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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 15 mai 1995

.1532

[Traduction]

Le président: Le comité poursuit son étude du projet de loi C-76. Nous avons avec nous cet après-midi le président du Conseil du Trésor, l'honorable Art Eggleton.

Monsieur Eggleton, pourriez-vous nous présenter les gens qui vous accompagnent? Nous avons hâte d'entendre votre bref exposé et vos réponses à nos questions.

L'honorable Arthur C. Eggleton (président du Conseil du Trésor): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'ai un Bob de chaque côté, ou un Robert si vous préférez: Bob Giroux, qui est secrétaire du Conseil du Trésor, et Bob Emond, qui est sous-secrétaire par intérim, à la Direction de la politique des ressources humaines.

[Français]

Monsieur le président, membres du comité, je vous remercie de m'avoir donné l'occasion d'être des vôtres aujourd'hui pour vous entretenir du projet de loi C-76.

[Traduction]

Je vais vous parler surtout de la partie du projet de loi qui porte sur les mesures touchant la Fonction publique du Canada. Le gouvernement a annoncé dans son budget de février des réductions majeures dans ses dépenses. Ces réductions étaient fondées sur un examen complet des programmes de tous les ministères, dans le but de répondre à certaines questions tout à fait fondamentales: de quoi le gouvernement fédéral devrait-il s'occuper; quels sont les services et les programmes qui ne sont plus nécessaires; quels sont les programmes qui pourraient être administrés plus efficacement par d'autres niveaux de gouvernement ou par le secteur privé; et enfin, quels sont ceux qui bénéficieraient de changements internes ou d'une restructuration, afin de les rendre plus efficaces et d'en réduire les coûts.

Cet examen des programmes visait à trouver des moyens de réduire les dépenses et d'améliorer ainsi la situation économique et financière du pays. Il a débouché sur une réduction de 45 000 postes dans la Fonction publique. Il est particulièrement important de noter que cette réduction d'effectifs n'était pas un des objectifs de l'examen des programmes, mais bien une de ces conséquences. C'est ce qui explique la nature des mesures que nous proposons et la façon dont nous voudrions les mettre en oeuvre.

À l'issue de l'examen, il est apparu clairement que certaines organisations connaîtraient des réductions très marquées au cours des trois prochaines années. L'attrition naturelle et les programmes déjà en place pour faire face à une réduction d'effectifs modérée ne suffiraient à répondre à un changement de cette ampleur. Par conséquent, les dispositions contenues dans le projet de loi permettraient d'effectuer les réductions prévues et, à notre avis, d'établir un équilibre entre la nécessité d'aider les ministères à assurer la transition vers une Fonction publique plus petite, d'une part, et celle d'aider le employés qui seront le plus touchés par ces réductions, d'autre part.

.1535

Je vais vous décrire très rapidement les mesures que nous proposons. Mes fonctionnaires ont déjà tenu des séances d'information, et mes collègues et moi sommes bien sûr prêts à répondre à toutes les questions que vous voudrez poser.

Voici donc quelles sont les mesures. Nous proposons d'abord un programme d'encouragement à la retraite anticipée, qui sera offert à tout fonctionnaire excédentaire répondant aux critères relatifs à l'âge et aux années de service, dans les organisations pour lesquelles le Conseil du Trésor est considéré comme étant l'employeur officiel. Les autres employeurs fédéraux visés par les dispositions de la Loi sur la pension de la Fonction publique et qui devront eux aussi réduire considérablement leur effectif par suite de l'examen des programmes pourraient être inclus dans ce programme.

Je dois souligner que ce programme n'est pas mentionné dans le projet de loi C-76; il a été mis en oeuvre par voie de réglementation, en vertu des lois sur les pensions, et il est actuellement en vigueur.

Nous proposons aussi un programme de primes de départ anticipé, qui serait offert aux fonctionnaires excédentaires dans les organisations désignées comme étant les «plus particulièrement touchées». Les ministères et organismes peuvent également être désignés «particulièrement touchés», et voici comment: s'ils ne sont pas en mesure de gérer les réductions d'effectifs par l'attrition normale, les mesures existantes de réaménagement des effectifs et les autres outils de gestion habituels; si les réductions sont particulièrement lourdes dans une région ou une catégorie professionnelle; si les réductions doivent être effectuées rapidement; ou si le mandat de l'organisation est modifié à un point tel que la combinaison de compétences de ses employés doit également changer de façon significative.

Nous comptons offrir les programmes de retraite anticipé et de départ ancitipé pendant trois ans. Le programme de primes de départ anticipé ne sera offert aux fonctionnaires excédentaires qu'après que le projet de loi C-76 aura reçu la sanction royale.

Troisièmement, nous proposons également que les dispositions relatives aux offres de nomination garantie prévues dans la Directive sur le réaménagement des effectifs soient suspendues pour cette période de trois ans. Dans ces organisations, les fonctionnaires excédentaires qui ne se prévaudraient pas de ces programmes seraient payés pendant six mois comme employés excédentaires, et bénéficieraient ensuite pendant 12 mois d'un statut d'excédentaire non payé, ce qui tient compte du fait que nous ne pouvons pas continuer à payer les employés si nous n'avons pas de travail pour eux, mais leur permettrait de conserver leur priorité pour réintégrer la Fonction publique.

Si nous ne pouvons pas trouver d'emplois raisonnables pour ces employés pendant toute la période de 18 mois pendant laquelle ils sont considérés comme excédentaires, ils seraient alors mis en disponibilité. Je tiens à insister sur le fait que nous continuerions, pendant toute cette période, à faire tous les efforts nécessaires pour trouver de l'emploi aux fonctionnaires excédentaires dans le but de réduire au minimum le nombre de ceux qui finiront pas être mis en disponibilité.

Quatrièmement, nous proposons que la Directive sur le réaménagement des effectifs, qui contient des dispositions relatives aux offres de nomination garantie, reste en vigueur dans les autres organisations qui n'ont pas été désignées comme étant particulièrement touchées, mais que cette directive soit modifiée. Nous proposons notamment les trois modifications suivantes:

- que l'indemnité de cessation d'emploi de 15 semaines soit suspendue; nous ne pouvons pas raisonnablement absorber ce coût étant donné les autres coûts qui découlent de certains autres éléments du programme;

- que les restrictions géographiques applicables aux offres de nomination garantie faites dans les cas de privatisation ou de sous-traitance soient assouplies; et

- que les ministères et organismes soient autorisés à accorder des contrats avant que soit déterminé le statut de tous les fonctionnaires excédentaires.

Cinquièmement, nous proposons que des changements soient négociés dans les régimes de rémunération, à condition que cela n'entraîne aucune augmentation de coût pour l'employeur.

Sixièmement, nous proposons que le Conseil du Trésor soit autorisé à offrir deux programmes de congé facultatif sans rémunération: les congés de transition de préretraite et les congés avec étalement du revenu.

Ces deux nouveaux types de congé seront profitables à la fois pour les employés et pour le gouvernement. Les employés pourront plus facilement établir un équilibre entre leurs responsabilités personnelles et professionnelles. En même temps, le gouvernement pourra garder autant d'employés que possible au travail, tout en réduisant son budget salarial.

Septièmement, nous proposons que la Loi sur la gestion des finances publiques et la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique soient modifiées de manière à permettre plus de souplesse dans le placement des fonctionnaires excédentaires et à assurer le transfert efficace de certains employés, et de leurs fonctions, à l'intérieur de la Fonction publique.

.1540

Je tiens à souligner que, si nous proposons ces mesures en vertu du projet de loi C-76, c'est parce qu'elles sont, à notre avis, essentielles pour concrétiser au cours des trois prochaines années les décisions découlant de l'examen des programmes et que les longues négociations que nous avons eues à ce sujet avec les agents négociateurs de la Fonction publique n'ont pas abouti. En fait, ces mesures sont semblables à celles que nous avions proposées aux agents négociateurs, à quelques différences près.

Comme je l'ai déjà mentionné, nous proposons d'éliminer l'indemnité de cessation d'emploi de 15 semaines offertes actuellement aux employés ayant droit à une pension. Étant donné les nouveaux avantages qui seraient offerts à ces employés dans le cadre des programmes d'encouragement à la retraite anticipée et de primes de départ ancitipé, nous trouvons que cette indemnité de cessation de 15 semaines ne se justifie plus, sur le plan des coûts.

Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, nous proposons aussi d'élargir les limites géographiques applicables aux offres de nomination dans les cas de privatisation ou de sous-traitance. L'ancienne limite de 16 kilomètres serait abandonnée, de façon à ce que cette disposition s'applique dans l'ensemble d'une même province ou d'un même territoire, ou jusqu'à 40 kilomètres à l'extérieure de la province.

Finalement, comme je l'ai également mentionné, nous proposons que des changements soient négociés dans les régimes de rémunération, à condition qu'ils n'aient pas de répercussions sur les coûts. Nous nous ferons un plaisir d'en discuter avec les agents négociateurs.

En outre, le paiement maximum qui serait accordé dans le cadre du programme de primes de départ anticipé aux employés ayant droit à une pension de retraite immédiate serait légèrement inférieur à ce qui avait été proposé à l'origine. Pour les autres employés, le paiement maximum demeurerait le même.

Nous allons continuer à maintenir la communication avec les agents négociateurs. Nous travaillons avec eux à la mise sur pied, dans l'ensemble du pays, de comités mixtes chargés du réaménagement des effectifs et composés de membres de la direction et des syndicats. Ces comités seront chargés d'abord et avant tout d'aider les fonctionnaires touchés par les changements à réorganiser leur carrière.

[Français]

Permettez-moi maintenant de répondre à quelques-unes des questions et préoccupations qui ont été soulevées par les membres de votre Comité et d'autres parties.

[Traduction]

On nous a demandé pourquoi les primes de départ ancitipé ne sont pas offertes à tous les fonctionnaires intéressés. Je sais que les agents négociateurs, notamment, l'ont suggéré.

J'ai déjà mentionné que les réductions prévues sont une conséquence des décisions découlant de l'examen des programmes. Notre objectif n'était pas de réduire la Fonction publique de façon arbitraire, mais plutôt de déterminer quels services et quels programmes le gouvernement fédéral devrait continuer à offrir, et de quelle façon. Donc, c'est ce changement dans la nature du travail qui constituait le but premier de l'exercice. À notre avis, les compressions d'effectifs doivent être liées directement à l'évolution de ces exigences.

Nos discussions avec un certain nombre d'organisations qui ont effectué des exercices de ce genre nous ont confirmé qu'un programme destiné expressément aux personnes dont l'emploi doit disparaître, par opposition à un programme volontaire, est moins dérangeant et moins coûteux.

La direction des ministères doit avoir la latitude voulue, dans les limites du cadre législatif et des directives du Conseil du Trésor, pour gérer les changements organisationnels en fonction de la situation particulière du ministère. Les ministères doivent pouvoir le faire de façon efficiente et économique, tout en maintenant la qualité des services offerts au contribuable, dans la mesure du possible. Ils sont actuellement en train de prendre ces décisions très difficiles.

Nous avons déjà dit qu'une fois qu'un employé serait déclaré officiellement excédentaire, par suite de ces décisions liées à l'organisation du travail, il ne pourrait pas y avoir de substitution. Toutefois, avant d'en arriver à cette étape, la direction a bien assez de marge de manoeuvre pour pouvoir déployer ces employés de façon à concilier les exigences de l'organisation et les préférences individuelles.

Le Secrétariat du Conseil du Trésor donnera bientôt des directives aux ministères au sujet de la gestion des substitutions. Ces directives porteront sur les échanges entre les employés qui préfèrent partir et ceux qui préfèrent rester. Je suis tout à fait d'accord avec ceux qui disent que ce genre d'approche est tout à fait logique.

Certaines personnes ont exprimé des préoccupations au sujet du coût de ces initiatives, de leurs répercussions et de la façon dont on surveillerait leur application. Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité, tous les fonds nécessaires au programme de primes de départ anticipé proviendront du milliard de dollars réservé à cette fin. Aucun crédit supplémentaire ne sera nécessaire pour le programme d'encouragement à la retraite anticipée. Nous allons surveiller et vérifier la façon dont ces fonds seront dépensés.

Je dois également souligner que nous allons surveiller les répercussions de la compression des effectifs en tant que telle. Nous déterminerons, entre autres choses, le nombre d'employés touchés, leur lieu de travail, quelles sont leurs fonctions et quels sont ceux et celles visés par le Programme de l'équité en matière d'emploi. Nous sommes en train de mettre la dernière main au cadre de contrôle que nous enverrons aux ministères dans les prochaines semaines. Les ministères savent bien que nous voulons que le tout se déroule convenablement sans qu'une région ou un groupe ne soit touché outre mesure.

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Certains craignent également que les ministères auront tout simplement recours à des sous-traitants pour remplacer les employés qui partent, et que les coûts assumés par l'État ne seront pas réduits pour autant. De toute évidence, telle n'est pas notre intention.

Nous avons demandé aux ministères de réexaminer le recours actuel et éventuel aux marchés, afin d'assurer la continuité de l'emploi des excédentaires et autres employés. Les budgets des ministères sont réduits pour tenir compte du fait que des programmes sont éliminés ou cédés et que d'autres ont subi des modifications. Bref, monsieur le président, nous n'aurons pas les fonds nécessaires pour augmenter les dépenses de programmes par la passation de marchés. L'objet de cet exercice et de l'examen des programmes visait à en arriver à un gouvernement adéquat, à réduire les budgets ministériels dans le cadre financier que nous pouvons nous permettre. Ce que nous envisageons, ce sont des réductions financières.

Un des autres aspects de la question de la sous-traitance des services est le réemploi des fonctionnaires fédéraux. Nous élaborons actuellement des lignes directrices sur le réemploi des fonctionnaires qui ont accepté la retraite ou le départ anticipé, si cela devait se produire. Il s'agit ici de la question du cumul des traitements et des pensions. Ces lignes directrices porteront à la fois sur les personnes qui sont employées directement et sur celles qui sont employées indirectement au moyen de contrats avec des entreprises qui les emploient. Notre but premier sera de protéger les intérêts des contribuables tout en tenant compte des droits et des besoins des personnes qui se cherchent un autre emploi.

On a mentionné très souvent que 45 000 employés seraient mis à pied. Ce chiffre n'est qu'une estimation provisoire fondée sur une évaluation des économies prévues au titre des budgets salariaux des ministères.

La réduction des effectifs s'échelonnera sur une période de trois ans, et quelque 20 000 ETP, équivalents à temps plein, devraient être abolis d'ici l'été de 1996.

Nous ne disposons pas pour l'instant de précisions au sujet des réductions qui s'effectueront dans les ministères et les organismes, étant donné que ceux-ci sont en voie d'élaborer leurs plans de mise en oeuvre à cet égard. Les réductions viseront la Fonction publique fédérale dans son ensemble, soit les ministères et organismes fédéraux, le secteur militaire et les sociétés d'État. Encore une fois, les réductions seront fonction des changements apportés aux programmes.

Certains emplois seront cédés au secteur privé. D'autres seront supprimés par suite de la réduction ou de l'élimination de certains programmes. Mais grâce à l'effet conjugué de l'attrition normale de l'effectif, des programmes spéciaux d'encouragement au départ, de la gestion plus rigoureuse de la main-d'oeuvre et des mesures de départ volontaire, nous comptons limiter le plus possible le nombre de départs involontaires.

Certains ont demandé si les membres des groupes désignés par le programme de l'équité en matière d'emploi bénéficieront d'un traitement de faveur dans le cas de l'exercice de réduction des effectifs. La réponse est non. Les administrateurs généraux se fonderont sur la Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et sur son règlement d'application pour déterminer quels employés seront déclarés excédentaires. Ils établiront à cette fin une liste des employés par ordre de mérite inversé, c'est-à-dire qu'ils s'appuieront essentiellement sur le principe du mérite.

Monsieur le président, je sais que de nombreux fonctionnaires, des Canadiens et Canadiennes craignent que le service au public se ressente de ces changements. Certes, des services seront éliminés et d'autres seront offerts autrement. Et nos sommes déterminés non seulement à conserver les modes actuels de prestation des services, mais aussi à les améliorer dans la mesure du possible.

Plusieurs projets intéressants sont en cours et je veux vous parler maintenant de quelques-uns d'entre eux. Nous avons tout d'abord publié le plan directeur pour le renouvellement des services gouvernementaux à l'aide des technologies de l'information, qui donne les orientations stratégiques en ce qui concerne le recours aux technologies de l'information, afin de rendre économiques, accesibles et adaptés aux besoins les services offerts par l'État. Les services de type guichet unique, comme les centres de services aux entreprises, sont un bel exemple de cette orientation.

Deuxièmement, nous avons lancé une initiative sur les services d'appui partagés localement, qui incite les ministères à unir leurs efforts afin d'améliorer les services et de réduire les coûts administratifs de l'État en partageant divers services de soutien dans un même immeuble ou dans une même région où le gouvernement offre des services qui exigent le même genre de mécanismes de soutien.

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Le troisième est notre plan pour réduire le nombre de rapports que doivent soumettre les entreprises d'ici 1998.

Le quatrième est l'établissement des normes relatives aux services et la prestation de services de qualité.

En guise de conclusion, monsieur le président, je tiens à dire que les trois prochaines années seront particulièrement difficiles et constitueront un défi pour la Fonction publique au fur et à mesure qu'elle s'adapte et qu'elle se prépare pour le XXIe siècle. En choisissant les mesures que j'ai décrites aujourd'hui, nous nous sommes efforcés d'atteindre un certain équilibre. Nous essayons d'offrir des services de haute qualité et un gouvernement abordable dans l'intérêt des Canadiens. D'ailleurs, nous voulons traiter équitablement et de façon humaine les nombreux fonctionnaires dévoués qui ont si bien contribué au bien-être de ce pays.

[Français]

Je vous remercie, monsieur le président, membres du Comité, de m'avoir permis de prendre la parole.

[Traduction]

Mes fonctionnaires et moi serons heureux de répondre à toutes les questions.

[Français]

Le président: Merci de votre présentation. Monsieur Loubier, s'il vous plaît.

M. Loubier (Saint-Hyacinthe - Bagot): Bienvenue, monsieur le ministre. Ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion de discuter avec vous au Comité des finances. Nos rencontres devraient être plus fréquentes. On apprendrait alors à mieux se connaître.

J'aurais trois questions à vous poser. Premièrement, vous vous rappelez sûrement que le21 septembre 1994, votre collègue, le ministre Marcel Massé, ministre du Renouveau de la Fonction publique, rendait publics six critères qui devaient conduire à un examen et à une révision des activités et des programmes par ministère. Je n'énoncerai pas les critères; ce serait trop long et le président m'arrêterait. Il y avait notamment l'intérêt public, le rôle du gouvernement, le fédéralisme, etc.

Monsieur le ministre, est-ce qu'il serait possible, et je vous fais cette requête officiellement, que vous déposiez devant le Comité le rapport d'évaluation fait en fonction des six critères énoncés par votre collègue qui vous a conduit à effectuer la mise à pied de 45 000 fonctionnaires de la Fonction publique fédérale?

