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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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36e Législature, 2ième Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 87

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 1er mai 2000

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES

. 1100

VL'INDUSTRIE CULTURELLE
VM. Nelson Riis
VMotion

. 1105

. 1110

VMme Wendy Lill

. 1115

. 1120

VM. Roy Cullen

. 1125

VM. Inky Mark

. 1130

. 1135

VM. Gilles-A. Perron

. 1140

VM. Scott Brison

. 1145

. 1150

VM. Peter Stoffer

. 1155

. 1200

VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
VProjet de loi C-31. Deuxième lecture
VL'hon. Elinor Caplan

. 1205

. 1210

. 1215

VM. Leon E. Benoit

. 1220

. 1225

. 1230

. 1235

. 1240

. 1245

. 1250

. 1255

. 1300

VM. Bernard Bigras

. 1305

. 1310

. 1315

. 1320

. 1325

. 1330

. 1335

. 1340

VM. Bill Blaikie

. 1345

. 1350

VM. John Solomon

. 1355

VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLE GALA EXCELLENCE DU RÉFAP
VM. Marcel Proulx
VLE TRANSPORT DU GRAIN
VM. Howard Hilstrom

. 1400

VLE VIÊTNAM
VM. John McKay
VLA SEMAINE DE LA SANTÉ MENTALE
VM. Yvon Charbonneau
VL'ARMÉNIE
VM. Sarkis Assadourian
VL'HÉPATITE C
VM. Grant Hill
VLA BIOTECHNOLOGIE
VM. Lynn Myers

. 1405

VJEAN-CLAUDE MARCUS
VM. Mauril Bélanger
VLES DROITS DE LA PERSONNE
VM. Werner Schmidt
VLE DÉCÈS DE JACQUES BEAUREGARD
VM. Robert Bertrand
VL'UNIVERSITÉ LAVAL
VMme Hélène Alarie
VLES DROITS DE LA PERSONNE
VM. Peter Stoffer

. 1410

VLA FÊTE INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS
VMme Francine Lalonde
VLA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL
VMme Raymonde Folco
VL'ENVIRONNEMENT
VM. John Herron
VLE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES
VM. John Harvard
VQUESTIONS ORALES

. 1415

VLE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
VM. Chuck Strahl
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Chuck Strahl
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Chuck Strahl
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Jay Hill
VL'hon. Don Boudria

. 1420

VM. Jay Hill
VL'hon. Don Boudria
VLE CONSEIL POUR L'UNITÉ CANADIENNE
VM. Gilles Duceppe
VM. Mauril Bélanger
VM. Gilles Duceppe
VM. Mauril Bélanger
VMme Caroline St-Hilaire
VM. Mauril Bélanger
VMme Caroline St-Hilaire

. 1425

VM. Mauril Bélanger
VLA SANTÉ
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Allan Rock
VM. Bill Blaikie
VL'hon. Allan Rock
VLE VIÊTNAM
VM. Peter MacKay
VL'hon. Maria Minna
VM. Peter MacKay

. 1430

VLe très hon. Jean Chrétien
VLA FISCALITÉ
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VM. Monte Solberg
VL'hon. Paul Martin
VCINAR
VM. Stéphane Bergeron
VL'hon. Martin Cauchon
VM. Stéphane Bergeron
VL'hon. Martin Cauchon

. 1435

VLE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
VMme Val Meredith
VL'hon. Jane Stewart
VMme Val Meredith
VL'hon. Jane Stewart
VCINAR
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Martin Cauchon
VM. Yvan Loubier
VL'hon. Martin Cauchon
VLA SANTÉ
VM. Bob Mills
VL'hon. Allan Rock
VM. Bob Mills

. 1440

VL'hon. Allan Rock
VLE CODE CANADIEN DU TRAVAIL
VMme Christiane Gagnon
VL'hon. Claudette Bradshaw
VLA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA
VL'hon. Charles Caccia
VM. Mauril Bélanger
VLE CRIME ORGANISÉ
VM. Jim Abbott
VM. Jacques Saada
VM. Jim Abbott
VM. Jacques Saada

. 1445

VL'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE
VMme Libby Davies
VL'hon. Don Boudria
VLES RÉGIONS ÉCONOMIQUES
VM. Yvon Godin
VL'hon. Jane Stewart
VLES TRANSPORTS
VM. Norman Doyle
VL'hon. David M. Collenette
VM. Norman Doyle
VL'hon. David M. Collenette
VL'AGRICULTURE
VMme Rose-Marie Ur
VL'hon. Lyle Vanclief

. 1450

VLE CRIME ORGANISÉ
VM. John Reynolds
VM. Jacques Saada
VLE PROJET DE LOI C-3
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Anne McLellan
VLE TRANSPORT DU GRAIN
VM. Dick Proctor
VL'hon. David M. Collenette
VLA DÉFENSE NATIONALE
VM. David Price
VL'hon. Arthur C. Eggleton

. 1455

VLE CRIME ORGANISÉ
VM. John Reynolds
VM. Jacques Saada
VLES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS
VMme Hélène Alarie
VL'hon. Lyle Vanclief
VL'INDUSTRIE DES JOURNAUX
VMme Wendy Lill
VLe très hon. Jean Chrétien
VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VM. Peter MacKay
VLe très hon. Jean Chrétien
VLE CRIME ORGANISÉ
VM. John Reynolds

. 1500

VM. Jacques Saada
VAFFAIRES COURANTES
VNOMINATIONS PAR DÉCRET
VM. Derek Lee
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Derek Lee
VPÉTITIONS
VLe réseau routier national
VM. Nelson Riis

. 1505

VLe cancer du sein
VM. Paul Szabo
VLe mariage
VM. Monte Solberg
VLe cancer du sein
VM. Ovid L. Jackson
VLe mariage
VM. Ovid L. Jackson
VLa Yougoslavie
VM. Ovid L. Jackson
VLa pauvreté chez les enfants
VM. Ovid L. Jackson
VLes organismes génétiquement modifiés
VM. Yves Rocheleau
VLes armes nucléaires
VM. John Harvard
VLes organismes génétiquement modifiés
VM. Paul Crête
VM. Peter Adams

. 1510

VLe prix de l'essence
VM. Peter Adams
VLe mariage
VM. Werner Schmidt
VLe cancer du sein
VMme Aileen Carroll
VLa pornographie juvénile
VMme Aileen Carroll
VLe mariage
VMme Aileen Carroll
VLe logement
VMme Libby Davies
VLes enfants victimes de la pauvreté
VMme Libby Davies
VLe mariage
VM. Reed Elley
VLa pornographie juvénile
VM. Ken Epp
VLe réseau routier national
VM. John Solomon
VLe mariage
VM. Scott Brison
VL'équité en matière d'emploi
VM. Norman Doyle

. 1515

VLa pornographie
VM. Norman Doyle
VPostes Canada
VM. Norman Doyle
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Gar Knutson
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS
VProjet de loi C-31. Deuxième lecture.
VM. John Solomon

. 1520

VM. David Price

. 1525

. 1530

. 1535

. 1540

VM. Leon E. Benoit

. 1545

VMme Raymonde Folco

. 1550

VM. Rick Borotsik
VMme Raymonde Folco

. 1555

. 1600

VM. Ken Epp
VM. Reed Elley

. 1605

VM. Leon E. Benoit
VM. Jerry Pickard

. 1610

. 1615

VM. Leon E. Benoit

. 1620

VM. Gurmant Grewal

. 1625

. 1630

. 1635

. 1640

. 1645

VM. Leon E. Benoit

. 1650

VM. John McKay

. 1655

. 1700

VM. Bernard Bigras

. 1705

VM. Reg Alcock

. 1710

. 1715

VM. Daniel Turp

. 1720

. 1725

. 1730

. 1735

. 1740

VM. Bernard Bigras

. 1745

VM. Yves Rocheleau

. 1750

VM. Steve Mahoney

. 1755

. 1800

. 1805

. 1810

VMme Wendy Lill

. 1815

VM. Peter Mancini

. 1820

. 1825

VMOTION D'AJOURNEMENT
VL'immigration
VM. Paul Szabo

. 1830

VL'hon. Elinor Caplan

. 1835

VL'immigration
VMme Rose-Marie Ur
VL'hon. Elinor Caplan

. 1840

VLes affaires étrangères
VL'hon. Charles Caccia

. 1845

VM. Denis Paradis

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 87


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 1er mai 2000

La séance est ouverte à 11 heures.



Prière


INITIATIVES PARLEMENTAIRES

 

. 1100 +

[Traduction]

L'INDUSTRIE CULTURELLE

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD) propose:  

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager d'exempter de l'impôt sur le revenu jusqu'à 30 000 $ de revenu en signe d'appui aux artistes et aux écrivains qui travaillent dans l'industrie culturelle du Canada.

—Madame la Présidente, j'aimerais obtenir le consentement unanime de la Chambre afin de pouvoir partager mon temps de parole avec la députée de Dartmouth.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député a-t-il le consentement de la Chambre pour partager son temps de parole?

Des voix: D'accord.

M. Nelson Riis: Madame la Présidente, je suis heureux d'amorcer le débat sur la motion no 259 qui veut apporter un peu plus d'équité fiscale à nos créateurs.

Nous devons tous reconnaître que le phénomène de Joe le Canadien lancé par Molson il y a quelques semaines a su toucher un corde sensible au pays, que les gens sont vraiment fiers de leur pays. Ils sont fiers de ce que nous avons accompli. Ils sont fiers de leur culture et du fait qu'elle est unique et distincte des autres cultures dans le monde.

 

. 1105 + -

Aujourd'hui, nous entreprenons un débat en vue d'appuyer les authentiques créateurs qui rendent possible ce phénomène culturel canadien. Je voudrais remercier Joe le Canadien de nous aider dans ce domaine.

Aujourd'hui, nous rendons hommage aux personnes qui amorcent ce processus créatif, qui sont les pionniers, qui créent littéralement quelque chose à partir de rien, qui sont le fer de lance de notre industrie culturelle: les artistes eux-mêmes. Ils sont l'équivalent des bûcherons et des agriculteurs.

Je tiens à commencer mon exposé d'aujourd'hui en lisant un poème rédigé par le cow-boy poète professionnel de ma circonscription, Kamloops, en Colombie-Britannique. Il s'appelle Mike Puhallo et son poème s'intitule: Sauge et pin.

Je suis allé dans vos villes
Qui conviennent peut-être à certains,
Mais ce qui me manque là-bas,
C'est l'odeur de la sauge et du pin.

Je ne suis qu'un poète rural.
Mes vers ne sont pas compliqués;
La grammaire en est atroce et
L'orthographe laisse encore plus à désirer.

Mais mes histoires sont simples et honnêtes
Comme les enfants de la terre,
Les cowboys, les éleveurs et les agriculteurs
Qui gagnent durement leur salaire.

Les citadins n'aiment pas ma prose;
Ils en critiquent chaque ligne.
Mes poèmes n'intéressent pas les beaux cercles
Où l'on sirote champagne et produit de la vigne.

Je ne suis certes pas riche ni célèbre,
Mais cela parfaitement me convient,
Que valent la célébrité ou la richesse
Pour humer la sauge et le pin?

Voilà une oeuvre de l'un des poètes professionnels du Canada, de l'un de nos créateurs officiels.

Je crois qu'il est du rôle du législateur de mettre à l'ordre du jour des questions qui permettront la tenue d'un discours public sain et, avec un peu de chance, une meilleure compréhension des problèmes. Voilà ce que je souhaite faire en ce début de débat sur la situation fiscale des créateurs du Canada en l'an 2000, de ces créateurs qui cherchent encore à être traités avec justice et considération par notre Loi de l'impôt sur le revenu.

En 1997, dans un rapport rédigé pour le compte du ministère du Patrimoine canadien, la firme Price Waterhouse constatait que les travailleurs de l'industrie culturelle qui sont autonomes et ont des revenus instables doivent supporter un fardeau fiscal injuste. Selon l'analyse de cette firme, le Canadien le plus vulnérable dans le cadre de l'actuel régime fiscal est l'artiste travailleur autonome.

Je crois que la culture est au coeur d'une nation. En tant que nation, le Canada a élaboré un secteur culturel dynamique avec de nombreuses institutions culturelles: une industrie de l'édition diversifiée, une industrie de la musique talentueuse, une industrie des nouveaux médias dynamique et des industries du film et de la télévision très bien vues par les critiques.

Nous oublions souvent de comprendre que, sans les artistes, il n'y aurait pas d'industrie cinématographique ni de production télévisée dans notre pays. Il n'y aurait pas d'industrie de l'édition ou de l'enregistrement. Il n'y aurait pas de productions théâtrales, de galeries ou de musées. Fondamentalement, l'industrie culturelle s'effondrerait.

La chose importante que cette motion cherche à préciser, c'est que nous devons reconnaître ces créateurs. Si je parlais en termes commerciaux, je dirais qu'il faut s'occuper de ces innovateurs et créateurs qui sont à la base de la recherche et du développement dans cette industrie. Nous ne pouvons avoir une industrie dynamique dans notre pays sans les chercheurs et développeurs, ces gens qui passent du temps dans les laboratoires pour créer le produit initial.

Ce que nous disons, c'est qu'il faut appliquer cette logique maintenant au secteur culturel pour reconnaître le travail de ces hommes et femmes qui investissent souvent beaucoup de leur temps et de leur énergie dans la formation et l'éducation pour répondre aux besoins de leurs professions. Ils créent en fait des choses qui alimentent les productions théâtrales, l'industrie cinématographique, les séries d'émissions télévisées et le reste, le secteur d'aval.

Je voudrais préciser à ce tout début de notre débat qu'il s'agit d'un secteur en pleine croissance. Ceux d'entre nous qui ont lu le livre de David Foot Boom, Bust and Echo vont se rappeler qu'il a déclaré que le secteur culturel allait être l'une des industries les plus florissantes au Canada à la suite des changements démographiques qui se produisent.

Il faut également reconnaître que notre secteur culturel représente de 5 à 8 p. 100 de la main-d'oeuvre canadienne, soit plus que l'agriculture et l'exploitation forestière et minière ensemble. Il n'est dépassé à ce chapitre que par le secteur de la santé et des services sociaux. Il s'agit d'une énorme industrie, mais elle dépend, à l'instar de tous ceux qui y participent en tant que spectateurs ou intervenants, de ces créateurs qui sont la source du processus industriel.

 

. 1110 + -

Les artistes bénéficient d'un traitement spécial dans certains pays, notamment l'Irlande, où le revenu que tirent les artistes, écrivains, compositeurs et sculpteurs de la vente de leurs oeuvres est exempté d'impôt, et cela sans aucun plafond. Nous savons tous, pour avoir lu à ce sujet, que la culture se porte très bien en Irlande grâce à un certain nombre d'initiatives, dont celle que je viens de mentionner.

Au fil des années, nous avons accordé beaucoup d'attention à notre souveraineté politique, au développement de notre souveraineté territoriale et de notre souveraineté économique. Le moment est maintenant venu d'en faire autant pour la souveraineté culturelle. Dans un texte qu'il a expédié par télécopieur à mon bureau l'autre jour, un compositeur fait valoir que notre identité culturelle a peine à survivre face au raz-de-marée des industries culturelles américaines et que toute mesure visant à favoriser la création au Canada sera la bienvenue, surtout si le gouvernement peut le faire à un coût raisonnable.

Le gouvernement pourrait effectivement soutenir la créativité sans qu'il ne lui en coûte trop cher en s'inspirant de ce qui se fait en Irlande, où l'exemption d'impôt n'est assujettie à aucun plafond. L'établissement d'un plafond de 30 000 $ chez nous serait tout à fait raisonnable.

En 1982, le gouvernement canadien a commandé une étude, le rapport Applebaum-Hébert, sur l'industrie culturelle canadienne. Une des principales conclusions du comité était que le plus important soutien de la vie culturelle au Canada provient non pas des gouvernements, des entreprises ou autres mécènes, mais des artistes eux-mêmes parce qu'ils sont sous-payés ou ne sont pas rémunérés.

Le mois dernier encore, le célèbre écrivain Margaret Atwood confirmait la validité de cette observation en affirmant que, de façon générale, les artistes subventionnent le reste de la société, car même quand un artiste tire un certain revenu de leurs oeuvres, d'autres personnes en bénéficient encore beaucoup plus.

Fait déconcertant, le revenu moyen des créateurs et des artistes au Canada se situe aujourd'hui à environ 13 000 $ par année. Nous savons bien que personne ne peut subsister avec un revenu pareil.

J'aurais encore beaucoup à dire sur la question, mais je tiens à partager mon temps avec la porte-parole de mon parti en matière de culture, la députée de Dartmouth. J'espère que ce débat contribuera à sensibiliser l'opinion publique à l'importance de la question et, ce qui est peut-être encore plus urgent pour nous, je souhaite qu'on en reconnaisse l'importance sur la scène politique canadienne, afin que les parlementaires que nous sommes puissent mettre tout en oeuvre pour que les créateurs, ceux qui sont à l'origine du processus culturel, soient rémunérés avec équité. Une des choses que nous pouvons faire, c'est d'examiner cette motion qui propose d'exempter d'impôt le revenu des artistes, jusqu'à concurrence de 30 000 $.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Madame la Présidente, je suis heureuse de prendre part ce matin au débat sur l'importante motion qu'a présentée mon collègue de Kamloops, Thompson and Highland Valleys: Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager d'exempter de l'impôt sur le revenu jusqu'à 30 000 $ de revenu en signe d'appui aux artistes et aux écrivains qui travaillent dans l'industrie culturelle du Canada.

Tout d'abord, je dois dire que cette question m'intéresse directement. J'ai gagné ma vie en écrivant des pièces de théâtre pendant 15 ans avant de devenir députée. Je compte parmi mes amis un grand nombre d'artistes, d'acteurs, d'auteurs dramatiques, de régisseurs, de peintres et de sculpteurs. La plupart d'entre eux se débrouillent tant bien que mal pour gagner leur vie sans la moindre sécurité financière et sans vraiment d'autre option puisqu'ils sont poussés par le désir de créer. Ils sont poussés par le désir de s'exprimer. Ils pensent qu'ils ont des choses à dire, qu'ils peuvent rendre claires des situations obscures, qu'ils peuvent faire rire les gens, les faire pleurer, les émouvoir ou les amener à changer leur ligne de conduite, à se révolter contre les injustices, à se battre en faveur d'une société plus humaine, à approfondir leur cheminement spirituel, à renforcer leurs liens avec leurs proches et la collectivité. En un mot, ils croient, à tort ou à raison, bêtement ou non, que grâce à l'infime contribution de leur création, ils peuvent avoir un impact, espérons positif, sur la condition humaine. Dans ce pâle espoir, ils travaillent laborieusement dans le domaine de la culture, gagnant en moyenne si l'on en croit ce qu'a dit récemment le président du Conseil des Arts du Canada, un revenu annuel de 13 000 $. Ils font d'énormes sacrifices.

Les personnes qui décident de devenir des créateurs n'ont souvent d'autre choix que celui de vivre dans la pauvreté. Être un artiste dans ce pays signifie se concentrer sur la création tout en se demandant avec quoi on va payer son loyer. Cela veut dire se battre pour se concentrer sur l'art tout en se débattant pour payer les factures en retard et essayer de pratiquer un art alors que le coût des outils est parfois trop cher.

 

. 1115 + -

Cela veut dire essayer de garder allumée l'étincelle de créativité, poursuivre un travail de création sur plusieurs années tout en exerçant d'autres emplois pour payer les factures. Cela veut souvent dire renoncer à fonder une famille et à avoir des enfants. Cela entraîne souvent une perturbation de la vie de couple ou de la vie de famille quand il faut aller au loin pour exercer son travail d'artiste, de réalisateur ou de comédien.

À la différence des députés qui bénéficient de points de voyage, les artistes ne peuvent rentrer chez eux le week-end. Ils exercent toutes ces activités d'année en année. Grâce à leurs sacrifices, nous nous en trouvons beaucoup plus riches. Notre pays se trouverait plus mal en point si ce n'était de cette bande de vaillants créateurs qui font la chronique de son évolution, qui racontent son histoire, qui projettent de la lumière dans ses coins sombres et qui lui donnent la force d'affronter un avenir incertain.

Il y a deux mois, j'ai eu le grand plaisir d'entendre Son Excellence John Ralston Saul en conférence à Halifax sur le sujet de la culture. M. Saul est un des écrivains et philosophes les plus respectés au Canada. Il a expliqué que la culture constitue un des trois piliers qui donnent à un pays sa force dans ses relations avec le monde. La culture, le commerce et la sécurité ont chacun autant d'importance l'un que l'autre.

Comme pays, nous ne sommes absolument rien sans nos créateurs et notre culture. Voilà pourquoi je profite de toutes les occasions pour aborder les questions de culture et de création à la Chambre. Je suis fière de dire que les députés néo-démocrates ont lu le mois dernier des poèmes de poètes canadiens de partout au Canada pour marquer le Mois national de la poésie. Nous défendons vigoureusement la Société Radio-Canada, notre radiodiffuseur public, notre véhicule public de choix pour donner la parole aux idées originales émanant de nos régions. Nous prônons la protection de l'industrie canadienne du livre et des périodiques afin que les créateurs de la culture canadienne puissent trouver des marchés et des débouchés pour leurs produits et afin que les Canadiens puissent s'en délecter.

C'est pour cette raison que je suis en faveur d'une mesure législative sur la concentration des médias; en effet, en permettant que les moyens d'expression soient concentrés entre quelques rares mains, on limite le nombre des voix qui peuvent s'exprimer.

Nous avons besoin d'un marché de la création canadienne dynamique, divers, exubérant, tapageur et bruyant. Il faut que tous les soirs aux nouvelles nationales on réserve un moment, peut-être juste avant les cours du NASDAQ et des autres bourses, pour dire aux Canadiens combien de livres ont été vendus, combien de tableaux ont été peints et combien de Canadiens ont vu un film ou une pièce de création canadienne ce jour-là. Alors même que je dis cela, je veux qu'il soit parfaitement clair que je ne considère pas la culture comme une marchandise qu'on vend à la bourse.

Comme le dit de façon très éloquente Margaret Atwood, que nous semblons citer souvent au Nouveau parti démocratique, la culture n'est pas une savonnette. Elle ne peut non plus être définie par des réclames pour la bière, ni par des barons de la presse qui vivent à l'étranger, ni encore par nos sports nationaux ou par Peter Mansbridge. Elle est définie par nos créateurs.

Si nous croyons en l'importance de nos créateurs, alors la motion no 259, qui reconnaît l'utilité de leur contribution et leur accorde une exemption d'impôt partielle, est une solution à la fois simple et éloquente. C'est pour nous une façon de leur exprimer notre appréciation, en leur accordant un statut spécial dans l'une des lois les plus exhaustives du Canada, la Loi de l'impôt sur le revenu.

L'initiative n'est certainement pas nouvelle pour ce qui est de reconnaître la portée d'une activité importante pour notre pays. Le gouvernement a souvent recours à la fiscalité pour appuyer concrètement un secteur spécifique de l'économie.

Combien un tel changement dans la loi risque-t-il de coûter aux Canadiens? Ce ne serait pas une grande perte pour le trésor fédéral puisque, comme je l'ai dit, le revenu moyen d'un artiste au Canada est de 13 000 $ par an. Cette motion n'est pas une affaire d'argent d'abord et avant tout.

L'Irlande accorde une exemption totale aux créateurs de recettes fiscales et il lui en coûte en tout et pour tout moins de 10 p. 100 des dépenses que nous consacrons au Conseil des arts du Canada, soit moins de 14 millions de dollars, ou encore moins de 50 cents par Canadien. Je ne pense pas que ce soit une question d'argent.

Je voudrais me pencher sur quelques-uns des étranges malentendus concernant le soutien accordé aux artistes du Canada. Il n'y a pas très longtemps, j'ai entendu une autre député, une réformiste, affirmer qu'elle ne pensait pas qu'il soit utile de soutenir financièrement nos artistes, puisque Céline Dion et Shania Twain ont si bien réussi leur carrière. Elle a eu le culot de soutenir que les députés protégeaient la communauté artistique en mettant en place des politiques officielles à leur intention. Cela est parfaitement illogique. Cela présuppose que toutes les formes d'art pratiquées au Canada peuvent être jugées en fonction de leur succès commercial sur le marché international. Cela laisse entendre que les gens qui créent en dehors du courant principal, ce qui signifie un succès commercial moins important, sont en quelque sorte moins créatifs. Cela signifie que les normes de succès dans l'art ne sont qu'un produit.

 

. 1120 + -

L'histoire regorge de grands artistes qui sont morts dans la pauvreté. Si nous suivions la logique selon laquelle le succès commercial est la seule manière de juger l'art, nous fermerions nos galeries, nous brûlerions nos musées, nous fermerions nos théâtres et nos salles de concert et nous laisserions le dollar tout puissant être notre nouvelle forme d'art. La mentalité actuelle nous incite à ne vénérer que ce qui s'achète et se vend, non ce qui peut apporter de la joie et de la tristesse, susciter la réflexion et enrichir notre esprit plutôt que notre porte-monnaie. Cette vision aride du monde en est une qui, j'en suis certaine, sera partagée par une petite minorité à la Chambre.

J'espère que, au contraire, les députés verront en cette motion une étape importante et constructive vers l'élimination des obstacles auxquels sont confrontés nos créateurs. J'espère qu'ils la verront comme un petit moyen pour atténuer les problèmes économiques auxquels ces derniers sont confrontés, en leur permettant peut-être de se consacrer de façon plus concentrée à leur art, en leur permettant peut-être de créer un livre ou une pièce de théâtre en un an plutôt qu'en trois ou quatre ans. Cela leur apportera un petit allégement fiscal, mais cela leur donnera également un élan symbolique relativement à leur importance pour le pays.

J'appuie fortement cette motion importante présentée par mon collègue. Ce que nous disons par le biais de cette motion, en tant que Parlement et en tant que nation, c'est que ce que font les créateurs est spécial pour nous, qu'ils fournissent les moyens par lesquels le coeur et l'âme de notre grand pays s'expriment. Par le biais de cette motion, nous reconnaissons collectivement cette contribution et nous disons que nous les appuyons et que nous les remercions.

M. Roy Cullen (secrétaire parlementaire du ministre des Finances, Lib.): Madame la Présidente, selon la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui et que parraine le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys, il faudrait exempter d'impôt le premier montant de 30 000 $ par an gagné par les artistes et les écrivains qui travaillent dans l'industrie culturelle du Canada.

L'intention qui sous-tend cette motion est admirable. Un appui à la communauté remarquable et diversifiée que forment nos poètes, nos écrivains et nos artistes visuels est indispensable à la préservation de notre identité nationale. Il est absolument crucial que nous possédions les instruments nécessaires pour protéger notre culture et pour nous raconter.

[Français]

Comme on le sait, le gouvernement consacre déjà des ressources considérables afin d'assurer que nos industries artistiques et culturelles demeurent prospères et en santé, surtout alors que le Canada entre dans le nouveau millénaire. Ces ressources importantes sont offertes par le biais d'un certain nombre d'organismes et d'institutions, témoignage de notre engagement d'assurer le maintien de l'excellence dans le domaine des arts.

[Traduction]

Je profite de l'occasion pour faire valoir des institutions, des programmes et des politiques qui existent justement pour aider les artistes et les écrivains à poursuivre leurs activités.

Par exemple, le gouvernement a augmenté considérablement son appui financier au Conseil des arts du Canada, haussant sa subvention annuelle de 25 millions de dollars dès 1997-1998. Une autre hausse de dix millions de dollars est incluse dans le budget présenté à la Chambre le 28 février 2000. En 1998-1999, le conseil a octroyé près de 5 700 bourses totalisant 112 millions de dollars, ce qui représente un appui direct aux artistes et aux organisations artistiques du Canada.

L'Office national du film du Canada est réputé dans le monde entier pour la qualité de son oeuvre. Cette organisation produit et distribue au Canada et partout dans le monde des oeuvres audiovisuelles et multimédias qui reflètent le Canada. Depuis plus de 60 ans, elle joue un rôle de premier plan dans la production de films tant à l'échelle canadienne qu'internationale.

Le ministère du Patrimoine canadien offre aussi des programmes importants, y compris le Programme d'initiatives culturelles qui facilite la participation d'artistes de tout le pays à plus de 150 festivals et événements spéciaux dans le domaine des arts sur la scène nationale et internationale. Patrimoine canadien offre aussi le Programme national de formation dans le secteur des arts, afin de venir en aide aux établissements canadiens se spécialisant dans la formation de jeunes Canadiens qui envisagent une carrière artistique professionnelle.

 

. 1125 + -

Quant au régime fiscal, je constate qu'il comprend déjà bon nombre de dispositions favorables au secteur culturel canadien. À titre d'exemple, les artistes peuvent déduire les coûts de la création d'une oeuvre d'art dans l'année au cours de laquelle ils les engagent, plutôt qu'au moment de la vente de l'oeuvre. De plus, les artistes et musiciens salariés peuvent déduire certaines dépenses de leur revenu d'emploi, déductions qui ne sont pas offertes aux autres salariés.

Au nombre des autres dispositions fiscales importantes favorisant la culture canadienne, on trouve le crédit d'impôt à la production canadienne de films et de vidéo, la radiation comptable dans le cas d'oeuvres d'art canadiennes achetées par des entreprises non constituées en société, la souplesse dans l'évaluation des dons de bienfaisance correspondant à des oeuvres d'un artiste et l'exonération de l'impôt sur les gains en capital pour les dons de biens culturels.

En ce qui concerne la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui, je tiens à féliciter de nouveau le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys de chercher à soutenir davantage notre collectivité culturelle. Toutefois, permettre à des particuliers comme les artistes de bénéficier d'une exemption fiscale pour leur revenu gagné ne semble pas le moyen le plus efficace d'atteindre ce résultat.

Comme je l'ai dit, le régime fiscal tient compte de bon nombre de façons de la situation propre aux artistes et aux musiciens. Grâce aux dispositions spéciales en vigueur, ces particuliers ne sont pas pénalisés par diverses situations propres à leur profession, comme la nécessité d'entretenir des instruments de musique précieux ou la difficulté d'évaluer des pièces d'art données par un artiste.

Sauf dans ces cas particuliers déjà reconnus par le régime de fiscalité, cependant, il n'est pas clair que les artistes, les auteurs ou les interprètes aient des besoins supérieurs à ceux d'autres particuliers touchant des revenus comparables. Dans toute la mesure du possible, le régime fiscal devrait traiter tous les particuliers d'une même façon dans des circonstances similaires. Sur le plan de l'équité, il serait donc très difficile de justifier l'attribution d'une exonération fiscale spéciale à un particulier en invoquant simplement le fait qu'il s'adonne à des activités artistiques. Cela pousserait aussi d'autres groupes qui estiment aussi avoir droit à un statut spécial à demander un traitement similaire.

[Français]

S'agissant d'allégement fiscal, j'estime que la voie adoptée par le gouvernement concernant un allégement fiscal général durable est la bonne. Le plan quinquennal de réduction des impôts, adopté par le gouvernement, assure un allégement fiscal réel et important à tous les particuliers, peu importe la carrière qu'ils ont choisie.

Les artistes et les écrivains profiteront de ces réductions historiques d'impôt, bien entendu, comme tous les autres contribuables.

[Traduction]

J'estime donc que la motion, aussi bien intentionnée qu'elle puisse être, ne devrait pas recevoir l'appui de la Chambre.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux de participer à ce débat sur la motion no 259. Le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys a le coeur à la bonne place car il préconise un allégement fiscal pour les créateurs culturels canadiens.

En tant que Canadiens, nous sommes tous redevables à nos artistes. Toutefois, l'Alliance canadienne est d'avis que tous les Canadiens devraient recevoir un allégement fiscal du gouvernement. Comme nous le savons tous, les Canadiens sont les gens les plus taxés des pays du G-7. L'allégement fiscal devrait être général et non ciblé.

Je remercie The Writers' Union of Canada de sa correspondance concernant le projet de loi. Comme cet organisme, je crois que la culture n'est pas une question de parti et que les artistes canadiens ont besoin d'un allégement fiscal. Je crois aussi que les artistes professionnels sont les travailleurs les moins bien payés du Canada.

Ce message a été exprimé haut et fort durant les audiences publiques du Comité permanent du patrimoine canadien à l'hiver de 1998. Le comité a tenu des audiences dans diverses régions du pays, d'un océan à l'autre. Une autre recommandation issue de ces réunions demandait que l'on examine l'étalement du revenu.

 

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La Writers' Union a aussi demandé que l'on accorde l'étalement du revenu aux artistes pour pallier leur fardeau fiscal injuste. Je suis d'accord pour dire que les artistes devraient avoir le droit d'étaler leur revenu pour équilibrer leurs gains qui varient d'une année à l'autre.

Il est aussi intéressant de voir que des pays comme l'Australie, l'Allemagne, le Danemark, les Pays-Bas, la Grèce, la France, le Royaume-Uni et le Luxembourg accordent une forme ou une autre d'étalement du revenu à leurs artistes. Tous les députés devraient demander au ministre des Finances de mettre en oeuvre cette option fort valable pour les artistes. J'exhorte tous les députés à le demander par écrit au ministre des Finances.

L'Alliance canadienne offre une solution qui aidera non seulement les artistes, mais tous les Canadiens. Il s'agit de la solution 17 qui prévoit un taux d'imposition unique. Il y aurait réduction d'impôts pour tous les contribuables. Le taux unique prévoit des déductions progressives et un taux maximal d'impôt pour les particuliers de 17 p. 100. En fait, les économies totales d'impôts équivaudront à environ 34 milliards de dollars sur cinq ans, en plus du remboursement de notre dette de 10,22 milliards sur cinq ans.

L'avantage du taux d'imposition moyen progressif proposé dans la solution 17 est qu'il instaure tout d'abord des taux d'imposition marginaux uniques de 17, 26 et 19 p. 100. Les économies totales se chiffreront à 17,2 milliards de dollars. Il accroîtra aussi les crédits personnels de base et les crédits pour conjoints de 7 131 $ et 6 055 $ respectivement à 10 000 $. Les niveaux de crédits seront alors à l'abri de l'inflation une fois la mise en oeuvre progressive terminée. Les économies d'impôts à ce chapitre seraient d'environ 8,3 milliards de dollars. En augmentant le taux de base, nous savons que, puisqu'ils gagnent peu, les artistes ne paieront pas d'impôts sur le revenu avant d'avoir gagné plus de 10 000 $ par année.

La solution 17 prévoit également l'adoption d'une déduction de 3 000 $ par année par enfant pour tenir compte des coûts entraînés par leur éducation. Les économies à ce chapitre seraient d'environ 2,4 milliards de dollars.

Un taux d'imposition moyen progressif permettrait de réduire de 2,40 $ à 2 $ les taux de cotisation à l'assurance-emploi. Il réduirait également les impôts sur l'emploi. Les économies d'impôts seraient de 2,7 milliards de dollars.

Le taux unique ferait disparaître la surtaxe de 5 p. 100 qui permettrait une autre réduction de 762 millions de dollars pour tous les Canadiens. Il y aurait également une augmentation des contributions au REER et au RPA, dont la limite passerait de 13 500 $, soit 18 p. 100 du revenu, à 16 500 $, ce qui correspond à environ 30 p. 100 du revenu moyen, et le contenu étranger admissible passerait de 20 à 100 p. 100 au cours de la période de mise en oeuvre de cinq ans. Cela permettrait aux salariés à revenu moyen de maximiser leurs contributions et de mieux planifier leur retraite. Les économies d'impôts à ce chapitre seraient d'environ 600 milliards de dollars.

Notre taux unique réduirait aussi l'impôt sur les gains en capital, le faisant passer de 40 à 20 p. 100, favorisant ainsi le succès et la prise de risques.

Notre taux unique réduirait le taux général d'imposition des sociétés, le faisant passer de 28 à 21 p. 100, soit le même niveau que l'impôt applicable aux entreprises des ressources et de la fabrication. Cela éliminerait également la discrimination contre la nouvelle économie. Les économies fiscales pour les Canadiens s'élèveraient à quelque 1,89 milliard de dollars.

Il ne fait pas de doute que la solution 17 aurait pour effet de diminuer l'impôt sur le revenu des petites sociétés, le faisant passer de 12 à 10 p. 100, stimulant ainsi l'établissement de nouvelles sociétés. Les économies fiscales seraient de 340 milliards de dollars.

En somme, ce sont là les principaux avantages d'un régime fiscal à taux unique. Tous, y compris les artistes, profiteraient d'un allégement fiscal. Cela augmenterait le revenu disponible de tous les Canadiens et supprimerait la discrimination entre les ménages canadiens. En outre, 1,9 million de contribuables canadiens à bas revenu, dont un bon nombre d'artistes, seraient rayés du rôle d'imposition. Il ne fait pas de doute que le succès et la prise de risques seraient récompensés.

 

. 1135 + -

L'augmentation de l'exemption de base équivaudrait à 10 000 $, comme je l'ai déjà dit. Il n'est pas douteux que les artistes, notamment ceux qui sont en période de développement et qui gagnent moins de 10 000 $, n'auraient aucun impôt à payer sur leurs revenus inférieurs à 10 000 $. Cela aurait pour effet de rayer 1,9 million de contribuables à bas revenu du rôle d'imposition. Cela représenterait un allégement fiscal non négligeable pour les travailleurs pauvres et se traduirait par une hausse du revenu disponible des intéressés ainsi que de leur liberté financière et par une diminution de la pauvreté chez les enfants; les intéressés regagneraient ainsi leur dignité en étant plus autosuffisants et en échappant au piège de l'aide sociale, qui semble être le lot de trop de gens aujourd'hui.

On doit féliciter le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys d'avoir présenté ce projet de loi à la Chambre. Il veut sans doute dire à tous les Canadiens que tous les contribuables, et non seulement les artistes, ont besoin d'un allégement fiscal. Le Canada est incontestablement endetté. Nous savons que nous avons de la chance de vivre dans un pays dont les artistes remportent beaucoup de succès non seulement ici, mais dans le monde entier.

Cependant, aussi louable que soit l'initiative du député, l'Alliance canadienne ne saurait appuyer une exemption fiscale de 30 000 $ pour les artistes. Nous estimons que la solution consiste à accorder à tous les Canadiens un allégement d'impôt uniforme. Les Canadiens le méritent certainement en ce moment.

[Français]

M. Gilles-A. Perron (Rivière-des-Mille-Îles, BQ): Madame la Présidente, permettez-moi de saluer les travailleuses et les travailleurs du monde entier, ceux du Québec et du Canada, en ce 1er mai, Journée des travailleuses et des travailleurs.

J'apprécie pouvoir débattre de la motion de mon collègue néo-démocrate, le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys.

La motion M-259 se lit comme suit:

    Que, de l'avis de la Chambre, le gouvernement devrait envisager d'exempter de l'impôt sur le revenu jusqu'à 30 000 $ de revenu en signe d'appui aux artistes et aux écrivains qui travaillent dans l'industrie culturelle du Canada.

L'objectif de cette motion du député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys est certainement très louable. D'ailleurs, nous, du Bloc québécois, le faisions remarquer dans le rapport dissident déposé au Comité permanent du patrimoine canadien.

Il est vrai que la situation financière des créatrices et créateurs, bien qu'ils soient scolarisés, est précaire, voire très précaire. Nous savons tous que, selon Statistique Canada, 58 p. 100 de nos artistes doivent avoir recours à un revenu d'appoint pour survivre.

Même si cette motion M-259 est fort louable, le Bloc québécois ne pourra pas l'appuyer, telle qu'elle est libellée, pour les raisons suivantes.

Nous sommes d'avis que la présente motion est inadéquate et est susceptible d'amener les citoyens et les contribuables du Québec et du Canada à croire qu'il existe deux classes de citoyens eu égard à l'impôt sur le revenu.

Nous sommes également d'avis que la mesure proposée n'est pas assez ciblée et est difficile d'application. Par exemple, qui pourra réclamer le statut d'artiste?

Cette motion est inéquitable envers plusieurs autres travailleuses et travailleurs qui n'auraient pas la chance de voir 30 000 $ de leur revenu être automatiquement exempté de l'impôt sur le revenu.

 

. 1140 + -

De surcroît, cette motion laisse croire que cette mesure bénéficiera aussi à la petite portion des artistes dont les revenus sont très élevés.

Le Bloc québécois serait disposé à appuyer cette motion si elle était amendée pour y inclure des éléments, tels que les suivants: que le gouvernement fédéral harmonise sa fiscalité avec celle du gouvernement du Québec, qui prévoit que les revenus des droits d'auteurs ne sont pas imposables en deçà de 15 000 $; que le gouvernement fédéral donne suite à la recommandation du Comité permanent des finances d'accorder aux travailleuses et aux travailleurs culturels l'accès à l'étalement du revenu, mesure qui existait dans les années 1970 et qui existe encore aujourd'hui pour les athlètes professionnels; qu'y soient inclus des éléments d'équité pour tous les contribuables, en augmentant le seuil à partir duquel ceux-ci commencent à payer de l'impôt. Au Québec, les seuils d'imposition nuls sont beaucoup plus élevés qu'au fédéral.

J'aimerais maintenant citer quelques exemples. Pour un couple ayant deux enfants et deux revenus de travail, le seuil d'impôt nul au fédéral pour l'an 2000 est de 14 392 $, tandis qu'au Québec, ce seuil est de 31 677 $. Pour une famille monoparentale avec un enfant, le seuil d'imposition au fédéral est de 14 124 $, tandis qu'au Québec, le seuil est de 21 764 $. Pour une personne âgée de moins de 65 ans, le seuil d'imposition nul au fédéral est de 7 464 $, comparé à 10 884 $ au provincial.

En ajustant son seuil d'imposition nul avec celui du gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral favoriserait une situation qui profiterait aux artistes, ainsi qu'à l'ensemble de la population québécoise et canadienne.

J'invite mon collègue de Kamloops, Thompson and Highland Valleys à modifier sa motion dans le sens que je viens d'énoncer, et le Bloc québécois sera fier de l'appuyer.

[Traduction]

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Madame la Présidente, je suis ravi de parler aujourd'hui de la motion no 259, qui fera l'objet d'un vote et que le député de Kamloops, Thompson and Highland Valleys a présentée.

Lorsque nous songeons à Périclès et à l'antiquité grecque, il est très important de reconnaître que les sociétés civilisées ont toujours soutenu les arts et la culture. Tout au long de l'histoire, on a attaché une grande importance à cette tradition. Nous devrions nous efforcer de maintenir et de rehausser cette tradition, à l'aide de politiques, pas expressément de politiques fiscales, mais de politiques qui favorisent et encouragent la culture et l'épanouissement des arts au Canada, dont l'histoire est longue et diversifiée.

Dans le Canada atlantique, la Nouvelle-Écosse, une des régions les plus diversifiées et les plus productives du pays sur le plan culturel, attache une grande valeur à une tradition qui repose sur l'excellence. En fait, tous les Canadiens peuvent tirer des avantages économiques à reconnaître et à exploiter le pouvoir que représente le milieu des arts et de la culture, qu'il s'agisse de la production de Lion King, à Toronto, de musiciens comme la Rankin Family, du Canada atlantique, qui a fait ses débuts à l'aide de moyens très modestes pour finalement obtenir un succès retentissant, ou d'artistes qui ont atteint une renommée internationale, comme Alex Colville, un résidant de ma circonscription. Ces histoires de réussite méritent d'être soulignées. Cependant, nous devons faire davantage pour aider les artistes à leurs débuts.

 

. 1145 + -

Il s'agit d'une très bonne mesure en ce sens qu'elle témoigne de la volonté du député d'aider les artistes. Cependant, sa mise en application pose certains problèmes, dont deux en particulier que je tiens à souligner.

Elle n'expose pas clairement qui peut s'en prévaloir ni comment le terme ou l'étiquette «artiste» s'applique à une personne en particulier et si cela peut être défini et si la définition peut se justifier efficacement.

Le député a aussi signalé les hauts et les bas que vivent les artistes sur le plan financier. Il peut arriver qu'un artiste ne reçoive aucun paiement pendant plusieurs années et qu'il reçoive une somme forfaitaire pour le travail qu'il a fait pendant une certaine période. La meilleure façon de régler ce problème serait l'étalement du revenu sur les années suivantes. Cette solution aiderait aussi d'autres travailleurs qui, en raison de la nature de leur profession, reçoivent aussi des paiements forfaitaires pour le travail qu'ils ont fait pendant plusieurs années. L'étalement du revenu serait la meilleure façon de régler ce problème.

Le revenu moyen d'un artiste au Canada est évalué actuellement à 13 000 $. Le député soulève un problème qui peut être réglé pour un bien plus grand nombre de travailleurs en augmentant considérablement le montant de l'exemption personnelle de base pour tous les Canadiens. Le groupe de travail progressiste conservateur, qui a rendu son rapport en janvier, a recommandé de faire passer le montant à 12 000 $, ce qui aiderait grandement bien des travailleurs. Cela dit, nous devrions hausser le montant de l'exemption personnelle de base sur une certaine période.

Le député reconnaît également que l'allégement des impôts peut jouer un rôle très important pour aider les artistes à faire carrière dans leur domaine, celui des arts et de la culture, et pour les garder au Canada. Ce fait n'est pas négligeable, car il montre que le député reconnaît tout aussi bien qu'il importe de réduire les impôts de tous les contribuables pour que tous, peu importe leur carrière professionnelle ou personnelle, aient le choix de rester au Canada et d'y prospérer. Les Canadiens peuvent se bâtir dans ce pays un brillant avenir, qu'ils exploitent un site .com, fassent du commerce électronique ou travaillent en biotechnologie ou dans des secteurs plus traditionnels.

Le député a montré clairement qu'il est conscient de l'important rôle que la politique fiscale peut jouer pour encourager ou décourager certaines activités. Dans le même ordre d'idées, il conviendra avec moi que nous devrions rester vigilants et nous assurer que la charge fiscale des Canadiens n'est pas excessive, comparée à celles d'autres pays.

Qu'ils veuillent faire carrière dans les arts, dans la nouvelle économie ou dans des secteurs traditionnels, nous tenons à ce que les Canadiens aient la liberté et la possibilité de le faire au Canada. Je suis persuadé que le député reconnaît avec moi la nécessité de réduire les impôts de tous les contribuables, au nom du principe fondamental qu'il avance: l'allégement des impôts peut aider les contribuables, en l'occurrence des artistes, à avoir et à maintenir un certain niveau d'activité.

Il faudra aussi s'occuper de la question de l'impôt sur les gains en capital. Au Canada, le taux d'inclusion ordinaire des dons de valeurs cotées en bourse faits à des organismes de bienfaisance ou à des institutions est imposé à 50 p. 100. Qu'il s'agisse d'un hôpital, d'une université, d'un fonds de dotation ou d'une activité culturelle, le taux d'imposition des gains en capital s'élève à 50 p. 100. Au Canada, le taux d'inclusion des dons de valeurs cotées en bourse est assujetti à l'impôt. Aux États-Unis, il n'y a aucun impôt sur les gains en capital sur les dons de valeurs cotées en bourse.

Au fil des ans, la situation a entraîné un sérieux désavantage pour les universités, les hôpitaux et la communauté artistique du Canada. Elle a dissuadé les Canadiens dont les actifs ont une valeur nette élevée de donner des actions de sociétés cotées en bourse à des fondations culturelles ou médicales ou à des universités.

 

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Comme il l'a fait dans son rapport dissident qui était annexé au rapport sur l'étude prébudgétaire, le Parti progressiste conservateur recommande l'élimination de l'impôt sur les gains en capital sur les dons de valeurs cotées en bourse. Cette simple mesure convaincrait des Canadiens dont les actifs ont une valeur nette élevée ainsi que des Canadiens ayant une fortune relativement modeste, mais ayant réalisé d'excellents placements ces dernières années, de faire des dons qui aideraient beaucoup le secteur culturel canadien. C'est là un moyen de parvenir à ce but.

Je voudrais aussi examiner les exemples d'autres pays qui accordent des exemptions d'impôt spéciales aux artistes. En Irlande, les artistes bénéficient d'un traitement fiscal spécial. Nous avons aussi entendu parler, plus tôt aujourd'hui, du traitement fiscal accordé aux artistes dans la province de Québec. Il serait intéressant de voir le succès de telles initiatives sur une certaine période.

En général, il n'y a qu'un seul parti à la Chambre des communes qui s'oppose constamment à tout genre d'appui à l'égard des arts au Canada. Je crois même qu'il expulserait un député de son caucus s'il apprenait qu'il est allé voir une pièce de théâtre. L'engagement à l'égard des arts et de la communauté culturelle doit venir de pratiquement tous les partis à la Chambre des communes.

