la sécurité du pays doit être dans l'intérêt de tous, même s'il y a des besoins ou des intérêts contradictoires au sein de la population.
[Français]
M. Claude Bachand: Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'avoir posé sa question une deuxième fois. En effet, la première fois qu'il a posé sa question, j'ai pensé que s'il me la posait, j'aurais une réponse à lui donner.
Je dois lui donner raison en partie. C'est un équilibre que l'on cherche entre la sécurité et la protection des droits et des libertés des citoyens. Cela est une certitude. Toutefois, mon collègue conviendra avec moi que cela est arbitraire. Si on est Américain, que fait-on? On resserre encore plus les mesures, on investit dans l'armée et dans tout ce qui est relatif à la guerre. Ils l'ont d'ailleurs démontré avec leur intervention en Afghanistan et en Irak. C'est la façon de voir les choses des Américains.
Maintenant, nous sommes voisins des États-Unis qui sont dix fois plus nombreux que nous. Le député parlait de souveraineté. Il sait très bien que c'est une question qui nous tient particulièrement à coeur de ce côté-ci de la Chambre. Quand il parle de souveraineté, est-ce qu'il est bon de copier un système américain?
J'ai vu Tom Ridge et Ashcroft venir à la tribune de la Chambre et assister à la période des questions orales; j'ai vu le ministre des Finances, lors du précédent budget, investir 7 milliards et des poussières dans la sécurité en donnant plus d'argent à la GRC, au SCRS, à l'armée canadienne et à l'Agence des douanes et du revenu du Canada.
Où est la souveraineté canadienne dans tout cela? Est-ce que nous avons encore notre mot à dire? Les Américains ne viennent-ils pas dicter aux différents ministres et aux parlementaires ce qu'ils veulent que nous fassions?
Cela s'est reflété dans le budget et cela se reflète dans le projet de loi que nous étudions aujourd'hui. Les Américains ont probablement demandé au gouvernement canadien de restreindre des choses sur l'immigration, les douanes et les revenus, etc. On voit la trame se développer et on a vu cela en partant avec le budget de 2002, où on investissait 7 milliards de plus dans la sécurité.
Je pense qu'on est allé beaucoup trop loin du côté de la sécurité. Ce qui distinguait le Canada, c'était ses droits et libertés, c'était notre façon de vivre au Canada et au Québec. Avec cette loi, nous sommes en train de changer cela dangereusement. À mon avis, nous sommes en train de perdre—et c'est un souverainiste qui vous le dit—des parts de souveraineté canadienne et québécoise en adoptant des projets de loi comme celui-ci et on joue le jeu des Américains.
Il y a plusieurs personnes qui disent que dans 50 ans, le reste du Canada—peut-être pas le Québec—sera composé de neuf États américains supplémentaires et que cette transformation aura peut-être commencé sous l'égide du gouvernement libéral qui est devant nous aujourd'hui.
M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, je veux dire à mon collègue de Saint-Jean qu'il répond pour la deuxième fois à la question de notre collègue libéral. Ce dernier n'aura pas plus compris la deuxième fois, puisque mon collègue de Rivière-des-Mille-Îles avait donné sensiblement la même réponse. Ce qu'on veut, c'est une question d'équilibre. Le député de Saint-Jean vient de le lui expliquer de nouveau, mais je ne pense pas qu'on trouve le moyen de se faire comprendre, et c'est un peu malheureux.
Il y a un aspect de cette loi qui me fatigue. On a beaucoup parlé de zones de sécurité militaire. Comme mon collègue de Saint-Jean est un spécialiste dans ce domaine, j'aimerais qu'il revienne sur la question des zones de sécurité militaire.
Avant, j'aimerais lui raconter que dans les années 1970, un certain M. Samson, policier de la GRC, s'était fait prendre en train de poser des bombes au nom du FLQ. Malheureusement, la bombe lui a explosé dans la main alors qu'il l'installait tout près de la résidence de l'ex-premier ministre, M. Trudeau, pour donner l'impression que les Québécois étaient de gros méchants. C'est alors qu'on a découvert que c'était la GRC qui faisait le coup. Donc, pour ma part, faire confiance à la GRC, merci beaucoup.
J'aimerais que le député nous parle des zones de sécurité militaire, car je signalerai qu'on a toujours 300 000 obus au fond du lac Saint-Pierre, dont 10 000 ou 12 000 présentent encore un danger. Avant de parler de zones de sécurité militaire, il me semble qu'on devrait tout d'abord obliger l'armée à nous prouver qu'elle nous permet d'être en sécurité chez nous.
M. Claude Bachand: Monsieur le Président, ce qui nous incommodait avec la question des zones de sécurité militaire, c'est que le ministre pouvait étendre à sa guise une zone bien confinée, par exemple la réserve navale de Québec, à toute la superficie qu'il voulait, et ce, pendant la durée qu'il voulait. Et il n'était pas obligé non plus de demander la permission à qui que ce soit.
Je prends l'exemple de la réserve navale parce que c'est une question très politique. Imaginez qu'on décide que tout le vieux Québec, y compris l'Assemblée nationale, fasse partie de la réserve navale. De quoi cela aurait-il l'air si des officiers et des soldats de l'armée canadienne étaient devant l'Assemblée nationale afin d'en contrôler l'entrée? Cela aurait pu aller jusque-là. Cela aurait pu se produire aussi dans le comté de Saint-Jean; on aurait pu englober une partie de la ville de Saint-Jean, y compris l'hôtel de ville, dans la base militaire de Saint-Jean. Des soldats auraient contrôlé l'entrée des conseillers municipaux et des citoyens qui auraient voulu se rendre à l'hôtel de ville.
Cela allait beaucoup trop loin. Mon collègue donne effectivement des exemples où l'armée a été fautive. On le sait, dans le dossier du lac Saint-Pierre, l'armée a été fautive; il est vrai que 300 000 obus ont été tirés dans l'eau, dans le fleuve, et il y en a probablement 12 000 qui sont encore actifs. Au lieu de dire qu'on donne un coup de main aux citoyens pour dépolluer le lac, les ministères de l'Environnement et de la Défense nationale se lancent actuellement la balle.
Donc, pour nous, la question des zones de sécurité militaire était très importante. Encore une fois, il fallait se méfier. Il y a eu des abus dans le passé; on essaie de les corriger. Avec un tel projet de loi, il ne faut pas donner des conditions qui permettront que ces abus reprennent aujourd'hui. Je ne suis pas intéressé à laisser à la génération future des terrains contaminés ou 300 000 obus dans le fond d'un fleuve. Ces abus se sont déjà produits.
C'est pour cette raison que nous sommes vigilants aujourd'hui. C'est aussi pour cette raison que nous, du Bloc québécois, sommes de grands défenseurs des droits et libertés des gens. C'est très important pour nous parce que nous en avons été victimes. On a brisé nos droits et libertés à plusieurs reprises, alors nous sommes capables de dénoter aujourd'hui s'il se trouve des choses dangereuses dans des projets de loi.
Je pense que nous faisons notre travail afin de vraiment prendre nos responsabilités parlementaires. On l'a fait en deuxième lecture. On l'a fait lors des séances des comités permanents pendant plusieurs mois, au comité permanent législatif que vous présidiez, monsieur le Président, et nous continuerons de le faire parce que nous avons été trop longtemps brimés dans nos droits, par des actions du gouvernement fédéral et nous pensons que ce projet de loi présente aussi un danger.
[Traduction]
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi C-17, la Loi sur la sécurité publique, remonte à très longtemps. Comme notre collègue de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam l'a dit dans son discours, c'est probablement la troisième tentative faite pour l'adopter. C'est malheureux, car des éléments importants du projet de loi C-17 sont essentiels à la sécurité des Canadiens.
Je dois préciser que malgré son exaspération à l'égard de certaines dispositions du projet de loi, le député de Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam a également confirmé que l'Alliance canadienne appuie le projet de loi, et j'espère que la plupart des députés en feront autant.
Hier soir, j'ai regardé la mini-série sur Pierre Elliott Trudeau. Un des derniers événements qui se sont produits dans la première partie était le recours à la Loi sur les mesures de guerre qui a entraîné fondamentalement la mise de côté totale des libertés civiles des Canadiens et l'arrestation sommaire de centaines de personnes. C'est une période sombre de notre histoire et je suppose que certains vont rétrospectivement se demander si les mesures prises à l'époque par le gouvernement fédéral étaient appropriées dans les circonstances.
Le Canada n'est pas habitué à des activités terroristes, mais les députés savent également que le gouvernement fédéral ne peut faire intervenir l'armée ou prendre certaines mesures sans une demande à cet effet de la part d'une province. Cela fait partie du partage des compétences entre les deux ordres de gouvernement.
Je suis quelque peu sensible aux arguments invoqués par les bloquistes au sujet du respect de la vie privée et peut-être, de façon plus large, des libertés civiles, des droits civils des Canadiens. Un député a dit plus tôt qu'une des préoccupations, pour résumer, résidait dans le fait que fondamentalement, il s'agissait d'un autre instrument qu'on donnait au gouvernement pour maîtriser les gens. C'est très inquiétant, car je suppose qu'il y en a d'autres qui partagent ce point de vue, surtout du fait qu'ils entendent parler de cas où on semble violer les droits à la vie privée des Canadiens.
Un des premiers exemples de cela à la suite des événements du 11 septembre 2001 a été la décision des États-Unis d'exiger une liste des passagers pour tous les avions en partance du Canada à destination des États-Unis. Je sais qu'à l'époque, cette décision a soulevé de graves préoccupations, mais les États-Unis, un pays souverain, ont le droit d'exiger certaines choses pour protéger leur souveraineté et leur sécurité. Ainsi, si nous voulions maintenir les vols entre le Canada et les États-Unis, nous devions nous plier aux exigences américaines et c'est ce qui s'est produit.
Quel genre d'information? C'est une sorte de point de départ qui permet de savoir notamment qui voyage, à quelle fréquence, vers quelles destinations; c'est ainsi qu'on peut établir les tendances. Si on applique cette logique jusqu'au bout, il est plutôt clair qu'il s'agit de profilage. Si on commence à envisager le profilage des activités physiques, il ne faut pas grand temps pour que suive le profilage en fonction des caractéristiques personnelles liées entre autres à la race, à la couleur et à l'origine ethnique.
C'est ici que la question devient plus délicate. La plupart des pays se sont heurtés à cette difficulté lorsqu'ils ont abordé le concept du profilage. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai invoqué, dans les questions précédentes aujourd'hui, la nécessité d'un équilibre entre le respect de la vie privée et la protection des libertés fondamentales des Canadiens et entre la sécurité et la sûreté des Canadiens et celles de notre pays.
Comme je l'ai dit précédemment, à défaut de sûreté, il n'y a pas de sécurité, et à défaut de sécurité, il n'y a pas de souveraineté. Ce sont les principes fondamentaux que le Canada doit défendre pour assurer sa protection.
Je crois que nous approchons de la période des questions. J'aimerais terminer mon intervention la prochaine fois que le projet de loi sera à l'ordre du jour, simplement parce que j'estime nécessaire d'inscrire certains arguments importants dans leur contexte. Néanmoins, j'expose certaines des raisons pour lesquelles j'appuie le projet de loi C-17.
Le vice-président: Le député de Mississauga-Sud disposera d'environ 15 minutes lorsque la Chambre sera de nouveau saisie de cette question.
La Chambre passe maintenant aux déclarations de députés.
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[Article 31 du Règlement]
* * *
[Traduction]
La Société d'aide à l'enfance
M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à parler aujourd'hui d'une question de la plus haute importance, soit la protection des enfants.
Le mois d'octobre est l'occasion d'accorder au sort des enfants négligés et exploités toute l'attention qu'il mérite. Afin de sensibiliser davantage la population aux efforts soutenus qui sont faits afin de mettre un terme à l'exploitation et à la négligence dont sont victimes les enfants, la Société d'aide à l'enfance de Haldimand—Norfolk m'a demandé de porter ce ruban pourpre.
La Société d'aide à l'enfance constitue un filin de secours et un refuge pour les enfants et les familles de l'Ontario qui ont grandement besoin d'aide. Je suis fier du leadership dont fait preuve depuis longtemps cet organisme dans la protection des enfants.
Au cours de la dernière année seulement, dans la circonscription de Haldimand—Norfolk—Brant, la Société d'aide à l'enfance a aidé plus de 1 900 familles et pris 138 enfants sous son aile.
Depuis plus de 100 ans, la Société d'aide à l'enfance de Haldimand—Norfolk rend des services vitaux à la population. C'est en arborant avec joie ce ruban que je félicite cet organisme pour son travail fantastique.
* * *
L'Université de la Saskatchewan
Mme Lynne Yelich (Blackstrap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureuse de porter à votre attention l'ouverture prochaine du nouveau centre d'études sur les vaccins et les maladies infectieuses de l'Université de la Saskatchewan, à Saskatoon.
Avec ses nouveaux locaux, ses nouveaux équipements et son personnel, ce centre pourra saisir les occasions créées par la génomique et les autres progrès scientifiques accomplis dans la recherche sur la santé humaine et animale. Il jouera notamment un rôle au sein du projet Génome Canada, en plus de collaborer avec des instituts de recherche et des sociétés partout dans le monde.
L'expansion prise par le centre augmentera considérablement la capacité du Canada et du monde à s'intéresser non seulement aux aliments, mais aussi aux maladies qui s'attaquent à l'homme et aux animaux. Pour ses travaux en matière de sécurité alimentaire, le centre s'appuiera sur l'infrastructure de recherche déjà impressionnante de l'Université de la Saskatchewan, de même que sur la réputation d'établissement d'enseignement de renommée mondiale dont jouit cette dernière.
* * *
[Français]
Les producteurs de bovins
M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, acculés au mur, les producteurs de bovins d'Abitibi-Témiscamingue demandent à Québec et à Ottawa d'agir rapidement, avant qu'ils perdent leurs fermes qui sont durement touchées par la crise de la vache folle. Actuellement, ils ont une perte de 8 millions de dollars.
Depuis le 1er septembre 2003, ils ne reçoivent aucune aide. Le 26 septembre dernier, j'ai rencontré plusieurs agriculteurs et leurs présidents, messieurs Alain Richard et Rosaire Mongrain. C'est une crise canadienne et nous devons maintenir l'aide financière sans date déterminée, comme en Angleterre.
Sur 793 entreprises agricoles situées dans la grande région de l'Abitibi-Témiscamingue, 597 sont affectées directement par la crise.
En date du 23 septembre 2003, le gouvernement a reçu de la part du président, M. Alain Richard, une liste de revendications des producteurs et productrices pour un nouveau programme d'aide financière couvrant tous les secteurs de la production bovine.
Aujourd'hui, je remets un don non remboursable de 200 $ au ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire du Canada pour contribuer à l'aide financière pour les effets de la crise de la vache folle en Abitibi-Témiscamingue. Voici mon chèque de 200 $.
* * *
[Traduction]
Les Jeux olympiques spéciaux de 2003
M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je tiens aujourd'hui à féliciter les athlètes qui ont représenté le Canada aux Jeux olympiques spéciaux d'été tenus en juin dernier à Dublin, en Irlande.
Les Jeux olympiques spéciaux d'été et d'hiver ont lieu aux deux ans en alternance.
À Dublin, l'équipe canadienne comptait parmi les 160 délégations internationales, qui regroupaient plus de 6 500 athlètes de partout dans le monde.
Formée de 59 athlètes, la délégation canadienne a offert une performance brillante qui a mis en évidence le programme canadien des Jeux olympiques spéciaux. En effet, l'équipe canadienne a remporté 102 médailles, dont 51 d'or. De nombreux athlètes ont totalement dominé leur discipline, dont Johanna Hambli de la Colombie-Britannique qui, à elle seule, a gagné cinq médailles d'or en gymnastique rythmique.
Tous les athlètes canadiens ayant participé aux Jeux olympiques spéciaux ont représenté leur pays avec fierté, tout en perpétuant l'esprit sportif propre au Canada.
Au nom de tous les députés, je félicite ces athlètes, où qu'ils soient, et je tiens à préciser qu'ils suscitent une grande admiration, à la fois comme athlètes et comme personnes. Parce qu'ils ont réussi à surmonter les épreuves sur le chemin de l'excellence, ils sont devenus des modèles pour tous les Canadiens.
* * *
[Français]
La violence à la télévision
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): Monsieur le Président, à titre de députée de Laval-Est, il me fait plaisir de souligner la présence à Ottawa aujourd'hui de plusieurs représentants du monde de l'éducation et de la santé du Québec, dont le Collège des médecins, l'Ordre des psychologues et la Fédération des commissions scolaires.
Ces derniers sont venus dénoncer la violence à la télévision qui s'est accrue, selon leurs estimations, de 432 p. 100 sur les réseaux de télévision privés québécois.
Ils ont déposé une pétition de près de 58 000 signatures de parents et des résolutions provenant de 288 commissions scolaires, conseils municipaux, comités de parents, conseils d'établissement scolaire et groupes sociaux.
Selon les organismes préoccupés par la santé mentale, les risques que la violence fait courir à un nombre grandissant d'enfants ont des répercussions sur le sentiment de sécurité de l'ensemble de la société.
Nos enfants sont notre bien le plus précieux. Pensons-y.
* * *
[Traduction]
Les catastrophes naturelles
Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, hier soir, l'ouragan Juan a frappé la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard, semant la destruction sur son passage.
Au nom de mes électeurs et de l'opposition officielle, j'aimerais offrir mes sincères condoléances aux personnes qui ont perdu un ami ou un membre de leur famille la nuit dernière.
J'ai déjà étudié au Collège de la Protection civile du Canada à Arnprior, en Ontario, et je suis en mesure d'attester de la valeur de son enseignement en situations de catastrophes naturelles. Les dirigeants des collectivités des Maritimes qui ont reçu la formation en mesures d'urgence du collège d'Arnprior seront de précieux atouts pour leurs concitoyens dans les heures qui viennent.
Le gouvernement doit veiller à ce que les collectivités de l'ensemble du Canada bénéficient de la formation, des installations et de l'équipement nécessaires pour faire face aux imprévus. Le gouvernement s'obstine à vouloir déménager les installations d'Arnprior.
D'après mon expérience, les habitants des Maritimes s'unissent toujours lorsque le besoin s'en fait sentir. Leurs efforts conjugués aideront ces collectivités à retrouver une vie normale le plus tôt possible.
* * *
Le Pakistan
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, le président du Pakistan a effectué récemment une visite d'État officielle au Canada. Tous les pays du monde qui souhaitent la paix et la sécurité pour leurs citoyens apprécient la coopération du Pakistan dans la lutte contre le terrorisme.
Les chrétiens du Pakistan, pour leur part, ne bénéficient cependant pas de cette paix et de cette sécurité. Les assassinats répétés, les attentats à la bombe et les cas de viol rendent la vie difficile à cette minorité particulière et à d'autres minorités. L'absence de volonté ou l'inaptitude du gouvernement pakistanais à assurer la protection de ses citoyens est honteuse.
Tous les gouvernements ont l'obligation de protéger leurs minorités des persécutions et, plus particulièrement, de veiller au respect de leurs droits de croyance et de pratique religieuse.
Le président Moucharraf plaide en faveur de la tolérance religieuse et de la compréhension pour la majorité islamique du Pakistan à l'étranger, mais n'accorde aucune protection à la minorité chrétienne ni aux autres minorités de son pays.
Le fait d'imposer la charia aux minorités comme à la majorité et de faire un usage abusif des lois relatives au blasphème met l'existence des minorités religieuses du Pakistan en péril.
J'espère que, au cours de cette visite, notre premier ministre et le ministre ont critiqué le bilan navrant du président Moucharraf sur le plan religieux.
* * *
[Français]
La ville de Drummondville
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, je suis heureuse de souligner le travail des intervenants économiques de la grande région drummondvilloise. En moins de 10 ans, Drummondville est devenue un véritable modèle de développement économique au Québec, sans compter les nombreux prix d'excellence qui lui ont été décernés dans tous les secteurs.
En 15 ans, le nombre d'entreprises manufacturières est passé de 288 à 547. Parmi les nouvelles venues, on en dénombre une quarantaine en provenance de l'étranger.
Au cours des 10 dernières années, la progression de la population a été de l'ordre de 34 p. 100 et cinq fois plus rapide que la moyenne québécoise. Sa prospérité est telle qu'on y a assisté à une baisse de taxes et de son niveau d'endettement. La clé de ce succès est le travail concerté.
La réussite de la grande région drummondvilloise repose sur l'équilibre entre le développement économique et culturel, le milieu des affaires et la classe politique. Grâce à l'effort de tous et de toutes, Drummondville est devenue la ville qu'on envie, et j'en suis fière.
* * *
[Traduction]
Le festival Centro Calabria
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le Canada est un pays qui jouit d'une diversité ethnique, linguistique et culturelle, et je suis fier d'être partie de cette riche mosaïque.
J'ai eu le plaisir de participer à une activité organisée par la Fédération ontarienne des Calabrais, qui représente plus de 200 000 Ontariens d'ascendance calabraise.
Le festival Centro Calabria, qui a eu lieu à Toronto, le 21 septembre, mettait à l'honneur la gastronomie, la musique et la culture calabraises.
La fédération espère fonder Centro Calabria, un centre social et culturel calabrais, qui suscitera un plus grand sentiment d'appartenance chez les membres de la communauté et qui contribuera à renforcer les liens sociaux, économiques et culturels entre l'Ontario et la Calabre, en Italie.
J'invite les députés à se joindre à moi pour féliciter Tony Silipo, président de la Fédération des Calabrais, pour ce merveilleux festival et pour lui souhaiter bonne chance à lui, ainsi qu'aux membres du conseil d'administration et de direction.
* * *
La guerre de Corée
M. Peter Goldring (Edmonton-Centre-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la guerre de Corée, cette guerre oubliée, n'est toujours pas résolue. Elle ne fut jamais déclarée, mais elle a bel et bien eu lieu.
Trente mille Canadiens ont participé à la guerre de Corée dans des conditions très pénibles. Ils ont donné à une petite nation assiégée la possibilité de se libérer. Cette libération coûta la vie à 516 jeunes Canadiens qui ne rentrèrent jamais chez eux.
Un monument commémoratif, financé par des fonds privés, a été érigé à Ottawa pour rappeler à tous la guere oubliée. Ce monument est une réplique du monument érigé dans le cimetière des Nations Unies en Corée.
Sur les belles collines verdoyantes de la Corée, on attend encore désespérément le jour où viendra enfin la paix.
Patrick O'Connor, du Royal Canadian Regiment, a été tué le jour après avoir écrit ceci:
Les collines de la Corée sont tachées de sang
C'est le sang de nos braves et loyaux soldats
Puissent-ils récolter toujours la gloire qu'ils méritent
Puisse leur âme reposer en paix.
Nous n'oublierons pas.
* * *
Le Monument aux Canadiens tombés au champ d'honneur
Mme Judi Longfield (Whitby—Ajax, Lib.): Monsieur le Président, hier, lors d 'une cérémonie émouvante et empreinte de dignité, on a dévoilé à Ottawa une réplique du Monument aux Canadiens tombés au champ d'honneur, dont l'original se trouve à Busan, en Corée, dans le Cimetière commémorant les morts des Nations Unies. Ce monument rend hommage aux quelque 30 000 Canadiens qui se sont battus en Corée pour défendre la justice, la démocratie et la paix.
Ce monument livre un message de paix. Le soldat volontaire canadien qu'on y voit ne tient aucune arme. D'un côté, il porte une fillette coréenne et, de l'autre, il tient par la main un garçon coréen. À la base de ce monument de bronze figurent les noms des 516 Canadiens qui ont donné leur vie pendant la guerre de Corée.
Ce monument rend hommage à ceux qui se sont battus et qui ont donné leur vie pour que d'autres soient libres.
Au nom de la Chambre et de tous les Canadiens, j'ai l'honneur de remercier tous les soldats canadiens et leur famille de l'incommensurable sacrifice qu'ils ont consenti.
* * *
Le festival Collectivités en fleurs
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC): Monsieur le Président, c'est avec une immense fierté que je prends la parole à la Chambre aujourd'hui afin de partager avec mes collègues l'expérience que j'ai eu le bonheur de vivre pendant le festival Collectivités en fleurs qui s'est déroulé à Stratford, dans ma circonscription ontarienne, celle de Perth—Middlesex.
Ce merveilleux festival vise à embellir le plus possible nos villes et villages. Il jouit d'une réputation à l'échelle mondiale. Cette année, des participants sont venus d'Europe, des États-Unis et de partout au Canada. Cet événement a été une occasion exceptionnelle de faire des gains sur les plans culturel et environnemental.
Le principal site aménagé avait pour toile de fond le lieu historique où se tient le Festival de théâtre shakespearien de Stratford et il a été très fréquenté. Encore une fois, Stratford a pu briller sur la scène internationale. Il convient de féliciter les lauréats dans les diverses catégories et de remercier les nombreux bénévoles. Quant aux participants, ils ont toutes les raisons d'être fiers.
Je sais que, personnellement, je suis fier du travail que la ville de Stratford a fait en organisant cet événement.
* * *
[Français]
Jean-Pierre Ronfard
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, un grand homme de théâtre Québécois a quitté la scène brutalement vendredi dernier à l'âge de 74 ans.
Jean-Pierre Ronfard, comédien, dramaturge et metteur en scène a apporté une contribution magistrale au théâtre québécois en innovant, en cherchant de nouvelles façons de jouer et en formant des centaines de comédiennes et de comédiens dont il était le mentor.
Son implication, suite à l'invitation de Jean Gascon de diriger la section française de l'École nationale de théâtre dès 1960, durera quatre ans. Suite aux événements de Mai 1968 en France, Ronfard remettra en cause la façon de faire du théâtre. C'est au Québec qu'il affirmera son besoin, comme il le disait, d'épurer et d'aller à l'essentiel.
Le Bloc québécois rend hommage à ce grand créateur qui a osé et offre ses plus sincères condoléances à ses filles Alice et Bénédicte, à son fils Benoît et à toute la communauté artistique québécoise touchée par ce départ.
* * *
[Traduction]
Hamilton Mountain
Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, l'université McMaster de Hamilton a récemment procédé à un sondage sur la santé des habitants de la ville. L'étude visait à démontrer que les diverses caractéristiques d'un quartier ont un effet sur la santé de ses habitants.
L'étude a conclu que les habitants de Hamilton Mountain sont plus satisfaits que les habitants de certains autres quartiers de Hamilton. Elle a aussi démontré que ceux qui habitent de bons quartiers avec de bons voisins, des habitations de bonne qualité et des programmes sociaux efficaces sont en meilleure santé. Les habitants de Hamilton Mountain ont indiqué des taux plus élevés de satisfaction à l'égard de leurs voisins, de leur niveau de vie et de leur emploi.
Je suis toujours très heureuse de représenter les gens de Hamilton Mountain. Aujourd'hui, je le suis davantage puisque je représente des gens heureux et en bonne santé.
* * *
La guerre de Corée
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, après avoir beaucoup trop tardé, on a enfin reconnu hier les sacrifices qu'ont faits les anciens combattants canadiens et coréens qui ont défendu notre démocratie et notre liberté au cours de la guerre de Corée.
Mon collègue de Windsor--St. Clair et moi nous sommes joints aux Canadiens et aux Coréens pour rendre hommage à nos héros à l'occasion du dévoilement d'un monument aux Canadiens tombés au champ d'honneur. Bien qu'on ne l'ait pas mentionné au cours de la cérémonie, les lieutenants-colonels retraités Chip Bowness, Vince Courtney, Henry Martinak et James Bradley ont lancé cette noble initiative.
Les dons ont été versés par les anciens combattants coréens, les filiales de la Légion royale canadienne, les Veterans of Foreign Wars of the U.S., la ville de Windsor et les syndicats de Windsor. En fait, aucun dignitaire ayant pris la parole n'a signalé que le monument a d'abord été exposé à Windsor, à côté de notre précieux Monument national aux morts de la guerre avant qu'Ottawa reconnaisse enfin ce sacrifice national.
Nous tenons à remercier le personnel des parcs et loisirs ainsi que Don Sadler et Sandy Lindsay, qui ont assisté à la cérémonie en compagnie de dix-sept anciens combattants coréens de la région de Windsor. Environ 30 000 Canadiens se sont battus sur les champs de bataille de la Corée, dont 516 qui y ont perdu la vie.
Au nom du caucus néo-démocrate, nous désirons remercier ces Canadiens et leurs familles pour les sacrifices qu'ils ont consentis pour défendre notre liberté et notre démocratie. Nous en sommes fiers.
* * *
[Français]
Les Jeux olympiques spéciaux de 2003
Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je rends hommage aujourd'hui à la délégation qui a représenté le Canada aux Jeux olympiques spéciaux mondiaux d'été de 2003, qui ont eu lieu en juin dernier à Dublin, en Irlande.
Avec une récolte de 102 médailles, l'équipe canadienne en a mis plein la vue à l'auditoire international, en surclassant parfois ses adversaires dans certaines disciplines, comme la gymnastique rythmique.
Cette excellente prestation est directement attribuable au travail acharné de Jeux olympiques spéciaux du Canada et à ses efforts en vue d'implanter un programme solide et novateur pour l'équipe nationale, lequel fait maintenant l'envie du monde entier.
La principale raison d'être de Jeux olympiques spéciaux Canada est d'enrichir par le sport la vie des Canadiens atteints de déficience intellectuelle. Il s'agit d'un organisme à but non lucratif, très présent au niveau communautaire, qui offre des possibilités d'entraînement et de compétition à 28 000 athlètes de tous les âges et de tous les niveaux d'habileté.
L'organisation compte aussi sur une armée de bénévoles qui donnent de leur temps comme entraîneurs, officiels et administrateurs.
Jeux olympiques spéciaux du Canada peut être fier de ses réalisations et de celles de ses athlètes. Sa contribution remarquable à la qualité de vie de nombreux Canadiens...
Le Président: L'honorable député de Edmonton-Sud-Ouest a la parole.
* * *
[Traduction]
Marc Ouellet
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui afin de féliciter l'archevêque Marc Ouellet d'avoir été sacré cardinal par le pape Jean-Paul II.
L'archevêque Ouellet est le troisième enfant d'une famille de huit venant d'Abitibi, au Québec. Au cours de sa vie religieuse au Canada, il a occupé le poste de recteur au Grand Séminaire, à Montréal, et au séminaire St. Joseph, à Edmonton.
[Français]
Son expérience internationale inclut ses études en Europe, enseigner en Colombie et travailler au Vatican. De 2001 à 2002, l'archevêque Ouellet a servi au Conseil Pontifical du Vatican pour promouvoir l'unité chrétienne.
[Traduction]
Le 21 octobre, l'archevêque Ouellet sera sacré prince de l'Église devant tout le Collège des Cardinaux qui se réunira pour fêter le 25e anniversaire du règne du Saint-Père.
Au nom de l'opposition officielle, je voudrais féliciter l'archevêque Ouellet et lui dire que nous prierons pour son succès dans ses nouvelles fonctions au service de Dieu.
QUESTIONS ORALES
[Questions orales]
* * *
[Traduction]
L'aide gouvernementale
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, vous savez, tout comme le gouvernement, que l'ouragan Juan s'est abattu sur la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard durant le week-end, causant, paraît-il, des dommages importants.
Il y a eu de graves inondations, des arbres ont été déracinés, il y a eu des pannes d'électricité, et deux malheureux habitants du Canada atlantique ont perdu la vie. Nous souhaitons tous exprimer nos condoléances aux familles des victimes.
Le gouvernement peut-il informer la Chambre du genre d'aide qu'il fournit?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a été saisi de ce problème majeur, principalement en ce qui concerne Halifax.
Nos fonctionnaires sont entrés en contact avec les autorités municipales, provinciales et militaires dimanche. J'ai moi-même parlé récemment à mes homologues des services d'urgence en Nouvelle-Écosse et à l'Île-du-Prince-Édouard.
Je suis heureux d'annoncer que, à partir de 16 heures aujourd'hui, il y aura au moins 200 soldats dans les rues pour aider à ramasser les débris. Il y aura aussi une cantine mobile pour donner à manger aux évacués au Halifax Sportsplex plus tard dans la journée.
