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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 089 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 13 février 2018

[Enregistrement électronique]

  (1555)  

[Traduction]

    Bon après-midi, et bienvenue à la 89e réunion du Comité permanent de la condition féminine. Aujourd'hui, le Comité siège en public.
    Nous poursuivons notre étude sur les femmes autochtones dans les systèmes juridique et correctionnel fédéraux et nous sommes ravis d'avoir avec nous aujourd'hui par vidéoconférence de Vancouver, Mme Darlene Shackelly, directrice générale de la Native Courtworker and Counselling Association of British Columbia, par vidéoconférence d'Edmonton, Mme Audra Andrews, représentante du Syndicat des employés-e-s de la Sécurité et de la Justice, et encore par vidéoconférence de Calgary, M. Lowell Carroll, gestionnaire des centres de services juridiques de Calgary, Red Deer et Siksika de Legal Aid Alberta.
    Nous avons également avec nous Mme Claudie Paul, directrice des services, et Mme Jacinthe Poulin, conseillère en santé et services sociaux, du Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec. Je suis vraiment désolée si j'ai mal prononcé certains mots.
    Je vous remercie énormément.
    Chaque groupe pourra témoigner pendant sept minutes après quoi je devrai vous arrêter, car nous manquons de temps.
    Nous allons commencer avec Mme Darlene Shackelly, pour sept minutes.
    Bonjour. Je m'appelle Darlene Shackelly et je suis directrice générale de la Native Courtworker and Counselling Association of British Columbia.
    Notre organisme a été mis sur pied en 1973 en raison du nombre élevé d'Autochtones plaidant coupable dans le système de justice pénale. Nous comptons 30 intervenants pour l'ensemble de la province de la Colombie-Britannique.
    On nous a demandé de témoigner devant le Comité parce que nous sommes non pas des intervenants du système correctionnel fédéral, mais bien des intervenants qui s'occupent de personnes qui intègrent le système de justice pénale parce qu'ils sont accusés d'avoir commis une infraction criminelle. Notre responsabilité, c'est de nous assurer qu'ils comprennent pleinement les accusations qui sont portées contre eux et qu'ils obtiennent les renvois nécessaires relativement à ces accusations.
    Nous sommes situés sur le territoire non cédé des peuples Salish de la côte, soit les nations Musqueam, Squamish et Tsleil-Waututh. C'est de là que je viens.
    Je tiens aussi à remercier notre conseil d'administration, qui m'a permis de témoigner devant vous aujourd'hui.
    Je veux vous donner quelques renseignements généraux que vous avez probablement déjà entendus maintes fois sur le traumatisme imputable aux pensionnats qui touche les femmes autochtones en établissement carcéral. Nous savons qu'un nombre élevé de femmes dans les centres sont des femmes ayant des enfants et qu'elles ont des problèmes de santé liés au traumatisme. Selon nous, une fois que l'on n'a plus accès à sa propre culture, le risque de demeurer dans le système est élevé.
    Ce qui nous préoccupe, ce sont les soins des enfants. Depuis 2006, la population autochtone a augmenté de 42,5 %. Ce taux de croissance est quatre fois plus élevé que celui de la population non autochtone sur la même période. Je tiens à souligner que ce ne sont pas les enfants qui ont fréquenté les pensionnats; il s'agit de la nouvelle génération d'enfants. Sur le terrain, nous constatons que les femmes autochtones sont plus souvent accusées d'actes plus violents qu'auparavant. C'est sur cette génération que nous devons nous concentrer.
    Nous savons également que la plupart des femmes en établissement se sont d'abord retrouvées dans des foyers d'accueil, des foyers de groupe ou en adoption. Nous croyons qu'il est temps de venir en aide aux femmes en établissement, particulièrement à celles qui ont des enfants, en améliorant les moyens technologiques.
    La collectivité de Bella Bella-Bella Coola, qui est très éloignée, a accès à la diffusion vidéo en continu permettant de visionner les audiences ayant lieu dans les tribunaux de Vancouver. Il est temps que le gouvernement fédéral envisage de fournir une diffusion vidéo en continu pour aider les familles et les enfants des détenus et veille à ce que les femmes autochtones en établissement puissent communiquer avec eux.
    Le système de soutien pour les enfants de parents incarcérés a été étudié sérieusement, mais nous devons nous concentrer davantage sur les femmes dans les établissements fédéraux et fournir un système de diffusion vidéo en continu aux collectivités éloignées d'où proviennent de nombreuses délinquantes autochtones afin que leurs enfants et les autres membres de leur famille puissent les voir et communiquer avec elles. Cela leur permettrait de garder contact et de ne pas perdre leur lien une fois qu'elles réintègrent la collectivité.
    Notre dernière recommandation consiste à investir dans un groupe d'experts de la justice pour les femmes autochtones qui élaborera un plan quinquennal et une stratégie fédérale d'investissement en vue de régler les problèmes que je viens tout juste de mentionner.
    Je vous remercie de votre temps.

  (1600)  

    Merci beaucoup.
    Passons maintenant à Mme Audra Andrews, pour sept minutes.
    Bon après-midi, et merci de m'accueillir. Je suis habituellement plus à l'aise devant un groupe de délinquants, et je m'excuse si je cherche un peu mes mots.
    J'ajouterais que le Service correctionnel du Canada n'aime pas que des membres de son personnel s'expriment publiquement, mais je crois que vous méritez de connaître le point de vue des intervenants de première ligne.
    Je tiens à souligner que les mesures que je vais proposer devraient être prises immédiatement pour améliorer le sort des femmes autochtones sous responsabilité fédérale.
    Premièrement, il faut offrir un meilleur soutien aux femmes ayant des problèmes de santé mentale. Deuxièmement, les programmes d'emploi doivent être revus, et il faut envisager des partenariats communautaires financés au-delà du modèle de programme actuel du SCC. Troisièmement, le rôle des aînés doit être revu afin qu'ils soient libérés de la paperasse, et nous recommandons d'embaucher des aînés qui interviendront dans la collectivité. Il faut plus d'employés autochtones au sein du service correctionnel et de la commission des libérations conditionnelles. Enfin, il faut mener des consultations concrètes auprès du personnel qui fait le travail.
    Vu les événements récents touchant le système de justice, je crois que l'étude que vous menez est plus importante que jamais afin que nous puissions entretenir de meilleures relations avec les Autochtones et leur prouver qu'ils seront traités de manière humaine et juste. Je suis entièrement d'accord avec les témoins précédents quant aux raisons de la surincarcération des femmes autochtones.
    J'ai eu de la difficulté à choisir mes mots pour ce court témoignage, car j'ai souvent l'impression d'avoir un pied dans chaque camp: d'un côté, je fais partie du Service correctionnel du Canada avec ses politiques et ses réflexions, et de l'autre côté, je suis une femme autochtone qui a un parcours semblable à de nombreux égards à celui de personnes auprès de qui je travaille.
    Je témoigne avec l'autorisation du Syndicat des employé-e-s de la Sécurité et de la Justice duquel je suis membre avec d'autres agents de libération conditionnelle, agents de liaison autochtones, agents de programme et autres membres du personnel de soutien. J'ai 16 ans d'expérience en tant qu'agente de libération conditionnelle dans la collectivité et, en ce moment, je travaille exclusivement avec des délinquantes. Auparavant, j'ai travaillé auprès de femmes mises en liberté sous condition entre 2002 et 2007.
    J'ai également travaillé avec la Commission des libérations conditionnelles du Canada pour les audiences tenues avec l'aide d'un aîné ainsi que dans un organisme pour Autochtones en milieu urbain et auprès des jeunes à risque.
    J'ai écouté les témoignages précédents et j'affirme la même chose: les femmes autochtones ont besoin de guérir de leur traumatisme et de renouveler avec leur famille et leur collectivité. J'ai été témoin de près de la douleur et du traumatisme de ces femmes et de l'immense difficulté qu'elles ont à réintégrer la collectivité, mais j'ai également eu l'immense privilège de les voir reconstruire complètement leur vie si elles disposaient de l'aide et des outils appropriés.
    Bon nombre de délinquantes me disent que la vie dans la collectivité est parfois plus difficile qu'en prison parce que, dans la collectivité, elles doivent composer notamment avec un manque d'occasions d'emploi et de logements abordables et des problèmes de protection de l'enfance en plus de devoir faire face à leurs problèmes personnels.
    Le SCC doit réinvestir dans les activités en établissement, mais aussi dans la collectivité, s'il veut améliorer ses résultats relativement à cette population. Certains progrès ont été réalisés quant aux investissements dans la collectivité, comme le montre l'agrandissement d'établissements visés à l'article 81, dont Buffalo Sage, mais ce modèle n'est pas toujours viable pour certains centres comptant un petit nombre de délinquants autochtones.
    Le SCC devrait envisager de réinstaurer certains programmes qui ont été éliminés, comme le programme de placements dans une maison privée, qui pourrait être une solution au problème que j'ai mentionné et qui pourrait convenir à des délinquants à faible risque qui ont peu de besoins en régions urbaine ou rurale.
    Parmi nos suggestions visant à améliorer la situation en établissement et dans la collectivité, mentionnons l'acquisition de compétences professionnelles réalistes et d'une formation adéquate ainsi que des programmes d'éducation et des placements à l'extérieur qui aideront les femmes à acquérir les compétences dont elles ont besoin pour réintégrer le marché du travail et subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants.
    Je tiens à souligner particulièrement la complexité accrue des cas. Nous devons composer avec des femmes ayant de graves problèmes de santé mentale ou de violence, des problèmes de santé complexes et de graves problèmes de toxicomanie, et ces cas exercent beaucoup de pressions sur le personnel et les infrastructures en établissement et dans la collectivité. Nous avons besoin de psychologues, d'infirmières spécialisées en santé mentale et de places dans les unités de santé mentale afin de mieux gérer ces cas; il y a souvent des listes d'attente pour avoir accès à ces services, et il y a très peu de places dans les centres psychiatriques régionaux.
    Pour ce qui est des autres délinquants, il faudrait accroître la capacité dans les unités des Sentiers autochtones des établissements. Les centres d'intervention pour Autochtones qui ont été proposés pour les établissements doivent être peaufinés davantage et devraient faire l'objet de consultations concrètes avec le personnel avant d'aller plus loin pour que l'on puisse savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.
    Le SCC doit également revoir le rôle des aînés, car nous leur manquons de respect et nous minons leur rôle les obligeant à remplir toutes sortes de documents. Ils doivent être libres de pouvoir intervenir auprès des délinquants et les aider à guérir dans le cadre de cérémonies et de séances individuelles. Il faut également qu'il y ait dans la collectivité un aîné à temps plein ou même à temps partiel qui vient en aide aux femmes qui résident seules, car les difficultés qu'éprouvent les femmes autochtones dans la collectivité sont souvent liées à leur incapacité d'avoir accès à des interventions culturelles à l'extérieur de l'établissement régulier ou de l'établissement visé à l'article 81.