Bien que nous ne soyons pas d'accord avec le député quant au moyen particulier qu'il propose pour contribuer à créer un climat plus propice à la diversité dans le domaine culturel et artistique au Canada, je peux lui assurer que le Parti progressiste conservateur demeure déterminé à travailler avec les partis altruistes à la Chambre. Nous devons chercher de meilleures façons d'appuyer et d'encourager les arts et tous les genres d'initiatives créatives de la part des Canadiens, qu'il s'agisse d'arts graphiques, de l'univers point com, de tissage, de peinture, de danse ou de dramaturgie. L'une des choses qui nous définissent en tant que Canadiens est l'énergie culturelle unique que nous avons d'un océan à l'autre et que nous continuerons d'avoir grâce à l'appui et à l'encouragement de tous les Canadiens.

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer à ce précieux débat dans l'histoire de notre pays. Je veux remercier mon collègue, le député de Kamloops, d'avoir mis de l'avant ce débat. Comme il l'a expliqué, l'industrie visée est la troisième en importance au Canada et elle nous définit à titre de Canadiens dans le monde entier.

Ce n'est pas pour rien que le Canada est considéré comme le meilleur pays dans le monde où vivre. Lorsqu'on demande à des gens d'ailleurs dans quel pays ils souhaiteraient vivre s'ils devaient s'expatrier, depuis cinq ans, ils répondent unanimement le Canada.

Le député de Dauphin—Swan River a dit que son parti propose un taux d'imposition de 17 p. 100 pour résoudre tous les problèmes fiscaux du Canada. Il y a un problème qu'il passe sous silence, et je souhaiterais que lui et son parti l'abordent de manière plus réaliste avec les Canadiens. Je pense, à l'instar du député, de son parti et d'autres partis, que nous devrions envisager une réforme fiscale de tous les secteurs de notre société.

Cependant, le député oublie de dire que la télévision et la radio de la Société Radio-Canada sont l'un des meilleurs moyens dont disposent de nombreux artistes canadiens de tous les secteurs pour exposer leurs problèmes et diffuser leurs idées. Or, son parti propose de supprimer la SRC. Dans le cadre d'un débat qui a eu lieu en 1997, le candidat réformiste qui se présentait contre moi a dit expressément que la priorité de son parti serait de privatiser et d'éliminer la SRC. Quand les Canadiens sauront cela, ils réfléchiront sérieusement à ce que signifie réellement le taux d'imposition de 17 p. 100 proposé par l'Alliance canadienne.

 

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Si le gouvernement cherche des conseils, il peut regarder ce que fait le Québec. Je vais vous lire ce que fait le Québec. Dans la version québécoise de la déduction sur le revenu des droits d'auteur, les particuliers peuvent déduire les premiers 20 000 $ du revenu de produits pour lesquels ils sont les premiers titulaires du droit d'auteur. Les 10 000 $ suivants sont également en partie déductibles.

La disposition s'applique pour tous les écrivains, artistes, cinéastes, musiciens, artistes de spectacle et quiconque produit quelque chose qui est protégé par un droit d'auteur et qui génère des revenus. Étant donné que les droits d'auteur ne sont pas clairement définis par la Loi sur le droit d'auteur, une telle disposition est facile à administrer. Il ne peut y avoir aucun débat quant à savoir qui est le premier titulaire du droit d'auteur. C'est le créateur, la personne même que nous devons encourager dans tout le pays.

La déduction sur le revenu des droits d'auteur ne nécessite presque aucun calcul et elle s'intègre facilement au cadre existant de la feuille de déclaration de l'impôt sur le revenu. Il existe déjà sur cette feuille de nombreux précédents similaires, tels que la déduction pour le revenu d'emploi gagné hors du Canada ou la déduction pour les employés de certaines organisations internationales comme les Nations Unies.

Le député de Dauphin—Swan River a mentionné de nombreux pays d'Europe qui accordent des déductions généreuses à leurs communautés culturelles. Puis-je ajouter que la plupart de ces pays sont des pays social-démocrates. Cela montre une fois de plus que les social-démocrates de la Chambre des communes et de tout le pays prennent réellement la culture de notre pays très au sérieux.

Il y a quelques années, l'un des plus grands Canadiens dans l'histoire de notre pays, Stompin' Tom Connors, de Skinners Ponds, dans l'Île-du-Prince-Édouard, a dit: «Mesdames et Messieurs, garçons et filles, il y a un million d'histoires canadiennes à raconter.» La question est de savoir si le gouvernement a la volonté de les faire connaître. Cet artiste mourait de faim. Il mourait littéralement de faim. Il a parcouru tout le pays, offrant au Canada de grands succès comme Hockey Night, que je ne pourrai jamais oublier, et Sudbury Saturday Night. Il n'est pas un seul député qui ne connaisse pas au moins deux ou trois de ses chansons. Stompin' Tom Connors symbolise vraiment la lutte menée par tous les artistes qui meurent de faim en vue de rapprocher les gens de ce pays, d'un océan un autre.

L'un de mes artistes favoris de tous les temps était l'incomparable Stan Rogers, aujourd'hui disparu. Ses textes au sujet non seulement de la Nouvelle-Écosse, mais aussi du pays tout entier, des textes qui ont été portés à la scène par son orchestre, son frère Garnet et ses guitaristes, racontent essentiellement ce que c'est que d'être un pêcheur, un fermier, un mineur, une femme, un jeune et un sportif. Stan Rogers a vraiment décrit ce que signifiait être Canadien au Canada français, au Canada anglais et dans les communautés autochtones.

J'ai souvent entendu dire à la Chambre des communes et ailleurs que le Canada est fondé sur les cultures des deux peuples fondateurs: les Français et les Anglais. Je rappelle à la Chambre qu'il est en fait fondé sur trois cultures: celles de la communauté autochtone, celle de la communauté francophone et celle de la communauté anglophone. Trois cultures définissent et sont à l'origine de notre grand pays, et non pas deux.

Comme on l'a déjà précisé, Margaret Atwood a déclaré que c'est vraiment l'artiste qui subventionne la nation et beaucoup d'autres entreprises. À combien de reprises avons-nous utilisé la culture et l'art autochtones comme moyens de nous enrichir? La façon dont nous traitons nos autochtones en ce qui concerne leur culture et leur art est vraiment honteuse. Je ne peux que remarquer qu'au cours des dernières années, dans tout le pays, cette culture autochtone a commencé à prendre de l'essor. Des gens du monde entier viennent en grand nombre au Canada pour cette raison.

Je suis persuadé que, après mûre réflexion, les députés à la Chambre et plus particulièrement la députée de Parkdale par exemple qui sourit là-bas vont dire qu'il s'agit d'une superbe initiative. Je suis sûr que notre collègue va appuyer cette initiative et amener le reste du Parti libéral à comprendre son importance, notamment pour notre communauté artistique.

L'autre jour, j'étais au West Petpeswick Yacht Club dans le cadre d'une activité de financement tout à fait remarquable du Twin Oaks Hospital qui a permis de recueillir beaucoup d'argent pour la Société Alzheimer. Les cinq articles les plus prisés qui étaient en vente étaient des aquarelles originales peintes par des artisans locaux. Je veux remercier les artisans de Musquodoboit Harbour, de West Petpeswick et de toute la région de Eastern Shore, dans ma circonscription, d'avoir prêté leur temps et leur génie à cette cause très importante.

 

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Si les gens de ma région comprennent des oeuvres d'art de qualité lorsqu'ils en voient sous leur forme originale, imaginez ce que le reste du pays doit avoir dans des régions comme la Colombie-Britannique, le Yukon, l'Ontario, le Québec, les Prairies ou Terre-Neuve, par exemple, où la culture est omniprésente. C'est absolument extraordinaire.

Je ne peux que remarquer que l'une des grandes personnalités culturelles de notre pays, M. Greg Malone, a maintenant décidé d'être le candidat néo-démocrate dans la circonscription de St. John's-Ouest. Il fait passer la culture au premier plan en montrant aux gens de Terre-Neuve et du Labrador à quel point ils peuvent être fiers de leur culture. Ils n'ont pas à s'exiler pour trouver un emploi. Ils n'ont pas à déménager dans d'autres régions du pays, qui risquent de ne pas être aussi accueillantes que leurs propres collectivités, foyers et familles.

Si nous réussissons à amorcer ce genre de mouvement, nous aurons alors plus d'histoires de réussite comme celles des Rankin, des Barra MacNeil et de tous ces magnifiques groupes musicaux, ainsi que des Natalie McMaster du monde qui contribuent de façon splendide à faire valoir la musique celtique et les traditions du Cap-Breton, de la Nouvelle-Écosse et des Maritimes partout au pays. C'est tout à fait remarquable.

Je ferai en terminant une publicité gratuite pour quelques artistes de ma circonscription: Brenda Huddinott, qui fait des imprimés et des photographies superbes; Lilly Snow, qui fait un travail remarquable en photographie; et Brenda Anderson, de Eastern Passage, qui fait des peintures à l'aquarelle et à l'acrylique tout à fait magnifiques. Ma femme fait de magnifiques tableaux, en compagnie de nos voisins. Ils se réunissent à l'occasion et peignent de magnifiques aquarelles. Ils ne cherchent pas à faire de l'argent. C'est leur amour de la culture et de leur milieu qui les guident. C'est le genre de cadre qui doit croître.

Existe-t-il une maternelle où l'on ne fait pas de peinture avec ses doigts? Nous adorerions que ces enfants de cinq et six ans de partout au pays donnent libre cours à leur imagination pour notre plus grand plaisir. Les enfants et les artisans peuvent souvent nous donner des leçons, peu importe le support utilisé.

Après mûre réflexion, je sais que cette vénérée Chambre des communes et toutes les législatures provinciales analyseront avec soin ce projet de loi très important et que celui-ci franchira rapidement les étapes à la Chambre afin que nous puissions donner aux artistes de tout le pays l'occasion de demeurer dans leur collectivité et d'y élargir leur auditoire. De plus, cette mesure nous donnera l'occasion de les appuyer afin de nous permettre de croître au XXIe siècle.

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): La période prévue pour l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est reporté au bas de la liste de priorité au Feuilleton.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

 

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.) propose: Que le projet de loi C-31, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

—Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter à la Chambre le projet de loi C-31 sur l'immigration et la protection des réfugiés qui en est à l'étape de la deuxième lecture. Ce projet de loi est le fruit d'un vaste processus de consultation. Il est consécutif à une série d'engagements pris par le gouvernement afin de moderniser le système canadien d'immigration et de protection des réfugiés de façon à nous permettre de relever les défis et de tirer parti des possibilités que nous réserve le nouveau siècle.

Le projet de loi C-31 est une mesure législative vigoureuse, mais je voudrais qu'on me comprenne bien. Il entend mener la vie dure aux individus qui abusent de notre système d'immigration et de protection des réfugiés, mais pas à l'ensemble des immigrants et des réfugiés qui, pour la plupart, ont bâti ce pays et poursuivront cette tâche encore longtemps.

Ce projet de loi crée de nouvelles peines, très sévères, contre les contrebandiers, contre les individus qui se livrent au trafic des humains. Il prévoit des amendes pouvant atteindre jusqu'à 1 million de dollars ainsi que des peines pouvant allant jusqu'à l'emprisonnement à vie.

 

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Le projet de loi permettra également aux tribunaux d'ordonner la confiscation des sommes et autres biens saisis auprès de trafiquants. Il éclaircit les motifs actuels de détention et, à cette fin, contient des dispositions exclusives qui visent les personnes dont les autorités auront des raisons de croire qu'elles sont arrivées au Canada à la faveur d'activités d'introduction clandestine ou de trafic de personnes.

Le projet de loi C-31 clarifie également les critères d'inadmissibilité au Canada. Il donne aux agents de l'immigration les moyens d'empêcher l'entrée au Canada des criminels, des terroristes, des personnes qui représentent une menace pour la sécurité nationale, des auteurs de violation des droits de la personne, des membres de la criminalité organisée ou d'organisations terroristes.

Le projet de loi permettra de prévenir l'utilisation illicite du système d'obtention du statut de réfugié, en soumettant tous les demandeurs à une enquête sécuritaire préalable, en réduisant le nombre d'appels accordés aux grands criminels et en suspendant le droit d'appel des personnes accusées d'actes criminels jusqu'à ce que les tribunaux aient statué sur leur cas.

Le projet de loi C-31 simplifie également l'évaluation des demandes. Les demandes seront renvoyées à la Commission d'immigration et du statut de réfugié dans les 72 heures, au lieu du délai actuel de un à six mois.

En regroupant plusieurs étapes et critères de protection sous le pouvoir de décision unique de la Commission d'immigration et du statut de réfugié, et en combinant l'utilisation accrue de groupes spéciaux à membre unique au processus d'appel interne par écrit fondé sur le mérite, le projet de loi fera en sorte que les demandes du statut de réfugié puissent faire l'objet de décisions plus rapides et plus équitables.

En regroupant les motifs de protection sous l'autorité de la Commission d'immigration et du statut de réfugié, le projet de loi C-31 contribue à maintenir l'application régulière de la loi et à assurer des audiences équitables pour tous les demandeurs du statut de réfugié, tout en réduisant les possibilités d'examen judiciaire prolongé.

Contrairement à certains renseignements non fondés, le projet de loi C-31 n'accroît pas le nombre de motifs de protection. Il regroupe tout simplement plusieurs critères actuels et décisions pertinentes correspondantes en une seule étape. Les motifs de protection demeurent les mêmes, conformément aux obligations internationales du Canada et à la tradition humanitaire qui est la nôtre.

Le projet de loi C-31 nous permettra également de gérer plus efficacement les demandes réitérées en interdisant l'accès à la Commission d'immigration et du statut de réfugié aux personnes qui reviennent au Canada dans un délai d'un an après leur renvoi consécutif au refus de leur demande. Ces personnes pourront demander la protection de n'importe quelle de nos missions à l'extérieur du Canada. Si, après un an, elles reviennent au Canada pour obtenir la protection, elles feront l'objet d'une évaluation de risque préalable à leur renvoi, pour savoir si les circonstances de leurs demandes préalables ont changé, mais elles n'obtiendront pas le droit de présenter une nouvelle demande à la Commission d'immigration et du statut de réfugié.

Grâce à ces dispositions, le projet de loi C-31 freinera le syndrome des demandes à répétition.

Le projet de loi C-31 renforcera également l'intégrité du système de l'immigration. Il resserrera les dispositions relatives au parrainage, en nous assurant que les parrains des personnes désireuses d'immigrer au Canada seront à la fois en mesure d'assumer les responsabilités financières auxquelles ils s'engagent et disposés à le faire.

Plus précisément, le projet de loi C-31 interdit de parrainage les personnes qui négligent leurs obligations en matière de pension alimentaire pour conjoint ou enfant et les assistés sociaux.

Le projet de loi C-31 crée également une nouvelle catégorie d'inadmissibilité pour ceux qui se rendent coupables de fraude ou de fausses déclarations dans le dossier de demande d'immigration, et crée une nouvelle infraction pour ceux qui, par fraude ou fausses déclarations, aident un individu à obtenir un statut au Canada.

Pour conserver le statut d'immigrant au Canada, les résidents permanents seront tenus de manifester un attachement raisonnable à notre pays. Le projet de loi C-31 exige la présence physique au Canada des nouveaux immigrants pendant au moins deux ans pour chaque période de cinq ans de résidence pour qu'ils puissent conserver leur statut de résidents permanents.

Ces changements sont importants pour une raison toute simple. Il s'agit d'une question de respect. D'après les nombreux entretiens que j'ai eus avec des individus et des organismes canadiens, je puis assurer à la Chambre que l'on a énormément insisté sur la question. Les Canadiens veulent d'un système basé sur le respect tant de nos lois que de notre esprit traditionnel d'accueil des immigrants, des nouveaux venus. C'est ce qui explique que le projet de loi C-31 soit également rédigé de façon à améliorer notre aptitude à attirer en territoire canadien des travailleurs plus qualifiés, à accélérer la réunification des familles et à honorer la noble tradition humanitaire du Canada consistant à offrir un refuge sûr aux personnes ayant réellement besoin de notre protection.

 

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Qu'il me soit permis de rappeler les dispositions principales qui s'appliqueront dans chacun de ces domaines.

Le projet de loi C-31 modernisera le système en vigueur au Canada de sélection des travailleurs qualifiés pour faciliter aux employeurs canadiens l'accès aux meilleurs et aux plus brillants des éléments dans le monde. Dans l'état actuel des choses, il est fait appel à un modèle basé sur la profession pour sélectionner les immigrants qualifiés; il s'agit de points qui sont accordés en fonction de la formation et de l'expérience dans un domaine donné. Grâce à ce nouveau système, les immigrants seront sélectionnés en fonction de leur adaptabilité, de leur niveau d'éducation et de formation, de leur aptitudes linguistiques et de leur niveau général d'employabilité.

Dans les conditions actuelles d'un marché du travail en rapide évolution, nous devons pouvoir compter sur des gens qui peuvent s'adapter à de nouvelles responsabilités puisque les besoins du marché du travail changent avec le temps. Nous avons besoin de gens prêts à se développer, à participer, à réussir et à contribuer à notre prospérité collective dans cette nouvelle économie basée sur le savoir.

Le projet de loi C-31 permettra également d'avoir plus facilement recours à des employés étrangers temporaires hautement spécialisés pour que les entreprises canadiennes puissent continuer de soutenir la concurrence et saisir toutes les occasions de croissance. Bon nombre des travailleurs spécialisés qui viennent au Canada pour une période de temps limitée se voient offrir des poste permanents. Le projet de loi C-31 permettra à ces employés, dans certaines conditions, de faire une demande de droit d'établissement alors qu'ils se trouvent au Canada, tout comme il permettra à des étudiants étrangers qui ont obtenu leur diplôme et travaillé au Canada et qui se voient offrir un emploi permanent de demander le droit de s'établir.

Le projet de loi C-31 reconnaît également que la réunification familiale a toujours été à la base de la politique canadienne d'immigration. Les Canadiens savent que les nouveaux arrivants s'établissent plus rapidement au pays lorsqu'ils peuvent compter sur l'appui de la famille étendue.

Le projet de loi C-31 et le règlement qui en découle permettront aux conjoints et aux enfants à charge de faire une demande d'établissement alors qu'ils se trouvent au Canada, à condition de ne pas s'y trouver illégalement et de respecter certains critères d'admissibilité. Le projet de loi fera passer de dix à trois ans la période au cours de laquelle les dispositions de parrainage s'appliquent aux conjoints. Cela permettra de faire disparaître l'obstacle à la recevabilité pour les conjoints et les enfants parrainés qui peuvent être considérés comme une charge excessive au chapitre des services sociaux et de santé. Le projet de loi étendra la définition d'enfant à charge pour inclure les enfants non mariés âgés de moins de 22 ans et reconnaîtra les conjoints de faits hétérosexuels et homosexuels, conformément aux dispositions législatives adoptées récemment à la Chambre.

Le projet de loi C-31 renforcera également le processus de sélection et de réinstallation des réfugiés à l'étranger. Dans le cadre du processus de sélection, la protection aura la priorité sur la capacité de s'établir au Canada. Autant que possible, les membres d'une même famille ne seront pas séparés. On s'occupera aussi rapidement et efficacement que possible de ceux qu'il est urgent de protéger. Nous collaborerons davantage avec les groupes outre-mer chargés de l'établissement des réfugiés, et les demandes des réfugiés qui ont réellement besoin de protection ne seront plus refusées en raison de préoccupations liées à leur besoin potentiel en soins de santé.

J'ai dit clairement à de nombreuses reprises que je tiens à ce que les niveaux d'immigration augmentent au Canada. En raison du vieillissement de la population, de la baisse des taux de natalité et des pénuries de travailleurs qualifiés dans des secteurs clés, nous devons accroître nos efforts en vue d'attirer au Canada les travailleurs les mieux qualifiés de la planète et veiller à ce que toutes les régions de notre pays bénéficient de la prospérité qu'apportent les immigrants. C'est là l'objet du projet de loi C-31.

Nous fermons la porte à ceux qui profiteraient de notre système et l'ouvrons plus grande aux vrais réfugiés et aux immigrants dont le Canada aura besoin pour progresser et prospérer dans l'avenir. Voilà le double mandat de mon ministère. Il s'agit de l'approche équilibrée à l'immigration et à la protection des réfugiés que les Canadiens veulent et dont ils ont besoin pour les guider dans le nouveau siècle.

Depuis l'adoption initiale de la loi actuelle sur l'immigration, en 1976, le monde s'est transformé considérablement. Plus que jamais, les gens migrent pour faire du commerce, du tourisme, des investissements et des études, pour se perfectionner, pour partager leurs connaissances et pour réaliser leurs rêves.

 

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Le Canada profite énormément de ce mouvement universel de migration. L'immigration est une source continue de richesses pour nous sur les plans socio-économique et culturel. Nous célébrons la diversité.

Des modifications administratives sont en cours à mon ministère pour offrir un appui qui se fait attendre depuis longtemps à des bureaux clés ici et à l'étranger dans le cadre de nos efforts pour améliorer le service à la clientèle, rattraper les arriérés, réduire au minimum les litiges et répondre à tous les griefs ou allégations d'actes illicites rapidement et équitablement.

Les nouveaux crédits pour mon ministère qu'on a annoncés dans le récent budget fédéral vont permettre de renforcer l'interception des indésirables à l'étranger, d'avoir plus d'agents d'immigration à nos ports d'entrée, d'assurer un meilleur filtrage de sécurité et médical des demandeurs et d'être mieux placé pour déporter les personnes non admissibles du Canada.

Ces étapes, les nouveaux crédits, et par-dessus tout l'adoption rapide du projet de loi C-31 vont permettre de moderniser notre système d'immigration et de protection des réfugiés et donner au Canada la possibilité de relever les défis et de profiter des débouchés à l'avenir. Nous voulons profiter de ces débouchés.

Le projet de loi est le résultat de consultations intensives auprès des Canadiens, des ministres et fonctionnaires provinciaux et territoriaux et d'innombrables organisations non gouvernementales. Je garantis à la Chambre que les règlements venant appuyer le projet de loi C-31 seront élaborés d'une façon tout aussi ouverte et consultative, ce qui donnera aux députés, aux principaux intervenants en matière d'immigration et aux Canadiens en général amplement l'occasion d'exprimer leurs points de vue.

Les questions d'immigration et de protection des réfugiés sont très importantes pour notre pays. Elles représentent beaucoup de valeurs fondamentales que nous partageons. Un processus de réglementation ouvert et transparent permettra de garantir que les Canadiens appuient et comprennent les nouvelles règles.

Je garantis également à la Chambre que le projet de loi C-31 reconnaît que l'immigration est un domaine de compétence partagé par les gouvernements fédéral et provinciaux. Dans ce projet de loi, le gouvernement s'engage à continuer de consulter les provinces au sujet de ces questions importantes et de collaborer avec elles à cet égard.

Le gouvernement est déterminé à appliquer l'entente-cadre sur l'union sociale et reconnaît que l'immigration a des répercussions sur des domaines de compétence provinciale comme les soins de santé, l'éducation et les services sociaux. L'immigration apporte également au Canada, aux provinces et aux territoires d'énormes avantages sur les plans socio-économique et culturel qui viennent contrebalancer les coûts à court terme. En fait, c'est l'une des raisons pour lesquelles tant de provinces cherchent à l'heure actuelle à attirer plus d'immigrants. Je collabore très étroitement avec ces provinces.

Ce sont des immigrants et des réfugiés qui ont bâti notre pays. Aux termes des nouvelles dispositions du projet de loi C-31, les immigrants et les réfugiés continueront de le faire pour de nombreuses années à venir. C'est une mesure législative importante. J'espère qu'elle aura l'appui de tous les députés et je suis fière de proposer l'adoption, en deuxième lecture, du projet de loi C-31.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir dans le débat du projet de loi C-31, la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

Dans son bref exposé, la ministre a signalé certains des éléments de la nouvelle loi. Je veux parler un peu de son contenu. Nous entamons aujourd'hui le débat de deuxième lecture, une étape où l'on discute des projets de loi d'une façon très générale. Je ferai donc surtout des observations générales, mais je signalerai certaines dispositions précises de la loi pour appuyer certaines de mes observations.

Je parlerai aujourd'hui de ce que la loi canadienne sur l'immigration devrait nous donner. Il est important de la considérer comme un point de départ avant de commencer à discuter de ce qu'on trouve dans la nouvelle loi sur l'immigration et de ce qu'on n'y trouve pas.

Deuxièmement, je parlerai de ce que la ministre a dit à propos du projet de loi et je dirai en quoi ses affirmations se rapportent réellement à ce qu'on y trouve. Cela est important car, à entendre la ministre, on a l'impression qu'elle s'est attaquée énergiquement au problème du passage de clandestins et de l'immigration illégale, chose que les Canadiens souhaitent entendre. Le projet de loi livre-t-il la marchandise? Voilà ce dont je voudrais parler un peu aujourd'hui.

 

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La ministre a dit également que la nouvelle loi fermerait la porte arrière aux indésirables et à ceux qui abuseraient du système, et qu'elle permettrait en même temps au Canada d'ouvrir la grande porte, selon les paroles de la ministre, aux immigrants qui apporteront quelque chose à notre pays. La ministre a exprimé là de bien beaux sentiments. Tout au long de mon intervention d'aujourd'hui, j'examinerai si la nouvelle loi tient parole ou non à cet égard.

Je dirai également, encore une fois d'une façon générale, quelles sont les améliorations qu'apporte le projet de loi et ce qu'il a de positif. Je vais commencer par ce qui est positif dans le message de la ministre parce qu'on en entend parler plus que du projet de loi. Je vais en parler parce que je trouve encourageant que son message ait changé. En fait, il ressemble beaucoup au message que l'Alliance canadienne présente depuis un bon bout de temps, ce qui ne peut qu'être encourageant. Mais est-ce que la loi produira les résultats escomptés? Là est la question.

Je vais également parler de certains articles de la loi qui sont bons. Ces changements positifs vont-ils avoir pour effet d'améliorer la politique de l'immigration? C'est là le critère essentiel. Si les changements ne conduisent pas à une amélioration du système, ils ne servent pas à grand-chose. Même s'ils sont prévus par le texte de la loi, si les choses ne changent pas de manière à en permettre l'application et à améliorer la situation, qu'aura-t-on gagné en fait? Aujourd'hui, je vais parler également de cet aspect.

Je vais aussi parler de choses qui sont clairement négatives dans la loi et de choses que je trouve tellement négatives dans certains cas que nous ne pouvons vraiment pas nous attendre à une grosse amélioration de la majorité des dispositions de la loi.

Je veux parler de ce qu'on serait en droit d'attendre de la Loi sur l'immigration. Elle prévoit trois catégories. La première est celle des immigrants économiques, soit les personnes sélectionnées pour s'établir au Canada parce qu'elles devraient devenir très rapidement un atout pour notre économie. Dans la catégorie économique, il y a plusieurs sous-catégories. Il y a, par exemple, la classe des investisseurs, la classe des entrepreneurs, et plusieurs autres classes dans lesquelles les gens soient choisis en raison de leur formation et de leurs compétences particulières, ce qui est un élément très positif de la Loi sur l'immigration. L'accent doit clairement être mis sur l'amélioration du système d'immigration. C'est la première catégorie, la catégorie des immigrants indépendants.

Malheureusement, lorsque nous songeons au nombre de personnes qui sont choisies dans la catégorie des immigrants indépendants en fonction de leur aptitude évaluée à contribuer à notre économie, nous constatons qu'elles ne représentent actuellement que 15 p. 100 de tous les immigrants au Canada. Les statistiques sur l'immigration économique sont beaucoup plus élevées. C'est que les statistiques englobent des personnes à charge et d'autres personnes faisant partie de la catégorie des immigrants indépendants, mais qui ne sont jamais évaluées, même si elles peuvent contribuer très rapidement à l'économie. Il s'agit de la première catégorie.

La deuxième est celle des réfugiés, qui sont censés être choisis non en fonction de leur contribution éventuelle à l'économie de notre pays, mais en fonction d'un besoin de protection. Les Canadiens favorisent l'accueil des réfugiés authentiques. Depuis que je suis porte-parole de mon parti en matière d'immigration, il y a un an et demi, j'ai entendu des Canadiens d'un peu partout se dire très heureux, voire très fiers, de pouvoir accueillir des personnes qui ont besoin d'être protégées, des réfugiés authentiques.

 

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Ce qui les préoccupe au sujet du système de protection des réfugiés, c'est que beaucoup de personnes qui entrent au Canada comme réfugiés ne sont pas des réfugiés authentiques. La ministre en parle dans son exposé, mais la question est de savoir comment on cherche à régler ce problème. J'y viendrai plus tard.

Les Canadiens sont très heureux d'accueillir le nombre prévu actuellement, soit 23 000 réfugiés. Je n'ai pas entendu beaucoup de Canadiens s'opposer à ce chiffre. Nous devrions certes tenir des discussions, dans tout le pays, pour déterminer le nombre approprié de réfugiés. J'estime que le débat sur le système d'immigration est vraiment nécessaire, et j'espère que ce projet de loi favorisera ce débat. Il s'agit là de la deuxième catégorie, celle des réfugiés.

La troisième catégorie est celle du regroupement familial. Elle permet d'accueillir les membres de la famille des personnes admissibles dans la catégorie de l'immigration économique ou qui viennent au Canada comme réfugiés. Des règles différentes s'appliquent, mais il s'agit au fond du même processus.

Il s'agit de réunir les personnes à charge—notamment les enfants et le conjoint—de la personne qui a été acceptée à titre de réfugié ou d'immigrant indépendant, afin de regrouper les familles. Il est certain que notre système actuel laisse à désirer sur ce plan.

Qu'on demande à n'importe quel député si notre système est efficace en ce qui concerne le regroupement des familles, et il répondra certainement que le système est loin de bien marcher. Chacun de nous a eu dans sa circonscription des gens qui sont venus demander de l'aide pour regrouper leurs familles, des familles dont les membres sont restés séparés de trois à cinq ans et même davantage. Le système est donc gravement déficient et il s'agit de voir maintenant si la nouvelle loi aidera à résoudre le problème. Voilà donc les trois catégories.

J'aborderai l'étude du projet de loi en me posant les questions suivantes: quel est le degré d'efficacité du système lorsqu'il s'agit d'accepter des immigrants indépendants? D'accepter les réfugiés authentiques tout en fermant la porte aux faux réfugiés, aux personnes qui risquent de faire du tort à notre pays ou qui constituent une menace pour la sécurité nationale? On a beaucoup parlé de cette question récemment. Dans son exposé, la ministre a expliqué, dans son optique à elle, ce que la loi a fait à cet égard. Mon point de vue diffère légèrement du sien, mais j'y reviendrai.

Il a été très intéressant d'observer la ministre et d'écouter ses propos depuis le dépôt du nouveau projet de loi qui faisait suite à une fuite entourant la version provisoire de la loi, dont j'ai reçu copie plus d'un mois avant le dépôt du projet de loi C-31 à la Chambre. Cette loi a soulevé beaucoup de discussions longtemps avant le dépôt officiel du projet de loi.

Bon nombre des déclarations de la ministre reflètent ce que pensent et ce que veulent les Canadiens en matière d'immigration. Si les objectifs et le contenu de cette nouvelle mesure législative correspondent à ce qu'en a dit la ministre, ce projet de loi ne pourra avoir que des effets positifs dans les secteurs qui reflètent ce que veulent les Canadiens.

Au cours de ma présentation aujourd'hui, les Canadiens constateront que ce que dit la ministre et que ce que renferme effectivement le projet de loi C-31, soit la nouvelle Loi sur l'immigration, ne concordent absolument pas. Je reviendrai sur cet aspect de la question dans quelques minutes. Au préalable, j'aborderai dans les grandes lignes le contenu de la loi.

La nouvelle loi traite des aspects de l'immigration non liés à l'administration. Je ne parle pas ici de l'efficacité de la loi sous ce rapport. Elle fournit un cadre législatif, mais elle ne traite pas de l'application de la loi. Il y est question de la sélection des immigrants, et je m'arrêterai sur ce qu'elle dit et ne dit pas à cet égard. Elle précise qui peut entrer au Canada et qui ne le peut pas. Elle traite de l'exécution de la loi dans une certaine mesure. Il y est question de la détention et de la libération des gens qui se présentent au Canada en réclamant le statut de réfugié ou qui entrent dans une autre catégorie. Il y est question d'appels, et de protection des réfugiés. On y aborde la question de la CISR, de la nouvelle Section du statut de réfugié et de la refonte de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. On y parle des infractions en matière d'immigration, probablement dans un langage qui est plus facile à comprendre que celui de la loi actuelle. On y aborde aussi d'autres questions techniques.

 

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Le projet de loi aborde de nombreux aspects différents, mais arrêtons-nous à ce qui y est prévu et qui constitue, selon moi, une solution à tout ce dossier. Examinons le cas des catégories indépendantes. À quoi sert le système d'immigration? Le système d'immigration doit, plus que toute autre chose, permettre au Canada de choisir ses immigrants parmi les personnes qui contribueront le plus possible au bien-être de notre pays. Je suis convaincu que l'immigration a exercé, de façon générale, une influence très positive sur le Canada.

Je suis originaire du centre-est de l'Alberta, une région que les immigrants ont contribué à rendre très prospère au cours du dernier siècle. D'ailleurs, on peut en dire autant de toutes les autres régions du Canada, où l'immigration a contribué à édifier notre pays et à nous assurer un niveau de vie très élevé. C'est important.

À quoi servait l'immigration dans ma région, le centre-est de l'Alberta? Comment les immigrants étaient-ils choisis, comment les choses se passaient-elles? Les responsables de l'immigration ont souvent visé juste dans l'histoire du Canada; ils savaient de quel genre de personnes le pays avait besoin, et qui voulait venir s'installer chez nous. Dans le cas de l'ouest du Canada notamment, le ministère de l'Immigration a su recruter les personnes qu'il fallait pour développer l'agriculture.

La circonscription de Lakeland que je représente, dont le territoire court de l'est d'Edmonton jusqu'à la frontière Saskatchewan-Alberta, est une région agricole que des immigrants de diverses provenances ont développée. Ce sont les immigrants d'origine britannique qui ont lancé l'industrie agricole dans cette région. De petits groupes de colons ukrainiens, allemands et scandinaves ont également aidé à bâtir notre pays. Plus tard, au début du siècle précédent, d'autres immigrants ukrainiens, allemands et autres ont suivi en grand nombre et sont venus s'installer dans cette région qu'ils ont rendue très prospère en y développant l'agriculture.

Nous savons tous que l'agriculture n'est pas toujours bien portante. Dans le secteur des grains notamment, les choses ne vont pas bien à l'heure actuelle, mais il n'en reste pas moins que dans une perspective historique l'industrie agricole a connu la prospérité, et cela grâce aux immigrants. Bien sûr, tout député peut dire que sa circonscription compte des immigrants qui ont aidé à bâtir le Canada et à en faire le pays dont nous sommes tous fiers. La participation des immigrants fait partie de notre histoire. Il faut se demander si le projet de loi permettra cette contribution à l'avenir.

Peu de Canadiens, dont la ministre d'ailleurs, sont prêts à dire que le système fonctionne bien et facilite la sélection d'immigrants susceptibles d'ajouter à brève échéance à la vigueur de notre économie. Un grand nombre de ceux qui arrivent comme immigrants indépendants réussissent bien, mais leur succès n'est pas attribuable au système. Je suis d'avis qu'il y a bien des gens qui ne tarderaient pas à contribuer à notre économie, mais qui ne peuvent pas entrer au Canada. Au bout d'un an ou deux, ces gens n'essaient même plus de venir au Canada et se dirigent vers d'autres pays. Ils ont le choix. Le Canada n'est pas une destination unique. C'est notre système qui ne fonctionne pas.

 

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Je m'arrêterai maintenant sur certaines bonnes modifications que propose le projet de loi C-31. Depuis notre arrivée au Parlement, nous, de l'opposition officielle, avons toujours essayé de ne pas nous limiter à éreinter ou à critiquer les projets de loi dont nous sommes saisis, pour proposer d'autres solutions. Il est important que nous le fassions. Si nous nous arrêtions seulement sur les aspects négatifs, je doute que les Canadiens trouveraient que cela correspond à ce qu'ils veulent. Ils veulent que l'opposition, surtout l'opposition officielle, parle autant de ce qui fonctionne bien et de ce qu'il y a de bon dans les modifications proposées que de ce qui va de travers.

La nouvelle Loi sur l'immigration est rédigée en un langage plus simple que la loi actuelle, ce qui est excellent. Elle est aussi beaucoup plus facile à lire et moins volumineuse que la loi actuelle, car cette dernière est un véritable embrouillamini. Elle a été élaborée en 1975 et a été modifiée à maintes reprises depuis; en 1989, on l'a transformée en profondeur, lors de la création de la CISR. En 1993, on a aussi apporté de grands changements à la loi de 1989. Au cours des 25 dernières années, on a apporté des modifications majeures à cette loi, de sorte que ce n'est plus vraiment la loi de 1975.

Malheureusement, les changements n'ont pas porté fruit. Je dirais même que notre présent système d'immigration ne fonctionne pas aussi bien que celui des années 50 et 60. Peu de députés ici contesteraient cette affirmation, et probablement pas la ministre elle-même. C'est pourquoi elle a déposé un nouveau projet de loi, j'en suis convaincu.

Malheureusement, le fait que le projet de loi soit beaucoup plus mince que la loi présente aussi certains inconvénients. L'un des principaux, c'est le nombre d'aspects qui ne seront pas décrits précisément dans la loi, mais seront plutôt soumis à l'application de règlements.

La loi est extrêmement vague sur les catégories d'immigrants indépendants et tout cet aspect positif de l'immigration. Je sais que bien des réfugiés apportent rapidement une contribution valable à notre économie, mais ils ne sont pas choisis pour cette raison, du moins je le crois. À l'heure actuelle, on choisit les réfugiés notamment pour leur éventuelle capacité de s'adapter à la vie au Canada. En général, le système de détermination du statut de réfugié sert à fournir un refuge à ceux qui en ont besoin.

Voyons toute la catégorie des immigrants indépendants qui est vraiment le pilier de notre système d'immigration. Quelle proportion du projet de loi C-31 y est consacrée? Le tiers peut-être? La moitié, étant donné que c'est un aspect extrêmement positif de l'immigration? Non. Seulement deux courts paragraphes dans toute la loi traitent de la catégorie des immigrants indépendants ou de la catégorie des immigrants de la composante économique, comme les appellent le gouvernement et le secteur de l'immigration. Le reste relèvera du Règlement. C'est une des raisons pour lesquelles le projet de loi est si mince.

Celui-ci est d'autant plus facile à lire et il est très bien organisé, mais il présente beaucoup de lacunes.

En laissant beaucoup de choses relever du Règlement, le gouvernement nous demande, en fait, de signer un chèque en blanc aux hauts fonctionnaires et à la ministre de l'Immigration. C'est absolument inacceptable. Étant plus court, le projet de loi est plus facile à lire, mais il est plus court pour des raisons qui ne sont pas très positives.

 

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Nous félicitons le gouvernement d'avoir supprimé le droit des grands criminels d'interjeter appel devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Beaucoup de Canadiens, y compris de nombreux membres du système de l'immigration qui travaillent auprès des réfugiés, se sont plaints de ce que de grands criminels notoires puissent interjeter appel par-dessus appel. Le projet de loi supprime au moins un niveau d'appel pour les grands criminels, quoique tous les niveaux qui s'ajoutent pour la plupart des candidats à l'immigration et des demandeurs du statut de réfugié ralentiront le processus.

La prochaine chose qu'il importe de reconnaître, à mon avis, c'est que, pour la première fois, le Canada présente une définition de trafic de personnes, ce qui n'a jamais été vraiment défini dans le passé. Il est bon de constater que l'article 111 du projet de loi définit ce qu'il faut entendre par trafic de personnes. Nous avons déjà entendu les expressions «passage de clandestins» et «trafic de personnes». Nous les avons souvent utilisées comme synonymes même s'il existe des définitions assez largement acceptées partout dans le monde. Toutefois, la définition sera en bonne partie déterminée par le règlement qui sera pris plus tard.

Il est inacceptable qu'on s'en remette trop aux règlements parce que lorsqu'on examine un nouveau projet de loi on ne sait pas ce qu'il renferme avec certitude. Le projet de loi présente une définition, et c'est une bonne chose. Cependant, nous ne saurons pas avec certitude de quoi il retourne ni dans quelle mesure la définition sera utile tant que le règlement ne sera pas pris.

Un autre élément positif est représenté par l'article 114, qui, nous l'espérons, donnera aux tribunaux des balises claires en leur fournissant une liste de circonstances aggravantes quand ils jugeront des personnes accusées de trafic de personnes. Autrement dit, cette liste déterminera la sévérité de la peine et sa durée, entre autres choses. C'est important, c'est utile et cela ne peut qu'améliorer la loi actuelle, mais je dirais qu'il en faudrait bien davantage. C'est un pas dans la bonne direction, mais on ne va malheureusement pas assez loin.

Il nous arrive très souvent de ne pas être d'accord avec l'orientation qu'adopte le gouvernement, les principes qui nous animent étant diamétralement opposés sur une foule de questions. C'est bon que pour une fois à la Chambre des communes on ait des vues très différentes quant à la façon de gérer le pays et à la voie qu'il faut lui faire suivre.

Je crois que nous assisterons pour la première fois lors des prochaines élections fédérales à un vrai débat idéologique entre deux partis. Je n'ai pas de problème avec les libéraux. Ils forment un gouvernement majoritaire et il n'est que juste que leurs façons de voir les choses se reflètent dans les lois. Cependant, le problème c'est qu'il n'y a pas une définition assez claire dans la loi. Comme à l'habitude, les libéraux font les choses à moitié et ne vont pas jusqu'à définir clairement ce qu'ils souhaitent.

Cela me préoccupe et préoccupe les députés de l'Alliance canadienne que de voir le gouvernement refuser d'entrer davantage dans les détails, tant et si bien qu'il nous faudra attendre de voir le règlement avant d'être vraiment fixés. C'est un problème qui se pose tout au long de ce projet de loi, comme les députés s'en doutent. Je vais y revenir plus longuement par la suite, car l'enjeu est important à mon avis.

 

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Je voudrais mentionner une autre chose positive au sujet de ce projet de loi. Il s'agit de la disposition concernant le recours à un examen par un seul membre de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, ce qui devrait permettre à celle-ci de traiter plusieurs cas au moins au cours de la première série d'appels, et c'est une bonne chose. C'est très bien d'avoir un examen par un seul membre de la commission tant qu'il y a raisonnablement moyen de faire appel de sa décision. L'appel ne doit pas nécessairement être interjeté devant les tribunaux.

À mon avis, notre système devrait prévoir un premier palier d'audience avec droit d'appel devant un ou plusieurs membres qualifiés et expérimentés de la CISR. Dans certains cas, je pense qu'un comité de deux ou trois membres serait souhaitable. Le système le prévoit déjà dans une certaine mesure, mais les appels devant les tribunaux et notamment la cour fédérale sont encore permis. Cela veut dire que les appels sont encore plus nombreux qu'ils ne l'étaient par le passé. L'examen par un seul membre de la commission devrait permettre d'accélérer le processus. Il y a ensuite le deuxième palier d'appel devant la CISR même, ce qui ralentira considérablement le processus, sans compter le palier d'appel devant les tribunaux.

Prise isolément, cette disposition est positive, mais combinée avec les autres dispositions du projet de loi, elle ne va pas faire grand-chose. Les dispositions positives de ce projet de loi ne vont malheureusement pas beaucoup aider à améliorer les choses. On en comprendra les raisons au fur et à mesure de ce débat.

Certaines modifications sont manifestement négatives. J'ai déjà longuement parlé de la première, qui est l'une des principales, mais je pense que c'est une chose sur laquelle on doit s'arrêter davantage. Je parle du fait que dans cette mesure législative, on laisse beaucoup de place au règlement d'application.

J'ai donné l'exemple de la catégorie des immigrants indépendants. Il n'y a que deux brefs paragraphes dans tout le projet de loi pour définir qui devrait être inclus et comment le système fonctionnera. Cela n'est pas suffisant pour qu'on puisse s'attendre à ce que nous appuyons ce projet de loi. J'espère que les députés libéraux ne l'appuieront pas sans avoir davantage de détails et sans mieux connaître les principes fondamentaux qui vont être appliqués. On laisse trop de place au règlement d'application.

On est retombé dans le système des droits d'établissement. En d'autres termes, les gens se trouvant déjà au Canada pourraient demander sur place le droit d'établissement. Je pense que dans certains cas, cela serait une chose positive et tout à fait sensée.

Prenons l'exemple d'étudiants étrangers qui ont étudié au Canada, qui ont très bien réussi et obtenu un diplôme ou des diplômes dans un certain domaine ou de très grandes compétences dans un domaine technologique. Ces étudiants ont étudié au Canada et se sont adaptés à la vie au Canada et peut-être, dans une certaine mesure, au milieu de travail. À l'heure actuelle, ils doivent quitter le pays pour demander le droit de s'établir chez nous. Beaucoup ne reviennent jamais. Ce n'est pas le but visé. Le but de ces étudiants étrangers est de retourner dans leur pays d'origine et, dans bien des cas, de l'aider à progresser.

L'immigration au Canada devrait profiter à notre pays. Ce que nous voulons faire, c'est attirer les meilleurs parmi ces étudiants et les encourager à rester chez nous. Il est tout à fait constructif de leur permettre de demander de s'établir au Canada à partir d'ici. Cela pourrait faire en sorte qu'un plus grand nombre des meilleurs étudiants étrangers décident de rester ici, car ils peuvent demander à devenir des résidents permanents à partir de notre pays. C'est une initiative qui mérite d'être applaudie.

Toute la notion voulant qu'on accepte généralement beaucoup plus de gens à partir du Canada est un véritable problème. C'est une chose qui s'est produite dans le passé et qui s'est révélée catastrophique. Des gens qui n'étaient manifestement pas admissibles ont présenté une demande et ainsi, un nombre de plus en plus grand de gens sans aucun statut juridique se sont retrouvés au Canada.

 

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Ce qui s'est produit dans le passé, c'est que nous accordions une amnistie générale à des dizaines de milliers de personnes, parce que le système ne pouvait pas traiter le nombre croissant de demandes. Les autorités gouvernementales ont, du moins à quelques occasions depuis les 30 dernières années, accordé une amnistie générale permettant à quiconque se trouvait ici dans certaines circonstances de rester dans notre pays.

Notre système accepte des gens qui n'ont pas fait l'objet d'une présélection. Ils n'ont pas vraiment été choisis en fonction de l'apport qu'ils pourraient représenter pour notre pays. Ils sont toujours en attente d'un statut, mais l'arriéré de travail est devenu tellement important qu'il nous faut recourir à ces amnisties générales. D'après ce que m'ont dit des personnes à l'intérieur du système, les amnisties générales ont causé énormément de problèmes.

Je pense que c'est un problème. Dans certains cas, c'est une bonne chose, mais d'une manière générale, cela ne pourra pas fonctionner. Il a été prouvé que cela ne pourrait pas fonctionner. Il est important de ne pas laisser cela s'immiscer dans la loi. J'espère que le gouvernement se rendra compte que cela ne pourra pas fonctionner.

Dans le même ordre d'idée, la disposition concernant la double intention permet à quelqu'un d'obtenir un visa de visiteur même lorsque cette personne compte clairement immigrer au Canada, ce que le système actuel ne permet pas. Il s'ensuivrait le même genre de problème. Des gens viendraient dans notre pays à titre de visiteurs et, une fois chez nous, ils diraient qu'ils demandent le statut d'immigrant reçu et qu'ils veulent s'établir dans notre pays. Entre-temps, ils pourraient rester ici tout le temps que durerait le processus.

Évidemment, il y a déjà un arriéré épouvantable de demandes à traiter. Pour quelqu'un qui présente une demande d'immigrant indépendant, l'attente peut être de deux ans, en moyenne. Souvent, l'attente est trop longue et les gens abandonnent tout simplement. Entre-temps, nous constatons que les visas de visiteur sont continuellement prolongés ou que des gens qui n'ont aucun statut officiel habitent au Canada. Les chiffres continueront d'augmenter et d'engorger toujours plus le système, jusqu'à ce que celui-ci s'effondre. À mon avis, ce système est déjà au bord de l'éclatement. J'estime aussi que le projet de loi ne réglera pas les problèmes. Ce sont là quelques aspects négatifs.

La réglementation est très importante. Cependant, il faut inclure dans la loi beaucoup d'éléments laissés dans la réglementation de sorte qu'ils fassent partie du débat public et que tous les Canadiens puissent parler en connaissance de cause lorsqu'ils font part de leurs opinions à leurs députés.

L'inclusion dans la nouvelle loi des principes de la décision Singh est un autre changement extrêmement important qui risque de provoquer l'effondrement du système. Dans cette décision de 1985, la Cour suprême déclarait, je crois, que les gens qui sont au Canada ont droit à une audition et à un appel avant d'être expulsés lorsqu'ils demandent à rester au Canada.

Les gouvernements, c'est-à-dire le gouvernement conservateur précédent et le gouvernement libéral actuel, ont beaucoup élargi l'interprétation de cette décision. Ils affirment que la décision Singh signifie que quiconque, y compris un non-Canadien qui vient au Canada, même illégalement, a droit à la pleine protection offerte par la Charte des droits et libertés.

