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CIIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent du commerce international


NUMÉRO 043 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er février 2007

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Traduction]

    Le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes a invité le Conference Board du Canada à présenter son rapport final sur son projet de recherche de trois ans intitulé Mission possible: Pour une prospérité durable au Canada.
    On a dit que ce rapport représente une étude clé qui peut servir de modèle pour ouvrir une nouvelle ère de prospérité canadienne. Il tombe à point puisque le comité étudie les possibilités et les défis que rencontre le monde des affaires canadien sur le marché international.
    Je tiens à remercier M. Glen Hodgson, premier vice-président et économiste en chef du Conference Board du Canada, ainsi que M. Gilles Rhéaume, vice-président, Politiques publiques, Conference Board du Canada.
    Nous allons commencer par les écouter. Ils vont nous dire quelques mots sur leur rapport et nous pourrons ensuite passer aux questions.
    Je voudrais tout d'abord vous remercier beaucoup, messieurs. Nous nous réjouissons beaucoup de cette occasion et de la possibilité de traiter de cette question extrêmement importante avec vous au cours de ces deux réunions.
    Allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Je remercie les membres du comité.

[Traduction]

    J'ai eu l'occasion de me trouver ici en octobre dernier quand nous avions une table ronde sur le commerce international et j'ai dit à l'époque que nous publiions un rapport assez important. Nous en sommes arrivés aux deux tiers du chemin pour ce qui est de la publication finale. Je me suis dit que j'allais commencer par vous dire quelques mots du contexte et du premier volume. Mon collègue, Gilles Rhéaume, vous parlera du deuxième volume, celui qui porte sur les ressources.
    Ce rapport s'intitule Mission possible: Pour une prospérité durable au Canada. C'est un sujet énorme. Nous avons constaté que la seule façon de le traiter serait de le diviser en trois parties: une partie portant sur la place du Canada dans la mondialisation, une autre sur l'explosion des ressources et sur la façon dont nous pouvons tirer profit de la montée spectaculaire des prix dans ce secteur actuellement et, une troisième, sur les villes. Notre présidente Anne Golden présentera cette troisième partie la semaine prochaine. Elle doit d'ailleurs faire un discours devant la Chambre de commerce de Toronto pour la publication du troisième volume.
    Le premier volume s'intitule Mission possible: Une performance canadienne étincelante dans l'économie mondiale. Il porte vraiment sur la question de dérive nationale, exposant les faits puis indiquant les éléments d'une stratégie de prospérité durable pour le Canada. Je vais prendre deux minutes pour vous exposer l'hypothèse centrale.
    Les faits sont clairs. Les économistes sont presque unanimes, en fait ils sont unanimes: le Canada, à l'heure actuelle, est un pays en dérive. C'est très difficile à voir. C'est presque imperceptible. Mais les faits sont là et je vais vous donner deux exemples.
    Pour ce qui est du revenu par habitant, nous sommes passés de la cinquième à la dixième place ces quatre dernières années parmi les pays de l'OCDE. C'est très lent mais c'est remarquable. Côté productivité, depuis les cinq, dix, vingt dernières années, nous glissons progressivement vers le fond de la classe.
    Nous sommes maintenant dans le dernier tiers des pays de l'OCDE, des pays industriels riches, pour ce qui est de nos taux de croissance annuels de productivité. Comparativement aux États-Unis, nous nous trouvons à environ 83 p. 100 des niveaux de productivité américains. Évidemment, cela signifie que l'on a une automobile plus petite. Je me plais à dire que l'on a une Corolla plutôt qu'une Lexus.
    Là où cela devient vraiment ennuyeux, évidemment, c'est que nous n'aurons pas la capacité... et je ne fais pas de la publicité gratuite pour Toyota... cela veut dire que l'on ne pourra pas forcément payer les biens sociaux, le système de santé public que nous souhaitons, le système d'éducation que nous souhaitons et les retraites que nous souhaitons tous. Qu'est-ce qui est à l'origine de cela? Nous voyons deux forces principales. D'une part, un mélange de démographie mondiale, une population vieillissante dans le monde industrialisé, au Canada et dans des pays comme le Japon et l'Italie, et des populations jeunes et des politiques économiques nouvelles dans le monde émergent.
    Tout d'un coup, des pays comme la Chine, l'Inde et le Brésil sont devenus des concurrents et des forces beaucoup plus fortes dans l'économie mondiale. Je crois que dans la revue Maclean's, on m'a cité en parlant de « mouvement dans les plaques tectoniques » de l'économie globale. C'est une bonne analogie parce que l'on voit les principales forces structurelles qui créent une friction mais qui créent aussi un nouveau monde où l'Asie, en particulier, sera un pôle de la croissance économique mondiale.
    L'autre force majeure que nous constatons, ce sont les ajustements constants que subit aujourd'hui le commerce international. J'ai parlé de « commerce d'intégration »,

[Français]

le commerce d'intégration.

[Traduction]

    Aujourd'hui, le commerce repose sur les investissements. De plus en plus, les entreprises ont recours aux investissements directs à l'étranger pour repositionner une partie de leur chaîne d'approvisionnement dans le monde. Au fur et à mesure que nous avons abaissé les barrières commerciales ces 25 dernières années, les entreprises se sont vues capables de repositionner certains éléments de leur production n'importe où dans le monde, là où ça leur semble le plus logique et elles recourent aux investissements à l'étranger pour ce faire. C'est ce qu'ont fait dans une certaine mesures les entreprises canadiennes, mais il n'est pas certain que nous ayons réussi à suivre la dynamique mondiale.
    Notre rapport analyse ensuite certains facteurs dont il va nous falloir tenir compte à court terme. Nous parlons notamment de durabilité. De l'équilibre à réaliser entre l'environnement et l'économie. C'est d'ailleurs un thème que l'on retrouve dans les trois volumes. Je sais que Gilles a passé un certain temps à examiner les pratiques durables dans le secteur des ressources.
    Nous parlons des déséquilibres mondiaux. Les États-Unis, en particulier, ont un déficit extérieur massif qui représente environ 850 milliards de dollars par an, ce qui signifie qu'il leur faut attirer des épargnes aussi importantes du reste du monde s'ils ne veulent pas perdre du terrain. Y aura-t-il à un certain moment un choc qui obligera les États-Unis à réagir?
    Nous parlons des négociations de Doha qui piétinent actuellement et nous examinons s'il serait possible de trouver le moyen politique de faire redémarrer ces négociations avant que le mandat de négocier du président américain expire en juillet prochain. Sinon, nous serons sur la ligne de mire d'un nouveau congrès aux États-Unis qui risque d'être protectionniste. Comme le Canada a un excédent commercial, nous pourrions très bien nous retrouver victimes d'un changement d'attitude de la part des Américains.
    Enfin, nous parlons des marchés émergents et de la concurrence qu'ils représentent. La Chine est maintenant, depuis en fait quelques mois, un exportateur plus important aux États-Unis que le Canada; jusqu'ici cela fait un mois. Mais d'ici deux ou trois ans, ce sera devenu la tendance normale, nous serons peu à peu déplacés par des pays comme la Chine sur le marché américain.
    D'un autre côté, cela nous donne des chances extraordinaires sur ces marchés. Pour la première fois, il y a une classe moyenne de centaines de millions de personnes qui ont un pouvoir d'achat et la possibilité d'acheter des choses que nous produisons et fabriquons.
    Alors, comment profiter effectivement des changements structurels que l'on constate en Chine, en Inde, au Brésil et dans 150 autres pays? Dans le reste de ce volume, nous exposons cinq stratégies qui, à notre avis, sont critiques pour créer une richesse durable au Canada. Je vais vous les indiquer en vitesse.
    Tout d'abord, il est nécessaire d'adopter la productivité et la compétitivité comme priorité nationale parce que c'est de là que devra venir la création de richesse. C'est la forme la plus intelligente de croissance: renforcer la productivité, le rendement par travailleur. Il ne s'agit pas de travailler plus fort, il s'agit de travailler plus intelligemment, de trouver de meilleurs moyens de combiner l'innovation, la technologie, la créativité afin de faire croître la richesse au Canada.
    Nous approfondissons un peu la question et nous nous penchons sur un deuxième thème qui est probablement le plus percutant dans ce volume, il s'agit de créer un marché canadien unique. Notre recherche, suite aux nombreuses études que nous avons effectuées dans le cadre du Canada Project, a fait ressortir des obstacles au commerce aux frontières provinciales, un décalage entre les réglementations fédérales et provinciales, un décalage même entre les différents ordres de gouvernement, des obstacles à la concurrence, un manque d'innovation dans notre industrie et dans les politiques gouvernementales, des obstacles fiscaux et des problèmes d'infrastructure. Il y a donc tout un éventail de choses dont nous sommes responsables et qui nous rendent moins compétitifs dans le monde. On ne peut pas être compétitifs dans une économie moderne mondiale si les entreprises ne peuvent pas se concurrencer efficacement au pays, s'il n'y a pas un véritable marché national. C'est donc un message percutant. Je me ferai un plaisir de vous en parler davantage.
    Le troisième thème est celui de la population active vieillissante: il faut trouver des moyens d'encourager davantage d'immigrants à venir et de les intégrer plus rapidement à notre population active et d'inciter les travailleurs plus âgés à continuer à travailler. Tout notre système de pension et notre système d'emploi ont été conçus pour une période où il y avait un excédent de main-d'oeuvre. Or, la situation a complètement changé. Nous sommes arrivés à un point où il y a pénurie de main-d'oeuvre et si vous vivez dans l'ouest du Canada, si vous représentez des circonscriptions de l'Ouest, vous savez exactement ce dont je parle. Mais cela devient même vrai dans le centre du Canada et dans la région de l'Atlantique. Il y a maintenant des pénuries de main-d'oeuvre qualifiée dans toute notre économie. Alors comment trouver la façon de remédier à cela? Nous pensons qu'il nous faut avoir une politique d'immigration plus intelligente, des investissements plus intelligents dans l'éducation, mettre l'accent sur les études postsecondaires et sur le développement des compétences et trouver le moyen d'inciter les travailleurs plus âgés à continuer à travailler.
    La quatrième stratégie vient directement de la question qu'étudie votre comité, à savoir le commerce international et les investissements, et la nécessité d'avoir une stratégie d'investissement et de commerce international bien articulée et globale. Nous nous ferons un plaisir de vous en parler davantage. Nous avons examiné des choses comme la réduction des obstacles aux investissements étrangers, le renforcement des frontières afin qu'elles deviennent plus fluides, afin que les investisseurs étrangers ne considèrent pas la frontière comme un obstacle à l'exercice de leurs activités en Amérique du Nord, des questions comme l'accroissement des exportations de services au pays. La balkanisation de notre économie nationale fait qu'il est en fait très difficile pour les exportateurs de services de faire face à la concurrence internationale parce qu'ils n'ont pas à faire face à une concurrence très suffisamment forte au pays pour acquérir cette compétitivité internationale.
    Bref, il faut que le commerce et les investissements soient au centre de notre stratégie de productivité nationale, que nous ayons un plan bien articulé, que le Canada assume à nouveau un rôle majeur dans les négociations de l'OMC. Nous nous sommes en fait laissés bousculer. Nous estimons qu'à l'OMC, nous nous contentons maintenant d'accepter des politiques élaborées par d'autres alors que nous devrions nous-mêmes participer à leur élaboration. Nous devons nous repositionner.
    Mais même si nous réussissons à le faire, nous savons qu'il y a un risque que Doha n'avance pas pendant deux, trois, ou cinq ans et nous ne pouvons pas nous contenter d'attendre dans l'intervalle. Nous devons ainsi nous employer à approfondir nos relations avec les États-Unis au sein de l'ALENA, les élargir afin d'ouvrir davantage de marchés et nous pencher sur des choses très difficiles comme les barrières non tarifaires, l'axe nord-sud entre le Canada et les États-Unis, tout en poursuivant d'autres ententes bilatérales et régionales qui offrent des tas de possibilités et en faisant davantage participer des pays comme la Chine et l'Inde sur le plan commercial.
    La dernière des cinq stratégies exposées dans le volume un porte sur la politique étrangère. Nous déclarons qu'il nous faut considérer la politique étrangère comme un autre élément de notre stratégie nationale de productivité, élément qui renforce nos investissements commerciaux et tous les autres éléments. Nous estimons que notre politique étrangère doit suivre en fait deux axes principaux. D'une part, évidemment, avec les États-Unis, nos relations de loin les plus importantes, quelque chose que nous ne pouvons jamais oublier, mais nous ne recommandons pas ni ne conseillons une solution spectaculaire pour ce qui est de ces relations avec les États-Unis. Il s'agit plutôt de continuer à participer quotidiennement à des discussions pratiques avec eux en fonction de règles bien établies, étant donné que ce sont nos meilleurs amis et alliés, tout en protégeant nos intérêts dans cette relation.
    Le second axe auquel nous croyons très fort, c'est la nécessité d'incorporer les marchés émergents au centre de notre politique étrangère — la Chine, l'Inde, le Brésil et bien d'autres — parce que ce sont le deuxième pôle de croissance économique dans le monde. En les intégrants davantage à notre politique étrangère, nous pourrons avoir une politique commerciale et d'investissement mieux articulée en ce qui concerne ces pays.

  (1115)  

    Nous trouvons tout cela dans un rapport d'environ 130 pages. Il est très difficile, très franchement, de vous en communiquer l'essentiel. Je l'ai lu à plusieurs reprises très attentivement et cela prend environ sept heures, si vous avez la patience de le faire. Nous allons toutefois préparer un résumé qui sera publié la semaine prochaine et qui vous présentera un peu mieux les choses en 20 pages.
    Gilles, voulez-vous ajouter quelque chose à propos de votre volume?

