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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 121 
l
1re SESSION 
l
42e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 1er novembre 2018

[Enregistrement électronique]

  (0845)  

[Traduction]

    Bonjour à tous. Commençons.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le mardi 18 septembre 2018, le Comité reprend son étude du soutien des familles après la perte d'un enfant.
    Aujourd'hui, le Comité entendra des témoins ici, à Ottawa, et par vidéoconférence.
    Pour commencer, comparaissant à titre personnel, nous accueillons Wendy Fuentes et Philippe Panneton, qui se joignent à nous par vidéoconférence depuis Miami, en Floride.
    Nous recevons Jens Locher, d'October15.ca, British Columbia Childloss Support Network, qui se joint aussi à nous par vidéoconférence, depuis Vancouver, en Colombie-Britannique.
    Nous accueillons aussi à Ottawa Bill Roberts, cofondateur, H.E.A.R.T.S. Baby Loss Support Program, et Cheryl Salter-Roberts, directrice exécutive, du Briar Patch Family Life Education Centre.
    Nous recevons Paula Harmon, directrice fondatrice; et Jessica Weatherbee, directrice, de Gardens of Grace.
    Nous accueillons Alain Pelletier, directeur général, de Les amis du crépuscule.
    Bienvenue à vous tous. Nous allons commencer par vos déclarations liminaires de sept minutes.
    Commençons par Wendy Fuentes et Philippe Panneton, de Miami, en Floride. Les sept prochaines minutes sont à vous.
    Aucune pression. Tout le monde aime briser la glace. Merci.
    Merci de nous accueillir ce matin. Nous sommes vraiment heureux d'avoir l'occasion de prendre la parole. Permettez-moi d'entrer dans le vif du sujet.
    Voici notre histoire.
    Le matin du 26 avril 2016, j'ai découvert notre fils, Manuel, froid et raide dans son lit. J'ai couru dans notre chambre en le tenant dans mes bras et j'ai réveillé mon épouse en la priant de lui sauver la vie. J'ai composé le 911 pendant qu'elle lui criait de se réveiller et se démenait pour faire entrer de l'air dans ses petits poumons tout en tentant de ne pas réveiller notre fille qui venait de naître.
    Les premiers intervenants sont arrivés en même temps que la police et ils nous ont demandé de trouver quelqu'un pour surveiller notre fille, car nous aurions besoin de les accompagner à l'hôpital. J'ai appelé mon père. Il était 6 h 15 le jour de son 65e anniversaire.
    Cette scène rejoue en boucle dans ma tête tous les jours. Les heures qui ont suivi ont été tout aussi dommageables et ont joué un grand rôle dans le traumatisme subi par notre famille. Durant la première heure qui a suivi notre arrivée à l'hôpital, notre fils a été déclaré mort. On nous a demandé d'envisager de donner ses valvules prothétiques à un enfant présentant un besoin urgent. Une conseillère en matière de deuil, qui était déjà en pleurs, est venue dans la salle et a essayé de nous réconforter. Les policiers ont commencé à nous interroger dans la salle même où reposait le corps inerte de notre fils. Quand ils ont été convaincus qu'il n'y avait pas d'acte criminel ni aucun risque de contagion, ils nous ont dit de rentrer chez nous.
    Un travailleur de l'hôpital nous a parlé d'une certaine maison funéraire qui offrait un forfait sans frais pour les familles d'enfants mort-nés, disant qu'elle pourrait peut-être nous aider, même si notre situation était différente. On nous a plus tard annoncé que, comme nous avions accepté de donner les valvules, les arrangements funéraires seraient reportés pour une période indéterminée. Les médecins nous ont dit qu'ils n'avaient rien pu faire. Ils ne savaient pas pourquoi notre fils était décédé.
    C'est ce dont nous nous souvenons. C'est tout. Il n'y avait personne vers qui se tourner. Il n'y avait personne pour nous guider ni pour nous rediriger vers une fondation pour qu'on puisse y obtenir de l'aide. Il n'y avait aucune forme d'aide en place pour compenser les coûts financiers ou émotionnels des semaines qui ont suivi.
    Dans un pays qui se targue de s'occuper de ses gens les plus vulnérables grâce à ses programmes sociaux, chaque porte unique à laquelle nous avons frappé a été fermée, depuis celle de notre médecin de famille, qui nous a dit que le mieux qu'elle pouvait faire, c'était nous aiguiller vers des soins psychiatriques — et, quand nous étions incapables de répondre à certaines de ses questions en raison de notre état de choc, on nous a dit carrément que, si nous ne faisons pas preuve d'une plus grande ouverture, il nous faudrait trouver un nouveau médecin de famille — jusqu'à celle des ONG, qui ont affirmé ne s'occuper que des familles dont les enfants étaient victimes du syndrome de mort subite du nourrisson ou de cancer, ou de quelque cause que ce soit, mais qui ne pouvait pas s'occuper de nous, parce que le nôtre n'avait pas le bon âge et que la cause du décès était inconnue. Nous avons dû traiter nous-mêmes avec le bureau du coroner pour remettre la dépouille de notre fils pour l'incinération, avec la maison funéraire, pour commander le certificat de décès, planifier les funérailles de notre enfant et envoyer au gouvernement l'avis du décès de notre fils.
    Pendant tout ce temps, les factures continuaient d'arriver. Nous avons dû payer pour que la famille de mon épouse puisse venir des États-Unis, puis pour les funérailles de notre fils. Heureusement, notre employeur m'a généreusement accordé du temps avec ma famille et une rémunération pour les semaines qui ont suivi le décès de notre fils. Des amis et des membres de la famille nous ont aidés en aidant à couvrir les coûts immédiats et en préparant quelques repas.
    Au bout de huit semaines, je suis retourné au travail. Je n'avais pas le choix. Même si mon employeur m'a dit de prendre tout le temps dont j'avais besoin, mon supérieur immédiat m'a laissé entendre que je devrais maintenant bien aller et que je devrais vraiment me montrer reconnaissant de ce qu'on m'avait donné et retourner au travail. C'était trop tôt. J'ai souvent pleuré à mon bureau ou j'ai pris des pauses prolongées pour calmer mon angoisse et ma colère. Les collègues me regardaient avec pitié, et des gens bien intentionnés sont venus me voir et m'ont avoué qu'ils étaient surpris que je n'aille pas encore mieux. Le fait de préserver les apparences et d'essayer de faire bonne figure a eu de terribles répercussions sur moi et ma famille.
    Enfin, j'ai trouvé sur Internet une organisation qui s'appelle Souffle de bébé. Elle nous a aiguillés vers la SUDC Foundation, une fondation américaine qui s'occupe de familles dont des enfants sont morts de façon subite et inexpliquée, qui est la cinquième principale cause de décès chez les enfants de 1 à 4 ans aux États-Unis, où des statistiques sont disponibles. Bien que la fondation n'offre pas de soutien financier, elle nous a fourni, ainsi qu'à notre famille élargie, du counseling et un soutien moral fort nécessaires. Nous lui sommes donc à jamais reconnaissants.
    Comme bon nombre des familles qui ont témoigné ici, nous avons pris ce que la vie nous a lancé et avons tenté d'en tirer le meilleur en améliorant la vie d'autres personnes. Nous procédons actuellement à la mise sur pied d'une organisation caritative qui aidera les familles à s'orienter dans le processus de deuil. Nous avons soumis la pétition E-1558, où nous demandons que le 26 avril soit désigné journée de sensibilisation à la mort subite et inexpliquée.

  (0850)  

    Avec d'autres familles, nous demandons fermement au gouvernement du Canada d'aider les parents orphelins au moyen d'une compensation financière de 12 semaines suivant immédiatement la perte d'un enfant, peu importe l'âge. Ce que nous aimerions voir comme recommandation de la part du Comité, c'est un service automatique qui ressemble à ce que l'on fait lorsqu'un bébé naît, qui est fait par l'hôpital, et non par la maison funéraire ou la famille. Ce processus automatique servirait aussi de déclencheur concernant deux aides financières différentes, la première de l'assurance-emploi, car les parents endeuillés sont incapables de travailler, et la deuxième, des prestations pour enfants, pour aider à payer les funérailles de votre enfant.
    Merci à vous tous de nous donner une voix dans le cadre de ce processus.
    Merci beaucoup de vous être joints à nous aujourd'hui et d'avoir raconté cette histoire.
    Ensuite, nous recevons Jens Locher, du British Columbia Chidloss Support Network, qui comparaît par vidéoconférence, de Vancouver.
    Les sept prochaines minutes sont à vous.
    Comme l'intervenant précédent, je remercie le député Blake Richards d'appuyer la motion M-110 et le Comité de nous avoir fourni la possibilité de parler aujourd'hui de ce sujet important. J'aimerais également raconter ma propre histoire au Comité.
    En 2010, mon épouse Kerstin et moi avons décidé que nous étions prêts à fonder notre famille et à l'élargir. Nous avions méticuleusement tout planifié. Nous avons fait des recherches pour connaître toutes les exigences alimentaires et l'information nutritionnelle pour mon épouse. Nous avons suivi un cours de réanimation cardiorespiratoire pour bébé. Nous avons assisté à de nouveaux ateliers pour parents, à des séances d'allaitement, et ainsi de suite. Nous nous sommes mis à la recherche de berceaux, de matériel pour l'allaitement et de toutes ces sortes de choses. Nous nous sentions vraiment préparés lorsque nous avons découvert que nous attendions un fils, en mars 2011.
    La grossesse s'est déroulée sans complications, et mon épouse a porté le bébé jusqu'à la 41e semaine. Nous avions établi un cercle social de soutien dans le cadre des événements auxquels nous avions assisté avec d'autres futurs parents, des événements comme le yoga prénatal.
    Cependant, tout s'est vraiment passé différemment que ce que nous avions prévu quand Marlon, notre fils, a manqué d'oxygène durant l'accouchement. Il a subi de graves lésions au cerveau, et son pronostic était pitoyable. Les médecins nous ont dit qu'il vivrait peut-être quelques heures. Malgré tous les cours que nous avions suivis et toutes les recherches que nous avions faites, nous nous sentions complètement et totalement démunis. À ce jour, nous savons gré à un médecin de nous avoir aiguillés vers le Canuck Place Children's Hospice ici, à Vancouver. Nous nous sommes déplacés vers ses installations un jour après la naissance de Marlon et avons passé un autre jour là-bas avec lui, créant des souvenirs avant qu'il décède dans nos bras.
    Quand j'y repense, je ne peux insister assez sur l'importance du soutien que nous avons reçu de Canuck Place. Nous avons pu passer du temps avec Marlon. Nous avons des souvenirs. Nous avons pris des photos. Nous avons des moules de ses mains et de ses pieds, et ainsi de suite. Tous ces éléments nous ont plus tard aidés avec notre deuil, durant lequel nous avons été soutenus par l'équipe de deuil du centre de soins palliatifs.
    Je vous raconte ces détails en particulier en raison des autres témoins qui ont d'autres histoires, parce que je me rends compte de la chance que nous avons eue d'obtenir le soutien et de l'importance que cela a eu pour notre deuil durant notre guérison. Sans Canuck Place, on ne nous aurait pas donné de renseignements par rapport à ce qu'il fallait faire. Il n'y aurait eu aucun counseling ni aucune possibilité de parler à d'autres parents endeuillés. Mon coeur saigne pour les familles qui n'ont pas l'occasion de passer du temps avec leurs enfants, qui n'ont personne à qui parler ou qui doivent découvrir eux-mêmes toutes les formalités.
    En fait, pendant plusieurs mois, nous avons essayé d'obtenir un soutien spécialisé par d'autres moyens, et cela a été incroyablement difficile. À mon avis, il y a dans le système une lacune énorme pour des milliers de parents dans des situations comme la nôtre, et le système du soutien existant semble un peu à l'envers. Si notre fils avait vécu, toute notre propre préparation nous aurait servi. Nous aurions eu tous ces liens avec les autres parents avec qui parler et à qui poser des questions. Nous avions un accès relativement facile à divers services, comme des consultantes en allaitement, des ergothérapeutes, des spécialistes du sommeil ou des conseillers dans des cas comme la dépression post-partum. Lorsque l'inimaginable s'est produit et que notre fils est décédé, il y a eu très peu d'aide, outre celle que nous avons reçue de Canuck Place.
    Avec Marlon, mon épouse avait déjà eu le congé de maternité, et aucune autre interaction n'était requise auprès de Service Canada. Mon employeur m'a énormément soutenu, et j'ai été en mesure de prendre des congés. Nous avions tous deux des régimes d'assurance-maladie complémentaires qui couvriraient plus tard une partie des services de counseling qui nous ont été fournis, mais pas pour le deuil, seulement pour la dépression. Encore une fois, ce n'est pas tout le monde qui a ces régimes d'assurance-maladie complémentaires.
    Après plusieurs mois, nous avons réussi à reprendre un peu notre vie en main et avons essayé d'avoir un autre enfant. Mon épouse est de nouveau tombée enceinte, et nous avons estimé que le risque était faible. La deuxième grossesse s'est déroulée sans complications, jusqu'à ce qu'un matin, mon épouse se réveille et ne sente plus le bébé bouger. Le 9 décembre 2012, notre fils Tobias est mort dans l'utérus à 35 semaines de grossesse.
    Comme d'autres parents l'ont mentionné, dans les semaines qui ont suivi le décès de nos enfants, nous n'avons pas pu réfléchir clairement et nous occuper des tâches les plus banales. Nos liens sociaux avec d'autres parents n'ont pas beaucoup aidé. Ils étaient des rappels beaucoup trop vifs de ce que nous avions perdu. Nous voulions nous cacher du monde, puisque le fait de voir une femme enceinte ou une famille avec des enfants était une torture. Cela voulait dire, par exemple, qu'il était hors de question d'aller faire des courses. De toute façon, nous n'en avions pas l'envie. Je peux vous dire que j'ai perdu des amis quand j'étais adolescent et que j'ai perdu mon père, qui est mort d'une tumeur au cerveau, mais ce type de deuil n'était pas comparable à ce que j'avais déjà vécu. Notre monde s'était complètement écroulé.
    Après le décès de Tobias, nous avons dû prendre des dispositions avec Service Canada pour organiser le congé de maternité de mon épouse. Durant cette période difficile, nous avons dû quitter notre maison, le refuge où nous nous cachions, et nous aventurer dans le monde pour remplir quelques documents. Nous avons dû nous tenir debout dans le bureau à espace ouvert et expliquer notre situation. En plus de tout cela, plusieurs années plus tard — en fait, il y a deux ans aujourd'hui — nous avons reçu une lettre de Service Canada disant que nous avions réclamé trop d'argent. Il a fallu plusieurs appels téléphoniques et lettres sur plusieurs mois pour clarifier avec le personnel que nous n'avions pas commis de fraude concernant ce paiement en trop. Nous avions simplement demandé que la période commence immédiatement après le décès de Tobias, qui est survenu une fin de semaine, et mon épouse n'est pas retournée au travail le lundi.

