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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 7 mai 1996

.0909

[Traduction]

Le président: La séance est ouverte.

Nous recevons M. Gordon Smith, sous-ministre des Affaires étrangères, qui est accompagné de M. Barry Carin, sous-ministre adjoint du secteur de la politique économique et commerciale. Nous recevons également du ministère des Finances, M. Tom Bernes, qui est déjà venu discuter avec nous des questions relatives aux institutions financières internationales.

Je vous souhaite la bienvenue messieurs. Je vous remercie d'être venus.

.0910

L'objet de la séance d'aujourd'hui est de passer en revue le sommet du G-7 tenu l'an dernier, auquel nous avons consacré un rapport, comme vous vous en souviendrez. M. Smith fera le point sur les perspectives du prochain sommet du G-7.

Pour ce qui est de l'organisation de nos travaux, je vous rappelle que nous siégerons dans cette salle jusqu'à 10 h 30 seulement, après quoi nous passerons à l'étage inférieur.

Monsieur Smith.

M. Gordon Smith (sous-ministre des Affaires étrangères, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Merci beaucoup, monsieur le président. Nous sommes heureux de l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui de comparaître devant vous pour discuter des préparatifs au sommet de Lyon mais aussi pour parler des suites du sommet de Halifax. Nous sommes très heureux de l'intérêt que le comité porte à ces rencontres au sommet. Il nous sera possible, je crois, d'illustrer les réels progrès que nous avons accomplis.

En préparation à la rencontre de Halifax, nous étions bien conscients du scepticisme croissant de la population vis-à-vis de ces rencontres, voire du cynisme de certains journalistes, pour qui ces manifestations grandioses sont entourées de beaucoup de battage mais ne se résument guère qu'à des séances de photos pour les chefs d'État et de gouvernement. L'importance des rencontres du G-7 pour nous nous a convaincus qu'il fallait que la rencontre d'Halifax aboutisse à des résultats concrets. C'est ce que nous avons accompli.

Comme vous connaissez tous la teneur du communiqué, je ne vais pas le commenter.

Après la rencontre d'Halifax, nous avons veillé à ce qu'il y ait un suivi. Nous avons même cri un plan de travail. Même s'il s'agissait là d'un mécanisme interne, je crois que dans ce cas-ci il a donné des résultats et c'est la raison pour laquelle j'en parle. Nous avons tenu deux rencontres inhabituelles de sherpas dans les six derniers mois de l'année et c'est ce qui nous a permis d'assurer le suivi. Le rapport que nous avons remis ce matin illustre nos réalisations.

J'aimerais aussi dire quelques mots des événements qui ont eu lieu dans le premier semestre de cette année. Je crois qu'ils susciteront l'intérêt des membres du comité.

Tout d'abord, une conférence du G-7 sur l'emploi a été tenue à Lille en présence de deux ou trois ministres de chaque pays. Dans notre cas, nous étions représentés par MM. Manley et Young . Il s'agissait d'une initiative de la France inspirée du précédent cri à Détroit en 1994. Je crois que la rencontre a été utile.

J'aimerais également dire quelques mots du sommet nucléaire de Moscou, qui se distingue par son caractère plutôt inhabituel. J'allais dire «unique en son genre», mais cette expression doit être utilisée avec prudence puisque ces choses ont tendance à se répéter. Je crois néanmoins qu'il s'agissait d'un événement unique en son genre.

Les membres du comité se souviendront que l'an dernier à Halifax, le président Eltsine a invité ses collègues à Moscou pour discuter de questions nucléaires: la sûreté et la sécurité nucléaires. Cela porte en fait sur la sûreté des réacteurs nucléaires, l'élimination des matières nucléaires, et leur protection, y compris celles qui proviennent des armes, pour éviter que dans une situation turbulente comme celle qui règne en Russie, celles-ci ne tombent pas entre les mauvaises mains.

Encore une fois, puisque nous occupions la présidence du sommet l'an dernier - notre mandat se poursuivait jusqu'à la fin de l'année - nous avons pu participer de très près aux préparatifs du sommet de Moscou. Cette fois encore, nous avons obtenu des résultats concrets. Permettez-moi d'en énumérer quelques-uns.

Tout d'abord, nous tenions clairement à susciter une culture de la sûreté nucléaire. Vous vous souviendrez que le premier ministre Chrétien s'est rendu à Moscou après avoir séjourné à Bucarest où il a inauguré le réacteur nucléaire bâti par l'Énergie atomique du Canada limité à Cernavoda où, j'ajouterai, bien que cela aille sans dire, la question de la sûreté nucléaire figure au premier rang des préoccupations de l'EACL.

.0915

On s'emploie vigoureusement à l'heure actuelle à répandre cette culture de la sûreté nucléaire en Europe centrale et en Europe de l'Est, et l'accident de Tchernobyl, dont nous venons de marquer le dixième anniversaire, ne fait que mettre en évidence l'importance de cette culture.

Il y a toutefois eu d'autres réalisations. En effet, nous avons réussi à convaincre la Russie d'adhérer à la Convention de Vienne relative à la responsabilité civile en matière de dommages nucléaires, à la Convention internationale sur la sécurité nucléaire, ainsi qu'à l'amendement de 1993 à la Convention de Londres interdisant l'immersion de déchets nucléaires. Il s'agit dans tous les cas de réalisations importantes favorisées par le sommet de Moscou.

En outre, les chefs d'État et de gouvernement ont approuvé un programme de lutte contre le trafic de matières nucléaires.

Lors de la rencontre de Moscou, le président Kuchma de l'Ukraine a rappelé l'accident de la centrale de Tchernobyl et confirmé que son pays allait appliquer d'ici à l'an 2000 le protocole d'entente négocié et signé dans l'édifice où nous nous trouvons en ce moment même sur la fermeture de Tchernobyl. Voilà autant de réalisations majeures.

En préparation à la rencontre de Lyon, je dois insister sur l'importance d'une question qui ne figure nulle part sur l'ordre du jour. Il s'agit de la participation de la Russie. Encore une fois, les membres du comité se souviendront que les Russes soutenaient qu'ils devraient pouvoir faire partie d'un G-8. Le fait est, toutefois, que la rencontre du G-7 à Lyon se tiendra quelques jours à peine après le premier tour des présidentielles russes. Les pays du G-7 estiment que le moment n'est pas venu d'inclure la Russie à part entière à un G-8 même si pendant notre mandat à la présidence du G-7, des progrès ont été réalisés concernant la participation de la Russie. D'autres progrès seront réalisés à Lyon et à la clôture de ce sommet, il y aura - et c'est singulier, voire sans précédent - une rencontre à laquelle participeront le Secrétaire général des Nations unies, les dirigeants du Fonds monétaire international, de la Banque mondiale et de l'Organisation mondiale du commerce.

Il y a deux raisons à cela.

La première découle directement de l'examen que l'on a fait à Halifax du fonctionnement des institutions de Bretton Woods, les rapports entre ces institutions et entre elles et avec l'ONU, ainsi que l'objectif de la réforme de ces institutions, à laquelle le comité a apporté une aide si précieuse. Il est donc très utile de réunir ainsi les chefs d'État et de gouvernement pour leur demander ce qui s'est produit depuis la rencontre de Halifax.

L'autre raison, c'est que le thème choisi par le président Chirac pour le sommet de Lyon est celui du développement. Même si à l'origine - certains d'entre vous se souviendront des propos du président - le thème devait être l'aide au développement, les discussions qui ont eu lieu ont abouti à une définition plus vaste. Pour des raisons que nous connaissons tous, les transferts d'aide publique au développement diminuent, et c'est un phénomène qui a peu de chances de disparaître au cours des prochaines années. C'est pourquoi il faut examiner la question du développement sous l'angle plus grand de la mondialisation de l'économie, du mouvement accru des capitaux privés et de la nécessité de mieux intégrer les pays en développement au système mondial du commerce. Il s'agit donc d'une définition plus vaste.

J'ajouterai également que le travail que nous avons fait dans le domaine de la technologie de l'information, à laquelle sera consacrée très prochainement une rencontre spéciale en Afrique du Sud, est également relié à la question de l'intégration du monde en développement au monde commercial international, ce qui permettra à ces pays de profiter au maximum des possibilités d'investissement et des débouchés commerciaux.

