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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 054 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 13 décembre 2010

[Enregistrement électronique]

  (1530)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous en sommes à la 54e réunion du Comité permanent des finances.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous examinons aujourd'hui l'évasion fiscale et les comptes bancaires à l'étranger. Il s'agit de notre première réunion sur ce sujet.
    Pour entamer ces études, nous allons entendre les représentants de deux ministères aujourd'hui. J'aimerais les remercier d'être venus. Trois fonctionnaires comparaîtront pour l'Agence du revenu Canada et deux fonctionnaires nous proviennent du ministère des Finances Canada. Merci beaucoup d'être des nôtres, mesdames et messieurs.
    Nous allons d'abord entendre la déclaration préliminaire de l'Agence du revenu Canada. Mme Ricard fera un exposé au nom de l'ARC et ensuite le ministère des Finances pourra répondre à vos questions.
    Vous pouvez commencer votre exposé.
    Merci, monsieur le président, de nous donner cette occasion de discuter des efforts continus de l'Agence du revenu du Canada, ou l'ARC, pour lutter contre la planification fiscale internationale abusive et l'évasion fiscale. Ma déclaration sera en anglais et en français.
    L'ARC est résolue à protéger l'intégrité du régime fiscal canadien en luttant contre l'évasion fiscale et l'évitement fiscal sur tous les plans. Permettez-moi brièvement de clarifier...
    Excusez-moi, mais l'interprète nous indique que le son ne fonctionne pas.
    Voulez-vous que je suspende la réunion?

    


    

  (1535)  

    Nous pouvons reprendre la séance. J'en suis désolé. Vous pouvez recommencer votre exposé.
    Merci, monsieur le président, de nous donner l'occasion de parler des efforts continus de l'Agence du revenu du Canada pour lutter contre la planification fiscale internationale abusive et l'évasion fiscale.
    L'ARC est résolue à protéger l'intégrité du régime fiscal canadien en luttant contre l'évasion fiscale et l'évitement fiscal sur tous les plans. Permettez-moi brièvement de clarifier ce que nous entendons par évitement fiscal et évasion fiscale.
    L'évitement fiscal consiste à réduire l'impôt minimum en contrevenant à l'objet et à l'esprit des lois fiscales canadiennes, mais non à la lettre de la loi. Il peut entraîner d'importantes pénalités financières ainsi que des intérêts. L'évasion fiscale signifie réduire de façon intentionnelle des impôts exigibles, par exemple en dissimulant des revenus ou des biens et en effectuant de fausses déclarations. L'évasion fiscale est un crime. En plus de recevoir une nouvelle cotisation fiscale et de devoir payer des intérêts et des pénalités, les contribuables qui sont reconnus coupables d'évasion fiscale pourraient recevoir une peine d'emprisonnement et payer des amendes imposées par les tribunaux. De telles amendes peuvent représenter jusqu'à 200 p. 100 des impôts qu'ils ont tenté d'éviter de payer.

[Français]

    La clé de la stratégie nationale et internationale de l'agence en matière de prévention de la planification fiscale abusive et de l'évasion fiscale est de permettre aux contribuables d'observer leur obligation fiscale plus facilement. Cette stratégie repose sur une exécution soutenue de la loi et le rappel constant que les conséquences de l'évasion fiscale ou de l'évitement fiscal sont graves.
    Le fait de dissimuler des revenus et des biens dans des administrations étrangères représente un grave problème dans de nombreux pays à l'échelle planétaire, y compris au Canada.
    Lorsque les Canadiens ne paient pas leurs impôts, ils privent les citoyens de ressources qui auraient pu être affectées aux soins de santé, aux soins pour enfants, à l'assurance-emploi, aux pensions et à d'autres programmes. Les entreprises qui ne paient pas leurs impôts en tirent un avantage injuste par rapport aux autres entreprises.
    Nous nous attendons à ce que les contribuables agissent de bonne foi. S'ils concluent des opérations financières dont le but ultime est l'évasion fiscale ou l'évitement fiscal, nous agissons et les conséquences sont graves.

[Traduction]

    Le Canada n'est pas le seul pays qui lutte contre l'évasion fiscale et la planification fiscale internationale abusive. Le problème est mondial.
    De concert avec ses partenaires de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), le Canada fait figure de chef de file dans l'établissement et la mise en application de normes fiscales qui ont reçu l'assentiment sur le plan international. Les leaders du G20, y compris le Canada, ont annoncé la fin de l'époque du secret bancaire lors de leur Sommet de Londres, en avril 2009. Ils se sont publiquement engagés à prendre des mesures à l'encontre des administrations peu coopératives, y compris les paradis fiscaux.
    La relation étroite du Canada et ses partenaires internationaux illustre bien que les pays peuvent s'échanger de l'information afin de révéler des renseignements permettant de lutter contre l'évasion fiscale ainsi que des renseignements liés à des stratagèmes d'évitement fiscal international abusif. Cette relation étroite s'appuie sur le réseau canadien de 87 conventions fiscales, l'un des plus importants dans le monde, grâce auquel nous pouvons échanger de l'information avec d'autres pays.
    Nous travaillons d'arrache-pied à accélérer la circulation des renseignements en négociant de nouveaux accords d'échange de renseignements à des fins fiscales, en mettant à jour les conventions actuelles et en améliorant les ententes administratives avec les autres pays. L'ARC a augmenté les ressources affectées aux questions fiscales internationales. Depuis 2006, le nombre d'employés à temps plein qui travaillent pour le programme de planification fiscale abusive de l'ARC a doublé, et le nombre d'employés à temps plein travaillant dans le domaine des vérifications internationales a augmenté de 44 p. 100.
    Dans les centres d'expertise partout au Canada, nous avons engagé des professionnels chevronnés dans le domaine de la vérification et des spécialistes des questions fiscales internationales et de l'évitement fiscal. Depuis 2006, l'ARC a vérifié plus de 6 700 dossiers, découvrant environ 3,5 milliards de dollars en impôts impayés grâce à ses efforts de lutte contre la planification fiscale internationale abusive. En 2009 seulement, l'ARC a découvert un milliard de dollars en impôts impayés liés à des activités internationales.
    L'ARC lutte aussi contre l'évitement fiscal devant les tribunaux. La demande péremptoire à l'égard de personnes non désignées nommément est une autorisation judiciaire qui permet à l'ARC d'obtenir des renseignements. Nous l'utilisons aussi pour obtenir des informations sur des stratagèmes d'évitement fiscal qui s'appuient sur les lois sur le secret bancaire d'administrations étrangères afin de dissimuler des revenus ou la propriété et le contrôle des biens. En invoquant la demande péremptoire à l'égard de personnes non désignées nommément, le ministre est en mesure d'exiger d'une personne ou d'une entreprise qu'elle fournisse des renseignements sur un tiers non désigné. L'ARC a invoqué la demande péremptoire à l'égard de personnes non désignées nommément dans de nombreux cas nationaux et internationaux.
    L'éducation constitue un autre élément important de stratégie de l'ARC. Grâce entre autres à des visites dans les collectivités, des allocutions, des séminaires, son site Web et ses publications, l'ARC s'assure que les Canadiens sont au courant des conséquences de l'évasion fiscale.

  (1540)  

[Français]

    L'agence a communiqué avec succès son message concernant ces conséquences. Il s'agit d'un facteur important qui explique l'augmentation marquée du nombre de contribuables qui, dans le cadre du Programme de divulgations volontaires, déclarent des biens qu'ils avaient auparavant dissimulés.
    Lorsqu'ils font appel au Programme de divulgations volontaires, si leur divulgation répond aux critères, ils sont quand même tenus de payer tous les impôts, plus les intérêts.
    Le nombre de divulgations reçues a augmenté régulièrement au cours des dernières années. L'an dernier, nous avons reçu près de 3 000 divulgations, représentant 138 millions de dollars en recettes fiscales impayées. Le nombre continue à augmenter.
    Détecter l'évasion fiscale et la planification fiscale internationale et prendre des mesures est une tâche assez importante pour l'agence. Cela nécessite de s'engager à long terme, de recueillir des renseignements, d'établir des relations internationales et de sensibiliser les Canadiens.
    Chaque année, à mesure que nous accomplissons notre travail, nous comprenons de mieux en mieux les stratagèmes d'évasion, les organisations qui y participent et la meilleure façon d'y mettre fin.
    Alors, à mesure que les contribuables deviennent de plus en plus conscients, nous approchons de notre but, qui est d'obliger tout le monde à observer volontairement les lois fiscales canadiennes.
    Merci encore une fois, monsieur le président, de nous donner l'occasion de discuter de nos efforts continus pour lutter contre la planification fiscale. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Merci de votre présentation.
    Nous allons commencer avec monsieur...

[Traduction]

    FJe suis désolé, on m'avait dit que le ministère des Finances n'avait pas de...
    Est-ce que le ministère des Finances souhaite faire une brève déclaration préliminaire?
    J'aimerais me présenter et vous présenter mon collègue. Nous aimerions faire une déclaration préliminaire, si le comité le désire.
    Allez-y.
    Je vous prie de m'excuser. Je pensais que vous n'en aviez pas.
    Je m'appelle Brian Ernewein. Je suis directeur général de la Direction de la politique de l'impôt au ministère des Finances. Mon collègue, Alain Castonguay, m'accompagne aujourd'hui. Il est le chef principal des conventions fiscales et de l'entente sur l'échange de renseignements fiscaux au ministère des Finances.
    Merci beaucoup de nous donner l'occasion de comparaître devant le comité aujourd'hui afin de parler des comptes bancaires à l'étranger détenus par les Canadiens, des mesures prises par le Canada pour lutter contre l'évasion fiscale internationale et du rôle du Canada en ce qui concerne le Forum mondial sur la transparence et l'échange d'information pour des raisons fiscales.
    Depuis 1996, le projet de l'OCDE sur les pratiques fiscales nuisibles, projet auquel participe le Canada, a permis de cibler un manque de transparence et d'échange de renseignements fiscaux qui minait la capacité des administrateurs fiscaux de faire appliquer les lois fiscales et de lutter contre l'évasion fiscale internationale.
    J'aimerais mettre cela en contexte: bon nombre de juridictions ont gardé les lois sur le secret bancaire interdisant aux banques, sous peine de commettre une infraction, de divulguer à quiconque, y compris les gouvernements étrangers, des renseignements sur leurs clients. De telles lois peuvent encourager les Canadiens à avoir recours aux banques dans ces pays afin de dissimuler de l'argent ou de gagner un revenu d'investissement qui ne déclareront pas au Canada. Cela est, bien entendu, profondément injuste pour la plupart des Canadiens qui déclarent tous leurs revenus et paient leurs impôts.
    En 2000, les pays de l'OCDE et ceux qui ne font pas partie de l'OCDE, y compris le Canada, ont créé un Forum mondial sur la transparence et l'échange d'information afin de promouvoir les normes de transparence et d'échange de renseignements fiscaux efficaces de l'OCDE — c'est ce que nous appellerons la norme de l'OCDE.

  (1545)  

[Français]

    Essentiellement, les standards de l'OCDE dans le contexte d'ententes bilatérales mettent de l'avant trois idées simples. Premièrement, un pays devrait fournir des renseignements de nature fiscale à un autre pays lorsque ces renseignements sont pertinents pour l'administration des lois fiscales de l'autre pays.
    Deuxièmement, l'échange de renseignements fiscaux ne devrait pas être assujetti à quelques législations internes garantissant le secret de ceux-ci.
    Troisièmement — et ceci est particulièrement pertinent à l'égard des juridictions qui n'imposent aucun impôt —, un pays devrait fournir des renseignements de nature fiscale nonobstant le fait que ce pays pourrait ne pas avoir un intérêt domestique dans les renseignements fiscaux demandés.

