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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 034 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 22 novembre 2016

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bonjour tout le monde. Bienvenue.
    Avant de présenter les témoins, monsieur Strahl, vous aviez quelque chose à dire.
    Merci, monsieur le président.
    Pour commencer, je suis certain que notre président nous écoute de chez lui. J'ai appris qu'il ne se sentait pas bien; j'aimerais lui souhaiter un prompt rétablissement.
    Je voulais présenter un avis de motion, et je veux le faire immédiatement, car il faut que ce soit réglé rapidement. J'espère que cela ne sera pas trop long et que nous pourrons rapidement en arriver à nos témoins. Je ne sais pas s'il faut que le document soit distribué avant.
    Voici cette motion:
Que le Comité invite l'honorable James Carr, ministre des Ressources naturelles, à témoigner au sujet du Budget supplémentaire des dépenses (B) au plus tard le 6 décembre 2016.
    De toute évidence, nous avons un délai à respecter. C'est pour cette raison que je voulais présenter la motion aujourd'hui. Nous n'avons pas d'autres affaires à traiter en comité. Nous aimerions savoir ce qu'il a à dire au sujet de ce budget, et j'aimerais que cette motion obtienne l'appui unanime des membres du Comité.
    Faut-il en discuter? Êtes-vous tous en faveur?
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup.
    Nous allons donc passer à nos témoins. J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme O'Connell et à M. Bratina, qui sont ici à titre de suppléants, aujourd'hui. Bienvenue. Le travail de notre Comité est parfois épuisant. Comme vous le constatez, M. Maloney n'en pouvait plus. Il a tellement poussé notre groupe que son dos n'a pas résisté. Je tiens à vous remercier de le remplacer ici aujourd'hui et de participer à la séance.
    Merci beaucoup aux témoins. Nous recevons ce matin deux témoins: Jerry Hopwood du Réseau d'excellence universitaire en génie nucléaire, et Glenn Harvel, de l'University of Ontario Institute of Technology.
    Vous aurez chacun 10 minutes pour faire votre exposé, après quoi nous allons passer aux questions du Comité.
    C'est à vous de commencer, monsieur Hopwood.
    Je m'appelle Jerry Hopwood et je suis ici pour deux raisons; premièrement, à titre de professionnel d'expérience du secteur de l'énergie nucléaire et ensuite à titre de président du Réseau d'excellence universitaire en génie nucléaire. Comme c'est un long titre, nous l'appelons tout simplement le Réseau.
    J'ai commencé ma carrière dans le domaine de la technologie de l'énergie nucléaire au Royaume-Uni, après quoi je suis venu au Canada pour travailler pour Énergie atomique du Canada limitée. C'était il y a plus de 35 ans. Je me suis occupé de la conception et de la mise au point de réacteurs nucléaires, des évaluations de sécurité et des affaires réglementaires, de même que de l'élaboration de projets pour la construction des réacteurs nucléaires CANDU ici et un peu partout dans le monde.
    Au bout du compte, j'ai été vice-président du développement de produit et des réacteurs pour Énergie atomique du Canada limitée. J'ai brièvement occupé un rôle similaire auprès de l'organisation du génie qui lui a succédé, Candu Énergie, après la réorganisation du groupe du génie d'Énergie atomique du Canada limitée, et j'ai quitté à la fin de 2015; récemment, je suis devenu président du Réseau.
    Permettez-moi de vous parler du Réseau. Nous sommes une organisation sans but lucratif dont les membres représentent les principales organisations de technologie nucléaire du Canada, les universités canadiennes du domaine du nucléaire et des organismes gouvernementaux; c'est donc un partenariat de trois milieux. Le Réseau a pour objectifs de favoriser le perfectionnement des professionnels de la technologie nucléaire en offrant des programmes de post-doctorat en formation continue pour les professionnels au début de leur carrière; ils viennent en général suivre un programme de maîtrise en génie nucléaire ou divers programmes de génie nucléaire sanctionnés par un diplôme; nous leur offrons aussi la possibilité de mener des recherches universitaires, en collaboration, pour répondre aux besoins du secteur tout en permettant au personnel hautement qualifié des niveaux du doctorat et post-doctorat de renforcer leurs capacités; enfin, le Réseau d'excellence bâtit ainsi un réseau d'experts universitaires à même de fournir des conseils crédibles au secteur, au gouvernement et à la société civile.
    À cette fin, notre Réseau prépare les programmes de génie et les programmes de diplomation du niveau de la maîtrise en génie nucléaire, permettant ainsi à plusieurs universités canadiennes du domaine nucléaire d'offrir des cours menant aux diplômes que nous décernons. Les cours sont principalement offerts les fins de semaine, mais il y a aussi des cours intensifs d'une semaine grâce auxquels les jeunes professionnels peuvent parfaire leur éducation pendant les premières années de leur carrière. Notre Réseau met en place et soutient également un groupe de chaires de recherche universités-industrie sur divers sujets liés à la technologie nucléaire. Le Réseau prépare et approuve également toute une série de projets de recherche et développement menés en collaboration par les universités membres. Les projets sélectionnés sont ceux qui ont de la valeur pour l'industrie et pour le Canada.
    Pour faire ce travail, le Réseau compte sur le financement du secteur. Dans la plupart des cas, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie fournit un financement de contrepartie. Le gouvernement du Canada verse donc un financement à hauteur du soutien du secteur, car ses travaux ont de la valeur pour le secteur, et le soutien du gouvernement ajoute de la valeur au pays.
    Je tiens à souligner que Glenn, ici présent, est un collègue non seulement de l'Institut de technologie de l'Université de l'Ontario, mais qu'il fait aussi partie du Réseau d'excellence. Je suis certain qu'il aura aussi des commentaires à présenter.
    Voilà ce que j'avais à dire sur moi-même et sur les raisons de ma présence. Le Réseau d'excellence universitaire en génie nucléaire est à coup sûr une partie intéressée dans la recherche et le développement du secteur nucléaire et il a des intérêts et des responsabilités dans le secteur nucléaire. Nous faisons partie de la chaîne d'approvisionnement, si vous voulez, puisque nous fournissons des professionnels et du personnel hautement qualifié. En ce qui concerne mes commentaires touchant les questions du Comité, je pensais fournir d'abord un bref aperçu de la façon dont je vois les choses, puis résumer le travail que fait le Réseau d'excellence, en contexte, puis, si j'ai le temps, faire quelques commentaires en réponse aux questions individuelles.
    Pour commencer, j'aimerais souligner, parce que c'est important, que la technologie nucléaire est une source d'énergie de base dont les émissions de gaz à effet de serre sont quasiment nulles. C'est un aspect essentiel, vu les changements climatiques, puisque nous cherchons tous à réduire les émissions de gaz à effet de serre.
(0850)
    Après la COP21 de Paris, l'an dernier, la réalité de la nécessité de prendre des mesures pour lutter contre les changements climatiques est devenue beaucoup plus largement acceptée, et les parties ont été plus nombreuses à prendre ces mesures. J'ai vu hier que le Canada avait annoncé un programme de réduction des centrales au charbon de tout le pays, ce qui fait partie de ces mesures.
    Aujourd'hui, les centrales nucléaires fournissent environ 11 % de l'électricité à l'échelle du monde et environ 18 % de l'électricité du Canada. En outre, les centrales nucléaires fournissent environ le tiers de l'électricité sans émission de gaz à effet de serre, à l'échelle du monde. L'énergie hydroélectrique en fournit la plus grande partie, et c'est bien sûr un important fournisseur au Canada. Cela dit, l'énergie nucléaire arrive au deuxième rang des principales sources d'électricité sans émission de gaz à effet de serre.
    La technologie nucléaire ne vise pas uniquement à fournir de l'énergie. Elle soutient les incroyables progrès accomplis au cours de la dernière génération dans les domaines de la santé et de la médecine. Le Canada est un chef de file, à ce chapitre, et sa production d'isotopes, entre autres, est un facteur des progrès de la technologie médicale, progrès qui concernent tout un chacun. J'ai moi-même profité des techniques de diagnostic par l'isotope du technétium, et je suis très heureux que le Canada soit un tel chef de file. Cela a affecté ma vie. Il ne s'agit pas seulement de l'énergie. Le secteur touche aussi la médecine et l'environnement.
    Le secteur nucléaire du Canada a une longue histoire. Je suis certain que vous avez entendu cela à de très nombreuses reprises. Cela fait des décennies que nous faisons de la recherche et du développement et que le secteur nucléaire du Canada accumule les réussites. Pensons par exemple à la conception du réacteur CANDU et d'autres réacteurs; aux progrès dans la réglementation du domaine nucléaire; à l'aide aux projets de R-D par les laboratoires nationaux et les universités du Canada, un aspect important pour le Réseau d'excellence, et aussi aux chaînes d'approvisionnement de l'équipement, du génie et de la gestion de projet.
    Dans le cadre de mon travail, je parcours le monde, et je constate que, partout, le Canada est très respecté, que le secteur industriel et la réglementation du Canada sont très respectés. Les gens considèrent que le Canada est un chef de file de la technologie nucléaire.
    Et tout cela, c'est grâce aux réacteurs CANDU. C'est la technologie des réacteurs du Canada. Il est certain que les travaux du Réseau portent beaucoup sur la technologie des réacteurs CANDU. Pourtant, pendant que nous assistons en quelque sorte à une renaissance des réacteurs CANDU, puisque les réacteurs de Darlington et de Bruce vont être remis en état et fonctionneront encore 30 ans, on constate une volonté d'aller au-delà des CANDU, c'est-à-dire un intérêt pour d'autres types de réacteurs conçus au Canada et ailleurs dans le monde.
    On envisage également d'utiliser les CANDU dans le cadre d'un programme de recyclage, selon lequel on récupérerait le carburant utilisé dans d'autres réacteurs pour l'utiliser une autre fois, de manière à en tirer davantage d'énergie avant l'épuisement du carburant. Il est possible d'élargir le secteur des CANDU traditionnels, et notre Réseau va s'assurer que, pour commencer, les travaux de recherche et développement dans les universités vont être mis à contribution; ce sera une des premières étapes de l'élargissement du secteur nucléaire.
    Dans ce contexte, le Réseau voit bien qu'il a une responsabilité. Notre secteur est là pour de bon, et l'énergie nucléaire continuera à servir en médecine et en tant que source d'énergie.
    Je ne doute pas que vous êtes au courant de l'accord signé par le gouvernement de l'Ontario et la direction de Bruce Power, qui prévoit que les centrales nucléaires de Bruce vont continuer à servir jusqu'en 2063. Je ne vivrai certainement pas jusque là. Cela dépasse également la durée de la carrière des nouveaux diplômés que le Réseau est en train de former, et c'est pourquoi le Réseau devra prendre en charge une autre génération, de manière que les centrales nucléaires qui fonctionnent aujourd'hui en Ontario et ailleurs puissent continuer à fonctionner. Le nucléaire est là pour de bon, et le Réseau a une responsabilité à cet égard. C'est important, pour nous. Nous devons être conscients de notre responsabilité.
(0855)
    La technologie nucléaire procure d'importants avantages à la société canadienne. Cette source d'énergie sans émission de gaz à effet de serre fournit 60 % de l'électricité de l'Ontario. C'est pour cette raison, surtout, que l'Ontario a pu il y a quelques années abandonner les centrales au charbon. L'Ontario a très bien réussi à fournir une source d'électricité propre et verte.
    La technologie nucléaire est aussi une très bonne source d'exportation potentielle pour notre pays. Le secteur nucléaire a connu des hauts et des bas, mais j'ai participé à la préparation de projets pour la Roumanie et la Chine, qui construisent des réacteurs CANDU et qui savent très bien les exploiter. Le fait que nous puissions exporter nos produits de cette manière représente, à notre avis, un atout de taille pour la technologie canadienne.
    L'autre chose que je voulais dire, c'est que, sous l'angle de son histoire, l'énergie nucléaire en est encore au premier stade de développement. Cela peut sembler étrange, quand on sait que le Canada s'occupe de technologies nucléaires depuis toutes les années qui se sont écoulées depuis la Seconde Guerre mondiale. Toutefois, il y a encore fort à faire pour l'améliorer, pour la rendre encore plus avantageuse et beaucoup plus largement applicable. Je crois donc que nous n'avons pas encore terminé les travaux de développement de l'énergie nucléaire et de la technologie nucléaire médicale.
    À titre d'organisation de recherche et de développement, le Réseau d'excellence estime que tout cela est très encourageant. Nous voulons maintenir notre relation avec le gouvernement du Canada — qui nous soutient, nous l'apprécions — et nous voulons également collaborer avec le secteur, pour mener des projets de recherche et développement de valeur et pour former des professionnels de valeur, tant pour le secteur que pour le Canada.
(0900)
    Merci, monsieur Hopwood. J'apprécie cela.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Harvel, pour 10 minutes.
    Bonjour. Merci beaucoup de m'avoir invité. Je suis très heureux d'être ici. C'est la première fois que je comparais devant un tel comité.
    J'ai travaillé dans le secteur nucléaire pendant 11 ans, à titre d'ingénieur et aussi de gestionnaire, surtout pour soutenir le produit CANDU, puis la technologie des plus petits réacteurs comme les réacteurs MAPLE et NRU. J'ai quelques connaissances sur cet aspect du cycle de travail.
    Je suis ensuite entré à l'Institut de technologie de l'Université de l'Ontario où j'ai été pendant 10 ans professeur en recherche. Si vous demandez à un enseignant de comparaître devant un comité pour parler de financement de la recherche et de développement, il est certain qu'il vous dira qu'il veut plus d'argent. Ça va sans dire.
    Je crois que le Canada couvre la totalité du spectre de l'industrie nucléaire: l'extraction du minerai, le broyage, les activités de Cameco et aussi la conception des réacteurs et des installations nucléaires et la prise en charge de la construction, de l'exploitation, de l'entretien et de la désaffectation. Nous nous occupons d'absolument tout.
