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ENVI Rapport du Comité

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TROUVER L’ÉNERGIE D’AGIR : RÉDUIRE LES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE DU CANADA

INTRODUCTION

En 1992, le monde a reconnu que les changements atmosphériques causés par l’activité humaine modifieront le climat d’une façon qui pourrait nuire aux écosystèmes naturels et à l’humanité. La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) a été la réponse proposée à ce problème. Elle est aujourd’hui ratifiée par 189 pays.

Le principal objectif de la CCNUCC est de :

stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique.

La Convention n’a pas chiffré ce niveau, mais elle a affirmé que :

Ce niveau devrait être atteint dans un délai suffisant pour que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se poursuivre d’une manière durable.

Il y a déjà des indices selon lesquels les écosystèmes ne pourraient pas être capables de s’adapter assez rapidement au changement climatique anthropique1.

Pour stabiliser les concentrations de gaz à effet de serre (GES), il faut que les émissions soient réduites. Par la CCNUCC, les pays développés du monde se sont engagés à adopter des politiques nationales visant à ramener leurs émissions au niveau de 1990; ils ont convenu officieusement d’y arriver d’ici l’an 2000.

Au milieu des années 1990, il était clair que la plupart des pays développés, en vertu des conditions volontaires de la Convention, ne seraient pas en mesure de réduire les émissions jusqu’à ce niveau. On a donc convenu de négocier un accord exécutoire, assorti de cibles et d’échéanciers de réduction. Le Protocole de Kyoto est né de ces négociations.

Le Canada s’est engagé à réduire ses émissions de GES, en moyenne, à 6 p. 100 en deçà des concentrations de 1990 durant la période de cinq ans qui va du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012.

Encore une fois, il devient clair que même avec des cibles exécutoires, des pays auront de la difficulté à réduire leurs émissions de GES. Cela est particulièrement vrai au Canada, où nos émissions de GES ont bondi à plus de 20 p. 100 au-delà du niveau de 1990 en 2003.

Nos émissions ont augmenté malgré les divers plans que le Canada a instaurés depuis 1995. Le premier Plan d’action national sur le changement climatique (PANCC) a été approuvé en 1995. Le Plan d’action 2000 a précisé les engagements fédéraux pour répondre aux objectifs de la stratégie nationale de mise en œuvre2. Le Plan du Canada sur les changements climatiques est paru en 2002 en préparation des votes de ratification parlementaires; il a été mis à jour dans le Projet vert — Un Plan pour honorer nos engagements de Kyoto, de 2005.

Le Comité estime que notre bilan en matière d’émissions nous oblige à repenser certains aspects de l’approche canadienne à la réduction des émissions de GES et considère que le moment est bien choisi pour une contribution parlementaire importante dans cette démarche.

Les mesures prises l’ont été spontanément, sans stratégie globale et sans cadre redditionnel. Elles ont donc été inefficaces et, prises en retard, elles ont fait augmenter les coûts de réduction des émissions.

En prenant des mesures tardives, le Canada a pris du retard sur d’autres pays. Les seuls pays qui sont prêts d’atteindre leurs objectifs de Kyoto (tels la Suède et le Royaume-Uni) sont ceux qui, pour quelle que soit la raison, ont agi tôt. Même certains pays en développement nous ont dépassés dans bien des aspects des énergies renouvelables.

Nous nous acheminons presque certainement vers un monde dans lequel le carbone sera limité; notre économie risque d’être mal préparée aux changements. Nous risquons également de ne pas être pris au sérieux sur la scène internationale si notre inaction nous fait rater de loin notre cible de Kyoto. Cela est particulièrement vrai cette année, alors que le Canada accueillera la 11e réunion de la Conférence des Parties à la convention (CdP11), qui deviendra la 1re réunion des Parties au Protocole (puisque ce dernier n’est entré en vigueur que cette année).

Cette situation embarrassante ne serait pas sans conséquence : si les pays développés ne manifestent pas de sérieux face à la réduction des émissions de GES, il n’y a aucune chance que les pays en développement, dont les émissions surpasseront bientôt celles des pays industrialisés, accordent de l’importance à réduire les leurs. Les risques causés au climat par des émissions incontrôlées de CO2 doivent être évités.

Je ne pense pas que l’on fera beaucoup d’adeptes dans le reste du monde sans faire quelque chose de notre côté. … À mon sens, la prestation des pays riches est une condition préalable à l’adhésion du reste du monde dans la deuxième phase. Faute de quoi, ils y verront simplement un coup monté3.

Pendant toute l’étude du Comité, nos témoins ont rivalisé d’imagination sur les façons de réduire nos émissions de GES. Mais ces idées demeureront lettre morte sans incitatifs pour s’éloigner du statu quo. Ce virage ne se fera pas du jour au lendemain : pour qu’il survienne, il faudra que le gouvernement établisse des règles claires pour que le secteur industriel puisse faire les plans à long terme nécessaires.

À court terme, le gouvernement doit modifier sa fiscalité pour que l’investissement dans le rendement énergétique devienne vraiment prioritaire.

Même si les parties au Protocole de Kyoto atteignent leurs cibles, les GES continueront de s’accumuler dans l’atmosphère où leurs effets dureront au moins cent ans. En outre, le climat continuera de changer naturellement comme il l’a toujours fait. Augmenter la capacité d’adaptation du Canada au changement climatique deviendra donc essentiel, en particulier dans le Nord où le changement se fait déjà sentir4.

En plus d’être un problème économique et social, les GES s’accompagnent souvent d’autres polluants, en particulier de ceux du smog et des composés mercurés. Réduire les émissions de GES pourrait donc avoir d’autres retombées positives sur l’environnement et la santé.

Le commissaire à l’environnement et au développement durable affirmait en 1998 :

3.39 Les changements climatiques ne sont pas qu’un problème environnemental. Ils ont aussi des incidences économiques, notamment sur le plan du commerce et de la compétitivité, et des incidences sociales. Ils soulèvent aussi des préoccupations au sujet de l’équité entre les générations, entre les divers paliers de pouvoir et secteurs d’activités au Canada, et entre les divers pays et régions du monde. Il faut tenir compte de ces considérations et des rivalités d’intérêts lorsqu’on décide des modalités d’intervention. Les changements climatiques incarnent donc le défi posé par le développement durable.

Par conséquent, notre cible de Kyoto devrait nous motiver à intégrer nos objectifs économiques, sociaux et environnementaux. Dans le monde de demain, le carbone sera rare; ce monde offrira autant de perspectives positives que négatives. Diminuer nos émissions de GES constitue un défi de tailler pour le Canada, mais si nous le relevons, le Canada se placera en position dominante dans l’évolution de l’économie mondiale.

LE DÉFI DE KYOTO AU CANADA

Cible du Canada

Le Protocole de Kyoto exige que le Canada réduise ses émissions de GES à 6 p. 100 en deçà de ce qu’elles étaient en 1990. Le Protocole stipule que les émissions permises doivent être cinq fois ce niveau durant la période d’engagement de cinq ans allant du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2012. Cela veut dire que, durant cette période, les émissions moyennes du Canada doivent se situer à 560 Mt/an.

Cette cible se situe à peu près au milieu des cibles des autres pays, l’UE s’étant fixée une cible de 8 p. 100 sous les niveaux de 1990, les États-Unis (qui ne sont cependant pas Partie au Protocole), de 7 p. 100 au-dessous, le Japon, de 6 p. 100 au-dessous et l’Australie de 8 p. 100 au-dessus.  À l’intérieur de l’UE, la cible est distribuée entre les pays aux termes d’un accord de partage du fardeau qu’elle représente, lequel permet à certains pays d’augmenter leurs émissions (pour l’Espagne, à 15 p. 100 au-dessus des niveaux de 1990), tandis que d’autres les réduisent (comme le Danemark, à 21 p. 100 en dessous des niveaux de 1990).

Un autre phénomène qui a un impact sur la difficulté d’une cible, c’est le contexte particulier des pays. Les pays qui ont participé aux négociations avaient une certaine idée de ce qu’ils pouvaient réaliser, mais ne pouvaient en être sûrs.

Quant aux engagements futurs au-delà de 2012, M. Elliott Diringer du Centre PEW sur les changements climatiques globaux a affirmé ceci :

Ce qui a changé depuis 1999, c’est que les gouvernements ont vraiment pris plus au sérieux la question, qu’ils comprennent bien mieux les difficultés et les circonstances particulières à leur pays. Ils seraient mieux en mesure de négocier en tenant compte de ces circonstances nationales. Nous voudrions donc un cadre qui permette à chaque gouvernement de faire concorder ses intérêts nationaux avec les intérêts mondiaux5.

L’UE dispose d’un net avantage sur le Canada : elle compte des économies en transition vers le capitalisme, comme celle de la Pologne, qui se sont effondrées après la chute du communisme. Avec l’effondrement d’économies telle celle de la Pologne, ses émissions de GES ont chuté de 30 à 40 p. 100 en deçà du niveau de 1990. Son total est également biaisé par la Grande-Bretagne et l’Allemagne, à cause de la taille de leur économie. Au début des années 1990, la Grande-Bretagne a remplacé le charbon par le gaz naturel tandis que l’Allemagne unifiée absorbait l’Allemagne de l’Est, autre pays dont les émissions de GES ont chuté avec l’effondrement de son économie. Ainsi, l’Allemagne tire maintenant 16 000 MW d’énergie du vent et d’autres sources renouvelables.

Au sein de l’Union européenne, des pays comme le Danemark (21 p. 100 en deçà du niveau de 1990) et l’Autriche (13 p. 100 en deçà du niveau de 1990) ont des cibles très difficiles en vertu de l’accord du partage du fardeau; on prévoit qu’ils rateront leurs cibles de loin.

Le Canada est un pays nordique, un pays froid, doté d’une infrastructure relativement peu importante compte tenu de sa population et dont l’économie comporte un important volet d’exploitation des ressources naturelles, une activité énergivore.  Notre qualité de vie dépend donc beaucoup des combustibles fossiles et, dans ce contexte, les changements sont difficiles.

D’autres pays, comme la Suède, ont certaines particularités en commun avec le Canada, mais obtiennent de meilleurs résultats. La Suède est intervenue tôt pour réduire les émissions et elle est l’un des rares pays qui pourraient réussir à respecter les objectifs de Kyoto au moyen de mesures intérieures (voir le tableau pour un aperçu des résultats relativement aux cibles). Certes, la Suède n’a pas les mêmes problèmes de compétence que le Canada, mais cela ne suffit pas à expliquer pourquoi les émissions ont augmenté au Canada. L’absence de mesures prises en temps opportun a aussi joué un rôle important à cet égard.

Émissions de GES en Mt/an dans certains États parties au Protocole de Kyoto


 

Cible relative à 1990

Cible

1990

1996

2000

2002

Canada

0,94

572

609

675

725

731

Royaume-Uni

0,875

650

743

708

648

635

Danemark

0,79

55

69

90

68

68

Japon

0,94

1116

1187

1352

1337

1331

Suède

1,04

75

72

77

68

70

Évolution des émissions du Canada

Depuis 1990, les émissions de GES du Canada sont passées de 596 mégatonnes (Mt) par an à 740 Mt par année en 20036. Cela représente une augmentation de 21 p. 100 par rapport à 1990 et de 28 p. 100 par rapport à la cible (environ 560 Mt/an). Les derniers calculs indiquent que le Canada présentera vraisemblablement un écart de 270 Mt entre le scénario du statu quo en 2010 et la cible de Kyoto. Le Canada a donc à atteindre une des cibles les plus exigeantes de toutes les parties qui doivent en atteindre une, et cette cible sera d’autant plus difficile à atteindre que nous avons pris du retard.

La période d’engagement de Kyoto commence dans deux ans et demi à peine et prendra fin dans sept ans et demi, alors que la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques a été signée il y a 13 ans et le Protocole de Kyoto, il y a 7 ans. Plus on approche de la période de Kyoto et plus nos émissions de GES continuent d’augmenter, plus il devient difficile de réduire nos émissions au niveau requis par le Protocole.

Le coût du retard (première partie)

La cible est d’autant plus difficile à atteindre que nos émissions de GES ont continué à augmenter depuis 1997. Comme la cible est la moyenne sur la période 2008-2012, plus les émissions canadiennes seront élevées au début de la période, plus il faudra dépasser la cible de 6 p. 100 en deçà des émissions de 1990 pour réduire cette moyenne.

La figure 1 illustre les effets de ce retard. En 1997, année de la signature du Protocole, la route était facile à suivre, avec une cible un peu plus exigeante que 6 p. 100 en deçà des émissions de 1990.

Figure 17 : Le coût du retard —

Voies à suivre8 pour atteindre la cible de Kyoto en 1997, 2002 et 2005

Émissions prévues de GES et l'objectif de Kyoto

Les deux autres scénarios supposent que le Canada est en mesure de plafonner ses émissions au niveau de 2002 ou de 2005 avant le début de la période de Kyoto. En 2002, année du premier Plan du Canada sur les changements climatiques et de notre ratification du Protocole (et dernière année pour laquelle les chiffres d’émissions de GES sont disponibles), le chemin à suivre était déjà devenu beaucoup plus ardu.

Si on arrive à la période de Kyoto avec des émissions au niveau de 2005, nous devrons les réduire très rapidement de plus de moitié, pour atteindre une cible finale de quelque 380 Mt/an, une baisse de plus de 50 p. 100 et ainsi atteindre la cible de Kyoto. Cela signifie que l’écart ne serait pas de 270 Mt/an mais plutôt de près de 500 Mt/an.

RÉDUIRE LES ÉMISSIONS DE GES : LES DÉTERMINANTS

Le Protocole de Kyoto vise plusieurs GES, dont le CO2, le méthane, les oxydes nitreux et les hydrofluorocarbures. Nos émissions de GES se composent d’environ 80 p. 100 de CO2, 13 p. 100 de méthane, 7 p. 100 d’oxydes nitreux et 1 p. 100 d’autres GES.

On doit en priorité s’attaquer aux émissions de méthane et d’oxydes nitreux qui sont des GES puissants; leur émission constitue un gaspillage dont la réduction pourrait être bénéfique à l’économie.

Pour bien s’attaquer aux GES cependant, il faut réduire les émissions de CO2. C’est plus difficile que de réduire les émissions des autres GES, car le CO2 résulte de la combustion des combustibles fossiles qui sont liés étroitement à notre économie. Pour réduire les émissions de CO2, il faudra affranchir la croissance économique de sa dépendance envers le carbone.

L’équation de Kaya

On peut réunir dans une équation simple les grands facteurs qui donnent lieu aux émissions de GES : la population, l’activité économique, la quantité d’énergie utilisée par unité d’activité économique et la part du carbone dans cette énergie.

Cette équation est parfois appelée équation de Kaya9.

Mc =

N

*           (PIB/N)

*           (E/PIB)

*           (C/E)

CO2
Émission

population

PIB/habitant

intensité d’énergie de l’économie

intensité carbone de l’énergie primaire

Comme le montre la figure 2, la population du Canada a crû de 30 p. 100 depuis 1980 et le PIB par habitant a augmenté de 42 p. 100. L’intensité d’énergie primaire de l’économie a cependant diminué de 27 p. 100 tandis que l’intensité carbone de l’énergie primaire chutait d’environ 15 p. 100 entre 1980 et 1996, avant de remonter aujourd’hui à 5 p. 100 en deçà de ce qu’elle était en 1980.

