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PROC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre


NUMÉRO 027 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 3 avril 2014

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    La séance est ouverte. Nous nous réunissons ce matin afin de poursuivre notre étude du projet de loi C-23. Nous accueillons trois témoins.
    Monsieur Howe, pouvez-vous m'entendre?
    Parfait.
    Monsieur Howe, nous allons commencer par entendre votre exposé par téléconférence. Ensuite, nous passerons aux deux autres témoins qui sont parmi nous. Je vous invite à commencer. Vous disposez de cinq minutes — ou moins, si vous le pouvez.
    Merci, monsieur le président.
    J’enseigne la science politique et je m’intéresse à la démocratie canadienne en général et plus particulièrement à la participation électorale des jeunes. Deux dispositions du projet de loi C-23 sont liées à mes recherches: soit la limitation du rôle d’Élections Canada en matière de promotion de la participation électorale et le relèvement du plafond annuel des contributions aux partis politiques à 1 500 $.
    J’ai commencé à m’intéresser à la participation électorale au moment des élections fédérales de 2000, où à peine plus de 60 % des électeurs ont exercé leur droit de vote. À peu près au même moment, Élections Canada s’est mis à s’occuper sérieusement du problème en menant lui-même ou en commandant des recherches. Il s’est ainsi constitué un réseau de chercheurs voués à l’étude de cette importante question.
     Quatorze ans plus tard, nous en savons beaucoup plus et nous cernons mieux le problème de la baisse du taux de participation électorale des jeunes. On s’entend généralement pour dire que le problème tient à de profonds changements de nature générationnelle. L’érosion du sentiment de devoir civique et l’accentuation de l’individualisme sont des facteurs sociaux qui jouent contre la participation électorale.
    Le manque d’intérêt pour la politique chez les générations récentes y est aussi pour quelque chose. Chose à retenir, beaucoup de jeunes ont pris l’habitude de ne pas voter. Ce n’est pas qu’ils boudent les urnes à l’occasion, c’est qu’ils ne s’y rendent jamais. Force est donc d’admettre que le problème ne se résume pas à de simples obstacles administratifs — bien que ceux-ci posent problème à certains.
    Mes recherches ont donné lieu à des initiatives visant à remédier à la faible participation électorale. On leur reproche cependant de n’avoir amélioré en rien la situation depuis 2000. Le taux de participation n’a pas augmenté. Il oscille autour de 60 % depuis 2000.
    Je ne suis pas convaincu de l’inutilité de ces initiatives. D’abord, il est impossible d’isoler l’impact de telle ou telle initiative sur le taux de participation parce que, à moins qu’elle ne soit d’une efficacité spectaculaire, son impact risque fort d’être neutralisé par une foule d’autres facteurs, dont certains tendent à faire baisser le taux de participation.
    Par exemple, les publicités négatives se multiplient depuis dix ans et sont diffusées même en dehors des campagnes électorales. Selon certains, elles éloignent les électeurs des urnes. Par conséquent, tandis qu’Élections Canada essaie de promouvoir la participation, les partis se livrent à des activités qui risquent de décourager les gens de voter.
    Je ne prétends pas que le problème soit facile à régler. La tendance à la baisse du taux de participation est lourde et elle sera difficile à renverser. Mais je crois que bon nombre des mesures que prend Élections Canada vont dans la bonne direction. Il cherche entre autres à sensibiliser le public au phénomène — ce qui lui serait désormais interdit aux termes du projet de loi.
    Élections Canada a essayé d'éliminer les obstacles administratifs autant que possible, a encouragé la participation par des campagnes de publicité et a subventionné des initiatives d’éducation civique comme le programme Vote étudiant. Il faudra des efforts soutenus et plus intenses de ce genre pour susciter chez les jeunes un réel engagement politique.
    Une autre idée, par exemple, serait de permettre aux jeunes de 16 ans de s'enregistrer au préalable en tant qu'électeur, ou peut-être même d'exiger qu'ils le fassent, comme cela se fait dans certains pays. Une campagne annuelle d'enregistrement pourrait alors être coordonnée dans les écoles secondaires, ce qui serait une excellente façon d'enregistrer de nouveaux électeurs et cela offrirait aussi d'autres possibilités d'apprentissage relativement aux responsabilités civiques.
    De toute évidence, il est contre-productif et inacceptable de chercher à abolir le mandat d'éducation d'Élections Canada.
    L’autre question qui m’intéresse en particulier est rarement évoquée dans les débats concernant le projet de loi C-23. Il s’agit de l’augmentation du montant qu’un particulier peut donner à un parti politique, lequel passe de 1 200 $ à 1 500 $ par an. J’ai récemment étudié la question avec quelques-uns de mes étudiants de l’Université du Nouveau-Brunswick.
    Mon étude visait à mesurer les effets que pourraient avoir les modifications apportées au financement des partis politiques, notamment la réduction progressive de la subvention proportionnelle au nombre de votes. Certains estiment cette mesure raisonnable parce que les règles régissant les contributions politiques ont pour effet de loger tous les partis à la même enseigne. Tous les partis doivent compter sur les dons relativement modestes de milliers de citoyens au lieu de se faire financer par quelques gros bailleurs de fonds.
    Or, il ressort de notre étude, entre autres, qu’il y existe d’importantes inégalités relatives aux contributions politiques. D’abord, ceux qui donnent plus de 200 $ représentent un quart des donateurs, mais leurs contributions comptent pour près des deux tiers du total des dons. Par conséquent, les dons importants représentent un pourcentage élevé de la totalité des dons.
    Ensuite, ceux qui donnent plus de 200 $ ont nettement tendance à être fortunés. En effet, dans cette catégorie, quatre fois plus de gens font partie du quintile supérieur des revenus familiaux que du quintile inférieur. Bref, les contributions politiques ne sont pas aussi également réparties qu’on pourrait le penser et sont le fait d’un petit nombre de Canadiens relativement riches.
    La conclusion de notre étude, c’est que le relèvement du plafond des contributions à 1 500 $ est un pas dans la mauvaise direction. Il faudrait abaisser le plafond, et ce, sans doute de beaucoup.
    En plus de cette question qui avait un peu passée sous silence, la conclusion plus générale à laquelle je suis arrivé, c'est que le projet de loi omnibus contient tant de dispositions qu’on n’a pas le temps de toutes les étudier comme il le faudrait ni d’examiner leurs ramifications potentielles. Je fais donc écho aux sentiments de ceux qui estiment qu’il faudrait considérablement repenser et réécrire le projet de loi.
    Merci.

  (1105)  

    Merci beaucoup, monsieur Howe.
    Nous passons maintenant à Barry Thorsteinson, de la Fédération nationale des retraités. Je vous invite à faire un exposé de cinq minutes ou moins, si possible.
    Monsieur le président, j'aimerais commencer par dire quelques mots au sujet de la fédération.
    Elle existe depuis 70 ans. Nous sommes le seul organisme démocratique d'aînés à tenir une convention annuelle ouverte et démocratique à laquelle participent des délégués de l'ensemble du pays. J'invite les gens à prendre connaissance de nos divers réseaux et clubs provinciaux, y compris de nos clubs régionaux, de même que de nos 250 affiliés. Nous comptons plus d'un million de membres.
    Dernier point, mais non le moindre, j'aimerais aussi mentionner que les aînés votent. Nous suivons de près le cheminement de ce projet de loi, pour les raisons dont je vais vous parler.
    Essentiellement, je suis ici pour vous parler plus précisément de sept lacunes dans le projet de loi. Je sais que vous êtes déjà parfaitement au courant des observations qui ont été formulées par 160 universitaires et 19 spécialistes étrangers, dont on a abondamment parlé dans les médias. Cependant, je vais vous parler brièvement de sept lacunes.
    Je mettrais la mesure concernant les répondants en premier. Dans les faits, bien que je parle ici au nom des aînés, il a déjà été souligné que cette mesure pose d'importants problèmes pour les jeunes, les étudiants et les membres des Premières Nations — mais je laisse à mon ami d'en face le soin de parler au nom des Premières Nations.
    Le fait de priver les gens de leur droit de vote constitue un grave problème dans l'histoire des élections canadiennes. Nous n'avons pas été en guerre pour défendre l'érosion de nos institutions démocratiques et de nos valeurs. Sur une note personnelle, mon père a traversé le Nord de l'Europe à pied en 1944 et 1945 jusqu'à ce qu'il soit blessé au cours d'un bombardement d'artillerie dans les Pays Bas. Quoi qu'il en soit, les soldats ne se battaient pas pour assister à l'érosion de nos institutions. Assez dit à ce sujet.
    Je passe à la deuxième lacune, soit l'élimination de la carte de l'électeur comme pièce d'identité. Nous vous demandons de ne pas éliminer ces cartes. Les aînés sont habitués à les utiliser, à les voir dans la boîte aux lettres et à s'en servir aux bureaux de vote. Vous trouverez rarement, voire jamais, un aîné présenter une carte d'électeur frauduleuse. Encore une fois, rien ne prouve que ces cartes créent des problèmes.
    En troisième lieu, nous vous demandons d'adopter d'un amendement au projet de loi visant à réintroduire la disposition qui contraint les gens à témoigner, comme c'est le cas dans plusieurs provinces. Nous n'avons qu'à regarder l'exemple regrettable de ce qui s'est passé à Guelph lors des dernières élections, incidents qui font toujours l'objet d'une enquête jusqu'à un certain point et dont l'affaire est devant les tribunaux, du moins pour ce qui est d'une personne.
    D'après ce que je comprends, un directeur de campagne refuse de témoigner, et il lui est légalement permis de faire cela aux termes de la loi actuelle — ce qui est maintenu dans ce projet de loi. Au nom de tous les aînés du pays, je pose la question suivante: pour quelle raison protégeons-nous des gens qui sont susceptibles d'être au courant de méfaits commis au cours des élections ou qui en ont des preuves? Pour quelle raison? Je vous laisse le soin de réfléchir à cette question.
    J'en suis au quatrième. Essentiellement, l'article 44 prévoit que la nomination des superviseurs des centres de scrutin soit partisane. Nous vous recommandons fortement de préserver les qualités reconnues de notre système électoral, selon lesquelles la nomination des présidents des bureaux de vote doit être faite en fonction des mérites des gens, non en se fondant sur considérations partisanes. À mon avis, cette question transcende les allégeances politiques. Il peut y avoir des gens trop zélés dans les bureaux de scrutin — je sais que j'en ai rencontré.
    J'allais parler de ceci plus tard: à plusieurs reprises, j'ai été directeur de campagne électorale dans une circonscription fédérale — mais je verrai si j'ai le temps d'en parler plus longuement tout à l'heure.
    Cinquièmement, la mesure législative maintien une certaine latitude dans le sens qu'elle continue de dispenser les partis de l'obligation de présenter des reçus pour toutes les dépenses électorales. Nous ne comprenons pas pourquoi un gouvernement qui s'est fait élire en réclamant la reddition des comptes et en faisant valoir sa supériorité n'exigerait pas la présentation de reçus pour toutes les dépenses électorales. Nous mettons sérieusement en doute ce qui motive le gouvernement à ne pas faire cela.
    Les deux dernières lacunes concernent Élections Canada. Nous demandons que le commissaire demeure un fonctionnaire indépendant aux termes des lois électorales du Canada, qu'il ne soit pas envoyé au Bureau du directeur des poursuites pénales et qu'il ne relève pas d'un ministre.

  (1110)  

    Enfin, et c'est mon septième et dernier point, Élections Canada devrait profiter de toute la latitude voulue pour faire la promotion de la démocratie, inciter les gens à voter et s'acquitter pleinement du mandat qui lui incombe pour assurer la tenue en bonne et due forme d'élections significatives au Canada. On ne devrait entraver d'aucune manière ses efforts pour promouvoir la démocratie et faire connaître les mécanismes de participation au scrutin. Cela irait tout simplement à l'encontre des valeurs canadiennes.
    Si j'ai déjà utilisé les cinq minutes à ma disposition, je vais m'arrêter là. Sinon, je peux continuer, car si j'ai déjà soulevé les sept points dont je souhaitais parler, j'en aurais encore beaucoup à dire. Je peux aussi attendre qu'on me pose des questions.
    Nous avons dépassé les cinq minutes. Nous pourrons y revenir durant la période de questions, monsieur Thorsteinson.
    Monsieur Dinsdale, je vous souhaite la bienvenue et je vous remercie de votre présence aujourd'hui. Vous avez un maximum de cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.
    Merci de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui sur ce territoire algonquin non cédé. Je m'appelle Peter Dinsdale et je suis membre de la Première Nation de Curve Lake. Je suis directeur général par intérim de l'Assemblée des Premières Nations.
    Je suis accompagné de Karen Campbell, notre directrice des politiques; Tonio Sadik, un directeur associé; et Aaron Asselstine, un de nos analystes des politiques. Ces gens-là sont beaucoup plus brillants que je puis l'être et sauront répondre à vos questions les plus difficiles.
    Je vous rappelle que l'Assemblée des Premières Nations (APN) est un groupe de défense national représentant plus de 630 gouvernements des Premières Nations au Canada. Nous avons relevé un certain nombre de préoccupations très précises concernant le projet de loi C-23 et les modifications qu'il apporterait à la Loi électorale du Canada.
    Les relations entre les Premières Nations et le Canada sont complexes, il faut bien l'avouer. Il en va de même de la participation des citoyens des Premières Nations au processus électoral pour tous les ordres de gouvernement. Il faut se souvenir qu'avant le 31 mars 1960, les Indiens inscrits ne pouvaient pas voter lors des élections canadiennes. S'ils le faisaient, ils perdaient leur statut d'Indien en vertu de loi et ne pouvaient même plus vivre au sein de leur communauté.
    Nous n'avons pas de statistiques précises sur les taux de participation électorale des Premières Nations, mais on estime qu'ils se situent entre 35 % et 75 %, selon la région. Différents facteurs peuvent amener les citoyens des Premières Nations à ne pas participer aux élections fédérales, mais les obstacles créés à l'échelon fédéral ne devraient pas les empêcher de le faire.
    La population des Premières Nations est très jeune. Les moins de 25 ans représentent près de la moitié de cette population qui a des taux de mobilité très élevés et est fortement représentée au sein des groupes nomades. Il va de soi que le taux de participation au scrutin est très faible au sein de ce sous-ensemble de la population des Premières Nations.
    Dans la foulée d'une résolution adoptée en 2004 concernant la réforme électorale et l'accroissement de la participation au vote chez les Premières Nations, l'APN a entrepris une campagne de sensibilisation des électeurs mettant en lumière l'impact direct des actions du Parlement canadien sur les droits et les intérêts des Premières Nations. La résolution prévoyait en outre que l'APN allait explorer différentes options de réforme électorale.
    En 2005, l'APN a tenu conjointement avec Élections Canada un forum de deux jours sur la participation électorale des Premières Nations à l'issue duquel on a recommandé l'élaboration d'une stratégie de communication et d'une campagne conjointe de sensibilisation misant sur la transmission d'information aux électeurs des Premières Nations. Pour ce faire, l'APN a participé à différentes initiatives de concert avec Élections Canada. On a ainsi pu concevoir des documents d'information sur la façon de voter, tenir un stand sur la participation électorale à l'occasion de rassemblements des Premières Nations, et diffuser des annonces d'intérêt public mettant en vedette l'ancien chef national de l'APN, Phil Fontaine. L'APN a aussi travaillé en partenariat avec Élections Canada pour diffuser de l'information aux Premières Nations quant à la manière de voter.
    En 2007, un certain nombre de changements ont été apportés à la Loi électorale du Canada concernant les exigences d'identification en prévision des élections de 2008. En vertu de ces changements, les électeurs devaient produire deux pièces d'identité, une avec photo et l'autre indiquant leur adresse résidentielle. Dans bien des communautés des Premières Nations, il n'y a pas d'adresse résidentielle à proprement parler; bon nombre d'entre elles sont desservies par des casiers postaux. En outre, bien des citoyens des Premières Nations vivant dans les grands centres, y compris les étudiants, n'ont pas nécessairement de pièces d'identité correspondant à leur adresse véritable au moment du scrutin.
    Tant en 2008 qu'en 2011, l'APN a communiqué directement avec les communautés des Premières Nations pour s'assurer que toutes étaient bien au courant des exigences d'identification et des options disponibles pour les électeurs, y compris la possibilité d'obtenir une attestation de résidence des dirigeants de la bande, l'utilisation de la carte d'information de l'électeur comme preuve de résidence, ou l'option du répondant en vertu de laquelle un électeur déjà inscrit à la même section de vote peut confirmer le lieu de résidence et l'identité d'une autre personne.
    Parmi les efforts que nous avons déployés depuis 2011, soulignons nos appels téléphoniques aux conseils de bande pour leur communiquer différents messages rédigés conjointement avec Élections Canada. Nous l'avons fait de façon ciblée dans 20 districts électoraux sélectionnés en raison de leur situation géographique, surtout au nord du 55e parallèle, et du fait qu'ils comportaient une proportion élevée de membres des Premières Nations étant reconnus pour leur faible taux de participation électorale.
    Ce travail nous a permis de constater qu'une organisation indépendante pourrait de toute évidence apporter une contribution importante en travaillant directement auprès des Premières Nations pour leur fournir de l'information sur la participation électorale. Il existe une documentation qu'Élections Canada peut mettre à la disposition des électeurs dans leur ensemble, mais on a déterminé que ce n'était pas l'idéal pour les Premières Nations, et ce, pour une variété de raisons, y compris le ton juridique de ces documents et leur approche générique.
    Pendant une élection, les scrutateurs assurent l'administration des processus électoraux dans leurs circonscriptions respectives au moyen de contacts directs avec les Premières Nations. L'APN a constaté que la quantité et la qualité des informations transmises aux communautés des Premières Nations par ces scrutateurs varient considérablement d'un endroit à un autre.
    On pourrait en faire encore bien davantage pour favoriser une plus grande participation des Premières Nations aux élections fédérales et c'est ce que nous avons cherché à réaliser de concert avec Élections Canada au fil d'un certain nombre d'élections déjà. Je ne sais pas si bien d'autres témoins pourraient venir vous parler en s'appuyant sur une expérience aussi directe du travail effectué pour sensibiliser les gens et favoriser la participation électorale de cette manière.

