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NDDN Rapport du Comité

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AMÉLIORER LA DIVERSITÉ ET L’INCLUSION DANS LES FORCES ARMÉES CANADIENNES

Introduction

Depuis longtemps, un des atouts du Canada est la multitude des points de vue, des expériences et des traditions qui caractérisent sa population plurielle et multiculturelle. Mais la diversité au pays s’est accrue. Les valeurs sociétales et les normes comportementales ont évolué, tout comme les attentes des Canadiens à l’endroit des Forces armées et de leurs membres. Du point de vue stratégique, la diversité représente un avantage opérationnel, et elle renforce le rendement organisationnel[1].

Cependant, la participation des femmes, des Autochtones, des minorités visibles et des membres de la communauté LGBTQ2[2] dans les Forces armées canadiennes (FAC) n’est pas actuellement représentative de la population. De plus, la lutte contre les inconduites sexuelles dans l’armée demeure une priorité, et beaucoup réclament un « changement de culture » en faveur d’une éthique militaire axée sur le respect, la confiance et la cohésion.

C’est dans ce contexte que le Comité a entrepris une étude de la diversité dans les FAC, au moyen de la motion suivante adoptée le 18 septembre 2018 :

Que le Comité entreprenne une étude d’au moins quatre réunions portant sur la diversité comme facteur essentiel de la réussite globale des missions des Forces armées canadiennes, notamment sur a) l’importance i) des femmes, ii) des membres de la communauté LGBTQ2, iii) des membres de cultures diverses et iv) des Autochtones, des membres autochtones des Forces armées canadiennes, et b) les pratiques exemplaires en matière de recrutement et de maintien en poste, dont en faisant le point sur les objectifs des Forces armées canadiennes en matière de diversité et sur l’état de l’opération HONOUR, qui vise à éliminer les comportements sexuels dommageables et inappropriés; et qu’il fasse rapport de ses conclusions à la Chambre.

Le Comité a tenu sept audiences publiques du 18 octobre 2018 au 11 avril 2019 et a reçu les témoignages et mémoires écrits de nombreux intervenants, dont des universitaires, des ex-militaires, des professionnels et des responsables du ministère de la Défense nationale (MDN) et des FAC. Cette étude ne se veut pas une investigation exhaustive de toutes les dimensions complexes de la diversité; elle se concentre plutôt sur les enjeux que les témoins ont soulevés et qui pourraient aider les FAC à devenir une organisation qui non seulement mise sur les avantages opérationnels et institutionnels de la diversité des horizons, des perspectives et des capacités, mais réussit à comprendre qu’ils sont essentiels à son succès.

À la lumière des témoignages et des mémoires reçus pendant son étude, et de renseignements trouvés dans des sources publiques, le Comité présente les constatations et les recommandations ci-dessous à la Chambre des communes.

PARTIE A : LA DIVERSITÉ Dans LES FORcES ARMÉES CANADIENNES

Dans l’environnement de sécurité complexe d’aujourd’hui, la diversité de l’armée est considérée comme un avantage stratégique. En 2017, le gouvernement du Canada a publié Protection, sécurité, engagement : La politique de défense du Canada. Il y reconnaît que la population multiculturelle du Canada est l’une des grandes forces du pays, et y dégage plusieurs initiatives de modernisation du personnel visant à accroître la diversité, le respect et l’inclusion dans les FAC. En particulier, on peut lire dans cette politique que les FAC se sont engagées à « vis[er] l’égalité entre les sexes et [à créer] un effectif qui tirera profit de la diversité de la société canadienne[3] ». En même temps, les FAC doivent refléter la société et appliquer ses valeurs. Or, comme la diversité de la population du Canada a augmenté, les FAC s’efforcent davantage aujourd’hui de se présenter comme un employeur de choix pour les femmes, les Autochtones, les minorités visibles et les membres de la communauté LGBTQ2[4].

À cette fin, et comme on le verra ci-dessous, les FAC se sont fixé des cibles de recrutement et de maintien en poste des groupes sous-représentés, ont intégré à leurs doctrines la reconnaissance des avantages de la diversité pour l’efficacité opérationnelle, et ont pris divers engagements en faveur de l’accroissement de la diversité et de l’inclusion.

A : Diversité – cibles et situation actuelle

Le général Jonathan Vance, chef d’état-major de la défense (CEMD), a fixé des cibles visant à accroître la diversité de l’effectif militaire. Ainsi, il a annoncé que les FAC souhaitent augmenter comme suit la représentation de certains groupes désignés sur une période de 10 ans :

  • Femmes : de 14,9 % en 2016 à 25 % d’ici 2026[5];
  • Autochtones : de 2,6 % en 2016 à 3,5 % d’ici 2026[6];
  • Minorités visibles : de 6,7 % en 2016 à 11,8 % d’ici 2026[7].

Comme on le voit aux annexes A et B, la représentation des femmes, des Autochtones et des minorités visibles au sein des FAC est actuellement bien en deçà des cibles établies pour 2026[8].

Les témoins ont dit au Comité que les femmes jouent un rôle important dans la défense du Canada depuis plus de 100 ans. Selon la commodore Rebecca Patterson, directrice générale de l’Équipe d’intervention combinée sur l’inconduite sexuelle et championne pour les femmes, elles sont aujourd’hui « pleinement intégrées dans toutes les professions et tous les rôles des [FAC][9] ». La commodore Patterson a signalé que, au mois de janvier 2019, 15 116 femmes servaient dans les FAC, ce qui représentait 15,7 % de l’effectif total[10]. Le lieutenant-général Charles Lamarre, commandant du Commandement du personnel militaire et champion des minorités visibles à la Défense nationale, a indiqué que « le nombre de femmes dans les forces armées a augmenté d’environ 1 300 » depuis deux ans[11]. Au mois de mars 2019, la représentation des femmes dans les métiers d’armes de combat des FAC se chiffrait à 2,9 % dans la Force régulière et à 6,7 % dans la Première réserve[12]. Par ailleurs, la commodore Patterson a dit que, au mois de janvier 2019, 13 femmes étaient officières générales, et 57, adjudantes-chefs et premières maîtres de 1re classe[13]. Enfin, le taux de recrutement de femmes au Collège militaire royal du Canada (CMR) était en baisse jusqu’en 2016. Cependant, « [c]es deux dernières années, 25 % des cadets qui se sont inscrits au Programme de formation des officiers de la Force régulière étaient des femmes[14] ».

Les témoins ont aussi dit au Comité que les peuples autochtones – les Premières Nations, les Inuits et les Métis – se battent vaillamment dans les Forces armées depuis la Guerre de 1812, et qu’ils ont notamment apporté une contribution importante lors des deux Guerres mondiales, de la Guerre de Corée et du conflit en Afghanistan[15]. Toutefois, selon Edward Lerat, troisième vice-chef de la Federation of Sovereign Indigenous Nations, beaucoup d’Autochtones, lorsqu’ils allaient se battre pour le Canada, « perdaient leur statut ou leur droit issu d’un traité d’être Indien » et devenaient « des Indiens non inscrits[16] ». Le lieutenant-général Jean-Marc Lanthier, commandant de l’Armée canadienne et champion des peuples autochtones, a dit que « [q]uelque 2 800 Autochtones servent [actuellement] dans les [FAC], que ce soit dans la Force régulière ou les Forces de réserve; ils représentent donc 2,8 % de la composition des forces[17] ». Au mois de février 2018, un des 129 officiers généraux des FAC se définissait comme Autochtone[18]. Ces chiffres ne tiennent toutefois pas compte des Rangers canadiens, qui appuient les opérations nationales/de souveraineté dans les régions éloignées, nordiques ou côtières du Canada. Selon le lieutenant-général Lanthier, 26 % des Rangers canadiens se définissaient comme Autochtones au mois de février 2019[19].

Le lieutenant-général Lamarre a aussi parlé des minorités visibles, dont la représentation au sein des FAC se chiffrait à 8,7 % en janvier 2019[20]. Au mois de février 2018, un des 129 officiers généraux se définissait comme membre d’une minorité visible[21]. Le lieutenant-général a décrit les mesures prises récemment par les FAC pour accroître son inclusivité, notamment sur le plan des accommodements religieux :

[L]e manuel sur la politique relative à la tenue comprend maintenant des clauses relatives aux accommodements religieux pour les cheveux des militaires. Les femmes musulmanes peuvent porter le hijab dans un uniforme modifié. Les militaires juifs peuvent porter la kippa avec de nombreuses tenues vestimentaires. Durant certains de nos événements, les militaires autochtones et métis portent fièrement le médaillon des anciens combattants autochtones ou l’écharpe métisse. Les militaires sikhs peuvent observer les cinq symboles religieux et porter un turban, sous réserve, bien entendu, des considérations relatives à la sécurité et des facteurs opérationnels.
En outre, la politique a été modifiée pour permettre aux membres des forces de respecter les exigences en matière de prière et de jeûne qui correspondent à leurs pratiques religieuses. Nous offrons également l’accès à une variété de repas au pays et lors d’opérations à l’étranger, y compris les préparations casher et halal pour nos rations de campagne[22].

En novembre 2017, le gouvernement du Canada a présenté des excuses officielles à la communauté LGBTQ2 du Canada pour la discrimination que le gouvernement a fait subir à ses employés en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre. Cette discrimination, qui remonte aux années 1940, s’est aussi traduite par des traitements injustes dans les forces armées[23]. L’homosexualité a été partiellement décriminalisée au Canada en 1969. Toutefois, les politiques des FAC concernant l’orientation sexuelle découlaient de l’Ordonnance administrative des Forces canadiennes (OAFC) 19-20, Déviation sexuelle – Enquêtes, examens médicaux et mesures à prendre, qui interdisait toujours le recrutement et le maintien des personnes homosexuelles[24]. Les restrictions officielles à l’encontre des personnes homosexuelles ont été éliminées en 1992, lorsque les FAC ont abrogé l’OAFC 19-20 des suites d’une décision de la Cour fédérale du Canada statuant que les politiques interdisant aux personnes homosexuelles le service dans les FAC allaient à l’encontre de la Charte des droits et libertés[25]. Le général Vance, CEMD, a confirmé que « [n]ous avons espionné, interrogé et poursuivi au criminel nos propres confrères et consœurs[26] ».

Le MDN dit ne pas recueillir de données sur l’orientation sexuelle de ses membres. La Loi sur l’équité en matière d’emploi ne considère par la communauté LGBTQ2 comme un groupe désigné[27], mais « le contexte en évolution des droits collectifs et de la personne a étendu l’esprit de l’égalité et de l’équité à d’autres groupes en mal d’équité, comme la communauté LGBTQ2[28] ». Le Plan de défense 2018–2023 du MDN charge le chef du personnel militaire d’« [e]ffectuer des recherches sur les attitudes envers les enjeux liés aux [LGBTQ2], le climat de diversité, la tolérance ou l’intolérance ethnique, et les compétences transculturelles pour appuyer la stratégie et le plan d’action en matière de diversité des FAC, afin de maintenir les efforts visant à s’assurer que la population du MDN et des FAC reflète la société et les valeurs canadiennes[29] ».

Dans le contexte des FAC, de récents rapports publics ont souligné la nécessité de s’attaquer aux obstacles persistants au recrutement et à la rétention afin d’accroître la diversité. Par exemple, dans son Rapport 5 — Recrutement et maintien de l’effectif dans les Forces armées canadiennes, publié à l’automne 2016, le Bureau du vérificateur général du Canada (BVG) a appelé les FAC à supprimer les obstacles à l’emploi pour assurer une représentation appropriée des divers groupes de la population. De même, l’Examen externe sur l’inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes (le rapport Deschamps), publié en 2015, préconise un changement culturel complet dans les FAC pour contrer une culture sous-jacente de sexualisation hostile aux femmes et aux LGTBQ2. En réponse aux conclusions du rapport Deschamps, le général Vance, CEMD, a lancé en 2015 l’opération HONOUR, soit la mission des FAC visant à éliminer les inconduites sexuelles au sein de l’armée canadienne.

B : La diversité et l’inclusion : deux avantages pour les FAC

La définition et la compréhension du concept de « diversité » ont changé au fur et à mesure que la société canadienne est devenue de plus en plus multiculturelle. À l’heure actuelle, la diversité et l’inclusion sont comprises comme deux concepts distincts, mais qui se renforcent mutuellement. Comme l’explique le Centre canadien pour la diversité et l’inclusion :

La diversité est relative à la personne. Il s’agit de l’éventail de dimensions, de qualités, de caractéristiques uniques que nous possédons tous. L’inclusion est relative à la collectivité. Il s’agit de la création d’une culture qui promeut l’équité, et qui célèbre, respecte, accepte et fait valoir la différence. La diversité et l’inclusion ont pour but de saisir l’unicité de la personne, de créer un milieu qui valorise et respecte les personnes pour les talents, les compétences, les aptitudes qu’elles mettent au service de la collectivité[30].

Dans le cadre du recensement de 2016, réalisé par Statistique Canada, plus de 250 origines ethniques ou ascendances différentes ont été déclarées. Ce recensement a également permis de constater que 21,9 % de la population canadienne était née à l’étranger. Ce pourcentage est le plus élevé depuis le recensement de 1921[31]. La proportion de la population canadienne que représentent les Autochtones, soit les Premières Nations (Indiens inscrits et non inscrits), les Métis et les Inuits, est à la hausse. Le recensement de 2016 révèle en effet qu’un peu plus de 2,1 millions de personnes ont déclaré avoir une ascendance autochtone, soit 6,2 % de la population totale, contre 4,3 % pour le recensement de 2011[32].

L’évolution démographique du Canada se répercute dans les collectivités où les FAC recrutent[33]. Selon le lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk, directeur général de Réserves 2000, « en puisant dans les communautés, au-delà des communautés traditionnelles française, anglaise et blanche », les FAC peuvent « avoir accès à un plus grand bassin, ce qui permet d’attirer plus de recrues. C’est une bonne chose. Les unités peuvent croître de cette façon[34] ».

Les FAC ont adopté une stratégie à l’égard de la diversité qui est axée sur la promotion et la protection du respect et de la dignité de tous les membres. On peut lire dans la Stratégie, signée par le CEMD en 2017, que « la diversité au sein des FAC signifie le respect et l’appréciation des différences d’ethnicité, de langue, de sexe, d’âge, d’origine nationale, de handicap, d’orientation sexuelle, d’éducation et de religion. Elle porte sur la compréhension des autres et va au-delà de la simple tolérance afin d’embrasser, de célébrer et d’intégrer les dimensions riches de la diversité de chaque individu[35] ».

Plusieurs témoins ont mentionné que les personnes qui, par leurs divers horizons, amènent des expériences et perspectives différentes peuvent être vues comme un atout dans l’environnement stratégique actuel, ce dernier se caractérisant par des conflits complexes et multidimensionnels, de grandes avancées technologiques et la réalité de la mondialisation[36]. Ainsi, le contre-amiral Luc Cassivi, commandant de l’Académie canadienne de la Défense et champion de la Défense pour l’égalité entre les sexes et la diversité dans le cadre d’opérations, a dit qu’« une équipe de la Défense composée de militaires dont la diversité sur les plans de l’origine, de la langue, de la race, de l’ethnicité, de l’orientation sexuelle, du genre, et ainsi de suite, présente un avantage opérationnel et institutionnel. Elle procure à l’équipe de la Défense une plus grande profondeur lui permettant de planifier et de mener des opérations partout dans le monde, d’élaborer des politiques plus exhaustives et d’assurer un meilleur leadership institutionnel[37] ».

Mme Sandra Perron, associée principale chez A New Dynamic Enterprise, Inc. et première femme à devenir officier d’infanterie au Canada, a parlé des avantages que présente la diversité lors des déploiements militaires à l’étranger :

[Les] missions complexes en rapide mutation exig[ent] le déploiement de groupes de combat possédant des compétences diversifiées dont certaines sont surtout maîtrisées par les femmes […] [C]haque soldat possède un don particulier, utile à son unité […] Nous avons besoin du coureur de vitesse, du transporteur de lourdes charges, de celui qui parle une autre langue ou la langue locale, de celui qui a le sens de l’orientation. Un peloton a besoin de tous ces talents[38].

La commodore Rebecca Patterson a fait observer que l’expérience a appris aux FAC « que la diversité des genres est essentielle pour atteindre l’efficacité opérationnelle et relever des défis opérationnels complexes[39] ». Évoquant les avantages tangibles de la diversité dans le théâtre d’opérations, le lieutenant-gouverneur Lanthier a décrit son expérience au sein des Forces de sécurité nationale afghanes :

À la fin des années 2000, la notion d’équipes d’intervention militaire féminines est apparue. Au départ, ces équipes ont été déployées surtout par nos alliés. Ce qu’il faut comprendre, c’est que, malgré ce qui semble au départ être une société très patriarcale, le rôle des femmes dans la société en Afghanistan est d’une importance cruciale. Ce qui arrive dans une enceinte, c’est que ce sont les femmes qui dirigent. La capacité d’éliminer cet obstacle culturel par le recours à une équipe d’intervention féminine nous a permis de comprendre la culture et les sphères d’influence au-delà de ce que permettent les moyens militaires habituels. Voilà un exemple flagrant d’une situation où le sexe a réellement de l’importance[40].