  (1120)  

    La semaine dernière, nous avons publié notre deuxième volume du Canada Project, qui s'intitule Mission Possible, a Canadian Resources Strategy for the Boom and Beyond. Nous avons mis l'accent sur la nouvelle demande mondiale en ressources naturelles, essentiellement venant d'Asie, et en fait sur la rapidité de la croissance économique en Chine et en Inde. Nous avons une population en Chine, une classe moyenne, de 200 millions. Elle pourrait passer à 400 millions d'ici à 2010.
    En Inde, il y a une classe moyenne d'environ 90 millions et elle augmente très rapidement. Tous ces gens ont des revenus supérieurs et souhaitent des choses qu'essentiellement nous n'aurions jamais imaginé qu'ils achètent par le passé, notamment des véhicules à moteur, des appareils électriques, des logements, tous les gadgets que nous connaissons. Tout cela nécessite des ressources naturelles et de l'énergie.
    Il y a également certains débouchés en Amérique du Nord pour ce qui est des tendances à long terme, de la croissance démographique et de la croissance économique mais dans une moindre mesure. Nous avons donc constaté cela et nous avons regardé en particulier quatre secteurs clés: les produits forestiers, l'agroalimentaire, les mines et l'énergie. Chaque secteur offre des possibilités importantes mais fait également face à de gros défis.
    Je dirai brièvement quelques mots sur chacun de ces secteurs.

[Français]

    Le grand défi, en ce qui a trait aux produits forestiers, c'est le maintien d'une compétitivité mondiale. Nos usines, surtout dans le domaine des pâtes et papiers, sont petites et vieilles, comparativement à celles qui existent dans le monde. Il y a des concurrents qui n'existaient pas auparavant, tels le Brésil, le Chili et la Nouvelle-Zélande. Tout cela met beaucoup de pression sur le dos de nos producteurs canadiens. Ils font également face à des coûts qui croissent plus rapidement que ceux des autres pays. La stratégie est donc de renouveler le secteur forestier.
    Le plus grand défi à relever, dans le secteur agricole, c'est d'ouvrir les marchés mondiaux. Mon collègue Glen a mentionné que nos barrières tarifaires étaient élevées. Le Cycle de Doha ne progresse pas. Si nous voulons avoir des opportunités dans le secteur agricole, il faut vraiment avoir une stratégie agressive pour libéraliser les échanges de ce côté. Il faut également accroître le niveau d'innovation dans notre secteur agricole.

[Traduction]

    Pour ce qui est des mines, il y a d'énormes possibilités mais nos réserves déclinent. Nous devons développer notre activité de prospection comme nous ne l'avons jamais fait jusqu'ici afin d'ouvrir de nouvelles mines. Nous recommandons un certain nombre de choses à cet égard. Nous avons de vastes ressources énergétiques. Les plus gros défis que nous constatons sont liés à l'environnement.
    Nous estimons ainsi que le Canada a une occasion de devenir essentiellement une superpuissance en énergie propre. J'insiste sur le mot « propre » qui signifie double stratégie, à la fois développer les ressources et mettre au point des technologies environnementales.
    Voilà essentiellement les quatre secteurs. Il ressort deux thèmes communs. D'une part la pénurie de main-d'oeuvre. Si l'on considère ces secteurs de ressources, en général, la population active est plus âgée que dans d'autres secteurs. La pénurie à laquelle faisait allusion Glen se ressent plus rapidement que dans d'autres secteurs et est déjà tout à fait réelle dans le secteur de l'énergie.
    Le deuxième grand thème qui revient continuellement dans tous les secteurs de ressources est la complexité de la réglementation, les obstacles que doivent franchir les entreprises pour faire approuver des projets et, à une époque où on est en pleine expansion, expansion qui ne va pas toujours durer, peut-être 10, 15 ou 20 ans, il faudrait pouvoir accélérer les choses. Il y aura certainement en fait un ralentissement, sinon un déclin.
    C'est donc une occasion qui est non seulement limitée dans le temps mais qui ne se répétera pas avant des générations si l'on considère les tendances et la démographie mondiales. C'est une chance à court terme dont nous pouvons profiter, mais nous devons relever les défis que nous avons exposés dans ce rapport.
    Merci beaucoup, messieurs. C'est fascinant.
    Nous allons maintenant passer aux questions, en commençant par l'opposition officielle, le Parti libéral, M. Bains. Allez-y, s'il vous plaît, sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je voudrais remercier MM. Hodgson et Rhéaume d'avoir accepté notre invitation.
     Je suis entièrement d'accord avec votre évaluation globale de la situation, monsieur Hodgson. S'il fallait que je résume ce que vous avez dit en deux mots, je dirais que l'objectif premier de tout cet exercice est l'amélioration du niveau de vie, accompagnée de la diminution du nombre d'heures travaillées et de l'augmentation du revenu par habitant. Voilà ce qui s'en dégage, travailler plus intelligemment pour être plus productif. Certains diront qu'il faut travailler plus longtemps, mais moi je ne suis pas d'accord; j'estime que nous devons travailler de façon plus intelligente.
    Le revenu moyen est un des indicateurs les plus importants qui nous permet de voir où on en est. À cet égard, nous accusons un certain recul par rapport aux États-Unis et l'écart se creuse entre le Canada et d'autres pays également. Ce phénomène est également le reflet de la richesse de certains et de l'iniquité qui est de plus en plus marquée entre les riches et les pauvres dans notre société.
    J'aimerais que vous m'aidiez à mieux comprendre deux aspects, à savoir la diversification commerciale et le marché commun canadien, auxquels vous avez fait allusion dans vos remarques.
    Pensez-vous que les ressources commerciales du gouvernement du Canada à l'étranger sont limitées par rapport aux autres pays? Par exemple, on a entendu dire, et dans certains cas cela s'est déjà fait, qu'il y aurait des fermetures de bureaux consulaires à Milan, en Italie, en Russie et au Japon, notamment. Croyez-vous que cette stratégie nous permettra d'accroître nos échanges commerciaux ou, au contraire, qu'il faudrait installer de nouveaux bureaux? Dans l'affirmative, stratégiquement parlant, quelles seraient vos recommandations? Quels marchés devrait-on cibler?
    Voilà pour ce qui est de ma première question. J'attendrai votre réponse avant de vous poser mes autres questions.

  (1125)  

    Je vais commencer par le commencement et dire qu'une politique commerciale bien articulée comporte trois volets essentiels. Premièrement, les entreprises doivent être prêtes à affronter la concurrence à l'échelle internationale. C'est pourquoi nous accordons tant d'importance au concept du marché unique au Canada, pour qu'on mette un terme à la balkanisation qui existe et qu'on permette à nos sociétés d'atteindre leur taille maximale au pays pour qu'elles aient ce petit plus qui leur permettra d'être concurrentielles à l'échelle mondiale.
    Deuxièmement, l'accès aux marchés. C'est ce sur quoi portent les négociations commerciales internationales. À l'heure actuelle, le cycle de Doha dérive. Cela fait maintenant 13 ans que l'ALENA existe et, comme nous l'avons indiqué dans notre rapport, c'est un accord qui est arrivé à maturité. Il n'y a plus d'énergie dynamique qui s'en dégage. Comme il n'y a plus de restructuration au sein des entreprises, nous pourrions aisément élargir la portée de l'ALENA en y incluant notamment les services de façon beaucoup plus détaillée, et renforcer l'accord par le biais d'une plus grande harmonisation. Le terme n'est peut-être pas bien choisi car il est vrai qu'il peut faire peur, politiquement parlant. Je pense qu'on peut parler d'alignement des normes et processus réglementaires tout en maintenant notre entière souveraineté. Souvent, nous avons des normes quelque peu différentes qui nous permettent d'atteindre la même objectif. Par conséquent, il faut qu'on trouve les moyens pour pénétrer davantage le marché américain dans le cadre d'une intégration nord-américaine, pour ensuite s'attaquer à d'autres marchés.
    Troisièmement, la promotion des investissements étrangers. Il s'agit essentiellement de la force de vente d'une société. On peut bien parler de diversification et de ressources nécessaires pour assurer les ventes, mais il faut être sûr de disposer des trois volets et, par conséquent, d'avoir des sociétés qui sont en mesure de faire face à la concurrence internationale, de s'accaparer des parts de marché grâce à la qualité de leurs produits et à leurs prix et d'avoir accès aux marchés pertinents.
    Pour ce qui est de la diversification, nous voudrions tous être plus diversifiés, mais sans ces deux premiers volets, sans négociations plus intenses sur l'amélioration de l'accès aux marchés, au niveau bilatéral, régional et multilatéral, on ne pourrait pas avancer bien loin même en consacrant davantage de ressources à cette question. Je dirais qu'il faut absolument prendre en compte les trois volets.
    Nous savons tous que nous exportons 83 p. 100 de nos produits aux États-Unis. Nos échanges avec les autres régions du monde stagnent depuis quelque temps déjà. En fait, ils ont chuté considérablement avec le Japon. Ainsi, ce ne serait pas utiliser nos ressources à bon escient que d'augmenter le financement accordé aux agents de développement commercial travaillant sur le terrain au Japon, par exemple, sans discuter de la question de l'accès au marché avec les autorités japonaises.
    Il en va de même pour l'Europe et bien d'autres marchés. Pour ma part, j'accorderais au moins autant d'importance à l'exportation, aux investissements et à l'accès aux marchés qu'au nombre de délégués commerciaux travaillant sur le terrain.
    Comment nos ressources en matière de commerce international, nos services consulaires et nos missions commerciales se comparent-elles avec celles des autres pays? Croyez-vous que la stratégie actuelle est bonne?
    Vous avez parlé du Japon. Il s'agit encore d'un partenaire commercial très important, en dollars absolus, et nos relations ont toujours été très bonnes. D'autre part, on prévoit que le PIB de la Russie, qui est un marché émergent, augmentera de 6,5 p. 100, ce qui n'est pas négligeable, l'année prochaine. Y a-t-il suffisamment de ressources pour promouvoir les échanges commerciaux avec ces pays, ou pensez-vous qu'il y en a trop?

  (1130)  

    Étant donné la piètre performance de nos investissements dans le domaine commercial au cours des dernières années, il serait impensable de diminuer les ressources. Il est clair que nous devons débloquer davantage de ressources dans les bonnes régions, déterminées par le biais d'analyses stratégiques. Cela veut dire qu'il faut investir plus aux États-Unis et dans les autres marchés caractérisés par un fort potentiel.
    Vous parlez de marchés émergents. Vous vous intéressez particulièrement à la Chine et au cours des dernières années avec le gouvernement il y a eu par exemple des questionnements par rapport à nos relations. Depuis, et le ministre du Commerce e le ministre des Finances y sont allés. Vous avez dit que ces visites étaient importantes, dans une certaine mesure, mais que quelque chose de plus complet s'imposait. Pourriez-vous nous en dire davantage? Que pourrait-on faire de plus, sachant que la visite d'un ministre une fois par année ne suffira pas. Nous le reconnaissons tous. Que pourrions-nous faire de plus?
    Que peut faire le gouvernement pour renforcer nos relations avec la Chine, qui constitue un des marchés émergents les plus importants? Que peut-on faire pour que nos relations soient plus étroites? De plus, pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la stratégie plus complète que vous préconisez?
    En premier lieu, comme nous l'avons dit dans notre rapport, il convient de reconnaître que les marchés émergents doivent occuper une place beaucoup plus importante dans notre politique étrangère. Je parle de la Chine, bien sûr, mais également de l'Inde et du Brésil, c'est-à-dire les grandes économies du monde émergent. Ce n'est pas que nous en avions fait fi, mais nous n'y avons pas accordé autant de poids par le passé qu'on devrait le faire dans l'avenir.
    Deuxièmement, ce sont les investissements qui nous permettront d'approfondir nos relations avec la Chine, l'Inde et le Brésil. Ainsi, au lieu de promouvoir les échanges commerciaux et de mettre l'accent sur l'exportation de produits finis canadiens, nous devrions nous intéresser de plus près à une plus grande intégration, par le biais notamment, d'accords bilatéraux, d'APIE, c'est-à-dire d'accords sur la protection des investissements étrangers, et en examinant, par exemple, l'ensemble des instruments de nature multilatérale ou bilatérale qui nous permettraient d'avoir des relations plus étroites.
    Malheureusement, il n'existe pas de panacée. Il faudra se retrousser les manches et identifier les occasions à saisir secteur par secteur.
    Il faudrait également que nous changions notre façon de concevoir les choses au Canada. Nous accordons autant d'importance au concept de marché unique en partie parce que nous avons protégé discrètement beaucoup de secteurs de notre économie contre la concurrence internationale. Par conséquent, les sociétés ne ressentent pas ce besoin urgent d'investir activement en Inde et en Chine que ressentent les sociétés dans les pays étrangers. La protection est très subtile.
    Il va vraiment falloir qu'on change notre façon de penser. En effet, on ne peut pas se permettre d'adopter une approche mercantiliste en protégeant notre marché national tout en pensant qu'on a le droit d'exporter partout dans le monde. Il faudra notamment ouvrir notre propre marché pour qu'il y ait plus de concurrence afin d'assurer...
    C'est exactement ce qui se produit entre les provinces de la Colombie-Britannique et de l'Alberta. Je pense même qu'on tente d'y ajouter une autre province, à savoir la Saskatchewan ainsi qu'un territoire. C'est un bon point de départ.
    Quel rôle le gouvernement fédéral pourrait-il jouer avec les provinces? Comment une telle relation serait structurée? Bien évidemment il faut respecter les compétences des provinces; mais j'aimerais savoir dans quelle mesure le gouvernement fédéral pourrait assumer un rôle de leadership et faciliter le processus.
    Vous avez entièrement raison. Nous sommes convaincus que ce qu'on appelle en anglais le TILMA, à savoir l'accord sur le commerce, les investissements et la mobilité de la main-d'oeuvre conclu entre la Colombie-Britannique et l'Alberta, marque un point tournant en ce qui concerne les attitudes dans notre pays. Ces deux provinces font preuve d'innovation, et c'est très important.
    En fait, il est incroyable de penser qu'il a fallu que deux provinces canadiennes concluent un accord de libre-échange afin de réduire les obstacles auxquels elles faisaient face. Mais l'accord est conclu et il prendra effet. Vous avez raison de dire qu'il y a d'autres provinces qui s'intéressent maintenant aux avantages que pourrait procurer un éventuel alignement.
    Mais que pouvons-nous faire au niveau fédéral? Il faut revenir en arrière pour parler de l'accord sur le commerce intérieur, conclu en 1994. Dans un de nos rapports intitulé Death by a Thousand Paper Cuts (Mort enseveli sous des montagnes de documents), nous énumérons tous les obstacles et faisons état des petits progrès accomplis en vertu de l'accord. Il faut maintenant y insuffler un nouvel élan pour en faire une véritable pierre angulaire. Il nous faut également établir des cibles beaucoup plus élevées et une stratégie de négociation beaucoup plus ambitieuse au niveau fédéral afin de libéraliser les marchés à l'échelle du pays.
    Merci, monsieur Bains.
    Nous allons maintenant passer au Bloc Québécois. Monsieur Cardin, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs. Il me fait plaisir de vous rencontrer. J'ai souvent entendu parler du Conference Board, surtout quand je m'occupais du pétrole. Disons que je n'ai pas toujours cru, mais je vais quand même faire preuve de reconnaissance pour le travail que vous avez fait dans le volume I. Je vous avoue que je n'ai pas encore lu le volume II.
    Vous parlez principalement de ressources naturelles. On nous avait promis un genre de sommaire en français. Je l'ai lu en anglais, mais j'ai eu besoin d'aide pour certains aspects.
    La politique que devrait adopter le Canada dans le domaine du commerce international, évidemment, touche un nombre d'éléments quasiment incalculables. Comme certains de mes collègues d'en face, vous préconisez la libéralisation complète ou presque des marchés, en éliminant, entre autres, la gestion de l'offre au Québec, parce que vous présumez que certaines mesures protectionnistes ici nuisent à la productivité de nos fabricants, manufacturiers, etc.
    Donc, les quatre éléments que vous avez mentionnés plus tôt, soit la productivité, un seul marché canadien, les politiques commerciales versus les investissements et le vieillissement de la population, sont évidemment basés sur la productivité. On sait que c'est une obligation, parce qu'on doit répondre à une concurrence assez féroce à la grandeur de la planète pour parvenir à générer la richesse.
    Je veux seulement faire un petit écart et parler de la philosophie de la progression, du développement des marchés et de la croissance économique versus la croissance démographique. Je ne sais pas de quelle excuse on se sert — la croissance démographique ou économique — pour expliquer l'un et l'autre. On dit qu'il manque de personnes; il faut en faire, il faut en inventer. Est-ce pour augmenter la productivité ou la consommation? Il y aura des limites, à un moment donné. Il y a la Chine, dont la population s'élève à 1,4 milliard de personnes, et il y a d'autres petits pays. Alors, il n'y a pas de commune mesure quant à la consommation.
    Aujourd'hui, on vise encore l'augmentation de la richesse en augmentant la consommation, jusqu'à ce qu'on frappe un mur. Techniquement, plusieurs pays ont frappé un mur, dont le Canada. On dit que les années 1980 ont été néfastes en ce qui a trait à la productivité. Au lieu de remplacer 100 employés par une machine moderne robotisée, on aurait dû en fournir une à chacun. La production aurait peut-être augmenté pour la peine.
    Quelles recommandations concrètes faites-vous au gouvernement canadien? Quel axe prendra-t-il afin que le Canada soit vraiment un concurrent, en fonction du temps? Si on crève avant d'être productifs, on ne sera pas plus avancés. Que recommandez-vous à court terme?