    Au début, dans les années 1950 et 1960, c'était magnifique. Nous avions beaucoup de soutien. Aujourd'hui, c'est trop grand. Le secteur est tellement étendu qu'il est difficile de trouver du financement pour chacun de ses composants. Le financement de la R-D que les universités reçoivent est au bout du compte éparpillé, parce qu'on essaie d'en verser un peu partout. Au final, nous ne pouvons faire que des améliorations minimes, dans tous ces composants, alors que nous pourrions faire des progrès importants, peut-être, en nous concentrant sur des composants clés. Il vaudrait peut-être la peine de se demander sur quels aspects nous aimerions concentrer les recherches universitaires, de façon à pouvoir commencer à faire les grands progrès que nous aimerions faire.
    L'un de nos grands avantages, c'est notre personnel. Notre université à elle seule a produit au cours de la décennie plus de 500 bacheliers en génie nucléaire, un apport important pour la main-d'oeuvre. Cela dit, les plus âgés n'ont accumulé jusqu'ici que 10 années d'expérience concrète. Bon nombre de membres de notre personnel vont très bientôt prendre leur retraite, et nous risquons de perdre leurs connaissances et leurs compétences.
    Nous avons besoin de programmes des cycles supérieurs, des programmes qu'offre le Réseau d'Excellence, dont Jerry Hopwood a parlé, et nous aurions aussi peut-être besoin d'autres programmes axés sur la R-D, dans les universités, de façon à pouvoir renforcer les compétences de notre effectif de base et faire en sorte que le Canada conserve son effectif actuel. Nous devons conserver ces effectifs, non pas seulement pour notre propre secteur, mais parce que leurs compétences sont éminemment exportables.
    Les Émirats arabes unis, par exemple, embauchent des Canadiens qui participent à la construction d'une centrale nucléaire conçue par des Coréens, mais qui n'est pas fondée sur la technologie canadienne. Pourquoi embauchent-ils des Canadiens? Parce qu'ils aiment travailler avec des Canadiens. Il est agréable de travailler avec des Canadiens. Les compétences et les connaissances qu'ils possèdent leur permettent de travailler partout dans le monde, peu importe le type de réacteurs. Ils sont également très bons pour la gestion de projets et les travaux de construction. Ce sont des compétences que nous devons maintenir, au pays, car nous pouvons les exporter partout dans le monde, entraînant des retombées économiques importantes pour notre pays.
    Il y a un autre aspect auquel nous devrions accorder plus d'importance, dans une certaine mesure, du moins, et c'est la nature de l'approbation sociale dans nos échanges avec le public. Dans le secteur nucléaire, le mot d'ordre serait: « bas les pattes! » Nous avons élaboré des programmes d'éducation du public par le truchement de l'organisme de réglementation. Il y a dans toutes les installations un secteur responsable et un centre d'information; nous avons aussi des programmes, dans les écoles secondaires, pour favoriser cette éducation.
    Toutefois, de manière générale, nous ne déployons pas les efforts importants qu'il faudrait déployer pour expliquer cette technologie aux Canadiens. En conséquence, ils ne la comprennent pas encore toujours. Si vous ne comprenez pas une technologie, vous avez de la difficulté à prendre des décisions éclairées en ce qui a trait à ses risques ou à décider s'il faut construire de nouvelles centrales, etc. Nous faisons toujours face à de la résistance. C'est un autre des aspects qui mériteraient à mon avis un peu plus d'attention et d'effort à l'avenir.
    En ce qui concerne les réacteurs CANDU actuels, il faut surtout trouver des façons de les rendre plus sûrs, de les construire plus rapidement et d'en diminuer les coûts. Il n'est pas nécessaire de nous mettre au travail pour concevoir un nouveau CANDU 6. Nous avons déjà l'un des meilleurs réacteurs du monde. Nous savons comment le construire. Nous savons comment le faire fonctionner. Il fonctionne très bien au Nouveau-Brunswick. Il fonctionne très bien en Chine, en Argentine, en Roumanie. Des pays qui n'ont pas une très grande expérience du nucléaire savent faire fonctionner cette machine et y arrivent très bien. La technologie est bonne, mais nous devons trouver une manière d'en réduire les coûts de construction, d'en réduire les coûts d'entretien et d'en réduire les coûts généraux, de façon que ce soit un réacteur encore plus économique à l'avenir.
(0905)
    En ce qui concerne les nouveaux réacteurs, par exemple le réacteur à eau supercritique ou le petit réacteur modulaire, je crois en fait que nous devrions nous concentrer sur un seul. Le Canada doit décider de ce qu'il veut faire.
    Voulez-vous concevoir un réacteur à eau supercritique? Il faudrait alors prévoir du financement et nous occuper uniquement de ce type de réacteur, sans tenir compte des autres. Si vous préférez un petit réacteur modulaire, c'est ce réacteur que vous devriez financer. Ce qui se passera, si nous essayons de tout faire, c'est que les autres pays auront mis la technologie au point avant nous, et nous nous retrouverons à jouer un rôle de soutien plutôt qu'un rôle de leader.
    Quoi qu'il en soit, j'ai des réponses à vos questions, mais je crois que ce serait mieux si je vous laissais poser vos questions. Je vais faire de mon mieux pour y répondre.
    Merci.
    Merci beaucoup monsieur Harvel. Vous êtes le premier témoin, sur tous ceux que nous avons reçus, à terminer bien avant le temps. J'aurais aimé qu'il existe un prix pour cela, mais nous n'en avons pas.
    Cela nous donne plus de temps pour les questions. Nous allons commencer par M. Tan, qui prépare sa recherche comme un forcené. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les deux témoins de s'être présentés, en particulier le témoin du Réseau d'Excellence. Je connais très bien cet organisme. Je sais qu'il réussit très bien dans le domaine de l'éducation et de la recherche, dans le secteur nucléaire du Canada, et qu'il soutient également d'autres secteurs nucléaires. J'ai déjà eu deux ou trois collègues qui avaient obtenu leur maîtrise en génie grâce au Réseau d'Excellence.
    En septembre, notre gouvernement, pour être plus précis SNC-Lavalin et Candu Énergie, ont signé une entente de principe avec la société nucléaire nationale de la Chine dans le but de prospecter des marchés et construire le réacteur CANDU à combustible avancé. Il est aussi question de mettre sur pied deux centres de conception, un au Canada et l'autre, en Chine.
    Quels sont les détails techniques de cette entente? En quoi sera-t-elle avantageuse pour le Canada? Je sais qu'elle permettra de créer des emplois ou d'ouvrir des marchés, sur la scène internationale, mais à quels égards sera-t-elle avantageuse pour les Canadiens, ici, à la maison?
    Je ne peux évidemment pas parler des détails de l'entente. Je ne suis pas tout à fait au courant, même si, dans une autre vie, j'étais jusqu'à un point renseigné.
    J'aimerais parler de deux ou trois aspects. Le premier, c'est que la technologie nucléaire canadienne, à laquelle le pays a consacré un budget de recherche et développement, a permis de concevoir le réacteur CANDU, et une grande partie de cette technologie a été partagée avec d'autres pays, dans le cadre de projets précédents. La Chine, par exemple, a ainsi conclu une entente de transfert de technologie, il y a 20 ans, dans le cadre des projets de construction de deux réacteurs CANDU en Chine.
    On peut dire que le Canada et la Chine partagent une partie de leur technologie nucléaire. Le Canada a fait d'énormes travaux du côté du développement. La Chine est également très active et développe différents types de technologie nucléaire. Du point de vue technologique, le partage a des avantages, c'est-à-dire que la Chine aura accès à notre technologie et que nous aurons accès à la sienne.
    En ce qui concerne les projets, tout projet ultérieur de construction d'un réacteur CANDU aura des répercussions pour le Canada. Il est certain que, si la Chine lance un projet, je m'attends à ce que le gouvernement chinois s'assure que la chaîne d'approvisionnement soit en grande partie chinoise, mais une partie serait canadienne, et une partie de l'ingénierie proviendrait du Canada. Cette entente aurait des retombées positives pour les exportations et pour les emplois.
    Enfin, cela pourrait favoriser les exportations possibles de réacteurs CANDU à des pays tiers. Plus les projets de construction des réacteurs CANDU augmentent en nombre, plus il est facile de faire approuver d'autres projets ailleurs, car ils sont mieux acceptés et plus faciles à financer.
    J'ai participé à la mission commerciale en Chine, au mois d'avril et, à ce moment-là, plusieurs universités chinoises manifestaient un vif intérêt pour la technologie canadienne. Nous avons entamé des discussions très préliminaires touchant des protocoles d'entente entre notre université et les universités chinoises, qui s'attachent surtout aux échanges d'étudiants.
    L'intérêt, dans tout cela, c'est que des étudiants canadiens vont probablement pouvoir aller en Chine pour faire ce dont nous parlons ici, et ils acquerront ainsi la capacité de travailler à l'étranger et d'oeuvrer dans des marchés internationaux.
(0910)
    Je constate que vous avez dit tous les deux que notre technologie CANDU ou nos réacteurs CANDU ont une assez bonne réputation sur la scène internationale; je parle de la centrale Qinshan III ou des autres, celles de Roumanie ou d'Argentine.
    Le marché a été conclu il y a de nombreuses années; pourquoi donc, depuis ces 20 ans, n'avons-nous pas construit de nouveaux réacteurs ou vendu de nouveaux réacteurs CANDU à d'autres pays? Est-ce que, tout simplement, nos chercheurs canadiens sont très respectés et estimés par la communauté internationale et est-ce que notre technologie couvre la totalité du spectre de la technologie nucléaire, dans ce domaine?
    Je ne sais pas quelle en est la raison. Pourquoi? Nous avons une bonne technologie, mais nous n'avons pas le marché.
    J'aurais un ou deux commentaires à faire.
    Premièrement, le secteur de la construction de centrales nucléaires a toujours été soumis à un cycle, et les deux dernières décennies correspondent à un creux, dans ce cycle. La période des années 1990 et 2000 a été bonne pour la construction des CANDU, mais après, il y a eu un relâchement des ventes de réacteurs nucléaires partout dans le monde, à quelques exceptions près, à savoir la Chine, l'Inde et, dans une moindre mesure, la Russie.
    Ces pays construisent des réacteurs en s'appuyant le plus possible sur leur propre chaîne d'approvisionnement. L'Inde a beau importer les modèles, elle essaie de faire faire sur son territoire le maximum des travaux de construction de réacteurs. La Chine a toujours été une grande partisane de l'énergie nucléaire et elle construit chaque jour des dizaines, littéralement, de centrales nucléaires. C'est un marché immense, mais il est dominé par les entreprises et organisations chinoises.
    Le Canada, qui est une puissance moyenne, n'a pas le même type de marchés que certains de nos voisins du Sud, les États, ou des pays comme la France, dont le secteur est très monolithique, et cela nuit à ses ventes. Je ne saurais dire si c'est une bonne chose ou pas, mais c'est un fait.
    Je crois possible que, à l'avenir, les ventes du secteur nucléaire augmenteront de façon marquée, partout dans le monde. La lutte aux changements climatiques est un facteur qui l'explique, mais la reconnaissance de la fiabilité et de la maturité des réacteurs nucléaires en est un autre.
    Merci, monsieur Hopwood.
    Merci, monsieur Tan.
    Nous donnons maintenant la parole à M. Strahl, pour sept minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aussi à nos témoins.
    Monsieur Harvel, vous avez parlé de l'approbation sociale. Comme je viens de la Colombie-Britannique, je dirais qu'il s'agit davantage d'un manque de sensibilisation à l'égard de la technologie nucléaire. Si vous demandiez à mes électeurs ce qui leur vient à l'esprit lorsqu'on parle du nucléaire, ils commenceront probablement leur liste, dans la plupart des cas, par l'émission Les Simpson puis passeront à quelques-uns des malheureux incidents qui se sont produits, aux accidents nucléaires des dernières décennies. Je crois que c'est le défi auquel le secteur fait face.
    Il a été question de ce secteur, la fin de semaine dernière. Le gouvernement a publié sa stratégie de développement à faibles émissions de gaz à effet de serre visant l'horizon du milieu du siècle et le long terme; c'est un titre très accrocheur. Il n'y est pas question du secteur pétrolier et gazier, pas du tout, mais il y est question de l'énergie nucléaire. Dans le cadre de séances précédentes, nous avions parlé du fait que l'énergie nucléaire n'avait pas été mentionnée à titre de technologie propre, et c'est donc un pas dans la bonne direction pour le développement du secteur nucléaire. Pendant notre étude sur les mines, que nous venons tout juste de finir, nous avons entendu parler des petits réacteurs modulaires.
    Vous en avez parlé, dans votre exposé, mais pourriez-vous dire dans combien de temps nous pouvons nous attendre à ce que cette technologie soit mise en marché et accessible? Si nous devons encore attendre 20 ans — ou 10, ou 5, je l'ignore —, je crois que nous devrions avoir une discussion franche, et le gouvernement devra faire preuve de franchise. S'il veut mettre cette technologie en valeur, de manière à ce que les collectivités éloignées puissent abandonner l'électricité au diesel ou encore pour alimenter les grands projets de développement dans les régions éloignées, mais que la technologie n'est pas disponible sur le marché et que, en théorie seulement, elle pourrait un jour l'être, ce serait malhonnête et cela ne contribuerait en rien aux discussions sur la réduction des gaz à effet de serre.
    Pourriez-vous me dire, au meilleur de votre connaissance, ou selon votre estimation, dans combien de temps le Canada ou le monde pourra concrètement profiter de cette fenêtre et quand cela pourra servir en sol canadien?
(0915)
    Pour un petit réacteur modulaire...?
    Oui.
    C'est une très bonne question, étant donné qu'il est à peu près impossible d'y répondre. Le problème, c'est que toutes les entreprises qui y travaillent entourent leurs travaux d'un très grand secret. Cela fait plusieurs années que j'assiste à leurs conférences, et j'y vois de magnifiques graphiques en trois dimensions que mes étudiants pourraient réaliser en une journée. C'est tout ce qu'elles vont vous montrer. Elles ne veulent pas vous dire quel serait le coût réel. C'est à cela que nous allons en venir. Est-ce que ce réacteur peut être construit? Oui. Je ne doute absolument pas de leur capacité de le construire. Je crois vraiment que, sous l'angle technique, ce réacteur fonctionnera. Nous en arrivons au coût en capital, et fait plus important encore, au nombre d'employés qu'il faudra pour faire fonctionner une de ces unités, car cela aura une incidence sur le coût en capital et sur la rentabilité de ces réacteurs. C'est cet aspect que nous devrions cibler. Si nous amenons les entreprises à se focaliser là-dessus, nous allons être en mesure de répondre à la question et de dire quand la construction pourra aller de l’avant.