C'est ainsi qu'ils ont interprété la décision. Cette interprétation a été transposée dans la loi actuelle, mais seulement dans les généralités du début. Aux termes de sa disposition d'application, cette nouvelle mesure législative assure à tous indifféremment la protection de la Charte canadienne des droits et libertés.

Qu'est-ce que cela signifie au juste? Cela signifie qu'il ne fait aucun doute que cette interprétation s'appliquera à tous les domaines de la loi. Cela est fort préoccupant car l'application de l'article 4 est même clairement élargie de façon à inclure les personnes ne jouissant pas de la nationalité canadienne, les personnes ne bénéficiant d'aucun statut au Canada, les personnes n'étant même pas physiquement présentes au Canada, et les personnes venues d'ailleurs qui ont pu présenter une demande d'admission au Canada.

 

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Je ne sais pas si les gens croiront ce que je dis, mais il n'en demeure pas moins que c'est vrai. C'est prévu à l'article 4 de la loi. C'est absurde. Aucun autre pays dans le monde n'accorderait ce type de protection aux personnes dont le seul lien avec le Canada est le fait qu'elles souhaitent y venir, en qualité de visiteurs ou d'immigrants.

Les spécialistes de l'immigration que j'ai consultés au sujet de ce projet de loi affirment que tel sera précisément le résultat de cette mesure législative, que des retards seront cumulés, et que cela pourrait même entraîner une interruption quasi totale du processus lorsque se produiront les contestations judiciaires et que démarrera le processus coûteux donnant, à des personnes non canadiennes et non présentes sur le territoire canadien, accès au système judiciaire canadien.

Ce facteur qui figure dans la disposition concernant la mise en application causera des problèmes à long terme. Si cette mesure législative est adoptée, peu importe les règlements qui seront pris, nous aurons un système d'immigration qui fonctionnera moins bien que celui que nous avons maintenant.

J'ai commencé mes remarques en disant que la plupart des gens à la Chambre seraient prêts à reconnaître que le système actuel ne fonctionne pas bien. Les gens qui contribueraient à enrichir notre pays et à faire croître notre économie peu de temps après leur arrivée et qui combleraient un besoin qu'a le Canada abandonnent souvent leurs démarches et vont s'installer dans un autre pays comme les États-Unis, l'Australie ou la Nouvelle-Zélande, des pays très semblables au Canada. Beaucoup d'autres qui essaient d'entrer dans notre système restent dans l'incertitude pendant des années. Ce projet de loi n'aidera pas ces gens.

Le projet de loi aidera-t-il les véritables réfugiés? Non, il ne les aidera pas. Il n'y a rien dans cette mesure législative qui amènera le gouvernement à choisir plus de gens dans les camps de réfugiés outremer.

Si le Canada veut aider les véritables réfugiés, ne devrions-nous pas choisir les gens qui ont été désignés comme étant des réfugiés et qui sont dans des camps outremer? Ne serait-ce pas là la chose sensée à faire?

Les Nations Unies ont un très bon système dans ce domaine. Je ne suis pas toujours un ardent partisan des Nations Unies. J'ai des préoccupations à bien des égards. Toutefois, en ce qui concerne les réfugiés, cet organisme a un système qui est très capable de déterminer qui est un réfugié, en particulier lorsqu'il s'agit des gens qui sont dans les camps de réfugiés.

Au grand déshonneur du Canada, je dirai que, sur les 23 000 réfugiés que nous avons choisis l'an dernier, probablement moins de 3 000 venaient de camps de réfugiés outremer. Environ 7 000 venaient d'outremer, mais plus de la moitié de ces gens avaient été rejetés par les systèmes européens. Les fonctionnaires canadiens les ont choisis et les ont fait venir au Canada comme réfugiés. Je ne dis pas que c'est mauvais parce que c'est un choix sensé dans bien des cas, mais pourquoi ne pas prendre des gens qui sont dans des camps, comme ceux au Bangladesh, par exemple, des gens qui sont dans ces camps depuis plus de 50 ans?

Si le gouvernement est compatissant, pourquoi la loi n'aide-t-elle pas ces personnes? Elle ne fonctionne pas pour les vrais réfugiés. Améliore-t-elle la situation des gens qui entrent au Canada illégalement et accroît-elle la protection des Canadiens contre le crime organisé, les terroristes, les grands criminels ou ceux qui viennent au Canada avec l'aide de passeurs? La réponse est non. Il y a de bons éléments dans la loi, comme les peines plus sévères, qui amélioreront la situation, mais, lorsqu'on examine le projet de loi dans son ensemble, on se rend compte qu'il ne protègera pas mieux le Canada que la loi actuelle.

Le projet de loi contribuera-t-il à réunir les familles? Ça me fend le coeur, et je suis certain qu'il en va de même pour tous les députés, de voir qu'il y a tant de familles dans chacune de nos circonscriptions qui attendent depuis des années d'être réunies. Elles attendent depuis deux, trois ou cinq ans et même plus longtemps parce que notre système est très mal en point. Selon moi, rien dans le projet de loi ne réglera ce problème.

Dans l'ensemble, le projet de loi n'améliorera pas le système. Elle le ralentira. J'encourage le gouvernement à envisager sérieusement d'amender considérablement le projet de loi. Nous pouvons lui proposer les amendements à apporter.

 

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[Français]

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-31 qui concerne l'immigration et la protection des réfugiés.

Ce projet de loi a été déposé le 6 avril dernier. Il vise à remplacer la loi actuelle qui date de 1976 et qui a été modifiée plus d'une trentaine de fois.

La ministre, dans son annonce du projet de loi tant attendu, l'a qualifié comme étant dur. Elle a déclaré que celui-ci visait à fermer la porte aux clandestins afin de l'ouvrir toute grande aux immigrants. En effet, une bonne partie du projet de loi met l'accent sur la fermeture de la porte. On y retrouve le renforcement des mesures destinées à contrer les fraudes, les fausses déclarations et les abus, l'interdiction de l'accès au territoire aux criminels et à ceux qui représentent un risque pour la sécurité, l'aggravation des peines, et ainsi de suite.

À la lecture du projet de loi, on remarque que, bien que ce dernier prévoit plusieurs mesures pour fermer la porte aux clandestins, comme le disait la ministre, la plupart des mesures annoncées pour ouvrir toute grande la porte ne sont que des propositions de modifications réglementaires. Comme le disait tout à l'heure mon collègue de l'Alliance canadienne, pour ce qui est de bon nombre de mesures qu'on aurait cru intégrées au projet de loi dans certaines dispositions, les parlementaires devront rester sur leur faim puisque plusieurs propositions devront être intégrées dans un règlement. À cet égard, on n'en sait pas vraiment plus sur la portée de ce projet de loi.

Par son projet de loi, la ministre cherche, notamment, à répondre à un fort courant de l'opinion publique américaine qui croit que le Canada est devenu un Club Med pour les terroristes et qui est d'avis que les États-Unis devraient resserrer les contrôles aux frontières, ce qui risque d'entraver le commerce entre les deux pays.

Parmi les mesures visant à décourager la migration clandestine, le projet de loi prévoit l'imposition de lourdes peines, soit des amendes allant jusqu'à un million de dollars ainsi que la prison à perpétuité pour les passeurs qui font entrer les immigrants au pays et pour ceux qui se livrent au trafic de personnes.

La refonte de la loi, en plus de serrer la vis aux illégaux, vise aussi à désengorger un système qui, depuis quelques années, ne permet pas au Canada d'atteindre ses objectifs de 300 000 nouveaux arrivants par année. Notons que, paradoxalement, il y a actuellement plus de 400 000 personnes au Canada et ailleurs dans le monde qui attendent de savoir si elles pourront s'installer au Canada.

Il est clair que le système actuel démontre qu'il y a de plus en plus de personnes qui veulent entrer au Canada, mais aussi que le processus et la procédure mis en place, autant dans l'étude des demandes de statut de réfugiés que des demandes de résidence permanente, sont déficientes, et que le traitement et les modalités d'étude de ces demandes pourraient être améliorés.

Le besoin d'agir avec plus de célérité dans la détermination du processus de détermination du statut de réfugié est au nombre des mesures les plus positives du projet de loi. En effet, la ministre a souligné qu'il faudra dorénavant 72 heures au lieu de trois mois pour déférer une demande de statut de réfugié à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qui devra prendre sa décision dans un délai de six à neuf mois.

La ministre a également rappelé que son projet de loi simplifiera grandement le processus de traitement des demandes de réfugiés de façon à réduire les délais maximum de cinq à deux ans. De nouvelles mesures seront également mises en place pour moderniser le mode de sélection des travailleurs immigrants qualifiés et des travailleurs temporaires.

Il faut préciser que ces mesures ne s'appliqueront pas au Québec puisque, en vertu de l'entente Canada-Québec de 1991, le Québec sélectionne ses propres immigrants économiques. La sélection des réfugiés et la réunification des familles restent néanmoins de juridiction fédérale.

Au niveau des obligations du Canada en matière des droits de la personne, en tant que signataire des textes internationaux des droits de la personne, il a des obligations en matière des droits des citoyens. Le nouveau projet de loi doit tenir compte des normes établies dans ces textes. Malheureusement, malgré quelques références, le projet de loi n'intègre pas les textes pertinents.

 

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Par exemple, à l'égard de la Convention de 1951 sur les réfugiés, bien que le mandat du Haut-Commissariat pour les réfugiés soit celui de protéger les réfugiés, cette responsabilité incombe également aux États partie de la Convention.

L'instrument fondamental, voire la clé de voûte du système de protection internationale des réfugiés, est le respect du principe de non-refoulement reconnu par les États et consacré à l'article 33, qui stipule, et je cite:

      [...] qu'aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières d'un territoire où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques.

En ce qui a trait à la Convention contre la torture, le projet de loi, à l'alinéa 90(2)a) se réfère à la Convention contre la torture et prévoit la protection de personnes qui sont menacées de torture, tel que défini à l'article 1 de la Convention.

Cependant, le projet de loi ne respecte pas complètement l'article 3 de la Convention qui interdit le refoulement de toute personne qui serait menacée de torture. En effet, selon le projet de loi, l'interdiction ne s'applique pas aux personnes jugées non admissibles pour motif de grande criminalité ou de sécurité, soit le paragraphe 108(2).

En ce qui a trait à la Convention relative aux droits de l'enfant, l'article 3 de cette Convention oblige les gouvernements à faire de l'intérêt supérieur de l'enfant une condition et une considération primordiales dans toutes les décisions qui le concernent. Le projet de loi, par contre, ne propose que de tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit la détention automatique de toute personne qui arrive au Canada dans le cadre d'une opération organisée par des trafiquants, tout en n'accordant aucun statut particulier aux demandeurs de statut de réfugié d'âge mineur. Or, l'alinéa 37b) de la Convention stipule que:

      [...] les États partie veillent à ce que

      b) nul enfant ne soit privé de liberté de façon illégale ou arbitraire. L'arrestation, la détention ou l'emprisonnement d'un enfant doit être en conformité avec la loi, n'être qu'une mesure de dernier ressort et être d'une durée aussi brève que possible;

Par ailleurs, la Convention prévoit, à son article 22, ce qui suit:

    Les États partie prennent les mesures appropriées pour qu'un enfant qui cherche à obtenir le statut de réfugié ou qui est considéré comme réfugié en vertu des règles et procédures du droit international ou national applicable, qu'il soit seul ou accompagné de ses père et mère ou de toute autre personne, bénéficie de la protection et de l'assistance humanitaire voulues pour lui permettre de jouir des droits que lui reconnaissent la présente Convention et les autres instruments internationaux relatifs aux droits de l'homme, ou de caractère humanitaire [...]

En ce qui a trait au troisième texte dont le projet de loi ne traite pas et ayant trait à la Commission interaméricaine des droits de l'homme, cette Commission vient de rendre public, il y a quelques mois, un rapport sur le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié.

Le projet de loi C-31 à l'étude aujourd'hui répond à deux des recommandations de ce rapport, en incluant un appel sur le fond pour les revendicateurs du statut de réfugié et en réunissant la révision de risque avant le renvoi à la décision prise par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Cependant, et de l'avis du Bloc, il reste beaucoup d'autres recommandations auxquelles le projet de loi ne répond pas du tout, voire aggrave la situation actuelle. Ainsi par exemple, le rapport demande que la décision sur la recevabilité soit placée sous la compétence de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

À cet égard, le projet de loi, au contraire, élargit les catégories de personnes dont la demande sera déclarée irrecevable et qui n'auront donc jamais l'occasion d'être entendues par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

 

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Un autre aspect du projet de loi, c'est toute la question de la détention. Au Canada, nous avons eu un large débat sur le sujet, débat qui a débuté, entre autres, au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration et qui, j'en suis convaincu, va se poursuivre lors de l'étude de ce projet de loi. Ce débat porte particulièrement sur les articles 50 à 55.

Le Bloc québécois s'inquiète particulièrement du fait que le projet de loi prévoit la détention automatique de toute personne qui arrive au Canada dans le cadre d'une opération organisée par des trafiquants. Plus particulièrement, le Bloc reproche au projet de loi de n'accorder aucun statut particulier aux demandeurs de statut de réfugié d'âge mineur et ce, en dépit du fait que le Haut-Commissariat pour les réfugiés a récemment signalé à Immigration Canada qu'il était contre les règles internationales d'emprisonnement de jeunes réfugiés, sauf exception, et pour de très courts laps de temps, tel que prévu dans la Convention des droits de l'enfant.

Conséquemment, le Bloc québécois poursuivra sa lutte pour que les mineurs qui demandent le statut de réfugié soient exemptés du processus de détention. Outre le cas des immigrants clandestins, le projet de loi prévoit trois motifs principaux de détention: risque de fuite, danger pour la sécurité publique et questions d'identité. Ces trois motifs se retrouvent déjà dans la loi actuelle. Cependant, à plusieurs égards, le projet de loi élargit les dispositions relatives à la détention.

De plus, le projet de loi accorde aux agents d'immigration de nouveaux pouvoirs de détention aux points d'entrée sur la base de la «convenance administrative», par exemple, afin de compléter un contrôle. Les agents pourront également détenir des gens lorsqu'ils ont des motifs raisonnables de soupçonner leur non-admissibilité pour motif de sécurité ou atteinte aux droits de la personne. Or, à cet égard, on peut se demander s'il était vraiment important d'ajouter de nouveaux motifs de détention fondés sur la convenance et les soupçons, les motifs de danger au public et de risque de fuite couvrant déjà toutes les situations où la détention est nécessaire.

Le projet de loi élargit les mesures relatives à la détention sans mandat. Actuellement, les arrestations sans mandat ne sont permises que dans certaines circonstances plutôt restreintes. Or, en vertu du projet de loi, les agents d'immigration pourront arrêter et détenir sans mandat les personnes jugées non admissibles, même si elles ne sont pas sur le point d'être renvoyées. C'est donner un large pouvoir à ces agents qui déjà, dans le rapport du Comité permanent, indiquaient qu'à bien des égards, ils n'avaient souvent pas la formation pour prendre les décisions nécessaires jusque, dans une certaine mesure, sur le bien-fondé du demandeur.

Nous nous inquiétons donc fondamentalement des pouvoirs accrus donnés aux agents d'immigration dans la prise de décision de la détention et dans certaines évaluations qu'ils ont à faire dans le cas de demandes bien particulières.

De plus, le projet de loi élargit les mesures relatives à la détention pour motif d'identité. Or, toute exigence de pièces d'identité nuit aux réfugiés. En effet, ces derniers sont souvent obligés de fuir sans leurs documents, car c'est précisément leur identité qui les expose à la persécution.

Actuellement, les détentions pour motif d'identité ne peuvent se faire qu'aux points d'entrée. Or, selon le projet de loi, on pourra maintenant détenir une personne qui n'établit pas son identité dans le cadre de n'importe quelle procédure prévue dans la loi. Cela signifie que les demandeurs du statut de réfugié pourraient être détenus s'ils n'établissent pas leur identité lors de l'audience sur le statut de réfugié.

Le projet de loi envisage de plus un règlement portant sur les éléments particuliers à prendre en compte à l'égard de la détention des enfants mineurs. À notre avis—et je l'ai déjà énoncé clairement dans un précédent discours—le principe est fondamentalement bon. Il reste toutefois à savoir quels éléments seront retenus dans cette réglementation.

 

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Je ne cache pas qu'à l'égard de la détention des demandeurs de statut de réfugié d'âge mineur, nous aurions préféré voir ces grands principes être inclus dans la loi plutôt que d'être inscrits dans un règlement. Il est clair qu'on aura à présenter des amendements à cet égard pour clarifier cette situation et pour éviter que cette clarification se fasse dans la perspective des modifications réglementaires. Il faut plutôt que cela soit enchâssé dans la loi.

En ce qui a trait aux demandes d'asile pour motif de protection, ce sont plus particulièrement les articles 89 et 90 qui précisent les demandes pour ce motif.

Dans le projet de loi C-31, les deux décisions distinctes actuelles, soit celle de la détermination du statut de réfugié et la révision des risques de retour, font l'objet d'une seule décision par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Pour chaque demande d'asile, ainsi que dans le cadre de chaque demande d'examen des risques avant renvoi, la Commission décidera si le requérant est un réfugié au sens de la Convention, tel que décrit en 1951, mais aussi modifié dans les années 1960. Elle déterminera également si le requérant est une personne à protéger, ce qui signifie si elle est une personne exposée aux risques de torture dans les pays d'origine, tel que défini dans la convention contre la torture que j'ai mentionnée il y a quelques minutes parmi les trois conventions importantes, soit celle contre la torture, celle des droits de l'enfant et celle des Nations Unies relative au statut de réfugié.

On devra également vérifier si le requérant est une personne dont la vie serait menacée ou qui courrait un risque de traitements ou de peines cruelles et inusitées, mais uniquement si la personne ne peut ou ne veut réclamer la protection de l'État, qu'il n'y a pas de possibilité de refuge intérieur, que le risque n'est pas lié à des sanctions légitimes qui répondent aux normes internationales et n'est pas non plus lié à la disponibilité de soins médicaux.

On vérifiera aussi que le requérant est un membre d'une catégorie de personnes dont le besoin de protection est reconnu par règlement.

Le changement important sera que lorsqu'on aura à prendre une décision et évaluer la demande, une seule décision en intégrera deux, soit la détermination du statut de réfugié et la révision des risques de retour.

Je pense que nous gagnerons beaucoup de temps dans l'étude de ces demandes puisqu'on intègre les deux éléments. Nous serons très certainement en mesure d'atténuer les drames humains suite à l'étude de chacune des demandes.

Il est à noter que les clauses d'exclusion de la Convention sur les réfugiés, aux sections E et F, s'appliquent aux réfugiés au sens de la Convention ainsi qu'aux personnes à protéger. Ces exclusions visent notamment les criminels, ceux qui ont commis un acte grave de droit commun en dehors du pays d'accueil et toute personne qui s'est rendue coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies.

À cet égard, j'aimerais faire deux commentaires. L'unification de la prise de décision à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié aura sans aucun doute pour effet de rendre le processus plus efficace et plus rapide.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, on avait souvent des cas où il y avait une demande de statut de réfugié. Il y avait une étude de la demande et une décision. La décision, à quelques reprises, peut-être même souvent, était négative. Il y avait par la suite une étude des risques de retour qui prolongeait considérablement l'étude du cas en question.

Cela créait des drames humains et était loin de faciliter l'acceptation ou le rejet de la demande. À cet égard, cela embourbait et bloquait tout le processus. Je crois que de réunifier ces deux décisions facilitera l'accélération de l'analyse du processus.

 

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La référence à la Convention contre la torture est nouvelle dans le projet de loi, et nous nous en réjouissons. C'est nouveau et je dirais que c'est important. Cependant, la définition de «personne à protéger» que l'on retrouve dans le projet de loi n'est pas entièrement conforme à la Convention contre la torture qui, à la différence de la Convention sur les réfugiés, ne contient pas de clause d'exclusion.

L'article 3 de la Convention contre la torture interdit de refouler toute personne qui risque la torture, et ce, indépendamment de ce que la personne aurait pu faire dans le passé ou pourrait faire éventuellement. À cet égard, ce qui se retrouve dans le projet de loi est loin de refléter nécessairement les dispositions et articles prévus dans la Convention contre la torture.

Dans le cadre de l'étude de ce projet de loi, il sera important de faire une remise à niveau. Si vraiment le gouvernement a l'intention de se baser sur cette convention et d'en refléter l'esprit dans le projet de loi, il faudra très certainement des amendements pour régulariser la situation.

Un autre aspect important est la question de demande d'asile, plus particulièrement sa recevabilité, traitée dans les articles 94 à 96. En vertu du projet de loi, seules les demandes de statut de réfugié jugées recevables par Citoyenneté et Immigration Canada pourront être entendues. Tel est déjà le cas en vertu de la loi actuelle. Cependant, le projet de loi prévoit qu'un contrôle des antécédents judiciaires du demandeur pouvant mener à la non-recevabilité de la demande se fera dorénavant dès l'entrée au pays, soit lorsque le demandeur a obtenu son statut de réfugié, et non plus à la fin du processus.

Par ailleurs, le projet de loi élargit les catégories de personnes dont les demandes seront jugées irrecevables, ce qui signifie qu'elles ne seront pas renvoyées à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié pour une audience. Les demandes ne sont actuellement irrecevables pour des motifs de criminalité que si la ministre émet un certificat de danger public. Elles seront dorénavant jugées irrecevables si le demandeur:

      a) a été déclaré coupable au Canada d'un crime punissable d'un emprisonnement maximal d'au moins 10 ans, et pour lequel un emprisonnement de plus de deux ans a été infligé; ou

      b) a été déclaré coupable à l'extérieur du Canada d'un crime qui aurait été punissable au Canada d'un emprisonnement maximal d'au moins dix ans.

À cet égard, je tiens à faire un commentaire. L'exclusion automatique de personnes déclarées coupables de crimes à l'extérieur du Canada constitue un danger particulier pour les réfugiés. En effet, le système de justice criminelle ne sert que trop souvent de mécanisme de persécution. Il n'est pas rare que des personnes victimes de persécution soient condamnées sur la base de fausses accusations fabriquées pour les rendre coupables de crimes qu'elles n'ont pas commis.

En ce qui concerne le premier alinéa: «a été déclaré coupable au Canada d'un crime punissable», nous admettons cette idée et croyons que, oui, à ce moment-là, l'étude devrait tenir compte de ce facteur. Pour ce qui est du deuxième alinéa, je crois qu'il faut mettre des bémols, soit vraiment vérifier la preuve et être plus flexible dans l'étude de la demande.

En ce qui a trait à la demande d'asile, et plus précisément au processus de demande d'asile, on sait que cette question a donné lieu à un débat assez animé au cours des dernières années. Il ne faut pas se le cacher, ce processus est lent et difficile à décoder.

Si je prends l'exemple d'un bureau qui couvre le territoire de mon comté à Montréal, le délai d'attente pour une décision est de plus de 12 mois. On ne peut pas dire que c'est un système ou un processus de détermination du statut de réfugié adéquat.

 

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On ne peut pas dire qu'il est rigoureux et qu'il nous permet de rendre des décisions dans un délai raisonnable, bien au contraire. Non seulement cela a pour effet de créer des drames humains, comme je le disais plus tôt, mais en retardant, en repoussant une décision prise par les bureaux d'Immigration Canada, cela ne permet pas de faire une étude juste, dans un délai raisonnable, des dossiers de ceux qui sont en attente. Donc, cela crée un double problème qui a un double impact.

Lorsqu'on sait—comme je l'ai dit dans mon énoncé—qu'il y a des objectifs d'immigration et qu'on voit des délais aussi grands, il y a de quoi s'inquiéter. Il est donc évident qu'il nous faut nous engager vers un renouvellement du processus de détermination des demandes de statut de réfugié, parce que les délais sont trop grands et qu'ils favorisent justement des drames humains importants.

Ce que l'on apprend par le projet de loi, c'est que les demandes d'asile seront entendues par la section de la protection des réfugiés. Actuellement, c'est la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié qui en est chargée. Il s'agit ici d'un changement de nom. Les demandeurs auront une audience devant un commissaire; actuellement, un panel de deux commissaires entend la cause. Une décision de la section de la protection des réfugiés pourra être portée en appel par le demandeur ou la ministre à la nouvelle section d'appel des réfugiés. La section d'appel des réfugiés ne tiendra pas d'audience mais prendra sa décision sur la base de soumissions écrites.

Ce que j'aimerais dire à cet égard, c'est que le projet de loi n'apporte aucune modification au processus de nomination des commissaires. À plusieurs reprises, depuis plusieurs années, le Bloc québécois a reproché aux libéraux de procéder constamment à des nominations politiques au sein de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il nous apparaît essentiel que toute transformation du processus de demande d'asile vise à garantir l'intégrité du système de détermination du statut de réfugié.

Pour ce faire, il est primordial que cessent les nominations politiques au sein de la Commission et que soit instaurée une procédure transparente—je dis bien transparente—de nominations et de renouvellements qui assure une entière impartialité et un choix fondé sur la compétence et sur l'expérience professionnelle des candidats et non, comme c'est souvent le cas actuellement, sur leurs affinités politiques.

Comme le projet de loi prévoit que les décisions seront prises par un seul commissaire, il devient donc encore plus important, je dirais même essentiel, que les décideurs soient tous de compétence supérieure. Cela va de soi. Je crois même que certains libéraux pourraient en convenir. À plusieurs reprises, il y a eu des nominations politiques à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Je pense que le gouvernement libéral a une chance en or, par le renouvellement de cette Loi sur l'immigration et la détermination du statut de réfugié, de faire preuve de transparence et de bonne volonté, et de démontrer clairement que le gouvernement désire s'assurer de la mise en place d'un processus de sélection des commissaires fondé, non pas sur les nominations politiques, non pas sur le service rendu au Parti libéral du Canada, mais plutôt sur la base de l'expérience professionnelle et sur la capacité des individus à prendre des décisions éclairées.

Lors du dépôt du projet de loi, le gouvernement ne s'est malheureusement pas donné la chance—nous ne nous sommes pas donné la chance—de mettre en place un processus clair. On étudiera cette question en comité et j'espère que le gouvernement se penchera sur le rapport du vérificateur général et s'assurera de la mise en place d'un processus clair, non pas basé sur l'expérience et l'expertise des citoyens dans certaines formations politiques, mais plutôt sur la base de l'expérience professionnelle.

 

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Un autre facteur important est l'introduction d'un appel sur le fond. Les articles 105 et 106 viennent pallier une des failles fondamentales du système actuel de reconnaissance du statut de réfugié. L'absence d'un mécanisme d'appel a été critiqué très récemment par la Commission inter-américaine des droits de l'homme dans son rapport sur le système canadien relatif aux réfugiés. Notons cependant que l'appel proposé n'offre qu'une protection limitée aux demandeurs de statut de réfugié puisqu'il ne se base que sur des soumissions écrites.

Or, un pourcentage important des décisions négatives qui sont rendues est fondé sur la crédibilité. Il sera donc extrêmement difficile de contester par écrit de tels constats de non-crédibilité. Par ailleurs, des procédures par écrit posent également le problème aux revendicateurs qui n'ont pas d'avocat, ce qui est souvent le cas à cause de l'insuffisance de l'aide juridique.

Un autre commentaire à l'égard de ce paragraphe et sur cette partie de l'article concerne toute la question relative au fait que le projet de loi n'offre aucune garantie de l'indépendance de la Section d'appel des réfugiés, ni de l'expertise supérieure de ses membres dans le domaine de la reconnaissance du statut de réfugié. Si l'appel doit corriger adéquatement les erreurs de la première instance, la Section d'appel doit manifestement être une instance hiérarchique distincte et supérieure.

Il apparaît en effet difficile de garantir l'impartialité ou l'apparence d'impartialité du processus lorsque les membres de la Section d'appel doivent se prononcer sur les décisions de leurs propres collègues de la section de première instance. Une telle structure, par laquelle les membres de la section sont appelés à se réviser eux-mêmes, n'implique pas un regard critique et ne peut donc, à notre avis, présenter les garanties d'indépendance nécessaires.

En ce qui a trait à toute la question de la réunification des familles, on me permettra un bref commentaire: le projet de loi, à cet égard, parle très peu de la réunification des familles, mis à part certaines dispositions dans lesquelles devraient se retrouver les règlements à venir. C'est le problème—et mon collègue de l'Alliance canadienne en parlait tout à l'heure—de ce projet de loi. Il ne parle et n'énonce que des principes et fournit plusieurs références aux règlements.

Je pense que c'est le droit fondamental des parlementaires de pouvoir étudier un projet de loi qui intègre un certain nombre de dispositions et qui ne les réfère pas et, dans une certaine mesure, les citoyens eux-mêmes, à certaines modifications réglementaires.

À cet égard, sur toute la question de la réunification des familles, le projet de loi est très peu loquace et nous ramène plutôt à des dispositions devant se retrouver dans les règlements à venir. Le gouvernement a cependant annoncé certaines mesures relatives à la réunification des familles. À notre avis, il serait bon de voir les mesures promises intégrées dans la loi, comme je viens de le dire, plutôt que d'énoncer de vieux principes très pieux.

En tant que parlementaires, on souhaiterait étudier les dispositions, en discuter et en débattre en comité. Le problème est que nous n'avons pas les règlements devant nous. On ne peut pas porter un jugement adéquat à l'égard de ce projet de loi parce que bon nombre des mesures sont à venir et ne seront pas intégrées au projet de loi. Au fond, chacun des parlementaires est en droit d'étudier le bien-fondé de ce projet de loi sur la base de ses dispositions et non pas sur des mesures réglementaires à venir.

Le projet de loi propose d'interdire aux bénéficiaires de l'aide sociale de parrainer les membres de leur famille, y compris les conjoints et les enfants mineurs, à moins d'obtenir une permission spéciale de la ministre. À notre avis, il s'agit d'une entrave au droit à l'unité familiale pour motif de statut économique. Actuellement, les conjoints et enfants mineurs sont les seuls membres de la famille qui peuvent être parrainés par un bénéficiaire de l'aide sociale. Nous croyons que c'est une entrave grave et il est clair que nous n'accepterons jamais que deux citoyens aient fondamentalement une permission différente.

 

. 1335 + -

Le système du deux poids, deux mesures ne peut être basé sur des facteurs économiques, que l'on soit prestataire l'aide sociale ou que l'on ait un travail. Je pense que le droit est fondamental et, à cet égard, il est clair qu'on aura des modifications à proposer.

Comme mon temps s'écoule, je vais conclure en disant que le Bloc québécois regrette le discours dur adopté par la ministre lors de son allocution et de sa présentation et le discours dur adopté par le gouvernement pour présenter le projet de loi et les annonces publiques qui l'ont accompagné. Par sa façon d'aborder la question, nous croyons que le gouvernement, qui semble chercher à rassurer la droite canadienne, renforce les préjugés envers les réfugiés et les immigrants. Il suscite ainsi la division.

Au cours des dernières années, le Bloc québécois a fait valoir à plusieurs reprises que le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié devait comporter deux caractéristiques essentielles: il doit être diligent et juste envers la personne qui sollicite l'asile de bon droit, et dissuasif à l'égard des personnes qui engorgent le système par la formulation de demandes non fondées. La lenteur du processus administratif dans le traitement des demandes entraîne des drames humains inacceptables et place les personnes et les familles dans des situations très difficiles à vivre.

À titre d'exemple, pour le seul bureau de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié de Montréal, le délai de traitement moyen des demandes est de 10 mois. De plus, il y avait à Montréal, à la fin décembre 1999, plus de 7 000 demandeurs d'asile en attente d'une audience, soit le tiers de tous les cas au Canada. Le tiers de tous les cas au Canada se retrouvent au bureau du CIC Montréal. Est-ce que cela n'est pas une preuve du laxisme de ce système de détermination du statut de réfugié?

Par ailleurs, nous sommes d'avis que le nouveau projet de loi sur l'immigration ne traduit pas de façon assez explicite la portée réelle de tous les pouvoirs acquis par le Québec dans ce domaine. Selon le ministre québécois des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, Robert Perreault:

    Il faudra que la loi comporte des engagements fermes à cet égard [...] Des dispositions devront être ajoutées au projet de loi actuel pour s'assurer, notamment, du respect des pouvoirs du Québec touchant la sélection des travailleurs temporaires ou du maintien d'un programme distinct pour les immigrants investisseurs.

C'est la déclaration du ministre québécois de la Citoyenneté et de l'Immigration. Il est donc clair que nous aurons des amendements pour clarifier ces deux aspects qui ne sont pas dans le projet de loi.

Dans le projet de loi—et je l'ai dit à plusieurs reprises après son dépôt—il n'y a pas de clarification des compétences du Québec en la matière. On le sait, le Québec est responsable de son immigration indépendante. Nous aurions donc souhaité que cette reconnaissance de la juridiction du Québec en la matière puisse se retrouver dans le projet de loi. Toutefois, il n'y a rien de clair dans le projet de loi. Il faudra préciser dans certaines dispositions les pouvoirs du Québec en la matière.

Outre la question des pouvoirs du Québec, il importe de mentionner que bien que le projet de loi propose des modifications concernant les demandes des revendicateurs du statut de réfugié, nulle part Ottawa ne s'engage à assumer les frais engendrés par sa gestion. En effet, si le gouvernement fédéral croit à l'efficacité des mesures proposées dans son projet de loi, il devrait pouvoir s'engager à assumer ces coûts, et ce, jusqu'à ce que les personnes en cause aient été reconnues réfugiées, aient obtenu la résidence permanente ou jusqu'à ce qu'elles aient quitté le territoire.

Rappelons qu'en février dernier, le Québec s'est joint à l'Ontario et à la Colombie-Britannique pour dénoncer la gestion fédérale du mouvement des demandeurs d'asile, réclamer que des correctifs majeurs soient apportés et que le gouvernement fédéral, seul responsable de tout le processus de reconnaissance du statut de réfugié, assume tous les coûts des services rendus à ces personnes, soit l'aide sociale, l'aide juridique et l'éducation.

Rappelons qu'il en coûte actuellement au Québec plus de 80 millions de dollars par année pour prendre en charge les personnes en attente d'une décision fédérale à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

 

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Il est clair que le Bloc québécois se préoccupe beaucoup du fait que de nombreuses règles cruciales seront reléguées aux règlements—je pense que je ne suis pas le seul à l'avoir dit aujourd'hui—et ne seront pas intégrées à la loi.

À l'heure actuelle, on ne peut pas être totalement en faveur de ce projet de loi, cela va de soi. Trop de mesures, trop de dispositions sont intégrés aux règlements pour que l'on puisse donner notre aval à ce projet de loi en deuxième lecture.

Ce que nous pouvons faire, à la limite, c'est nous prononcer en faveur du principe du projet de loi. Mais actuellement, on ne peut pas se prononcer en faveur de ce projet de loi les yeux fermés. On va l'étudier en comité, on apportera des modifications, on en débattra, on reviendra à la Chambre pour la troisième lecture et on prendra alors une décision. Mais je signale qu'il est décevant que plusieurs des mesures ne soient pas inscrites dans le projet de loi mais plutôt dans les règlements.

[Traduction]

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Madame la Présidente, je vais partager mon temps de parole avec le député de Regina—Lumsden—Lake Centre. Lui et moi allons tous deux parler du projet de loi. Nous voulons que la Chambre sache que, à la prochaine occasion, le porte-parole du NPD, le député de Winnipeg-Centre, parlera plus en détail de certaines des préoccupations que nous avons au sujet du projet de loi et de notre attitude générale face à cette mesure législative. Malheureusement, il lui était impossible d'être à la Chambre aujourd'hui.

Il n'y a probablement pas de moment plus approprié pour les députés pour débattre la réforme de la loi sur l'immigration du Canada qu'après un congé parlementaire de deux semaines. Le congé des autres députés a peut-être été comme le mien; j'ai passé beaucoup de temps à rencontrer des gens qui ont des problèmes d'un type ou d'un autre avec l'immigration.

Au cours du congé de deux semaines, j'ai rencontré une femme qui avait fui le Libéria sans préparation, au milieu du conflit et alors qu'une grande confusion régnait. Elle a laissé derrière elle certains de ses enfants adolescents et elle tente maintenant de les faire entrer au pays, mais elle a de grandes difficultés à y parvenir.

J'ai rencontré un jeune homme qui a une femme enceinte en Roumanie et qui voudrait la faire entrer au Canada avant la naissance du bébé en septembre. J'ai rencontré des gens du Bangladesh qui ont demandé le statut de réfugié et qui doivent quitter le Canada en dépit du fait qu'il semble qu'ils aient maintenant en leur possession des documents qu'ils n'avaient pas lorsque la commission du statut de réfugié a pris sa décision.

J'ai rencontré une famille originaire de l'Inde qui aimerait que des membres de sa famille viennent au Canada assister à un mariage. J'ai rencontré une autre famille qui voulait que des membres de sa famille viennent du Chili pour assister à une cérémonie de remise de diplômes. Dans les deux cas, la difficulté tenait à l'émission des visas de visiteur et quelquefois au processus très difficile qui attend les gens qui réussissent à obtenir ces visas.

Je connais ces familles qui sont toutes deux établies depuis longtemps au sein des communautés sikh et chilienne respectivement. Elles ont du mal à faire venir des gens au pays pour assister à ces importantes rencontres familiales. Ce ne sont là que quelques-uns des exemples du genre de choses dont les députés doivent souvent s'occuper. Il est très frustrant pour nous de ne pas pouvoir régler sans délai les problèmes que les gens portent à notre attention. On ne peut bien sûr pas régler tous les problèmes, mais nous pourrions en régler quelques-uns si nous avions davantage de ressources.

L'un des messages que j'aimerais transmettre au gouvernement et à la ministre à l'heure actuelle touche à l'importance de traiter ces cas plus rapidement. Il n'est pas question d'accélérer le processus au point de le rendre injuste ou inefficace, mais il importe tout de même de l'accélérer. C'est un châtiment cruel et inhabituel pour un grand nombre de personnes qui ne peuvent obtenir rapidement une solution à leurs problèmes.

 

. 1345 + -

Je repense au grand nombre de fois où j'ai rencontré dans mon bureau des gens pour qui le processus de traitement de leur demande de statut de réfugié a été très long et difficile, des gens qui sont parfois au pays depuis des années. Dans bon nombre de cas, depuis leur arrivée ici, ces gens ont eu des enfants. Ces enfants sont en fait canadiens et le Canada est le seul pays qu'ils connaissent. Toutefois, lorsque le processus de demande d'établissement au pays prend beaucoup de temps et qu'il échoue en fin de compte, ces enfants sont parfois expulsés de leur pays qui est le Canada. À mon avis, il est très important de traiter ces cas rapidement pour éviter que ces enfants se retrouvent dans des situations de ce genre.

Ce sont là certaines des situations que je trouve très pénibles depuis mon arrivée au Parlement. Ces gens se retrouvent dans des situations très difficiles. Je trouve ces situations pénibles, mais naturellement elles le sont encore plus pour ceux qui les vivent. Il m'est pénible de ne pas toujours pouvoir faire pour eux ce que j'aimerais faire dans les délais où ils voudraient que je le fasse.

Tout cela est lié au projet de loi dans la mesure où, comme députés, nous traitons avec des gens qui ne sont pas au pays et qui cherchent à y entrer en suivant les règles. Lorsque nous rencontrons des gens dans notre bureau de circonscription, rien n'est plus difficile que lorsqu'ils soulignent que d'autres personnes entrent au pays en enfreignant les règles. Ils disent qu'ils essaient d'observer les règles et qu'ils font tout en leur pouvoir pour satisfaire aux exigences fixées, mais que la procédure n'en finit plus. Pourtant, il y a des exemples d'immigration illégale qui, pour des motifs évidents, sont perçus par ces gens comme étant très frustrants.

Selon la ministre, le projet de loi vise à empêcher les gens d'entrer au Canada par des voies détournées tout en favorisant davantage l'immigration légitime. Ce sont certes un principe et une intention du projet de loi que nous appuyons. C'est pourquoi nous voudrions que le projet de loi soit renvoyé à un comité et examiné plus à fond.

On a souligné plus tôt qu'un très grand nombre d'aspects ne seront abordés que dans la réglementation. Nous ne savons pas quelle en sera la teneur. Nous ne savons pas si les mesures qui y figureront concorderont avec l'esprit du projet de loi. Le comité pourrait notamment déterminer les autres aspects qui pourraient être précisés dans le projet de loi afin qu'il y en ait moins à aborder dans la réglementation.

Nous entretenons des inquiétudes au sujet des pénalités concernant les revendicateurs du statut de réfugié qui ont été reconnus coupables d'une infraction entraînant une peine de dix ans et plus ou qui ont reçu une peine de deux ans et moins, ce qu'appuient selon moi tous les Canadiens. Nous ne voulons pas d'un système d'immigration qui permet à des criminels d'entrer au pays. Toutefois, nous devons aussi nous rappeler que les infractions définies comme étant des activités criminelles dans tous les pays d'où viennent les revendicateurs du statut de réfugié ne font pas toutes nécessairement partie de cette catégorie. Il arrive parfois que l'activité politique soit ce qui a fait d'eux des réfugiés.

À mon avis, une des choses qui exigera notre attention au comité, c'est la nécessité de définir de façon plus précise ce qu'est une infraction criminelle au sens le plus strict, et ce que signifie être un criminel. Ce qui peut parfois être défini comme criminel par un pays qui utilise le code criminel national pour entraver, punir ou inhiber l'activité politique crée ainsi les réfugiés qui se présentent au Canada avec ce prétendu casier judiciaire. C'est une préoccupation que nous éprouvons à l'égard du projet de loi, et le comité pourrait très bien examiner cet aspect.

Quant à la réunification des familles, je crois comprendre que le projet de loi a également pour objet d'élargir le concept de réunification des familles. Tous les Canadiens y sont sûrement favorables.

En me reportant encore une fois à ma propre expérience de député, et sans doute celle de beaucoup d'autres députés, nous avons maintes fois reçu à notre bureau des gens qui avaient encore un enfant vivant dans leur pays d'origine, mais parce que l'enfant a maintenant 19 ans ou parce qu'il a commis l'erreur de se marier, il n'est plus admissible et ne peut être réuni avec sa famille. Les règles actuelles régissant la réunification des familles ont besoin d'être améliorées à de nombreux égards afin de remédier à certaines des anomalies existantes. J'exhorte certes à le faire.

 

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J'exhorterais également Immigration Canada à adopter une attitude plus ouverte et plus confiante envers les gens qui cherchent à obtenir des visas de visiteurs pour des parents qu'ils veulent inviter à venir assister à des événements spéciaux, surtout lorsque ces demandes de visas sont présentées par des familles qui sont établies depuis longtemps au Canada. Je ne pense pas que le temps de résidence au Canada ait une grande incidence sur ces demandes, mais il est certes avéré que beaucoup de gens qui sont depuis longtemps citoyens canadiens et qui veulent inviter des gens de leur pays d'origine à venir assister à des événements spéciaux trouvent maintenant très difficile d'obtenir ces visas.

J'exhorte la ministre à voir ce qu'elle pourrait faire à ce propos. Si cela n'entre pas dans le cadre du projet de loi, elle pourrait peut-être trouver un autre moyen d'y remédier.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Madame la Présidente, c'est pour moi un grand plaisir de me joindre à mon collègue, le député de Winnipeg—Transcona, et à notre porte-parole pour l'immigration, le député de Winnipeg-Centre, pour dire quelques mots du projet de loi C-31, Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

De façon générale, le projet de loi renforce les dispositions législatives à l'égard des immigrants illégaux. Il simplifie les lois et règlements pour faciliter la tâche aux immigrants qui veulent venir chez nous en empruntant les voies officielles et en se conformant au processus réglementaire.

Nous connaissons l'importance de l'immigration. Presque tous les députés ont des grands-parents ou des parents qui ont immigré au Canada en se pliant à un processus prévu par la loi précédente, ou bien ils sont eux-mêmes immigrants. L'ensemble du Canada est beaucoup plus fort et il est considéré comme le meilleur pays du monde parce que nous avons accueilli à bras ouverts ces nouveaux Canadiens venus chez nous pour aider à bâtir ce grand pays.

Mon grand-père paternel est venu au Canada en 1897. Il était originaire d'Ukraine, et il a été recruté par M. Sifton, du CP, pour aller s'installer à Fork River, au Manitoba. Mon grand-père et de nombreux autres colons ukrainiens ont reçu un quart de section boisé, dont ils devaient tirer leur subsistance et celle de leur famille. C'est ce que mon grand-père a fait.

Mon grand-père s'appelait Panko Solomon, et il s'est installé dans le district de Fork River. Il a mis quelques années à déboiser un quart de section, soit environ 160 acres. Il l'a fait en déboisant une dizaine d'acres à la fois à la hache, à la scie et en utilisant des chaînes et un cheval. À ce jour, la ferme demeure un hommage non seulement à cet homme et aux autres Ukrainiens et colons qui ont édifié notre pays, mais à tous nos ancêtres qui sont venus ici pour que nous puissions tous avoir une vie meilleure.

En passant, la propriété appartient maintenant à mon oncle. Elle est plus grande et il a planté quelque 100 000 arbres autour des quartiers d'habitation. S'il le savait, mon grand-père se retournerait probablement dans sa tombe. Il faut dire qu'ils protègent très agréablement les quartiers d'habitation.

Le projet de loi C-31 resserre les lois relatives aux abus en matière d'immigration. Pour ceux qui organisent l'entrée illégale d'immigrants au Canada, il prévoit des peines sévères pouvant aller jusqu'à un million de dollars et l'emprisonnement à vie.

En gros, je trouve que la ligne dure envers la criminalité et les causes de la criminalité est une excellente approche en matière d'immigration. C'est une approche que, personnellement, j'appuie et que, selon moi, la plupart des Canadiens appuient également. La réaction du public à l'arrivée d'immigrants illégaux a été largement négative et certains mettraient même pratiquement fin à toute immigration. Toutefois, ceux qui éprouvent de la compassion pour les réfugiés qui suivent les règles et qui doivent pendant des années attendre dans des camps que la législation canadienne leur permette de venir légalement s'installer ici voient cette loi d'un oeil intéressé.

Par ailleurs, le projet de loi augmente le nombre des agents de contrôle de l'immigration à l'étranger. Cela a toujours été une faiblesse des lois libérales. Les libéraux présentent toujours des lois qui plaisent, mais ils ne prévoient jamais les ressources nécessaires pour les appliquer dans la réalité.

C'est ce qui s'est passé, par exemple, dans le cas de la contrebande de cigarettes. Au lieu de rendre la loi plus stricte et de débloquer les ressources pour engager un plus grand nombre de douaniers afin qu'ils puissent appréhender les contrebandiers, les libéraux ont adopté une mesure législative rassurante, disant qu'en réduisant la taxe sur le tabac, on rendra ce produit moins attrayant pour les contrebandiers.

 

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Bien entendu, les contrebandiers abandonneront les cigarettes pour les armes à feu. Au lieu d'affecter les ressources nationales à la lutte contre la contrebande d'armes, le gouvernement a adopté une loi sur l'enregistrement des armes à feu, qui ne contribue en rien à réduire la contrebande de ce type d'arme. Les gens se sentent rassurés parce que les libéraux font quelque chose pour lutter contre le problème, mais les résultats concrets se font attendre faute de ressources.

Je crains que les ressources ne fassent défaut. J'aimerais que le ministre nous dise combien d'argent et combien d'agents d'immigration le gouvernement affectera, dans nos consulats et ambassades, pour mettre en oeuvre le projet de loi C-31. J'aimerais connaître la situation non seulement à l'échelle mondiale mais au Canada également.

Certains cas préoccupants, relativement à l'immigration, se sont produits dans Regina—Lumsden—Lake-Centre. La Saskatchewan est une province enclavée dans le centre du pays. Les personnes qui veulent venir s'établir au Canada ou qui amènent des membres de leurs familles doivent nécessairement retourner dans leurs pays d'origine ou se rendre au consulat canadien le plus près aux États-Unis, à Seattle ou Buffalo, pour présenter une demande d'immigration. De nombreuses personnes se trouvant dans cette situation ont dû subir les inconvénients liés aux déplacements. J'espère que les nouvelles règles faciliteront l'accès du pays aux étudiants qui ont eu une bonne conduite durant leur séjour au Canada.

La réunification des familles a toujours été une question complexe. En Saskatchewan, la lenteur du processus de réunification des familles nous a toujours préoccupés. Comme le disait la ministre, la réunification des familles a des effets très bénéfiques. Quand leurs parents sont ici, les immigrants tendent à travailler plus fort pour s'assurer que leurs familles puissent avoir de solides assises économiques. Il m'apparaît très important que la simplification des règles vise en particulier le processus de réunification des familles.