.0920

Bref, de l'avis général, le développement se fera de plus en plus en fonction de la capacité des pays en développement à participer à l'économie mondiale. Ces pays ne peuvent donc plus compter uniquement sur les apports d'APD pour sortir du dénuement. Il faudra qu'ils le fassent par leurs propres moyens. C'est l'intégration à l'économie mondiale qui est le facteur déterminant.

À Lyon, la question sera abordée sous l'angle du partenariat entre les participants au sommet et les pays en développement, ce qui englobera un vaste éventail de questions.

La rencontre de clôture avec les dirigeants des institutions internationales est très importante, donc, non seulement pour l'intégration des pays en développement à l'économie mondiale mais aussi pour le dossier de la réforme des institutions internationales. Sur ce point, nous avons le sentiment très net d'avoir réalisé des progrès. Mon collègue, M. Bernes, pourra sûrement vous parler des rencontres auxquelles il a participé à ce sujet, lorsque les ministres des Finances du G-7 ont continué de donner suite au programme d'action établi à Lille.

À Lyon, nous aborderons évidemment de façon plus large les problèmes de la libéralisation du commerce et confirmerons notre position. Dans ce dossier - nous pouvons le dire sans crainte, je crois - nous jouons un rôle de premier plan en faveur d'un régime fondé sur des règles efficacement régies par l'OMC. C'est important en préparation à la rencontre ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce qui se tiendra à Singapour en décembre.

[Français]

Je dois aussi mentionner qu'une réunion des ministres de l'Environnement débutera demain et se poursuivra jusqu'à vendredi prochain. Nous avions tenu une réunion des ministres de l'Environnement à Hamilton l'an dernier, et à Florence, à Firenze, en Italie l'année précédente. Les ministres se rencontreront donc pour une troisième fois afin de discuter des enjeux dans ce domaine et de se préparer en vue de la rencontre à Lyon.

[Traduction]

Je ne m'étendrai pas là-dessus, mais je peux ajouter que l'on s'emploie également à combattre la criminalité organisée et le terrorisme. Sur ce dernier point, je préciserais qu'au Sommet spécial de Charm el Cheikh, consacré en particulier au terrorisme au Proche-Orient mais aussi ailleurs et auquel le premier ministre Chrétien a participé, nous nous sommes servis de la déclaration sur la lutte contre le terrorisme adoptée en décembre dernier pour essayer de multiplier les appuis en faveur de cette déclaration. Je crois qu'il s'agit ici encore d'une réalisation importante.

J'aimerais maintenant me servir de cette question pour revenir sur la participation de facto de la Russie à la discussion d'un nombre croissant de questions internationales. Il est possible que d'autres progrès soient réalisés dans ce dossier. Autrement dit, la participation de la Russie aux sommets, qui jusqu'ici se limitait à la discussion de questions politiques englobe aujourd'hui des questions comme la criminalité et le terrorisme. Ce que je prévois, c'est que précisément à cause de l'incertitude qui règne en Russie mais aussi parce que ce pays n'est pas aux prises avec les mêmes problèmes macro-économiques que nous, celui-ci ne deviendra pas un membre à part entière du G-8. C'est une autre façon de dire que le G-7 ne deviendra pas prochainement le G-8 mais je m'attends à ce que le débat se poursuive au cours des prochaines semaines.

.0925

Monsieur le président, je crois qu'il serait bon que M. Bernes, sous-sherpa aux finances - c'est M. Carin qui est le sous-sherpa aux affaires étrangères - ajoute quelques mots puisque les ministres des Finances ont beaucoup travaillé aux suites du Sommet de Halifax.

Le président: Monsieur Bernes, si vous avez un instant, j'aimerais que vous nous parliez un peu de la réforme des institutions financières internationales. Comme vous le savez, nous avons entendu dernièrement le vice-président et nous recevrons M. Wolfensohn prochainement. C'est donc une question qui intéresse le comité. Merci.

M. Tom Bernes (sous-ministre adjoint, ministère des Finances): Merci, monsieur le président. Je ne ferai qu'ajouter quelques observations à celles de Gordon.

Lorsque nous avons comparu devant vous la dernière fois, j'ai fait le point sur le programme de travail adopté à l'issue du Sommet de Halifax. Ce sommet est aujourd'hui perçu comme un point tournant, aussi bien pour ce qui y a été accompli que pour les préparatifs qui y ont mené. Un certain nombre d'événements, comme la crise mexicaine et celle de la Banque Barings, ont électrisé les participants et les institutions et les ont convaincus d'intervenir. Beaucoup de progrès ont été réalisés depuis.

La dernière fois, vous vous en souviendrez, j'ai dit qu'un certain nombre d'accords avaient été conclus. L'un d'entre eux doit permettre de reconnaître les problèmes avant qu'ils n'atteignent des proportions critiques. Ici, le FMI a renforcé ses mécanismes de contrôle grâce à une analyse plus vigoureuse, plus franche et plus hâtive des politiques économiques de ses membres.

Deuxièmement, lors de la réunion du Comité intérimaire du FMI qui s'est tenue il y a à peine deux semaines, les ministres ont convenu d'une nouvelle norme de communication de données que devront publier notamment les pays qui empruntent sur les marchés internationaux de capitaux. Le Canada a été l'un des premiers pays à adhérer sans réserve à cette norme ambitieuse destinée à mieux informer les marchés des faits nouveaux en matière financière et économique.

Le FMI a cri une nouvelle procédure appelée mécanisme de financement d'urgence lui permettant de réagir plus rapidement en cas de crise et d'effectuer des décaissements plus importants. Les discussions ont également progressé sur le renforcement des ressources financières du Fonds dans le but de faire face aux situations d'urgence grâce à la création de nouveaux mécanismes de financement qui s'ajouteront aux moyens financiers prévus par les Accords généraux d'emprunt.

Comme délégué du Canada au G-7, j'ai présidé un groupe de travail du G-10 dont le but est de multiplier par deux les ressources financières, actuellement de 17 milliards de DTS, soit environ 35 millions de dollars US, pour les porter à 70 milliards, grâce aux contributions des pays du G-10 et d'autres pays qui, même s'ils ne sont pas actuellement des participants, sont capables de soutenir le système économique mondial.

Des progrès ont été réalisés dans ce domaine et une entente est intervenue sur les grands principes qui guideront la forme finale des nouveaux arrangements. Les discussions se poursuivent. De fait, d'autres réunions se tiendront au cours des prochaines semaines dans le but d'en arriver à un résultat le plus vite possible. Nous espérons que la rencontre de Lyon relancera l'activité pour mener cette entreprise à terme.

L'an dernier à Halifax, les dirigeants du G-7 ont invité les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du G-10 à passer en revue les mécanismes susceptibles de désamorcer les crises de liquidités. Un groupe de travail du G-10 a été cri pour examiner tous les aspects de la question et il a présenté son rapport aux ministres à Washington, il y a deux semaines. Les ministres et les gouverneurs des banques centrales ont approuvé le rapport final du groupe de travail.

Voici les grandes lignes du rapport. Les modalités des contrats d'emprunt doivent être respectées à la lettre. Ni le pays débiteur ni le pays créancier ne peuvent s'attendre à échapper aux conséquences financières négatives d'une crise grâce à une opération officielle de sauvetage. Les mécanismes internationaux en cas de faillite ne peuvent ni ne doivent s'appliquer dans l'avenir immédiat car en certaines circonstances la suspension des paiements par le débiteur peut être un élément inévitable du désamorçage de la crise. Enfin, des dispositions doivent être introduites dans les contrats types des titres de créance souverains pour faciliter la conciliation et la collaboration entre le débiteur souverain et ses créanciers en cas de crise.

.0930

Ce rapport de travail, après approbation par les ministres et les gouverneurs, a été rendu public. Nous participons actuellement à une série de consultations avec les principaux participants financiers internationaux pour examiner les moyens de faire progresser davantage de dossiers.

Le communiqué de Halifax a aussi attiré l'attention sur l'importance d'une collaboration étroite entre les organes de contrôle financier dans le cadre de la réforme. La disparition des frontières géographiques et les distinctions nettes entre différentes catégories d'institutions financières a il est vrai ouvert de nouvelles possibilités mais aussi rendu beaucoup plus complexe la tâche de ces organes de contrôle. Une collaboration et des communications plus étroites entre ces organes sont les meilleures façons pour eux d'être à la mesure des institutions qui relèvent d'eux.