  (1115)  

    Dans ce contexte, nous avons des réserves importantes concernant les changements proposés dans le cadre du projet de loi C-23. La première concerne le resserrement des exigences d'identification et notamment l'interdiction d'avoir recours à un répondant. Ces dispositions qui ne permettent pas l'utilisation de la carte d'information de l'électeur comme preuve de résidence créeront un nouvel obstacle pour les citoyens des Premières Nations qui désirent voter, et particulièrement pour ceux qui résident dans les communautés où il n'y a pas d'adresse résidentielle, ceux qui viennent de déménager ou ceux qui habitent un logement surpeuplé, et nous savons que cela existe.
    En outre, l'impossibilité d'avoir recours à un répondant fera en sorte que certains de ces citoyens des Premières Nations verront leurs possibilités de participation au scrutin presque réduites à néant lors de la prochaine élection.
    Nous nous préoccupons par ailleurs des restrictions imposées quant aux communications entre les électeurs et le directeur général des élections.
    Comme je l'ai déjà indiqué, nous avons collaboré activement avec Élections Canada dans une perspective non partisane lors des trois dernières élections fédérales pour aider à faire en sorte que les électeurs des Premières Nations soient renseignés quant à la façon de participer au scrutin. Le projet de loi C-23 propose d'importants changements à l'article 18 de la Loi électorale du Canada actuellement en vigueur. Il ne serait notamment plus possible pour le directeur général des élections de communiquer avec les électeurs ou de leur fournir de l'information au moyen d'appels non sollicités.
    Nous avons l'impression que ces changements viendraient saper les efforts que nous déployons auprès des conseils de bande pour les informer au sujet d'une élection à venir. Le rôle d'Élections Canada consiste notamment à offrir un soutien impartial à la tenue d'élections justes et accessibles de telle sorte que tous les électeurs admissibles puissent exercer leur droit de vote s'ils jugent bon de le faire. Si les changements proposés sont adoptés, il deviendra plus difficile, voire impossible, pour Élections Canada de remplir ce rôle.
    En conséquence, l'APN recommande que l'on retire du projet de loi C-23 toutes les modifications touchant l'article 18 de manière à maintenir intact le mandat actuel du directeur général des élections qui peut mettre en oeuvre des programmes d'information et d'éducation populaire visant à mieux faire connaître le processus électoral à la population, et particulièrement aux personnes et aux groupes susceptibles d'avoir des difficultés à exercer leurs droits démocratiques.
    Deuxièmement, l'APN recommande que les dispositions interdisant l'utilisation de la carte d'information de l'électeur comme preuve de résidence et le recours à un répondant soient rayées de ce projet de loi.
    Les Premières Nations veulent déterminer elles-mêmes la façon dont elles souhaitent entrer en interaction avec leurs gouvernements et avec l'État canadien de manière plus générale. Ces changements limitent leurs options ainsi que leur capacité de participer au processus démocratique canadien et d'avoir leur mot à dire quant à ses résultats. Nous croyons que c'est un pas dans la mauvaise direction.
    Meegwetch. Merci beaucoup.

  (1120)  

    Merci, monsieur Dinsdale.
    Nous passons à un tour de questions où chacun aura droit à sept minutes.
    Monsieur Reid, c'est à vous de partir le bal.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Disons que je vais débuter avec M. Dinsdale.
    J'aimerais discuter de deux éléments qui sont ressortis de vos observations. Le premier concerne la participation des jeunes. Êtes-vous au fait de l'étude menée par le directeur général des élections au sujet de la participation des jeunes lors du dernier scrutin?
    Non, je n'ai pas cette étude en main. Je suppose que vous allez la citer.
    D'accord.
    À l'issue des élections générales de 2011, il a rendu publics les résultats de ce qu'il a appelé son « Enquête nationale auprès des jeunes ». C'est une enquête menée auprès d'un échantillon aléatoire de 1 300 jeunes, ainsi que d'un échantillon non aléatoire comptant également 1 293 jeunes. On voulait ainsi obtenir des données suffisantes concernant différents groupes, dont les jeunes Autochtones.
    J'aimerais maintenant vous citer quelques observations formulées dans ce rapport quant à la faible participation des jeunes Autochtones.
    Il dit d'abord ce qui suit au sujet des cinq sous-groupes de jeunes:
Les jeunes des cinq sous-groupes ont indiqué avoir voté à des taux largement plus bas que les taux visant les jeunes en général, et le plus bas taux a été relevé chez les jeunes Autochtones et les jeunes sans emploi.
    Il résume ensuite les principales raisons expliquant le faible taux de participation pour chaque groupe.
Pour les jeunes Autochtones, les principaux obstacles au vote étaient la faible connaissance des différentes façons de voter, le manque d'intérêt à l'égard de l'élection, et la difficulté à se rendre au bureau de scrutin.
    Ce n'est pas indiqué dans ce rapport, mais je présume que les jeunes Autochtones pourraient sans doute être subdivisés en deux sous-groupes, ceux qui vivent dans les réserves et ceux qui résident dans les grands centres et qui ne savent probablement pas à quel endroit se rendre pour voter.
    Tout cela pour dire que le nouvel article 18 qui découlerait des changements proposés à la Loi électorale du Canada exigerait du directeur général des élections qu'il fournisse certains de ces renseignements de base aux citoyens, un domaine où le travail actuellement effectué est malheureusement, à mon sens et de l'avis de certains témoins qui ont comparu devant nous, totalement inadéquat. On n'a pas vraiment bien réussi à renseigner les gens sur ces éléments fondamentaux, à savoir l'endroit où voter; quoi faire si son nom n'apparaît pas sur la liste électorale, si on ne reçoit pas une carte d'information de l'électeur ou si les renseignements y figurant sont erronés; de quelle heure à quelle heure on peut voter; à quel moment on peut voter en dehors du jour du scrutin; et ainsi de suite. Tous ces éléments figurent désormais dans la loi et devront être communiqués.
    À la lumière des témoignages du directeur général des élections au fil des ans, je dois vous dire que le seul exemple d'effort de cette envergure pour fournir ces renseignements de base — non pas dire aux gens pourquoi ils doivent voter, mais comment ils peuvent exercer leur droit de le faire — nous vient d'un programme réalisé par votre organisation. C'était en collaboration avec une autre organisation autochtone dont le nom m'échappe...
    C'était l'Association nationale des centres d'amitié.
    C'est exact. C'était bien sûr une façon pour eux de rejoindre les Autochtones en milieu urbain.
    Bien que je n'en connaisse pas tous les détails, j'ai l'impression qu'il s'agissait de programmes valables. Je crois d'ailleurs que ces programmes demeureront tout à fait acceptables en vertu de la nouvelle loi et pourront en fait servir de modèles pour d'autres groupes comme les personnes handicapées dont les taux de participation électorale sont faibles.
    Je voulais porter cela à votre attention surtout pour vous faire comprendre que, si vos craintes sont raisonnables, ce projet de loi dans sa forme actuelle devrait vous rassurer complètement.
    J'aimerais souligner deux ou trois choses. Disons d'abord que je ne connais pas l'étude que vous avez citée, mais qu'elle m'apparaît certes raisonnable. Il y a différentes façons de ventiler les taux de participation des Autochtones selon, entre autres, qu'ils vivent ou non dans une réserve. Bien évidemment, les Métis et les Inuits doivent composer avec des difficultés qui leur sont propres.
    Nous avons pu prendre connaissance d'autres travaux qui concluent que la faible participation électorale des Premières Nations peut s'expliquer de différentes manières. Il y a parfois un sentiment de nationalisme qui amène les gens à se distancier — c'est votre élection, pas la nôtre. Nous croyons qu'il peut y avoir une certaine crainte à traiter avec l'État fédéral en raison du traumatisme collectif découlant notamment des pensionnats indiens et des autres réalités historiques dont nous avons parlé. Il y a aussi une absence de tradition quant à la participation aux élections fédérales dans nos communautés. Ajoutons l'élément pauvreté qui peut entrer en ligne de compte à certains égards. Ce sont donc bien évidemment des considérations importantes.
    J'étais directeur exécutif de l'Association nationale des centres d'amitié au moment de cet effort de collaboration qui a été très utile. On s'assurait que les gens sachent comment voter, quelles étaient les exigences et de quelles pièces d'identité ils devaient se munir avant l'élection. C'est très semblable au travail accompli par l'Assemblée des Premières Nations.
    Vous me dites que c'est ce que prévoient les dispositions actuelles, mais ce n'est pas ce que vous avons compris. Si c'est effectivement le cas, il serait important que cela soit précisé et clarifié. Si c'est l'intention visée, c'est assurément un pas dans la bonne direction.

  (1125)  

    Merci.
    Comme je vais bientôt manquer de temps, je vais adresser ma prochaine question à M. Thorsteinson.
    Peut-être que vous l'ignorez, mais en vertu de la réglementation prise en application de la loi en vigueur, la carte d'information de l'électeur ne peut pas servir de pièce d'identité. Le directeur général des élections souhaitait qu'on en élargisse l'usage, et des projets pilotes ont été menés à cet effet lors des dernières élections. Il n'était toutefois pas possible d'utiliser la carte d'information de l'électeur comme mode d'identification à l'extérieur de ces zones pilotes.
    C'est une distinction importante. Il y a bien des gens qui soutiennent que l'on ne devrait pas mettre fin à cette pratique, mais on n'a pourtant pas encore commencé à l'utiliser.
    Il y a un aspect qui me préoccuperait dans l'éventualité d'une utilisation plus étendue de la carte d'information de l'électeur. Ces cartes comportent de nombreuses erreurs et je me réjouis donc que ce projet de loi en empêche l'utilisation.
    Je vais me référer ici au rapport produit par le directeur général des élections à l'issue des dernières élections générales. Il indique que 84 % des électeurs figurant sur les listes préliminaires pour les 41es élections générales étaient inscrits à la bonne adresse résidentielle, ce qui signifie que 16 % ne l'étaient pas. Il s'agit donc de millions de personnes. Les cartes d'information de l'électeur sont émises à partir de la liste préliminaire, et non de la liste définitive, ce qui fait que 16 % des gens ont reçu une carte indiquant la mauvaise adresse.
    À titre d'exemple, mon ex-épouse et moi-même avons reçu des cartes nous invitant à aller voter dans deux circonscriptions différentes à la suite de problèmes internes avec la base de données. Si elle avait pu utiliser cette carte comme pièce d'identité, elle aurait pu voter dans la mauvaise circonscription.
    Je ne vois pas comment Élections Canada peut autoriser quelqu'un à voter dans la mauvaise circonscription — une circonscription où il ne réside pas — mais ce sont des choses qui arrivent. Tant et aussi longtemps que les corrections nécessaires ne seront pas apportées à la base de données, et il restera sans doute toujours des erreurs, le recours à la carte d'information de l'électeur demeurera problématique.
    Dans ce contexte, convenez-vous avec moi que ce n'est peut-être pas la meilleure façon de régler les problèmes liés à la participation au scrutin pour les personnes âgées?
    Veuillez répondre brièvement, monsieur Thorsteinson.
    Oui, monsieur le président
    Je dirais à l'honorable député que je comprends bien que la carte d'identification de l'électeur n'avait qu'un usage limité lors des élections de 2011. Néanmoins, bien des aînés ont comme moi des problèmes de mémoire et apprécient pouvoir compter sur ces cartes qui facilitent grandement les choses au bureau de scrutin lorsqu'il s'agit d'identifier les électeurs sur les différentes listes.
    Il va de soi que certains prennent des raccourcis. Est-ce que les greffiers, les scrutateurs et les superviseurs des bureaux de scrutin essaient d'obtenir deux pièces d'identité lorsqu'ils sont convaincus de la validité de la carte d'information de l'électeur et de la première pièce d'identification produite?
    Je ne soutiens pas qu'il faudrait accorder à la carte d'identification de l'électeur une valeur légale qu'elle n'a pas. Quoi qu'il en soit, les aînés apprécient ces cartes. Ils ne veulent pas des changements qui pourraient en miner la valeur de quelque manière que ce soit, et j'estime qu'on devrait pouvoir continuer à s'en servir.
    Merci.
    Merci, monsieur Reid. Vous n'avez plus de temps.
    C'est à vous, monsieur Scott. Je crois que vous allez partager votre temps dans un ratio quatre et trois.
    Vous avez la parole.
    Merci.
    Je vous dirai quand on en sera à quatre minutes.
    Nous savons tous que le directeur général des élections a le pouvoir de désigner les pièces d'identité acceptables. C'est ce qu'il a fait avec la carte d'information de l'électeur lors des dernières élections. Il n'y a pas...
    Seulement dans quelques régions pilotes.
    Il a le pouvoir de le faire. Cessez donc de tromper les gens en leur faisant croire qu'il ne pouvait pas le faire.
    Pour l'amour du ciel...
    Messieurs, s'il vous plaît.
    Vous devriez avoir honte, Craig.
    Une minute, monsieur le président...
    C'est autorisé.
    ... M. Scott vient juste de tenir des propos non parlementaires, car il m'a accusé de tromper les gens.
    Effectivement.
    Ce sont des propos non parlementaires. Je n'ai rien fait de la sorte. Il doit retirer ses paroles.
    Je ne retire rien du tout.
    S'il vous plaît.
    Merci.
    Adressez-vous un à la fois au président ou à un témoin, mais ne vous parlez pas entre vous.
    Continuons.
    Monsieur le président, le directeur général des élections a le pouvoir de désigner les cartes d'identité. Il a désigné des cartes d'information de l'électeur pour environ un million de personnes en 2011. Il est faux de penser que cela n'était pas acceptable ou autorisé en 2011.
    Deuxièmement, le directeur général des élections a témoigné qu'avec un taux d'exactitude de 90 %, la carte d'information de l'électeur est probablement le document gouvernemental le plus exact et le plus courant. Les permis de conduire sont aussi inexacts que les cartes d'information de l'électeur, car l'adresse qu'ils portent est souvent obsolète, et il s'ensuit que les scénarios fantaisistes élaborés par M. Reid pourraient se produire aussi bien avec un permis de conduire...
    J'invoque le Règlement.
    Merci. Monsieur Scott, veuillez vous arrêter pour une seconde.
    M. Reid invoque le Règlement.