  (0855)  

    En raison de quelque paramètre du système, le système de l'assurance-emploi avait rajusté la date de début du lundi que nous avions demandée pour qu'elle passe au lundi de la semaine suivante. Nous ne l'avions pas remarqué, et l'employeur de mon épouse a fait commencer le congé à la semaine que nous avions demandée, et il y avait donc cet écart d'une semaine. Nous avons ensuite dû expliquer pendant plusieurs mois que nous avions droit aux 15 semaines, mais qu'il y avait cet écart.
    En 2014, notre fille Thea est née. Compte tenu de nos antécédents, nous l'avons mise au monde quatre semaines plus tôt et avons passé neuf jours avec elle dans l'unité néonatale de soins intensifs. C'est maintenant une fille de 4 ans en bonne santé, et nous profitons de chaque jour avec elle.
    En 2015, nous avons essayé pour une dernière fois d'agrandir notre famille, mais avons vécu une fausse couche précoce à sept semaines.
    Comme j'ai personnellement connu la fausse couche, la mortinaissance et le décès néonatal, il est important pour moi d'encourager le Comité à examiner la grossesse et la perte d'un bébé de façon holistique. Cela touche beaucoup de Canadiens dans des circonstances très différentes. Un des membres du Comité a dit plus tôt que les règles s'appliquent souvent en noir et blanc, sans zones grises. Malheureusement, ces situations tragiques sont tout sauf noir et blanc et nécessitent de la compassion et de l'empathie pour aider les parents à redevenir des membres fonctionnels de la société canadienne.
    Merci de m'avoir permis de raconter notre histoire. Comme l'intervenant précédent, j'appuie entièrement la proposition de fournir aux parents 12 semaines de congé et d'automatiser le processus afin de le simplifier, et non pas de conserver cette nécessité indue pour eux de s'occuper de la paperasserie.
    Merci.
    Merci beaucoup. Bien franchement, c'est un merci bien spécial, puisque je vois que l'horloge derrière vous indique 6 heures. Nous vous remercions vraiment d'être ici à une heure aussi matinale. Merci.
    Nous recevons maintenant M. Bill Roberts, cofondateur, H.E.A.R.T.S. Baby Loss Support Program, et Mme Cheryl Salter-Roberts, directrice exécutive, H.E.A.R.T.S. Baby Loss Support Program, du Briar Patch Family Life Education Centre.
    Vous avez sept minutes.
    Je vais parler pour nous deux et je parle aussi pour les parents de l'ensemble du Canada qui vivent actuellement leur propre épreuve de perte d'un bébé et dont la voix ne peut s'exprimer aujourd'hui. Je serai cette voix.
    En tant que parent endeuillée qui a connu la perte d'un enfant durant la grossesse et la perte d'un bébé et comme cocréatrice de notre programme de soutien local des décès périnataux dans ma collectivité à l'extérieur d'Edmonton, en Alberta, j'aimerais raconter notre expérience et notre histoire et vous faire part des connaissances que nous possédons maintenant dans ce domaine unique et crucial.
    Mon époux Bill et moi savions bien longtemps avant de nous marier que nous voulions tous deux fonder une famille plus grande que nature. Nous avons été chanceux que la conception ne soit jamais un problème, mais le fait de rester enceinte, parfois, est devenu un problème.
    Les deux premières grossesses ont été faciles. Nous avons accueilli notre première fille, Chelsea, de façon naturelle, puis, deux ans plus tard, notre premier fils, Brady.
    Avec notre premier enfant, j'ai pu profiter d'un congé de maternité payé, puis j'ai choisi de ne pas retourner travailler à temps plein en raison des coûts élevés des frais de garde d'enfant dans notre région. J'ai fini par rester à la maison avec quatre enfants pendant plus de 20 ans, une période que j'ai chérie et que je souhaite à tous les parents.
    Quand nous avons eu notre troisième enfant, nous avons été choqués et surpris de vivre la première de nombreuses pertes, et nous étions très mal préparés. Notre médecin et notre sage-femme n'avaient pas de réponse pour nous, puisque notre perte s'est produite très tôt durant la grossesse. Nous avons pris du temps pour guérir, puis nous avons essayé de nouveau, accueillant heureusement un autre fils né naturellement et en santé, Brodie, l'année suivante.
    Nous avons pris une courte pause pendant que Bill est retourné à l'université. Durant sa dernière année, nous avons décidé qu'il était temps d'avoir notre quatrième bébé. Encore une fois, nous avons vécu deux fausses couches avant de finalement accueillir notre deuxième fille, Chynna, juste 10 jours avant que Bill obtienne son diplôme. C'était une époque magique, puisque mon époux commençait sa nouvelle carrière et que nous commencions à vivre en tant que famille de six personnes.
    Nos pertes durant ces années ont été profondes et très difficiles. Grâce au soutien de bons amis, de membres de la famille et de l'un et l'autre, nous nous sommes débrouillés, mais ce sont nos deux pertes suivantes qui ont changé notre monde et notre parcours de vie. Alors que nos enfants grandissaient en santé, heureux et forts, nous savions que nous voulions continuer d'agrandir notre famille et nous étions très enthousiastes à l'idée d'annoncer notre prochaine grossesse. Un soir, plus tard durant notre grossesse, je me suis rendu compte que j'étais en travail. Même si notre fils devait naître à la maison, nous avons décidé de nous diriger vers l'hôpital dans l'espoir qu'on puisse faire cesser ce travail précoce. Malheureusement, mon travail allait trop vite, et personne n'a rien pu faire.
    On nous a traités avec grâce, dignité, bienveillance et compassion, mais le matin suivant, nous sommes arrivés à la maison les bras vides et le coeur brisé. Nous avons nommé notre fils Bretton-Elijah Lucas, et sa naissance et son décès ont modifié notre vie à jamais.
    Au bout de quelques jours, nous avons su que ce n'était pas une perte que nous pouvions subir seuls et que nous pouvions comprendre, et à l'aide de soutien communautaire, nous avons créé dans notre hameau un programme nommé H.E.A.R.T.S. Baby Loss. Nous l'avons lancé en 1996, et aujourd'hui, nous avons soutenu, conseillé, tenu et servi plus de 4 600 familles en personne, par téléphone, par courriel et même sur Skype.
    Nos services sont vastes. Ils couvrent l'Ouest du Canada, le Nord de l'Alberta jusqu'aux territoires et traversent les États. Nous offrons notamment des groupes de soutien, du clavardage en ligne, des visites à domicile, du counseling, des programmes pour les parents, une cérémonie annuelle aux chandelles et des ressources pour quiconque a besoin de soutien.
    Il y a un peu plus de six ans, nous avons lancé le programme Baby Steps Walk to Remember, auquel le député Blake Richards a assisté. Il a parlé de façon passionnée de la motion M-110 avec nos familles. C'est une journée pour tous ceux qui sont touchés par la perte d'un précieux bébé.
    Le 14 octobre, il y a juste quelques semaines, nous avons fait notre marche sur le terrain de l'immeuble législatif de l'Alberta, dans le centre-ville d'Edmonton. Nous avons marché avec un peu moins de 300 parents, frères et soeurs, amis et membres de la famille, pour honorer 206 bébés. En six ans, plus de 1 800 personnes ont marché sur ce chemin, ce qui représente un peu plus de 1 200 précieux bébés.
    Chaque année, en Alberta, près de 16 000 bébés sont perdus durant la grossesse ou après la naissance, une grossesse documentée sur quatre se termine en fausse couche, et plus de 400 bébés meurent à la naissance, comme notre fils, Bretton. Sans un souffle et sans ouvrir les yeux, Bretton, par sa brève existence, a créé du soutien, de l'éducation, de la sensibilisation et de la compassion pour ceux qui subissent cette perte unique et énorme.
    Après la naissance et le décès de Bretton, nous nous sommes souvent posé la question: « Pourquoi? ». Avec le temps, nous nous sommes dit que son but était d'être le catalyseur de ce programme. Nous nous sentons tous deux chanceux de dévouer notre vie à cette cause nécessaire.
    Quand nous élaborions notre programme, on nous a encouragés à offrir d'autres options aux familles de notre collectivité. Nous avons créé un centre d'initiation à la vie familiale en plus de notre programme de décès périnataux. C'était un travail incroyable qui a mobilisé notre famille, notre collectivité, nos amis et des collègues.
    Puis, ça s'est reproduit. Nous avons attendu un certain temps pour guérir et pour créer notre centre de vie familiale. Notre médecin et notre sage-femme étaient convaincus que notre expérience de mortinaissance ne serait pas répétée, car j'étais toujours jeune et en santé, et que la mortinaissance est rare. Le soir du 21 août 1998, dans le confort de notre maison, nous avons accueilli Ciara-Rose Kennedi d'un salut rapide et d'un au revoir très triste, dans un moment qui a encore une fois arrêté notre vie.
    Cette fois-là, nous savions comment trouver du soutien et comment intégrer cette perte incroyablement difficile à notre vie, une fois de plus. Malgré toute notre expérience, nos connaissances et la communauté qui nous entourait, nos bras étaient une fois de plus vides, et nos coeurs, brisés.

  (0900)  

    Au cours des années suivantes, tandis que nous poursuivions notre guérison, nous avons vécu trois fausses couches de plus et décidé que, sans raison médicale expliquant toutes nos pertes, nous continuerions nos efforts pour élever les quatre enfants incroyables que nous avions. Je crois qu'il est important de dire que, même si nous avions ces quatre enfants maintenant adultes et sommes bénis de les avoir élevés, cela ne réduit en rien notre deuil, car nous savons exactement ce que nous avons perdu, pas juste les rêves et les espoirs d'un bébé en santé dans l'avenir avec nos enfants désirés, mais aussi des moments importants: la première dent, les pas jamais faits, l'absence de la première journée d'école et tout ce qui mène à ces petits-enfants que nous n'aurons pas de ces gentils bébés innocents qui sont morts trop tôt.
    Entretemps, nous avons renommé notre centre, combiné la première partie du nom de Bretton et le milieu du nom de Ciara pour créer notre projet patrimonial, le BriarPatch Family Life Education Centre.
    Nous avons quatre enfants en santé, Chelsea, Brady, Brodie et Chynna. Deux mortinaissances importantes, Bretton et Ciara; six fausses couches précoces, Birkley, Cabriola, Cambria, Beau, Cree et Bentley. Ce sont des pertes que de nombreuses personnes ne connaîtront jamais, mais pour ceux qui le vivront, la noirceur de ces premiers jours de perte devient la noirceur des jours de deuil qui suivent pour le reste de leur vie.
    Ce n'est pas un deuil qu'on peut simplement surmonter en lisant un livre ou en assistant à une séance de groupe de soutien. Pour la plupart des familles, la perte d'un bébé nécessite des soins intensifs de la part d'un médecin ou d'un soignant pour les répercussions physiques, du soutien spécialisé pour les répercussions émotionnelles, du soutien communautaire pour les répercussions sociales, du soutien didactique pour les répercussions spirituelles et du soutien psychologique pour des répercussions cognitives.
    C'est une expérience de deuil qui ne ressemble pas aux autres. Personne d'entre nous ne commence une grossesse avec une liste de vérification pour savoir quoi faire si nous perdons notre bébé. Personne d'entre nous ne sait comment gérer une fausse couche, consoler les coeurs brisés et réparer les relations fracturées; nous ignorions où enterrer notre bébé, qui ferait le service et quel type de cercueil choisir.
    J'aimerais maintenant vous faire part de mes réflexions à l'appui de la motion M-110. Cette initiative a d'abord été portée à notre attention par le député Blake Richards, et nous sommes heureux, pas seulement en tant que famille, mais en tant qu'organisation, de donner un aperçu du sort de nos familles et des répercussions de la perte d'un bébé sur les familles et la collectivité dans son ensemble.
    Pour les familles qui ont été en mesure d'accéder à des prestations d'assurance-emploi au titre des congés de maternité et de paternité, il est bouleversant d'entendre les histoires de ceux qui se retrouvent coupés des prestations une fois que les responsables du système apprennent que leur bébé est décédé. En plus d'un revenu déjà réduit, de nombreux coûts sont associés à la perte d'un bébé, et la plupart des familles ne sont pas préparées à cette difficulté. Les funérailles coûtent cher, et même si les maisons funéraires aident souvent généreusement en réduisant les coûts, au final, nous devons tout de même payer certains frais. Si le père ou le conjoint s'absente du travail pour soutenir la mère et pour vivre son propre deuil, il faudrait peut-être réfléchir à des pertes de salaire supplémentaires et les couvrir.
    Notre système de santé couvre de nombreuses interventions, mais dans le cas de la perte d'un bébé, il pourrait y avoir des médicaments ou des services qui ne font pas partie du régime d'assurance santé provincial ou qui ne sont pas couverts par des prestations privées. Le counseling peut être couvert, mais les coûts peuvent être élevés, et très peu de rendez-vous sont remboursés.
    Les enfants et les adolescents, les frères et les soeurs, sont grandement touchés par la perte d'un bébé, ce qui entraîne des jours d'école manqués et des rendez-vous de counseling. Ils pourraient aussi manifester un comportement parce qu'ils auraient du mal à comprendre ce qui s'est passé. Les enfants et les adolescents n'ont pas les mots pour parler pleinement de leurs sentiments et de leurs émotions, et c'est là où apparaissent des comportements néfastes qui pourraient, sans soutien, s'aggraver et aller jusqu'à la consommation de drogues et d'alcool pour atténuer la douleur et engourdir l'expérience. Des problèmes de santé mentale pourraient apparaître, et c'est un autre coût pour le système.
    En tant que pays, nous devons soutenir ces familles endeuillées qui vivent la perte d'un bébé au moyen d'une législation qui leur donne la possibilité de conserver leurs prestations, afin de leur donner du temps pour guérir et du temps, en famille, pour traverser cette incroyable épreuve de deuil. Nous avons besoin de mesures de soutien communautaire financées pour les parents, les enfants, les membres de la famille élargie et la collectivité dans son ensemble. La perte d'un bébé nous touche tous, que ce soit des heures de travail perdues, des activités sociales perdues, de l'exercice physique perdu et des moments d'émotion perdus.
    Comme j'étais mère au foyer quand nos enfants grandissaient, je n'étais pas admissible aux prestations de maternité au-delà de notre premier enfant, mais une prestation qui aurait fourni à mon époux la possibilité de s'absenter du travail pour être à la maison avec nous, quand j'éprouvais des difficultés physiques et émotionnelles, pour être avec nos enfants qui essayaient de saisir le concept de deuil et de perte et, fait encore plus important, pour qu'il puisse avoir du temps pour vivre son propre deuil et passer à travers les complexités qui ont influencé notre relation et pour grandir durant cette période sombre aurait complètement changé les choses. Il a plutôt dû retourner au travail, et cacher ses larmes et sa douleur, tout en se montrant fort pour moi et nos enfants.
    Nous avons réussi à nous en sortir, et, même si ce n'est pas chaque mariage qui survit à la grossesse ou à la perte d'un bébé, notre occasion d'aider les autres a renforcé notre engagement à l'égard de notre mariage et de notre famille. C'est toujours un travail en cours, mais c'est sain et c'est complet.