  (1135)  

    Vous avez débuté en parlant de la croissance démographique. Nous ne proposons pas d'augmenter le taux de natalité pour relever nos défis. Nous proposons plutôt qu'on se penche sur le vieillissement de la population. Les gens vont prendre leur retraite. Or, il faut trouver d'autres moyens pour les encourager à rester sur le marché du travail, à temps partiel ou autrement, pour aider. C'est une de nos propositions.
    L'autre proposition concerne la politique d'immigration. Il faut pouvoir intégrer plus facilement les immigrants dans nos marchés. C'est une autre stratégie qu'on peut adopter.
    Vous parlez d'immigration. Si vous ne préconisez pas l'augmentation de la natalité au Canada ou au Québec, vous préconisez quand même, indirectement, l'augmentation de la natalité dans les pays étrangers, pour avoir des immigrants.
    En fait, il y a déjà un très grand potentiel de travailleurs étrangers qui ont des compétences et qui cherchent des perspectives d'avenir. Alors, où vont-ils se retrouver? On pourrait les attirer chez nous, plutôt que de les laisser aller ailleurs. Une politique d'immigration pourrait les encourager à venir au Canada. On pourrait les intégrer au marché du travail et leur offrir un salaire comparable à ce qui est accordé ailleurs dans le monde. À mon avis, c'est une partie importante de la stratégie.
    Également, il y a toute la question de la formation. Prenons, par exemple, la formation des adultes. Les employeurs canadiens dépensent à peu près 850 $ par année, par employé, pour la formation. Aux États-Unis, c'est plus de 1 000 $. En Europe, c'est à peu près 1 200 $ par année. On dépense très peu en matière de formation. Lorsqu'on pense à établir une stratégie pour le marché du travail, il faut considérer la formation.
    Un autre groupe de travailleurs potentiels, que Glen n'a pas mentionné mais qu'on mentionne dans notre programme de ressources humaines, ce sont les Autochtones. Ils forment une population grandissante, qui est jeune. Par contre, ils n'ont pas atteint un niveau de scolarité suffisant pour pouvoir s'intégrer au marché du travail. On a des défis majeurs sur le plan de l'éducation. Le gouvernement fédéral a un rôle à jouer à cet égard, surtout à l'endroit des jeunes dans les réserves. On a une occasion de les intégrer au marché du travail au moment où on aura besoin de ressources humaines. Donc, c'est un autre élément qu'il faut considérer dans le cadre de cette réflexion.
    Finalement, on parle d'investissement pour accéder aux marchés à l'étranger. Un autre aspect de l'investissement à l'étranger, c'est de pouvoir accéder à cette compétence professionnelle à l'extérieur du pays.

  (1140)  

    J'ai lu quelque part que pour 1 $ d'investissement à l'étranger, on peut espérer des retombées de 2 $ ici, au Canada et au Québec.
    Pourriez-vous m'expliquer cela?
    En fait, dans le passé, on mettait l'accent sur le commerce. On disait que nous avions besoin d'exportation. De nos jours, il y a un lien très étroit entre l'investissement et le commerce. Souvent, nous avons constaté qu'en faisant des investissements dans un pays, cela entraînait une augmentation du commerce.
    Je pense que Glen pourrait mieux vous l'expliquer.
    Je pourrais probablement mieux vous l'expliquer en anglais.

[Traduction]

    Selon ce concept, qui est l'aboutissement d'une analyse effectuée par l'OCDE, organisation multilatérale, les investissements sont assortis d'autres services et permettent de pénétrer davantage d'autres marchés. Ainsi, les investissements sont assortis d'un effet multiplicateur. Ce n'est pas seulement une question d'emplois qui sont exportés, même si cela arrive mais plutôt l'intégration de cette partie de la production dans le modèle global d'entreprise et l'augmentation de la compétitivité d'une société ou d'un secteur en particulier. Ainsi, d'après l'analyse effectuée par l'OCDE qui a été confirmée par Exportation et Développement Canada, où j'ai travaillé avant de me joindre au Conference Board, pour chaque dollar investi dans un pays industrialisé, un pays mûr, l'effet multiplicateur est de 0,6, à savoir 60 cents. Ainsi, un plus grand engagement crée plus d'échanges et donc il y a un petit effet net. Par contre, quand on investit 1 $ dans un marché émergent, l'effet multiplicateur est beaucoup plus important.
    Nous citons une analyse effectuée par EDC selon laquelle 1 $ investi se traduit par 2 $ en échanges commerciaux. Mais en fait, plus le pays est pauvre, moins il est développé, moins le système économique et financer et les marchés sont évolués, plus l'effet multiplicateur est important. C'est ainsi que dans un pays très pauvre, il peut atteindre un facteur de six. Par conséquent, 1 $ investi risque de créer 6 $ en échanges commerciaux bilatéraux dans l'avenir. Il y a donc un impact énorme.
    C'est en partie pour cela que depuis cinq à six ans je m'intéresse de très près à cette question dans le cadre de mes recherches. Il faut qu'on fasse un véritable effort non pas seulement pour attirer des investissements au Canada, mais aussi pour encourager nos sociétés à investir à l'étranger parce que l'effet multiplicateur est important. C'est encore plus vrai à notre époque où il n'y a plus de surplus de main-d'oeuvre, bien au contraire, puisque nous connaissons des pénuries de main-d'oeuvre. Afin de générer davantage de richesse au Canada, nous devrions entre autres encourager nos entreprises à investir à l'étranger dans le but de pénétrer d'autres marchés et d'être plus efficaces, d'élargir leur bassin de consommateurs et de vendre par le biais de filiales étrangères.
    En fait, c'est le degré d'engagement d'intégration.

[Français]

    Quand on parle de pénétrer le marché étranger, si on ne stimule pas la consommation, on ne crée pas de lien direct avec les entreprises d'ici. Dans ce cas, la seule personne qui va gagner 2 $ ou 6 $, c'est l'entrepreneur qui fait des affaires à l'étranger, et non pas le pays qui exporte ou qui cherche à obtenir des investissements.

[Traduction]

    Non, mais souvent si les entreprises canadiennes qui tentent de faire face à la concurrence étrangère n'effectuent pas cet investissement, elles risquent de ne protéger aucun emploi au Canada. Elles risquent même de faire faillite parce qu'elles n'opèrent pas dans un vide. Au contraire, elles subissent la concurrence directe des sociétés étrangères qui font exactement la même chose. Justement, l'effet multiplicateur s'explique en partie par le fait qu'en devenant plus efficaces et en tirant profit du modèle commercial d'intégration, elles sont sans doute en mesure de protéger certains emplois au pays et, en fait, d'améliorer la qualité.
    Dans le cadre de la distribution mondiale, au Canada, nous voulons des emplois à forte valeur, dans la recherche et le développement, la conceptualisation de produits, le marketing et les services financiers. Et très franchement, nous avons raté le coche. C'est ainsi qu'aux États-Unis, 20 p. 100 des emplois dans les domaines manufacturiers ont été perdus au cours des 10 dernières années. Ces emplois se sont retrouvés en grande majorité en Asie, en Chine et au Vietnam, et dans une moindre mesure en Inde. Et pourtant, le chômage a reculé aux États-Unis pendant cette période.
    La question de la nature de l'emploi et du partage des bénéfices de la mondialisation est fondamentale. Il faudra y penser sérieusement dans le cadre de l'élaboration de nos politiques sociales. Mais il ne faut pas penser qu'il nous est possible de contrecarrer la mondialisation. En y résistant, on risque de tout perdre. L'idée de protéger un certain nombre d'emplois au Canada risque d'être dépassée parce que l'ensemble des emplois risque de disparaître pour cause de faillite. Si les entreprises ferment leurs portes, ce sont tous les emplois qui disparaîtront et on ne pourra plus penser à tenter d'améliorer la qualité des deux tiers des emplois qui auraient pu être maintenus au Canada. Quand on prend en compte l'effet multiplicateur et un plus grand engagement d'intégration, l'impact net est positif.
    Bien évidemment, c'est un grand concept. La réalité pour une entreprise dans une ville X peut être entièrement différente et beaucoup moins rose. Vous avez entièrement raison de vous inquiéter des effets sur la consommation et l'emploi pour des employeurs et des régions en particulier.

  (1145)  

