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TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 26 novembre 1996

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[Français]

La coprésidente (Mme Guarnieri): Je vois qu'il y a quorum. La séance est ouverte. Bonjour.

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On a entendu les témoignages de M. Beaudry, des Travaux publics et de Mme Copps et aujourd'hui, on va recevoir les représentants de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada et de l'Association canadienne-française de l'Ontario. Je vous souhaite la bienvenue.

Ces groupes combattent depuis des années pour faire valoir leurs droits, et nous avons hâte d'entendre les conseils qu'ils vont nous donner. Je vous souhaite la bienvenue. On va entendre les deux présentations d'abord et ensuite on va passer aux questions. Monsieur Samson, vous allez commencer, je pense. Voulez-vous nous présenter vos collègues?

M. Yvon Samson (directeur général, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada): Merci, madame la présidente. Je vous présente Mme Sophie Galarneau, agente de communications à la Fédération, Mme Manon Henry, agente de liaison, et Mme Diane Desaulniers, présidente de l'ACFO régionale d'Ottawa-Carleton.

Madame la présidente, chers membres du comité, permettez-moi d'abord, au nom du président de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada, de remercier le Comité mixte permanent des langues officielles de nous permettre aujourd'hui de lui faire part de nos observations concernant le dossier de l'affichage et des services en français de la région de la Capitale nationale.

Jacques Michaud, le président de la Fédération, m'a demandé de vous présenter ses excuses pour son absence. Malheureusement, il a été retenu par une activité professionnelle dont il ne pouvait se libérer. Normalement, c'est le président qui prend la parole devant votre humble comité.

Comme vous le savez sans doute, la FCFA du Canada a organisé en août dernier une campagne positive visant à encourager certains grands commerces installés dans la Capitale nationale à afficher en français.

L'affichage et les services en français devraient être monnaie courante pour l'ensemble des commerces opérant dans la Capitale nationale. Nous devrions pouvoir refléter dans toutes les composantes de la vie à Ottawa la valeur la plus fondamentale de l'identité canadienne, soit la dualité linguistique.

Il va sans dire que toute cette question fait également appel au bon sens des affaires. Offrir des services en français et afficher dans les deux langues officielles sont des pratiques pouvant contribuer directement à offrir un service adéquat à 35 p. 100 de la population de la région.

J'affirme tout de suite haut et fort qu'il est possible de vivre en français à Ottawa, contrairement aux propos maintes fois tenus par certains. Dans plusieurs cas, le service en français est disponible et l'affichage est bilingue. Malheureusement, ce n'est pas partout la norme, et c'est ce que nous déplorons et voulons rectifier. C'est également la raison de notre comparution d'aujourd'hui. Il faut explorer ensemble cette problématique et ensuite déterminer les actions concrètes qui contribueront à améliorer l'état de l'affichage et des services en français dans la capitale de notre pays.

Il importe ici de souligner que les objectifs de parfaire les services et l'affichage en français sont fondamentalement indissociables. Il est vrai que notre campagne se concentrait principalement sur la question de l'affichage. Toutefois, il est conséquent que le commerçant voulant pleinement satisfaire sa clientèle lui fournisse un service dans la langue de son choix. Après tout, il serait insensé que l'affichage bilingue dans un commerce désigné ne se traduise pas par un service dans l'une ou l'autre langue officielle du Canada.

Cela dit, nous croyons que le gouvernement fédéral, à tout le moins en tant que propriétaire d'édifices, a un rôle essentiel, voire fondamental à jouer en vue de sensibiliser les marchands à l'importance d'offrir un service à leurs clientèles dans la langue de leur choix. Où devrait-il commencer? D'abord, en encourageant activement les marchands qui louent des locaux dans les édifices lui appartenant à desservir leur clientèle francophone dans leur langue. Ce rôle appartient évidemment à la Commission de la Capitale nationale, la CCN, et au ministre des Travaux publics, qui sont propriétaires d'un bon nombre d'édifices de la région.

Cette responsabilité ne s'arrête pas là, toutefois. L'alinéa 43(1)f) de la Loi sur les langues officielles permet au gouvernement d'intervenir auprès des entreprises afin de promouvoir auprès d'elles l'usage des deux langues officielles du pays.

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Nous pourrions donc envisager que le gouvernement élargisse ses actions au niveau des services en français dans une approche plus globale.

Nous ne voulons pas que le gouvernement légifère de façon à obliger les marchands à afficher et à offrir les services en français. Notre expérience nous a démontré que, dans la majorité des cas, ce n'était pas nécessaire.

Nous demandons plutôt que le gouvernement utilise les moyens qui lui sont disponibles pour sensibiliser les commerçants et les encourager à mieux desservir leur clientèle francophone dans sa langue.

Nous trouvons certainement malheureux que le Regroupement des gens d'affaires et le Ottawa-Carleton Board of Trade aient tous deux refusé de comparaître devant le comité. Leurs membres sont certainement les pierres angulaires du dossier.

Nous espérons que le comité réitérera son invitation et que ces deux groupes accepteront cette fois de comparaître. Ces audiences publiques ne devraient certainement pas être perçues comme une menace pour eux, mais plutôt comme une occasion d'intervenir dans le dossier. C'est aussi pour eux un moyen d'aider le gouvernement à trouver des mesures incitatives pour aider leurs membres à mieux desservir leur clientèle francophone.

Vous vous doutez sans doute que nous n'avons pas été satisfaits des arguments présentés par MM. Beaudry et Nurse devant le comité la semaine dernière. Ces hauts fonctionnaires sont venus vous justifier leur inaction. Ils n'ont pas su faire la preuve de leur engagement envers la dualité linguistique car ils n'ont pas voulu reconnaître, à prime abord, que le problème qui préoccupe les membres de ce comité est réel. Ils n'ont pas su proposer des mesures concrètes qui contribueraient à combler les lacunes existant en matière de langues officielles.

Faut-il encore aujourd'hui que la FCFA rappelle la décision du Cabinet de mettre en oeuvre la partie VII de la Loi sur les langues officielles et le fait que toutes les institutions fédérales sont responsables d'actualiser cette décision? Madame la présidente, l'attitude de ces hauts fonctionnaires incarne parfaitement l'ensemble des problèmes que rencontrent nos communautés face à la mise en oeuvre de cette partie de la loi, c'est-à-dire un manque évident de volonté et une suffisance bureaucratique.

On nous a servi une liste d'excuses indiquant les raisons pour lesquelles on ne peut rien faire. Manifestement, on prend la question à l'envers. Ne faut-il pas plutôt, en tant que serviteur de l'État qui a comme valeur fondamentale la dualité linguistique, parler des moyens qui pourraient être mis en oeuvre pour faire quelque chose? Dans sa présentation, M. Nurse a dit qu'une surréglementation pourrait avoir l'effet de lui faire perdre des locataires.

S'agit-il de naïveté, d'une incompréhension totale ou encore d'une absence du sens des affaires?

Prenons l'exemple de la rue Sparks. Vous conviendrez tous que c'est un emplacement des plus intéressants pour implanter un commerce. Peut-on trouver un autre lieu dans la Capitale nationale qui soit plus central? Difficilement. Personne ne pourra nous faire croire qu'une entreprise qui aura été sensibilisée à l'importance de mettre des affiches dans les deux langues officielles et d'embaucher un personnel bilingue décidera de déménager son commerce ailleurs. Et si elle décidait de quitter pour cette raison, ce serait tout simplement qu'elle n'a pas sa place à l'intérieur d'un édifice fédéral.

Pour sa part, M. Beaudry nous a informé du fait qu'il est juridiquement impossible d'appliquer la clause de ses baux qui parle d'inciter les commerces qui logent dans les édifices de la CCN à offrir des services dans les deux langues. Cette affirmation est loin de nous suffire. D'ailleurs, elle soulève quelques questions de notre part.

