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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 018 
l
2e SESSION 
l
43e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 18 février 2021

[Enregistrement électronique]

  (1540)  

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Bienvenue à la 18e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes. Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le 24 octobre 2020, nous reprenons l'étude de la capacité de transformation.
    La réunion se déroulera en formule hybride, conformément à l'ordre adopté par la Chambre le 25 janvier 2021. Par conséquent, des membres sont présents dans la salle, et d'autres participent à la réunion à distance au moyen de l'application Zoom. Les délibérations seront diffusées sur le site Web de la Chambre des communes. À titre d'information, la diffusion Web montre toujours la personne qui a la parole plutôt que l'ensemble du Comité.
    De plus, je rappelle à tous les participants qu'il est interdit de faire des captures d'écran ou de prendre des photos de votre écran au cours de la réunion.

[Français]

    Pour garantir le bon déroulement de la réunion, j'aimerais vous faire part de certaines règles.
    Les députés et les témoins peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Au bas de l'écran, vous pouvez choisir entre le parquet, l'anglais et le français, sans avoir à sélectionner le canal linguistique. Vous pouvez aussi utiliser la fonction « lever la main ». Si vous souhaitez prendre la parole ou alerter le président et que cette option ne fonctionne pas, vous pouvez toujours lever la main, et la greffière établira la liste des députés qui souhaitent prendre la parole.
    Avant de prendre la parole, attendez que je vous nomme. Cliquez sur le microphone pour désactiver le mode sourdine.
    Je vous rappelle que toutes les observations des députés et des témoins doivent être adressées à la présidence.
    Lorsque vous n'avez pas la parole, mettez votre microphone en mode sourdine.

[Traduction]

