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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 7 mars 2005




¹ 1530
V         Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.))
V         M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC)
V         M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ)
V         Le président
V         M. Michael Chong
V         Le président
V         M. Michael Chong
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD)
V         Le président
V         M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC)
V         Le président
V         M. Werner Schmidt
V         Le président
V         M. Werner Schmidt
V         Le président
V         M. Brian Masse
V         Le président

¹ 1535
V         M. Brian Masse
V         Le président
V         M. Harvey Penner (président, Institut canadien des textiles)
V         Le président
V         M. Harvey Penner

¹ 1540

¹ 1545
V         Le président
V         M. Elliot Lifson (président, Fédération canadienne du vêtement)

¹ 1550

¹ 1555

º 1600
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         Mme Alex Dagg (directrice canadienne, UNITE HERE Canada)
V         Le président
V         Mme Alex Dagg

º 1605
V         Le président
V         M. Randy Rotchin (directeur, Conseil d'administration, Institut des manufacturiers du vêtement du Québec)

º 1610

º 1615
V         Le président
V         M. Randy Rotchin
V         Le président
V         M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC)

º 1620
V         M. Elliot Lifson
V         M. John Duncan
V         M. Elliot Lifson
V         M. Randy Rotchin
V         M. John Duncan
V         M. Elliot Lifson

º 1625
V         Le président
V         M. Harvey Penner
V         Le président
V         Mme Elizabeth Siwicki (présidente, Institut canadien des textiles)
V         Le président
V         M. Harvey Penner
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Paul Crête

º 1630
V         M. Elliot Lifson
V         M. Paul Crête
V         M. Elliot Lifson
V         M. Harvey Penner

º 1635
V         M. Paul Crête
V         M. Harvey Penner
V         M. Paul Crête
V         M. Harvey Penner
V         M. Paul Crête
V         M. Harvey Penner
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         Le président
V         M. Randy Rotchin
V         M. Paul Crête
V         M. Randy Rotchin
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard (Chatham-Kent—Essex, Lib.)
V         M. Harvey Penner

º 1640
V         L'hon. Jerry Pickard
V         M. Harvey Penner
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Mme Elizabeth Siwicki

º 1645
V         L'hon. Jerry Pickard
V         M. Bob Kirke (directeur général, Fédération canadienne du vêtement)
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Le président
V         M. Brian Masse
V         M. Harvey Penner

º 1650
V         M. Brian Masse
V         Mme Alex Dagg

º 1655
V         M. Brian Masse
V         M. Elliot Lifson
V         M. Brian Masse
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         M. Brian Masse
V         M. Elliot Lifson
V         M. Brian Masse
V         M. Randy Rotchin
V         Le président
V         Mme Elizabeth Siwicki

» 1700
V         Le président
V         M. Werner Schmidt
V         M. Randy Rotchin
V         M. Werner Schmidt
V         M. Randy Rotchin
V         M. Werner Schmidt
V         M. Bob Kirke
V         M. Werner Schmidt
V         M. Bob Kirke
V         M. Werner Schmidt
V         M. Bob Kirke
V         Le président
V         M. Harvey Penner

» 1705
V         M. Werner Schmidt
V         M. Elliot Lifson
V         Le président

» 1710
V         M. Werner Schmidt
V         M. Randy Rotchin
V         M. Werner Schmidt
V         Le président
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         M. Randy Rotchin
V         M. Harvey Penner
V         Le président
V         M. Harvey Penner
V         M. Werner Schmidt
V         M. Harvey Penner
V         M. Werner Schmidt
V         Le président
V         M. Paul Crête

» 1715
V         Le président
V         M. Harvey Penner
V         M. Paul Crête
V         M. Harvey Penner
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         M. Paul Crête
V         M. Elliot Lifson
V         M. Paul Crête
V         M. Elliot Lifson
V         M. Paul Crête
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Randy Rotchin
V         Le président
V         L'hon. Jerry Pickard
V         M. Harvey Penner

» 1720
V         L'hon. Jerry Pickard
V         M. Harvey Penner
V         L'hon. Jerry Pickard
V         M. Elliot Lifson
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         L'hon. Jerry Pickard
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         M. Elliot Lifson
V         M. Harvey Penner
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC)

» 1725
V         Mme Elizabeth Siwicki
V         M. Bradley Trost
V         M. Elliot Lifson
V         M. Bradley Trost
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Paul Crête
V         M. Elliot Lifson
V         Le président
V         M. Elliot Lifson
V         Le président










CANADA

Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
38e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 7 mars 2005

[Enregistrement électronique]

*   *   *

¹  +(1530)  

[Traduction]

+

    Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin—Kapuskasing, Lib.)): Bonsoir, chers collègues. Bonjour tout le monde.

    Je déclare ouverte ce 7 mars 2005 la séance du Comité permanent de l'industrie, des ressources naturelles, des sciences et de la technologie.

    Avant de commencer avec ce merveilleux groupe de témoins qui nous aideront dans l'étude générale sur la stratégie industrielle du Canada, et en particulier de l'industrie canadienne du textile, nous allons nous occuper des demandes de Paul Crête et Michael Chong au sujet de deux questions.

    S'il y a un accord, nous pourrions probablement nous dispenser tout de suite de la demande de Paul. Je crois comprendre que toutes deux concernent ou pourraient concerner les prévisions budgétaires. Les prévisions budgétaires entrent dans le cadre de notre mandat, et s'il n'y a pas de désaccord, nous pourrions tout simplement convenir d'inviter des fonctionnaires à comparaître à propos des prévisions budgétaires de la Commission canadienne du tourisme et des prévisions budgétaires de la Commission canadienne de sûreté nucléaire et l'Énergie atomique du Canada limitée (EACL). Si nous sommes d'accord, nous pouvons tout simplement l'inscrire au calendrier.

    Êtes-vous d'accord, Michael et Paul?

+-

    M. Michael Chong (Wellington—Halton Hills, PCC): Oui.

+-

    M. Paul Crête (Montmagny—L'Islet—Kamouraska—Rivière-du-Loup, BQ): Oui.

+-

    Le président: Je vais fixer une date pour une réunion sur les prévisions budgétaires à la même réunion de l'EACL et de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. Cela vous paraît-il acceptable?

+-

    M. Michael Chong: Êtes-vous en train de me dire que...?

+-

    Le président: Nous en avons terminé. Si vous êtes d'accord, nous continuons et je fixerai une date pour les réunions.

+-

    M. Michael Chong: Donc, ma motion est adoptée.

+-

    Le président: Parce que les prévisions budgétaires font partie de notre mandat. C'est seulement que, en tant que membre, vous nous signalez que vous voulez que les prévisions budgétaires de cet organisme ou de ce ministère doivent être considérées—c'est pareil pour Paul—donc je ne pense pas qu'une discussion est nécessaire. S'il y a un consensus, nous respectons le consensus.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Quand pourrons-nous accueillir le ministre? Est-ce qu'il va venir devant ce comité témoigner sur le budget?

[Traduction]

+-

    Le président: Pas pour les prévisions budgétaires du ministère, mais en tant que question distincte, nous pouvons nous renseigner sur la disponibilité du ministre pour les prévisions budgétaires.

+-

    M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): C'est ce dont je voulais parler, car j'estimais que le comité devrait inviter le ministre à propos du Budget principal des dépenses.

+-

    Le président: Bien qu'il y ait beaucoup de projets de loi à étudier, les prévisions budgétaires font aussi partie du travail du comité. Donc s'il n'y a pas de désaccord, en consultation avec le greffier et du mieux que nous le pouvons avec les témoins, nous demanderons...

    Et Jae est ici. Nous demanderons à Jae si le ministre est disponible pour parler des prévisions budgétaires du ministère, et nous arrangerons une réunion particulièrement pour les prévisions budgétaires de la Commission canadienne du tourisme, selon la demande de Paul, et de l'EACL et de la Commission canadienne de sûreté nucléaire à la même réunion, comme l'a demandé Michael.

    Werner.

+-

    M. Werner Schmidt (Kelowna—Lake Country, PCC): Avions-nous une motion de forme avant cela chaque fois que le ministre comparaît, nous essayerons d'avoir une réunion télévisée? Je pense que nous en avions une.

+-

    Le président: Je pense que c'est de la régie interne.

+-

    M. Werner Schmidt: Donc il va s'en occuper afin que nous puissions l'avoir.

+-

    Le président: Tout à fait. Merci de nous le rappeler, Werner. Pendant que nous fixons avec le Bureau du ministre une date, nous essayerons aussi d'avoir une salle avec télédiffusion.

+-

    M. Werner Schmidt: Merci beaucoup.

+-

    Le président: Nous n'aurons qu'à nous organiser en fonction de la disponibilité des témoins, cela étant dit, la question est réglée.

    Brian.

+-

    M. Brian Masse: Serait-il possible, si on a encore du temps le jour où nous recevrons la Commission canadienne du tourisme, d'inviter aussi le ministre d'État (Nord-canadien) au sujet de FedNor? S'il y a du temps; nous en avons deux—est-ce que ce serait plus difficile s'il y en avait trois?

+-

    Le président: Bien, nous pourrions discuter avec vous et Paul et voir si nous devons avoir des réunions séparées ou si nous pouvons consacrer deux tiers de la réunion, par exemple, à la Commission et un tiers de la réunion à FedNor. Mais cela dépend plus du temps dont nous disposerons; de la gestion de notre temps. Je pense que le comité est prêt à faire ce qu'il faut en ce qui concerne les prévisions budgétaires. Cela vous paraît-il acceptable?

¹  +-(1535)  

+-

    M. Brian Masse: Absolument.

+-

    Le président: Et nous contacterons Jae au sujet de la disponibilité du ministre.

    Bon, passons à nos témoins.

    Merci beaucoup d'être ici aujourd'hui. Votre présence va nous permettre de progresser dans notre étude.

    Je pense que nous allons suivre, comme toujours, l'ordre qui apparaît dans l'ordre du jour, c'est-à-dire premier arrivé premier servi.

    Pour l'Institut canadien des textiles, qui prendra la parole M. Penner ou Mme Siwicki?

+-

    M. Harvey Penner (président, Institut canadien des textiles): Ce sera moi.

+-

    Le président: Le greffier vous a probablement dit que nous vous demandons de parler entre cinq et sept minutes. Nous pouvons faire preuve d'un peu de flexibilité, mais si l'exposé est trop long, il nous restera moins de temps pour les questions et les réponses. Si vous omettez de parler d'une question dans votre exposé, vous pouvez certainement la reprendre pendant une réponse à une question plus tard durant la séance.

    Vous avez la parole.

+-

    M. Harvey Penner: Merci.

    Je suis Harvey Penner, président du conseil d'administration de l'Institut canadien du textile et président directeur général de Tricot Richelieu Inc. Je me présente devant vous accompagné de Liz Siwicki, présidente de l'Institut canadien des textiles et de Lucie Brassard, directrice des relations gouvernementales de Consoltex.

    Comme il m'a été demandé, je vais vous faire la lecture d'une brève déclaration préliminaire après laquelle nous serons à votre disposition pour répondre à vos questions.

    Nous sommes heureux de comparaître devant vous pour vous parler de notre industrie et vous communiquer nos points de vue sur le cadre de la stratégie industrielle du Canada. Personnellement j'attends depuis longtemps ce moment d'avoir un auditoire captif qui accepte de m'écouter. Nous sommes en train de devenir « une nation qui se contente de blanchir des tissus fabriqués par d'autres pays », alors je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez.

    L'industrie textile canadienne est dynamique, créative, concurrentielle et innovatrice. Elle produit des fibres, du fil, des tissus et des articles textiles vendus à plus de 100 différents destinataires. Elle contribue considérablement à l'économie du Canada. Les exportations comptent pour environ la moitié des livraisons totales de l'industrie qui se sont chiffrées à 6,4 milliards de dollars en 2004.

    L'industrie du textile a besoin beaucoup de capital et doit continuellement investir dans de nouveaux équipements, technologie et processus pour survivre dans un environnement commercial de plus en plus compétitif. Les fabricants de textile ont investi plus d'un milliard de dollars dans des usines et de l'équipement uniquement au cours des cinq dernières années afin d'établir une industrie de calibre mondial. Nous sommes parmi l'un des six secteurs manufacturiers canadiens qui ont été désignés récemment dans une étude de Statistique Canada comme surclassant leurs concurrents américains en travaux dans le domaine de la R et D.

    L'industrie du textile offre des emplois directs intéressants à près de 50 000 Canadiens et des emplois indirects à plusieurs autres milliers de Canadiens dans des collectivités où elle est le principal ou unique employeur. L'industrie utilise abondamment des programmes de perfectionnement professionnel primés afin de s'assurer que sa main d'oeuvre reste à jour et à l'avant-garde en ce qui a trait à l'apprentissage de son personnel.

    Notre industrie n'est pas agonisante—elle est une industrie de l'avenir et il y a un avenir au Canada pour le textile si de bonnes conditions d'investissement et de création d'emploi sont mises en place.

    Votre étude du cadre de la stratégie industrielle du Canada est opportune. Il est important également parce qu'à condition que notre pays arrive à mettre un frein à l'érosion de la base manufacturière du Canada, y compris de l'industrie textile, je crains que nous devenions « une nation qui se contente de blanchir des tissus fabriqués par d'autres pays »—et des fonctionnaires du Conseil privé. Il n'y a qu'une solution, à mon avis, pour éviter cela, c'est que le comité et le gouvernement du Canada appliquent des politiques pour changer le cours actuel des choses. Autrement, les conséquences seraient désastreuses pour tous les Canadiens.

    Nous relevons des éléments positifs dans le cadre stratégique actuel du gouvernement. Je vais vous en donner quelques exemples précis.

    Les fabricants canadiens de textile utilisent efficacement les crédits d'impôt RS et DE qui sont importants pour eux parce que la R-D est essentielle à notre industrie. Le système n'est pas parfait. On peut et on doit l'améliorer mais il s'agit d'un bon exemple indiquant que le gouvernement est sur la bonne voie. L'industrie a également accueilli favorablement l'engagement pris par le gouvernement envers les ressources humaines et le développement des compétences en établissant des conseils de secteur et en leur fournissant un soutien permanent, tel que les modèles de développement des compétences du Conseil des ressources humaines de l'industrie du textile. Les modèles de développement des compétences élaborés par le CRHIT sont reproduits actuellement dans d'autres pays, comme le Royaume-Uni, l'Australie et la Corée du Sud.

    Cependant, les produits innovateurs générés par les grands efforts consentis par l'industrie en R-D et les travailleurs qualifiés qui sont révélateurs de l'importance qu'accorde l'industrie à ses ressources humaines ne nous serons d'aucune utilité si nous n'avons ni clients ni marchés à qui vendre nos produits et une bonne politique gouvernementale qui crée un climat nous incitant à investir au Canada. C'est sur ce point de la stratégie industrielle du Canada que nous croyons que vous devez porter votre attention. Il existe un manque de liens entre les différents aspects de la politique du gouvernement canadien.

    On relève beaucoup trop d'exemples où on donne d'une main pour reprendre de l'autre. Ainsi, la décision que le gouvernement a prise d'autoriser l'entrée en franchise et son contingentement des textiles et vêtements en provenance de 48 pays les moins avancés a eu en 2003, des conséquences graves sur nos activités commerciales car nos clients se sont tournés vers les vêtements importés et les prix ont baissé à un niveau que notre industrie ne peut concurrencer. La R-D que nous effectuons et les efforts de nos employés talentueux pour créer les produits les meilleurs et les plus innovateurs deviennent vains si la politique commerciale du Canada accule nos clients à la faillite ou les oblige à se délocaliser.

    Il existe toute une série de mesures que nous pouvons prendre pour que l'initiative des pays en développement soit plus efficace et moins perturbatrice; nous pouvons nous attarder sur ce sujet si vous le souhaitez.

¹  +-(1540)  

    Les débouchés de l'industrie sont en baissent depuis quelques années en raison des alliances bilatérales progressivement conclues par les États-Unis qui réduisent notre accessibilité à leurs marchés. Notre industrie est une réussite sur le plan du libre-échange : ses exportations de textiles sont passées de 0,8 milliard de dollars en 1989 à plus de trois milliards de dollars en 2004, dont la majorité était destinée aux États-Unis. Cependant, sa croissance a subi une récession en 2000 quand les Américains ont adopté le Caribbean Basin Trade Partnership Act (CBTPA) et conclu d'autres accords bilatéraux qui ont efficacement rompu les liens entre les exportateurs canadiens de fils et de tissus et leurs clients américains.

    Un marché nord-américain était une politique solide. Les négociateurs canadiens ont été proactifs et ont remporté de grands succès en ramenant au pays un accord de libre-échange qui a été un tremplin qui a permis la réussite commerciale de nombreuses industries du textile. Mais le Canada semble incapable de défendre ses acquis dans le cadre de l'ALENA. Il doit s'attaquer sérieusement à ce problème et le résoudre le plus rapidement possible.

    Nous savons qu'il n'est pas facile de se disputer avec les Américains, mais à moins de mettre au point un plan afin de résoudre les problèmes de rapports de force et d'injustice qui existent actuellement, les industries canadiennes telles que la nôtre continueront d'en payer le prix. Un trop grand nombre d'entreprises de textile canadiennes ont déjà fait faillite à cause du bilatéralisme pratiqué par les États-Unis et le sort des autres dépend de la volonté de notre gouvernement de porter à un niveau supérieur les relations entre le Canada et les États-Unis.

