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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 26 mars 1996

.1105

[Français]

La présidente: Mesdames et messieurs, la séance est ouverte. Comme c'est la première réunion du comité, je souhaite la bienvenue à tout le monde. Je suis sûre que nous allons faire un travail très intéressant.

[Traduction]

Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos premiers témoins et les remercier d'avoir répondu à notre invitation à si bref préavis.

Dick Harris nous a dit que c'est une séance d'information qui vaut l'attente, et nous nous en remettons donc à votre savoir. Vous voudrez peut-être commencer par faire les présentations.

M. Richard Neville (secrétaire adjoint et contrôleur général adjoint, Conseil du Trésor du Canada): Vous nous avez certainement lancé un défi, madame la présidente.

Madame la présidente et membres distingués de ce comité, j'aimerais vous féliciter de vos récentes nominations et vous remercier de nous avoir invités pour vous présenter un bref survol de l'univers de l'attribution des marchés.

Je suis accompagné de Ron Campbell, directeur de la Division de la gestion des marchés et de la gestion des projets. M. Pierre Adam est un agent supérieur de projet dans la division de M. Campbell.

Permettez-moi de dire, pour commencer, combien nous sommes heureux de l'occasion qui nous est offerte de travailler avec les membres de ce comité sur un sujet aussi important que l'adjudication des marchés. Nous travaillons de longue date en collaboration avec ce comité dans le but d'améliorer les procédures de passation des marchés et je ne doute pas que cette collaboration se poursuivra.

[Français]

La mise en place de procédures adéquates pour l'attribution des marchés est importante à trois points de vue: premièrement, afin d'obtenir le meilleur rapport qualité-prix pour les Canadiens; deuxièmement, pour aider les gestionnaires à atteindre leurs objectifs de programmes; et troisièmement, afin de garantir un système d'attribution équitable pour les fournisseurs.

[Traduction]

Afin de vous familiariser avec tous ces concepts, nous allons présenter un bref exposé. J'ai ici un jeu de diapositives que je vais passer en revue avec vous. Nous nous ferons un plaisir de répondre ensuite à vos questions, mais si vous avez besoin d'éclaircissements pendant la présentation, n'hésitez pas à m'interrompre.

Si vous voulez bien passer à la première page, je vais vous exposer la vue d'ensemble, qui se trouve en fait à la page 2 du texte. Je vous demande d'ouvrir votre document à cette page. Vous y voyez comment est structurée la relation entre le Conseil du Trésor, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et les ministères individuels.

Pour ce qui est du Conseil du Trésor, c'est-à-dire les ministres qui composent le Conseil du Trésor, il est appuyé par le Secrétariat du Conseil du Trésor, dont nous-mêmes sommes tous membres. C'est le Secrétariat qui établit la politique en matière de passation de marchés. Pour ce qui est de l'approbation des contrats à risque élevé, ceux qui dépassent le plafond des délégations de pouvoir, j'en traiterai dans un instant. Une fois qu'un marché atteint un certain seuil, l'approbation du Conseil du Trésor devient nécessaire.

Nous avons également la responsabilité de contrôler et d'examiner les activités contractuelles et de présenter des rapports au Parlement à ce sujet. Pour ce qui est de TPSGC, le ministère adjuge environ 50 p. 100 de tous les marchés du gouvernement fédéral. La raison de ce chiffre de 50 p. 100 est que dans le cas des biens - c'est-à-dire de tout ce qui est tangible, tel que tables, fauteuils, chars d'assaut - c'est lui qui octroie tous les marchés supérieurs à 5 000$. Les ministères ont une délégation de pouvoir jusqu'à 5 000$, mais toute acquisition d'un montant supérieur à 5 000$ doit être faite par le biais de TPSGC.

S'agissant de contrats de service, par exemple le recours à un expert-conseil, les ministères ont le choix. Ils ne sont pas tenus de passer par TPSGC. Ils peuvent les adjuger de leur propre chef. Cela dit, bon nombre de ministères continuent à recourir à TPSGC en raison du savoir-faire du ministère en matière d'acquisitions. Si un ministère pense ne pas posséder en son sein la capacité voulue, il continue à passer par TPSGC.

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Donc, avec les deux volets combinés, c'est-à-dire presque la totalité des marchés de biens, puisque tout ce qui dépasse 5 000$ doit passer par TPSGC, et le volet optionnel des services, ce ministère émet environ 50 p. 100 de tous les contrats.

Une fois qu'un marché a été adjugé, TPSGC est responsable du suivi des paiements, ainsi que de l'exécution du contrat. Il administre quelque chose dont le nom vous est sans doute encore inconnu, le «système d'invitations ouvertes à soumissionner». Vous en entendrez beaucoup parler à l'avenir.

Juste pour vous donner une idée de quoi il s'agit, c'est un système informatisé par lequel tous les besoins du gouvernement sont affichés sur un tableau d'affichage électronique que tout fournisseur peut consulter. C'est donc tout à fait ouvert et transparent, tout fournisseur pouvant savoir quels appels d'offres sont lancés. Vous entendrez beaucoup parler du service d'invitations ouvertes à soumissionner au cours des prochaines séances. Voilà donc essentiellement le rôle de TPSGC.

Les ministères - comme vous pouvez le voir, ils sont reliés par une ligne pointillée car la relation est optionnelle dans le cas des marchés de service - sont libres d'adjuger leurs propres marchés de service. Si un marché dépasse un certain seuil fixé par le Conseil du Trésor, ils doivent demander l'approbation de ce dernier. Une fois le marché adjugé, ils doivent certifier la valeur reçue pour l'argent dépensé; autrement dit, ils doivent attester que le travail a effectivement été fait et le service rendu. Ils sont responsables aussi des pratiques de vérification, c'est-à-dire qu'ils doivent s'assurer que le processus est correctement suivi à l'intérieur du ministère.

Le tableau énonce un certain nombre de garanties d'accès équitable. Il y a ce que l'on appelle le Tribunal canadien du commerce international, auprès duquel des fournisseurs peuvent intenter un recours s'ils jugent que des accords commerciaux sont enfreints. Ces accords commerciaux sont l'Accord de libre-échange nord-américain - je pense que vous connaissez tous le sigle ALENA - et aussi l'Organisation mondiale du commerce, précédemment connue sous le nom de GATT. Le GATT a maintenant pris le nom d'Organisation mondiale du commerce. Il y a aussi l'Accord sur le commerce intérieur, ACI, conclu à l'échelle canadienne entre les provinces et le gouvernement fédéral. Ce sont donc là les autres garanties d'accès équitable qui interviennent dans le processus d'ensemble.

Si vous tournez la page, vous voyez une synopsis des seuils au-delà desquels les marchés doivent être autorisés par le Conseil du Trésor. Ce n'est pas un tableau complet, toutes les délégations de pouvoir n'y figurent pas, mais vous voyez de façon générale les seuils qui s'appliquent.

Par exemple, s'agissant de travaux de construction de nature générale, si vous regardez la colonne de droite, c'est-à-dire les marchés non concurrentiels, vous voyez deux colonnes. Un ministère pourrait adjuger un marché de construction non concurrentiel jusqu'à hauteur de 40 000$ sans devoir demander l'autorisation du Conseil du Trésor. S'il y a une modification du contrat, celle-ci peut également atteindre 40 000$ avant que l'aval du Conseil du Trésor soit requis.

Prenons un exemple. Si un marché se monte à 50 000$, il dépasse le seuil de 40 000$, et donc le ministère doit s'adresser au Conseil du Trésor. Si le contrat est pour 30 000$, le ministère peut signer seul. Après l'adjudication, s'il y a une modification à hauteur de 50 000$, l'autorisation du Conseil du Trésor est nécessaire; si c'est pour moins de 40 000$ - mettons 30 000 - alors le ministère peut signer lui-même. Donc, généralement parlant, le pouvoir de signature d'un ministère, s'agissant d'un marché de construction, s'arrête à 40 000$ lors de la passation, plus un avenant pour encore 40 000$, soit un total de 80 000$.

Travaux publics et Services gouvernementaux jouit d'une délégation de pouvoir, à hauteur de 200 000$ à la signature et de 500 000$ s'agissant d'un avenant. Cela vous donne donc une idée de ce que représente ce tableau. Vous pouvez consulter l'une ou l'autre des colonnes, celle des marchés non concurrentiels et celle des marchés concurrentiels, puis celle de l'invitation ouverte à soumissionner. Dans ce dernier cas, il s'agit du service d'invitations ouvertes dont j'ai parlé tout à l'heure.

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Je pense que l'élément le plus intéressant sur cette page est à la rubrique «Biens». Vous avez la ligne «Tous les programmes non précisés», et si vous regardez dans la colonne de droite, vous voyez 40 000$ et 40 000$ respectivement pour l'entrée et la modification. N'oubliez pas que la ministre des Travaux publics et Services gouvernementaux, en vertu de la loi qui la régit à l'heure actuelle, peut déléguer jusqu'à 40 000$, mais a choisi pour le moment de ne déléguer que jusqu'à hauteur de 5 000$. Donc, en pratique, le seuil aujourd'hui est de 5 000$. Les ministères doivent s'adresser à TPSGC s'ils veulent acheter des biens pour plus de 5 000$; en dessous de 5 000$, les ministères peuvent passer contrat eux-mêmes.

Comme vous pouvez le voir, Travaux publics et Services gouvernementaux jouit d'une délégation de pouvoir beaucoup plus grande, jusqu'à 2 millions de dollars s'agissant de biens et d'un marché non concurrentiel, plus un avenant jusqu'à hauteur de 1 million de dollars. Ce chiffre augmente considérablement si vous regardez dans les deux colonnes de gauche, la colonne des marchés concurrentiels, 10 millions de dollars et 5 millions de dollars, et la colonne invitations ouvertes à soumissionner, où le chiffre est de 20 millions de dollars à la signature, avec encore10 millions de dollars pour un avenant. Tout ce qui dépasse ces sommes exige l'autorisation du Conseil du Trésor.

Dans le cas des services, vous pouvez voir que les principes sont les mêmes. Seuls les chiffres sont légèrement différents et vous avez une ligne supplémentaire pour Transports Canada.

Voilà un aperçu rapide des seuils. J'ai ici un extrait du manuel du Conseil du Trésor sur la passation des marchés, l'Annexe C, qui énonce certaines exceptions - autrement dit, différents niveaux de délégation de pouvoir pour divers ministères, selon leurs besoins. J'y ai jeté encore un coup d'oeil l'autre jour et j'ai extrait quelques exemples que je vais vous donner afin que vous puissiez vous faire une idée de cette annexe.