Le projet de loi contient de nombreuses dispositions. Il prévoit des vérifications de sécurité à l'endroit des personnes qui demandent le statut de réfugié. Il interdit l'accès au système de détermination du statut de réfugié et supprime le droit d'appel pour les grands criminels, les personnes qui représentent un risque pour la sécurité et celles qui ont organisé des activités criminelles ou qui ont commis des violations des droits de la personne.

J'aimerais que la ministre nous dise si le projet de loi permettra de contrer le problème dont faisait état, dans son numéro de samedi dernier, le Globe and Mail au sujet des triades chinoises.

Le Président: Comme le député modifie le cours de son allocution, je crois que le moment est bien choisi pour l'interrompre. Il lui reste un peu plus de trois minutes et demie, sans compter la période des questions et observations qui suivra.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

LE GALA EXCELLENCE DU RÉFAP

M. Marcel Proulx (Hull—Aylmer, Lib.): Monsieur le Président, le 15 avril dernier, le Réseau des femmes d'affaires et professionnelles de l'Outaouais soulignait le dynamisme de ses membres dans le cadre de son Gala Excellence 2000.

Cette première grande célébration du millénaire pour le RÉFAP a permis d'honorer d'une façon toute particulière les efforts et la détermination de deux grandes dames de l'Outaouais, Mme Ginette Chassé-Séguin, qui a remporté le titre de Femme d'affaires de l'année, et Mme France Gagnon, lauréate du titre de Femme professionnelle de l'année.

Plus que jamais, leur réussite est un signe indéniable de la place et de la vitalité grandissante des femmes en Outaouais. Des exemples de réussite de la sorte ne peuvent qu'encourager un plus grand nombre de femmes à s'impliquer activement dans notre communauté.

Je profite donc de cette occasion pour féliciter de nouveau Mme Ginette Chassé-Séguin et Mme France Gagnon et leur souhaiter bonne chance dans leurs projets futurs.

*  *  *

[Traduction]

LE TRANSPORT DU GRAIN

M. Howard Hilstrom (Selkirk—Interlake, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette année, les agriculteurs canadiens devront payer 44 millions de dollars de plus pour expédier leur grain, car le gouvernement libéral refuse de réformer le système de transport du grain.

La semaine dernière, l'Office des transports du Canada a annoncé que les tarifs réglementés augmenteront de 4,5 p. 100. Voilà la plus récente preuve de l'échec manifeste du statu quo.

Une réforme du système pourrait faire économiser aux agriculteurs 300 millions de dollars par année si les tarifs étaient moins élevés. Or, au lieu de baisser, ils augmentent.

Les propres experts du gouvernement ont recommandé clairement une réforme. Il faut offrir aux agriculteurs un système fondé sur des contrats et priver la Commission canadienne du blé de son entière mainmise sur le transport des grains. Cependant, le gouvernement préfère défendre des causes qu'affectionnent les libéraux, comme le monopole exercé par la Commission canadienne du blé, plutôt que d'accroître les résultats financiers des agriculteurs.

Si les libéraux se souciaient vraiment du sort des familles d'agriculteurs, ils cesseraient de défendre le système actuel, qui est déficient, et ils apporteraient immédiatement les réformes dont les agriculteurs ont désespérément besoin. Qu'est-ce que le ministre des Transports a à dire à ce sujet?

*  *  *

 

. 1400 + -

LE VIÊTNAM

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, le Viêtnam a fait les manchettes récemment: la fin de la guerre du Viêtnam, il y a 25 ans, l'exécution d'une Canadienne qui aurait été innocente, et le rappel de notre ambassadrice.

Ce qui ne fait pas les manchettes, c'est la violation courante des droits religieux par le Viêtnam. Les droits religieux ne font pas beaucoup la nouvelle au Canada, en partie parce que nous tenons ces droits pour acquis, en partie parce que les journalistes ne s'intéressent pas aux gens qui ont des convictions religieuses.

Peu importe s'ils sont catholiques, bouddhistes, musulmans ou évangélistes, s'ils ne célèbrent pas leurs services religieux dans un endroit agréé par l'État, ils sont victimes de sévices, d'arrestations ou d'emprisonnement. Les droits religieux sont un peu comme le canari dans la mine. Si ces gens n'ont aucun droit religieux, ils n'ont probablement aucun droit à un procès équitable, aucun droit à la liberté de rassemblement et certes aucun droit contractuel.

Il y a deux ans, j'ai rencontré le ministre de la Justice du Viêtnam. En substance, il ne croyait pas à la règle de droit. Si le Viêtnam ne croit pas à la règle de droit, il lui est certes facile de violer les droits religieux, tout comme les droits civils et les droits contractuels. Tant que le Viêtnam restera accroché au passé, sa population ne jouira pas de ces droits.

*  *  *

[Français]

LA SEMAINE DE LA SANTÉ MENTALE

M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir d'informer la Chambre et toute la population canadienne que la semaine du 1er au 7 mai est la Semaine de la santé mentale. Le thème de cette année est «Le stress en milieu de travail peut perturber votre équilibre».

Étant donné que 43 p. 100 des adultes canadiens de 30 ans ou plus se sentent accablés par leur travail, leurs responsabilités familiales ou leurs obligations financières, il est clair que le fait d'atténuer le stress lié au travail aura des répercussions positives pour des milliers de gens.

Statistique Canada estime à 12 milliards de dollars par année le coût du temps ouvrable perdu à cause du stress.

[Traduction]

L'Association canadienne de la santé mentale a entrepris des activités dans tout le pays pour favoriser le mieux-être en milieu de travail. Je prie la Chambre de se joindre à moi pour souhaiter à l'Association canadienne de la santé mentale une très bonne Semaine de la santé mentale.

*  *  *

L'ARMÉNIE

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens à la Chambre aujourd'hui pour rappeler le souvenir des victimes du génocide arménien du 24 avril 1915.

Le gouvernement canadien n'a pas encore reconnu officiellement le génocide des Arméniens par les Turcs ottomans. Toutefois, en réponse à une question que j'ai posée à la Chambre des communes, le 10 juin 1999, le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères de l'époque a déclaré ce qui suit:

    Au nom du ministre des Affaires étrangères, j'aimerais informer la Chambre qu'avec tous les Canadiens nous nous souvenons du massacre de la population arménienne survenu en 1915. Cette tragédie avait été provoquée dans le but d'éliminer un groupe national, des centaines de milliers d'Arméniens ayant été victimes de toutes sortes d'atrocités, y compris des déportations massives et des meurtres collectifs.

    Puisse le souvenir de cette époque contribuer à panser les blessures, à réconcilier les nations et les communautés d'aujourd'hui et à rappeler à nous tous le devoir collectif qui nous incombe de travailler ensemble à la paix dans le monde.

Le génocide arménien n'est pas encore tout à fait reconnu.

*  *  *

L'HÉPATITE C

M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Canadiens qui ont contracté l'hépatite C à la suite d'une transfusion de sang contaminé attendent toujours. Ils attendent l'indemnité promise s'ils ont été infectés entre 1986 et 1990. Ils attendent depuis plus de deux ans alors que leurs avocats ont déjà été bien payés. Ils attendent qu'on les aide à remplir des formulaires de 40 pages incroyablement compliqués et qu'on leur explique pourquoi le sang contaminé de détenus américains est entré au Canada sans être détecté. Ils attendent que le conseiller en éthique dépose un rapport qui est censé exonérer le ministre des Finances de tout conflit d'intérêts, même s'il a tranquillement admis que les procès-verbaux pertinents des réunions du conseil d'administration de la CDC avaient mystérieusement disparu. S'ils ont été infectés avant 1986, ils attendent sans le moindre espoir, sauf ceux qui ont reçu une indemnité du gouvernement de l'Ontario ou du Québec. Ils attendent tous, sauf ceux qui ne sont plus de ce monde.

*  *  *

LA BIOTECHNOLOGIE

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, au cours des derniers mois, des députés à la Chambre ont soulevé des questions et fait état de certaines inquiétudes quant à l'innocuité des aliments, surtout en ce qui concerne les aliments dérivés de la biotechnologie. Certains ont laissé entendre que les aliments que nous consommons ne sont soumis à aucun tests. C'est tout simplement faux.

Avant d'être approuvés, les aliments dérivés de la biotechnologie sont soumis à un processus réglementaire très sévère qui assure leur innocuité pour les êtres humains, les animaux et l'environnement.

Le Canada possède les meilleurs règlements du monde en matière de sécurité des aliments. Nos procédés d'approbation et de réglementation se fondent sur les meilleures données scientifiques qui existent. Les règlements canadiens sont conformes aux normes et établis par l'Organisation mondiale de la santé, l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture et d'autres organisations internationales.

 

. 1405 + -

Les députés de l'opposition essaient simplement d'alarmer les Canadiens en leur faisant croire que les aliments qu'ils mangent ne sont pas sans danger. franchement, les Canadiens méritent mieux que cela. Ils méritent de connaître les faits. Ils devraient être fiers de notre système de réglementation et de notre approvisionnement en aliments de classe mondiale.

*  *  *

[Français]

JEAN-CLAUDE MARCUS

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Monsieur le Président, c'est après 20 ans de service auprès du Centre national des Arts que M. Jean-Claude Marcus quittera ses fonctions de directeur artistique du théâtre français du CNA.

Au cours de son tour de scène parmi nous, M. Marcus a été innovateur et pionnier. Nous lui devons, entre autres, le programme de théâtre jeunesse du CNA, soit Grand-Galop et Petit-Trot, le programme de Développement du théâtre en région, dont La Quinzaine, que l'on connaît tous, ainsi que le baccalauréat spécialisé en théâtre au département d'art dramatique de l'Université de Moncton.

C'est son implication au niveau international qui lui a valu son insigne de Chevalier des Arts et des Lettres pour sa contribution au rayonnement des arts et des lettres en France et dans le monde.

Nous tous qui avons été émus, touchés et même bouleversés par les différentes productions offertes durant les saisons «Marcus» du CNA, dont la dernière sera dévoilée plus tard cette semaine, lui disons merci et lui souhaitons la plus grande sérénité alors qu'il voyagera en France en compagnie de son épouse.

*  *  *

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette semaine, l'exécution gratuite de la Canadienne Nguyen Thi Hiep par le gouvernement vietnamien a indigné les Canadiens. Cette exécution est contraire aux principes fondamentaux des droits de la personne car Mme Nguyen n'a pas eu droit à un procès juste et équitable et elle a été mise à mort avant que toutes les enquêtes ne soient terminées.

Étant donné ce mépris flagrant des droits de la personne, on peut facilement imaginer quel sort est réservé à Mme Nguyen mère, cette femme de 74 ans incarcérée à perpétuité dans une prison de Hanoi.

Les Canadiens sont outrés et ils prient le gouvernement de rétorquer fermement et de revoir ses accords de coopération avec le Viêtnam. Au nom de l'Alliance canadienne, je tiens à offrir mes sympathies à la famille de Mme Nguyen. Nous demandons à tous les Canadiens de poursuivre la lutte contre les violations des droits de la personne.

Le Canada doit faire savoir clairement aux gouvernements étrangers qu'ils doivent abandonner de telles pratiques atroces s'ils veulent entretenir des relations de coopération avec notre pays.

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE JACQUES BEAUREGARD

M. Robert Bertrand (Pontiac—Gatineau—Labelle, Lib.): Monsieur le Président, il y a quelques semaines, le maire de Ferme-Neuve, Jacques Beauregard, alors en devoir comme ambulancier, perdait la vie dans un tragique accident de la route.

J'ai eu le privilège de partager plusieurs moments avec l'ancien maire de Ferme-Neuve. Il était impliqué comme pas un dans sa municipalité sur le plan social, économique et communautaire.

M. Jacques Beauregard laisse dans le deuil un fils, Martin, sa compagne de vie, Mme Nicole Sarrasin, son père, M. Roger Beauregard, sa mère, Madeleine, ainsi que trois frères.

Ferme-Neuve a perdu un maire, mais aussi et surtout un ami, une personne impliquée à fond au sein de sa communauté. Je désire offrir à la famille, ainsi qu'à tous les amis et résidants de Ferme-Neuve éprouvés par cette immense perte, mes respectueuses condoléances.

Merci, Jacques, pour ton travail. Ta mémoire restera gravée à jamais à Ferme-Neuve et dans la belle région de Labelle.

*  *  *

L'UNIVERSITÉ LAVAL

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, la mondialisation crée chaque jour de nouveaux défis pour les travailleurs et les chefs d'entreprise. Tous doivent développer des habiletés nouvelles. Dans ce contexte, je salue l'heureuse initiative que constitue la création d'une Chaire en gestion des affaires internationales à l'Université Laval, dans ma circonscription.

La chaire contribuera à la formation de gestionnaires qualifiés par un appui aux programmes réguliers et par le développement d'activités de formation continue sur mesure pour les entreprises. Elle offrira les services de stagiaires spécialisés en gestion internationale et des missions commerciales étudiantes pour l'exploration de marchés étrangers, en partenariat avec l'industrie.

Les premiers travaux devraient porter sur les processus d'internationalisation des PME technologiques, la gestion des entreprises virtuelles, l'intelligence économique et le marketing international des produits et services éducatifs.

Félicitations aux fondateurs et aux partenaires de cette nouvelle institution.

*  *  *

[Traduction]

LES DROITS DE LA PERSONNE

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, le 1er mai est le Jour de la sensibilisation à l'égard de l'hépatite. Je tiens à transmettre mes remerciements personnels et ceux de mon parti à M. Joe Haché, d'Ottawa, et à M. Bruce DeVenne, de la Nouvelle-Écosse; tous deux ont sensibilisé les Canadiens à cette maladie très grave qui touche plus de 300 000 personnes et ont exercé les pressions qui s'imposaient.

Aujourd'hui, nous célébrons aussi la Fête internationale des travailleurs. Je rappelle à la Chambre que les droits des travailleurs font partie des droits de la personne. Ces droits comprennent aussi bien ceux des facteurs ruraux de tout le Canada qui luttent pour se syndiquer que ceux des familles de mineurs qui tentent d'obtenir une indemnisation adéquate à la suite d'incidents comme la catastrophe survenue à la mine Westray, en Nouvelle-Écosse.

 

. 1410 + -

Le moment est venu pour la Chambre de reconnaître le travail du chef du Nouveau Parti démocratique fédéral et d'appuyer son initiative parlementaire, le projet de loi C-259, qui vise à établir la responsabilité criminelle des entités concernées.

Au nom de tous les néo-démocrates fédéraux et provinciaux d'un océan à l'autre, je remercie tous ceux qui travaillent dur chaque jour.

*  *  *

[Français]

LA FÊTE INTERNATIONALE DES TRAVAILLEURS

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le Bloc québécois est fier de souligner aujourd'hui la Fête internationale des travailleurs et des travailleuses.

En 2000, 39,5 p. 100 des travailleurs sont syndiqués au Québec et 32,2 p. 100 au Canada. En Ontario, ce taux est de 28 p. 100, alors qu'aux États-Unis, moins de 15 p. 100 des travailleurs sont syndiqués.

Or, il faut le souligner, ce sont souvent celles et ceux qui ne sont pas syndiqués et qui travaillent dans des conditions difficiles qui risquent le plus de se retrouver victimes d'abus divers.

De même, les travailleurs et travailleuses qui perdent leur emploi ont de plus en plus de difficultés à se qualifier pour l'assurance-emploi depuis les réformes du gouvernement libéral.

Enfin, la nouvelle réalité du marché du travail fait en sorte que nombre de travailleurs et de travailleuses se retrouvent sans protection syndicale ou législative.

Face à cette situation, le Bloc québécois s'engage à continuer la lutte pour défendre les droits des travailleurs et des travailleuses du Québec et du Canada.

Bonne fête du travail à tous.

*  *  *

LA SANTÉ ET LA SÉCURITÉ AU TRAVAIL

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 28 avril dernier était le Jour de deuil national consacré tous les ans au souvenir des personnes qui ont été tuées ou blessées au travail au Canada.

Cette journée vise principalement à montrer la préoccupation des Canadiens à l'égard de la santé et de la sécurité au travail.

Ces commémorations se sont répandues dans le monde entier. Bien qu'il ait pris naissance au Canada, le Jour de deuil est maintenant célébré dans plus de 70 pays.

La réalité est inquiétante. Au Canada, on estime qu'un travailleur sur 16 se blesse au travail. Cela signifie une blessure toutes les neuf secondes. Plus de 800 000 blessures sont rapportées au Canada chaque année. Ce sont surtout les jeunes et les travailleurs inexpérimentés qui sont le plus à risque.

Nos pensées et nos prières se joignent à celles des familles et des amis des victimes. Nous partageons avec eux la perte de leurs êtres chers.

*  *  *

[Traduction]

L'ENVIRONNEMENT

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, le gouvernement libéral affiche le bilan environnemental le plus sombre des cent dernières années. En fait, le premier ministre a proposé le pire programme législatif environnemental jamais présenté dans notre pays. Depuis sept ans, son gouvernement n'a pas mis en oeuvre une seule initiative environnementale.

Les Canadiens veulent des dispositions législatives efficaces à l'égard des espèces en péril. Dans la mesure où il n'a aucun projet de loi de nature environnementale à son actif, le gouvernement libéral ne peut se permettre de refuser les conseils d'ordre législatif que lui offrent des groupes concernés au sujet d'un plan visant à protéger les espèces en péril. Des écologistes et des personnes concernées de l'industrie sont arrivés à un consensus sans précédent en forment un groupe de travail appelé Species at Work. Le gouvernement a toutefois ignoré leurs recommandations.

Le Parti progressiste conservateur appuie les recommandations mises de l'avant par ce groupe de travail et il estime que la loi devrait établir une liste fondée sur des données scientifiques et qu'il faudrait tenir compte des considérations socio-économiques pertinentes au moment de concevoir le plan de rétablissement.

De plus, nous pensons que le projet de loi devrait s'appliquer à l'ensemble du territoire canadien, sauf là où des dispositions législatives provinciales équivalentes existent. Il faudrait négocier les équivalences en fonction de chaque espèce, en utilisant le cadre...

Le Président: Le député de Charleswood St. James—Assiniboia a la parole.

*  *  *

LE SERVICE D'ASSISTANCE CANADIEN AUX ORGANISMES

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour féliciter deux de mes électeurs qui ont récemment consacré leur temps et leurs talents à l'étranger dans le cadre d'un travail pour le Service d'assistance canadien aux organismes, le SACO.

John Goodes s'est rendu à Ostra, en Roumanie, pour travailler bénévolement à l'élaboration d'un plan de développement économique pour cette collectivité économiquement défavorisée.

Bob Harvey s'est rendu à Jelgava, en Lettonie, où il a pu mettre ses compétences à profit pour donner des conseils sur la façon de gérer des compagnies d'assurance-maladie, étant donné que la Lettonie est en train de mettre en oeuvre un régime d'assurance-maladie.

Cela fait 33 ans que le SACO envoie des bénévoles canadiens à l'étranger. L'année dernière, l'organisme a fourni plus de 23 000 jours d'assistance bénévole.

MM. Goodes et Harvey ne sont que deux parmi les nombreux experts bénévoles canadiens qui consacrent leur temps et leur énergie à aider les pays du monde entier. C'est grâce aux efforts de gens comme eux que le Canada jouit d'une aussi bonne réputation dans le monde.



QUESTIONS ORALES

 

. 1415 + -

[Traduction]

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est bon d'être de retour. Les gens partout dans le monde sont particulièrement contents de voir que le premier ministre est rentré de son voyage au Moyen-Orient et qu'il n'aura pas l'occasion de faire valoir son expertise dans le domaine des affaires étrangères au-delà de nos frontières pendant un certain temps.

Quatre mois se sont écoulés depuis que les Canadiens ont été mis au courant du gâchis d'un milliard de dollars du gouvernement. Il n'y a pas eu de démission ni de remaniement ministériel. Il n'y a même pas eu un aveu de culpabilité.

Les Canadiens mettent leurs déclaration de revenus à la poste aujourd'hui et ils veulent des réponses.

Pourquoi les Canadiens devraient-ils continuer d'envoyer une partie de leur argent durement gagné au gouvernement alors que le premier ministre n'a absolument rien fait pour réparer ce gâchis d'un milliard de dollars à DRHC?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens sont très heureux de voir que l'économie du Canada va très bien dans le moment.

Les Canadiens sont extrêmement heureux que nous ayons créé plus de 2 millions d'emplois depuis notre accession au pouvoir.

Les Canadiens sont très heureux que nous ayons transformé un déficit de 42 milliards de dollars en un excédent de plus de 10 milliards de dollars.

Les Canadiens sont très heureux que nous ne soyons pas obligés de changer le nom de notre parti.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le système semble très bien fonctionner, du moins pour les libéraux.

Le 4 février 1997, une société du nom de Mode Conili Star a été constituée. Trois semaines plus tard, la députée d'Ahuntsic a écrit une lettre au ministre du Développement des ressources humaines pour que le gouvernement accorde des subventions à cette société. Le 10 avril, la société a reçu trois quarts de millions de dollars. Moins d'un mois plus tard, au beau milieu d'une campagne électorale, Mode Conili Star a fait un généreux don de 7 000 $ à la députée qui l'avait aidée à obtenir la subvention.

Depuis quand la stratégie de collecte de fonds des libéraux consiste-t-elle à utiliser l'argent des contribuables canadiens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, tout le monde au Canada sait que, lorsque nous avons une campagne électorale, les gens versent des contributions aux partis politiques.

J'ai discuté de cette question le week-end dernier aux États-Unis avec des gens qui posaient des questions sur le financement des campagnes électorales au Canada. Tout est public. Tout le monde sait qu'il faut déclarer les dons de plus de 100 $. Lorsque les gens ont un bon député, ils sont toujours ravis de l'aider.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est certainement public et c'est exactement ce qui est arrivé. La députée d'Ahuntsic a fait des démarches auprès du ministre pour qu'une société de sa circonscription reçoive une subvention. Cette société a ensuite versé une contribution de 7 000 $ à la campagne électorale de la députée. Mode Conili a obtenu 750 000 $, et la députée d'Ahuntsic a eu la plus grosse contribution politique de toute sa campagne. C'est encore une autre heureuse coïncidence.

Pourquoi les subventions gouvernementales sont-elles une mine d'or pour les candidats libéraux, mais un gouffre sans fond pour les contribuables canadiens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, , les députés du Parti réformiste font la même chose dans leurs circonscriptions. Ils essaient d'aider leurs électeurs et, quand viendra le temps des élections, ils leur demandent de les aider à se faire réélire.

Ce qui se passe actuellement au sein du Parti réformiste, ou quel que soit son nom aujourd'hui, c'est que ses députés sont à vendre et que Bay Street est en train de les acheter.

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais me faire l'écho des sentiments de mon collègue. Je suis persuadé que je parle pour tous les Canadiens lorsque je dis espérer devoir attendre encore bien longtemps avant de voir la suite de la nouvelle émission, Les pitreries de M. Bean dans la bande de Gaza.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'invite le député à poser sa question.

M. Jay Hill: Monsieur le Président, la députée de Ahuntsic a obtenu de la société Mode Conili une somme représentant près de 10 p. 100 de sa caisse électorale. Le Parti libéral a également reçu des dons totalisant 2 000 $. L'entreprise n'avait jamais donné à la députée ou à son parti dans les années précédant les élections. Par pur hasard, elle a commencé à verser des dons après avoir reçu des subventions de 750 000 $.

Les contribuables doivent-ils croire la dernière de la longue liste de coïncidences dont sont victimes les libéraux?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Les deux premières questions étaient à la limite de l'acceptable. Nous devons parler de la responsabilité administrative du gouvernement. Je vais permettre au très honorable premier ministre ou au leader du gouvernement à la Chambre des communes de répondre à la question s'il le désire.

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, comme notre vis-à-vis le sait, son parti et lui-même ont contribué au processus. Nous savons tous ici que la loi électorale s'applique à tous les députés, à tous les Canadiens contribuant à des partis politiques et bien entendu également aux candidats durant une campagne électorale. Notre vis-à-vis ne devrait pas essayer de présenter les choses de façon à laisser entendre que cette loi est conçue pour favoriser une personne plutôt qu'une autre. Elle est équitable et s'applique à tous les députés à la Chambre des communes.

 

. 1420 + -

M. Jay Hill (Prince George—Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est question en l'occurrence de l'octroi de subventions par le gouvernement. Si cela ne touche pas à l'administration du gouvernement, je ne sais pas à quoi cela touche alors.

Monsieur le Président, écoutez cette liste: Confections St-Elie, Aérospatiale Globax, Placeteco, Fermco Industries et maintenant, Mode Conili. La liste est longue. Toutes ces entreprises ont reçu des subventions du ministère du Développement des ressources humaines et ont ensuite donné de l'argent aux libéraux. Trente-trois p. 100 des gens qui ont contribué à la campagne du premier ministre ont obtenu des subventions, mais nous apprenons maintenant que les députés d'arrière-ban sont aussi chanceux.

Pourquoi les deniers publics sont-ils maintenant devenus simplement un autre outil pour les collecteurs de fonds libéraux?

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le député sait, comme nous tous d'ailleurs, que les Canadiens sont libres de donner aux partis politiques durant les campagnes électorales. Ils peuvent donner aux partis politiques entre des élections et aux candidats durant les campagnes électorales. C'est la loi au Canada.

Je rappelle aux députés que le projet de loi C-2 sera approuvé par le Sénat d'ici quelques semaines, on peut l'espérer, et qu'on va ainsi améliorer encore davantage l'excellente loi que nous avons déjà.

*  *  *

[Français]

LE CONSEIL POUR L'UNITÉ CANADIENNE

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, depuis plusieurs mois, nous demandons que le Conseil pour l'unité canadienne fasse l'objet de vérification, afin que les contribuables puissent connaître l'usage qui est fait des fonds publics. Le gouvernement refuse même que le Conseil pour l'unité canadienne fasse partie de la liste des organismes devant faire l'objet de vérification.

Comment le gouvernement peut-il expliquer sa décision de soustraire le Conseil pour l'unité canadienne à toute vérification?

M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, ce n'est pas le cas du tout.

Le Conseil pour l'unité canadienne verra certains de ses programmes vérifiés sous peu, certains financés par le ministère du Développement des ressources humaines et d'autres par le ministère du Patrimoine canadien.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, on parle de l'ensemble des programmes, et on se demande si la raison pour laquelle on refuse que le Conseil fasse l'objet de vérification sur l'ensemble de l'argent qui est accordé par le gouvernement à ce Conseil ne s'explique pas par le fait qu'il y a plusieurs petits copains libéraux qui en profitent.

Si c'est tellement vrai qu'ils veulent que certains programmes soient examinés, est-ce qu'on pourrait me dire si on le fera pour Option Canada, entre autres? Ce serait intéressant, ça, car il y a 4,8 millions de dollars de disparus jusqu'à ce jour.

M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, les gens qui bénéficient des programmes gérés par le Conseil pour l'unité canadienne sont principalement les jeunes du Canada.

Il y a le programme Échanges-Étudiants Canada auquel 89 députés ont participé. Tous les partis politiques y étaient représentés. Il y a au-dessus de 50 000 jeunes Canadiens qui ont participé aux programmes de Rencontres du Canada et il y avait le programme Expérience Canada qui sera interrompu d'ici l'automne.

Ce sont les programmes et ce sont les jeunes du Canada qui en ont bénéficié.

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, ce matin, une porte-parole de Patrimoine Canada déclarait dans un journal que sa ministre attendait que les programmes du Conseil pour l'unité canadienne soient bien rodés avant que ses activités financières soient vérifiées.

La ministre du Patrimoine reconnaîtra-t-elle que le Conseil pour l'unité canadienne, fondé en 1964, a eu suffisamment de temps pour roder ses programmes et qu'il est plus que temps de les soumettre à une vérification?

M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous avons déjà répondu à cette question. Les programmes que j'ai mentionnés seront vérifiés. Ce sont les programmes que le Conseil pour l'unité canadienne gère et auxquels le gouvernement du Canada contribue pour le mieux-être des jeunes du Canada et pour l'avenir du Canada.

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, puis-je rappeler au secrétaire parlementaire qu'en 1997, la directrice générale des examens ministériels de Patrimoine Canada affirmait, dans le dossier de Option Canada, que 20 des 22 critères requis par la procédure normale pour obtenir des subventions n'ont pas été respectés, ni même les normes de versement des subventions du Conseil du Trésor?

Au-delà de ce que le secrétaire parlementaire peut dire, est-ce qu'on peut s'attendre de la part du gouvernement qu'il va prendre des engagements pour enfin administrer les fonds publics et cesser d'avantager ses petits amis?

 

. 1425 + -

M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, les petits amis, comme le dit la députée d'en face, sont 89 députés de cette Chambre qui ont participé l'été dernier au programme Échanges-Étudiants du Canada au bénéfice d'au-delà de 700 jeunes Canadiens.

Ce sont 3 000 étudiants par année, au-dessus de 52 000 jusqu'à maintenant, qui ont bénéficié du programme Rencontres du Canada.

C'est cela, les amis: de jeunes Canadiens du pays qui bénéficient de ce programme.

*  *  *

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.

Hélas, au cours de la semaine de relâche, le premier ministre de l'Alberta n'a pas changé d'idée et il est toujours déterminé à faire adopter le projet de loi 11. Quand j'ai interrogé le ministre la dernière fois à cet égard, il a répondu que le gouvernement se penchait sur les répercussions de cette loi quant à l'ALENA.

Le ministre peut-il nous dire ce que le gouvernement fédéral pense des répercussions du projet de loi 11 quant à l'ALENA? Que fera le gouvernement à cet égard? Le temps presse vraiment. Ira-t-il à Edmonton ce soir pour participer au rassemblement parrainé par Friends of Medicare et dire ce que le gouvernement projette de faire pour empêcher le premier ministre Klein de menacer l'existence même du régime d'assurance-maladie universel à cause de l'ALENA?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, nous avons soulevé la question de l'ALENA au moment de notre réaction initiale à la proposition du gouvernement de l'Alberta au mois de novembre. Depuis lors, divers avis juridiques ont été émis.

Nous avons soulevé d'autres questions que l'ALENA. Nous avons fait valoir le point de vue selon lequel la voie choisie par l'Alberta n'est pas la bonne et qu'elle ne règlera pas les problèmes qu'elle est censée résoudre d'après M. Klein. En fait, nous avons demandé à ce dernier de modifier le projet de loi dont est maintenant saisie l'Assemblée législative de sa province.

Nous observons avec intérêt la population de l'Alberta exprimer son insatisfaction à cet égard, et nous verrons si l'Assemblée législative adoptera le projet de loi, et sous quelle forme, dans les jours à venir.

M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, il n'est plus temps d'observer avec intérêt. Il importe plutôt que le ministre passe à l'action. Le ministre ira-t-il à Edmonton ce soir pour se joindre au chef du NPD? Si c'est une question d'argent, monsieur le Président, nous avons ici un billet qui a été acheté et payé...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député sait pertinemment qu'il ne peut brandir des objets. Si le ministre veut bien répondre à la question, je l'autorise à le faire.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je me suis rendu à Calgary il y a quelques semaines et j'ai énoncé en détail les raisons pour lesquelles le gouvernement pense que le projet de loi 11 n'est pas dans l'intérêt de la population ainsi que ses préoccupations à cet égard. Depuis lors, j'ai demandé de façon détaillée au ministre de modifier le projet de loi en fonction de nos grandes préoccupations.

L'Assemblée législative est maintenant saisie du projet de loi. Des amendements ont été proposés, et le débat se poursuit. Nous ne savons pas encore quel sera le libellé final du projet de loi qui sera adopté par l'Assemblée législative de l'Alberta.

Il est clair, toutefois, que nous allons protéger les cinq principes fondamentaux du régime d'assurance-maladie.

*  *  *

LE VIÊTNAM

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, la semaine dernière, une citoyenne canadienne a été attachée, bâillonnée et exécutée par le gouvernement du Viêtnam. Pendant que la famille de Mme Nguyen Thi Hiep pleure toujours cette mort horrible, le gouvernement libéral continue les relations commerciales et ses programmes d'aide normaux avec le Viêtnam.

Le Canada n'a pris que des mesures symboliques en se contentant de boycotter les célébrations de la fin de semaine dernière et en retirant son appui à la candidature du Viêtnam à l'Organisation mondiale du commerce. C'est très faible. Les Canadiens s'attendent à plus.

Ma question s'adresse au premier ministre. Quelles mesures concrètes le gouvernement a-t-il prises pour montrer le dégoût du Canada devant cette exécution?

L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, le Canada condamne l'exécution de Mme Nguyen Thi Hiep et présente ses plus sincères condoléances à sa famille.

Les autorités vietnamiennes n'ont répondu à aucune des préoccupations que le gouvernement du Canada a exprimées et nous restons insatisfaits des déclarations publiques. Par conséquent, le ministre des Affaires étrangères a suspendu tous les contacts au niveau ministériel entre le Canada et le Viêtnam à l'exception des contacts ayant lieu dans le cadre de réunions multilatérales.

Pour ma part, j'ai repoussé indéfiniment les consultations qui étaient prévues prochainement sur les programmes existants et futurs d'aide au développement au Viêtnam. De plus, le ministre des Affaires étrangères a demandé à notre ambassadrice au Viêtnam, qui est actuellement...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Pictou—Antigonish—Guysborough.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, les autorités vietnamiennes avaient donné l'assurance que l'exécution serait reportée en attendant de nouveaux éléments de preuve provenant du Canada, mais, en dépit de cela, le Viêtnam a exécuté une Canadienne qui avait peut-être été chargée par duperie de transporter de la drogue.

Dans la foulée d'un voyage désastreux au Moyen-Orient où le premier ministre a fait la preuve de son incompétence en affaires étrangères, celui-ci est resté complètement silencieux sur cette tragédie internationale.

 

. 1430 + -

Pendant qu'il jouait encore au golf avec le président des États-Unis en fin de semaine dernière, le premier ministre a-t-il obtenu des États-Unis une condamnation de cette injustice? Il s'agit de la vie d'une femme.

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement a pris ses décisions et a fait ses interventions la semaine dernière. Comme l'a dit la ministre, nous déplorons cette conduite inacceptable de la part du gouvernement du Viêtnam. Nous avons pris toutes les mesures possibles pour nous assurer qu'il comprend que ses gestes ne sont pas acceptables et que le gouvernement du Canada les condamne catégoriquement.

*  *  *

LA FISCALITÉ

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, des milliers de Canadiens transmettront aujourd'hui à Shawinigan leur déclaration de revenus accompagnée d'un chèque personnel. On trouvera bien davantage que de la menue monnaie dans cette fontaine, au propre comme au figuré.

Le ministre des Finances peut-il nous dire pourquoi les Canadiens devraient envoyer à Shawinigan des impôts qui atteindront un niveau record et serviront à financer des fontaines et des entreprises privées?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, le budget a été déposé il y a trois mois et demi et le député pose sa première question à ce sujet. Je l'en félicite.

Je lui souligne, trois mois plus tard, que le budget du gouvernement comporte des réductions d'impôt de l'ordre de 58 milliards de dollars sur les cinq prochaines années. Nous avons rétabli l'indexation du régime fiscal en vue de protéger les Canadiens à revenus faible et moyen. Nous avons ramené le taux d'imposition intermédiaire de 26 p. 100 à 24 p. 100, et il baissera bientôt à 23 p. 100. Je poursuivrai dans cette voie.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette réponse montre je suppose que l'on peut faire dire ce que l'on veut aux chiffres.

Le ministre des Finances fait payer chaque année aux Canadiens des milliards de dollars d'impôts en trop afin de financer des projets bidons. Néanmoins, avant le budget, il s'employait à dire aux journalistes que le gouvernement ne peut choisir des gagnants dans le secteur privé, mais que des perdants peuvent certes choisir des gouvernements.

Quand le ministre des Finances a-t-il changé d'idée et décidé qu'il incombe au gouvernement de financer des fontaines dans la circonscription du premier ministre et des entreprises privées?

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut voir des perdants, il n'a qu'à se regarder dans le miroir. Il a l'air un peu épuisé.

Le député n'a qu'à s'arrêter à la politique industrielle du gouvernement sur les plans de l'appui à la recherche et au développement, de l'appui à l'éducation et de l'appui aux Canadiens qui construiront l'économie de l'avenir. Si le député se penche sur le programme d'infrastructure, qui sera conclu par le président du Conseil du Trésor avec les provinces et les municipalités du pays, il constatera que le gouvernement contribue à établir le climat et à créer la structure de base qui donneront la meilleure économie que nous n'ayons jamais eue.

*  *  *

[Français]

CINAR

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, nous savons que la GRC a déposé un affidavit à la Cour du Québec, dans lequel elle établit avoir des preuves à l'effet que CINAR se serait prêté à l'utilisation de prête-noms.

De toute évidence, le programme de divulgation volontaire de Revenu Canada s'avère donc inapplicable dans le cas de CINAR. Or, des négociations se poursuivraient malgré tout entre CINAR et Revenu Canada en vertu de ce programme.

Le ministre du Revenu peut-il garantir à cette Chambre qu'il ne s'est pas engagé dans une course avec la GRC, dans le but de sauver CINAR, avant que la GRC ait pu compléter son enquête et déposer son dossier auprès du procureur général du Canada?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit à plusieurs reprises, dans un premier temps, lorsqu'on pose une question sur un dossier spécifique, en vertu de la loi, il s'agit d'éléments confidentiels que je ne peux commenter.

Dans un deuxième temps, il y a une loi au Canada qui existe, la Loi de l'impôt sur le revenu. Tous les Canadiens sont assujettis à la Loi de l'impôt sur le revenu; il en va de même pour les particuliers et également pour l'ensemble des corporations canadiennes.

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le Président, sans entrer dans les détails entourant le dossier particulier de CINAR, le ministre reconnaît-il que lorsque la GRC détient des preuves à l'effet qu'il y aurait effectivement eu fraude fiscale dans un dossier quelconque, le programme de divulgation volontaire de son ministère, comme son nom l'indique, devient par le fait même inapplicable?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Encore une fois, monsieur le Président, premièrement, je ne peux pas fournir une information spécifiquement; deuxièmement, la loi s'applique à tous et à toutes; et, troisièmement, je veux réitérer ce que j'ai déjà dit à la Chambre, c'est-à-dire qu'il existe une très bonne collaboration entre la Gendarmerie royale du Canada et l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

*  *  *

 

. 1435 + -

[Traduction]

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, selon les hauts fonctionnaires qui administrent les partenariats de création d'emplois, la majeure partie des fonds de ce programme est censée servir aux salaires.

Or, dans la circonscription du vice-premier ministre, plus de 80 p. 100 des 1,6 million de dollars du programme ont servi à des choses comme l'achat d'arbres et de toilettes pour un parc riverain.

Ne s'agit-il pas là, selon la ministre, du plus récent exemple d'évacuation de l'argent des contribuables, dans le seul but de permettre à un député libéral de se prêter à une séance de photos?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je ne suis pas d'accord avec la députée.

Ce projet a été lancé par la ville de Windsor dans le cadre de son plan stratégique. En association avec le personnel de Développement des ressources humaines Canada dans cette région, la ville a voulu permettre à 37 prestataires d'assurance-emploi qui désiraient sortir de chez eux et travailler d'acquérir de l'expérience dans le domaine de l'aménagement paysager, d'apprendre à poser des briques et à planter des arbres.

Aujourd'hui, la grande majorité de ces 37 personnes ont un emploi. Les résidents de Windsor ont aujourd'hui un héritage dont ils sont fiers.

Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Canadiens veulent savoir pourquoi, puisque ce programme aide tellement les Canadiens à acquérir des compétences professionnelles, seulement 20 p. 100 des fonds servent à créer des emplois et à préparer les gens à occuper des emplois? Pourquoi 80 p. 100 des fonds servent-ils à autre chose?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle que le projet est pleinement conforme aux modalités et conditions du programme de création d'emplois.

La députée peut-elle m'expliquer comment ces 37 hommes et femmes auraient pu acquérir les compétences et l'expérience professionnelles nécessaires à l'obtention d'emplois à temps plein dans le secteur de l'aménagement paysager, s'ils n'avaient pas préalablement appris à poser des briques, à planter des arbres et s'ils n'avaient pas eu accès aux ressources nécessaires pour le faire?

*  *  *

[Français]

CINAR

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier de CINAR, on ne peut pas parler de divulgation volontaire puisque c'est suite à des questions du Bloc québécois que le dossier a été porté à l'attention du gouvernement.

Dans ces circonstances, le ministre du Revenu peut-il nous assurer, hors de tout doute, qu'il n'y aura pas d'entente en vertu du programme de divulgation volontaire ni avec CINAR, ni avec aucune des sociétés bidon gravitant autour de CINAR, compte tenu qu'il y a eu dénonciation dans ce dossier?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, au risque de me répéter, je ne peux commenter de façon spécifique le dossier de CINAR. Cependant, on fait référence à l'initiative d'équité qui a été mise de l'avant par l'Agence des douanes et du revenu, une initiative dont je suis particulièrement fier et qui comprend plusieurs points.

À l'intérieur cette l'initiative, il y a un élément qu'on appelle la divulgation volontaire. Il est évident que lorsqu'on parle de divulgation volontaire, on parle d'une initiative et d'un geste positif de la part d'un individu ou d'une corporation.

M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe—Bagot, BQ): Monsieur le Président, le ministre se réfugie derrière la confidentialité pour éviter de répondre, mais n'utilise-t-il pas la confidentialité pour protéger CINAR et mettre ainsi le couvercle sur toute cette affaire?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, je l'ai dit et je le répète, la Loi de l'impôt sur le revenu s'applique à l'ensemble de la population canadienne, à tous et à toutes, aux individus comme à l'ensemble des corporations.

Les gens comprennent bien et appuient également le principe de la confidentialité, un principe que je vais défendre comme ministre du Revenu national.

Troisièmement, au risque de me répéter, lorsqu'on parle de divulgation volontaire, c'est un geste positif. Le gouvernement ou toute autre entité ne doit pas avoir entamé de mesures visant à récupérer les fonds dus à l'État.

*  *  *

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, un riche patient marocain a eu droit à une chirurgie cardiaque dans un hôpital de Montréal moyennant la somme de 60 000 $. Pendant ce temps, il y avait 635 Canadiens inscrits sur une liste d'attente pour obtenir la même chirurgie dans le même hôpital de Montréal.

Pourquoi ce riche étranger a-t-il réussi à se faufiler alors que des Canadiens meurent en attendant leur tour?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, le député doit savoir que l'administration des hôpitaux relève de la compétence des provinces ou des régions.

Le député devrait également savoir que si la question monétaire était la seule en cause, il ne faut pas oublier que le gouvernement du Québec avait à sa disposition une somme de quelque 800 millions du budget de l'an dernier qui se trouvait toujours dans un compte bancaire à Toronto.

Si l'argent était la seule préoccupation en cause, cette question serait alors réglée.

M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, cette somme doit s'étaler sur une période de cinq ans et le gouvernement du Québec fait seulement preuve de prudence dans la gestion de ses dépenses.

Le député se cache constamment derrière la Loi canadienne sur la santé. En plus de...

Des voix: Oh, oh!

Une voix: C'est très impoli de la part de ces gens là-bas.

 

. 1440 + -

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Je suis d'accord avec le député. On profère des grossièretés des deux côtés de la Chambre.

M. Bob Mills: Monsieur le Président, le ministre se cache derrière la Loi canadienne sur la santé. En plus de réduire le financement offert, le gouvernement a laissé le système se délabrer et a forcé les hôpitaux à rechercher de nouvelles formes de financement.

Encore une fois, j'aimerais que le ministre me dise pourquoi il laisse des étrangers jouer les passe-droits en payant pour obtenir des chirurgies complexes alors que des Canadiens sont obligés d'attendre patiemment leur tour.

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut devenir le porte-parole de l'Alliance canadienne, il devrait commencer à s'informer un peu mieux. Il se rendra compte qu'au cours des 14 derniers mois, le gouvernement a accru de 14 milliards de dollars le montant qu'il consent aux provinces en matière de santé. Le domaine de la santé fait partie des priorités du gouvernement.

Le Parti réformiste demande que nous respections les domaines de compétence provinciale et nous le faisons. Lorsque les provinces viennent nous voir pour discuter d'améliorations au système de soins de santé, nous ne parlons pas que d'argent; nous parlons de meilleure gestion. Nous sommes prêts à travailler avec nos homologues provinciaux dans ce sens.

*  *  *

[Français]

LE CODE CANADIEN DU TRAVAIL

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, dans le cas des travailleuses enceintes ayant droit au retrait préventif, celles qui sont régies par le Code canadien du travail n'ont pas les mêmes droits que celles régies par le Code du travail du Québec. Cette injustice peut être rapidement corrigée si la ministre en a la volonté politique.

La ministre du Travail s'engage-t-elle, dans les plus brefs délais, à conclure une entente administrative avec sa collègue du Québec, afin que toutes les femmes, toutes les travailleuses du Québec aient droit aux mêmes conditions?

L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, la ministre du Travail du Québec et moi-même en sommes toujours à parler des conditions, surtout pour les femmes du Québec et du Canada. Il me fera plaisir de m'asseoir avec elle pour parler de cette situation.

*  *  *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Madame la Présidente, ma question s'adresse à la ministre du Patrimoine canadien. La ministre peut-elle dire à la Chambre si elle a l'intention d'intervenir auprès de la Société Radio-Canada pour veiller au maintien des programmes locaux et régionaux?

[Français]

M. Mauril Bélanger (secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Monsieur le Président, je pense que mon collègue va reconnaître que Radio-Canada est une agence autonome. Il serait inapproprié pour le gouvernement de lui dicter une ligne de conduite. Ce serait essentiellement de l'ingérence.

D'ailleurs, le président de Radio-Canada, M. Rabinovitch, lors de sa comparution devant le Comité permanent du patrimoine, au mois de février, a reconnu que Radio-Canada avait le mandat de représenter les régions du pays.

Ce que les Canadiens peuvent faire—et ils sont libres de le faire—c'est communiquer avec M. Rabinovitch ou les membres du conseil pour leur faire part de leurs craintes au sujet de décisions à venir.

*  *  *

[Traduction]

LE CRIME ORGANISÉ

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Madame la Présidente, l'opération Sidewinder a révélé que le gouvernement chinois et les gangs criminels asiatiques ont travaillé main dans la main pour s'établir au Canada. Leurs objectifs étaient d'influencer les hommes politiques canadiens, de voler les secrets en matière de technologie de pointe, de blanchir l'argent et de prendre le contrôle de compagnies canadiennes légitimes.

Les Canadiens veulent savoir pourquoi le Service canadien du renseignement de sécurité a mis fin à l'opération Sidewinder en 1997.

[Français]

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, mon collègue semble oublier un petit peu trop facilement que le rapport publié à la suite de cette affaire a été un rapport conjoint entre la GRC et le SCRS. Par conséquent, cela illustre la collaboration qu'il y avait entre ces deux organisations.

Je dois aussi dire que le Comité de surveillance des activités du renseignement de sécurité, le CSARS, ou le SIRC en anglais, revoit actuellement le dossier. Quand il fera rapport, nous serons tous très heureux d'en prendre connaissance ensemble.

[Traduction]

M. Jim Abbott (Kootenay—Columbia, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le rapport Sidewinder, qu'a obtenu le Globe and Mail, dit de cette affaire que c'est l'une des plus grandes menaces actuelles à la sécurité nationale du Canada et à l'industrie canadienne. Le secrétaire parlementaire a raison, il s'agissait d'un groupe de travail mixte de la GRC et du SCRS. Le groupe de travail a recommandé d'inclure dans ce groupe des représentants des ministères des Affaires étrangères, du Commerce international et de l'Immigration. Au lieu de cela, le SCRS a mis fin à l'opération. Nous voulons savoir pourquoi.

[Français]

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je remercie mon collègue pour sa question. Cela me donne l'occasion de dire quelque chose que je veux dire depuis pas mal de temps.

 

. 1445 + -

En matière de collaboration internationale pour la préservation de la sécurité du territoire canadien, Mme Janet Reno, qui est la procureure générale des États-Unis, a communiqué avec notre solliciteur général pour le féliciter de la collaboration qu'elle a eue de la part de la GRC et du Service canadien du renseignement de sécurité dans le but de régler les problèmes de terrorisme international.

Peut-être faudrait-il parfois voir le verre à moitié plein.

*  *  *

[Traduction]

L'ENSEIGNEMENT POSTSECONDAIRE

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens apprécient l'universalité du système national de soins de santé et le droit à l'instruction et y croient. Jour après jour, nous avons sommé le gouvernement de prendre la défense du régime d'assurance-maladie et d'en empêcher la privatisation. Aujourd'hui, voilà que les Canadiens sont menacés par la mise en place d'un système à deux vitesses, non seulement pour ce qui concerne les soins de santé, mais aussi l'éducation.

Je voudrais que le premier ministre nous dise s'il compte ne rien faire, ou bien s'il compte annoncer haut et fort que le gouvernement ne permettra pas la privatisation des universités et que seront rétablis les financements accordés aux établissements publics d'enseignement pour en assurer l'accessibilité aux étudiants? Le fera-t-il?