    Comment pouvons-nous croître et prospérer et comment la stratégie industrielle du Canada peut-elle assurer la croissance et la prospérité du pays alors que notre marché des marchandises se rétrécit et que nous subissons des obstacles à l'exportation vers les États-Unis?

    Une partie de la réponse consiste à trouver de nouveaux clients au Canada et à l'étranger, un processus qui est permanent et sur lequel les fabricants de textile travaillent avec acharnement. Ce processus est coûteux et long, et les résultats rapides sont peu nombreux. L'érosion de nos marchés traditionnels et de nos nouveaux marchés est plus rapide que le développement de nouveaux marchés et la politique commerciale du Canada est en grande partie responsable de cette situation déplorable.

    Une partie de la réponse réside dans la politique gouvernementale qui défend et met à profit ce que nous avons déjà, à savoir l'ALENA, les travailleurs qualifiés du secteur manufacturier et des usines de calibre mondial. Les industries seront en mesure de relever le défi de la concurrence dans un marché où les règles du jeu sont les mêmes pour tous. Notre industrie est trop souvent éliminée par ceux qui croient que la capacité concurrentielle de notre pays réside dans les industries de pointe ou dans une économie axée sur le savoir. Monsieur le président, au Canada, la plupart des fabricants, y compris les fabricants de textile—entrent dans ces deux catégories. Vous avez autant besoin de nous que nous avons besoin de vous pour aborder l'avenir avec confiance et réussite.

    Chaque entreprise doit s'assurer qu'elle a les meilleurs employés, la meilleure technologie, les pratiques exemplaires, les meilleurs produits, bref le meilleur de tout pour qu'elle soit de classe internationale si elle veut soutenir une concurrence mondiale de plus en plus vive. Nos investissements, les connaissances de nos employés, les R-D que nous effectuons, notre créativité et esprit d'innovation sont essentielles à l'atteinte de ces objectifs. Notre industrie a pris les mesures qui s'imposaient pour mettre à profit une force, nos réussites du passé et les débouchés qui s'offrent à elle.

    Mais nous avons besoin de vous comme partenaires pour nous accompagner dans ce processus. Nous ne pouvons réussir si le gouvernement nous met des bâtons dans les roues—ce dont nous pouvons nous passer—ou nous élimine comme si nous étions des dinosaures. La manière dont a été mise en oeuvre l'initiative en faveur des pays les moins avancés dont nous avons parlé tout à l'heure est une exemple de la manière dont la politique commerciale du Canada sape inutilement les efforts des fabricants canadiens. Des emplois ont été perdus. Des usines ont fermé leurs portes. Les investissements s'en vont à l'étranger et non dans nos collectivités. L'énergie qui aurait dû être dirigée vers la recherche de résultats positifs a été dépensée à essayer de survivre à la crise. C'était une politique canadienne élaborée par des Canadiens qui a en fait, c'est malheureusement la réalité, réduit le nombre d'emplois au Canada.

    Les emplois et l'investissement sont également en jeu au moment où le gouvernement se lance à l'attaque des tarifs sur les textiles. La suppression des tarifs sur les textiles qui entrent en concurrence avec les produits que nous fabriquons au Canada nuira à la survie de notre industrie. La réduction des tarifs douaniers nous est familière, les tarifs sur les fibres, le fil et les tissus ont été réduits considérablement depuis le milieu des années 90 et une grande partie des importations de textile entre au pays en franchise de droits. Le problème réside dans l'approche dite « trou de gruyère » à la politique tarifaire sur les textiles actuellement à l'étude—une approche qui nuit aux éléments mêmes qui assurent la viabilité et la réussite des fabricants—l'innovation, la R-D et le développement de nouveaux produits. Nous nous rendons compte que l'intention de la démarche TCCE annoncée en décembre de l'année dernière est d'aider l'industrie de l'habillement, mais on ne doit pas aider une industrie aux dépens d'une autre industrie.

    J'ajouterai que sans industrie du textile dans ce pays, il n'y aura pas d'industrie du vêtement. L'industrie du vêtement survit grâce aux expéditions en provenance des États-Unis. S'il n'y a pas d'intrants fondés sur l'ALENA et que l'on utilise des tissus et des fibres venant de l'étranger, l'accès au marché américain nous sera fermé, c'est donc une approche autodestructrice. Nous sommes partenaires à ce niveau. Sans industrie du textile, vous pouvez oublier l'industrie du vêtement.

    Voici un exemple d'une proposition qui contribue à atteindre cet objectif.

¹  +-(1545)  

    En 2003, les importations canadiennes des vêtements se sont chiffrées à 5,6 milliards de dollars. Tous ces vêtements fabriqués à l'étranger avec des tissus fabriqués à l'étranger représentent environ 1 milliard de mètres carrés de tissu, soit un manque à gagner considérable pour les fabricants canadiens de textiles. Si nous pouvions rapatrier ne serait-ce qu'une petite partie de ces importations étrangères, cela serait bénéfique pour la production et l'emploi au Canada. Un programme douanier qui accorderait l'entrée en franchise de droits aux vêtements importés faits avec des tissus canadiens permettrait à l'industrie canadienne du textile d'accroître ses revenus d'exportation tout en incitant les consommateurs étrangers à acheter nos textiles.

    Le Canada offre déjà l'admission en franchise de droits à une multitude de tissus utilisés dans les vêtements fabriqués au Canada ainsi que des vêtements confectionnés à l'extérieur du pays. Mais les vêtements fabriqués dans d'autres pays avec des tissus canadiens sont tous soumis aux droits de douane. Nous estimons qu'il s'agit d'un chaînon manquant dans la politique tarifaire du textile. Les Américains et les Européens ont des programmes de traitement à l'extérieur qui accordent la préférence aux vêtements fabriqués à l'étranger avec leurs propres textiles, ce que ne fait pas le Canada. Nous avons besoin d'un programme identique au Canada pour nos fabricants de textiles et nous en avons besoin rapidement s'il doit être de quelque utilité.

    Pour terminer, monsieur le président, nous sommes préoccupés par le fait que le gouvernement estime avoir une politique industrielle solide en matière de textiles parce qu'il a mis en oeuvre le PICTV et CANtex, afin d'aider les fabricants à s'adapter à l'environnement commercial international en évolution, y compris l'initiative des pays les moins avancés qu'il a imposée unilatéralement. Ces programmes peuvent aider certaines entreprises, mais ils sont limités quant au type et à la quantité d'aide qu'ils offrent.

    Je réitère ce que j'ai dit tout à l'heure, la réalisation de plus grandes économies, l'amélioration de la production et un équipement moderne de pointe nous seront d'aucune utilité si nous n'avons pas de clients. Le Canada a besoin de politiques industrielles et commerciales sensées et coordonnées si nous voulons que les industries telles que celles du textile puissent encore être des investisseurs et des employeurs importants et des générateurs de richesse dans notre pays.

    Nous vous redemandons comme nous l'avons demandé à nos collègues siégeant dans les sous-comités du commerce international : quelle logique y a-t-il à créer des programmes d'assistance pour aider l'industrie du textile à devenir plus efficace si vous donnez nos marchés aux importateurs et obligez nos consommateurs à quitter le pays et incitez ceux qui restent au pays à s'approvisionner en textiles importés en franchise de droits? Pourquoi exporter des emplois canadiens au Bangladesh, en Chine, en Inde et d'autres pays, si ce n'est que pour verser des indemnités de chômage aux travailleurs de nos propres collectivités? Pourquoi insister pour que nos fabricants canadiens élaborent des plans de marketing afin de pénétrer le marché américain alors que l'accès que nous avons acquis dans le cadre de l'ALENA est sapé par la réglementation commerciale des États-Unis et que notre gouvernement semble incapable de faire quoi que ce soit à ce sujet? Où est le cadre stratégique qui indique aux fabricants de textiles qu'ils devraient continuer à investir au Canada parce que le gouvernement reconnaît l'importance de notre industrie pour l'économie, la base de connaissances du Canada, nos travailleurs et nos familles ainsi que pour nos collectivités?

    Je vous remercie.

+-

    Le président: Merci, monsieur Penner.

    Nous passons à la Fédération canadienne du vêtement.

    Monsieur Lifson, vous avez la parole.

+-

    M. Elliot Lifson (président, Fédération canadienne du vêtement): Merci beaucoup, monsieur le président.

[Français]

    Ma présentation est en anglais, mais je pourrai répondre en français à vos questions.

[Traduction]

    Merci de nous donner l'occasion de présenter notre point de vue sur votre examen de la stratégie industrielle du Canada, des cadres de réglementation et d'investissement étranger.

    Je me nomme Elliot Lifson et je suis le président de la Fédération canadienne du vêtement. Je suis également vice-président de Peerless Clothing Inc. En outre, comme j'enseigne la stratégie commerciale à la faculté de gestion de l'Université McGill, votre examen sur la stratégie industrielle du Canada présente un double intérêt, pour moi.

    Je suis accompagné de Bob Kirke, le directeur administratif de la Fédération.

    La Fédération canadienne du vêtement (FCV) représente l'industrie canadienne du vêtement à l'échelle nationale. Elle compte quelque 700 membres à travers le Canada et des sections régionales dans six provinces. Randy Rotchin, représentant d'une de ces sections régionales, l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec, prendra la parole après moi afin d'ajouter des observations supplémentaires.

    Je suis très heureux que votre comité ait choisi le vêtement et le textile comme l'un des trois secteurs sur lesquels porte votre examen. J'aimerais cependant souligner que, bien qu'on les présente souvent comme faisant partie du même sous-secteur, comme vous l'avez fait, le vêtement et le textile forment deux secteurs. En réalité, le secteur du vêtement est très différent et distinct de celui du textile, et leurs différences deviennent de plus en plus marquées, particulièrement au Canada.

    L'industrie canadienne du vêtement suit la mode et est axée sur les goûts des consommateurs. En outre, elle doit répondre aux exigences grandissantes des détaillants qui réclament des vêtements de qualité au meilleur prix possible et qui sont intraitables sur la date de livraison. L'industrie canadienne du textile se concentre de plus en plus sur les textiles à usage technique à grande valeur ajoutée destinés, par exemple, à l'ameublement, à l'industrie automobile et aux secteurs qui utilisent des géotextiles. Ainsi, bien que les textiles constituent la principale matière de production de l'industrie du vêtement, cette dernière est très différente de l'industrie du textile et l'industrie canadienne du textile ne répond plus aux besoins des fabricants canadiens de vêtements.

    Je viens, aujourd'hui, expliquer que le secteur du vêtement a besoin d'une stratégie industrielle cohérente et coordonnée. L'an dernier, nous avons témoigné devant divers comités parlementaires et nous avons toujours fait part de ce besoin, en soulignant que la manière dont le Canada élabore actuellement ses politiques commerciales et industrielles relatives au vêtement manque de cohésion et de coordination. Par exemple, en 2003, on a modifié la politique commerciale afin d'abolir tous les contingents et les tarifs douaniers sur les produits importés des pays les moins avancés (PMA) en vue d'augmenter les importations de vêtements de ces pays. Cependant, on n'a apporté aucune modification aux politiques industrielles du Canada dans le but de permettre aux fabricants canadiens de vêtements d'affronter l'accroissement de la concurrence de l'importation des PMA. Nous avons bien expliqué pourquoi les membres du Parlement devraient, à l'avenir, veiller à ce que nous réussissions à mieux coordonner les politiques industrielles et commerciales, ainsi que la réglementation nationale.

    Avant d'aborder notre sujet principal, j'aimerais d'abord présenter un bref aperçu de l'industrie canadienne du vêtement. L'industrie canadienne du vêtement produit une vaste gamme de vêtements pour femmes, hommes et enfants. Elle occupe le 10e rang des plus grands secteurs manufacturiers au Canada. Cette industrie est reconnue pour son développement de produits, son innovation en matière de mode et ses capacités de production. Au cours de la dernière décennie, les entreprises canadiennes ont obtenu un franc succès en tant qu'exportatrices, particulièrement en faisant une percée majeure sur le marché américain. Actuellement, nous exportons des vêtements aux États-Unis pour une valeur annuelle approximative de 2,5 milliards de dollars, ce qui représente plus de 40 p. 100 de notre production nationale. En 2002, l'industrie employait 94 000 personnes, dont les salaires totalisaient 2,3 milliards de dollars. En 2003 et 2004, en partie en raison de l'augmentation des importations et des pressions sur nos exportations causées par la revalorisation du dollar canadien, le nombre d'emplois a diminué.

    On doit souligner que l'industrie du vêtement dépend de diverses compétences professionnelles. Citant, entre autres, des emplois de spécialisation et à technicité relativement réduite qui conviennent aux nouveaux arrivants sur le marché du travail canadien, qu'ils soient de jeunes Canadiens ou des immigrants fraîchement arrivés au Canada. Chez Peerless Clothing Inc, où je travaille, les quelques 3 000 employés de notre usine de Montréal représentent environ 60 nationalités. Au même moment et, souvent, dans la même usine, les fabricants de vêtements utilisent les techniques et procédés les plus récents et emploient du personnel hautement formé. Ces employés peuvent posséder des diplômes d'études supérieures dans des domaines tels que l'ingénierie, la gestion et les technologies de l'information. Ils travaillent au développement de nouveaux produits, de procédés de fabrication et de logiciels en vue de répondre aux besoins de l'industrie.

    L'industrie canadienne du vêtement affronte de plus en plus de pressions et d'obstacles, en raison des changements continuels des règles commerciales et des conditions du marché. Soulignons aux membres du comité que, le 1er janvier 2005, le Canada, les États-Unis et l'Europe ont aboli tous les contingents sur les vêtements importés. Ces changements sont venus s'ajouter aux concessions sur l'accès aux marchés accordé aux PMA en 2003 et ont profondément modifié les règles du jeu. La valeur et le nombre des importations de vêtements augmentent, et cette tendance va probablement se maintenir. Afin de relever ces défis, les entreprises canadiennes de vêtements mettent de plus en plus l'accent sur le développement de produits, la commercialisation et la gestion de la chaîne d'approvisionnement en vue de se différencier de maintenir leur position dans les marchés du Canada et des États-Unis, qui constituent nos deux principaux marchés et où la concurrence axée sur le prix est très forte.

¹  +-(1550)  

    Les Canadiens peuvent être concurrentiels s'ils se concentrent sur la conception de la qualité supérieure et sur le service à la clientèle et s'ils répondent aux besoins de leurs clients de la vente au détail, partout en Amérique du Nord.

    En ce qui concerne la production de vêtements au Canada, toutes les entreprises augmentent leur efficacité grâce aux techniques de pointe et à des procédés novateurs. Toutefois, on doit souligner que beaucoup de sociétés révisent leur position actuelle quant à l'endroit où elles fabriquent leurs vêtements et la façon dont elles le font, et qu'elles sont nombreuses à choisir de faire fabriquer une partie ou la totalité de leurs vêtements à l'étranger.

    Ce qui me ramène à mon sujet principal : si nous voulons que l'industrie canadienne du vêtement demeure viable et concurrentiel, et éviter que nous devenions de simples propriétaires de marques ou importateurs et distributeurs de vêtements finis, nous devons veiller à ce que notre stratégie industrielle soit cohésive et coordonnée.

    Selon moi, le gouvernement devra soutenir de façon proactive les entreprises d'ici. Nous ne réclamons ni protection ni subventions, mais nous voulons simplement des politiques conçues en vue de soutenir et d'améliorer, dans la mesure du possible, la capacité concurrentielle des entreprises nationales.

    Afin que notre stratégie industrielle pour le vêtement soit cohésive et coordonnée, nous devons en tout temps veiller à parfaitement comprendre les répercussions d'une modification à une politique avant de la mettre en oeuvre, ainsi que prendre des mesures appropriées visant à résoudre les effets indésirables qui pourraient se présenter à la mise en vigueur de la modification de la politique.

    Par exemple, en janvier 2003, le Canada a aboli les contingents et les tarifs douaniers sur les vêtements fabriqués dans les pays les moins avancés. En vertu de cette mesure de libéralisation du commerce, les vêtements fabriqués dans des PMA, comme le Bangladesh, peuvent être fabriqués de tissus chinois ou indiens, importés en franchise de droits dans le PMA, et exportés au Canada, exempts de droits. Une entreprise canadienne qui importe les mêmes tissus en vue de fabriquer des vêtements ici paie des droits de 14 p. 100 sur les tissus seulement. Au moment de l'entrée en vigueur de cette mesure de libéralisation, aucune politique industrielle n'a été mise en place afin de palier à cet effet défavorable aux fabricants canadiens de vêtements.

    Nous croyons qu'il n'était simplement pas raisonnable de modifier de façon si spectaculaire les règles et la politique commerciales, tout en laissant inchangée la politique douanière sur les intrants. Le 14 décembre 2004 le gouvernement a finalement annoncé qu'il corrigerait ce déséquilibre des politiques en abolissant les droits sur les intrants textiles qu'utilise l'industrie du vêtement, dès la fin d'une étude que mène actuellement le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE).