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le gouvernement pour ces renseignements.
Je veux maintenant poser une question qui porte plus directement sur l'aide en cas de catastrophe, compte tenu de l'inconstance dont le gouvernement a fait preuve à cet égard.
Il a été lent à agir dans le cas du SRAS et est encore lent à agir pour ce qui est des incendies en Colombie-Britannique et de l'ESB. Terre-Neuve a dû attendre deux ans avant de recevoir de l'aide après les événements du 11 septembre.
Voici ma question: le gouvernement a-t-il évalué les dommages financiers? Est-il prêt à offrir de l'aide en cas de catastrophe?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il y a à peine une demi-heure, j'ai discuté de ce sujet même avec M. Ernest Page de la Nouvelle-Écosse et M. Elmer MacFayden de l'Île-du-Prince-Édouard.
Je leur ai dit que cet ouragan était certainement une catastrophe naturelle et que l'admissibilité de ces deux provinces à des fonds dans le cadre des Accords d'aide financière en cas de catastrophe ne faisait aucun doute.
Par contre, nous étions tous d'accord pour dire que ce n'était pas le moment de parler d'argent, mais bien de nettoyer les dégâts et de fournir de l'aide physique là où c'est nécessaire.
M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cela m'inquiète un peu lorsque j'entends dire que ce n'est pas le moment de parler d'aide financière. C'est peut-être vrai aujourd'hui, mais nous avons vu, dans bien d'autres crises, que ce moment semble être repoussé constamment, et c'est un problème.
Nous avons un nouveau chef libéral qui entrera en fonction. Encore une fois, le gouvernement a-t-il évalué les dommages et peut-il garantir à la Chambre que la lenteur de cette transition à un nouveau chef ne retardera pas le versement de fonds à ces deux provinces dans le cadre du programme d'aide en cas de catastrophe?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, sauf le respect que je dois au chef de l'opposition, je ne crois pas qu'il convienne de poser ce genre de question à ce moment-ci.
Nous sommes saisis du problème. Des arbres sont tombés, l'électricité n'a pas encore été pleinement rétablie, et les gens qui ont été évacués de leur domicile ont besoin d'aide.
Mes homologues provinciaux sont entièrement d'accord avec moi pour dire que ce n'est pas le moment de parler d'argent aujourd'hui. L'argent viendra. La priorité immédiate est de réparer les dommages réels sur le terrain.
* * *
La santé
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre des Finances a avoué la semaine dernière que le gouvernement reniait sa promesse de verser aux provinces 2 milliards de dollars pour les soins de santé. Il prétend ne pas avoir cet argent.
Le ministre des Finances expliquerait-il comment il se fait que son gouvernement se lance dans de folles dépenses de 5,5 milliards dans toute l'administration, mais est incapable de dégager 2 milliards pour honorer la promesse faite aux provinces?
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je présume que les sentiments amicaux de la semaine dernière se sont usés. Je lui ai même dit la semaine dernière que j'avais de l'amitié pour lui. Cela s'est perdu quelque part sur le chemin du Parlement.
Aucune des affirmations du député ne sont véridiques. Tout d'abord, nous ne renions aucune promesse. Nous respectons notre promesse à la lettre.
Deuxièmement, les prévisions budgétaires n'ont pas révélé un excédent de 5 milliards. En réalité, nous sommes en deçà des dépenses prévues pour cette année.
M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le problème ne concerne pas que le ministre et moi. Ce sont les priorités qui sont en cause.
Le gouvernement a annoncé de nouvelles dépenses de 5,5 milliards de dollars: 1,1 milliard pour de nouvelles subventions de ministères comme Patrimoine canadien et Développement des ressources humaines Canada, 10 millions de plus pour un registre des armes à feu qui est un échec, et 28 millions pour Communications Canada, à qui nous devons le scandale des commandites.
Pourquoi le gouvernement accorde-t-il plus d'importance au financement de ces gâchis qu'à celui des soins de santé des Canadiens?
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si le député est plongé dans une telle confusion, peut-être pourrions-nous l'aider à quitter la Chambre. Quoi qu'il en soit, je peux lui dire que, avec le budget principal et le seul budget supplémentaire déposé jusqu'à maintenant, nos dépenses sont d'environ 5 milliards de dollars inférieures à ce que nous avons estimé dans le budget de février.
Bien sûr, l'exercice n'est pas terminé, et il y aura d'autres budgets supplémentaires, mais nous arrivons assez bien à suivre notre plan budgétaire et à atteindre nos objectifs.
Les 34,8 milliards que nous avons promis en financement supplémentaire pour la santé seront versés.
* * *
[Français]
Les marchés publics
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux songe à sanctionner les fonctionnaires ou les gestionnaires des programmes de commandites qui ont violé la loi, mais que l'on ne peut atteindre présentement parce qu'ils sont à la retraite. Malheureusement, le ministre ne trouve pas pertinent de se donner les outils pour que les anciens ministres—comme Alfonso Gagliano, par exemple—, qui ont pris des décisions dans le scandale des commandites, rendent eux aussi des comptes.
Puisque le premier ministre dit que les individus qui ont fauté doivent répondre de leurs actes, qu'attend-il pour déclencher une enquête publique pour qu'Alfonso Gagliano rende lui aussi des comptes, au lieu de jouer à l'ambassadeur au Danemark?
[Traduction]
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, nous poursuivons notre étude étape par étape de plusieurs secteurs et nous attendons les résultats.
[Français]
M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est sécurisant cela!
En refusant de tenir une enquête publique indépendante, le gouvernement envoie un message inacceptable à la population dont l'argent a servi à financer le scandale des commandites et à graisser la patte des petits amis.
Est-ce que le premier ministre réalise qu'il envoie un double message aux gens, à savoir que pour les fonctionnaires, ce sera des sanctions, et pour les ministres, des nominations.?
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà expliqué à la Chambre qu'il y a un processus. Des enquêtes sont faites par la GRC, et cela continue. Toutes les personnes qui seront trouvées responsables d'activités illégales seront traitées selon la loi.
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, la semaine dernière, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux affirmait que la GRC et la vérificatrice générale étaient suffisantes pour faire la lumière dans le scandale des commandites. Ces propos sont également ceux qu'a tenus le prochain premier ministre.
Comment le gouvernement peut-il accorder de la crédibilité à une enquête de la GRC quand on sait que dans le scandale du ministère du Développement des ressources humaines, les enquêtes de la GRC ont été le moyen par excellence pour qu'on n'entende plus jamais parler de rien et qu'on ne sache jamais qui était responsable de quoi?
[Traduction]
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, comme le ministre l'a souligné, je crois que nous faisons une étude très approfondie, nous penchant sur chacun des aspects de la question. La vérificatrice générale en fait autant. La GRC mène elle aussi une enquête. Lorsque toutes ces enquêtes seront terminées, des mesures seront prises au besoin.
[Français]
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux affirme que nous ne sommes pas encore rendus à l'étape de l'enquête publique dans le dossier des commandites. Si le gouvernement ne met pas maintenant sur pied une enquête publique, aussi bien admettre qu'on n'entendra plus jamais parler de ce scandale, parce que même le futur chef libéral n'est pas du tout intéressé à ce qu'on sache quoi que ce soit dans ce dossier. Il l'a déjà dit.
[Traduction]
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, c'est prématuré à ce moment-ci.
* * *
Les ressources naturelles
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le ministre responsable des ressources naturelles a déclaré publiquement qu'il était en faveur de la création d'une commission de développement extracôtier pour le Canada atlantique.
Comment le ministre peut-il concilier cette approche avec l'existence de l'accord de l'Atlantique qui prévoit un conseil de gestion mixte Terre-Neuve-Canada, et qui donne aux habitants de Terre-Neuve-et-Labrador un accès privilégié aux emplois dans le secteur des biens et services.
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Ressources naturelles n'est pas ici aujourd'hui, mais je sais qu'il est au courant de ces préoccupations, qu'il fera tout ce qui est nécessaire pour veiller à ce que toute question à cet égard soit portée à son attention et qu'il continuera de s'occuper de ce dossier comme il l'a fait avec beaucoup de compétence par le passé.
* * *
Les affaires intergouvernementales
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le 11 septembre 2001, quelque 80 avions avec environ 12 000 personnes à leur bord ont atterri à Terre-Neuve. Comme à leur habitude, les habitants de cette province ont ouvert leur coeur, leur foyer et leur portefeuille pour venir en aide à ces gens, moyennant l'assurance qu'ils seraient remboursés par le gouvernement du Canada.
Cela fait maintenant plus de deux ans et ils n'ont toujours pas été indemnisés. Selon les rumeurs les plus récentes, le gouvernement étudierait la possibilité de ne leur rembourser que la moitié de leurs dépenses.
Quelle est la vérité? Quand les remboursera-t-on?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je sais que les Canadiens, et encore davantage les Américains qui étaient à bord de ces avions, sont extrêmement reconnaissants aux Terre-Neuviens et aux Labradoriens de leur hospitalité.
En fait, de nombreux Américains retournent encore à Terre-Neuve-et-Labrador à diverses occasions pour remercier personnellement les habitants de cette province, deux ans après l'événement.
Je sais également que mon collègue, le ministre des Affaires intergouvernementales, a été saisi de la question particulière qu'a soulevée le député.
* * *
La fiscalité
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, il existe de nouvelles allégations selon lesquelles, pendant que le député de LaSalle—Émard occupait le poste de ministre des Finances, son entreprise a réalisé à la Barbade des opérations qui ne se conformaient pas aux exigences du gouvernement en matière d'abris fiscaux.
Je suis persuadée que, en sa qualité de ministre du Revenu, la ministre estime que la fraude fiscale doit être condamnée. Et je suis persuadée que, en sa qualité de libérale, elle souhaite préserver son nouveau chef de toute possibilité de scandale lié à ses anciennes activités de chef d'entreprise.
Ma question est la suivante. Avant qu'il ne devienne chef du Parti libéral, la ministre procédera-t-elle à une enquête complète sur les pratiques de fraude fiscale de la Société maritime CSL Inc.? Le fera-t-elle?
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, non seulement cette question est irrecevable, mais il est clair qu'aucun ministre ne discutera du traitement fiscal d'un particulier ou d'une entreprise à la Chambre des communes.
* * *
L'industrie pharmaceutique
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, avec toutes les histoires qu'on entend, j'imagine que le ministre ne se gardera pas la part du lion.
Passons au bilan du gouvernement qui a favorisé l'augmentation du prix des médicaments.
Le prix des médicaments doit être plus abordable tant pour les Canadiens que pour les Africains qui doivent lutter contre le sida. La semaine dernière, certains ministres ont dit qu'ils souhaitaient obtenir des médicaments à faible coût pour l'Afrique, mais, nous le savons, les grandes entreprises pharmaceutiques ont réagi fortement.
Les Canadiens veulent donc savoir quelle est la position réelle du gouvernement. Appuie-t-il Stephen Lewis ou les grandes entreprises pharmaceutiques?
Ma question s'adresse au premier ministre. Le Canada tiendra-t-il tête aux grandes entreprises pharmaceutiques et permettra-t-il à l'Afrique de lutter contre le sida grâce à des médicaments moins chers? Le gouvernement est-il prêt à s'attaquer aux grandes entreprises pharmaceutiques pour venir en aide aux Africains?
L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de dire à la Chambre combien j'étais fier, comme tous les Canadiens, lorsque nous avons conclu l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce et lorsque tous les membres de l'Organisation mondiale du commerce ont accepté d'offrir un accès privilégié aux Africains afin qu'ils puissent lutter contre ces pandémies que sont le sida, la malaria et la tuberculose.
Bien sûr, nous souhaitons que les entreprises canadiennes contribuent à alléger les souffrances et les difficultés de l'Afrique, tout en respectant évidemment la propriété intellectuelle, tel que nous le demande l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce.
* * *
La justice
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, on se souviendra que le ministre libéral de la Justice, celui-là même qui a affirmé que le registre des armes à feu, qui a englouti jusqu'à maintenant un milliard de dollars, ne devait coûter que 2 millions de dollars, avait promis en 1997 de s'en prendre aux contrevenants dangereux en leur imposant des peines plus sévères.
Il ne faut pas se surprendre du fait que la Cour suprême du Canada a fait savoir, vendredi dernier, que les criminels dangereux parvenaient plus facilement à éviter la prison grâce aux changements apportés à la loi.
Quand le ministre libéral de la Justice proposera-t-il un projet de loi visant à protéger la population en gardant les délinquants dangereux derrière les barreaux?
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le Code criminel est une véritable mosaïque de recours à notre disposition pour punir les contrevenants. Parmi ces recours, la catégorie des délinquants dangereux est très utile.
La Cour suprême a établi que le traitement que nous réservons aux délinquants dangereux est légitime et adéquat et nous poursuivrons dans cette voie.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce n'est pas une mosaïque, mais plutôt un kaléidoscope que le ministre utilise à l'envers.
Le gouvernement appuie la détention à domicile dans le cas des trafiquants de drogues, des violeurs et des agresseurs d'enfants. Les criminels dangereux doivent être incarcérés si l'on veut protéger la population contre ces prédateurs.
Pourquoi le gouvernement continue-t-il d'investir des centaines de millions de dollars dans un registre des armes à feu voué à l'échec au lieu d'adopter des lois et de fournir aux policiers les ressources nécessaires afin que les criminels dangereux purgent leur peine en prison?
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je crois que la Cour suprême a été très claire en établissant que l'utilisation de la catégorie des délinquants dangereux était légitime et adéquate.
Elle a indiqué aux tribunaux la façon d'interpréter ces dispositions et de les appliquer à l'intérieur du système judiciaire. Nous croyons en cette façon de faire et nous jugeons qu'il est très important et crucial d'utiliser la catégorie des délinquants dangereux pour protéger nos citoyens.
* * *
[Français]
CINAR
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, un autre cas ténébreux qui implique ce gouvernement, c'est le dossier CINAR. Nos informations nous indiquent que le gouvernement aurait un rapport accablant en main, mais qu'il refuserait d'y donner suite.
Le gouvernement peut-il nous dire si oui ou non il a reçu un rapport sur l'affaire CINAR de la part de la GRC?
L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas au courant à savoir si un rapport du genre, tel que décrit par l'honorable député, a en fait été remis au gouvernement, encore moins s'il s'agit d'un document qui est public.
Mais je m'engagerai à déterminer si tel est le cas et à faire rapport à l'honorable député le plus tôt possible.
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, selon ces mêmes informations, le rapport de la GRC conclurait qu'il y aurait eu lieu de poursuivre CINAR et ses ex-dirigeants.
Le gouvernement peut-il nous dire pourquoi il n'y a pas eu de poursuite dans ce dossier? Qui bloque quoi?
L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, puisque je ne connais pas le rapport et que je ne sais pas s'il est public, je peux encore moins commenter sur le contenu du présumé rapport, ne connaissant même pas son existence.
Mais bien sûr, je tenterai de m'informer, comme je viens de le dire à l'honorable député, pour lui fournir une réponse dans les plus brefs délais.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le Canada a accueilli au cours de la fin de semaine dernière le président de l'Afghanistan, Hamid Karzaï. Celui-ci est venu nous demander de nous engager à augmenter le nombre de militaires chargés de venir en aide à son pays déchiré par la guerre. Toutefois, quelques jours à peine avant l'arrivée de M. Karzaï, le chef d'état-major de la Défense a déclaré que la présence canadienne en Afghanistan mobilisait déjà nos forces armées au point où nous ne pourrions probablement pas déployer de nouveaux soldats à l'étranger pendant une période qui pourrait atteindre les 18 mois suivant la fin de la présente mission.
Pourquoi le premier ministre a-t-il fait perdre du temps au président de l'Afghanistan alors qu'il savait pertinemment que nous n'avions tout simplement plus de soldats disponibles en raison des réductions imposées par l'ancien ministre des Finances?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, un contingent de 2 000 militaires constitue une contribution très substantielle représentant 40 p. 100 des effectifs de l'ISAF. M. Karzaï est venu nous rencontrer et j'ai assisté à la réunion. Il était reconnaissant au Canada de fournir 2 000 militaires.
Non seulement notre pays fournit-il ce contingent, mais pour la première fois depuis de nombreuses années le Canada confie la direction de la mission à un général trois étoiles. Nous versons une aide de 250 millions de dollars à ce pays. Nous mettons l'accent sur l'Afghanistan. Nous y apportons une contribution importante sur plusieurs fronts, et le président Karzaï l'a reconnu.
M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Je suis d'accord, monsieur le Président, mais ma question portait sur ce qui va se passer dans un an.
Si le Canada entend prolonger au delà d'un an notre engagement de fournir des soldats pour le maintien de la paix en Afghanistan, une décision doit être prise dès maintenant pour que l'on puisse entreprendre la planification et les préparatifs. Il n'est tout simplement pas pratique que le titulaire actuel du poste de premier ministre déclare que le Canada n'envisagera pas l'envoi d'autres soldats tant que le déploiement actuel de 12 mois n'aura pas pris fin.
Le ministre de la Défense a-t-il discuté de la demande afghane avec le vrai dirigeant libéral et, le cas échéant, quelle a été la réaction de ce dernier?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait savoir que le principal centre d'intérêt du gouvernement à ce stade-ci est la très importante mission en Afghanistan. Une période de seulement un mois ou deux s'est écoulée depuis le début de cette mission de 12 mois. C'est ma plus haute priorité. Soucieux d'assurer le succès de cette mission, nous ne ménageons absolument pas l'argent ni les efforts. Nous avons insisté pour qu'un Canadien dirige cette mission à compter de février, et ils ont accepté comme on vient de nous l'apprendre.
Nous réfléchissons à ce qui pourrait survenir dans l'avenir, mais notre principal centre d'intérêt est la mission à laquelle nous participons à l'heure actuelle.
* * *
[Français]
L'environnement
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, le gouvernement prétend que dans le dossier de Belledune, nous lui demandons d'intervenir dans les compétences des provinces, or, il n'en est rien.
Le gouvernement admettra-t-il qu'en vertu de l'article 35 de la Loi sur les pêches, il lui est tout à fait possible d'intervenir et de suspendre pour un temps un projet, comme celui de Belledune, qui pourrait avoir des incidences négatives sur les stocks de poisson dans ce secteur? Admettra-t-il que c'est tout à fait possible pour lui d'agir en vertu de ses compétences?
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, c'est surprenant qu'on nous demande d'intervenir dans les compétences provinciales. La province a complètement le droit et la capacité de juger si les émissions rencontrent les normes fédérales, et elle l'a fait. Il n'y aura pas d'eau qui entrera dans les cours d'eau à partir de l'usine; c'est un circuit fermé. On continuera de voir à cette entreprise et de jouer notre rôle en vertu de nos responsabilités et des lois canadiennes.
M. Jean-Yves Roy (Matapédia—Matane, BQ): Monsieur le Président, selon le gouvernement, il n'y aurait aucun problème d'émission de polluants dans l'atmosphère par l'incinérateur de Belledune. Or, les seules études à ce sujet ont été payées par la compagnie Bennett elle-même.
Si le ministre des Pêches et des Océans peut avoir une analyse complète sur les impacts de ce projet, pourquoi n'utilise-t-il pas l'article 35 de la Loi sur les pêches, qui lui donne l'autorité complète pour agir dans le dossier?
L'hon. Robert Thibault (ministre des Pêches et des Océans, Lib.): Monsieur le Président, on a confiance en la capacité de la province du Nouveau-Brunswick pour faire adopter ses propres lois et sa propre réglementation. Sur la question des pêches, nous avons procédé à une vérification lorsqu'on parlait de l'écoulement des eaux dans les cours d'eau. Ils ont changé leurs demandes et leur programme. C'est un circuit fermé. Donc, cela ne nécessite pas d'examens de la part du ministère des Pêches et des Océans.
* * *
[Traduction]
La défense nationale
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les avions de patrouille Aurora rêvetent une importance cruciale pour le maintien de la souveraineté du Canada. Ces dix dernières années, la marine a connu une réduction de 54 p. 100 du nombre d'heures de vol des Aurora. Pour pallier cette réduction, le gouvernement envisage d'engager des sociétés privées qui patrouilleront les côtes est et ouest.
Pourquoi les 18 avions Aurora qui restent sont-ils en si mauvais état que le gouvernement confie leur mission au secteur privé et sacrifie la souveraineté du Canada?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, cette question est un peu bizarre. Voilà incontestablement le député le plus à droite d'un parti politique de droite qui nous dit que privatiser une partie de ce travail, c'est sacrifier notre souveraineté.
Le gouvernement adopte une approche pratique. Notre littoral est le plus long au monde. Il est probable que la meilleure solution consistera à allier des ressources militaires traditionnelles, la haute technologie, comme des radars et des satellites, la collaboration avec le secteur des pêches et le recours, dans une certaine mesure, au secteur privé.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en 1991, l'aviation possédait 725 appareils. Aujourd'hui, elle en a 350.
Nous devons défendre notre pays contre des drogues mortelles comme l'héroïne, contre le trafic illégal d'immigrants et contre les terroristes. Pourtant, le gouvernement refile la responsabilité et confie la sécurité nationale au secteur privé. Les passeurs pourront-ils soumissionner?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le Parti libéral aborde de façon pratique des problèmes concrets. L'opposition semble embourbée dans une idéologie. Le seul problème du député, c'est qu'il est embourbé dans la mauvaise idéologie, car voilà un parti de droite qui est embourbé dans une idéologie de gauche selon laquelle tout recours au secteur privé constitue un rejet de notre souveraineté. Si vous pouvez comprendre cela, monsieur le Président, vous êtes plus brillant que moi.
* * *
L'aide gouvernementale
M. Roy Cullen (Etobicoke-Nord, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense nationale. Il y a déjà répondu de manière très exhaustive, mais je suis certain qu'il aimerait ajouter quelque chose.
Les provinces de l'Atlantique ont été très durement frappées par l'ouragan Juan. Que fait le gouvernement pour les aider à composer avec les répercussions de cet ouragan?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de sa question très brillante. J'ai répondu à cette question, mais de nouvelles informations ont été portées à ma connaissance depuis que la première question a été posée.
J'ai dit tout à l'heure qu'au moins 200 soldats des Forces canadiennes seraient déployés à Halifax pour aider à nettoyer les débris. On m'a depuis informé que 600 soldats des Forces canadiennes seront à l'oeuvre dans les rues de Halifax.
* * *
La défense nationale
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale déclarait récemment:
Compte tenu de l'imminence d'un changement au gouvernement et de l'incertitude qui marquera les prochains mois, je ne crois pas que ce soit le moment de déployer de grands efforts pour obtenir une augmentation du financement de base à long terme. |
Le personnel de notre marine est épuisé, les sous-marins ne peuvent pas flotter, les avions Hercules ne peuvent pas voler, les Aurora sont incapables de patrouiller, les camions de l'armée sont en panne et les Sea King sont presque aussi âgés que le ministre. Ce dernier est-il en train de dire à la Chambre que le premier ministre actuel est responsable de ces problèmes qui frappent les forces armées et que le nouveau chef trouvera l'argent nécessaire pour y remédier?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de prendre, dans cette longue liste, le cas des avions Hercules. Je suis évidemment saisi de l'affaire, car les Hercules, qui sont les avions les plus fiables des forces armées, sont indispensables pour les missions intérieures et outre-mer. J'ai dit aux militaires de faire tout ce qu'il fallait, d'avoir recours aux ressources intérieures et extérieures, d'acheter et de louer pour accroître la disponibilité des Hercules, qui sont indispensables.
Nous avons tenu plusieurs rencontres, dont une aujourd'hui, et je suis heureux d'annoncer que les décisions prises au cours de cette rencontre permettront d'accroître de 50 p. 100 par année le nombre prévu d'appareils en état de fonctionner...
Le Président: Le député de Perth—Middlesex.
M. Gary Schellenberger (Perth--Middlesex, PC): Monsieur le Président, nous savons que le ministre de la Défense nationale attend l'arrivée du nouveau chef, afin de disposer des fonds nécessaires à l'achat de pièces de rechange et pour permettre à la force aérienne de patrouiller nos côtes et de protéger notre souveraineté. Le ministre des Travaux publics réfléchit maintenant à ce que disait le député de LaSalle—Émard, à savoir que les nouveaux hélicoptères devront absolument offrir le meilleur rapport qualité-prix et une capacité optimale.
Le ministre peut-il dire à la Chambre combien ce renversement de politique coûtera au gouvernement et de combien la date de livraison des appareils sera repoussée?
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je me permets de dire à l'auteur de la question que ce n'est pas toujours une bonne idée de poser une question à cinq volets, car cela me permet de choisir celui qui me convient.
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je suis certain que le ministre de la Défense nationale est ravi des observations et suggestions qui lui sont faites pour l'aider à répondre à la question, mais nous devons être en mesure d'entendre sa réponse, quelle qu'elle soit. Le ministre a la parole. J'invite les députés à écouter, au lieu de faire des suggestions.
L'hon. John McCallum: Monsieur le Président, après avoir entendu la myriade de questions posées par le député, je lui répondrai que l'augmentation de 800 millions de dollars du budget de base contribue grandement à assurer la viabilité des forces armées. De fait, les crédits qui manquaient sont en voie d'assurer cette viabilité.
À titre d'exemple, le député parlait des pièces de rechange. Le budget de cette année seulement prévoit une augmentation de 221 millions de dollars pour l'achat de pièces de rechange. Cette mesure a un excellent effet sur nos militaires.
* * *
L'aide gouvernementale
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, l'ouragan Juan a durement frappé les citoyens et les localités de l'Île-du-Prince-Édouard ainsi que la municipalité régionale de Halifax. Il n'y a plus ni électricité, ni communications, ni transport. Deux personnes ont été tuées, des milliers de gens ont été évacués et beaucoup sont encore vulnérables.
Je demande au ministre de la Défense, qui est responsable des mesures d'urgence, d'assurer aux Haligoniens et aux habitants de l'Île-du-Prince-Édouard que le fédéral déploiera, dans la mesure du possible, du matériel, notamment des générateurs, des réservistes et du personnel de la marine pour aider à la reconstruction et assurer la sécurité de nos concitoyens.
L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je sais que la députée est très préoccupée, car elle vient de cette région. Je sais également que certains de mes collègues, dont le ministre des Pêches et des Océans et le député de Halifax-Ouest, se sont entretenus avec le maire de Halifax. Nous travaillons tous ensemble dans ce dossier, sans aucune partisanerie.
J'ai donné mon numéro de téléphone cellulaire à mes homologues de la Nouvelle-Écosse et de l'Île-du-Prince-Édouard. Je leur ai dit de m'appeler n'importe quand s'ils avaient besoin d'autre chose. Ils m'ont répondu que, pour le moment, nous avions répondu à tous leurs besoins. Je leur ai dit que nous avions des générateurs et qu'ils n'avaient qu'à m'appeler s'ils en avaient besoin. Nous travaillons en collaboration et dans un excellent esprit de partenariat.
* * *
La Loi électorale du Canada.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, le nouveau chef libéral pense que la démocratie devrait être réservée aux seuls députés libéraux. Le leader parlementaire du gouvernement pense que sa propre aversion personnelle pour la représentation proportionnelle est une raison suffisante pour ne pas donner aux électeurs l'occasion de nous dire ce qu'ils pensent réellement.
Demain, pour la première fois en 80 ans, le Parlement se prononcera sur la question de la représentation proportionnelle. Ma question pour le vice-premier ministre est simple. Peut-il dire aux électeurs pourquoi ils ne méritent pas qu'on leur demande s'ils veulent ou non modifier notre système électoral et nous faire entrer dans la modernité?
L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, les expériences en matière de fonctionnement de la démocratie sont toujours intéressantes et font toujours l'objet de débats vigoureux.
L'un des avantages d'une fédération est que, très souvent, on peut essayer les nouvelles idées au niveau provincial. Je me demande si le député a jamais pensé à proposer au gouvernement néo-démocrate de la Saskatchewan de faire un essai de représentation proportionnelle dans cette province pour que nous puissions voir comment ça marche avant d'en faire l'essai au niveau fédéral.
* * *
Le gouvernement libéral
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, aujourd'hui, dans son rapport sur l'affaire Radwanski, la Commission de la fonction publique affirme que le népotisme et le copinage sont très répandus au sein du fonctionnariat. La semaine dernière, les fonctionnaires Boyer et Théberge faisaient la manchette pour avoir monté, sans supervision, des comptes de dépenses faramineux. Au cours de l'été, Allan McGuire et Paul Cochrane se sont retrouvés sur la sellette parce que personne ne s'occupait de la boutique.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que le gouvernement est corrompu. Qui, en face, va assumer la responsabilité de cette culture de corruption libérale?
[Français]
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, comme à son habitude, le député de St. Albert exagère grandement, surtout dans l'utilisation des mots. Je pense que cela mine toute crédibilité, y compris celle des parlementaires.
La Commission de la fonction publique relève directement du Parlement et se rapporte au Parlement, de même que le commissaire à la protection de la vie privée, qui est un haut fonctionnaire du Parlement. Dès lors, je pense que mes collègues du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires vont faire le suivi approprié de ces rapports qui sont actuellement déposés.
[Traduction]
M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cet été, la Commission de la fonction publique a déclaré que 20 p. 100 des emplois d'été au gouvernement sont arrangés à l'avance. Les fonctionnaires s'empiffrent aux frais des contribuables. De hauts fonctionnaires corrompus se remplissent les poches à même les les deniers publics. À Travaux publics, les marchés sont truqués. Maintenant, nous découvrons du népotisme, du copinage et du favoritisme de la part du commissaire à la protection de la vie privée. On ne peut oublier que des enquêtes policières sont en cours un peu partout. L'odeur de la corruption s'accentue de jour en jour.
Avec l'arrivée d'un nouveau chef à la tête du parti, peut-on s'attendre au tableau habituel ou à davantage de corruption?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, sauf tout le respect que j'ai pour mes collègues qui siègent au Comité des opérations gouvernementales, sans égard à leur allégeance politique, je dois dire que leur approche diffère totalement de celle du député de St. Albert. Mes collègues fondent leurs jugements sur des faits, non sur des rumeurs ou des qu'en-dira-t-on. J'invite le député de St. Albert à suivre l'exemple de ses collègues qui sont membres du Comité des opérations gouvernementales, et à ne pas utiliser ces termes qui nuisent à la crédibilité de tous les Canadiens, y compris le Parlement.
* * *
[Français]
Le Grand Prix du Canada
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, à la suite de la suggestion mise de l'avant par le Bloc québécois pour sauver le Grand Prix de Montréal, le ministre de la Justice a rejeté l'idée de compenser les écuries à même les fonds publics. Il semble pourtant que l'industrie se dirige vers cette solution.
Devant cette nouvelle dynamique, est-ce que le gouvernement ne juge pas qu'il devra envoyer un signal clair à l'industrie selon lequel lui aussi est prêt à faire sa part?
L'hon. Claude Drouin (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada, avec le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal, n'ont pas ménagé leurs efforts pour trouver une solution pour garder le Grand Prix du Canada à Montréal.
Toutefois, il n'est pas question, présentement, que le gouvernement investisse de l'argent dans cela. Mais si le secteur privé veut le faire, il est invité à le faire. Nous serons très heureux de l'aider en ce sens.
M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, je rappelle au secrétaire d'État que seulement en revenus de TPS, le gouvernement fédéral va perdre beaucoup d'argent. Je lui rappelle aussi que la seule idée qui est retenue par tout le monde en ce moment, c'est l'idée d'un fonds transitoire temporaire limité à deux ans.
Est-ce que le gouvernement ne juge pas qu'il est impératif d'envoyer un message clair à savoir que si l'industrie fait sa part, il est prêt, de son côté, à faire la sienne afin de sauver le Grand Prix de Montréal et les 80 millions de dollars de retombées économiques qui vont avec?
L'hon. Claude Drouin (secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai mentionné, il n'est pas question pour nous d'abandonner le Grand Prix de Formule 1. Toutefois, nous avons des règles et des lois que nous devons appliquer, ce que nous continuerons de faire, comme le ministre de la Justice, qui était responsable du dossier, l'a fait depuis le début au nom du gouvernement.
