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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 2ième Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 83

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 11 avril 2000

VAFFAIRES COURANTES

. 1005

VDÉCRETS DE NOMINATION
VM. Derek Lee
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Derek Lee
VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VIndustrie
VMme Susan Whelan
VM. Charlie Penson
VLOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
VProjet de loi C-33. Présentation et première lecture
VL'hon. David Anderson
VLA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
VProjet de loi C-474. Présentation et première lecture
VM. Inky Mark

. 1010

VLOI SUR LES REFUGES POUR LES ESPÈCES EN VOIE DE DISPARITION
VProjet de loi C-475. Présentation et première lecture
VM. Keith Martin
VPÉTITIONS
VLa pauvreté chez les enfants
VMme Alexa McDonough
VLe projet de loi C-23
VM. Leon E. Benoit
VLes droits des enfants à naître
VM. John O'Reilly
VLes organismes génétiquement modifiés
VMme Madeleine Dalphond-Guiral
VLe développement des ressources humaines
VM. Peter Goldring

. 1015

VLe projet de loi C-23
VM. Eric Lowther
VM. Rick Casson
VLe développement des ressources humaines
VM. Rick Casson
VLe projet de loi C-23
VM. Reed Elley
VM. Ken Epp
VM. Jason Kenney
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Derek Lee
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR LA MODERNISATION DE CERTAINS RÉGIMES D'AVANTAGES ET
VProjet de loi C-23. Troisième lecture
VL'hon. Hedy Fry
VM. John Maloney

. 1020

. 1025

. 1030

VM. Eric Lowther

. 1035

. 1040

. 1045

. 1050

. 1055

. 1100

. 1105

VAmendement
VM. Réal Ménard

. 1110

. 1115

. 1120

. 1125

. 1130

. 1135

. 1140

. 1145

VMme Libby Davies

. 1150

. 1155

VM. Eric Lowther

. 1200

VM. Pat Martin

. 1205

. 1210

VM. Peter Goldring

. 1215

VM. Eric Lowther
VM. Peter MacKay

. 1220

. 1225

. 1230

. 1235

VM. Peter Goldring

. 1240

VM. Eric Lowther

. 1245

VM. Jim Pankiw

. 1250

VL'hon. Hedy Fry

. 1255

. 1300

VL'hon. Ronald J. Duhamel
VL'hon. Jim Peterson

. 1305

. 1310

VM. Eric Lowther

. 1315

VM. Rick Casson

. 1320

. 1325

VL'hon. Hedy Fry

. 1330

VM. Julian Reed
VM. Grant McNally

. 1335

. 1340

VL'hon. Hedy Fry
VM. Lynn Myers

. 1345

VM. John Bryden

. 1350

. 1355

VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
VLe Président
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLES POMPIERS
VM. Gurbax Singh Malhi

. 1400

VLES SOINS DE SANTÉ
VM. Gary Lunn
VLE REGISTRE NATIONAL DES DONNEURS D'ORGANES
VM. Lou Sekora
VLES DOUANES CANADIENNES
VMme Raymonde Folco
VL'ÉDUCATION
VMme Aileen Carroll
VLE PREMIER MINISTRE DU CANADA
VM. Gurmant Grewal

. 1405

VLA HONDA INSIGHT
VM. Paul Bonwick
VUNE VISION DU CANADA
VM. Paul Szabo
VLES DROITS DES CONTRIBUABLES
VM. Rick Casson
VLA JOURNÉE DU LIVRE DU CANADA
VMme Carolyn Parrish
VLES DÉNÉS SAYISIS
VMme Bev Desjarlais
VAÉROPORTS DE MONTRÉAL
VM. Paul Mercier

. 1410

VL'IRAN
VM. Bill Graham
VLE PREMIER MINISTRE DU CANADA
VMme Francine Lalonde
VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Norman Doyle
VLES BÉNÉVOLES
VM. John McKay

. 1415

VL'IRAN
VM. Bill Blaikie
VQUESTIONS ORALES
VREVENU CANADA
VMme Deborah Grey
VL'hon. Martin Cauchon
VMme Deborah Grey
VL'hon. Martin Cauchon
VMme Deborah Grey
VL'hon. Martin Cauchon

. 1420

VM. John Williams
VL'hon. Martin Cauchon
VM. John Williams
VL'hon. Martin Cauchon
VLE MOYEN-ORIENT
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Herb Gray

. 1425

VMme Francine Lalonde
VL'hon. Herb Gray
VMme Francine Lalonde
VL'hon. Herb Gray
VLA SANTÉ
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Allan Rock
VMme Alexa McDonough
VL'hon. Allan Rock
VLE MOYEN-ORIENT
VM. André Bachand

. 1430

VL'hon. Herb Gray
VM. André Bachand
VL'hon. Herb Gray
VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
VM. Monte Solberg
VL'hon. Martin Cauchon
VM. Monte Solberg
VL'hon. Martin Cauchon
VLES JEUNES CONTREVENANTS
VM. Michel Bellehumeur

. 1435

VL'hon. Anne McLellan
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Anne McLellan
VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
VM. Mike Scott
VL'hon. Robert D. Nault
VM. Mike Scott
VL'hon. Robert D. Nault
VLES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1440

VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VLE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL
VM. Leon E. Benoit
VL'hon. Elinor Caplan
VM. Leon E. Benoit
VL'hon. Elinor Caplan
VL'IMMIGRATION
VM. Benoît Sauvageau
VL'hon. Elinor Caplan
VLA FISCALITÉ
VM. Alex Shepherd

. 1445

VL'hon. Paul Martin
VLE SOLLICITEUR GÉNÉRAL
VM. Jim Abbott
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Jim Abbott
VL'hon. Lawrence MacAulay
VL'IMMIGRATION
VM. Pat Martin

. 1450

VL'hon. Elinor Caplan
VLES AFFAIRES AUTOCHTONES
VMme Bev Desjarlais
VL'hon. Robert D. Nault
VLA DÉFENSE NATIONALE
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VMme Elsie Wayne
VL'hon. Arthur C. Eggleton
VLE CONSEIL DU TRÉSOR
VM. Rey D. Pagtakhan
VL'hon. Lucienne Robillard

. 1455

VLE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
VMme Diane Ablonczy
VL'hon. Jane Stewart
VOPTION CANADA
VM. Pierre de Savoye
VL'hon. Lawrence MacAulay
VLE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA
VL'hon. Lorne Nystrom
VL'hon. Paul Martin
VL'IMMIGRATION
VM. David Price
VL'hon. Elinor Caplan
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES

. 1500

VLOI SUR LA MODERNISATION DE CERTAINS RÉGIMES D'AVANTAGES ET
VProjet de loi C-23. Troisième lecture
VM. Eric Lowther

. 1505

VM. Lynn Myers

. 1510

. 1515

VM. Grant McNally

. 1520

VM. Darrel Stinson

. 1525

VM. Daniel Turp

. 1530

. 1535

VM. Eric Lowther
VMme Marlene Catterall

. 1540

VM. Gilles Duceppe

. 1545

. 1550

VMme Karen Redman

. 1555

VMme Marlene Catterall

. 1600

VM. Eric Lowther

. 1605

VM. Chuck Strahl

. 1610

. 1615

VM. Leon E. Benoit

. 1620

VM. Ken Epp

. 1625

. 1630

. 1635

VMme Marlene Catterall
VM. Chuck Strahl

. 1640

VM. Mac Harb

. 1645

. 1650

. 1655

VM. John Bryden

. 1700

VM. Andrew Telegdi

. 1705

VM. Werner Schmidt

. 1710

. 1715

. 1750

(Vote 1276)

VRejet de l'amendement

. 1800

(Vote 1277 )

VAFFAIRES COURANTES
VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VAffaires étrangères et commerce international
VM. Derek Lee
VMotion

. 1805

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES
VLA COMMUNAUTÉ CIRCUMPOLAIRE INTERNATIONALE
VMotion
VMme Bev Desjarlais

. 1810

VM. Peter Adams

. 1815

VMme Francine Lalonde

. 1820

VAmendement

. 1825

VM. Ken Epp

. 1830

. 1835

VM. Ted McWhinney

. 1840

. 1845

VM. Mark Muise

. 1850

VM. Dennis Gruending

. 1855

. 1900

VM. Denis Paradis

. 1905

VMOTION D'AJOURNEMENT
VLa défense nationale
VM. Gordon Earle

. 1910

VM. Robert Bertrand
VL'Iran
VM. Bill Graham

. 1915

VM. Denis Paradis

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 83


CHAMBRE DES COMMUNES

Le mardi 11 avril 2000

La séance est ouverte à 10 heures.



Prière


AFFAIRES COURANTES

 

. 1005 +

[Traduction]

DÉCRETS DE NOMINATION

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il me fait grand plaisir de déposer aujourd'hui à la Chambre, dans les deux langues officielles, des décrets annonçant des nominations faites récemment par le gouvernement.

Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets sont réputés avoir été renvoyés aux comités permanents indiqués en annexe.

*  *  *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 16 pétitions.

*  *  *

COMITÉS DE LA CHAMBRE

INDUSTRIE

Mme Susan Whelan (Essex, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter, dans les deux langues officielles, le quatrième rapport du Comité permanent de l'industrie intitulé «Productivité et prospérité—Pour un Canada compétitif et prospère».

Le Comité permanent de l'Industrie a rencontré plus de 70 témoins afin de discuter de productivité, d'innovation et de compétitivité. Je profite de l'occasion pour remercier toutes les personnes qui ont participé à nos nombreuses audiences et nous ont fait connaître leurs points de vue. Je suis persuadée que la population estimera que ce rapport reflète ses préoccupations ainsi que les valeurs et les priorités chères aux Canadiens dans le contexte d'une économie axée sur la productivité et le changement.

Au nom du comité, je voudrais également remercier notre greffier, Richard Rumas, nos recherchistes, Daniel Shaw et Daniel Brassard, ainsi que les interprètes et le personnel parlementaire pour leur précieuse aide.

M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je profite de l'occasion pour toucher un mot sur report du comité permanent concernant la productivité et l'innovation.

Je dirais que le comité a fait un bon travail en signalant l'histoire des 30 ans de baisse de la productivité au Canada et en brossant un portrait fidèle de la situation actuelle qui reste préoccupante à ce chapitre. Cependant, il n'a pas su expliquer les raisons qui sont responsables de la baisse de la productivité au Canada.

L'opposition officielle croit que le rôle joué par la politique publique pendant toutes ces années constitue un facteur qu'il y a lieu de prendre en considération. Nous pensons que la nouvelle orientation adoptée à la fin des années 1960 et durant les années 1970 en matière de politique gouvernementale a créé les conditions qui ont favorisé une baisse de la productivité au Canada, d'où la nécessité pour nous d'émettre un avis minoritaire.

*  *  *

LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

 

L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

 

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-474, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (proportion des dons déductible de l'impôt).

—Monsieur le Président, c'est un honneur de présenter à la Chambre aujourd'hui mon projet de loi d'initiative parlementaire tendant à modifier la Loi de l'impôt sur le revenu. Il porte plus particulièrement sur la proportion des dons déductible de l'impôt.

Dans la législation fédérale, les oeuvres de bienfaisance enregistrées n'ont pas droit au même traitement que les partis politiques fédéraux. La majorité des Canadiens font en moyenne des dons de 239 $ par année. Si ces dons vont à des organismes de bienfaisance, les donateurs reçoivent un taux de crédit d'impôt moindre que s'ils versaient cet argent à des partis politiques fédéraux. Ce projet de loi vise à supprimer tout avantage dans le cas des dons à des partis politiques.

Jusqu'à maintenant, j'ai reçu des documents d'appui portant plus de 30 000 signatures et un très fort appui de milliers d'organismes de bienfaisance de tout le pays. J'exhorte tous les députés à envisager de souscrire à cette mesure législative extrêmement utile.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

 

. 1010 + -

LOI SUR LES REFUGES POUR LES ESPÈCES EN VOIE DE DISPARITION

 

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-475, Loi visant la création de refuges fauniques pour les espèces en voie de disparition.

—Monsieur le Président, à l'heure actuelle, la situation en ce qui concerne les espèces en voie de disparition au Canada est déplorable. Il y a plus de 300 espèces en voie de disparition au Canada, mais on constate un déclin dans l'habitat si important pour la conservation de ces espèces pour les générations futures.

Ce projet de loi prévoit que les espèces en question devront être définies par un groupe de scientifiques sous les auspices du Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada. Il prévoit la protection des habitats en obligeant le gouvernement fédéral à se lancer dans des négociations avec les propriétaires fonciers privés et les provinces. Si les négociations n'aboutissent pas, le terrain en question pourrait être alors exproprié pour être transformé en un refuge faunique pourvu que les groupes visés soient indemnisés de façon appropriée en obtenant pour leur terrain sa juste valeur marchande. Enfin, le projet de loi prévoit que les gens qui possèdent des terrains où on retrouve des habitats critiques pour des espèces peuvent avoir droit à des avantages aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Ce projet de loi permettra dans une large mesure de protéger nos espèces en voie de disparition pour que les générations futures puissent en profiter.

(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*  *  *

PÉTITIONS

LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui à la Chambre une pétitons signé par environ 700 Canadiens, pour la plupart de ma circonscription mais aussi d'autres régions du pays.

Les pétitionnaires rappellent au gouvernement l'engagement qu'il a pris de travailler avec les parlementaires à l'élimination de la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. Ils se disent extrêmement préoccupés face à l'augmentation spectaculaire et alarmante de la pauvreté chez les enfants et demandent au gouvernement de remplir sa promesse et de mettre en place un plan pluriannuel en vue d'éliminer la pauvreté chez les enfants au Canada.

LE PROJET DE LOI C-23

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition venant comme d'autres de milliers de Canadiens.

Les pétitionnaires font remarquer qu'il existe des preuves empiriques de l'importance du mariage en tant que pierre angulaire de la politique gouvernementale, que le mariage procure des avantages tangibles et que le Parlement a réaffirmé que le mariage est et devrait demeurer l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de tout autre union. Malgré cela, le gouvernement a présenté le projet de loi C-23 qui étend les avantages que procure le mariage aux couples homosexuels. Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de retirer le projet de loi C-23 avant son adoption aujourd'hui.

LES DROITS DES ENFANTS À NAÎTRE

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition venant de certains habitants de Haliburton—Victoria—Brock. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'intervenir immédiatement pour étendre l'application du Code criminel à l'enfant à naître de sorte que celui-ci jouisse de la même protection que les autres êtres humains.

[Français]

LES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, il me fait plaisir de déposer une pétition appuyée par 128 signataires. Les pétitionnaires demandent instamment au Parlement d'adopter rapidement une législation qui rendrait obligatoire l'étiquetage de tous les aliments qui sont en totalité ou en partie génétiquement modifiés.

[Traduction]

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition venant de plus de 400 Canadiens, pour la plupart de la province de l'Alberta.

Les pétitionnaires demandent au premier ministre de tenir sa promesse concernant la responsabilité ministérielle. Ils réclament la démission de la ministre du Développement des ressources humaines et demandent au vérificateur général de procéder à une enquête détaillée et indépendante sur les méthodes de gestion et de comptabilité du ministère du Développement des ressources humaines.

 

. 1015 + -

LE PROJET DE LOI C-23

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je désire également présenter une pétition. Les pétitionnaires se joignent à environ 4 000 autres qui ont présenté des pétitions depuis une semaine. Nous en recevons tous les jours sur ce sujet.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de retirer le projet de loi C-23, de confirmer dans la loi la définition du mariage comme l'union de personnes de sexes opposés et de faire en sorte que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions à présenter aujourd'hui sur deux sujets différents. La première constitue trois pétitions distinctes.

Les pétitionnaires, qui habitent ma circonscription, demandent que le Parlement retire le projet de loi C-23. Ils disent qu'un projet de loi qui ne définit pas le mariage comme l'union entre un homme et une femme, définition que la Chambre a confirmée le 8 juin 1999, constitue une intrusion dans la vie privée des Canadiens et accorde des avantages uniquement à des personnes qui ont des relations sexuelles. Ils voudraient que le projet de loi soit retiré.

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais présenter une autre pétition, conformément à l'article 36 du Règlement.

Les pétitionnaires estiment que les Canadiens paient trop d'impôts. Ils exigent donc que le gouvernement fédéral rende compte de la mauvaise gestion flagrante, à DRHC, de l'argent provenant de leurs impôts. Ils demandent également que la ministre de DRHC démissionne immédiatement et que le vérificateur général mène une enquête complète et indépendante sur les pratiques de gestion et de comptabilité à DRHC.

LE PROJET DE LOI C-23

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter au Parlement une pétition portant la signature de centaines de Canadiens du Nouveau-Brunswick, du Québec, de l'Ontario, du Manitoba et de l'Alberta.

Les pétitionnaires se joignent à des milliers d'autres Canadiens pour demander au gouvernement de bien vouloir retirer le projet de loi C-23, de préciser que le mariage est défini comme une union entre personnes de sexes opposés et de veiller à ce que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai moi aussi l'honneur de déposer une pétition.

La pétition est intéressante en ce qu'elle porte la signature de personnes du Nouveau-Brunswick, du Québec, de la région d'Ottawa, du Manitoba et de Calgary. Les signataires sont d'un peu partout au Canada.

Comme pour les autres pétitions déjà déposées, les pétitionnaires demandent instamment au Parlement de retirer le projet de loi C-23 qui va à l'encontre de tout ce en quoi ils croient.

M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais déposer à mon tour une pétition signée par une centaine d'Albertains et d'Ontariens qui s'opposent au projet de loi C-23, à l'instar des dizaines de milliers de personnes qui demandent au gouvernement de retirer le projet de loi en cause et de protéger l'institution du mariage.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que les autres questions restent au Feuilleton.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LA MODERNISATION DE CERTAINS RÉGIMES D'AVANTAGES ET D'OBLIGATIONS

 

L'hon. Hedy Fry (au nom de la ministre de la Justice et procureur général du Canada) propose que le projet de loi C-23, Loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les lois du Canada, soit lu une troisième fois et adopté.

M. John Maloney (secrétaire parlementaire du ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi C-23, Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

Je tiens d'abord à remercier mes collègues, les membres du Comité permanent de la justice et des droits de la personne, pour leur excellent travail. Je désire également remercier tous les témoins, les particuliers et les organismes qui ont pris le temps d'étudier avec soin le projet de loi et de comparaître devant le comité ou de présenter un mémoire au sujet du projet de loi C-23. Leur travail est très important dans ce processus, et je les remercie du temps qu'ils y ont consacré et de leur apport utile.

Le projet de loi C-23 modifiera 68 lois afin de veiller à ce que les couples hétérosexuels et homosexuels de fait soient traités également en vertu de la loi en ce qui concerne les avantages et les obligations. Comme la ministre de la Justice l'a maintes fois répété, cette mesure législative en est une de tolérance et d'équité.

 

. 1020 + -

Grâce à ce projet de loi, nous respectons les valeurs fondamentales inhérentes à la Charte canadienne des droits et libertés. Le gouvernement et la majorité des Canadiens estiment que tous les couples de fait qui vivent dans une relation d'engagement devraient être traités sur le même pied. Le projet de loi C-23 est le reflet de cette réalité.

Permettez-moi d'abord d'examiner les points les plus complexes et la mésinformation entourant le projet de loi C-23. Des députés et des témoins ayant comparu devant le comité permanent ont laissé entendre que le projet de loi C-23 ne va pas assez loin et que les avantages et obligations devraient non seulement être étendus aux couples homosexuels, mais aussi à toutes les personnes entretenant une relation de dépendance. J'insiste cependant sur le fait que le projet de loi C-23 n'empêche pas la tenue d'un débat, qui a déjà débuté, visant à déterminer s'il y a lieu de reconnaître ou non la nature et la réalité des nombreux genres de relations de dépendance.

Le gouvernement reconnaît que c'est une question importante qui mérite d'être approfondie. C'est pourquoi la ministre de la Justice a déjà annoncé que ce dossier sera renvoyé à un sous-comité parlementaire.

Le mandat de ce sous-comité sera d'examiner quatre grandes catégories de questions. Premièrement, le gouvernement canadien devrait-il revoir la base sur laquelle les avantages et les obligations sont déterminés? Deuxièmement, quels sont les objectifs d'ensemble de la politique sociale du Canada que les avantages et les obligations devraient appuyer? Troisièmement, si la dépendance économique ou l'interdépendance affective et économique constitue la base la plus appropriée à partir de laquelle accorder des avantages et imposer des obligations à la société canadienne, comment la définir et la mesurer? Quatrièmement, devrait-on répartir tous les avantages et toutes les obligations sur cette base, ou seulement certains, le cas échéant?

Ces questions sont très théoriques et représentent la première étape de cette étude qui fixera le cadre et les principes de toute étude future sur la question de la dépendance.

Comme il a été dit pendant les audiences du comité, la Commission du droit du Canada étudie le sujet de la dépendance et de l'interdépendance depuis quelque temps et devrait publier un document de réflexion sur ces questions au début de l'été. Ces importantes questions sont réellement à l'étude et les travaux progressent.

Le vaste sujet de la dépendance est complexe et différent de l'objet du projet de loi C-23. Je me rends compte que beaucoup de gens sont frustrés par ce qu'ils considèrent comme un retard de plus dans ce dossier qui est connexe, mais toutefois différent. Cependant, le gouvernement est fermement convaincu qu'il serait prématuré et irresponsable d'étendre les avantages et, plus particulièrement, d'imposer des obligations à ces relations de dépendance plus générales sans en étudier de très près toutes les répercussions sur la société.

Bien que certaines lois fédérales étendent déjà des avantages et des obligations à certaines personnes dans une relation de dépendance, nous devons en savoir plus là-dessus. Nous devons connaître les coûts financiers ainsi que les inconvénients possibles pour les personnes âgées et les handicapés, et nous devons savoir si les Canadiens seraient même prêts à accepter des obligations légales pour les membres de leur famille et d'autres, avant de pouvoir déterminer s'il serait approprié d'inclure de telles relations dans toutes les lois.

Un certain nombre de Canadiens adultes habitent actuellement avec des parents âgés, des frères et soeurs ou d'autres membres de leur famille. L'application des prestations et obligations à tous ces gens aurait des conséquences considérables sur les individus et la société dans son ensemble. Les prestations liées à la relation de dépendance seraient probablement accueillies très favorablement, mais on ne sait pas très bien si les obligations légales qui les accompagnent devraient être imposées à ces individus ou aux membres de leur famille avec lesquels ils habitent.

Par exemple, l'admissibilité au supplément de revenu garanti en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse est déterminée sur la base de la combinaison du revenu des deux personnes, ce qui pourrait entraîner une baisse des prestations pour certaines personnes âgées qui vivent avec des enfants adultes ou d'autres membres de leur famille. Autre exemple: si un adulte vit avec un de ses parents âgés pendant de nombreuses années, puis qu'il part pour se marier, les crédits du Régime de pensions du Canada pourraient alors être partagés entre le parent et son fils ou sa fille, comme c'est actuellement le cas après un divorce.

Des changements prématurés peuvent avoir des conséquences inattendues. Le gouvernement doit faire attention et faire preuve de responsabilité, lorsqu'il procède à des changements, afin que le système encourage les gens à prendre soin les uns des autres plutôt que de les décourager de le faire. Nous devons veiller attentivement à ce que les changements apportés à la loi ne constituent pas des barrières pour les gens qui souhaitent prendre soin les uns des autres.

Bien que les questions plus complexes qui entourent les questions plus larges des relations de dépendance doivent être réglées, on ne peut pas laisser ce travail retarder davantage les questions abordées dans le projet de loi C-23. Comme l'a dit la Commission du droit du Canada lorsqu'elle a comparu devant le comité:

    Nous croyons tout aussi fermement que des dispositions législatives comme celles proposées dans le projet de loi C-23 méritent d'être adoptées dès maintenant. Autant nous croyons fermement à la nécessité que le Parlement s'efforce d'adopter des dispositions législatives somme toute «les meilleures», il y a des occasions—dont celle-ci—où il se doit de procéder à l'adoption de dispositions législatives qui sont, sur le plan constitutionnel, somme toute «bonnes».

 

. 1025 + -

Les députés d'en face ont aussi prétendu que le projet de loi C-23 détruira l'institution du mariage ou permettra l'adoption par les couples de même sexe. La ministre de la Justice a répété que ce projet de loi ne porte par sur le mariage. Il porte sur le traitement égal en vertu des lois fédérales de tous les couples en union libre, qu'ils soient de sexe opposé ou du même sexe.

Néanmoins, le gouvernement a été à l'écoute des préoccupations de nombreux Canadiens, dont certains dans ma circonscription, qui avaient besoin qu'on leur assure que l'institution fondamentale du mariage ne serait modifiée d'aucune façon par ce projet de loi. J'ai proposé un amendement à l'étape de l'étude en comité pour donner cette garantie aux Canadiens. L'article 1.1 du projet de loi C-23 se lit maintenant comme suit:

    Il demeure entendu que les modifications que la présente loi apporte ne changent pas le sens du terme «mariage», soit l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne.

Cet amendement répond aux nombreuses questions qui ont été posées aujourd'hui et aux pétitions qui ont été présentées. Même si certains ont prétendu que cet amendement n'a aucun effet juridique, moi-même et d'autres députés de ce côté-ci ne sommes pas d'accord. Cet amendement affirme clairement que le gouvernement tient à ce que le mariage conserve la signification juridique qu'on lui a toujours donnée au Canada.

Pour ce qui est du fait que le projet de loi permettra l'adoption par les conjoints de même sexe, je tiens à signaler encore une fois que l'adoption est régie par les lois provinciales. Ce sont les provinces qui prennent les décisions à cet égard. Les dispositions sur l'adoption dans le projet de loi C-23 ne visent qu'à faire en sorte que les enfants adoptés conformément aux lois provinciales seront assujettis à la loi fédérale.

C'est là un aspect du projet de loi C-23 dont on n'a pas beaucoup parlé au cours des débats, mais que je considère important. Le projet de loi C-23 modifie plusieurs lois fédérales pour garantir que les enfants ne font pas l'objet de discrimination, à la fois en incluant les enfants adoptés dans les quelques lois qui ne le prévoyaient pas déjà et en faisant disparaître les dernières références à l'illégitimité pour que tous les enfants soient pris en compte dans la loi fédérale.

Nous avons également entendu toute une série de commentaires contradictoires en provenance de l'autre côté. Tout d'abord, on a dit que le gouvernement n'avait présenté ce projet de loi que parce que les tribunaux l'avaient forcé à le faire malgré les objections des Canadiens. Deuxièmement, on a dit que ce projet de loi était inutile parce qu'il allait plus loin que ce que la Cour suprême exige. À cela, j'aimerais répondre que la raison pour laquelle le gouvernement a déposé ce projet de loi à ce moment-ci, c'est que c'était la chose à faire.

Les gouvernements doivent représenter tous les citoyens, qu'ils fassent partie de la majorité ou, plus important encore, de la minorité. Je suis heureux d'être membre d'un parti politique qui croit que le gouvernement a la responsabilité de préserver les intérêts de la majorité et des diverses minorités qui composent le Canada et qui en tient compte dans ses principales politiques.

Dans la décision qu'elle a rendue dans la cause M. c. H. en mai 1999, la Cour suprême du Canada a souligné que les gouvernements ne peuvent continuer d'exercer une discrimination à l'égard des partenaires de même sexe qui vivent en union de fait en leur refusant les droits et obligations dont jouissent les couples hétérosexuels. Tous les couples non mariés vivant en union de fait, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels, doivent avoir les mêmes droits et obligations.

Toutefois, même si c'est la Cour suprême qui a établi les critères de base en précisant que les couples homosexuels vivant en union de fait doivent être inclus dans la loi, rôle qui lui revient en vertu de la Constitution, c'est au gouvernement qu'incombe la responsabilité de décider quelles modifications doivent être apportées à la loi pour assurer ce traitement égal. C'est pourquoi le projet de loi C-23 repose sur une approche à la fois responsable et équilibrée, en maintenant une distinction juridique claire entre les couples mariés et les unions de fait.

Les tribunaux nous ont dit que la loi devait traiter sur un pied d'égalité les conjoints de fait, qu'ils soient de même sexe ou de sexes opposés, et c'est l'objectif que vise la mesure législative à l'étude. Le projet de loi emploie une terminologie claire, en appliquant le terme «époux» aux couples mariés et la nouvelle expression «conjoint de fait» aux conjoints de fait de même sexe ou de sexes opposés. Cela permet de préserver la distinction juridique entre les couples mariés et les couples non mariés.

À défaut d'une mesure législative comme ce projet de loi, les tribunaux continueront de traiter le problème à la pièce, en se concentrant sur les cas limités qui leur seront soumis. Le statu quo n'est pas envisageable. Il engendrera confusion, injustice et perpétuera les litiges coûteux, sans compter qu'il risque de faire des tribunaux les arbitres de la politique sociale.

Enfin, les modifications à la Loi sur les juges contenues dans le projet de loi C-23 ont été renvoyées à la commission de la rémunération et des avantages judiciaires, pour fins d'examen et de recommandations, conformément à la Loi sur les juges. Je suis heureux d'annoncer que la commission, qui est un organisme indépendant et mandaté en vertu de la Constitution, a informé le gouvernement qu'elle appuie les modifications à la Loi sur les juges qui sont conformes aux modifications que le projet de loi apporte aux autres lois.

 

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Dans son rapport, déposé à la Chambre des communes le 30 mars, la commission observe que les modifications à la Loi sur les juges répondent de façon satisfaisante aux questions entourant les prestations de pension aux conjoints survivants. Le rapport souligne que les règles de répartition assurent un moyen satisfaisant de régler les différends dans les quelques cas où il pourrait y avoir plus d'un survivant, un conjoint marié légalement séparé et un conjoint de fait subséquent.

Peut-être plus importants encore sont l'observation de la commission selon laquelle les modifications sont importantes et opportunes dans la mesure où elles permettront de se conformer à la Charte canadienne des droits et libertés et sa recommandation d'adopter les modifications le plus rapidement possible. Nous savons gré à la commission d'avoir examiné ces questions attentivement et d'avoir présenté son rapport au bon moment.

En conclusion, le projet de loi C-23 vise à assurer égalité et respect des gens. Il propose une façon responsable et équilibrée de remédier à une discrimination de longue date contre les conjoints de même sexe et d'assurer un traitement égal aux conjoints de fait de même sexe et de sexes opposés, tout en préservant l'importance fondamentale du mariage.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour participer au débat de troisième lecture du projet de loi C-23.

Au cours de l'étude du projet de loi à la Chambre et au comité, j'ai pu exprimer mon point de vue quatre fois. Je ne crois pas qu'il serait utile à la Chambre, ni à vous, monsieur le Président, que je revienne trop largement sur ce dont j'ai traité longuement.

Le compte rendu d'hier fait ressortir avec quelque détail les dix excellentes raisons pour lesquelles l'opposition, qui a présenté de solides arguments en ce sens, estime que le projet de loi C-23 devrait être retiré. Nous avons exprimé nos vues et présenté des amendements pour améliorer le projet de loi. Hier soir, malheureusement, ces amendements ont été rejetés, à l'exception de quelques-uns proposés par les députés ministériels.

Le député d'en face a parlé de la définition du mariage que la ministre de la Justice, cédant aux pressions du public, a ajoutée au projet de loi C-23. Oui, nous lui sommes reconnaissants de cet amendement.

Ce qui me dérange, c'est la définition de conjoint de fait. Le projet de loi le définit comme une personne qui vit dans une relation conjugale avec une personne de même sexe ou de sexe différent pendant un an. Cette définition est reprise dans toutes les lois visées par le C-23. Pourtant, les libéraux ont refusé d'inscrire dans ces mêmes lois une définition de mariage et de conjoint. Ils ajoutent cette définition au début du projet de loi, mais elle ne se retrouvera pas dans toutes les lois modifiées. Lorsque quelqu'un consultera la Loi de l'impôt sur le revenu ou la Loi sur le partage des prestations de retraite, par exemple, il n'y trouvera aucune définition du mariage. Mais il y trouvera assurément une définition du conjoint de fait.

Dans nos amendements, nous avons demandé au gouvernement de rendre cette définition du mariage vraiment substantielle pour qu'elle ait un effet juridique, car les tribunaux seront bientôt saisis de causes visant à contester la définition du mariage. Nous soutenions que, si nous pouvons l'incorporer dans la loi, il faut le faire. Nous réclamions en effet de l'incorporer dans toutes les lois concernées.

Malheureusement, les libéraux ont choisi de laisser cette définition hors de ces lois et de l'inscrire plutôt au début de la mesure à l'étude. De l'avis d'un grand juriste, David Brown, un avocat du cabinet Stikeman Elliott, de Toronto, qui a étudié les précédents judiciaires et les ouvrages de droit à ce sujet, la façon dont le gouvernement a procédé aurait peu d'effet juridique sinon aucun quand les tribunaux seront saisis de ces causes. Le gouvernement aurait dû au contraire adopter l'approche que l'Alliance canadienne a préconisée et inscrire de façon substantielle la définition du mariage dans la loi canadienne.

Pourquoi est-ce si important? C'est parce que cela adresserait de la part des Canadiens un message clair aux tribunaux, à savoir que le mariage doit demeurer l'union d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre définition.

 

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Il est troublant de constater que le gouvernement propose un amendement pour apaiser les inquiétudes des Canadiens. Nous avons entendu les milliers de pétitions présentées ici à la Chambre à ce sujet, probablement plus de 10 000 maintenant, qui nous ont été adressées en peu de temps à propos du projet de loi. Nous trouvons préoccupant que le gouvernement tente de calmer ces Canadiens inquiets en apportant au projet de loi C-23 un amendement de pure façade. D'après les paroles que le député libéral de Scarborough-Est a employées pour en parler, il s'agit d'un amendement fantôme qui va flotter au-dessus de tout ça et qui n'aura aucun effet réel. Les Canadiens pensent que l'amendement aura un effet, mais ils ont été induits en erreur par le gouvernement libéral.

Il aurait été plus facile de croire le gouvernement s'il avait adopté les amendements proposés par l'Alliance canadienne et inscrit directement la définition du mariage dans les toutes les lois visées. Il est troublant de le voir tromper ainsi les Canadiens et laisser croire aux pétitionnaires qu'il a pris une mesure positive, alors que ce n'est pas le cas.

Ce projet de loi présente des problèmes importants qui donneront lieu à des complications au moment de la mise en oeuvre et dont j'ai déjà parlé. C'est le cas notamment du terme que le gouvernement a ajouté dans la définition de conjoint de fait. En fait, ce terme est le critère d'admissibilité au régime d'avantages et d'obligations auquel ont droit actuellement ceux qui sont mariés et qui élèvent une famille. Ce critère s'appliquant aux couples homosexuels est le fait qu'ils vivent dans une relation conjugale.

Eh bien, c'est tout un terme. La loi renferme toutes sortes de termes, mais une définition y est habituellement inscrite pour que ceux qui s'y reportent comprennent clairement qui était visé ou non par la mesure législative au moment de son adoption par la Chambre.

Nous avons maintes fois demandé qu'une définition soit incluse dans le projet de loi C-23. Le gouvernement s'y est opposé. Au comité et ailleurs, il a répondu que les tribunaux savent ce qu'est une relation conjugale. Est-ce une réponse? Autrement dit, il faudra s'adresser aux tribunaux pour déterminer si une personne vit vraiment dans une relation conjugale qui lui donne droit à tout le régime d'avantages et d'obligations.

Voyons un peu à quel point c'est illogique. Prenons deux personnes qui vivent ensemble, on peut supposer qu'elles vivent dans une relation conjugale et constater par la suite que ce n'est pas le cas; par contre, on peut penser qu'elles ne vivent pas dans une relation conjugale alors que c'est le cas. La confusion, les affaires judiciaires, les contestations, ce qui arrive aux avantages, les obligations au décès, le projet de loi ne répond pas clairement à toutes ces questions.

Ce qui me trouble le plus, c'est que les députés d'en face, qui sont de bons députés, qui ont des enfants et une famille, ou qui sont mariés, savent que c'est là une lacune fondamentale du projet de loi; ils le savent. Et pourtant, hier soir, pour les amendements à l'étape du rapport, nous avons vu que, même si les députés savent que ce sont là des faiblesses fondamentales du projet de loi, ils vont faire ce que leur disent de faire le premier ministre et le Cabinet et voter en faveur d'un projet de loi qui est aussi tragiquement insuffisant. C'est ce qui me trouble le plus, que des femmes et des hommes bons ne prennent pas la parole pour défendre ce qu'ils savent juste, pour contester ce qu'ils savent injuste et remplir les obligations qu'ils ont promis à leurs électeurs de remplir, il y a quelques années, lorsqu'ils ont été élus à la Chambre.

Ce n'est pas la première fois que nous voyons le gouvernement libéral aller dans la direction que leur indiquent soit les tribunaux, soit des groupes de pression. Le présent gouvernement libéral a pris une kyrielle de décisions qui ont été néfastes pour la famille canadienne. Je ne peux pas le dire autrement, sinon que les politiques du gouvernement libéral nuisent effectivement à la famille canadienne.

En voici quelques-unes. Je crois que cela a à voir avec le projet de loi C-23, car cela montre une constante chez le présent gouvernement libéral.

 

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Par exemple, il y a un an environ, le secrétaire parlementaire du ministre des Finances a fait à la Chambre une déclaration selon laquelle les parents qui restent à la maison ne travaillent pas autant que ceux qui ont un emploi. Cette déclaration a provoqué un tollé dans tout le pays. Les familles du pays qui s'occupent de leurs enfants à la maison ont protesté. Il y a eu des rétractations qui se sont traduites par toutes sortes d'activités, et ensuite des questions ont été posées à cet égard.

En fait, en raison des pressions exercées par le public et des motions présentées par l'Alliance canadienne au sujet de l'iniquité du traitement fiscal accordé aux parents qui restent à la maison ou aux familles à revenu unique, le ministre des Finances a été forcé de créer un comité spécial pour examiner la question de l'équité fiscale.

Le comité spécial a siégé pendant quelques mois et a entendu des témoins, comme le veut le processus des comités; il a par la suite déposé un rapport dans lequel il est dit qu'il y a, dans le traitement fiscal des familles, des iniquités fondamentales qui font en sorte qu'il est plus difficile pour les parents de consacrer du temps à leurs enfants. En fait, le régime fiscal les encourage plutôt à confier leurs enfants à des garderies et à entrer dans la population active. Le comité a recommandé des modifications à cet égard.

Il y a quelques semaines, le budget a été présenté. Les recommandations du comité n'y figurent pas. Nous avons tout fait. Nous avons fait des recommandations par le truchement du comité spécial pour supprimer les effets antifamiliaux des politiques fiscales libérales. Certaines de ces recommandations étaient valables, mais aucune d'entre elles n'a été mise en oeuvre.

Passons maintenant à autre chose. C'est de loin la question qui a suscité le plus grand nombre de pétitions que nous ayons reçues à la Chambre au cours de la 36e législature. Bien des gens qui ne se sont jamais occupés de politique ont voulu intervenir à ce sujet. Nous dépassons le demi-million de signatures. Je crois que nous atteindrons le million avant que la question ne soit résolue. Des piles de pétitions arrivent encore à mon bureau. Ceux qui nous écoutent reconnaîtront peut-être que c'est la triste décision d'un tribunal de la Colombie-Britannique qui a aboli l'illégalité de la possession de pornographie juvénile. Rien que d'entendre ces mots, c'est déjà choquant. Les pétitionnaires de tout le pays demandent que cette décision soit renversée et que la loi soit maintenue afin qu'il soit illégal de posséder ce genre de matériel.

L'Alliance canadienne a présentée à la Chambre une motion que quelque 70 députés d'en face avaient appuyée au départ. J'ai demandé au gouvernement d'employer la clause de dérogation pour maintenir la loi et ne pas laisser un tribunal abolir ainsi une loi qui protégeait les enfants et rendait illégal ce genre de matériel déplorable. Malheureusement, seulement quatre de ces députés ont tenu bon. Les autres ont rompu leur engagement et ont voté selon la discipline de parti, conformément au vote imposé par le premier ministre. La motion que nous avions présentée pour maintenir la loi protégeant les enfants a été défaite par les libéraux. Ils l'ont reportée en disant qu'il fallait laisser les tribunaux trancher la question, qu'ils iraient en appel et que tout serait réglé dans les deux mois.

Les députés savent-ils combien de mois se sont écoulés depuis? Il y près d'un an et demi que le tribunal a aboli la loi qui rendait la possession de pornographie juvénile illégale en Colombie-Britannique. Que s'est-il passé depuis? Les causes ont été reportées à plus tard. Les poursuites judiciaires n'ont pas été entendues. L'affaire de la Colombie-Britannique est citée dans d'autres provinces et a des répercussions sur les poursuites à ce sujet. Un an et demi s'est écoulé, et rien n'est encore réglé.

Nous avions à la Chambre un outil nous permettant de résoudre cette question. Nous avions la disposition d'exemption. Celle-ci fait partie de la Charte, elle n'est pas séparée de cette dernière. Cette disposition existe pour qu'on s'en prévale. Cependant, au lieu d'utiliser l'outil dont il disposait, un outil législatif conféré par la Charte, le gouvernement a préféré ne pas s'en prévaloir, il a préféré s'en remettre aux tribunaux, placer nos enfants dans une situation risquée et rendre légal cet épouvantable matériel.

Ce n'est pas tout. Le projet de loi C-23 s'inscrit dans une tendance que nous constatons chez le gouvernement libéral. Voici un autre exemple.

 

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J'ai fait partie d'un comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat qui a été constitué à la suite des énormes pressions que le public a exercées et des vives inquiétudes qu'il a exprimées au sujet du droit de la famille, de la Loi sur le divorce, des problèmes concernant la garde des enfants et l'accès à ces derniers, parce que l'approche adoptée par les tribunaux ainsi que les lignes directrices établies par le gouvernement libéral sont inefficaces. Elles sont inefficaces lorsqu'il est question de garde d'enfants, d'accès et de pension alimentaire lors d'une rupture conjugale.

C'est essentiellement à la suite des pressions exercées par un sénateur en particulier que le comité a été formé, et j'ai eu le privilège d'en faire partie. Le gouvernement a dépensé environ 600 000 $ pour financer les travaux du comité.

Nous sommes allés dans diverses régions du Canada. Nous avons entendu des Canadiens d'un océan à l'autre raconter leur triste histoire et expliquer comment leur relation s'est détériorée au point où ils se sont retrouvés devant les tribunaux. Dans certains cas, il semble que les avocats avaient aggravé la situation et que les deux parties au litige étaient en train de dépenser tout leur argent et de s'endetter pour essayer de résoudre ces conflits familiaux. Les enfants étaient les otages de tels conflits. Parfois, les témoignages étaient douloureux à entendre. Il est arrivé à quelques reprises que les interprètes qui accompagnaient le comité doivent sortir de la cabine d'interprétation parce qu'ils étaient en larmes et ne pouvaient continuer d'assurer les services d'interprétation.

Beaucoup d'argent a été dépensé. De nombreux témoignages ont été entendus. Cet important comité a travaillé d'arrache-pied pendant un an. Il a finalement produit un rapport qui contenait d'excellentes recommandations applicables, dont bon nombre avaient l'aval de l'opposition officielle. Notre rapport dissident était très bref.

Quelle a été la réponse du gouvernement libéral lorsqu'il a reçu ce rapport? Allait-il le mettre en oeuvre? Est-ce que c'était une priorité pour le gouvernement? La réponse du ministre de la Justice de l'époque a été de dire que le gouvernement voulait l'examiner plus en détail et qu'il faudrait probablement trois ans de plus avant qu'on y donne suite. Cela dit aux Canadiens que ce n'est pas une priorité de régler cette question.

Quel message le gouvernement transmet-il aux Canadiens avec le projet de loi C-23 quant à sa principale priorité? On a appliqué la clôture au projet de loi C-23 en deuxième lecture après quatre heures de débat seulement. Après trois jours et demi de délibérations au comité, alors que de nombreuses personnes qui souhaitaient comparaître devant le comité n'ont pu le faire, on applique à nouveau la clôture à l'étape de la troisième lecture. On va adopter cette mesure à toute vapeur alors qu'elle touche 68 lois et modifie fondamentalement certaines de nos normes et structures sociales.

Le gouvernement n'a pas donné suite au rapport sur la garde et le droit de visite des enfants. On attend encore. Je reçois encore des lettres de gens qui se demandent quand il y aura une réforme du droit de la famille comme on l'a recommandé dans le rapport du comité mixte de la Chambre des communes et du Sénat sur la garde et le droit de visite des enfants auquel j'ai siégé. Que puis-je dire à ces gens? Je les invite à continuer d'écrire à la ministre de la Justice pour lui faire connaître leurs préoccupations.

En fin de compte, je n'ai pas beaucoup d'espoir, car nos vis-à-vis ne portent qu'un intérêt de façade aux enfants. De temps à autre, ils parlent de la famille. On a beaucoup parlé de la famille et des enfants dans le discours du Trône, mais lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre des mesures concrètes qui aident les familles à conserver l'argent qu'elles gagnent, qui protègent les enfants et qui favorisent la réussite des mariages, le gouvernement n'est pas là. Il ne fait pas ce qu'il faut.

En ce qui concerne les questions de justice, il y a la Loi sur les jeunes contrevenants. Qui a exercé des pressions et a réclamé qu'on modifie la Loi sur les jeunes contrevenants? L'opposition officielle. Un membre de notre parti, un député de la Colombie-Britannique, a présenté un certain nombre d'amendements importants et a exercé des pressions sur le gouvernement pour qu'il agisse. Enfin, les choses commencent à bouger, même si on craint que là encore, ce ne soit que de la poudre aux yeux et qu'il n'y ait pas de changements de fond.

Dans certains cas, le gouvernement permet qu'une libération conditionnelle soit accordée à des délinquants sexuels reconnus, qui sont alors libérés dans nos collectivités. Les familles et les collectivités ne sont pas au courant du danger auquel elles risquent d'être confrontées.

 

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Je pourrais poursuivre ainsi bien longtemps, mais le message que je veux transmettre à la Chambre, c'est qu'il y a toute une série de...

M. Lou Sekora: J'invoque le Règlement, monsieur le Président. J'écoute le député et il semble s'écarter du sujet. Il parle de tout sauf du projet de loi et j'aimerais bien qu'il y revienne.

Le vice-président: Je sais que le député de Calgary-Centre arrive au sujet du projet de loi. Il juge apparemment que certaines questions entourent ce projet de loi et que les gestes posés par le gouvernement dans certains secteurs ont une incidence sur celui-ci. Je crois que c'est ce qu'il tente d'établir et je sais qu'il arrivera bientôt aux dispositions du projet de loi C-23.

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, comme d'habitude, vous avez tout compris. J'établis un lien entre tous les exemples que j'ai cités à la Chambre des communes et je pourrais en présenter encore davantage. Par considération pour mon vis-à-vis, qui craint que je ne m'écarte du sujet, je m'imposerai des limites et ne parlerai pas des nombreux exemples de mesures anti-famille prises par le gouvernement libéral.

Comme vous le disiez, monsieur le Président, ce que j'essaie de faire comprendre au député, c'est que, en matière d'imposition, de protection de l'enfance, de réforme du droit et de droit de la famille, le parti auquel le député appartient affaiblit constamment la famille canadienne. Je demande au député de réfléchir au fait qu'il faut modifier ces politiques.

Le gouvernement du Canada devrait promouvoir des politiques qui reflètent l'important travail que les parents font. Ce sont eux qui élèvent la prochaine génération. Ils forment le caractère des futurs citoyens du Canada et leur inculquent leurs valeurs, dont l'intégrité. Le message que doit leur envoyer la politique gouvernementale, c'est qu'ils font le travail le plus important dans le pays, soit élever la prochaine génération. Malheureusement, l'approche anti-famille du gouvernement libéral mine le rôle des parents. L'opposition officielle a proposé de nombreuses initiatives visant justement à renverser cette approche.

C'est une des raisons qui font du projet de loi C-23 une source de préoccupation pour nous. Il semble que le gouvernement libéral tienne absolument à accorder les avantages aux conjoints de même sexe, que ce soit là sa plus grande priorité, même à la lumière des préoccupations exprimées à la Chambre à l'égard de l'équité fiscale pour les familles. Nous avons reçu d'innombrables pétitions, non seulement après la présentation du projet de loi C-23, mais aussi avant sa présentation. Depuis des années, les Canadiens d'un bout à l'autre du pays demandent au gouvernement et à la Chambre de définir le mariage dans une loi, de ne pas l'exposer aux caprices des tribunaux. Il veulent que le mariage soit défini clairement dans une loi, non pas dans une loi fantôme comme le projet de loi C-23, mais directement dans les vraies lois.

Les Canadiens ont présenté des pétitions à la Chambre au sujet de la pornographie juvénile, de la réforme du droit de la famille et ainsi de suite. L'opposition officielle a demandé une approche fondée sur la garde partagée des enfants. Nous avons demandé le recours à la disposition de dérogation, qui fait partie de la charte, pour protéger les enfants. Nous avons même proposé des améliorations à la Loi sur les jeunes contrevenants pour protéger les enfants contre les jeunes contrevenants violents et pour voir à ce que les contrevenants non violents reçoivent les traitements nécessaires pour pouvoir ensuite réintégrer la société une fois que les réformes pertinentes auront été faites.

Nous avons toujours dit qu'il fallait laisser l'argent et les choix aux parents lorsqu'il est question d'élever leurs enfants. Je siège à un autre comité de la Chambre qui étudie la question des enfants et des jeunes à risque. Ce comité propose l'établissement d'un programme national de garderies de 7,8 milliards de dollars. Quel argent servira à financer ce programme national de garderies? L'argent gagné par les mères et les pères qui essaient d'élever leurs familles. Ils ne veulent peut-être pas avoir accès à un programme national de garderies, mais ils devront quand même financer ce programme sous le gouvernement libéral.

 

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Pourquoi ne pas simplement laisser cet argent aux parents? S'ils décident de recourir aux services d'une garderie, grand bien leur fasse. S'ils préfèrent confier leurs enfants à quelqu'un dans la famille qui les aime, une grand-mère, un grand-père, une tante ou un oncle, par exemple, c'est leur choix. Et s'ils décident de rester à la maison et acceptent de gagner un peu moins, ils ont tout le loisir de le faire.

Or, le gouvernement libéral dit plutôt à la famille à revenu unique qui touche 50 000 $ par an qu'il entend lui faire payer 100 p. 100 d'impôt de plus que celle à deux revenus. Il force les familles à consacrer moins de temps aux enfants pour des considérations financières.

Le projet de loi C-23 traite du mariage. L'union d'un homme et d'une femme est le fondement de la famille. Il y a aujourd'hui au Canada six millions de mariages. On dit qu'il y a un degré élevé de divorce. Or, chaque année, sur six millions de mariages, on n'enregistre que 2 p. 100 de divorce, alors que 98 p. 100 renouvellent leur engagement pour une année encore. Au Canada, 75 p. 100 des enfants sont actuellement élevés dans ces mariages. C'est une institution qui fonctionne et c'est une institution que les Canadiens ne veulent pas voir changée.

Le problème avec le projet de loi, comme je l'ai dit en préambule, c'est que le mariage devrait être clairement défini dans les lois. Le gouvernement s'y refuse. Cette définition, il l'a enfouie dans un recoin du projet de loi, là où elle ne risque pas déranger, et cela, malgré toutes les pétitions présentées. Deuxièmement, le gouvernement a introduit une définition de l'union conjugale qui ne figure pas dans les lois et qui obligera les tribunaux à faire intervenir l'État pour déterminer si, oui ou non, telle ou telle relation privée correspond à la définition.

