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SECU Rapport du Comité

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Réponse du gouvernement au septième rapport du Comité permanent de la Sécurité publique et nationale

Sous-comité sur la revue de la Loi antiterroriste

Droits, restrictions et sécurité : Un examen complet
de la Loi antiterroriste et des questions connexe


CODE CRIMINEL : FINANCEMENT DES ACTIVITÉS TERRORISTES ET BIENS LIÉS AU TERRORISME (Recommandations 16–22)

La Loi antiterroriste a modifié le Code criminel de manière à créer des infractions pénales et à imposer d’autres exigences liées au financement des activités terroristes, appliquant des obligations internationales en vertu de la Résolution 1373 du Conseil de sécurité des Nations Unies et de la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme.

Selon l’article 83.1 du Code criminel, toute personne au Canada et les Canadiens, où qu’ils soient, sont tenus de communiquer au commissaire de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) et au directeur du Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) l’existence de biens qui sont à leur disposition ou en leur possession et qui, à leur connaissance, appartiennent à un groupe terroriste ou sont à sa disposition, et tout renseignement portant sur des opérations, réelles ou projetées, mettant en cause ces biens. Les représentants de la profession juridique ont comparé l’exigence de l’article 83.1 avec les normes du blanchiment d’argent et ils ont exprimé la crainte qu’elle puisse être incompatible avec le privilège avocat-client en certaines circonstances. Le Sous-comité a recommandé qu’une modification soit apportée pour y soustraire les avocats offrant des services juridiques. Des normes internationales instaurées depuis longtemps à l’égard du blanchiment d’argent obligent à signaler les opérations douteuses et les éléments de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, qui mettent en œuvre ces normes, sont fondés sur des motifs raisonnables de soupçonner. Par ailleurs, l’objet de l’article 83.1 du Code criminel, combiné à l’article 83.08, est de bloquer les biens liés au terrorisme et d’appuyer des mesures de saisie, puis de confiscation des biens. La communication est obligatoire uniquement si l’intéressé sait vraiment si les biens en cause sont à la disposition d’un groupe terroriste ou en sa possession. Dans le domaine du terrorisme, il faut des mesures énergiques pour assurer que le Canada respecte ses obligations internationales et, en principe, le gouvernement ne croit pas qu’on devrait invoquer le privilège avocat-client pour cacher des biens ou des transactions si l’avocat sait qu’ils ont des liens avec le terrorisme. En conséquence, le gouvernement ne propose pas d’apporter le changement recommandé.

L’article 83.08 du Code criminel porte sur le blocage des biens liés au terrorisme. L’article 83.12 fait une infraction du fait d’effectuer sciemment des opérations portant sur ces biens, de conclure ou faciliter sciemment des opérations portant sur ceux-ci ou de fournir des services liés à ces biens au profit ou sous la direction d’un groupe terroriste. Le Sous-comité a recommandé qu’une défense de diligence raisonnable devrait être prévue pour cette infraction. Cette défense s’applique aux infractions de responsabilité stricte, mais c’est là une infraction pénale. En l’occurrence, l’élément moral de la connaissance est requis. Il en est ainsi parce que, pour les infractions pénales, un élément de faute subjectif est généralement exigé. Aussi, pour établir que l’accusé a effectué « sciemment » des opérations portant sur des biens liés au terrorisme, par exemple, il faudrait prouver hors de tout doute raisonnable qu’il savait vraiment que les biens appartenaient à un groupe terroriste ou étaient en sa possession.

Le Sous-comité a aussi recommandé que les mots « délibérément et » soient supprimés de l’article 83.02 du Code criminel. Cependant, le gouvernement propose de conserver le libellé actuel qui est conforme à celui de la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme et de la Résolution 1373 du Conseil de sécurité des Nations Unies.

LOI SUR LES NATIONS UNIES ET CODE CRIMINEL : LISTES D’ENTITÉS TERRORISTES (Recommandations 23–26)

Il est essentiel d’empêcher les terroristes de recourir au système financier international pour financer leurs activités si l’on veut enrayer le terrorisme international. Un élément clé de la réponse de la collectivité internationale a été l’imposition de mesures pour prévenir la dissimulation et le transfert de fonds ou de biens servant à financer le terrorisme, et la désignation des personnes et des entités auxquelles ces mesures doivent s’appliquer en les inscrivant sur les listes.