    Vous aurez peut-être remarqué que le calendrier de comparution a été modifié à la dernière minute et que nous accueillons aujourd'hui un groupe de trois témoins. La réunion se terminera à 17 heures ou un peu plus tard étant donné que nous avons eu un petit problème.
    Permettez-moi maintenant de présenter nos témoins.
    Je connais très bien Ron Lemaire, qui représente l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes. Il a témoigné à de nombreuses reprises devant le Comité. Bienvenue, monsieur Lemaire.
    Nous accueillons également Kelleen Tait, associée, et Glenn Fraser, dirigeant national, Pratiques de transformation des aliments et des boissons, du cabinet MNP S.E.N.C.R.L., s.r.l. Je vous souhaite la bienvenue à tous les deux.
    Je pense que le troisième témoin n'est pas encore des nôtres. Il s'agit de Derek Johnstone, adjoint spécial au président national des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce Canada. Quand il se joindra à nous, nous lui donnerons du temps pour présenter sa déclaration liminaire.
    Monsieur Lemaire, nous allons écouter votre déclaration liminaire. Vous avez sept minutes et demie.
    Au nom de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes, qui représente plus de 800 entreprises de culture, d'emballage, de transport et de ventes de fruits et de légumes au Canada et qui soutient quelque 249 000 emplois à l'échelle du pays, je voudrais remercier le président et les membres du Comité de nous donner la possibilité de donner notre point de vue sur l'augmentation de la capacité de transformation du Canada.
    Je vais vous parler aujourd'hui d'une chaîne d'approvisionnement complexe, dont tous les intervenants travaillent d'arrache-pied pour approvisionner le Canada entier en fruits et légumes frais, mais aussi pour mettre en valeur les possibilités et trouver des solutions afin d'accroître notre capacité de transformation et notre compétitivité.
    Nos recommandations appuient l'objectif du gouvernement d'atteindre 75 milliards de dollars d'exportations d'ici 2025, comme le recommande le rapport Barton. Nous appuyons également son objectif d'accroître la capacité locale afin d'assurer la sécurité alimentaire et de renforcer la souveraineté alimentaire du Canada, en plus d'approvisionner tous les Canadiens en aliments sains.
    Le secteur canadien des fruits et légumes frais engendre des bénéfices considérables pour notre économie, nos communautés et le gouvernement. Pour 2018 seulement, la valeur totale du secteur a atteint 17,7 milliards de dollars, et son développement, y compris dans le domaine de la transformation, est une source directe de nouveaux emplois pour de nombreux travailleurs canadiens. Parallèlement, le gouvernement perçoit annuellement 2,6 milliards de dollars en impôts sur la production.
    Le secteur des fruits et légumes frais pourrait potentiellement acheminer beaucoup plus de produits vers la transformation et la production à valeur ajoutée comme les fruits et les légumes congelés, les aliments pour bébés, les jus, la laitue effilochée, les salades prêtes à manger minimalement transformées, les mini-carottes, les purées et beaucoup d'autres. En 2020, selon une enquête menée par Caddle, 24 % des Canadiens ont déclaré qu'ils pensaient acheter plus de produits congelés l'année suivante, c'est-à-dire en 2021.
    Malheureusement, les conditions du marché font en sorte que beaucoup plus de produits canadiens de seconde catégorie destinés à la transformation ou à la fabrication de jus sont vendus sur le marché libre des États-Unis qu'au Canada. C'est le cas parce que nous imposons nous-mêmes des restrictions à nos secteurs de la transformation. Il faut moderniser les processus d'acheminement des produits frais de seconde catégorie vers le secteur de la transformation pour promouvoir les investissements à l'échelon provincial, particulièrement en Ontario. Le modèle ontarien des produits réglementés est un bon exemple d'instrument qui a eu un effet dissuasif sur l'innovation et l'investissement.
    À notre connaissance, il n'y a pas de nouveau transformateur dans le marché canadien en raison des problèmes de main-d'œuvre, des régimes d'imposition des sociétés et de la réglementation dans la province la plus importante. Les conditions du marché réglementé de l'Ontario restreignent la circulation des produits frais et leur accès au marché libre et aux circuits de transformation. Les producteurs ontariens envoient maintenant leurs carottes fraîches en Caroline du Nord, où elles sont transformées en purée, ou vers les États de New York, du New Jersey et de la Pennsylvanie, où elles sont coupées en dés pour la confection de soupes. Ce n'est qu'un exemple.
    Or, quand une entreprise canadienne vend ses produits aux États-Unis, elle récupère à peine 35 % des revenus bruts en raison des coûts de logistique et de transport. De prime abord, on peut penser que ces exportations contribuent à l'atteinte de l'objectif du rapport Barton mais, en réalité, le rendement est loin d'être optimal pour nos producteurs.
    Pour favoriser l'augmentation de notre capacité nationale de transformation, le gouvernement fédéral devra concentrer son attention et ses efforts sur trois éléments: le modèle de travail dans les usines; le coût élevé des produits et des intrants, et la concurrence des produits congelés importés d'outre-mer, beaucoup moins chers à produire à cause des faibles coûts des intrants et de la main-d'œuvre.
    Le Comité a reçu divers témoignages sur la pénurie de main-d'œuvre. Je me permets de vous rappeler que, selon les estimations, il manque 30 000 travailleurs dans le secteur de la transformation, et que ce nombre devrait doubler d'ici 2025. La pénurie de main-d'œuvre spécialisée place déjà le secteur dans une position extrêmement difficile. Notre association préconise d'axer notre stratégie en matière de main-d'œuvre sur la pénurie de travailleurs dans les métiers spécialisés, sur l'accès à des travailleurs étrangers qualifiés, ainsi que sur le soutien à l'automation et à l'innovation.
    Nous savons tous que le secteur des produits frais fait face à une concurrence féroce. Parce que la réussite ou l'échec dépendent uniquement des prix et des volumes dans notre secteur, le gouvernement canadien doit trouver des moyens de mettre en valeur les possibilités directes et à court terme de la chaîne d'approvisionnement afin de soutenir et de créer les débouchés offerts sur les marchés nationaux et internationaux.
    En même temps, il est crucial de revoir les modèles de réglementation fédéraux et provinciaux pour saisir toutes les possibilités et comprendre les lacunes qui sont des conséquences imprévues des modèles de produits et des volumes de production réglementés. La pandémie de COVID-19 a imposé des difficultés nouvelles et importantes aux entreprises de la chaîne d'approvisionnement, qui ont dû absorber des coûts supplémentaires pour se procurer de l'équipement de protection individuelle et d'autre matériel comme des outils de dépistage, mettre en place des protocoles de distanciation physique afin d'assurer la sécurité des travailleurs, etc.

  (1545)  