    Merci, monsieur Cardin.
    Monsieur Menzies, secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs. Vos interventions sont tout à fait le genre de choses que recherchent les membres du comité. Nous tentons de déterminer quelle position devrait être adoptée par le Canada dans l'avenir pour réussir. Je ne suis pas le seul à savoir que nous sommes une nation exportatrice. Ainsi, si nous ne tirons pas profit de ce que Dieu nous a donné, nous méritons d'échouer. En ce sens, vos rapports nous servent d'encouragement et j'espère que nous pourrons... Je dois reconnaître que je n'ai pas lu le rapport en entier car il est très long. Il faudra que je prenne un vol très long pour en venir à bout.
    J'aimerais revenir à certains points saillants... En fait, au lieu de m'écouter parler, je préférerais que vous nous expliquiez la stratégie du commerce d'intégration dont vous nous avez parlé l'automne dernier. Vous avez dit que les pays se spécialisaient en fonction de leurs compétences en répartissant les éléments de production à l'échelle mondiale, ce qui permettait de générer davantage de richesse au bout du compte. J'aimerais que vous nous en disiez davantage. Vous avez parlé d'investissements directs à l'étranger à double sens et des bienfaits pour le Canada. Pourriez-vous nous en dire davantage, s'il vous plaît?
    J'ai inventé l'expression « commerce d'intégration » parce que j'essayais de trouver quelque chose qui permettrait aux gens de réfléchir et de vraiment comprendre. Cela reflète ce qui s'est produit avec la libéralisation du commerce en remontant jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cela s'est développé très progressivement. Les barrières tarifaires ont commencé à disparaître. Cela a permis aux entreprises de repositionner une partie de leur production dans le monde entier parce qu'elles n'ont pas à faire face aux mêmes coûts additionnels de fabrication dans un pays avant exportation. Et cela est dû aux investissements étrangers. C'est un phénomène que l'on constate au Canada et que l'on peut en fait suivre. Par exemple, si l'on considère la part étrangère de nos exportations — c'est un concept difficile — je vais présenter cela autrement: Le contenu canadien de nos exportations a en fait diminué très progressivement année après année, jusqu'à récemment, et ce pendant très longtemps. Je crois qu'en 1990, le contenu canadien de nos exportations représentait en gros 70 à 71 p. 100. Il est maintenant passé à 65 p. 100.
    Pensez au secteur automobile. Ce secteur est probablement l'exemple le plus frappant parce que c'est certainement l'un des plus intégrés mondialement, sinon le plus. Au Canada, nous faisons des machines-outils, qui sont ensuite exportées aux États-Unis pour faire des pièces détachées qui nous sont renvoyées au Canada pour être montées puis réexpédiées aux États-Unis. Les pièces de voiture traversent apparemment la frontière jusqu'à sept fois avant que ne soit construit le produit final.
    Évidemment, nous faisons plus que notre part de produits finaux au Canada. Nous avons un avantage évident dans la fabrication finale au Canada. Nous sommes un exportateur net d'automobiles, à raison d'environ 1,6 million par an. C'est donc vous montrer combien les sociétés automobiles représentent l'Amérique du Nord intégrée.
    Nous avons le Pacte automobile depuis 1965. Nous avons choisi tout à fait délibérément, comme politique commerciale, alors, d'essayer de nous intégrer dans l'économie nord-américaine. Les sociétés peuvent ainsi repositionner les différents éléments de toute leur chaîne de production en Amérique du Nord de la façon la plus avantageuse pour elles. C'est l'exemple le plus frappant du concept de commerce d'intégration.
    Évidemment, il faut investir des deux côtés pour parvenir à cela. On peut intégrer des pièces d'autres pays. On peut fabriquer des coussins pour les sièges ou des pare-brise au Brésil ou en Pologne et les intégrer à la chaîne d'approvisionnement. C'est le nouveau paradigme commercial.
    Lorsque je faisais mes études supérieures — j'ai fait mes études de premier cycle à l'Université du Manitoba il y a très longtemps — on nous enseignait ce qu'était le commerce de produits finis. Un pays fabriquait du coton et l'autre des chaussures et on échangeait. On échangeait en fonction de l'avantage comparatif, de l'efficacité relative. Le commerce moderne est une question d'échange d'intrants. Environ 40 p. 100 de tout le commerce mondial aujourd'hui se fait entre entreprises, c'est du commerce interentreprises, cela parce que les entreprises du monde entier recherchent leur avantage comparatif en mettant certains éléments de leur chaîne d'approvisionnement là où c'est le plus logique.
    Nous sommes un pays qui a des ressources, mais ce que nous avons surtout c'est des cerveaux et nous pensons que nous devons nous positionner à la fin de la chaîne d'approvisionnement là où nous pourrons gagner le plus d'argent en utilisant nos cerveaux. Il faut donc avoir une politique commerciale, pensons-nous. C'est magnifique d'exporter du charbon et du bois brut, mais il est bien préférable d'exporter des connaissances et d'investir dans les connaissances. C'est la raison pour laquelle une partie tellement importante de notre rapport porte sur le capital humain, sur la nécessité d'investir davantage dans notre système d'éducation.
    En réfléchissant à la politique d'investissement commercial, il faut considérer tous les éléments et penser à la façon de rendre l'économie nationale aussi compétitive que possible et de faire les investissements qui s'imposent pour l'avenir.
    Une des choses qui m'a plu dans Avantage Canada et qui me plaisait aussi dans la déclaration libérale un an plus tôt — le Conference Board ne fait pas de politique mais essaie d'élaborer des politiques — c'est que l'on insistait sur les études postsecondaires. Je pense que le gouvernement fédéral a un rôle réellement très important à jouer à ce sujet et qu'il doit investir beaucoup plus dans les études postsecondaires parce que le capital humain est finalement très mobile.
    Donc, si vous pensez politique commerciale, il faut penser à tous les éléments et à la place que vous voulez avoir dans ces chaînes d'approvisionnement.

  (1150)  

    Je me permettrai de vous rappeler que dans notre budget de 2006, nous avons fait un gros effort et mis beaucoup d'argent dans l'éducation, pas seulement dans les études universitaires mais également dans la formation professionnelle. Nous pensons que c'est également très utile. C'est une lacune que nous avons reconnue.
    Vous avez également dit que le gouvernement fédéral devrait se poser fermement en défenseur de la libéralisation du commerce dans le secteur alimentaire. Je reviens à certaines choses que vous avez dites quant à la nécessité de profiter de ce que nous avons et d'utiliser cela comme ressource primaire à laquelle nous pouvons ajouter de la valeur à ce que nous exportons en quantités énormes, qu'il s'agisse de boeuf ou de blé ou de tout le reste. Je reviens à ce que vous disiez à propos de l'OMC, nous avons beaucoup à y gagner mais nous nous inquiétons aussi beaucoup de ce que nous avons à perdre si nous n'obtenons pas d'entente.
    Nous avons ce problème, inutile de nous le cacher, des tarifs au Canada. Quoi faire à ce sujet? Tous les partis ont déclaré que nous voulons défendre toutes nos industries. Nous voulons offrir les meilleures possibilités à toutes nos industries. Comment, en tant que pays, en tant que gouvernement, pouvons-nous régler ce problème, aller de l'avant, offrir à tous les Canadiens les meilleurs avantages?
    Si vous voulez bien revenir au secteur agroalimentaire, 80 p. 100 de nos revenus agricoles dépendent de nos exportations. Cela ne signifie pas que tous les secteurs, toutes les exploitations agricoles et tous les producteurs d'aliments font de l'exportation, mais il y en a une bonne partie qui en font.
    Si vous considérez l'accès aux marchés, nos plus gros problèmes se trouvent en haut de la chaîne, avec les types d'aliments les plus transformés, les types d'aliments de plus haute qualité, où il y a des tarifs qui peuvent atteindre 300 p. 100. Lorsque les pratiques interdisent la vente de ces produits transformés, on veut acheter les produits bruts. Cela nous retire alors la possibilité de produire ces produits transformés qui rapportent davantage de revenus et des salaires plus élevés, etc.
    C'est pourquoi nous croyons que la mondialisation du commerce est essentielle dans le secteur agroalimentaire. Cela ne veut pas dire que tout le monde va gagner. Tous les agriculteurs ne vont pas gagner à une telle stratégie, il y aura certains perdants, évidemment. Mais, de façon générale, il y aura beaucoup plus de gagnants que de perdants et ce sera un gain net pour le Canada. C'est pour ça que nous croyons à cette stratégie.
    Considérez le moment où les négociations de Doha ont stoppé — et nous pourrions parler de nos secteurs de gestion de l'offre agricole, comme les oeufs, la volaille et les produits laitiers — on disait qu'il pourrait y avoir une certaine protection pour des secteurs sensibles. Cela signifie que pour les secteurs où règne la gestion de l'offre, il y aurait moins de protection qu'actuellement mais que l'on maintiendrait tout de même une certaine protection.
    C'est par ces négociations que l'on peut obtenir le meilleur résultat mais en sachant que plus on libéralisera le commerce dans ce secteur, mieux s'en trouvera le Canada.

  (1155)  

    Permettez-moi d'intervenir.
    J'aimerais aborder d'emblée la gestion de l'offre. Après tout, vous nous avez demandé d'être très francs aujourd'hui. Si nous estimons que certains secteurs agricoles ont besoin d'un appui financier, il faut trouver un moyen intelligent de leur faire parvenir cette aide. Les économistes s'inquiètent toujours quand ce soutien est attribué par le biais d'un mécanisme de fixation des prix. En vertu de la gestion de l'offre, les prix sont fixés à un niveau bien supérieur au prix du marché pour des produits en particulier, sans doute parce que nous voulons accorder une aide au revenu à certaines catégories d'exploitations agricoles et de produits. Mais ce n'est pas la façon la plus intelligente d'agir. Très franchement, en faisant un chèque, c'est-à-dire en accordant une aide directe, on gérerait de façon beaucoup plus efficace. Les méthodes d'octroi de l'aide seraient également sans doute plus efficaces. De plus, il nous serait plus facile d'assumer un rôle de leadership à l'OMC et de favoriser une plus grande libéralisation du commerce sur bon nombre de fronts.
    En fait, nous avons été évincés par l'Australie dans le cercle des grands de l'OMC. À l'époque, il y avait ce qu'on appelait le groupe des quatre. Nous avons été évincés parce que nous n'étions pas prêts à mettre de l'avant un véritable plan de libre-échange, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral, le Canada, ne s'est pas engagé dans la voie d'une plus grande libéralisation du commerce à l'échelle internationale. Pour réintégrer le cercle, nous allons devoir faire des sacrifices mais pas forcément des sacrifices absolus. Gilles a tout à fait raison de dire que quand on apporte des modifications aux règles, il y a des gagnants et des perdants. Il est possible de concevoir des politiques publiques visant à indemniser ces perdants. Je dirais même qu'il s'agit là du grand défi de la mondialisation: il faudra que d'une façon ou d'une autre on aide les perdants, afin de mitiger et d'annuler les pertes, pendant que les autres jouissent des avantages d'une plus grande mondialisation et libéralisation.
    Monsieur Rhéaume, vous vouliez intervenir.
    J'ai quelque chose à dire par rapport à ce que vous avez mentionné au sujet de l'autre mécanisme qui permettrait d'indemniser ceux qui souffrent d'une plus grande libéralisation du commerce. Grâce à la mondialisation des échanges, les revenus augmenteront en général au Canada. Ce qui veut dire que l'assiette fiscale grossira, etc. Ainsi, il serait plus facile d'indemniser les perdants. Il faut qu'on adopte des stratégies agressives à cet égard, ce qui ne s'est pas fait dans le passé.
    Merci beaucoup, monsieur Menzies.
    Nous allons maintenant passer au député néo-démocrate, M. Julian.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Avant de poser ma question, j'aimerais enchaîner sur vos observations au sujet de la gestion de l'offre et de l'aide aux fermes familiales.
    Je pense qu'il serait exact de dire que les Canadiens n'ont pas reçu beaucoup d'aide de la part de leur gouvernement fédéral, soit de l'ancien gouvernement libéral ou de l'actuel gouvernement conservateur. C'est en effet le problème que nous avons constaté lors de la capitulation dans le dossier du bois d'oeuvre, soit que le gouvernement n'était pas prêt à défendre les droits des Canadiens.
    Ainsi, la différence entre la théorie que vous énoncez et la pratique révèle un gouffre entre ce qui est important ici à Ottawa et ce qui se passe dans la réalité pour les Canadiens ordinaires. Il y a des milliers d'emplois qui ont disparu parce que le gouvernement n'a pas défendu nos droits dans le dossier du bois d'oeuvre, et les collectivités agricoles de tout le pays risquent d'être dévastées si notre gouvernement ne défend pas les droits des Canadiens dans le dossier de la Commission canadienne du blé et de la gestion de l'offre.
    Les Américains ne cesseront jamais d'exercer des pressions sur nous, mais le Canada doit tracer sa propre voie. La plupart des Canadiens croient profondément qu'il faut appuyer nos institutions et que les Canadiens ont le droit de tracer leur propre voie. C'est là où je ne suis pas d'accord avec certaines de vos observations.
    J'en reviens à ma question. Elle concerne le développement durable. Il y a un élément du rapport que le NPD réclame depuis un certain temps, à savoir d'importants nouveaux investissements dans l'éducation et la formation. Nous vous félicitons d'avoir traité de cette question dans votre rapport.
    J'ai commencé par lire votre section sur le développement durable puisque l'environnement est certainement l'une des grandes préoccupations de la population et c'est aussi une question de politique gouvernementale. Comme nous avons un rôle à jouer dans la politique gouvernementale, c'est un facteur que nous devons prendre en considération.
    En gros, vous citez les arguments en matière d'environnement et de développement durable, mais vous faites aussi une observation intéressante. Vous dites que le Canada a besoin d'un régime de réglementation qui fonctionne bien afin de protéger les intérêts du public et l'environnement et d'assurer la sécurité publique. Je suis totalement d'accord avec vous. C'est une observation très juste.
    Cependant, vous mentionnez auparavant le PSP, le partenariat pour la sécurité et la prospérité, qu'on appelle aussi l'intégration profonde, où le Canada renoncerait essentiellement à son pouvoir de réglementation pour adopter la norme américaine inférieure dans 300 domaines différents. Vous avez également mentionné le TILMA, l'accord sur le commerce, l'investissement et la mobilité de la main-d'oeuvre qui, comme le chapitre 11 de l'ALENA, prévoit que les droits des investisseurs l'emportent sur l'intérêt public en matière d'environnement, de sécurité publique et dans une foule d'autres domaines.
    Je me demande donc comment vous pouvez concilier ce que vous avez reconnu — la nécessité de protéger l'intérêt public, l'environnement et la sécurité publique — et des ententes d'investissement qui donnent aux investisseurs des droits qui l'emportent sur la sécurité publique, l'intérêt public et l'environnement. Le TILMA est très controversé dans ma province, en Colombie-Britannique, à mesure que les gens en découvrent les détails. Essentiellement, il accorde aux investisseurs une protection qui a la priorité sur l'intérêt public, tout comme le fait le chapitre 11.
    Comment pouvez-vous résoudre cette contradiction? Vous avez reconnu l'intérêt public en matière d'environnement tout en appuyant des ententes d'investissement qui priment cet intérêt.