Figure 2 : Évolution des termes de l’équation de Kaya depuis 1980 10

Changement depuis 1980Changement depuis 1980Changement depuis 1980

L’augmentation démographique depuis 1980 est légèrement supérieure à la diminution de l’intensité de l’énergie primaire, de sorte que les deux s’annulent. Comme, au bilan, l’apport de carbone dans l’énergie primaire n’a diminué que de 5 p. 100 depuis 1980, on peut dire que les GES ont suivi d’assez près le PIB par habitant.

On peut présumer que la population du Canada continuera d’augmenter. On espère que le PIB par habitant augmentera également. C’est ce facteur qui a chuté dans les anciens pays communistes après l’effondrement du régime, et qui a conduit aux réductions des émissions. Personne ne souhaite qu’il arrive la même chose au Canada.

Cela nous laisse, pour agir, les deux derniers facteurs : l’intensité énergétique de l’économie et l’intensité carbone de l’énergie primaire11. Pour réduire les émissions de CO2, il faut soit accroître la production par unité d’énergie, soit réduire la quantité de carbone produite par unité d’énergie.

Le coût du retard (deuxième partie)

Le premier coût du retard, comme l’indiquait la figure 1, est dû au fait que les émissions du Canada ont augmenté considérablement depuis 1990, ce qui signifie qu’il faut aller plus loin qu’une réduction de 6 p. 100 en deçà du niveau de 1990 pour atteindre l’exigence moyenne du Protocole et que notre cible est beaucoup plus difficile et coûteuse à atteindre.

Le deuxième coût, probablement plus important que le premier, résulte du fait que réduire la quantité d’énergie utilisée par unité de production, ou la quantité de carbone libérée par unité d’énergie, prend un temps qui est lié en partie au taux de rotation des capitaux dans l’industrie.

Pour diminuer l’intensité énergétique, il faut augmenter le rendement ou changer la structure de l’économie. Réduire l’intensité carbone implique qu’il faut recourir à des carburants qui émettent moins de carbone et/ou piéger le carbone produit et le stocker à long terme à l’abri de l’atmosphère.

Rien de cela n’est facile. Si le gouvernement avait pris au sérieux en 1992 ses engagements envers la CCNUCC et mis en place des politiques pour réduire graduellement les émissions, il se peut que nous ayons atteint notre cible de Kyoto au pays. S’il avait mis en place des politiques au lendemain de la signature du Protocole, il aurait rendu notre engagement moins coûteux, et l’atteinte de la cible plus facile. Plus on retarde, plus il en coûtera.

Comme le Comité l’a appris dans son étude, un modèle radical de l’atteinte de la cible de Kyoto par des mesures au Canada seulement prévoit une augmentation de prix de 10 à 100 p. 100 pour l’électricité, de 60 p. 100 pour le gaz naturel et de 50 p. 100 pour l’essence. Évidemment, ce modèle est une méthode qui gonfle artificiellement les prix dans l’espoir de réduire la consommation, et le Comité ne le recommande pas.

Même si ces augmentations à court terme ne se traduisent pas par une économie dévastée, leur coût politique pourrait être considérable12. Aujourd’hui, les coûts seraient beaucoup plus élevés.

Il s’agissait d’hypothèses mises à l’essai au moyen de notre modèle d’efficacité énergétique; nous avions pris pour acquis que le Canada atteindrait 100 p. 100 de ses objectifs … de Kyoto. Autrement dit, toutes les réductions seraient intérieures. En fait, si nous devions commencer dès maintenant à prendre des mesures pour atteindre la cible de 100 p. 100, ces coûts ne seraient pas encore assez élevés. Ça pourrait être le double. L’année de départ pour la simulation était l’an 2000…

Les chiffres visaient 100 p. 100. Je suis convaincu du bien-fondé de mes chiffres et j’irai jusqu’à dire qu’ils seraient beaucoup plus élevés maintenant13.

Il est aujourd’hui impossible de réaliser au Canada assez de réductions pour atteindre notre cible, ce que le gouvernement reconnaît tacitement dans son nouveau plan. Il faudra donc acheter des crédits à l’étranger.

Cependant, le Comité est convaincu que le Canada peut atteindre en grande partie sa cible de réduction de ses émissions de GES en adoptant de meilleures politiques intérieures, notamment en investissant massivement dans l’efficacité énergétique et la mise en valeur des énergies renouvelables, au-delà des objectifs fixés par le gouvernement fédéral, ce qui permettra de réduire les émissions à long terme et de maximiser les réductions à court terme, pour la période de Kyoto.

Comme on l’a dit, une des difficultés du Canada à atteindre sa cible tient à notre contexte national. S’attaquer au changement climatique anthropique tout en soutenant une économie concurrentielle exige la concertation de l’ensemble des gouvernements et des intervenants. Pour atteindre les objectifs établis, il faut une planification d’ensemble coordonnée et un cadre de gestion serré.

GESTION DU PORTEFEUILLE CLIMATIQUE FÉDÉRAL

La gestion du portefeuille relatif au changement climatique explique en partie pourquoi le Canada se trouve dans la situation où il est aujourd’hui. Le Comité est découragé d’apprendre que cette gestion a été le principal problème depuis le début de nos efforts pour réduire nos émissions de GES.

Le rapport de 1998 de la commissaire à l’environnement et au développement durable arrive à la conclusion suivante :

3.16 […] Nombre des éléments clés nécessaires à la gestion de la mise en œuvre de la démarche canadienne visant à parer au changement climatique manquent ou sont incomplets. Par exemple, le rôle des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et celui des autres intervenants en la matière sont mal définis ou ne le sont pas du tout. Un élément clé, un programme national de sensibilisation du public, n’existe pas encore. Il n’y a aucun plan de mise en œuvre, peu de dispositions ont été prises pour contrôler régulièrement l’évolution de la situation en fonction des résultats, et aucun rapport sommaire consolidé n’est présenté au Parlement.

3.17 Nous sommes conscients des défis à relever, mais nous croyons que le non-respect par le Canada de ses engagements relatifs au changement climatique découle surtout d’une mauvaise planification et d’une gestion inefficace. À ce moment-ci, rien n’indique clairement que la poursuite de l’approche actuelle permettra de mieux respecter les engagements présents et futurs. À notre avis, il faut repenser en grande partie les mesures prises par le Canada pour la réalisation de l’orientation stratégique du PANCC.

La commissaire actuelle entreprend une vérification des mesures de lutte contre le changement climatique au sein du gouvernement et devrait le déposer à l’automne 2006. Malgré le plan actuel, nous craignons malheureusement qu’elle ne constate guère de changement.

Évaluer la performance

Le Comité a découvert qu’il n’est pas possible actuellement d’avoir une vision d’ensemble des dépenses de l’État fédéral sur le changement climatique, encore moins d’avoir une idée de la mesure dans laquelle les programmes atteignent leurs objectifs. Faire le lien entre les annonces budgétaires et les dépenses des programmes ministériels est à peu près impossible. Évaluer leur rendement, en particulier dans le contexte des objectifs globaux du gouvernement est également difficile. Le Secrétariat du Conseil du Trésor s’est attelé un projet qui l’aiderait dans cette tâche, mais on ne sait pas quel effort il y met, et de toute façon il en est encore aux premières étapes. Le Comité trouve cela inacceptable et demande à la vérificatrice générale de faire un examen détaillé de tous les fonds dépensés ou attribués dans le cadre de programmes ou de projets liés à Kyoto depuis 1997.

Dans son dernier plan, Le Projet vert — Aller de l’avant pour contrer les changements climatiques : Un plan pour honorer notre engagement de Kyoto, le gouvernement fédéral reconnaît qu’avant le budget de 2005, 3,7 milliards de dollars avaient été annoncés depuis 1997 pour contrer le changement climatique. Cependant, seulement 1,7 milliard de dollars avaient été dépensés et seulement 900 millions étaient allés à des activités aptes à réduire les émissions de GES. Les témoignages que nous avons entendus donnent à penser que 250 des 900 millions ont été alloués à des projets tels que les Fonds municipaux verts14. Comme les fonds ont été difficiles à suivre et que la reddition de comptes a laissé à désirer, le Comité recommande que la vérificatrice générale dresse un bilan comptable complet de tous les fonds dépensés dans le cadre de programmes liés à Kyoto depuis 1997.

Le Comité reconnaît qu’il faut du temps pour mettre en place des programmes et que leurs effets ne seront peut-être pas apparents avant longtemps. Cependant, des mesures sont en place depuis 1990 pour réduire les émissions, de sorte que les investissements réalisés après 1997 s’ajoutaient aux programmes en cours. Entre temps, nos émissions de GES ont augmenté de plus de 20 p. 100 depuis 1990 et de 7 p. 100 depuis 1997.

Comme on l’a dit, il faut changer l’économie en profondeur pour réaliser des réductions significatives d’émissions. Il semble clair que les efforts à ce jour n’ont pas réussi à apporter les changements requis, soit une réduction mesurable des émissions de GES.

Comme l’écrivait la commissaire en 1998, «  Rien n’indique clairement que la poursuite de l’approche actuelle permettra de respecter les engagements présents et futurs  ». Quelque chose doit changer et, pour qu’il y ait changement, il faut créer un cadre redditionnel qui prévoie une évaluation régulière et des rapports au Parlement.

Le Comité s’est réjoui de lire ce qui suit dans le budget 2005 :

Un profil du financement de programme pouvant servir à prolonger les programmes existants relatifs au changement climatique a été créé. Cependant, avant de débloquer ces fonds pour 2006-2007, les ministres reverront toutes les mesures existantes pour déterminer leur succès relatif dans la réduction rentable des émissions à court et à long terme.

Cependant, cet exercice devrait être en cours depuis le début du plan. Selon les ministères, il existe une forme d’évaluation permanente de programme :

Nous avons un accord de compatibilité avec le Conseil du Trésor et nous avons aussi, à l’intérieur de cela, une série d’évaluations. Justement, ce matin j’ai rencontré mes collègues du ministère pour revoir notre évaluation des programmes pour l’année à venir. Cela n’inclura pas tous les programmes, mais chaque fois que nous recevons l’approbation du Conseil du Trésor pour mettre en œuvre un programme, un certain montant … est consacré à l’évaluation du programme et une date est fixée pour cette évaluation. Nous suivons ces règles15.

Il se peut que le mécanisme d’approbation du Conseil du Trésor fonctionne pour des programmes isolés. Pour des programmes horizontaux cependant, qui supposent une cohésion dans le travail vers un objectif commun (ici, la réduction des émissions de GES), cette évaluation n’est pas suffisante, de toute évidence. Il faut un mécanisme pour évaluer le plan au moment de sa mise en œuvre, et pas seulement évaluer isolément chaque élément du plan.

Ces évaluations doivent également inclure des rapports au Parlement sur le progrès vers les objectifs des programmes. Les rapports de tous les ministères devraient avoir une présentation uniforme et :

[R]enseigner le Parlement, par exemple, sur les rôles et les responsabilités du gouvernement fédéral, notamment sur son rôle de chef de file national, sa responsabilité au titre de la mise en oeuvre du PANCC, les résultats obtenus et, dans la mesure du possible, les ressources humaines et financières utilisées pour trouver solution aux changements climatiques16.

Cette approche concertée aux politiques fédérales de lutte au changement climatique nécessitera une nouvelle agence, qui pourrait ou non appartenir au BCP mais devrait relever de lui ou directement du premier ministre.

Certains témoins ont craint que la création de cette agence complique le système actuel et retarde l’action. Le Canada ne peut guère se permettre de retards, mais la création de politiques sans cadre redditionnel n’est pas davantage souhaitable. Le Comité estime qu’il est possible de créer cette agence sans retarder indûment la mise en œuvre de la politique.

RECOMMANDATION 1 :

Que le gouvernement crée une agence pour contrôler la mise en œuvre des politiques sur le changement climatique à l’échelle de toute l’administration fédérale. L’agence créerait des protocoles uniformes pour les rapports des ministères et déposerait un bilan annuel consolidé.

Coordination et reddition de comptes ministérielles générales

La reddition de comptes est une relation fondée sur l'obligation de faire la preuve du rendement, de l'examiner et d'en assumer la responsabilité, soit à la fois des résultats obtenus à la lumière des attentes convenues et des moyens employés17.

La coordination ministérielle est essentielle aux résultats dans les programmes horizontaux comme ceux qui concernent le développement durable et le changement climatique. Par le passé, les ministères se faisaient concurrence au Cabinet pour l’approbation de leurs programmes. Cependant, comme l’a souligné Gene Nyburg de la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie, «  lorsqu’on regarde le développement durable, si on veut prendre les choses au sérieux, il est clair qu’il faut plus d’intégration18  ».

Évaluations environnementales stratégiques et stratégies de développement durable : on fait fi des exigences fondamentales

Pour intégrer le développement durable, et atteindre des objectifs en matière de changement climatique dans l’ensemble de l’appareil gouvernemental, des signaux puissants doivent émaner du centre, ultimement du Bureau du premier ministre. Malheureusement, ces signaux ont été relativement faibles et souvent ignorés.

Il y a des exigences ministérielles fondamentales qui favoriseraient l’orientation concertée du gouvernement vers la réduction des émissions de GES : l’exigence, en vertu de la Loi sur le vérificateur général, que les ministères déposent une stratégie de développement durable (SDD) et la directive du cabinet sur l’Évaluation environnementale stratégique (EES).

La réalisation des SDD est un bon indice du sérieux des ministères dans le dossier du développement durable et du changement climatique. La commissaire a fait la liste des objectifs relatifs au changement climatique anthropique que les ministères ont inscrits à leur SDD. La liste est considérable. Malheureusement, comme elle le signale, les SDD sont pris à la légère par les ministères, à quelques exceptions près. Réaliser les objectifs de la SDD n’est pas un élément important de la performance générale du ministère et il n’y a guère de conséquences pour ne pas atteindre ou négliger les cibles.

L’évaluation environnementale stratégique vise les politiques susceptibles d’avoir des répercussions sur l’environnement. Le Cabinet a émis sa Directive sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes il y a 15 ans. Dans sa vérification 2004 de son application, la commissaire arrive à la conclusion non équivoque suivante :

Les résultats de notre vérification, pris dans leur ensemble, permettent de croire que la plupart des ministères n’ont pas pris de mesures sérieuses pour appliquer cette directive. De fait, l’évaluation environnementale stratégique est loin de respecter sa promesse d’orienter l’élaboration des politiques, des plans et des programmes.

Orienter les politiques pour réaliser des objectifs environnementaux, voilà exactement ce qu’il faut pour réduire les émissions. C’est le moyen convenu pour réaliser des attentes communes (voir la définition donnée plus haut de reddition de comptes).

Cependant, comme le Comité l’a appris, le ministère des Finances, dont l’adhésion est indispensable pour réaliser des objectifs environnementaux, ne disposait même pas de mécanismes suffisants avant mai 2003 pour réaliser des EES. Cela a permis à des projets de loi comme le C-48 (visant une réduction du taux d’impôt des entreprises du secteur énergétique, semblable à celle déjà accordée à d’autres secteurs, pour favoriser l’exploitation des ressources) d’échapper à l’EES. Nous ne voulons pas préjuger des conclusions d’une EES de ce projet de loi, mais simplement signaler qu’une directive du Cabinet vieille de 10 ans a été complètement ignorée.