    Forcément, ces nouveaux coûts se répercutent sur le prix des produits frais vendus aux Canadiens et ont un effet négatif sur la sécurité alimentaire.
    Nous sommes très reconnaissants de l'aide gouvernementale versée au programme de protection au travail pour le secteur agroalimentaire et au Fonds d'urgence pour la transformation, mais elle est insuffisante pour s'attaquer aux nombreux défis économiques auxquels notre secteur fait face, d'autant plus que les protocoles liés à la COVID-19 ne semblent pas près de disparaître.
    Le gouvernement canadien devrait adopter des programmes d'encouragements fiscaux pour inciter l'industrie à investir au Canada. Par exemple, il pourrait accorder des crédits d'impôt pour l'équipement de protection individuelle aux entreprises qui assurent la sécurité de leurs travailleurs sur les chaînes d'emballage et de transformation, ou des crédits d'impôt à l'investissement pour stimuler la croissance du produit intérieur brut.
    Comme je l'ai dit d'entrée de jeu, il existe un potentiel réel d'augmenter le volume des produits destinés à la transformation et à la production à valeur ajoutée dans le secteur canadien des fruits et des légumes frais. Le gouvernement canadien pourrait favoriser la croissance de notre secteur en collaborant avec ses acteurs pour trouver des solutions aux défis que je viens de vous décrire.
    L'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes est très reconnaissante de la possibilité qui lui est offerte de faire connaître son point de vue. Je répondrai volontiers aux questions des membres du Comité.
    Merci, monsieur Lemaire.
    Madame Tait et monsieur Fraser, nous vous écoutons.
    C'est un honneur de pouvoir discuter avec vous de la reconstruction en mieux du secteur agroalimentaire afin de lui insuffler de la vigueur et de le rendre plus compétitif. Jamais il n'a été aussi crucial de renforcer notre capacité de fabrication d'aliments et de boissons pour augmenter la compétitivité nationale et mondiale de ce secteur. Le Canada ne peut pas se permettre de tirer de l'arrière dans cette course mondiale.
    Je m'appelle Glenn Fraser et je suis le dirigeant national, Pratiques de transformation des aliments et des boissons chez MNP. Je suis accompagné par ma collègue, Kelleen Tait, notre dirigeante nationale pour les secteurs du bétail et de la volaille.
    MNP est un chef de file dans les domaines des services de conseil en matière de comptabilité, de consultation et de fiscalité. Notre siège social est au Canada et, pour cette raison, MNP occupe une place de choix pour défendre les intérêts de plus de 20 000 clients du secteur agroalimentaire, dont 1 000 entreprises de fabrication d'aliments et de boissons de partout au pays. Une chose est sûre, le contexte commercial aura beaucoup changé après la pandémie de COVID-19. On prévoit que les activités se feront de plus en plus en ligne à mesure que les fabricants d'aliments et de boissons se tourneront vers des solutions technologiques d'automation, de mécanisation, de numérisation, de commerce en ligne ou d'intelligence artificielle pour améliorer leur efficience et leur efficacité.
    MNP s'attend à ce que les Canadiens assistent à une croissance marquée de l'applicabilité et des investissements dans ces domaines de la chaîne d'approvisionnement de ce secteur. En fait, c'est déjà commencé. Pour améliorer la compétitivité nationale et mondiale, le gouvernement fédéral devrait contribuer à la recherche de solutions aux problèmes et aux obstacles qui freinent la croissance et la rentabilité. Nous avons trois recommandations à lui faire pour reconstruire en mieux.
    Notre première recommandation au gouvernement fédéral est de jouer un rôle de chef de file en adoptant des politiques et des programmes qui assureront une disponibilité continuelle de main-d'œuvre spécialisée. L'accès à la main-d'œuvre est essentiel dans un secteur qui constitue la pierre angulaire de la chaîne d'approvisionnement alimentaire du Canada. Il manque actuellement 10 % de travailleurs dans le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons, et cette pénurie devrait s'aggraver dans les cinq prochaines années. Le gouvernement fédéral doit explorer différentes options de politiques axées sur l'investissement dans l'automation, la formation et la sensibilisation aux carrières.
    L'automation permet aux entreprises d'améliorer leur efficience et de réduire leurs coûts, et elle peut également fournir une partie de la solution aux pénuries de main-d'œuvre, souvent exacerbées en période de perturbation. L'automation créera par ailleurs une demande de travailleurs spécialisés et des emplois mieux rémunérés plus attrayants pour les jeunes, qui seront fiers de contribuer à leurs communautés.
    Pour tirer le meilleur parti des possibilités, le gouvernement fédéral devra mettre en place des mesures d'encouragement et des programmes axés sur la formation et le perfectionnement des compétences attendues d'une main-d'œuvre moderne. Des politiques ciblées seront aussi nécessaires pour informer les jeunes sur les perspectives de carrières et d'emplois spécialisés et enrichissants offertes par le secteur.
    Notre deuxième recommandation au gouvernement concerne le soutien à l'innovation dans le secteur de la fabrication d'aliments et de boissons. Les investissements sont en baisse dans ce secteur à cause de la diminution des marges bénéficiaires, des difficultés d'accès aux capitaux d'investissement et des obstacles à l'accès aux crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental.
    Le gouvernement devrait travailler en partenariat avec les gouvernements provinciaux et l'industrie pour élargir les programmes de financement en place et élaborer des politiques de promotion de l'innovation dans le secteur de la fabrication des aliments et des boissons. L'innovation ne se limite pas aux technologies de pointe ou nouvelles. Elle peut aussi passer par des stratégies et des technologies déjà utilisées au Canada et ailleurs dans le monde et qui ont fait leurs preuves.
    Les programmes comme Agri-innover d'Agriculture Canada et le Fonds stratégique pour l'innovation d'Innovation, Sciences et Développement économique Canada pourraient être élargis et offrir des mesures d'encouragement à l'investissement aux fabricants d'aliments et de boissons. Nous tenons à souligner l'importance de l'innovation, de l'automation, de la mécanisation, de la numérisation, du commerce électronique et de l'intelligence artificielle dans ce secteur. Les programmes de financement de ce type doivent être adaptés aux réalités du secteur de la fabrication d'aliments et de boissons, et les mécanismes d'accès au financement devront être allégés et simplifiés.
    Notre troisième recommandation s'adresse aux ministres de l'Agriculture du fédéral, des provinces et des territoires, à qui nous demandons d'adopter un code de conduite des épiciers afin de favoriser des relations justes, transparentes et efficientes entre les détaillants et les fabricants d'aliments et de boissons. Au Canada, cinq grandes épiceries au détail contrôlent 80 % du marché. Cette domination a créé un déséquilibre dans les relations commerciales entre les détaillants et les fabricants, qui doivent composer avec des coûts de transaction, des frais et des pénalités arbitraires, qui parfois s'appliquent rétroactivement.
    La pandémie de COVID-19 a aggravé la situation en ajoutant de nouveaux défis et de nouveaux coûts à tous les niveaux de la chaîne d'approvisionnement.