À la suite du Sommet de Halifax les ministres des Finances du G-7 ont demandé au Comité de Bâle des règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires et à l'Organisation internationale des commissions de valeurs de faire rapport des activités qu'elles ont menées pour améliorer la collaboration entre leurs membres. La réponse qu'ils ont donnée aux ministres fait état d'un volume impressionnant de travaux récents et en cours.

À la suite des discussions lors du Sommet de Halifax, les superviseurs des banques, des entreprises de valeurs mobilières et des compagnies d'assurance ont cri un forum mixte dont le but est de relever le défi que représente la supervision des conglomérats financiers. Le Comité de Bâle et l'OICV ont également resserré les liens entre eux et ont adopté une initiative conjointe destinée à promouvoir les arrangements de coopération.

En préparation du sommet du G-7 de cette année, les ministres vont étudier ce rapport et vont chercher des moyens pour continuer à améliorer la coopération entre les autorités de surveillance.

Passons brièvement à la Banque mondiale. Comme vous le savez, M. Wolfensohn, le nouveau président de la Banque mondiale, sera à Ottawa le 30 mai 1996 pour rencontrer un certain nombre d'entre vous. Sous sa direction, la Banque mondiale a entrepris un vaste programme de changements. Le président prend des mesures pour que la banque mette davantage l'accent sur la clientèle, qu'elle renonce à ses tendances bureaucratiques et qu'elle fasse preuve d'une plus grande souplesse dans ses réactions aux défis que pose l'évolution du monde. Plusieurs des changements entrepris actuellement découlent de recommandations formulées au Sommet de Halifax, et ont reçu un appui non équivoque des ministres au cours des réunions du printemps.

Ces mesures visent notamment à améliorer l'intégration des activités concernant le secteur privé à la Banque mondiale, à la Société financière internationale et à l'Agence multilatérale de garantie des investissements. L'amélioration de la coopération devrait se traduire par une politique plus intégrée envers le secteur privé dans les stratégies d'aide aux pays de la banque.

Une autre de ces mesures vise la décentralisation des opérations, qui doivent être réalisées plutôt sur le terrain que dans les administrations centrales. Le nouveau président veut que le personnel de la banque travaille directement auprès des intéressés de façon à favoriser le sentiment de propriété envers les projets de la banque. À cette fin, les missions sur le terrain reçoivent un plus grand nombre de bureaux de pays. En particulier, M. Wolfensohn a beaucoup insisté sur la notion de partenariat et a consacré une bonne partie de sa première année en fonction à établir des contacts et à favoriser une plus grande transparence dans les relations avec les ONG.

En outre, des mesures sont prises pour améliorer la coordination avec d'autres banques multilatérales, notamment par la création d'un groupe de travail qui doit élaborer des méthodologies communes d'évaluation. On s'attend à de nouvelles mesures dans ce domaine en réponse aux recommandations d'un rapport récemment publié par le Groupe de travail sur les banques multilatérales de développement, dont j'ai fait partie. Ce rapport invite la Banque mondiale et les banques régionales à collaborer davantage aux analyses économiques par pays, aux stratégies d'aide et à la collecte et à l'évaluation des données. Ces recommandations ont reçu l'appui des ministres il y a deux semaines et je pense qu'elles devraient servir de thème de discussion à Lyon et rallier l'appui des participants.

Je voudrais soulever maintenant une dernière question qui a été abordée à Halifax et qui devrait l'être également à Lyon, c'est la question de la dette multilatérale.

Le fardeau de la dette de certains pays pauvres lourdement endettés, particulièrement en Afrique, constitue manifestement une question importante qu'on peut considérer comme le dernier élément de la formulation de la stratégie évolutive en matière de dette. À Halifax, les chefs d'État du G-7 ont invité les institutions de Bretton Woods à adopter une formule globale pour venir en aide aux pays confrontés à des problèmes de dettes multilatérales et pour faire à cette fin un meilleur usage des ressources de la Banque mondiale et du FMI.

.0935

Au cours des réunions de printemps tenues il y a deux semaines, les institutions ont présenté une proposition globale. Sa structure fondamentale a été approuvée par les comités de développement provisoire, mais il reste encore à se mettre d'accord sur d'importants détails, notamment sur un partage approprié du fardeau entre les créanciers bilatéraux et multilatéraux et sur les délais d'accès et les conditions d'admissibilité à l'assistance multilatérale exceptionnelle. Ces détails sont actuellement en cours d'étude dans le cadre du processus financier du G-7 et devraient faire l'objet de rapports aux chefs de gouvernement à Lyon; nous espérons avoir l'occasion de promouvoir cette initiative et d'en assurer la conclusion avec les réunions d'automne du FMI et du comité de développement.

Merci, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup.

Y a-t-il des questions?

[Français]

Monsieur Bergeron.

M. Bergeron (Verchères): Comme le président le signalait, ce comité s'intéresse particulièrement depuis plusieurs mois à la question de la réforme des institutions financières internationales.

La deuxième recommandation du rapport du comité qui s'intitulait De Bretton Woods à Halifax et au-delà: vers un 21e sommet pour relever les défis du XXIe siècle parlait d'une stratégie globale d'information du public sur, d'une part, les enjeux du sommet d'Halifax et, d'autre part, sur le suivi qui serait donné aux décisions prises lors du sommet d'Halifax.

Il était également question que la réforme des institutions financières internationales fasse l'objet d'une étude approfondie de la part du Forum national sur les relations internationales du Canada, qui se tenait à Toronto en septembre dernier. Ce ne fut pas le cas. La question de la réforme des institutions financières internationales n'a pas plus que toute autre question retenu l'attention des participants lors de ce forum.

Nous avions parlé de la mise en place d'une stratégie globale d'information. Ce qu'on retient de l'expérience d'Halifax et de ce qui a suivi, c'est qu'il ne semble pas que les dirigeants des pays du G-7 se soient attardés plus qu'il ne le fallait à la question des institutions financières internationales lors du sommet du G-7, puisqu'il y avait un certain nombre d'autres questions politiques à l'ordre du jour qui ont, si je puis dire, volé la vedette à ce moment.

Ce sommet devait tout particulièrement se pencher sur les réformes des institutions financières internationales. Mes propos se basent sur ce qu'on a pu voir de l'extérieur, et je vous renvoie la balle en disant que ce qu'on a pu voir de l'extérieur a été le fruit de la stratégie que vous aviez mise sur pied.

Ce que nous avons pu voir de l'extérieur, c'est que la question des institutions financières internationales n'a finalement joui que d'une attention relativement secondaire lors des discussions du sommet d'Halifax.

D'autre part, nous n'avons pas vraiment l'impression que les recommandations formulées dans le rapport du Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international aient véritablement connu des suites lors du sommet d'Halifax, ni dans les mois qui ont suivi jusqu'à aujourd'hui.

On nous a bien sûr parlé, dans le document qu'on nous a remis sur l'année du Canada à la présidence du G-7, des améliorations qui sont en cours quant à la saine gestion des différentes institutions financières internationales, mais nous sommes encore un peu dans l'expectative quant à la transparence des opérations des institutions financières internationales; quant à la priorité qui doit être accordée au développement humain durable; quant à la démocratisation de ces institutions, particulièrement quant à la plus grande participation des pays bénéficiaires; quant à l'élimination des différents dédoublements entre les différentes institutions financières internationales; et quant à l'allégement des programmes d'ajustement structurel.

On nous a parlé un petit peu de la présidence canadienne qui, fort malheureusement, s'est terminée à la fin de 1995 sans qu'on ait pu voir de résultats très tangibles de ses opérations de modification ou de réforme des institutions financières internationales.

Quelles sont vos perspectives quant à la prochaine présidence, la présidence actuelle, et quant au prochain sommet par rapport aux suites qui doivent être données au sommet d'Halifax?

Peut-on véritablement s'attendre à des résultats, à plus ou moins long terme, par rapport aux différents thèmes que j'ai soulevés? On est plutôt dubitatifs quant à la qualité des résultats depuis le sommet d'Halifax.

.0940

M. Smith: J'aimerais que M. Bernes se joigne à moi pour répondre à cette question. Je dois vous dire qu'à Halifax, même si d'autres sujets, dont la Bosnie, ont surgi à la dernière minute, les leaders ont eu une bonne discussion. J'étais là comme sherpa sur ce sujet.

Une réforme des institutions internationales financières exige une collaboration entre les sept pays membres du G-7. Les leaders avaient fait un travail de préparation important avant Halifax et ils ont dit aux fonctionnaires de pousser davantage certains points et leur ont donné des directions pour l'avenir.