    L'entreprise NuScale est l'une des principales entreprises de ce secteur, aux États-Unis. Il est fort probable qu'elle cible le marché des porte-avions. Donc, ses plans sont probablement assez bien avancés, mais, encore une fois, elle ne veut pas que personne sache où elle en est rendue.
    Au Canada, le modèle qu'il serait le plus intéressant de suivre est celui de l'entreprise Terrestrial Energy, le réacteur à sels fondus. L'entreprise y consacre d'importants efforts, et a à coup sûr formulé de nouvelles idées très intéressantes sur les modes d'utilisation et de mise en oeuvre, et c'est franchement fascinant. Mais, encore une fois, il faudrait savoir de quels coûts on parle, et ainsi de suite.
    Je crois qu'il leur serait possible de soumettre un plan dans cinq ans, peut-être, accompagné de quelques belles estimations du coût, mais qu'il nous faudra attendre au moins 10 ans, à mon avis, selon ce que j'observe aujourd'hui, avant que des travaux de construction ne puissent être lancés. Cela nous ramène à ce que je voulais dire en parlant de cible. Aujourd'hui, Ressources naturelles Canada met beaucoup d'argent sur le réacteur à eau supercritique. Si ces sommes étaient réaffectées aux petits réacteurs modulaires, ce dossier avancerait peut-être un peu plus vite. Mais nous avons encore à choisir un modèle. Je crois qu'à l'heure actuelle, à l'échelle mondiale, une trentaine de modèles circulent, et c'est un peu ridicule. Nous devons en choisir un.
    Vous avez également souligné que, par rapport à certaines autres technologies, l'énergie nucléaire est, sur le plan économique, une option plus coûteuse, et, de toute évidence, ses émissions sont faibles. Quelles seraient les cibles de réduction, dans ce cas-là? De toute évidence, les gens veulent assurer leur sécurité; ils veulent des installations fiables. Le long de la chaîne d'approvisionnement, si vous préférez, où devrions-nous chercher si nous voulons réduire les coûts?
    Je vais prendre un raccourci. La meilleure façon de réduire les coûts, ce serait de reproduire ce qui existe déjà. La raison pour laquelle les centrales nucléaires ont coûté cher et ont dépassé le budget — ce qui est peut-être un motif de préoccupation plus important encore, étant donné qu'il fait naître le doute dans l'esprit des investisseurs —, c'est que nous nous entêtons à construire des réacteurs qui seront uniques en leur genre. Il y a eu de nombreux exemples, à l'échelle du monde, de nouvelles technologies qui semblent très intéressantes, et qui seront très intéressantes, mais construire des choses jamais vues, c'est toujours un problème. Ce n'est que plus tard que la technologie devient bien établie et que les gens commencent à la copier. C'est ce qui s'est passé, en fait, dans le cas des réacteurs CANDU; les réacteurs CANDU 6 de seconde génération, construits un peu partout dans les années 1980 et 1990 avaient l'avantage d'être, en fait, des copies des installations initiales. Je crois que c'est un avantage, mais cela veut dire qu'il faudrait peut-être prendre un engagement, un engagement mondial, à l'égard des commandes.
    Glenn, voulez-vous dire quelque chose?
(0920)
    Je suis d'accord avec ce que vous dites. Prenons la remise à neuf du réacteur de Darlington. Ces travaux se déroulent sans le moindre problème, pour le quatrième réacteur, étant donné les leçons tirées de ces travaux sur le premier réacteur. Nous ne devons pas perdre de vue que, lorsqu'on s'attaque à un premier réacteur, les travaux peuvent être retardés, certains problèmes peuvent se présenter, étant donné que c'est la première fois que des gens s'attaquent à cette tâche. C'est à cet égard que, à mon avis, un peu de R-D...
    Je suis désolé, monsieur Harvel, je vais devoir vous interrompre, nous arrivons au terme des sept minutes. Peut-être que M. Cannings vous donnera la possibilité de terminer votre intervention.
    Monsieur Cannings, vous avez sept minutes.
    Des voix: Oh, oh!
    D'accord.
    Les universités pourraient réaliser de bons projets de R-D, dans le domaine de la mécatronique et de la robotique, et nous pourrions chercher à concevoir des outils grâce auxquels réduire le temps que des hommes doivent consacrer à une partie de ce travail. Cela sera aussi utile sur le plan de la reproductibilité, étant donné que vous aurez alors un outil qui pourra vraiment faire la même tâche de la même façon chaque fois. C'est dans ce domaine que nous pourrions, je crois, commencer à investir du côté de la R-D, dans les universités, pour mettre ces techniques au point.
    Si cela ne vous dérange pas, j'ajouterais quelque chose sur cette question des coûts en reprenant ce que Glenn vient de dire quant à la conception des petits réacteurs modulaires, des réacteurs de ce type, ou de la façon dont les mettre en chantier.
    Je crois qu'un autre facteur qui explique l'augmentation des coûts, c'est le fait que, en cours de projet, les exigences sont modifiées. Le secteur nucléaire en a été victime, les premières années. Aujourd'hui, nous en savons beaucoup plus en matière de réglementation et en matière de sécurité; c'est du moins notre avis, en tant que praticiens du secteur. Nous estimons que les exigences en matière de sécurité peuvent être établies avant la mise en oeuvre d'un projet de façon que le constructeur sache exactement ce qu'il a à faire. C'est un peu comme si, pendant que vous construisez une maison, vous appreniez que le code de l'électricité vient de changer, et vous n'en êtes rendu qu'à la moitié de vos travaux. C'est vraiment une mauvaise nouvelle. Si nous pouvions régler ce problème, nous nous en trouverions bien mieux.
    En ce qui concerne les petits réacteurs modulaires, j'aimerais insister sur le fait qu'il y a de nombreuses façons de les construire. Plusieurs ont déjà été construits sans problème. La clé, c'est de savoir exactement quelles exigences ils doivent respecter, s'ils sont installés par exemple dans des collectivités éloignées ou nordiques, ou même, encore, dans une petite ville. Si ces exigences étaient établies dès le départ, qu'elles concernent le fonctionnement, comme vous le dites, dans les collectivités éloignées, ou encore les attentes des personnes installées à proximité d'un réacteur, les concepteurs pourront plus rapidement terminer leur travail.
    Il s'agit là, seulement, de deux façons de répondre.
    Pour en revenir à vous, monsieur Harvel, vous avez dit qu'il nous fallait déterminer notre cible et choisir soit un réacteur à eau supercritique, soit un petit réacteur modulaire. Vos commentaires me laissent croire que vous seriez en faveur des petits réacteurs modulaires. Vous avez dit qu'il en existait 30 sortes. J'aimerais avoir votre opinion: Y en a-t-il un modèle que nous devrions favoriser?
    En tant que professeur, je dirais que tous les modèles sont fascinants; et j'aurais aimé qu'ils soient tous financés, mais cela est impossible.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Glenn Harvel: La technologie des RESC ne devrait pas accaparer un financement trop élevé, car il s'agit encore d'une technologie qui nous amène dans 15 ou 20 ans d'ici, étant donné tout ce qui se passe. Le débat sur la façon de faire fonctionner cet appareil est toujours très animé.
    En ce qui concerne les PRM, actuellement, je favoriserais probablement la technologie de Terrestrial Energy, car elle a une forte composante canadienne, qu'elle est très intéressante et qu'elle est unique; autrement, je collaborerais avec les concepteurs de petits réacteurs modulaires intégraux, comme NuScale ou avec une entreprise du même type, et je ne m'occuperais que de ce dossier-là.
    L'avantage du modèle de NuScale, c'est qu'il s'appuie beaucoup sur les technologies des sous-marins, et nous savons que, à cette échelle, cela devrait fonctionner. Les sels fondus représentent un risque un peu plus grand, mais aussi un potentiel bien plus intéressant pour les droits de propriété intellectuelle au Canada.
    Vous avez parlé d'autres choses; vous avez parlé de l'amélioration du réacteur CANDU et du fait qu'il fallait le rendre plus sûr et moins coûteux et qu'il fallait trouver le moyen de le construire plus rapidement. Vous avez parlé un peu de la façon dont on pourrait en réduire les coûts. Pourriez-vous tous les deux expliquer comment nous pourrions les rendre plus sûrs et en accélérer la construction?
(0925)
    Tout cela concerne notre travail quotidien. Si nous devons y aller pour changer le joint d'étanchéité d'une pompe, par exemple, ou pour changer un tube de force ou quelque autre composante... c'est le travail d'entretien. La façon de faire ces travaux d'entretien, aujourd'hui, exige encore beaucoup de temps. Il faudrait faire de la recherche et du développement et trouver des moyens de travailler plus rapidement, en utilisant des machines, de penser à des réacteurs qui ne seront plus uniques en leur genre, que l'on pourra toujours reproduire, et en réduisant le temps que les gens consacrent [Difficultés techniques].
    Tous ces aspects-là auraient leur importance, dans ce cadre.
    Merci.
    J'essaie encore de comprendre ce qui diable a bien pu se passer avec le son.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Richard Cannings: Je pourrais peut-être, s'il me reste un petit peu de temps...
    Je vais vous en donner un peu plus. Vous avez deux minutes.
    Vous pourriez peut-être tous les deux parler de l'aspect de la gestion des déchets, dans le secteur nucléaire, et nous dire quelle est la situation du Canada par rapport à celle du reste du monde, et combien ces aspects vont nous coûter.
    Je vais ouvrir le bal avec quelques commentaires.
    Il me semble que le Canada a mis en oeuvre, depuis plusieurs décennies, un programme pour la gestion des déchets nucléaires les plus dangereux, c'est-à-dire le combustible nucléaire usé. Il gère ses déchets nucléaires depuis tout ce temps.
    Le Canada a adopté rapidement l'énergie nucléaire, à l'instar de certains autres pays, pendant la guerre au cours des années 1940. En conséquence, nous devons aujourd'hui nous occuper des déchets qui remontent à une époque où la documentation et l'élimination n'étaient pas vraiment au point. Cela a rendu le nettoyage difficile et compliqué à certains endroits, comme à Chalk River.
    À propos du combustible nucléaire, je crois que les ingénieurs comprennent qu'il est parfaitement compréhensible et faisable... nous savons comment entreposer des déchets en profondeur dans des dépôts situés dans une formation géologique. Au niveau technique, les données semblent indiquer que les risques pour la vie sont extrêmement faibles. Nous savons comment utiliser ce genre de dépôt. Tout repose sur l'approbation sociale, parce qu'il faut d'abord que les gens acceptent qu'il y ait un dépôt de déchets près de l'endroit où ils vivent. Selon moi, la Société de gestion des déchets nucléaires a été très prudente et réfléchie à ce chapitre; ses interactions avec les gens vont aboutir — je l'espère — à cette approbation sociale ou la renforcer. Selon moi, c'est indéniablement l'élément clé.
    Le coût de la gestion et du traitement des déchets ne représente qu'une toute petite fraction du coût de production de l'énergie nucléaire. C'est une part absolument minime du coût total de la production d'électricité, alors l'augmentation du coût total au fil des ans ne me préoccupe pas, puisque les installations nucléaires sont censées contribuer à un fonds qui servira à financer la gestion des déchets nucléaires.
    Selon moi, l'approbation sociale demeure l'élément clé.
    Merci, monsieur Hopwood.
    Merci, monsieur Cannings.
    La parole va maintenant à Mme O'Connell pour sept minutes.
    Allez-y, je vous prie.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous deux d'être ici.
    Je vais me présenter, puisque je ne suis pas un membre régulier du Comité. Je suis députée de Pickering—Uxbridge et j'ai siégé au conseil municipal pendant 10 ans en tant que conseillère municipale, comme conseillère régionale, puis comme adjointe au maire. Tout cela a une très grande importance à mes yeux, parce que je représente la municipalité régionale de Durham où se trouvent les centrales nucléaires de Darlington et de Pickering.
    Monsieur Hopwood, vous avez effleuré un point important, mais je crois cependant, vu ce qui se passe à Pickering, que nous devons à tout prix aborder le sujet du déclassement. Sommes-nous prêts — les ingénieurs, la collectivité et nous-mêmes — au déclassement prochain de la centrale nucléaire de Pickering?
    On devrait être prêt, parce que le déclassement va se faire bientôt. C'est inévitable.
    J'ai deux choses à dire. Premièrement, l'OPG travaille déjà, incidemment, avec le Réseau d'excellence universitaire en génie nucléaire à mettre au point des techniques pour le démantèlement et le déclassement du réacteur de la centrale de Pickering. Vous voyez: elle prend des mesures proactives.
    Deuxièmement, il y a une occasion incroyable que le Canada peut saisir; voilà de nombreuses années, un ensemble de réacteurs prototypes ont été arrêtés ici au Canada. Il y a eu la Centrale expérimentale d'énergie atomique de Rolphton dans la vallée de l'Outaouais, le réacteur de Douglas Point dans le comté de Bruce et celui de Gentilly-1, près de Trois-Rivières. Tous ces réacteurs étaient des prototypes. Cela fait un certain nombre d'années depuis leur arrêt, et il a dû y avoir une décroissance de la radioactivité depuis tout ce temps. Puisqu'il s'agit de prototypes — qui sont également, je crois, la propriété du Canada —, on devrait les utiliser comme bancs d'essai afin d'acquérir de l'expérience. Le déclassement du réacteur de Pickering doit se faire en s'appuyant sur les connaissances obtenues à la suite du déclassement et du démantèlement de ces autres réacteurs. Si je ne fais pas erreur, le démantèlement de la Centrale expérimentale d'énergie atomique fait partie du mandat de la nouvelle entreprise qui exploite le centre de recherche nucléaire de Chalk River.
(0930)
    Merci. J'imagine que si vous voulez vendre le réacteur CANDU sur les marchés internationaux, vous allez devoir vendre également une méthode pour son déclassement. Le réacteur de Pickering en est un exemple parfait. Il s'agit d'un des plus vieux réacteurs au monde et, bien sûr, au Canada.
    Je suis satisfaite de voir que vous avez tous deux soulevé la question de l'approbation sociale. J'ai passé toute ma vie à Pickering et je sais ce que c'est de vivre dans une collectivité où il y a une centrale nucléaire. Je suis aussi au courant de la façon dont les choses ont changé au fil des ans. Quand j'étais à l'école primaire, il y avait des exercices d'urgence en cas d'accident nucléaire. Cela se faisait à l'école primaire, mais pas à l'école secondaire, parce que j'imagine qu'il faut se débrouiller seul à l'école secondaire. Récemment, on a distribué des cachets d'iodure de potassium, à la suite d'une motion régionale que nous avions proposée à l'époque où je siégeais au conseil. Aujourd'hui, il n'y a plus d'exercices d'urgence dans les écoles.