[Traduction]

    Des normes de l'OCDE ont été mises en oeuvre grâce à des traités fiscaux et à des accords d'échange de renseignements à des fins fiscales — les AERF — et ont permis aux autorités fiscales d'avoir accès à des renseignements pertinents à leurs enjeux fiscaux afin de mieux appliquer et administrer leurs lois fiscales et lutter contre l'évasion fiscale internationale. Le Forum mondial a rédigé le texte de l'AERF qui a depuis été utilisé par la plupart des pays, y compris le Canada, à titre de modèle pour négocier des accords d'échange d'information fiscale bilatéraux.
    Le point tournant dans la mise en oeuvre de la norme de l'OCDE a été le Sommet du G20 de 2009, à Londres. En avril 2009, les leaders du G20 ont indiqué qu'ils étaient prêts à prendre les mesures et à imposer des sanctions afin de protéger les finances publiques et les systèmes financiers de leur pays contre les autres pays et les abris fiscaux qui ne s'étaient pas engagés à respecter la norme de l'OCDE ou n'avaient pas réussi à la mettre en oeuvre.
    Dès lors, le rythme des négociations des AERF et des protocoles pour incorporer la norme de l'OCDE dans les traités fiscaux s'est considérablement accéléré. Nous avons vérifié ces faits et avons vu qu'en avril 2009, 65 AERF et protocoles avaient été négociés à l'échelle internationale. Depuis octobre de cette année, il y en a plus de 560.
    Que faisons-nous pour lutter contre l'évasion fiscale internationale au Canada? Dans le budget de 2007, le gouvernement du Canada a annoncé une politique qui prévoyait des mesures incitatives pour que les pays non signataires fassent des AERF avec le Canada pour inclure la norme de l'OCDE sur les échanges d'information fiscale. Le budget de 2007 a également indiqué que la politique gouvernementale dictait que tous les nouveaux traités et examens des traités existants devraient inclure la nouvelle norme d'échange de renseignements fiscaux.
    Jusqu'à présent, nous avons signé 11 AERF et espérons qu'ils entreront en vigueur l'année prochaine afin que l'ARC puisse compter dessus pour obtenir des renseignements de la part des pays couverts par ces accords. Nous avons également pris part aux négociations d'AERF avec 14 autres pays. Nous espérons pouvoir conclure ces négociations et voir approuver ces AERF afin de les signer le plus rapidement possible.
    Tous les 87 traités fiscaux en vigueur au Canada à l'heure actuelle, à l'exception de sept, répondent à la norme actuelle de l'OCDE sur l'échange de renseignements à des fins fiscales. Sur les sept qui ne s'y conforment pas, nous venons tout juste de signer un protocole avec l'un d'entre eux, soit la Suisse, afin de faire entrer en vigueur cette nouvelle norme. Nous avons commencé à négocier ou à renégocier avec les six autres pays la mise à jour des dispositions d'échange de renseignements dans leurs traités pour qu'ils respectent la norme de l'OCDE. Nous espérons conclure ces négociations et obtenir l'approbation de ces traités révisés aussitôt qu'ils seront signés, en espérant que ce soit le plus rapidement possible aussi.
    Enfin, il y a d'autres dispositions dans nos lois sur les revenus fiscaux, qui sont soit en vigueur ou ont été proposées, et qui peuvent être des outils importants pour empêcher l'évitement fiscal international. Cela inclut notamment nos règles sur les déclarations étrangères, l'imposition des investissements dans des entités d'investissements étrangères, les propositions de resserrer notre régime fiduciaire pour les non-résidents et des nouvelles obligations de déclaration du dernier budget pour ceux qui participent à des transactions fiscales agressives.
    Je n'entrerai pas dans les détails de ces règles dans ma déclaration préliminaire, mais j'aurais peut-être l'occasion de répondre à des questions là-dessus si vous le souhaitez.
    Merci.
    Merci de votre exposé.
    Nous allons commencer par M. Szabo. Vous avez sept minutes.
    J'aimerais remercier tous les fonctionnaires du ministère des Finances et de l'ARC.
    Vous avez indiqué que le nombre d'employés travaillant à temps plein sur les vérifications internationales a augmenté de 44 p. 100 depuis 2006. Cette augmentation est considérable. Je me rappelle qu'il y a un certain temps les vérifications de l'ARC portant sur des appels téléphoniques anonymes de la part des Canadiens étaient sous-contractées à des sociétés de comptables, à des comptables ou à d'autres enquêteurs qui faisaient une bonne partie du travail. Le taux de récupération était de l'ordre de 1,700 p. 100 de retour pour chaque dollar dépensé en embauchant des travailleurs externes et non pas des gens à temps plein.
    Étiez-vous au courant de cela? Pourquoi nous faut-il des employés à temps plein quand tellement de personnes y travaillent déjà à l'échelle internationale?

  (1550)  

    Si j'ai bien compris votre question, vous voulez savoir pourquoi nous embauchons des gens à temps plein.
    Je ne suis pas certaine de bien comprendre votre question.
    C'est exact. Vous ne la comprenez pas.
    L'ARC sous-contractait à des agences — à des sociétés de comptabilité, à des gens qui avaient une bonne connaissance du domaine, qui oeuvraient dans le domaine — afin qu'elles fassent des vérifications en fonction des clients. On leur disait « Voici quelqu'un. Allez examiner son dossier. » Quand je siégeais auparavant au Comité des finances, à la fin des années 1990, le taux de retour était de l'ordre de 1,700 p. 100.
    Cela me semble bien plus logique que d'avoir des employés à plein temps.
    Peut-être que vous comprendriez mieux la question si je la formulais autrement. Vous avez augmenté le nombre d'employés travaillant à temps plein de l'ordre de 44 p. 100. Quel retour avez-vous reçu en ce qui concerne l'augmentation du nombre d'employés?
    Quand vous parlez de retour, voulez-vous savoir combien de revenus fiscaux ils arrivent à recouvrer par personne?
    Essayons donc autre chose.
    Je voulais essayer de répondre à la première partie de votre question, monsieur le président.
    Si j'ai bien compris, vous semblez inférer que nous étions en train de sous-contracter au public la charge de travail de vérification que l'ARC devait assumer. À ma connaissance, nous n'avons jamais sous-contracté des activités de vérification. Les vérifications de l'ARC et...
    Jane Stewart était ministre à l'époque. Elle l'a déclaré à la Chambre. Il s'agissait d'une récupération de milliards de dollars qui avait été effectuée au cours de l'année dont elle faisait mention. Vous pouvez vérifier ce fait. C'est ce qui s'est passé et ça semblait très logique.
    En ce qui concerne les 1 700 comptes qui proviennent de la Suisse et du Liechtenstein, quelle approche prendra le gouvernement pour s'occuper de ces comptes? Cela prendra combien de temps? Combien d'argent peut-on s'attendre à récupérer grâce à ces comptes?
    Je vais tenter de répondre à votre question. Le processus de ces vérifications est très long. Il s'agit d'un long processus en raison de la nature même de la vérification effectuée. La première étape consiste à faire une analyse des risques. Quand nous avons obtenu des renseignements du Liechtenstein, nous avons fait une analyse des risques et cela nous a permis de mieux cibler le risque et de faire des vérifications.
    Si ma mémoire est bonne, nous avons fait 26 vérifications en juin 2010. En octobre, nous en avions fait 30. Nous en faisons encore en ce moment. Il s'agit d'un processus qui prend beaucoup de temps tout simplement parce que, comme vous pouvez l'imaginer, il s'agit de renseignements qui nous proviennent de l'étranger. Cela prend plus de temps pour recevoir des renseignements en provenance de l'étranger. De plus, ces renseignements ne sont pas complets. Nous n'avons souvent pas de numéro d'assurance sociale ou d'adresse, alors nous devons les retrouver dans notre système.
    Mais je repose ma question: n'avez-vous donc aucune idée de combien d'argent est dépensé pour faire ces recherches et quelles sommes allons-nous récupérer?
    Nous n'avançons pas d'hypothèses sur les sommes que nous pourrions récupérer.
    Au sujet du Programme des divulgations volontaires, quand a-t-il été conçu et quand a-t-on examiné pour la dernière fois la façon dont les cas sont traités?

  (1555)  

    Le Programme des divulgations volontaires a été créé en 1973. Il existe sous sa forme actuelle depuis longtemps, mais au fil des ans, des changements y ont été apportés. Récemment, l'an dernier, nous avons évalué le programme pour nous assurer qu'il continuait d'atteindre ses objectifs.
    Comme Mme Ricard l'a signalé dans sa déclaration préliminaire, le nombre de divulgations volontaires a continué à augmenter ces dernières années, tout comme les sommes que le gouvernement perçoit grâce à ce programme qui est très utile. Nous estimons que ces augmentations sont attribuables aux efforts du gouvernement, notamment les accords d'échange de renseignements à des fins fiscales et diverses autres mesures que nous avons prises...
    Oui, mais, avant que mon temps soit écoulé, je veux souligner que ces divulgations peuvent être anonymes, ce qui n'est pas comme subir une vérification de son rapport d'impôt et devoir donner des détails sur ses revenus en personne.
    Brian Mulroney a fait une divulgation volontaire et a finalement payé beaucoup moins d'impôt que probablement tout autre Canadien qui, dans le passé, n'avait pas déclaré tous ses revenus. Voilà pourquoi je pose la question. Ne croyez-vous pas que la situation de M. Mulroney justifie un examen approfondi du Programme des divulgations volontaires?
    Une très brève réponse, je vous prie.
    Comme je l'ai indiqué, le Programme des divulgations volontaires a été évalué l'an dernier et nous le jugeons très efficace. Quand un contribuable s'adresse à l'ARC pour faire une divulgation volontaire, il n'a pas à donner son nom, mais il doit donner toutes les informations nécessaires. Quand nous acceptons la divulgation volontaire, le nom du contribuable nous est donné et nous examinons le dossier pour nous assurer que toutes les informations sont justes.
    Merci.
    Monsieur Paillé, s'il vous plaît, à vous la parole.

[Français]

    Si vous le permettez, je vais continuer là-dessus. Il y a des choses dans la déclaration d'ouverture de l'Agence du revenu du Canada qui sont pour le moins étonnantes.
    Je commencerai à la page 6. On y lit que depuis 2006, l'agence a vérifié 6 700 dossiers pour recouvrer 3,5 milliards de dollars.
    Si mes calculs sont bons, en prenant 3,5 milliards et en divisant par 6 700 dossiers, ça donne une moyenne d'environ 525 000 dollars que vous êtes allés chercher par dossier.
    Ensuite, M. Montroy est venu nous dire que votre Programme de divulgations volontaires va très bien, que c'est un succès boeuf. Pour 3 000 divulgations, vous avez amassé 138 millions de dollars. Cela représente 46 000 $; c'est 11,5 fois moins.
    Personne ne demande au contribuable de faire une déclaration volontaire d'impôts; il y est obligé. Alors que là, vous vous félicitez, vous vous vantez en disant que c'est incroyable d'avoir ramassé 46 000 $ en moyenne par la déclaration volontaire. Cependant dans le même texte, vous écrivez que quand on les poursuit et qu'on les analyse, qu'on y va à fond de train, ce sont 525 000 $, soit 11,5 fois plus.
     Jean Drapeau a déjà essayé la taxe volontaire pour payer les Jeux Olympiques, ou l'Expo 67, je ne me souviens plus lequel c'était.
    Il me semble qu'en matière fiscale, on ne doit pas parler d'acte volontaire, on doit poursuivre de plus en plus.
    J'aimerais entendre vos remarques là-dessus.
    On ne peut pas faire la moyenne de la même façon lorsqu'on parle du Programme de divulgations volontaires. Certaines divulgations n'étaient pas liées à des impôts non payés, mais plutôt à des déclarations de sommes ou d'actifs détenus à l'étranger, ce qui est aussi obligatoire.

  (1600)  

    Vous parlez de 138 millions de dollars de recettes fiscales. Comme fiscaliste, pour moi, une recette fiscale, c'est un impôt, un droit ou une taxe.
    Oui.
    Cela dit, sur les 3 298 divulgations reçues pour l'année 2009-2010, certaines ne sont pas des divulgations pour lesquelles les Canadiens auraient eu à payer de l'impôt. On a aussi une déclaration obligatoire d'actifs à l'étranger lorsque ce formulaire n'est pas présenté. Cependant, je n'ai pas les chiffres avec moi.
    Je suis quand même étonné que des gens fassent des déclarations fiscales et qu'il n'y ait pas d'impôt. Ça doit être assez rare, par rapport au nombre de personnes qui déclarent du revenu et qui n'ont pas d'impôt à payer.
    C'est parce que ça ne représenterait pas un revenu, mais plutôt un actif.
    Toujours dans le même texte — je m'excuse, mais des phrases m'ont frappé —, à la page 2, vous écrivez qu'on peut envoyer un nouvel avis de cotisation, qu'on va payer des intérêts, des pénalités, et « les contribuables qui sont reconnus coupables [...] pourraient recevoir une peine d'emprisonnement ».
    Dans le public, on se dit beaucoup que les riches ne paient que de l'impôt, ils essaient d'en éviter le plus possible, ils reçoivent des amendes mais ont les moyens. C'est comme quelqu'un disant qu'il peut rouler à 200 km/h sur l'autoroute parce qu'il est capable de payer sa contravention. Et là, on pourrait recevoir une peine d'emprisonnement.
    Comment est-ce que ça fonctionne? Quand l'Agence du revenu du Canada décide-t-elle de poursuivre? Y a-t-il des poursuites dans certains cas? C'est un des aspects qui nous intéressent le plus. Quelqu'un poursuit-il ces gens?
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    C'est une très bonne question, parce que ça implique plusieurs...
    C'est la réponse qui est importante.
    C'est une question de droit civil par rapport au droit criminel, dans la mesure où les cotisations pour l'impôt à payer sont basées sur la prépondérance de la preuve. Tandis que si le gouvernement désire poursuivre au criminel, on doit prouver notre cause hors de tout doute raisonnable.
     Je sais cela. M. Mulcair va sans doute insister là-dessus, mais moi, voici ce que je veux savoir. Comment fonctionne la relation entre le ministre des Finances, qui décide d'aller piger dans l'assiette fiscale, et l'Agence du revenu, qui a pour mandat d'aller récupérer l'argent? Quand elle n'en trouve pas, est-ce qu'une poursuite est intentée? C'est ce que je veux savoir. Quand est-il indiqué, pour le ministère de la Justice ou le solliciteur général, d'intenter une poursuite?
    Merci.
    Monsieur le président, lorsqu'on a un dossier, on examine la preuve et on essaie d'obtenir la meilleure preuve possible. À un certain moment, on consulte nos collègues du ministère de la Justice pour s'assurer qu'on a la preuve nécessaire pour soutenir une cause, pour intenter une poursuite criminelle. C'est seulement après les discussions avec le ministère de la Justice et le directeur des poursuites pénales qu'on décide si on a assez de preuves pour poursuivre au criminel.
    J'ai une question relative à cela. On sait que la France, en 2009, a annoncé qu'il y avait certaines banques qui devaient fermer leurs paradis fiscaux, ou plutôt les succursales qu'elles avaient dans les paradis fiscaux. Le Canada, en 2009, selon les rapports annuels des cinq grandes banques, avait 79 filiales bancaires dans les paradis fiscaux.
    Tout récemment, à cause de la décision française...
    Posez votre question.
    ... BNP Paribas a annoncé qu'elle vendait à Scotiabank du Canada ses activités au Panama, à Grand Cayman et aux Bahamas. Quand est-ce que le Canada va faire la même chose, c'est-à-dire fermer les filiales bancaires dans les paradis fiscaux dénoncés, plutôt que de seulement être un acheteur dans ces paradis fiscaux?