Ce sont là les deux énormes lacunes du projet de loi. Ce ne sont pas les seules, mais ce sont celles qui nous ont convaincus que, en bout de piste, ce projet de loi ne fonctionnera pas. Il constituera une manne pour les avocats et les juges et poussera les gens à s'adresser aux tribunaux, mais il n'atteindra pas vraiment l'objectif du gouvernement.

Plus que toute autre chose, on exclura les personnes qui sont susceptibles de présenter une dépendance économique ou de s'entraider d'une quelconque façon, mais qui ne songeraient jamais à entretenir une union conjugale, si cela signifie qu'il doit y avoir une intimité physique ou des relations sexuelles. On entend tous ces discours au sujet de l'élimination de la discrimination, mais le gouvernement exclut des gens qui entretiennent toutes sortes de dépendance et de relations personnelles étroites, mais non physiques. Ces personnes sont exclues. Si cela n'est pas discriminatoire, je ne sais pas ce qui peut l'être. Nous jouons parfois avec les mots à la Chambre. Nous le savons tous. C'est un des gros problèmes que nous connaissons avec le projet de loi C-23.

Il y a d'autres éléments que je dois souligner au sujet du projet de loi C-23. Dans toutes les réserves que j'ai exposées au sujet de ce chapelet de politiques anti-familiales tous azimuts présentées par le gouvernement libéral, y compris le projet de loi C-23, et dans toutes les initiatives pro-familiales que nous avons mises de l'avant sur les plans de l'impôt et de la protection des enfants et ainsi de suite, voici ce qui me perturbe le plus.

Des députés d'en face savent que nous avons évoqué des préoccupations légitimes. Ils sont d'accord avec certaines des observations que nous avons faites. Ils me l'ont dit en privé «Je suis d'accord avec vous, mais que puis-je faire?» Ils savent que certains des points sur lesquels on les oblige à se prononcer favorablement sont indéfendables. Je les vois s'efforcer de rationaliser la situation et de trouver une façon d'apaiser leur conscience afin de dire que ce sur quoi ils se prononcent est correct. Ils tournent et retournent la question et cherchent à trouver n'importe quel petit élément de raisonnement bureaucratique légaliste qui justifie l'adoption de leur position. Ils savent que ce pour quoi ils votent n'est pas correct. Ils savent que c'est mauvais pour les familles. Ils savent que ça ne va pas renforcer la famille canadienne. En fait, ils savent qu'une grande partie de ces initiatives et mesures sont finalement au détriment de la famille. Ce qui me gêne, c'est qu'ils le savent, mais qu'ils ne feront pas ce qu'ils devraient faire à cet égard.

 

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Cela inquiète aussi beaucoup de Canadiens un peu partout dans le pays. C'est la raison pour laquelle les Canadiens en ont assez des politiciens. J'ai vu des questionnaires où l'on demandait aux Canadiens à laquelle de toutes les professions ils faisaient le plus confiance. Sur la liste figuraient des professions comme avocat, médecin et autres. Les députés savent-ils quelle profession a obtenu la cote la plus faible? Politicien, cette profession arrive presque en dernier.

Nous pouvons en plaisanter et en rire. Nous pouvons dire que c'est amusant. Mais quoi? Nous sommes ici pour servir les Canadiens. Nous devrions servir d'exemple à nos enfants en faisant preuve d'intégrité et de caractère. Nous devrions nous faire l'exemple des valeurs qui inspirent les jeunes de notre pays. Hélas, ce n'est pas le cas.

Quand nous nous moquons d'un élu, que ce soit le premier ministre ou le chef de l'opposition, ou encore quand nous nous moquons du rôle des représentants élus, c'est comme si nous nous détruisions nous-mêmes. Cela ne renforce pas notre nation. En fait, cela nuit au respect que nous avons pour les institutions qui sont en place un peu partout dans le pays.

J'invite les députés d'en face à réfléchir à toutes les politiques anti-familiales qu'ils ont proposées et au message qu'ils envoient en élaborant des politiques qui affaiblissent la famille canadienne. Ils ont l'obligation de dire aux Canadiens que certaines choses sont importantes. Les faits prouvent que le mariage est bénéfique pour les enfants. C'est aussi simple que cela.

Le gouvernement libéral a appliqué la clôture à ce projet de loi. Je crois d'ailleurs que c'est la 62e fois qu'il a recours à ce moyen pour limiter la durée du débat. Ainsi, même si le projet de loi C-23 vise à modifier 68 lois canadiennes, nous ne disposons que d'une journée, à l'étape de la troisième lecture, pour en débattre. C'est déplorable. Lorsque les députés d'en face voteront ce soir sur ce projet de loi, qui accorde les mêmes avantages et obligations aux conjoints de même sexe qu'aux conjoints mariés et à leur famille, j'espère qu'ils se demanderont s'il s'agit d'une question prioritaire et si c'est le message qu'ils veulent envoyer aux jeunes Canadiens, la génération qui nous suivra.

Selon les sondages et études dont les médias font état, 90 p. 100 des jeunes considèrent la famille et le développement de liens familiaux comme leur priorité. Lorsque les députés d'en face voteront ce soir, enverront-ils le bon message? Dirons-nous aux jeunes que nous sommes d'accord avec eux lorsque nous voterons ce soir?

Je ne crois pas qu'un vote favorable au projet de loi C-23 enverra le bon message. Il enverra plutôt un message très ambigu. J'invite tous les députés à réfléchir aux obligations qu'ils ont contractées et aux engagements qu'ils ont pris envers leurs électeurs. Je les invite à réfléchir au projet de loi et au message qu'ils enverront aux jeunes Canadiens.

 

. 1105 + -

Étant donné la teneur de mon discours, je me sens l'obligation de proposer un amendement, afin de donner une autre chance à tous les députés. Je propose, appuyé par le député d'Elk Island:  

    Que le projet de loi C-23, Loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les Lois du Canada, ne soit pas maintenant lu une troisième fois, mais qu'il soit de nouveau renvoyé au Comité permanent de la justice et des droits de la personne afin que le Comité étudie la possibilité d'ajouter une définition du mariage à tous les articles pertinents du projet de loi qui aura pour effet d'inclure la définition dans chaque loi visée par ce dernier de manière à donner à la définition une valeur et un effet juridiques significatifs.

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Lorsqu'il a lu la motion que j'appuie, la voix du député de Calgary-Centre est devenu inaudible et je voudrais m'assurer que le compte rendu officiel dit bien qu'il a été proposé que le projet de loi «ne soit pas maintenant lu une troisième fois».

Le vice-président: C'est exact, c'est bien ce que dit l'amendement. Le débat porte sur l'amendement.

[Français]

M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Monsieur le Président, c'est avec beaucoup de plaisir que je prends la parole sur ce projet de loi. Je n'hésite pas à qualifier cette journée d'historique. En fait, cette journée est un moment que nous attendions depuis fort longtemps, car cela nous permet de travailler à la pleine égalité de tous nos concitoyens.

Avant de m'attaquer à la substance du projet de loi, à ce que les avocats appellent, je crois, le droit positif—mon collègue, le député de Chambly, me corrigera si l'expression n'est pas appropriée—je veux d'abord remercier les fonctionnaires qui nous ont accompagnés en comité, et je me permets de les nommer. Il s'agit de Michelle Gosselin, Stan Farber, Mme Lisa Hitch, Sharon Colbert, Mme Janet McIntyre, qui a été d'une collaboration de tous les instants et dont le concours a été très apprécié, et de Mme Valerie Lasher.

On sait que ce n'est pas courant pour l'opposition de remercier le gouvernement, mais je crois que, vu l'importance du projet de loi qui, on n'aura de cesse de le dire, est un projet de loi réparateur, qui vient corriger plusieurs décennies d'injustice à l'endroit de la communauté homosexuelle, il faut transcender tous les clivages partisans et remercier le gouvernement d'avoir eu le courage de le déposer.

Le projet de loi C-23 nous permet également de mesurer le chemin parcouru par notre société sur les sentiers de la tolérance. Je veux rappeler qu'il n'y a pas très longtemps, en 1994—j'étais moi-même un jeune parlementaire fougueux, dynamique, rempli d'idéalisme, idéalisme qui ne s'est, au demeurant, jamais démenti—j'ai déposé un projet de loi très semblable.

 

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Ce projet de loi proposait aussi de modifier toutes les lois fédérales où il y avait une définition hétérosexiste de conjoints pour y inclure une définition homosexiste.

À l'époque, en 1994, il y a seulement 52 députés qui avaient appuyé le projet de loi et un seul membre du Conseil des ministres, c'est-à-dire la ministre de l'Environnement de l'époque et vice-première ministre, soit la députée de Hamilton-Est.

Aujourd'hui, les choses ont considérablement évolué. Il y a eu un dialogue nourri entre les parlementaires et le travail de la communauté gaie et de tous ceux qui croient à l'égalité. On pourrait également parler du rôle extrêmement important de la Commission canadienne des droits de la personne qui, depuis 1979, a rappelé la discrimination dont les personnes d'orientation homosexuelle étaient l'objet.

Je profite de l'occasion pour remercier les différents porte-parole des associations gaies, comme ÉGALE et son président, John Fisher. Ce groupe pancanadien s'active depuis plusieurs années déjà en faveur de l'égalité des gais et des lesbiennes. Cet organisme a été associé à différentes causes qui ont été présentées devant la Cour suprême ou des tribunaux inférieurs, telle l'affaire Rosenberg, l'affaire Egan-Nesbit et, plus près de nous, l'affaire M. c. H.

Je veux remercier les gens au Québec qui ont été une voix extrêmement importante dans le débat. Je pense, bien sûr, à M. Laurent McCutcheon et à la coalition qu'il dirige avec beaucoup de talent. C'est une coalition qui regroupe des mouvements syndicaux, telle la CEQ, et des groupes communautaires. Je veux également remercier les gens de Québec, dont Claudine Ouellet, qui est venue en comité parlementaire et qui nous a présenté un témoignage extrêmement éloquent sur la nécessité d'un projet de loi comme celui-là.

Je veux aussi remercier mes collègues du Bloc québécois qui, à plusieurs reprises au sein du caucus, m'ont permis de faire des présentations et ont toujours été extrêmement patients. On sait très bien que quand on fait de la politique, on ne part pas tous du même niveau. Il faut accepter de convaincre.

Le pari que nous avons fait comme parlementaires, autant au Bloc québécois que dans d'autres formations politiques, est celui de ne pas contraindre, mais de convaincre. Nous l'avons fait parce que nous savons qu'en démocratie les mots, les idées et les valeurs ont leur importance.

Je me félicite d'avoir été patient et d'avoir travaillé pendant longtemps. Je crois que, ce soir, nous ne serons pas déçus de voir qu'un nombre très important de parlementaires vont travailler à la pleine égalité. Quand le Président va se lever et demander la mise aux voix du projet de loi en troisième lecture, je sais qu'ils seront nombreux à appuyer le gouvernement dans son initiative relative au projet de loi C-23.

Je veux remercier mon collègue de Burnaby—Douglas qui est, on le sait, un de mes amis. D'une certaine manière, il a été un précurseur et nous a un peu tracé la voie. Lui aussi a été extrêmement persévérant. Je crois que pour ce qui est du résultat que nous obtiendrons ce soir, nous devons lui être reconnaissant d'avoir été non seulement persévérant, mais extrêmement présent dans tous les débats lorsqu'il s'est agi du droit à l'égalité des gais et des lesbiennes.

Sur ces remerciements, venons-en au fond du débat.

D'abord, rappelons-le, le projet de loi dont nous sommes saisis est éminemment respectueux des jugements antérieurs qui ont été rendus par les tribunaux. Je me permettrai un bref rappel historique sur ce que fut la quête de la communauté gaie et lesbienne vers l'égalité que le présent gouvernement nous propose d'accorder.

 

. 1115 + -

C'est d'abord en 1979 que, pour la première fois, la Commission canadienne des droits de la personne mentionne que l'orientation sexuelle comme motif interdit de discrimination devrait être incluse dans la Loi canadienne sur les droits de la personne.

La reconnaissance des conjoints de même sexe est celle que nous avons des relations affectives que nos concitoyens d'orientation homosexuelle engagent au vu et au su de tous. Préalablement, il nous fallait cesser de discriminer sur une base individuelle. C'est pour cela que le premier contentieux juridique qui s'est posé est celui d'inclure dans la Loi canadienne sur les droits de la personne l'orientation sexuelle comme motif interdit de discrimination.

Je voudrais que l'on comprenne bien que la Loi canadienne sur les droits de la personne est une loi différente de la Charte. La Charte fait partie de la Constitution; c'est la loi suprême. Elle a été adoptée en 1982 dans les conditions que vous savez, et que la journée de célébration d'aujourd'hui m'interdit de rappeler.

La Loi canadienne sur les droits de la personne est, elle, une loi organique du Parlement. Elle offre une protection aux gens qui reçoivent des services du gouvernement fédéral ou qui sont des travailleurs dans l'une ou l'autre des juridictions du gouvernement fédéral. Je pense, bien sûr, aux banques, au domaine des télécommunications, aux postes et à l'ensemble des juridictions.

En 1992, dans l'affaire Haig c. Canada, la Cour d'appel de l'Ontario a déclaré qu'il était discriminatoire, incompatible avec l'article 15 de la Charte de ne pas reconnaître que l'orientation sexuelle est un motif interdit de discrimination. À l'époque, un jugement, qui aurait pu être exécutoire en Ontario seulement, l'a été pour tout le Canada. C'est à Kim Campbell, qui était à l'époque ministre de la Justice—dont vous aurez plaisir à vous rappeler—que nous devons d'avoir rendu le jugement exécutoire à travers le Canada.

Plus près de nous, il y a eu le projet de loi C-33. Au moment où nous avons adopté cette loi, en 1993, j'étais parlementaire. Le ministre de la Justice de l'époque, l'honorable Allan Rock, a déposé un projet de loi modifiant la Loi canadienne sur les droits de la personne, de telle sorte que nous puissions nous conformer au jugement rendu par la Cour d'appel de l'Ontario.

Ensuite, il y a eu une cascade de causes présentées devant différentes cours. Il y a eu des tribunaux administratifs, des tribunaux de droit commun qui, dans les milieux de travail, ont déclaré qu'il était discriminatoire de ne pas reconnaître les conjoints de même sexe dans les conventions collectives.

Une autre cause extrêmement importante est la cause de 1995, initiée en 1993, celle de Nesbit et Egan c. Canada. Il vaut la peine d'en parler d'une manière plus particulière, parce que la contribution de cette arrêt de la Cour suprême aura été de faire en sorte que nous devons maintenant lire l'article 15 de la Charte canadienne des droits de la personne comme comprenant l'orientation sexuelle comme motif interdit de discrimination.

Laissez-moi en quelques minutes vous raconter un peu le cas dont la Cour suprême a été saisie. Jim Egan et John Nesbit ont vécu ensemble pendant plus de 40 ans. Il arrive que, dans la population, on ait un préjugé. On s'imagine que les gens d'orientation homosexuelle qui s'engagent dans des relations conjugales ne sont pas toujours des gens stables, capables de relations à long terme.

Je ne suis pas au fait de votre vie conjugale, monsieur le Président, mais imaginez qu'ici, nous sommes en présence d'une référence de gens qui ont fait vie commune pendant plus de 40 ans. Ce n'est pas rien.

C'est à regret d'ailleurs que je dois informer mes collègues que l'un d'entre eux est décédé, il y a environ un mois, ce qui a été ressenti comme une lourde perte pour la communauté gaie.

 

. 1120 + -

M. Nesbit a demandé une allocation de conjoint en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. Cette allocation est habituellement accordée en vertu de la loi lorsque le conjoint du titulaire de la pension est âgé entre 60 et 65 ans et que le revenu global du couple est inférieur à un montant donné qui est évidemment réajusté selon les années. Le gouvernement a refusé à M. Nesbit cette allocation sous prétexte que la définition de conjoint inscrite dans la loi ne s'appliquait qu'aux couples de personnes de sexe opposé.

Le couple Nesbit-Egan a donc présenté une requête à la Cour fédérale afin d'obtenir un jugement déclarant que la définition de conjoint figurant dans la Loi sur la sécurité de la vieillesse engendrait une discrimination fondée sur les tendances sexuelles et enfreignait le droit à l'égalité garanti par l'article 15. Leur requête fut rejetée par le tribunal de première instance. Le jugement fut porté en appel devant la Cour d'appel fédérale et la requête fut de nouveau rejetée. Comme quoi, dans les annales judiciaires, il nous faut être extrêmement persévérant.

La cause du rejet était que la définition de conjoint n'engendrait pas une discrimination contraire à l'article 15. C'est ce que disait la Cour d'appel fédérale. La Cour prétendait avoir refusé les prestations de conjoint en vertu de la situation de relation non conjugale dans laquelle ils se trouvaient plutôt qu'en raison de leur orientation sexuelle. Le tribunal statuait que: «la distinction entre les relations conjugales et non conjugales découlant de la définition n'étant pas le genre de distinction qui franchisse les limites pour constituer de la discrimination».

La cause s'est retrouvée devant la Cour suprême et, dans un jugement extrêmement serré, on avait à répondre à trois questions. Ce que l'on doit retenir de ce jugement, c'est qu'on a dit qu'il n'était pas permis de lire l'article 15 de la Charte canadienne sans y inclure l'orientation sexuelle.

C'est intéressant de se rappeler cela parce, déjà en 1982—cette année-là on le sait, on a rapatrié la Constitution, on a réécrit certains aspects de la Constitution, pas toujours avec une préoccupation équitable à l'endroit du Québec mais cela, c'est un autre débat—, des gens souhaitaient que l'orientation sexuelle soit inclus comme motif interdit de discrimination. À ce moment-là, qui était le ministre de la Justice? C'était l'actuel premier ministre et il avait décliné cette préoccupation pourtant fort légitime. L'histoire allait donner raison à ceux qui croyaient que ce type de discrimination ne serait pas toléré par les tribunaux.

Il y a eu l'affaire Rosenberg qui, on le sait, met en cause un syndicat, soit l'Alliance de la fonction publique, qui a contesté les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu qui ne permettait pas que l'on enregistre des régimes de retraite et que l'on reconnaisse des pensions et des allocations de conjoint de survivant pour les conjoints de même sexe. Il y avait là un traitement discriminatoire.

Encore une fois, les tribunaux ont prêté une oreille extrêmement attentive à cette affaire et on a invalidé les dispositions de la loi qui ne permettait pas cette reconnaissance. Le gouvernement a été mis en instance de changer la loi et cela nous a donné le projet de loi C-68. L'affaire Rosenberg a donc permis de changer une disposition importante de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Cependant, le projet de loi qui est devant nous en est directement dicté par la Cour suprême. C'est pour cela que je ne peux être d'accord avec les collègues de l'Alliance canadienne. Règle générale, je le dis en toute amitié, je me fais plutôt un devoir de ne pas être d'accord avec les députés de l'Alliance canadienne. Les députés de l'Alliance canadienne n'ont pas une grande ouverture d'esprit lorsqu'il s'agit de parler des droits de la personne. Rappelons-nous qu'ils se sont opposés au projet de loi C-33 qui modifiait la Loi canadienne des droits de la personnes. Ils ont aussi voté contre mon projet de loi d'initiatives parlementaires.

 

. 1125 + -

Ils se sont opposés au projet de loi C-68, spécifiquement en ce qui concerne l'aspect de la reconnaissance des rentes de conjoint survivant. Aujourd'hui, ils s'opposent au projet de loi C-23. En fait, on doit savoir que le type de société que l'Alliance canadienne souhaite préconiser en est un où on ne veut pas reconnaître les gens d'orientation homosexuelle.

Ouvertement, ces gens souhaitent poursuivre la discrimination. Vous le savez, ces gens sont des pharisiens. Ils tiennent un discours en parlant des deux côtés de la bouche. Soyons clairs, du côté de l'Alliance canadienne, il y a des gens qui sont homophobes. Chaque fois qu'ils ont eu l'occasion de piétiner, de marcher, de fouler, de rejeter les droits des homosexuels, d'une seule voix, d'une voix monolithique, d'une voix directement guidée par l'intolérance, nous avons pu assister à un vote monolithique contre les intérêts bien compris de la communauté homosexuelle.

Je leur dis que, bien sûr, en démocratie, il faut accepter que ces gens sont élus. Ils sont élus par leurs populations respectives, c'est ce qui fait que je les respecte. Mais jamais je ne souscrirai, jamais le Bloc québécois ne souscrira au type de société que l'Alliance canadienne souhaite mettre sur pied.

Nous serons un jour dans un Québec souverain. Je souhaite au reste du Canada de ne jamais être gouverné par l'Alliance canadienne. Imaginez ce que serait le Canada, sans ou avec le Québec, si un jour les gens de l'Alliance canadienne en venaient à former le gouvernement. Quelles garanties pourrions-nous avoir, s'agissant de l'égalité de traitement, s'agissant de tous ceux qui croient à l'égalité des individus?

Ce que je connais du reste du Canada m'amène à penser que les Canadiens hors Québec sont beaucoup trop généreux, beaucoup trop ouverts, beaucoup trop sensibles pour, un jour, faire confiance aux députés de l'Alliance canadienne.

Je disais donc que le projet de loi à l'étude est directement dicté par un jugement de la Cour suprême du 20 mai 1999, de huit contre un. Quand on connaît la Cour suprême, on sait très bien que c'est un jugement extrêmement solide, un jugement extrême important. C'est assez exceptionnel, dans les annales judiciaires, que la Cour suprême, à huit contre un, statue sur une cause.

M. c. H. est un couple de lesbiennes qui ont vécu ensemble pendant quelques années. Elles ont acquis un fonds d'entreprise, fait des affaires ensemble pour une période de temps et se sont séparées. En vertu de l'article 29 de la Loi sur le droit de la famille, l'une d'entre elles a demandé une pension alimentaire. Cette pension alimentaire ne lui a pas été accordée, parce que dans le libellé même de la loi, on prévoyait que les pensions alimentaires étaient redevables entre conjoints de sexe opposé. On a mis en oeuvre tout un processus de contestations judiciaires qui est parti de la Cour de première instance de l'Ontario pour se rendre jusqu'à la Cour suprême. À mon avis, ce jugement de M. c. H. est le plus important s'agissant des droits de la personne.

Qu'a dit la Cour suprême? Elle a dit: «Les relations d'union de fait sont des relations conjugales qui doivent être considérées comme telles, peu importe qu'on soit en présence d'un couple homosexuel ou d'un couple hétérosexuel.»

Ainsi, la Cour suprême reconnaissait d'abord les unions de fait, et en plus, elle reconnaissait l'égalité absolue qui doit exister entre ceux qui composent les unions de fait, dussent-ils être d'orientation homosexuelle ou d'orientation hétérosexuelle.

 

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Je veux citer deux paragraphes qui sont peut-être un peu longs, mais qui constituent, je dirais, la quintessence, l'ossature et l'essentiel du jugement de la Cour suprême. Par respect pour nos interprètes, je vais lire extrêmement lentement pour que rien ne leur échappe.

La Cour suprême faisait l'énoncé suivant, en parlant de la définition de conjoints, telle qu'elle existait à l'article 29 de la Loi sur le droit de la famille:

    Cette définition [...] établit une distinction entre les personnes qui forment une union conjugale d'une durée déterminée avec une personne de sexe différent et celles qui forment une union conjugale d'une durée déterminée avec une personne de même sexe. [...] Les unions entre personnes de même sexe peuvent à la fois être conjugales et durables, mais les personnes qui forment de telles unions se voient néanmoins refuser l'accès au régime de l'obligation alimentaire prévu par la Loi sur le droit de la famille et mis en application par les tribunaux. Cette différence de traitement est fondée sur une caractéristique personnelle, savoir l'orientation sexuelle, que la jurisprudence antérieure a jugé analogue aux caractéristiques expressément mentionnées au paragraphe 15(1).

On comprend que la Cour réfère ici à l'arrêt Nesbit-Egan. Je continue:

    Le noeud de la question en litige est que cette différence de traitement établit réellement une discrimination en portant atteinte à la dignité humaine [...]

J'espère que nos collègues de l'Alliance canadienne comprennent bien que la Cour suprême a référé à une telle chose qui s'appelle la dignité humaine. Je ne vois pas comment, comme législateurs, on pourrait s'opposer à une telle chose qui s'appelle la dignité humaine. Je poursuis:

      [...] des personnes formant une union avec une personne de même sexe [...] la nature du droit touché est fondamentale, savoir la capacité de subvenir à des besoins financiers de base après la rupture d'une union caractérisée par l'intimité et la dépendance financière. L'exclusion des partenaires de même sexe du bénéfice du régime de l'obligation alimentaire entre conjoints laisse entendre qu'ils sont jugés incapables de former des unions intimes marquées par l'interdépendance financière, peu importe leur situation. Si on prend en considération ces facteurs, il est manifeste que la définition du mot «conjoint» à l'article 29 de la Loi sur le droit de la famille porte atteinte à la dignité humaine des personnes qui forment une union avec une personne de même sexe.

Oui, c'est souhaitable. Un homme qui en aime un autre, c'est possible, c'est souhaitable et cela mérite la pleine reconnaissance du législateur. Une femme qui en aime une autre, c'est souhaitable, c'est reconnaissable, c'est noble et cela mérite la même reconnaissance du législateur.

Il n'y a pas de force suffisante pour empêcher que l'égalité à laquelle sont en droit d'aspirer les gens d'orientation homosexuelle qui s'engagent dans des relations puisse être brimée par des préjugés. Nous l'avons vu par les jugements des tribunaux. Nous le voyons par le courage politique. Je suis sûr que nous serons fort nombreux ce soir à vouloir aller dans la voie de l'égalité.

Posons-nous la question: pourquoi est-ce important que nous soyons nombreux à appuyer un projet de loi comme celui-ci?

On pourrait parler pendant des heures sur les causes de l'homosexualité. Je l'ai souvent dit, je suis issu d'une famille de cinq enfants. J'ai eu des parents tout ce qu'il y a de plus normaux et attachants, avec une mère à la maison et un père pourvoyeur. Je n'ai été privé ni d'affection ni d'amour.

 

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Il n'y a rien dans mon cheminement qui laisse penser qu'il y ait eu quelque dysfonctionnement dans ma famille, et pourtant, je suis d'orientation homosexuelle. Je suis très heureux d'être d'orientation homosexuelle. Je suis heureux, j'aime la vie, j'aime mon travail, j'ai des amis, j'ai de l'amour dans ma vie et je ne suis privé de rien à ce niveau.

Posons-nous la question à savoir ce que cela voudrait dire si le législateur continuait à envoyer le message que lorsqu'on est un couple homosexuel, on est des citoyens de seconde zone, que malgré le fait qu'on soit souventes fois des contribuables, on n'a pas droit à la pleine reconnaissance.

J'espère que les députés de l'Alliance canadienne vont réfléchir à ce qui suit. Monsieur le Président, vous avez eu vous-même 13, 14 ou 15 ans; cela fait déjà quelques années, me direz-vous. Mais que ce soit en Alberta, en Saskatchewan, à Montréal ou à Charlottetown à l'Île-du-Prince-Édouard, lorsqu'on a 13, 14 ou 15 ans et que l'on découvre qu'on est différent des autres par notre pulsion sexuelle, par l'attraction que l'on a pour un partenaire de même sexe, ne pensez-vous pas que dans de tels moments, il est important que l'on sache bien qu'on est un citoyen à part entière, que dans la vie, quoi qu'on fasse sur le plan professionnel, quelles que soient nos aspirations, on va pouvoir compter sur une pleine reconnaissance du législateur, que quel que soit l'endroit où on a les pieds posés au Canada ou au Québec, on n'acceptera pas qu'il y ait de la discrimination?

C'est ce que propose de faire le projet de loi. En quoi cela vient-il nous menacer? Est-ce que quelqu'un de l'Alliance canadienne peut m'expliquer en quoi le fait qu'une personne qui choisit de vivre son homosexualité dans la société, qui s'engage dans une relation affective, dont la Cour suprême a dit qu'elle devait être considérée comme conjugale, cela menace-t-il la communauté hétérosexuelle? En quoi est-ce que les députés de l'Alliance canadienne doivent interpréter le projet de loi C-23 comme menaçant les familles comme elles doivent exister dans un sens traditionnel?

Je suis issu d'une famille traditionnelle. Mon frère jumeau forme une famille traditionnelle. Ma soeur Lorraine forme une famille traditionnelle avec son mari Jean-Pierre et son fils Francis. Pourtant, je ne crois pas que moi, comme individu, je les menace dans le choix qu'ils font de former une famille traditionnelle.

Je crois que les députés de l'Alliance canadienne doivent revoir leurs positions. Ils doivent appuyer ce projet de loi. Je pense qu'ils en sortiront grandis comme groupe parlementaire.

Ce que ce projet de loi ne change pas, c'est important de le dire, c'est la définition du mariage. La définition du mariage n'est pas inscrite dans un projet de loi, c'est inscrit en common law. Rien, dans ce projet de loi, dans les quelque 300 articles que contient le projet de loi C-23, ne change la définition du mariage.

Ceux qui seraient tentés de voter contre le projet de loi en disant que cela menace l'institution du mariage dans la représentation conventionnelle qu'on s'en fait sont, tout simplement, de mauvaise foi.

Ce projet de loi ne change pas la définition de cohabitation qui existe dans les lois fédérales et qui réfère à une période de vie commune pendant un an. Ce projet de loi ne change pas les conséquences et les faits juridiques de la séparation. Les unions de fait prennent fin dans le droit fédéral canadien, tel qu'il existe, au moment où il y a séparation. Rien dans ce projet de loi ne vient le changer.

Le Code criminel n'est pas changé, à son article 18, qui dit qu'une personne mariée qui commet une infraction en présence de son conjoint a été contrainte de le faire. Cet article n'est pas changé, ni l'article 278, ni l'article 155 relatif à l'inceste, ni l'article 290 relatif à la bigamie, ni l'article 293 relatif à la polygamie. Et bien sûr, ce projet de loi ne modifie en rien la Loi sur le mariage et les degrés prohibés ou la Loi sur le divorce.

 

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Ce que dit ce projet de loi, c'est que l'expression «relations conjugales» doit être associée et employée en relation intime avec les conjoints de fait.

Quels sont les critères établis par le terme «relations conjugales»? Qu'est-ce que cela veut dire quand on parle de «relations conjugales»? En droit canadien, depuis que les tribunaux antérieurs se sont penchés sur le terme «relations conjugales», on a une idée assez précise de ce que cela veut dire. Cela signifie le partage d'un toit, les rapports personnels et sexuels, la présence de services, la présence d'activités sociales, le soutien financier, l'image sociétale que l'on se fait du couple dans notre communauté. Il y a bien sûr des fois où tous ces éléments sont présents et d'autres fois où seulement quelques éléments sont présents.

Je veux tout de suite donner mon point de vue sur un aspect très important du débat qui a eu lieu en comité parlementaire et ailleurs. Je crois que le gouvernement a été bien avisé de ne pas reconnaître, dans le projet de loi, d'autres types de relations d'interdépendance. En effet, il existe d'autres types de relations d'interdépendance dans notre société: un fils qui prend soin de sa mère, un autre qui prend soin de sa nièce, un colocataire qui prend soin d'un autre colocataire qui peut être, par exemple, une personne handicapée. Sauf que ces types d'interdépendance ne constituent pas des relations conjugales.

C'est éminemment méritoire dans notre société que des gens prennent soin d'autres personnes. On sait que dans quelques années, le nombre de personnes âgées au Canada et au Québec représentera plus du tiers de notre société. Oui, on a une réflexion à faire comme société sur comment on va soutenir ceux qui dépendent financièrement d'autres personnes, et comment on va soutenir les gens qui prennent soin d'autres personnes. Cependant, cela ne peut pas être inscrit dans un débat qui concerne les conjoints de même sexe ou les conjoints de fait de sexe opposé.

Ce débat a duré dix ans au Canada. La première cause qui a concerné les conjoints de fait de même sexe a été portée devant les tribunaux en 1990. On se retrouve à l'an 2000 et on a un projet de loi. On ne peut pas dire que la communauté homosexuelle et tous les démocrates qui la soutiennent ont été impatients, puisque le débat a duré dix ans.

Je souhaite que nous ayons un débat extrêmement éclairé sur les différentes formes d'interdépendance qui existent dans notre société. Je sais que certains de mes collègues, dont la députée de Saint-Bruno—Saint-Hubert, souhaitent que ce débat ait lieu. D'autres de mes collègues à l'intérieur du caucus du Bloc québécois le souhaitent aussi, sauf qu'on ne peut pas prétexter que parce que ce débat n'a pas eu lieu, on doive voter contre le projet de loi C-23.

Le projet de loi C-23 fait l'objet et a fait l'objet d'une extrême connaissance de la part des décideurs, d'abord parce que les tribunaux ont rendu des jugements, et ensuite, parce que le ministère des Finances a évalué les coûts de ce qu'il en coûterait de reconnaître les conjoints de même sexe. On sait très bien—et j'aurai l'occasion d'y revenir—que les coûts sont minimes.

Or, concernant les autres formes d'interdépendance, le débat n'a pas eu lieu. La Commission canadienne de révision du droit commence à peine à se pencher sur le sujet. Je sais qu'au gouvernement, on se propose de mettre sur pied un comité parlementaire mixte—ressources humaines, justice et finances—pour que tous les ministères concernés par une éventuelle reconnaissance d'autres formes d'interdépendance puissent y aller de leur expertise et que l'on puisse, nous, comme parlementaires, comme décideurs, avoir le maximum d'information.

 

. 1145 + -

J'invite tous mes collègues à voter en faveur du projet de loi et à faire oeuvre d'égalité et de démocratie, et ce, pour six raisons.

Premièrement, c'est un projet de loi qui vient consacrer une des valeurs les plus fondamentales dans notre société. Que nous soyons souverainistes ou fédéralistes, hommes ou femmes, jeunes ou vieux, riches ou pauvres, nous croyons tous à l'égalité de traitement. C'est ce dont parle le projet de loi.

Deuxièmement, les cours de justice, en particulier la Cour suprême, ont dit que nous ne pouvions pas, comme législateurs, continuer de faire de la discrimination à l'endroit des gens qui sont engagés dans des unions de fait entre partenaires de même sexe. C'est pourquoi ce projet de loi est réparateur.

Troisièmement, soyons clairs. Le gouvernement a déposé un amendement au Comité permanent de la justice. Je n'étais pas favorable à cet amendement, mais il a au moins le mérite de lever toute espèce d'ambiguïté. Ce projet de loi ne concerne d'aucune façon, ni à l'abscisse, ni à l'ordonnée, ni de manière directe, ni de manière indirecte, le mariage. Le mariage, dans la représentation classique qu'on s'en fait et tel qu'il est défini en «common law», va continuer d'exister, et c'est très bien qu'il en soit ainsi.

Bien sûr, je ne peux pas donner de garantie que dans 10 ou 15 ans, une cour de justice ne déclarera pas discriminatoire le fait de ne réserver l'institution du mariage qu'à la communauté hétérosexuelle. Je ne le sais pas, mais ce que je sais, c'est que si une cour de justice déclare que le mariage est inconstitutionnel parce qu'il est réservé en propre à la communauté hétérosexuelle, ce ne sera pas à cause de ce projet de loi. Ce sera à cause de l'article 15 de la Charte canadienne des droits de la personne.

Quatrièmement, ce projet de loi n'implique pas de coûts substantiels pour le Trésor public, comme l'a évalué le ministère des Finances dans l'arrêt Rosenberg.

Cinquièmement, 70 p. 100 des Canadiens souhaitent que nous mettions fin à la discrimination dont sont victimes les personnes d'orientation homosexuelle.

Sixièmement, l'Assemblée nationale, dans un geste unanime, comme le Salon de la race sait le faire dans les grands moments de la vie collective, a adopté en juin dernier, en fin de session, la loi 32 qui modifiait 28 lois et qui reconnaissait les conjoints de même sexe.

Toutes ces raisons, individuellement et prises ensemble collectivement, font en sorte que, ce soir, si la démocratie a un sens et si nous sommes fiers de représenter les gens qui nous ont fait confiance, lorsque la Présidence demandera de voter sur le projet de loi, tous les députés doivent se lever et appuyer le projet de loi C-23 devant nous.

[Traduction]

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Winnipeg-Centre.

Je remercie mon collègue de Burnaby—Douglas qui s'est fait le champion de l'égalité pour les partenaires de même sexe, non seulement à la Chambre des communes mais également dans la société plus large. Je reconnais le travail incroyable qu'a effectué le député de Burnaby—Douglas, pas uniquement au Nouveau Parti démocratique, mais également dans la vie politique du pays, en prenant la parole pour veiller à ce que les homosexuels ne soient pas victimes de discrimination et pour défendre l'égalité de tous au pays.

Dans ce débat de troisième lecture du projet de loi C-23, je suis fière de dire que les députés du Nouveau Parti démocratique appuient entièrement le projet de loi. Notre parti s'est toujours battu pour l'égalité et pour défendre les droits des minorités et nous allons continuer de le faire.

Je vais parler un peu de ce projet de loi. Comme pour d'autres questions dont a été saisie la Chambre, nous avons entendu tant de propagande et d'informations fausses et je pense qu'il est important de préciser ce que dit vraiment le projet de loi. Pour moi, et pour toute personne qui se donnera la peine de le lire, il s'agit d'un projet de loi sur l'égalité. Il règle les questions légales qui ont résulté de l'arrêt M. c. H. de mai 1999 de la Cour suprême, qui statuait de façon claire et légitime que les gouvernements ne peuvent pas limiter les prestations ou les obligations sur la base d'une discrimination faite à l'encontre des partenaires de même sexe vivant en union libre.

 

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Depuis cette affaire historique devant la Cour suprême, un certain nombre de provinces et d'autres autorités ont examiné leurs lois pour voir si elles renfermaient une certaine discrimination. Ainsi, depuis 1997, la province d'où je viens, la Colombie-Britannique, a modifié de nombreuses lois, y compris six lois fondamentales, pour veiller à ce qu'il n'y ait pas de discrimination en ce qui concerne les avantages offerts aux conjoints homosexuels.

En juin 1999, le Québec a modifié 28 lois et 11 règlements. En Ontario, 67 lois ont été modifiées. De plus, dans une grande majorité de villes canadiennes, dans des entreprises du secteur privé, des municipalités, des hôpitaux, des bibliothèques et divers établissements de services sociaux du Canada, on constate que les mêmes changements se produisent.

Je tiens à dire, et je pense que c'est un sentiment partagé par bien des gens au Canada, que cela s'est fait attendre assez longtemps. La route a été longue, coûteuse et difficile pour de nombreuses personnes au Canada qui ont été victimes de discrimination aux yeux de la loi notamment, ainsi que dans les attitudes de la population, dans la législation gouvernementale et dans les services gouvernementaux. De nos jours, le projet de loi C-23 est une mesure dont nous devrions nous enorgueillir en disant que c'est la bonne chose à faire pour assurer l'égalité de tous au Canada.

Cela dit, je tiens à préciser que c'est également avec une certaine consternation que nous devons remettre en question les fausses informations véhiculées par l'ancien Parti réformiste. En fait, j'ai vraiment été tout à fait consternée par le niveau du débat à la Chambre au cours des dernières semaines, par les attaques mesquines qui ont eu lieu et par les commentaires haineux formulés par des membres de l'ancien Parti réformiste.

Les anciens réformistes ont fait la même chose dans le cas de l'Accord définitif nisga'a. Ils ont essayé de faire croire aux gens qu'il n'était pas question d'égalité, mais plutôt de conférer des droits spéciaux à un groupe d'intérêt, mais rien n'est plus faux. Il n'est pas question de droits spéciaux, de règles ou de considérations spéciales. Il s'agit de mettre un terme à la discrimination à l'égard des couples homosexuels en union de fait et de dire que la loi doit s'appliquer également et équitablement à tous les Canadiens.

J'ai également entendu les anciens réformistes affirmer que cette mesure législative allait nuire aux enfants, qu'ils allaient souffrir. J'ai entendu également...

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je suis vraiment désolé d'interrompre la députée, car j'aime écouter ce qu'elle a à dire, mais le Président a statué que le nom de notre parti est l'Alliance canadienne. Le Président a rendu cette décision, qui a été rappelée environ quatre ou cinq fois depuis, et je demande à la députée de simplement la respecter.

Mme Libby Davies: Monsieur le Président, je crois que j'ai parlé de l'ancien Parti réformiste. Le terme alliance est intéressant parce qu'à mon avis, il évoque l'idée de partenariat, et je suis curieuse de voir qui tient vraiment à adhérer à cette alliance.

Nous avons l'Alliance canadienne, l'ancien Parti réformiste, l'opposition, mais l'essentiel ici, c'est ce que ce parti dit à la Chambre et la façon dont il présente le projet de loi. Ce parti a utilisé des manoeuvres pour tenter de tromper les gens ou de leur donner l'illusion que le projet de loi accorde des droits spéciaux. Ce qui est complètement sans fondement. Il n'y a rien de plus faux.

Les députés d'en face m'ont particulièrement offusquée en déclarant que le projet de loi fera du mal aux enfants et aux familles. Hier justement, un député de l'opposition a dit: «J'estime que le gouvernement a encore une fois cédé à la tyrannie de la minorité. Égalité et moralité ne sont pas des principes qui s'imposent par une loi.»

L'égalité s'impose en effet par une loi. C'est là l'objet de la Charte des droits et libertés, de la Constitution et de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Nous imposons effectivement l'égalité par une loi et tous les députés doivent défendre le droit à l'égalité.

 

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Ces députés tentent plutôt d'imposer la moralité par une loi. Je tiens toutefois à préciser une chose. À mon avis, en faisant cela, il faut comprendre qu'ils font plus que s'attaquer aux homosexuels ou aux couples de même sexe qui vivent en union de fait. Ils portent également atteinte aux droits de tous ceux qui vivent en union de fait, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels.

Certains des amendements dont nous avons parlé hier touchaient des points précis et visaient à soustraire les unions de fait de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et de la Loi de l'impôt sur le revenu. Cela ne fera que nous replonger dans l'âge des ténèbres alors que j'avais cru comprendre que nous étions entrés dans un nouveau millénaire. Les députés de l'opposition, de l'ancien Parti réformiste, sont figés dans une époque ancienne et leurs opinions étroites et moralisatrices ainsi que la haine avec laquelle ils considèrent les Canadiens sont loin d'être partagés par la majorité des Canadiens.

Je demande aux députés de l'opposition qui sont contre le projet de loi de m'expliquer pourquoi il constitue à leur avis une menace pour les familles hétérosexuelles. Ils semblent croire que le projet de loi C-23 attaquera d'une certaine façon leur propre famille ou ce qu'ils considèrent comme le mariage traditionnel. Pourquoi n'existe-t-il pour eux qu'une seule définition du mariage?

J'ai entendu des réformistes affirmer que ce projet de loi réduira le nombre d'unions matrimoniales. Je me pose de sérieuses questions. Je me demande pourquoi ils se sentent si menacés, si faibles et si hargneux qu'ils doivent refuser l'égalité aux Canadiens qui vivent une union homosexuelle pour pouvoir imposer leurs opinions moralistes. Pourquoi sont-ils prêts à agir ainsi?

L'une des conséquences malheureuses de leur argumentation est que, en exprimant leurs préjugés et leur parti pris à l'égard de certaines personnes, ils en autorisent en fait d'autres à susciter la haine et la dissension. C'est ce qui s'est passé pendant le débat sur les Nisga'a; en effet, les réformistes ont tenu des propos qui ont été repris par des racistes et par des gens qui éprouvent des sentiments d'homophobie intenses. Voilà où conduisent les propos extrêmement offensants des réformistes. Ils tiennent des propos qui divisent notre société.

Nous, au Nouveau Parti démocratique, nous sommes absolument consternés par leur prise de position. Nous pensons qu'elle est monstrueuse. Pour notre part, nous avons le courage de prendre la parole en cet endroit pour défendre l'égalité et les relations entre partenaires de même sexe. Tous les citoyens devraient être traités de la même façon par la loi.

En fin de compte, ce projet de loi est très important car nous avons été témoins de procès incroyablement longs. Je connais des couples qui se sont attaqués au système, qui ont dû subir humiliation et discrimination à cause de la loi, et qui ont dû payer des avocats. Nous savons ce que peuvent coûter ces contestations judiciaires. Il est important pour nous, législateurs, d'avoir un jugement clair. C'est une question d'égalité. Il est temps de prendre les mesures qui s'imposent. Les gens ne devraient pas avoir à engager des procès au coût astronomique. Il faut modifier ces lois. C'est une autre raison pour laquelle le projet de loi C-23, que les néo-démocrates appuieront, devrait être adopté à l'unanimité par la Chambre ce soir.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai remarqué que la députée a dit probablement une dizaine de fois dans son allocution que les députés de l'Alliance canadienne étaient pleins de haine. Il ne sert les intérêts de personne de recourir à des insultes. Je remarque que, lorsque des députés, notamment ceux du NPD, ne s'entendent pas à la Chambre, ils se lancent à l'attaque et font des accusations de la sorte, au lieu de participer à un débat de fond. C'est déplorable.

Un des aspects que la députée n'a pas relevé dans les observations que nous faisons constamment et que je voudrais qu'elle commente, c'est celui-ci: si le mariage doit constituer une partie importante du projet de loi, la députée voit-elle un inconvénient à ce que la définition du mariage paraisse dans les lois, où, selon les avis juridiques, il aura un effet juridique important? Selon les avis juridiques, en raison de la façon dont la ministre de la Justice a procédé, le mariage sera exclus.

 

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En outre, la députée a dit que nous ne voulions pas que des gens soient obligés de s'adresser aux tribunaux et de payer des frais d'avocat. Pourtant, à défaut d'une définition de relation conjugale dans la loi, des gens devront probablement s'adresser aux tribunaux pour faire évaluer leur relation par l'État. Nous avons dit systématiquement que cela est probablement mal indiqué et qu'il serait mieux de définir le mariage dans la loi. Je lui demanderais de commenter ces deux aspects.

Mme Libby Davies: Monsieur le Président, jai effectivement employé le terme «haineux» à plusieurs reprises et je le maintiens, car je crois que les arguments que j'ai entendus de la part des députés de l'opposition étaient vraiment haineux envers d'autres membres de la société. Par exemple, quand ils attaquent les gens qui vivent en union de fait, je me demande ce qu'il y a de moral à vouloir imposer leurs conceptions à d'autres Canadiens.

Je trouve que cela sème la discorde au plus haut point. Cela témoigne d'un esprit rempli de préjugés et haineux. Cela revient au fond à faire des distinctions à l'égard de certaines gens parce que ces derniers ne partagent pas la conception que le député se fait du mariage, même si ces gens qui forment un couple de même sexe présentent peut-être tous les attributs et toutes les caractéristiques de ce que le député considérerait comme un mariage traditionnel. Je trouve cela haineux.

Quant à l'autre question, je tiens à dire très clairement que je n'ai pas appuyé le préambule, la définition de mariage contenue dans le projet de loi. Je ne pense pas non plus qu'elle devrait figurer dans les autres lois tout simplement parce que le projet de loi a trait aux avantages et obligations. Tel était l'objet initial du projet de loi. Il est vraiment honteux que le gouvernement ait cédé à la dernière minute pour ajouter ce préambule afin de se gagner l'appui de certains de ses députés d'arrière-ban, mais manifestement en vain.

L'objet initial du projet de loi, ayant trait aux avantages et obligations, était juste. Y ajouter ce préambule, et vouloir l'incorporer à toutes les autres lois où ne figure actuellement aucune définition du mariage, ne fait que créer un climat incendiaire qui permet aux députés de l'opposition, de l'Alliance canadienne, l'ancien Parti réformiste, de poursuivre leur programme d'action qui est de semer la discorde dans la population. Je n'approuve tout simplement pas cela.

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, je note que la députée a mentionné qu'il fallait assurer un traitement équitable. Je ne peux m'empêcher de penser qu'un soir dernièrement la Chambre s'est penchée sur un projet de loi d'initiative parlementaire parrainé par un député de notre parti, le député de Wild Rose, qui préconisait la mise en place d'un ombudsman auquel les autochtones des réserves pourraient s'adresser pour recevoir un traitement équitable. Le parti de la députée qui a voté contre cette mesure.

Je suis pourtant d'avis que ce projet de loi d'initiative parlementaire est fort raisonnable puisqu'il centre l'attention sur la nécessité de satisfaire les besoins des autochtones de la base, de sorte qu'ils aient une occasion équitable de se faire entendre. Pourtant, tous les collègues de la députée ont voté contre la mise en place d'un ombudsman des affaires autochtones. Cela me paraît contredire la préoccupation qu'exprime la députée à l'endroit...

Le président suppléant (M. McClelland): Je regrette d'interrompre le député, mais nous allons entendre la réponse.

Mme Libby Davies: Monsieur le Président, il est facile de répondre à cette question. Au Nouveau Parti démocratique, nous croyons dans le principe d'autodétermination des peuples autochtones. Nous sommes d'avis que les collectivités autochtones, les premières nations, ont l'habileté et la capacité nécessaires pour prendre toutes les procédures voulues pour mettre en place un ombudsman.

Nous voyons ce que le Parti réformiste cherche à faire en le leur imposant. Dans les débats qui ont eu lieu à la Chambre sur les droits des autochtones, le Parti réformiste s'est opposé à toutes les mesures visant à élargir ces droits. Et le voilà tout à coup qui propose la mise en place d'un ombudsman. Je trouve qu'il est fort en gueule. Son programme est très clair, mais nous sommes d'avis que la proposition devrait venir des autochtones mêmes.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, c'est un grand plaisir pour moi de participer au débat sur le projet de loi C-23, la Loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les Lois du Canada.

Je demanderais aux députés de garder le titre du projet de loi à l'esprit tout au long de mes observations. Il importe que nous nous en tenions à ce que le projet de loi est vraiment, à ce qu'il signifie réellement, et que nous ne laissions pas déraper le débat. Il s'agit d'un projet de loi très pratique et pragmatique qui vise simplement à moderniser la façon dont on traite les avantages en cours d'emploi ou au décès.

 

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Je voudrais rendre hommage au député de Burnaby—Douglas qui, au nom du caucus néo-démocrate, a défendu cette cause tout au long de sa vie d'adulte. Ce doit être très gratifiant pour lui de voir que ce projet de loi est enfin ainsi débattu aujourd'hui. Il y a 21 ans, lorsque le député a été élu pour la première fois à la Chambre des communes, nous aurions été à des années-lumières de tenir un débat sur les avantages des conjoints de même sexe.

La situation a évolué, très lentement et à un rythme très frustrant, j'en suis sûr, pour les nombreux militants qui ont consacré leur vie à cette cause. Comme on l'a souvent dit, c'est comme faire tourner un superpétrolier d'un degré à la fois. Grâce à des gens dévoués comme le député de Burnaby—Douglas, nous avançons socialement; j'aimerais lui rendre hommage aujourd'hui.

Le mouvement en faveur des droits des gais est sans doute le dernier mouvement de défense des droits de la personne de notre époque. Nous avons négligé de régler cette question au cours du siècle dernier. L'émancipation des noirs et l'avancement des grands dossiers sociaux aux États-Unis ont généré un véritable mouvement en faveur des droits de la personne. Plus récemment, chez nous, les autochtones ont finalement occupé l'avant-plan en matière de justice sociale. C'était un autre mouvement de défense des droits. Les seuls droits qui restent à défendre, et que nous avons négligés en n'accordant pas suffisamment d'attention à une discrimination très réelle qui existe encore, sont les droits des gais et des lesbiennes.

Je suis toujours frustré et triste d'entendre les discours de certains membres des partis extrémistes de la droite. Pour les extrémistes, il est toujours plus facile de promouvoir la haine que de la combattre. On obtient plus facilement l'attention par des arguments qui sèment la discorde que par des arguments qui rapprochent et font avancer la société. Je ne suis pas seulement en colère, je suis triste de voir le ton et le contenu des arguments que nous a présentés le parti extrémiste de droite.

