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HUMA Rapport du Comité

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Rapport minoritaire, Parti libéral du Canada

Nous remercions tous les témoins qui ont comparu devant le Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées dans le cadre de l’étude intitulée De meilleurs emplois pour les Canadiens : une étude sur le renouvellement des Ententes sur le développement du marché du travail. Le Parti libéral est d’accord avec l’intention de l’étude et de ses recommandations; il a toutefois le sentiment que ces dernières ne répondent pas aux grandes préoccupations et aux suggestions des groupes d’intervenants qui ont comparu devant le Comité ou présenté des mémoires.

Les premières Ententes sur le développement du marché du travail (EMDT) ont été négociées il y a près de 20 ans. En 20 ans, le marché du travail canadien a considérablement changé, notamment en raison de la hausse de la précarité d’emploi (les emplois à temps partiel et les emplois temporaires étant plus nombreux) et de l’augmentation du chômage de longue durée, augmentation attribuable à la restructuration des secteurs et des industries (comme les industries manufacturières). Le renouvellement des EMDT doit tenir compte des réalités d’aujourd’hui, tant la réalité de la personne à la recherche d’un emploi ou d’un meilleur emploi que la réalité de l’employeur qui cherche un employé pour hausser la productivité et la compétitivité de son entreprise.

Voici les questions qui, de l’avis du Parti libéral, mériteraient d’être approfondies.

Information sur le marché du travail – de l’information de qualité pour des décisions éclairées

L’étude révèle très justement que les « chercheurs d’emploi, les étudiants, les apprentis, les employeurs, les experts en politiques, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux ont tous besoin d’information sur le marché du travail canadien afin de prendre respectivement les meilleures décisions possibles en matière de choix de carrière, de formation, d’embauche, d’identification des meilleures pratiques et d’utilisation des fonds publics ». L’information sur le marché du travail dont nous disposons doit absolument être exacte et rendue rapidement disponible; à l’heure actuelle au Canada, cette information est inadéquate et ne répond pas aux besoins des intervenants du marché du travail. Nous sommes d’accord avec la recommandation selon laquelle le gouvernement devrait continuer d’investir pour améliorer cette information, mais nous croyons qu’elle manque d’ampleur et ne peut offrir de résultats positifs.   

Malheureusement, au cours des cinq dernières années – pour des raisons idéologiques ou par suite de compressions budgétaires – le gouvernement a cessé de favoriser la solidité de l’information sur le marché du travail. Peu importe les motifs, le gouvernement n’en a pas fait une priorité.

Les compressions imposées à des organismes comme Statistique Canada montrent que l’information sur le marché du travail a été appauvrie, au détriment des particuliers, des entreprises et du gouvernement lui‑même. Au cours des deux dernières années seulement, le budget central de Statistique Canada – à l’exclusion des dépenses consacrées au recensement ou aux enquêtes prévues –  a été amputé de 29,3 millions de dollars (soit plus de 7 % du budget), et le personnel a été réduit de 767 personnes, soit 18,5 % du personnel.

Cela fait maintenant quatre ans et demi que le gouvernement fédéral a obtenu le rapport final intitulé Travailler ensemble pour bâtir un meilleur système d'information sur le marché du travail pour le Canada, déposé par le Comité consultatif sur l’information sur le marché du travail, présidé par M. Don Drummond. Le gouvernement a pourtant négligé de mettre en œuvre de nombreuses recommandations issues du rapport, dont une recommandation de la plus grande importance en matière de gouvernance.

Selon le Comité, l’absence d’un organisme responsable et chargé de la mise sur pied d’un plan cohérent et coordonné en vue de l’identification, de la collecte, de la diffusion et de la communication de l’information constituait la principale source de confusion relativement aux EMDT[1]. Il avait recommandé que le Forum des ministres du marché du travail devienne cet organisme. La recommandation a quatre ans et demi, et rien n’a été fait pour l’appliquer, d’où la persistance d’une confusion entourant les EMDT.

