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FAAE Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires étrangères et du développement international


NUMÉRO 014 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 4 avril 2022

[Enregistrement électronique]

  (1110)  

[Français]

    Chers collègues, bienvenue à la 14e réunion du Comité permanent des affaires étrangères et du développement international.

[Traduction]

    Conformément à la motion adoptée le 31 janvier, le Comité se réunit pour étudier l'équité vaccinale et les droits de propriété intellectuelle.

[Français]

    Comme d'habitude, des services d'interprétation sont disponibles pour cette réunion. Pour entendre l'interprétation, il vous suffit de cliquer sur l'icône de globe au bas de votre écran.
    Je demanderais aux députés qui participent en personne de bien vouloir garder à l'esprit les directives du Bureau de régie interne concernant le port du masque ainsi que les protocoles en matière de santé.

[Traduction]

    J'aimerais profiter de l'occasion pour rappeler à tous les participants qu'il est interdit de faire des captures d'écran et de prendre des photos de l'écran.

[Français]

    Avant de prendre la parole, veuillez attendre que je vous nomme. Lorsque vous avez la parole, veuillez parler lentement et clairement. Lorsque vous ne parlez pas, veuillez mettre votre micro en mode sourdine.
    Je rappelle aux députés et aux témoins que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.

[Traduction]

    Chers collègues, j'aimerais maintenant accueillir notre premier groupe de témoins devant le Comité et les remercier d'avoir accepté de passer un peu de temps avec nous ce matin.
     Comme d'habitude, lorsqu'il vous restera 30 secondes dans votre temps de parole, je vous ferai signe à l'aide de cette carte jaune, alors gardez un oeil sur vos écrans.

[Français]

    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue au premier groupe de témoins, ce matin.
    Tout d'abord, nous accueillons Mme France‑Isabelle Langlois, directrice générale d'Amnistie internationale Canada francophone.

[Traduction]

    D'Oxfam Canada, nous accueillons Diana Sarosi, directrice, Politiques et campagnes, et Brittany Lambert, spécialiste de la politique et de la défense en matière des droits de la femme.
     Vous disposez chacune de cinq minutes pour votre déclaration préliminaire.

[Français]

    Je propose que nous commencions par Mme Langlois.
    Madame Langlois, je vous cède la parole pour cinq minutes pour vos remarques d'ouverture.
    Mesdames et messieurs, bonjour. Je vous remercie de l'invitation.
    Amnistie internationale, à titre d'organisation de défense des droits de la personne, est intervenue dès les premiers instants de la pandémie afin de réclamer une solidarité internationale sans faille de la part de tous les États, notamment du Canada. Comme de nombreux autres acteurs, cela fait plus de deux ans que nous réclamons l'équité vaccinale et la levée temporaire des brevets à l'Organisation mondiale du commerce, soit l'OMC. C'est la troisième fois que je comparais personnellement devant un comité parlementaire sur ce sujet. Pendant ce temps, la position du Canada n'a pas évolué, et la COVID‑19 est toujours présente et continue de faire des morts, même si nous en parlons de moins en moins. L'écart entre les pays riches et les pays pauvres s'accentue, et les compagnies pharmaceutiques continuent d'engranger des profits faramineux.
    Amnistie internationale veut rappeler que, en vertu du droit international relatif aux droits de la personne, les États ont l'obligation d'apporter le soutien financier et technique nécessaire pour mettre en œuvre le droit à la santé, en particulier lorsqu'il est question de la propagation internationale d'une maladie.
    Nous appelons donc le Canada, une fois de plus, à soutenir fermement la proposition soumise par l'Afrique du Sud et l'Inde en octobre 2020 à l'OMC visant une dérogation temporaire aux protections sur la propriété intellectuelle pour les technologies de santé relatives à la COVID‑19.
    Toutefois, nous sommes grandement préoccupés par un projet de texte, qui a fait l'objet d'une fuite dans les médias à la fin mars, proposant un compromis entre l'Union européenne, les États‑Unis, l'Inde et l'Afrique du Sud relativement à cette dérogation. Tel que libellé, ce texte ne permettra jamais d'assurer l'approvisionnement et le transfert de technologies qui sont nécessaires à un accès égal aux outils de santé pour combattre la COVID‑19 et à la protection des droits à la vie et à la santé. Nous demandons instamment au Canada de ne pas entériner ce texte.
    Au départ, l'Inde et l'Afrique du Sud ont réclamé une dérogation à l'Accord de l'OMC sur les ADPIC, soit les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, dans le but de démocratiser la production de produits contre la COVID‑19 jusqu'à ce que l'immunité collective mondiale soit atteinte.
    L'Assemblée mondiale de la santé a reconnu le « rôle d'une immunisation à grande échelle contre la COVID‑19, en tant que bien public mondial en rapport avec la santé, pour prévenir, endiguer et éliminer la transmission afin de mettre un terme à la pandémie ».
    Or, les entreprises du secteur pharmaceutique du monde entier poursuivent leurs activités comme si de rien n'était, ce qui limite les capacités de production et d'approvisionnement.
    Nous aurons à vivre avec la COVID‑19 pour les années à venir. Tout le monde doit avoir accès à des vaccins, mais aussi à des traitements. On doit démocratiser la production, surtout maintenant que de nouveaux traitements deviennent disponibles.
    En soutenant la levée de la protection de la propriété intellectuelle pour les vaccins et autres produits contre la COVID‑19, le Canada fera passer la vie des gens du monde entier, dont les Canadiens, avant les profits de quelques géants pharmaceutiques et de leurs actionnaires.
    La seule façon de mettre fin à la pandémie est de l'endiguer à l'échelle mondiale, et la seule façon d'y parvenir est de faire passer les gens avant les profits.
    Les normes internationales en matière de droits de la personne auxquelles adhère le Canada, de même que les règlements internationaux relatifs au commerce, décrètent clairement que la protection de la propriété intellectuelle ne doit jamais se faire aux dépens de la santé publique.
    La crise de la COVID‑19 est aussi une crise de droits de la personne, et elle ne pourra être surmontée sans un véritable engagement à respecter l'un des Objectifs de développement durable, à savoir celui de ne pas faire de laissés-pour-compte. À partir du principe selon lequel « personne ne sera en sécurité tant que tout le monde ne le sera pas », le Canada a aujourd'hui l'occasion de prendre une décision qui pourra aider à l'atteinte de ce but.
    Amnistie internationale réitère sa demande expresse au gouvernement canadien afin qu'il soutienne une dérogation qui ne se limite pas aux seuls vaccins, mais qui inclut toutes les technologies médicales nécessaires, qui ne se limite pas non plus à certains pays, mais qui permet à tous ceux qui en ont les moyens de pouvoir contribuer à la production, et qui ne remet pas à plus tard, dans six mois ou au-delà, d'autres discussions sur d'autres dérogations.
    Nous demandons au Canada de faire preuve d'un leadership exemplaire en matière de solidarité internationale.
    Je vous remercie.

  (1115)  

    Je vous remercie beaucoup de votre allocution d'ouverture, madame Langlois.

[Traduction]

    Nous passons maintenant la parole à Mme Sarosi d'Oxfam Canada pour sa déclaration préliminaire.
     Allez‑y, madame, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président. C'est un plaisir pour moi d'être ici devant le Comité.
     Oxfam soutient des programmes de développement à long terme, de défense et d'intervention d'urgence dans plus de 90 pays du monde. Les pays à faible revenu et à revenu moyen inférieur dans lesquels nous travaillons ont énormément souffert de la pandémie. La COVID‑19 a démoli les économies les plus faibles du monde, détruisant les moyens de subsistance et faisant exploser la faim dans le monde. En 2021, 163 millions de personnes ont sombré dans la pauvreté à cause de la pandémie.
     Ces mêmes pays ont eu du mal à accéder aux vaccins. En 2021, plus de 80 % de tous les vaccins sont allés aux pays du G20, tandis que moins de 1 % a atteint les pays à faible revenu. L'inégalité en matière de vaccins a prolongé la pandémie, et les pays les plus pauvres en ont payé le prix sur le plan économique et en pertes de vie. Pour chaque vie perdue à cause de la COVID‑19 dans un pays riche, quatre l'ont été dans des pays à faible revenu et à revenu moyen. Dans le monde, 4,7 millions d'enfants ont perdu un parent ou un proche aidant à cause du virus. Cela représente un nombre stupéfiant de quatre enfants chaque minute.
     COVAX était censé fournir deux milliards de doses aux pays à faible revenu et à revenu moyen d'ici la fin de 2021, mais n'en a fourni que moins de la moitié en raison de la lenteur des dons des pays riches, dont le Canada, et des retards de livraison par les fabricants de vaccins. Les habitants des pays à faible revenu ou à revenu moyen ne devraient pas avoir à compter sur la bonne volonté charitable des pays riches et des sociétés pharmaceutiques pour exercer leur droit à la protection contre la COVID‑19. C'est pourquoi Oxfam a soutenu les appels à une dérogation à l'Accord sur les ADPIC.
     La proposition de dérogation à l'Accord sur les ADPIC présentée par l'Inde et l'Afrique du Sud en octobre 2020 et soutenue par plus de 100 nations était un message puissant des pays en développement indiquant qu'ils avaient besoin de secours dans cette pandémie. En donnant à un plus grand nombre d'entreprises la capacité légale de reproduire les vaccins et les médicaments de la COVID, une dérogation pourrait contribuer à augmenter l'approvisionnement et ouvrir la voie à une distribution plus équitable des technologies permettant de sauver des vies.
     Pendant 18 mois, l'Union européenne et d'autres pays riches ont choisi de bloquer la dérogation à l'Accord sur les ADPIC et la voie vers une sortie rapide de cette pandémie, défendant ainsi les intérêts des monopoles pharmaceutiques. Les grandes entreprises pharmaceutiques ont été les plus grands gagnants de cette pandémie. Il est tragique que notre économie mondiale se soit révélée plus apte à créer de nouveaux milliardaires du vaccin qu'à vacciner les milliards de personnes qui ont besoin d'être protégées contre cette cruelle maladie.
    Il y a quelques semaines, un document a été publié, proposant un accord de compromis sur la dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Il a été négocié par les États-Unis, l'Union européenne, l'Afrique du Sud et l'Inde. À l'exception de l'Union européenne, ces pays n'ont pas officiellement approuvé la proposition de compromis. Il est positif que l'Union européenne soit enfin venue à la table et reconnaisse que les règles de propriété intellectuelle et les monopoles pharmaceutiques constituent un obstacle à la vaccination du monde; toutefois, à notre avis, le document ne constitue qu'un très petit pas en avant. Le texte actuel a une portée étroite et présente des limites considérables. Il ne couvre pas les tests ou les traitements de la COVID. Il ne couvre que les brevets et non les autres obstacles à la propriété intellectuelle. Il réduit le champ d'application géographique, excluant les pays disposant d'une capacité de fabrication importante, et il crée de nouvelles barrières onéreuses pour les pays cherchant à délivrer une licence obligatoire, au lieu d'assouplir les règles actuelles.
     L'adoption de ce texte sans en corriger les défauts créerait un précédent négatif et entraverait la capacité du monde à répondre collectivement aux pandémies futures. Nous espérons que le Canada travaillera en collaboration à l'Organisation mondiale du commerce pour remédier de toute urgence aux limitations du texte proposé. Nous aimerions également que le Canada accélère la livraison des doses excédentaires et augmente le financement de l'aide internationale pour soutenir les pays en développement face aux retombées économiques dévastatrices de la pandémie.
     L'impact économique, social, éducatif et sanitaire de la COVID‑19 sur les femmes et les filles a été particulièrement effarant. En 24 mois, la pandémie a fait reculer d'une génération entière l'objectif de parité entre les sexes.
     La COVID‑19 est un défi transnational, mais notre réponse collective a jusqu'à présent été imprévoyante, inéquitable et nationaliste. Il est temps de changer de cap. Le monde a attendu assez longtemps.
     Je vous remercie à nouveau de m'avoir donné l'occasion de parler ici aujourd'hui au nom d'Oxfam.