La population canadienne doit-elle subir l'unilinguisme dans sa Capitale nationale à cause de l'inaction de M. Beaudry? Doit-elle se résigner à l'unilinguisme parce que cet individu, qui a le pouvoir de changer des choses, ne croit pas qu'il soit souhaitable d'insister sur l'affichage dans les deux langues officielles du Canada dans les édifices appartenant au gouvernement fédéral?

Comment doit-on réagir au fait qu'il se justifie par un avis juridique voulant qu'un bail n'ayant pas été contesté dans le passé soit désormais lié par un accord tacite? Non, monsieur Beaudry, nous ne consentons pas à votre esquive.

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L'honorable Sheila Copps l'a elle-même mentionné devant le comité la semaine dernière. En réponse à une question venant d'un membre de ce comité, elle a tout simplement répondu: «Un contrat, c'est un contrat».

Même en tenant compte de l'analyse juridique que vous a servie M. Beaudry, qu'est-ce qui l'empêche de demander à ses fonctionnaires d'aller rencontrer des commerçants pour les sensibiliser à l'importance d'offrir un service à leur clientèle dans la langue de son choix? Rien, si ce n'est la volonté personnelle.

M. Beaudry a également fait mention du nombre peu élevé de plaintes au Bureau du commissaire aux langues officielles. Il n'y aurait eu que quatre plaintes concernant le manque de services en français chez des marchands ayant une place d'affaires dans des édifices fédéraux. Il nous a également indiqué que ces problèmes avaient été réglés très rapidement.

D'une part, il ne faut pas se surprendre que le commissaire n'ait pas reçu de plaintes à cet égard. Les citoyennes et les citoyens du Canada ne savent pas que le gouvernement fédéral est propriétaire de ces édifices.

Nous ne pouvons pas non plus négliger le fait que des sondages ont démontré que le commissaire aux langues officielles et son rôle étaient très peu connus du public en général.

On ne peut pas non plus penser qu'un touriste de passage dans la Capitale nationale saura où et à qui adresser son mécontentement. Il le fera ailleurs, auprès de ses amis, des gens qu'il côtoie, lesquels auront ensuite l'impression d'un Canada unilingue anglophone.

D'autre part, si ces quatre cas ont été réglés si rapidement, pourquoi MM. Nurse et Beaudry ne pourraient-ils pas obtenir l'affichage des services en français de façon proactive aussi facilement dans les autres commerces? Nous en avons été témoins lors de notre campagne. La majorité des marchands que nous avons contactés ont dit qu'ils se feraient un plaisir d'amender la situation si on leur fournissait les outils nécessaires ou qu'on leur indiquait la nécessité de le faire.

Mais, surtout, pourquoi devons-nous toujours nous plaindre pour faire corriger quelque chose qui doit déjà nous appartenir? Pourquoi devons-nous prouver par la plainte que nous avons à coeur la présence active de notre langue au sein de la société canadienne? Faut-il sortir dans les rues chaque fois que l'on veut avancer d'un pas?

Comment se fait-il que le gouvernement fédéral, qui s'est engagé maintes et maintes fois envers la dualité linguistique et face au développement des communautés, permette que ses institutions nous servent ces excuses? Comment se fait-il que ces institutions gouvernementales ne soient pas capables de prendre avantage de l'intérêt qu'a suscité cette question et de mettre en oeuvre des initiatives pour faire avancer la question des services bilingues dans la Capitale nationale?

La volonté de ces deux institutions ne devrait pas être tributaire des audiences publiques tenues par ce comité. Le ministère des Travaux publics et la CCN auraient normalement dû saisir l'occasion de l'attention publique dont jouissait le dossier pour mettre de l'avant un plan d'action. Voilà qui, manifestement, est trop leur demander.

Ces institutions sont visées par l'article 41 de la Loi sur les langues officielles et elles connaissent les obligations qui en découlent. Cet article mentionne clairement:

41. Le gouvernement fédéral s'engage à favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français dans la société canadienne.

L'intention derrière cette loi est précisément d'étendre la responsabilité de la promotion du français à l'ensemble des ministères et agences du gouvernement. De plus, le paragraphe 43(1) de la loi mentionne que le secrétaire d'État, qui est devenu le ministre du Patrimoine canadien:

f) pour encourager les entreprises [...] à fournir leurs services en français et en anglais et à favoriser la reconnaissance et l'usage...

du français, évidemment, et de l'anglais dans le cas d'une minorité linguistique anglophone.

...et pour collaborer avec eux à ces fins;

Existe-t-il toujours une loi qui oblige les marchands à servir leurs clients en français à Ottawa? La réponse est non. Existe-t-il une loi qui oblige le ministère à demander que les commerces ayant leur place d'affaires dans ses édifices servent leurs clients dans la langue de leur choix? Pas à notre connaissance.

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Ceci nous amène à une autre question: doit-on toujours appliquer le minimum exigé par la loi? Est-ce que le gouvernement, qui s'est engagé à plusieurs reprises face à la dualité linguistique, ne devrait pas démontrer un minimum d'initiative et de proactivité pour assurer le plein développement des communautés?

Nous ne demandons pas l'impossible, loin de là. La réceptivité des gens à notre campagne nous encourage certainement en ce sens. La population d'Ottawa, qu'elle soit francophone ou anglophone, est d'avis que l'affichage bilingue dans la Capitale nationale est tout à fait justifié. Le Ottawa Sun, un journal qui tient normalement des positions éditoriales moins que favorables au fait français, a nettement pris position en faveur de l'affichage bilingue. Ce fut d'ailleurs le cas de tous les médias de la région. Comment se fait-il donc que nous devons sans cesse nous battre pour revendiquer que la CCN et le ministère des Travaux publics incitent activement leurs locataires à afficher en français?

Voici donc les mesures que nous recommandons en vue d'actions concrètes de la part de la CCN et du ministère des Travaux publics:

- Premièrement, que le ministère des Travaux publics et la CCN s'assurent d'incorporer dans les baux qu'ils signeront dorénavant une clause sur l'affichage bilingue similaire à celle déjà présente dans les baux de la CCN, encourageant leurs locataires à offrir des services dans les deux langues, et qu'ils appliquent activement cette clause.

Il faut comprendre que l'attente de la mise en oeuvre de cette clause n'empêche ni n'exclut la mise en oeuvre des prochaines recommandations.

- Deuxièmement, que la CCN et le ministère des Travaux publics élaborent dans les plus brefs délais un plan d'action qui viserait spécifiquement à encourager leurs locataires à afficher dans les deux langues officielles du pays et à offrir des services en français d'ici deux ans.

Les plans d'action de ces institutions devraient contenir des actions telles des rencontres avec les propriétaires, gérantes et gérants de ces entreprises pour leur indiquer les mesures à prendre pour bien desservir leur clientèle francophone sans que les coûts soient exorbitants. On leur présenterait alors une liste d'actions à appliquer afin de servir de la meilleure façon possible leur clientèle francophone. On les sensibiliserait à l'importance de cette question et aux avantages évidents qui en découleraient. La CCN pourrait alors utiliser le livret qu'elle a produit en 1992 intitulé Bien servir sa clientèle, c'est payant!.

- Troisièmement, que la CCN et le ministère des Travaux publics écrivent dès maintenant une lettre à l'ensemble de leurs locataires. Cette lettre affirmerait que l'affichage et les services bilingues sont certainement des atouts pour toute entreprise qui désire bien servir sa clientèle avec respect et considération; que ces deux institutions sont très préoccupées par cette question et veulent la régler, parce qu'elles ont une responsabilité en vertu de la Loi sur les langues officielles, mais surtout parce qu'elles y croient; qu'il n'y a pas lieu de se tourmenter puisque l'on se donne deux ans pour y arriver; et que la CCN et le ministère des Travaux publics ont l'intention de travailler avec leurs locataires pour les amener vers l'affichage bilingue.