L’une des recommandations du Comité consistait à étudier les avantages et les coûts associés à la création d’un Institut canadien d’information sur le marché du travail. Le Parti libéral appuie l’idée puisqu’elle est fondée sur le principe d’un « fédéralisme de coopération ». Il croit en outre que le gouvernement fédéral doit prendre les rênes pour travailler en collaboration avec les provinces et les territoires à la création d’un organisme ou d’une organisation qui coordonnerait la production d’information cohérente sur le marché du travail.

S’il est important de se doter d’un organisme responsable de l’information sur le marché du travail, il est tout aussi important de veiller à ce que l’information utilisée soit pertinente et exacte et fournie en temps utile aux utilisateurs (soit les particuliers, les entreprises, les gouvernements et les établissements d’enseignement).

Plusieurs témoins, y compris le directeur parlementaire du budget, de même que Don Drummond dans son rapport de 2014, ont critiqué les failles importantes relatives à l’information sur le marché du travail, et plus particulièrement en ce qui a trait à l’offre et à la demande. L’étude affirme correctement que :

« Pour prendre de bonnes décisions en matière de politique publique sur le marché du travail, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux ont besoin de données à jour sur la demande de main-d’oeuvre des employeurs et l’offre de main-d’oeuvre des chercheurs d’emploi par région, secteur et profession. Sans ces données, il peut être très difficile de développer des mesures efficaces permettant de répondre aux problèmes d’appariement des chercheurs d’emploi aux emplois disponibles dans certaines régions, certains secteurs ou certaines professions. »

Les utilisateurs d’information sur le marché du travail disent avoir besoin de renseignements plus précis. Ils veulent des données à l’échelle locale et des détails pointus sur les types d’emploi occupés et les compétences. Des témoins recommandent – tout comme le rapport de 2014 de Drummond – que Statistique Canada améliore ses enquêtes sur les postes vacants afin d’offrir de l’information actuelle sur l’offre de travail et des données sur la demande. En ce qui concerne la demande, des témoins recommandent d’améliorer les enquêtes sur les postes vacants pour que l’information locale soit plus précise sur les types d’emplois occupés et d’ajouter des questions pour accroître l’utilité de l’enquête comme outil stratégique[2]. Le Parti libéral croit que la mise en œuvre de cette recommandation aurait renforcé l’étude et amélioré l’information sur le marché du travail.

Il est essentiel que le système d’information sur le marché du travail du Canada permette d’établir efficacement des correspondances entre les compétences et les besoins du marché du travail. La réussite est impossible pour les partenaires du marché du travail s’ils n’ont pas accès à de l’information sur le marché du travail leur permettant de déterminer les compétences nécessaires ou disponibles. Comme M. Drummond l’a affirmé dans son rapport de juin 2014, l’amélioration de l’information sur le marché du travail ne résoudra pas tous les problèmes du marché du travail. Cette mesure offrira toutefois une base fondamentale qui permettra à tous les intervenants – les particuliers, les entreprises, les établissements d’enseignement et les gouvernements – de prendre de meilleures décisions.

Le Parti libéral est d’accord avec les conclusions de M. Drummond et croit que le renouvellement des EMDT sera peu utile si on ne s’attache pas ensuite à repenser nos systèmes d’information et à concevoir de nouveaux outils pour garantir une meilleure information à ceux qui doivent prendre des décisions éclairées.

Gouvernance – la collaboration et la coordination entre les partenaires du marché du travail

Des témoins ont dit au Comité qu’il est possible et nécessaire d’en faire plus pour accroître la consultation, la collaboration et la coordination entre les partenaires des gouvernements provinciaux, territoriaux et fédéral et d’autres intervenants (soit les employeurs, les travailleurs, les établissements d’enseignement et de formation ainsi que les collectivités). Ces améliorations ne visent pas seulement à profiter aux différents intervenants à l’échelle provinciale et territoriale, mais aussi à atteindre des objectifs pancanadiens. La clé : la mise en place d’une bonne structure de gouvernance pancanadienne permettant à tous les partenaires de collaborer et de coopérer.