  (0905)  

    Aujourd'hui, si on nous demande ce qui aiderait ces familles blessées et vulnérables, ce dont nous avons besoin et ce qui pourrait changer les choses, je répondrais ceci: restructurez le système actuel pour les familles afin qu'elles puissent accéder aux prestations complètes auxquelles elles ont droit en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi et les conserver. Créez une nouvelle prestation, comme d'autres familles l'ont souhaité, de 12 semaines pour des mesures de soutien globales aux personnes endeuillées, partout au Canada, pour toutes les familles ayant perdu un bébé, dans toutes les collectivités; une prestation concrète de congé pour les parents et les partenaires afin qu'ils puissent composer avec les répercussions physiques, émotionnelles, sociales, cognitives et spirituelles de leur grossesse unique ou de leur deuil associé à la perte d'un bébé; un congé qui est simple à offrir et simple à demander pour les parents et fourni, dans l'idéal, automatiquement quand la nouvelle de l'interruption de leur grossesse ou de la perte de leur bébé est inscrite dans le système, sans qu'on se heurte à des obstacles. Créer du financement durable et à long terme et soutenir des programmes spécialisés comme le nôtre qui offrent l'aspect de soutien par les pairs.
    Nous sommes souvent aiguillés vers des professionnels, et, en tant que professionnelle dans la collectivité, j'aimerais dire que ces mesures de soutien sont agréables, mais les parents veulent vraiment parler à d'autres familles ayant vécu la perte d'un bébé. Si nous pouvons créer des animateurs de groupe de décès périnatal avec des ressources professionnelles, ce serait idéal.
    Le financement de cet aspect permettra de réduire les coûts de soins de santé à l'avenir pour ceux qui cherchent du soutien, de l'éducation et des ressources, s'ils pouvaient les recevoir au moment de la perte et quand ils en ont besoin plus tard, sans obstacles et sans coûts personnels.
    Nous sommes convaincus que cette information fournie aujourd'hui est utile au Comité. Nous offrons notre expérience et notre expertise à ceux qui examinent cette question, à ceux qui présenteront les recommandations et à ceux qui décideront du résultat de cette motion importante pour nos familles endeuillées ayant vécu une grossesse et le décès d'un bébé partout au Canada.
    Merci d'avoir pris le temps d'écouter notre histoire aujourd'hui et de nous soutenir en faisant de cette question essentielle une expérience positive et saine pour tous.

  (0910)  

    Merci beaucoup.
    Nous accueillons ici, à Ottawa, Paula Harmon, directrice fondatrice, et Jessica Weatherbee, directrice, de Gardens of Grace.
    Vous avez sept minutes, s'il vous plaît.
    Bonjour, et merci de nous fournir l'occasion d'être une voix pour ma Grace et pour le Vincent de Jessica, ainsi que pour d'autres parents endeuillés.
    Bien que mon histoire soit extrêmement longue et compliquée, je vais m'en tenir aux parties qui s'appliquent ici.
    Ma fille, Grace Neela Tamsin, est née en 2013. Elle était une surprise arrivée tard dans la vie et, au départ, c'était une jumelle. Nous avons découvert assez tôt que la jumelle avait probablement une maladie génétique fatale, et si le bébé se rendait jusqu'à la naissance, il ne vivrait probablement que quelques heures. On ne nous a donné aucun autre renseignement que celui-là, et on nous a renvoyés chez nous. Puis, à 17 semaines, j'ai contracté une maladie d'origine alimentaire qui s'appelle listériose, essentiellement la pire infection que vous pouvez attraper quand vous êtes enceinte. Rares sont les bébés qui y survivent.
    Quand j'ai appelé mon service de maternité rural, on m'a suggéré de prendre un bain chaud, puisque nous n'avions pas atteint le stade viable de 20 semaines, et on m'a dit que je serais seulement assise à l'urgence pendant des heures, puisque je ne serais pas une priorité.
    Notre hôpital pour femmes et enfants à Halifax, l'IWK, m'a admise immédiatement, a découvert que la jumelle en péril était décédée, puis, quand j'ai perdu les eaux deux jours plus tard, on m'a dit que je resterais essentiellement à l'hôpital sur antibiotiques par voie intraveineuse jusqu'à ce que le bébé survivant soit né. N'oubliez pas que j'étais enceinte de 17 semaines à ce moment-là. Neuf semaines plus tard, Grace est née en détresse, à 26 semaines. Elle est restée longtemps à l'IWK avant de recevoir son congé, à sept mois et demi. J'ai vécu à l'hôpital avec elle pendant tout ce temps.
    Avançons rapidement à trois ans; Grace est une enfant normale et heureuse, en santé, qui n'a qu'un problème intestinal, vestige de ses jours à l'unité néonatale de soins intensifs. Même ce problème avait été déclassé, au début décembre, et devait faire l'objet d'un suivi mineur. Puis, le 28 décembre, nous avons amené Grace à l'urgence en croyant comme tout le monde qu'il ne s'agissait que d'une autre infection bactérienne mineure de ses intestins. Dix-huit heures plus tard, elle est morte. Des tissus cicatriciels invisibles sur les appareils d'imagerie, le résultat inattendu d'une intervention subie à six semaines, ont étranglé ses intestins et causé son décès.
    Étant donné les nombreux besoins de Grace, au début, je suis restée à la maison avec elle. Je venais à peine de recommencer à travailler dans un poste temporaire à l'été 2016, qui a pris fin en décembre de la même année. Quand Grace est morte, je n'ai pas songé tout de suite à l'assurance-emploi, puis, quand j'ai fini par présenter une demande, j'étais à peine admissible en raison des exigences liées aux heures. On m'a demandé pourquoi j'avais attendu aussi longtemps avant de présenter une demande. J'ai dit à la fille à l'autre bout du fil que ma fille de trois ans était décédée. Elle ne savait pas du tout quoi dire. J'ai ressenti le besoin de m'excuser, car je l'avais fait pleurer.
    Elle a dû me transférer à un gestionnaire pour régler ma demande, donc j'ai dû expliquer de nouveau ce qui s'était passé. On m'a dit que je pourrais aussi demander des prestations de maladie de l'assurance-emploi si je présentais un billet du médecin, donc je suis allée voir mon médecin, qui a fourni un billet pour « deuil de ma fille ».
    Des semaines plus tard, j'ai reçu par la poste une lettre disant que ma demande avait été rejetée, et aucune raison n'était fournie. J'ai rappelé le même gestionnaire de l'assurance-emploi. On m'a dit que le deuil n'était pas une excuse acceptable pour un congé de maladie. J'ai demandé ce qui serait acceptable. On n'a pas été en mesure de me le dire directement, mais quand j'ai parlé de stress, on m'a dit que cela pourrait fonctionner.
    J'ai donc dû retourner voir mon médecin et lui expliquer que le premier billet avait été refusé. Il en a écrit un autre en utilisant le stress comme raison. Le stress est une excuse acceptable; le décès d'un enfant ne l'est pas.
    Nous avons aussi reçu des dépôts automatiques inaperçus du crédit d'impôt pour enfants, des dépôts équivalant à des mois, même si la carte santé de Grace avait été annulée, que son numéro d'assurance sociale avait été annulé et qu'un certificat de décès avait été délivré.
    Des témoins précédents ont mentionné que des membres de la famille et des amis sont intervenus pour s'occuper de certaines choses — s'assurer que les factures sont payées, faire des courses, toutes les petites choses dont on doit s'occuper. Ce sont les choses auxquelles je pensais habituellement pour les autres, donc nous ne l'avons juste pas remarqué avant des mois plus tard, et tout cela, évidemment, a dû être remboursé. Lorsque j'ai demandé à la dame de l'ARC pourquoi les paiements ne cessaient pas juste automatiquement dans ces situations, elle a répondu que c'était en raison de la sécurité: un ministère ne pouvait pas informer l'autre ministère même lorsqu'on avait affaire à un décès.
    Durant tout ce temps, mon époux Neil a continué de travailler. Certains jours, il s'en sort; d'autres, non. Heureusement, il a un patron très compréhensif, mais nous n'étions pas dans une position financière qui lui permettait de prendre quelque congé que ce soit pour faire son deuil. Malheureusement, le parcours de Neil est beaucoup plus difficile. Après un an et demi, presque deux ans maintenant, c'est encore très fréquent pour lui d'être incapable d'affronter le monde. Serait-il dans une meilleure situation maintenant si nous avions pu lui offrir le temps nécessaire pour ne pas s'occuper des factures qui s'empilent et des obligations à respecter? Je crois que cela l'aurait certainement aidé.
    Je vais céder le temps qu'il me reste à Jessica Weatherbee.

  (0915)  

    Comme Paula l'a dit, je m'appelle Jessica Weatherbee. Je suis infirmière autorisée.
    Le nom de mon fils est Vincent. C'était notre premier enfant. Il est né à 23 semaines de grossesse et est décédé peu après la naissance dans les bras de mon époux. Imaginez la situation: vous êtes père et vous venez de vivre le décès de votre enfant. Imaginez dans quel type d'état émotionnel vous seriez tout en essayant d'être là émotionnellement pour votre partenaire, qui est aussi physiquement malade en raison des complications qui ont fini par déboucher sur le décès de votre enfant.
    C'est ce que nous avons vécu. Il travaillait pour une entreprise de câblodistribution qui faisait passer des lignes très près de câbles de haute tension, quelque chose qui exige un esprit sain et une attention aux détails. Son employeur lui a donné juste un peu plus d'une semaine de congé, ce qu'on considérait comme généreux à l'époque. En passant, c'était la durée des vacances de mon époux pour l'année. Juste sept jours plus tôt, il tenait notre fils dans ses bras durant son dernier souffle, et, d'une certaine façon, on s'attendait à ce qu'il retourne au travail. Nous n'avions pas de médecin de famille à l'époque, comme bon nombre de personnes aujourd'hui, donc nous sommes allés voir une clinique de santé primaire dans ma ville natale, où personne n'était au courant de notre perte. Nous ne pouvions nous rendre au service d'urgence local, car nous aurions été un cas non urgent et aurions dû attendre pendant des heures. Mentalement, nous ne pouvions gérer cette situation. Nous avons vu un médecin et demandé si mon époux pouvait cesser de travailler. Le médecin nous a dit que ce n'était pas une raison légitime pour s'absenter du travail. Il a donné à mon époux une ordonnance pour quatre comprimés d'Ativan afin de l'aider à dormir et nous a renvoyés chez nous.
    Durant cette semaine de congé, nous avons dû prendre toutes les dispositions de fin de vie et essayer de trouver l'argent pour couvrir toutes les dépenses imprévues. J'ai un emploi bien rémunéré. Nous avions une situation que je considérerais comme stable financièrement; toutefois, je n'avais rien prévu de tout cela. Personne n'est financièrement préparé à enterrer son bébé, et personne ne se prépare à toutes les dépenses que suppose le fait de ne pas travailler pendant un congé précoce imprévu. Au final, je me suis absentée du travail pendant neuf semaines. J'avais droit à 15 semaines. Je suis retournée pour deux raisons. D'abord, je ne pouvais supporter d'être seule chez moi encore plus longtemps, puisque mon époux n'était pas à la maison et que nous n'avions pas d'autres enfants. Le silence n'était pas thérapeutique. Ensuite, mon revenu était notre principal revenu. Mon époux gagnait un peu plus que le salaire minimum. Nous avons une maison, un véhicule et d'autres factures.
    J'ai présenté une demande au titre de l'assurance-emploi au cours des deux semaines qui ont suivi le décès de Vincent. Je n'ai jamais reçu de paiement avant mon premier jour de retour au travail, le 10 novembre 2014. Vincent est né le 4 septembre. J'ai téléphoné plusieurs fois pour savoir quel était le problème, mais ce qu'on nous a surtout dit, c'était d'attendre patiemment.
    Je crois que, comme résultat direct du manque de temps qu'on a donné à mon époux après le décès de notre fils, il a fait une dépression.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Enfin, nous accueillons Alain Pelletier, directeur général de l'association Les amis du crépuscule.
    Vous avez sept minutes.

[Français]

    Notre organisme a 25 ans, et voici sa mission.
    Le premier volet de la mission est l'accompagnement de personnes qui sont en fin de vie à l'unité des soins palliatifs de l'Hôtel-Dieu-de-Saint-Hyacinthe ainsi qu'à domicile.
    Notre deuxième volet est l'accompagnement de personnes qui vivent un deuil. C'est ce volet qui m'amène ici aujourd'hui.
    Nous formons des bénévoles qui accompagnent ces personnes. Ils ont d'abord été sélectionnés parce qu'ils possèdent de grandes qualités d'écoute et un respect indéfectible de la capacité de l'être humain à se prendre en main. Nous accompagnons des personnes qui vivent des moments difficiles. Nous devons nous assurer que nos bénévoles le font avec tout le doigté nécessaire. Notre accompagnement est tout à fait gratuit, et j'insiste là-dessus: nous accompagnons les gens gratuitement. Actuellement, 60 bénévoles font partie de nos effectifs.
    Notre formation de base, qui a pour titre « Accompagner l'autre c'est s'accompagner soi-même », est d'une durée de 30 heures. À la suite de cette formation, nous faisons une sélection des personnes qui deviennent bénévoles chez nous. Il faut dire que toutes les personnes qui suivent cette formation ne peuvent pas devenir bénévoles chez nous. Ensuite, avant de commencer tout accompagnement, nos nouveaux bénévoles reçoivent une formation de 15 heures sur la relation d'aide, qui s'appelle « L'accompagnateur ». À la suite de cette deuxième formation, les bénévoles décident s'ils désirent accompagner les personnes en fin de vie ou les personnes qui vivent un deuil.
    Le nouveau bénévole peut immédiatement être intégré comme coanimateur dans un groupe d'adultes endeuillés. De fait, nous ne laissons pas nos bénévoles entreprendre un accompagnement tout seuls. Nous leur montrons la bonne façon de faire. Cela signifie que les personnes endeuillées sont accompagnées individuellement ou en groupe de cinq à huit personnes. Nous parlons de 10 rencontres étalées sur 10 semaines. Deux bénévoles accompagnent les groupes, et une personne bénévole accompagne une autre personne lors des rencontres individuelles. Ainsi, ces 10 semaines d'accompagnement se font de la bonne façon.
    Les formations suivantes viennent s'ajouter à la formation de base. Il y a une approche particulière qui a été conçue pour l'accompagnement des enfants qui vivent un deuil. Elle s'appelle « J'écoute ma toute petite voix ». Il s'agit d'une formation de 15 heures. Les bénévoles ainsi formés peuvent accompagner des groupes d'enfants qui vivent un deuil. Nous avons aussi une approche particulière destinée aux adolescents, qui s'appelle « À la découverte de ta route ». Il s'agit là aussi d'une formation de 15 heures qui permet aux personnes qui la suivent d'accompagner les adolescents.
    Nous avons également entrepris l'élaboration d'une approche qui concerne le deuil périnatal. Souvent, plusieurs personnes dans notre société ne considèrent pas la perte d'un enfant à naître ou nouvellement né comme un véritable deuil. Pourtant, les parents, les grands-parents et les autres membres de la famille sont très touchés par cette perte. Nous allons donc offrir une formation particulière qui va permettre à des bénévoles ainsi formés d'accompagner cette clientèle touchée par un deuil tout aussi important.
    En ce qui concerne les membres d'une famille qui ont perdu un enfant, nous les accompagnons à partir des différentes approches que nous avons élaborées. Chaque deuil est unique, et nous sommes à l'écoute des besoins particuliers de chaque personne qui fait appel à nous.
    En tenant compte des budgets disponibles, nous inscrivons nos bénévoles à différents congrès et formations. Plusieurs bénévoles ont reçu la formation Agir en sentinelle pour la prévention du suicide.
    Le vendredi 2 novembre, c'est-à-dire demain, au Centre de congrès de Saint-Hyacinthe, se tiendra un colloque que nous avons organisé. Il a pour titre « Deuil et famille ». Plusieurs de nos bénévoles y assisteront. Environ 100 personnes seront présentes pour entendre les conférences sur différents sujets liés à ce thème.
    Notre organisme s'est bâti une excellente réputation au cours de ses 25 ans d'existence. Les personnes endeuillées qui ont eu recours à notre accompagnement ont toutes témoigné du mieux-être qu'elles éprouvaient par la suite. Les rencontres leur ont permis de s'exprimer librement sur le grand vide qu'avait laissé la personne décédée. Elles ont pu reconnaître les émotions qu'elles vivaient et repartir avec des outils qui allaient les aider à l'avenir. Le retour à la vie normale s'en trouvait donc facilité.