    La Fédération canadienne du vêtement a fortement approuvé l'annonce faite par le gouvernement; cependant, si cette mesure s'avère utile, sa mise en place est plutôt tardive. Il est bon de rappeler qu'il y a plus d'un an, la ministre de l'Industrie de l'époque, Lucienne Robillard, avait promis un allègement tarifaire pour notre industrie. Bien que l'allègement premier ait été amélioré, il reste que l'industrie continue à attendre. Jusqu'à maintenant, ces promesses ne se sont pas encore traduites par de réelles économies de la part de nos membres.

    Donc, pour ce qui est de l'abolition des droits, tous les droits des douanes devraient être abolis sur tous les tissus importés qui ne sont pas fabriqués par l'industrie canadienne du textile et qui sont utilisés pour la fabrication de vêtements au Canada. Au Canada, une très grande partie des tissus utilisés pour la fabrication de vêtements est importée et assujettie à des droits qui peuvent atteindre 14 p. 100. Nous payons annuellement plus de 100 millions de dollars en droits de douane sur les matières brutes. Afin que les fabricants canadiens de vêtements puissent concurrencer les importations pour lesquelles les PMA ne paient aucun droit et les produits hors contingent de pays à bas salaire, comme la Chine, les droits sur nos très importants intrants textiles devraient être abolis.

    Comme je l'ai mentionné plus tôt, le gouvernement du Canada s'est, en fait, engagé à prendre cette première mesure lorsqu'il a annoncé, en décembre dernier, qu'il abolirait les droits sur les tissus qui ne sont pas fabriqués au Canada. Le ministre des Finances, M. Goodale, a demandé au Tribunal canadien du commerce extérieur de recenser les tissus qui étaient produits ici et de déposer un rapport à ce sujet en juin 2005. L'abolition des droits sera rétroactive au 1er janvier 2005.

    Une deuxième mesure, la mise en oeuvre de régimes de remise de droits applicables aux vêtements, devrait être prise lorsqu'il est opportun de le faire. Le gouvernement a également fait des progrès en cette matière quand, en décembre, il a approuvé la prolongation des régimes de remise de droits. Ces régimes permettent aux entreprises canadiennes de certains secteurs de l'industrie du vêtement de compléter leur production nationale avec des vêtements finis importés exempts de droits.

    Le gouvernement devrait examiner la possibilité de mettre sur pied des programmes de transformation à l'extérieur, qui permettent aux fabricants d'exporter des éléments de vêtements et de les faire coudre dans un autre pays, puis de les réimporter en franchise de droits. Le Canada ne s'est jamais doté d'un régime officiel de transformation à l'extérieur pour les vêtements. Les États-Unis et les pays européens ont de tels programmes, qui profitent aux fabricants de vêtements de ces pays, ainsi qu'aux travailleurs des pays à bas salaire voisins.

¹  +-(1555)  

    Au lieu de mettre sur pied un programme de transformation à l'extérieur, le Canada a adopté des régimes de remise de droits pour des secteurs particuliers. Ces régimes ont été reconduits à la fin de l'année dernière. Nous croyons qu'il est temps d'examiner la façon dont les régimes de transformation à l'extérieur et de remise de droits pourront fonctionner à l'avenir. Les entreprises canadiennes ont de plus en plus besoin de marier production nationale et fabrication à l'étranger, et ces programmes pourraient permettre de soutenir ces types d'activités.

    L'éducation et la formation professionnelle pour l'innovation et la gestion sont essentielles pour l'industrie—et ces processus sont en place. En outre, il y a une rubrique...

º  +-(1600)  

+-

    Le président: Pourriez-vous conclure, s'il vous plaît...

+-

    M. Elliot Lifson: Oui, monsieur le président. Je comprends. Vous savez, conduire dans cette tempête de neige... et travailler pendant 35 ans dans cette industrie, je vous demande deux minutes de plus; je le demande à tout le monde ici présent. Croyez-moi, nous avons tous les deux conduit. Nous étions tous les deux quelques minutes...

+-

    Le président: Continuez.

+-

    M. Elliot Lifson: Merci beaucoup.

    En plus de ces quatre domaines principaux, j'aimerais glisser un mot au sujet de questions qui tombent sous la rubrique de la « réglementation intelligente » qui fait partie de votre mandat relativement au présent examen.

    Nous croyons que le gouvernement devrait également envisager de réduire les politiques administratives qui accablent l'industrie ou, du moins, de les rendre cohérentes avec la stratégie industrielle. Les entreprises de vêtements doivent assumer des frais administratifs inutiles dans de nombreux secteurs. Pendant nombre d'années, le régime contingentaire a offert une mesure de protection pour les fabricants canadiens, mais ces mesures ne sont plus en vigueur. Toutefois, le gouvernement du Canada exige encore que les entreprises qui importent des textiles aient des licences d'importation et paient des frais pour chaque importation. Il s'agit d'un vestige du système de contrôle contingentaire. Le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international perçoit ainsi annuellement des millions de dollars en frais pour des licences d'importation, sans qu'une politique ne le justifie. Les licences d'importation sont exigées pour les importations des pays de l'ALENA et d'autres partenaires au libre-échange. Le comité devrait encourager le gouvernement à agir rapidement en vue d'éliminer ces frais administratifs qui sont désormais totalement superflus.

    En ce qui concerne les permis en NPT(niveau de préférence tarifaire) de nombreux vêtements envoyés du Canada aux États-Unis comportent des tissus importés et il est probable que de plus en plus de vêtements en contiennent, à mesure que l'approvisionnement en textiles de fabrication canadienne deviendra plus limité. Les permis NPT ajoutent des frais importants à la production des entreprises canadiennes. Chaque envoi qui nécessite un NPT doit être accompagné d'un permis, associé à des frais. Ces frais sont souvent égalés par ceux des courtiers en douane et, au total, les exportateurs, en particulier ceux à faible volume, se retrouvent à payer des frais exorbitants. Cela est tout à fait inutile.

    La protection des consommateurs est un autre problème. Il y a des contradictions entre les numéros CA et Santé Canada; la réglementation manque de conformité. Nous devons assurer leur cohérence et rendre notre industrie plus concurrentielle.

    En résumé, monsieur le président, l'industrie canadienne du vêtement réclame l'élaboration d'une politique industrielle cohésive et coordonnée qui tient compte d'une stratégie d'approvisionnement moderne pour l'industrie. L'industrie canadienne du vêtement ne se fait pas d'illusion en ce qui concerne la nature de la protection à l'importation dont elle bénéficiera au cours des années à venir : elle sera minime ou absente. L'industrie canadienne du vêtement a besoin des outils lui permettant de soutenir la concurrence des producteurs de partout à travers le monde. Elle a besoin qu'on abaisse les droits sur les intrants afin de réduire les coûts de la production nationale. En outre, dans certains cas, elle a besoin de compléter sa production nationale avec des produits fabriqués à l'étranger, et c'est exactement ce que les régimes de remise de droits ont permis à des entreprises de certains secteurs de notre industrie de faire.

    J'ai un petit paragraphe à la fin. Je vous remercie de m'avoir invité. Si vous voulez me reconduire à Montréal, j'accepterai avec plaisir, mais nous allons devoir affronter la neige.

    J'ajoute ici une remarque personnelle, je voudrais dire à tout le monde ici présent, car cela nous concerne tous—et nous avons de la chance d'être dans un pays où nous pouvons discuter ainsi autour d'une table—ne l'oublions pas, notre industrie survivra et prospérera et la seule question critique à laquelle nous devons répondre est « Où allons-nous nous approvisionner? ». Seule une stratégie industrielle convenable nous permettra de continuer à être en mesure de fabriquer nos produits et de nous approvisionner dans des usines canadiennes. Nous voulons conserver les 3 000 emplois que nous avons à Montréal plus les secteurs connexes.

    Je vous remercie de votre patience.

+-

    Le président: Merci, monsieur Lifson. Votre enthousiasme, celui de M. Penner et d'autres personnes est évident. Nous apprécions vos efforts non seulement d'être venus, mais aussi pour transmettre ce message en termes clairs.

    Madame Dagg, au nom de UNITE HERE.

+-

    Mme Alex Dagg (directrice canadienne, UNITE HERE Canada): Merci beaucoup. Je vous remercie de me donner l'occasion de parler aux membres du comité cet après-midi. Puisque je viens de plus loin, de Toronto, je devrais avoir un plus long temps de parole, n'est-ce pas?

    Des voix: Oh, oh!

+-

    Le président: Nous serons le plus généreux possible.

+-

    Mme Alex Dagg: Je serai brève.

    Au nom des 40 000 membres de UNITE HERE au Canada, je tiens à vous remercier de me donner l'occasion de vous exposer notre point de vue. UNITE HERE représente des travailleurs dans les secteurs du vêtement, du textile, de la buanderie, de la distribution, des services hôteliers et des services de restauration.

    Aujourd'hui, mes propos porteront sur le secteur du vêtement et du textile, mais je tiens à faire comprendre clairement que UNITE HERE croit en une économie mixte. Le Canada a besoin d'un secteur manufacturier et productif, d'un secteur public bien financé et d'un secteur des services diversifié. Je crois que le marché joue un rôle essentiel dans l'évolution de notre économie, mais le gouvernement doit s'assurer que le marché produit des emplois et fait monter le niveau de vie.

    L'industrie du vêtement est au sixième rang, dans le secteur manufacturier, avec environ 100 000 employés qui travaillent dans 3 900 établissements. L'industrie du textile emploie 43 000 travailleurs de plus. On fabrique des vêtements dans toutes les provinces et tous les territoires. Le Québec assure 55 p. 100 de la valeur de la production canadienne de vêtements. Montréal se situe au troisième rang en Amérique du Nord comme centre de fabrication de vêtements, derrière Los Angeles et New York.

    Ces industries essentielles sont maintenant menacées. Une stratégie industrielle dans le secteur du vêtement et du textile doit tenir compte de deux problèmes cruciaux. Mes opinions ne vont pas dans le même sens que celles du gouvernement.

    D'abord, l'expiration des contingents sur les importations de vêtements et de textiles a pour conséquence que l'industrie canadienne du vêtement subira une diminution de ses exportations vers les États-Unis—la Chine devrait s'emparer d'environ 70 p. 100 du marché américain après l'expiration des contingents—et devra affronter une augmentation des importations d'origine chinoise sur le marché canadien. Deuxièmement, l'économie du Canada dépend davantage des exportations vers les États-Unis que tout autre pays du monde. Par conséquent, nos autorités monétaires devraient être extrêmement préoccupées par l'appréciation de la devise canadienne par rapport au dollar américain.

    Le début de cette année a été un tournant dans l'histoire de l'industrie mondiale du vêtement et du textile. En effet, il a marqué la fin du système de contingents qui régissait depuis 30 ans cette industrie dans le monde entier. Pour la première fois en 30 ans, tous les pays devront affronter la concurrence chinoise dans un contexte libre de toute réglementation. Cette évolution de la situation menace tous les pays du monde qui ont une industrie du vêtement et du textile.

    La nature radicale de cette menace ressort de façon évidente si on considère l'évolution des importations venant de Chine lorsque les contingents ont été supprimés pour plusieurs catégories de vêtements en janvier 2002. Dans les trois ans qui ont suivi la suppression du contingentement, les importations chinoises de vêtements pour bébés ont augmenté de 427 p. 100, et la part de marché de ces importations est passée de 14,7 p. 100 à 54.1 p. 100. Dans le cas des jupes et chemisiers en tricot pour femmes et filles, les importations ont progressé de 406,3 p. 100 et leur part de marché est passée de 20,7 p. 100 à 61,5 p. 100. Maintenant que tous les contingents sont disparus, nous pouvons prévoir des augmentations analogues des importations chinoises pour tous les produits. Des dizaines de milliers d'autres emplois sont menacés.

    Toutefois, le gouvernement peut intervenir pour protéger les travailleurs et les entreprises du Canada. Lorsque la Chine a accédé à l'OMC, une mesure de sauvegarde spéciale a été prévue pour le secteur du vêtement et du textile. Cette mesure peut être appliquée si les importations en provenance de Chine menacent d'entraver le développement régulier du commerce. La mesure de sauvegarde permettrait au gouvernement du Canada de limiter la croissance des importations chinoises au Canada à seulement 7,5 p. 100. Plusieurs pays—le Pérou, l'Argentine et la Turquie—ont déjà mis en place des mesures de sauvegarde.

    En janvier dernier, la Global Alliance for Fair Textile Trade—qui regroupe 96 associations industrielles de 54 pays—s'est réunie pour étudier la menace que présentent les exportations de vêtements de Chine. Dans les mesures réclamées dans sa déclaration, on remarque ceci :

    Les gouvernements, surtout ceux des États-Unis, de l'Union européenne et du Canada, devraient mettre en place de façon immédiate et effective des mesures spéciales de sauvegarde contre les vêtements et textiles chinois pour éviter que la Chine ne monopolise le commerce mondial de ces produits.

    Je crois que le Canada devrait immédiatement mettre en place la mesure de sauvegarde dans le cas des vêtements et textiles de Chine.

    La valeur du dollar canadien est passée de 64 à largement plus de 80 cents américains, ce qui représente une progression du tiers en deux ans. Et le tiers de cette augmentation a eu lieu entre juin et décembre 2004. Bien que l'appréciation du dollar canadien soit en grande partie l'envers de la dépréciation de la devise américaine, le fait demeure que le dollar a pris plus de valeur par rapport au dollar américain que ne l'a fait la devise de tout autre grand partenaire commercial des États-Unis. Ce n'est pas la Banque du Canada qui est la grande responsable de l'appréciation du dollar canadien, mais les deux relèvements du taux d'intérêt vers la fin de 2004 ont contribué à cette évolution au cours des derniers mois.

º  +-(1605)  

    À cause de cette appréciation du dollar, il est très difficile pour les entreprises canadiennes d'exporter vers le marché américain et de livrer concurrence sur le marché canadien. Le problème ne réside pas seulement dans la concurrence plus vive des États-Unis, mais aussi dans la menace plus lourde des devises de la Chine et d'autres pays asiatiques dont la valeur est fixée en fonction du dollar américain. La Banque du Canada devrait faire valoir ses inquiétudes devant la dépréciation du dollar américain, garder des taux d'intérêt faibles et revenir sur le resserrement de la politique monétaire amorcé récemment.

    UNITE HERE soutient respectueusement que les éléments suivants doivent figurer dans toute politique ou stratégie industrielle visant les secteurs du textile et du vêtement. Premièrement, le comité devrait recommander que le gouvernement du Canada mette en place des mesures de sauvegarde contre les vêtements et les textiles chinois. Deuxièmement le comité devrait aussi exhorter la Banque du Canada à faire valoir les inquiétudes que lui inspire la dépréciation du dollar américain. Troisièmement, le comité devrait recommander également que la Banque du Canada maintienne des taux d'intérêt faibles et inverse le resserrement récent de la politique monétaire.

    Les industrie du vêtement et du textile fournissent des milliers d'emplois aux Canadiens. Bien que les entreprises soient présentes dans l'ensemble du pays, elles sont plus particulièrement concentrées au Québec. Nous avons pu constater récemment dans cette province que l'économie de localités complètes peut être décimée par la fermeture d'entreprises de ce secteur. Il n'est pas trop tard pour agir et pour améliorer nos industries du vêtement et du textile dans tout le pays et plus particulièrement dans les localités et villes qui dépendent vraiment de ce secteur d'activité.

+-

    Le président: Merci beaucoup, madame Dagg.

    Nous terminons avec Randy Rotchin de l'Institut des manufacturiers du vêtement du Québec.

+-

    M. Randy Rotchin (directeur, Conseil d'administration, Institut des manufacturiers du vêtement du Québec): Merci beaucoup, monsieur le président, et merci aux membres du comité d'avoir accepté de m'entendre aujourd'hui.

    Je m’appelle Randy Rotchin et je suis ici pour exprimer les vues de l’Institut des manufacturiers du vêtement du Québec. Je suis le président de A&R Dress, l’un des grands manufacturiers de vêtements pour femme portant la marque du fabriquant au Canada.

    Pour ceux d’entre vous qui ne le savent pas déjà, le terme « marque du fabriquant » désigne un segment de l’industrie qui ne fait pas la promotion de sa propre marque. Plus précisément, les manufacturiers qui utilisent la marque du fabriquant, comme A&R Dress, vendent leurs produits sous les marques de leurs clients et, de ce fait, demeurent en grande partie inconnus du consommateur final. Alors, nous faisons directement concurrence à des pays comme la Chine et le Bangladesh.

    A&R a été fondée en 1947, soit cinq ans avant que Sears n’ouvre son premier magasin au Canada. Je suis fier de dire que j’appartiens à la troisième génération propriétaire de cette entreprise familiale. Je suis également fier de dire que, au cours des 58 dernières années, A&R a fourni à des milliers de Canadiens—de nouveaux arrivants pour beaucoup d’entre eux—un salaire suffisant et un lieu de travail respectable. Grâce à eux, notre entreprise a mérité de nombreux prix pour la conception supérieure et la qualité de ses produits décernés par presque tous les principaux grands magasins et magasins à succursales multiples au Canada.