Le 15 février dernier, vous avez rendu publique l'évaluation des organismes. Maintenant, je me demande s'il vous serait possible de rendre disponible - si vous l'avez faite sérieusement, bien entendu - cette évaluation ministère par ministère et d'étoffer les six critères d'évaluation dont faisait état votre collègue.

[Traduction]

M. Eggleton: Comme vous avez dit, l'examen des programmes a été présidé par l'honorable Marcel Massé. J'admets que nous avons eu notre mot à dire au sujet du processus, mais essentiellement, cet examen a été effectué par le Bureau du Conseil privé et je pense que vous devriez vous adresser à M. Massé. Nous n'avons pas la responsabilité de fournir ces informations, et nous ne sommes pas capables de les fournir non plus. C'est au Conseil privé de le faire.

[Français]

M. Loubier: Monsieur le ministre, les mesures de compression des dépenses découlant de l'examen des programmes qui figurent dans le Budget des dépenses pour 1995-1996, par ministère et organisme, viennent de votre ministère. Comment avez-vous établi cette liste-là où on trouve les chiffres suivants: Agriculture et Agroalimentaire, 215 millions de dollars de moins; Agence de promotion économique du Canada Atlantique, 29,5 millions de dollars de moins? Ce sont les compressions de 45 000 postes. Comment en êtes-vous arrivés à ces chiffres-là? Ils viennent de chez vous. Sur quoi vous êtes-vous basés? Ce que je vous demande en réalité, c'est de rendre publique cette base d'évaluation à partir des six critères d'examen. Ceci devrait venir de vous.

[Traduction]

M. Eggleton: Le processus budgétaire fait état des chiffres dans le contexte des divers ministères, ainsi que vous l'avez mentionné, et non dans le contexte des six critères. Je dois dire que nous n'avons pas ces renseignements. Je le répète, s'ils existent, il faudrait qu'ils viennent de l'honorable Marcel Massé ou du Bureau du Conseil privé.

.1555

[Français]

M. Loubier: Est-ce que vous pouvez vous engager, comme membre du Conseil des ministres et membre de ce gouvernement, à faire la requête auprès de votre collègue, puisque ces analyses ou ces examens faits à partir des six critères qu'il a annoncés le 21 septembre vous donnent du travail? C'est vous qui prenez les décisions sur cette base-là. Alors, il est tout à fait normal que vous demandiez à votre collègue de rendre publique cette étude ou cette analyse ministère par ministère. Est-ce que vous pouvez vous engager devant le Comité à exiger de votre collègue ces études précises, s'il existe effectivement des études précises et si vous n'avez pas procédé à des coupures à l'aveuglette, comme beaucoup le prétendent et pas uniquement dans l'Opposition officielle? Je vous demande de prendre cet engagement si c'est possible et si vous n'avez pas peur des analyses que vous avez faites.

[Traduction]

M. Eggleton: Comme je l'ai déjà dit, nous n'avons pas effectué des compressions à l'aveuglette. Nous avons examiné les programmes et services fournis par le gouvernement en nous servant des critères, comme vous l'avez mentionné. Si vous voulez ces informations, ou si le comité les veut, vous devriez poser la question à M. Massé.

[Français]

Le président: Peut-être pourriez-vous le faire par l'entremise de la greffière.

M. Loubier: Nous allons demander à la greffière de demander au ministre responsable du Renouveau de la Fonction publique de rendre public son rapport. Est-ce bien la démarche à suivre, monsieur le président?

Le président: On pourrait le faire.

M. Loubier: Est-ce qu'on peut compter sur votre appui si on dépose une motion à ce sujet?

Le président: Oui.

M. Loubier: Je vous remercie.

Je vais entrer un peu plus dans vos cordes, monsieur le ministre. Comme président du Conseil du Trésor, vous avez la responsabilité de l'application de la Loi sur les langues officielles. Récemment, le commissaire aux langues officielles a déploré l'état pitoyable du bilinguisme dans les institutions fédérales. Depuis que vous êtes devenu responsable de l'application de la Loi sur les langues officielles, l'année dernière, il n'y a pas eu d'amélioration.

Alors, je vous demande si, en dépit de la mise à pied de 45 000 fonctionnaires au cours des prochaines années, vous pouvez vous engager à faire en sorte que les fonctionnaires qui ont la responsabilité des langues officielles et de la santé de la langue française, en particulier sur la Colline parlementaire, soient suffisamment nombreux? Depuis quelques mois surtout, depuis l'arrivée des libéraux, la situation semble se détériorer à vue d'oeil.

[Traduction]

M. Eggleton: Je ne suis pas d'accord avec vous. En effet, je pense que la situation s'est améliorée. Ce gouvernement prend au sérieux l'application de la Loi sur les langues officielles et son règlement. Nous avons pris certaines mesures pour faciliter l'application de la loi. Évidemment, il est toujours possible d'améliorer les choses, et nous allons continuer à nous assurer que les gens reçoivent les services gouvernementaux dans la langue officielle de leur choix et que les politiques en matière de langue de travail sont appliquées rigoureusement.

Nous avons pris certaines mesures; par exemple, nous avons compilé de nouvelles listes de ministères et nous avons publié ces listes dans des publications de langues minoritaires. Nous avons également doublé nos efforts pour informer le public que nos services sont fournis dans les deux langues officielles. Tout récemment, nous avons publié un livre sur la langue de travail, en collaboration avec le Commissaire aux langues officielles. Nous avons demandé à tous les ministères de nous soumettre des plans de travail d'ici septembre. Nous allons examiner ces plans tous les six mois, et nous allons en faire rapport régulièrement afin de suivre les progrès accomplis dans tout l'appareil gouvernemental. Ce sont des procédures de vérification. Cette question a tellement d'aspects différents.

Des fonctionnaires du Secrétariat du Conseil du Trésor ont visité des bureaux pour vérifier les dispositions relatives aux services, tout comme les fonctionnaires du Commissariat aux langues officielles, bien sûr. Nous avons réalisé des progrès très importants depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement.

[Français]

M. Loubier: Monsieur le ministre, malgré tout le respect que je vous dois, permettez-moi de vous souligner que depuis environ six mois, je reçois des documents des ministères fédéraux comportant des fautes de français. C'est horrible, ce qu'on reçoit.

Récemment, la semaine dernière, un de mes électeurs m'a apporté une enveloppe du gouvernement du Canada où on dit: Governement of Canada. Ici, il n'y a aucun problème. Il n'y a pas de faute là-dedans. Mais du côté du français, c'est Governement du Canada. Il manque un «u». Jamais je n'avais vu une chose pareille. Vous me dites qu'il n'y a pas de problème. C'est une faute grave. Ce n'est même pas une phrase. Il n'y a même pas de verbe. C'est «gouvernement du Canada». Le gouvernement du Canada existe depuis 1867, et on n'est même pas capable d'avoir une enveloppe ou un sigle avec un français correct. J'ai failli tomber à la renverse. Je vous dirai qu'une enveloppe comme celle-là, c'est horrible.

J'ai une dernière question à poser. Ce matin, l'association des employés en sciences sociales a déposé un mémoire devant le Comité des finances. Il contenait différentes recommandations, dont une qui rejoignait les recommandations faites par différents organismes et syndicats de la Fonction publique, c'est-à-dire d'adopter des mesures de contrôle de la sous-traitance et des lignes directrices pour refléter le coût réel de cette sous-traitance par rapport aux coûts que le même contrat pourrait occasionner s'il était effectué à l'interne. Je sais qu'on vous a posé cette question-là depuis que vous êtes en fonction. Est-ce que vous entendez mettre en place un comité d'évaluation de la sous-traitance par rapport à la production des mêmes contrats à l'intérieur de la Fonction publique? Je pense qu'il serait temps de répondre à cela, d'autant plus que les municipalités à travers le Canada ont mis au point, au cours des dernières années, une évaluation coûts-bénéfices qui est probablement plus avancée que celle qu'on retrouve au sein du gouvernement fédéral.

.1600

[Traduction]

M. Eggleton: Premièrement, en ce qui concerne l'enveloppe, je suis sûr que le ministère responsable aimerait l'avoir pour prendre les mesures correctrices. On peut toujours trouver des problèmes, mais dans la grande majorité des cas, les gens reçoivent un bon service dans la langue officielle de leur choix. Oui, il est possible d'apporter des améliorations et on peut toujours trouver des défauts ici et là. Mais nous continuerons de travailler à l'amélioration du service. Nous avons déjà apporté un certain nombre d'améliorations importantes. J'en ai mentionné quelques-unes aujourd'hui.

En ce qui concerne le groupe des sciences sociales et la sous-traitance, oui, nous examinons la question de la sous-traitance. C'est le comité des opérations gouvernementales qui s'en charge. Nous avons fourni un certain nombre d'informations. Nous voulons que cela soit examiné avec soin car notre position, en tant que gouvernement, est que nous voulons simplement sous-traiter uniquement lorsque cela est avantageux. Dans ce cas, il n'y a aucune raison de s'y opposer. S'il est plus avantageux de le faire à l'interne, alors c'est ce que nous ferons. C'est ce qui représente la plus grande économie pour le contribuable. Après tout, c'est là l'essentiel. C'est ce que nous encourageons.

Le président: Monsieur Abbott, s'il vous plaît.

M. Abbott (Kootenay-Est): Merci, monsieur le président.

Je vais m'attarder sur un sujet puis je passerai aussi rapidement que possible à M. Williams pour être sûr que nous ayons tous les deux notre mot à dire.

Le président: Vous faites équipe.

M. Abbott: C'est exact. Étant donné le ministre que nous avons, nous avons pensé que nous devions au moins être deux.

J'aimerais m'attarder sur la question des programmes d'équité en matière d'emploi. Je remarque qu'à la page 7 de la version française du mémoire du ministre, on parle des groupes visés par l'équité en matière d'emploi. Puis à la page 8, au cinquième paragraphe, il est dit:

Je tiens à dire au ministre avec tout le respect que je lui dois, comme le Président de la Chambre le rappelle toujours, nous sommes tous ici des gens honorables. Donc je ne veux pas médire de la réponse du ministre, mais je veux que cela soit absolument clair et évident.

La nouvelle Loi sur l'équité en matière d'emploi ou d'autres lois qui seront bientôt adoptées ne vont-elles pas être influentes ou applicables? La Loi sur l'emploi dans la Fonction publique et son règlement d'application ne vont-ils pas être touchés par toute nouvelle loi sur l'équité en matière d'emploi? Dans ce cas, pour la réduction des effectifs... Il y a deux aspects de la réduction des effectifs qui me préoccupent. Le premier est l'impression qu'il y a des membres de l'effectif, dans un ministère donné, des gens, qui de par leur sexe ou quels que soient les critères d'identification, seraient classés comme devant rester et d'autres comme devant partir.

Vous avez dit ici:

.1605

Néanmoins, le gouvernement ne va-t-il pas être inhibé par l'équité en matière d'emploi dans la mesure où, s'il y a réduction des effectifs, il y aura ordre de licenciement inversé tout comme il y a actuellement ordre d'embauche inversé dans bien des cas, afin d'en arriver à un équilibre dans l'équité en matière d'emploi? Il y a ordre d'embauche inversé ou en tout cas cela fait partie des critères d'embauche. Pourquoi cela ne serait-il pas le cas pour les licenciements?

Le deuxième aspect est que s'il y a des employés excédentaires à la Fonction publique qui sont qualifiés pour un poste donné, s'ils ne sont pas du bon sexe, n'ont pas la bonne couleur ou quelles que soient les autres désignations, seraient-ils nécessairement licenciés pour que l'on embauche de nouvelles personnes? Autrement dit, quelle est la place de l'équité en matière d'emploi dans tout ceci? J'aimerais avoir une réponse extrêmement claire.

M. Eggleton: Je pense que vous mélangez ordre du mérite inversé et principes d'équité en matière d'emploi. Nous engageons nos employés selon le principe du mérite ainsi que le définit la loi. Nous avons un programme d'équité en matière d'emploi parce que nous voulons augmenter la réserve des candidats qui viennent des groupes qui sont sous-représentés à la Fonction publique. Que ce soient des femmes occupant des postes non traditionnels ou de direction, des personnes handicapées, les autochtones ou les membres de minorités visibles, il s'agit de groupes qui sont sous-représentés. Nous voulons que la Fonction publique reflète davantage la population d'aujourd'hui dans notre pays.

Nous voulons essayer de faire en sorte que ces gens puissent se porter candidats en plus grand nombre et aient l'occasion de concourir. Lorsqu'on en vient au concours lui-même, que ce soit pour une embauche ou une promotion, de par la loi, nous nous appuyons sur le principe du mérite.

Lorsque nous parlons de l'ordre de mérite inversé, nous parlons par exemple d'un cas dans un ministère où, aux fins de la réduction des effectifs, il y a peut-être un groupe particulier de gens qui occupent des emplois semblables. Ils sont peut-être 20 à occuper les mêmes emplois et à avoir les mêmes qualifications. Disons que les compressions impliquent une réduction de moitié du niveau de service et de la portée du programme. Cela signifie que nous n'avons plus besoin que de la moitié du nombre de ces employés.

Comment allons-nous alors déterminer les 10 qui vont rester et les 10 qui vont partir, s'ils font plus ou moins le même travail et ont les mêmes qualifications fondamentales? C'est là ou l'ordre de mérite inversé, le principe du mérite, entre en jeu. Cela n'a rien à voir avec l'équité en matière d'emploi.

Nous nous préoccupons évidemment de l'équité en matière d'emploi. J'ai fait remarquer dans mes observations que nous ne voulions pas de situation disproportionnée. Nous pensons en termes des groupes visés par l'équité en matière d'emploi et des différents échelons - direction, cadre moyen, superviseur, travailleur de première ligne et personnel de soutien administratif. Nous allons surveiller cette situation.

Nous voulons garder de justes proportions pour que nous en arrivions à une Fonction publique qui fonctionne bien, car il se peut que 15 p. 100 - c'est ce que représente le chiffre de 45 000 - de nos employés partent, mais 85 p. 100 vont rester, la grande majorité des programmes et des services vont se poursuivre et nous devons assurer un bon fonctionnement de la Fonction publique.

Voilà le contexte dans lequel nous envisageons l'ordre de mérite inversé.

M. Abbott: Mais, monsieur le ministre, pouvez-vous m'aider à comprendre si le gouvernement embauche de manière à essayer de tenir compte de l'équité. Je crois que c'est exact.

M. Eggleton: Non, j'ai parlé de mérite. Le mérite est le principe sur lequel nous... Nous essayons d'augmenter la réserve des candidats appartenant aux groupes désignés par les programmes d'équité en matière d'emploi.

M. Abbott: D'accord. Ce que j'ai du mal à comprendre c'est ceci: Si le gouvernement agit de cette façon au moment de l'embauche, le gouvernement ne va-t-il pas utiliser la même méthode pour les licenciements? Autrement dit, cette déclaration peut être prise au pied de la lettre. Les gens n'auront pas à s'inquiéter d'être des hommes blancs d'âge moyen.

M. Eggleton: Comme je l'ai dit à maintes reprises, même avec des objectifs d'équité en matière d'emploi, la moitié des gens que nous avons embauchés au cours des dernières années ont été des homnmes blancs. Je ne crois pas que l'on puisse montrer que ce groupe particulier fait l'objet d'une discrimination. Nous essayons simplement d'accroître le nombre de candidats des autres groupes de façon à en arriver à une Fonction publique qui reflète davantage la population. Mais pour ce faire, il faut qu'une personne se qualifie selon le principe du mérite. C'est le principe sur lequel nous nous appuyons pour engager le personnel. C'est également le principe sur lequel nous nous appuyons pour les licenciements.

.1610

M. Williams (St-Albert): Vous avez dit que les programmes de départ ne coûteront pas plus cher que les offres raisonnables faites ailleurs. Mais vous allez payer des indemnités de départ de 39 à 40 semaines à des gens qui n'ont pas plus de six ans de service. Je cite le Edmonton Journal du samedi 15 avril 1995:

Cela signifie qu'il faudrait 20 ans de service avant d'obtenir une indemnité de départ de 40 semaines. Or, vous allez payer 40 semaines ou plus après six ans de service. Ne pensez-vous pas que votre offre est extrêmement généreuse et va coûter cher aux contribuables canadiens?

M. Eggleton: Non. Il y a toutes sortes de programmes. Il y en a certainement qui offrent des niveaux d'indemnité plus élevés que celui que nous proposons. Mais on peut dire qu'il se trouve dans la moyenne. Nous avons demandé à un consultant de l'examiner, et il nous a dit qu'il se situait dans la moyenne. Je pense que c'est une proposition tout à fait convenable.

M. Williams: Ce programme va coûter un milliard de dollars. Cette somme représente-t-elle le coût une fois que les employés qui continueront à être rémunérés pendant six mois, ou cela comprend-il les six mois d'avis qui auront été donnés?

M. Eggleton: Cela concerne les personnes qui opteront pour le PERA.

M. Williams: Je sais, mais ils vont travailler pendant six mois, période pendant laquelle...

M. Eggleton: Non, pas s'ils optent pour le PERA. S'ils n'optent pas pour le PERA, ils travailleront pendant six mois avant d'avoir le statut d'excédentaire non rémunéré.

M. Williams: Combien de temps vont-ils travailler avec le PERA? Va-t-on simplement leur donner un avis et les renvoyer la semaine suivante?

M. Eggleton: Ils ont 60 jours pour prendre une décision. Mais le gestionnaire devrait alors les informer de la date à laquelle ils devraient quitter leur poste, la date à laquelle l'emploi prendrait fin. C'est peut-être presque immédiatement, ou dans un mois, ou dans quelques semaines.

M. Williams: Vous dites que vous n'avez pas adopté de règlement ni de règles, ni pris de décisions concernant le réemploi. Les gens vont-ils prendre leurs indemnités puis revenir travailler presque aussitôt?

M. Eggleton: Non.

M. Williams: Allez-vous le garantir?

M. Eggleton: En général, je ne pense pas que cela se produirait. Cela ne va pas aider les ministères à atteindre leurs objectifs qui sont de réduire leur budget. Il n'y aucun avantage à accorder des primes de départ à des gens pour qu'ils partent et à les réemployer aussitôt après. Ce n'est pas ainsi que l'on parviendra à réduire les budgets de manière à atteindre les objectifs fixés par l'examen des programmes.

Mais il y aura certains cas où des gens reviendront à temps partiel ou occuperont peut-être le même emploi. Nous ne pensons pas que cela se produira très souvent. Mais compte tenu des chiffres envisagés - 45 000 - il y a toutes sortes de possibilités. Nous voulons protéger les intérêts des contribuables dans des cas comme cela. Nous ne voulons pas verser des sommes importantes puis réemployer la personne. Si nous allons engager la personne de nouveau, elle devra rembourser les sommes qui lui ont été versées.