Les avancées technologiques aussi peuvent avoir des implications pour la diversité dans les FAC. Andrea Charron, directrice du Centre for Defence and Security Studies, a avancé que « vu l’évolution de la nature de la guerre résultant de nouvelles technologies révolutionnaires (aviation sans pilotes, par exemple), il importe de reconnaître que, plus cela ira, plus les partis pris existants risquent de devenir dysfonctionnels et donc de miner l’efficacité des FAC[41] ». Le lieutenant-général Paul Wynnyk, vice-chef d’état-major de la Défense, a expliqué que les FAC évaluaient actuellement si leur structure et unités étaient pertinentes pour le XXIe siècle, et si, notamment, « tout le monde doit répondre à la même norme, parce que différents emplois exigent des normes de condition physique différentes ». Il a ajouté que ces questions se posaient particulièrement dans le contexte des nouveaux métiers et professions, comme la cybernétique[42]. Selon le lieutenant-général, les FAC envisageraient des mesures d’accommodement de l’exigence de l’universalité du service, qui empêche actuellement certaines personnes handicapées de s’enrôler[43]

Les témoins ont donné des exemples concrets de situations où la diversité linguistique a profité aux FAC. Le lieutenant-général Lamarre a expliqué que, lorsque le typhon Haiyan de catégorie 5 a frappé les Philippines, les FAC ont « eu la chance de trouver […] 34 membres qui parlaient le tagalog. Ainsi, le premier hélicoptère — un hélicoptère canadien — à arriver dans un village qui n’avait pas encore reçu l’aide d’aucune Force avait à son bord des gens qui savaient parler le tagalog et pouvaient à tout le moins se faire comprendre[44] ».

Mme Kristine St-Pierre, directrice du WPS Group, a avancé que la diversité des perspectives, en plus d’être utile dans le cadre des opérations, contribue à l’efficience et à l’efficacité : « les groupes diversifiés sont généralement plus intelligents et aptes à prendre de meilleures décisions que ceux qui sont homogènes. Les entreprises ayant nommé plus de femmes à des postes de direction se tirent généralement mieux d’affaire financièrement […] [U]n bassin plus diversifié d’employés donne accès à une meilleure capacité de réflexion et de prise de décisions[45]. » Pour ce témoin, en plus d’apporter des avantages opérationnels, la diversité est aussi « une question d’équité », et l’évolution du cadre de promotion de la diversité dans l’armée reflète l’obligation morale et juridique des FAC d’accroître la représentation dans leurs rangs des groupes désignés[46].

C. L’évolution de l’approche à l’égard de la diversité

Au fil de l’histoire, il y a souvent eu corrélation entre le contexte politique, social et culturel et le taux d’enrôlement militaire des femmes, des peuples autochtones et des minorités visibles. Alan Okros, professeur au Collège des Forces canadiennes, a expliqué que l’approche adoptée par les FAC à l’égard de la diversité a passé « d’une mise en œuvre réticente des changements commandés de l’extérieur, à une prise en main proactive pour répondre aux besoins de l’armée et être en phase avec la société[47] ». Selon le témoin, cette évolution de philosophie et de politique s’est faite en trois phases :

Il y a eu tout d’abord la phase de tolérance et d’accommodements. On s’employait à éliminer les obstacles manifestes et à fournir aux personnes concernées des accommodements qui étaient basés sur des besoins justifiés et qui étaient habituellement exigés par la loi [...] On est passé ensuite à la phase de l’acceptation et de l’intégration. Les FAC reconnaissaient alors que ceux ne faisant pas partie de la norme dominante — plus précisément les femmes et les gens ayant une culture, une croyance religieuse, une orientation sexuelle ou une identité de genre différente — avaient aussi le droit de servir et de gravir les échelons […] Au cours de cette phase, les efforts d’intégration déployés par les FAC équivalaient souvent, pour les personnes visées, à de l’assimilation […] La phase actuelle m’apparaît maintenant comme celle où l’on souhaite passer à l’étape de la compréhension et de l’inclusion. On veut améliorer l’efficacité opérationnelle en s’inspirant des diverses perspectives, visions du monde, connaissances culturelles et points de vue personnels de la riche mosaïque sociale canadienne[48].

Le Canada n’est pas le seul pays à prendre des mesures pour élargir le bassin de recrues potentielles et maintenir en poste dans ses forces armées les groupes sous-représentés. Ces dernières années, les partenaires du Canada dans le Groupe de cinq – les États-Unis, l’Australie, la Nouvelle‑Zélande et le Royaume‑Uni – ont adopté des politiques pour accroître la diversité de leurs effectifs militaires, politiques axées surtout sur le recrutement et le maintien en poste, ainsi que sur la lutte contre le harcèlement et les inconduites sexuels[49]. Les FAC collaborent avec l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) et le Groupe des cinq à réduire les cas de discrimination et à accroître l’égalité des chances dans l’armée[50]. Pour M. Okros, la volonté des FAC de s’inspirer « des diver[s] perspectives, visions du monde, connaissances culturelles et points de vue personnels de la riche mosaïque sociale canadienne […] est admirable, très positive et mérite d’être appuyée […] Au sein des pays de l’OTAN, le Canada fait office de modèle[51] ».

L’approche actuelle des FAC en matière de diversité s’inspire des lois et des initiatives existantes, y compris Protection, sécurité, engagement, et cherche à s’aligner sur les directives, politiques et engagements internationaux du gouvernement du Canada, tels qu’ils s’expriment notamment dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Loi sur le multiculturalisme canadien, la Loi sur l’équité en matière d’emploi, la Loi sur les langues officielles, l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) de Condition féminine Canada, l’opération HONOUR et les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité[52]

Selon les témoins, l’approche des FAC à l’égard de la diversité repose principalement sur les instruments suivants : le Programme des Nations Unies (ONU) sur les femmes, la paix et la sécurité, l’opération HONOUR, la Stratégie à l’égard de la diversité et Protection, sécurité, engagement.

1. Le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité

En tant que membre de l’ONU et de l’OTAN, le Canada s’est engagé à mettre en œuvre la résolution 1325 du Conseil de sécurité de l’ONU (RCSNU 1325), qui reconnaît que la protection et les droits des femmes sont des enjeux relevant de la paix et de la sécurité. Depuis son adoption en octobre 2000, la RCSNU 1325 s’est vu adjoindre des résolutions subséquentes[53]; collectivement, elles composent le Programme sur les femmes, la paix et la sécurité (FPS). L’un des points sur lesquels ce programme insiste est l’importance de la participation des femmes à la prévention et à la résolution des conflits, et à la reconstruction et à la reprise après les conflits. Aux termes de l’article 1 de la RCSNU 1325, les États membres doivent « faire en sorte que les femmes soient davantage représentées à tous les niveaux de prise de décisions dans les institutions et mécanismes nationaux, régionaux et internationaux pour la prévention, la gestion et le règlement des différends[54] ». En novembre 2017, le gouvernement du Canada a rendu public son deuxième Plan d’action national sur les FPS, où il expose ses principaux objectifs de mise en œuvre de Programme sur les FPS pour la période allant de 2017 à 2022[55].

En reconnaissance du rôle des FAC dans la mise en œuvre du Programme sur les FPS, le CEMD a publié en janvier 2016 une Directive pour l’intégration de la RCSNU 1325 et de résolutions connexes à la planification et aux opérations des FAC[56]. La politique Protection, sécurité, engagement souligne aussi l’importance du Programme sur les FPS :

Les femmes élargissent l’éventail de compétences et d’aptitudes dans toutes les catégories de personnel, améliorent l’exécution de tâches de paix et de sécurité, rehaussent la connaissance de la situation et l’alerte avancée en facilitant les contacts avec les femmes dans les collectivités, et rehaussent l’accessibilité, la crédibilité et l’efficacité de la force militaire dans son travail auprès des populations locales. En dernier lieu, quand des femmes sont présentes, les processus de paix sont plus susceptibles de réussir et les accords de paix ont plus de chance de perdurer[57].

Malgré les nombreuses recherches qui prouvent les avantages de la participation réelle des femmes à tous les aspects du cycle de conflit, et le principe reconnu de longue date selon lequel les femmes ont le droit de s’enrôler, « les femmes représentent à peine plus de cinq pour cent des soldats en uniforme déployés dans les missions de maintien de la paix de l’ONU[58] ». En 2017, le gouvernement du Canada a lancé l’Initiative Elsie pour la participation des femmes aux opérations de paix, qui vise la mise au point d’approches pour éliminer les obstacles au déploiement des femmes. Cette initiative appuie la RCSNU 2242, qui appelle le secrétaire général et les États membres de l’ONU à doubler d’ici cinq ans le nombre de femmes dans les contingents militaires et les effectifs de police des opérations de maintien de la paix de l’ONU[59].

L’OTAN travaille aussi à mettre en œuvre le Programme sur les FPS, et elle a émis une directive à ses membres à ce sujet. En 2007, elle a adopté la première Politique de l’OTAN/du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA) sur les femmes, la paix et la sécurité, laquelle a été suivie – en 2019 – par un Plan d’action visant sa mise en œuvre. La Politique et le Plan d’action ont été mis à jour et adoptés au Sommet de Bruxelles de 2018[60].

Les témoins ont mis en évidence le lien qui existe entre la mise en œuvre du Programme sur les FPS et l’accroissement de la diversité au sein des FAC. Selon Mme Perron, « [l]a présence bien intégrée dans ces équipes de combat de femmes pouvant s’épanouir pleinement est non seulement le reflet des transformations que nous souhaitons voir se produire dans ces États fragilisés, mais peut aussi y contribuer. En effet, dans ces régions du monde ravagées par la violence, il est bon de redonner espoir aux femmes maltraitées, victimisées, dépossédées et violées en leur montrant qu’il est possible pour elles d’aspirer à un meilleur sort[61] ».

Selon M. Okros, la mise en œuvre du Programme sur les FPS pourrait aider à éliminer ce qu’il considère comme un des obstacles à l’accroissement de la représentativité des FAC : « l’expectative qu’ont les jeunes concernant la façon dont ils seront considérés et la contribution qu’ils pourront apporter ». Il a expliqué que les « perceptions [des FAC] sont en train de changer » grâce aux politiques découlant du Programme sur les FPS, et s’est dit d’avis que les Canadiens « seront plus nombreux à envisager une carrière dans l’armée[62] ».

2. Opération HONOUR

Après la publication dans Maclean’s et L’actualité, en 2014, d’articles affirmant que quelque 1 780 agressions sexuelles avaient lieu chaque année dans les FAC, l’ancienne juge à la Cour suprême Marie Deschamps a été chargée de procéder à un examen externe indépendant des inconduites et du harcèlement sexuels dans les FAC[63]. Dans son rapport, Mme Deschamps a conclu que la culture des FAC était propice à des incidents graves de harcèlement et d’agression sexuels. Elle a aussi formulé 10 recommandations sur les mesures que le MDN et les FAC devraient prendre pour lutter contre le harcèlement et les agressions sexuels et « piloter » un changement de culture.

En réponse au rapport Deschamps, le général Vance, CEMD, a lancé en 2015 l’opération HONOUR, qui vise à éliminer les comportements sexuels dommageables et inappropriés dans les FAC. L’opération vise quatre secteurs d’efforts : comprendre le problème; intervenir en cas d’incident d’agression sexuelle; soutenir les victimes d’inconduites sexuelles; prévenir les inconduites sexuelles[64].

Depuis le lancement de cette opération, le MDN et les FAC ont mis en œuvre plusieurs initiatives, dont certaines répondent aux recommandations du rapport Deschamps. Par exemple, en septembre 2015, le MDN a créé le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle (CIIS). Ce centre vient en aide aux membres des FAC victimes d’inconduites sexuelles, accroît les mesures préventives et améliore les interventions en cas d’incidents[65]. En 2016, au nom des FAC, Statistique Canada a adressé un sondage à 43 000 membres actifs des FAC; le taux de réponse a été de 53 %. Les résultats de ce Sondage sur les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes[66] ont confirmé les conclusions du rapport Deschamps et mis en lumière la fréquence des inconduites sexuelles : en 2016, plus de 25 % des femmes membres de la Force régulière ont déclaré avoir fait l’objet d’une agression sexuelle survenue en milieu de travail et mettant en cause des militaires, des employés du MDN ou des sous-traitants. En mai 2019, Statistique Canada a publié les résultats du Sondage sur les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes de 2018, qui montrent que dans la Force régulière comme dans la Première réserve, la prévalence des agressions sexuelles en 2018 a été la même que celle observée en 2016. Le sondage de 2018 révèle qu’environ 900 membres de la Force régulière (1,6 %) ont dit avoir été victimes d’une agression sexuelle au cours des 12 mois précédant le sondage[67]. En outre, environ 600 membres de la Première réserve (soit 2,2 %) ont affirmé avoir été victime d’agression sexuelle au cours des 12 mois précédant le sondage[68].

La politique Protection, sécurité, engagement prévoit aussi de nouvelles initiatives dans le cadre de l’opération HONOUR : ainsi, le MDN et les FAC assureront la mise en œuvre complète des 10 recommandations du rapport Deschamps; fourniront des services de soutien supplémentaires aux victimes et aux survivants; traiteront les plaintes de harcèlement en temps opportun; et communiqueront ouvertement et de façon transparente les progrès réalisés[69].

Dans son rapport d’automne 2018 sur les inconduites sexuelles dans les FAC, le BVG a conclu que les inconduites sexuelles minent la camaraderie, la confiance et la cohésion qui sont essentielles à l’accomplissement efficace des opérations et des missions des FAC. Plus particulièrement, le BVG a relevé des lacunes en ce qui concerne le soutien aux victimes, la sensibilisation et la formation sur les comportements sexuels inappropriés et la surveillance des mesures prises en réaction à des comportements sexuels inappropriés, et il a formulé sept recommandations[70]. En réponse au rapport du BVG, le MDN a approuvé chacune des recommandations et a fait l’annonce de nouvelles initiatives visant à combler les lacunes observées dans l’approche de l’opération HONOUR visant le traitement et la prévention des comportements sexuels inappropriés dans les FAC[71].

En décembre 2018, dans son Intention - Opération HONOUR, le CEMD a qualifié l’opération HONOUR de « priorité institutionnelle la plus élevée des FAC », et préconisé « une intervention efficace, coordonnée et dotée de ressources à long terme permettant de relever ce défi[72] ». Il a aussi donné instruction au vice-chef d’état-major de la défense de diriger la conception et la mise en œuvre d’une campagne s’articulant sur : le soutien aux victimes; une nouvelle Directive et ordonnance administrative de la défense pour aider les personnes à déclarer les incidents d’inconduite sexuelle; l’élargissement du mandat du CIIS; la prévention; l’engagement; l’élimination des lacunes de la politique; le changement de culture.

3. Stratégie à l’égard de la diversité

La Stratégie de 2017 des FAC à l’égard de la diversité, qui adopte une approche fondée sur les valeurs, affirme que « [l]a diversité dans les FAC met de l’avant le respect et la mise à contribution des différences, que ce soit d’origines, de talents et de perspectives culturelles uniques entre ses militaires. Ceci permettra de constituer un environnement inclusif où tous se sentiront habilités à contribuer à leur plein potentiel dans l’exécution de leurs fonctions[73] ». Cette stratégie énonce quatre objectifs : comprendre la culture de la diversité; inculquer une culture de diversité; moderniser les politiques en appui à la diversité; générer des FAC qui reflètent la diversité canadienne[74].

Le Plan d’action associé à la Stratégie présente le détail des activités, des attentes, des mesures de rendement, des tâches et des ressources pour exécuter ces quatre objectifs. La vérification annuelle du Plan d’action permet de « soutenir les changements organisationnels permettant une intégration complète de la diversité en tant que valeur fondamentale au sein des FAC », et les chefs des FAC y reçoivent instruction de « maintenir une connaissance situationnelle et [de] soutenir entièrement la Stratégie des FAC – plan d’action[75] ». La Stratégie à l’égard de la diversité valorise l’inclusion et, selon le plan d’action, les FAC examineront le potentiel d’un réseau national ou d’un forum communautaire pour ses membres LGBTQ2[76]. Le lieutenant-général Lamarre a signalé que la Stratégie était en cours de révision en réponse aux objectifs énoncés dans Protection, sécurité, engagement[77].

4. Protection, sécurité, engagement : La politique de défense du Canada

En 2017, le ministre de la Défense nationale du Canada a annoncé Protection, sécurité, engagement, où sont formulées cinq initiatives sur la diversité et l’inclusion[78] :

  • Faire la promotion de la diversité et de l’inclusion à titre de valeur institutionnelle primordiale dans l’ensemble de l’Équipe de la Défense;
  • Nommer un champion en matière de diversité qui surveillera la mise en œuvre de tous les aspects de la stratégie et du plan d’action en matière de diversité, y compris de la formation obligatoire sur la diversité à toutes les étapes du perfectionnement professionnel;
  • Utiliser l’outil l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) pour toutes les activités de défense dans l’ensemble des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale, de la conception et la mise en œuvre de programmes et de services soutenant notre personnel à l’acquisition d’équipement et à la planification opérationnelle;
  • Mettre l’accent sur le recrutement et le maintien en poste de membres de groupes sous-représentés au sein des Forces armées canadiennes, ce qui comprend, sans s’y limiter, les femmes, les Autochtones et les membres des minorités visibles;
  • Aspirer à jouer un rôle de leader dans l’équilibre entre les femmes et les hommes dans les forces armées en augmentant la proportion des femmes de 1 p. 100 par année au cours des 10 prochaines années pour atteindre 25 p. 100 de l’ensemble des forces.