Le ministre responsable des Archives nationales du Canada peut passer ou modifier un marché pour l'acquisition de documents historiques si le montant total, avenant compris, ne dépasse pas 150 000$. Ainsi, le ministre responsable des Archives nationales pourra acheter quelque chose dans son domaine de compétence pour un montant supérieur au seuil général. Dans son cas, le seuil est de 150 000$.

Comme autre exemple, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire peut passer des marchés de service non concurrentiels intéressant l'enregistrement des pesticides jusqu'à hauteur de 100 000$.

Voici donc quelques exemples d'exceptions, qui ont été accordées au fil des ans, pour une raison ou pour une autre, par le Conseil du Trésor. Ces exceptions sont toutes énoncées à l'Annexe C.

Je vous parle de tout cela pour vous donner une idée de la complexité de la délégation de pouvoir. Les seuils diffèrent d'un bout à l'autre et il faut travailler avec ces seuils et les respecter.

Si vous tournez la page, je peux vous décrire la perspective du Conseil du Trésor sur l'attribution des marchés. Je tenterai d'être bref, madame la présidente.

Les objectifs du Conseil du Trésor en matière de marchés sont le meilleur rapport qualité-prix possible, c'est-à-dire l'équilibre optimal entre les avantages et les coûts, et non le prix le plus faible. En d'autres termes, même si quelqu'un offre le prix le plus bas dans un appel d'offres, il n'obtiendra pas nécessairement le marché. C'est le rapport qualité-prix qui compte, l'équilibre optimal entre les avantages et les coûts.

Nous nous soucions également de l'accès, en d'autres termes de la possibilité pour tous les fournisseurs de participer au processus; l'ouverture du processus; l'équité, car le processus doit être perçu par tous comme équitable et transparent. Nous devons également passer le test de l'examen public, tant sur le plan de la prudence que de la probité. Je n'insisterai jamais assez sur ce point, car au bout du compte tout revient à cela. Les marchés que l'on passe doivent résister à l'épreuve de l'examen public.

Les demandes concurrentielles s'autojustifient et la raison en est la transparence. Un appel d'offres est transparent pour tous les participants et il est beaucoup plus facile de cette façon d'expliquer aux soumissionnaires perdants et au public comment ce contrat particulier a été adjugé. J'ai été directeur général régional pendant plusieurs années au ministère des Travaux publics et Services gouvernementaux Canada et, ayant eu affaire à des fournisseurs dont la soumission n'a pas été retenue, vous pouvez me croire, il est beaucoup plus facile de leur expliquer comment les choses se sont passées lorsqu'il y a une situation de concurrence que lorsqu'il y a un fournisseur unique.

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Cela résout également les problèmes d'ordre moral: vous évitez le «fractionnement des marchés». Pour ceux d'entre vous qui ne connaissent pas ce terme, le fractionnement des marchés est une situation où vous avez un seuil de X. Si le marché est légèrement supérieur à cela, la tendance est de le scinder en plusieurs contrats afin de passer en dessous du seuil. Voilà ce qu'est le fractionnement des marchés. À l'évidence, nous cherchons tous à réprimer cela et nous sommes à l'affût de cette pratique. Donc, si vous entendez ce terme, voilà ce qu'il signifie.

En outre, cela résout également un problème d'ordre moral en ce sens que le marché pourrait être perçu par le public comme étant du favoritisme. Dans certains cas, un marché peut être considéré comme résultant de favoritisme politique et/ou administratif. Donc, en procédant par appel d'offres, on élimine cette perception. Nous arrivons donc à la conclusion que la concurrence est le meilleur moyen, et nous visons toujours la concurrence.

Cela dit, pourquoi les ministères ont-ils de la difficulté à respecter la politique du Conseil du Trésor? Il y a quantité de raisons. Mettez-vous quelques instants à la place d'un ministère. Il a tout d'abord la contrainte du temps. Un appel d'offres prend plus de temps, en règle générale, qu'un contrat avec un fournisseur exclusif.

Cela comporte un coût. Le temps, c'est de l'argent. S'il faut plus de temps, il en résulte un coût. Dans bien des cas, les ministères y voient un fardeau administratif. Il faut plus de temps pour adjuger un marché au moyen d'un appel d'offres qu'en faisant appel à un fournisseur exclusif. Les ministères ont des sous-objectifs qui s'excluent mutuellement. Bon nombre de gestionnaires voudraient privilégier l'exécution des programmes sans trop se soucier des bonnes procédures de passation des marchés.

Un appel d'offres exige également des connaissances et un savoir-faire. Cela suppose normalement avoir une organisation spécifique exclusivement chargée de passer les marchés. Cela représente parfois une contrainte pour les ministères, particulièrement en période de compression des effectifs. Les ressources humaines sont limitées. Les effectifs de la fonction publique ont considérablement diminué ces dernières années, ce qui fait que les ressources disponibles pour cette activité en particulier sont limitées. Vous avez également besoin d'un personnel bien formé et expert. Or, dispenser cette formation et donner cette expérience aux ressources humaines présente évidemment quelques contraintes.

Comme autres raisons pour lesquelles les ministères ont de la difficulté à respecter la politique du Conseil du Trésor, il y a les rigidités du processus d'adjudication lui-même. Premièrement, il y a quelque chose dont vous entendrez parler assez souvent, les règlements sur les marchés de l'État ou RME. Ce sont les règles qui régissent l'ensemble de la politique du Conseil du Trésor en matière d'acquisitions, règles que les ministères sont tenus de respecter.

Les règlements sur les marchés de l'État stipulent à l'heure actuelle que tout marché supérieur à 30 000$ doit faire l'objet d'un appel d'offres.

Il y a quatre exceptions à cela. L'une des exceptions sont les situations d'urgence. Si vous avez une situation d'urgence, vous n'êtes pas tenu de suivre cette politique, mais vous devez pouvoir justifier votre décision.

M. Harvard (Winnipeg-St. James): Pourquoi ce chiffre?

M. Neville: Il y a beaucoup de raisons. Nous cherchons à contrôler l'utilisation des marchés concurrentiels. Nous avons pensé que c'était un meilleur chiffre. Il est également proche de ce que prévoient les divers accords commerciaux, 25 000$. En outre, votre comité a influé sur cette décision. Nous essayons de tenir compte des vues des parlementaires exprimées dans diverses recommandations. Nous sommes donc en train de ramener le chiffre à 25 000$, et avons enclenché le mécanisme pour cela. Encore une fois, les ministères estimeront que la réduction de 30 000$ à 25 000$ du seuil rend le système encore plus rigide.

Vous avez la common law, vous avez la délégation des pouvoirs contractuels du CT - toutes ces restrictions, tous ces seuils sont perçus par les ministères comme une gêne.

En outre, il y a l'obligation de passer par TPSGC. Chaque fois que vous voulez acheter des biens pour une valeur de plus de 5 000$, vous devez passer par TPSGC. Les ministères trouvent cela contraignant.

En sus, il y a les obligations imposées par les accords commerciaux. Qu'il s'agisse de l'ALENA, du commerce intérieur ou du commerce mondial, leurs dispositions sont contraignantes au Canada et doivent être respectées. Les seuils que prévoient ces accords sont tous différents. Il faut donc suivre les différentes délégations de pouvoir de façon à respecter ces exigences. C'est une contrainte pour les ministères.

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Ces accords couvrent tant les biens que les services et la construction, c'est-à-dire la grande majorité des acquisitions. Il n'y a que quelques exceptions, de portée très limitée dans la plupart des cas.

Comme autres difficultés que voient encore les ministères, il y a les obligations d'approvisionnement auprès des Autochtones. Un certain nombre d'accords de règlement des revendications territoriales ont été signés et, à toutes fins pratiques, chacun prévoit un seuil différent en matière de passation des marchés. Il faut donc tenir compte des divers accords de règlement des revendications territoriales, à quoi s'ajoute la possibilité d'un programme d'achat réservé aux fournisseurs autochtones. C'est en cours de négociation et cela présente un autre problème potentiel aux ministères.

Il y a aussi les rapports sur les marchés attribués, un rapport pour chaque accord commercial, pour le RME et pour l'approvisionnement auprès des Autochtones. C'est aux ministères de rédiger ces rapports. Nous reviendrons vous présenter plus tard ce printemps le rapport 1994-1995 sur les marchés attribués, et la clé ici est la standardisation des formats. À partir de l'exercice 1995, nous essaierons de faciliter les choses aux ministères en n'ayant plus qu'un seul rapport. Mais, dans l'intervalle, c'est toujours une grosse contrainte pour les ministères.

Je vais maintenant passer à la page suivante, qui comporte un certain nombre de diagrammes circulaires. Vous voyez là le sommaire des activités contractuelles du gouvernement, l'univers des marchés gouvernementaux, si vous voulez. Je commencerai par la partie gauche, le nombre des marchés, en partant du bas, l'année 1991-1992.

Cent quatre-vingt-onze mille contrats ont été signés en 1991-1992, 171 000 en 1992-1993 et 183 000 en 1993-1994. Généralement parlant, le nombre des marchés tend à diminuer, de façon générale. Mais sur le plan de la distribution entre marchés concurrentiels et non concurrentiels, vous remarquerez que la proportion des premiers est en baisse. Il y a donc, en volume, un plus grand nombre de marchés non concurrentiels.

Sur la partie droite de la page, vous avez la valeur des marchés. Si vous commencez par le bas, en 1991-1992, la valeur totale était d'environ 9 milliards de dollars et ce chiffre est resté à peu près stable les années suivantes, avec 9,8 milliards de dollars en 1992-1993 et 8,9 milliards de dollars en 1993-1994. La dépense globale est donc à peu près la même, mais là encore, si vous regardez la répartition, la valeur des marchés concurrentiels a légèrement diminué. Mais il ne faut pas tant considérer la valeur, car il pourrait y avoir un gros contrat qui pèse sur le chiffre, il faut plutôt considérer le nombre des contrats, et là vous pouvez voir qu'il y a diminution.

Cela dit, nous pensons que les chiffres les plus révélateurs figurent sur la page suivante. Je pense que tout le reste de ce que nous vous dirons aujourd'hui est résumé sur cette page. Ce sont les modifications contractuelles pour la même période. Encore une fois, si vous regardez le nombre des modifications de contrat, en 1991-1992, il y en a eu environ 40 000, chiffre qui est resté à peu près stable sur les trois années. Mais si vous regardez le nombre de modifications inférieures à 30 000$, vous constatez une hausse sensible, ce qui appelle la question de savoir pourquoi il y a tant d'avenants inférieurs à 30 000$. Je pense que nous devinons tous la raison.