    Je suis ici pour représenter non seulement A&R Dress mais aussi les 200 membres de l’Institut des manufacturiers du vêtement, lequel représente environ 70 p. 100 de l’ensemble des emplois dans l’industrie de l’habillement au Canada. Nous comptons parmi nos membres un large éventail d’organisations—y compris des chefs de file mondiaux comme Peerless, représentée par M. Lifson, Gildan et Canadelle, ainsi que des établissements locaux comme le manufacturier de pantalons pour homme Ballin, Keystone Industries et le groupe d’entreprises Algo.

    Je mentionne individuellement chacune de ces entreprises parce qu’elles illustrent un fait fondamental concernant ce qu’on appelle « l’industrie du prêt-à-porter ». L’industrie canadienne de l’habillement n’est pas un secteur homogène et monolithique. Elle se compose plutôt de dizaines de sous-secteurs, chacun ayant des intérêts et des modèles d’affaire différents.

    Prenez les deux manufacturiers assis devant vous aujourd’hui. M. Lifson est un important manufacturier de complets classiques pour homme. Pour ma part, je suis un petit producteur de robes et de vêtements sport pour femme. M. Lifson peut utiliser la même gamme de tissus pendant de longues périodes. Nous utilisons rarement les mêmes tissus plus d’une fois par an. Le commerce des complets classiques pour homme est régi par deux saisons de base; la mode pour femme est assujettie à cinq saisons de dix semaines qui défilent rapidement. Cela signifie que les robes et les ensembles que nous produisons, tout comme les fameuses bananes qui brunissent dans les jours suivant leur achat à l’épicerie, n’ont absolument aucune durée de conservation. J’attire l’attention sur ces différences parce que je crois qu’il est important que le comité prenne conscience que l’industrie du vêtement aura besoin d’un éventail de solutions pour répondre aux besoins variés de ses nombreux sous-secteurs.

    J’aimerais également mentionner que ce n’est pas la première fois que je me présente devant un comité parlementaire. Il y a environ un an, j’ai témoigné devant le Comité permanent de la Chambre des communes sur les finances et le Comité sénatorial permanent des banques et du commerce dans le cadre de l’examen du projet de loi C-21. Je souligne ce fait parce que les raisons qui m’ont alors poussé à témoigner intéressent également ce Comité.

    Vous vous souviendrez peut-être que le projet de loi C-21 prévoyait l’octroi d’exemptions des droits de douane aux fabricants de vêtements dans certains pays à bas-salaires dans le cadre de l’initiative concernant les pays les moins avancés. Il ne faisait pas de doute que l’adoption du projet de loi C-21 allait nuire à A&R, mais je ne m’y suis pas opposé. J’ai plutôt profité de l’occasion pour expliquer que la confluence d’événements liés aux tarifs douaniers combinée au désintérêt général des fonctionnaires et des décideurs du gouvernement était en train de créer « la mère de toutes les tempêtes » qui allait frapper le 1er janvier 2005.

    Notamment, j’ai alors fait remarquer que le gouvernement avait promis de remplacer les décrets de remise de droits de douane alors existants par une solution plus équitable avant janvier 2000. J’ai témoigné la veille de la date d’expiration des décrets pour demander une prolongation parce qu’aucune solution n’avait encore été appliquée. Bien entendu, la disparition des remises des droits de douane allait avoir des répercussions négatives sur mon entreprise. Cependant, je me suis finalement senti obligé de témoigner parce que je voyais bien que des emplois dans l’industrie du prêt-à-porter étaient sacrifiés pour des motifs de politique extérieure à courte vue. Il me semblait inconcevable que, tandis que le gouvernement fédéral accordait des exemptions des droits de douane à nos concurrents à l’étranger, il augmentait également les droits imposés aux importations des matières premières essentielles aux manufacturiers canadiens.

    Heureusement, notre message selon lequel la politique sur les tarifs intérieurs et la politique sur le commerce international avaient des répercussions négatives sur la production canadienne a été bel et bien entendu. Le Comité des finances a réagi immédiatement en produisant un rapport contenant trois recommandations essentielles, lesquelles ont par la suite été adoptées par le ministre des Finances.

    Il va sans dire que ma visite au Parlement aujourd’hui est beaucoup moins désespérée mais tout aussi importante que celle de l’an dernier.Aujourd’hui, j’espère offrir au comité une vision plus optimiste et livrer un message général, à savoir que, pour que l’industrie canadienne du prêt-à-porter puisse prospérer, il est nécessaire d’adopter une politique industrielle stratégique, innovatrice, exhaustive et à long terme sur laquelle il lui sera possible de prendre appui pour progresser.

    Elliott a présenté un excellent exposé sur l’importance globale de l’harmonisation des politiques commerciale et industrielle et je vais donc essayer de faire quelques suggestions précises—une perspective plus terre-à-terre, si vous voulez.

    . Il est vrai que nous ne pouvons plus compter sur des barrières artificielles pour protéger nos marchés, mais l’industrie canadienne de l’habillement possède encore plusieurs avantages concurrentiels sur ses concurrents dans les pays à bas-salaires – le plus évident étant la proximité du Canada avec le plus important marché de consommation au monde.

º  +-(1610)  

    Je crois qu’il est dans l’intérêt de ce comité d’examiner les répercussions négatives que des procédures douanières excessives, des mécanismes d’encadrement des échanges désuets et coûteux, par exemple les permis d’importation, de même qu’une administration rigide et isolée des NPT ont sur la production de prêt-à-porter au Canada. Je suis ici pour vous dire que toutes ces contraintes provoquent une érosion de nos avantages concurrentiels.

    Un rapport récent de l’OCDE intitulé « A New World Map in Textiles and Clothing » traite de certaines questions fondamentales intéressant le comité. Selon ce rapport, tandis que de nombreuses restrictions jusqu’alors imposées dans les secteurs du vêtement et du textile sont levées, les pays dont le cadre réglementaire est mal préparé pour faire face à la concurrence internationale risquent de payer le gros prix. Le rapport de l’OCDE précise notamment que les régimes réglementaires inefficaces, l’infrastructure désuète de services gouvernementaux essentiels, les lourdes procédures douanières et d’autres structures de marché désorganisées posent un risque dans le monde d’après 2005.

    Au Canada, je crois que nous avons maintes preuves que tous ces facteurs existent. Dans son exposé, Elliott a mentionné les coûts directs associés au commerce international. J’aimerais donner un exemple actuel d’un coût indirect attribuable au manque de consultation et de coordination. Une gestion efficace des NPT est essentielle au succès de l’industrie canadienne du prêt-à-porter étant donné que 90 p. 100 de nos exportations (et 40 p. 100 de notre production totale) sont acheminées vers les États-Unis.

    À l’origine, le système des contrôles à l’exportation et à l’importation (SCEI) devait être une solution de commerce électronique moderne pour l’administration des NPT. Sur une note positive, disons que le SCEI a permis de moderniser les systèmes de gestion de la DGCEI. Par contre, il ne règle pas l’un des principaux problèmes des intervenants dans l’industrie du prêt-à-porter, à savoir, la gestion depuis toujours inefficace et coûteuse des NPT dans le cadre de l’ALENA. Malgré de nombreuses promesses faisant miroiter l’établissement d’un système plus efficace et direct, les exportateurs doivent encore s’informer sur leurs soldes et effectuer des transferts en passant par un ou plusieurs intermédiaires.

    Le message, c’est que des millions de dollars ont été dépensés pour prolonger la vie d’un système de gestion de permis maintenant désuet pour le bénéfice d’une agence et de courtiers en douane, au lieu de créer un instrument efficace et utile pour les exportateurs de vêtements.

    Elliott a aussi mentionné le régime de remise de droits de douane qui assure actuellement un allégement tarifaire d’environ 30 millions de dollars annuellement aux producteurs de vêtements sports coordonnés pour femme, de chemises pour homme et de vêtements de dessus. Je suis certainement reconnaissant que mon entreprise ait droit à une partie de ce montant, mais je me demande pour quelle raison d’autres sous-secteurs ne pourraient pas eux aussi bénéficier de programmes de remise similaires, surtout qu’il s’agit d’une politique acceptée instaurée par le gouvernement.

    De plus, en élargissant la portée des programmes de remise, on encouragerait sûrement d’autres sous-secteurs de l’industrie du vêtement à maintenir au moins une partie de leur production ici au Canada. Sous sa forme la plus large, le régime de remise de droits pourrait être associé à des mesures visant à encourager l’utilisation de textiles canadiens par le biais du traitement à l’extérieur. Je crois que cette suggestion vient de M. Penner.

    En terminant, j’aimerais souligner que, d’après mon expérience, les efforts déployés par le gouvernement pour aider l’industrie de l’habillement au moyen de politiques industrielle et commerciale souffrent, en règle générale, d’un manque d’uniformité, de coordination et d’engagement. En fait, je pense qu’il ne serait pas faux de qualifier la plupart des initiatives gouvernementales prises jusqu’ici de « mesures réactives ».

    Le comité trouvera un excellent exemple de planification stratégique dans le programme d’investissement stratégique dans le textile, le vêtement et la chaussure du gouvernement de l’Australie. Les Australiens ont compris que leurs industries nationales allaient être mises en péril par l’admission de la Chine au sein de l’OMC et l’expiration de l’Arrangement multifibres. Donc, en 1999, le gouvernement australien a adopté un programme d’investissement stratégique polyvalent qui englobe un plan tactique pour les industries du textile, du vêtement et de la chaussure de même qu’un éventail de mesures de réglementation, d’investissement et de politique commerciale qui s’échelonnent jusqu’en 2015. Le programme contient des initiatives comme le dégrèvement tarifaire général des importations, des investissements sectoriels à long et moyen termes et le traitement à l’extérieur. Le but global du programme d’investissement stratégique dans le textile, le vêtement et la chaussure est d’offrir une aide spéciale aux secteurs de l’industrie qui ont les meilleures chances de devenir concurrentiels sur la scène internationale après 2005.

    Il est important de souligner qu’une aide spéciale devrait être accordée aux secteurs et aux entreprises qui ont les meilleures chances de réussir sur la scène internationale après l’expiration de l’Arrangement multifibres. J’ai mentionné tout à l’heure que l’industrie de l’habillement se compose de dizaines de sous-secteurs. Il est également important que le comité prenne conscience du fait que la grande majorité des entreprises manufacturières canadiennes se sont adaptées aux changements en devenant des organisations hybrides.

    Ainsi, certaines activités traditionnelles comme la conception, la commercialisation et la distribution continuent d’être réalisées à l’échelon local, mais une partie de la production est maintenant effectuée à l’étranger. Tout comme en Australie, les initiatives canadiennes, quelles qu’elles soient, devront être conçues de façon à soutenir les modèles d’entreprise les plus prometteurs.

    J’aimerais terminer mon témoignage en insistant à nouveau sur le message que le comité a entendu plus d’une fois aujourd’hui. Pour que l’industrie canadienne de l’habillement prospère dans un environnement concurrentiel mondial, il faudra que tous les secteurs du gouvernement assurent un soutien uniforme, coordonné et déterminé.

    Merci beaucoup.

º  +-(1615)  

+-

    Le président: Merci, monsieur Rotchin.

+-

    M. Randy Rotchin: Merci d'avoir prononcé mon nom correctement.

+-

    Le président: Nous allons commencer par M. Duncan, je crois.

+-

    M. John Duncan (Île de Vancouver-Nord, PCC): Merci beaucoup. Évidemment, cela représente beaucoup d'information en très peu de temps, et vous êtes tous très passionnés par le sujet.

    Vous avez parlé de l'Australie et comment ce pays avait réussi à élaborer une stratégie d'ensemble et fait beaucoup de bonnes choses. Ce n'est pas uniquement dans votre secteur que nous avons constaté cela. Nous l'avons constaté secteur après secteur, qu'il s'agisse d'éducation ou de politique commerciale des pays côtiers du Pacifique, ou de beaucoup d'autres choses. Le gouvernement de ce pays semble avoir une façon de poser les bons gestes, alors que nous sommes embourbés dans les sables mouvants canadiens. Je ne vois pas d'autre façon de décrire la situation.

    J'ai été très heureux de savoir que vous avez de bonnes suggestions. Vous avez tous de bonnes suggestions au sujet de ce qui devrait être fait. Le comité ne s'intéresse pas uniquement aux textiles et aux vêtements, mais il s'intéresse à la réglementation intelligente. La bureaucratie et les coûts liés aux douane, aux permis d'importation et aux règlements touchant la consommation sont des éléments sur lesquels le comité veut agir avec le plus de vigueur possible.

    Ma question porte sur le point soulevé par M. Lifson à savoir les droits de douane que vous payez sur les tissus. Je ne comprends pas vraiment comment cela fonctionne. Était-ce différent pour les tissus destinés à être réexportés comme des produits manufacturés comparativement à la situation où les produits étaient destinés au marché national?

º  +-(1620)  

+-

    M. Elliot Lifson: Nous payons des droits de douanes sur tous les tissus qui sont importés au Canada. La seule question, c'est que le 1er janvier 2005, il y a eu une annonce faite par le ministre voulant que les droits de douane seraient éliminés rétroactivement au 1er janvier 2005 pour tout tissu utilisé par un fabricant ici au Canada et qui n'est pas fabriqué au Canada par l'industrie textile. C'est la question qui est débattue.

    À l'heure actuelle, l'industrie, même à ce jour, verse plus de 100 millions de dollars en droits de douane.

+-

    M. John Duncan: Plutôt que de ne pas le payer, vous le payez dans ce programme de remise de droits...

+-

    M. Elliot Lifson: La remise de droits est un programme complètement différent. L'un n'est pas lié à l'autre. Les droits de douane sur les tissus, c' est une question et le programme de remise des droits a été placé... En fait, Randy est un expert de cette question et pourrait en parler, mais la question des droits de douane sur les tissus n'est pas liée au programme de remise de droits. L'un n'est pas lié à l'autre.

+-

    M. Randy Rotchin: Si vous le permettez, essentiellement, la remise de droits est un privilège qui est accordé à certains sous-secteurs d'importer, pour chaque vêtement qui est fabriqué au pays, un accessoire complémentaire ou semblable d'un pays hors-ALENA que l'on suppose en franchise de droits. Essentiellement, c'est cela. Si je peux vous donner un exemple, pour tous les ensembles sports coordonnés de deux pièces que nous fabriquons, nous pouvons importer une blouse qui vient compléter cet ensemble sans payer de droits de douane.

+-

    M. John Duncan: Lorsque vous avez débuté votre exposé, monsieur Lifson, vous avez fait beaucoup d'efforts pour séparer de manière précise l'industrie du vêtement de l'industrie textile. J'ai été frappé du fait que personne n'en a reparlé. Est-ce qu'une partie de la raison pourrait être que l'industrie du vêtement estime qu'une partie de la réglementation gouvernementale est, en fait, conçue pour l'industrie textile au détriment de l'industrie du vêtement? Est-ce exact de dire cela?

+-

    M. Elliot Lifson: Je ne suis pas un homme politique, alors je ne veux pas commencer à comparer une industrie avec l'autre. Chaque industrie est centrée sur elle-même.

    Avec tout le respect que je dois à notre président, lorsqu'il a débuté ses observations, il a dit que nous allons maintenant traiter du secteur des textiles. Il y a toujours cette perception qu'il s'agit de textiles. Il s'agit de deux industries distinctes. L'importance de garder cela à l'esprit, c'est qu'une industrie doit survivre par elle-même. Vous ne pouvez en avoir une qui dépend de l'autre, parce qu'alors, vous devez fermer toutes nos frontières et dire que la seule chose qu'un fabricant canadien peut fabriquer, c'est uniquement avec des textiles fabriqués dans ce pays. C'est complètement ridicule. Nous sommes dans l'industrie de la mode. Nous devons être en mesure d'utiliser les intrants de partout au pays.

    Et en même temps, vous ne voulez pas détruire votre industrie textile si elle fabrique ce tissu au pays. Veuillez garder à l'esprit que seulement 20 p. 100 de la production de l'industrie canadienne du textile sont destinés à l'industrie du vêtement. Le reste va à l'industrie du meuble, à l'industrie automobile, à toutes sortes de secteurs différents. La production n'est pas destinée à 100 p. 100 à notre industrie, alors nous ne pouvons pas être dépendants.

    Il faut garder à l'esprit que 90 p. 100 de la production de Peerless Clothing, par exemple, et 90 p. 100 de la production de l'industrie—c'est pratiquement la même chose—sont vendus aux États-Unis. Lorsque nous expédions vers les États-Unis, nous ne faisons pas concurrence à d'autres fabricants canadiens. Nous ne luttons pas contre notre propre industrie canadienne du textile. Nous sommes des acteurs dans le marché le plus difficile au monde sur un terrain où les chances sont égales. Tout le monde expédie des produits sur ce marché. Nous est-il possible de survivre si nous ne pouvons pas livrer le bon article de mode au bon moment? C'est la seule façon que nous pouvons faire concurrence aux autres. Notre proximité avec les États-Unis est un facteur déterminant.

º  +-(1625)  

+-

    Le président: Laissons parler M. Penner.

+-

    M. Harvey Penner: Je pense qu'il y a un malentendu ici. Je crois fermement, malgré tout le respect que je dois à Elliot, que les textiles et les vêtements sont interdépendants. L'un ne survivra pas sans l'autre.