  (0920)  

    Je me permets de vous parler de notre situation financière.
    Nous recevons une subvention du gouvernement du Québec par l'entremise du Programme de soutien aux organismes communautaires, mais elle est insuffisante. Elle ne compte que pour 40 % de notre budget annuel.
    Heureusement, nous avons de généreux donateurs qui nous soutiennent financièrement chaque année. Malgré cela, nous devons tenir deux activités de financement, sous la forme de soupers-bénéfice. Quand cela va bien, les revenus provenant de ceux-ci nous permettent de boucler notre budget. Toutefois, année après année, nous constatons une diminution de l'engouement de la population pour ce genre d'activité.
    Quoi qu'il en soit, nous investissons de nombreuses heures dans la préparation de ces événements. Le temps que nous y consacrons, c'est du temps de moins que nous avons pour élaborer nos approches, soutenir nos bénévoles ou accentuer notre collaboration avec le centre de santé et nos différents partenaires.
    Je vous remercie de m'avoir entendu. J'espère que vous aurez été à notre écoute.

  (0925)  

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Monsieur Diotte, vous avez six minutes.
    J'offre mes condoléances sincères à toutes les personnes qui doivent composer avec la perte d'êtres chers. Cela semble terrible. Je n'étais pas personnellement au courant des répercussions que cela pouvait avoir sur la vie des gens. Merci d'être venus et de nous raconter bravement votre histoire.
    Une des choses que j'entends d'emblée, c'est la difficulté de traiter avec des bureaucrates. Jens, vous avez dit avoir reçu de Service Canada une lettre dans laquelle on disait avoir versé trop d'argent pour le soutien aux enfants, je crois. Paula, vous avez parlé des crédits d'impôt pour enfants et du fait que l'ARC voulait ravoir cet argent. On doit se demander comment c'est possible que les gens ne soient pas au courant. Nous avons entendu les histoires qui ont fait les manchettes au sujet de Statistique Canada qui se rend dans les banques et obtient des renseignements sur 500 000 personnes. Cela doit être très frustrant.
    Paula, à votre avis, qu'est-ce qui pourrait régler ce problème?
    Je pense que c'est en partie une question de counseling. Si on annule une carte d'assurance-maladie et un numéro d'assurance sociale et qu'un certificat de décès est délivré, il devrait y avoir une ligne de code ou je ne sais quoi d'autre qui déclenche une procédure dans le système grâce auquel Service Canada ou l'ARC et les personnes concernées peuvent savoir que quelque chose s'est passé, ce qui enclencherait d'autres processus automatiques.
    Michelle LaFontaine l'a mentionné l'autre jour durant son témoignage. Même au début, lorsqu'un enfant meurt, on pourrait faire signer une sorte de formulaire d'autorisation pour que les différents ministères sachent ce qui est arrivé, afin de réduire tout ça.
    Pour que je comprenne bien, il semble qu'on vous ait dit que les ministères n'interagissaient pas les uns avec les autres.
    Oui.
    Quels sont les deux ministères avec lesquels vous faisiez affaire?
    Si une carte d'assurance-maladie a été annulée, il y a une raison. Si un certificat de décès est délivré et qu'on en informe le gouvernement, ce n'est pas pour rien. C'est un ministère. On n'a aucune raison d'envoyer de l'argent pour un enfant décédé. Il y a des systèmes qui contiennent cette information, alors partagez-la. Ce ne serait pas un secret.
    Comment vous êtes-vous senti lorsque vous avez dû vivre tout ce que vous avez vécu?
    Déjà, c'était frustrant, parce qu'on ne veut pas avoir à composer avec ce genre de choses, rester au téléphone pendant des heures ou avoir à se rendre dans des bureaux précis lorsqu'on ne peut pas tout régler au téléphone. C'est un fardeau qui s'ajoute à tout le reste. Si on n'arrive même pas à sortir du lit, on ne veut pas interagir avec des fonctionnaires.
    Nous avons aussi entendu des histoires d'horreur au sujet de l'ARC et du fait que les gens se faisaient raccrocher au nez dans un tiers des cas. Cette information vient du vérificateur général. On leur fournissait de mauvais renseignements dans un tiers des appels.
    Quelle a été votre expérience avec l'ARC?
    Les gens à qui j'ai parlé comprenaient, mais ils ne pouvaient rien faire en raison du système et des processus en place. Il faut modifier ces processus afin de faire preuve de compassion.

  (0930)  

    Merci.
    Jens, pouvez-vous nous expliquer votre expérience à cet égard? Vous avez parlé d'une lettre de Service Canada vous disant que vous aviez réclamé trop d'argent.
    Je crois que les représentants du bureau de Service Canada qui tentaient de nous aider ne savaient pas exactement comment toutes les choses fonctionnaient. C'était notre problème en même temps. Je me rappelle d'avoir eu ces formulaires en main et d'avoir essayé de comprendre; il y a avait des questions très banales comme la date de décès et la date de naissance. Mon enfant est décédé le 9 décembre, mais il est né le 10 décembre. Qu'est-ce que je suis censé écrire?
    J'étais assis là, et je ne savais pas quoi faire. Nous ne savions pas quand le congé de maternité allait commencer, alors nous avons posé des questions. À ce moment-là, nous avions évidemment déjà informé l'employeur de mon épouse qu'elle n'allait pas se présenter au travail le lundi matin suivant, mais nous sommes seulement retournés au bureau plus tard, alors on lui a accordé un congé de maladie. Puis, Service Canada nous a dit que le congé de maternité devait commencer immédiatement après la naissance, alors il a tout fallu changer. Il a fallu annuler le congé de maladie. En outre, mon épouse devait recevoir le paiement de soutien de l'employeur — le supplément — en s'attendant à ce que le versement des prestations d'assurance-emploi commence le lundi.
    Puis, l'employeur a émis un relevé d'emploi jusqu'au dimanche, même si mon épouse ne travaille pas le samedi et le dimanche. L'employeur avait indiqué qu'il la payait jusqu'au dimanche, mais ensuite, cinq ans plus tard, Service Canada nous a expliqué: « Oh, nous croyions que le relevé avait été émis jusqu'au dimanche, ce qui repousse le début de la semaine, parce que notre semaine commence le dimanche et que vous ne pouvez pas recevoir votre premier paiement un lundi. »
    Au bout du compte, nous avons reçu les 15 semaines de paiements auxquelles nous avions droit, mais en raison de la modification de la date de début que nous n'avions pas remarquée, on nous a envoyé beaucoup de lettres: « Voici une facture. Vous devez renvoyer tel ou tel montant. » Il a fallu faire de nombreux appels téléphoniques et parler à de nombreux superviseurs pour leur raconter ce qui était arrivé et leur dire que nous ne savions pas pourquoi la date avait été rajustée et ils ont dit [Inaudible]. Il y avait beaucoup d'inconnu quant à la façon dont il fallait composer avec la situation.
    Pour améliorer les choses, j'aimerais qu'il y ait une équipe spéciale composée de personnes ayant reçu une formation précise sur ces types de cas. Je crois qu'on rêve un peu en couleur si on s'imagine que tous les employés de Service Canada peuvent bien s'occuper de toutes ces situations. Je crois que c'est aussi injuste pour les employés, parce qu'ils sont eux aussi touchés émotionnellement par ces situations. Je crois qu'ils devraient recevoir une formation appropriée sur la façon de soutenir les parents dans de telles situations et afin qu'ils connaissent toutes les procédures appropriées à ce moment-là et qu'ils puissent fournir les bons renseignements lorsqu'ils parlent à des parents.
    C'est une bonne suggestion.
    J'aimerais vous donner un autre exemple. Il y a un processus en vertu duquel, environ une semaine après l'accouchement, une infirmière de la santé publique fait un suivi et appelle les familles afin de leur fournir certains renseignements. Quelqu'un a dit à l'infirmière qu'il y avait eu une naissance et qu'elle devait faire un suivi. On ne dit pas aux infirmières lorsqu'un bébé meurt. Vous pouvez vous imaginer à quoi ressemblent les conversations lorsque ces infirmières se présentent au domicile des parents sans savoir que l'enfant est mort et qu'elles se présentent en disant: « Je suis ici pour vous soutenir. Avez-vous des questions? Comment va le bébé? » Puis, on dit que le bébé est décédé, et les choses dégénèrent.
    C'est difficile pour les parents de recevoir de tels appels. Je me demande comment c'est possible. Je crois bien n'avoir jamais consenti à ce que mes renseignements soient communiqués à cette personne, alors pourquoi nous dit-on encore et encore qu'il y a des enjeux liés à la protection des renseignements personnels lorsqu'il s'agit de s'assurer que l'information selon laquelle mon enfant est décédé peut être communiquée à cette personne, de façon à ce que l'infirmière sache qu'elle ne doit pas appeler? En outre, ce devrait peut-être être un conseiller en deuil qui appelle pour organiser des séances de counseling avec les parents.
    Merci.
    Nous passons maintenant au député Long, s'il vous plaît, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins d'avoir eu le courage de venir nous raconter leur histoire. Je tiens à remercier le député Richards d'avoir présenté la motion M-110.
    J'ai tellement de questions à poser. Je vais commencer par vous, madame Roberts.
    Merci de votre témoignage. Vous avez mentionné vouloir une restructuration du système actuel, et vous aviez trois points à formuler. Pouvez-vous passer ces trois points en revue rapidement encore une fois afin que nous soyons certains de bien les comprendre?
    Une des mesures consistait à restructurer le régime d'assurance-emploi.
    De quelle façon procéderiez-vous si vous aviez le pouvoir de restructurer le régime?

  (0935)  

    Si j'avais le pouvoir, lorsqu'un enfant meurt, le médecin, le soignant, la sage-femme... Quelqu'un pourrait fournir lui-même l'information au système.
    Ce serait presque comme un automatisme.
    Exactement. Nous remplissons un formulaire et nous obtenons un numéro d'assurance sociale pour notre bébé. Nous obtenons notre carte d'assurance-maladie.
    Ne pourrait-il pas y avoir un autre système similaire qui permettrait tout simplement de fournir de l'information, puis c'est tout? Ce serait un système en vertu duquel les familles ont droit à 12 ou 15 semaines, selon ce que nous jugerons applicable et adéquat.
    Est-ce que de 12 à 15 semaines, c'est adéquat? La famille Cormier a comparu il y a quelques réunions et a proposé 12 semaines. C'est assez?
    Le deuil est un processus. C'est quelque chose qui nous suit toute notre vie.
    Je crois que, pour la plupart des familles, de 12 à 15 semaines leur permettrait de souffler. Ce ne sont pas toutes les familles qui utiliseront tout le temps qui leur est proposé.
    Comme Jessica l'a mentionné, dans son cas, retourner au travail l'a aidée. Le fait de rester à la maison dans le silence n'est pas toujours utile. Disposer de ce temps...
    Proposeriez-vous également une certaine souplesse dans le cadre du régime d'assurance-emploi? Certaines personnes — je ne dirai pas qu'elles ont besoin de retourner au travail —, mais elles peuvent mieux se rétablir dans un environnement de travail.
    Pensez-vous que le régime d'assurance-emploi pourrait être souple?
    La chose que je demanderais, que je proposerais, c'est que, si une famille décide de retourner au travail, que la mère, le père ou le partenaire dit: « Je suis prêt à retourner au travail », mais que, six mois plus tard, le deuil refait surface, et la personne a besoin d'un peu de repos, elle y aurait encore accès.
    On pourrait peut-être offrir 12 semaines sur une période de un an, et les personnes pourraient prendre les congés dont elles ont besoin ici et là.
    Je n'ai assurément pas vécu ce que vous avez vécu, mais je me souviens que, lorsque mon père est mort, j'ai eu besoin de retourner au travail. Ça m'a aidé à guérir. Cependant, six mois plus tard, c'est à ce moment-là que la réalité m'a rattrapé et que j'ai vraiment eu besoin d'un peu de temps.
    Exactement.
    Quoi d'autre?
    Je vais vous le dire très rapidement.
    Oui, bien sûr.
    Il faut de deux à six mois pour que le choc du décès s'estompe et que la réalité s'installe vraiment.
    Six mois est une période clé. Il faut aussi de deux à six ans pour intégrer une expérience régulière de la mort, l'expérience du deuil, dans notre vie. On parle ici non pas de la perte d'un bébé, mais tout simplement de la perte d'un père, d'un frère ou d'une soeur.
    Absolument.
    Il y a deux choses à garder à l'esprit: de deux à six mois et de deux à six ans.
    Et il y a une autre chose à laquelle je réfléchirais dans notre situation. J'étais déjà à la maison, alors je n'étais pas admissible à des prestations de maternité, mais, pour ce qui est de mon partenaire — mon époux —, le père devrait avoir droit à un peu de temps pour faire son deuil. Il a eu la chance d'avoir un employeur qui lui a dit de prendre un peu de temps de congé, mais il s'est senti obligé de retourner au travail parce que...
    Permettez-moi d'intervenir.
    Un autre témoin durant une réunion précédente a dit que le milieu de travail est l'un des endroits où le deuil est moins reconnu.
    Je veux l'opinion de tous les témoins parce que nous devons tous retourner au travail un jour ou l'autre.
    Certains milieux de travail offrent une aide et un soutien, dans d'autres, les gens s'en fichent. Nous avons eu l'exemple d'un homme qui est retourné au travail pour ensuite être mis à pied trois mois plus tard parce qu'il manquait de passion.
    Je veux commencer par Mme Fuentes, à Miami.
    Avez-vous des recommandations à formuler concernant ce qui pourrait se produire dans un environnement de travail?
    Nous sommes un gouvernement fédéral. Que pouvons-nous faire? Qu'est-ce qu'un gouvernement pourrait faire pour favoriser une meilleure compréhension, une culture d'acceptation en milieu de travail?
    Madame Fuentes et monsieur Panneton.
    Je vais répondre à cette question.
    Nous y avons réfléchi.
    Nous avons un employeur très compréhensif. Nous travaillons tous les deux pour la même entreprise. L'employeur a continué de nous soutenir lorsque nous en avions besoin au cours des deux années depuis la mort de notre fils.
    Ce que j'aimerais que le gouvernement fasse, c'est que tout comme dans le cas des congés de maladie ou des congés de maternité, notre emploi soit garanti. Notre emploi sera toujours là lorsqu'on retournera au travail. Si une personne doit prendre du temps pour elle afin de faire son deuil — que le congé soit rémunéré ou non —, nous aimerions qu'elle ait les mêmes garanties. On éliminerait ainsi une partie du stress que ressent une famille endeuillée ou un parent endeuillé.
    D'accord.
    Allez-y, monsieur Locher.