  (1120)  

    Madame Sarosi, merci beaucoup pour votre déclaration préliminaire.
     Chers collègues, nous commençons maintenant le premier tour.
     Je regarde l'horloge. Nous avons commencé un peu tard. Je pense que nous n'avons le temps que pour ce premier tour. J'encourage les collègues conservateurs et libéraux à partager leur créneau s'ils le souhaitent. Il s'agit de blocs de six minutes.
     Nous commençons par M. Genuis, s'il vous plaît, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci beaucoup aux témoins.
     Pourriez-vous nous dire clairement ce que vous pensez être la position du gouvernement? Quelle est votre compréhension de la position du gouvernement à l'heure actuelle et de ce que nous préconisons?
    Je peux intervenir.
    C'est une question délicate. C'est ce que nous essayons de découvrir nous aussi. C'est très nébuleux. D'un côté, ils disent qu'ils ne l'appuient pas, mais ils ne s'y opposent pas non plus. Ils n'ont pas bougé d'un iota sur cette question depuis de nombreux mois maintenant, mais ils ont également proposé une troisième voie, qui a encore compromis l'avancement des conversations sur la dérogation à l'Accord sur les ADPIC.
     J'aimerais faire appel à ma collègue, Brittany Lambert, qui pourra vous en dire un peu plus sur le processus d'Ottawa.
    Oui, le gouvernement a toujours déclaré, en ce qui concerne la dérogation aux ADPIC, que son objectif est de travailler de manière constructive pour trouver une solution consensuelle à l'OMC, qui serait acceptable pour tout le monde. En réalité, cependant, cette position nébuleuse a rendu très difficile de déterminer la position du gouvernement. Il n'a pas voulu s'engager avec nous sur la spécificité des clauses de la dérogation aux ADPIC ou de la proposition de compromis. Il est impossible de dire dans quelle mesure il joue un rôle constructif à l'OMC en ce moment.
    Au risque de paraître partisan, cela semble typique, malheureusement. Il a les bons mots à la mode — coopérer, collaborer, être gentil, aider les gens —, mais il devient difficile de savoir ce que ces mots signifient en réalité.
     Diriez-vous que la troisième voie dont il parle apporte plus de clarté ou simplement plus de confusion sur ce qu'est sa position? Savez-vous quelle est la substance des propositions de la troisième voie, ou s'agit‑il simplement d'une autre série de beaux concepts imprécis?
    Dans la troisième voie, le processus Walker, dirigé par le Groupe d'Ottawa, le gouvernement dit vouloir s'attaquer à des questions comme les chaînes d'approvisionnement, les restrictions à l'exportation et d'autres questions que l'industrie a cernées comme étant des obstacles à la production. Malheureusement, elle ne contient rien sur la propriété intellectuelle, de sorte qu'elle n'est pas considérée comme une solution viable par la centaine de pays qui ont établi que la propriété intellectuelle est le principal obstacle à leur capacité d'obtenir des outils permettant de sauver des vies.
    Je dirais que cela a brouillé les pistes à l'OMC et a probablement retardé le consensus sur la dérogation aux ADPIC.
    Le gouvernement a‑t‑il énoncé les raisons pour lesquelles il a choisi de ne pas aller dans cette direction? Cela a‑t‑il fait partie du dialogue, ou n'a‑t‑il même pas été jusque‑là?
    Non, il a dit qu'il voulait une solution consensuelle qui fonctionne pour tout le monde. Je soupçonne que ses raisons, tout comme celles des autres pays riches qui ont fait obstruction à la dérogation aux ADPIC, sont liées au fait qu'ils ne veulent pas adopter une position qui serait contraire aux intérêts des sociétés pharmaceutiques, qui ont évidemment une énorme influence, surtout lorsque ces nations dépendent elles-mêmes d'elles pour obtenir leurs vaccins.
    Comment décririez-vous le niveau et la nature de l'engagement de la société civile, des organisations de défense des droits de la personne comme la vôtre et par le gouvernement sur cette question?
    Le gouvernement a été réactif. Il a accepté de nous rencontrer, mais comme je l'ai dit, sa position est si nébuleuse qu'elle nous empêche d'entreprendre des discussions détaillées avec lui sur quoi que ce soit. Il continue d'affirmer qu'il favorise le consensus et qu'il travaille en coulisse pour l'obtenir, c'est tout.
    Merci.
    Madame Langlois d'Amnistie, voulez-vous intervenir sur ce point, sur la nature de votre engagement avec le gouvernement jusqu'à présent?

  (1125)  

    Pourriez-vous répéter votre question? Je ne suis pas sûre d'avoir compris.
    Comment décririez-vous la nature et la qualité de l'engagement que vous avez eu avec le gouvernement sur cette question? Ses porte-parole ont-ils été francs? Ont-ils été disponibles aux échelons supérieurs pour discuter de leur position? Comment cela s'est‑il déroulé?

[Français]

    Nous avons des discussions avec le gouvernement et avec différents acteurs. Ce n'est pas facile; il a fallu insister beaucoup, il y a 18 mois, pour avoir ces rencontres et ces discussions. Cependant, nous ne pouvons pas dire qu'il n'y a pas d'échanges. Il y a des discussions, mais la position qui nous est présentée ne semble pas avoir évolué.

[Traduction]

    Je sais que nous avons un projet... Je ne suis pas censé parler des projets de motions ayant fait l'objet d'un avis, alors je ne le ferai pas.
     J'ai une dernière question. L'une des témoins pourrait-elle parler du concept de l'intérêt personnel bien compris dans le contexte de la pandémie? Nous voulons parler de l'altruisme, bien sûr, qui est une valeur primordiale, mais comment l'intérêt personnel bien compris informe-t‑il de ce que nous devrions faire à cet égard?
    La question s'adresse à moi?
    Elle s'adresse à tous ceux qui veulent y répondre.

[Français]

    Comme mentionné déjà, cela fait plus de deux ans que nous vivons dans le contexte de la pandémie, et cela fait plus de deux ans qu'il y a des tergiversations et des négociations. Ce que nous demandons au gouvernement, c'est de faire preuve d'un réel leadership, de façon constructive, de sorte que la situation se dénoue. Il faut vraiment procéder à la levée des brevets ainsi qu'à la démocratisation des technologies et de la production de tous les traitements destinés à combattre la COVID‑19 partout dans le monde. Il faut établir une équité vaccinale, mais aussi une équité d'accès à l'ensemble des technologies et, surtout, aux nouveaux médicaments qui sont en cours de conception et qui seront bientôt disponibles.
    Merci beaucoup, madame Langlois.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Genuis.
     Nous allons passer à Mme Fry, pour six minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je tiens à remercier ma collègue, Heather McPherson, d'avoir soulevé ce sujet particulier, car nous savons tous, c'est le bon sens même, que, tant que nous ne pourrons pas mettre fin à la pandémie partout, nous continuerons à avoir des épisodes de pandémie, comme actuellement avec le BA.2, qui commence à menacer des pays d'Europe et, évidemment, les États-Unis et le Canada.
    C'est une question importante. Nous avons parlé des vaccins. Je me demande si l'un d'entre vous sait ou comprend ce que le Canada fait en matière de tests, de diagnostics et de culture? Je crois que l'aspect culturel est un facteur important de l'adoption des vaccins dans certains pays.
    Je peux en parler.
     Grâce à l'accélérateur ACT, il y a plusieurs volets. Je suis heureuse de voir que le Canada ne se concentre pas sur les vaccins exclusivement, mais aussi sur les autres volets, le diagnostic, les traitements, et autres.
     Cela étant dit, cette proposition de compromis sur la dérogation aux ADPIC est assez inquiétante en ce qui concerne le dépistage et les traitements. L'une de ses failles les plus flagrantes est qu'elle ne porte que sur les vaccins. Cela aurait pu être utile il y a 18 mois, mais le contexte a maintenant changé, et nous ne sommes plus en pénurie de vaccins. Nous sommes maintenant à un stade de la pandémie où des moyens de dépistage et des traitements normalisés, rapides et abordables sont tout aussi importants, et nous craignons que cette proposition de compromis sur les ADPIC, parce qu'elle exclut le dépistage et les traitements, ne fasse que reproduire la même inégalité extrême constatée avec les vaccins, mais pour l'accès à d'autres traitements vitaux.
    J'aimerais revenir sur l'un des éléments de ma question, à savoir que nous savons que de nombreux pays... Prenons un pays comme Hong Kong. Ce n'est évidemment pas un pays à faible revenu, mais la pandémie y cause aujourd'hui un nombre considérable de décès, alors qu'il était en bonne posture au tout début de la pandémie pour ce qui est des protocoles de santé publique.
    Ce que nous entendons, cependant — et j'ai vérifié cela dans de nombreuses publications médicales —, c'est que beaucoup d'habitants de Hong Kong ne veulent pas se faire vacciner pour des motifs culturels. Ils ne font pas confiance aux vaccins, ils ne les comprennent pas. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles de nombreux pays refusent la vaccination ou pour lesquelles le taux est faible.
     Que pensez-vous qu'on puisse faire à ce sujet? Quelle est la bonne stratégie pour traiter les facteurs culturels? On ne peut pas obliger les gens à faire quelque chose s'ils ne le veulent pas, mais existe‑t‑il un moyen créatif d'inciter les gens à se faire vacciner? Quels sont les moyens d'y parvenir?

  (1130)  

    Il est certain que les campagnes de lutte contre la désinformation sont essentielles et que l'hésitation à se faire vacciner est un problème partout. Toutefois, je dirais deux choses. À mon avis, la faiblesse de l'offre dans de nombreux endroits a favorisé l'hésitation. Ici, c'est très courant. Tout le monde se fait vacciner, tout le monde en parle. Le gouvernement peut faire campagne de manière crédible pour augmenter l'adoption du vaccin, car il a des vaccins à offrir aux gens. Cela peut expliquer — pas forcément à Hong Kong; je ne connais pas cette situation — une partie de l'hésitation que nous avons observée dans des endroits comme l'Afrique.
     Il y a aussi d'autres facteurs sociaux complexes qui suscitent l'hésitation de certaines communautés — une histoire d'abus colonial, médical, de recherche sur les vaccins, et ainsi de suite.
    Vous n'avez pas de réponses créatives pour nous aider à surmonter certains de ces problèmes? Ici, au Canada, nous voyons une hésitation à l'égard des vaccins. Dans des pays comme le Canada et comme Hong Kong, qui est un pays assez bien éduqué, ce genre de barrière culturelle existe encore, mais je veux passer à autre chose.
    Comme vous le savez, le Groupe d'Ottawa a couvert les questions de commerce et de santé. Quel rôle pensez-vous que ce groupe peut jouer et qu'il a joué en dirigeant la discussion à l'OMC pour les 32 autres membres? Comme vous l'avez dit, seuls les vaccins sont couverts par les ADPIC. Qu'en est‑il des questions comme les traitements et le dépistage? Quel rôle pensez-vous que le Groupe d'Ottawa peut et doit jouer?
     Je pose cette question à tout le monde.
    Je ne connais pas les tenants et les aboutissants du Groupe d'Ottawa et tout ce qu'il fait, mais j'espère qu'il pourra jouer un rôle constructif. Je pense simplement qu'il est important qu'il ne soit pas interprété comme une possibilité de dérogation à l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, parce que les barrières de la PI que les pays en développement ont soulevées sont clairement importantes pour eux, et le Groupe d'Ottawa n'inclut rien à cet effet.
    Non, et je pense que le problème de la dérogation aux ADPIC est que le Canada n'a pas nécessairement de pion dans ce jeu, parce que le Canada n'est pas un pays pharmaceutique. Il ne livre pas d'énormes produits pharmaceutiques. Nous devons obtenir les nôtres d'autres personnes. L'Europe est un grand producteur de vaccins et les États-Unis en produisent certains, mais ma question se résume toujours à ceci: comment faire pour qu'ils soient adoptés? C'est une chose d'amener un cheval à l'eau, mais il faut le faire boire.
    Pour moi, la question se résume à savoir comment faire en sorte que les pays à revenu faible ou intermédiaire qui hésitent à se faire vacciner le fassent. Je sais que les motifs religieux ont une influence énorme dans la décision des gens de se faire vacciner ou d'accepter les vaccins. Dans d'autres pays, les aspects culturels jouent un rôle important. Je veux revenir sur ce point, car pour moi, c'est une grosse pierre d'achoppement. Hormis la dérogation aux ADPIC et le rôle joué par le Canada dans ce domaine, je crois bien être d'accord avec vous sur ce point. Le problème, à mon avis, est que l'on peut faire tout ce que l'on veut, mais si les gens ne se font pas vacciner, comment pouvons-nous trouver un moyen de contourner ce problème?
     L'éducation est une chose à long terme, comme vous le savez. On ne peut pas dire aux gens: « Oh non, non, non. Faites-nous confiance, parce que nous pensons que c'est important pour vous. » Quelle sorte de moyen pouvons-nous utiliser pour contourner ce problème? Je sais que certaines personnes ont parlé de payer les gens pour qu'ils se fassent vacciner. J'en ai entendu parler dans de nombreux pays. Pensez-vous que ce soit un moyen valable d'inciter les gens à se faire vacciner lorsque, pour divers motifs culturels et autres, ils ne veulent pas le faire?
    Madame Fry, malheureusement, votre temps est écoulé. Nous devrons attendre la réponse au prochain tour.
    Je suis désolée, monsieur le président.

[Français]

    Madame Normandin, bienvenue au Comité.
    Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins de leurs témoignages.
    Mes questions s'adresseront principalement à Mme Langlois.
    Madame Langlois, j'aimerais parler de la lettre que vous avez envoyée à plusieurs parlementaires, le 23 mars, dans laquelle vous faites part de certaines de vos préoccupations quant aux modalités entourant une modification à l'Accord sur les ADPIC.
    Le deuxième point que vous mentionnez est que, selon le projet en cours, seuls seraient admissibles les pays qui produisent moins de 10 % des vaccins mondiaux. Ne serait-il pas plus approprié, par exemple, de permettre également la participation de pays qui produisent plus de 10 % des vaccins mondiaux, à la condition qu'ils produisent des vaccins pour des pays à plus faibles revenus?
    Pouvez-vous faire un commentaire général à ce sujet, s'il vous plaît?