- Quatrièmement, que la CCN et le ministère des Travaux publics offrent pendant un mois des services de traduction gratuits.

- Cinquièmement, que la CCN et le ministère des Travaux publics fournissent à leurs locataires des noms de distributeurs de matériel promotionnel bilingue, par exemple des affiches indiquant que le service est offert dans les deux langues.

- Sixièmement, que la CCN et le ministère des Travaux publics subventionnent lesdits distributeurs, afin d'encourager l'achat de matériel en français par leurs locataires.

- Septièmement, que ces mesures s'appliquent dans tous les édifices appartenant au gouvernement fédéral, partout au Canada où il y a une communauté francophone et acadienne.

- Huitièmement, que le gouvernement utilise tous les moyens qui lui sont disponibles pour encourager activement les commerçants du pays à afficher dans les deux langues, sans toutefois légiférer de façon à forcer ou à obliger l'affichage et les services en français.

- Par exemple, le ministère du Patrimoine canadien pourrait mettre sur pied un programme pour sensibiliser et encourager les entreprises à mieux desservir leur clientèle francophone.

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Vous avez reçu une liste d'attentes. Cette liste fait état de plusieurs services qu'un commerce devrait offrir afin de bien desservir sa clientèle de langue française. Il serait bon que la CCN et le ministère des Travaux publics l'aient en main lors de leurs discussions avec leurs locataires.

La FCFA a une grande confiance dans les travaux du comité. Vous avez déposé un rapport en Chambre au printemps dernier sur la partie VII de la loi, dans lequel vous demandiez que le gouvernement remette la responsabilité de la mise en oeuvre entre les mains d'une agence ou d'un organisme central afin d'instaurer un mécanisme d'imputabilité. Cette position démontre clairement votre conviction à défendre le principe de la dualité linguistique.

Nous sommes également convaincus de l'impact de vos travaux. Grâce à votre intervention, la réponse du Cabinet à votre rapport reflète directement les demandes de la FCFA du Canada et des communautés qu'elle représente. En élargissant le rôle du Conseil du Trésor au niveau de l'article 41, nous avons franchi un obstacle important qui empêchait sa mise en oeuvre. C'est pourquoi nous vous demandons, madame la présidente, messieurs et mesdames les députés et sénateurs, de soumettre des recommandations fortes et surtout de ne pas vous laisser influencer par les prétextes que vous ont servis les directeurs des institutions fédérales.

La Capitale nationale, de même que tous les édifices fédéraux, devraient refléter de façon exemplaire les valeurs sur lesquelles s'est bâti notre pays.

Nous espérons que les recommandations que nous venons de vous présenter pourront contribuer à faire évoluer la situation. Sur ce, je vous remercie encore une fois de votre attention et je me ferai maintenant un plaisir de répondre à vos questions à la suite de la présentation deMme Desaulniers.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Je vois que vous avez écrit dans votre texte que vous avez confiance en nos travaux. On va faire du bon travail, j'en suis sûre.

M. Samson: Merci.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Madame Desaulniers, s'il vous plaît.

Mme Diane Desaulniers (présidente, Association canadienne-française de l'Ontario (Ottawa-Carleton)): Madame la présidente, mon collègue vous a expliquait la genèse du dossier de l'affichage. Lors de la conférence de presse en septembre, l'ACFO a voulu informer les gens de la presse que le dossier était un dossier régional et qu'il s'appliquait à l'ensemble d'Ottawa-Carleton.

Depuis le début de la campagne, le discours «acfoïste» est un dossier économique. La campagne d'affichage s'appuie sur l'importance du pouvoir économique des francophones qui vivent, qui travaillent et qui visitent la Capitale nationale pour inciter les commerçants d'Ottawa-Carleton à mettre en place de saines pratiques de gestion, de bonnes pratiques d'affaires en respectant leurs clients et en les servant dans la langue officielle qu'ils préfèrent. L'ACFO encourage la participation économique, à savoir que les francophones et les francophiles utilisent leur pouvoir d'achat là où on affiche et où on assure les services en français parce que l'affichage sans services est, à toutes fins utiles, de la publicité trompeuse.

J'insiste sur la perspective économique du dossier. La dernière chose que l'ACFO régionale veut voir se produire, c'est que le dossier de l'affichage des commerces d'Ottawa-Carleton soit récupéré dans l'arène politique, où les intérêts des francophones seront subordonnés aux intérêts politiques et où nous pourrions facilement encore une fois devenir des otages sur le dos desquels on ressortira le dossier constitutionnel.

Cela dit, lorsqu'elle se penche sur les résultats de la campagne à ce jour, l'ACFO régionale constate deux choses.

Tout d'abord, nous constatons l'ouverture d'esprit et la collaboration démontrées par le monde des affaires et manifestées principalement par le Regroupement des gens d'affaires et le Ottawa-Carleton Board of Trade, qui forment un comité travaillant à donner un visage plus canadien à la Capitale nationale. Je diverge un peu des positions de mon collègue à l'égard de ces organismes.

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L'approche d'affaires, du gros bon sens des affaires fait en sorte que l'ACFO d'Ottawa-Carleton obtient l'appui de ces organismes et de leurs membres. Les gens d'affaires ont généralement compris le message: «Si vous voulez nos dollars, parlez-nous dans notre langue.»

Deuxièmement, l'ACFO d'Ottawa-Carleton constate une plus grande sensibilisation, une plus grande fierté, une plus grande détermination des francophones de la région à demander qu'on les serve en français. Pour le commerçant, c'est une marge potentielle de profit. Ils sont prêts à aller ailleurs si on n'a pas à coeur de leur donner un service de qualité en français. J'en profite pour leur rappeler l'importance de redoubler leurs efforts et de faire leur magasinage des Fêtes dans les commerces qui sont vraiment intéressés à faire des affaires avec nous dans notre langue.

Lorsqu'on parle d'affichage commercial, la solution peut être aussi simple ou aussi compliquée qu'on le voudra, coûter très peu comme elle peut coûter très cher. L'ACFO d'Ottawa-Carleton travaille avec les marchands de sorte que tout le monde atteigne les meilleurs résultats au moindre coût. Nous visons à reconnaître de façon publique les marchands, les commerçants, les entrepreneurs qui offriront les services en français et qui afficheront en français.

Connaissant la portée de la Loi sur les langues officielles, je sais que la compétence du Parlement canadien se limite aux institutions fédérales, ce qui exclut de facto l'affichage commercial d'entreprises privées.

La loi stipule par ailleurs que le gouvernement peut exiger que les tiers conventionnés qui donnent des services au nom du gouvernement et les organismes qui obtiennent des deniers publics pour organiser les événements nationaux aient l'obligation d'assurer la prestation des services en français et anglais.

La loi oblige également les institutions fédérales à s'afficher et à annoncer leurs services dans les deux langues officielles. Le client, en l'occurrence le gouvernement fédéral, peut mieux dicter les conditions, les paramètres d'une entente quand il s'agit de son argent, quand c'est lui, le bailleur de fonds. La chose est un petit peu plus difficile quand celui-ci se trouve à la place du récipiendaire.

L'ACFO d'Ottawa-Carleton veut que la Capitale nationale ait l'air plus bilingue et reflète la dualité linguistique du Canada. L'ACFO régionale croit que le Parlement canadien peut prendre des mesures concrètes et positives sans légiférer, ce qui peut prendre des mois et des années, alors que souvent, une politique bien calibrée et bien ciblée peut donner des résultats à court terme. Tout ce qu'il faut, en fin de compte, c'est qu'il y ait une volonté politique et des conséquences rattachées aux résultats.