Le contre-amiral Cassivi a dit qu’une équipe de six cadres du MDN et des FAC a été chargée de remplir les fonctions de champion en matière de diversité : trois cadres s’occupent de l’égalité entre les sexes dans le cadre des opérations, deux de l’ACS+, et un du Programme sur les FPS[79].

D : Les politiques en pratique

Les politiques qui gouvernent l’approche des FAC en matière de diversité reposent sur une gamme d’engagements dont les objectifs, quoique distincts, se rejoignent. Ainsi, Mme St-Pierre a expliqué que :

[l]'efficacité des efforts déployés dans le cadre de l’opération Honour pour créer un environnement exempt de discrimination et de harcèlement sexuel contribuera grandement à faciliter le recrutement par les Forces armées canadiennes d’un plus grand nombre de femmes et de membres des différents groupes désignés. Il est en outre essentiel de pouvoir recruter davantage de femmes pour respecter nos engagements en vertu du plan d’action national du Canada pour les femmes, la paix et la sécurité. Ce plan d’action national peut quant à lui devenir un outil essentiel à l’intégration par le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes des considérations liées au sexe à leurs plans, leurs politiques et leurs opérations à l’étranger[80].

La révision des politiques des FAC en faveur d’un enrôlement accru des groupes sous-représentés constitue un progrès dont les témoins se sont félicités. Certains ont toutefois fait valoir que, en pratique, certains problèmes persistent. Pour Grazia Scoppio, professeure et doyenne des études permanentes au Collège militaire royal du Canada, « [b]ien que les politiques d’équité en matière d’emploi soient des outils importants pour uniformiser les règles du jeu, le respect de la loi n’est que le premier pas sur la voie menant à une plus grande diversité dans la force militaire et ses effectifs. La prochaine étape consistera à voir dans la diversité une force et une valeur ajoutée pour l’organisation et, en fin de compte, à changer la culture organisationnelle[81] ».

PARTIE B : les défis de la diversité dans les forces armées canadiennes : recrutement, conservation et inconduite sexuelle

Pour le lieutenant-général Lamarre, « la diversité dans les [FAC] nous permet de disposer du talent indispensable au maintien de la défense du Canada et des Canadiens[82] ». Cependant, pour atteindre ses objectifs en matière de diversité, les FAC doivent non seulement recruter des candidats de divers horizons, mais aussi les maintenir en poste. Les témoins ont donc donné leur point de vue sur les défis que posent le recrutement et la conservation du personnel. Ils ont aussi parlé de l’impact de l’inconduite sexuelle à cet égard, des progrès faits par l’opération HONOUR dans l’élimination des comportements sexuels inappropriés, et des mesures supplémentaires qui s’imposent.

A : Recrutement

Dans l’ensemble, les témoins se sont dits favorables aux cibles établies pour le recrutement des femmes, des Autochtones et des minorités visibles, tout en signalant la nécessité d’accroître aussi la représentation des personnes LGBTQ2. M. Okros a dit que l’établissement de cibles, en plus de signaler clairement les priorités des FAC, peut faire changer les choses, c’est-à-dire « amener des jeunes à se demander si l’armée les intéresse. Il y a des jeunes femmes surtout qui n’ont peut-être pas songé à l’armée, mais si elles savent que [les FAC sont] sérieu[ses], elles y penseront peut-être[83] ».

Le recrutement joue un rôle central dans l’atteinte des cibles des FAC en matière de diversité. À ce sujet, le lieutenant-général Lamarre a parlé de la mise en place de l’opération GENERATION, « un système officialisé qui utilise une approche ciblée pour que nous puissions recruter les gens que nous voulons enrôler dans les Forces armées canadiennes, qu’il s’agisse de femmes, de minorités visibles ou d’Autochtones[84] ». 

On a dit au Comité que les FAC modernisent leurs méthodes de recrutement à l’endroit de tous les candidats, mais selon certains témoins, il faudrait viser en priorité certains domaines pour accroître la représentation des femmes, des Autochtones, des minorités visibles et des personnes LGBTQ2. Ces domaines à cibler en priorité seraient : les nouvelles stratégies de recrutement; le recrutement dans les collectivités rurales, éloignées et autochtones; le recrutement dans les centres urbains; et le recrutement de réservistes.

1. Nouvelles stratégies de recrutement

Il faut avant tout attirer une gamme accrue de candidats pour accroître la diversité des FAC. Selon le lieutenant-général Wynnyk, les FAC ont traditionnellement recruté « des hommes blancs […] Cela n’a pas changé depuis 50 ou 60 ans[85] ». Au sujet de l’importance d’attirer les jeunes et d’élargir le bassin de candidats traditionnel des FAC, Mme Perron a fait valoir qu’il est nécessaire que « les gens comprennent que nous recrutons nos soldats parmi 26 % de la population, quand nous recrutons principalement des hommes blancs[86] ».

Le lieutenant-général Wynnyk a parlé des efforts qui se font actuellement pour sensibiliser toute la société canadienne au fait que les FAC sont « prêt[es][87] » à accueillir de nouveaux membres. Le lieutenant-général Lamarre a dit que, pour intéresser les gens – particulièrement les jeunes et les femmes – aux possibilités qu’offrent les FAC, celles-ci ont opté pour la création d’un nouveau site Web, d’un centre de recrutement virtuel, d’une application de recrutement et de campagnes sur les médias sociaux[88]. Il a ajouté que les FAC ont appris que le site Web de recrutement ne doit pas être un « site alambiqué où il est difficile de naviguer » : il faut qu’une « personne puisse postuler en six clics […] Avant, cela prenait 27 clics[89] ».

Selon le lieutenant-général Lamarre, les FAC tiennent à « démystifier » le service militaire. Ses publicités et sa présence sur les médias sociaux mettent donc de plus en plus de l’avant des femmes, des Autochtones et des membres de minorités visibles, afin que les groupes désignés s’y voient représentés[90]. Mentionnant que les FAC mesurent le résultat de leurs initiatives en ligne, le lieutenant-général a dit ce qui suit : « nous avons constaté que, lorsque de jeunes femmes font du recrutement et qu’elles apparaissent dans nos vidéos en ligne […] ou qu’elles participent à des forums de discussion, ce que nous faisons dans le monde entier, la réaction est très, très positive, car les recrues peuvent s’y reconnaître; c’est pourquoi nous insistons sur le fait que nous avons besoin de plus de femmes et de membres des minorités visibles dans nos rangs[91] ».  

On applique des méthodes similaires aux efforts de recrutement sur le terrain. Par exemple, le lieutenant-général Lamarre a indiqué que les « recruteurs sont multilingues et ont des origines ethniques et raciales très diverses », ce qui a « facilité la communication avec les recrues potentielles » et atténué certaines des préoccupations qu’ont parfois les minorités au sujet des militaires[92] ». Les recruteurs participent aussi à des programmes de formation interculturelle et de sensibilisation à la culture autochtone, programmes « qui sont conçus pour sensibiliser tous les recruteurs à des normes culturelles qui peuvent différer de leurs propres antécédents et croyances[93] ».

Par ailleurs, de nouvelles stratégies de recrutement, comme le programme pilote « Les femmes font la force » lancé en 2017, offrent aux femmes l’occasion de se familiariser avec la vie militaire avant de s’enrôler, ce qui peut les encourager à opter pour les professions non traditionnelles où elles sont sous ‑représentées, comme les armes de combat. Mme Scoppio a signalé que les métiers choisis le plus souvent par les femmes sont ceux liés à la logistique et « à la santé[94] ». Quant à l’établissement de cibles pour chaque groupe professionnel, le lieutenant-général Lamarre a signalé que « nous établissons des cibles pour tous dans chaque groupe professionnel, et nous incitons les femmes, tant qu’il y en a, à s’engager dans les métiers non traditionnels et ceux où les besoins en personnel sont les plus grands. Par exemple, nous cherchons à augmenter le nombre d’opérateurs de sonar dans nos rangs pour être en mesure de maintenir nos navires et d’assurer leur fonctionnement[95] ». Selon M. Okros, on s’intéresse certes davantage aux femmes spécialisées dans les STIM, soit les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, mais « [i]l ressort que les femmes qui s’intéressent à ces domaines d’emploi actuellement ont tendance à trouver beaucoup de débouchés. Je pense que l’armée étudie certaines des initiatives que les universités prennent dans les domaines des STIM pour voir ce qu’il y aurait lieu de faire[96] ».

Enfin, le lieutenant-général Lamarre a aussi mentionné l’opération RESURRECTION, dans le cadre de laquelle les recruteurs des FAC contactent à nouveau les personnes qui ont présenté leur candidature, mais ont arrêté le processus[97]. Le « taux de retour des dossiers ressuscités […] est d’environ 30 %[98] ».

2.   La diversité et le recrutement dans les collectivités rurales, éloignées et autochtones

Selon les témoins, le recrutement dans les collectivités rurales, éloignées et autochtones n’est pas sans poser des difficultés. M. Lerat a proposé des façons d’encourager les Autochtones à envisager une carrière dans les FAC. Selon lui, l’approche actuelle présente des lacunes :

En Saskatchewan, la carrière militaire pourrait intéresser beaucoup de personnes, mais, si elles vivent loin dans le Nord, il faut les faire venir en ville et commencer par leur donner de l’aide pour remplir la demande. Le formulaire de demande est en effet assez compliqué. C’est la même chose pour les examens médicaux. Les gens de nos communautés doivent aller au sud pour rencontrer un médecin. On pourrait plutôt faire venir le médecin et lui demander d’examiner une dizaine de personnes. La logistique du recrutement est un immense problème. Je sais que l’intérêt existe. Il faut simplement amener les personnes intéressées à l’endroit voulu[99].

La question des examens médicaux a également été soulevée par le lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk. En effet, si le processus de vérification lié aux cotes de sécurité est considérablement raccourci, la centralisation continue de poser problème, puisque « les médecins doivent prendre connaissance de tous les dossiers[100] ». Selon ce témoin, « la plus grande amélioration à apporter concerne les retards dus au processus d’évaluation médicale[101] ».

Pour certains témoins, le dernier réaménagement des effectifs, en réduisant l’affectation de ressources humaines et financières, a entraîné une diminution de la présence des FAC dans les collectivités rurales, éloignées et autochtones. Selon Mme Scoppio, « il y a eu moins de postes et moins de ressources pour le recrutement[102]. Pour le lieutenant-colonel (à la retraite) David A. Quick, membre de l’Association canadienne des vétérans et membres actifs, la présence réduite des CAF dans ces localités est imputable au « coût que cela représente d’envoyer des équipes dans ces régions éloignées, [au] temps que cela prend. L’argent n’est tout simplement plus là[103] ». Mme Tasina Pope, avocate autochtone et ex-membre des FAC, s’est dite d’avis que les FAC devraient mieux diffuser l’information dans les collectivités autochtones : « [b]eaucoup de femmes autochtones se sont plaintes dans les médias sociaux du peu de ressources auxquelles elles ont accès[104] ». Réitérant qu’il faut davantage mettre l’accent sur le recrutement et le rayonnement dans les collectivités autochtones, M. Lerat a souligné que, « [d]e nos jours, en cette ère de communication, je ne vois pas pourquoi il n’y aurait pas des activités de recrutement plus concentrées » dans le Nord[105].

Les FAC tiennent des programmes de formation et de familiarisation pour intéresser les Autochtones à la carrière militaire. À cet égard, le lieutenant-général a cité le Programme d’initiation au leadership à l’intention des Autochtones, dans le cadre duquel de jeunes membres autochtones des FAC fréquentent le Collège militaire royal pendant un an; le Programme d’enrôlement des Autochtones des Forces canadiennes, un cours de trois semaines destiné aux Autochtones qui envisagent une carrière militaire; et les programmes d’instruction d’été de la Première réserve, c’est-à-dire Bold Eagle, Black Bear, Carcajou, Grey Wolf et Raven[106].

Les programmes de leadership autochtone ont été mis au point en consultation avec des aînés, et ce serait en partie la raison de leur succès. Par exemple, Bold Eagle – qui en est à sa 29e année – offre à de jeunes Autochtones, chaque été, une formation militaire au leadership. Selon M. Lerat, cette réussite est largement attribuable au « partenariat entre les Forces armées canadiennes et les Premières Nations, mais aussi au fait que nous pouvons incorporer une grande composante culturelle durant la première semaine, pour aider les jeunes à se familiariser avec l’environnement de la base de Wainwright. Beaucoup de militaires en service qui sont d’ascendance autochtone contribuent au programme et servent de modèles aux jeunes[107] ». Le lieutenant-général Lanthier a dit que les initiatives de familiarisation et d’éducation destinées aux Autochtones « permettent aux hommes et aux femmes autochtones de devenir des chefs de file dans tous les domaines des [FAC]. À l’inverse, elles permettent aux [FAC] d’apprendre des communautés autochtones[108] ».

L’intérêt ne manque pas chez les Autochtones de la Saskatchewan pour les programmes estivals des FAC : selon M. Lerat, « [i]l y aurait 10 candidats pour chaque poste offert, », mais « les propulser de là jusqu’à la Réserve, puis la Force régulière, demeure un défi[109] ».

Mme Scoppio a avancé que, en plus d’offrir des programmes qui durent tout l’été ou toute l’année, les FAC devraient créer des programmes plus courts et plus variés, question d’attirer des groupes différents : « [u]ne semaine, ce pourrait être les jeunes Autochtones et une autre semaine, les minorités visibles. Ce pourrait être très court, juste pour susciter l’intérêt des jeunes envers l’organisation[110]. »

3. Le recrutement et la diversité dans les centres urbains

La grande majorité de la diversité ethnoculturelle du Canada se concentre dans les centres urbains. C’est pourquoi, comme l’a dit le lieutenant-général Lamarre, la composition démographique des unités situées dans ces centres « reflèt[e] la population[111] » : « à Vancouver, le deuxième bataillon des services est établi dans une communauté qui est presque entièrement d’origine chinoise. Le personnel qui compose cette unité est donc à 80 % issu de la communauté chinoise[112] ». Le lieutenant-général a ajouté que les unités de Toronto deviennent de plus en plus représentatives de la diversité démographique, et que « [c]'est ce que [les FAC veulent] voir et appliquer de plus en plus[113] ». M. Lerat a signalé que les jeunes Autochtones sont de plus en plus nombreux à déménager dans les grandes villes, ce qui est une raison de plus d’y faire du recrutement[114].

Dans le cadre des activités de recrutement dans les centres urbains, des officiers et des militaires du rang se rendent aux cérémonies de citoyenneté, où ils « s’adressent aux nouveaux membres de la grande famille canadienne et les encouragent à […] considérer [les FAC] comme employeur potentiel[115] ». Le lieutenant‑colonel (à la retraite) John Selkirk a lui aussi salué les initiatives de recrutement des immigrants récents, qui donnent à ceux-ci « l’occasion de participer à un programme national d’envergure[116] ».

Selon Mme Scoppio, les FAC devraient envisager de recruter les non-citoyens. Elle a fait valoir que « [l]'un des obstacles à l’augmentation de la population des minorités visibles au sein des forces armées est la citoyenneté » et que, « aux États-Unis, de nombreuses professions sont ouvertes aux non-citoyens et, en fait, la procédure de naturalisation des enrôlés est accélérée[117] ». L’ouverture du recrutement aux non-citoyens serait « une des stratégies importantes pour augmenter le nombre de membres de minorités visibles[118] ».

4. Recrutement dans la Réserve

Reconnaissant que le territoire canadien est très vaste et qu’on y trouve de nombreuses collectivités différentes, certains témoins ont suggéré que les FAC recourent à la Force de réserve pour relever les défis du recrutement dans certaines régions. Ainsi, le lieutenant-général Lanthier a dit que « [l]’une des plus grandes réussites de la Réserve, si on parle d’attirer des candidats reflétant davantage la diversité, c’est son attachement à la collectivité[119] ». Selon le lieutenant-colonel (à la retraite) Selkirk, malgré des « budgets publicitaires très limités », « [l]a décentralisation du recrutement dans la Réserve de l’armée a déjà entraîné une augmentation de l’enrôlement de nouveaux membres provenant de populations traditionnellement sous-représentées […] Accorder plus d’autonomie aux unités en matière de publicité et d’autres méthodes de recrutement pourrait [aider à] cibler plus efficacement les recrues potentielles issues de ces populations[120] ». Le témoin a mentionné que le pourcentage de femmes dans la Force de réserve – 16 % – est légèrement plus élevé que dans la Force régulière[121].

Comme on n’a pas besoin de déménager lorsqu’on travaille pour la Force de réserve, celle-ci peut intéresser les personnes qui veulent s’enrôler dans les FAC mais rester dans leur collectivité, notamment les Autochtones qui sont fortement attachés à leur territoire ancestral, à leur famille ou à leurs coutumes. Mme Pope a dit espérer que les unités de la Réserve « pourront elles-mêmes insister sur la diversité en engageant des Autochtones[122] ».

B. Conservation des effectifs

Le recrutement et la conservation des effectifs vont de pair. En effet, il ne suffit pas de recruter des candidats représentant la diversité; il faut ensuite les maintenir en poste.