  (1135)  

    Précisons d'abord que mon champ de spécialité, tout comme celui d'Amnistie internationale, se limite aux droits de la personne. Nos préoccupations concernent le fait que les modifications ou les restrictions demandées ne sont conformes ni à l'esprit des droits de la personne ni aux traités et aux conventions que le Canada a signés.
    En ce qui a trait à la levée des brevets et à la propriété intellectuelle, il faut garder en tête qu'il doit y avoir le moins possible de restrictions. Il faut en effet que le processus soit démocratisé autant que possible, de sorte que le plus grand nombre de personnes, partout dans le monde, ait accès aux traitements, et pas seulement aux vaccins.
    Pour toutes sortes de motifs, il y a des réticences, comme le soulignait avec raison Mme Fry, et celles-ci deviendront de plus en plus nombreuses, à l'égard non seulement des vaccins, mais également des traitements. Plus on tarde, plus il y aura de réticences. En effet, quand on s'approprie des technologies ou des vaccins, qu'on en restreint l'accès et qu'on tarde à les partager avec l'ensemble de l'humanité, cela envoie un bien mauvais message. Par exemple, en envoyant aux pays plus pauvres les surplus de vaccins d'AstraZeneca dont nous ne voulons pas, nous envoyons un très mauvais signal: cela laisse entendre que ces vaccins ne sont pas bons pour nous, mais qu'ils sont bons pour eux.
    Il faut tenir compte de tout cela. Il ne faut pas restreindre la production de vaccins à certains pays, peu importe la manière dont les restrictions s'établissent. En fait, il faut ouvrir la possibilité à d'autres. Il faut appuyer tous les pays qui veulent et qui peuvent produire des vaccins.
    Le rôle du Canada va au-delà de l'achat de vaccins et de leur envoi aux populations les plus pauvres. Toute une logistique doit être mise sur pied dans ces pays pour qu'ils puissent administrer les traitements, y compris les vaccins. La situation est compliquée, dans le cas des vaccins. En effet, les vaccins actuels demandent une grande précision, notamment en ce qui a trait à la chaîne de froid. Dans plusieurs régions du monde, c'est difficile à appliquer si l'on ne dispose pas de la technologie et de la logistique appropriées. Il faut non seulement fournir la technologie et les remèdes, entre autres choses, mais également sensibiliser les populations à l'importance de ces médicaments et de ces traitements.
    Merci beaucoup. Vous avez répondu à des questions que j'allais vous poser. C'est pourquoi je vous ai laissée répondre plus longuement.
    Je voulais justement aborder la question de la réticence, pour faire suite à des questions posées par Mme Fry, notamment.
    Les modulations de l'Accord sur les ADPIC qui sont proposées portent uniquement sur l'aspect préventif, soit les vaccins, et ne permettent pas de latitude sur le plan curatif. Cela ne contribue-t-il pas à la réticence au sein de la population? Comme on le sait, les gens peuvent être réticents aux vaccins, mais, lorsqu'ils sont malades, ils sont beaucoup moins réticents aux traitements.
    Le fait de ne pas inclure les traitements curatifs contribue-t-il à cette tendance à la réticence?
    Je ne saurais dire exactement pourquoi on n'a pas inclus les traitements curatifs, mais on peut penser que votre supposition est valable. À mon avis, il faut garder en tête le fait que les compagnies pharmaceutiques veulent garder la mainmise sur les profits. Dans toute cette situation, on fait passer les intérêts économiques avant la santé et la vie de populations entières.
    Dans votre lettre du 10 janvier, vous exhortez les parlementaires « à veiller à ce que les droits [de la personne] soient inclus en tant que principes directeurs dans les débats qui se tiendront à l'Assemblée mondiale de la [santé] sur un éventuel traité international sur les pandémies ».
    J'aimerais que vous nous parliez des droits de la personne et du droit à la santé. Est-il codifié de façon précise que cela implique le droit aux vaccins, ou a-t-il fallu déduire que c'était le cas, notamment au moyen d'un avis juridique?
    Le droit à la santé, c'est le droit d'avoir accès à tous les traitements disponibles, quels qu'ils soient, et d'avoir accès, de façon équitable et juste, à des soins de santé, peu importe lesquels. Par déduction, on comprend que les vaccins font partie des soins de santé dans le cas de plusieurs maladies, dont la COVID‑19.
    Serait-il pertinent de préciser à l'avance ce qui est inclus et ce qui ne l'est pas? Cela permettrait d'éviter d'éventuels débats visant à déterminer si cela inclut ou non certains éléments, par exemple les traitements curatifs.

  (1140)  

    C'est exact. À mon avis, le Canada doit soutenir les travaux qui sont en cours en vue d'établir un traité portant précisément sur la question des pandémies. On suppose en effet qu'il y en aura d'autres, alors l'idée est d'éviter, lors de la prochaine pandémie, de passer des mois, voire des années, à débattre de ces questions, comme c'est le cas actuellement. Cela permettrait d'avoir déjà en place des mécanismes visant à assurer une meilleure équité en matière de traitements curatifs et préventifs.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Langlois et madame Normandin.

[Traduction]

    Madame McPherson, vous avez six minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
     Merci à nos témoins d'être ici aujourd'hui. C'est tellement important. Le travail que vous avez fait à ce sujet est primordial.
     Au cours du week-end et de la semaine dernière, nous avons entendu parler de la nouvelle variante d'Omicron, la XE, ce qui est, bien sûr, extrêmement inquiétant. Cela signifie que ce que nous faisons ici aujourd'hui est d'autant plus important.
     Je dois commencer par dire que je suis extrêmement frustrée par le fait que nous en soyons là, à débattre et discuter encore de certaines des questions dont nous parlons aujourd'hui. La première fois que j'ai soulevé cette question au comité des affaires étrangères, c'était le 17 novembre 2020, lorsque j'ai demandé que nous ayons un moyen équitable de nous assurer que les pays du monde entier aient accès aux vaccins, et que ceux‑ci ne soient pas tous achetés et monopolisés par les pays riches au détriment de la santé mondiale. De toute évidence, si l'on considère la façon dont les vaccins ont été distribués au cours de la pandémie de COVID, cela n'a pas été le cas.
     Je suppose que c'est par là que je vais commencer aujourd'hui. Certains de mes collègues ont déjà évoqué l'idée que les sociétés pharmaceutiques ont reçu le pouvoir de déterminer qui reçoit un vaccin et qui ne le reçoit pas. Bien entendu, si l'on confie à une société, dont la raison d'être est le profit, la responsabilité de distribuer des vaccins qui sauvent des vies, on n'obtiendra pas une distribution équitable. Nous savons que les profits réalisés par Pfizer, BioNTech et Moderna s'élèvent à environ 34 milliards de dollars en 2021, alors qu'ils ont reçu 8 milliards de dollars de fonds publics.
     Je vais peut-être demander à nos collègues d'Oxfam de commenter en premier. Pourriez-vous nous donner un peu plus de renseignements sur ce que cela signifie lorsque nous donnons aux entreprises le pouvoir de déterminer qui peut être vacciné et qui peut avoir accès aux vaccins, plutôt que de traiter cela comme une question de santé publique qui est déterminée de manière plus équitable?
    Vous avez raison, Mme McPherson, au sujet des monopoles pharmaceutiques. Les quatre grands, si vous voulez, ont eu des brevets exclusifs sur ces vaccins que le monde entier veut. Cela leur a permis de se prendre pour Dieu et de décider du prix auquel ils allaient vendre les vaccins et à qui ils allaient les vendre. Ils ont évidemment donné la priorité aux contrats avec les gouvernements les plus riches, qui étaient prêts à payer plus.
     Ils ont insisté sur le fait qu'ils pouvaient alimenter le monde entier. Ils ont constamment exagéré leurs capacités de production. Ce contrôle qu'ils ont conservé leur a permis de limiter artificiellement l'offre au prix de millions de vies dans les pays en développement. Les profits qu'ils réalisent sont tout à fait scandaleux. Moderna et BioNTech ont des marges bénéficiaires de 69 %. Ensemble, Pfizer, BioNTech et Moderna, récoltent environ 65 000 $ de profit par minute.
    C'est par minute.
    Oui. C'est assez choquant.
    Je pense que les vies devraient passer avant les profits des entreprises qui en ont déjà plus qu'assez.
    Merci beaucoup.
    Si je peux ajouter quelque chose, c'est que nous savions que cela se produirait, car c'est ainsi que cela s'est produit par le passé et c'est ainsi que le monde fonctionne, n'est‑ce pas? C'est pourquoi le mécanisme COVAX a été créé. Voilà ce qu'il y a: le COVAX, dans sa conception, était une idée brillante pour essayer d'éviter ce genre de situation, mais entretemps, les pays avaient commencé à conclure des accords parallèles avec les pharmaceutiques, et le COVAX a été complètement sapé. Sinon, l'alimentation du monde entier serait passée par le COVAX. Ces pharmaceutiques n'auraient pas été en mesure de monter les pays les uns contre les autres pour obtenir les prix les plus élevés.

  (1145)  

    Exactement. Aussi, ce n'est rien de nouveau. Nous avons déjà eu des problèmes d'accès aux médicaments essentiels. J'ai travaillé avec Médecins sans frontières sur des campagnes il y a des décennies à ce sujet.
     L'une des autres préoccupations que j'ai et que je veux vous signaler est que nous avons entendu que le Canada utilisera les doses de vaccin pour contribuer au calcul de l'aide publique au développement, l'APD. Si l'on considère les effets de la COVID sur les femmes et les jeunes filles, les pénuries alimentaires que nous constatons actuellement dans le monde et les répercussions sur notre capacité de respecter la politique féministe d'aide internationale, quelles seront les conséquences de l'utilisation de ces vaccins dans le cadre de notre APD? Comment cela influencera‑t‑il la capacité du Canada de jouer un rôle important dans le monde en ce qui concerne l'aide humanitaire et l'aide au développement?
    Il est clair qu'avec cette pandémie et toutes les autres crises auxquelles le monde est confronté — le climat, les répercussions économiques de la pandémie, les conflits, les déplacements mondiaux — nous avons besoin que l'APD augmente pour pouvoir aider le monde à faire face aux retombées à long terme de cette pandémie. Je demande instamment au gouvernement de veiller à ce que tout... C'est très bien s'il peut être crédité pour ses dons de vaccins, mais il doit augmenter l'APD proportionnellement.
    L'inégalité face aux vaccins a prolongé la pandémie. Elle a annulé certaines des avancées fragiles en matière de droits des femmes que nous réalisions grâce à de merveilleux investissements comme ceux de la politique féministe d'aide internationale. En ce sens, je dirais que l'inégalité vaccinale a menacé, ou menace, les objectifs et les réalisations de la politique féministe d'aide internationale.
     Il y va de l'intérêt du Canada, si nous ne voulons pas que le merveilleux travail que nous avons accompli et dans lequel nous avons investi soit gaspillé, de veiller à augmenter le taux d'aide internationale pour compenser ce qui se passe et l'argent supplémentaire que nous devons consacrer aux vaccins.
    Madame McPherson, merci beaucoup.
     Chers collègues, je vais me corriger. Nous avons le temps de procéder à un bref deuxième tour de table, même s'il est comprimé. Je propose que nous fassions des rotations de trois minutes et d'une minute et demie. Ainsi, nous pourrons nous faufiler juste après midi, je crois.
     Si mes collègues sont d'accord, M. Morantz va prendre la parole pour trois minutes.
    Allez‑y, je vous en prie.
     Étant donné le temps limité, je veux me concentrer sur l'entreprise de vaccins Medicago et son vaccin Covifenz. Je vais m'adresser à Oxfam, parce que leur représentante a mentionné un souci quant à la capacité du Canada de respecter ses obligations envers COVAX. C'était Mme Sarosi, je crois.
     Comme vous le savez peut-être, le gouvernement du Canada a accordé au titre du FIS une subvention de 173 millions de dollars à Medicago pour la production d'un vaccin fabriqué au Canada, qui était destiné à un certain nombre d'objectifs. L'un d'entre eux était de permettre au Canada de s'acquitter de ses obligations relatives au COVAX. Cela a été confirmé par le ministre Sajjan dans des articles de presse. Les fonctionnaires l'ont nié lorsque j'ai posé la question lors de la dernière réunion sur l'équité vaccinale.
     Avez-vous des inquiétudes à ce sujet? L'OMS a déclaré expressément que Covifenz ne serait pas approuvé pour une utilisation d'urgence. En fait, elle est allée jusqu'à dire qu'il existe un conflit fondamental et irréconciliable entre les intérêts de l'industrie du tabac et ceux de la politique de santé publique. Pourquoi a‑t‑elle dit cela? Parce que Philip Morris International, qui est une société de tabac, détient environ un tiers des actions de Medicago.
     Pourriez-vous commenter cette situation?
    Je suis désolée. Je ne peux pas commenter cette situation précise. Je ne connais pas les détails.
     Mon espoir est que le Canada pourra... Évidemment, je souhaite que le Canada puisse donner le plus grand nombre possible de vaccins utiles aux pays en développement, mais je ne connais pas les tenants et les aboutissants de cette situation et ses aspects politiques.
    Est‑ce que l'une des autres témoins est au courant de cette question? Non.
     Je vous laisse le soin de vous renseigner. De toute évidence, les obligations du Canada à l'égard du COVAX sont des obligations internationales très sérieuses, et vous aimeriez peut-être savoir que le Canada aura beaucoup de difficultés à respecter son obligation de 200 millions de doses. Cela est dû à l'absence de diligence raisonnable lorsque 173 millions de dollars des contribuables ont été investis dans une entreprise qui produit un vaccin qui ne peut pas être utilisé à l'extérieur de nos frontières en cas d'urgence.
     Voilà mes questions, monsieur le président.