M. Williams: Y aura-t-il des règles pour empêcher que cela ne se produise?

Le président: Excusez-moi. Pourrions-nous poursuivre. Vous pourrez y revenir lors d'une deuxième série de questions. Cela ne vous dérange pas?

M. Williams: D'accord, monsieur le président.

Mme Catterall (Ottawa-Ouest): À plusieurs reprises dans votre exposé, monsieur le ministre, vous avez dit que tout ceci fait suite à l'examen des programmes et que ce n'est pas un exercice de réduction du personnel. Il s'agit de changer les choses que le gouvernement fait et la façon dont il les fait. Il me semble que bon nombre de ces décisions auraient été prises avant le Budget, et pourtant, les gens doivent attendre très longtemps avant de savoir si leur poste sera touché. D'autre part, j'entends dire que les ministères ne peuvent pas obtenir le montant total du fonds de un milliard de dollars pour payer les primes d'encouragement au départ anticipé, en particulier s'ils doivent accélérer leur processus de mise à pied. Ces deux facteurs soulèvent un certain nombre de questions.

.1615

Premièrement, étant donné que de nombreux ministères ne semblent pas avoir décidé ce qu'ils vont faire, bien des gens n'ont pas encore eu le temps de décider, s'ils n'y sont pas forcés, s'ils vont opter pour des indemnités de départ anticipé, le programme de retraite anticipée ou envisager d'autres possibilités au sein du gouvernement. Ils n'ont peut-être pas le temps de le faire avant que le texte de loi entre en vigueur et à ce moment-là, il leur faudra prendre une décision rapidement. Il devient alors très difficile de savoir les choix que l'on peut faire.

Je suis heureuse de vous entendre dire que vous allez donner des lignes directrices aux ministères sur les substitutions. Mais si on leur permet de le faire, pourquoi n'est-ce pas dans le cadre du processus officiel et du programme d'encouragement au départ anticipé tel qu'il est prévu dans le projet de loi, si l'on va avoir un choix plutôt que de ne considérer qu'un seul emploi, un seul employé, une seule prime de départ anticipé?

M. Eggleton: Premièrement, pour ce qui est de la lenteur du processus, étant donné le rythme auquel les gouvernements agissent dans ces circonstances, nous avançons plutôt bien. Mais lorsqu'il s'agit de leur vie personnelle, je comprends que les gens s'inquiètent. Les inquiétudes et les incertitudes semblent ne jamais finir.

C'est certainement la raison pour laquelle nous encourageons les ministères à être aussi ouverts que possible avec leurs employés pour que ceux-ci puissent savoir à l'avance, même de façon informelle, si leur poste sera déclaré excédentaire ou non. Je sais que cela s'est produit dans un grand nombre de cas. Mais tous les ministères n'en sont pas encore arrivés là et il leur reste encore beaucoup de communications à faire. Ils sont encore à la formulation des programmes, ils en sont encore aux détails.

Les grandes lignes de ces initiatives ont été définies lors de l'examen des programmes, c'est vrai, mais il faudra encore un peu de temps pour savoir comment s'y prendre et ce que cela signifie pour chaque poste. Tout ce travail se poursuit pendant que l'on débat du projet de loi C-76. Mais j'aimerais dire que si le projet de loi C-76 est adopté rapidement, toute cette incertitude et cette angoisse cesseront et nous pourrons officiellement appliquer le PERA. Tant que le projet de loi n'est pas adopté et que le PERA n'est pas entré en vigueur, nous devons attendre.

Vous avez parlé du fonds de un milliard de dollars. Les ministères absorberaient une partie des coûts de la réduction des effectifs - certains des coûts normaux associés à la suppression des postes. Les coûts extraordinaires que représente le PERA lui-même seront assumés à même le fonds de un milliard de dollars, mais il y a certains coûts connexes que les ministères assumeront eux-mêmes. Nous collaborons avec eux à ce sujet pour nous assurer qu'ils ont les ressources nécessaires et pour que l'exercice de réduction et la façon dont ils assumeront ces coûts ne leur causent pas de problème.

Vous avez parlé des remplaçants ou de la gestion des substitutions. Là encore, l'aspect fondamental c'est que nous ne cherchons pas à réduire le nombre d'employés mais le nombre de programmes et de services. À cela correspond un certain montant qui se traduit par la réduction de 45 000 postes. Mais dans la mesure où il est question de programmes et de services, il est aussi question de postes très précis qui sont associés à la prestation de ces programmes ou de ces services.

Les employés qui occupent ces postes ont des compétences particulières qu'ils ont acquises au fil du temps. De nos jours, l'apprentissage est un processus permanent. Un grand nombre des compétences associées à ces postes ne sont pas transférables à d'autres postes. De façon tout à fait fondamentale, on ne peut pas mettre un ingénieur à la place d'un avocat. Il est peut-être possible de le faire, mais en général, on ne le fait pas. Des gens ayant des antécédents ou traits similaires ou ayant suivi les mêmes études acquièrent des connaissances et des compétences très différentes au cours des années, c'est pourquoi on ne peut pas automatiquement procéder à des substitutions à grande échelle.

Mais il y a certains cas où cela est possible, c'est pourquoi nous avons un programme ciblé. D'ailleurs, le vérificateur général a dit que c'est ce que nous devons faire. Mais nous avons dit également qu'il arrive que deux personnes occupent des postes semblables et ont des compétences semblables. Le poste d'une des personnes va être déclaré excédentaire, mais cette personne souhaite rester. L'autre personne aimerait partir alors que son poste n'a pas été déclaré excédentaire. Peut-elle remplacer l'autre? Oui, toutes choses étant égales, ce genre de substitution....

Mais tout cela est entre les mains des gestionnaires. C'est ainsi que l'on doit procéder. Sans quoi, nous finirons par avoir des employés qui n'ont pas les compétences pour assurer les programmes et les services que nous allons continuer d'administrer. Donc tout cela doit être géré avec beaucoup de soin avant de désigner un poste comme excédentaire. Une fois qu'il est déclaré excédentaire, il ne peut pas y avoir de substitution. C'est très clair.

.1620

Les gestionnaires ont la latitude nécessaire sous l'autorité de leur sous-ministre, dans chaque cas, au sein de chaque ministère.

Mme Catterall: Cela m'amène à ma deuxième question, qui est celle des délais. Comme je l'ai dit, il semble que la plupart des gens ne savent pas ce qu'est leur situation. Malheureusement, près de 100 p. 100 s'inquiètent alors que 15 p. 100 peut-être d'entre eux vont être touchés. Êtes-vous prêt à envisager de ne pas délivrer d'avis de poste excédentaire avant que les employés aient eu le temps d'examiner leurs options, d'obtenir des conseils financiers suffisants, et avant que les ministères aient pu envisager des options de recyclage pour que les employés puissent occuper d'autres postes disponibles et ne prennent pas hâtivement de décisions vitales et ne perdent pas leurs droits chaque jour où ils remettent cette décision? Êtes-vous prêt à envisager un délai d'au moins 60 jours par exemple avant de délivrer un avis de poste excédentaire officiel à quelqu'un qui sait déjà que son poste va être touché?

M. Eggleton: Il existe déjà une disposition qui prévoit un délai de 60 jours, que je trouve suffisant. Je pense que la plupart des employés connaîtront déjà leur situation. Nous avons certainement encouragé les sous-ministres et autres hauts fonctionnaires à être francs avec les employés et à leur dire le plus rapidement possible s'ils seront déclarés excédentaires ou non. S'ils respectent cette démarche, je pense que nous découvrirons que la plupart des gens sauront bien avant de recevoir leur avis officiel de 60 jours. Ils ont déjà toute l'information sur le PERA et le PEDA. Ils peuvent commencer à envisager diverses possibilités. Je pense donc que certains d'entre eux peuvent déjà réunir un certain nombre de renseignements. Mais pour ce qui de l'avis officiel, je pense que la période de 60 jours est tout à fait suffisante.

Mme Catterall: Je vous demande simplement d'envisager de prolonger cette période lorsque les choses vont s'accélérer.

M. Eggleton: En fait, on m'a dit que certains ministères font actuellement du counselling. Nous avons eu des questions sur les emplois. Tout cela se fait déjà, c'est pourquoi les gens sauront, comme je l'ai dit, bien avant de recevoir leur avis officiel.

M. St. Denis (Algoma): Merci, monsieur le ministre de votre présence.

En fait, dans votre réponse à Mme Catterall, vous avez répondu à ma première question sur les substitutions. Je pense que mes commenttants seront heureux de voir que nous avons agi de façon à ce que, tout en respectant le principe des cibles, ce qui est important pour répondre aux objectifs, nous avons permis à nos gestionnaires de tenir compte des besoins des gens dans leur propre secteur de compétence.

Je vais donc passer à ma deuxième question, qui a trait au cumul. Notre gouvernement a réglé cette question pour ce qui est des pensions des députés. Tout en reconnaissant le droit d'une personne à chercher un emploi après son départ de la Fonction publique, comment pouvons-nous raisonnablement garantir aux Canadiens qu'il n'y aura pas d'abus à cet égard, et pouvons-nous aller jusqu'à un réemploi dans les provinces? Est-ce possible?

M. Eggleton: Je pense que ce serait difficile.

Comme je l'ai dit, le principe que nous appliquons ici c'est que nous ne devons pas avoir de situation où une personne bénéficie d'un de ces programmes de départ puis revient à la Fonction publique ou obtient un contrat personnel sans avoir à rembourser l'argent qu'elle a obtenu pour son départ. Mais s'ils s'en vont et trouvent un autre emploi quelque part ailleurs, dans le secteur privé ou même ailleurs dans l'administration, il serait très difficile pour nous de le contrôler.

.1625

Effectivement, nous essayons ici de trouver le juste milieu. Entre l'intérêt public, celui du contribuable, et l'intérêt de celui qui quitte la Fonction publique pour obtenir un emploi; nous essayons de ne pas mettre trop d'obstacles sur son chemin ou lui rendre la vie plus difficile. C'est ce que nous essayons de concilier. Nous examinons divers scénarios pour fixer des règles, mais c'est le juste milieu qui est notre objectif.

Mme Brushett (Cumberland - Colchester): Ma question est semblable à celle de la personne qui m'a précédée.

Je reviens à la question du cumul de la pension et du traitement. J'ai siégé au Comité des opérations gouvernementales et j'ai écouté beaucoup de témoins nous parler de la sous-traitance. On nous a souvent cité le cas de celui qui prend sa retraite le vendredi, qui touche sa pension et qui embauché à nouveau à contrat le lundi matin.

Comme j'ai été dans les affaires, je comprends pourquoi cela peut se produire souvent. On a l'habitude de travailler avec quelqu'un, un employé excellent qui est formé et a de l'expérience. C'est beaucoup plus facile que de trouver un nouveau venu et de passer par toutes les formalités.

Cela ne permet pas à la relève de décrocher un emploi. C'est un argument qui revient souvent.

Même s'il faut encourager les gens à trouver un emploi, je me demande s'il n'aurait pas lieu de se prononcer clairement sur cette méthode, dont on a usé ou abusé - j'ignore quel est le terme qui doit s'appliquer - et qui empêche les jeunes de se trouver un emploi.

M. Eggleton: Il y a deux choses ici. Tout d'abord, en ce qui concerne le cas de celui qui part pour revenir le lendemain, j'ignore combien de fois cela se produit. Quantité de choses sont possibles dans une Fonction publique aussi vaste que la nôtre.

Toutefois, en ce qui concerne l'examen des programmes, on n'atteint pas les objectifs en fonction du nombre de postes déclarés excédentaires ou d'employés congédiés. On atteint ces objectifs si lon réduit le montant total et ce ne sera pas possible si l'on embauche quelqu'un qui vient de partir. C'est donc tout autre chose. Cette opération ne s'apparente pas aux précédentes fondées sur des réductions généralisées et dans lesquelles à peu près tout était permis. Dans le cas présent, le ciblage est très précis. C'est pourquoi il faut être très prudent lorsque l'on parle de substitution.

Pour ce qui est des jeunes, oui, ces dernières années nous avons embauché beaucoup moins de recrues que par le passé; il faut toutefois s'assurer de renouveler la Fonction publique en injectant du sang neuf. Nous l'avons fait, mais moins que par le passé. Il faut néanmoins continuer de songer à la relève. Nous avons des programmes de formation en gestion et autres pour attirer des jeunes et assurer leur avancement. Nous allons les maintenir. Nous allons continuer parce que nous sommes conscients de la nécessité d'assurer la relève.

M. Williams: Monsieur le ministre, vous avez dit que les départs involontaires allaient être maintenus au minimum mais je crois savoir qu'il n'y a pas de démissions dans la Fonction publique à l'heure actuelle. Tous attendent qu'on leur offre un pont d'or. Comment peut-on réduire au minimum le nombre de départs involontaires si personne ne s'en va de son propre gré à l'heure actuelle?

M. Eggleton: Je conteste vos prémisses. Ce n'est pas un pont d'or. C'est une façon raisonnable de traiter des employés qui ont travaillé longtemps et avec dévouement pour les aider à opérer la transition vers le secteur privé. Pour bien des gens, qui devront trouver un autre travail pour subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille et payer leur hypothèque, ce ne sera pas chose facile. Ne disons donc pas qu'on leur fait un pont d'or. On essaie plutôt de les aider à s'adapter à une nouvelle vie.

.1630

Quant à ceux qui ont été déclarés excédentaires mais qui veulent rester dans la Fonction publique, chaque fois que la chose est possible, nous allons essayer de leur trouver un autre emploi. Tel est l'esprit de la directive sur le réaménagemnt des effectifs. Cette directive, qui prévoit une offre d'emploi raisonnable, continuera de s'appliquer dans un grand nombre de ministères et à beaucoup de fonctionnaires qui seront déclarés excédentaires. Autrement dit, il faudra leur trouver un autre emploi parce que cela est prévu dans la convention collective.

M. Williams: Ma question était la suivante. Combien de gens y a-t-il encore dans la Fonction publique, en chiffres, qui auraient démissionné de leur propre gré mais qui attendent encore qu'on leur offre la prime de départ anticipé au lieu de partir tout de suite?

M. Eggleton: Je ne saurais vous le dire. Je l'ignore. Il y a des gens qui sont admissibles à la prime de retraite anticipée et qui peuvent partir maintenant si leur poste est déclaré excédentaire.

M. Williams: Sauf que plus personne ne démissionne de son propre gré. Tout le monde attend la prime pour départ anticipé. Combien cela va-t-il nous coûter de plus? Il y a des gens qui sont rémunérés à attendre et à qui l'on va faire, je le répète, un pont d'or de 40 semaines ou plus de traitement pour les faire partir alors qu'ils auraient pu partir de leur propre gré sans cette prime qui s'envient sous peu.

M. Eggleton: Il est impossible de le savoir. Les gens qui savent que quelque chose comme cela s'envient, choisiront peut-être d'attendre pour voir de quoi il retourne avant de décider. C'est leur droit. S'ils sont rémunérés pour le travail qu'ils font, c'est donc que ce travail est nécessaire et ils continuent de l'accomplir. Ils ne sont pas là à se tourner les pouces. Cela ne nous coûte rien. De toute évidence, cette fonction est nécessaire actuellement.

M. Williams: Vous avez choisi d'appliquer le PDA a quatre autres organismes: le SCRS, le Groupe Communication Canada, l'Office du transport du grain et le Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports. Vous dites que cela n'entraînera pas de coûts supplémentaires. Comment pouvez-vous élargir le programme sans que cela nous coûte plus cher?

M. Eggleton: La somme prévue au budget, un milliard de dollars, tient compte d'ajouts supplémentaires. Au début, nous savions qu'il y en aurait environ 11, mais que d'autres, qui n'avaient pas formulé leurs plans et qui pouvaient entrer dans la catégorie des plus durement touchés, pouvaient venir s'ajouter. Nous l'avions prévu, et effectivement il y en a et il est possible de les inclure tout en respectant le budget d'un milliard de dollars.

M. Williams: Vous venez d'ajouter d'autres services. Est-ce que cela vient changer le chiffre de 45 000 fonctionnaires? A-t-il grossi lui aussi?

M. Eggleton: Non, c'est toujours notre estimation. Le chiffre reste en-deça de 45 000.

M. Williams: Projetez-vous d'opérer des réductions plus importantes aux échelons supérieurs de l'administration plutôt qu'au niveau du service à la clientèle? L'emploi de ceux qui traitent avec le contribuable et l'ensemble de la population est jugé plus important que celui d'un gestionnaire qui gère d'autres gestionnaires. Y aura-t-il une proportion plus élevée de départs aux échelons supérieurs, grâce au PRA et PDA, de manière à protéger le service à la clientèle?

M. Eggleton: C'est à chaque ministère de décider comment se fera la réduction des effectifs mais chacun d'eux est censé continuer d'assurer les services prévus dans ces plans à long terme. Nous voulons qu'ils continuent d'offrir des services de qualité à la population. C'est pourquoi il faudra conserver les travailleurs de première ligne qui assurent les services à la clientèle, c'est-à-dire aux contribuables. C'est toutefois à chaque ministère de décider comment.

Certains craignent que ce soit l'inverse qui se produise, qu'il y ait plus de réductions parmi les employés de première ligne et trop peu aux échelons supérieurs. Nous allons surveiller la situation pour nous assurer qu'il n'y a pas de disproportions...

M. Williams: Mais n'allez-vous pas donner des directives?

M. Eggleton: Non, pas de directives. Nous leur avons bien fait savoir que nous nous attendons à ce qu'ils assurent des services de qualité et qu'ils aient le personnel nécessaire pour le faire. Comment cela se fera d'un poste à l'autre, c'est à chaque ministère de le décider.

.1635

M. Williams: Vous n'allez pas suivre la situation pour déterminer...

M. Eggleton: Oui, nous allons suivre la situation.

M. Williams: ...que les gestionnaires qui prendront les décisions ne vont pas s'occuper de leur propre survie et renvoyer quelqu'un d'autre, plutôt que de faire en sorte...

M. Eggleton: Eh bien, je ne le dirais pas de cette façon, mais vous...

M. Williams: ...que le service soit la plus grande priorité et que nous réduisions le nombre de gestionnaires? Le service doit absolument être la plus grande priorité. Quand les effectifs sont réduits dans le secteur privé, on réduit le nombre de cadres intermédiaires et supérieurs de façon draconienne. Nous n'allons pas procéder de cette même façon quand nous réduisons les effectifs cette fois-ci?

M. Eggleton: Le Conseil du Trésor n'a pas l'habitude de gérer tous les détails de chaque ministère. Ce n'est pas le Conseil du Trésor qui administre tous les ministères. Ce sont les administrateurs généraux des ministères qui font ce travail. Nous allons leur donner les lignes directrices nécessaires, et nous allons suivre la situation parce que nous ne voulons pas qu'un échelon en particulier soit réduit de façon disproportionnée. Nous voulons réduire les effectifs de manière sensée et en même temps, continuer à offrir de bons services aux Canadiens.

[Français]

Le président: Monsieur Plamondon, s'il vous plaît.