C'est désolant, et un peu effrayant, de penser que des Canadiens peuvent souffrir à ce point d'un retard de développement par rapport à certaines questions sociales. C'est le seul mot qu'on puisse employer. Ils ont en quelque sorte été retenus. Les autres ont avancé et eux sont restés derrière. Ils n'ont pas pu, ou n'ont pas voulu, écouter ou comprendre ce que le reste du pays leur disait.

Dans un sens, le Parti libéral n'a pas de quoi pavoiser non plus. Il a proposé un amendement qui, en réalité, satisfait les extrémistes de droite. Le Parti libéral a en effet proposé un amendement qui prévoit l'inclusion dans le projet de loi C-23 d'une définition du mariage qui date de 1880, cela pour apaiser et calmer les extrémistes de droite qui ne pouvaient supporter l'idée d'un projet de loi progressiste qui, à leur avis, menaçait le caractère sacré du mariage.

Lorsqu'on a proposé, dans les années 1880, d'inclure cette définition du mariage dans le common law britannique, le mariage était assorti d'autres caractéristiques. Par exemple, des individus de race différente ne pouvaient se marier. À l'époque, les mariages interraciaux étaient illégaux. Nous avons maintenant dépassé cela. Nous avons évolué, nous avons fini par comprendre que c'était ridicule et nous avons éliminé les dispositions à cet égard. À l'époque, il était légal de battre sa femme, pour autant qu'on n'utilise pas pour le faire un bâton d'un diamètre plus gros que celui de son pouce. C'était ridicule. Cette disposition était désuète et il fallait régler le problème; nous avons donc modernisé l'institution du mariage de manière à supprimer ces anachronismes. Il y a une autre barrière dont nous devons encore nous débarrasser et que les partis d'extrême-droite jugent absolument horrifiante de nos jours; il s'agit des unions et des mariages entre partenaires de même sexe.

Je suis très fier que mes enfants aient grandi dans un voisinage où ils ont appris que les familles peuvent prendre toutes sortes de formes et qu'il n'existe pas une définition unique de la famille nucléaire parfaite. En fait, j'ai parmi mes voisins une famille formée d'une mère, d'un père et de deux enfants. Il y a aussi une mère seule avec ses enfants, et ils forment une famille. Il y a également deux mères et des enfants qui forment, eux aussi, une famille. Mes enfants ont grandi en étant sensibilisés à ce phénomène et ils n'en ont pas peur. Il n'y a rien d'effroyable à accorder à d'autres groupes les mêmes droits que ceux dont nous jouissons nous-mêmes.

 

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Les extrémistes de droite ont toujours l'impression, on dirait, que le fait d'étendre certains droits à un groupe restreint les droits de tous les autres. Rien ne saurait être plus éloigné de la vérité. En réalité, nous accroissons les droits dont nous jouissons tous, car, lorsque nous progressons tous ensemble, c'est à ce moment-là seulement que notre société s'améliore vraiment. Si nous abandonnons à son sort un groupe important, peu importe lequel, nous manquons au principe de l'égalité des droits et des chances.

Certains des arguments avancés par le Parti réformiste—désolé, par le parti d'extrême droite—sombrent dans le ridicule. Une critique formulée par ce parti veut que le projet de loi accorde des «prestations pour relations sexuelles» et ouvre la porte à des abus pour ce qui est de l'admissibilité aux prestations. Ces députés disent que des hommes hétérosexuels vont se prétendre gais pour profiter d'un régime d'assurance dentaire, par exemple. Ils cherchent désespérément des moyens de critiquer le projet de loi, car nous savons tous que cela est absurde. Mais c'est le genre d'argument que ces gens-là ont invoqué.

Les réformistes ont voté systématiquement contre toutes les mesures visant à instaurer l'égalité en cette matière. Depuis mon élection à la Chambre, en 1997, cela transparaît dans tous leurs propos. En 1996, la porte-parole réformiste, Sharon Hays, a déclaré au cours du débat sur les modifications de la Loi canadienne sur les droits de la personne que le Parti réformiste avait décidé de s'opposer à l'ajout de l'orientation sexuelle parmi les motifs prohibés de discrimination parce que c'était à la fois inutile et peu judicieux. Elle recommandait ainsi qu'une partie non négligeable de notre population soit privée de la protection de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

Je me demande parfois si mes vis-à-vis réfléchissent vraiment à ce qu'ils disent et font. Je me demande vraiment s'ils ont bien réfléchi ou s'ils se laissent aller à une réaction épidermique et émotive ne reposant sur aucun principe que nous pourrions partager avec eux.

Au début de mon intervention, j'ai demandé aux députés de ne pas oublier que nous parlons ici d'un projet de loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les Lois du Canada, rien de plus. Il vise à permettre aux travailleurs qui le désirent de faire bénéficier de leurs avantages une personne autre qu'un conjoint au sens traditionnel du terme.

Des modifications en ce sens ont déjà été apportées dans la plupart des conventions collectives et dans beaucoup de lois provinciales. Donc, il ne fait qu'adapter les lois fédérales à ce qui constitue déjà la norme. Il n'y a rien de radical ou de révolutionnaire là-dedans. Le projet de loi ne fait que confirmer ce que la société a déjà accepté comme norme.

Nous croyons que ce projet de loi est la réponse gouvernementale attendue depuis longtemps à des décisions de la Cour suprême. S'il nous faut une orientation ou s'il nous faut connaître l'autorité morale qui sous-tend le projet de loi, il suffit de se reporter à des affaires comme la cause M. c. H. Il s'agissait d'une décision concernant le paiement d'une pension alimentaire après la fin d'une relation entre personnes de même sexe. Tôt ou tard, nous savions qu'il nous faudrait faire face à la musique. Cette affaire, qui a eu beaucoup de retentissements, a contribué à amener le Canada à finalement s'occuper une fois pour toutes de ce qui se passe après la fin d'une relation entre personnes de même sexe et à se demander s'il faut traiter de telles ruptures comme les ruptures d'unions plus conventionnelles.

Cette affaire a été très utile au Canada. Elle a permis de finalement jeter un oeil sur toute la question. Je crois que le débat de ces derniers jours nous a tous été utile. J'attends avec impatience l'adoption du projet de loi C-23 parce que je crois sincèrement que nous donnons corps à l'un des derniers grands droits civils de notre époque. Je suis fier d'avoir la chance d'être député aujourd'hui et de pouvoir ainsi jouer un rôle dans l'adoption du projet de loi.

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en 1996, lors du débat sur le projet de loi C-33, le gouvernement a dit qu'il n'avait absolument pas l'intention d'accorder des avantages aux conjoints de même sexe. Quatre ans plus tard, nous en sommes rendus là.

Le projet de loi C-23 n'est-il pas seulement une étape qui mènera à d'autres modifications concernant l'institution du mariage ou la définition du mariage? Le député peut-il me dire s'il voudrait que d'autres modifications soient apportées à la définition du mariage?

 

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M. Pat Martin: Monsieur le Président, j'ai demandé aux gens de reconnaître que le titre du projet de loi dit bien qu'il s'agit simplement de moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans nos lois. C'est un peu de la paranoïa que de penser que ce projet de loi est le début d'un mouvement dangereux vers autre chose. Qu'on n'y accorde pas plus d'importance qu'il en a en réalité. Il ne fait que moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans de nombreuses lois où il est question de ce genre de partage.

Pour ce qui est de la définition du mariage, oui, je crois qu'elle devrait être modernisée. Comme je l'ai dit, celle que nous utilisons actuellement est inspirée de la common law britannique des années 1880. Beaucoup de choses ont dû être changées depuis ce temps pour refléter les valeurs morales de notre société et ainsi de suite. À mon avis, il ne faut pas essayer de légiférer sur des questions de moralité. Cet argument a déjà été avancé. Si nous lisons Oliver Wendell Holmes, nous verrons qu'il disait à cette époque, soit dans les années 1880, qu'on ne pouvait pas légiférer sur des questions de moralité, que l'État n'avait pas d'affaire à légiférer sur ce genre de questions. Nous pouvons légiférer sur des questions d'égalité, comme le signalait à juste titre la députée de Vancouver-Est, mais nous ne pouvons pas légiférer sur des questions de moralité.

Je dirais que le parti de l'extrême droite dans notre pays voit les choses complètement à l'envers. Qu'il cesse d'essayer de légiférer sur des questions de moralité et qu'il admette qu'il est nécessaire de légiférer sur des questions d'égalité.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je pense qu'il est regrettable que le député du NPD continue d'utiliser les termes extrémiste et haineux, qui affaiblissent le débat. Ce sont des étiquettes qui minent la crédibilité de la Chambre. Certes, chacun a droit à son opinion sur différentes questions. Selon notre parti, le mariage devrait unir un homme et une femme. C'est écrit dans l'exposé de notre politique.

Je tiens à rappeler à la Chambre qu'au mois de juin dernier, nous avons présenté une motion demandant à la Chambre d'affirmer que le mariage est, en droit, l'union d'un homme et d'une femme et de tout faire pour qu'il le reste. Une majorité de députés, peut-être même tous les députés néo-démocrates présents ce jour-là, ont voté contre cette motion. J'admets qu'ils puissent avoir une opinion différente.

Je suppose que je voudrais des éclaircissements de la part du député. Est-ce que la position officielle du NPD est que nous ne devrions pas définir le mariage comme étant l'union d'un homme et d'une femme? Ce parti veut-il que la définition légale de mariage comprenne l'union entre personnes de même sexe?

M. Pat Martin: Monsieur le Président, rien n'empêche les organismes auxquels appartient le député d'avoir une définition du mariage qui soit différente de celle qu'on trouve dans la loi. Ce qui existe dans la loi et ce qui existe dans la religion du député sont deux choses différentes. Rien n'empêche le député d'adopter un règlement dans son Église ou dans le mouvement évangélique de droite de la majorité bien pensante, selon lequel seule l'union entre un homme et une femme ne sera considérée comme acceptable.

Cependant, dans la loi, où il nous faut une définition juridique de la relation contractuelle entre partenaires, nous pouvons faire preuve d'une plus grande flexibilité et d'une plus grande générosité.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part à ce débat, un débat qui nous a beaucoup appris, un débat qui a suscité beaucoup d'émotions, des émotions qui à mon avis reflètent celles ressenties par de nombreux Canadiens à travers le pays à l'égard de cette question.

Le projet de loi C-23, Loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les lois du Canada, est on ne peut mieux intitulé. Il est sûr qu'un élément de modernisation et un élément d'obligation se dégageront de cette mesure législative de type omnibus qui modifie 68 lois fédérales.

Monsieur le Président, vous et d'autres présidents avant vous avez entendu pas mal de discussions souvent très animées sur cette question, qui est une source de consternation. Je suis sûr que beaucoup de députés ont reçu pas mal de lettres à ce sujet et ont eu droit à des réactions positives et négatives à l'égard de ce projet de loi. Chaque fois qu'une question d'orientation sexuelle ou autre semble ou risque d'être perçue comme empiétant sur les valeurs et les définitions traditionnelles, on peut s'attendre à coup sûr à une réaction souvent motivée par la crainte, l'incompréhension et l'émotion.

 

. 1220 + -

Nous devrions faire preuve de modération et de compréhension, et faire tout notre possible pour ne pas envenimer les choses comme nous l'avons fait dans d'autres cas.

Je ne veux établir ici aucune corrélation directe avec ce qui se passe sur la côte Est, où une décision rendue par la Cour suprême a suscité pas mal de débats sur les droits de pêche des autochtones, mais encore une fois, cette décision a provoqué toutes sortes de réactions et d'émotions qui ont frisé la violence, en fait qui ont mené à des actes de violence. Il nous incombe en tant que députés de ne pas envenimer une situation déjà explosive. Or, nous avons tendance à envenimer la situation.

Il ne fait aucun doute que ces problèmes ne disparaîtront pas, même si cette mesure législative est adoptée. Quelle que soit la décision qui sera prise en fin de compte lorsque ce projet de loi sera adopté, s'il l'est, le problème lui-même ne disparaîtra pas.

Ceci dit, j'ai personnellement eu la chance de rencontrer des électeurs de ma circonscription, des gens qui suivent ce débat de très près. Dernièrement par exemple, j'ai rencontré Ernie Curry d'Antigonish, qui est le président de la Ligue catholique des droits de l'homme de la région d'Antigonish. Le 3 avril, j'ai rencontré M. Curry et son groupe et les discussions que nous avons tenues sur le contenu du projet de loi C-23 ont été à mon avis très productives.

À la fin de notre longue rencontre, nous n'avions peut-être pas réussi à nous mettre d'accord sur tous les points en litige, mais au moins nous avions pu nous exprimer. Ces discussions ont été très ouvertes et franches et les deux côtés ont pu échanger des renseignements et des points de vue. J'espère d'ailleurs que c'est ce genre de processus qui finira par prévaloir ici. C'est le genre d'analyse qui porte fruits et qui donne aux participants la chance de comprendre à tout le moins tous les signes en cause.

Comme je l'ai souligné, nous ne nous sommes peut-être pas entendus sur tous les points, mais nous avons à tout le moins pu mieux comprendre les divers enjeux. J'ai été très heureux d'avoir la chance d'entendre ce qu'il avait à dire et d'entendre parler des efforts des membres de son groupe, de leur dévouement et de l'excellent travail qu'ils accomplissent.

Monsieur le Président, comme vous n'êtes pas sans le savoir pour avoir suivi ce débat et y avoir participé vous même à titre de député de la circonscription de Kingston et les Îles, ce projet de loi ne vise pas à modifier la définition juridique du mariage ou des époux. Ce n'était d'ailleurs pas là l'intention du projet de loi. La définition qui se trouve dans le projet de loi C-23 est en fait un ajout de dernière heure. Mais il reste évident qu'il ne s'agit pas de modifier, d'altérer ou de diminuer en quoi que ce soit la définition du mariage, et encore moins de s'attaquer à l'institution du mariage.

Bien des définitions ont été présentées à la Chambre, par les députés du Parti réformiste pour la plupart. Ces amendements ont été proposés de bonne foi en vue d'apporter une plus grande clarté à une définition que nous considérons comme étant la conception traditionnelle du mariage.

Ce fut la même chose au comité de la justice. Le secrétaire parlementaire a proposé d'inclure cette définition du mariage. Cette initiative a obtenu l'appui du Parti conservateur. Étant membre du comité de justice, je puis confirmer que nous avons appuyé cette définition.

Le 22 mars, le gouvernement a présenté cet amendement et le comité s'est prononcé pour l'inscription dans le projet de loi du principe selon lequel l'union d'un homme et d'une femme correspond à la conception traditionnelle du mariage. Cela n'a rien à voir avec la conception du mariage que d'autres ont proposée. Le Parti conservateur n'a pas l'intention de partir en guerre contre ce qui est considéré comme étant une notion traditionnelle du mariage.

Étant moi-même membre du comité, même si j'ai souscrit à cet amendement, j'estime que dans bien des cas c'est n'est pas nécessaire. Il vaut peut-être mieux de ne pas préciser que le mariage est ce que chacun considère comme étant ce que cette union représente pour les deux personnes sur le plan spirituel, religieux, compte tenu de leurs origines et de leur éducation.

 

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Il se trouve parfois, je le crains, que nous nous laissons si bien prendre au jeu de la pensée cartésienne qu'il nous faut tout mettre par écrit. Cela nous vient du début des années 1980, lorsqu'il a été question de rapatrier la Constitution et de nous pourvoir d'une charte des droits et des libertés prévoyant tous les droits et toutes les obligations reconnus aux habitants de ce pays.

Cela étant, il est inévitablement à craindre d'avoir négligé un élément ou un autre. Dans le common law, certaines choses sont acceptées et d'autres sont considérées comme étant la pratique, une évolution normale, si l'on préfère, des effets de la loi , des réactions des personnes visées par cette loi et de leur interaction avec le reste de la société.

Il est de plus en plus fréquent de nos jours que le gouvernement s'immisce dans les affaires privées des Canadiens, mettant tout par écrit et rappelant aux individus la conduite à tenir en telle ou telle circonstance, et, essentiellement, les plaçant devant le fait accompli. Cela fait penser à des bardeaux qui se superposent sur un toit. Le gouvernement ne semble pas envisager d'alléger ces différentes superpositions de bardeaux avant d'en rajouter de nouvelles. L'administration devient de plus en plus intrusive et s'immisce toujours et plus dans le quotidien des Canadiens.

Il faudra, je le crains, mettre un frein à cette tendance. Nous devrions réexaminer les décisions que nous nous proposons de prendre. Prenons l'exemple du texte de loi sur l'enregistrement des armes à feu. Nous savons que ce texte a été présenté en réaction à un affreux incident ayant entraîné la mort tragique de jeunes Montréalaises. Pourtant, plutôt que d'essayer de s'attaquer à la source du problème ou au problème lui-même, le gouvernement de l'époque, c'est-à-dire le gouvernement actuel, a réagi comme s'il était mû par un réflexe rotulien, et il a mis en place un système de registre qui est lourd, bureaucratique et importun et qui n'a en fait absolument aucun effet sur les criminels. Il se concentre sur les individus qui mènent des activités tout à fait légales et pertinentes sur le plan personnel, telles que le tir au pigeon d'argile, la chasse ou l'utilisation d'armes à feu à des fins récréatives.

Qu'on soit d'accord ou non avec cela, certaines personnes choisissent de le faire et c'est leur droit. Pourtant, le gouvernement a ciblé ces gens comme un groupe qui doit faire l'objet d'une loi et qui doit presque être calomnié en vertu de ce type de loi.

On pourrait citer de nombreux exemples. Il n'est pas surprenant, dans un sens, que le gouvernement, pour cette question, ait choisi d'inclure la définition du mariage dans cette mesure législative. Bien entendu, le gouvernement, comme pourraient le laisser entendre certains, dont moi, devient assez suffisant, dépourvu d'idées, très modéré et quelconque dans son approche de l'avenir du pays.

Il est évident que, dans le contexte de cette mesure législative, à la réaction des gens qui a peut-être été aussi négative que pour la question de la subvention de la LNH, le gouvernement, aimant être à l'avant-garde du progrès, a suivi le sens du vent et il a inséré à la dernière minute la définition du mariage. Peut-être aurait-il dû le faire dès le début, mais c'est un gouvernement qui se laisse manifestement complètement mener par le bout du nez par les sondages d'opinion publique.

La ministre de la Justice a décidé, en préparant le terrain pendant des semaines pour la présentation du projet de loi, que ce n'était pas nécessaire et que le mariage n'était pas en cause. Elle s'est donné beaucoup de mal pour rappeler aux Canadiens que le projet de loi ne portait pas sur le mariage. Voilà ce qui se passe lorsque le gouvernement est coincé.

Comme je l'ai dit, nous sommes d'accord pour que la définition paraisse dans la Loi d'interprétation, même si, comme vous le savez, monsieur le Président, puisque vous avez une formation en droit, cela n'aura aucune incidence juridique réelle sur des lois telles que la loi sur l'obligation alimentaire et la Loi sur le divorce. Ces types de loi ne seront pas touchés par l'ajout de cette règle d'interprétation dans le projet de loi C-23.

Je sais que le Parti réformiste a présenté une motion visant à élargir la définition du mariage et à ajouter au projet de loi cette nouvelle définition. Je le félicite d'avoir eu la motivation de proposer cet amendement, mais je ne comprends pas nécessairement son raisonnement ni la raison pour laquelle il a décidé de le faire.

 

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J'appuierai un grand nombre des amendements présentés par le député de Calgary-Centre qui portent sur la définition du mariage et de conjoint dans les différentes lois qui seront touchées par le projet de loi C-23. Comme je l'ai dit, cela n'aura aucun effet drastique sur le fonctionnement des tribunaux canadiens de la famille.

Je répète que le projet de loi C-23, qui est une loi omnibus, confère aux couples de même sexe et de sexe opposé les mêmes avantages et obligations sur le plan financier. Il reste un critère auquel une personne devrait répondre ou un obstacle qu'elle devrait surmonter pour bénéficier de cet avantage ou y devenir admissible.

Beaucoup ont dit que le projet de loi découlait de l'action des tribunaux et plus particulièrement du jugement de la Cour suprême dans l'affaire M. c. H. Aux termes de ce jugement, le gouvernement ne peut pas limiter les avantages ou les obligations en exerçant une discrimination à l'endroit des unions de fait de personnes de même sexe. Il est en effet contraire aux principes d'équité consacrés dans la Charte canadienne des droits et libertés de même que dans la Loi canadienne sur les droits de la personne de refuser de traiter les couples de même sexe de façon égale devant la loi.

Ce jugement établit un principe très simple. Les tribunaux déclarent très clairement que les couples homosexuels ne peuvent être traités de façon différente sur le plan fiscal. Il ne s'agit pas d'un jugement moral. Il ne s'agit pas d'une tentative de la part des tribunaux de fouler aux pieds l'institution sacrée du mariage. Il s'agit simplement de la reconnaissance juridique d'un critère fiscal qu'il faut appliquer quand il est question de relations humaines.

L'orateur précédent a dit avec beaucoup d'éloquence qu'il fallait reconnaître que la mesure à l'étude parle d'humanité et incite à traiter les êtres humains avec le même niveau d'équité, avec le même critère judicieux et équitable qui s'applique partout dans notre beau grand pays. Le député et d'autres avec lui ont rappelé que le mouvement pour la défense des droits civiques, par exemple, n'aurait pas pu s'épanouir si notre conception des relations interpersonnelles n'avait pas été définie sans égard à la race, au sexe, au bagage culturel ou à la langue. Tous ces stigmates qui risquent malheureusement d'être attachés aux individus dans notre société doivent être considérés d'une façon impartiale.

La justice est censée être aveugle. Nous avons vu la représentation de la justice, cette femme aux yeux bandés portant l'épée et la balance. C'est ainsi que la loi est censée déterminer la façon dont nous traitons les individus dans la société. Cela ressemble à la façon dont les femmes ont été traitées jusqu'à récemment dans notre pays. Elles n'ont obtenu le droit de vote qu'en 1940. Elles n'ont été autorisées à posséder des terres que très récemment, à la fin du siècle dernier. Cela s'est passé à une période où la situation était très explosive et où les débats étaient parfois très acrimonieux dans notre pays. Pourtant, le tissu moral du pays ne s'est pas déchiré. Le pays n'a pas été réduit en cendres. Il a survécu.

À mon avis, il est scandaleux de laisser entendre que le pays sera jeté dans le chaos et qu'il sera complètement détruit si nous accordons un traitement et des avantages fiscaux équitables aux partenaires de même sexe.

Ce projet de loi prévoit des obligations et des droits équitables pour les personnes qui ont cotisé à un fonds. Il s'agit souvent de personnes qui pourront recevoir des avantages provenant d'un fonds auquel elles ont cotisé et dont elles désirent maintenant bénéficier.

Ce projet de loi fait une nette distinction entre personnes mariées et personnes non mariées. Même si le projet de loi parle du mariage, il ne va pas jusqu'à définir ce qu'est un conjoint, pas plus qu'il ne tente d'inclure dans cette notion, ou d'en exclure, les personnes qui ont choisi un certain mode de vie. Il protège l'institution du mariage, en reconnaît l'importance et accepte l'opinion évidente que le mariage est une belle chose.

 

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Le Parti progressiste conservateur a été le premier à dire qu'il n'y a absolument rien de mal à reconnaître la valeur et l'importance de ce choix. Un choix n'exclut pas l'autre. L'opinion d'une personne et son attachement personnel à une conception du mariage doivent être respectés, et c'est fort bien.

Le projet de loi ne sape pas l'institution du mariage. Il n'enlève rien à ceux qui ont choisi de vivre leur vie d'une certaine manière, d'adopter un certain mode de vie et de mariage. Le mariage n'est qu'une possibilité parmi d'autres pour vivre ses relations personnelles avec d'autres personnes du même sexe ou de sexe opposé.

On a prétendu que, comme le projet de loi confère aux couples de même sexe des avantages et des obligations déjà reconnus dans notre société aujourd'hui, il va d'une certaine manière dénigrer le mariage que certains diraient plus traditionnel ou que certains appellent le choix de la majorité. Mais la majorité doit respecter la minorité. C'est l'un des principes fondamentaux de notre pays, et c'est là que se situe le lien avec d'autres groupes minoritaires qui ont été victimes de discrimination. Nous avons eu à la Chambre des débats marquants sur les droits des autochtones, les droits des femmes, les droits des noirs, le mouvement des droits civils. Il existe une corrélation, car il s'agit d'une oppression qu'il faut lever.

Le changement le plus important apporté par ce projet de loi qui propose d'englober indifféremment les conjoints de même sexe et les conjoints de sexe opposé vivant ensemble depuis au moins un an, c'est que ces couples auront ainsi les mêmes avantages et les mêmes obligations.

On a beaucoup parlé de la conjugalité. Pour certains, une relation conjugale se limite aux relations sexuelles. Dans la pratique, c'est inexact. Certains députés ont émis de sérieuses réserves au sujet de la définition. Permettez-moi de vous renvoyer aux paragraphes 59 et 60 du jugement de la Cour suprême dans l'affaire M. c. H, dans lesquels elle approuve les critères d'une relation conjugale. Ils avaient été établis par la Cour de district de l'Ontario dans l'affaire Molodowich c. Penttinen, qui remonte à 1980, et qui se trouve dans 17 R.F.L., deuxième édition, 376.

Selon la Cour suprême, ce jugement

      ...énonce les caractéristiques généralement acceptées de l'union conjugale, soit le partage d'un toit, les rapports personnels et sexuels, les services, les activités sociales, le soutien financier, les enfants et aussi l'image sociétale du couple. Toutefois, il a été reconnu que ces éléments peuvent être présents à des degrés divers et que tous ne sont pas nécessaires pour que l'union soit tenue pour conjugale.

C'est clair comme de l'eau de roche. Les relations conjugales ne devraient pas être limitées à une définition très stricte.

Je sais gré aux autres députés de leurs nombreuses interventions au sujet de ce projet de loi. Je sais gré aux électeurs de ma circonscription, Pictou—Antigonish—Guysborough, en Nouvelle-Écosse, et de partout au Canada de l'abondant courrier qu'ils m'ont envoyé. Le Parti progressiste conservateur du Canada a le plus grand respect pour l'opinion des autres au sujet de ce projet de loi. Nous avons choisi de laisser les députés de notre parti voter selon leur conscience et d'exercer un vote libre, ce que les autres partis ne feront pas, si je ne m'abuse.

Je suis heureux d'avoir pu faire part à la Chambre de mes humbles commentaires concernant le projet de loi C-23.

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député a dit que nous mettons trop de choses par écrit concernant cette question. À ce qu'il me semble, les tribunaux ont du mal à interpréter la loi à l'heure actuelle, justement parce que les lois manquent souvent de précision.

 

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Le député veut-il dire que les lois devraient être rédigées dans un style vague et ambigu? Ne serait-il pas préférable qu'elles soient définies très clairement et le plus précises que possible?

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, il y a deux lignes de pensée. À une certaine époque, au Canada, en particulier peut-être lorsque nous reproduisions davantage le modèle britannique de la common law, on acceptait certaines réalités. Par exemple, on acceptait le principe selon lequel il ne fallait pas entrer dans la maison de son voisin ou passer sur sa propriété sans autorisation. Tout cela a changé avec le temps à tel point qu'il faut tout écrire aujourd'hui. La difficulté qui se présente quand on écrit tout, c'est qu'il y a inévitablement des omissions.

On n'arrivera jamais à prévoir absolument tout. On ne pourra jamais imaginer tous les tenants et les aboutissants de la loi ou de la dynamique des relations humaines. L'être humain est beaucoup trop complexe, ce n'est pas une créature dont on peut prévoir l'évolution avec précision. En donnant des définitions étroites de tout ou, comme le député le propose, en utilisant pour chaque cas des définitions précises, je crains qu'à l'occasion nous adoptions des lois restrictives qui excluront certains groupes.

Je conviens toutefois qu'il est certainement bon à l'occasion de voir à ce que les définitions soient claires.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député du Parti progressiste conservateur qui vient de parler est, comme toujours, vague et évasif; il hésite à prendre nettement position. Il parle encore une fois de l'importance de certains aspects de cette question et il répète qu'il est heureux d'entendre les opinions à ce sujet, mais chaque fois que je l'entends, je me demande toujours, en bout de ligne, quelle est sa propre position. Je n'arrive pas à faire la part des choses.

Je me rappelle que, durant les travaux du comité, le député a voté contre une définition précise du mariage. Il a voulu qu'on rejette l'amendement de la ministre de la Justice étant donné que le projet de loi n'affecte pas directement le mariage. Puis, lorsque la motion de la ministre de la Justice a défini le mariage comme l'union entre un homme et une femme, il a voulu qu'on exclue cette partie. Il a voté en faveur de l'exclusion de cette partie de la définition, si je me souviens bien.

Son parti était partagé à ce sujet déjà en juin 1999, lorsque la Chambre des communes a été saisie d'une motion demandant si on acceptait que le mariage soit défini comme l'union entre un homme et une femme, à l'exclusion de toutes les autres. Cette motion a été adoptée par une marge de quatre contre un, mais son parti était divisé à ce sujet. La moitié des membres de son groupe parlementaire n'étaient pas certains si le mariage devait, oui ou non, être défini comme l'union entre un homme et une femme. Cette attitude est conforme à celle du député au Comité de la justice, lorsque nous avons étudié la motion de la ministre de la Justice.

On serait porté à croire que les députés de ce parti veulent affirmer l'importance du mariage, mais ne veulent pas le définir. C'est très frustrant pour moi et, je crois, pour bien des Canadiens, qui aimeraient voir ce parti prendre position et cesser de tergiverser ainsi. Le député peut-il expliquer cela? J'ai peut-être mal interprété ses interventions.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, le député de Calgary-Centre a mal interprété ce que j'ai fait. S'il était attentif, il réaliserait qu'il fait erreur.

Nous en sommes à penser que nous ne devrions pas laisser le Parti réformiste dénaturer les faits. Je sais que je ne suis pas censé utiliser ce genre de langage à la Chambre, mais il est très trompeur qu'un député prenne la parole et rapporte incorrectement la position d'un parti ou d'une personne, et je m'en indigne vivement.

En ce qui concerne la nature des conservateurs, il y a de nombreux députés réformistes qui pensent qu'on ne peut être tolérant si l'on est un conservateur. Ils pensent qu'on ne peut avoir un esprit ouvert ni examiner les choses de tous les angles si l'on est un conservateur. Ils pensent qu'il faut faire la loi et élaborer une position extrême, alors qu'il n'en est rien.

 

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Ce n'est pas ainsi que de nombreux Canadiens interprètent le fait d'être conservateur. À maintes occasions, les réformistes ont aussi essayé de montrer que le très honorable Joe Clark n'était pas un conservateur, tout comme certains députés de notre parti. Ils ont dit de Joe Clark qu'il était un homme tourné vers le passé. C'est peut-être vrai, et je vais vous expliquer pourquoi, monsieur le Président. Il faisait dans le passé des choses que les gens pensent à faire aujourd'hui. Si c'est là la définition d'un homme tourné vers le passé, cela définit fort bien le très honorable Joe Clark. Il est un être d'avant-garde qui a grandement contribué à la croissance et au développement de notre pays et il est un conservateur convaincu, dans le sens que je donne à ce terme.

Je veux remercier le député d'avoir présenté de façon complètement erronée la position du Parti progressiste conservateur. Nous sommes parfaitement à l'aise avec la position que nous avons adoptée, et je pense qu'il en est de même de la majorité des Canadiens, contrairement aux 10 p. 100 d'extrémistes qui essaient de se trouver une identité et une raison de vivre au sein du Parti réformiste du Canada.

M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je n'ai pu m'empêcher d'écouter le député parler de Joe Clark et je crois qu'une correction s'impose. Joe Clark a été le ministre le plus influent durant les neuf années du gouvernement Mulroney. Les conservateurs ont augmenté le fardeau fiscal à 71 reprises, et ils ont plus que doublé la dette nationale de 300 milliards de dollars. Voilà de l'extrémisme.

C'est d'ailleurs pourquoi notre pays se trouve dans une situation désespérée. Notre fardeau fiscal est le plus lourd de tous les pays industrialisés et nous avons aujourd'hui une dette de près de 600 milliards de dollars, qu'il faudra des décennies à rembourser. Nous devons à nos enfants de ne pas embourber l'économie plus que ne l'ont fait les conservateurs sous la direction de Joe Clark, notamment. Je siège ici au nom de mes enfants et de tous les jeunes Canadiens, pour remettre le pays sur la bonne voie.

Je reproche au député de tenir des propos élogieux au sujet de Joe Clark, alors que ce dernier et Brian Mulroney ont représenté les forces les plus négatives et les plus destructrices jamais vues dans notre pays.

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, gardons-nous bien de dire quoi que ce soit de positif à la Chambre. De toute façon, le député d'en face en serait bien incapable car tout ce que fait l'opposition, c'est de tenir des propos négatifs et de répandre des faussetés au sujet des députés, des partis et des faits.

Le fait d'attribuer l'entière responsabilité de la dette à un seul parti est une fausseté tellement grosse qu'elle rappelle le style des libéraux. Le député avance un argument qui n'a aucune pertinence. Il est passé de l'homophobie à la phobie des impôts. Aussi ridicule que cela puisse être, c'est le genre et le niveau de discours auxquels nous devons nous attendre de la part du Parti réformiste de l'ouest du Canada.

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, le député du Parti progressiste conservateur a qualifié d'extrémiste l'opinion exprimée. Il a dit que nous sommes des extrémistes parce que nous souhaitons voir la définition du mariage limitée à l'union d'un homme et d'une femme au Canada.

M. Peter MacKay: Ce n'est pas du tout ce que j'ai dit. C'est une fausseté.

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, c'est ce que nous avons entendu à la Chambre. Le député nous a qualifiés d'extrémistes et a dit que nous tentions d'exclure certaines personnes, alors que nous disons que le mariage devrait demeurer l'union d'un homme et d'une femme. C'est la politique de notre parti. C'est aussi la position que la Chambre a endossée il y a neuf mois. Si c'est la position du parti de mon collègue, a-t-il l'intention de la défendre?

M. Peter MacKay: Monsieur le Président, je vais parler très lentement pour que le député puisse comprendre.

Je souscris personnellement à l'idée selon laquelle un mariage s'entend de l'union d'un homme et d'une femme. À sein du Parti progressiste conservateur, ce grand parti national que le député et ses cohortes cherchent à faire disparaître, nous avons choisi de laisser les gens voter librement. Cette décision reconnaît le fait que les députés du parti peuvent avoir des points de vue différents. C'est la liberté, une notion qui n'est pas familière au Parti réformiste. Ses députés sont brusquement ramenés dans le rang lorsqu'ils osent déroger à la façon de penser du parti. Ils sont relégués aux banquettes arrières, expulsés du parti ou priés d'abandonner la politique s'ils ont un point de vue différent.

Peut-être ne sommes-nous pas des conformistes de ce genre, mais nous avons décidé de respecter les députés et les divers points de vue des Canadiens sur cette question qui, à certains moments, est très émotive et sème la discorde.

 

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[Français]

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme)(Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir, aujourd'hui, sur le projet de loi C-23, Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

[Traduction]

Je partagerai mon temps de parole avec un de mes collègues.

Je tiens à souligner à la Chambre que je suis fière d'intervenir dans ce débat. J'ai écouté les commentaires de divers députés, dont celui de Pictou—Antigonish—Guysborough et celle de Vancouver-Est. Ils ont parlé, comme le font les partis nationaux, des droits de la personne.

J'ai entendu un député du Bloc souligner que le député de Burnaby—Douglas est depuis longtemps un député homosexuel et qu'il a eu le courage d'intervenir au sujet de ces questions à une époque où ce n'était pas populaire. Je souligne l'apport du député.

Toutefois, il faut aussi un gouvernement qui fasse preuve de volonté politique pour faire progresser un dossier. Depuis 1993, le gouvernement a agi de façon progressive et régulière, en commençant avec les projets de loi C-33 et C-41, en passant par le projet de loi du Conseil du Trésor qui traitait des questions d'avantages et de pensions et en aboutissant aujourd'hui au projet de loi dont nous sommes saisis. C'est le point culminant d'une longue série d'étapes progressives nous ayant amenés au point où nous voyons disparaître le dernier bastion de discrimination dans les lois du pays. Je suis fière d'appartenir à un gouvernement et à un parti qui ont eu le courage d'agir de la sorte.

Ma plus grande préoccupation est liée au fait que j'ai entendu à la Chambre ce que je considère être la propagation de la haine et de messages haineux par le parti de l'Alliance.

Il ne s'agit pas uniquement de la question du mariage. Le projet de loi, comme l'a dit à maintes reprises auparavant la ministre de la Justice, ne concerne pas le mariage. Il a trait aux droits de la personne. Il y est question de droits civils et politiques d'un groupe de Canadiens à qui ces droits ont été niés pendant longtemps.

J'ai entendu les députés de l'Alliance canadienne faire des commentaires qui me préoccupent beaucoup parce que je crois qu'ils véhiculent des préjugés, voire des préjugés dangereux qui pourraient donner à penser aux gens qui écoutent que nous avons beaucoup de raisons de haïr et de craindre les gais, les lesbiennes et les bisexuels et même de leur nier leurs droits humains.

Je suis troublée d'avoir entendu le député de Nanaïmo—Cowichan et le député de Calgary-Centre faire certaines affirmations en leur donnant des allures de faits scientifiques. Il y a certains stéréotypes très graves qui sont dangereux.

Ainsi, le député de Nanaïmo—Cowichan a déclaré que le féminisme créait des gais et des lesbiennes. Il a dit que les familles monoparentales et le divorce créaient des gais et des lesbiennes au Canada. Je voudrais citer les paroles du député de Nanaïmo—Cowichan même si elles ne méritent pas d'être répétées, car elles montrent l'extrémisme du parti auquel il appartient. Il a déclaré que:

    Un climat de confusion entre les sexes s'est installé progressivement, et de jeunes hommes élevés dans des familles monoparentales dominées par des femmes ont vécu une crise identitaire. Il s'en est suivi une augmentation du nombre d'homosexuels militants, de femmes et d'hommes qui révélaient leur homosexualité et qui exigeaient aussi l'égalité. Un comportement qui avait été considéré inacceptable était désespérément en quête d'une légitimité.

Pressé de questions, le député a été incapable d'expliquer pourquoi il croyait que les familles monoparentales dirigées par des femmes encouragent le militantisme homosexuel. Il a aussi dit qu'il ignorait pourquoi les homosexuels qui grandissaient dans une famille où il y avait un père et une mère étaient, selon lui, moins militants.

 

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C'est ainsi qu'on propage de la propagande haineuse au sujet d'autres personnes. Il est question d'un parti qui veut tellement monter les citoyens les uns contre les autres qu'il dira n'importe quoi, peu importe si c'est vrai ou pas.

Mon père vient d'une famille monoparentale dirigée par sa mère. Mon père et ma mère sont mariés depuis environ 60 ans. Tout comme eux, j'ai grandi dans une maison où l'amour et l'engagement étaient omniprésents, mais où j'ai aussi appris de mes parents que tous les gens du monde ont des droits humains pour lesquels je devais continuer à lutter lorsque je serais adulte. C'est ce que je fais.

En tant que médecin, j'ai eu de nombreux patients homosexuels et bisexuels. Malgré ce que le député de Calgary-Centre voudrait nous faire croire, il n'y a aucune recherche psychologique qui montre que les gais et les lesbiennes fonctionnent différemment des autres hommes et des autres femmes.

Depuis 1974, l'American Psychiatric Association affirme que l'homosexualité n'est pas une maladie qu'on peut soigner. L'American Psychological Association reconnaît que l'homosexualité en elle-même ne nuit pas au jugement, à la stabilité, à la fiabilité ou aux capacités générales sur les plans social et professionnel.

En juillet 1997, en fonction de recherches et de preuves recueillies, l'Ontario Psychological Association a émis un communiqué appuyant le principe général selon lequel toutes les personnes vivant en union doivent être traitées également aux termes de la loi, peu importe leur orientation sexuelle.

C'est le type de déclarations faites par les députés de Calgary-Centre et de Nanaïmo—Cowichan qui sont déconcertantes pour beaucoup d'entre nous.

En tant que médecin, parent et députée, je suis extrêmement inquiète par les torts causés aux jeunes gais et lesbiennes qui commencent à comprendre leur sexualité. Le taux de suicide chez les jeunes gais et lesbiennes est extrêmement élevé, dès l'âge de 15 ans lorsque les jeunes commencent à comprendre leur sexualité. Ces jeunes se demandent s'ils sont oui ou non gais ou lesbiennes. Ils se demandent s'ils vont être acceptés ou pas.

Ils sont maintenant marginalisés encore davantage par les députés de l'Alliance canadienne, l'ancien Parti réformiste. Je ne peux suivre les changements de nom de ce parti. Ces jeunes sont davantage marginalisés. Dans un endroit où beaucoup de Canadiens recherchent la vérité et l'honnêteté, on leur dit ouvertement qu'ils sont malades. On leur dit qu'ils sont en quelque sorte des êtres anormaux sur la Terre.

Qu'est-ce que cela fait à l'estime de soi de ces jeunes? De combien est-ce que cela augmente le taux de suicide chez ces jeunes qui craignent d'être rejetés par le reste de la société? C'est un risque de plus pour eux. C'est ce qui me préoccupe tellement dans les déclarations irresponsables des députés de l'Alliance canadienne, ou peu importe comment s'appelle ce parti.

D'autres éléments de désinformation circulent ici. On dit notamment que la majorité des pédophiles sont gais. Au moins 96 p. 100 des actes de violence sexuelle à l'endroit des enfants sont commis par des hétérosexuels.

En tant que médecin, j'ai lu autre chose que le journal d'où les députés de l'Alliance canadienne semblent tirer toute leur information. J'ai lu des renseignements, des données et des conclusions scientifiques qui établissent clairement que l'homosexualité n'est pas une maladie qui se guérit. Je sais pertinemment quel tort la peur cause aux jeunes homosexuels du Canada, qui sont marginalisés encore davantage. Ils se suicident.

Je tiens à faire valoir un dernier point. Beaucoup de gens ont parlé de l'époque où les unions de fait étaient regardées d'un mauvais oeil, l'époque où les relations entre des personnes de religions différentes ou de couleurs différentes étaient regardées de travers. Je me réjouis de voir que nous avons levé un autre obstacle qui existait depuis tellement longtemps.

 

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Les gais et les lesbiennes forment des familles unies. Les gais et les lesbiennes sont des parents. Les gais et les lesbiennes sont des enfants. Ils sont des frères et des soeurs. Ils sont des grands-parents. Je suis fière de présenter ici avec mon gouvernement un projet de loi que je crois être probablement le plus important à être présenté à la Chambre au XXIe siècle.

L'hon. Ronald J. Duhamel (secrétaire d'État) (Diversification de l'économie de l'Ouest canadien) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, je voudrais poser deux questions à ma collègue.

Je me demande si elle aurait l'amabilité de donner la définition du féminisme à la Chambre. Cette notion semble avoir plusieurs significations. Je pense que cette définition pourrait être utile. On semble croire que le féminisme n'existe que chez les femmes. J'aimerais qu'on me corrige si j'ai tort.

Deuxièmement, la secrétaire d'État sait-elle s'il y a des Églises ou des groupes appartenant à des Églises traditionnelles qui appuient cette mesure législative? Je pense que cela pourrait également être utile pour les gens qui nous regardent et nous écoutent.

L'hon. Hedy Fry: Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que je répondrai aux questions de mon collègue.

Le député demandait premièrement si le féminisme est réservé exclusivement aux femmes. Mon père était le plus grand féministe que j'aie connu. Il m'a appris que les femmes peuvent être égales aux hommes en intelligence et quant à leur capacité de faire tout ce qu'elles avaient envie de faire. Voilà ce qu'est véritablement le féminisme. Il s'agit de convaincre les femmes qu'elles sont égales aux hommes et qu'elles peuvent faire tout ce que les hommes font.

Le député m'a ensuite demandé si je connaissais des Églises qui souscrivent au contenu et à l'objet de ce projet de loi. Bien des membres et des dirigeants de l'Église Unie m'ont dit qu'à leur avis le gouvernement avait présenté là un projet de loi très important pour la cause des droits humains.

L'hon. Jim Peterson (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, ce débat fait naître des émotions intenses non seulement à la Chambre, mais dans tout le pays.

Je crois qu'on comprend mal ce que fera ce projet de loi. Pour moi, c'est très simple. Dans la décision rendue récemment dans l'affaire M. c. H., la Cour suprême du Canada, le plus haut tribunal au pays, a dit que, aux termes de la Constitution du Canada, les conjoints de fait de même sexe devaient être traités de la même façon que les conjoints de fait de sexe opposé. C'est une question d'égalité. C'est une question de justice. Depuis cette décision, d'autres actions ont été intentées à cet égard.

Je n'ai pas souvent de belles choses à dire au sujet de nos collègues conservateurs qui sont au pouvoir en Ontario, mais le gouvernement de l'Ontario, qu'on ne peut pas qualifier d'osé et d'inventif et qui n'aime pas faire les choses différemment juste pour se démarquer, a agi très rapidement, comme tous les gouvernements sont tenus de le faire pour respecter les lois du Canada. Il a présenté un projet de loi conforme à la décision de la Cour suprême, accordant des droits égaux aux conjoints de fait de même sexe. Seulement cinq jours après sa présentation, ce projet de loi a été adopté sans même la tenue d'un vote, avec l'assentiment des trois partis.

Les choses ne vont pas aussi rapidement ici. Néanmoins, nous avons présenté ce projet de loi et il sera adopté.

Mon bureau et ceux de bien d'autres députés ont reçu des appels de gens inquiets qui se demandaient si ce projet de loi donnait une nouvelle définition du mariage. Ce n'est pas le cas. Ce projet de loi ne porte pas du tout sur le mariage. Cela a été dit très clairement. Ce projet de loi porte uniquement sur les droits et obligations de certaines personnes qui vivent ensemble.

 

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Pour qu'il soit clair que ce projet de loi n'avait rien à voir avec le mariage, un amendement a été proposé. Beaucoup de députés jugent l'amendement inutile. L'amendement dit:

    Il demeure entendu que les modifications que la présente loi apporte ne changent pas le sens du terme «mariage», soit l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne.

Dire que ce projet de loi change la définition ou l'idée du mariage, comme si c'était la seule chose qui comptait, c'est faire peur aux gens.

Une autre question soulevée au cours de ce débat par plusieurs députés sérieux a trait au fait que ce projet de loi ne devrait pas seulement traiter des relations homosexuelles où il y a une relation de dépendance, mais de toutes les relations où il existe une telle relation. Je félicite les députés, notamment celui de Scarborough, d'avoir proposé cette solution.

Il est tout à fait logique que, lorsqu'il existe une relation de dépendance, ces avantages et ces obligations s'appliquent et soient respectés dans toute la législation. Après tout, nous sommes une société altruiste et l'un de nos objectifs est de nous assurer que les individus assument leur responsabilité et s'occupent de ceux avec lesquels ils ont une relation, que celle-ci soit entre parents et enfants, entre frères et soeurs, entre amis de n'importe quel sexe.

Des problèmes se posent cependant, car il n'est pas question que de droits lorsqu'il est à l'avantage d'une personne de pouvoir toucher, par exemple, les prestations de pension ou les avantages liés à un régime de soins de santé ou de soins dentaires d'une autre personne.

L'obligation de soutenir certaines personnes est reconnue en droit. On a vu récemment que des parents ont poursuivi leurs enfants afin d'obtenir leur soutien. La relation de dépendance reconnue par la loi n'étant pas toujours à sens unique, nous avons dû repenser cette question. La sécurité de la vieillesse en est un exemple.

Lorsque deux personnes âgées et mariées vivent ensemble, leur revenu conjoint sert de base au calcul des prestations de la sécurité de la vieillesse. Si ces personnes ne sont pas mariées mais entretiennent une relation de dépendance, l'utilisation du revenu conjoint comme base de calcul pourrait entraîner une diminution des prestations de la sécurité de la vieillesse versées à l'une des personnes.

Un autre exemple est celui d'un adulte qui vit avec un parent âgé, mais qui le quitte pour se marier. En vertu du Régime de pensions du Canada, les crédits de pension doivent être accordés au parent âgé, comme dans le cas du divorce d'un couple marié.

Ces deux exemples illustrent les difficultés que peut engendrer la création d'obligations fondées sur une relation de dépendance entre deux personnes ou plus, car il ne s'agit pas d'une question à sens unique, il ne s'agit pas que de prestations.

C'est pourquoi la Commission du droit du Canada a examiné cette question, car elle mérite d'être étudiée plus en profondeur. C'est également la raison pour laquelle le ministre a annoncé, et j'en suis heureux, que le projet de loi C-23 ne règle pas définitivement la question des avantages et obligations et qu'un sous-comité parlementaire sera chargé d'examiner la question des avantages et obligations dans d'autres types de relations de dépendance. Je crois que c'est ce qu'il faut faire.

 

. 1310 + -

En attendant, la Cour suprême du Canada a clairement indiqué que, pour des raisons d'égalité et de justice, ces droits devaient être étendus, ce que nous avons d'ailleurs fait.

C'est une question d'équité, d'égalité et de justice.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je trouve très intéressant que le député affirme que c'est une question de justice et d'égalité. J'aimerais lui rappeler que le gouvernement a imposé la clôture dans ce dossier à l'étape de la deuxième lecture, puis à l'étape du rapport et maintenant à celle de la troisième lecture. Il a restreint les travaux du comité à trois jours et demi. Bon nombre de gens n'ont pas pu faire part de leurs préoccupations relativement à ce projet de loi. Il me semble que tout cela ne correspond pas vraiment à l'esprit du projet de loi qui doit viser la justice.

Le député a souligné qu'on se pencherait plus tard sur la question de la dépendance financière et que ce projet de loi visait un tout autre but.

Nous avons souvent demandé si l'exigence de la relation conjugale était le critère qui autorisait le versement des prestations en vertu de ce projet de loi. Ce sont là des avantages qui étaient autrefois accordés aux couples mariés et aux familles. Deux personnes de même sexe qui vivent une relation de type conjugale y ont maintenant accès. J'aimerais poser une question au député d'en face qui est un membre du Cabinet ainsi qu'un député libéral estimé. J'ai demandé à la secrétaire d'État au multiculturalisme, qui a parlé avant lui, si les gens devaient avoir des relations physiques ou sexuelles pour remplir les exigences des relations conjugales et être admissibles en vertu du projet de loi C-23. Elle m'a répondu que ce n'était pas essentiel. Toutefois, lorsque la ministre de la Justice a déposé ce projet de loi, elle a souligné que les avantages et obligations des personnes vivant d'autres genres de relations, par exemple des liens de dépendance financière ou affective, n'étaient pas prévus dans ce projet de loi.

La ministre de la Justice semble donc nous dire que s'il s'agit d'une relation de dépendance financière, ce n'est pas inclus dans le projet de loi. Toutefois, lorsque j'ai clairement demandé à la secrétaire d'État si deux personnes n'ayant pas de relations physiques pouvaient être admissibles aux termes du projet de loi C-23 , elle m'a répondu qu'elles pourraient l'être si elles satisfaisaient aux autres exigences relatives à la relation conjugale. J'entends donc deux sons de cloche différents à ce sujet.

Si on ne parle pas de dépendance financière, mais plutôt de relation conjugale, ne disons-nous pas que nous accordons ces avantages sur la base de rapports physiques privés, ce qui inquiète plus d'un Canadien?