  (1150)  

    Merci beaucoup, monsieur Morantz. Merci d'avoir respecté les limites de temps.
    Monsieur Sarai, vous avez trois minutes.
    Je vous remercie.
    Je tiens à remercier les témoins de nous avoir éclairés sur ce sujet. Il s'agit d'un problème permanent, et c'est encore une question assez pressante, même si nous constatons que les taux au Canada ont baissé et que l'adoption des vaccins est très élevée.
    J'aimerais savoir si l'une des témoins peut nous expliquer dans quelle mesure une dérogation aux ADPIC serait pratique, compte tenu du temps qu'il faudrait pour construire une installation spécialement pour les vaccins à ARNm, qui se procurerait les ingrédients et fabriquerait et livrerait les vaccins?
     Nous l'avons vu ici; même si des annonces de soutien financier ont été faites dès le début de la COVID‑19, les installations commencent tout juste à voir le jour. Cela prend presque deux ans.
     Même si nous devions obtenir une dérogation aux ADPIC — si le monde était en mesure de le faire — dans quelle mesure cela serait‑il pratique? Est‑ce que les installations seraient opérationnelles et recevraient des ingrédients? Si le délai est le même au Canada et dans le monde occidental, cela prendrait essentiellement presque deux ans. Je ne sais pas si cela a été pris en compte.
     Quelqu'un peut‑il nous en dire plus?
    Je peux intervenir sur cette question.
     Une étude de Médecins sans frontières a déjà montré qu'une centaine d'entreprises sont prêtes à produire ces vaccins dans le monde. Évidemment, rien ne se fera du jour au lendemain et il faudra procéder à des ajustements. Ce sont des entreprises qui produisent déjà des vaccins et des médicaments pour toutes sortes d'autres maladies, c'est donc une simple question d'adaptation.
     L'autre élément à prendre en compte est le temps requis pour les essais cliniques. Essayer de produire un nouveau vaccin prend beaucoup de temps, car il faut passer beaucoup de temps à faire des essais cliniques. Ce temps pourrait vraiment être réduit s'il y avait une possibilité de partager les connaissances et la technologie afin que nous n'ayons plus à faire de tels essais cliniques approfondis.
    Quelle est la cause de la lenteur de la vaccination, même dans des pays comme la Chine qui fabrique ses propres vaccins et qui dispose d'un système assez solide d'exécution et d'approvisionnement, et dont les niveaux sont très bas? L'adoption des vaccins est très lente. Ce n'est pas une question de disponibilité seulement, mais d'hésitation aussi ou d'autres facteurs.
     Quelqu'un peut‑il parler davantage de la situation de la Chine, qui représente presque un sixième de la population mondiale?
    Je peux vous en dire plus à ce sujet, qui comprend également la situation à Hong Kong.
     La Chine a poursuivi une politique de zéro cas de COVID. Dès le départ, la politique chinoise était de ne pas laisser entrer le virus; elle allait se concentrer sur le dépistage. Dès qu'il y avait un cas, ils l'isolaient et, en gros, l'excluaient de la société. Il a fallu la variante Omicron pour qu'ils admettent que cette politique n'est pas viable.
     Pour ce qui est de l'hésitation, je renvoie à une étude récente du Partnership for Evidence-Based Response to COVID‑19. Elle montre qu'une majorité écrasante de personnes en Afrique, 78 % des personnes interrogées dans 19 pays, sont disposées à recevoir le vaccin.
     L'hésitation n'est pas beaucoup plus élevée dans les pays en développement que dans les pays développés. Partout, les gens veulent se faire vacciner, mais avec l'approche de charité selon laquelle les pays ne savent jamais quand ils vont recevoir les vaccins et quand ceux‑ci vont expirer, il est très difficile vacciner les gens.
    Je suis désolé, madame Sarosi et monsieur Sarai, mais pour des raisons de temps, nous allons devoir passer à une autre personne.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à Mme Normandin pour une intervention très courte d'une minute et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Effectivement, c'est très court.
    On parle beaucoup des obligations des États eu égard aux droits de la personne et au droit à la santé. Corrigez-moi si je me trompe, mais ces obligations ne sont pas assorties de sanctions en cas de non-respect. C'est peut-être pour cette raison que cela branle dans le manche. Les compagnies pharmaceutiques exercent beaucoup de pression ainsi qu'un puissant lobby pour éviter qu'on déroge à l'Accord sur les ADPIC.
    Serait-il pertinent de prévoir, dans le contexte d'un futur traité sur les pandémies, l'imposition de sanctions aux États en cas de non-respect de leurs différentes obligations en matière de droits de la personne et de droit à la santé?

  (1155)  

    C'est une bonne question que vous posez.
    De façon générale, les obligations internationales ne sont pas assorties de sanctions. Ce sont plutôt les pays eux-mêmes qui s'imposent des sanctions, c'est-à-dire qu'ils se donnent eux-mêmes des moyens législatifs pour respecter leurs engagements internationaux.
    Il s'agit quand même d'un engagement moral. Les traités internationaux favorisent le respect des engagements.
    Dans ce cas-ci, les lobbys pharmaceutiques exercent un poids d'un côté. Serait-il pertinent d'avoir des sanctions pour faire contrepoids, pour contrebalancer les choses?
    Je pense qu'il faut surtout contrebalancer la force excessive qu'exercent les compagnies pharmaceutiques. Il faut que le politique prenne beaucoup plus de place que les intérêts économiques du secteur privé. C'est surtout là-dessus qu'il faut travailler. Il y a des intérêts économiques nationaux qui sont liés aux intérêts économiques des compagnies pharmaceutiques, et c'est là que le bât blesse.
    Merci beaucoup, madame Normandin.

[Traduction]

    Madame McPherson, s'il vous plaît, vous avez une minute et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Encore une fois, merci à nos témoins.
     J'ai une question très rapide pour Mme Langlois.
     Nous sommes maintenant à deux ans de pandémie et nous entrons dans la troisième année.
     Pouvez-vous me dire ce que vous considérez — je vous prie d'être franche — comme la principale raison pour laquelle le gouvernement canadien n'a pas donné suite à la dérogation aux ADPIC et a hésité et tenté de ménager la chèvre et le chou les deux dernières années? Pouvez-vous me donner la principale raison de cette situation, s'il vous plaît?

[Français]

    C'est intuitif, mais je pense que c'est pour des raisons économiques. Le Canada, comme les autres pays, est lui-même en négociation avec les compagnies pharmaceutiques pour avoir accès à des stocks. On ne connaît pas le prix payé pour les vaccins ou les traitements par chacun des pays, mais on sait que les prix ne sont pas les mêmes d'un pays à l'autre. Il y a aussi des négociations avec les compagnies pharmaceutiques pour avoir des installations sur place pour produire nos propres vaccins. Malheureusement, cela pèse dans la balance. D'un côté, on ne veut pas se mettre en porte-à-faux avec les compagnies pharmaceutiques avec lesquelles on négocie; de l'autre, on devrait exercer des pressions politiques beaucoup plus fortes sur ces compagnies.

[Traduction]

    En fait, vous dites que le gouvernement canadien a permis aux sociétés pharmaceutiques du monde entier d'avoir un pouvoir de vie et de mort et qu'il n'a pas fait pression pour obtenir des outils qui pourraient faire en sorte que l'équité vaccinale soit une réalité dans le monde entier.

[Français]

    C'est exact.

[Traduction]

    Merci beaucoup, madame McPherson.
     Monsieur Aboultaif, vous avez trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
     J'ai entendu dire aujourd'hui que les facteurs politiques sont très prévalents dans toute cette question. L'un d'eux est l'utilisation du produit de Medicago, dont des millions de doses ont été commandées pour être données au COVAX. Elles ont été refusées en raison de la participation d'une tierce partie ou d'une société d'investissement dans la fabrication ou dans le secteur privé au Canada.
     Cela ne fait‑il pas également partie de la politique? Le voyez-vous de cette façon?
     Pourquoi refuser d'administrer ou d'accepter ces vaccins qui sont disponibles dans le monde entier, là où ils sont le plus nécessaires, pour de telles raisons?
     Cette question peut s'adresser à n'importe quel témoin, comme Oxfam.
    Comme je l'ai mentionné dans une réponse précédente, j'ignore les détails de cette affaire, donc je ne peux pas faire de commentaire.
    Il s'agit d'une conversation sur la disponibilité du vaccin et l'attente de celui‑ci, ainsi que sur les décès qui ont eu lieu dans de nombreuses régions du monde. Oxfam est l'une des organisations sur le terrain qui fonctionne et essaie d'aider les pays qui n'ont pas de vaccins.
     Cela ne fait‑il pas partie de la politique, aussi?

  (1200)  

    Peut-être bien, mais je ne connais pas les détails de la situation.
    Évidemment, nous surveillons les types de vaccins dont le Canada fait don. Je sais que pour l'instant, il s'agit plus de celui d'AstraZeneca. Cela pose quelques problèmes. Beaucoup de pays ont du mal à les placer parce que, souvent, les pays n'en veulent pas maintenant que des données montrent que les vaccins à ARN messager sont plus efficaces contre le variant Omicron en particulier.
    Nous surveillons aussi... Je sais que le Canada a fait don d'un certain nombre de doses de Moderna. Quant aux vaccins de Pfizer et de Novovax, on ne sait pas encore vraiment si le Canada fera don de doses. Je pense que bien des pays aimeraient le savoir.
    Malheureusement, je ne connais pas les détails en ce qui concerne Medicago.
    J'aimerais aussi avoir l'avis d'Amnistie internationale.
    Je vous remercie.

[Français]

    Je n'en sais pas plus sur le cas de Medicago, alors il m'est difficile de répondre à votre question.

[Traduction]

    Je suis très surpris que ni l'une ni l'autre des organisations ne puisse répondre à cette question. Vous vous battez pour la vaccination. Vous vous battez pour ces populations — les plus démunies — et vous ne connaissez pas la réponse à cette question.
    Je vous remercie. Je m'arrêterai là.
    Je vous remercie.
    Notre dernière intervention de cette série avec ce groupe sera celle de M. Sarai pour trois minutes.
    Je vous en prie, vous avez la parole.
    Je vous remercie.
    Puis‑je avoir des précisions sur les chiffres?
    Il me semble que certains chiffres que vous avez sur le nombre de doses données par le Canada ne sont peut-être plus à jour. Je crois savoir que nous avons fait don de près de 100 millions de doses dans le cadre du programme COVAX.
    Est‑ce que les témoins peuvent vérifier et préciser ces chiffres?

[Français]

    Je pense que c'est plus de 200 millions de doses qui ont été promises par le Canada. Cependant, à ce jour, seulement 14 ou 15 millions de doses ont été rendues disponibles. À ce rythme, ce sera long.

[Traduction]

    C'est un peu compliqué aussi, parce que l'engagement de 200 millions de doses du Canada est un engagement à faire don de l'équivalent de 200 millions de doses. Il s'agit donc des doses en tant que telles, mais aussi de fonds pour en acheter dans le cadre du programme COVAX. Pour ce qui est de l'excédent de doses, à l'heure actuelle, les dons sont inférieurs à 15 millions de doses, comme ma collègue d'Amnistie le disait. Ce sont des doses en surplus par rapport aux besoins du Canada, qui les envoie donc dans d'autres pays.
    Est‑ce que le programme COVAX ne fait pas d'achats? De toute évidence, il y avait deux volets. Il y avait l'excédent que le Canada donnerait, et ces dons reposaient manifestement sur son excédent. La deuxième partie était financière. Autrement dit, le programme COVAX se procurerait, achèterait ou commanderait des stocks. Est‑ce que cette partie avance lentement parce que les fonds tardent à être versés au programme COVAX ou est‑ce que c'est parce que les contrats d'approvisionnement ne sont pas aussi solides que ceux des autres pays qui en ont eux aussi?
    Je pense que les choses commencent à s'accélérer dans le cadre du programme COVAX. Les mois de décembre et janvier ont marqué un tournant. Jusque‑là, l'approvisionnement était généralement insuffisant. Le programme COVAX ne pouvait rien faire parce qu'il n'y avait pas de vaccins à acheter.
    À présent, le paysage change. J'espère que, désormais, les fonds versés au programme COVAX permettront d'acheter des vaccins plus rapidement.
    Ne pensez-vous pas qu'il serait plus rapide pour vacciner plus de personnes de financer les installations existantes qui sont maintenant en mesure de produire en plus, au lieu de recommencer à zéro?
    Ce n'est pas la position du gouvernement. J'essaie seulement d'être pratique. Quelle est la solution la plus rapide pour vacciner les populations? Est‑ce qu'il ne serait pas logique de se concentrer sur ce point et de s'assurer que le programme COVAX dispose d'assez de moyens financiers pour acheter les vaccins et les donner à ceux qui en manquent en ce moment?
    Je vous répondrai en soulignant que nous n'avons aucun contrôle sur ce que ces entreprises facturent pour les vaccins. Aujourd'hui, c'est tel prix; l'an prochain, ce pourrait être le double. Laisser les coudées franches aux monopoles pharmaceutiques nuit aussi à notre capacité, à la possibilité à l'avenir, d'acheter par l'intermédiaire du programme COVAX, parce que les prix continueront de grimper.