  (0940)  

    Je dois dire que, au travail, j'ai reçu beaucoup de soutien, alors j'ai toujours été très chanceux de ce côté-là.
    Nous avons en fait découvert — et c'est l'une des choses qui n'ont pas été mentionnées très souvent — que beaucoup de personnes sont touchées... En fait, au travail, les gens sont venus nous voir pour nous dire des choses dont on ne savait rien. Il y a de la stigmatisation ou un défi associés au fait de parler des enfants décédés, parce que ce n'est pas vraiment une bonne façon de briser la glace. Après le décès de mon fils — dans mon bureau, il y a environ 48 personnes —, j'ai appris qu'il y avait 6 ou 7 familles qui avaient perdu un enfant dans diverses situations. J'ai travaillé avec ces personnes pendant des années et je ne savais rien de tout ça. Puis, les gens sont venus me voir et m'ont raconté toutes ces histoires.
    Mon employeur m'a fourni un très bon soutien. Un conseiller en deuil est venu parce que les gens au bureau ont été touchés. Ce genre de choses sont vraiment extraordinaires, mais nous ne sommes pas tous aussi chanceux.
    J'ai entendu des histoires d'horreur de personnes dans notre réseau de soutien, et c'était tout le contraire pour elles. Certaines avaient droit à une période de deuil de trois jours, puis elles devaient retourner au travail comme si de rien n'était. Selon moi, il y a tout un spectre allant de ce que j'ai vécu aux histoires que d'autres personnes m'ont racontées.
    Il est très difficile de répondre à la question de savoir ce que le gouvernement pourrait faire pour aider. La réponse est liée à cette sensibilisation quant au nombre de personnes touchées, à l'effet réel du deuil sur une personne et à la façon dont on peut la soutenir.
    Comme on l'a déjà dit, le fait de pouvoir prendre un peu de temps de congé et d'avoir droit à un peu de souplesse à cet égard sont des facteurs importants. Comme Cheryl l'a dit, je ne crois pas que cela signifie que tout le monde doit prendre congé. Je suis en fait l'une des personnes qui ont trouvé utile et positif de retourner au travail pendant mon deuil. Je ne suis pas resté en congé très longtemps, même si mon employeur me l'avait permis. Par exemple, mon épouse ne pouvait pas retourner au travail. Elle n'arrivait pas à se concentrer, et c'était impossible pour elle de travailler. Le congé de maternité a été une bonne chose pour elle.
    Je crois qu'il doit y avoir un peu de souplesse. Dans le cas des personnes qui estiment qu'il est préférable pour elles de ne pas retourner au travail immédiatement, ce serait merveilleux qu'elles aient la possibilité d'avoir ce temps. De plus, ce serait bien que le temps puisse être partagé entre les partenaires, de sorte que ce n'est pas seulement la mère qui peut prendre un congé, mais qu'il y ait aussi du temps prévu pour le père.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Madame Sansoucy, la parole est à vous, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais remercier chacune des personnes qui comparaissent devant nous. Vos témoignages sont vraiment importants pour notre étude, dont le sujet nous a été suggéré par notre collègue.
    Monsieur Pelletier, je souhaite vous dire que j'ai à plusieurs reprises entendu des gens témoigner de l'importance de votre organisme dans leur vie. Je pense que notre communauté est choyée de pouvoir compter depuis 25 ans sur un organisme comme Les amis du crépuscule, qui vient en aide aux gens endeuillés.
    Depuis le début de notre étude, nous entendons parler de prestations pour les parents. Nous en avons encore entendu parler ce matin. Plusieurs organismes nous ont aussi dit qu'ils ne comptaient que sur des bénévoles et qu'ils n'avaient pas de financement. Vous l'avez dit vous-même, le ministère de la Santé et des Services sociaux doit faire face aux nombreux coûts de la santé, en plus de soutenir des organismes communautaires. Dans votre cas, à peine 40 % de votre financement vient de l'État.
    J'aimerais d'ailleurs féliciter votre équipe et votre conseil d'administration qui, malgré la situation financière difficile de votre organisme, ont choisi de mettre sur pied un nouveau programme pour le deuil périnatal, à même des fonds que vous avez obtenus difficilement.
    Je sais que, pour d'autres secteurs d'activité, par exemple les organismes pour femmes, le fédéral a des programmes de subvention. Comme le deuil peut toucher tout citoyen, sans égard à la province de résidence, croyez-vous qu'il serait important, dans le cadre de notre étude, d'émettre une recommandation visant à soutenir des organismes comme le vôtre? Nous avons entendu un témoin nous dire qu'il venait d'une région où il n'y avait aucune ressource. Peu importe où nous vivons, il serait bon d'avoir quelqu'un vers qui nous tourner pour nous appuyer dans ces moments difficiles qu'entraîne un deuil, surtout celui d'un enfant.
    Nous entendons souvent des commentaires comme ceux que vous venez de faire.
    Des gens vivant à 100 kilomètres de nos bureaux viennent chez nous pour recevoir ces services, car de tels services n'existent pas partout. Ils sont très rares. Nous avons cette mission à coeur, et nous continuons de la mener à bien malgré le manque de financement.
    Les témoignages que nous entendons de personnes qui font appel à nos services sont toujours très éloquents. Toutes ces personnes, sans exception, nous disent se sentir mieux à la suite de ces accompagnements, qui durent environ 10 semaines. Elles vivent mieux le moment présent et se sentent beaucoup plus prêtes à affronter l'avenir. La peine demeure et ne partira jamais, mais ces personnes sont désormais capables de mieux y faire face.
    Nous allons procéder de la même manière pour le deuil périnatal, parce que nous pensons qu'il s'agit d'un deuil tout aussi important que tous les autres. Nous allons tout faire pour que ces personnes puissent vivre beaucoup plus facilement l'absence de ce petit être. Bien que celui-ci n'ait été dans leur vie qu'un court instant, ce sont des moments importants. Nous allons nous assurer de continuer à remplir notre mission dans ce domaine.

  (0945)  

    Lors de notre dernière rencontre, Mme Chantal Verdon, qui est chercheure à l'Université du Québec en Outaouais, nous a dit qu'il serait intéressant que le gouvernement fédéral lance une vaste campagne de sensibilisation à ce sujet, un peu comme celle sur l'acceptation de la santé mentale dans notre société.
    Plusieurs témoins nous ont dit que le deuil n'était pas suffisamment connu ni respecté. De plus, comme vous l'évoquiez vous-même, certaines personnes jugent que le deuil périnatal n'est pas aussi grave que d'autres deuils.
    Selon vous, serait-il pertinent d'avoir une campagne de sensibilisation sur ce qu'est le deuil et sur ses conséquences, afin de mieux faire connaître cette réalité dans nos vies?
    Absolument. Le deuil n'est pas quelque chose qui commence une journée puis se termine un an plus tard. Chacun vit le deuil à sa façon, selon ce qu'il ressent. Tantôt, M. le député disait que le moment le plus difficile pour lui était survenu six mois après le décès de son père. Chacun vit ces moments d'une façon très personnelle.
    Une campagne pancanadienne de sensibilisation serait intéressante parce que tout le monde doit, un jour ou l'autre, faire face à la perte d'un être cher. Tout le monde devrait donc être sensibilisé au fait que ce qui est vécu à ce moment-là est vraiment très difficile. Cette campagne devrait offrir à tous ceux qui vivent un deuil les moyens d'y faire face.
    J'ai déjà été directrice d'un organisme communautaire pour jeunes en difficulté, et rien ne me peinait plus que d'entendre un parent me dire qu'il aurait voulu connaître l'existence de l'organisme au moment où ce dernier lui aurait été utile.
    Vos ressources limitées ne vous permettent pas de faire la promotion de vos services. Plusieurs des personnes que nous avons rencontrées nous ont dit qu'elles ne savaient pas vers où se tourner.
    Pensez-vous qu'il serait utile que vos services soient connus de Service Canada ou des hôpitaux, par exemple? Quels moyens pourrait-on prendre pour s'assurer que les ressources qui existent sont connues, de sorte que les organismes puissent y diriger les personnes qui en ont besoin?
    Vous aviez la réponse tantôt lorsque vous parliez d'une campagne de sensibilisation. Cette dernière permettrait notamment de faire connaître les organismes qui offrent ces services.
    J'ai entendu ce matin plusieurs personnes qui, dans leur milieu, en ont fait beaucoup pour aider les gens. Il est important que ces personnes soient connues et reconnues par les gens qui vivront les mêmes choses un peu plus tard sans savoir vers qui se tourner. Il est important de faire savoir que ces organismes et cette aide existent, et il faut savoir où trouver les ressources.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au député Ruimy, s'il vous plaît.
    Merci. Je vais partager mon temps avec Mme Romanado.
    Merci à vous tous d'être là aujourd'hui. Ce n'est pas facile de se retrouver devant un groupe de politiciens qui vous pose des questions exploratoires. Essayez de comprendre que, pour en arriver là où nous voulons tous aller, nous devons vous poser certaines questions, parce que c'est une situation difficile à comprendre.
    Nous sommes une confédération composée de provinces et d'administrations. Ça aussi, c'est un défi. Prenons Service Canada; ses systèmes ne sont pas nécessairement connectés avec ceux des provinces.
    Quelle est la voie à suivre? Nous avons entendu parler d'organisations qui sont créées principalement par des personnes qui ont vécu de telles expériences. C'est là-dessus que je veux concentrer le peu de temps que j'ai, sur les organisations.
    Recevez-vous un financement quelconque, que ce soit par l'entremise de la province... Pas du gouvernement fédéral... D'accord.
    Avez-vous des bénévoles?
    Je veux que l'information figure au compte rendu, ce qui n'est pas possible si vous ne faites que hocher la tête.
    J'ai deux questions: obtenez-vous un financement quelconque? Et vos bénévoles reçoivent-ils une formation quelconque?
    Commençons par vous, madame Roberts.

  (0950)  

    Dans notre organisation, nous pouvons parfois obtenir des subventions, mais, habituellement, il s'agit de subventions locales, de la CIBC ou de la Banque TD et ces genres d'institutions qui peuvent aider. De façon générale, des familles recueillent des fonds pour nous aider. Dans le cadre de notre marche, nous demandons aux familles de nous soutenir en faisant un don au nom de leur enfant. C'est de là que vient notre financement.
    Pour ce qui est des bénévoles, dans mon programme précis, je déploie beaucoup d'efforts pour m'assurer que tous mes intervenants et mes bénévoles sont évalués, bien formés et bien soutenus, parce que le travail qu'ils font est très critique, et nous ne voulons pas faire d'erreur. Ce sont des gens qui viennent du milieu du soutien par les pairs. Ces personnes ont elles-mêmes perdu un enfant, alors elles comprennent. Elles comprennent, et, ensuite, elles peuvent fournir les services, grâce à de la formation et du soutien.
    Merci.
    Madame Harmon.
    Nous avons commencé il y a à peine un peu plus d'un an, alors la question du financement est intéressante. En fait, nous n'avons pas d'argent. Il y a beaucoup de subventions qui ne sont pas axées sur le deuil.
    C'est parfois difficile de faire jouer le système en sa faveur et d'essayer de trouver une façon de correspondre aux critères des subventions. Nous allons en fait offrir une séance de formation dimanche au centre IWK, à Halifax, en utilisant du matériel de formation fourni par le Pregnancy and Infant Loss Network, ici même, en Ontario.
    Merci beaucoup.
    Madame Romanado, je vous cède le reste de mon temps.

[Français]

    Je suis vraiment honorée d'être ici aujourd'hui.

[Traduction]

    Wendy et Philippe viennent de ma circonscription, et j'ai été ravie de les aider dans leur quête de sensibilisation à la mort subite et inexpliquée d'enfants.
    En écoutant les témoignages ce matin, je me suis rendu compte que, il y a 25 ans, mon époux et moi avons perdu notre premier enfant, alors je comprends que votre douleur et votre deuil n'a pas de date de péremption.
    J'entends beaucoup parler des approches holistiques en matière de deuil; on parle de la province, des organisations locales, de la collectivité, de la famille et du gouvernement fédéral.
    Que pouvons-nous faire? Nous parlons de deux choses différentes en ce qui concerne les prestations et les mesures de soutien accessibles et la prestation de tout ça. Lorsqu'on subit une perte, la dernière chose qu'on veut, c'est d'avoir à faire de pirouettes. Ça, nous l'avons très bien compris. Que pourrions-nous faire en tant que députés?
    Des organisations ou des citoyens communiquent souvent avec nous pour nous dire qu'ils ont de la difficulté à s'y retrouver dans le système, qu'ils ont besoin de telle ou telle chose, un passeport, par exemple. Que pourrions-nous faire pour fournir un soutien en temps réel? Ce sont de petites modifications que nous pouvons apporter de façon à ce qu'on sache que vos organisations existent, et, lorsque d'autres familles viennent nous voir et nous parlent de leur souffrance, nous pouvons être ce guichet unique, et nous pouvons dire aux familles: « Écoutez, nous savons que vous souffrez. Permettez-nous de vous aider. Nous connaissons une organisation qui peut vous venir en aide. »
    Nous pouvons vous aider en nous assurant que l'ARC est au fait du décès de votre enfant et nous pouvons nous assurer que ces prestations... Que les gens sont informés. Nous pouvons nous assurer que nos homologues provinciaux sont au courant de la situation.
    Que pourrions-nous faire pour vous aider et aider les familles? Il y a certaines choses que nous pouvons faire en temps réel pour fournir un soutien. Selon moi, le simple fait de miser sur une approche holistique — un guichet unique — pourrait être bénéfique, de sorte que vous n'ayez pas à raconter continuellement votre histoire.
    Quelles recommandations formuleriez-vous? C'est une question ouverte.