À l'issue du sommet, nous avions fait une coordination entre les sept pays concernant la gestion des quatre organisations. Il faut toutefois se rappeler que dans les trois organisations - je n'inclus pas les Nations unies - , en particulier la Banque mondiale et le FMI, on retrouve plusieurs autres pays membres. Il faut donc procéder avec une certaine délicatesse; les autres pays n'apprécieraient pas du tout l'idée d'un directoire. Il n'y a pas de directoire. Nous essayons de pousser nos idées mais en collaboration avec les autres pays.

M. Bernes aimerait peut-être ajouter quelque chose puisqu'il s'agit d'une question importante. Nous avons en effet travaillé davantage avec les autres pays que par le biais de programmes d'information au grand public, qui est moins en mesure d'influencer les décisions des organisations.

[Traduction]

M. Bernes: Je me souviens que, dans la question à laquelle les chefs de gouvernement ont répondu à Halifax, on leur demandait si les institutions financières internationales étaient de taille à relever les défis du siècle prochain. Ils ont répondu par l'affirmative. Ces institutions ne sont pas parfaites, elles ont fait des erreurs, mais elles ont réussi à en corriger certaines. Il reste encore des progrès importants à faire, mais les structures sont fondamentalement saines. Dans ce contexte, les chefs de gouvernement ont fait diverses recommandations dont certaines figurent dans le rapport de votre comité au gouvernement.

On peut toujours se demander si le verre est à moitié plein ou à moitié vide. Évidemment, il y a toujours des progrès à faire, mais étant donné que le Sommet de Halifax s'est tenu il y a moins d'un an et que, et comme l'a dit Gordon, il est indispensable d'obtenir l'adhésion de la communauté internationale, on ne peut pas, comme le G-7, dire que les choses vont se passer ainsi. Je pense que les organisations internationales ont fait des progrès tout à fait remarquables, en particulier dans le contexte du FMI.

Comme je l'ai dit, il suffit, pour s'en convaincre, de considérer un certain nombre de décisions: les modifications apportées aux pratiques de surveillance, les nouvelles normes concernant les données, le mécanisme de financement d'urgence, les progrès apportés à la révision du onzième quota et l'augmentation des ressources disponibles en vertu des Accords généraux d'emprunt, les modalités d'extension de la Facilité d'ajustement structurel renforcées et la plus grande attention portée aux préoccupations sociales dans le cadre des programmes de la FASR.

En ce qui concerne la publication des données, des mesures ont déjà été prises. Le Canada voudrait qu'on aille encore plus loin. À Washington, M. Martin a préconisé la publication par le FMI des rapports prévus à l'article 4. Ces publications causent un problème, mais pas pour le G-7. Un certain nombre de pays en développement ne souhaitent pas que les rapports les concernant soient publiés, car ils redoutent les conséquences de la divulgation des analyses objectives qu'on y trouve.

.0945

Comme je l'ai dit, grâce à un certain nombre d'autres organismes, notamment le G-10, le Comité de Bâle des règles et pratiques de contrôle des opérations bancaires et l'Organisation internationale des commissions de valeurs, des décisions de suivi ont été présentées aux ministres et devraient permettre d'aboutir à une conclusion.

En ce qui concerne la Banque mondiale, comme je l'ai indiqué, au cours de l'année dernière, le nouveau président - et vous aurez sans doute l'occasion de lui poser directement la question - a mis l'accent sur l'amélioration de la transparence de la Banque mondiale, sans doute en réponse aux pressions exercées à Halifax, mais sans doute également à cause de ses dispositions naturelles. Il s'agit de travailler avec toutes les parties intéressées pour faire en sorte que dans la mesure du possible, chaque pays assume la responsabilité de l'élaboration de la stratégie d'aide aux pays, qu'on parvienne à un vaste processus de participation de ces pays, que l'on traite des questions de gouvernance, que l'on mette l'accent sur la réduction de la pauvreté et que les ressources consacrées aux programmes comportent un plus grand engagement à réduire la pauvreté et les problèmes sociaux.

En ce qui concerne votre rapport, une bonne partie des thèmes abordés ont été approuvés à Halifax, mais il y a eu en outre un suivi important par rapport aux autres démarches. Cela étant dit, il reste du travail à faire.

Le président: Merci.

Monsieur Morrison.

M. Morrison (Swift Current - Maple Creek - Assiniboia) Je n'ai pas de questions à poser.

Le président: Monsieur Flis.

M. Flis (Parkdale - High Park): Je voudrais poser ma première question au sous-ministre des Affaires étrangères.

Lorsque le premier ministre est allé à Moscou pour le sommet nucléaire - et nous sommes tous d'accord pour dire que ce sommet était attendu depuis longtemps, car il est grand temps qu'on règle des problèmes comme celui des déchets nucléaires déversés en mer - il a également été question de ce qu'on doit faire du plutonium après le démantèlement des ogives nucléaires. Est-il vrai que le premier ministre ait promis d'envisager la possibilité de brûler ce plutonium dans nos réacteurs CANDU? Cette proposition a-t-elle fait l'objet de recherches? Le premier ministre a-t-il été bien informé des risques d'une telle entreprise? Cette proposition ne risque-t-elle pas d'exposer le Canada à l'infiltration de terroristes qui pourraient chercher à voler ce plutonium? J'aimerais que vous répondiez à cette question.

M. Smith: Monsieur le président, comme le savent M. Flis et les membres du comité, le démantèlement des armes nucléaires va produire d'énormes quantités de plutonium. Il faut évidemment se préoccuper de faire en sorte que ce plutonium soit contrôlé, ou mieux, qu'il soit transformé ou utilisé de telle façon qu'il ne puisse plus jamais servir à la fabrication d'armes. La communauté internationale a envisagé différents procédés, dont la vitrification, mais on pourrait aussi transformer le plutonium en MOX, que l'on pourrait brûler assez facilement et efficacement dans un réacteur CANDU à cause de la nature même de ce réacteur.

Ce qu'a dit le premier ministre - et nous avons beaucoup travaillé sur ce sujet - c'est qu'il était effectivement disposé à ce qu'on travaille sur cette idée, qui semble bonne à première vue. Mais il faut poursuivre les recherches pour que le plutonium ne présente pas de danger pour l'environnement ou la sécurité.

.0950

Il est important de bien comprendre que ce n'est pas du plutonium qui arrivera au Canada. Il sera transformé en substance qui ne peut pas servir à fabriquer une arme.

Nous considérons donc actuellement - et je précise bien ``actuellement'', car il reste du travail à faire pour garantir la sécurité de l'opération - qu'une telle activité ne présente pas de grands dangers et que nous ne risquons pas de voir cette substance détournée par quelqu'un qui voudrait se fabriquer une bombe. Mais il faut encore travailler sur les différentes techniques, sur les questions de sécurité et de manutention, de même que sur les questions environnementales.

D'une façon ou d'une autre, nos réacteurs CANDU ont besoin de combustible. Il s'agit d'une forme de combustible parmi d'autres.

Comme je l'ai dit tout à l'heure, il reste que les réacteurs nucléaires présentent un certain danger. Nous pensons qu'au Canada, compte tenu des caractéristiques de nos réacteurs et du contrôle qu'exerce la Commission de contrôle de l'énergie atomique, les risques sont parfaitement gérés et que le nucléaire est une énergie sûre.

Ce n'est qu'à la condition d'une entente absolument sûre qu'en définitive, le gouvernement canadien pourrait accepter de brûler ce combustible MOX dans nos réacteurs CANDU. Voilà ce que je peux dire en toute confiance.

M. Flis: Les prévisions budgétaires d'un autre ministère indiquent que la recherche et le travail scientifiques à Chalk River ont subit des compressions budgétaires importantes. Pourquoi porter atteinte à la capacité scientifique du Canada au moment même où le pays aurait à assumer la responsabilité supplémentaire d'une telle opération?

M. Smith: Monsieur le président, je vous invite à faire comparaître ici celui qui m'a précédé en tant que sous-ministre et qui est actuellement président d'Énergie atomique du Canada, Limitée; je suis sûr qu'il serait enchanté de venir vous parler de cette question. Je ne suis pas véritablement compétent pour parler des conséquences de la réduction du programme de recherche de l'EACL.

Le président: La question visait peut-être plutôt à faire ressortir le problème, tout simplement.