  (1205)  

    Monsieur Sarai, je vous remercie.
    Voilà qui conclut notre temps avec le groupe.
    Je remercie les témoins de ce groupe de leur présence aujourd'hui. C'était un plaisir.

[Français]

    Merci beaucoup de nous avoir fait part de votre expertise.

[Traduction]

    Nous allons vous laisser vous déconnecter. Ensuite, nous suspendrons brièvement la séance afin d'accueillir le deuxième groupe de témoins.
    Merci beaucoup.

  (1205)  


  (1205)  

    Je souhaite la bienvenue aux témoins de notre deuxième groupe.
    J'ai, très rapidement, un point d'ordre administratif à régler avant de vous présenter.
    Nous avons, dans certains cas, des attributions de temps très serrées. Je vous montrerai ce papier quand il vous restera 30 secondes pour poser des questions ou obtenir des réponses. C'est un signal, en quelque sorte. Si vous pouvez respecter les temps impartis, cela nous aiderait beaucoup.
    Chers collègues, nous avons le plaisir d'accueillir, dans notre deuxième groupe, M. Shehzad Ali, professeur agrégé et titulaire de la chaire de recherche du Canada en économie de la santé publique, Western University; et Mme Robyn Waite, directrice, Politique et défense des intérêts à Résultats Canada.
    Je vous donnerai à chacun cinq minutes pour présenter vos observations préliminaires, et nous commencerons par le professeur Ali.
    Je vous en prie, monsieur. Vous avez la parole.
    Après deux ans de pandémie, 64,5 % de la population mondiale a reçu au moins une dose du vaccin, mais le pourcentage dans les pays en développement n'est que de 14,5 %. Cette inégalité massive face au vaccin est, à vrai dire, une honte. Les entreprises ont donné la priorité aux ventes aux gouvernements qui pouvaient payer le prix fort, repoussant les pays à faible revenu en queue de peloton. Résultat, 70 % des doses produites par Moderna, Pfizer et BioNTech vont aux pays riches, ce qui cause d'énormes inégalités en matière de vaccination. Je pense que nous pouvons encore corriger le cap, et je parlerai de deux domaines où le Canada peut jouer un rôle important.
    Le premier est la question des licences et des dérogations en matière de propriété intellectuelle. Comme nous le savons, la propriété intellectuelle est protégée dans le cadre de l'Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce, autrement dit l'Accord sur les ADPIC, de l'Organisation mondiale du commerce, l'OMC.
    Plusieurs arguments peuvent être avancés en faveur de dérogations en matière de propriété intellectuelle pendant la pandémie. Premièrement, une grande partie de la technologie utilisée pour mettre au point le vaccin est financée par des fonds publics. Par exemple, Moderna a reçu 2,5 milliards de dollars et Pfizer, près de 2 milliards de dollars rien que du gouvernement américain. Deuxièmement, la capacité actuelle des sociétés titulaires de brevet et des entreprises qui produisent les ingrédients ne suffit pas pour vacciner la population mondiale à court terme. Nous devons regrouper les ressources mondiales, mais la propriété intellectuelle fait directement barrage à cet objectif.
    Le Canada a fait référence à maintes reprises à l'article 31bis de l'Accord sur les ADPIC et à sa mise en œuvre par le Régime canadien d'accès aux médicaments, le RCAM, comme exemple de souplesse existant dans cet accord. Cependant, le Canada n'a utilisé cette disposition qu'en 2008, pour deux envois au Rwanda d'un médicament contre le VIH après quatre années de bataille avec le processus du RCAM. Après cela, Apotex, le fabricant, a décidé de ne plus passer par ce processus.
    Le RCAM tel qu'il existe aujourd'hui ne remplit pas son rôle. L'initiative quadrilatérale pour obtenir une dérogation à l'Accord sur les ADPIC, dont l'Inde et l'Afrique du Sud sont les fers de lance, est une approche plus globale et mondiale en la matière. Certains membres de l'OMC, dont le Canada, s'y montrent réticents en faisant valoir que la souplesse existante suffit, mais elle fonctionne pays par pays et produit par produit. Elle ne suffit pas du tout, étant donné l'ampleur de la pandémie.
    Après 18 mois de négociation, le texte de la dérogation à l'Accord sur les ADPIC est en préparation, mais aux premières nouvelles, il présente plusieurs limites. Même l'avant-projet actuel de dérogation pourrait être menacé si des pays s'y opposent. Dans le passé, le Canada n'a pas franchement soutenu cette initiative, mais le moment est venu de jouer un rôle en insistant pour l'adoption d'une dérogation globale à l'Accord sur les ADPIC.
    La deuxième initiative que le Canada peut soutenir est celle du centre de transfert de technologie pour les vaccins à ARNm de l'Organisation mondiale de la santé, établi l'an dernier en Afrique du Sud. L'objet de ce centre est de faciliter la fabrication de vaccins dans les pays en développement en transférant la technologie et le savoir-faire technique à des producteurs locaux. Le centre a produit le premier lot de vaccins contre la COVID en se fondant sur l'information publiée, mais sans l'aide des titulaires de brevet. Cependant, de nombreuses étapes restent à franchir avant que le vaccin puisse être distribué, et il n'aidera pas à enrayer la pandémie cette année.
    Pour que ce centre soit efficace, il est essentiel soit que la technologie utilisée ici soit libre de toute contrainte de propriété intellectuelle dans les pays à faible revenu, soit que ces droits soient mis à la disposition du centre par le biais de licences non exclusives. Le centre nécessitera des ressources et une expertise technique importantes.
    Je pense que le Canada a l'occasion de soutenir une initiative historique destinée à réduire la dépendance et les inégalités en matière de vaccins.
    Je vous remercie.

  (1210)  

    Monsieur Ali, je vous remercie. Je vous remercie aussi de ne pas avoir dépassé le temps qui vous était alloué. Je vous en sais gré.
    Madame Waite, vous avez la parole pour vos observations préliminaires. Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je salue tout le monde. Je m'appelle Robyn Waite et je suis directrice, Politique et défense des intérêts, à Résultats Canada.
    Résultats Canada est une organisation à but non lucratif fondée sur l'action citoyenne qui milite pour un monde débarrassé de l'extrême pauvreté. Notre réseau de plus de 500 bénévoles fait depuis le début de la pandémie la promotion de l'égalité en matière de vaccins.
    Je suis heureuse d'avoir l'occasion de vous faire part de quelques-unes de nos réflexions sur ces questions, éclairées par nos propres points de vue et par ceux des nombreux experts, alliés dans la promotion de cette cause et partenaires de la société civile avec qui nous travaillons ici, au Canada, et dans le monde entier.
    Malgré l'assouplissement des mesures sanitaires ici, à Ottawa, la pandémie est loin d'être terminée. Dans le monde entier, nous voyons augmenter le nombre de cas, et la menace de nouveaux variants dangereux persiste. L'échec à coordonner une réponse mondiale face à la pandémie et l'inégalité d'accès aux outils contre la COVID‑19 qui en résulte ont des conséquences coûteuses.
    De fait, 85 % des décès liés à la COVID‑19 sont enregistrés dans des pays qui ont peu accès aux tests de dépistage, aux traitements et aux vaccins. La perturbation connexe des systèmes de santé et le redéploiement des ressources et de l'attention au profit de la COVID‑19 ont effacé des décennies de progrès dans la santé mondiale.
    En 2020, 23 millions d'enfants n'ont pas reçu les vaccins infantiles de base, soit le plus grand nombre depuis 2009. En 2021, l'Organisation mondiale de la santé a signalé la première augmentation annuelle du nombre de cas de tuberculose depuis 2005. De plus, dans le monde entier, les enfants d'âge scolaire ont manqué plus de 3 billions d'heures d'apprentissage en personne, avec à la clé des pertes d'apprentissage et de revenus. L'économie mondiale devrait perdre 5,3 billions de dollars américains d'ici 2027.
    La guerre en Ukraine, les crises humanitaires grandissantes et les urgences alimentaires et énergétiques imminentes pèseront de plus en plus sur les économies, les populations et les systèmes dans le monde entier. La collision des crises de la COVID, du conflit et du climat qui toutes se jouent et prennent rapidement de l'ampleur en temps réel exige de la part de chefs de file mondiaux comme le Canada qu'ils redoublent d'efforts pour mettre fin à la pandémie. Cette étude porte sur l'équité vaccinale, mais nous devrions, en fait, parler de tous les outils nécessaires pour venir à bout de la COVID‑19, y compris le dépistage, les traitements et les vaccins, ainsi que de l'infrastructure des systèmes de santé et des personnes nécessaires pour les déployer.
    En ce qui concerne l'équité vaccinale, le Canada fait un bon travail à certains égards — ainsi, il faisait partie des premiers pays à investir une juste part dans l'Accélérateur ACT —, mais il accuse un retard sur les autres pays du G7 et du G20 dans d'autres domaines, notamment en ce qui concerne la dérogation à l'Accord sur les ADPIC.
    Le Canada devrait prendre ses responsabilités et se déclarer favorable à la levée temporaire des droits de propriété intellectuelle que l'Organisation mondiale du commerce protège et fait respecter en ce qui concerne tous les outils relatifs à la COVID‑19. Le Canada devrait aussi négocier activement avec les membres de l'OMC afin de parvenir à une bonne proposition de compromis. C'est indispensable pour une réponse équitable face à la COVID‑19; pour que le monde puisse réagir collectivement et rapidement face à de futures pandémies; pour protéger les fonds publics et les intérêts des personnes avant les bénéfices; et pour faire preuve de solidarité mondiale en matière sanitaire. Quand les pays à revenu élevé comme le Canada n'épaulent pas les pays moins avancés, les engagements envers la décolonisation deviennent pure rhétorique.
    Le gouvernement reconnaît souvent que les problèmes mondiaux exigent des solutions mondiales. Pourtant, l'enveloppe canadienne de l'aide internationale est nettement insuffisante. Depuis 1970, les Nations unies, sous l'égide du Canada, demandent aux économies avancées d'investir 0,7 % de leur produit national brut dans l'aide au développement. En 2019, le Canada n'y a consacré que 0,27 % de son PNB, pratiquement son plus faible pourcentage et bien moins que la moyenne des pays riches.
    Avec l'arrivée de la pandémie, cette tendance à la baisse s'est heureusement inversée, et il faut que des augmentations soutenues deviennent la norme par la suite, en commençant par faire passer l'enveloppe canadienne de l'aide internationale à 9 milliards de dollars dans le budget de 2022. C'est essentiel pour continuer de réagir directement face à la pandémie, d'atténuer ses répercussions afin de favoriser un redressement mondial et de se préparer aux menaces futures.
    La collectivité propose des mesures pour que le Canada puisse consacrer des ressources à des solutions efficaces. Résultats Canada veut que le Canada continue d'investir sa juste part dans l'Accélérateur ACT et ses partenaires de mise en œuvre, comme la Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies, le Fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, et la Fondation pour des outils diagnostiques nouveaux et novateurs, autrement dit FIND.
    Il est indéniable que le monde doit être réparé, et il incombe à chacun d'éduquer les populations et de les sensibiliser aux solutions mondiales aux problèmes mondiaux.
    Dans tout le pays, les bénévoles de Résultats Canada font un travail extraordinaire à ce sujet. Ils veulent l'équité vaccinale. Ils tiennent à agir et ils veulent que les parlementaires et le gouvernement du Canada relèvent le défi de l'époque actuelle avec l'ambition et l'approche planétaire nécessaires. Autrement dit, il faut investir plus dans l'aide internationale; tirer le meilleur parti de chaque dollar investi; dépenser du capital politique pour bâtir une volonté politique; et adopter une démarche pangouvernementale qui mette l'accent sur la coopération internationale.
    Je vous remercie, monsieur le président.