Andrea Charron a souligné que, « [e]n l’absence d’une stratégie de rétention pour maintenir femmes et minorités au sein des FAC, une stratégie […] de recrutement diversifié risque de créer des FAC reflétant la société canadienne seulement à un macroniveau […] Le reflet disparait toutefois à un microniveau[123] ». Par ailleurs, comme on le voit aux annexes A et B, la représentation des groupes désignés au sein des FAC se concentre aux grades inférieurs. Plusieurs témoins ont donc signalé deux obstacles qui pousseraient certains membres de ces groupes à quitter les FAC : les lacunes sur le plan de l’avancement et du soutien aux familles; et le manque d’ouverture aux pratiques spirituelles et culturelles.

1. Avancement professionnel et soutien aux familles

Des études montrent que ce sont encore les femmes qui s’occupent le plus des soins familiaux et des tâches ménagères[124]. De plus, selon certains témoins, les femmes rencontreraient des obstacles particuliers à l’avancement dans l’armée.

Certes, la commodore Patterson a dit que « les hommes et les femmes des FAC sont choisis exactement de la même manière relativement à la formation, aux promotions, aux affectations et aux possibilités de carrière : en fonction du grade, des qualifications et du mérite[125] ». De même, le lieutenant-général Wynnyk a qualifié les FAC de méritocratie où « les mêmes possibilités d’avancement [sont] offertes à tout le monde[126]. Par contre, d’autres témoins ont dit que les femmes ont plus de difficulté que les hommes à avoir de l’avancement parce qu’elles doivent composer avec la dichotomie entre les obligations familiales et la carrière militaire.

Selon Mme Perron, « [s]i l’on se demande pourquoi les femmes ne progressent pas plus [dans la carrière militaire], il suffit de regarder les chiffres sur le nombre d’hommes qui prennent un congé parental ou s’occupent de personnes âgées. Encore aujourd’hui, selon les statistiques, les soins aux aînés sont offerts par des femmes dans 70 % des cas[127] ». De plus, dans certains cas, les femmes « perdent des occasions de déploiement, […] elles ratent des occasions d’exercer leur leadership et d’obtenir le genre d’évaluation personnelle qui leur procurerait une promotion et tout le reste […] [S]'il n’y a que 10 % de femmes parmi les hauts gradés et que 90 % des forces déployées se composent d’hommes, c’est synonyme d’occasions ratées pour les femmes[128] ». Toujours selon Mme Perron, même les femmes qui partent en déploiement ne montent pas en grade au même rythme que leurs pairs par la suite[129].

Mme Scoppio a affirmé que, « [s]ouvent, pour obtenir une promotion, il faut aussi cocher les cases. Dans certaines professions, sans déploiement à l’étranger, il est très difficile d’aller au-delà, disons, du grade de major[130] ». Faudrait-il revoir les critères régissant les promotions? À ce sujet, et comme substitut aux strictes exigences de déploiement, Mme Scoppio a évoqué « [l]a possibilité d’obtenir des diplômes d’études militaires professionnelles par l’apprentissage à distance. C’est un moyen, pour une femme qui a de jeunes enfants, d’éviter d’avoir à passer, disons, un an au Collège des Forces canadiennes à Toronto pour obtenir une qualification afin de passer du grade de major au grade de lieutenant‑colonel[131] ».

Selon le lieutenant-général Lamarre, les FAC ont « mis en place de très bonnes politiques pour que les femmes qui prennent un congé de maternité ne soient pas pénalisées. Il y a le comité de sélection au mérite. Ces femmes ne sont pas rétrogradées comme elles le seraient pour cause d’absentéisme[132] ». Mme St-Pierre a affirmé qu’« [i]l y a aussi un coût professionnel à la maternité et à l’aptitude de prendre congé[133] ». Mme Laura Nash, une ex-militaire, a dit que les FAC ne l’ont pas appuyée lorsqu’elle est devenue mère, et que la rigidité des processus l’a empêchée d’obtenir un poste qui lui aurait permis, comme mère de famille monoparentale, de s’occuper de son enfant[134]. Ce témoin a prôné l’instauration du travail flexible pour aider les femmes dans l’armée[135], et porté à l’attention du Comité des lacunes sur le plan tant de la garde d’enfants que des prestations offertes aux mères célibataires[136].

Le WPS Group a lui aussi réclamé l’amélioration des politiques des FAC sur les accommodements, et particulièrement « le soutien nécessaire aux femmes, aux personnes seules et aux parents célibataires. Il ne faut pas faire comme si tous les militaires sont des hommes dont la femme est mère au foyer[137] ».

S’assurer que les femmes, les Autochtones et les membres des minorités visibles ont des occasions d’avancement, au cours de leur carrière, est essentiel pour favoriser une plus grande diversité parmi les hauts gradés des FAC. Actuellement, cependant, la diversité des FAC ne se retrouve pas dans les postes de grades supérieurs. Mme Charron a laissé entendre que dans les processus de promotion, les membres des FAC ont tendance « à appuyer et promouvoir les leurs, ce qui désavantage les métiers de soutien, où réside, statistiquement, l’essentiel de la diversité des FAC[138] ». Elle a fait remarquer, par exemple, que l’ARC tend à privilégier les pilotes par rapport à tous les autres métiers de l’aviation pour des promotions à des postes d’officier général. Par conséquent,

[L]es officiers subalternes n’étant pas des pilotes ont tôt fait de constater qu’ils se heurtent à un plafond en matière de promotion. De ce fait, ils sont plus susceptibles de quitter les FAC en début ou en milieu de carrière […] Rien ne sert de recruter des individus divers, ayant des approches et des opinions diverses, si, au sommet de la chaîne de commandement, le système perpétue un groupe largement homogène d’opérateurs appuyant et protégeant leurs propres candidats[139]

Qui plus est, Mme Charron a expliqué qu’à mesure que l’on monte en grade, dans les FAC, « la promotion dépend d’un nombre toujours plus réduit d’apports et de décideurs. Au niveau de colonel et plus haut, c’est criant ». Elle a ajouté que « le processus de prise de décision aux plus hauts niveaux est peu transparent, voire totalement opaque. Des influences idiosyncrasiques sont alors susceptibles de l’emporter [dans les processus de promotion]. On sait notamment que chacun a tendance à préférer une réplique de soi » lorsqu’il est appelé à intervenir dans une promotion, « ce qui constitue un autre obstacle potentiel à la diversité[140] ».

Le brigadier Nicholas Orr, conseiller en matière militaire et de défense du Royaume-Uni et chef du personnel de liaison de la Défense britannique, a dit que les forces armées britanniques ont récemment adopté des mesures qui permettront aux militaires de demander un horaire variable « pour mieux harmoniser leur carrière avec leur vie familiale[141] ». De plus, le ministère de la Défense du Royaume-Uni offre maintenant les logements pour familles de militaires aux personnes qui ne sont pas mariées, à condition que la relation dure depuis plus de 12 mois et que la personne est dans l’armée depuis au moins quatre ans[142].

La New Zealand Defence Force (NZDF) s’efforce elle aussi d’améliorer la gestion de carrière des femmes militaires. Par exemple, elle vise à ce que 20 % des lieutenants-colonels, et 20 % des sergents et des adjudants, soient des femmes[143]. Elle applique aussi un « quota de nominations de femmes lorsque tous les critères d’emploi sont satisfaits[144] ». Par ailleurs, le gouvernement de la Nouvelle-Zélande a adopté des politiques sur l’allaitement au sein et conclu des partenariats public-privé pour accroître les services de garde d’enfants offerts aux militaires[145].

2. Traditions spirituelles et culturelles

Il existe des attentes envers les membres de la Force régulière – déploiements, postes tournants, etc. – qui peuvent rebuter les Autochtones et les membres des minorités visibles qui sont étroitement attachés à leur famille, à leur collectivité, à leurs traditions culturelles et à leurs coutumes. Comme Mme Perron l’a dit, « [t]ous les deux ou trois ans, [les membres des FAC] déracinent leur famille. Ils doivent trouver une nouvelle école, un médecin et obtenir des plaques d’immatriculation. Ils perdent des amis et l’équité à long terme de leurs maisons. Ils sont éloignés de leur famille[146] ».

M. Lerat a expliqué que « nous avons, en tant que Premières Nations, nos propres coutumes, nos propres traditions, et chaque région a ses propres protocoles ». Des mesures sont donc prises pour « protéger les droits religieux des personnes des Premières Nations qui sont membres des [FAC], comme le droit de porter des tresses. Dans l’Ouest, […] nous travaillons beaucoup en partenariat avec la base de Wainwright […], les cérémonies de suerie sont autorisées […] C’est notre église[147] ». M. Lerat a aussi parlé du rôle important que jouent les aînés dans les programmes d’éducation et de familiarisation des FAC. Ainsi, auprès des jeunes autochtones qui peuvent « avoir de la difficulté à trouver leur place, le programme estival Bold Eagle] donne de bons résultats parce que les jeunes reçoivent de l’aide pour traverser les moments où ils se sentent seuls ou d’autres difficultés liées à leur départ de la maison[148] ».

Selon M. Okros, le Service de l’aumônerie royale canadienne est « très attenti[f] à l’évolution de la société canadienne en ce qui a trait à la religion et à la spiritualité, et i[l] s’assur[e] d’offrir les bons services[149] ». Le lieutenant-général Lanthier a dit que les politiques des FAC reconnaissent maintenant l’importance de la spiritualité, des traditions et des coutumes autochtones, et que le premier conseiller autochtone à l’aumônier général a été nommé en 2017[150].

Cela dit, Mme Pope a dit qu’elle a connu de l’isolement et des difficultés en tant que femme autochtone dans l’armée :

Les pratiques spirituelles autochtones étaient rares, voire inexistantes. On m’a refusé le droit de me faire pousser les cheveux […] On m’a aussi refusé des permissions pour assister aux funérailles de membres de ma famille proche. Dans une communauté autochtone, la présence aux funérailles est un signe d’honneur envers le clan familial[151].

Vu la diversité qui existe entre les Premières nations, les Inuits et les Métis – et à l’intérieur de leurs collectivités –, Mme Pope a recommandé aux FAC de resserrer leurs liens avec les aînés locaux. Le lieutenant-colonel (à la retraite) Quick a lui aussi dit que l’établissement de relations avec les chefs spirituels locaux améliorerait l’appui aux membres autochtones des FAC; il a donné l’exemple du Programme d’initiation au leadership à l’intention des Autochtones du Collège militaire royal du Canada, programme auquel un aîné local est intégré[152]. M. Lerat a expliqué que « nos cérémonies sacrées et nos protocoles nous sont utiles à nous, Premières Nations […] [I]l est plus facile de parler à un aîné parce qu’il fait partie de notre culture[153]. Mme Pope a également proposé que les unités, escadres et bases aménagent une salle de purification[154].

Mme Scoppio a donné comme exemple d’intégration réussie la représentation importante des Maoris au sein de la New Zealand Defence Force. En effet, la Defence Force a une « politique biculturelle » qui indique comment doit être mis « en application un biculturalisme qui reconnaît les intérêts culturels des Maoris et la place spéciale qu’occupe la culture maorie au sein » de l’institution militaire[155]. Cette politique précise aussi que le « runanga » (conseil), composé de conseillers culturels maoris, de cadres de la NZDF et d’aînés, se réunit tous les six mois pour aviser le commandant en chef sur les questions maories (« tikanga »)[156]. Des conseillers culturels sont également nommés dans les camps et les bases ainsi que sur les navires pour « aider les commandants et les gestionnaires à entretenir un dialogue avec les iwi (tribus) locales à l’extérieur [de la Defence Force][157] ». La participation aux groupes « kapahaka » (groupes culturels), formés pour diriger et appuyer les besoins cérémoniels, est ouverte à tout le personnel militaire. En application de cette approche biculturelle, les chefs de la Defence Force doivent faire montre de leur engagement envers la protection des intérêts maoris, et notamment établir un plan de sensibilisation et de formation.

Le lieutenant-général Lanthier a nommé plusieurs activités réalisées au cours de l’année « pour célébrer les contributions des Autochtones au service militaire », et dit que « [l]'activité phare est la Semaine de sensibilisation aux cultures autochtones[158]. Il a aussi mentionné que les « initiatives et [l]es efforts du genre sont éclairés par le Groupe consultatif des Autochtones de la Défense » qui « veille à assurer que les voix uniques des membres autochtones sont entendues sur une multitude de plateformes. Il formule des conseils aux commandants sur des questions comme le recrutement, le maintien en poste et les autres enjeux qui ont une incidence sur la vie des militaires autochtones. Il représente également une tribune pour les peuples autochtones[159] » Cependant, le lieutenant-colonel (à la retraite) Quick a dit que, lorsqu’il était membre du Groupe consultatif, « [i]l était difficile pour les membres du Groupe d’obtenir la permission d’assister aux réunions mensuelles […] [I]ls me laissaient entendre que leurs superviseurs ne voulaient pas prendre le risque de nuire à la productivité en accordant du temps pour une réunion de deux heures et les déplacements. [Certains membres du Groupe craignaient] que leur superviseur leur donne une mauvaise évaluation annuelle du rendement[160] ».

C. Opération HONOUR

Les conclusions du rapport Deschamps sont formelles : l’inconduite sexuelle est endémique dans la culture des FAC. Cette situation crée des problèmes pour le recrutement et le maintien des effectifs, en plus de miner les normes éthiques de l’armée et l’intégrité de ses membres. En outre, l’inconduite sexuelle affaiblit la confiance entre les pairs et à l’endroit de la chaîne de commandement, ce qui compromet les valeurs et les principes professionnels exprimés dans Servir avec honneur : La profession des armes au Canada, le manuel de base des FAC.

Tout membre des FAC mérite de pouvoir remplir ses fonctions sans faire l’objet de comportements sexuels inappropriés, comme le harcèlement ou les agressions. Pour le lieutenant-général Wynnyk, « [l]a diversité et l’inclusion consistent à s’assurer que tous les membres [des FAC] se sentent accueillis dans [l’]organisation[161] ». Dans ce contexte, il faut extirper les comportements et les attitudes qui perpétuent l’inconduite sexuelle, sans quoi la diversité ne pourra pas être concrétisée.

La lutte contre l’inconduite sexuelle, qui était jusque-là un objectif organisationnel, est devenue un impératif opérationnel en 2015. L’opération HONOUR, par laquelle les FAC entendent éliminer les comportements sexuels inappropriés et néfastes dans l’armée, se fonde sur deux principes : les personnes qui servent leur pays méritent d’être traitées avec dignité et respect; tout comportement ou attitude minant la camaraderie, la cohésion et la confiance des militaires en service entre eux menace la réussite opérationnelle à long terme des FAC[162]. Pourtant, selon les résultats du Sondage sur les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes de 2018 de Statistique Canada, la prévalence des agressions sexuelles n’a pas changé entre 2016 et 2018[163]. Dans la Force régulière, 7 membres sur 10 ont été témoins ou victimes de comportements sexualisés ou discriminatoires au cours des 12 mois précédant le sondage, en baisse par rapport à 8 sur 10 en 2016[164]. Tant dans la Force régulière que dans la Première réserve, plus de la moitié des agressions sexuelles survenues dans le milieu de travail militaire impliquaient un pair; le sondage indique toutefois que parmi les femmes réservistes, « une proportion importante de ces incidents impliquaient un superviseur ou une personne occupant un grade supérieur au leur (51 %, en hausse par rapport à la proportion de 38 % enregistrée en 2016)[165] ».

La commodore Rebecca Patterson a dit que, « [a]u cours des trois dernières années, les [FAC] ont pris des mesures décisives pour régler toutes les formes d’inconduite sexuelle au moyen de l’opération HONOUR, mais nous avons encore beaucoup de travail à faire. Nous sommes tout à fait déterminés à poursuivre nos efforts afin de mieux appuyer les victimes, tout en travaillant à remodeler notre culture de manière à assurer le respect et la dignité pour tous[166] ».

Selon certains témoins, les FAC ont fait des progrès sur le plan de la reconnaissance du problème de l’inconduite sexuelle et de la sensibilisation. Pour Mme Perron, « [i]l est difficile et démoralisant d’entendre tous ces récits de sévices subis, mais cela démontre que nous avons créé un environnement où les victimes sentent qu’elles peuvent dénoncer leur agresseur en toute sécurité. C’est une démarche qui témoigne de leur force, plutôt que de leur ressentiment[167] ». Par contre, le lieutenant-général Wynnyk a souligné que « nous n’avons pas tout compris et nous sommes conscients qu’il reste beaucoup de travail à faire[168] ».

Toujours selon le lieutenant-général Wynnyk, c’est dans le cadre des 10 recommandations du rapport Deschamps qu’il faut évaluer les progrès des FAC[169]. À ce sujet, les FAC ont réitéré leur volonté de mettre en œuvre les 10 recommandations « dans toute la mesure du possible ». Deux d’entre elles sont à ce jour considérées comme pleinement mises en œuvre : reconnaître le problème, et simplifier le processus de résolution des plaintes de harcèlement. Selon le lieutenant-général, les FAC ont aussi « répondu [même si ce n’est pas entièrement] à une recommandation de plus [c.-à-d. permettre aux victimes de demander le transfert de la plainte aux autorités civiles] de manière à respecter son intention, tout en respectant les paramètres structuraux, fonctionnels et juridictionnels des [FAC][170] ». Celles-ci continueraient aussi « de réaliser des progrès, à des niveaux variables, sur les sept autres [recommandations][171] ».