  (1200)  

    Fondamentalement, je ne suis pas sûr que notre analyse aboutisse à la conclusion que vous avez énoncée. Je constate les bénéfices nets de la libéralisation des échanges horizontalement d'un bout du pays à l'autre et verticalement. Nous comprenons les compromis qu'il faut faire, mais je ne pense pas que ce soit compromettre ou négliger l'intérêt public que d'assurer une plus grande certitude pour l'investissement.
    Je pense que l'aspect le plus litigieux est l'utilisation de la réglementation pour protéger une industrie. Par exemple, on peut appliquer une norme environnementale qui est différente de celle des États-Unis de manière à empêcher les entreprises américaines d'investir à moins qu'elles n'adoptent la même norme. Lorsque cela se produit, les entreprises visées disent que c'est injuste.
    Vous dites qu'il est primordial de protéger le public et l'environnement et d'avoir pour cela un régime de réglementation très efficace et efficient. Or, le régime actuel n'est pas très efficient. Certains ne sont pas convaincus qu'il soit très efficace non plus.
    Il y a beaucoup de double emploi et de chevauchement entre les provinces, entre le gouvernement fédéral et les provinces, entre les différents ministères fédéraux et entre les différents ministères provinciaux. Il y a beaucoup de bureaucratie. Essentiellement, cela nuit à notre compétitivité et n'est pas nécessairement dans l'intérêt du public canadien ni de l'environnement. Donc, il y a beaucoup d'améliorations à apporter à notre régime de réglementation.
    Essentiellement, le message est que nous ne devrions pas dire que nous allons rationaliser la réglementation aux dépens de la sécurité publique et de la protection de l'environnement, mais nous pourrions certainement faire beaucoup mieux qu'à l'heure actuelle. C'est essentiellement le problème.
    Mais vous comprenez la préoccupation du public à l'égard des dispositions du chapitre 11, des dispositions du TILMA, et de l'abandon de notre souveraineté dans le PSP. Il n'y a pas un seul domaine où les Américains sont prêts à accepter les normes canadiennes plus élevées. À la table de négociation, nous faisons concession après concession, ce qui est frustrant pour les Canadiens. C'est ce qui est arrivé dans la trahison du bois-d'oeuvre et vous comprenez donc pourquoi les Canadiens s'inquiètent maintenant de ces accords.
    Oui, bien sûr que je le comprends.
    J'aimerais aborder une autre question. Lundi, l'ambassadeur du Chili a comparu devant ce comité et il nous a parlé de l'importance de ne pas traiter le commerce de manière isolée et il nous a dit que depuis l'élection d'un gouvernement beaucoup plus progressiste au Chili, ce pays place maintenant le commerce et l'économie sur des voies parallèles et a lancé une initiative de politique sociale très ciblée en vue de réduire les inégalités entre les revenus. Au Canada, bien sûr, nous constatons que l'inégalité des salaires augmente. Nous nous retrouvons maintenant dans la même situation que dans les années 1920. En fait, le revenu de la plupart des ménages canadiens a baissé depuis 1989, depuis la signature du premier accord de libre-échange Canada-États-Unis.
    Y a-t-il des éléments dans votre plus récent rapport ou dans le prochain qui disent qu'il faut veiller à ce que la politique sociale réduise les inégalités entre les revenus afin que nos communautés puissent prospérer?
    Deuxièmement, selon l'indice du développement humain, qui inclut le niveau de vie et la qualité générale de vie, la plupart des pays qui se placent au premier rang sont des démocraties sociales — en d'autres mots, des pays qui ne s'en remettent pas pour tout au marché mais qui ont intégré leurs politiques sociales, notamment l'investissement dans l'éducation, et comme vous l'avez mentionné, dans les soins de santé, qui constituent un important avantage concurrentiel pour les entreprises canadiennes puisque nos soins de santé sont subventionnés par le secteur public. Dans votre rapport, traitez-vous de ces questions — politique sociale et inégalité des revenus — et de la nécessité d'avoir une politique globale pour empêcher que nous allions plus loin sur la voie que nous suivons depuis quinze ans, celle de l'accroissement de l'inégalité, de la pauvreté, du sans-abrisme et de la réduction des programmes sociaux?

  (1205)  

    De façon générale, vous avez tout à fait raison, parmi les pays qui s'en sortent le mieux actuellement, la plupart disposent de hauts niveaux d'imposition, d'un investissement social important et de normes environnementales strictes. Je pense à la Suède, par exemple. C'est intéressant, car depuis qu'elle est entrée dans l'Union européenne, elle se porte très bien — elle a respecté ses cibles de Kyoto et a fait toutes sortes de choses formidables pour restructurer son économie à l'interne. À mon avis, une des raisons pour lesquelles la productivité de la Suède est aussi bonne, c'est l'augmentation de la concurrence. Les Suédois paient beaucoup d'impôt, mais la croissance de leur productivité est beaucoup plus importante qu'au Canada, donc les revenus augmentent plus rapidement que chez nous.
    Nous avons quelques idées précises. Par exemple, nous avons appuyé le groupe de travail MISWAA à Toronto, qui s'est penché sur les travailleurs à faible revenu et sur le taux marginal d'imposition dissuasif des Canadiens à faible revenu dans plusieurs provinces. C'est un des trois domaines pour lesquels nous préconisons une réforme fiscale pour favoriser la productivité. Il faut diminuer le taux d'imposition marginal des Canadiens à faible revenu pour les aider à passer plus facilement de l'aide sociale au marché du travail. Une des façons concrètes d'y parvenir serait par exemple de proposer des crédits d'impôt pour les travailleurs ou des avantages fiscaux.
    Nous avons donc des idées précises qui permettraient d'atténuer l'incidence sociale de la libéralisation et de l'ouverture des marchés au Canada.
    Merci beaucoup, monsieur Julian.
    Nous passons à notre deuxième tour de questions.
    Monsieur Temelkovski, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et merci à nos témoins.
    Tout à l'heure, M. Menzies a décrit le Canada comme un pays exportateur. Si nous allons un peu plus loin et que nous étudions la pénurie de travailleurs dont vous avez parlé plus tôt... Vous avez mentionné certaines façons de remédier à cette pénurie. La plupart des pays occidentaux préconisent l'immigration. Si tous ces pays occidentaux et ces marchés émergents sont aux prises avec ce problème, je crois que nous sommes tous dans la même situation: nous vivons tous une pénurie de travailleurs. J'ai voyagé récemment en Suisse, et le problème est le même. Je suis allé en Colombie, et c'était pareil, etc.
    Vous avez parlé d'immigration intelligente. Pouvez-vous nous en dire plus?
    Nous avons un avantage énorme sur beaucoup d'autres pays industrialisés, c'est que nous disposons de politiques et de valeurs relatives à l'immigration depuis longtemps. Un pays comme le Japon, qui a atteint et a adopté la « croissance population zéro », ne croit pas à l'immigration. Il octroie des permis de travail d'un an et essaie ensuite de renvoyer les gens chez eux, parce qu'il a des orientations sociales particulières.
    Pour nous, une politique d'immigration intelligente consisterait par exemple à reconnaître les titres étrangers. Nous l'avons demandé il y a quelques années — il y a trois ou cinq ans — et nous sommes très encouragés que le gouvernement ait annoncé récemment qu'il allait travailler sur ce dossier. C'est un élément fondamental. Nous pensons qu'il faut repenser l'équilibre entre les immigrants de la composante économique et les autres catégories d'immigrants. Il faut accorder davantage d'attention à ceux qui vont pouvoir contribuer directement au marché du travail.
    Il est évident qu'il faut investir pour permettre une intégration rapide des immigrants dans la société. Il faut reconnaître les titres étrangers plus tôt afin que les gens qui arrivent n'aient pas à se requalifier. À mon avis, il faut une solution au problème criant que vit l'Alberta actuellement — et le Manitoba, d'après ce que j'entends — et envisager des permis de travail à court terme et même des programmes de travailleurs invités. Il faut faire tout cela de façon créative et positive et chercher des façons d'intégrer ces mesures à notre stratégie économique.
    Il est intéressant de remarquer que les provinces semblent montrer l'exemple dans ce domaine, en ce moment. Elles mettent en place des programmes, essaient de faire correspondre les besoins des employeurs avec la main-d'oeuvre disponible et se tournent vers les autres pays. Il existe beaucoup de possibilités.

  (1210)  

    Quelle sera l'ampleur de cette pénurie de travailleurs dans les dix prochaines années? Allons-nous pouvoir garder notre titre de nation exportatrice? Ou est-ce que l'on devrait voir les choses dans l'autre sens, c'est-à-dire que nous ne sommes pas très bons pour importer?
    Notre croissance, selon notre population et l'âge de la population active, baisse rapidement. Glen a dit que d'ici 2012, on observera une croissance de l'immigration, mais pas de notre population naturelle. C'est la croissance nette de notre population active.
    Il y a autre chose dont vous avez parlé. Vous associez les pénuries de main-d'oeuvre à notre statut de pays exportateur. Or, il faudra faire bien plus pour rester un pays exportateur.
    Nous pensons à trois éléments. Nous avons déjà parlé de l'investissement dans notre capital humain — les programmes de formation, etc. Le deuxième élément consiste à investir dans les nouvelles technologies. Nous sommes à la traîne dans ce domaine par rapport aux autres pays. Nous n'investissons pas autant. En économie, c'est ce que l'on appelle l'intensité du capital. Nous sommes loin derrière les autres pays, et cela nuit à notre productivité.
    Le troisième élément fondamental, c'est notre degré d'innovation et de commercialisation, qui nous aide à devenir plus efficients mais également à trouver des façons de fabriquer de meilleurs produits avec les ressources dont nous disposons — nos ressources humaines et nos équipements.
    Il y a bien d'autres choses que l'on peut faire pour nous assurer de continuer à prospérer.
    J'ai siégé au Comité de l'immigration pendant deux ans et nous avons étudié certaines de ces questions. Nous parlions souvent de l'exode des cerveaux pour les autres pays et du gaspillage de cerveaux au Canada. Est-ce que vous vous inquiétez de l'exode des cerveaux des plus petits pays que le Canada et de la création éventuelle de ghettos sur la planète?
    En bout de ligne, les gens votent avec leurs jambes et s'ils ne se sentent pas valorisés dans la société dans laquelle ils vivent, les gens intelligents trouveront des façons d'utiliser leurs compétences ailleurs. Honnêtement, je suis sans doute moins préoccupé par l'exode des cerveaux des pays comme l'Inde et la Chine, qui sont les deux plus grandes sources d'immigrants actuellement, car ils investissent massivement dans l'éducation et forment des ingénieurs et des travailleurs qualifiés en grand nombre, beaucoup plus que nous pourrions en avoir besoin au Canada.
    Votre argument principal est tout à fait correct. Dans le cadre de notre politique sociale, il faut nous inquiéter des effets de priver les autres pays de leurs éléments les plus brillants. Cependant, très souvent, ces gens veulent partir, car ils n'arrivent pas à exploiter leurs talents chez eux.
    Si vous me le permettez, j'aimerais passer à l'environnement. Vous avez dit que c'était un secteur émergent au Canada et l'environnement est fondamental pour notre avenir. Vous avez également dit que pour pouvoir profiter des marchés mondiaux, il faudra envisager sérieusement d'investir dans ce secteur. Pensez-vous qu'il faut davantage de recherche et de développement en environnement? Que faudrait-il faire pour lancer le mouvement?
    La recherche et le développement en seraient un élément clé.
    Lorsque nous avons envisagé de faire du Canada une superpuissance en matière d'énergie propre, en ce qui concerne l'aspect écologique, nous avons constaté qu'il fallait développer un certain nombre de technologies environnementales, et cela se fait grâce à l'investissement dans la recherche et le développement et également en s'assurant que nous pouvons commercialiser ces nouvelles technologies au Canada afin de pouvoir bâtir une industrie qui peut ensuite exporter et non seulement vendre dans ce pays.
    Essentiellement, par le passé, nous avons manqué le coche quelques fois. Si vous examinez le secteur des produits forestiers, par exemple, on y faisait beaucoup de recherche et de développement. Nous avons un secteur manufacturier qui vendait des technologies aux fabricants de produits manufacturiers. Aujourd'hui, nous importons cette technologie des pays scandinaves et une bonne partie de la technologie pour laquelle nous avons fait de la recherche a été concédée aux pays scandinaves. Nous avons raté une formidable occasion de développer une industrie au Canada qui aurait pu faire de l'exportation vers ces pays.
    Sur le plan énergétique, nous avons l'occasion, compte tenu de nos énormes ressources énergétiques, de développer également une industrie qui met au point ces types de technologies afin que nous puissions les exporter partout dans le monde, parce que les autres pays feront face aux mêmes difficultés environnementales que nous, et qu'elles voudront produire et consommer cette énergie.

  (1215)  

    Il n'est donc pas trop tard.
    Non.
    Monsieur Temelkovski, votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant passer à M. André. Vous avez cinq minutes.

[Français]

    Bonjour, monsieur Hodgson et monsieur Rhéaume.
    Dans un premier temps, je m'interroge à savoir si vous parlez réellement, monsieur Hodgson, d'un commerce d'intégration. Je me demande s'il ne s'agit pas plutôt d'un commerce d'exclusion de certaines catégories d'individus, que vous avez énumérés. On dit de la mondialisation, du commerce international, qu'ils nous amènent à nous retirer de certains secteurs, tel le secteur manufacturier, qui permet à des personnes souvent moins scolarisées d'occuper des emplois.
    Vous avez également parlé de l'agriculture et de la gestion de l'offre. J'ai beaucoup d'interrogations à ce sujet. J'assistais dernièrement à un colloque de l'Union des producteurs agricoles, où j'ai rencontré des agriculteurs. Vous n'êtes pas sans savoir qu'ils vivent d'énormes difficultés actuellement. L'agriculture est très menacée, que ce soit dans le domaine de l'industrie porcine — vous l'avez sans doute entendu aux nouvelles récemment —, dans celui de la culture du blé ou dans celui de l'exportation, en regard des subventions américaines. Les gens vivent d'énormes difficultés. Je dirais également, au sujet du système de gestion de l'offre, que les producteurs ne gagnent pas des fortunes non plus.
    Parallèlement à cela, j'étais aux États-Unis, il n'y a pas très longtemps, et j'y ai rencontré des agriculteurs. Ils sont en train de renégocier leur Farm bill, la loi agricole américaine. À ma grande surprise, ils me disaient qu'ils vivaient eux aussi des difficultés financières malgré le fait que l'industrie soit hautement subventionnée.
    Je crois donc que l'agriculture ne devrait pas faire l'objet de marchandage comme cela se fait dans le secteur manufacturier, dans celui de l'acier ou dans d'autres secteurs industriels. Je crois que l'agriculture devrait être un domaine souverain. On devrait se diriger davantage vers la souveraineté alimentaire parce que l'alimentation, comme vous le savez, c'est ce qui nous permet de vivre. Alors, se détacher de notre agriculture, d'après moi, représente un danger important.
    Revenons à la mondialisation, au commerce et à la question de l'occupation des territoires ruraux. Je suis issu d'un territoire rural. Ce qui fait vivre notre territoire, c'est l'agriculture, c'est le secteur manufacturier, ce sont des secteurs mous. On pense aux territoires situés dans le Bas-Saint-Laurent, en Gaspésie et même pas aussi loin. Je viens moi-même d'un territoire situé entre Trois-Rivières et Montréal. Toutes les entreprises qui ne sont pas établies dans les grandes villes semblent avoir d'énormes difficultés parce que l'industrie du savoir se développe dans les grandes villes. J'aimerais donc vous entendre à ce sujet.
    Vous avez mentionné également qu'il y avait des perdants et des gagnants, dans le cadre de la mondialisation. On devrait être capable d'aider les perdants, mais je crois que la tendance actuelle est de les délaisser. Je vous mentionne, par exemple, les coupes effectuées dans l'assurance-emploi, l'existence d'un système de santé de plus en plus axé vers le privé, le fait que l'éducation penche vers le privé également. Il s'agit donc d'une forme d'exclusion. Voilà ce qu'est la tendance actuelle. On se désengage même par rapport à nos étudiants. Il y a eu des coupes dans les programmes à l'intention des étudiants, etc.
    J'aimerais connaître votre opinion sur ce sujet.

