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FEWO Rapport du Comité

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CHAPITRE SIX : MÉCANISMES DE REDDITION DE COMPTES EN MATIÈRE D’ANALYSE COMPARATIVE ENTRE LES SEXES

A.     Garantir la reddition de comptes au fédéral

Plusieurs personnes ont demandé la mise en place d’un mécanisme de reddition de comptes garantissant que l’analyse comparative entre les sexes est prise en compte dans l’élaboration de programmes, de politiques et de lois dans tous les ministères fédéraux. Les commentateurs entendus pendant les audiences relatives à l’ACS et les témoins ayant comparu lors des tables rondes du Comité ont affirmé qu’une mise en œuvre efficace de l’ACS nécessitait un mode efficace de rapport des résultats. Le gouvernement fédéral a l’obligation d’effectuer des ACS et de répondre de ses actions devant les Canadiens.

C’est également la conclusion à laquelle est arrivée la coordonnatrice de Condition féminine Canada lors de sa présentation devant le Comité le 10 février 2005. Elle a alors souligné que si l’on assiste depuis cinq ans à une prise de conscience de l’importance de l’analyse comparative entre les sexes au sein du gouvernement, il est maintenant temps de renforcer les mécanismes de reddition de comptes afin de s’assurer que tous les ministères la mettent en œuvre14.

Un tel mécanisme de reddition de comptes ne serait pas un précédent, car le Canada a déjà légiféré en ce sens dans le domaine des langues officielles, du multiculturalisme et de l’équité en matière d’emploi, obligeant les ministères à soutenir certains groupes et à faire rapport de leurs activités au Parlement. Le gouvernement fédéral a également élaboré des mécanismes de reddition de comptes concernant des questions comme le développement durable. Il y exige que les ministères soumettent des plans de développement durable à tous les trois ans et y précise la position du commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada au sein du Bureau de la vérificatrice générale. Or les ministères fédéraux ne sont pas tenus par la loi de préciser les mesures prises en matière d’égalité entre les sexes.

B.     Les mécanismes de reddition de comptes pour les politiques fédérales

Au fil du temps, le Canada a conçu plusieurs instruments pour s’assurer que les objectifs politiques qui se situent au-delà des mandats propres à chacun des ministères soient servis adéquatement par la plupart ou par l’ensemble des ministères. Comme on peut le voir dans le tableau suivant, les mécanismes d’application et de responsabilisation varient largement d’un objectif politique à l’autre.


Objectif de politique

Dispositions législatives

Mécanismes d’application et de responsabilisation

Soutien aux langues officielles

Loi sur les
langues officielles

Le Bureau du Conseil privé joue un rôle de coordination dans l’application du programme des langues officielles. Tous les ministères et organismes du gouvernement fédéral visés par la Loi sur l’emploi dans la fonction publique doivent préparer un rapport annuel sur leur rendement en matière de langues officielles.

 

L’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada mène des activités de vérification et de surveillance, notamment des visites des bureaux et points de services qui doivent servir le public dans les deux langues officielles, des études téléphoniques et des interviews auprès des employés. L’agence transmet les résultats de ces vérifications au Commissaire aux langues officielles.

 

Les institutions désignées doivent élaborer un plan d’action pour la mise en œuvre de l’article 41 de la Loi sur les langues officielles, qui doit refléter les besoins particuliers des communautés minoritaires de langue officielle. Le ministre responsable de ces institutions fait ensuite parvenir ces plans d’action au ministre du Patrimoine canadien qui, à son tour, présente un rapport annuel au Parlement.

 

Doté d’un budget de 5,5 millions de dollars par an pour cinq ans (1999-2004), le Programme interministériel des communautés de langue officielle (PICLO) sert de levier financier afin de changer la culture organisationnelle des institutions fédérales en vue de les amener à prendre en considération les besoins des minorités de langue officielle dans leurs programmes et initiatives ministérielles.