  (1605)  

    Les événements récents et de cette semaine liés au système de justice montrent l'importance d'avoir plus d'employés autochtones au sein du service correctionnel et de la commission des libérations conditionnelles, vu le nombre élevé de femmes autochtones incarcérées. Le SCC a clairement besoin d'adopter une approche radicale, et toutes les options doivent être envisagées, y compris réengager nos partenaires dans la collectivité et les aider à proposer des solutions au modèle de programme unique du SCC. On se fie beaucoup trop sur les outils actuariels pour aiguiller les délinquants vers les programmes appropriés, et les agents de libération conditionnelle peuvent de moins en moins exercer leur pouvoir discrétionnaire.
    Le SCC doit également cesser de traiter les femmes autochtones comme des victimes pour mieux les habiliter et les traiter plutôt comme des survivantes, et les interventions thérapeutiques devraient aller dans le même sens.
    La réponse à la question du Comité est que, pour s'assurer que ces femmes n'intègrent jamais le système fédéral, il vaut mieux utiliser les programmes de déjudiciarisation, sensibiliser davantage les professionnels du système de justice aux questions autochtones, rendre les rapports Gladue plus accessibles au moment de prononcer la peine et travailler avec les provinces sur les questions de la protection de l'enfance.
    Cependant, le SCC doit s'assurer que ces femmes, une fois qu'elles sont incarcérées, sont à l'abri des abus et qu'elles en sortent mieux outillées qu'elles l'étaient à leur arrivée. Dans de nombreux cas, les employés sont dépassés, ils manquent de ressources, ils ont peur de s'exprimer et ils craignent que l'organisation ne les écoute pas.
    J'ai souvent dit que les agents de libération conditionnelle et les autres membres de l'équipe de gestion de cas travaillent dans l'ombre, là où bien des gens craignent d'aller, car nous sommes témoins de traumatismes et de douleurs incroyables et nous nous y exposons du même coup. Mais peu importe, nous sommes convaincus de l'importance de notre travail. Nous avons simplement besoin que la direction nous fournisse les outils, la formation, les ressources et le soutien dont nous avons besoin pour aider ces femmes à jouer leur rôle de mère, de tante et de fille et devenir des membres de la collectivité productifs, positifs et en santé.
    Je crois que le SCC reconnaît que la situation doit changer, cependant cela prendra du temps, et le changement devra être radical pour que la situation s'améliore.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Écoutons maintenant pendant sept minutes M. Lowell Carroll, gestionnaire des centres de services juridiques de Calgary, de Red Deer et de Siksika.
    Je m'appelle Lowell Carroll et je suis gestionnaire des centres de services juridiques de Calgary, de Red Deer et de la nation Siksika. Je suis un ancien membre du FASD Network de Red Deer, en Alberta, et je suis actuellement membre de la Justice Sector Constellation, qui est un comité multidisciplinaire composé d'intervenants de la collectivité et de la province qui cherchent à améliorer le système de justice. Je suis ici à titre personnel pour vous parler de mon expérience et de ce que j'ai observé dans le cadre de mon travail au sein du système de justice.
    Il m'a été demandé de parler plus précisément de l'accès des femmes autochtones au système de justice au Canada et de commenter notamment les taux d'incarcération et les pénalités infligées à ces femmes.
    Je suis conscient qu'il est extrêmement important de parler de ces sujets, mais il est raisonnable de croire que le Comité connaît déjà les statistiques relatives aux taux d'incarcération des femmes autochtones et qu'il sait que les chiffres sont extrêmement problématiques, et c'est pourquoi cela est à l'étude aujourd'hui.
    Nous savons que les femmes autochtones constituent la population carcérale qui augmente le plus rapidement. Nous savons qu'elles sont sous-représentées dans presque toutes les facettes du système de justice, alors pour moi, nous avons beaucoup plus avantage à nous concentrer sur les divers problèmes sociaux et juridiques interreliés qui perpétuent ce problème ainsi que sur les causes et la prévention.
    Avant de vous présenter mes observations et mes commentaires, j'aimerais faire une déclaration.
    Je suis convaincu que, si nous voulons régler de manière positive ces problèmes sociaux et juridiques, nous devons changer de fond en comble notre système de justice. Nous devons déterminer si le but de notre système de justice est de punir et de se venger ou si nous voulons que notre système de justice soit axé sur la prévention, la réadaptation et la création d'une société juste pour tous. Nous devons reconnaître que, dans son état actuel, notre système de justice ne permet pas de prévenir la criminalité, et ne permet pas aux détenus de se réadapter et il ne crée pas une société juste. En fait, d'après mon expérience, le système perpétue la pauvreté de multiples façons, crée des problèmes sociaux et favorise l'inégalité sociale.
    Il est important de reconnaître que, à travers l'histoire, les problèmes systémiques ayant une influence négative sur la façon dont les femmes autochtones perçoivent le système de justice se sont accumulés. Bon nombre d'entre elles ne voient pas le système de justice comme un mécanisme qui peut les aider à aller mieux ou à s'améliorer. Elles le perçoivent plutôt comme un système de punition et un endroit où elles se perdent et sont oubliées.
    Cela explique pourquoi je suis en faveur des tribunaux communautaires, et c'est ce que je veux promouvoir devant vous aujourd'hui. Un projet pilote est mené à Vancouver — c'est pour cela que j'en parle —, et le comité auquel je siège met en oeuvre un projet pilote semblable à Calgary. Le projet consiste essentiellement à avoir un procureur de la Couronne qui est prêt à travailler avec la défense pour élaborer une sorte de plan stratégique et de système de soutien pour l'accusé. Selon moi, il s'agit probablement du système le plus efficace que nous pouvons avoir. Lorsque l'accusé se présente devant le tribunal, souvent, nous ne nous attardons pas aux raisons pour lesquelles il se retrouve là au départ. Le système de justice se concentre sur les gestes qui ont été posés. Lorsqu'il examine les raisons, c'est souvent dans le but de déterminer la peine et non pas de prévenir.
    Le but des tribunaux communautaires est de s'attaquer aux problèmes de pauvreté, de violence conjugale, d'itinérance et de déplacement, aux problèmes d'origine historique, ainsi qu'en cernant les problèmes systémiques qui font en sorte que l'accusé se retrouve devant le tribunal et de lui fournir dans la collectivité le soutien qui lui permettra de résoudre ces problèmes.
    De plus, en théorie, le procureur de la Couronne tiendrait l'accusé responsable tout au long du processus en maintenant les accusations jusqu'à ce que les programmes soient terminés. Cela aide les femmes autochtones, mais aussi tous les Albertains qui ont des problèmes avec le système de justice. Comme je l'ai déjà mentionné, il existe des programmes semblables qui fonctionnent très bien. En fait, je suis gestionnaire d'un autre programme familial à Siksika qui est axé sur la violence conjugale. Il fonctionne comme un tribunal communautaire, et les résultats sont très positifs.
    Selon moi, un des grands problèmes de notre système de justice est l'absence de pratiques holistiques et de liens entre les problèmes sociaux et juridiques auxquels font face les femmes autochtones et les Autochtones en général. Je sais que le système correctionnel offre divers programmes adaptés à la culture autochtone et axés sur la prévention et la guérison. Le problème cependant, c'est que bon nombre de ces programmes ne sont offerts qu'aux personnes qui sont détenues dans un établissement fédéral ou provincial. Selon moi, ces programmes sont offerts beaucoup trop tard pour avoir l'impact nécessaire. Le fait que ces programmes soient également moins disponibles pour les femmes autochtones est aussi un problème injuste.
    Lorsque je faisais partie du FASD Network de Red Deer, nous avons consulté un rapport sur l'Établissement d'Edmonton pour femmes qui révélait que toutes les femmes incarcérées à cet endroit étaient autochtones, et nous soupçonnions qu'une grande proportion d'entre elles souffraient d'un TSAF. Comme je l'ai déjà mentionné, les femmes autochtones constituent la population carcérale qui augmente le plus rapidement et elles sont surreprésentées en isolement. En fait, elles sont deux fois plus susceptibles d'être surreprésentées dans les unités à sécurité maximale et en isolement.

  (1610)  

    Regardez ces chiffres, et vous constaterez l’épouvantable cycle de l’injustice. Il s’agit d’une population qui souffre de pauvreté, de violence conjugale, de problèmes de santé mentale et de déplacements forcés, et, en raison de ces problèmes, elles se retrouvent dans le système de justice. Ces femmes sont incarcérées, elles sont placées en isolement, leurs lésions cérébrales ou leurs problèmes de santé mentale ne sont pas traités, les familles sont séparées, et ces femmes sont encore davantage poussées vers la grande pauvreté et l’isolement. Pour parler franchement, je ne vois aucune guérison ni aucun mécanisme de prévention.
    Je manque de temps, alors je vais sauter quelques points, mais j’ai indiqué dans mes notes que les tribunaux communautaires sont jugés inefficaces parce qu’on les voit comme une façon pour l’accusé d’éviter la prison. Pour ce qui est des victimes cependant — du moins celles avec qui je me suis entretenu —, elles croient que le système de justice existe pour se venger, et, peu importe la durée de la peine et la sévérité de la punition, les victimes demeurent souvent insatisfaites. Elles sont insatisfaites du système de justice.
    Selon moi, c'est parce qu'elles sont conscientes de l'échec perpétuel du système. Elles savent qu'une peine plus longue ne se traduit pas statistiquement par une réduction de la criminalité. Elles savent aussi que les accusés sortent souvent de prison sans avoir été réhabilités et parfois même dans un état pire qu'avant d'être incarcérés.
    Je crois que la meilleure façon de guérir pour une victime est de savoir que, peu importe ce qui lui est arrivé et peu importe ce que l'accusé leur a fait, personne d'autre ne le subira. Elles doivent avoir la certitude que le système de justice donne des résultats positifs et qu'il peut améliorer les choses. Je tiens à répéter que les tribunaux communautaires constituent la meilleure façon d'administrer ce type de justice.
    En guise de conclusion, nous devons sérieusement revoir le système de justice et déterminer quel est son véritable objectif, et nous devons tous prendre la responsabilité de nos décisions. Si l'objectif premier est la réhabilitation et la création d'une société juste, il faut absolument faire des changements.
    Merci.

  (1615)  

    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant écouter Claudie Paul et Jacinthe. Vous avez sept minutes.

[Français]