En qualité d’État membre des Nations Unies et de partie à la Charte des Nations Unies, le Canada est légalement tenu d’exécuter les mesures imposées en vertu des résolutions contraignantes du Conseil de sécurité, y compris celles prévues dans la Résolution 1267, celles qui l’ont remplacée et la Résolution 1373. Le Canada répond en établissant un processus d’inscription des entités terroristes sur les listes afin d’appliquer les mesures précisées, tel le blocage de biens, aux entités qui y figurent. Ce processus a pris la forme de trois mécanismes distincts, mais complémentaires, pour l’inscription des terroristes sur les listes.

Le premier mécanisme, le Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur Al-Qaïda et le Taliban (RARNUAT), a été institué en 1999 en vertu de la Loi sur les Nations Unies pour bloquer les biens des entités appartenant ou associées à Al-Qaïda et au Taliban. Les noms de ces entités ont été inscrits sur la liste par le comité du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui est chargé d’exécuter la Résolution 1267 et les résolutions ultérieures et qui met cette liste à jour de temps à autre.

Le deuxième mécanisme, aussi instauré en vertu de la Loi sur les Nations Unies, est le Règlement d’application des résolutions des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme (RARNULT), plus général, qui crée une liste canadienne d’entités terroristes dont l’étendue géographique et les affiliations ne sont pas restreintes comme dans le RARNUAT. Il met en œuvre les obligations plus générales de réprimer le financement du terrorisme en vertu de la Résolution 1373, adoptée peu après les attaques du 11 septembre 2001 contre les États-Unis.

Cela suppose l’application des mesures imposées par le Conseil de sécurité, mais en l’absence d’un consensus international au sujet de l’identification ou de la désignation des entités en cause, le Conseil a laissé aux États membres le soin de décider quelles entités doivent être inscrites sur la liste.

Le troisième mécanisme d’inscription sur une liste, instauré en vertu du Code criminel, permet au gouvernement du Canada d’appliquer les mesures pénales appropriées aux entités, ce qui englobe celles qui ne sont pas nécessairement inscrites par application des deux premiers mécanismes.

Pris ensemble, les trois mécanismes font avancer les intérêts du Canada en matière de sécurité et appuient le respect, par le Canada, d’un éventail d’obligations internationales, dont celles découlant de la Résolution 1267 et des textes législatifs subséquents, de la Résolution 1373 ainsi que de la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme, que le Canada a ratifiée à la suite de l’entrée en vigueur de la Loi antiterroriste.

Le Sous-comité a recommandé que le gouvernement envisage d’intégrer davantage les trois mécanismes. À cet égard, il convient de souligner que le ministre des Affaires étrangères est le ministre responsable sous le régime de la Loi sur les Nations Unies et qu’il est chargé de veiller à ce que les obligations découlant des résolutions du Conseil de sécurité concernant le Canada sont mises en œuvres au Canada, notamment par l’établissement de listes d’entités terroristes conformément au RARNULT. Pour sa part, le ministre de la Sécurité publique est responsable des activités liées à l’application de la loi et au renseignement, ce qui signifie qu’il est tenu pour responsable de recommander l’inscription des listes d’entités terroristes conformément au Code criminel. Par conséquent, le gouvernement est structuré de manière à pouvoir appuyer et remplir ces responsabilités ministérielles complémentaires par l’entremise des Affaires étrangères et du Commerce international et de Sécurité publique.

Il convient en outre de souligner que le Cabinet est collectivement responsable, conformément au Code criminel et au RARNULT, la décision finale d’inscrire sur la liste ou de radier de la liste appartient au gouverneur en conseil fondée sur la recommandation des ministres responsables. Grâce au processus du gouvernement, on parvient à une coordination interministérielle intégrale qui permet au Cabinet de prendre des décisions éclairées.