Sur la partie droite, vous verrez les équivalents en dollars. Encore une fois, on constate une augmentation sensible de la valeur des modifications. Cela peut probablement s'expliquer par l'existence d'un certain nombre d'avenants majeurs. Nous nous concentrons toujours sur le nombre de contrats concurrentiels par opposition aux non concurrentiels et sur les modifications supérieures à 30 000 par opposition à celles inférieures à 30 000$, la partie gauche de la page. Ces statistiques font apparaître un problème non négligeable.

Il y a quatre ministères qui procèdent à des modifications de marché importantes. On y trouve les noms de ceux auxquels on pouvait s'attendre, mais aussi d'autres plus inattendus. En 1991-1992, le ministère de la Défense nationale avait 16 500 modifications valant 311 millions de dollars, chiffre qui est passé à 18 000 valant 598 millions de dollars, puis 17 974 valant 1,114 millions de dollars. L'Agence spatiale canadienne a eu 156 modifications en 1991-1992, valant 5 millions de dollars, et 462 modifications en 1993-1994, valant 125 millions de dollars. Vous pouvez voir que les autres affichent une aussi une augmentation, de façon générale. Ce sont les quatre ministères qui ont eu la majorité des modifications contractuelles au cours des trois dernières années.

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Je voudrais maintenant passer aux pratiques exemplaires pour une bonne gestion de l'attribution des marchés. Vous voyez ici certaines des suggestions que nous faisons aux ministères dans le but d'améliorer le processus. Premièrement, il s'agit pour eux de disposer d'une structure adéquate de soutien des initiatives ministérielles en matière d'attribution des marchés. Une autre façon de formuler cela serait de dire que les ministères doivent disposer d'une section spécifique s'occupant de l'adjudication des marchés; deuxièmement, des mécanismes d'examen des marchés internes efficaces, peut-être même avec l'obligation de demander l'aval du sous-ministre ou du sous-ministre adjoint pour tous les marchés non concurrentiels et tous ceux passés avec d'anciens fonctionnaires, à l'exception de ceux qui se sont prévalus du PDA ou du PERA, la prime de départ anticipé ou la prime de départ à la retraite anticipée; troisièmement, veiller à ce que les risques contractuels soient couverts par les vérifications comptables internes; quatrièmement, la formation des gestionnaires et des employés à l'approvisionnement, qui est essentielle à la viabilité du processus de passation des marchés.

Au sein du Conseil du Trésor, nous avons cherché à résoudre certains des problèmes au moyen des mesures ou initiatives suivantes. J'ai maintenant rencontré à plusieurs reprises les sous-ministres pour discuter des moyens par lesquels des améliorations pourront être obtenues au cours des années à venir. Les sous-ministres, dans leur optique propre, ont entrepris d'examiner les pratiques d'attribution des marchés au sein de leurs ministères respectifs pour assurer une concurrence optimale et veiller à ce que tous les marchés non concurrentiels soient pleinement justifiables. Voilà les assurances que les sous-ministres nous ont données. Les données actuellement recueillies ne donnent qu'un instantané de l'activité contractuelle globale du gouvernement et l'identification des tendances et la modification des données saisies permettra d'améliorer l'utilité du rapport sur l'attribution des marchés de 1996. Voilà, en gros, ce que nous avons fait.

Je vais maintenant passer à la page suivante. Nous avons également publié un certain nombre de documents pour aider les ministères. Je vous laisse lire cela à loisir, mais un certain nombre de politiques, de guides ou de directives ont été publiés pour faciliter les choses aux ministères. Des vérifications ont été menées par tous les ministères pour s'assurer que les dépenses de fin d'exercice - le cas échéant - sont imputées à l'exercice voulu. Nous tenons à ce que cette comptabilité soit correctement faite et les vérifications internes menées nous en donnent l'assurance.

En outre, nous offrons divers cours de formation par le biais de Formation et Perfectionnement Canada. Nous avons participé à la mise au point de ces cours et nous les dispensons sur place, dans les ministères concernés.

Le SCT a mis en place une fonction de vérification, d'examen et d'évaluation en liaison avec les ministères. Jusqu'à présent, 57 vérifications des politiques de passation des marchés ont été réalisées par 24 ministères, et je pense donc que nous faisons notre part de ce point de vue. Nous allons réévaluer ces renseignements après la publication du rapport de 1994-1995, toujours pour isoler toute évolution de la tendance.

Cela dit, il faut être prudent car ces transactions ont déjà eu lieu. Donc, même si le rapport les concernant va être publié prochainement, il ne fera pas nécessairement apparaître une modification de la tendance. Nous comptons que cette évolution interviendra à partir de 1996, une fois les nouvelles procédures mises en place.

Les initiatives dont j'ai parlé visent au bon déroulement de l'attribution des marchés au sein de l'administration fédérale. Toutefois, ce sont des mesures provisoires pendant la période de transition. Notre objectif à long terme est d'établir une stratégie d'information financière destinée à améliorer les renseignements comptables et les rendre plus visibles pour les gestionnaires.

Voilà donc, en bref, un survol de la passation des marchés. Si nous avions plus de temps, nous aurions pu vous donner des renseignements plus détaillés. Mais, j'espère vous avoir donné au moins, comme point de départ, un bon aperçu de l'attribution des marchés.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Neville. Je suis sûre que votre exposé va susciter beaucoup de questions, d'autant que vous êtes particulièrement bien placé pour nous faire le point des développements récents en la matière. Je pense que nous sommes tous intéressés de voir comment on veille à ce que nous en ayons pour notre argent.

Nous allons commencer par des tours de question de cinq minutes, car le temps nous est compté.

[Français]

Monsieur Fillion, vous avez la parole.

M. Fillion (Chicoutimi): J'aimerais revenir à la page 3 de votre document, qui est la clé de l'ensemble, simplement pour préciser quelques termes. Lorsque vous parlez de marché non concurrentiel, est-ce qu'il s'agit d'un fournisseur unique?

M. Neville: Oui, en règle générale, c'est un fournisseur unique.

M. Fillion: Dans ce cas, il n'y a pas d'appels d'offres concernant les montants qui sont inscrits dans chacun des secteurs.

M. Neville: C'est exact.

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M. Fillion: Maintenant, au niveau des marchés concurrentiels, y a-t-il un nombre limité de soumissionnaires? Est-ce également limité dans certains secteurs, selon les régions, le matériel ou les services à acquérir?

M. Neville: C'est une bonne question. Cela dépend. Encore une fois, en règle générale, c'est l'agent responsable des contrats qui détermine le nombre de fournisseurs qu'il veut bien inviter à faire une offre. Par conséquent, le nombre n'est pas nécessairement fixe. Ça peut être un nombre assez élevé ou ça peut être un minimum de deux.

M. Fillion: Est-ce que c'est sur invitation?

M. Neville: Oui.

M. Fillion: Donc, c'est déterminé par le fonctionnaire.

M. Neville: Oui. Au ministère des Travaux publics et des Services gouvernementaux, il y a un système électronique qui soumet les noms de trois fournisseurs si le montant de l'offre doit se situer entre 2 500$ et 5 000$. Si c'est moins de 2 500$, c'est à la discrétion du fonctionnaire.

M. Fillion: Votre système d'information est le SIOS, n'est-ce pas?

M. Neville: Oui.

M. Fillion: Je suis un néophyte dans ce dossier. Est-ce que vous disposez d'instruments qui me permettent à moi, en tant qu'élu, de vérifier régulièrement les contrats que vous mettez à la disposition du public?

M. Neville: Oui.

M. Fillion: Est-ce que je peux avoir quelque chose, à mon bureau, qui me permette de vous suivre au jour le jour?

M. Neville: C'est une question que vous pourriez poser à mes collègues de Travaux publics et Services gouvernementaux qui vont se présenter ici. Ils sont tout à fait au courant et ils ont d'ailleurs offert à tous les députés un service électronique qui leur permet de suivre ces dossiers de leur bureau. Je crois même que vous pourriez y avoir accès aujourd'hui à un coût minime ou même gratuitement.

M. Fillion: Si vous me le permettez, il faudra peut-être vérifier parce que j'ai fait une demande récemment pour obtenir ce service et on m'a fait savoir que le coût serait de 1 000$ ou plus par mois. Est-ce que c'est possible? Nous ne parlons peut-être pas du même système.

M. Neville: Je ne pense pas que nous parlions de la même chose, effectivement. En règle générale, même un fournisseur à l'extérieur pourrait obtenir ce service. Pour un fournisseur typique, une formule a été rédigée et il doit payer environ 300$ par année. Cela dit, c'est pour un fournisseur qui l'utilise assez fréquemment, peut-être deux fois par semaine ou une fois toutes les deux semaines.

En ce qui concerne ce qui vous a été offert, je vous suggère de poser la question directement à Travaux publics et Services gouvernementaux, mais je crois que les frais sont minimes dans votre cas ou que c'est même gratuit. Ce n'est sûrement pas 1 000$.

M. Fillion: Quels renseignements trouve-t-on dans ce programme dont vous parlez?

M. Neville: Vous allez voir tous les contrats qui sont dans le système auquel les fournisseurs ont accès. Cela vous donne aussi le nombre des contrats qui ont déjà été octroyés, le nom de la compagnie qui a été approuvée et d'autres renseignements statistiques disponibles ainsi que les nouvelles qui peuvent être annoncées concernant les séminaires.

M. Fillion: Est-ce qu'on peut y trouver aussi les nouvelles soumissions que vous demandez ou les nouveaux contrats?

M. Neville: Seulement lorsqu'ils sont dans le système. Vous trouvez aussi les demandes qui ont été soumises.

[Difficultés Techniques - Éditeur]

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[Traduction]

La présidente: Monsieur Gilmour.

M. Gilmour (Comox - Alberni): Un certain nombre d'organismes - le MDN, Travaux publics et Affaires indiennes - nous ont expliqué comment les marchés sont attribués chez eux et le rôle de Travaux publics dans cette équation. Ils nous ont dit que, dans la plupart des cas, si une offre est la moins chère et si l'organisme demandeur est en faveur de ce soumissionnaire particulier, c'est à lui que le marché sera adjugé.

J'aimerais parler d'un contrat particulier, non pas que je m'attende à ce que vous le connaissiez, mais à titre d'exemple. Je pense que la présidente le connaît. Il s'agit d'un marché de 35 millions de dollars portant sur l'entretien de 12 dragueurs de mines. On ne peut plus les appeler dragueurs de mines aujourd'hui, il faut les appeler navires maritimes. Le chantier naval de Halifax avait fait l'offre la moins chère et techniquement la meilleure. Le MDN recommandait de lui attribuer le marché. Or, il ne l'a pas obtenu. Il est allé à une autre entreprise, dont l'offre était plus chère de 1 million de dollars.