M. Plamondon (Richelieu): Bonjour, monsieur le ministre. Merci de votre présence.

Monsieur le ministre, entre 1985 et 1986, le vérificateur général du Canada avait été très sévère à l'égard de la façon dont avaient été faites les coupures à la Fonction publique. Il avait dit que 35 p. 100 des paiements forfaitaires versés avaient été trouvés sans fondement et que 29 p. 100 étaient discutables. Donc, de ceux qui avaient été congédiés et qui avaient reçu un paiement forfaitaire, selon le vérificateur général, 64 p. 100 ne le méritaient pas ou l'avaient eu de façon très discutable.

Comme les partis au pouvoir changent, mais que la haute Fonction publique demeure, ce seront sans doute les mêmes personnes qui émettront les critères et les directives qui guideront ceux qui feront ces coupures-là. Dans les réponses que vous avez données au représentant du Parti réformiste, vous m'avez semblé ne pas avoir une approche précise quant à la façon dont ces paiements forfaitaires seront donnés pour s'assurer qu'ils soient donnés à juste titre. Deuxièmement, ces personnes qui sont congédiées ne reviendront-elles pas comme employés à temps partiel?

Je vous rappelle que dans son rapport, à la page 236, le vérificateur général émettait une série de principes à respecter ou d'orientations dont les ministères devraient tenir compte losqu'ils effectuent des coupures.

Monsieur le ministre, êtes-vous bien conscient que ce sont sans doute les mêmes hauts gradés de la Fonction publique qui vont agir en votre nom, les mêmes qui agissaient pour les Conservateurs, les mêmes qui agissent pour le Parti libéral, et qu'on se retrouvera au fond, après ces coupures-là, avec les mêmes problèmes, c'est-à-dire un gaspillage des fonds publics dans 64 p. 100 des cas et un retour probable à temps partiel de plusieurs des employés congédiés?

[Traduction]

M. Eggleton: Le vérificateur général a dit aussi que ce sont les postes qu'il faut viser et c'est certainement ce que nous faisons. Nous ne suivons pas cette fois-ci les façons de procéder d'autrefois qu'il a critiquées.

De toute façon, nous avons pris des mesures pour corriger les situations qu'il a critiquées autrefois, qui se sont produites à une autre époque sous un autre gouvernement.

Je demanderais au secrétaire, Bob Giroux, d'en dire plus long là-dessus. Il est en peu plus au courant des détails de cette question.

[Français]

M. Plamondon: Je voudrais savoir comment cette coupure-ci sera différente de l'autre coupure. Comment allez-vous faire ces coupures différemment de ce qui a été fait entre 1986 et 1991?

M. R.J. Giroux (secrétaire du Conseil du Trésor du Canada): Monsieur le président, tout d'abord, comme le président du Conseil du Trésor l'a dit plusieurs fois, il y a une très grosse différence entre ce qui se passe aujourd'hui et ce qui, en 1985-1986, a fait l'objet du rapport du vérificateur général.

Premièrement, les budgets des ministères ont été réduits du montant de la réduction prévue dans la revue des programmes. Il est extrêmement difficile pour ces ministères-là de congédier des gens et de les réengager le lendemain, ou de faire des coupures qui ne sont pas défendables.

Le rapport du vérificateur général avait aussi démontré quelques faiblesses dans l'application de la politique du réaménagement des effectifs, et surtout du paiement du fameux six mois qu'on appelle le paiement forfaitaire de six mois. Depuis ce temps-là, nous avons fait des vérifications additionnelles auprès des ministères. Nous avons établi des lignes directrices et un cadre d'approche avec ces ministères pour nous assurer que les décisions qui sont prises le sont réellement pour des postes qui sont abolis, qui disparaissent et qui ne reviendront pas.

Nous avons aussi demandé aux sous-ministres de s'assurer qu'il y ait une rigueur interne dans l'application de ces mesures-là. Cela peut aller jusqu'à prendre les décisions eux-mêmes pendant un certain temps, jusqu'à ce qu'ils soient convaincus que les ministères mettront en application une bonne gestion.

Finalement, comme le président l'a dit tout à l'heure, nous aurons aussi un système de contrôle, de monitoring comme on dit en anglais, qui va nous permettre d'évaluer le bien-fondé de ces décisions-là et de nous assurer qu'il y ait en place des réductions réelles.

Le rapport du vérificateur général nous a guidés dans la direction que nous avons prise aujourd'hui, c'est-à-dire cibler les coupures, et nous a beaucoup aidés à nous préparer à faire le travail que nous allons mettre en place lorsque le projet de loi sera adopté.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Plamondon.

.1640

[Traduction]

M. Fewchuk (Selkirk - Red River): Je vous ai déjà posé la question et je n'ai pas obtenu de réponse. je vais vous la reposer. Si un travailleur excédentaire âgé de 47 ans veut rester et a les mêmes compétences qu'un autre de 58 ans qui lui veut prendre sa retraite, est-ce que l'employé plus jeune pourra demander à la direction de rester? Je crois savoir que sur le terrain actuellement le patron de l'employé de 47 ans répond que c'est impossible et qu'il doit partir. La possibilité n'est pas offerte à l'employé.

M. Eggleton: Cela est laissé au jugement de la direction. L'employé peut demander si c'est possible ou non, toutes choses étant égales. Le gestionnaire a une certaine latitude et jouit d'une certaine marge de manoeuvre pour prendre des décisions fondées sur le bon sens. Mais dans bien des cas, les conditions ne sont pas exactement les mêmes. Encore une fois, le gestionnaire a le choix de ne pas procéder ainsi.

M. Fewchuk: L'employé aurait-il la possibilité de s'adresser à quelqu'un? Certains gestionnaires sont pas mal durs. Peuvent-ils s'adresser à quelqu'un s'il y a un problème?

M. Eggleton: Les gestionnaires relèvent de leurs supérieurs; il y a donc d'autres gens. Pour ce qui est des postes qui sont déclarés excédentaires, c'est une décision qui peut faire l'objet d'un appel. Cela vient à un stade ultérieur. Mais je suis certain qu'il y a des gens à qui l'employé peut s'adresser.

M. Fewchuk: Est-ce que cela comprend le sommet de la pyramide, les adjoints ministériels, les sous-ministres et leurs adjoints? Souvent, il y a trop de cadres. Ce sont les adjoints qui font le véritable travail et l'autre est introuvable. Est-ce qu'on a besoin de tous ces gens-là? Un jour, on va examiner la chose.

M. Eggleton: Je pense que l'opération va aller assez rondement et nous allons surveiller les choses pour veiller à ce qu'il en soit ainsi. Mais quantité de problèmes peuvent survenir dans une opération de cette envergure. Nous allons suivre les choses de très près. Je suis certain que les syndicats notamment vont suivre la situation et se feront entendre au besoin.

M. Abbott: Très rapidement, je constate qu'en vertu de l'article 7 du projet de loi C-76, les fonctionnaires pourraient relever de deux ministres. En effet, un fonctionnaire pourrait déléguer une partie des pouvoirs d'un ministre à un autre fonctionnaire, d'un autre ministère. Je vois quatre dangers. D'abord, sur le plan de la loyauté, le fonctionnaire pourrait être tiraillé entre deux ministres. Deuxièmement, en théorie, deux ministres pourraient être responsables des gestes du fonctionnaire. Troisièmement, les deux pourraient récuser cette responsabilité. Dans la pratique, ni l'un ni l'autre n'exercerait d'autorité sur le fonctionnaire.

Avez-vous examiné l'article 7 sous cet angle?

M. Eggleton: L'objectif visé ici, c'est une plus grande efficacité dans la Fonction publique. Nous avons pris plusieurs mesures. Nos employés font preuve de beaucoup d'initiative et ils ont instauré ce que l'on appelle la pratique des services d'appui partagés localement.

Par exemple, dans un immeuble qui loge trois ou quatre ministères, il n'est pas nécessaire d'avoir quatre salles du courrier. Une seule suffit. Ils peuvent aussi partager des véhicules ou divers appareils. Quantité de choses peuvent être partagées, ce qui abaisse le coût d'exploitation et permet de réaliser des gains d'efficacité.

.1645

C'est cela l'objectif, parce que l'on sait que certaines opérations seront réalisées en commun par plusieurs ministères et que l'activité ne relèvera pas d'un sous-ministre ou d'un ministère en particulier. C'est en tout cas ce que l'on essaie de faire.

M. Giroux: Monsieur le président, j'aimerais ajouter un complément d'information. Chaque fois que l'on décidera, par exemple, que la classification des postes ou une fonction semblable sera réalisée pour les ministères par l'employé d'un seul ministère, ce qui est prévu - et c'est très simple - c'est que les administrateurs généraux des quatre ministères en cause délégueront à l'employé en question le pouvoir de classifier les postes au nom des quatre ministères. Actuellement, ce n'est pas possible; la délégation doit se faire à un subalterne direct, qui relève de l'administrateur général.

Par exemple, cela permettra au ministère des Transports de déléguer la fonction de classification à un agent de classification qualifié au ministère de la Défense nationale qui s'en chargerait. Le but est de nous aider à réaliser des économies sur les lieux de travail en mettant en commun les ressources en fonction de la pratique des services d'appui partagés.

M. Abbott: Le Parti réformiste trouve cette initiative louable. Nous sommes tout à fait pour.

Pour ce qui est de l'article 7, l'objectif est clair et nous sommes en faveur de cet objectif. L'ennui, c'est que la disposition n'est pas claire du tout sur l'identité de la personne à qui un employé doit rendre des comptes. Si quelqu'un prend une initiative - c'est peut-être le ministère des Transports, celui des Pêches et Océans ou celui de la Défense - il nous faut savoir quel ministre il faut engueuler. La responsabilité doit être clairement attribuée à quelqu'un. Or, avec le libellé actuel, ce n'est pas le cas. Nous allons revoir la formulation.

M. Giroux: Dans l'application de cette disposition, les sous-ministres doivent prendre soin de bien circonscrire les pouvoirs qu'ils délèguent. Ils ne se contenteraient pas d'une délégation en termes généraux. C'est un pouvoir bien précis qui serait délégué, assujetti à l'obligation de rendre compte, et qui préciserait que l'employé qui classifie les postes au nom du sous-ministre doit suivre les normes fixées par l'administration.

En dernier analyse, c'est toujours le sous-ministre, des Transports dans ce cas-ci, qui serait tenu responsable des décisions de l'employé à la Défense nationale qui s'est occupé de la classification en son nom. L'obligation de rendre compte reste intacte et le sous-ministre préciserait que, pour cette fonction, il laisse l'employé de l'autre ministère exercer son autorité. Mais ce n'est pas une délégation tous azimuts. Le pouvoir délégué serait bien précisé.

M. Duhamel (Saint-Boniface): J'aimerais parler rapidement de deux choses. Une de celle-là a déjà été soulevée. C'est-à-dire que si l'on n'est pas satisfait de la décision prise, les gens peuvent exercer un recours en remontant la filière et, ultérieurement, déposer un grief. Je croyais que c'était le cas, et vous l'avez confirmé, monsieur le ministre. Je vous en remercie.

Pour ce qui est de l'autre question, j'ignore si vous ou vos collaborateurs avez les chiffres. Je crois savoir qu'il y a un grand nombre de réductions au niveau administratif dans l'ensemble de la Fonction publique. Quelqu'un a-t-il des chiffres précis? Y a-t-il eu des réductions considérables du nombre de gestionnaires au niveau de la Fonction publique?

M. Giroux: Je peux répondre à cette question, monsieur le président. Depuis 1991-92 environ, le groupe EX, c'est-à-dire la haute direction, a subi une réduction légèrement supérieure à 20 p. 100 - au moins 20 p. 100 depuis - à la suite de la déstratification, la réduction de 10 p. 100 imposée par le gouvernement précédent ainsi que la grande réorganisation qui a eu lieu en 1993. Nous nous attendons à ce que proportionnellement cela baisse encore d'autant au fur et à mesure que des postes sont éliminés.

Le président: Monsieur le ministre, l'une des choses qui est sans doute le plus difficile pour nous tous ici au comité c'est le fait que nous avons obtenu de si bons services de nos fonctionnaires depuis des années. Congédier au cours des trois prochaines années 45 000 personnes, dont beaucoup ne trouveront peut-être pas un gagne-pain par la suite, c'est quelque chose que nous faisons le coeur très lourd. D'après les témoignages que nous ont donnés les groupes de la Fonction publique, grâce à ce que l'on appelle la substitution, il serait possible de se débarrasser d'un grand nombre de ces fonctionnaires de façon volontaire.

.1650

En revanche, vous et le vérificateur général, vous nous dites que ce choix n'existe pas et qu'il faut fixer des objectifs bien précis. Vous nous avez dit aujourd'hui, et cela nous réconforte un peu, que ce ciblage peut se faire avec une certaine latitude. Vous pouvez trouver des façons, si une personne est prête à accepter la prime pour la retraite anticipée dans un ministère, d'opérer une certaine substitution.

Nous vous exhortons, dans toute la mesure du possible, à mettre en oeuvre ce principe, sachant bien que les gestionnaires doivent prendre une décision basée sur les principes de l'efficacité, du service à la population et de quantité d'autres considérations. Mais pendant cette période difficile, nous vous exhortons aussi, dans toute la mesure du possible, de recourir à la substitution et de faire preuve de compassion chaque fois que possible. Nous savons que c'est ce que vous ferez. Nous savons que ce n'est pas une tâche facile pour vous, pas plus que pour nous.

En notre nom à tous, nous vous remercions beaucoup de votre comparution.

M. Eggleton: Merci beaucoup, monsieur le président. Je souscris à tout ce que vous venez de dire. C'est un gros défi. Avec nos fonctionnaires, nous voulons faire deux choses. Nous voulons les traiter de façon juste et raisonnable et faire tout en notre pouvoir pour aider ceux qui s'en vont à s'adapter à une nouvelle vie et à trouver un autre gagne-pain.

De même, nous disposons d'employés magnifiques, dévoués et à l'esprit très créatif. Je l'ai contasté dans mes rencontres avec un grand nombre d'entre eux dans tout le pays. Nous tenons à encourager ces nouvelles façons de procéder et ses innovations lorsque nous les rencontrons, à les faire connaître à d'autres partout dans l'administration et ainsi à renouveler, vivifier et remotiver notre Fonction publique pour qu'elle offre aux Canadiens les services de qualité dont elle est tout à fait capable. Aussi bien la population que nos employés y trouveront une plus grand satisfaction.

Le président: Merci beaucoup, monsieur le ministre. Faisons une pause de deux minutes en attendant nos témoins suivants. Nous les avons déjà fait attendre depuis un bon moment.

.1652

PAUSE

.1658

Le président: La séance est rouverte. Nous poursuivons l'étude du projet de loi C-76.

Nous recevons cet après-midi le Comité canadien d'action sur le statut de la femme, représenté par sa présidente, Sunera Thobani, Mme Cameron et Mme Head. Je vous présente nos excuses, nous sommes en retard d'environ 29 minutes et demie. Nous sommes tous impatients d'entendre votre témoignage, après quoi nous aimerions pouvoir vous poser quelques questions.

Mme Sunera Thobani (présidente, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): Pourrions-nous attendre à ce que les autres membres du comité se joignent à nous?

Le président: Combien voulez-vous qu'il y ait de membres avant de commencer? Nous avons le quorum.

Mme Barbara Cameron (membre, Comité de politique sociale, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): Nous ne devrions pas témoigner tant qu'il n'y aura pas de membres pour nous entendre.

Mme Thobani: C'est juste.

Le président: Très bien. C'est votre décision. D'après nos règles, nous avons pourtant le quorum.

Mme Cameron: Pas d'après les règles du CCA.

Le président: Combien vous en faut-il?

Mme Thobani: Autant que possible, en tout cas plus que quatre, s'il vous plaît.

Le président: Je suis certain que vos membres ont communiqué avec les membres du comité qu'elles voulaient voir présents pour entendre votre témoignage.

Mme Thobani: Est-ce qu'il s'agit d'attendre les autres membres du comité ou sont-ils partis pour le reste de la journée?

Le président: Je n'en ai aucune idée.

Mme Thobani: Nous allons attendre.

Le président: Très bien. Nous savons qu'un d'entre eux va revenir.

.1659

PAUSE

.1703

Le président: Vouliez-vous commencer?

Mme Thobani: Oui, je crois. Je soupçonne que personne d'autre ne va revenir.

Le président: Je sais que quelqu'un d'autre viendra.

Mme Thobani: Monsieur le président, je commencerai par vous demander d'exhorter les membres du Comité à lire le mémoire écrit que nous avons soumis.

Le président: En effet, j'en recommanderais la lecture à tous les membres du Comité et à tous les députés.

Mme Thobani: Merci beaucoup.

Aujourd'hui, je suis accompagnée des personnes suivantes: Mme Barbara Cameron, professeur de sciences politiques à l'Université York et membre du Comité des politiques sociales du CCA; Mme Tina Head, qui est avocate et qui faisait partie du Conseil consultatif canadien sur la situation de la femme avant la dissolution de cet organisme. Actuellement, Tina est aussi membre du Comité des politiques sociales du CCA.

Tout d'abord, je tiens à vous remercier de nous avoir donné l'occasion de présenter ce témoignage.

Comme vous le savez, le CCA est la plus importante organisation de femmes au pays, et nous représentons plus de 600 groupes de femmes.

Nous sommes d'accord avec bon nombre de spécialistes qui estiment que le projet de loi C-76 représente le plus important changement de la politique sociale depuis le Livre blanc de 1945 sur l'emploi et le revenu. S'il est adopté, ce projet de loi servira de cadre à la restructuration de la politique sociale par le gouvernement fédéral et à la redéfinition de la nature même de la citoyenneté sociale au Canada. À bien des égards, il représente un recul par rapport aux avantages qui ont découlé du Livre blanc de 1945 et ramène le Canada au système de financement des programmes sociaux qui existait avant la Seconde Guerre mondiale.

Le CCA a exprimé publiquement son opposition aux compressions massives des transferts aux provinces au titre des programmes sociaux, prévues dans le budget de février 1995. Ces compressions vont entraîner la réduction de programmes sociaux aussi fondamentaux que les soins de santé, les soins aux enfants, le soutien du revenu pour les pauvres, les maisons de transition, les centres d'aide aux victimes de viol et d'autres services qui sont essentiels pour les femmes.

Dans le budget de février, le gouvernement a également réimposé l'infâme taxe d'entrée aux immigrants et aux réfugiés, ce qui va attiser les préjugés à l'égard des immigrants.

Pour les femmes, la compression des services sociaux entraînera une augmentation du travail familial non rémunéré et de la pauvreté, ainsi que la perte d'emplois mieux rémunérés dans le secteur public. Le projet de loi C-76 facilitera la disparition de 45 000 postes au cours des trois prochaines années, et les femmes seront les plus touchées par cette mesure.