  (1550)  

    Les détaillants ont refilé une partie des coûts financiers associés à la COVID-19 aux fabricants d'aliments et de boissons, dont la plupart, sinon tous, étaient déjà aux prises avec une escalade des coûts.
    Un code de conduite pour les épiciers favoriserait des discussions constructives et transparentes entre les détaillants et les parties prenantes du secteur de la fabrication d'aliments et de boissons, au bénéfice de tous les Canadiens.
    En conclusion, nous souhaitons remercier le Comité pour l'important travail qu'il accomplit pour accroître la compétitivité du secteur de la fabrication d'aliments et de boissons. L'automation, la spécialisation, la formation et la sensibilisation de la main-d’œuvre, l'amélioration des programmes d'innovation et l'instauration d'un code de conduite pour les épiciers sont autant de mesures essentielles pour favoriser la croissance et la prospérité de ce secteur névralgique à l'échelle nationale, l'atteinte d'objectifs d'exportation réalistes et la compétitivité à l'échelle mondiale.
    La mise en œuvre de nos recommandations sera essentielle pour assurer notre sécurité alimentaire et l'approvisionnement en aliments de qualité et abordables à l'ensemble des Canadiens.
    Merci.

  (1555)  

    Merci, monsieur Fraser.
    Je vois que M. Johnstone, adjoint spécial au président national des Travailleurs et travailleuses unis de l'alimentation et du commerce Canada, est avec nous.
    Monsieur Johnstone, vous avez sept minutes et demie.
    Au nom des Travailleurs et des travailleuses unis de l'alimentation et du commerce, ou TUAC, je remercie le Comité permanent de nous donner la possibilité de faire connaître nos points de vue. Je tiens aussi à souligner son travail sur un sujet aussi important.
    Avant de vous présenter certaines de nos réflexions, j'aimerais glisser quelques mots au sujet de notre organisation.
    Nous sommes le porte-voix des travailleurs de l'alimentation au Canada. Notre organisation syndicale est l'une des plus importantes au pays, et c'est à la fois une grande fierté et un immense privilège de représenter plus d'un quart de millions de personnes qui travaillent d'arrache-pied un peu partout au Canada. Environ 80 % de nos membres travaillent dans des secteurs liés à l'alimentation. Nous nous plaisons à dire qu'on trouve des membres des TUAC dans toute la chaîne alimentaire, du champ à l'assiette.
    Pendant la pandémie, nos membres ont joué un rôle essentiel en première ligne pour approvisionner les Canadiens en produits alimentaires et autres produits et services essentiels dans leur vie quotidienne.
    Je peux vous assurer que les 12 derniers mois n'ont pas été de tout repos pour les travailleurs de l'alimentation du Canada. Beaucoup de nos membres ont eu peur d'aller travailler, et on peut les comprendre. Ils ont eu peur d'être malades, ou de transmettre le virus à leur famille. Ils ont été des milliers à recevoir un diagnostic positif, beaucoup ont dû être hospitalisés, et certains sont décédés.
    À titre d'organisation syndicale représentant des travailleurs de l'alimentation, nous avons demandé diverses mesures et interventions liées à la pandémie, dont plusieurs ont été mises en œuvre à des degrés divers dans le secteur, et par les principaux employeurs surtout. Toutefois, l'uniformité et la mise en application restent problématiques.
    L'Agence canadienne d'inspection des aliments surveille la production. Toutefois, elle nous a indiqué très clairement que son travail est d'assurer la salubrité des aliments dans les usines, pas des personnes qui y travaillent. Cette responsabilité, comme vous le savez, appartient aux provinces, avec lesquelles nous avons eu des expériences mitigées, c'est le moins qu'on puisse dire, pendant la pandémie.