Cependant, comme je l'ai mentionné, nous sommes très intéressés. Si le secteur privé veut investir, nous sommes ouverts et nous espérons que nous trouverons une solution avec le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal pour conserver le Grand Prix du Canada à Montréal.
* * *
[Traduction]
La citoyenneté et l'immigration
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous avons découvert aujourd'hui une autre escroquerie que pratiquent les libéraux à l'égard des immigrants. Premièrement, ils n'ont rien fait pour mettre fin à la fraude des fausses écoles permettant la délivrance de faux visas. Et maintenant, nous découvrons que, même si les frais de traitement des visas sont censés être fondés sur le recouvrement des coûts, le gouvernement ne s'est pas donné la peine de déterminer quels étaient les coûts exacts.
Grâce à l'accès à l'information, le gouvernement a dû admettre qu'il ne connaissait pas les détails des coûts de délivrance des visas. Il semble que les libéraux utilisent simplement les visas comme source de revenus, aux dépens des immigrants que le Canada souhaite accueillir et dont il a besoin. Comment les libéraux peuvent-ils justifier une telle pratique aussi injuste?
[Français]
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, je trouve un peu regrettable qu'on vienne parler un peu contre ce programme extraordinaire, non seulement pour ces étudiants qui viennent partager l'expérience canadienne, mais qui est en même temps un investissement pour une relation entre deux pays, éventuellement.
Alors, le gouvernement canadien veut investir davantage; nous devons trouver le programme qui fonctionne en ce sens. Mais nous voulons plus d'étudiants internationaux, et nous allons agir en conséquence.
[Traduction]
Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je ne crois pas que le ministre ait même entendu la question. Il n'y a certainement pas répondu.
Le gouvernement est censé répondre rapidement aux demandes faites en vertu de l'accès à l'information pour montrer aux Canadiens qu'il est vraiment ouvert et transparent. Pourtant, il a fallu près de deux ans pour que le ministre avoue piteusement que «le coût total d'exploitation des sections de délivrance des visas de tous les coins de la planète était pour le moment inconnu».
Si les libéraux ne savent pas combien coûte leur système lent et inefficace de traitement des visas, comment déterminent-ils la somme qu'ils exigent des requérants et des immigrants?
[Français]
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je trouve qu'il est un peu triste que l'opposition veuille continuellement frapper notre première ligne dont le rôle est de s'assurer, effectivement, que l'on puisse profiter pleinement de ce genre de programme.
Alors, le gouvernement canadien fait un travail; les gens des bureaux de visas font aussi un travail exemplaire en ce sens. C'est sûr, parfois il peut y avoir des questions de délai. Toutefois, je pense que dans l'ensemble nous sommes un modèle pour le reste du monde.
* * *
[Traduction]
Postes Canada
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Monsieur le Président, j'ai appris avec plaisir, en juillet, que Postes Canada et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes avaient conclu des conventions collectives préliminaires. Le secrétaire d'État chargé de Postes Canada pourrait-il dire à la Chambre où en sont ces conventions?
L'hon. Steve Mahoney (secrétaire d'État (Sociétés d'État déterminées), Lib.): Monsieur le Président, tous les députés et l'ensemble des Canadiens se rappelleront les menaces intermittentes de grève aux postes l'été dernier. J'ai le plaisir d'informer la Chambre que Postes Canada et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes viennent d'annoncer la ratification de deux conventions collectives. Il s'agit d'un contrat de quatre ans visant les postiers des villes et d'un contrat distinct de huit ans qui s'applique aux facteurs des zones rurales et des banlieues, qui deviendront des employés de Postes Canada.
Je suis persuadé que tous les députés se joindront à moi pour féliciter les dirigeants du syndicat et de la société de cette entente historique. Les Canadiens peuvent maintenant compter sur quatre autres années de service postal ininterrompu, entre autres choses.
* * *
La citoyenneté et l'immigration
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de l'Immigration doit dire pourquoi des Chinois ont été trahis par ses collaborateurs et ont été victimes d'actes de torture ou pire par la police chinoise.
Ces habitants de la Chine ont témoigné lors de l'audience d'immigration de Lai à Vancouver, par l'entremise d'un avocat canadien. Les collaborateurs du ministre ont promis de garder l'audience confidentielle pour les protéger. Chose incroyable, le ministre a trahi l'identité de ces témoins confiants.
Pourquoi la parole du ministre ne vaut-elle rien?
[Français]
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, au lieu de faire des attaques personnelles, je pense que je ne ferai aucun commentaire. Très certainement, lorsqu'il y a des choses devant la cour, ou lorsqu'il y a un processus déjà en place, ce n'est pas le rôle du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration de venir dire publiquement ce qui se passe pendant ce processus.
[Traduction]
M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre a mis des vies en danger et il prétexte maintenant une décision pendante du tribunal, mais la question de la trahison de Tao Mi et d'autres par le gouvernement canadien n'a rien à voir avec les questions dont le tribunal est saisi.
Je demande simplement pourquoi le ministre a trahi Tao Mi et d'autres témoins, ce qui va entièrement à l'encontre des engagements pris par son ministère. Que fera maintenant le ministre pour protéger Tao Mi et les autres témoins chinois?
L'hon. Denis Coderre (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, ma réponse est très claire. Lorsqu'une décision est pendante devant un tribunal, nous, de ce côté-ci de la Chambre, croyons à l'état du droit. Je ne vais pas faire d'autres observations et répondre à des attaques personnelles de ce genre.
* * *
[Français]
Le harcèlement psychologique
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, malgré la politique et les règlements en vigueur dans la fonction publique, le harcèlement psychologique demeure une réalité. Des études révèlent qu'il y a encore 21 p. 100 des effectifs de la fonction publique qui sont victimes de harcèlement. Dans les faits, le taux réel dépasserait même 30 p. 100.
Quelles mesures concrètes la présidente du Conseil du Trésor compte-t-elle prendre afin de mettre fin au harcèlement psychologique qui touche 21 p. 100 de la fonction publique?
L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, dans la fonction publique du Canada, nous avons une politique de prévention, une politique contre le harcèlement. À la suite d'un sondage fait auprès des employés de la fonction publique, nous avons dû réviser cette politique.
À l'heure actuelle, avec les agents négociateurs et les représentants syndicaux, nous entreprenons une période de formation et de sensibilisation, à l'échelle de toute la fonction publique, afin d'atteindre l'objectif de ne plus avoir de harcèlement dans la fonction publique du Canada.
* * *
[Traduction]
Le multiculturalisme
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la secrétaire d'État au Multiculturalisme et à la Situation de la femme. Statistique Canada a rendu publics aujourd'hui les résultats du premier sondage jamais effectué au Canada sur la diversité ethnique. La secrétaire d'État pourrait-elle instruire la Chambre sur la façon dont la politique publique profitera de ce sondage?
L'hon. Jean Augustine (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de l'intérêt qu'il porte à cette question, de même que tous ceux et celles qui ont remarqué ce jalon historique qu'a constitué aujourd'hui la présentation de cette étude sur l'appartenance ethnique au Canada. Cette étude nous procure des données inédites sur les Canadiens, plus particulièrement sur les communautés ethnoculturelles. Elle nous renseigne sur leur patrimoine culturel, leurs antécédents familiaux, leurs connaissances, leur usage de la langue et leurs activités économiques.
Ce sondage nous aidera à comprendre les rapports qui existent entre le passé des gens et leur participation à la société canadienne, et les effets de leur origine ethnique et de leur diversité...
Le Président: Le député de Windsor—St. Clair a la parole.
* * *
L'énergie
M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, pas plus tard que demain, le Cabinet pourrait être appelé à se prononcer sur l'engagement d'une somme de 2,3 milliards de dollars dans le projet de fusion nucléaire de l'AIEA, lequel ne produira aucune énergie nouvelle avant au moins 30 ans. En fait, l'AIEA consommera elle-même énormément d'énergie au cours des prochaines décennies.
Le ministre des Finances pourrait-il nous dire pourquoi, au lieu d'investir des milliards de dollars dans un projet ne présentant aucun avantage tangible pour les Canadiens, n'élimine-t-il pas tout simplement ces subventions à l'AIEA et ne réaffecte-t-il pas les fonds publics qui lui étaient destinés à des programmes rentables d'exploitation de sources d'énergie renouvelable, propre et sécuritaire?
L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Ressources naturelles étudie attentivement cette proposition et il a longuement consulté les collectivités touchées sur la question. Le projet nous offre évidemment l'occasion de procéder à d'importantes recherches scientifiques à long terme, mais on doit y réfléchir très sérieusement, car il représente un très gros investissement financier. Le gouvernement continuera d'étudier la question et ne rendra sa décision que lorsqu'il connaîtra tous les faits.
* * *
L'agriculture
M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la crise dans le secteur de l'élevage bovin au Canada s'aggrave chaque jour un peu plus, entraînant avec elle de plus en plus de familles canadiennes.
La frontière américaine est toujours fermée à tout le commerce bovin et n'est ouverte qu'à une petite partie de l'industrie canadienne du boeuf. Un des problèmes empêchant la réouverture de la frontière américaine à nos bovins réside dans le refus du gouvernement canadien d'ouvrir notre frontière aux bovins américains.
L'industrie réclame des mesures concrètes, la Canadian Cattlemen's Association en fait autant et le ministre a même promis certaines mesures.
Le ministre pourrait-il nous préciser quelles mesures il a prises pour éliminer cet obstacle à l'ouverture du marché bovin?
L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, l'Agence canadienne d'inspection et des aliments continue, de concert avec le ministère de la Santé et l'industrie, d'examiner la situation dont le député parle. Ils procèdent à une évaluation des risques pour la santé parce qu'ils craignent que des maladies n'entrent au Canada en provenance des États-Unis. Nous avons mené des projets pilotes à cet égard. Nous allons continuer de surveiller la situation et d'évaluer les risques.
Je voudrais également rappeler au député qu'il devrait remercier le gouvernement d'avoir réussi à obtenir dans une telle mesure la réouverture de la frontière. Ainsi, 27 millions de livres de viande et de boeuf canadiens ont déjà été exportées aux États-Unis au mois de septembre.
* * *
[Français]
L'assurance-emploi
Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Monsieur le Président, les mesures transitoires qui avaient été accordées par le gouvernement fédéral lors de l'implantation des nouvelles règles pour l'assurance-emploi prennent fin le 11 octobre pour les régions de la Gaspésie, de la Côte-Nord et du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Sans ces mesures transitoires, ce sont des centaines de travailleuses et de travailleurs saisonniers qui se verront dans l'impossibilité d'obtenir des prestations.
J'aimerais demander à la ministre du Développement des ressources humaines d'admettre qu'il faut diminuer l'effet négatif des coupures que ce gouvernement a faites dans l'assurance-emploi. Il est essentiel de prolonger les mesures transitoires afin de tenir compte du contexte socioéconomique de ces régions, où les travailleuses et travailleurs saisonniers...
Le Président: L'honorable ministre du Travail a la parole.
L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, venant du Nouveau-Brunswick, je suis au courant de la décision qu'il faut prendre à DRHC. J'aimerais dire aujourd'hui à la Chambre et aux Canadiens, et surtout aux gens du Québec et du Nouveau-Brunswick, que nous sommes en train d'en discuter et qu'il y aura une décision sous peu.
* * *
[Traduction]
Présence à la tribune
Le Président: Je voudrais signaler aux députés la présence à notre tribune de l'honorable Tyronne Fernando, ministre des Affaires étrangères de la République socialiste démocratique de Sri Lanka.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je voudrais également signaler aux députés la présence à notre tribune de l'honorable David Lokyan, ministre de l'Agriculture de la République d'Arménie.
Des voix: Bravo!
Le Président: Je voudrais aussi signaler aux députés la présence à la tribune des dames de plusieurs olympiens spéciaux, entraîneurs et gérants qui ont participé aux Jeux olympiques spéciaux internationaux d'été qui ont eu lieu à Dublin, en Irlande. Au nom des députés, je voudrais souligner leurs efforts et les féliciter.
Nous sommes tous très fiers de tout ce que vous avez accompli.
Des voix: Bravo!
Le Président: La présidence a reçu préavis d'une question de privilège. Le député de Fraser Valley va la présenter à la Chambre.
* * *
Question de privilège
Le rapport de la Commission de la fonction publique
[Privilège]
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'invoque la question de privilège au sujet du rapport de la Commission de la fonction publique concernant le comportement de l'ancien commissaire à la protection de la vie privée, qui a été rendu public aujourd'hui à 13 heures.
Une séance d'information a huis clos était prévue pour les députés à midi; or, à 11 heures, une séance d'information a eu lieu à l'intention des journalistes.
J'ai deux choses à dire. Premièrement, le rapport aurait dû être déposé à la Chambre avant d'être communiqué au public. Deuxièmement, les députés auraient dû être informés avant les médias.
Le paragraphe 47(2) de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique, qui porte sur l'obligation de faire rapport au Parlement, dit ceci:
Le ministre fait déposer le rapport devant le Parlement dans les 15 jours suivant sa réception ou, si le Parlement ne siège pas, dans les 15 premiers jours de séance ultérieurs de l'une ou l'autre chambre. |
Bien que cette disposition concerne le rapport annuel, j'avance que tous les rapports devraient d'abord être déposés à la Chambre des communes avant d'être communiqués aux médias et au public, particulièrement lorsqu'ils concernent un agent du Parlement ou un ancien agent du Parlement.
Procéder autrement est une insulte et un affront à la Chambre. C'est le Parlement qui avait nommé le commissaire à la protection de la vie privée et tout rapport concernant ses activités alors qu'il servait le Parlement devrait être déposé au Parlement avant d'être communiqué au public.
Le 15 mars 2001, la présidence s'était prononcée sur le recours à la question de privilège au sujet du fait que les médias avaient été mis au courant d'un projet de loi avant les députés.
Dans votre décision, vous aviez dit ceci, monsieur le Président:
Pour préparer ses mesures législatives, le gouvernement peut souhaiter tenir de larges consultations, et il est tout à fait libre de le faire. Mais lorsqu'il s'agit de documents à présenter au Parlement, la Chambre doit avoir préséance[...] La convention de la confidentialité des projets de loi inscrits au Feuilleton est nécessaire non seulement pour que les députés eux-mêmes soient bien informés, mais aussi en raison du rôle capital que la Chambre joue, et doit jouer dans les affaires du pays... Ne pas fournir aux députés des informations sur une affaire dont la Chambre doit être saisie, tout en les fournissant à des journalistes qui les interrogeront vraisemblablement sur cette question, est une situation que la présidence ne saurait tolérer. |
En l'occurrence, il y a également des documents qui doivent être présentés au Parlement. Ils renferment des renseignements sur un ancien agent du Parlement qui pourraient très bien avoir une incidence sur notre rôle dans la nomination du prochain commissaire à la protection de la vie privée. La teneur du rapport aurait du être communiquée au Parlement et les députés auraient dû en être informés avant les médias.
Le fait de ne pas être en possession de cette information aujourd'hui signifie que, lorsque nous sortirons de cette enceinte, alors que les médias ont été informés et que nous n'avons pas encore vu le rapport, nous essaierons de répondre à des questions sur un sujet qui a été porté à la connaissance des médias, mais pas de la nôtre.
Monsieur le Président, si vous concluez que la question de privilège est fondée de prime abord, je suis prêt à proposer la motion appropriée.
Le Président: La présidence remercie le député de Fraser Valley de son aide. Je me pose une première question, car je remarque que le député n'a pas cité un article de loi qui exigerait le dépôt de ce rapport au Parlement. Je tiendrai compte de ce point dans mon examen de la question. Si le député pouvait se renseigner là-dessus, je serais heureux qu'il m'en parle ici même ou bien qu'il me communique directement le nom de la loi sur laquelle il s'appuie et le numéro de l'article.
Je vais certainement tenir compte de cet élément, car les documents sont normalement déposés en vertu d'une loi ou d'un ordre de la Chambre. Je ne pense pas que le député laisse entendre qu'il y a eu un ordre de la Chambre à ce propos, mais nous allons essayer de voir si un article d'une loi fédérale exige le dépôt du rapport. La présidence sera reconnaissante au député s'il peut l'éclairer à ce sujet. Je vais certainement étudier la chose. Je remercie le député et je vais prendre la question en délibéré.
AFFAIRES COURANTES
[Affaires courantes]
* * *
[Traduction]
Réponse du gouvernement à des pétitions
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à six pétitions.
* * *
Pétitions
M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom d'un certain nombre d'électeurs de la circonscription de Kelowna.
Les pétionnaires prient le Parlement du Canada de faire tout son possible pour adopter une loi reconnaissant l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union volontaire à vie d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
J'appuie du fond du coeur cette pétition.
M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter deux pétitions signées par 200 électeurs de ma circonscription, Okanagan—Shuswap, qui signalent à la Chambre que le mariage est la meilleure assise sur laquelle fonder une famille et élever des enfants.
Les pétitionnaires rappellent aussi à la Chambre qu'elle a adopté une motion en juin 1999 selon laquelle le mariage devrait continuer d'être défini comme l'union entre un homme et une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
Les pétitionnaires demandent donc au Parlement d'adopter une loi pour reconnaître l'institution du mariage dans le droit fédéral comme étant l'union à vie d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre forme d'union.
* * *
Questions au Feuilleton
Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.
Le Président: Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
Initiatives ministérielles
[Initiatives ministérielles]
* * *
[Français]
Loi modifiant le code criminel (cruauté envers les animaux)
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 25 septembre, de la motion relative aux amendements apportés par le Sénat au projet de loi C-10B, Loi modifiant la code criminel (cruauté envers les animaux).
M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, encore une fois, nous prenons la parole sur le projet de loi C-10B. Bien entendu, au départ, la première allocution que j'ai faite le projet de loi C-15B établissait que nous avions proposé plusieurs amendements qui avaient malheureusement été rejetés au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.
En revanche, et heureusement—c'est rare qu'on peut dire cela de notre côté—, le Sénat a accepté les amendements du Bloc québécois. Cela permet enfin d'inclure explicitement les définitions du paragraphe 429(2) du Code criminel dans ledit projet de loi.
Enfin, toute l'industrie animalière, que ce soit dans le domaine de la recherche, que ce soient les chasseurs ou toute autre industrie, ont maintenant une excuse légitime leur permettant de faire ce qu'ils ont toujours fait, tout en étant en sécurité quant à leurs action envers des animaux.
Comme vous le savez, c'était nécessaire. À cet égard, on félicite le gouvernement d'avoir pris les devants malgré toute la longueur du processus pour en arriver à protéger les animaux. Ainsi il y aura une nouvelle section dans le Code criminel; on a extirpé les animaux d'une section où on les considérait comme des choses. Enfin, il existe une section propre aux animaux, la section 5.1.
Il ne suffit pas simplement de regarder ce qu'un procureur pourrait avoir comme dossier. On a précisé dans une section ce qu'était la cruauté envers les animaux. Mais maintenant, on précise que les droits légitimes et surtout les droits de défense sont prévus à l'article 8 qui est le droit de défense sur la «common law». C'est en fait un droit explicite qui est prévu dans le projet de loi présentement pour tout ce qui concerne le droit de défense du paragraphe 429(2).
Je félicite le comité. Malheureusement, je n'ai pu être présent à toutes les réunions du comité. Au départ, les députés libéraux du Comité permanent de la justice et des droits de la personne étaient d'accord avec nous quant aux amendements et de cette façon explicite d'avoir ces droits de défense.
Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, je n'ai pas compris pour quelle raison cela avait été rejeté. Malheureusement, je n'étais pas au comité. Qu'est-ce qui a fait changer d'idée les membres du comité, afin de permettre le fait d'avoir explicitement ces droits de défense? Est-ce que ce sont les témoignages qui avaient déjà été rendus ou si ce sont les témoignages des gens de l'industrie animalière qui ont comparu devant le comité du Sénat, qui sont probablement les mêmes personnes venues témoigner de leurs craintes au comité de la Chambre?
Il était simple de pouvoir le faire. On peut constater que si les amendements du Bloc et les miens avaient été acceptés, le projet de loi C-15B serait déjà adopté. Tout cela est une perte de temps. Heureusement le projet de loi sera adopté comme on le veut.
Je respecte maintenant beaucoup plus les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, parce qu'ils n'ont pas seulement dit en privé qu'effectivement, ils pouvaient craindre que le projet de loi ne soit pas explicite. On se basait sur une façon de dire qu'implicitement, les droits de défense sont prévus. Mais il était clair que, dans la section, on prévoyait des droits de défense explicites.
Le législateur ne parle pas pour rien dire. Si on avait mis cela dans cette section et que ce n'était pas prévu en conformité avec l'article 8 de la «common law», c'est que le législateur ne parlait pas pour rien dire. J'avais donc de la difficulté à suivre mes collègues qui ont voté contre ces amendements par la suite. Ils disaient que l'article 8 de la «common law» s'appliquait de façon implicite. C'est vrai, mais pour quelle raison avait-on prévu des droits de défense spécifiques à l'article 429?
Avec les questions que je pouvais poser aux témoins, j'ai essayé d'avoir des explications. Eux aussi avaient la même crainte que moi. Heureusement, aujourd'hui, nous arrivons avec un résultat qui n'est pas idéal—ce ne sont pas tous les amendements du Bloc qui ont été repris par le Sénat—, mais on a tenu compte de la pierre angulaire, ce qui était le plus important, soit ce droit de défense prévu à l'article 429.
Il nous faut ajouter que le Bloc québécois était, depuis le départ, favorable à ce qu'il y ait une nouvelle section 5.1, pour protéger les animaux et, bien entendu, interdire la cruauté contre eux.
Je veux revenir sur le travail qui se fait en comité. Au départ, nous avons entendu entre 20 et 30 témoins qui sont venir nous dire toutes sortes de choses. Nous voulons également que les sanctions contre ceux qui sont cruels envers les animaux soient plus sévères afin de protéger les animaux. Mais ce que veut l'industrie animalière, c'est d'être assurée que tout ce qu'on a fait depuis toujours soit considéré comme des défenses. Bien entendu, ces défenses peuvent découler de l'article 8 de la common law, mais aussi de l'article 429.2. Des témoins sont venus témoignés à cet effet.
Les gens ont répondu à nos questions. Il y avait une crainte. Lorsqu'on disait, de façon implicite: «Vous allez être protégés», pourquoi avoir perdu tous ces mois pour enfin avoir compris? Enfin, le gouvernement a compris que, concernant les droits prévus de façon explicite dans le Code criminel, on n'a pas fait d'amendements pour les enlever. On les a mis pour les ajouter. Il faut en être conscient si on change de section les dispositions sur les animaux et que l'on crée une nouvelle section 5.1. Je crois qu'il était clair et évident qu'il fallait les inclure.
J'aimerais certainement savoir si c'est le lobby qui a réussi à amener le résultat que l'on connaît ou si, tout simplement, on a enfin compris que, de façon implicite et explicite, cela ne veut pas dire la même chose.
Aujourd'hui, si enfin le projet de loi prévoit de façon explicite l'article 429, l'honneur en revient au Bloc québécois et me revient en tant que député de Châteauguay. Je me suis battu pendant toutes ces séances pour faire comprendre cela. Article par article, j'ai pris le temps nécessaire pour expliquer qu'il était nécessaire d'avoir ces amendements. Je demande pour quelles raisons ils ont été rejetés? C'est incroyable.
Aujourd'hui, nous sommes obligés de revenir parler de ce projet de loi important, dûment modifié, comme cela aurait pu être fait auparavant. C'est pour cela que je parlais du travail fait en comité. Le travail qui est fait est intéressant au moment où on le fait. Lorsqu'on arrive au travail article par article, tout le travail des témoins qui sont venus rendre les choses claires et explicites est balayé du revers de la main.
Plusieurs de ces députés, viennent tout simplement voter et n'entendent même pas les témoins. Pourquoi? Parce qu'ils viennent voter de façon unanime en fonction de la ligne parti. Mais la ligne de parti était mauvaise dans ce cas-là. On le voit aujourd'hui.
Par le Sénat, on revient pour faire accepter mes amendements, dont le plus important, la pierre angulaire.
Comment est-il possible que ces mêmes députés, qui doivent faire partie aujourd'hui du même comité, se retrouvent comme lors du dépôt du projet de loi et que maintenant ils changent d'avis? Toutes les explications ont été données une fois ou deux. Au moment du travail article par article, on a vu également ces amendements être présentés.
Il y avait une logique. Je me souviens du ministre de la Justice à qui j'avais posé des questions à plusieurs occasions. Il se levait et disait: «Monsieur le député de Châteauguay, je vous le dis, c'est implicite, l'industrie animalière, les chasseurs, les chercheurs, tous les gens concernés, auront la garantie de pouvoir continuer de la même façon.» C'était la réponse du ministre.
Mais j'aime mieux la réponse que me fait le ministre actuellement, car maintenant c'est clair. Nous ne serons pas obligés d'utiliser l'article 8 de la Common Law. On peut le faire dans des droits de défense spécifiques et il est parfois nécessaire d'utiliser cet article, c'est évident.
Toutefois, dans d'autres cas spécifiques, l'article 8 n'aurait pas permis d'arriver au même résultat. Heureusement, l'article 429 sera enfin repris dans la nouvelle section. Pourquoi est-ce important de l'inclure de façon explicite?
Premièrement, cela vous permettra sûrement d'avoir l'appui du Bloc québécois, car cette loi est très importante. Il faut protéger ces animaux. Vous avez tous eu l'occasion de voir des films montrant des chenils, des chiots, des chats et le tort qu'on peut faire aux animaux. Malheureusement, nous étions dans une situation inconfortable. Nous avons appuyé le principe de modifier le Code criminel afin de rendre les sanctions plus sévères et d'y inclure une nouvelle section.
Toutefois, en raison de l'entêtement du gouvernement, nous étions obligés de voter contre. Ensuite, nous avons été obligés d'expliquer de façon détaillée à l'ensemble de la population, aux électeurs et aux citoyens de notre circonscription la logique derrière tout cela.
Lorsqu'on écoutait les discours, on disait: «Oui, vous êtes pour la modification, pour la protection des animaux et pour infliger des sanctions plus sévères. Mais pour quelle raison avez-vous voté contre ce projet de loi à ce moment-là?»
Lorsqu'on rencontrait des gens on se rendait compte que même les lobbyistes de l'industrie de protection des animaux comprenaient les amendements qu'on voulait apporter. Le gouvernement voulait même aller plus loin que ce que demandaient les gens. Il fallait en arriver à ce qu'il n'y ait plus de telles cruautés. Les gens venaient à mon bureau et me disaient: «Monsieur le député, nous sommes d'accord avec vos amendements. Il faut démontrer à la société que tout le monde en Chambre pourrait voter en faveur d'un projet de loi si important.»
On utilisait le titre, mais on essayait d'une façon détournée, je n'ai jamais compris pour quelle raison, de nuire à l'industrie animalière. Je suis content que les groupes de pression soient intervenus, pas seulement ceux qui voulaient protéger les animaux de ces cruautés. Il y a aussi toute l'industrie animalière qui veut protéger les animaux, des gens comme des cultivateurs et des éleveurs.
Ils venaient témoigner et disaient: «Bien entendu que nous voulons que ceux qui commettent des cruautés envers les animaux soient punis.» Ce n'est pas ceux qui commettent des actes de cruauté envers les animaux qu'il faut protéger. Les gens savent parfois qu'ils ont un voisin cruel, mais à cause de ce voisin, on en déduit que toute l'industrie a des problèmes avec les animaux. Parfois, simplement ils en font l'élevage, ils les mènent à l'abattoir, et tuent les animaux pour se nourrir.
Ils étaient placés dans une situation où il pouvait y avoir un groupement d'individus ou même un procureur de la Couronne un peu zélé qui pouvait porter des accusations contre cette industrie animalière, car il y avait une faille dans la nouvelle section de la loi. Rien n'était prévu pour les protéger.
On nous disait simplement de façon implicite: «Vous avez droit à ces moyens de défense.» Imaginez au Canada et au Québec, ce qui se passerait pour toute l'industrie de la recherche qui utilise des rats et des souris. Pourtant, c'est un besoin et des normes ont été établies pour que les animaux ne souffrent pas. Dans cette industrie, les normes sont strictes et on les respecte.
Ces gens pouvaient se retrouver, le lendemain matin, avec des poursuites sur le dos. À cause de quoi? À cause d'une loi qui était mal rédigée parce qu'il y manquait une pierre angulaire, soit le fait de prévoir de façon spécifique et exhaustive ces droits de défense.
Je suis très heureux aujourd'hui de revenir parler de ces questions, même si cela aurait dû être fait avant. Il faut souligner la force des gens qui viennent témoigner. Cela démontre l'importance de venir témoigner en comité, de venir rencontrer les députés pour qu'ils soient conscientisés sur les aspects spécifiques. Ce sont eux qui connaissent le monde animal beaucoup plus que les 301 députés. Probablement que certaines personnes au sein de la Chambre travaillent avec des animaux, mais ce n'est pas le cas de la majorité. Ce n'est pas mon cas puisque je suis avocat. Je ne suis pas quelqu'un qui connaît les animaux de façon approfondie. Par contre, je veux les protéger.
Il est évident qu'il faut avoir un projet de loi solide. Maintenant, avec une loi plus solide sur les droits de défense, des droits qu'on peut utiliser, les avocats auront beaucoup plus de force lorsqu'ils arriveront devant le tribunal puisque les droits de défense sont précisés. On pourra amener devant les tribunaux les personnes qui font réellement preuve de cruauté envers les animaux. On retrouve maintenant une plus grande sévérité dans le projet de loi. Il y a, au sein de ce projet de loi très important, des amendes sévères. Il y a aussi des possibilités d'emprisonnement et des suivis qui seront faits.
Ce que cela fait, c'est de conscientiser les gens, surtout si on peut avoir l'unanimité à la Chambre sur un projet de loi comme celui-là.
J'entendais les collègues de l'Alliance canadienne s'opposer à ce projet de loi, comme je l'ai fait à cause de ce manque de clarté. Je rappelle à mes collègues de l'Alliance canadienne et à ceux du Bloc québécois le travail qui a été fait pour voter contre ce projet de loi au moment où il était mal rédigé. Toutefois, j'ai appuyé cet aspect parce qu'il était très important pour toute l'industrie animalière à travers le Canada et le Québec. J'espère maintenant que les représentants du gouvernement le comprennent.
Dans un dossier aussi technique, c'était le jeu à utiliser. Il était du devoir des membres du comité de non seulement aller voir le ministre de la Justice, mais de faire comprendre aux collègues l'importance de cet aspect. Il y en a sûrement qui représentent des régions rurales où sont exploitées des industries animalières, ou encore des régions urbaines où oeuvrent des compagnies de recherche, des compagnies pharmaceutiques ou autres entreprises qui utilisent des animaux pour faire de la recherche, ou tout simplement pour fournir de la nourriture. Il y a aussi les chasseurs. Ces gens ont des droits, et pas seulement des droits acquis. Il ne faut pas seulement utiliser le terme de «droits acquis». Il faut, dans une société comme la nôtre, en 2003 et presque en 2004, arriver à dire qu'il est maintenant interdit de commettre de la cruauté envers les animaux.
Pourquoi cette loi doit-elle maintenant être acceptée, je l'espère, par tout le monde? Pourquoi ce projet de loi doit-il être adopté par toute la Chambre? C'est que l'aspect implicite de ces droits de défense est enfin prévu explicitement. Il est maintenant temps d'envoyer un message clair à tout le monde. Je suis certain que l'industrie animalière appuiera maintenant ce projet de loi comme le fera le Bloc québécois et, je l'espère, l'Alliance canadienne et le Parti progressiste-conservateur.
Il faut maintenant appuyer ce projet de loi le plus globalement possible à la Chambre et donner un message clair à la population. La cruauté envers les animaux est terminée. J'espère que les sanctions seront appropriées et qu'on aura les fonds nécessaires pour mener à bien toutes les accusations qui pourraient être portées contre les gens qui enfreindront la loi.
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je remercie mon collègue qui vient de conclure ses remarques. Je dois souligner le fait que si on peut accepter les amendements proposés par nos collègues de l'autre place, ce sera beaucoup plus certain pour nous d'avoir une unanimité, comme il vient d'en parler.