En juin 2003, le Comité recommandait que la directive reçoive une assise légale dans son rapport Le développement durable et l’Évaluation environnementale : Au-delà du projet de loi C-9. À l’époque, le gouvernement avait répondu qu’il ajoutait à la directive du Cabinet l’exigence d’un rapport public sur les effets environnementaux, pour assurer les intervenants et le public que les décisions avaient bien tenu compte de l’environnement. Il s’engageait également à considérer les autres avis et recommandations du Comité, de concert avec les constatations du commissaire à l’évaluation environnementale stratégique (rapport de 2004) et les recommandations faites au ministre de l’Environnement par son Comité consultatif de la réglementation.

Dans son rapport 2004, la commissaire recommandait que le BCP garantisse l’affectation des responsabilités et des pouvoirs visant :

 le contrôle central permanent de l’application de la directive du Cabinet,  
 un contrôle de qualité suffisant des évaluations entreprises,  
 l’amélioration continuelle de la procédure d’évaluation.  

Dans sa réponse, le gouvernement a affirmé que les ministères demeureraient responsables de leur propre évaluation, mais que le BCP avait un droit de regard important.

Le Comité estime que l’autocontrôle est insuffisant, comme les 15 dernières années en font foi. Il réitère donc sa demande que la directive ait force de loi, avec exigence que le BCP fasse rapport sur l’application de l’EES à l’échelle de toute l’administration fédérale.

RECOMMANDATION 2 :

Le Comité recommande que la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes reçoive un fondement légal et que le Bureau du Conseil privé soit tenu par cette loi de faire rapport  au Parlement chaque année sur l’application de l’EES dans toute l’administration fédérale.

En outre, les EES doivent suffisamment tenir compte des objectifs du gouvernement en matière de changement climatique. La directive ne mentionne pas nommément le changement climatique comme facteur à considérer dans les évaluations environnementales. Cependant, comme le Comité l’a entendu durant les audiences : «  La directive ne mentionne pas expressément le changement climatique parmi les facteurs qui doivent être pris en considération dans les évaluations environnementales, mais cet aspect constitue certainement une question environnementale qui doit être prise en compte, si elle est susceptible d’avoir un effet sur l’initiative en préparation19  ».

L’EES des politiques fédérales doit tenir compte des objectifs climatiques, et cela doit être signifié clairement aux ministères. L’Agence canadienne d’évaluation environnementale, de concert avec les intervenants et les provinces, a produit un guide20 afin d’aider à intégrer le changement climatique aux évaluations environnementales. L’Agence doit également être tenue de prendre des règlements en vertu de la loi sur l’EES, expliquant comment incorporer les objectifs climatiques dans leur EES.

RECOMMANDATION 3 :

Que l’Agence canadienne d’évaluation environnementale se voie confier la tâche de produire les règlements d’application de la loi sur l’EES, expliquant comment tenir compte des objectifs fédéraux visant le changement climatique dans les évaluations de projets de politiques, de plans et de programmes.

Signaux émis du centre

À cause du manque de responsabilité redditionnelle à l’égard des exigences prescrites par les agences centrales, on a proposé qu’un organisme central, peut-être le Bureau du Conseil privé, se voit confier un plus grand rôle de coordination et d’application. La commissaire est allée dans le même sens dans son rapport de 2004, au sujet du développement durable :

En faisant davantage pour qu'il y ait reddition de comptes sur le rendement et les résultats, les organismes centraux, comme le BCP et le Secrétariat du Conseil du Trésor, peuvent inciter les ministères à être plus responsables en matière d’environnement et de développement durable.

Une autre faiblesse du développement et de la mise en œuvre du développement durable dans les ministères, c’est l’absence d’une stratégie fédérale cohérente et globale à l’intérieur de laquelle ils joueraient des rôles bien définis. Ici encore, la commissaire relève cette faiblesse depuis des années.

C’est pourquoi, au risque de donner une impression de déjà-vu aux personnes qui ont lu mes précédents rapports, j’encourage fortement le gouvernement fédéral à définir une vision à la fois mobilisatrice et explicite pour un Canada durable ainsi qu’une stratégie pangouvernementale pour la réaliser. Les ministres, les parlementaires, les fonctionnaires à tous les échelons et la population en général doivent prendre part à cet exercice.

RECOMMANDATION 4 :

Que le Bureau du Conseil privé crée un secrétariat du développement durable qui se voit confié les tâches :

 de produire une stratégie fédérale du développement durable assortie de grandes priorités; 
 de faire rapport chaque année sur les progrès réalisés en vue des objectifs ministériels de développement durable. 

Le rôle des fonctionnaires

La responsabilité de la coordination interministérielle de la politique du développement durable relève d’un comité de sous-ministres.

Un comité formé de sous-ministres — le Comité de coordination pour l’environnement et le développement durable — a été chargé de diriger et de coordonner les efforts du gouvernement en faveur du développement durable. Ce mandat fort et unique lui a été confié directement par le greffier du Conseil privé21.

En 2004, la commissaire a conclu que ce comité (aujourd’hui dissous et reconstitué sous un autre nom) «  n’exploite pas son plein potentiel  ».

Espérons que le nouveau comité sous-ministériel sera plus efficace. Sans orientation donnée par le centre, cela est douteux. Le BCP doit faire en sorte que la coordination des politiques visant le changement climatique soit la priorité absolue de ce comité.

Il est facile de se disculper de ne pas avoir atteint des cibles horizontales quand les rôles ne sont pas bien définis. On a tendance à les oublier facilement s’il n’y a pas de conséquences.

La reddition de comptes ne porte pas suffisamment à conséquences pour les responsables. Je m’inquiète particulièrement du fait que les hauts fonctionnaires qui ne se conforment pas aux directives émanant des organismes centraux du gouvernement fédéral n’ont pas à en subir les conséquences22.

RECOMMANDATION 5 :

Qu’un segment important de la prime au rendement soit utilisé comme mécanisme de reddition de comptes pour tenir les sous-ministres et sous-ministres adjoints responsables des cibles de développement durable.

L’absolue nécessité d’une bonne gestion du dossier du changement climatique ne saurait être surestimée. Sans elle, le nouveau plan est condamné à l’échec. C’est ce que souligne depuis des années la commissaire à l’environnement et au développement durable.

Il demeure cependant un besoin pressant d’un plan pour combattre le changement climatique sur lequel le secteur industriel peut compter pour faire une planification à long terme. Il existe suffisamment d’information aujourd’hui pour établir un plan juste et efficace; il faut le mettre en place de toute urgence.

VERS UN PLAN JUSTE ET EFFICACE DE RÉDUCTION DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE

Liens avec la sécurité énergétique

Le changement climatique anthropique est un problème qui se posera à  plus ou moins long terme. De plus, l’expression souvent utilisée pour le décrire, le réchauffement planétaire, risque peu de susciter l’attention du public dans un pays où l’hiver sévit. À cause du caractère abstrait du problème, il est difficile d’y sensibiliser les gens en général, et les Canadiens en particulier.

Comme le gaz à effet de serre le plus préoccupant, le CO2, est étroitement lié à la consommation d’énergie, il serait des plus utile d’aborder la question de l’atténuation du changement climatique anthropique en s’intéressant aux émissions liées à la sécurité énergétique.

La quantité de CO2 libéré lors de la consommation d’énergie dépend de la quantité d’énergie consommée et de l’intensité carbone de la source d’énergie (voir la partie ci-dessus sur les déterminants de la réduction des émissions). Cette intensité carbone varie en fonction de la composition du portefeuille énergétique du pays. L’évolution future du portefeuille énergétique influera sur les émissions futures de CO2.

La figure 3 illustre l’analyse de l’Office national de l’énergie comparant le portefeuille énergétique du Canada de 2000 à celui de 202523. Même dans son scénario d’une évolution technologique rapide (Techno-vert), l’Office prévoit que, dans 20 ans, l’approvisionnement énergétique au Canada sera dominé par les combustibles fossiles. Il en est ainsi en raison «  des contraintes structurelles sur la manière dont l’énergie est utilisée au Canada  ».

Diminution de l’intensité carbone des sources d’énergie primaire

Figure 3 : Part de l’énergie primaire en 2000 par rapport à 2025 avec et sans le
changement technologique accéléré (Techno-vert)
24

Techno-vert

Les scénarios de l’ONE sont aussi fondés sur diverses hypothèses, notamment un prix du baril de pétrole de 22 $US. Ce n’est pas le cas maintenant, et il est difficile de prévoir si le prix du pétrole à long terme demeurera élevé. Une telle hypothèse peut influer grandement sur tout scénario, compte tenu de l’effet du prix sur la consommation et la prospection de pétrole, en particulier dans le cas des sables bitumineux.

Le manque de prévisions à jour préoccupe le Comité, tout comme l’accès à des données sommaires à jour et conviales sur l’utilisation de l’énergie au Canada. Ainsi, le dernier Perspectives énergétiques du Canada a été publié en 1996 et mis à jour en 1999. Cela oblige le gouvernement à traiter avec l’industrie en se fondant sur de vieux scénarios. Le protocole d’entente avec l’industrie automobile est un bel exemple : le document de référence est Perspectives 1999. Un nouveau Perspectives est censé paraître cette année, mais de nouvelles éditions devraient être publiées plus fréquemment.

RECOMMANDATION 6 :

Que Ressources naturelles Canada produise tous les ans un sommaire complet et entièrement accessible sur les utilisations de l’énergie au Canada et mette à jour et rende disponible sa publication Perspectives énergétiques aux deux ans au moins.

Malgré l’absence de Perspectives à jour, le Comité sait bien qu’il sera long et difficile de délaisser les combustibles fossiles, notamment dans le domaine des transports. Il faudrait que l’objectif premier soit de délaisser les combustibles fossiles. Toutefois, même si nous décidions aujourd’hui de recourir massivement à des combustibles faibles en carbone que le nucléaire, l’hydroélectricité et l’éolien, il fait peu de doute que le portefeuille énergétique canadienne sera dominé à moyen terme par les combustibles fossiles. Cela n’empêche évidemment pas de prendre des mesures pour accroître la part des combustibles faibles en carbone dans le portefeuille énergétique du Canada au-delà des prévisions de l’ONE.

Les plus grandes réductions de l’intensité carbone des sources d’énergie devraient survenir dans la production d’électricité. Dans ses scénarios, l’ONE prévoit une évolution lente de ce secteur, mais le Comité est d’avis que l’évolution sera d’autant plus marquée si un ensemble d’incitatifs intéressants est mis en place.

Diverses sources d’électricité à faible intensité carbone sont disponibles au Canada : l’hydroélectricité, le nucléaire, la biomasse et l’énergie éolienne. Chacun de ces secteurs est susceptible de se développer et pourrait progresser, si tel est le choix des gouvernements.

L’hydroélectricité

Selon l’Association canadienne de l’hydroélectricité, le Canada dispose d’un potentiel hydroélectrique de 118 000 MW (un million de watts) qui, techniquement, pourrait être mis en valeur25. La capacité actuelle (2002) est de 69 205 MW, ce qui permet de produire quelque 60 p. 100 de toute l’électricité au Canada.

Comme il en va de toute source d’énergie, un potentiel technique ne peut être exploité que dans des circonstances favorables. Nombre de facteurs, en particulier l’éloignement des marchés, détermineront s’il est financièrement possible d’exploiter le potentiel technique. En outre, il reste toujours les problèmes environnementaux et sociaux que pose l’inondation des terres.

Le nucléaire

Actuellement, le secteur nucléaire produit 16 p. 100 de l’électricité au Canada. En théorie, le nucléaire pourrait répondre à tous les besoins en électricité du Canada. Il soulève toutefois des problèmes : évacuation à long terme du combustible épuisé, risques réels et perçus que posent les rayonnements pour la santé, prolifération des armes nucléaires et manque systématique de fiabilité.

Malgré ces problèmes, il ne fait aucun doute que, sans le nucléaire, les émissions de GES du Canada seraient beaucoup plus élevées26. Parallèlement à l’élimination progressive du nucléaire, il faudra produire une quantité équivalente d’électricité quasi exempte d’émissions de carbone.

La biomasse

L’énergie stockée dans la biomasse peut être utilisée pour soutenir l’économie. Cela s’est fait pendant des millénaires. Mais le bilan carbone ne peut être nul que si les stocks de carbone (tels les stocks contenus dans les forêts et les déchets végétaux) sont remplacés. De plus, si des combustibles fossiles entrent dans la production d’un combustible de la biomasse (p. ex. l’éthanol), il est important de tenir compte du cycle complet de production du combustible quand il s’agit de déterminer dans quelle mesure le combustible peut réduire les émissions de GES.

Comme l’a appris le Comité, le Canada a un avantage sur les autres pays quant à sa capacité d’utiliser la biomasse comme source d’énergie (et comme puits, sujet qui sera abordé plus loin).

Le Canada occupe une place unique à l’échelle planétaire parce qu’il est le pays dont la biosphère est la plus vaste, proportionnellement à sa population. Nous représentons 7 p. 100 des zones émergées du globe et 10 p. 100 des superficies boisées mondiales, alors que notre population n’équivaut qu’à 0,5 p. 100 de la population mondiale. Chaque année, nos systèmes biologiques absorbent et libèrent de 10 à 20 fois la quantité de CO2 émise par l'utilisation des combustibles fossiles. Cette vaste biosphère, surtout notre territoire agricole et forestier, nous donne l’occasion de respecter jusqu’à un tiers de nos engagements dans le contexte du Protocole de Kyoto27.

Les arbres dévastés par le dendroctone du pin ponderosa pourraient à eux seuls fournir 900 MW d’énergie pendant 20 ans. Il pourrait y avoir des problèmes pour acheminer cette énergie vers les marchés, mais cela donne une idée du genre de possibilités que le Canada pourrait être en mesure d’exploiter. La Suède a aussi un avantage biologique distinct, les biocombustibles (essentiellement des copeaux de bois) constituant quelque 20 p. 100 de son portefeuille de combustibles28.

L’énergie éolienne

Le potentiel éolien du Canada est énorme et peu exploité. Le Canada a nettement pris du retard sur d’autres pays pour ce qui est de mettre en valeur cette source d’électricité.

À l’heure actuelle, le Canada accuse encore un retard important par rapport aux chefs de file mondiaux en matière d'énergie éolienne. Nous avons 444 mégawatts de capacité installée. Le chef de file mondial est l'Allemagne, avec 16 500 mégawatts. Nous avons connu une année record au Canada l'année dernière. Nous avons ajouté 122 mégawatts de capacité installée. Nous ferons encore mieux cette année car nous comptons atteindre un minimum de 300 mégawatts de capacité installée. Nous serons toutefois encore très en retard sur les autres pays. Je prendrai une nouvelle fois l'Allemagne comme exemple. En Allemagne, l'année dernière, la capacité installée a été de 34 mégawatts par semaine, en ce qui concerne les nouvelles installations éoliennes29.

