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JUST Rapport du Comité

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EXAMEN PARLEMENTAIRE DE LA PARTIE XVII DU CODE CRIMINEL

1. INTRODUCTION

L’ordre de renvoi du 8 novembre 2012 de la Chambre des communes prévoyait que « le Comité permanent de la justice et des droits de la personne soit le comité désigné pour l'examen prévu par l'article 533.1 du Code criminel ». Lors de la session parlementaire subséquente, un ordre de renvoi au même effet a été adopté par la Chambre des communes le 16 octobre 2013.

L’article 533.1, ajouté au Code criminel (le Code) par suite de l’adoption du projet de loi C-13, Loi modifiant le Code criminel (procédure pénale, langue de l’accusé, détermination de la peine et autres modifications) en 2008[1], se lit comme suit :

(1) Dans les trois ans suivant l’entrée en vigueur du présent article, un examen approfondi des dispositions et de l’application de la présente partie est entrepris par le comité soit du Sénat, soit de la Chambre des communes, soit mixte, que le Parlement ou la chambre en question, selon le cas, désigne ou constitue à cette fin.
(2) Dans l’année qui suit le début de son examen ou dans le délai supérieur que le Parlement ou la chambre en question, selon le cas, lui accorde, le comité visé au paragraphe (1) remet son rapport au Parlement, accompagné des modifications qu’il recommande.

Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes (le Comité) a entrepris son étude de la partie XVII du Code (langue de l’accusé) le 27 mai 2013. Il a tenu cinq réunions sur le sujet et a entendu des témoins du ministère de la Justice du Canada, du Bureau du directeur des poursuites pénales, de la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law (FAJEF), du Programme d'appui aux droits linguistiques, ainsi que de Gérard Lévesque et Steven Slimovitch, avocats, de Geneviève Lévesque, étudiante en droit, et du commissaire aux langues officielles du Canada.

Le 5 novembre 2013, le Comité a envoyé des lettres à tous les ministres de la Justice des provinces et territoires afin d’obtenir des renseignements sur leur expérience dans l’application des dispositions de la partie XVII, incluant les pratiques exemplaires et problèmes soulevés. Ils ont également été invités à témoigner. Le Comité a reçu sept lettres, lesquelles, selon leur auteur, tiennent lieu de leur témoignage. Ces lettres se trouvent en annexe au présent rapport.

Malgré quelques enjeux et divergences selon les régions du pays, ces lettres indiquent qu’en général, l’application des dispositions de la partie XVII du Code se passe sans difficulté majeure. Toutefois, il y a toujours place à amélioration.

Le présent rapport brosse ainsi un tableau des principaux enjeux soulevés par les témoins entendus. Il ne s’agit pas d’un examen exhaustif de toutes les questions relatives aux droits linguistiques en matière criminelle. C’est pourquoi le Comité recommande au ministère de la Justice du Canada de continuer de collaborer avec les principaux acteurs dans le domaine et qu’un comité parlementaire assure un suivi en entreprenant un examen des dispositions et de l’application de la partie XVII du Code dans cinq ans.

1.1 PARTAGE DES COMPÉTENCES

D’entrée de jeu, il faut noter que l'action du gouvernement fédéral dans la mise en œuvre des dispositions linguistiques du Code est limitée. En effet, bien que le gouvernement fédéral ait une compétence exclusive à l'égard des modifications apportées au Code, se sont principalement les provinces qui ont compétence pour les poursuites en matière criminelle et l’administration de la justice.

Le pouvoir de légiférer en matière de langues officielles est un pouvoir accessoire à l’exercice de la compétence législative du Parlement ou des législatures provinciales dans les domaines qui leur sont assignés[2]. C’est ainsi que le Parlement, ayant compétence en droit criminel, a adopté la partie XVII (langue de l’accusé) dans le Code. Les provinces et les territoires jouent toutefois un rôle de premier plan à l’égard de la protection des minorités linguistiques dans les domaines qui relèvent de leur compétence.

Le témoignage de Michel Francoeur, avocat général et directeur, Direction des langues officielles du ministère de la Justice du Canada, fournit plus de précisions sur le rôle des provinces et territoires:

Les provinces et les territoires sont responsables de la constitution et de l'organisation des tribunaux de juridiction criminelle. Cela signifie qu'en vertu des dispositions faisant l'objet de la présente étude, les provinces doivent s'assurer qu'elles ont les ressources institutionnelles et humaines nécessaires au sein de leur système de justice afin de permettre aux accusés de subir leur procès dans la langue officielle de leur choix[3].

Le ministère de la Justice du Canada offre des espaces d'échange et de collaboration au sein du Comité consultatif sur l'accès à la justice dans les deux langues officielles du Groupe de travail fédéral-provincial-territorial. De plus, il appuie directement les provinces et territoires par l'entremise de deux initiatives : l'Initiative d'appui à l'accès à la justice dans les deux langues officielles et le Fonds pour l'application de la Loi sur les contraventions.

Ces initiatives servent, entre autres, à appuyer des mesures telles que l'embauche de personnel judiciaire ou extrajudiciaire bilingue, la formation linguistique, l'affichage bilingue et la traduction de documents. Des exemples concrets de programmes seront présentés dans la section 2.2.

1.2 HISTORIQUE DE LA PARTIE XVII

Les dispositions de la partie XVII, adoptées en 1978, sont entrées en vigueur graduellement province par province et, enfin, dans tout le Canada en janvier 1990[4]. La Cour suprême du Canada, dans l’affaire Beaulac, a déclaré que l’accès égal aux tribunaux désignés dans la langue officielle de l’accusé est un droit substantiel et non un droit procédural auquel on peut déroger[5]. Il incombe au Parlement de définir l’étendue et la portée des droits linguistiques à la partie XVII, qui sont distincts du droit à une défense pleine et entière garantie à l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte).