[Traduction]

    Merci.
    Une brève réponse, je vous prie.

[Français]

    Je peux simplement dire que ce n'est pas notre proposition.

[Traduction]

    Par le biais du mécanisme que je vous ai décrit, nous voulons nous attaquer à l'évasion fiscale en misant sur la transparence, surtout grâce à des accords d'échange de renseignements à des fins fiscales permettant au Canada de recueillir des informations permettant à l'ARC de procéder à des vérifications et de percevoir des impôts. Jusqu'à présent, du moins, on ne se propose pas d'imposer des sanctions comme on le fait en France. Notre objectif est plutôt d'accroître la transparence.

  (1605)  

     Merci.
    Monsieur Généreux, s'il vous plaît, vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Tout d'abord, bienvenue au comité. Je suis aussi intéressé par des commentaires que vous avez faits, madame Ricard, dans votre texte. J'aimerais revenir à la page 2, où on fait la distinction entre l'évitement fiscal et l'évasion fiscale. J'aimerais, dans l'intérêt des gens qui nous regardent — parce qu'on est vus à la télé quand on tient ces réunions —, être certain de bien comprendre la distinction concernant la loi, particulièrement.
    Dans votre texte, vous dites « à la lettre de la loi ». Qu'est-ce que vous entendez par « la lettre de la loi », dans un cas et dans l'autre?
    Il y a une distinction entre tax evasion et tax avoidance. Dans un cas, c'est lorsqu'il y a utilisation des principes qui sont dans la loi, mais peut-être de façon non intentionnelle. C'est pour cela qu'en 1988, le ministère de Finances nous a donné le pouvoir, en vertu de la règle anti-évitement, de nous attaquer à certaines transactions qui ne répondent pas nécessairement au but et à l'objectif de la loi.
    Donc, c'est la bonne foi des gens que vous analysez à ce moment-là pour faire la distinction entre l'un et l'autre.
    Oui, la bonne foi ainsi que les documents et les transactions.
    Dans le deuxième cas, l'évitement fiscal, c'est quand il y a une intention claire, nette et précise de frauder, quand des actions ont été prises pour faire en sorte d'obtenir le résultat qui a été obtenu.
    Donc, c'est à la suite des analyses de chacun des cas que vous faites cette distinction. Vous parlez quand même de 6 700 dossiers depuis 2006.
    Ça me réjouit de voir que notre gouvernement a mis en place des moyens pour être capable, justement, d'augmenter le nombre de dossiers, je suppose. Est-ce que le nombre de dossiers que vous avez vérifiés a augmenté de façon importante au cours des dernières années, puisqu'on a investi des sommes additionnelles et des ressources additionnelles?
    En 2005-2006, par exemple, il y a eu 278 cas, et en 2009-2010, il y en a eu 1 251.
    C'est quand même une augmentation substantielle.
    Des vérifications.
    Est-ce dû au fait que des ressources additionnelles ont été mises à la disposition du ministère?
    Oui. Voulez-vous poursuivre, madame Bergevin?
    Les fonds qu'on a obtenus nous ont permis d'agrandir notre couverture en ce qui concerne les transferts, les planifications fiscales abusives. Cela nous a permis de faire davantage de vérifications, donc d'avoir davantage de résultats.
    L'argent qu'on a obtenu nous a permis de mettre sur pied des centres d'expertise qui sont des centres de recherche, qui nous permettent de bâtir un système de renseignements afin d'avoir de meilleures résultats.
    En vertu de la loi actuelle, cela veut-il dire que les sommes que vous allez recueillir dans ce domaine pourront être réinjectées?
    Oui.
    Donc, cela n'est pas versé au fonds consolidé du ministère?
    Oui, c'est versé au fonds consolidé.
    Par contre, vous pouvez vous permettre d'y puiser des sommes.
    Non. Notre budget est déterminé et tout ce qu'on recueille est versé dans le fonds du revenu consolidé. Au fil des ans, on a obtenu des fonds additionnels, qui nous ont permis d'augmenter les ressources qu'on investissait dans les vérifications et la recherche.
    Dans votre texte, à la page 6, vous dites et je cite:
L'ARC lutte aussi contre l'évitement fiscal devant les tribunaux. La demande péremptoire à l'égard de personnes non désignées nommément est une autorisation judiciaire qui permet à l'ARC d'obtenir des renseignements.
    Comment cela fonctionne-t-il exactement?
    Merci, monsieur le président.
    Les demandes péremptoires sont des outils compris dans la Loi de l'impôt sur le revenu pour obtenir de l'information, soit des individus ou d'une tierce partie. Nous avons la possibilité de récupérer de l'argent de contribuables qui, peut-être, ont des fonds ou de l'information ailleurs.
    L'exemple classique serait une demande d'une tierce partie, qu'on adresse à une institution financière. Cette dernière nous donne le nom et le montant des fonds des individus. Alors, c'est avec cette information qu'on fait des recherches et qu'on ouvre des dossiers pour la vérification.

  (1610)  

    Pourrait-on dire que cette façon de faire est productive en ce qui concerne les personnes qui veulent éviter de payer des impôts? Je suppose que vous êtes capables d'aller chercher des sommes importantes?
    Certainement. Au cours des dernières années, on a utilisé de plus en plus cet outil pour obtenir de l'information des institutions financières. Je dirais même que jusqu'à présent, les institutions financières nous ont aidés beaucoup en nous donnant l'information demandée, et cette information nous a permis d'entreprendre plusieurs vérifications. D'ailleurs, c'est une des raisons pour lesquelles le nombre de vérifications et l'argent qu'on perçoit à la suite de ces vérifications ont augmenté au cours des dernières années.
    Y a-t-il un lien entre cela et le fait que l'an dernier, au mois de janvier, je crois, le ministre Blackburn — pour ne pas le nommer — avait eu accès à une liste de clients ou de banques en Suisse?
    On parle de deux choses différentes. Par contre, en ce qui concerne les demandes péremptoires, cela nous permet de comprendre beaucoup mieux les stratagèmes, de savoir qui est impliqué dans les stratagèmes. À partir de là, cela nous permet de demander d'autres informations pour avoir davantage de renseignements au sujet des joueurs et des promoteurs.
    Et comment la liste de noms à laquelle le ministre Blackburn a eu accès l'an dernier a-t-elle été obtenue?
    C'est plutôt dans le cadre des échanges avec nos partenaires internationaux.
    D'accord.
    Dans le cadre de notre traité avec la France, il a pu demander une liste.
    Y aura-t-il des répercussions pour les gens dont les noms étaient sur la liste?
    On a obtenu la liste et on va commencer nos vérifications.
    Y a-t-il une moyenne de temps allouée pour les vérifications? Comment cela fonctionne-t-il? Cela peut s'étendre sur plusieurs années, je suppose.
    J'aimerais vous expliquer le processus, très brièvement. D'abord, après avoir obtenu l'information, on fait une analyse du risque. On compare l'information obtenue à celle qu'il y a dans nos systèmes. Le premier défi, c'est de s'assurer qu'il s'agit des bons individus, parce que souvent on a très peu d'information, même pas leur numéro d'assurance sociale ou leur adresse. Alors, c'est notre premier défi.
    Par la suite, on communique avec le contribuable. On lui envoie un questionnaire, par exemple. Ce pourrait être une des méthodes utilisées. Souvent, on obtient très peu de coopération de la part des individus. À ce moment-là, on peut avoir besoin de se servir d'autres outils existants. Alors, ce qui prend du temps, c'est l'obtention d'information, surtout si elle se trouve à l'étranger.
    Merci.
    Monsieur Mulcair, la parole est à vous, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Comme le temps presse, je vous laisse décider entre vous qui est le plus apte à répondre. J'ai plusieurs questions pour vous.
    Avez-vous une idée de la taille globale du manque à gagner, pour ce qui est du Trésor canadien, entre ce qui était dû en impôts et ce qui est en train d'être planqué à l'extérieur? Les Américains ont une estimation de l'ordre de 100 milliards de dollars. Quelle est l'estimation du Canada?
    À l'agence, nous n'avons jamais essayé d'estimer le montant. Ça pourrait être très difficile, ça pourrait nous demander beaucoup de ressources, car on est à la recherche de revenus non déclarés et d'impôts impayés qui sont cachés.
    Pourtant les États-Unis, le Mexique, la Suède, le Royaume-Uni publient une estimation. Pourquoi eux sont-ils capables de le faire, alors que vous ne le pouvez pas?
    Je n'ai pas d'indication selon laquelle nos collègues des États-Unis ont publié...
    Si, si, ils ont publié une estimation: 100 milliards de dollars. C'est là leur chiffre.
    J'ai vu dans la littérature que plusieurs organisations ont publié des estimations aux États-Unis, dont le...
    L'estimation dont je parle est publiée par le U.S. Department of the Treasury. Ce ne sont pas des individus, ce n'est pas une ONG, ce ne sont pas des lobbyistes; c'est le U.S. Department of the Treasury.
    Je ne sais pas si ces gens du U.S. Department of the Treasury sont les collègues de nos collègues du ministère des Finances.

[Traduction]

    Monsieur Ernewein?
    Non, nous n'avons pas cette estimation. On peut faire des estimations à partir d'hypothèses, mais la nature même de l'évasion fiscale rend difficile la détermination de son ampleur. Par définition, il s'agit de sommes qu'on ne connaît pas. On peut donc faire des hypothèses, comme je l'ai dit, pour estimer ce que certains appellent l'écart fiscal...
    Eh bien, posons ensemble une hypothèse sur notre écart fiscal.
    Les Américains estiment le leur à 100 milliards de dollars. Serait-il raisonnable d'estimer le nôtre à 10 milliards de dollars environ?

  (1615)  

    Je le répète, monsieur le président, nous pouvons faire des calculs ensemble, mais ils ne seraient fondés que sur des hypothèses. Si vous disiez que 10 p. 100 de ce que les Américains...
    Pourquoi le Trésor américain peut-il faire cette estimation mais pas vous? Je ne comprends pas.
    Honnêtement, je ne connais pas cette estimation faite par les Américains, je ne sais pas si elle a été faite par le Trésor américain ou comment on y est arrivé.

[Français]

    En 2009, La Barbade, les Bermudes et les îles Caïmans ont reçu des investissements directs, en provenance du Canada, de l'ordre de 78,4 milliards de dollars. Ce sont 13 milliards de dollars de plus que notre investissement direct total au Royaume-Uni, qui est le deuxième pays en importance après les États-Unis. C'est parmi les endroits les plus importants.
    Est-ce qu'ils peuvent nous dire si ça n'a pas sonné d'alarme pour eux, à savoir qu'on était face à une énorme tentative d'évitement fiscal?

[Traduction]

    Non, je ne dirais pas que c'est un indice d'évasion fiscale. Des multinationales canadiennes investissent des sommes considérables dans divers pays, y compris la Barbade, les Bermudes et d'autres, comme le font des entreprises d'autres pays. Ces pays sont d'importantes destinations pour les investissements. Les Bermudes sont connues pour l'assurance et la Barbade est partie depuis longtemps à un traité avec le Canada et reçoit en effet beaucoup d'investissements.