    Tous ceux qui ont pris la parole ce matin ont parlé de l'importance des États-Unis—que tout le monde vend aux États-Unis; que la population totale du Canada n'équivaut qu'à celle de la Californie; que si nous ne pouvons vendre aux États-Unis, nous ne pourrons pas survivre. Par conséquent, si vous prenez cela comme exemple, comment une de ces entreprises de vêtement fera-t-elle pour faire venir du tissu en franchise de droits de Chine, de l'Inde ou d'ailleurs, le transformer et l'expédier aux États-Unis? Il n'y a pas d'intrants de l'ALENA.

    Elles ont le NPT, qui est à la fois une malédiction et une bénédiction. Le NPT est parfois...

    Liz, pourquoi ne parlez-vous pas du NPT?

+-

    Le président: Très rapidement.

+-

    Mme Elizabeth Siwicki (présidente, Institut canadien des textiles): Un NPT est un niveau de préférence tarifaire. C'est une exception aux règles originales de l'ALENA qui exige qu'essentiellement, pour qu'un vêtement puisse être expédié aux États-Unis en franchise de droits, il doit être fabriqué au Canada à partir d'un tissu provenant de l'ALENA, de fil provenant de l'ALENA. Alors le NPT offre une exception limitée, mais elle est limitée, et c'est à cela qu'Harvey faisait allusion.

+-

    Le président: C'était la transcription, alors nous avons une explication. Bien. Merci.

    Monsieur Penner.

+-

    M. Harvey Penner: Je vais continuer juste un instant.

    Si nos prenons l'exemple d'Elliot concernant Peerless, qui est une entreprise phénoménale et une véritable histoire de succès, cette entreprise n'achète pas un mètre de tissu, et n'a pas acheté un mètre de tissu du Canada depuis 20 ans, ou 10 ans, ou 15 ans. Elle utilise le NPT. Alors, elle a un avantage. Elle peut utiliser un intrant d'un tiers pays. Elle peut expédier sa production aux États-Unis. Cela lui donne un avantage important par rapport aux Américains qui n'avaient pas cet avantage pour leurs propres opérations de filature de laine aux États-Unis.

    J'ignore quels sont les droits de douane. Je doute qu'il s'agit de 14 p. 100 pour la laine. Je pense qu'il s'agit de 3 ou de 4 p. 100. Je pense que la plus grande partie de la laine est probablement en franchise de droits à cette étape. Je pense que lorsqu'il parle de l'industrie, c'est une chose. Lorsqu'il parle de Peerless, c'en est une autre. Il est important de distinguer les deux.

    Si vous n'avez pas une industrie textile, où allez-vous vous procurer vos...? Vous allez vous procurer vos tissus des États-Unis ou du Mexique. Très bien. Si vous n'avez pas d'intrants de l'ALENA, vous n'avez pas de marché américain. Les NPT sont limités. Les Américains ne vont pas les renouveler. Ils vont être maximisés.

    Maintenant, tout le monde s'assoit autour de la table et dit que tout va bien, il y a encore une partie du NPT qui est disponible. Mais il n'y aura plus de NPT disponible. Les entreprises vont devoir payer des droits de 20 p. 100 pour entrer aux États-Unis. Je ne le comprends pas. Je ne le comprends vraiment pas.

+-

    M. Elliot Lifson: Puis-je simplement corriger un point? C'est un point important. Nous n'avons pas besoin de vendre par l'intermédiaire du NPT pour notre usage. Nous payons des droits de douane aux États-Unis. Nous ne cherchons pas de passe-droit.

+-

    Le président: C'est un débat intéressant. Je suis sûr que nous en entendrons parler davantage. Nous allons poursuivre.

    Paul, allez-vous...? Très bien.

    Alors, Jerry et, ensuite, Brian.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci beaucoup pour vos présentations.

    Vous savez que le 9 février, la Chambre des communes a adopté, à 157 voix contre 108, une motion par laquelle elle constatait l'insuffisance du plan d'aide aux industries du vêtement et du textile. Il y a donc un espoir que nous aurons un jour une véritable stratégie d'intervention.

    Premièrement, dans ce qui a été annoncé au mois de décembre, est-ce qu'il y a des choses qui devraient être opérationnelles et qui ne le sont pas encore ou qui posent des difficultés?

    Deuxièmement, qu'est-ce qui devrait être ajouté au plan actuel pour que ce soit une véritable stratégie d'intervention?

º  +-(1630)  

+-

    M. Elliot Lifson: Premièrement, on a annoncé au début janvier l'élimination des tarifs. C'est important.

    L'autre mesure n'est pas encore en place, mais on attend un rapport du tribunal qui doit être déposé au mois de juin 2005.

+-

    M. Paul Crête: Est-ce que c'est réaliste? Pensez-vous que cela va être fait pour juin 2005?

+-

    M. Elliot Lifson: J'espère que oui. C'est le défi que je lance au gouvernement. Le rapport devrait être prêt pour le 1er juin 2005. On va attendre. Je n'ai pas la réponse à votre question.

+-

    M. Harvey Penner: Mon français n'est pas celui de Voltaire ou de Rousseau, alors je vais répondre en anglais.

[Traduction]

    Je pense que ce que le gouvernement a fait en nous donnant la capacité de nous moderniser et d'utiliser le fonds qui a été rendu accessible est un geste positif, mais c'est tellement loin de la solution. Ce n'est qu'un cataplasme. Ce qui n'est pas encore réglé, c'est qu'est-ce que nous allons faire au sujet des PMA? Pourquoi le gouvernement canadien ne comprend-t-il pas qu'il peut tout de même avoir des PMA et aider les pays pauvres du monde en élaborant une politique soit américaine soit européenne, en établissant soit un mécanisme pour faire face à l'imprévu soit un plan quelconque dans le cadre duquel il y aura cinq ou dix ans pour créer une infrastructure? Pourquoi faisons-nous face à la Chine, à l'Inde, au Pakistan et à la Corée du Sud? Ce sont des géants du point de vue économique dans le domaine des textiles et du vêtement. Pourquoi obtiennent-ils un accès en franchise de douane au marché canadien alors que ces pays profitent d'une main-d'oeuvre qu'ils traitent comme des esclaves? Et dès que les salaires dans le pays augmentent, ces gens vont ailleurs.

    Je vais vous donner un exemple. J'ai vu cela l'autre jour. On disait que les T-shirts chinois, destinés à l'Europe, coûtent 35 p. 100 de moins qu'il y a un an, mais qu'ils sont quand même deux fois plus chers que les T-shirts en provenance du Bangladesh. Le Bangladesh a ouvert toutes grandes les vannes ici. La Chine n'a pas eu l'augmentation que tout le monde disait qu'elle aurait. Ce sont les PMA. C'est le Bangladesh qui a pris la part du lion et qui a fait chuter les prix.

    Alors, pourquoi le gouvernement canadien, qui a élaboré cette politique canadienne, ne fait-il pas quelque chose à propos des PMA? Comment allons-nous avoir accès au marché américain? C'est notre marché. Pourquoi ne s'occupe-t-on pas de la question des ententes bilatérales? Pourquoi ne poussent-il pas pour obtenir une entente de libre-échange? Pourquoi ne vont-ils pas voir le gouvernement américain et dire : « Vous voulez notre pétrole et notre eau? Donnez-nous accès en vertu de l'ALENA ». L'esprit de l'ALENA... permettre l'apport du Canada et du Mexique. Je pense qu'Elliot a parlé de transformation à l'extérieur. Pourquoi ne mettent-il pas sur pied la transformation à l'extérieur?

    Enfin, le TCCE doit présenter une approche intelligente, planifiée à la réduction des tarifs douaniers. Mais ils n'ont pas compris la substitution des biens. Ils doivent comprendre toutes les nuances. Ils doivent comprendre s'il y a quelque chose que nous pouvons fabriquer dans l'avenir et qui devient populaire, que nous pouvons le faire.

    Et quatrièmement, avec tout le respect que je vous dois, le vêtement est toujours la principale partie de l'industrie textile. Ne vous faites pas leurrer par la nanotechnologie. Nous faisons tout cela, mais ce n'est pas là qu'il y a du volume. Si vous voulez vendre un quart de livre de produit, vous faites un produit ésotérique. Le gros de notre commerce se fait avec les produits de base, traditionnels et innovateurs. Alors, nous devons continuer dans cette voie. Et nous ne vendons pas aux gens de l'ameublement de maison; nous vendons au groupe qui fabrique des vêtements.

    Je suis dans les deux secteurs. J'ai une entreprise de fabrication de vêtements et j'ai une entreprise de textile. Je sais que j'expédie 95 p. 100 de mes vêtements aux États-Unis. Mon fil et ma fabrication sont ici, mais il manque une activité de tricotage, c'est-à-dire des textiles.

    Alors, littéralement, voilà quels sont les problèmes. Et lorsque vous regardez notre succès, à la fois dans le domaine du vêtement et des textiles, regardez la croissance. Nous sommes passés de 0,8 à 3 milliards de dollars. C'est une augmentation de 2,3 milliards de dollars. Ce n'était pas par chance. Ce n'était pas par hasard. C'était à cause d'un investissement; c'était à cause d'une production d'usine; c'était à cause de toutes ces choses que nous avons bien faites.

    Le gouvernement canadien ne le comprend tout simplement pas. Il ne comprend tout simplement pas que nous pouvons survivre et croître. Nous avons une langue. Nous avons un bon emplacement géographique. Nous avons accès à toutes les chaînes américaines. Leurs bureaux sont ici également. Diable, nous avons un avantage. Et l'industrie américaine du textile et du vêtement est décimée; il ne reste plus personne.

    Les Chinois ont la cote en ce moment. Tout vient de Chine. Les Chinois vont réévaluer leur devise. Leur marché domestique est en croissance. Ils vont augmenter les prix aux États-Unis au cours des deux ou trois prochaines années. Et alors, les Américains vont refuser de payer, mais ils vont regarder autour pour se rendre compte qu'ils n'ont plus d'industrie.

    Nous avons toujours une infrastructure. Nous avons des teintureries, des usines de tissage, des tricoteuses. Nous avons tout cela. Si on ne détruit pas tout cela au cours des deux ou trois prochaines années, nous allons prospérer de nouveau. Et c'est ce que je ne comprends pas. C'est pourquoi je ne comprends pas les gens de l'industrie du vêtement, parce qu'ils doivent acheter des produits de l'ALENA ou disparaître. Ils ne vont pas vendre du tissu chinois, taillé ici pendant la nuit et payer 20 p. 100 de douanes. C'est fini.

º  +-(1635)  

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Monsieur Penner, j'ai aussi une question sur le programme actuel. Est-ce que CANtex fonctionne?

+-

    M. Harvey Penner: Oui, ça fonctionne. C'est bon.

+-

    M. Paul Crête: L'argent sort-il de la poche des gouvernements? Est-il rendu dans les entreprises?

+-

    M. Harvey Penner: Oui. C'est le cas pour CANtex 1, mais CANtex 2 n'a pas encore été annoncé.

+-

    M. Paul Crête: Qu'en est-il de CANtex 2?

+-

    M. Harvey Penner: J'attends CANtex 2.

[Traduction]

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: Le problème avec CANtex 2, c'est que, théoriquement, il doit entrer en vigueur le 1er avril, mais il n'a pas toujours approuvé formellement. Les critères ne sont pas encore disponibles. Personne ne peut faire une demande à l'heure actuelle. Il se pourrait très bien que le tout soit reporté au-delà de la date du 1er avril. CANtex 1 fonctionne. Les gens ont reçu des fonds. Mais dans le cas de CANtex 2, il semblerait qu'il y aura un retard.

+-

    Le président: Monsieur Rotchin.

+-

    M. Randy Rotchin: Pour répondre à votre question initiale, l'annonce concernant les tarifs faite à la fin de décembre était certainement le mieux que nous pouvions espérer. C'était le tonique dont cette industrie avait vraiment besoin. Le problème auquel nous sommes confrontés maintenant, c'est la mise en application. Nous ne savons même pas quels produits seront admissibles. Nous n'en sommes pas certains. Comme l'a dit Elliot, il y a une date cible et nous espérons que cette date sera respectée. Mais nous attendons toujours.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Quelles mesures?

[Traduction]

+-

    M. Randy Rotchin: Le mandat qui a été donné au TCCE par le ministre des Finances.

    Cela devrait également en dire long au comité sur la question des règlements intelligents. Il y a la question de la mise en application. Une décision politique a été prise et un programme a été créé, et elle a été imminente pendant des années. Beaucoup d'efforts ont été consacrés à cette dernière, mais nous attendons toujours pour comprendre de quoi il s'agit vraiment.

+-

    Le président: Avez-vous une dernière observation, monsieur Lifson?

+-

    M. Elliot Lifson: John a mentionné qu'il y avait deux industries. Harvey fait du tricot. Pour tout le monde autour de la table, il y a deux types de tissus : les tricotés et les tissés. Dans notre entreprise, nous n'achetons pas un demi-centimètre de produits tricotés. Tous nos tissus sont tissés. Nous n'avons pas de problème avec les gens qui font des tissus tricotés. Personne dans ce pays ne fabrique un centimètre de biens produits de cette façon. Que sommes-nous censés faire? Nous devons l'acheter à l'étranger. C'est une question importante. Vous devez comprendre l'industrie. C'est la raison pour laquelle nous sommes tous réunis ici. Lorsque vous parlez des produits tricotés, c'est une question. Je n'ai pas de problème avec Harvey à ce sujet. Mais lorsque vous parlez de produits tissés, vous parlez d'une question différente.

+-

    Le président: Merci, monsieur Lifson.

    Nous allons donner la parole à Jerry et ensuite, à Brian.

+-

    L'hon. Jerry Pickard (Chatham-Kent—Essex, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

    Comme dans votre industrie, où les textiles et les vêtements ont des rôles et des besoins très différents, le gouvernement fédéral examine fondamentalement ce problème par le biais de deux ministères distincts également. Le ministère des Finances a mis en oeuvre les mesures en décembre. J'entends M. Rotchin dire que ces mesures ont été favorables à son secteur de l'industrie du vêtement. Je vois son secteur de l'industrie du vêtement comme étant très différent du secteur de M. Lifson, parce que ils doivent importer des tissus de l'étranger. Espérons que les mesures prises par le ministère des Finances ont aidé les deux secteurs de l'industrie du vêtement. Comment cela a-t-il touché l'industrie textile? Est-ce que l'industrie textile subit plus de pression à cause de l'annonce faite en décembre? Pourriez-vous me donner vos impressions à cet égard?

+-

    M. Harvey Penner: Dans le cas du TCCE, il faut attendre. Il vient juste de commencer à travailler là-dessus. Je ne sais pas quand le rapport initial sera rendu public. C'est censé être en mars.

    Si le mandat que lui a donné le gouvernement canadien, c'était que les tarifs ne seront pas éliminés pour tout ce qui peut être substitué ou produit avec l'équipement actuel dans l'avenir, ils devraient éliminer les tarifs sur les choses sur lesquelles nous ne sommes pas intéressés à maintenir les tarifs parce que nous ne les produisons plus au Canada et que nous n'avons aucun intérêt à le faire.

    Cela dépend de ce qu'ils diront dans leur rapport final, sur quoi ils vont réellement éliminer les droits de douane. Par exemple, s'ils décident d'éliminer les tarifs sur le fil de coton, il est évident que ce sera un désastre, mais s'ils décident d'éliminer les droits sur le plastique Rubbermaid, je n'ai aucun problème avec cela tant et aussi longtemps que personne dans l'industrie a actuellement l'équipement ou le produit ou pourrait le substituer à quelque chose d'autre. En réalité, je pense que nous sommes sur la même longueur d'onde.

    Ils ont tenté de couper la poire en deux. Ils nous ont donné CANtex et ils leur ont donné l'argent des droits. Ils ont agi sur les deux tableaux dans le but de nous faire taire. Le problème dans le cas de ce plan, c'est qu'il ne parle pas de marchés, alors que ce que nous voulons, ce sont des marchés.

º  +-(1640)  

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Je ne veux pas contester vos paroles, mais « jouer sur les deux tableaux pour nous faire taire »... ne s'agissait-il pas d'une initiative pour tenter de venir en aide à l'industrie textile, dans votre esprit?

+-

    M. Harvey Penner: Oui, c'était le cas, mais ce n'était pas ce que nous voulions. Ce n'est pas ce que nous avons demandé. De toute évidence, nous ne sommes pas stupides. Si la chose est là, nous allons nous en servir. Nous allons prendre l'argent et investir, etc. Mais il s'agit d'un cataplasme sur une blessure grave. Nous aurions de beaucoup préféré une meilleure politique industrielle. Nous aurions de beaucoup préféré une entente sur les PMA, sur la consultation, dont nous avons parlé ensemble tant et tant.

    Les PMA ont fait chuter les prix moyens d'une manière spéculaire au pays. Wal-Mart paye 3 $ et tout à coup, vous pouvez l'obtenir pour un 1,25 $. Que fait-il du reste de cette production canadienne? Il demande la même chose. Il fait dégringoler toute la structure de prix. C'est absolument fou. Et c'est ce que nous voulions. Nous n'avons pas demandé d'argent, mais on nous a dit prenez l'argent et taisez-vous. Eh bien, ce n'est pas la réponse. Nous pouvons utiliser l'argent, mais nous ne nous tairons pas.