Par exemple, en exigeant que les commerces qui sont locataires dans les édifices fédéraux d'Ottawa-Carleton affichent en français et donnent des services dans cette langue, le gouvernement fédéral signalerait clairement l'importance qu'il accorde au fait français et au respect des deux langues officielles dans ses locaux. En échange, l'avantage que le commerçant en retire, c'est d'avoir la possibilité de rejoindre une vaste clientèle avec ses produits, j'allais presque dire une clientèle captive.

Toute mesure contribuant à l'épanouissement de la communauté francophone et de sa langue constitue une étape positive, mais comme le dossier de l'affichage en français dans Ottawa-Carleton est un dossier régional, l'ACFO aurait apprécié être consultée pour pouvoir évaluer l'incidence des interventions de tiers sur la question, car nous n'avons pas les ressources humaines, financières ou temporelles pour réparer les pots cassés par d'autres, notre priorité étant de nous concentrer sur nos propres dossiers.

Voici où je veux en venir. Il a fallu faire valoir aux marchands que le dossier, même si le comité tenait des audiences publiques, demeurait un dossier économique. Donc, permettez-moi de vous faire quelques suggestions qui peuvent être mises en place maintenant avec un minimum d'arias dans le cadre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

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Premièrement, le Conseil du Trésor pourrait modifier sa politique d'acquisition de sorte que le gouvernement fédéral utilise son propre pouvoir d'achat pour encourager les marchands, les commerçants, les entrepreneurs à afficher leurs services et à en faire la prestation en français.

Deuxièmement, le Conseil du Trésor pourrait modifier sa politique de location de manière à ce qu'il y ait dans les baux une clause qui oblige les locataires à afficher et à donner les services dans les deux langues officielles.

Troisièmement, le gouvernement fédéral pourrait prendre des mesures pour assurer des retombées économiques équitables pour les Franco-Ontariens et les Franco-Ontariennes de la région d'Ottawa-Carleton, que ce soit sur le plan des contributions, de la création d'emploi ou de l'octroi de marchés. En échange, je peux vous assurer que le gouvernement fédéral pourra compter sur l'ACFO régionale d'Ottawa-Carleton pour continuer à encourager ses membres et les parlants français de la région à exiger et à utiliser ces services en français.

Madame la présidente, nous sommes à votre disposition.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Nous commençons par un tour de dix minutes. Aujourd'hui, je serai assez sévère.

M. Marchand (Québec-Est): Vous allez être sévère parce que le sénateur Riel est là?

La coprésidente (Mme Guarnieri): On va s'en tenir à dix minutes aujourd'hui.

M. Marchand: Merci de vos présentations, monsieur Samson et madame Desaulniers. J'aimerais d'abord vous poser à tous les deux une question au sujet de la ville d'Ottawa.

M. Beaudry, président de la Commission de la Capitale nationale, est venu devant nous la semaine dernière pour dire que la ville d'Ottawa était bilingue. D'après vous, Ottawa est-elle une ville bilingue?

Mme Desaulniers: On peut se demander: Est-ce qu'Ottawa est aussi bilingue qu'elle pourrait l'être? La réponse est non. Est-ce qu'Ottawa est une ville unilingue? Je ne veux pas répondre oui à cela, parce que ce serait abdiquer. Malgré l'ouverture et l'appui des villes d'Ottawa et de Vanier, et bien que les marchands soient prêts à faire des choses et que les gens en demandent plus, il y a du progrès à faire.

M. Marchand: Est-ce qu'il est possible de fonctionner en français? Dans votre présentation, monsieur Samson, à la page 1, vous dites qu'il est possible de vivre en français à Ottawa

M. Samson: Je vis dans le quartier de Vanier, et Mme Desaulniers y vit aussi. Je vis très bien dans le quartier de Vanier en français. Je peux faire mes emplettes en français au Centre Rideau. C'est une question de choix personnel. Je n'ai pas besoin d'aller à un magasin anglophone qui ne donne pas de services en français. Si je le veux, à Ottawa et dans certaines localités, je peux faire mes achats en français.

La ville d'Ottawa est-elle officiellement bilingue? Elle a une politique officielle sur les langues officielles. Est-ce qu'elle l'applique correctement? C'est une question de perception. Je peux dire qu'elle l'applique et d'autres peuvent dire le contraire. Tout dépend de la valeur que chacun y accorde.

Dans ma perspective, je peux vivre en français à Ottawa. Il n'y a pas de différence là.

M. Marchand: Peut-être qu'à Vanier, c'est possible, mais à Ottawa... Je vais souvent sur la rue Sparks, et je ne vois pas beaucoup de français. Je vais dans les magasins et je suis obligé de mettre le français dans ma poche. Je suppose qu'il est possible de fonctionner en ce sens. D'ailleurs, vous avez même manifesté cet été au sujet du manque d'affichage en français à Ottawa.

À cet égard, madame Desaulniers et monsieur Samson, vous dites que c'est un dossier économique. Sauf erreur, le Regroupement des gens d'affaires tout comme le Ottawa-Carleton Board of Trade ont indiqué qu'ils n'avaient aucun intérêt ou aucune volonté de prendre des mesures d'affichage bilingue.

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Mme Desaulniers: Je ne suis pas d'accord avec vous. Je sais pertinemment que le Regroupement des gens d'affaires et le Board of Trade forment un comité. Leur prochaine étape est de faire un recensement des commerçants, des membres qui ont déjà une politique d'affichage et de services en français. Donc, la communauté des affaires est viscéralement engagée dans ce dossier.

M. Marchand: D'accord. Je me suis peut-être trompé parce qu'ils ont refusé de venir devant nous pour en témoigner ou en parler. Du moins, ils nous ont laissé entendre...

Mme Desaulniers: Le Regroupement des gens d'affaires et le Board of Trade ont décliné l'invitation parce que, pour eux, c'est un dossier économique alors que ce comité a un parti pris politique. Je vous ai déjà dit que tant que le dossier restera économique, on aura la collaboration des principaux intéressés.

M. Marchand: Monsieur Samson, est-ce que vous pouvez maintenant nous donner un compte rendu des résultats de la manifestation sur la rue Sparks l'été dernier?

M. Samson: Oui. Évidemment, nous continuons à écrire à ces grandes chaînes nationales pour nous assurer qu'elles affichent en français et offrent dans leurs établissements des services en français. Nous voulons connaître en détail leur politique officielle sur le service à la clientèle.

La chaîne de magasins Zellers a étendu sa politique au-delà des frontières de la région de la Capitale nationale, de sorte qu'elle l'applique également à celle de Cornwall. La chaîne a donc décidé de changer et de respecter les francophones de cette région-là.

Rogers Video, à son tour, le 1er décembre, respectera les consommateurs de la région de la Capitale nationale en offrant ses services dans les deux langues officielles.

Lors de notre campagne, huit compagnies ont dit qu'elles allaient mettre des choses en place. Quatre compagnies ciblées ont été récalcitrantes, et nous continuons à les encourager à faire le nécessaire.

Il ne faut jamais oublier ce que Mme Desaulniers a dit tout à l'heure. C'est quand même un dossier régional jusqu'à un certain point, sauf pour la question des baux fédéraux et pour celles qui vous touchent comme parlementaires, au niveau du respect de la dualité linguistique et des obligations du gouvernement fédéral à cet égard.

M. Marchand: On examine justement le caractère bilingue d'Ottawa, c'est-à-dire l'affichage et les services.

Vous savez aussi sans doute, monsieur Samson et madame Desaulniers, qu'en 1995, le commissaire aux langues officielles avait fait une étude sur la langue à la fonction publique à Ottawa.

Vous savez aussi que le gouvernement fédéral occupe une très grande place ici, à Ottawa, à cause de ses employés et de ses édifices. Étant donné que la fonction publique, d'après le rapport, fonctionne majoritairement en anglais - à peu près 80 p. 100 - , est-ce que cela, d'après vous, a aussi un effet sur le manque de services en français à Ottawa?