[Français]

     Monsieur le président, l'OCDE calcule que la somme totale détenue dans des « juridictions opaques » se situerait entre 5 000 milliards de dollars et 7 000 milliards de dollars, alors que le Tax Justice Network du Royaume-Uni l'estime un peu plus élevée, mais dans le même ordre de grandeur, à la hauteur de 11 000 milliards de dollars.
    Ces chiffres semblent-ils correspondre à ce que connaît notre Agence du revenu?
    On n'a pas tenté d'estimer combien il y avait d'argent dans des... Néanmoins, je peux vous dire qu'on a eu des budgets additionnels qui nous ont permis d'augmenter de façon substantielle notre capacité. Notre travail avec nos collègues à l'étranger, dans un cadre bilatéral ou multilatéral, nous permet d'apprendre ensemble les stratagèmes, de les partager.
    Regardons ce qu'on a appris ensemble des stratagèmes. L'UQAM a publié une étude validée — personne n'a jamais contesté les chiffres — selon laquelle on a calculé qu'entre 1992 et 2007, les cinq plus grandes banques canadiennes ont réussi à éviter de payer 16 milliards de dollars en taxes et impôts fédéraux et provinciaux.
    Avez-vous des raisons de contester les chiffres de l'UQAM?
    Je n'ai pas de raison de les contester ou non. Je n'ai pas consulté l'étude de l'UQAM.
    Vous n'avez pas consulté l'étude de l'UQAM? Vous arrivez ici et vous nous informez que vous n'avez aucun estimé. La seule étude valable, validée, non contestée, vous ne l'avez jamais consultée?
    Non, je ne l'ai pas consultée. Et vous, madame Bergevin?
    Je m'excuse, mais je suis abasourdi.
    Je ne l'ai pas consultée non plus. Par contre, ce que je peux dire, c'est que l'OCDE s'est penché beaucoup sur la question des institutions financières et de la planification fiscale abusive qu'elles pourraient pratiquer. Alors, on en est au courant et, en ce qui concerne l'administration fiscale, on en tient compte.
    En 2007, grâce à une personne qui a rendu publique la liste de UBS, les Américains ont été en mesure d'imposer une amende de 780 millions de dollars américains à UBS. On a su qu'il y avait des centaines de Canadiens sur la liste,  que vous avez, vous l'avez confirmé tout à l'heure. Vous avez récupéré combien d'argent, jusqu'à maintenant, à partir de cette liste de UBS? Ensuite, on passera à la liste de HSBC.
    Les montants qu'on a récupérés l'ont été par le Programme de divulgations volontaires. Je n'ai pas le tableau ici. On étudie les listes qu'on a obtenues à la suite des demandes péremptoires, mais on n'a toujours pas de résultats de vérification.
    Je vais vous poser la question autrement. Est-ce qu'il y a systématiquement des enquêtes qui sont faites sur les activités des banques canadiennes à l'étranger, oui ou non?
    Tout à fait. Ça fait partie de notre population de grands dossiers et on a une très grande couverture de la population de grands dossiers.
    Alors, comment se fait-il, si on enquête régulièrement, que c'est seulement lorsque les Américains reçoivent une liste de UBS, ou lorsque les Français reçoivent la liste de HSBC, qu'on apprend que les noms de Canadiens figurent à ces listes? Comment se fait-il qu'on n'a aucune information, à moins qu'il y ait des fuites comme celles-là?

  (1620)  

[Traduction]

    Monsieur le président, puis-je intervenir?
    Je pense que le député mêle deux choses. Il est tout à fait légitime de s'inquiéter du fait que certains tentent de cacher des revenus dans des institutions financières étrangères, et c'est une pratique que nous tentons de prévenir. Mais l'imposition des investissements des institutions financières canadiennes à l'étranger est une autre question.
    Nous connaissons l'étude à laquelle vous faites allusion, et, pour calculer de manière estimative les impôts qu'on avait évité de payer, les auteurs ont pris comme point de départ le revenu des banques canadiennes gagné à l'étranger sur un certain nombre d'années et l'ont multiplié par un taux d'imposition canadien. À notre avis, ce n'est pas une analyse valide de l'évitement fiscal.
    Vous pourrez poursuivre à la prochaine série de questions.
    Monsieur Pacetti, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je remercie les témoins d'être venus.
    Selon moi, nous sommes ici pour deux choses: d'abord, nous tentons de cerner l'ampleur de ce phénomène, qu'on appelle évasion fiscale ou compte bancaire extraterritorial — essentiellement, cela reste de l'évasion fiscale. Pour ma part, j'estime qu'il y a deux types d'évasion fiscales, nationale et internationale.
    Je ne peux pas croire que vous n'ayez aucune estimation. Notre priorité devrait donc être de déterminer à combien s'élève la somme qui n'a pas été imposée, puis quel genre d'outils nous pouvons vous donner pour que vous puissiez mettre la main sur cet argent. Voilà de façon bien simple ce que nous tentons de faire ici.
    Nous avons vu différentes estimations, qu'elles viennent d'experts indépendants de l'OCDE ou d'ailleurs. Ma première question est donc la suivante: comment ces calculs sont-ils faits à l'interne? Vous faites sûrement un calcul quelconque. Je suis certain que le ministère des Finances fait ces calculs pour l'ARC.
    Comment chiffrez-vous l'évasion fiscale, que ce soit à l'échelle nationale ou internationale? Je comprends que ce ne peut être qu'un chiffre approximatif, parce que si vous connaissiez précisément ce chiffre, cet argent vous aurait déjà été versé, n'est-ce pas?
    Encore une fois, je suis désolé, mais nous ne savons pas ce que nous ignorons. Vous pouvez poser des hypothèses et obtenir ainsi un chiffre...
    Je vous arrête tout de suite.
    Quand vous constatez que des gens acceptent de divulguer volontairement leurs revenus dans le cadre du Programme des divulgations volontaires, n'établissez-vous pas une tendance? Y a-t-il davantage de divulgations volontaires quand les temps sont durs ou pendant les périodes de prospérité économique ou quand les Américains commencent à s'intéresser aux comptes bancaires extraterritoriaux? Il y a certainement une tendance.
    Certains pays ont déclaré une amnistie. Ils ont offert un taux d'imposition de 5 p. 100, 10 p. 100, 15 p. 100 ou 20 p. 100 à ceux qui acceptaient de divulguer tous leurs revenus. J'imagine que vous avez analysé cette possibilité, la possibilité d'imposer les revenus non encore déclarés à un taux fixe.
    Mes collègues de l'Agence du revenu du Canada auront peut-être quelque chose à ajouter, mais je peux vous dire que nous estimons que limiter les possibilités d'évasion fiscale réduira l'évasion fiscale. Au ministère des Finances, nous tentons d'élaborer des politiques qui donneront les outils que vous venez d'évoquer qui permettront à l'ARC d'avoir un meilleur accès aux informations et, ainsi, de réduire l'évasion fiscale. Les accords que nous signons en matière fiscale ressemblent au traité sur l'extradition, par exemple. Chaque fois que vous concluez un traité d'extradition avec un pays, c'est un endroit de moins où les fugitifs peuvent se réfugier. Chaque fois que vous concluez un accord d'échange de renseignements à des fins fiscales avec un pays dont les lois sur le secret bancaire limitent notre accès aux renseignements, c'est un endroit de moins où ceux qui veulent frauder le fisc pourront déposer leur argent.
    Et quand notre pays conclut un accord d'échange de renseignements à des fins fiscales — je crois que c'est l'appellation officielle — y a-t-il une augmentation des divulgations volontaires? Est-ce que nous récupérons davantage d'impôts? Devrions-nous agir plus rapidement?
    C'est une bonne question. Toutefois, il est encore trop tôt pour pouvoir y répondre, ces accords n'étant pas encore en vigueur. L'un a été déposé au début de l'année, ou peut-être à la fin de l'année dernière; 10 accords ont été déposés ces derniers jours, et je suppose que...
    Je suis désolé de vous interrompre, mais cela ne répond pas à ma question.
    Nous échangeons déjà des informations avec d'autres pays. Mais même dans le cas de pays comme les États-Unis, toutes les sommes qui traversent la frontière ne sont pas déclarées. J'ose à peine imaginer combien de temps il nous faudra pour obtenir de bons renseignements de pays comme les Bermudes, les îles Caïmans, ou la Dominique, sans vouloir cibler ces îles mais la tenue des dossiers dans certains de ces pays laisse beaucoup à désirer. Si nous avons du mal à suivre tout l'argent qui entre des États-Unis, ce n'est pas demain que les renseignements que nous obtiendrons de ces pays nous permettront de trouver les délinquants.

  (1625)  

    Pourrais-je intervenir?
    M. Massimo Pacetti: Oui, allez-y.
    M. Brian Ernewein:Premièrement, nous avons en effet une excellente procédure pour l'échange de renseignements avec les États-Unis. Dans bien des cas, cet échange de renseignements se fait automatiquement. Mes collègues pourront vous en dire plus, si vous le souhaitez, mais le système fonctionne très bien.
    Deuxièmement, en ce qui concerne la conclusion d'ententes d'échange de renseignements avec de nouveaux pays, il y a, je vous l'accorde, des doutes quant à la fermeté de leur engagement et à leur capacité de nous fournir les informations que nous leur demandons.
    Dans le cadre de ses travaux, le Forum mondial a justement entrepris une analyse en deux étapes. On examinera d'abord l'architecture juridique de tous les pays, y compris le Canada, pour déterminer si les lois et les ententes nécessaires à l'échange de renseignements sont en place.
    Pendant la deuxième étape, qui a été amorcée pour certains pays et commencera d'ici un an ou deux pour les autres, on analysera et évaluera le rendement sur le terrain pour s'assurer que tous ceux qui se sont engagés à échanger des renseignements le font véritablement.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à M. Carrier.

[Français]

    Bonjour, messieurs, mesdames.
    Les chiffres que vous nous présentez, madame Ricard, me semblent effarants. À la page 6, justement — je reviens là-dessus — vous dites : « En 2009 seulement, l'ARC a découvert 1 milliard de dollars en impôts impayés liés à des activités internationales ». C'est extraordinaire d'apprendre ça.
    Si on se met à la place des contribuables qui nous écoutent actuellement, je pense que ce n'est pas à notre honneur, en tant que gouvernement. C'est sûr qu'on attrape ces gens-là, mais si on a découvert un milliard de dollars, cela veut dire qu'il y a beaucoup plus d'argent qui n'est pas encore découvert. Je me demande où se trouve la lacune.
    Est-ce que vous faites des démarches auprès du gouvernement pour essayer de remédier à la situation? À mes yeux, c'est tout à fait anormal qu'après avoir vérifié des dossiers, on découvre tout à coup pour un milliard de dollars en impôts impayés au cours d'une année. Quand on pense à toutes les tracasseries que de simples contribuables peuvent subir de la part de l'Agence du revenu, je pense qu'il y a beaucoup d'argent à aller chercher ailleurs. Est-ce que vous exprimez une recommandation?
    Dans les deux premières pages de votre présentation, tout est beau, tout va bien, on semble vivre le parfait bonheur, mais en voyant les chiffres que vous nous mentionnez, la situation, selon moi, devient dramatique. J'aimerais avoir une idée des recommandations que vous faites au gouvernement pour améliorer la situation.
    Comme nous avons plus de vérificateurs, nos approches sont plus sophistiquées. Nous travaillons de concert avec nos partenaires internationaux qui subissent le même problème. La planification fiscale abusive à l'échelle internationale a commencé à attirer l'attention il y a quelques années. Nous avons donc commencé à unir nos efforts à ceux d'autres pays. Par exemple, il y a quelques années, nous avons créé le Groupe de travail des sept pays sur les paradis fiscaux. Le Canada en est le fondateur et le leader. Comme nos moyens sont sophistiqués, nous arrivons à recueillir de l'information sur les stratagèmes d'évitement fiscal abusif qui sont découverts à l'échelle mondiale et à en suivre la trace.
    En 2004, nous avons créé, en collaboration avec d'autres pays, le Centre d'information conjoint sur les abris fiscaux internationaux. Il y a un bureau à Washington et un autre à Londres. Il y a six pays participants, en ce moment. Pour notre part, nous avons un représentant à Washington. Des renseignements sont échangés tous les jours.

  (1630)  

    Concernant les dossiers que vous vérifiez, est-ce qu'il s'agit, dans certains cas, de revenus générés par des entreprises canadiennes qui vous échappent, dont le revenu n'apparaît nul part, mais se retrouve tout à coup dans un compte à l'étranger? Est-ce qu'il faudrait d'abord combler une lacune ici, au niveau de la vérification locale, pour éviter d'apprendre par d'autres pays qu'on a laissé s'échapper beaucoup de revenus?
    Je vais tenter de répondre à cela. Ce que vous venez de décrire fait partie de l'évitement fiscal. On évolue dans une économie mondialisée. Il est donc possible que des sociétés essaient de transférer des revenus à des endroits où les taux d'impôt sont moins élevés et où les traités permettent certaines choses. Mais les recouvrements auxquels nous procédons nous permettent de mieux comprendre les stratagèmes. À partir de cela, nous pouvons faire des recommandations au ministère des Finances afin d'apporter des changements à la loi et d'accroître la conformité.
    Au sujet des 2 000 cas relevés à la banque HSBC, en Suisse, vous avez mentionné plus tôt que la vérification ne semblait pas très avancée. Si c'est le cas, je suis surpris que vous n'agissiez pas de toute urgence, au moins pour vérifier ces cas, qui sont connus et portés à votre attention. L'enquête à cet égard devrait se faire plus rapidement.
    J'aimerais préciser que les vérifications sont commencées. Aucune n'est terminée, mais il faut dire que la liste n'a été obtenue qu'assez récemment; c'était au printemps 2010, je crois. Nous en sommes encore à analyser l'information que nous avons reçue et à déterminer celle qu'il nous manque.