L'hon. Jim Peterson: Monsieur le Président, je voudrais dire deux choses. Je crois que le député reconnaît tacitement que le projet de loi est fondé sur l'équité, car il a précisé que, le projet de loi étant fondé sur l'équité, nous devrions veiller à ce que la procédure retenue pour sa mise en oeuvre le soit elle aussi. Il n'a cependant pas apprécié que nous appliquions la clôture à ce projet de loi.

La question est à l'étude à la Chambre depuis un bon moment déjà. Je rappelle simplement au député que le gouvernement conservateur de l'Ontario, en fait le Parti conservateur de l'Ontario avec lequel le parti du député souhaite faire alliance, n'a étudié la question que pendant cinq jours en tout et pour tout. Or notre projet de loi est devant la Chambre depuis bien plus longtemps.

Voyons de plus près comment a évolué la loi.

 

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Il n'y a pas si longtemps, les droits et les obligations en cause aujourd'hui n'étaient rattachés qu'au mariage, mais la loi les a ensuite étendus aux unions de fait. Que le ciel nous en préserve! Mais c'est cela le progrès. Voilà que ces droits ont été accordés aux couples de même sexe.

Je puis le comprendre que cela dépasse le sens moral d'un grand nombre, mais le gouvernement n'a pas nécessairement pour rôle de simplement prendre acte du code moral de certains de ses administrés. La Constitution nous dicte d'aller au-delà et de traiter avec équité et justice le plus grand nombre possible de Canadiens. Il en découle que la question de la dépendance deviendra, avec le temps, une nouvelle évolution de la loi.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est important que nous soyons ici aujourd'hui pour débattre de ce projet de loi. Je suis ici pour parler au nom des centaines de mes électeurs qui m'ont téléphoné ou m'ont envoyé des télécopies ou des courriels. Des centaines d'autres qui ont signé des pétitions que j'ai déposées à la Chambre. Ces pétitions portant la signature de milliers de pétitionnaires qui demandent au gouvernement de retirer ce projet de loi.

Je vais aborder la question sous deux angles différents. Le projet de loi qui est proposé n'a pas fait l'objet d'un vaste débat public, comme cela aurait dû être le cas pour un projet de loi aussi important. Cela soulève plusieurs questions et je voudrais en évoquer quelques-unes que les gens ont posées. Je voudrais parler ensuite du bilan du gouvernement libéral concernant les questions familiales et son manque de soutien aux familles. Je voudrais parler aussi de certaines des mesures qu'il a mises en oeuvre et de certaines autres qu'il a négligé de mettre en oeuvre et qui ont des répercussions sur les familles et minent leur importance.

Je parlerai d'abord des répercussions financières du projet de loi. Les libéraux n'ont pas chiffré ce que cette mesure pourrait coûter aux contribuables canadiens. Quand il a parlé du projet de loi et de certaines des modifications qui y sont proposées, le ministre des Finances a dit que l'incidence financière de ces modifications sera minime, voire nulle et que ce n'était pas une affaire de coûts.

Or, cette mesure est effectivement une affaire de coûts. Nous devrions savoir combien de personnes seront touchées par cette mesure. Nous devrions savoir ce qu'il en coûtera au trésor public et aux contribuables canadiens. Nous ne le savons pas. Comme le projet de loi C-23 vise à accorder des avantages à des gens qui n'en ont jamais bénéficié, cela devrait occasionner un coût additionnel.

Le sujet de la conjugalité a donné lieu à de nombreuses questions et à un débat nourri. Le projet de loi C-23 définit un conjoint de fait comme toute personne qui cohabite avec une autre dans une relation conjugale depuis au moins un an. Qui définit ce qu'est une relation conjugale? Du terme conjugal, le dictionnaire dit «relatif à l'union entre époux».

Est-ce que cela veut dire qu'une relation conjugale est la même chose que le mariage? Est-ce que c'est ce que nous disons? Est-ce que c'est ce que signifie le projet de loi? Est-ce que cela signifie que ces couples seront obligés d'assumer les mêmes responsabilité que les couples mariés? Cet aspect de la responsabilité est-il inclus? Ou est-ce que cela signifie que ces couples contribuent à la société dans la même mesure que les couples mariés? Comment le gouvernement va-t-il prouver le caractère conjugal d'une relation? Je suppose que la véritable question est de savoir comment nous allons prouver le caractère conjugal. À l'instar d'un ancien premier ministre libéral, je crois que le gouvernement n'a rien à voir dans les chambres à coucher de la nation. Pourquoi le gouvernement a-t-il refusé de donner une définition claire dans le projet de loi? Où est-elle cette définition? Y aura-t-il un moyen d'empêcher les gens d'abuser du projet de loi en disant qu'ils sont partenaires d'une relation alors que ce n'est pas vrai? Comment allons-nous y arriver?

 

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Le projet de loi devrait définir clairement ce qu'est une relation conjugale, mais il ne le fait pas. Il devrait préciser les droits et les responsabilités associés avec cette définition. Ce projet de loi crée-t-il des responsabilités supplémentaires? En quoi va-t-il changer l'ensemble de la société? Je signale que je partage mon temps ave le député de Dewdney—Alouette.

Voyons les relations qui ne sont pas inclues, les autres relations de dépendance qui existent dans la société. Nous en connaissons tous. Il pourrait y avoir une fille qui prend soin de sa mère âgée ou un couple de frères âgés qui vivent ensemble pour s'entraider. Quelles que soient ces situations, elles ne sont pas prises en considération parce qu'elles ne sont pas basées sur un aspect conjugal.

Il y a également un manque de participation du public. Les gens ont dit et répété que la question était si importante qu'il fallait tenir un débat sur la scène publique, qu'il fallait donner aux gens de tout le pays l'occasion de débattre les deux côtés de la question de manière très large. Cela ne s'est pas produit. En fait, la clôture a été imposée à un certain nombre de reprises et certainement sur ce projet de loi.

Nous parlons de mariage. S'agit-il d'un projet de loi sur le mariage? S'agit-il d'un projet de loi sur la définition du mariage? Les gens ont dit que la définition du mariage devait être réaffirmée. Nous l'avons fait en juin dernier à la Chambre. Une motion affirmant que la définition du mariage est et devrait rester exclusivement l'union d'un homme et d'une femme et que le Parlement prendrait toutes les mesures nécessaires en son pouvoir pour la préserver a été présentée et adoptée. C'est simple. La motion a été adoptée. Les gens ont été entendus.

Pourtant, ce projet de loi a été présenté sans définition du mariage. La ministre de la Justice a tenté d'inclure une définition, qui, de l'avis de conseillers juridiques, pourrait toutefois être annulée. La définition du mariage doit être insérée dans les 68 lois touchées par ce projet de loi; elle devrait être enchâssée dans le texte même.

Une question fondamentale que les gens ont portée à mon attention est que cette définition est importante pour eux. Ils aimeraient la voir enchâsser dans le projet de loi, comme le montrent les milliers de signatures déjà déposées à la Chambre qui demandent que la définition du mariage figure dans le projet de loi ou, sinon, que le projet de loi tout entier soit retiré. Hier, nous avons présenté certains amendements en ce sens, mais ils ont été rejetés. Nous avons essayé par des amendements de faire ajouter la définition dans le projet de loi, mais la Chambre a décidé de les rejeter.

Je tiens à parler brièvement de la famille dans notre société et de certaines choses qui ont nui aux familles. Entre autres, le régime fiscal désavantage les familles où l'un des parents reste à la maison. Nous croyons qu'il est essentiel d'alléger le fardeau fiscal des contribuables et de réduire les impôts pour créer des familles plus solides.

Il y aussi la question de la pornographie juvénile. Le gouvernement n'a pas invoqué la disposition d'exemption pour protéger nos enfants des personnes qui utilisent, vendent ou collectionnent de la pornographie juvénile. Après le jugement rendu en Colombie-Britannique, nous avons demandé au gouvernement d'utiliser la disposition d'exemption en attendant le jugement définitif sur la question. Il a décidé de ne rien faire. Cela fait un an et demi à deux ans que nous avons fait cette demande, et nous attendons toujours.

Toute cette question de pornographie juvénile s'est répercutée sur mon travail aussi. J'ai proposé le projet de loi C-321 qui modifierait le Code criminel pour autoriser les tribunaux à saisir le matériel utilisé pour la production de pornographie juvénile. Dans de très nombreux cas, le Code criminel permet ces saisies, mais non dans celui de la production de pornographie juvénile. Il est à espérer que, un jour, ce projet de loi sera tiré au hasard et sera débattu. Entre-temps, j'insiste auprès de la ministre de la Justice pour qu'elle apporte cette modification.

 

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L'autre problème qui revient quotidiennement, à propos de l'érosion des familles, est celui des délinquants sexuels. Nous avons réclamé un registre des délinquants sexuels. Si nous regroupons tous ces problèmes, nous en revenons à notre idée: il nous faut une définition du mariage dans la loi. Il nous faut une définition de ce qu'est une relation de type conjugale. Nous devons soutenir les familles, les renforcer.

Nous n'avons pas besoin de ces attaques incessantes contre la cellule familiale qui sapent son autorité. Des députés de tous les partis se sont rendus à des conférences mondiales où on s'attaque aux familles. Il est donc important que le Canada reconnaisse l'importance des familles et prenne des mesures pour les renforcer, non les miner.

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je voudrais faire une observation et poser une question.

Je trouve fort intéressant qu'une question ait été posée au secrétaire d'État aux Institutions financières alors qu'elle aurait pu très facilement m'être adressée à moi. Cette question avait trait à des propos tenus par moi, semble-t-il, mais le député de Calgary-Centre n'a pas jugé bon de ne pas me poser cette question quand j'étais présente. Je voudrais dire quelques mots là-dessus.

Le principe de la conjugalité, que le député de Calgary-Centre n'arrive pas à comprendre ou refuse de comprendre, a été également énoncé par le député de Pictou—Antigonish—Guysborough. C'est une série de critères qui existent depuis plus de 40 ans.

Nous n'avons jamais éprouvé de difficulté à appliquer la définition de conjugalité aux couples mariés ou aux unions de fait hétérosexuelles. Pourquoi éprouvons-nous ce problème à l'appliquer aux relations entre conjoints de fait de même sexe? Faut-il chercher à savoir si les personnes en cause ont des relations sexuelles?

Ce n'est pas le seul élément d'une relation conjugale. En fait, il y a un grand nombre de mariages et d'unions de fait hétérosexuelles et autres qui connaissent l'harmonie sans avoir des relations sexuelles fréquentes ou même sans avoir eu de relations sexuelles depuis longtemps.

Nous entendons parler de l'érosion de la famille. Les jeunes homosexuels, qui présentent un taux de suicide élevé, appartiennent-ils à des familles? Je voudrais savoir si leur famille ne compte pas. Dans les familles de conjoints de même sexe attachés l'un à l'autre qui ont des enfants, est-ce que la famille compte pour ces derniers? Ou devons-nous croire qu'elle ne compte pas, que les enfants ne devraient pas être considérés comme des enfants?

La question de la famille ne cesse d'être soulevée à la Chambre. La famille est importante, mais je pense que ce que les députés d'en face ne comprennent pas ou ne veulent pas comprendre, c'est que les couples de même sexe ont des enfants, des parents, des grands-parents, des frères et des soeurs. Allons-nous définir de façon très étroite ce qu'il faut entendre par famille? Le député peut-il répondre à cette question?

M. Rick Casson: Monsieur le Président, je suis heureux de réagir à ces propos. Le député vient de dire que les familles sont importantes, mais à certaines conditions. Les familles sont très importantes. Le problème, c'est qu'il y a trop de mais, de toutefois et de si.

Dans le but d'éclaircir la notion d'union conjugale, le député de Calgary-Centre a demandé à la secrétaire d'État au multiculturalisme, à l'occasion d'une table ronde du CPAC, si selon elle deux personnes n'entretenant pas une relation physique seraient admissibles en vertu du projet de loi C-23. La ministre a répondu que si elles satisfont aux autres exigences relatives à l'union conjugale, la réponse est oui.

Qu'est-ce que cela veut dire? Quelles sont les autres exigences? Quelle est la définition de l' union de type conjugal?

 

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La ministre dit que le projet de loi ne porte pas sur cette question. Il y a tant de messages contradictoires de la part du gouvernement que les gens ne savent plus exactement ce qu'il en est. Pourquoi la définition n'est-elle pas incluse? Le gouvernement devrait éclaircir la question et éliminer tout élément d'indécision. Il devrait rassurer les gens qui se posent des questions à ce sujet et inclure la définition des expressions «union conjugale» et «mariage» dans le projet de loi, à tout endroit où il le faut.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Monsieur le Président, au début de son intervention, le député de Lethbridge a soulevé la question des coûts. Il a dit qu'un des problèmes de ce projet de loi sont les coûts.

Je me demande comment il concilie cela avec le fait que chaque citoyen canadien est un contribuable, peu importe qu'il vive seul, dans une union homosexuelle, dans une union hétérosexuelle, ou autre.

Comment concilie-t-il cela avec le fait que les gens dont il est question dans le projet de loi sont des contribuables? Pourquoi veut-il continuer à faire de la discrimination contre ces gens?

M. Rick Casson: Monsieur le Président, il est rassurant d'entendre le député d'en face reconnaître que chaque citoyen au pays est un contribuable ou sera un contribuable. C'est important, mais il n'a pas compris ce que je disais.

L'élément essentiel, c'est que les contribuables canadiens sont préoccupés. Lorsqu'un projet de loi est devant la Chambre, ils ont certes le droit de savoir ce qu'il renferme, combien d'impôts de plus ils devront payer pour appuyer cette initiative, peu importe l'initiative et le ministère qui en est à l'origine. Ils ont le droit de savoir ce qui leur en coûtera dans le cadre du système d'imposition.

À mon avis, il n'a pas compris. Les Canadiens ont le droit de savoir combien coûtera cette initiative.

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de parler une fois de plus du projet de loi C-23. C'est la troisième occasion que j'ai de traiter de cette très importante mesure législative.

Je voudrais tout d'abord résumer certains des points que j'ai soulevés plus tôt. Ils n'ont pas été réfutés à la Chambre par les ministériels. J'invite la ministre ou la secrétaire d'État au multiculturalisme à écouter.

Voici les faits. Au début du débat, j'ai dit que le gouvernement mettait en place un arrangement fondé sur la transitivité. En fait, il met sur le même pied les unions de fait entre conjoints de même sexe et les couples homosexuels qu'il assimile ensuite aux couples mariés et ainsi, aux yeux de la loi, il fait en sorte que ces trois types d'unions soient égaux.

Le gouvernement n'a pas réfuté cet argument. Seule la ministre de la Justice a déclaré que les gens mariés sont en mesure de divorcer et que la Loi sur le divorce s'applique dans leur cas, mais pas dans le cas des unions de fait dont on parle dans ce projet de loi. C'est la seule différence mise en lumière par la ministre et ainsi, elle reconnaît que le projet de loi met le mariage sur le même pied que les unions de fait hétérosexuelles et homosexuelles. C'est ce qu'elle dit.

La ministre responsable du Multiculturalisme remet en question sa propre compréhension alors que je l'entends marmonner. Il est tout à fait clair qu'elle ne comprend pas l'argument que son gouvernement et elle-même défendent.

Ce que nos vis-à-vis disent, en fait, avec ce projet de loi, c'est qu'ils croient dans l'égalitarisme sexuel, qu'ils pensent que les gens peuvent choisir les arrangements qui leur conviennent et l'État traitera ces arrangements exactement de la même manière dans le cadre de sa politique publique. C'est l'effet net du projet de loi C-23.

La députée est une ministre. Chose certaine, elle doit être en mesure de suivre la logique de sa propre argumentation et la logique suivie par son gouvernement en présentant ce projet de loi. Elle ne semble pas être au courant de ce fait. C'est déconcertant et cela devrait bien montrer aux Canadiens que le gouvernement ne s'appuie sur rien de solide dans le cas présent.

 

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Pour sa défense, le gouvernement a présenté quelques arguments et a eu recours aux insultes, comme je l'ai dit plus tôt. Ainsi, tout député qui s'oppose à ce projet de loi pour le motif logique qu'il n'a tout simplement aucun sens fait l'objet d'insultes. Nous connaissons toute la panoplie d'insultes qui ont été proférées par les ministériels. En fait, ils recourent à cette tactique pour couper court au débat. C'est ce que nous appelons de la tyrannie intellectuelle. C'est exactement à cela que participent la ministre et les membres de son gouvernement. Lorsqu'ils n'ont aucun argument puissant qui repose sur la logique, ils lancent des insultes à d'autres personnes, en espérant que celles-ci refusent de chercher des failles dans leurs arguments faibles et peu solides. C'est une tactique que le gouvernement emploie. C'est une tactique dont j'ai été témoin bien des fois dans la cour de récréation, lorsque j'étais enseignant. On emploie la même tactique à la Chambre.

Il faut que la ministre comprenne qu'il y a des gens, non seulement à la Chambre, non seulement les députés de l'Alliance canadienne, mais des gens de tout le pays, qui défendront leurs convictions même s'ils font l'objet d'insultes de la part de ceux qui prétendent avoir raison.

Un autre aspect de mon argument que j'ai expliqué plus tôt, c'est la notion d'absolutisme par rapport à celle de relativisme. Lorsqu'un gouvernement rejette la notion de vérité et celle du bon et du mauvais, il s'avance sur un terrain très glissant. En fait, lorsqu'il fait valoir l'argument que sa proposition est bonne, cet argument se détruit lui-même. Comment peut-on dire que chacun fait ce qui est bon pour lui, mais que ce que, moi, je fais est correct tandis que tous les autres se trompent? Cet argument relativiste sur lequel le gouvernement fonde le projet de loi C-23 est très fragile et ne tient pas la route. C'est comme si l'on disait: «Moi, je sais et tout le monde devrait faire comme moi.»

Quand on adopte cette ligne de pensée, comme le gouvernement semble l'avoir fait ici, en réalité, on cherche à imposer son propre point de vue aux autres. Le gouvernement impose ici une opinion d'ordre moral à la population. Les députés soutiennent que ce projet de loi est illogique, mais s'ils suivent la logique de leurs propres arguments, ils verront bien que le projet de loi C-23 repose sur un sophisme qui ne tient pas, qui ne résiste pas aux arguments rigoureux d'un débat intellectuel. Les insultes servent à dissimuler leurs arguments faibles et peu convaincants. Ils n'ont rien d'autre.

Ce projet de loi vise à mettre toutes les relations sur un pied d'égalité. La ministre a parlé de pratiques discriminatoires. En sa qualité de ministre d'État, elle exerce de la discrimination contre certains arrangements. À l'heure actuelle, si un homme décide de marier deux femmes, il est victime de discrimination. Et si un ménage à trois lui convient? Appelons cela une triade. Le gouvernement exerce de la discrimination contre ce type de ménage. J'imagine mal que la ministre puisse se lever pour dire qu'il faudrait étendre les avantages à ce genre de ménage et, pourtant, elle a dit qu'il faudrait étendre les avantages à un autre type d'arrangement. Voilà l'aboutissement logique de cette manière de penser selon laquelle le projet de loi est fondé sur le principe de l'égalitarisme sexuel.

Dans notre société, le mariage a toujours été reconnu comme une institution importante. En fait, notre société repose sur cette institution. Parce que le mariage est tellement important, nous accordons des avantages et imposons des obligations aux personnes qui concluent cet arrangement parce que cet arrangement assure l'édification d'une société. Voici que la ministre et le gouvernement disent que le mariage est une invention de la société, que ce n'est pas une institution présentant en soi les caractéristiques immuables du bien, mais que c'est seulement un arrangement social qui était bon jusqu'à maintenant, mais qui sera désormais remplacé par autre chose. Nous allons ouvrir la porte à tout groupe de personnes qui décidera de venir défendre sa cause devant nous pour toucher les mêmes avantages que les couples mariés. C'est là une pente glissante pour une société. Je ne crois pas que la ministre comprenne les répercussions de ce qu'elle propose dans ce projet de loi.

 

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Il est très significatif que le gouvernement ait rejeté ici des amendements qui visaient à inclure la définition du mariage comme étant exclusivement l'union d'un homme et d'une femme. Il a voté maintes et maintes fois, une centaine de fois, contre ces amendements ici, hier soir. Il montre ainsi qu'il ne veut pas protéger la définition du mariage. Nous avons vu ici ce qui s'est produit dans le passé.

Mon collègue, le député de Calgary-Centre, et moi étions ici en 1997; nous avons lancé le débat sur l'affaire Rosenberg en Ontario. Nous avons demandé instamment au gouvernement d'agir, quand ce tribunal a redéfini le mot «conjoint» comme pouvant s'appliquer à une personne du même sexe. Le tribunal est allé au-delà de ce que le Parlement souhaitait. Nous avons demandé au gouvernement de faire appel parce que cette décision créait un précédent qui pourrait ensuite être utilisé dans d'autres causes pour redéfinir le mariage.

Nous savons que parmi les gens qui sont en faveur de ce projet de loi il y en a qui souhaitent que le mariage soit redéfini de façon à inclure des personnes de même sexe. Qu'a fait le gouvernement? Il n'a même pas réagi en 1997 quand le terme «conjoint» a été redéfini.

Comment les Canadiens peuvent-ils se fier à ce groupe quand contestation il y aura, je dis bien «quand» et non «si», quand on sait qu'il y a des gens qui ne songent qu'à contester la définition du mariage? Comment les Canadiens peuvent-ils se fier à ce groupe qui n'a même pas défendu la définition de conjoint dans le contexte du mariage? Il faut juger un groupe à ses actes. Or, on ne va pas loin avec des paroles creuses et de beaux discours.

Pour conclure, j'exhorte les Canadiens à examiner les actes du gouvernement et ce qu'il fait en ce sens avec le projet de loi C-23 pour faire admettre l'égalitarisme sexuel. Il fait comprendre aux Canadiens qu'il ne considère plus l'institution du mariage comme une institution sacrée, la pierre angulaire de la société. L'Alliance canadienne est contre cette initiative et fera son possible pour empêcher le gouvernement de la poursuivre.

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, je voudrais poser une question au député. Elle est très simple. Le député parle du mariage et du fait que le mariage est en réalité la seule institution viable dont nous devrions discuter. Le député veut-il dire que l'on devrait annuler les unions de fait entre hétérosexuels qui existent dans la loi depuis plus de 40 ans et qui créent des avantages et des obligations pour les conjoints de fait?

M. Grant McNally: Monsieur le Président, je n'ai pas dit cela. L'union de fait entre hétérosexuels que la loi interprète comme équivalent à un mariage est basée sur les mêmes principes que ceux sur lesquels est basé le mariage, à savoir que les conjoints sont en mesure de vivre ensemble pendant une période prolongée, de procréer et d'avoir des enfants qui constituent la pierre angulaire de notre société. Je crois que lorsque le gouvernement a élargi la définition pour inclure les couples de fait, c'était parce que ces couples étaient en mesure de procréer et d'avoir des enfants.

La ministre dit qu'elle veut élargir la définition pour inclure les individus qui, du fait de la nature même de leurs relations, n'ont pas cette fonction et cette capacité de procréer. C'est la définition que préconise la ministre, une définition qui ouvre la porte à toutes sortes de possibilités et d'arrangements.

C'est ce qui arrive quand la ministre rejette la notion du mariage et du bien inhérent à cette institution et qu'elle veut rallier les Canadiens à son idée. La ministre ne s'en rend pas compte. C'est absolument incroyable.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté attentivement le député d'en face. Il a parlé des scandaleuses triades. Il pensait sans doute au Parti réformiste, à l'Alliance réformiste conservatrice canadienne et à l'Alliance canadienne, dans cet ordre. Voilà une triade dont il ne faut pas s'approcher.

 

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Cela dit, je tiens à préciser que la ministre sait très bien ce qu'elle fait et que nous, les députés du côté ministériel de ce magnifique Parlement, nous savons aussi très bien ce que nous faisons dans le cadre du projet de loi C-23.

Je trouve répréhensibles les mythes et les faussetés que le député d'en face et les gens de son espèce semblent vouloir perpétuer car, ce faisant, ils opposent entre elles les régions de notre pays et ils suscitent l'affrontement entre les gens. Notre politique n'est pas, comme ils le prétendent, une politique de destruction, de griefs, de haine et d'affrontements; c'est plutôt une politique de l'espoir...

M. Lee Morrison: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Tout cela dépasse un peu les bornes. Assistons-nous à un débat ou à une bataille de taverne?

Le vice-président: Nous espérons bien qu'il ne s'agit pas d'une bataille. Je sais que le député de Waterloo—Wellington va immédiatement poser sa question.

M. Lynn Myers: Je disais donc, monsieur le Président, que notre politique est axée sur l'espoir et la réconciliation.

Des voix: Oh, oh!

M. Lynn Myers: Écoutez-les rire. Je rappelle ceci aux députés d'en face: Stockwell Day, c'est assez; anti-choix, anti-gais; Stockwell Day disparaissez; fanatique droitiste partez.

Voilà qui décrit bien ces gens. C'est ce que les Ontariens pensent d'eux et cela correspond tout à fait à ce qu'ils sont.

Pourquoi le parti qui parle sans cesse du vote libre a-t-il voté en bloc hier soir? Ce sont eux qui parlent toujours de l'appui des gens de la base et de l'importance du vote libre. Pourquoi ont-ils voté en bloc?

M. Grant McNally: Monsieur le Président, le député soutient que son parti est celui de l'espoir. Le seul espoir que puisse formuler les Canadiens est que les libéraux soient renversés dans les plus brefs délais et que l'Alliance canadienne soit enfin en mesure de présenter ses idées novatrices sur la façon de gouverner le pays.

Le député a utilisé exactement la même tactique, celle de l'injure; il a prétendu avoir assisté à mon intervention alors qu'il n'en était rien, à l'évidence, quand il n'a tout simplement rien à de sérieux à dire...

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il est interdit de mentionner l'absence ou la présence d'un député. Cependant, aux fins du compte rendu officiel, j'étais présent, j'ai écouté avec...

Le vice-président: C'est une question de point de vue et il n'y pas là matière à rappel au Règlement.

M. Grant McNally: Monsieur le Président, je rappelle enfin que le gouvernement s'est prononcé hier contre l'insertion dans le projet de loi de la définition du mariage, et cela à plus d'une centaines de reprises. Le député tient des propos scandaleux. Il se fait l'instrument de la destruction et de la haine et affirme que les gens de mon espèce ont le tort de vouloir faire inscrire dans la loi une définition du mariage. C'est là une action des plus choquantes à laquelle nous avons pris part hier soir, et je plaide coupable. Je plaiderai coupable tous les jours s'il faut en venir à cela pour défendre l'institution du mariage et pour m'opposer au gouvernement libéral.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais amener ce débat dans une autre direction qui, je l'espère, intéressera les députés d'en face ainsi que tous les députés.

Je commencerai en disant que j'appuie ce projet de loi. J'appuie ce projet de loi parce qu'il fait ce qui doit être fait; les mesures qui s'imposent et la raison d'être de ce projet de loi tiennent au fait qu'il nous faut définir les relations qu'entretiennent des personnes de même sexe comme se situant hors du mariage et le mariage comme l'union légale d'un homme et d'une femme. J'appuie cette mesure législative qui renferme les définitions requises.

Ce que j'aimerais dire, c'est que l'opposition, manifestement parce qu'elle est l'opposition, doit s'opposer au projet de loi et faire tout ce qui est en son pouvoir pour cela, mais j'aimerais préciser que 19 députés de mon propre parti se sont opposés à la motion à l'étape du rapport hier. Il y a de bonnes chances pour que ces mêmes députés libéraux—peut-être plus, peut-être moins—votent contre le projet de loi à la Chambre ce soir.

 

. 1350 + -

J'ai un grand respect pour mes collègues. Il sera peut-être très intéressant pour vous, monsieur le Président, de comprendre pourquoi certains d'entre nous qui avons exactement les mêmes valeurs, à savoir les valeurs libérales, les mêmes valeurs sur la famille et les mêmes préoccupations concernant la protection de la définition traditionnelle du mariage, etc, voteraient contre cette mesure législative, que j'estime être très bonne, alors que d'autres voteraient en faveur de ce projet de loi, de ce côté-ci de la Chambre exclusivement.

Nous devons revenir un peu en arrière pour comprendre comment est né ce projet de loi. J'ai été, à l'origine, un des promoteurs de ce projet de loi. Si je l'ai fait, c'est parce qu'il devenait très clair qu'à moins que le Parlement n'intervienne, les tribunaux allaient définir le mariage comme incluant une union entre personnes de même sexe. C'était imminent. Cela s'était produit devant la Cour d'appel de l'Ontario et dans diverses autres affaires dont les tribunaux avaient été saisis. Je craignais cela depuis très longtemps.

La première fois que je me suis dissocié de mon parti lors d'un vote, c'était lors de l'étude du projet de loi C-33, en 1995. J'ai voté contre cette initiative ministérielle parce qu'elle ne définissait pas le mariage, sur le plan légal, comme excluant une union entre partenaires de même sexe. J'ai voté contre ce projet de loi parce qu'il laissait aux tribunaux le soin de définir cette question. Or, le projet de loi dont nous sommes actuellement saisis comprend enfin les définitions nécessaires.

Soit dit en passant, monsieur le Président, je vais partager mon temps avec un collègue.

Voyons ce qui s'est produit hier. Les 19 libéraux qui ont voté contre l'initiative ministérielle se sont prononcés sur la motion no 5 présentée par le député de Scarborough-Sud-Ouest. Dans sa motion, dont l'essentiel était d'ailleurs repris dans d'autres motions de l'opposition, le député proposait de définir le mariage comme l'union légitime d'un homme et d'une femme, ce que fait le projet de loi, et de répéter cette définition dans toutes les lois visées par cette mesure législative. En d'autres termes, il est ici question d'un projet de loi qui aura des répercussions sur 68 autres lois. Il est précisé dans ces lois que les unions entre partenaires de même sexe, aux fins des prestations ou à tout autre égard, doivent être considérées au même titre que les unions de fait. Cela aurait dû suffire, mais le député de Scarborough-Sud-Ouest estimait qu'il fallait répéter cela dans chaque loi.

Je suis d'avis que le fait de définir le mariage dans la loi, alors qu'il n'était défini que dans le common law, constitue un énorme progrès. En fait, d'après toutes les analyses, cela devrait suffire à garantir que, sur le plan légal, le mariage désigne uniquement l'union de deux personnes hétérosexuelles. Alors pourquoi le député de Scarborough-Sud-Ouest estimait-il si important de répéter cela dans chacune des lois touchées par le projet de loi C-23?

À mon avis, monsieur le Président, c'est parce qu'il a peur que les tribunaux ne voient pas cette définition du mariage qui existe dans le projet de loi C-23. Il a peur que, dans les causes futures portant sur la définition du mariage, les tribunaux ne tiennent pas compte de cette mesure législative que nous aurons adoptée.

Pourquoi pense-t-il de cette façon? Voici la mauvaise nouvelle, et c'est très malheureux. J'espère que la ministre de la Justice et tous les Canadiens écoutent. La réalité est que les députés de ce côté-ci de la Chambre ne font plus confiance à notre propre ministère de la Justice. Le problème est que, de ce côté-ci de la Chambre, on a l'impression que les fonctionnaires du ministère de la Justice résistent aux mesures sensées visant à définir des questions comme celle-ci parce qu'ils ont des objectifs cachés. Je peux vous assurer, monsieur le Président, que j'ai entendu bien des députés de ce côté-ci de la Chambre dire, à propos de toutes sortes de mesures législatives, que nous ne pouvons pas compter sur l'impartialité des fonctionnaires du ministère de la Justice.

 

. 1355 + -

J'hésite vraiment à dire cela parce que beaucoup de fonctionnaires du ministère de la Justice sont très compétents et très sincères dans ce qu'ils font. Toutefois, il est clair qu'un certain doute s'est installé chez les parlementaires à l'égard du ministère de la Justice.

Les exemples sont nombreux. Si on remonte au premier projet de loi sur le contrôle des armes à feu, c'était bien d'avoir une mesure législative créant un système de contrôle des armes à feu, mais ce que nous avons observé de ce côté-ci de la Chambre, c'est qu'il était très difficile d'y apporter les amendements même les plus sensés. Et il y a de nombreux autres exemples depuis mon arrivée au Parlement en 1993.

Un projet de loi aurait permis aux autorités de contrôler les déplacements de certaines personnes qui n'avaient même pas été accusées de crime, au moyen d'émetteurs électroniques qu'elles auraient été obligées de porter sur elles. Certains projets de loi limitaient le droit d'une personne accusée d'agression sexuelle d'accéder à la documentation de la poursuite.

Dans le cas du projet de loi à l'étude, j'avais proposé à l'étape de la deuxième lecture de remplacer le mot «conjugale» par «intimité sexuelle» parce que le mot «conjugale» avait été utilisé à mauvais escient par un juge qui avait une connaissance insuffisante de la langue. Or, le ministère de la Justice, qui aurait pu corriger cette erreur et satisfaire ainsi tout le monde, a choisi de conserver le mot «conjugale», qui suppose une relation hétérosexuelle.

Malheureusement, le projet de loi dont nous sommes saisis est une bonne mesure. Il définit le mariage et accorde des avantages à des conjoints de même sexe sans pour autant aller à l'encontre des valeurs traditionnelles. Toutefois, des députés de ce côté-ci de la Chambre ont l'impression que ce projet de loi n'est pas aussi parfait, complet et peaufiné, et qu'il laisse de côté certaines catégories de personnes. D'autres soupçonnent l'existence d'intentions cachées qui permettraient au ministère de la Justice de soumettre, plus tard, le projet de loi à l'interprétation des juges. Le ministère de la Justice, qui crée les lois à la Chambre, les défend aussi par voie de conséquence.

C'est pourquoi beaucoup de mes collègues ont l'impression désagréable que les personnes qui produisent des projets de loi au nom du gouvernement et qui le conseillent à ce sujet ne sont peut-être pas aussi impartiales qu'elles le devraient.

J'espère que la ministre de la Justice et ses collaborateurs réfléchissent à cette question. Il y a longtemps que cette critique devait être faite. Je regrette de la faire alors que nous étudions un excellent projet de loi. Le Parlement se retrouve de nouveau saisi de la définition du mariage et des relations entre personnes de même sexe. Il y a longtemps qu'il aurait dû se prononcer sur cette question, mais malheureusement l'optique du projet de loi demeure imparfaite parce qu'il n'est pas aussi bien ciblé qu'il aurait pu l'être. En ce sens, les 19 députés de ce côté-ci de la Chambre qui refusent d'appuyer le projet de loi sont justifiés de le faire et je regrette cette situation.

Le Président: Nous disposons de cinq minutes pour les questions et observations. Je propose de passer immédiatement à la période des questions orales, afin d'éviter toute interruption.

*  *  *

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

Le Président: J'ai l'honneur de déposer sur le bureau le volume un, daté d'avril 2000, du rapport du vérificateur général du Canada à la Chambre des communes.

[Français]

Conformément à l'alinéa 108(3)e) du Règlement, ce document est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent des comptes publics.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES POMPIERS

M. Gurbax Singh Malhi (Bramalea—Gore—Malton—Springdale, Lib.): Monsieur le Président, les membres de l'Association internationale des pompiers de tous les coins du Canada travaillent fort et risquent leur vie tous les jours.

La retraite à 55 ans est la norme qui a été établie dans l'intérêt des pompiers et des collectivités qu'ils servent. Mais, en partie parce qu'ils vivent moins longtemps, les pompiers ne peuvent pleinement profiter des contributions qu'ils ont versées à leur régime de pension durant toute leur vie active.

En raison d'une injustice dans la Loi de l'impôt sur le revenu, les pompiers estiment qu'une modification réglementaire s'impose. Ce serait là une étape importante du rétablissement de l'équité sur le plan des pensions.

 

. 1400 + -

J'encourage tous les députés à examiner cette modification réglementaire qui est proposée au nom de l'équité envers les pompiers professionnels du Canada.

*  *  *

LES SOINS DE SANTÉ

M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour déplorer l'état du système canadien de soins de santé.

En Colombie-Britannique, il n'existe que deux services de soins intensifs de niveau 2 pour enfants, soit un à Vancouver et l'autre à Victoria. La province s'apprête à fermer celui de Victoria. Il n'en restera donc plus qu'un. Cette décision de fermeture ne tient qu'à un manque d'argent.

Le 20 mars, l'opposition a demandé au ministre des Finances d'accroître de 1,5 milliard de dollars les transferts en matière de santé et de programmes sociaux et de renoncer à l'augmentation de 1,5 milliard de dollars des subventions et contributions fédérales. Nous avons tous entendu parler du cafouillis d'un milliard de dollar. C'est la même somme que nous essayons d'affecter à la santé. La majorité libérale a rejeté cette demande.

Je crois que la protection du régime de soins de santé est plus importante que l'attribution de subventions pour acheter des votes. Les Canadiens méritent mieux que cela.

*  *  *

LE REGISTRE NATIONAL DES DONNEURS D'ORGANES

M. Lou Sekora (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine nationale de sensibilisation aux dons d'organes et de tissus commence le 16 avril prochain pour se terminer le 23. Le projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai déposé, le projet de loi C-420, reconnaît la nécessité de mettre sur pied un registre national de donneurs d'organes en vue de sauver des vies.

Je demande à tous les députés et à tous les Canadiens de faire ce qu'il faut pour sauver des vies.

*  *  *

[Français]

LES DOUANES CANADIENNES

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 7 avril dernier, le gouvernement canadien annonçait son intention de simplifier les contrôles douaniers aux frontières et dans les aéroports d'ici les quatre prochaines années.

Il entend y parvenir en automatisant les services et en remettant une carte spéciale aux voyageurs. C'est ainsi que l'on verra apparaître les écrans tactiles permettant aux voyageurs inscrits de s'identifier, de même que des guichets électroniques pour payer les droits de douanes.

Cette mise en place de moyens plus souples a essentiellement pour but d'améliorer le service à la clientèle. Les citoyens et les gens d'affaires pourront se procurer une «Canpass» qui accélérera leur passage à la frontière canadienne. Les douaniers continueront cependant de procéder à des fouilles au hasard.

En somme, instaurer une souplesse aux frontières canadiennes tout en assumant un rôle de surveillance efficace, voilà les deux priorités des agents de Douanes Canada pour les prochaines années.

Souhaitons que le public canadien apprécie ces nouvelles mesures mises sur pied pour lui.

*  *  *

[Traduction]

L'ÉDUCATION

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, la fixation du gouvernement de l'Ontario sur l'importance de la haute technologie dans l'éducation supérieure ne cadre pas avec les discours des chefs d'entreprise.

Il est vrai que le secteur de la haute technologie est en rapide expansion et qu'il assure la création de la moitié des nouveaux emplois, mais il n'en reste pas moins que les travailleurs de ce domaine ont toujours besoin de connaissances dans le domaine des arts, des lettres et des sciences humaines. Un article publié dans le National Post rapporte les paroles des dirigeants des 30 plus importantes compagnies, de Jean Monty chez BCE à Kevin Francis chez Xerox qui se sont dit d'avis que:

    Le financement de l'éducation supérieure au Canada ne doit pas forcer les jeunes à faire un choix entre la technologie et le domaine des arts et des sciences humaines. Il est très important que les universités canadiennes reçoivent suffisamment de fonds pour assurer une main-d'oeuvre instruite et une nouvelle génération de dirigeants.

La politique du gouvernement Harris qui mise tout particulièrement sur les programmes technologiques trahit son faible niveau de connaissances culturelles et sociales.

*  *  *

LE PREMIER MINISTRE DU CANADA

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant son départ pour le Moyen-Orient, le premier ministre avait promis de ne pas créer de controverse, mais il a de nouveau manqué à sa parole.

Premièrement, il a vexé les Palestiniens en refusant de les rencontrer à Jérusalem-Est. Puis, le premier ministre ne savait plus où il se trouvait, à l'est, à l'ouest ou au nord de Jérusalem. Il a ensuite vexé les Israéliens en donnant à M. Arafat le conseil bizarre d'utiliser la menace d'une déclaration unilatérale d'indépendance comme moyen de pression dans les négociations. Puis, il ne savait plus ce qu'il avait dit. Cela n'est pas nouveau.

En 1994, le premier ministre a dit en France qu'il aurait préféré que le Canada n'ait pas été conquis autrefois par les Anglais et que cette partie de l'Amérique du Nord fût demeurée française. En 1997, il a dit du mal des Américains à des dirigeants d'autres pays du G-7, sans savoir que son micro était ouvert. Il a invoqué de piètres excuses quand il a décidé d'aller skier à Whistler au lieu d'aller représenter le Canada aux funérailles du roi Hussein.

 

. 1405 + -

Le premier ministre devrait être vacciné contre la fièvre gaffeuse en même temps qu'il l'est contre la grippe avant de pouvoir se rendre dans les autres pays prévus à l'itinéraire de son voyage.

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LA HONDA INSIGHT

M. Paul Bonwick (Simcoe—Grey, Lib.): Monsieur le Président, j'ai de bonnes nouvelles. Je suis en effet heureux d'annoncer aujourd'hui que la société Honda introduira cette année sur le marché le premier véhicule hybride à moteur électrique et à essence fabriqué au Canada.

Il s'agit de la toute nouvelle Honda Insight, qui constitue une véritable révolution technologique. La Insight est propulsée par le groupe moteur intégré et assisté d'avant-garde de Honda. Grâce notamment à sa carrosserie légère en aluminium, la Insight consomme aussi peu que 3,2 litres d'essence aux 100 kilomètres. Par ailleurs, la Insight est conçue de manière à réduire les émissions au minimum.

Le 9 mai, les dirigeants de Honda viendront présenter ce véhicule sur la colline du Parlement. J'encourage tous mes collègues à la Chambre à visiter ce stand pour voir ce véhicule incroyable et peut-être même en faire l'essai sur la route.

Je suis convaincu que ce véhicule révolutionnaire sera bien accueilli par les consommateurs canadiens.

Je félicite la société Honda et toute son équipe. Bravo Honda!

*  *  *

UNE VISION DU CANADA

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, nous avons chacun notre propre idée de ce qu'est un pays sain.

Pour moi, ce qui est plus important que d'avoir davantage d'argent dans ma poche, c'est d'édifier une société reposant sur des valeurs solides. Je veux que ma famille se sente en sécurité et que chacun ait le sentiment de pouvoir réaliser son plein potentiel. Je veux savoir que tous les Canadiens ont un toit, de quoi manger, un système de santé qui répond à leurs besoins médicaux, un système d'éducation qui permet à chacun d'apprendre et de s'épanouir.

Ce sont là, à mon avis, les premières priorités d'une société saine. Tous les Canadiens auraient ainsi les outils nécessaires pour poursuivre leurs rêves et contribuer à part entière à la société.

*  *  *

LES DROITS DES CONTRIBUABLES

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le 30 janvier 1994, Deborah Starr-Stephan, mère de 10 enfants et épouse adorée de Tony Stephan, s'est ôté la vie. En 1993, son mari, après avoir épuisé toutes les autres options, avait été obligé de déclarer faillite. À partir de ce moment-là, sa famille a été constamment harcelée par le personnel de l'Agence des douanes et du revenu. Sa famille réduite à la misère, incapable elle-même de faire face au stress extrême de sa vie, Deborah Stephan s'est suicidée. Cela n'aurait jamais dû se produire.

À l'automne 1997, l'opposition officielle a proposé une charte des droits des contribuables et un bureau de protection des contribuables. Le gouvernement doit adopter cette proposition afin que les Canadiens comme la famille Stephan soient protégés contre les traitements sommaires et abusifs de la part des agents de l'ADRC.

En l'absence d'une charte forte des droits des contribuables, l'ADRC pourrait être assaillie par les mêmes problèmes de reddition de comptes qui font de l'IRS l'organisme le plus honni des États-Unis.

*  *  *

LA JOURNÉE DU LIVRE DU CANADA

Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de déclarer à la Chambre que le 27 avril sera la Journée du livre du Canada. Cette journée est une initiative du Writer's Trust of Canada, qui appuie la Journée mondiale du livre. Cet événement a lieu chaque année depuis 1995. La Journée du livre du Canada est le plus important événement d'une journée consacré à la lecture et à l'achat de livres au Canada.

Cette année, le ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux du Canada apporte un important soutien à l'événement. Un quart de million d'articles ont été distribués aux Canadiens par l'intermédiaire du réseau ministériel très actif composé de plus de 700 librairies. Aujourd'hui, une table de promotion du livre est installée dans la rotonde de l'Édifice du Centre. Des publications clés du gouvernement y sont en montre et on y distribue aussi de la documentation.

J'invite tous les députés à prendre une courte pause pendant leur journée très occupée pour passer à cette table d'exposition.

*  *  *

LES DÉNÉS SAYISIS

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, la poésie sauvegarde la mémoire de notre société. Plus qu'un dossier historique, la poésie préserve les sentiments de ceux qui vivent des événements historiques.

Entre 1950 et 1970, le ministère des Affaires indiennes a infligé un traitement épouvantable aux Dénés sayisis du nord du Manitoba. Au moins un tiers des membres de cette bande, soit toute une génération, sont morts des suites d'une réinstallation forcée.

La poésie d'Ila Bussidor traduit bien la douleur et les pertes des Dénés, mais également la force et l'espoir de la guérison. Aujourd'hui, Ila Bussidor est chef des Dénés sayisis. Elle mène son peuple dans sa lutte pour une indemnisation. Sa poésie parle des esprits de la nuit, c'est-à-dire des esprits de ceux qui sont morts.

      Je rêve d'un aigle
      Venant toujours vers moi,
      Expression de force, d'amitié et de bonté.
      Je touche l'oiseau sacré de l'esprit.
      Il prend soin de moi, chaque fois qu'il m'apparaît.
      Il me laisse le porter.
      Il me donne ses plumes sacrées.
      Il marche à mes côtés.
      Je ne le crains pas.
      Je crois qu'il me protège.
      En lui sont les esprits de mon père et de ma mère
      Qui m'accompagnent aux jours de ma douleur.

*  *  *

[Français]

AÉROPORTS DE MONTRÉAL

M. Paul Mercier (Terrebonne—Blainville, BQ): Monsieur le Président, depuis plusieurs semaines, les journaux sont remplis de révélations sur les pratiques de gestion déficientes d'Aéroports de Montréal. Ces révélations troublantes ont amené le Bloc québécois à convoquer la présidente et chef de la direction, Mme Pageau-Goyette, au Comité permanent des transports. Les problèmes de relations de travail, de manque de transparence et d'apparence de conflit d'intérêts ont été soulevés.

 

. 1410 + -

Les réponses de la direction d'ADM ont été pour le moins insatisfaisantes et nous laissent perplexes. Des décisions cruciales pour le développement de Montréal ont été prises par ADM et des investissements importants ont été annoncés dans un contexte où la confiance du public a été fortement ébranlée.

Le Bloc québécois entend bien ne pas en rester là. Les aéroports de Montréal sont des biens publics qui ont été financés par les deniers publics.

La direction d'ADM devra revoir ses pratiques afin de regagner la confiance du public et des élus. Il ne saurait être question de voir les pratiques qui ont cours à Développement des ressources humaines Canada se répéter au sein d'un organisme chargé du développement d'infrastructures aussi importantes pour le Québec.

*  *  *

[Traduction]

L'IRAN

M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, jeudi de cette semaine débutera en Iran un procès que suivront de près ceux d'entre nous qui attachent de la valeur aux droits de la personne et à la démocratie.

Treize citoyens juifs d'Iran sont accusés de crimes contre l'État. Bon nombre d'observateurs estiment que ces accusations ne sont pas fondées et ont été inventées de toutes pièces par le clergé conservateur de l'Iran pour freiner l'ouverture de l'Iran.

Bon nombre d'entre nous ont suivi la situation avec intérêt et espoir à l'occasion des récentes élections en Iran qui ont rapproché ce pays du jour où il aura la société ouverte et démocratique que souhaitent ses citoyens.

Certaines des récentes initiatives positives adoptées par le gouvernement iranien en ce qui concerne la poursuite des accusés sont encourageantes. Des droits fondamentaux, comme le droit de choisir un avocat libre et indépendant, et certaines dispositions en matière de cautionnement ont été reconnus. Toutefois, le gouvernement iranien doit veiller à ce que tout le procès se déroule dans un cadre juste.

Beaucoup d'entre nous respectent l'Iran en raison de sa riche histoire et de sa population dynamique et instruite. Toutefois, nos yeux seront rivés sur ce procès et nous nous attendons à ce que les accusés fassent l'objet d'un verdict juste et à ce que la liberté religieuse soit protégée en Iran.

*  *  *

[Français]

LE PREMIER MINISTRE DU CANADA

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, pour redorer l'image du premier ministre du Canada, ternie ici par les scandales, enquêtes et contestations de son leadership, quoi de mieux qu'un bon voyage à l'étranger, mieux, au Moyen-Orient, où, bien encadré, il pourra montrer sa stature d'homme d'État et la finesse de son doigté dans les relations internationales.

Ses conseillers doivent être bien déçus. Au lieu du succès attendu, voilà que le premier ministre, en plus de confondre l'Est et l'Ouest à Jérusalem, se plaît à dire le contraire de ce qu'on lui a soufflé, se met les pieds dans le plat et indispose tout le monde.

«Je crois, moi personnellement, que c'est mieux de garder la déclaration d'indépendance comme point de pression pour les négociations» dit-il en français à Yasser Arafat, alors que le Jerusalem Post, citant en anglais ses conseillers, lui fait dire exactement le contraire.

Il semble bien que même le décalage horaire n'arrive pas à redonner cohérence au discours du premier ministre. Je vous donne à suivre demain le voyage du premier ministre au Golan.

*  *  *

[Traduction]

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, les prétendues réformes apportées par les libéraux au système d'assurance-chômage ont eu un effet dévastateur sur les chômeurs canadiens. À l'heure actuelle, seulement 36 p. 100 des chômeurs canadiens sont admissibles aux prestations d'AE, par rapport à 87 p. 100 en 1989.

Dans St. John's-Est, les réductions d'AE coûtent 50 millions de dollars par année à mes électeurs. Dans la circonscription voisine de St. John's-Ouest, royaume des élections partielles, ces réductions coûtent 56 millions de dollars par année. La circonscription de Burin—St. George perd 81,7 millions de dollars par année et celle d'Humber—St. Barbe—Baie Verte perd pour sa part 74,7 millions de dollars. En tout, l'économie de Terre-Neuve et du Labrador a perdu plus d'un milliard de dollars en prestations d'assurance-emploi depuis que les libéraux ont pris le pouvoir en 1993.

Qu'ont redonné les libéraux? Ils ont fait passer de 6 à 12 mois le congé de maternité du système d'AE. Toutefois, étant donné que seulement 31 p. 100 des chômeuses canadiennes sont effectivement admissibles à des prestations, ce n'est vraiment pas très réconfortant.

*  *  *

LES BÉNÉVOLES

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, la Semaine nationale de l'action bénévole est une excellente occasion pour s'arrêter quelques moments sur le profil des bénévoles au Canada.

Le rapport intitulé Religion, Volunteering and Charitable Giving fait état d'une corrélation tout à fait renversante: plus on pratique sa religion activement, plus on s'efforce pour doter le Canada d'une société civile.

Seulement 14 p. 100 des Canadiens disent pratiquer activement leur religion, mais ils représentent 43 p. 100 des bénévoles et ils contribuent pour plus de la moitié au total du temps consacré au bénévolat. En outre, ils font 65 p. 100 des dons de charité.

Si ceux qui ne pratiquent pas activement leur religion participaient autant, les dons doubleraient et le temps de bénévolat augmenterait de 60 p. 100.

Tous les députés devraient féliciter les pratiquants actifs de leurs collectivités et ceux qui, grâce à leur foi et à leurs engagements, favorisent la croissance de notre société civile.

Je profite de l'occasion pour encourager tous mes électeurs, pratiquants ou non, à donner du temps et de l'argent pour vraiment faire une différence.