À notre avis, ce projet de loi ne vise pas à mettre en oeuvre un plan financier annuel. Il vise plutôt à redéfinir le rôle du gouvernement fédéral dans la vie économique et sociale. Il s'agit de mettre en oeuvre l'objectif central que Paul Martin a défini en 1995, à savoir redéfinir le rôle du gouvernement dans l'économie.

Quel sera donc ce nouveau rôle du gouvernement? D'après M. Martin, il s'agira de gérer l'économie dans l'intérêt du secteur privé et d'orienter en conséquence la politique monétaire, fiscale, commerciale et réglementaire, de même que le marché du travail. Dans le budget, il y a une lacune flagrante: le gouvernement ne prend aucun engagement en ce qui concerne l'égalité, qu'elle soit régionale, sociale, sexuelle ou raciale.

.1705

Dans le budget, à propos de la redéfinition du rôle du gouvernement, le ministre des Finances et son ministère estiment qu'il faut laisser le gouvernement faire ce qu'il fait le mieux - et laisser le reste à ceux qui peuvent faire mieux - qu'il s'agisse des entreprises, des syndicats ou du secteur bénévole. Le CCA soutient que le ministère des Finances doit se contenter de faire ce qu'il fait le mieux et laisser la définition de la citoyenneté canadienne et le rôle du gouvernement à ceux qui sont plus qualifiés pour la tâche - à savoir le peuple canadien. Au Canada, la redéfinition des responsabilités des gouvernements doit découler d'un débat public, ouvert et démocratique. Elle ne doit pas être imposée d'en haut par le biais d'un budget conçu par un groupe restreint, élitiste et extrêmement non représentatif - constitué d'économistes conservateurs et de hauts fonctionnaires.

Je voudrais également profiter de cette occasion pour rappeler au Comité des finances que la dernière fois que nous avons comparu devant vous, nous avons attiré votre attention sur la composition du Comité et sur les questions relatives à l'équité. Ce Comité ne reflète pas la société canadienne des points de vue sexuel et racial. Nous vous exhortons à accorder plus d'attention...

Le président: Voulez-vous dire que nous sommes illégitimes?

Mme Thobani: Nous disons que les femmes ne sont pas équitablement représentées au sein du Comité.

Le président: Pourquoi donc prenez-vous la peine de comparaître devant nous?

Mme Thobani: Parce que nous voulons vous exhorter à corriger la situation, et nous espérons qu'un jour, nous pourrons comparaître devant un comité dont la composition reflète celle de la population canadienne et dont 52 p. 100 des membres seront des femmes. C'est un rappel, et nous vous exhortons encore à viser cet objectif.

Le président: Je pourrais peut-être remplacer tous les hommes de ce Comité par des femmes, si ça peut vous faire plaisir et vous inciter à revenir. Cela vous conviendrait-il?

Mme Thobani: Voulez-vous dire que vous allez créer un nouveau Comité des finances constitué uniquement de femmes qui prendraient cette décision...

Le président: Non, pas du tout. Vous avez dit 52 p. 100. Mais si vous voulez, je suis sûr que les trois partis représentés ici pourraient s'arranger pour remplacer les hommes de ce Comité par des femmes, si cela peut vous mettre plus à l'aise pour comparaître devant nous.

Mme Thobani: Non, nous ne voulons pas un comité constitué uniquement de femmes pour entendre le témoignage du CCA. Nous voulons que les instances décisionnelles du Comité reflètent la proportion de femmes et d'hommes dans la société canadienne. Si telle est votre proposition, si vous nous dites que c'est possible que le Comité des finances soit reconstitué et que 52 p. 100 de ses membres soient des femmes qui participeront à la prise de décisions, nous serions tout à fait disposées à accepter cette proposition ici aujourd'hui. Il s'agit d'un engagement que nous demandons aux gouvernements fédéraux depuis longtemps. Nous en serions ravies. Rien ne nous plairait plus que de vous entendre prendre cet engagement aujourd'hui.

Le président: Bon, je comprends.

Mme Thobani: Je vous remercie.

Le président: Je ne prendrai pas cet engagement, mais je pourrais faire en sorte qu'il y ait une majorité de femmes à n'importe quelle audience de ce Comité, si vous le voulez.

Mme Thobani: C'est justement là le problème. Il ne s'agit pas d'une séance donnée. Il faudrait que ces femmes participent à la prise des décisions.

Le président: Je comprends ce que vous dites.

Mme Thobani: Merci.

Même si nous contestons d'autres dispositions du projet de loi C-76, nous sommes particulièrement préoccupés par la position du Régime d'assistance publique du Canada et du projet de transfert social en matière de santé et de programmes sociaux; nos observations porteront essentiellement sur ces deux points.

Au cours de notre témoignage, nous invitons les membres du Comité à se rappeler qu'à notre avis, le Canada est un pays multi-national et multi-racial. Nous reconnaissons qu'il existe des différences très importantes entre la population du Québec et celle du reste du pays quant au rôle que doit jouer le gouvernement fédéral. Nous reconnaissons le droit des Québécois et des peuples autochtones de négocier avec le gouvernement fédéral les relations qui conviennent le mieux à leurs besoins. Nous refusons que l'on invoque les aspirations nationales des Québécois pour transférer aux autres provinces la responsabilité des programmes sociaux.

En 1976, le Canada a ratifié la Pacte des Nations unies relatif aux droits sociaux, économiques et culturels, pacte qui prévoit, entre autres, le droit d'obtenir un revenu suffisant et de choisir ou d'accepter librement de travailler. Le RAPC a été créé par la seule loi fédérale qui protège le droit à un revenu suffisant au Canada, droit reconnu par l'article 11 du Pacte de l'ONU. Dans les rapports présentés au Comité des Nations unies chargé de surveiller la mise en oeuvre de la convention, les différents gouvernements canadiens ont présenté les droits garantis en vertu du RAPC domme étant la preuve que le Canada s'y conformait.

En proposant d'éliminer le RAPC, le projet de loi C-76 supprime toutes les protections de base, excepté l'interdiction aux provinces d'imposer des conditions de résidence aux prestataires de l'aide sociale. En vertu du changement proposé, les provinces recevront de l'argent du gouvernement fédéral, mais elles pourront refuser l'aide sociale aux nécessiteux en invoquant n'importe quel motif, sauf celui de la résidence. Si cette mesure est adoptée, elle privera effectivement les pauvres de leur citoyenneté sociale et favorisera l'émergence d'une sous-classe de Canadiens qui se retrouveront probablement dans une pauvreté complète et absolue.

.1710

En raison de la gravité de cette infraction aux droits des Canadiens, surtout les plus vulnérables, le Comité canadien d'action s'est joint à l'Organisation nationale anti-pauvreté et au Comité de la charte et des questions de pauvreté pour porter le projet de loi C-76 à l'attention du Comité des Nations unies chargé de surveiller la mise en oeuvre Du Pacte de l'ONU relatif aux droits sociaux, économiques et culturels. Dans une décision sans précédent, le Comité de l'ONU a décidé d'écrire au gouvernement canadien à propos du projet de loi en question. Il a soulevé des questions sur la compatibilité entre les dispositions du projet de loi C-76 et les obligations du Canada en vertu du Pacte international.

Pour les femmes, l'élimination des mesures de protection garanties par le RAPC est une préoccupation particulière. Le CCA ne veut pas que l'on retourne à une situation dans laquelle les femmes dans le besoin peuvent se voir refuser l'assistance sociale parce qu'elles ne répondent pas à une conception de la moralité imposée par l'État. Ce genre de police morale dirigée contre les femmes, surtout les chefs de famille monoparentale, est une menace très réelle dans le contexte où les politiciens provinciaux de droite se servent des assistés sociaux comme bouc émissaire pour justifier l'érosion du niveau de vie de nombreux Canadiens.

Au lieu de limiter les droits sociaux et économiques de la population, le gouvernement canadien devrait plutôt les étendre.

Le CCA recommande que les droits sociaux et économiques prévus dans le Régime d'assistance publique du Canada soient maintenus et protégés dans les lois fédérales relatives à l'assistance sociale. Il recommande également que l'on étende les droits économiques et sociaux des Canadiens et, en particulier, ceux des femmes canadiennes en incorporant explicitement les droits sociaux, économiques et culturels comme l'a recommandé le Comité de l'ONU dans son rapport de 1993 sur le Canada.

Autrefois, dans leurs budgets, les Conservateurs se sont servis de la distinction entre les transferts pécuniaires et les points d'impôt pour éliminer rapidement toutes les contributions fédérales aux soins de santé et à l'enseignement postsecondaire. Même si les Canadiens ont mis du temps à constater l'ampleur de la destruction des institutions nationales par le Parti conservateur, ils ont réagi de façon brutalement efficace à l'heure de vérité.

En effet, à l'élection de 1992, le Parti libéral s'est présenté comme une solution de rechange à la malhonnêteté et à la fourberie qui, aux yeux des Canadiens, caractérisaient les Conservateurs. On espérait qu'un gouvernement libéral serait honnête et qu'il protégerait - au lieu de détruire - les programmes sociaux et créerait des emplois.

Dans ce contexte, en lisant les dispositions du projet de loi C-76 relatives au transfert en matière de santé et de programmes sociaux, on a un peu l'impression de recevoir à l'estomac un coup dur qui vous coupe le souffle. Il s'en dégage une malhonnêteté et un manque de respect, il est époustouflant de constater à quel point ses dispositions sont malhonnêtes et anti-démocratiques. Le gouvernement libéral ne se contente pas d'utiliser le même stratagème que les Conservateurs pour détruire les programmes sociaux; il va même plus loin. Le projet de loi C-76 ajoute l'assistance sociale à la liste des programmes sociaux que le gouvernement ne financera plus.

Il est évident que l'objectif primordial du transfert en matière de santé et de programmes sociaux est d'accélérer la disparition des subventions fédérales tant à l'aide sociale qu'aux soins de santé et à l'enseignement postsecondaire. Il s'ensuivra un transfert intégral de ces programmes aux provinces sur le dos des Canadiens.

En plus de violer une promesse électorale et d'utiliser l'astuce des points fiscaux pour tromper les Canadiens, le gouvernement enfreint d'autres règles démocratiques en proposant le système de transfert en matière de santé et de programmes sociaux. Ce dossier a fait l'objet de deux séries distinctes et coûteuses de consultations publiques - le référendum sur l'Accord de Charlottetown et l'examen de la politique sociale effectué par M. Axworthy. Le ministre des Finances et son ministère n'ont peut-être pas apprécié l'issue de ces initiatives, et ils ont maintenant décidé d'imposer leurs propres solutions préférées en ce qui concerne la conception de nos programmes sociaux et la Constitution.

.1715

Le CCA estime que les dispositions du projet de loi C-76 relatives au transfert en matière de santé et de programmes sociaux modifieront de façon fondamentale nos programmes sociaux et le rôle du gouvernement fédéral dans ce domaine. Le gouvernement fédéral ne dispose d'aucun mandat à cet effet. En fait, il a le mandat de ne pas agir de la sorte.

Par conséquent, le CCA recommande:

- Que les dispositions du projet de loi C-76 portant sur l'élimination du RAPC et l'introduction du système de transfert en matière de santé et de programmes sociaux soient supprimées du projet de loi;

- Que le gouvernement fédéral cesse de considérer les transferts de points d'impôt comme des dépenses courantes;

- Que les transferts fédéraux aux provinces dans le cadre des programmes sociaux soient des tranferts pécuniaires;

- Que les transferts pécuniaires aux provinces soient suffisants pour assurer la qualité des services et leur accessibilité à tous les Canadiens, et pour permettre l'application efficace des normes nationales;

- Que la formule utilisée pour calculer les transferts soit simple et compréhensible pour les Canadiens et qu'elle soit liée à des facteurs touchant directement aux programmes sociaux;

- Que les négociations relatives aux points d'impôt ne soient plus à l'ordre du jour des discussions sur les transferts fédéraux au titre des programmes sociaux; tout changement ultérieur dans la répartition de la marge fiscale entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux doit faire l'objet de négociations transparentes et démocratiques.

Pour ce qui est des normes nationales, elles vont disparaître avec l'élimination des transferts pécunaires aux provinces. La seule façon pour le gouvernement fédéral d'assurer le respect des normes nationales est de menacer de retenir l'argent.

Étant donné que le projet de loi C-76 contient une formule pour l'élimination rapide des transferts pécuniaires aux provinces, l'inclusion des principes et des critères de la Loi canadienne sur la santé dans le projet de loi C-76 est trompeuse. Si les Libéraux envisagent de mettre fin aux transferts pécuniaires, ils doivent le dire clairement au peuple canadien et admettre qu'ils ne peuvent aucunement protéger l'assurance-maladie et les principes de la Loi canadienne sur la santé.

Le président: Je pense que je suis d'accord là-dessus.

Mme Thobani: Très bien.

La disposition du projet de loi relative à la détermination des normes nationales semble indiquer que le ministre des Finances est tout à fait conscient du fait que la conséquence inévitable du transfert en matière de santé et de programmes sociaux est la provincialisation intégrale de la santé, de l'assistance sociale et de l'enseignement postsecondaire. À ce sujet, le projet de loi stipule:

Bien des arguments pourraient être invoqués pour contester l'idée d'énoncer des principes et des objectifs communs qui dépendraient de l'accord mutuel des provinces. Ces arguments ont été présentés par le CCA, de même que par d'autres organisations et des particuliers, au cours de la campagne référendaire sur l'Accord de Charlottetown. Il est évident que si le gouvernement fédéral ne finance pas activement les programmes sociaux et ne fixe pas de normes nationales, on va se retrouver avec des programmes hétéroclites. Dans le contexte actuel où prévaut la concurrence effrénée à l'échelle mondiale, nous assisterons à une rivalité entre les provinces qui voudront attirer des investissements en démantelant les programmes sociaux.

Du point de vue de la démocratie, il est alarmant de constater que l'idée d'établir des principes et des objectifs communs dans le projet de loi C-76 ressemble beaucoup à une disposition rejetée dans l'Accord de Charlottetown. La seule différence réside dans le fait que le projet de loi reconnaît encore moins le rôle du gouvernement fédéral que l'Accord de Charlottetown.

Une fois de plus, nous estimons que le gouvernement libéral fait preuve d'une arrogance extrême en essayant d'imposer subrepticement, dans un projet de loi portant exécution du budget, une proposition qui a été rejetée après un débat public approfondi dans le cadre d'un référendum tenu il y a moins de trois ans. Le ministre et le ministère des Finances n'ont peut-être pas accepté l'issue du référendum sur l'Accord de Charlottetown, mais ils n'ont pas le droit de renverser la décision populaire par des mesures discrètes et anti-démocratiques.

Le CCA reconnaît le rôle du gouvernement fédéral dans l'établissement de normes nationales. À l'extérieur du Québec, ce rôle est un élément essentiel de la citoyenneté sociale. Au Québec, on estime que le gouvernement provincial doit jouer un rôle clef dans les programmes sociaux.

Par conséquent, le CCA recommande que l'amendement proposé au paragraphe 13(3) de la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux concernant l'établissement des normes nationales soit supprimé dans le projet de loi C-76, de même que toute la section consacrée au transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

.1720

En ce qui concerne l'avenir du RAPC, les gouvernements canadiens ont tenté d'invoquer la récession et les difficultés budgétaires pour renoncer à leur responsabilité d'éliminer la pauvreté. Dans un pays aussi riche que le nôtre, cela est tout à fait inacceptable. Dans son rapport de 1993 sur le Canada, le Comité des Nations unies sur les droits économiques, sociaux, économiques et culturels n'a pas accepté que l'on invoque la situation économique du pays pour justifier l'ampleur de la pauvreté au Canada.

Compte tenu de la proportion de pauvres dans notre pays, en plein milieu des années 1990, le Parti libéral ne devrait pas démanteler le cadre législatif et financier qui a été établi pour combattre la pauvreté. Le Comité canadien d'action sur le statut de la femme préconise le maintien du Régime d'assistance publique du Canada pour financer le soutien du revenu et les services sociaux destinés aux pauvres. En particulier, le CCA appuie le maintien du partage des coûts comme mécanisme de financement de l'assistance sociale.

Le principal argument invoqué contre les programmes à coûts partagés est que les dépenses fédérales sont tributaires des dépenses provinciales dans un domaine donné. Dans le cas de l'assistance sociale, ce lien entre les dépenses fédérales et provinciales est tout à fait justifié parce que le niveau des dépenses provinciales dépend à maints égards des politiques fédérales, surtout en ce qui concerne la monnaie, les finances, le commerce et l'assurance-chômage.

À cause des politiques monétaires étroites de la Banque du Canada, des accords de libre-échange et des réductions des prestations d'assurance-chômage, le fardeau des provinces en matière d'assistance sociale s'est considérablement accru. Compte tenu de l'incidence des politiques fédérales sur la demande d'aide sociale, il est tout à fait normal que le Trésor fédéral contribue directement à répondre à cette demande. En exigeant du fédéral qu'il apporte une contribution importante à l'aide sociale, on découragerait les gouvernements fédéraux irresponsables dont la gestion économique pourrait entraîner un chômage accru à long terme.

Eu égard à ces considérations, le CCA recommande:

- Que l'assistance sociale et le soutien du revenu continuent d'être financés dans le cadre d'accords de partage des coûts entre les gouvernements fédéral et provinciaux;

- Que le Régime d'assistance publique du Canada soit maintenu comme cadre des accords de partage des coûts jusqu'à ce que l'on adopte une loi qui prévoit une protection accrue des droits des pauvres;

- Que la part du gouvernement fédéral dans le partage des coûts soit établie à 50 p. 100 en reconnaissance du lien entre les politiques fédérales et la demande d'aide sociale, et pour décourager une gestion économique irresponsable de la part du gouvernement fédéral.

Permettez-moi de citer l'exemple des garderies pour illustrer ce qu'il arrive au développement des programmes sociaux quand le gouvernement fédéral refuse de jouer un rôle de premier plan. Faute d'un appui financier et politique stable de la part du fédéral, les services de garderie ont été développés à l'échelle locale, souvent et presque intégralement sous l'égide des groupes communautaires de femmes.

C'est ainsi que l'on s'est retrouvé avec des programmes disparates qui ne profitent pratiquement à personne - que ce soit les enfants, les parents, les femmes qui ont besoin de faire garder leurs enfants pour travailler, se former, aller à l'école ou gérer leurs entreprises. Si le gouvernement fédéral transfère des pouvoirs aux provinces comme il l'a proposé dans le budget, ce sera la fin de l'idée d'un programme national de garderies, et cela compromettra davantage les services existants de garde d'enfants.

La garde d'enfants est essentielle pour la participation des femmes à la main-d'oeuvre rémunérée, aux programmes de formation, à l'éducation, et à leur pleine intégration à la société canadienne. Un service de garde accessible et de qualité est un élément fondamental dans tout programme visant à promouvoir et même à permettre l'égalité des femmes. S'il n'en existe pas, le Canada continuera à comprometttre l'égalité des femmes, ainsi que la santé, la sécurité et le développement des enfants.