La demande d’énergie éolienne augmente au Canada. Les gouvernements provinciaux ont maintenant entrepris soit d’établir des normes pour un portefeuille d’énergie renouvelable, soit de préparer des demandes de propositions pour la mise en place de plus de 5 000 mégawatts d’énergie éolienne d’ici à 2012. L’objectif de l’Association canadienne de l’énergie éolienne est de porter à 10 000 MW la capacité installée en 2010, ce qui représentera 5 p. 100 de la production d’électricité au Canada. Comme la capacité actuelle des installations en cours de construction ou commandées par contrat d’achat est de 2 000 MW, cet objectif n’est pas réaliste.

Le dossier de l’énergie éolienne devient par ailleurs de plus en plus épineux. Les populations locales s’opposent de plus en plus à l’aménagement de parcs d’éoliennes dans leur région et c’est la première fois que des parcs d’éoliennes font l’objet d’évaluations environnementales.

En outre, dans d’autres pays beaucoup plus expérimentés, tels l’Allemagne et le Royaume-Uni, les analyses révèlent que le coût réel de l’énergie éolienne est actuellement très élevé. Selon un rapport allemand30, il en coûte entre 41 et 77 € (65,6 et 123 $CAN31) pour réduire les émissions de CO2 d’une tonne. Le National Audit Office du Royaume-Uni en est aussi venu à la conclusion que son Renewables Obligation était en général l’outil le plus coûteux pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, à quelque 70 ₤ à 140 ₤ (162 $ à 324 $CAN32) par tonne de CO2, ce qui ne comprend pas toutefois les avantages d’une réduction des coûts externes33. Le prix élevé de l’électricité tient au coût élevé de production d’électricité à partir de sources renouvelables, secteur qui, au Royaume-Uni, est dominé par l’énergie éolienne.

Le solaire

L’énergie solaire comprend la chaleur et l’électricité d’origine solaire. L’électricité solaire produite, p. ex. à partir de piles photovoltaïques, coûte encore très cher. La chaleur d’origine solaire est toutefois une source très prometteuse pour aider le Canada à atteindre ses objectifs de réduction des GES.

En 2003, le Canada avait une capacité installée de production de chaleur solaire de 280 MW, comparable à sa capacité installée d’énergie éolienne. Selon l’Association des industries solaires du Canada, la capacité potentielle mondiale  du solaire est de 70 GW (1 GW = 1000 MW), soit 3,5 fois plus que celle de l’éolien.

La chaleur solaire peut servir à chauffer l’eau et à chauffer, activement ou passivement, les locaux. Dans tous les cas, selon l’Association des industries solaires du Canada, le coût moyen de production d’un kWh de chaleur solaire est de 5 ¢ ou moins, soit une des solutions les meilleur marché.

Le chauffage solaire est aussi intéressant parce qu’il permet de réserver des énergies plus courantes, tels l’électricité et le gaz naturel, à d’autres fins.

L'énergie géothermique

Au Canada, et surtout en Colombie-Britannique, les sources géothermiques à température moyenne à élevée abondent et peuvent contribuer grandement à notre sécurité énergétique et à des fins récréatives. L’énergie géothermique peut contribuer au marché de l’énergie : elle peut servir à produire de l’électricité ou être utilisée directement comme source de chaleur. Diverses sources à faible température sont disponibles partout au pays, mais leur intérêt économique dépend de l’ampleur du projet (p. ex. des besoins des locaux en chauffage et climatisation). De même, la mise en valeur de sources géothermiques à faible température peut être limitée par des facteurs comme la profondeur du gel saisonnier et la disponibilité d’eau souterraine provenant des nappes aquifères34.

La sécurité énergétique au Canada

Au Canada, les sources d’énergie abondent. Les réserves de charbon devraient durer 234 ans au taux actuel de consommation (60 Mt/an)35. Les réserves d’hydroélectricité non exploitées représentent techniquement le double de la capacité actuelle. Les réserves d’uranium de la Saskatchewan renferment un équivalent énergétique de 19 milliards de barils de pétrole ou de 4 milliards de tonnes de charbon36. Les sables bitumineux renferment 174 milliards de barils de pétrole, récupérables au moyen de la technologie actuelle37. L’énergie éolienne permettrait de produire jusqu’à 50 000 MW d’électricité. La Coalition pour l’air pur et l’énergie renouvelable «  a conclu que le potentiel des diverses sources d'énergie renouvelable est suffisant pour produire l'équivalent de la capacité thermique et nucléaire installée au Canada, de la capacité électrique actuelle38  ».

La sécurité énergétique, du moins du point de vue de l’offre globale, ne devrait poser aucun problème au Canada. Mais c’est plus qu’une simple question d’offre. Bien des facteurs influent sur la possibilité et la façon d’exploiter une source. Le nucléaire pose nombre de problèmes qui font hésiter la population à accepter une augmentation de la capacité installée. Le changement climatique lui-même peut modifier l’approvisionnement en eau pour la production d’hydroélectricité et en vent pour la production d’énergie éolienne. Les combustibles fossiles abondent, mais leur exploitation sera de plus en plus difficile dans un monde limité en carbone.

Pour garantir sa sécurité énergétique, le Canada doit explorer toutes ses possibilités énergétiques.

Malgré l’abondance d’énergie au Canada, toutes les administrations sont confrontées aux questions énergétiques. Parmi les plus importantes, outre celles de la sécurité et des prix, il y a les questions environnementales liées à la consommation d’énergie. Qu’il s’agisse de fuites de pétrole en mer, de gaz acides, d’émissions liées au smog ou de la protection des paysages, toutes les sources d’énergie ont une incidence sur l’environnement. De plus, le problème de l’accès au réseau électrique a été soulevé comme étant un problème important.

La question, c’est de savoir quel genre de portefeuille énergétique permettrait le mieux d’atteindre les nombreux objectifs réclamés par la société. En particulier, quel genre d’approvisionnement en énergie suffirait à combler les besoins énergétiques du pays tout en permettant de réduire au minimum les répercussions sur l’environnement et de réduire l’apport en carbone dans l’économie.

La question de l’approvisionnement énergétique relève presque exclusivement de la compétence des provinces, mais le Comité s’est fait dire par bien des témoins que le Canada a besoin d’une stratégie énergétique globale, y compris une stratégie de l’énergie renouvelable.

Par conséquent, il est essentiel de mettre en place une stratégie nationale sur l'énergie renouvelable plutôt que d'adopter des mesures faites de bric et de broc, comme nous l'avons fait jusqu'à présent et que cette stratégie mobilise tout le pays au lieu de laisser à chaque province le choix d'y participer ou non39.

Vous voyez deux points fondamentaux sur lesquels nos membres sont d'accord. Premièrement, il nous faut un cadre énergétique général qui permette d'élaborer une stratégie réaliste en matière d'émissions de gaz à effet de serre. Ce cadre doit refléter nos réalités énergétiques. Nous devons également faire appel à toutes les options disponibles. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser de côté quelque option que ce soit40.

Par conséquent, il est essentiel de mettre en place un programme global et une coopération accrue s'impose. Je suis certain que c'est également vrai pour d'autres secteurs de l'énergie renouvelable mais en ce qui concerne celui de l'énergie éolienne, il faut mener les mêmes combats, province par province. Chaque province commence avec une feuille de papier vierge et tente de réinventer la roue. Nous pensons que le gouvernement fédéral pourrait jouer un rôle très utile en facilitant le dialogue et les discussions entre les divers gouvernements pour aider à vaincre cet obstacle41.

Le Canada doit se doter d'une stratégie nationale à long terme permettant de lutter contre les changements climatiques. Une telle stratégie doit comporter des mesures efficaces de conservation de l'énergie, bien sûr, et des programmes d'efficacité énergétique. Elle doit aussi tenir compte des aspects sociaux, économiques et environnementaux de la question, examiner les besoins énergétiques en regard des potentiels national et régionaux et se fonder sur les synergies potentielles entre les différentes sources d'énergie renouvelable42.

Le Comité sait que le gouvernement a demandé à la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie «  de lui fournir des avis et des recommandations pour l’élaboration d’une stratégie à long terme pour le Canada sur l’énergie et le changement climatique  », y compris des avis sur la façon de faire avancer les dossiers de la CdP11.

La Table ronde a pour mandat de fournir les avis suivants en matière d’énergie avant le printemps 2006 :

 Une stratégie d’intégration du changement climatique dans les objectifs du Canada en matière de politique étrangère, d’aide extérieure et de commerce international. 
 La stratégie devra proposer de promouvoir l’exportation de technologies environnementales canadiennes axée sur l’échange de crédits d’émission prévu au Protocole de Kyoto. 
 Un ensemble de recommandations sur la façon d’harmoniser les marchés du carbone du Canada et les marchés internationaux existants ou nouveaux, pour assurer l’accès du Canada à ces marchés. 
 Une stratégie à long terme en matière d’énergie et de changement climatique. 

Le Comité attend les avis de la Table ronde, mais il craint que, avec un budget de 4,6 millions de dollars, celle-ci ne soit pas en mesure de fournir de bons avis sur des questions aussi diverses, mais combien essentielles pour l’avenir du Canada.

À titre de comparaison, le gouvernement a accordé dans le Budget 2005 un montant de 200 millions de dollars pour élaborer une stratégie scientifique et technologique relative à l’énergie durable. Cette stratégie a trait à l’innovation et non aux perspectives énergétiques à long terme.

Le Comité est aussi préoccupé par le fait que les intérêts provinciaux ne sont pas explicitement mentionnés. La question de l’énergie relève presque exclusivement de la compétence des provinces et aucune stratégie ne saurait leur être imposée. La stratégie devrait être considérée comme une vision reconnaissant au fédéral aurait un rôle explicite de facilitation de décisions interprovinciales. Une meilleure coordination de la politique énergétique serait sans aucun doute profitable pour le Canada, et le gouvernement fédéral devrait y contribuer.

RECOMMANDATION 7 :

Que le gouvernement du Canada reconnaisse dans sa stratégie énergétique à long terme, telle que la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie l’élabore actuellement, que son rôle en matière d’énergie est de faciliter une meilleure coordination des politiques énergétiques au pays, en partenariat avec les provinces et les territoires. Le Comité recommande que le gouvernement fédéral produise un livre «  vert  » sur l’énergie.

Outre l’importance de son rôle de facilitateur, le gouvernement fédéral peut mettre en œuvre diverses politiques pour aider le Canada à s’intégrer dans un monde limité en carbone.

L’écologisation de la fiscalité

L’approvisionnement énergétique est primordial pour la qualité de vie des Canadiens, ce qu’a reconnu le gouvernement canadien en apportant son soutien à de nombreuses sources d’énergie dans les premières étapes de leur mise en valeur. Qu’il s’agisse de la mise en valeur des sables bitumineux ou des hydrocarbures en mer, ou encore de l’énergie nucléaire, le gouvernement a soutenu pendant des décennies les efforts d’expansion et de diversification des approvisionnements énergétiques au Canada. Pour aider le Canada à s’orienter vers une économie limitée en carbone, le Canada doit maintenant se retirer des secteurs énergétiques établis et soutenir les sources d’énergie à faible intensité carbone.

Un facteur important peut faciliter cette transition : l’écologisation de la fiscalité (EF). L’EF, c’est l’utilisation de la fiscalité (exemptions, crédits, remboursements), de permis d’émission échangeables, de dépenses directes et de programme, pour «  écologiser  » les mécanismes d’achat, de vente et d’investissement des gens dans l’économie. Exemple : la décision du gouvernement fédéral d’exempter de la taxe d’accise fédérale les carburants de remplacement tel l’éthanol produit à partir de sources renouvelables.

L’ER peut aussi passer par une réforme fiscale écologique — adapter l’impôt en fonction des effets sur l’environnement ou ajouter un nouvel impôt pour inciter les gens à réduire leurs effets sur l’environnement. Les nouvelles recettes fiscales pourraient servir à financer, par exemple des réductions de l’impôt existant, sans modifier les recettes globales, c.-à-d. une réforme fiscale neutre43.

La fiscalité actuelle de l’énergie

En 2000, la commissaire à l’environnement et au développement durable (CEDD) a déposé un rapport sur cette question et en est venue aux conclusions suivantes :

3.83 Nous avons constaté que, dans le passé, les gouvernements sont intervenus sur les marchés du secteur de l'énergie par l'intermédiaire de dépenses directes, de la réglementation et d'incitatifs fiscaux. Parfois, ils voulaient encourager les investissements dans certaines formes d'énergie et parfois faciliter l'atteinte d'objectifs stratégiques particuliers. La plupart des dépenses fédérales et des incitatifs fiscaux se rapportent aux ressources non renouvelables, qui constituent la source prédominante d'énergie au Canada.

3.84 Dans l'ensemble, nous avons constaté que, à quelques exceptions près, l'aide accordée actuellement par le gouvernement fédéral aux investissements dans le secteur de l'énergie, y compris par le truchement du régime fiscal, ne favorisait pas particulièrement le secteur des ressources non renouvelables par rapport au secteur des ressources renouvelables. Font exception : les investissements dans les sables pétrolifères et les mines de charbon, qui bénéficient d'un important allégement fiscal; les investissements dans la technologie nucléaire, qui reçoivent une aide directe substantielle; les investissements dans les carburants de remplacement, qui bénéficient d'un traitement plus favorable quant à la taxe d'accise; les entreprises du secteur de l'énergie qui appartiennent aux provinces et qui ne paient pas d'impôt fédéral sur le revenu. Nous avons aussi constaté que le régime fiscal n'accordait pas de traitement préférentiel à certains investissements qui ont pour objet d'améliorer l'efficacité énergétique.

Il est bien possible que cette situation ait changé depuis cinq ans, en particulier depuis le Budget 2005. Il faudrait poursuivre une telle analyse en continu.

Pour réduire les émissions, il ne suffit pas de soutenir les sources faibles en carbone. Il faut aussi s’assurer de diminuer l’aide fiscale aux autres secteurs qui émettent beaucoup de GES. Ainsi, au moins une analyse a révélé que le gouvernement avait dépensé dans le secteur du pétrole et du gaz naturel plus de 8 milliards de dollars canadiens entre 1996 et 200244.

Dans le Budget 2005, le gouvernement a annoncé un montant de 920 millions de dollars en 15 ans (200 millions les cinq premières années) pour l’Encouragement à la production d'énergie éolienne et un montant de 886 millions de dollars en 15 ans (97 millions les cinq premières années) pour l’Encouragement à la production d’énergie renouvelable.

Que les chiffres de Pembina soient exacts ou non, le Comité craint fort que le ministère des Finances ne fait apparemment pas un suivi régulier de ces dépenses et ne semble pas en mesure de confirmer ou d’infirmer les chiffres. Pour prendre des décisions éclairées quant au niveau d’aide qu’il entend accorder aux différents secteurs de l’économie qui pourraient avoir des incidences très différentes sur un grand objectif déclaré du gouvernement, telle la réduction des émissions de GES, le gouvernement doit recueillir et analyser les données pertinentes.

RECOMMANDATION 8 :

Que le ministère des Finances analyse les dépenses fédérales directes et indirectes dans le secteur énergétique et en fasse rapport au Parlement une fois l’an.