*  *  *

 

. 1415 + -

L'IRAN

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, jeudi prochain, 13 Iraniens juifs comparaîtront devant un tribunal, en Iran, sous de fausses accusations d'espionnage.

Même si l'on met de côté les questions cruciales de liberté religieuse soulevées dans ce cas, il est clair que ces hommes ont droit à un procès équitable, aux termes de l'article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Ce droit suppose que chacun ait accès à un représentant juridique de son choix et qu'il ait assez de temps pour préparer sa défense devant un tribunal ouvert, en présence d'observateurs internationaux libres d'assister aux séances ou de suivre les travaux. Malheureusement, il semble pour le moment que ces hommes comparaîtront à huis clos, devant un tribunal révolutionnaire iranien, et qu'ils n'auront pas droit à un défenseur de leur choix.

Le NPD se joint à la communauté internationale pour exiger que ces 13 Iraniens juifs aient droit à un procès équitable. Nous exhortons le gouvernement iranien à garantir la liberté religieuse de tous ses citoyens, peu importe leur religion.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

REVENU CANADA

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est aujourd'hui la remise des bulletins, et ce n'est pas beau du tout.

Le vérificateur général a critiqué la mauvaise gestion à l'Immigration, aux Affaires indiennes, au Développement des ressources humaines et au Solliciteur général, mais c'est Revenu Canada qui a eu le premier prix aujourd'hui.

Revenu Canada distribue plus de 2 milliards de dollars, principalement aux grandes sociétés. Cela rapporte de 20 à 55 millions de dollars à l'économie canadienne. Un autre gâchis monumental. Ce n'est certainement pas une bonne affaire.

Le ministre du Revenu croit-il que les contribuables aiment voir leur argent gaspillé par le ministère percepteur lui-même?

[Français]

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, je pense que dès le début, il faut être clair. Les députés de l'Alliance canadienne essaient de faire croire qu'il y a eu des problèmes et des pertes de fonds qui relèveraient du ministère du Développement des ressources humaines. Encore une fois, ils vont essayer de faire croire qu'il y a des pertes de fonds.

J'aimerais simplement dire qu'on ne parle pas de perte d'argent ni dans un ministère, ni dans un autre. Ce qu'il faut comprendre également, c'est que ce qui a été soulevé dans le rapport du vérificateur général remonte à 1994 et bien avant cela. Toutefois, en 1994, une décision a été prise d'imposer des délais pour le dépôt des demandes de crédits d'impôt en recherche et développement, ce qui a fait en sorte que 16 000 demandes ont été déposées en même temps à l'intérieur d'une période de quatre mois.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ce n'est peut-être pas une question de perte d'argent, mais c'est une question de mauvaise gestion flagrante des deniers publics dans chaque ministère.

Selon le solliciteur général, Revenu Canada est très sélectif quand vient le temps de distribuer son argent. En fait, moins de 10 p. 100 des sociétés qui présentent des demandes obtiennent 85 p. 100 de l'argent.

Dans un cas, le ministère a passé près de 10 000 heures à essayer de trouver comment une certaine personne pouvait même être admissible, mais elle a fini par obtenir deux fois plus d'argent qu'elle n'en avait demandé. Quelle bonne affaire!

Comment se fait-il que, chaque fois que quelqu'un au gouvernement voit une cagnotte pleine d'argent des contribuables, il ne peut pas résister à la tentation de distribuer cet argent?

[Français]

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, on voit qu'ils ne comprennent pas du tout ce qu'est le développement économique et encore moins ce qu'est un crédit d'impôt en recherche et développement.

Ce que j'ai expliqué, et je pense que c'est important, c'est qu'en 1994, pour faire une bonne administration, on a annoncé dans le budget que les demandes de crédits d'impôt en recherche et développement devaient être déposées dans 18 mois suivant l'année où les dépenses étaient encourues.

Cela a fait en sorte que toutes les demandes, même celles qui pouvaient remonter à 1985, ont été déposées. Il y a eu 16 000 demandes additionnelles qui ont été déposées à l'intérieur d'une période de quatre mois. Je considère que le ministère a fait un bon travail et que le rapport du vérificateur général déposé aujourd'hui sera un bon outil pour faire en sorte qu'on puisse améliorer notre programme.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, seul un libéral peut se vanter de cela et penser que ce rapport est tout simplement extraordinaire.

Les libéraux devraient appeler leur ministère «Dépenses Canada». On a perçu plus d'argent en impôts cet année? Eh bien, qu'on le dépense le plus vite possible avant que les Canadiens s'en rendent compte.

Un demandeur a obtenu un demi-million de dollars de plus que ce qu'il avait demandé. On lui a dit: «Ne vous en faites pas. Il n'y a pas de problème. Nous promettons que cela ne se produira plus.» Puis on lui a dit de garder l'argent.

C'est incroyable de voir le gouvernement agir de la sorte. Pourquoi découvre-t-on chaque jour un nouveau gâchis dont il est responsable?

[Français]

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, il existe des mécanismes au sein de l'Agence pour assurer qu'on puisse analyser l'ensemble des demandes de recherche et développement.

Il existe également des mécanismes de discussion et d'appel qui ont été utilisés. Encore là, au risque de me répéter, du côté de l'opposition officielle, on ne veut évidemment pas comprendre et on ne peut pas comprendre. Si l'Alliance canadienne était au gouvernement, l'ensemble du milieu des affaires et le développement économique au Canada n'existeraient pas. Parler avec les députés de ce parti du management d'un programme est impossible. Ils ne peuvent pas comprendre ce que c'est. D'autre part, dès 1994, on a commencé à travailler pour faire en sorte de s'occuper des 16 000 demandes additionnelles et je suis fier du travail de l'Agence.

 

. 1420 + -

[Traduction]

M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voyons si nous aurons plus de chance avec la prochaine question.

Le vérificateur de l'impôt approuve un crédit d'impôt pour la recherche scientifique de plusieurs dizaines de millions de dollars. Il soumet son initiative à l'approbation des gens d'en haut. Et que disent-ils? Ils disent que des dizaines de millions de dollars ce n'est pas assez. Ils parlent de doubler ce montant.

Ma question au ministre du Revenu national est simple. Pourquoi ses hauts fonctionnaires ont-ils doublé le montant du crédit d'impôt qu'avait autorisé le vérificateur, sans aucun autre élément d'information?

[Français]

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, il y a eu 16 000 demandes, en 1994, auprès de l'Agence en l'espace de quatre mois. Malgré tout, l'Agence a été capable de s'occuper de l'ensemble de ces demandes, suivant les processus d'analyses, de consultations, de discussions et d'appels qui ont été mis en place.

Je dois dire que lorsqu'on regarde l'ensemble des recommandations du rapport du vérificateur général, il est important de noter qu'au niveau de l'Agence, nous avons reconnu qu'il y a des améliorations à apporter à la gestion du crédit d'impôt et, en ce sens, le rapport sera un outil remarquable.

Mais aujourd'hui, on fait une sortie à la Chambre pour essayer de scorer des points politiques «cheap». Où étaient-ils lorsqu'on est intervenus pour améliorer le système?

[Traduction]

M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous sommes d'accord, il y a sûrement des améliorations qui s'imposent.

Poursuivons. Croyez-le ou non, toujours dans le cas qui nous occupe, ils ont versé au sous-traitant des dizaines de millions de dollars pour ce travail. Lorsque l'affaire a été vendue à l'entrepreneur, une plus grande entreprise, le même crédit a de nouveau été accordé et l'administration centrale de Revenu Canada a multiplié le montant par deux. Ils ont donc été payés trois fois. Et les contribuables ont payé trois fois pour le même travail.

La question est fort simple. Quand le gouvernement s'engage dans un énorme gâchis, pourquoi faut-il qu'il multiplie le montant par trois?

[Français]

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'impression que je vais devoir le répéter plusieurs fois: 16 000 demandes déposées en quatre mois. Malgré tout, je suis fier du travail qui a été fait par les membres de l'Agence dans des circonstances très difficiles.

D'ailleurs, lorsqu'il regarde la situation, le vérificateur général parle d'un «administrative nightmare». Donc, la situation était difficile.

Mais ce que j'aimerais demander à l'opposition officielle, c'est où étaient-ils quand on a mis de l'avant un plan d'action pour essayer de faire en sorte qu'on puisse améliorer le système? Où étaient-ils lorsqu'on a mis sur pied une conférence à Vancouver pour consulter la communauté des affaires? Où étaient-ils lorsqu'on a rencontré les gens d'affaires à Montréal?

*  *  *

LE MOYEN-ORIENT

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, c'est certes un honneur pour le Canada de présider le Conseil de sécurité des Nations Unies.

Cependant, comment peut-on concilier les importantes responsabilités canadiennes au Conseil de sécurité avec la succession d'erreurs que commet le premier ministre au Moyen-Orient, une région où, pourtant, l'équilibre politique est si fragile?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le Canada a été élu membre du Conseil de sécurité et on a reconnu que, comme membre de ce Conseil, le Canada est dirigé par le premier ministre actuel qui est en position de donner un bon leadership à notre pays dans les Conseils du monde.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, on voit qu'il est très habile dans ses conseils actuellement en Israël. Il y a lieu de s'interroger sur le degré de préparation du premier ministre avant d'entreprendre un tel voyage.

Le vice-premier ministre ne croit-il pas que le premier ministre, loin de perpétuer la tradition de Pearson, est en train de nuire grandement à la réputation internationale du Canada sur le plan diplomatique?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que le premier ministre actuel marche dans la même voie que feu le premier ministre Pearson. Il travaille afin qu'il y ait une région au Moyen-Orient—et un monde—qui soit dans une situation de paix, et je pense qu'il fait un très bon travail en ce sens.

 

. 1425 + -

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, est-ce que le premier ministre ne devrait pas se rendre compte qu'avec ses commentaires sur Jérusalem et sur la déclaration unilatérale d'indépendance de la Palestine, il a réussi, en moins de 24 heures, à mécontenter et les Israéliens et les Palestiniens, n'améliorant en rien la sérénité nécessaire à la poursuite des négociations de paix?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je n'accepte aucunement les prémisses de la question de l'honorable députée.

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, cette question est éminemment importante, parce que cette partie du monde a trop souffert pour qu'on vienne nuire à la faible chance de paix.

Comment le gouvernement canadien peut-il espérer jouer un rôle utile dans les futures négociations au Moyen-Orient, alors que son premier ministre semble aussi peu au fait de l'impact de ses déclarations?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre et le Canada continuent de travailler pour appuyer la cause de la paix au Moyen-Orient et partout dans le monde.

*  *  *

[Traduction]

LA SANTÉ

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, j'ai reçu une lettre d'Agatha Corcoran, de Mount Pearl, à Terre-Neuve.

    Chère Alexa,

    J'attends un examen IRM depuis décembre 1999. J'ai constamment des douleurs et des spasmes au cou. Je suis en congé de maladie, mes prestations sont épuisées et je ne peux pas faire grand-chose. Un examen IRM déterminera la cause du problème, mais il n'est prévu qu'en juillet.

Dans l'intervalle, elle reste à la maison et applique des compresses de glace pour essayer de supporter la douleur.

Je demande au ministre de la Santé: pourquoi Agatha Corcoran et des milliers de Canadiens comme elle doivent-ils attendre dans la souffrance, pendant que le gouvernement retient des ressources dont ils ont désespérément besoin?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la députée sait fort bien que, au cours des 14 derniers mois, le gouvernement a accru de 14 milliards de dollars le montant des transferts aux provinces au titre de la santé, qu'au cours des 14 derniers mois, la partie en espèces des transferts est passée de 12,5 à 15,5 milliards par année. Comme le premier ministre l'a dit, nous sommes disposés à accorder encore plus de fonds à long terme si les provinces instaurent un plan raisonnable pour s'attaquer aux difficultés comme celles dont la députée vient de parler.

À mon avis, si les gouvernements collaborent, ils pourront atteindre leurs objectifs.

Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le Président, pourtant, le ministre de la Santé admet encore une fois qu'il faut investir plus d'argent, mais Agatha Corcoran et d'autres devront attendre et continuer de souffrir.

Permettez-moi de souligner le cas d'une autre malade qui a écrit de St. John's. Il y a sept mois, Jody Ann O'Brien a été référée à un spécialiste en raison d'une arthrite débilitante. Elle n'a toujours pas vu un spécialiste, malgré les efforts de son médecin de famille.

Le ministre pourrait-il expliquer pourquoi son gouvernement consacre de l'argent à des annonces publicitaires, au lieu d'aider des malades comme Jody Ann O'Brien?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens dépensent 90 milliards de dollars par année en soins de santé. L'argent fait partie de l'enjeu, mais un autre aspect important, c'est de savoir comment cet argent est dépensé et quels changements nous devons apporter pour offrir des services aux personnes dont la députée a parlé.

Une figure publique, Bob Rae, ancien premier ministre néo-démocrate de l'Ontario, a déclaré que notre gouvernement avait raison: il faut plus d'argent, mais il faut aussi un plan pour résoudre ces problèmes. Le gouvernement néo-démocrate de la Colombie-Britannique est du même avis.

La députée ne travaillera-t-elle pas avec nous pour faire en sorte que, si nous dépensons plus d'argent, nous l'utiliserons pour régler les problèmes, au lieu de chercher tout simplement à marquer des points politiques?

*  *  *

LE MOYEN-ORIENT

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, de toute évidence, ce n'est pas le premier ministre qui aura le prix Nobel de la paix pour avoir contribué à l'édification de la paix au Moyen-Orient. Au lieu d'appuyer la création d'un nouvel État palestinien dans le cadre du processus de paix, le premier ministre a compromis le processus de paix en déclarant qu'il reconnaîtra une déclaration d'indépendance unilatérale de la part des Palestiniens.

De tels commentaires sont déplacés et témoignent d'un changement spectaculaire dans la politique étrangère du Canada. N'est-il pas temps que le Parlement rappelle le premier ministre au Canada avant qu'il ne nuise encore à la réputation internationale dont jouit le Canada pour ce qui est de sa politique étrangère au Moyen-Orient?

 

. 1430 + -

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, la position du premier ministre au Moyen-Orient et au Canada est d'insister auprès des parties afin qu'elles s'efforcent d'arriver à une solution négociée.

C'est sa position au Canada. C'est sa position au Moyen-Orient. Personne ne devrait avoir d'objections à cela, pas comme les conservateurs qui profitent de nos efforts en vue d'arriver à une solution pacifique au Moyen-Orient pour se constituer un capital politique.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Monsieur le Président, le vice-premier ministre devrait expliquer la position canadienne au premier ministre.

Pour un amateur de clarté, le premier ministre sème la confusion. Ayant toujours dénoncé la menace d'une déclaration unilatérale d'indépendance du Québec, voilà qu'il la bénit pour la Palestine.

C'est certain que le cas de la Palestine peut différer de celui du Québec, mais il y a des similitudes, selon le premier ministre. Or, dans le cas de la Palestine, le premier ministre dit que si les négociations ne sont plus de bonne foi de la part d'Israël, le Canada serait prêt à reconnaître la déclaration unilatérale d'indépendance tout comme la France semblerait en mesure de le faire.

Dans le cas du Québec, on reconnaît au paragraphe 155 que si le Canada refuse de négocier de bonne foi, le Québec pourrait être reconnu, déclarer son indépendance et la communauté internationale pourrait la reconnaître. Est-ce un changement de politique?

L'hon. Herb Gray (vice-premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, ici, au Canada, il n'y a pas de région occupée. Il n'y a pas de colonie et notre situation est tout à fait différente des régions du Moyen-Orient. Je me demande pourquoi l'honorable député progressiste-conservateur ne comprend pas cette différence.

*  *  *

[Traduction]

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le nouveau rapport du vérificateur général vient de sortir. On dirait que le gouvernement essaie de battre Rocky sur le terrain des mauvaises suites. Cette fois, ce sont le ministère des Finances et l'Agence des douanes et du revenu du Canada qui ont la vedette, dans ce quatrième épisode du cafouillis, «La revanche des bureaucrates».

Selon le rapport du vérificateur général, le ministère et l'agence ont mal géré 2 milliards de dollars dans l'application du programme de crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental. Pourquoi le gouvernement estime-t-il qu'un rendement de 1 $ sur un investissement de 40 $ est satisfaisant pour les contribuables?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, je vais sans doute devoir me répéter encore et encore. Tout d'abord, il n'y a pas de cafouillis au ministère du Développement des ressources humaines, et il n'y en a pas non plus à l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

Deuxièmement, si les députés prennent le temps de lire correctement le rapport du vérificateur général, ils constateront que, en 1994, il a été décidé de régler le problème des retards de 18 mois dans le traitement des demandes pour ce genre de crédits d'impôt. À l'époque, nous avons reçu plus de 16 000 demandes en quatre mois.

Le vérificateur général a dit que nous vivions un cauchemar politique et administratif et que nous...

Le Président: Le député de Medicine Hat a la parole.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avec ce gouvernement, c'est devenu le cauchemar des contribuables. De toute évidence, le cas de DRHC n'était pas un incident isolé. Il a servi de modèle au gouvernement pour faire un usage abusif de montants considérables provenant des contribuables.

Le ministère des Finances et l'agence ont mal géré 2 milliards de dollars. Combien d'autres catastrophes de cette ampleur devrons-nous découvrir avant que le gouvernement ne reconnaisse, pour reprendre les propos du ministre des Finances, qu'il ne peut pas choisir les gagnants, mais que les perdants peuvent certainement choisir le gouvernement?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, je crois l'avoir dit, mais je vais continuer de le répéter. Le programme canadien de crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental est l'un des meilleurs outils du monde pour favoriser le développement économique dans les centres et dans toutes les régions du Canada. Je m'en tiens à cette position.

Deuxièmement, nous avons dû faire face à un cauchemar administratif. Lorsque j'entends ce qui se dit en face, je sais que, s'il n'en tenait qu'aux députés d'en face, nous n'aurions pas cet outil. Ce serait un cauchemar politique si le Parti réformiste accédait au pouvoir.

*  *  *

[Français]

LES JEUNES CONTREVENANTS

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, des intervenants provenant des quatre coins du Québec sont venus dénoncer le projet de loi C-3 visant à abroger la Loi sur les jeunes contrevenants.

 

. 1435 + -

Ce sont ces personnes qui ont permis au Québec d'afficher le plus bas taux de criminalité juvénile de toute l'Amérique du Nord. Suite à leurs représentations, la ministre de la Justice a déposé, mardi dernier, des amendements au projet de loi C-3.

Devons-nous comprendre que ces amendements constituent la réponse de la ministre à l'opposition manifestée par ces intervenants en comité?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous croyons que notre nouvelle Loi sur le système de justice pénale pour les adolescents est un cadre souple à l'intérieur duquel les provinces et territoires peuvent mettre en oeuvre cette mesure législative en tenant compte de leurs besoins et de leurs préférences au niveau local.

Comme le député le sait, je lui ai déjà demandé de préciser une politique ou un programme au Québec qui ne pourrait être poursuivi à cause de cette nouvelle loi. Jusqu'à maintenant, il n'a pu m'en nommer aucun.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, la ministre réalise-t-elle que ses amendements ne répondent aucunement aux questions soulevées par les intervenants québécois—il y a un consensus clair à ce sujet—et que le seul moyen d'y parvenir, c'est de permettre au Québec, par un amendement au projet de loi C-3, de continuer d'appliquer telle quelle la Loi sur les jeunes contrevenants?

C'est ce que le Québec lui demande depuis longtemps.

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, le projet de loi C-3 est une mesure législative souple qui va permettre au Québec de poursuivre dans le domaine de la justice pour les jeunes ce qu'il fait déjà à l'heure actuelle.

*  *  *

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Mike Scott (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans son rapport, le vérificateur général dit ceci au sujet de l'éducation des autochtones:

    Affaires indiennes et du Nord Canada ne peut démontrer qu'il atteint l'objectif qu'il s'est fixé, à savoir aider les élèves membres d'une première nation qui vivent dans une réserve à répondre à leurs besoins en matière d'éducation. Cette situation est complexe et nécessite une solution rapide. Au rythme où les progrès sont réalisés actuellement, il faudra plus de 20 ans pour que leur niveau de scolarisation atteigne celui des autres Canadiens.

Je voudrais poser la question suivante au ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien: comment peut-il regarder les enfants autochtones droit dans les yeux à la suite de cet échec?

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, je reconnais avec le vérificateur général que nous allons trop lentement. C'est pourquoi, en 1998, nous avons présenté des réformes dans le document appelé Rassembler nos forces dans le but de procéder à une refonte du système d'éducation.

Au cours des prochaines années, nous allons présenter ces modifications à la Chambre et j'espère que pour une fois le député votera en faveur de ces mesures.

M. Mike Scott (Skeena, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre et le gouvernement sont responsables de l'éducation des enfants autochtones. Ils dépensent plus d'un milliard de dollars par année et, malgré toutes ces dépenses, la situation est vraiment terrible.

En 20 ans, le gouvernement a commandé 22 études distinctes, mais aucun progrès n'a encore été réalisé. Pourquoi devrions-nous croire que Rassembler nos forces va faire une différence? Même le vérificateur général l'a dit. Comment le ministre peut-il défendre ce type de bilan honteux?

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, le vérificateur général a dit en fait que la façon la plus appropriée d'atteindre nos objectifs quant au type d'éducation que nous voulons offrir aux étudiants autochtones consiste à donner aux autochtones le contrôle dans leurs propres collectivités. J'espère que le député votera en faveur de cela lorsque nous saisirons la Chambre de la mesure pertinente.

*  *  *

[Français]

LES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, quoi qu'en dise le ministre de l'Agriculture, on a appris, hier, que l'étiquetage des OGM serait désormais obligatoire en Europe.

Or, cette réglementation risque d'entraîner de sérieuses conséquences sur l'exportation de nos produits agroalimentaires.

Le ministre peut-il nous dire ce qu'il entend faire pour éviter les conséquences négatives sur nos exportations?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a eu aucune conséquence néfaste sur l'exportation de nos produits pris séparément dans l'Union européenne.

Comme je l'ai rappelé hier à la Chambre et à la députée, même si l'Union européenne a mis une loi en place, il est évident qu'elle ne dispose pas de critères ou de méthodes adéquats pour déterminer la teneur d'un produit en quoi que ce soit de génétiquement modifié. Elle a mis en place une mesure législative qui n'est pas logique, qui n'est pas crédible et qui n'est pas applicable.

Ce n'est pas dans ce sens que nous allons aller. Nous allons relever ce défi avant de...

Le Président: La députée de Louis-Hébert a la parole.

 

. 1440 + -

[Français]

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je pense que le ministre est mal informé.

Puisque la technologie pour détecter les OGM existe actuellement au Canada, qu'attend-il pour rendre l'étiquetage obligatoire?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, l'Union européenne a admis et démontré que la teneur d'une marchandise en produits génétiquement modifiés n'était pas détectable. Elle ne dispose d'aucune méthode pour faire cela; c'est pourquoi elle se trouve dans l'incapacité d'appliquer cette loi.

*  *  *

LE RAPPORT DU VÉRIFICATEUR GÉNÉRAL

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans son rapport rendu public aujourd'hui, le vérificateur général accuse le gouvernement d'avoir mal administré le ministère de l'Immigration. Cette mauvaise gestion a ouvert la porte au crime organisé qui menace la sécurité de notre nation.

Ce rapport est quasiment une copie conforme de celui de 1990. La ministre et son gouvernement ont eu sept ans pour régler le problème. Pourquoi les Canadiens devraient-ils croire qu'elle va maintenant le résoudre?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, la santé et la sécurité des Canadiens représentent ma toute première priorité.

Des voix: Oh, oh!

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Nous entendrons la ministre.

L'hon. Elinor Caplan: Nous connaissons les préoccupations du vérificateur général. Je veux que le député et tous les autres députés à la Chambre sachent que nous procédons à d'importants changements administratifs.

Le récent budget et la mesure législative nous accordent un financement additionnel. J'espère que le député et son parti appuieront le projet de loi C-31 pour que nous puissions mettre en oeuvre les changements législatifs recommandés par le vérificateur général.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le vérificateur général affirme qu'on ne règlera pas le problème avec de nouveaux fonds ou de nouvelles mesures législatives. Il faudra plutôt améliorer la gestion, la formation et la vérification.

Le thème récurrent est clairement la mauvaise gestion du gouvernement. Le gouvernement de la ministre a eu sept ans pour régler le gâchis déploré dans le précédent rapport du vérificateur général et il ne l'a pas fait. Comment pouvons-nous croire que la ministre saura maintenant résoudre le problème?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le vérificateur général affirme que le ministère de l'Immigration a besoin de ressources additionnelles. Le dernier budget nous a donné ces ressources. Grâce à celles-ci, nous pourrons mettre à niveau la technologie dont nous avons besoin, exercer des contrôles additionnels et assurer la formation supplémentaire qu'il nous faut.

La nouvelle mesure législative que je viens de déposer contribuera largement à régler les problèmes que mentionne le vérificateur général et j'espère que le député et son parti appuieront ce projet de loi.

*  *  *

[Français]

L'IMMIGRATION

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, une fois de plus, le vérificateur général dénonce de graves lacunes à Immigration Canada, notamment la faiblesse de la sécurité entourant les visas, le manque d'étanchéité des banques de données et, plus inquiétant encore, les examens médicaux nécessaires à l'entrée au Canada qui sont les mêmes depuis 40 ans.

Comment la ministre de l'Immigration peut-elle expliquer qu'en l'an 2000, son ministère fait toujours passer les mêmes examens médicaux qu'il y a 40 ans?

[Traduction]

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de répéter que les questions de sécurité et de santé publiques sont prioritaires pour mon ministère et le gouvernement.

Le vérificateur général a dit que nous devons améliorer nos contrôles de sécurité, et c'est ce que nous faisons. Il a aussi dit que nous devons améliorer nos examens médicaux, et c'est ce que nous faisons.

Lorsque nous déposerons les nouveaux règlements, nous aurons, pour la première fois, une définition de la non-admissibilité pour des raisons médicales qui aura fait l'objet d'un consensus entre toutes les provinces. Cela devrait répondre aux besoins, dans une large mesure.

Je tiens à dire aux députés que les agents d'immigration aux différents points d'entrée qui ont des doutes sur l'état de santé de quiconque entre au Canada peuvent demander, voire exiger que la personne se soumette à un examen médical.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Alex Shepherd (Durham, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. Il ne reste plus que 19 jours aux Canadiens pour produire leur déclaration d'impôt sur le revenu de 1999, et bien des gens dont les revenus sont faibles ou moyens savent que, lorsque leurs revenus s'approchent des seuils des nouveaux paliers d'imposition, ils sont souvent assujettis à un taux d'imposition marginal pouvant atteindre 50 p. 100.

Cela décourage les gens de travailler, et il s'ensuit une baisse de notre productivité et de la richesse à laquelle peuvent aspirer tous les Canadiens. Que fait le ministre pour éliminer cette disparité?

 

. 1445 + -

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le député de Durham soulève une question très importante, parce que, dans les faits, nous avons réduit le taux d'imposition moyen qui, à plus ou moins brève échéance, passera de 26 à 23 p. 100. La question est importante parce que nous haussons les seuils respectifs de 29 000 $ à 35 000 $, et de 59 000 $ à 70 000 $. Elle est aussi importante parce que nous avons réindexé tout le régime fiscal. Elle est importante parce que l'on constate d'après la période des questions des derniers mois qu'il n'y a que les libéraux qui sont déterminés à réduire les impôts des Canadiens.

*  *  *

LE SOLLICITEUR GÉNÉRAL

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, parlons de mauvaise gestion au ministère du solliciteur général, où elle ne coûte pas seulement de l'argent, mais des vies, en fait.

Le vérificateur général cite l'infâme catastrophe de l'affaire Bernardo, où un retard de deux ans dans le traitement d'échantillons d'ADN a permis à Bernardo de commettre quatre autres viols et deux autres meurtres.

Comment le présent gouvernement peut-il dire sérieusement aux Canadiens qu'il protège les citoyens respectueux de la loi? Ses politiques permettent à Bernardo et à d'autres prédateurs de s'en prendre à des citoyens respectueux de la loi.

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, nous prenons très au sérieux le rapport du vérificateur général. Pour ce qui est des tests d'ADN, ils se sont considérablement améliorés ces derniers mois et, à compter du 30 septembre, tous les cas prioritaires seront traités en dedans de 30 jours.

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Comment pouvons-nous croire cela, monsieur le Président? Voyons l'autre exemple que donne le vérificateur général dans son rapport. On a accusé un retard de 227 jours dans le traitement d'échantillons d'ADN dans le cas de l'agression sexuelle d'un enfant.

Le vérificateur est très clair: le problème n'en est pas un de ressources, mais de mauvaise gestion de la part du gouvernement.

Quand le solliciteur général se décidera-t-il à protéger les citoyens respectueux de la loi?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, la question est grave, bien sûr. Il est dommage que mon collègue ne fasse pas un peu de recherches avant de poser ses questions.

En fait, le labo visé par la première question au sujet de l'ADN était le labo ontarien, non le labo fédéral. Vous devriez vérifier les faits!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je rappelle aux députés de bien vouloir toujours adresser leurs observations à la présidence.

*  *  *

L'IMMIGRATION

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, le vérificateur général a dénoncé aujourd'hui l'existence de graves lacunes dans la composante économique du programme canadien de l'immigration. Non seulement ces lacunes compromettent-elles sérieusement la capacité du Canada de maximiser les bienfaits de l'immigration, mais elles apportent de l'eau au moulin des ennemis de l'immigration qui mettraient à profit le moindre prétexte pour fermer nos frontières à toute immigration.

Que compte faire la ministre de l'Immigration en réponse à ces nombreuses critiques et reconnaîtra-t-elle qu'une partie du problème tient au fait que les coupes sombres opérées par le gouvernement ont pénalisé à un point tel le ministère de l'Immigration que ce dernier n'est plus en mesure d'offrir des services de qualité?

 

. 1450 + -

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le vérificateur général a reconnu la nécessité d'accorder à mon ministère des ressources complémentaires. En fait, nous avons reçu 139 millions de dollars de plus, dont 49 millions dans le dernier budget, pour la sécurité et la santé.

Le député d'en face devrait savoir que le nouveau texte de loi que je viens de déposer a pour objet de répondre à bon nombre des autres préoccupations soulevées. Nous voulons supprimer les échappatoires permettant aux personnes mal intentionnées d'abuser du système, pour être en mesure de faciliter la venue des effectifs étrangers dont le Canada a besoin pour asseoir sa prospérité.

*  *  *

LES AFFAIRES AUTOCHTONES

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, le ministre des Affaires indiennes doit savoir que l'un des plus importants facteurs qui ont des conséquences pour le niveau d'instruction des élèves autochtones est la médiocrité des logements et de l'infrastructure.

Le dernier budget fédéral comportait très peu de mesures pour régler ce problème. Le vérificateur général a déclaré que, si ces lacunes ne sont pas comblées, il faudra 23 ans pour que le niveau d'instruction des habitants des réserves rejoigne celui des élèves de l'ensemble des écoles secondaires du Canada.

Le ministre est-il satisfait du temps qu'il faudra? Est-il convenable qu'il faille 23 ans aux habitants des réserves pour atteindre le niveau d'instruction des élèves du reste du Canada?

L'hon. Robert D. Nault (ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, comme j'ai déjà répondu, non, je ne suis pas satisfait. Nous voulons absolument corriger cette situation.

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LA DÉFENSE NATIONALE

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, hier, le premier ministre s'est personnellement engagé à envoyer des troupes canadiennes au Moyen-Orient si on lui en faisait la demande. Le Moyen-Orient est un très dangereux théâtre d'opérations, qui pourrait devenir extrêmement instable et dangereux pour les soldats canadiens.

Le ministre de la Défense nationale ou le CEMD était-il personnellement au courant de l'engagement avant qu'il soit pris et y souscrivait-il?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, nous sommes fiers de notre participation aux missions de maintien de la paix au Moyen-Orient. En fait, sur le plateau du Golan, nous assumons le commandement en ce moment. Les Nations Unies nous ont confié cette tâche parce qu'elles savent que le Canada est fiable et qu'il peut faire du bon travail dans le maintien de la paix. C'est ce que le premier ministre a dit.

Nous nous intéressons au Moyen-Orient et nous voulons continuer de le faire. Nous voulons nous rendre utiles. Si les Nations Unies organisent une mission, nous voulons y participer. Cependant, avant de le faire, nous ferons les vérifications d'usage, y compris l'évaluation des risques, pour nous assurer que le niveau de ces derniers soit acceptable.

Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président, dans la foulée de la décision prise par le premier ministre l'an dernier d'envoyer des troupes canadiennes au Timor oriental, tant le ministre que le CEMD ont fait savoir que la charge opérationnelle était trop lourde pour les militaires. Depuis lors, le gouvernement a été très prudent dans ses engagements en matière de maintien de la paix.

Maintenant que le premier ministre Barak a obtenu la promesse de l'envoi de troupes canadiennes, quels changements le ministre de la Défense nationale devra-t-il faire pour remplir la promesse du premier ministre canadien?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, il y a des consultations qui se poursuivent entre le CEMD, le premier ministre, le cabinet de ce dernier et moi. Lors de mon passage dans cette région du monde l'automne dernier, j'ai soulevé moi aussi cette idée d'envoyer des troupes au Moyen-Orient.

Nous allons continuer d'examiner et d'évaluer la situation. Nous voulons nous rendre utiles, comme nous le faisons habituellement. Nous avons moins de troupes à l'étranger qu'il y a un an. Nous avons ramené nos engagements à un niveau plus raisonnable, et nous sommes prêts à répondre aux demandes.

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LE CONSEIL DU TRÉSOR

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la présidente du Conseil du Trésor.

Aujourd'hui, nous sommes en pleine Semaine nationale de l'action bénévole. Dans le dernier discours du Trône, le gouvernement du Canada a pris l'engagement d'établir un nouveau partenariat dynamique avec le secteur bénévole. Qu'est-ce que le gouvernement du Canada a fait pour remplir cet engagement?

L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor et ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement s'est engagé à renouveler sa relation avec les organismes bénévoles.

Nous avons l'intention de donner suite aux recommandations faites dans le rapport intitulé «Travailler ensemble». L'une des recommandations du rapport avait trait à l'établissement d'un groupe de référence de ministres. Le premier ministre vient de mettre sur pied ce groupe de référence. Nous avons tenu hier soir une réunion avec les dirigeants des divers secteurs pour arrêter nos priorités. Le gouvernement a l'intention de donner suite à son engagement en concluant, en 2001, un accord national avec le secteur bénévole pour jeter les bases nouvelles d'un partenariat dynamique.

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. 1455 + -

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous avons entendu parler d'un autre exemple du peu de confiance que nous pouvons avoir dans le ministère du Développement des ressources humaines.

D'après le vérificateur général, le ministère s'était engagé à réduire les temps d'attente pour les services au comptoir et pour le versement des prestations de sécurité de la vieillesse et du Régime de pensions du Canada. Drôle d'engagement: DRHC ne s'est même pas donné la peine de vérifier si les temps d'attente avaient diminué ou non.

Comment les Canadiens peuvent-ils croire les promesses de la ministre étant donné qu'elle ne les a jamais respectées?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je me réjouis au contraire du travail du vérificateur général. Je l'ai rencontré pour discuter du contenu du chapitre qu'il a présenté aujourd'hui.

Dans l'ensemble, il a parlé de façon très positive des méthodes de prestation des services du ministère. J'aimerais citer ce passage où il dit que «DRHC a fait des progrès considérables au chapitre de la qualité du service».

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[Français]

OPTION CANADA

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ): Monsieur le Président, depuis que le vérificateur général l'a lui-même déclaré il y a deux ans, les opérations d'Option Canada n'ont jamais à ce jour été clarifiées et nous ignorons toujours comment furent utilisés les 4,8 millions de dollars.

Le solliciteur général peut-il nous donner l'assurance que, suite à la lettre que je lui ai fait parvenir aujourd'hui, lui demandant d'instituer une enquête policière pour savoir où sont disparus les 4,8 millions de dollars octroyés à Option Canada, il va y donner suite?

[Traduction]

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, si j'ai bien compris, le député m'a envoyé une lettre juste comme je me préparais à venir assister à la périodes des questions. Je n'ai pas encore eu l'occasion de me pencher sur cette lettre, mais je vais le faire en temps opportun.

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LE RÉGIME DE PENSIONS DU CANADA

L'hon. Lorne Nystrom (Regina—Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Comme le ministre le sait, une centaine de pompiers manifestent sur la colline du Parlement aujourd'hui pour demander qu'aux termes du Régime de pensions du Canada, ils aient droit aux prestations de retraite anticipée dès l'âge de 55 ans et aux prestations intégrales dès l'âge de 60 ans, au lieu des critères actuels de 60 et de 65 ans. Le ministre sait aussi que le Comité des finances de la Chambre des communes a formulé une recommandation en ce sens l'automne dernier.

Compte tenu de cela, le ministre est-il prêt à proposer une modification du Régime de pensions du Canada pour que les pompiers puissent toucher des prestations de retraite à un âge plus hâtif, étant donné qu'ils exercent un métier essentiel et dangereux?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, il ne fait aucun doute que tous les Canadiens ont une lourde dette envers les pompiers de partout au Canada.

Des voix: Bravo!

L'hon. Paul Martin: La proposition que fait le député a déjà été présentée. Nous l'avons inscrite à l'ordre du jour de la prochaine réunion fédérale-provinciale des ministres des Finances, où de telles questions sont discutées.

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L'IMMIGRATION

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, le vérificateur général a fait savoir aujourd'hui qu'après dix années de discussions, les ministères de l'Immigration et de la Santé n'en sont toujours pas arrivés à une décision à savoir si les demandeurs devraient automatiquement faire l'objet de tests de dépistage des maladies infectieuses.

Le ministre de la Santé peut-il faire savoir à la Chambre combien de temps encore les Canadiens devront attendre avant que l'on soumette automatiquement les demandeurs à des tests de dépistage des maladies infectieuses?

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le vérificateur général a souligné le besoin d'améliorer le dépistage médical et c'est ce que nous faisons.

Comme je l'ai précisé, nous avons préparé un règlement dans le cadre des nouvelles mesures législatives mises au point à la suite du consensus établi d'un bout à l'autre du pays. Il sera déposé lors de l'étude article par article.

La Chambre devrait également savoir que les questions de santé et de sécurité se trouvent au premier rang de nos priorités et que c'est la raison pour laquelle les agents de l'immigration qui se trouvent aux divers points d'entrée au Canada peuvent exiger que toute personne entrant au pays subisse un examen médical. Il est important que tous sachent bien que nous devons pouvoir compter sur une définition commune de la non-admissibilité d'un demandeur pour assurer une certaine cohérence dans le processus de prise de décisions.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

 

. 1500 + -

[Traduction]

LOI SUR LA MODERNISATION DE CERTAINS RÉGIMES D'AVANTAGES ET D'OBLIGATIONS

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-23, Loi visant à moderniser le régime d'avantages et d'obligations dans les Lois du Canada, soit lu pour la troisième fois et adopté, et de l'amendement.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai apprécié les observations du député de Wentworth—Burlington.

Il a trouvé inapproprié l'usage qui est fait du terme conjugal dans le projet de loi C-23. Je suis d'accord avec lui. Nous avons dit plusieurs fois à la Chambre que non seulement il était inapproprié de l'utiliser pour désigner un couple de personnes du même sexe, mais également que c'était probablement irresponsable de ne pas le définir dans le projet de loi, surtout qu'on l'y retrouve très fréquemment.

J'ai trouvé alarmant d'entendre le député dire que les bureaucrates du ministère de la Justice étaient à l'origine des problèmes trouvés dans le projet de loi, que ce n'était pas la ministre de la Justice qui était responsable de la manière dont il était présenté et structuré, avec tous les points faibles inhérents que nous avons dénoncés ici à plusieurs reprises, mais que le problème venait vraiment du ministère de la Justice. Je trouve cela choquant. Veut-il laisser entendre que la ministre de la Justice n'a pas la maîtrise de son ministère? Qu'elle est incapable d'imposer sa volonté aux gens qui travaillent sous ses ordres? C'est ce que laissent supposer ses observations.

M. John Bryden: Monsieur le Président, j'ai dit que l'on n'est pas tout à fait sûr que les fonctionnaires du ministère de la Justice réserveront un traitement impartial à ces questions.

En réalité, j'ai dit que c'est un très bon projet de loi dans la mesure où il donne une définition du mariage et de l'union homosexuelle hors du mariage. Malheureusement, force est de constater qu'il existe de mon propre côté de la Chambre une école de pensée selon laquelle les avocats, et en particulier le ministère de la Justice, ne défendront pas la disposition définissant le mariage lorsqu'elle se présentera dans une autre mesure législative.

J'essayais de souligner qu'il existe un problème lorsque nous sommes en présence d'un ministère de la Justice qui crée les lois, conseille le ministre et défend ensuite les lois. Selon moi, il est juste de dire qu'il existe à la grandeur de la Chambre un sentiment général selon lequel le ministère de la Justice n'agit pas toujours pour le compte du Parlement et intervient en fonction de son interprétation de la Charte plutôt que de celle des élus.

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, j'apprécie la réponse du député et la franchise dont il a fait preuve. Il me semble certes qu'il existe des problèmes dans ce ministère et que la ministre de la Justice devrait être celle qui a les choses en main. En dernière analyse, elle est responsable de ce qui sort de son ministère et elle devrait intervenir à ce sujet.

 

. 1505 + -

J'ai relevé dans le projet de loi C-23 que la définition de partenaire de fait, qui comprend deux personnes de même sexe vivant en union conjugale, est reprise dans chaque loi. En réalité, elle est parfois reprise plus d'une fois dans chacune des lois figurant dans le projet de loi C-23. Pourtant, la ministre de la Justice et le ministère de la Justice n'ont pas jugé approprié d'inclure la définition du mariage dans chaque loi. Elle figure au début du projet de loi, mais non dans les lois.

Selon un avis juridique que nous avons obtenu, cela n'aura pas de poids lorsqu'il y aura contestations devant les tribunaux. Par conséquent, ne pense-t-il pas que les amendements rejetés hier par le gouvernement auraient dû être inclus? Si on peut inclure une définition de l'expression «partenaires de fait», pourquoi ne peut-on inclure une définition du «mariage», mesure que nous préconisons depuis le début?

M. John Bryden: Je le répète, monsieur le Président, à mon avis, il suffirait d'insérer la définition du mariage dans la loi et de dire que les couples de même sexe ne sont pas compris dans cette définition.

La seule raison pour laquelle les 19 députés de ce côté-ci ne se sont pas ralliés au gouvernement et ont appuyé le député de Scarborough-Sud-Ouest, c'est qu'ils ne sont pas convaincus que les avocats, voire le ministère de la Justice, citeront cette disposition du projet de loi C-23 lorsqu'il s'agira de définir le mariage ou une relation entre personnes de même sexe. C'est triste et répréhensible. C'est déplorable, car nous devrions être convaincus que les lois que nous adoptons seront appliquées et défendues comme il convient devant les tribunaux.

Je soutiens que c'est là un des problèmes qui surgit lorsque la Cour suprême interprète la charte. Je ne dis pas que la Cour suprême n'accomplit pas sa tâche. La vraie question est de savoir si les intérêts du Parlement sont bien défendus devant la Cour suprême. Malheureusement, monsieur le Président, ceux qui défendent les intérêts du Parlement sont les mêmes qui ont élaboré les lois et qui ont conseillé la ministre de la Justice.

Je propose que nous réexaminions les rapports qui existent entre le ministère de la Justice, l'élaboration des lois et la défense de ces lois. Nous devons examiner toute cette question, et je suggère aux députés d'en face de présenter un jour une motion d'opposition à ce sujet. Je ne peux le faire moi-même.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur d'intervenir aujourd'hui pour parler du projet de loi C-23. Il est crucial à cause du genre de mesures que le gouvernement prend dans ce dossier fort important.

Je féliciterai tout d'abord la ministre de la Justice qui a rédigé un excellent projet de loi que les Canadiens de toutes les régions du pays vont, en grande majorité, respecter et accueillir favorablement. C'est un geste heureux; l'histoire montrera que les Canadiens vont bien apprécier cette mesure et applaudir le fait que nous agissions dans ce domaine.

J'ai écouté le débat sur le projet de loi C-23 et je dois dire que certains députés d'en face, ceux du Parti réformé de l'alliance réformiste conservatrice, les membres de l'Alliance canadienne, qui à maintes reprises...

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le Président a décidé, un lundi soir il y a déjà plusieurs semaines, et il a confirmé sa décision à plusieurs reprises depuis lors, que le nom de notre parti était Alliance canadienne et nous devrions...

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, vous avez sans doute remarqué que j'ai dit le Parti réformé de l'alliance réformiste conservatrice, les membres de l'Alliance canadienne. Cela dit...

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'invoque à nouveau le Règlement.

Le président suppléant (M. McClelland): Nous n'allons pas continuer ainsi. Le député de Waterloo—Wellington peut présenter le texte de sa dissertation et j'y verrai.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, vous êtes juste et impartial, comme toujours.

En écoutant récemment les députés d'en face, j'ai été carrément renversé par certains mythes et idées fausses qu'ils semblent vouloir perpétuer. Par exemple, avant la période des questions, j'écoutais le député de Dewdney—Alouette. J'ai aussi écouté le député de Cypress Hills—Grasslands qui, alors que j'avais la parole, a parlé d'une bataille de taverne. N'est-il pas intéressant qu'un député d'en face parle de bataille de taverne? Je pensais que le député avait mieux à faire que de fréquenter les tavernes et surtout d'assister à des batailles.

 

. 1510 + -

Des propos du député de Nanaïmo—Cowichan ont été rapportés récemment dans le Sun de Vancouver. Le député a dit ceci: «Un climat de confusion entre les sexes s'est installé progressivement, et de jeunes hommes élevés dans des familles monoparentales dominées par des femmes ont vécu une crise identitaire.» Selon lui, «il s'en est suivi une augmentation du nombre d'homosexuels militants.»

Il a ensuite dit qu'il ne pouvait toutefois pas expliquer pourquoi, à son avis, les mères chefs de famille monoparentale encouragent pareil militantisme homosexuel.

Comparons maintenant ces propos à ceux du député de Yorkton—Melville, un autre député de l'Alliance aux vues extrémistes et aux idées absurdes de droite. Dans un communiqué, voici ce qu'il aurait déclaré: «Dans les années 50, la sodomie était un crime. Maintenant, c'est une exigence pour recevoir des prestations du gouvernement fédéral.»

Il n'y a pas si longtemps, le parti d'en face a laissé entendre que les homosexuels et les noirs devraient être confinés à l'arrière des autobus. C'est ce que les députés de ce parti ont dit expressément. Il est étonnant que les députés d'en face continuent de perpétuer ce genre d'idées absurdes, haineuses, discriminatoires et intolérantes. Je suppose que nous pouvons dire que cela fait intrinsèquement partie de ce qu'ils sont et de ce qu'ils représentent, mais c'est extrêmement regrettable qu'ils agissent de la sorte.

Ce que je veux faire, au lieu de m'intéresser aux propos absurdes et négatifs des gens de l'Alliance, peu importe comment ils s'appellent, c'est me concentrer sur quelque chose de positif, c'est-à-dire la position que nous, députés ministériels, défendons, soit la tolérance et la compassion. Contrairement à ces gens-là et aux partisans de la politique de l'extrémisme et de l'intolérance, nous représentons la politique de l'espoir et de la réconciliation.

C'est à cela que les Canadiens raisonnables s'attendent de leur gouvernement, soit qu'il fasse preuve de compassion et de tolérance. C'est précisément ce que la ministre de la Justice et le gouvernement ont commencé à faire dans ce très important domaine.

Je pourrais continuer de parler des mythes que colportent les députés d'en face. En fait, je vais le faire.

J'ai écouté certains discours qui ont été prononcés ces derniers jours. Je tiens à souligner que le projet de loi C-23 ne porte pas sur le mariage. De fait, les députés ministériels ont appuyé l'an dernier la motion prévoyant que ce n'était pas le cas. Il est franchement révoltant que les gens d'en face ne cessent d'affirmer que le projet de loi C-23 traite du mariage. J'ignore quels avantages politiques ils comptent tirer de cela, mais c'est vraiment inacceptable. Les Canadiens voient clair dans leur hypocrisie, leur duplicité et leur mystification.

Le projet de loi ne traite pas du mariage. Il ne traite certainement pas de relations, qu'il s'agisse de dépendance ou non. Il ne s'agit pas d'envoyer la police du sexe après quiconque, comme certains députés d'en face l'ont laissé entendre de leur façon tordue. Pour sa part, le gouvernement, d'une manière constructive et moderne, propose plutôt que nous entrions dans le XXIe siècle en nous définissant de façon conforme aux valeurs chères aux Canadiens que sont la tolérance et la compassion. C'est pourquoi nous avons présenté le projet de loi C-23.

Cela a été réaffirmé l'an dernier par le Parlement dans une motion affirmant que le mariage est exclusivement l'union d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de toute autre personne. Nous l'avons répété dans le projet de loi pour bien marquer ce point. Si, dans tout le pays, il y a des Canadiens qui ne pensent pas comme d'autres députés et moi-même, mais sont plutôt d'accord avec l'opposition, ils seront rassurés de savoir que rien n'a été changé dans ce domaine très important.

La mesure législative proposée est un projet de loi omnibus. Comme tout le monde le sait, un projet de loi omnibus agit sur un certain nombre de fronts. Le projet de loi supprime la discrimination en ce sens qu'il étend aux couples de même sexe les avantages et les obligations qui s'appliquent aux conjoints de fait de sexe opposé.

 

. 1515 + -

Le projet de loi modernise en outre un langage dépassé. Il abroge des dispositions de lois désuètes qui ne sont plus nécessaires et, s'il y a lieu, apporte les modifications qui s'imposent dans un projet de loi omnibus du genre de celui dont nous sommes saisis. Je crois que les Canadiens respectent cela au bout du compte. Ce faisant, nous le plaçons dans un contexte contemporain en fonction de ce que nous sommes en tant que Canadiens au moment d'entrer avec confiance dans le XXIe siècle.

Je me permets de passer en détail certaines de ces modifications. Soixante-huit lois et statuts et plus de 20 ministères et organismes du gouvernement fédéral seront touchés par ces changements. Je vais mentionner certains des changements les plus importants parce que je crois qu'il convient de le faire.

Le terme «conjoint de fait» est un nouveau terme dans le langage juridique, mais il est utilisé et compris par les Canadiens qui se sont familiarisés avec ce concept au fil du temps. En anglais, le terme équivalent est «common law partner». Chaque jour, nous voyons ou entendons ce terme, en français ou en anglais, dans les médias d'un bout à l'autre du Canada. Je crois que les Canadiens en comprennent bien la signification.

Le projet de loi C-23 uniformiserait la définition du terme «conjoint de fait» comme désignant une personne qui vit avec une autre personne dans une relation conjugale depuis au moins un an. Après l'adoption du projet de loi à l'étude, le terme anglais «spouse» sera réservé uniquement aux personnes mariées. Il convient de signaler que la période de cohabitation d'un an pour avoir droit aux avantages ou être assujetti aux obligations n'est rien de nouveau et que le projet de loi C-23 ne change rien à cela.

Le terme «conjugal» est utilisé dans les lois fédérales depuis 40 ans pour décrire les unions de fait entre personnes de sexe opposé. Les facteurs qui servent à déterminer l'existence d'une relation conjugale seront les mêmes pour les conjoints de même sexe que pour les conjoints de sexe opposé.