 

La Commissaire aux langues officielles présente un rapport annuel au Parlement. Elle peut aussi présenter un rapport spécial au Parlement sur toute question concernant son secteur de compétence. Elle peut examiner les règlements ou instructions d’application de la Loi sur les langues officielles ainsi que tout autre règlement ou instruction visant ou susceptible de viser l’emploi des langues officielles, instruire toute plainte énonçant que le statut d’une langue officielle n’est pas reconnu ou que l’esprit de la Loi et l’intention du législateur ne sont pas respectés et exercer un recours judiciaire ou comparaître lors d’un recours devant la Cour fédérale suite à une plainte contre une institution fédérale.

Un Comité des sous-ministres sur les langues officielles, appuyé par le Secrétariat des affaires intergouvernementales du Bureau du Conseil privé, analyse tous les mémoires au Cabinet et les projets de politiques en fonction de leur incidence sur les langues officielles et sur le développement des communautés minoritaires de langue officielle.

Équité en matière d’emploi

La Loi sur l’équité en matière d’emploi vise à faire en sorte que les employeurs sous réglementation fédérale offrent des chances égales d’emploi à quatre groupes désignés : les femmes, les Autochtones, les personnes handicapées et les personnes appartenant à une minorité visible.

Chaque employeur (c’est-à-dire les ministères et organismes du gouvernement ou les employeurs du secteur privé assujettis au règlement fédéral et les sociétés d’État) doit effectuer des analyses de ses effectifs; il doit aussi préparer un plan d’équité en matière d’emploi où sont précisées les politiques positives d’embauche, de formation, de promotion et de conservation des personnes appartenant aux groupes désignés, et les mesures qui seront prises pour éliminer les obstacles à l’emploi de ces personnes; il prépare un rapport annuel sur l’état de l’équité en matière d’emploi.

Chaque année, le président du Conseil du Trésor dépose devant chaque chambre du Parlement un rapport annuel sur l’état de l’équité en matière d’emploi dans les secteurs de la fonction publique visés par la Loi.

La Commission canadienne des droits de la personne est chargée de faire observer la Loi. Elle mène des vérifications pour déterminer si les employeurs se plient aux dispositions de la Loi. Si l’employeur respecte la Loi, on rédige un rapport d’observation et le processus de vérification prend fin. En revanche, l’employeur doit proposer des mesures visant à corriger tout manquement à l’observation de la Loi et les présenter à l’agent de la vérification de la conformité.

La Loi prévoit des mesures d’exécution progressives quand les employeurs refusent de coopérer, et en dernier lieu, on peut enregistrer une ordonnance du Tribunal auprès de la Cour fédérale, ce qui équivaut à une ordonnance de la cour.

Multiculturalisme

La Loi sur le multiculturalisme

 

La Loi sur le multiculturalisme inscrit dans la loi la responsabilité qui incombe aux institutions canadiennes de refléter la réalité multiculturelle; elle confère au ministre du Multiculturalisme un rôle spécial de coordination et de défense dans le cadre de l’application de la Loi; elle procure une base législative aux programmes de multiculturalisme; elle oblige le ministre à déposer chaque année un rapport sur l’application des dispositions de la Loi par le gouvernement et les organismes fédéraux. Bien que la politique fédérale en matière de multiculturalisme soit incitative plutôt que directive, le ministre d’État (Multiculturalisme) dépose au Parlement un rapport annuel sur l’application de la Loi sur le multiculturalisme qui s’appuie sur des renseignements obtenus par les réponses au questionnaire envoyé à tous les ministères et organismes du gouvernement fédéral.

Développement durable

Modifications à la Loi sur le vérificateur général

Les modifications à la Loi sur le vérificateur général, entrées en vigueur en décembre 1995, exigent que les ministères et certains organismes du gouvernement fédéral préparent des stratégies de développement durable et des plans d’action pour les mettre en œuvre. Elles prévoient également la création du poste de Commissaire à l’environnement et au développement durable, et exigent du vérificateur général qu’il reçoive du public les pétitions sur des questions de développement durable et qu’il les achemine au ministre concerné en vue d’obtenir une réponse.