    Depuis l'éclosion de la pandémie, et bien avant en fait, la cadence de travail a toujours été l'éléphant dans la pièce. À cause de la vitesse imposée sur les chaînes de production, il est à peu près impossible de respecter les règles de distanciation physique. Depuis des années, elle a été la principale cause de lésions attribuables au travail répétitif et de troubles de santé mentale pour un grand nombre de membres des TUAC.
    La vérité, en un mot, est que la protection de la chaîne d'approvisionnement alimentaire au Canada passe avant tout par la protection des travailleurs de l'alimentation. Or, à cause de divers problèmes structurels importants, il est impossible de leur assurer une protection complète.
    L'analyse des difficultés de recrutement de main-d’œuvre doit tenir compte de ces facteurs, qui font partie du problème.
    Cela dit, le potentiel du secteur de la transformation des aliments reste énorme. Ce secteur pourrait et devrait recruter des travailleurs et créer plus d'emplois pour les Canadiens.
    Notre organisation est très préoccupée par la croissance exponentielle du Programme des travailleurs étrangers temporaires ces dernières années. Nous recommandons vivement de diversifier les solutions adoptées pour redresser la situation de notre secteur, notamment en privilégiant l'élargissement des programmes des candidats du fédéral et des provinces, et en veillant à ce que les Canadiens soient bien informés des occasions et des parcours offerts dans le secteur de la transformation des aliments.
    Le gouvernement doit encourager les investissements dans le développement du marché du travail intérieur. Des données indiquent qu'il existe une relation inverse entre le recours à des travailleurs étrangers temporaires et les investissements publics dans des mesures actives d'emploi, ce qui n'est pas franchement la meilleure avenue pour construire l'avenir.
    Pour construire l'avenir, nous exhortons le Comité à recommander la mise à contribution des parties prenantes dans l'élaboration de mesures et de stratégies de recrutement et de perfectionnement. Les TUAC, notamment, pourraient être des alliés de choix pour la promotion des métiers des services et de l'industrie de l'alimentation. Si les employeurs étaient obligés de collaborer avec nous, par l'entremise d'un processus comme l'étude d'impact sur le marché du travail ou un autre, pour recenser les sources de main-d’œuvre au pays, les résultats seraient probablement meilleurs et plus utiles pour l'ensemble du secteur.
    Une chose est certaine, en tant qu'organisation syndicale représentant des travailleurs de l'alimentation, il est difficile pour nous de concevoir un système alimentaire canadien totalement dépendant d'une main-d’œuvre temporaire, précaire et vulnérable, comme c'est dorénavant le cas dans le secteur agricole primaire. Si rien n'est fait, la stabilité et la sécurité de l'un des secteurs les plus cruciaux du Canada seront compromises, au détriment de notre souveraineté alimentaire.
    Une chose est certaine, en tant qu'organisation syndicale représentant des travailleurs de l'alimentation, il est difficile pour nous de concevoir un système alimentaire canadien totalement dépendant d'une main-d’œuvre temporaire, précaire et vulnérable, comme c'est dorénavant le cas dans le secteur agricole primaire. Si rien n'est fait, la stabilité et la sécurité de l'un des secteurs les plus cruciaux du Canada seront compromises, au détriment de notre souveraineté alimentaire.
    Je m'arrête ici. Je remercie le Comité de son invitation et de son travail sur un sujet de la plus grande importance.
    Je suis impatient de répondre à vos questions. Merci.