Je voudrais donc vous poser la question suivante. Je sais qu'il y a une vérification. Vous pouvez vérifier l'exécution du contrat - c'est facile à faire - mais quel processus avez-vous en place concernant l'adjudication? Y a-t-il un mécanisme qui permet d'analyser le processus suivi pour l'adjudication d'un marché concurrentiel? En l'occurrence, il y avait quatre soumissionnaires.

À la page 4 vous parlez de transparence, d'équité, d'examen public et de perception de favoritisme, et tout cela se trouve mis en question dans cette adjudication. Quel mécanisme existe-t-il pour contrôler cela?

M. Neville: Je ne suis pas au courant de ce contrat, et je ne peux donc vous en parler spécifiquement. Je donnerai une réponse générale.

Lorsqu'un ministère présente une demande d'acquisition de quelque chose à Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, un bien en l'occurrence, il incombe à TPSGC, plus particulièrement à son groupe professionnel, d'examiner la demande et les spécifications et de vérifier qu'elles soient appropriées, puis de déterminer la meilleure procédure pour répondre à ce besoin.

Il rédige ce que l'on appelle un «plan d'acquisition», un document formel, qu'il soumet au ministère client pour accord. Ensuite, il exécute ce plan d'acquisition. L'évaluation est faite à l'interne, sur la base de la présentation que nous recevons, et puis le contrat est adjugé conformément à la décision prise.

Ensuite, si un fournisseur estime que la décision est fautive, il peut demander une justification. Je crois que cette demande est accordée dans pratiquement tous les cas. C'est un processus plutôt rigoureux, où des fonctionnaires de TPSGC s'assoient avec le fournisseur concerné et passent en revue son offre, expliquent la démarche suivie et donnent leur avis sur les résultats.

Dans un cas dont je me souviens précisément, on a même demandé à une tierce partie de suivre le processus d'un bout à l'autre, de façon à pouvoir faire un debriefing plus objectif après l'adjudication du marché. Comme je l'ai dit précédemment, ce debriefing est offert aux fournisseurs et ils peuvent s'en prévaloir s'ils le veulent.

M. Gilmour: Dans ce cas particulier, je crois savoir qu'il y a eu un debriefing mais qu'il était plutôt superficiel. Le fournisseur n'était pas du tout convaincu. Est-ce que le Conseil du Trésor supervise ce travail ou bien est-il fait à l'interne? Et une fois que Travaux publics adjuge un contrat, est-ce qu'il reste administré à l'interne?

M. Neville: S'il correspond à sa délégation de pouvoir, oui, à moins que quelque chose retienne notre attention. Généralement parlant, c'est pour cela qu'il y a des délégations de pouvoir et des seuils. Les seuils sont tels que nous comptons que TPSGC fasse un travail très professionnel dans l'administration du processus de passation des marchés général, mais si un contrat dépasse une certaine limite, alors il est soumis au Conseil du Trésor et la décision d'adjudication est finale et prise par les ministres du Conseil du Trésor.

.1145

M. Gilmour: Quelle est la limite?

M. Neville: Comme vous pouvez le voir sur le diagramme de la page 3, s'il a opté pour l'invitation ouverte à soumissionner - et je ne sais pas si c'est le cas en l'occurrence, je dis seulement si - c'est 20 millions de dollars pour TPSGC, et une modification jusqu'à 10 millions de dollars. Si le montant du marché dépasse ces seuils, l'aval des ministres du Conseil du Trésor est nécessaire.

M. Harvard: Permettez-moi une courte intervention sur cette discussion qui se déroule entre M. Gilmour et M. Neville.

M. Gilmour, bien entendu, parle de Fenco MacLaren. Fenco MacLaren a demandé un contrôle judiciaire. Je suppose que celui-ci va avoir lieu, et donc un tribunal décidera si des erreurs ont été commises.

Il est raisonnable de penser que si les tribunaux jugent qu'une erreur a été commise, le ministère ou quelqu'un va devoir se demander si la politique elle-même laisse à désirer et s'il faut la renforcer ou la resserrer de façon à éviter que ce genre de chose se répète à l'avenir. Mais il nous faudra patienter, le temps de savoir ce que le tribunal va décider.

Je comprends. Votre parti, monsieur Gilmour, a posé un certain nombre de questions. Je pense que nous allons devoir faire preuve d'un peu de patience à cause du contrôle judiciaire qui a été demandé par une des parties plaignantes, si je puis utiliser ce qualificatif.

La question que j'aimerais poser à M. Neville intéresse les avenants aux contrats. On voit ces modifications de marché se multiplier. Comment cela se fait-il? Je pense que les modifications appellent des questions. Elles sont peut-être tout à fait justifiées et peut-être pourriez-vous nous éclairer à ce sujet.

M. Neville: Nous sommes préoccupés par l'accroissement du nombre des modifications, particulièrement de celles pour une somme inférieure à 30 000$. Nous-mêmes nous penchons sur cet aspect. Je ne pense pas pouvoir isoler une raison en particulier.

De façon générale, il y a pas mal de contrats proches du seuil de 30 000$, qui est le seuil à partir duquel il faut procéder par appel d'offres. Nous obligeons les ministères à procéder par appel d'offres si le marché est supérieur à 30 000$, sauf raison précise. Vous avez donc un scénario où, si la valeur dépasse légèrement 30 000$, il est probablement plus facile pour les ministères d'adjuger le marché pour un montant inférieur à 30 000$, et de compléter ensuite le travail au moyen d'un avenant.

M. Harvard: Est-ce que cela n'est pas contraire à l'esprit de la politique?

M. Neville: Je pense que c'est une violation de l'esprit de la politique. Je réponds oui.

M. Harvard: Vous ne pouvez discerner de raison précise, particulièrement à l'augmentation du nombre lui-même?

M. Neville: Comme vous pouvez l'imaginer, c'est très difficile à préciser. Ils formulent l'avenant de telle façon qu'il est difficile d'établir le lien entre les deux.

M. Harvard: Est-il possible de distinguer des catégories dans les plaintes formulées au sujet de l'adjudication des marchés, de la façon dont les marchés sont exécutés et évalués? Y a-t-il un type particulier de doléances de fournisseurs qui revient régulièrement et qui vous amène à vous poser des questions, ou bien les plaintes sont-elles de nature très diverse?

.1150

M. Neville: Il faut d'abord que je place cela en contexte. Je ne suis pas certain des chiffres, mais j'utilise toujours ces approximations car elles sont faciles à suivre. Songez que 1 000 marchés sont adjugés par jour, ou à peu près - peut-être un peu moins, mais pour simplifier, disons 1 000 marchés par jour. Vous avez un gagnant, bien entendu, pour chacun de ces marchés, mais vous avez sans doute de 4 000 à 5 000 fournisseurs déçus ce jour-là. Donc, nous sommes le 26 mars, le gouvernement fédéral va passer 1 000 marchés à l'échelle du pays; il y aura aujourd'hui 1 000 fournisseurs heureux, et 3 000 ou 4 000 fournisseurs malheureux. Multipliez cela par cinq et vous avez peut-être 15 000 fournisseurs par semaine qui ne sont pas exactement ravis. Par année, cela fait un chiffre élevé. Or, le nombre de plaintes que nous recevons est très faible. Je pense que c'est moins de 1 p. 100.

La majorité de ces plaignants pensent qu'ils ont un meilleur produit, même s'il est un peu plus cher que celui qui l'a emporté, et donc qu'ils offrent une meilleure valeur. Voilà une catégorie, et cette appréciation est évidemment subjective. Elle est fondée sur la perception, opposée à l'évaluation de l'agent des marchés et des ministères clients.

L'autre genre de doléance est toute simple: «c'est nous qui avons le meilleur prix, un point c'est tout, et c'est à nous que vous auriez dû acheter le produit. Puisque vous représentez l'État, vous devez dépenser le moins possible; or, nous avions le prix le plus bas, aussi pourquoi n'avez-vous pas acheté notre produit?» Ici, on ne voudrait pas que nous tenions compte du rapport qualité-prix, uniquement du prix.

Je pense que ces deux catégories couvrent la majorité des plaintes reçues.

[Français]

La présidente: Monsieur Crête, vous avez trois minutes.

M. Crête (Kamouraska - Rivière-du-Loup): Est-ce qu'il existe un tableau de la répartition des contrats par province ou par région? Ensuite, est-ce que des séances d'information sont données aux petites et moyennes entreprises à travers tout le Canada pour leur expliquer comment s'inscrire à ce système?

On a souvent l'impression que c'est beaucoup plus une question de contacts, pas nécessairement des contacts politiques mais plutôt des contacts administratifs ou d'un autre ordre. Est-ce qu'il y a des statistiques qu'on pourrait voir?

M. Neville: Ces deux questions sont différentes, je pense. Premièrement, en ce qui concerne la distribution des contrats par province, il coûte cher de recueillir des statistiques et il faut réduire les dépenses. Il n'y a pas de système qui prenne en considération tous les contrats en faisant une répartition par province, comme vous le désirez.

M. Crête: L'assurance-chômage nous dit qu'il devrait y avoir d'autres moyens. Cela fait partie des moyens. Si nous pouvions prendre connaissance de la répartition du gouvernement, on pourrait savoir si c'est équitable ou pas.

M. Neville: Il y a trois points à cette réponse. Premièrement, il n'y a pas de système en cours qui fasse une répartition par province.

En ce qui concerne la première question, il y a deux autres points que j'aimerais soulever. D'abord, les factures que l'on reçoit des fournisseurs ne sont pas toujours reliées à la bonne province. Je vais vous donner un exemple. Esso nous envoie de Nepean une facture pour des centaines de millions de dollars pour l'essence. Je pense qu'on est tous d'accord que l'essence n'est pas fabriquée en Ontario. Je ne voudrais pas avoir à étaler des chiffres qu'il serait difficile de défendre plus tard.

.1155

Troisièmement, dans les Comptes publics, il y a un tableau qui donne une répartition de certaines dépenses du gouvernement fédéral, qui représentent près de 27 p. 100 des dépenses totales. C'est une répartition pour des programmes très spécifiques, mais pas pour l'ensemble.

M. Crête: Ce n'est pas une répartition géographique?

M. Neville: Quand je parle des provinces, c'est géographique.

M. Crête: Donc, ce pourcentage de 27 p. 100 est ventilé géographiquement.

M. Neville: Oui, bien sûr, mais c'est seulement 27 p. 100 de l'ensemble des Comptes publics.

À mon avis, ça répond à votre première question. Quant à votre deuxième, vous devriez la poser à mes collègues qui seront ici bientôt. Il y a plusieurs programmes, à Travaux publics et Services gouvernementaux, qui permettent aux petits et moyens fournisseurs d'avoir accès au système, davantage aujourd'hui que dans les années précédentes.