En vertu des dispositions de la partie XVII, sur demande de l’accusé, un juge ordonnera que l’accusé subisse son enquête préliminaire et son procès devant un juge seul ou un juge et un jury qui parlent la langue officielle du Canada qui est celle de l’accusé. Si l’accusé ne parle ni l’anglais ni le français, un juge ordonnera que l’accusé subisse son enquête préliminaire et son procès devant un juge seul ou un juge et un jury qui parlent la langue officielle du Canada qui permettra à l’accusé de témoigner le plus facilement. Par ailleurs, le tribunal a l’obligation de fournir des services d’interprétation à l’accusé, à son avocat et aux témoins[6].

Avant la présentation du projet de loi C-13, des études réalisées par le Commissariat aux langues officielles[7] et une enquête menée par le ministère fédéral de la Justice[8] ont identifié des obstacles à un accès complet et égal à l’appareil de justice pénale dans la langue officielle du choix de l’accusé. Les modifications proposées dans le cadre du projet de loi C-13 avaient comme objectif de contribuer à réduire ces obstacles et les problèmes d’interprétation identifiés.

Le projet de loi C-13 a ainsi apporté diverses modifications au Code, dont certaines concernaient les dispositions sur la langue de l’accusé. Il prévoyait notamment qu’un procès bilingue serait justifié s’il s’agit de coaccusés qui comprennent différentes langues officielles. Le 29 janvier 2008, le Sénat a adopté le projet de loi C-13 avec, notamment, un amendement qui dispose que, dans les trois ans suivant l’entrée en vigueur, un examen parlementaire des dispositions de la partie XVII du Code devra être effectué. C’est cet examen qu’a entrepris le Comité.

Le Sénat désirait également modifier le projet de loi afin que le juge à la comparution demeure responsable d’aviser personnellement l’accusé de son droit à un procès dans la langue officielle de son choix. Cet amendement n’a toutefois pas été adopté. Le projet de loi C-13 a reçu la sanction royale le 29 mai 2008. Les dispositions sur la partie XVII sont entrées en vigueur le 1er octobre 2008.

2. ENJEUX SOULEVÉS

2.1 OBLIGATION D’AVISER L’ACCUSÉ DE SON DROIT (PAR. 530(3) DU CODE)

Auparavant, le juge devait aviser l’accusé de son droit de subir un procès dans la langue officielle de son choix uniquement s’il n’était pas représenté par un avocat. Le projet de loi C-13 a supprimé cette dernière condition. Ainsi, le juge doit désormais s’assurer que l’accusé soit avisé de son droit dans tous les cas. Toutefois, il n’a pas l’obligation d’aviser personnellement l’accusé; il doit veiller à ce qu’il ait été avisé de son droit — par exemple, par son avocat.

Comme pratique exemplaire, le Yukon exige que les juges, lors de la première comparution, récitent un texte énonçant ce droit. L’Ontario souligne toutefois qu’une certaine flexibilité dans la manière d’informer l’accusé est nécessaire. Ainsi, la façon d’appliquer le paragraphe 530(3) varie d’une région à l’autre dans cette province. Parfois, c’est le juge ou l’avocat de la défense qui avise l’accusé; dans d’autres cas, un avis préimprimé est distribué à l’avance.

2.1.1 L’ABSENCE D’AVIS

Le Comité a entendu qu’une telle flexibilité dans la façon d’informer les accusés est souhaitable dans la pratique. C’est plutôt le défaut d’aviser l’accusé qui est préoccupant. Dans certains cas, le paragraphe 530(3) passerait effectivement « entre les mailles du filet » et l’avis ne serait tout simplement pas donné[9]. Comme le notait le sous-procureur général adjoint de l’Ontario, James Cornish, dans sa lettre au Comité : « Il semble toutefois que ce degré de conformité au paragraphe 530(3) ne soit pas le même partout en Ontario. (…) [I]l y a encore du travail à faire de ce côté[10] ». Selon Steven Slimovitch, avocat en droit criminel :

J'ai vu un tribunal où l'on remettait un formulaire préimprimé à la personne mise en accusation — je devrais dire deux tribunaux en fait. Ces exceptions mises à part, je n'ai jamais entendu un juge dire à une personne comparaissant devant lui, qu'elle soit représentée ou non, qu'elle a droit à un procès en anglais en vertu de l'article 530[11].

L’absence d’ « offre active » avait également été identifiée en 2012 par le Comité consultatif de la magistrature et du barreau sur les services en français en Ontario[12] et a été renforcée par les témoignages devant le Comité. Plusieurs raisons expliquant l’absence d’avis ont été avancées par les témoins, notamment le fait que certains juges ne sont pas informés ou formés à cet égard[13].

De plus, selon Allan Damer, président de la FAJEF : « Habituellement, les juges se basent sur le nom de la personne [accusée] (…) On ne peut pas tenir pour acquis qu'une personne portant le nom de Boivin est francophone. Pourquoi le juge ne ferait-il pas l'offre active à M. Johnson, par exemple? Toutes les personnes doivent pouvoir exercer leurs droits[14] », et ce, peu importe son nom de famille ou sa connaissance de l’autre langue officielle.

Il faut premièrement savoir que l’expression « la langue officielle du Canada qui est celle de l’accusé », utilisée à l’article 530 du Code, a été interprétée de façon large par la Cour suprême dans l’affaire Beaulac. Afin de déterminer la langue officielle de l’accusé, il faut éviter, selon la Cour, d’entreprendre un examen de ses préférences linguistiques personnelles ou de son identité culturelle dominante[15]. Il pourra, par exemple, affirmer que le français est sa langue, indépendamment de sa capacité de parler l’anglais, s’il possède une connaissance suffisante du français pour donner des directives en français à son avocat[16]. « Les accusés pourront donc choisir la langue officielle dans laquelle ils préfèrent subir leur procès, et ce, peu importe leur ‘langue maternelle’[17]».