  (1605)  

    Merci beaucoup, monsieur Johnstone.
    Nous allons entamer la période des questions.
    Madame Rood, les six premières minutes vous appartiennent.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'avoir accepté notre invitation. Dans vos exposés, vous avez abordé des thèmes communs, l'un d'eux étant la pénurie de main-d’œuvre, dont vous avez parlé tous les trois.
    Monsieur Johnstone, vous avez dit notamment qu'il faut faire plus de recrutement dans le secteur de la transformation des aliments. Je suis curieuse de savoir ce que vous suggérez pour favoriser le recrutement. Je viens moi-même du milieu agricole, et je sais que la main-d’œuvre est le principal enjeu pour les producteurs de denrées alimentaires. J'aimerais vous entendre un peu plus sur ce que vous proposez pour faciliter le recrutement de travailleurs dans ce domaine. Vous affirmez que nous n'avons pas besoin de travailleurs étrangers temporaires ou de travailleurs agricoles saisonniers mais, sans eux, l'approvisionnement alimentaire serait tout simplement impossible au Canada. J'aimerais vous entendre à ce sujet.
    C'est la grande question, bien évidemment. Je pense que nous pourrions tirer davantage profit des réseaux des parties prenantes. Comme organisation syndicale des travailleurs de l'alimentation, nous représentons un quart de million de personnes au Canada, qui viennent de plus de 600 communautés. Pourtant, nous n'avons jamais été sollicités sérieusement pour participer à la promotion des perspectives dans le secteur. Nous représentons des dizaines de milliers de travailleurs du secteur de la viande, et nous savons qu'il offre de très bons emplois, dont beaucoup sont des emplois syndiqués à temps plein qui viennent avec un régime de retraite.
    Je vous dirais que beaucoup de Canadiens, malgré les efforts déployés par les employeurs et certaines démarches du gouvernement, ne sont pas au courant de ces possibilités. Je peux même vous dire que certains de nos membres ne sont pas au courant. Les parties prenantes auraient beaucoup à apporter, mais elles sont sous-utilisées. Nous voulons contribuer à cet effort, et nous tenons à ce que ce soit entendu. C'était une des raisons pour lesquelles nous voulions venir ici aujourd'hui.
    Comme vous le savez peut-être, le Programme des conseils sectoriels du Canada offrait un forum aux parties prenantes, qui pouvaient participer à un processus tripartite pour trouver des solutions à ce genre de défis. Ce programme, malheureusement, a été aboli il y a une dizaine d'années, si bien que nous n'avons plus de forum au Canada pour avoir ce genre de discussions. À mon avis, c'est une perte pour le secteur.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Lemaire, j'ai deux ou trois questions pour vous. Comme je viens du milieu de la production agricole... Nous avons entendu parler des faibles marges bénéficiaires dégagées par les agriculteurs pour leurs produits, et particulièrement dans le secteur des fruits et des légumes frais. Pouvez-vous nous donner quelques précisions sur le code de conduite pour les épiciers et nous dire pourquoi il serait important pour le secteur canadien de la transformation. Si nous perdons des agriculteurs, si nous perdons notre capacité à cause des pénuries de main-d’œuvre ou des faillites qui pourraient se multiplier en raison de la pandémie de COVID-19, pourquoi sera-t-il important d'avoir un code de conduite et comment aidera-t-il les producteurs à continuer leurs efforts pour assurer notre sécurité alimentaire?
    Merci pour cette question. Je crois qu'un de mes collègues, M. Fraser, a déjà parlé des principaux éléments du code de conduite et de l'environnement concurrentiel dans le secteur du détail à l'échelle nationale. Dans un marché où les concurrents sont si peu nombreux et qui est régi par les prix, les producteurs subissent de la pression et deviennent des preneurs de prix. C'est une partie du défi, surtout dans un contexte de concurrence mondiale et nationale. Une combinaison de facteurs explique pourquoi la question que vous posez est si complexe. Le coût des intrants, le coût de la main-d’œuvre, même au niveau d'entrée actuellement, pour quelqu'un qui veut devenir agriculteur... Le coût du terrain, du transfert de propriété d'une génération à l'autre, tout cela place le producteur devant une pente très abrupte. S'il met tous ces éléments ensemble et étudie le marché global, il constatera que la marge bénéficiaire sur le produit qu'il livrera représentera une très petite partie du prix parce qu'il est le preneur de prix. C'est un obstacle majeur pour les producteurs canadiens.
    Merci beaucoup.
    Vous avez évoqué les légumes de seconde catégorie et la transformation. Il y a quelques transformateurs de légumes dans ma circonscription, et beaucoup de grandes cultures. J'aimerais vous entendre un peu plus sur cette question, parce que selon les échos que j'en ai, les transformateurs considèrent toujours la main-d’œuvre comme leur principal défi. Le problème ne semble pas tant l'approvisionnement en produits, mais la pénurie de main-d’œuvre. Si de plus en plus d'exploitations disparaissent, les transformateurs auront probablement du mal à trouver des produits. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Volontiers.
    Cette information nous vient directement de membres qui ne font pas partie de l'Association ontarienne des producteurs de fruits et de légumes. Les prix négociés annuellement et le modèle axé sur le volume qui sont appliqués aux produits frais en Ontario... Sur les 350 producteurs de légumes de transformation en Ontario qui produisent... Vous avez raison, ils produisent selon des exigences de volume et vendent leurs produits au prix qu'on leur impose. La main-d’œuvre leur pose un défi, bien sûr, mais un producteur de produits frais n'a pas accès à ce marché. Si j'ai des produits en excès, si j'ai eu une année exceptionnelle et que je veux vendre mes produits sur ce marché, c'est impossible. Le principe du marché fermé pose des problèmes au secteur des produits frais. Je ne veux pas prendre position pour les producteurs de légumes de transformation, mais ce modèle freine l'expansion, c'est certain.
    Merci, madame Rood et monsieur Lemaire.