     Bonjour, je suis Claudie Paul, une Innue de la communauté autochtone de Mashteuiatsh.
    Nous représentons aujourd'hui le Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec, l'organisation provinciale des centres d'amitié de cette province. Le mouvement des centres d'amitié est présent partout au Canada. Il y a environ 120 centres d'amitié au pays et une association provinciale dans chaque province. Tous les centres d'amitié ont la même mission, partout au Canada. C'est la plus grande infrastructure de services.
     Nous militons pour les droits et intérêts des Autochtones dans les villes. Les associations soutiennent le développement de services au sein des centres d'amitié dans les villes. Le Québec compte neuf centres d'amitié, qui sont situés dans les villes suivantes: Chibougamau, La Tuque, Joliette, Maniwaki, Montréal, Roberval, Senneterre, Sept-Îles et Trois-Rivières.
    Deux nouveaux centres ont été ouverts au cours des deux dernières années. Il s'agit de carrefours de services communautaires autochtones, de milieux de vie et de milieux d'ancrage culturel. C'est un peu ce que représentent les centres en milieu urbain. Naturellement, ce sont des organisations démocratiques, qui émergent du milieu. C'est la mobilisation de la population autochtone dans les villes qui fait émerger les centres. On parle ici de 50 services intégrés et interreliés.
     Nous travaillons dans les domaines suivants: la petite enfance, la famille et la jeunesse, le développement des compétences, l'employabilité, la justice, de plus en plus, la réussite éducative, la santé, les services sociaux ainsi que le développement social et économique. Nous offrons un continuum de services. En effet, les gens qui arrivent dans les villes ont besoin de soutien. Aujourd'hui, au Québec, 53,2 % des Autochtones se retrouvent dans les villes. Ce pourcentage est beaucoup plus élevé qu'ailleurs au Canada. Les motifs qui expliquent ce déplacement vers les villes sont nombreux et incluent le logement, les études, le travail et d'autres raisons, dont le désir d'améliorer ses conditions de vie. Nous allons bientôt voir en quoi c'est relié à la justice.
     Je vais maintenant céder la parole à Mme Poulin.
    Je m'appelle Jacinthe Poulin et je suis conseillère en santé et services sociaux pour le Regroupement des centres d'amitié autochtones du Québec. J'ai une formation en criminologie. J'ai donc un grand intérêt pour le sujet à l'étude aujourd'hui.
    Nous avons eu différentes préoccupations relativement aux axes qui ont été suggérés pour la réflexion d'aujourd'hui.
    D'abord, les rapports Gladue sont sous-utilisés au Québec par rapport au reste du Canada, ce qui, selon nous, peut influer non seulement sur le processus judiciaire qui va amener les femmes autochtones à purger des peines dans un pénitencier, mais aussi sur la détermination de la peine.
    Nous souhaitons aussi vous faire part aujourd'hui d'une autre de nos préoccupations qui a trait à la méconnaissance du système de justice et des processus. Cette méconnaissance a pour conséquence que les accusées autochtones plaident coupable plus souvent.
    Le mode de régulation traditionnel des conflits chez les Premières Nations et les Inuits amène les gens à admettre avoir commis des actes criminels alors qu'il serait parfois dans leur intérêt de plaider non coupable. Nous considérons qu'il est important de le souligner.
    Nous aimerions aussi parler d'une des recommandations de la Commission de vérité et réconciliation du Canada, qui émettait deux appels à l'action concernant la formation des avocats et des étudiants en droit sur les réalités autochtones et le développement des compétences culturelles. C'est un aspect dont nous voulons vous faire part aujourd'hui.
    Il y a aussi la manière dont le système correctionnel traite les femmes. Nous avons aussi des préoccupations à l'égard des outils de gestion actuarielle du risque utilisés par le Service correctionnel du Canada. Ces outils sont systématiquement discriminatoires, puisqu'ils tiennent compte de facteurs de risque statiques, comme l'âge et le sexe, mais principalement de facteurs de risque dynamiques, ceux qui liés aux conditions de vie économiques, à la pauvreté, à la consommation et aux problèmes de santé mentale. Ce sont tous des aspects qui ont été mentionnés par d'autres témoins.
    Je ne vous apprends pas que, dans le cas des Autochtones incarcérés, le fait d'utiliser de tels facteurs dynamiques pour analyser le risque fait en sorte qu'on leur attribuera souvent une cote de sécurité plus élevée. Comme l'ont souligné nos collègues, les Autochtones se retrouvent souvent avec des cotes de sécurité maximale ou de sécurité maximale renforcée, ce qui veut dire qu'ils sont considérés comme des détenus à risque élevé ayant de grands besoins. Les détenues autochtones sont plus souvent mises en isolement que les détenues allochtones et elles sortent moins en libération conditionnelle. Ce sont des choses préoccupantes pour nous.
    Il y a eu un changement dans les outils utilisés. On est passé du l'inventaire du niveau de service/de la gestion des case, ou LS/CMI, à l'échelle de classement par niveau de sécurité, mais ce sont tous deux des outils actuariels.
    Par ailleurs, les cotes de sécurité ont aussi une incidence sur les programmes auxquels les détenues autochtones peuvent avoir accès. Évidemment, quand une détenue a une cote de sécurité maximale ou de sécurité maximale renforcée, c'est difficile d'avoir accès à certains programmes.
    Au Québec, il y a un pénitencier pour femmes qui offre ces programmes, et c'est celui de Joliette. On nous a informés que le nombre peu élevé de femmes et le fait qu'on leur attribue souvent une cote de sécurité élevée font qu'elles n'ont pas accès aux programmes correctionnels. Il n'y a qu'un centre autochtone de guérison pour femmes au Canada, et il se trouve en Saskatchewan. Évidemment, les femmes du Québec n'ont pas accès à ce centre de guérison. Par ailleurs, à l'article 81 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en en liberté sous condition, il est question de ces centres de guérison. Le premier critère à respecter pour pouvoir aller dans ces centres est que le délinquant soit en mesure d'obtenir une cote de sécurité minimale ou, selon le cas, une évaluation de sécurité moyenne. Cela fait que des femmes n'ont pas accès à ces centres de guérison.
    Notre expérience sur le terrain nous démontre que les collectivités autochtones et les Autochtones qui habitent en milieu urbain sont divisés quant à la guérison traditionnelle. Toutes les femmes autochtones n'adhèrent pas forcément au mode de guérison traditionnel et ne seront pas nécessairement à l'aise dans les programmes destinés à la population carcérale générale. Il manque donc de services pour ces dames. La réappropriation culturelle n'est pas la solution pour toutes les femmes.
    Au fil du temps, différentes stratégies ont été mises en place par le Service correctionnel du Canada. Il serait intéressant de savoir ce qui est ressorti de l'évaluation de ces stratégies. On parle d'engager du personnel autochtone...

  (1620)  

[Traduction]

    Les interprètes ont de la difficulté à suivre.
    Je suis désolée.
    C'est correct. Ralentissez un tout petit peu. Nous allons vous donner un peu plus de temps.
    J'ai beaucoup de choses à dire, et il n'y a pas beaucoup de temps.

[Français]

    Différentes stratégies mises en place impliquent du personnel engagé autochtone, mais elles sont soumises à la logique carcérale et correctionnelle. C'est une limite que nous remarquons.
    Par ailleurs, sur le plan de la réinsertion sociale, il a été question du fait que les femmes autochtones sont moins admissibles aux libérations conditionnelles. Par ailleurs, en général, il n'y a pas de transition entre le pénitencier et les communautés urbaines ou les communautés autochtones, si les femmes désirent y retourner. Certaines femmes autochtones désirent demeurer en milieu urbain, mais on n'offre pas d'accompagnement à ces femmes.
    Au Québec, il y a une maison de transition, et sur 40 places disponibles, elle ne reçoit qu'une à deux femmes autochtones. C'est une très petite part du bassin de services disponibles pour ces femmes.

[Traduction]

    Nous allons devoir arrêter ici. Je vous ai donné 30 secondes de plus, mais nous devons passer maintenant à notre période de questions.
    Nous allons commencer avec Pam Damoff pour sept minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci à tous nos témoins.
    Avant de poser mes questions, Audra, je tiens à vous assurer que vous ne pouvez pas subir de représailles au travail pour tout ce que vous dites devant le Comité et que, si c'est le cas, vous devez nous laisser savoir, et nous nous occuperons de la situation.
    Ma première question s'adresse à M. Carroll. Que pensez-vous du fait de limiter ou d'abolir les récusations péremptoires durant la sélection des jurés? Avez-vous une opinion à ce sujet?
    Quels genres de récusations?
    Je parle de récusations dans le cadre de la sélection des jurés, lorsque certains membres du jury peuvent être retirés. Cela a fait les manchettes en raison de ce qui vient de se produire.
    Je me demandais si vous vous êtes déjà penché là-dessus. Croyez-vous que ce serait une bonne chose de s'en débarrasser? Avez-vous une opinion sur ce sujet?
    Honnêtement, mon opinion au sujet de la sélection des jurés est plus personnelle que professionnelle. Je ne serais pas à l'aise de répondre à votre question.
    Madame Shackelly, avez-vous des commentaires à formuler sur cette question?
    Vu ce qui s'est passé la semaine dernière, je crois que c'est encore beaucoup trop frais. Je ne veux pas commenter non plus.

  (1625)  

    Je vais m'adresser à Audra. C'est bon de vous revoir, Audra.
    À mon passage à Edmonton, j'ai entendu notamment que, en raison de coupures faites dans les services correctionnels par l'ancien gouvernement, les agents de libération conditionnelle et les agents de programme ont beaucoup de difficultés à faire leur travail, et vous êtes inondés d'une paperasse qui vous empêche d'intervenir auprès des délinquants et d'assurer leur réussite.
    Pouvez-vous nous en dire davantage?
    Je tiens à vous dire que vous faites un travail incroyable. Et ne pensez pas que je dis cela parce que vous ne faites pas un bon travail malgré toutes les tâches que vous devez accomplir, mais votre charge de travail est beaucoup plus imposante. Vous devez remplir plus de rapports et vous avez moins de temps à consacrer aux personnes.
    Je suis d'accord avec vous. On nous demande constamment de faire plus avec moins, et les attentes envers le personnel et son rendement demeurent très élevées. Par conséquent, les employés sont plus stressés et sont sujets à l'épuisement professionnel.
    Malgré tout, nous tentons de faire de notre mieux dans nos interactions avec ces hommes et ces femmes. Comme je l'ai déjà mentionné, cela nous cause du stress et de l'épuisement professionnel. Je suis tout à fait d'accord avec votre intervention.
    J'ai également entendu dire que l'accès aux placements à l'extérieur est un des meilleurs indices de réussite pour les délinquants lorsqu'ils réintègrent la société.
    Cependant, au Centre Pê Sâkâstêw — et non pas lorsque j'étais avec vous —, on disait que le temps qui s'écoule entre le moment où l'employeur dit qu'il embauchera quelqu'un et la fin du traitement des documents du délinquant est si long que le poste finit par ne plus être disponible.
    Avez-vous été témoin de cela?
    Pas moi personnellement, car je travaille dans la collectivité, mais je dirais que nos délinquants réussissent mieux lorsqu'ils bénéficient de placements à l'extérieur.
    La création de placements à l'extérieur prend du temps et de l'argent. Il faut travailler très fort pour trouver des employeurs potentiels qui sont prêts à embaucher nos délinquants. Il peut être très frustrant pour les employeurs qui ont accepté de travailler avec nous d'avoir à attendre. C'est frustrant pour tout le monde.
    Qu'en est-il du soutien au moment de la libération? Quand une femme autochtone quitte la prison, elle a besoin d'un logement et d'un emploi. Pensez-vous que ce soutien manque, dans la collectivité, et y a-t-il quelque chose que nous puissions faire pour aider les femmes à réussir, une fois qu'elles sont mises en liberté?
    Pour les femmes autochtones, comme c'est d'ailleurs le cas de bien des délinquants dans la collectivité — mais surtout dans le cas des femmes, car elles ont également des enfants —, la recherche d'un logement abordable constitue un véritable défi, surtout si elles quittent une de nos maisons de transition et retournent dans la collectivité en raison de ce qui s'appelle la libération d'office. C'est très difficile pour elles. Elles sont en général sous-employées. Il leur serait extrêmement utile, je l'ai déjà dit, de posséder un peu de compétences professionnelles à offrir.
    Comme je l'ai déjà dit, d'ailleurs, il leur serait aussi extrêmement utile d'avoir un accès facile à une aînée; j'ai en effet constaté moi-même récemment que l'absence de ces soutiens culturels peut vraiment avoir un effet négatif sur ces dames.
    Qu'en est-il des audiences de libération conditionnelle et du fait qu'il faut nommer davantage de commissaires à la Commission des libérations conditionnelles pour s'assurer que ces femmes puissent obtenir une audience de libération conditionnelle?
    Est-ce exact?
    Oui. Nous avons accumulé un certain retard, à l'heure actuelle; ces dames doivent attendre de plus en plus longtemps, et cela a un effet domino, car nos maisons de transition sont remplies à pleine capacité. Il y a souvent d'autres femmes qui attendent à l'intérieur d'un établissement, et les femmes qui vivent dans une maison de transition attendent de plus en plus longtemps pour obtenir leur libération conditionnelle totale ou d'autres types de mise en liberté. Cela a un effet domino qui se fait sentir jusque dans les établissements.
    Comment pouvons-nous inciter davantage d'Autochtones à travailler dans le milieu correctionnel?
    Les processus qu'utilisent actuellement les RH sont assez longs et compliqués. Premièrement, il faudrait aussi que le SCC s'efforce de sensibiliser les collectivités autochtones et qu'il rende le milieu de travail plus attrayant. Il faudra pour cela qu'il écoute ce qu'a à dire son effectif actuel. Mais, essentiellement, les processus des RH qui s'appliquent dans le cas de la Commission des libérations conditionnelles et du SCC sont actuellement très longs et très compliqués à tous égards.
    Si j'ai bien compris, il faut essentiellement se passer de revenus pendant un certain temps.
    Oui, c'est ça. Si vous voulez devenir agent correctionnel et que vous suivez la formation... Je ne sais pas si ça se passe de la même manière au Dépôt de la GRC, mais les candidats doivent pouvoir se passer de revenus pendant au moins deux ou trois mois. Je ne me souviens pas très bien, mais ce processus suppose que vous vous passez de revenus pendant toute cette période.

  (1630)  

    Il n'y a aucune mesure de soutien. D'accord.
    J'aimerais pour finir tous vous remercier de participer à cette étude. J'aurais aimé avoir plus de temps.
    Je crois que c'est tout.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à Stephanie Kusie, pour sept minutes.