Mme Desaulniers: On parle de choses complètement différentes. La personne n'a pas nécessairement le choix des collègues avec qui elle travaille. Par contre, elle a le choix d'exercer son pouvoir d'achat où bon lui semble.

M. Samson: Dans mon cas, je vais magasiner au marché. Sur la rue Sparks, il y a des magasins qui ne respectent pas mes droits; donc, je ne magasine pas là. Je n'ai pas besoin de faire des affaires en anglais.

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C'est une question individuelle, mais c'est vrai qu'il y a un problème. Le commissaire a quand même souligné très correctement dans son rapport qu'il y a un problème à l'intérieur de la fonction publique, où les réunions se font majoritairement en anglais. Le comité devrait peut-être se pencher sur cette question et voir comment trouver des mesures pour encourager davantage la participation en anglais et en français à ces réunions internes.

M. Marchand: C'est tout pour le moment. Merci.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Serré.

M. Serré (Timiskaming - French River): Permettez-moi d'abord de vous remercier et de vous féliciter pour vos deux excellentes présentations. Mes salutations à MM. Michaud et Lalonde.

J'ai écouté avec intérêt vos deux présentations. Avant de faire quelques commentaires et de poser des questions, j'aimerais rétablir les faits sur les paramètres de notre étude. Depuis le début, on entend parler presque uniquement des services en français dans la région d'Ottawa, alors que les paramètres de notre étude sont les services dans les deux langues dans toute la région de la Capitale nationale, des deux côtés de la rivière. Ce qui se dit pour la minorité francophone de ce côté-ci de la rivière s'applique autant à la minorité anglophone de l'autre côté. Je tenais à le préciser, parce certains semblent penser que que l'étude porte seulement sur les services en français à Ottawa.

J'ai écouté avec intérêt la présentation de la Fédération des communautés francophones et acadienne et, dès le début, j'ai été un peu déçu du ton très négatif de la présentation, mais vous vous en êtes très bien tiré avec les recommandations de la fin. Je suis complètement d'accord sur vos commentaires sur le président de la Commission de la Capitale nationale. Il nous sert des prétextes très simplistes pour ne pas prendre ses responsabilités, et je n'accepte pas ses arguments. Je n'ai aucun problème quant à la plupart des recommandations des deux organismes. La Fédération demande au gouvernement de faire un certain nombre de choses.

Par contre, je trouve la présentation de Mme Desaulniers beaucoup plus positive, en ce sens qu'elle ne nous lance pas la balle en nous disant que nous devons faire telle et telle choses pour régler le problème. Elle nous dit: Voilà ce que nous devons faire ensemble. Le gouvernement a peut-être certaines responsabilités, mais l'association et les minorités en ont elles aussi. À mon avis,la présentation est beaucoup plus positive et laisse percevoir de bons résultats pour l'avenir.

Madame Desaulniers, vous dites quelque chose d'intéressant à la page 5, et j'aimerais que vous commentiez votre pensée. Vous dites:

D'abord, qui sont les tiers?

À quelle tierce partie faites-vous allusion et quels sont ces pots cassés?

Mme Desaulniers: La tierce partie, en l'occurrence, est cet auguste comité. L'été dernier, quand on a déclaré que le Comité mixte des langues officielles se pencherait sur la question de l'affichage, il y a eu un petit sursaut dans la communauté des gens d'affaires, parce que dans un forum national ou gouvernemental, le comité peut faire et dire ce qu'il veut.

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Par contre, le un à un, la conviction, l'engagement, le travail se fait au niveau local. Aussi longtemps qu'on fait valoir la dimension économique du dossier et le fait que c'est une pratique enseignée dans le cours Mise en marché 101, les commerçants embarquent. Les gens sont prêts à dire que cela a du bon sens. Les francophones qui se disent bilingues ont quelque chose à gagner de ce dossier parce que le fait d'avoir des services en français ajoute une valeur à la connaissance des deux langues.

M. Serré: Ce que vous me dites d'une façon très aimable et très diplomatique, c'est que les déclarations à l'emporte-pièce, autant du député de l'opposition que du président du comité de l'époque, n'ont pas aidé la cause de la minorité francophone de la région d'Ottawa-Carleton.

Mme Desaulniers: Il a fallu faire du rattrapage.

M. Serré: Merci. La prochaine question...

Une voix: Je pense qu'il voulait faire un commentaire.

M. Serré: Allez-y.

La coprésidente (Mme Guarnieri): On va lui donner la chance de répondre avant, s'il vous plaît.

M. Samson: Je suis content que vous ayez trouvé notre mémoire tempéré; il était juste. La communauté économique est plutôt inquiète, parce que les parlementaires commencent à regarder des choses. Mais on ne reçoit pas le même avis des citoyens, des gens ordinaires, des consommateurs. Nous avons eu des lettres et des appels nous encourageant à poursuivre dans cette direction. En fait, ces gens ont été sensibilisés au fait que la Capitale nationale est un territoire quasi fédéral. C'est perçu de cette façon-là. Il y a donc cet élément qui joue aussi dans l'échiquier par rapport à la région de la Capitale nationale qui, vous avez raison, inclut Hull et Ottawa-Carleton.

M. Serré: Merci. J'ai encore quelques minutes?

La coprésidente (Mme Guarnieri): Est-ce que vous voulez partager votre temps avec le sénateur Robichaud? Il voulait poser une question.

Le sénateur Robichaud (L'Acadie): Vous avez dû faire du rattrapage à cause d'une déclaration qui a été faite par votre organisation, à savoir que vous alliez lancer une campagne pour l'affichage bilingue?

Mme Desaulniers: Non. C'était techniquement du damage control parce que les déclarations des politiciens ont donné un son de cloche différent aux gens. Ce que les gens ne veulent pas voir, tant M. et Mme Tout-le-monde que la communauté des affaires, c'est qu'on se fasse du capital politique sur le dos de la communauté francophone.

M. Serré: Vous avez presque répondu à la question que j'allais vous poser. Vous dites à la page 3 de votre présentation que vous insistez sur la perspective économique du dossier. Je suis tout à fait d'accord. Vous dites:

C'est exactement ce que j'ai perçu pendant tout l'été. C'est pourquoi je m'opposais au début à cette étude. J'ai demandé qu'on change les paramètres de l'étude parce que j'ai pleine conscience que, tant du côté du Bloc québécois que du côté du Parti libéral, des gens se sont servis de ça pour se faire du capital politique, pour promouvoir leur option. C'est très négatif pour les dossiers des francophones à l'extérieur du Québec ou pour le dossier de la minorité anglophone au Québec.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Serré, c'est votre dernière question. Votre temps est écoulé.

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M. Serré: Je ne comprends pas tellement le sens de votre recommandation numéro 3:

Mme Desaulniers: Dans l'esprit de la partie VII, on propose que les institutions fédérales prennent des mesures pour promouvoir le développement et l'épanouissement de la communauté. Là encore il y a une question de proportion; le tiers de la population d'Ottawa-Carleton est francophone. Le denier public devrait donc avoir des répercussions dans la même proportion pour les francophones de la région.

Par exemple, avec la dévolution de la formation professionnelle, qui passe du fédéral au provincial, s'il y a 30 p. 100 de francophones dans Ottawa-Carleton, les fonds consacrés à ce poste devraient être proportionnels. Pour ce qui est de la création d'emplois, quant à la Loi sur les langues officielles et au partage équitable entre les niveaux, cela va quand même assez bien, sauf au niveau de la haute gestion.

Pour ce qui est de l'octroi de marchés, beaucoup de fonctionnaires lancent de petites entreprises et le gouvernement pourrait utiliser son pouvoir d'achat pour faire en sorte que les retombées soient équitables lors de l'octroi de marchés, toutes choses étant égales par ailleurs.

