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SECU Rapport du Comité

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CHAPITRE 2 : LE PARTAGE DES COMPÉTENCES DANS LES DOMAINES CORRECTIONNEL ET DE LA SANTÉ

Tout au long de l’examen du Comité, des témoins ont mis au jour des défis propres au Canada en matière de prestation de services de santé mentale et de toxicomanie en milieu correctionnel. Ces défis découlent du partage des compétences entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux dans les domaines correctionnels et de la santé. Le présent chapitre traite brièvement de la séparation des pouvoirs dans ces domaines.

2.1       LE DOMAINE CORRECTIONNEL

Au Canada, en vertu de la Loi constitutionnelle de 1867, la responsabilité dans le domaine correctionnel est partagée entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux ou territoriaux en fonction de la peine imposée par le tribunal. Les délinquants adultes qui encourent une peine d’emprisonnement d’au moins deux ans relèvent du gouvernement fédéral; ceux qui purgent une peine d’emprisonnement de moins de deux ans relèvent des gouvernements provinciaux ou territoriaux[8]

Le SCC est l’organisme fédéral chargé d’administrer les peines d’emprisonnement de deux ans et plus. Cet organisme relève du ministère de la Sécurité publique; il est régi par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC)[9]. Il est chargé de la gestion des établissements correctionnels fédéraux, de la prise en charge et de la garde des délinquants, de la préparation à leur réintégration progressive dans la collectivité et de la supervision de ceux qui bénéficient d’une libération sous condition. Le SCC est ainsi responsable du délinquant à compter de l’imposition de sa sentence jusqu’au terme de celle-ci. De plus, le SCC est aussi responsable de la surveillance postpénale des délinquants visés par une ordonnance de surveillance de longue durée.

Par contre, tous les délinquants condamnés à l’emprisonnement en Norvège, en Angleterre et au pays de Galles relèvent d’une administration centrale. Cette distinction est importante puisque l’étude du Comité n’a porté que sur les délinquants sous la responsabilité du gouvernement fédéral. Certains établissements visités en Norvège et en Angleterre abritaient des délinquants condamnés à de très courtes peines d’emprisonnement, dans certains cas à moins d’un mois. Lors de son séjour, le Comité a appris que les très courtes peines posent des défis particuliers aux administrations correctionnelles de ces pays en ce qui a trait au traitement des troubles mentaux et de toxicomanie et au suivi des délinquants dans la collectivité. En Angleterre, par exemple, l’administration correctionnelle n’a pas l’autorité d’imposer des conditions et de surveiller les adultes condamnés à des peines de moins d’un an d’emprisonnement lorsqu’ils bénéficient d’une libération avant la fin de leur peine.

Au Canada, seuls les détenus sous responsabilité fédérale libérés à l’expiration de leur peine d’emprisonnement ne sont pas soumis à une surveillance dans la collectivité. La très grande majorité des délinquants sont libérés progressivement dans la collectivité sous la surveillance du SCC. Des recherches ont établi que cette approche constitue le moyen le plus sûr de contrôler le risque de récidive criminelle et d’assurer ainsi la protection du public.

2.2       LE DOMAINE DE LA SANTÉ

La Loi constitutionnelle de 1867 prévoit également le partage des compétences dans le domaine de la santé entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux. Selon la structure du système de soins de santé canadien, les provinces et les territoires ont les responsabilités les plus importantes dans la prestation de ces services. Les provinces et territoires sont chargés de légiférer en matière de santé mentale et de voir à l’établissement, l’entretien et l’administration des hôpitaux psychiatriques. En conséquence, chaque province et territoire possède sa propre loi sur la santé mentale[10].

Le gouvernement fédéral est chargé d’aider au financement des services de soins de santé provinciaux et territoriaux, par l’entremise de transferts monétaires, d’administrer les normes applicables au système de santé en vertu de la Loi canadienne sur la santé (LCS), et d’offrir des services de santé à des groupes spécifiques de la population canadienne[11], dont les délinquants qui purgent une peine d’emprisonnement dans un pénitencier (au sens de la Partie I de la LSCMLC)[12].

Les détenus sous responsabilité fédérale sont ainsi exclus en vertu de l’article 2 de la LCS. Par conséquent, leurs soins médicaux ne sont ni couverts par Santé Canada, ni par le système de soins de santé de la province où ils se trouvent. Aux termes de la LSCMLC, la prestation des soins de santé dispensés aux délinquants des établissements fédéraux relève du SCC. Pour assurer la continuité des soins dans la collectivité, le SCC doit également, en vertu de ses politiques internes, veiller à ce que le délinquant possède une carte d’assurance-maladie au moment de sa libération ainsi qu’une provision adéquate de médicaments liés à tout problème physique et/ou troubles de santé mentale[13].