L’inconduite sexuelle est un problème complexe et difficile et, du point de vue du lieutenant-général Wynnyk, « nous avons encore beaucoup à apprendre ». Plusieurs témoins ont dit qu’il reste du travail à faire, surtout dans les domaines considérés comme lacunaires par le BVG, soit le soutien aux victimes, la sensibilisation et la formation, et le suivi des mesures prises[172]. L’honorable Marie Deschamps, qui a souligné que « [b]eaucoup de choses auraient dû se faire immédiatement » quand son rapport est sorti en 2015, a aussi dit que les FAC risquent de perdre la confiance de la population si elles n’en font pas plus pour concrétiser les recommandations du rapport[173]. Mme Scoppio a fait la mise en garde suivante : si les FAC souhaitent être vues comme un employeur de choix, elles ne doivent pas oublier « [b]eaucoup de parents sans doute auront [le rapport Deschamps] à l’esprit quand leurs enfants choisiront leur carrière[174] ».

Lorsqu’ils ont discuté des progrès de l’opération HONOUR, les témoins se sont arrêtés principalement à quatre aspects : le CIIS; la collecte de données; le processus de divulgation des cas d’inconduite sexuelle; le changement de culture.

1. Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle

Le rapport Deschamps réclamait la création d’« un centre indépendant de responsabilisation en matière de harcèlement sexuel et d’agression sexuelle à l’extérieur des FAC qui aura la responsabilité de recevoir les signalements de comportements sexuels inappropriés, de mener les activités de prévention, de coordonner et de surveiller la formation, de faire de la recherche, de fournir le soutien aux victimes, de faire le suivi de la responsabilisation, et d’agir comme autorité centrale pour la collecte de données[175] ». Comme on l’a vu ci-dessus, les FAC ont répondu à cette recommandation en 2015 par la création du CIIS, dont le principal objectif est de soutenir les membres des FAC victimes d’inconduites sexuelles. Denise Preston, directrice exécutive du CIIS, a expliqué que le Centre offre 24 heures par jour, 7 jours par semaine « des services confidentiels, bilingues et axés sur le client qui sont accessibles pour les membres des FAC, peu importe où ils se trouvent dans le monde. Les conseillers du Centre ont tous une expertise dans le travail avec les survivants de traumatismes sexuels et n’ont pas le devoir de signaler[176] ».

Cependant, l’honorable Marie Deschamps a dit voir un « fossé » entre sa recommandation et le CIIS tel qu’il a été mis en œuvre :

Ce qu’ils ont créé, initialement, c’est une entité ayant très peu de responsabilités […] [À] l’origine, on l’appelait un centre d’appels. Il n’était pas très bien connu et il n’avait pas les ressources suffisantes […] Tel que je l’avais conçu, le centre était censé pouvoir recevoir les signalements officiels et les signalements ou les divulgations des victimes qui voulaient seulement obtenir du soutien. Le centre devait être en mesure de recevoir les victimes et il ne devait pas avoir l’obligation de divulguer l’information à la chaîne de commandement […] Même aujourd’hui, le centre n’a pas encore la responsabilité ni le pouvoir de recevoir les signalements[177].

Dans son rapport de 2018 sur les comportements sexuels inappropriés dans les FAC, le BVG a recommandé que le MDN et les CAS définissent clairement « qui fait quoi », c’est-à-dire les rôles et les responsabilités de l’Équipe d’intervention stratégique sur l’inconduite sexuelle, dirigée par la commodore Patterson, et du CIIS, dirigé par Mme Preston. Par ailleurs, le BVG a préconisé la révision et l’élargissement du mandat du CIIS[178]. À ce sujet, la commodore Patterson a dit que « [le CIIS], une fois mis sur pied, devait croître. Au début, on y traitait les problèmes les plus criants, et on soutenait les victimes d’inconduite sexuelle[179] ». Mme Preston a indiqué que, bien que les services du Centre aient à l’origine « comblé une lacune critique, ils ne sont pas suffisants pour répondre à l’éventail des besoins des militaires affectés dû à la complexité de l’environnement des FAC[180] ». Elle a ajouté qu’il est « nécessaire d’améliorer la coordination des services de soutien et d’offrir de la formation spécialisée pour ceux qui fournissent du soutien[181] ».

Les témoins ont parlé de l’évolution de la relation entre le CIIS et les FAC; plus encore sera fait pour soutenir les victimes, et le mandat du Centre sera élargi. Selon le lieutenant-général Wynnyk, le CIIS fera « autorité pour orienter, appuyer et surveiller les progrès »; son nouveau mandat n’est toutefois pas finalisé[182]. Mme Preston a dit que, grâce à son nouveau mandat, le Centre pourra fournir des services de gestion de cas, devenir le point de contact unique qu’il y ait eu ou non déclaration de l’incident, et aider les membres des FAC à se conformer aux processus administratifs et juridiques[183]. Le Centre jouera également un rôle dans l’orientation de la stratégie nationale d’aide aux victimes.

Reconnaissant que les personnes LGBTQ2 font souvent l’objet de comportements sexuels inappropriés dans les FAC, Mme Preston a indiqué que le « personnel du CIIS a reçu une formation spécialisée d’organismes communautaires et recherche des façons d’améliorer la prestation des services afin de mieux répondre aux besoins de[s] [LGBTQ2] et d’autres groupes spécialisés[184] ». Elle a ajouté que le CIIS financera des centres d’aide aux victimes d’agressions sexuelles établis près des principales bases et escadres des FAC au Canada.

Par ailleurs, le lieutenant-général Wynnyk a dit qu’un conseil consultatif externe a été établi pour « renforcer et soutenir l’indépendance du [CIIS][185] ». Selon le lieutenant-général, ce conseil d’experts de l’extérieur a contribué à la rédaction des documents des FAC sur l’opération HONOUR, et notamment à l’élaboration d’« une définition plus claire de l’inconduite sexuelle et [d’]un arbre décisionnel pour guider les militaires de la chaîne de commandement dans leurs interventions en cas d’incidents signalés[186] ». Mme Preston a signalé que le CIIS a récemment engagé un expert pour mettre au point un plan de prévention de l’inconduite sexuelle et contribuer à la politique des FAC sur les agresseurs[187]. L’honorable Marie Deschamps a dit que l’ajout de spécialistes au CIIS était une initiative positive « quoique très tardive[188] ». Enfin, d’après le lieutenant-général Wynnyk, les FAC continuent de réaliser des progrès sur l’une des recommandations du rapport Deschamps, à savoir « confier au [C]entre la responsabilité d’élaborer le programme de formation et d’assurer le suivi de la formation sur toutes les questions qui ont trait au comportement sexuel inapproprié[189] ».

2. Suivi

Sur la question du suivi des incidents d’inconduite sexuelle, Mme Perron a souligné « que ce qui est mesuré correspond à ce qui est fait[190] ». Jusqu’à présent, la collecte des données s’est faite d’une manière surtout fragmentaire. Selon la commodore Patterson, les statistiques sur l’inconduite sexuelle viennent principalement de deux sondages : un sondage qualitatif, intitulé « À vous la parole », que les FAC tiennent deux fois par année pour mesurer les attitudes et les opinions des membres; et le Sondage sur l’inconduite sexuelle dans les FAC que Statistique Canada réalise tous les deux ans[191]. Les résultats du premier sondage de Statistique Canada ont été publiés en 2016, tandis que ceux du sondage de 2018 sont sortis le 22 mai 2019[192].

Le lieutenant-général Wynnyk a parlé du Système de suivi et d’analyse de l’opération HONOUR (SSAOPH), une nouvelle base de données conçue spécifiquement pour aider les FAC à consigner et à gérer plus efficacement l’information sur l’inconduite sexuelle. Le SSAOPH, qui est distinct du système de collecte de données du CIIS, a été lancé en janvier 2018, et ses données ont été intégrées au dernier Rapport d’étape des FAC sur la lutte contre l’inconduite sexuelle. Selon le lieutenant-général, le SSAOPH est probablement « l’un des premiers dispositifs ou méthodes de collecte de données sur mesure dans les pays du Groupe des cinq[193] ».

3. Processus de divulgation des incidents d’inconduite sexuelle

Plusieurs témoins ont discuté des problèmes qu’ils observent du point de vue de la divulgation des incidents d’inconduite sexuelle et des processus à suivre. Ainsi, Mme Preston a avancé que « moins de 10 % des cas [d’inconduite sexuelle] sont signalés. Ceux qui le sont concernent généralement des infractions de nature plus grave[194] ».

La chaîne de commandement devrait-elle s’abstenir de prendre part aux enquêtes sur les accusations d’agressions sexuelles? Pour Mme Perron,

[a]bsolument, je pense que c’est essentiel. Les victimes d’agression ou d’inconduite sexuelles se trouvent souvent obligées de signaler l’incident à un officier ou à un haut gradé qui n’a pas reçu de formation sur les méthodes d’enquête et d’entrevue adaptées aux victimes d’inconduite sexuelle. Il y a toutes sortes de blocages, de perceptions et d’idées préconçues sur les femmes qui dénoncent une inconduite. C’est dévastateur pour leur carrière […] Elles ont toujours peur de la chaîne de commandement[195].

La commodore Patterson a toutefois dit que, chez les répondants au sondage des FAC « 87 % […] étaient convaincus que leur chaîne de commandement leur offrirait du soutien s’ils déposaient une plainte d’inconduite sexuelle[196] ». Cependant, selon Mme Preston, « [c]e sont les gens qui n’ont jamais vécu une telle expérience et qui n’ont jamais eu ce genre de problème qui ont confiance[197] ».

Certains témoins ont critiqué le « devoir de signaler », c’est-à-dire l’obligation qu’ont les membres des FAC, dans la loi, de déclarer tous les incidents d’inconduite et de comportements sexuels inappropriés portés à leur attention. Dans son rapport de 2018 sur la question, le BVG a déclaré que cette obligation incitait certaines victimes à garder le silence et que « le devoir de signaler tous les comportements sexuels inappropriés a fait augmenter le nombre d’incidents signalés par un tiers, même si la victime n’était pas disposée à signaler l’incident à ce moment‑là[198] ».

Pour l’honorable Marie Deschamps, l’« obligation de faire rapport n’est pas axée sur la victime[199] ». Discutant de cette obligation de déclarer les incidents, quelles que soient les préférences de la victime, Mme Perron a dit que « la victime a le choix d’aller à son rythme et de décider si elle veut dénoncer l’incident ou non. Je comprends que l’organisation veuille absolument avoir connaissance des incidents afin de pouvoir y donner suite comme il se doit, mais parfois, une dénonciation cause plus de dommages qu’autre chose[200] ».

Le rapport Deschamps recommandait que les victimes d’agression sexuelle aient la possibilité de demander le transfert de leur plainte aux autorités civiles. Dans une décision de 2018, les juges de la Cour d’appel de la Cour martiale du Canada ont conclu à la majorité que « l’alinéa 130 (1) a) de la [Loi sur la défense nationale] est inconstitutionnel dans la mesure où il prive un militaire d’un procès devant juge et jury pour une infraction civile dont la peine maximale est de cinq ans ou plus[201] ». Cette décision est actuellement devant la Cour suprême du Canada.

Pour le moment, une victime qui souhaite déposer une plainte officielle auprès des autorités militaires peut s’adresser à la chaîne de commandement, à la police militaire ou au Service national des enquêtes des Forces canadiennes[202].

Les témoins ont informé le Comité que divers facteurs déterminent la juridiction compétente en cas d’inconduite sexuelle[203]. Par exemple, selon le lieutenant-général Wynnyk, si l’acte constitue une infraction aux termes du Code criminel, « ce serait renvoyé à l’externe[204] ». Le lieu entre aussi en ligne de compte : comme l’a dit Mme Preston, « si l’infraction a été commise dans un établissement non militaire, c’est habituellement la police civile qui est appelée, alors que si elle est survenue dans un établissement militaire, c’est la police militaire qui est appelée[205] ». De plus :

les souhaits de la victime sont pris en considération pour déterminer quelle voie sera empruntée, mais c’est, en fait, la poursuite qui a le pouvoir décisionnel définitif quant à la cour qui sera saisie de l’affaire […] Il arrive parfois que la police civile porte des accusations, mais que les procureurs civils choisissent de ne pas intenter de poursuites. Ces cas pourraient être transférés à la justice militaire[206].

L’honorable Marie Deschamps a dit que, si le devoir de signaler est conservé, il devrait avoir « comme condition préalable […] le fait qu’il faille s’occuper de la victime et s’assurer que la manière dont les choses se passent lui convient […] La victime pourrait se sentir plus à l’aise dans un cadre civil dans certains cas, et militaire dans d’autres cas. Il s’agit quand même d’une approche axée sur la victime[207] ».

Dans son rapport, le BVG a aussi critiqué la longueur des délais de traitement des plaintes. À ce sujet, le lieutenant-général a répondu que ce serait desservir les parties que de résoudre « à la hâte » toutes les affaires dans le délai de 30 jours donné à la police militaire. Il a expliqué que « le grand prévôt a […] six équipes qui ont reçu une formation spéciale en la matière, et il y a un agent de liaison qui travaille au bureau de Mme Preston […] Nous voulons nous assurer que les ressources sont mises à contribution, qu’il n’y a pas de pénurie de ce côté-là. C’est ainsi qu’on procède pour s’assurer que tous les cas font l’objet d’une enquête aussi approfondie qu’il le faut[208] ».

Selon les témoins, le traitement réservé aux fautifs mérite qu’on y porte davantage attention. Assimilant le système actuel à une « lacune », Mme Preston a mentionné que « [l]'échelle de gravité des comportements [sexuels] inappropriés est très grande, et certains peuvent être réglés très facilement et de façon très informelle à l’échelle locale. D’autres sont d’un degré de gravité semblable à ceux de délits que j’ai connus dans le système pénal fédéral, et ces cas devaient être aiguillés vers des services spécialisés d’évaluation et d’intervention […] [N]ous devons mieux analyser les personnes[209] ».

4. Lutter contre la « culture de la sexualisation » des FAC[210]

Le rapport Deschamps prônait un changement en profondeur de la culture des FAC, question d’y éradiquer l’environnement sexualisé d’hostilité aux femmes et aux personnes LGBTQ2, et de « créer une culture organisationnelle inclusive, dans laquelle la dignité de tous leurs membres est respectée[211] ». La juge Deschamps, reconnaissant que les changements de culture organisationnelle prennent du temps, et soulignant l’importance de mobiliser l’engagement des hauts dirigeants, recommandait dans son rapport que les FAC adoptent une stratégie de changement de culture.

Les témoins ont dit que les FAC sont pleinement déterminées à transformer leur culture pour que tous y soient respectés. Cela dit, le lieutenant-général Wynnyk a reconnu que les FAC n’ont « pas progressé suffisamment dans des domaines clés comme les politiques et le changement de culture stratégique, ce qui a freiné nos efforts dans l’ensemble[212] ». Quant à elle, l’honorable Marie Deschamps s’est dite déçue par les progrès limités faits jusqu’à présent : « quatre années se sont déjà écoulées, et nous n’avons pas encore vu la couleur de [la] stratégie [de changement de culture][213] ».

La réaction de certaines membres des FAC à l’opération HONOUR donne à penser que la culture institutionnelle ne changera pas du jour au lendemain. Selon Mme Perron, l’opération HONOUR est un « mal nécessaire, en ce sens qu’elle nous a propulsés vers l’avant et nous a obligés à examiner les problèmes » d’inconduite sexuelle, mais « [l]es contrecoups de cette opération sur les femmes sont atroces[214] ». Si les membres des FAC « ne veulent plus en entendre parler » et réagissent négativement aux formations données dans le cadre de l’opération HONOUR, c’est selon elle à cause des réticences des dirigeants : « [n]ous demandons aux dirigeants de tous les niveaux, depuis le grade de sergent, de donner des cours sur la diversité et le harcèlement. Ils se trouvent ensuite devant une classe contre leur gré, ils n’y croient pas[215] ». Selon elle, pour accélérer le changement de culture, « nous devons intervenir en amont et créer des conditions favorables dès la formation pour que les femmes soient valorisées[216] ».

Certains témoins ont insisté sur l’importance cruciale de recourir à des spécialistes externes[217]. À ce sujet, le lieutenant-général Wynnyk a signalé que les FAC tiennent compte de l’information et des conseils qu’elles reçoivent de l’extérieur[218], mais la commodore Patterson a précisé qu’il n’est pas toujours facile de traduire les « conseils d’experts en un outil que les militaires peuvent utiliser[219] ».

Concernant le futur, le lieutenant-général Wynnyk a dit qu’un « plan de campagne » est en élaboration pour accroître les progrès de l’opération HONOUR dans certains domaines, dont la prévention, l’engagement, la mise au point de politiques, le soutien aux victimes et le changement de culture. Ce plan, assorti d’un budget, reflétera les résultats de la recherche, l’apport des intervenants et les pratiques exemplaires des alliés du Canada[220]. Selon le lieutenant-général, les changements d’attitudes et d’idées exigent – du niveau de l’institution à celui de la personne – une transformation systémique qui « englobe tout » :

la formation, l’éducation et, ce dont nous avons parlé, la nécessité d’accroître le nombre de femmes exerçant fonctions de direction et d’en recruter davantage dans les Forces canadiennes, de façon à atteindre une masse critique et à faire bien comprendre à tous que les comportements inappropriés sont inacceptables et ne seront pas tolérés[221].