  (1130)  

    Le professeur Craig a déclaré que j'avais trompé le comité. S'il veut soutenir que je n'ai pas tenu compte de certains renseignements, que je n'étais pas bien informé, ou quelque chose de ce genre, je n'ai pas d'objection. Mais affirmer que j'ai été malhonnête envers le comité est inacceptable. Je ne porterais jamais une telle accusation contre lui sans avoir de preuve. Je crois qu'il devrait retirer cette déclaration.
    Merci.
    Monsieur Scott, aidez-moi à maintenir l'ordre en la retirant.
    Monsieur le président, je n'ai pas utilisé le mot malhonnête. J'ai laissé entendre que la façon dont la question avait été posée pouvait induire en erreur.
    Vous avez utilisé le mot « tromper ».
    Je crois que vous avez utilisé le mot « tromper » et j'aimerais beaucoup que vous m'aidiez à corriger la situation.
    D'accord.
    M. Reid n'a pas délibérément trompé les témoins.
    Merci.
    Continuez.
    J'aimerais poser trois questions.
    J'aimerais que M. Howe et M. Dinsdale répondent à ces questions, car il me reste seulement quelques minutes.
    Tout d'abord, à votre avis, y a-t-il une raison particulière pour laquelle l'article 18, dans sa forme actuelle, c'est-à-dire les programmes d'information et d'éducation populaire, et l'article suggéré par le ministre et prôné par M. Reid pour les très bonnes raisons qu'il a fournies, ne peuvent pas coexister? Y a-t-il une raison pour laquelle nous devons éliminer l'un de ces articles et le remplacer seulement par l'article actuel? Le ministre a refusé dès le premier jour d'envisager cette possibilité lorsque je la lui ai suggérée.
    Deuxièmement, en ce qui concerne le lien de cause à effet, voyez-vous des preuves qui démontrent que les efforts en matière de sensibilisation et d'éducation déployés par Élections Canada, notamment auprès de l'APN, ont eu des effets négatifs ou aucun effet?
    Je vais m'arrêter ici, car il me reste seulement une minute.
    Merci.
    Tout d'abord, je crois que la principale différence que nous voyons dans les changements de l'article 18, c'est manifestement l'absence de sensibilisation proactive et le fait de ne pas être en mesure de mener des recherches, surtout en ce qui concerne les tendances en matière de vote et l'identification des groupes participants. Cela me semble être l'obstacle auquel nous tentons de nous attaquer.
    Deuxièmement, je ne crois pas qu'il existe de bases de données parfaites. Je n'ai jamais vu une base de données qui n'avait pas de problèmes. Cela ne signifie pas que nous ne devrions pas nous efforcer d'arranger ces bases de données, mais à mon avis, la carte d'information de l'électeur des Premières Nations est un outil très utile. Je ne suis au courant d'aucune fraude, d'aucun problème ou d'aucun défi liés à l'utilisation de ces cartes lors d'élections précédentes.
    Je pense que le rôle actuel du directeur général des élections, qui consiste à encourager la participation des électeurs, devrait être préservé et même étendu. Même s'il est difficile de déterminer quels effets précis les initiatives lancées par Élections Canada engendreront, nous avons de nombreuses preuves venant d'autres pays qui ont été en mesure d'utiliser des méthodes d'évaluation plus précises — des méthodes expérimentales, etc. — qui démontrent que lorsqu'on déploie des efforts pour sensibiliser les électeurs, cela entraîne des effets concrets. Parfois, ils sont faibles, mais ils sont tout de même concrets, et ils se font sentir. Plus vous faites d'efforts, plus les effets se font sentir.
    D'accord.
    Monsieur Christopherson.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais remercier nos témoins. Je vous suis reconnaissant d'être ici.
    J'ai seulement quelques minutes, et j'aimerais donc simplement vous dire, monsieur Dinsdale, qu'étant donné que vous êtes ici au nom des Premières Nations et que vous avez dit que cela créait de nouveaux obstacles... Honnêtement, si le gouvernement actuel respectait les peuples des Premières Nations comme il le devrait, ce processus s'arrêterait immédiatement, et on donnerait à plus de gens — c'est-à-dire aux Canadiens eux-mêmes — l'occasion de formuler des commentaires. Mais ce n'est pas ce que le gouvernement fait. Je suis très heureux que vous soyez ici pour donner un visage aux Canadiens qui risquent de perdre leur précieux vote.
    Mais j'aimerais m'adresser à M. Thorsteinson au sujet de ce qu'il a dit sur le manque de documentation concernant les remises accordées. Même si le gouvernement ne semble pas trop touché par les Premières Nations, l'opposition, le directeur général des élections, le commissaire aux élections ou par n'importe quel autre expert qui a commenté à cet égard, il s'est vraiment mis les pieds dans les plats maintenant, car il a irrité Sheila Fraser. S'il y a une personne au pays sur laquelle les Canadiens peuvent compter pour leur dire la vérité, c'est Sheila Fraser. Voici ce qu'elle a dit, selon les médias:
On a beaucoup parlé des petites dépenses et de ce que (les politiciens) dépensent pour leurs déplacements et (pourtant), les partis politiques reçoivent plus de 30 millions de dollars (en remises et en crédits d'impôt), et il n'y a pas vraiment de reddition de comptes...

En cette époque où tout le monde parle d'une augmentation de la transparence et de la reddition de comptes, pourquoi ne devraient-ils pas être assujettis à une forme de vérification?
    Ces paroles font référence au fait que, sur les 66 millions de dollars que tous les partis ont payés lors des dernières élections, ils ont obtenu 33 millions de dollars en remises sans avoir à fournir un seul reçu. On ne leur a pas demandé de fournir de reçus. J'ai déjà mentionné que lorsque je suis arrivé ici — les changements datent seulement de deux ou trois ans —, on pouvait présenter une demande de remboursement de 25 $ pour un déplacement en taxi sans présenter le reçu, car on considérait qu'il s'agissait d'une formalité administrative mineure. Toutefois, aujourd'hui, tout le monde dit: « Attendez une minute. On ne peut pas rembourser 25 $ sans un reçu. Voyons donc. » Mais voilà que nous donnons 30 millions de dollars sans exiger les reçus.
    Monsieur Thorsteinson, j'aimerais avoir vos commentaires sur la façon dont on perçoit cela à l'extérieur de la bulle d'Ottawa. Je vous serais reconnaissant de nous donner votre avis.

  (1135)  

    Très brièvement, monsieur le président, vous avez cité de nombreux organismes et experts, ou tous ceux qui ont donné leur avis jusqu'ici. Je crois que tous leurs témoignages ont été ajoutés au compte rendu et que les membres du comité connaissent leurs commentaires.
    À mon avis, cela aura seulement un effet lorsque les membres et les électeurs du parti au pouvoir commenceront à dire tranquillement, par l'entremise de leurs voies de communication, qu'ils sont là pour maintenir la démocratie, et non pour l'éroder, et que cela va à l'encontre des valeurs et des principes des Canadiens. Lorsque leurs propres membres et électeurs le leur auront dit assez souvent, les problèmes de cette loi se feront sentir sur le plan politique.
    Merci, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Lamoureux, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Thorsteinson, j'ai vraiment aimé la déclaration que vous avez faite sur le fait que nos hommes et nos femmes qui sont allés à la guerre se sont battus, en grande partie, pour la liberté et la démocratie. Vous représentez une organisation de personnes âgées de toutes les régions du Canada. Il me semble qu'il s'agissait d'une déclaration personnelle, car manifestement, le sujet vous passionne énormément, tout comme il passionne les députés de l'opposition, y compris moi-même.
    Vous avez souligné que vous aviez l'impression que la démocratie était en fait diminuée par l'adoption de cette loi. Je ne veux pas vous faire dire des choses que vous n'avez pas dites, mais à votre avis, avons-nous le temps de sauver le projet de loi, ou devrions-nous tout recommencer?
    Il est tentant de dire que nous devrions tout recommencer, monsieur le président, mais de façon réaliste, une longue liste d'amendements, à mon avis, pourrait être acceptée en partie. Je ne peux pas parler au nom des partis de l'opposition au Parlement. Ces députés décideront de la qualité des amendements, si des amendements sont proposés. Mais une liste étoffée d'amendements qui rétablissent la réputation du Canada au sein de la communauté internationale en ce qui concerne le leadership, la qualité et le savoir-faire sur le plan électoral serait très bénéfique.
    J'aimerais utiliser l'exemple de ce qui tient lieu de Chambre des communes en Nouvelle-Zélande, où l'on exige un taux d'approbation de 75 % pour tout ce qui concerne la Loi sur les élections. C'est la norme à laquelle les Canadiens devraient s'attendre. Je ne suis pas certain d'avoir répondu à votre question, mais je crois qu'elle portait sur la refonte du projet de loi ou sur l'option de tout recommencer. Je vais laisser cette décision entre les mains des parlementaires. J'espère qu'ils sont à l'écoute des Canadiens.
    C'est un point valable. Qu'il s'agisse de Sheila Fraser, d'anciens directeurs généraux des élections, du directeur général des élections actuel ou de plus de 120 — ou peut-être même 160 — experts en politique de partout au Canada, on s'oppose de plus en plus au projet de loi.
    Malheureusement, je crois qu'il faudra que les députés du Parti conservateur demandent au premier ministre de faire ce qu'il faut et de permettre les changements. Si cela ne se produit pas, il nous sera difficile de voir... car le Cabinet du Premier ministre ne veut tout simplement pas de changements.
    Vous avez fait référence à un point que nous avons reconnu comme étant une lacune fondamentale du projet de loi. Il y en a plusieurs, mais celle qui nous intéresse vraiment, c'est l'incapacité d'Élections Canada d'assigner un témoin à comparaître. Nous croyons qu'au bout du compte, cela affaiblira nos lois. Comme de plus en plus de gens le savent, tout ce que nous avons à faire, c'est de dire non, et au bout du compte, il y aura moins de poursuites.
    Vous avez fait référence à l'obligation de comparaître des témoins. Croyez-vous qu'il s'agit d'un amendement absolument nécessaire au projet de loi?
    Oui. Au nom de notre fédération, monsieur le président, je dirais que c'est nécessaire. Nous croyons au redressement complet des torts ou nous n'y croyons pas.
    Je comprends que ce sont des questions justes, étant donné que je suis un témoin, mais j'aimerais beaucoup entendre les députés du gouvernement expliquer pourquoi on protège ceux qui violent les lois électorales. Quelle est la raison?

  (1140)  

    Oui, et je comprends que c'était la question que vous avez présentée. Quelle est la raison? Nous ne le savons pas, et nous n'entendons pas la réponse. Je soupçonne que c'est parce que le Cabinet du premier ministre a imposé le silence à ses députés à cet égard.
    Vous avez également soutenu que le commissaire devrait toujours relever d'Élections Canada. Encore une fois, c'est un point extrêmement important. Le bureau du commissaire a été créé en 1974, je crois, et il a été intégré à Élections Canada, car on jugeait qu'il serait mieux géré par l'entremise de cet organisme que par un bureau extérieur.
    Aimeriez-vous faire un commentaire sur ce point de politique, c'est-à-dire sur le problème de perception posé par le fait que cet organisme fait partie d'Élections Canada?
    C'est l'indépendance de l'institution d'Élections Canada qui est primordiale dans ce cas-ci. Le commissaire qui mène des enquêtes sur des irrégularités ou sur des violations présumées plus graves devrait en effet être aussi indépendant que possible du contrôle ministériel. Je crois que j'ai fait valoir ce point, mais je pense que les mandataires indépendants du Parlement servent bien les Canadiens, et je crois que la plupart des Canadiens sont de cet avis.
    Enfin, monsieur Dinsdale, la participation des Premières Nations au processus électoral est extrêmement importante. Vous avez fait référence à l'article 18, tout ce que le gouvernement avait dit que le directeur général des élections actuel peut faire. Ce qui nous préoccupe, c'est qu'on limite la capacité du directeur général des élections de communiquer avec votre organisme pour mener des études ou faire autre chose de ce genre.
    Encore une fois, à votre avis, le projet de loi peut-il être adopté sans amendement à l'article 18 qui permettrait à Élections Canada d'être en mesure de faire des études, notamment sur la façon dont nous pourrions augmenter la participation des Premières Nations aux élections? Pourriez-vous commenter à cet égard?
    Je vous remercie d'avoir posé la question.
    L'article 18 devrait être, à notre avis, amendé ou, honnêtement, éliminé. Comme nous le savons, et comme le directeur général des élections l'a dit dans son témoignage et selon les renseignements qu'il a diffusés, cet article impose des limites importantes à la capacité de communiquer avec la population, notamment par les programmes d'engagement civique, qui seraient évidemment considérés comme étant... C'est, à notre avis, le problème principal en ce qui a trait à cet article. Il faut le modifier pour que les activités en matière d'engagement civique que nous avons menées jusqu'ici puissent se poursuivre.
    Je remarque que les trois témoins présents ce matin...
    Je vais vous poser ma dernière question, monsieur Howe, au sujet de l'article 18 du projet de loi. Il semble que même si tous ceux qui comparaissent devant le comité reconnaissent que nous devons permettre à Élections Canada de faire son travail, cela n'a aucune importance. Le projet de loi empêchera Élections Canada d'être en mesure de faire le travail qu'il doit accomplir.
    Monsieur Howe, à votre avis, est-il absolument nécessaire d'apporter des amendements à l'article 18 du projet de loi?
    Veuillez être bref, monsieur Howe.
    Oui, je crois que c'est essentiel. À mon avis, c'est vraiment un problème important, et même si je partage d'autres préoccupations et critiques qui ont été exprimées à l'égard du projet de loi, ce point me préoccupe énormément.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Reid, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens également à remercier M. Scott pour la façon courtoise avec laquelle il a retiré ses paroles.
    Si vous me le permettez, j'aimerais prendre quelques instants pour parler de l'utilisation de la carte d'information de l'électeur. Je le répète, je parle ici de la carte d'information de l'électeur et non de la carte d'identité électorale. Il est important de faire la distinction.
    Dans son rapport sur la 41e élection générale qui a eu lieu en 2011, dont j'ai ici une copie et dont tous les députés ont reçu une copie, le directeur général des élections explique, à la page 36, ce qui s'est produit lors de ces élections avec la carte d'information de l'électeur, la CIE. Il explique que la CIE a été utilisée à titre de preuve d'identité et d'adresse à plusieurs endroits, y compris dans 745 bureaux de scrutin dans des réserves autochtones, et dans un grand nombre de bureaux de scrutin dans des résidences pour personnes âgées, dans des bureaux de scrutin itinérants et, dans une moindre mesure, dans des bureaux de scrutin dans des résidences étudiantes. Il fournit également des détails à ce sujet.
    Mais, on parle ici de trois cas bien précis. Il souligne que, dans le cas des étudiants, peu ont profité de cette nouvelle option. Bon nombre n'ont pas reçu leur carte, et c'est également un problème, car on ignore où ils habitent. Donc, on ne peut pas leur envoyer une CIE. Dans son rapport sur les jeunes, le directeur général des élections souligne également ce problème.
    Cela ne change rien au fait que, dans l'ensemble du pays, le taux d'erreur en ce qui a trait à la CIE est extrêmement élevé. Selon le DGE, à la page 28 de son rapport, le taux d'exactitude n'est pas de 90 % — la liste préliminaire sur laquelle on s'appuie pour produire les CIE —, mais bien de 93 %. Cela concerne l'information sur les électeurs, c'est-à-dire que la carte a été envoyée à la bonne personne, et non à une personne décédée, par exemple. L'autre 7 % concerne des non citoyens ou des personnes décédées, ou il y a eu tout simplement une erreur au chapitre des données.
    Cependant, en ce qui concerne l'adresse des électeurs — un élément essentiel, car comme je l'ai souligné, ces cartes sont utilisées à titre de preuve d'adresse —, le taux d'exactitude chute à 84 %, soit un taux d'erreur de 16 %.
    Le DGE poursuit en disant -- je vais citer le DGE, d'accord? Donc, monsieur Scott, je n'induis personne en erreur. Je ne fais que citer le rapport. Donc, le DGE dit: « On a estimé dans 10 circonscriptions que le niveau d'exactitude de la liste avait chuté à moins de 75 %. »
    Mettons une chose au clair. Il ne précise pas ce qui a chuté à 75 %. Je soupçonne qu'il fait référence à l'exactitude relative au nom des électeurs. Il ne donne aucune précision, mais il pourrait également s'agir de l'exactitude relative aux adresses, ce qui signifie que seulement 25 % des électeurs reçoivent de mauvaises informations. Le pourcentage pourrait être plus élevé.
    Il s'agit d'un problème sérieux qui n'a pas été réglé dans le cadre du projet pilote. Néanmoins, le DGE précise qu'il a l'intention d'étendre cette pratique à l'ensemble du pays, y compris dans les circonscriptions où 25 % de ces cartes orienteront les électeurs vers le mauvais bureau de scrutin ou leur fourniront de mauvaises informations, notamment.
    C'est le point que je voulais souligner. Merci.