[Français]

     Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Monsieur Carroll, je me demandais si vous ne pourriez pas nous expliquer un peu mieux ce que vous entendez par « tribunaux communautaires » et la façon dont vous envisagez l'évolution entre le système actuel de détermination de la peine et le résultat final, les tribunaux communautaires. S'il vous plaît, pourriez-vous nous en dire un peu plus?
    Le projet des tribunaux communautaires dont je parlais... Je crois que le premier tribunal a vu le jour à Vancouver. Je fais partie du comité Justice Sector Constellation, et nous avions demandé une petite subvention pour lancer notre propre projet à Calgary; cette demande vient tout juste d'être approuvée. Nous en sommes pour le moment à essayer de voir comment tout cela fonctionnera sur le plan logistique.
    Avant qu'une peine soit déterminée, que l'incarcération commence, avant tout cela, la solution serait de s'attaquer immédiatement aux problèmes qui ont fait que la personne accusée a eu au bout du compte des démêlés avec les tribunaux. Il y a aujourd'hui à Calgary, par exemple, un tribunal des affaires liées à la santé mentale. Il y a à Edmonton un tribunal des affaires liées à la drogue. Ces tribunaux sont extrêmement efficaces, mais ils ne s'intéressent semble-t-il qu'à un aspect de la problématique. Nous nous rendons compte de plus en plus, à mesure que nous étudions la question, que les problématiques sont multiples et que les problèmes ont trait au logement, au revenu, au déplacement ou à la santé mentale. Il nous faudrait un tribunal universel, qui peut tenir compte de toutes ces problématiques. Une personne peut se présenter devant le tribunal qui s'occupe de la santé mentale, mais avoir un problème de drogue. Et c'est ça, le problème: tous les projets pilotes s'attachent à un seul aspect, mais nous savons tous que les aspects problématiques sont nombreux et que c'est à cause d'eux que les gens ont des démêlés.
     Les tribunaux communautaires cherchent d'une certaine façon à s'attaquer à ce problème, et c'est pourquoi j'estime que c'est un meilleur système. Il tient compte de tous les aspects, non pas seulement d'un aspect problématique en particulier.
    Merci beaucoup.
    Madame Andrews, j'aimerais savoir à quelle date le programme de placement dans les maisons privées a été éliminé et pour quelle raison il l'a été.
    En ce qui concerne la raison pour laquelle il a été éliminé, je crois que la haute direction du SCC est mieux placée pour répondre. Je me trompe peut-être, mais je crois que le programme a été éliminé en 2008 ou en 2009, dans ces eaux-là.
    Vous dites 2008 ou 2009. Combien de temps a-t-il été en place avant d'être éliminé?
    Encore une fois, mes souvenirs sont peut-être incorrects, mais il a été offert pendant au moins huit ou neuf ans. Je crois qu'il avait été créé en 2000, à peu près. Il a été offert pendant huit ou neuf ans, au moins, je crois.
    Merci beaucoup.
    Vous avez parlé d'un soutien accru dans le domaine de la santé mentale. C'était le premier des cinq points dont vous avez parlé. Pourriez-vous nous en dire un peu plus, s'il vous plaît, madame Andrews, quant à ce que vous entendez par des mesures de soutien accrues dans le domaine de la santé mentale?
    Nous constatons que les personnes incarcérées — non pas seulement les femmes autochtones, mais surtout les femmes autochtones — sont de plus en plus nombreuses à présenter des problèmes de santé mentale beaucoup plus complexes. Parfois, en plus d'un trouble de la santé mentale, elles ont un problème d'alcoolisme ou de toxicomanie. Elles ont donc tendance à passer davantage à l'acte, elles sont plus susceptibles de s'automutiler, de s'infliger des blessures, de faire des tentatives de suicide.
    J'aimerais bien, comme je le disais, qu'il y ait davantage d'infirmières en santé mentale et de psychologues, ce qui réduirait les listes d'attente des femmes qui veulent avoir accès à ce type de soutien en santé mentale, dont elles ont tellement besoin.
    Vous avez également parlé de programmes de travail. Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur le genre de programmes de travail qui seraient à votre avis utiles?
    Il serait utile de donner à davantage de femmes la possibilité d'apprendre un métier, d'apprendre quelque chose qui pourrait réellement leur permettre de vivre et de faire vivre leur famille lorsqu'elles seront libérées dans la collectivité. Je crois que nous devons hausser un peu la barre. Les métiers sont un bon exemple. Il serait très utile de les aider à parfaire leur éducation pendant qu'elles sont incarcérées et lorsqu'elles retournent dans la collectivité.

  (1635)  

    Merci.
    Monsieur Carroll, vous avez expliqué qu'il s'agissait malheureusement d'un cycle: les délinquantes qui quittent la prison se sentent souvent moins bien que lorsqu'elles y sont arrivées, et pourtant, l'objectif était d'assurer leur réinsertion sociale. Que pourrait-on faire, au bout du compte, pour éviter que les femmes autochtones n'aient des démêlés avec la justice?
    Pour le moment, je ne crois pas que les établissements, fédéraux ou provinciaux, réussissent très bien à assurer la réinsertion sociale. Si vous pouviez faire davantage de place à la déjudiciarisation... Il y a bien d'autres choses, par exemple la justice réparatrice, et j'ai déjà parlé des tribunaux s'occupant d'affaires liées à la drogue ou à la santé mentale, des choses comme ça. Vous pouvez très souvent vous tourner vers la déjudiciarisation pour éviter d'emprisonner quelqu'un. L'incarcération coûte cher, mais en plus, c'est très souvent inutile.
    Je n'arrête pas de parler des tribunaux communautaires, mais il faut nous intéresser aux problèmes qui font que les gens vont en prison. Par exemple, dans le cas d'une personne emprisonnée pour vol, qui a volé parce qu'elle était pauvre, il faudrait peut-être organiser un mécanisme de soutien du revenu; dans le cas des personnes itinérantes, cette solution ne fonctionnera pas. Il faut leur proposer un logement, des choses comme ça.
    Le problème des services juridiques et d'un grand nombre de nos autres institutions, c'est que le transfert se fait plutôt froidement. Quand une personne se retrouve dans le système de justice, on lui dit où aller pour demander un logement, mais elle peut très bien ne jamais se rendre jusque-là. Dans les tribunaux communautaires, quand une personne se présente et que vous cernez ses problèmes, la défense travaille en collaboration avec la Couronne pour chercher une solution à ces problèmes. C'est une façon de prendre les choses en main qui est beaucoup plus concertée; on ne se contente pas de punir une personne en la mettant derrière les barreaux et en espérant ensuite qu'elle aille mieux.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Madame Poulin, qu'est-ce qui différencie les défis auxquels font face les femmes autochtones dans les villes et ceux des femmes à la campagne?
    La différence est que, quand les femmes arrivent dans les villes, elles trouvent moins de tissu social. Elles vivent donc souvent beaucoup plus d'isolement, surtout celles qui sortent d'un établissement de détention. Souvent, les personnes et la famille qui étaient autour d'elles auparavant ne sont plus là. Il s'agit là d'un grand isolement, que les centres d'amitié peuvent contribuer à briser. C'est sûr qu'en ce qui concerne la difficulté des conditions de vie, elles se ressemblent dans les communautés rurales et dans les milieux urbains, mais c'est surtout le tissu social autour de ces femmes qui est très mince.

[Traduction]

    Excellent. Merci beaucoup.
    Nous cédons maintenant la parole à Irene Mathyssen pour sept minutes.
    Merci beaucoup, madame la présidente, et merci aussi à tous nos témoins. Vous êtes une mine d'information et d'expérience, et nous espérons pouvoir mettre cette information et expérience à contribution afin d'améliorer les choses.
    Je vais faire une confession, pour commencer. Il y a huit ans, j'étais membre de ce même comité, et nous avons parlé exactement du même sujet que celui dont nous parlons ici aujourd'hui. J'ai vraiment l'impression que nous avons échoué, que nous avons trahi la confiance de femmes très vulnérables et de leurs enfants.
    J'aimerais approfondir certains des sujets que vous avez abordés. Je souhaite pour commencer parler de l'importance du système judiciaire — les juges, les avocats, les professionnels de l'exécution de la loi — c'est-à-dire de la formation qui leur est offerte, la formation et les compétences qui tiennent compte des aspects culturels. Y en a-t-il suffisamment? Est-ce que nous pouvons en voir les résultats positifs?
    Est-ce que quelqu'un parmi vous pourrait commenter cette très importante formation?
    Je peux vous en parler du point de vue de la Couronne. Dans le cadre de notre projet de tribunal communautaire, nous avons eu d'énormes difficultés tout simplement pour convaincre un avocat de la Couronne, par exemple, de collaborer avec nous en se pliant à nos règles, ce qui en dit long sur la volonté de la Couronne de vraiment faire changer les choses pour le mieux. Nous avions réuni des données probantes selon lesquelles cette façon de faire réussit à décourager la criminalité et à aider les collectivités, et nous n'avons quand même pas pu trouver un avocat de la Couronne prêt à se joindre à nous.
    Je crois qu'il y a un écart important entre ce qui se passe dans la réalité, ce qu'il faudrait faire et ce qui, selon la Couronne, est une façon appropriée d'administrer la justice. Honnêtement, les intervenants de la Couronne ne s'intéressaient absolument pas, pour la plupart, aux tribunaux communautaires ni même à l'examen de ces problèmes.
    Pourquoi cette résistance? Est-ce que quelqu'un n'a jamais su dire pourquoi diable ils ne profitent pas de l'occasion qui leur est donnée?

  (1640)  

    C'est pour cette raison que j'ai parlé des victimes. Les avocats de la Couronne sont souvent d'avis qu'ils défendent les droits des victimes plutôt que ceux des accusés. Je crois que c'est une perspective problématique en soi. C'est pour cette raison que j'ai dit qu'il était vraiment important de changer notre façon de concevoir la justice, étant donné que les avocats de la Couronne eux-mêmes conçoivent leur rôle comme étant aux antipodes du rôle des avocats de la défense. Ce n'est pas nécessairement la meilleure façon de régler le problème, surtout quand c'est un problème permanent dont la cause est liée à tous ces enjeux sociaux et politiques. C'est comme si c'était « nous contre eux »; c'est comme s'ils disaient: « Je ne suis pas ici pour aider les accusés, je suis ici pour les mettre en prison. »
    Je ne dis pas cela pour tous les avocats de la Couronne, mais nous en connaissons qui ne veulent rien savoir et qui ne veulent même pas en parler.
    Merci.
    Monsieur Carroll, vous avez mentionné très brièvement que bon nombre des femmes ou des personnes incarcérées avaient des troubles du spectre de l'alcoolisation foetale. Sauriez-vous dire dans quelle proportion? Voilà ma première question.
    Les TSAF sont un traumatisme cérébral.
    C'est exact.
    Une personne malade ne devrait pas être emprisonnée. Elle devrait être placée dans un autre type d'établissement.
    Qu'est-ce qu'on vous répond quand vous parlez de cela?
    Il y a deux choses. En ce qui a trait aux TSAF, le principal problème que nous avons connu, dans le réseau, a trait aux évaluations. Ce n'est pas aussi simple qu'on le pense de diagnostiquer les TSAF.
    Un des autres témoins a mentionné que les problèmes étaient souvent très nombreux et complexes. Nous avons constaté que ces évaluations coûtent très cher à faire. Nous devons embaucher des médecins et des choses comme ça.
    Nous avons reçu du financement, mais il fallait vraiment beaucoup de temps pour poser un diagnostic personnalisé. C'est en fonction des entrevues qu'ils ont faites qu'ils ont supposé que la proportion de personnes affectées par le TSAF correspondait au moins à plus de la moitié des gens.
    Vous avez dit aussi qu'il s'agissait d'un traumatisme cérébral, et il y a un autre problème, c'est que les tribunaux qui s'occupent des affaires liées à la santé mentale ne s'occupent pas des personnes affectées par un TSAF, puisqu'il s'agit dans le fond d'un traumatisme cérébral. Ils ne voient pas cela comme un problème de santé mentale. Il en est peut-être tenu compte au moment de déterminer la peine, mais, à part cela, les personnes touchées sont traitées comme tout le monde.
    Nous pourrions mener une enquête nationale pour savoir combien parmi les personnes emprisonnées souffrent d'un TSAF; je crois que la proportion serait extrêmement élevée.
    Vous parlez des dépenses, c'est intéressant. J'ai déjà étudié la question des TSAF, et je sais que c'est très difficile. Les victimes ont une grande incapacité d'interagir avec les gens et même de se concentrer.
    En ce qui a trait aux coûts de l'incarcération — du fait qu'une personne se retrouve constamment placée dans la même situation, devant les tribunaux, et tout le reste —, est-ce qu'il ne serait pas juste que les coûts de l'un représentent une économie pour l'autre?
    Est-ce que quelqu'un a réfléchi à cela?
    Oui. C'est le principal problème, à mon avis. Cela tient en grande partie aux votes qu'il faut remporter. Je ne cible pas un gouvernement en particulier, mais cela fait partie de l'équation.
    L'autre aspect, c'est que les tribunaux communautaires et tout cela, ça coûte très cher à mettre sur pied. Comme vous l'avez dit, à long terme cela permet toutefois d'économiser des millions de dollars et d'améliorer la vie des gens, qui seront moins susceptibles de devenir un jour des victimes et d'avoir besoin, par exemple d'un soutien du revenu.
    Historiquement, le gouvernement en place et, en particulier, le gouvernement précédent, s'intéressait uniquement au court terme: quelle solution nous coûtera le moins cher? Il est plus facile pour un gouvernement de jeter les gens en prison que de créer des tribunaux innovateurs qui vont régler leur problème de manière adéquate.
    Vous revenez constamment sur le sujet de la prévention et, encore une fois, quand on travaille avec des personnes touchées par les TSAF, il faut parler de prévention. Vous avez également parlé de prévention quand il était question d'offrir l'accès à un logement approprié, à des services de garde d'enfants, à un emploi et à l'éducation.
    Combien de femmes, parmi celles qui aboutissent en prison viennent de collectivités rurales et éloignées où il manque de logements, où la violence familiale est répandue et où la seule issue consiste à s'établir en milieu urbain? Y a-t-il eu un suivi à ce chapitre?