  (1215)  

    Madame Waite, je vous remercie de vos observations préliminaires.
    Nous allons passer à la première série de questions. Les membres du Comité disposeront chacun de six minutes.
    Nous commencerons par M. Genuis.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie les témoins de leurs exposés. Mes questions porteront essentiellement sur le sujet de l'étude, évidemment.
    Madame Waite, pouvez-vous nous parler en quelques mots de la situation en Ukraine en ce qui concerne les craintes de pénuries alimentaires et des conséquences qu'elles pourraient avoir sur la santé mondiale plus généralement? Nous entendons beaucoup parler de l'approvisionnement alimentaire mondial et des possibles répercussions.
    Certainement.
    La COVID‑19 nous rappelle que les maladies ne connaissent pas de frontières et que personne n'est en sécurité tant que tout le monde ne l'est pas. Nous vivons à l'ère de la mondialisation. Nos économies sont mondialisées et notre production alimentaire aussi.
    Nous savons que la guerre est catastrophique pour les Ukrainiens en ce moment même et qu'ils fuient leur pays. Leur fuite est préoccupante pour leur propre santé et aussi pour la sécurité et la stabilité sanitaires mondiales.
    Nous savons qu'un autre conflit et des crises qui se bousculent mettront à mal des budgets restreints, ce qui est très préoccupant. Plus de ressources qui vont à la COVID et à l'Ukraine, ce sont moins de ressources pour autre chose, sauf si nous augmentons l'enveloppe de l'aide internationale dont je parlais tout à l'heure.
    Est‑ce que vous, ou d'autres témoins, pouvez répondre à la question de la distribution des doses de vaccin AstraZeneca inutilisées? Il en a déjà été question.
    Nous parlons d'hésitation à se faire vacciner, mais par rapport à un vaccin qui — et je ne sais pas si j'emploie les bons mots — n'est peut-être pas recommandé pour les Canadiens, ou qui est approuvé, mais que d'autres sont recommandés de préférence, et nous distribuons des doses. Quel effet cela a‑t‑il sur la perception de l'innocuité du vaccin et sur la perception du rôle du Canada dans tout cela, et que recommandez-vous au sujet des doses d'AstraZeneca?
    Bien sûr. Je parlerai la première.
    Résultats Canada participe plus ou moins à la promotion du don de doses et y ait généralement favorable. Si nous ne menons pas la charge sur ce front, c'est notamment parce que nous sommes très déçus de voir que nous sommes, pour commencer, dans une démarche caritative par rapport à la fourniture de vaccins dans le monde entier.
    Je dirai que, oui, le vaccin d'AstraZeneca a été prêt rapidement. Cependant, nous constatons que nous ne l'utilisons pas au Canada, ce qui influe certainement sur la demande de ce vaccin dans d'autres pays. Nous voyons déjà que ce n'est pas forcément le préféré des pays bénéficiaires du programme COVAX.
    Je suis heureuse de voir que les vaccins de Moderna et, je l'espère, de Pfizer vont bientôt être produits au Canada, mais cela influe certainement sur l'idée qu'on a des vaccins.
    Je sais qu'on parle beaucoup de l'hésitation à se faire vacciner, mais je tiens aussi à dire qu'il ne faudrait pas se focaliser sur ce point. La directrice des CDC a déclaré, il n'y a pas trop longtemps, que c'est « l'apartheid vaccinal », pas l'hésitation à se faire vacciner, qui contribue à prolonger la pandémie de COVID‑19. Nous devons donc faire attention à nous focaliser sur les bons sujets.
    J'aimerais beaucoup en parler, peut-être un peu plus tard, mais l'hésitation à se faire vacciner tient aussi, au fond, à un problème de confiance et d'érosion de la confiance. Nous assistons à une chute de confiance dans le monde entier, notamment de confiance dans les institutions gouvernementales et dans les dirigeants. Il est tout à fait essentiel de rebâtir cette confiance pour que des produits médicaux tels que les vaccins soient adoptés.

  (1220)  

    Je vous remercie.
    J'aimerais entendre tous les témoins, en particulier au sujet de leurs échanges avec le gouvernement et de ce qu'il a dit à propos de la dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Il me semble que quelqu'un dans le premier groupe a dit que le gouvernement faisait beaucoup de beaux discours, mais qu'au bout de deux ans dans ce processus, on ne sait toujours pas ce qu'il fait ou compte faire.
    Parlez-nous un peu de vos échanges directs avec le gouvernement et dites-nous quelle est, selon vous, sa position et ce qu'il vous dit.
    Je répondrai en premier, si vous le voulez bien.
    Je n'ai pas d'échanges directs avec le gouvernement sur ce sujet en particulier, mais j'ai vu plusieurs comptes rendus sur la participation ou la non-participation du Canada à ce processus. En fait, l'an dernier, plusieurs comptes rendus laissaient entendre que le gouvernement canadien décourage d'autres pays de s'engager dans la procédure de dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Il présente le RCAM comme un mécanisme de rechange à une dérogation à l'Accord sur les ADPIC, ce qui — comme je l'ai dit dans mon exposé — n'est pas vraiment l'approche à adopter.
    Par ailleurs, j'aimerais ajouter que la récente expérience de Biolyse est très frustrante. Il faut parfois des mois rien que pour faire inscrire un médicament à l'annexe 1 de la Loi sur les brevets.
    Je suis désolé, mais mon temps de parole est pratiquement écoulé. J'aimerais juste que vous précisiez quelque chose que vous avez dit, à savoir qu'il paraîtrait que le gouvernement s'oppose en coulisse à la dérogation à l'Accord sur les ADPIC. Avez-vous des raisons de croire que c'est vrai?
    Pouvez-vous répondre très brièvement, s'il vous plaît?
    Beaucoup de commentaires amènent à conclure que oui.
    Très bien. Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Genuis.
    Madame Bendayan, vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie Mme Waite et le professeur Ali.

[Traduction]

    Monsieur Ali, je vais peut-être poursuivre en anglais, car j'aimerais revenir sur le tout dernier point que vous avez soulevé. Évidemment, nous travaillons en comité et nos propos sont consignés au compte rendu, monsieur, et de nombreux pays ont reconnu le leadership du Canada à l'égard de la création du groupe d'Ottawa. Avec d'autres collègues de ce comité, j'ai participé à la vaste étude du comité du commerce international sur les discussions relatives à la dérogation à l'Accord sur les ADPIC dans lequel de nombreux experts se sont prononcés sur le rôle du Canada.
    Si vous n'avez pas de sources précises dont vous êtes prêt à nous faire part, je vous demanderais de reconsidérer vos commentaires sur le rôle du Canada à ce jour. J'aimerais aussi souligner que le Royaume-Uni, l'Union européenne et la Norvège se sont tous opposés à la dérogation à l'Accord sur les ADPIC à l'OMC, alors que le Canada a tenté de rassembler les pays afin de dégager un consensus. Je pense que vous conviendrez, monsieur, que nous avons besoin que l'Union européenne accepte une telle dérogation pour qu'elle prenne effet.
    Monsieur Ali, la parole est à vous.
    Je suis d'accord. Je pense que les États-Unis et l'Union européenne sont des acteurs beaucoup plus importants que certains autres pays. Il était réjouissant de voir les États-Unis commencer l'an dernier à appuyer activement les dérogations relatives aux vaccins et l'Union européenne a certainement quelques réserves dans ce domaine également.
    Bien sûr, le Canada a manifesté son appui de différentes façons, mais si vous examinez les documents publiés, je pense que vous direz que nous devons vraiment voir un leadership de la part du Canada.

  (1225)  

    L'Union européenne et le Royaume-Uni évoquent de nombreuses raisons et vous venez de reconnaître qu'ils sont tous deux essentiels à une entente sur une dérogation à l'OMC, notamment sur les capacités de fabrication, le contrôle de la qualité et l'innocuité des vaccins.
    Dans ce contexte, et compte tenu du fait qu'il s'agit d'acteurs importants qui ont des fabricants dans leurs pays, pouvez-vous nous donner, dans une réponse très brève, certaines raisons pour lesquelles vous êtes si opposés à l'utilisation des marges de manoeuvre prévues dans le RCAM, non pas parce que je pense que c'est forcément une meilleure voie, mais compte tenu de l'intransigeance des pays dont nous avons besoin pour obtenir une dérogation? Comme vous l'avez souligné, certaines d'entre elles ont été utilisées en 2008.
    Comme je l'ai souligné, la société qui a utilisé cette marge de manoeuvre en 2008 était extrêmement frustrée par le processus, et l'expérience récente de Biolyse n'était pas vraiment différente. Comme je l'ai dit, le simple fait d'inscrire un médicament à l'annexe 1 prend plusieurs mois et l'approche consistant à procéder pays par pays et médicament par médicament n'est vraiment pas un mécanisme efficace pour répondre à cette crise.
    Je comprends, monsieur Ali, mais nous sommes maintenant bloqués dans des négociations à l'OMC, et j'insiste encore une fois sur le fait que le Canada s'emploie avec vigueur à les débloquer.
    Madame Waite, je pense que je vais me tourner vers vous pour clarifier certaines statistiques que nous avons entendues lors du témoignage d'un groupe précédent. Je pense que nous avons déclaré très publiquement sur le site Web de notre gouvernement que le Canada a déjà donné 14,2 millions de doses de vaccins par l'entremise du mécanisme COVAX, mais c'est en fait 100 millions d'équivalents de doses qui ont été donnés. Connaissez-vous cette statistique, madame Waite?
    Oui, je la connais. C'est parce qu'une partie de notre engagement envers les 200 millions de doses est sous forme de dollars engagés, que le COVAX peut ensuite utiliser pour acheter des vaccins.
    Exactement.
    Ne convenez-vous pas, madame Waite, que c'est une bonne idée d'offrir la possibilité aux pays de choisir le vaccin qu'ils souhaitent acheter pour leur population?
    Oui, et c'est exactement la raison pour laquelle Résultats Canada n'a pas trop insister dans son plaidoyer pour le don de doses comme telles, parce que les dollars sont l'investissement le plus utile afin que le COVAX puisse disposer de cette latitude et de ce pouvoir d'achat direct auprès des sociétés pharmaceutiques.
    C'est excellent. C'est exactement ce que nous faisons en tant que gouvernement.
    J'aimerais souligner que cela place le Canada approximativement parmi les 10 premiers. Seriez-vous d'accord pour dire que nous sommes l'un des 10 premiers au monde en ce qui concerne les dons de vaccins?
    Oui.
    Dans votre introduction, madame Waite, vous avez dit que les enfants ont manqué deux billions d'heures d'enseignement en personne. Je crois que vous avez dit que c'était l'année dernière. Je vous vois hocher la tête.
    Le Canada se classe aussi au premier ou au deuxième rang — peut-être le savez-vous — pour la fourniture de diagnostics, comme les tests rapides, aux pays en développement. Pensez-vous que c'est important, compte tenu de certaines statistiques que vous avez citées dans votre introduction?
    Je ne pourrais pas dire si nous sommes en tête ou non. Je ne connais pas cette statistique, mais je peux dire qu'il est très important d'investir équitablement dans tous les piliers de l'ACT-Accelerator, notamment les vaccins, les axes thérapeutiques et diagnostiques et un connecteur pour le renforcement des systèmes de santé. Le Canada a investi dans tous ces domaines.
    L'ACT-Accelerator s'emploie aussi à sensibiliser et à lutter contre la réticence à se faire vacciner.
    Répondez très brièvement, s'il vous plaît.
    Oui.
    C'était très bref.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Bendayan.
    Je donne maintenant la parole à Mme Normandin pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie beaucoup l'ensemble des témoins.
    On sait que, dès le début de la crise et au moment de concevoir des vaccins, l'intérêt des compagnies pharmaceutiques se situait vraiment sur le plan pécuniaire. Il y avait un lobby pharmaceutique. Il y avait un intérêt financier à distribuer les vaccins dans les pays les plus offrants, ce que l'initiative COVAX devait tempérer, d'une certaine façon, en permettant à des pays moins fortunés d'obtenir des vaccins.
    Parallèlement à cela, on a vu une forme de diplomatie du vaccin. Par exemple, on a vu la Chine s'allier à la Serbie pour la distribution de vaccins Sinopharm. En échange, la Chine demandait que l'on fasse des courbettes devant elle. La Chine est beaucoup intervenue en Afrique également.
    Selon vous, est-ce que l'initiative COVAX et ce genre de diplomatie vaccinale sont deux choses en confrontation ou est-ce que l'une aide l'autre? L'initiative COVAX devrait-elle aussi servir à tempérer cette forme de diplomatie vaccinale, qui sert ses propres intérêts? Au contraire, cela aide-t-il l'initiative COVAX que la Chine, par exemple, décide par elle-même de fournir des doses à des pays moins fortunés?

  (1230)  

[Traduction]

    Lorsque le COVAX a été créé, les ambitions et les intentions étaient très élevées. Si nous avions tous respecté les principes du COVAX dès le départ, notre situation serait très différente aujourd'hui.
    Parce que des pays à revenu élevé comme le Canada ont adhéré au COVAX, mais l'ont miné en même temps en achetant des quantités massives de doses directement aux sociétés pharmaceutiques, nous nous sommes retrouvés avec une contrainte d'approvisionnement. Idéalement, nous aurions eu une réponse coordonnée à cette pandémie à l'échelle mondiale dès le départ. Malheureusement, nous n'en sommes pas là.
    Le principe du « tout le monde sur le pont » est plutôt bienvenu en ce moment. Si nous devons envisager le don bilatéral de doses au COVAX ou toute autre mesure nécessaire pour réaliser l'objectif de vacciner 70 % de la population mondiale, nous devons le faire dès maintenant.
    Nous devrions certainement tirer des leçons et essayer de comprendre comment coordonner globalement à l'avenir afin d'éviter une course folle à l'échelle mondiale comme celle‑ci.

[Français]

    Autrement dit, si l'initiative COVAX avait été mieux structurée dès le début, on aurait pu éviter d'avoir autant affaire à une diplomatie du vaccin, notamment par la Chine. Ai-je bien compris votre réponse?

[Traduction]

    Je dirais qu'il fallait qu'il soit mieux soutenu par les pays du G20, pas nécessairement mieux structuré.
    Si tous les pays qui ont adhéré à la vision du COVAX l'avaient soutenu sans réserve en veillant à ce que le COVAX dispose d'un accès prioritaire aux dons de doses, alors nous aurions pu vivre une situation différente.