La nature de l’obligation du SCC en ce qui a trait aux soins de santé en établissement découle des articles 85 à 89 de la LSCMLC selon lesquels tout détenu doit bénéficier de soins de santé essentiels tels les soins médicaux et dentaires ainsi que les soins actifs et prolongés en santé mentale. Le SCC est également tenu de donner aux détenus un accès raisonnable à des soins de santé non essentiels pouvant faciliter leur réadaptation et leur réinsertion sociale. La prestation des soins de services du SCC doit être dispensée par des professionnels agréés et se conformer aux normes reconnues par la profession.

La responsabilité du SCC s’exerce également dans le cadre de programmes et de services axés sur les facteurs qui auraient pu inciter des délinquants à commettre l’acte criminel pour lesquels ils ont été condamnés. En vertu des articles 3, 5, et 76 de la LSCMLC, il incombe au SCC de mettre sur pied et d’offrir des programmes correctionnels pouvant répondre aux besoins des délinquants, les aider à modifier leur comportement et favoriser leur réadaptation.

Le régime du système de soins de santé présente d’importants défis pour le SCC dans l’administration et la prestation de ses services en établissement et dans la collectivité. Il faut noter que, en vertu de la LSCMLC, l’administration de tout traitement est subordonnée au consentement volontaire et éclairé du détenu qui peut le refuser ou y mettre fin. Lorsque le délinquant est incapable de donner un consentement éclairé, ce sont les lois provinciales sur la santé mentale qui s’appliquent.



[8]           Les services correctionnels provinciaux et territoriaux sont aussi responsables des accusés en détention provisoire et des délinquants qui sont condamnés à purger une peine dans la collectivité.

[9]           La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (LSCMLC), proclamée le 1er novembre 1992, a remplacé la Loi sur les pénitenciers et la Loi sur la libération conditionnelle de détenus. La LSCMLC dicte les responsabilités respectives des trois organismes qui composent le système correctionnel fédéral, à savoir le Service correctionnel du Canada (SCC), la Commission nationale des libérations conditionnelles (CNLC) et le Bureau de l’enquêteur correctionnel (BEC), de même que les principes qui doivent guider leurs actions, et prévoit les définitions et les règles d’application des différentes formes de libération sous condition

[10]           Voir John E. Gray, Margaret A. Shone et Peter F. Liddle, Canadian Mental Health Law and Policy, 2e éd., LexisNexis, Canada Inc. 2008 à la p. 19: Colombie-Britannique : Mental Health Act, R.S.B.C 1996, ch. 288; Alberta : Mental Health Act, R.S.A. 2000, ch. M-13; Saskatchewan : Mental Health Services Act, S.S. 1984, 1985 et 1986, ch. M-13.1; Manitoba : Loi sur la santé mentale, C.P.L.M. ch. M110; Ontario : Loi sur la santé mentale, L.R.O. 1990, ch. M.7; Québec : Loi sur la protection des personnes dont l’état mental présente un danger pour elles-mêmes ou pour autrui, L.R.Q. ch. P-38.001; Nouveau-Brunswick : Loi sur la santé mentale, L.R.S.N.-B. 1973, ch. M-10; Nouvelle-écosse : Involuntary Psychiatric Treatment Act, S.N.S. 2005, ch. 42; Île-du-Prince-édouard : Mental Health Act, R.S.P.E.I. 1988, ch. M-6.1; Terre-Neuve-et-Labrador : Mental Health Care and Treatment Act, S.N.L. 2006, ch. M-9.1; Yukon : Loi sur la santé mentale, L.R.Y. 2002, ch. 150; Territoires du Nord-Ouest : Loi sur la santé mentale, L.R.T.N.-O. 1988, ch. M-10; Nunavut : Loi sur la santé mentale (Nunavut), L.R.T.N.-O. 1988, ch. M-10.

[11]           Le gouvernement fédéral a la responsabilité exclusive de six autres groupes de Canadiens, à savoir les Premières nations et les Inuits, les Forces canadiennes et les anciens combattants, la Gendarmerie royale du Canada, les immigrants et les réfugiés, et les fonctionnaires fédéraux.

[12]           Un « pénitencier » est défini en vertu de LSCMLC comme un « établissement — bâtiment et terrains — administré à titre permanent ou temporaire par le Service pour la prise en charge et la garde des détenus ainsi que tout autre lieu déclaré tel aux termes de l’article 7 » de ladite Loi.

[13]           Service correctionnel du Canada, Directive du commissaire no 712-4, Processus de mise en liberté.