[Traduction]
Je suis contre la motion à la formulation très étroite et inhabituelle dont nous sommes aujourd'hui saisis et j'exhorte la Chambre à accepter les modifications proposées au projet de loi C-10B par l'autre endroit.
Notre système comprend deux chambres législatives. C'est la deuxième fois que la Chambre étudie des amendements à ce projet de loi présentés par nos collègues de l'autre chambre. C'est très inhabituel. Il est très rare que l'autre chambre insiste sur des amendements. Lorsqu'elle agit de la sorte, elle a une raison de le faire. Nous avons le devoir de traiter avec beaucoup de sérieux cette initiative inhabituelle, non partisane et fondée sur des principes.
Deux mandats explicites de l'autre chambre revêtent beaucoup de pertinence dans ce débat. L'un d'entre eux est l'obligation de se livrer à un second examen objectif et non partisan de propositions ne faisant peut-être pas l'objet de l'étude attentive qu'elles méritent à la Chambre.
Je constate que ces amendements n'ont aucun caractère partisan. Ils sont appuyés par les sénateurs libéraux et ceux de mon parti. S'il en était autrement, ils n'auraient jamais été adoptés, car le Parti libéral a aussi la majorité à l'autre endroit. Ces amendement reposent sur des principes et non sur la partisanerie, et ils sont donc ici à leur place.
La deuxième obligation de l'autre endroit est de protéger les minorités et, en l'occurrence, principalement les minorités autochtones du Canada dont le gagne-pain est disproportionnellement tributaire de la chasse et de la pêche et qui sont doublement touchées par la formulation sur laquelle insiste le gouvernement.
Premièrement, la formulation gouvernementale remet de nouveau en question des droits traditionnels existant depuis des temps immémoriaux et ayant été confirmés par les tribunaux et réitérés à l'article 35 de la fameuse Loi constitutionnelle de 1982 de M. Trudeau. L'ironie, c'est que l'actuel premier ministre temporaire revendique désespérément les réalisations de M. Trudeau comme faisant partie de sa contribution inepte à la loi constitutionnelle et qu'il insiste parallèlement sur une formulation qui affaiblit ces mêmes garanties constitutionnelles.
Deuxièmement, selon la formulation perverse adoptée par le gouvernement, ces droits autochtones traditionnels et établis ne pourront être exercés qu'après avoir franchi les énormes obstacles que représentent un procès et un appel.
Il n'est pas ici question de la société Power Corporation, de la Société maritime CSL Inc. ou d'autres riches sociétés bénéficiant d'un paradis fiscal adapté à leurs besoins à la Barbade. Nous parlons des autochtones bénéficiant des revenus les plus marginaux pour assurer leur subsistance. Cette politique de deux poids deux mesures du gouvernement ne pourrait être plus claire.
Le gouvernement est prêt à modifier les règles pour accorder de nouvelles échappatoires fiscales aux grandes entreprises de transport maritime, et il essaie maintenant de changer les règles pour priver les autochtones à faible revenu, dont la chasse est la principale source de revenu, de l'une des rares protections dont ils bénéficient.
L'amendement proposé par l'autre endroit mettrait fin à cette situation de deux poids deux mesures, et j'espère que les députés se feront un devoir de l'appuyer.
Le secrétaire parlementaire déclarait, le 25 septembre 2003, que l'étude du projet de loi avait été fort longue. En effet. Mon parti s'est prononcé sans équivoque en faveur de l'amélioration des dispositions du Code criminel relatives aux animaux et à la cruauté envers les animaux. L'élaboration de ce projet de loi a cependant été laborieuse, précisément parce que depuis longtemps, les ministres saisissent très mal les réalités de la vie rurale au Canada. Le gouvernement a souvent démontré cette lacune.
Cette lacune se manifeste aujourd'hui de façon lamentable dans son incapacité de venir efficacement en aide aux agriculteurs et aux éleveurs, qui voient leur avenir gravement menacé par la crise de l'ESB.
Pendant que le premier ministre se trouvait à New York, où il n'a pas rencontré le seul Américain, le président Bush, qui aurait pu accélérer la réouverture de la frontière, les agriculteurs et les éleveurs des Prairies devaient tuer leurs vaches parce que l'aide fédérale tardait à venir, et à cause de l'inefficacité des mesures prises aux États-Unis.
Chaque fois que la Chambre a rejeté les amendements proposés par nos collègues de l'autre endroit, ces derniers ont examiné nos arguments et ont amélioré leurs amendements. Ceux dont nous sommes saisis aujourd'hui améliorent le projet de loi.
Reportons-nous à juin 2002. Les députés de tous les partis étaient clairement préoccupés par les effets du projet de loi sur les pratiques traditionnelles en agriculture et en élevage. Certains craignaient que le marquage ou la castration des animaux de ferme ne donnent lieu à des poursuites contre les agriculteurs et les éleveurs.
Le 4 juin 2002, le Edmonton Journal rapportait que le gouvernement avait promis «d'examiner des amendements à venir à certaines parties du projet de loi sur la cruauté envers les animaux». Le ministre de la Justice a paré à de possibles difficultés en acceptant «d'examiner favorablement les amendements apportés au projet de loi par le Sénat». Par la suite, il a été rapporté que même si le gouvernement n'avait pas l'intention de proposer des amendements dans l'autre endroit, le ministre de la Justice «examinerait sérieusement, le cas échéant, l'amendement qui serait adopté par le Sénat».
Par la suite, la définition d'«animal» proposée par le Sénat a apaisé certaines craintes. Cet amendement a été accepté par la Chambre. Le Sénat propose maintenant que le gouvernement n'insiste plus sur le moyen de défense relié au fait de «tuer sans excuse légitime» et qu'on remplace plutôt cela par la notion de « causer la mort, sans nécessité ». Il s'agit de limiter l'interdiction générale de tuer des animaux.
Nous ne voulons pas que des agriculteurs et des éleveurs soient accusés de cruauté envers les animaux pour avoir essayé de lutter contre une épidémie de marmottes communes sur leur exploitation agricole ou avoir essayé de faire face à des prédateurs. La vie est plus complexe que les lois que nous rédigeons ici et nos lois doivent refléter la réalité à laquelle les Canadiens ordinaires sont confrontés en essayant de gagner leur vie.
Plutôt que d'obliger les autochtones à continuellement s'adresser aux tribunaux pour faire respecter leurs droits, l'amendement, que le gouvernement propose de rejeter, préciserait qu'aucun autochtone ne peut être condamné pour une infraction si la douleur, la souffrance, la blessure ou la mort est causée pendant l'exercice de pratiques ancestrales de chasse, de piégeage ou de pêche, pourvu que la douleur, la souffrance ou la blessure se limite à ce qui est raisonnablement nécessaire à ces pratiques ancestrales.
Soyons clairs, l'amendement du Sénat ne créerait pas une exception permettant à un autochtone d'être cruel envers un animal. En fait, le Sénat a jugé qu'il serait conforme à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982 de donner aux peuples autochtones la possibilité d'exercer leurs droits constitutionnels protégeant les pratiques ancestrales de chasse et de pêche sans craindre d'être arrêtés et accusés injustement de cruauté envers les animaux. En d'autres termes, les droits des peuples autochtones seraient reconnus au moment de l'arrestation plutôt qu'à la suite d'une décision de la Cour suprême dans le cadre d'un appel d'une condamnation.
La Chambre des communes a maintenant la possibilité, comme les tribunaux l'ont fait depuis 20 ans, de faire tout en son pouvoir pour veiller à ce que les lois fédérales protègent les droits des peuples autochtones. À l'autre endroit, nos collègues autochtones ont prétendu avec passion qu'on avait là une occasion de protéger les chasseurs autochtones qui essayaient de gagner leur vie et de nourrir leur famille.
Le gouvernement s'est fait un point d'honneur de nommer des autochtones à l'autre endroit. Vraisemblablement, il ne l'a pas fait que pour la forme. Vraisemblablement, il l'a fait parce qu'il savait que ces sénateurs autochtones apporteraient avec eux leurs connaissances spéciales et qu'ils seraient écoutés par les parlementaires des deux Chambres qui n'étaient pas autochtones, qui n'avaient pas cette expérience.
S'il en est ainsi, je demande à la Chambre d'écouter ce que notre collègue Charlie Watt a déclaré au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Il a dit:
Nombre des outils traditionnels qu'utilisent les autochtones--particulièrement ceux des Inuits dans le grand Nord—servent à des fins de conservation. Par conséquent, la loi ne tient pas suffisamment compte des questions relatives au temps, à l'énergie et à la faune eu égard à ces activités traditionnelles—il se peut même que les législateurs ne les aient pas bien comprises. |
De ce fait, nous avons sincèrement tenté de présenter un amendement faisant en sorte que, si un autochtone est accusé, il pourra au moins invoquer une défense raisonnable. La loi ne comporte pas beaucoup de dispositions visant la protection des autochtones... |
Voilà les propos tenus par un sénateur autochtone, nommé par le présent gouvernement à cause de ses connaissances en la matière. Or, le gouvernement propose maintenant, dans cette motion, de supprimer une des protections particulières dont notre collègue de l'autre Chambre, Charlie Watt, a fait mention.
Dans son rejet de l'amendement, le gouvernement soutient qu'en droit criminel, les pratiques traditionnelles ne sont pas définies clairement, et qu'il serait difficile pour la police de porter des accusations. Or, nous savons que les policiers ont reçu une formation a l'égard d'autres mesures législatives complexes, notamment celles qui concernent le crime organisé et la répression criminelle.
Justice Canada pourrait aisément offrir de sensibiliser les agents de police à la culture et aux activités traditionnelles des autochtones. Ce ne serait pas un grand défi à relever. Il ne serait pas nécessaire de former des agents à Toronto, Vancouver, Montréal, Winnipeg ou Calgary, où personne ne réclame le droit de chasser en vertu des droits ancestraux. Le choix est simple. Formons-nous quelques policiers ou imposons-nous un fardeau injuste à des groupes entiers de chasseurs autochtones?
[Français]
Le quatrième amendement prévoyait rétablir le recours à la défense d'apparence de droit qui s'applique actuellement aux infractions criminelles contre des biens.
En vertu de l'amendement de l'autre place, et je cite:
Nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction de cruauté envers les animaux, s'il prouve qu'il a agi avec une justification ou une excuse légale ou avec apparence de droit. |
Ce moyen de défense, à première vue complexe, se définit comme suit: selon l'affaire La Reine c. Watson, de la Cour d'appel de Terre-Neuve, en 1999, l'apparence de droit est une croyance sincère dans un état de faits ou de droit civil qui, s'il existait, nierait l'intention coupable, c'est-à-dire, la mens rea, d'une infraction.
Il est actuellement inscrit au paragraphe 429(2) du Code criminel.
Le ministre de la Justice a refusé, jusqu'en juin dernier, cet amendement en prétextant qu'il provoquerait un renversement de la charge de la preuve, ce qui obligerait l'accusé à prouver son innocence selon la prépondérance des probabilités.
Or, lors des procédures judiciaires entourant l'affaire Watson, les deux parties avaient convenu que le recours à la défense d'apparence de droit n'entraînait pas un renversement du fardeau de la preuve.
L'autre place, dans son deuxième message à la Chambre des communes, a toutefois décidé de réintroduire son amendement, puisque les membres de leur Comité des affaires juridiques et constitutionnelles ont convenu que le recours à l'expression «dans la mesure où ils sont pertinents», constituait une tentative inutile et injustifiée de restreindre le recours à la défense d'apparence de droit, ce qui, en bout de ligne, pourrait nuire à certains accusés ou mener à des condamnations injustifiées.
[Traduction]
Les sénateurs ont débattu la question à fond. Nous devrions sérieusement envisager d'accepter ces amendements. Nous ne devrions pas provoquer de lutte inutile entre les Chambres au sujet de ces mesures simplement parce que leur bon sens, et leur jugement, est en désaccord avec ceux du rédacteur choisi par le gouvernement du moment. Il n'arrive pas souvent que le Sénat insiste à l'égard des amendements qu'il propose et nous devrions examiner attentivement les raisons pour lesquelles il le fait aujourd'hui.
Les Canadiens veulent une meilleure législation concernant la cruauté envers les animaux. Ce genre de mesure législative a de vastes ramifications et il est évident que les amendements proposés par le Sénat l'améliorent car ils assurent un équilibre entre la protection des animaux et la protection du gagne-pain des Canadiens. Nous devrions accepter ces amendements et faire en sorte que cette mesure législative permette de s'attaquer efficacement aux véritables cas de cruauté envers les animaux.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai aussi des observations à faire sur le projet de loi.
Le débat à ce sujet a été long et pénible. Au début, le projet de loi faisait partie d'un projet de loi omnibus. Les libéraux tentaient d'intimider les gens pour les contraindre à voter en faveur du projet de loi. Ils prétendaient que si on s'y opposait, on était aussi contre des principes comme la protection des enfants ou les mécanismes servant à s'assurer que les policiers bénéficient d'une protection accrue. Les libéraux ont conjugué dans un seul projet de loi les dispositions législatives visant les armes à feu et la cruauté envers les animaux.
Cela était bien sûr contraire aux règles de la transparence de la Chambre des communes. De fait, les libéraux ne voulaient pas que les Canadiens soient au courant de ce qui se déroulait à la Chambre. Néanmoins, l'Alliance canadienne a pris fermement position et a indiqué que des amendements devaient être apportés aux dispositions particulières du projet de loi portant sur la cruauté envers les animaux.
Comme je l'ai déjà dit, l'Alliance canadienne était tout à fait convaincue qu'on ne pouvait pas tolérer la cruauté envers les animaux et qu'à vrai dire, il fallait imposer des peines plus sévères pour que celles-ci aient un effet de dissuasion qui convienne. Je trouvais plutôt étrange d'être d'accord sur ce point avec les libéraux car, en général, ces derniers tentaient d'éviter que les criminels soient tenus responsables de leurs actes. Cependant, dans ce cas, ils semblaient être déterminés à aller de l'avant, et non pas seulement en ce qui a trait à l'accroissement des peines. Un fait plus troublant était que, dans leur projet de loi, les libéraux étaient entièrement disposés à imposer la responsabilité criminelle à des personnes ne possédant pas d'intentions criminelles suffisantes, qu'ils étaient tout à fait prêts à éliminer les moyens de défense prévus par la loi.
Je trouvais curieux que les libéraux éliminent d'une partie du Code criminel les dispositions pertinentes sur les moyens de défense des propriétaires d'animaux pour les transférer dans une autre partie de ce code. La justification des libéraux étaient que le projet de loi ne changeait aucune question d'envergure et que ce qui était illégal à ce moment le serait également en vertu de la nouvelle loi.
J'ai trouvé étrange que, après des mois et même des années à nous pencher sur cette mesure législative, notre seul but soit de ne rien changer au droit. C'est insensé. Or, bien entendu, il n'y a rien de plus faux. Ce projet de loi modifie fondamentalement les moyens de défense qui s'offrent aux agriculteurs et à tous ceux qui veulent sincèrement protéger leur gagne-pain.
Un des aspects trompeurs dans tout ce débat, c'est que ceux qui prônent l'adoption de ce projet de loi, essentiellement des défenseurs des droits des animaux, c'est-à-dire des citadins habitant de grands centres urbains et ignorant tout de la réalité de la vie à la ferme, disent que les gens s'opposent aux modifications parce qu'ils veulent camoufler les horribles crimes commis contre les animaux. Ces activistes racontent des histoires de chats qu'on dépouille vivants, de chiens qu'on affame, torture, maltraite ou néglige. Bien entendu, tout cela n'a rien à voir avec la réalité. La réalité, c'est que ces gestes horribles de torture de chats, de chiens et d'autres animaux sont déjà illégaux.
Je parle à titre d'ancien substitut du procureur et je peux affirmer qu'une partie de la difficulté vient du fait qu'il est difficile de poursuivre les coupables de pareilles infractions parce que les victimes sont rarement capables de parler.
Par conséquent, le problème ne vient pas des lacunes de la loi à l'égard de situations semblables. Le problème vient de la difficulté de poursuivre les auteurs de tels actes.
Bien entendu, nous constatons que divers groupes défendent chacun leurs propres visées. Je tiens à citer ces groupes car il importe de comprendre quelles sont leurs motivations.
Une avocate de la Société mondiale pour la protection des animaux, Lesli Bisgould, a déclaré:
En fait, le statut juridique aujourd'hui reconnu aux animaux est analogue à celui reconnu aux groupes opprimés au siècle dernier, à savoir qu'on ne leur reconnaît pas le droit de ne pas être perçus comme un instrument, le droit de ne pas être considérés comme un bien. |
Voilà donc une activiste pour la défense des animaux soutenant que les animaux sont comparables aux êtres humains opprimés du siècle dernier. C'est une chose assez révoltante à dire au sujet d'êtres humains.
Nous respectons les animaux et nous respectons leur place au sein de la société. Nous respectons aussi le fait que les agriculteurs les utilisent, comme le font d'autres organisations légitimes. Il est insensé de laisser entendre que les animaux forment un groupe d'opprimés, comparables aux êtres humains opprimés du siècle dernier.
Même une organisation aussi respectable que la SPCA de l'Ontario a déclaré, dans une recommandation faite au ministère de la Justice en 1999, que les animaux:
...doivent littéralement faire partie de la famille et que tout mauvais traitement, délibéré ou involontaire, qu'on leur fait subir doit être considéré au même titre que des mauvais traitements infligés à des enfants. |
Nous savons que les libéraux ne consacrent pas trop d'efforts à la protection de nos enfants. Cela n'augure peut-être pas très bien pour les animaux.
Il se trouve que, selon moi, nous avons de plus grandes obligations envers les enfants qu'envers les animaux. Il est dangereux de faire des comparaisons entre les deux. C'est dégradant pour les humains.
Ce que ces observations illustrent, ce sont les objectifs réels qui se cachent derrière ces modifications. En réalité, elles visent à exposer à des risques ceux qui gagnent leur vie en agriculture ou dans la recherche médicale. Ces mesures entraveront l'agriculture, la recherche médicale, la chasse, le piégeage et toutes sortes d'activités légitimes. Les gens auront trop peur de ne pas savoir ce qui est acceptable ou légal et se détourneront de ces activités.
Un des hauts fonctionnaires du ministère de la Justice qui ont témoigné devant le comité a refusé de dire comment il se débarrassait des rongeurs et autres animaux nuisibles sur sa ferme, en périphérie d'Ottawa. Apparemment, il ne voulait pas se retrouver inculpé d'une infraction criminelle quelconque.
Lorsqu'un des juristes les plus haut placés au Canada en arrive au point où il a peur de dire à la Chambre ou à ses comités comment on peut se débarrasser des rongeurs de façon acceptable, on se dit que les agriculteurs, les chercheurs, les chasseurs, les trappeurs et beaucoup d'autres ont encore bien plus raison de s'inquiéter des répercussions de ces modifications.
L'Alliance a agi très énergiquement en proposant des amendements précis qui expliquent clairement les moyens de défense possibles. Il est insensé de dire que ces moyens ne sont pas explicites, mais implicites et que, par conséquent, les moyens de défense existent. Cela ne tient pas debout en droit.
Si j'étais un avocat de la défense devant les tribunaux, je dirais au nom de mon client: «Votre Honneur, dans l'autre partie de la loi où l'infraction était prévue autrefois, des moyens de défense explicites étaient exposés, et le gouvernement, sans raison aucune, a présenté un projet de loi qui a déplacé les infractions d'un endroit de la loi à un autre, mais il a laissé les moyens de défense là où ils étaient. Votre Honneur, vous ne devriez pas tenir compte de cette modification de la loi. Ces moyens de défense, même s'ils étaient explicitement prévus dans l'autre partie de la loi, sont maintenant implicites dans la nouvelle partie.»
En tant qu'avocat, j'aurais pu dire que cela n'a absolument aucun sens. Penser que le Parlement débattrait un projet de loi et en discuterait aussi longtemps pour ne faire absolument rien, cela n'a aucun sens. Les infractions ont été retirées d'une partie et insérées dans une autre. Le fait que les moyens de défense aient été laissés dans cette première partie signifie manifestement que le projet de loi a été considérablement modifié.
J'ai été heureux d'appuyer les amendements qui incorporaient explicitement ces moyens de défense dans cette nouvelle partie. Mon collègue du Bloc avait une position très ferme à ce sujet également. Nous avons parlé de cette question au comité et j'ai bien aimé ses interventions au cours des audiences du comité. Il a rendu un bon service à ses électeurs et j'estime que l'Alliance canadienne a parlé en faveur de ses électeurs pour protéger leurs activités légitimes.
Comme le député du Parti progressiste-conservateur l'a dit, le Sénat a reconnu que certains autres amendements étaient importants. Ces amendements ont été présentés sans sectarisme.
Ce sont là des préoccupations légitimes. Une fois déjà, les sénateurs qui ont suivi attentivement les discussions au sujet du projet de loi, y ont apporté des amendements et ont renvoyé le projet de loi à la Chambre. Cette fois ils ont adopté d'autres amendements après avoir tenu des audiences. Ce ne sont pas des amendements majeurs pour la plupart d'entre nous qui habitent dans des régions urbaines. Cependant, pour ceux des régions rurales, ceux des régions du Nord, les chasseurs et les trappeurs autochtones, ces amendements sont importants.
Ce que je n'arrive pas à comprendre et la question que je voudrais poser à la Chambre, c'est pourquoi le gouvernement libéral refuse-t-il ces amendements, pourquoi les libéraux sont-ils si mesquins au sujet de ce dossier? Depuis le début, le gouvernement a agi avec mesquinerie dans tout ce dossier. Nous sommes actuellement témoins d'une autre manifestation de cette mesquinerie, de cette incapacité d'accepter des arguments raisonnables qui sont présentés.
Je demande au ministre, en face, de mettre de côté la mesquinerie, d'adopter ce projet de loi amendé par le Sénat et de nous laisser passer à autre chose. Donnons aux animaux la protection dont ils ont besoin. Donnons aux chasseurs, aux trappeurs, aux éleveurs et aux chercheurs en médecine la garantie dont ils ont besoin que leurs activités sont légitimes.
L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais également dire quelques mots sur ce projet de loi. C'est un projet de loi dont la Chambre a déjà été saisie et qui été scindé en deux, une partie traitant des règles portant sur le contrôle des armes à feu et l'autre des droits et du bien-être des animaux. Il a été scindé au Sénat.
Le NPD appuie le projet de loi C-10B pour ce qui est de la partie portant sur les droits et le bien-être des animaux. Nous l'avons précisé très clairement plus tôt au cours du débat.
L'autre endroit a décidé d'affaiblir le projet de loi en y apportant des amendements avant de le renvoyer à la Chambre des communes.
Les députés sont élus et ils doivent rendre des comptes aux habitants du pays. Les sénateurs, par contre, ne sont pas élus et ils n'ont de compte à rendre à personne. Le Sénat n'est pas une institution démocratique.
Je crois que la Chambre des communes devrait apporter des modifications au projet de loi à son tour et que l'opinion de la Chambre devrait prévaloir chaque fois qu'il y a opposition entre les deux Chambres.
Il est très important que nous ne laissions pas se créer un précédent qui permettrait au Sénat non élu de renvoyer un projet de loi à la Chambre avec plusieurs propositions d'amendement sans que la Chambre renvoie elle-même le projet le loi pour rejeter les amendements proposés.
Une institution législative non élue n'a pas sa place dans une société démocratique. C'est une institution qui modifie les lois. Je suis persuadé, monsieur le Président, que vous faites partie des 90 à 95 p. 100 des Canadiens qui ne sont pas d'accord sur la structure actuelle du Sénat. Entre 90 et 95 p. 100 des Canadiens interrogés ont répondu à de nombreuses reprises qu'ils ne voulaient pas maintenir cette institution non élue. Je présume que les 95 p. 100 des Canadiens qui affirment cela sont partagés entre l'idée d'abolir tout simplement le Sénat ou d'exiger que ses membres soient élus.
Si nous devions décider d'élire les sénateurs, nous devrions alors discuter des pouvoirs qui devraient être confiés au Sénat. J'ai vu ce débat resurgir d'année en année. En fait, ce fut là l'une des principales questions qui ont fait échouer les débats constitutionnels de 1981-1982. C'était également un point très controversé avant Charlottetown.
Je me souviens des négociations du comité spécial de la Chambre des communes auquel j'ai eu le privilège de siéger pendant quelques mois. Le comité parlait de tout en fonction de la Constitution de 1991, après l'échec du lac Meech en 1992-1993.
Nous avons connu le comité Beaudoin-Dobbie et le comité Beaudoin-Edwards. Nous avons parlé de la répartition des compétences, de la Charte des droits et libertés, des langues des minorités, de tout ce que contenait la Constitution, d'un mode de révision, etc. La question la plus difficile à laquelle était confronté ce comité multipartite de la Chambre des communes était la question du Sénat, et de ce qu'il faudrait faire à ce sujet. Partout où le comité siégeait, les gens souhaitaient l'abolition du Sénat ou l'élection de ses membres afin qu'il soit le reflet des habitants du pays.
J'hésite à accepter des amendements proposés par l'autre Chambre alors qu'elle n'a pas reçu de mandat du peuple canadien. En fait, les amendements que le Sénat a proposés au projet de loi C-10B concernant les droits et le bien-être des animaux affaiblissent le projet de loi. Il n'y a eu aucune modification à la loi au sujet du bien-être des animaux depuis 1892. Nous avons un projet de loi accepté par la Chambre des communes, et le Sénat l'affaiblit.
Le temps est venu de passer à l'action: soit que nous modernisons l'autre endroit en prévoyant un Sénat élu revêtu de pouvoirs différents, soit que nous l'abolissons. Ma position est très claire: nous devrions l'abolir. En fait, il fut une époque où cinq de nos provinces avaient un sénat ou une chambre haute. Lorsqu'on visite l'Assemblée législative de l'Île-du-Prince-Édouard, on peut visiter la salle qui servait de chambre haute. C'est la même chose au Québec, qui fut la dernière province à abolir sa chambre haute. Cinq provinces avaient leur chambre haute, mais elles n'en ont plus aujourd'hui.
Selon moi, la mission initiale du Sénat, qui était de fournir un contrepoids à la Chambre des communes, pourrait être incorporée à la mission de cet endroit par le truchement d'une réforme parlementaire.
Si nos comités parlementaires étaient plus forts et plus indépendants, si leurs présidents étaient élus librement, si nos comités avaient le pouvoir d'initier des mesures législatives et de les présenter à la Chambre, s'ils avaient le pouvoir d'établir des échéanciers et s'il y avait moins de votes de confiance, la Chambre des communes pourrait fournir ce contrepoids que le Sénat est censé fournir. Si nous allions dans ce sens, cet endroit serait un endroit beaucoup plus démocratique et plus représentatif des citoyens.
Nous savons tous à quel point il est emballant de voir un vote libre sur une question controversée pendant la période réservée aux initiatives parlementaires, mais si nos comités étaient plus forts, ils pourraient s'opposer plus souvent au premier ministre. Selon moi, c'est l'orientation que nous devrions prendre.
Dans le passé, je me suis montré ouvert à l'élection des sénateurs. En fait, j'étais en faveur de l'accord de Charlottetown et j'ai fait campagne aux quatre coins du pays du côté du «Oui». Une part de cet accord prévoyait un Sénat élu à représentation régionale égale doté de pouvoirs très restreints. Toutefois, peu importe la façon d'examiner la question, il est devenu très difficile de s'entendre sur une composition du Sénat acceptable pour tous les Canadiens.
J'ai relevé dans un communiqué que le futur premier ministre, le député de LaSalle—Émard, continue de se prononcer en faveur du principe d'un Sénat triple E, à la façon proposée par l'Alliance canadienne, mais il est très difficile de faire la promotion d'une telle mesure dans tout le pays lorsqu'on accorde le même nombre de sénateurs à l'île-du-Prince-Édouard, au Québec et à l'Ontario. L'île-du-Prince-Édouard compte de 120 000 à 130 000 habitants tandis que l'Ontario en compte 10 ou 11 millions, mais ces deux provinces auraient droit au même nombre de sénateurs.
Pour transformer le Sénat, il nous faudrait une modification à la Constitution qui exigerait le consentement d'au moins sept provinces sur dix et représentant la moitié des habitants du pays. La seule façon dont nous obtiendrions l'assentiment du Québec, qui compte de sept à sept millions et demi d'habitants, et se distingue des autres provinces par sa langue, sa culture et son code civil, et la seule façon dont nous obtiendrions l'assentiment de l'Ontario à un nombre égal de sénateurs par province, serait de réduire si radicalement les pouvoirs du Sénat que celui-ci en deviendrait presque insignifiant.
Si les pouvoirs en étaient réduits si radicalement, cela se répercuterait dans beaucoup d'autres petites provinces, qui se demanderaient si la démarche en vaudrait la peine. Cela ressemble à un chien qui court après sa queue. C'est là une histoire qui n'a pas connu d'aboutissement durant mes 30 ans au Parlement. Cette histoire n'a jamais connu de fin depuis l'avènement de la Confédération.
Les députés de l'Alliance canadienne m'étonnent vraiment. Ils réclament constamment une administration publique moins lourde, qui intervienne moins et une réduction du nombre de politiciens. Si nous avions un Sénat élu dans notre pays, la place des sénateurs serait aussitôt légitimée puisque ceux-ci seraient élus et recevraient le même mandat que le nôtre, les députés. Si nous devions consentir cette dépense, le Sénat ne nous coûterait pas les 60 millions de dollars actuels par année. Ce montant doublerait ou triplerait, puisque les sénateurs auraient besoin d'un bureau de circonscription, des comités, des installations et des services en beaucoup plus grand nombre pour transmettre le point de vue de leurs électeurs et pour devenir les égaux des députés.
Nous nous retrouverions alors avec une bonne centaine de politiciens de plus au pays. Je ne crois pas que nous ayons besoin de cela. On peut instaurer cet équilibre des pouvoirs, ce second regard à la Chambre des communes en réformant cet endroit, en s'assurant que nos comités aient un rôle utile à jouer, en réduisant le nombre de votes de confiance, en ayant des élections, des discours du Trône et des discours du budget à dates fixes. On enlèverait ainsi certains des pouvoirs dont jouissent le cabinet du premier ministre et le Bureau du Conseil privé pour les redistribuer également à tous les députés de la Chambre, comme ce devrait être le cas.
Mais ce n'est pas ce que l'on fait. Je me souviens d'avoir lu il y a environ un an l'autobiographie de John Crosbie, l'ex-ministre des Transports. Il a écrit qu'un des buts de Brian Mulroney lorsqu'il a accédé à la direction de son parti était d'abolir le Sénat. Mais lorsqu'il est devenu premier ministre, il s'est senti pressé de nommer au Sénat quelques-uns de ses amis, et les nominations n'ont pas cessé de se succéder. C'est toujours la même histoire depuis les débuts de la Confédération.
La plupart des gens qui siègent à l'autre endroit sont des personnes décentes et laborieuses, mais d'autres ont des fiches de présence épouvantables, parce qu'ils n'ont de comptes à rendre à personne.
M. Brian Masse: Celui au Mexique.
L'hon. Lorne Nystrom: Oui, le sénateur mexicain, comme mon ami de Windsor vient de le dire, est au nombre de ceux-là, mais il n'est pas le seul. Ces gens n'ont de comptes à rendre à personne.
Le député de St. John's-Ouest, le leader du Parti conservateur à la Chambre, sait qu'il doit rendre des comptes à ses électeurs de St. John's. Il sait que tous les trois ans et demi à quatre ans et demi il doit redemander à ses électeurs de renouveler son mandat.
Une voix: Trois ans.
L'hon. Lorne Nystrom: Oui, c'est tous les trois ans avec les gens d'en face. Mai les sénateurs n'ont pas à faire cela.
Le sénateur de la Saskatchewan Herb Sparrow a été nommé par Lester Pearson en 1967 ou 1968 et il est encore au Sénat. Il n'a pas été élu démocratiquement et ne rend compte à personne. Une telle chose ne devrait pas avoir sa place dans une société moderne.