Quand j'étais directeur général régional du Québec, on avait plusieurs réunions avec la province de Québec pour être sûrs de pouvoir toucher tous les petits et moyens fournisseurs. Si vous voulez plus de détails, je vous suggère de poser vos questions à mes collègues un peu plus tard.

La présidente: Merci, monsieur Neville.

[Traduction]

Monsieur Gilmour, trois petites minutes - avez-vous des questions?

M. Gilmour: Non.

La présidente: Monsieur Jackson.

M. Jackson (Bruce - Grey): Je ne vous envie pas vos problèmes. Venant d'une ville où nous avions le plus gros contrat, pour passer au gouvernement fédéral où vous avez tant de contrats et où tout le monde se plaint, pour différentes raisons, de ne pas les obtenir, j'ai apprécié vos remarques en réponse à M. Harvard.

J'ai deux questions concernant la sous-traitance par un entrepreneur principal. Je sais qu'il y a un problème sur la colline en ce moment, un incident mettant en jeu une employée. J'aimerais faire une remarque, puis poser une question. Vous dites que vous ne choisissez pas nécessairement l'offre la moins chère, car il peut y avoir un problème de financement ou un vice de caractère ou quelque chose du genre.

M. Neville: Désolé. Je n'ai pas saisi la dernière partie...

M. Jackson: Vous ne retenez pas nécessairement l'offre la moins chère.

M. Neville: Exact, car nous recherchons le meilleur rapport qualité-prix par opposition au prix le plus bas.

M. Jackson: Ce doit être indiqué quelque part. Il peut y avoir toutes sortes de raisons qui font que vous n'acceptiez pas l'offre la moins chère.

M. Neville: Exact, car il peut y avoir un problème de qualité de la marchandise, les normes de service peuvent ne pas être respectées ou peuvent être différentes, ou les qualifications des entrepreneurs peuvent laisser à désirer. Quantité de facteurs interviennent. Nous visons le meilleur rapport qualité-prix, et non le prix le plus bas.

M. Jackson: Donc, la plupart des plaintes sont de cette nature.

M. Neville: J'ai dit qu'il y a deux catégories de doléances et celle-ci en est une: les moins-disants n'obtiennent pas toujours le marché et pensent que nous aurions dû le leur adjuger.

M. Jackson: D'accord, nous y reviendrons. La question que j'aimerais vous poser est de savoir si l'entrepreneur principal doit répondre à toutes les exigences du gouvernement fédéral en matière d'équité salariale et à toute la réglementation régissant les employés du gouvernement.

M. Neville: Nous ne traitons qu'avec un entrepreneur principal. Nous ne sommes pas responsables des accords que celui-ci a pu conclure avec d'autres. L'entrepreneur principal est la seule autorité contractuelle avec laquelle nous traitons.

Nous attendons d'eux qu'ils respectent toutes les exigences fédérales; c'est ce que dit le contrat cadre. Les entreprises comptant plus de 100 employés, par exemple, doivent remplir certaines conditions en matière d'équité. Il y a aussi des conditions environnementales. Tout dépend du contrat. Il faut considérer chacun individuellement.

Les exigences générales du gouvernement fédéral sont établies en fonction de l'entrepreneur principal. C'est à lui que nous demandons des comptes vis à vis du respect de ces engagements.

M. Jackson: Cela dit, nous recevons quantité de plaintes de la part des sous-traitants, par exemple lorsqu'ils semblent être les derniers payés, ou ne touchent pas leur salaire, ou que leur matériel leur est enlevé sans être payé. Est-ce que le gouvernement n'a aucune obligation à leur égard? Ils n'ont de recours qu'auprès de l'entrepreneur principal?

M. Neville: C'est juste. Encore une fois, lorsque j'étais directeur général régional dans l'Ouest et au Québec, je recevais des plaintes de sous-traitants qui demandaient à être payés plus rapidement ou qui avaient quelque doléance à l'égard du principal.

.1200

La présidente: Monsieur Bryden.

M. Bryden (Hamilton - Wentworth): Je n'ai qu'une remarque sur la question, ou peut-être plusieurs questions. Je signale à mes collègues qui siègent à ce comité pour la première fois - et il n'y en a que deux d'entre nous, ici, qui ont quelque ancienneté - que la tendance à l'augmentation des contrats non concurrentiels et à la multiplication des avenants de moins de 30 000$ a déjà été remarquée par les membres du comité en juin dernier et est à l'origine de l'analyse assez fouillée de ce problème menée par le Conseil du Trésor. Je tiens donc à ce que vous sachiez que ce comité a déjà fait de l'excellent travail, en collaboration avec les fonctionnaires.

Nous sommes probablement l'un des comités les plus efficaces et je félicite le Conseil du Trésor, qui a manifestement réalisé beaucoup de progrès et beaucoup réfléchi au problème.

La présidente: Monsieur Bryden, c'est pourquoi je les qualifie de fonctionnaires exemplaires.

M. Bryden: Eh bien, c'est ce qu'ils sont.

M. Neville: Je vous remercie.

M. Bryden: J'aimerais néanmoins poser une question. En suivant votre présentation, j'ai vu que vous parlez maintenant de programme d'achats réservés. J'aimerais entendre la position du Conseil du Trésor sur toute la question des achats réservés. Pensez-vous que ces derniers aillent dans le sens d'un plus grand recours aux appels d'offres?

M. Neville: Je ne pense réellement pas qu'il nous appartienne de répondre. Nous respectons les décisions politiques et les exécutons. Cela sera décidé au niveau politique, en tant que sujet de programme, et nous serons ravis de la décision, quelle qu'elle soit.

M. Bryden: Eh bien, dans ce cas, je pense que notre comité devrait se saisir de la question des achats réservés, car elle est majeure. Je ne sais pas où elle est débattue. Elle ne l'est certainement pas à la Chambre des communes ni en caucus, ni dans aucune instance que je connaisse, et il conviendrait peut-être que le comité s'en saisisse.

Pourriez-vous néanmoins, monsieur Neville, nous expliquer de quoi il retourne?

M. Neville: Généralement parlant, un programme d'achats réservés signifie que vous réservez une certaine partie des marchés ou des contrats adjugés à la petite entreprise. C'est ainsi que je les conçois.

M. Bryden: Je vois que vous avez un programme d'achats réservés à la rubrique des obligations d'approvisionnement auprès des Autochtones. Y a-t-il des programmes d'achats réservés aux fournisseurs autochtones, par exemple?

M. Neville: Je crois savoir que c'est en cours de discussion, et c'est une possibilité.

M. Bryden: N'est-il pas vrai qu'il pourrait y avoir des programmes d'achats réservés aux provinces, par exemple? Mes collègues du Bloc québécois, ici, pourraient dire qu'une certaine proportion des marchés devrait être réservée au Québec. Vous pourriez le demander, car vous êtes du Bloc québécois et voyez les choses dans l'optique de la souveraineté, mais l'Ontario, la Colombie-Britannique ou toute autre province pourraient réclamer la même chose.

Le problème est là, et je pense que c'est une question sur laquelle le comité devrait se pencher, car si vous commencez à instaurer un régime d'achats réservés pour un groupe, alors il faut le faire pour tous les autres.

La présidente: Monsieur Neville, à vous le dernier mot.

M. Neville: Je pense qu'il faut respecter également l'Accord sur le commerce intérieur, qui a été signé par toutes les parties, et qui cherche justement à éviter ce genre de choses. Donc, ce serait problématique dans le cadre de la législation actuelle.

La présidente: Monsieur Neville, pourriez-vous nous parler d'un rapport qui doit être déposé à la fin du printemps? Pouvez-vous nous donner une date estimative de publication que nous pourrions attendre l'haleine suspendue?

M. Neville: Mon supérieur me pose cette question presque chaque jour. Nous dépendons d'un autre ministère pour les renseignements, ce qui complique manifestement les choses. Cela dit, cela demeure notre responsabilité et c'est à moi de rendre des comptes.

Nous aimerions disposer de ces renseignements vers la fin avril pour être en mesure d'en discuter et de les analyser au niveau interne, et soumettre le rapport aux ministres du Conseil du Trésor. Donc, pour vous parler très franchement, madame la présidente, il faudra attendre encore quelques mois.

La présidente: Je vous remercie. M'autorisez-vous une question rapide? Si vous deviez avancer un chiffre quant au pourcentage des marchés que l'on pourrait qualifier de sous-traitance de travaux précédemment effectués par des fonctionnaires, est-ce que l'économie réalisée par les compressions d'effectifs dans la fonction publique justifie et dépasse le surcoût de ces contrats? Y a-t-il des études à ce sujet?

M. Neville: Madame la présidente, vous avez utilisé un terme que nous n'avons pas encore employé ce matin. Assurons-nous de bien nous entendre sur le sens du mot. Vous avez parlé de «sous-traitance», ce qui n'est pas ce dont nous avons parlé jusqu'à présent ce matin. Nous avons parlé de passation de marchés.

.1205

La présidente: Oui, je le sais.

M. Neville: La sous-traitance, pour nous, revêt un sens bien précis, et correspond à ce que vous avez dit: prendre du travail effectué actuellement par la fonction publique et le transférer au secteur privé.

La présidente: Vous le donnez à l'extérieur. C'est cela.

M. Neville: Exactement. Bien. Dans ce contexte, je pense pouvoir dire que nous avons fait très peu de sous-traitance au cours des dernières années. Il y en aura peut-être davantage à l'avenir, mais jusqu'à présent c'est minime. Je ne sais pas quel est le pourcentage, il est probablement très faible. La compression des effectifs pourrait amener une augmentation, ajoutée à toutes sortes d'autres méthodes et de scénarios envisagés, mais je ne puis vraiment pas avancer de chiffre.

Donc, pour nous assurer que nous sommes sur la même longueur d'ondes, la sous-traitance en soi n'a pas représenté un montant important au cours des dernières années.

La présidente: Je vous remercie de la précision, ainsi que de votre patience. Il ressort clairement de la question de M. Bryden que nous allons devoir vous faire revenir. J'espère que vous conviendrez que ceci n'a pas été trop douloureux et que vous voudrez bien revenir nous voir ultérieurement. Nous promettons de vous donner davantage de préavis. Je vous remercie.

M. Neville: Oui, je vous remercie.

La présidente: Nous allons faire une courte pause, de peut-être quelques minutes, le temps que nos témoins suivants prennent place.

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La présidente: J'aimerais, pour commencer, souhaiter la bienvenue à M. Williams et àM. Stobbe. Puisque nous avons un peu de retard sur l'horaire, je vais couper court aux assauts de courtoisie habituels. Je suis sûre que vos exposés vont nous donner beaucoup à réfléchir. Je vous remercie, soyez les bienvenus, et veuillez nous pardonner.