M. Flis: Nous pourrions peut-être profiter de la présence du sous-ministre pour solliciter son avis, puisque ce comité va aborder l'élaboration d'une politique nationale et internationale sur l'Arctique, après les sommets qui se sont tenus sur le déversement de déchets nucléaires en mer et sur d'autres questions environnementales. Il y a actuellement des sous-marins nucléaires dans les eaux de l'Arctique.

Le comité devrait-il aborder cette question, ou a-t-elle déjà été traitée suffisamment? Ne risquons-nous pas de perdre notre temps là-dessus, alors que nous allons élaborer une politique étrangère canadienne pour l'Arctique?

M. Smith: De façon générale, il serait bien utile - à mon avis, mais je pense que mon ministre, M. Axworthy, partage cet avis - que le comité consacre du temps à l'étude des questions de l'Arctique et à la coopération dans l'Arctique.

Comme le sait M. Flis, puisqu'il a été secrétaire parlementaire, nous avons fait de la coopération dans l'Arctique une priorité importante pour le gouvernement.

Nous avons convaincu un certain nombre de pays à participer à un conseil de l'Arctique, dont les premières réunions au niveau ministériel devraient se tenir au début de juillet.

Cette coopération portera sur divers sujets, dont l'environnement, car encore une fois, nous ne savons que trop à quel point cet environnement est sensible aux catastrophes écologiques de toute sorte. Comme vous l'avez dit, il peut arriver que des sous-marins nucléaires se rendent dans l'Arctique, et le conseil va sans doute aborder cette question.

Monsieur le président, pour répondre à la question de M. Flis, j'invite instamment le comité à travailler à la définition de ce que devraient être nos objectifs et nos priorités en matière de coopération dans l'Arctique, et à la façon dont le conseil de l'Arctique devrait fonctionner.

.0955

M. Flis: Merci.

Le président: Merci. Monsieur Assadourian.

M. Assadourian (Don Valley-Nord): Merci beaucoup.

Je voudrais poser trois courtes questions. Vous avez déjà répondu partiellement à la première. Elle porte sur le G-7,5 ou le G-8. J'aimerais avoir vos commentaires. Pourquoi n'impose-t-on pas de conditions à la Russie? On pourrait, par exemple, lui accorder cinq ans pour se conformer à ces conditions, après quoi le statut de la Russie serait révisé. Nous pourrions dire aux Russes: si vous vous conformez à certaines exigences que nous vous soumettons, vous pourriez vous joindre au G-7 et en faire le G-8. Voilà ma première question.

Ma deuxième question concerne la sécurité nucléaire. Dans ce rapport, à la page 6, vous signalez que quatre pays, à savoir la Russie, l'Ukraine, la Lituanie et la Bulgarie, ont des centrales nucléaires aussi dangereuses que celle de Tchernobyl. Je crois que c'est aussi le cas de l'Arménie.

Pouvez-vous m'indiquer si la centrale nucléaire de Medzamor en Arménie fonctionne? Quelle évaluation en faites-vous en ce qui concerne la sécurité dans cette région?

Enfin, chaque pays du G-7 a ses propres normes pour évaluer les indicateurs économiques comme le niveau d'emploi, le niveau d'inflation, etc. Pourquoi n'a-t-on pas défini de normes uniformes pour mesurer ces éléments, ce qui faciliterait la communication de l'information? Les mesures seraient beaucoup plus précises. La façon de mesurer l'emploi est différente au Canada et aux États-Unis. Si on appliquait les normes canadiennes à la situation américaine, ou vice versa, on constaterait peut-être un plus fort taux de chômage. En appliquant une échelle de mesure uniforme aux pays du G-7, on devrait obtenir une image plus fidèle de la situation économique dans ces pays.

Merci.

M. Smith: Merci beaucoup.

Monsieur le président, tout d'abord, en ce qui concerne la participation de la Russie à un éventuel G-8, à l'Organisation du commerce ou à l'OCDE, je pense que la communauté internationale n'a pas tellement le choix. Nous avons évidemment intérêt à ce que la Russie devienne membre à part entière du système international, car tout le monde souhaite que la Russie continue à progresser vers la démocratie et l'économie de marché.

Il s'agit donc de faire en sorte que la Russie puisse respecter les normes sans qu'on ait à les modifier. On ne peut pas modifier les normes pour la Russie sans les modifier également pour les autres. Prenons, par exemple, le cas de la Chine au sein de l'Organisation mondiale du commerce. L'uniformité est indispensable. C'est là une question importante. Comment respecter l'équilibre entre l'application de ces normes et la nécessité d'une parfaite intégration de la Russie dans le système mondial? Évidemment, les Russes sont très sensibles à ces questions.

En ce qui concerne le G-7 ou le G-8, même s'il y a des différences entre nous sur la façon de définir le chômage et les autres indicateurs économiques - je demanderai dans un instant à M. Carin de nous donner son avis à ce sujet - même si de telles différences existent, les résultats sont du moins à peu près comparables. Il suffit de regarder la situation en Russie pour constater que les problèmes auxquels les Russes sont confrontés comme l'emploi, la réforme des institutions, les mesures de protection sociale, les problèmes de finance internationale et la stabilité des finances et du rouble sont qualitativement différents.

Nous avons dit aux Russes - et ils l'ont accepté, mais ils aimeraient évidemment accélérer le processus - qu'en ce qui concerne l'OMC et l'OCDE, ils devront respecter certaines normes; nous ne nous opposons pas à ce que la Russie se joigne au G-7, bien au contraire, mais son économie devra progresser de façon que tout le monde parle de la même chose.

Nous n'avons pas fixé de délai. Si on en fixe un, il va exercer d'énormes pressions, non pas seulement sur les Russes, ce qui pourrait être souhaitable, mais également sur le G-7, qui devra déterminer si l'objectif a été atteint ou non. Le fait de fixer un délai pourrait avoir des conséquences très négatives pour le cas où le G-7 devrait dire: vous n'avez pas réussi et nous devons vous imposer une deuxième période de cinq ans.

.1000

Je ne suis pas certain qu'il soit possible de fixer un délai, mais je reconnais avec vous qu'il est important d'énoncer des critères précis, grâce auxquels on pourra déterminer si la situation a évolué et s'il reste encore beaucoup de progrès à faire.

En ce qui concerne la centrale nucléaire en Arménie, je vais faire parvenir plus tard une réponse précise au président, à moins que mes collaborateurs ne la connaissent. Je crois que cette centrale a été remise en service, ce qui ne nous plaît guère. Nous en avons parlé aux Arméniens. Mais avant qu'on ne donne suite à mes propos, j'aimerais vous faire parvenir une réponse précise, que vous recevrez d'ici à demain matin.

Encore une fois, Barry, si vous avez davantage d'informations, faites-nous en part. Vous pouvez peut-être répondre à la troisième question et m'aider à répondre à la deuxième.

M. Barry Carin (sous-ministre adjoint, secteur de la politique économique et commerciale, ministère des Affaires étrangères et du Commerce international): Nous devons vous faire parvenir la réponse, car je ne sais pas si cette centrale fonctionne aujourd'hui.

Je sais que les préoccupations de sécurité à la centrale de Medzamor, lorsqu'il a été question de la remettre en service il y a 15 ou 18 mois, concernaient davantage les perspectives de violence et d'agitation, compte tenu des relations difficiles entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, ainsi que la capacité de la centrale à résister aux tremblements de terre. Les Arméniens n'ont pas ménagé leurs efforts pour apaiser les craintes des Occidentaux.

Un ancien vice-président de l'EACL, M. Mooradian, je crois, a participé à l'intervention du Canada. Finalement, on a fait savoir aux experts de Vienne que les préoccupations de sécurité concernant cette centrale étaient d'un ordre de grandeur différent. La centrale ne répond pas aux normes occidentales, mais elle ne suscite pas le même genre de craintes que celles des quatre pays susmentionnés.

Nous devrons vous faire parvenir les détails par la suite.

Le président: Merci beaucoup.

M. Smith: Avez-vous quelque chose à ajouter concernant les critères économiques, Barry?

M. Carin: Je ne peux que reprendre ce qu'a dit M. Smith en ce qui concerne la nature des discussions sur les sujets qui figuraient à l'ordre du jour de la conférence de Détroit ou de la conférence sur l'emploi de Lyon. Quand on parle de problèmes de chômage ou d'emploi, qui sont au coeur du sommet consacré à nos politiques intérieures, on traite de questions comme l'efficacité des charges sociales, le partage du temps de travail, la retraite anticipée et les petites et moyennes entreprises.