L'hon. Don Boudria (leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement du Canada travaille en étroite collaboration avec ses contreparties provinciales sur une foule de sujets concernant l'éducation et autres questions. Je rappelle à la députée d'en face que nous avons augmenté les transferts fédéraux en matière de santé et de programmes sociaux. Au contraire des allégations de plusieurs députés, et notamment les députés du caucus de notre collègue, les montants transférés aux provinces n'ont pas diminué; ils sont plus importants qu'ils ne l'étaient lorsque nous sommes arrivés au pouvoir en 1993.

*  *  *

[Français]

LES RÉGIONS ÉCONOMIQUES

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le Président, le 27 avril dernier, en Gaspésie, la ministre du Développement des ressources humaines déclarait que son ministère envisageait de donner le statut de région économique distincte à la région de Gaspésie-Les Îles afin de mieux refléter les besoins en matière d'assurance-emploi.

Ma question s'adresse à la ministre du Développement des ressources humaines. Est-ce que son ministère envisage de faire des modifications à ses régions économiques dans toutes les régions au pays affectées par le travail saisonnier, comme par exemple dans la Péninsule acadienne?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, tous les cinq ans, les régions économiques partout au Canada sont sujettes à révision. Le processus est déjà en cours à l'heure actuelle. Les économistes rattachés à la Commission de l'assurance-emploi examineront les données statistiques et recommanderont des changements, si besoin est.

*  *  *

LES TRANSPORTS

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. La société Marine Atlantique a récemment annoncé une hausse des tarifs de traversier entre Terre-Neuve et le Canada continental. Cependant, le ministre des Anciens combattants a annoncé il y a deux ou trois jours que ces tarifs seraient bloqués, du moins, je suppose, jusqu'après l'élection partielle dans la circonscription de St. John's-Ouest.

Le ministre des Transports peut-il dire combien de temps ces tarifs seront bloqués?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, on n'a annoncé ni approuvé aucune hausse de tarifs de traversier pour Marine Atlantique. Des consultations ont cependant eu lieu entre la direction de Marine Atlantique et les représentants du secteur du camionnage à Terre-Neuve à propos de l'établissement des coûts, étant donné qu'il n'y a pas eu de hausse depuis quatre ou cinq ans. Aucune approbation n'a été accordée. Par conséquent, mon collègue, le ministre des Anciens combattants, avait entièrement raison.

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, nous savons qu'aucune approbation n'a été accordée. Nous espérons connaître cet été une excellente saison touristique à cause des célébrations du millénaire de l'arrivée des Vikings. Des tarifs de traversier stables ne pourront que contribuer à faire de cet été un grand succès. Étant donné l'importance de ce lien pour la survie et la croissance continue de notre industrie touristique, le ministre acceptera-t-il de bloquer ces tarifs indéfiniment?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, je ne peux pas croire que le député puisse demander sérieusement à la Chambre que l'on bloque indéfiniment les tarifs. On ne peut pas s'engager à bloquer des tarifs ou des taxes et aucun gouvernement ne peut donner de garantie à cet égard. Pour ma part, j'ai dit qu'aucune hausse n'avait été approuvée.

Pour les raisons mêmes que le député a évoquées, nous voulons faire en sorte d'avoir une capacité accrue pour la traversée du golfe cet été afin de répondre aux besoins d'une industrie touristique florissante. Nous prenons cet engagement. Il y aura un bon service pour répondre aux besoins de tout le monde à Terre-Neuve.

*  *  *

L'AGRICULTURE

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire vient de rentrer d'une mission commerciale en Chine et aux Philippines. Le ministre peut-il informer la Chambre des avantages commerciaux de cette mission pour les agriculteurs canadiens?

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, notre mission a été un franc succès à deux égards.

J'ai eu l'occasion de rencontrer le vice-premier ministre chinois Weng Giabao et le président des Philippines ainsi que leur ministre respectif de l'Agriculture; j'ai souligné l'importance pour chacun d'entre nous d'unir nos efforts en vue de l'élimination des subventions à l'exportation et des subventions internes dans le monde entier.

 

. 1450 + -

En Chine, j'ai signé un protocole qui va permettre à l'industrie porcine du Canada d'exporter du porc en Chine ainsi qu'un autre protocole qui permettra au Canada d'être le premier et, pour le moment, le seul pays à vendre des pommes de terre de semence à ce pays.

*  *  *

LE CRIME ORGANISÉ

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ma question s'adresse au Solliciteur général et porte sur l'opération Sidewinder.

Nous parlons d'une énorme organisation criminelle internationale qui cherche à influencer les politiciens canadiens et américains. Elle cherche à voler des secrets industriels, à blanchir de l'argent et à se servir d'entreprises canadiennes légitimes comme paravents pour se livrer à des activités criminelles.

Le solliciteur général peut-il expliquer à la Chambre le pourquoi de la décision d'abolir l'opération Sidewinder et ce qui se cache derrière cette décision?

[Français]

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je crois comprendre de l'intervention de mon collègue qu'il va appuyer le projet de loi que nous déposons sur le blanchiment de l'argent.

Je crois comprendre de la part de mon collègue qu'il appuie que nous ayons mis les montants suivants pour lutter contre le crime organisé, à savoir, en particulier, 115 millions de dollars pour le CPIC, 78 millions pour l'initiative anti-contrebande, 810 millions de plus sur trois ans pour le solliciteur général, la suppression du billet de 1 000 $, 13 unités mixtes pour prévenir la criminalité.

Je pourrais continuer pendant trois heures de la même façon. C'est cela qu'il ne veut pas reconnaître.

*  *  *

LE PROJET DE LOI C-3

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, la ministre de la Justice refuse toujours de permettre au Québec de continuer d'appliquer la Loi sur les jeunes contrevenants, même si tous les intervenants québécois persistent à dire que l'approche préconisée dans son projet de loi C-3 va à l'encontre de celle adoptée par le Québec.

La ministre ne comprend-elle pas que, dans un système judiciaire, la jurisprudence ne s'applique pas sur une base régionale et, en conséquence, puisque sa nouvelle loi n'exclut pas le Québec de son application, il faut en conclure que le modèle québécois disparaîtra au profit de l'approche punitive et répressive du reste du Canada?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, loin de faire disparaître le modèle québécois, la nouvelle Loi sur la justice pour les jeunes contrevenants renforcera et encouragera un bon nombre de stratégies déjà en place au Québec ainsi que les organismes et les programmes qui en découlent.

Je n'arrête pas de demander au député de nommer un programme ou une initiative actuellement en cours dans la province et auquel le projet de loi mettrait un terme. Il ne l'a toujours pas fait.

*  *  *

LE TRANSPORT DU GRAIN

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, les Canadiens de l'Ouest sont totalement scandalisés par la hausse de 4,5 p. 100 des taux de fret annoncée la semaine dernière pour les céréales.

Quelques semaines à peine après que le ministre de la commission du blé ait promis à plus de 1000 délégués de la SARM qu'ils pouvaient compter sur 150 millions de dollars de réduction des taux de fret cette année, ces taux augmentent en fait de 44 millions de dollars. C'est injuste, injustifié et incroyable, et la réaction partout dans les Prairies et en particulier en Saskatchewan est extrêmement négative.

Le ministre des Transports dira-t-il à la Chambre pourquoi il n'a pas déjà ordonné la suspension de cette augmentation scandaleuse?

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait savoir que l'Office des transports du Canada a la responsabilité légale de prendre en compte tous les coûts que doivent assumer les chemins de fer dans leurs opérations. Il était donc tout à fait en droit de prendre la décision qu'il a prise il y a quelques semaines.

Je suis conscient du fait que cela a suscité certaines préoccupations chez les habitants des Prairies, mais, comme le sait le député, nous travaillons dur en vue d'améliorer la compétitivité des céréaliers des Prairies. J'espère que certaines des économies dont a parlé mon collègue dans les médias, il y a quelques semaines, pourront réellement profiter aux producteurs.

*  *  *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale s'est montré assez ouvert à l'égard de la participation du Canada à un système de défense nord-américain. Notre ministre qui aspire à devenir prix Nobel de la paix préférerait que nous soyons des victimes. Étant donné que le ministre des Affaires étrangères n'agit pas, le ministre de la Défense nationale envisage-t-il d'apporter un amendement pour inclure la Russie ou est-ce que ce sera la mort de NORAD?

L'hon. Arthur C. Eggleton (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères a soulevé des questions très valables concernant la proposition qu'étudie actuellement le gouvernement des États-Unis.

Ces questions nous préoccupent tous, tant du point de vue de la défense que de celui de la paix et de la sécurité internationales. Les bonnes questions sont posées.

Les États-Unis n'ont pris aucune décision. Ils n'ont pas demandé au Canada de participer. Le gouvernement du Canada examinera très sérieusement le dossier et prendra une décision.

*  *  *

 

. 1455 + -

LE CRIME ORGANISÉ

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, concernant la réponse qu'a donnée le vérificateur général la dernière fois, notre parti appuie le projet de loi sur le blanchiment d'argent. C'est notre parti qui a présenté le projet de loi sur le crime organisé, et non celui d'en face.

Si son gouvernement n'était pas responsable de la destruction du dossier Sidewinder, pourquoi refuse-t-il de dire à la Chambre pourquoi ce dossier a été détruit?

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà répondu à cette question en français à quelques reprises, mais il semble que cela pose un problème. Je m'exprimerai en anglais cette fois-ci.

Premièrement, on n'a pas mis fin à l'opération Sidewinder. Deuxièmement, le rapport sur cette opération a été rédigé conjointement par la GRC et le SCRS. Troisièmement, le CSARS, ou Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, examine ce rapport et présentera ses propres conclusions.

Au lieu de fonder mon évaluation sur des spéculations, comme les députés d'en face voudraient que nous fassions, je préfère m'en tenir aux faits.

*  *  *

[Français]

LES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS

Mme Hélène Alarie (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, contrairement à ce que disait le ministre de l'Agriculture en avril dernier, à savoir qu'il n'y avait pas de problème d'exportation pour les OGM, son secrétaire d'État affirmait le contraire à l'automne 1997 en prenant l'exemple de l'interdiction d'exportation du canola transgénique en Europe.

Comment le ministre peut-il continuer à nier les problèmes d'exportation, alors que nos producteurs subissent les conséquences de son inaction?

[Traduction]

L'hon. Lyle Vanclief (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je signale encore une fois que le gouvernement collabore très étroitement avec l'Association canadienne de normalisation, avec l'industrie, avec l'Association des consommateurs du Canada, avec plusieurs ministères du gouvernement fédéral et avec les provinces pour établir un ensemble de critères sur l'étiquetage des produits. Des critères s'imposent. C'est sur ce chapitre que d'autres pays éprouvent des difficultés. Ils sont incapables de se doter d'un ensemble de critères qui soient efficaces, applicables et crédibles.

*  *  *

L'INDUSTRIE DES JOURNAUX

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre.

Le 15 février dernier, le premier ministre a dit que le gouvernement se pencherait sur la concentration de la propriété des journaux, par suite de l'annonce par Thomson de la décision de vendre la plupart de ses journaux. Étant donné que Hollinger a annoncé la semaine dernière la possibilité de mettre en vente plus de 300 journaux communautaires et plus de 50 quotidiens, le premier ministre pourrait-il renseigner la Chambre sur les progrès de son étude et dire s'il profitera de cette occasion unique pour présenter une loi sur les journaux, conformément à la recommandation de la Commission royale sur les quotidiens?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je pense que la députée ne parle pas de concentration. Ce sont les responsables de la concentration de la presse qui veulent vendre leurs journaux. Ce problème est différent de celui que visait la question qui a déjà été posée.

Si M. Black vend ses journaux, quelqu'un les achètera et il y aura moins de concentration, et non plus de concentration. Il est préférable de voir d'abord ce qu'il fera de ses journaux.

*  *  *

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, vu la réponse qui a été donnée plus tôt au sujet de l'assassinat d'une citoyenne canadienne au Viêtnam et la réponse du premier ministre qui n'en était pas une, je reviens à la charge: le premier ministre a-t-il pris le temps ne serait-ce que de soulever la question, pendant une partie de golf de quatre heures avec le président des États-Unis? Le président a pris le temps d'intervenir personnellement pour essayer de sauver la vie de cette Canadienne. Pourquoi le premier ministre n'a-t-il pas fait la même chose, c'est-à-dire donner un coup de téléphone pour essayer de sauver une Canadienne?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai expliqué clairement la position du gouvernement du Canada à ce sujet. Je n'ai pas à demander au président des États-Unis d'énoncer la position du Canada. Le Canada peut s'en charger.

J'ai toutefois profité de ma conversation avec le président. La semaine dernière, je me suis entretenu avec lui au téléphone, et j'ai eu un échange privé avec lui au sujet de la situation du Moyen-Orient. De plus, M. Berger, qui s'occupe de la sécurité, est venu samedi matin discuter pendant une heure et demie avec moi du rapport sur les constatations de la mission canadienne au Moyen-Orient. Il était très satisfait de ce voyage et de ce que le gouvernement du Canada a fait.

*  *  *

LE CRIME ORGANISÉ

M. John Reynolds (West Vancouver—Sunshine Coast, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je tiens à remercier le secrétaire parlementaire du solliciteur général de sa réponse formulée dans les deux langues officielles. J'ai bien compris, dans les deux langues, mais il n'a pas répondu à la question.

 

. 1500 + -

Permettez-moi de lui poser une question simple. Pourquoi le gouvernement a-t-il mis fin à l'opération Sidewinder alors que la GRC souhaitait en élargir la portée?

M. Jacques Saada (secrétaire parlementaire du solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement n'a pas mis fin à l'opération Sidewinder. C'est aussi simple que cela.



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

NOMINATIONS PAR DÉCRET

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites récemment par le gouvernement.

Conformément à l'article 110 du Règlement, ces décrets sont renvoyés d'office aux comités permanents énumérés dans la liste jointe.

*  *  *

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 13 pétitions.

*  *  *

PÉTITIONS

LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson and Highland Valleys, NPD): Monsieur le Président, c'est pour moi un véritable honneur de présenter la pétition que, comme vous pouvez le constater, des dizaines de milliers d'électeurs de ma circonscription et de toute la Colombie-Britannique ont signée.

 

. 1505 + -

Les pétitionnaires font valoir que nous avons besoin d'un réseau routier national et qu'une meilleure infrastructure nationale de transport améliorerait la qualité de vie des Canadiens en favorisant une plus grande productivité, des possibilités commerciales, la création d'emplois et le tourisme.

Ils demandent au Parlement de faire tout en son pouvoir pour encourager le gouvernement à créer un réseau routier national, à adopter une politique nationale en matière de routes et à financer de façon suffisante la construction de routes.

LE CANCER DU SEIN

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de présenter une pétition signée par un certain nombre de Canadiens, dont des électeurs de Mississauga-Sud, ma circonscription.

Les pétitionnaires souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que le Canada vient au deuxième rang des pays du monde pour l'incidence du cancer du sein, après les États-Unis, que les États-Unis ont des normes obligatoires d'assurance de la qualité des mammographies depuis octobre 1994 et que le Canada n'a adopté aucune loi à cet égard.

Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement de promulguer une loi visant à charger un organisme indépendant de mettre au point, de mettre en oeuvre et d'appliquer des normes uniformes et obligatoires d'assurance et de contrôle de la qualité des mammographies.

LE MARIAGE

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui deux pétitions à présenter au sujet du mariage. Les signataires de la première pétition exhortent le gouvernement à adopter le projet de loi C-225, de façon à ce qu'il soit bien précisé dans la loi qu'un mariage peut seulement être contracté entre un homme célibataire et une femme célibataire.

Les signataires de la deuxième pétition demandent au Parlement de retirer et d'invalider le projet de loi C-23, de faire valoir dans la loi que la définition du mariage s'entend de l'union de personnes de sexe opposé et de veiller à ce que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

LE CANCER DU SEIN

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, j'ai un certain nombre de pétitions à présenter aujourd'hui. La première invite le Parlement à créer un organisme directeur indépendant qui élaborerait et mettrait en oeuvre un programme uniforme de mammographies.

LE MARIAGE

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, les signataires de la deuxième pétition nous demandent de retirer le projet de loi C-23, de réaffirmer dans la loi que la définition du mariage s'entend de l'union de personnes de sexe opposé et de veiller à ce que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

LA YOUGOSLAVIE

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, ma troisième pétition concerne la Yougoslavie. Les pétitionnaires demandent que nous versions des fonds afin de participer à la reconstruction de ce pays.

LA PAUVRETÉ CHEZ LES ENFANTS

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, les signataires de la dernière pétition que j'ai à présenter demandent au gouvernement de réaffirmer l'engagement qu'il a pris en 1989, celui d'éliminer la pauvreté chez les enfants avant l'an 2000. Les pétitionnaires estiment que le gouvernement fédéral devrait présenter un plan pluriannuel afin d'adopter ou d'améliorer des dispositions législatives visant les enfants.

[Français]

LES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition signée par environ 75 citoyens et citoyennes de la Mauricie, soit des comtés de Champlain, de Saint-Maurice, représenté par le premier ministre, et de Trois-Rivières, bien sûr.

Les pétitionnaires demandent au Parlement l'adoption rapide d'une législation rendant obligatoire l'étiquetage de tous les aliments qui sont en totalité ou en partie génétiquement modifiés. Je porte à l'attention de la Chambre que des centaines de citoyens de la Maurice se sont déjà manifestés en ce sens.

[Traduction]

LES ARMES NUCLÉAIRES

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, j'ai ici une pétition qui reflète les préoccupations de nombreux Canadiens face aux armes nucléaires.

Les pétitionnaires soulignent que plus de 30 000 armes nucléaires existent dans le monde et que ce gigantesque arsenal nucléaire présente une menace pour la santé des êtres humains, la survie de la civilisation et l'environnement mondial.

Par conséquent, les pétitionnaires prient humblement le Parlement d'appuyer la négociation immédiate et la signature avant la fin de l'an 2000 d'une convention internationale établissant un calendrier exécutoire pour l'abolition de toutes les armes nucléaires.

[Français]

LES ORGANISMES GÉNÉTIQUEMENT MODIFIÉS

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Monsieur le Président, à la veille de la journée d'opposition qui sera consacrée justement à la question des OGM, j'ai le plaisir de déposer une pétition signée par 108 personnes de ma circonscription principalement qui demandent au Parlement l'adoption rapide d'une législation rendant obligatoire l'étiquetage de tous les aliments qui sont en totalité ou en partie génétiquement modifiés.

[Traduction]

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai aussi une pétition sur les aliments génétiquement modifiés.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à adopter une loi obligeant l'étiquetage clair des semences et des aliments génétiquement modifiés ainsi que de leurs sous-produits vendus au Canada et interdisant leur commercialisation tant qu'ils n'ont pas été soumis à des tests rigoureux.

 

. 1510 + -

LE PRIX DE L'ESSENCE

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai une autre pétition signée par un très grand nombre de citoyens de Peterborough qui soulignent que l'augmentation du prix de l'essence excède de beaucoup ce que nous devrions payer compte tenu du prix du pétrole brut à la sortie des puits, ce qui équivaut à escroquer les consommateurs à la pompe et ce qui nuit à l'économie canadienne.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à adopter une loi réglementant le prix de l'essence au Canada.

LE MARIAGE

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai deux pétitions sur le même sujet, mais envoyées à deux dates différentes, à présenter. Il y a plus de 400 noms sur ces pétitions.

Les pétitionnaires exhortent le gouvernement à abroger le projet de loi C-23, à inclure dans la loi une définition du mariage reconnaissant que ce doit être une union entre deux personnes de sexe opposé et garantissant que le mariage est reconnu comme étant une institution unique.

LE CANCER DU SEIN

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, je présente trois pétitions à la Chambre des communes.

La première pétition est signée par 236 personnes qui sont préoccupées par l'incidence élevée des cas de cancer du sein au Canada. Les pétitionnaires demandent au Parlement d'adopter une loi qui crée un organisme indépendant chargé d'élaborer, de mettre en oeuvre et de faire respecter des normes uniformes et obligatoires d'assurance et de contrôle de la qualité pour les mammographies au Canada.

LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, ma deuxième pétition est signée par 298 membres de la Highway Pentecostal Church qui habitent ma circonscription et qui sont préoccupés par le phénomène de la pornographie juvénile.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de prendre toutes les dispositions nécessaires afin que la possession de matériel pornographique juvénile demeure un crime grave.

LE MARIAGE

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, ma troisième pétition est signée par 174 électeurs de ma circonscription qui demandent au Parlement de retirer le projet de loi C-23.

LE LOGEMENT

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse aujourd'hui de présenter une pétition signée par plus de 3 000 Canadiens qui sont extrêmement préoccupés par le manque de logements salubres à loyer raisonnable.

Les pétitionnaires demandent au gouvernement fédéral de reconnaître le logement comme un droit fondamental et de collaborer avec les provinces pour que 1 p. 100 des budgets du gouvernement fédéral et des provinces soit consacré à ce droit vraiment fondamental.

LES ENFANTS VICTIMES DE LA PAUVRETÉ

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, je suis heureuse de présenter une pétition signée par plus de 600 électeurs qui rappellent qu'en 1989 la Chambre des communes avait adopté à l'unanimité une résolution en faveur de l'élimination de la pauvreté chez les enfants. Malheureusement, nous sommes encore bien loin d'avoir atteint cet objectif.

Les pétitionnaires prient le gouvernement de prévoir des mesures budgétaires qui soient de nature à éliminer la pauvreté chez les enfants au Canada.

LE MARIAGE

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre une pétition au nom de certains habitants de ma circonscription.

Les pétitionnaires demandent au Parlement de retirer le projet de loi C-23, de faire valoir dans les mesures législatives que la définition du mariage s'entend de l'union de personnes de sexe opposé et de veiller à ce que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

LA PORNOGRAPHIE JUVÉNILE

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, nous voulons ajouter 27 noms à la liste de plus de 500 000 personnes qui ont signé une pétition concernant la pornographie juvénile.

Les pétitionnaires, la plupart de ma circonscription, craignent l'inaction du gouvernement qui n'a pris aucune mesure dans ce domaine. Ils demandent au gouvernement de faire quelque chose.

LE RÉSEAU ROUTIER NATIONAL

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36 du Règlement, j'ai l'honneur de présenter une pétition au nom des Canadiens de l'Ouest qui sont dégoûtés par l'absence de programme de réfection du réseau routier national.

Le Canada est le seul des 28 pays de l'OCDE à ne pas avoir de tel programme. Nous avons eu de très sérieux problèmes dans l'Ouest du Canada, notamment des décès sur les routes qui sont encore à une seule voie.

Les pétitionnaires demandent à la Chambre des communes et au gouvernement libéral de mettre en place un programme financé par le gouvernement fédéral afin de refaire le réseau routier de notre pays d'un océan à l'autre. Ils demandent au gouvernement de prendre des mesures à cet effet dans les meilleurs délais.

LE MARIAGE

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui une pétition de la part des habitants de ma circonscription. Les pétitionnaires demandent au Parlement de retirer le projet de loi C-23, de faire valoir dans les mesures législatives que la définition du mariage s'entend de l'union de personnes de sexe opposé et de veiller à ce que le mariage soit reconnu comme une institution unique.

L'ÉQUITÉ EN MATIÈRE D'EMPLOI

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par environ 300 personnes au nom du personnel du centre fiscal de St. John's-Est-Stafford.

Les pétitionnaires veulent parvenir à l'équité dans l'émission des chèques d'équité salariale. Plus particulièrement, les employés nommés pour une période déterminée et les employés occasionnels qui ne font pas partie des effectifs depuis juillet 1998 ne pourront obtenir leurs chèques d'équité salariale avant l'automne alors que les autres employés ont reçu leurs paiements rétroactifs d'équité salariale en avril. On doit ces paiements rétroactifs à tous les employés et je ne vois pas pourquoi ils ne peuvent tous être payés en même temps.

 

. 1515 + -

LA PORNOGRAPHIE

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée par 45 habitants de Terre-Neuve qui souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur la nature dégradante de la pornographie pour les personnes et la société dans son ensemble.

Ils invitent de plus la Chambre à exhorter le gouvernement à promulguer une loi tendant à réduire la production et la distribution de matériel pornographique.

POSTES CANADA

M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, j'ai une pétition signée au nom des facteurs ruraux du Canada.

La pétition attire l'attention de la Chambre des communes sur le fait que ces travailleurs gagnent souvent moins que le salaire minimum et ont des conditions de travail dignes d'une autre époque. On ajoute qu'ils n'ont pas le droit de négocier collectivement pour améliorer leurs salaires et leurs conditions de travail, que les travailleurs du secteur privé qui livrent le courrier dans les régions rurales ont le droit à la négociation collective à l'instar des travailleurs du secteur public qui livrent le courrier pour Postes Canada dans les régions urbaines et que le paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes prive les facteurs ruraux du Canada du droit à la négociation collective.

Ainsi, les pétitionnaires exhortent le Parlement à abroger le paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Gar Knutson (secrétaire parlementaire du premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions restent au Feuilleton.

Le président suppléant (M. McClelland): Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR L'IMMIGRATION ET LA PROTECTION DES RÉFUGIÉS

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-31, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. John Solomon (Regina—Lumsden—Lake Centre, NPD): Monsieur le Président, j'étais en train de demander au ministre de m'indiquer les répercussions du projet de loi C-31 pour ce qui est d'empêcher la venue sur notre territoire de criminels et de gangs.

Par exemple, à la une du Globe and Mail du week-end dernier est paru un article sur les triades chinoises qui infiltrent, ou ont infiltré, le pays et qui ont entrepris de mettre en place un processus criminel fort complexe leur permettant d'exploiter nos concitoyens, et qui tirent assurément profit de la possibilité qui leur est donnée d'agir dans notre pays en qualité de citoyens.

J'ose espérer que ce projet de loi empêchera ces organisations de se constituer au Canada. La criminalité est déjà suffisamment élevée dans ce pays sans qu'il soit nécessaire d'importer des éléments criminels de Chine ou d'ailleurs.

Nous avons des réserves en ce qui concerne ce projet de loi. Il est indispensable que la réglementation s'applique au nom de la justice et de l'équité et qu'elle n'engendre pas qu'un simulacre de justice. La meilleure illustration qui soit est le fait que nous ne permettrons pas aux personnes reconnues coupables d'un crime de venir sur notre territoire.

C'est à mon avis un bon critère, mais nous ne devrions pas l'appliquer de façon tout à fait inflexible, car une personne ayant été reconnue coupable d'un crime entraînant une peine de plus de dix ans et ayant été en prison pendant plus de deux ans, Nelson Mandela par exemple, n'aurait pas été admissible comme réfugié au Canada en vertu du projet de loi proposé. À mon avis, nous devons nous pencher sur le dossier criminel de ces particuliers et déterminer s'ils défendaient les droits de la personne dans leurs pays, s'ils ont été mis en accusation et incarcérés. Nous devons analyser ces dossiers individuellement.

Il y a d'autres exemples, dont ceux des gens qui ont caché Anne Frank et des braves Canadiens qui ont contribué à la construction du chemin de fer clandestin destiné aux esclaves américains. Sous le régime du projet de loi C-31, ils auraient pu faire l'objet de sanctions pénales rigoureuses. À notre avis, cette situation pose des problèmes et nous espérons que nous pourrons régler certains d'entre eux en comité.

Nous attendons avec impatience l'invitation de la ministre à participer à l'examen de la réglementation et à contribuer à l'établissement de cette dernière. Elle a mentionné plus tôt aujourd'hui à la Chambre que tous les intervenants, les caucus et les partis politiques auront l'occasion d'influer sur la réglementation liée à ce projet de loi. Je me réjouis à l'idée que notre porte-parole, notre caucus et notre parti fassent des recommandations visant à simplifier la réglementation et à la rendre aussi équitable que possible.

Bref, nous du NPD estimons que la Loi sur l'immigration doit être modernisée et renforcée. Les deux démarches qui sous-tendent cette loi, soit sévir contre les criminels et intervenir en vue d'enrayer les causes de la criminalité, sont des éléments importants, mais nous devons aussi faire preuve d'ouverture à l'égard de ceux qui ont des motifs légitimes d'immigrer au pays et accueillir ces gens.

 

. 1520 + -

Le Trésor du Canada doit fournir des ressources si nous voulons que cela se produise. Plus de ressources seraient donc affectées aux consulats et ambassades du Canada partout dans le monde. À titre d'exemple, un des plus graves problèmes a trait à notre ambassade de Beijing. Nous ne pouvons parler aux gens qui s'y trouvent. Nous n'obtenons qu'un message enregistré. Toute personne souhaitant présenter en Chine une demande d'immigration au Canada doit franchir un processus très complexe et très frustrant. Nous espérons que les ressources accrues qui accompagneront le projet de loi permettront de simplifier le processus et de faire en sorte que des candidats à la citoyenneté canadiennes puissent parler à des Canadiens.

[Français]

M. David Price (Compton—Stanstead, PC): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer le projet de loi C-31, Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

Nous demandons depuis longtemps au gouvernement de présenter une nouvelle Loi sur l'immigration, laquelle était censée être présentée l'an dernier. En retard ou pas, le projet de loi arrive alors qu'une foule de défauts et de problèmes chroniques font surface à Citoyenneté et Immigration Canada.

Aujourd'hui, je vais aborder diverses questions se rapportant à l'immigration et au nouveau projet de loi à l'étude. Je vais aussi toucher un mot du rapport sur l'immigration que le vérificateur général a publié, il y a quelques semaines. Il a mis en lumière certains problèmes dont le gouvernement est conscient depuis quelque temps déjà.

Je vais exposer les recommandations que j'ai personnellement soumises au comité. D'après la ministre, le projet de loi sera dur à l'endroit des criminels, mais moi, je n'en suis pas si sûr. Les dispositions du projet de loi C-31 visant la sécurité ne sont pas adéquates.

Avant de traiter de ces problèmes et du projet de loi lui-même, je tiens à dire que le Parti progressiste-conservateur du Canada est le parti de l'immigration. En effet, le nombre d'immigrants a monté en flèche lorsque les conservateurs étaient au pouvoir dans les années 1980. En 1984, dernière année du gouvernement libéral, le Canada a accepté 88 239 immigrants. En 1993, dernière année du gouvernement progressiste-conservateur, il en a accepté 255 919. Nous connaissons les avantages d'un nombre accru d'immigrants. Les chiffres ne mentent pas.

[Traduction]

Nous sommes toutefois également conscients du revers de la médaille: l'abus du système qui se produit beaucoup trop souvent.

Dans les années 80, nous avons présenté des projets de loi controversés pour remédier aux imperfections du système. Les libéraux se sont totalement opposés à ces projets de loi, dont l'un était une mesure législative d'urgence. Ce n'est guère surprenant. La théorie des libéraux consiste à fermer les yeux sur les problèmes et à les laisser empirer. Les libéraux ne prennent pas position sur ces questions de crainte de perdre les prochaines élections.

Lorsque des dangers se sont présentés, nous avons pris des mesures. Je peux assurer la Chambre que, durant le débat sur le projet de loi sur l'immigration, le Parti conservateur va poursuivre sa tradition de lutte pour un système d'immigration efficace.

Nous connaissons bien le système d'immigration. C'est pourquoi notre parti attend avec impatience de débattre les articles et dispositions du projet de loi C-31.

Il y a trois semaines à peine, le vérificateur général a publié un rapport accablant du ministère. Le ministère connaît des problèmes chroniques, problèmes que le gouvernement libéral n'a pas réglés. Pire encore, il y a des problèmes dont le vérificateur général avait parlé auparavant. Permettez-moi de fournir plus de détails sur ces questions graves.

Tous les nouveaux arrivants au Canada doivent passer un examen médical pour protéger la société canadienne du risque de maladie. Les critères pour les tests médicaux sont presque nuls et n'ont pas changé depuis un certain temps, à savoir 40 ans. Il n'existe aucun test pour détecter les nouvelles maladies telles que le VIH ou l'hépatite. Mieux encore, ce ne sont pas les médecins qui déterminent l'admissibilité médicale, mais les fonctionnaires. Des médecins reconnus effectuent des examens et transmettent leur opinion aux agents. À quels risques pour la santé les Canadiens sont-ils exposés? Quelles nouvelles maladies sont amenées couramment au Canada?

 

. 1525 + -

En fin de semaine dernière, le président américain a annoncé qu'il désignait le VIH comme la plus grande menace pour la sécurité des États-Unis, et notre pays ne s'en occupe même pas.

Malheureusement, le vérificateur général a mis en évidence des faiblesses dans les examens médicaux effectués il y a dix ans.

Les libéraux doivent retrousser leurs manches et se pencher sur les risques potentiels pour la santé auxquels les Canadiens pourraient être exposés. Comment peuvent-ils attendre?

Le projet de loi sur l'immigration ne garantie aucunement que, dans un avenir rapproché, la santé des Canadiens sera protégée. Le projet de loi C-31 comporte très peu de dispositions ayant trait aux examens médicaux et à la santé. Je ne crois pas qu'il contient un nombre suffisant de mesures préventives. Quand le critère d'admissibilité sur le plan médical sera-t-il révisé? Quelles maladies seront jugées préjudiciables à la santé de la population canadienne? Quelles maladies accableront considérablement le régime de soins de santé? Ce ne sont là que quelques questions sur lesquelles la ministre doit se pencher en ce qui concerne ce nouveau projet de loi.

Le vérificateur général a aussi examiné les systèmes informatiques du ministère, qui sont désuets et non intégrés. S'agit-il du genre de systèmes informatiques qui aident à déterminer l'admissibilité au Canada sur le plan médical et sur le plan de la criminalité?

La ministre a annoncé la mise en oeuvre d'un nouveau système global de gestion des cas au coût de 200 millions de dollars. Le ministère a reçu une nouvelle somme de 575 millions de dollars, mais 209 millions de dollars ont déjà été dépensés. Ces nouvelles sommes disparaîtront très rapidement. Où la ministre croit-elle pouvoir trouver les sommes nécessaires à la mise sur pied du système de gestion des cas et à la charge administrative accrue due au projet de loi C-31?

On ne saura jamais combien de criminels sont accueillis au Canada. Les relevés judiciaires étrangers sont parfois incomplets ou peu fiables. Certains pays ne sont pas en mesure de fournir de renseignements en raison de conflits internes. Le ministère a réglé ce problème en acceptant tout simplement de ne pas exiger de certificats de police de quelque quarante pays. C'est une façon absurde de régler le problème de l'admission de criminels au pays.

Et ce n'est pas tout. En 1998, plus de 1 300 permis ministériels ont été émis à des gens qui avaient déjà été reconnus coupables de crimes. Quels genres de personnes entrent généralement au pays?

Des amendes plus sévères et des peines d'emprisonnement plus longues peuvent aider à garder les criminels à l'extérieur du pays, mais nous devons remonter à la source. Nous devons pouvoir compter sur une meilleure stratégie de détection à l'étranger pour trier les criminels. Le simple fait d'exiger des certificats de pays non fiables ne permet pas de régler le problème.

J'espère que la ministre jugera opportun de faire une étude approfondie de son ministère et d'y apporter des solutions à l'interne. J'espère que le nouveau système global de gestion des cas sera bientôt en place. Je ne suis pas certain que le nouveau projet de loi permettra de régler les lacunes dans l'administration interne du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration.

Comme l'a souligné le comité permanent dans son rapport provisoire sur la sécurité à la frontière, j'ai réussi à faire inscrire deux amendements dans le rapport final. On y prévoyait l'obligation de prendre une photographie ainsi que les empreintes digitales de tous les demandeurs du statut de réfugié au premier point de contact au Canada.

Il arrive souvent que les demandeurs du statut de réfugié disparaissent et qu'ils ne se présentent pas à l'audience de leur cause. Selon des statistiques de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada à Vancouver, 71 p. 100 des demandeurs ne se seraient pas présentés à l'audience de leur cause. Où vont ces gens-là? Combien de criminels réussissent à passer? Quels risques présentent pour les Canadiens ces inconnus qui déambulent dans nos rues?

Notre parti se préoccupe de ces criminels potentiels. Voilà pourquoi il est extrêmement important d'identifier ces individus au premier abord. En tant que pays souverain, nous avons le droit et le devoir de savoir qui entre chez nous. Dans un pays aussi vaste que le Canada, il est difficile de retracer tout le monde, mais nous devons tâcher de bien savoir qui entre chez nous.

Cette résolution a été adoptée sans opposition au comité. Les députés étaient favorables à son inclusion dans le projet de loi. Les députés peuvent donc imaginer à quel point j'ai été étonné que la ministre ne fasse pas entrer dans le projet de loi C-31 la recommandation relative aux empreintes digitales et à la photo. Quand je me suis informé à ce sujet auprès des responsables, ils m'ont dit que cela se ferait par voie de réglementation. Cela n'est pas suffisant.

 

. 1530 + -

La nouvelle loi doit prévoir la prise des empreintes digitales et de la photo. Nous ne devons pas permettre qu'une disposition aussi importante, approuvée sans opposition par le comité permanent, soit exécutée uniquement selon le caprice des agents d'immigration. Pour que cette disposition soit appliquée rigoureusement, elle doit être stipulée dans le projet de loi C-31.

Une deuxième résolution que j'ai proposée au comité a trait aux tiers pays sûrs. Un tiers pays sûr est un pays par lequel un réfugié est passé en route pour venir au Canada. Des dispositions relatives aux tiers pays sûrs constitueraient un moyen efficace et équitable de traiter les demandeurs d'asile dépourvus de documents de voyage. Ces personnes trouveraient un refuge sûr dans un tiers pays sûr.

Le principe qui sous-tend la disposition concernant le tiers pays sûr, c'est que cette disposition bénéficie aux deux pays. Plus important encore, les demandeurs du statut de réfugié reçoivent l'asile dans un pays par lequel ils passent pour se rendre au Canada. Ensuite, le Canada peut contrôler ses frontières contre des arrivées non documentées.

Je suis heureux que le projet de loi C-31 prévoie, à l'article 95, des négociations au sujet des tiers pays sûrs. Le gouvernement est disposé à examiner la notion de tiers pays sûrs, mais pourquoi n'a-t-il pas agi? Au cours des sept dernières années, les libéraux ont négocié des dispositions au sujet de tiers pays sûrs avec un seul pays, les États-Unis. Ils ont passé un an et demi à négocier sans succès. C'est étrange, car les deux pays en bénéficieraient.

La ministre a sûrement une idée des autres pays qui sont considérés comme des partenaires éventuels. Je lui demanderais d'en fournir la liste à la Chambre et de préciser quand les négociations commenceront.

Une des plus grandes craintes qu'a notre parti, c'est l'entrée de criminels étrangers au Canada. Comme des députés du NPD l'ont dit, le Canada a déjà son lot de crimes. Nous n'avons pas besoin de commencer à en importer. Bien que le nouveau projet de loi vise à renforcer notre position actuelle au sujet des criminels, nous pouvons faire beaucoup plus.

Dans le nouveau projet de loi, les articles 31 et 32 prévoient interdire à certains personnes l'accès au système de détermination du statut de réfugié. L'article 31 porte sur les personnes inadmissibles pour atteinte aux droits de la personne. Il renvoie aux représentants d'«un gouvernement contre qui le Canada a imposé ou a convenu d'imposer des sanctions de concert avec la communauté internationale». La ministre pourrait-elle clarifier le terme «représentant»? S'agit-il d'un fonctionnaire du gouvernement ou d'un ressortissant d'un pays?

L'article 32 du projet de loi C-31 énonce les critères d'interdiction pour grande criminalité. Je ne comprends pas pourquoi n'est considéré un grand criminel que celui qui a été reconnu coupable d'un crime punissable par une peine d'emprisonnement d'au moins dix ans au Canada. Pourquoi ce chiffre? La ministre serait-elle en train de nous dire que les infractions pour lesquelles on purge une peine de neuf ans ne sont pas graves? Que signifie pour elle l'expression grand criminel? Je ne vois pas pourquoi la ministre ne prend pas tous les crimes au sérieux.

En plus de cela, il n'y a pas nécessairement de correspondance entre les systèmes de justice pénale de deux pays. Une infraction peut entraîner une peine de dix ans au Canada, mais n'être même pas punissable dans un autre pays. J'accepte mal ce chiffre. Je vois mal comment les dispositions qui établissent ce chiffre peuvent être efficaces pour empêcher les criminels d'entrer au Canada.

Au cours de la campagne électorale de 1997, nous avons inscrit dans le programme du Parti conservateur notre engagement à mettre un terme aux nominations politiques à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. Conformément aux bonnes traditions des libéraux, l'article 150, à la partie 4, prescrit sans la moindre ambiguïté que le président et les commissaires de la CISR seront nommés par le gouverneur en conseil. Le nouveau projet de loi ne prévoit aucun moyen pour garantir les nominations selon le mérite. Ce parti et de nombreuses personnes qui ont comparu devant le comité, dont le Conseil canadien pour les réfugiés et l'Association du Barreau canadien, ont invité le gouvernement à mettre un terme aux nominations politiques. Encore une fois, le gouvernement n'a pas tenu compte de cette recommandation afin de servir ses propres intérêts.

Je crois qu'une opposition efficace et représentative a le devoir de critiquer le parti au pouvoir quand c'est nécessaire, mais aussi celui de le féliciter quand il fait du bon travail. Je suis heureux de voir que la ministre a modifié les dispositions et les critères relatifs au traitement au Canada. Les époux, les étudiants et les travailleurs temporaires pourront désormais demander le statut de résident permanent tout en étant au Canada. Une fois établis au Canada, ils n'auront plus à se déraciner ni à subir les longs retards dus au système d'immigration.

 

. 1535 + -

[Français]

C'est important pour moi qui suis de Lennoxville, une ville universitaire dont la population croît en septembre à cause des étudiants qui arrivent des quatre coins du globe pour fréquenter l'Université Bishop's.

J'ai connu beaucoup d'étudiants étrangers doués, intelligents et ambitieux qui voulaient rester au Canada pour y refaire leur vie. Malheureusement, j'en ai connu beaucoup aussi qui ont fait des pieds et des mains pour rester au Canada, mais qui ont dû interrompre leurs études ou leur programme de travail pour aller demander, de l'étranger, la résidence permanente. Voilà une première mesure bénéfique pour ces jeunes qui sont brillants et pleins d'énergie.

Dernièrement, une résidente de ma circonscription a été victime des lacunes des dispositions actuelles concernant le droit d'établissement. Elle a déménagé au Canada, il y a deux ans, pour s'établir dans les Cantons de l'Est, avec son mari qui l'a quittée peu de temps après. Or, comme elle avait demandé l'autorisation de venir au Canada sous le nom de son mari, elle s'est retrouvée dans une situation critique. Elle doit maintenant quitter le Canada pour pouvoir demander la résidence permanente.

C'est d'autant plus pénible qu'elle a quatre jeunes enfants, dont deux vont à l'école. Cette famille a commencé à s'intégrer à la société canadienne, mais la mère doit maintenant la déraciner pour aller à l'étranger demander la résidence permanente au Canada. Outre les terribles désagréments que cela lui cause, elle ne sait même pas combien de temps elle devra attendre avant d'obtenir son statut de résidente permanente.

Je félicite la ministre pour les mesures qu'elle prend à cet égard. C'est un pas dans la bonne voie qui permettra d'ouvrir la porte d'en avant un peu plus grand.

Je suis heureux de faire connaître mon point de vue et celui de mon parti sur le projet de loi C-31, Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés. Les progressistes-conservateurs seront au premier plan du débat. Comme je l'ai dit en commençant, nous sommes le parti de l'immigration. Nous avons pris les initiatives nécessaires pour corriger, dans la mesure du possible, les insuffisances du régime.

Nous connaissons bien le dossier et, comme dans le passé, notre parti va veiller à ce que la sécurité du Canada et l'intégrité de ses frontières soient protégées.

[Traduction]

Je voudrais parler de deux ou trois cas qui pourront illustrer pourquoi on n'a pas réglé, selon moi, bien des questions dans ce projet de loi.

J'ai eu l'occasion de participer à quelques entrevues, la première touchant un jeune homme et son épouse. C'était un aéronauticien avec six années d'université dans un autre pays qui, il le savait, n'étaient pas reconnues au Canada. À propos, les aéronauticiens recevaient des notes élevées dans le cadre de notre système de points.

L'intéressé présentait une demande en tant que mécanicien d'aéronef étant donné qu'il avait de l'expérience dans ce domaine également. Malheureusement, notre système de points n'avait pas suivi et on n'a pas reconnu qu'il était en demande au Canada. L'intéressé parlait les deux langues officielles du pays. Il avait une jeune famille et de bons antécédents professionnels et il était disposé à venir s'établir au Canada. Pourtant, à cause du problème que posait notre système de points et du fait que nous ne reconnaissons pas certains certificats d'études d'autres pays, nous devons refuser des gens comme lui. C'est un problème de notre système et il n'est pas corrigé dans ce projet de loi.

Étant donné que le temps me presse, je vais m'arrêter directement sur un autre problème, soit la sécurité aux frontières. Les agents des douanes sont, dans bien des cas, nos agents d'immigration de première ligne. Malheureusement, ils ont des pouvoirs limités, peu de ressources et peu de formation. On examine la question.

Il y a sept postes frontaliers dans ma circonscription. Le gouvernement a décidé qu'à l'un de ces postes frontaliers, il y aurait des gens formés qui auraient les pouvoirs nécessaires, mais cela ne fait qu'un poste frontalier. C'est tout à fait absurde. En effet, aux six autres postes frontaliers dans ma circonscription, il n'y a absolument aucun plan pour ce qui est de changer le personnel, de donner aux employés la formation et le matériel nécessaires et tout ce qui va avec. Ainsi, les criminels qui veulent traverser la frontière n'auront aucun problème. Ils choisiront simplement un autre poste frontalier.

 

. 1540 + -

C'est une chose qui n'est pas directement reliée à l'immigration, mais qui la menace tout de même. Je vais en rester là et simplement préciser que j'attends avec impatience de pouvoir présenter des amendements et tenir de bons débats au comité.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est intéressant de voir qu'un député du Parti conservateur souligne que le gouvernement libéral ne s'intéresse pas autant qu'il le prétend à l'immigration.

Voilà une excellente remarque. Les libéraux, qui parlent toujours comme s'ils s'occupaient sérieusement de l'immigration, ont laissé le système se détériorer. Le système ne fonctionne même plus pour les immigrants qui contribuent à l'économie, lesquels apporteraient rapidement de l'aide à notre pays. Il ne fonctionne pas pour les véritables réfugiés, alors qu'il fonctionne très bien pour les faux demandeurs de statut, pour ceux qui entrent illégalement au pays et pour les passeurs de réfugiés clandestins. À mon avis, le projet de loi n'aidera pas le gouvernement à régler ce problème.

De même, les libéraux ont laissé le nombre d'immigrants décroître chaque année depuis leur arrivée au pouvoir en 1993. Ce parti prétend favoriser l'immigration, mais il laisse le nombre d'immigrants diminuer d'année en année. Ses gestes ne correspondent pas à ses paroles.

Ma principale inquiétude ne porte pas tant sur le nombre d'immigrants que sur la détérioration du système qui est dans un tel état qu'il est impossible de faire les vérifications judiciaires nécessaires et d'attirer les immigrants dont nous avons besoin pour bâtir notre pays. Nous en sommes à une étape où il faut rebâtir notre pays.

Il est intéressant d'entendre le député conservateur soutenir que le Parti progressiste conservateur de Brian Mulroney était un parti favorable à l'immigration. Il est vrai que les conservateurs ont laissé entrer un nombre adéquat d'immigrants, mais, dans le sillage du régime Trudeau, ils ont permis que s'effondre notre système d'immigration qui fut excellent à une certaine époque. Ce sont les conservateurs qui ont laissé ainsi le système s'écrouler. Ils ont autorisé de nombreuses personnes à entrer dans le cadre d'une amnistie générale. Les chiffres sont là, mais il n'y a absolument pas eu de sélection des gens autorisés à entrer dans le cadre de l'amnistie générale. C'est ainsi qu'ils ont permis à de grand nombres de gens d'entrer au pays.

Le problème à régler est double. Il faut déterminer comment favoriser la venue des gens qui profiteront le plus rapidement à notre pays et comment tenir à l'écart les gens dont nous ne voulons pas. Le député ne voit pas le dossier Mulroney de façon très réaliste s'il estime que les conservateurs ont bien fait dans le domaine de l'immigration.

Les députés devraient se reporter au rapport de 1990 du vérificateur général. Les conservateurs ont été au pouvoir pendant les trois années suivantes. Il y a à peine quelques semaines, le vérificateur général a souligné que nous avons toujours en l'an 2000 exactement les mêmes problèmes qu'en 1990. Les conservateurs de Mulroney n'ont rien fait pour corriger le système pendant les trois années où ils auraient pu le faire. Leur bilan n'est pas meilleur, et le député devrait à mon avis le reconnaître.