  (1145)  

    Merci.
    Il vous reste une minute.
    D'accord.
    Monsieur Thorsteinson, vous dites que vous avez été président de campagne lors de l'élection fédérale. Pourriez-vous nous parler de votre expérience politique par rapport au sujet à l'étude? Je crois qu'il est important que les gens comprennent ce qui vous motive.
    Monsieur le président, à des fins de transparence, je tiens à souligner que je suis un activiste politique depuis environ 40 ans et que j'ai été directeur de campagne lors de trois élections fédérales et de trois élections provinciales, mais pas président.
    M. David MacKenzie: J'aimerais en venir à...
    M. Barry Thorsteinson: Je sais, et j'y arrive.
    Donc, j'ai acquis mon expérience de campagne au sein du Nouveau parti démocratique. Je vous le dis honnêtement. Cependant, je crois que je partage les mêmes valeurs canadiennes que tous les partis politiques.
    Monsieur, votre groupe a-t-il un mandat?
    Comme je l'ai dit plus tôt, nous organisons un congrès annuel. Nous avons toutes sortes de mandats. Honnêtement…
    Un de vos mandats serait-il de faire élire des candidats du NPD?
    Je parlais de mes expériences personnelles. J'ai déjà été directeur de campagne. Après avoir pris ma retraite en 2008, je suis devenu président de la fédération. Je ne suis plus président aujourd'hui. Mais, j'ai cessé d'être directeur de campagne lorsque j'ai pris ma retraite. Je ne dirige plus de campagnes.
    Merci.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Allez-y, monsieur Lamoureux.
    Je crois qu'il faut faire attention. Nous accueillons de merveilleuses organisations au comité, et il ne faudrait pas manquer de respect envers les témoins simplement parce qu'ils ont participé à des activités d'un parti politique…
    Absolument, monsieur Lamoureux.
    Cela ne signifie pas qu'une organisation est partisane. Il est important de le souligner.
    Merci.
    Vous avez raison, monsieur Lamoureux, mais je crois que les témoins sont capables de choisir ou non de répondre aux questions. Je suis ici pour les défendre, s'il y a lieu.
    Madame Latendresse, vous avez la parole pour quatre minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je veux revenir aux questions qu'a posées précédemment mon collègue, David Christopherson, à propos du pouvoir d'Élections Canada de demander des reçus aux partis politiques.
    Monsieur Howe, je sais que vous avez beaucoup d'expérience dans les domaines de l'argent et de la politique. J'aimerais donc obtenir votre opinion à ce sujet.
    Actuellement, au palier fédéral, avec Élections Canada, les partis politiques sont les seules entités qui n'ont pas à produire de reçus après un rapport d'élections et qui n'ont pas à prouver que les dépenses qu'ils ont faites respectent la Loi électorale du Canada. J'aimerais avoir votre opinion à ce sujet.

[Traduction]

    En fait, ma recherche portait davantage sur la participation des jeunes aux activités politiques que sur le financement politique. J'ai mené une étude avec mes étudiants sur ce sujet en particulier. Toutefois, en tant que citoyen intéressé et engager, je dirais qu'il s'agit d'un problème et qu'il faudrait d'ailleurs le régler. C'est tout ce que je dirai à ce sujet.

  (1150)  

[Français]

    Merci.
    Monsieur Dinsdale, je vais maintenant m'adresser à vous. J'aimerais qu'on continue à parler des cartes d'information de l'électeur.
     On nous a donné beaucoup d'informations jusqu'à maintenant et certains aspects n'étaient vraiment pas assez clairs. Or je pense qu'il faut envoyer aux gens un message très clair.
    On a dit que dans 5 600 bureaux de scrutin, les gens avaient pu utiliser la carte d'information de l'électeur pour être en mesure de voter. Selon MM. Neufeld et Mayrand, c'est un projet pilote qui a très bien fonctionné. Les deux ont recommandé d'étendre l'utilisation de la carte d'information de l'électeur.
    À elle seule, la carte d'information de l'électeur ne suffit pas à prouver son identité au moment de voter. Si une carte d'information de l'électeur était incorrecte, cela ne voudrait pas dire que cela pourrait mener à de la fraude parce que, au moment de voter, il faut présenter une autre carte d'identité dont l'information correspond à celle figurant sur la carte d'information de l'électeur.
    D'après les données que j'ai ici, environ 72 000 Autochtones ont pu utiliser la carte d'information de l'électeur pour voter en 2011. D'après vous, est-ce que cela s'est avéré positif au regard de la participation au vote des Premières Nations?

[Traduction]

    Absolument. Selon nous, la possibilité d'utiliser la carte d'information de l'électeur s'est avérée une expérience positive. Lors de la dernière élection, nous avons communiqué directement avec 313 Premières Nations pour les informer des différentes options qui s'offraient aux membres pour exercer leur droit de vote, et beaucoup ont utilisé la CIE.
    Pour me préparer à mon témoignage ce matin, j'ai lu certains témoignages antérieurs, dont celui du directeur général des élections. Il a parlé de ce projet et souligné que certains groupes d'électeurs, dont les personnes âgées dans des résidences et les membres de Premières Nations dans des réserves, ont utilisé la CIE pour contourner l'important problème de la liste des pièces d'identité autorisées. Comme vous l'avez souligné, il était nécessaire de présenter deux pièces d'identité. La carte d'information de l'électeur pouvait être utilisée comme une de ces pièces d'identité.
    Dans son témoignage, le DGE a dit ceci: « L'initiative a connu du succès et a été bien reçu par les électeurs, les établissements et les administrateurs de réserve. Le fait de permettre aux électeurs d'utiliser leur CIE comme preuve de résidence réduirait le recours aux répondants. »
    Donc, ce projet pilote a été une réussite sur tous les plans et cette option devrait être maintenue.

[Français]

    Le directeur général des élections a aussi expliqué que la carte d'identification autochtone ne comporte pas d'adresse. C'était l'un des grands problèmes. Les Autochtones possédaient une carte qui ne permettait pas de prouver leur adresse. La carte d'information de l'électeur vient combler cette lacune et permet à plus d'Autochtones d'aller voter.
    Êtes-vous d'accord à ce sujet?

[Traduction]

    Très brièvement...
    Aucune adresse ne figure sur ma carte de statut. Si c'était ma seule pièce d'identité avec photo, je ne pourrais pas voter.
    Merci beaucoup.
    Monsieur O’Toole, vous avez la parole pour quatre minutes. Vous serez notre dernier intervenant de cette série de questions.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux deux témoins d'avoir accepté notre invitation. Mes questions ne s'appuieront que sur des éléments importants dont j'aimerais parler concernant les répondants. Je parlerai également de ces statistiques et je m'adresserai à M. Dinsdale.
    De nombreux témoins, y compris vous, monsieur Thorsteinson, avez lié, à tort, deux des problèmes dont nous parlons. Il faut faire la distinction entre les exigences en matière de vérification de l'identité de l'électeur et les problèmes liés à la participation des électeurs. Plusieurs les confondent… Le professeur Thomas la fait l'autre jour. Voici ce que dit à ce sujet le rapport Neufeld commandé par Élections Canada.
    Selon les vérifications effectuées, 120 000 répondants ont été utilisés. On ignore si c'est exact — quoiqu'il s'agit d'une vérification considérable sur le plan statistique — et 95 000 erreurs ont été commises. Alors, comment cette vérification a-t-elle été réalisée? Il y a eu 1 000 sondages randomisés, 10 sondages menés au centre Etobicoke et 50 sondages menés lors des trois élections partielles de 2012, y compris celle qui a eu lieu dans ma circonscription de Durham. Donc, en tout, c'est 1 160 sondages randomisés. Aucun lien n'a été établi entre les 120 000 répondants et ceux qui ont fait appel à eux. Donc, aucune donnée ne permet de confirmer ce que vous avez soulevé aujourd'hui, monsieur Thorsteinson, soit que ce sont les jeunes, les Autochtones ou les personnes handicapées qui, pour la plupart, ont fait appel à un répondant.
    Nous savons qu'il y a un problème de participation avec ses groupes et il faudrait s'y attarder, mais rien de ce que le comité a entendu ne vient appuyer ce que vous laissez entendre, soit que ces groupes sont les principaux utilisateurs de répondants. Le témoignage de M. Howe est très utile à cet égard, puisqu'il a clairement indiqué que, selon son étude, les obstacles administratifs n'ont pas vraiment nui à la participation. D'ailleurs, mon collègue, M. Reid, a dit la même chose. Selon le rapport d'Élections Canada sur les élections générales de 2011, les obstacles administratifs et le manque de répondants n’ont pas eu d'impact sur la participation, notamment chez les jeunes autochtones. Les problèmes sont plus graves et je crois que les députés de tous les partis aimeraient voir une augmentation du taux de participation, notamment chez les membres des Premières Nations. Mes collègues peuvent bien chahuter, mais leurs questions ne s'appuyaient sur aucun fait.
    Je suis très heureux que vous soyez ici, monsieur Dinsdale, et ma question s'adresse à vous. Selon votre expérience dans les Centres d'amitié et à l'APN, vous dites que le niveau de connaissance et d'expérience d'Élections Canada et, plus particulièrement, des DRO, ainsi que le travail effectué sur le terrain en matière de formation et de supervision varie de façon spectaculaire à l'échelle du pays. Pourrait-on en faire davantage pour encourager les membres de Premières Nations à voter, notamment dans le cadre de ce projet de loi qui vise à revenir à des principes de base relativement au droit de vote?

  (1155)  

    Je vous remercie pour cette question. Je suis d'accord avec vous, mais selon moi, ce n'est pas une question de l'un ou l'autre. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas s'attaquer aux autres problèmes d'exclusion sociale qui nuisent à la participation des membres des Premières Nations tout en éliminant les nouveaux obstacles au vote, comme permettre l'utilisation de la carte d'identité électorale et d'autres outils.
    La carte d'information de l'électeur… Vous voyez, mes collègues ont réussi à vous embrouiller.
    La carte d'information de l'électeur… Oui, merci beaucoup.
    J'ignore pourquoi on ne pourrait pas faire les deux. Je ne comprends pas.
    La plupart des membres des groupes vulnérables ne reçoivent pas de CIE. C'est intéressant, puisque les informations qui y figurent sont les mêmes que celles qu'utilise le gouvernement pour dresser la liste électorale. Le plus ironique dans tout cela, et ce que mes collègues ne semblent pas comprendre, c'est que les membres des groupes où le taux de participation est faible ne peuvent pas fournir l'information nécessaire pour recevoir une CIE. Donc, je dirais que ces cartes ne sont pas la solution pour les Autochtones.
    En ce qui a trait aux répondants, je ne suis pas au courant des autres groupes auxquels vous faites référence. Je sais que pour les collectivités des Premières Nations, le répondant constitue une option utile, tout comme l'utilisation de la carte d'information des lecteurs. Ce sont des outils utiles, compte tenu de la situation du logement, de la situation socio-économique, du manque de pièces d'identité, et du fait qu'aucune adresse ne figure sur la principale pièce d'identité des membres, la carte de statut. Ces outils utiles permettent à ceux qui désirent exercer leur droit de vote de le faire. J'ignore pourquoi on ne pourrait pas faire les deux.
    J'ignore pourquoi on ne pourrait pas s'attaquer aux problèmes socio-économiques plus vastes dont vous parlez et encourager les gens à voter de façon à limiter l'exclusion sociale et à ne pas ériger de nouvelles barrières qui, pour les Premières Nations — je ne peux pas parler des autres groupes auxquels vous faites référence —, pourraient maintenir cette exclusion…
    Merci.
    Merci, monsieur O'Toole,
    Nous allons nous arrêter ici.
    Monsieur Howe, merci de votre participation et de votre aide.
    Messieurs Dinsdale et Thorsteinson, merci à vous deux d'avoir accepté notre invitation.
    Nous allons suspendre la séance quelques instants afin de permettre aux prochains témoins de s'installer.