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose, l'industrie textile est à la recherche d'une bonne politique gouvernementale. Quelque chose comme l'ALENA, par exemple, qui était une bonne politique gouvernementale. Et il ne s'agissait pas de lancer de l'argent à l'industrie textile. C'était une bonne politique qui nous a permis d'avoir du succès sur le marché américain. Ce que nous voulons maintenant, c'est une bonne politique gouvernementale comme celle-là, qui ne nous donne pas nécessairement de l'argent pour résoudre des problèmes que le gouvernement a créés, comme le problème des PMA, mais plutôt qui nous permettra de bâtir sur nos forces, à savoir faire des affaires.

    Nous faisions un excellent travail pour alimenter le marché américain jusqu'à ce que la législation commerciale américaine mette un terme à notre capacité d'accéder au marché américain.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Je pense que M. Kirke voulait répondre, mais pour revenir sur la question que vous soulevez, je sais que ce que vous pouvez percevoir comme une bonne politique industrielle pourrait probablement entrer en conflit avec ce que l'industrie du vêtement pourrait considérer comme une bonne politique industrielle.

    Serait-il sage, au point où nous en sommes, que vous fassiez part au comité de ce que vous percevez comme une bonne politique industrielle et que l'industrie du vêtement en fasse autant, de sorte que nous puissions examiner les deux et que nous puissions faire ressortir les points qui sont cohérents, premièrement? Je pense que c'est une information déterminante pour le travail du comité.

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: Il y a beaucoup d'éléments communs dans ce que recherchent l'industrie textile et l'industrie du vêtement. Elliot a fait allusion à une approche coordonnée de la politique et nous sommes certainement d'accord avec cela. Je pense que la question la plus controversée entre nos deux industries, c'est la question des droits sur les textiles. Je pense que c'est là où vous allez probablement trouver la plupart des différences.

    De notre point de vue, en tant qu'industrie qui produit du fil et des tissus, la question n'est pas aussi simple qu'elle n'y paraît à première vue; Elliot et d'autres ont dit que si un produit n'est pas fabriqué au Canada, alors il devrait être en franchise de douane. Nous sommes d'accord. Nous n'avons pas de problème avec cela. Le problème, c'est de définir ce qui est fait et ce qui n'est pas fait et comment les produits se font concurrence sur le marché.

    Si vous enlevez les droits de douane sur quelque chose, ce que le TCCE examine à l'heure actuelle, disons par exemple, un produit de coton et de polyester à 50/50, parce qu'il est jugé qu'un tel tissu n'est pas fabriqué au pays... Mais qu'arrive-t-il si un produit contenant ces deux fibres dans une proportion 65-35 est produit au pays? Est-ce que ces deux produits se font concurrence sur le marché? Y aura-t-il un changement dans le marché? Est-ce que le fait d'éliminer les droits sur quelque chose qui, en théorie, n'est pas fabriqué au Canada influera sur d'autres produits qui font concurrence à ce dernier? C'est le genre de chose que nous... et c'est la raison pour laquelle la date de mise en application du 1er janvier n'arrive pas immédiatement; elle sera rétroactive. C'est pourquoi le tribunal a une période de six mois pour examiner cette question précise.

º  +-(1645)  

+-

    L'hon. Jerry Pickard: C'est pourquoi il est très difficile pour un comité comme le nôtre d'essayer de traiter des aspects techniques que vous soulevez et d'en traiter d'une manière raisonnée.

    Je pense que M. Kirke avait une observation.

+-

    M. Bob Kirke (directeur général, Fédération canadienne du vêtement): Oui, et je pense que notre argument qui a amené cette annonce, c'est que nous devons trouver une façon de faire parler les faits par eux-mêmes. Je pense que nous reconnaissons que le gouvernement a probablement fait le meilleur travail possible pour le faire. Le processus du TCCE exige que les gens démontrent qu'ils fabriquent ce produit et qu'ils le vendent à des gens—et non pas les vendre à une entreprise de meubles ou à quelqu'un d'autre, mais qu'ils nous le vendent à nous. Et à partir de ces faits, je pense qu'ils en arriveront à une conclusion assez sensée.

    Il pourrait y avoir des problèmes quant à la définition des produits. La définition des produits est une question très controversée et même simplement le fait d'avoir un classement correct est quelque chose de difficile. Mais nous nous approchons des faits; nous n'allons plus débattre sur des choses, mais les faits vont parler par eux-mêmes. Ils vont fabriquer le produit, nous le vendre, il y aura une preuve documentaire de la vente et le gouvernement élaborera une politique sur cette base.

    Je pense que l'autre chose que je dirais, toutefois, c'est que vous devez reconnaître tout le temps qu'il a fallu, et c'est pourquoi nous éprouvons un certain degré d'impatience, si vous voulez. En juin 2002, juste avant le Jour du Canada, la question des PMA a été annoncée au sommet de Kananaskis. C'est là que le véritable problème a débuté pour nous, avec l'engagement du gouvernement de faire ces concessions à ces pays. Mais le 27 février de la même année, le ministre de l'Industrie, comme l'a dit M. Lifson, a indiqué qu'il y aurait un allégement tarifaire pour notre industrie—et nous ne l'avons toujours pas.

    Alors, si nous sommes impatients, c'est parce que nous attendons depuis deux ans et demi, mais en même temps, nous reconnaissons que la façon dont le gouvernement aborde le problème maintenant est correcte et nous l'invitons à faire son travail.

+-

    Le président: Y a-t-il d'autres observations?

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Monsieur le président, j'ai un rappel au Règlement.

    À titre d'information, j'aimerais dire à M. Pickard qu'en une année, leurs propositions ont été faites à trois comités différents. Les propositions ont été déposées l'an passé au Comité des finances. Elles ont aussi été déposées au Comité des affaires étrangères et du commerce international au mois de novembre ou décembre, je crois, et ils nous en parlent encore ce matin. Le gouvernement a toutes leurs propositions pas très loin dans ses filières.

[Traduction]

+-

    Le président: Merci, Paul.

    Très bien, Jerry, une dernière question.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Lorsque vous réalisez que le ministère des Finances a renvoyé plusieurs de ses propositions au Comité des finances, qui les a examinées, et qui en a fait rapport, et que le gouvernement a agi en décembre... Le problème, c'est que la mise en application prend du temps.

    Et à l'heure actuelle, nous sommes dans le processus budgétaire, et je pense que l'industrie en est consciente. Et à la fin du processus budgétaire, ces annonces seront faites, et je crois que vous le savez.

+-

    Le président: Très bien, Jerry. Merci beaucoup.

    La parole est à Brian et ensuite, ce sera au tour de Werner.

+-

    M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.

    C'est un sujet intéressant en termes de chronologie. Je viens du secteur de l'automobile et je crois qu'il y a beaucoup de ressemblances avec ce qui arrive ici, de même qu'avec l'industrie de l'aérospatiale. Il est étonnant de voir le recoupement.

    Si je pouvais commencer avec M. Penner, je viens juste d'arriver de Washington dans le cadre d'une délégation de tous les partis. J'étais assis dans le bureau d'un membre du Congrès républicain et il était intéressant de l'entendre soulever cette question avec un néo-démocrate et parler du commerce équitable et dire qu'il regrettait que la Chine ait été autorisée à devenir membre de l'OMC. C'est le genre de choses dont nous sommes témoins partout en Amérique du Nord à l'heure actuelle.

    J'aimerais vous demander votre opinion au sujet de ce qui est arrivé à l'industrie américaine. Est-ce que l'industrie textile a déménagé en Chine ou s'est-elle développée par elle-même dans ce pays? Qu'est-il arrivé par rapport à ce scénario ou par rapport à l'évacuation de cet espace sur le marché américain?

    Et j'aimerais savoir si vous ne pourriez pas enchaîner et nous dire de combien de temps dispose notre industrie ici, à votre avis, avec l'infrastructure actuellement en place?

+-

    M. Harvey Penner: Je crois que les États-Unis et la Chine, ce n'est pas la même chose que le Canada et la Chine.

    Je pense que pour le Canada, les quotas n'ont jamais été utilisés à 100 p. 100 pour certains produits. Il n'y avait pas la même pression sur les droits des quotas, car les quotas entre le Canada et la Chine n'étaient pas toujours utilisés de la même manière.

    Je ne connais pas très bien les détails de la politique des États-Unis, mais je sais qu'il y avait tellement de pression, il y avait tellement peu de quotas pour une demande élevée, que les prix des quotas étaient très, très élevés. Dès le moment où les quotas ont été retirés, les prix ont monté dramatiquement, alors qu'au Canada, l'effet n'est pas le même actuellement, car plusieurs catégories n'étaient pas pareilles. Certains des quotas n'étaient pas utilisés. Alors, lorsque les quotas ont été retirés, cela n'a rien changé.

    Combien de temps avons-nous encore? C'est difficile. En réalité, notre problème réside davantage dans la question des pays les moins avancés et du Bangladesh. Cela a été terrible avec le Bangladesh.

    La croissance du Bangladesh est très rapide. Elliot a dit qu'il y a 700 entreprises. Randy a dit, Je crois, qu'il représente 200 entreprises qui équivalent 70 p. 100 des manufactures ou 70 p. 100 de l'industrie du vêtement.

    La majorité des firmes, comme Elliot l'a dit, étaient des hybrides d'importations qui ont changé. Un bon nombre des grandes entreprises qui étaient là avant, lorsque les pays les moins avancés ont fermé leurs manufactures—Big Silver ou... je ne suis pas certain que c'est 100 p. 100 Silver, mais un bon nombre d'autres entreprises qui faisaient de la fabrication—ont décidé maintenant qu'elles ne pouvaient plus se permettre de le faire.

    Alors, je ne crois pas que pour la Chine, il y aura le même effet immédiat, bien que le Syndicat du vêtement, du textile et autres industries a parlé d'un problème énorme dans le secteur des produits pour bébé, qui était un secteur de produits de base très important. Actuellement, ce que nous voyons, ce sont les pays les moins avancés et le Bangladesh, car la Chine n'a pas besoin d'envoyer ses produits directement. Pourquoi enverrait-elle directement ses produits pour payer des taxes?

    Ils envoient leur tissu. Soixante-quinze pour cent de la valeur est envoyée au Bangladesh. Les vêtements sont cousus là-bas puis ils sont envoyés ici en franchise de droits. Pourquoi fabriquer des produits en Chine et les envoyer ici? Les prix des produits fabriqués en Chine sont beaucoup plus élevés que les prix des produits fabriqués au Bangladesh et dans les pays les moins avancés. C'est cela, notre grand problème.

    La Chine est un monstre, mais il y a un autre problème avec la Chine. Ils ont besoin d'énormes quantités, de grandes séries. Ils ne sont pas intéressés par 500, 1 000 douzaines ou même 5 000 douzaines.

    Il faut comprendre l'industrie du vêtement, comme Randy l'a dit. Nous vendons aux États-Unis, aux principaux détaillants. Nous fabriquons des T-shirts. Nous fabriquons des T-shirts qui coûtent certainement plus cher que ceux qui sont fabriqués en Chine et dans tous les autres pays, et certainement au Bangladesh. Pourquoi achètent-ils ces T-shirts de nous? Parce qu'en janvier et février, lorsque le rose et le jaune se vendent, vous ne pouvez vous fier à la Chine, car cela prend six mois.

    Toutes les principales chaînes de magasins aux États-Unis possèdent des fonds. Avec ce qu'ils ont dans les entrepôts, la disponibilité de l'argent et la disponibilité des biens, nous sommes en mesure de sortir quelque chose en trois à quatre semaines. C'est notre point fort.

    Si le gouvernement canadien avait égalisé les chances, s'il n'avait pas adopté les mesures pour les pays les moins avancés, ce qui n'était pas nécessaire, ou si ces mesures était comme celles des Américains ou des Européens, s'il s'était battu pour conserver l'esprit de l'ALENA, pour conserver l'ALENA, croyez-vous que Cleyn et Tinker, Cavalier et Huntingdon auraient fermé s'il n'y avait pas eu l'Initiative concernant le bassin des Caraïbes? Toutes ces entreprises seraient encore ouvertes. C'était des entreprises prospères et en croissance. Bien sûr, le dollar américain a eu un effet, cela ne fait aucun doute. Mais ce n'est pas pour cette raison que ces entreprises ont fermé. C'était plutôt à cause des accords bilatéraux et de l'Initiative concernant le bassin des Caraïbes.

    Donnez-nous des chances égales. Éliminez les tarifs des pays les moins avancés. Établissez un genre de règle.

    Une fois, j'ai comparu devant un comité où les gens du gouvernement m'ont dit qu'ils ne pouvaient faire cela. Eh bien, changez les règles pour pouvoir le faire.

    C'est cela le problème, selon moi. La Chine continuera à croître. Elle a un rôle à jouer. La Chine fera partie du paysage, mais comme toute chose, ce ne sera pas permanent.

º  +-(1650)  

+-

    M. Brian Masse: Cela s'est produit également dans le secteur de l'automobile. Le marché était au Mexique, puis au Brésil, puis en Chine, et maintenant, il se dirige vers l'Inde pour ce qui est de la concurrence. Le marché se déplace rapidement vers le moins en ce qui concerne les normes environnementales et les droits des travailleurs, et il passe d'un pays à l'autre.

    J'aimerais peut-être demander à Mme Dagg de nous faire des recommandations à ce sujet. Quel genre d'avantage immédiat y aurait-il si nous adoptons ces recommandations? Je demanderais aux autres témoins de nous dire si c'est quelque chose qui peut être arriver à court terme, si c'est réaliste.

+-

    Mme Alex Dagg: J'ai deux commentaires à faire.

    Je comprends ce que les gens disent au sujet de la Chine, mais je crois que nous sous-estimons l'impact que la Chine aura. Selon moi, il ne faut pas penser que les effets seront minimes. C'est une économie énorme.

    En ce qui a trait aux prévisions quant à l'effet que cela aura au marché américain, duquel nous dépendons énormément pour l'exportation, nous ne devrions pas sous-estimer le rôle de la Chine. C'est pourquoi notre position est en faveur des mesures de protection. Je ne vois pas pourquoi nous ne devrions pas faire cela. Je crois que c'est ce qu'il faut faire, qu'il est intelligent d'essayer de protéger les emplois dans ce pays.

    L'autre sujet sur lequel je voudrais faire un commentaire, c'est le dollar. Je conviens qu'il s'agit d'un comité de l'industrie. Mais lorsqu'il y a une politique monétaire qui a un effet important sur les secteurs manufacturiers dans ce pays, je crois qu'il ne faudrait pas exclure ce sujet de la discussion pour la simple raison que ce n'est pas la question principale sur laquelle porte votre étude. Étant donné que l'on sait ce qui se passe avec le dollar canadien et le dollar américain, si l'on n'examine pas ces chiffres afin de comprendre l'impact de la situation sur les manufacturiers du Canada, on limiterait la discussion ainsi que le rôle que le comité peut jouer, car ce dernier pourrait examiner comment on pourrait améliorer et maintenir les emplois manufacturiers au pays. Il est important que ce comité se prononce sur cette question.

    Quand je parle avec des employeurs à titre de représentant des travailleurs, savez-vous quel est le sujet de l'heure? C'est le dollar canadien et le dollar américain. C'est la seule chose dont ils parlent. À chaque fois que je m'assois à la table de négociation en vue d'améliorer les salaires et les conditions de travail pour les travailleurs canadiens, la question qui revient est celle du dollar canadien et du dollar américain. C'est la raison pour laquelle les travailleurs n'obtiennent pas d'augmentations de salaire et ont été touchés dans ce secteur.

    Le comité doit examiner la question et se prononcer.

º  +-(1655)  

+-

    M. Brian Masse: Pouvons-nous dire que le fait d'exercer ce droit permettrait...?

+-

    M. Elliot Lifson: Je peux aborder la question. L'une des choses que j'ai apprises, c'est qu'il ne faut pas se défiler.

+-

    M. Brian Masse: Il s'agit simplement d'exercer notre droit, un droit qui a été négocié.

+-

    M. Elliot Lifson: Oui, bien sûr, nous pouvons négocier. Vous pouvez instituer des obstacles et établir des droits. Mais est-ce une réalité aujourd'hui? Comme je l'ai dit, je ne crois pas que l'établissement de droits et d'obstacles est réaliste.

    Voici comment on peut être réaliste, selon moi : comment pouvons-nous, en tant qu'industrie, et je parle des deux industries, être concurrentielle dans l'environnement actuel? Que pouvons-nous faire par rapport au type de gestion qui existe aujourd'hui? Q'est-ce que le gouvernement peut faire pour collaborer avec les industries qui sont encore en place au Canada afin de nous rendre plus concurrentiels?

    On pourrait apprendre aux gestionnaires comment être concurrentiels dans l'environnement global d'aujourd'hui. C'est cela la réalité. On ne peut se le cacher. Nous ne voulons pas perdre les emplois qui restent.

    Voici une bonne illustration de mes propos : une des questions que nous avons abordées, les deux industries, celle du textile et celle du vêtement, c'est la question du perfectionnement passif. Si c'est une question qui peut aider l'industrie, etc., alors nous pourrions assurément nous asseoir ensemble et intervenir. Ce n'est pas dans notre intérêt de faire en sorte que mon ami présent ici, Harvey Penner, ferme les portes de son entreprise. Il est dans le domaine des vêtements de tricot. Il l'a dit. C'est ce qu'il fait. Nous sommes dans le domaine du textile tissé. Nous n'avons pas d'intrants dans ce pays. Nous devons nous approvisionner ailleurs.