    L'OPG a réalisé dernièrement un sondage à Pickering. On a demandé aux gens s'ils étaient prêts en cas d'accident nucléaire; on leur a demandé ce qu'ils feraient. Les résultats sont si insatisfaisants que c'en est effrayant. Les gens ne savent pas où aller chercher leurs enfants, où se rendre, quoi faire ni de combien de temps ils disposent, quelles routes prendre, etc.
    Selon vous, vos établissements devraient-ils jouer un rôle... je sais que vos efforts sont axés sur le génie et sur la science, mais, par rapport à l'approbation sociale, il me semble que tout est compartimenté. Vous vous occupez de la science, quelqu'un d'autre est chargé de la planification des mesures d'urgence, et une autre personne, de l'aménagement du territoire pour les installations nucléaires, y compris les terres environnantes.
    Selon vous, quels sont vos rôles en ce qui concerne la recherche de cette approbation sociale? C'est quelque chose dont on parle. J'ai parfois l'impression qu'on évite d'aborder le sujet des plans d'urgence afin que les gens ne réfléchissent pas aux raisons pour lesquelles ils pourraient en avoir besoin. Toutefois, sans cette conversation, les gens auront probablement une mauvaise compréhension de la situation, comme vous l'avez tous les deux mentionné.
    Notre université a déjà commencé à déployer des efforts afin de régler ce problème. Nous avons commencé simplement: avec les étudiants. Nous avons organisé des tribunes et des débats afin de leur présenter la question; nous voulons susciter leur enthousiasme. Nous avons préparé un nouveau cours sur la sécurité nucléaire et nous projetons d'introduire des cours de planification des mesures d'urgence aux programmes pour les étudiants de cycle supérieur. Voilà, en partie, ce que nous avons été en mesure de faire.
    Aussi, notre université est entièrement disposée à accueillir tout autre type de tribunes ou de réunions de discussions organisées par l'OPG, la Commission canadienne de sûreté nucléaire ou le gouvernement. Nous l'avons même déjà fait: la CCSN est venue organiser une séance sur le fondement du rôle des organismes de réglementation. Donc, nous faisons déjà ce que nous pouvons à ce chapitre.
    À présent, le milieu universitaire doit recommencer à déployer des efforts afin de sensibiliser directement le public. Cela doit se faire dans les salles de cours et par l'intermédiaire de groupes communautaires locaux. Je crois que le milieu universitaire peut remplir ce rôle.
    Merci.
    Dans ma dernière question, j'avais survolé le sujet de l'aménagement du territoire. Je trouve que c'est une question intéressante qui ne reçoit pas assez d'attention. Pourriez-vous nous en parler, même juste un peu?
    À Pickering — encore —, non seulement nous avons une centrale nucléaire, mais la province a décidé que la ville devait s'agrandir, ce qui suppose d'intensifier les activités du centre-ville et d'accroître notre population. Notre centrale nucléaire se trouve tout près de notre centre-ville; quand les gens ont des préoccupations par rapport à l'agrandissement de cette partie de la ville, on justifie cela en disant « Eh bien, le réacteur va être déclassé ». Puis, le gouvernement provincial se met à dire qu'il veut prolonger son utilisation, ce à quoi on répond: « Vous venez de dire l'inverse pour justifier l'aménagement du territoire! »
    On en revient encore à ce cloisonnement, n'est-ce pas? Vous parlez d'approbation sociale et de la participation du public... J'ai siégé au conseil pendant 10 ans, et, comme je l'ai déjà dit, nous ne pouvions pas compter sur le milieu universitaire. Les scientifiques ne venaient pas témoigner devant nous. Peut-on faire quelque chose par rapport à l'aménagement du territoire, puisqu'il est impensable de construire des centrales nucléaires sans prendre en considération la façon dont la collectivité va évoluer d'ici 10, 15, 20 ou 30 ans.
(0935)
    Je suis d'accord. Vous n'avez qu'à nous inviter, et nous viendrons. Nous parlons de ce genre de choses dans mon cours lorsqu'on aborde le sujet de la conception d'une centrale nucléaire, de la façon dont elle doit être aménagée et où elle doit l'être, etc.
    L'un des points intéressants que je fais remarquer, par rapport à Pickering en particulier, c'est qu'il n'y avait pas de ville là-bas au moment où la construction de la centrale a commencé.
    C'est vrai.
    C'était une région rurale. Aujourd'hui, toute une ville a poussé autour, ce qui a créé une toute nouvelle relation entre la centrale et la ville.
    Vous avez tout à fait raison.
    C'est quelque chose qu'on enseigne aux étudiants: lorsqu'ils conçoivent quelque chose, ils doivent prendre ce genre de chose en considération et prévoir ces éventualités. Un endroit donné ne conviendra pas nécessairement pour les 150 années à venir si une collectivité va s'établir autour.
    Ce serait un plaisir de participer à une séance de n'importe quel conseil ou comité. Nous l'avons déjà fait à quelques occasions. La situation s'est améliorée au cours des dernières années, mais cela ne fait que cinq ou six ans qu'on invite le milieu universitaire à participer à la discussion.
    Merci, madame O'Connell.
    Merci, monsieur Harvel.
    Il nous reste un peu moins de 10 minutes. Il ne nous reste pas vraiment assez de temps pour une deuxième période de questions, mais si tout le monde est d'accord, nous pourrions peut-être en faire une si les questions ne dépassent pas deux ou trois minutes.
    Madame Stubbs, vous avez la parole pour deux ou trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être ici.
    J’espère que la députée de Pickering pourra participer aux prochaines séances du Comité. Vous avez soulevé certaines questions qui ne l’avaient jamais été avant. Je trouve que vous amenez une perspective intéressante dans les discussions que nous tenons ici.
    Monsieur Hopwood, je sais que vous avez soulevé plus tôt des préoccupations relativement à la capacité de recherche et développement au Canada. Vous avez aussi mentionné que l'accent été de plus en plus mis sur la commercialisation au détriment de la R-D. Je voulais donc vous inviter à approfondir le sujet : d’après vous, quels sont les principaux obstacles? Avez-vous aussi des conseils à nous fournir — outre le financement direct — sur les outils stratégiques, les mesures financières, les cadres stratégiques ou les approches dont le gouvernement pourrait tirer parti pour ce processus. Je vous serais reconnaissante de répondre tous deux à cette question.
    Bien sûr. C'est un sujet qui me tient à coeur, mais je vais essayer de répondre rapidement.
    Au Canada, il y a eu beaucoup de R-D qui n’a pas toujours abouti à des résultats utilisables pour l’aménagement de nouvelles centrales électriques et pour de nouvelles recherches. La R-D est une aventure imprévisible. Pour nous — peut-être parce que nous venons tous deux du milieu universitaire et que nous voyons les choses d'une autre façon —, il semble raisonnable de commencer modestement lorsqu'il y a un grand nombre de variables inconnues et d'explorer les différentes possibilités de R-D. Il faut développer le programme de l’intérieur vers l’extérieur, et ne pas commencer d’emblée avec un projet immense.
    Pour la R-D dans le domaine nucléaire, le Canada va devoir affronter le fait qu'il ne peut pas tout faire tout seul. Il serait absolument insensé pour une puissance moyenne comme le Canada d'essayer de reproduire la réussite incroyable du réacteur CANDU. Nous avons réussi cela par nous-mêmes, mais je ne crois pas que ce serait possible aujourd'hui.
    Glenn a mentionné qu'il existait 30 types de PRM. Aucun n'est propre au Canada, mais tous présentent un intérêt certain pour le pays et sur la scène internationale. Je recommanderais donc fortement au Canada — en tant que pays qui participe à l'industrie — d'établir des partenariats avec les organisations et organismes internationaux à l'étranger afin d'établir des liens de collaboration et de coopération et ainsi participer à leurs activités. De cette façon, nous pourrons multiplier de manière importante les connaissances que nous obtenons de la R-D. Voilà, par exemple, comment on pourrait faire avancer les choses.
    Je veux reprendre les commentaires de Glenn sur le fait qu'il faut choisir, à un moment donné, d'axer les efforts sur un seul produit, même si ce n'est pas le meilleur. On se rappelle tous de l'histoire de la guerre des vidéocassettes; les cassettes Betamax étaient supérieures, mais ce n'est pas le format que le grand public a choisi. Ce n'est pas une mauvaise chose. Parfois, il faut choisir quelque chose qui fonctionne et continuer d'avancer. Je ne crois pas qu'attendre de trouver la meilleure solution possible est nécessairement la bonne chose à faire.
(0940)
    Merci, monsieur Hopwood.
    La parole va à M. Serré pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leurs exposés.
    J'ai deux questions à poser dans le peu de temps qui m'a été accordé. D'abord, pourriez-vous fournir au greffier davantage de données ou alors des recommandations à propos de ce que vous avez mentionné quant à la « voie à suivre » en matière de R-D? J'aime cette expression, une « voie à suivre ». Je suis d'accord avec vous: on devrait se décider d'utiliser soit un réacteur à eau sous pression, soit un petit réacteur modulaire. Nous vous saurions gré de fournir de plus amples renseignements au greffier afin que nous puissions les intégrer à notre rapport.
    Ensuite, j'ai une question à poser par rapport aux Autochtones. J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet. Nous avons de très bonnes ententes sur les répercussions et les avantages pour ce qui est de l'exploitation de l'uranium. Nous jouissons aussi d'une bonne relation avec les Autochtones, mais lorsqu'il est question d'approbation sociale... M. Strahl a mentionné plus tôt que Les Simpson a fait l'éducation du public. J'imagine qu'il y a des collectivités autochtones qui n'écoutent pas Les Simpson, et c'est peut-être une bonne chose.
    Mis à part ce qui concerne les mines d'uranium, qu'est-ce que l'industrie nucléaire a fait jusqu'ici afin de faire participer les collectivités des Premières Nations à l'industrie nucléaire, et que devrait-elle faire dans l'avenir?
    La seule chose qui me vient à l'esprit est la fois où un groupe d'exploitation minière a voulu installer un petit réacteur modulaire dans l'Arctique afin de soutenir son exploitation minière. Le groupe avait communiqué avec les collectivités autochtones dans le Nord, mais la réaction avait été plutôt tiède. Les Autochtones voyaient d'un bon oeil le fait qu'ils n'auraient pas à payer 20 $ le litre de diesel, mais le nucléaire les préoccupait beaucoup. Nous n'avons pas eu l'occasion de faire le suivi ni de tenir une bonne discussion à propos des risques.
    Une des choses que l'on peut faire... Un de mes collègues, Dan Meneley, étudie l'idée proposée par les forces armées américaines d'utiliser, d'une façon ou d'une autre, l'énergie nucléaire pour produire du combustible, par exemple du carburant d'aviation et du kérosène. Ce serait faisable dans le Nord en utilisant un PRM, et ensuite, on pourrait s'en servir pour approvisionner les collectivités autochtones. L'entreprise pourrait même être administrée par des groupes autochtones. C'est une possibilité intéressante pour eux, mais cela suppose un peu plus de recherche et développement. C'est tout ce que j'ai à dire.
    Très rapidement, j'ai un commentaire à faire à propos de la SGDN. En Ontario, elle est très active auprès des collectivités autochtones pour ce qui est du choix de l'emplacement des dépôts de déchets. J'ai assisté à des discussions et à des débats qui, selon moi, ont été très constructifs. Je ne sais pas si l'objectif sera atteint, mais, au moins, l'industrie leur témoigne du respect et reconnaît que c'est elle qui doit aller vers eux.
    Merci, monsieur Hopwood.
    Nous allons terminer avec M. Cannings. Vous avez deux ou trois minutes, s'il vous plaît.
    Très brièvement, j’aimerais vous demander à tous les deux… Peut-être que ma question va au-delà des activités du milieu universitaire, mais vu les importants coûts initiaux liés à la production d’énergie nucléaire et la baisse des coûts dans d’autres secteurs liés à l’énergie renouvelable, je me demandais si vous aviez des commentaires à formuler à propos des difficultés qui pèsent sur l’industrie nucléaire lorsqu’elle veut s'implanter dans une nouvelle province. Par exemple, l’Ontario semble l'avoir acceptée, mais d’autres provinces ont choisi des voies différentes. Ce choix repose, dans une grande mesure, sur les coûts. Pouvez-vous vous exprimer là-dessus?
    Compte tenu des efforts pour réduire graduellement l’utilisation du charbon, je crois qu'il n'y a pas de meilleur moment. Je crois, surtout, que les coûts seuls n'offrent pas un portrait complet de la situation. L’énergie nucléaire est utilisée pour l’alimentation de base en électricité. On en tire pleinement parti lorsque les centrales fonctionnent à plein rendement, 24 heures sur 24. L’énergie nucléaire fournit de façon continue et très fiable l’électricité qui alimente la pièce dans laquelle nous sommes. D’autres sources d’énergie qui ne produisent pas de gaz à effet de serre — par exemple l’énergie éolienne ou l’énergie solaire — sont intermittentes. Elles fournissent de l’énergie très précieuse, mais leurs caractéristiques sont très différentes pour ce qui est de l’alimentation de base.
    Les organismes indépendants —par exemple l'Agence internationale de l'énergie — affirment qu'il faut utiliser les deux sources d'énergie, qu'il ne faut pas recourir seulement à l'une ou l'autre.
    J’ai grandi à l’époque où la planification centralisée pour l’approvisionnement en électricité était la norme. Les gens essayaient de trouver un équilibre entre les différentes sources d’alimentation électrique parce qu’il s’agissait du système le plus fiable. Nous avons délaissé cette approche pour nombre de raisons valables, mais l'idée demeure que nous avons besoin de plus d’une source d’alimentation électrique. Par conséquent, je crois qu’il vaudrait la peine que l’industrie nucléaire et la Saskatchewan, l’Alberta et même la Nouvelle-Écosse discutent ou débattent de cette question.
(0945)
    Merci, monsieur Hopwood. Je suis désolé de devoir vous interrompre, mais notre temps est écoulé.
    Merci beaucoup à M. Harvel et à M. Hopwood d'être venus ici aujourd'hui. Vos témoignages ont été très instructifs.
    Nous allons prendre une pause de deux minutes, le temps que nos prochains témoins s'installent, puis nous allons reprendre avec notre deuxième groupe de témoins.
(0945)