[Français]

    Madame Bessette, vous avez la parole pour six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Mes questions vont s'adresser à M. Lemaire, de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes.
    Monsieur Lemaire, vous avez mentionné que les marges de profit liées aux produits exportés vers les États-Unis pour la transformation n'étaient pas aussi grandes qu'elles pourraient l'être.
    Mis à part la mise en oeuvre d'un code de conduite, quelles mesures le gouvernement fédéral peut-il prendre à long terme pour corriger cette situation?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    La solution que nous cherchons à cet égard revient, encore une fois, à une série de stratégies que j'ai déjà mentionnées. L'une de ces stratégies consiste à s'assurer d'avoir accès à un bassin de travailleurs suffisant pour nous permettre de produire et de transformer efficacement nos produits chez nous. Le problème inhérent à la vente aux États-Unis est lié aux coûts supplémentaires entraînés par la logistique et le transport. Il faut aussi tenir compte des conditions du marché qui déterminent le prix des produits de base au moment où ils sont vendus, et ce prix fluctue.
    Nous avons déjà entendu quelques observations au sujet de l'Ontario et du Canada. Lorsque l'on cherche de nouvelles possibilités de croissance en Ontario, et que l'on commence à regarder des éléments majeurs comme l'automatisation et l'innovation, on constate que ce sont peut-être les meilleures opportunités qui s'offrent à nous. Si nous sommes dans l'incapacité de trouver des travailleurs, et si nous devons nous engager sur la voie d'une automatisation accrue ou de l'innovation entourant la chaîne de production, comme nous l'a expliqué M. Johnstone, il faut miser sur la vitesse de la chaîne et son mode de fonctionnement ainsi que sur d'autres outils à introduire dans cette chaîne. Nous faisons face à une pénurie de main-d’œuvre pour amener le produit à destination. C'est vrai même à une vitesse accélérée et avec un nombre réduit de travailleurs, nous éprouvons malheureusement de la difficulté à répondre à la demande pour le produit sur le marché à moindre coût.
    Nous évoluons dans un environnement concurrentiel qui nous force à trouver le modèle de production, de transformation et d'expédition le plus efficient pour amener le produit à destination. Malheureusement, au niveau mondial, d'autres pays ont déjà mis en place des stratégies dont une main-d’œuvre à faible coût dans certains cas. Dans d'autres cas, on a recours à des mesures d'encouragement et de soutien du secteur de la transformation pour aider les entreprises à prospérer grâce au modèle fiscal. On mise aussi sur la structure d'entreprise pour permettre aux sociétés de bénéficier d'incitatifs, des incitatifs qui sont offerts parfois même seulement pour leur présence dans le pays.
    Merci.

[Français]

    La semaine dernière, nous avons entendu le témoignage d'un représentant d'Olymel, entreprise qui a dû fermer l'une de ses usines de transformation à cause d'une éclosion de la COVID-19. Cette situation nous rappelle à quel point les employés de l'industrie alimentaire, en tant que travailleurs essentiels, peuvent être particulièrement vulnérables à l'égard de ce virus.
    Pouvez-vous nous parler un peu plus des mesures mises en place par vos membres pour assurer la protection de leurs employés?
    Ces mesures ont-elles causé des ralentissements dans la chaîne d'approvisionnement?