Une aide au secteur du pétrole et du gaz naturel pourrait s’avérer nécessaire parce que la prospection pétrolière et gazière est un secteur qui peut être à risque, surtout lorsque le prix du pétrole est bas. Le prix actuel du pétrole est de quelque 60 $US le baril. Le risque est donc nettement moins élevé, mais cela pourrait vite changer à cause de la volatilité du marché. Par ailleurs, le secteur du pétrole et du gaz naturel verse des sommes importantes aux gouvernements en impôts et redevances. On ne sait pas dans quelle mesure ces revenus sont liés à l’investissement de sommes dépensées par les gouvernements, mais ce n’est certes pas un lien direct de dépendance.

Il est peu pertinent de savoir si les chiffres de Pembina sont exacts. Il est clair que le régime fiscal entraîne des dépenses très élevées à cause de la taille de l’industrie du pétrole et du gaz naturel. Il se peut que le régime fiscal soit équitable (sauf quelques exceptions importantes comme le souligne la CEDD), mais, en chiffres absolus, il s’est dépensé beaucoup plus dans le secteur du pétrole et du gaz naturel que dans le secteur des nouvelles technologies, qui a bien davantage besoin d’aide. Le régime fiscal peut donc être orienté vers les nouvelles technologies sans que cela entraîne des changements importants dans les dépenses ou les revenus. Comme le Comité a pu le constater,

Pour ce qui est de faire pencher la balance ou d'égaliser les règles du jeu, il est impératif que le gouvernement décide ce qu'il veut et lorsqu'il aura décidé ce qu'il veut, il devra mettre en place une politique pour atteindre ses objectifs. Par conséquent, si vous voulez mettre en œuvre le Plan de Kyoto et assurer la durabilité, il sera essentiel de faire pencher la balance, sinon, il faudra mettre en doute la sincérité de l'objectif. Par conséquent, je vous recommande vivement de faire pencher la balance, sinon vous n'obtiendrez pas la durabilité qui est votre objectif et vous n'atteindrez pas l'objectif de Kyoto45.

Malheureusement, le ministère des Finances ne sait pas comment écologiser la fiscalité pour fixer l’ensemble des règles du jeu de manière à servir les grands objectifs environnementaux du gouvernement. Le Ministère analyse des mesures isolées au fur et à mesure que les ministères élaborent une politique. Cela doit changer.

Cette conclusion est partagée par la commissaire à l’environnement et au développement durable, qui a écrit dans son rapport annuel de 2004 :

Finances Canada doit s'efforcer davantage de respecter ses engagements fiscaux, notamment son but premier qui consiste à déterminer exactement sous quels aspects le régime fiscal pourrait entraver la réalisation du développement durable. L'examen systématique, fondé sur le risque, d'occasions déterminantes d'utiliser le régime fiscal pour mieux intégrer l'économie et l'environnement constitue une étape importante en vue d'utiliser le régime fiscal comme un outil de développement durable.

Appel en faveur de l’écologisation de la fiscalité

Divers groupes ont fait des recommandations sur la façon d’écologiser la fiscalité.

La Table ronde nationale sur l’économie et l’environnement a donné un avis précis sur l’EF et elle le considère maintenant si fondamental qu’elle l’inclut dans toutes les analyses qu’elle effectue.

Le Comité consultatif externe sur la réglementation intelligente (CCERI) a fait la recommandation suivante dans le rapport qu’il a publié l’automne dernier :

Recommandation 25 : Le gouvernement devrait envisager d’accroître l'utilisation judicieuse d’instruments économiques au Canada. Il pourrait à cette fin prendre notamment les mesures suivantes :

-     examiner les possibilités qu'offre l’EF au Canada et les défis qu'elle présente, et établir si elle pourrait être mise en œuvre pour appuyer des objectifs de la politique environnementale et, le cas échéant, comment procéder.

De plus, l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) a publié l’automne dernier un rapport intitulé Examen par l’OCDE des performances environnementales du Canada. Elle y recommande, en particulier, que le Canada devrait :

 Continuer de supprimer les subventions préjudiciables à l’environnement aux niveaux fédéral et provincial, y compris les subventions sous la forme d’incitatifs fiscaux dans les secteurs économiques des ressources naturelles; 
 Réexaminer les taxes liées à l’environnement existantes (par exemple, les taxes sur le transport et les produits énergétiques) de façon à ce qu’elles servent davantage à des fins environnementales, aux niveaux fédéral et provincial, dans un cadre fiscal neutre. 

Les exemples d’EF dans un cadre neutre abondent. Au Royaume-Uni, l’impôt sur le changement climatique est une taxe sur la consommation d’énergie dans l’industrie, le commerce et le secteur public, assortie de réductions des cotisations des employeurs à l’assurance-emploi et d’une aide additionnelle aux programmes d’efficacité énergétique et aux sources d’énergie renouvelable. Elle n’augmente ni le fardeau fiscal global de l’industrie ni les recettes du gouvernement. La réforme vise à promouvoir l’efficacité énergétique, à stimuler l’emploi et à favoriser l’investissement dans les nouvelles technologies46. Cet impôt s’inscrit dans une réforme écologique de la fiscalité, qui s’inscrit à son tour dans l’EF.

Le Comité ajoute maintenant sa voix aux appels de plus en plus pressants pour réclamer au gouvernement qu’il effectue une analyse approfondie sur l’EF. Entre-temps, il faudrait s’efforcer d’inciter les intervenants à déterminer quels éléments du régime actuel d’aide fiscale il conviendrait d’éliminer dans les secteurs qui sont de grands émetteurs de GES.

RECOMMANDATION 9 :

Que l’écologisation de la fiscalité soit orientée vers le secteur de l’énergie pour mieux soutenir toutes les sources d’énergie renouvelables à faible impact et réduire les émissions de GES.

RECOMMANDATION 10 :

Que le gouvernement annonce clairement qu’il diminuera toute aide fiscale inutile aux entreprises bien établies qui produisent beaucoup d’émissions de GES et incite celles-ci à déterminer quelles dépenses il conviendrait d’éliminer.

Les biocombustibles et les puits de carbone

Le Canada a une occasion en or de tirer avantage de sa géographie et d’utiliser des biocombustibles comme sources importantes d’énergie. L’industrie des pâtes et papiers en particulier tire déjà une bonne part de son énergie de ce genre de combustibles.

À cause de la faible population du Canada par rapport à la quantité de carbone absorbée et libérée par ses systèmes naturels, il pourrait être utile d’apprendre à exploiter ces flux de carbone à notre avantage pour réduire nos émissions totales de GES. Cela pourrait se faire en stockant de plus grandes quantités de carbone dans les systèmes naturels (puits) ou en extrayant une partie de ce carbone pour l’utiliser comme combustible, comme cela se fait en Suède.

Pour atteindre cet objectif et le faire accepter sur la scène internationale, notamment en ce qui a trait aux puits, il est essentiel de comprendre le fonctionnement du cycle du carbone au Canada. À cause de la situation particulière du Canada à cet égard, il est primordial que les assises scientifiques sur lesquelles repose notre utilisation de cet avantage naturel soient solides comme le roc.

La crédibilité des données scientifiques est absolument essentielle dans le contexte de nos efforts — la crédibilité des données scientifiques que le gouvernement pourra diffuser à l'échelle internationale, leur crédibilité dans le contexte de la mise en place de techniques de vérification pour le Canada, dans le contexte de nos négociations internationales avec des pays comme l'Union européenne, qui affiche un certain scepticisme à l'égard de certaines des méthodes de séquestration du carbone par le biais de nos systèmes naturels47.

À cause de phénomènes naturels comme les infestations par le dendroctone du pin et les feux de forêt, le Canada ne peut plus compter autant que par le passé sur les puits de carbone pour atteindre ses objectifs de Kyoto48. Cela ne devrait toutefois pas empêcher le Canada de mettre à contribution ses puits de carbone dans les secteurs agricoles et forestier pour atteindre sa cible de Kyoto. Il doit néanmoins baser son utilisation des puits sur une assise scientifique solide.

RECOMMANDATION 11 :

Que le gouvernement augmente son aide à la science qui étudie le cycle du carbone au Canada.

La séquestration du carbone

Les seules perspectives à long terme pour le Canada ont été avancées par l’Office national de l’énergie. L’Office prédit que dans 25 ans les combustibles fossiles constitueront toujours l’essentiel de l’approvisionnement énergétique au Canada. Le Comité est d’avis que le travail de l’ONE est à la fois relativement prudent et dépassé. Il faudrait interpréter les scénarios de l’ONE avec discernement, si ce n’est que par crainte qu’ils se réalisent d’eux-mêmes. Il faudrait en fait axer en priorité les efforts de réduction des émissions de GES sur l’abandon de ces scénarios en faveur de l’adoption de sources faibles en carbone.

Étant donné qu’il faudra sans doute compter un temps assez long pour éliminer les combustibles fossiles du portefeuille énergétique, il est essentiel de gérer le carbone contenu dans les combustibles fossiles, ce qui comporte deux aspects. Il faut mettre au point des méthodes pour piéger le carbone (captage) et en assurer le stockage à long terme pour qu’il ne puisse retourner dans l’atmosphère (séquestration).

Bien des efforts ont été entrepris pour capter et séquestrer le carbone. En fait, le Canada s’est engagé dans l’une des expériences les plus réussies jusqu’à maintenant en matière de séquestration : le projet Weyburn dans le sud-ouest de la Saskatchewan.

La première phase du projet de surveillance et de stockage à Weyburn s'est terminée par la publication d'un rapport sommaire en septembre 2004.

Le projet a donné des résultats très prometteurs. Une série de technologies perfectionnées en matière de surveillance et de vérification ont été mises au point et appliquées.

Le Canada est un chef de file dans les domaines de la surveillance et de la vérification. Le projet a favorisé le développement de l'expertise canadienne.

Les technologies peuvent s'appliquer à d'autres sites, ailleurs dans le monde.

L'intégration de tous les éléments du projet au sein de chacune des disciplines techniques et entre elles, ainsi que la collaboration d'EnCana au plus haut niveau ont été essentielles à la réussite du projet49.

S’il peut être établi que la séquestration du carbone est un moyen éprouvé scientifiquement et viable économiquement pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, ce pourrait être un outil utile à moyen terme, étant donné que l’objectif ultime est d’en arriver à une société limitée en carbone. Plusieurs questions doivent toutefois être résolues au préalable.

Reste à traiter des sujets de recherche comme : la diminution du coût de captage du CO2; la démonstration de la sécurité à long terme du stockage de CO2 dans les formations géologiques; les facteurs de réglementation qui doivent être envisagés en vue de régir l'exploitation, la fermeture et la surveillance à long terme des sites de stockage géologiques; la détermination des capacités et des exigences relatives à la surveillance requise afin de gérer la responsabilité à long terme pour l'industrie et le secteur public; et enfin l'assurance que le public comprend en quoi consiste cette technologie et quelles sont ses implications dans le cadre de la démarche visant à obtenir l'acceptation de la population50.

Comme la séquestration du carbone est actuellement utilisée dans divers contextes dans le monde, y compris au Canada, le Comité est d’avis que la séquestration du carbone dans un monde où les combustibles fossiles continuent d’occuper une place importante dans le portefeuille énergétique pourrait être un moyen très prometteur pour réduire les émissions de GES.

RECOMMANDATION 12 :

Que le gouvernement, en partenariat avec ses partenaires provinciaux et territoriaux et les intervenants, effectue la recherche nécessaire pour évaluer et exploiter la capacité de séquestration du carbone comme moyen efficace de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Options stratégiques : obligatoires et volontaires

Jusqu’à présent, le gouvernement a compté sur la bonne volonté pour réduire les émissions de GES. Le résultat des politiques à ce jour est plutôt difficile à mesurer (voir la section sur l’évaluation de la performance), mais il est évident que les émissions de GES ont continué de croître. Les méthodes volontaires ne suffisent pas. Voici ce qu’en pense M. Jaccard :

Que se passe-t-il si vous subventionnez certaines mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre? Puisque ces investissements allaient avoir lieu de toute façon, devinez ce qui se passe? Les gens qui auraient fait ces investissements sont, pour la plupart, ceux qui reçoivent les subventions. Nulle part dans le monde arrivons-nous à gérer un programme où on peut séparer les gens qui auraient investi dans des mesures d'efficacité énergétique de ceux qui ne l'auraient pas fait.

Dans une économie de marché innovatrice en pleine croissance, il faut imposer des restrictions et des amendes en ce qui a trait aux émissions de gaz à effet de serre si on veut voir une baisse. C'est aussi simple que ça51.

Les options stratégiques varient grandement, allant d’une réglementation rigoureuse (de type commandement et contrôle) à une autoréglementation entièrement volontaire. Jusqu’à maintenant, le gouvernement a trop mis l’accent sur l’approche volontaire. Les approches volontaires présentent des avantages : cela incite notamment les entreprises à s’intéresser aux processus d’apprentissage (tel le programme pilote d’apprentissage concernant la réduction et la réduction des émissions).

Les émissions continuent toutefois d’augmenter, et il est clair qu’il faut imposer plus de restrictions. Nombre de programmes apparemment volontaires ne connaissent un succès que parce qu’ils ont un fondement légal.

L’industrie de l’automobile est un bon exemple. Comme le Comité l’a entendu à maintes reprises, les constructeurs automobiles au Canada ont atteint plusieurs objectifs grâce à un protocole d’entente signé avec le gouvernement.

Nous croyons que les protocoles d'entente représentent une étape positive dans le contexte de l'élaboration des règlements et un instrument auquel les gouvernements devraient s'intéresser davantage pour s'attaquer aux défis futurs et prévenir les écarts que nous connaissons aujourd'hui. Au fil des ans, nous avons réussi à atteindre les objectifs environnementaux et de sécurité des politiques publiques au moyen de plus de 10 accords volontaires52.

Cela est juste, mais le marché de l’automobile en Amérique du Nord est tellement intégré que le succès remporté par les protocoles d’entente au Canada découle bien souvent de règlements pris aux États-Unis.

[le] secteur était tenu de respecter ces 14 accords au titre de la loi CAFE aux États-Unis, l'EPA imposant des amendes de 5 000 $ par voiture aux sociétés qui ne satisfont pas ces cibles. C'est la raison pour laquelle nous avons aujourd'hui des véhicules deux fois plus efficaces qu'en 1970, grâce à une loi adoptée par les États-Unis à la fin des années 197053.

Si des mesures volontaires ne suffisent pas, et que l’observation et la théorie économique nous le confirment, quelle forme de stratégie faut-il établir? Selon les témoignages entendus, la solution serait de canaliser l’ingéniosité de l’industrie en imposant un plafond d’émissions, tout en laissant à cette dernière le choix des moyens, par un système d’échange de droits d’émissions.

Plafond et échange de droits d’émissions

Des systèmes de plafond et d’échanges ont déjà donné de bons résultats, comme pour la réduction des pluies acides aux États-Unis. (Toutefois, la comparaison avec le dioxyde de soufre est un peu boiteuse puisque le soufre n’entre pas dans la production, alors que le CO2 est le résultat inévitable de la combustion des combustibles fossiles.)

Dans un système de plafond et d’échanges, un organisme de réglementation établit un objectif général de réduction, le «  plafond  ». On attribue ensuite un permis à chaque émetteur (selon différentes méthodes d’attribution); la somme des permis équivaut au plafond. La méthode d’attribution des permis peut également servir à établir une meilleure équité dans le système, notamment en tenant compte des différences régionales54.