J'aimerais aborder avec le député la question d'un tiers pays sûr. J'ai entendu des personnes ayant travaillé dans les hautes sphères du système d'immigration dire que la raison, si nous en cherchions une, pour laquelle notre système de réfugié fonctionne si mal, est liée à la question d'un tiers pays sûr où les réfugiés sont autorisés à revendiquer le statut de réfugié, même s'ils viennent d'un pays qui est considéré comme un pays d'origine sûr. Plus d'une personne qui connaît très étroitement le système pour y avoir travaillé m'a dit que si cette question, avait été réglée lorsque le CISR a été mis en place sous le régime Mulroney, notre système fonctionnerait très bien à l'heure actuelle. Cela n'ayant pas été fait, le CISR est un échec depuis le début.

 

. 1545 + -

Selon le député, quelle importance faut-il accorder à la question d'un tiers pays sûr et au fait de ne pas permettre aux gens de revendiquer le statut de réfugiés s'ils viennent d'un pays qui est perçu comme un endroit qui respecte les droits de la personne et qui est signataire de la Convention des Nations Unies sur les réfugiés?

M. David Price: Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je répondrai au député. La notion de pays tiers sûr m'a toujours dérangé.

Je reconnais volontiers que la notion de pays tiers sûr a été présentée en 1988 par notre gouvernement et qu'elle n'a jamais été appliquée. C'est dommage. Les gens de l'immigration nous disent maintenant que tout ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant au sujet de la loi existante, c'est passer un an et demi à négocier avec les États-Unis. Aucun autre pays n'a été envisagé jusqu'à maintenant et c'est bien dommage, car il existe beaucoup d'autres pays.

Nous avons eu récemment des cas comme celui du groupe qui est arrivé l'été dernier du Tibet via l'Inde. Nous savons que ces gens-là ont passé plusieurs années en Inde. Certains ont passé plusieurs années en Allemagne. Ils auraient bien pu présenter une demande à partir de ces pays-là. Comme nous savons qu'ils sont arrivés de ces pays-là, nous aurions pu, si nous avions conclu une entente avec ceux-ci, les y renvoyer directement pour qu'ils y présentent leur demande.

Je suis d'accord avec le député là-dessus. C'est là une recommandation que j'ai présentée au comité et qui y a été adoptée à l'unanimité. Une chose que j'ai demandée et qui a été acceptée est que le ministre présente à la fin de chaque année à la Chambre un rapport sur le nombre de pays avec lesquels le ministère a entrepris des négociation et sur le point où en sont alors celles-ci. Si cela se faisait tous les ans, on insisterait peut-être un peu plus pour que cela fasse partie du système.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais commenter le discours de mon honorable collègue de l'opposition.

Je tiens à lui rappeler qu'il ne faut pas oublier que la grande majorité, de loin la très grande majorité des réfugiés ne viennent pas au Canada pour s'y installer, au contraire. Ils viennent s'installer dans ce qu'ils appellent «the third countries», les deuxième ou troisième pays dans lesquels ils s'installent, c'est-à-dire les pays adjacents à leur pays d'origine. En d'autres termes, s'ils veulent quitter le Rwanda, ils vont tout d'abord s'installer par millier, sinon par million, dans les pays qui sont tout à fait à côté et non pas au Canada.

Quand on parle des quelques milliers de réfugiés qui essaient de venir s'installer au Canada, je pense qu'il faut prendre tout cela en proportion et bien regarder la responsabilité que nous avons, nous, comme Canadiens, de les accepter.

Mais je voudrais surtout poser une question à notre honorable collègue. Comment peut-il faire concorder ce qu'il nous dit avec les preuves, avec la réalité? La réalité nous dit que quand les libéraux formaient le gouvernement dans les années 1950 et dans les années 1960 et même à la fin des années 1940, nous avons reçu ici, au Canada, des personnes, des immigrants venant d'Italie, d'Allemagne, de Grèce, des Juifs qui sont partis d'Europe après la guerre. Nous les avons reçus ici par millier. Ils sont devenus l'épine dorsale de notre immigration et maintenant, leurs enfants et leurs petits-enfants sont des citoyens canadiens.

Alors, quand mon honorable collègue dit que le gouvernement libéral de l'époque n'a jamais été un champion des immigrants, je voudrais qu'il nous réponde en nous disant comment, la preuve étant tout à fait contraire, il peut marier le concept de ce qu'il vient de dire avec la réalité?

M. David Price: Monsieur le Président, je pense que la réponse à cette question sera très brève. Il n'y a pas eu que des gouvernements libéraux; il y a eu deux gouvernements, conservateur et libéral. Les deux ont accepté des immigrants au cours des années que la députée mentionne. J'en suis témoin, car mon épouse vient d'Allemagne et elle faisait partie de ce groupe d'immigrants des années 1950.

 

. 1550 + -

Les temps ont beaucoup changé, les besoins aussi, et le gouvernement libéral n'a pas réagi. Nous avons réagi à ces problèmes.

Le gouvernement libéral parle de 300 000 personnes. C'est un chiffre dans les airs. Je viens de demander au comité de faire une étude sur cette question et je crois qu'elle a été acceptée. On fera une étude sur le nombre dont on a besoin à l'heure actuelle, parce qu'on ne le sait pas.

Quand on demande à la ministre, elle nous dit que le chiffre de 300 000 vient du livre rouge. Je ne crois pas. La dernière étude a été faite en 1980. Il n'y a rien eu depuis ce temps.

[Traduction]

M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Monsieur le Président, je voudrais remercier mon collègue de l'exposé mûrement réfléchi et très juste qu'il a présenté et de la position légitime qu'il a adoptée à l'égard du projet de loi C-31. Il dit qu'il a proposé une pièce d'identité assortie d'une photo et d'empreintes digitales pour faciliter l'application de la politique que nous envisageons en matière d'immigration, mais que les fonctionnaires ont déterminé qu'il serait préférable de prévoir des dispositions à cet égard dans un règlement plutôt que dans la loi. À mon avis, il vaut toujours mieux prévoir ce genre de chose dans la loi; de cette manière, les gens pourraient s'appuyer sur la loi pour ce genre de pièce d'identité assortie d'une photo et d'empreintes digitales.

Mon collègue peut-il m'expliquer comment il se fait que les fonctionnaires insistent pour que pareille disposition soit prévue dans un règlement plutôt que dans une mesure législative comme le projet de loi C-31?

M. David Price: Monsieur le Président, malheureusement, il n'y a pas que les fonctionnaires qui sont en cause. Les fonctionnaires aimeraient que cela soit prévu dans un règlement, mais ils subissent les pressions de la ministre. Cela devient un problème d'ordre budgétaire. Du matériel est disponible à la plupart des endroits, mais pas partout. Cela pose donc un problème. C'est une question monétaire. La seule façon d'avoir l'assurance qu'un tel système sera en place, c'est de l'exiger dans le projet de loi. De cette manière, nous aurons la garantie que des fonds sont prévus à cette fin.

[Français]

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, de temps à autre, l'immigration fait les manchettes, et même beaucoup ces jours-ci. Quand cela se produit, il y a immanquablement quelqu'un pour dire que le Canada doit modifier sa législation sur l'immigration afin de régler le problème du jour.

Nous avons certainement tous entendu répéter cela à la Chambre à diverses occasions depuis mon arrivée. Or, il vient un temps où il faut prendre du recul. Plutôt que de réclamer une autre modification particulière pour régler un problème particulier, il convient de revoir toute la législation. Il faut repenser toute la façon de faire.

Essentiellement, c'est ce que le gouvernement a fait au moyen du projet de loi C-31. À la suite de vastes consultations, la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration a recommandé que nous, les parlementaires, approuvions un nouveau cadre juridique pour l'immigration et la protection des réfugiés au Canada. Mais il ne s'agit pas de rafistolage. C'est une nouvelle loi qui correspond aux besoins et aux réalités du monde contemporain.

[Traduction]

Je voudrais aujourd'hui parler des principales raisons pour lesquelles le Canada a besoin du projet de loi C-31.

Je précise que je partagerai le temps dont je dispose avec le député de Chatham—Kent Essex.

Je voudrais expliquer pourquoi la structure même de la loi doit être modifiée. Beaucoup de changements sont survenus au cours des presque 25 ans qui ont passé depuis l'adoption de la Loi sur l'immigration actuelle et, pendant cette même période, beaucoup de modifications ont été apportées à cette loi. En fait, le Parlement a modifié la Loi sur l'immigration plus de 30 fois depuis la fin des années 70 et, pourtant, même avec tous ces changements, il reste des questions à régler, ce que fait le projet de loi.

L'évolution des attitudes et les décisions des tribunaux ont obligé les gouvernements à voir les relations familiales dans un sens plus large.

 

. 1555 + -

En fait, nous avons nous-mêmes, ici, récemment adopté une loi dans laquelle nous prenons acte de l'évolution des relations familiales. Le projet de loi C-31 permet donc de parrainer des partenaires vivant en union de fait au même titre que les personnes de la catégorie des familles.

Dans la foulée de la modernisation des lois sur les prestations, la définition de partenaires vivant en union de fait qui fera partie des règlements inclura les conjoints de même sexe.

[Français]

Par ailleurs, nous vivons dans un monde où l'introduction clandestine de migrants et le trafic de personnes sont devenus des activités très lucratives pour des gens ignobles et sans scrupules. Nous avons tous lu les annonces des journaux l'été dernier avec la venue de centaines de personnes qui sont manipulées par d'autres qui font de l'argent sur leur tête.

Nous ne parlons pas uniquement des personnes qui arrivent au Canada par des moyens irréguliers. Nous parlons des personnes qui se retrouvent piégées dans la clandestinité par des criminels qui les contraignent au travail forcé. Le projet de loi dont on parle s'attaque directement et durement à ces criminels. Ces migrants illégaux ne représentent qu'une facette du nombre croissant de travailleurs en migration dans le monde.

Du bon côté de la médaille, les Canadiens doivent revoir la façon dont notre gouvernement encourage la venue au Canada de personnes pouvant contribuer fortement à son économie. Nous devons faire en sorte que notre pays continue de profiter de l'arrivée d'immigrants qualifiés, et cela, dans un monde où la concurrence se fait vive pour attirer ces gens.

Il ne faut pas oublier que notre responsabilité comme gouvernement, c'est tout d'abord notre responsabilité envers les Canadiens et Canadiennes et le niveau de vie que ces Canadiens et Canadiennes veulent avoir.

Le projet de loi ouvre plus grandes nos portes. Dans l'ensemble, nous avons besoin de processus administratifs qui donnent de bons résultats d'une manière plus efficiente. Le projet de loi sert mieux les contribuables à plus d'un titre, tout en préservant les principes fondamentaux de l'équité et d'un bon processus décisionnel.

Il est impossible de rafistoler suffisamment la loi pour y intégrer toutes ces modifications, ainsi que les autres modifications qui découleront de l'adoption du projet de loi C-31. Il est tout simplement temps de créer une nouvelle loi.

[Traduction]

Mais quel genre de loi servira le mieux le Canada dans le domaine très changeant de l'immigration et de la protection des réfugiés? Des événements nous ont déjà montré que nous avons besoin d'une loi flexible et souple, et non pas d'une loi rigide et lourde.

Pour répondre à cette question, je voudrais me tourner vers la structure même de ce que serait la loi si le projet de loi était adopté.

[Français]

Il s'agit d'une loi-cadre. Autrement dit, elle renferme les grands principes et les grandes politiques devant sous-tendre les efforts en matière d'immigration et de protection des réfugiés. Elle précise clairement que les procédures visant à mettre en application ces principes et ces politiques se retrouveront de façon générale dans la réglementation.

Certains prétendent, à tort selon moi, qu'on empêche ainsi le public d'examiner cette réglementation et de donner son avis. En réalité, la réglementation est déjà considérable et je peux assurer mes honorables collègues que le processus réglementaire du Canada est très transparent.

Il y a des mesures à prendre avant d'adopter la réglementation proposée. Il est nécessaire d'informer et de consulter les députés et les groupes intéressés à cet égard. Et, bien entendu, grâce à des moyens comme l'Internet, le gouvernement permet aux Canadiens de connaître les dispositions réglementaires, actuelles ou proposées, et de faire part de leurs commentaires au sujet de ces règlements.

[Traduction]

Néanmoins, tout ne doit pas être dans les règlements. C'est certainement vrai dans des domaines aussi importants pour les Canadiens que l'immigration et la protection des réfugiés.

Les politiques canadiennes en matière d'immigration sont fondées sur trois piliers. D'abord, nous sommes déterminés à ouvrir la porte aux familles et à réunir le plus possible les familles, conformément aux intérêts du Canada.

Ensuite, nous voulons ouvrir la porte aux gens qui peuvent apporter une contribution à l'économie du Canada.

Enfin, nous voulons remplir nos obligations en matière de protection des personnes qui fuient la persécution et continuer de venir en aide à celles qui ont besoin de notre protection, conformément aux idéaux et aux traditions humanitaires du Canada.

 

. 1600 + -

[Français]

Voilà les principes de la législation actuelle. Ce seront également les principes sous-tendant la nouvelle législation. Toutefois, il importe d'observer que ces principes n'étaient pas enchâssés antérieurement dans la loi, mais qu'ils le seront dans la nouvelle loi.

La loi-cadre s'appuie sur ces principes. Elle intègre les règles de fond qui déterminent quelles personnes ne seront pas admissibles au Canada. La loi garantirait les droits fondamentaux. Le projet de loi que nous étudions indique clairement les critères pour la détermination du statut de réfugié. Il décrit clairement les pouvoirs d'arrestation. Selon le projet de loi C-31, les éléments qui doivent se retrouver dans la loi s'y retrouveraient.

Si quelqu'un demande pourquoi le gouvernement a décidé que la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés serait une loi-cadre, la réponse est facile à trouver. Un bref coup d'oeil aux commentaires concernant l'actuelle Loi sur l'immigration permet de comprendre.

Il y a eu, au cours des dernières années, beaucoup de consultations sur la nouvelle orientation de cette législation. Bien que les opinions varient sur de nombreux points, personne ne prétend que la loi actuelle est un modèle de clarté ou de bonne administration publique.

[Traduction]

Si nous voulons avoir une loi utile et flexible qui puisse être comprise, nous devons y mettre ce qui doit l'être, et laisser aux règlements ce qui est propre au processus réglementaire.

[Français]

Nous pourrons ainsi procéder à une adaptation rapide qui répondra aux besoins des Canadiens, tout en veillant à ce que les droits et les principes soient respectés comme ils le doivent. Et le public aura la possibilité de donner son opinion, ce qui est de mise puisqu'il s'agit de questions d'intérêt public.

Je serai fière d'appuyer ce projet de loi au moment du vote. J'incite mes honorables collègues de tous les partis à faire de même.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Je me demande si la députée de Laval-Ouest peut éclairer ma lanterne. La députée de Laval-Ouest partageait-elle son temps de parole?

[Français]

Mme Raymonde Folco: Monsieur le Président, j'avais porté à votre attention que je partageais mon temps avec le député de Chatham—Kent Essex.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): J'étais si captivé que je n'ai pas vu le temps passer et que je me suis demandé: «Comment les vingt minutes ont-elles pu passer aussi vite?» Mais elles se sont bien écoulées.

M. Ken Epp (Elk Island, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai écouté le discours et je me pose une drôle de question.

Dans son discours, la députée a parlé des différentes choses qui ont été changées dans la Loi sur l'immigration et elle a signalé le fait que des modifications ont été apportées concernant les relations entre personnes de même sexe. Je me demande comment, selon elle, cela va fonctionner. Si deux jeunes hommes se présentent à un bureau d'immigration et déclarent qu'ils vivent en union conjugale, qu'est-ce que le gouvernement va faire pour s'assurer qu'il en est bien ainsi et qu'il ne s'agit pas plutôt de deux amis londoniens qui ont décidé de venir au Canada? Comment cela va-t-il fonctionner?

[Français]

Mme Raymonde Folco: Monsieur le Président, il est bien tôt pour pouvoir répondre dans le détail à ces questions, mais je peux dire à mon collègue que nous avions le même problème par rapport aux réfugiés. Il est possible de poser des questions extrêmement spécifiques qui permettent de déterminer si les personnes qui désirent immigrer ont vraiment vécu ensemble, par exemple pendant plusieurs années, et s'ils ont vraiment un statut de conjoints.

Dans la province de Québec, dont je viens, nous avons des lois qui permettent à des conjoints de même sexe de recevoir un certain nombre de bénéfices de la part du gouvernement provincial. Là, il faut prouver, encore une fois, tout simplement, que les deux partenaires ont vécu ensemble pendant une période de temps déterminée. Je pense qu'on pourrait faire de la même manière en ce qui concerne l'immigration.

[Traduction]

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais poser une question à la députée à propos de son discours et de la mesure législative dont le gouvernement nous a saisis, laquelle prévoit des peines maximales plus sévères contre le trafic des êtres humains.

 

. 1605 + -

Il est très louable de la part du gouvernement d'avoir accru ces peines: emprisonnement à vie, amendes plus élevées et ainsi de suite. Mais, étant donné que la plupart des individus qui se livrent au trafic des êtres humains ne résident pas au pays et qu'ils se livrent à telles activités à l'étranger, comment diable le gouvernement va-t-il pouvoir s'y prendre pour faire respecter une telle loi alors que ces gens n'ont jamais mis les pieds au Canada?

[Français]

Mme Raymonde Folco: Monsieur le Président, cette question est extrêmement pertinente en ce qui nous concerne aujourd'hui.

Nous savons que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration revient d'un voyage officiel en République populaire de Chine. C'est justement l'une des choses dont elle a discuté avec des membres du gouvernement, le ministre des Affaires étrangères et plusieurs des gouverneurs des provinces d'où viennent des immigrants et des réfugiés illégaux.

Il s'agit ici de conclure des ententes avec le gouvernement du pays où résident ces criminels pour que, lorsque nous avons des preuves que ces personnes ont commis des actes criminels et qu'ils ne résident pas au Canada, il y ait au moins des ententes légales entre notre gouvernement et le gouvernement du pays d'origine de ces criminels pour qu'il puisse agir en fonction des actes criminels commis par ces personnes. C'est donc une question d'entente entre deux gouvernements, comme il y en a déjà plusieurs à d'autres niveaux.

[Traduction]

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Lakeland pour une brève question.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais revenir sur la question qu'a posée mon collègue car je ne crois pas qu'il y ait été répondu.

La ministre a bien prévu dans ce projet de loi des sanctions sévères allant de l'emprisonnement à perpétuité à une amende pouvant aller jusqu'à un million de dollars à l'égard des responsables du passage de réfugiés clandestins, mais le fait est que ces dix prochaines années, personne ne sera confronté à la loi. Les gens qui pourraient encourir de telles sanctions ne vivent pas au Canada. Les principaux responsables se trouvent à l'étranger, dans leur pays d'origine.

J'aimerais que la députée réponde à cette question. Quel effet cette mesure, dont je pense par ailleurs qu'elle est bonne et dont je me réjouis, va-t-elle vraiment avoir sur le trafic des personnes quand on sait que les responsables ne seront jamais confrontés à la loi puisqu'ils vivent à l'étranger?

Ma deuxième question concerne les tiers pays sûrs. Certaines personnes m'ont dit que jusqu'à 90 p. 100 des demandeurs du statut de réfugié qui arrivent dans les aéroports au Canada ou qui traversent nos frontières passent par des tiers pays sûrs. Par exemple, un grand nombre de demandeurs du statut de réfugié qui viennent à Vancouver atterrissent d'abord à Hawaï, et les États-Unis sont donc le premier...

Le président suppléant (M. McClelland): Je suis désolé. Je savais que c'était beaucoup demander au député de Lakeland de poser une brève question car nous n'avions pas beaucoup de temps.

[Français]

Mme Raymonde Folco: Monsieur le Président, je répondrai certainement à la question qui a été posée. D'abord, je m'excuse auprès de mon collègue, mais il me semble justement avoir répondu à la question.

Il ne faut pas oublier que le problème des réfugiés illégaux, c'est que ce ne sont pas des réfugiés, nous le savons. Ce sont des gens manipulés par le crime international. C'est le même problème que nous avons par rapport à la drogue, par exemple. Il y a donc le problème de pouvoir rejoindre des criminels qui ont des réseaux extrêmement sophistiqués et qui ne résident pas au Canada. C'est le cas pour les réfugiés. C'est aussi le cas pour la drogue et c'est le cas pour bien d'autres choses.

Nous avons besoin d'avoir des ententes avec les pays où résident ces criminels et nous commençons à le faire. Il y a également la possibilité—je sais que la ministre y travaille—de pouvoir travailler en coopération avec des organismes comme Interpol. Le problème des réfugiés illégaux, je dis bien illégaux, n'est pas un problème de réfugiés, c'est un problème de criminels internationaux.

[Traduction]

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de poursuivre le débat, à l'étape de la deuxième lecture, sur le projet de loi C-31, Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés.

Dans un monde trop souvent déchiré par des conflits d'ordre ethnique, racial et religieux, le Canada demeure un modèle pour les autres pays. Il partage cet honneur avec quelques autres États.

 

. 1610 + -

L'une des raisons qui explique cette tolérance et cette compassion dont font preuve les Canadiens est le fait que la nation est composée d'immigrants. Il faut savoir que, dans l'état actuel des choses, 46 de nos députés sont nés hors territoire canadien. Notre gouverneure générale, Mme Adrienne Clarkson, est arrivée au Canada pendant la Seconde Guerre mondiale, en tant que réfugiée. Dans la capitale nationale, beaucoup de Canadiens ont contribué à la création d'entreprises de haute technologie. Bon nombre de ces entreprises ont été fondées par des immigrants.

Les immigrants contribuent à enrichir la vie quotidienne de tout un chacun en tant que médecins, membres des personnels infirmiers et soignants, enseignants et professeurs d'université. Les immigrants qui écrivent des livres, réalisent des films et nous divertissent avec leur créativité ont fait connaître l'industrie culturelle canadienne de par le monde, remportant souvent des prix internationaux.

Ma circonscription, Chatham—Kent Essex, est riche sur le plan pluri-ethnique. Beaucoup de mes électeurs sont des réfugiés qui ont dû surmonter de nombreuses difficultés financières pour refaire leur vie au Canada. Aujourd'hui, ils contribuent à la société canadienne et à la vie économique du pays en tant que travailleurs, en tant que bénévoles dans nos communautés et en tant que bâtisseurs du Canada de demain.

Effectivement, exception faite des autochtones, nous sommes tous des immigrants ou des réfugiés, ou des descendants d'immigrants ou de réfugiés. Voilà pourquoi ce débat d'aujourd'hui est si important. Tout comme nous avons hérité d'un Canada bâti par des immigrants et des réfugiés, la nation canadienne de demain, nos enfants et petits-enfants hériteront d'un pays fondé par les systèmes que nous modifions et remanions aujourd'hui.

Les députés savent que, de toujours, les pays qui ont été les plus ouverts à l'immigration ont prospéré. C'est ce qui explique que le gouvernement se soit donné pour objectif à long terme de porter les niveaux annuels de l'immigration à 1 p. 100 de la population. Ce gouvernement sait que des niveaux adéquats d'immigration constituent le carburant du dynamisme et de la croissance de l'économie. Avec notre taux de natalité en baisse et notre population vieillissante, un programme d'immigration fort est un investissement pour notre avenir.

Alors que nous accueillons de nouveaux arrivants sur nos côtes, le Canada continue de profiter des économies, des profits et des investissements qui en découlent et qui conduisent ensuite à une augmentation de la demande pour nos biens et services. Dans les nouveaux marchés mondiaux d'aujourd'hui, les travailleurs canadiens d'ethnies et de langues multiples nous offrent la formidable possibilité d'être compétitifs dans le monde entier.

Si l'immigration a joué un rôle crucial dans notre succès économique, notre système de réfugiés nous a valu, dans le monde entier, une réputation de leader humanitaire. Les Canadiens sont fiers de notre tradition qui consiste à offrir un refuge sûr à ceux qui ont véritablement besoin de protection. À maintes reprises, les Canadiens ont ouvert leur coeur et leurs foyers à ceux qui fuyaient la guerre, la persécution et de terribles violations des droits de la personne. Dans les années 90, nombreux sont mes électeurs à s'être joints aux Canadiens de tout le pays pour ouvrir leur coeur aux Kosovars, souvent en faisant des contributions financières et d'autres dons.

Le processus concernant les immigrants et les réfugiés a bien profité aux Canadiens. Toutefois, les environnements canadien et international dans lesquels fonctionnent ces systèmes ont changé. Il est donc nécessaire d'apporter des changements à notre Loi sur l'immigration.

Le passage d'immigrants clandestins est devenu une industrie parallèle importante, des gens essayant de contrevenir aux règles d'immigration qui sont là pour protéger tout le monde. Les Nations Unies estiment que plus de quatre millions de personnes traversent chaque année des frontières nationales à l'aide de passeurs et que ce trafic représente une industrie de 10 milliards de dollars.

Les guerres civiles, les tensions raciales et les persécutions religieuses dans d'autres parties du monde mettent en danger la vie de personnes innocentes. Les demandes de réfugiés à la recherche d'un refuge sûr au Canada se sont presque multipliées par 50 au cours des 20 dernières années, passant de 500 dans les années 70 à 24 000 au cours des dernières années.

L'économie canadienne a besoin de travailleurs et d'entrepreneurs habiles qui peuvent contribuer à la croissance économique du Canada. Le projet de loi dont nous sommes saisis qui porte sur ces questions et sur d'autres est le résultat de plus de quatre ans de travail. Le processus a consisté notamment en de nombreuses consultations à l'échelle du Canada avec les gouvernements provinciaux, des groupes d'entreprises, l'Association du Barreau canadien, des organismes destinés aux réfugiés et des Canadiens.

 

. 1615 + -

Comme mes collègues l'ont si bien dit durant le présent débat, le projet de loi C-31 a une double utilité. Il fermera la porte à ceux qui profitent du système, en prévoyant par exemple des peines sévères, des amendes pouvant aller jusqu'à un million de dollars et l'emprisonnement à vie pour les personnes qui organisent le passage d'étrangers clandestins au Canada ou qui sont prises à le faire.

Nous fermons la porte à ces personnes et nous l'ouvrons davantage aux vrais réfugiés et aux immigrants dont le Canada aura besoin pour progresser et prospérer. Le projet de loi est sévère à l'égard de l'abus à des fins criminelles des systèmes d'immigration et de protection des réfugiés, mais non envers la très grande majorité des immigrants et des réfugiés qui ont contribué à bâtir notre pays et qui continueront dans les années à venir.

Ce projet de loi complet renforce l'intégrité des programmes et diminue les coûts sans réduire l'équité ni les garanties juridiques que les Canadiens ont établis au sein du système au fil des ans. Il donne suite à l'engagement formulé dans le discours du Trône, à savoir renforcer les mesures visant à prévenir l'entrée et à renvoyer des criminels, des terroristes, des auteurs de violations des droits de la personne et des individus qui effectuent du trafic de personnes. Ces réformes établissent un juste équilibre entre les mesures à prendre pour combattre les abus et la nécessité de rendre le système plus accessible. De nouvelles mesures aideront aussi le Canada à attirer des immigrants qui peuvent contribuer à l'économie du savoir du XXIe siècle.

Les députés connaissent bien les arriérés qu'affichent les systèmes d'examen des demandes d'immigration et de détermination du statut de réfugié. Nous entendons souvent les doléances de résidents permanents ou de familles qui désirent parrainer des immigrants éventuels, ou de la part d'organismes de défense des réfugiés, qui nous demandent d'intervenir pour aider à abréger les longues attentes. J'espère que le projet de loi C-31 aura bientôt force de loi de sorte que nous puissions informer les commettants qui font appel à notre aide que des mesures concrètes ont été prises pour améliorer nos systèmes d'examen des demandes d'immigration et de détermination du statut de réfugié.

Je me permets d'énumérer certaines des mesures importantes que le gouvernement a déjà mises en oeuvre ou qu'il sera en mesure de mettre en application lorsque le projet de loi C-31 sera adopté.

Le service au client est en voie d'amélioration grâce à la mise en place de systèmes globaux de gestion des dossiers. Cela permettra d'accélérer le traitement des dossiers. De nouveaux fonds ont été alloués pour mettre fin aux arriérés. La gestion de l'inventaire des demandes de résidence permanente et de visas d'immigration présentées à l'étranger est elle aussi en voie d'amélioration. Ces mesures permettront de servir plus rapidement et plus efficacement les Canadiens, les résidents permanents et les immigrants potentiels.

La catégorie de personne ayant obtenu le droit d'établissement au Canada que propose le projet de loi à l'intention des travailleurs temporaires, des étudiants étrangers et des membres de famille parrainés par des résidents permanents permettrait plus facilement à tous ces gens de rester au Canada. En facilitant l'entrée de travailleurs temporaires grâce à une approche axée sur le service, le gouvernement aidera les employeurs à répondre plus rapidement à leurs besoins immédiats de travailleurs spécialisés.

De nombreuses mesures permettront de garder le système de détermination du statut de réfugié équitable et de le rendre plus rapide. Il y a l'obligation de rendre dans un délai de 72 heures les décisions relatives à l'admissibilité; la consolidation des décisions de la Commission d'immigration et du statut de réfugié en matière de protection; et le recours plus fréquent à un tribunal composé d'un seul commissaire avec possibilité d'appel sur dossier. Toutes ces mesures permettront de traiter plus rapidement les demandes des véritables réfugiés dont la vie ne restera pas dans les limbes en attendant une décision cruciale pour leur avenir.

Les Canadiens ont fait savoir clairement à leurs représentants élus qu'ils veulent un système fondé sur le respect tant des lois que de la tradition d'accueil des nouveaux venus. Le projet de loi réussit à établir l'équilibre que souhaitent les Canadiens. Je suis persuadé que les gens de ma circonscription, aussi bien les Canadiens que les nouveaux immigrants et les réfugiés, appuieront les objectifs de ce projet de loi. J'exhorte tous les députés à l'appuyer.

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il est très intéressant de noter que tous les points soulevés par le député, à l'exception d'un seul, se rapportent à l'application de la loi, ce dont il n'est absolument pas question dans cette mesure législative. Il n'y a aucune tentative pour traiter de l'application de la loi.

 

. 1620 + -

Le seul point que le député a soulevé et qui figure dans le projet de loi est la proposition voulant que les audiences soient tenues devant un seul commissaire. Le député a déclaré que cela accélérerait le processus. Ce serait exact, s'il n'y avait pas un autre processus d'appel à l'intérieur de la CISR. Cet autre processus d'appel sera utilisé par la plupart des demandeurs et pourra faire appel à la participation de plus d'un commissaire. Comme tous les autres processus d'appel sont toujours disponibles, le système ralentira probablement encore davantage. Si cela s'ajoute aux autres dispositions de la loi, le système ralentira certainement.

Pourquoi le député insiste-t-il sur des changements administratifs qui ne sont même pas inscrits dans le projet de loi en disant que cela réglera le problème? Il soulève ainsi un argument fondamental selon lequel le projet de loi en soi, même s'il était bon, ce que je ne crois pas, ne réglerait pas le problème. C'est l'application qui fait problème. Le vérificateur général l'a fait remarquer il y a deux semaines. Comment le député peut-il penser que la nouvelle loi réglera le problème si l'on n'améliore pas l'application de la loi? L'application constitue un problème distinct.

M. Jerry Pickard: Monsieur le Président, une chose est très claire lorsqu'on examine la Loi sur l'immigration et les modifications proposées aujourd'hui, qui seront en vigueur à tout jamais ensuite: le Canada doit s'assurer que son système lui permet de traiter aussi rapidement que possible les dossiers des réfugiés.

Il ne fait aucun doute qu'il s'agit en partie d'un processus législatif que l'administration doit parrainer et appuyer fermement.

Le porte-parole, notre collègue d'en face, a laissé entendre qu'une commission d'un seul membre ralentirait le système. C'est absolument insensé. Lorsqu'on songe aux commissions et aux processus en place, il est évident que le processus serait plus simple et plus efficace si une seule personne entendait les très nombreux appels et veillait à ce qu'ils soient traités plus rapidement. Nous consacrons davantage d'argent au système pour nous assurer que ces appels seront entendus plus rapidement. Effectivement, l'enquête sera plus poussée dans certains cas, ce qui est tout simplement juste. Il est juste de permettre un appel plus poussé si l'on ne fournit pas une réponse à toutes les questions à la première étape.

D'après les appels que j'ai examinés, dans les dossiers d'électeurs de ma circonscription, je crois que le processus est adéquat et exécuté avec soin. Les dossiers sont compilés de telle sorte qu'une personne entendant l'appel peut se prononcer sur le lieu et la procédure de mise en oeuvre des résultats de l'appel.

Le problème ce n'est pas que l'administration laisse à désirer, c'est que de plus en plus d'immigrants demandent d'être reçus au Canada. Nous devons donc modifier le système pour que des auditions justes et équitables soient accessibles à tous ceux qui le demandent.

Il est inutile de s'en prendre à l'administration. Il faut plutôt examiner attentivement les changements proposés et les recommandations formulées et reconnaître que tout cela va permettre d'accélérer le traitement des dossiers.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole au nom des habitants de Surrey-Centre pour participer au débat sur le projet de loi C-31, Loi concernant l'immigration au Canada et l'asile conféré aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Avant de poursuivre, je tiens à remercier le député de Lakeland, porte-parole de l'Alliance canadienne pour l'immigration, de l'exposé mûrement réfléchi qu'il a fait aujourd'hui au cours du débat.

Pendant la période de relâche de Pâques, mon bureau a reçu de nombreux appels à propos de ce projet de loi. Je suis persuadé que d'autres députés en ont reçu aussi un grand nombre.

 

. 1625 + -

Pendant le week-end, j'ai participé à une émission-débat à la radio portant sur le projet de loi. Le public ne s'y retrouve plus dans la désinformation qui lui vient du gouvernement fédéral, et il en a plein le dos. Il y a bien de la propagande libérale au sujet des changements apportés par le projet de loi C-31. Les libéraux ont communiqué aux médias une information sélective. Ils nous ont dit que la nouvelle loi ferait certaines choses pour les nouveaux immigrants, que le projet de loi permettrait aux gens de parrainer n'importe quelle personne ou n'importe quel membre de leur famille. Ce n'est qu'une des nombreuses choses qui suscitent des réserves. J'ai dû me porter à la défense de tout le processus en précisant que ce texte n'a pas encore force de loi, qu'il n'en est qu'à la deuxième lecture. J'ai dû expliquer toute la démarche à suivre avant qu'un projet de loi ne devienne loi pour que les gens arrivent à comprendre.

Au téléphone, quelqu'un m'a dit que la famille allait arranger un mariage, mais que le projet est désormais en suspens parce que la famille estime que la nouvelle loi va probablement l'aider à parrainer l'immigration d'un parent au Canada. Les gens prennent des décisions en fonction de la propagande gouvernementale.

Avant des élections fédérales, les libéraux ont l'habitude de dorer la pilule à tout le monde afin d'obtenir le soutien politique des immigrants. Dans leur premier livre rouge, ils promettaient d'accroître les contingents d'immigration afin d'obtenir la faveur des électeurs immigrants qui approuvaient cette idée. Après que les libéraux eurent pris le pouvoir, le nombre d'immigrants autorisés à venir s'installer au Canada a diminué.

La même chose est arrivée pour ce qui est de l'ouverture d'un consulat à Chandigarh, dans la province indienne du Pendjab. Des déclarations et des photos ont paru dans les journaux pour annoncer l'ouverture d'un consulat à Chandigarh. La plupart des Indiens qui vivent au Canada viennent du Pendjab et réclament l'ouverture d'un consulat à part entière à Chandigarh.

Les libéraux ont pris des photos et ont fait des déclarations avant les élections fédérales de 1997 et même avant les élections de 1993, et aucune de ces promesses n'a été tenue, encore moins par le ministre fédéral des Pêches. Celui-ci a déclaré officiellement avoir aidé le gouvernement libéral à ouvrir le consulat à Chandigarh. Or, il s'agit seulement d'un bureau de liaison. Il ne donne pas de formulaires de demande de visa de visiteur. Il n'accepte même pas de prendre un certificat de mariage qui manque dans un dossier. Les libéraux ont l'habitude de ce genre de propagande.

Comme des élections sont pour bientôt, les libéraux ont commencé à chanter la même chanson. Ils oublient qu'ils ne peuvent pas tromper les gens deux fois.

Le projet de loi C-31 a pour objet d'abroger et de remplacer l'actuelle Loi sur l'immigration de 1976. Il tente de régler les questions touchant, entre autres, le problème croissant du trafic des êtres humains, le processus de détermination du statut de réfugié au Canada et la définition de réfugié au Canada, en vue d'assurer une plus grande protection. Il tente également de créer une catégorie d'immigrants s'établissant au Canada, à étendre les critères concernant l'immigration du type catégorie de la famille et à renforcer les dispositifs de contrôle en matière de parrainage. Cependant, il n'y parviendra pas et il va tout simplement ralentir énormément le processus d'immigration.

Le gouvernement n'a pas su apporter les changements qui s'imposaient à l'évidence. Cette mesure législative ne sera jamais efficace tant que le gouvernement libéral, qui est dépourvu de vision, n'aura pas améliorer la gestion du système: une meilleure formation, une vérification plus rigoureuse et une application de la loi de tous les instants.

Permettez-moi de souligner certains points où le projet de loi s'avère inefficace. L'alinéa 3(3)d) du projet de loi confère une protection conforme à la Charte des droits et libertés à tous les gens dans le monde qui souhaitent être admis au Canada. Autrement dit, quiconque se voit refuser l'accès au Canada a parfaitement le droit d'en appeler de la décision, et le processus des appels successifs se poursuivra ainsi sans jamais prendre fin.

 

. 1630 + -

La mesure législative offre très peu de protection aux frontières du Canada vu que cette disposition lie les mains des agents d'immigration qui pourraient hésiter de plus en plus à refuser l'accès au pays, ce qui ne pourrait qu'alourdir davantage un système d'immigration déjà paralysé par des actions en justice.

Aucun autre pays dans le monde n'accorde à des étrangers le droit que possèdent ses citoyens. Nous devons accueillir les immigrants de bonne foi au Canada mais le ministère doit être en mesure de contrôler le système au lieu que celui-ci ne soit contrôlé par les avocats.

Ce projet de loi ne resserre pas la définition de réfugié mais l'étend au contraire bien au-delà de la définition d'un réfugié au sens de la Convention des Nations Unies, contrairement à ce qu'on fait la plupart des autres nations occidentales. Cela ne va faire qu'encourager les abus de notre système de détermination du statut de réfugié et les responsables du trafic de personnes ainsi que les passeurs. Il est presque garanti qu'ainsi, quiconque arrive au Canada avec une histoire plausible fournie par les passeurs, sera accepté en tant que réfugié.

À l'heure actuelle, le Canada accepte plus de 50 p. 100 des demandeurs d'asile alors que les États-Unis en acceptent moins de 20 p. 100. Le Royaume-Uni en accepte moins de 30 p. 100 et la Nouvelle-Zélande moins de 15 p. 100. Le problème n'est pas d'accepter les réfugiés; le problème, c'est qu'il faut fixer les critères de telle sorte qu'ils assurent une protection aux réfugiés de bonne foi et non aux faux réfugiés.

Nous devrions accepter les réfugiés de bonne foi au Canada et le ministère devrait être en mesure de leur assurer une protection immédiate et de les réunir avec leur famille dans les meilleurs délais au lieu de les faire attendre des années parce que le système est obstrué.

J'ai eu à traiter dans ma circonscription, Surrey-Centre, d'au moins 40 cas de réfugiés qui ont été acceptés il y a cinq ou dix ans, mais qui ne se sont pas vu accorder le droit d'établissement. Résultat, ils ne peuvent être réunis avec les leurs. Ils ne peuvent pas avoir un travail adéquat.

Je me rappelle un cas où le réfugié a été accepté, ses empreintes digitales ont été prises et on l'a accepté. Toutefois, le système ne lui a pas donné son certificat d'immigrant reçu. Entre-temps, il a travaillé grâce à un permis de travail, pour se faire un peu d'argent, et il voulait acheter un taxi. Il ne pouvait pas acheter ce taxi. Il ne pouvait pas se lancer dans les affaires simplement parce qu'il n'avait pas de certificat d'immigrant reçu. C'est le genre d'obstacles qui empêchent ces gens qui deviennent immigrants au Canada de contribuer à l'économie. C'est inacceptable. Nous ne devons pas laisser les choses empirer.

Le projet de loi prévoit des peines maximales plus sévères pour le trafic d'humains. Cela semble bien à première vue. Lorsque la ministre a présenté le projet de loi, elle a fait passer un message du gouvernement, mais ce message va dans un autre sens que ce qu'offrirait ce projet de loi. Ils vont dans deux directions différentes.

De même, le discours semble dur, mais la question est de savoir si les mesures proposées fonctionneront et si elles seront mises en application. Les peines les plus sévères ne s'appliqueraient qu'aux responsables d'opérations de recrutement d'immigrants illégaux et ceux-là opèrent principalement à l'extérieur du Canada et restent absolument intouchables.

 

. 1635 + -

Les organisateurs intermédiaires au Canada sont protégés par les cercles de crime organisé et ils sont rarement arrêtés et rarement reconnus coupables.

Les peines maximales actuelles n'ont en fait jamais été appliquées à quelqu'un qui avait été reconnu coupable de trafic d'humains. En fait, depuis 1999, la peine la plus sévère qui ait été infligée était de 10 mois de prison et d'une amende de 3 000 $. C'est une parodie de la justice. C'est une parodie de la loi et de l'ordre.

Récemment, la ministre a fait un séjour éclair dans la province de Fujian en Chine, avec l'intention de mettre fin au trafic d'humains. C'est ridicule. Des milliers et des milliers de personnes dans 150 pays veulent venir au Canada. Ils sont prêts à utiliser tous les moyens pour y entrer, qu'ils soient légaux ou illégaux. Ça leur importe peu. La ministre se rendra-t-elle dans chacun de ces pays pour les en empêcher? Elle n'a pas su renforcer notre loi au Canada. Je croyais qu'il incombait au ministre des Affaires étrangères d'utiliser la diplomatie et d'être efficace, et non à la ministre de l'immigration.

Elle n'a pas su envoyer un message clair aux passeurs de partout dans le monde en renvoyant les immigrants illégaux. C'était à elle de le faire. Elle n'a pas fait son travail, mais elle voulait faire celui du ministre des Affaires étrangères.

Elle n'a pas su donner du mordant à ce nouveau projet de loi. Peut-être préférerait-elle faire un voyage autour du monde et tenter d'accumuler plus de milles aériens que le ministre des Affaires étrangères.

Le projet de loi prévoit aussi que les demandeurs du statut de réfugié feront l'objet de vérifications de sécurité avant que leur demande soit soumise à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié du Canada. N'est-il pas stupéfiant que ce faible gouvernement admette maintenant que cela ne se faisait pas auparavant? Pourquoi ne procédait-on pas à des vérifications de sécurité avant que les demandes soient soumises à la Commission?

Selon le vérificateur général du Canada, si on ne met pas davantage l'accent sur l'exécution, il sera très difficile d'effectuer une vérification de sécurité pour 60 p. 100 des demandeurs du statut de réfugié, qui arrivent au Canada sans papier d'identité. Lorsqu'ils montent à bord de l'avion, ils ont des papiers d'identité, mais quand ils débarquent, ils n'en ont plus. D'après le vérificateur général, 60 p. 100 des réfugiés arrivent sans papier d'identité. Comment peut-on mener une vérification de sécurité?

Le nouveau projet de loi permet aux ressortissants étrangers de demander le statut de résident permanent en vertu de la partie de la loi qui concerne les immigrants indépendants, c'est-à-dire qu'ils peuvent faire la demande à l'intérieur du Canada. Cela paraît tomber sous le sens dans certains cas, notamment dans le cas des travailleurs hautement qualifiés ou des étudiants qui ont achevé des études postsecondaires dans un domaine recherché au Canada. L'expérience montre toutefois que cela est difficile à maintenir car cela permettrait à des milliers de personnes sans statut de rester sur le territoire canadien, engorgeant davantage le système.

La ministre a également indiqué ce matin que, comme toujours, le projet de loi sera très largement tributaire de la réglementation pour son interprétation. Le texte de loi n'est pas long, mais la réglementation le concernant est lourde. Ce texte est l'équivalent d'un blanc-seing donné par la ministre inefficace. S'il ne se trouve personne dans les coulisses pour assurer la gestion, l'administration, l'application et la formation, les moyens mis en oeuvre pour accélérer la réunification des familles des immigrants indépendants et des réfugiés authentiques ne serviront à rien.

J'assure la coprésidence du Comité permanent d'examen de la réglementation et je puis vous assurer que la réglementation fort volumineuse est arrêtée par des intervenants anonymes, alors que, à la Chambre, nous en discutons ouvertement et nous mettons l'accent sur la loi.

Il serait juste d'affirmer que 80 p. 100 de l'efficacité de la loi est attribuable à des facteurs indirects, à la réglementation, et que probablement 20 p. 100 de nos 300 députés consacrent leur temps et leur énergie à s'énerver à ce propos à la Chambre.

 

. 1640 + -

Nous devons disposer d'un meilleur système pour examiner la réglementation et nous assurer qu'elle est efficace et qu'elle respecte l'intention du texte adopté par les Communes.

Quelle est la position de l'Alliance canadienne à ce sujet? Le Canada est un pays d'immigrants. Nous continuerons d'accueillir de nouveaux immigrants sur notre territoire. J'en suis moi-même et cela ne fait pas très longtemps que je suis au Canada.

Nous souscririons au parrainage des proches parents. Notre politique de l'immigration tiendrait compte des besoins économiques du Canada. Nous mettrions en place un système plus équitable et plus sûr, notamment en ce qui concerne le respect des obligations faites aux parrains. Nous accueillerions les véritables réfugiés à bras ouverts et avec chaleur. Nous serions disposés à collaborer avec les provinces pour faciliter l'installation des immigrants. Nous protégerions l'intégrité de la précieuse contribution que des millions d'immigrants respectueux des lois apportent au tissu social du Canada. Nous ne permettrions pas que de bonnes réputations soient ternies par ceux qui s'engagent dans des activités criminelles et nous déporterions sans délai ces derniers dès qu'ils auraient purgé leur peine.

De plus, nous réaffirmerions l'obligation humanitaire du Canada d'ouvrir la porte aux véritables réfugiés. Nous sommes fiers que notre pays soit un refuge sûr pour les personnes déplacées en provenance de tous les coins du monde. Pour garantir l'équité et mettre un terme au resquillage, nous déporterions immédiatement les faux réfugiés, ceux qui abusent du système et les immigrants illégaux. Nous punirions sévèrement les vrais responsables des abus de notre système. Nous veillerions à ce que l'arbitrage du statut de réfugié soit rapide, uniforme et professionnel. Nous mettrions un terme au recours abusif à la demande du statut de réfugié comme voie accélérée pour bénéficier des avantages du statut de résident permanent.

Le système devrait fonctionner pour ceux qui veulent légitimement et véritablement immigrer au Canada, et non pour les criminels ou ceux qui veulent entrer insidieusement au Canada et faire un mauvais usage du système.

Notre système ne fonctionne pas pour les véritables réfugiés. Pensons simplement aux reportages télévisés que nous voyons sur les camps des Nations Unies pour les réfugiés, les véritables réfugiés qui sont déplacés et qui souffrent. Ces derniers ne peuvent pas venir au Canada, car le système ne fonctionne pas pour eux.

Je voudrais utiliser un peu de mon temps de parole pour rapporter ce que les électeurs de Surrey-Centre me disent. Surrey est l'une des collectivités dont la croissance est la plus rapide au Canada, l'un des centres métropolitains multiculturels qui ont une grande diversité raciale. Nous sommes fiers de cela.

J'entends des plaintes qui dénoncent le système canadien d'immigration, auquel on reproche des lacunes et des déficiences. Certains ont dit que des gens dans nos ambassades acceptaient des pots-de-vin. Lorsque j'ai signalé le problème à la ministre, on a rapidement fait intervenir la GRC, qui a fait enquête, et il y a eu des sanctions. La question qui se pose est la suivante: pourquoi le système ne peut-il pas déceler le problème et travailler pour les immigrants de bonne foi?

Un autre problème est l'arriéré dans l'étude des dossiers qui existe au Canada. Mes électeurs me disent souvent que, lorsqu'il y a des funérailles, un anniversaire ou une fête et que des gens veulent venir de l'étranger rendre visite à leur famille, ils n'arrivent pas à obtenir de visas de visiteur. Certains ont même donné des garanties personnelles ou étaient disposés à verser une caution, mais le système n'a pas répondu à leurs besoins. Si aucun visiteur ne peut faire une demande en territoire canadien, comment ces gens-là peuvent-ils obtenir des visas de visiteur pour venir au Canada? C'est donc que l'étau se resserre sur les demandeurs, ce qui rendra le système injuste. Il n'existe aucun droit d'appel en ce qui concerne les visas de visiteur.