[Traduction]

    Merci.
    C'est maintenant au tour de M. Wallace.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos invités d'être venus témoigner aujourd'hui.
    Dans ce domaine, comme tant d'autres, on peut lancer bien des chiffres mais parlons franchement, le public ne comprend pas très bien ce qui se passe; moi non plus d'ailleurs, avant de commencer à m'intéresser à la question. Je pense en toute justice qu'il faut le souligner.
    Par exemple, on n'a parlé des sommes récupérées. On n'aurait pu parler des impôts perçus et non des vérifications des activités internationales. J'ignore ce qui se passait voilà 15 ou 20 ans, quand cette personne était ministre, mais j'imagine qu'on s'affairait à percevoir des impôts.
    Permettez-moi de donner quelques exemples. D'après ce que vous avez répondu à d'autres députés, votre organisme ne perd pas beaucoup de temps à deviner le montant des impôts impayés. Vous sévissez contre ceux qui se livrent à l'évitement fiscal — ce qui n'est pas un acte criminel, mais entraîne quand même certaines pénalités, etc., et nous devons récupérer cet argent — ou ceux qui ne paient pas leurs impôts délibérément, ce qui est un acte criminel. D'après les réponses que vous avez données jusqu'ici, vous travaillez activement dans ce sens.
    D'après les statistiques que vous m'avez données, il y avait environ 278 cas en 2005 et 2006, et quelque 175 millions de dollars ont été recouvrés — c'est-à-dire découverts, récupérés et remboursés. L'année dernière, à cette date, on avait découvert environ 1 250 cas qui représentaient environ un milliard de dollars.
    Est-ce parce que vous avez plus de ressources à présent? Affectons-nous plus de gens et d'argent à cette activité? Est-ce cela qui explique cette augmentation faramineuse des sommes récupérées?
    C'est exact.
    Et depuis quand le processus est-il en place? Est-ce que cela fait un an, deux ans, trois ans? Peut-on embaucher des gens pour faire ce genre de travail?
    Quand avons-nous commencé à améliorer la situation sur ce plan?
    Permettez-moi de répondre. Je pense que je saisis le sens de la question.
    Voilà quatre ou cinq ans nous avons reçu de nouveaux fonds grâce auxquels nous avons affecté plus de ressources à l'établissement des prix de cession et aux cas de planification fiscale abusive. Nous chargeons des agents des services fiscaux de ce travail. Il y a donc plus d'employés qui font les vérifications, ce qui a permis d'améliorer les résultats.
    Un des députés de l'opposition a prétendu à la Chambre que nous avions réduit nos activités dans ce domaine de 16 p. 100, puisque le gouvernement avait réduit le budget d'application de la loi de 16 p. 100.
    Cette allégation est-elle exacte? Comment a-t-il pu arriver à ce chiffre?

  (1635)  

    Nous avons reçu deux fois, en 2006 et en 2007, des fonds additionnels pour travailler sur les dossiers internationaux. Nous avons augmenté notre effectif des vérifications internationales de 44 p. 100, de 300 à 440 employés. Le nombre de nos employés affectés aux cas de planification fiscale abusive est passé de 244 à 500. Mais ils ne sont pas les seuls à travailler sur ce dossier.
    Nous avons aussi doublé le personnel de la planification fiscale abusive. Bien sûr, pour le faire il faut avoir des fonds supplémentaires, par exemple pour retenir les services d'avocats afin d'intenter des poursuites; les autres...
    Certains ont également prétendu que notre gouvernement ferme les yeux sur l'évasion fiscale et que nous avons changé les règles pour être plus indulgents avec les fraudeurs.
    Est-ce exact? Cela s'est-il passé dans votre ministère? Y a-t-il eu des changements?
    Effectivement.
    C'est au témoin que je pose la question, pas à vous.
    Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Nous avons augmenté nos ressources, nos connaissances, notre expertise, le raffinement de nos méthodes et nous nous attaquons à ces cas.
    Nos employés qui travaillent sur ces dossiers le font avec acharnement. Cela prend beaucoup de patience, de rigueur, et de connaissances. Ils doivent constamment se perfectionner et se tenir au courant des nouveautés dans le domaine.
    Continuez votre bon travail et merci beaucoup.
    Merci.
    À vous, monsieur Brison.
    Je félicite M. Wallace, un député conservateur, pour son fervent soutien à la fonction publique. Il est bon de voir...
    Vous avez été un conservateur.
    Non, j'étais un progressiste-conservateur. C'est très différent.
    Des voix: Oh, oh!
    L'hon. Scott Brison: Quoiqu'il en soit, j'ai une question sur les rapports entre les auteurs de fraudes fiscales au Canada et d'éventuels produits du crime organisé.
    Travaillez-vous avec d'autres corps policiers et organismes d'enquête, y compris l'unité des crimes économiques de la GRC? Collaborez-vous étroitement avec eux sur certains de ces dossiers, en vous fondant sur la présomption que certains criminels voudraient cacher l'argent obtenu illégalement en se servant de comptes dans d'autres pays?
    Merci, monsieur le président.
    En effet, nous travaillons beaucoup avec des corps policiers et le CANAFE. Il s'agit d'un système qui permet de transmettre à l'ARC des données financières lorsqu'on soupçonne de l'évasion fiscale.
    Nous collaborons également avec nos collègues du ministère des Finances pour obtenir les modifications dont nous avons besoin. Dans le dernier budget, l'évasion fiscale a été considérée comme une infraction sous-jacente. Le gouvernement a modifié différentes lois pour faire en sorte que lorsque nous intentons des poursuites et que nous prouvons qu'il y a eu évasion fiscale, les dispositions relatives au blanchiment d'argent et aux produits de la criminalité s'appliquent, ce qui nous permet de saisir les actifs et l'argent des personnes reconnues coupables de fraudes fiscales.
    Y a-t-il des liens importants entre les comptes détenus à l'étranger et le crime organisé?
    En tant qu'administrateur des impôts, je peux difficilement répondre à une telle question. Mes collègues du CANAFE et de la GRC seraient mieux placés que moi pour y répondre.
    Certaines banques canadiennes ont des services très efficaces de gestion de fortunes privées. C'est le cas de la Harris Bank, avec la Banque de Montréal. Toutes les banques à charte ont de très puissants groupes de gestion des fortunes.
    Si on prend le cas du Crédit Suisse, par exemple, ou d'une banque UBS, y a-t-il une différence entre les services offerts par le Crédit Suisse et la banque privée Harris? Y a-t-il une différence entre les produits qu'elles offrent?

  (1640)  

    En tant que fonctionnaire, je n'ai jamais traité avec le Crédit Suisse ou ce genre d'institution. Je ne peux donc pas commenter personnellement les services qu'elles offrent, puisque je ne les connais pas.
    D'une certaine façon, je suis moi aussi un employé du gouvernement. Je suis donc dans la même situation que vous.
    Étant donné la vigueur des banques canadiennes et l'efficacité de leurs services de gestion privée de patrimoine, ne trouvez-vous pas qu'il y a une différence clé entre les services qu'une banque canadienne peut offrir à ses clients et ceux du Crédit Suisse ou de l'UBS?
    Je ne crois pas que nous pouvons répondre à cette question.
    Puis-je faire une suggestion? Sans vouloir vous dire comment faire votre travail, si j'étais à votre place je présumerais que ce qu'une banque suisse peut offrir de plus qu'une banque canadienne, c'est la capacité de cacher assez facilement de l'argent. N'y a-t-il pas un nombre disproportionné de clients canadiens du Crédit Suisse ou de la banque UBS qui ont des comptes à l'étranger? Vous êtes-vous penché sur la question?
    Merci, monsieur Brison.
    Madame Ricard.
    Il n'y a pas beaucoup d'institutions de ce genre au Canada. Si j'ai dit que nous ne pouvons pas répondre à cette question...
    Ça ne prendra pas beaucoup de temps pour suivre ces pistes.
    Merci pour la suggestion.
    J'essayais de vous aider.
    Merci.
    Merci, monsieur Brison.
    À vous, monsieur Menzies, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également nos témoins.
    Voilà un échange fort instructif pour beaucoup d'entre nous. Nous savons tous qu'il y a de tels cas de fraude et nous en sommes tous plutôt indignés. Les Canadiens honnêtes paient leurs impôts, même si personne n'aime payer de l'impôt. Je vous félicite d'essayer de trouver ceux qui ne les paient pas.
    Je crois qu'en octobre dernier notre premier ministre a signé une entente avec mon amie, madame Leuthard, en Suisse. Est-ce là le genre d'entente privilégié par l'OCDE?
    Monsieur Ernewein, pourriez-vous répondre à cette question?
    En un mot, oui. Nous avons une convention fiscale sur la double imposition avec la Suisse. Mais en ce qui concerne l'échange de renseignements, cette convention n'est pas aussi complète que ce que nous souhaiterions comme norme pour l'OCDE, comme je l'ai décrit tout à l'heure.
    Dans un protocole relatif au traité signé en octobre, les Suisses ont accepté d'adopter la nouvelle norme de l'OCDE qui englobe tous ces aspects. Essentiellement, cela correspond aux accords d'échange de renseignements à des fins fiscales que nous signons avec d'autres pays et qui n'incluent pas une convention globale sur la double imposition.
    Pour poursuivre dans la même veine, j'ai passé une journée à Berlin à la demande du ministre des Finances. Lorsque j'assistais à une réunion de l'OCDE. Je crois que c'était en 2009. Trois ou quatre pays étaient furieux parce qu'on les avait critiqués ouvertement pour ne pas avoir respecté les normes de l'OCDE. Nous nous attendions à une assemblée très houleuse mais ces pays ont déclaré devant tous les autres qu'ils allaient se conformer à ces normes. Nous n'avons pas critiqué ces pays en les désignant nommément, mais est-ce que cette approche est efficace dans l'ensemble ou l'a-t-elle été seulement dans ce cas-là?

  (1645)  

    Certains de ces pays trouvent que d'autres manquaient de diplomatie en les exhortant à échanger davantage de renseignements. À quelques reprises, différents pays ont affirmé qu'ils étaient souverains et ne pas apprécier les pressions exercées sur eux pour qu'ils apportent de tels changements.
    Quoi qu'il en soit, nous estimons que nous visions tous le même objectif. Certes, quelques pays se sont montrés réticents. Comme je l'ai dit, c'est le Sommet du G20 de 2009 qui a marqué le point tournant; plongés dans la crise financière, bien des pays ont décidé que le temps de l'indulgence était terminé et exigeaient de la coopération. Et effectivement, ils l'ont eue.
    J'ai aussi indiqué le nombre d'accords d'échange de renseignements à des fins fiscales qui ont été signés depuis. Je pense que nous avions raison en l'occurrence vu que les événements ont évolué dans le bon sens, même si je n'irais pas jusqu'à dire que « la fin justifie les moyens ».
    Vous avez dit que 14 de ces accords d'échange de renseignements à des fins fiscales étaient en cours de négociation à l'heure actuelle. À mon sens, cela ne représente pas encore beaucoup de pays. Est-ce parce que les autres pays hésitent à se manifester ou parce que les ententes déjà signées sont suffisantes.
    Nous avons négocié 25 AERF en tout, dont 11 ont déjà été signés et 14 sont en négociation. Si on ajoute à cela le réseau de traités que nous avons déjà conclus avec 87 pays, et il y en a d'autres qui doivent être ratifiés sous peu, cela représente quelque 120 accords qui visent 110 ou 115 pays, soit une bonne partie du monde industrialisé.
    Bien sûr, nous n'avons pas de traités ou d'accords d'échange de renseignements à des fins fiscales avec tous les pays, mais l'OCDE a identifié les pays qui méritent le plus d'attention et le Canada, comme d'autres pays, ont entamé des démarches pour signer avec ces pays des accords d'échange de renseignements à des fins fiscales.
    Comment les petits territoires, auxquels nous n'accordons pas généralement beaucoup d'attention, comme l'île de Guernesey, réussissent à attirer de l'argent provenant de Canadiens?
    Sa proximité au Royaume-Uni et à l'Europe est un facteur important. Personnellement, j'ai amélioré mes connaissances en géographie à force de travailler dans ce domaine et j'ai appris l'existence de certaines petites îles du Pacifique Sud dont je n'avais jamais entendu parler auparavant. Du reste, il n'est pas nécessaire d'avoir un vaste territoire pour être souverain et pouvoir offrir certains avantages fiscaux ou réglementaires. Il y a de petits pays qui ont compris qu'il était avantageux de le faire, ce qui nous préoccupe. Nous essayons de trouver un équilibre.
    Je vais redonner la parole à M. Szabo.
    On entend souvent dire que si chacun payait sa juste part d'impôt, la facture de tous les contribuables baisserait. J'en suis persuadé. Par conséquent, il est sans doute primordial aux yeux des Canadiens que nous soyons rigoureux et que nous usions de tous les outils disponibles, au Canada et à l'échelle internationale, pour récupérer les impôts impayés. Il importe aussi que les sommes récupérées dépassent largement les ressources investies pour les recouvrer, parce que l'examen des coûts d'un dossier individuel indique généralement une quantité considérable de coûts afférents, par exemple les frais juridiques.
    Cela dit, nous traitons en fait de l'économie souterraine, qui représenterait des dizaines de milliards de dollars, ce qui devrait tous nous préoccuper. J'aimerais donc savoir si le ministère des Finances a une stratégie pour combattre l'économie souterraine. À quand remonte la dernière étude ou consultation des Canadiens sur le sujet? Sait-on quelles mesures les Canadiens sont prêts à accepter — pourvu que leur vie privée soit protégée — pour qu'on identifie le plus possible de fraudeurs fiscaux?
    C'est une bonne question et il est vrai que nous tenons à ce que le système en place renforce la capacité de l'ARC de faire respecter les lois du Canada.
    D'abord, je rappellerai que le Canada a un système d'autocotisation. Dans la majorité des cas, les Canadiens sont honnêtes qui déclarent leurs revenus et paient leurs impôts. Quant à mettre en place, pour ceux qui ne le font pas, davantage de règles ne réduit pas nécessairement les cas de fraude fiscale. Rédiger une autre loi pour dire aux contribuables qu'ils doivent absolument payer leurs impôts ne vas pas nécessairement faire avancer les choses. Il faut, pour ceux qui cherchent à éviter de payer leurs impôts, mettre en place d'autres sortes de règles ou communiquer à Revenu Canada davantage de renseignements qui lui permettront de retracer ces contribuables.
    Dans le contexte de l'impôt international, sur lequel porte la séance d'aujourd'hui, je crois, j'ai mentionné quelques nouveaux éléments dans ma déclaration préliminaire. Nous avons en place depuis un certain nombre d'années des règles sur la déclaration d'actifs à l'étranger. Ces règles n'exigent pas de déclaration des revenus mais bien l'existence d'actifs étrangers; c'est une autre façon de trouver des solutions à ce problème.
    Nous avons mis en place il y a quelque temps des règles qui traitent de l'imposition des investissements dans de prétendues entités de placement étranger...