Bien qu’il y ait eu quelque progrès, l’honorable Marie Deschamps et Mme Preston ont appelé de leurs vœux la mise en œuvre accélérée des recommandations encore non concrétisées du rapport Deschamps et du rapport de 2018 du BVG[222].

PARTIE C : le changement culturel, la diversité et l’inclusion

L’accroissement de la diversité dans les FAC passe nécessairement par la lutte contre l’inconduite sexuelle, le recrutement et le maintien en poste. Mais les efforts en ce sens seront vains s’ils ne s’inscrivent pas dans la poursuite d’un objectif global : transformer la culture des Forces armées. Il n’est certes pas facile de changer les paradigmes qui existent de longue date, mais tous ceux et celles qui choisissent de se joindre aux FAC méritent de se sentir acceptés et valorisés, et de savoir qu’ils seront protégés contre les mauvais traitements et soutenus tout le long de leur carrière. Il faut des engagements durables en faveur d’un changement culturel à long terme pour transformer les attitudes et les comportements aux échelles organisationnelle et individuelle.

Selon M. Okros, la diversité doit être « comprise et adoptée en tant que valeur institutionnelle de base » dans les FAC[223]. De plus, comme l’a fait remarquer le contre-amiral Cassivi, outre qu’elle fixe des cibles de représentation des femmes, des Autochtones et des minorités visibles, la politique Protection, Sécurité, Engagement énonce une volonté claire de refléter « les idéaux canadiens de la diversité, du respect et de l’inclusion[224] ». Cela dit, Mme Perron a rappelé qu’« [o]n ne peut pas ordonner aux soldats de respecter les femmes, les membres des communautés LGBT[Q2], des minorités visibles ou de tout autre groupe désigné[225] ». Selon ce témoin, les paradigmes doivent changer, et les FAC doivent « générer des situations qui créent un déclic dans l’esprit des militaires et les amènent à se dire : “Wow! nous sommes chanceux d’avoir des femmes parmi nous”, parce que les femmes de leurs pelotons peuvent les aider à mieux réussir un exercice d’une certaine façon[226] ».

Si plusieurs témoins ont convenu de l’importance de susciter une culture de la dignité, de la confiance et du respect, tous ne s’entendaient pas sur les moyens à prendre pour mesurer le changement de culture[227]. Ainsi, la commodore Patterson a signalé que les modèles traditionnels d’évaluation n’ont pas réussi à faire beaucoup progresser les FAC dans ce domaine[228]. D’autres témoins ont toutefois décrit concrètement à quoi pourrait ressembler le changement de culture dans les FAC.

Selon Mme Scoppio, l’accroissement du nombre de membres issus des groupes désignés devrait précipiter la transformation : « [t]ant qu’on n’a pas une masse critique de femmes, de minorités visibles ou de membres autochtones, il est très difficile de changer une culture[229] ». Elle a ajouté « qu’un projet sans les ressources est une chimère, alors nous avons beau avoir un merveilleux plan stratégique, s’il n’y a pas les ressources pour le réaliser, c’est peine perdue ».

Pour M. Okros, il faudrait que les FAC valorisent davantage la différence au lieu de la conformité[230]. Le plus important, comme changement de mode de pensée et d’action, serait que l’armée voit dans la diversité non pas « [l]es autres », mais « nous[231] ». Mais il faudrait pour ce faire un réexamen de « l’idée qu’on se fait du membre idéal; l’image du modèle de soldat, de marin, d’aviateur, souhaité et valorisé. »[232]

Mme Perron a illustré comment les approches traditionnelles peuvent desservir les minorités. Par exemple, « [s]i nous structurons notre formation de manière à ce que les femmes soient valorisées, dans des contextes comme en Afghanistan ou à Haïti, […] les hommes verront que s’ils n’avaient pas de femmes parmi eux, ils n’auraient pas accès à toute cette information, et à ces renseignements précieux. Nous ne le faisons pas. Nous les forçons à respecter les femmes, puis nous créons des courses à obstacles qui mettent en lumière les faiblesses physiques des femmes plutôt que leurs forces[233] ». Donnant un autre exemple pour « faire comprendre ce que j’entends par la remise en question de nos paradigmes actuels[234] », Mme Perron a dit ce qui suit :

Chaque année, nous reconnaissons le sacrifice des mères qui ont perdu un enfant au service de notre pays en désignant la Mère de la Croix d’argent qui est choisie par la Légion royale canadienne […] Il fut un temps où c’était surtout les mères qui devaient s’occuper des enfants, et il n’était pas rare qu’elles doivent le faire toutes seules lorsque leur époux partait pour la guerre. C’était la norme à ce moment-là, mais les temps ont changé […] En désignant uniquement une Mère de la Croix d’argent, on dévalorise le rôle joué par les pères tout en contribuant à la stigmatisation de ceux qui choisissent de prendre un congé parental ou de demeurer à la maison pour s’occuper de leurs enfants. On perpétue par le fait même la perception suivant laquelle les femmes sont les seules qui ont à s’occuper des enfants ou voulant qu’elles aient une contribution plus importante à ce chapitre […] Il est temps que l’on désigne un parent de la Croix d’argent[235].

Selon Mme St-Pierre, la contestation des normes sociales établies peut contribuer à éliminer les comportements comme le harcèlement et la discrimination[236]. Pour elle, les normes sexospécifiques définies par la société, en plus de brimer les hommes comme les femmes, perpétuent dans l’armée des stéréotypes masculins, y compris celui selon lequel « il faut prendre des traits masculins et agir comme un homme pour être accepté[237] ». Selon Mme St-Pierre, ces facteurs peuvent créer un environnement hostile aux femmes et aux personnes LGBTQ2[238]. Discutant des liens entre la culture militaire et la diversité, l’honorable Marie Deschamps a dit que « [l]a diversité est souvent vue comme un moyen de changer la culture, et le changement de culture est un volet essentiel de la lutte contre l’inconduite sexuelle[239] ».

Les témoins ont dégagé divers domaines où, selon eux, les FAC devraient particulièrement redoubler d’efforts pour transformer la culture militaire. Ces domaines sont : l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+); la formation et l’éducation à la diversité; l’engagement des hommes; la responsabilisation des hauts dirigeants des FAC; la collecte de données; la création de réseaux de soutien.

A. L’analyse comparative entre les sexes plus

Plusieurs témoins ont avancé que le recours à l’ACS+, qui vise « à évaluer les répercussions potentielles des politiques, des programmes ou des initiatives sur divers ensembles de personnes — femmes, hommes ou autres[240] », pourrait aider à changer la culture des FAC. L’application de l’ACS+ n’implique pas nécessairement le remaniement des normes, mais elle permet de reconnaître et de dépasser les suppositions a priori. Ainsi, selon Mme Perron, « [s]i l’ennemi construit des murs de deux mètres, chaque soldat devrait pouvoir escalader des murs de deux mètres. Cependant, si nous disons que tous nos soldats doivent faire 1,70 mètre parce que nous avons retenu le fournisseur le moins cher pour construire un aéronef et c’est la taille minimale qu’il faut avoir, il y a un problème[241] ».

M. Okros s’est dit d’avis que la pensée et la pratique militaires ne pourront changer que si les FAC passent « d’une conception étroite de l’équité en emploi pour les groupes désignés à une reconnaissance de tous les aspects de la diversité[242] ». Or, le « plus » de l’ACS+ reconnaît justement l’intersectionnalité de multiples facteurs d’identité, comme le sexe, l’identité de genre, la race, l’ethnicité, la religion, l’orientation sexuelle, le revenu, la géographie, la culture, l’éducation, l’âge et les handicaps mentaux ou physiques.

L’appartenance à plus d’un groupe marginalisé aggrave généralement les inégalités subies. Par exemple, l’expérience des femmes autochtones dans les FAC diffère de celle des femmes blanches. Et la personne qui est membre à la fois d’une minorité visible et de la communauté LGBTQ2 risque de rencontrer plus d’obstacles que celle qui appartient à seulement un de ces deux groupes. Se demandant si lui, « un homme d’un certain âge, privilégié, de race blanche [, pouvait] arriver à bien comprendre les vues d’une jeune femme de couleur marginalisée[243] », M. Okros a prôné le dialogue, afin d’examiner ce que la diversité veut dire dans les faits.

Mme Scoppio a signalé que « tout le monde dans la fonction publique et dans l’armée doit suivre un cours sur l’ACS+ en ligne[244] ». La formation sur l’intersectionnalité fait peut-être défaut. M. Okros a ajouté qu’il y a un « fort degré d’acceptation » de l’orientation sexuelle dans les FAC, mais « [o]n ne comprend pas encore le genre et l’expression de genre[245] ». Mme Perron a mentionné que, pour beaucoup, le concept d’intersectionnalité est « tellement loin de la zone de confort […] Beaucoup de personnes imprégnées de la culture traditionnelle n’ont jamais été exposées à cela. Il faut en parler, exposer les gens à ces réalités; il faut aussi revoir nos paradigmes à l’égard de toutes les questions non binaires[246] ».

B. Faciliter la formation et l’éducation à la diversité

Plusieurs témoins ont parlé de la formation sur la diversité qu’offrent actuellement les FAC et sur l’importance cruciale des experts pour ce qui est tant de donner cette formation que d’éliminer les comportements sexuels inappropriés. M. Okros a indiqué qu’« il y a certainement des programmes qui insistent [sur la diversité] et qui visent à ce que ceux qui arrivent aux niveaux intermédiaires et qui aspirent aux niveaux supérieurs soient exposés à ces points de vue ». Cependant, selon Mme Scoppio, nous avons « besoin d’un volet éducatif, […] et ce volet éducatif ne peut pas être une simple présentation PowerPoint préparée à l’avance, après quoi tout le monde dit avoir reçu une formation sur la diversité. Il faut aller plus loin que cela à tous les niveaux de l’organisation[247] ».

Pour Mme St-Pierre, « il est important que les militaires comblent leur manque d’expertise en matière d’équité entre les sexes en apprenant à tirer parti de celle acquise par la société civile [pour créer] un milieu propice et au respect de toutes les promesses faites par le MDN et les FAC. S’ils arrivent à respecter toutes ces promesses, y compris à susciter un changement de mentalité et de culture, cela pourrait changer la donne[248] ». Par ailleurs, Mme Preston a reconnu que :

[u]n autre aspect positif en plus de se pencher sur le changement culturel, c’est que les [FAC] ont reconnu qu’elles se sont dispensé des conseils d’experts à l’heure d’élaborer leur stratégie […] À présent qu’elles l’ont reconnu, [le CIIS] devra s’acquitter de nouvelles responsabilités. […] Je crois que les conseils et l’expertise externe sont essentiels au succès de la mise en œuvre de l’opération Honour ainsi qu’au mandat [du CIIS][249].

Sur la question des préjugés involontaires, Mme St-Pierre a souligné que les « préjugés profondément ancrés à l’égard des femmes et des membres de différents autres groupes » peuvent beaucoup compliquer l’adoption de la diversité comme valeur institutionnelle de base[250]. Le contre-amiral Cassivi a expliqué que les FAC ont « dans l’ensemble de [leur] cadre de perfectionnement professionnel des cours qui initient les participants à la notion de préjugé et à la sensibilisation aux préjugés […] Nous avons généré un site Web d’autoperfectionnement présentant des lectures recommandées, et nous encourageons les gens à effectuer les tests qui sont accessibles en ligne, à se rendre compte de leurs réels préjugés, à les comprendre et à comprendre comment ils influent sur les décisions qu’ils prennent et sur les personnes qui les entourent[251] ». Il a toutefois ajouté qu’« il y a encore des difficultés ou des choses à améliorer sur le plan tactique, par exemple en ce qui a trait à la sensibilisation aux préjugés ou aux préjugés systémiques[252] ». Le lieutenant-général Lamarre a dit qu’il n’était « pas au courant d’une institutionnalisation de l’instruction visant à former tout le monde sur la question des préjugés[253] ».

De plus en plus, les alliés du Canada reconnaissent que les préjugés involontaires sont un obstacle au changement de culture. Selon le brigadier Orr, au Royaume-Uni, « [n]os hauts dirigeants auront également tous suivi une formation sur les préjugés inconscients. Je pense que nous acceptons tous également l’idée que les préjugés inconscients font partie des éléments qui nécessitent une formation continue, sans quoi ils referont surface[254] ». De même, en Nouvelle-Zélande, des formations aident à « identifier et à contrer les préjugés inconscients des conseils de promotion au mérite[255] ».

C. L’engagement des hommes

Certains témoins ont avancé que les hommes devaient y mettre davantage du leur pour opérer le changement de culture désiré. Par exemple, M. Okros a invité les hommes « à élargir leur conception du monde militaire et des méthodes de leadership, pour y inclure ce qui est communément considéré comme des approches féminines », de manière à « mieux reconnaître et prévenir certains comportements inappropriés au sein des FAC, tout en contribuant au succès des missions lorsqu’elles sont déployées[256] ».

Mme Perron a avancé que « les hommes détiennent l’essentiel du pouvoir quand il s’agit de faire progresser les choses et de donner de l’élan au changement. Imaginez une classe où le même sergent dit à tous qu’il ne veut rien enseigner à propos des foutaises de l’opération HONOUR, mais qu’un caporal de sexe masculin se lève et dise : “Un instant. Je trouve que c’est vraiment important et cela m’intéresse […]” Cela changerait tout[257] ». Abondant dans le même sens, M. Okros a dit que « [c]’est comme cela que l’armée va changer. C’est lorsque les gens regardent autour et disent qu’ils n’ont pas la bonne équipe, la bonne combinaison de talents[258] ».

D. La responsabilisation des hauts dirigeants

Certains témoins ont parlé du rôle des hauts dirigeants. Par exemple, Mme St-Pierre a souligné que « l’objectif d’inculquer une culture de la diversité doit être considéré dans une perspective à long terme exigeant des efforts de tous les instants de la part de tous les membres des forces armées, en commençant par les hauts gradés[259] ». Le lieutenant-général Wynnyk a dit que « [l]es membres [de la chaîne de commandement] sont tout à fait d’accord pour dire que nous devons mieux faire et accroître la proportion non seulement de femmes, mais aussi de membres des minorités visibles dans l’ensemble des Forces armées canadiennes[260] ». Il a ajouté ceci :

Il y a des exceptions, mais en moyenne, quand on devient brigadier-général ou commodore, on en est à 27 ou 31 ans. Nous sommes allés très loin pour nous assurer que nous offrons des possibilités à tous les groupes minoritaires dans les Forces canadiennes, et j’inclus les femmes parce qu’elles sont en minorité. La chaîne de commandement est tenue responsable de veiller à ce que nous examinions chaque personne, à ce que nous ne lui accordions pas nécessairement des privilèges, parce qu’il s’agit d’une méritocratie comme il se doit, mais que les mêmes possibilités d’avancement soient offertes à tout le monde[261].

Faudrait-il des incitatifs pour encourager les hauts dirigeants à en faire plus pour atteindre les cibles de diversité et promouvoir le changement de culture? Le lieutenant-général Lamarre a rappelé que les FAC ont reçu des ordres à ce sujet : « on nous a donné pour mandat [d’accroître la diversité], et c’est une mission que nous prenons très, très au sérieux[262] ». Il a ajouté : « Nous n’incitons pas chaque personne à le faire, mais nous leur disons effectivement qu’elles profiteront des talents qui existent […] Le seul échelon auquel nous incitons officiellement les gens est celui du recrutement […] Le groupe du recrutement fait l’objet d’évaluations quant à la façon dont il répond aux exigences que nous avons établies dans le cadre d’un examen annuel des professions militaires[263] ».

Mme Scoppio a proposé qu’on se serve de l’évaluation du rendement pour responsabiliser les dirigeants : « une des choses qui inciteraient fortement les hommes et les femmes en uniforme à promouvoir la diversité serait que ce soit justement une case à cocher pour gravir les échelons […] À l’heure actuelle, il n’y a pas de tels critères[264] ». Pour Mme St-Pierre, il incombe à la haute direction des FAC de faire comprendre que la diversité est une priorité organisationnelle. Le témoin a donc recommandé « un plan de communication solide et efficace […] qui permet à chacun, allant du haut de l’échelle jusqu’en bas, de bien comprendre pourquoi nous le faisons et pourquoi c’est tellement important de changer la culture de l’organisation militaire[265] ».

E. Collecte de données

Il faut des statistiques pour bien comprendre comment les groupes désignés sont traités dans les FAC, pour évaluer les progrès de la diversité afin de concrétiser et pérenniser le changement de culture souhaité. Certains témoins ont donc proposé qu’on recueille plus de données. Par exemple, souhaitant identifier les raisons qui poussent certains à quitter les FAC, Mme St-Pierre a dit que, « lorsqu’il s’agit de fixer des cibles pour recruter davantage de femmes ou avoir des groupes plus diversifiés, il faut comprendre qui se présente, pourquoi certaines personnes abandonnent et qui gravit les échelons[266] ».