  (1155)  


  (1205)  

    Reprenons.
    Encore une fois, bienvenue à la 27e séance du Comité permanent de la procédure et les affaires de la Chambre. Pour notre prochain groupe de témoins, nous accueillons Gladys Christiansen et Teresa Edwards. Elles vont nous présenter un exposé, nous dire qui elles sont et nous faire part de leur position.
    Madame Christiansen, nous vous entendrons d'abord. Vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je tiens à commencer par remercier les membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre d'avoir invité les peuples autochtones et les Premières Nations à venir témoigner.
    Je m'appelle Gladys Christiansen, et je suis membre des Premières Nations de la Bande indienne du Lac La Ronge, qui est encore notre appellation légale. Il s'agit de la plus grande Première Nation du nord de la Saskatchewan avec ses 9 935 membres, dont 6 399 vivent dans les réserves et 3 536 à l'extérieur de celles-ci. De ce nombre, 6 136 personnes sont en âge de voter, dont 3 778 sont sur les réserves et 2 358 à l'extérieur de celles-ci.
    Nous ignorons combien de membres de la Bande indienne du Lac La Ronge ont voté aux dernières élections, mais nous savons que certains n'ont pas pu le faire parce qu'ils n'avaient pas la carte d'information de l'électeur ou une des pièces d'identité obligatoires. Nous savons aussi que certains ont eu recours à un répondant pour se prévaloir de leur droit de vote.
    Je ne suis pas une spécialiste, et ce n'est pas pour cette raison que j'ai été convoquée. Vous avez déjà entendu le témoignage de nombreux experts, mais je veux plutôt vous parler de nos inquiétudes concernant le projet de loi C-23 et ses répercussions sur la participation ultérieure des Premières Nations aux élections fédérales.
    Je suis une Indienne inscrite qui a vécu presque toute sa vie sur une réserve. Le projet de loi C-23 propose d'éliminer le recours à un répondant et d'interdire l'utilisation de la carte d'information de l'électeur. Comme le directeur général des élections vous l'a dit le 6 mars dernier, le projet de loi C-23 réduira encore davantage le nombre de membres des Premières Nations qui peuvent voter aux élections fédérales.
    L'ancien membre du personnel électoral de la Colombie-Britannique Harry Neufeld a affirmé la fin de semaine dernière à l'émission The West Block qu'en 2011, 400 000 Canadiens ont voté à l'aide de la carte d'information de l'électeur, et que 120 000 ont eu recours à un répondant. La majorité d'entre eux étaient des Autochtones habitant dans les réserves — c'est ce qu'il a dit —, des étudiants en résidence et des aînés en maison d'hébergement pour les personnes retraitées. Or, le projet de loi C-23 empêchera tous ces électeurs de voter.
    La majorité des Canadiens peuvent voter à l'aide de leur permis de conduire seulement, pour autant que celui-ci indique leur adresse. Mais comme le directeur général des élections vous l'a dit dans son témoignage du 6 mars, quelque quatre millions de Canadiens n'ont pas de permis de conduire. Qui plus est, je possède moi-même un permis de conduire valide de la Saskatchewan qui n'indique pas l'adresse. Par conséquent, il faut ajouter aux quatre millions de Canadiens sans permis de conduire les nombreux autres qui ne peuvent pas utiliser ce document puisqu'il ne répond pas aux exigences d'identification.
    L'autre façon d'identifier les électeurs aux bureaux de scrutin est de présenter deux pièces d'identité admises, dont une doit indiquer l'adresse. Une liste de 38 est présentée. De ce nombre, seuls 13 documents peuvent donner l'adresse. Je les ai passés en revue, et contrairement au ministre d'État à la Réforme démocratique Pierre Poilievre, dont le portefeuille est rempli de pièces d'identité, la plupart des membres des Premières Nations n'ont aucun des documents d'identification admis, et encore moins un de ceux qui indiquent l'adresse, comme une facture de service, un relevé bancaire, un relevé de carte de crédit, un certificat d'immatriculation, un bail ou une police d'assurance.
    La réalité dans les réserves, c'est que bien des membres des Premières Nations sont au chômage et vivent dans des logements surpeuplés, où il n'est pas rare que trois ou quatre générations partagent un même toit. C'est ainsi que j'ai grandi au sein de ma communauté. Par conséquent, une seule personne du ménage reçoit une facture de service. Comment peut-on s'attendre à ce qu'une personne vivant avec 320 $ par mois ait des relevés de carte de crédit, de compte bancaire, d'immatriculation ou d'hypothèque, un bail ou une police d'assurance? Bon nombre d'entre eux n'ont pas de permis de conduire et ne possèdent aucune autre pièce d'identité.

  (1210)  

    Même obtenir un certificat de statut d'Indien est difficile ces dernières années. Les membres des Premières Nations attendent toujours leurs nouvelles cartes d'Ottawa puisque celles-ci ne peuvent plus être délivrées par la Première Nation ni même par les bureaux régionaux d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. Des demandeurs peuvent attendre jusqu'à deux ans avant d'obtenir leur carte.
    Si le gouvernement émet de nouvelles cartes, nous espérons qu'il envisagera de les accepter comme preuve d'identité. Le certificat de statut d'Indien est une carte d'identité avec photo qui est délivrée par le gouvernement. Pourquoi ce document n'est-il pas aussi acceptable qu'un permis de conduire?
    Nous appuyons les initiatives antérieures d'Élections Canada visant à augmenter le taux de participation des Canadiens défavorisés, comme la carte d'information de l'électeur et le recours à un répondant. Cette procédure relativement nouvelle peut être améliorée, mais ne devrait pas être éliminée.
    Comment le gouvernement canadien peut-il continuer à surveiller les procédures de vote d'autres pays alors qu'il exclut lui-même les électeurs les plus défavorisés de ses élections fédérales?
    Le gouvernement insiste continuellement sur la responsabilisation des Premières Nations. Qu'en est-il de la responsabilité du gouvernement à l'endroit des Canadiens? Le directeur général des élections consulte de nombreux experts, qui disent que le projet de loi C-23 doit être amendé, mais le gouvernement et le ministre Pierre Poilievre continuent à faire la sourde oreille. Les Premières Nations espèrent que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre pourra inciter le ministre et le gouvernement à apporter les amendements nécessaires.
    Si le projet de loi C-23 n'est pas amendé, le nombre de Premières Nations qui pourront voter aux prochaines élections générales sera considérablement réduit. Nombreux sont ceux qui ne pourront pas exercer leur droit.
    Merci.
    Merci. C'était très bien.
    Madame Edwards, je vous invite à nous présenter votre exposé, s'il vous plaît.
    Merci infiniment, Gladys. J'ai l'impression de n'avoir rien à ajouter après votre exposé très approfondi et très révélateur.
    Wela'lin. [Le témoin s'exprime en micmac.]
    Je m'appelle Teresa Edwards, et je suis une Micmaque de la réserve indienne de Listuguj. Je suis ici aujourd'hui en tant qu'avocate-conseil et directrice des droits de la personne de l'Association des femmes autochtones du Canada, ou AFAC.
    Je tiens à rendre hommage au territoire du peuple algonquin sur lequel nous sommes rassemblés aujourd'hui.
    L'AFAC s'efforce depuis 40 ans à améliorer le bien-être des femmes et des jeunes filles autochtones et de leurs familles et communautés au moyen d'actions et de politiques visant à essayer de changer la loi. Nous prononçons aussi des exposés comme celui d'aujourd'hui et exprimons toutes sortes de revendications.
    Incorporée en 1974, l'AFAC est une des cinq organisations autochtones reconnues à l'échelle nationale, et son objectif est de représenter sur la scène nationale les femmes autochtones, surtout les membres des Premières Nations et les Métisses, et de parler en leur nom. Nous avons bel et bien des Inuites parmi nos membres, mais nous laissons Pauktuutit s'occuper d'elles.
    L'AFAC a identifié un certain nombre de préoccupations bien précises relatives au projet de loi C-23 et aux modifications qu'il apporte à la Loi électorale du Canada. Comme vous le savez peut-être, avant 1960, il était interdit aux Indiens inscrits de voter aux élections canadiennes, sans quoi ils n'étaient plus considérés comme des Indiens selon la loi et ne pouvaient plus vivre dans leur communauté, leur réserve, et sur leur territoire. Le fait que certains peuples autochtones aient obtenu le droit de vote assez récemment explique en partie le nombre peu élevé d'hommes et de femmes autochtones qui ont été élus à la Chambre des communes. Depuis 1867, la Chambre n'a eu que 18 députés se reconnaissant Autochtones.
    La relation entre les Premières Nations et le gouvernement n'a pas toujours été harmonieuse, surtout en ce qui a trait aux votes et aux élections. Cette tension a eu une incidence sur la participation des Premières Nations aux élections de toutes les instances hors de leur collectivité, soit fédérales, provinciales, territoriales et municipales. Par contre, c'est tout à fait le contraire pour ce qui est de leur participation dans leur propre collectivité. Ce n'est pas une question d'indifférence ou de manque de connaissances. D'après l'expérience de l'AFAC, les confidences des femmes et nos recherches, c'est un choix qui est fait de façon générale.
     Pour ce qui est de la participation électorale, les membres des Premières Nations sont extrêmement actifs au sein de leur collectivité lorsque vient le temps d'élire un chef ou les membres du conseil. Le problème ne découle pas du fait qu'ils ignorent la procédure. Ils sont très bien informés et participent bel et bien dans leur propre collectivité.
    Dans le cadre de notre travail entourant les élections, les femmes autochtones ont énuméré de nombreuses raisons pour lesquelles elles ne participent pas aux élections fédérales. En voici quelques-unes: elles ne considèrent pas que le gouvernement les représente, surtout celui qui est actuellement au pouvoir; elles ne reconnaissent pas être gouvernées et dirigées par le gouvernement fédéral; et elles ne croient pas que le système fédéral aura une incidence favorable sur leur vie. Voilà certaines des raisons invoquées.
    Je n'oserais jamais parler au nom des membres des Six Nations, mais je sais qu'ils ont leur propre passeport, par exemple. Les femmes nous disent qu'ils ont leurs raisons de ne jamais participer aux élections, ce qui serait perçu comme une soumission ou une renonciation de leur souveraineté, en quelque sorte.
    Même si bien des raisons peuvent expliquer pourquoi les femmes autochtones ne participent pas aux élections fédérales, comme celles que j'ai énumérées, le gouvernement ne devrait pas dresser d'obstacles supplémentaires tels que ceux que Gladys a nommés avant tant d'éloquence, qui limiteront encore davantage leur capacité de voter si elles choisissent de le faire.
    Les jeunes femmes autochtones sont souvent des mères de famille monoparentale. Elles vivent dans la pauvreté, se déplacent beaucoup et sont souvent obligées de déménager plusieurs fois par année. Elles peuvent quitter la réserve et y revenir, ou changer de province pour rejoindre d'autres membres de leur famille. Ce mouvement peut être attribuable à des crises du logement, à la pauvreté, à la recherche d'un emploi, à un retour à l'école ou à un milieu violent qu'elles cherchent à fuir, peut-être.
    Au cours de la dernière année, l'AFAC s'est consacrée à un projet pour Élections Canada, et nous espérons continuer à faire ce genre de travail à l'avenir afin d'augmenter le taux de participation des femmes et des jeunes filles autochtones. Si nous ciblons ce groupe, c'est parce qu'il a été démontré que ceux qui votent quand ils sont jeunes continuent à le faire lorsqu'ils sont plus âgés.
    En 2007, en prévision des élections générales, un certain nombre de changements ont été apportés à la Loi électorale du Canada concernant les exigences d'identification. Ainsi, les électeurs devaient désormais présenter deux pièces d'identité, une avec photo, l'autre avec l'adresse résidentielle.
    Bien des femmes autochtones utilisent une case postale plutôt qu'une adresse domiciliaire. Aujourd'hui, je remplissais justement un formulaire pour l'Agence du revenu du Canada, et deux des membres de notre conseil ont des cases postales. Or, il était précisé que les cases postales ne devraient pas être permises. Sauf que c'est l'adresse de ces personnes; c'est là qu'elles vivent. Je vais devoir régler ce problème à mon retour avant de pouvoir envoyer les papiers au nom du conseil.

  (1215)  

    Un autre formulaire est couramment utilisé, car il y a aussi de nombreuses femmes autochtones qui vivent en milieu urbain, y compris des étudiantes, ou qui ont déménagé plusieurs fois dans l'année, et qui ne possèdent peut-être aucune pièce d'identité avec leur adresse au moment du vote. Gladys l'a mentionné, et moi aussi tout à l'heure.
    Un problème majeur est le moyen utilisé pour établir l'identité, comme le certificat de statut d'Indien. À l'heure actuelle, il n'existe aucune norme de service pour l'obtention du certificat auprès d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada. L'AFAC rencontre des femmes qui ont attendu leur carte 3, 5 et même 12 ans. Pour ma part, mon statut d'Indien est expiré. Par pur esprit de rébellion, je refuse de faire renouveler ma carte, car aucune autre race n'arrive à échéance à une date donnée. Veuillez m'excuser, mais je devais absolument en parler.
    Voilà qui serait une pièce d'identité acceptable. J'ai essayé de l'utiliser. Mon statut est expiré depuis mon anniversaire en juillet dernier, et j'ai depuis essayé d'utiliser ma carte à de nombreuses occasions. Même si les services ne devaient jamais être refusés si d'autres pièces d'identité comme un passeport ou un permis de conduite sont présentés, ce que j'ai fait, on me refuse constamment des services parce que mon certificat est expiré.
    Comme Glady l'a dit, bien des femmes autochtones sont dans cette situation. Dans le cas du projet de loi C-3, la loi qui est entrée en vigueur il y a deux ou trois ans, les femmes qui souhaitent inscrire leurs enfants doivent présenter un acte de naissance pour chacun d'eux. Ainsi, une mère célibataire qui a cinq enfants doit obtenir un acte de naissance pour chacun, ce qui peut coûter jusqu'à 90 $ par enfant, selon la province ou le territoire. Il faut aussi des photos de format passeport, qui peuvent coûter 25 $ au Shoppers Drug Mart. Le formulaire doit ensuite être envoyé au ministère des Affaires autochtones.
    À titre d'exemple, je sais que ma fille a envoyé sa demande il y a trois ans. Le ministère la lui a retournée trois fois. C'était tellement long. On lui a répondu que tout était correct, mais que la photo était maintenant expirée. Après un an, elle n'était plus bonne. Puisque le traitement de la demande n'était pas terminé et que celle-ci devait être envoyée à un autre ministère, ma fille a dû payer encore pour reprendre les photos. Elle devait également envoyer un autre acte de naissance original, mais le premier ne lui a jamais été retourné. Elle a donc dû débourser deux fois 90 $ pour les actes de naissance, et deux fois pour... Tout cela simplement pour obtenir un certificat de statut d'Indien, une carte importante dans la procédure.
    Les conseils de bande étaient au courant des exigences d'identification et des options qui s'offraient aux électeurs, y compris l'attestation de résidence de représentants autorisés de la collectivité; la carte d'information de l'électeur comme preuve de résidence actuelle; et le recours à un répondant, comme Gladys l'a dit, qui permet à un électeur déjà enregistré de confirmer l'adresse et l'identité d'une personne de la même section de vote.
    En 2012, l'Assemblée des Premières Nations, ou APN, a collaboré avec Élections Canada afin d'acheminer des appels sur les réserves suivant une série de scénarios créés conjointement avec Élections Canada pour informer les électeurs admissibles des pièces d'identité dont ils allaient avoir besoin. Dans le cadre de nos travaux avec Élections Canada, nous nous sommes rendu compte que des organisations autonomes comme l'AFAC et l'APN ont clairement un rôle à jouer auprès de la population; en collaboration avec Élections Canada, elles peuvent fournir de l'information, organiser des ateliers ou contribuer à informer le peuple sur les procédures électorales et le reste.
    Tant d'autres choses peuvent être faites pour améliorer la participation des Premières Nations aux élections fédérales, comme ce que l'APN et l'AFAC ont fait antérieurement avec Élections Canada pour s'inspirer des campagnes passées. Nous pourrions même apprendre des États-Unis à ce chapitre, avec la campagne sur le vote autochtone.
    C'est dans ce contexte que s'inscrivent nos inquiétudes par rapport aux modifications proposées dans le projet de loi C-23, à savoir les exigences d'identification restrictives et l'élimination du répondant. La disposition du projet de loi C-23 qui supprime le droit d'utiliser la carte d'information de l'électeur comme preuve d'adresse créera un tout nouvel obstacle pour nous, et plus particulièrement pour les femmes, surtout celles qui vivent dans une collectivité des Premières Nations et qui ont une case postale plutôt qu'une adresse domiciliaire.
    De plus, si elles ne peuvent pas avoir recours à un répondant, certaines de ces femmes, surtout les aînées, pourraient n'avoir aucune autre façon d'exercer leur droit de vote aux prochaines élections. Prenons l'exemple des étudiants qui vivent loin de chez eux, des mères seules qui déménagent plusieurs fois dans l'année, dont j'ai parlé, ou des aînés qui vivent avec leur famille.