  (1650)  

    D'accord. Mon temps s'épuise et j'aimerais poser rapidement deux autres questions.
    La première concerne... Nous avons des accords de libre-échange avec environ 90 pays différents. Pourquoi n'ajoutons-nous pas comme condition préalable à ces accords que le pays signe aussi un accord d'échange de renseignements à des fins fiscales? Ne serait-ce pas une bonne idée?
    Peut-être. Je n'ai pas de réponse toute prête. Je dirai toutefois qu'il y aurait probablement énormément de chevauchements dans les critères que nous appliquerions tant en ce qui concerne l'interaction économique, les relations diplomatiques et autres choses du genre.
    C'est une idée. Si le pays est un bon partenaire commercial et que ce partenariat vaut la peine d'être créé, il me semble que nous devrions travailler dans l'intérêt des deux pays.
    Enfin, j'aimerais parler de ces entreprises sur Internet qui transmettent à tout le monde au Canada des millions et des millions de messages disant qu'il y a un problème avec le compte à la Banque TD, que le compte a été fermé, qu'il faut que le récipiendaire réponde immédiatement pour corriger le problème. Il y a un logo sur ces courriels. On fait la même chose pour la Banque Scotia, la Banque Royale et chacune de nos banques nationales.
    Les expéditeurs échappent à la loi canadienne mais il ne fait aucun doute qu'ils fraudent énormément de Canadiens. C'est tout aussi inacceptable que l'évasion fiscale et l'évitement illégal.
    En quoi ces pratiques influencent-elles les relations internationales quand bon nombre de ces pays, dont l'Inde, la Chine, etc., hébergent des entreprises téléphoniques et des banques en ligne qui bombardent les Canadiens de tentatives de fraudes?
    Une courte réponse s'il vous plaît.
    La courte réponse c'est que je comprends certainement vos préoccupations.
    Je ne crois pas qu'il existe un lien direct entre ces pratiques et l'échange de renseignements à des fins fiscales. D'ailleurs, communiquer des renseignements à des fins fiscales à d'autres pays dans le but d'établir les avis de cotisation dans cet autre pays, et vice versa, est quelque chose qui nous préoccupe car l'information peut être utilisée à d'autres fins. Cela mérite réflexion.
    Merci.
    Madame Block, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie aussi nos témoins d'être venus aujourd'hui.
    Madame Ricard, dans votre déclaration préliminaire, vous dites:
    La clé de la stratégie nationale et internationale de l'ARC en matière de prévention de la planification fiscale abusive et de l'évasion fiscale est de permettre aux contribuables d'observer plus facilement leurs obligations fiscales. Cette stratégie repose aussi sur une exécution soutenue et sur le rappel constant que les conséquences de l'évasion fiscale ou de l'évitement fiscal sont graves.
    Vous avez aussi dit: « Nous nous attendons à ce que les contribuables agissent de bonne foi. S'ils concluent des opérations financières dont le but ultime est l'évasion fiscale ou l'évitement fiscal, nous agissons ». Ailleurs vous parlez de la différence qu'il y a entre l'évasion et l'évitement fiscal et vous dites que l'évitement fiscal consiste à contrevenir « à l'objet et à l'esprit des lois fiscales canadiennes ». Je suppose qu'en cas « d'évasion » il y a contravention de la lettre de la loi.
    Quand on a déterminé qu'il y a eu infraction à la lettre de la loi et qu'une enquête doit être ouverte, quel est le déclencheur? Puis, j'aimerais poser des questions au sujet des condamnations pour évasion fiscale.

  (1655)  

    Plus tôt aujourd'hui nous en avons parlé et j'ai tenté d'expliquer la différence entre les poursuites au civil et les poursuites au criminel.
    Il s'agit essentiellement d'une question de fardeau de la preuve. Quand nous augmentons les cotisations fiscales pour évitement, c'est une simple question de prépondérance de la preuve tandis que quand nous intentons des poursuites au criminel pour évasion fiscale, c'est hors de tout doute raisonnable.
    Cela tient essentiellement à la quantité de documentation et de preuves que nous devons réunir, en consultation avec nos collègues du ministère de la Justice, avant d'intenter une poursuite pour évasion fiscale.
    Pouvez-vous m'expliquer comment se déroule un procès pour évasion fiscale et combien de temps peut s'écouler avant une condamnation?
    Je peux vous dire, en ma qualité d'avocat, que la réponse simple c'est que tout cela prend énormément de temps. Dans les procès au criminel, divers facteurs expliquent la longueur des procédures. À l'agence, nous rendons publics les cas de réussite dans les affaires criminelles.
    Par conséquent, nous déployons énormément d'effort pour monter les dossiers afin qu'ils soient, pour ainsi dire, aussi solides que possible pour que nous ayons gain de cause quand un cas d'évasion fiscale se retrouve devant la cour. Je crois que nos statistiques révèlent que dans plus de 90 p. 100 des poursuites que nous intentons pour évasion fiscale, nous avons gain de cause. C'est le résultat de tout l'effort qui est déployé pour monter le dossier.
    Il faut énormément de temps pour préparer un dossier et le mener jusqu'au procès. Même quand la cour entend l'affaire, les contribuables que nous poursuivons font tout en leur pouvoir pour retarder le processus. Ça prend tout simplement beaucoup de temps.
    Le processus est long et les dossiers sont complexes mais le nombre de vérifications pour évitement fiscal est en hausse comme l'est le nombre de cas de demandes péremptoires à l'égard de personnes désignées et non désignées. Prévoyez-vous que le nombre de condamnations augmentera en raison du travail que vous avez fait au cours des quatre dernières années?
    Je dirais que dans un monde idéal il y aurait moins d'évasions fiscales. Beaucoup de facteurs entrent en jeu. Mon collègue du ministère des Finances a parlé des accords d'échange de renseignements à des fins fiscales qui nous permettront d'obtenir de divers pays des renseignements grâce auxquels nous pourrons réexaminer les cotisations. Bien que ces accords d'échange de renseignements à des fins fiscales ne soient pas encore en place, la crainte que l'ARC puisse avoir accès à ces renseignements a déjà incité certaines personnes à prendre l'initiative de régulariser leur situation.
    Il n'y a pas de réponse facile. Y aura-t-il une augmentation? C'est possible, en ce sens que si les gens continuent d'éviter de payer leurs impôts, malgré que nous disposions de plus d'outils grâce aux accords d'échange de renseignements à des fins fiscales, nous pourrons de plus en plus facilement dans les années à venir obtenir les renseignements qui nous aideront à monter des dossiers.

[Français]

    Monsieur Mulcair.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Ernewein, dans un premier temps, je vais spontanément vous offrir de revenir avec Léo-Paul Lauzon et l'équipe de l'Université du Québec à Montréal, étant donné que vos collègues de l'autre endroit n'avaient pas eu le temps de prendre connaissance de leur étude. Vous avez répondu en évoquant de façon assez péremptoire et globale la non-validité de leur approche. J'ai hâte de vous entendre étayer votre position d'arguments substantiels, parce que l'étude de l'UQAM me paraissait assez valable.
    Je vous lance l'invitation officieusement, mais soyez assuré qu'elle sera suivie d'une invitation plus officielle.

[Traduction]

Je vais très rapidement piger dans la liste des affaires devant les tribunaux pour tenter d'obtenir des réponses des fonctionnaires de l'Agence du revenu du Canada sur l'état d'avancement du dossier.

[Français]

    Dans le cadre d'une enquête menée par la France au sujet d'une filiale suisse de la banque HSBC, on a découvert plus d'un milliard de dollars d'avoirs cachés en Suisse par des Canadiens. Vous enquêtez sur ce sujet. Où en êtes-vous, précisément? S'agit-il toujours du dossier que vous dites vouloir étudier depuis le printemps dernier et à propos duquel vous n'avez pas de suivi à nous offrir aujourd'hui? C'est bien ça? D'accord.
    Il y a aussi le cas de RBC Dominion Securities. J'ai ici un affidavit provenant d'un de vos vérificateurs. Je m'excuse, mais c'est en anglais. On peut y lire ce qui suit:

  (1700)  

[Traduction]

... des résidents canadiens utilisent des montages comportant des entités titulaires de comptes au Liechtenstein et des comptes à l'étranger, ce qui leur permet de se faire passer pour des non-résidents et de cacher leurs investissements et leurs autres revenus de l'ARC et qui se soustraient à leur obligation de payer l'impôt au Canada...

[Français]

    Cela se retrouve dans le Globe and Mail et à la CBC. Où en est-on pour ce qui est du Liechtenstein?
    Pour ce qui est du Liechtenstein, on a déjà fait 26 vérifications jusqu'au printemps. Jusqu'en octobre, on a fait 30 vérifications. On poursuit les vérifications. On a obtenu de bons résultats à la suite des 26 vérifications, soit 5,8 millions de dollars.
    Selon le Globe and Mail du 12 janvier 2010 — il y a 11 mois —, votre agence est aussi en train de tenter d'obtenir des résultats auprès de Scotiabank en ce qui concerne un fonds fiduciaire qui détiendrait l'avoir de plusieurs familles très riches, y compris 900 millions de dollars qui appartiendraient à six grandes familles canadiennes liées aux affaires.
    Il y a la filiale irlandaise de Scotiabank. Cette dernière gère le fonds fiduciaire et prétend qu'elle ne peut avoir accès à l'information détenue par sa propre filiale. On se comprend: il s'agit d'une filiale d'une banque canadienne, propriété à 100 p. 100 de la banque canadienne. Elle possède cette information, mais elle dit qu'elle ne peut pas donner l'information qui provient de sa filiale en Irlande. Où en est rendu cette affaire?
    L'article 241 de la loi nous empêche de parler de cas, de dossiers particuliers.
    Même si vous ne me parlez pas du cas particulier, pourriez-vous au moins me dire, comme pour les autres cas, que vous poursuivez cette affaire, ou est-ce que ça tombe à l'eau? C'est d'intérêt public et c'est pourquoi on en discute aujourd'hui.
    C'est trop spécifique.
    Ah! c'est parce que ça concerne une banque.
    Parce que ça concerne...
    ... des familles riches. En fait, vous avez parlé des autres cas, plus tôt.
    On a parlé de listes; on n'a pas parlé de situations particulières.
    Je ne vous ai pas demandé d'identifier les six familles. On les connaît toutes.

[Traduction]

    Monsieur le président, je suis désolée de ne pas pouvoir répondre à des questions aussi précises.