M. Alan S. Williams (sous-ministre adjoint, Direction générale du service des approvisionnements, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada): Merci beaucoup, madame la présidente.

Jim et moi sommes ravis de représenter ici le sous-ministre. Je crois savoir que vous souhaitez commencer par un survol du processus de passation de marchés du gouvernement, et je vais donc vous projeter une série de diapositives dont j'ai distribué des copies. N'hésitez pas à nous interrompre si vous avez des questions ou besoin de précisions.

J'ai distribué une copie papier des diapositives et également une grande feuille dont j'aimerais commencer par vous expliquer le contenu. Vous pourrez conserver celle-ci sous les yeux pendant que nous passerons en revue les diapositives page par page.

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En gros, en vous expliquant le processus de passation des marchés, qui est indiqué ici sous forme d'organigramme, nous parlerons des valeurs et des principes qui le sous-tendent. Il y a, en gros, trois valeurs: l'intégrité, la transparence et la concurrence. Vous voyez que j'ai attribué à chacune un code-couleur afin que vous puissiez voir comment ces trois principes se répercutent sur différents éléments du processus.

Le processus de passation des marchés doit répondre également à deux grands objectifs. Le premier est de satisfaire les besoins de la clientèle. Deuxièmement, il y a souvent des objectifs socio- économiques. Vous verrez que ces deux indicateurs, les points 4 et 5, ont également un code-couleur dans l'organigramme.

Tout ce que nous faisons en matière de passation des marchés s'inscrit dans les trois valeurs que sont l'intégrité, la transparence et la concurrence, et dans les deux grands objectifs. J'espère que ces indications vous donneront un aperçu général de ce que nous cherchons à accomplir.

Passons maintenant rapidement en revue les diapositives, de façon à laisser du temps pour les questions.

Premièrement, pour vous donner une idée des ordres de grandeur, si les dépenses liées aux marchés du secteur public se montent à environ 57 ou 58 milliards de dollars, le gouvernement fédéral lui-même ne représente que 14 milliards de cette somme, soit environ 25 p. 100, et notre ministère en particulier passe des marchés pour 8,6 milliards de dollars. Plus loin dans l'exposé, vous verrez que tous les ministères procèdent à pas mal d'achats. Nous nous chargeons d'une partie pour leur compte, mais les autres sont effectuées par les ministères eux-mêmes dans le cadre de délégations de pouvoir.

Pour ce qui est de notre ministère, le ministère de la Défense nationale est le plus gros de nos quatre principaux clients, avec environ 3,6 milliards de dollars sur notre chiffre de 8,6 milliards de dollars. C'est à lui que sont destinés bon nombre des grands programmes d'achats. Nous sommes notre propre deuxième plus gros client, surtout à cause de la façon dont nous classons les acquisitions. Nous organisons une bonne part des offres permanentes. Comme nous le faisons pour le compte de tous les ministères, ces offres permanentes représentent un gros morceau des marchés gouvernementaux, avec environ 1,4 milliard de dollars au total pour notre ministère. Ce sont là les deux principaux éléments de ce chiffre de 8,6 milliards de dollars.

Pour ce qui est du genre de biens que nous achetons, les plus grosses dépenses intéressent l'informatique, avec près de 1 milliard de dollars par an. L'impression et l'édition représentent environ 500 millions de dollars, les carburants presque 500 millions de dollars, et les munitions 250 millions de dollars. Voilà donc dans quels domaines nous achetons des biens pour le compte des ministères.

Comme je viens de l'indiquer, ces trois principes directeurs sont réellement au coeur de ce que nous faisons. Nous cherchons à instiller ces valeurs à tous nos agents de négociation des contrats. Nous essayons d'appliquer un processus aussi rigoureux que possible et nous veillons à ce que, dans tout ce que nous faisons, l'intégrité du processus ne soit pas compromise. Cela suppose de ne favoriser aucun fournisseur particulier par rapport à un autre et d'assurer que les règles donnent une chance égale à tous de remporter un contrat.

Comme je l'ai indiqué au début, il y a deux objectifs principaux. Chaque achat est conçu de façon à répondre aux objectifs d'un client et, dans les nombreux cas où aucun accord commercial n'est mis en jeu, nous cherchons également à remplir des objectifs socio-économiques.

Je vais maintenant passer en revue avec vous tous les éléments du processus de passation des marchés, en commençant avec la définition des besoins. Tout part de là.

Il y a plusieurs façons de définir les besoins. On peut essayer de définir, sur le plan de la performance, la rapidité d'un ordinateur, le temps de réponse et ce genre de choses. On peut spécifier des configurations. Par exemple, toujours dans le monde informatique, on peut spécifier le genre de système opérationnel que l'on veut. On peut aussi, et c'est le dernier scénario, spécifier des marques de commerce ou des équivalents. C'est le genre de chose que nous cherchons à éviter, car cela peut évidemment limiter la concurrence.

L'une des tâches principales de notre ministère est de passer en revue les spécifications des besoins remises par le ministère client afin d'éviter ce que nous appelons des spécifications ciblées ou exclusives. Nous cherchons réellement à éviter toute impression que nous focalisons sur un fournisseur particulier pour acquérir le bien particulier qu'il a à offrir. C'est l'un des grands défis des agents qui travaillent dans notre ministère.

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S'il n'y a pas d'accord commercial mis en jeu, nous avons alors un processus par lequel on se penche de près sur les possibilités socio-économiques.

Ainsi, pour les marchés situés entre 2 millions et 100 millions de dollars, un certain nombre de comités sont formés. Il y a un comité d'examen des acquisitions qui compte des représentants d'une quinzaine de ministères, y compris les organisations économiques. Il passe en revue l'acquisition pour voir si les plans d'acquisition à court terme peuvent présenter quelque avantage socio-économique pour le pays. Dans l'affirmative, le dossier est transmis à un comité de niveau supérieur qui déterminera l'ampleur des avantages industriels et régionaux potentiels.

Il y a un vaste éventail d'initiatives touchant les programmes socio-économiques et le contenu canadien. Il y a celles qui touchent le secteur IT. Il y a les programmes qui exigent le respect des dispositions relatives à l'équité en matière d'emploi, il y a des programmes intéressant la construction navale, les munitions et les revendications territoriales globales. Il y a toutes sortes de programmes différents qui touchent les acquisitions dans différents domaines.

Une fois effectué l'examen socio-économique, nous définissons alors notre stratégie d'achat. Nous cherchons par là à déterminer la meilleure façon d'acquérir le bien considéré, en ayant toujours à l'esprit les valeurs que j'ai énoncées au début. J'ai indiqué ici trois stratégies possibles: l'appel d'offres, la demande de prix et la demande de proposition.

L'appel d'offres est la méthode que l'on suit lorsqu'on sait qu'il y a concurrence. J'entends par là au moins deux sources possibles, ou plus. Il faut aussi qu'il y ait un besoin bien défini assorti d'un critère très clair. Le prix proposé va être un élément de comparaison facile, et on opte toujours pour le prix le plus bas. Lorsque ces conditions sont réunies, on peut opter pour la méthode simple, qui est l'appel d'offres.

Supposons qu'une ou plusieurs de ces conditions ne soient pas remplies. Disons qu'il n'y ait pas plus de deux fournisseurs possibles que vous connaissez bien, par exemple, ou que vous ne puissiez prendre la décision uniquement sur l'élément prix, mais que des considérations de qualité interviennent également. Vous émettez alors une demande de proposition dans laquelle vous demandez aux fournisseurs de vous faire parvenir leurs propositions, que vous évaluerez ensuite à la lumière de certains critères.

La demande de prix est utilisée pour les marchés de faible montant, habituellement moins de 25 000$. Vous avez un besoin bien défini, et là encore une fois, vous allez décider uniquement sur la base du prix, et donc vous demandez simplement à divers fournisseurs de donner un prix.

Lorsque vous allez solliciter ces offres, vous pouvez... Dans notre ministère, nous essayons d'utiliser le plus possible le système des invitations ouvertes à soumissionner, quelle que soit la valeur du marché. C'est notre principal support publicitaire. S'agissant des marchés inférieurs à 25 000$, vous pouvez utiliser une liste de fournisseurs préétablie, avec un système automatisé qui tire les noms de deux ou trois fournisseurs préaccrédités, en rotation.

S'agissant des marchés non concurrentiels, la politique du Conseil du Trésor prévoit un certain nombre de conditions dans lesquelles on peut avoir recours à un fournisseur exclusif.

La principale condition, qui recouvre 70 p. 100 de ces marchés, est ce que l'on appelle une source choisie, où vous achetez quelque chose de si simple et de si faible valeur qu'il ne serait pas rentable pour le contribuable canadien de procéder autrement. Dans certains cas, les critères sont énoncés dans un règlement.

Prenez les services téléphoniques, par exemple. Il n'est pas nécessaire d'avoir une concurrence dans ce domaine. La sécurité nationale est un autre critère. Parfois, vous avez des objectifs gouvernementaux, par exemple l'achat de meubles auprès de Services correctionnels Canada, ou le programme des munitions. Ce sont les principaux domaines où l'on peut à juste titre recourir aux contrats non concurrentiels.

Sur le plan de la demande de soumission, un impératif clé est également l'existence de critères d'évaluation clairs, précis et bien connus des soumissionnaires. Il importe aussi d'inscrire dans les spécifications des clauses d'assurance ou d'indemnisation appropriées afin de minimiser les risques pour l'État. Voilà donc les facteurs clés de l'élaboration de la stratégie d'achat.

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Une fois que l'on a défini la stratégie d'achat et décidé si ce sera un marché concurrentiel ou non, nous avons recours, surtout dans le cas des marchés concurrentiels, au service des invitations ouvertes à soumissionner. Au cas où vous ne le sauriez pas, c'est un service automatisé auquel les entreprises ont accès à l'échelle nationale et qui les informe des appels d'offres publics. On peut y accéder électroniquement, mais il y a aussi une publication que l'on peut recevoir si l'on ne dispose pas d'installations électroniques.

Près de 25 000 entreprises y sont abonnées. Les trois quarts d'entre elles comptent moins de15 employés, c'est-à-dire qu'on peut les qualifier de petites entreprises. Normalement, on y annonce les marchés de biens et de services d'une valeur de plus de 25 000$, les marchés de construction de plus de 60 000$ et les marchés d'impression de plus de 10 000$.

Ce système est géré par une société du nom de Information Systems Management, ISM. Nous avons conclu ce contrat avec elle en 1992 et venons de le prolonger jusqu'en 1997. Nous nous concertons actuellement avec les provinces pour déterminer la meilleure façon de reconduire ce système au-delà de mai 1997.