  (1220)  

    Je sais qu'il me reste peu de temps. Je veux également parler brièvement du travail que fait l'AFAC en collaboration avec Élections Canada. Essentiellement, les modifications apportées à l'article 18 de la Loi électorale du Canada, qui confie à Élections Canada un vaste mandat sur l'information au public et la communication avec les électeurs, restreignent la capacité du directeur général des élections d'effectuer des appels non sollicités pour donner de l'information aux électeurs. Nous avions espéré pouvoir offrir aux femmes et aux filles autochtones le guide que nous sommes en train de préparer sur l'exercice du droit de vote et de collaborer avec nos associations membres des provinces et des territoires d'une façon que je décrirais comme similaire. Les modifications nous empêcheront de faire ce travail.
    Le rôle d'Élections Canada consiste entre autres à favoriser de façon impartiale des élections justes auxquelles tous les électeurs inscrits peuvent participer s'ils le souhaitent. Les changements apportés empêcheront Élections Canada de jouer ce rôle.
    L'AFAC recommande le retrait de toute modification apportée à l'article 18 dans le cadre du projet de loi C-23, et donc de conserver le mandat actuel du directeur général des élections de mettre en oeuvre des programmes de sensibilisation et d'information qui permettent à la population de mieux connaître le processus électoral.
    De plus, et je terminerai mon exposé là-dessus, l'AFAC recommande que soient retirées du projet de loi les dispositions qui rejettent la possibilité d'utiliser la carte d'information de l'électeur comme preuve de résidence et de recourir à un répondant.
    Merci beaucoup. Je m'excuse d'avoir dépassé le temps qui m'était alloué.

  (1225)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant aux questions. Vous disposez de sept minutes chacun.
    Monsieur Lukiwski, c'est vous qui avez la parole en premier aujourd'hui.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vous remercie de votre présence.
    Ma première question s'adresse à Mme Christiansen.
    Je viens de la Saskatchewan. Je pense que nous avons au moins quelques amis en commun. Le regretté Jim Sinclair était l'un de mes meilleurs amis. Je sais que tous les membres des Premières Nations et tous les Métis de la province, et probablement de tout le Canada, connaissaient Jim. J'avais beaucoup d'admiration pour lui et son départ m'a beaucoup attristé. Je ne sais pas si vous avez assisté aux funérailles. Je souligne en passant que j'ai été le seul non-Autochtone à faire un discours lors de ses funérailles. Il me manque beaucoup. Je sais qu'il a toujours eu à coeur, autant que n'importe quel Canadien que j'ai rencontré, de défendre les intérêts de toutes les Premières Nations, de tous les Autochtones et de tous les Métis.
    J'ai également quelques questions précises à vous poser au sujet de vos observations sur l'identification des électeurs, qui constitue selon vous un obstacle à la participation électorale. Vous avez dit qu'un peu plus de 3 700 personnes, je crois, vivent dans la réserve du Lac La Ronge, mais peu importe le nombre exact, ce n'est vraiment pas important.
    Vous y avez vécu presque toute votre vie, voire toute votre vie. Je sais que vous ne pouvez probablement pas me fournir de données exactes, mais quelle proportion des membres de votre réserve ont leur carte de statut? Est-ce que la majorité en a une?
    Ils ont tous le statut.
    Je le sais, mais vous avez dit que certains d'entre eux n'ont pas leur... que cela fait des années qu'ils attendent de recevoir leur carte de statut.
    Cela ne veut pas dire qu'on n'a pas...
    Monsieur le président, puis-je...?
    Certainement.
    Donc, ils ont tous leur carte?
    Ils n'ont pas nécessairement de carte; ils ont leur statut visé par un traité. Le chiffre dont je parlais était lié au nombre de membres enregistrés des Premières Nations, peu importe où ils vivent. Nous avons le statut dès notre naissance.
    Leur carte de statut est une preuve d'identité acceptable. Je sais que l'adresse n'y figure pas. Toutefois, elle comprend l'identité de la personne, non? Son nom y figure.
    J'ai ici ma carte de statut. Je l'ai obtenue à Ottawa lors de ma dernière visite. Il y a ma photo. C'est censé être la nouvelle carte, d'après ce que je comprends. Il n'y avait pas de photo sur la carte que j'avais auparavant.
    Non, mais comme je l'ai dit, votre nom y figure.
    Mon nom y figure, mais il n'y a pas d'adresse.
    D'accord, et il semble que c'est un problème pour la plupart des gens, c'est-à-dire le fait qu'il n'y a pas d'adresse. Je comprends que c'est le cas pour les réserves, mais saviez-vous que pour la vérification de l'adresse, vous pouvez utiliser tout simplement une lettre rédigée par n'importe quel membre, chef ou administrateur d'un conseil de bande de la réserve, et que ce serait acceptable?
    Non, je ne le savais pas, et je ne crois pas que mon chef ou les dirigeants le sachent.
    Oui, cela fait partie des 39 pièces d'identité pouvant servir de preuve d'adresse. En d'autres termes...
    Eh bien, j'ai vu la liste.
    ..., si une personne a sa carte de statut, tout ce dont elle a besoin, c'est une lettre d'un membre de l'administration de la bande qui confirme qu'elle vit dans la réserve. Elle pourra alors exercer son droit de vote.
    Comme l'ont expliqué quelques témoins, le problème que posent les cartes d'information de l'électeur, c'est qu'elles sont peu fiables, surtout celles dont les destinataires vivent dans les réserves. Donc, l'une des dispositions du projet de loi vise à remédier au problème et à faire en sorte qu'il soit le plus facile possible de fournir une preuve de résidence. On peut donc se servir des deux pièces — une carte de statut et une lettre d'un membre, d'un chef ou d'un administrateur d'un conseil de bande — pour prouver son identité et aller voter.
    Ma question est donc la suivante: cela réglerait-il une bonne partie des problèmes que vous avez soulevés?
    J'ai lu à ce sujet en fin de semaine pour avoir l'information dont j'avais besoin en prévision de mon témoignage d'aujourd'hui. Je n'en avais jamais entendu parler auparavant, et donc, je ne sais pas si les gens qui s'occupent des bureaux de scrutin sont au courant.
    Ce que je disais, c'est que nous avons près de 10 000 membres, dont plus de 6 000 sont en âge de voter. Quel membre de l'administration de la bande rédigera ces lettres prouvant que les gens peuvent voter? Pourquoi faut-il toujours imposer un fardeau supplémentaire aux Premières Nations?

  (1230)  

    Je dirais — j'essaie simplement de trouver une solution facile — que l'on peut avoir un modèle de lettre...
    Inscrire une adresse sur la carte serait une solution facile.
    Oui, mais au lieu de cela, ce que je dis, c'est que rien n'empêche quiconque dans la réserve de voter, puisqu'il y a des options dans le projet de loi C-23. Je vous remercie de vos observations, mais...
    Il faut toutefois que la lettre soit accompagnée d'une autre pièce d'identité.
    Excusez-moi?
    Il faut que la lettre soit accompagnée d'une autre pièce d'identité.
    La carte de statut est une possibilité.
    Encore faut-il en avoir une.
    C'est vrai. C'est pourquoi je voulais savoir quelle proportion des membres de votre réserve en a une.
    Nous ne le savons pas, car cela fait deux ans qu'ils attendent d'en recevoir une.
    D'accord.
    La plupart d'entre eux ont-ils une carte santé?
    Elle ne contient pas d'adresse.
    Non, mais le nom de la personne y figure.
    Encore une fois, si la personne se présente avec une carte santé et une lettre venant d'un conseil de bande dans laquelle on confirme qu'elle habite sur la réserve, elle pourra voter.
    Non, je ne pense pas.
    En fait, c'est le cas. C'est dans le projet de loi C-23.
    Je croyais qu'il fallait utiliser un permis de conduire, avec...
    Non. C'est une option. Si une personne a un permis de conduire, c'est tout ce dont elle a besoin, mais si elle n'en a pas, elle peut...
    ... photo et adresse, excusez moi.
    Je suppose que c'est une façon détournée de dire que puisque je ne vois... Bien que certains membres de l'administration de la bande risquent de se retrouver avec des tâches supplémentaires, l'identification et l'adresse ne constituent vraiment pas des obstacles à la participation électorale. Vous avez dit que vous ne saviez pas quel avait été le taux de participation dans votre réserve lors des dernières élections. Selon l'information que j'ai consultée, à moins que j'aie mal lu, il semble que le taux a été d'environ 35 %.
    M. Dinsdale, qui a comparu tout à l'heure, a dit que normalement, partout au Canada, le taux de participation dans les réserves se situe entre 35 et 75 %. À mon avis, cela signifie qu'il doit y avoir bien d'autres raisons que le manque de pièce d'identité adéquate qui expliquent que les membres des Premières Nations ne participent pas au processus électoral. Lors des dernières élections, les dispositions n'existaient pas, et il était possible d'avoir recours à un répondant, comme vous l'avez dit. Toute personne vivant dans votre réserve qui souhaitait voter aurait pu demander à son voisin d'agir à titre de répondant, et rien n'empêchait donc les gens de voter — certainement pas sur le plan de l'identification.
    Merci, monsieur Lukiwski. Votre temps est écoulé.
    La parole est à Mme Latendresse, pour sept minutes.
    Je devrais vous donner la possibilité de répondre brièvement, et ce sera au tour de Mme Latendresse par la suite.
    J'allais seulement dire qu'il ne s'agirait probablement pas d'un voisin, car il n'aurait pas la pièce d'identité qu'il faut.
    Une voix: Oh, oh!
    D'accord.
    Madame Latendresse.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vais m'adresser aux témoins en français. Vous pouvez écouter l'interprétation simultanée de mes questions en utilisant les écouteurs.
    Je vous remercie toutes les deux de vos témoignages. Votre travail est très important.
    Madame Edwards, j'ai beaucoup apprécié la façon dont vous avez expliqué toutes les difficultés que rencontrent certaines personnes pour obtenir cette pièce d'identité.
    Madame Christiansen, je suis parfaitement d'accord avec vous qu'il y a vraiment un problème quand on place le fardeau sur les chefs de bande pour fournir ces pièces d'identité. Je pense que ces personnes ont beaucoup d'autres choses à s'occuper que de produire de la paperasse pour permettre aux gens d'exercer leur droit de vote.
    Certains témoins, qui représentaient des sans-abri, nous ont fait part de ce même problème. Ils nous ont expliqué les difficultés que suscite le fait de ne plus permettre le recours à un répondant. Le gouvernement leur répondait la même chose en disant que les soupes populaires et les refuges peuvent leur fournir une preuve. Est-ce qu'on veut vraiment que les soupes populaires et les refuges utilisent leurs ressources et leur énergie pour fournir des papiers d'identité aux milliers de personnes qui passent chez eux?
    Présentement, il y a une solution à ce problème qui est le recours aux répondants et l'utilisation, at large, de la carte d'information d'électeur. Je ne comprends donc pas pourquoi on ferait ces changements et qu'on mettrait plus de barrières qu'il n'en existe actuellement.
    Ma question s'adresse à Mme Edwards.
    Je sais qu'Élections Canada avait un contrat avec l'Association des femmes autochtones du Canada pour des programmes d'engagement civique qui étaient particulièrement ciblés pour les jeunes femmes. Pourriez-vous nous parler un peu de cette expérience? Quelle est votre opinion concernant le fait que ce programme ne pourra pas continuer en vertu du projet de loi C-23?

  (1235)  

[Traduction]

    Je vous remercie de la question.
    Oui, exactement. Actuellement, l'AFAC est en train de terminer... Nous avons jusqu'à la fin du mois d'avril pour terminer la préparation d'un guide destiné aux jeunes femmes autochtones, car comme je l'ai dit, nous savons que cela établira leurs habitudes de vote. Si nous pouvons prendre contact avec elles pendant qu'elles sont jeunes, elles continueront d'exercer leur droit de vote. Cependant, nous connaissons aussi tous les autres obstacles, comme ceux que nous avons énumérés et dont il a été question.
    Bien qu'il puisse sembler assez simple de communiquer avec son bureau du conseil de bande et d'obtenir la lettre, c'est énormément difficile pour nos membres féminines. Bon nombre de femmes autochtones sont pauvres. Comme je l'ai dit, elles déménagent deux ou trois fois par année. Elles fuient un milieu violent. Elles n'ont pas l'argent qu'il faut pour obtenir une pièce d'identité.
    Vous savez, il faut avoir des pièces d'identité pour faire des choses simples, comme ouvrir un compte bancaire, et bon nombre de femmes avec lesquelles nous travaillons ne peuvent pas le faire. Ce n'est donc pas une tâche facile. Elles ne peuvent pas savoir... Nous pouvons ajouter cette information dans notre guide, c'est-à-dire qu'il est possible d'obtenir une lettre du conseil de bande, mais encore une fois, c'est un autre fardeau qui est imposé aux peuples autochtones qui, contrairement aux autres Canadiens, doivent accomplir une tâche supplémentaire pour pouvoir voter. Nous nous heurtons déjà à tellement d'obstacles dans la situation actuelle.

[Français]

    Exactement.
    Comme le disait plus tôt mon collègue, M. Christopherson, pourquoi, alors que cela pourrait être si facile pour nous de faire autrement, imposerait-on tous ces obstacles supplémentaires à une communauté qui a déjà beaucoup de difficultés à obtenir une bonne participation électorale?
    Le but est d'encourager la participation électorale par tous les moyens possibles. Or, ce que je vois dans ce projet de loi va exactement dans le sens contraire.

[Traduction]

    Pour pouvoir vivre dans une société démocratique, nous voulons que tout le monde puisse participer. Nous prendrons des mesures pour aider les gens qui ne peuvent pas le faire, à participer, plutôt que dresser des obstacles qui les empêchent encore plus de le faire. Je suis entièrement d'accord avec vous.

[Français]

    Absolument.
     Madame Christiansen, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet?
    Mme Gladys Christiansen: Non
    Mme Alexandrine Latendresse: D'accord.
    Je voulais aussi mentionner que, lors de l'élection de 2011, j'ai croisé dans la réserve autochtone de mon comté Mme Michèle Audette, la présidente de l'Association des femmes autochtones du Canada. Elle faisait beaucoup d'efforts pour aider les femmes à accéder aux bureaux de vote et leur fournir l'information nécessaire. Je tiens à saluer cette dame. Elle s'est vraiment efforcée de susciter l'engagement des femmes autochtones au Canada. Je pense que c'est extrêmement important. Je la remercie beaucoup pour les efforts qu'elle déploie.
    Par ailleurs, selon l'actuel directeur général des élections, M. Mayrand, de même que selon M. Neufeld, M. Kingsley et tous les experts qui ont comparu, la nécessité de fournir une preuve d'adresse est ce qui cause problème. À ce sujet, des témoins ont suggéré de remplacer le recours aux répondants, qui a cours présentement, par une déclaration officielle du votant ou de la votante. Une personne qui ne posséderait qu'une seule pièce d'identité et qui n'aurait aucun document constituant une preuve d'adresse pourrait alors simplement signer une déclaration en vertu de laquelle elle affirmerait vivre à un endroit donné et voter par la suite.
    Selon vous, l'élimination du recours aux répondants pourrait-elle être une option raisonnable?