Deuxièmement, la Cour a, dans la même cause, clairement décidé que l'aptitude d'un accusé à s'exprimer dans l'autre langue officielle n'était aucunement pertinente dans la détermination des droits de l’accusé en vertu de la partie XVII du Code[18].

2.1.2 CONSÉQUENCES D’UNE VIOLATION

Le défaut d’aviser l’accusé de son droit de subir son procès dans la langue officielle de son choix n’est pas nouveau[19]. La jurisprudence, rendue avant les modifications de 2008, n’est toutefois pas claire sur la question des conséquences juridiques d’une telle violation[20]. En effet, la Cour suprême de la Nouvelle-Écosse a statué, en 1999, qu’une violation du paragraphe 530(3) portait atteinte aux droits garantis aux articles 15, 16 et 19 de la Charte et entraînait, par conséquent, le rejet du verdict de culpabilité[21]. Néanmoins, un peu moins d’un mois après cette décision, la Cour supérieure de l’Ontario arrivait à une conclusion contraire[22].

En 2004, la Cour d’appel de la Nouvelle-Écosse, dans R. v. MacKenzie, était d’avis que l’absence d’avis en l’espèce ne constituait pas une violation d’un droit constitutionnel et que le remède approprié était d’ordonner un nouveau procès et non le retrait des accusations[23]. Selon Johane Tremblay, directrice et avocate générale au sein du Commissariat aux langues officielles, l’ordonnance d’un nouveau procès est bel et bien le remède habituel en ces cas[24].

2.1.3 PISTES DE SOLUTION

Plusieurs témoins ont évoqué des initiatives pour faciliter le respect du paragraphe 530(3). Par exemple, à la Cour provinciale du Manitoba, on a intégré à la procédure une liste de contrôle qui sert d’aide-mémoire aux juges qui doivent s’assurer que l’accusé soit avisé de ses droits. Les guides de politique de certains services des poursuites pénales, comme celui de l’Ontario et du Nouveau-Brunswick de même que celui du service fédéral, contiennent des dispositions exigeant des procureurs qu’ils veillent à ce que l’accusé soit informé de ses droits linguistiques[25].

Des modifications ont aussi été apportées aux codes de déontologie des avocats de l'Ontario et du Nouveau-Brunswick comme le soulignait Rénald Rémillard, directeur général de la FAJEF : « il est aussi important que l'avocat informe son client qu'il a ou qu'il n'a pas les compétences linguistiques requises pour le représenter dans un procès qui se tiendra en français ou en anglais[26]

Considérant la situation d’autorité du juge et de la position de vulnérabilité des personnes accusées devant un tribunal de juridiction criminelle, et malgré toutes les autres pistes de solution fort louables, certains témoins étaient d’avis que le juge devrait avoir l’obligation légale d’aviser personnellement les accusés de leur droit de subir un procès dans leur langue officielle[27]. Le Comité croit toutefois, comme l’a souligné d’ailleurs le sous-procureur général adjoint de l’Ontario, qu’une flexibilité dans la manière d’informer l’accusé demeure nécessaire.

Par ailleurs, certains membres du Comité ont noté une différence dans la formulation des versions française et anglaise du paragraphe 530(3). En effet, pour qualifier l’obligation faite au juge, cette dernière utilise les termes directifs « shall ensure that they are advised of their right », tandis que la version française utilise le verbe « veiller » seul, soit : « veille à ce que l’accusé soit avisé ».

2.2 ACTEURS JUDICIAIRES PARLANT LA LANGUE DE L’ACCUSÉ (ART. 530.1 DU CODE)

Afin de s’assurer que la partie XVII du Code puisse être mise en œuvre adéquatement, les provinces doivent posséder les ressources humaines bilingues afin que le système judiciaire permette à un accusé de se faire entendre, selon son choix, dans l’une ou l’autre des langues officielles.

2.2.1 JUGES

En vertu de la partie XVII du Code, le juge doit actuellement veiller à ce que l’accusé soit informé de son droit de subir son procès dans la langue officielle de son choix. Il découle également de cette partie que le juge qui préside le procès doit être en mesure de siéger dans la langue officielle demandée.

Lors de son témoignage devant le Comité sur le Budget supplémentaire des dépenses (C) 2013–2014, le ministre de la Justice, l’honorable Peter MacKay, a mentionné que « l’obstacle le plus important est de trouver suffisamment de juges francophones en mesure de mener en français des procès, civils et criminels parfois très complexes[28]». Le ministre de la Justice a ajouté qu’un programme de formation linguistique est offert aux juges fédéraux ainsi qu’à ceux des cours provinciales :

Nous déployons des efforts auprès d'eux [juges fédéraux] et nous leur donnons de la formation, qui est aussi proposée aux juges qui ne sont pas les nôtres. Parmi les juges nommés par le fédéral, on compte amplement de juges bilingues, en particulier parmi ceux nommés à la Cour fédérale. À cet égard, je suis d'accord avec les fonctionnaires de mon ministère. Je parle des tribunaux provinciaux, d'où provient la plus grande partie de la jurisprudence en matière de droit criminel. C'est là que le bât blesse. Nous avons lancé un programme de formation linguistique destiné aux juges des cours provinciales, notamment ceux en dehors du Québec et du Nouveau-Brunswick[29].

Robert Doyle, avocat-conseil et chef du Secrétariat de la haute direction du Service des poursuites pénales du Canada, a exprimé l’opinion qu’il y a suffisamment de juges bilingues au Canada dans chaque province et dans les cours d’appel[30]. Toutefois, les ressources ne sont pas toujours disponibles et ceci devient un problème d’appariement. Malheureusement, aucune solution n’a encore été trouvée pour y remédier[31].