[Français]

    Ah! zut, on aurait tellement voulu avoir un peu plus d'information, monsieur le président.
    On va maintenant parler un peu de votre évaluation de ce que cela rapporte d'investir dans l'expertise dont vous avez parlé. Vous avez dit que l'agence comptait dans ses rangs des gens dévoués — on n'en doute pas.
    Y a-t-il un calcul de l'avoir public, en termes de gestion, à savoir que si l'on investit tant en répression et en contrôle, ça va nous rapporter tant? Avez-vous ce genre d'analyse objective sur l'investissement, et qu'est-ce que cela rapporte quand on investit dans l'application rigoureuse des lois fiscales?
    Il vous reste 30 secondes.
    Ça fait partie de la façon dont on établit nos coûts pour dire si on investit tant de ressources. Selon l'expérience passée, qu'est-ce que ça pourrait...? Mais ce n'est pas objectif.
    Vous n'avez pas de chiffres?
    Non.
    Vous n'avez pas de chiffres établissant que si on investit plus là-dedans, ça va rapporter plus?
    Tout dépend du costing qu'on serait en train de faire. On regarde, selon nos expériences passées, ce que ça donne dans différents domaines et ce que ça pourrait vouloir dire.
    Merci.
    Soyez assuré, monsieur Ernewein, que l'équipe de l'Université du Québec à Montréal va avoir très envie de vous entendre.

[Traduction]

    Un très bref commentaire, monsieur Ernewein.
    Je dois dire que le comité s'est déjà penché sur cette question et je suis ravi d'être de nouveau ici. Je me ferai un plaisir de faire quelques observations à ce sujet aujourd'hui si cela intéresse le comité, pour tenter d'expliquer ce qui suscitait de l'inquiétude mais je signale en passant que le comité a déjà examiné la question.
    D'accord. Merci.

[Français]

    Je veux remercier M. Ernewein de sa sollicitude quant à notre horaire chargé. Je tiens à le rassurer: l'équipe de l'UQAM va se faire un devoir de venir défendre son étude. Je serai là pour entendre le débat, car cette équipe a pondu une étude, et M. Ernewein a des affirmations à faire à cet égard. Aussi, j'ai hâte de pouvoir confronter les deux.

[Traduction]

    Nous serons heureux de les accueillir.
    Nous allons maintenant à M. Pacetti, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame Bergevin, vous avez dit que depuis l'annonce des banques suisses à l'effet que l'information était disponible, le nombre de cas a augmenté de 26 à 30. Est-ce exact?
    En fait, j'ai dit qu'on avait fait 26 vérifications pour ce qui est des comptes au Liechtenstein, en date du mois d'avril. Je vous ai également fourni une donnée un peu plus à jour pour ce qui est du mois d'octobre, soit 30 vérifications. Je crois savoir que ces deux chiffres ont été publiés.
    Donc, jusqu'en avril, vous avez fait 26 vérifications. Et d'avril à octobre, il y a eu seulement quatre autres vérifications. Est-ce exact?
    Êtes-vous satisfaite du nombre de dossiers que vous avez ouverts durant ce temps? Je sais que ça prend du temps, mais qu'en est-il de votre satisfaction? Pour ma part, je pense que quatre dossiers en six mois, ce n'est pas fantastique.

  (1705)  

    Compte tenu de la complexité des dossiers et du peu d'information dont nous disposons, je suis satisfaite du progrès.
    Vous parlez de complexité, mais la plupart des cas ne sont-ils pas semblables, quand il s'agit de comptes à l'étranger, dans les banques suisses ou ailleurs?
    Oui, c'est un peu la nature de la chose. Ce sont des dossiers complexes. De toute évidence, les vérifications prennent normalement un certain temps, dans des circonstances normales. Or, les circonstances de celles-ci sont plus complexes. Il est donc normal que ça prenne plus de temps.
    Les cas que vous traitez concernent-ils surtout des individus ou des entreprises?
    Il y a un peu des deux. Je n'ai pas le pourcentage, mais il peut s'agir d'entités comme des fondations, des fiducies, ou il peut s'agir d'individus.
    Sont-ce des fondations d'oeuvres de charité?
    Seulement des fondations.
    J'ai suggéré qu'on ait recours à une amnistie. J'en avais parlé plus tôt, lors du premier tour. Ne serait-il pas plus rapide et plus efficace, n'obtiendrait-on pas un meilleur rendement si on accordait une amnistie à ces gens pour un montant forfaitaire? Je ne sais pas quel est le montant, mais je sais que cela se fait dans d'autres pays, en Europe, notamment. Cela ne serait-il pas un bon outil?
    Chaque pays doit décider de ses politiques selon ses propres besoins. Pour ma part, je travaille dans le domaine de l'impôt depuis un certain temps. Nous avons toujours pensé que notre nature canadienne nous portait plutôt à nous assurer qu'on applique la loi et qu'on utilise nos ressources pour faire en sorte que les Canadiens qui doivent de l'impôt paient leur part. L'amnistie qu'ont accordée certains pays a peut-être envoyé un mauvais message à certaines personnes.
    Mon collègue Paul Szabo vient de dire qu'en ce qui a trait à l'immigration, notre système de réfugiés permet parfois à des gens de rentrer au pays. On pourrait peut-être faire la même chose et faire entrer un certain montant d'argent.
    C'est un peu décevant de n'avoir que quatre dossiers et de constater que ceux-ci ne sont même pas encore finalisés après six mois. On ne sait même pas quel est le résultat, parce que même lorsque vous aurez envoyé un avis de cotisation, ça ne veut pas dire que vous êtes certains de collecter des sommes d'argent.
    On a plusieurs dossiers. En un an, notre initiative concernant la planification agressive de l'impôt international nous a permis de traiter 1 251 dossiers.
    Imaginez combien d'argent on pourrait économiser en envoyant des vérificateurs ailleurs. On pourrait simplement faire entrer l'argent, sans travail et sans devoir: on demande un pourcentage, je ne sais pas lequel. Je suis très surpris que vous n'ayez pas fait d'analyses ou d'études là-dessus. Plus les années avancent, plus les gens savent qu'ils doivent payer, et moins ils auront la volonté de retourner l'argent, de le rapatrier.

[Traduction]

    J'aimerais faire un commentaire — qui sera pertinent j'espère, pour compléter la réponse de mon collègue.
    L'idée d'une amnistie n'est pas carrément déraisonnable; personne ne dit cela, je crois. Mais elle comporte des incitatifs qui nous préoccupent. C'est en quelque sorte une récompense pour non-observation de la loi si, du fait que vous n'avez pas payé vos impôts, vous n'avez pas à payer les intérêts et les pénalités quitte à rembourser une fraction de l'impôt exigible — et vous vous en sortez mieux que si vous aviez payé vos impôts au départ.
    Il y a aussi le risque de récidive. Si l'on déclare une amnistie, quelle est la possibilité qu'il y en ait une autre à l'avenir? Ce serait un incitatif à ne pas payer l'impôt dans l'espoir de profiter de la prochaine amnistie. C'est donc un choix délicat.
    Je comprends tout cela. Voilà pourquoi je dis qu'il faudrait étudier la question.
    Merci.
    Monsieur Paillé.

[Français]

    Je veux revenir sur la déclaration que M. Ernewein a faite plus tôt au sujet des renseignements qu'on n'a pas, apparemment, notamment sur les institutions bancaires. Ça m'étonne beaucoup parce qu'en vertu de la Loi sur les banques, qui est du ressort du ministre des Finances, les institutions bancaires ont l'obligation de faire un rapport chaque année. Quelques-unes d'entre elles ont déjà publié celui du 31 octobre 2010 et je présume qu'au ministère des Finances, ainsi qu'à l'Agence du revenu, on a ces rapports. Chose certaine, on a tous ceux du 31 octobre 2009. Je trouve curieux qu'on dise ne pas connaître ces chiffres.
    Par exemple, à la page 133 du rapport annuel de la Banque Scotia, on dit qu'il y avait 10 paradis fiscaux et que ça faisait économiser 325 millions de dollars en impôts au Canada. À la page 128 du rapport annuel de la RBC, on dit que cette banque a 28 filiales dans des paradis fiscaux et qu'elle épargne 360 millions de dollars en impôts aux Canadiens. On ne parle pas ici de sommes imposées sur leurs revenus, mais d'impôts qu'ils doivent. Pour ce qui est de la TD, on parle à la page 129 de quatre filiales et on dit que la somme totalise 450 millions de dollars. Du côté de la CIBC, on dit à la page 150 qu'il y a 12 paradis fiscaux et que le montant se chiffre à 118 millions de dollars. Ces gens ne sont pas très efficaces. Quant à la Banque de Montréal, on parle à la page 152 de trois paradis fiscaux et d'une somme de 212 millions de dollars. Enfin, à la page 144 du rapport de la Banque Nationale, on note qu'avec deux pays seulement, cette banque épargne 45 millions de dollars. Au total, on parle de 59 pays, dont neuf sont sur la liste grise; 11 d'entre eux ont signé avec le Canada des accords qui ne sont cependant pas en vigueur, et 14 n'ont pas signé d'accord mais participent présentement à des négociations. Pour 2009, on parle de 1,5 milliard de dollars. Je suis étonné d'entendre dire qu'on n'a pas de renseignements.
    Comment se fait-il que la main gauche du ministre des Finances ne soit pas en mesure de dire à sa main droite qu'un milliard et demi de dollars sont disponibles? On le dit chaque année, et je vous gage ma chemise — quoique vous ne la voulez peut-être pas — que pour le 31 octobre 2010, ça va être pire encore. Selon moi, conclure une amnistie, c'est l'équivalent de devenir amnésique. C'est comme si on disait que tout va bien et qu'on oublie ça.
    Comment se fait-il que vous n'alliez pas chercher cette information, qui est disponible, ou que vous fassiez semblant de ne pas être au courant?

  (1710)  

[Traduction]

    Je vous remercie de la question. Je suis heureux d'avoir la possibilité d'y revenir parce qu'elle m'apparaît importante.
    D'abord, si j'ai donné l'impression que nous ne possédons pas l'information concernant nos banques, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Je ne crois pas que cela soit vrai. Le député a montré que nous possédons de l'information sur les banques canadiennes.
    Ce que j'essayais de dire plus tôt, c'est que nous n'avons pas d'information sur l'évasion fiscale, ce qui peut signifier que nous n'avons pas d'information au sujet des investissements canadiens que détiennent les banques étrangères. Mais je ne crois pas que cela soit vrai au sujet des banques canadiennes. Comme le montrent les rapports, nous possédons cette information.
    Deuxièmement, je ne crois pas que ce soit une affaire d'évasion fiscale. Nos banques canadiennes ont des activités au Canada et à l'étranger et pour ce qui est de leurs investissements et de leurs opérations à l'extérieur du Canada, ils ne paient pas d'impôt courant canadien quand ces opérations sont le fait de filiales. Je ne crois pas que la même règle s'applique dans tous les pays du monde. Pour autant que je sache, un seul pays a déjà cherché à imposer le revenu d'entreprise de filiales étrangères et il a abandonné l'idée. Personne d'autre ne le fait. Notre système est très semblable.
    Je ne crois donc pas que l'on puisse parler d'évitement ou même d'évasion fiscale. Il s'agit en réalité de revenu gagné dans un pays étranger et assujetti aux lois fiscales qui s'appliquent dans le pays.

[Français]

    Vous dites que ce n'est pas de l'évasion, et c'est heureux, parce qu'autrement, ce serait rire du monde. Quoi qu'il en soit, le gouvernement conservateur du Canada, selon sa politique fiscale, ne va pas chercher dans ces paradis fiscaux la somme de 1,5 milliard de dollars en impôts qui s'y trouve et qu'il pourrait récupérer. C'est ce que vous me dites?

  (1715)  

[Traduction]

    Je crois que la politique est en place depuis 1938, au moins, de sorte qu'elle est antérieure à l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement.
    Ce qui est important, c'est que je ne crois pas qu'il s'agisse d'évitement fiscal. On ne fait qu'appliquer les lois canadiennes quand on dit que les entreprises étrangères appartenant à des Canadiens ne sont pas imposées au Canada du seul fait qu'elles ont des actionnaires canadiens.
    Monsieur Hiebert.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais revenir sur des questions qui ont déjà été abordées. Si j'ai bien entendu, M. Pacetti et les libéraux semblent dire qu'une amnistie fiscale serait une bonne idée ou du moins une idée à envisager. Est-ce qu'une amnistie n'équivaut pas à récompenser les fraudeurs et est-ce qu'elle n'inciterait pas les gens à se cacher le plus longtemps possible du fisc sachant que plus ils se cachent longtemps plus ils pourront économiser?
    C'est ce que j'ai dit plus tôt, que c'est une préoccupation. On pense aussi le contraire, que cela peut inciter des gens à réintégrer le système, ce qui serait utile. Mais il est qu'une amnistie pourrait être perçue comme récompensant ceux qui ne paient pas leurs impôts et pourrait encourager la récidive.
    J'ai aussi cru comprendre que le NPD dit que les États-Unis calculent le total des sommes qui disparaissent dans les abris fiscaux. M. Layton demandait à M. Harper de commencer à publier une estimation annuelle du montant d'argent que de riches tricheurs dans certaines entreprises dérobent au fisc canadien.

[Français]

    Les États-Unis le font maintenant. Cent milliards de dollars de revenus sont perdus chaque année dans les paradis fiscaux. C'est un vide énorme à combler pour les citoyens.