Cela étant dit, je pense que le projet de loi devrait demeurer inchangé. La Chambre doit adopter un projet de loi qui vise à mieux protéger les animaux contre la cruauté et qui répond aux intentions exprimées par la Chambre il a plusieurs mois lorsque ce processus a été amorcé.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, je signale qu'à l'appui de la société protectrice des animaux du Yukon, il est très important de faire tout notre possible pour adopter au plus tôt ce projet de loi capital.
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, j'ai certainement dit la même chose et fait valoir le même point. Je suis heureux que le député du Yukon ait fait ce discours très profond et détaillé en faveur du projet de loi.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, le député a parlé des droits et du bien-être des animaux. Je n'ai absolument aucune difficulté à appuyer une mesure qui aide à garantir le respect des droits des animaux et à assurer leur bien-être.
On doit toutefois se rendre compte que les êtres humains ont aussi des droits et un bien-être qu'il faut prendre en considération.
Je ne sais pas trop quelles sont les priorités du parti du député. Je voudrais lui poser deux questions. Tout d'abord, lorsque le chef actuel de son parti a été choisi, il a embauché, comme membre de son personnel, quelqu'un qui a beaucoup milité dans le mouvement de défense des droits et du bien-être des animaux. En l'espace non pas de quelques jours, mais bien de quelques heures, les pressions exercées par les députés de son propre parti, non pas par ceux de l'Alliance, de notre parti ou du parti ministériel, mais bien par ceux de son parti ont obligé le chef néo-démocrate à congédier la personne qu'il avait embauchée. Je me demande à quel point ces gens-là sont animés de solides convictions quand ils agissent ainsi.
Deuxièmement, quelle est la position du député sur la chasse aux phoques pratiquée sur la côte est du Canada?
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, en ce qui concerne ma position sur la première question, j'appuie le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui.
Le député se demande pourquoi une certaine personne n'était pas chef de cabinet du chef du Nouveau Parti démocratique. Je suppose qu'il spéculait simplement sur les raisons pourquoi cette personne n'est plus chef de cabinet, mais, quoi qu'il en soit, j'appuie le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.
En ce qui concerne la chasse aux phoques, je la soutiens. C'est la position que j'ai adoptée depuis plusieurs années. Mes idées en faveur de la chasse aux phoques sont très bien connues, de même que mon appui aux droits de chasse et de pêche, non seulement pour les premières nations et les autochtones, mais tous les droits de chasse pour tous les citoyens canadiens qui ont les permis requis. Je suis né sur une petite ferme du centre-est de la Saskatchewan, et, dans mon enfance, j'ai croisé des chasseurs et des pêcheurs durant des années. Je crois que ma position sur ces questions est assez équilibrée.
Le projet de loi dont la Chambre est saisie aujourd'hui n'a rien de radical. Comme je l'ai dit, il constitue la première amélioration depuis 1892 à la protection des animaux, et j'estime que nous devrions l'adopter.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, dans quelle mesure le député de Regina—Qu'Appelle estime-t-il que sa motion d'initiative parlementaire pourrait contribuer aux questions auxquelles nous faisons face en l'occurrence? Le Sénat a renvoyé un amendement, et le député a précisé très éloquemment tous les problèmes que cela pose dans une démocratie. Comment pourrait-on améliorer ce processus en recourant à un nouveau système de démocratie, celui qui, en fait, a été adopté par la plupart des autres pays industrialisés?
L'hon. Lorne Nystrom: Monsieur le Président, cette question s'inscrit dans le débat que nous tiendrons demain sur la représentation proportionnelle.
Selon moi, la réforme électorale au Parlement doit être abordée comme un tout. J'ai parlé aujourd'hui de mesures de réforme du Parlement, c'est-à-dire de l'élimination de l'autre endroit. À mon avis, il faut aussi modifier la façon dont les députés sont élus. Il est très important que le vote de chaque Canadien ait du poids à la Chambre.
Je ne sais pas si vous le savez mais, dans le monde, le Canada est au nombre des trois seuls pays démocratiques comptant plus de 8 millions d'habitants et utilisant encore le système uninominal à un tour. Outre le Canada, il y a l'Inde et les États-Unis. À l'occasion de la dernière campagne électorale aux États-Unis, Al Gore a obtenu 550 000 voix de plus que George W. Bush. Mais qui est le président? George W. Bush.
Le système canadien déforme la réalité. Le parti ministériel a obtenu 41 p. 100 des voix, mais il bénéficie de près de 60 p. 100 des sièges. En 1997, le premier ministre a obtenu 37 p. 100 des voix et il a bénéficié d'une solide majorité. Ce fut la même chose en 1993, année où il obtint environ 40 ou 41 p. 100 des voix et une solide majorité. Des minorités élisent des majorités.
En réalité, depuis 1923, seulement trois ou quatre gouvernements l'ont emporté avec une majorité, dont celui de John Diefenbaker, en 1958, mais presque tous les gouvernements majoritaires sont élus par une minorité de personnes et presque tous les pays dans le monde ont une forme quelconque de représentation proportionnelle.
Il est intéressant de constater que, au moment où l'Union soviétique s'est effondrée, les nouveaux pays qui en faisaient partie se sont mis à la recherche d'un système électoral. Ils ont analysé notre système et divers autres systèmes dans le monde, mais aucun de ces pays, qu'il s'agisse de la Russie, de l'Ukraine ou de la Pologne, n'a choisi le nôtre, soit le système uninominal à un tour. Selon eux, il n'était pas assez démocratique pour assurer une représentation égale à chacun des habitants du pays au moment des élections. Chacun de ces pays a adopté une forme quelconque de représentation proportionnelle. Selon moi, c'est la voie que nous devrions emprunter.
Au Québec, notamment, le premier ministre Jean Charest a déclaré qu'au cours des élections qui suivront les prochaines, il devrait y avoir une certaine représentation proportionnelle à l'Assemblée nationale du Québec. Le premier ministre Binns de l'Île-du-Prince-Édouard a tenu des propos similaires, soulignant qu'il étudierait bientôt sérieusement la question de la représentation proportionnelle. Le premier ministre de la Colombie-Britannique s'est prononcé dans le même sens.
Le moment est venu d'emprunter cette voie. Si la Chambre analysait cette question et décidait d'abolir la Chambre non élue, accordant du même coup plus de pouvoir aux comités et plus d'indépendance à la Chambre, tous bénéficieraient d'une bien meilleure démocratie.
M. Loyola Hearn (St. John's-Ouest, PC): Monsieur le Président, la mesure législative que nous examinons risque de causer de graves problèmes dans nombre de segments de la société canadienne.
Cependant, je voudrais faire quelques observations sur certains propos tenus par le député de Regina—Qu'Appelle qui siège dans cette noble institution depuis un bon moment déjà et qui possède nettement plus d'expérience que la plupart d'entre nous ici. Il peut certainement se comparer favorablement avec n'importe qui ici au chapitre de ses années de service et de son dévouement à la Chambre. Néanmoins, son opinion et la mienne à l'égard du Sénat diffèrent passablement.
J'estime que le Sénat joue un rôle extrêmement important. Nous pouvons discuter de la façon dont les membres du Sénat sont choisis, ce que nous ferons un jour, peut-être plus tôt que nous ne le pensons. Ceci dit, c'est au Sénat que revient le mérite de certains des meilleurs travaux réalisés au Parlement, qu'il s'agisse d'analyses approfondies, de second examen objectif, de travail en comité ou d'examen de questions sur lesquelles la Chambre ne peut se pencher. Nous pouvons discuter autant que nous voulons quant au choix des sénateurs, et nous en discuterons effectivement, mais nous ne devrions jamais sous-estimer la valeur de leur second examen objectif.
Dans le présent cas, j'estime que les amendements proposés sont fort légitimes. J'ai écouté plus tôt l'intervention fort sensée que le porte-parole allianciste en matière de justice a faite sur la question. Je partage son avis à tous égards, comme d'habitude, car l'Alliance canadienne et mon parti sommes d'accord sur pratiquement tous les points. J'estime que mon collègue allianciste a visé tout à fait juste en abordant certaines questions. Il n'est pas nécessaire d'aller au-delà des toutes premières dispositions du projet de loi, dont je donne lecture aux fins du comte rendu:
182.2 (1) Commet une infraction quiconque,volontairement ou sans se soucier desconséquences de son acte: |
a) cause à un animal ou, s’il en est lepropriétaire, permet que lui soit causée unedouleur, souffrance ou blessure, sans nécessité; |
b) tue sauvagement ou cruellement unanimal—que la mort soit immédiate ounon—ou, s’il en est le propriétaire, permetqu’il soit ainsi tué; |
À première vue, personne ne peut être en désaccord là-dessus. Cependant, lorsque les tribunaux auront à interpréter un tel texte de loi et qu'un juge sympathique devra trancher en se fondant sur une telle disposition, je ne sais pas si leur interprétation sera identique à la nôtre. Cela pose de graves problèmes. Ce sera source de difficultés pour les agriculteurs et les éleveurs, mais surtout pour les gens du milieu médical.
Probablement que des députés siégeant dans cette enceinte, et certainement 95 p. 100 des téléspectateurs canadiens qui nous regardent à la chaîne CPAC pour voir ce que nous disons et ce que nous faisons à la Chambre, peuvent tourner le bouton de leur téléviseur, s'asseoir, écouter, marcher, conduire leur automobile ou jouer un rôle au Parlement grâce à une découverte ou à une innovation médicale réalisée par des scientifiques ou des médecins qui ont pu faire des expériences. Sans ces expériences, habituellement faites sur des animaux, bon nombre des remèdes, des antibiotiques et des médicaments antivirus découverts ne l'auraient jamais été.
Est-ce que ces expériences causent de la douleur et des souffrances? Sans aucun doute. Est-il légitime de procéder à des expériences qui causent de la douleur et des souffrances? Un juge pourrait certes interpréter cette résolution et décréter qu'il est interdit d'imposer de la douleur et des souffrances. Si ce texte doit mettre fin à toute forme d'expérimentation, je me demande quels droits nous protégeons et où nous devrions tirer la ligne. Ce projet de loi pourrait avoir de graves conséquences; nous ne pouvons admettre qu'il soit adopté si son interprétation peut mettre en péril la vie de nombreux citoyens de notre pays.
Permettez-moi de pousser le raisonnement un peu plus loin et de donner d'autres exemples pratiques hors du domaine de l'expérimentation. Que penser des éleveurs et des agriculteurs qui utilisent les animaux pour gagner leur vie? Ils s'occupent d'animaux en grands nombres et certaines personnes pourraient certainement interpréter ce qu'ils font, durant le marquage ou pendant d'autres activités, comme des gestes causant de la douleur et de la souffrance.
On dira peut-être que tout le monde est assez large d'esprit pour comprendre que ces pratiques s'imposent. Ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Nous sommes en présence d'une mesure législative qui, nous le savons parfaitement, peut être interprétée par les tribunaux. Qui va saisir les tribunaux de ces causes? Nous le savons. Ce sont les défenseurs des droits des animaux. Ils peuvent intenter des poursuites à propos de n'importe quoi. Il suffit qu'ils aient un cadre juridique qui leur permet de présenter leur argumentation, et ils auront carte blanche pour mettre à l'essai n'importe quelle hypothèse.
Permettez-moi d'aborder une autre question, celle de la chasse au phoque sur les côtes est et nord du Canada, et plus particulièrement au large de Terre-Neuve et du Labrador. Les groupes de défense des droits des animaux ont accordé une attention considérable à cette chasse. Greenpeace et d'autres groupes de défense des droits et du bien-être des animaux, groupes bien trop nombreux pour qu'on puisse les énumérer, ont attiré beaucoup d'attention sur leur cause et, je dirais, recueilli beaucoup d'argent, lorsqu'ils se sont attaqués aux chasseurs de phoque de Terre-Neuve et du Labrador.
Ces chasseurs pratiquent une activité qui a cours depuis des années. Ils arrondissent leurs maigres revenus en participant à la chasse au phoque. Ils font une chose à laquelle le gouvernement se refuse, soit limiter les énormes troupeaux de phoques au large de nos côtes. Dans le nord du Québec, la situation est la même. Il est certain qu'elle est identique dans votre propre région, monsieur le Président, et plus particulièrement au large de nos côtes. Les troupeaux de phoque explosent. Ces dernières années, le nombre de phoques a été multiplié par six.
Nos stocks de poisson, nos stocks de morue et nos poissons de fond en particulier ont pratiquement disparu. Les gens qui établissent la liste des espèces en voie de disparition envisagent à l'heure actuelle de placer la morue du Nord sur cette liste.
La morue du Nord était l'espèce de morue la plus prolifique dans le monde. C'était une morue qui incitait des gens de tous les pays à participer à la pêche. Les stocks étaient abondants. Tant que la morue a été pêchée avec les moyens techniques voulus, ce qui donnait aux poissons la chance de grossir et de se reproduire, les stocks sont demeurés constants année après année pendant 500 ans. Par la suite, il y a eu des progrès technologiques et les gouvernements n'ont plus exercé un contrôle aussi serré et ils ont laissé des individus, des pays et des transformateurs et tout le monde prendre toutes les morues possibles au point de faire disparaître complètement l'espèce en utilisant des techniques qui ne laissaient aucune chance aux poissons de s'échapper.
Tout le monde s'en fichait. Ce n'était que du poisson et il n'était question que de Terre-Neuve-et-Labrador. On ne parlait que du nord du Québec et des Territoires du Nord-Ouest. Qui s'en préoccupait? Nous formons les limites du pays. Nous sommes oubliés la plupart du temps et personne n'a porté vraiment attention à ce qui se passait.
Tout à coup, les gens ont commencé à comprendre que cela arrivait à une ressource renouvelable pouvant créer beaucoup d'emplois au Canada et rapporter beaucoup au Trésor public. À l'heure actuelle, la pêche de fond à Terre-Neuve est pratiquement inexistante. La pêche est encore relativement bonne grâce aux crabes et aux crevettes, aux mollusques. La valeur au débarquement n'a jamais été aussi bonne, mais si on excluait la pêche aux mollusques qui n'existait pas il y a 15 ans, le résultat serait nul ou presque, car notre pêche de fond a pratiquement disparu.
Si nous avions conservé la pêche de fond que nous avions en 1973, lorsque tout a commencé à s'effondrer, si ces stocks avaient été non pas accrus, mais maintenus, la valeur du poisson débarqué en dollars d'aujourd'hui s'élèverait à 3,38 milliards de dollars. C'est important. On ne parle que du poisson de fond. Si on ajoutait à cela un milliard de dollars environ pour les crevettes et le crabe, nous aurions à Terre-Neuve-et-Labrador une industrie valant plus de quatre milliards de dollars. Imaginez seulement ce que cela voudrait dire pour notre province. Imaginez ce que cela représenterait pour le Trésor public canadien.
Une des raisons pour lesquelles nos stocks ont été dévastés, c'est que les populations de phoques n'ont pas été contrôlées. Les groupes de pression ont entraîné la fin de la chasse aux phoques pendant plusieurs années et les troupeaux de phoques ont connu une croissance incontrôlée.
Le secteur de la pêche est rétabli. Cependant, même si le ministre a augmenté le quota ces quelques dernières années, ce qui est à son honneur, il est extrêmement minime. Il ne suit pas le rythme de la croissance du troupeau de phoques. Il y a encore de six à huit millions de phoques qui mangent le poisson. Des gens soutiendront qu'ils ne mangent pas de la morue. Un ancien politicien a dit qu'ils ne mangent pas de navets. Que mangent-ils? Ils mangent du poisson. Nous savons qu'ils mangent du poisson.
Par conséquent, si la chasse aux phoques cesse ou ralentit en raison des groupes de défense des droits des animaux, ce sera désastreux. Si ces groupes disposent d'une mesure législative qui leur permet de s'adresser aux tribunaux et de dire que la chasse est inhumaine, cruelle ou quoi que ce soit, et que le juge qui rend la décision n'a jamais vu de phoque ou ne sait rien de la chasse aux phoques, je ne voudrais pas parier les quelques dollars que je pourrais avoir sur la décision.
Cela préoccupe particulièrement nos gens, mais également tous les participants des industries des ressources, notamment des ressources animales dans tout le pays. Cela préoccupe les chercheurs du secteur médical qui se rendent compte que, pour effectuer le travail qui doit être fait, pour trouver un remède au SRAS, au sida, au cancer, il faut faire des expériences. S'ils ne peuvent pas faire des expériences sur des animaux, je ne sais pas quel résultat ils obtiendront.
Nous avons des préoccupations. Nous estimons que les amendements atténueront quelques-unes d'entre elles. Par conséquent, tout comme le député de Provencher, j'appuierai certes les amendements et je demande à la Chambre d'en faire autant.
Le président suppléant (M. Bélair): La Chambre est-elle prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. Bélair): Le vote porte sur la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.
Des voix: Oui.
Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.Je déclare la motion adoptée.
(La motion est adoptée, les amendements sont lus une deuxième fois et adoptés.)
* * *
Le Code criminel
L'hon. Paul DeVillers (au nom du ministre de la Justice et procureur général du Canada) propose: Que le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (fraude sur les marchés financiers et obtention d'éléments de preuve), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
M. Paul Harold Macklin (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la confiance des investisseurs est essentielle à l'existence des marchés financiers canadiens et à l'économie canadienne. Les scandales qu'ont connus certaines sociétés américaines ont ébranlé la crédibilité des marchés financiers mondiaux en 2001 et en 2002. Pendant cette période, des supercheries de plusieurs milliards de dollars et d'autres scandales financiers ont fait la manchette des médias d'affaires internationaux. En raison de leur incidence profonde, ces scandales ont miné la confiance des investisseurs bien au-delà des frontières américaines.
Un sondage mené en 2002 a révélé que la confiance des investisseurs avait connu une chute dramatique à la suite de l'effondrement de WorldCom, la majorité des répondants croyant que les économies américaine et canadienne continueront à en subir les effets tant et aussi longtemps que des méfaits semblables auront une incidence sur la confiance des investisseurs.
De plus, un sondage public mené en 2002 montre que la majorité des Canadiens ne font plus confiance à la bourse des valeurs mobilières et qu'ils appuient les initiatives visant à améliorer la transparence dans le domaine financier et à augmenter les peines pour les contrevenants.
Actuellement, le gouvernement du Canada, en collaboration avec les provinces, les organismes de réglementation et la police, travaille très fort pour assurer l'intégrité des marchés financiers canadiens. Malgré les récents scandales au sein de sociétés américaines, le gouvernement du Canada veut s'assurer que ce travail se poursuivra et même qu'il s'intensifiera.
Le 30 septembre 2002, le discours du Trône engageait le gouvernement à:
...passer en revue et, si nécessaire, changer ses propres lois et renforcer les moyens de les appliquer, afin que les normes de gouvernance auxquelles sont astreintes les institutions financières et les entreprises constituées en vertu des lois fédérales soient du plus haut niveau. |
Le gouvernement du Canada s'est engagé à préparer une réponse adaptée aux besoins des investisseurs et des responsables de l'application de la loi. Les lois criminelles portant sur les graves cas de fraude sur les marchés financiers sont l'un des aspects de la loi canadienne sur lesquels on a dû se pencher.
Le gouvernement a proposé des mesures législatives devant dissuader les auteurs de crime en puissance de commettre de graves délits de fraude sur les marchés financiers, faciliter la cueillette de preuves contre ceux qui se sont rendus coupables de telles infractions et voir à ce que ceux qui en ont été reconnus coupables soient punis comme ils le méritent.
Je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel et portant sur la fraude sur les marchés financiers et l'obtention d'éléments de preuve. Ce projet de loi constitue la réponse du gouvernement à la dimension pénale liée aux fraudes sur les marchés financiers, une étape très importante en vue de restaurer la confiance des investisseurs envers nos marchés financiers et notre économie en général. Comme les députés le constateront facilement bientôt, ceux qui se livreront à des actes de fraude sur les marchés financiers risqueront bien davantage de se faire prendre et d'être accusés, reconnus coupables et punis.
La meilleure façon de dissuader les gens de mal agir est d'accroître les possibilités de détection et de poursuite et d'agiter la menace de punitions sévères. Nous pouvons donc espérer qu'une réaction plus sévère de la justice pénale aux infractions de fraude sur les marchés financiers permettra de dissuader bon nombre de ceux qui pourraient autrement songer à s'adonner à de tels actes.
J'aimerais parler maintenant de la partie du projet de loi portant sur les équipes de sécurité intégrées. Tout d'abord, afin d'accroître la présence des autorités nationales au chapitre de l'application des lois relatives aux infractions graves en matière de fraude sur les marchés financiers, le budget de 2003 a prévu une somme de 30 millions de dollars pour la création de jusqu'à neuf équipes de sécurité intégrées sur les marchés financiers. Ces équipes seront composées de membres de la GRC, de juricomptables ainsi que de conseillers juridiques et de procureurs du Service fédéral des poursuites de Toronto, Montréal, Vancouver et Calgary.
Ces équipes seront chargées de faire enquête sur des infractions graves au Code criminel en matière de fraude sur les marchés financiers ayant une importance nationale et impliquant des sociétés cotées en bourse dont les actions ont véritablement risqué de miner la confiance des investisseurs et la stabilité économique du Canada. Ces équipes se serviront des dispositions actuelles du Code criminel et des nouvelles mesures prévues au projet de loi C-46 une fois que le projet de loi sera adopté.
Le projet de loi C-46 traite de quatre éléments majeurs: premièrement, il crée de nouvelles infractions; deuxièmement, il contient des dispositions relatives à la détermination de la peine, troisièmement, il crée une compétence fédérale concurrente en matière de poursuites pour certaines infractions; et quatrièmement, il améliore les mécanismes d'obtention d'éléments de preuve.
L'examen que nous avons fait du Code criminel, dans la foulée des mesures prises aux États-Unis pour rétablir la confiance des investisseurs, démontre que nous avons déjà des lois efficaces pour réprimer la fraude sur les marchés financiers, notamment des dispositions efficaces concernant la fraude, l'obstruction de la justice et la production de faux prospectus.
Nous avons constaté deux lacunes, que le projet de loi C-46 permettra de combler. Ainsi, le projet de loi crée de nouvelles infractions concernant, premièrement, les opérations d'initié interdites et, deuxièmement, les mesures d'intimidation visant à dissuader des employés initiés, au sein d'une entreprise, de dénoncer des pratiques illégales et d'aider les autorités.
Lorsque les initiés travaillant dans des entreprises profitent, à des fins personnelles, de leur droit d'accès spécial à de l'information à laquelle les autres investisseurs n'ont pas accès, cette pratique nuit gravement à la confiance des investisseurs qui est nécessaire pour maintenir la crédibilité de nos marchés financiers vitaux. Cette activité peut engendrer de graves préjudices économiques pour les investisseurs particuliers et les entreprises, et nuire gravement à l'économie canadienne dans son ensemble.
Les lois provinciales sur les valeurs mobilières et la Loi canadienne sur les sociétés par actions interdisent certaines opérations d'initié. Toutefois, il est également nécessaire d'avoir recours à la législation pénale pour prévenir ce genre de méfait au sein des sociétés, à cause de sa valeur symbolique et des peines plus lourdes qu'elle prévoit.
La création, dans le Code criminel, d'une nouvelle infraction concernant les opérations d'initié illicites assurerait un moyen supplémentaire de réprimer les délits justifiant des peines plus lourdes, et contribuerait à stabiliser la confiance des investisseurs.
Les députés se souviendront de l'importance du rôle joué par les initiés qui avaient dénoncé des pratiques illégales lors des récents scandales survenus aux États-Unis. Le Code criminel contient certaines dispositions qui interdisent l'intimidation, laquelle consiste essentiellement à tenter d'empêcher une personne de poser un geste qu'elle a le droit de poser, comme contacter la police, en menaçant cette personne d'user de violence contre elle ou de lui porter préjudice. Le Code criminel interdit également les tentatives d'obstruction de la justice, à savoir l'ingérence dans des enquêtes et dans des poursuites criminelles.
Les infractions actuelles ne suffisent pas à réprimer efficacement les menaces et actions visant à empêcher des employés de collaborer avec les organismes d'exécution de la loi ou à punir ceux qui le font.
Encore une fois, le gouvernement du Canada a répondu. L'ajout d'une infraction ciblée au projet de loi C-46 contribuera à décourager ce type de conduite inappropriée de la part des employeurs tout en contribuant à encourager les initiés à coopérer à l'application de la loi. Cette nouvelle infraction enverra un message clair selon lequel cette forme d'intimidation ne sera pas tolérée. Je signale aux députés que cette infraction contrecarrera les efforts visant à empêcher les employés de parler à un organisme d'exécution de la loi au sujet de tout type de conduite illégale et non seulement de fraudes sur les valeurs mobilières.
Le fait d'encourager ceux et celles qui sont au courant d'écarts de conduite à coopérer avec les autorités facilitera la détection des fraudes sur le marché financier et d'autres formes de fautes commises par des employés et contribuera à l'application des peines fédérales et provinciales conformément aux lois de réglementation touchant les valeurs mobilières et à d'autres lois régissant les actions des sociétés.
J'aimerais maintenant parler des peines que le projet de loi prévoit. Le projet de loi C-46 prévoit de lourdes peines qui vont dans le sens de l'engagement pris par le Canada de faire en sorte que les personnes reconnues coupables de fraude sur le marché financier et de fraude commise par des employés se voient imposer des peines appropriées pour leur écart de conduite et le tort qu'elles font aux Canadiens.
En plus de la peine d'emprisonnement maximale de dix ans prévue pour le délit d'initié et de la peine de cinq ans pour les menaces et représailles envers un employé, le projet de loi C-46 fait passer de 10 à 14 ans la peine maximale pouvant être infligée pour les fraudes, et double la peine maximale pour les manipulations frauduleuses d'opérations boursières, qu'il fait passer de cinq à dix ans. Il convient de signaler qu'aux termes du Code criminel, la peine d'emprisonnement la plus élevée est de 14 ans, exception faite de l'emprisonnement à perpétuité.
Les peines proposées augmentent donc les peines maximales infligées pour les fraudes sur les marchés financiers, de manière à reconnaître la gravité de ces fraudes et les effets dévastateurs qu'elles peuvent avoir sur notre économie.
Par ailleurs, le projet de loi C-46 codifie certaines règles applicables aux circonstances aggravantes et atténuantes lors de la détermination de la peine dans le cas de fraudes et de manipulations frauduleuses, de manière à ce que les tribunaux infligent des peines qui reflètent les torts économiques et sociaux de ces crimes. Le gouvernement croit que cette codification améliorera aussi les peines infligées pour des infractions commises par les employés en général.
Permettez-moi de traiter de la question de la compétence parallèle. Le partenariat est une notion clé qui donne vie au projet de loi C-46. Par conséquent, nous proposons le recours à une compétence parallèle en matière de poursuites en guise de complément aux autorités et aux ressources provinciales dans les cas de fraude majeure sur les marchés financiers auxquels s'intéressent les groupes d'enquête intégrés.
La participation du fédéral se limiterait aux quelques cas qui menacent l'intérêt national pour l'intégrité des marchés financiers.
Qu'on me comprenne bien. Nous n'avons pas l'intention de remplacer ni de diminuer la compétence provinciale en matière de poursuites, mais de la compléter. Voilà pourquoi des fonctionnaires du ministère de la Justice ont amorcé un dialogue avec les autorités provinciales compétentes sur l'élaboration de protocoles conjoints destinés à protéger la compétence des provinces, tout en permettant, lorsque cela est souhaitable ou nécessaire, le recours à des ressources fédérales en matière de poursuites.
Le gouvernement du Canada entend travailler avec les provinces à l'établissement de protocoles afin de garantir une mise en oeuvre coordonnée et efficace d'une autorité parallèle. L'autorité parallèle proposée répond aux préoccupations exprimées à l'échelle du pays au sujet de la confiance des investisseurs dans les marchés financiers canadiens. À l'aide de partenariats efficaces avec nos collègues provinciaux, nous pourrons rehausser le niveau de confiance des investisseurs et traduire en justice les personnes qui portent atteinte à cette confiance. Je me réjouis à la perspective de poursuivre cette relation.
Il faut également réfléchir à la façon de recueillir des preuves dans des situations de ce genre. Je me reporterai à cette fin aux dispositions du projet de loi C-46 qui traitent de cette question.
Dans le discours du Trône, le gouvernement s'est engagé à créer de meilleurs outils pour accroître les capacités de collecte de preuves des enquêteurs. C'est précisément ce que fait le projet de loi C-46 en proposant des modifications au Code criminel en vue créer des ordonnances de production, lesquelles s'apparentent à des mandats de perquisition. Mais si ceux-ci permettent aux policiers de perquisitionner un endroit pour y trouver des éléments de preuve, les ordonnances de production obligent la personne à présenter des informations pertinentes à la police.
Bien que ce moyen d'enquête soit tout nouveau dans le Code criminel, il existe déjà dans le droit canadien, notamment dans la Loi sur la concurrence. On en fait également un recours limité en vertu d'autres lois. Il s'agirait donc d'étendre l'usage de pratiques existantes. Ainsi, lorsqu'un policier se présente dans une banque avec un mandat pour saisir des dossiers, il ne ferme pas la banque habituellement pour se procurer ces dossiers. Et il ne saisit pas non plus le système informatique de la banque.
D'habitude, celui qui possède l'information recherchée au moyen de l'ordonnance communiquera lui-même l'information à la police. Il y a deux raisons pour cela: premièrement, c'est plus pratique pour l'institution bancaire, car ses activités ne sont pas interrompues; deuxièmement, c'est plus rentable et cela mobilise moins de temps des policiers.
Les ordonnances de communication dont il est fait état dans le projet de loi C-46 ont été créées dans le contexte des fraudes sur les marchés financiers, mais elles sont conçues de manière à ne pas s'appliquer uniquement aux enquêtes sur les marchés financiers, mais aussi à toutes les infractions au Code criminel pour lesquelles on peut obtenir un mandat de perquisition ordinaire. Comme les nouvelles ordonnances de communication ont une vaste portée, nous avons cru bon d'inclure les mêmes garanties judiciaires requises par les dispositions du Code criminel concernant les mandats de perquisition.
Les organismes chargés d'appliquer la loi et les procureurs de la Couronne réclamaient un nouvel outil d'enquête depuis un certain temps et, avec la popularité d'Internet et l'adoption généralisée de nouvelles technologies de communication, la création de cet outil d'enquête tombe à point nommé.
Les ordonnances de communication régleront un certain nombre de problèmes embêtants pour les enquêteurs, dont les enquêtes à l'étranger et les problèmes de délais. Conformément à ces nouvelles ordonnances, la personne qui aura en sa possession les documents, données ou renseignements requis ou qui en aura la garde devra produire ceux-ci, qu'ils se trouvent au Canada ou à l'étranger. Par conséquent, dans la mesure où la personne possède les renseignements pertinents ou en a la garde, elle devra les produire, peu importe où ils se trouvent. Cela règle le problème attribuable, en partie, à l'entreposage de données outremer à peu de frais.
Deuxièmement, les nouvelles ordonnances de communication devront être exécutées rapidement; ainsi, la tierce partie à qui on aura signifié une ordonnance devra produire les renseignements dans les délais prescrits dans l'ordonnance ou elle devra faire rapport au tribunal, dans les délais prévus, afin d'expliquer pourquoi elle ne peut se conformer à l'ordonnance. Cela règle le problème inhérent aux ententes officieuses, c'est-à-dire leur caractère officieux et le fait qu'elles sont souvent dépourvues de conditions particulières à respecter, par exemple, des délais.
Dans certains cas, la police a dû attendre jusqu'à un an avant d'obtenir des renseignements d'une tierce partie qui en avait la garde. Le projet de loi à l'étude établit deux types d'ordonnance de communication dans le Code criminel afin d'améliorer la capacité générale des enquêteurs de recueillir des preuves. L'ordonnance de communication générale obligera une personne autre que celle visée par l'enquête à produire des documents ou des données ou à créer et à produire un document fondé sur des données ou des documents existants.