Toutes les provinces ont donc, à tous les paliers de tribunal, des juges qui parlent la langue de la minorité. C'est le cas de toutes les provinces sauf une, laquelle a pris des arrangements. Légalement, on est capable d'assurer partout la présence d'un procureur francophone. Toutes les provinces ont cette capacité, sauf l'Île-du-Prince-Édouard, qui a des arrangements avec le Nouveau-Brunswick et notre service pour que des procureurs bilingues lui soient fournis si une telle demande est faite[32].

D’autres témoins ont plutôt parlé d’un problème de pénurie de juges bilingues. Allan Damer, président de la FAJEF, a expliqué au Comité que ce problème peut provenir du fait que certains accusés choisiront de procéder dans la langue qui leur permettra d’avoir une date de procès plus rapidement[33]. Dans ces circonstances, la langue dans laquelle l’accusé désire procéder n’est plus un choix personnel. Ce choix dépend plutôt de la capacité du système judiciaire de fixer une date de procès rapidement dans la langue officielle majoritaire. Le Comité a entendu que la vidéoconférence peut être une solution afin de remédier à la pénurie de personnel judiciaire francophone, mais que ce n’est pas toujours efficace, car il arrive que des problèmes techniques surviennent[34].

Pour sa part, Rénald Rémillard, directeur général de la FAJEF, a mentionné au Comité qu’il est d’avis que le problème de pénurie de personnel judiciaire sera moins sérieux au fil des années :

La capacité bilingue des procureurs et des gens qui vont travailler dans le domaine de l'aide juridique est en train d'augmenter, ce qui est le résultat de l'immersion. De plus en plus de membres anglophones d'associations de juristes ont le français comme langue seconde. C'est certainement le cas dans les provinces de l'Ouest, de même qu'en Ontario et en Nouvelle-Écosse. À mon avis, la capacité bilingue s'accroît. La pénurie de gens bilingues risque donc d'être un moins grand problème à l'avenir, surtout grâce aux formations actuellement offertes partout au Canada. C'est un moyen d'accroître la capacité bilingue du système. Il y a beaucoup moins de contraintes à cet égard qu'il y a 5, 10 ou 15 ans[35].

De plus, le Commissariat aux langues officielles a publié une étude en 2013 sur l’exercice par les Canadiens de leurs droits linguistiques devant les tribunaux du Canada[36]. Cette étude fut réalisée avec la participation du commissaire aux services en français de l’Ontario et du commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick et portait sur la capacité bilingue de la magistrature des cours supérieures et des cours d’appel de six provinces : l’Alberta, le Manitoba, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse, l’Ontario et le Québec.

L’étude portait sur le processus de nomination et la formation linguistique donnée aux juges des cours supérieures. Selon le commissaire, l’accès à un système de justice qui offre la possibilité de choisir d’être entendu dans l’une ou l’autre des langues officielles découle d’un principe plus important encore que la disponibilité des ressources. La capacité institutionnelle est au cœur de la question, et c’est pourquoi le commissaire aux langues officielles demande dans son rapport « que le ministre de la Justice du Canada nomme un nombre approprié de juges bilingues ayant les compétences linguistiques nécessaires pour présider des instances dans la langue officielle de la minorité[37]. »

Le commissaire a recommandé qu’un nombre suffisant de juges bilingues soient nommés dans chaque province. Il a également recommandé que leur niveau de français soit suffisamment élevé pour pouvoir entendre des procès dans les deux langues officielles d’une manière suffisante. Les tribunaux devraient avoir la capacité de fonctionner dans les deux langues officielles sans embûche.

Il a également été dit au Comité que la formation des juges dans l’une ou l’autre des langues officielles est essentielle, car elle permettra d’accroître le nombre de juges bilingues au Canada. D’ailleurs, le Comité a entendu que le bilinguisme, en particulier des juges des cours provinciales, est un facteur des plus importants pour la mise en œuvre efficace de la partie XVII du Code[38]. À cet effet, le Fonds d’appui à l’accès à la justice[39] dans les deux langues officielles (le Fonds) permet d’améliorer la capacité du système judiciaire afin que les services soient offerts dans les deux langues officielles. À cette fin, le Fonds offre des ateliers et de la formation, des outils juridiques et linguistiques aux juristes et autres intervenants bilingues du système de justice, ainsi que du matériel et de l’information juridique au public. Le Fonds possède une enveloppe d'environ 40 millions de dollars sur une période de 5 ans. Ce montant a été renouvelé dans le cadre de la Feuille de route pour les langues officielles du Canada 2013–2018[40]. Un programme spécifique de formation linguistique pour les juges est également financé par le Fonds :

Le programme de formation linguistique pour les juges provinciaux parrainé par le Conseil canadien des juges en chef, sous la direction du juge en chef de la Cour provinciale du Nouveau-Brunswick, est un exemple concret d'un projet financé par le fonds dans le cadre du volet de formation. En plus de contribuer financièrement au fonds d'appui, le ministère de la Justice joue également un rôle dans l'élaboration du programme. Depuis 2010, soit depuis quatre ans, le ministère de la Justice travaille de concert avec la Cour provinciale du Nouveau-Brunswick à l'élaboration du programme, notamment à la création d'outils de formation et à l'établissement de l'approche axée sur des cas réels, des tribunaux fictifs, en quelque sorte. Depuis la mise en œuvre du programme en 2011, environ 120 juges ont participé au programme de formation linguistique[41].

En 2010, le Fonds a aussi permis la création du Centre canadien de français juridique, situé à Winnipeg. Ce Centre offre de la formation linguistique spécialisée en terminologie juridique. Les acteurs du système judiciaire peuvent ainsi acquérir et maintenir leurs connaissances dans les deux langues officielles[42].