En matière de consultation et de collaboration avec les provinces et les territoires, il n’y a pas pire exemple, en matière de leadership fédéral, que celui de la mise sur pied de la Subvention canadienne pour l’emploi. D’abord, il y a eu la déclaration unilatérale que les provinces et les territoires se feraient retirer 300 millions de dollars de fonds pour la formation de la main‑d’œuvre (financement des ententes relatives au marché du travail), des fonds qui servaient à former les groupes les plus vulnérables de notre société (les personnes handicapées, les travailleurs âgés et les jeunes sans formation). On leur a ensuite annoncé qu’ils allaient devoir fournir 300 millions de dollars de leurs propres coffres pour financer le nouveau programme du gouvernement, un programme dont ils n’avaient jamais entendu parler et sur lequel ils n’ont jamais été consultés.

Alors qu’il aurait dû collaborer avec les provinces et les territoires, et autres intervenants, pour mettre sur pied le plan de formation professionnelle qui est si nécessaire, le gouvernement a gaspillé toute une année en luttes et en menaces. Le Parti libéral a une vision totalement différente des provinces et territoires, puisqu’il y voit des partenaires et non des adversaires.

Les EDMT existantes sont des ententes bilatérales, compartimentées, sans perspective pancanadienne. Les nouvelles devraient refléter, dans leur conception et leur mise en place, les priorités nationales, en plus de respecter les objectifs provinciaux et territoriaux. Le Parti libéral est d’avis qu’il est nécessaire de mettre en place des programmes propres à relever efficacement les défis qui se posent sur le marché du travail au pays tout en assurant cohésion et coordination dans les services d’emploi et de formation professionnelle fournis par la voie des EDMT.

Des témoins se sont dits en faveur de forums où seraient représentées les principales parties prenantes du marché du travail ou des entités similaires, afin d’encourager la coordination et la collaboration. D’autres ont prôné un forum pancanadien. Aux dires de M.  Meredith : « Il est essentiel que les EDMT permettent de réformer la gouvernance, de façon à reléguer les stratégies bilatérales et de promouvoir un forum pancanadien actif dans les domaines de la planification, de l'établissement des priorités et de la collaboration et de l'expérimentation intergouvernementale ».

Le Parti libéral croit lui aussi que la saine gouvernance est la pierre angulaire d’EDMT efficaces et réussies. Il faut pour cela des dialogues dynamiques aux niveaux provincial, territorial et national entre les parties prenantes au marché du travail. Ces tribunes peuvent jouer un rôle important pour ce qui est de tisser des liens entre les partenaires du marché du travail dans le but d’encourager consultation et collaboration et de contribuer à la coordination de la communication de données. Le Parti libéral est d’avis que le Comité aurait dû, à l’issue de son étude, recommander au gouvernement de travailler avec les provinces et les territoires à l’instauration de ce type de forum.

Accroître l’accès à la formation pour les chômeurs

Trop de Canadiens ne peuvent bénéficier du soutien du revenu et de la formation nécessaire pour revenir sur le marché du travail. Le pourcentage de chômeurs ayant droit à l’assurance-emploi affiche un creux inégalé depuis 70 ans. En conséquence, les programmes de formation financés par la voie des EDMT ne s’adressent qu’à 37 % environ des chômeurs. Et c’est ainsi qu’un nombre croissant de Canadiens ont un emploi précaire ou sont en chômage de longue durée et ne peuvent avoir accès à la formation qui les aiderait à trouver un emploi ou à améliorer leur situation professionnelle.

Le Parti libéral est d’avis qu’il serait naïf de penser que le marché du travail serait mieux servi par des EDMT qui excluent plus de 60 % des chômeurs. Nous appuyons la recommandation du Comité voulant que l’on révise les critères d’admissibilité aux prestations d’emploi offertes dans le cadre des Ententes sur le développement du marché du travail et espérons que cette révision améliorera l’accès aux possibilités de formation qui mèneront à un réemploi.