Nous pourrons peut-être vous donner de plus amples explications sur ce système plus tard. Si vous le voulez, je peux également vous en faire une démonstration afin que vous puissiez vous rendre compte par vous-mêmes. C'est beaucoup plus facile que de l'expliquer par des mots.

Lorsque nous n'avons pas recours à un contrat concurrentiel pour l'une des raisons convenues, nous pouvons néanmoins émettre un PAC, un préavis d'adjudication de contrat. Cela permet à d'éventuels intéressés de contester la nature non concurrentielle du marché. Près de 40 p. 100 des contrats non concurrentiels font l'objet de PAC. Si quelqu'un a des objections légitimes ou peut prouver qu'il peut fournir le même produit ou service, nous lancerons alors un appel d'offres.

Une fois que les soumissions nous arrivent, elles sont évaluées. Lorsqu'il s'agit d'une demande de prix, ce dernier seul compte. S'il s'agit d'une demande de proposition, nous vérifions d'abord que les soumissionnaires répondent aux conditions. Habituellement, il y a une série de conditions techniques auxquelles les soumissionnaires doivent satisfaire de façon à répondre aux spécifications du client.

En outre, il y aura les dispositions contractuelles qui devront également être satisfaites. Voilà donc les deux types de conditions à remplir, et la demande de proposition précise si l'on va retenir le prix le plus bas ou si l'on va juger sur la base de la valeur. La valeur peut être déterminée par une cote divisée, par exemple, par le prix. On divise l'un par l'autre pour obtenir un coût par point. Plus le nombre de points par dollar est élevé, et plus grande sera la valeur de la proposition.

Dans certains cas nous négocions pour assurer que le gouvernement obtient ce que nous appelons les conditions du client le plus favorisé. D'ailleurs, lorsque nous faisons appel à un fournisseur exclusif, nous n'acceptons pas simplement le prix annoncé, nous avons des experts au sein du ministère qui vont chez le fournisseur pour examiner sa structure de coût, ses coûts de matériaux, de main-d'oeuvre et de frais généraux, pour vérifier que ce sont des coûts raisonnables, puis ajoutent un pourcentage raisonnable de frais généraux et négocient ensuite le prix final.

Autrement dit, nous voulons nous assurer que lorsque nous achetons un bien, le gouvernement obtient le meilleur prix possible et que le fournisseur ne cède pas ce même bien à quelqu'un d'autre à un meilleur prix que celui qu'il consent à l'État.

Comme vous pouvez vous y attendre, il y a toute une hiérarchie de délégations de pouvoir en matière de passation des marchés. Ces délégations diffèrent selon qu'il s'agit de biens ou de services. En gros, c'est notre ministre qui a la délégation de pouvoir s'agissant des biens. C'est un service obligatoire qui ne peut être fourni que par notre ministère. Nous avons récemment délégué le pouvoir aux ministères clients pour les acquisitions jusqu'à hauteur de 5 000$. Notre ministre vient donc de donner cette délégation de pouvoir.

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S'agissant de services, les ministères clients n'ont pas besoin de s'adresser à nous. Ils peuvent les acquérir de leur propre chef, et vous voyez les limites sur cette feuille ici. Manifestement, les ministères jouissent d'une latitude beaucoup plus grande lorsqu'ils utilisent le système des invitations ouvertes à soumissionner que lorsqu'ils veulent faire appel à un fournisseur exclusif.

Une fois qu'un marché donné a reçu successivement les approbations nécessaires, soit du ministère soit du Conseil du Trésor, et que le contrat a été adjugé, il nous incombe de débreffer les soumissionnaires malheureux. Nous n'avons généralement pas à attendre longtemps. D'habitude, ils veulent savoir très vite pourquoi ils n'ont pas été retenus. Nous publions des AAC, des avis d'adjudication de contrat pour annoncer qui a remporté un marché donné.

Le Tribunal canadien du commerce extérieur, une création relativement récente, offre un recours à tout fournisseur s'estimant lésé. Il peut contester un aspect avant l'adjudication et l'adjudication elle-même, pour toute raison. En cas de contestation, le TCCE mène une enquête similaire au processus d'une cour supérieure. Des gens vont être convoqués à assister à des audiences, des témoins peuvent déposer et le tribunal a des pouvoirs assez étendus lui permettant d'annuler l'adjudication, d'arrêter les travaux, d'indemniser le soumissionnaire pour le coût de sa soumission. Il peut également formuler certaines recommandations qui ne sont pas aussi contraignantes mais que nous prenons néanmoins très au sérieux.

Pour vous donner une idée des ordres de grandeur, en 1984, moins de 0,05 p. 100 de nos marchés ont donné lieu à des plaintes. Entre 1989 et 1995, 36 causes ont été gagnées par les fournisseurs. Au cours de ces sept années, il y a eu 173 plaintes, pour placer les choses en perspective. Près de 60 p. 100 d'entre elles ont été rejetées, soit que le TCCE s'est déclaré incompétent soit que la plainte a été déposée après les délais, soit que le tribunal a jugé qu'elle n'était pas fondée. Un règlement est intervenu dans 21 p. 100 des cas et 21 p. 100 des plaintes ont été jugées fondées.

Dans les causes perdues par nous, la raisons la plus fréquente était que les critères d'évaluation ont été jugés inéquitables pour une raison ou pour une autre. Souvent aussi, le tribunal a estimé que le recours à un fournisseur exclusif n'était pas justifié et que nous aurions dû faire un appel d'offres. Dans d'autres cas, les spécifications favorisaient excessivement une entreprise en particulier. Il y a eu deux cas où il... [Difficulté technique - Éditeur]... de la part du ministère, si bien que le fournisseur a gagné sa cause.

Un changement intéressant est que sous le régime de l'accord de libre-échange, il y avait un seuil maximal d'environ 210 000$. Sous le régime de l'ALENA, il n'y a pas de limite supérieure, si bien que l'on peut s'attendre à voir le nombre des contestations augmenter considérablement.

Les membres du TCCE sont nommés par décret et sont au nombre de sept. Ils siègent à plein temps.

Une fois que l'on a dépassé le stade du recours auprès du TCCE, notre ministère joue de nouveau un rôle clé. Bon nombre de ces contrats sont pour une durée de plusieurs années; beaucoup sont très complexes, particulièrement ceux dans le domaine informatique. Personne ne sera surpris d'apprendre qu'un nombre énorme de changements interviennent en cours d'exécution d'un contrat. La technologie peut changer ou les besoins peuvent changer, si bien que nous passons beaucoup de temps à superviser et gérer le contrat avec le client, pour le compte du client. Très souvent, des avenants doivent être apportés, pour toutes les raisons que j'ai indiquées. C'est une pratique commerciale rationnelle et notre objectif lors de la gestion du contrat est d'obtenir la meilleure valeur possible pour le contribuable.

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Pendant la phase d'administration du contrat, des différends peuvent surgir pour toutes sortes de raisons. Nous avons des instances au niveau interne pour cela. Il y a un Conseil de règlement des différends contractuels, qui a été formé en janvier 1994. Il comporte deux divisions: l'une qui s'occupe des contrats de construction, qui est un conseil consultatif de règlement des différends contractuels comportant trois arbitres; dans le cas de biens et de services, il comprend cinq ou six personnes, y compris les usagers, qui cherchent à résoudre les griefs qu'un réclamant peut avoir.

Si le fournisseur n'est néanmoins pas satisfait, il lui reste toujours l'option d'intenter des poursuites. Mais il peut toujours essayer d'autres méthodes, telles que la négociation directe, s'il pense que cela peut produire des résultats.

J'espère ne pas avoir été trop vite. Je voulais donner à tout le monde un aperçu du processus.Jim et moi serons ravis de répondre à vos questions.

La présidente: Je vous remercie de cet exposé très succinct.

[Français]

Il nous reste à peu près 21 minutes que nous pouvons peut-être partager. On va faire un tour de sept minutes chacun.

Monsieur Fillion, vous avez la parole.

M. Fillion: Ma première question concerne le SIOS, le Service des invitations ouvertes à soumissionner. En tant qu'élus, nous recevons une publication sur demande, mais ce n'est pas toujours facile à consulter parce que vous en produisez plusieurs par semaine. Serait-il possible pour les députés d'avoir accès à ce système-là?

M. Williams: Bien sûr. L'autre question est de savoir s'il y a des coûts.

M. Fillion: Oui, c'est ça.

M. Williams: Je ne sais pas exactement s'il y a des coûts pour les députés, mais je vais vérifier et vous dirai ce qu'il en est.

M. Fillion: Merci. Il serait agréable pour les membres du comité d'avoir cet outil qui leur permettrait de faire un suivi sur cette question.

D'autre part, vous attachez beaucoup d'importance au règlement de certaines contestations que vous avez au Tribunal canadien du commerce extérieur, mais il y en a aussi pour le commerce intérieur, n'est-ce pas? Je suis étonné que vous n'en fassiez pas mention.

En ce qui concerne le commerce intérieur, est-ce qu'il y a des litiges avec les soumissionnaires et où se règlent-ils? Quelle est la proportion? Je dois dire que nos petites et moyennes entreprises ne sont pas toujours satisfaites du rendement par rapport à la soumission qu'ils ont faite. Vous avez certainement des litiges à ce niveau-là, mais je ne vous ai pas entendu en parler.

[Traduction]

M. Williams: L'Accord sur le commerce intérieur, tout comme l'ALENA, impose un certain nombre de conditions très rigoureuses que nous passons en revue au début du processus. Lorsqu'un marché est assujetti à l'Accord sur le commerce intérieur, nous allons évidemment exiger le respect de ces conditions et veiller à ce que le marché soit accessible à toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, de tout le pays.

Dans les cas où une petite ou moyenne entreprise donnée estime qu'elle n'a pas été informée d'un marché donné ou n'a pas eu l'occasion... Je ne sais pas si c'est de ce genre de situation que vous parlez. Nous essayons de régler ce genre de problème par une activité de promotion auprès des fournisseurs beaucoup plus proactive. Nous le faisons pas mal depuis déjà quelques années, mais depuis la réunion du comité de l'automne dernier, il nous est devenu très apparent que nous devions faire beaucoup plus dans ce domaine. Nous nous sommes organisés pour toucher davantage les entreprises intéressées et nous espérons avoir ces mesures en place pleinement dans le courant de l'année. Nous prévoyons d'organiser beaucoup plus de séminaires et de les rendre accessibles à autant d'entreprises que possible.

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En outre, advenant qu'une entreprise donnée estime, pour quelque raison, avoir été tenue dans l'ignorance, nous nous appliquons à entrer en contact avec elle, ou nous demandons à nos services régionaux de le faire, afin de les informer de...