La relation entre les lois du Canada et les instruments internationaux applicables signifie que les mécanismes d’inscription et de radiation, ainsi que les conséquences de l’inscription, sont différents dans chaque cas.

La liste des entités terroristes inscrites en vertu du RARNUAT a été créée par les Nations Unies, plus précisément par le Comité des sanctions imposées aux entités liées à Al-Qaïda et au Taliban. Les entités inscrites sur cette liste sont automatiquement incorporées à la liste du Canada en vertu du RARNUAT. Le RARNULT permet au Canada de remplir l’obligation qui lui incombe en vertu de la Résolution 1373, à savoir bloquer « sans retard » les fonds et autres actifs financiers des entités terroriste inscrites par le Canada, et non par les Nations Unies, en vertu du RARNULT. Pour ces deux listes, les conséquences de l’inscription se limitent à celles qu’exige le Conseil de sécurité et consistent principalement dans le blocage de biens et dans une interdiction de recueillir des fonds.

Le troisième mécanisme d’inscription du Code criminel est établi exclusivement par les lois canadiennes, mais il est un élément important de la mise en œuvre de la Convention internationale sur la répression du financement du terrorisme et de la Résolution 1373 par le Canada. Il comporte des mesures supplémentaires à celles qui mettent en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité. Toute personne ou entité inscrite devient un « groupe terroriste », ce qui rend donc possible le dépôt d’accusations et les poursuites relatives à toutes les infractions prévues au Code criminel et le recours à d’autres dispositions là où ce terme est employé, comme celle sur la radiation d’un organisme de la liste des organismes de bienfaisance enregistrés ou le refus d’enregistrer un organisme comme organisme de bienfaisance. En outre, il existe des dispositions pour la saisie et la confiscation des biens appartenant à des terroristes.

En conséquence, le régime du Code criminel concernant la liste comporte aussi une norme plus élevée, soit le fait de croire que l’intéressé a, sciemment, participé à une activité terroriste ou agi au nom d’une entité terroriste. Par contre, la norme relative au mécanisme du RARNUAT est fondée sur les exigences de la Résolution 1373.

Par conséquent, même s’il semble souhaitable d’avoir un régime d’inscription intégré pleinement, les considérations susmentionnées démontrent que ces trois mécanismes sont parallèles dans une mesure acceptable et qu’ils offrent des outils complémentaires pour lutter contre le terrorisme et le financement du terrorisme. Devant les mêmes considérations relatives au droit national et international, d’autres pays dotés de systèmes juridiques semblables à celui du Canada, comme l’Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni, ont également instauré et maintenu des régimes de listes séparées.

En ce qui concerne la recommandation du Sous-comité de la Chambre des communes qu’un recours plus direct aux tribunaux soit prévu pour contester les décisions relatives aux listes, le gouvernement soulignerait que le rôle des ministres, à l’égard des processus respectifs, tant d’inscription que de radiation, est essentiel pour faire en sorte que les décisions puissent être prises le plus rapidement possible en se fondant sur des renseignements exacts et actuels en matière de sécurité. Aussi, permettre à une entité de demander directement un contrôle judiciaire, au titre du Code criminel, sans d’abord s’adresser au ministre de la Sécurité publique serait contraire à l’objectif de rendre des décisions efficaces dans un laps de temps raisonnable.

Aussi, la mise en œuvre d’un mécanisme qui raye automatiquement des listes les noms de personnes ou d’entités après une période donnée, que ce soit dans le contexte d’une demande ou dans le cadre d’un examen de deux ans de la liste du Code criminel, pourrait faire que le Canada ne respecte pas pleinement ses obligations internationales. Étant donné les répercussions importantes que cela pourrait avoir sur les obligations du Canada relatives à la sécurité nationale et internationale, il est important que les processus actuels soient maintenus.

Le gouvernement estime qu’il n’est pas nécessaire de modifier le Code criminel pour clarifier que c’est le gouverneur en conseil qui rend la décision finale quant à la radiation, ou qui approuve la liste à la suite d’une révision effectuée aux deux ans.