L’importance de la littératie et de la formation en compétences essentielles

Des témoins ont expliqué au Comité que la littératie et les compétences essentielles constituent un facteur de plus en plus important dans le rendement des particuliers sur le marché du travail. De plus, la formation formelle exige un niveau de littératie de base, et il est plus difficile et plus onéreux d’améliorer les compétences spécialisées lorsque les compétences de base sont médiocres. Bien des témoins qui ont évoqué ces préoccupations représentaient des entreprises, notamment :

Sean Reid, Progressive Contractors Association of Canada : « L’acquisition de compétences de base en littératie et en numératie l’est [un enjeu fondamental], particulièrement en ce qui concerne le taux d’achèvement. Des obstacles liés aux compétences de base en littératie empêchent certains de réussir leur examen. Nous ne devons pas l’oublier. »
J. Craig Martin, Bureau canadien de soudage : « Nous avons dit que l’un des principaux obstacles à la réussite d’une formation, en particulier dans le secteur du soudage, est l’incapacité de lire la documentation et d’appliquer des compétences de base en mathématiques. Dans certains cas, nous constatons que des organismes de formation vont d’abord inscrire les gens à de tels cours en vue d’évaluer leur capacité à réussir la formation technique. Je ne peux pas parler des améliorations à apporter dans ce qui se fait dans les écoles secondaires, mais il ne fait aucun doute que les compétences en littératie et en numératie sont fondamentales pour les gens qui veulent apprendre un métier. »
Catherine Pennington, Enbridge : « Je reviens toutefois à un message que je tiens à transmettre au comité : une personne doit absolument posséder des compétences essentielles avant de recevoir une formation pour acquérir des compétences techniques. »

Barbara Byers, secrétaire-trésorière du Congrès du travail du Canada, a également évoqué le désir des travailleurs d’acquérir des compétences plus larges : « Les travailleurs veulent plus que de simples compétences propres à l'entreprise. Ils veulent une formation générale qui permet d'acquérir un large éventail de compétences, y compris de meilleures connaissances et une mise à niveau de leurs compétences essentielles. »

Le Parti libéral estime que la littératie et les compétences essentielles sont capitales pour le bien-être des particuliers et le développement économique de notre pays. Elles constituent le fondement des autres compétences plus complexes. S’ils n’ont pas ce fondement, les Canadiens ne peuvent acquérir les compétences plus perfectionnées dont le marché du travail et l’économie ont besoin pour être compétitifs.

Les études montrent que près de 50 % des adultes n’ont pas les compétences en littératie nécessaires pour réussir dans l’économie moderne. Selon la Chambre du commerce du Canada, il s’agit d’un enjeu très important pour les employeurs, autant que pour les travailleurs. Selon un de ses rapports récents[3], « le manque de compétences essentielles bloque de nombreux employés actuels qu’une formation aurait rendus plus productifs ».

Le gouvernement a montré par ses actes et ses paroles qu’il ne croit tout simplement pas à l’importance de la littératie et des compétences essentielles et au rôle qu’il doit jouer pour que les Canadiens disposent des compétences nécessaires pour être des travailleurs et des membres de la société productifs. Il n’a pas dégagé les millions de dollars prévus au titre des programmes de littératie et d’acquisition de compétences essentielles (plus de 70 millions de dollars depuis 2006), il a réduit le financement destiné aux agences nationales et provinciales de littératie et il a éliminé 300 millions de dollars des ententes sur le marché du travail que les provinces et territoires utilisent, notamment, pour financer leurs programmes de littératie afin d’aider les plus vulnérables des Canadiens à réintégrer le marché du travail.

Le Parti libéral estime que, si le Canada doit disposer d’une classe moyenne robuste, il doit offrir des possibilités d’avancement et l’égalité des chances à chacun. Pour ce qui est de l’égalité des chances, rien n’est plus important que l’éducation, notamment des compétences essentielles et une littératie solides. Le Parti libéral croit que le Comité aurait dû recommander au gouvernement de reconnaître l’importance de la littératie et de la formation en compétences essentielles pour relever le niveau de compétence de la population et ainsi élargir le bassin de talents prêts à suivre une formation avancée.



[1] Don Drummond, Wanted: Good Canadian Labour Market Information, Institut de recherches en politiques publiques, juin 2014. [Document en anglais seulement]

[2] Ibid.

[3] 10 obstacles à la compétitivité 2014, Chambre du Commerce du Canada, février 2014.