Les députés sont dans une impasse, incapables d'aider leurs électeurs, incapables de faire quoi que ce soit pour régler le problème.

Je voulais dire un mot de la taxe d'entrée et des organismes non gouvernementaux, mais le temps me manque. Le système devrait être efficace et être au service des immigrants authentiques. Dans le projet de loi à l'étude, le gouvernement n'a pas su répondre aux attentes des Canadiens.

 

. 1645 + -

[Français]

Le président suppléant (M. McClelland): Il est de mon devoir, conformément à l'article 38 du Règlement, de faire connaître à la Chambre les questions qu'elle abordera au moment de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Mississauga-Sud, L'immigration; l'honorable députée de Lambton—Kent—Middlesex, L'immigration; et l'honorable député de Davenport, Les affaires étrangères.

[Traduction]

M. Leon E. Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je comprends l'intervention de mon collègue. Il représente la circonscription de Surrey-Centre, qui compte un nombre très imposant de nouveaux immigrants.

Les médias ont récemment diffusé les résultats de deux études réalisées par deux personnes différentes, qui donnent une image assez sinistre de la situation. La première est le travail de Jeffrey Reitz, un professeur de sociologie, qui demande si l'on obtient, des nouveaux immigrants, l'impact économique qu'on aurait le droit d'espérer et qu'on obtenait auparavant. Cela m'amène à penser que le système actuel ne fonctionne pas très bien.

Selon cette étude assez exhaustive du professeur Reitz, en 1981, les nouveaux immigrants recevaient un salaire équivalant à environ 80 p. 100 du salaire des travailleurs nés au Canada. En 1996, cette proportion n'était plus que de 60 p. 100. Il est très troublant de voir que les nouveaux immigrants habitant au Canada depuis cinq ans ne reçoivent que 60 p. 100 du salaire des gens qui sont nés ici. Cela signifie que des améliorations s'imposent dans notre système d'immigration. Le député pourrait-il commenter cet état de fait?

Une deuxième étude, celle de Jack Jedwab, montre aussi que les nouveaux immigrants ne parviennent pas à s'intégrer à la société comme ils le faisaient auparavant. Le député pourrait-il commenter ces études et les informations qu'elles révèlent?

M. Gurmant Grewal: Monsieur le Président, nous avons tous entendu parler de discrimination en ce qui concerne la rémunération et la capacité de gagner leur vie des immigrants. Cependant, la population est mal informée. Si l'on examine l'histoire du Canada, tout le monde va reconnaître que le Canada est un pays d'immigrants. Ils ont travaillé dur et ce sont eux qui ont bâti ce pays. Ils ont bâti le Canada dont nous sommes fiers de nos jours.

Je vais blâmer le gouvernement dans une certaine mesure. Au cours des 132 dernières années, seulement deux partis ont gouverné, les Partis libéral et conservateur. D'une certaine façon, ces partis sont à blâmer. Permettez-moi de donner un exemple.

Selon moi, il y a une discrimination institutionnalisée par les libéraux contre les pays économiquement faibles, par exemple. Permettez-moi de parler du droit d'immigration que nous appelons la taxe d'entrée. Cette taxe de 1 500 $ par personne représente peu d'argent dans les pays industrialisés. Par contre, dans d'autres régions du monde, les gens vivent avec 2 $ ou 3 $ par jour ou même moins dans certains pays sous-développés. Ces gens n'auront jamais la chance de venir au Canada, car pour eux, 1 500 $ représentent une énorme somme. C'est une discrimination institutionnalisée par le gouvernement.

Nous devrions engager les gens en fonction de leur mérite. Nous ne devrions pas catégoriser les gens en fonction de leur ethnie ou d'autres caractéristiques. Je crois que ce qui nous définit est probablement aussi ce qui nous limite. Tous les gens devraient être traités en fonction de leur capacité, de leur mérite, de leurs compétences et de leur expérience et non de leur ethnie ou du pays d'où ils viennent. Il ne devrait pas être question de cela au XXIe siècle.

 

. 1650 + -

M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Monsieur le Président, j'ai été fasciné par la réponse du député à cette question. Je félicite la ministre de s'être montrée disposée à écouter le comité, à écouter les autres Canadiens, et d'avoir élaboré ce projet de loi en fonction de ce qu'elle avait entendu. Il fait bon travailler avec une ministre qui écoute. J'apprécie également son travail avec le comité et son respect pour le comité. Dans les quelques observations que je vais formuler, je vais parler du nombre de recommandations qu'elle a retenues. Avant d'aller plus loin, je voudrais préciser que je vais partager mon temps de parole.

Je reviens à peine de Taïwan, où j'ai dirigé une délégation multipartite. Cela a été un voyage fascinant. Taïwan traite quelque 1 200 visas par jour. C'est bien simple, c'est notre bureau des visas le plus occupé au monde. Les Taïwanais ont un dicton; ils disent que les Canadiens vivent tranquillement au paradis. C'est très intéressant.

Je dirais que, dans une grande mesure, les Taïwanais ne sont pas les seuls à penser cela. Il n'est donc vraiment pas étonnant que beaucoup de monde se bouscule à la frontière et soit prêt à tout sacrifier pour entrer au Canada. On va presque jusqu'à vendre son âme au diable, littéralement, pour pouvoir venir au Canada.

Nous devrions tous avoir ces problèmes. D'autres pays devraient éprouver les mêmes problèmes. Le premier ministre se plaît à dire que, lorsqu'il revient de l'étranger, il se rend compte qu'il a beaucoup moins de mal à gouverner notre pays que de nombreux autres dirigeants en ont à diriger le leur.

On peut dire que la plupart des autres pays voudraient avoir les mêmes problèmes que nous. On se meurt littéralement de venir au Canada, ce qui fait que nous avons un capital humain énorme. Néanmoins, nous sommes inondés d'immigrants. Trente-neuf millions de personnes traversent la frontière chaque année, soit dix millions de plus que la population canadienne. Nous délivrons quelque trois millions de visas chaque année.

Pour arriver à surveiller notre frontière et à appliquer un semblant de politique de l'immigration, nous devons monopoliser d'énormes ressources. Franchement, nous ne réussissons pas toujours aussi bien que nous le voudrions, mais la ministre a résolu dans une grande mesure ces problèmes.

Certaines critiques formulées à l'égard de notre politique d'immigration sont légitimes. Certains déplorent notamment le fait que des gens viennent chez nous et prétendent être des réfugiés. Leur demande suit alors la filière du système de traitement des demandes de statut de réfugié et, si elle est rejetée, les demandeurs en appellent de la décision. S'ils sont déboutés en appel, ils demandent alors une évaluation des risques. Si cette démarche échoue aussi, ils peuvent interjeter appel. S'ils sont à nouveau déboutés, ils peuvent alors présenter une demande fondée sur des motifs de compassion humanitaire. S'ils essuient un autre refus à ce niveau, ils peuvent se prévaloir d'une forme d'appel. S'ils n'obtiennent pas gain de cause, ils font l'objet d'une mesure de renvoi. Ils peuvent aussi contester cette mesure de renvoi. Après cela, ils font face à des mesures d'expulsion. Si cela leur déplaît, ils disparaissent.

Ce système donne lieu à de nombreux abus, et la ministre a voulu remédier à ce problème. À cette fin, elle a essayé de regrouper les divers processus, s'inspirant en cela d'une recommandation du comité. Elle a décidé de regrouper le processus de détermination du statut de réfugié, le processus d'évaluation des risques et le processus d'examen des motifs de compassion humanitaire, de manière à ce que tous se déroulent en même temps.

 

. 1655 + -

La ministre a pris des mesures pour mettre un terme à cette interminable partie de serpents et échelles. C'est un jeu qui met en cause la vie d'être humains et qui met à rude épreuve la tolérance des Canadiens lorsqu'il s'agit d'être justes et responsables envers ceux qui ont besoin de la protection de notre pays.

Actuellement, l'évaluation des motifs de protection se déroule à plusieurs niveaux. La CISR est l'un de ces niveaux, l'autre étant le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Le nouveau système regroupera en une étape l'évaluation des motifs qui seront examinés au cours d'une seule audience devant la CISR. Ce projet de loi part essentiellement du principe que les faits sont les mêmes. Peu importe que ces faits soient examinés dans l'optique d'une demande de statut de réfugié, d'un examen des risques ou d'un examen des motifs de compassion humanitaire, ils restent les mêmes. Par conséquent, il est tout naturel que les mêmes faits soient examinés en même temps afin que les intéressés susceptibles d'être admissibles à la détermination du statut de réfugié soient également admissibles à l'examen des risques.

Les motifs d'évaluation des risques sont énoncés dans la Convention de Genève pour les réfugiés, soit le risque de torture ainsi que la notion de menace pour la vie ou de traitement ou punition cruels ou inusités. Ces motifs ne sont pas nouveaux. Ils sont regroupés pour qu'il n'y ait plus une multitude de mesures, mais une seule.

Le deuxième aspect de cette réforme du processus d'examen sera l'établissement d'un tribunal composé d'un seul commissaire plutôt que de deux. À l'heure actuelle, deux commissaires de la CISR entendent les demandes de statut de réfugié. Dans la majorité des cas, les décisions sont unanimes. Grâce au recours à un seul commissaire, le processus sera plus efficace.

Au comité, nous avons entendu des témoins se préoccupant des réfugiés affirmer que cela entraînerait certaines difficultés. La ministre a répondu en chargeant un groupe d'étude spécial au sein de la CISR de faire un examen du processus pour que ceux qui estiment qu'après la détermination en vertu des critères relatifs aux réfugiés, la détermination relative aux risques et la détermination relative aux motifs humanitaires, il n'y ait pas d'injustices et de cafouillages. Une étude sera faite par un groupe de la CISR composé de personnes d'expérience.

La ministre, par l'entremise de ses collaborateurs, peut intervenir plus fréquemment durant les audiences de la CISR pour présenter de l'information relative à la sécurité ou d'autres données pertinentes au dossier. Nous espérons en fait que la ministre prendra une part plus active à ce processus.

Je cite la ministre relativement à son processus parce que le projet de loi qu'elle présente est une mesure sur laquelle les Canadiens ont été clairs. Ceux-ci ont dit clairement qu'ils voulaient un système fondé sur le respect de la loi. Ils ne veulent pas voir continuellement dans le Toronto Sun des manchettes leur apprenant quel a été le plus récent groupe à exploiter le processus. Nous voulons continuer à faire preuve d'ouverture à l'endroit des nouveaux venus, et c'est pourquoi le projet de loi cherche à instaurer un processus de prise de décision qui sera dans tous les cas plus rapide et plus équitable.

Le comité a entendu de nombreuses heures de témoignage. Il est à mon avis instructif de se reporter au rapport du comité déposé le mois dernier. Je constate que la ministre a effectivement donné suite aux recommandations 9 à 23.

Le comité a recommandé que la Section du statut de réfugié forme des tribunaux d'un seul membre en ayant l'option de constituer un tribunal de trois membres pour entendre les causes types ou les causes particulièrement difficiles. Il a aussi recommandé qu'il y ait une structure d'appel interne pour les demandeurs déboutés, et la ministre a retenu cette demande. Il a recommandé que toutes les décisions ayant trait aux risques courus par une personne incombent à la Section du statut de réfugié, et elle a donné suite à cette demande.

Le comité a recommandé que la Section du statut de réfugié s'efforce d'accroître le pourcentage des demandes soumises au processus accéléré. Elle a donné suite à cette demande. Il a aussi recommandé que soient éliminées les restrictions actuelles à la participation du représentant du ministre aux audiences sur le statut de réfugié et que le gouvernement prenne une part plus active que par le passé dans le choix des causes exigeant son intervention. Elle a de nouveau donné suite à cette demande.

Par conséquent, je souligne de nouveau que la ministre a été courageuse d'agir de la sorte et d'adopter une attitude aussi proactive face aux témoignages entendus par le comité.

 

. 1700 + -

L'autre secteur que la ministre a renforcé est celui de l'admissibilité. Autrement dit, la période précédant l'arrivée à l'aéroport et au pays d'une personne est la plus judicieuse pour statuer sur les questions d'admissibilité. L'arbitre examinera désormais la question de l'admissibilité et exclura les personnes reconnues coupables d'infractions criminelles graves, soit les manquements aux droits de la personne, les organisateurs d'activités criminelles ou les personnes présentant des risques pour la sécurité. Plutôt que de s'adresser à la CISR si la décision est négative, il s'adressera désormais au tribunal fédéral d'examen. Autrement dit, c'est l'élimination d'une autre étape du processus tortueux.

Je tiens en terminant à souligner que la ministre durcit sa position en ce qui concerne la question de la résidence. Au lieu de nous en remettre simplement à une définition anodine de la période de résidence, nous exigerons qu'une personne réside effectivement au pays pendant deux années sur cinq.

Ce projet de loi mérite l'appui de tous les députés. Ce fut un long processus. La ministre a tenu de vastes audiences auprès de tout un éventail de députés, de comités et de Canadiens. J'espère que les députés s'en rendront compte à la lecture de son projet de loi et lui accorderont beaucoup de soutien. La ministre a écouté le comité et a présenté un projet de loi qui reflète une grande partie de ce que nous avons entendu.

[Français]

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Madame la Présidente, il m'a fait plaisir d'entendre le discours de mon collègue qui est membre du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration.

Comme il le sait, le projet de loi à l'étude aujourd'hui modifie de façon assez considérable la Loi sur l'immigration et le statut de réfugié, qui datait de 1976. Elle a subi un changement assez considérable.

Au fond, ce projet de loi modifie un certain nombre d'éléments. Je pense, entre autres, à toute la question des agents d'immigration. Ils auront de plus en plus de pouvoirs. On peut dire que dans une certaine mesure, ils auront un pouvoir discrétionnaire. Que l'on pense seulement à la question de la détention.

Le rapport du vérificateur général est assez éloquent là-dessus. Est-ce qu'il est normal que des agents d'immigration n'aient pas la formation requise pour prendre un certain nombre de décisions, mais qu'ils prennent quand même des décisions quant à la détention d'un certain nombre de personnes? C'est ma première question.

Un autre point concerne la détention des enfants. Mon collègue le sait très bien, c'est un des éléments que j'ai soulevés dès le dépôt de ce projet de loi. Il n'y a pas de disposition, pas d'article prévu pour accorder ce traitement particulier aux demandeurs de statut de réfugié de moins de 18 ans.

Est-ce qu'il est normal que ce projet de loi ne traite pas les demandeurs du statut de réfugié qui sont mineurs à un niveau différent de tous les citoyens qui font une demande de citoyenneté, compte tenu du fait que le Canada a signé la Convention sur les droits de l'enfant? Comme je l'ai dit dans mon discours, le Canada est partie de trois conventions internationales: la Convention contre la torture, la Convention sur les droits de l'enfant et la Convention de 1951 sur les réfugiés. Est-ce que mon collègue trouve normal qu'on n'accorde pas un statut particulier aux mineurs?

Il y a aussi toute la question de l'accord Canada-Québec. Le Canada et le Québec en sont venus à un accord pour tout ce qui touche la question du choix des immigrants indépendants, de la sélection. Nous, de ce côté-ci de la Chambre, aurions souhaité que cette reconnaissance des compétences du Québec en la matière soit non seulement reconnue dans l'accord Canada-Québec, mais que ce soit clairement indiqué dans des articles prévus au projet de loi. Rien dans le projet de loi ne nous assure de cette reconnaissance et cela nous inquiète.

Ce sont donc trois questions que j'adresse à mon collègue et j'aimerais avoir quelques réponses.

[Traduction]

M. John McKay: Madame la Présidente, je remercie mon collègue de ses bonnes questions. Cela nous change un peu des autres questions.

 

. 1705 + -

Premièrement, en ce qui concerne l'admissibilité, on a entendu bien des choses; l'admissibilité à l'aéroport devrait relever du pouvoir discrétionnaire de l'agent d'immigration. À notre avis, il faudrait accroître le pouvoir discrétionnaire de l'agent. Il ne faudrait pas que ce soit une simple formalité.

Je suis d'accord avec ce que la ministre a fait en ce qui concerne le point d'entrée. Elle est pour un pouvoir discrétionnaire plus grand de la part de l'agent. On peut toujours faire appel à la Cour fédérale si la personne visée n'est pas satisfaite des décisions rendues.

Il s'agit de mettre fin à ce jeu des serpents et de l'échelle. Auparavant, les gens allaient voir l'agent et, s'ils n'étaient pas d'accord avec la décision rendue, ils se présentaient devant la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et, en cas de refus, ils allaient en appel. Je suis favorable à cette consolidation du processus.

En ce qui concerne la deuxième question, celle touchant les enfants, je trouve que c'est là un bon point. Les enfants, ça concerne la famille toute entière. Le problème se pose quand les demandeurs adultes ne remplissent pas les critères d'admissibilité, alors que les enfants sont tout à fait admissibles. Je pense que la consolidation du processus au sein même de la commission, à savoir l'examen des risques, la détermination du statut de réfugié et la prise en compte des motifs humanitaires, sera faisable et plus acceptable pour les enfants dans les cas où leurs parents ou les autres qui s'en occupent ne peuvent pas être admis en tant que réfugiés.

M. Reg Alcock (secrétaire parlementaire du président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir parler de ce dossier, que mon bureau examine activement depuis le jour où j'ai été élu, comme c'est probablement le cas pour bien des bureaux de députés.

Je voudrais d'abord remercier l'ancienne ministre de l'Immigration et celle qui lui a succédé, les plus de 50 personnes qui siègent à un comité que j'ai créé dans ma circonscription pour examiner ces questions, vu leur importance pour la population, ainsi que les employés du ministère de l'Immigration, qui travaillent dans le monde entier pour nous aider à atteindre et à sélectionner les personnes qui veulent immigrer au Canada et à faciliter leur entrée ici.

Pour nous, cette question n'est pas facile à comprendre. La première fois que j'ai été élu, des gens sont presque immédiatement venus à mon bureau pour me faire part des problèmes d'immigration qu'ils éprouvaient avec le ministère et de leur difficulté à faire venir des proches au Canada. Je me rappelle quelques cas en particulier.

Il y a celui d'un homme qui a immigré au Canada lorsqu'il était étudiant, qui a obtenu son diplôme ici, qui est devenu immigrant reçu et citoyen canadien, qui a poursuivi des études en médecine et qui est actuellement médecin de famille à Winnipeg. Il pratique la médecine depuis près de 20 ans. Il est marié et père d'un enfant. Il voulait que sa mère vienne au Canada pour partager sa joie et son enthousiasme d'avoir un nouveau membre dans sa famille.

Sa mère vit en Éthiopie, dans ce que nous considérons au Canada comme des conditions relativement primitives. On lui a immédiatement refusé l'entrée au Canada. Lorsque cet homme est venu à mon bureau pour m'en parler, je n'en croyais pas mes oreilles. Je présume que, étant assez jeune, j'étais quelque peu naïf sur ces questions, mais j'ai pensé que la situation était ridicule. Comme je suis moi-même nouveau parent, je comprends bien qu'on veuille partager avec d'autres membres de la famille la joie qu'on ressent. J'ai immédiatement écrit au ministère, comme nous le faisons tous, et j'ai reçu une lettre me disant de me mêler de mes affaires, ce qui m'a plutôt étonné de la part d'un fonctionnaire.

 

. 1710 + -

Pour résumer, après un certain temps, je me suis mis de nouveau en rapport avec lui pour lui demander ce qui se passait avec sa mère. Sa mère ne voulait pas émigrer. Elle ne voulait pas venir s'établir au Canada. Elle était très heureuse. Elle avait ses amis et était très heureuse dans son pays, mais il voulait qu'elle vienne passer quelques mois chez lui pour faire la connaissance d'un de ses petits-enfants.

Je suis finalement allé au cabinet du ministre chercher un permis ministériel. La mère est venue au Canada pour l'été il y a un an et elle est repartie. Il s'agissait seulement d'une visite comme il s'en produit souvent dans les familles. Cette année, il voulait faire venir sa belle-mère. Nous avons dû passer par le même processus tortueux.

Voici des années que je parle aux ministres. Chaque fois que je vais à l'étranger, je m'assure d'aller voir le personnel de l'immigration dans les bureaux du ministère. Je suis allé en Inde, où il existe à New Delhi un bureau où les demandes sont très nombreuses, ainsi qu'en Chine et à Hong Kong.

Je me demande pourquoi des choses normales, du type de celles auxquelles on s'attendrait d'avoir droit en tant que citoyen, ne peuvent se passer normalement. J'ai toute une liste de dossiers. Je suppose que d'autres députés en ont aussi.

Le frère d'un éminent microbiologiste de l'Université du Manitoba a pris sa retraite et voulait venir en visite, encore une fois pour un été. On le lui a refusé. Il se trouve que je représente l'Université du Manitoba. Un autre scientifique de l'Université du Manitoba avait une soeur qui effectuait un voyage aux États-Unis et en Europe et voulait s'arrêter un moment au Canada. On le lui a refusé. Et la liste continue. Pourquoi? Pourquoi les citoyens canadiens ne peuvent-ils, comme l'a dit mon collègue, vivre tranquillement? La question n'est pas facile.

J'ai entendu toutes sortes d'histoires d'horreur au sujet du bureau de New Delhi. Ayant moi-même travaillé dans la fonction publique, je sais qu'il y a toujours deux versions des faits. Je m'étais promis, lorsque j'aurais la chance de m'arrêter là-bas et de passer du temps avec les fonctionnaires, de leur poser ces questions.

J'ai été tout à fait impressionné par la qualité du personnel qui travaille à l'étranger, notamment en raison du temps, de l'énergie, de l'attention, du soin et de la réflexion qu'il consacre aux services qu'il dispense. Le problème, cependant, est le même que dans toute situation de pénurie.

Le Canada est un paradis où des millions, et peut-être des milliards de personnes voudraient se retrouver. Cette situation, qui engendre des pressions énormes, est tout à fait propice à ce dont nous sommes actuellement témoins. Elle a tout ce qu'il faut pour conduire à des abus et à l'exploitation des gens, comme l'ont fait les Snake Heads. En fait, ce genre de situation est propice à la corruption sous de nombreuses formes.

C'est pourquoi nous devons évacuer l'aspect lucratif du système. Nous devons amener les gens à comprendre que le système exige et mérite le respect, de manière à éliminer les pressions qu'il subit. Comment y arriver? Malheureusement, dans de nombreux genres d'exercices de contrôle social, il n'existe pas de solutions faciles ou évidentes.

J'ai été impressionné par le fait que l'ancien ministre et la ministre actuelle se soient engagés de façon très personnelle dans cette tâche. Ils y ont travaillé très dur.

J'ai parlé d'un comité. Un certain Sharad Chandra et une autre personne nommée Ken Zaifman président un groupe de travail dans ma circonscription. Celle de mon collègue, le député de Winnipeg-Nord—St. Paul, compte de nombreux immigrants nouvellement arrivés. Nous travaillons tous ensemble. Nous avons commencé par examiner les offres initiales. Les concepts initiaux ont été mis de l'avant. La ministre a rencontré les gens et, ensemble, nous avons examiné ces concepts en détail. Les gens ont littéralement consacré des centaines d'heures à examiner les solutions proposées.

Nous avons rencontré des fonctionnaires du ministère. J'ai soulevé la question auprès du personnel à l'étranger. Lorsque la nouvelle ministre est entrée en fonctions, elle est immédiatement revenue sur la même question. La ministre actuelle s'est adressée à des gens au cours d'une rencontre dans ma circonscription et nous avons examiné chacune des questions litigieuses avec les personnes directement concernées.

 

. 1715 + -

La mesure législative dont nous sommes saisis est équilibrée, mais lourde. Elle renferme un bâton qui doit servir à faire respecter la loi. Il permet d'intervenir rapidement et efficacement en cas de violation. Il permet que justice soit faite. Mais il le fait dans le contexte canadien. Il le fait de manière à préserver les droits de la personne.

Au bout du compte, je doute qu'une mesure législative permette de régler tous les problèmes et de calmer toutes les inquiétudes qui sont soulevées, mais je suis d'avis que ce projet de loi permet de franchir un pas important pour que les citoyens canadiens originaires de pays où la demande est très forte puissent bénéficier de leur citoyenneté au même titre que moi.

Les membres des premières nations n'aiment pas tellement qu'on le leur rappelle, mais nous sommes tous des immigrants au Canada. Ensemble, nous avons bâti un pays très puissant, très prospère et absolument magnifique. Nous voulons le partager. Nous voulons accueillir des immigrants, parce que nous savons que chaque nouveau groupe qui arrive ajoute à la qualité du tissu social canadien.

Quand je parle avec des membres du groupe le plus vulnérable, soit celui des nouveaux immigrants, je constate qu'ils sont aussi opposés que nous aux abus. En resserrant le processus et en conférant une certaine discrétion au personnel sur place, en qui j'ai confiance, je pense que nous progressons. Si le projet de loi est bien mis en oeuvre et bien appuyé, il améliorera la situation.

Les citoyens canadiens ne devraient pas avoir à s'adresser à moi pour que justice soit faite. Il est bon que nous puissions les aider, mais le système devrait simplement permettre l'interaction au sein des familles comme nous le souhaitons tous.

J'approuve les efforts déployés dans le domaine de l'immigration. J'appuie ce projet de loi et j'espère que les députés l'approuveront sans délai.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Madame la Présidente, je prends à mon tour la parole au nom du Bloc québécois à la demande de mon collègue, le député de Rosemont, qui est notre porte-parole en matière d'immigration. J'ai donc le plaisir de faire part des vues de notre parti sur le projet de loi C-31 qui concerne l'immigration au Canada et l'aide conférée aux personnes déplacées, persécutées ou en danger.

Je prends un plaisir particulier à me pencher sur cette législation, comme professeur de droit international, puisque lorsque j'avais le privilège d'enseigner le droit international public à l'Université de Montréal, j'ai eu à de nombreuses occasions le plaisir de parler de la Loi sur l'immigration de 1976, de voir son évolution, les nombreuses modifications qu'on y a apportées, ainsi que les nombreux règlements qui ont cherché de façon progressive à mettre en oeuvre la loi et ses dispositions.

Je comprends que le gouvernement a maintenant l'intention, par le projet de loi C-31, de procéder à une refonte des dispositions qui gouvernent la question de l'immigration et la question du refuge et de la protection des réfugiés au Canada.

Le Bloc québécois, et je partage cette vue du parti et de son porte-parole, constate, à la lecture de ce projet de loi et de la présentation qu'en a faite le ministre le 6 avril, que le gouvernement adopte un discours dur. Il aborde la question sans doute pour plaire à une certaine partie de l'électorat canadien, sans doute l'électorat de la droite canadienne, dont le Parti libéral veut s'assurer de son soutien au détriment du soutien qu'elle voudrait peut-être donner à l'Alliance canadienne.

C'est un projet de loi qui, en cela, semble renforcer les préjugés à l'égard des réfugiés et des immigrants.

 

. 1720 + -

C'est un projet de loi qui tend à vouloir être dur à l'égard des immigrants et des réfugiés. Choisir la ligne dure à l'égard des immigrants et des réfugiés peut exacerber la division, les sentiments xénophobes ou racistes au sein d'une société qui se dit accueillante. On constate parfois qu'elle est moins accueillante lorsque des immigrants, en grand nombre, ou lorsque des réfugiés, venant de divers pays, revendiquent un statut dans ce pays.

Notre parti a fait valoir, au cours des dernières années et à plusieurs reprises, que le système canadien de reconnaissance du statut de réfugié devait comporter deux caractéristiques essentielles. Il devait être diligent et juste envers la personne qui sollicite l'asile de bon droit, en conformité des droits qui lui sont accordés par les conventions internationales auxquelles le Canada est partie et il devait aussi être dissuasif à l'égard de personnes qui engorgent le système par des demandes qui ne sont pas fondées, qui sont, par exemple, des réfugiés économiques, des réfugiés qui ne répondent pas aux critères de refuge, tel qu'il est énoncé dans la Convention de 1951 des Nations Unies sur le statut de réfugié et de son protocole additionnel de 1967.

La lenteur du processus administratif dans le traitement des demandes est également quelque chose qui mérite d'être corrigé, parce que cela a entraîné, au Québec comme ailleurs au Canada, des drames humaines inacceptables. Il a placé des personnes et des familles dans des situations très difficiles à vivre, comme en ont fait foi le refuge de familles d'immigrants ou de revendicateurs de statut de réfugié dans des églises, dans des lieux d'asile où on a cherché à protéger des personnes qui réclamaient, avec raison, le statut de réfugié.

Si on parle, par exemple, de cette lenteur du processus administratif, pour le seul bureau de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié de Montréal, le délai moyen de traitement des demandes est, au moment où on se parle, de dix mois. De plus, il y avait, à la fin de décembre 1999—donc, il y a quelques mois à peine—plus de 7 000 demandeurs d'asile en attente d'une audience, soit le tiers de tous les cas au Canada. On sait que le Québec est une terre d'accueil très généreuse pour les réfugiés. Il l'est maintenant et il doit continuer de l'être, si le Québec devient un jour un pays, comme c'est le souhait des membres de ma formation politique. Il devra continuer d'être une terre d'accueil pour les réfugiés.

Nous sommes aussi d'avis, au Bloc québécois, que le nouveau projet de loi sur l'immigration ne traduit pas de façon assez explicite la portée réelle de tous les pouvoirs acquis par le Québec en matière d'immigration. C'est un pouvoir, comme nous le savons, qui est concurrent au sens de la Loi constitutionnelle de 1867 et qui permet aux provinces d'exercer certaines compétences, si telle est la volonté partagée du gouvernement du Québec et du gouvernement du Canada.

Selon le ministre québécois des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, M. Robert Perreault, et je le cite:

    Il faudra que la loi comporte des engagements fermes à cet égard. Des dispositions devront êtres ajoutées au projet de loi actuel pour s'assurer, notamment, du respect des pouvoirs du Québec touchant la sélection des travailleurs temporaires ou du maintien d'un programme distinct pour les immigrants investisseurs.

Le projet de loi—et j'ai pu le lire attentivement—ne comporte pas de telles garanties, de telles assurances. D'ailleurs, toutes les dispositions qui visent à assurer que le Québec assume des compétences dans le domaines de l'immigration et, notamment, de la sélection des immigrants, sont des dispositions contenues dans un arrangement administratif, l'accord McDougall-Gagnon-Tremblay, qui est le successeur de plusieurs accords conclus entre le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec.

 

. 1725 + -

Les dispositions en demeurent toujours précaires puisqu'il s'agit d'un accord qui n'a jamais pu être constitutionnalisé, malgré les tentatives de le faire, notamment celles avortées de l'Accord de Charlottetown.

Il aurait été souhaitable, et il le serait toujours, que l'on reconnaisse, comme une certaine résolution de cette Chambre des communes le laisse entendre, que la société distincte qu'est le Québec—ou que serait le Québec—mériterait d'avoir une traduction très concrète dans une loi fédérale sur l'immigration, où serait reconnu le statut particulier et distinct du Québec lorsqu'il s'agit de questions d'immigration, de sélection des immigrants, des travailleurs temporaires ou des responsabilités que le Québec veut assumer en matière de refuge.

Outre cette question des pouvoirs du Québec, il importe de mentionner que, bien que le projet de loi propose des modifications concernant les demandes des revendicateurs du statut de réfugié, nulle part le gouvernement ne s'engage à assumer les frais engendrés par la gestion de ce système.

En effet, si le gouvernement fédéral croit à l'efficacité des mesures proposées dans son projet de loi, il devrait pouvoir s'engager à assumer ces coûts, et ce, jusqu'à ce que les personnes en cause aient été reconnues comme des réfugiés au sens de la Convention, qu'elles aient obtenu la résidence permanente, ou jusqu'à ce qu'elles aient quitté le territoire.

À cet égard, rappelons qu'en février dernier, le Québec se joignait à l'Ontario et à la Colombie-Britannique pour dénoncer la gestion fédérale des demandeurs d'asile, ou du mouvement des demandeurs d'asile. Ces provinces réclamaient que des correctifs majeurs soient apportés et que le gouvernement fédéral, seul responsable de tout ce processus de reconnaissance du statut de réfugié, assume tous les coûts des services rendus à ces personnes, qu'il s'agisse des coûts relatifs à l'aide sociale, à l'aide juridique ou à l'éducation.

D'ailleurs, je pense qu'il serait utile de rappeler aux députés de cette Chambre qu'il en coûte actuellement au Québec—et c'est sans doute la même chose pour d'autres provinces, ou l'équivalent en proportion pour d'autres provinces—plus de 80 millions de dollars par année pour prendre en charge les personnes en attente d'une décision fédérale à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié.

Le Bloc québécois se préoccupe aussi du fait que de très nombreuses règles contenues dans ce projet de loi, ou des règles qui devront s'appliquer en matière d'immigration et de protection du statut de réfugié, seront adoptées par règlement, par législation déléguée. De telles règles ne sont pas, pour l'instant du moins, intégrées au projet de loi C-31.

Ceci signifie que le gouvernement soustrait, en définitive, ces règles à l'examen attentif de cette Chambre et que le regard parlementaire sur ces règles importantes sera très limité. Cela ouvre aussi la porte à des modifications nombreuses, au gré de l'humeur du gouvernement, sous la pression populaire, ou face à un mécontentement devant une décision judiciaire.

Comme l'ont fait d'autres partis, le Bloc québécois, lui aussi, regrette que l'on ne veuille pas dépolitiser le processus de nomination des personnes qui seront nommées ou continueront d'être en fonction à la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. C'est là une critique partagée, non seulement par les partis d'opposition, mais aussi par la société civile qui considère qu'il n'est pas opportun que le gouvernement ait le seul contrôle sur la nomination et la désignation des personnes appelées à prendre des décisions importantes en matière d'immigration et de reconnaissance du statut de réfugié.

 

. 1730 + -

Comme contribution particulière à ce débat, j'aimerais, au nom de mon parti, soulever quelques difficultés suscitées par la volonté du gouvernement, par ce projet de loi, de mettre en oeuvre des obligations internationales découlant de traités auxquels le Canada est partie, des obligations que le projet de loi a pour objet de remplir, comme le stipule d'ailleurs l'alinéa 3(2)b) de ce projet de loi.

J'ajoute que ce projet de loi veut sans doute mettre en oeuvre, à l'avance en quelque sorte, les dispositions d'un projet de traité en cours de négociations, c'est-à-dire le projet de protocole contre l'introduction clandestine de migrants, qui fait l'objet actuellement de négociations par un comité spécial sur l'élaboration d'une convention contre la criminalité internationale organisée, qui vise, par conséquent, à fixer des règles sur l'introduction clandestine de migrants par terre, air et mer, et qui est un protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité internationale ou transnationale organisée.

D'ailleurs, dans une étude toute récente, l'avocat Philippe Tremblay, qui a examiné de façon approfondie les rapports entre ce projet révisé et le projet de loi C-31, laisse entendre que le projet de loi C-31 est une incorporation précipitée du droit international en devenir.

Je ne peux m'empêcher de souligner qu'alors que le Parlement est saisi de ce projet de loi, il n'a pas eu l'occasion, en vérité, soit par l'intermédiaire de cette Chambre ou par un comité, d'examiner cette négociation en cours qu'on rapporte aux députés de cette Chambre, les positions canadiennes en cette matière ainsi que l'état des discussions relatif à ce projet de protocole.

Cela m'amène à dire qu'il est devenu impérieux que les parlements, et en particulier la Chambre des communes, soient associés au processus de conclusion des traités avant qu'ils ne soient appelés à adopter des lois de mise en oeuvre de ces traités puisque, s'ils ne sont pas associés au projet de mise en oeuvre des traités par législation, ils sont dans une situation où ils doivent seulement accepter les règles telles qu'elles ont été négociées et signées, sans avoir eu aucun droit de regard sur les normes contenues dans les conventions, et qu'un État comme le Canada, en l'occurrence, aura acceptées par sa signature.

Cela est d'autant plus important que, lorsqu'il s'agit de conventions qui ont déjà été signées et ratifiées, un parlement comme le nôtre, qui n'a pas été en mesure de participer aux délibérations sur ces traités et qui n'a pas approuvé les traités avant qu'ils ne soient ratifiés, n'est pas en mesure véritablement de comprendre et de participer adéquatement à leur mise en oeuvre.

D'ailleurs, ne s'agit-il pas du cas qui nous occupe, puisque le projet de loi C-31, de façon à tout le moins explicite, vise à mettre en oeuvre deux traités, la Convention sur les réfugiés et son protocole facultatif, ainsi que la Convention contre la torture, deux conventions qui ont déjà été signées et ratifiées par le Canada sans véritable débat parlementaire à leur sujet, alors qu'une troisième convention, qui n'est pas mentionnée dans ce projet de loi, la Convention sur les droits de l'enfant, devrait aussi avoir un impact réel et significatif sur la législation qui nous occupe.

 

. 1735 + -

À l'égard de ces trois Conventions dont je vais parler successivement, il nous semble, au Bloc québécois, qu'il y a des lacunes importantes qui pourraient encore être corrigées pour faire en sorte que ce projet de loi C-31 ait pour objet de remplir adéquatement les obligations internationales du Canada en la matière.

D'abord, prenons la Convention sur les réfugiés et son protocole facultatif. Il y a une référence explicite à cette Convention à l'article 2, paragraphe 1, où on définit la Convention et où on la décrit. C'était le cas également dans la Loi de 1976 qui la précédait. L'annexe de ce projet de loi comprend aussi une référence à certaines dispositions de la Convention sur les réfugiés.

Toutefois, lorsqu'on examine le projet de loi, lorsqu'on le lit attentivement, on constate qu'il va sans doute à l'encontre de l'esprit sinon de la lettre de la Convention sur les réfugiés et de son protocole de 1967.

Lorsque nous examinons, par exemple, les dispositions qui concernent les décisions d'interdiction du territoire, lorsque nous lisons ensemble les articles 29, 30 et 33 de ce projet de loi, lorsque l'on regarde les dispositions qui permettent un recours croissant à la détention des revendicateurs du statut de réfugié—je fais référence particulièrement à l'article 50 de la Convention—et lorsqu'on constate que le projet de loi resserre l'accès à la procédure du statut de réfugié, on peut penser que ce projet de loi ne respecte pas l'esprit de la Convention sur les réfugiés. Celle-ci se veut une Convention visant à faciliter l'accès de véritables réfugiés au territoire d'un État et vise aussi à protéger ces réfugiés.

Les dispositions qui serrent la vis, qui sont très limitatives, beaucoup plus que celles qui étaient convenues dans la loi antérieure, de l'avis du Bloc québécois, mettent probablement en péril certaines protections et certaines garanties de la Convention et du protocole sur le statut de réfugié.

Si on regarde la Convention contre la torture, nous sommes d'avis qu'elle n'est pas incorporée de façon complète et convenable. Cette Convention comprend une interdiction absolue du refoulement des personnes qui pourraient être victimes de torture dans le pays où on pourrait les refouler. La référence qui est contenue à la Convention contre la torture à l'article 90, paragraphe 2, alinéa a, est une référence utile et elle est louée dans certains milieux. Mais l'article 91 tend à limiter la protection des personnes qui pourraient être victimes de torture et ne semble pas correspondre convenablement aux exceptions des paragraphes e et f de la Convention sur les réfugiés.

Le principe de non-refoulement est incorporé à l'article 108 de ce projet de loi et vise également à confirmer l'acceptation du principe de non-refoulement prévu à l'article 33 de la Convention sur les réfugiés, où il est question de torture. Cela est quelque chose de positif. Toutefois, il ne rassure pas en la matière puisque l'interdiction absolue de refoulement des personnes susceptibles d'être torturées n'est pas garantie.

En dernier lieu, je veux signaler que, de l'avis de notre parti, l'intérêt supérieur de l'enfant, tel qu'il est protégé par la Convention des droits de l'enfant, n'est certainement pas la considération principale dans ce projet de loi puisqu'il est prévu qu'un enfant d'âge mineur pourrait être détenu et que seuls des règlements pourraient être adoptés pour limiter cela.

Notre parti est donc d'avis que le gouvernement devrait songer de façon très sérieuse à mieux mettre en oeuvre ses obligations internationales et à faire les améliorations qui s'imposent au projet de loi C-31.

 

. 1740 + -

M. Bernard Bigras (Rosemont, BQ): Monsieur le Président, mon collègue, le député de Beauharnois—Salaberry, nous a renseignés sur l'importance de l'Accord Canada-Québec en matière d'immigration.

Il nous a fait part, entre autres, du fait que le Québec, en vertu de cet accord, a la responsabilité de la sélection des immigrants indépendants.

Pourquoi devrions-nous aller plus loin que l'Accord Canada-Québec? Pourquoi devrions-nous aller plus loin en faisant en sorte que les compétences du Québec soient contenues, non seulement dans cet accord, mais qu'elles le soient dans le projet de loi que nous étudions aujourd'hui?

On le sait, notre collègue de Beauharnois—Salaberry est un éminent constitutionnaliste. Alors, j'aimerais qu'il nous explique de façon claire quelle est la différence entre reconnaître les compétences dans un accord entre deux gouvernements et des compétences qui seraient reconnues de façon législative dans le projet de loi C-31.

M. Daniel Turp: Monsieur le Président, je remercie mon collègue de sa question. J'en profite pour dire à quel point nous, députés du Bloc québécois, sommes fiers du travail qu'il accomplit comme porte-parole en matière d'immigration.

Il y a eu beaucoup de débats constitutionnels dans ce pays. Il y en a qui semblent en être fatigués. Ils sont tellement fatigués de ces débats qu'ils n'osent pas affronter ceux qui pensent encore aujourd'hui qu'il devrait y avoir des changements dans la Constitution du Canada. Au moment où nous nous parlons, le premier ministre est à dévoiler une exposition où il est question de la Constitution du Canada. Lorsque l'on parcourt les divers lieux d'exposition, on constate à quel point la Constitution du Canada a été imposée au Québec, qu'il s'agisse de la Constitution de 1840 qui créait l'Acte d'Union, ou la Constitution de 1982, qui a été rapatriée sans l'assentiment du Québec.

S'il y a un domaine où il y a eu une percée, c'est l'immigration. Il y a eu un arrangement administratif, non pas un arrangement administratif qui est une générosité du gouvernement du Canada, mais un accord administratif qui est possible en vertu de la Constitution actuelle, parce que les pouvoirs en matière d'immigration sont des pouvoirs concurrents. Ce sont des pouvoirs que les gouvernements fédéral et provinciaux, et leurs assemblées, peuvent exercer de façon concurrente, si telle est la volonté du gouvernement et du Parlement fédéral. Ce sont des pouvoirs qui prévoient une prépondérance du gouvernement fédéral en la matière.

C'est la bonne volonté du gouvernement fédéral qui détermine si oui ou non il y aura un accord et un exercice par les provinces, et le Québec en particulier, de certains pouvoirs en matière d'immigration.

Les premiers accords conclus en la matière—l'Accord Andras-Bienvenue, si je me rappelle bien, suivi par l'entente Cullen-Couture, et maintenant l'accord McDougall-Gagnon-Tremblay—sont le résultat de négociations.

Pour répondre à la question de mon collègue, le statut de ces accords est toujours précaire. Si un gouvernement voulait ne plus conférer ou accepter que les provinces exercent des compétences en matière d'immigration, il le pourrait.

C'est la raison pour laquelle on voulait constitutionnaliser ces accords en matière d'immigration dans l'accord de Charlottetown, pour qu'ils ne puissent pas être précaires et pour qu'un processus d'amendement constitutionnel garantisse leur pérennité sans qu'un gouvernement puisse, unilatéralement, les modifier. Cela nous inquiète toujours, parce que le gouvernement fédéral, en tout cas le gouvernement libéral, a souvent fait des choses unilatéralement lorsqu'il s'est agi de Constitution.

Si une protection était accordée à ces accords dans une loi fédérale, cela rendrait moins précaire les accords qui existent, bien que cette protection ne serait pas intégrale, puisque ce Parlement pourrait toujours la modifier et mettre fin à cette protection additionnelle que contiendrait cette référence aux accords intergouvernementaux et aux arrangements administratifs entre le gouvernement du Québec et celui du Canada.

C'est la raison pour laquelle notre parti, qui veut défendre les intérêts du Québec au moment où nous nous parlons, avant que le Québec choisisse démocratiquement la souveraineté, croit qu'il serait opportun de conférer une garantie à ces accords qui ne sera jamais suffisante, puisqu'elle serait davantage utile si elle était constitutionnalisée.

 

. 1745 + -

Dans l'état actuel des choses, on ne peut pas concevoir qu'on veuille constitutionnaliser quelque chose qui soit dans l'intérêt du Québec et des Québécois parce que, semble-t-il, les Québécois ont assez de protections.

Ce n'est pas l'avis de notre parti. C'est la raison pour laquelle, malgré le fait que nous agissions de façon constructive dans l'étude du projet de loi C-31, nous croyons et sommes convaincus que, pour que le Québec se développe au sein de cette communauté internationale, il doit contrôler son immigration pour s'assurer à l'avenir d'être un pays de langue commune française, qu'il continue d'être généreux, qu'il ne prenne pas les mauvais penchants d'un gouvernement qui, sous le couvert d'être un pays très généreux à l'égard des réfugiés, tente cette fois-ci encore de serrer la vis et de rendre la vie plus difficile aux revendicateurs du statut de réfugié. C'est une tendance à laquelle voudra échapper un Québec souverain lorsque les Québécois auront décidé qu'il le deviendra.

M. Yves Rocheleau (Trois-Rivières, BQ): Monsieur le Président, mon éminent collègue de Beauharnois—Salaberry m'a inspiré cette question par le dernier volet qu'il a abordé. Il faudrait qu'il élabore davantage.

Il m'apparaît, comme souverainiste d'un certain âge, qu'il y a des raisons positives pour le Québec à devenir souverain. Il y a aussi des raisons négatives qui devraient nous motiver, comme Québécois, quant à la réflexion à laquelle nous devons nous imposer comme peuple.

Le fait que le peuple québécois ne contrôle pas son immigration m'apparaît être un des facteurs principaux quant à la réflexion qui devrait nous habiter face à une nouvelle consultation quant à l'avenir du peuple québécois.

J'aimerais donc entendre mon collègue nous définir encore mieux le prix à payer pour un peuple comme le nôtre, joyau francophone en Amérique parmi une mer d'anglophones, de ne pas contrôler ce ce qui concerne les nouveaux arrivants, et ce, sans qu'il ne soit question de près ou de loin ou de quelque façon que ce soit de racisme ou de xénophobie, mais plutôt d'administration et de bonne gestion quand à l'avenir de ce peuple unique en Amérique.

J'aimerais donc entendre mon éminent collègue là-dessus.

M. Daniel Turp: Monsieur le Président, cette question me permet de rappeler à la Chambre qu'en dépit du dernier arrangement administratif entre le gouvernement du Canada et celui du Québec sur l'immigration et la sélection des ressortissants étrangers et des réfugiés, le Québec ne contrôle que 40 p. 100 de son immigration et l'entrée des réfugiés.

Alors qu'on laisse entendre que le Québec a une autonomie complète en la matière, il n'a d'impact véritable que sur 40 p. 100 des personnes de l'étranger qui entrent sur son territoire et qui y séjournent.

Cela signifie que l'autonomie qu'on a bien voulu accorder au Québec en vertu de la Constitution actuelle n'est certainement pas suffisante et satisfaisante dans un État comme le Québec. Celui-ci a tellement besoin des pouvoirs en matière d'immigration pour assurer le maintien de l'équilibre démographique actuel.

Les Québécois de langue française forment un peu plus que 80 p. 100 de la population et ceux de langue anglaise, d'autres origines et les nations autochtones forment environ 18 p. 100. C'est une proportion qui, somme toute, est tout à fait acceptable et qui permet une société riche, diversifiée, pluraliste, qui se respecte et qui devrait pouvoir choisir le français comme langue commune.

C'est là où l'immigration est tellement importante pour le Québec. Des pouvoirs accrus en matière d'immigration sont tellement importants pour convaincre les immigrants ou même les réfugiés qui arrivent au Québec, que lorsqu'ils choisissent le Québec comme terre d'élection ou de refuge, que le français est la langue qu'ils devront adopter comme langue de travail.

 

. 1750 + -

Cette façon de voir les choses est très difficile dans un pays qui a deux langues officielles et qui cherche à convaincre que ces deux langues officielles sont les langues que les immigrants peuvent choisir sans distinction. C'est une des raisons qui fait que l'on sait que les Québécois vont un jour choisir, je crois, la souveraineté, parce qu'ils seront convaincus que le fait de contrôler l'ensemble des pouvoirs en matière d'immigration est une clé pour la survie, le maintien et le développement de la langue française au Québec.

[Traduction]

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre part au débat sur ce projet de loi. Depuis les trois ans que je suis député, j'ai eu l'honneur de siéger au Comité de la citoyenneté et de l'immigration. Cette année, j'ai été élu à la vice-présidence de ce comité.