M. Serré: Merci beaucoup.

La coprésidente (Mme Guarnieri): La parole est au sénateur Rivest.

Le sénateur Rivest (Stadacona): Évidemment, en tant que Québécois, il faut parler prudemment de l'affichage parce que, comme vous le savez, on n'est pas sans péché dans ce domaine au Québec.

Maintenant que la Loi 86 est venue rétablir des droits en matière d'affichage commercial pour les Québécois anglophones et que même nos amis souverainistes se sont convertis à la Loi 86 en fin de semaine, c'est-à-dire à l'affichage bilingue, je veux les en féliciter et les en remercier.

Des voix: Ah! Ah!

M. Marchand: Je vous rappelle que je suis du Bloc québécois.

Le sénateur Rivest: On peut donc dorénavant avoir les coudées relativement franches pour appuyer les revendications des Québécois ou des Canadiens français de la région de la Capitale nationale.

Je dois vous dire que, malheureusement, je n'étais pas présent à la séance dont vous parlez. J'ai été très étonné des propos tenus par le président de la Commission de la Capitale nationale et je partage l'analyse que vous en faites. Cela m'étonne qu'il n'ait pas voulu ou su assumer le leadership qu'il devait prendre et qui est, je pense, dans la nature même de la Commission de la Capitale nationale.

Le premier ministre du Canada répond en français au journaliste qui lui pose des questions en français ou en anglais, par conviction, parce qu'il croit à la dualité linguistique du Canada. Il n'y a aucune loi qui l'oblige à le faire. C'est la même chose: il me semble que cela fait simplement partie de la nature des choses, de la nature de ce pays. La dualité linguistique est une caractéristique fondamentale du pays. La Commission de la Capitale nationale devrait le comprendre au lieu de se retrancher derrière des arguments juridiques qui relèvent davantage du délire juridique que de toute autre chose.

Je suis généralement d'accord sur l'ensemble de vos recommandations et totalement d'accord pour que, dans la région de la Capitale nationale, on doive procéder de façon incitative, un peu à la manière des démonstrations et démarches que l'ACFO a faites, enfin des initiatives que vous avez prises. Ce qui m'étonne, cependant, c'est l'appui que vous recevez du gouvernement canadien dans ce dossier particulier.

Mme Desaulniers: Moi, je suis pour une ACFO autosuffisante, voyez-vous. Nous travaillons sur les questions régionales et concluons par la recommandation que, pour vraiment donner un coup de main dans ce domaine, le gouvernement fédéral doit utiliser son propre pouvoir d'achat, qui est de l'ordre de quelques millions de dollars, pour inciter les marchands à annoncer leurs services et à les offrir en français.

Le sénateur Rivest: Est-ce que vous croyez que c'est la seule initiative qu'il doive prendre? Par exemple, la ministre du Patrimoine canadien pourrait écrire une lettre simplement incitative pour appuyer vos démarches, sans faire le travail à votre place, à tous les intervenants du milieu, que ce soit les chambres de commerce ou d'autres, pour leur faire savoir que, malgré l'absence d'obligation juridique, on souhaiterait que l'ensemble des activités commerciales et gouvernementales dans la Capitale nationale reflète la dualité linguistique de ce pays telle qu'on la conçoit.

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Elle pourrait écrire également qu'elle appuie les efforts des associations et des porte-parole des groupes francophones, de l'Ontario ou d'ailleurs au Canada, que leurs préoccupations sont justes et qu'elle leur demande de vous accueillir avec un esprit ouvert.

Croyez-vous que le gouvernement canadien a la volonté politique de soutenir les efforts que vous faites et que vous voulez continuer de faire?

Mme Desaulniers: À mon point de vue, on n'est jamais si bien servi que par soi-même. Il y a différentes façons de mettre ce principe en application. Je verrais mal, par exemple, que vous, du Comité et la ministre du Patrimoine canadien preniez des mesures si vous n'étiez pas d'abord convaincus que la communauté elle-même est prête à se tenir debout. Comme je le disais, toute mesure qui peut contribuer à l'avancement du dossier est la bienvenue et, en l'occurrence, les actes que vous pouvez poser en ce sens sont appréciés.

Il y a divers modes d'action. Au niveau régional, par exemple, Mme Holzman, maire d'Ottawa, est prête à communiquer avec tous les marchands. Ce contact est beaucoup plus près de la vie courante et du portefeuille de la communauté d'Ottawa-Carleton. Ce sont des options intéressantes et si vous voulez signaler vous-mêmes votre engagement profond et encourager les marchands à annoncer...

Le sénateur Rivest: Très bien. Vous semblez très soucieuse de votre indépendance. Je vous poserai une question un peu particulière.

M. Samson: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose par rapport à l'engagement?

Le sénateur Rivest: Oui.

M. Samson: Il ne faut pas oublier que pendant la campagne, le premier ministre Jean Chrétien a même dit que lorsqu'il était à Ottawa, il voulait se faire servir en français. Donc, selon moi, il y a un engagement de la part du gouvernement, en haut lieu.

Le sénateur Rivest: Je m'adresse à nouveau à Mme Desaulniers. Une chose m'a frappé, un détail dont je ne veux pas vous faire le reproche. Vous dites vouloir vous occuper de vos gens. Cependant, quand je viens de Montréal à Ottawa par la route 417 et que je m'arrête dans un village constitué probablement à 95 p. 100 de Franco-Ontariens, je vois des raisons sociales qui sont unilingues anglaises à environ 60 p. 100. Faites-vous votre travail de ce côté-là?

Mme Desaulniers: Tout cet aspect constitue un dossier clé dans lequel différents facteurs jouent. Jusqu'à présent, les commerçants ou les divers paliers gouvernementaux ont souvent l'impression que l'ACFO, la FCFA, etc., ne font que quémander. Nous avons également la responsabilité de sensibiliser les gens. Par exemple, lors de la plainte instruite par le commissaire contre le ministère du Développement des ressources humaines, on a mentionné qu'à plusieurs endroits, les services étaient offerts mais qu'il n'y avait pas preneur.

Nous avons la responsabilité de faire que les gens soient des preneurs, que les gens soient sensibilisés à l'importance d'utiliser ces services, de là ma remarque, dans ma conclusion, disant que nous sommes prêts à faire ce qu'il faut dans Ottawa-Carleton, c'est-à-dire à faire en sorte que lorsque les services y sont offerts, il y ait preneur.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Monsieur McTeague.

M. McTeague (Ontario): En général, je suis tout à fait d'accord sur ce que vient de dire le sénateur Rivest. L'ensemble de vos recommandations me plaît beaucoup. Toutefois, je voudrais savoir ce que vous entendez par le pouvoir d'achat du gouvernement. Vous avez indiqué que vous vouliez que le gouvernement encourage les détaillants à afficher dans les deux langues. Qu'est-ce que le gouvernement fédéral, selon vous, pourrait faire, que ce soit en Ontario ou au Nouveau-Brunswick, pour favoriser ce mouvement? Pourriez-vous élaborer sur le sujet?

Mme Desaulniers: D'accord. Je pourrais presque faire un rapprochement avec la politique des marchés et la politique d'équité en emploi selon lesquelles, pour avoir des contrats de plus de tel montant d'argent, l'employeur doit s'engager à mettre en place un programme d'équité en emploi et à fournir un rapport sur sa mise en application.

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Donc, qu'est-ce qui empêche le gouvernement, qui a un pouvoir d'achat considérable, de privilégier les marchands qui respectent la dualité linguistique en ayant comme politique commerciale d'afficher et d'offrir des services en français?

M. McTeague: Si je vous comprends bien, vous êtes en train de dire que la meilleure chose que puisse faire le gouvernement fédéral serait de joindre au chèque que nous recevons aux deux semaines une note expliquant qu'il serait préférable que les fonctionnaires achètent leurs gilets à tel ou tel endroit.