Certains émetteurs pourront réduire leurs émissions à plus faible coût que d’autres. Ceux dont les réductions coûtent cher peuvent juger qu’il serait moins coûteux d’acheter des crédits auprès d’émetteurs dont les réductions coûtent moins cher. Le vendeur vend son permis plus cher que ce qu’il lui en coûte pour réduire ses émissions. Par conséquent, les deux entreprises réduisent le coût de la cible. Ainsi, le gouvernement établit une cible globale, mais ce sont les forces du marché qui déterminent la distribution des réductions parmi les émetteurs55. Les cibles globales d’émissions coûtent donc moins cher que si chaque émetteur était réglementé. L’organisme de réglementation et les entreprises visées font tous des économies puisque les entreprises, contrairement à l’organisme de réglementation, connaissent leurs coûts.

Le système de plafond et d’échanges fonctionne mieux dans un marché concurrentiel. Plus particulièrement, la compétitivité nécessite un grand nombre d’acteurs prêts à participer, et la participation est meilleure lorsque les règles d’échange sont claires, que les coûts de transaction sont faibles, que l’information sur le prix et autres aspects du système sont facilement accessibles et qu’aucun acheteur ou vendeur n’influence le marché d’une façon anticoncurrentielle56.

Au départ, le plafond est relativement élevé et permet plus d’émissions. Le prix est faible et l’on obtient des résultats faciles à atteindre. Dans bien des cas, ces résultats peuvent découler de l’amélioration de l’efficacité, au-delà de la normale. Avec le temps, toutefois, le plafond est abaissé et l’on obtient des réductions plus difficiles à atteindre.

[traduction] S’il est communiqué clairement à l’industrie au départ, un prix initial faible par permis de plafond permet d’éviter le retrait prématuré des capitaux nationaux, mais l’anticipation de l’augmentation des prix des permis favorise le développement et la diffusion à long terme de technologies à faible émission de gaz à effet de serre avec le roulement naturel du capital national57.

Il est peu probable qu’un tel système donnerait lieu à des réductions suffisantes au pays pour atteindre la cible de Kyoto à l’échéance. Toutefois, si le gouvernement compte vraiment réduire les émissions, il devrait créer un système de plafond et d’échanges, qui prévoit un filet économique aussi vaste que possible. Et il doit le faire prudemment :

Ce que je tiens à vous dire, c'est que des économistes dans ce domaine tentent avec ardeur de trouver des façons de changer le comportement à long terme des consommateurs et des innovateurs sans anéantir à court terme l'économie. De toute évidence, on ne peut pas, dès demain, imposer une taxe élevée sur les émissions de gaz à effet de serre, ni mettre en place un système de plafonnement et d'échange très restrictif, ni réglementer de façon draconienne l'efficacité énergétique58.

Le gouvernement a étudié les mécanismes de plafond et d’échanges pour les grands émetteurs finaux (GEF) depuis un certain temps, pendant que d’autres pays les mettaient en œuvre. Il faut prendre beaucoup de décisions concernant les nouvelles immobilisations dès maintenant ou dans un proche avenir; ces décisions doivent s’appuyer sur la certitude qu’un système de plafond progressif et d’échanges sera instauré. Comme le système d‘échanges canadien ne sera pas très important, il faudrait instaurer des liens avec les autres systèmes, mais il est impossible de passer des accords internationaux sans d’abord savoir quelles seront nos règles nationales.

RECOMMANDATION 13 :

Le Comité recommande que le gouvernement mette en place le plus tôt possible un mécanisme de plafond et d’échanges couvrant autant de secteurs économiques que possible. Ce faisant, il devrait préciser que le plafond sera réduit avec le temps, par secteur.

RECOMMANDATION 14 :

Le Comité recommande en outre, que durant cette action et après, le gouvernement mène à terme les négociations internationales garantissant la compatibilité des crédits.

Vers une meilleure efficacité

Dans les discussions sur la réduction des émissions de GES, il faudrait trouver des façons de réduire l’intensité énergétique de l’économie. Pour changer l’intensité énergétique, il faut procéder à des changements structurels dans l’économie et consommer plus efficacement l’énergie dans la structure actuelle.

Deux points importants ressortent lorsqu’il est question d’intensité énergétique et d’émissions de GES. D’une part, la baisse de l’intensité énergétique n’entraînera pas une réduction à long terme des GES présents dans l’atmosphère. Une diminution des taux d’émissions ralentira l’accumulation, mais ne l’empêchera pas, puisque le temps de séjour du CO2 dans l’atmosphère est d’environ 100 ans.

D’autre part, la réduction de l’intensité (la hausse du rendement) peut ralentir les émissions et représente en fait, dans l’ensemble, le moyen le plus rentable d’y parvenir. Le Comité reconnaît que ce n’est pas possible pour toutes les industries. Certaines ont accru leur rendement au point où plus aucun gain rentable ne peut être obtenu facilement. Néanmoins, la réduction de l’intensité peut être un bon moyen de gagner du temps pendant que se produisent des changements à plus long terme dans l’intensité carbone de l’énergie primaire. Essentiellement, bon nombre de ces gains sont faciles.

Uniquement dans le secteur du pétrole et du gaz naturel, on estime qu’il reste 29 Mt par année de réduction rentable d’émissions, surtout grâce à la réduction des émissions fugitives59. Le coût de l’Engagement au rendement énergétique, au Royaume-Uni, était de moins (c.-à-d. qu’il créait un équilibre positif) de ₤16 par tonne de CO2. Malgré cela, il se peut que le gain de rendement ne soit pas pour les entreprises une grande priorité dans leurs dépenses d’immobilisation. Grâce à de bonnes mesures incitatives, le gouvernement peut rendre l’investissement dans les gains de rendement davantage prioritaire.

Le Comité a entendu de nombreux témoins parler des efforts visant à réduire leur intensité d’émissions. (c’est-à-dire la quantité de GES émise par unité d’activité économique, obtenue en multipliant l’intensité énergétique de l’activité par l’intensité carbone de l’énergie utilisée.)

J'aimerais aussi vous dire, comme je le mentionne dans mon mémoire, qu'il y a certains secteurs industriels qui sont très fiers de ce qu'ils ont accompli au cours des dernières années alors que certains d'entre eux se sont mis à la tâche bien avant l'adoption du Protocole de Kyoto. Prenez l'exemple du secteur de l'aluminium dont les émissions de GES sont restées stables alors que leur production augmentait de 73 p. 100. Le secteur des pâtes et papiers a réduit de moitié sa consommation de pétrole au cours des 15 dernières années. Dans le secteur pétrolier et gazier, le brûlage du gaz naturel a diminué de 62 p. 100 depuis 199660.

Le Comité est impressionné par les nombreux efforts des industries au Canada. Cela prouve que tout est possible. Ainsi, les producteurs d’engrais ont accru leur rendement au point où les émissions de CO2 résultent presque exclusivement des processus chimiques.

Comme il a été mentionné dans la section sur l’équation de Kaya, toutefois, une grande partie de cette réduction de l’intensité des émissions a cours depuis les années 1980. L’incitation au rendement est toujours présente dans l’industrie, puisque l’énergie est un coût à réduire. Comme M. Mark Jaccard le dit :

[] des initiatives innovatrices qui améliorent ou réduisent la consommation énergétique par rapport à la valeur unitaire de production sont mises en œuvre constamment. On peut, en tout temps, dresser une liste de toutes ces innovations. On aurait pu le faire en 1920, en 1940 ou en 1980. Nous avons tout simplement décidé de le faire en 1990 []61.

En somme, une certaine hausse de rendement fait partie du scénario du statu quo. Pour gagner du temps, il faut aller au-delà. Jusqu’à maintenant, toute réduction de l’intensité des émissions a été annulée par l’augmentation encore plus forte de la production, qui entraîne une hausse constante des émissions de GES. Quoique bien réels, les efforts de l’industrie en vue d’améliorer le rendement doivent être accélérés.

Dans les subventions qu’il accorde pour les améliorations sur le plan de l’efficacité énergétique, le gouvernement doit donc faire très attention de ne pas accorder de subventions à ceux qui auraient tout de même apporter les améliorations. La création de l’Office de l’efficacité énergétique est un pas dans la bonne direction, et les programmes comme l’Encouragement éconergétique Énerguide pour les maisons sont une réussite évidente, bien que leur véritable valeur ne puisse être mesurée que par rapport au scénario du statu quo.

Les systèmes de plafond et d’échange et la réforme fiscale écologique peuvent tous deux servir à accroître l’efficacité. Les systèmes de plafond et d’échange, par exemple, incitent les entreprises à faire de l’investissement dans l’efficacité une priorité.

En 2000, le commissaire a souligné dans son rapport que, même si le gouvernement avait consacré quelque 64 millions de dollars par année à l’efficacité énergétique dans les années précédant le rapport, le régime fiscal n’accorde aucun traitement préférentiel à certains investissements dans l’efficacité énergétique. 

Des systèmes de plafond et d’échange et une réforme fiscale écologique à effet neutre ne suffiront pas à l’atteinte de la cible de Kyoto, mais ce sont les deux meilleurs moyens d’y arriver. Pour honorer ses engagements, le Canada n’aurait donc théoriquement pas le choix d’acheter des crédits à l’étranger.

Activités internationales

L’achat de crédits à l’étranger est devenu un sujet controversé malgré le fait que :

[] quand le Canada a souscrit à sa cible dans le cadre du Protocole de Kyoto, soit une réduction de 6 p. 100 par rapport aux niveaux de 1990, il l'a fait uniquement à condition de pouvoir acquérir des crédits de réduction grâce à des investissements à faible coût sur les marchés étrangers. J'ai toujours trouvé assez ironique que le système, que Jack va vous décrire dans une minute, conçu pour répondre aux exigences du Canada et des États-Unis, fasse en fait le bonheur de l'Europe, qui se hâte à présent de mettre en œuvre un système d'échange d'émissions. Lors des négociations sur le Protocole de Kyoto, les plus ardents partisans des mécanismes de Kyoto étaient des industries et des provinces axées sur l'énergie, et leur principal opposant, l'UE. Il est intéressant de constater comme la situation a été renversée62.

Toutefois, l’achat de crédits internationaux doit se faire avec beaucoup de soins. Il faut surtout mettre en place des mécanismes pour s’assurer que les réductions d’émissions sont transparentes et vérifiables.

L’achat de crédits par le Mécanisme de développement propre ou l'Application conjointe du Protocole de Kyoto serait le meilleur moyen de garantir que les crédits serviront bel et bien à la réduction des émissions. L’achat de crédits sur le marché international commence certes à soulever un tollé, sous prétexte que l’argent pourrait plutôt être dépensé ici même, mais il comporte son lot d’avantages pour le Canada :

[] les mécanismes de Kyoto, s'ils sont bien conçus et mis en œuvre, peuvent procurer au Canada quatre avantages : premièrement, ils réduiront sensiblement ce qu'il en coûtera au Canada pour atteindre l'objectif souscrit à Kyoto; deuxièmement, ils signaleront que le Canada entend vraiment être un acteur important sur le marché mondial croissant du carbone; troisièmement, ils fourniront aux technologies canadiennes propres des possibilités de financement; et, quatrièmement, ils fourniront au Canada une occasion de faire preuve de leadership au plan international63.

Malheureusement, le Canada, auparavant un acheteur de crédits relativement important, a moins souvent recours à cette solution, en grande partie à cause du climat d’incertitude entourant les exigences relatives à la réduction des émissions de GES.

[] si vous examinez le diagramme circulaire qui remonte à cinq ou six ans, en ce qui concerne la part du marché de la participation canadienne au marché international, vous constaterez que le Canada représente un secteur très important de ce très important diagramme circulaire. Ce secteur a énormément rétréci depuis. Je crois qu'il s'agit d'une attitude tout à fait logique de la part des entreprises canadiennes, parce que si vous vous présentez devant un comité de haute direction et que vous demandez un gros montant d'argent pour acheter des crédits, on vous demandera ce dont vous avez besoin pour vous conformer au protocole et le montant dont vous avez besoin à ce stade-ci, la plupart des membres de l'industrie ignorent la réponse. On leur dira de revenir une fois qu'ils la connaîtront. Oui, nous avons constaté une diminution de la participation. C'est dommage, parce que nous étions des pionniers dans ce domaine64.

À cause du retard dans les achats, les entreprises achèteront probablement leurs crédits plus tard, lorsque la demande sera plus grande. Les coûts risquent alors d’être beaucoup plus élevés.

Il pourrait toutefois y avoir une pénurie des crédits prévus dans les mécanismes de Kyoto puisque, jusqu’à maintenant, la vérification semble très coûteuse. La Russie aura peut-être une grande quantité de crédits à vendre à bas prix à cause de l’effondrement de son économie, à moins qu’elle ne se redresse rapidement. Ces crédits bon marché sont souvent tournés en dérision et devraient être exclus, puisqu’ils n’ont aucun avantage évident pour l’environnement.

RECOMMANDATION 15 :

Le Comité recommande que le gouvernement s’abstienne d’acheter des crédits d’émissions de pays dont l’économie est en transition ou de toute autre source si les crédits ne sont pas liés à une amélioration importante de l’environnement.

S’il n’achète pas les crédits sans avantage pour l’environnement, et que le marché des véritables crédits de Kyoto est petit et cher, le Canada risque d’avoir de la difficulté à honorer ses engagements en achetant des crédits.

En accueillant la 11e Conférence des Parties de la CCNUCC (1re réunion des Parties au Protocole), le Canada deviendra vraisemblablement président du Bureau de la Conférence des Parties. À ce titre, il sera bien placé pour influencer la gestion globale du processus intergouvernemental de la CdP11 et pour l’exhorter à régler les problèmes des échanges internationaux de droits.

Le Canada ne sera pas seul à devoir acheter des crédits à l’étranger; et d’autres pays ont sans doute les mêmes réserves quant à l’achat dans des pays dont l’économie est en transition. Aussi, toutes les parties ont intérêt à ce que les mécanismes de Kyoto fonctionnent bien.

On a demandé son avis à la TRNEE en vue de la CdP11, notamment sur l’amélioration du Mécanisme de développement propre. Bien que cet avis soit précieux, c’est avec ses partenaires internationaux que le gouvernement devrait négocier maintenant la simplification des mécanismes de Kyoto. La TRNEE ne produira son avis qu’en octobre, mais ce retard ne devrait pas empêcher le gouvernement d’agir dès maintenant afin de définir les discussions qui se tiendront à la CdP11.

Un rôle important que le gouvernement fédéral pourrait jouer serait de négocier avec ses partenaires internationaux pour s’assurer que les crédits internationaux se vendent au plus bas prix possible, tout en étant associés à une réduction vérifiable des émissions.

Si le Canada ne parvient pas à atteindre sa cible de Kyoto par des mesures intérieures, il devrait néanmoins tout faire pour réduire au maximum ses émissions de GES  sur son territoire afin d’acheter le moins de crédits possible à l’étranger. Tout achat de crédit doit être transparent et vérifiable.

Discussions continentales

Le Comité estime également que le Canada peut très bien discuter ouvertement de la réduction des GES avec ses partenaires de l’ALENA. Il existe déjà le Groupe de travail nord-américain sur l’énergie (GTNAE), dont l’objectif est de favoriser la communication et la coopération entre les trois pays dans les dossiers communs de l’énergie. De plus, le GTNAE vise à intensifier le commerce et les interconnexions nord-américaines en matière d’énergie, conformément à l’objectif de développement durable, tout en respectant les politiques intérieures, les domaines de compétence et les obligations commerciales de chacun des pays.