  (1645)  

    Cette question m'était-elle adressée?
    Je n'ai pas de statistiques sur le sujet, mais j'ai moi-même interviewé plusieurs personnes — des centaines, probablement des milliers de personnes — et, oui, c'est très souvent le cas. Elles n'ont pas d'endroit où aller. Elles n'ont pas de source de revenus. Comme je l'ai dit, il y a des problèmes permanents qui sont, vous le savez...
    Oui, je comprends.
    Merci beaucoup.
    Nous donnons maintenant la parole à Bernadette Jordan, pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente, et merci aux témoins d'être venus ici aujourd'hui. J'ai vraiment beaucoup de questions.
    Je vais m'adresser pour commencer à Mme Shackelly. Vous avez dit à quel point il était important que les femmes puissent voir leurs enfants, pendant qu'elles sont incarcérées, et de nombreux autres témoins nous ont dit la même chose. C'est positif, non seulement pour la femme qui est incarcérée, mais aussi pour les autres femmes incarcérées dans le même établissement.
    Nous allons formuler des recommandations; que pouvons-nous faire pour nous assurer que les femmes ne sont pas séparées de leurs enfants? Quelle sorte de programme faudrait-il offrir? Je me demandais si vous pourriez nous en parler.
    Selon mes recherches, les programmes offerts dans les établissements afin de fournir un soutien sont limités. Je sais que lorsqu'un enfant naît, il y a un programme mère-enfant, il y a un accès. Je parlais des liens que la technologie permet, qui relient la femme incarcérée aux membres de sa famille.
    C'est une chose que de faire une visite en personne, mais, dans l'environnement carcéral, il ne fait aucun doute que les enfants peuvent être traumatisés par ce dont ils sont témoins. Je parlais de la technologie, c'est-à-dire, dans un certain sens, de ce que nous faisons ici. Vous voyez votre parent. Vous voyez vos enfants.
    Nous avons bien sûr besoin du soutien du ministère responsable de l'enfance et du développement des familles. Dans le cas des enfants placés, nous avons besoin du soutien de la famille d'accueil. Nous avons aussi besoin du soutien des grands-parents, si ce sont eux qui sont responsables des enfants. Cela concerne toutes sortes de catégories d'enfants, mais je crois que l'on ne va vraiment pas assez loin si on se contente d'attendre qu'une femme soit libérée de l'établissement. Il faut vraiment agir tout au long de la période d'incarcération de cette femme.
    D'accord. Merci.
    Madame Andrews, je vais discuter avec vous un instant, parce que vous avez parlé du traumatisme intergénérationnel et du combat qu'il faut mener pour se réinsérer, guérir et reprendre contact, grâce à des pratiques culturelles. Vous avez dit qu'il nous fallait revoir le rôle des aînées.
    Pourriez-vous en dire un peu plus à ce sujet et nous expliquer quel rôle vous confieriez aux aînées dans le système de justice, à moins que vous pensiez plutôt à leur rôle lorsque les femmes sont remises en liberté dans la collectivité?
    En fait, cela concerne tout ce que vous venez de dire. Ça commence pendant la procédure devant les tribunaux, ça continue après cette procédure et pendant l'incarcération. Je parle seulement de ce que je connais personnellement, et, selon mon expérience de travail auprès des aînées dans les établissements et dans la collectivité, elles sont un élément absolument essentiel.
    On leur demande à l'heure actuelle de remplir beaucoup de paperasse, ce qu'elles n'avaient pas pour objectif de faire, au départ. Ce n'est pas ça, leur rôle. Leur rôle consiste à travailler auprès des femmes, les délinquantes en établissement et dans la collectivité. Si vous parliez vous-même à certaines des aînées qui travaillent dans les établissements, elles vous diraient probablement qu'elles sont vraiment accablées de papiers à remplir, et que cela les empêche de travailler autant qu'elles le voudraient auprès des femmes.
    Merci.
    Je vais maintenant m'adresser à Jacinthe et à Claudie.
    Vous avez dit qu'il n'y avait pas de centres culturels inspirés de Buffalo Sage, mais des témoins du ministère de la Justice et du Service correctionnel du Canada ont affirmé que d'autres programmes étaient offerts aux gens qui n'avaient pas accès à ce type de centres. Connaissez-vous des programmes comme les Sentiers autochtones? Avez-vous eu de bons résultats avec de tels programmes? Pensez-vous que ce serait une bonne solution de rechange s'apparentant par exemple à des pavillons de ressourcement?

[Français]

     Nous avons répertorié, avec l'aide d'une chercheuse de l'Université Laval, certains programmes tels que Esprit du guerrier, les « seven sisters », Le Sentier autochtone, pour les hommes, à l'Établissement La Macaza, et In Search of Your Warrior.
    Je ne peux pas vous parler du taux de réussite de ces programmes. Au Québec, la difficulté vient du fait qu'il n'y a pas assez de détenues dans le seul pénitencier pour femmes de la province et que ces programmes n'y sont pas offerts. C'est l'information que j'ai. On nous dit qu'il faut passer, en moyenne, 238 jours en pénitencier avant d'avoir accès à ces programmes, quand ils sont disponibles. Je ne peux donc pas vous donner d'information sur l'efficacité de ces programmes, d'abord parce que je ne l'ai pas en main. Il nous aurait fallu plus de temps pour avoir davantage d'information. Ensuite, comme je vous l'ai dit, au Québec, peu de programmes sont offerts aux femmes détenues.

  (1650)  

[Traduction]

    Est-ce que cette information est accessible? Pourriez-vous la faire parvenir au Comité, c'est-à-dire l'envoyer à la greffière?

[Français]

     Oui, je peux le faire.
    Je vous en remercie.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Encore une fois, je tiens à remercier les témoins de s'être présentés aujourd'hui. De nouveau, je vais m'efforcer de prononcer votre nom le mieux possible: Darlene Shackelly, Audra Andrews, Lowell Carroll, Claudie Paul et Jacinthe Poulin.
    Merci beaucoup de vous être présentés.
    Nous allons suspendre la séance pendant deux minutes, pour laisser aux prochains témoins le temps de s'installer. Je demanderais à tous d'être prêts à reprendre les travaux dès que les nouveaux témoins seront là.
    Vous avez deux minutes.

    


    

    Nous reprenons nos travaux. Est-ce que vous pourriez aller discuter à l'extérieur ou revenir vous asseoir? Nous allons reprendre nos travaux.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais souhaiter la bienvenue à Mme Marie-Claude Landry, présidente, et à Mme Fiona Keith, avocate-conseil principale, toutes deux de la Commission canadienne des droits de la personne.
    Nous souhaitons également la bienvenue à Mme Teresa Edwards, membre du conseil d'administration de l'Association du Barreau autochtone au Canada.
    Nous donnons d'abord la parole aux représentantes de la Commission canadienne des droits de la personne, pour sept minutes.
    Je vais faire ma déclaration en français et en anglais, dans les deux langues.
    Merci beaucoup d'avoir invité la Commission canadienne des droits de la personne à participer à votre étude portant sur les femmes autochtones dans les systèmes juridique et correctionnel fédéraux.
    Permettez-moi de présenter ma collègue, Fiona Keith, avocate-conseil principale de la Commission. Elle est ici pour répondre, tout comme moi, à certaines de vos questions.

[Français]

     De 2009 à 2015, j'ai siégé à titre de première présidente indépendante des audiences disciplinaires tenues dans les établissements correctionnels fédéraux au Québec. Dans ce contexte, je devais statuer sur les accusations portées en établissement contre les détenus. Cette expérience jumelée à mon rôle actuel de présidente de la Commission canadienne des droits de la personne sont à la base de mon témoignage d'aujourd'hui.
    Les expériences que j'ai vécues sur le terrain confirment ce que la Commission constate depuis longtemps, notamment par l'entremise des plaintes qu'elle reçoit, à savoir que les groupes vulnérables sont assujettis à des traitements injustes lors de leur séjour dans un établissement correctionnel, et ce, de façon disproportionnée.
     Les femmes autochtones se trouvant dans un établissement carcéral ont souvent été victimes d'une combinaison toxique de racisme, de violence, d'agressions sexuelles et d'autres formes d'abus. De plus, leur lourd passé fait en sorte qu'elles souffrent souvent physiquement ainsi que psychologiquement, et cette souffrance contribue fréquemment aux motifs de leur incarcération. Or, une fois incarcérées et en manque de soutien, elles vivent des difficultés reliées à leur passé qui se manifestent par des comportements difficiles.
     En réponse à ces comportements, les services correctionnels n'ont recours à rien de mieux que l'isolement, alors que de nombreuses études en ont confirmé les effets dévastateurs. Ainsi, ces femmes autochtones, dont plusieurs sont victimes d'abus et souffrent de dépression, de choc post-traumatique, et ainsi de suite, se retrouvent isolées et privées de tout contact humain. Cela enclenche un cycle destructeur que le service correctionnel semble incapable d'arrêter pour le moment. Ce cycle prend souvent fin tragiquement et a même parfois des conséquences fatales.