(0950)
    Merci, tout le monde, d'être ici aujourd'hui.
    Il semble que notre liste de témoins va changer un peu. M. Heysel a pris un peu de retard avec son vol, mais nous avons avec nous Andrea Armstrong et Karin Stephenson de l'Université McMaster. Nous accueillons aussi Jean Koclas de l'École Polytechnique de Montréal et Éric Turcotte, par vidéoconférence, de l'Université de Sherbrooke.
    Merci d'être venus témoigner. Chaque témoin dispose de 10 minutes pour présenter son exposé, puis nous passerons aux questions du Comité.
    Les témoins de l'Université McMaster passeront en dernier, au cas où M. Heysel arriverait à temps.
    Pourquoi ne pas commencer avec M. Turcotte? Vous avez 10 minutes, s'il vous plaît.

[Français]

     Bonjour, à tous et à toutes. Je vous remercie beaucoup de l'invitation à comparaître devant le Comité.
    Je suis ici comme représentant de médecins spécialistes en médecine nucléaire. Je suis professeur agrégé de médecine nucléaire à l'Université de Sherbrooke. Je suis aussi chef clinique du Centre d'imagerie moléculaire de Sherbrooke. Enfin, je suis détenteur d'une licence de fabrication d'isotopes médicaux de recherche ainsi qu'une licence de fabrication d'isotopes privés. Bref, je suis à la fois professeur en médecine nucléaire, utilisateur et producteur d'isotopes médicaux. Je travaille à toutes les étapes de la chaîne d'utilisation de ces fameux isotopes.
    En 2009, j'ai été membre du Groupe d'experts sur la production d'isotopes médicaux formé à la demande de la ministre Raitt du gouvernement canadien. Ce groupe s'est penché sur les plans de développement des isotopes en territoire canadien. Je fais partie également d'un groupe de recherche sur l'utilisation des cyclotrons comme moyen de remplacement des réacteurs nucléaires dans la production du technétium.
    Entre 2009 et aujourd'hui, soit depuis ma dernière comparution en comité parlementaire, il s'est passé plusieurs événements. J'aimerais les résumer très rapidement pour établir le contexte.
    De 2009 à 2016, le réacteur national de recherche universel, ou NRU, a repris ses activités, au grand soulagement de tous. Sa présence a permis de mettre fin à la crise des isotopes que nous avons vécue en 2009. Par la suite, plusieurs comités internationaux ont été formés pour gérer l'approvisionnement. Ces comités ont fait un excellent travail pour unifier la production et les chaînes d'approvisionnement ainsi que pour s'assurer que les pénuries n'arrivent pas dans le futur.
    Des modifications lentes des réacteurs nucléaires ont été menées. Rappelons-nous que les réacteurs doivent changer de l'uranium hautement enrichi en uranium faiblement enrichi. Pour certains réacteurs, le changement a déjà été fait. Ce sera à faire pour d'autres étant donné que l'uranium hautement enrichi ne sera plus fourni par les États-Unis.
    Le gouvernement canadien a fait des investissements dans l'élaboration de solutions de remplacement pour la production d'isotopes médicaux sans l'utilisation de réacteurs nucléaires. Parmi ces solutions, il y a des projets menés avec les accélérateurs linéaires et les cyclotrons. Je prévois que ces technologies devraient devenir opérationnelles d'ici le printemps et l'été 2018.
    Je tiens à rappeler également qu'il s'est produit beaucoup de choses parmi les fournisseurs d'isotopes en territoire canadien. Les radiopharmacies de Lantheus Medical Imaging ont été vendus à Isologic. Ce dernier forme maintenant le groupe principal en approvisionnement des isotopes en territoire canadien. Aussi, nous avons assisté à la fermeture du réacteur NRU en octobre 2016. Il devra demeurer en dormance jusqu'en mars 2018.
    Je parlerai en mon nom, et probablement au nom de plusieurs personnes du domaine médical, en ce qui a trait aux aspects médicaux. Nous ne prévoyons pas de manque d'isotopes médicaux à court terme étant donné la coordination frappante et organisée des différents réacteurs nucléaires à travers le monde. Malheureusement, cela ne nous met aucunement à l'abri d'un bris majeur. Un tel bris pourrait survenir n'importe quand et déstabiliserait la chaîne d'approvisionnement.
    En ce qui à trait au Canada, je voudrais mettre l'accent sur une réalité. Même si nous pensons que l'approvisionnement devrait rester stable, nous nous dirigeons vers un autre problème, soit celui des coûts d'approvisionnement et d'utilisation des isotopes. En raison de la fermeture du réacteur NRU, les isotopes ne sont plus en abondance. Quelques réacteurs nucléaires font la production mondiale, ce qui fait qu'il n'y a plus tellement de surplus. De plus, les réacteurs qui étaient hautement subventionnés, comme le NRU, se retirent du marché. Cela fait en sorte que la voie est maintenant beaucoup plus libre pour que les plus petits réacteurs recouvrent les coûts complets de la fabrication des isotopes afin d'être rentables Nous prévoyons vraiment une augmentation de coûts liés à cela.
    Il faut ajouter la baisse de l'efficacité de production de l'uranium faiblement enrichi, c'est-à-dire que cette technologie engendre des coûts supplémentaires. De plus, le retrait des distributeurs canadiens, à la suite de la formation de mégagroupes, pourrait grandement favoriser l'apparition de monopoles en approvisionnement d'isotopes au Canada.
    Nous observons donc que tous les ingrédients sont présents pour faire augmenter le coût de l'isotope en territoire canadien. Certains pourraient avancer une augmentation des coûts de 10 ou 20 $ par patient. Sur une base individuelle, ces dix ou vingt dollars peuvent paraître anodins, mais lorsqu'on les multiplie par les centaines de milliers de procédures faites annuellement, ces dollars se transforment en millions. Le système de santé du Canada ne peut pas absorber une augmentation aussi rapide.
    Je vous laisse la parole.
(0955)