[Traduction]

    Absolument. Je voulais mentionner deux choses.
    Tout d'abord, vous avez parlé de notre présidente, Michèle Audette. Elle vous salue. Elle est en train de défendre ardemment les droits de la personne, et c'est donc la raison pour laquelle je suis venue comparaître à sa place. Susciter l'engagement de nos membres pour qu'ils aillent voter lui tient beaucoup à coeur.
    Nous savons qu'il n'est pas juste de dire que les collectivités autochtones ne participent pas ou que cela ne ferait aucune différence, car parmi 633 collectivités, plus de 120 chefs sont des femmes. Nous savons qu'il y a plus de 800 conseillères. La représentation des femmes y est plus importante que dans n'importe quelle administration municipale, n'importe quel gouvernement provincial ou territorial ou qu'au gouvernement fédéral. Les Autochtones participent aux élections.
    Je voulais le dire, et non, je ne vois aucun problème à ce qu'on demande plutôt à quelqu'un de faire une déclaration officielle sur l'endroit où il vit et qu'il l'a signe.

  (1240)  

    Merci.
    Je suis d'accord. Nous avons eu des élections cette semaine, et sur 6 000 électeurs, il y en avait 3 200. Aussi, notre chef, Tammy Cook-Searson, est une femme.
    Merci, madame Latendresse.
    Monsieur Lamoureux, vous disposez de sept minutes. Allez-y, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Je crois que nous convenons que ce que nous voulons pouvoir faire, c'est faire participer les gens au processus électoral. Je crois que c'est la raison pour laquelle on critique énormément aujourd'hui l'article 18 qui est proposé. Nous ne reconnaissons pas que le plus important organisme, c'est Élections Canada, et que nous limitons sa capacité d'accroître la participation électorale en général. Nous devons vraiment améliorer les choses à certains égards.
    Quoi de mieux que de faire en sorte que les gens d'Élections Canada collaborent avec différents intervenants pour qu'ils essaient de faire ce qu'ils pourraient être capables de faire compte tenu des ressources et des compétences qu'ils ont à offrir pour accroître la participation électorale et améliorer le système.
    La question que je veux vous poser à toutes les deux concerne les consultations qui ont lieu entre votre organisation, ou vous personnellement, et Élections Canada. Est-ce que des consultations permanentes ont lieu? Vous invite-t-on à participer à des consultations sur le vote des Premières Nations ou sur les façons de faire participer davantage les gens d'ascendance autochtone au processus? Dans quelle mesure des consultations avec Élections Canada ont-elles lieu?
     Je peux parler du point de vue de l'AFAC.
    En fait, je suis allée voir les gens d'Élections Canada il y a deux ans pour leur proposer de collaborer avec l'Association des femmes autochtones du Canada pour réussir à joindre plus de 50 % de la population autochtone, préparer les jeunes, semer l'idée.
    Nous savons que les jeunes femmes autochtones représentent la population à la croissance la plus rapide. Si nous ciblons les femmes de 16, 17 ou 18 ans aujourd'hui, elles vont voter à la prochaine élection. Nous les informons dès maintenant parce que malgré tous les efforts d'Élections Canada pour rendre l'information publique accessible à tous, elle ne veut rien dire pour notre peuple. Elle n'est pas sensible à notre culture. Elle n'est pas exprimée en mots simples. Il y a encore une différence dans la façon dont l'information est présentée.
    Lorsqu'un tiers comme l'AFAC ou l'Assemblée des Premières Nations interagit avec une Première Nation, la relation de confiance est déjà établie. Il y a 12 associations provinciales ou territoriales associées à l'AFAC, nous avons un réseau, et en Ontario, il peut y avoir une soixantaine de bureaux qui comptent tous des femmes autochtones parmi leurs membres. Quand nous envoyons quelque chose à notre bureau provincial de l'Ontario, par exemple, à l'Ontario Native Women's Association, elle fait parvenir toute l'information à ses membres.
    Quand Élections Canada travaille en partenariat avec l'AFAC, il a accès à un groupe très vaste. Les représentants de l'APN vous ont déjà parlé de ce qu'ils pouvaient faire, donc je ne parlerai pas de leur représentation ni de l'étendue de leur public au Canada. En ce qui nous concerne, nous avons des membres dans les réserves comme à l'extérieur.
    À mes yeux, c'est clairement une relation à mettre à profit, à renforcer et à promouvoir. La première fois que j'ai proposé quelque chose à Élections Canada, on m'a dit non faute de budget et d'aptitude à s'engager avec l'AFAC. Ce n'est que cette année financière, de 2013 à 2014, que nous avons réussi à établir un petit projet avec Élections Canada afin d'élaborer un guide à l'intention des femmes et des filles autochtones pour les informer, susciter leur engagement et leur intérêt et de contribuer à la création d'un groupe de travail. Nous avons également procédé à un examen de la littérature.
    Notre rêve, maintenant, serait d'aller porter ce guide dans toutes les communautés, avec l'aide de nos membres des provinces et des territoires, mais ce pourrait être perçu comme une ingérence ou...
    Voyez-vous, je crois que nous devons nous arrêter ici, madame Edwards.
    D'après ce que je comprends de ce que vous dites aujourd'hui, vous arrivez à travailler avec Élections Canada et grâce à son aide, vous pouvez en faire beaucoup plus.
    Vous avez un contrat avec Élections Canada?
    C'est un petit contrat pour la rédaction d'un guide. C'est très limité. Et c'est parce que nous sommes revenus à la charge très souvent.

  (1245)  

    Si l'article 18...
    Il n'y a donc pas eu de consultation, je n'utiliserais jamais ce mot. Il y a eu un petit engagement.
    Si l'article 18 n'était pas modifié ni supprimé, ce type d'engagement ne serait probablement pas possible.
    En effet.
    N'importe quel engagement futur que nous espérons pouvoir obtenir avec nos associations provinciales et territoriales...
    Votre objectif est d'amener un plus grand nombre de personnes à participer aux élections fédérales.
    De favoriser la participation civique, tout à fait.
    Oui.
    Madame Christiansen, voulez-vous dire quelque chose? Encore une fois, je parle de l'article proposé 18 en particulier et des limites au rôle d'Élections Canada.
    Encore une fois, je ne connais pas très bien l'article 18, mais pour répondre à votre question, à ma connaissance, Élections Canada ne consulte pas notre Première Nation, parce que nous ne sommes qu'une sur 74 en Saskatchewan. S'ils veulent augmenter le taux de participation aux élections, le plus probable serait qu'ils s'associent à l'APN ou peut-être à la Federation of Saskatchewan Indian Nations.
    Je crois que vous avez dit qu'à la dernière élection, le taux de participation n'a été que de 51 % pour l'élection du chef et du conseil.
    D'après vos estimations, quel serait le pourcentage de participation à une élection fédérale?
    Je n'en ai aucune idée. C'est la raison pour laquelle j'ai cherché la réponse dans Google.
    Je suppose qu'il y en a qui ont réussi à la trouver, pas moi. Le seul article que j'ai trouvé est un vieil article selon lequel 51 % des Autochtones sont allés voter. Ils parlent ensuite de 75, c'est pourquoi je me dis que je ferais mieux de rassembler mes propres données pour savoir il y en a combien, parce que je ne sais pas comment on peut en arriver...
    Ce que vous avez dit l'autre jour sur Gary Merasty... Je vous ai regardé l'autre jour, quand vous avez fait des commentaires sur Gary Merasty et l'élection.
    Pour commencer, je ne sais pas comment ils en sont arrivés à ces noms, mais dès qu'il y a un Autochtone qui se présente pour un parti, quel que soit le parti, tout le monde va aller voter. Je vais aller voter...
    Cela a une incidence.
    ... même si je ne vote habituellement pas.
    Pour terminer, j'ai entendu Peter Dinsdale soulever la question de la carte d'identification de l'électeur dans sa conclusion, en réponse à une question. Il croit que nous devrions pouvoir nous en servir comme outil.
    Merci, monsieur Lamoureux.
    D'accord, merci, monsieur le président.
    Nous allons être un peu trop serrés au prochain tour si je ne vous interromps pas ici. Je m'excuse.
    Nous allons donner quatre minutes à M. Richards, pour les questions et les réponses, afin de pouvoir terminer cette série de questions, s'il vous plaît.
    Merci. Je vous remercie toutes les deux d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais revenir à une chose que j'ai entendue dans les questions et les observations. Si j'ai bien compris, madame Christiansen, au sujet de l'attestation de l'identité par un répondant, cette forme d'attestation ne vous semblerait pas très utile parce que dans les réserves, si un Autochtone n'a pas de carte d'identité et que son voisin n'en n'a pas non plus, il ne pourra pas attester de son identité de toute façon. C'est à peu près ce que vous avez dit.
    Je ne sais pas d'où vous sortez cela.
    Eh bien, c'est ce que vous avez dit. Quand M. Lukiwski vous a questionnée sur l'attestation de l'identité par un répondant, vous avez répondu que si votre voisin n'a pas de pièce d'identité, il ne pourra pas attester de la vôtre non plus, ce qui est exact. Si votre voisin n'a pas de pièce d'identité admise, il ne pourra pas attester de votre identité non plus.
    Je pense donc qu'on peut en déduire que l'attestation de l'identité par un répondant et les cartes d'information de l'électeur ne sont pas nécessairement la solution. La solution serait d'améliorer l'éducation, et la raison pour laquelle...
    Absolument pas, absolument pas...
    Je m'excuse, laissez-moi finir, parce que je pense que nous avons... même si vous ne le voyez pas encore. Permettez-moi de vous expliquer ce que j'essaie de dire.
    Ce qui a été dit aujourd'hui, c'est que par exemple, le permis de conduire est évidemment une pièce d'identité admissible pour tout... Vous savez, on y voit le nom, l'adresse, toutes les données d'identification requises. Si une personne n'en n'a pas, comme on l'a dit, et qu'il s'agit d'un Indien inscrit vivant dans une réserve, le certificat de statut... Vous avez dit que vous ne saviez pas trop combien en avaient, mais ce serait sûrement une option pour prouver l'identité d'une personne.
    Il y en a toute une liste, et je peux vous en nommer quelques-unes des plus communes. Il y en a 39, bien sûr. Vous savez, il y a la carte d'assurance-maladie, le certificat de naissance, le passeport et les autres preuves de citoyenneté, la carte de crédit ou de débit, les autres cartes d'identité provinciales... Ce ne sont que quelques exemples que je peux vous donner, mais il y en a beaucoup d'autres. Si une personne a l'une de ces cartes et qu'elle a une attestation fournie par un représentant autorisé du conseil ou de la bande, c'est tout ce qu'il faut pour voter.
    Je sais qu'en réponse à une autre question, madame Christiansen, vous avez mentionné que vous n'étiez pas au courant. Je suppose qu'il y a probablement bien d'autres personnes qui ne le sont pas. Cela me porte à dire que les dispositions de la Loi sur l'intégrité des élections, qui dicte qu'Élections Canada doit mieux informer la population, mieux éduquer les gens sur les façons dont ils peuvent voter, vont être très utiles pour toutes les personnes au Canada. Nous semblons bien constater qu'elles vont être particulièrement utiles dans les réserves autochtones, puisque vous avez dit vous-même que vous n'étiez pas au courant.
    Je serais curieux de savoir si vous croyez que si vous étiez mieux informés de tout cela, il y a plus de gens qui iraient voter. S'ils savaient qu'avec une carte d'identité et une attestation, ils peuvent aller voter — et Élections Canada doit mieux informer la population pour cela —, est-ce que ce serait utile?

  (1250)  

    Je tiens à vous dire respectueusement que les gens ne savent pas à quel point il est difficile pour beaucoup d'Autochtones d'obtenir une carte d'identité; c'est dit de façon tellement simpliste, mais ce n'est pas une question d'éducation ni de pauvreté... Ce n'est pas une question d'options, c'est difficile...
    Ils ne connaissent pas toutes les possibilités. Ils ne connaissent pas toutes leurs options pour pouvoir voter. De leur indiquer quelles sont leurs options... Mme Christiansen a été très claire: elle ne savait pas qu'elle pouvait voter de cette façon. Il serait sûrement utile de leur apprendre...
    Dans son cas à elle, elle ne le savait pas, mais...
    Permettez-moi d'essayer. Laissons-le obtenir une réponse, il vous reste 10 secondes.
    Je dis seulement que cela montre à quel point les gens dans cette pièce sont privilégiés, ils ne comprennent absolument pas combien il peut être difficile pour un Autochtone d'obtenir une pièce d'identité.
    Une voix: Bravo!
    Mais Élections Canada n'informe pas les gens de leurs options...
    Votre temps est écoulé, monsieur Richards.
    C'est la raison pour laquelle je n'essaie même pas de répondre, parce que je l'ai déjà dit, et ceux qui voulaient l'entendre l'ont entendu.
    Merci, madame Christiansen.
    Nous allons maintenant donner quatre minutes à M. Christopherson, pour les questions et les réponses, s'il vous plaît.
    Je vous remercie infiniment de vos dernières observations et de votre résumé de la situation.
    Monsieur le président, si vous me le permettez, je vous ai indiqué, à vous comme à M. Lukiwski, que j'espérais déposer mon avis de motion aujourd'hui. J'ai précisé que je n'avais pas beaucoup grand-chose à dire, presque rien. J'espère que nous pourrons nous en occuper aujourd'hui, mais sinon, si nous avons besoin de temps, j'espère que nous allons le trouver. Quoi qu'il en soit, je mentionne que je vous en ai avisé et j'espère que je vais pouvoir le déposer aujourd'hui.
    Je vais donc me limiter à une seule question pour ne pas risquer de dépasser le temps imparti. J'aimerais revenir à des observations que vous avez faites, toutes les deux. Vous semblez trouver que nous ne comprenons pas ce que vous vivez, les défis auxquels vous êtes confrontés et votre frustration de voir le gouvernement fédéral créer de nouveaux obstacles, alors que vos relations sont déjà tendues, c'est le moins que l'on puisse dire.
    J'aimerais mettre l'accent sur la CIE. Le gouvernement tient à tout prix à ce qu'on l'appelle la carte d'information de l'électeur, parce qu'il ne veut surtout pas qu'on l'appelle la carte d'identification de l'électeur.
    Je suis tout sauf statisticien, mais voici le hic. Mon bon sens me dit que si l'on peut fouiller toutes les bases de données possibles pour trouver l'adresse la plus à jour d'un citoyen, elle devrait être aussi exacte sinon plus que les bases de données consultées, parce que ce sont ces bases de données qui génèrent toutes les autres cartes et pièces d'identité jugées acceptables. Vous avez l'avantage de pouvoir consulter l'ensemble de ces bases de données.
    Il y a donc un très bon argument qui va à l'encontre de ce que fait le gouvernement. Nous devrions envisager l'idée d'une carte d'identification de l'électeur, pour laquelle on utiliserait les ressources de toutes les bases de données pour aider les gens, afin qu'ils puissent voter le plus facilement possible.
    Encore une fois, pouvez-vous nous expliquer davantage le tort que cause le refus de la carte d'information de l'électeur dans les bureaux de scrutin et à l'inverse, à quel point il serait bénéfique de pouvoir l'utiliser comme pièce d'identité pour prouver l'adresse de la personne, même si l'on devait en présenter une autre sur laquelle apparaissent le nom et la photo?
    Exactement, je pense que vous présentez très bien la chose. Si Élections Canada n'a pas fait la preuve que l'information apparaissant sur cette carte pose problème, pourquoi essayer de régler un problème qui n'en est pas un?
    Exactement.
    Cela ne va que rendre la tâche encore plus difficile aux Autochtones, et je ne peux m'empêcher de me demander si c'est là l'intention. Est-ce vraiment démocratique ou l'intention est-elle de limiter le vote autochtone à la prochaine élection? Posez-vous la question.