  (0955)  

    J'aimerais bien y répondre. Pour commencer, j'ai quelques points à soulever.
    Premièrement, il faudrait inclure sur un site Web tous les renseignements sur les mesures qu'il faut prendre après un décès, une base de données contenant des renseignements de soutien. Michelle LaFontaine a mentionné des formulaires de consentement pour mettre certaines choses en branle. Sands, au Royaume-Uni — l'organisme de bienfaisance qui s'occupe des morts-nés et des décès néonataux —, propose une série de livrets très utiles, pas seulement un document d'une page, mais des livres complets qui contiennent beaucoup de bons renseignements. Deux de ces documents sont produits à l'intention des employeurs et des employés qui retournent au travail. On pourrait miser sur des documents comme ceux-là pour prodiguer des conseils aux intervenants en milieu de travail afin qu'ils sachent de quelle façon traiter un employé qui revient et aider les employés qui interagissent avec lui à son retour au travail.
    Deuxièmement, il doit y avoir un peu de souplesse en ce qui a trait au temps. Lorsqu'on se blesse au dos, on se voit affecter à des tâches légères. Si on occupe un emploi qui exige plus de concentration, on ne pourra pas s'acquitter de nos tâches quand on vient de perdre un enfant. Le processus doit être adapté à la personne.
    Troisièmement, il faut prévoir des ressources continues liées au deuil par l'intermédiaire des programmes d'aide aux employés.
    Quatrièmement, il faut assurer une sensibilisation et une formation précise des employés de Service Canada. C'est aussi quelque chose qu'on pourrait offrir aux employés du domaine de la santé, parce que, dans de nombreuses situations, ils ne sont pas outillés pour gérer des décès soudains. Il n'y a pas de programme d'accréditation pour les médecins et les travailleurs de la santé. Notre médecin, lorsque nous sommes retournés la voir pour le rapport d'autopsie, nous a dit qu'elle avait l'impression de nous laisser tomber et de nous laisser à nous-mêmes lorsque nous avons quitté l'hôpital ce soir-là. Si cette médecin se sent comme ça, de quelle façon compose-t-elle avec tout ça?
    Voilà ce que je proposerais, en plus d'une période de grâce pour soumettre les formulaires médicaux. On pourrait peut-être aussi prévoir une modification des prestations de maternité et des prestations parentales pour faciliter la période de deuil.
    Merci.
    Nous passons maintenant au député Hogg, s'il vous plaît.
    Encore merci à Blake d'avoir présenté la motion.
    En tant que société, nous voulons nous considérer comme compatissants, bienveillants et capables de fournir de telles mesures de soutien.
    Dans tous les témoignages que nous avons entendus, il y a beaucoup de thèmes qui reviennent, des enjeux communs qui émergent de tout ça. Ça me rappelle un peu le tournant culturel en... Je crois que c'est en 1969, quand Elisabeth Kubler-Ross a écrit Les derniers instants de la vie, un livre qui nous a permis de mieux saisir et de mieux comprendre la façon de gérer tout ça dans les sociétés occidentales. Je crois que nous en sommes à une nouvelle étape importante, à un genre de tournant qui change la donne, comme celui du mouvement de la société des soins palliatifs à l'époque. Il est évident que quelque chose a persisté en ce qui concerne la compréhension, l'engagement et la bienveillance, des éléments très importants ici.
    Madame Harmon, vous avez mentionné l'organisation Sands, au Royaume-Uni. Je me demande si les témoins connaissent des administrations à l'échelle internationale qui ont changé leur façon de faire dans de telles situations, qui ont adopté une meilleure méthode. J'imagine que les valeurs sont probablement les mêmes, du moins parmi les démocraties occidentales, en ce qui concerne ce que les gens veulent réaliser. Avez-vous connaissance d'administrations qui ont réellement mis en oeuvre un système dont nous pourrions tirer des leçons?
    Sands est probablement la principale organisation. Elle existe depuis 40 ans, et elle possède aussi des filiales en Australie. En fait, au printemps dernier, le Royaume-Uni a adopté une loi pour payer les funérailles de tous les enfants de moins de... C'est 16 ou 18 ans. Le gouvernement britannique couvre le coût de toutes ces funérailles.
    L'organisation Sands est-elle une société sans but lucratif qui a découlé de tout ça?
    Oui. L'organisation réalise en fait des recherches et forme des médecins et des sages-femmes — c'est le programme de soins infirmiers, là-bas —; c'est une formation vraiment complète sur le deuil. Deux des trois hôpitaux qui possèdent des services de maternité au Royaume-Uni ont des chambres de deuil, qui permettent de « se faire des souvenirs » et de faire beaucoup d'autres suivis importants. Il y a 103 groupes de soutien Sands au Royaume-Uni.

  (1000)  

    Est-ce que d'autres témoins ont des expériences ou des connaissances au sujet d'autres administrations dont nous pourrions tirer des leçons?
    Peut-on revenir, si possible, à la question précédente aussi? Quelqu'un a demandé ce que le gouvernement canadien pourrait faire pour aider les gens.
    C'est tout à fait possible, si vous pouvez attendre un instant, le temps que Mme Salter-Roberts réponde.
    Je ne suis pas au courant de l'existence de lois ou d'une quelconque administration parmi les autres pays du G8 ou du G20. Il y a un certain nombre de grandes organisations comme Sands. Pour nous, c'était la SUDC Foundation, aux États-Unis. L'organisation est présente aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Australie, mais c'est une organisation privée, et il n'y a donc pas, à ma connaissance, de loi, à part ce que vient de mentionner le témoin précédent.
    Merci.
    Je peux parler de nos services de deuil régionaux accessibles dans la région d'Edmonton et ailleurs. Les Services de santé de l'Alberta ont contribué au travail avec différentes organisations pour créer un processus pour les familles afin de faciliter un peu les choses.
    L'une des choses qui se produisent, c'est que, lorsqu'on perd un enfant, on nous remet une trousse — que l'enfant soit né à la maison, à l'hôpital en salle d'urgence ou peu importe —, et cette trousse inclut un document d'une ou de deux pages qui mentionne les groupes de soutien, les prestations et ainsi de suite, les choses qui sont accessibles, de façon à ce que les familles n'aient pas à chercher toute cette information. Elles n'ont pas à trouver l'information en ligne, parce que ce n'est pas toujours facile de tout trouver sur Internet.
    Chaque famille reçoit une boîte de souvenirs, des empreintes des pieds et des mains, des cheveux de leur enfant et un ours en peluche que nous donnons grâce à nos divers programmes et nos marches. On offre du counseling et du soutien une fois les familles de retour à la maison. Il y a une certaine continuité du soutien. Il y a quand même des gens qui passent entre les mailles du filet, mais, au moins, c'est un début. Et les responsables tentent d'élargir le programme dans toute la province et différentes régions. Je sais que c'est quelque chose qui se produit.
    J'aimerais bien qu'il y ait une structure pancanadienne quelconque qui permettrait de relier nos groupes de soutien, de sorte que nous fournissions tous le même type de soutien; ainsi, les familles, peu importe la région, pourraient savoir ce qui est accessible, tout comme les employés qui offrent les services.
    J'aimerais parler du fait que l'accouchement — que ce soit à 6, 12, 22 ou 42 semaines ou plus — est une expérience physique. Lorsqu'on parle des avantages, de donner du temps aux parents, il faudrait tenir compte des aspects physiques... Je ne sais pas comment l'expliquer, mais les mères produisent quand même du lait. Le corps des mères ne sait pas que le bébé est décédé. Il y a donc encore un paquet d'inconforts physiques, et c'est quelque chose dont on devrait tenir compte lorsqu'il est question des avantages à offrir.
    Jens.
    Merci.
    Je voulais tout simplement revenir à une question précédente: qu'est-ce que le gouvernement fédéral peut faire pour les parents? J'ai en fait préparé quelques exemples dont j'aimerais vous faire part.
    Je suis tout à fait d'accord avec ce que Paula a dit, avec tout ce que vous ont déjà dit les chercheurs qui ont témoigné. Ce serait merveilleux s'il pouvait y avoir un groupe de travail ou une commission chargé de créer du matériel à l'échelon fédéral dans le sens de ce que Cheryl vient tout juste de mentionner, de façon à décrire l'expérience de deuil à laquelle les gens peuvent s'attendre, à leur dire simplement que tout ce qu'ils vivent est normal. Beaucoup de parents ont l'impression de devenir fous et ils se demandent ce qui leur arrive.
    C'est tout simplement cette idée de pouvoir leur dire: « Regardez, nous savons ce qui se passe. Voici les recherches sur ces sujets. Voici ce qui, selon nous, peut vous être utile et voici certaines suggestions quant à ce que vous pouvez faire ». Ce pourrait être un document comme les dépliants que je vous montrerai, ici.
    En Colombie-Britannique, par exemple, tout le monde se voit remettre ces livrets. Toutes les personnes qui ont un enfant vivant et en santé obtiennent ces livrets très complets qui décrivent tout ce qui se produira au cours des trois ou quatre prochaines années. Tout cela est issu de recherches. C'est très bien préparé. Il s'agit d'une très bonne ressource.
    Lorsqu'un enfant meurt, voici ce à quoi ressemble le document que nous remet l'hôpital: un document de six pages imprimé recto verso par l'hôpital. En fait, on peut lire au verso: « Produit en 1989. Révisé en 1999 ». Le document contient très peu d'information, et il est surtout question de considérations physiques qui concernent ce qui peut arriver au corps d'une mère une fois qu'elle donne naissance. Il y a une demi-page sur les changements émotionnels et il est indiqué que, si on a plus de questions, il faut en parler au personnel infirmier, ce que nous avons fait, et le personnel ne connaissait aucune ressource, pas même le groupe de soutien dans son propre hôpital.
    Voici ce que je propose: qu'est-ce qui nous empêche de créer un registre national des parents endeuillés? Ce pourrait être une solution facultative. Parce que nous avons demandé les documents sur tous nos enfants à l'hôpital, j'ai pu voir tous les documents qui sont déjà communiqués par l'hôpital aux diverses organisations. J'en ai un, ici: c'est une déclaration de naissance vivante ou d'enfant mort-né. La déclaration contient toute l'information dont on aurait besoin pour créer une telle chose. Le document est envoyé aux organismes responsables des statistiques, l'organisme provincial —dans ce cas-ci, l'organisme de l'état civil de la Colombie-Britannique —, mais, ensuite, je crois que l'information est fournie à Statistique Canada.
    Ce serait une façon parfaite de faire en sorte que toute cette information soit transmise au gouvernement fédéral et, essentiellement, nous pourrions faire un suivi lorsque l'information est fournie aux parents, soit par lettre, soit par courriel, pour demander: « Voulez-vous faire partie d'un réseau qui vous permettrait de créer des liens avec d'autres familles qui ont vécu quelque chose de similaire? » On pourrait tout simplement coordonner les activités d'extension entre pairs de cette façon.
    Une fois que c'est fait, la prochaine étape logique serait d'étendre le registre à ceux qui fournissent vraiment des services aux familles afin de pouvoir dire aux familles endeuillées: « Nous savons que vous êtes dans cette zone, et il y a 15 fournisseurs enregistrés, ici. » Il pourrait s'agir de tous les témoins que vous avez entendus aujourd'hui et qui ont des organisations, des réseaux de pairs et des groupes de soutien. Essentiellement, ces organisations pourraient demander de figurer au registre, et on pourrait tout simplement assurer le jumelage, qui est le principal problème pour beaucoup d'organisations avec lesquelles j'ai dû composer. Comme je l'ai dit tantôt, c'est l'argument lié à la protection de la vie privée.
    En tant qu'organisation, on ne peut pas tout simplement aller à l'hôpital et demander les coordonnées de toutes les personnes qui perdent un enfant afin d'aller les voir et de leur offrir des services. Habituellement, on tente, ensemble, d'inscrire l'information sur un dépliant ou on travaille avec certaines des personnes à l'hôpital et on crée des relations de confiance, mais ce n'est pas un système infaillible, parce qu'il s'appuie sur les gens. Si une personne se présente à l'hôpital à un moment précis et qu'il y a un infirmier précis qui est là et qui connaît l'information, il pourra peut-être la fournir à la famille, mais, dans une autre situation, si la même personne n'est pas là, l'information n'est pas communiquée.
    Je préconiserais vraiment un système holistique et central faisant en sorte que personne ne passe entre les mailles du filet tout simplement parce que, à un moment donné, une personne précise n'est pas à l'hôpital pour faire le travail. Si vous organisez les choses de cette façon en misant sur les processus actuels d'avis envoyés aux divers organismes gouvernementaux pour consigner le décès d'un enfant, la prochaine étape tout à fait logique serait peut-être d'élargir ce service pour prévoir un tel registre et, de cette façon, lier les parents les uns avec les autres et avec les organisations.

  (1005)  

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant au député Richards, s'il vous plaît.
    Je vais commencer par remercier tous les parents et les défenseurs des parents qui sont parmi nous aujourd'hui de leur courage et de leur altruisme.
    Vous parlez d'une situation très tragique que vous avez vécue et vous essayez de la transformer de façon à pouvoir aider les autres. Même si c'est peut-être une façon qui vous permet de garder la mémoire de vos enfants en vie, bien sûr, cela ne changera rien à ce que vous avez vécu. Il est évident que vous travaillez pour vous assurer que d'autres personnes n'ont pas à passer par là où vous êtes passés, sans soutien et sans compassion. Je vous remercie de vos efforts et du travail que vous faites au nom d'autres parents qui ont perdu des enfants.
    Vous avez tous parlé rapidement du point de contact, généralement au niveau de l'hôpital, et vous estimez que c'est là qu'il doit y avoir un changement quelconque en ce qui concerne l'information. On parle de la communication des renseignements qui vous sont fournis, les renseignements sur les mesures de soutien auxquelles les parents ont accès. C'est quelque chose qui relève de l'échelon provincial, mais, au Comité, nous avons tout de même la capacité de formuler une recommandation pour encourager une telle chose. On peut le faire par l'intermédiaire d'un mécanisme comme, par exemple, les réunions des ministres fédéral et provinciaux de la Santé, où on pourrait encourager une telle chose, que des renseignements soient communiqués à l'échelle du pays. C'est assurément quelque chose que nous pouvons quand même recommander.
    De plus, s'il y a vraiment des problèmes liés à la protection de la vie privée dans l'échange de renseignements au niveau des gouvernements, on a la capacité de faire signer un formulaire ou je ne sais quoi afin que ce soit possible. C'est assurément quelque chose qu'on peut faire. Nous apprécions ces suggestions. Je crois que ce sont des suggestions très importantes, et nous les prenons bien en note.
    J'aimerais aborder un aspect précis du dossier, et j'ai une autre question. Si possible, j'aimerais que vous me répondiez tous.
    Premièrement, vous aujourd'hui, et d'autres parents, nous avez parlé de certaines des expériences terribles associées au fait d'avoir à raconter l'histoire de votre perte plusieurs fois, dans certains cas, à de nombreux bureaucrates et fonctionnaires afin d'essayer d'avoir accès à ce qui pourrait vous être offert. Les résultats ont été différents à différents endroits. Selon moi, deux choses découlent de cette situation.
    Dans un premier temps, il devrait y avoir une ligne d'aide quelconque par l'intermédiaire de Service Canada, par exemple, où des parents endeuillés ou des personnes qui vivent un deuil peuvent appeler pour parler à quelqu'un qui comprend vraiment leurs besoins et qui a l'information nécessaire à leur fournir, de façon qu'on n'ait pas des résultats différents et des expériences différentes d'une situation à l'autre. J'aimerais obtenir vos commentaires à tous à ce sujet. Est-ce, selon vous, quelque chose qui serait important?
    Dans un deuxième temps, il y a la question des prestations en tant que telles. Beaucoup de parents qui sont venus nous voir ont souligné qu'il est important que ce soit un congé lié précisément au deuil. L'exemple de Paula montre très bien à quel point c'est important. La possibilité des congés de maladie a été soulevée, mais ce n'est pas possible pour tout le monde pour diverses raisons. Vous avez peut-être constaté que vous n'y aviez pas droit. Dans certains cas, des congés ont déjà été utilisés, durant la grossesse, par exemple,
    L'idée, c'est que les prestations devraient être spécifiques et automatiques, de sorte que les gens n'ont pas à se battre contre la bureaucratie pour y avoir accès. C'est quelque chose qui serait accessible à tous les parents endeuillés.
    J'aimerais que vous me disiez tous ce que vous pensez de cet aspect précis — l'importance de miser sur une prestation automatique, spécifique et universelle — et aussi de l'idée d'une ligne qui serait accessible pour tous les parents, une ligne où l'interlocuteur comprend vraiment le deuil.
    C'est une question que je vous pose à vous quatre, mais nous allons commencer par vous, Cheryl.