    Comment nous rendre concurrentiels? On peut devenir concurrentiels de trois manières différentes. On peut être concurrentiels par rapport au prix, mais nous ne serons jamais les producteurs les moins chers au monde. Vous pouvez le demander à tous les économistes qui nous demandent d'être plus concurrentiels. Pouvons-nous être plus concurrentiels? Il y a toujours quelqu'un qui coûte moins cher.

    Il y a une autre manière. La Chine non plus n'est pas l'endroit le moins cher au monde. L'innovation, la conception, le service et la proximité avec les États-Unis, voilà des facteurs qui nous caractérisent. Notre industrie du vêtement dans son grand ensemble représente 1 p. 100 du marché américain; 1 p. 100, cela fait 2,5 milliards de dollars. Imaginez si nous atteignions 2 p. 100.

    Soyons réalistes. Comment pouvons-nous protéger ce que nous avons? Ce n'est pas en se battant les uns contre les autres ni en mettant de l'huile sur le feu. Ce n'est pas ainsi que les choses peuvent fonctionner. Comment faire, alors? Si nous bénéficions des mêmes règles, alors nous pourrions être plus concurrentiels.

    Il y a des problèmes. Nous ne pouvons rester assis à ne rien faire. Il faut se rappeler qu'à chaque jour, des entreprises ferment. Une fois qu'elles ferment leurs portes et partent s'installer à l'étranger, soyez assurés qu'elles ne reviendront pas ici.

    Souvenez-vous que nous fabriquons 30 000 habits et 40 000 pantalons par semaine. Croyez-vous que les impartissants en Chine vont vouloir envoyer des conteneurs, du tissé, des boutons, ou quoi que ce soit d'autre, de là?

    Il faut protéger ce que nous avons ici. Nous devons nous asseoir à la table. Croyez-moi, vous vous occupez des choses politiques, pas nous.

+-

    Le président: Brian.

+-

    M. Elliot Lifson: Nous disons que les mesures de protection ne sont pas un problème.

+-

    M. Brian Masse: J'aimerais que tout le monde me dise ce qu'il pense.

    Vous dites qu'il ne faut pas demander cela?

+-

    M. Elliot Lifson: C'est exact.

+-

    M. Brian Masse: J'aimerais que tous me répondent.

+-

    M. Randy Rotchin: Les mesures de protection sont une solution vraiment temporaire. Nous aimerions avoir quelque chose de plus substantiel, quelque chose qui fonctionnera à long terme, quelque chose de solide et de stratégique.

    Les États-Unis ont recours à des mesures de protection dans certains cas, tout comme d'autres pays, mais cette solution ne dure pas. Elle offre un faux sentiment de sécurité. Cela ne fait que retarder l'inévitable.

+-

    Le président: Voulez-vous faire un commentaire rapide?

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: J'ai un petit commentaire à faire à ce sujet. Toute mesure de sécurité imposée n'est valide que pour une année. Il faut qu'elle soit reconduite à échéance. C'est difficile à renouveler, et les Américains viennent de le constater.

    J'aimerais aussi dire que la formule utilisée pour établir le niveau est perdue dans l'augmentation des importations. On prend 12 des 14 derniers mois et on ajoute 7 p. 100. On prend le dommage, on ajoute 7 p. 100, ce qui donne un niveau de référence. Il y a des limites aux mesures de protection.

»  +-(1700)  

+-

    Le président: Merci, Brian. Excellent.

    Werner, s'il vous plaît.

+-

    M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président.

    Je vous remercie beaucoup pour l'information que vous nous donnez. J'ai vraiment appris sur deux plans. Premièrement, il y a une réelle concurrence entre les représentants qui sont ici, et je crois que c'est bien. Et je suis tout à fait d'accord avec Elliott et avec ce que Mme Siwicki vient de dire au sujet des mesures de protection—et c'est vraiment le mot—à l'effet que cela ne fonctionne pas. C'est une solution très temporaire.

    J'aimerais poursuivre sur ce que M. Penner a dit, c'est-à-dire que le monde va changer et il en sera probablement de même pour la stratégie. J'aimerais cependant aller au-delà des mesures de protection et dire qu'il faut un cadre, une stratégie avec laquelle les gens du textile et les gens du vêtement peuvent collaborer et faire concurrence sur le reste du monde, car c'est ce qui va se produire ultimement. Je crois qu'il nous faut une stratégie.

    Il faut tenir compte de deux éléments. Une stratégie, un cadre général à partir duquel nous allons travailler; et aussi les tactiques à employer. Je pense que l'industrie pourra déterminer les tactiques qu'elle emploiera lorsqu'elle aura mis en place une stratégie d'ensemble.

    J'aimerais mettre au défi Randy qui, je crois, a donné l'Australie en exemple. J'aimerais savoir ce que l'Australie a fait pour réussir. Ce pays fait face au changement. Il fait face à des industries en concurrence. L'industrie australienne fait concurrence à des industries d'autres pays qui elles-même font compétition à des industries. Qu'est-ce que fait l'Australie? Il ne s'agit pas de mesures valides pour un an ou deux. L'Australie travaille probablement sur une proposition de dix ans.

    Que pouvons-nous faire ici au Canada afin de protéger nos industries, c'est-à-dire pour leur donner les outils qui leur permettront d'être concurrentielles? Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet? 

+-

    M. Randy Rotchin: La première chose que l'Australie a réussi, c'est qu'elle a commencé à réfléchir à ce problème il y a 15 ans.

+-

    M. Werner Schmidt: Cela ne nous avance guère. Nous sommes dans le temps présent. Il faut avancer de 15 ans. Qu'est-ce qui se passera dans 15 ans?

+-

    M. Randy Rotchin: C'est exactement là où je veux en venir. Nous devons réfléchir à ce qui se produira dans 15 ans.

+-

    M. Werner Schmidt: Vous avez tous sûrement une idée de ce que sera le contexte dans 15 ans. Vous nous avez déjà dit ce que la Chine sera. Alors, allez-y.

+-

    M. Bob Kirke: Je crois que vous avez réfléchi à ce que seront les entreprises dans 15 ans.

+-

    M. Werner Schmidt: Bien sûr.

+-

    M. Bob Kirke: Les entreprises seront axées sur la mise en marché, sur la conception, sur le développement des produits, et elles produiront certains de leurs biens ici. C'est ce que l'Australie a fait. Elle a réfléchi sur l'environnement futur des entreprises et elle a établi une politique en conséquence.

    Cette politique comprend des crédits d'impôt fondés sur la mise en marché. Nous avons essayé d'obtenir cela du gouvernement canadien, mais il a dit : « Oh mon Dieu, des crédits d'impôt pour les coûts de mise en marché! », mais c'est exactement ce que les entreprises doivent faire en termes d'investissements. Qu'y a-t-il de mal à cela?

    Le gouvernement du Québec a établi un crédit d'impôt novateur. Cela fait environ dix ans que nous demandons que le gouvernement fédéral établisse une politique semblable, mais il ne l'a pas fait. Nous savons ce que sera l'environnement des entreprises sous certains aspects. Nous ne savons pas combien elles produiront, mais nous savons qu'elles produiront. Il y aura des entreprises novatrices. Dans notre industrie, l'innovation porte sur la mise en marché et le développement des produits.

    Comme je l'ai dit, il s'agit de déterminer ce que seront les entreprises et d'établir des politiques qui leur permettront d'exister. Je crois que l'Australie a fait un très bon travail en ce sens.

    J'aimerais ajouter que la politique des tarifs des pays les moins avancés a été mise sur pied en même temps qu'un programme de mesures d'adaptation pour l'industrie du vêtement, tout comme pour l'industrie du textile, mais nous avons dépensé rapidement cet argent. Il s'agissait d'un programme qui fonctionnait bien. En fait, il a tellement bien fonctionné qu'après un an et demi, il n'y avait plus d'argent. S'il y avait plus de mesures d'aide...

+-

    M. Werner Schmidt: C'est facile de regarder en arrière. C'est facile de se fonder sur le passé.

+-

    M. Bob Kirke: Je dis simplement qu'il s'agissait d'une politique réussie. Elle a vraiment permis de réaliser l'objectif pour laquelle elle était fondée, mais le programme a cessé.

+-

    Le président: Monsieur Penner.

+-

    M. Harvey Penner: Soyons clair. L'Australie est un pays de 15 millions de personnes isolées géographiquement. Nous sommes en Amérique du Nord, à côté des États-Unis, dans un bassin d'environ 350 millions de personnes. C'est un scénario différent.

    Ce qui s'est produit avec l'ALENA est un cas de réussite. Tout le monde a connu une croissance; tout le monde a connu la prospérité. Lorsque l'ALENA a été mis sur pied, tout le monde disait que c'était fini, que les Américains allaient nous enterrer. Cela ne s'est pas produit. Nous avons connu une croissance incroyable. Nous sommes en Amérique du Nord. Nous avons des industries du vêtement et du textile. Nous sommes un pays de distance et il faut tenir compte de la logistique.

    La situation est instable avec la Chine, dans une certaine mesure, parce que la majorité des affaires sont réalisées soit dans un environnement à but non lucratif ou un système bancaire inexistant, ou avec des crédits à l'exportation. Ces mesures sont présentes pour les emplois seulement. À long terme, la Chine aura un marché national incroyable. Ils vont augmenter leurs prix et leurs produits, et leur marché intérieur et leurs prix changeront à l'échelle mondiale.

    Nous pouvons faire comme l'a mentionné Randy, je crois, c'est-à-dire combiner des choses. Nous devons avoir accès à des marchés. Lorsque vous avez mis sur pied l'ALENA, vous nous avez donné accès à des marchés. Les accords bilatéraux ont été établis et l'accès du Canada aux États-Unis a été retiré... quand on ne peut vendre un tissu aux États-Unis parce qu'il n'est pas fait d'intrants américains..., et quand ils font leur fabrication dans le cadre de l'initiative concernant le bassin des Caraïbes, nous n'y arrivons pas.

    Il existe une politique actuellement qui nous permet de faire des affaires dans la zone de libre-échange des Amériques, la ZLEA. La ZLEA s'étendra à l'Amérique du Nord, à l'Amérique du Sud et aux Caraïbes. Éventuellement, vous verrez que la majorité de la conception se fera dans d'autres pays, mais que le tissage, la teinture,...? Ce type d'opérations est très concurrentiel au niveau du prix et nécessite peu de travailleurs. Si nous avons le savoir-faire et les capacités de production, nous pourrons vendre du tissu aux États-Unis et partout dans le monde, car il nécessite 6 à 7 p. 100 d'emplois, alors que l'assemblage par couture nécessite 40 à 50 p. 100.

»  +-(1705)  

+-

    M. Werner Schmidt: J'aimerais que cette discussion porte sur plus d'un secteur.

+-

    M. Elliot Lifson: Vous avez posé une très bonne question : qu'est-ce qui se passera dans 15 ans? N'oubliez pas que nous sommes dans l'industrie de la mode. Avant, on s'inquiétait de la saison suivante et c'était tout. C'était la nature de l'industrie; c'est un fait. C'est ce que nous voulons savoir, et c'est une très bonne question. Nous voulons savoir comment utiliser ce que nous avons maintenant et dire aux gestionnaires que nous sommes en concurrence dans un nouvel environnement mondial. Quinze ans, c'est long, mais c'est bon d'exagérer comme cela, car c'est ce qu'il faut faire. Qu'est-ce qui se passera?

    Souvenez-vous lorsque tout le monde parlait de l'accord de libre-échange... nous n'avions pas d'accord de libre-échange. Le libre-échange? Le tissu et le vêtement devaient venir d'un pays de l'ALENA sinon il ne s'agissait pas de libre-échange. Cinq ans plus tard, l'ALENA a été mis en oeuvre. On demandait une transformation triple : la fibre, le tissu et le vêtement fini devaient... nous n'avons donc pas d'accord de libre-échange. De qui se moque-t-on? Tout le monde parle de libre-échange.

    Savez-vous ce qui s'est passé? Les gestionnaires ont changé leur mentalité et ils ont affirmé que les frontières étaient ouvertes. Qu'est-ce que cela signifie, que les frontières sont ouvertes? Si on utilisait du tissu qui ne venait pas d'un pays de l'ALENA, ou si la fibre ne venait pas d'un de ces pays...

    Nous envoyons des biens. L'industrie du vêtement pour homme est un secteur qui a très bien réussi. Ce n'est pas le tissu. Nous ne détenons pas tous les niveaux de préférence tarifaire et nous payons beaucoup de frais de douane à la frontière. L'industrie du vêtement pour homme réussit dans le marché américain, car la mentalité des gestionnaires a changé et ces derniers se sont dit : « Hey! Soyons novateurs, puisque nous sommes à côté du marché américain, si nous pouvons approvisionner ce marché, alors nous sommes bons. »

    Je vais vous dire un secret. Savez-vous où réside la force de notre compagnie? Ce n'est pas le produit que nous fabriquons... Bien sûr, c'est le produit, mais ce n'est pas le livre des commandes, comme nous l'appelons, et ce n'est pas ma Macey's qui vient et qui dit « Je veux cet habit rayé le 1er avril et je le veux dans telle couleur. » Non, le plus grand produit que nous avons, notre plus grand avantage concurrentiel—gardez ceci pour vous—c'est le programme de renouvellement du stock. Nous avons ce programme, car la meilleure chose qu'un détaillant puisse faire, c'est de faire rouler son inventaire, car il ne roule pas assez vite. Nous pouvons avoir entre 10 et 15 000 unités le lundi matin et les faire parvenir au Vermont le mardi après-midi.

    C'est un avantage concurrentiel, et c'est comme cela que les entreprises pourront être concurrentielles dans 10 ou 15 ans. C'est ça, l'industrie du tissé.

    Harvey a parlé du tricot. Le tricot est une industrie différente. Elle nécessite pour fonctionner des manufactures et de la machinerie. Il parle de la même chose. Il parle du roulement.

    Il y a deux industries différentes. J'apprécie le fait que nous devons travailler en paix et en harmonie partout dans le monde, mais nous ne pouvons travailler à la seule condition que nous nous approvisionnons les uns les autres. Si j'étais un producteur de tricot, j'aimerais Harvey. Je serais venu à Ottawa avec lui. Pourquoi? Parce qu'il est un grand fournisseur, et qu'il est mon voisin, et je n'ai pas besoin de conserver d'inventaire. Je peux dire « Harvey, j'ai besoin d'un tricot rose demain. Donne-le moi, sinon je ne ferai plus des affaires avec toi. ». Je vais lui dire quelque chose de pire que cela.

    Mais c'est important. Vous devez vous rappeler qu'il faut comprendre l'industrie. Vous avez donc posé une excellente question.

    Merci.

+-

    Le président: Merci, monsieur Lifson.

    Werner, allez-y s'il vous plaît.

»  +-(1710)  

+-

    M. Werner Schmidt: La question comporte trois mots clés ont été utilisés. On a parlé de cohérence, de coordination et d'engagement. Cela fait partie de la mentalité, je crois, dont Elliot a parlé. Vous avez montré très clairement qu'il y avait un manque de coordination dans notre politique sur l'industrie, notre politique sur le commerce et celle sur les finances. Il s'agit de trois ministères différents, mais il faut de la coordination à ce niveau.

    Je crois que pour l'engagement, c'est très clair, mais en ce qui concerne la cohérence, pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Que voulez-vous dire par cela?

+-

    M. Randy Rotchin: La cohérence consiste essentiellement à s'en tenir à une politique à long terme—ce qui signifie une politique de moyen à long terme—et de respecter les engagements faits dans le cadre de cette politique. Je peux simplement dire que dans notre industrie, comme je l'ai déjà dit, nous avons cinq saisons de 10 semaines par année et il est difficile pour nous de dire ce qui se passera dans 15 ans. Si nous commençons à faire cela maintenant, je crois que le gouvernement pourrait nous appuyer.

    Nous n'aurions certainement pas pu imaginer en 1947 ce à quoi notre compagnie allait ressembler en l'an 2000, mais comme Bob l'a mentionné tout à l'heure, nous sommes une entreprise hybride. Nous faisons de la fabrication ici et nous importons, ce que nous ne faisions pas avant. L'ensemble de notre conception, le développement de nos produits, notre distribution et tous les services que nous offrons aux clients se font ici, et je ne crois pas que cela va changer.

+-

    M. Werner Schmidt: Merci, monsieur le président.

+-

    Le président: Madame Siwicki.

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: J'aimerais faire un bref commentaire au sujet de la cohérence et de la politique tarifaire. Le gouvernement permet que l'on utilise du tissu en franchise de droits pour fabriquer des vêtements et d'autres produits d'utilisation finale. Le gouvernement permet que l'on fasse venir des vêtements en franchise de droits de pays comme le Bangladesh. Cependant, les vêtements faits à partir de tissu canadien qui sont fabriqués dans d'autres pays sont passibles des droits de douane lorsqu'ils reviennent au pays. C'est tout à fait insensé. Nous avons donc recommandé de remédier à cela. C'est nécessaire.