Mme Desaulniers: Ou de stipuler dans les appels d'offres qu'on donnera la préférence, toutes choses étant égales par ailleurs, aux commerces qui ont comme politique l'affichage et les services en français.

M. McTeague: D'après moi, une partie du problème vient des petits détaillants qui n'ont pas un volume d'affaires suffisant pour avoir vraiment un impact. Bien que j'apprécie votre position, soit celle d'encourager les gens à afficher et de parler dans les deux langues, je ne pense pas qu'il soit toujours possible d'encourager sur le marché les démarches qui permettraient de s'assurer que les deux langues officielles soient respectées dans la région de la Capitale nationale.

Cela m'amène à une question que j'aimerais poser à M. Samson. D'après vous, les recommandations que vous avez faites ont-elles un certain lien avec ce qui s'est fait dans la province du Nouveau-Brunswick? Est-ce que ce gouvernement provincial a déjà pris des mesures pour s'assurer que l'affichage soit fait dans les deux langues?

M. Samson: À ma connaissance, et le sénateur Robichaud pourrait certainement ajouter à ce que je vais dire, il y a eu des politiques gouvernementales concernant les panneaux routiers ou des choses de ce genre qui ont amorcé le processus.

Comme Mme Desaulniers l'a mentionné, les communautés s'impliquent davantage et disent - je ne me souviens pas exactement du slogan - que «c'est une question de services en bout de ligne» ou «c'est une question en français». C'est un slogan utilisé dans le sud-est du Nouveau-Brunswick à l'heure actuelle pour encourager les gens, non seulement à afficher en français, mais aussi à assurer la qualité du service en français dans leurs entreprises.

À ma connaissance, il n'y a pas eu de véritable politique gouvernementale, et M. Robichaud pourrait certainement vous le confirmer, qui demande de faire les choses d'une certaine façon.

M. McTeague: [Inaudible - Éditeur] ...légiférer?

M. Samson: Non.

M. McTeague: D'accord. Merci, madame la présidente.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Monsieur Marchand, vous avez 10 minutes.

M. Marchand: Madame la présidente, je suis impressionné par les recommandations que fait la FCFA, recommandations qui sont tout à fait légitimes. Je crois que si elles étaient appliquées, le français aurait beaucoup plus de visibilité à Ottawa et nous aurions aussi beaucoup plus de services en français.

Ce qui me tracasse toujours par rapport à ces questions, surtout à Ottawa, c'est que le gouvernement fédéral ne manifeste aucune intention d'agir, du moins n'a pas manifesté l'intention d'agir jusqu'à ce jour, et ne manifeste même pas de bonne volonté.

Écoutez, ni M. Beaudry, la semaine dernière, ni Mme Copps n'ont jusqu'à aujourd'hui et depuis la manifestation de l'ACFO de l'été dernier, posé quelque acte que ce soit au nom du gouvernement fédéral pour seulement reconnaître que le manque de français ou de services à Ottawa était une source de problèmes. C'est comme si on ne voulait même pas reconnaître l'existence du problème. C'est ce qui me tracasse.

Je ne sais pas s'il y a une façon de motiver le gouvernement à agir. Vous avez souligné dans votre document, comme vous avez le droit de le faire, la reconnaissance du rôle du Conseil du Trésor dans l'application de la Partie VII. Mais vous savez que c'est formulé d'une telle façon qu'on ne sait pas ce que le Conseil du Trésor va faire, quand il va agir ou s'il va agir. On sait qu'il jouera un rôle mais on sait pas quel sera ce rôle ou s'il commencera à le jouer en 1997 ou en 2097.

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C'est la même chose pour toutes les recommandations que vous faites, peu importe le débat sur le caractère bilingue d'Ottawa. Pour ma part, je pense qu'il y a certainement une grave lacune de ce côté, mais le gouvernement n'est même pas porté à bouger le moindrement, ni même à reconnaître l'existence du problème. Il n'a donné aucun signe à ce jour de vouloir le faire alors que c'est lui qui est sans doute le plus coupable dans cette affaire, étant donné qu'Ottawa est sa capitale...nationale.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Marchand, est-ce que votre intervention contient une question?

M. Marchand: C'est cela, la question: comment inciter le gouvernement à agir, surtout quand on a parmi les députés un francophone de l'Ontario qui est davantage préoccupé par l'affichage bilingue à Hull que par l'affichage ou les services en français à Ottawa? Imaginez-vous le problème. Comment inciter le gouvernement à agir, d'après vous? Que faut-il faire pour réveiller ces pauvres gens?

M. Serré: Moi, je suis resté en Ontario pour défendre les droits des francophones. Je suis resté pour continuer la bataille.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Monsieur Samson, voulez-vous faire des commentaires sur le sujet? On ne veut pas mettre le témoin dans l'embarras.

M. Samson: J'ai de la difficulté à imaginer comment le Conseil du Trésor va mettre en oeuvre toute la partie VII. J'aimerais donner la chance au coureur. On dit que c'est un pas dans la bonne direction. Il ne faut pas oublier que vous, du comité, êtes ici pour discuter de la question de l'affichage et que votre rôle est de faire des recommandations. Je pense qu'on vous a fait des suggestions positives sur ce plan. Vous êtes le gouvernement...

Le sénateur Rivest: [Inaudible - Editeur] ...garder son indépendance.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Vous avez bien répondu à la question.

Monsieur le sénateur Beaudoin.

Le sénateur Beaudoin (Rigaud): Je voulais revenir sur la partie VII de la Loi sur les langues officielles parce qu'on n'a certainement pas vidé le débat la semaine dernière. Je suis porté à croire que le Parlement ne parle pas pour ne rien dire; du moins, il n'est pas supposé le faire. Ces dispositions sont là et, d'après moi, elles signifient quelque chose.

Nous avons eu une discussion avec Me Beaudry. Il disait avoir une opinion juridique sur la question des baux mais, si j'ai bien compris, il a tout de même admis que ce n'était qu'une opinion verbale.

Est-ce que vos mouvements ont déjà étudié ce point? Quelle serait la valeur des baux et quelle serait la valeur de la partie VII de la loi? Je suis porté à croire que la partie VII a, à tout le moins, une signification parce que c'est un acte législatif. Quand on dit que le gouvernement s'engage, d'après moi, il a une obligation. Cela veut dire que c'est impératif et non pas uniquement incitatif.

Une cour pourrait déclarer que si le mot «engage» est dans la loi, eh bien, il y a obligation. Est-ce que vous avez fait une étude là-dessus?

M. Samson: Officiellement, nous n'avons pas reçu d'avis juridique, mais s'il y a une volonté politique, comme on l'a dit dans notre mémoire, si on veut encourager le respect du bail... Si j'introduis un chat dans l'appartement que j'habite et que je le garde pendant cinq ou dix ans alors que mon bail me l'interdit, quand le propriétaire de l'immeuble le découvrira, croyez-vous qu'il va me permettre de continuer à le garder? Il me semble qu'il peut à tout le moins prendre des mesures incitatives.

Pour la partie VII, vous avez raison. Elle promeut l'égalité. Elle constitue le strict minimum. Donc, on devrait bâtir là-dessus pour que le gouvernement ou les institutions gouvernementales fédérales mettent en oeuvre ce qu'on appelle l'égalité des langues officielles un peu partout. Cela inclut l'affichage à l'intérieur de leurs bâtiments.

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Le sénateur Beaudoin: Personnellement, je serais plus enclin à faire reposer mes prétentions sur la partie VII, qui est une partie d'un texte législatif. C'est le Parlement qui parle. Mais pour ce qui est des baux, il est tout à fait différent d'étendre l'application d'une loi de façon contractuelle. Je ne sais pas jusqu'à quel point on peut le faire. Ça vaut quand même la peine d'essayer, c'est certain, car on ne perd absolument rien, mais je ne suis pas sûr que cela marche.