  (1255)  

    Madame Christiansen, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Non, je n'ai rien à ajouter, sauf que si ce problème les inquiète tellement, comment se fait-il qu'ils ne trouvent pas le moyen de modifier la carte de traité pour en faire une forme d'identification acceptable pour le gouvernement?
    Je ne peux rien ajouter pour renforcer l'impression que vous laissez ici. Je vous remercie beaucoup de votre présence ici aujourd'hui.
    Monsieur le président, j'ai terminé.
    Merci, cela vient clore votre tour. Il nous resterait normalement le temps d'un autre tour de quatre minutes, mais je crois que les membres du parti ministériel nous disent...
    Pour permettre à David de présenter sa motion et nous permettre d'y réagir et de partir, je pense qu'il serait probablement préférable de tous laisser tomber ces quatre dernières minutes et de partir.
    Très bien, je remercie nos témoins. Je vous remercie d'être venues nous faire part de votre point de vue aujourd'hui. Vous l'avez très bien fait, et nous sommes contents que vous soyez venues.
    Nous allons maintenant nous disputer entre nous. Merci. C'est toujours la partie la plus amusante de la soirée pour le président. Ce n'est pas tout à fait le soir. Comment se fait-il que j'aie l'impression que c'est le soir?
    Monsieur Christopherson, votre motion, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Ma motion est la suivante:
Que, conformément à la motion adoptée par la Chambre le jeudi 27 mars 2014 concernant les fonctions parlementaires étant effectuées dans les bureaux de l'opposition officielle, le Comité invite l'honorable chef de l'opposition; et invite également le très honorable premier ministre à comparaître devant le Comité pour répondre aux nombreuses activités partisanes menées par son gouvernement, en particulier par le cabinet du premier ministre (CPM) et par le Groupe de recherche conservateur (CRG), et que, par ailleurs, l'étude en cours sur le projet de loi C-23 soit prolongée par le même nombre de jours que ceux prévus pour l'étude de la motion visée.
    Je la propose, monsieur le président.
    Merci.
    Monsieur Lukiwski, à vous la parole d'abord, M. Lamoureux sera deuxième.
    Oui, merci. J'aimerais seulement invoquer le Règlement au sujet de la motion de David. Je vais la lire pour le compte rendu, monsieur le président, et j'espère que vous pourrez vous penchez là-dessus quand bon vous semble ou le plus rapidement possible.
    Je crois que la motion de M. Christopherson est irrecevable, monsieur le président, car, dans la deuxième moitié, on demande à notre comité de ne pas limiter son étude aux activités de l'opposition officielle, ce qui dépasse tout simplement la portée de notre mandat. Nous savons tous ce qui s'est passé jeudi dernier, monsieur le président. Nous avons demandé le consentement unanime pour faire comparaître M. Mulcair devant le comité, mais nous ne l'avons pas obtenu. Nous avons ensuite invoqué l'article 56.1 du Règlement, et le NPD n'avait pas les 25 députés nécessaires pour s'opposer à la motion, qui a donc été adoptée. C'était leur gâchis procédural, et je pense qu'ils se sont remis les pieds dans les plats en essayant de présenter cette nouvelle motion.
    Je vais clarifier ce que je veux dire. Tout d'abord, il est indiqué à même le libellé que la motion est présentée conformément à celle adoptée par la Chambre jeudi dernier. Je vais lire pour le compte rendu la motion en question afin que tout le monde sache à quoi s'en tenir.
Que le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre soit chargé d'examiner les accusations d'utilisation des ressources de la Chambre des communes à des fins partisanes par l'opposition officielle; et

Que le chef de l'opposition officielle soit cité à comparaître devant le comité, à titre de témoin, au cours d'une réunion télévisée, qui aura lieu au plus tard le 16 mai 2014.
    C'est une motion très précise en soi, monsieur le président. On ne dit rien à propos du gouvernement, du Parti conservateur ou même du Parti libéral. Il est seulement question de la façon dont l'opposition officielle, le Nouveau Parti démocratique, utilise les ressources parlementaires.
    Monsieur le président, cette motion est non seulement irrecevable compte tenu de l'ordre de renvoi adopté par la Chambre jeudi dernier, mais elle l'est également parce que les activités du gouvernement, et en particulier du Cabinet du premier ministre, ne peuvent pas être visées par les ordres de renvoi donnant instruction au comité.
    Voici ce qui est écrit à la page 993 de la deuxième édition de La procédure et les usages de la Chambre des communes:
Hormis quelques exceptions, toutes les études effectuées par les comités se fondent sur un ordre de renvoi ou une instruction de la Chambre des communes (et du Sénat dans le cas des comités mixtes). L’ordre de renvoi est la formalité par laquelle la Chambre charge un comité d’étudier une question ou définit la portée de ses délibérations. Les comités reçoivent des ordres de renvoi lors de leur établissement et peuvent en recevoir d’autres de temps à autre.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, le mandat de la plupart des comités permanents est vaste, mais le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre n'est pas visé par cette disposition. L'alinéa 108(3)a) du Règlement énumère la plupart, mais pas tous les mandats de notre comité permanent.
    La page 962 de l'ouvrage d'O'Brien et Bosc décrit l'étendue de nos divers mandats énoncés dans le Règlement. Je vais citer encore une fois ce qui est écrit:
Le Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre s’occupe notamment des questions relatives à l’élection des députés; à l’administration de la Chambre et à la prestation de services et d’installations aux députés; de l’étude de l’efficacité, de l’administration et du fonctionnement d’opérations relevant à la fois de la Chambre et du Sénat, à l’exclusion de la Bibliothèque du Parlement; de la révision du Règlement de la Chambre ainsi que de ses procédures et pratiques, en plus de celles de ses comités; des affaires relatives aux projets de loi d’intérêt privé; de la revue des pratiques de radiodiffusion et de télédiffusion des travaux de la Chambre et de ses comités; du Code régissant les conflits d’intérêt des députés; et de l’étude du rapport annuel du Commissaire aux conflits d’intérêt et à l’éthique en lien avec les responsabilités de ce dernier en vertu de la Loi sur le Parlement du Canada. Ce Comité agit également comme comité de sélection pour recommander les membres de tous les comités permanents et comités législatifs, ainsi que les députés représentant la Chambre aux comités mixtes permanents. Il régit aussi la priorité d’utilisation des salles de réunions de comités et joue un rôle dans la désignation des affaires émanant des députés qui sont votables et non votables.
    Monsieur le président, ce qui ressort clairement de ce passage, c'est que notre mandat a pour objet la Chambre des communes ainsi que son administration, son fonctionnent, ses travaux et ses députés, y compris le processus grâce auquel nous avons été élus. C'est d'ailleurs une question sur laquelle nous nous penchons actuellement conformément à une partie de l'ordre de renvoi concernant l'étude du projet de loi  C-23, la Loi sur l'intégrité des élections.
    La page 994 de l'ouvrage d'O'Brien et Bosc est sans équivoque. Je vais les citer encore une fois:
Les comités sont liés par leurs ordres de renvoi ou leurs instructions et ils ne peuvent entreprendre d’études ni présenter à la Chambre des recommandations allant au-delà des limites établies par ceux-ci.
    Quel est le lien avec la motion proposée par M. Christopherson? Je crois qu'O'Brien et Bosc ont une réponse pour nous à la page 1054:

En général, les règles régissant la recevabilité des motions à la Chambre des communes s’appliquent de la même manière dans les comités parlementaires [...]



De plus, les motions proposées en comité ne doivent pas outrepasser le mandat du comité ni enfreindre la prérogative de la Couronne en matière financière [...]
    À vrai dire, monsieur le président, il est évident que notre mandat permanent ne nous autorise pas à examiner les activités du gouvernement. D'ailleurs, la motion adoptée à la Chambre jeudi dernier se limite expressément à l'utilisation des ressources de la Chambre des communes par l'opposition officielle.

  (1300)  

    Maintenant que nous avons clairement déterminé que la motion présente une faille, du moins selon moi, quelle est la voie à suivre?
    On peut trouver la réponse aux pages 533 et 534 de l'ouvrage d'O'Brien et Bosc. Bien qu'il soit question de la recevabilité des amendements, j'estime que c'est comparable à la façon dont une motion qui dépasse la portée de notre mandat doit être considérée. Je vais encore une fois citer l'ouvrage:
Un amendement est irrecevable dans les cas suivants:

s’il ne se rapporte pas à la motion principale (c’est-à-dire s’il porte sur une question étrangère à la motion principale, s’il déborde du sujet de la motion ou s’il introduit une nouvelle proposition [...]

[...] si une partie de l’amendement est irrecevable [...])
    Monsieur le président, j'estime que vous n'avez d'autre choix que de juger tout à fait irrecevable la motion de M. Christopherson. Je suis certain qu'ils s'en veulent de s'être fait embobiner avec la procédure il y a une semaine, mais j'aimerais porter à votre attention que c'est le deuxième gâchis procédural qu'ils ont créé, car, de toute évidence, cette motion n'entre pas dans le cadre du mandat et du champ d'action de notre comité. Elle est donc irrecevable.
    Merci, monsieur le président.
    J'invoque le Règlement.
    Je suis déjà en train d'examiner un rappel au Règlement.
    Le mien s'ajoutera à la liste.
    M. Lamoureux sera le prochain intervenant, mais il est déjà plus de 13 heures, chers collègues. C'est l'heure à laquelle nous étions censés terminer, et c'est pourquoi...
    Je sais par expérience que le comité peut poursuivre la réunion.
    J'ai toujours pensé que le président avait son mot à dire à ce sujet, M. Christopherson. Je viens tout juste d'apprendre que je peux choisir les salles de comité. Je ne comprends pas ce qu'il en est.
    À propos du même rappel au Règlement, je suppose...
    Monsieur Lamoureux.
    Écoutez, chers collègues, allons-nous continuer d'en parler jusqu'à 13 h 30? J'aimerais recevoir quelques conseils avant d'aller plus loin. Je serais heureux d'ajourner et de poursuivre cette discussion à notre prochaine réunion. Nous avons commencé très tard aujourd'hui.
    Je pense que si nous pouvions seulement avoir encore cinq minutes. J'aimerais entendre la réponse. Encore cinq minutes...
    Réglons la question. Cela ne devrait pas être aussi long.
    M. Lamoureux est le prochain intervenant, monsieur Christopherson.
    Je ne suis pas aussi...
    Je signale que ce ne doit pas être trop long comme observation.
    ... bien préparé que M. Lukiwski au sujet de ce rappel au Règlement. J'aimerais juste dire ce qui saute aux yeux, monsieur le président, c'est-à-dire que nous nous occupons d'une motion plutôt que d'étudier le projet de loi C-23, dont les délais sont très serrés. Le processus d'adoption doit être terminé d'ici le 1er mai, ce qui me préoccupe grandement. À mon avis, il serait regrettable de le compromettre.
    Pour ce qui est de la motion, je peux comprendre qu'on ait remis en question l'éthique du chef de l'opposition officielle dans ce cas particulier, et, si je ne m'abuse, il aura l'occasion de s'expliquer devant le comité avant le 16 mai. Si des motions de ce genre sont jugées recevables à compter du 2 mai, il pourrait être préférable qu'elles fassent l'objet de discussions approfondies une fois que le comité se sera penché sur ce qui représente à mon avis le projet de loi le plus important qu'on lui a confié depuis de nombreuses années.
    Je vous propose de simplement tourner la page et de nous en tenir à cela.

  (1305)  

    Je vous remercie de vos conseils, monsieur Lamoureux.
    Monsieur Christopherson, vous avez quelques secondes.
    Merci.
    Désolé, monsieur le président. Pour ce qui est de la procédure, je me demande...
    Il parle de votre rappel au Règlement. Vous avez invoqué le Règlement, et il peut lui aussi aborder la question.
    J'aimerais savoir si vous savez maintenant à quel moment vous comptez vous prononcer sur mon rappel au Règlement concernant la recevabilité de la motion.
    Aussitôt que tout le monde m'aura éclairé de sa sagesse.
    Il a besoin d'entendre le point de vue de chacun de nous sur votre rappel au Règlement, et ensuite...
    Je suppose que vous acceptez encore que nous demandions un avis, monsieur Lukiwski.
    Je ne vous priverais jamais de votre droit d'avoir une opinion, car, de toute façon, ce ne serait pas à mon avantage.
    Parfois sans cesse, rien de moins...
    De toute façon, ce ne serait pas à mon avantage.
    J'ai passé des journées entières à entendre vos points de vue, monsieur Christopherson. Pourriez-vous juste me donner une version un peu plus courte?
    Je n'y arriverai jamais. Il ne me reste pas suffisamment de temps ici-bas.
    Si je peux me permettre d'aborder deux points... Tout d'abord, ma première réaction est de me dire que le gouvernement pense que c'est acceptable de jouer les casse-pieds avec le chef de l'opposition officielle, mais que le premier ministre est protégé, qu'il est intouchable. C'est essentiellement ce qu'on a dit.
    Plus précisément, d'un point de vue technique, j'aimerais également souligner que le paragraphe 108(3) autorise le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre à étudier les dispositions concernant les services et les installations à la disposition des députés. Le CRG offre des services aux députés, et nous pensons que le CPM en fait autant. Par conséquent, nous croyons que c'est tout à fait logique sur le plan de l'équité.
    On peut s'engager dans cette voie avec l'opposition officielle, c'est de bonne guerre, mais il faut faire la même chose avec le premier ministre. Il ne faut pas commencer à dire que nous sommes libres de nous servir de l'opposition officielle comme bouc émissaire quand cela nous convient, mais que le premier ministre est hors d'atteinte, qu'il est protégé à tous les égards.
    C'est essentiellement ce que j'avance, monsieur le président. Je veux juste vous dire que, selon les principes de la justice fondamentale et naturelle, c'est injuste de ne même pas me permettre de défendre cet argument pour ensuite mettre la question aux voix, et de plutôt laisser le gouvernement décidé et dire: « Nous sommes protégés et nous allons nous en prendre aux autres quand bon nous semble. »
    Merci, monsieur Christopherson.
    Je vais rendre ma décision sur le rappel au Règlement. J'y ai réfléchi, et j'en ai discuté à quelques reprises avec la greffière depuis le dépôt de la motion, et c'est la raison pour laquelle je n'ai cessé de vous demander quand vous alliez la présenter. À mon avis, elle ne relève pas de la compétence du comité.
    Elle s'ajoute à... Je ne peux pas modifier l'ordre de renvoi que nous avons reçu de la Chambre. Votre motion ajoute des éléments qui ne sont normalement pas examinés par le comité. Je la déclare donc irrecevable.
    Si je peux me permettre, avec le plus grand respect, monsieur, et je m'adresse à vous à titre personnel, je conteste la décision de la présidence.
    Cela s'est déjà fait.
    Je sais.
    Est-ce que cela signifie que j'aurai congé demain?
    Le comité maintient-il la remise en cause de la décision de la présidence par M. Christopherson? Non, c'est ma décision.
    Le comité maintient-il ma décision?
    Les oui vous appuient, et c'est le contraire pour ce qui est des non.
    Pourrait-on avoir un vote par appel nominal?
    J'allais proposer... Allons-nous procéder de cette façon, ou dois-je simplement demander qu'on lève la main?
    J'essaie juste de me rendre utile, monsieur.
    Très bien. Allons-y.
    (La décision de la présidence est maintenue par 5 voix contre 3) [Voir le Procès-verbal]
    Le président:Ma décision est maintenue. C'est une bonne chose.
    Y a-t-il un autre point à aborder aujourd'hui dans l'intérêt du comité?
    La séance est levée.
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