+-

    M. Randy Rotchin: Et si je peux me permettre, au sujet de la cohérence, nous pourrions nous en remettre aux décisions du Tribunal canadien du commerce extérieur au sujet de certains tissus. Si Elliot obtient un allégement tarifaire sur la laine destinée à la fabrication d'habits pour hommes, par exemple, il est fort probable que cette même laine ne soit pas disponible au pays pour la fabrication de complets pour femmes. Pourquoi les avantages ne sont-ils pas les mêmes?

+-

    M. Harvey Penner: Est-ce que je peux ajouter quelque chose?

+-

    Le président: Très rapidement, monsieur Penner.

+-

    M. Harvey Penner: Certaines personnes semblent penser que nous sommes en conflit, mais à la lumière de cette conversation, je ne pense pas que nous sommes en conflit.

    Une voix: C'est juste une apparence.

    M. Harvey Penner: Exact, c'est juste une apparence.

    Nous sommes d'accord au sujet des tarifs des pays les moins avancés. Nous sommes d'accord sur l'accès au marché américain. Au sujet du perfectionnement passif des marchandises, c'est la même chose. La seule chose pour laquelle nous ne sommes pas d'accord, c'est le TCCE, et cette question ne relève pas de nous.

+-

    M. Werner Schmidt: Que veut dire cet acronyme?

+-

    M. Harvey Penner: Le Tribunal canadien du commerce extérieur.

    Au bout du compte, ils vont prendre une décision en fonction des intrants, alors nous sommes d'accord. Nous sommes d'accord depuis longtemps sur ces sujets. Dans l'ensemble, nous ne sommes pas en conflit. La chose que je dis toujours, c'est qu'il n'y a pas d'industrie du vêtement sans industrie du textile; il faut des importateurs, sinon l'industrie s'en ira aux États-Unis. Nous avons perdu des emplois dont les salaires variaient entre 35 000 $ et 45 000 $, et ces emplois n'étaient pas destinés à partir, mais nous les avons perdus.

+-

    M. Werner Schmidt: Monsieur, vous n'avez pas à nous convaincre de l'importance de cela. Vous devez plutôt nous convaincre de la meilleure solution.

+-

    Le président: Très bien. Nous allons conclure. Si nous avons la chance de nous pencher de nouveau sur la question, nous le ferons.

    Paul, puis Jerry.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Merci, monsieur le président. J'ai deux questions.

    Le gouvernement du Canada a remis ce petit document lorsque des parlementaires canadiens sont allés à Washington mardi dernier. À l'intérieur, on trouve un t-shirt sur lequel il est écrit:

[Traduction]

    « T-shirts fabriqués au Mexique, imprimés et emballés aux États-Unis. »

[Français]

    Rien n'est fait au Canada, et on a remis cela aux Américains pour souligner la contribution canadienne. La seule chose qui n'est pas écrite est que c'est le Canada qui a payé. C'est tout ce qu'on a fait. Ce commentaire vise à savoir si vous croyez que ce type de message est approprié, mais je ne veux pas avoir la réponse tout de suite. Je me comprends.

    On a envoyé un drôle de message. Le gouvernement canadien considère qu'il n'y a pas de produits faits au Canada qui méritent d'être offerts aux Américains en guise de cadeau. On a donné quelque chose qui a été fabriqué au Mexique. Ce n'est pas le geste d'un acheteur qui, quelque part dans le monde, a décidé d'acheter un t-shirt, c'est le gouvernement du Canada qui a donné un cadeau aux parlementaires américains.

    Cela dit, si vous aviez la chance de parler à M. Paul Martin avant le sommet qui aura lieu le 23 mars avec M. Fox et M. Bush et que la discussion porte sur la pertinence d'avoir un ALENA-plus ou autre chose, que lui demanderiez-vous de défendre ou d'ajouter à la situation actuelle?

»  +-(1715)  

[Traduction]

+-

    Le président: Qui veut répondre?

+-

    M. Harvey Penner: Je pense que nous avons une lettre adressée à Paul Martin. Je ne sais pas si vous l'avez lue. Ce sont les quatre points que j'ai portés à l'attention de M. Martin dans ma lettre, pour laquelle j'ai reçu une réponse disant que l'on comprend les inquiétudes, que l'on en fera part à d'autres ministres, merci beaucoup, signé Paul Martin. Nous avons demandé de le rencontrer, nous avons demandé une audience, mais on nous l'a refusée.

    Je suis certain qu'avec l'effondrement de l'industrie manufacturière secondaire du Canada; vous n'êtes pas obligés de regarder seulement les industries du textile et du vêtement; vous pouvez regarder l'industrie du meuble, l'industrie de la transformation des métaux, vous pouvez regarder plus loin; le Canada se situe à un point tournant. Si le gouvernement ne fait rien pour l'industrie manufacturière secondaire, on se retrouvera avec, disons, un pays de nettoyeurs à sec. Il n'y aura personne. C'est pourquoi la politique doit être mise en oeuvre, pour toutes les industries manufacturières secondaires présentes au Canada et qui veulent accéder au marché américain.

[Français]

+-

    M. Paul Crête: C'est ce que vous diriez au sujet de l'ALENA-plus.

+-

    M. Harvey Penner: Oui. En bout de ligne, on demanderait qu'on nous laisse entrer aux États-Unis, comme c'était le cas il y a 10 ou 15 ans lorsqu'il y avait l'ancien Accord de libre-échange. Cela fonctionnait.

[Traduction]

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: Nous aimerions dire à M. Martin que l'ALENA était une bonne chose, que nous devons construire à partir de cela. Nous ne pouvons briser l'ALENA, comme c'est le cas actuellement. Nous avons besoin de l'ALENA pour en arriver à la ZLEA, afin qu'il y ait un échange libre des biens dans l'hémisphère couvert par la ZLEA. Cela résoudra certains de nos principaux problèmes. Si cela s'était produit l'année dernière, il y aurait eu au moins cinq entreprises de textile encore en affaires aujourd'hui.

+-

    Le président: Quelqu'un désire-t-il faire un autre commentaire à ce sujet?

[Français]

+-

    M. Elliot Lifson: Je n'ai rien à dire à M. Martin si ce n'est d'assurer la mise en oeuvre de ce que nous avons demandé.

+-

    M. Paul Crête: Pour vous, il s'agit davantage de mettre en oeuvre ce qu'il y a dans le programme. Vous ne savez pas si cela va se faire assez rapidement.

+-

    M. Elliot Lifson: Exactement. Ce serait une erreur de demander plus.

+-

    M. Paul Crête: Donc, vous n'avez pas besoin d'améliorations à l'ALENA.

+-

    M. Elliot Lifson: On peut parler des règles d'origine, mais c'est autre chose et c'est trop compliqué. Qu'on mette en oeuvre...

+-

    M. Paul Crête: M. Martin est très intelligent, il est capable de comprendre.

+-

    M. Elliot Lifson: Ce n'est pas une question d'intelligence. On dit simplement qu'il y a assez de choses ici pour passer à la mise en oeuvre de ce qui est prévu. C'est ce qui est le plus important pour nous.

[Traduction]

+-

    Le président: Monsieur Rotchin.

+-

    M. Randy Rotchin: Je dirais ceci au premier ministre : Ne restez pas là à attendre alors que nos partenaires de l'ALENA semblent aller de l'avant. C'est tout.

+-

    Le président: Merci.

    Jerry, puis Brad.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Je suppose que cela revient à ce que vous avez dit. J'aimerais avoir plus de renseignement sur les tarifs des pays les moins avancés. Pourquoi parlons-nous de ces tarifs? Quelle était la réaction de ces pays les moins avancés qui ont fait des affaires avec vous au Canada?

    Tout le monde peut répondre à cette question.

+-

    M. Harvey Penner: Je peux vous dire que nous avons engagé une firme afin de pouvoir communiquer avec les représentants du gouvernement. Nous sommes allés voir le caucus libéral de l'époque, à Chicoutimi; nous avons pris un avion et nous nous sommes assis avec cinq ministres. Nous avons consulté notre groupe, le Groupe de consultation sectorielle sur le commerce extérieur, soit le GCSCE, et nous avons répété les mêmes choses : si vous voulez mettre en place les tarifs des pays les moins avancés, nous sommes d'accord pour ce qui est de l'Afrique; cependant, n'incluez pas le Bangladesh, car c'est le quatrième plus grand exportateur vers les États-Unis. Je pense que les gens de l'industrie du vêtement étaient de notre côté.

    Le gouvernement nous a dit—je crois que c'était l'avis des bureaucrates plutôt que celui des ministres—que nous n'avions pas raison et que nous ne savions pas de quoi nous parlions; que cela n'allait pas avoir un effet sur nous, que ce n'était rien, que cela n'avait pas de rapport et que nous devrions oublier la chose, car rien n'allait être modifié. Je pense qu'à l'époque, M. Chrétien était vraiment en faveur de cela. Il voulait le mettre en place, et il ne voulait rien entendre d'autre.

    Nous avons fait un effort pour expliquer au gouvernement qu'il pouvait faire la même chose que ce que les Américains avaient fait dans le cadre de l'Initiative concernant le bassin des Caraïbes. Nous leur avons dit qu'ils pouvaient faire cela ou du moins qu'ils pouvaient mettre en place un mécanisme, qu'ils devraient exclure le Bangladesh... pour aider la croissance économique.

»  +-(1720)  

+-

    L'hon. Jerry Pickard: D'accord. Voilà ma seconde question. Selon vous, avons-nous la possibilité de mettre en place des restrictions sans avoir à conclure des ententes avec d'autres pays?

+-

    M. Harvey Penner: Je crois que ce que nous avons fait en tant que Canadiens peut être fait. Je crois que nous pouvons améliorer les choses. Je ne pense pas qu'il faut tout changer dramatiquement. Il faut améliorer les choses afin qu'il y ait un mécanisme quelconque, ou une mesure comme point de départ, afin qu'il soit nécessaire de mettre sur pied une industrie du tricot ou du tissage ou d'autres formes d'industries manufacturières secondaires dans ces pays.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Je suis tout à fait d'accord avec cela. Je ne sais pas pourquoi un tel mécanisme n'a pas été mis en place, mais je vais poser la question aux représentants du gouvernement plus tard.

    Lorsqu'il est question de régime de réglementation, je suppose que c'est là que réside votre problème en grande partie. Au sujet de l'accès aux États-Unis, qu'est-ce qui limite votre accès? Vous avez parlé de la continuité. Qu'est-ce qui limite l'accès actuellement?

+-

    M. Elliot Lifson: Je crois que c'est une question que les membres du comité ne comprennent pas. C'est une question liée à l'industrie du textile. Je crois que les représentants de l'industrie du textile doivent expliquer ce qu'ils avaient avant et ce que les États-Unis ont fait pour limiter leur accès—c'est une question vraiment critique. Je crois que les représentants de l'industrie doivent aborder cette question.

    J'aimerais répondre à votre première question au sujet du Bangladesh; les industries du textile et du vêtement n'avaient pas d'objection à ce que la mesure tarifaire s'applique uniquement aux pays africains. Nous nous objections uniquement au sujet du Bangladesh, car ce pays avait déjà une infrastructure en place. En tant qu'homme d'affaires, où allez-vous investir votre argent? L'objectif était d'aider les pays africains. Si vous investissez de l'argent en Afrique pour aider ces pays, c'est bien. Mais si un pays comme le Bangladesh a accès à des produits finis hors de droits, vous allez aller là où cette infrastructure existe. Vous n'avez rien à investir, tout est déjà en place.

    Il faut se rappeler que de chaque côté du Bangladesh, il y a l'Inde et la Chine—c'est très facile.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Votre réponse m'amène à vous poser une question. Pourquoi un investisseur n'utiliserait-il pas les pays africains ou d'autres pays de la même manière? Quel est le raisonnement?

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: La plupart des pays africains ne produisent pas de textile; ils produisent du vêtement. Ils peuvent couper et coudre. Alors, si les règles de départ que nous proposions avaient été mises en place, les pays africains auraient pu recevoir un incitatif pour développer leur industrie du textile, et non seulement l'industrie de la coupe et de la couture. Ensuite, les avantages pour ces pays auraient duré plus longtemps que le simple avantage d'être la source de main-d'oeuvre la moins chère au monde. Ils auraient pu développer l'infrastructure dont a parlé Harvey.

+-

    L'hon. Jerry Pickard: Allez-y et expliquez ce qui se passe aux États-Unis aussi, s'il vous plaît.

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: D'accord. Du côté des États-Unis, dans le cadre de l'ALENA, nos exportations ont connu une croissance exceptionnelle. La croissance était vraiment exceptionnelle.

    En 2000, les États-Unis ont mis en place une loi pour les biens produits dans les Caraïbes, où une bonne partie des vêtements sont manufacturés pour le marché américain, et cette loi stipulait que du tissu et du fil américain devaient être utilisés. Nous avons alors perdu tous nos clients des États-Unis qui faisaient couper et coudre leur tissu dans les Caraïbes. Ils ne pouvaient plus acheter du fil et du tissu canadiens, car s'ils le faisaient, ils ne pouvaient tirer avantage de cette nouvelle loi sur le commerce. C'était quelque chose de gros pour nous.

+-

    M. Elliot Lifson: Je ne veux pas parler pour l'industrie du textile, mais je veux simplement dire que je sais que la question n'est pas claire. Avant, vous pouviez utiliser des textiles canadiens et bénéficier de l'Initiative concernant le bassin des Caraïbes. Lorsque les Américains ont vu ce qui se passait, ils n'étaient pas contents et ont demandé de bloquer les textiles canadiens. Les Canadiens ont donc été rabroués, et seuls les textiles américains pouvaient être utilisés dans le cadre de cette initiative.

+-

    M. Harvey Penner: Joignez-vous à notre association, Elliot.

+-

    M. Elliot Lifson: Écoutez, je suis Canadien, alors...

+-

    Le président: Merci beaucoup, Jerry.

    Je crois que Brad veut dire le dernier mot.

+-

    M. Bradley Trost (Saskatoon—Humboldt, PCC): C'est moi qui fais la conclusion, pour une fois.

    J'ai simplement un commentaire général à formuler. C'est la première fois pour la plupart d'entre nous—peut-être pas pour Paul ou pour d'autres qui sont dans un comté où il y a une industrie... Je viens de la Saskatchewan. C'est une industrie tout à fait étrangère pour moi; je suis un géophysicien minier.

»  -(1725)  

+-

    Mme Elizabeth Siwicki: Ne dites pas « étrangère », s'il vous plaît.

+-

    M. Bradley Trost: Dans l'Ouest du Canada, nous nous demandons parfois dans quel pays nous sommes, mais je ne m'étendrai pas sur la question.

    Il serait très utile et apprécié... Les notes d'information que nous avons reçues du Comité de l'industrie, du personnel, ont été très utile. C'était, pour certains d'entre nous, la première fois que nous lisions quelque chose à ce sujet. Une bonne partie du jargon interne—comme je l'ai dit, j'ai deux diplômes universitaires; je crois que je ne suis pas trop stupide. Mais j'aimerais vraiment, si vous le voulez, obtenir plus de renseignements, pour moi, pour mon personnel—j'ai le sentiment que d'autres membres du comité aimeraient aussi avoir plus de renseignements sur le sujet—car il est important d'avoir tous les détails dans ce dossier. J'aimerais vraiment cela.

    Je commençais à comprendre l'ALENA un peu mieux, ses impacts, mais je ne suis pas certain à 100 p. 100 de la manière dont l'ALENA a été avantageux, ni de la manière dont l'accord de libre-échange bilatéral a été avantageux par rapport à d'autres accords, alors j'aimerais beaucoup que l'on me fournisse plus de renseignements ou d'informations à ce sujet.

+-

    M. Elliot Lifson: Cela fait 35 ans que je suis dans l'industrie et j'essaie encore de tout comprendre, alors je comprends qu'en une seule fois, c'est très difficile.

+-

    M. Bradley Trost: Et je vais devoir contribuer à une prise de décisions à ce sujet, alors...

+-

    M. Elliot Lifson: Nous allons nous pencher là-dessus, et j'apprécie le fait que vous le demandiez. Merci.

+-

    Le président: C'est un bon point, Brad, et si vous avez des documents, nous serons heureux de les recevoir. Si vous les avez dans les deux langues...

    Je crois que nous pouvons remercier nos témoins pour le temps qu'ils nous ont consacré cet après-midi. Nous apprécions les efforts que vous avez faits.

    Paul, avez-vous un commentaire?

[Français]

+-

    M. Paul Crête: Exceptionnellement, si les personnes remettaient leur texte en anglais au comité et que celui-ci le faisait traduire, tout le monde pourrait en obtenir des copies dans les deux langues dès que la traduction serait disponible.

+-

    M. Elliot Lifson: On va remettre le texte en anglais et en français.

[Traduction]

+-

    Le président: Tous les documents qui n'avaient pas... Je crois que la majorité de ces documents ont été remis dans les deux langues, n'est-ce pas? Seulement un. D'accord. Eh bien, nous ferons de notre mieux à ce sujet, Paul. Merci.

    Sur cela, je vous remercie. Je vous souhaite bon retour et je vous remercie encore pour vos efforts.

+-

    M. Elliot Lifson: Merci beaucoup.

-

    Le président: La séance est levée.