  (1010)  

    Je serais ravie qu'il y ait une ligne téléphonique. Je pense qu'il serait très utile de savoir que vous pouvez appeler et qu'une personne peut répondre à vos questions: elle a reçu une formation particulière et a les renseignements sous la main. On parlerait à une personne plutôt que de joindre un ministère et un autre.
    Au sujet de la prestation, si nous pouvions faire en sorte que cela soit aussi simple que possible... Même l'idée qu'une famille devrait... J'ai seulement fait des démarches pour un congé de maternité; je vous prie donc de m'excuser si je ne suis pas au courant, mais je sais que je devais envoyer une déclaration toutes les semaines pour dire si je travaillais ou non, même si j'étais en congé de maternité.
    J'aimerais voir une période garantie, pendant laquelle vous n'avez pas à montrer que vous bénéficiez de ce congé et que vous y êtes toujours admissible — c'est accordé seulement à ce moment-là.
    Je pense qu'une ligne téléphonique réservée à cette fin serait une excellente idée.
    Je pense aussi qu'il est très important de souligner que, parfois, lorsque des personnes sont en congé de maladie, elles ne peuvent pas se permettre de maintenir leurs prestations de maladie en vertu du régime au travail. Lorsque j'étais en congé de maladie, nous n'avions pas les moyens financiers de conserver nos régimes de soins dentaires et médicaux, car notre employeur ne participe pas à ces coûts. J'étais employée par la Régie de la santé de la Nouvelle-Écosse. Nous ne pouvions pas nous permettre de maintenir les prestations, et celles-ci couvrent le counseling, essentiellement. C'est un point très important à soulever.
    Paula, Jens, ou monsieur et madame Fuentes, avez-vous des commentaires à ce sujet?
    Absolument. Pour notre part... je pense que la ligne téléphonique centrale serait très importante. D'expérience, nous savons qu'il est épouvantable de se retrouver dans diverses organisations gouvernementales immédiatement après la perte d'un enfant. Même si les interlocuteurs sont bien intentionnés, comme d'autres témoins l'ont dit, ils ne sont pas suffisamment formés. Avoir quelqu'un au bout d'une ligne téléphonique exclusive nous aiderait tous énormément.
    Quant à la manière possible de structurer ou de répartir l'indemnisation, nous pourrions avoir quelque chose comme vous, Jens et moi ainsi que tous les autres témoins l'avons mentionné: un recours automatique par lequel nous pourrions signer une renonciation à la protection de nos renseignements personnels afin que les hôpitaux de la province puissent communiquer avec le palier fédéral. Un congé de deuil « sans qu'on pose de questions » serait absolument fantastique.
    Jens, souhaitez-vous également faire un commentaire?
    Je ne fais que penser à une chose, même si je ne sais pas si cela a déjà été soulevé. La personne a déjà évoqué les prestations de maladie complémentaires. Je tiens à mentionner que nous avons abordé la question de savoir si 12 semaines seront suffisantes et si le processus est assez automatique.
    Une chose dont nous n'avons pas vraiment parlé est la façon dont les gens ont accès au soutien en cas de deuil s'il n'y a aucune organisation dans leur région. Dans de nombreuses régions rurales, il serait difficile d'obtenir un soutien en personne.
    Je me demandais si le Comité envisageait quelque chose à cet égard. Si nous savons qu'un financement quelconque qu'une personne pourrait obtenir pour des services de counseling — et c'est en fait assez coûteux — dépend vraiment du régime d'assurance-maladie complémentaire, nous pourrions peut-être parler d'une prestation. Cela pourrait faire partie d'une prestation automatique, c'est-à-dire que lorsque celle-ci s'applique, il y aura un calendrier, un strict minimum de soutien offert par un conseiller.
    Là encore, je ne dis pas que tout le monde doit utiliser cette aide; certaines personnes n'en veulent peut-être pas. Si les gens recherchent du soutien et qu'il n'y a rien dans leur région, comment pouvons-nous prendre le relais? S'ils n'ont pas de prestations de maladie complémentaires et qu'ils ne peuvent pas consulter un conseiller inscrit dans leur région ou qu'ils n'en ont pas les moyens, le gouvernement ferait-il quelque chose? Serait-il prêt à financer trois séances au minimum afin que quelqu'un puisse au moins décrocher le téléphone et faire le point avec une personne ayant suivi une formation spécifique sur le deuil? Cela concerne particulièrement les gens à l'extérieur des régions métropolitaines, où il pourrait y avoir des organisations de soutien dirigées par des pairs ou des bénévoles. Nous ne devrions pas oublier des gens dans ces régions.

  (1015)  

    Merci.
    Merci.
    La parole est au député Morrissey, s'il vous plaît.
    Monsieur le président, j'ai quelques brèves questions à poser et je partagerai ensuite mon temps de parole avec le député Vaughan.
    Je crois que c'est Mme Harmon qui a parlé de certaines des administrations qui ont prévu une indemnité pour frais funéraires dans le cas des enfants d'un certain âge. Où est-ce?
    C'est en Grande-Bretagne. C'était au printemps.
    C'est récent.
    Oui, c'est une députée qui en est à l'origine, car son enfant est décédé, et elle a presque fait faillite pour l'inhumer, compte tenu des coûts connexes. Il lui a fallu huit ans pour faire adopter une loi, mais celle-ci a été adoptée au printemps.
    Quels sont les âges encore?
    Cela va de la naissance à 16 ou 18 ans.
    D'accord, merci.
    Je veux juste raconter quelque chose. Mon collègue, M. Hogg, a mentionné que personne, à part madame, ne semblait avoir d'information sur ce qui est susceptible d'être couvert dans d'autres administrations. Trois thèmes sont apparus depuis que nous avons commencé à étudier cette motion, et je tiens à les reformuler pour voir si vous êtes d'accord.
    Le premier était évident: il fallait rembourser des prestations après un décès. Il y a eu plusieurs exemples à ce sujet.
    Le deuxième était qu'il n'existait aucune information claire sur les prestations disponibles ni aucune similitude entre les critères d'admissibilité.
    Le troisième est qu'on retrouve une véritable mosaïque de services de soutien dans tout le pays, et il n'y a pas d'unanimité.
    Êtes-vous d'accord pour dire que ce sont les trois thèmes sur lesquels le Comité devrait se concentrer dans le cadre de ses recommandations?
    Madame Salter-Roberts et madame Harmon.
    Oui, ce sont certainement les principaux problèmes sur lesquels le comité HUMA devrait se concentrer. Il faut également tenir compte du fait que, sans le soutien du système de santé lui-même, les congés ne sont valables que dans la mesure où vous bénéficiez des mesures de soutien. Je pense que cela devrait être fait de concert avec Santé Canada.
    Je vais laisser mon temps de parole au député Vaughan.
    Moi aussi, je vous remercie de votre bravoure, de votre courage et de votre compassion en racontant vos histoires et en aidant les autres. C'est là un des aspects les plus inspirants de la nature humaine, la capacité d'aider les autres même lorsque vous avez besoin d'aide vous-même. Je vous dis donc merci.
    Pendant que vous parliez et que nous entendions où certaines des idées nous mènent avec vos suggestions et vos conseils judicieux, une question m'est venue à l'esprit: quelle est l'ampleur de cette dynamique d'un bout à l'autre du pays, c'est-à-dire combien de personnes ont besoin des services que vous tentez de faire mettre en place? À quelle fréquence aurait-on recours à ces services?
    Je peux faire part de nos statistiques en Alberta.
    Près de 16 000 bébés meurent chaque année, et ces cas sont documentés comme des fausses couches. Lorsque nous disons « documentés », nous savons qu'il y en a davantage. Une grossesse sur quatre se terminera par une fausse couche en Alberta. Nous savons que c'est plus élevé que cela, car de nombreuses femmes ne consultent pas leur médecin et ne disent pas: « Je pense avoir fait une fausse couche. Pouvez-vous faire un test? » Elles savent seulement qu'elles étaient enceintes. Elles ont fait le test à la maison et ont perdu ce bébé en quelques semaines. Il y a beaucoup de pertes non documentées.
    Nous savons également qu'il y a environ 400 enfants mort-nés chaque année. Je n'ai pas les statistiques pour les cas de SMSN, le syndrome de mort subite du nourrisson. Je sais qu'elles sont élevées. Je n'ai pas les statistiques pour les cas de mort subite et inexpliquée durant l'enfance, dont le nombre est également élevé.
    Dans les collectivités de l'Alberta, la tendance est à la hausse. Nous constatons, entre autres, que de nombreuses familles attendent avant d'avoir un bébé et que les parents sont peut-être un peu plus âgés, de sorte que les occasions de dépistage sont plus nombreuses. Parfois, il s'agit d'interruptions médicales de la grossesse lorsque les bébés ne sont pas viables ou si la santé de la mère est en danger. Nous assistons également à une forte augmentation des interruptions médicales de la grossesse, ce qui fait grimper les chiffres.

  (1020)  

    Dans ce cas, les fausses couches surviennent manifestement avant la naissance, d'après les calculs.
    Oui, les fausses couches vont de la conception aux 20 premières semaines de gestation, et on parle de mortinaissance, de 20 semaines au terme de la grossesse, ou juste après la date d'accouchement.
    Vous avez divisé ces statistiques en trois catégories. Il y a eu les fausses couches...
    Les enfants mort-nés.
    ... les enfants mort-nés, puis...
    Les cas de syndrome de mort subite du nourrisson et de mort subite et inexpliquée durant l'enfance.
    Vous avez dit que vous n'aviez pas de statistiques fiables pour l'une d'entre elles.
    Je n'ai pas le chiffre en ce qui concerne les cas de SMSN. Je m'en excuse.
    Pas de problème, ça va.
    Adam, la personne de la vidéoconférence les a.
    En fait, j'y ai jeté un coup d'oeil en venant ici. En 2016, Statistique Canada a indiqué que les cas de SMSN ou de mort infantile sont de 1,2 pour 1 000 naissances vivantes au Canada. Ce qui nous touche, car notre fils avait près de deux ans lorsqu'il est décédé, c'est le fait que l'on recense 4,9 décès pour 1 000 naissances vivantes d'enfants de moins de cinq ans en 2016.
    Nous n'avons pas du tout de statistiques sur les cas de mort subite et inexpliquée au Canada, car ils ne font pas l'objet d'un suivi uniforme dans les provinces. Ce n'est pas une cause reconnue de décès. C'est une absence de diagnostic.
    D'accord, et le taux de fausses couches fait-il également partie de vos recherches?
    Non. Ce sont vraiment des enfants qui sont nés à terme, et non pas des enfants mort-nés.
    Je suis désolé d'insister sur des statistiques, mais à mesure que les idées avancent, il est utile de comprendre l'ampleur du modèle avec lequel nous travaillons, car, comme vous le savez, l'assurance-emploi est un programme financé par des tarifs. Lorsque vous apportez des modifications, la critique consiste souvent à dire qu'il s'agit d'une taxe imposée aux petites entreprises, etc. Cependant, nous devons trouver un moyen d'établir un modèle, alors merci beaucoup.
    Monsieur Locher, vous avez également quelque chose à ajouter.
    Oui. Je veux vous donner des statistiques à l'échelle fédérale. En fait, j'ai dû remonter jusqu'en 2005, car lorsque j'ai consulté le site Web de Statistique Canada, je pense qu'on a cessé d'enregistrer les fausses couches à un moment donné. Il n'y a même plus de données disponibles au niveau fédéral sur les fausses couches.
    Le seul jeu de données qui vous donne réellement le portrait complet de toutes ces situations est celui de 2005, où, au moment de la recherche, on dénombrait 447 485 grossesses au total. Les données de Statistique Canada comprenaient une catégorie intitulée « fausses couches », mais les chiffres étaient très bas, avec 6 285 cas. Toutefois, un astérisque indiquait qu'il s'agissait uniquement de celles consignées par Statistique Canada. Par conséquent, comme on l'a indiqué précédemment, je pense qu'il existe un écart important au chapitre des données qui ne sont pas consignées.
    À ce moment-là, ils ont divisé le nombre de mortinaissances en perte foetale hâtive, qui débute à 20 semaines, puis en perte foetale tardive, à partir de 27 semaines. Les chiffres étaient de 1 197 pour les pertes foetales hâtives, plus 1 012 pour les pertes foetales tardives. C'est la catégorie des mortinaissances.
    Ensuite, il y a les décès néonataux, qui vont de la première année de vie...
    En fait, ils avaient un autre groupe, de 1 an à 14 ans, et 791 enfants étaient décédés en 2005. Parmi ceux-ci, il y avait 66 suicides, 233 accidents et 116 cas de néoplasme. Une autre catégorie regroupait les cas de SMSN, le syndrome de mort subite du nourrisson, et, en 2005, il y en avait 112.
    Pouvez-vous nous envoyer cette information?
    Oui, bien sûr.
    Merci.
    Monsieur le député Richards, vous êtes le suivant.
    Je vais poursuivre dans le même sens. De toute évidence, la difficulté tient à la complexité des chiffres. Nous comprenons tous que, dans de nombreux cas, les personnes finissent par avoir droit à une prestation de maladie ou bien, si vous y étiez admissible, il y a encore un congé de maternité accessible à certaines personnes.
    Certaines personnes sont laissées pour compte, et nous essayons de faire en sorte que tout le monde ait cet accès, mais les chiffres ne sont pas aussi énormes qu'ils pourraient paraître, car certaines personnes peuvent prétendre à d'autres prestations.
    Le problème — et nous l'avons entendu dire aujourd'hui de votre part et d'autres personnes — est que vous devez vous battre contre la bureaucratie et avec le gouvernement pour les obtenir. Ce n'est pas que quelqu'un tente de bloquer l'accès, c'est simplement que personne ne sait comme s'y prendre. J'aimerais que vous abordiez tous cet aspect, car c'est ce que les gens me disent très souvent. On pense que, si cela pouvait simplement se faire automatiquement, les gens n'auraient pas à se battre et à se démener pour que cela fonctionne, essayer de faire entrer la cheville carrée dans le trou rond. Cela semble être le plus gros défi. Si certains d'entre vous aimeraient en parler plus précisément, comme quelque chose qui est propre à votre situation de deuil — et ce serait aussi automatique de sorte que...
    J'ai entendu des histoires. Je pense qu'une famille de la région d'Ottawa ici a raconté son histoire à 17 reprises à des représentants du gouvernement afin d'obtenir ses prestations. Elle a pu les obtenir, mais elle a raconté son histoire 17 fois. Je pense que si nous pouvions remédier à cela, on pourrait changer les choses de façon importante. De plus, il faut reconnaître que c'est une question sérieuse et que nous devons l'aborder au lieu d'essayer de trouver des moyens de l'inclure dans une autre catégorie.
    Je ne savais pas que nous finirions par constater qu'un nombre significatif de nouvelles prestations serait versé, mais je pense que les gens se sentiraient reconnus. Je pense que nous allégerions le fardeau qui leur est imposé lorsqu'ils doivent traiter avec la bureaucratie.
    Je voulais entendre certains commentaires à ce sujet, si l'un d'entre vous souhaite en faire. Quelqu'un veut-il intervenir?
    Cheryl.