[Traduction]

    Je pourrais peut-être commencer et Gilles pourra vous parler en particulier de l'agriculture parce que je sais qu'il veut le faire.
    Je pense que vous venez d'aborder la question la plus épineuse du débat sur la mondialisation, à savoir comment partager les profits, comment partager le capital, et comment s'occuper de ceux que l'on a tendance à délaisser. C'est une question très intéressante.
    La revue The Economist a consacré une partie de son dernier numéro aux gagnants et aux perdants de la mondialisation, et à la difficulté d'élaborer des politiques publiques qui permettent aux gens de se remettre sur pied, de se recycler, et de recevoir de l'aide au cours de cette période de réadaptation. Par ailleurs, dans chaque pays touché par la mondialisation — il n'y en a que deux ou trois qui ne le sont pas, et nous ne voudrions vivre dans aucun de ces trois pays, comme la Birmanie ou la Corée du Nord — une partie de la population est toujours laissée pour compte, et il s'agit alors de trouver des programmes équitables et justes sur le plan social pour aider ces gens, en sachant qu'une personne qui ne possède pas les capacités de lecture et d'écriture fondamentales pour fonctionner dans une économie industrielle moderne n'est probablement pas recyclable à 55 ans pour retourner au travail. Il ne faut pas non plus oublier, et c'est une réalité, que ceux qui perdent des emplois bien payés dans le secteur manufacturier et finissent souvent par travailler dans le secteur des services subissent alors une baisse importante de leur salaire réel. Le salaire qu'ils touchent est nettement moins élevé. Ce sont des perdants. C'est là la question la plus épineuse.
    En tant qu'économistes, nous savons que sur une base nette, grosso modo, la mondialisation crée de la richesse pour l'économie mondiale et qu'un plus grand nombre de personnes ont des revenus plus élevés qu'il y a 25 ans. Cela est très clair. Mais il est tout aussi clair qu'il ne s'agit pas d'une équation parfaite, loin de là, et la façon dont les programmes sociaux sont conçus est effectivement importante. Comment pouvons-nous modifier l'éducation que reçoivent nos jeunes pour qu'ils puissent développer leurs compétences et progresser dans la vie? À quel stade décide-t-on tout simplement d'accorder à quelqu'un de l'aide sociale parce que cette personnes est incapable de s'adapter à l'économie moderne?
    Mais si je dois choisir entre une plus grande ouverture des marchés et une plus grande protection, je sais que j'opterai pour une plus grande ouverture des marchés, parce que je reconnais l'avantage net que cela représente pour la société.
    Voulez-vous parler en particulier de l'agriculture?

  (1220)  

[Français]

    Abordons rapidement la question de la souveraineté alimentaire, un concept de plus en plus populaire.
    La souveraineté alimentaire ne constitue pas un problème au Canada. Le Canada est un exportateur agricole net important. Nous avons beaucoup plus de territoires agricoles que notre population n'en a besoin. Donc, la souveraineté alimentaire n'est pas un sujet qui nous préoccupe. Il ne devrait pas nous préoccuper, au Canada.
    Il est plus important de s'assurer que les agriculteurs canadiens arrivent à toucher des revenus adéquats. Il y a une lacune de ce côté, à cause de la protection qui est offerte aux agriculteurs dans d'autres pays, des subventions allouées non seulement par les Américains, mais aussi par les Européens, et cela nous crée de graves problèmes. C'est pour cela qu'on parle d'une stratégie de libéralisation des échanges à l'échelle mondiale, qui serait essentielle à la prospérité du secteur agricole du Canada.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Rhéaume.
    Nous allons maintenant céder la parole aux députés ministériels, qui auront cinq minutes chacun. Vous avez la parole, monsieur Cannan.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à vous remercier, messieurs, de votre exposé. Je vous suis reconnaissant d'avoir pris le temps d'assister à notre réunion du mois d'octobre et de partager cette information. J'ai hâte également de recevoir le rapport sur les villes. Le développement durable et prospère des villes est un sujet important pour tous les Canadiens.
    En ce qui concerne certains aspects précis, je considère que certaines observations faites à propos du soutien du revenu et de l'indice du développement humain sont importantes. Je crois comprendre que la population des 20 principaux pays évalués par cet indice a une espérance de vie similaire, à quelques semaines près peut-être, donc il n'y a pas vraiment d'écart. Le Canada, les États-Unis et l'Australie font partie des 20 principaux pays en question.
    Comme nous en avons discuté avant la réunion, nous devons faire face à d'autres initiatives et à d'autres difficultés. Vous arrivez de la Colombie-Britannique et de l'avion, vous avez pu constater la dévastation causée par le dendroctone du pin, et comme vous l'avez mentionné dans votre préambule, le secteur forestier est d'une importance capitale pour la Colombie-Britannique. Heureusement, notre comité a réussi à conclure une entente sur le bois d'oeuvre qui offre à l'industrie la certitude et la stabilité qui lui permettront de faire face à cette dévastation et de fournir de l'emploi. Autrement, la situation aurait été bien pire. Nous avons fourni plus de 1,5 milliard de dollars pour l'agriculture. D'autres initiatives suivront, et nous traiterons du programme canadien de stabilisation du revenu, donc nous aurons des défis à relever. Nous continuons à aller de l'avant et à travailler en collaboration avec l'industrie. Nous vous remercions de votre rapport.
    En ce qui concerne la situation entre les États-Unis et le Canada, vous avez mentionné que le Canada continuera d'être notre principal partenaire commercial. Dans votre préambule, vous avez abordé certains des obstacles commerciaux. À votre avis existe-t-il des obstacles commerciaux qui vous paraissent inutiles? Pourriez-vous recommander des mesures à notre comité qui permettraient de favoriser une expansion plus concurrentielle de notre commerce?
    C'est une questions intéressante. Je sais que mes collègues au Conseil canadien des chefs d'entreprise agissent plus ou moins comme le secrétariat du Conseil nord-américain de la compétitivité qui a été créé. À l'issue des discussions que nous avons eues avec eux, ils ont présenté deux aspects du côté canadien sur lesquels ils se sont entendus sans nous consulter, mais je pense qu'ils ont raison. Ils ont signalé deux aspects pour lesquels des améliorations s'imposent. Il s'agit des obstacles non tarifaires que je considère insidieux. Il est assez remarquable de constater à quel point un règlement ou un processus réglementaire peut être conçu de manière à constituer un obstacle subtile qui empêche les entreprises canadiennes de faire affaires aux États-Unis et vice versa. Je dois toutefois vous dire qu'en ce qui concerne les obstacles non tarifaires, c'est un tel embrouillamini qu'il devient parfois extrêmement difficile de déterminer les aspects particuliers pour lesquels on peut apporter des changements.
    Lorsque la protection était assurée par des tarifs, l'avantage c'est que le processus était transparent. Vous pouviez voir le prix. Vous deviez payer 12 p. 100 de plus ou 300 p. 100 de plus pour un produit en particulier, et c'était donc l'obstacle, mais comme aujourd'hui nous nous sommes plus ou moins débarrassés des tarifs — et ils existent toujours mais ils sont assez faibles dans l'ensemble — nous commençons à constater à quel point les obstacles non tarifaires sont insidieux et à quel point il sera difficile de remédier à la situation. C'est donc un aspect.
    L'autre aspect, c'est la frontière; il faut faire en sorte que l'infrastructure frontalière fonctionne. Nous n'avons pas investi suffisamment dans l'infrastructure frontalière, nous n'avons pas vraiment défini les systèmes de sécurité ni facilité la circulation des biens et des personnes de part et d'autre de la frontière. À l'heure actuelle, nous sommes en train de faire une étude en coopération avec le Conference Board dans un centre que nous avons créé sur le commerce et l'investissement international et nous tâchons d'examiner les temps d'attente à la frontière avant et après les événements du 11 septembre, et comment les entreprises ont dû s'adapter à cette nouvelle réalité. Nous publierons les résultats de cette étude probablement ce printemps. Je n'en connais pas encore les résultats, parce que cette étude est en cours, mais je soupçonne qu'il y aura toutes sortes de coûts subtils qui auront été transmis aux entreprises des deux côtés de la frontière et qui ont vraiment rendu les relations commerciales beaucoup plus difficiles.
    Donc, ce que nous recommandons, et cela se trouve dans notre rapport, c'est d'investir beaucoup dans l'infrastructure physique, dans l'harmonisation des systèmes de sécurité et dans des mesures qui permettront d'avoir une frontière beaucoup plus intelligente. Autrement, nous aurons créé des obstacles supplémentaires à l'investissement au Canada pour ce qui est de desservir le marché nord-américain et il deviendra encore plus difficile pour nos entreprises d'être concurrentielles en Amérique du Nord.

  (1225)  

    Eh bien, merci. Je sais que le ministre Day serait impatient de prendre connaissance de ce rapport, car il a travaillé en très étroite collaboration avec les Américains pour tenter de rationaliser cette initiative pour le tourisme et le commerce des deux côtés de la frontière.
    Je suis d'accord pour dire qu'il est important d'avoir un système d'immigration plus intelligent, efficace, mais je suis d'avis également que nous ne pouvons par régler tous nos problèmes de compétence et de pénurie de main-d'oeuvre avec Immigration. Comme on l'a déjà dit, nous voulons qu'il y ait des investissements dans l'éducation afin que nous essayions certaines initiatives au niveau postsecondaire et que nous puissions continuer sur cette voie. L'un des éléments, cependant, comme l'a dit M. Julian, l'ambassadeur du Chili est venu rencontrer notre comité mardi et nous avons parlé des ententes bilatérales. Le Canada n'a pas eu d'entente bilatérale depuis 2001. Le Chili en a conclu plus de 40. À votre avis, quels sont les domaines spécifiques sur lesquels nous pourrions nous concentrer? Que pouvons-nous faire pour nous sortir de cette impasse?
    Essentiellement, nous avons mis tous nos oeufs dans le même panier, c'est-à-dire dans la ZLEA. Nous avions espéré que la zone de libre-échange des Amériques serait la prochaine étape et que nous serions en mesure de mettre en place un accord commercial régional, et évidemment, ce projet s'est écroulé il y a deux ou trois ans pour une raison ou pour une autre.
    Si nous accordons autant d'importance aux marchés émergents dans le cadre de notre politique étrangère, c'est en partie parce que ce sont ces marchés qui connaissent une croissance mondiale à l'heure actuelle. Ultimement, le commerce doit aller là où il y a croissance, là où se trouvent les consommateurs. Je me tournerai donc vers des pays comme la Chine et l'Inde, tout en reconnaissant qu'il sera difficile de négocier avec ces pays qui ont des cultures très différentes et dont l'économie est à un stade de développement tout à fait différent.
    Je vais vous donner un contre-exemple. Nous avons consacré beaucoup d'énergie pour tenter d'approfondir nos relations commerciales avec l'Europe et avec l'Union européenne et cela ne nous a presque rien rapporté. J'apprécie les efforts du premier ministre Charest la semaine dernière pour tenter de ré-énergiser le commerce avec l'Europe, mais je crains que nous ne soyons pas vraiment grand-chose par rapport à une économie européenne de 450 millions d'habitants. Leur intérêt bien sûr est aux États-Unis. Nous devrons donc décider s'il serait préférable de négocier des accords bilatéraux ou s'il faudrait plutôt négocier des accords régionaux.
    Par exemple, je dirais que l'une des raisons pour lesquelles nous voulons conclure une entente avec la Corée à l'heure actuelle, c'est que les Américains l'ont fait d'abord. Ils négocient un accord de libre-échange avec les Coréens; nous devrons décider si nous voulons toujours tenter de faire la même chose que les Américains ou si nous sommes prêts à faire vraiment un pas en avant et dire que nous allons envisager un engagement régional nord-américain avec l'Europe, avec l'Asie.
    Merci, monsieur Cannan. Votre temps est écoulé.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Julian pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je comprends la théorie économique dont vous nous faites part aujourd'hui. Évidemment, les Canadiens ne peuvent pas se nourrir d'une théorie.
    Je voudrais revenir à la question de la qualité des emplois. Ce que Statistique Canada nous dit, c'est que de 1989 à 2004, et ce sont les chiffres les plus récents qui existent, plus de 60 p. 100 des familles ayant un revenu de travail — en d'autres termes, le premier, le second et le troisième quintile — ont vu leur revenu diminuer en termes réels, et gagnent en fait moins d'argent aujourd'hui qu'elles n'en gagnaient en 1989, avant l'entrée en vigueur de ces accords de libre-échange, avant que nous commencions à changer, à restructurer l'économie canadienne. La classe moyenne supérieure a maintenu son revenu, de justesse, et a essentiellement réussi à suivre l'inflation. Il y a ensuite les plus riches, 20 p. 100 des Canadiens dont le revenu est monté en flèche.
    Nous ne parlons pas d'une situation théorique où il y a eu certains perdants. La plupart des Canadiens ont vu leur situation se détériorer depuis 1989. Ils travaillent plus longtemps et font davantage d'heures. Les heures supplémentaires ont augmenté, comme vous le savez, de près d'un tiers. Nous constatons que la plupart des emplois qui sont créés dans l'économie à l'heure actuelle — Statistique Canada nous le dit — sont des emplois à temps partiel, des emplois temporaires, sans avantages sociaux ni pension de retraite. Nous constatons également que la qualité des emplois qui sont créés dans l'économie actuelle sont des emplois beaucoup plus précaires, des emplois qui n'assurent pas un revenu suffisant pour faire vivre une famille comme ceux qu'on a l'habitude de voir au Canada.
    Ma première question concerne la qualité des emplois. Je regarde votre document et j'essaie de trouver un plan pour la création d'emplois permettant de faire vivre une famille. Je ne le trouve pas. Cela m'échappe peut-être, ou cela se trouve peut-être dans d'autres études. Nous avons conclu ces divers accords commerciaux mais la plupart des Canadiens sont encore moins avancés qu'au début, même si le secteur des entreprises a généralement tendance à dire qu'il faut tout simplement continuer dans la même voie et comme par magie cela va créer une prospérité réelle et équitable pour tous les Canadiens. J'ai des doutes, car en fin de compte, d'après les chiffres les plus récents que nous avons depuis 1989, cela n'a pas fonctionné. C'est un échec. Qu'allez-vous donc faire à cet égard? C'est ma première question.
    Ma deuxième question porte sur l'investissement étranger. Il y a eu 11 000 prises de contrôle au cours de cette période de 15 ans. Ces 11 000 prises de contrôle ont toutes été entérinées d'office par les Libéraux et par les Conservateurs. À quel moment l'investissement étranger n'est-il pas dans l'intérêt des Canadiens? Encore une fois, le revenu réel de la plupart des familles canadiennes a chuté — 11 000 prises de contrôle sans un seul examen réel.
    Ma troisième question porte sur le secteur agricole, les exploitations agricoles familiales. Les pays qui ont l'indice de qualité de la vie le plus élevé, l'indice de développement humain le plus élevé, sont ceux qui appuient les exploitations agricoles familiales. L'administration Bush fait tout ce qu'elle peut pour détruire la Commission canadienne du blé, même si les agriculteurs font de leur côté des pressions sur le gouvernement afin de ne pas laisser tomber la gestion des approvisionnements. Pourquoi est-ce que le Canada devrait renoncer à la gestion des approvisionnements et à la Commission canadienne du blé alors que cette dernière dessert très bien nos agriculteurs et aide à soutenir les exploitations agricoles familiales et les collectivités agricoles partout au pays?
    Ce sont là mes trois questions. Merci.