Par conséquent, le CCA recommande:

- Que le gouvernement fédéral conçoive un nouveau programme national de garderies, comme nous l'avons proposé antérieurement, regroupant le financement actuel des services de garde d'enfants dans le cadre du Régime d'assistance publique du Canada, les déductions fiscales pour frais de garderie, les allocations aux personnes à charge et d'autres programmes;

- Qu'un ensemble de principes, y compris l'accessibilité universelle, l'intégralité, la qualité et la responsabilité assurées par voie de réglementation et d'administration sans but lucratif, soient mis en place pour bâtir le programme national de garderies; ces principes doivent respecter les droits nationaux des peuples québécois et autochtones;

- Que les fonds promis pour les garderies sur trois ans dans le Livre rouge - 720 millions de dollars - soient utilisés pour renforcer et développer les services existants de garde d'enfants, conformément aux engagements pris au cours de la campagne électorale et dans le budget fédéral de 1994.

.1725

Dans cet exposé, le CCA a voulu faire part au gouvernement libéral de ses graves préoccupations au sujet d'un projet de loi qui, en mettant en oeuvre le budget, va entraîner des changements fondamentaux en ce qui concerne le rôle du gouvernement fédéral et la nature de la citoyenneté canadienne. Nous avons d'ailleurs demandé la suppression des articles du projet de loi qui prévoient l'abolition du Régime d'assistance publique du Canada et l'introduction du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux.

Si le gouvernement libéral veut redéfinir les conditions de financement des programmes sociaux et élaborer une procédure d'élaboration de normes nationales, il doit absolument ouvrir tout ce processus afin qu'on puisse tenir un débat démocratique à ce sujet. À cette fin, nous partageons le point de vue du Congrès du travail du Canada, selon lequel la restructuration du régime canadien qui sera le résultat inévitable de la création du transfert canadien mérite qu'on l'examine en profondeur et qu'on débatte la question en public, tout comme on l'a fait pour l'accord de libre-échange et les récentes propositions constitutionnelles. Nous appuyons donc la proposition du CTC voulant qu'un comité d'experts soit nommé pour étudier les propositions du gouvernement fédéral en vue de modifier les responsabilités des gouvernements fédéral et provinciaux en matière de programmes sociaux.

Comme nous l'avons souligné dans ce mémoire, le projet de loi C-76 met en lumière le mépris du gouvernement fédéral pour ses engagements internationaux en matière de droits économiques, sociaux et culturels - mépris qui caractérisait d'ailleurs le gouvernement conservateur qui l'a précédé. Il indique aussi que le Canada n'a pas du tout l'intention de respecter ses autres engagements internationaux, en ce qui concerne l'élimination de la discrimination à l'endroit des femmes et la mise en oeuvre de stratégies progressistes qui favoriseront l'avancement des femmes, même si ces engagements ont été pris il y a une dizaine d'années.

L'adoption de ce projet de loi aura pour effet de transformer la contribution canadienne à la quatrième Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes, prévue pour septembre 1995 à Beijing, en une simple parodie. Nous exhortons donc ce Comité à refuser d'avaliser la menace pour les droits économiques et sociaux des Canadiens, et pour les programmes sociaux canadiens, que représente ce projet de loi.

Merci. Nous sommes maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.

[Français]

Le président: Nous allons commencer les questions par M. Plamondon.

M. Plamondon: Merci, monsieur le président. Madame la présidente, c'est avec plaisir qu'on vous accueille ici au Comité. Pour moi, c'est un procès en règle des intentions gouvernementales que vous venez de faire. Je partage en très grande partie les choix sociaux que vous voulez défendre, contrairement aux choix sociaux que le gouvernement a décidé de faire. Il est clair que, dans les orientations du Budget, les riches, les possédants ont toujours le privilège de placer leur argent dans des paradis fiscaux, d'avoir des fiducies familiales très riches et des privilèges généraux, alors que c'est beaucoup plus facile de couper les bénéfices aux démunis, ce qu'on fait avec plaisir.

Voyez-vous une différence - vous en avez parlé un peu - entre les orientations des derniers budgets conservateurs et ceux des libéraux? Autrement dit, sentez-vous que ce sont les mêmes personnes qui écrivent les discours du Budget, que ce sont les mêmes hauts fonctionnaires qui dirigent, qui protègent leur petit palais, que les ministres se succèdent, mais qu'au fond, aucun n'a une colonne vertébrale pour vraiment donner une orientation de protection sociale aux différents programmes? Je vais vous laisser répondre à cette partie-là et ensuite, j'aurai une autre petite question.

[Traduction]

Mme Cameron: Je crois que ce qui décourage le plus la population canadienne, c'est de constater que les politiques du gouvernement libéral ne sont que la suite logique des politiques élaborées par les Conservateurs, qui ont été rejetées catégoriquement. En ce qui concerne la politique sociale, du moins, c'est très clair.

En fait, il y a une chose qui nous inquiète tout particulièrement. Je ne crois pas que le gouvernement conservateur aurait jamais proposé l'abolition du Régime d'assistance publique du Canada. Il voulait le faire, mais il n'avait pas la crédibilité nécessaire. Je crois que les Libéraux essaient de profiter d'un moment un peu particulier de l'histoire de la politique au Canada pour nous imposer contre notre volonté des changements que les Conservateurs n'auraient jamais osé faire.

.1730

Il semble clair que les hauts fonctionnaires du ministère des Finances continuent à mener la barque. Ils ont usurpé le rôle joué en matière de développement des ressources humaines et ils se sont approprié le mandat électoral du Parti libéral.

Pour moi, ce sont des questions fondamentales pour notre démocratie. Les Canadiens sont de plus en plus cyniques face à leur gouvernement, surtout quand ils voient que les politiques ne changent pas même après la défaite du gouvernement conservateur aux dernières élections.

[Français]

M. Plamondon: Est-ce que j'ai cinq ou dix minutes?

Le président: C'est votre choix.

M. Plamondon: J'adore parler de votre gouvernement en leur compagnie.

Le président: Vous pouvez continuer seulement s'ils sont partisans!

M. Plamondon: Vous avez parlé du réseau de garderies. Je pense que ce furent des promesses électorales, depuis 1984 surtout, à toutes les élections, et des engagements fermes. Je pense qu'il y avait des engagements très intéressants dans le Livre rouge, mais, comme vous l'avez dit, le Livre rouge est devenu le Livre bleu et il n'y a pas de grandes perspectives d'avenir.

J'ai participé, à l'intérieur de mon parti, à un comité qui cherchait à recruter des candidatures féminines. Je me suis rendu compte qu'on avait énormément de difficulté, non pas parce que les femmes n'étaient pas intéressées, mais parce que leur contexte social ne le leur permettait pas. Elles étaient, soit monoparentales, soit responsables de l'éducation à l'intérieur de la famille, et elles n'avaient donc pas cette possibilité qu'ont les hommes d'aller en politique.

Je me souviens, en particulier, d'une avocate de Trois-Rivières, monoparentale avec deux enfants, qui était très intéressée à s'engager politiquement. La journée où elle en a parlé avec son ex-conjoint, celui-ci lui a répondu que si elle allait en politique, il allait demander la garde des enfants. Elle a changé d'idée plutôt que d'avoir des problèmes avec son ex-conjoint.

Chaque fois qu'on rencontrait des candidates intéressantes, des situations survenaient, qui étaient pour moi une découverte, une surprise et une constatation me révélant à quel point cela peut être difficile pour une femme de faire de la politique. Je parle surtout des femmes âgées entre 30 et 50 ans, qui ont encore des enfants ou qui n'ont pas une carrière assurée si elles se dirigent en politique et y reviennent ensuite. D'où l'importance d'avoir, pour faire carrière, ce fameux réseau de garderies. On ne mettra pas sur pied un réseau de garderies seulement pour avoir des femmes députés ou des femmes qui occupent de hauts postes, mais simplement pour leur travail quotidien. Je ne sais pas quels arguments il faudrait donner pour que le gouvernement comprenne cela.

Vous en avez parlé rapidement, je trouve, dans votre texte bien fait. Remarquez que j'aurais aimé l'avoir dans les deux langues, mais il est quand même très bien fait et nous avons un système de traduction très efficace. Je rends d'ailleurs hommage aux interprètes parce qu'ils ont un débit très rapide lorsqu'ils s'expriment.

Pourriez-vous élaborer davantage sur la pertinence d'avoir ce réseau de garderies et sur les déceptions par rapport aux coupures? Il semblerait qu'à l'heure actuelle, il n'y a même plus d'espoir, ni de lumière au bout du tunnel pour ce qui est d'une prise de position gouvernementale en faveur d'un réseau national de garderies.

[Traduction]

Mme Thobani: Je dois vous présenter mes excuses car je parle effectivement très vite. J'essayerai de ralentir dans mes réponses.

À mon avis, maintes études ont clairement démontré que si les femmes n'ont pas les mêmes chances économiques que les hommes, c'est en bonne partie en raison de l'absence d'un bon système de garde d'enfants au Canada. Le gouvernement libéral lui-même a reconnu cette réalité dans sa plate-forme électorale. Le ministre Axworthy n'a pas arrêté d'insister sur l'engagement du gouvernement vis-à-vis des services de garde d'enfants pendant la longue consultation sur la politique sociale.

.1735

Le problème, à mon avis, ce n'est pas que le gouvernement ne comprenne pas à quel point l'accès aux services de garde d'enfants est essentiel pour garantir l'égalité économique des femmes. Je pense que ce gouvernement n'attache aucune importance aux droits des femmes tout simplement. Et il continue à montrer son mépris à l'égard des femmes au lieu de se servir de ses pouvoirs pour mettre en oeuvre une politique qui pourrait favoriser non seulement l'égalité économique des femmes mais aussi l'amélioration du niveau de vie des enfants au Canada.

En refusant d'assurer des services de garde d'enfants et de s'engager à mettre en oeuvre un programme national de services de garde d'enfants, ce gouvernement condamne les femmes et les enfants à l'inéquité économique. Tout cela aura pour effet de retarder le développement des enfants. Nous savons fort bien que beaucoup d'enfants canadiens - beaucoup plus qu'il ne devrait y en avoir - vivent dans la pauvreté, et que les services de garde d'enfants permettraient, dans une très grande mesure, d'améliorer la qualité de vie de ces enfants.

Donc, ce n'est pas que le gouvernement ne comprenne pas que le manque d'accès aux services de garde pose un problème pour les femmes et les enfants; c'est simplement que le gouvernement trouve normal que les femmes et les enfants ne soient pas sur un pied d'égalité avec les autres citoyens, si bien qu'il continue à appuyer des politiques qui répondent bien aux intérêts des marchés financiers internationaux aux dépens, bien entendu, du bien-être des femmes et des enfants canadiens.

Mme Tina Head (membre, Comité des politiques sociales, Comité canadien d'action sur le statut de la femme): J'ajouterai quelques observations aux remarques de ma collègue.

Je voudrais, moi aussi, insister sur le fait que l'accès à des services de garde d'enfants de qualité n'est pas simplement une question de politique gouvernementale, et que le gouvernement en place est donc libre d'accepter ou de rejeter cette idée selon ses priorités politiques. Le fait est que le Canada s'est engagé très clairement à favoriser le respect des droits économiques, sociaux et culturels de tous les Canadiens, et qu'en vue de favoriser les droits à l'égalité économique, sociale et culturelle de l'ensemble des femmes, notamment, il mettra à la disposition de sa population un système public de services de garde d'enfants de qualité élevée, étant donné que c'est un élément fondamental pour l'ensemble de la société canadienne.

Il ne s'agit pas d'une simple question de politique dont nous pouvons maintenant débattre par opportunisme. Le Canada s'est engagé, sur la scène internationale, à favoriser le respect de ces droits fondamentaux, alors que le gouvernement canadien se montre tout à fait indifférent en ce qui concerne la protection de ces droits.

[Français]

M. Plamondon: Je vais laisser la parole aux nouveaux conservateurs, monsieur le président.

Le président: Fantastique! Merci, monsieur Plamondon.

Madame Brushett.

[Traduction]

Mme Brushett: Je vous remercie de me donner ainsi l'occasion de poser une question.

En présentant vos arguments, vous sembliez dire que le système actuel, c'est-à-dire le statu quo, est parfait à tous les points de vue, et qu'en l'absence d'un système de partage des coûts entre les gouvernements fédéral et provinciaux, le problème de la pauvreté va considérablement s'aggraver. Mais si ce système est à ce point parfait, pourquoi y a-t-il aujourd'hui autant d'enfants qui vivent dans la pauvreté, et pourquoi est-ce que leur nombre ne cesse d'augmenter?

Mme Cameron: Il va sans dire que le RAPC, dans sa forme actuelle, est loin d'être parfait. Le soutien actuellement accordé aux assistés sociaux est tout à fait insuffisant. De même, il y a eu toutes sortes de problèmes lorsque le gouvernement fédéral a décidé de plafonner le RAPC... les Conservateurs ont lancé cette idée et les Libéraux l'ont conservée. Donc, il ne fait aucun doute que le système actuel présente des difficultés majeures...

Mme Brushett: Permettez-moi de vous arrêter.

J'ai moi-même beaucoup travaillé avec les enfants au niveau municipal. Je vous rappelle que nous ne sommes pas totalement isolés de nos communautés. Nous nous efforçons au contraire de participer à des réunions qui portent sur les services sociaux et de nous occuper des familles et des parents seuls qui ont besoin d'aide dans nos communautés. Ils nous ont rappelé à juste titre qu'il ne suffit pas de trouver plus d'argent pour régler le problème. Les besoins sont plus importants au niveau local. Nous pourrions toujours engager des sommes faramineuses sans jamais résoudre le problème de la pauvreté chez les enfants.

Mme Cameron: Je crois que vous n'avez peut-être pas bien saisi notre principal argument, à savoir que les modifications proposées ne constituent pas simplement une redéfinition des programmes ou des conditions de financement. Ces changements nous renvoient à la période précédant la Seconde Guerre mondiale. Le projet du gouvernement nous ramène au type de relations financières qui existaient entre les gouvernements fédéral et provinciaux dans les années 1930. Voilà ce dont il s'agit, les provinces sont appelées à assumer de nouveau la responsabilité des programmes sociaux. Cette politique a été abolie en 1945, et je vous rappelle que le Parti libéral a joué un rôle important dans ce contexte.

Nous appuyons fermement les progrès qui ont été réalisés dans l'après-guerre. Et c'est dans ce même contexte qu'il convient maintenant de prévoir des changements importants. Il faut développer une relation différente avec le Québec. Il faut démocratiser les services. Toutefois, il faut développer le cadre et faire des progrès. Nous ne devrions pas retourner à la période d'avant la Seconde Guerre mondiale comme le fait le Parti libéral.

.1740

Mme Brushett: Vous dites que le montant des transferts pécuniaires aux provinces doit être suffisant pour assurer la qualité, l'accessibilité, etc. C'est toujours le montant total qui fait problème. Comme nous le savons tous, les Canadiens nous demandent une réduction du déficit et une restructuration pour que nous puissions effectivement combattre la pauvreté chez les enfants et non pas simplement gaspiller plus d'argent. Voilà ce que la population nous a demandé de faire.

Mme Cameron: Cela ne faisait certainement pas partie de votre programme électoral.

Vous parlez de supprimer...

Mme Brushett: Vous avez raison, cela ne faisait pas partie de mon programme.

Mme Cameron: ...les transferts pécuniaires aux provinces. Il ne s'agit pas de faire le Père Noël à l'égard des provinces. Vous proposez de supprimer les transferts pécuniaires aux provinces. Il s'agit d'une redéfinition des relations entre les gouvernements fédéral et provinciaux. Tel est l'objet du projet de loi.

Mme Brushett: Je dois vous rappeler que nous sommes très proches de nos électeurs et que nous connaissons les besoins de nos collectivités. Je crois que la plupart des femmes de ma circonscription ne savent pas ce que c'est que le CCA. Elles ne savent donc pas...

Mme Cameron: Vos électeurs vous ont-ils dit qu'ils voulaient que le gouvernement fédéral se retire des programmes sociaux? Vous ont-ils vraiment dit qu'ils ne voulaient pas que le gouvernement fédéral joue un rôle dans ce domaine? Est-ce bien cela qu'ils vous ont demandé de faire?

Mme Brushett: Mes électeurs m'ont demandé d'abord et avant tout de réduire le déficit et de rapprocher les programmes des collectivités pour mieux répondre aux besoins. Je crois que plus le service est proche du client, mieux l'argent du contribuable est utilisé et plus on aura de chances de servir directement le client ou de combattre la pauvreté.

Mme Thobani: Permettez-moi de vous rappeler que le CCA a effectivement participé à l'examen des programmes sociaux l'année dernière, et nous nous attendions que ce genre de changements soient proposés et qu'ils fassent l'objet d'un débat et d'une consultation.

Le CCA a organisé une conférence nationale des femmes sur la réforme de la politique sociale; vos associations membres y ont participé et ont étudié la possibilité de renforcer le système actuel pour le rendre plus efficace et plus axé sur les besoins des femmes et des enfants. Cependant, tout le processus est maintenant compromis à cause du budget fédéral et des dispositions du projet de loi C-76.

Nous voulons certainement participer activement à l'examen des programmes sociaux dans le but de les renforcer. C'est de bonne foi que nous y avons participé pendant une année entière. À l'époque, nous avons demandé aux ministres Axworthy et Martin de ne pas se servir du budget pour transformer les programmes sociaux du Canada. Dans toutes les régions du pays, il était question de l'examen de la politique sociale, et ce processus a été complètement mis de côté par le budget fédéral. Je tiens donc à vous rappeler simplement que c'était de bonne foi que nous avons participé à ce processus.

Mme Brushett: Je pense qu'on ne peut pas examiner séparément les programmes sociaux et la réduction du déficit; les deux sont imbriqués.

Mme Thobani: C'est exactement ce que le gouvernement essaie de faire. Vous êtes en train de rompre complètement ce lien pour vous concentrer uniquement sur la réduction du déficit. C'est sous cet angle que vous envisagez la réforme de la politique sociale, et nous rejetons cette démarche.

Mme Brushett: Je crois que nous essayons de servir les Canadiens en leur offrant les programmes sociaux qu'ils veulent et qui sont efficaces; tel est notre objectif.

M. Pillitteri (Niagara Falls): Je voudrais revenir sur ce que mon honorable collègue d'en face a déclaré. Qu'il sache que j'ai toujours été Libéral et que je n'ai pas l'intention de changer. Évidemment, je ne suis pas un expert comme mon honorable collègue. Je me demande simplement s'il a l'intention d'adhérer à un autre parti. J'ai toujours été Libéral et j'ai l'intention de le demeurer pour le reste de ma carrière politique.

.1745

Dans votre exposé, vous dites qu'avec le projet de loi C-76 nous nous débarrassons de nos responsabilités en supprimant certains transferts pécuniaires. En fait, ce n'est pas le cas. Vous avancez l'hypothèse que les transferts vont diminuer pour disparaître complètement d'ici une dizaine d'années. Toutefois, le gouvernement conserve la possibilité de transférer suffisamment de fonds pour maintenir ces programmes.