Voilà le genre de questions dont nous pouvons parler entre nous au sein de l'OCDE, et nous n'avons pas d'homologues russes pour en parler. Les Russes n'ont pas l'infrastructure nécessaire pour mesurer ces éléments. Ils n'ont pas le même genre de...

M. Assadourian: Et au sein du G-7?

Le président: Il demande quels sont les critères au sein du G-7. Allez-y, Tom.

M. Bernes: J'ai signalé tout à l'heure que l'une des conclusions du comité provisoire, il y a deux semaines, a été l'approbation d'un nouvel ensemble de normes sur les données par le FMI. Il s'agit effectivement d'un pas dans la bonne direction. Vous avez parfaitement identifié le problème, à savoir que les statistiques ne sont pas toujours comparables. Les nouvelles normes de données qui ont été approuvées, représentent un progrès en ce qui concerne les catégories de données à fournir, la périodicité et la mise en place d'une structure commune. Le travail n'est pas terminé, mais il s'agit d'un progrès considérable, qui devrait nous aider.

Le président: Je crois savoir que bien souvent, il y a un écart considérable entre les données canadiennes et américaines concernant nos exportations. Les chiffres américains sont différents des nôtres. Si nous ne pouvons pas nous mettre d'accord avec les Américains, qu'en sera-t-il avec les Russes?

.1005

Je voudrais revenir sur ce que disait M. Assadourian concernant la participation de la Russie au G-7. Est-ce qu'on s'est préoccupé du rôle que pourrait jouer la Russie si elle était admise au G-7 lorsque viendrait son tour d'occuper la présidence de cet organisme? Le Canada a revendiqué un certain contrôle sur le programme des activités du G-7 lorsqu'il en a occupé la présidence. Est-ce là une source de préoccupation, ou doit-on supposer qu'une fois l'économie russe relancée, le reste suivra?

M. Smith: Je crois que vous avez raison, monsieur le président. Bien que le président Eltsine ait été l'hôte du Sommet nucléaire de Moscou, la présidence du sommet a été partagée entre le président Eltsine et le président Chirac, et les Français ont participé très activement à la gestion de l'ordre du jour du sommet.

Je voudrais également ajouter que pendant que les membres du G-7 posent cette question, il n'est pas certain que ce soit le président Eltsine qui remporte les prochaines élections à Moscou, au second tour. Ce sera peut-être M. Ziouganov. Son élection poserait un problème complexe si le G-7 devenait le G-8.

Le président: Merci.

Monsieur Penson.

M. Penson (Peace River): Je voudrais vous demander de nous parler des problèmes de la dette et de la participation du Canada à la restructuration de la dette par l'intermédiaire du FMI. Peut-être avez-vous déjà abordé cette question. Vous m'excuserez, je suis arrivé en retard à cette séance.

Je voudrais tout d'abord avoir votre point de vue sur notre participation aux activités du Club de Paris et sur nos engagements en matière de radiation de la dette. Je ne pense pas qu'il faille radier la dette de pays du tiers monde. Il faudrait plutôt la suspendre jusqu'à ce qu'ils soient en mesure de la rembourser. Un jour viendra...

On a déjà vu des pays lourdement endettés se restructurer et relancer leur économie. Ils parviennent ensuite à rembourser leur dette. Je ne pense pas que l'idée d'une radiation totale de la dette puisse gagner la faveur des Canadiens d'autant plus que notre pays est lui-même endetté.

Je voudrais donc que vous nous parliez de nos engagements par l'intermédiaire du Club de Paris et que vous nous donniez votre opinion sur la question de la radiation de la dette, par opposition à sa suspension.

M. Bernes: Normalement, le Club de Paris ne préconise pas la radiation de la dette. En fait, comme vous l'avez dit, il est préférable d'opter pour le richelonnement de la dette, et c'est ce que nous avons fait. Il s'agit de négocier une restructuration de la dette de façon à la rendre supportable. La période de remboursement est plus longue, mais il peut y avoir une période de grâce ou de suspension, et le prêteur récupère son argent. Je n'ai pas de chiffres précis concernant les activités du Club de Paris, mais nous pourrons vous les faire parvenir.

Le Club de Paris se rencontre une fois par mois, essentiellement, pour examiner certains cas. Ils viennent de conclure une entente sur la dette russe. Je souligne qu'il n'est pas question de radier cette dette. Il s'agit d'un richelonnement sur une plus longue période. Les banques privées ont aussi donné leur aval à cette entente par l'entremise du Club de Londres, comme on l'appelle.

J'ai d'ailleurs parlé de dette multilatérale dans mon allocution d'ouverture; comme on avait demandé, lors de la conférence de Halifax qu'on mette au point une stratégie multilatérale d'ensemble pour régler le problème de la dette due par les pays les plus défavorisés aux institutions multilatérales, le FMI et la Banque mondiale ont présenté une proposition, il y a deux semaines environ, aux ministres réunis à Washington, et les grandes lignes de cette proposition ont été approuvées. Certains détails importants restent à préciser. Cela fera partie du travail de préparation à la réunion de Lyon. On espère que certaines décisions finales pourront être prises lors des réunions à l'automne du FMI et de la Banque mondiale.

.1010

Bien qu'on puisse s'occuper de la dette bilatérale officielle, par les offices du Club de Paris, et de la dette du secteur privé par l'entremise du Club de Londres, il reste la composante multilatérale. Elle est d'une importance critique pour certains pays en voie de développement qu'on compte parmi les plus pauvres. Ceci complétera cette stratégie. Nous avons bon espoir que des progrès seront réalisés cet automne.

M. Penson: Pour poursuivre sur ce même sujet, l'an dernier, quand le Canada a accepté de réduire la dette de la Pologne - il s'agissait de prêts consentis par la Commission canadienne du blé et par la SEE, je crois - cette dette n'a-t-elle pas été radiée plutôt que richelonnée sur une plus longue période?

M. Bernes: C'est exact. Ce n'était pas l'an dernier, en réalité, bien qu'on fasse état des chiffres dans les comptes publics à cause des pratiques comptables. En réalité, cette décision a été prise il y a environ cinq ans.

Elle touchait deux pays, la Pologne et l'Égypte. À cause des circonstances, c'est-à-dire l'énormité du fardeau de la dette de ces deux pays, et à cause d'un consensus international selon lequel les pays industrialisés d'une certaine importance devaient se répartir le fardeau, la décision a été prise de radier une partie de cette dette. Comme je le disais, cela figure tous les ans aux comptes publics, au fur et à mesure que la dette arrive à échéance et que la somme convenue est radiée.

Ce sont deux cas exceptionnels. En règle générale, les dettes publiques restent bel et bien des dettes, et doivent être remboursées.

M. Penson: Pourriez-vous nous donner plus d'explications quant à notre engagement en vertu de l'entente du Club de Paris? Quelles sommes le Canada s'est-il engagé à radier ou à richelonner?

M. Bernes: On discute de la situation de chaque pays concerné au cas par cas, et cela varie énormément.

Ce qui se passe au Club de Paris, c'est qu'on conclut une entente générale en ce qui a trait à un pays particulier, et puis les pays individuels négocient, dans le cadre de cette entente générale, leur propre entente avec le pays débiteur; dans notre cas, comme vous l'avez dit, il s'agit en général de prêts consentis par la SEE ou la Commission canadienne du blé.

Je n'ai pas les détails en main, mais je me ferai un plaisir de vous fournir, ainsi qu'aux autres membres du comité, des renseignements à propos des richelonnements qui ont eu lieu récemment.

M. Penson: Il y aurait donc une entente cadre quant aux sommes que nous sommes disposés à... Ou alors, dites-vous que toute somme prêtée à ces pays par le Canada pourrait être assujettie à une entente du Club de Paris à un moment donné, si besoin est?

M. Bernes: C'est exact; cela peut arriver, si c'est l'opinion de la majorité. Encore une fois, il y a un processus de négociation entre les créanciers. L'objectif de tous les créanciers, y compris les gouvernements, est d'assurer le remboursement de l'argent qui leur est dû. Il s'agit de voir comment faire pour qu'un pays lourdement endetté puisse continuer à produire des recettes afin de pouvoir rembourser sa dette.