[Traduction]

    J'imagine que cette estimation provient du fisc américain. Est-ce que ce serait une bonne source d'information?
    En fait, certains ont dit que l'information provenait du Trésor américain mais je ne le sais pas et je ne pourrais pas vous le confirmer.
    Croyez-vous qu'il serait utile que votre ministère tente d'établir cette estimation ou est-ce que ce serait une perte de temps?
    Je ne dirais pas que ce serait une perte de temps mais ce serait une tâche très difficile. Le nombre d'hypothèses qu'il faudrait formuler pour arriver à un chiffre rendrait l'exercice moins utile qu'on ne pourrait l'espérer.
    Il me semble que le ministère pourrait plus utilement essayer de retracer les fraudeurs que d'essayer de calculer leur nombre.
    Plus tôt dans votre exposé, vous avez aussi dit que vous avez des règles additionnelles dont vous pourriez nous parler, si l'occasion se présentait. Eh bien je vous offre l'occasion de le faire.
    Merci. Je vais prendre quelques instants pour décrire les règles qui s'appliquent dans le contexte international. Il y a aussi d'autres règles qui s'appliquent au Canada.
    Il y a depuis plusieurs années des règles de déclaration des actifs à l'étranger et il ne s'agit pas, comme je l'ai dit plus tôt, de déclarations de revenus mais plutôt de simples déclarations de l'existence d'actifs étrangers que l'Agence du revenu du Canada peut utiliser comme indicateur afin de procéder à une enquête un peu plus poussée pour déterminer si tous les revenus associés à ces actifs sont effectivement déclarés.
     Nous avons aussi des règles relatives aux investissements dans ce qu'on appelle les entités de placement étrangères — fonds communs de placement étrangers et autres placements semblables — selon lesquels l'impôt est payable si l'investissement a été fait pour des raisons liées à l'impôt. D'autres règles viendront. Les règles ont été modifiées dans le budget de 2010 afin de resserrer le régime applicable aux fiducies non résidentes pour faire en sorte que les gens ne puissent plus... je ne dirai pas commettre d'évasion, parce que ce sont des gens qui veulent se conformer à la loi — mais pour faire en sorte qu'un bon montant d'impôt soit payé même par ceux qui investissent à l'extérieur du Canada par le biais d'une fiducie non résidente.
    Enfin, dans le budget de 2010, il y a une proposition concernant l'instauration de nouvelles obligations de déclaration pour ceux qui participent à des transactions fiscales abusives. Si ces transactions comportent une entente de confidentialité avec le conseiller ou le promoteur, ou s'il y a des frais associés à la réussite ou non de la planification fiscale ou s'il y a une assurance ou une couverture quelconque en cas d'échec, ces critères, compte tenu de la transaction d'évitement fiscal initiale, obligeront le contribuable, et dans certains cas son conseiller ou promoteur, a déclaré la transaction à l'ARC ce qui donnera à cette dernière l'information dont elle a besoin pour pousser son enquête plus loin.
    Merci.
    Monsieur Szabo.

  (1720)  

    J'aimerais revenir aux stratégies pour l'avenir, parce que je pense qu'il est très important d'en parler avant la fin de la réunion.
    Les amendes en cas d'évasion fiscale varient entre 50 p. 100 et 200 p. 100 des intérêts. C'est vraiment impressionnant. Lorsque je travaillais comme comptable agréé, j'ai passé de nombreuses années à préparer des déclarations d'impôt. Je dois avouer, j'ai eu à m'occuper de cas où les gens me disaient: « J'ai eu des difficultés. Je n'ai pas pu payer mes impôts. Le temps que je me rétablisse, ma dette fiscale était si élevée que je n'avais absolument pas les moyens de la rembourser. Donc je n'avais aucun choix, et je jouais à la roulette russe lorsque j'avais à décider si je pouvais continuer sans risquer de recevoir un appel téléphonique. Une fois qu'on reçoit cet appel, la prochaine chose à faire c'est probablement de se trouver un bout de corde pour se pendre. » Il y a des exemples très clairs de ce genre. Je sais que le ministère des Finances et l'ARC savent très bien de quelle manière les gens se mettent dans le pétrin.
    Le Programme des divulgations volontaires est un genre d'amnistie n'est-ce pas? Les gens peuvent se manifester et négocier quelque chose pour éviter à avoir à payer 200 p. 100 d'intérêt. Ils peuvent dire: « Voyons ce que je peux faire; je veux rembourser tout ce que je peux, mais je dois également survivre. » Il s'agit à toutes fins pratiques d'un programme d'amnistie.
    Mais ne parlons pas d'amnistie. Nous avons déjà un programme qui permet aux gens, en toute bonne foi, de se manifester et de rectifier la situation de leur mieux à long terme. J'aimerais mieux avoir 80 p. 100 de quelque chose que 100 p. 100 de rien. Il faut que cela fasse partie de notre stratégie, du moins je l'espère.
    Alors, si nous nous embarquons maintenant dans de nouvelles initiatives de traités internationaux et d'échange de renseignements, et que nous adoptons une position vraiment ferme à l'égard de ceux qui utilisent des instruments étrangers, ne serait-il pas temps de lancer un programme de sensibilisation du public plutôt que de nous contenter de brandir un gros bâton?
    Pardon, monsieur le président. Est-ce que vous voulez dire ce que nous pensons d'une amnistie ou ce que nous pensons de la divulgation volontaire, ou...?
    Non, comme je le disais, le Programme des divulgations volontaires est à toutes fins pratiques une amnistie, car les gens ne vont pas payer... Ils vont négocier un montant moins élevé. Nous devons déterminer... et faire exactement ce que M. Mulroney a fait. Il a dit: « Voici ce que j'ai », et il a payé juste une fraction de ce qu'il aurait payé s'il avait déclaré le montant au moment approprié. Vous avez déjà là un outil, sans la menace de sanctions et d'intérêt etc. Vous dites simplement: « Trouvons une solution. »
    Il me semble que cela coûterait beaucoup moins cher si vous n'étiez pas obligé de vous adresser aux tribunaux et de faire des mois et des mois de recherches de données, si les gens étaient prêts à se manifester si seulement nous les informions. Je pense que les contribuables canadiens ont tout simplement peur de faire une divulgation volontaire et nous ne leur avons pas dit qu'ils n'ont rien à craindre car, bien franchement, tout le monde y gagne si nous pouvons les inscrire au rôle d'imposition et qu'ils paient leur juste part de taxes.
    À quoi est-ce que vous pensez? Est-ce que nous allons simplement utiliser le gros bâton? Est-ce que nous allons dire: « Allez, venez, tout le monde, tentez votre chance, nous avons un programme; vous pouvez communiquer avec nous; nous voulons vous réinscrire sur le rôle d'imposition, sinon le stress va vous tuer bien plus vite que tous vos autres problèmes de santé »?
    J'aimerais préciser une chose. Je ne voudrais surtout pas que les membres du comité quittent cette séance en pensant qu'on peut négocier une entente en vertu du Programme des divulgations volontaires. Ce programme permet aux gens de communiquer avec nous et de déclarer les revenus qu'ils n'ont peut-être pas déclarés au moment où ils auraient dû le faire. Ils ne négocient pas un règlement. L'une des conditions d'admissibilité au programme est de se manifester volontairement et de déclarer tous les revenus ou actifs qui n'ont pas été déclarés. Ce n'est donc pas l'occasion de négocier le montant des impôts.
    Toutefois, l'ARC, a un programme d'équité, pas seulement pour les placements étrangers mais pour le recouvrement de toute somme due; en vertu de ce programme nous écoutons les contribuables dont la dette a augmenté en raison de certaines circonstances. Nous sommes certainement intéressés à dialoguer avec le contribuable pour nous assurer qu'il va se conformer. Notre objectif ultime, comme le disait madame Ricard au tout début, c'est de faire respecter la loi. S'il faut pour cela négocier un plan de remboursement avec les contribuables qui nous doivent un certain montant, eh bien, nous le faisons tous les jours.

  (1725)  

    Je suis d'accord, et je sais que ça fonctionne, mais d'après mon expérience, il y a de nombreux contribuables qui ont peur d'essayer.
    Merci.
    J'ai quelques questions. J'aimerais obtenir certaines précisions de l'ARC. Vous avez peut-être déjà répondu à cette question, mais au sujet du milliard de dollars d'impôts impayés sur les activités internationales que vous avez découvert pour 2009, pouvez-vous me dire quelle part était due sur des actifs dans un compte bancaire à l'étranger détenu par un particulier? avez-vous cette information?
    Nous ne l'avons pas...
    Le président: Pouvez-vous me l'obtenir?
    Mme Lyse Ricard:... réparti en catégorie de contribuables. Nous allons vérifier ce que nous... Je ne peux pas vous garantir que nous allons pouvoir faire ce genre de ventilation.
    Très bien. Toute information que vous pouvez nous fournir à ce sujet nous serait utile.
    Voici ma deuxième question. Vous avez peut-être déjà répondu à cette question. Vous avez dit que vous avez vérifié 6 700 dossiers mais dans combien de ces dossiers avez-vous découvert des problèmes?
    Combien nous avons...?
    Dans votre déclaration vous dites « Depuis 2006, l'ARC a vérifié plus de 6 700 dossiers », dans combien de cas avez-vous trouvé des problèmes?
    J'ai dit que nous avions vérifié ce nombre de dossiers et que nous avions découvert 3,7 milliards de dollars en impôts impayés.
    Donc, en gros, est-ce que vous avez trouvé un problème dans 50 p. 100 ou 20 p. 100 des dossiers que vous avez vérifiés?
    Est-ce que nous savons combien de nouvelles cotisations nous avons établies?
    Je n'ai pas cette information avec moi. Je suppose que vous demandez combien de ces 6 700 dossiers ont donné lieu à une nouvelle cotisation?
    Si vous pouviez me fournir cette information, je l'apprécierais.
    Je voulais revenir à la question des banques dans d'autres pays, monsieur Ernewein, et il me reste environ deux minutes et demie.
    Prenons l'exemple de BMO, qui est propriétaire de Harris Bank aux États-Unis. Elle paie bien sûr des impôts aux États-Unis, mais sans éviter d'en payer au Canada. C'est une banque canadienne qui est propriétaire d'une banque aux États-Unis et qui par conséquent se conforme aux lois américaines en matière de fiscalité et d'autres choses. À mon avis, c'est une bonne chose pour le Canada et c'est une bonne chose pour les Canadiens, c'est-à-dire le fait que nos sociétés soient propriétaires de sociétés à l'étranger, c'est une bonne chose. Bien sûr, nous souhaitons voir autant d'investissements au Canada que possible, mais nous souhaitons également que nos entreprises soient des championnes mondiales.
    Mais je pense que certains y voient un moyen d'éviter de payer de l'impôt alors que ce n'est pas le cas. Dans les quelques minutes qui me restent, j'aimerais vous donner l'occasion d'éclaircir la question des activités de nos banques et de nos compagnies d'assurances et des autres entreprises qui sont présentes à l'étranger et la question de l'évitement fiscal, car je crois réellement qu'il faut éclaircir cela.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion de revenir à cette question. En effet, je pense que l'exemple que vous donnez d'une banque canadienne propriétaire d'une institution financière américaine est excellent. Les taux d'imposition américains sont semblables ou, de plus en plus, supérieurs aux taux canadiens et cela peut vouloir dire que la banque paie davantage d'impôt américain sur le revenu de la banque américaine que les impôts qu'elle paie au Canada. Nous accordons un crédit pour l'impôt étranger c'est-à-dire que nous permettons aux entreprises canadiennes de déduire leur impôt étranger du calcul de leur impôt payé au Canada.
    Dans de tels cas, les bénéfices d'une institution financière américaine appartenant à une société mère canadienne ne produisent pas plus d'impôt canadien, et cela semble raisonnable car il faut accorder le crédit pour impôt étranger pour éviter la double imposition. Ça c'est un cas.
    Il y a aussi le cas de l'institution financière filiale d'une banque canadienne installée dans un pays où le taux d'imposition est inférieur au taux canadien. Dans ce cas-là, nous n'imposons pas les bénéfices commerciaux de la filiale étrangère, à l'instar de pratiquement tous les autres pays.
    Cela m'amène à mon troisième point, c'est-à-dire la suggestion de traiter ces institutions financières étrangères appartenant à des banques ou à d'autres institutions financières canadiennes est de leur appliquer le taux d'imposition canadien. Je pense que c'est trompeur, car cela donne l'impression que si nous imposions ces bénéfices selon un taux de 25 p. 100, ces banques canadiennes conserveraient le même niveau d'activité. Toutes les autres banques du monde présentes dans le même pays bénéficieraient des mêmes règles de non-imposition et c'est pour des raisons de compétitivité que nous ne leur faisons pas payer d'impôt. Ainsi, l'idée d'appliquer un taux d'imposition fictif ou d'appliquer un taux d'imposition à ce revenu fictif serait je pense une mauvaise façon de mesurer les pertes de revenus des entreprises canadiennes.

  (1730)  

    J'apprécie beaucoup cet éclaircissement.
    Je vous remercie tous d'être venus cet après-midi répondre à nos questions. S'il y a autre chose que vous souhaiteriez soumettre à l'attention du comité, veuillez l'envoyer au greffier qui veillera à ce que tous les membres du comité le reçoivent.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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