Dans votre dernière observation, vous dites que le gouvernement précédent et celui-ci prennent très à la légère la contribution du Canada à la Conférence des Nations Unies sur les femmes qui doit avoir lieu à Beijing en septembre, et que cela contrevient aux dispositions que nous avons entérinées.

Étant Canadien de fraîche date, je suis convaincu que nous vivons dans le meilleur pays du monde, et pourtant, vous prétendez que notre position contrevient à ces dispositions.

Pouvez-vous me dire combien de pays contreviennent à ces dispositions et si la Chine est l'un d'entre eux?

Mme Head: Il nous semble que le gouvernement a pris l'habitude, ce qui lui convient fort bien, de contrevenir à ses engagements internationaux en ce qui concerne les droits de l'homme. Cela s'applique aussi au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. On a beaucoup parlé récemment de violations des normes internationales fixées par la convention de l'OIT sur la liberté d'association, de violations qui affectent considérablement les droits des travailleurs du secteur public fédéral, dont une bonne partie sont des femmes.

À notre avis, on a de bonnes raisons de s'interroger sur la position du Canada en ce qui concerne la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes et les engagements pris par le gouvernement canadien dans le cadre des stratégies de Nairobi. Ces violations du Pacte et de la Convention des Nations Unies sont bien établies et reconnues sur la scène internationale.

À mon avis, si l'on mesure les politiques actuelles à l'aune des précédents disponibles, le verdict n'est pas douteux. En septembre, lorsque les réalisations du Canada seront passées en revue par la communauté internationale, je suis convaincue que le Canada échouera au test une fois de plus.

Ce sont des faits reconnus dans le monde entier.

M. Pillitteri: Je comprends votre position, vous l'avez fort bien expliquée dans votre exposé.

Je vous ai demandé combien d'autres pays contrevenaient à ces dispositions? Je vous ai demandé si la Chine faisait partie de ces pays, puisque c'est le pays qui accueille cette conférence en septembre.

Mme Thobani: En septembre, lorsque nous irons à Beijing, si toutefois la conférence a bien lieu à Beijing, nous verrons combien d'autres gouvernements contreviennent aux stratégies entérinées il y a 10 ans à Nairobi.

Vous ne prétendez pas, j'espère, que le fait que d'autres pays contreviennent à ces dispositions jusqu'ici...

M. Pillitteri: Non, pas du tout.

Mme Thobani: Nous verrons cela en septembre.

Quant à la question que vous avez posée au sujet de la Chine, il est certain qu'on a assisté en Chine par le passé à des violations des droits fondamentaux de l'homme. Cela a été prouvé. Je ne vois pas le rapport.

M. Pillitteri: C'est la troisième fois que vous intervenez devant un comité, et j'imagine que vous aurez encore l'occasion de le faire à l'automne pendant les audiences prébudgétaires. Pourriez-vous, à ce moment-là, nous dire quels sont les autres pays qui contreviennent à ces dispositions?

Mme Thobani: Oui.

Mme Head: J'aimerais ajouter quelque chose qui pourrait vous aider à faire ces comparaisons. Les Nations Unies ont élaboré ce qu'elles appellent un indice du développement humain. En 1992, le Canada s'est placé au premier rang et, en 1993, au second rang, tout de suite après le Japon. Cela contribue sans aucun doute au sentiment que vous avez exprimé tout à l'heure quand vous avez dit que le Canada était l'un des meilleurs pays du monde.

.1750

Toutefois, vous devez savoir que lorsqu'on ajuste cet indice pour tenir compte du statut de la femme dans les pays où des données sur les femmes sont disponibles, en 1992, le Canada n'était plus qu'au huitième rang. Autrement dit, il passait du premier au huitième rang, et, en 1994, du second au neuvième rang. Ainsi, au Canada, il reste beaucoup à faire en ce qui concerne le statut des femmes. Ce qu'il faut, c'est aller de l'avant.

Le président: M. Pillitteri est revenu sur une de vos principales objections, le fait que non seulement nous réduisons, mais que nous éliminons également. Ce sont les termes que vous avez utilisés. En fait, vous allez même plus loin, vous dites que le principal objectif du transfert est de placer le financement fédéral de l'assistance sociale sur une voie de garage définitive. Effectivement, si à un certain moment la tendance ne change pas, cela finira par disparaître, et il est certain que cela diminue déjà.

On peut voir les choses avec beaucoup de pessimisme et penser qu'en l'an 2000, au rythme où vont les choses, il ne restera plus rien, mais cette législation ne va pas dans ce sens. Ce projet de loi s'applique uniquement au budget des deux prochaines années. Je ne suis donc pas d'accord quand vous dites que tous ces programmes vont disparaître.

Cela dit, je précise que c'est la mort dans l'âme, sinon avec beaucoup de...

[Français]

M. Plamondon: Je vais vous dire une chose: Allez raconter ça aux pompiers, ils vont vous arroser.

[Traduction]

Le président: De ce côté-ci de la Chambre, il n'y a pas un seul député qui soit heureux de devoir couper dans les programmes sociaux ou renoncer à des engagements pris avant les élections de 1988 en ce qui concerne les programmes nationaux dans le secteur de la santé. Loin de nous l'idée de nous réjouir quand tant de gens sont au chômage, quand tant d'enfants vivent dans la pauvreté. Si nous pouvons trouver le moyen de faire mieux avec les ressources dont nous disposons... nous serions heureux d'entendre vos suggestions.

Vous vous êtes plaintes des transferts de points d'impôt qu'est-ce que nous pouvons faire, et comment?

Mme Cameron: Vos arguments seraient plus convaincants s'ils étaient différents. Ils seraient plus convaincants si vous changiez le rapport entre les points d'impôt et les tranferts de fonds parce qu'en effet, vous avez la possibilité de modifier la structure. Quant à la différence pour le trésor fédéral, à court terme, il importe peu qu'il s'agisse de transfert de fonds ou de points d'impôt. À long terme, la différence est considérable. Dans ces conditions, pourquoi ne pas inverser la relation actuelle entre transfert de fonds et points d'impôt?

J'ai une...

Le président: Que voulez-vous dire par inverser le rapport? Nous avons renoncé aux points d'impôt il y a longtemps et nos fonds diminuent.

Mme Cameron: Vous continuez à ...

Le président: Comment faire pour les rétablir?

Mme Cameron: C'est le problème avec la politique. Il faut mettre fin à l'érosion dès maintenant et...

Le président: Attendez un instant. Pouvons-nous régler cette affaire de points d'impôt? Comment faire pour récupérer ces points d'impôt que nous avons transférés?

Une voix: Légiférez.

Le président: Quelqu'un vous aide, là-bas dans le fond. Vous en aurez peut-être besoin. Si vous voulez qu'ils se joignent à vous à la table, n'hésitez pas.

Mme Cameron: Les défenseurs de la politique sociale n'ont cessé de critiquer cette politique depuis qu'on a établi que les transferts pécuniaires...

Le président: Je comprends cela, je suis d'accord avec vous. La question est de savoir comment se débarrasser du transfert.

.1755

Mme Cameron: Il va falloir que vous vous adressiez à la population canadienne, que vous reconnaissiez les erreurs des gouvernements passés et vous allez devoir approvisionner le système suffisamment pour défendre les programmes nationaux. Si cela vous oblige à augmenter les impôts, à revenir sur certais changements apportés par les Conservateurs, à mettre en place un système fiscal plus progressif, eh bien, c'est ce que vous devrez faire. Voilà ce qui se passe quand on donne des points d'impôt.

Le président: D'accord. Je vous ai posé une question très simple. Je suis même peut-être d'accord avec vous. Comment faire pour récupérer ces points d'impôt?

M. Plamondon: Pourquoi l'avoir promis si vous ne pouvez pas le faire? Si vous l'avez promis, faites-le.

Le président: Si c'est possible; je vous demande de nous aider à récupérer ces points d'impôt pour nous permettre de défendre les programmes sociaux plus efficacement. Vous dites que le seul moyen c'est d'augmenter les impôts fédéraux.

Mme Cameron: Pensez-vous que les gouvernements provinciaux seront aussi généreux en rendant ces points d'impôt que le gouvernement fédéral l'a été en les leur donnant?

Le président: Non.

Mme Cameron: Absolument pas. La seule chose à faire, c'est de s'adresser à la population canadienne et de réaffirmer votre soutien envers des programmes sociaux nationaux, des normes nationales, et le tout, assortis des fonds nécessaires.

J'ajoute que des dispositions spéciales doivent être prévues pour la population du Québec car le CCA a prétendu, à juste raison, que le Québec a besoin d'exercer un contrôle sur ses programmes sociaux pour respecter les aspirations de la population de cette province. Nous sommes d'accord. Cela dit, nous sommes convaincus que le reste du Canada veut conserver des programmes sociaux nationaux. Si le Parti libéral réussissait à le faire, nous serions en faveur de cela.

Le président: Vous pensez que les provinces suivraient?

Mme Cameron: Non, nous pensons que les provinces feraient tout pour éviter cela, et c'est la raison pour laquelle le gouvernement fédéral doit être très ferme.

Le président: Je suis d'accord avec vous. Cela va être très difficile. J'aimerais bien que nous ayons encore ces points d'impôt.

Mme Head: En ce qui concerne les points d'impôt, c'est un peu de la poudre aux yeux, car si j'ai bien compris, le gouvernement fédéral n'a pas toujours comptabilisé ces points d'impôt comme des dépenses fédérales. En fait, pendant très longtemps, ces points n'étaient pas comptabilisés et ce n'est qu'au cours des années 80 qu'ils ont de nouveau été inscrits dans les livres comme des dépenses fédérales. On peut donc se demander si cela compte vraiment comme une contribution fédérale aux programmes sociaux.

Le président: À quel moment les points d'impôt ont-ils été transférés?

Mme Head: Je suis désolée, je n'ai pas cette information.

Le président: Était-ce en 1976?

Mme Cameron: Cela a commencé avec le FPE. C'est en 1982 qu'on a commencé à les déclarer comme une dépense annuelle. À notre avis, ce n'est que de la poudre aux yeux.

Le président: Je suis d'accord avec vous, je pense que notre démocratie serait plus représentative et que notre Parlement serait plus représentatif si 52 p. 100 de ses membres étaient des femmes. Malheureusement, en dépit des efforts de votre parti et du mien, des efforts qui ne sont peut-être pas suffisants, nous n'avons pas réussi à réaliser cet équilibre. Lors des dernières élections, M. Chrétien a dû nommer des candidates, et cela au détriment de la démocratie, pour améliorer un peu les choses.

Je suis d'accord avec vous. En attendant, vous devez vous contenter de nous. Vous avez toute ma sympathie. À mon avis, vous vous trompez quand vous dites que le financement fédéral des programmes sociaux va disparaître. De ce côté-ci de la Chambre, nous sommes bien déterminés à éviter cela.

Au nom de tous les députés, je vous remercie d'être venues. Nous considérons que votre groupe est particulièrement important. Nous vous avons demandé de venir tout au début de nos consultations budgétaires. Je pense que vos demandes sont dans bien des cas exagérées, mais nous partageons vos préoccupations en ce qui concerne les normes nationales et le financement fédéral des programmes sociaux.

Mme Thobani: J'aimerais faire une observation en réponse à ce que vous venez de dire au sujet de la composition de ce comité. Nous ne cessons de réclamer au ministre des Finances une analyse du budget compte tenu du sexe, nous lui réclamons un budget axé sur les femmes, un examen de l'impact des décisions budgétaires sur les droits des femmes de ce pays. Ce comité pourrait, entre autres choses, recommander la préparation d'un budget axé sur les femmes. Cela compenserait la faible représentation des femmes au sein du comité.

.1800

Le président: Avez-vous lu notre rapport prébudgétaire de l'automne dernier?

Mme Thobani: Oui.

Le président: Est-ce que la recommandation qui y figurait vous a plu?

Mme Thobani: Non, cela n'a servi à rien.

Le président: D'accord. Nous avons adopté votre... Si vous relisez ce rapport, peut-être...

Mme Thobani: Il est certain que si cette recommandation avait été adoptée, ce comité serait aujourd'hui très différent.

Mme Cameron: Le budget aurait été très différent.

Mme Thobani: Un comité différent et un budget différent.

Le président: Vous nous aviez demandé de faire cette recommandation, vous devez vous en souvenir, et c'est ce que nous avons fait.

Mme Thobani: Nous nous en souvenons. De toute évidence, il faut recommencer.

Le président: D'accord.

Mme Head: Puis-je poser une question? Lorsque le ministre a comparu devant le comité, je suis certaine qu'il a dû comparaître, lui avez-vous demandé dans quelle mesure il avait étudié l'impact de ce budget sur les femmes? Lui avez-vous demandé de soumettre ces renseignements?

Le président: Je ne me souviens pas. Nous pourrions consulter les procès-verbaux.

Mme Head: C'est une façon de mettre votre recommandation à l'essai.

Le président: L'idée nous a été soumise, nous en avons discuté et nous l'avons mentionnée dans notre rapport, une analyse de l'impact du budget compte tenu du sexe. C'est un sujet qui nous préoccupe beaucoup.

Je vous remercie de votre présentation.

Mme Thobani: Merci.

Le président: Notre témoin suivant représente «La voix Réseau canadien des aînés». Je vous prie de nous excuser, nous vous avons fait attendre très longtemps.

M. Andrew Aitkens (directeur de la recherche, La Voix, Réseau Canadien des aînés: Cela ne fait rien; certains d'entre nous ont dû partir.

Le président: Je suis désolé. Je reconnais des visages familiers auxquels nous avons déjà parlé et je leur souhaite la bienvenue. Qui est à la tête de votre délégation? Qui est votre porte-parole?M. Aitkens? Voulez-vous avoir l'amabilité de nous présenter ceux qui vous accompagnent.

M. Aitkens: Certainement.

Je suis directeur de la recherche pour l'organisme «La Voix, Réseau Canadien des aînés» et je vais laisser les autres se présenter et nommer leurs organisations.

[Français]

Mme Gisèle Bérubé-Farmer (deuxième vice-présidente, La Voix, Réseau canadien des aînés): Mon nom est Gisèle Bérubé-Farmer. Je représente la Coalition des aînées et aînés du Québec.

[Traduction]

Le révérend Bruce Mutch (membre, La Voix, Réseau Canadien des aînés): Je suis membre de «La voix, Réseau Canadien des aînés». Je suis également président de Canadian Pensioners Concerned Incorporated et membre du Comité de Alliance of Seniors for the Protection of Canada's Social Programs. Je suis également membre du Comité directeur de Paying for Canada Coalition qui a son siège à Toronto et qui est parrainé, en grande partie, par le Conseil de planification sociale de Toronto.

M. Ben Swanky (membre, La Voix, Réseau Canadien des aînés): Je représente plusieurs organisations de personnes âgées en Colombie-Britannique et je suis président du Groupe d'action sociale pour la santé de «La Voix, Réseau Canadien des aînés».

Le président: Nous vous souhaitons la bienvenue.

M. Aitkens: Je vais commencer par quelques observations d'ordre général. Aujourd'hui, nous n'avons pas l'intention de faire un long exposé, mais j'apprécie beaucoup cette occasion de discuter avec vous.

Par ailleurs, après ce que vous venez d'entendre, je ne voudrais pas vous donner l'impression que vous entendez toujours la même rengaine. Cela dit, je dois souligner que les personnes âgées sont très inquiètes lorsqu'elles voient le rôle du gouvernement fédéral dans le domaine social diminuer de plus en plus, à la fois sur le plan de la contribution financière et sur le plan des normes nationales.

.1805

Les tendances qui se font jour dans certaines provinces - et l'Alberta en est un excellent exemple - les inquiètent considérablement et nous ne sommes pas certains de pouvoir faire confiance aux gouvernements provinciaux pour nous assurer les services nécessaires pour aider les différents membres de la communauté à rester indépendants.

Quand vous considérez les programmes compris dans le financement global prévu dans le transfert en matière de santé et de programmes sociaux, il s'y trouve beaucoup de programmes qui n'ont pas un rapport direct avec la «santé» et qui ne relèveraient pas de la Loi canadienne sur la santé, mais qui n'en sont pas moins terriblement utiles pour favoriser l'indépendance des membres de la communauté. Il faut se rendre compte que ce genre de dépense est en réalité un investissement, qu'elle donne aux gens les moyens dont ils ont besoin pour préserver leur propre santé et assurer leur indépendance, ce qui à long terme, est moins coûteux. Les gens qui ne réussissent pas à conserver leur santé finissent par nous coûter plus cher.

Notre organisme, «La Voix», a approuvé le rapport prébudgétaire de votre comité et vous a envoyé une lettre, ainsi qu'à M. Martin, pour manifester cette approbation, en particulier en ce qui concerne le caractère progressiste du système d'impôt sur le revenu, l'augmentation des impôts payés par les sociétés et les Canadiens les plus riches et également la réforme symbolique des pensions des députés, ce qui ne représente pas une économie majeure, mais dont le symbolisme pourrait rassurer quelque peu les cyniques. Vous n'avez pas recommandé explicitement des coupures dans les dépenses sociales, mais voilà qu'on nous présente un budget et un projet de loi qui imposent des coupures considérables et qui changent la façon dont nous finançons nos programmes sociaux.

A long terme, les provinces auront deux options pour assurer ces programmes: soit les réduire, soit augmenter leurs propres impôts pour compenser. Ni l'une ni l'autre de ces démarches n'est très séduisante. Les coupures ont déjà été effectuées en Alberta et on voit des gens qui sont renvoyés chez eux le jour même d'une opération et qui sont confiés aux soins de leur petite-fille de 13 ans que cela oblige à manquer l'école. C'est tout à fait ridicule. Nous essayons d'établir combien de gens se retrouvent ensuite à l'hôpital en plus mauvais état pour être sortis trop tôt. A l'heure actuelle, on a du mal à obtenir des chiffres du gouvernement de l'Alberta.

Les provinces ont une autre option, celle d'augmenter leurs propres impôts, et cela signifie probablement une taxe de vente régressive et même une taxe foncière régressive, si les choses se répercutent sur les municipalités. Je crains que ces mécanismes n'aboutissent à un système qui ne nous conviendra pas vraiment.

J'aimerais mentionner un dépliant publié récemment par le Caledon Institute, un document que vous avez peut-être vu et qui est intitulé CHST Spells Cost for Disabled. On y trouve une description très complète de l'impact du transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. C'est une lecture très intéressante.

Par ailleurs, et cela vous surprendra peut-être de la part d'un organisme qui représente des personnes âgées, mais nous le répétons tout de même, nous continuons à penser que les déductions accordées aux éléments les plus riches de la population pour leur REÉ
R sont trop généreuses. La dernière fois que nous avons comparu, nous avions recommandé d'abaisser le seuil - 1 000$, ce n'est vraiment pas suffisant - et d'augmenter le pourcentage, ce qui rendrait cette réduction beaucoup plus progressive. Evidemment, on pourrait également en faire un crédit, ce qui serait très utile.