Le Club de Paris procède en fait selon un processus très informel. Il n'y a pas de règles officielles. On a mis au point diverses directives de nature assez générale par le passé, quant à l'envergure des dettes qui peuvent être richelonnées et aux modalités de richelonnement, et ces directives constituent un contexte. Comme je le disais, les négociations individuelles ont lieu entre les pays concernés.

Je peux certainement vous faire parvenir, ainsi qu'aux autres membres du comité, les directives générales qui ont guidé les richelonnements récents auxquels nous avons été parties.

M. Penson: Simplement pour terminer ce que je disais, monsieur le président, voici où je voulais en venir - et je pense que vous m'avez compris - je pense que nous devrions suspendre ou richelonner plutôt que radier les dettes, parce que certains de ces pays seront peut-être en mesure de rembourser leur dette plus tard. Comme nous sommes assez lourdement endettés nous-mêmes, c'est plutôt ironique que nous radions complètement ces dettes.

Le président: Monsieur Bergeron.

[Français]

M. Bergeron: Je comprends, à la suite de la réponse de M. Bernes, qu'il reste beaucoup de travail à faire. Je regrette toutefois ne pas avoir bien saisi dans vos réponses quelles sont vos perspectives quant à la présidence actuelle et quant au processus de réforme des institutions financières internationales d'ici le prochain sommet du G-7.

M. Smith a abordé une question importante quant au rôle du G-7 dans le processus de réforme des institutions financières internationales.

.1015

C'est une question importante puisque notre comité a eu à s'y pencher à plusieurs reprises. Jusqu'à quel point le G-7 pouvait-il ou ne pouvait-il pas initier un processus de réforme des institutions financières internationales? Qui devait initier ce processus? Le G-7? les Nations unies?

Nous nous sommes posé des questions quant à la représentativité du G-7. On a soulevé tout à l'heure l'adhésion possible de la Russie au G-7. Le G-7 est-il toujours cette espèce d'association des sept puissances, des sept pays les plus industrialisés qui en viennent à jouer un rôle politique? Ou va-t-on maintenant faire de cette institution une institution plus politique en permettant à la Russie d'y adhérer?

D'autre part, si on se base simplement sur le concept des sept pays les plus industrialisés, n'admettra-t-on pas l'Espagne dans le groupe du G-7 puisque son économie est maintenant plus importante que celle du Canada? Le G-7 deviendra-t-il le G-8 ou le G-9? Finalement, qu'est-ce que le G-7? Quel rôle peut-on donner au G-7 quant à la réforme des institutions financières internationales?

M. Smith a soulevé un point important puisque nous nous sommes effectivement posé la question. À partir du moment où on prétend qu'on peut faire un sommet du G-7 portant sur la réforme des institutions financières internationales, on tient pour acquis que le G-7 peut jouer un rôle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle on a émis un rapport sur la réforme des institutions financières internationales initiée par le G-7. Si le G-7 prétend pouvoir jouer un rôle, qu'il ne vienne pas invoquer le fait qu'il ne peut pas initier ces réformes pour justifier le fait qu'il a fait peu de choses dans la réforme des institutions financières internationales, dans un premier temps.

Dans un deuxième temps, M. Bernes a abordé la question en disant que ça dépend si on voit le verre à moitié plein ou si on le voit à moitié vide. Je ne vois même pas le verre à moitié vide actuellement.

La question que j'aimerais poser est la suivante: est-ce que le fait que je ne dispose que de fort peu d'information quant au résultat des travaux du sommet d'Halifax et des suites qui y ont été données n'est pas une illustration flagrante que la stratégie globale d'information du public qui devait être mise sur pied par le gouvernement fédéral a été défaillante et déficiente, dans la mesure où les gens n'ont pas l'impression qu'il y a eu des suites intéressantes, non seulement du sommet lui-même, mais aux travaux de la présidence du Canada et maintenant de la nouvelle présidence en prévision du prochain sommet?

M. Smith: Je m'attends qu'à Lyon, on va se concentrer sur les institutions, y compris les Nations unies et le développement.

Quant au G-7, il est précisément en mesure d'initier des réformes, de proposer des idées et de trouver un accord du membership plus large dans les organisations. Quant au commerce international, on a accepté qu'il y ait un leadership des quatre pays, dont fait partie la Commission de l'union européenne.

Quant aux deux autres institutions à Washington, on a aussi accepté qu'il y ait un leadership du G-7, regroupant les ministres des Finances du G-7. Nous devons toutefois travailler avec les autres membres pour en arriver à un accord visant à changer la direction d'une institution.

Mon dernier point porte sur la possibilité que d'autres membres adhèrent au G-7. On parle ce matin de G-7 et de G-8. Certains peuvent penser qu'il serait opportun que la Chine et d'autres pays deviennent éventuellement membres. Nous devons toutefois regarder assez attentivement nos intérêts parce que si on se retrouve avec un G-9, G-10, G-11, G-12... Je puis vous assurer que les discussions sur les questions économiques internationales importantes n'auront pas lieu dans un contexte regroupant beaucoup d'autres pays.

.1020

Je crois que nous devons maintenant nous concentrer sur le G-7 ou le G-8 et la question de la Russie, et ne pas discuter de la possibilité d'admettre l'Espagne, par exemple, comme vous le mentionniez. Il me semble que nous devons considérer notre propre intérêt. Celui du Canada consiste à rester membre d'un club où on discute de questions d'économie internationale.

[Traduction]

M. Bernes: Je pense que Gordon a répondu en partie à votre première question, sur la perspective française. Le programme de réforme a été solidement approuvé, et les discussions auxquelles j'ai participé sous la présidence française visaient à mener à terme le processus lancé à Halifax.

Je pense que l'impression qui règne est qu'il y a eu beaucoup de progrès en ce qui a trait au FMI, moins en ce qui a trait à la Banque mondiale, et les français entendent bien faire du développement l'axe qui lie la Banque mondiale et les autres institutions.

Quant à l'information maintenant, l'absence d'information sur ce qui a été réalisé peut effectivement être problématique. Je pense que nous avions fourni au comité un document résumant les activités du Canada pendant l'année où il a présidé le G-7, document dans lequel nous passions en revue les conclusions de la réunion de Halifax et donnions un aperçu du suivi. C'est certainement un sujet qui était au programme quand Gordon et moi avons comparu auparavant devant ce comité, et encore une fois aujourd'hui nous sommes ici pour vous en parler. Les ministres en ont parlé dans leur discours.

Nous sommes en train de mettre la dernière main au rapport annuel sur les institutions de Bretton Woods, documents qui doivent être déposés au Parlement, selon les exigences, d'ici la fin mai. Ces documents traiteront certainement du processus de réforme mis en oeuvre au cours de l'année qui vient de s'écouler.

Nous essayons, donc, de disséminer l'information. Si quelqu'un désire nous proposer des façons d'améliorer ce processus, nous lui réservons un accueil attentif.

[Français]

M. Dupuy (Laval-Ouest): J'aimerais revenir à la question du programme nucléaire du G-7.

[Traduction]

Les pays du G-7 poursuivent trois objectifs fondamentaux en ce qui a trait au nucléaire. Premièrement la non-prolifération; deuxièmement, la sécurité; et troisièmement la sûreté.

En ce qui a trait à la non-prolifération, tous les instruments et politiques existent de longue date. Ils ont été mis en oeuvre. On adhère bien sûr à la gamme des mesures de sécurité du traité de non-prolifération et au club des exportateurs de Londres, et tout cela fonctionne d'une manière très cohérente.

Sous la rubrique de la sécurité, il y a bien sûr toutes les mesures de désarmement, y compris l'interdiction d'effectuer des essais nucléaires, et bien sûr les efforts qui visent à empêcher que les armes nucléaires tombent entre les mains d'usagers non autorisés, ou soient utilisés à des fins non autorisées.

Sous la rubrique de la sûreté environnementale, l'objectif principal est d'améliorer la manutention de l'équipement ou du matériel nucléaire, ou l'enfouissement des déchets.

On poursuit chacun de ces objectifs à l'aide d'un système très cohérent, mais quand on examine la situation, il y a certaines irrégularités, ainsi qu'une certaine incohérence. Essentiellement, le problème touche la Chine, l'Inde et le Pakistan.