Il est clair qu’il faudra revoir la politique énergétique à mesure que nous nous dirigeons vers un monde dans lequel le carbone sera limité, et les travaux du Comité consistent à tâter le terrain sur les possibilités de coopération pour la réduction des émissions de GES. Ces discussions sont certes utiles, mais elles ne doivent pas s’éloigner des négociations principales pour une véritable réduction des émissions à l’échelle mondiale.

COMMENTAIRES SUR LE PROJET VERT

Le Comité s’est retrouvé dans une position plutôt délicate lorsque le gouvernement a diffusé son plus récent plan, au moment même où nous débattions de son contenu. Le Projet vert est loin d’être complet. Il reste encore beaucoup de consultations et de temps pour en changer ou en influencer l’issue.

Le Comité n’a pas étudié spécifiquement le Projet vert, même si le sujet a été abordé à plusieurs reprises. Par conséquent, il n’est pas en mesure de le commenter en détail. Il espère que son rapport influencera directement le Projet et, surtout, qu’il guidera ceux et celles qui réclameront dans les consultations davantage de mesures efficaces pour réduire nos émissions.

Il y a tout de même quelques points que le Comité aimerait souligner à propos du Projet vert.

Le Fonds pour le climat

Pour être efficace, le système de plafond et d’échange doit s’appliquer à grande échelle. Pour les grands émetteurs finaux (GEF), le système, complexe à concevoir, n’est pas assez vaste pour donner des liquidités suffisantes. C’est donc dire que les GEF doivent avoir la possibilité d’acheter des crédits compensatoires hors du système d’échanges (sauf si on crée un système pancanadien beaucoup plus vaste).

Malheureusement, le gouvernement a créé un Fonds pour le climat de plusieurs milliards de dollars, également pour acheter des crédits compensatoires et les encaisser. Il se place donc en concurrence avec les GEF pour l’achat de ces crédits. Ce ne devrait pas être l’objet du Fonds pour le climat.

Le Fonds pour le climat est la pièce maîtresse du gouvernement pour réduire les émissions de GES, mais il risque de gaspiller beaucoup d’argent pour de piètres résultats. Cet argent serait mieux investi ailleurs, par exemple en recherche et développement sur le captage et la séquestration du carbone, tout en laissant le système de compensations en place au profit des GEF.

RECOMMANDATION 16 :

Le Comité recommande que le gouvernement fasse preuve de prudence dans l’achat de crédits compensatoires au Canada, en les laissant pour la plupart dans le système d’échange des GEF. L’argent réservé à ces achats dans le Fonds pour le climat devrait davantage appuyer des travaux risqués exigeant beaucoup de capital, mais aptes à réduire beaucoup les émissions.

La cible de grands émetteurs finaux

La cible des GEF a été réduite pour passer de 55 Mt par année, comme le prévoyait le Plan du Canada pour les changements climatiques, à 45 Mt par année. De plus, ils pourront acheter jusqu’à 9 Mt par année auprès du fonds technologique. C’est donc dire que la contribution finale des GEF est passée de 55 Mt à quelque 36 Mt par année, puisque les achats auprès du fonds technologique, même s’ils comptent pour la cible des GEF, ne sont pas comptabilisés pour la cible du Canada.

Le Comité comprend qu’en raison des retards dans la mise en œuvre de règlements et de politiques sur les GEF, il risque d’être maintenant plus difficile pour les GEF d’atteindre leur cible d’ici la fin de la période visée par les engagements de Kyoto. Toutefois, le Comité a également appris qu’il serait possible de réduire d’au moins 29 Mt par année les émissions, uniquement dans le secteur du pétrole et du gaz naturel. D’autres ont même laissé entendre que l’industrie s’en sortirait très bien même si on imposait un plafond de 30 $ (plutôt que celui de 15 $ garanti dans le Plan)65.

Le Comité estime donc que la cible des GEF devrait être maintenue à 55 Mt, comme ce qui était prévu au départ dans le plan de 2002.

Règlement sur le système de plafond et d’échange des GEF

Le gouvernement entend s’inspirer de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) pour réglementer le système de plafond et d’échange des GEF. Beaucoup de travail a été déjà fait à Ressources naturelles Canada sur divers éléments de cette loi. Le Canada est déjà en retard sur les autres pays dans la création d’un tel système, et le transfert du dossier de RNCan à Environnement Canada risque de retarder encore plus les choses. Nos industries ont besoin de savoir ce qu’on attend d’elles pour planifier leurs investissements.

Si le gouvernement souhaite poursuivre dans la lignée de la LCPE, il doit le faire de façon à ne pas risquer d’affaiblir la Loi. Le Comité a déjà déposé un rapport sur le sujet (reproduit en annexe du présent rapport).

Tout système d’échange doit respecter deux principes importants : être équitable et éviter les mesures perverses qui pourraient inciter à la pollution. Pour être équitable, le système d’attribution des permis doit tenir compte des mesures déjà prises pour réduire les émissions de GES. Le scénario de statu quo par rapport auquel les réductions sont comparées pour l’attribution des crédits doit avoir été convenu par les intervenants et être mis à jour à mesure que s’améliore l’établissement du modèle économique pour les émissions.

De plus, il faut que l’année de référence soit absolument l’année 1990. Si cette année est ultérieure (comme 2008), cela incitera les entreprises à accroître les émissions de GES afin de maximiser les réductions.

Réforme fiscale écologique

Les éléments fiscaux du Plan seront vains si le cadre fiscal général encourage la hausse des émissions de GES. Dans le Plan, il n’est aucunement question d’une réforme fiscale écologique. Diverses mesures favorisent l’énergie renouvelable, par exemple, mais ces efforts seront balayés par la hausse des émissions de GES ailleurs, si l’on ne détecte et n’élimine pas les mesures incitant à produire des émissions dans d’autres secteurs. Le Plan doit analyser la possibilité d’une telle réforme fiscale écologique.

Divers témoins ont également fait remarqué que le cadre fiscal ne tient pas du tout compte des sources potentielles d’énergie à basse teneur en carbone et des hausses d’efficacité. Il faudrait rectifier la situation. Toutes les sources d’énergie renouvelable à faible teneur en carbone et la hausse de l’efficacité devraient être traitées de la même façon dans le régime fiscal.

L’industrie de l’automobile

Dans le protocole d’entente actuelle avec l’industrie de l’automobile, il est très clair, même s’il n’était pas nécessaire de le préciser, que le gouvernement se réserve le droit de réglementer l’industrie si le besoin se fait sentir. Toutefois, il faut du temps pour rédiger et appliquer un règlement. Le gouvernement devrait préciser qu’un règlement accompagne le protocole d’entente actuelle avec l’industrie de l’automobile et commencer à rédiger dès maintenant un règlement de renfort.

Il faudra aussi améliorer la consommation d’essence des automobiles aux États-Unis. Ces initiatives sont déjà en cours, notamment en Californie. Le Canada devrait amener les autres parties intéressées en Amérique du Nord à réglementer davantage la consommation d’essence des automobiles.

Obligation de rendre compte du gouvernement

Comme il a été mentionné auparavant, si l’obligation de rendre compte reste inchangée, alors le Plan risque fort d’échouer, à l’instar de tous les autres. Selon certains, des exigences rigoureuses de surveillance et de déclaration seront mises en place pour garantir la conformité et la responsabilité à l’égard du public, tout en préservant la confidentialité des pratiques concurrentielles de l’industrie.

On espère que le gouvernement tiendra compte des conseils du Comité et du commissaire à l’environnement et au développement durable lorsqu’il créera ces mécanismes. La création d’une autorité centrale qui se rapporterait chaque année au Parlement est essentielle à la réussite du Plan.

Faire participer la population

Le Défi d’une tonne est le principal programme du gouvernement pour tenter d’amener la population canadienne à réduire les gaz à effet de serre. Le programme est plutôt faible parce qu’il ne comporte pas d’effort de sensibilisation du public assorti d’une stratégie de réduction efficace.

De plus, l’information diffusée au public sur la réduction des émissions devrait être adaptée aux différentes régions du pays. Les régions ne sont pas toutes aux prises avec les mêmes problèmes d’émissions de GES. Un partenariat avec les provinces pour adapter le message du Défi d’une tonne permettrait sans doute d’aller chercher le plus grand nombre de gens possible.

À plusieurs égards, la réduction des émissions de GES nécessitera un changement d’attitude et de pensée, comme il en faudra pour le développement durable. Pour amorcer ce changement, le gouvernement pourrait notamment faire le point à la population sur les progrès dans le dossier du développement durable.

Entre autres, il pourrait parler du concept des indicateurs du développement durable. Le ministre des Finances a demandé à la TRNEE d’élaborer des indicateurs qui pourraient servir à faire le point auprès de la population canadienne d’une façon semblable, ainsi que des indicateurs du progrès économique, comme le PIB. Ils comprendraient les émissions de GES. Le Comité estime qu’il faut accorder à ces indicateurs la même importance qu’au PIB, et publier les résultats en même temps que le PIB.

Adaptation

Le programme actuel s’attache peu au problème de l’adaptation :

Concevoir des outils d'adaptation appropriés : Les changements climatiques sont lourds de conséquences pour les gouvernements quant à la pertinence de leurs politiques et règlements en vigueur. La réalisation d'évaluations approfondies des risques pourrait leur être d'un précieux secours afin d'en arriver à bien comprendre les risques que font peser les changements climatiques sur les opérations et la planification. Il sera important pour les gouvernements de cerner clairement les questions de responsabilité.

Le besoin de s’adapter est beaucoup plus grand que le laisse supposer ce paragraphe, Le Nord canadien vit déjà des changements qui posent à la population des défis qui dépassent sa capacité de s’adapter. Les données historiques sur le climat dans les Prairies démontrent que les sécheresses sont beaucoup plus longues et intenses que toutes celles qui sont survenues depuis l’avènement de l’agriculture moderne dans la région. Des stratégies pour aider les Canadiens et l’économie canadienne à s’adapter aux changements climatiques s’imposent. Il faut porter une plus grande attention à cet aspect du programme.

RECOMMANDATION 17

Le Comité recommande que le gouvernement, en collaboration avec les provinces et les territoires, élabore une stratégie d’adaptation au changement climatique.

CONCLUSION

Si une combinaison raisonnable de politiques réglementaires, fiscales et volontaires avait été mise en place peu après la signature du Protocole de Kyoto, le Canada aurait peut-être pu atteindre sa cible seulement en réduisant ses émissions à l’échelle nationale. Ce n’est plus le cas. Le Canada devra acheter des crédits internationaux pour honorer son engagement. Cette réalité, toutefois, ne devrait pas empêcher le gouvernement de mettre en place un ensemble de mesures politiques justes et raisonnables qui sonneraient l’alarme à long terme et permettraient à l’industrie d’innover pour s’y ajuster.

Les systèmes de plafond et d’échange d’émissions à long terme en sont un exemple, un autre serait une réforme fiscale écologique à effet neutre. De plus, il faudra peut-être investir dans des technologies à haut risque, comme la séquestration du carbone, surtout si le Canada et le reste du monde continuent d’utiliser les combustibles fossiles. Toutes ces mesures doivent s’inscrire dans un cadre de responsabilité convenable.

Il n’est pas simple pour les gouvernements d’établir des politiques. Ils sont souvent bombardés de messages conflictuels des intervenants privés et de la population. Comme un témoin l’a dit :

En dernière analyse, je crois que seulement nos efforts donneront des résultats concrets, et ces résultats seront à la hauteur du défi, à condition d'avoir suffisamment de volonté politique66.

La réduction des émissions de GES, en particulier de CO2, passe par notre façon de consommer l’énergie. La volonté politique viendra plus facilement si on réalise que, même si les sources d’énergie du Canada sont abondantes, le monde se dirige vers une ère où les interactions entre l’énergie et l’environnement dicteront notre façon de consommer l’énergie. Il faut établir des politiques maintenant pour se diriger sans crainte vers la sécurité énergétique dans un monde où le carbone sera limité.

 

 

 



CHAMBRE DES COMMUNES
OTTAWA, CANADA
K1A 0A6

 


38e legislature, 1re session

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable a l’honneur de présenter son

CINQUIÈME RAPPORT

Conformément à son ordre de renvoi permanent aux termes de l'article 108(2) du Règlement, votre Comité a entrepris l’étude d’une ébauche de rapport au sujet du projet de loi C-43, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 23 février 2005 et a convenu d’en faire rapport.

INTRODUCTION

Le budget de 2005 annonçait l’affectation de 5 milliards de dollars à des initiatives de développement durable insistant fortement sur la préparation au changement climatique. Il annonçait notamment deux systèmes axés sur les mécanismes du marché et visant à inciter l’industrie à réduire ou à éliminer ses émissions de gaz à effet de serre et à développer la technologie voulue pour y arriver.

Le budget faisait aussi référence à d’autres mécanismes commerciaux, soit un système d’échange de crédits d’émissions pour les grands émetteurs finaux (GEF). On peut en effet y lire ce qui suit :

Au cours des prochains mois, le gouvernement présentera, à l’intention des GEF, le détail du régime obligatoire de réduction d’émissions — incluant le cadre réglementaire connexe — et du système d’échange de crédits d’émissions pour que le secteur réussisse à mieux relever le défi du changement climatique.

Le projet de loi d’exécution du budget, le projet de loi C-43, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au parlement le 23 février 2005, a reçu la première lecture le 24 mars 2005. Il comporte deux parties mettant en vigueur les mesures annoncées dans le budget de 2005 à l’égard des mécanismes du marché. Sa Partie 13 porte sur la création de l’Agence canadienne pour l’incitation à la réduction des émissions, chargée de superviser l’administration du Fonds pour le climat, et sa Partie 14 traite de la création du fonds d’investissement technologique pour la lutte aux gaz à effet de serre.

La Partie 15 du projet de loi porte également sur le développement durable. Elle aurait pour effet de modifier la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999) de manière à retirer le terme «  toxique  » de la plupart de ses parties. Elle le supprimerait plus précisément à l’article 64, qui définit les critères appliqués pour établir s’il y a lieu de considérer une substance comme «  toxique  » aux fins de la Loi. Cette modification vise apparemment à faciliter les discussions relatives au renfort législatif établi aux fins du système d’échange de crédits d’émissions à l’intention des grands émetteurs finaux.

Le Comité permanent de l'environnement et du développement durable de la Chambre des communes (le Comité) reconnaît l’existence d’un certain lien entre la Partie 15 et le passage du Budget qui porte sur l’adoption d’un cadre législatif régissant le système d’échange de crédits d’émissions, mais il ne croit pas que la Partie 15 soit une mesure budgétaire à strictement parler.

Par ailleurs, le Comité est fort inquiet de la façon dont ces modifications sont présentées et des conséquences qu’elles pourraient avoir au-delà de l’objectif officiel du projet de loi, qui est de faciliter la réglementation des émissions de CO2 des GEF. Après avoir consacré deux réunions à la Partie 15 du projet de loi C-43, le Comité formule les réserves qui suivent.