Le Commissaire, au nom du vérificateur général, surveille l’application de ces stratégies, plans d’action, pétitions, et fait rapport au Parlement sur une base annuelle, dans un rapport «  vert  » établissant dans quelle mesure les ministères ont respecté les objectifs de leurs stratégies de développement durable et mis en œuvre leurs plans d’action, et pour savoir ce qu’il advient des pétitions reçues.

Les stratégies des ministères et organismes sont mises à jour au moins une fois tous les trois ans.

Égalité des sexes

 

Condition féminine Canada ne dispose d’aucun mandat législatif. Bien que l’analyse comparative entre les sexes reflète l’orientation donnée aux lois telles que la Charte canadienne des droits et libertés et la Loi canadienne sur les droits de la personne, le mandat de CFC ne découle pas directement de ces documents. Même s’il existe une politique fédérale exigeant des ministères qu’ils mènent une analyse comparative des sexes (ACS), les ministères n’ont pas l’obligation d’élaborer des plans d’action pour l’ACS ou de communiquer au Parlement leurs activités relatives à l’ACS.


C.     Évaluation des mécanismes de reddition de comptes

Afin d’évaluer les mécanismes présentés dans le tableau précédent, ainsi que leur efficacité à faire avancer les objectifs politiques, le Comité a invité des témoins clés à discuter de ceux appliqués dans le domaine des langues officielles et de l’équité en matière d’emploi. La Commission canadienne des droits de la personne est chargée de s’assurer que les ministères et les organismes respectent leurs objectifs et stratégies visant à atteindre une main-d’œuvre plus représentative. Le Secrétariat du Conseil du Trésor, l’Agence de gestion des ressources humaines de la fonction publique du Canada et le Bureau du Conseil privé ont également été invités à discuter des mécanismes qu’ils utilisent dans le cadre de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles et de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

[Lorsque] la Loi sur l'équité en matière d'emploi a été conçue et que le Parlement l'a mise en vigueur en 1986, il n'y avait pas de processus de vérification. Le Parlement a cru bon, dans les années 1990, de faire en sorte qu'une organisation comme la nôtre ait l'obligation de faire une vérification. D'après moi, c'est un élément clé, parce qu'il y avait peu de progrès lorsqu'il n'y avait pas de vérification possible. Depuis que les vérifications sont faites d'une façon régulière, nous constatons des progrès dès que nous entrons dans une organisation pour y commencer une vérification.

Mme Mary Gusella (présidente, Commission canadienne des droits de la personne)

Plusieurs témoins ont insisté sur la nécessité de mettre en œuvre des mesures de reddition de comptes pour étendre l’utilisation de l’analyse comparative entre les sexes à l’ensemble du gouvernement fédéral. Toutefois, il est difficile pour le Comité de déterminer quel modèle d’application et de reddition de comptes serait le plus approprié pour promouvoir l’égalité entre les sexes dans tous les ministères. Si un fort consensus existe quant à la nécessité d’avoir des mesures de reddition de comptes, les témoins ont insisté sur l’importance pour le Comité d’évaluer avec attention quel type de rapport exiger des ministères. Un rapport sur les processus gouvernementaux qu’implique l’application de l’ACS serait-il suffisant? Serait-il plus important de cibler des objectifs d’égalité entre les sexes ou de faire un rapport sur les progrès réalisés?

Le Comité a jugé qu’une approche double était nécessaire afin d’évaluer à la fois le processus et les résultats de l’analyse comparative entre les sexes. Il recommande donc que des mécanismes de reddition de comptes soient élaborés afin de garantir un haut degré de mise en œuvre de l’analyse comparative entre les sexes. Il recommande également que des objectifs d’égalité entre les sexes soient ciblés — à l’aide d’un processus consultatif — et communiqués à l’ensemble des ministères dans le cadre du prochain plan quinquennal (2005-2010) sur l’égalité entre les sexes.



14FEWO, Témoignages, Florence Ievers,10 février 2005, 1530.