Ce que nous cherchons à faire, c'est nous assurer que tout cela s'inscrit bien dans le contexte moderne et contemporain. Nous cherchons à intégrer tout cela de façon sensée dans toutes sortes de domaines. Je pourrais les énumérer, mais je me contenterai de dire que cela va jusqu'à la Loi sur les programmes de commercialisation agricole et la Loi sur les allocations aux anciens combattants. Il va sans dire que des programmes comme le Régime de pensions du Canada et la Loi sur la faillite et l'insolvabilité de même que bien d'autres lois seront aussi touchés.

Là où il y a des droits et des responsabilités, il y a aussi des obligations. Il importe de souligner que, du côté gouvernemental, nous avons reconnu tous ces importants concepts. Nous les avons mis en perspective. Nous les avons évalués et nous avons beaucoup réfléchi à ce que la mesure signifie pour la Chambre des communes, bien sûr, mais aussi pour tous les Canadiens, peu importe où ils vivent dans notre beau pays.

Au bout du compte, nous avons réussi à produire un projet de loi très valable. Le projet de loi est très sensé. Il traduit en acte ce que la Cour suprême nous avait demandé de faire. À mon sens, il accomplit ce que les Canadiens attendaient du gouvernement dans un domaine très important. En Ontario, M. Harris a fait exactement la même chose en 48 heures. Pourquoi? Il l'a fait parce que c'était sensé et parce que c'était la chose à faire. Il l'a fait parce qu'il savait que la décision de la Cour suprême devait être respectée.

Notre merveilleux Parlement doit aussi agir. Il nous faut moderniser et mettre à jour toutes les lois importantes dans ce domaine. C'est exactement ce que nous faisons. Je crois que, au bout du compte, les Canadiens jugeront que nous avons fait ce qu'il fallait faire.

M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai prêté une oreille attentive au discours de mon collègue et il a fait quelques remarques fort intéressantes. Mais je dirais qu'il a montré son vrai visage quand, au début de son discours, au lieu d'entrer dans le vif du sujet, il a proféré toutes sortes d'insultes, ce qui est la forme d'argument la plus abjecte. Quand on a rien de mieux à dire et qu'on n'a pas d'argument logique et sensé à faire valoir, on a recours à la forme d'argument la plus abjecte, les injures. C'est exactement ce que le député a fait ici aujourd'hui et c'est malheureux.

 

. 1520 + -

Je voudrais lui poser deux questions très précises et je serai bref.

La première a trait à une observation faite par son leader de la Chambre, l'actuel leader du gouvernement à la Chambre. Celui-ci a dit: «Je m'oppose à toute suggestion voulant que les couples homosexuels soient traités de la même façon que les couples hétérosexuels.» Il a également dit ceci: «Je ne crois pas que les homosexuels devraient être considérés comme des familles. Ma femme, MaryAnn, et moi, nous ne prétendons pas être des homosexuels. Pourquoi les homosexuels prétendraient-ils former une famille?» J'aimerais qu'il me dise s'il est d'accord avec ces propos. J'aimerais également lui demander pourquoi il s'est tant opposé à ce que la définition du mariage figure dans le projet de loi C-23 contre lequel il a voté hier soir à l'issue du débat à l'étape du rapport.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, merci de me donner la possibilité de répondre.

J'écoute jour après jour les attaques et les parades des députés d'en face et du nouveau chef de l'Alliance canadienne, la députée d'Edmonton-Nord. Le député parle d'insultes. J'ai observé attentivement le chef de l'opposition et la façon qu'elle a de se moquer des ministres et du premier ministre, de tourner tous les propos en dérision et d'insulter les gens. C'est seulement là un exemple de la façon dont se comportent les députés de l'opposition à la Chambre des communes. C'est incroyable. Toutefois, les Canadiens ne sont pas dupes. Ils se rendent compte du double jeu de ces gens qui disent une chose et en font une autre. Ils se rendent compte du double jeu de ces gens qui adoptent une attitude plus royaliste que le roi, qui disent une chose et, très franchement, se contredisent.

Mais venons-en à la question du député. Nous, les députés du côté de la partie gouvernementale, reconnaissant le caractère sacré du mariage, n'avons pas hésité à appuyer l'an dernier une motion qui mettait en relief ce dont nous sommes fermement convaincus, à savoir que le mariage est l'union d'un homme et d'une femme et rien d'autre. Je vois pas ce que le député ne comprend pas là-dedans. J'ignore quel capital politique il cherche bassement à se faire, mais les Canadiens ne sont pas dupes. Ils comprennent très bien.

M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai écouté le député et j'avoue qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond dans son raisonnement.

Je voudrais lui poser la question suivante. Ceux d'entre nous qui s'opposent au projet de loi ont du mal à accepter qu'on leur fasse la leçon et qu'on les accuse de faire obstacle à la démocratie. J'en ai marre d'être accusé de racisme et d'intolérance parce que je ne puis accepter que des conjoints soient du même sexe. J'en ai parfaitement le droit, et je dirai même que cela est de mon devoir. Je refuse que l'on cherche à nous museler, à nous intimider, et à transformer cette affaire en question de droits de l'homme. Je ne vois pas du tout les choses ainsi. C'est ce qu'a prétendu le député de Mississauga-Ouest, un libéral. Je vais à mon tour dire qu'il est raciste et sectaire.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, il n'est pas aisé de répondre au député d'en face quand il s'énerve ainsi.

Il parle de raisonnement erroné. De quels arguments dispose-t-il? Le député est très susceptible et parle de sectarisme et de racisme. Ce n'est pas moi qui ai abordé le sujet, mais bien le député. Il proteste un peu trop.

Les gens d'en face nous ont donné la preuve de leur véritable nature. Le vote d'hier soir était révélateur, car ces gens parlent de participation et de consultation de la base. Ce sont eux qui réclament la tenue d'un vote libre. Pourtant, hier soir, ils ont tous voté en bloc. Pourquoi? Pour la bonne raison qu'ils y ont été amenés de force. Ce sont ces gens qui préconisent de consulter la population. Ce sont ces gens qui réclament la tenue de votes libres. Quelle duplicité! Quelle hypocrisie!

 

. 1525 + -

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole, après mon collègue d'Hochelaga—Maisonneuve, en cette dernière partie du débat sur le projet de loi C-23, la Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

Je rappelle à la Chambre que ce projet de loi a été déposé le 11 février 2000 et qu'il vise essentiellement, pour des raisons d'équité, à moderniser certains régimes d'avantages et d'obligations afin de garantir que les couples vivant en union de fait, de même sexe ou de sexe opposé, soient traités également devant la loi.

Les modifications proposées dans ce projet de loi doivent garantir, conformément à la décision de la Cour suprême du Canada de mai 1999 dans l'affaire M. c. H., que les couples de même sexe vivant en union de fait aient les mêmes avantages et les mêmes obligations que les couples de sexe opposé vivant en union de fait, et aient le même accès que les autres couples du Canada ou du Québec aux programmes d'avantages sociaux auxquels ils ont contribué.

J'aimerais préciser que je partagerai le temps qui m'est imparti avec le député de Laurier—Sainte-Marie, qui prendra la parole, pour le Bloc québécois, après moi.

Je rappelle que ce projet de loi est l'aboutissement d'efforts multiples et constants de personnes qui sont engagées depuis longtemps dans un combat pour éliminer la discrimination en vertu de l'orientation sexuelle. D'ailleurs, c'est un combat où le Québec est à l'avant-garde ou a été à l'avant-garde, puisqu'il a été le premier à adopter une législation visant à incorporer l'orientation sexuelle comme motif de discrimination. C'est en 1977 que le Québec modifiait sa Charte des droits et libertés allant dans ce sens.

Donc, le projet de loi C-23 est l'aboutissement d'un combat constant de plusieurs acteurs de la société civile, quelles que soient leurs opinions sur les orientations sexuelles ou leur propre choix d'orientation sexuelle. C'est aussi l'aboutissement de nombreuses tentatives de réformer la législation fédérale ou des législations provinciales. C'est également l'aboutissement de réussites, au niveau provincial, parce plusieurs législations ont été adoptées pour mettre fin à la discrimination en matière d'avantages sociaux qui était présente aussi dans les provinces canadiennes.

Je pense qu'en cette fin de débat en troisième lecture du projet de loi C-23, il est opportun de rappeler les jalons de cette histoire législative, ce qui mettra en lumière, en contexte, ce projet de loi dont je souhaite, comme plusieurs députés de mon parti, l'adoption par la Chambre des communes.

Je rappelle à la Chambre que le Parlement du Canada avait décriminalisé les relations homosexuelles entre adultes consentants dès 1969; il y a donc au-delà de 30 ans. La Loi sur l'immigration retirait, en 1976, sept ans plus tard, les homosexuels de la catégorie des personnes refusées au Canada.

Jusqu'à récemment, il n'y avait d'ailleurs guère eu d'autres initiatives législatives fédérales relatives aux aspects juridiques de l'homosexualité. De nombreux projets de loi d'initiative parlementaire visant à interdire la discrimination fondée sur l'orientation ont été présentés à la Chambre des communes entre 1980 et 1992, mais aucun n'avait dépassé l'étape de la première lecture. Les modifications proposées à d'autres lois en vue d'éliminer certaines formes de discrimination fondées sur l'orientation sexuelle n'avaient pas abouti non plus.

En décembre 1992, la ministre de la Justice de l'époque, Mme Kim Campbell, avait déposé le projet de loi C-108 qui aurait ajouté l'orientation sexuelle aux motifs de discrimination illicite de la Loi canadienne sur les droits de la personne et qui aurait également défini le statut de personne mariée en termes strictement hétérosexuels.

 

. 1530 + -

Le projet de loi S-15, déposé au Sénat par le sénateur Noël Kinsella, avait, quant à lui, pour but d'ajouter l'orientation sexuelle aux motifs énumérés dans cette même Loi canadienne sur les droits de la personne. Ce projet de loi était adopté en juin 1993.

Ce projet de loi, ainsi que le projet de loi C-108, mourrait cependant au Feuilleton lorsque le Parlement a été dissout en septembre 1993, en raison du déclenchement des élections générales.

En 1995, le Parlement adoptait le projet de loi C-41, Loi modifiant le Code criminel. Il prévoyait que des preuves établissant qu'un crime a été motivé par la haine ou des préjugés fondés sur un certain nombre de caractéristiques personnelles constituaient des circonstances aggravantes devant mener à l'imposition d'une peine plus sévère.

L'inclusion de l'orientation sexuelle parmi ces caractéristiques personnelles a suscité énormément d'opposition. Cela tenait en partie à l'avis exprimé par certains que cette mesure mènerait à l'inclusion de l'orientation sexuelle dans les motifs illicites de discrimination prévus dans la Loi canadienne sur les droits de la personne, ou qu'elle contribuerait autrement à l'érosion de valeurs familiales traditionnelles.

Le projet de loi C-41 recevait, malgré cette opposition, la sanction royale en juillet 1995 et entrait en vigueur l'année suivante, en septembre 1996.

En février de cette même année, donc quelques mois avant l'entrée en vigueur du projet de loi C-41, le sénateur Noël Kinsella revenait à la charge et présentait le projet de loi S-2 qui était analogue au projet de loi S-15. Il visait ainsi à ajouter l'orientation sexuelle aux motifs de distinction illicite prévus à l'article 3 de la loi fédérale, ainsi qu'à l'article 16 qui porte sur l'accès à l'égalité ou l'action positive. Le projet de loi était adopté par le Sénat en avril 1996.

Par ailleurs, le projet de loi C-265, un projet de loi d'initiatives parlementaires, présenté par le député de Burnaby—Douglas, dont je salue le combat personnel sur ces questions, ne franchissait pas, quant à lui, l'étape de la première lecture dans cette Chambre.

Le 29 avril 1996, le gouvernement libéral de l'époque, par l'intermédiaire du ministre de la Justice d'alors, présentait, quant à lui, le projet de loi C-33 voulant modifier la Loi canadienne sur les droits de la personne et visant à ajouter l'orientation sexuelle à la liste des motifs illicites de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Ce projet de loi a finalement été adopté par la Chambre des communes et par le Sénat et est entré en vigueur le 20 juin 1996.

Je ne voudrais pas non plus passer sous silence les efforts de mon collègue, le député de Hochelaga—Maisonneuve, qui est le porte-parole de notre parti sur ces questions. Il présentait lui aussi, en novembre 1994, en mai 1996 et revenait à la charge en février 1998 et en mars 1999, des projets de loi visant à mettre fin à cette discrimination dans la législation fédérale. On sait que ces projets de loi, comme bien d'autres projets de loi d'initiatives parlementaires, n'ont pas eu de suite.

Nous en arrivons aujourd'hui à l'étape ultime de l'adoption de ce projet de loi. Cette adoption fera d'ailleurs suite à celle unanime par l'Assemblée nationale du Québec d'un projet de loi qui avait les mêmes buts et qui visait à modifier diverses dispositions législatives concernant les conjoints de fait, mettant fin à la discrimination sur la base de l'orientation sexuelle contenue dans les lois du Québec. L'Ontario a fait de même.

Il est donc grand temps que le Parlement du Canada, cette Chambre des communes en particulier, choisisse la voie qu'ont choisi d'autres législatures, soit celle de l'égalité, qu'il mène à terme ce combat pour l'égalité et qu'il donne un sens véritable à la notion d'égalité que nous retrouvons dans nos chartes.

 

. 1535 + -

[Traduction]

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le député de ses commentaires. Je crois comprendre qu'il a de nombreux titres de compétence.

J'ai déposé à la Chambre des pétitions signées par des gens du Québec qui demandaient que l'on confirme la définition du mariage dans la loi. J'ai également en main une opinion juridique d'un avocat-conseil principal de Toronto qui a dit fondamentalement que le fait d'inclure une définition du mariage comme étant une union entre un homme et une femme au début d'un projet de loi omnibus mais non dans le corps même de la loi n'apporterait pas une définition juridiquement contraignante du mariage.

Les pétitions signées par des gens du Québec et les efforts de l'opposition officielle visent à faire inscrire la définition du mariage dans les lois où elle aurait une portée juridique importante et témoignerait de la volonté de la Chambre, le député est-il d'accord avec cela? Dans l'affirmative, serait-il prêt à appuyer la motion qui prévoit que ce projet de loi soit renvoyé au Comité de la justice qui serait chargé d'examiner la possibilité d'inclure une définition significative du mariage dans les lois visées par le projet de loi?

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le Président, tout d'abord, je dirais, pour répondre à mon collègue, qu'il faut prendre acte qu'au Québec, comme ailleurs au Canada et certainement dans le monde, il y a des positions différentes sur les questions d'égalité des personnes de différentes orientations sexuelles, tenant parfois des convictions religieuses ou, parfois, par ailleurs, de préjugés auxquels une bonne et saine éducation pourrait peut-être mettre fin.

Il faut prendre acte de ces divergences mais, par ailleurs, ne pas aller à l'encontre de cette volonté des parlements, ici et ailleurs dans le monde, de mettre fin à une discrimination.

Je crois que ce projet de loi est l'aboutissement des nombreux efforts qui ont été faits par les gens principalement intéressés par ces questions, ceux qui ont été souvent victimes de discrimination et de combats. Ce projet de loi va enfin leur donner un véritable accès à l'égalité et le droit à ces avantages qui leur ont été refusés.

La question du mariage et de sa définition est évoquée dans ce projet de loi. Le gouvernement libéral a choisi d'y inclure une clause interprétative qui pourra aller dans le sens d'une reconnaissance du fait que le mariage est réservé aux personnes de sexe opposé. Ce débat devra continuer. C'est un débat que l'Alliance canadienne voudra peut-être poursuivre, dans toute la légitimité qu'elle a de vouloir faire ce débat.

Quant à nous, le fait que cette question ne soit pas nécessairement résolue de façon définitive dans ce projet de loi ne nous empêche pas, en tout cas pour la plupart d'entre nous, de favoriser l'adoption d'un projet de loi réparateur, qui conférera une égalité qui a été trop longtemps refusée aux personnes de même sexe.

[Traduction]

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, je sais que mon collègue d'en face est habitué au Code civil, mais il pourrait peut-être expliquer à notre collègue de Calgary-Centre qu'il existe déjà dans la common law une définition du mariage qui a toute la force et la portée d'une loi adoptée par la Chambre. Elle a été unanimement avalisée par la Chambre des communes et est maintenant réaffirmée dans le projet de loi dont la Chambre est actuellement saisie. Peut-être pourrait-il expliquer cela à notre collègue de Calgary-Centre.

 

. 1540 + -

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le Président, il est vrai qu'il y a une définition du mariage, tant dans le Code civil du Québec que dans la common law canadienne. Il faut constater que c'est une définition qui peut évoluer, qui a évolué dans d'autres juridictions nationales, qui pourra évoluer ici, au Canada, et qu'elle pourra évoluer au Québec.

Je voudrais toutefois penser que cette question de la définition du mariage, même si elle est évoquée dans le projet de loi, pourra continuer d'être débattue. Je crois que nos sociétés évoluent de telle sorte que pourront être reconnues, non seulement les unions de fait mais, plus formellement, les partenariats entre personnes de même sexe.

C'est un débat qui, à mon avis, n'est pas clos. Il ne devrait pas être clos, parce qu'il y a des tenants d'une reconnaissance plus formelle des unions de fait de personnes de même sexe. Il y en a qui veulent réserver le mariage aux gens de sexe opposé.

Le débat progressera à la lumière de l'évolution de nos sociétés. J'espère que cette évolution se fera dans le respect des institutions, ainsi que dans le respect des convictions, mais surtout dans le respect de l'égalité des hommes et des femmes.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à préciser la nature et les objectifs de ce projet de loi. Certains lui font englober beaucoup plus de réalités ou de situations qu'il n'en contient.

Ce n'est pas un projet de loi qui porte sur le mariage ou l'adoption. Ce projet de loi vise essentiellement, et pour des raisons d'équité, à modifier certains régimes d'avantages sociaux et d'obligations afin de garantir aux couples vivant en union de fait, qu'ils soient de même sexe ou de sexe opposé, d'être traités également devant la loi. Voilà l'essentiel de l'objectif de ce projet de loi.

Les modifications proposées ne font qu'actualiser la décision de la Cour suprême dans l'affaire M. c. H. de mai 1999. Les objectifs de la loi sont d'apporter des modifications à 68 lois, de façon à inclure dans les définitions de «conjoint de fait» les conjoints de même sexe.

Depuis 20 ans, la plupart des gouvernements au Canada ont légiféré pour interdire la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. L'adoption de la Charte des droits et libertés a modifié le cadre juridique en matière de droits à l'égalité pour les homosexuels.

Je tiens à préciser que la Charte canadienne a grandement été inspirée par la Charte québécoise qui l'a précédée. Dès 1977, on retrouvait dans la Charte canadienne, in texto, l'interdiction de discrimination en vertu de l'orientation sexuelle.

Les aspects juridiques de l'orientation sexuelle concernent deux grands principes: premièrement, celui de l'interdiction de discrimination afin de protéger les gais et les lesbiennes contre des actes discriminatoires; et deuxièmement, celui de la reconnaissance des relations homosexuelles qui implique l'attribution aux partenaires de ces couples les avantages et garanties dont jouissent les couples hétérosexuels non mariés.

Cette loi n'est donc pas une loi portant sur le mariage, même si un amendement a été apporté afin de préciser que le mariage était un acte juridique entre deux personnes de sexe opposé. Je ne vois pas ce que cela avait à faire là, mais si cela peut en sécuriser quelques-uns, tant mieux.

Donc, cette loi vise à interdire et à supprimer les formes les plus pernicieuses de discrimination fondée sur les caractéristiques individuelles d'un groupe ou d'une personne. C'est vrai pour la race, la langue, la religion, mais également pour l'orientation sexuelle.

On reconnaît, dans cette loi, que la société considère inacceptable que certains groupes ne soient pas traités équitablement, notamment en matière d'avantages sociaux et de garanties.

Cette loi, en excluant l'orientation sexuelle comme motif de discrimination illicite, ne signifie pas que l'on approuve ou désapprouve l'homosexualité, mais plutôt que l'on se préoccupe d'accorder aux individus une protection juridique.

 

. 1545 + -

Soulignons que les modifications proposées ne sont pas à sens unique. Elles offriront de nouveaux avantages aux couples de même sexe, tout en leur imposant de nouvelles obligations.

J'ai quelques exemples. En matière fiscale, il y aura prise en compte des revenus totaux du ménage pour la prestation fiscale pour enfant, ce qui n'existait pas auparavant. Il y aura prise en compte également de revenus des deux conjoints pour l'admissibilité au supplément de revenu garanti.

Dans la Loi sur la faillite, les couples de même sexe seront astreints aux mêmes limitations quant au transfert de propriété ou de leurs biens avant de déclarer faillite.

Dans la Loi canadienne sur les sociétés par actions, l'interdiction pour un actionnaire, un associé ou un administrateur de recevoir de l'aide financière d'une compagnie s'étendra aux conjoints de même sexe.

Dans la Loi sur les banques, en matière de conflits d'intérêt, le conjoint d'un administrateur sera pris en compte.

Dans la Loi électorale, un directeur de scrutin ne pourra nommer son conjoint comme directeur adjoint.

Dans la Loi sur les sociétés de fiducie ou de prêt, il y a inclusion des conjoints de même sexe quant aux amendes supplémentaires que le tribunal peut imposer au conjoint d'une personne déclarée coupable d'une infraction à la loi s'il en a tiré des avantages financiers.

Voilà donc des obligations qui n'existaient pas. Il y aura donc des avantages, mais également des obligations, faisant en sorte que ces personnes seront traitées au même niveau que tous les citoyens et citoyennes du Canada.

Cette loi n'a rien d'unique ou de révolutionnaire. Je disais qu'elle faisait suite à de nombreux jugements en Cour suprême. D'ailleurs, toutes ces causes ont été gagnées par ceux et celles qui les ont menées. Nous sommes devant un état de fait et un état de droit.

Depuis 1997, plusieurs provinces ont agi, dont la Colombie-Britannique. Elles ont modifié leurs lois de façon à y inclure les conjoints de même sexe. En juin 1999, par exemple, le Québec a modifié 28 lois et 11 règlements en vue d'accorder aux couples de même sexe les mêmes avantages et les mêmes obligations qu'aux couples de sexe opposé vivant en union de fait. En octobre 1999, l'Ontario, sous Mike Harris, a adopté une loi omnibus modifiant 67 lois pour se conformer au jugement de la Cour suprême. Je pense qu'il s'agit là d'une attitude réaliste.

Sept provinces, les trois territoires et le gouvernement fédéral ont adopté des lois qui accordent à leurs fonctionnaires des pensions de survivants aux conjoints de même sexe. Il en va de même pour les grandes villes canadiennes, quelle que soit la région: la Colombie-Britannique, les Prairies, l'Ontario, le Québec, les Maritimes, pour plus de 200 entreprises canadiennes du secteur privé, des hôpitaux, des bibliothèques, des institutions de services sociaux et des banques.

Il s'agit donc d'une tendance lourde, si je peux m'exprimer ainsi, visant à s'adapter à la modernité, à la situation actuelle, à ce que nous vivons, à ce que nous savons qui existe et que certains voudraient cacher. On ne peut effacer cette réalité.

Les sondages confirment d'ailleurs la volonté de la population de mettre fin à la discrimination basée sur l'orientation sexuelle. En 1998, un sondage Angus Reid révélait que 74 p. 100 des répondants se disaient favorables à l'attribution des avantages fédéraux aux couples de même sexe; 67 p. 100 des répondants étaient d'avis que les couples de même sexe devraient recevoir les mêmes avantages et faire face également aux mêmes obligations que les conjoints de fait; 84 p. 100 des personnes interrogées estimaient que les gais et les lesbiennes devraient être protégés de la discrimination.

Comme le démontrent ces résultats, le présent projet de loi répond aux attentes de la population qui trouve inappropriée la discrimination fondée sur l'orientation sexuelle. Ce projet de loi propose des mesures concrètes qui vont au-delà des déclarations de bonnes intentions. Au-delà de l'orientation sexuelle, cette loi accorde un traitement équitable à chaque citoyen, quelle que soit son orientation sexuelle.

J'ai traité de cette situation il y a déjà une quinzaine d'années quand je négociais pour les syndicats. En 1986, je crois que j'avais signé la première convention collective, au Québec tout au moins, reconnaissant les mêmes avantages sociaux aux couples de même sexe. Cette tendance s'est poursuivie, tant et si bien que dans l'hôtellerie, qui était le secteur où je négociais à cette époque, l'ensemble des directeurs et des propriétaires d'hôtels au Québec reconnaissent cette réalité. Cela n'a pas entraîné de coûts énormes parce que ces gens paient aussi des impôts comme vous et moi.

 

. 1550 + -

Encore une fois, cette loi n'est pas une loi sur la sexualité ou sur le mariage, c'est une loi sur l'équité. Je comprends que certains hésitent, à cause d'un certain nombre de leurs valeurs, souvent inspirées par les croyances religieuses, mais il ne faut pas que la religion des uns devienne la loi des autres.

La religion, c'est une affaire individuelle, ce en quoi j'ai le plus grand respect, mais on ne doit pas l'imposer aux autres; cela ne s'impose pas. On doit reconnaître les valeurs, qui ne sont pas nécessairement les nôtres en certaines occasions, mais que d'autres partagent et qui, d'aucune façon, ne heurtent les nôtres ou ne dénoncent les nôtres.

En ce sens-là, ce projet de loi me semble corriger des injustices que nous vivons et que nous avons vécues depuis longtemps. Il est temps, je crois, de mettre notre système de lois, notre cadre juridique, au diapason de la réalité et de l'ouverture que manifestent les Canadiens et les Québécois envers ceux et celles qui ont une orientation différente de la leur mais qui participent tout autant qu'eux, que moi et que nous tous, à notre société.

[Traduction]

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je suis très heureuse d'avoir la possibilité de prendre part, aujourd'hui, au débat sur le projet de loi C-23, la loi sur la modernisation du régime d'avantages et d'obligations.

Cette loi omnibus porte sur l'équité et l'égalité pour tous ceux qui vivent en union de fait, mais, puisqu'il semble que ce ne soit toujours pas juste aux yeux de certains députés, je vais saisir cette occasion pour dire de quoi il est question dans ce projet de loi et comment nous en sommes arrivés là.

Essentiellement, ce projet de loi vise à mettre fin à une forme de discrimination. Les tribunaux ont très clairement statué que les prestations et obligations qui s'appliquent aux couples de personnes de sexes opposés vivant en union libre doivent être appliquées aux couples de personnes de même sexe vivant en union libre.

Lors de récentes contestations judiciaires se fondant sur la Charte canadienne des droits et libertés et de la Loi canadienne sur les droits de la personne, les tribunaux ont établi que les politiques et programmes fédéraux engendrent une distinction injuste fondée sur l'orientation sexuelle.

Le 20 mai 1999, la Cour suprême du Canada a statué sur la question de la pension alimentaire versée à un conjoint dans l'affaire M. c. H. Elle a décidé que les dispositions de la Loi ontarienne sur le droit de la famille violaient la Charte des droits et libertés et qu'elles refusaient injustement aux couples d'homosexuels non mariés le traitement accordé aux couples d'hétérosexuels non mariés.

Une fois la décision sur l'affaire M. c. H. rendue, le gouvernement de l'Ontario a disposé de six mois pour modifier sa Loi sur le droit de la famille. À la suite de cette affaire, la plupart des autres provinces ont également annoncé qu'elles allaient modifier leurs lois pour les rendre conformes à la Charte.

Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui vise à assurer un traitement égal dans la législation fédérale aux couples homosexuels et hétérosexuels en union de fait, tout en préservant la distinction juridique très claire qui existe entre les couples non mariés et les couples mariés.

Le projet de loi utilise les termes «spouse» ou «common law partner» qui se traduisent en français par «époux» ou «conjoint de fait» lorsqu'on ne pouvait pas trouver de terme neutre comme survivant. Les termes «common law partner» et «conjoint de fait» sont définis pour englober les couples homosexuels et hétérosexuels.

Le projet de loi C-23 modifie 68 lois pour veiller à ce qu'elles englobent les couples homosexuels en union de fait et qu'elles étendent aux couples homosexuels et aux membres de leurs familles les avantages et obligations se rapportant aux couples hétérosexuels en union de fait.

Ce projet de loi d'ensemble porte sur les avantages et les obligations. Voici quelques exemples de certains de ces avantages et obligations. Il est utile de rappeler aux gens que c'est le fond de ce projet de loi.

Aux termes de la Loi sur la sécurité de la vieillesse, une personne mariée à faible revenu ou un conjoint de fait de sexe opposé peut réclamer le Supplément de revenu garanti qui est établi en fonction du revenu combiné des deux époux ou conjoints. Le projet de loi C-23 prévoit qu'un conjoint de fait de même sexe peut être admissible au Supplément de revenu garanti en fonction du revenu combiné des deux conjoints.

Aux termes du Régime de pensions du Canada, l'époux survivant d'un mariage ou le conjoint survivant d'une union de fait hétérosexuelle peut avoir droit à des prestations au survivant, en fonction des contributions au régime de son époux ou conjoint. Le projet de loi C-23 prévoit cela dans des circonstances semblables. Le conjoint survivant d'une union de fait homosexuelle aurait également droit aux prestations au survivant en fonction des contributions de son conjoint au régime.

 

. 1555 + -

Aux termes de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, on limite la capacité des personnes mariées de transférer à leur époux la propriété de leur maison ou d'autres biens avant de déclarer faillite. Le projet de loi C-23 prévoira les mêmes limites dans le cas des unions de fait hétérosexuelles et homosexuelles.

Il est clair que le projet de loi C-23 devrait avoir l'appui de tous les partis, car il s'agit d'une mesure législative nécessaire. Ces dispositions figurent déjà dans les lois provinciales et il s'agit de mettre un terme à la discrimination et de traiter les gens de façon équitable. C'est une chose que tous les Canadiens devraient appuyer.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'avoir l'occasion de parler de nouveau de ce projet de loi. J'ai écouté avec un certain intérêt les députés d'en face dire que cette mesure va miner le mariage et les familles. Monsieur le Président, si vous essayiez de faire des réservations à une église ou un hôtel ici à Ottawa ou dans n'importe quelle ville canadienne pour la célébration d'un mariage dans moins d'un an, vous verriez que l'institution se porte très bien au Canada.

Les députés d'en face ont soutenu que seuls les gens mariés devraient avoir droit aux avantages et que les prestations, régimes de pension, régimes d'assurance-maladie et ainsi de suite ont pour but de contribuer à soutenir une famille avec des enfants. Cette proposition aurait pour effet de rendre la plupart des cotisants à ces régimes de prestations inadmissibles aux prestations. Elle exclurait des familles, comme la mienne, qui ont déjà eu des enfants et ne sont plus en mesure d'en avoir. Elle exclurait les couples mariés qui ne désirent pas avoir d'enfants, qui ne prévoient pas en avoir ou qui n'en sont pas capables. Elle exclurait quiconque ne rentre pas dans la définition très étroite de la famille traditionnelle, qui ne correspond d'ailleurs pas à la majorité des familles dans notre pays.

Au cours du débat, les députés d'en face ont dit que le projet de loi C-23 constituait une autre preuve du programme d'action anti-famille du gouvernement. Ce genre d'exagération peut faire de bonnes déclarations dans les médias électroniques et de bonnes manchettes dans les journaux, mais cela n'a pas beaucoup de bon sens.

Voyons les dispositions du projet de loi C-23. Un député d'en face a parlé ce matin de «bonnes familles». La définition que ce député donne d'une bonne famille est une mère et un père qui sont mariés et qui ont des enfants. Tout ce qui ne correspond pas à ce modèle est exclu de cette définition de la famille.

Je demande aux députés: et les familles monoparentales? Et les couples sans enfants, et les familles où les parents sont des conjoints de fait, de sexe opposé ou de même sexe? Par extrapolation, est-ce que ces familles sont mauvaises? Je ne le pense pas. Je pense que la plupart de ces couples sont probablement aussi déterminés à s'occuper de l'autre, à partager avec l'autre et à contribuer à leur communauté que les couples qui sont mariés.

Le gouvernement reconnaît qu'il y a plusieurs types de familles dans notre pays. Le programme du gouvernement est d'appuyer les familles sans faire de distinction entre ce qui constitue une bonne ou une mauvaise famille.

Un nombre important de dispositions du projet de loi C-23 ont été rédigées de façon à permettre aux conjoints de fait, de sexes opposés ou de même sexe, de nommer leur conjoint comme bénéficiaire de leur pension de retraite, retraite à laquelle, je le rappellerai aux députés d'en face, ils contribuent soit comme employés soit comme contribuables. Ces dispositions du projet de loi C-23 n'enlèvent aucun avantage existant aux autres couples, à ce que l'opposition définit comme une bonne famille. Elles ne supprimeront pas les dispositions concernant les prestations de pension aux enfants. En fait, ces modifications apporteront une protection supplémentaire aux enfants dont les parents sont des conjoints de fait.

 

. 1600 + -

Le projet de loi C-23 encouragera les couples de fait, qu'ils soient de sexe opposé ou de même sexe, à planifier l'avenir financier de leur partenaire, ce qui allégera le fardeau imposé à l'État lorsque des partenaires sont laissés dans la misère. Comment le fait d'encourager des partenaires qui sont dans une relation conjugale sérieuse à s'occuper l'un de l'autre peut-il menacer la famille?

Comment le projet de loi C-23 peut-il être contre la famille lorsqu'il abroge les dernières références à des enfants illégitimes qu'il reste encore dans les lois fédérales? Quelle référence horrible. J'accorde beaucoup de crédit au député d'Ottawa-Centre pour avoir présenté un projet de loi d'initiative parlementaire sur ce sujet, afin que soit retirée cette expression horrible de toutes les lois fédérales, ce qui est enfin fait dans le projet de loi C-23. Enfin, il met tous les enfants de notre société sur un pied d'égalité.

Je ne vois pas comment le projet de loi C-23 peut être contre la famille lorsqu'il modifie une disposition de la Loi sur la médaille canadienne du maintien de la paix, ce qui permettra à des partenaires de fait d'être inscrits sur la liste des proches parents qui pourront recevoir une médaille au nom d'un partenaire à qui une médaille est décernée à titre posthume. Comment la modification de cette disposition peut-elle être contre la famille?

Comment le projet de loi peut-il être contre la famille lorsqu'il supprime des références surannées à la femme, au commis ou au serviteur, dans la Loi sur les lettres de change, ou la référence désuète au père, au fils ou au frère d'un patron, qui figure actuellement dans l'article de la Loi sur les syndicats ouvriers qui est abrogé dans ce projet de loi?

Comment le projet de loi C-23 peut-il être contre la famille quand il modifie la Loi sur les ponts afin de préciser que les conjoints de fait peuvent être ajoutés à la liste des personnes pouvant présenter une demande d'indemnité par suite d'une blessure ou de la mort de leur conjoint sur un pont? Comment ce projet de loi peut-il être antifamilial quand il modifie la Loi sur le transport aérien afin d'ajouter les conjoints de fait à la liste des personnes pouvant intenter des poursuites contre un transporteur aérien en cas de dommages entraînant la mort d'un passager?

Ce ne sont là que quelques exemples de ce que contient le projet de loi C-23. Comment menace-t-on la société canadienne quand on encourage les personnes visées à vivre une relation mutuelle d'attention et d'interdépendance? Je pense que cela renforce la société.

Le projet de loi n'enlève rien à la société ou à la famille, mais il encourage les personnes à prendre mutuellement soin d'elles en étendant le régime d'avantages et d'obligations. Cette mesure préconise l'équité et la tolérance, et si quelqu'un la juge antifamiliale, c'est qu'il ne l'a pas lue ou qu'il a décidé de mal l'interpréter ou de l'attaquer.

Au cours de ce débat, on a entendu des propos blessants et haineux. Je le regrette sincèrement parce que je ne pense pas que de telles observations, à l'endroit de personnes qui ne sont pas mariées, traduisent les opinions de la plupart des Canadiens, voire des députés.

Nous sommes saisis d'un projet de loi qui étend un traitement équitable et égal à des membres de notre société. Ce projet de loi représente un progrès pour la société et pour les familles, et non un recul.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai écouté les propos de la députée avec grand intérêt. Elle soulève des points fort valables.

J'aimerais qu'elle parle d'un point bien précis. Bien des gens considèrent, et ils ont présenté des pétitions et écrit des lettres à cet effet, que le mariage constitue à bien des égards le fondement initial des familles. Dans la pratique, le propre rapport du gouvernement, issu de son étude longitudinale sur les enfants et la famille, a démontré que les enfants réussissent mieux lorsqu'ils grandissent dans le cadre d'un mariage entre un homme et une femme.

Il est intéressant de voir que ce projet de loi comporte une définition du mariage dans la partie correspondant au préambule, mais que, de l'avis des experts juridiques, placée ainsi, cette définition n'aura pas la force ou l'impact souhaité. Par conséquent, l'opposition officielle, l'Alliance canadienne, a présenté un certain nombre d'amendements visant à inscrire la définition du mariage dans chacune des lois mentionnées dans le projet de loi.

 

. 1605 + -

De cette façon, le Parlement donnerait aux tribunaux et au public en général une nette indication de ses intentions. Ces amendements modifieraient ce projet de loi muet quant à la définition du mariage, ce projet de loi qui ne dit rien aux tribunaux qui seront bientôt saisis de contestations demandant que l'on redéfinisse le mariage. En fait, certaines causes se trouvent déjà dans le système judiciaire et elles atteindront bientôt la Cour suprême. En insérant la définition du mariage dans les lois, comme nous le désirions, nous aurions transmis un message clair témoignant de notre position à cet égard, soit que la meilleure base possible pour une famille est le mariage.

Si la définition est assez valable pour être ajoutée en préambule au projet de loi, pourquoi ne l'est-elle pas suffisamment pour être insérée dans les lois?

Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, le député fait valoir deux points et je voudrais réagir aux deux.

La loi est très claire; elle existe depuis 150 ans en common law. C'est exactement ce qu'est le mariage, et la Chambre a réaffirmé cette définition au cours de la dernière année. On ne la modifie pas en la mettant dans le préambule au projet de loi; on ne fait que la souligner. En tant que bon législateur, je n'aime pas me répéter. Si nous avons déjà une loi, il est inutile d'en avoir une autre qui dit la même chose.

Le député parle de l'étude sur les enfants. Ce qu'il importe de noter, c'est que, dans notre société, les enfants qui ont des problèmes appartiennent à tous les genres de famille. On insiste beaucoup trop, et le parti d'en face est celui qui le fait le plus à mon avis, sur la nécessité de punir les enfants lorsqu'ils ont maille à partir avec la justice au lieu de les appuyer et de les aider, quelle que soit leur situation familiale.

Il faut s'occuper beaucoup plus des jeunes enfants dans nos collectivités. Les collectivités doivent participer beaucoup plus au développement des enfants et des parents qui les élèvent, en particulier peut-être des chefs de famille monoparentale qui subissent encore plus de stress. Un parent qui a un revenu insuffisant peut faire beaucoup d'efforts pour élever un enfant seul, avec toutes les pressions que cela comporte. Il ne bénéficie pas d'un appui suffisant de la société.

Le parti d'en face, maintenant qu'il a un nouveau nom, voudra peut-être adopter une nouvelle attitude à l'égard des enfants qui ont effectivement maille à partir avec la justice, à savoir les aider et les appuyer au lieu de les punir lorsqu'ils vont trop loin. Ce n'est pas en privant d'avantages les enfants de quelque famille que ce soit qu'on les aide à mûrir.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi C-23, qui modernise le régime d'avantages. Je voudrais partager mon temps de parole avec le député d'Elk Island, ce qui signifie que je ne disposerai que de 10 minutes pour présenter ce que je considère comme des arguments convaincants en faveur du renvoi du projet de loi au comité pour une étude plus approfondie. Je voudrais présenter brièvement ces arguments.

D'abord, ce projet de loi est un exemple de la très mauvaise façon de s'y prendre pour élaborer des orientations publiques. Le fait de limiter, tant à la Chambre qu'au comité, le débat sur un tel projet de loi qui modifiera 68 ou 69 autres lois n'est pas une bonne façon d'élaborer des orientations publiques.

Ensuite, le fait de limiter le nombre de témoins pouvant comparaître devant le comité n'est pas non plus une bonne façon d'élaborer une orientation publique qui aura d'incalculables répercussions pour les années à venir. C'est une bien mauvaise façon d'élaborer des orientations publiques, et c'est ce qu'ont fait les libéraux avec ce projet de loi. Le fait que nous n'ayons pas entendu des représentants de tous les milieux de la société portera préjudice à cette mesure à long terme.

Fait à remarquer, quand le gouvernement et le ministre des Finances font leur tournée prébudgétaire, ils mettent de côté 500 000 $ et prévoient tout le temps voulu pour que le ministre des Finances puisse aborder les sujets de son choix sur la route. Cependant, quand il est question d'initiatives importantes comme celle-ci, le comité se fait dire de rester à Ottawa et de ne pas entendre de témoins. Le gouvernement va tout simplement adopter ce projet de loi à toute vapeur et les Canadiens vont devoir en subir les conséquences.

 

. 1610 + -

Troisièmement, le parti ministériel n'a pas tenu compte des intérêts des provinces dans ce projet de loi. Il a même refusé d'écouter les ministres provinciaux que ce projet de loi concerne. Il n'a pas voulu tenir compte de leurs préoccupations concernant les répercussions de cette mesure sur les intérêts des provinces. On commet toujours une erreur en faisant adopter à toute vapeur un projet de loi qui ne tient pas compte des intérêts des provinces.

Enfin, il s'agit là d'une question importante. Avant de présenter un projet de loi qui aura sur la société autant de répercussions que celui-ci, il aurait fallu organiser un vaste débat public et discuter des rôles du gouvernement, du secteur privé, des particuliers, de la famille, des organismes caritatifs et du secteur communautaire dans la société de demain. Dans une discussion sur la société du XXIe siècle, il aurait fallu aborder ces aspects à titre de préambule ou de fondements philosophiques à tout débat sur des orientations futures qui auront autant de répercussions que le projet de loi dont nous sommes saisis. Aucun débat général d'orientation n'a eu lieu. On nous a plutôt présenté cette mesure comme quelque chose de réglé, avec laquelle nous devrions composer.

Il est intéressant de souligner que la plupart des mesures d'intérêt public adoptées au Canada l'ont été après la Seconde Guerre mondiale: c'est le cas du Régime de pensions du Canada, de notre régime d'assurance-maladie, de nos prestations de maternité et de toute une gamme d'avantages sociaux. Quand on y pense, les années 40 étaient une époque différente de l'histoire de notre pays et du monde entier. Je parle de l'orientation que devraient prendre les mesures d'intérêt public dans le siècle à venir. Or, il est ici question d'un ancien régime qui date des années 40; le gouvernement veut ajouter une ou deux autres catégories à ce régime et maintenir les mêmes vieilles prestations, car elles sont bel et bien d'une autre époque.

Les mesures d'intérêt public s'inscrivant dans ce genre de projet de loi devraient être débattus. Je suis très déçu que le gouvernement ait choisi de ne pas tenir ces discussions. Nous aurions pu déterminer qui devraient ou non être les bénéficiaires de ces avantages en nous fondant sur l'intérêt manifesté par le public à l'égard de ce projet de loi et de nombreuses autres mesures législatives.

Ce projet de loi est si mal rédigé qu'il devrait être rejeté. Il est intéressant de constater que tout au long du débat, le gouvernement n'a pas réussi à bien définir une expression comme «relation conjugale.» Les tribunaux se prononceront un jour sur cette question comme ils ont si souvent été obligés de le faire en raison d'expressions mal définies, de mesures législatives mal rédigées et, en toute franchise, de l'absence de volonté politique de la part des libéraux d'adopter une position définitive et de la communiquer aux tribunaux. Les libéraux ont plutôt dit que c'est une situation difficile et qu'ils vont se cacher derrière les tribunaux.

Je ne blâme pas les tribunaux. Ils vont devoir se prononcer sur cette question, comme c'est leur rôle. Ils vont alors dire que, comme les expressions sont fort mal définies, ils vont arrêter les définitions. Quelle mauvaise façon d'établir une mesure législative qui influera sur tous les Canadiens pendant de nombreuses années. Les libéraux abandonnent la partie et disent que les tribunaux sont mieux qualifiés que la Chambre des communes. C'est une honte. Les avocats vont avoir des beaux jours. Notez bien ce que je dis. Les cas ne feront que se succéder devant les tribunaux au cours des années à venir.

La preuve que ce projet de loi est mal rédigé, c'est que l'on a cherché à définir à la dernière minute la notion du mariage dans le préambule du projet de loi C-23. La ministre s'est présentée au comité, a lancé la définition et dit: «Voici une définition. Qu'en pensez-vous?» La définition est bonne et elle reçoit l'appui du Parti réformiste qui s'appelle désormais l'Alliance canadienne. Toutefois, c'était strictement un exercice de relations publiques. Cette définition n'affecte en rien les 68 ou 69 lois qui seront modifiées. Elle permet au gouvernement de pavoiser et de dire qu'il a apporté un petit changement.

Pour ce qui est des lois proprement dites, il n'y a pas de changement. On n'y met pas l'accent sur le mariage. Au cours des prochaines années, lorsque nous consulterons une des quelque 60 lois, nous ne pourrons trouver une seule référence au mariage. C'est une erreur grave. C'est bien de l'inclure dans un projet de loi omnibus, mais lorsque les tribunaux, les avocats et les ministères seront en cause, personne ne trouvera de définition du mariage dans l'une ou l'autre de ces lois. C'est un grand échec et un autre signe révélateur d'un projet de loi mal rédigé.

 

. 1615 + -

Finalement, le gouvernement refuse d'adopter des amendements de fond. Mon collègue qui a suivi le projet de loi pour notre parti a demandé pourquoi, s'il était possible de modifier le préambule, il ne serait pas possible de modifier les articles. Nous n'obtenons aucune réponse du gouvernement. S'il ne veut pas modifier le contenu du projet de loi, c'est parce qu'il refuse absolument d'y donner quelque substance que ce soit. C'est une honte.

Le gouvernement laissera les tribunaux trancher. Il demandera à quelques bureaucrates d'essayer de sortir l'information, d'un grand trou noir, je suppose. La vérité, c'est que le gouvernement a rejeté nos amendements et même les amendements proposés par des députés libéraux parce qu'il ne veut rien savoir des propositions qui ont été faites.

Comment un projet de loi ayant été si mal conçu, ayant été si peu débattu et ayant une si faible priorité aux yeux de la population peut-il être si prioritaire pour le gouvernement? La question mérite d'être posée aujourd'hui.

N'aurait-il pas été préférable de présenter toute une série de mesures réclamées par les familles Canadiennes? Ce projet de loi n'était pas annoncé dans le livre rouge des libéraux. Le sujet n'a pas été abordé pendant la campagne électorale. Il ne figurait pas dans leur plate-forme électorale. Il nous est arrivé comme un cheveu sur la soupe.

Au lieu de répondre aux attentes des Canadiens, les libéraux ont présenté ce projet de loi qu'ils se devaient, en raison de son importance, de faire adopter par la Chambre, quitte à avoir recours à toutes les astuces procédurières possibles.

Que se passe-t-il? Pourquoi les libéraux n'ont-ils pas amélioré le régime fiscal de sorte que ce soit non pas le fisc mais les familles qui prennent les décisions au sujet de leurs enfants et de leur éducation? Pourquoi le gouvernement ne l'a-t-il pas fait?

Il est intéressant de constater que toutes les questions importantes liées à la famille et au mariage ont été soulevées par l'opposition sous forme de motions de crédits à la Chambre, alors que les libéraux n'ont rien proposé en cette matière. Ils ont même rejeté une motion qui proposait de modifier le régime fiscal fédéral pour mettre fin à la discrimination contre les familles à revenu unique ayant des enfants.

Nous avons réussi à faire accepter la définition de mariage, mais le gens d'en face ont poussé les hauts cris, soutenant que ce serait une source de division et qu'il fallait éviter d'en débattre. Nous avons soulevé la question et nous sommes fiers de l'avoir fait, car, en fin de compte, la ministre a utilisé la même définition dans son projet de loi. Nous nous devions de porter la question à l'attention de la Chambre.

Nous devions aussi faire valoir que les soins de santé doivent avoir priorité sur les subventions gouvernementales. Nous l'avons fait ce printemps, mais ils ont rejeté la motion que nous avons présentée. Ils veulent plus de subventions gouvernementales et moins de soins de santé. Peu importe le dossier, qu'il s'agisse de l'affaire Sharpe ou de la protection de nos enfants, ils n'ont rien voulu entendre, et cela même à la demande de certains de leurs propres députés d'arrière-ban.

L'opposition, qui tôt ou tard formera le gouvernement, a insisté pour que l'on se penche là-dessus, et le gouvernement lui a opposé une fin de non-recevoir. Cela fait sept ans que je siège à la Chambre, et la Loi sur les jeunes contrevenants est toujours à l'étude en comité. Nous n'assurons toujours pas la protection de nos enfants. Le projet de loi sur la conduite avec facultés affaiblies est perdu quelque part dans un trou noir. La question des peines consécutives n'a jamais été abordée par le gouvernement; c'est un député d'arrière-ban qui l'a fait.

En ce qui concerne les libérations conditionnelles et les droits des victimes, chaque fois que nous, de ce côté-ci de la Chambre, essayons de protéger les familles et de leur donner priorité, les gens d'en face s'y opposent.

Pourquoi? Comment les ministériels définissent-ils leurs priorités? Je ne saisis pas. Ils semblent se défiler non seulement devant les tribunaux, mais aussi devant l'opinion publique canadienne, et ils refusent de s'occuper des choses qui tiennent à coeur aux Canadiens.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai entendu des députés du parti ministériel et des autres partis parler des divers contextes dans lesquels les gens élèvent des enfants aujourd'hui.

Je crois que c'est la réalité et je suis le premier à féliciter les parents qui élèvent leurs enfants dans ces divers contextes, que ce soit en tant que parent seul ou dans n'importe quelle autre situation imaginable. Je félicite ces gens d'élever leurs enfants dans des circonstances qui sont souvent loin d'être idéales.

Lorsque les députés d'en face abordent la question, croient-ils que la situation idéale pour élever des enfants est dans un foyer avec deux parents de sexe opposé? S'ils croient que c'est là la situation idéale, alors n'est-ce pas un but louable du gouvernement que d'essayer de reconnaître cet idéal? Je ne dis pas qu'il faudrait promouvoir cet idéal. Je dis seulement qu'il faudrait le reconnaître, du moins dans la loi. C'est une question à laquelle j'aimerais bien que tous les ministériels qui parlent de ce projet de loi répondent.

 

. 1620 + -

Le député de Fraser Valley-Est est-il d'avis que le projet de loi contribue de quelque façon que ce soit à reconnaître ce que je crois être une situation idéale, soit celle d'une famille où il y a un père, une mère et des enfants? D'autres peuvent avoir une opinion différente, mais le gouvernement a-t-il essayé, dans les lois fiscales, de reconnaître cette situation? Ce n'est certainement pas la seule situation acceptable et cela ne correspond pas à la réalité dans bien des cas, mais c'est ce que je vois comme étant la situation idéale. Dans les diverses mesures législatives que le député a vues à la Chambre, le gouvernement a-t-il essayé de reconnaître cet idéal?

M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, je vais essayer de répondre à cette question. Dans notre caucus, nous analysons chaque projet de loi dont nous sommes saisis et nous nous demandons quel va être son impact sur la famille. Ce n'est pas la seule question que nous nous posons. Nous nous demandons aussi quel va être son impact sur l'économie, quel va être son impact sur l'environnement. Nous nous posons toute une série de questions au cours de nos analyses.

L'une des questions qu'il convient d'après nous de se poser, c'est quel va être l'impact du projet de loi sur la famille. Va-t-il avoir pour effet de la renforcer? Une famille est formée de quiconque est apparenté par le sang, par mariage ou par adoption. Nous n'essayons pas d'avoir une définition restrictive de la famille, mais ce que nous disons c'est que le gouvernement a un rôle à jouer dans le renforcement de la famille.