2.2.2 INTERPRÈTES

On a, à maintes reprises, dit au Comité qu’il existe des difficultés quant à l’interprétation des procédures judiciaires. Lors de sa rencontre en 2012, le Comité fédéral-provincial-territorial des chefs des poursuites pénales a d’ailleurs discuté de ce problème et a soulevé que la qualité et l’exactitude de l’interprétation variaient d’une province à l’autre. Robert Doyle, avocat-conseil et chef au Secrétariat de la haute direction du Service des poursuites pénales du Canada et Rénald Rémillard, directeur général de la FAJEF, ont évoqué des opinions semblables :

Ça varie d'une province à l'autre. Dans certains cas, les employés ou les interprètes judiciaires sont bien formés. Ce sont des employés de la province, qu'ils soient du ministère de la Justice ou d'un autre ministère. Ces employés ont une capacité bilingue assez élevée dans le domaine judiciaire. Dans d'autres provinces, par contre, ce n'est pas le cas. On fait appel à des interprètes qui ne sont pas formés dans le domaine judiciaire pour faire l'interprétation de témoignages ou quelque chose de ce genre[43].

Le Comité a également entendu qu’il est difficile de trouver un interprète dans la langue de la minorité à l’extérieur des grands centres. Les procès criminels étant de plus en plus complexes et pouvant s’échelonner sur plusieurs semaines, cela n’incite pas les interprètes à se déplacer hors des grandes villes. Certains frais de déplacement peuvent être payés aux juges et aux procureurs de la Couronne, mais non aux interprètes[44].

De plus, on a dit au Comité qu’il arrive que l’interprétation ne rapporte pas de façon juste le déroulement d’un procès[45]. Il arrive aussi que la sténographie soit de piètre qualité. Toutefois, cela varie encore une fois d’une province à l’autre. Le Comité a entendu que les problèmes liés à l’interprétation judiciaire semblent plus importants dans les provinces de l'Ouest, entre autres en Saskatchewan et en Alberta, que dans le reste du Canada[46]. Allan Damer, président de la FAJEF, a dit :

Nous trouvons qu'en pratique, les interprétations ne sont pas fiables. Ce n'est pas parce que les interprètes ne sont pas capables de parler français, mais plutôt parce qu'ils n'ont pas une formation spécialisée en français juridique[47].

À cet effet, l’une des initiatives de FAJEF a été de créer le Centre canadien de français juridique, qui offre de la formation aux intervenants publics et privés ayant un lien avec le système juridique canadien. Sa mission est de faciliter l’accès à la justice en français à travers le Canada. Le Comité a entendu que ce Centre offre aussi de la formation aux interprètes[48].

De plus, le Centre de jurilinguistique de l'Université de Moncton offre de la formation au Nouveau-Brunswick ainsi que dans les régions de l'est du pays. Les témoins ont indiqué au Comité que le manque de formation persiste toutefois dans certaines régions :

Il y a environ deux ans, lorsque nous avons consulté des interprètes judiciaires de partout au Canada, la plupart d'entre eux nous ont dit qu'il y avait un besoin de formation et que c'était une lacune générale. C'est ce que nous avons entendu dans plusieurs régions[49].

2.2.3 JURÉS

Certaines provinces ont mentionné qu’elles éprouvaient des difficultés à trouver des candidats francophones ou bilingues afin de former un jury. Le Comité a entendu que les façons de former un jury sont différentes d’une province à l’autre et qu’il n’y a pas de processus uniforme à travers le Canada. Par exemple, la province du Manitoba utiliserait les numéros d'assurance-maladie pour constituer une liste représentative de la population en général. La Colombie-Britannique utiliserait la liste des parents qui envoient leurs enfants à l’école francophone[50]. La Colombie-Britannique a aussi décidé de centraliser ses procès devant jury au même endroit :

La situation ne pourrait survenir qu'à très peu d'endroits au pays, car la Colombie-Britannique a adopté une politique de centralisation pour que les procès devant jury se tiennent tous au même endroit (…) Par conséquent, tous les procès bilingues devant jury se dérouleront dans cette ville, et la province défraiera les personnes de leur déplacement, au lieu d'avoir à trouver des citoyens bilingues dans les localités du nord de la Colombie-Britannique, ce qui est une mission impossible[51].

Selon, Rénald Rémillard, directeur général de la FAJEF, la constitution d’un jury bilingue est un sujet qui a été discuté seulement à quelques reprises par ses membres et à leur avis, « il est davantage préoccupant que les juges dans certaines régions ou provinces ne veillent pas à avertir les accusés de leur droit[52]».

2.2.4 TRANSCRIPTEURS

La qualité des transcriptions dans les deux langues officielles a été abordée brièvement devant le Comité. Dans certains cas, il a été dit qu’elles comportent des erreurs qui peuvent préjudicier grandement les parties lorsque la cause est portée en appel. Gérald Lévesque, avocat, qui a témoigné à titre personnel devant le Comité, a mentionné que certaines transcriptions en français sont écrites sans les accents de la langue française. Il arrive aussi que l’on réfère au français dans les transcriptions sous les expressions « autre langue utilisée » ou « langue étrangère utilisée[53]».

De plus, dans sa lettre du 27 novembre 2013 adressée au Comité, le ministre de la Justice de l’Alberta a mentionné qu’il est difficile de trouver des transcripteurs compétents en français pour préparer une transcription des travaux du tribunal[54].

2.3 PROCÉDURES NON EXPRESSÉMENT VISÉES PAR LA PARTIE XVII ART. 530 ET 530.1 DU CODE)

Les articles 530 et 530.1 du Code précisent que l’accusé a le droit de subir son procès et son enquête préliminaire dans sa langue officielle. De prime abord, la partie XVII a donc une portée quelque peu restrictive : « À l'heure actuelle, en vertu de la loi, seules les procédures au moment de l'enquête préliminaire et du procès sont assujetties aux dispositions du Code criminel qui portent sur la langue du procès[55]».

Par contre, on peut se demander quelles procédures constituent un « procès » selon les termes du Code. Par exemple, Guylaine Loranger, conseillère juridique au sein du Programme d'appui aux droits linguistiques, s’est interrogée sur l’application de la partie XVII aux audiences de détermination de la peine[56]. Toutefois, la Cour d’appel du Québec a rappelé, en 2008, que de telles audiences sont soumises aux exigences des articles 530 et 530.1 du Code[57].