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    La parole va maintenant à M. Koclas pour 10 minutes.
    Je vais commencer mon exposé.
    Présentement, je suis professeur de génie nucléaire à l'École Polytechnique de Montréal. J'y ai passé presque 25 ans . Avant, j'ai travaillé pendant 10 ans à Hydro-Québec où j'étais chargé de l'analyse de la sécurité nucléaire et de l'analyse du système de conduite d'un réacteur, et avant cela, j'ai travaillé pendant presque deux ans pour EACL aux laboratoires nucléaires de Chalk River. Vous comprendrez que j'ai donc une bonne compréhension de ce qui se passe dans l'industrie.
    Au Canada, l’industrie nucléaire est très étendue et très complexe. On croit que tout se résume aux réacteurs, mais il y a aussi un grand nombre d’entreprises qui fournissent des services et des biens de très haute qualité adaptés aux exigences précises de l’industrie. Au Canada, cette industrie a toujours reposé sur le système CANDU, et le réacteur CANDU est particulièrement compliqué.
(1000)
    Vous pouvez poser la question à quiconque dans une centrale CANDU: si on compare une centrale CANDU aux autres types de centrales viables commercialement, n'importe où dans le monde, la réponse est toujours la même, soit que le réacteur CANDU est un réacteur compliqué. Il comprend un grand nombre de systèmes et de sous-systèmes, plus que n’importe quelle autre centrale. Cette complexité fait que nous devons nous appuyer sur de la R-D à la fine pointe — et ce, à beaucoup de niveaux — si nous voulons que les centrales CANDU demeurent compétitives à l’échelle mondiale.
    À propos des laboratoires nucléaires de Chalk River, je nourris de grandes préoccupations à propos de l'avenir de notre industrie à cause de la possibilité que le réacteur national de recherche universel soit arrêté à court terme, sans qu'un réacteur équivalent prenne la relève pour les recherches ciblées. Contrairement aux autres réacteurs dans le monde, les réacteurs CANDU doivent être remis à neuf ou retubés après 20 à 25 ans d'utilisation. Cela veut dire que ce genre de réacteurs doit être arrêté pendant une année ou deux — parfois trois — afin que l'on puisse effectuer des travaux de remise à neuf et remplacer les tubes de force.
    Ce n'est pas la même chose avec les autres technologies. Voilà la première différence. Une autre différence concerne le développement du combustible lui-même. La seule façon d'étudier adéquatement les matériaux de pointe qui seront utilisés pour le réacteur CANDU dans l'avenir est de trouver un endroit où il y a un réacteur avec un flux élevé de neutrons qui fonctionne à haut rendement. Il ne faut pas voir trop petit; il nous faut une surface de coeur très grande où les conditions d'une centrale nucléaire peuvent être reproduites. Nous avons besoin de ce genre d'installation pour la recherche.
    Il faut aussi un réacteur de recherche assez grand pour recevoir le combustible produit par les réacteurs CANDU. Puisqu'il n'y a pas de réacteur de recherche assez grand dans notre pays, nous sommes obligés d'envoyer les conceptions de combustible à l'étranger. Il est toutefois évident que les installations dans les autres pays ne sont pas en mesure de fournir assez de combustible pour toute la grappe de combustible d'un réacteur CANDU. Ils peuvent seulement en fournir une petite partie.
    À moyen et à long terme, cela veut dire que la méthode canadienne pour les centrales nucléaires va simplement disparaître de la scène internationale. Nous ne serons pas capables de passer à la troisième génération de réacteurs — nous en sommes à la deuxième génération actuellement — et encore moins à la quatrième.
    Je vous implore donc de fournir au Canada un remplacement pour le réacteur NRU. Autrement, laissez-nous au moins l'utiliser un peu plus longtemps. Je crois qu'il ne s'agit que d'une contrainte administrative, et non uniquement d'une contrainte au niveau technique en raison de la durée de vie du réacteur NRU.
    C'est un sujet qui me tient à coeur. Je crois que les laboratoires nucléaires de Chalk River vont continuer leur bon travail, et ce, dans un grand nombre de domaines. Prenez les « laboratoires »; c'est au pluriel. Cela veut clairement dire qu'il y a beaucoup de laboratoires dans l'installation de Chalk River. Cette installation est cruciale pour le Canada si nous voulons garder le système CANDU en vie. Nous devrions déployer tous les efforts possibles, non seulement au Canada, mais aussi à l'étranger, afin de garder le réacteur NRU en service ou alors de le remplacer.
    C'était mon premier point. Mon deuxième point est que les gens doivent être au courant de la fragilité du système. Au Québec, nous avions un réacteur CANDU qui fonctionnait à plein rendement. Le réacteur allait être remis à neuf, mais le gouvernement du Québec, d'un seul coup de stylo, a fermé toute la centrale. Nous n'avons plus de centrale nucléaire au Québec aujourd'hui.
(1005)
    Je ne dis pas cela parce que je suis contrarié. Je veux simplement que les gens comprennent que les différences de plus en plus grandes entre les coûts liés à la production d'énergie nucléaire et d'autres sources d'énergie douce ou plus facile à produire — par exemple, les coûts associés au gaz de schiste sont très bas — rendent difficile de maintenir l'industrie nucléaire à flot, que ce soit ici ou à l'étranger.
    Excusez-moi, monsieur Koclas. Merci beaucoup. Nous devons passer à nos prochains témoins. Peut-être pourriez-vous en dire plus pendant la période de questions.
    Je vois que M. Heysel est arrivé.
    Je vous remercie d'être venu. Vous arrivez juste au bon moment. Vous avez 10 minutes pour votre exposé.
    Je souhaite bonjour au président et aux membres du Comité. Je m'appelle Chris Heysel. Je suis directeur, Activités et installations nucléaires à l'Université McMaster.
    J'aimerais commencer en remerciant le Comité de me donner l'occasion de témoigner ici ce matin.
    Avant d'être à l'Université McMaster, j'ai passé 14 ans au réacteur national de recherche universel — ou NRU —, à Chalk River, où j'étais directeur de l'ingénierie.
    L'Université McMaster est un établissement de taille moyenne établi à Hamilton, en Ontario. Nous sommes très axés sur la recherche. L'établissement comprend un très grand nombre d'installations de recherche nucléaire, y compris le réacteur nucléaire McMaster, un réacteur de recherche de cinq mégawatts. Une fois que le réacteur national de recherche universel sera arrêté pour de bon en mars 2018, le réacteur nucléaire McMaster sera le réacteur de recherche le plus puissant au Canada.
    L'importance des réacteurs nucléaires de recherche vient de leur production de neutrons. Les neutrons sont importants parce qu'ils sont utilisés par des centaines de chercheurs canadiens qui tentent de résoudre des problèmes de recherche dans les cinq domaines prioritaires du Canada en matière de sciences et de technologie. Les neutrons sont utilisés dans la recherche environnementale et agricole afin d'accroître les connaissances canadiennes sur la façon dont les plantes se nourrissent, l'objectif étant d'assurer la sécurité alimentaire à l'échelle mondiale à l'époque des changements climatiques. Les neutrons sont également utilisés pour l'analyse de la circulation des polluants dans les écosystèmes et pour comprendre les impacts de ces polluants sur les lacs, les cours d'eau et la vie aquatique au Canada. Les chercheurs utilisent aussi les neutrons pour examiner les effets de l'exposition aux radiations sur les cellules.
    Dans les secteurs des ressources naturelles et de l’énergie, les neutrons sont utilisés pour déterminer l’emplacement des gisements de ressources, y compris l’or et l’uranium, et ils sont aussi utilisés pour établir la composition et l’âge géologique des masses terrestres du Canada. D’ailleurs, au réacteur nucléaire McMaster, on procède chaque année à des dizaines de milliers de dosages pour soutenir l’industrie minière canadienne. En outre, les neutrons sont utilisés dans le secteur pétrolier et gazier pour les jauges nucléaires des canalisations et des puits souterrains ainsi que pour détecter les fuites dans ces systèmes. Les technologies émergentes liées aux petits réacteurs modulaires ont également un potentiel immense: on peut les utiliser pour alimenter l’équipement servant à l’exploitation des ressources dans des endroits éloignés ainsi que pour fournir de l’énergie à nos collectivités loin dans le nord du Canada.
    Dans le secteur de la santé et des sciences biologiques, le Canada est fier d’utiliser depuis longtemps les isotopes médicaux produits à partir de neutrons pour diagnostiquer et traiter les maladies. D’un bout à l’autre du Canada, les études se poursuivent sur de nouveaux isotopes médicaux et les nouveaux médicaments qui les utilisent. Les chercheurs à l’Université McMaster sont également en train de mettre au point des techniques neutroniques pour diagnostiquer les cas d’empoisonnement aux métaux lourds chez les travailleurs qui y sont exposés.
    Les neutrons sont tout particulièrement importants dans la recherche liée à la science des matériaux à cause de leur capacité de pénétrer en profondeur dans les matériaux et ainsi de fournir de l'information à propos de la structure atomique interne de la matière. Cela est indispensable dans l'élaboration de matériaux de pointe pour les technologies énergétiques propres, les machines à haut rendement et le matériel pour la technologie de l'information.
    Les neutrons sont aussi couramment utilisés dans l'industrie aérospatiale pour détecter les défauts dans une pièce et ainsi veiller à la sécurité des transports aériens au Canada. Les chercheurs étudient également les effets du rayonnement cosmique sur les pièces de composantes aérospatiales afin de mettre au point la nouvelle génération de satellites, de télescopes spatiaux et de sondes spatiales interplanétaires.
    Les neutrons ont une importance, tout comme les réacteurs de recherche, et il est de la plus haute importance de conserver — après 2018 — le petit parc de réacteurs de recherche qui se trouvent au Canada, ce qui comprend plusieurs réacteurs SLOWPOKE et le réacteur nucléaire McMaster, qui est beaucoup plus puissant. Sans ces réacteurs de recherche pour nous alimenter en neutrons, il sera impossible de continuer toutes les recherches que j'ai mentionnées.
    Le réacteur nucléaire McMaster joue aussi un rôle important en éducation, en particulier dans notre programme d'approche. Chaque année, des milliers d'élèves du secondaire, d'étudiants de niveau universitaire, de jeunes des camps scientifiques et des membres du grand public visitent le réacteur nucléaire McMaster pour s'informer à propos de l'énergie nucléaire et de la recherche nucléaire au Canada.
(1010)
    McMaster possède un ensemble étendu d'installations nucléaires qui s'ajoutent à son réacteur de recherche, y compris un laboratoire nucléaire de 24 000 pieds carrés et un nouveau cyclotron qui produit l'isotope médical fluor-18, qui est utilisé pour diagnostiquer le cancer.
    Notre nouvel ensemble de cellules chaudes d'examen post-irradiatoire de taille industrielle permet aux chercheurs de manipuler et de mettre à l'essai en toute sécurité des matières hautement radioactives, comme des composants venant des centrales nucléaires du Canada. Cela permet aux scientifiques de veiller à la sécurité du parc de centrales nucléaires existant au Canada tout en élaborant les matériaux appropriés qui seront utilisés dans les technologies de la prochaine génération. Notre ensemble étendu d'installations, d'infrastructures, de compétences et d'équipement dans le domaine du nucléaire a valu à McMaster le titre d'université canadienne par excellence à ce chapitre.
    J'aimerais répondre plus précisément aux questions posées par le Comité. Le principal défi auquel fait face le développement de l'énergie nucléaire au Canada est la mise hors service imminente du réacteur NRU,alors qu'il n'existe aucun plan clair visant à relocaliser la recherche essentielle qui se fait à cette installation. Le réacteur nucléaire McMaster est la seule installation au Canada capable de soutenir ces travaux. Nous travaillons en vue d'élargir notre capacité à recevoir les chercheurs du réacteur NRU, mais nous ne pouvons le faire sans aide.
    Le réacteur nucléaire McMaster est le seul réacteur de recherche autofinancé au monde. Il ne touche aucun financement de l'université ni du gouvernement fédéral ou provincial. Nous avons tenté d'assurer le financement de l'expansion de notre capacité de recherche à l'aide du programme d'initiatives scientifiques majeures de la Fondation canadienne pour l'innovation. Toutefois, le comité des initiatives scientifiques majeures a jugé qu'il n'était même pas en mesure d'examiner notre demande au motif que les activités de recherche neutroniques demeurent une responsabilité du gouvernement fédéral par l'entremise de RNCan.
    L'avenir de la recherche, du développement et de la technologie nucléaires au Canada est très précaire. Quand le réacteur NRU sera mis hors service, une communauté d'environ 250 chercheurs canadiens qui travaillent sur les faisceaux de neutrons devront mener leurs recherches ailleurs. Ces scientifiques pourraient bien s'installer dans des pays étrangers pour avoir accès à des sources de neutrons ou changer complètement de domaine de recherche.
    Les industries canadiennes qui dépendent de cette recherche, y compris la fabrication de pointe et les sciences médicales, sont aussi compromises. Au réacteur nucléaire McMaster, nous travaillons dans le but d'accroître notre capacité à soutenir les chercheurs de sources de neutrons au Canada et les chercheurs qui les utilisent et de réduire au minimum l'impact de la mise hors service du réacteur NRU, mais nous avons besoin de votre aide.
    Le Canada est l'un des premiers pays du monde en matière de recherche nucléaire, comme il a été mentionné plus tôt. Le Canada est également un chef de file mondial en production d'isotopes médicaux. Le réacteur NRU fournit actuellement une dizaine d'isotopes médicaux différents au monde. En effet, le réacteur de recherche de l'Université McMaster est le plus grand fournisseur mondial de l'isotope médical iode-125, qui est utilisé pour traiter le cancer de la prostate. Nos employés sont fiers de produire des traitements contre le cancer pour plus de 200 pères par jour. L'équipe de recherche et de développement du réacteur nucléaire McMaster travaille avec des chercheurs des quatre coins du Canada pour créer de nouveaux isotopes médicaux et de nouvelles technologies. Nous travaillons également au renforcement de notre capacité de produire un grand nombre des isotopes médicaux qui sont maintenant produits par le réacteur NRU.
    Pour conclure, la recherche neutronique au Canada risque de faire face à d'énormes perturbations en 2018. Le réacteur nucléaire McMaster joue déjà un grand rôle dans la recherche neutronique au Canada, et ce rôle ne fera que prendre de l'importance avec le temps, particulièrement si une mise à niveau du coeur du réacteur est envisagée comme solution à long terme à la pénurie imminente de neutrons.
    Nous sommes enthousiastes d'avoir la possibilité et le privilège de travailler avec certains scientifiques et ingénieurs de renom du Canada dont les recherches permettront de respecter les priorités du Canada en matière de science et de technologie et d'améliorer la santé, l'environnement et le niveau de vie de tous les Canadiens.
(1015)
    Merci beaucoup de votre temps et de votre attention. C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Heysel. J'apprécie votre exposé.
    À titre de rappel, vous pouvez écouter l'interprète à l'aide des casques d'écoute à votre droite, au-dessous de votre bureau ou sur votre bureau, si vous en avez besoin.
    Nous allons maintenant poursuivre avec M. Lemieux.