Enfin, les personnes âgées sont très inquiètes lorsqu'elles entendent dire que le document du gouvernement sur le vieillissement de la société risque de ne pas voir le jour. Pour l'instant, ce n'est qu'une rumeur, mais c'est un document qu'on nous a promis dans deux budgets et dont nous avons vraiment besoin. Notre population va bientôt subir un glissement démographique considérable. Nous avons encore la possibilité de garder le contrôle, mais pour ce faire, nous avons besoin d'une stratégie exhaustive, une stratégie qui doit être élaborée sur la base d'une consultation publique approfondie. Nous avons besoin de ce document pour amorcer et encourager cette discussion.

Je m'arrête pour laisser la parole à mes collègues.

.1810

[Français]

Mme Bérubé-Farmer: Monsieur le président, madame, messieurs, je voudrais parler des transferts d'argent relativement au système de santé. Au début, quand ces transferts ont été instaurés, les gouvernements précédents ont eu la sagesse d'ajouter des normes. Voilà maintenant qu'on abaisse ces normes, qu'on réduit les transferts aux provinces. Dans la province de Québec, ce qui découle de cette réduction, c'est que le dernier Budget provincial annonce d'énormes compressions dans le système de santé. On nous dit alors: «La faute est aux transferts fédéraux qui ne sont pas suffisants».

Les aînés sont inquiets. On nous affirme que nous ne pourrons pas rester à l'hôpital longtemps, que la chirurgie d'un jour va devenir la norme et le virage ambulatoire - c'est-à-dire qu'on rentre à la maison après 24 heures - entrera en vigueur. Qui prendra soin de nous, surtout des femmes qui demeurent seules à la maison?

On nous dit: «Vous vous adresserez aux CLSC», mais les CLSC ne sont pas ouverts 24 heures par jour. Les aînés sont inquiets du manque de fonds à cause des paiements de transfert qui ont grandement diminué.

Je sais bien que vous allez dire: «Nous n'avons pas d'argent, il faut couper quelque part». Il me semble que le gouvernement fédéral devrait avoir un leadership très fort là-dessus et dire qu'il faut absolument que les provinces recouvrent la totalité des paiements de transfert, autrement les normes vont varier d'une province à l'autre. Le danger, c'est que les provinces pauvres vont en souffrir, les soins et les services vont vraiment diminuer.

Une autre façon d'aller chercher des fonds, c'est de s'attarder aux façons de gaspiller. Pensez aux médecins qui sont rémunérés par paiement à l'acte. Pourquoi ne leur accorderait-on pas un salaire?

Une autre solution serait aussi de vérifier les profits des pharmacies et des compagnies pharmaceutiques qui font d'énormes gains avec les aînés. Nous vous demandons de maintenir la Loi canadienne sur la santé telle qu'elle a été instaurée au début, avec toute la compassion pour les gens, peu importe qu'ils soient riches ou pauvres.

Une grande part du problème est aussi la privatisation du système. Les aînés n'ont pas tous de gros revenus. Au Québec, on paie déjà des tickets modérateurs pour les médicaments; il va falloir maintenant payer des infirmières privées ainsi que des chambres privées. En conclusion, il faut absolument maintenir la Loi canadienne sur la santé. Merci.

Le président: Merci, madame Bérubé-Farmer.

[Traduction]

À titre d'information, les cloches vont commencer à sonner pour un vote autour de 18h30, et nous devrons donc quitter cette salle au plus tard à 18h37. Nous allons donc essayer de ne pas vous interrompre, si possible.

Révérend Mutch.

Le rév. Mutch: Je voudrais vous remercier de l'occasion qui m'est donnée ce soir de vous rencontrer.

Est-ce que cela signifie que j'ai environ quatre minutes?

Le président: Nous avons un peu moins d'une demi-heure - à peu près 25 minutes en tout.

Le rév. Mutch: Très bien.

Je voudrais dire tout d'abord que j'ai beaucoup apprécié l'exposé du CCASF; de toute évidence, les représentantes de l'organisme ont fait énormément de recherche et se sont très bien préparées en prévision de cette réunion.

Je pense qu'il serait peut-être utile que je vous parle un peu des sentiments et de l'attitude de bon nombre de citoyens de la région de Toronto face au budget et notamment au projet de loi C-76. Les gens ont généralement l'impression que le Livre rouge des Libéraux a été mis à la poubelle.

.1815

Avant le budget, nombre d'entre nous, et pas seulement des organisations représentant des personnes âgées, mais également d'autres représentants de la communauté, avons travaillé très fort et rencontré les députés libéraux du grand Toronto. Nous avons eu l'impression que nos efforts donnaient des résultats.

Il y avait un autre projet de budget qui nous semblait politiquement défendable, et des amis du caucus libéral nous disaient que c'était le cas. En ce qui concerne les objectifs de M. Martin pour réduire le déficit, à un moment donné, il réclamait 7 milliards de dollars, et environ un mois et demi plus tard, cette somme était passée à 9 milliards de dollars. En nous contentant de réduire modestement les dépenses fiscales, nous avions réussi à trouver 5 milliards de dollars de plus qu'il ne réclamait. Pourtant, quand le budget a été déposé, cette proposition n'avait pas été...

Le président: De laquelle s'agissait-il?

Le rév. Mutch: De la proposition avancée par l'organisme Paying for Canada: Perspectives on Public Finance and National Programs. Vous vous en souviendrez, monsieur, j'ai passé en revue toutes les échappatoires fiscales possibles, les unes après les autres devant la soupe populaire, quand le caucus libéral s'est réuni à Toronto.

Le président: Vous aviez dit qu'on pouvait trouver 5 milliards de dollars, et nous n'en avons pas profité. De quelle proposition s'agissait-il?

Le rév. Mutch: C'était l'autre projet de budget proposé...

Le président: Oui, je l'avais lu attentivement, mais je dois vous dire qu'il n'y avait pas suffisamment d'éléments solides pour nous permettre de travailler...

Le rév. Mutch: À notre avis, les éléments étaient là, et nous en sommes encore convaincus.

Cette dame - je suis désolée, mais je ne sais pas votre nom - a dit que cet exercice avait pour but de réduire le déficit. À notre avis, le Comité des finances existe, non seulement pour réduire le déficit, mais également pour repenser l'administration financière du pays en des termes qui préservent le caractère et les attributs humanitaires de notre société. Cette loi sur le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux va nous en écarter définitivement.

Vendredi dernier, je crois, on m'a demandé de prendre la parole devant l'Association ontarienne de gérontologie, et c'est ce que j'ai fait. Je vais vous en citer quelques phrases; à l'époque c'était un discours préparé, mais je vais vous le citer de mémoire.

Assistaient à la réunion 570 représentants de l'Ontario, 7 de Finlande, 1 de l'Australie et plusieurs des États-Unis. Mon intervention, qui portait sur l'accès et l'équité, a été bien reçue. Je vais vous en citer quelques passages.

Les nouveaux plans de dévolution des pouvoirs fédéraux aux provinces dans le cadre de la législation sur le transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux qui est étudiée actuellement par un comité à Ottawa vont rendre la sécurité sociale inaccessible pour beaucoup de gens qui en ont véritablement besoin. Avec cette législation, les provinces auront le pouvoir d'utiliser la totalité des transferts pour l'exécution de leurs propres plans régionaux. Les normes nationales disparaîtront. L'accès et l'équité vont disparaître. On créera ainsi une société à deux catégories, un mouvement qui est déjà en cours. Cette année est la dernière année des paiements au titre du Régime d'assistance publique du Canada et du financement des programmes établis, deux mesures qui doivent cesser d'exister.

Cela dit, est-ce que tous les retraités s'opposent à l'impôt? Est-ce que nous souscrivons à une révolte fiscale? Est-ce que pour nous, la dette nationale et les déficits annuels ne sont pas importants? La réponse à toutes ces questions est un non clair et net.

Par contre, nous sommes opposés à un régime d'imposition régressif et injuste. La récente vague de propagande, menée par les gens d'affaires, dont les intérêts sont défendus en partie par les médias, et par certains hommes politiques et leurs partisans inconditionnels est une importation idéologique des États-Unis.

.1820

Elle est très utile aux grandes entreprises qui profitent d'une exonération d'impôt et qui ne contribuent donc pas au bien-être du pays. On peut obtenir une liste des entreprises qui ne paient pas d'impôt ou qui ne paient pas autant d'impôt que les pauvres du Canada.

Les taxes sont essentielles pour une société ordonnée et civilisée. Des taxes progressives et justes sont esentielles pour une société attentionnée et humanitaire. Nous ne sommes pas partie à une révolte fiscale.

La théorie selon laquelle toute la population a créé notre dette et notre déficit est une escroquerie des plus grotesques mais que la propagande réussit fort bien à faire accepter. Dans notre société, il y a des économistes et des analystes financiers, qui ne sont pas à la solde de la grande entreprise, des instituts commerciaux ou des soi-disant cellules de réflexion, qui nous disent qu'il y a d'autres façons de régler le problème de la dette, qu'il n'y a pas que l'élimination de notre filet de sécurité sociale.

Les économistes indépendants disent que le déficit et la dette peuvent être freinés et réduits en supprimant les échappatoires fiscales et les dépenses fiscales, en abrogeant la loi qui permet l'existence des fiducies familiales pour les riches, en instituant une fiscalité progressive pour les entreprises et les particuliers, en réinstaurant des règlements pour empêcher l'exode de nos richesses vers l'étranger et en refinançant la dette, de manière qu'elle soit de nouveau entre les mains des Canadiens, plutôt qu'entre celles d'obligataires étrangers, comme c'était le cas jusqu'à récemment.

Le gouvernement fédéral actuel continue à affaiblir le tissu social canadien avec ses politiques financières qu'il a reprises du gouvernement fédéral précédent. On nous dit que nos dettes sont causées par nos dépenses excessives. En fait, elles résultent d'une perception de taxes insuffisante.

En terminant mon exposé à l'Association de gérontologie, j'ai cité Monica Townson, économiste et ancienne présidente de la Ontario Fair Tax Commission. Elle a dit:

Elle est économiste. D'autres économistes disent la même chose. Nous pouvons maintenir ou même augmenter les niveaux d'aide qu'offre le système public, si nous le décidons.

Je pense que les compressions actuelles sont des choix politiques et moraux, et non une nécessité économique. Comme le disait la célèbre économiste britannique Joan Robinson, toutes les questions économiques, sauf les plus futiles, sont fondées sur des questions politiques et toutes les questions politiques sont essentiellement des questions de morale.

Si le gouvernement fédéral ne modifie pas rapidement et considérablement son orientation, nous traverserons une période sombre au Canada, où les mots égalité et accès n'auront de sens que pour le passé récent et l'avenir lointain.

Merci.

M. Swanky: Merci de nous avoir permis de vous parler.

J'ai l'occasion de parler devant des personnes âgées et d'autres personnes, en Colombie-Britannique, qui sont préoccupées par l'avenir de notre assurance-maladie. Je peux vous dire que les personnes âgées sont craintives, préoccupées, que beaucoup d'entre elles sont en colère à l'idée que c'est le commencement de la fin pour l'assurance-maladie.

Nous sommes particulièrement préoccupés par le financement global, non seulement parce qu'il représente une réduction des fonds pour la santé, mais également parce qu'il semble que les provinces auront désormais la liberté de faire ce qu'elles veulent de ces fonds. Ce qui est encore pire, d'après ce que nous avons lu, c'est que les provinces pourront non seulement décider du montant qui sera alloué à l'aide sociale, aux universités, ou aux soins de santé, mais qu'elles pourront aussi utiliser ces fonds pour autre chose.

.1825

Nos craintes ont été aggravées par les déclarations de notre premier ministre. Je crois qu'il a déclaré devant un auditoire à Saskatoon que les provinces auraient la liberté d'utiliser ces fonds pour offrir le déjeuner aux écoliers. Il a également dit que ces fonds pourraient être utilisés pour augmenter les salaires des travailleurs à faible revenu. Il a aussi déclaré qu'à l'origine l'assurance-maladie a été conçue tout simplement pour payer les factures médicales lors d'une maladie catastrophique parce que ces frais seraient tellement élevés que les gens pourraient être obligés de vendre leur maison.

M. Chrétien n'aurait pas dû faire de telles déclarations, étant donné qu'il était membre du conseil des ministres qui a adopté la Loi canadienne sur la santé en 1984. Cette loi, qui est parmi les meilleures lois ici au Canada, protège les gens contre beaucoup plus de choses, pas seulement contre les maladies catastrophiques.

Des déclarations de ce genre de la part du premier ministre de notre pays inquiètent énormément les personnes âgées, et vous devriez le savoir.

[Français]

Le président: Nous allons commencer les questions par M. Plamondon.

M. Plamondon: Bienvenue! Je suis toujours intéressé à entendre les gens qui ont bâti notre nation, à venir s'exprimer. Je pense que tout gouvernement qui se respecte doit porter une attention spéciale lorsque les personnes du troisième âge viennent témoigner, puisqu'en fait ce sont elles qui ont laissé en héritage ce que nous avons aujourd'hui.

Je suis né d'un père de 55 ans. J'ai donc été entouré, dans ma jeunesse et dans mon adolescence, par des personnes du troisième âge puisque, lorsque j'avais 15 ans, mon père en avait 70 ans et donc toute sa famille immédiate était du même groupe d'âge.

J'ai passé mes soirées de Noël, de Pâques, entouré de personnes du troisième âge. J'ai donc été en mesure d'apprécier tous leurs efforts parce que dans ce temps-là, c'était la coutume: les jeunes écoutaient et la discussion se déroulait entre adultes.

J'ai donc été souvent témoin de faits que les personnes du troisième âge décrivaient, par exemple, en ce qui avait trait aux longues heures de travail, soit 15 heures par jour. Ils ont trimé dur pour «joindre les deux bouts» et bâtir un système dans lequel la santé a une importance primordiale lorsqu'on atteint l'âge d'or.

Ce qui est surprenant, c'est qu'au cours de la campagne électorale, vous ayez souligné l'importance de ces points-là; que vous ayez même sensibilisé le parti actuellement au pouvoir en le mettant en garde: Ne faites pas comme les conservateurs, changez la direction de vos orientations en ce qui concerne les programmes sociaux.

Une fois le Parti libéral élu, on devait s'attendre à un changement d'orientations puisqu'on laissait entendre pendant la campagne électorale - d'ailleurs, les engagements du Livre rouge étaient très clairs à ce sujet - le maintien et la protection du système de santé et des systèmes sociaux.

Or, vous qui avez de l'expérience, qui avez vécu plusieurs élections, plusieurs courants d'idées à travers les années, pourriez-vous m'expliquer comment il se fait qu'en changeant de gouvernement, on ait exactement les mêmes orientations que le précédent, concernant les programmes sociaux? Et ce qui est pire, c'est qu'on ait plus de coupures présentement et pourtant, le dernier gouvernement a été défait à cause des choix qu'il avait faits.

Vous avez mentionné, et à raison, les endroits où effectuer des coupures. On a encore des paradis fiscaux - qu'on estime à 16 milliards de dollars par année - sous forme de placements qui s'en vont dans les îles et qu'une simple législation permettrait de contrôler par la perception d'un impôt minimal de 4 milliards de dollars, soit le quart ou 25 p. 100. Mais ce n'est pas la priorité du gouvernement, c'est plutôt: Coupons chez les démunis, dans les systèmes de santé et chez les personnes du troisième âge.

.1830

Je vous écoute parler et je suis presque gêné que vous vous soyez déplacés, parce que j'ai l'impression que même si ce que vous dites est logique - vous l'aviez déjà dit, il y a un an; vous aviez reçu des engagements fermes par rapport à ce que vous demandiez - , aujourd'hui vous venez encore le répéter et le gouvernement fait la sourde oreille.

Par rapport à votre expérience, que ressentez-vous de voir...

Le président: Posez votre question.

M. Plamondon: Oui. Ma question est...

[Traduction]

Le rév. Mutch: Il me ferait un plaisir de pouvoir dire quelques mots à ce sujet.

Le président: Allez-y. Nous pensons déjà savoir quelle sera votre réponse.

M. Campbell (St. Paul's): Je voulais tout simplement préciser quelque chose que M. Aitkens a soulevée.

Vous avez exprimé des inquiétudes au sujet de l'état d'avancement du rapport sur le vieillissement. Je voulais tout simplement confirmer qu'au courant de cette année, le ministre du Développement des ressources humaines et le ministre des Finances rendront public un rapport sur les changements nécessaires pour assurer la viabilité du régime public de pension, y compris les programmes qui vous préoccupent le plus. Les personnes âgées et d'autres groupes intéressés seront consultés une fois que le rapport sera publié.

Dans le budget de 1995, on dit que le gouvernement a l'intention d'aller jusqu'au bout du processus et d'analyser dans quelle mesure des changements s'imposent, à temps pour pouvoir les mettre en vigueur en 1997.

Donc, le rapport est toujours à venir, et il y aura des consultations là-dessus.

Je voulais tout simplement apporter cette précision, monsieur le président, pour que les gens puissent bénéficier de ces informations.

Le président: Malheureusement, il nous faut aller voter en Chambre.

Comme j'ai participé moi-même à ce processus, je me permettrai de vous inviter à envoyer des propositions précises sur d'autres sources de recettes fiscales à notre Comité l'automne prochain, lors de nos consultations prébudgétaires. Je souligne que ces consultations seront tenues. Même si le même groupe de gens répètent les mêmes mythes, cela ne veut pas dire qu'ils ont raison. Nous voulons tenir un débat complet devant tous les Canadiens sur vos propositions pour trouver d'autres sources de recettes fiscales, et pour cette raison, nous nous ferons plaisir de recevoir vos propositions. Comme nous ne les avons pas encore étudiées nous n'avons pas établi quel montant pourrait être perçu, mais continuons à chercher la recette magique qui pourrait nous permettre de ne pas avoir à effectuer les compressions que nous aimerions éviter.

[Français]

M. Plamondon: Monsieur le président, dans le Livre rouge vous aviez toutes les solutions, paraît-il. Alors, pourquoi ne les mettez-vous pas en application?

Le président: Nous allons faire notre possible pour sauvegarder et protéger notre système social, notre système de santé, mais vous devez vous rappeler que nous ne sommes que des êtres humains.

[Traduction]

La Loi canadienne sur la santé est encore protégée. Les cinq principes de cette loi nous tiennent à coeur. Je vous assure que nous ne prenons pas plaisir à sabrer dans les programmes.

Voilà pourquoi nous vous avons invités, pour nous faire part des priorités de La Voix, un groupe qui exprime très bien les préoccupations des personnes âgées du Canada. Je pense que notre Comité a beaucoup de chance d'entendre des témoignages de gens comme vous qui parlez avec autant de force et d'éloquence au nom de nos personnes âgées qui méritent la loyauté, le respect et l'appui de chacun d'entre nous. Au nom de tous les membres, je tiens à vous remercier pour votre présence.

La séance est levée jusqu'à demain, 9h30.

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