CONSÉQUENCES DE LA SUPPRESSION DU TERME «  TOXIQUE  »

Le Comité reconnaît qu’employer le terme «  toxique  » à l’égard de chaque substance qui respecte les critères énoncés à l’article 64 de la LCPE pose des problèmes. Désigner comme «  toxiques  » des substances telles que l’ammoniac dissous dans l'eau (qui figure dans la liste des substances toxiques) et le sel de voirie (qui correspond aux critères, mais ne figure pas dans la liste) sème la confusion chez les Canadiens, qui emploient ces produits dans des circonstances fort différentes, et peut donner injustement une mauvaise réputation à des produits fabriqués par l’industrie canadienne.

Le Comité n’est toutefois pas certain que la meilleure façon de régler ce problème soit de retirer le mot «  toxique  » de la LCPE. Comme des témoins le lui ont dit, on courrait ainsi le risque, faible mais très réel, que la Loi soit contestée pour inconstitutionnalité. Cela pourrait aussi modifier la perception du danger que représentent les produits chimiques à toxicité intrinsèque et avoir une incidence sur leur gestion et l’usage qui en est fait.

INCIDENCE SUR L’EXAMEN PARLEMENTAIRE DE LA LCPE

L’examen quinquennal de la LCPE de 1999 a récemment été déféré au Comité. Dans les travaux préparatoires qu’il a faits en prévision de cet examen, Environnement Canada a dit que l’emploi du terme «  toxique  » fait problème67, et le gouvernement a décidé de le retirer de la Loi sans attendre d’avoir eu l’avantage de connaître les résultats de l’examen.

Ce geste arbitraire visant à faciliter l’application de la LCPE dans un but unique sans avoir au préalable discuté de ses conséquences possibles pourrait affaiblir l’incidence de l’examen en portant le Comité et ses témoins à croire que le gouvernement ne donnera pas suite à leurs recommandations.

ABSENCE DE DISCUSSION DES SOLUTIONS DE RECHANGE

Au ministère des Ressources naturelles, le groupe chargé des GEF étudie depuis un certain temps les problèmes liés à l’élaboration d’une réglementation pour eux, mais pendant tout ce temps, on n’a jamais discuté ouvertement de la possibilité de faire de la LCPE le vecteur législatif permettant d’appliquer cette réglementation.

La LCPE est peut-être l’outil législatif le plus indiqué pour atteindre cet objectif. Comme le Comité l’a entendu, elle comporte certains avantages, comme de permettre d’échanger les droits d’émissions et de conclure des accords d’équivalence fédéraux-provinciaux. Mais à défaut d’avoir étudié les solutions de rechange, le Comité n’est pas en mesure de dire si elles seraient meilleures ou pires.

CONCLUSION

Le Comité ne croit pas que la Partie 15 du projet de loi C-43 soit une mesure budgétaire à strictement parler, mais c’est surtout sa teneur qui l’inquiète. Les répercussions possibles de la suppression du terme «  toxique  » de la LCPE soulèvent beaucoup de points d’interrogation qui doivent être examinés en public. Des témoins ont dit au Comité que du point de vue juridique, il n’est pas nécessaire de retirer le terme «  toxique  » de la Loi pour qu’elle puisse servir de loi habilitante permettant de créer, par règlement, un renfort législatif pour les GEF. Bien que le Comité préférerait voir d’autres solutions, il demeure ouvert à un projet de loi distinct pour cette réglementation.

Quelle que soit la loi habilitante qui deviendra la loi habilitante permettant de prendre le règlement devant servir de renfort législatif au système d’échange de crédits d’émissions pour les GEF, c’est le fond de ce règlement que nous devrions étudier en ce moment.

Pour toutes ces raisons, le Comité fait la recommandation suivante :

Le Comité recommande au gouvernement de retirer la Partie 15 du projet de loi C-43, de produire rapidement un règlement régissant les grands émetteurs finaux et de le soumettre à un examen parlementaire et public.

Le changement climatique requiert une action immédiate. Les grands émetteurs finaux du Canada sont prêts et disposés à prendre les décisions nécessaires pour réduire leurs émissions de GES, mais la planification des investissements à consacrer à cette tâche exige des certitudes. Le gouvernement doit prendre des mesures sans équivoque et en toute transparence et il doit le faire dès maintenant.

DEMANDE DE RÉPONSE DU GOUVERNEMENT

Conformément à l’article 109 du Règlement, le Comité demande au gouvernement de déposer dans les 120 jours une réponse globale à ce rapport.

Des exemplaires des Procès-verbaux du Comité (Réunion nos 28, 30 et 32) sont déposés.


Respectueusement soumis,

Le président,



ALAN TONKS

 


1 En général, dans ce rapport, on parle de changement climatique de la façon que le groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat en parle : «  Le Changement climatique  » désigne toutes les formes de changement, naturel et anthropique. Le changement climatique qui résulte de l’activité humaine est qualifié de changement climatique anthropique. Quand il qualifie des mots comme plan le terme «  changement climatique  » concerne avant tout l’atténuation du changement climatique anthropique.
2 À laquelle toutes les provinces ont convenu en octobre 2000.
3 M. David Runnalls (président, Institut international pour le développement durable), Témoignages, 17 février 2005.
4 M. John Streicker (gestionnaire, Réseau canadien de recherche sur les impacts et l’adaptation au climat, région du Nord), Témoignages, 7 avril 2005, réunion 31; chef Phil Fontaine (chef national, Assemblée des Premières nations), Témoignages, 12 avril 2005, réunion 32.
5 M. Elliott Diringer (directeur, Stratégies internationales, Centre Pew sur les changements climatiques globaux), Témoignages, 31 mai 2005, réunion 41.
6 À noter que l’inventaire des GES de 2003 repose sur des méthodes différentes qu’auparavant, ce qui a pour effet d’abaisser les émissions globales même si les variations relatives au cours des ans sont les mêmes. Ainsi, selon l’inventaire de 2002, les émissions de GES s’élevaient à 731 Mt/an en 2002. Une fois recalculées, elles s’élèveraient à 719 Mt/an. De plus, la cible, qui était de 572 Mt/an selon l’inventaire de 2002, est maintenant de 560 Mt/an.
7 Tel que modifié à partir du Plan national d’activités 2002 du Canada sur les changements climatiques, mai 2002, page 125. À noter que la courbe représentant les émissions prévues n’est plus valable, mais c’est la seule actuellement disponible (voir la recommandation 6). Les émissions ont dépassé les prévisions du Plan de 2002. L’UNFCCC a changé les méthodes utilisées par les parties pour calculer leurs émissions, ce qui a eu pour effet de faire passer la cible de 571 Mt/an à 560 Mt/an. Les émissions de 1990 ont maintenant été rétablies à 596 Mt/an par rapport à 607 Mt/an comme l’indique le graphique.
8 La voie à suivre pour 1997 est tracée en fonction d’un déclin linéaire constant; celles pour 2002 et 2005 sont établies en fonction de l’entrée dans la période d’engagement à des niveaux d’émission à 2002 et à 2005 respectivement. PCCC désigne le Plan du Canada sur les changements climatiques, 2002.
9 Hoffert MI et al. «  Energy Implications of Future Stabilization of Atmospheric CO2 Content  », Nature, vol. 395, 881-884, 1998.
10Source des données : Administration de l’information sur l’énergie, Département américain de l’énergie, http://www.eia.doe.gov/emeu/international/total.html#Consumption. L’intensité carbone a été calculée comme les émissions de CO2 divisées par la consommation d’énergie primaire.
11Notons que la multiplication de ces deux facteurs donne des émissions de CO2 par unité de production économique, ce qu’on désigne parfois comme l’intensité carbone de l’économie, soit l’apport de carbone dans l’économie. Quand on considère tous les GES, on parle d’intensité GES de l’économie.
12M. Mark Jaccard, Costing Greenhouse Gas Abatement — Canada’s Technological and Behavioural Potential, ISUMA, hiver 2001.
13M. Mark Jaccard (professeur, École de gestion de l’environnement et des ressources naturelles, Université Simon Fraser), Témoignages, 7 avril 2005, réunion 31.
14Secrétariat du Conseil du Trésor, mémoire, 17 mai 2005.
15M. George Anderson (sous-ministre, ministère des Ressources naturelles), Témoignages, 4 avril 2005, réunion 29.
16Commissaire à l’environnement et au développement durable, Rapport 1998, chapitre 3.
17Vérificateur général, Rapport, décembre 2002.
18M. Gene Nyberg (directeur général et premier dirigeant par intérim, Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie), Témoignages, 9 décembre 2004, réunion 13.
19M. Steve Burgess (directeur exécutif, Projets spéciaux et Liaison régionale et Orientation, Agence canadienne d’évaluation environnementale), Témoignages, 24 février 2005, réunion 22.
20Intégration des considérations relatives au changement climatique à l’évaluation environnementale : Guide général des praticiens (novembre 2003).
21Commissaire à l’environnement et au développement durable, Rapport 2004, Point de vue de la commissaire.
22Ibid.
23Office national de l’énergie, L’avenir énergétique du Canada : Scénarios sur l’offre et la demande jusqu’à 2025, 2003, consulté le 19 mai 2005 à http://www.neb-one.gc.ca/energy/SupplyDemand/2003/SupplyDemand2003_f.pdf.
24Office national de l’énergie, L’avenir énergétique du Canada : Scénarios sur l’offre et la demande jusqu’à 2025.
25M. Pierre Fortin (directeur général, Association canadienne de l’hydroélectricité), Témoignages, 23 mars 2005, réunion 26.
26M. Duncan Hawthorne (président, Association nucléaire canadienne), Témoignages, 23 mars 2005, réunion 26.
27M. David Layzell (président et directeur de la recherche, Fondation BIOCAP Canada), Témoignages, 4 mars 2005, réunion 27.
28M. Tom Hedlund, Agence suédoise de protection de l’environnement, mémoire présenté au Comité.
29M. Robert Hornung (président, Association canadienne de l’énergie éolienne), Témoignages, 22 mars 2005, réunion 25.
30Luke Harding et al., “Report doubts future of wind power,” Society Guardian, 26 février 2005, http://society.guardian.co.uk/environment/story/0,14124,1425868,00.html, visité le 19 mai 2005
31Basé sur un taux de change de 1,599, OANDA.com, site sur les devises, 19 mai 2005, http://www.oanda.com/convert/classic.
32Basé sur un taux de change de 2,32, OANDA.com, site sur les devises, 19 mai 2005, http://www.oanda.com/convert/classic.
33National Audit Office, Department of Trade and Industry, Renewable Energy, février 2005, http://www.nao.org.uk/publications/nao_reports/04-05/0405210.pdf, 19 mai 2005.
34What is Geothermal Energy and How Can It Be Used?, Canadian Geothermal Energy Association, http://www.geothermal.ca/whatis.html#canresources, consulté le 14 juin 2005.
35M. Allan Wright (directeur général, Association canadienne du charbon), Témoignages, 8 mars 2005, réunion 24.
36Association nucléaire canadienne, Nuclear Energy, Clean Electricity is Important to All of Us, 2004 http://www.cna.ca/english/Nuclear_Facts/Clean_Electricity_August_8x11.pdf.
37Gouvernement de l’Alberta, Alberta’s Oli Sands, 2003, http://www.energy.gov.ab.ca/docs/oilsands/pdfs/osgenbrf.pdf.
38M. John Keating (PDG, Canadian Hydro Developers, Inc.), Témoignages, 22 mars 2005, réunion 25.
39Ibid.
40M. Michael Cleland (PDG de l’Association canadienne du gaz; président, Groupe pour un dialogue sur l’énergie), Témoignages, 15 février 2005, réunion 19.
41M. Robert Hornung (président, Association canadienne de l’énergie éolienne), Témoignages, 22 mars 2005, réunion 25.
42M. Pierre Fortin (directeur général, Association canadienne de l’hydroélectricité), Témoignages, 23 mars 2005, réunion 26.
43Commissaire à l’environnement et au développement durable, Rapport 2004, chapitre 3.
44L’Institut Pembina, Government Spending on Canada’s Oil and Gas Industry, 31 janvier 2005, http://www.pembina.org/pdf/publications/GovtSpendingOnOilAndGasFullReport.pdf, consulté le
19 mai 2005.
45M. Jeff Passmore (vice-président exécutif, Corporation Iogen), Témoignages, 22 mars 2005, réunion 25.
46The United Kingdom Department for Environment, Food and Rural Affairs, Climate " Change Agreements, The Climate Change Levy ", http://www.defra.gov.uk/environment/ccl/intro.htm, consulté le 15 juin 2005.
47M. Bob Page (président, conseil d’administration (vice-président, Développement durable, TransAlta Corporation), Fondation BIOCAP Canada), Témoignages, 24 mars 2005, réunion 27.
48Le gouvernement du Canada, Projet vert — Aller de l’avant pour contrer les changements climatiques : Un plan pour honorer notre engagement de Kyoto, 2005.
49M. Graham Campbell (directeur général, Bureau de recherche et de développement énergétique, ministère des Ressources naturelles), Témoignages, 21 avril 2005, réunion 35.
50Ibid.
51Ibid.
52M. Mark Nantais (président, Association canadienne des constructeurs de véhicules), Témoignages, 3 mai 2005, réunion 36.
53M. John Bennett (directeur, Campagne concernant l’énergie et l’atmosphère, Club Sierra du Canada (Chapitre de la C.-B.)), 17 février 2005, réunion 20.
54Groupe de travail sur les permis échangeables, Le recours aux permis échangeables comme moyen d’atteindre les objectifs nationaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre, 2000.
55Ibid.
56Ibid.
57M. Mark Jaccard, et coll., «  The Morning After, Optimal Greenhouse Gas Policies for Canada’s Kyoto Obligations and Beyond,  » Institut C.D. Howe, Commentaire, mars 2004
58M. Mark Jaccard (professeur, École de gestion de l’environnement et des ressources naturelles, Université Simon Fraser), Témoignages, 7 avril 2005, réunion 31.
59Petroleum Technology Alliance of Canada, «  A Compelling Business Case for Oil and Gas Facility Energy and Emission Auditing  », 29 septembre 2003.
60Mme Nancy Hughes Anthony (présidente-directrice générale, Chambre de commerce du Canada), Témoignages, 15 février 2005, réunion 19.
61M. Mark Jaccard (professeur, École de gestion de l’environnement et des ressources naturelles, Université Simon Fraser), Témoignages, 7 avril 2005, réunion 31.
62M. David Runnalls (président, Institut international du développement durable), Témoignages, 17 février 2005, réunion 20.
63Ibid.
64M. Andrei Marcu (directeur exécutif, Association des mécanismes internationaux d’échange de droits d’émission), Témoignages, 10 mai 2005, réunion 38.
65M. Mark Jaccard (professeur, École de gestion de l’environnement et des ressources naturelles, Université Simon Fraser), Témoignages, 7 avril 2005, réunion 31.
66M. Elliot Diringer (Directeur, Strategies internationales, Centre Pew sur les changements climatiques globaux), Témoignages, 31 mai 2005, réunion 41
67Environnement Canada, DIAGNOSTIC: Préparation pour l'examen parlementaire de la LOI CANADIENNE SUR LA PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT (1999)
http://www.ec.gc.ca/RegistreLCPE/review/CR_participation/CR_Scope/CEPA_Scope_f.pdf.