[Français]

     Monsieur Lemieux, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos trois témoins pour leurs excellentes présentations qui ont été très intéressantes.
    Ma première question s'adresse au Dr Turcotte.
     Vous êtes le chef de la recherche clinique du Centre d’imagerie moléculaire de Sherbrooke, un des centres de recherche les plus reconnus au Canada en matière de tomographie d'émission par positrons. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce centre de recherche et sur les travaux que vous y menez?
    J'apprécie énormément votre question. Nos travaux se situent à plusieurs niveaux. Le Centre d’imagerie moléculaire de Sherbrooke a été formé en 1998, avec l'installation d'un cyclotron, un appareil qui fonctionne à l'électricité et qui permet de fabriquer des isotopes de recherche.
    Par la suite, le Centre a beaucoup grandi grâce à l'embauche de radiophysiciens et de radiochimistes, toute l'équipe nécessaire pour fabriquer des isotopes. Le Centre a donc pris un tournant, allant de la recherche à l'utilisation clinique. Les isotopes qu'on utilise chez l'animal pour les besoins de recherche scientifique vont également être utilisés chez l'humain pour des fins de diagnostic.
     Notre centre combine deux appareils de fabrication d'isotopes. Nous utilisons deux cyclotrons qui nous donnent une vaste gamme d'isotopes. Nous avons des appareils pour effectuer de l'imagerie à la fois chez le modèle animal et chez le modèle humain. Ce sont les appareils de tomographie d'émission par positrons.
     Nous avons également des appareils par résonance magnétique et d'autres hautes technologies qui nous permettent d'effectuer de l'imagerie.
     Il s'agit d'un laboratoire unique qui permet de partir d'un isotope — quelque chose de radioactif — et de l'appliquer à une maladie.
(1020)
    Le gouvernement canadien pourrait-il faire davantage pour appuyer votre centre de recherche?
    Le gouvernement a été beaucoup impliqué entre 2009 et aujourd'hui en matière de financement des programmes d'utilisation des accélérateurs pour fabriquer des isotopes. Le Centre de Sherbrooke a déjà été financé par le gouvernement canadien à deux reprises pour trouver une façon de produire du technétium à partir des cyclotrons.
    Nous pouvons en fabriquer et nous avons le droit de l'utiliser chez l'humain, mais nous sommes encore en mode recherche. Cependant, en ce qui a trait à cette fabrication d'isotopes de technétium, nous prévoyons que, d'ici mars 2018, nous pourrions même passer en mode commercial et par conséquent approvisionner d'autres hôpitaux au Québec avec les isotopes fabriqués à Sherbrooke.
    C'est très intéressant.
    D'autres témoins ont mentionné à notre comité qu'il y avait beaucoup d'amélioration, mais marginale, dans divers secteurs de la recherche nucléaire. Ils recommandent donc au gouvernement de concentrer les travaux de recherche afin d'avoir de meilleurs résultats.
    J'aimerais entendre nos trois témoins à cet égard. Croyez-vous que le Canada est trop éparpillé dans le domaine de la recherche nucléaire?
    À notre avis, il y a éparpillement. Malheureusement, cela fait en sorte que les fonds sont dilués, ce qui ne favorise pas l'installation de très hautes technologies à un endroit particulier.
    Par contre, le fait de créer de la concurrence en plusieurs milieux nous force à nous surpasser. En fait, le Canada a même la réputation de faire beaucoup avec très peu. Cette façon d'envoyer de l'argent un peu partout dans différents groupes permet justement de garder cette forme de leadership.
     Si, dans le secteur nucléaire, on choisissait de tout concentrer à l'intérieur d'un seul centre, en un an ou un an et demi, tous les autres centres fermeraient, ce qui serait catastrophique.
    J'aimerais maintenant entendre les autres témoins répondre à cette question.
     Il m'est un peu difficile de répondre très directement à votre question.
    À Polytechnique Montréal, nous ne pouvons pas affirmer que nous couvrons l'ensemble de toutes les disciplines liées au génie nucléaire.
    Par contre, chez nous, nous avons élaboré des logiciels qui sont aujourd'hui utilisés par toute l'industrie nucléaire des CANDU, pas seulement ceux du Canada ni ceux de l'ex-centrale de Gentilly-2, mais par tous les CANDU, partout sur la planète.
    Cela s'est produit parce que nous avons concentré nos efforts et profité d'un financement assez constant. Avant que nous connaissions le succès, ces efforts se sont échelonnés sur au moins 25 sinon 30 ans de développement. Pendant ce temps, Énergie atomique du Canada essayait de concevoir un type de logiciel similaire à celui que nous avons créé.
     Toutefois, comme nos logiciels étaient déjà acceptés par le reste de l'industrie nucléaire, ce créneau que nous avons trouvé a porté ses fruits grâce à une concentration de personnes qui travaillaient toutes dans le même sens. Si quelques-uns d'entre nous avions travaillé séparément, l'un sur l'enfouissement des déchets, l'autre sur le génie civil des enceintes de confinement et l'autre sur l'approvisionnement d'uranium à long terme, nous n'aurions pas connu ce rayonnement, ce succès.
     Je pourrais vous dire que, à une échelle plus grande, il est nécessaire de se concentrer...
(1025)

[Traduction]

    Désolé, monsieur Koclas. Vos sept minutes sont écoulées. Vous aurez peut-être du temps pour continuer votre réponse lors d'une autre question.
    Nous allons maintenant écouter M. Strahl, durant sept minutes. Allez-y.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous nos témoins également.
    Nous avons entendu le groupe de témoins précédent parler de la nécessité de concentrer nos efforts de recherche et développement. Je crois que M. Lemieux vient tout juste de le mentionner dans sa question.
    Ma question s'adresse au Dr Turcotte. Il parle du cyclotron de Sherbrooke. Nous avons aussi une installation de renommée mondiale en Colombie-Britannique. Il s'agit du laboratoire TRIUMF. Nous avons entendu d'autres témoins aujourd'hui parler du besoin de remplacer le réacteur NRU, et nous avons vu qu'il existait une possibilité de le faire. Vous avez parlé de la commercialisation en 2018 de l'isotope médical technétium 99m, qui serait dans une installation non nucléaire comme la vôtre.
    Vu la rareté des ressources, quel domaine le gouvernement devrait-il financer en priorité pour l'avenir? Est-ce celui des nouvelles technologies? Avons-nous besoin des deux? Je ne m'attends pas à ce que vous soyez en mesure de dire si le gouvernement peut se le permettre, mais j'imagine que ce serait très dispendieux de maintenir les deux avec une capacité de calibre mondial.
    Pouvez-vous nous parler de votre point de vue à ce sujet d'abord? Je poursuivrai ensuite avec les témoins qui sont ici à Ottawa.

[Français]

     Merci.
    Pour ce qui est de la production des isotopes médicaux par un réacteur nucléaire, le comité d'experts médicaux qui avait été formé en 2009 et moi avons toujours jugé qu'il s'agissait là d'une mission secondaire et non principale d'un réacteur nucléaire. Je crois qu'il faut bien établir ce principe selon lequel le réacteur nucléaire est un appareil utilisé principalement pour faire de la recherche. Tout à l'heure, nous avons entendu M. Koclas et les autres témoins sur le rôle du neutron en provenance de ces réacteurs nucléaires.
     Si on cesse la production d'isotopes par des réacteurs nucléaires, il reste les autres appareils, comme les cyclotrons et les accélérateurs linéaires, qui sont utilisés de façon régulière pour fabriquer les isotopes médicaux. Il est certain qu'il s'agit d'une échelle de production tout à fait différente de celle d'un réacteur nucléaire. Prenons l'exemple d'un cyclotron. La production de technétium par cyclotron se fait à une échelle provinciale en territoire canadien. Les appareils à Sherbrooke pourraient produire au maximum 50 % de l'utilisation et du besoin d'isotopes au Québec. Pour faire la comparaison avec un réacteur nucléaire, on utilisait à cet égard un maigre 20 % du réacteur NRU à l'échelle mondiale.
    Les isotopes médicaux peuvent prendre le tournant de ces nouvelles technologies moins coûteuses et en demande. Si nous en avons besoin une journée, nous n'avons qu'à activer les appareils pour avoir les isotopes. C'est aussi facile que cela. En comparaison, avec les réacteurs nucléaires, il faut s'y prendre deux semaines à l'avance pour produire ces fameux isotopes.
    Selon moi, le réacteur nucléaire doit être perçu comme étant un appareil appartenant à la recherche; il s'agit de sa raison principale. La production d'isotopes médicaux par un réacteur nucléaire est une mission secondaire. À ce propos, les accélérateurs pourraient justement aider dans ce domaine.