  (1230)  

    Je dirais essentiellement qu'il existe un lien entre ce qui se passe à l'heure actuelle en ce qui a trait aux salaires et l'éducation. Essentiellement, 40 p. 100 de notre population en âge de travailler a des capacités de lecture et d'écriture peu élevées. Comment ces gens peuvent-ils être concurrentiels dans cette nouvelle réalité à laquelle nous devons faire face. Nous avons des immigrants qui n'ont pas réussi à faire reconnaître leurs titres de compétences, qui sont sous-employés par rapport à leurs compétences et qui gagnent par conséquent un revenu moins élevé. Il y a un lien important entre le niveau d'éducation et le niveau de revenu. C'est une chose.
    Par ailleurs, si on regarde les tendances actuelles, et Glen a mentionné les droits des chaînes d'approvisionnement mondial, au Canada nous n'avons toujours pas trouvé notre place en ce qui a trait aux chaînes d'approvisionnement mondiales et pour ce qui est de nous assurer que nous pouvons prospérer dans cette nouvelle réalité économique. Dans notre document, nous disons que les Canadiens sont insouciants à plusieurs égards. Cette insouciante affecte notre productivité. Si nous pouvions générer davantage de productivité au Canada, nous aurions également des revenus plus élevés. Le défi de la productivité touche également certains de ces emplois qui sont moins rémunérés.
    Il y a plusieurs questions qui entrent en ligne de compte ici. Il y a notamment l'éducation, mais il s'agit également de trouver notre créneau dans ces chaînes d'approvisionnement mondiales, et de nous assurer que nous pouvons créer les types d'emplois dont nous avons besoin.
    Glen, aimeriez-vous ajouter quelque chose?
    Je pense que Gilles a déjà dit plusieurs choses que j'avais l'intention de mentionner.
    Nous reconnaissons clairement d'emblée que nous perdons du terrain parmi les pays de l'OCDE sur le plan du revenu par habitant. Nous faisons le lien avec la productivité, mais comme Gilles l'a dit, nous faisons ensuite une analyse beaucoup plus détaillée non pas des emplois comme tels, mais des attributs des travailleurs.
    Alors, comme vous le disiez, nous examinons les 40 p. 100 de notre main-d'oeuvre qui n'ont pas les compétences de base en lecture et en écriture pour pouvoir s'adapter. C'est alors que nous parlons d'apprentissage tout au long de la vie et du besoin d'offrir des cours de perfectionnement dans les collèges, les universités et en milieu de travail. En fait, nous demandons aux employeurs d'investir beaucoup plus d'argent dans la formation et le recyclage continus de leurs travailleurs.
    Nous signalons les populations autochtones dont les chiffres sont franchement scandaleux. Les enfants autochtones qui terminent leur secondaire vivent aussi bien que nous. Ils ont à peu près la même espérance de vie et leurs revenus ne sont pas différents des nôtres. Mais s'ils ne franchissent pas ce cap, le cap de la 12e année, leur espérance de vie diminue radicalement à tous les égards.
    Alors, je pense qu'il ne suffit pas d'examiner les chiffres de l'emploi. Je pense qu'il faut également examiner en détail les microfacteurs. Mais vos données sont tout à fait juste et c'est précisément la raison pour laquelle nous devons mettre l'accent sur la prospérité durable, la productivité et la compétitivité, qui sont les facteurs clés.

  (1235)  

    Merci, monsieur Julian. Votre temps est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Maloney, de l'opposition officielle libérale.
    M. Hodgson a mentionné le caractère insidieux des obstacles non tarifaires au commerce avec les États-Unis.
    Notre prochain accord bilatéral sera probablement avec la Corée. Des représentants des syndicats et des producteurs nous ont exprimé de manière convaincante leur extrême crainte qu'un accord avec la Corée ouvre une voie à sens unique dans le secteur de l'automobile en raison des obstacles non tarifaires.
    Étant donné que le secteur de l'automobile occupe une place tellement importante dans notre économique, comment pouvons-nous nous protéger contre ces obstacles non tarifaires? Comment pouvons-nous signer un accord sans avoir de telles protections ou au moins la possibilité de se retirer au cas où ils dresseraient ces barrières auxquelles nous ne pourrions pas réagir?
    C'est une question extrêmement pertinente. Pour vous donner un exemple, je ne connais pas la Corée aussi bien que le Japon, mais au Japon, ils ont des moyens subtiles axés sur la propriété des véhicules et sur le fait que la plupart des gens ne conduisent pas la même voiture plus de six ans. Il y a des inspections de sécurité et toutes sortes de petites mesures qui encouragent l'achat de voitures japonaises de sorte que la pénétration de voitures fabriquées en Amérique du Nord a été très très lente au cours des années.
    Je ne pense pas pouvoir vous fournir de réponses simples. Mais je pense que nous devons nous demander très sérieusement si nous devons avoir deux accords bilatéraux distincts.
    Les Américains ont déjà sondés les Coréens. Est-ce que le Canada va dire « moi aussi » et tenter de négocier un accord distinct ou va-t-il envisager sérieusement une équipe Canada-États-Unis afin de protéger efficacement nos intérêts collectifs face à la Corée? Il est évident que les États-Unis auront beaucoup plus d'influence dans cette relation que le Canada ne pourrait en avoir seul.
    Il est évident que l'industrie de l'automobile canadienne et américaine est intégrée.
    Dans l'industrie de l'automobile, en particulier, l'intégration est totale, la seule difficulté étant d'expédier la marchandise de l'autre côté de la frontière sans entrave.
    À l'heure actuelle, bien sûr, nous bénéficions d'un avantage concurrentiel en raison de mesures comme le régime public de soins de santé. C'est probablement le principal facteur, et avant, il y avait aussi le taux de change, mais plus maintenant.
    Mais pourquoi y a-t-il plus de voitures fabriquées au Canada qu'aux États-Unis? Parce que les fabricants économisent de 800 $ à 1 500 $ par voiture qu'ils fabriquent ici. Eh bien, cela veut dire, d'après moi, que si vous vous inquiétez de ce secteur en particulier, notre stratégie de base devrait être de nous aligner sur les États-Unis.
    Politiquement, cela mène à une conclusion très différente, et nous comprenons cela tout à fait, mais dans le monde de la realpolitik, il serait difficile pour le Canada de faire cavalier seul en Corée alors qu'il n'a pas le même poids que notre voisin du Sud.
    L'autre chose qu'il faut savoir au sujet du secteur de l'automobile, c'est que le Canada a les processus d'assemblage les plus efficaces en Amérique du Nord. Nous sommes très productifs.
    Le projet Beacon, mis en oeuvre l'an dernier par l'industrie automobile du Canada est également important. Il s'agit essentiellement de rendre notre secteur de l'automobile encore plus novateur et d'assurer sa prospérité au sein de chaînes d'approvisionnement mondiales.
    C'est une chose d'assembler des voitures, et une autre de les concevoir. Une plus grande innovation dans le secteur de l'automobile nous permettrait d'être concurrentiels non seulement en Amérique du Nord mais à l'échelle mondiale. Je pense que cela devrait être la principale stratégie du Canada pour réussir dans cette industrie.
    Vous avez également mentionné les problèmes que nous devons surmonter à la frontière. Mais que peut-on faire alors que les Américains sont tellement paranoïaques en matière de sécurité?
    Auparavant, il suffisait, pour franchir la frontière, d'indiquer notre pays d'origine et ceux qui étaient nés dans un autre pays devaient produire un passeport. Maintenant, ils exigent des passeports non seulement de la part des Canadiens mais aussi de leurs propres citoyens qui retournent dans leur pays.
    Nous avons les cartes NEXUS, les cartes à puce, mais chaque fois que nous essayons de trouver une solution, ils érigent de nouvelles barrières. Comment faire pour lutter contre cette résistance à la libre-circulation des services et des personnes à la frontière?
    Nous n'avons certainement pas de solution miracle à vous proposer. Dans notre rapport, nous suggérons, par exemple, d'investir davantage dans le prédédouanement, bien avant l'arrivée à la frontière. J'ajouterais que le gouvernement fédéral et les provinces devraient investir de manière très visible dans des mesures visant à renforcer la confiance des Américains envers notre sécurité, comme de bons renseignements de sécurité, des mesures à l'égard des camions, etc.

  (1240)  

    Mais nous le faisons déjà.
    Et c'est ça qui est frustrant, car dans une certaine mesure, nous sommes vraiment deux solitudes de part et d'autre de la frontière en matière de sécurité. Nous mettons tous nos efforts dans nos intérêts économiques et eux mettent tous leurs efforts dans la sécurité, et c'est frustrant.
    J'ai dirigé une équipe du Conference Board qui donne des conseils en matière de tourisme. Nous sommes l'un des principaux prévisionnistes en matière de tourisme auprès de divers intervenants du pays. L'effondrement de notre industrie touristique est très triste. C'est très tranquille. C'est une industrie très éclatée, éparpillée, de sorte que nous ne remarquons pas vraiment son impact.
    Mais vous avez absolument raison de vous inquiéter de la frontière, car les Américains qui viennent passer la journée chez nous vont simplement cesser de venir. Ils ne viendront pas dans nos casinos. Bon nombre d'entre eux ne vont pas se munir d'un passeport pour faire ce trajet. Il y a donc raison d'être inquiet. Il n'y a pas de solution facile, il n'y en a vraiment pas.
    Je suppose que nous allons recourir à la bonne vielle diplomatie, la représentation, pour essayer de trouver les parties intéressées à Washington et être présents constamment, amicalement. Mais nous n'avons de solution toute faite.
    Vous avez dit que l'Europe ne faisait pas grand cas du Canada et qu'elle s'intéressait plutôt au marché américain. Vous avez aussi dit que 83 p. 100 des échanges commerciaux du Canada vont actuellement en direction des États-Unis. Quelle mesure pouvons-nous prendre pour éviter que les pays européens ne nous évincent sur le marché américain?
    Nous avons été dans une large mesure déjà évincés du marché européen. Le rapport comporte quelques tableaux montrant que nos exportations vers l'Europe ont très peu augmenté au cours des 10 à 20 dernières années. Les entreprises canadiennes ont aussi dû devenir des entreprises européennes. L'Europe se réfugie derrière une véritable forteresse. Le protectionnisme de l'Europe est en large partie de nature non tarifaire.
    Les entreprises qui veulent faire affaire en Europe doivent devenir européennes. Pour pénétrer dans la forteresse, elles doivent investir en Europe. Il suffit de voir quelles sont les ventes des filiales canadiennes en Europe. Elles sont un multiple de nos exportations vers l'Europe. Dans un pays comme le Royaume-Uni, ces ventes sont trois fois et demie plus élevées que les exportations. Les entreprises canadiennes qui se sont installées en Grande Bretagne ont des ventes trois fois plus élevées que nos exportations vers ce pays.
    Comment surmonter ce problème? Nous avons essayé de le faire. Nous avons d'ailleurs essayé très fort d'attirer l'attention de l'Europe. L'accord d'intégration du commerce qui est en place favorise un dialogue entre les entreprises canadiennes et européennes, dialogue qui n'a pas jusqu'ici donné des résultats très encourageants. Je crois qu'il nous faut donc — et cela ne figure pas dans le rapport — réfléchir sérieusement à la façon dont nous pourrions nous servir de l'intégration nord-américaine comme d'un tremplin vers ce marché.
    Je crois que nous avons déjà été évincés du marché européen. Les Européens ont cessé d'investir en Amérique du Nord pour investir ailleurs. La part canadienne des investissements européens consentis en Amérique du Nord — Gilles, c'est vous qui avez fait cette recherche il y a trois ans — a progressivement diminué depuis 15 ou 20 ans. Nous avons donc déjà été évincés. La question qui se pose est de savoir si nous pouvons récupérer le terrain perdu.
    Je vous remercie, monsieur Maloney. Votre temps est écoulé.
    C'est maintenant le tour du Bloc québécois. J'accorde la parole à M. Vincent, qui nous vient du Comité de l'industrie. Je vous souhaite la bienvenue. Allez-y.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Merci également à mes collègues qui me donnent l'occasion d'intervenir.
    Bonjour. Je vous écoute parler depuis un moment, et il est clair que vous avez une certaine expérience du commerce international. J'aimerais savoir quels sont, d'après vous, les trois facteurs principaux qui expliquent que nous ne soyons pas concurrentiels face aux pays émergents.
    On parle dans notre rapport du problème de compétitivité. La faible productivité qui caractérise notre pays est un autre facteur important. Ça nous crée des difficultés.
    À quoi est-ce dû?
    Il y a plusieurs facteurs. Nous en avons considéré 13 environ.
    De façon globale, les barrières qui sont imposées ici, au Canada, sont avant tout ce qui nous empêche de devenir compétitifs. Il y a les barrières interprovinciales mais aussi internationales, donc avec les autres pays. Ça explique qu'il y ait moins de concurrence ici, au pays. Le faible niveau de concurrence que l'on connaît fait qu'on a moins tendance à vouloir innover ou essayer de faire les choses différemment.
    À Sherbrooke, j'ai discuté avec un groupe d'entrepreneurs. Ces gens m'ont parlé entre autres des pressions grandissantes venant de la Chine. Pendant plusieurs années, ils ont vendu le même produit, uniquement aux Américains, en utilisant la même technologie. C'est devenu une habitude. Ce genre de stratégie ne peut plus vraiment répondre à nos besoins en tant que pays.
    Ces entrepreneurs ressentent soudainement la pression de la Chine et se demandent quoi faire. En ce sens, il faut avoir une stratégie qui permette d'investir dans la nouvelle technologie, dans nos innovations. Pour le gouvernement, il s'agit aussi d'aider les entrepreneurs à saisir de nouvelles occasions d'affaires dans ces marchés.
    Notre groupe sur l'innovation a fait une analyse dans cette optique. D'après ce que nous avons constaté, le gouvernement a un bon nombre de sites Web que les entrepreneurs peuvent consulter pour identifier d'éventuels marchés. Par contre, l'interface entre les individus se trouvant dans le marché extérieur et ces entrepreneurs est plutôt faible. On aurait avantage à accroître ces relations de façon à aider les entrepreneurs, surtout la petite entreprise canadienne, à saisir ces nouveaux marchés.