À titre d'exemple, une ordonnance de communication émise à l'endroit d'une banque pourrait obliger celle-ci à réunir les renseignements concernant directement un client, mais non pas indirectement, et à les fournir à la police. Avant d'émettre une telle ordonnance, le juge doit être convaincu qu'il y a de bonnes raisons de croire qu'une infraction a été commise, que des documents ou des données spécifiques fourniront une preuve relative à l'infraction commise et que la personne visée par l'ordonnance a ces documents ou ces données en sa possession ou sous son contrôle. Il s'agit là des mêmes mesures de protection juridiques fondamentales que prévoient actuellement les dispositions du Code criminel pour un mandat de perquisition.
Le deuxième type d'ordonnance de communication est spécifique. C'est une ordonnance conçue comme étant un instrument d'enquête en première étape, portant uniquement sur des types précis de renseignements dont on s'attend qu'ils soient moins confidentiels. Avant de l'émettre, le juge ou le jury doit être convaincu qu'il y a de bonnes raisons de croire que les renseignements aideront à faire progresser l'enquête sur une infraction. Une ordonnance de ce type, d'une portée plus limitée, ne pourrait viser que des institutions financières ou d'autres organisations désignées dans la loi.
De cette manière, les détails généraux d'un compte bancaire, tels que le nom du détenteur du compte, le type et le statut d'un compte, pourraient être obtenus moyennant une ordonnance de communication pertinente.
Je suis content de m'être exprimé sur ce projet de loi. Celui-ci reflète la façon dont le gouvernement entend réprimer les fraudes graves en matière de valeurs, qui menacent sérieusement la confiance des investisseurs en la stabilité de nos marchés et de notre économie.
Le président suppléant (M. Bélair): Avant de passer aux questions ou aux observations, il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: le député de Windsor-Ouest, l'industrie automobile; le très honorable député de Calgary-Centre, le député de LaSalle—Émard.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-46. Je me demande s'il sera adopté dans le cadre des travaux de la Chambre et s'il saura nous convaincre. Mais, si tout va bien, c'est bien ce qui aura lieu.
J'aimerais poser au député une question précise sur l'engagement à imposer des sentences. Les sentences sont plus douces qu'aux États-Unis. Or, ce qui m'inquiète, c'est que des Canadiens--retraités ou investisseurs--ou des entreprises sont touchés par ces scandales. Certains individus pourraient s'en tirer avec une peine minimale ou une peine qui ne comporte pas un séjour en prison, alors que leurs activités continueraient d'avoir des conséquences négatives sur la vie de quelqu'un et les biens de sa famille durant 10, 20 ou 30 ans.
Ma question porte précisément sur cette partie du projet de loi et sur toute autre mesure qu'on pourrait envisager, à l'étape du comité, pour renforcer l'application de la loi. Pour l'instant, j'ai l'impression que ce projet de loi utilise des gants blancs avec les coupables, ce qui ne permet pas de créer la confiance.
M. Paul Harold Macklin: Monsieur le Président, cette question est fort intéressante. Une partie du projet de loi, qui donne l'essentiel du processus de détermination de la peine, est très positif. Il s'agit de la disposition traitant de la détermination des circonstances aggravantes dont il faut tenir compte. Ces dernières sont très importantes. On examine parfois les facteurs pris en considération dans la détermination de la peine des personnes ayant commis ce genre de crime, et on peut tenir compte de la réputation générale et passée de l'accusé et de la façon dont il est perçu dans la collectivité.
Le projet de loi inverse le processus et précise qu'il ne faut pas en tenir compte. La disposition se lit comme suit:
Le tribunal ne prend pas en considération à titre de circonstances atténuantes l’emploi qu’occupe le délinquant, ses compétences professionnelles ni son statut ou sa réputation dans la collectivité, si ces facteurs ont contribué à la perpétration de l’infraction, ont été utilisés pour la commettre ou y étaient liés. |
Il est très important de faire valoir devant les tribunaux les circonstances qui, selon nous, ne sont pas aggravantes pour ne pas réduire les peines. Ce message doit être transmis, et nous le faisons clairement dans le projet de loi où certaines peines sont doublées, et d'autres, augmentées. Nous disons très clairement et directement que nous tenons à maintenir l'intégrité du régime de marché au Canada et que nous prendrons toutes les mesures raisonnables pour le faire et pour veiller à la protection de tous les citoyens du pays.
M. Vic Toews (Provencher, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat d'aujourd'hui sur le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel, qui porte sur des infractions reliées à la fraude sur les marchés financiers. Ce projet de loi a été rédigé à la suite de scandales financiers qui ont eu lieu aux États-Unis et qui ont affaibli la confiance des investisseurs dans les marchés financiers dans le monde entier. Une loi américaine semblable a été adoptée en juillet dernier, la Sarbanes-Oxley Act de 2002.
Comme le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice l'a dit, le projet de loi C-46 propose un certain nombre de modifications visant à renforcer la confiance des gens dans les marchés et à protéger les investisseurs contre la fraude et d'autres agissements illégaux.
La nouvelle loi prévoirait une nouvelle infraction au Code criminel interdisant le délit d'initié, qui serait passible d'une peine maximale de dix ans d'emprisonnement. Une autre nouvelle infraction au Code criminel interdirait les menaces et représailles envers les employés afin de protéger les dénonciateurs. Cette infraction serait passible d'une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement. Les peines maximales pour les infractions actuelles en matière de fraude dans le Code criminel seraient portées à 14 ans d'emprisonnement comparativement à dix ans à l'heure actuelle, alors que la sanction passerait de cinq à dix ans d'emprisonnement pour toute manipulation dolosive des opérations boursières.
Le secrétaire parlementaire a signalé qu'il y aurait des facteurs aggravants précis dans la détermination de la peine, qui comprendront maintenant la portée des torts économiques causés par l'infraction. Comme il l'a dit, les circonstance atténuantes actuelles comme la réputation ou le statut, seraient inapplicables à ceux qui commettent de graves fraudes sur les marchés financiers si les facteurs en question ont servi à commettre leur infraction.
Ce sont mes préoccupations relativement à ce projet de loi et elles concernent les dispositions sur la détermination de la peine. Il s'agit d'un gouvernement qui ne cesse d'affirmer qu'il se montrera impitoyable envers les criminels. Si nous remontons à la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents et aux dispositions portant sur les délinquants dangereux, les ministériels ont toujours utilisés de beaux slogans destinés à cacher aux gens la vérité sur ce que renfermait le projet de loi.
La semaine dernière, la Cour suprême du Canada a corrigé l'ancien ministre de la Justice, qui a déclaré qu'il présentait une mesure législative pour protéger les Canadiens contre les délinquants dangereux. En fait, lorsque le projet de loi a été analysé, comme il l'a été par les tribunaux et la Cour suprême du Canada, on s'est aperçu que le projet de loi tel qu'adopté en 1997 faisait qu'il était plus facile pour les criminels d'éviter de rester derrière les barreaux. L'option d'un statut de délinquant à contrôler permet maintenant aux délinquants dangereux en question de réclamer un tel statut et d'être condamnés à purger des peines dans la collectivité ou de profiter d'une forme de libération conditionnelle.
L'autre argument que le gouvernement invoque constamment lorsqu'il parle de durcir le ton est d'imposer des peines maximales plus longues. Toutefois, nous savons tous qu'il n'envisage pas sérieusement de prendre des mesures pour prévenir les crimes en imposant des peines substantielles parce qu'en fait, il n'impose même pas des peines minimales. Qu'une peine soit de 10 ou de 14 ans, nous avons vu ce que les tribunaux font. Ils recourent simplement aux autres solutions, comme les condamnations conditionnelles, les condamnations avec sursis ou n'importe quelle autre alternative à l'emprisonnement, permettant ainsi aux individus de ne pas faire face à leurs responsabilités.
J'ai été témoin de cela dans le système juridique où j'ai évolué. Lorsque j'ai commencé à pratiquer le droit, il n'était pas inhabituel que des avocats ayant fraudé des clients se voient imposer des peines d'emprisonnement substantielles.
Évidemment, au cours des dernières années, ces avocats qui ont trompé des clients, qui ont causé des dommages incroyables aux économies de certaines personnes et ont sérieusement entaché la réputation du Barreau, n'ont fait l'objet que de condamnations conditionnelles. Ils ont réussi à éviter la prison à cause de la tendance actuelle des tribunaux, tel que le prescrit la loi, à recourir à des solutions de rechange au lieu d'imposer l'incarcération.
Encore une fois, nous sommes témoins de la même approche. Le gouvernement répète qu'il durcira sa position à l'égard des gens qui roulent les investisseurs, pourtant il n'impose même pas de peines minimales. Il se contente tout simplement de faire un clin d'oeil aux magistrats, de leur dire de ne pas s'inquiéter au sujet de ses promesses de peines plus musclées et d'agir à leur guise.
Compte tenu de l'orientation que doivent suivre les juges en vertu d'autres parties du Code criminel, le projet de loi C-46 donnera lieu à l'imposition du même genre de peines et de solutions de rechange à l'incarcération. C'est ce qui s'est produit dans le cas des délinquants dangereux et des jeunes contrevenants. C'est ce qui est arrivé presque chaque fois que le gouvernement a mis de l'avant une soi-disant réforme. J'estime que si nous voulons durcir le ton à l'égard des individus qui roulent les investisseurs sur les marchés, il faut imposer des peines minimales.
Le secrétaire parlementaire a indiqué que des ressources additionnelles seraient fournies pour les enquêtes et les poursuites dans les cas les plus graves de fraudes sur les marchés financiers, notamment jusqu'à 120 millions de dollars en fonds fédéraux sur les cinq prochaines années. C'est absolument risible. Lors du récent procès des membres d'une gang en Alberta, la seule défense des individus en cause a coûté 20 millions de dollars et le procès a finalement avorté. Les dizaines de millions de dollars consacrés à ce seul procès sont disparus. Une somme de 120 millions de dollars ne nous mènera pas loin dans la lutte contre ce genre de fraude.
Le secrétaire parlementaire a affirmé que le gouvernement conclurait un accord quelconque avec les provinces. Tout ce que je peux dire, c'est que les provinces devront se tenir sur leurs gardes. Nous avons déjà vu des ententes entre les provinces et le gouvernement fédéral. Rappelons-nous du partenariat à parts égales dans le domaine de la santé. Le gouvernement fédéral paie maintenant une part de 15 p. 100 environ. Rappelons-nous de l'entente de partenariat à parts égales pour l'aide juridique. Le gouvernement fédéral assume maintenant une portion de 15 à 20 p. 100 des coûts.
Une voix: La Loi sur les jeunes contrevenants.
M. Vic Toews: Notre collègue de la Colombie-Britannique me rappelle le cas de la Loi sur les jeunes contrevenants.
J'étais alors ministre provincial de la Justice au Manitoba et je me souviens d'avoir discuté avec le gouvernement fédéral. Il nous a remis quelques millions de dollars, mais sa contribution n'a pas couvert tous les coûts de mise en oeuvre de la Loi sur les jeunes contrevenants, loin s'en faut. Ce sont ensuite les provinces qui ont dû assumer les coûts des poursuites.
Pour l'exécution de sa propre loi, le gouvernement fédéral paye probablement une part de 10, 15 ou 20 p. 100. Aux provinces qui pourraient se laisser séduire par les 120 millions, je conseille d'exiger des détails par écrit sur ce qu'elles obtiendront réellement. Il ne faut pas prendre la parole de ces gens. Nous les avons vus manquer à leur parole à maintes et maintes reprises.
Le projet de loi C-46 vise à autoriser le procureur général du Canada à intenter des poursuites dans un nombre limité de cas qui menacent l'intérêt national et l'intégrité des marchés financiers. Franchement, je dirais aux provinces de laisser le gouvernement fédéral intenter des poursuites dans tous les cas. Il se rendra compte, alors, à quel point il est coûteux, encombrant et complexe de le faire. Le ministère de la Justice emploie des milliers d'avocats qui rédigent toutes ces lois, qui n'ont pas à les défendre devant un tribunal, ni à intenter des poursuites en vertu de ces lois.
Ces avocats ont rédigé une loi antigang qui est absolument inapplicable, parce que trop complexe. Nous luttons contre un problème du XXIe siècle avec une loi du XIXe siècle. Les avocats du ministère de la Justice se préoccupent davantage de ce que les tribunaux diront au sujet de la Charte des droits, que de poursuivre au criminel et d'aller dire aux tribunaux pourquoi il est important de mettre ces criminels derrière les barreaux.
Nous avons mis le système sens dessus-dessous, et le procureur général du Canada vient nous dire qu'il voudrait pouvoir intenter des poursuites à l'égard d'un nombre limité de ces crimes. Les provinces devraient laisser le gouvernement fédéral intenter des poursuites dans tous les cas. Il se rendrait compte que les 120 millions de dollars dureront peut-être un an, mais pas cinq ans et plus.
De façon générale, cependant, à l'exception de la question des ressources et de l'incapacité du gouvernement de prévoir des peines minimales, j'appuie l'intention générale du projet de loi. Les Canadiens reconnaissent qu'il est nécessaire de préserver la confiance envers le secteur des entreprises et envers les marchés financiers. Ils ont cependant de la difficulté à prendre le ministre de la Justice et son secrétaire parlementaire au sérieux lorsqu'ils affirment qu'il est important de réprimer sévèrement l'utilisation abusive, par des entreprises, de l'argent investi par le public, alors que rien n'est fait pour empêcher le gouvernement libéral de faire une utilisation abusive de l'argent des contribuables.
Il y a tout juste deux semaines, le député de St. Albert révélait qu'un ancien adjoint de la ministre du Patrimoine avait dépensé, en tout juste moins de deux ans, plus de 50 000 $ en frais de nourriture et d'hébergement, sans fournir de pièces justificatives pour la plupart des factures. La semaine dernière, ou la semaine d'avant, les comptes de dépenses douteux de 600 000 $ du directeur du Musée des beaux-arts du Canada sont venus s'ajouter à la liste des cas de gaspillage et de mauvaise gestion. Et cette liste ne comprend pas que le personnel ou des fonctionnaires nommés. Les plus hauts dirigeants gouvernementaux y figurent aussi.
L'an dernier, des entreprises privées comme le Groupe Everest et Lafleur Communications ont fait l'objet d'une enquête criminelle après d'intenses pressions de la part de l'Alliance canadienne. La vérificatrice générale a déclaré que des hauts fonctionnaires avaient enfreint toutes les règles en attribuant des contrats à des personnes ayant fait des dons au Parti libéral.
La corruption ayant entouré le programme des commandites a mené à des révélations de gaspillage totalisant 230 millions de dollars dans les dépenses de publicité du gouvernement. Plusieurs ministres libéraux ont été obligés de démissionner lorsque le premier ministre n'a plus été en mesure de défendre les gestes qu'ils avaient posés.
L'ancien ministre des Travaux publics, Alfonso Gagliano, a été mêlé à l'adjudication de contrats de publicité douteux et il a été chassé fort opportunément du Cabinet pour aller occuper le poste d'ambassadeur du Danemark que les libéraux lui ont accordé par favoritisme.
L'ancien ministre de la Défense a été congédié après que l'on eut révélé qu'il avait adjugé un contrat sans appel d'offres à une amie personnelle. L'ancien solliciteur général a fait l'objet d'une enquête de la part du conseiller en éthique et il a démissionné après que l'on eut constaté qu'il avait enfreint les lignes directrices en matière d'éthique en accordant des contrats à des amis du parti.
C'est ce même gouvernement qui nous dit maintenant que nous devons faire preuve de fermeté à l'endroit du secteur privé concernant l'utilisation abusive de l'argent que le public investit dans les marchés financiers. C'est pourtant un gouvernement qui n'a absolument rien fait pour mettre de l'ordre dans ses propres affaires. C'est un autre exemple des motifs pour lesquels les députés ne veulent pas des peines minimales.
Comme je l'ai dit auparavant, ils veulent tout simplement faire un clin d'oeil aux juges pour leur signifier que tout est normal et que le gouvernement doit augmenter les peines maximales, mais que les juges n'auront pas à s'en préoccuper parce qu'ils peuvent faire ce qu'ils veulent à l'autre bout.
Le ministre de la Justice s'empresse de souligner que 55 p. 100 des Canadiens ont perdu confiance dans les marchés boursiers par suite des récents scandales mettant en cause des sociétés. Il est amusant de constater qu'il a oublié de mentionner que, selon des sondages réalisés en 2002, 69 p. 100 des Canadiens estiment que le système politique fédéral est corrompu.
Le ministre de la Justice est disposé à intervenir en ce qui concerne le secteur privé devant le fait que 55 p. 100 des Canadiens souhaitent que des changements soient apportés au marché boursier. Pourtant, alors même que 69 p. 100 des Canadiens disent que le système fédéral est corrompu, le ministre de la Justice et son secrétaire parlementaire demeurent tout à fait muets sur cette importante question.
Le gouvernement libéral du Canada doit mettre de l'ordre dans ses propres affaires s'il veut avoir quelque crédibilité que ce soit au moment d'appliquer toute nouvelle loi ayant pour objet de mettre un frein à la criminalité des sociétés.
Cela étant dit, j'estime qu'il est important que les députés analysent de très près la mesure législative, qu'ils présentent les amendements appropriés et qu'ils appuient une loi qui décourage la fraude sur les marchés financiers. C'est un important projet de loi et on devrait veiller à ce qu'il aille de l'avant.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis quelque peu déçu de certaines observations que le député vient de faire au sujet de l'ancien ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux. Il a laissé entendre qu'il avait été mis en cause dans certaines activités. Il n'a pas dit par qui. L'ancien ministre n'a pas été mis en cause par la vérificatrice générale, qui a fait rapport sur les activités de deux bureaucrates, ni dans des accusations ou des renvois à la GRC. Le député voudra peut-être préciser sa pensée.
Du même souffle, le député a parlé de l'ancien ministre de la Défense. Le député sait qu'il ne s'agissait pas d'une question de légalité ou de corruption. Il fallait plutôt savoir si un certain comportement était conforme aux normes d'éthique. Il n'y avait rien d'illégal. Je suis désolé que le député ait pris cette tangente.
En disant que 69 p. 100 des Canadiens estimaient que le gouvernement fédéral était corrompu, le député n'a pas cité le sondage avec exactitude. Il était question des députés fédéraux, de nous tous, et non du gouvernement. Le député a fait une affirmation inexacte. Je présume que c'est plutôt normal.
Cela dit, le député a de solides connaissances sur le sujet à l'étude. Je connais ses antécédents et le travail qu'il fait ici et a fait comme député provincial. Certaines des questions qu'il a soulevées me préoccupent, notamment la question de la rigueur avec laquelle il faut sévir.
Nous avons légiféré pour que les personnes coupables d'abus de confiance, comme ceux qui sont reconnus coupables de violence conjugale, soient passibles de peines plus lourdes aux termes du Code criminel, en raison de la relation particulière qui est en cause. C'est une tendance qu'on a observée à la Chambre.
Le député croit-il, fort de son expérience, que ce qui s'est passé jusqu'à maintenant devant les tribunaux tient à l'insuffisance des ressources dans le système judiciaire pour faire appliquer correctement les lois du Canada dans ce cas-ci ou dans des cas analogues? Ou bien est-ce que les tribunaux décident de ne pas aborder ces délits de la façon envisagée par les législateurs?
M. Vic Toews: Monsieur le Président, parlons brièvement de certains sujets connexes concernant l'ancien ministre des Travaux publics.
Mon parti a demandé à ce que cet homme vienne justifier sa conduite. Le gouvernement libéral et les membres du comité lui ont refusé la possibilité de témoigner devant ce comité. Je m'en tiens à ce que j'ai dit. Il a participé à certaines affaires très douteuses et il devrait avoir la possibilité de se faire entendre et de laver sa réputation. Je me réjouirais de cette possibilité. Je suis sûr que le député aimerait également voir cette personne se présenter devant la Chambre pour laver sa réputation, si rien ne la lie à ces affaires douteuses.
En ce qui concerne les normes d'éthique, je ne ferai pas d'autres observations sur la question de l'ancien ministre de la Défense. Qu'on parle d'acte illégal ou de non conformité aux normes d'éthique, je pense que nous, députés à la Chambre, sommes tous liés par une norme plus rigoureuse que nous devons respecter, et je ne vais pas jouer sur les mots.
En ce qui concerne ma déclaration sur le taux de 69 p. 100 des Canadiens, ce que j'ai dit, et je crois l'avoir dit clairement, et ce qui a été exprimé dans les bureaux de vote, c'est que le système politique fédéral est corrompu, et je fais partie de ce système politique, et cela se répercute de façon négative sur tous les députés.
En ce concerne les questions portant précisément sur l'insuffisance des ressources ou des lois, je dirai qu'effectivement il existe de graves problèmes de ressources pour mettre en application certaines lois.
La police de Toronto a répété à plusieurs reprises que ses ressources étaient notamment insuffisantes pour lutter efficacement contre les amateurs de pornographie juvénile. Elle travaille à la limite de sa capacité pour faire face aux défis technologiques qui se posent dans ce domaine. Dans certains cas, la police doit examiner un demi-million d'images, les classer par catégories et les cataloguer avant de les envoyer à l'avocat de la défense. Cela a toutes sortes de conséquences sur le plan des ressources.
Le gouvernement fédéral n'a certainement pas fait sa part dans ce domaine. Le chef de police de Toronto a mis en évidence ce problème de manque de ressources en précisant dans quels secteurs et programmes il serait possible d'aller chercher celles qui manquent. Le registre des armes à feu, que le chef de police considère comme un colossal gaspillage d'argent, fait partie de ces secteurs.
Certaines ressources sont insuffisantes, et il en va de même de certaines lois.
L'une des questions que j'espérais voir traiter par l'actuel ministre de la Justice et son prédécesseur concernait les enquêtes préliminaires. Dans ce type de procès, les enquêtes préliminaires vont s'étaler sur plusieurs années. Les procureurs généraux des provinces ont pourtant fait savoir qu'il n'était pas nécessaire de mener ces enquêtes préliminaires.
Dans le cadre de certaines affaires récentes dont la Cour suprême a été saisie, comme l'affaire Stinchcombe, on a enjoint à l'État de produire toute la documentation. Les enquêtes préliminaires perdent tout leur sens. Elles sont utilisées pour étirer le processus. Cela ne fait qu'aggraver le problème des ressources.
Si le gouvernement osait vraiment modifier la loi pour rendre le système judiciaire plus efficace, il serait possible de résoudre un grand nombre de problèmes de ressources en faisant simplement en sorte que la loi tienne compte de la technologie du XXIe siècle.
Il faut combiner les deux. Modifions la loi pour éliminer les anachronismes et augmentons les ressources des programmes là où elles sont insuffisantes pour répondre à un besoin légitime de justice.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, l'un des aspects intéressants de ce projet de loi, c'est la création d'un nouveau service public. Au cours des dix dernières années, nous avons vu un nettoyage interminable des différents services dans la fonction publique, qui visait à supprimer les structures mêmes de l'administration gouvernementale. Aujourd'hui, nous assistons à la création d'un nouvel organisme, d'une nouvelle entité formée d'équipes qui doivent oeuvrer sur le terrain et lutter contre la criminalité des sociétés. C'est là en soi un indice tendant à prouver l'échec du modèle selon lequel on se contente de tout confier au secteur privé et de faire confiance à sa bonne volonté pour nos propres besoins et de se fier à lui.
Ce que l'on nous propose, c'est la création d'une autre structure bureaucratique qui, laisse-t-on entendre maintenant, nécessiterait initialement un investissement de 120 millions de dollars sur une période de cinq ans.
Aux yeux du député, cette structure est une farce. Alors, quel genre de ressources devrions-nous affecter à cette nouvelle structure? Comment pouvons-nous lui conférer les caractéristiques qui lui permettrait de policer ce secteur?
M. Vic Toews: Monsieur le Président, le député pose une excellente question. Comment utiliser adéquatement les ressources nécessaires pour nous attaquer à ce problème très sérieux? Faisons-nous directement appel à la police? Faisons-nous appel aux organismes de réglementation actuels? Nous contentons-nous d'adopter de nouvelles lois?
Dans la suite de ce débat, j'aimerais entendre dans quelle mesure cela améliorerait la détection de l'activité criminelle. Dans mon esprit, les organismes autoréglementés comportent des aspects intéressants : ils possèdent cette connaissance interne qui leur permet d'agir avec efficacité et efficience.
[Français]
M. Richard Marceau (Charlesbourg—Jacques-Cartier, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir, au nom de mes collègues du Bloc québécois, d'amorcer le débat portant deuxième lecture du projet de loi C-46 parrainé par la ministre de la Justice et portant sur la prévention de la fraude sur les marchés financiers et l'obtention d'éléments de preuve à cet égard.
Ce projet de loi, on s'en rappelle, a été déposé à la toute fin de la session du printemps dernier, après des mois d'attente et de pressions de toutes parts. En effet, au cours des 24 derniers mois, les scandales financiers titanesques que sont devenus les Enron, Arthur Anderson et WorldCom, pour ne nommer que ceux-là, ont démontré l'urgence pour le gouvernement de légiférer sur la question afin de protéger non seulement les investisseurs, mais aussi tout le système économique.
Or, le gouvernement a lamentablement tardé à agir, trop occupé qu'il était sans doute à gérer la crise liée au leadership du Parti libéral du Canada. Le projet de loi est venu, bien tard malheureusement, mais nous pouvons néanmoins nous réjouir de son dépôt récent. Je précise par la même occasion que le Bloc québécois verra à appuyer l'adoption rapide de ce projet de loi pour enfin encadrer de manière efficace les transactions financières et la reddition de compte des vérificateurs des entreprises. À cet égard, le Bloc québécois verra à présenter certains amendements au texte législatif dont nous sommes saisis, afin d'en préciser non seulement la portée, mais aussi l'esprit. Je verrai à préciser ces éléments un peu plus en avant au cours de mon allocution.
Je vous rappellerai que dès l'automne 2002, le Bloc québécois a énergiquement pressé le gouvernement fédéral d'intervenir pour resserrer les dispositions du Code criminel, afin que les autorités puissent bénéficier de meilleurs outils pour lutter contre les fraudes corporatives. D'ailleurs, plusieurs éléments du projet de loi tirent leur origine de la contribution du Bloc au débat, mais nous déplorons du même souffle que certaines de nos suggestions n'aient pas été retenues.
En effet, nous entretenons certaines réserves importantes concernant un aspect particulier du projet de loi. Nous nous expliquons difficilement comment ce projet de loi pourrait prévoir qu'un procureur fédéral ait aussi compétence pour engager des poursuites liées à certaines infractions du Code criminel relatives à la fraude sur les marchés financiers. Cette situation est d'autant plus inquiétante pour nous du fait que le gouvernement fédéral a ouvertement annoncé son intention, ou du moins a laissé entendre, qu'il souhaitait créer un organisme canadien de réglementation des valeurs mobilières.
Or, comme vous le savez, et c'est un aspect particulièrement important pour le Bloc québécois, la réglementation des valeurs mobilières est clairement un domaine de compétence du gouvernement du Québec et des provinces et en conséquence, nous nous devons de faire en sorte que les différentes juridictions soient respectées et ainsi contrer les visées fédérales sur le sujet.
Mais ces discussions se tiendront à l'étape du comité, et je considère que nous devrions nous en tenir au principe du projet de loi pour l'instant. Ainsi, le projet de loi modifie le Code criminel et crée deux nouvelles infractions, soit le délit d'initié et l'interdit de menaces et représailles envers un employé qui dénoncerait la conduite illégale et répréhensible de l'employeur. Du coup, la peine maximale encourue pour certaines infractions, notamment la fraude, est augmentée et certaines règles applicables aux circonstances aggravantes et atténuantes seront codifiées pour en faciliter l'interprétation au moment de la détermination de la peine. De même, le projet de loi accorde au procureur général du Canada la compétence en matière de poursuite pour ces infractions.
Le texte crée également un nouveau mécanisme au titre duquel certaines personnes seront tenues de fournir des documents, des données ou des renseignements dans des cas bien précis. Comme je le mentionnais en introduction, il existe un contexte très précis portant à la nécessité de légiférer aujourd'hui dans le secteur financier.
Les scandales qui ont éclaté aux États-Unis nous ont fait prendre conscience de la fragilité de notre système financier et de notre dépendance collective envers celui-ci. En effet, certains pourraient croire que seuls les gros investisseurs peuvent être touchés par une débâcle financière et que, de ce fait, les simples épargnants comme la majorité de la population sont relativement hors de danger. Eh bien, il n'en est absolument rien.
Dans les faits, les acteurs financiers les plus gros et les plus puissants sont représentés par toute la panoplie de fonds de pension que nous connaissons, et ceci signifie qu'inévitablement une partie de ces fonds renferme les économies de nos citoyens. Ainsi, dans l'éventualité où un fonds de pension subit des pertes importantes, ce seront les petits investisseurs qui en paieront le gros prix, allant jusqu'à perdre l'épargne de toute une vie et voir leurs projets de retraite s'envoler en fumée.
À cet égard, et sans trop vouloir sombrer dans les chiffres, il est important de noter, pour la bonne compréhension des éléments en jeu, qu'au Canada en 1998, les actifs des caisses de retraite en fiducie canadienne représentaient plus de 500 milliards de dollars. Statistique Canada, dans un rapport intitulé «Caisses de retraite en fiducie: statistiques financières», évaluait, toujours en 1998, que des 500 milliards de dollars en actifs des caisses de retraite, environ 115 milliards de dollars étaient investis en actions canadiennes et quelque 57 milliards de dollars avaient été investis en actions étrangères.
Ces sommes astronomiques pour le commun des mortels, mais somme toute ordinaires sur les marchés financiers, sont le fruit de la contribution de quatre millions de travailleurs québécois et canadiens qui cotisent activement à ces caisses. À titre d'exemple, seuls les actifs financiers des banques à charte devancent la réserve de capitaux que constitue l'actif des caisses.
Il existe aussi un autre fait important démontrant la nécessité d'encadrer la probité des administrateurs. Cela découle de la propension des caisses de retraite en fiducie à favoriser davantage les placements en actions au détriment des titres à revenu fixe. De ce fait, et à la lumière des chiffres énoncés précédemment, nous ne pouvons que constater combien dévastatrice pourrait s'avérer une crise financière au Canada qui serait de l'ampleur de celle qui a été vécue chez nos voisins du sud. Les conséquences sur les revenus de retraite de millions de ménages seraient incommensurables et ce sont précisément ces ménages que nous nous devons de protéger.
Heureusement, à ce jour, les bourses canadiennes ont été relativement épargnées par les malversations à grande échelle, à l'exception des scandales attribués aux anciens dirigeants de Cinar et de Nortel. Cependant, nous estimons qu'en dépit du fait que nos systèmes de réglementation des valeurs mobilières soient, de l'avis de plusieurs experts, beaucoup plus complets que ceux qui existaient aux États-Unis avant la crise financière, il importe néanmoins d'envoyer impérativement un message clair aux dirigeants de sociétés à l'effet que les malversations financières constituent des crimes graves et qu'à ce titre, les peines infligées le seront tout autant.
Ce sont ces considérations qui ont poussé le Bloc québécois à demander, dès l'automne 2002, d'importantes modifications au Code criminel afin de fournir aux autorités compétentes de meilleures armes pour lutter contre les crimes de nature financière.
Ainsi, avec mon collègue de Joliette, nous avons proposé, il y a un an, d'ajouter un article au Code criminel rendant criminelles les transactions d'initiés afin de faire comprendre aux dirigeants de compagnies qu'il est intolérable qu'ils utilisent les informations confidentielles dont ils disposent en vertu de leurs fonctions, afin de réaliser des profits ou éviter des pertes. Il s'agit essentiellement d'une question de fair-play puisque les profits ainsi réalisés, ou encore les pertes évitées, se font au détriment des autres investisseurs n'ayant pas accès aux mêmes renseignements privilégiés.
Nous avions donc suggéré de modifier le Code criminel par l'adjonction, après l'article 382, d'une infraction criminelle touchant directement la transaction d'initié, laquelle aurait été passible d'une peine d'emprisonnement maximale de 10 ans. Nous nous réjouissons donc de la considération qu'a manifestée le gouvernement à notre proposition en la retenant pour l'inclure dans son projet de loi.