Le cas de la Chine est moins problématique, car comme la Chine figure à la liste des pays qui reconnaissent avoir en leur possession des armes nucléaires, tous peuvent prétendent qu'elle tombe sous le coup du TNP. Mais au chapitre de la sûreté, certaines indications laissent quand même supposer que la Chine voudrait effectuer des essais nucléaires. Nous avons certaines raisons de croire - sous toutes réserves - que la Chine transfert peut-être du matériel, de l'équipement et de la technologie au Pakistan, si ce n'est à d'autres.

À propos de la sûreté environnementale, le problème se pose avec encore plus d'acuité en Inde et au Pakistan. Idéalement, nos politiques devraient faire en sorte que ces deux pays, qui sont des puissances nucléaires non négligeables, fassent parti du système et respectent le cadre qui a été mis en place, mais l'objectif de non-prolifération que nous poursuivons a tendance à les rebuter. Il y a donc là un manque de cohérence.

.1025

De plus, toujours au chapitre de la sûreté, deux pays membres du G-7, les États-Unis et le Canada, avaient un problème précis, parce que nous avons construit des réacteurs en Inde. Les États-Unis ont construit un réacteur, le Canada aussi. Nous avons construit un réacteur au Pakistan. Afin d'assurer l'exploitation sûre de ces réacteurs, il faut que le pays en cause coopère dans une certaine mesure, objectif que vient contrecarrer la non-prolifération que nous poursuivons. Nos réacteurs ont été fermés, et je crois savoir que le réacteur américain éprouve aussi certaines difficultés.

D'abord, mes analogies sont-elles valables? Ensuite, lors des pourparlers en cours, les pays du G-7 ont-ils donné l'impression qu'ils sont disposés à réexaminer certains aspects de leurs politiques afin de renforcer le système tout entier plutôt que quelques composantes seulement, ce qui accentuerait certaines divergences importantes dans le système?

Le président: Monsieur le sous-ministre, j'espère que vous pourrez, dans votre réponse, nous garantir que c'est le seul secteur dans votre ministère où il existe des incohérences. Ces «incohérences» pourraient devenir le thème principal de notre discussion.

M. Smith: Je n'ai pas encore admis, monsieur le président, qu'il y a des incohérences. Cependant, je suis prêt à confirmer la validité - c'est mon avis - de l'analyse faite par M. Dupuys.

J'estime bien franchement que «nous» - pas particulièrement le Canada mais plutôt les pays occidentaux - avons mis l'accent sur la non-prolifération, comme vous le dites vous-mêmes, en refusant d'affronter la réalité telle qu'elle existe en Inde et au Pakistan mais ailleurs aussi. Il y a en outre le cas d'Israël dont vous n'avez pas parlé. Le fait est que beaucoup plus de pays sont en mesure de se doter d'armes nucléaires que certains ne sont prêts à l'admettre.

Je me permets d'ajouter à votre analyse que certaines indications, et j'entends par là des indications récentes, nous permettent de croire que l'Inde et le Pakistan s'apprêtent à procéder à de nouveaux essais. Les gouvernements de l'Inde et du Pakistan affirment qu'il n'y aura pas d'essais. Néanmoins, certaines indications révèlent que leurs propres forces armées exercent des pressions en ce sens.

Je suis d'accord avec M. Dupuys lorsqu'il dit qu'il nous faut une politique globale. Nous espérons que les Chinois signeront cette année le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires au sens de la définition australienne: aucun essai. L'Inde et le Pakistan auront peut-être beaucoup de mal à résister. Mais comme vous le savez fort bien, les Chinois, les Indiens et les Pakistanais ont toujours trouvé que quand les autres puissances nucléaires se réunissent pour parler de questions nucléaires elles ne tiennent pas réellement compte de leurs problèmes et c'est l'une des raisons pour lesquelles ils ont maintenu leurs propres programmes nucléaires. Lors de la réunion de Moscou, on a donc parlé de la Chine. On a peu parlé de l'Inde et du Pakistan.

Je suis d'accord avec l'analyse de M. Dupuys lorsqu'il dit que toutes ces questions doivent être abordées dans le cadre d'une politique cohérente et j'aimerais transmettre ces avis au ministère pour que nous puissions y réfléchir avant la rencontre de Lyon; il y a bien sûr une déclaration politique sur laquelle nous pourrons nous appuyer.

Le président: Monsieur English.

M. English (Kitchener): Le rapport que vous nous avez remis comporte un chapitre assez long sur la réforme de l'ONU, sujet inscrit à l'ordre du jour de la conférence de Halifax. Bien sûr, l'an dernier marquait le cinquantième anniversaire de l'ONU et toute une pile d'études ont été réalisées, certaines au Canada, sur la réforme de l'Organisation. Ces derniers mois, le secrétaire général a signé des articles où il n'est pas question de réforme; il est maintenant question d'un risque d'effondrement.

.1030

Je note que vous dites que la situation financière de l'ONU continue d'affaiblir l'Organisation et de mettre en doute le succès des initiatives de réforme voir même que le point de crise pourrait être atteint au milieu ou vers la fin de 1996 de sorte que la situation retient l'attention aux plus hauts niveaux. Pouvez-vous nous faire le point de la situation actuelle et nous dire ce que vous projetez? La réforme est-elle vouée aux oubliettes et quelle action sera requise?

M. Smith: Je ne crois pas que la réforme soit vouée aux oubliettes. D'ailleurs, le processus de réforme se poursuit. Si nous avions plus de temps, M. Carin pourrait vous en dire plus long.

Pour en venir à la question de M. Bergeron, les huit, y compris la Russie, ont eu des rencontres sur le programme de réforme. Les rencontres ont eu lieu entre les sous-sherpas des Affaires étrangères, parmi lesquels on compte M. Carin, et au quartier général des diverses organisations onusiennes. Le processus se poursuit.

Le vrai problème c'est la menace d'une crise financière. L'ONU paie maintenant ses factures en puisant dans le fonds des opérations de maintien de la paix. Étant donné l'accord conclu avec le Congrès américain, il semblerait que les États-Unis paieront leurs arriérés, à un rythme un peu plus rapide que nous ne l'avions espéré - ce qui est une bonne nouvelle - et d'autres pays paieront aussi leurs arriérés.

La crise menace toujours, mais nous l'attendions pour le printemps, de sorte qu'il se peut qu'elle n'éclate même pas à l'automne, ou peut-être qu'elle éclatera.

Mais les membres du Congrès américain... Je sais qu'une rencontre importante aura lieu entre des parlementaires canadiens et américains où - si je peux me permettre de donner un conseil gratuit en ma qualité de fonctionnaire - il sera d'importance cruciale d'aborder la question des Nations unies. Les Américains semblent oublier que le fonctionnement efficace des Nations unies sert sans aucun doute les intérêts américains. L'ONU n'est pas un modèle d'efficience mais le Congrès américain compte à lui seul plus d'employés que les Nations unies. Je ne parle pas de tout l'appareil gouvernemental américain mais du seul Congrès. Cela donne une idée de l'ordre de grandeur.

Ce que nous acceptons mal c'est que les Américains cherchent à utiliser le paiement des arriérés comme levier pour obtenir les réformes qu'ils souhaitent. À notre avis c'est inacceptable. Nous sommes prêts à coopérer avec eux pour faire de l'ONU une organisation plus efficace et plus efficiente, mais nous ne voulons pas que cela soit utilisé comme un bâton.

Il m'apparaît très important, et je me permets de le répéter, que nous fassions tous ce que nous pouvons pour empêcher que l'élite américaine continue de croire, à tort, que l'ONU est le problème et l'atout de quelqu'un d'autre. C'est à eux.

Le président: Merci.

Je ne crois pas que vous fassiez d'affirmations gratuites. Je présiderai le comité chargé d'examiner la question du financement des institutions financières internationales, avec les Américains. M. Assadourian y sera ainsi que Mme Debien du Bloc québécois et, je crois, M. Grubel du Parti Réformiste. Nous allons tous nous entretenir avec nos collègues américains pour tenter de les encourager à faire en sorte que le Congrès continue d'appuyer ces institutions.

Je vous remercie, monsieur Smith, ainsi que vos collègues, d'être venus. Nous vous en sommes reconnaissants.

Je suis ravi de voir ici quelqu'un du ministère des Finances, M. Bernes. Si nous pouvions vous rencontrer plus régulièrement, nous réussirions peut-être à régler un plus grand nombre de problèmes.

Merci. La séance est levée jusqu'à 10 h 45; nous nous retrouverons dans la pièce 112-N où nous poursuivrons notre examen du Nord circumpolaire. Nous suspendrons nos travaux à 12 h 30.

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