  (1025)  

    L'une des animatrices de mon programme dont le bébé est décédé à 21 semaines a dû subir un déclenchement artificiel du travail pour l'expulser. Elle a touché l'intégralité des prestations pour l'année entière, pour un bébé de 21 semaines. Dans le même programme, j'ai eu d'autres parents qui sont allés au-delà de 40 semaines, et leur bébé est décédé par la suite ou quelques jours après la naissance, mais des prestations leur ont été totalement refusées. Leur bébé est mort; par conséquent, ils ne sont pas admissibles.
    Il y a de grandes incohérences quant à savoir qui reçoit des prestations et qui n'en reçoit pas, mais cela dépend vraiment de la personne qui a pris la décision ce jour-là et à qui ils ont parlé. La mère, qui a touché l'intégralité de ses prestations, devait essentiellement se rendre au bureau, remplir des formulaires, et tout était dit. Les mères à qui on a refusé les prestations et qui avaient mené leur grossesse à terme ont dû faire des pieds et des mains et raconter leur histoire 17 fois. Il faut réellement modifier ce processus, le simplifier.
    Il y a le cas de cette famille de la vallée de l'Annapolis en Nouvelle-Écosse. La mère est morte en couches, et le bébé est décédé neuf jours plus tard. Le père est travailleur indépendant avec un enfant en bas âge, mais il n'a accès à rien parce qu'il travaille à son propre compte. Il doit reprendre le travail, qui consiste à... Il a une garderie. Il retourne donc au travail et s'occupe des enfants immédiatement après le décès de son enfant et celui de sa femme.
    Je pense qu'une prestation de deuil distincte serait bénéfique dans des situations comme la mienne. Mon mari a été obligé de retourner au travail après une semaine. S'il y avait des prestations individuelles pour les deux parents... Nous avions les mains liées. Ils ne signaient pas les formulaires. Nous sommes allés voir un médecin deux fois par semaine, puis nous n'avions tout simplement plus la force de nous battre. S'il y avait eu une prestation distincte, cela ne serait jamais arrivé. J'ai fini par retourner au travail neuf semaines après l'accouchement parce que le bébé n'était pas à la maison avec moi.
    Après que vous avez perdu un bébé, les gens ne se précipitent pas chez vous pour vous réconforter. Les gens gardent leurs distances. Vous êtes seuls.
    Monsieur Pelletier, je pense vous avoir vu lever la main.

[Français]

    Merci.
    La ligne téléphonique dont vous parliez tantôt pourrait être une sorte de guichet unique qui permettrait aux gens d'appeler pour obtenir des renseignements sur l'aide et les programmes offerts ainsi que sur les prestations possibles. Cela leur permettrait aussi d'être dirigés au bon endroit pour obtenir un soutien psychologique.

[Traduction]

    Je pense que nous avons un certain intérêt de la part de la personne en vidéoconférence.
    S'il vous plaît...
    Merci beaucoup.
    Comme notre enfant avait plus de un an, il n'y avait aucune prestation parentale, de maternité ou autre à laquelle nous pouvions avoir accès, à l'exception des congés de maladie. Comme un témoin l'a déclaré précédemment, ils ne pouvaient pas demander à leur médecin de signer... Notre médecin ne voulait pas approuver un congé lié au stress ou un congé de maladie. Elle nous a dit d'aller parler à un conseiller, et c'était tout. C'était notre médecin de famille.
    À part se rendre dans une clinique d'urgence quelque part pour demander à quelqu'un d'autre d'approuver quelque chose qui n'était pas réellement vrai... Ce n'était pas du stress. C'était du chagrin. Nous ne devrions pas avoir à déjouer un système auquel nous contribuons.

  (1030)  

    C'est un excellent point.
    Merci.
    La suivante est la députée Sansoucy, s'il vous plaît.
    Désolé, Jens veut commenter.
    Bien sûr.
    Très brièvement, s'il vous plaît, Jens.
    Vous aviez une question à deux volets, dont l'un concernait l'histoire à raconter. Je suis entièrement d'accord avec les autres témoins quant à la nécessité de cette prestation automatique.
    Je peux vous dire que mon fils aîné aurait maintenant sept ans et mon deuxième fils, Tobias, cinq ans. Il m'a fallu plusieurs années pour être en mesure d'en parler sans être une épave terrassée par l'émotion.
    Au moment où Service Canada voulait me parler, c'était impossible. À la seule idée qu'il fallait aller là-bas, dans cet endroit public... je n'avais aucun contrôle sur les heures et les conditions dans lesquelles je devais raconter l'histoire. C'était juste terrible.
    Je pense qu'il faut changer cette situation; les gens doivent mieux maîtriser la façon dont ils sont obligés de raconter l'histoire. Une équipe affectée à une ligne téléphonique exclusive aiderait grandement.
    Merci.
    Merci.
    Madame Sansoucy.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Pelletier, vous avez dit avoir décidé de mettre en place un programme vraiment particulier pour le deuil périnatal. En tout respect pour les parents qui sont avec nous aujourd'hui et qui ont vécu eux-mêmes un tel deuil, j'aimerais que vous nous expliquiez comment votre organisme en est venu à cette décision après avoir rencontré des parents. Pourquoi en êtes-vous arrivés à penser que le deuil périnatal nécessitait une approche tout à fait particulière?
    Nous oeuvrons dans le domaine du deuil depuis déjà longtemps, depuis 25 ans, et nos approches ont évolué au fil du temps. Bien sûr, nous travaillons depuis longtemps auprès des adultes en deuil, mais nous avons conçu des approches particulières pour l'enfant en deuil et pour l'adolescent en deuil.
    Comme cela a été mentionné ce matin, la situation des personnes qui vivent un deuil périnatal est aggravée par le fait que certaines personnes de notre société ne considèrent pas ce deuil comme étant aussi important que la perte d'une autre personne ou d'un enfant âgé de 10 ans, par exemple. On a vécu peu de temps avec un enfant qui est mort en bas âge, mais on est aussi en deuil et on a autant de peine, sinon plus, que lors du décès d'une autre personne.
    Nous croyons que cela nécessite une approche particulière. C'est pour cela que nous nous faisons aider par des personnes qui ont vécu un deuil périnatal, mais aussi par des personnes qui ont étudié le deuil périnatal et qui sont des sommités en la matière.
    Vous avez dit que vous allez tenir demain un colloque intitulé « Deuil et famille ». J'aimerais que vous indiquiez, à l'intention du Comité, quelles sont ces sommités qui ont une expertise en deuil périnatal.
    Vous avez parlé tantôt de Mme Chantal Verdon. Elle a été conférencière à l'un de nos colloques passés où il était question du deuil périnatal. C'est l'une des personnes qui nous aideront à concevoir la meilleure approche possible pour aider les gens qui vivent de tels moments.
    Quelle est la programmation de votre colloque de demain sur le deuil et la famille?
     Nous n'abordons pas le deuil périnatal lui-même. Nous parlons de l'historique du deuil de la perspective d'une famille. Quand une personne décède, ce n'est pas une seule personne qui est endeuillée, mais c'est toute la famille, de même que les proches et les amis.
    Entre autres, il y aura le témoignage d'une famille dont le père est décédé dans un accident auquel la conjointe et les trois enfants ont survécu. M. Deslauriers, un de nos conférenciers, va demander aux membres de cette famille d'expliquer comment ils ont pu traverser ce deuil en ayant quelqu'un à qui en parler. Le fait de pouvoir en parler est l'un des meilleurs moyens non pas pour régler un deuil, mais pour mieux le vivre.

  (1035)  

    Dans votre présentation, vous avez parlé...

[Traduction]

    Je suis désolé, mais cela prend environ une minute. Nous aurons d'autres occasions de poser des questions.

[Français]

    D'accord.

[Traduction]

    Nous en sommes rendus à la fin de deux séries de questions. Nous n'avons pas vraiment le temps de commencer un troisième tour officiel depuis le début, mais si vous le souhaitez, nous pourrions proposer trois minutes par député. Y a-t-il quelqu'un de ce côté qui aimerait ces trois minutes? Nous n'avons pas l'obligation de prendre le temps qu'il reste.
    Nous commencerons par Mme Sansoucy, pour trois minutes.

[Français]

    Mes collègues savent que j'ai toujours une question.
    Monsieur Pelletier, vous avez dit que tous vos bénévoles avaient reçu une formation de sentinelle, qui a été conçue au Québec pour la prévention du suicide. Cela m'a interpellée.
    Quand on travaille dans le domaine du deuil, il est important d'avoir toujours en tête la possibilité qu'une personne endeuillée mette fin à sa vie aussi, n'est-ce pas?
    Absolument. Les personnes vivent leur deuil de façon différente. C'est arrivé régulièrement que, parmi les personnes que nous accompagnions, certaines aient manifesté un découragement au point de penser au suicide. Nous l'avons détecté et les avons dirigées vers les personnes compétentes. Dans notre cas, nous les adressons à l'organisme Contact Richelieu-Yamaska, un organisme qui s'occupe de personnes en crise et qui parlent de s'enlever la vie.
    À l'intention de mes collègues, j'aimerais préciser que le programme de sentinelle au Québec peut former tout le monde à détecter la détresse chez les autres. Il y a même des étudiants du secondaire, dans les polyvalentes, qui peuvent détecter la détresse et diriger les gens concernés au bon endroit.
    Pour vous, il est important que tous les gens qui accompagnent des personnes endeuillés suivent cette formation de base pour détecter la détresse chez elles.
    Les personnes qui vivent un deuil peuvent arriver à un tel état de découragement qu'elles pensent à mettre fin à leurs jours, et il faut être capable de détecter ces situations.
    C'était ma dernière question. Merci.

[Traduction]

    Monsieur Diotte.
    Je lance la question à tous. Vous nous avez tous donné beaucoup de matière à réflexion et d'excellentes suggestions. L'un d'entre vous pense-t-il à autre chose qui pourrait améliorer notre système et nous mettre sur la bonne voie?
    Monsieur Pelletier.

[Français]

    On a parlé tantôt d'une ligne téléphonique. Ce serait une idée à retenir, toujours dans l'optique d'un guichet unique.
    Il faudrait aussi subventionner suffisamment le travail des personnes qui donnent de leur temps et qui n'ont pas assez de moyens financiers pour en faire davantage.

[Traduction]

    Désolé de vous interrompre, mais on entend la sonnerie.
    Je vérifie simplement ici.
    Allez-y, monsieur Diotte.
    Nous pourrions peut-être entendre les gens qui comparaissent par vidéoconférence.
    Jens.
    Il y avait une question plus tôt concernant les experts dans ce domaine. Je voulais souligner que le Canada compte six centres de soins palliatifs pédiatriques qui font un travail remarquable dans ce domaine. Ils ne s'occupent pas des fausses couches ni des mortinaissances, mais après la naissance et la maladie en phase terminale chez les enfants, ils apportent un soutien considérable aux parents. Ils font beaucoup de recherche. Ils comptent beaucoup d'experts et disposent d'une vaste expertise dans ce domaine. Cela pourrait être un autre secteur où vous pourriez obtenir de l'information auprès d'experts sur ce sujet.
    Merci.
    On entend la sonnerie. Je dois demander le consentement unanime pour continuer encore un peu et terminer la séance.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Monsieur Diotte, il vous reste une minute.

  (1040)  

    Encore une fois, je laisse la parole à quiconque pourrait suggérer autre chose qui nous aurait peut-être échappé, d'autres suggestions visant à aider le système.
    Je pense qu'il serait utile de supprimer la nécessité de faire signer le certificat médical par un médecin en cas de décès. Je ne pense pas que les médecins devraient avoir le choix de décider si vous avez ou non le droit d'avoir 15 semaines de congé simplement parce qu'ils pensent que faire le deuil de votre enfant n'est pas une raison légitime.
    Y a-t-il quelqu'un d'autre?
    J'aimerais ajouter quelque chose à propos de la campagne de sensibilisation. Cette idée me plaît. Je pense que lorsque nous examinons la santé mentale et la toxicomanie, lorsque nous revenons à la cause première de certains de ces problèmes, nous constatons souvent qu'il s'agit de chagrin, maintes et maintes fois, à mon avis. Je travaille dans un centre d'accueil et avec des familles qui vivent une telle situation. Le chagrin est le catalyseur de ces expériences. Je sais que tout ce que vous proposez coûtera de l'argent au gouvernement, mais je pense que si vous investissez dans certaines des causes profondes de la situation, il est possible que d'autres fonds consacrés à d'autres programmes ne soient pas nécessairement dépensés à long terme.
    Merci.
    Madame Romanado, s'il vous plaît.
    Merci.
     Je vais revenir sur ce que mon collègue Blake Richards a mentionné à propos d'une famille qui doit raconter son histoire 17 fois — je crois que c'est ce que vous avez dit. Nous avons beaucoup parlé d'un guichet unique. Étant donné que nous sommes en 2018, le recours à la technologie pourrait-il aider à cet égard?
    Ce que je m'efforce de dire, c'est que nous sommes beaucoup plus à l'aise maintenant avec les plateformes en ligne, qu'il s'agisse de Facebook ou de groupes de soutien, pour tendre la main. Cela aiderait-il les gens d'avoir l'option d'utiliser la technologie pour éventuellement faire les demandes relatives à divers services et prestations en ligne et faire toutes les démarches de cette façon? Ils le feraient une seule fois. Certaines personnes veulent utiliser le téléphone. Elles veulent parler aux gens et raconter leur histoire, ce qui fait partie de la guérison, etc. Je sais que Philippe va probablement intervenir ici, mais je pense simplement à cela. Et si nous avions un portail en ligne sur lequel vous racontez votre histoire une fois et où diverses organisations s'affichent, ce qui correspondrait presque à ce qui est disponible selon votre code postal, disons...
    Maintenant, j'ai une foule d'idées, mais Philippe, si vous pouviez intervenir, ce serait formidable.
    Bien sûr. Wendy avait des idées, mais elle a un rhume et ne peut donc pas parler.
    Nous avons récemment eu une fille que vous avez rencontrée. À la naissance d'un enfant, vous devez remplir tous ces petits formulaires. À la fin du formulaire se trouve une liste des adresses URL auxquelles vous devez vous rendre pour demander l'émission d'une carte ou une autre ou du NAS, le numéro d'assurance sociale. Pour obtenir quelque chose de similaire, lors du décès d'un enfant, le document vous serait remis par l'hôpital, une simple feuille de papier avec différentes URL, ou même simplement une seule URL centrale, comme celle que vous proposez maintenant, qui établirait le lien avec tout le monde; je pense que ce serait extrêmement bénéfique pour nous tous.
    Nous ne pouvons même pas compter le nombre de fois où nous avons dû raconter cette histoire, pas seulement pour les audiences, mais en général. La raconter une seule fois aurait été vraiment bien.
    D'accord.
    Dans les hôpitaux, il y a des guichets où vous fournissez les renseignements afin d'obtenir le certificat de naissance, le numéro d'assurance sociale et la carte d'assurance maladie en même temps. Ce serait un guichet semblable à celui-là, surtout si votre cas est traité à l'UNSI, l'unité néonatale des soins intensifs, ou à l'UPSI, l'unité pédiatrique des soins intensifs. Si quelque chose se produit, cela peut être fait sur place, avec l'aide du personnel médical. La technologie existe déjà.
    Merci.
    Merci.
    J'ai bien peur qu'il ne nous reste plus de temps, Gordie. Je suis désolé.
    Je tiens à remercier toutes les personnes présentes ici et celles qui ont comparu par vidéoconférence aujourd'hui de leur contribution à notre étude. Il est difficile pour nous, de ce côté-ci, d'entendre certaines de ces histoires. Je ne peux donc qu'imaginer les difficultés que vous rencontrez lorsque vous les racontez. Merci beaucoup.
    J'aimerais rappeler à mes collègues que, le 6 novembre, nous avons des travaux du Comité. Les travaux se dérouleront dans la pièce 228 de l'édifice de la Bravoure, le 6 novembre.
     Le 7 novembre, de 18 heures à 21 heures, nous allons commencer l'étude article par article du projet de loi C-81. Les travaux se dérouleront dans la pièce 415 de l'édifice Wellington.
     Le 8 novembre, à notre heure habituelle, de 8 h 45 à 10 h 45, nous reprendrons l'étude article par article du projet de loi C-81. Nous pourrions éventuellement avoir une séance en après-midi, à 15 h 30, le 8 novembre, au besoin, afin de mener à terme cette étude. Espérons que nous n'en aurons pas besoin, mais c'est une possibilité, le cas échéant.
    Je vous remercie tous infiniment.
    La séance est levée.
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