  (1655)  

[Traduction]

    En 2003, la Commission a publié un rapport intitulé Protégeons leurs droits: Examen systémique des droits de la personne dans les services correctionnels destinés aux femmes purgeant une peine de ressort fédéral. Le rapport comprenait 19 recommandations, et les tribunaux le citent toujours dans leurs décisions.
    La première recommandation que j'aimerais soumettre à votre attention, c'est que le Service correctionnel du Canada prenne des mesures immédiates pour régler le problème touchant le nombre disproportionné de femmes autochtones condamnées à une peine de ressort fédéral qui sont classées au niveau de sécurité maximale; pour ce faire, il doit immédiatement réévaluer la classification de toutes les femmes autochtones actuellement classées au niveau de sécurité maximale à l'aide d'un outil de classification tenant compte du sexe et, ensuite, en changeant les politiques générales selon lesquelles les femmes classées à un niveau de sécurité maximal ne peuvent être placées dans un pavillon de ressourcement.
    Quinze ans plus tard, sur nos 19 recommandations, la plupart n'ont toujours pas été mises en oeuvre. On peut dire la même chose des recommandations intégrées à de nombreux autres rapports.
    Il y a trois ans, la Commission a organisé une série de tables rondes pour réunir des femmes autochtones de toutes les régions du Canada. Nous avons des copies de ce rapport; vous pourrez tous en obtenir dans l'une ou l'autre langue.
    Ces tables rondes nous ont permis de nous renseigner sur les difficultés auxquelles les femmes autochtones font face lorsqu'elles se retrouvent dans le système de justice. Les participantes ont cerné 21 obstacles à l'accès à la justice, entre autres, la complexité des processus juridiques, les obstacles linguistiques, l'absence de connaissances, l'absence de soutien et l'absence de services juridiques et d'autres ressources.
    Elles ont aussi exprimé une profonde méfiance à l'égard des services de police et du processus judiciaire. Lorsqu'elles sont victimes d'un crime, elles ne se sentent pas en sécurité à l'idée de demander l'aide de la police. Cela pourrait expliquer pourquoi une petite fraction seulement des plaintes de discrimination que la Commission reçoit sont déposées par des détenues autochtones incarcérées dans le système fédéral.
    Soyons honnêtes: une femme autochtone qui se retrouve en prison est destinée à être invisible, tenue à l'écart, déshumanisée et oubliée. Nous les avons oubliées, puisque les constatations qui ont été faites il y a 10, 15 ou 20 ans sont toujours une réalité. Rien n'a été fait. Ces femmes continuent à être ignorées.
    Les femmes autochtones sont toujours classées à des niveaux de sécurité plus élevés, étant donné que les outils et processus de classification ne tiennent pas compte de leurs caractéristiques uniques. Elles sont toujours placées en isolement à une fréquence disproportionnée, malgré leurs antécédents de traumatisme et de violence. Elles n'ont toujours pas un accès approprié à des services pertinents en santé mentale ou à des mesures de soutien culturel et spirituel. Elles vivent toujours — plus vivement, en fait, entre les murs de la prison — du harcèlement, de la violence, de la misogynie, tout comme elles en vivaient avant leur incarcération. Les femmes autochtones affichent un taux de récidive plus élevé parce que le système correctionnel ne leur permet pas de se réadapter et de se réinsérer dans la société, et qu'en outre, elles n'ont pas accès à des mesures de soutien après leur mise en liberté.
    Étant donné le très petit nombre de recommandations qui ont été mises en oeuvre, la seule façon de provoquer un changement, c'est de s'adresser aux tribunaux. Dans le cas des femmes autochtones, c'est préjudiciable à deux égards. Le système de justice intimide la plupart des gens, et davantage encore les femmes autochtones qui n'ont pour ainsi dire pas accès à une aide quelconque pour s'orienter dans un processus qui peut être long, coûteux et très stressant.
    Malgré cela, je reste optimiste et je crois que les politiciens désirent sincèrement faire des changements pour le mieux. J'espère que le gouvernement en place va enfin mettre en oeuvre les nombreuses recommandations formulées au fil des ans.
    Cela dit, étant donné ce que les femmes autochtones nous ont dit, voici comment on pourrait améliorer l'expérience des femmes autochtones au sein du système fédéral et du système correctionnel.
    Premièrement, il faut établir un climat de confiance. Les femmes autochtones qui ont été victimes d'un crime doivent se sentir en sécurité lorsqu'elles le dénoncent.
    Deuxièmement, il faut fournir un soutien et une aide là où il y a des femmes autochtones. Les services doivent aller jusqu'à elles: dans leur collectivité, dans un centre urbain, au poste de police, devant un juge, dans un centre de détention provisoire, dans un établissement fédéral et au moment de leur mise en liberté.

  (1700)  

    Parfait. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Teresa Edwards. Vous avez sept minutes.
    [Le témoin s'exprime en micmac.]
    Je viens de dire que je m'appelle Teresa Edwards, que je suis membre de la nation micmaque et que mon nom traditionnel signifie jeune femme du feu.
    Je tiens à saluer les Algonquins, étant donné que nous nous réunissons aujourd'hui sur leur territoire et parce que je suis leur invitée aujourd'hui. Je tiens aussi à remercier le Comité de me donner l'occasion de témoigner sur l'amélioration de l'expérience des femmes autochtones dans les systèmes juridique et correctionnel fédéraux.
    Je comparais aujourd'hui en tant que membre du conseil d'administration de l'Association du barreau autochtone au Canada, une organisation nationale sans but lucratif constituée en 1994 et composée d'avocats, d'universitaires et d'étudiants en droit de partout au pays. Les objectifs de l'ABA sont de promouvoir les enjeux et les préoccupations des Autochtones relativement au système de justice et de représenter, à l'échelon national, les Autochtones de façon générale. L'ABA a aussi été reconnue par des gouvernements, des cours et des tribunaux dans de nombreux cas. J'espère que vous tiendrez compte de nos recommandations aujourd'hui.
    De plus, j'ai mentionné que je témoigne aussi en tant qu'avocate-conseil et directrice générale de la Fondation autochtone de l'espoir, une organisation autochtone nationale qui tente de sensibiliser les Canadiens au sujet des répercussions continues des pensionnats sur les survivants, leurs familles et leurs collectivités.
    Le dernier pensionnat a fermé ses portes en 1996; nous sommes donc une société au sein de laquelle des générations d'Autochtones ont été victimes de racisme au chapitre des politiques, des lois et des systèmes juridique et correctionnel. Les survivants ont été victimes de toutes les formes de violence — physique, psychologique et spirituelle —, et ils n'ont souvent pas bénéficié d'une éducation appropriée ni n'ont pu acquérir les aptitudes à la vie quotidienne nécessaires pour réussir comme adulte ou parent. Ces expériences ont contribué de façon importante aux nombreuses conditions socioéconomiques auxquelles ces personnes sont confrontées aujourd'hui, y compris une pauvreté marquée et des démêlés avec les systèmes juridique et correctionnel fédéraux.
    J'ai apporté un rapport de recherche à l'intention du Comité aujourd'hui. J'ai seulement des exemplaires en anglais avec moi. J'ai aussi des copies en français que je remettrai au Comité. Demain, je vais demander à quelqu'un de mon bureau de vous les apporter.
    La FAE s'acquitte de son mandat en fournissant des programmes et des ressources pédagogiques aux écoles à l'échelle du pays. Nous avons mis en place des programmes dans les trois territoires, et nous tentons actuellement de conclure un accord avec le gouvernement de l'Alberta et, aussi, avec le gouvernement de l'Ontario relativement à leurs programmes scolaires de la maternelle à la fin du secondaire, l'objectif étant d'y inclure des cours d'histoire appropriés sur les Autochtones au Canada, y compris les pensionnats, la rafle des années 1960 et les problèmes encore d'actualité liés à la protection de l'enfance.
    Nous procédons ainsi pour expliquer les liens du passé avec les problèmes sociaux actuels et renforcer l'empathie et la reconnaissance, tout comme nous honorons les vétérans en parlant des guerres, d'Auschwitz ou encore d'autres sujets dans les cours d'histoire. Il faut faire la même chose pour les aspects sombres de l'histoire canadienne.
    Nous utilisons l'art et une série d'expositions pour mettre en lumière les actes répréhensibles du passé de façon à ce que les gens puissent comprendre où la société a erré dans son traitement des Autochtones.
    Je veux aussi parler des répercussions sur les femmes qui expliquent leurs démêlés avec le système de justice.
    Il faut tout de même dire aux Canadiens et aux représentants du système de justice qu'il y a un autre côté à l'histoire du Canada de façon à ce qu'on puisse régler le problème du racisme.
    Il y a des problèmes en ce qui concerne les interactions avec les forces de l'ordre. Au moment de la première interaction, si la personne n'est pas autochtone ou n'est pas racialisée, elle a souvent droit à 5 ou même 10 avertissements. C'est quelque chose que j'ai constaté personnellement en 25 ans d'expérience comme avocate, grâce à mes visites dans plus de 110 collectivités et en oeuvrant en tant qu'avocate pour l'AFAC, l'Association des femmes autochtones du Canada, et l'APN. Récit après récit, j'entends parler d'enfants... Un groupe de cinq enfants ont été arrêtés par des policiers. Les enfants non autochtones ont été ramenés à la maison, chez leurs parents, et ont eu droit à une simple réprimande, tandis que les autres ont été amenés au poste de police et immédiatement accusés. C'est ainsi que ça commence pour eux.
    Il y a toute cette chaîne de survivants des pensionnats, des enfants qui sont des survivants d'un pensionnat ou qui sont des enfants de survivants. Ces personnes ont peut-être eu des démêlés avec des représentants de l'État, ils ont peut-être été retirés de leur famille, principalement en raison de la pauvreté, puis, ces enfants ont des démêlés à leur tour avec le système de justice, et le cycle recommence.
    Il y a du racisme à chaque étape. Je veux vraiment que le Comité le comprenne bien, dans la mesure où il faut tenir compte de toutes les répercussions des pensionnats sur les Autochtones. Lorsqu'on envisage la solution, il faut tenir compte de ce contexte.

  (1705)  

    J'adore l'anecdote de « Robert qui frappe Marie », qui devient « Marie est une femme victime de violence ». On cherche des solutions pour Marie, la femme victime de violence, et Robert n'est plus dans l'équation.
    Il faut se pencher sur le problème du racisme au sein du système de justice, et ce, de tous les points de vue, avant qu'on puisse penser aux solutions.
    Je suis vraiment d'accord avec les commentaires qui ont été formulés avant les miens. J'ajouterais tout simplement que, pendant plusieurs générations, les communautés autochtones ont dû composer avec les répercussions des pensionnats et l'imposition de politiques, de lois et de systèmes étrangers qui ont perturbé nos nations et ont contribué aux difficultés socioéconomiques dont j'ai parlé.
    Nous avons été victimes de violations des droits de la personne, et le processus de colonisation des femmes autochtones s'est poursuivi, leurs enfants étant les plus durement touchés par ces violations. On nous a retiré des terres traditionnelles et certains de nos rôles et responsabilités traditionnels en ce qui concerne notre participation aux décisions politiques et sociales. Toutes ces choses sont des facteurs qui ont contribué au préjudice subi par nos familles, nos cultures, nos traditions et nos langues. Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes des Nations unies a constamment reconnu que les femmes autochtones, en particulier, sont confrontées aux multiples formes de discrimination dont j'ai parlé.
    Au Canada, les femmes autochtones détenues sont plus susceptibles de faire l'objet d'isolement non sollicité et d'y rester plus longtemps que les femmes non autochtones. Ces prisonnières sont plus jeunes que leurs homologues non autochtones, avec une moyenne d'âge de 29 ans, comparativement à 32 ans pour les femmes non autochtones. Nous savons que les femmes autochtones représentent 5 % de la population féminine au Canada, mais 39 % de la population carcérale féminine. Nous savons aussi qu'elles font l'objet de plus de 50 % des placements en isolement à l'échelon fédéral.
    J'ai aussi entendu des gens parler des programmes pour les mères et les filles. En réalité, j'ai vu ce à quoi ces programmes sont censés ressembler et la façon dont ils doivent être mis en oeuvre, mais j'ai aussi rencontré des femmes qui m'ont dit avoir droit à des visites de seulement 30 minutes par semaine avec leur nouveau-né.
    Je pourrais vous fournir de nombreux cas. Je sais que vous allez tous recevoir le rapport que j'ai déjà présenté, alors je vais passer directement à mes recommandations.
    Teresa, nous devons passer aux questions, parce que votre période de sept minutes est écoulée. Nous avons seulement le temps pour une série de chaque groupe.
    Je vais commencer en accordant sept minutes à Emmanuella Lambropoulos.
    Merci d'être là parmi nous aujourd'hui et de répondre à nos questions. Ma première question est destinée à Teresa.
    Voulez-vous formuler à notre intention vos principales recommandations liées à la façon dont nous pouvons améliorer la situation?
    Merci.
    Premièrement, il faut éliminer les dispositions juridiques qui sont des sources de discrimination contre les femmes autochtones, comme on l'a mentionné. Ensuite, il y a la formation obligatoire pour tous les responsables de l'application de la loi, les juges et les employés du Service correctionnel du Canada au sujet des Autochtones, et, plus particulièrement, de la situation des femmes autochtones.
    J'essaie de fournir une formation de sensibilisation culturelle aux corps policiers depuis 13 ans. Je suis heureuse de déclarer que j'ai rencontré un groupe d'agents de police à Deerhurst, il y a deux semaines, et qu'il y a eu une percée. Il y a du changement, mais il faut vraiment que ça se passe à plus grande échelle.
    Ensuite, il faut s'assurer de respecter et d'appliquer les principes de l'arrêt Gladue. Je ne le dirai jamais assez. Les gens cochent les cases, mais aucun des principes établis dans l'arrêt Gladue n'est utilisé par les avocats qui représentent des Autochtones.
    Il y a ensuite la facilitation et l'application des articles 81 et 84 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition au profit des prisonnières autochtones criminalisées.
    J'entends parler du centre Buffalo Sage et d'autres endroits où des places sont données à des femmes non autochtones. Les femmes autochtones affichent des taux très élevés d'incarcération, mais, en raison de leur cote de sécurité élevée, elles n'ont pas accès à ces pavillons de ressourcement. Je suis d'accord avec l'idée qu'il faille se pencher sur la classification et les transfèrements, lorsqu'il y a des besoins d'ordre médical, parce que ces femmes sont aux prises avec d'importants problèmes de santé mentale et de TSPT.
    Il faut s'assurer que les femmes ont accès à des programmes adaptés à leur culture et des services spirituels pendant leur incarcération et il faut prendre toutes les mesures nécessaires pour régler le problème de la séparation des enfants autochtones et de leurs parents.
    Pendant l'incarcération, il faut fournir des mesures de soutien et du counseling adéquats relativement à la santé mentale et au bien-être et s'assurer qu'il y a des stratégies de guérison et d'adaptation pour composer avec les problèmes à l'extérieur.
    Et voici un enjeu énorme: comme on l'a déjà dit, il faut soutenir les femmes autochtones qui veulent parfaire leur formation. Les femmes autochtones affichent de faibles taux d'achèvement de programmes durant leur incarcération. Il faudrait en outre leur permettre d'acquérir des aptitudes à la vie quotidienne et leur fournir d'autres cours de formation qui les aideront au moment de leur réinsertion.
    Nous savons maintenant, grâce aux statistiques, que les femmes autochtones affichent des niveaux de scolarité plus élevés que les hommes autochtones, mais cela ne se traduit pas au chapitre des revenus. Il faut changer cette situation. Nous avons besoin de programmes de soutien qui aideront les femmes autochtones à participer à la population active et à avoir accès à un emploi au moment de leur libération. Plus particulièrement, les métiers sont une excellente option que nos femmes peuvent choisir, afin que leur premier emploi leur permette de gagner un revenu stable et de subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants.
    Il faut aussi aider les femmes autochtones à trouver des logements sécuritaires et abordables pour elles et leurs enfants au moment de leur libération. Nous entendons des récits de femmes à qui on remet quatre billets d'autobus. Elles montent sur un autobus, se rendent le plus loin possible et commettent à nouveau un crime afin de pouvoir revenir en prison et avoir un endroit où vivre. Il n'y a aucun plan en place.
    Il faut mettre en place ces plans pour les femmes et définir des plans pour assurer la sécurité des femmes et des enfants qui fuient des situations violentes. Il faut ajouter à ça des mesures de soutien à la transition appropriées et des programmes permettant d'assurer leur bien-être physique et psychologique au moment de leur libération.
    Merci de l'occasion que vous m'avez offerte.