De même, insistant sur le « besoin de meilleures données à toutes les étapes[267] », Mme Perron a signalé que, lorsqu’elle travaillait chez General Motors et Bombardier, « [n]ous utilisions des indicateurs pour évaluer le succès des membres de groupes désignés à toutes les étapes de leur carrière pour nous assurer de faire ce qu’il faut. Quand nous constations que les femmes n’obtenaient pas de promotion, nous analysions le phénomène. Nous nous attaquions au problème et nous demandions pourquoi nous perdions ainsi nos femmes. Parfois, c’était une question de conciliation travail/famille, mais il arrivait aussi que ce soit pour des raisons liées à l’avancement de la carrière[268] ». Or, selon ce témoin, les FAC ne mesurent pas « le succès ni les progrès des femmes[269] ». Les statistiques sur l’inconduite sexuelle présenteraient le même problème :

Aux fins de l’opération Honour, très peu de données sont conservées sur le nombre d’infractions ou de plaintes. Or, il faudrait avoir des données pour chaque unité. Chaque unité à chaque échelon devrait faire l’objet d’un suivi non seulement en fonction des plaintes, mais également en fonction du cheminement professionnel, des taux d’échec et de réussite, du recrutement, des réussites et des échecs aux cours, et des raisons sous-jacentes. Parfois, c’est tout simplement une question d’équipement. Dans d’autres cas, c’est la façon dont les cours ont été conçus[270].

Faudrait-il mener des entrevues de départ? Pour le lieutenant-colonel (à la retraite) Selkirk, il est stupéfiant qu’elles ne fassent pas partie des instructions permanentes d’opérations[271]. De même, Mme Perron a dit qu’il faudrait tenir une entrevue de départ avec les femmes qui quittent les FAC « pour connaître leur expérience et en tirer des leçons[272]. Le brigadier Nicholas Orr a insisté sur l’importance de comprendre pourquoi des gens quittent les forces armées. Il a indiqué que les Forces armées britanniques procèdent à « des entrevues de départ », même si celles-ci ne sont pas obligatoires[273]. Le lieutenant-général Lamarre a précisé que ces entrevues ont lieu lorsque la personne qui part exerce un métier très en demande, mais que les FAC envisagent de les généraliser[274].

Enfin, la collecte de données pourrait aider à cerner les aspects de la lutte contre l’inconduite sexuelle qui donnent de bons résultats. Selon Mme Perron, il faut mesurer « les aspects positifs[275] » aussi, et pour Mme Preston, nous « devons mieux faire connaître les progrès que nous réalisons[276] ».

F. Créer des réseaux de soutien

Si les FAC sont accueillantes pour tous, il sera plus facile d’y accroître la représentation des femmes, des Autochtones, des minorités visibles et des personnes LGBTQ2. Or, certains témoins ont déploré à cet égard le manque de réseaux de soutien. La commodore Patterson a reconnu que « [d]ans les Forces canadiennes, si vous faites partie d’un groupe minoritaire et que vous n’avez pas de réseau, vous risquez de vous sentir très seul[277] ».

Mme Pope a décrit comme suit son expérience dans l’armée : « Je me sentais confuse, et il n’y avait pas de femme autochtone qui aurait pu me servir de mentore au grade de militaire du rang. Il y avait de la rivalité entre les femmes de tous les rangs, du dénigrement aussi. J’ai établi très peu de liens significatifs pendant mes années de service dans les Forces canadiennes[278] ». Mme Nash a vécu une situation similaire, et n’est pas parvenue à trouver de mentors féminins[279]. Comme l’a souligné Mme Perron :

Ce n’est pas naturel pour les femmes [la compétition au sein des FAC]. Nous faisons les choses différemment. Ce qui est naturel pour nous, c’est l’entraide à différentes étapes de nos vies. Puis nous entrons dans l’armée et devons soutenir la compétition; nous devenons pires ennemies plutôt que de nous soutenir mutuellement[280].

Selon les témoins, le mentorat n’est pas encore généralisé aux FAC : il y a bien du mentorat informel, a dit le lieutenant-général Lamarre, mais « [l]e programme de mentorat n’est pas encore officiellement en place »; il « sera instauré dans le cadre de la révision en cours de la stratégie en matière de diversité dans les Forces armées canadiennes[281] ».

Plusieurs témoins ont dit qu’un programme de mentorat officiel pourrait aider les femmes et les autres membres des groupes désignés à s’épanouir dans les FAC[282]. Mme Perron a proposé que les représentants des groupes désignés puissent choisir leur mentor et devenir « les mentors que nous n’avons jamais eus[283] ». Selon Mme Pope, un programme de cet ordre favoriserait « davantage un engagement à long terme à l’endroit des [FAC][284] ». Quand on a demandé à Mme Perron s’il y avait un modèle de parrainage qui permettrait de faire augmenter le nombre de femmes dans les postes de grades supérieurs, celle-ci a répondu que les unités qui comptent moins de femmes que les autres devraient être « précisément visées pour l’avancement professionnel et le parrainage. Dans les armes de combat, tous les grades supérieurs à celui de major seraient admissibles au parrainage et, dans tous les autres corps de métier, peut-être à partir du grade de lieutenant-colonel, les officiers supérieurs[285] ».

M. Okros a insisté sur l’importance d’établir une culture qui appuie le bien-être de tous les membres des FAC : « [p]our concrétiser le programme sur les [FPS] de l’ONU, les objectifs de la politique d’aide internationale du premier ministre, les objectifs de la politique “Protection, Sécurité, Engagement” et les directives connexes de l’OTAN et du chef d’état-major de la Défense, il faut que les militaires assurent la sécurité humaine des individus, de leur famille et de la communauté[286] ».

conclusion et RECOMMANDATIONS

Grâce à la riche diversité de la société canadienne, les FAC disposent d’un large bassin de talents où recruter. Non seulement la diversité du personnel militaire est un avantage stratégique dans les théâtres d’opération, mais c’est en soi un atout pour les FAC d’avoir des membres qui diffèrent par l’origine ethnoculturelle, la langue, la race, l’orientation sexuelle, le sexe et l’âge, entre autres facteurs d’identification. Les politiques inclusives voient dans la diversité une force, et si les FAC ont fait des pas dans la bonne direction, elles n’exploitent pas encore le plein potentiel de la diversité démographique du Canada.

Les FAC, pour atteindre les cibles de diversité qu’elles se sont fixées, doivent s’atteler à relever les défis signalés par les témoins sur le plan du recrutement et du maintien en poste. Elles doivent en effet élargir leur bassin démographique de recrutement pour incarner les valeurs qu’elles défendent. À cet égard, elles gagneraient à adopter des politiques et des pratiques adaptées et favorables aux dynamiques familiales et aux traditions culturelles.

Mais surtout, les FAC doivent s’assurer que chacun de leurs membres soit traité avec respect et dignité. En tant qu’institution nationale chargée de défendre les Canadiens, elles ne doivent jamais relâcher leur détermination à extirper de leurs rangs toute forme de harcèlement et de discrimination. Comme en témoigne le lancement de l’opération HONOUR, les FAC reconnaissent que l’inconduite sexuelle est un problème sérieux qui mérite toute leur attention. Mais – les témoins l’ont rappelé –, elles sont encore bien loin d’avoir mis en œuvre les 10 recommandations du rapport Deschamps.

Le principal message qui ressort des témoignages entendus est celui-ci : la transformation de la culture, si elle est difficile à réaliser et à mesurer, est surtout urgemment nécessaire. Certes, les FAC agissent pour promouvoir l’inclusion et le respect de la diversité au pays et à l’étranger. Mais s’« [i]l ne fait aucun doute que les Forces armées canadiennes ont amorcé un virage vers une culture militaire plus inclusive et accueillante qui valorise davantage la diversité, a dit Mme Perron, première femme à devenir officière d’infanterie au Canada, cela se fait toutefois trop lentement. Il ne suffit pas d’amorcer un virage. Une transformation radicale s’impose[287] ».

À la lumière des témoignages entendus, le Comité recommande ce qui suit :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada :

  • (a) encourage et soutienne les efforts actuels faits par les Forces armées canadiennes pour mettre en œuvre l’analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) à la grandeur de l’organisation, y compris à l’échelle des unités, et pour promouvoir la sensibilisation et la formation à cet égard chez tout le personnel, y compris les nouvelles recrues et les nouveaux employés civils;
  • (b) instaure dans les plus brefs délais des mécanismes d’évaluation pour faire un suivi régulier des effets de l’ACS+ dans l’ensemble des Forces armées canadiennes.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada :

  • (a) veille à ce que des efforts soient faits par les Forces armées canadiennes pour désigner des champions de l’égalité des sexes, de la diversité et de l’inclusion, à l’échelle tant des unités que de l’organisation, et pour sensibiliser aux points de mire tout le personnel, y compris les nouvelles recrues et les nouveaux employés civils;
  • (b) encourage et soutienne la création et la mise en place de formes de reconnaissance du leadership et de l’initiative individuels en matière d’égalité des genres, de diversité et d’inclusion au sein des Forces armées canadiennes.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada offre des horaires et des parcours de carrière plus souples à toutes les familles des Forces armées canadiennes.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada instaure un programme de mentors pour les nouvelles recrues des Forces armées canadiennes pour les aider à cheminer dans l’environnement et à comprendre ce qu’on attend des personnes qui servent le Canada.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada établisse une base de données sur les compétences spécialisées des membres des Forces armées canadiennes, y compris les réservistes, et qu’on y répertorie, entre autres, les langues parlées ainsi que les compétences en électronique et en cybernétique.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada octroie du financement supplémentaire pour permettre aux Forces armées canadiennes d’envoyer des recruteurs dans les collectivités des Premières Nations et les localités rurales et éloignées, afin que les Forces armées puissent, comme c’est leur objectif, accroître le nombre de leurs membres autochtones dans les forces régulières et de réserve, et donner les mêmes possibilités de recrutement aux collectivités rurales et éloignées.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada donne instruction au ministère de la Défense nationale de publier un plan détaillé expliquant comment les Forces armées canadiennes atteindront leur objectif de représentation des femmes, soit 25 % d’ici 2026.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada octroie du financement supplémentaire pour le recrutement dans les Forces armées canadiennes, afin que celles-ci puissent utiliser des services comme les cliniques itinérantes, qui permettraient aux recrues potentielles habitant les collectivités éloignées et rurales de subir leur examen médical à proximité de chez eux.

Recommandation 9

Que les Forces armées canadiennes accroissent le rôle des aînés communautaires dans les services d’aumônerie, question d’accroître le sentiment d’appartenance des recrues autochtones.

Recommandation 10

Que le gouvernement du Canada collabore étroitement avec les responsables du Ministère et la chaîne de commandement à établir des dates d’échéance fermes pour la pleine mise en œuvre des recommandations du rapport Deschamps, qui vise à transformer la culture d’inconduite sexuelle dans les Forces armées canadiennes.

Recommandation 11

Qu’on envisage en profondeur la possibilité de situer de nouvelles unités de la réserve dans les collectivités rurales, éloignées et nordiques.

Recommandation 12

Que le gouvernement du Canada continue de soutenir l’opération HONOUR, et notamment les efforts pour mieux faire connaître les services de soutien existants, tout en tenant compte attentivement des points de vue et positions des parties prenantes, dont les femmes qui sont ou ont été membres des Forces armées canadiennes, les professionnels de la santé mentale, les professionnels du droit, les commandants, les sous-officiers supérieurs, les universitaires et les intervenants locaux, surtout ceux qui sont issus de groupes marginalisés.

Recommandation 13

Que le gouvernement du Canada donne instruction aux membres de l’équipe de la haute direction des Forces armées canadiennes de mettre en œuvre un programme de parrainage de candidates prometteuses à des postes de direction au sein des Forces armées canadiennes au fur et à mesure qu’elles montent en grade.

Recommandation 14

Que le gouvernement du Canada rende de la formation portant sur les préjugés involontaires disponible à tous les membres des Forces armées canadiennes, et que cette formation soit donnée à nouveau si le besoin s’en fait sentir conformément aux pratiques exemplaires établies par des spécialistes.

Recommandation 15

Que les Forces armées canadiennes envisagent des options permettant de tenir le haut commandement responsable d’améliorer la représentation des femmes et des groupes minoritaires.

Recommandation 16

Que les Forces armées canadiennes mettent en place des programmes de formation offerts aux hommes et aux femmes sur l’équité entre les sexes et la diversité.

Recommandation 17

Que les Forces armées canadiennes établissent comme pratique courante des programmes d’entrevues de départ pour toutes les personnes qui quittent les Forces armées canadiennes, et s’assurent que les entrevues comprennent des questions sur l’avancement, l’environnement de travail, les raisons de leur départ et les moyens d’être plus accueillant et encourageant à l’égard des différents groupes, de manière à ce que le gouvernement puissent recueillir des données lui permettant d’améliorer la rétention des membres.

Recommandation 18

Que les Forces armées canadiennes, en collaboration avec des organismes et des universitaires pertinents et spécialisés, cernent et compilent les données sur les agressions sexuelles dans l’ensemble des divisions, unités et autres secteurs de l’armée.

Recommandation 19

Que le gouvernement du Canada mette immédiatement en œuvre toutes les recommandations formulées dans le Rapport 5 de l’automne 2018 du Bureau du vérificateur général, Les comportements sexuels inappropriés – Forces armées canadiennes, et qu’il présente dans les plus brefs délais un rapport d’étape sur les mesures prises pour réaliser ces recommandations.

Recommandation 20

Que le gouvernement du Canada effectue un examen des circonstances dans lesquelles des Canadiens qui ne répondent pas aux normes de l’universalité du service peuvent devenir membres des Forces armées canadiennes ou être employés à titre de civil au sein du ministère de la Défense nationale.

Recommandation 21

Que le gouvernement du Canada mette en œuvre des solutions pour les membres des Forces armées canadiennes qui ont des enfants en matière de garde d’enfants et de reclassement pour assurer la compatibilité du service et de la vie familiale.

Recommandation 22

Que le gouvernement du Canada s’assure que les Forces armées canadiennes offrent à leurs membres une plus grande souplesse pour compléter la formation et obtenir les qualifications nécessaires, notamment en offrant de la formation à distance quand la situation le permet.

Recommandation 23

Que le gouvernement du Canada donne à la Réserve des Forces armées canadiennes l’autonomie nécessaire pour mener des activités de publicité et d’autres activités liées au recrutement.


[1]              Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes [NDDN], Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio); NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron et Kristine St‑Pierre); Témoignages, 21 février 2019 (contre-amiral Luc Cassivi). Tous les témoignages entendus durant l’étude ont été faits pendant la 1re session de la 42e législature.

[2]              Dans le présent rapport, l’acronyme « LGBTQ2 » désigne les personnes qui s’identifient comme lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers ou bispirituelles. Voir : Condition féminine Canada, « Glossaire », Introduction à l’ACS+, 26 septembre 2018.

[3]              Ministère de la Défense nationale [MDN], Protection, sécurité, engagement : La politique de défense du Canada, 2017, p. 23.

[4]              Ibid.

[6]              Thomas (2018), p. 6; NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[7]              Thomas (2018), p. 6; NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[8]              Le 21 février 2019, NDDN a demandé d’obtenir des données à jour sur la représentation des femmes, des Autochtones et des minorités visibles dans les FAC, ventilées par rang et par service. Au 13 juin 2019, NDDN n’avait pas reçu l’information demandée.

[9]              NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[10]            Ibid.

[11]            NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[12]            MDN, Les femmes dans les Forces armées canadiennes, 7 mars 2019.

[13]            Comme le montre l’annexe A, on comptait en février 2018 129 officiers généraux et 769 adjudants-chefs et premiers maîtres de 1re classe dans les Forces régulières et la Première réserve. NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[14]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[15]            Voir : Anciens Combattants Canada, « Les vétérans autochtones », 14 février 2019; et gouvernement du Canada, « Peuples autochtones dans l’histoire militaire », 27 février 2019.

[16]            NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[17]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[18]            Lindsay Rodman, Modernizing the Military Personnel System: Lessons from the Force of the Future, Canadian Global Affaires Institute, 2018, p. 5.

[19]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[20]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[21]            Lindsay Rodman, Modernizing the Military Personnel System: Lessons from the Force of the Future, Canadian Global Affairs Institute, 2018, p. 6.

[22]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[23]            Justin Trudeau, premier ministre du Canada, « Discours du premier ministre Justin Trudeau pour présenter des excuses aux Canadiens LGBTQ2 », 28 novembre 2017.

[24]            Aaron Belkin et Jason McNichol, « Homosexual Personnel Policy in the Canadian Forces: Did Lifting the Gay Ban Undermine Military Performance? », International Journal, vol. 56, no 1 (hiver 2000-2001), p. 73-88.

[25]            Ibid.

[26]            MDN, « Message du chef d’état-major de la défense touchant la communauté LGBTQ2 », déclaration, 28 novembre 2018.

[27]            Au sens de la Loi sur l’équité en emploi, les groupes désignés sont les femmes, les Autochtones, les minorités visibles et les personnes handicapées. La Loi vise à déterminer et à supprimer les obstacles discriminatoires qui entravent la pleine participation des groupes désignés au marché du travail du Canada. Voir : Loi sur l’équité en matière d’emploi, L.C. 1995, ch. 44.

[28]            Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada, L’équité en matière d’emploi dans la fonction publique du Canada, exercice 2016 à 2017, 28 mars 2018.

[29]                  MDN, « Annexe A - Plan de défense 2018-2023 - Sommaire des tâches », Annexe A – Plan de défense 2018-2023, 18 mai 2018.

[30]            Centre canadien pour la diversité et l’inclusion, Définition de la diversité.

[31]            Laurence Brosseau et Michael Dewing, Le multiculturalisme canadien, Publication no 2009-20-F, Service d’information et de recherche parlementaires, Ottawa, 3 janvier 2018.

[32]            Ibid.