  (1245)  

    Que pensez-vous du problème touchant la propriété intellectuelle? Je sais pertinemment — et  on en a parlé pendant des heures et de heures — que des produits sont développés par l'industrie, mais que d'autres pays violent la propriété intellectuelle en développant ces produits chez eux et en venant par la suite les vendre dans le marché canadien à des coûts inférieurs dus aux salaires peu élevés versés aux travailleurs de ces pays.
    Qu'en pensez-vous? Devrait-on adopter un projet de loi pour protéger la propriété intellectuelle?
    On est déjà protégés en vertu des dispositions sur la propriété intellectuelle. Ça n'empêche pas ces gens de vendre les droits d'auteur ailleurs.
    Ce qui est important, ce n'est pas de protéger ces droits, mais plutôt de stimuler la commercialisation au Canada en vue d'accroître celle-ci. C'est ce qui nous manque. On n'a pas de stratégie de commercialisation efficace.
    Je vais revenir à la question de la propriété intellectuelle. Des représentants d'entreprise nous ont dit qu'il ne valait pas la peine de dépenser des milliers ou des centaines de milliers de dollars en poursuites contre des compagnies japonaises, chinoises ou autres. Selon eux, il est inutile de faire valoir qu'on nous a volé un produit qui nous appartient, que nous avons développé et mis sur le marché.
    Êtes-vous d'accord là-dessus?
    Je ne sais pas comment vous interprétez le mot « volé ».
    Disons qu'on se l'est approprié.
     Je crois que d'une certaine façon, il pourrait y avoir une entente sur la vente de cette propriété intellectuelle.
    Je vais vous donner un exemple. Imaginez que vous ayez un nouveau produit et que dans une foire commerciale, des gens provenant d'autres pays prennent trois ou quatre photographies de ce produit, en achètent un exemplaire, retournent chez eux en fabriquer un semblable, voire presque pareil, et le mettent sur le marché au Canada. Qu'en pensez-vous?
    C'est une autre histoire. Ça se passe surtout dans les pays en développement: pas au Japon, mais certainement en Chine. On parle souvent de cas semblables. Nous constatons que c'est un problème de taille sur le plan international. La propriété intellectuelle est volée — et ici, le terme est approprié —, copiée, sans qu'il y ait de compensation pour le développement réalisé. C'est une situation que l'on devrait étudier lors des négociations internationales, de façon à trouver des solutions en matière de protection.
    On a parlé de négocier une entente commerciale avec la Chine. Or, il y a des éléments qu'on peut inclure à la méthode de négociation. Dans le cadre de l'entente nord-américaine, par exemple, on a aussi conclu une entente sur l'environnement, de même que sur le marché du travail, donc les travailleurs.
    Le gouvernement canadien investit dans les activités de recherche et développement des industries et amène ensuite les représentants de ces industries en Chine, dans le cadre de missions visant à faire produire dans ce pays les fruits de la recherche et du développement qu'il a financés. Qu'en pensez-vous?
    L'idée...

[Traduction]

    Nous n'avons plus de temps. C'était la dernière question.
    Je vous prie d'y répondre brièvement.

[Français]

    L'idée des missions est d'aider à développer des marchés auxquels nos entrepreneurs n'ont pas accès en ce moment, afin qu'ils puissent vendre leurs produits plutôt que de les voir copiés.
    Je vous parle de recherche et développement. Supposons que vous avez conçu un produit. On vous emmène en mission et on vous présente un partenaire qui va fabriquer votre produit.
    Oui, cela fait partie des chaînes globales de production. Tout cela est une stratégie qui doit être... Je vous donne un exemple, celui de la production de vêtements. Prenez le cas d'une chemise: la plus grande part du prix que vous payez pour cette chemise ira aux commerçants et à ceux qui en ont fait le design. Ceux qui la confectionnent ne touchent presque rien. Telle est la réalité économique d'aujourd'hui. C'est la même chose dans le cas d'autres produits. Il n'y a donc aucun problème.

  (1250)  

    Vous n'y voyez pas de problème? Vous avez parlé, à un certain moment, de matière grise. On n'a donc pas besoin de plus de matière grise, si on va faire fabriquer nos produits ailleurs pour les vendre dans notre marché. On n'a pas besoin non plus de personnes, on ne manquera jamais de travailleurs. Vous nous dites qu'on manque de main d'oeuvre, qu'en 2012, il faudra avoir recours à l'immigration. Si on conçoit nos produits ici avec l'aide du gouvernement, qu'on les fait fabriquer en Chine et qu'on les introduit dans notre marché, finalement, on n'a besoin de travailleurs pour s'en occuper.

[Traduction]

    Soyez bref, je vous prie.

[Français]

    Il faut tenir compte des avantages comparatifs entre différents pays. Avec notre matière grise, on peut concevoir des produits, mais pas nécessairement les fabriquer et les vendre au Canada. On peut concevoir le design, le contenu, et la production peut se faire ailleurs.

[Traduction]

    Je vous remercie.
    Monsieur Lemieux, vous avez cinq minutes.
    Je vous remercie. Je partagerai mon temps avec mon collègue.
    Je voulais poser une question. Nous avons parlé d'exportation, mais nous souhaitons aussi attirer des investissements au Canada. Nous voulons aussi faciliter le franchissement de la frontière. Nous étudions actuellement les mesures qui peuvent être prises pour améliorer le passage à la frontière dans la région de Windsor.
    Le gouvernement a aussi annoncé des investissements importants relativement à la porte d'entrée du Pacifique. Avez-vous examiné quelles seraient les retombées positives de cette initiative? Pourriez-vous nous indiquer quelles seraient, à votre avis, ces retombées?
    Hier matin à la même heure, je regardais par ma fenêtre cette porte d'entrée du Pacifique, car j'étais à Vancouver. J'ai en fait discuté de cette question avec trois ou quatre personnes qui font des analyses de l'économie de la Colombie-Britannique et de la porte d'entrée du Pacifique.
    Je me demande si la portée de l'initiative est suffisante. On s'interroge beaucoup à l'heure actuelle sur la viabilité économique de l'agrandissement du port de Prince Rupert. La question qu'il convient vraiment de se poser, c'est de savoir si l'initiative de la porte d'entrée du Pacifique sera suffisante pour permettre au Canada d'obtenir sa juste part du commerce, par rapport à Long Beach, à Portland ou aux ports mexicains. Voilà donc un aspect de la question.
    Il faut réfléchir à ce qui s'est passé en ce qui touche l'autoroute de l'information. Allons-nous tous consentir d'énormes investissements dans ce secteur et nous retrouver par la suite avec deux fois la capacité dont nous avons vraiment besoin? Il pourrait y avoir tout un débat sur cette question-là.
    Pour que nous puissions attirer notre juste part du commerce, nous devons consentir des investissements suffisants à cette fin. Les investissements totaux consentis sont évidemment très loin de ceux qu'a annoncés le gouvernement fédéral. Le gouvernement provincial a investi des milliards de dollars. Le secteur privé a fait de même. Nous aimerions en fait savoir s'il ne serait pas possible de faire en sorte que nous devenions le point d'accès des conteneurs en Amérique du Nord et devenir ainsi une véritable porte d'entrée de toute l'économie nord-américaine.
    C'est une excellente question. Nous nous demandons si l'initiative sera suffisante. Ces investissements sont absolument nécessaires, sinon ce seront les ports de Long Beach, de Portland et tous les ports le long de la côte Ouest qui nous supplanteront. Il ne faut pas oublier non plus l'agrandissement du canal de Panama.
    Je vous remercie.
    Monsieur Allison, vous avez la parole.
    Je commencerai par dire que je ne suis pas d'accord avec mon bon ami du NPD au sujet de l'impact sur les salaires de l'accord de libre-échange. Nous payons trop d'impôt et nous ne sommes pas suffisamment productifs. D'autres facteurs entrent aussi en ligne de compte.
    Le Comité des ressources humaines étudie actuellement la question de l'employabilité. Il y a évidemment toute la question de l'alphabétisation. Nous avons accueilli de bons travailleurs du monde entier, mais ils n'ont pas tous le même niveau d'alphabétisation et ne peuvent pas tous produire des diplômes étrangers reconnus.
    Je sais que vous n'avez pas parlé dans votre rapport de l'expérience de l'Irlande, mais comme on a abordé la question de la productivité au Canada — et je sais que vous en avez déjà parlé — il ne faudrait pas oublier que non seulement on a réduit les impôts dans ce pays, mais on a aussi incité les gens à rentrer chez eux et on a investi dans l'infrastructure. Nous pourrions discuter pendant 10 minutes de cette question, mais je n'ai que trois minutes. Ce sera donc ma seule question. J'aimerais que vous fassiez un lien avec l'augmentation des salaires et que vous nous indiquiez quels seraient les enseignements à tirer de l'expérience de l'Irlande.
    En fait, les analystes économistes s'entendent de façon générale sur ce que constitue une stratégie de productivité efficace permettant à un pays de générer de la richesse. Vous avez fait allusion aux éléments de cette stratégie. Il faut avoir un régime fiscal compétitif. Il faut investir dans les ressources humaines. Il faut avoir une bonne infrastructure. Nous abordons tous ces éléments de la stratégie dans notre rapport.
    Le seul avantage dont l'Irlande a joui et dont nous ne jouirons pas c'est que le pays est devenu une porte d'entrée pour les investissements étrangers en Europe tout en obtenant des subventions de l'Union européenne pour ses agriculteurs. Nous ne pourrions pas en faire autant. Nous n'allons pas attirer une part disproportionnée des investissements consentis en Amérique du Nord, mais nous devrions pouvoir obtenir notre juste part de ceux-ci.
    Le cas de l'Irlande est intéressant tout comme le cas de Singapour et d'autres économies mondiales connaissant un haut taux de croissance. C'est le cas de l'Islande en ce moment. Le taux de croissance de la productivité a été spectaculaire en Islande, un pays minuscule. Nous ne pouvons pas reproduire l'expérience de ces pays, mais nous pouvons en tirer des enseignements. Nous avons compris qu'il nous faut une stratégie nationale relative à la compétitivité et à la productivité et que nous devons nous intéresser au marché national, à l'éducation, au rôle des investissements et aussi à notre politique étrangère.

  (1255)  

    Monsieur Rhéaume, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Il y a un point intéressant au sujet de l'Irlande. À la fin des années 1980 ou dans les années 1990, le revenu par habitant en Irlande était de moitié inférieur au revenu par habitant moyen au Canada. Maintenant, le revenu moyen par habitant en Irlande est plus élevé qu'au Canada. Voilà la première chose.
    Deuxièmement, l'Irlande s'est créé des créneaux. Nous ne l'avons pas fait. Les Irlandais ont décidé de mettre l'accent sur les technologies de l'information et des communications ainsi que sur la biotechnologie. Ce sont dans ces domaines qu'ils ont attiré des investissements. Et ce sont dans ces domaines qu'ils ont connu beaucoup de succès. Nous devrons nous créer des créneaux. Le Canada n'en a pas pour l'instant.
    Contrairement à d'autres économistes, Gilles et moi ne pensons pas que nous devons simplement nous en remettre au marché. Il faut bien reconnaître que les gouvernements ont des ressources limitées. Chaque jour, ils doivent établir des priorités: il faut envisager de la même façon tous les secteurs sans choisir de gagnant parmi les entreprises ou les sous-secteurs particuliers. Il faut créer des conditions qui nous sont favorables et nous choisir des créneaux.
    Comme je l'ai déjà dit, vous nous avez présenté un excellent rapport. Nous avons hâte de voir les autres.
    Je vous remercie.
    Il nous reste quelques minutes.
    Monsieur Julian, voulez-vous poser une brève question ou devrions-nous mettre fin à la séance?
    Je n'ai pas d'autres questions à poser. Peut-être que l'un de mes collègues, soit M. LeBlanc, soit M. Bains...
    Il ne nous reste de toute façon presque plus de temps. Il faudrait que la question soit très brève.
    Cette discussion a été fascinante, messieurs. J'ai hâte à la partie deux du rapport la semaine prochaine. Je suis sûr que la discussion à ce moment-là sera tout aussi intéressante. Vous avez mené une étude fort intéressante. Elle nous sera très utile. Je vous remercie beaucoup. Nous vous reverrons bientôt.
    La séance est levée.