Comme le savent les députés, la circonscription de Mississauga que je représente est un foyer d'immigrants et de réfugiés nouvellement arrivés dans le pays et éprouve à ce titre de nombreux problèmes en matière d'immigration et de citoyenneté. En fait, un de mes collaborateurs, Terry Kirsch, s'occupe pratiquement à temps complet de ce type de problèmes. Dans notre communauté très diversifiée, la question nous tient à coeur, et elle est extrêmement importante pour mes électeurs et tous ceux de la région de Peel.

L'une des choses qu'il nous a été donné d'apprendre depuis notre élection est que le système de l'immigration et de la citoyenneté semble être considérablement entravé par une organisation bureaucratique lourde et différentes contraintes administratives. La ministre a reconnu le problème et a opéré des changements destinés à améliorer le système. En fait, elle s'est fait une réputation de ministre qui agit, qui règle les problèmes, qui n'a pas peur de s'y frotter.

J'ai trouvé intéressantes les affirmations de certains députés, notamment celles du porte-parole de l'opposition officielle qui a parlé pendant près de 40 minutes. Pendant les 15 ou 20 premières minutes de son intervention, il a parlé de tous les aspects positifs de l'initiative. Je commençais à m'inquiéter. Je croyais qu'il allait souscrire pleinement au projet de loi et qu'il nous faudrait revenir au point de départ. Mais évidemment, cela ne s'est pas produit. Comme à l'accoutumée, et comme d'autres députés de l'opposition, il trouve du bon au projet de loi à l'étude, mais il se concentre sur les aspects qu'il juge négatifs. Cela est particulièrement manifeste lorsqu'on traite de la délicate question des réfugiés.

Comme tout le monde le sait, ce pays est devenu, en 1949, signataire de la Convention de Genève par laquelle nous convenions d'accepter notre part de réfugiés, de gens connaissant des problèmes en raison de conflits qui règnent dans leur pays. La question est alors la suivante: comment définir notre part? En réalité, elle s'est définie d'elle-même en termes de chiffres. Alors qu'il peut y avoir plus ou moins 200 000 nouveaux immigrants qui arrivent dans notre pays, environ 20 000 demandent le statut de réfugié.

Qu'est-ce qui arrive dans le cas d'un réfugié? Si les gens arrivent normalement à l'aéroport Pearson, se présentent sans documents, demandent simplement le statut de réfugié et décrivent la persécution dont ils sont victimes et les problèmes qu'ils connaissent dans leur pays d'origine, ils doivent suivre un processus. Par le passé, ce processus durait plusieurs années. Toutefois, s'ils arrivent sur un bateau rouillé sur les côtes de la Colombie-Britannique ou s'ils gagnent la rive à la nage dans les Maritimes, trempés, après avoir quitté une sorte de bateau, les caméras de télévision se ruent sur l'affaire et la question fait les gros titres.

 

. 1755 + -

Pour replacer les choses en contexte, alors qu'il y a eu environ 600 immigrants qui sont arrivés sur la côte ouest d'une manière qui a été qualifiée d'illégale, ce qu'elle était clairement, il en arrive presque autant que cela chaque mois à l'aéroport international Pearson. Suscitent-ils l'attention? Attirent-ils les médias? Provoquent-ils les commentaires négatifs que nous entendons des opposants au gouvernement qui veulent simplement se servir de cette tragédie?

Que les choses soient claires. Il s'agit d'une tragédie humaine. Cette situation résulte de l'asservissement, du trafic et de l'esclavage. Elle est attribuable au crime organisé. De nos jours, faire passer des gens clandestinement à la frontière est plus facile que faire entrer illégalement des drogues, et certains diraient même que c'est plus profitable et moins dangereux.

Ils reçoivent toute l'attention alors qu'à la suite des entrevues qui ont eu lieu, on constate que la majorité de ces gens sont effectivement des victimes. Ce sont les victimes d'une organisation criminelle internationale, de personnes qui se livrent au trafic d'êtres humains. Ces personnes doivent être débusquées et punies et faire l'objet des mesures les plus sévères possible.

Notre ministre était en Chine la semaine dernière, et j'étais fier de la voir dire au gouvernement chinois qu'il doit nous aider à mettre un frein à cette situation, puis se rendre dans la province de Fujian et déclarer aux dirigeants de cet endroit qu'ils disent à leurs fils et à leurs filles que verser 40 000 $ ou 50 000 $ pour monter à bord de vieux pétroliers rouillés manifestement inaptes à prendre la mer et entreprendre un voyage de plusieurs semaines pour traverser l'océan est dangereux. C'est une entreprise insensée qui doit prendre fin. Notre ministre a dit aux Chinois qu'ils ont la solution à ce problème.

Toutefois, il y a de ce côté-ci de l'océan des gens qui aimeraient utiliser cela afin d'en tirer un avantage politique. Je comprends le sentiment de la collectivité chinoise de Colombie-Britannique qui a dit ressentir un malaise parce qu'elle ne veut pas que des gens coupent la file. «Nous sommes venus ici en empruntant les filières pertinentes, en adoptant les bonnes méthodes, et nous ne voulons pas que des gens entrent subrepticement.» Je comprends ce point de vue et j'y suis sympathique.

Je leur dis cependant, comme à tous les Canadiens, que nous devons comprendre qui sont les victimes. La vaste majorité des gens détenus en Colombie-Britannique sont des femmes et des enfants. Ce ne sont pas des criminels. Les criminels sont les personnes qui ont organisé le voyage à partir de la Chine en faisant miroiter des promesses de vie meilleure et d'autres choses du genre. Qu'arrive-t-il? Pourquoi ces personnes sont-elles en détention alors que cela coûte si cher? Si on les libère en tant que réfugiées, les jeunes filles pourraient aboutir dans le domaine de la prostitution, dans l'industrie de la drogue et dans toutes sortes d'activités souterraines illégales qui sont toutes aussi dangereuses les unes que les autres.

Ce n'est pas un problème facile à résoudre. Il y a des barrières linguistiques et culturelles. Il est extrêmement difficile de bien faire connaître les faits aux Chinois, mais notre ministre essaie. En leur adressant ce message directement, j'espère que nous remporterons un certain succès. Quoi qu'il en soit, ce projet de loi renferme des idées dont nos vis-à-vis ont parlé, parfois pour les appuyer et d'autres fois pour s'y opposer, qui sont destinées à rationaliser le processus.

Il est insensé d'installer des gens dans un motel à Mississauga ou ailleurs au Canada pour qu'ils vivent comme une famille, alors qu'ils ont des enfants qui devraient aller à l'école. Pourquoi sont-ils ici? Ils sont ici parce que s'ils sont de véritables réfugiés, ils ont un grave problème. Ainsi, il incombe au Canada, en tant que l'un des pays signataires de la Convention de Genève, de trouver une solution à ce problème.

 

. 1800 + -

Malgré certaines des élucubrations que j'ai entendues de la part de nos vis-à-vis dans cette enceinte et au comité, je crois que la plupart des Canadiens, la grande majorité des Canadiens, vous diront que, s'il s'agit de véritables réfugiés, si ces gens sont en danger d'être persécutés, s'ils ont des raisons de craindre pour leur vie, s'ils risquent d'être jetés dans une prison infestée par les rats quelque part, on ne devrait pas alors les renvoyer chez eux. Nous devrions trouver une façon de prendre une décision le plus rapidement possible pour que leurs enfants, s'ils en ont, puissent être intégrés au système scolaire et pour qu'ils aient la possibilité de se bâtir une nouvelle vie.

Cette fin de semaine, alors que nous étions témoins de la célébration du vingt-cinquième anniversaire de la fin de la guerre du Viêtnam, j'ai trouvé intéressant que quelqu'un parle des réfugiés de la mer. C'est John Downing qui, dans le Toronto Sun, a raconté comment il a aidé un certain nombre de réfugiés de la mer à s'établir dans la région de Toronto à leur arrivée. Les intéressés ont loué deux maisons. Tout d'abord, ils ont placé tous ces gens dans une maison jusqu'à ce que les autorités sanitaires leur disent qu'il y avait trop de gens entassés là et ainsi, Downing et le Sun ont loué une autre maison pour faire plus de place à ces gens. Nous nous rappelons tous d'eux. On les appelait les réfugiés de la mer.

On paniquait, car on craignait qu'ils arrivaient dans des navires-citerne, pour l'amour du ciel, et qu'ils détruiraient nos collectivités. Cette information fautive était effrayante, mais elle était alimentée par l'attitude négative des gens qui s'opposaient à ce que le Canada accueille sa juste part de réfugiés, mais je crois que ce n'était pas la majorité.

J'ai trouvé brillant l'article de M. Downing, car il parle du succès que connaissent ces réfugiés aujourd'hui. Il raconte l'histoire d'un réfugié vietnamien qui est arrivé ici, s'est retrouvé à Winnipeg et a ouvert un magasin de confection sur mesure. Sans instruction ni aide financière, il a bâti lui-même une entreprise familiale. Il a maintenant des enfants et mène une vie merveilleuse au Canada. C'est là l'essentiel. C'est sur quoi devrait être fondée la Loi sur l'immigration et la Loi sur la citoyenneté. Comment peut-on partager la richesse du Canada et en même temps régler les problèmes des réfugiés, qu'ils soient arrivés de Saigon il y a 25 ans ou qu'ils arrivent maintenant de la province du Fujian en Chine ou d'ailleurs?

Je comprends le sentiment de frustration que ressentent les gens lorsqu'ils apprennent que des réfugiés se présentent à l'aéroport Pearson sans papier d'identité. Ils devaient bien en avoir quand ils sont montés à bord de l'avion. Où sont-ils? Nous savons qu'ils les font passer dans les toilettes, qu'ils les font disparaître d'une manière quelconque ou qu'ils les redonnent au transporteur qui les leur a vendus. Nous savons qu'il y a des activités illégales et nous devons y mettre un terme.

Le projet de loi prévoit une peine plus sévère pouvant aller jusqu'à l'emprisonnement à vie pour le trafic de personnes. En fait, j'ai expliqué en comité que le trafic de personnes devrait devenir un crime contre le statut d'être humain. Ce n'est pas en ces termes qu'on en parle, mais je crois que ce devrait être le cas. Il n'y a rien de plus horrible au monde que d'exiger de l'argent des gens dans le cadre d'une activité criminelle pour les mettre dans une situation où ils ne savent pas dans quoi ils s'embarquent. Ils finissent par être placés en détention au Canada, dans des situations inconfortables, et cela constitue vraiment un crime contre l'humanité.

La ministre fermera la porte arrière, c'est-à-dire le moyen détourné d'entrer au Canada qui est exploité par les criminels, que ce soit dans le cadre du crime organisé ou d'une criminalité spécialisée, qui exploitent la situation pour se remplir les poches.

 

. 1805 + -

La ministre dit que nous devons fermer la porte arrière. Et il est très intéressant de noter qu'elle ajoute «afin de pouvoir ouvrir toute grande la porte principale». C'est une idée intéressante.

En temps de prospérité, si nous demandions aux Canadiens s'il faut faire entrer plus d'immigrants, certains diraient oui, d'autres non, et d'autres encore diraient que nous devrions nous assurer que les emplois augmentent. En réalité, cependant, qu'est-ce que le Canada sinon un pays d'immigrants? Si ce n'est pas un pays bâti grâce au dur labeur des immigrants et au prix de leur sang, de leurs sueurs et de leurs larmes, je ne sais pas ce qu'est ce pays.

Mon père est venu de Cardiff, au Pays de Galles, pour travailler dans les aciéries. La plupart d'entre nous pourraient sûrement faire remonter leur famille et leur histoire à une autre partie du monde, et certains d'entre nous sont mêmes des immigrants de la première génération. C'est l'un des aspects les plus merveilleux de ce pays. Il est possible d'être originaire d'une autre région du globe, d'être peut-être même miséreux, et de gravir les échelons pour devenir député. Je crois que ce poste est honorable et mérite le respect des Canadiens, malgré les commentaires qu'on entend à l'occasion dans les médias et du côté de l'opposition. Tout cela est lié à l'immigration.

Nous avons récemment étudié le projet de loi sur la citoyenneté. Imaginons la fierté des nouveaux Canadiens qui participent à la cérémonie où on leur confère leur citoyenneté. C'est profondément émouvant de voir le sentiment qui les habite alors. Les gens peuvent être fiers de dire qu'ils possèdent un passeport canadien, peu importe où ils se trouvent sur la planète.

En fait, on le répète assez souvent ici, les Nations Unies décrètent depuis six années consécutives que le Canada est le meilleur pays au monde quant à la qualité de vie. Je dis toujours que c'est le premier pays au monde pour tout le monde sauf ceux qui y vivent; ceux-là ne font que se plaindre de leur pays.

J'ai fait un voyage en compagnie d'un collègue du Parti conservateur et de la ministre. Nous avons séjourné à Londres et nous y avons rencontré le personnel du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, les agents des visas, tous ces jeunes hommes et ces jeunes femmes qui essaient de traiter les demandes de visas pour les visiteurs et les demandes de tous ceux qui souhaitent obtenir le statut d'immigrant admis ou de réfugié. Ils essaient de répondre aux attentes, mais ils sont surchargés car le bureau de Londres est réputé comme le plus efficace et le meilleur endroit où s'adresser. Des gens du Nigeria et de tous les pays occidentaux se rendent à Londres en affirmant qu'ils y obtiendront leur visa rapidement et que c'est pourquoi ils choisissent cette ville. Ils font la queue.

J'ai aussi assisté à certaines entrevues. Cette expérience à Londres a été très utile, intéressante et instructive pour moi. J'ai été étonné du nombre de demandes que nous rejetons. Je pensais que toutes les demandes étaient acceptées automatiquement, les unes après les autres. Il n'en est rien. On refuse les candidats si on a le moindre doute qu'ils ne disent pas la vérité. On les refuse si on a le moindre doute qu'ils pourraient poser un risque ou un danger pour la sécurité des Canadiens.

J'ai été très impressionné par le dévouement du personnel qui travaille pour nous à Londres, en Angleterre, mais c'est pendant l'autre partie de ce voyage que j'ai vécu l'expérience la plus marquante de mes 20 ans de vie publique. Notre voyage nous a menés à Nairobi, au Kenya. C'est une ville de six millions d'habitants. C'est une ville où 500 personnes par jour meurent du sida dans les hôpitaux. C'est une ville où l'on n'ose pas s'aventurer le soir. C'est une ville où, la ministre s'en souviendra, on n'ose même pas conduire avec un bras à l'extérieur de la voiture de peur que quelqu'un ne nous le coupe pour s'emparer de notre montre. C'est une ville où nos employés, qui sont environ 80 au total, vivent dans des enceintes entourées d'un mur surmonté d'une clôture électrique et surveillées 24 heures par jour par des gardiens de sécurité, dans des demeures magnifiques dont les fenêtres et les portes sont munies de barreaux et dont les cours extraordinaires font rêver. On se croirait quelque part en Floride ou à Hollywood.

L'hon. Elinor Caplan: Ou à Mississauga.

M. Steve Mahoney: Oui, bien sûr, ou à Mississauga, comme le dit la ministre.

La vie de ces êtres est constamment en danger.

Je suis allé dans un camp de réfugiés et j'y ai vu 110 000 personnes dépendant d'une seule source d'eau. Bon nombre vivaient là depuis dix ans dans les conditions de vie les plus épouvantables qu'il m'ait été donné de voir et dont pourrait être témoin n'importe quel Canadien.

 

. 1810 + -

J'espérais avoir le temps de raconter l'histoire d'une Éthiopienne dont le mari et un fils adolescent ont été assassinés, qui n'a pas revu son autre fils adolescent depuis qu'il a été enlevé, qui a été emprisonnée pendant deux mois et qui a été violée en bandes tous les soirs alors qu'elle était enchaînée au mur. J'ai vu cette femme pleurer de joie lorsque l'agent des visas lui a annoncé que ses quatre autres enfants et elle allaient pouvoir venir au Canada. Je n'ai jamais été aussi fier d'être Canadien.

J'espère que le personnel du bureau de Nairobi me tiendra au courant de ce qui leur arrivera, à elle et à ses enfants. Sa fille de 11 ans a dit par le truchement d'un interprète qu'elle voulait devenir pilote de ligne. C'est étonnant!

Nous accomplissons des merveilles au ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration. Ce projet de loi facilitera la tâche à tous les membres de notre personnel et assurera aux Canadiens que leur système est l'un des meilleurs au monde.

Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser sur le concept de meilleurs intérêts de l'enfant, qui est un des principes contenus dans le projet de loi. J'aime beaucoup l'idée que le projet de loi reflète bien tout l'attachement des Canadiens au bien-être de l'enfant.

En tant que mère d'un enfant handicapé, je suis très intéressée au traitement que le projet de loi réserve aux personnes handicapées.

Dans ma vie personnelle, je constate souvent que les décisions du gouvernement ne semblent pas viser à assurer le bien-être de mon enfant. Par exemple, il n'a pas accès à tous les services d'éducation qui sont accessibles à tous les autres enfants.

Selon notre Charte des droits et libertés, tous les Canadiens sont égaux en droit. Dans le rapport du groupe de travail intitulé «La volonté d'intégrer les personnes handicapées», qui a été produit il y a quelques années, il était question de donner un sens à la citoyenneté canadienne pour les personnes handicapées.

À l'article 34 du projet de loi, il est question de ressortissants étrangers ou d'autres résidents permanents qui seraient inadmissibles pour des motifs sanitaires, leur état de santé pouvant vraisemblablement constituer un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé. C'est le seul article du projet de loi qui, à mon sens, se rapporte au cas d'une personne handicapée désireuse de venir s'établir au Canada.

J'aimerais savoir si une famille ayant un enfant handicapé, par exemple, le syndrome de Down ou la paralysie cérébrale, serait acceptée au Canada.

Le député a parlé de l'époque où, de Londres, en Angleterre, il suivait le processus. Si je vivais là avec ma famille, serais-je autorisée à venir m'établir au Canada? Mon enfant handicapé serait-il le bienvenu au Canada?

Je veux savoir cela et, j'en suis convaincue, beaucoup de Canadiens aussi voudraient bien le savoir.

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, je remercie la députée pour sa question très pertinente.

Ma collègue a soulevé deux points. Elle a d'abord parlé des meilleurs intérêts de l'enfant. Le comité a essayé de saisir la question, qui peut être difficile à définir. Sur quoi se fonde-t-on pour définir les meilleurs intérêts de l'enfant?

Je crois qu'il est internationalement reconnu, notamment en vertu de la Convention de Genève et d'autres textes, que les meilleurs intérêts de l'enfant peuvent effectivement être définis. Dans le cas d'un enfant handicapé, par exemple, je crois qu'il s'agit de prévenir les abus. Dans ce cas, l'abus pourrait être qu'une personne veuille venir au Canada dans le seul but de bénéficier de soins de santé gratuits.

Dans le cas des réunifications de familles cependant, s'il s'agit de faire venir une nouvelle famille au Canada et qu'un enfant de cette famille souffre d'un handicap, je suis convaincu, ayant rencontré les hommes et les femmes qui travaillent pour Citoyenneté et Immigration, que nous tiendrions compte de tous ces faits et ne tolérerions pas qu'ils constituent un obstacle.

 

. 1815 + -

J'ai vu dans ma propre circonscription des cas de personnes qui tentaient de faire venir des parents âgés au Canada pour qu'ils puissent bénéficier de soins de santé de meilleure qualité. Nous devons faire preuve de compréhension et d'équité, mais nous ne voulons pas abuser du système et le rendre subitement plus coûteux en permettant à tous ceux qui sont malades de venir chez nous pour y recevoir des soins de santé gratuits. Nous devons faire preuve de compassion, et cela doit être évident dans la mise en oeuvre, dans la façon dont nous administrons le système.

Je signale à ma collègue que j'ai participé activement à la vie communautaire de ma communauté. Je suis convaincu que nous devons tendre la main à tous les citoyens du monde qui ont besoin d'aide pour venir s'établir au Canada. Et je crois que c'est ce que nous ferons. Je crois que le projet de loi met en place les mécanismes qui donneront à nos fonctionnaires l'assurance et la capacité voulues pour autoriser la venue d'immigrants au Canada comme le disait la députée.

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Monsieur le Président, je n'avais pas l'intention de prendre la parole aujourd'hui, mais, en écoutant d'autres députés signaler à la fois les vertus et les problèmes du projet de loi, j'ai estimé important de présenter, au nom de mes électeurs de Sydney—Victoria, les éléments du projet de loi que je considère comme positifs et ceux qui soulèvent des préoccupations.

Notre parti a déjà présenté son point de vue sur ce projet de loi aujourd'hui. Le porte-parole de notre parti pour l'immigration, le député de Winnipeg Centre, aura d'ailleurs un certain nombre de choses à dire quand ce projet de loi reviendra à la Chambre. Je sais qu'il a accompagné la ministre à l'occasion de son tout dernier voyage en Chine en raison des préoccupations de notre parti au sujet de certaines choses qui se sont produites.

C'est une question qui revêt une importance primordiale. Les députés qui ont pris la parole ont dit l'un après l'autre que notre pays est un pays d'immigrants. Je suppose que certains autochtones diraient plutôt que nous sommes un pays colonialiste. Cependant, j'estime qu'on peut dire que nous sommes un pays d'immigrants.

Tous les députés ont parlé de leurs propres origines. Les députés représentent des immigrants de toutes les régions du monde. Je suis moi-même d'origines italienne et écossaise. Mon grand-père paternel est arrivé au Canada à l'âge de 15 ans. Je regarde mon propre fils qui a 13 ans et je pense à mon grand-père qui avait 15 ans quand il est arrivé au Canada par bateau en provenance d'Italie, qui ne parlait pas la langue, qui était tout seul et qui n'avait que 25 cents en poche. Il a choisi le Canada pour faire sa vie. Quand je regarde autour de moi à la Chambre, je pense que c'est la même chose pour la plupart d'entre nous.

La politique en matière d'immigration est d'une très grande importance parce qu'elle définit non seulement qui peut entrer au Canada, mais encore comment notre pays croîtra. Elle trace la vision du Canada de l'avenir. Elle définit aussi qui nous ne laisserons pas entrer. Cela est aussi important que les critères relatifs à ceux que nous admettrons. C'est un reflet de nos obligations internationales.

Je félicite la ministre d'avoir examiné la loi et d'avoir présenté une nouvelle loi maintenant que près de 25 ans se sont écoulées depuis que la dernière loi a été adoptée à la Chambre, soit en 1976. Vu l'importance que revêt l'immigration, je remercie et félicite la ministre d'avoir présenter cette nouvelle mesure législative et d'avoir ouvert le débat sur l'immigration. C'est un dossier qui polarise les Canadiens depuis les deux ou trois dernières années.

La loi a été modifiée à plusieurs reprises. Bien qu'on en parlait, ce n'est qu'à partir de 1997, quand nous avons commencé à voir des navires remplis d'immigrants chinois s'échouer en Colombie-Britannique, que les Canadiens ont été polarisés par la question de l'immigration. Cette polarisation donne naissance à deux camps opposés.

Il y a ceux qui ne veulent plus qu'on laisse personne au pays. Il y a des groupes qui consentiraient à en laisser entrer mais à condition que la plupart d'entre eux d'origine européenne. Je sais bien qui sont ces groupes. Quand je me suis montré critique à leur égard, j'ai reçu de leur part un intéressant courrier. Ils m'ont mis sur leur site Web et ils ont produit des images assez intéressantes qui prouvent bien qu'ils sont à tout le moins des créatifs.

 

. 1820 + -

Nous avons ces groupes d'un côté. De l'autre côté, nous avons ceux que les détracteurs pourraient qualifier de coeurs tendres, qui estiment que nous devrions ouvrir nos portes à tout le monde. Naturellement, il y a un juste milieu. Il n'est pas facile à trouver, mais puisque le ministre a ouvert la porte, je pense que nous devons en parler.

Je ne crois pas que nous puissions parler de l'immigration sans tenir compte de certaines questions internationales étant donné la mondialisation croissante. Nous contribuons aussi bien aux bons qu'aux mauvais aspects de la communauté mondiale. Nous ne devrions pas être surpris, étant donné la superficie et la richesse de notre pays, que des milliers et des milliers de personnes à travers le monde désirent venir au Canada pour fuir les injustices.

N'oublions pas que nous vivons dans l'hémisphère nord. Nous consommons une grande partie de l'énergie mondiale. Nous contribuons en grande partie au gaspillage et à la pollution de l'atmosphère. De l'autre côté de l'hémisphère, des millions et des millions de personnes vivent dans une misère noire. Or, étant donné l'ère de la mondialisation et de l'information dans laquelle nous vivons, ces millions de gens sont au courant de la vie que nous avons.

La semaine dernière, en rentrant chez moi, j'ai eu dans l'avion une conversation très intéressante avec un de mes amis originaire du Cap-Breton qui a passé presque ces trente dernières années dans un village reculé de l'Himalaya, en Inde. Il m'a dit que, aujourd'hui, il n'est pas inusité de voir des antennes paraboliques sur le toit de quelques-unes des petites maisons situées dans cette région de l'Inde. Les habitants regardent comment les gens vivent dans le monde occidental, surtout en Amérique. Compte tenu de la pauvreté grandissante dans le tiers monde et de la richesse croissante dans l'hémisphère nord, nous ne saurions nous étonner que des millions de personnes désirent venir dans notre pays.

J'ai entendu le député de Mississauga dire que le Canada accueille sa juste part d'immigrants. Je crois que nous devons parler de notre juste part et de nos obligations. Si nous consommons une grande quantité de l'énergie mondiale et que nous contribuons grandement à accroître la pauvreté dans le monde, nous avons sûrement des obligations à assumer. C'est dans cette optique et dans celle de l'augmentation énorme de la population mondiale que nous devons examiner notre politique en matière d'immigration.

Encore une fois, soyons clairs. Il a fallu plusieurs milliers d'années à la race humaine pour atteindre un million d'habitants dans le monde entier. Au cours des 20 dernières années, la population mondiale a quadruplé ou quintuplé, de sorte que notre planète compte actuellement six ou sept milliards d'habitants. J'estime que c'est dans cette optique que nous devons examiner les aspects positifs du projet de loi et ceux qui risquent de nous préoccuper.

J'ai examiné quelques-uns des aspects positifs du projet de loi. Il crée des peines sévères contre les passeurs, soit des amendes allant jusqu'à 1 million de dollars et l'emprisonnement à vie. Je suis en faveur de cela. À mon avis, le commerce d'êtres humains est le crime le plus abject qu'on puisse imaginer. Il est tragique qu'on oblige des personnes sans défense, dont les besoins sont criants, à payer pour venir au Canada et qu'on fasse le trafic d'êtres humains, comme s'il s'agissait d'écharpes de soie. Il est judicieux de punir sévèrement ceux qui font passer clandestinement des immigrants au Canada.

Je pense qu'il est sensé, et je félicite à nouveau le gouvernement d'avoir pensé à augmenter le nombre d'agents de contrôle de l'immigration à l'étranger. La ministre n'a cessé de dire qu'elle comptait supprimer les échappatoires et faciliter la venue d'immigrants dont le Canada a besoin. Une partie du problème auquel nous avons été confrontés est le manque d'agents d'immigration.

Selon certaines personnes, les immigrants chinois de la province de Fujian auraient dû se présenter au bureau d'immigration et faire les démarches en bonne et due forme. En réalité, si nous pensons où se trouvent la province de Fujian en Chine et le bureau d'immigration et au fait que seulement un ou deux agents d'immigration travaillent là-bas, il aurait été impossible pour ces gens de suivre la procédure, s'ils sont des réfugiés, pour demander d'entrer au Canada.

 

. 1825 + -

Je suis heureux d'apprendre que le nombre d'agents d'immigration augmentera. Je crois que le ministère a besoin de cette augmentation et que c'est juste envers les fonctionnaires dont la charge de travail a été très lourde ces dernières années. Il est aussi sensé de mener des vérifications de sécurité à l'égard des grands criminels, car comme l'a fait remarquer le député néo-démocrate de Winnipeg—Transcona, ce qui constitue un crime dans certains pays ne constitue pas nécessairement un crime au Canada. Certaines personnes peuvent avoir été emprisonnées pour avoir défendu les droits de la personne dans leur pays et peuvent détenir un casier judiciaire. Je voudrais que la définition d'un crime ne vise pas ces personnes.

Nous félicitons le gouvernement pour certaines dispositions que renferme ce projet de loi. Il y en a d'autres dont nous prenons bonne note et que nous étudierons soigneusement, par exemple, la définition d'un crime. Nelson Mandela était un criminel en Afrique du Sud parce qu'il luttait contre l'apartheid.

J'ai eu la chance de rencontrer la vice-présidente désignée de Taïwan, qui a passé cinq ans en prison parce qu'elle contestait la loi martiale de ce pays dont elle assume aujourd'hui la vice-présidence. Sa peine d'emprisonnement a été commuée, passant de 12 à 5 ans, pour cause de maladie. Aurait-on refusé l'entrée au Canada de cette personne, du fait qu'elle avait un casier criminel?

J'ai des inquiétudes à d'autres égards. Je sais que nous aurons l'occasion de les examiner. Dans le communiqué de la ministre que j'ai lu, il était question d'étendre les politiques pour attirer l'élite, les cerveaux les plus brillants. J'ignore si ce critère aurait permis à mon grand-père de venir au Canada. Il n'était pas diplômé en informatique. Il n'arrivait pas avec de l'argent plein les poches. Il n'avait aucun appui financier.

L'hon. Elinor Caplan: C'était un as.

M. Peter Mancini: La ministre dit que c'était un as. Ma famille en conviendrait. Cependant, il n'avait pas de curriculum vitae ni de plan d'entreprise à son arrivée et il ne promettait pas de favoriser la croissance du Canada. Il l'a fait pourtant. Il a élaboré un plan d'entreprise une fois arrivé au Canada et, à diverses époques, il en avait un intéressant, mais je ne suis pas certain qu'il faisait partie de l'élite et qu'il était un des plus brillants cerveaux.

Je reconnais qu'on devrait améliorer le système d'immigration en refusant le parrainage d'individus qui ont été reconnus coupables de violence conjugale et qui ne s'acquittent pas de leur obligation de verser une pension alimentaire au conjoint ou à un enfant, mais on parle aussi de ceux qui vivent de l'aide sociale. La pauvreté ne peut certainement pas être un empêchement d'immigrer au Canada. On ne peut refuser à ceux qui, pour une raison ou une autre, sont démunis dans leur pays et doivent compter sur l'aide de l'État la possibilité de se bâtir une vie au Canada, comme tant de nos ancêtres l'ont fait.

Je sais que la ministre répondra à ces questions. Nous avons la possibilité d'exprimer nos réserves et d'en débattre et je suis très heureux de pouvoir le faire.

Le président suppléant (M. McClelland): Le député de Sydney—Victoria disposera encore d'environ dix minutes lorsque la Chambre reprendra l'étude de ce projet de loi.



MOTION D'AJOURNEMENT

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

L'IMMIGRATION

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, par pur hasard, la question que je soulève aujourd'hui se rapporte à la Loi sur l'immigration. Il s'agit d'une question que j'ai posée à la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration au sujet de la possibilité pour certains étudiants d'étudier au Canada, selon leur statut.

J'en profite pour préciser que j'ai bien apprécié le débat qui s'est déroulé jusqu'à maintenant. Je félicite la ministre des mesures très progressistes contenues dans cette nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui aborde certains thèmes généraux que les Canadiens sont certainement très satisfaits de voir apparaître dans une mesure législative.

 

. 1830 + -

Il y a certes des points saillants comme la sécurité de la société canadienne, la lutte contre l'exploitation indue du système, la réduction des coûts du système et la possibilité de favoriser la croissance économique en attirant des gens qualifiés et capables de combler des postes vacants, surtout dans le secteur de la haute technologie.

La réunion des familles est certainement une question qui demeure importante pour la société canadienne. On parle de plus en plus de l'intégrité du parrainage, comme je l'avais mentionné lors de mon premier discours à la Chambre, en 1994. Je suis donc très heureux de ce que la ministre a réussi à faire en présentant ce projet de loi.

Pour en venir à la question précise, il s'agissait de savoir si on pouvait préciser l'interprétation ou dissiper la confusion au sujet de la possibilité que les enfants qui se trouvent ici fréquentent l'école élémentaire ou l'école secondaire. Leurs études risquent de souffrir de leur statut en matière d'immigration. La Chambre reconnaîtra qu'il faut faire en sorte que nos enfants puissent fréquenter l'école.

La ministre a répondu et elle m'a donné quelques assurances. Peut-être pourrait-elle aussi confirmer autre chose.

Un résident permanent doit se trouver au Canada pendant au moins 730 jours de chacune des périodes de cinq ans après qu'il a été autorisé à entrer et à rester au Canada. Cela dit, le paragraphe 26(2) prévoit qu'un enfant mineur au Canada n'a pas besoin d'autorisation pour étudier aux niveaux primaire et secondaire.

La ministre pourrait-elle expliquer comment on établit la résidence permanente si, en fait, l'un des critères est le séjour au Canada pendant les cinq dernières années depuis l'obtention de la résidence permanente? Il y a peut-être là une raison de se demander si le statut de résident permanent a bien été maintenu. Qu'arrive-t-il à un enfant qui a commencé et a eu l'autorisation pour pouvoir fréquenter l'école, lorsqu'il y a ensuite un manquement ou une remise en question du statut de résident?

La question va probablement encore plus loin en ce qui concerne un enfant mineur d'un résident temporaire. Il y a des résidents temporaires qui se trouvent au Canada depuis un certain temps. Je me demande quelle est la position officielle au sujet des enfants mineurs qui peuvent fort bien se trouver dans cette situation.

J'espère que la ministre profitera de l'occasion pour nous éclairer.

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, l'éducation des enfants du Canada me tient beaucoup à coeur.

Même si l'éducation relève de la compétence provinciale, on a fait dire à l'actuelle Loi sur l'immigration que des enfants devaient avoir un permis de séjour pour étudiants avant de pouvoir fréquenter une école primaire ou secondaire publique. Des personnes et des conseils scolaires de tout le Canada ont fait dire au règlement existant qu'il leur fallait un permis de séjour pour étudiants.

Je crois fermement que les enfants ne doivent pas être privés du droit de s'instruire. Ils ne doivent pas être privés du droit de fréquenter une école primaire ou secondaire, qu'ils soient au Canada depuis dix ans ou depuis dix minutes. Je crois en outre que le règlement d'application de l'actuelle Loi sur l'immigration exige un permis de séjour pour étudiants des seules personnes qui veulent poursuivre des études postsecondaires ou professionnelles au Canada.

Le 6 avril, j'ai eu le plaisir et l'honneur de déposer la nouvelle Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, le projet de loi C-31. La nouvelle loi prévoit très clairement ceci, au paragraphe 26(2):

    Peut étudier sans autorisation au niveau préscolaire, au primaire ou au secondaire, l'enfant mineur qui est au Canada.

Il importe de savoir que de nombreuses personnes viennent au Canada à la faveur d'un visa d'étudiant expressément pour poursuivre des études habituellement universitaires ou postsecondaires, mais pour poursuivre aussi à l'occasion des études secondaires et, plus rarement, des études primaires. Les étrangers qui viennent ici pour étudier devront toujours obtenir un visa d'étudiant.

 

. 1835 + -

L'intention de la nouvelle loi est de clarifier une situation qui existe déjà, à mon sens, à savoir que la Loi sur l'immigration n'empêche aucun enfant déjà au Canada d'étudier. Nous croyons que les enfants qui sont au Canada ont le droit de fréquenter l'école et de s'instruire. C'est dans l'intérêt du Canada et dans l'intérêt des enfants eux-mêmes.

L'IMMIGRATION

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Monsieur le Président, lors de la période des questions du 8 février dernier, j'ai posé à la ministre une question sur l'immigration illégale. Les électeurs de ma circonscription ont de sérieuses préoccupations au sujet de la Loi sur l'immigration actuelle et s'interrogent sur son efficacité, tant lorsqu'il s'agit de l'accueil des réfugiés légitimes et des immigrants que de la prévention des abus contre notre système.

Trois incidents distincts survenus dans ma circonscription ou dans les environs ont servi à mettre en lumière les préoccupations des gens. À Windsor, Sarnia et Wallaceburg, plusieurs personnes ont été capturées par les policiers alors qu'elles tentaient d'entrer illégalement au Canada ou qu'elles s'y trouvaient déjà. Voir ainsi des gens tenter de se soustraire aux formalités en se livrant aux mains d'organisations criminelles chinoises était la preuve que notre système d'immigration était assailli.

Les électeurs de ma circonscription m'ont exhortée à faire part à la ministre de leur volonté de voir instaurer l'équité dans le système. Les gens ont besoin de savoir que notre système d'examen du statut de réfugié fonctionne aussi bien qu'il le devrait.

Actuellement, les gens qui utilisent de faux documents de voyage ou les détruisent en route vers le Canada constituent un véritable fléau. Une fois au Canada, ces gens ont certes le droit de présenter une demande de statut de réfugié, mais les agents d'immigration ont énormément de difficulté à les identifier avec certitude et à évaluer leurs antécédents judiciaires.

Craignant que Sarnia devienne un point de chute des immigrants illégaux qui tentent d'entrer aux États-Unis, beaucoup ont réclamé des améliorations à la loi pour empêcher les gens d'entrer en Amérique du Nord illégalement.

Étant moi-même fille d'immigrant, je sais que le Canada et les Canadiens peuvent être fiers de leur compassion et de leurs valeurs humanitaires. Cependant, nous ne devons et ne pouvons pas permettre que les individus prêts à faire fi de nos frontières abusent du Canada.

Nous ne devons pas devenir un refuge pour les immigrants illégaux. Il faut traiter de la manière la plus dure qui soit les organisations criminelles Snake Head de Chine et autres qui exploiteraient les pauvres. Elles ne sont pas là pour servir notre pays, mais pour l'exploiter. Des escrocs multimillionnaires puissants sont à l'origine de la situation critique et terrible dans laquelle se retrouvent les jeunes Chinois abandonnés dans ma circonscription; ils utilisent ces derniers pour parvenir à leurs fins. Je suis heureuse que la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration se soit rendue en Chine le mois dernier pour exprimer les opinions du Canada avec vigueur et conviction.

La mise à jour récente de la Loi sur l'immigration par la ministre constitue une étape dans la bonne direction. Nous disons ainsi aux gens du monde entier que nous les accueillerons volontiers, leur famille et eux, mais nous les prévenons qu'ils ne doivent pas essayer de manipuler le système et confondre notre compassion canadienne de toujours avec une approbation de la violation des règlements.

L'hon. Elinor Caplan (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Monsieur le Président, le Canada est conscient que certaines personnes tentent d'entrer clandestinement dans notre pays. Il y a des gens qui essaient d'entrer chez nous sans obtenir aucun statut, ce qui en fait des immigrants illégaux au Canada. Nous savons aussi qu'il existe un problème de criminalité organisée transnationale et que des individus essaient de faire entrer des gens clandestinement dans divers pays du monde entier.

Le Canada n'est pas le seul à faire face à ce problème. C'est un problème international qui appelle des solutions internationales. C'est l'une des raisons pour lesquelles les Nations Unies élaborent actuellement une convention sur la criminalité organisée transnationale. Le Canada a joué un rôle de chef de file dans l'élaboration de protocoles, notamment certains visant à mettre un terme à l'exploitation des femmes et des enfants.

S'il est vrai que certains demandeurs du statut de réfugié enfreignent la loi une fois qu'ils sont au Canada, le nombre de ceux qui s'engagent dans des activités criminelles représente en fait une très infime proportion de ceux qui viennent au Canada tous les ans pour demander notre protection.

J'ai récemment déposé un nouveau projet de loi sur l'immigration et la protection des réfugiés qui, selon moi et, je l'espère, de l'avis de la majorité des députés, permettra de freiner les criminels qui abusent de notre système d'immigration et de détermination du statut de réfugié. Nous voulons fermer nos portes à ceux qui, de façon détournée, abusent criminellement de notre système, et ouvrir davantage nos portes aux réfugiés authentiques qui ont besoin de notre protection et aux immigrants qui veulent venir chez nous pour contribuer à la prospérité et à la croissance de notre pays.

 

. 1840 + -

Je voudrais signaler une ou deux choses qui se trouvent dans le projet de loi. Je sais que je n'ai pas le temps de tout couvrir, mais je suis persuadée que ces éléments contribueront à dissiper les préoccupations de la députée.

Nous alourdissons les sanctions pour le trafic de personnes, en imposant notamment des amendes allant jusqu'à 1 million de dollars et des peines d'emprisonnement à vie pour les personnes inculpées de trafic de personnes. Nous mettons en place des dispositions plus sévères prévoyant notamment la saisie de véhicules, de bateaux, d'avions et d'autres biens utilisés pour organiser l'entrée illégale au Canada de personnes étrangères. Nous mettons également en place un mécanisme de dépistage des criminels et des dispositions relatives à la sécurité, lesquels s'appliquent dès le début du processus de détermination du statut de réfugié. Nous précisons en outre les motifs de détention pour mieux nous occuper des individus pratiquant le trafic de personnes.

Je dirais cependant à la députée et à la Chambre qu'il arrive parfois que d'authentiques réfugiés arrivent au Canada sans document d'identité, ou encore avec des documents falsifiés. Nous devons accepter de les entendre, car il se trouve souvent que ces gens ont dû fuir à la hâte, sans leurs papiers d'identité. Nous ne pouvons donc pas présumer que tous ceux qui arrivent sans papiers d'identité ne sont pas de vrais réfugiés.

Notre intention est d'accélérer le processus et de le rendre plus équitable. Nous serons en mesure d'expulser plus rapidement les personnes jugées inadmissibles. Le peuple canadien est bon et généreux, mais il ne saurait être question de nous laisser exploiter. Nous honorerons nos traditions humanitaires, mais nous tenons à ce que nos lois soient respectées et à ce que les gens soient traités avec équité.

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, en février, j'ai demandé au ministre des Affaires étrangères d'assurer à la Chambre que le Canada n'adhérera pas au système de défense anti-missiles nord-américain que les États-Unis d'Amérique mettent actuellement à l'essai. Depuis, ce projet américain a suscité un débat international qui dépasse la question de la participation canadienne et en est arrivé au point où la possibilité que les États-Unis mettent en place un tel système représente une menace pour la paix mondiale.

Certains politiciens américains ont évoqué un scénario de fin du monde faisant intervenir des attaques de missiles de la part d'États prétendument dévoyés comme la Corée du Nord, l'Iran, l'Irak ou la Libye. Cette hypothèse absurde néglige le fait qu'aucun de ces États ne possède d'armes nucléaires ni de missiles longue portée, que ces pays sont très pauvres et que leurs dirigeants ne veulent pas provoquer de représailles.

De plus, les spécialistes s'accordent pour dire que les attaques terroristes, les armes dissimulées dans des mallettes ou dans des camions posent un plus grand danger pour la sécurité nationale que les missiles balistiques, mais là n'est pas le problème. Il y a que cet alarmisme insensé a déclenché le débat le plus litigieux depuis longtemps en matière de sécurité et risque de saper des décennies de bon travail vers la conclusion d'accord sur la réduction des armements.

Le projet américain de système national de défense anti-missiles violerait le traité sur les missiles anti-missiles balistiques, car le traité interdit les systèmes anti-missiles nucléaires à grande échelle. Pour mettre un tel système en place, il faudrait que les États-Unis obtiennent l'approbation de la Russie afin de modifier le traité. Déjà, le président russe a déclaré publiquement qu'il se retirerait de tous les accords bilatéraux de limitation des armements si les États-Unis décidaient de mettre en place un système national de défense anti-missiles. Dans ce cas, les Américains ont dit qu'ils annuleraient tout simplement le traité sur les missiles anti-missiles balistiques et implanteraient leur système de toute façon.

La raison pour laquelle le traité interdit les systèmes de défense nationaux, c'est qu'ils auraient pour effet de pousser les pays ennemis à contrer les systèmes de défense proposés, déclenchant ainsi une course aux armements. La Russie et la Chine ont donc averti les autres pays que le déploiement de systèmes de défense composés de missiles balistiques entraînerait le déploiement d'un plus grand nombre d'ogives nucléaires. Pareil déploiement menacerait la conclusion d'un autre traité clé dans le cadre du contrôle des armes, à savoir le traité de non-prolifération. Le déploiement d'un système de défense composé de missiles enverrait donc un mauvais signal aux États ne possédant pas l'arme nucléaire, et le traité de non-prolifération dont le Canada s'est traditionnellement fait le défenseur s'effriterait.

Quelle a été la réaction du Canada jusqu'à maintenant? Il semble que des pressions s'exercent sur le ministre de la Défense puisqu'il craint que les États-Unis s'en remettent à une mentalité d'assiégé. Cependant, les États-Unis ont déjà fait connaître leur intention d'agir unilatéralement, s'isolant du même coup du reste du monde.

 

. 1845 + -

Il convient également de mentionner que même si les États-Unis n'ont pas sollicité officiellement la participation du Canada, certains croient que celui-ci doit le faire à cause de NORAD, le commandement de la Défense aérienne du continent nord-américain. Le fait est que Washington ira de l'avant avec ou sans l'appui du Canada, mais qu'il aimerait pouvoir compter sur la bonne réputation internationale du Canada pour obtenir l'appui d'autres pays.

En guise de conclusion, je dirai qu'il me semble qu'il faut donner l'assurance aux Canadiens que le Canada n'appuiera jamais le déploiement d'un système de défense par missiles. Il importe de dire pourquoi nous devrions faire valoir les raisons pour lesquelles il ne devrait pas y avoir pareils systèmes du tout plutôt que de débattre la question de savoir si le Canada devrait participer au système.

Le ministre des Affaires étrangères a contesté de façon assez ferme les raisons militant en faveur de la participation du Canada. Je l'appuie et je l'exhorte à utiliser tous les moyens à sa disposition pour empêcher le Canada d'adhérer à ce plan et décourager les États-Unis d'aller de l'avant. Le secrétaire parlementaire peut-il, ce soir, donner cette assurance à la Chambre?

[Français]

M. Denis Paradis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le point le plus important à préciser au sujet du Programme de défense nationale contre les missiles est qu'il s'agit là d'un programme américain que les États-Unis n'ont pas encore décidé de mettre en oeuvre et auquel le gouvernement américain n'a pas invité officiellement le Canada à participer.

Si le gouvernement canadien est amené à prendre une décision quant à ce programme, ce sera à la lumière d'un grand nombre de facteurs. Avant d'aborder certains de ces facteurs, il serait peut-être utile d'expliquer en quoi consiste le programme NMD, le National Missile System.

Depuis la fin de la guerre des étoiles, au milieu des années 1980, les États-Unis continuent de travailler à un système de défense contre les missiles balistiques. Le NMD serait un système terrestre, et non spatial, doté de capteurs situés dans l'espace servant à détecter et à suivre les missiles lancés. Le système lancerait du sol un projectile non armé, un «véhicule destructeur», qui intercepterait un missile lancé et le détruirait par simple impact. Actuellement, il est prévu que le NMD ne puisse répondre qu'à un nombre limité d'attaques par missiles et ogives.

Les partisans du NMD aux États-Unis font valoir que la menace naissante que constitue la prolifération de la technologie relative aux missiles et aux armes de destruction massive est un facteur nouveau, que le monde bipolaire est aujourd'hui chose du passé et que la sécurité des États-Unis est menacée.

Un État réprouvé doté de missiles balistiques intercontinentaux pourrait limiter les options des États-Unis en matière de politique étrangère en faisant chanter, paraît-il, les administrations américaines à venir. Les appréciations de «renseignement» indiquent que les États en question pourraient disposer de cette capacité de frappe d'ici les cinq à dix prochaines années.

Le 23 juillet 1999, le président Clinton a signé la «National Missile Defence Act», qui stipule qu'un système NMD sera déployé lorsque la technologie le permettra. La décision de déployer ce système n'a pas encore été prise, et peut-être que l'administration américaine en place, ou même toute autre administration à venir, ne la prendra pas. En faisant de la «National Missile Defence Act» une loi, le président Clinton a également souligné qu'une décision finale au sujet du déploiement d'un système de défense nationale contre les missiles ne pourrait être prise avant que ne soit réalisée une étude sur l'état de préparation du déploiement.

La date prévue de l'étude a été fixée à juillet. Bien qu'une décision quant au déploiement pourrait être prise dès août 2000, il faudrait compter quelques années avant que le système ne puisse être effectivement mis en place.

Je conclus en disant que le président des États-Unis n'a pas encore pris la décision de déployer ce système de défense nationale contre les missiles. Le Canada n'a pas été invité à participer et le gouvernement canadien n'a donc pas décidé s'il y participerait.

Le président suppléant (M. McClelland): La motion portant que la Chambre s'ajourne maintenant est réputée adoptée. La Chambre demeure donc ajournée jusqu'à demain, à 10 heures, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 18 h 49.)