Cependant, en ce qui concerne la partie VII de la Loi sur les langues officielles, vous êtes en terrain solide, puisque c'est un acte du Parlement. J'ai l'impression que cela a une valeur plus qu'incitative.

M. Samson: Il y aurait peut-être lieu de demander au commissaire, qui s'occupe quand même d'un service juridique, de vous donner son opinion sur cette question et de vous dire s'il y a une obligation.

Le sénateur Beaudoin: Le commissaire aux langues officielles?

M. Samson: C'est cela, monsieur Beaudoin.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. Monsieur Serré.

M. Serré: Je n'ai pas de questions.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Sénateur.

Le sénateur Robichaud: Enfin! J'ai remarqué qu'un membre du comité avait eu deux tours pendant que j'attendais le mien.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Deux tours, vraiment?

Le sénateur Robichaud: Peut-être qu'on ne voit pas la moitié des gens qui sont de l'autre côté.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Vous avez été timide, sénateur.

Le sénateur Robichaud: Cinq minutes vont me suffire, parce qu'habituellement je ne parle pas trop longtemps.

On parle de l'institution du gouvernement qui est bilingue, qui doit être bilingue et qui l'est en fait. Aujourd'hui, nous sommes ici depuis 15h30 et le seul mot anglais que j'ai entendu prononcer par tout le monde a été le mot «marketing». Mais comme «marketing» a été francisé, on peut donc dire qu'on a été unilingues français depuis le début de la séance d'aujourd'hui.

La coprésidente (Mme Guarnieri): C'est vraiment merveilleux.

Le sénateur Robichaud: Je ne me plains pas, mais je voudrais juste vous faire remarquer qu'on a seulement parlé en français aujourd'hui, alors qu'on dit en général que le service en français est inexistant dans la Capitale nationale.

Je trouve assez difficile d'imposer au gouvernement fédéral, aux Travaux publics ou à la Commission de la Capitale nationale l'obligation de forcer les locataires à afficher dans les deux langues. Je suis assez d'accord avec Mme Desaulniers qui dit que toutes choses étant égales, le gouvernement fédéral devrait faire signer un bail à ceux qui afficheraient de façon bilingue.

Mais ce n'est pas facile d'imposer le bilinguisme à des locataires. Il s'agit de marketing, de commercialisation, de servir la clientèle. Si on ne sert pas la clientèle, eh bien, c'est le commerce qui en souffre.

Ensuite, j'hésite à exiger des institutions fédérales qu'elles ne signent pas de bail avec ceux qui n'affichent pas dans les deux langues. Malgré tout, je crois qu'on devrait annuler le bail d'un locataire qui insiste pour n'afficher que dans une langue, parce qu'il rend de mauvais services à l'autre langue, que ce soit l'anglais ou le français, et qu'il viole la Loi sur les langues officielles. Est-ce qu'on ne la respecte pas parce qu'on veut économiser de l'argent? C'est difficile de respecter la loi intégralement.

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Je pense, par exemple, au propriétaire d'un magasin Home Hardware. Ce propriétaire-là est très francophone, mais comment va-t-il traduire «Home Hardware», qui est le nom d'une compagnie qui a des magasins à travers tout le Canada? C'est le nom officiel de la compagnie. Comment peut-il le changer?

La coprésidente (Mme Guarnieri): Ce sera votre dernière question.

Mme Desaulniers: La façon de faire une affiche bilingue est de mettre: Quincaillerie«Home Hardware». Ce n'est pas si compliqué. Au mois d'août, quand on a lancé la campagne d'affichage, de grosses compagnies nous ont dit que ça leur coûterait les yeux de la tête. Si elles avaient été le moindrement débrouillardes, elles auraient téléphoné à leurs collègues de Gatineau et elles se seraient rencontrées sur le pont pour s'échanger des affiches. Tous ces gens seraient retournés chacun chez eux et il n'y aurait pas eu de déboursés pour l'affichage.

Je reviens à l'essence de votre commentaire. La CCN dit qu'elle n'a pas le moyen de mettre ses baux en vigueur. Est-ce que ce sont des documents fictifs qui sont échangés entre le locataire et le propriétaire? Il y a un élément que je ne saisis pas pleinement.

D'un autre côté, si le locataire choisit cet emplacement-là, il doit y avoir une valeur ajoutée. J'ai été fonctionnaire pendant 20 ans et je sais pertinemment qu'à plusieurs endroits, là où il y a un édifice gouvernemental, c'est fantastique pour le commerçant. Il a accès à tout un public, d'autant plus que les gens qui vont là n'ont pas à sortir quand le temps est misérable. Donc, c'est un avantage commercial, strictement du point de vue économique. Le marchand doit faire les débours nécessaires, l'investissement, la mise de fonds pour attirer et mériter cette clientèle francophone.

La coprésidente (Mme Guarnieri): J'aimerais vous remercier. Malheureusement, le temps est écoulé. J'ai trouvé votre présentation très productive. Sur une note personnelle, je ne sais pas si vous êtes au courant, mais je suis une fille adoptée par des Acadiens de l'Île-du-Prince-Édouard. J'aimerais vous remercier parce que vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion.

Monsieur Marchand.

M. Marchand: J'aurais voulu poser une dernière question. En fait, je ne sais pas si on s'y prêterait...

La coprésidente (Mme Guarnieri): Vous avez eu deux tours.

M. Marchand: Oui.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Vous êtes la seule personne à avoir eu deux tours de questions aujourd'hui en tant que représentant de l'Opposition officielle.

M. Marchand: Mais j'ai utilisé seulement six de mes dix minutes.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Non, je vous ai remis le temps au deuxième tour, monsieur Marchand. Est-ce une question longue ou courte?

M. Marchand: C'est très court, parce qu'il y a eu des choses de dites.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Alors on va vous laisser la poser. Avant que vous ne posiez votre question, j'aimerais demander aux députés de rester pendant quelques minutes parce qu'on a des choses à discuter au sujet de notre horaire de réunions pour la semaine prochaine. Je vous demande de ne pas quitter.

Une voix: Les sénateurs aussi?

La coprésidente (Mme Guarnieri): Oui, parce qu'il nous faut tous les membres du comité.

Monsieur Marchand, pouvez-vous poser votre courte question sans discours?

M. Marchand: Oui, je pose une question sans discours. Il y a eu des choses de dites par le sénateur Beaudoin, entre autres concernant l'application de la partie VII. Évidemment, tous les pouvoirs sont là, mais quand le gouvernement n'arrive pas à faire appliquer un bai, dans lequel il est clairement inscrit, de façon coercitive, qu'on doit offrir des services et de l'affichage dans les deux langues, quand le gouvernement fédéral lui-même ne respecte pas ses propres lois, comment peut-on inciter le gouvernement à agir?

La coprésidente (Mme Guarnieri): Je pense que M. Marchand ne peut pas résister à la tentation de faire des discours. Je ne sais pas si vous voulez répondre à la question.

M. Samson: Écoutez, il y a longtemps que je dis que le gouvernement devrait agir rapidement. C'est à vous de faire les recommandations nécessaires pour qu'il puisse agir. Vous l'avez fait au niveau de la partie VII, lorsqu'il a été question des plans d'actions.

Vous avez suggéré au Parlement des méthodes et des façons d'y arriver. C'est, à mon avis, ce qu'il est important de faire.

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Dans notre perspective, on va appuyer le comité parce que les choses que vous avez faites dans le passé ont fait en sorte qu'il y a eu de l'action. C'est important et vous devriez être félicités pour ça.

La coprésidente (Mme Guarnieri): Merci. On va terminer sur cette note.

[La séance se poursuit à huis clos]

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