Quand nous analysons ce projet de loi, nous ne voyons pas en quoi il va renforcer la famille. Nous n'avons pas réussi à voir comment il va le faire. Comme je l'ai dit plus tôt, cette question justifiait un grand débat qui, à mon avis, aurait dû précéder la présentation de ce projet de loi, un débat sur la question de savoir quel est l'intérêt de ce projet de loi ou de tout autre projet de loi sur les avantages sociaux pour le public et dans quelle mesure nous pouvons démontrer qu'il va profiter à la société.

Comme le député de Lakeland l'a mentionné, il y a un avantage démontrable à laisser aux parents toute la latitude voulue pour élever leurs enfants comme ils l'entendent. Par exemple, pourquoi une famille a un seul revenu de 60 000 $ par an devrait-elle être pénalisée en vertu du régime fiscal en vigueur, pourquoi devrait-elle faire l'objet de discrimination et pourquoi devrait-on lui dire que, si elle place ses enfants dans une garderie agréée, elle aura droit à un allégement fiscal? Qu'en revanche, si elle décide de demander à la tante Marie, à Grand-mère ou à quelqu'un d'autre de s'occuper des enfants, elle n'aura droit à aucune aide de l'État, à aucun avantage fiscal, à cause du choix qu'elle aura fait. C'est le percepteur qui décide si elle a droit ou non à un avantage fiscal. Ce n'est pas à la famille de décider qui va s'occuper de ses enfants. Si les enfants fréquentent une garderie agréée, la famille aura droit à un allégement fiscal, mais si un membre de la famille s'occupe des enfants, la famille ne bénéficiera malheureusement d'aucune aide. Non mais, quel genre de loi est-ce?

Les parents ont sûrement à coeur l'intérêt de leurs enfants. Ils ont bien des facteurs à considérer: le désir d'aller travailler, la nécessité de travailler à l'extérieur, la proximité de la famille, la distance entre la maison et la garderie, tout un tas de considérations, quoi. Ils tiennent compte de tous ces facteurs pour déterminer la façon dont ils élèveront leurs enfants. Ils peuvent décider de rester à la maison pour s'occuper des enfants.

Toutefois, sous le régime libéral, le percepteur leur dit que ce n'est pas à eux de prendre cette décision. C'est au percepteur de prendre cette décision. Et le précepteur prévient les parents qu'ils pourront difficilement choisir une autre option que celle qu'il leur impose. C'est insensé. Voilà pourquoi l'Alliance canadienne soutient que ce devrait être aux personnes intéressées et aux familles de prendre cette décision, et non pas au ministre du Revenu.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis honoré de pouvoir participer à ce débat. Je suis père et grand-père. J'ai quatre merveilleux petits-enfants.

Aujourd'hui, c'est un jour très spécial pour notre famille. C'est le 11 avril 1935 que mes parents se sont engagés l'un envers l'autre à vivre ensemble toute leur vie. Ils célèbrent aujourd'hui leur 65e anniversaire de mariage.

Des voix: Bravo!

 

. 1625 + -

M. Ken Epp: C'est 65 ans de bonheur suprême, selon mon père. J'exagère un peu.

Une voix: Cela paraît beaucoup plus long.

M. Ken Epp: Oui, cela semble plus long. Quoi qu'il en soit, je vais prendre quelques secondes pour remercier mes parents. Quand je pense à la famille dans laquelle j'ai grandi, je m'aperçois que nous avions des parents qui s'aimaient l'un et l'autre, qui nous aimaient, et nous le savions.

J'ai déjà raconté dans cette enceinte ce qui s'est passé lorsque j'ai commis une grave faute en allant avec certains de mes cousins plus âgés casser toutes les fenêtres d'une maison abandonnée. Je ne peux pas croire que j'ai fait cela, mais c'est pourtant ce que j'ai fait à neuf ou dix ans seulement.

Mon père, et je l'aime vraiment pour cela, a pris le temps de m'amener chez l'homme qui possédait cette maison et m'a demandé de rendre des comptes. J'ai dû demander à cet homme de me pardonner mon geste. Papa a également exigé qu'au cours des trois ou quatre années suivantes, sauf erreur, tout l'argent que j'allais gagner serve à réparer les dommages. Il m'a fait assumer mes responsabilités et je l'en remercie.

Quand je songe à l'amour qu'éprouvaient nos parents l'un pour l'autre et à notre égard, à l'amour et à la discipline avec lesquels ils ont élevé leurs enfants, je pense vraiment qu'il aurait presque été impossible pour mon frère et moi-même de devenir des criminels. Je crois que cela aurait été impossible, car nous avions un si bel exemple.

En pensant à mes parents encore en cette occasion aujourd'hui, je me rappelle du nombre de fois qu'ils ont aidé d'autres personnes dans le besoin. Nous étions toujours prêts à faire notre part. Je n'ai pas le temps aujourd'hui de parler de cela en détail, mais nous avons eu un exemple remarquable dans notre maison.

Depuis une vingtaine d'années, ma mère prie pour qu'elle et mon père vivent plus longtemps que ma soeur invalide. J'ai déjà parlé d'elle à la Chambre. Lorsque ma soeur est décédée, il y a une quinzaine de jours, notre famille a vécu des moments d'une grande intensité. Nous devions dire adieu à une soeur que nous chérissions, mais nous devions aussi remercier nos parents de ces longues années de fidélité à cet engagement à l'égard de ma soeur. C'est du fond de son coeur que ma mère priait: «Seigneur, nous voulons survivre à Marion pour veiller à ce qu'on s'occupe bien d'elle.» Le Seigneur a répondu à sa prière, et ma famille en est très reconnaissante.

Si je raconte cela en guise d'entrée en matière aujourd'hui, c'est pour faire comprendre que les familles solides sont le fondement d'une bonne société saine. J'ai un idéal dont je n'ai pas à m'excuser ni à rougir. L'idéal, pour moi, c'est un père et une mère qui s'aiment toute leur vie, qui élèvent leurs enfants et s'occupent d'eux, veillent à ce qu'ils ne manquent de rien au plan matériel, mais aussi à ce que leur éducation soit extrêmement ferme, des parents qui enseignent à leurs enfants à se soucier des autres, à s'aimer les uns les autres, à se pardonner lorsqu'ils commettent des erreurs, ce qui nous arrive à tous, des parents qui donnent à leurs enfants des fondements solides.

Comme certains de mes collègues l'ont dit, il serait bien préférable que le gouvernement du Canada, au lieu d'agir comme il le fait, veille à ce que sa politique appuie cet idéal.

Il arrive souvent, comme mon collègue vient juste de le dire, que les décisions du gouvernement soient préjudiciables aux familles. Il y a des familles qui ont de graves problèmes financiers. Elles n'arrivent pas à joindre les deux bouts. Les deux conjoints doivent travailler pour payer taxes et impôts et pour essayer de subvenir aux besoins de leurs enfants. Je ne comprends vraiment pas pourquoi le gouvernement ne prévoit pas un allègement fiscal pour les parents qui offrent ce qu'il y a de mieux, le cadre idéal où élever leurs enfants.

 

. 1630 + -

Je sais que, comme moi, des députés de mon parti se sont attiré bon nombre de commentaires négatifs en raison de la position qu'ils ont prise. J'aimerais régler cette question une fois pour toutes.

On nous a accusés d'avoir des comportements haineux et de bien d'autres choses terribles. Rien ne peut être plus faux. Je dois dire que je ne suis nullement intéressé à faire preuve de manque d'empathie pour mes semblables. C'est la vie. La vie, c'est la famille. C'est l'amitié. C'est l'amour. Je rejette d'emblée leurs accusations.

Ceci dit, j'aimerais également ajouter que les députés libéraux d'en face ont dit des choses très méchantes à notre endroit. Il est très tentant pour nous de crier plus fort et de leur dire: «Vous avez tort». Toutefois, compte tenu de toutes les circonstances émotives que j'ai vécues au cours des derniers mois, et je m'excuse si l'émotion me gagne, je me sens blessé. Ce sont vraiment des insultes. Que je me sente blessé n'est pas si grave, mais il n'est pas de bonne guerre qu'un député puisse en regarder un autre et proférer des accusations de façon aussi désinvolte sur des attitudes présumées, sur les motivations présumées d'autres personnes sans même connaître les faits. J'aimerais beaucoup que les libéraux et les autres députés s'abstiennent d'agir de la sorte.

Il est certain que j'ai certaines réserves en ce qui concerne ce projet de loi. Cela ne veut pas dire que je refuse de venir en aide à ceux qui sont dans le besoin pour autant. Au contraire. En fait, si j'avais une critique importante à formuler relativement à ce projet de loi, c'est qu'on prétend qu'il doit assurer l'égalité alors que ce n'est pas le cas. Selon la façon habituelle de faire des libéraux, il ne fera qu'intégrer un autre groupe dans le cercle, à l'exclusion de tous les autres. Je rejette cette façon de procéder.

Je connais bon nombre de gens qui s'entraident et qui vivent ensemble depuis des années. Ce projet de loi ne prévoit rien dans leur cas. Il n'y a rien au sujet de l'égalité.

Je pense à deux de mes amies, deux soeurs, qui ne se sont jamais mariées. Elles ont vécu avec leur mère durant de nombreuses années puis, au décès de cette dernière, elles ont continué à habiter ensemble dans leur maison. Je donne à la Chambre l'assurance qu'elles n'ont jamais été dans une situation d'union conjugale. Le gouvernement reconnaît-il leur besoin de partager leurs avantages? Non. Il choisit un groupe particulier et dit que tout est affaire d'égalité. Ce n'est pas le cas. Cette mesure a trait au groupe que le gouvernement a choisi et, à l'heure actuelle, ce groupe est celui des gens qui vivent ensemble dans une relation homosexuelle. Voilà l'objet de ce projet de loi.

J'ai aussi entendu à maintes reprises que ce projet de loi n'a rien à voir avec le mariage. C'est intéressant. Je me demandais si c'était le cas. J'ai donc ouvert le projet de loi et j'ai été tout à fait renversé de constater qu'un des premiers mots figurant dans le projet de loi est le mot «mariage». C'était avant l'amendement.

Le titre abrégé est:

    Loi sur la modernisation de certains régimes d'avantages et d'obligations.

L'article 2 modifie la Loi sur les programmes de commercialisation agricole. Le sous-alinéa 2(1)(ii) précise ce qui suit:

      ils sont unis par les liens du mariage, c'est-à-dire que l'un est marié à l'autre ou à une personne qui...

Et ainsi de suite. Le gouvernement dit que le mariage n'est pas en cause. Or, le tout premier est justement «mariage». En réalité, le projet de loi concerne le mariage. Il porte sur une union. Le gouvernement parle de deux personnes qui vivent ensemble dans une union similaire au mariage. Voilà ce qu'il fait.

Je peux donner à la Chambre l'assurance que ni le mariage de mes parents ni mon mariage ne sont menacés par cette mesure. Ce n'est absolument pas le cas. Toutefois, le projet de loi modifie d'une certaine façon le sens du mot mariage en traitant exactement de la même façon que des gens mariés des couples qui entretiennent une union qui n'est pas un mariage. En pareil cas, la définition pratique du mot mariage changera.

Je regrette que mon temps soit écoulé car j'aurais pu continuer.

 

. 1635 + -

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Monsieur le Président, je dois répliquer car le député de Elk Island a dit que ce que nous faisions consistait à faire entrer un autre groupe dans le cercle.

Quand le cercle en question est la société canadienne et quand il est question de gens qui ont vécu trop longtemps dans l'ombre et en marge de la société, le député ne croit-il pas que d'amener plus de gens à vivre au grand jour et dans le cercle de la société canadienne serait quelque chose de positif, non de négatif? Ne croit-il pas que faire entrer des gens dans le cercle de la société canadienne renforcerait la société, renforcerait le Canada et permettrait à ces gens de mener une vie mieux remplie en tant que membres acceptés et à part entière de la société, au lieu d'être considérés comme des parias vivant en marge de la société?

M. Ken Epp: Monsieur le Président, j'ai effectivement beaucoup réfléchi à cette question depuis six ans que je suis député. Je me rappelle avoir souvent discuté de ce sujet. Il me semble que le sujet se présente chaque fois que les libéraux ont un gros problème de relations publiques. Ils s'amènent avec une autre mesure sur les avantages destinés aux conjoints de même sexe et n'arrêtent pas de parler d'égalité, d'élargir le cercle et ainsi de suite.

Dans tous les cas, les libéraux ont ajouté des gens à la liste. Ce n'est pas ce qui fait l'égalité. À mon avis, la liste n'est complète que lorsque tout le monde s'y trouve. Je ne sais pas pourquoi ils insistent pour ajouter simplement des gens à la liste. Pourquoi ne proposent-ils pas une politique qui tienne compte des besoins?

Il en existe de nombreux cas. Il y a par exemple le cas des autochtones au Canada. Parce qu'on les a mal traités et qu'on s'y est mal pris avec eux, on essaie maintenant de satisfaire à leurs demandes en leur accordant des avantages spéciaux en fonction de leur race.

Ne serait-il pas préférable de tenir compte des besoins et de pourvoir aux besoins des gens en fonction des besoins plutôt que de la race, de la couleur ou d'autres caractéristiques?

La liste ne sera complète que lorsque tout le monde s'y trouvera. Je pourrais peut-être ajouter, entre parenthèses, même les obèses.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai bien aimé l'allocution du député d'Elk Island. Comme toujours, il apporte une touche personnelle à ses discours. Il fait des blagues au sujet de son embonpoint, mais tout le monde sait qu'il a le coeur sur la main.

Au moment où nous débattons cette question, je voudrais faire remarquer que, demain, ce sera mon 25e anniversaire de mariage. Je ne prétends pas être expert en la matière. En fait, je pense que, après 25 ans de mariage, une personne est encore novice et se rend compte à quel point elle ne connaît pas grand-chose de cette institution. Cela dit, le mariage est pour moi une institution merveilleuse. J'ai une merveilleuse relation avec ma femme, Deb, et j'y attache une grande valeur. Je travaille très fort à maintenir une bonne relation avec elle, et j'ai hâte aux 25 prochaines années.

Le député d'Elk Island a parlé des groupes qui ont été ajoutés, notamment les homosexuels. Croit-il qu'il existe d'autres sortes de relations, pas forcément liées au mariage, qui sont importantes? Si la relation n'a pas trait au mariage, a-t-elle tout de même de l'importance? Il a mentionné la cohabitation de deux soeurs. Ces autres relations qui ne sont pas consacrées par le mariage sont-elles importantes?

M. Ken Epp: Monsieur le Président, absolument. J'en ai des centaines à l'esprit.

Je pense à mes propres amis du temps où je n'étais pas marié. Je disais en plaisantant qu'un homme ne sait pas ce qu'est le vrai amour tant qu'il n'est pas marié et qu'ensuite il est trop tard. Bien entendu, c'était une plaisanterie.

 

. 1640 + -

Nos deux fils se sont mariés sur le tard. En fait, l'un d'entre eux n'est pas encore marié. Ils ont des amis très proches. Ils vivent ensemble, ils partagent les frais et les dépenses. À mon avis, leur relation ne devrait pas être admissible aux termes de ce projet de loi. Le problème, c'est que, lorsque le gouvernement essaye de dresser une liste de tous les gens qui ont droit à ceci ou à cela, la liste ne finit jamais. C'est une faille que je vois dans cette mesure législative.

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Halifax-Ouest, La Défense nationale; l'honorable député de Toronto-Centre—Rosedale, L'Iran; et l'honorable députée de Québec, Le congé parental.

[Traduction]

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter la ministre de la Justice d'avoir adopté une approche décisive, d'avoir fait preuve de leadership et d'avoir enfin proposé une loi pour mettre fin à une injustice trop longtemps laissée sans réponse.

Je veux parler d'un aspect particulier du projet de loi, celui qui touche aux enfants. Ce projet de loi omnibus modifie plusieurs lois. Il y a dans ce projet de loi un élément cher à beaucoup de mes collègues des deux côtés de la question, à savoir les enfants. Que les gens soient mariés, qu'ils soient conjoints de fait, que ce soient des mères seules ou des pères seuls, les enfants sont très importants pour chacun d'entre nous.

Pour cette raison, je puis dire que je suis exceptionnellement heureux que la ministre ait mis en oeuvre la proposition que j'avais présentée il y a quelques mois, visant à supprimer de la législation canadienne toute référence aux enfants illégitimes dans la loi canadienne. Quand je m'en suis entretenu avec la ministre et ses collaborateurs, ils m'ont accordé un appui enthousiaste. Ce n'était plus qu'une question de temps. Ils m'ont assuré que ce serait fait au moment le plus approprié.

J'ai été sincèrement heureux quand ce projet de loi a été présenté en première lecture et que la ministre et ses collaborateurs m'ont fait savoir que la modification proposée à la loi y figurait et que, désormais, tous les petits Canadiens seraient traités sur le même pied, sans qu'il soit jamais fait mention de la naissance, qu'elle soit issue d'un mariage, d'une relation de fait ou hors des liens du mariage. Les enfants seront dorénavant considérés comme des enfants et traités comme tels, et, pour tout ce que nous déciderons, en tant que société, leur intérêt primera.

Avec ce seul élément déjà, nous franchissons une autre étape en vue de nous assurer que justice soit faite pour tous.

Le projet de loi est une autre étape en vue de veiller à respecter les engagements pris par le Canada à la signature de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et d'en appliquer les dispositions. Cette convention précise clairement que les administrations, à tous les niveaux, doivent passer en revue la législation en vigueur pour s'assurer de l'observation de ses dispositions et de la préservation des intérêts de l'enfant et de la reconnaissance de leur primauté dans tout ce que nous entreprenons.

 

. 1645 + -

Le projet de loi permet de franchir un autre pas pour garantir le respect de la Charte des droits et libertés, qui prescrit le traitement égal de tous les Canadiens, peu importe leur âge, leur sexe, leur lieu d'origine, leur religion ainsi que leurs habiletés ou leurs handicaps.

C'est un grand jour, en particulier pour le député de l'Alberta dont les parents célèbrent leur 65e anniversaire de mariage. La journée est également marquante pour un grand nombre d'enfants de partout au Canada, plus de deux millions d'enfants, dont certains sont assis des deux côtés de la Chambre des communes. Ils sont venus me remercier l'an dernier, quand j'ai présenté un projet de loi pour tenter de faire quelque chose à cet égard, parce qu'ils ne savaient pas que, en vertu des lois canadiennes, ils étaient considérés illégitimes.

Comme les députés le savent, tout député est légitime et a le droit, droit qu'il a acquis, de siéger et de se prononcer à la Chambre. Je dirais que c'est un grand jour pour nous tous.

C'est aussi un jour de réjouissance pour toutes les mamans et tous les papas qui pourront se souvenir d'avoir redressé une injustice dans nos lois. Il aura fallu que le ministre et le gouvernement s'attaquent avec détermination à cette question, qu'ils fassent preuve de leadership et qu'ils corrigent la situation.

Désormais, nous et nos enfants sommes tous égaux devant la loi. Qu'un enfant soit né d'un couple marié ou non n'aura plus d'importance. Lorsque certains de mes collègues prennent la parole à la Chambre des communes et nous font des discours sur l'importance de la famille, qu'en est-il de l'importance de l'enfant? Pourquoi ne prendrions-nous pas la parole à la Chambre pour en faire notre grande priorité? Quelles que soient la situation ou la condition économique de la famille, pourquoi ne prendrions-nous pas la parole à la Chambre pour demander ce qui est dans le meilleur intérêt de l'enfant?

Ce qu'a fait le gouvernement est dans le meilleur intérêt de l'enfant. Il n'est pas juste de dire que ce n'est que lorsque le père et la mère sont mariés que l'on a une situation familiale heureuse. Ce n'est pas toujours le cas. De nombreux enfants vivent dans des familles où il y a de la violence et où ils ne reçoivent pas l'attention dont ils ont besoin et les soins qu'ils méritent. Quant à moi, je préfère voir un enfant sans famille qu'un enfant vivant dans une famille violente.

À cet égard, certains de mes collègues ne voient rien de mal à prendre la parole pour nous faire des discours sur le fait qu'il est important de veiller à l'unité familiale sans prendre en considération l'importance qu'il y a à veiller aux meilleurs intérêts de l'enfant dans cette unité familiale. Peu importe qu'il s'agisse de personnes de même sexe, de sexes opposés, de sexe unique, de double sexe ou de quadruple sexe, le fait est que nous devons faire ce qui est juste.

Avec cette mesure législative, le gouvernement a fait ce qui est juste. Il y avait une décision des tribunaux. Je suis confus de voir que nous avons attendu une décision de la cour pour faire ce que nous aurions dû faire dès le début, c'est-à-dire faire régner la justice à la Chambre des communes et dans la société.

 

. 1650 + -

Monsieur le Président, nous connaissons tous deux un homme qui s'est exprimé exceptionnellement bien et très respectueusement à ce sujet. Il s'agit de Pierre Elliot Trudeau, mon idole. Ses paroles tintent à mes oreilles chaque fois que nous débattons de cette question, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur de la Chambre des communes. Il a dit un jour que le gouvernement n'avait rien à faire dans les chambres à coucher de la nation.

Lorsque mes collègues d'en face se lèvent avec leur attitude homophobe et nous sermonnent en essayant de nous dire ce qui est civilisé ou non, ce qui est moral ou non, leur geste constitue une intrusion immorale dans les chambres à coucher de la nation. Ils n'ont aucunement le droit de dire aux gens comment vivre leur vie.

Nous sommes élus pour veiller à ce que nos lois assurent l'égalité à tous les citoyens, peu importe leurs relations, leurs origines, leur religion, leur couleur, leurs caractéristiques physiques, etc. Nous devons voir à ce que nos lois traitent tout le monde également. C'est exactement ce que fait le projet de loi présenté par la ministre.

Mes collègues craignent que deux personnes du même sexe, deux hommes ou deux femmes, mentent au sujet de leurs relations de type conjugal, parce que la loi est limpide à ce sujet. Un tel mensonge constitue une fraude en droit canadien et ceux qui s'en rendent coupables pourraient être poursuivis en justice.

Il existe déjà une loi qui régit les personnes vivant en union de fait. Il serait insensé de faire d'une question d'équité une affaire d'infraction à l'institution du mariage. Nous serions à côté du sujet et ferions fausse route. Ceux d'en face examinent la question par le mauvais bout de la lorgnette.

Nous devons nous en tenir au sujet à l'étude. L'institution du mariage n'est pas touchée. Si les députés d'en face veulent définir le mariage comme l'union d'un homme et d'une femme célibataires, très bien, mais ils doivent savoir que la société d'aujourd'hui n'est plus celle d'il y a 100 ans ou 200 ans. Nous vivons dans une société moderne qui tolère les différences et tient compte des besoins des gens. Notre gouvernement doit aussi tenir compte des besoins de la société.

Si nous suivons les suggestions faites par les députés d'en face, notre société aura des difficultés. Nous devons aller de l'avant et, en ce sens, refléter les valeurs de la société. Nous devons répondre aux besoins des gens.

Ce projet de loi est une excellente mesure pour deux millions d'enfants au Canada qui, demain, se réveilleront le sourire aux lèvres et sauront que justice a finalement été faite.

 

. 1655 + -

Je suis très honoré d'avoir pu prendre la parole en faveur du projet de loi, et j'espère que le Sénat, lorsqu'il en sera saisi, l'adoptera rapidement.

J'ai reçu d'innombrables lettres de Canadiens de toutes les régions du pays qui abordaient la question de la différenciation des enfants nés de parents mariés ou de mère ou de père célibataire. Certains se disaient outrés. Il y a parmi eux des journalistes de réputation nationale, des politiciens et d'éminents gens d'affaires, mais aussi des parlementaires qui occupent des fonctions importantes. Ce sont de bonnes personnes et nous devons les traiter avec dignité et respect. Nous devons leur rendre justice.

Je suis très honoré d'avoir présenté le projet de loi, mais je suis encore plus honoré d'être associé à une ministre qui a finalement eu le courage d'agir et de remédier à des injustices qui existaient depuis fort longtemps.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, je félicite mon collègue de faire entrer les enfants dans ce débat, car je suis profondément persuadé moi aussi que ce projet de loi aura une incidence énorme sur les enfants. C'est, en fait, une des raisons pour lesquelles je l'appuie.

Enfin, il définit les relations entre des personnes de même sexe comme étant hors mariage et comme il définit enfin le mariage comme étant l'union légitime d'un homme et d'une femme, il crée une situation où, toutes choses étant égales, un enfant a le droit d'avoir des parents hétérosexuels plutôt que des parents de même sexe.

Le problème, à mon sens, était que, avant ce projet de loi, les tribunaux étaient sur le point de définir le mariage comme une relation entre des personnes de même sexe. S'ils l'avaient fait, ils auraient supprimé le droit d'un enfant, toutes choses étant égales entre des parents de même sexe et des parents de sexe opposé, d'avoir plutôt des parents hétérosexuels.

Ce qui arrive avec ce projet de loi, c'est qu'il n'exclut pas la possibilité pour les partenaires de même sexe d'adopter des enfants. Il garantit, toutefois, que les autorités auront le pouvoir de faire le choix entre les parents de même sexe et les parents de sexe opposé.

Je n'ai jamais été prêt à étendre les droits d'un groupe aux dépens des droits d'un autre, surtout des enfants.

Il est vrai que ce projet de loi est imparfait. Je conviens dans une certaine mesure avec l'opposition qu'il devrait vraiment parler de partenaire à charge. La sexualité ne devrait avoir rien à voir avec ce projet de loi. Mais il fallait faire quelque chose pour les enfants, car les tribunaux étaient sur le point de déterminer que le mariage pouvait être l'union de personnes de même sexe. S'ils l'avaient fait, un enfant n'aurait plus eu le droit de choisir d'avoir des parents hétérosexuels plutôt que des parents de même sexe.

Cela ne veut pas dire que les parents de même sexe ne peuvent pas être de bons parents, mais nous ne savons pas encore si les parents hétérosexuels sont absolument égaux aux parents de même sexe. Il nous paraît plus naturel d'avoir des parents de sexe opposé. Je devrais dire que cela nous paraît beaucoup plus normal car, qui que nous soyons, nous sommes tous des créatures de la nature et de Dieu. Je ne crois pas qu'il soit contre nature d'être homosexuel, parce qu'on est ce qu'on est, mais il n'est certes pas naturel, dirons-nous, que des parents soient deux hommes ou deux femmes. C'est là-dessus que porte le projet de loi. Il assure, toutes choses étant égales, que les enfants aient le droit d'être adoptés d'abord et avant tout par des parents hétérosexuels plutôt que par des parents homosexuels.

J'aimerais bien que mon collègue nous dise ce qu'il pense de ces observations.

 

. 1700 + -

M. Mac Harb: Monsieur le Président, permettez-moi de revenir sur le but du projet de loi. Celui-ci vise à mettre en oeuvre une décision rendue par les tribunaux. En résumé, les tribunaux se sont penchés à maintes occasions sur cette question, et le message qu'ils ont toujours envoyé au gouvernement, c'est qu'il doit faire en sorte qu'il n'y ait aucune discrimination.

En gros, l'institution du mariage n'est absolument pas touchée. En fait, la ministre a même pris une précaution supplémentaire en précisant de manière non équivoque dans le projet de loi que le mariage désigne l'union légitime d'un homme et d'une femme.

Je pense que tout député qui tente de faire dévier le débat véritable pour l'amener sur un nouveau terrain ne sert pas les intérêts de la justice. En fin de compte, ce que les tribunaux nous disent, c'est que nous avons fait preuve de discrimination envers les personnes qui vivent dans une relation conjugale avec un partenaire de même sexe. Nous avons une Charte qui dit clairement et sans équivoque que nous ne pouvons exercer de discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Dans cette optique, à titre de parlementaire, je me dois de respecter les lois de mon pays. Nous devons mettre en oeuvre les dispositions que les lois nous ordonnent de mettre en oeuvre.

Je tiens à dire à certains de mes collègues que nous devons sortir de notre milieu, aller à l'extérieur, parler à nos amis, à nos parents et aux électeurs de notre circonscription pour prendre leur pouls. La société a changé. Je n'ai pas le droit d'essayer d'imposer mes convictions à autrui. Si des gens ont une orientation sexuelle différente de la mienne, je n'ai pas le droit de leur dire comment mener leur vie. Cela ne me regarde absolument pas. La loi me dit aussi que je fais de la discrimination en prenant la parole en tant que parlementaire et en imposant mes croyances personnelles à autrui.

Il ne convient pas de détourner le débat. Nous devons exposer la question clairement. Il n'est plus acceptable dans notre société de faire de la discrimination contre des gens en fonction de leur orientation sexuelle, de leurs croyances, de leur style de vie, de leurs antécédents. Nous devons traiter tout le monde sur un pied d'égalité, sans exception.

Je ne comprends pas que nos vis-à-vis prennent la parole à tout bout de champ pour nous faire la leçon sur le plan moral au lieu de nous dire vraiment et franchement quel est le problème. Pourquoi ne peuvent-ils pas prendre acte du fait que la société d'aujourd'hui est différente de celle d'il y a 500 ans? Pourquoi devons-nous continuer de vivre comme au Moyen Âge? Pourquoi n'entrons-nous pas dans le nouveau millénaire en faisant ce qui s'impose?

Parfois, je comprends qu'il n'est peut-être pas populaire pour certains de mes collègues de prendre la parole et d'appuyer ce qu'il est juste d'appuyer. Je n'ai qu'une chose à dire, monsieur le Président: si j'étais à leur place, je voterais en faveur de ce projet de loi parce que c'est ce qu'il faut faire.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à féliciter le député d'Ottawa-Centre. Il a prononcé un très bon discours.

Il a parlé des enfants et j'aimerais qu'il nous en dise plus à ce sujet. J'aimerais qu'il parle de l'attitude de la société envers les enfants, de la nécessité de leur montrer que nous les acceptons sans discrimination. J'aimerais qu'il parle des luttes qu'ils doivent mener dans une société trop souvent homophobe.

 

. 1705 + -

M. Mac Harb: Monsieur le Président, je ne doute pas un instant que notre société doit faire un pas de plus et commencer à se pencher sérieusement sur la question en adoptant, comme le dit toujours un de mes collègues, une approche holistique, c'est-à-dire qu'il nous faut prendre chaque loi fédérale et provinciale, chaque arrêté municipal et nous demander s'ils peuvent aider les enfants et comment ils peuvent servir leurs intérêts.

Malheureusement, cela ne se fait pas à d'autres paliers de gouvernement. C'est ce que fait le gouvernement actuel avec chacune des lois présentées au Parlement, comme par exemple, les lois récentes des ministères de l'Industrie, de la Justice, des Transports ou du Conseil du Trésor. Chacun de ces ministères a présenté au Parlement des projets de loi qui contenaient des éléments visant les enfants.

Le député a parfaitement raison de dire que, dans tout ce que nous faisons, nous devons avoir les intérêts des enfants à coeur avant tout.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député qui vient de parler a demandé pourquoi nous devions toujours retourner à l'âge des ténèbres. Ce que je veux faire, c'est transposer tout cela au XXIe siècle.

Je voudrais bien savoir qui a écrit ceci, mais il semble que ce soit anonyme. Il y a quatre catégories de gens. Il y a ceux qui ne savent pas et qui n'en sont pas conscients. Ils sont stupides. Il y a ceux qui ne savent pas et qui en sont conscients. Ils sont simples et on devrait les instruire. Il y a ceux qui savent mais qui n'en sont pas conscients. Ils sont endormis et on devrait les réveiller. Enfin, il y a ceux qui savent et qui en sont conscients. Ils sont sages et on doit les écouter.

Il y a beaucoup de Canadiens qui appartiennent à la quatrième catégorie. Ils savent et ils en sont conscients. Il est question ici du mariage. Ils savent ce qu'est l'institution du mariage et ils en sont conscients. Ils savent aussi ce qu'est la définition du mariage, soit l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne. Ils nous ont dit cela dans des milliers de lettres, de fax, d'appels téléphoniques et de messages électroniques. C'est pourquoi la ministre a apporté un amendement au projet de loi.

Nous avons besoin de clarté dans ce projet de loi. Pourquoi? La façon dont le gouvernement votera sur ce projet de loi déterminera s'il croit vraiment dans la démocratie ou s'il veut simplement promouvoir ses propres objectifs.

Le gouvernement écoutera-t-il les Canadiens ou fera-t-il la sourde oreille aux préoccupations qui ont été exprimées en poursuivant les objectifs qu'il s'est fixé pour promouvoir une position en particulier?

Il y a trois points que je veux soulever dans le temps qu'il me reste. Le premier est le besoin de clarté dans ce projet de loi. Le deuxième point, c'est la nécessité d'une expression claire de l'intention des parlementaires quant à ce qu'ils souhaitent que les tribunaux interprètent en droit. Le troisième point, c'est la nécessité de reconnaître l'importance du message que nous envoyons à la société. C'est pour nos enfants que nous envoyons ce message.

L'importance de la signification d'un mot me rappelle ce passage d'Alice au Pays des merveilles: «Quand on emploie un mot, il signifie ce qu'on veut bien qu'il signifie, rien de plus rien de moins. C'est simplement une question de savoir qui est le maître, c'est tout.»

L'autre revers de la médaille, c'est que le maître est quiconque détermine la signification d'un mot. En l'occurrence, le maître au Canada c'est la cour, laquelle a décidé ce que le mariage devait signifier.

Par conséquent, en tant que parlementaires, il vaut mieux que nous déterminions la signification, si nous voulons être le maître de la fin poursuivie et de la façon que nous entendons que les tribunaux décident. Il vaut mieux que nous décidions, et pas les tribunaux et les juges.

 

. 1710 + -

En tant que parlementaires, il nous faut exprimer clairement ce que nous entendons par mariage. J'ai déjà mentionné ce que divers Canadiens nous ont dit ce qu'il devrait signifier.

Passons au point suivant qui concerne nos enfants. Je note que cinq ministériels écoutent. Je les félicite d'être ici. Je voudrais formuler le message que le Parlement envoie à la population. Voulons-nous vraiment tenir compte de ce que les gens nous ont dit qu'ils souhaitaient comme définition du mariage, ou bien allons-nous le définir autrement? Nous devrons nous montrer prudents dans cette affaire, car il s'agit d'établir la vérité de ce que nous croyons. Sommes-nous une institution démocratique ou non?

M. John Bryden: Oui, oui.

M. Werner Schmidt: Je suis heureux que le député de l'autre côté ait dit oui. Je compte sur lui pour voter dans le sens de ses électeurs, et non pas dans celui que lui dicte son parti.

Ce que la coutume nous a enseigné est important. Elle nous a enseigné que le mariage sera l'union légitime d'un homme et d'une femme, à l'exclusion de toute autre personne. Telle est notre histoire et notre tradition. Telle est et telle continuera d'être la définition du mariage. Le Parlement l'a dit officiellement en juin lorsqu'il a adopté la motion no 216-55. Il était clair que le Parlement devrait faire tout son possible pour cela. Si la ministre avait vraiment voulu faire en sorte que la définition du mariage dans l'amendement qu'elle a proposé soit exécutoire, elle aurait pu le faire.

Selon David Brown, un expert constitutionnel et un avocat plaidant qui travaille pour l'un des plus grands cabinets de Toronto, si la ministre avait vraiment voulu faire cela, elle aurait pu faire trois choses. Elle aurait pu modifier la Loi sur le mariage de façon à inclure une définition précise du mariage. Elle aurait pu modifier la loi de sorte à inclure un article habilitant stipulant que «aux fins de toutes les lois fédérales, le terme “mariage” s'entend de l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne». Elle aurait pu encore modifier chaque loi touchée par le projet de loi de façon à y inclure une définition précise du mariage. Elle n'a rien fait de tout cela.

En fait, ce qu'elle a fait, c'est de le préciser dans la règle d'interprétation. Quel était l'amendement déjà? «Il demeure entendu que les modifications que la présente loi apporte ne changent pas le sens du terme “mariage”, soit l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne.» Si c'est vraiment ce qu'elle voulait dire, elle aurait dû indiquer cette précision dans la loi, dans un article habilitant. Cela aurait vraiment signifié quelque chose. La façon dont c'est formulé ici n'a aucun impact.

Certains des députés d'en face sont juristes et savent pertinemment que c'est le cas. La ministre de la Justice sait que c'est le cas. Il n'y a rien de nouveau à ce que j'affirme. Elle devrait le savoir. D'autres de ses collègues ministériels devraient le savoir eux aussi.

Le moment est venu de dire la vérité et de reconnaître que les Canadiens tiennent à ce que l'union légitime d'un homme et d'une femme à l'exclusion de toute autre personne soit la définition que l'on donne au mariage dans la loi. Ils veulent que la législation canadienne en fasse état. C'est ce qu'ils nous ont fait comprendre. Si les ministériels veulent sincèrement tenir compte de cet avis, ils voteront en ce sens. Il serait indécent de leur part de voter autrement, juste pour obéir à leur whip. Ce serait, à mon sens, de l'abus de pouvoir de la part du whip que de les forcer tous à voter d'une certaine façon. Ces députés devraient voter en fonction des instructions reçues de leurs électeurs.

Autrement, force nous sera de conclure que les gens d'en face sont anti-famille et anti-mariage. Il faut que l'on sache parfaitement de quoi il retourne. Il est temps que nous décidions de ce que nous sommes. Sommes-nous des partisans de la démocratie? Entendons-nous sincèrement que le mariage est l'union légitime d'un homme et d'une femme? Est-ce là la question, ou bien s'agit-il d'autre chose?

 

. 1715 + -

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 17 h 15, conformément à l'ordre adopté le lundi 10 avril 2000, il est de mon devoir d'interrompre les délibérations et de mettre aux voix sur-le-champ toute question nécessaire pour disposer de l'étape de la troisième lecture du projet de loi dont la Chambre est actuellement saisie.

La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

Le président suppléant (M. McClelland): La mise aux voix porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

Le président suppléant (M. McClelland): Convoquez les députés.

 

. 1750 + -

[Traduction]

(L'amendement, mis aux voix, est rejeté.)

Vote no 1276

POUR

Députés

Abbott Ablonczy Anders Bachand (Richmond – Arthabaska)
Bailey Benoit Bernier (Tobique – Mactaquac) Borotsik
Breitkreuz (Yellowhead) Breitkreuz (Yorkton – Melville) Cadman Calder
Casey Casson Chatters Cummins
Doyle Elley Epp Forseth
Goldring Gouk Grewal Grey (Edmonton North)
Hanger Harris Hart Harvey
Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Hoeppner
Hubbard Jaffer Johnston Karygiannis
Keddy (South Shore) Kenney (Calgary Southeast) Konrad Lowther
Lunn MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough) Mark Mayfield
McNally McTeague Meredith Mills (Red Deer)
Morrison Muise O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly
Obhrai Pankiw Penson Peric
Price Ramsay Ritz Schmidt
Scott (Skeena) Solberg Steckle Stinson
Strahl Thompson (New Brunswick Southwest) Thompson (Wild Rose) Vellacott
Wappel Wayne White (Langley – Abbotsford) Williams  – 72


CONTRE

Députés

Adams Alarie Alcock Anderson
Asselin Augustine Bachand (Saint - Jean) Baker
Bakopanos Barnes Beaumier Bélair
Bélanger Bellehumeur Bellemare Bergeron
Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bertrand Bevilacqua Bigras
Blaikie Blondin - Andrew Bonwick Boudria
Bradshaw Brien Brison Brown
Bryden Bulte Byrne Caccia
Caplan Carroll Catterall Cauchon
Chamberlain Clouthier Coderre Crête
Cullen Dalphond - Guiral Davies de Savoye
Desjarlais Desrochers DeVillers Dhaliwal
Dion Discepola Dromisky Drouin
Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière) Duceppe Duhamel Dumas
Earle Easter Eggleton Finlay
Folco Fontana Fry Gagliano
Gagnon Gallaway Gauthier Girard - Bujold
Godfrey Godin (Acadie – Bathurst) Godin (Châteauguay) Goodale
Graham Grose Gruending Guarnieri
Guay Guimond Harb Harvard
Ianno Jackson Jennings Jordan
Keyes Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) Knutson Kraft Sloan
Laliberte Lalonde Lastewka Lee
Lefebvre Leung Lill Limoges
Lincoln Loubier MacAulay Mahoney
Malhi Maloney Mancini Manley
Marceau Marchand Marleau Martin (LaSalle – Émard)
Martin (Winnipeg Centre) Matthews McCormick McDonough
McGuire McKay (Scarborough East) McLellan (Edmonton West) McWhinney
Ménard Mifflin Milliken Mills (Broadview – Greenwood)
Minna Mitchell Murray Myers
Nault Normand Nystrom O'Brien (Labrador)
Pagtakhan Paradis Parrish Patry
Peterson Pettigrew Phinney Pickard (Chatham – Kent Essex)
Plamondon Pratt Proud Proulx
Redman Reed Richardson Riis
Robillard Rock Saada Sauvageau
Scott (Fredericton) Sgro Shepherd St. Denis
St - Hilaire St - Jacques St - Julien Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland) Stoffer Szabo Telegdi
Thibeault Torsney Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis)
Turp Valeri Vanclief Volpe
Wasylycia - Leis Whelan Wood  – 171


«PAIRÉS»

Députés

Copps Nunziata


 

Le Président: Je déclare l'amendement rejeté.

Le prochain vote porte sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le Président: Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le Président: Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le Président: À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

 

. 1800 + -

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

Vote no 1277

POUR

Députés

Adams Alarie Alcock Anderson
Asselin Augustine Bachand (Richmond – Arthabaska) Bachand (Saint - Jean)
Baker Bakopanos Barnes Beaumier
Bélair Bélanger Bellehumeur Bellemare
Bergeron Bernier (Bonaventure – Gaspé – Îles - de - la - Madeleine – Pabok) Bertrand Bevilacqua
Bigras Blaikie Blondin - Andrew Bonwick
Borotsik Boudria Bradshaw Brien
Brison Brown Bryden Bulte
Byrne Caccia Caplan Carroll
Casey Catterall Cauchon Chamberlain
Clouthier Coderre Crête Cullen
Dalphond - Guiral Davies de Savoye Desjarlais
Desrochers DeVillers Dhaliwal Dion
Discepola Dromisky Drouin Dubé (Lévis - et - Chutes - de - la - Chaudière)
Duceppe Duhamel Dumas Earle
Easter Eggleton Finlay Folco
Fontana Fry Gagliano Gagnon
Gallaway Gauthier Girard - Bujold Godfrey
Godin (Acadie – Bathurst) Godin (Châteauguay) Goodale Graham
Grose Gruending Guarnieri Guay
Guimond Harb Harvard Harvey
Ianno Jackson Jennings Jordan
Keddy (South Shore) Keyes Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh) Knutson
Kraft Sloan Laliberte Lalonde Lastewka
Lee Lefebvre Leung Lill
Limoges Loubier MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough)
Mahoney Malhi Maloney Mancini
Manley Marceau Marchand Marleau
Martin (LaSalle – Émard) Martin (Winnipeg Centre) Matthews McCormick
McDonough McGuire McLellan (Edmonton West) McWhinney
Ménard Mifflin Milliken Mills (Broadview – Greenwood)
Minna Mitchell Muise Murray
Myers Nault Normand Nystrom
O'Brien (Labrador) Pagtakhan Paradis Parrish
Patry Peterson Pettigrew Phinney
Pickard (Chatham – Kent Essex) Plamondon Pratt Price
Proud Proulx Redman Reed
Richardson Riis Robillard Rock
Saada Sauvageau Scott (Fredericton) Sgro
Shepherd St. Denis St - Hilaire St - Jacques
St - Julien Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Stoffer
Szabo Telegdi Thibeault Torsney
Tremblay (Lac - Saint - Jean) Tremblay (Rimouski – Mitis) Turp Valeri
Vanclief Wasylycia - Leis Whelan Wood – 176


CONTRE

Députés

Abbott Ablonczy Anders Bailey
Benoit Bernier (Tobique – Mactaquac) Bonin Breitkreuz (Yellowhead)
Breitkreuz (Yorkton – Melville) Cadman Calder Cannis
Casson Chatters Cummins Doyle
Elley Epp Forseth Goldring
Gouk Grewal Grey (Edmonton North) Hanger
Harris Hart Hill (Macleod) Hill (Prince George – Peace River)
Hilstrom Hoeppner Hubbard Iftody
Jaffer Johnston Karygiannis Kenney (Calgary Southeast)
Konrad Lincoln Longfield Lowther
Lunn Mark Mayfield McNally
McTeague Meredith Mills (Red Deer) Morrison
O'Brien (London – Fanshawe) O'Reilly Obhrai Pankiw
Penson Peric Provenzano Ramsay
Ritz Schmidt Scott (Skeena) Solberg
Steckle Stinson Strahl Thompson (New Brunswick Southwest)
Thompson (Wild Rose) Ur Vellacott Volpe
Wappel Wayne White (Langley – Abbotsford) Williams – 72


«PAIRÉS»

Députés

Copps Nunziata


Le Président: Je déclare la motion adoptée.

(Le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté.)



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

COMITÉS DE LA CHAMBRE

AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET COMMERCE INTERNATIONAL

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre les partis au sujet des déplacements du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, et je pense que vous constaterez qu'il y a consentement unanime pour adopter la motion qui suit. Je propose:  

    Que le groupe A, composé des membres du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, soit autorisé à se rendre à Ankara (Turquie), Istanbul (Turquie), Bakou (Azerbaijan), Tbilisi (Georgie) et Erevan (Arménie), du 6 au 16 mai 2000; que le groupe B, composé des membres du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international, soit autorisé à se rendre à Almaty (Kazakhstan), Tashkent (Uzbekistan), Astana (Kazakhstan) et Bishkek (Kyrgyzstan), du 6 au 16 mai 2000, dans le but d'étudier les intérêts du Canada en matière de politique étrangère dans le caucase du Sud et l'Asie centrale; que le personnel nécessaire accompagne le Comité.

 

. 1805 + -

Le président suppléant (M. McClelland): Le secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter la motion?

Des voix: D'accord.

Le président suppléant (M. McClelland): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

Le président suppléant (M. McClelland): Comme il est 18 h 06, la Chambre passe maintenant à l'étude des initiatives parlementaires inscrites au Feuilleton d'aujourd'hui.



INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Traduction]

LA COMMUNAUTÉ CIRCUMPOLAIRE INTERNATIONALE

 

La Chambre reprend l'étude de la motion, interrompue le 15 novembre 1999.

Le président suppléant (M. McClelland): Quand le débat a été suspendu, la députée de Churchill disposait encore de cinq minutes.

Mme Bev Desjarlais (Churchill, NPD): Monsieur le Président, je remercie une fois de plus mon collègue de Churchill River, en Saskatchewan, d'avoir proposé la motion no 237.

Comme ça fait un bout de temps que la Chambre a été saisie de la motion, je vais la lire de nouveau:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire du 55e parallèle la frontière canadienne aux fins de la participation à la communauté circumpolaire internationale.

Le 55e parallèle est très important pour moi. Je vis à Thompson, au Manitoba, depuis environ 27 ans. Nous nous considérons comme une population du nord du 55e. Nous nous identifions aux gens qui habitent le Nord dans les autres provinces du Canada et dans le reste du monde.

Nous avons eu l'occasion de rencontrer des gens d'autres régions du monde, et nous sommes confrontés aux mêmes problèmes et aux mêmes enjeux. Bien souvent, les mêmes peuples se trouvent dans toutes ces régions nordiques.

Nous trouvons quelque peu intéressant que, au Canada, nous ne reconnaissions pas le 55e parallèle comme la limite d'appartenance au groupe circumpolaire représenté dans le monde entier.

Cette motion nous en donnerait l'occasion. Elle donnerait aux habitants des régions nordiques l'occasion de rencontrer les peuples des autres régions circumpolaires de façon régulière et de discuter de façon plus formelle des solutions à apporter à leurs problèmes et des réponses aux questions qu'ils se posent.

À mon avis, nous sommes à un moment crucial de notre histoire, en raison du réchauffement de la planète, et maintenant plus que jamais il est important que les peuples de ces régions se concertent et définissent les problèmes attribuables au réchauffement de la planète.

Dans la région de Churchill, au Manitoba, il a été prouvé que les ours polaires ne sont pas en mesure de se nourrir comme ils le faisaient par le passé en raison du réchauffement de la planète. Les glaces ne restent pas assez longtemps pour que les ours puissent manger suffisamment de phoques pour garder leur poids optimal afin de pouvoir survivre au cours des longs hivers du nord du Manitoba.

Il est maintenant plus important que jamais de reconnaître que le Canada et toutes les régions de notre pays qui sont situées au nord du 55e parallèle devraient faire partie de cette famille internationale reconnue comme étant la région circumpolaire.

Les différents peuples de ces régions se ressemblent partout au monde. Les autochtones des régions arctiques se préoccupent des effets que risque d'engendrer, pour eux-mêmes et pour la vie sauvage, le transport à grande distance des contaminants vers le Nord. Encore une fois, cela leur donnerait la chance de se réunir et de discuter de ces questions.

La motion no 237 demande que la Chambre, en adoptant cette motion, reconnaisse que les conséquences ne seront pas ressenties uniquement dans le secteur du 60e parallèle. C'est là la région que le Canada reconnaît comme faisant partie du groupe circumpolaire.

C'est le Canada lui-même qui le reconnaît et nous devrions donc, nous parlementaires, avoir la possibilité de changer cela. J'espère que tous mes collègues sont prêts à se pencher sur la question. C'est une question importante pour ma région du nord du Manitoba, mais je suis persuadée que ce serait la même chose dans toutes les autres provinces.

 

. 1810 + -

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi d'intervenir dans le débat sur cette motion, qui m'intéresse au plus haut point.

Comme le député qui vient d'intervenir, j'ai passé une grande partie de ma vie au 55e parallèle et ce, à deux reprises. J'ai d'abord vécu dans le nord de l'Angleterre, dans les îles britanniques, puis à Schefferville qui, comme Churchill, se situe à proximité du 55e parallèle dans le nord du Québec. Ayant vécu à ces deux endroits qui sont à proximité du 55e parallèle, je trouve intéressant de noter qu'ils sont très différents l'un de l'autre.

J'ai également passé une année au 80e parallèle, soit dans le Grand Nord, mais je ne crois pas que ce soit pertinent dans le débat.

Je ferai remarquer que trois des grandes villes dans le monde, Saint-Pétersbourg, Helsinki et Stockholm, sont situées au 60e parallèle. Mais, encore une fois, ces villes ne ressemblent guère à Churchill, au Yukon, au nord du Québec et aux îles britanniques. Ces grandes villes se trouvent en Scandinavie et en Russie.

La députée a eu recours à l'argument du réchauffement de la planète. Quand nous vivions à Schefferville, dans le nord du Québec, nous soutenions que c'était dans le Nord, pas parce qu'il faisait chaud ou que le climat se réchauffait, mais parce qu'il y faisait très froid. À cause du vent, de la neige et des tempêtes, il faisait encore plus froid que la moyenne des conditions atmosphériques ne porte à penser.

Si l'on part du Labrador et du nord du Québec pour traverser le nord de l'Ontario, du Manitoba, de la Saskatchewan, de l'Alberta et de la Colombie-Britannique pour enfin arriver au Yukon, par comparaison à la moyenne, le temps s'améliore. Je dirais qu'il n'est pas possible de vivre plus au nord que Schefferville, pour ce qui est de la rigueur du temps et du manque de confort.

Ce que j'aime de la motion du député, c'est que c'est une façon de sensibiliser les Canadiens au Nord et à son importance. Il est vrai que nous sommes une grande nation septentrionale, mais nous n'en sommes pas assez conscients.