Dans d’autres cas, il est clair que le libellé des articles 530 et 530.1 ne vise pas certaines procédures, notamment l’arrestation et l’appel[58]. Par ailleurs, la jurisprudence a élargi la protection offerte par la partie XVII aux demandes d’ajournement[59] et aux procédures visant à obtenir un engagement de garder la paix[60].

Les paragraphes suivants du rapport ne se veulent pas un examen exhaustif de toutes les différentes procédures criminelles, mais bien un tableau des principaux enjeux soulevés par les témoins. Il ne faut pas non plus perdre de vue la différence entre les droits protégés par la partie XVII et ceux garantis par les principes de justice fondamentale qui sont enchâssés dans notre droit constitutionnel. Comme le disait si bien la Cour suprême, s’efforçant de dissiper la confusion entre les droits linguistiques et les principes de justice fondamentale :

Le droit à une défense pleine et entière est lié aux aptitudes linguistiques uniquement en ce que l’accusé doit être en mesure de comprendre son procès et de s’y faire comprendre. Toutefois, ce droit est déjà garanti par l’art. 14 de la Charte, une disposition qui prévoit le droit à l’assistance d’un interprète. Le droit à un procès équitable est universel et il ne peut pas être plus important dans le cas de membres des collectivités des deux langues officielles au Canada que dans celui de personnes qui parlent d’autres langues. Les droits linguistiques ont une origine et un rôle complètement distincts. Ils visent à protéger les minorités de langue officielle du pays et à assurer l’égalité de statut du français et de l’anglais[61]. [Le souligné est de nous.]

2.3.1 DIVULGATION DE LA PREUVE

La décision R. c. Stinchcombe[62] de la Cour suprême du Canada (1991) et la jurisprudence subséquente obligent les procureurs à divulguer les renseignements pertinents à l’accusé. Dans sa lettre envoyée au Comité en janvier 2014, le ministre de la Justice et procureur général de la Saskatchewan, Gordon Wyant, exprimait son inquiétude à propos du manque de ressources nécessaires pour faire traduire tous les documents visés par l’obligation de divulgation. Il désirait donc obtenir des précisions quant à l’application de la partie XVII à ces documents.

Jusqu’à présent, la jurisprudence a établi que le droit de l’accusé de recevoir la divulgation de la preuve ne relevait pas d’un droit linguistique. La Cour d’appel du Québec a clairement affirmé que l’article 530.1 ne génère pas un devoir pour la poursuite de fournir une traduction de la preuve qui est divulguée[63].

Cela dit, selon Michel Francoeur : « dans certains cas, les principes de la justice naturelle ou fondamentale pourraient faire en sorte que l'on traduise, intégralement ou en partie, la preuve[64]». Des tribunaux ont effectivement déjà ordonné la traduction d’un sommaire des éléments de preuve sur la base des principes d’équité[65]. Étant donné la protection offerte par les principes de justice fondamentale et le fait que l’article 530.1 garantit le droit de l’accusé à l’assistance d’un interprète pour traduire les documents présentés au tribunal, le Comité a décidé qu’il ne serait pas opportun de recommander l’application de la partie XVII aux documents divulgués par la poursuite.

2.3.2 ENQUÊTE SUR LE CAUTIONNEMENT

Lorsqu’un prévenu a été mis sous garde par des agents de la paix à la suite de l’arrestation, l’on doit généralement tenir une enquête sur mise en liberté provisoire (aussi appelée « enquête sur le cautionnement ») devant un juge de paix dans les cinq jours suivants l’arrestation[66]. Tout comme pour l’obligation de divulgation, le ministre de la Justice de la Saskatchewan a demandé au Comité des éclaircissements au sujet de l’application de la partie XVII, citant des retards possibles dans le cas d’enquêtes sur le cautionnement tenues en français[67].

Le Comité a entendu des témoignages contradictoires sur cette question. Bien que l’enquête sur le cautionnement, selon une certaine jurisprudence, pourrait faire partie du terme « procès » utilisé dans la partie XVII[68], nous avons également entendu, d’un témoin du ministère de la Justice du Canada, que :

Les enquêtes sur le cautionnement ne sont pas couvertes par les articles 530 et 530.1 (…) Cet enjeu est survenu lorsque nous consultions les provinces avant le dépôt du projet de loi C-13 [en 2007]. Nous avions décidé à l'époque que l'élargissement ne serait pas une bonne idée parce que les provinces nous disaient qu'elles avaient encore du mal à pleinement mettre en œuvre le système linguistique actuel et, à l'époque, elles ne voulaient pas qu'il soit élargi. L'objectif était d'aider les provinces et les intervenants en utilisant, par exemple, le fonds d'appui (…)[69].

Près de sept ans se sont écoulés depuis le dépôt du projet de loi C-13 et les provinces et territoires, dans leur lettre envoyée au Comité, indiquent qu’en général, l’application des dispositions de la partie XVII se passe sans difficulté majeure.

Nous reconnaissons que des provinces font déjà des efforts pour offrir de telles enquêtes dans la langue de la minorité, mais nous sommes également conscients que la situation n’est pas parfaite et que le manque de personnel entraîne bien souvent des délais, comme le soulignait d’ailleurs le ministre de la Justice de la Saskatchewan : « [N]ous avons de nombreux tribunaux situés à plusieurs endroits différents de la province, et un nombre relativement petit de procureurs, de juges et de fonctionnaires de la Cour sont bilingues. Par conséquent, les audiences en français sur le cautionnement peuvent être retardées à l’occasion[70]. »

Afin de pallier le problème du manque de personnel et des délais entraînés par un ajournement des procédures, le tribunal pourrait tenir l’enquête sur le cautionnement par vidéoconférence, comme c’est parfois le cas en Alberta[71]. N’oublions pas qu’une personne accusée est souvent en situation de vulnérabilité, surtout dans le cadre de son enquête sur le cautionnement, où sa liberté est en jeu. Comme le disait le commissaire aux langues officielles du Canada: « Si on parle d'un droit égal à un processus judiciaire dans la langue de son choix, il ne devrait pas se limiter à la cause elle-même, mais s'appliquer au processus en entier[72]».