[Français]

    Vous avez parlé un peu de l'aspect structurel, mais aussi de l'aspect du soutien par les pays du G20. Qu'est-ce qui a manqué le plus à l'initiative COVAX pour la rendre fonctionnelle?

[Traduction]

    Ce qui manquait, c'était des dollars et un investissement rapide dans le COVAX en tant que mécanisme afin qu'il puisse ensuite aller acheter rapidement des doses de vaccins. L'autre élément manquant était un engagement total envers sa vision et sa mission. Par exemple, le Canada a appuyé le COVAX en investissant dans le mécanisme de garantie de marché dans son volet d'autofinancement, mais nous avons aussi acheté nos propres doses directement auprès de sociétés pharmaceutiques, ce qui a miné le COVAX en soi.

[Français]

    Parlons justement du fait que des pays ont reçu des doses de vaccins plutôt que de l'argent pour s'en procurer. On a constaté une forme de gaspillage dans certains cas, alors que des pays ont donné des doses en fin de cycle, qui étaient pratiquement périmées et qui, à leur arrivée dans les autres pays, ont carrément dû être jetées.
    Qu'aurait-il fallu améliorer pour éviter cela?

[Traduction]

    Le COVAX est un nouveau mécanisme. C'est le plus grand déploiement de masse de vaccins dans le monde que nous ayons vu à cette échelle, donc il apprend au fil de son évolution. Nous constatons aussi que le COVAX commence à instaurer des durées de conservation minimales pour les doses données, de sorte que lorsqu'elles arrivent dans un pays, il reste au moins un certain temps pour transformer ce vaccin en vaccination.
    Ces choses changent et se déroulent en temps réel, car nous apprenons au fur et à mesure.

[Français]

    Précédemment, des témoins nous ont dit qu'au début, il y avait eu des problèmes d'approvisionnement en vaccins, mais qu'à un certain moment, il y avait eu des problèmes de demande. En réalité, la demande de vaccins de certains pays était moindre que le nombre de vaccins qu'on leur envoyait.
    Afin d'éviter les pertes, devrait-on revoir les algorithmes de distribution des vaccins dans les différents pays?

  (1235)  

[Traduction]

    Je ne suis pas sûr que nous ayons besoin d'algorithmes de distribution très compliqués. Il y a une demande importante dans la plupart des pays. Je pense que Mme Waite ou l'un des intervenants précédents a dit que la demande de vaccins est extrêmement élevée. L'hésitation à se faire vacciner, telle qu'elle a été présentée dans le monde occidental, est faible, donc je pense qu'il s'agit de cette volonté.
    Honnêtement, si nous envisageons de ne donner que des doses excédentaires ou des doses proches de la date d'expiration, seulement à certaines occasions, je dois le souligner, cela n'envoie pas un bon message au monde.

[Français]

    Merci beaucoup, madame Normandin.
    Merci aux témoins également.

[Traduction]

    La parole est maintenant à Mme McPherson, pour six minutes, je vous en prie.
    Merci beaucoup, monsieur le président et merci aux témoins de se joindre à nous pour cette importante étude.
    En tant que députée de l'opposition, mon rôle est d'examiner la réponse du gouvernement et d'essayer de trouver des moyens de l'améliorer. Ce que je retiens des témoignages de ce groupe, et du groupe précédent, c'est que le gouvernement canadien a en fait miné le COVAX en concluant ou en négociant des accords bilatéraux avec des sociétés pharmaceutiques.
    En outre, le gouvernement canadien n'a pas réussi à garantir la protection de la propriété intellectuelle par l'entremise de la dérogation à l'Accord sur les ADPIC afin que d'autres pays puissent produire leurs propres vaccins.
    La pièce finale, c'est que nous constatons que le gouvernement canadien dispose d'un système, sous la forme du Régime canadien d'accès aux médicaments, qui ne fonctionne pas. Il n'a pas fonctionné dans le passé et il n'est certainement pas en mesure de fonctionner aujourd'hui. J'ai entendu des organisations dire que les sites Web sont en panne, que les téléphones ne fonctionnent pas... Rien dans tout ce processus ne fonctionne.
    En tant que députée de l'opposition, je vois la possibilité d'obtenir une réponse différente si une future pandémie ou un variant de la COVID‑19 devait survenir.
    J'aimerais demander à nos deux témoins dans quelle mesure ils pensent que la réponse mondiale, en particulier du point de vue du gouvernement, serait différente si nous devions nous retrouver dans cette situation dans un avenir proche ou lointain.
    Je pourrais peut-être commencer par vous, monsieur Ali.
    Merci.
    Nous avons observé un nationalisme en matière de vaccins dans le monde entier. Le Canada n'est pas le seul pays. Les États-Unis et la plupart des pays européens ont emprunté une voie très similaire, ce qui est compréhensible, à certains égards. Le public exerce une pression sur le gouvernement, mais par ailleurs, j'espère que c'est vraiment le moment de tirer des leçons de notre réaction. Nous comprenons tous que ce n'est pas la dernière pandémie. Il y en aura d'autres.
    De plus, j'estime important de penser aux efforts mondiaux. À l'heure actuelle, notre réflexion a surtout été axée sur les dons et sur la recherche de différents mécanismes au sein de notre système pour permettre la fabrication de vaccins ici, puis leur envoi à l'étranger.
    J'applaudis particulièrement le Centre de transfert de technologie pour les vaccins à ARNm de l'OMS qui, à mon avis, est un excellent mécanisme pour produire et propager la capacité dans les pays en développement. C'est là que le Canada devrait prendre l'initiative et se ranger du côté de l'OMS, car, de toute évidence, ces choses vont continuer à se produire. Je pense qu'il s'agit d'un moment historique auquel nous devrions vraiment apporter notre contribution.
    Merci.
    Allez‑y, madame Waite.
    Oui. J'espère que nous ferons les choses différemment parce que j'ai confiance dans le gouvernement du Canada, dans l'humanité et dans les institutions multilatérales, alors j'espère que nous tirerons des leçons de cette expérience et que nous nous adapterons, que nous apporterons les changements nécessaires. Je sais que cela se produira, car je le vois déjà en temps réel. Le COVAX apprend en temps réel et s'adapte en temps réel. Le gouvernement du Canada fait de même; l'Organisation mondiale de la santé fait de même.
    Nous commençons à mener des études comme celle‑ci, pour réfléchir à ce qui a fonctionné ou non et à ce que nous devons faire pour nous assurer d'être prêts à faire face aux menaces futures, qui sont inévitables.
    Je suis d'accord avec tous les propos d'opposition par lesquels vous avez préfacé cette question, mais je tiens à dire que le Canada est aussi en avance à certains égards. Nous sommes l'un des quatre seuls pays à couvrir les frais accessoires pour chaque dose que nous donnons par l'entremise du COVAX. Nous avons été l'un des premiers pays du G20 à investir notre juste part dans l'ACT-Accelerator. Nous avons joué un rôle de premier plan dans la création du mécanisme de dons COVAX et la ministre Karina Gould, lorsqu'elle était au ministère du Développement international, était coprésidente du groupe de mobilisation du mécanisme de garantie de marché.
    C'est une question nuancée et complexe. Dans certains domaines, nous nous en sortons bien et dans d'autres, nous sommes moins performants.

  (1240)  

    Je vous remercie.
    Même si j'aimerais poser d'autres questions, je vais profiter du temps qui m'est imparti pour présenter une motion que j'ai proposée et qui a trait à ce sujet.
    Monsieur le président, me permettez-vous de présenter la motion que j'ai déposée la semaine dernière? Voulez-vous que je la lise, ou puis‑je la proposer dès maintenant?
    C'est à votre discrétion, madame McPherson.
    J'aimerais la lire, si possible.
    Vous êtes libre de le faire. Allez‑y.
    Merci beaucoup. C'est très court.
    Voici la motion:
Que, conformément à l'article 108(1)(a) du Règlement, le Comité ordonne que toutes les notes de synthèse, notes de service et courriels concernant les réunions de lobbying entre le gouvernement et les sociétés pharmaceutiques au cours desquelles le principe de l'équité en matière de vaccins a été discuté depuis mars 2020 soient fournis au Comité au plus tard le 21 avril 2022; que les renseignements confidentiels du Cabinet soient exclus de la demande; et que les renseignements commerciaux de nature délicate soient expurgés uniquement lorsque cela est strictement nécessaire.
    Merci, monsieur le président. Je demande le vote.
    Merci beaucoup. Je vais maintenant inviter les collègues à intervenir sur la motion dont nous sommes saisis. Le Comité en est saisi en bonne et due forme. Elle a déjà fait l'objet d'un avis et elle est directement liée au sujet dont nous discutons.
    Je vais travailler avec notre greffière pour m'assurer que nous dressons une liste intégrée d'intervenants. Je vois des mains levées virtuellement et il se pourrait bien que des collègues dans la salle souhaitent aussi intervenir.
    Madame Bendayan, veuillez lancer la discussion de cette motion.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je suis quelque peu déçue. Je croyais que nous étions unanimes sur l'importance de notre présente étude. Or, nous allons prendre 20 minutes de cette rencontre pour traiter la motion de ma collègue.
    Cela dit, je vois que nous avons déjà entamé le débat. Je vais donc suivre son cours.
    Merci.
    Merci beaucoup, madame Bendayan.

[Traduction]

    Y a‑t‑il d'autres interventions sur la motion dont nous sommes saisis? Je ne vois personne virtuellement.
    Madame la greffière, est‑ce que quelqu'un dans la salle souhaite intervenir? Je vais être prudent ici, juste au cas où les gens seraient encore en train de formuler leurs pensées.
    Comme il n'y a pas d'autre débat, le Comité est‑il prêt à voter sur la motion telle que présentée? Il semble y avoir consensus pour passer au vote.
    Chers collègues, y a‑t‑il une opposition à la motion présentée par Mme McPherson?
    Madame McPherson, je ne vois pas d'opposition à la motion. Je veux encore une fois m'assurer d'obtenir les réactions de la salle et virtuellement.
    (La motion est adoptée.)
    Merci beaucoup.
    Je vais céder le reste de mon temps de parole. Je ne pense pas qu'il en restait beaucoup de toute façon.
    En réalité, nous l'avons un peu dépassé. Je vous remercie beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à ce que je propose d'être une deuxième série de questions très comprimée pour notre groupe de témoins.
    Si les collègues sont d'accord pour faire comme la dernière fois, c'est‑à‑dire trois minutes et une minute et demie, je vais demander à M. Genuis de relancer le débat pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je suis un peu désavantagé, étant isolé. Si certains de mes collègues conservateurs veulent prendre la parole, ils peuvent peut-être m'envoyer un message dans la salle de clavardage appropriée.
    J'ai des questions, alors je suis heureux d'utiliser le temps jusqu'à ce qu'un autre collègue me fasse signe.
    Bien sûr. C'est à votre discrétion, et vous êtes libre de partager votre temps comme vous le souhaitez.
    Parfait. Je vais attendre ces notifications.
    Nous parlions de la perception des différents types de vaccins. L'un ou l'autre des témoins pourrait‑il parler de la diplomatie d'État de la Chine en matière de vaccin? Comment sont perçus les vaccins fabriqués en Chine?
    Quelle est l'incidence sur la coordination internationale en matière d'accès aux vaccins et de propriété intellectuelle lorsque d'autres acteurs ayant d'autres intérêts stratégiques disent en quelque sorte qu'ils offrent des vaccins, mais qu'ils ont un autre programme ou que les vaccins ne sont peut-être pas aussi efficaces.