[Traduction]

    Merci.
    Je m'adresse aux témoins ici; monsieur Koclas et monsieur Heysel, de quels chiffres parlons-nous en ce qui concerne le remplacement du réacteur NRU? Quel serait, selon vous, le montant de l'investissement requis pour remettre à neuf ou remplacer le réacteur NRU actuel, lequel sera mis hors service?
(1030)
    Je pense que les montants peuvent varier. Tout dépend de la taille, de l'échelle et de l'utilisation prévue du réacteur.
    Il ne faut pas oublier qu'il y a plus de un isotope médical. Il y a des dizaines d'isotopes médicaux. Certains peuvent être produits dans des cyclotrons, comme ceux de Sherbrooke ou de McMaster, mais d'autres peuvent uniquement être produits dans des réacteurs nucléaires. En ce qui concerne le coût de l'énergie de remplacement, j'ai entendu dire que ça pouvait varier entre des centaines de millions de dollars et un milliard de dollars. J'ai examiné le coût qu'occasionnerait la mise à niveau du réacteur nucléaire McMaster, et la facture pourrait monter jusqu'à 200 millions de dollars. Il existe un éventail de possibilités. Tout dépend de si vous voulez la Volkswagen ou la Cadillac, j'imagine.
    Les chercheurs au Canada se sont dirigés vers les réacteurs nucléaires en raison des flux intenses de neutrons qui sont disponibles. Nous sommes là pour produire des neutrons, que ce soit pour la recherche ou pour la production d'isotopes médicaux. Nous sommes polyvalents; par conséquent, l'investissement dans ce type d'installation profite aux Canadiens à différents chapitres. Je pense que les réacteurs nucléaires, tout comme les cyclotrons, doivent faire partie de la solution pour l'avenir.
    Selon moi, nous pouvons laisser la production d'isotopes radioactifs à d'autres installations de production. Cela semble être la voie à suivre.
    Je pense qu'il coûterait environ un milliard de dollars pour concevoir et construire l'équivalent d'un réacteur NRU moderne. Un réacteur de recherche comme le NRU est essentiel, parce que si vous voulez remettre à neuf votre réacteur CANDU dans 40 ans au lieu de 20 ans, vous devez mettre à l'essai le comportement de la matière de façon accélérée dans un environnement à haut flux comme celui qu'offre le réacteur de recherche.
    Vous recevrez peu d'aide de la part de vos concurrents internationaux pour faire en sorte que votre technologie soit concurrentielle avec la leur, donc vous ne devez le faire que pour vos matières. Vous devez également étudier le comportement de votre nouveau combustible. Du point de vue strictement technologique, il est nécessaire de remplacer le réacteur NRU ou de prolonger sa durée de vie.
    Lorsque j'ai témoigné devant le Comité en 2009, j'ai dit que la vie du réacteur NRU pouvait être prolongée bien au-delà de 2010 ou 2012. Personne ne m'a cru, mais nous sommes maintenant en 2016 et nous pensons à 2018, qui est à nos portes. Je pense que la vie du réacteur pourrait être prolongée afin d'offrir les sources de neutrons dont nous avons besoin pendant ce temps.
    Merci, monsieur Koclas. Merci du temps que vous nous avez accordé.
    Monsieur Cannings, vous avez sept minutes. Allez-y.
    Merci.
    Je remercie tous les témoins de leur présence et de leur exposé.
    J'aimerais m'adresser d'abord au Dr Turcotte.
    Vous avez parlé des défis auxquels faisaient face le Canada et le monde à l'égard de la production d'isotopes médicaux — la hausse des coûts, la coordination requise — et des défis touchant la production advenant l'arrêt d'un réacteur. Il pourrait y avoir des pénuries. Pourriez-vous nous expliquer ce qui, selon vous, est le meilleur système ou le meilleur programme que doit adopter le Canada pour offrir un approvisionnement stable en isotopes à notre pays et, peut-être, au monde, un rôle que nous avons déjà joué?
(1035)

[Français]

     Je vais réitérer la recommandation émise en 2009 par le groupe d'experts. Elle était de construire un nouveau réacteur nucléaire en sol canadien pour remplacer le réacteur NRU. C'était la principale recommandation du rapport. Ce réacteur servirait à la recherche sur les neutrons, à l'élaboration des nouveaux réacteurs CANDU avec, comme mission secondaire, de fabriquer des isotopes médicaux. Il servirait finalement à de nombreux projets de recherche. Selon moi, le Canada a donc besoin d'un réacteur nucléaire fonctionnel pour toutes ces raisons.
    Plus précisément, en ce qui concerne les isotopes médicaux, il est certain que d'avoir un réacteur en notre sol est la garantie d'un approvisionnement et d'une notoriété mondiale en matière de fabrication d'isotopes. Cela s'ajouterait également à la participation des autres pays, et diminuerait le fardeau global de devoir produire des isotopes. Un seul pays ne devrait pas être producteur unique pour le monde entier. Mon rêve est que nous ayons un nouveau réacteur nucléaire. Dans un contexte où il n'y en aurait pas, le Canada deviendra un acheteur d'isotopes comme d'autres pays qui n'ont pas de réacteur.
    Si cela se produit, nous ne serons pas à l'abri du marché. Nous devrons suivre la disponibilité et les coûts d'obtention des isotopes, ce qui fait que le marché pourrait être fluctuant en fonction de la stabilité des réacteurs nucléaires dans le monde. La mécanique est relativement complexe quant au coût final que cela pourrait entraîner, et à ce qu'on croirait que le coût final puisse être.
    Comment les technologies de remplacement pourraient-elles s'inscrire dans cette grande chaîne d'approvisionnement? Selon moi, ces autres techniques existent pour combler les manques des réacteurs nucléaires. Par exemple, le réacteur nucléaire de Petten, aux Pays-Bas, pourrait devoir subir un entretien très prolongé et le territoire canadien se retrouverait en pénurie d'isotopes, disons de 30 %. Nous recevrions donc 30 % de moins d'isotopes.
    En ce qui concerne les accélérateurs, — comme nous l'avons entendu plus tôt — il y en a un en Colombie-Britannique, un à l'Université McMaster en Ontario et un autre à Sherbrooke. Ces accélérateurs pourraient être mis en fonction et combler le manque de 20 à 30 % des isotopes en territoire canadien. Lorsque le réacteur nucléaire de Petten reviendrait en service, la production des cyclotrons pourrait être revue à la baisse. Il pourrait donc y avoir une telle dynamique en ce qui concerne l'approvisionnement global, dans le cadre de laquelle les accélérateurs viendraient combler le manque à gagner.

[Traduction]

    Merci. Je vais m'adresser à M. Heysel.
    Pourriez-vous m'en dire plus au sujet du rôle possible de McMaster? Je sais que vous avez effleuré le sujet lors de votre exposé. Avec la mise hors service du réacteur NRU, aimeriez-vous voir McMaster prendre part à un programme nucléaire de recherche et de production d'isotopes au Canada, où McMaster pourrait collaborer avec une autre installation dotée d'un réacteur nucléaire?
    La clé de la stabilité d'une chaîne d'approvisionnement est la collaboration avec les concurrents. En effet, je pense qu'il y a deux autres producteurs à grande échelle de I-125, qui est utilisé sur toute la planète pour traiter le cancer de la prostate. Nous communiquons régulièrement avec nos concurrents pour nous assurer que, au bout du compte, le patient peut recevoir un traitement.
    En vue de l'arrêt du NRU, notre plan est d'accroître notre puissance et notre temps de fonctionnement ou, du moins, nous avons examiné cette possibilité. Cela nous permettra non seulement de produire plus d'isotopes, mais également de soutenir un certain nombre de chercheurs et d'industries qui utilisent actuellement le réacteur NRU.
    C'est une solution à moyen terme et une solution viable pour aider le Canada à traverser une période de pénurie de neutrons jusqu'à ce que nous trouvions une autre source importante de neutrons. Nous nous pencherons sur la façon de remettre à neuf notre installation en vue d'en faire une importante source de neutrons, mais cela fera l'objet d'une vaste discussion avec un certain nombre de parties concernées.
(1040)
    Monsieur Koclas, vous nous avez livré un vibrant plaidoyer en faveur du maintien en service du réacteur NRU. Je me demandais si vous pouviez poursuivre sur ce sujet et peut-être parler de l'aspect économique de l'investissement — je pense que vous avez parlé de un milliard de dollars pour garder le réacteur en service — pour les prochaines générations de réacteurs CANDU.
    Vous n'avez que 30 secondes. Je sais que c'est très peu. Peut-être que M. Serré vous accordera du temps.
    Je ne pense pas que nous ayons vraiment le choix. Tout de même, l'utilisateur final de cette technique spécialisée est l'industrie nucléaire, l'industrie énergétique des CANDU, qui est une industrie très grande et très riche, même si les gens de l'industrie prétendent qu'elle n'est pas grande ni riche.
    Je suis désolé, monsieur Koclas, mais nous sommes —...
    Cette industrie devrait fournir une partie du financement à cet égard.
    Nous sommes très serrés dans le temps.
    Monsieur Whalen, allez-vous...?
    Je vais partager mon temps avec M. Whalen.
    D'accord. Vous n'avez que trois minutes environ.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Stephenson, merci beaucoup d'être présente aujourd'hui. Nous avons entendu un témoignage intéressant de la part de M. Heysel où il disait que votre installation atteint le seuil de rentabilité grâce aux revenus générés par vos opérations commerciales. Puisque vous êtes gestionnaire des opérations commerciales, je vais vous en attribuer le mérite.
    Dans le même ordre d'idées, si le réacteur NRU était remis à neuf, que sa durée de vie était prolongée ou qu'il était remplacé, croyez-vous qu'il trouverait sa place au sein de la chaîne d'approvisionnement mondiale et qu'il pourrait générer des revenus suffisants pour répondre à sa capacité opérationnelle et être autosuffisant au même titre que celui de McMaster?
    Je crois qu'il faut investir dans la remise à neuf, mais je pense que, même lorsque nous avons rédigé notre demande au titre du programme d'initiatives scientifiques majeures du FCI, l'objectif était de devenir durable à un moment donné. Je pense qu'il y a un compromis à faire. Il faudra un certain soutien sous-jacent pour les coûts opérationnels, puisque le réacteur soutient également la communauté de chercheurs. En fin de compte, l'objectif à long terme est d'en faire une entité durable et de réinvestir dans le réacteur nucléaire McMaster.
    Voyez-vous un marché mondial auquel il pourrait prendre part pour générer ces revenus à long terme?
    Je crois que oui. Nous avons beaucoup parlé du technétium aujourd'hui, mais nous n'avons pas parlé de tous les autres isotopes médicaux qui servent à la médecine nucléaire, à la radiologie et au traitement.
    Un réacteur nucléaire permet de produire bon nombre de ces autres isotopes également. Ces marchés connaissent une croissance, et c'est probablement ce qui va aider à le maintenir à long terme.
    En ce qui concerne la pénurie de neutrons qui pourrait survenir au Canada, où le Canada pourra-t-il se procurer d'autres isotopes pour la recherche au pays si le réacteur NRU est mis hors service? Vers quels marchés devrons-nous nous tourner? De quels pays achèterons-nous les isotopes?
    Les autres grands réacteurs de recherche dans le monde se situent en Afrique du Sud, en Belgique et aux Pays-Bas. La Russie en possède un aussi. Les États-Unis font certainement la production de molybdène-90, mais pour ce qui est des autres isotopes, tous les autres pays en produisent.
    Je présume qu'un réacteur dont la durée de vie a été prolongée ou dont les possibilités sont augmentées nous permettrait de conclure des ventes sur ces marchés de même que sur nos...
    Absolument, oui.
    Merci.
    Il vous reste environ une minute ou un peu moins peut-être.
    Je vais prendre 30 secondes, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Le mandat du Comité est de se pencher sur l'innovation, les solutions durables et les possibilités économiques. Je demande aux trois témoins de fournir au greffier des recommandations précises sur ce qu'ils attendent de nous pour accroître le nombre d'emplois au Canada dans les industries nucléaires et médicales, particulièrement au chapitre des emplois bien rémunérés, vu le peu de temps que nous avons.
    Merci, monsieur le président.
(1045)
    Merci, monsieur Serré. Je m'en remets à nos témoins.
    Veuillez fournir ces renseignements au greffier si vous êtes en mesure de le faire. Merci beaucoup à tous d'avoir été présent. Encore une fois, c'était très intéressant.
    Merci à M. Whalen et à Mme O'Connell d'être venus aujourd'hui. Nous espérons vous revoir.
    Bonne fin de journée.
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