  (1710)  

[Français]

     Madame Landry, pouvez-vous nous parler du cercle vicieux que vous avez mentionné, ce cycle qui ne s'arrête jamais?
    Pouvez-vous nous dire ce que vous recommandez au gouvernement pour aider à mettre fin à ce cycle?
    Je vous remercie de votre question.
    Ma première recommandation est simplement

[Traduction]

arrêter d'étudier et commencer à mettre en oeuvre des choses.

[Français]

    Il faut arrêter de mener des études. Des études sont effectuées depuis plusieurs années. Il y a eu l'étude de Mme Arbour et plusieurs autres auparavant. Il y a eu celle de la Commission canadienne des droits de la personne en 2003 et, depuis, il y en a eu bien d'autres.
    Il y a eu des recommandations, mais elles n'ont pas été mises en oeuvre. C'est la priorité. C'est le message le plus important que la Commission veut faire passer aujourd'hui.

[Traduction]

    Combien de temps me reste-t-il?
    Il vous reste trois minutes et demie.
    Mme Emmanuella Lambropoulos: Je vais céder le reste de mon temps à Eva.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie nos témoins de leurs présentations.
    Madame Landry, j'aimerais vous poser une question à propos d'une chose à laquelle j'ai pensé.
    Je n'ai pas trouvé de preuves concrètes de différences en ce qui touche l'expérience des femmes autochtones quand elles doivent traiter avec des agents de police de sexe féminin ou masculin. Savons-nous si les femmes autochtones qui sont victimes de racisme et de misogynie et qui font l'objet de discrimination de la part de la police sont mieux traitées par les agents de police de sexe féminin? Selon votre expérience ou d'après les études que vous avez consultées, les officiers de police de sexe féminin sont-elles plus compréhensives et mieux équipées pour intervenir auprès des femmes incarcérées?
    Je n'ai pas de chiffres, je n'en ai aucun. Il n'y a pas d'étude...
    Je n'ai pas besoin de chiffres. Je veux que vous me répondiez selon votre expérience, selon ce que vous en savez.
    Selon mon vécu, selon mon expérience à la Commission à titre de présidente, il y a effectivement une différence dans la façon de considérer et de gérer les choses de la part des policiers de sexe féminin à l'égard des détenues féminines. C'est clair. La réceptivité ou la connexion entre les deux groupes est beaucoup plus facile qu'elle ne l'est entre les policiers hommes et les femmes détenues.
    Nous pourrions donc dire que les policiers de sexe féminin n'ont pas le même genre de préjugés envers les communautés autochtones.
    Je ne sais pas si c'est une question de préjugés ou si c'est plutôt une différence d'approche. La relation est peut-être plus facile entre femmes. Comme je le disais dans mes remarques, il faut tenir compte du traumatisme historique des femmes, souvent victimes d'abus de toutes sortes, par exemple de violence physique et psychologique. Généralement — et je ne veux pas tomber dans des stéréotypes — cette violence subie par les femmes de la part d'hommes, de conjoints, de la gent masculine. C'est évident que la relation d'autorité des agents de police ou des agents du service correctionnel est plus difficile aussi. La connexion, ou la confiance nécessaire, le trust, comme je le disais dans mes remarques, n'y est pas.

  (1715)  

    Madame Edwards, voulez-vous ajouter quelque chose?

[Traduction]

    J'aimerais ajouter que la violence sexuelle dont les femmes ont été victimes s'ajoute à tout cela. Oui, bien sûr, il est facile de créer une relation de confiance lorsque des femmes interagissent avec des femmes autochtones.
    Merci de votre exposé.
    Teresa, nous allons prendre vos renseignements et faire traduire tout ça afin que tous les membres puissent consulter l'ensemble de vos recommandations. Vous aviez quelque chose de très bien à nous fournir. Nous allons nous assurer que tout le monde y a accès.
    Nous allons maintenant passer à Rachael Harder, pour sept minutes.
    Bienvenue. Ma première question est destinée à Mme Landry.
    Pouvez-vous formuler des commentaires sur l'aspect de la prévention et nous dire quelles seraient vos suggestions pour le Comité de façon à ce que nous puissions aider les femmes à prendre leur vie en main afin qu'elles ne soient plus confrontées à l'incarcération d'entrée de jeu. Plutôt que de mettre l'accent sur la période « durant l'incarcération » ou « après l'incarcération », pourquoi ne pas tout simplement prévenir tout ça, habiliter ces femmes autochtones afin qu'elles puissent vivre des vies merveilleuses?
    Permettez-moi d'être très précise. Je veux connaître votre point de vue là-dessus. Est-il préférable de le faire grâce à d'importants programmes gouvernementaux ou serait-il préférable d'habiliter des membres de la collectivité et des organisations communautaires à faire le travail sur le terrain?

[Français]

     Certainement.

[Traduction]

Selon moi, il faut habiliter la communauté, bien sûr, et accroître le niveau de sensibilisation en plus de donner aux personnes les ressources et l'aide dont elles ont besoin pour s'informer et relever les différents défis auxquels elles sont confrontées. C'est assurément une des mesures nécessaires pour éliminer la discrimination systémique. Il faut lutter contre la discrimination systémique dont ces femmes sont victimes.
    L'un des témoins que nous avons rencontrés, dont l'organisation fait du travail incroyable en Saskatchewan, compte, parmi ses principaux clients — j'imagine qu'on peut le dire ainsi —, ou encore parmi les personnes et les groupes avec lesquels l'organisation travaille, de jeunes mères autochtones. L'organisation oeuvre auprès de ces femmes afin de les habiliter et de les aider à prendre soin de leurs enfants, à cuisiner des repas, à trouver un logement sécuritaire et à trouver le bonheur dans leur vie. Grâce à ce travail, ces femmes aiment la vie; elles peuvent redonner à la société et elles vont remarquablement bien. Selon moi, c'est un excellent exemple de prévention. On investit dans ces femmes et on les habilite afin qu'elles puissent vivre d'excellentes vies.
    Ce programme a été réalisé par l'intermédiaire de ce qu'on appelle une « obligation sociale » ou une « obligation à impact social », ce qui signifie que cette organisation fait ce travail et, à la lumière des résultats obtenus, elle reçoit un financement public ainsi qu'un financement privé lui permettant de continuer.
    Un tel modèle pourrait-il être utilisé dans les collectivités? Selon vous, une telle chose pourrait-elle être bénéfique, si nous décidions d'élargir ces types d'initiatives afin d'aider davantage les femmes?
    Je vais laisser ma collègue répondre. La première chose qui me vient à l'esprit, c'est que, selon moi, il faudrait demander aux collectivités elles-mêmes.
    Si vous me permettez, j'aimerais répondre rapidement à cette question. La majeure partie des Autochtones vivent à l'extérieur des réserves, et donc, lorsqu'il est question de collectivités, on parle des collectivités au Canada, dans les provinces et dans les territoires. C'est ça, la réalité. Les Autochtones vivent en milieu urbain. Un très faible pourcentage d'Autochtones vivent dans les réserves, alors dire qu'on pourrait offrir des programmes dans les collectivités...
    Je comprends ce que vous dites. Les collectivités autochtones qui ont déjà un lien de confiance peuvent aider les femmes à se prendre en main. C'est parfait. J'y crois beaucoup. Je travaille bénévolement auprès des femmes autochtones qui vivent dans des refuges pour sans-abri afin de renforcer leur littéracie financière, de les encourager à retourner aux études et de les aider à trouver un logement et à parfaire leur éducation. Cependant, avant tout, le plus important, c'est de les aider à trouver un emploi, parce que la réalité, c'est qu'on a beau avoir suivi toutes les études qu'on veut, et c'est le cas de beaucoup de femmes autochtones... J'ai six diplômes, et j'ai la chance d'avoir une belle carrière d'avocate, mais beaucoup de femmes autochtones ont plusieurs diplômes et vivent de l'aide sociale parce qu'elles n'ont pas réussi la transition économique leur permettant de trouver un emploi.
    Il faut soutenir les femmes pour les aider à trouver un emploi. Elles ont parfois l'éducation nécessaire, mais elles vivent dans une situation de violence. Elles peuvent se tourner vers une maison d'hébergement ou de transition, mais, après un mois, elles n'ont plus d'argent, alors elles retournent dans cette situation violente. Si vous donnez à une femme un emploi, si vous l'aidez à trouver un emploi, même dans une situation de violence, elle peut mettre de l'argent de côté, avoir un plan, et ensuite fuir la violence. C'est un aspect précis, mais il faut tout de même des mesures de soutien holistiques qui s'attaquent à toute la violence, la violence sexuelle, et tous les autres problèmes rencontrés par les femmes.
    Le dernier pensionnat a fermé ses portes en 1996. Ce n'est pas il y a 100 ans. C'est il y a 20 ans.