[33]            MDN, Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité, 2017, p. 1, document présenté au Comité, 2019.

[34]            NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk).

[35]            MDN, Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité, 2017, p. 1, document présenté au Comité, 2019.

[36]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre); NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron); et NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[37]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Contre-amiral Luc Cassivi).

[38]            NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[39]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[40]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[41]            Andrea Charron, Mémoire sur la diversité pour le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes, mémoire à NDDN, 2019.

[42]            NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk).

[43]            Ibid.

[44]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[45]            NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[46]            Ibid.

[47]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[48]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[49]            Par exemple, le Royaume-Uni a publié une stratégie de diversité et d’inclusion dans le domaine de la défense s’appuyant sur trois grands objectifs : être un employeur inclusif, représenter la société du Royaume-Uni et améliorer les contacts avec les collectivités. Le Département de la Défense des États-Unis (DoD) a créé le Sexual Assault Prevention and Response Office afin d’éliminer les agressions sexuelles dans l’armée. Des suites de la publication en 2018 d’un rapport sur les agressions sexuelles dans l’armée américaine indiquant qu’environ 20 500 membres actifs des Forces armées avaient signalé des cas d’agression sexuelle au cours de l’année (une augmentation de 5 600 cas par rapport à 2016), le DoD a créé la Sexual Assault Accountability and Investigation Task Force en avril 2019. Ce groupe de travail effectuera des examens et formulera des recommandations afin d’améliorer les processus en place de façon à lutter contre les agressions sexuelles, d’appuyer les victimes et de cibler des réformes et des améliorations au processus judiciaire militaire. Afin de réagit aux agressions et au harcèlement sexuels dans l’armée, le ministère de la Défense de l’Australie a mis sur pied une ligne téléphonique de prévention et d’aide en matière d’agression sexuelle permettant aux membres des Forces armées de signaler des cas d’agression à l’extérieur de leur chaîne de commandement, en plus d’élaborer un guide sur l’éthique et les comportements au travail. Enfin, la Force de défense de la Nouvelle-Zélande a lancé son opération Respect en 2016 afin de veiller à ce que tous les membres des Forces puissent s’acquitter de leurs tâches dans un environnement respectueux et inclusif et exempt de comportements inappropriés ou malsains. Voir : NDDN, Témoignages, 4 avril 2019 (Brigadier Nicholas Orr); DoD, Annual Report on Sexual Assault in the Military, 2018; DoD, « DoD Task Force Will Address Military Sexual Assaults », 22 avril 2019; Isabelle Caron et Sébastien Girard Lindsay, « Women and the Armed Forces: Inclusive Policies and Practices in Canada, Australia and New Zealand », Canadian Naval Review, vol. 14, no 2, 2018; Force de défense de la Nouvelle-Zélande, « Op Respect », document présenté à NDDN, 2019.

[50]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[51]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[52]            MDN, Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité, 2017, p. 6, document présenté au Comité, 2019.

[53]            Le Programme du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité s’exprime dans les résolutions suivantes :  1325 (2000); 1820 (2008); 1888 (2009); 1889 (2009); 1960 (2010); 2106 (2013); 2122 (2013); 2242 (2015); et 2467 (2019).

[54]            Conseil de Sécurité des Nations Unies, Résolution 1325, S/RES/1325 (2000), 31 octobre 2000.

[55]            Voir : Gouvernement du Canada, « Plan national d’action du Canada consacré aux femmes, à la paix et à la sécurité », 15 octobre 2018. Le premier plan nation d’action du Canada consacré aux femmes, à la paix et à la sécurité a été publié en octobre 2010 et a pris fin en mars 2016. Des rapports d’étape sur la mise en œuvre de ce plan d’action ont été publiés pour 2012-2013, 2013-2014, 2014-2015, et 2015-2016. Voir : Gouvernement du Canada, « Le Plan d'action du Canada pour la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies sur les femmes, la paix et la sécurité -  2010-2016 », 2 octobre 2018.

[58]            ONU Femmes, « The Elsie Initiative Fund launched to increase uniformed women in UN peacekeeping », 29 mars 2019 [traduction].

[59]            Ibid.

[60]            Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN), OTAN/CPEA - Femmes, paix et sécurité - Politique et plan d’action, 2018.

[61]            NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[62]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[63]            Voir : Noémi Mercier et Alec Castonguay, « Our military’s disgrace, » Maclean’s, 16 mai 2014; et Noémi Mercier et Alec Castonguay, « Crimes sexuels : le cancer qui ronge l’armée canadienne », L’actualité, 25 avril 2014.

[64]            MDN, Ordre d'opération du CEMD (O Op CEMD) – Op HONOUR, août 2015.

[65]            MDN, Centre d'intervention sur l'inconduite sexuelle – Charte, octobre 2017.

[66]            Statistique Canada, Les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes, 2016, 28 novembre 2016.

[67]            Comportements compris dans la définition d’agression sexuelle utilisée par Statistique Canada: attaque de nature sexuelle, contacts sexuels non désirés ou activité sexuelle à laquelle la victime ne pouvait pas consentir. Voir : Statistique Canada, Les inconduites sexuelles dans la Force régulière des Forces armées canadiennes, 2018, 22 mai 2019.

[70]            BVG, Les comportements sexuels inappropriés, Rapport 5 des Rapports de vérificateur général du Canada – Automne 2018, 2018.

[72]            MDN, « Intention du chef d’état-major de la défense (CEMD) - Opération HONOUR, » Opération HONOUR – Ordonnances, politiques et directives, décembre 2018.

[73]            MDN, Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité, 2017, p. 2, document présenté au Comité, 2019.

[74]            Ibid., p. 6.

[75]                  MDN, Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité, Annexe B : Stratégie des Forces armées canadiennes à l’égard de la diversité – Plan d’action, 2017, avant-propos, document présenté au Comité, 2019.

[76]            Ibid., B-11/16.

[77]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[79]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Contre-amiral Luc Cassivi).

[80]            NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[81]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[82]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[83]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[84]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre). Le 21 février 2019, le Comité a demandé lors de l’audience publique un exemplaire de l’opération GENERATION. Au 13 juin 2019, il n’avait toujours pas reçu le document.

[85]            NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk).  

[86]            NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[87]            NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[88]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[89]            Ibid.

[90]            Ibid.

[91]            Ibid.

[92]            Ibid.

[93]            Ibid.

[94]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[95]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[96]            NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[97]            NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[98]            Ibid.

[99]            NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[100]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk).

[101]          Ibid.

[102]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio); et NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) David A. Quick).

[103]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) David A. Quick).

[104]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[105]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[106]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[107]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[108]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[109]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[110]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[111]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[112]          Ibid.

[113]          Ibid.

[114]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[115]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[116]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk).

[117]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[118]          Ibid.

[119]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[120]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) John Selkirk).

[121]          Ibid.

[122]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[123]          Andrea Charron, « Mémoire sur la diversité pour le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes », mémoire présenté au NDDN, 2019.

[124]          Women, Peace and Security Network – Canada, « Gender Perspectives and the Women, Peace and Security Agenda in Canada’s Defence Policy, Submission to the Defence Policy Review by the Women, Peace and Security Network – Canada, 30 juillet 2016 », mémoire présenté au Comité, 2019.

[125]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[126]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[127]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[128]          Ibid.

[129]          Ibid.

[130]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[131]          Ibid.

[132]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[133]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[134]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Laura Nash).

[135]          Ibid.

[136]          Ibid.

[137]          Women, Peace and Security Network – Canada, « Gender Perspectives and the Women, Peace and Security Agenda in Canada’s Defence Policy, Submission to the Defence Policy Review by the Women, Peace and Security Network – Canada, 30 juillet 2016 », mémoire présenté au Comité, 2019.

[138]          Andrea Charron, Mémoire sur la diversité pour le Comité permanent de la défense nationale de la Chambre des communes, mémoire présenté au NDDN, 2019.

[139]          Ibid.

[140]          Ibid.

[141]          NDDN, Témoignages, 4 avril 2019 (Brigadier Nicholas Orr).

[142]          Ibid.

[143]          Isabelle Caron et Sébastien Girard Lindsay, « Women and the Armed Forces: Inclusive Policies and Practices in Canada, Australia and New Zealand, » Canadian Naval Review, vol. 14, no 2, 2018 [traduction].

[144]          Ibid.

[145]          Ibid.

[146]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[147]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[148]          Ibid.

[149]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[150]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier)

[151]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[152]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) David A. Quick).

[153]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Edward Lerat).

[154]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[155]          New Zealand Defence Force [NZDF], « Politique biculturelle pour les Te ope Kātua o Aotearoa (FDNZ) », document présenté au Comité, 2019.

[156]          Ibid.

[157]          Ibid.

[158]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Jean-Marc Lanthier).

[159]          Ibid.

[160]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Lieutenant-colonel (à la retraite) David A. Quick).

[161]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[162]          MDN, « À propos de l’opération HONOUR, » 1er mai 2019.

[163]          Statistique Canada, « Les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes, 2018 », 22 mai 2019, p. 13.

[165]          Statistique Canada, « Les inconduites sexuelles dans les Forces armées canadiennes, 2018 », Le Quotidien, 22 mai 2019.

[166]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[167]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[168]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk).  

[169]          Ibid.

[170]          Ibid.

[171]          Ibid

[172]          BVG, Les comportements sexuels inappropriés, Rapport 5 – Automne 2018 - Rapports du vérificateur général du Canada, 2018.  

[173]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps).

[174]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Grazia Scoppio).

[175]          Marie Deschamps, C. C. Ad.E, Responsable de l’examen externe, Examen externe sur l’inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes, p. 34.

[176]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[177]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps). 

[178]          Voici les recommandations formulées par le BVG dans son rapport de 2018 sur les comportements sexuels inappropriés au sein des FAC :

1.        Les Forces armées canadiennes devraient collaborer avec le ministère de la Défense nationale en vue de revoir la répartition des rôles et responsabilités entre l’Équipe d’intervention stratégique des FAC sur l’inconduite sexuelle et le Centre d’intervention sur l’inconduite sexuelle et de préciser leurs rôles et responsabilités respectifs, afin d’améliorer leur efficience et d’éviter le dédoublement des efforts. Les Forces armées canadiennes devraient aussi veiller à ce que ces rôles et responsabilités soient diffusés dans l’ensemble de l’organisation pour qu’ils soient mieux compris par tous les militaires.

2.        Les Forces armées canadiennes devraient établir une approche nationale intégrée de soutien aux victimes pour veiller à répondre entièrement aux besoins de tout militaire qui est victime de comportements sexuels inappropriés. Cette approche devrait garantir un accès à des services et un soutien spécialisé uniformes à tous les militaires, peu importe l’endroit où ils sont déployés.

3.        Les Forces armées canadiennes devraient donner la priorité à l’aide aux victimes grâce aux mesures suivantes : offrir des services complets et intégrés de gestion de dossiers, dès le moment où la victime signale un incident jusqu’à la fermeture du dossier; s’assurer que les militaires, les intervenants et les responsables comprennent bien le processus de traitement d’une plainte, son déroulement et les dénouements possibles tant pour la victime que pour l’auteur présumé d’un incident.

4.        Les Forces armées canadiennes devraient établir des lignes directrices claires à l’intention des membres sur le règlement imposant de « signaler aux autorités compétentes » tout incident lié à un comportement sexuel inapproprié. Ces lignes directrices devraient préciser quelles sont les « autorités compétentes » pour chaque type d’incident. Il faudrait viser à concilier la nécessité de protéger la sécurité de l’organisation et la nécessité d’appuyer les victimes en leur permettant de divulguer un incident et de demander de l’aide sans qu’elles soient obligées de déclencher un processus officiel de signalement et de plainte.

5.        Les Forces armées canadiennes devraient se donner comme priorité d’offrir à tous leurs membres l’atelier intitulé « Le respect dans les FAC », et ce, dans les meilleurs délais. Elles devraient aussi examiner d’autres types de séances de sensibilisation et de formation axées sur l’aide aux victimes afin d’avoir l’assurance que tous les membres suivent une formation appropriée qui appuie les objectifs de l’Opération HONOUR.

6.        Les Forces armées canadiennes devraient élaborer un cadre d’évaluation du rendement pour mesurer et suivre les résultats de l’Opération HONOUR, et pour présenter des rapports à ce sujet. Les Forces devraient utiliser l’information recueillie pour améliorer continuellement les mesures prises à l’encontre des comportements sexuels inappropriés et s’employer à atteindre leur objectif, à savoir éliminer les comportements sexuels inappropriés dans l’ensemble de l’organisation.

7.        Les Forces armées canadiennes devraient avoir davantage recours à des experts externes en la matière, en plus d’utiliser les sources d’information et éléments probants internes, afin de disposer d’une plus grande diversité d’information sur le rendement et d’avoir l’assurance de recevoir une évaluation objective des mesures prises pour mettre fin aux comportements sexuels inappropriés.

Voir : BVG, Les comportements sexuels inappropriés, Rapport 5 des Rapports de vérificateur général du Canada – Automne 2018, 2018.

[179]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[180]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[181]          Ibid.

[182]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk).

[183]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[184]          Ibid.

[185]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[186]          Ibid.

[187]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[188]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps). 

[189]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[190]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[191]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson);

[193]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[194]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[195]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[196]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[197]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[198]          BVG, Les comportements sexuels inappropriés, Rapport 5 – Automne 2018 - Rapports du vérificateur général du Canada, 2018.  

[199]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps).

[200]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[201]          Beaudry c. R., 2018 CACM 4.

[202]          BVG, Les comportements sexuels inappropriés, Rapport 5 – Automne 2018 - Rapports du vérificateur général du Canada, 2018.  

[203]          Dans le Manuel de l’opération HONOUR, il est dit qu’« [a]u moment de déterminer le système qui devra exercer sa compétence, les enquêteurs et les procureurs militaires tiennent compte d’un certain nombre de facteurs, à savoir dans quelle mesure l’affaire concerne l’armée, dans quelle mesure elle concerne la société civile, si la personne accusée, la personne affectée, ou les deux, sont des membres des FAC, ainsi que les points de vue de la personne affectée ». Voir : MDN, Manuel de l’opération HONOUR (Édition provisoire), point 3.29, avril 2019, p. 41.

[204]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk).  

[205]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[206]          Ibid.

[207]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps).

[208]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[209]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[210]          Le terme « culture de la sexualisation » est tiré du rapport Deschamps. Voir : Marie Deschamps, C. C. Ad.E, Responsable de l’examen externe, Examen externe sur l’inconduite sexuelle et le harcèlement sexuel dans les Forces armées canadiennes, p. 15.

[211]          Ibid., ix.

[212]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[213]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps). 

[214]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[215]          Ibid.

[216]          Ibid.

[217]          Ibid.; NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre); NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[218]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[219]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[220]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[221]          Ibid.

[222]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps); et Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[223]          NDDN, Témoignages, 18 février 2018 (Alan Okros).

[224]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Contre-amiral Luc Cassivi).

[225]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[226]          Ibid.

[227]          NDDN, Témoignages,  7 février 2019 (Lcol (à la retraite) John Selkirk); NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[228]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[229]          On a atteint une masse critique, ou le seuil requis pour produire un résultat particulier, lorsque 30 % d’une population est représentée. NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio); NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[230]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[231]          Ibid.

[232]          Ibid.

[233]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[234]          Ibid.

[235]          Ibid.

[236]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[237]          Ibid.

[238]          Ibid.

[239]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (l’honorable Marie Deschamps).

[240]          Condition féminine Canada, Analyse comparative entre les sexes plus, 12 décembre 2018.

[241]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[242]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[243]          Ibid.

[244]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[245]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[246]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[247]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[248]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[249]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[250]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[251]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Contre-amiral Luc Cassivi).

[252]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Contre-amiral Luc Cassivi).

[253]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[254]          NDDN, Témoignages, 4 avril 2019 (Brigadier Nicholas Orr).

[255]          Isabelle Caron et Sébastien Girard Lindsay, « Women and the Armed Forces: Inclusive Policies and Practices in Canada, Australia and New Zealand, » Canadian Naval Review, vol. 14 no 2, 2018 [traduction].

[256]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[257]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[258]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[259]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[260]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Lieutenant-général Paul Wynnyk). 

[261]          Ibid.

[262]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre). 

[263]          Ibid.

[264]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Grazia Scoppio).

[265]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Kristine St-Pierre).

[266]          Ibid.

[267]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[268]          Ibid.

[269]          Ibid.

[270]          Ibid.

[271]          NDDN, Témoignages,  7 février 2019 (Lcol (à la retraite) John Selkirk).

[272]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[273]          NDDN, Témoignages, 4 avril 2019 (Brigadier Nicholas Orr).

[274]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[275]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[276]          NDDN, Témoignages, 11 avril 2019 (Denise Preston).

[277]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson).

[278]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[279]          NDDN, Témoignages, 7 février 2019 (Laura Nash).

[280]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[281]          NDDN, Témoignages, 21 février 2019 (Lieutenant-général Charles Lamarre).

[282]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron); Témoignages, 7 février 2019 (Laura Nash); Témoignages, 21 février 2019 (Commodore Rebecca Patterson); et Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[283]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[284]          NDDN, Témoignages, 26 février 2019 (Tasina Pope).

[285]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).

[286]          NDDN, Témoignages, 18 octobre 2018 (Alan Okros).

[287]          NDDN, Témoignages, 31 janvier 2019 (Sandra Perron).