  (1245)  

    Veuillez m'excuser, je n'en sais pas assez pour me prononcer sur cette question.
    Moi non plus. Je suis mal placé pour répondre à cette question.
    D'accord, pas de problème. Nous pourrons faire un suivi auprès d'autres témoins.
    Madame Waite, vous n'avez pas eu l'occasion de répondre à mes dernières questions. Je me demande si vous pourriez nous faire part de vos réflexions sur cette question également.
    Oui. Résultats Canada a récemment eu des contacts avec le cabinet de la ministre Ng, à la fois directement et en travaillant en coalition avec des organisations alliées de la société civile qui veulent voir le Canada s'engager et appuyer explicitement la proposition de dérogation à l'Accord sur les ADPIC.
    Je peux dire qu'essentiellement, ce que nous entendons ou ressentons, c'est qu'il y a un engagement envers le processus, mais aucun signe réel et clair d'un engagement à appuyer les propositions concrètes de l'Inde ou de l'Afrique du Sud. C'est un engagement à négocier le processus, et c'est à peu près tout.
    Juste pour préciser un peu ce point, au bout du compte, vous avez l'impression que vous ne connaissez pas vraiment la position du gouvernement. Il n'a pas été clair sur sa position en ce qui concerne la dérogation dans un sens ou dans l'autre.
    Oui, je dirais que c'est exact. S'il n'y a pas beaucoup de discussion, c'est difficile à comprendre.
    D'accord, merci.
    S'il me reste du temps, vous pourriez également préciser pourquoi le transfert d'argent est préférable au transfert de vaccins.
    Donnez une réponse ultra brève, s'il vous plaît.
    Il s'agit pour le COVAX de pouvoir utiliser les ressources pour combler ses plus grands besoins. Il s'agit également d'éliminer autant de frictions que possible dans le processus de livraison de vaccins dans d'autres pays.
    Lorsque vous commencez à mener des négociations à trois entre le gouvernement du Canada, le COVAX et une société pharmaceutique, par exemple, cela implique toute une logistique, qui est beaucoup plus lourde que si nous investissions directement des fonds dans le COVAX.
    Merci beaucoup, monsieur Genuis.
    Monsieur Ehsassi, la parole est à vous pour trois minutes.
    Merci, monsieur le président et merci à nos deux témoins.
    Je vais commencer par M. Ali.
    Dans votre déclaration, vous avez dit qu'environ 70 % des vaccins distribués à ce jour ont été destinés à des économies avancées ou à des pays riches.
    Étant donné qu'il y a une telle pénurie, si ces choses ne changent pas, comme nous sommes préoccupés par l'ampleur de ce défi et qu'il nous incombe d'en comprendre les dimensions, combien de temps faudra‑t‑il pour que les grandes sociétés pharmaceutiques produisent suffisamment de vaccins pour couvrir tous les pays?
    Plusieurs sociétés ont récemment annoncé qu'elles allaient mettre en place de nouvelles usines en Afrique. Tout ce processus peut prendre un an ou plus, mais je pense qu'une occasion s'offre vraiment à nous, avec l'aide technologique qui a été établie par l'OMS. Ils possèdent le savoir-faire.
    La demande est considérable. Des producteurs locaux sont prêts à fabriquer le vaccin et ils ont produit les premières doses. Il est évident qu'ils doivent maintenant procéder à des essais cliniques, car ils ont utilisé la séquence mise à disposition par Moderna — ou autrement dit, la même formule que Moderna utilise était disponible — mais sans l'aide de l'industrie.
    Je pense que si nous voulons avoir une incidence à court terme, en plus du COVAX, une étape importante consistera à mobiliser l'industrie pharmaceutique et à la convaincre d'aider ce centre, car le transfert de technologie à court terme est la vraie solution. Je pense que c'est le processus qui permettra d'accélérer considérablement les choses.
    Nous avons besoin d'environ 10 milliards de doses dans les pays à faible revenu. D'après ce que je comprends, le COVAX s'est engagé à fournir environ un milliard de doses. L'écart est considérable et le combler d'ici la fin de l'année, pour obtenir 70 % de couverture dans les pays à faible revenu, semble une tâche impossible compte tenu des mécanismes actuels dont nous disposons.

  (1250)  

    À ce jour, l'une de ces grandes entreprises de vaccins a‑t‑elle contribué de quelque façon au Centre? Y a‑t‑il eu une quelconque aide?
    Je ne dispose pas de cette information, monsieur. Je ne sais pas si Mme Waite a quelque chose à ajouter.
    C'est une excellente question. Puis‑je revenir en arrière? L'information existe, mais je ne l'ai malheureusement pas dans mes notes. Si je peux vous revenir avec cette information, j'en serai ravie, parce que nos alliés ont fait des analyses pour savoir quelles sociétés pharmaceutiques sont de bonnes joueuses dans le COVAX et lesquelles ne le sont pas.
    Merci beaucoup, madame Waite.
    Merci, monsieur Ehsassi.

[Français]

    Madame Normandin, vous avez la parole pour une minute et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    On sait qu'une centaine de pays n'atteindront pas l'objectif de couverture vaccinale de 70 % qu'on espérait atteindre en juillet 2022. On entend souvent la population dire que, au lieu d'offrir une quatrième dose ici, nous devrions donner ces doses aux pays n'ayant pas atteint cette couverture vaccinale.
    J'aimerais savoir si la question sur laquelle nous devons nous pencher comporte uniquement l'aspect de l'approvisionnement en vaccins ou s'il y a aussi un problème plus complexe de distribution et d'administration du vaccin. Est-ce quelque chose de combiné? Est-ce qu'on est en train de changer un peu la dynamique dans l'approvisionnement, c'est-à-dire qu'il ne s'agit plus simplement de donner des doses de vaccins, mais encore faut-il aussi avoir la capacité, sur le terrain, de les administrer?

[Traduction]

    Je peux répondre à cette question.
    Absolument, ce n'est pas seulement une question d'approvisionnement: nous avons besoin que les vaccins se transforment en vaccinations. Cela nécessite des systèmes de santé solides et résilients ainsi que des personnes outillées et prêtes à administrer ces vaccins. L'an dernier, je suppose, au début de la pandémie, l'approvisionnement était le problème majeur et crucial pour vacciner le monde.
    Aujourd'hui, il s'agit davantage de l'administration de ces doses. Nous avons beaucoup de doses: comment pouvons-nous les injecter dans des bras aussi vite que possible? Cela revient à renforcer les systèmes de santé et à investir dans le personnel.
    Nous avons vu que les interventions menées par les communautés sont absolument essentielles pour faire bouger les choses rapidement et pour instaurer la confiance dans les communautés. Je recommande d'investir dans les héros de la santé de première ligne qui font ce travail essentiel pour nous.

[Français]

    Votre temps de parole est presque écoulé, madame Normandin. Avez-vous une autre question très brève à poser?
    Il ne me reste pas suffisamment de temps pour poser une autre question, monsieur le président.
    D'accord. Merci beaucoup.

[Traduction]

    Nous avons Mme McPherson, s'il vous plaît, pour une minute et demie.
    Merci, monsieur le président et merci encore à nos témoins.
    J'allais poser ma dernière question à M. Ali, si vous le permettez, sur le RCAM.
    Vous avez dit que le RCAM est un processus qui ne fonctionne pas en ce moment et je ne pense pas qu'il devrait être utilisé à l'exclusion d'autres outils, mais j'espère que vous conviendrez que c'est quand même un outil que nous devrions utiliser.
    En outre, pour le moment, connaissant notre situation, sachant combien de temps il nous a fallu pour en arriver là et que la pandémie n'est pas terminée dans le monde, quelles sont les trois principales mesures que vous aimeriez que le gouvernement canadien prenne immédiatement pour assurer l'équité en matière de vaccin?
    En ce qui concerne les trois principales mesures à prendre selon moi, la première consiste à appuyer la dérogation à l'Accord sur les ADPIC et à jouer un rôle très actif à cet égard. Actuellement, je pense que nous attendons de voir l'allure que l'ébauche prendra. Je pense qu'il serait souhaitable d'exercer un leadership actif.
    La deuxième mesure consiste à soutenir le Centre de transfert de l'OMS qui nécessite des ressources et un savoir-faire technique importants.
    La troisième est de réexaminer le RCAM et de voir comment nous pouvons rendre ce processus efficace.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le président, c'était ma question et je suis suffisamment informée, je vous remercie.
    Merci beaucoup, madame McPherson.
    Monsieur Morantz, la parole est maintenant à vous pour trois minutes, je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Cette question s'adresse d'abord à M. Ali.
    Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion d'écouter la première heure de notre réunion, mais je m'intéresse particulièrement à la subvention que le gouvernement du Canada a accordée au fabricant du vaccin Medicago, et madame Waite, l'un ou l'autre d'entre vous est le bienvenu pour intervenir dans le court laps de temps dont nous disposons.
    Cette subvention a été accordée pour permettre au Canada de disposer d'une capacité de production nationale, mais aussi pour veiller à ce que nous puissions nous acquitter de nos obligations envers le COVAX. Lors de la dernière réunion, j'ai interrogé les fonctionnaires à ce sujet et ils m'ont répondu que l'interdiction par l'OMS de l'utilisation du vaccin Covifenz en cas d'urgence internationale n'aurait pas une incidence sur la contribution du Canada au COVAX.
    Par la suite, les médias ont rapporté que la ministre avait confirmé qu'en fait, cela aurait une incidence sur notre contribution au COVAX.
    J'estime qu'il s'agit là d'un manque de diligence raisonnable de la part du gouvernement du Canada qui, lorsqu'il accorde une subvention à une entreprise qui appartient en partie à une compagnie de tabac — Philip Morris en l'occurrence — doit faire preuve de diligence raisonnable pour s'assurer que le produit est disponible en cas d'urgence à l'extérieur de nos frontières. Je me demande si vous pouvez commenter cette situation.

  (1255)  

    Je ne peux pas commenter les détails et le processus qui a été suivi, mais je pense que nous sommes dans une situation de crise en raison de la pandémie mondiale.
    Je comprends la position adoptée par l'OMS, étant donné la participation de 21 % de Philip Morris dans la société, mais je me suis demandé: s'il avait été le premier vaccin disponible en 2020‑2021, quelle aurait été notre position à ce moment‑là?
    Pour ma part, ayant travaillé activement à la lutte au tabagisme et au tabac, je ne soutiendrais rien qui soit financé par l'industrie du tabac. Cependant, par le passé, l'OMS a approuvé en 2014 des traitements contre Ebola qui avaient des liens avec le tabac.
    Je ne sais pas comment la situation va évoluer dans ce cas particulier, mais je pense que nous devons examiner les choses au travers d'un prisme différent de celui que nous utiliserions dans des situations non pandémiques.
    Madame Waite, vous avez la parole.
    Oui. Je peux juste intervenir rapidement et convenir d'un regrettable manque de diligence raisonnable, mais je crois savoir que les 200 millions de doses promises au COVAX ne tenaient pas compte des doses de Medicago.
    La contribution était constituée de dollars, puis de doses excédentaires de produits comme AstraZeneca, Pfizer et Moderna que nous avions déjà achetés directement à des sociétés pharmaceutiques.
    Vous pourriez consulter les reportages, mais la ministre a déclaré dans les médias que cela aura une incidence sur l'obligation du Canada de tenir ses engagements envers le COVAX.
    Monsieur Morantz, merci beaucoup et merci à nos témoins.
    Notre dernière intervention avec ce groupe de témoins cet après-midi revient à Mme Fry, pour trois minutes.
    Allez‑y, je vous en prie.
    Merci. Je voulais remercier le groupe de témoins d'avoir trouvé des solutions très créatives à certains problèmes que j'essayais d'aborder.
    Vous avez tout à fait raison, madame Waite, qu'il ne s'agit pas seulement d'obtenir des vaccins, mais de les injecter dans les bras des gens. Je pense que c'est un point important.
    Je n'ai pas de question à poser. J'ai trouvé que les trois principales recommandations formulées par M. Ali étaient judicieuses. Je pense donc, au bout du compte, que nous savons tous que l'objectif est de vacciner le plus grand nombre de personnes dans le monde afin de nous débarrasser de cette pandémie. Vous avez tout à fait raison de dire que notre capacité à tirer des leçons du processus, des erreurs et de la première série de mesures rapides que nous avons essayé de prendre, sera importante pour les pandémies futures. Cependant, j'espère qu'une fois que tout cela sera derrière nous, nous ne nous concentrerons pas simplement sur le COVAX, mais sur les préparatifs, à la fois en ce qui concerne les infrastructures dans les pays en développement et la recherche de moyens d'éduquer entretemps en ce qui concerne les objections culturelles et religieuses de sorte qu'en cas de nouvelles pandémies, nous soyons prêts à agir et préparés, ayant appris de nos erreurs.
    Je tiens à vous remercier tous les deux pour vos réponses très complètes et non idéologiques. Elles ont témoigné de la capacité de sortir des sentiers battus.
    Je vous remercie.
    Merci beaucoup, madame Fry.

[Français]

    Au nom de tous les membres du Comité, je souhaite remercier les témoins qui ont comparu cet après-midi.
    Professeur Ali et madame Waite, merci beaucoup de votre comparution et de votre témoignage. Nous vous en sommes très reconnaissants.

  (1300)  

[Traduction]

    Chers collègues, sur ce, j'ai un très bref point à aborder, à savoir notre projet de réunion informelle avec le haut commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, jeudi à neuf heures. Veuillez aviser la greffière si vous avez l'intention d'y assister. Il y a une option virtuelle et une option en personne.
    Sur ce, je veux prendre un moment, comme toujours, pour remercier notre greffière, nos analystes et notre formidable équipe de la Chambre des communes pour tout le soutien qu'ils nous apportent ces jours‑ci, non seulement lors des séances régulières, mais aussi pour plusieurs réunions ponctuelles extraordinaires. C'est vraiment très apprécié.
    Monsieur Genuis, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Pourrais‑je simplement demander que lorsque nous recevons des hauts fonctionnaires d'organisations internationales, vous nous offriez la possibilité d'envisager une réunion officielle avec eux également? Nous avons déjà tenu des réunions officielles. Les conversations informelles sont agréables, mais elles n'ont pas le même niveau de transparence qu'une séance publique. Il semble que nous ayons beaucoup de réunions informelles, ce qui est mieux que rien du tout, mais je veux signaler que nous devrions peut-être envisager cette possibilité lorsque nous en avons l'occasion.
    Monsieur Genuis, c'est noté et apprécié. En fait, dans ces cas‑là, une réunion officielle est souvent la première option ou la première considération. Dans ce cas‑ci, en raison des ressources de la Chambre ou de l'ordre de la Chambre, il est impossible d'organiser une réunion officielle dans le délai imparti au haut commissaire et nous avons donc choisi l'option informelle. Votre remarque est dûment notée, cependant. Il est toujours prioritaire d'envisager cette option en premier lieu.
    D'accord, merci.
    Mesdames et messieurs, merci beaucoup.
    Sur ce, la séance est levée. Soyez prudents et nous nous verrons à notre prochaine séance.
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