De même, le Bloc québécois proposait aussi de créer une nouvelle infraction de fraude de valeurs mobilières. Cette infraction, inspirée de la mesure adoptée récemment aux États-Unis, passible de 10 ans d'emprisonnement, interdira les fraudes dans le cas de vente ou d'achat de valeurs mobilières. À cet article, nous proposions aussi deux modifications à l'article 397 du Code criminel. Le libellé de ce même article stipule clairement qu'une infraction de fraude est commise par quiconque:
[...] détruit, mutile, altère ou falsifie tout livre, écrit, valeur ou document, ou y fait une fausse inscription ou omet un détail essentiel d'un livre, papier, écrit, valeur ou document, ou y altère un détail essentiel. |
À notre avis, cette disposition aurait pu s'appliquer dans les cas de fausses inscriptions à des états financiers. De même, le paragraphe 2 de cet article prévoit une infraction spécifique si la falsification du documents se fait dans le but de frauder des créanciers.
Pour les deux infractions, la peine actuelle est de cinq ans. Nous estimons qu'une peine semblable est si peu sévère qu'elle ne risque pas de décourager un ou des individus peu scrupuleux que des millions de dollars pourraient convaincre de frauder. En conséquence, nous avions proposé d'augmenter la peine maximale à 10 ans de pénitencier.
Finalement, nous proposions d'ajouter un troisième paragraphe à l'article 397 du Code criminel afin de préciser la falsification de documents dans le but de frauder les actionnaires. Nous estimons que ces derniers, qui ne bénéficient pas de garanties pour leurs investissements contrairement à la majorité des créanciers, constituent une catégorie plus vulnérable. De même, l'information qui leur est transmise, bien qu'accessible, n'est pas pour autant facile à assimiler.
Je vous rappelle que ces petits investisseurs sont inclus dans les grands fonds de pension et qu'à ce titre peu de gens savent précisément de quoi est composé leur portefeuille. En conséquence, nous nous expliquons mal le fait qu'il existe une infraction spécifique liée à la fraude dont sont victimes les créanciers et qu'en ce qui concernait les actionnaires, une disposition semblable ne serait pas incluse dans le Code criminel. C'est là précisément la lacune que souhaite corriger le Bloc québécois et nous avons bon espoir que le gouvernement se rendra à l'évidence de la singularité de cette situation.
Comme je le mentionnais précédemment, le gouvernement entend ajouter au Code criminel une disposition définissant la transaction d'initié et son caractère criminel passible d'une peine maximale de dix ans d'emprisonnement. Bien que le délit d'initié soit actuellement interdit au titre de la législation provinciale régissant la vente des valeurs au Canada et au titre de la Loi canadienne sur les sociétés par actions, la nouvelle infraction au Code criminel servirait pour les causes qui méritent une sanction plus sévère découlant du droit pénal.
Puisque cette nouvelle proposition d'infraction est directement inspirée de la proposition du Bloc québécois, nous ne pouvons que nous réjouir de son inclusion dans le projet de loi. Il semble en effet que, pour une fois, le gouvernement a entendu l'opposition et s'est rendu à ses arguments.
Il en va de même en ce qui concerne les menaces ou les représailles liées à l'emploi. En effet, il est nécessaire, voire impératif, d'accorder une protection spéciale aux employés qui dénonceraient une situation frauduleuse ou qui contribueraient à leur découverte en aidant les responsables de l'application de la loi dans leur enquête visant la mise à jour de telles situations. Ceci, d'une part dans le but de débusquer les cas de fraudes dans les marchés financiers, mais aussi de protéger les employés contre l'intimidation dont ils pourraient faire l'objet dans pareille situation.
Souvent, ces personnes jouent un rôle clé dans la divulgation des scandales chez les personnes morales, mais elles peuvent, en conséquence, être intimidées ou menacées, y compris par des mesures prises contre leur emploi ou leur moyen de subsistance. Une nouvelle infraction de menaces ou de représailles liées à l'emploi encouragerait les initiés à collaborer avec les responsables de l'application de la loi et punirait ceux et celles qui usent de rétorsion ou qui menacent ces personnes. Notons au passage que cette infraction entraînerait une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement si le projet de loi C-45 est adopté en ce sens.
Globalement, les peines d'emprisonnement prévues deviendraient plus lourdes pour assurer une certaine relation avec la gravité du crime commis et ses répercussions. De même, les réformes proposées établiraient des circonstances aggravantes dont les tribunaux devraient tenir compte dans la détermination de la peine. Ainsi, on prévoit, dans le projet de loi C-45, que les peines maximales passeront de 10 à 14 ans d'emprisonnement pour les infractions actuelles de fraude au titre du Code criminel et pour les fraudes ayant une incidence sur le marché public. La peine maximale d'emprisonnement pour manipulations frauduleuses de transactions de la Bourse des valeurs mobilières passerait de cinq à dix ans.
Des facteurs tels que l'ampleur des dommages économiques ou toute incidence négative sur la confiance des investisseurs ou la stabilité des marchés, ainsi définies comme des circonstances aggravantes, pourraient entraîner une peine accrue.
Il est aussi particulièrement intéressant de mentionner que les accusés, et finalement les personnes condamnées en vertu de ces dispositions, ne pourront invoquer leur bonne réputation dans la communauté ou au travail comme facteur atténuant dans la détermination de la peine. Ceci précisément parce que cet élément de la personnalité sert plus souvent qu'autrement à tromper et commettre les crimes. Nous reconnaissons que ces propositions sont très intéressantes, mais nous regrettons néanmoins que le gouvernement n'ait pas retenu nos suggestions quant à l'augmentation des peines à l'article 397 du Code criminel.
Dans une perspective différente, je souhaiterais attirer l'attention de la Chambre sur le fait que le projet de loi C-46 prévoit contraindre un professionnel à ne pas respecter son devoir visant à observer un secret professionnel.
En effet, la proposition législative du gouvernement obligerait, en certaines circonstances, un professionnel à communiquer des renseignements ou des documents, et même à préparer des documents, qui pourraient conduire à la divulgation d'éléments confidentiels faisant vraisemblablement partie de la vie privée d'une personne.
Ainsi, même si ces articles prévoient que l'ordonnance de communication peut être assortie de certaines conditions pour protéger les communications privilégiées, notamment entre un avocat et son client, il demeure que des informations confidentielles pourront être divulguées dans certaines circonstances. On doit donc se demander si le fait d'obliger un professionnel de communiquer des informations confidentielles pourrait miner la relation de confiance entre client et professionnel.
On prévoit cependant que toute personne visée par ces dispositions du projet de loi pourra adresser à un juge une requête visant à l'exempter de l'obligation de communiquer la totalité ou une partie des documents, données ou renseignements demandés. Il reste à voir quels seront les critères sur lesquels s'appuieront les juges pour refuser la communication de renseignements à caractère confidentiel.
Avant de conclure, j'aimerais revenir sur un détail que j'ai abordé en introduction concernant la conduite des poursuites par des procureurs fédéraux. En effet, cet élément comporte certains irritants qu'il nous faudrait corriger dès maintenant pour assurer l'entrée en vigueur rapide de la nouvelle loi.
Ainsi, comme vous le savez, la réglementation des marchés financiers est une compétence qui relève du Québec et des provinces. C'est aussi le cas pour ce que qui concerne l'administration de la justice, qui relève aussi du Québec et des provinces.
Or, au titre des réformes proposées, le procureur général du Canada aurait la compétence, conjointement avec les provinces et les territoires, d'entreprendre des poursuites concernant certaines infractions afférentes aux fraudes relevant du Code criminel, y compris l'infraction proposée de délit d'initié. L'intervention fédérale serait, semble-t-il, restreinte à un nombre limité de causes portant atteinte à l'intérêt national dans l'intégrité des marchés.
Selon les intentions dévoilées par le gouvernement fédéral pour qu'il y ait une coordination convenable, le gouvernement du Canada collaborera avec les provinces afin d'établir des protocoles de poursuites qui assureront la réalisation coordonnée et efficace de la juridiction concurrente.
Nous ne pouvons souscrire à cet empiétement délibéré du gouvernement fédéral dans les sphères de compétence constitutionnelle des provinces. Pire encore, cette intention tend à confirmer, à consacrer la volonté du gouvernement fédéral de s'ingérer dans le domaine des valeurs mobilières, un domaine qui relève pourtant de la compétence du Québec et des provinces.
En terminant, nous débattons actuellement du principe du projet de loi et nous verrons à approfondir ces points particuliers à l'occasion de l'étude en comité. Ainsi, à cette étape du processus, le Bloc québécois appuiera le principe du projet de loi C-46.
[Traduction]
M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de parler aujourd'hui du projet de loi C-46. Pour la gouverne de nos téléspectateurs, permettez-moi d'abord de lire un sommaire du projet de loi C-46:
Le texte modifie le Code criminel et crée deux nouvelles infractions: le délit d'initié et les menaces et représailles envers l'employé qui s'apprête à dénoncer la conduite illégale de l'employeur. Il augmente la peine maximale qui peut être infligée pour certaines infractions, notamment la fraude, et codifie certaines règles applicables aux circonstances aggravantes et atténuantes lors de la détermination de la peine. Il accorde aussi compétence au procureur général du Canada en matière de poursuite de ces infractions. |
C'est un défi de taille.
Le Parti progressiste-conservateur appuie le projet de loi C-46 en principe.
Pourquoi ce projet de loi a-t-il vu le jour? Récemment, d'importantes fraudes comptables et d'autres scandales dans des entreprises, comme celles d'Enron et de WorldCom, aux États-Unis, ont entraîné des pertes de plusieurs milliards de dollars et ont sapé la confiance des investisseurs. Les États-Unis ont riposté en adoptant la Sarbanes-Oxley Act de 2002 et en augmentant les ressources consacrées aux enquêtes et aux poursuites.
Le gouvernement canadien agit actuellement pour accroître les ressources dont il dispose pour appliquer les lois canadiennes existantes et renforcer les sanctions pénales existantes. Ce que nous comprenons dans cette affirmation, c'est que le gouvernement veut être vu et perçu comme punissant plus sévèrement les crimes, notamment les crimes sur les marchés financiers. Pourtant, nous constatons en même temps que le gouvernement est vraiment indulgent envers les criminels. Il est facile de dire une chose, mais, comme le veut le vieil adage, joindre le geste à la parole, c'est autre chose.
Même en ce qui concerne l'exécution de la Loi sur l'immigration, l'Ontario compte au total huit agents chargés d'appliquer la loi. Et cela dans une province de la taille de l'Ontario. Cela n'a tout simplement pas de sens.
La Loi sur la justice pénale pour les adolescents a entraîné beaucoup de problèmes d'un bout à l'autre du pays. Les collectivités sont aux prises avec le vandalisme et la criminalité juvénile, et elles ont les mains liées. Elles ne savent vraiment pas comment y faire face. En fait, je me suis entretenu avec les procureurs généraux des provinces et ils éprouvent le même problème. Ils se demandent vraiment pourquoi la nouvelle Loi sur la justice pénale pour les adolescents est ainsi faite. En réalité, elle est pire que la Loi sur les jeunes contrevenants qu'elle a censément remplacée.
Dans le secteur de l'immigration, que je connais très bien, je crois savoir que les niveaux de dotation n'ont pas retrouvé ceux de 1994. Lorsque les libéraux ont pris le pouvoir, ils ont sabré dans toutes les dépenses, notamment ils ont amputé le système de soins de santé de 24 milliards de dollars. Ils ont fait la même chose dans le secteur de l'immigration, même si on peut multiplier par trois, voire par quatre, les activités dans ce secteur par rapport à 1993. Il est facile pour le gouvernement de dire qu'il sera sévère au plan de la criminalité. Nous avons en effet un nouveau projet de loi. Toutefois, pour pour contrer efficacement les criminels, il faut avoir des ressources.
Certains députés ont parlé de peines obligatoires. En rentrant à Ottawa, j'ai lu dans le journal que le procureur général du Manitoba, Gord Mackintosh, demandait au gouvernement fédéral de modifier le Code criminel pour que les récidivistes ne soient admissibles à aucun cautionnement. Cela cause un problème dans le domaine. Il y a un écart énorme entre ce que nous croyons approprié et la réalité.
Cette mesure prévoit de nouvelles peines. Le délit d'initié est déjà illégal en vertu des lois provinciales sur les valeurs mobilières et la Loi canadienne sur les sociétés par actions. Dans les cas où une réponse plus dure est souhaitable, le projet de loi C-46 fait du délit d'initié une nouvelle infraction criminelle passible d'une peine d'emprisonnement maximale de dix ans.
Le projet de loi C-46 protège aussi les employés qui dénoncent une conduite illégale en vertu de mesures fédérales ou provinciales. Il fait aussi des menaces et des représailles envers un employé une infraction criminelle passible d'une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans.
Le projet de loi C-46 vise vraiment à rendre le secteur privé et les marchés financiers plus responsables. Les gouvernements, et certainement le gouvernement actuel, devraient ravaler leurs paroles. S'ils veulent vraiment montrer qu'ils sont responsables, ils devraient le prouver par la façon dont ils dépensent les deniers publics. À quel point sont-ils responsables?
Le projet de loi aborde les fraudes sur les marchés financiers. La vérificatrice générale a critiqué le gouvernement parce qu'il n'a pas informé la Chambre des communes de la façon dont il a dépensé les fonds du registre des armes à feu manqué. Il dépense frauduleusement des milliards de dollars des contribuables. Avant de dire aux contribuables, aux citoyens de ce pays, comment les choses devraient fonctionner, il devrait d'abord prêcher par l'exemple.
Quand on examine le registre des armes d'épaule et le gaspillage de l'argent des contribuables du point de vue de la fraude, c'est réellement ce que nous essayons de faire ici aujourd'hui. Le projet de loi C-46 porte sur les marchés financiers, sur l'utilisation frauduleuse de l'argent des gens et sur les investissements trompeurs dans le secteur privé. Dans le cas du registre des armes d'épaule, le gouvernement n'a toujours pas révélé au Parlement quel est le coût total du programme jusqu'ici. Le gouvernement n'a toujours pas révélé au Parlement quel sera le coût total de la mise en place du programme de contrôle des armes à feu.
Les fonctionnaires du Conseil du Trésor ont fini par admettre que même eux ne connaîtraient pas le coût total du programme de contrôle des armes à feu avant l'automne. Le gouvernement cache la vérité au Parlement et au public depuis sept ans et n'a guère été plus franc au cours des cinq derniers mois, cet été ou même cet automne. Même quand nous posons des questions au sujet du nouveau budget des dépenses du ministère du Solliciteur général, ce dernier refuse carrément de dire s'il prévoit une somme nouvelle de 10 millions de dollars au titre du registre des armes à feu.
Le Budget des dépenses du gouvernement est loin d'avoir été divulgué puisque le rapport sur les plans et les priorités du ministère de la Justice pour 2003-2004, qui a été déposé au mois de mars, compte 111 blancs. Il s'agit de l'usage que fait le gouvernement de l'argent des contribuables.
Par ailleurs, le gouvernement refuse de révéler le coût de l'observation et de l'application de la loi comme le recommande la vérificatrice générale. Le gouvernement a refusé de rendre publique une analyse coûts-avantages du programme de contrôle des armes à feu en déclarant que c'était un secret du Cabinet.
La façon dont le gouvernement gère l'argent des contribuables et leur rend des comptes laisse beaucoup à désirer.
Le projet de loi C-46 est censé réprimer plus strictement les activités criminelles en imposant des peines plus lourdes aux termes du Code criminel. La peine maximale actuelle pour fraude sur les marchés publics passera de 10 à 14 ans et la peine maximale pour manipulation frauduleuse des transactions en bourse passera de 5 à 10 ans.
Peut-être avons-nous besoin de peines minimales plus strictes. Autrement dit, il faut imposer une peine minimale obligatoire aux personnes reconnues coupables de fraude sur les marchés financiers.
Le projet de loi C-46 ajoute une liste de circonstances aggravantes précises qui entraîneraient des peines plus lourdes, notamment l'étendue des torts économiques et l'incidence sur la stabilité du marché. La réputation d'une personne et sa position au sein de la collectivité ou dans son milieu de travail ne peuvent plus être considérées comme des circonstances atténuantes pour alléger les peines lorsque les personnes coupables de fraude sur les marchés financiers ont profité de ces facteurs pour commettre leurs crimes.
Au chapitre de la collecte de preuves, le projet de loi C-46 prévoit le recours à des ordonnances de production au cours des enquêtes criminelles. Ces ordonnances sont déjà utilisées aux termes de la Loi sur la concurrence. Ce sont des solutions de rechange moins radicales par rapport aux mandats de perquisition. Elles obligent la personne à produire des documents pertinents dans un délai précis, à défaut de quoi la personne en question pourrait se voir imposer une peine maximale de six mois de prison ou une amende pouvant atteindre 250 000 $.
Pour ce qui a trait à la compétence parallèle, le Code criminel accorde actuellement aux provinces la responsabilité d'intenter des poursuites dans les cas de fraude sur les marchés financiers. Suivant les dispositions du projet de loi C-46, le gouvernement fédéral, tout autant que les provinces, pourrait intenter des poursuites dans de tels cas. Le gouvernement prétend que les interventions du fédéral se limiteraient à une étroite catégorie de cas menaçant l'intérêt national.
Comme je l'ai mentionné précédemment, les provinces doivent être sur leurs gardes lorsque le gouvernement fédéral promet de financer des poursuites devant des cours fédérales. On ne manque pas d'exemples d'ententes de financement entre le gouvernement fédéral et les provinces qui semblent bien fonctionner sur papier mais qui, dans la réalité, ne fonctionnent pas du tout. Il suffit de penser au régime de soins de santé. Nous connaissons tous les problèmes qui existent à ce chapitre partout au Canada. On avait précisé au tout début que les gouvernements fédéral et provinciaux se partageraient également les coûts des services de santé. Or, voilà que la part du fédéral se situe maintenant à environ 15 p. 100, si je ne m'abuse.
Il y a aussi le registre des armes d'épaule. Huit provinces ont déjà indiqué qu'elles n'allaient pas intenter des poursuites pour des infractions liées au registre des armes d'épaule et qu'elles laisseraient aux tribunaux fédéraux le soin de traduire en justice les gens ayant enfreint les dispositions du projet de loi C-68, c'est-à-dire les chasseurs ou les utilisateurs d'armes à feu qui n'ont pas enregistré leur arme ou qui n'ont pas de certificat de possession d'arme à feu. Les autorités savent sans doute que des centaines des personnes ont enfreint ces dispositions, et pourtant le gouvernement fédéral n'a déposé aucune accusation.
S'il se garde de déposer des accusations, c'est parce que le gouvernement n'est pas prêt à dépenser des millions de dollars pour intenter des poursuites contre des innocents qui n'ont pas pris la peine d'enregistrer un objet de famille ou un vieux fusil hérité de leur grand-père.
Les provinces doivent donc se montrer très méfiantes à l'égard des arrangements financiers prévus dans le projet de loi C-46.
Le gouvernement essaie de rattraper les législateurs américains qui ont déjà adopté des lois, non seulement pour renforcer les sanctions pénales, mais aussi pour réformer la gouvernance des entreprises. Les conseils d'administration, les vérificateurs et les comités de vérification ont tous des rôles clés à jouer lorsqu'il s'agit de protéger les intérêts des actionnaires. Les scandales qui ont ébranlé les marchés financiers en 2001-2002 ont d'ailleurs été perçus comme étant largement attribuables à une piètre gouvernance des entreprises, à un relâchement de la vérification, des normes comptables et de la surveillance, ainsi qu'aux incitatifs prévus dans les accords visant la rémunération des cadres de direction. Malgré cela, le document d'information du gouvernement sur le projet de loi C-46 ne fait nulle part mention du rôle de dispositions législatives efficaces sur la saine gouvernance des entreprises.
Peu après le dépôt du projet de loi C-46 par le gouvernement, le Comité sénatorial des banques a terminé une étude d'un an sur les circonstances ayant mené aux scandales qui ont secoué certaines entreprises américaines. Le comité a notamment tenté de déterminer si des circonstances semblables pourraient se produire au Canada et avoir des conséquences identiques et, le cas échéant, quelles mesures il faudrait prendre pour empêcher cela.
Le comité a préconisé des sanctions plus sévères, des mécanismes de protection pour les dénonciateurs qui signalent des irrégularités financières ainsi que l'affectation de ressources plus importantes pour les enquêtes sur les écarts de conduite, mais il a aussi recommandé que soient déposées des mesures législatives exigeant: que la majorité des membres d'un conseil d'administration soient indépendants; que soit élaboré un code de déontologie que devraient suivre tous les membresdes conseils d’administration; que tous lesmembres du comité de vérification soient indépendants etpossèdent des compétences financières; que soient limités les services autres que de vérification pouvant être fournispar les vérificateurs aux clients dont ils assurent la vérification; que le chefde la direction et le directeur des finances d’une société certifientque les états financiers annuels reflètent fidèlement les résultatsd’exploitation et la situation financière de la société; que les membres du comité de rémunération possèdent des compétences en matièrede rémunération et de gestion des ressources humaines et leur interdisant d'être aussi membres de la direction.
Le défi reposera sur le partage des compétences entre les provinces et le gouvernement fédéral. Il faut être conscient que papa n'a pas toujours raison. Le Parti progressiste-conservateur attend avec impatience les futures audiences du comité sur ce projet de loi.
M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais poser certaines questions à mon collègue au sujet des fraudes sur les marchés financiers. Je crois que le nouveau chef du Parti libéral nous en fournit un exemple de premier choix. J'explique mon point de vue.
Le nouveau chef libéral se livre depuis des années à de la fraude fiscale, en l'occurrence de la fraude sur le marché financier. Le propriétaire de la Société maritime CSL Inc. et d'environ 132 autres sociétés affiliées cache ses avoirs et ses profits à l'étranger. L'hypocrisie dans tout cela c'est que, lorsqu'il était ministre des Finances, il n'arrêtait pas de claironner que, au Canada, les impôts sont raisonnables, mais il gardait son argent à l'étranger et ne payait pas d'impôt au Canada. Pourquoi? De toute évidence, il estime que les impôts sont terriblement élevés, au Canada. À mon avis, c'est un bon exemple de fraude sur le marché financier, précisément ce sur quoi porte le projet de loi C-46. L'ancien ministre des Finances ne connaît que trop bien la fraude sur les marchés financiers.
Qu'est-ce que mon collègue pense du fait que Paul Martin fils a acquis la Société maritime CSL Inc. pour une bouchée de pain? Il s'agit d'une société d'État qui a été vendue à Paul Martin père pour trois fois rien. Parlons donc de fraude sur les marchés financiers et d'appropriation d'argent...
Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. La présidence éprouve certaines difficultés et demande simplement aux députés de coopérer. La Chambre respecte la tradition bien établie de ne jamais permettre à un député d'attaquer l'intégrité d'un autre député. Je veux simplement que nous soyons prudents et conscients de cette pratique bien établie et que, nous fassions de notre mieux, pour la respecter.
M. Inky Mark: Monsieur le Président, je suis convaincu que le député de LaSalle—Émard répondra à la même question lorsqu'il reviendra à la Chambre.
En ce qui concerne la fraude, j'ai parlé plus tôt de la fraude sur les marchés financiers que j'ai comparée à l'attitude frauduleuse du gouvernement en ce qui concerne le registre des armes à feu qui a coûté plus d'un milliard de dollars.
Les députés libéraux doivent ouvrir les yeux. S'ils élaborent des mesures législatives pour imposer des obligations en matière de reddition de comptes, il est peut-être temps qu'ils rendent eux-mêmes des comptes sur la façon dont l'argent des contribuables est dépensé.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, je tiens à poser au député une question assez précise concernant une entreprise et non une personne.
Quelle somme, selon lui, est restée sur la table, n'a jamais été remise aux contribuables canadiens, n'a jamais été versée dans le compte des recettes générales, n'a jamais été recouvrée sous forme d'impôts qui auraient pu et auraient dû être réclamés à la Société maritime CSL Inc. si cette société avait été enregistrée ici au Canada, avait fait affaires ici, avait embauché des Canadiens au lieu de fournir de l'emploi à des étrangers et avait agi en bon citoyen au lieu d'essayer de cacher ses avoirs à l'étranger? Qu'en pense le député? Pourrait-il avancer un chiffre pour dire combien la Société maritime CSL Inc. a volé dans les coffres de l'impôt canadien en s'établissant à l'étranger? Pourrait-il me dire ce qu'il en pense?
M. Inky Mark: Monsieur le Président, ceux qui affirment que le Canada est leur pays d'origine doivent l'appuyer de toutes les façons possibles. Dans le monde des affaires, c'est souvent le résultat final qui compte. Par exemple, la semaine dernière, les entreprises fabriquant des jeans ont plié bagages et ont traversé l'Amérique du Nord. Elles ont tout emballé et vont probablement aller s'installer en Chine où elles seront plus rentables.
Je ne sais pas quelles sont les pertes pour le Canada. Je suis convaincu qu'il s'agit de centaines de millions de dollars et probablement de milliards de dollars en impôts. Cependant, le rôle du gouvernement est de voir à ce que toutes les échappatoires soient abolies afin que les Canadiens qui prétendent faire affaire sous le drapeau de ce pays payent leur juste part d'impôts.
Le mot profit n'est pas un mot à proscrire et je crois que pas un seul député à la Chambre ne le réprouverait car, sans profit, personne ne voudrait se lancer en affaires. Ce qu'il faut rechercher, c'est l'équilibre. Je suis convaincu que tous les députés à la Chambre veulent que la justice prime et que soient colmatées les échappatoires entraînant de grandes pertes pour les coffres de l'État.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, au début de ses observations, le député a déclaré que la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, qui avait remplacé la Loi sur les jeunes contrevenants, causait toutes sortes de problèmes dans toutes les régions du pays et que ce n'était pas une bonne mesure législative. Le député veut-il dire que cette loi était trop sévère?
La personne qui a prononcé les discours les plus passionnés et les plus constants sur cette question est notre ancien collègue de Berthier—Montcalm qui est intervenu tous les jours pour expliquer comment l'ancienne Loi sur les jeunes contrevenants fonctionnait très bien au Québec et pour préciser qu'il était inutile d'insérer de nouvelles dispositions. De son point de vue, ces dernières étaient trop sévères.
Je me demande si le député faisait allusion à cela, car pour ma part, je croyais que c'était un bon compromis. On s'est montré plus sévère à l'égard des crimes graves, mais on a fait preuve de plus de créativité pour les crimes mineurs, pour les délinquants primaires.
M. Inky Mark: Monsieur le Président, cet été, j'ai passé un certain temps à rencontrer des gens dans les municipalités et les chefs de bande dans les réserves indiennes afin de parler des problèmes reliés au système de justice pour les jeunes, au vandalisme commis par les jeunes et aux activités criminelles des jeunes. Si nous avions des ressources financières illimitées, cela ne serait pas un problème. Par contre le problème, c'est que nous n'avons pas tout cet argent. Lorsqu'un jeune est accusé de violence, il peut falloir jusqu'à 12 mois avant qu'il ne comparaisse devant un tribunal. Que devons-nous faire de ces jeunes contrevenants?
Je sais que toutes les collectivités ont un problème avec les jeunes qui causent sans cesse des dommages matériels. En vertu de la nouvelle loi, nous ne pouvons les incarcérer. Que faisons-nous avec eux? Le système de soutien n'est pas là. Nous avons besoin de plus de crédits fédéraux pour soutenir les programmes et les initiatives prévus dans la Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents, mais sans cet argent, cela ne fonctionne pas.
M. Rob Anders: Monsieur le Président, je veux revenir sur les questions que j'ai déjà soumises au député. Je pense qu'il a raison. Le Canada a perdu des centaines de millions de dollars de recettes fiscales parce que la Société maritime CSL Inc. n'a pas payé d'impôts ici, au Canada. Je suis d'accord avec lui là-dessus.
Ma question complémentaire est donc celle-ci: combien d'appareils d'imagerie par résonnance magnétique, combien de tomodensitogrammes, combien d'infirmières et combien de médecins le Canada aurait-il pu se payer si la Société maritime CSL Inc. avait gardé cet argent et ces emplois au Canada plutôt que d'essayer de tout cacher à l'étranger? Qu'en est-il?
M. Inky Mark: Monsieur le Président, il est évident que si nous pouvions recueillir des centaines de millions de dollars en impôts, nous pourrions sans aucun doute investir tout cet argent dans le régime de soins de santé. Toutefois, nous pourrions le faire dès maintenant avec tout l'argent que le gouvernement a dépensé pour son programme raté d'enregistrement des armes d'épaule. Des milliards de dollars pourraient être consacrés au régime de soins de santé.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je participe au débat sur le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel (fraude sur les marchésfinanciers et obtention d’éléments de preuve).
Il est tenant de faire comme plusieurs l'ont fait aujourd'hui et d'attaquer le gouvernement et ses façons de fonctionner plutôt que de se pencher sur ce que ce projet de loi tente d'accomplir, mais je ne le ferai pas. Je veux parler de ce projet de loi en particulier et présenter certains des aspects que je trouve positifs, ainsi que les principales faiblesses dont nous devons discuter.
Je sais que nous accélérons actuellement l'étude de la révision des limites des circonscriptions électorales pour que le député de LaSalle—Émard puisse compter sur les nouveaux sièges demandés par les provinces au moment opportun. C'est un dossier qui a été poussé tout au cours de l'été et qui l'est encore maintenant.
Je m'attends à ce que la même situation se présente dans le cas du projet de loi C-46. Puisque ce projet de loi est important pour les familles et pour les entreprises du Canada, nous devons veiller à ce que les travaux de la Chambre ne soient pas perturbés. Je ne veux pas qu'on traite ce dossier de façon hypocrite. Le grand public a très certainement besoin de ce projet de loi.
Le seul fait que nous débattions de cette question montre que les fraudes sans précédent commises dans des entreprises ont bouleversé l'ensemble du système des marchés financiers. Des cabinets d'expertise comptable, des dirigeants d'entreprises et des banques, jusque-là réputés, ont été ébranlés jusque dans leurs fondements, et cela ne s'est pas produit qu'au Canada. Les cas de WorldCom, Xerox et Enron, aux États-Unis, sont de bons exemples de ce qui nous a poussés à reconnaître l'existence de problèmes.
Ces problèmes mettent en évidence des lacunes systémiques du système financier. Systémiques parce qu'elles ne mettent en cause pas seulement un ou deux groupes ou organisations. Ces lacunes ont des répercussions considérables et touchent de nombreuses entreprises et organisations dont nous n'avons même pas connaissance.
Nous ne nous sommes attardés qu'aux plus importantes d'entre elles, mais pas aux petites et moyennes entreprises, dont nous ne connaissons pas la situation. De nombreuses sociétés, qui sont excellentes, qui fonctionnent très bien dans le système, sont elles aussi pénalisées parce que d'autres abusent de ce système. Il faut mettre un terme à cette situation. Cela ne fait aucun doute.
Les bâilleurs de fonds des marchés financiers et du gouvernement attribuent la situation à un problème d'éthique individuel plutôt qu'à un problème systémique. Le fait est que les règles les plus rigoureuses s'appliquent aux avocats, aux policiers et aux enquêteurs afin que les dénonciateurs puissent venir à nous et que nous puissions recueillir les renseignements que nous cherchons. C'est un changement important survenu depuis quelques années. Cela démontre l'existence de problèmes systémiques qui ont des effets préjudiciables, non seulement sur les investisseurs mais sur le développement de notre économie de libre marché. Cela doit changer.
Il y a un aspect dont le projet de loi ne traite pas, mais qu'il faut aborder. Il s'agit, selon moi, de fraude. Le système actuel permet à un président-directeur général de venir dans entreprise, de supprimer des milliers d'emplois, de vendre du matériel et des actifs, de hausser le prix des actions à court terme, d'obtenir une généreuse indemnité de départ, de nombreuses primes et de quitter l'entreprise après l'avoir ruinée. Il faut aussi remédier à ce problème. Le projet de loi ne le fait pas, mais c'est un changement systémique dont nous devons commencer à discuter.
Des milliers de travailleurs ont perdu leur emploi et des personnes ont perdu leurs investissements à court terme. Il faut aussi remédier à cette situation.