  (1720)  

    Je suis désolée, mais, pour ce qui est de cette déclaration, je tiens à préciser pour le compte rendu que je ne crois pas que nous voulons soutenir la violence passée. Nous voulons soutenir les victimes après cette violence.
    Non, je ne dis pas... Je suis désolée. C'est simplement parce que j'essaie d'aborder ce point. Ce que je dis, c'est qu'il faut fournir des mesures de soutien...
    Mme Rachael Harder: Oui.
    Mme Teresa Edwards: ... liées à la violence dont elles ont été victimes, par exemple, en leur offrant du counseling.
    La situation de la protection de l'enfance est l'exemple parfait. Les familles perdent leur enfant principalement en raison de la pauvreté. Les gens ne peuvent pas subvenir aux besoins de leur enfant ou n'ont pas un logement comptant une chambre à coucher pour leur fille et une autre pour leur garçon, et, une fois que les enfants ont cinq ans, il faut des chambres à coucher différentes. Les responsables de la protection de l'enfance viennent et disent: « Nous sommes désolés, vous ne pouvez pas subvenir adéquatement aux besoins de votre enfant, alors l'État s'en occupera ». L'enfant est alors confié aux soins de l'État, puis nous donnons à une autre famille 2 000 $ par mois pour élever l'enfant de quelqu'un d'autre, tandis que, si l'État fournissait les mesures de soutien... C'est ce dont je parle. Si un soutien avait été fourni à cette personne avant, elle n'aurait pas perdu la garde de son enfant.
    C'est semblable à d'autres mesures de soutien à l'intention des femmes autochtones. Il faut leur offrir une approche holistique en matière de counseling, de bien-être, de formation de littéracie financière, de soutien et d'encouragement relativement aux études et de moyens et d'occasions liés à la garde des enfants, ce qui est crucial. C'est la première des choses. Au total, 80 % des femmes autochtones sont des mères célibataires, alors on peut offrir tous les programmes qu'on veut, s'il n'y a pas de services de garde d'enfants, ces femmes ne peuvent pas saisir ces occasions parce qu'elles doivent prendre soin de leurs enfants.
    De plus, dans notre culture, nous prenons soin de nos parents, alors nous sommes responsables des deux, et ces femmes doivent tout faire seules.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Irene. Vous avez sept minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup d'être là et, encore une fois, de nous fournir les renseignements dont nous avons besoin.
    Teresa, vous donnez l'impression que c'est simple. Tout ce qu'il faut faire, c'est de mettre en place toutes ces mesures de soutien. C'est tout à fait logique. C'est humain. C'est destiné à l'être humain. On respecte ainsi l'expérience des personnes. Pourquoi ne le faisons-nous pas?
    Eh bien, c'est rentable de mettre des gens en prison.
    C'est aussi simple que ça?
    Eh bien, si on calcule tout l'argent dépensé pour appliquer la loi et incarcérer des gens, et qu'on pense aux coûts associés au maintien d'une personne en établissement, ce n'est pas une solution avantageuse pour les Canadiens. Quelle est la réponse? Pourquoi est-ce que nous ne faisons pas les choses différemment? Ça paraît peut-être plus coûteux dans l'immédiat, mais ne serait-ce que sur un horizon de cinq ans, des investissements pour les femmes et les enfants dans ce domaine seraient bénéfiques d'un point de vue financier, social et ainsi de suite.
    C'est ce qu'on constate lorsqu'on regarde les 30 ans d'études et les millions de dollars qui ont été consacrés à ces choses. Si ces fonds avaient été affectés à des programmes pour les femmes autochtones et la garde des enfants, la situation serait très différente.
    C'est intéressant de vous entendre parler d'investissements pour les femmes et les enfants. C'est quelque chose que l'on sait depuis des générations lorsqu'il est question des pays en développement. Si on habilite les femmes et qu'on leur fournit des systèmes de soutien, elles prendront soin de leur enfant, et la collectivité ira beaucoup mieux, mais nous ne semblons pas capables de faire la même chose ici. C'est frustrant. C'est très frustrant.
    Vous avez parlé du programme scolaire. J'ai été enseignante, et je crois beaucoup au pouvoir de l'éducation.
    Pour ce qui est du programme que vous avez décrit en Ontario, en Alberta et dans les territoires, est-il offert actuellement? Quand le sera-t-il? L'avez-vous vu à l'oeuvre?

  (1725)  

    Oui, il est déjà en place dans les territoires. La Fondation autochtone de l'espoir, pour laquelle je travaille, existe depuis environ 20 ans, et le programme dans les Territoires du Nord-Ouest est offert dans les écoles depuis 5 ou 10 ans, si je ne me trompe pas. En Alberta, nous ne faisons que commencer. En Ontario, nous le faisons de manière fragmentaire, parce que nous n'avons pas signé d'entente encore avec le gouvernement ontarien. Nous n'avons pas fait d'annonce pour ce qui est de l'Alberta. C'est en cours, et ce, de façon très concrète.
    Nous espérons pouvoir annoncer des produits livrables au cours de la prochaine année ou des deux prochaines années et préciser la façon dont cette initiative permet de changer la société, parce que les enfants sont les dirigeants de demain. Ce seront les prochains médecins, enseignants, avocats et juges, alors il faut les sensibiliser au fait que les Autochtones ne viennent pas tout simplement de milieux socioéconomiques problématiques.
    Ce que j'enseigne aux femmes avec qui je travaille et de qui je suis la mentore, c'est que, si on trace une ligne du temps des 15 000 dernières années, pendant 14 850 années, les femmes autochtones étaient fortes. Les collectivités étaient florissantes, les systèmes socioéconomiques, commerciaux et de justice étaient solides, et les gens fonctionnaient bien. C'est seulement depuis les 150 dernières années que nous rencontrons ces problèmes, et cela découle en grande partie des pensionnats. Ce n'est pas dans notre ADN de vivre de l'aide sociale, d'être toxicomane ou de nous retrouver en prison, alors nous pouvons changer la situation. Nous pouvons réécrire l'histoire. Nous pouvons créer une nouvelle voie pour les nôtres.
    Vous avez donc constaté des résultats positifs dans les territoires, là où le programme est en place depuis un certain temps?
    Absolument. Dans les territoires, il y a des taux élevés d'Autochtones qui travaillent pour le gouvernement et qui doivent parler la langue. C'est une revitalisation culturelle. Cela donne plein de résultats positifs.
    C'est un respect pour la culture qu'on sert.
    Mme Teresa Edwards: Oui.
    Mme Irene Mathyssen: N'est-ce pas là une notion intéressante? Merci.
    S'il me reste du temps, je veux vous parler, Marie-Claude.
    Vous avez parlé d'isolement. Howard Sapers a produit un rapport sur cet enjeu il y a très longtemps. Autant que nous sachions, le gouvernement actuel a décidé qu'il n'y aura plus d'isolement. Est-ce ce qui se produit vraiment ou est-ce que les gens en sont encore victimes?
    Pour commencer, il faut dire qu'il y a de nombreuses façons d'isoler quelqu'un. Les gens doivent le comprendre. Dans les établissements fédéraux, on peut utiliser différentes expressions pour en parler, mais c'est toujours la même chose.
    Prenons un exemple: lorsque des gens risquent de s'automutiler, qu'est-ce que les établissements vont faire? Ils envoient ces personnes dans une cellule où elles feront l'objet d'une surveillance, mais ces cellules se trouvent dans l'unité d'isolement, ce qui signifie que les personnes n'ont plus de contact avec des êtres humains. C'est un peu comme si elles se trouvaient en isolement, en fait, et cela crée beaucoup de problèmes.
    Il y a aussi ce qu'on appelle l'« isolement préventif ». C'est lorsqu'on croit que des détenus constituent un risque pour eux-mêmes ou pour l'établissement. C'est une autre façon. Qu'est-ce que les établissements vont faire? Ils appellent ça l'isolement préventif, mais il n'y a pas de surveillance, ou à peu près pas. Ces personnes se retrouveront en unité d'isolement et elles n'auront pas de contact avec des êtres humains, ou à peu près pas.
    Il y a aussi les mesures disciplinaires. Après qu'un détenu a reçu une sanction pour, par exemple, un mauvais comportement, une personne de l'administration peut décider de l'envoyer en isolement. Dans ce cas-là, l'isolement est punitif.
    Ce sont des choses qu'on voit encore.
    Irene, il vous reste 15 secondes.
    Le Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes a recommandé que les prisonnières aient des gardes de sexe féminin: plus d'hommes, en raison du harcèlement et du possible harcèlement sexuel. Avez-vous entendu des plaintes à cet égard? Est-ce quelque chose que vous avez vécu?

  (1730)  

    Veuillez répondre très rapidement, s'il vous plaît.
    Oui, nous avons reçu des plaintes de femmes détenues concernant le recours à des gardes de sexe masculin dans leur établissement.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à Sean Fraser, qui a le temps de poser une question.
    C'est parfait. Je croyais que j'avais fini...
    C'est ce que je pensais aussi.
    Des voix: Ah, ah!
    Merci. Vos propos sont puissants et émouvants, et j'ai hâte d'inclure votre témoignage dans notre rapport et nos recommandations.
    J'ai une question pour vous, madame Edwards. À la lumière du témoignage de Mme Landry, la question de la confiance envers le système est de toute évidence bien réelle. Les Autochtones et les femmes autochtones sont grandement surreprésentées au sein de la population carcérale.
    J'ai remarqué que, en Nouvelle-Écosse, l'arrivée du premier avocat micmac au sein du système remonte à 1993. A-t-on l'occasion d'inclure plus d'Autochtones et de femmes autochtones en particulier, dans le système? Est-ce une façon de renforcer le genre de confiance qui fait si cruellement défaut actuellement?
    Je crois que oui, et il faut aussi le faire au sein des jurys et dans tous les aspects du système. Il faut que notre présence soit reflétée dans chaque aspect de la fonction publique, y compris dans le système de justice, alors cela peut aider.
    Merci beaucoup.
    Encore une fois je tiens à remercier Marie-Claude Landry, Fiona Keith et Teresa Edwards d'avoir participé aujourd'hui.
    Avant de conclure, même si j'ai terminé avec les témoins, je veux dire une chose. Le budget a été déposé. Dans le passé, nous avons toujours invité la ministre, alors je veux obtenir un consensus. Tout doit être retourné à la Chambre d'ici le 21 mars. Nous devons aussi tenir compte du fait que le jour de dépôt du budget est le 27 février. Par conséquent, il y a une journée où nous ne siégerons pas. Je me demande simplement si je peux obtenir votre approbation afin d'envoyer une invitation à la ministre.
    Avons-nous une autre réunion avant cela?
    Pardon?
    Y a-t-il une plage horaire libre?
    Il faudra combiner des choses. Il y a déjà beaucoup de combinaisons en raison du jour de dépôt du budget et de diverses autres choses. Je cherche simplement à obtenir un consensus pour inviter la ministre. Est-ce que j'ai votre approbation?
    Demandez-vous si nous pouvons le faire avant le 20 février?
    M. Sean Fraser: Non. Je...
    Non. Nous avons environ deux jours pour le faire. Hélas et malheureusement, parce qu'au cours de trois des quatre prochaines semaines, nous ne serons pas ici, il n'y a que peu d'options.
    Je demanderais à la greffière de se pencher sur cette question.
    Nous ne siégeons pas le 15, ce qui est jeudi prochain. Puisque le budget sera déposé le 27 février, cela ne nous laisse qu'une journée. Ce serait le 1er mars.
    Oui, Pam?
    Cela signifie que nous n'aborderons pas la question de la sécurité économique avant la fin de mars?
    Non. Nous allons aborder ce sujet la semaine suivante, la semaine du 26 ou du 27 février.
    Ce que nous pouvons faire, c'est de réserver la première heure pour la ministre, et la deuxième sera consacrée au début de l'examen de l'ébauche du rapport.
    Ce serait le 27.
    Ce serait le 1er.
    Ce serait le 1er, et on ne siège pas le 27.
    Cela signifie tout de même que, le 1er, nous aurons une heure à consacrer au rapport, puis nous n'y reviendrons pas avant le 20 mars.
    C'est exact, parce que nous avons trois semaines de congé.
    D'accord.
    Nous l'invitons habituellement, alors je ne crois pas que nous ayons vraiment le choix, simplement en raison du nombre de semaines où nous ne sommes pas là, n'est-ce pas?
    Oui. Malheureusement. Vu le calendrier, nous n'avons pas beaucoup d'options.
    Nous pouvons l'inviter et voir si elle est disponible.
    Comme quelqu'un l'a mentionné, tout dépend aussi de sa disponibilité. C'est quelque chose dont il faudra tenir compte. Je veux tout simplement obtenir le consensus pour aller de l'avant et l'inviter.
    Des députés: Oui.
    La présidente: D'accord, invitez-la s'il vous plaît.
    Merci beaucoup.
    La séance est levée.
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