[Français]

M. Fillion: Dans chacune des régions, que ce soit une province ou une région, y a-t-il une personne-ressource avec laquelle les élus ou les soumissionnaires peuvent communiquer? Qu'en est-il par exemple pour la région de Québec?

[Traduction]

M. Williams: Oui, absolument.

[Français]

Dans chaque région il y a des agents qui sont capables de répondre à toutes les questions. À Ottawa, par exemple, nous offrons les politiques et le soutien à toutes les régions.

M. Fillion: Pouvez-vous nous faire parvenir la liste de ces gens-là?

M. Williams: Absolument.

M. Fillion: Pour chacune des régions.

Je m'inquiète un peu du nombre de modifications qui arrivent en cours de route aux soumissions, qu'elles soient concurrentielles ou pas. Il y a beaucoup de modifications qui s'effectuent en cours de route. Est-ce que ce n'est pas aller un peu à l'encontre des principes que vous voulez respecter, c'est-à-dire l'intégrité, la transparence et la concurrence? J'ai de la difficulté avec ça. Est-ce que vous établissez des contrats permettant certaines modifications en cours de route afin de favoriser quelqu'un? C'est une question qui me vient à l'esprit.

[Traduction]

M. Williams: Permettez-moi de distinguer entre ce que nous faisons jusqu'au moment d'émettre la demande de proposition et ce qui arrive après réception des offres, une fois que nous adjugeons et gérons le contrat.

Sans aucun doute, il importe que chaque soumissionnaire ait une chance égale dans l'appel d'offres.

Une fois que nous nous sommes assurés auprès du client que nous comprenons bien son besoin et les conditions, nous spécifions cela dans la demande de proposition, de même que les critères d'évaluation. En règle générale, nous ne modifions pas ces derniers. Une fois que c'est envoyé, nous n'y touchons absolument plus, pour éviter qu'un changement ne favorise quelqu'un.

Il n'y a qu'une seule personne que les fournisseurs ont le droit de contacter. C'est le même agent de contrat pour tous et celui-ci veille à ce qu'il y ait transparence et égalité des chances pour tous.

En revanche, une fois les soumissions reçues et évaluées et le contrat adjugé, ce dernier peut très souvent durer de nombreuses années. Bon nombre de nos marchés de grande envergure concernent l'informatique. Eh bien, ce domaine change tellement vite que nous savons bien que ce qui pouvait paraître raisonnable pour notre client au début du processus peut ne plus être valable du tout deux ou trois ans après, vu la rapidité des progrès dans ce secteur.

Nous avons aujourd'hui des capacités de communications tellement sophistiquées et des systèmes tellement conviviaux qu'il ne serait pas approprié de prendre livraison d'un ordinateur devenu désuet alors qu'il était à la pointe du progrès deux ou trois ans auparavant. Il faut s'attendre à ce genre de situations, et nous essayons dans ces cas de renégocier le contrat et de le modifier.

Il se peut également, par exemple, que vous ayez commandé un certain nombre d'articles - mettons 3 000 bébelles d'une certaine taille - et que, pour des raisons de compression d'effectifs, nous n'ayons plus besoin que de 2 080. Eh bien, nous essaierons de négocier un avenant au contrat de façon à réduire la quantité. Il peut donc y avoir des modifications de quantité.

Par ailleurs, ce que l'on pensait être une qualité de produit raisonnable peut ne plus l'être, du fait de nouvelles connaissances technologiques ou environnementales, par exemple. Il faut donc négocier une modification du contrat dans ce genre de situation.

Ce genre de choses arrivent. Nous passons environ 110 000 marchés dans notre ministère. Près de 30 p. 100 d'entre eux font l'objet de modifications. Est-ce un problème? C'est possible, mais je pense qu'il est en recul dans notre ministère, tant en nombre de contrats...

[Français]

M. Fillion: J'espère que vous ne trouvez pas normal qu'il y ait autant de modifications.

.1245

Merci, madame.

[Traduction]

La présidente: Monsieur Williams, le dernier mot vous appartient, et nous passerons ensuite à M. Gilmour.

M. Williams: C'est quelque chose que nous suivons de près, mais je veux faire ressortir que les modifications de contrat en soi ne sont pas une chose inquiétante. On pourrait arguer que cela fait partie d'une bonne gestion de contrat.

La présidente: Monsieur Gilmour, vous disposez de sept minutes.

M. Gilmour: Je pense que M. Bryden et moi-même sommes les seuls membres anciens du comité et nous avons déjà entendu Travaux publics, le MDN et un certain nombre d'organismes sur la façon dont les marchés sont adjugés et comment ils sont censés être administrés et tout cela était très bien. Mais il y a un exemple - je suis sûr que vous connaissez le contrat Halifax-Fenco MacLaren. Pour résumer à l'intention des membres du comité, Halifax Shipyard avait présenté l'offre la plus basse, la meilleure offre technique, mais le marché a été adjugé à Fenco-MacLaren, qui n'a pas de chantier naval et dont l'offre était plus chère d'un million de dollars.

Êtes-vous disposé à expliquer au comité le processus suivi dans ce cas précis? Il va à l'encontre de tout ce que nous avons entendu ces derniers mois concernant la manière dont les marchés sont censés être attribués. Approuvez-vous cette adjudication?

M. Williams: J'y serais tout à fait disposé. Je vous informe également que nous procédons actuellement à un examen indépendant de ce cas.

M. Gilmour: Excellent.

M. Williams: Mais je signale aussi que rien dans la manière dont ce contrat a été administré ne va à l'encontre de ce que j'ai dit.

M. Gilmour: Je ne dis pas qu'il y a eu quelque chose de mal...

M. Williams: Non, je sais.

M. Gilmour: ...mais la perception est clairement qu'il y a là quelque chose de bizarre.

M. Williams: L'élément clé est que tous les soumissionnaires doivent remplir les conditions tant techniques que contractuelles. Ce n'était pas le cas de Halifax Shipyard.

M. Gilmour: D'accord.

La présidente: Avez-vous d'autres questions, monsieur Gilmour?

M. Gilmour: Combien de temps a duré le processus d'adjudication de ce contrat - pour les soumissionnaires?

M. Williams: J'essaie de me souvenir. Je pense que l'évaluation a été menée sur plusieurs mois, à la fin de l'été ou au début de l'automne.

M. Gilmour: Et est-ce que Halifax Shipyard va intenter un procès?

M. Williams: Je pense qu'il est trop tôt pour le savoir. Nous procédons à un réexamen de la situation... Permettez-moi de reformuler cela. Une enquête a été ouverte. Ce ne sont pas des poursuites en justice, mais le soumissionnaire a demandé un contrôle judiciaire ou une opinion sur la question. Les choses en sont là.

M. Gilmour: Bien, c'est donc activement à l'étude...

M. Williams: C'est juste, mais nous en sommes à l'étape avant un procès. Il n'y a pas encore de poursuite qui ait été intentée.

M. Gilmour: Je vous remercie, madame la présidente.

La présidente: Je vous remercie, monsieur Gilmour.

Monsieur Gurbax Malhi, pour une question rapide.

M. Malhi (Bramalea - Gore - Malton): Lorsque le ministère communique avec les soumissionnaires malheureux, peut-il leur donner la raison de leur échec?

M. Williams: Oui.

M. Malhi: Peut-il également les encourager à améliorer leur soumission la prochaine fois?

M. Williams: Absolument.

La présidente: Monsieur Jackson.

M. Jackson: Je pense que M. Fillion a répondu à ma question: comment fait-on pour se mettre en ligne? Est-ce que ces gens ont tous...? Vous avez d'autres clients et ils reçoivent plus ou moins l'information directement sur leur fax et leur ordinateur.

M. Williams: Parlez-vous du système SIOS?

M. Jackson: Oui, pour le SIOS. Y a-t-il un programme spécial pour y accéder?

M. Williams: Oui, si vous avez la capacité électronique, vous pouvez passer contrat avec le fournisseur de service, ISM, qui vous donne accès contre redevance. Nous avons procédé ainsi pour assurer que l'usager paie. Ce n'est pas le contribuable qui paie la facture de ce service. Ce sont les fournisseurs qui en bénéficient.

Pour vous donner une idée du coût, un fournisseur typique dépense en moyenne entre 300$ et 400$ par an pour cet accès. Cela comprend un droit fixe, la location d'une ligne et le temps d'utilisation typique de cette ligne pendant l'année.

M. Jackson: Je vous remercie.

La présidente: J'ai moi-même quelques questions rapides.

Étant donné les compressions d'effectifs de la fonction publique, on peut imaginer des immeubles de bureaux gouvernementaux entiers restés vides. Cela m'amène à demander si le gouvernement a pu rajuster ces baux en fonction de son programme de compression d'effectifs. Pourriez-vous nous en parler? Dans quelle mesure le gouvernement paie-t-il pour des locaux vides, le cas échéant?

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M. Williams: Cette question... Je ne veux pas me défausser sur autrui, mais dans notre ministère...

La présidente: Comment savais-je que vous alliez dire cela?

M. Williams: ...je m'occupe de l'acquisition de biens et services. C'est un collègue qui est responsable des locaux. Je suis sûr qu'il se ferait un plaisir d'essayer de répondre à cette question.

La présidente: Monsieur Stobbe.

M. Jim C. Stobbe (sous-ministre adjoint, Service opérationnel du gouvernement, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada): Si je puis ajouter un mot, l'examen des programmes de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada comprend des réductions budgétaires très ambitieuses dans le domaine des locaux loués. Ces réductions budgétaires ont été décidées au vu de l'intention du gouvernement de réduire de 45 000 le nombre des fonctionnaires.

La réalisation de ces compressions budgétaires est un cauchemar logistique. Les baux ne sont généralement pas pour une durée d'un an. Ce sont des baux à long terme qui offrent au gouvernement des loyers très favorables. La résiliation anticipée d'un bail est quelque chose de très coûteux. C'est une rude tâche que d'assortir les réductions d'effectifs des ministères individuels à des bâtiments et des baux individuels.

Notre budget est effectivement rajusté en fonction de la réduction des effectifs de fonctionnaires et des besoins de locaux. Je suis sûr que M. Nurtz se fera un plaisir de venir expliquer tout cela au comité.

La présidente: Je vois que vous avez compris le sens de ma question, monsieur Stobbe. Merci beaucoup. Et nous vous remercions d'avoir répondu à notre invitation à si bref préavis. Je suis sûre que nous sommes condamnés à quelques autres séances avec vous, si vous acceptez de revenir.

M. Stobbe: Ce sera avec plaisir.

La présidente: Merci.

La séance est levée

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