Cette mesure a pour origine plusieurs affaires aux États-Unis et dans le reste du monde qui, comme nous l'avons dit, ont causé la perte de millions de dollars.
Le Congrès américain a réagi en adoptant la loi Sarbanes-Oxley, en appliquant plus strictement la loi et en accroissant le financement au titre des enquêtes et des poursuites. Il a agi très rapidement et très clairement alors que nous sommes encore en train de tâtonner. C'est inacceptable.
Après avoir écouté les discussions aujourd'hui du côté ministériel et du côté de l'opposition, il me semble que la mesure jouit d'un certain appui. Personnellement, j'espère que nous continuerons à aller de l'avant et à insister pour qu'il y ait au moins certaines améliorations. La nature de ces améliorations, pouvant aller du genre d'outils à la disposition des procureurs aux amendes et aux peines de prison, peut varier, mais nous devons nous assurer que quelque chose soit fait.
J'espère que nous obtiendrons une législation très stricte et les améliorations au projet de loi qui sont nécessaires.
Le 12 juin 2003, le projet de loi C-46, mesure connexe au projet de loi C-45, la loi Westray, a été déposé et présenté comme étant la réponse canadienne au fiasco d'Enron et le pendant de la loi Sarbanes-Oxley. Il est important de noter qu'il s'agit également de certaines questions de sécurité humaine et environnementale dans le milieu de travail. Le projet de loi rendrait les gens responsables de leurs actes. Les gens ne pourraient plus se cacher derrière un symbole ou une image de marque. Le projet de loi mettrait sur le devant de la scène les gens qui prennent les décisions et qui sont négligents dans l'exercice de leurs fonctions.
C'est réellement important et enthousiasmant, car cela donne aux personnes qui fournissent de bons emplois stables et qui appliquent les meilleures pratiques la capacité de faire concurrence à ceux qui fraudent le système.
Cette stratégie, qui a pour objet de maintenir la confiance des investisseurs dans les entreprises canadiennes cotées en Bourse, prévoit de dépenser 120 millions de dollars au cours des cinq prochaines années et propose des modifications au Code criminel. L'argent servirait à créer six équipes intégrées d'application de la loi dans les marchés, ou EIALM, qui seraient composées d'enquêteurs de la GRC, d'avocats du fédéral et d'autres experts.
En soi, c'est une fois de plus reconnaître l'existence de problèmes systémiques. Nous avons un gouvernement qui a pour habitude de démanteler la fonction publique et de privatiser. C'est ce qu'il fait depuis 10 ans. Le gouvernement admet maintenant qu'il doit créer un autre organisme pour s'attaquer à ce problème. Je ne pense pas que la somme de 120 millions de dollars soit suffisante car, comme le document lui-même le précise, le gouvernement ne s'en prendra qu'aux principaux contrevenants et ne pourra pas attraper les autres. Le gouvernement ne fait qu'effleurer la surface.
Il se pourrait qu'en dépit de cela le montant de 120 millions de dollars ne suffise pas à lutter contre le plus grave des crimes. Il est à espérer que, à l'étape du comité, des délégations, des témoins et des spécialistes mettront des chiffres de l'avant. Je m'attends à ce que certains proposent un accroissement de ce montant de 120 millions de dollars afin de pourvoir aux répercussions juridiques et aux poursuites pour que les gens ne s'en tirent pas impunément.
Le projet de loi C-46 fait du délit d'initié une infraction criminelle comportant une peine de 10 ans d'emprisonnement. Le projet de loi cible les employés des sociétés et autres personnes utilisant de l'information privilégiée dont ne peuvent se prévaloir d'autres investisseurs. C'est en soi une importante réalisation. C'est signe qu'il y aura des répercussions. À mon avis, ce n'est pas suffisant. J'y reviendrai plus tard dans le cadre d'une comparaison avec les mesures adoptées aux États-Unis. Selon moi, nous devons aller plus loin que ce qui est prévu.
Le projet de loi crée aussi une nouvelle infraction punissable d'une peine d'emprisonnement maximale de cinq ans susceptible d'être infligée aux personnes exerçant des menaces et des représailles à l'endroit d'employés qui signalent une fraude ou d'autres pratiques ou conduites illégales sur les marchés financiers. Cette mesure mettra les employés à l'abri du harcèlement et des pénalités liés à l'emploi; nous parlons de dénonciation. Les députés du Nouveau Parti démocratique demandent depuis de nombreuses années que l'on assure la protection des dénonciateurs. C'est une bonne mesure, mais une période de cinq ans n'est pas suffisante pour protéger un employé.
Nous savons qu'il est possible que certaines de ces personnes n'obtiennent même pas de peine d'emprisonnement. Elles pourraient être libres et détenir aussi un emploi chez des concurrents. Elles pourraient être de mèche avec des groupes, des organismes ou d'autres investisseurs et cela pourrait avoir des répercussions sur les employés. Je veux voir dans ce projet de loi plus de détails sur la façon dont nous pouvons protéger les employés. Ainsi, s'ils effectuent une dénonciation, ils auront la certitude que non seulement leur entreprise les appuiera, mais aussi que le gouvernement du Canada et l'appareil judiciaire assureront leur protection et celle de leur famille.
Sans cela, nous perdrons de nombreux dossiers. Nous verrons de nombreux cas exigeant une enquête plus approfondie et se traduisant par des coûts plus élevés. Il nous suffit de dire que nous ne laisserons pas les gens à eux-mêmes, que nous allons les protéger ainsi que leur famille lorsqu'ils auront le courage d'effectuer une dénonciation. Cela ne s'est pas produit assez dans le passé.
À l'heure actuelle, le projet de loi prévoit également les circonstances non atténuantes. À titre d'exemple, si une société s'est comportée en bon citoyen et qu'elle en a tiré partie, cette circonstance lui sera opposée pour empêcher un allégement de l'amende. C'est une amélioration. C'est à n'en pas douter un premier pas.
Je crois que nous devrions examiner d'autres aspects des antécédents de l'entreprise afin de connaître les déductions aux fins d'impôt qu'elle a utilisées. S'agit-il de repas? Combien de consommations alcoolisées ont été déduites? Qu'en est-il de l'environnement? A-t-elle effectivement été à l'origine de problèmes environnementaux et profité d'une déduction aux fins d'impôt? Cela peut se faire couramment dans le cadre du programme gouvernemental. Une entreprise peut déverser ou créer des déchets toxiques, devoir payer une amende et en même temps déduire cette amende aux fins d'impôt sur le revenu. L'entreprise a-t-elle fait cela?
Il y a les contributions politiques, les parties de golf et toutes les autres déductions possibles qu'une entreprise peut demander dans ce système. Il faudrait les examiner. L'entreprise devrait rembourser ces montants si elle a versé des pots-de-vin pour obtenir des renseignements ou s'est servi de ces renseignements pour améliorer sa propre position ou celle d'un groupe de personnes. La vérité est que les contribuables paient la note pour ces déductions. Ce sont eux qui subventionnent les déductions. Il faudrait ajouter tout ça à la facture réelle.
Actuellement, le projet de loi C-46 crée une nouvelle procédure exigeant la production de documents, de données ou de renseignements justificatifs dans des cas précis. Un des éléments positifs du projet de loi est que ces ordonnances de communication peuvent être émises sans qu'aucune autre partie ne le sache, ce qui permettra aux enquêteurs de recueillir des preuves auprès de tiers, tels que les institutions financières et les vérificateurs, sans dévoiler l'objet de leur enquête.
Cela revient à mon point de vue au sujet des dénonciateurs. Nous pourrions économiser des millions de dollars, étayer les causes et veiller à ce que justice soit faite si nous pouvions obtenir ces renseignements et cette collaboration, mais il faut que les dénonciateurs aient confiance. À l'heure actuelle, je ne crois pas que ce projet de loi procure cette confiance. Il ne procure pas cet engagement à toute épreuve qui s'impose. Nous savons que ce système nous offrira de meilleures possibilités d'engager des poursuites et d'avoir gain de cause, mais, là encore, il faut consacrer ce principe de façon à ce que les gens se sentent protégés.
À l'heure actuelle, il existe un effet dissuasif. La peine infligée pour fraude passerait de 10 à 14 ans, pour fraude sur les marchés financiers, de 10 à 14 ans, et pour manipulation d'opérations boursières, de 5 à 10 ans. J'estime que cela n'est pas suffisant. Il faut changer cela. Nous devrions envisager des peines plus sévères. En outre, si les dommages dépassent 1 million de dollars, les amendes pourraient être augmentées. Nous devrions peut-être songer à abaisser ce montant de 1 million. Je ne sais pas si cela me conviendrait, et j'ai hâte d'entendre les témoins venir en discuter.
Le projet de loi permettrait également à l'État d'intenter des poursuites pour délit d'initié. C'est très important. Nous estimons qu'il faudrait appuyer cette disposition immédiatement.
Une des préoccupations que nous avons au sujet du projet de loi, c'est que certaines de ses définitions sont encore vagues. Les renseignements au sujet du délit d'initié sont vagues, c'est-à-dire: qu'entend-on par influence importante? On ne définit pas l'importance de l'influence. Nous savons que des peines plus sévères peuvent être imposées parce que des renseignements importants ont été communiqués ou qu'il y a une modification importante des marchés, mais qui va définir cela? Je ne crois pas qu'il soit bon de laisser entièrement aux tribunaux le soin de le faire. Ces choses nous préoccupent, qu'il s'agisse d'une baisse de 15 p. 100 du cours des actions ou d'une question financière influant sur le rendement ultérieur. Nous voudrions que ces aspects soient mieux définis.
Je voudrais aborder un autre aspect du projet de loi C-46. Là encore, je reviens à la dénonciation; je pourrais en dire très long, car nous parlons de la dénonciation depuis des années. Au lieu de modifier le Code criminel, nous devrions maintenir la définition plus large d'extorsion, de sorte que les contrevenants puissent toujours être inculpés d'une infraction criminelle punissable d'une peine d'emprisonnement à perpétuité. Nous pouvons veiller à ce qu'il s'agisse d'une des peines les plus sévères qui existent.
Le projet de loi ne mentionne pas la participation accessoire à la fraude ni la négligence volontaire. Je vais vous présenter un bref scénario impliquant Enron pour vous donner une idée des lacunes du projet de loi dont nous devons discuter. Il est évident que la fraude est un acte commis avec l'intention de tromper, mais qu'arrive-t-il quand une personne n'a pas cette intention et que le fait qu'elle n'ait pas agi ait permis que la supercherie se produise?
Prenons, par exemple, le fiasco d'Enron qui, en partie, a fait naître ce projet de loi. Dans cette cause, le cabinet d'experts-comptables d'Arthur Andersen a admis avoir commis des «erreurs de jugement». Il a déchiqueté des milliers de documents de vérification d'Enron, et il soupçonnait ou savait qu'Enron enfreignait les règlements régissant les valeurs.
Dans la plupart des poursuites intentées en vertu de ce projet de loi, des sociétés indépendantes comme des cabinets d'experts-comptables ne joueront pas un rôle aussi étroitement lié à l'infraction, mais l'exemple permet de montrer comment les omissions d'une société indépendante peuvent contribuer à l'acte proprement dit. Voilà pourquoi nous devons examiner la possibilité d'intégrer au projet de loi C-46 une responsabilité légale visant les sociétés indépendantes s'occupant des états financiers d'une entreprise ou des dispositions faisant en sorte que les sociétés vérifient ou surveillent les pratiques comptables de leurs clients pour exclure tout risque de responsabilité criminelle.
Il ne suffit pas de mettre la responsabilité sur le dos d'un autre. Nous voudrions que les groupes qui sont en fait rénumérés en tant que sociétés montrent qu'ils font confiance aux produits commercialisés par l'entreprise afin de prouver le bien-fondé de leurs actions. Ces groupes ne doivent pas avoir la possibilité de se cacher. C'est l'une des lacunes du projet de loi. Celui-ci n'est pas suffisamment sévère à l'égard de ces entreprises et permettrait que des cas comme celui d'Enron se reproduisent.
Il est à présent clair qu'il ne faut pas compter uniquement sur les effets dissuasifs des lois dans les causes criminelles afin de prévenir de telles situations désastreuses. Il nous faut de meilleurs gardiens pour surveiller les affaires des entreprises et s'assurer que leurs méthodes comptables se conforment à la loi et que toute information significative est divulguée.
Une fois de plus, on en revient à l'idée de la dénonciation pour recueillir l'information, et faire en sorte qu'elle puisse être utilisée. On ne peut se borner à la société. Il faut que les cabinets d'experts-comptables soient responsables, eux aussi. Si nous considérons certaines affaires d'irrégularités comptables, et je vais en aborder une ou deux, nous savons que ces cabinets sont très importants, relativement à la responsabilité criminelle. Il y a eu l'affaire Enron, comme je l'ai dit. Je ne vais pas revenir là-dessus, sinon pour dire que, en somme, elle a gonflé ses gains d'environ 600 millions de dollars US en 1997. Elle aurait dû être tenue responsable, ainsi que tous les associés qui ont signé les documents comptables.
Selon les allégations, Tyco a évité de payer 1 million de dollars US en taxe sur les ventes d'oeuvres d'art de 13,2 millions. Les documents comptables n'en faisaient pas état. Il aurait fallu tenir les intéressés responsables. Adelphia Communications a prêté des milliards à ses fondateurs, la famille Rigas. La famille a renoncé au contrôle d'Adelphia, qui n'a pu honorer des dettes de 7 milliards de dollars US et a demandé, le 25 juin, la protection contre ses créanciers en vertu du chapitre 11. Une fois encore, on n'a pas fourni les documents et l'information sur le prêt. Livent est un autre cas où les documents comptables ont été manipulés pour cacher des pertes de 100 millions de dollars.
Encore une fois, ceux qui approuvent ces comptes doivent être tenus responsables et considérés comme complices.
Dans le cadre du débat sur le projet de loi C-46, je vais faire ressortir des différences entre les États-Unis et le Canada.
En ce moment, le Canada inflige une peine de dix ans de prison pour les transactions d'initié. Aux États-Unis cette peine va passer de dix à 20 ans, et l'amende pourra aller jusqu'à 5 millions de dollars. C'est le minimum.
La peine prévue au Canada pour les menaces à des dénonciateurs est d'un maximum de cinq ans de prison. Aux États-Unis, ce sera un maximum de dix ans.
Pour l'exécution des mesures d'application plus rigoureuses, ils embaucheront 200 nouveaux enquêteurs, avocats et vérificateurs et créeront un comité de surveillance comptable qui sera chargé de surveiller et de réglementer l'industrie de la comptabilité. Cela me ramène à ce que j'ai dit plus tôt sur la reddition de comptes, à savoir qu'ils ont cerné le problème et qu'ils fournissent les ressources nécessaires.
Au Canada, la peine pour fraude passe de 10 à 14 ans. Aux États-Unis, la peine d'emprisonnement maximale sera portée à 20 ans.
À l'instar de mes collègues, je me demande aussi s'il y a lieu de prévoir des peines minimales. Honnêtement, je crains qu'un juge n'inflige une peine minimale qui n'aurait pas d'effet dissuasif. Il pourrait arriver qu'une peine de quelques années n'ait aucune conséquence sur la vie d'un coupable. Celui-ci pourrait peut-être subir des conséquences professionnelles, qui seraient somme toute minimes par rapport aux conséquences subies par les entreprises et les familles qui ont perdu leurs économies et la capacité de planifier leur avenir financier. Je crains vraiment que nous n'obtenions pas le type de moyens dissuasifs que nous recherchons.
Le gouvernement doit se pencher sur cette question. Nous devons axer nos efforts sur ce problème si nous voulons vraiment l'attaquer. C'est un problème systémique. Cette situation ne concerne pas qu'une ou deux entreprises. Nous savons qu'il y a des fraudes et que certaines personnes qui prennent avantage du système peuvent contourner les pratiques qui ont cours sur les marchés. Nous devons veiller à ce que justice soit faite.
Ici, au Canada, nous voyons la criminalité des entreprises dans une optique différente. Nous prenons des mesures un peu différentes en matière de criminalité urbaine, mais pour ce qui est de la criminalité des entreprises, nous ne faisons rien ou presque rien. Cela doit changer. Ce projet de loi devrait être adopté rapidement par le Parlement, de manière à assurer que les Canadiens soient protégés et qu'ils puissent profiter de leurs investissements dans l'avenir.
MOTION D'AJOURNEMENT
[Ajournement]
* * *
L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.
* * *
[Traduction]
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Monsieur le Président, le 26 mai j'ai posé une question sur l'industrie automobile.
Des possibilités réelles de création d'usines d'automobiles se sont envolées. Je parle de nouvelles usines, de nouveaux développements qui n'ont pas toujours été réalisés en pratique dans ce pays, en particulier lorsqu'il était en concurrence avec les États-Unis. Nous avons par exemple perdu l'usine d'assemblage de Sprinter et celle de M60 lorsque Chrysler n'a pas réalisé son usine à Windsor.
Ma question est très simple. La réponse que j'ai obtenue du ministre revenait à dire qu'il s'attendait à ce qu'il y ait des délais avant que soit prise une décision sur l'usine DaimlerChrysler de Windsor en Ontario. J'aimerais savoir ce que le gouvernement a fait depuis lors, depuis ce supposé délai. Quelles mesures a-t-il prises depuis pour attirer cette usine? Qu'a-t-il proposé? Qu'a-t-il offert pour séduire les promoteurs et permettre la création de ces emplois dont nous avons tant besoin dans le secteur de la construction automobile?
Il était clair, d'après la réponse du ministre, que le gouvernement ferait tout ce qu'il pourrait dans ce dossier et, parallèlement, il semblait aller de soi pour lui que la décision soit reportée. Qu'est-il arrivé depuis?
M. Tony Tirabassi (secrétaire parlementaire de la présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Le député a effectivement interrogé le gouvernement, au cours de la période des questions du 26 mai, au sujet de son engagement à attirer de nouvelles activités de production d'automobiles au Canada.
Il y a eu beaucoup de discussions au cours de la dernière année avec les divers paliers de gouvernement au sujet des efforts qui sont faits en vue d'attirer de nouveaux investissements dans le secteur de l'automobile au Canada. Je suis ravi de pouvoir parler de cette question aujourd'hui.
Premièrement, permettez-moi de préciser que le gouvernement tient à ce que le Canada attire le plus de nouveaux investissements possibles dans le secteur de l'automobile. C'est principalement pour cette raison que le Conseil du partenariat pour le secteur canadien de l'automobile a été créé, pour que l'industrie et le gouvernement élaborent des stratégies communes afin d'assurer la croissance et la prospérité à long terme du secteur canadien de l'automobile. Nous travaillons au sein de ce conseil avec les constructeurs automobiles, les fabricants de pièces, les syndicats et les provinces à élaborer une approche coopérative pour s'attaquer aux difficultés que connaît l'industrie.
Au cours des mois qui ont suivi l'intervention du député sur l'état du secteur de l'automobile au Canada, un certain nombre de choses sont survenues qui indiquent que le Canada demeure un endroit attrayant pour les investisseurs dans le domaine de la fabrication d'automobiles.
DaimlerChrysler vient d'ailleurs d'annoncer un investissement de 1,4 milliard de dollars dans le réoutillage de son usine d'assemblage de Brampton.
Le 26 septembre, Toyota a organisé une cérémonie pour annoncer la production de la Lexus RX330 dans son usine de Cambridge,en Ontario. Ce sera la première fois que la Lexus sera construite à l'extérieur du Japon. Comme l'ont souligné les dirigeants de Toyota en poste au Japon et au Canada, cet investissement témoigne directement de l'engagement du gouvernement envers le secteur de l'automobile.
Les cinq fabricants qui montent des automobiles au Canada ont actuellement des plans de réinvestissement.
Dans le secteur des pièces d'automobile, les nouvelles sont aussi encourageantes. Il y a eu près de 7 000 nouveaux emplois pendant la première moitié de 2003, ce qui représente une augmentation de 6,9 p. 100 par rapport à l'an dernier. On compte maintenant un total de 106 384 emplois dans ce secteur.
L'industrie de l'automobile investit au Canada en raison de nos points forts: une main-d'oeuvre hautement qualifiée; des coûts de main-d'oeuvre concurrentiels; un excellent climat de travail, y compris des taux d'inflation et d'intérêt qui sont bas, et un régime fiscal concurrentiel. Le Canada demeurera un excellent endroit où fabriquer des automobiles, un endroit affichant de brillants résultats sur les plans de la productivité et de la qualité.
Qui plus est, le gouvernement fédéral aide l'industrie à innover et à accroître sa productivité ainsi que sa compétitivité par l'entremise de nombreux programmes. Il y a un exemple récent qui illustre à merveille le succès de cette approche: le fabricant du camion Navistar est revenu sur sa décision de déménager les activités de son usine de Chatham au Mexique. Avec l'aide du programme canadien Partenariat Technologie, l'entreprise investira 270 millions de dollars sur 10 ans afin de concevoir du matériel à la fine pointe, ce qui garantira l'avenir de cette usine pour de nombreuses années.
Nous, de ce côté-ci de la Chambre, reconnaissons que le Canada ne peut se contenter de ses succès passés. Nous continuons de travailler en étroite collaboration avec le secteur de l'automobile afin de maintenir les avantages que présente le Canada sur le plan de la compétitivité et de veiller à ce que les fabricants d'automobile continuent d'investir et de multiplier leurs activités au Canada. Nous étudions activement ces questions, dans le cadre du Conseil du partenariat pour le secteur canadien de l'automobile.
M. Brian Masse: Monsieur le Président, j'ai été heureux de constater que le gouvernement avait pris des mesures dans le cas de Navistar. Il a toutefois fallu pour cela qu'une personne soit gravement blessée et que les gens de la collectivité se plaignent du fait que les responsables de la sécurité faisaient venir des briseurs de grève des États-Unis. Nous avons dû protester pour nous assurer que les membres de la collectivité soient entendus. Le ministre a finalement pris des mesures et je l'en félicite.
Mais ce ne sont pas les statistiques et le jargon du milieu de travail qui m'intéressent. Le ministre a promis un investissement de 2 milliards de dollars, mais on ne parle plus maintenant que de 1,4 milliard. Il manque donc 0,6 milliard de dollars. Qu'est-il arrivé à cet argent au cours de l'été? Le secrétaire parlementaire pourrait peut-être nous faire savoir si DaimlerChrysler a retiré un investissement de 0,6 milliard.
Je veux obtenir des détails. Quelle est notre politique en ce qui concerne le secteur automobile? Que faisons-nous pour lutter contre la politique d'ensemble américaine qui prévoit des mesures incitatives et des zones défiscalisées, volant ainsi des emplois aux Canadiens. Comment luttons-nous contre ces mesures américaines?
M. Tony Tirabassi: Monsieur le Président, le député a souligné qu'il ne s'intéressait pas au jargon statistique, mais c'est ce qui mesure le rendement. C'est ce qui intéresse ce secteur. Il ne s'intéresse nullement aux propos dramatiques que l'on entend à la Chambre des communes ou à ce qui a été nécessaire. Il est évident qu'il a fallu un effort concerté de tous les partis pour faire aboutir cette affaire.
J'aimerais rappeler à la Chambre que la croissance annuelle du secteur de l'automobile au Canada a été de 7 p. 100, alors que le taux de croissance global n'était que de 3 p. 100. Au cours de cette même période, la production de véhicules légers a augmenté de 570 000 unités au Canada, ce qui correspond à la production de deux ou trois usines typiques d'assemblage.
Je trouve tout cela très impressionnant, surtout si l'on tient compte du fait que seulement 8 p. 100 de tous les véhicules nord-américains sont vendus au Canada. Pendant cette période, nous avons toujours produit environ 16 p. 100 de tous les véhicules nord-américains. Selon l'Association des fabricants de pièces d'automobile, le Canada est maintenant passé à la troisième place, derrière la Chine et les États-Unis.
* * *
Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le 23 septembre, j'ai demandé au gouvernement de faire enquête sur les divergences qui existent entre les renseignements fournis par le député de LaSalle—Émard lorsqu'il était ministre des Finances et les documents publiés par son avocat et affichés sur le site Web du conseiller en éthique.
La déclaration du ministre date de février 2002. Elle disait que, par l'entremise de Sheilamart Enterprises, il possédait 438 210 actions privilégiées de Passage Holdings, qui était propriétaire de la Société maritime CSL et d'autres sociétés. Les documents fournis par son avocat ne font aucune mention des actions de Sheilamart.
Ce qu'il est advenu de ces actions de Sheilamart est une question d'intérêt public. Ont-elles été rachetées dans une transaction non enregistrée au Canada ou à l'étranger? Ont-elles été cédées à quelqu'un d'autre et, dans l'affirmative, à qui?
Selon son avocat, l'intérêt financier total de l'ancien ministre des Finances dans la Société maritime CSL était inférieur à un million de dollars.
Cela représente une somme importante pour vous et moi, monsieur le Président, mais pas pour le député de LaSalle—Émard. Il s'agit d'une société qui vaut plusieurs millions de dollars. Elle appartient entièrement à l'ancien ministre et à sa famille immédiate. Sa valeur ne cesse d'augmenter. Elle a réduit ses coûts en congédiant des travailleurs canadiens et en battant pavillon étranger. Elle bénéficie des avantages offerts par le paradis fiscal qu'est la Barbade, avantages qui ont été protégés pendant que l'ancien ministre était encore responsable de la politique budgétaire canadienne.
Il est franchement difficile de croire que ses intérêts financiers personnels dans cette achine internationale à faire de l'argent étaient si peu importants. Or la lettre de son avocat dit: «Les actions de Passage ont une valeur de rachat totale de 829 000 $.»
Cette affirmation est d'autant plus curieuse que le registre public indique que la valeur de rachat de chaque action privilégiée de Passage Holdings Inc. est de 100 $ plus les dividendes. L'ancien ministre détenait 438 210 actions privilégiées. À 100 $ l'action, cela donne une valeur de rachat d'au moins 43 821 000 $, soit 43 millions de dollars de plus que la valeur déclarée par son avocat.
L'ancien ministre affirmera sans doute que les actions qu'il avait dans Sheilamart étaient d'une classe qui avait une valeur de rachat moindre. L'organisation du capital social de Sheilamart a été modifiée en décembre 2000, juste après les élections, pour créer une nouvelle classe E d'actions assortie d'un droit de vote ayant moins de poids.
Toutefois, par définition, ces actions n'existaient pas avant décembre 2000. Or, l'ancien ministre a contrôlé la compagnie pendant des années avant cela. Quelle était la valeur de rachat des actions privilégiées qu'il détenait alors?
S'il les a vendues quand une nouvelle classe d'actions a été créée en décembre 2000, a-t-il tout simplement donné l'argent? Y a-t-il eu un transfert non comptabilisé que son avocat a préféré ne pas divulguer?
Même si la nouvelle classe E d'actions est assortie d'un droit de vote ayant moins de poids que les actions qu'il détenait auparavant, comment peut-on être sûr de leur valeur de rachat? L'accord aux termes duquel les nouvelles actions ont été créées précise que la valeur de rachat serait touchée par la valeur de la contrepartie reçue par Passage Holdings Incorporated. Cette valeur pourrait être contestée par Revenu Canada. Cela pourrait augmenter la somme de manière sensible. Ces faits n'ont pas été mentionnés dans la lettre de l'avocat de l'ancien ministre.
Le gouvernement refuse de répondre à mes questions. Il m'a dit de m'adresser au conseiller en éthique. Ce que j'ai fait dans une lettre détaillée en date du 26 septembre.
Ces questions sont d'une grande importance, car l'ancien ministre vient juste de recevoir un billet gratuit pour devenir premier ministre du pays. Et avant cela il a bénéficié d'un arrangement appelé fiducie sans droit de regard. Aucun autre ministre canadien n'en avait bénéficié avant lui. À l'époque, il était ministre des Finances et était mis régulièrement au courant des affaires de son entreprise multinationale.
Le mystère entoure l'homme qui pourrait bien devenir premier ministre. Les Canadiens ont le droit de connaître certains détails des transactions qui sont connues du conseiller en éthique.
M. Rodger Cuzner (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, comme on l'a souligné auparavant, le député de Calgary-Centre a posé, durant la période des questions du 23 septembre, deux questions concernant le fait que le député de LaSalle—Émard s'était récemment dessaisi de ses intérêts dans la Société maritime CSL Inc. Nous savons tous que le député de LaSalle—Émard a été pendant de nombreuses années ministre des Finances et qu'il continue de servir le pays avec distinction.
Selon le député de Calgary-Centre, l'ancien ministre des Finances a déclaré en février 2002 que, par l'entremise de Sheilamart Enterprises Inc., il possédait des actions de la Société maritime CSL Inc. Le député de Calgary-Centre a ajouté que la lettre que les avocats du député de LaSalle—Émard ont adressée au conseiller en éthique pour expliquer la façon dont ce dernier avait rompu ses liens avec CSL ne faisait pas mention de ces actions.
Au cours de la même période des questions, le député de Calgary-Centre a aussi demandé quelle était la valeur de rachat de certaines actions privilégiées détenues par Passage Holdings Inc., entreprise qui détenait les intérêts dans la Société maritime CSL. Il a alors demandé au gouvernement d'obtenir une réponse à ses questions de la part du conseiller en éthique.
Le premier ministre suppléant a répondu que le député était libre d'aborder directement la question auprès du conseiller en éthique. Nous savons que ce dernier a toujours été disposé à répondre aux demandes de conseils des députés et aux questions en matière d'éthique, qu'elles aient trait à la situation de l'auteur de la demande ou à celle d'autres députés.
Je crois comprendre que le député de Calgary-Centre a suivi le conseil du premier ministre suppléant et que, le 26 septembre, il a remis au conseiller en éthique une lettre très détaillée soulevant bon nombre de questions à cet égard. Je crois aussi comprendre que le conseiller en éthique examine la lettre du député de Calgary-Centre et qu'il compte y répondre dans les meilleurs délais.
Je conseille donc au député de Calgary-Centre de laisser le conseiller en éthique exécuter le travail qu'il lui a demandé et d'attendre sa réponse.
Le très hon. Joe Clark: Monsieur le Président, j'attendrai évidemment la réponse du conseiller en éthique. On sait qu'il y a beaucoup d'interrogations au sujet de la mesure dans laquelle le conseiller, qui ne relève pas du Parlement, est assujetti à la même obligation redditionnelle que les autres fonctionnaires du Parlement.
Le cas du député de LaSalle—Émard soulève des questions très importantes. Pourquoi a-t-il obtenu une fiducie sans droit de regard d'un genre auquel aucun autre ministre canadien n'a eu droit auparavant, et qui lui a permis d'être informé régulièrement de la situation de son entreprise, tout en continuant d'agir comme ministre des Finances? On nous a dit, à un moment donné, qu'il n'y avait eu que 12 de ces séances d'information. Il semble maintenant qu'il y en ait eu davantage et, si j'ai bien compris le conseiller en éthique, leur nombre pourrait atteindre la trentaine.
Pourquoi cela s'est-il produit, si le député a modifié la nature de ses actions dans Sheilamart. Qu'a obtenu Passage Holdings pour qu'il obtienne cette nouvelle catégorie d'actions? Y aurait-il eu une transaction, à l'insu du public canadien, qui nous permettrait de mieux comprendre la situation financière de l'homme qui pourrait devenir premier ministre?
Pourquoi n'était-il pas question de Sheilamart dans la lettre que son avocat a rédigée, et qui figure maintenant en tant que document officiel sur le site Web du conseiller en éthique?
Je constate que mon temps de parole est écoulé. Ce sont là des questions pressantes, qui présentent un intérêt pour le conseiller en éthique mais également pour la population canadienne.
M. Rodger Cuzner: Monsieur le Président, les députés de ce côté-ci de la Chambre continuent de respecter le travail et le rôle du conseiller en éthique. Nous souhaiterions que le député de Calgary-Centre comprenne que le conseiller en éthique procédera à une enquête minutieuse et approfondie, à la suite de laquelle il présentera ses conclusions.
Nous prions le député d'attendre patiemment le rapport du conseiller en éthique.
[Français]
Le vice-président: La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, 10 heures, conformément à l'article 24 du Règlement.
(La séance est levée à 18 h 45.)