3. RECOMMANDATIONS

RECOMMANDATION 1

Le Comité recommande que le Parlement modifie la version française du paragraphe 530(3) du Code criminel comme suit : « Le juge de paix ou le juge de la cour provinciale devant qui l’accusé comparaît pour la première fois doit veiller à ce que l’accusé soit avisé de son droit de demander une ordonnance au titre des paragraphes (1) ou (2) et des détails dans lesquels il doit faire une telle demande. »

RECOMMANDATION 2

Le Comité recommande que le Comité fédéral-provincial-territorial des chefs des poursuites pénales se réunisse avec le ministère de la Justice du Canada afin de discuter des problèmes liés à la constitution de jurys bilingues et de l’interprétation de procès dans les deux langues officielles, et de proposer des solutions possibles.

RECOMMANDATION 3

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral poursuive sa collaboration avec les provinces et les territoires pour assurer l’exécution de la partie XVII du Code criminel, considérant que les provinces et les territoires qui ont écrit au Comité, ont indiqué en général, leur satisfaction à l’égard de l’administration de la justice dans les deux langues officielles.

RECOMMANDATION 4

Le Comité recommande que les agents de police de première ligne soient bien informés des droits linguistiques d’un accusé et que le gouvernement fédéral réaffirme cette exigence auprès des provinces, des territoires et des services de police.

RECOMMANDATION 5

Le Comité recommande que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et territoires, envisage des façons de remédier au manque de transcripteurs et d’interprètes dans les deux langues officielles. Il recommande aussi que le gouvernement fédéral, en collaboration avec les provinces et territoires, considère élaborer des normes de formation jurilinguistique nationales, si nécessaire.

RECOMMANDATION 6

Le Comité recommande qu’un comité parlementaire examine de nouveau la partie XVII du Code criminel dans cinq ans.

RECOMMANDATION 7

Le Comité recommande que le Comité fédéral-provincial-territorial sur l’accès à la justice dans les deux langues officielles mette à l’ordre du jour, lors de leur prochaine rencontre, une discussion sur l’application des articles de la partie XVII du Code criminel, sur la disponibilité des ressources judiciaires bilingues sur le plan national, et de considérer une définition commune du niveau de compétence linguistique requis de la part des juges bilingues et fasse rapport de ses conclusions au Comité dans un délai raisonnable.

RECOMMANDATION 8

Le Comité recommande que le ministère de la Justice du Canada consulte les provinces et territoires, lors de la prochaine réunion du Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur l’accès à la justice dans les deux langues officielles, afin de déterminer si un élargissement de la partie XVII du Code criminel pour inclure les enquêtes sur le cautionnement serait souhaitable et d’explorer des solutions, telles que tenir ces enquêtes par vidéoconférence.


[1]             L.C. 2008, ch. 18.

[2]             Devine c. Québec (procureur général), [1988] 2. R.C.S. 790.

[3]             Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes (JUST), 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014.

[4]             Loi modifiant le Code criminel, S.C. 1977-1978, ch. 36. Toutefois, comme le faisait remarquer Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice: « il faut noter que le droit de tout accusé de subir son procès dans la langue officielle de son choix n'est pas nouveau. En effet, ce droit a d'abord été reconnu dans la Loi sur les langues officielles de 1969 » (JUST, 1re session, 41e législature, Témoignages, 27 mai 2013). Par ailleurs, l’article 849(3) du Code prévoit que certaines formules, comme les mandats de perquisition, doivent être imprimés dans les deux langues officielles.

[5]             [1999] 1 R.C.S. 768, par. 28.

[6]             Ce droit est également protégé à l’article 14 de la Charte.

[9]             JUST, 1re session, 41e législature, Témoignages, 27 mai 2013 (Robert Doyle, avocat-conseil et chef, Secrétariat de la haute direction, Service des poursuites pénales du Canada).

[10]           James Cornish, sous-procureur général adjoint de l’Ontario, Lettre envoyée au Comité, 7 février 2014.

[11]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 mars 2014.

[12]           Comité consultatif de la magistrature et du barreau sur les services en français auprès du procureur général de l’Ontario, Accès à la justice en français, juin 2012, pp. 14 et 15.

[13]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Allan Damer, président, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law inc.). Voir aussi : JUST, 1re session, 41e législature, Témoignages, 27 mai 2013 (Robert Doyle, avocat-conseil et chef, Secrétariat de la haute direction, Service des poursuites pénales du Canada).

[14]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Allan Damer, président, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law inc.).

[15]           R. c. Beaulac, [1999] 1 R.C.S. 768, par. 34.

[16]           Ibid.

[17]           Renée Soublière, « Les perpétuels tiraillements des tribunaux dans l’interprétation des droits linguistiques », Revue de la common law en français, Vol. 4:1, 2001, p. 79.

[18]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[19]           Voir Commissariat aux langues officielles, L’utilisation équitable du français et de l’anglais devant les tribunaux du Canada, novembre 1995, p. 105.

[20]           Voir Renée Soublière, « Les droits linguistiques en matière criminelle : où en sommes-nous depuis l’arrêt Beaulac? Ou la fin de l’ère d’un tourment judiciaire éphémère », The Supreme Court Law Review, Second series, Volume 32, 2006.

[21]           R. v. Deveaux, 1999 CarswellNS 447 (C.S.N.-É).

[22]           Her Majesty the Queen v. Che Mong Le, (31 janvier 2000), Ottawa 5024F (C.S.J. Ont.) juge Killeen.