Les autres pays que j'ai mentionnés, même les îles britanniques, accordent beaucoup d'importance au Nord dans certaines régions et pourtant, selon nos normes, au Canada, nous ne les percevons pas comme des régions septentrionales. Ici au Canada, avec notre territoire arctique qui s'étend plus au nord que pour tout autre pays, nous sommes peu sensibilisés à ce fait.

Selon moi, la motion du député est excellente, car elle attire l'attention des gens sur le Moyen Nord. Il nous rend à tous un grand service en nous saisissant de cette motion.

Le gouvernement a déployé beaucoup d'efforts relativement à la communauté circumpolaire. C'est le Canada qui est vraiment à l'origine du Conseil de l'Arctique qui a représenté les huit nations circumpolaires et trois grandes organisations autochtones.

Le Conseil de l'Arctique a vu le jour après la disparition de l'Union soviétique. Le Canada a persuadé les États-Unis, par l'entremise de l'Alaska, de faire partie d'un conseil qui superviserait la communauté circumpolaire.

Le Conseil de l'Arctique joue un rôle très actif. C'est le gouvernement libéral qui a nommé pour la première fois une ambassadrice aux Affaires circumpolaires, Mary Simon. Il est intéressant de noter que Mary Simon était la présidente élue de la Conférence circumpolaire inuit, la grande organisation internationale des Inuit allant du Groenland à la Sibérie. C'est la Conférence circumpolaire inuit qui est à la source de la Stratégie de protection de l'environnement arctique, une stratégie suffisamment explicite entreprise par le Conseil de l'Arctique. Cela touche maintenant toutes les nations circumpolaires et sert de base à la protection de l'environnement dans tout le Nord circumpolaire.

 

. 1815 + -

Le Conseil de l'Arctique et l'ambassadeur aux Affaires circumpolaires sont deux exemples des mesures que le gouvernement a prises pour attirer l'attention sur le Nord, comme le député le fait ici de façon très efficace.

En ce qui concerne les gens vivant au nord du 55e parallèle ou n'importe où ailleurs sur la planète, je tiens à signaler la création de l'Université de l'Arctique par le Conseil de l'Arctique. L'université existe actuellement en principe, mais n'offre pas encore des cours. Si je ne m'abuse, son secrétariat est établi dans le nord de la Finlande à l'heure actuelle, mais il s'agira d'un secrétariat itinérant. L'Université de l'Arctique offrira par l'entremise d'Internet des cours qui seront disponibles partout dans le monde, mais qui seront particulièrement précieux pour les résidents du Moyen Nord du Nord proche et de l'Extrême-Arctique. À mon avis, l'Université de l'Arctique est une réalisation positive du Conseil de l'Arctique qui a été établi par le Canada.

Depuis la création du Conseil de l'Arctique, je constate que le gouvernement a poursuivi des activités qui ont stimulé partout au Canada l'intérêt à l'égard du Nord, comme veut le faire le député, et l'intérêt dans les affaires circumpolaires, auxquelles le député dit également être intéressé.

Je signale un examen des intérêts dans le Nord effectué en 1997 et intitulé «Le Canada et l'univers circumpolaire: relever les défis de la coopération à l'aube du XX1e siècle». Il a été suivi en 1998 d'un document intitulé «Le développement durable dans l'Arctique: leçons apprises et voie de l'avenir» et découlant d'une conférence qui a eu lieu à Whitehorse. Les participants étaient le gouvernement fédéral, les gouvernements territoriaux du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest, comme on les appelait à cette époque. Désormais, ce serait bien sûr le Nunavut. Cette conférence visait à recueillir de l'information concernant le Nord de la part de gens qui y habitent et aussi à stimuler à l'échelle du pays l'intérêt envers le Nord.

La ministre a commandé un document de consultation visant à arrêter la politique étrangère du Canada dans le Nord. Dans ce cadre, l'ambassadrice aux Affaires circumpolaires, Mme Mary Simon, dont je viens de mentionner le nom, a tenu des audiences non seulement à divers endroits dans le Nord, mais aussi dans le sud du Canada, y compris dans ma propre collectivité de Peterborough. Comme la motion du député, cette activité a soulevé de l'intérêt au Canada à l'égard du Nord et du Nord circumpolaire, et aussi à l'égard de ce que font le Canada et les Canadiens dans leur propre région du Nord.

Je suis heureux que le député présente cette motion. Je l'en félicite. Personnellement, je ne suis pas sûr qu'il soit pratique d'adopter le 55e parallèle nord pour les raisons que j'ai mentionnées. Je pense que les autres pays qui ont des capitales et des grandes villes au 60e parallèle pourraient bien s'interroger sur la pertinence d'adopter une latitude située aussi au Sud que les îles Britanniques, qui comprennent l'Irlande, par exemple. Toutefois, je soutiens fortement sa volonté de sensibiliser davantage les habitants du nord du Canada, y compris ma fille qui est née à la hauteur du 55e parallèle et les gens qui vivent encore plus au Nord.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, je veux à mon tour féliciter le député de Rivière Churchill pour avoir donné l'occasion à la Chambre d'avoir cette discussion et sans doute d'aller plus loin.

Les motivations qui m'amènent à intervenir sur cette motion sont nombreuses. Je n'étais pas membre du Comité permanent des affaires étrangères quand ce comité a fait une étude fouillée qui propose d'ajouter un volet à la politique étrangère du Canada, qui est toute la région circumpolaire, mais je peux dire que j'ai déjà été conseillère au programme pour le Parti québécois et, en tant que telle, j'avais proposé d'ajouter un chapitre sur le Nord.

 

. 1820 + -

Nous ne pouvons regarder une carte, connaître l'histoire, nous intéresser aux relations internationales, sans non plus connaître la société—je parle du Québec—et ne pas savoir que le Nord est habité par des autochtones, des nations, des sociétés qui sont tout à fait originales, qui ont développé des manières de vivre et qui, sur le plan de l'environnement par exemple, héritent de problèmes générés au Sud. Ils n'ont pas toujours les moyens de résoudre ces problèmes.

J'ai été consciente également de la nécessité, pour les différentes sociétés vivant au Nord, d'échanger entre elles. Je suis heureuse aussi quand le député souligne la contribution majeure d'un géographe, d'un anthropologue, M. Louis Hamelin, qui est également historien et qui a vraiment contribué à donner au Nord, aux sociétés nordiques et aux Québécois du Nord leurs lettres de noblesse. Je pense qu'il a vraiment poussé à ce qu'on s'intéresse davantage au Nord, mais aussi à l'organisation des gens du Nord.

Toutes ces raisons moussent notre intérêt parce que nous avons à apprendre des autres et qu'il faut s'organiser. Toutefois, le député de Rivière Churchill ne sera pas surpris de m'entendre ramener une question qui, au Québec et sans doute dans les autres provinces si elle s'applique, les intéressent: c'est celle de la traduction. Le terme «frontière canadienne» est traduit par «boundary». Or, j'ai fait faire une recherche et on pourrait le confirmer par une recherche au plan international. Le mot «frontière» correspond davantage en anglais au mot «border», alors que le mot «boundary» coïncide davantage avec le mot «limite» ou «limite territoriale».

Je me permettrai de lire la traduction de «border». On y lit «nom, bord d'un chemin, d'une route». Le deuxième sens est «frontière entre deux pays». Ce n'est pas de cela dont on parle dans le projet de loi du député de Rivière Churchill. Par contre, à «boundary» on lit: «nom, limite, borne», et ensuite on ajoute: «between countries», «frontière». Je vais alors prier instamment cette assemblée de nous permettre de poursuivre le débat sur l'intention du député en acceptant cet amendement.

Je propose:  

    Que la motion soit modifiée en supprimant le mot «frontière» et en le remplaçant par ce qui suit: «limite territoriale».

On comprendra sans doute, et mon collègue le comprend également, qu'on change complètement tout le sens de sa démarche si par celle-ci on change la «frontière» des provinces.

Je pense que ce n'est pas du tout son intention. Son intention est de déterminer une limite à l'intérieur d'une frontière. Si je traduis en anglais, cela serait une «boundary» à l'intérieur de «borders», mais une limite au-delà de laquelle on identifie que les gens se reconnaissent et sont définis comme venant du Nord, comme nordiques et faisant partie du Cercle circumpolaire.

 

. 1825 + -

D'autres collègues se sont demandé s'il fallait parler du 55e parallèle. Je pense que nous pourrions en discuter, mais nous ne pouvons pas en discuter si on garde le mot «frontière» au lieu de «limite». Je n'ai pas parlé à M. Hamelin, mais je pense bien qu'il serait d'accord avec le mot «limite» plutôt que «frontière».

Je tenais à présenter cet amendement parce que, autrement, il ne s'agit plus de la même question. On parle de la redéfinition des frontières et je ne pense pas que le député de Rivière Churchill veuille, par cette proposition, créer des sociétés qui soient complètement détachées de la province à laquelle elles appartiennent. Je crois qu'il veut que, avec l'accord des provinces, celui des ONG, les gens qui habitent dans les régions nordiques puissent se regrouper pour définir des objectifs, faire pression, obtenir des programmes et participer avec des parlementaires aux travaux du Conseil de l'Arctique.

Encore une fois, je félicite le député d'avoir présenté cette question à la Chambre et je le prie instamment de prendre en considération les raisons de mon amendement.

Le président suppléant (M. McClelland): L'amendement est recevable, mais je voudrais savoir si l'amendement s'applique à la version française seulement.

Mme Francine Lalonde: Oui, monsieur le Président. En anglais, le mot utilisé n'est pas «border», c'est «boundary». Mon amendement vise à dire qu'en français, le mot qui devrait être utilisé est celui que je conçois comme étant la meilleure traduction du mot «boundary».

Le président suppléant (M. McClelland): C'est très bien. L'amendement est donc recevable.

[Traduction]

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je pense qu'en intervenant et en m'exprimant en anglais, les interprètes chargés d'interpréter du français à l'anglais doivent pousser un énorme soupir de soulagement après votre intervention.

Le président suppléant (M. McClelland): Je considère cela comme un compliment.

M. Ken Epp: Je ne voulais pas donner à mon observation le moindre caractère désobligeant, monsieur le Président.

Je voudrais prendre quelques minutes pour parler de la motion M-237, que je trouve intéressante. L'amendement a exprimé en françaisce que nous comprenions. Si le député de Rivière Churchill avait proposé de modifier les frontières des provinces, cette proposition aurait suscité beaucoup plus de discussions. Il se serait trouvé en train de donner de nombreuses entrevues à la presse et mêlé à beaucoup d'autres événements excitants s'il avait réellement proposé de baisser les frontières de toutes les provinces afin de donner suite à la motion.

Je parlerai donc de la motion telle qu'elle est libellée au Feuilleton:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait faire du 55e parallèle la frontière canadienne aux fins de la participation à la communauté circumpolaire internationale.

D'après ce que je comprends, l'auteur de la motion ne modifie aucune frontière. Tout ce qu'il veut faire, quand il s'agit de négociations et de participation avec d'autres pays concernés par la région circumpolaire, c'est d'inclure tous les gens qui vivent au nord du 55e parallèle. J'aimerais qu'il me fasse un signe de tête pour m'assurer que je comprends bien la motion. Il fait signe que oui. Merci.

 

. 1830 + -

Je ne sais pas combien de députés sont au courant d'un fait intéressant à propos du Canada. J'habite tout juste à l'extérieur d'Edmonton, en Alberta. Cette ville est située à 53 degrés de latitude. Ce qui veut dire que, si cette motion est adoptée, nous tracerons une ligne à environ 220 kilomètres au nord d'Edmonton et que le territoire au-dessus de cette ligne sera considéré comme faisant partie de la région circumpolaire.

Autrement dit, nous déplaçons la limite vers le sud, à environ 560 kilomètres de l'actuel 60e parallèle. Il est intéressant de savoir qu'Edmonton est plus éloignée de l'équateur que ne l'est tout autre point sur la terre ferme dans l'hémisphère sud, à l'exception de l'Antarctique. En d'autres mots, si nous étions au point le plus au sud de l'Amérique du Sud, de l'Afrique ou de l'Australie, nous serions quand même plus près de l'équateur que si nous étions à Edmonton. Bien des gens habitent au nord du 55e parallèle. Les Canadiens sont robustes. Nous n'avons pas peur d'affronter le vent et la neige.

La motion propose que les gens qui habitent entre le 55e et le 60e parallèle puissent être représentés dans ces discussions et débats internationaux.

Premièrement, il va sans dire que d'habiter dans le Nord constitue un défi. Le climat y est rigoureux. Nous devons avoir beaucoup de respect pour nos ancêtres qui, pendant des siècles, ont vécu dans cette région, ont survécu et ont très bien réussi. Ce sont des gens robustes. Nous devrions les féliciter et les admirer pour cela.

Cela a aussi beaucoup de sens que, lorsqu'il s'agit de savoir comment survivre sous un climat aussi rigoureux, on collabore avec d'autres pays qui connaissent des conditions similaires et que l'on partage avec les gens qui habitent la région circumpolaire d'autres pays ce que nous découvrons ou inventons pour nous aider à vivre confortablement dans cette partie du monde.

En second lieu, cette partie du pays est très riche en ressources. Beaucoup de gens ne le savent pas. On a tendance à croire que la vie commence à Toronto, s'étend jusqu'à Montréal et finit à Ottawa. Une grande partie de notre pays se trouve à l'extérieur de ce triangle des Bermudes.

Au nord des 55e et 60e parallèles, il y a beaucoup de ressources. On parle ici d'énormes ressources minérales et minières telles que du pétrole, du gaz et de toutes sortes de ressources naturelles. Cette partie du monde possède aussi une faune et une flore très riches. On y trouve beaucoup de différentes formes de vie.

Elles constituent un défi pour nous tous qui vivons sous ce climat. Il faut donc collaborer avec d'autres pays qui exploitent leurs ressources sous des climats similaires, partager nos ressources et améliorer ainsi la qualité de vie d'autres personnes que nous.

Je me pose de sérieuses questions sur ce sujet. J'ai toujours eu le don de poser des questions et de laisser ensuite à d'autres le soin de trouver les réponses. Je me pose de sérieuses questions sur notre collaboration avec d'autres pays à cet égard.

Il me semble que le Canada s'empresse toujours de contribuer à établir une organisation ou une autre ou à y adhérer. Nous voyons notre premier ministre se rendre à l'étranger. La politique étrangère de notre pays semble prendre forme quelque part entre le cerveau du premier ministre et ses lèvres. Elle quitte son cerveau à l'état d'ébauche et, une fois arrivée à ses lèvres, elle compte quelques éléments définis. Nous avons pu le constater ces dernier jours.

 

. 1835 + -

Quelle est l'efficacité de ce Conseil de l'Arctique? Est-ce que les rapports que nous aurons avec d'autres pays par l'intermédiaire de cet organisme nous en donneront pour notre argent? Je me demande s'il n'y aurait pas de meilleure façon de faire les choses. Le ministre des Finances peut-il nous dire quelles études ont été faites pour démontrer le bien-fondé de cet investissement, et si nous avons intérêt à participer de cette façon à ces organismes avec d'autres pays?

Très souvent, les organismes de ce genre se mettent à grossir dès que les gouvernements des divers pays, le Canada et les autres, y investissent des ressources. Une organisation n'apporte pas nécessairement plus d'avantages aux contribuables d'un pays, et notamment ceux du Canada, du seul fait qu'elle prend de l'ampleur. Je crois cependant que le Canada s'expose à des risques s'il joint ce genre d'organisme et y dépense de l'argent sans savoir s'il en retirera des avantages concrets et mesurables.

Nous ferions peut-être mieux de placer ce projet sous les auspices de DRHC, et de voir ce qui se produira. Ce ne pourrait être pire que ce qui s'est déjà produit. Je suis facétieux, mais je me devais de le dire, parce que je ne crois pas que le hansard enregistre les sons sarcastiques. Voilà, c'est dit.

L'autre question porte sur les relations entre les provinces et le gouvernement fédéral. On sait qu'il y a actuellement beaucoup de tension dans le secteur de la santé et dans d'autres. Si la limite était ramenée plus au sud, une partie de chaque province devrait une fois encore passer par le gouvernement fédéral, dans le domaine de la politique étrangère, pour traiter avec des pays étrangers.

Je ne crois pas que nous donnerons carte blanche à ces organismes qui sont présents au nord du 55e parallèle et que nous les laisserons faire ce qu'ils veulent. Ils devront agir en harmonie avec la politique étrangère fédérale, qui relève du contrôle du gouvernement fédéral, bien sûr.

La présence d'un organisme parallèle travaillant hors de ce cadre est contestable.

Quoi qu'il en soit, je félicite le député de Rivière Churchill d'avoir manifesté encore une fois des préoccupations authentiques et légitimes au sujet du Nord et de la façon dont les gens de cette région du pays travaillent ensemble.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, le député de Rivière Churchill a proposé une idée intéressante à la Chambre. Il n'est pas vain de se rappeler que la notion de limite territoriale est relativement moderne et qu'elle nous vient, bien sûr, de l'Europe.

Le brillant juriste algérien Mohamed Bedjaoui, qui est devenu ensuite président de la Cour internationale, nous l'a rappelé dans l'affaire du Sahara occidental: cette notion n'avait pas grande signification pour les non-Européens, jusqu'à ce que les Européens débarquent dans des contrées étrangères.

J'ai étudié soigneusement la proposition du député, et je comprends ce qui l'a poussé à la présenter. Il y a un détail qu'il ne faut pas perdre de vue, toutefois. Le Parlement canadien ne peut guère imposer aux autres une déclaration unilatérale concernant la possibilité d'adhérer à une organisation internationale. Ce genre de déclaration pourrait fort bien n'être qu'un ordre à la mode du roi Canut auquel personne n'obéit.

Toutes les organisations internationales reconnues ont leur comité d'examen des titres, elles ont leurs critères d'admissibilité et elles définissent le statut de membre. Il s'agit ici d'un groupe plutôt particulier d'organisations. Je prends note des observations du ministre des Affaires étrangères.

 

. 1840 + -

[Français]

Il a fait ressortir les nombreuses et intéressantes perspectives de partenariat qu'offre l'avenir, en particulier avec la Russie et les États baltes. Il a cité les partenariats qui existent déjà, qu'ils s'appellent le Conseil de l'Arctique, le Conseil de la région Euro-Arctique de la mer de Barents et de l'Union européenne, de même que le Conseil des États de la mer Baltique. Le Conseil de la région Euro-Arctique a créé des comités pour servir de forums de coopération. Je parle d'un rassemblement d'organisations internationales sans statut juridique, sans pouvoir décisionnel.

[Traduction]

Ce sont des organismes comme le Commonwealth et, dans une certaine mesure, la Francophonie, qui sont créées, mais qui n'ont pas de pouvoirs décisionnaires. Par conséquent, les règles que nous appliquons aux Nations Unies, ou qu'elle applique à elle-même et aux organismes qui relèvent d'elle, ne s'appliquent pas.

L'aspect valable de cette suggestion est de prendre note de la formule que Paul Martin senior, qui était ministre des Affaires étrangères en 1965, et le premier ministre du Québec de l'époque avaient élaborée pour la collaboration fédérale-provinciale. Il s'agissait pour le gouvernement fédéral d'inclure, sans sacrifier volontairement son autonomie, des représentants des provinces dans les délégations canadiennes aux conférences internationales, y compris celles des organismes relevant officiellement des Nations Unies.

Si la motion du député de Rivière Churchill pouvait être interprétée comme une invitation lancée au gouvernement du Canada pour qu'il reconnaisse l'artificialité de la distinction entre les 60e et 55e parallèles et les nombreux éléments de la collectivité canadienne, je pourrais l'appuyer. Les Métis sont un exemple parfait, mais il y a aussi des collectivités indiennes dans des régions situées beaucoup plus au sud au Canada. Si c'était une invitation lancée au gouvernement du Canada pour qu'il envisage de nommer ces gens pour faire partie des délégations canadiennes, je crois que c'est une motion que je pourrais appuyer et que je recommanderais au gouvernement d'appuyer également. Je crois que le gouvernement pourrait l'accepter.

C'est certainement dans l'esprit de ces grandes organisations nordiques que nous reconnaissons un lien ethnique entre les peuples de la Sibérie russe, du nord de la Finlande, du nord de la Suède, du nord de la Norvège et de l'Islande et nos Indiens, nos autochtones, et les Métis également. Pourquoi ne pas profiter de cela? Un des instruments les plus puissants de la politique étrangère canadienne est de pouvoir profiter de la pluralité de nos peuples et de nos cultures.

Dans ce contexte, je dirais que le gouvernement peut et devrait prendre note de cette suggestion. La députée de Mercier est une personne sensée.

[Français]

La députée de Mercier a proposé un amendement au sujet de la distinction à faire entre frontières et limites territoriales, «borders and frontiers». Dans la langue juridique anglaise, il n'y a pas, à mon avis, de signification juridique dans cette distinction, mais dans la langue française, j'accepte certainement sa suggestion. Il me semble que la meilleure traduction en anglais serait de substituer une conception comme «the southern limit», limite territoriale du sud, ou quelque chose comme ça.

Dans cet esprit, je peux certainement accepter la suggestion et il me semble que c'est très valable. Cela indique aussi la pluralité de notre pensée sur cette question et c'est dans cet esprit que j'accepte très volontiers la proposition du député de Rivière Churchill.

[Traduction]

Il nous a rappelé que nous vivons dans un pays pluraliste. Il nous a rappelé que le Canada ne se limite pas seulement aux peuples de descendance européenne et que la limite territoriale fondée sur le 55e parallèle a une artificialité qui est certainement eurocentrique dans son origine. Par conséquent, à l'avenir, les délégations canadiennes profiteront de ce que peuvent nous apporter nos peuples qui ont des liens de consanguinité avec les peuples du grand nord, au delà du 60e parallèle. Ces gens viendront enrichir nos délégations.

 

. 1845 + -

[Français]

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, mon collègue de Richmond—Arthabaska a déjà pris la parole au sujet de la motion M-237 présentée par le député de Rivière Churchill. Toutefois, j'aimerais ajouter quelques informations supplémentaires.

[Traduction]

On peut dire beaucoup de choses au sujet du projet de loi, mais la plus importante est de savoir où commence le Nord. Est-il important que la limite soit située au 55e ou au 60e parallèle? Quelles sont les conséquences de cette modification? Quel est son objectif? Qu'essaie-on d'accomplir?

Il est vrai que nous ne pensons pas assez à la région du Nord. Je crois que c'est honteux, car le Nord regorge de ressources naturelles, et nous savons tous que l'économie canadienne repose principalement sur l'exportation de ressources naturelles. En fait, nous devrions également accorder plus d'attention aux habitants du Nord.

Je crois que le député de Rivière Churchill a voulu attirer notre attention en présentant cette motion, et je l'en félicite.

Nous devrions nous poser la question suivante: est-il si important de modifier la limite de la zone circumpolaire, ou n'y a-t-il pas un autre moyen d'accroître la force des habitants du Nord? Bien sûr, en établissant la limite au 55e parallèle, nous augmenterions le poids politique qu'ont les habitants du Nord au sein du Canada, car ils seraient plus nombreux.

Pour examiner cette motion, nous devons étudier les conséquences de cette modification pour le Canada. Par exemple, qu'adviendra-t-il des provinces? Comment vont-elles réagir à cela? Qu'en est-il de certains ministères fédéraux comme le ministère des Ressources naturelles, le ministère des Affaires indiennes et d'autres?

[Français]

Ainsi, certaines provinces pourraient avoir à subir de nouvelles obligations en vertu de cette modification. En effet, si une partie du territoire de certaines provinces devient une partie du Nord canadien, inévitablement, cela aura un impact sur les provinces. Or, sont-elles en mesure de répondre à cet impact?

Il serait important que les provinces soient consultées à ce sujet, car c'est de leurs frontières dont il sera question si on modifie le parallèle.

[Traduction]

Monsieur le Président, même si la motion de notre collègue de Rivière Churchill vise un objectif louable, le Parti progressiste conservateur ne pourrait pas l'appuyer, à cause de son libellé. Il y manque de nombreux éléments; si elle était adoptée dans sa forme actuelle, cette motion pourrait faire plus de tort que de bien.

Le Nord canadien est l'un de nos secrets les mieux gardés. Il est vrai qu'il faudrait prendre des mesures pour exploiter son potentiel considérable et que nous devrions collaborer avec les habitants de cette région. Cependant, le Parti progressiste conservateur ne croit pas qu'on y parviendra en changeant la position de la limite territoriale. Cela pourrait peut-être accroître le poids politique des gens du Nord au sein du Canada, mais ce n'est pas la véritable façon d'assurer le développement du Nord.

[Français]

On parle souvent de haute technologie lorsqu'on se réfère à l'économie mondiale. Nous n'avons qu'à regarder les investissements qui se font ici, dans la région, le Silicon Valley du nord, et dans d'autres régions du Canada au plan pharmaceutique, dans les télécommunications et la haute technologie.

En effet, ces domaines sont en pleine effervescence au Canada et sont une véritable force économique. Toutefois, le Nord va prendre de plus en plus d'importance.

[Traduction]

Nous ne devons pas oublier que, même si l'avenir est dans la haute technologie, l'économie canadienne repose principalement sur les ressources naturelles dont la grande majorité se trouvent dans le Nord. Au lieu de changer la limite, ne devrions-nous pas nous occuper du développement du Nord canadien? Selon le parti progressiste conservateur, si on orientait soigneusement les efforts, on pourrait renforcer l'économie canadienne en exploitant les ressources naturelles dans le nord du pays, et la haute technologie dans le sud.

 

. 1850 + -

Notre parti est favorable à un meilleur développement et à une économie plus solide dans toutes les régions du Canada, y compris le Nord.

M. Dennis Gruending (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole pour appuyer la motion présentée par mon ami et collègue, le député de Rivière Churchill.

D'entrée de jeu, je veux simplement rappeler que, comme le député l'a déjà expliqué, il n'est pas question ici de changer les frontières et les limites des provinces ni de les redéfinir de manière à occasionner toute une réorganisation gouvernementale, à tout le moins, par rapport aux frontières et aux territoires. Ce que mon collègue a dit, c'est que la communauté circumpolaire internationale utilise le 55e parallèle dans sa définition.

Si l'on se place au-dessus d'un globe terrestre, vis-à-vis de l'Arctique, et qu'on regarde vers le bas, on constate que des pays entiers comme la Finlande et la Suède et une vaste étendue de la Russie sont situées au nord de ce parallèle, alors qu'au Canada, c'est actuellement la frontière des Territoires du Nord-Ouest qui sert de frontière. Lorsque les gens de cette communauté se réunissent pour discuter de problèmes et de préoccupations qu'ils ont en commun, quel que soit le pays d'où ils viennent, les Canadiens qui vivent dans un vaste territoire que nous considérons comme faisant partie du Nord sont exclus de ces discussions.

Ce que mon collègue dit, c'est qu'il ne s'agit pas de modifier les frontières politiques. Ce qu'il propose, je pense, c'est de modifier la perception que nous avons des frontières. Je vais donner quelques exemples fondés sur mon expérience de Canadien ayant grandi dans le sud de la Saskatchewan, alors que mon collègue a grandi, lui, dans le nord. L'histoire et la géographie de nos régions sont très différentes, tout comme de nombreux autres aspects.

Je vous décris le système hydrographique de la Saskatchewan. Le bras sud et le bras nord de la rivière Saskatchewan prennent leur source dans les Rocheuses et traversent toute la Saskatchewan pour aller se jeter dans la baie d'Hudson, après avoir traversé le Manitoba. Ces deux bras drainent une région distincte du bassin hydrographique du nord. En fait, le 55e parallèle se situe entre le système hydrographique de la rivière Saskatchewan et le bassin du fleuve Churchill, au nord, sans parler du réseau hydrographique Peace-Athabasca, qui part du lac Athabasca jusqu'à la côte, tandis que le fleuve Mackenzie coule droit vers le nord.

Historiquement, par exemple à l'époque du commerce des fourrures, la distinction entre le bassin hydrographique de la rivière Saskatchewan et celui qui est situé plus au nord était perçue très clairement.

J'ai beaucoup lu sur le commerce des fourrures. Un grand écrivain et cartographe, David Thompson, a passé de longues années dans la région de la rivière Saskatchewan puis, quelques années, plus au nord. Il décrit très bien les grandes différences entre les Cris et les Chipewyans, sans parler des Dénés et des Inuit.

Il y a des différences entre ces peuples, mais elles ne sont rien comparées aux différences historiques entre eux et les Européens venus coloniser le sud de notre province.

En raison du temps que j'ai passé dans ma province natale de la Saskatchewan à titre de résident et de journaliste, je sais que notre gouvernement provincial a fait quelques tentatives et amorcé certaines reconnaissances, avec un peu de retard je l'avoue, mais au début des années 1970, on reconnaissait que ce que l'on considère comme le nord de la Saskatchewan ne tirait pas de profit de la façon dont le sud de la Saskatchewan était dirigé et là encore, la limite était assez près du 55e parallèle, tel que l'a décrit mon collègue de Rivière Churchill.

Le gouvernement de l'époque, celui du premier ministre Allan Blakeney, a fait remarquer que les choses n'allaient pas bien dans le Nord et que l'on devait adopter de nouvelles mesures. C'est alors qu'on a mis sur pied le Department of Northern Saskatchewan et tenté d'adopter de nouvelles techniques de gestion.

 

. 1855 + -

Ces tentatives n'ont pas remporté un grand succès, mais elles ont en fait constitué une forme de reconnaissance des énormes différences entre ce que nous considérons comme le Nord et le Sud.

On a pensé entre autres qu'il devrait y avoir un certain partage des revenus en ce qui a trait aux ressources du Nord parce que, comme nous le savons, nous avons malheureusement souvent eu tendance à extraire des ressources des régions nordiques habitées par les peuples autochtones et à exporter ces avantages et ces richesses dans le Sud. C'est là une situation courante, non seulement dans la province dans laquelle j'ai grandi, mais dans toutes les provinces.

Ce que dit mon collègue, le député de Rivière Churchill, c'est que nous devons reconnaître que la situation que je décris dans l'histoire de la Saskatchewan est une situation qui a, pourrait-on dire, existé dans toutes les provinces et que le Canada a traité de façon similaire les habitants des territoires nordiques. Nous exploitons les ressources, mais les habitants de ces régions sont souvent défavorisés par nos façons d'exploiter la ressource qui comporte un élément environnemental et aussi par la perte de richesse que subit la région dans laquelle ils vivent.

Mon collègue et ami, le député de Rivière Churchill, nous demande de sortir du cadre déjà établi. Il dit que la communauté internationale a établi le 55e parallèle comme la ligne de démarcation reconnue pour participer aux activités de la communauté circumpolaire. Il ne propose pas de modifier en quoi que ce soit les frontières politiques de notre pays.

Le Conseil de l'Arctique se compose de huit États membres. Ce sont le Canada, le Danemark, le Groenland, la Finlande, l'Islande, la Norvège, la Russie et les États-Unis à cause de l'État de l'Alaska. Leurs représentants se réunissent et ont beaucoup de choses en commun à discuter. Voilà pourquoi cette motion est tellement importante. Il s'agit d'élargir la participation ou tout au moins la possibilité de représentation des gens qui habitent un peu plus au sud.

Mon ami et collègue, le député de Rivière Churchill, a signalé que les habitants de ces régions nordiques sont défavorisés sur le plan environnemental, si je peux m'exprimer ainsi, à cause de la pollution qu'ils n'ont pas créée mais dont ils ont à subir les effets. Je me rappelle avoir lu il n'y a pas longtemps dans un journal un article publié en première page au sujet d'une autochtone de Churchill dont le fils souffrait de ce qu'on pourrait appeler une insolation. Cela a quelque chose à voir avec l'amincissement de la couche d'ozone, particulièrement dans le nord du Canada. Nous avons entendu dire récemment, et cela suscite beaucoup d'inquiétude, que le trou dans la couche d'ozone correspond à un appauvrissement de 60 p. 100 de cette dernière. Le jeune enfant de cette femme avait des rougeurs au cou et, dans sa langue, il n'y avait pas de mots pour décrire un coup de soleil. C'est le genre de choses auxquelles les gens du Nord doivent faire face.

Mon collègue de Rivière Churchill ne dit pas que nous devrions séparer cette région du pays de l'autre en établissant des limites politiques identifiables. Il dit que ces gens ont également une préoccupation. Ils vont également subir le sort qui les attend à leur grand regret si les choses ne changent pas sur le plan environnemental. Il affirme que les gens dans des endroits comme Churchill ont beaucoup plus en commun avec les gens habitant beaucoup plus au Nord qu'avec les gens de Winnipeg, Saskatoon ou Thunder Bay. Ils ont la même façon de voir le monde et des problèmes communs que nous ne partageons pas vraiment.

Le député demande que, à tout le moins, lors de ces conférences internationales qui voient le monde d'un certain point de vue qui est très valide, qui correspond à la vie que les intéressés ont vécu depuis des milliers et des milliers d'années, les habitants du nord du Canada, la région située entre le 55e et le 60e parallèles, puissent participer et élargir cette vue du monde et l'expliquer aux autres citoyens, afin que nous puissions commencer à voir cette région du monde un peu différemment.

Il parle certes des gouvernements. Il dit que le gouvernement canadien a adopté une mentalité tout à fait coloniale à l'égard de ces régions. Il croit que nous devons changer cela. Cette motion n'est pas un projet de loi. Le monde ne changera pas du jour au lendemain si nous l'adoptons comme j'espère certes que nous allons le faire. Je recommande à tous les députés de l'appuyer.

Le député demande simplement qu'on laisse ces gens participer à cette organisation et à d'autres organisations qui ont des objectifs semblables. Il croit qu'on pourra en tirer des avantages si cela se produit. Je suis certes d'accord avec lui.

 

. 1900 + -

J'exhorte les autres députés à ne pas affirmer que des choses terribles vont découler de cela, car rien de terrible ne se produira si ce n'est peut-être un changement de mentalité qui n'a rien de terrible après tout.

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole sur cette motion.

Je tiens à remercier le député de Rivière Churchill de donner au gouvernement l'occasion de parler de la reconnaissance et de l'appui qu'il accorde aux Canadiens des collectivités nordiques relativement à leurs nombreux défis et possibilités.

Pour répondre correctement au député de Rivière Churchill, j'estime devoir d'abord parler de la vision et du programme du gouvernement concernant le Nord.

[Français]

D'une façon très générale, nos objectifs à long terme pour le Nord correspondent aux buts que nous nous sommes fixés pour les autres régions du Canada et suivent les grands thèmes énoncés dans le rapport intitulé «Rassembler nos forces: Le plan d'action du Canada pour les questions autochtones», à savoir: premièrement, il faut que des gouvernements démocratiques, efficaces et responsables donnent à leurs citoyens voix au chapitre dans les décisions qui les concernent le plus directement.

Deuxièmement, il faut que les individus et les collectivités dont les droits sont protégés par la Charte des droits et libertés, par exemple, reçoivent des services et des programmes comparables à ceux dont jouissent les Canadiens des autres régions, mais que leur diversité nordique soit protégée et encouragée.

Troisièmement, il faut que des économies locales prospères se développent de manière dynamique et durable en bénéficiant des connaissances et des recherches nécessaires à leur succès à long terme.

Quatrièmement, il faut que les relations financières fournissent au gouvernement les ressources et la stabilité nécessaires pour leur permettre d'agir efficacement dans le présent et préparer l'avenir.

Dans sa vision, notre gouvernement inclut la protection des droits des autochtones et l'adaptation aux conditions nordiques d'économies fondées sur le marché dans un cadre réglementaire classique. Il s'accomplit de réels progrès. Les groupements autochtones et non autochtones communiquent mieux, le règlement des revendications et la conclusion d'accords sur l'autonomie gouvernementale ouvrent la voie à des progrès plus grands encore, et à une plus grande coopération dans le développement des institutions.

Sur le plan international, notre vieux souci d'affirmer notre souveraineté sur le Nord a fait place à une préoccupation plus productive et plus positive: l'encouragement de la coopération circumpolaire.

Des mesures concrètes ont déjà été prises en ce sens, à savoir la participation d'autochtones aux délibérations de tribunes internationales, comme le Conseil de l'Arctique, et aux travaux de la Commission canadienne des affaires polaires.

Depuis 1991, la Commission canadienne des affaires polaires joue un rôle essentiel en recensant, en favorisant et en diffusant des connaissances relatives aux régions polaires, en sensibilisant l'opinion publique à l'importance de la science polaire pour le Canada, en faisant mieux connaître le Canada comme un pays polaire sur la scène internationale, et en recommandant au gouvernement des orientations politiques dans le domaine de la science polaire.

La Commission a fait la preuve de son engagement en faveur du développement et de la diffusion des connaissances sur les régions polaires, d'abord en participant aux travaux du Comité interministériel pour la stratégie relative aux sciences et à la technologie nordiques, et ensuite, en favorisant le développement des connaissances traditionnelles.

En outre, la Commission exécute un travail inestimable pour mieux faire connaître le Canada comme pays circumpolaire dans le cadre de sa participation aux travaux du Comité international des sciences dans l'Arctique et du Comité scientifique pour les recherches antarctiques. Tout cela montre que nous avons une excellente vision et un excellent programme pour le Nord, et que cela apporte des retombées positives aux gens du Nord et aux gens de tout le pays.

Dans la motion qu'il présente aujourd'hui, mon collègue affirme que le gouvernement définit le Nord de manière rigide, comme étant le territoire situé au nord du 60e parallèle. Permettez-moi de mettre les choses au point tout de suite. Nous n'avons pas en fait de définition unique et générale pour le Nord. Voici quelques exemples pour mieux mettre en lumière la position du gouvernement à ce sujet.

 

. 1905 + -

Un des programmes que le gouvernement dispense dans le Nord est la livraison de vivres par la poste. Ce programme est destiné à mettre des aliments nourrissants mais périssables à la portée des collectivités isolées.

En conclusion, pour 1999-2000, ce programme est doté d'un budget de 15,6 millions de dollars. Il consiste à payer Postes Canada pour transporter, par la voie des airs, des aliments nourrissants et périssables jusqu'aux collectivités isolées. Cette contribution financière fait baisser le prix des comestibles.

Le président suppléant (M. McClelland): Je m'excuse d'interrompre l'honorable secrétaire parlementaire. Il lui restera cinq minutes lorsque le projet de loi sera de nouveau à l'étude à la Chambre.

[Traduction]

L'heure réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Monsieur le Président, je m'inquiète beaucoup du traitement réservé par le gouvernement aux anciens militaires souffrant du syndrome de la guerre du Golfe et d'autres syndromes de stress post-traumatique.

En de nombreuses occasions, j'ai évoqué les dangers que pose l'uranium appauvri et les répercussions qu'il peut avoir sur les militaires canadiens, les civils et les citoyens d'autres pays. Mes avertissements concernant les dangers de l'uranium appauvri semblent en grande partie avoir été ignorés.

On a trouvé de l'uranium appauvri dans le corps de Terry Riordan, ancien combattant de la Nouvelle-Écosse. D'autres demandent à subir des tests permettant de déceler la présence d'uranium appauvri et à être traités, le cas échéant.

J'ai écrit aux ministres de la Défense nationale et des Anciens combattants en mars. Voici un extrait de ma lettre:

    Je crains que nos soldats aient récemment été exposés à de l'uranium appauvri au Kosovo. M. Eggleton, comme vous le savez, je vous ai posé de nombreuses questions à ce sujet à la Chambre des communes depuis le mois d'avril de l'année dernière.

    Au nom de tout le caucus fédéral du NPD, je vous prie d'adopter les mesures suivantes: faire en sorte que les tests portent également sur les tissus et sur les autres prélèvements nécessaires pour déceler la présence d'uranium appauvri et de ses effets; veiller à ce que les tests soient effectués par un laboratoire indépendant et respecté; permettre aux membres de la famille immédiate qui le désirent de subir les mêmes tests; veiller à ce que le Canada exerce un rôle de chef de file en vue d'aboutir à un traité international interdisant l'emploi d'uranium appauvri dans la fabrication d'armes.

    De plus, afin de protéger la santé des anciens combattants et des membres de leur famille, je prie instamment le gouvernement d'adopter la mesure qui s'impose et d'amorcer une enquête publique complète sur les effets médicaux de l'uranium appauvri sur nos soldats, sur les membres de leur famille et sur tout civil canadien qui peut avoir été exposé à cette substance.

À la différence des États-Unis, le Canada n'a pas de loi l'autorisant à indemniser les anciens combattants de la guerre du Golfe atteints d'une maladie chronique non diagnostiquée. Depuis le début de 1995, en vertu de la Gulf War Veterans Act, la Veterans Administration des États-Unis verse des indemnités aux anciens combattants de la guerre du Golfe qui présentent une incapacité chronique attribuable à des maladies non diagnostiquées. L'application de cet avantage a été élargie en vertu d'un règlement adopté en avril 1997 qui a essentiellement eu pour effet de rendre non pertinente la date de manifestation initiale de symptômes latents dans l'attribution des prestations, et cela jusqu'à la fin de 2001. En vertu de ce règlement, une invalidité est considérée comme chronique si elle existe depuis au moins six mois.

Il est consternant que le Canada, contrairement aux États-Unis, ait décidé de traiter si mal ses anciens combattants et d'autres personnes qui sont atteintes de ces troubles.

Je suis cependant très heureux que le ministre ait rencontré récemment, à Halifax, des anciens combattants qui souffrent de ces affections. J'ai assisté à une partie de ces rencontres, et je crois que le ministre voudrait traiter avec respect nos soldats qui souffrent de maladies liées à leur travail. Mais, comme nous le savons tous, il ne suffit pas d'avoir de bonnes intentions. Ces personnes ont désespérément besoin de mesures concrètes et positives.

Sur les quelque 750 000 soldats qui ont été déployés dans le golfe Persique, dont 4 500 Canadiens, environ le dixième signalent divers symptômes, le plus souvent de la fatigue, des maux de tête, des douleurs musculaires et articulaires, de la diarrhée, des éruptions cutanées, un essoufflement et des douleurs à la poitrine.

Voici ce que le Dr Rosalie Bertel, la célèbre épidémiologiste, a dit au sujet de l'uranium appauvri:

    L'uranium appauvri est très toxique pour les humains, à la fois sur le plan chimique, en tant que métal lourd, et sur le plan radiologique, comme émetteur alpha, et il devient très dangereux lorsqu'il est ingéré.

    Sous la force d'un impact, l'uranium appauvri s'enflamme. Il produit un aérosol céramisé toxique et radioactif qui est beaucoup plus léger que la poussière d'uranium. Il peut se déplacer dans l'air jusqu'à des dizaines de kilomètres de son point d'échappement ou rester suspendu dans l'air en attendant d'être transformé en poussière par le mouvement de l'homme ou de l'animal.

Cette infime quantité d'uranium peut être ingérée par n'importe qui, depuis les bébés jusqu'aux personnes âgées ou malades en passant pas les femmes enceintes. Cette céramique radioactive et toxique peut demeurer dans les poumons pendant des années, irradiant le tissu environnant de puissantes particules alpha. Elle peut toucher les poumons, le système gastro-intestinal, le foie, les reins, les os, d'autres tissus et le système rénal.

 

. 1910 + -

Lorsque le gouvernement libéral répondra à mes observations, je lui demanderais de répondre directement aux arguments que j'ai soulevés. Va-t-il élargir la portée des nouveaux tests, comme je l'ai souligné, et veiller à ce qu'ils soient effectués par des laboratoires indépendants et respectés? Les familles des personnes qui souffrent ou qui ont souffert d'un empoisonnement à l'uranium appauvri et d'autres troubles de stress post-traumatique attendent une réponse complète et positive à ces questions.

M. Robert Bertrand (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis certain que le député sera très heureux d'entendre ce que j'ai à dire ce soir.

Comme le ministre l'a déclaré à maintes reprises, celui-ci se préoccupe de la santé et du bien-être des membres des forces canadiennes. Nous devons nous occuper de toute personne qui était en santé au moment d'être déployée mais qui était malade lorsqu'elle est rentrée au pays. J'exhorte quiconque pense qu'il ou qu'elle pourrait être malade à consulter un médecin. Ceux qui voudraient subir des tests de dépistage d'uranium appauvri devraient communiquer avec le Centre pour le soutien des militaires blessés ou retraités et de leurs familles, au numéro 1-800-883-6094, ou avec le centre médical des forces canadiennes le plus près.

Après avoir étudié les propositions d'un certain nombre de laboratoires, le ministère a choisi deux compagnies indépendantes distinctes pour effectuer les tests. Les résultats de ces tests seront envoyés à un consultant civil aux fins d'une interprétation indépendante. Des dispositions sont en place pour commencer les tests sur des membres actifs et retraités des forces canadiennes qui ont demandé à subir ces tests.

Nous offrons des tests de dépistage d'uranium appauvri afin de donner suite à toute préoccupation du personnel des forces armées. Le gros de la documentation scientifique indique que l'uranium appauvri ne présente pas de danger pour le personnel des forces canadiennes. Normalement, les forces armées canadiennes font subir de tels tests à leurs membres s'il est établi que ceux-ci ont été exposés à de l'uranium appauvri. Les forces canadiennes ont testé plusieurs employés qui avaient pu être exposés à de l'uranium appauvri et les tests se sont révélés négatifs. La radiation totale de l'uranium était inférieure aux limites détectables.

[Français]

Je tiens à préciser à la Chambre que le Canada n'emploie pas d'uranium appauvri en ce moment et qu'il n'existe aucun plan visant l'acquisition de munitions en uranium appauvri au sein des Forces canadiennes.

L'arsenal d'un certain nombre de pays compte actuellement des munitions en uranium appauvri. Pour qu'une interdiction soit viable et revête un sens, il faudrait convaincre les pays en question de se passer de leurs munitions en uranium appauvri, ce qui semble improbable dans un avenir prochain.

[Traduction]

L'IRAN

M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je donne suite à une question que j'ai posée récemment au ministre des Affaires étrangères sur les conséquences des élections en Iran.

Il y a environ un an, j'ai eu l'occasion formidable de visiter l'Iran et d'y rencontrer beaucoup de jeunes ainsi que les autorités. J'ai été extrêmement impressionné par la jeunesse et le dynamisme de la population de ce pays. Plus de 50 p. 100 des Iraniens ont moins de 25 ans. Ces jeunes veulent que les choses changent. Le résultat des élections en est la preuve.

Le président, M. Khatami, est un homme très positif. Il a écrit un livre intitulé «Dialogue des civilisations». Il recherche le dialogue avec les autres pays et a une idée très positive de ce que peut faire l'Iran et du rôle que son pays peut jouer dans le monde d'aujourd'hui. Nous observons un véritable changement d'attitude.

Ce matin, le Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international a reçu un groupe de gens d'affaires canadiens très sérieux qui sont extrêmement actifs dans cette région. Ils nous ont dit qu'ils voyaient des signes réels de changement en Iran. L'Iran coopère avec les autorités occidentales pour endiguer le trafic de drogues en provenance de l'Afghanistan. Les autorités iraniennes font beaucoup d'efforts pour collaborer avec les autre pays.

Par ailleurs, il y a aussi des indices très troublants dans ce pays. L'armée, qui a encore beaucoup de pouvoir, est entre les mains du chef suprême, l'ayatollah. Le système de sécurité n'est pas dirigé par des représentants élus démocratiquement. Les tribunaux sont dirigés par des religieux qui résistent au changement; la police se livre à des activités arbitraires qui menacent la vie des citoyens ordinaires. Il y a des abus de pouvoir. Nous voyons des choses comme la façon dont la législation fiscale est appliquée. Pendant que j'étais là-bas, un groupe d'hommes d'affaires m'a dit que la législation fiscale est tellement arbitraire qu'il est très difficile d'attirer des investisseurs étrangers parce qu'ils ne connaissent pas vraiment le régime qui y est en vigueur. Ils n'ont pas la sécurité juridique qu'ils souhaiteraient avoir.

 

. 1915 + -

Nous en venons maintenant à la situation actuelle, à ce qui s'est passé dans les mois qui nous séparent des dernières élections. Une majorité parlementaire favorise la réforme. Je voudrais compléter ma dernière question en demandant au secrétaire parlementaire de nous parler un peu des changements qui sont en cours.

Nous lisons encore dans les journaux comment on arrête encore les gens. La police des moeurs harcèle encore les jeunes. On peut s'interroger sur la réaction des tribunaux. Comme je l'ai signalé aujourd'hui à la Chambre, on s'inquiète du procès d'un groupe de citoyens juifs d'Iran qui aura lieu jeudi et de la protection dont ils bénéficieront et du genre de liberté de religion qui existe dans ce pays.

Il semble que ce soit un cas où l'on fait deux pas en avant et un pas en arrière. Je suppose que c'est vrai de toutes les situations politiques. Je voudrais savoir ce que l'on fait à cet égard. Que faisons-nous pour encourager le changement? Comment venons-nous en aide aux Iraniens qui souhaitent un changement? Quelles visites les députés, les ministres et les hauts fonctionnaires du commerce font-ils là-bas? Il me semble que c'est maintenant le temps d'agir. Il est temps d'encourager les autorités iraniennes à ouvrir les frontières de leur pays.

Je voudrais proposer que nous soyons un peu plus actifs. Je voudrais encourager le gouvernement à favoriser et à promouvoir les forces du changement en Iran et à restreindre la marge de manoeuvre des adversaires du changement dans l'intérêt de tous les Iraniens.

[Français]

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, les élections législatives du 18 février en Iran ont profondément modifié l'équilibre du pouvoir politique au pays. Les partisans réformateurs du président Khatami ont obtenu une majorité de sièges. Le Canada félicite la population iranienne d'avoir respecté l'esprit démocratique des élections et d'avoir voté en aussi grand nombre.

Nous estimons que le processus électoral était ouvert et équitable et qu'il reflétait vraiment la volonté démocratique de la population iranienne. Les résultats indiquent que l'Iran s'oriente vers un système plus démocratique basé sur la primauté du droit, loin de la rigidité idéologique du passé. Après les élections présidentielles et les élections municipales de mars 1999, c'est la troisième fois que le peuple iranien vote massivement pour les réformateurs.

Le Canada espère que la voie choisie par le peuple iranien permettra de resserrer les liens avec Téhéran et d'assurer la réintégration soutenue de l'Iran au sein de la communauté internationale. Le gouvernement du président Khatami accomplit énormément pour améliorer ses relations avec ses voisins arabes et il s'est tourné vers l'Ouest dans l'espoir d'élargir ses relations.

Le Canada a adopté une politique d'engagement contrôlé envers l'Iran, qui limite les visites officielles entre les deux pays au niveau des sous-ministres. Cette politique a été mise en place en raison des inquiétudes du Canada face au dossier iranien des droits de la personne, au soutien du pays au terrorisme international, son opposition au processus de paix au Moyen-Orient, son appui aux groupes qui le rejettent et sa quête d'armes de destruction massive.

Bien que nous soyons très encouragés par les résultats des élections, nous attendons maintenant des améliorations dans ces secteurs de préoccupation stratégiques. Nous avons été témoins de progrès au chapitre des droits de la personne puisque les Baha'is sont maintenant autorisés à enregistrer leurs mariages, améliorant ainsi le statut des enfants baha'is. Le gouvernement a par ailleurs déclaré qu'il tiendra un procès public pour les 13 juifs iraniens et autres personnes arrêtées il y a un an pour espionnage pour le compte d'Israël et des États-Unis.

Le Canada a clairement indiqué au gouvernement iranien que les souffrances de ces personnes demeurent extrêmement préoccupantes et qu'il n'entrevoyait pas de normaliser les relations entre les deux pays tant que l'Iran ne parviendra pas à résoudre la situation à la satisfaction du Canada.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 14 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 18.)