[23]           [2004] N.S.J. No 23 (C.A. N.-É.).

[24]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 27 mars 2014.

[25]           Quelques décisions des tribunaux soutiennent que les procureurs de la Couronne ont bel et bien cette obligation (R. v. MacKenzie, [2004] N.S.J. No 23 (C.A. N.-É.); Ville de Saint-Jean c. Charlebois et 042504 NB INC (25 février 2004), Saint-Jean, no 04939902 (C.P. N.-B.) décision orale du juge Vautour).

[26]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014; voir aussi JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 mars 2014 (Gérard Lévesque).

[27]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Allan Damer et Rénald Rémillard, président et directeur général respectivement, FAJEF); JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 27 mars 2014 (Graham Fraser, commissaire aux langues officielles). Par ailleurs, dans son étude intitulée L’utilisation équitable du français et de l’anglais devant les tribunaux au Canada (Commissaire aux langues officielles, novembre 1995), le commissaire aux langues officielles recommandait « qu’un nouveau formulaire obligatoire soit ajouté au processus pénal, lequel aviserait les accusés de leurs droits linguistiques prévus au Code et leur permettrait de préciser la langue officielle qu’ils préfèrent » (Renée Soublière, « Les perpétuels tiraillements des tribunaux dans l’interprétation des droits linguistiques », Revue de la common law en français, Vol. 4:1, 2001, p. 37, note 109).

[28]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 6 mars 2014.

[29]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 6 mars 2014.

[30]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014.

[31]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014.

[32]           JUST, 1re session, 41e législature, Témoignages, 27 mai 2013.

[33]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014.

[34]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014.

[35]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014.

[37]           Ibid., p. 1.

[38]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Rénald Rémillard, directeur général, FAJEF).

[40]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Michel Francoeur, avocat général et directeur, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[41]           Ibid.

[42]           Ibid.

[43]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Rénald Rémillard).Voir aussi JUST, 1re session, 4e législature, Témoignages, 27 mai 2013 (Robert Doyle).

[44]           JUST, 2e session, 4e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Robert Doyle, avocat-conseil et chef, Secrétariat de la haute direction, Service des poursuites pénales du Canada).

[45]           Voir, en Annexe, la lettre datée du 11 décembre 2013 de l’honorable Troy Lifford, ministre de la Justice du Nouveau-Brunswick : « Selon l’étude que nous avons réalisée, il y a problème récurrent au Nouveau-Brunswick : celui de la disponibilité d’interprètes en langues officielles. Le ministère des Services gouvernementaux engage des interprètes judiciaires, mais il éprouve continuellement de la difficulté à recruter et à retenir des interprètes qualifiés. »

[46]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Rénald Rémillard, directeur général, FAJEF).

[47]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014.

[48]           Centre canadien de français juridique inc. (CCFJ), À propos du CCFJ.

[49]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Rénald Rémillard, directeur général, FAJEF).

[50]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 27 mars 2014 (Graham Fraser, commissaire aux langues officielles).

[51]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Robert Doyle, avocat-conseil et chef, Secrétariat de la haute direction, Service des poursuites pénales du Canada).

[52]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014.

[53]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 mars 2014 (Gérald Lévesque, avocat).

[54]           Voir, en Annexe, la lettre datée du 27 novembre 2013 de l’honorable Jonathan Denis, ministre de la Justice de l’Alberta.

[55]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[56]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 mars 2014.

[57]           LSJPA — 0856, 2008 CarswellQue 11503, 2008 QCCA 2232.

[58]           JUST, 1re session, 41e législature, Témoignages, 27 mai 2013 (Robert Doyle, avocat-conseil et chef, Secrétariat de la haute direction, Service des poursuites pénales du Canada); JUST, 2e session, 41législature, Témoignages, 25 février 2014 (Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[59]           R. c. Bujold, 2011 NBCA 24.

[60]           R. v. Bauer, 2005 ONCJ 337.

[61]           R. c. Beaulac, [1999] 1 R.C.S. 768, par. 41.

[62]           [1991] 3 R.C.S. 326.

[63]           R. c. Stockford, 2009 QCCA 1573.

[64]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014.

[65]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[66]           Art. 503 et 516 du Code. La révision de l’ordonnance de mise en liberté ou de détention provisoire peut également être révisée par la suite (art. 520 à 523).

[67]           Voir, en Annexe, la lettre datée du 9 janvier 2014 de Gordon S. Wyant, ministre de la Justice et procureur général de la Saskatchewan.

[68]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Michel Francoeur, avocat général et directeur, Direction des langues officielles, ministère de la Justice). Voir Renée Soublière, « Les droits linguistiques en matière criminelle : où en sommes-nous depuis l’arrêt Beaulac ? Ou la fin de l’ère d’un tourment judiciaire éphémère », The Supreme Court Law Review, Second series, Volume 32, 2006, p. 34, note 59, qui réfère à la décision R. c. Larocque, du juge de paix L. Sclisizzi de la Cour de justice de l’Ontario, rendue le 7 août 2002, « dans laquelle le juge semble indiquer que dans la mesure où la Couronne est d’accord, un accusé a le droit à une enquête de cautionnement en français (…) »

[69]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 25 février 2014 (Renée Soublière, avocate-conseil, coordonnatrice du contentieux et superviseure, Direction des langues officielles, ministère de la Justice).

[70]           Gordon S. Wyant, ministre de la Justice et procureur général de la Saskatchewan, Lettre envoyée au Comité, 9 janvier 2014. Voir aussi Comité consultatif de la magistrature et du barreau sur les services en français auprès du procureur général de l’Ontario, Accès à la justice en français, juin 2012, p. 23.

[71]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 4 mars 2014 (Allan Damer, président, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law inc.).

[72]           JUST, 2e session, 41e législature, Témoignages, 27 mars 2014 (Graham Fraser, commissaire aux langues officielles).