  (1610)  

[Traduction]

    Absolument. Je ne peux parler que pour le secteur des fruits et des légumes frais ainsi que pour celui de la transformation dans ce domaine, et cela comprend notamment l'industrie des cultures de serre, ainsi que celle des produits minimalement transformés. Lorsqu'il est question des investissements à réaliser dans ce domaine, il faut penser aux écrans de protection entre les employés qui travaillent sur les chaînes de transformation. Il faut penser aussi à l'équipement de protection individuelle complet qu'ils doivent porter à l'intérieur de ces chaînes. Sans oublier les efforts visant à créer une plus grande distanciation.
    Si vous n'avez pas la possibilité d'installer des écrans de protection entre les travailleurs, il faut envisager d'instaurer des quarts de travail. Il faut gérer les chaînes de manière à ce que les travailleurs n'arrivent pas tous en même temps dans une cohorte. Il faut les répartir entre plusieurs équipes dans l'éventualité d'une éclosion malheureuse, afin de pouvoir gérer cette main-d’oeuvre et d'éviter une réduction dans le soutien. Tout un éventail de stratégies se sont avérées extrêmement efficaces. Nous avons constamment opté pour les tests de dépistage rapides, et nous nous sommes informés sur la manière d'obtenir les outils nécessaires pour procéder à des tests de dépistage aléatoires. Ou encore, pour procéder à des tests de dépistage sur des personnes susceptibles de présenter des symptômes afin d'assurer la sécurité générale de l'effectif. Toutefois, toutes ces mesures ne se sont pas révélées efficaces jusqu'ici.
    Merci.

[Français]

    Tantôt, vous avez parlé un peu d'automatisation.
    Selon vous, quels sont les principaux obstacles qui limitent l'innovation et l'adoption de nouvelles technologies?
    Par ailleurs, dans quelle mesure l'investissement privé peut-il contribuer à stimuler l'innovation?

[Traduction]

    Les investissements privés sont un élément clé pour stimuler l'innovation. Il faut aussi repenser nos méthodes de travail et adopter certains outils nouveaux et innovateurs susceptibles de modifier la chaîne de production réelle. Il faut notamment envisager une autre manière d'exploiter notre chaîne, encore une fois, du point de vue de l'industrie des fruits et des légumes.
    Aussi, il faut penser à inclure la totalité de la chaîne d'approvisionnement dans la solution, et ne pas la considérer relativement à un seul segment du marché. Il faut faire participer les producteurs, et tous les intervenants jusqu'à la vente au détail, et jusqu'aux acheteurs finalement. Et enfin, il est fondamental de tenir cette discussion ensemble afin de repérer où se situent les opportunités dans le processus d'automatisation.

[Français]

    Je vous remercie, madame Bessette.

[Traduction]

    Merci, monsieur Lemaire.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. Perron.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Je remercie les témoins d'être avec nous aujourd'hui.
    J'ai plusieurs questions à poser. Je vais d'abord m'adresser à M. Lemaire.
    Monsieur Lemaire, la plupart des intervenants qui viennent ici nous parlent des problèmes liés à la main-d’œuvre.
    Dans votre secteur, y a-t-il un problème en matière de bureaucratie en ce qui concerne les travailleurs étrangers?
    Je vous remercie de votre question.

[Traduction]

    C'est une bonne question, et je m'excuse auprès des interprètes, parce que je suis sur le canal anglais.
    Je vais répondre très brièvement. J'aimerais parler de la situation dans laquelle nous nous retrouvons aujourd'hui, parce que cette situation nous place dans un environnement très particulier. Nous devons faire face à plusieurs niveaux d'autorité et plusieurs niveaux de responsabilité pour assurer la sécurité des travailleurs.
    Premièrement, il faut les faire entrer au pays, et suivre des protocoles pour les faire passer de leur point d'origine jusqu'à l'usine de transformation ou jusque dans la région ou l'exploitation agricole où ils travailleront.
    Le défi fondamental qui nous occupe actuellement est l'inconnu. Nous sommes tous au courant des récents changements qui ont été apportés aux exigences d'entrée au Canada et des difficultés que cela entraîne pour nous. Nous attendons la date du 14 mars, parce qu'il n'est pas encore clair si les travailleurs étrangers temporaires devront demeurer dans un hôtel prévu par le gouvernement ou encore s'ils seront exemptés de cette obligation et transférés directement vers l'exploitation agricole où ils respecteront une période de quarantaine.
    Nous devons prendre en considération toute une gamme de défis qui ne cessent de faire grimper les coûts. Nous devons donc garder les yeux sur la question des coûts dans le système.
    Les autres éléments dont il faut tenir compte sont les ordres de gouvernement municipal et provincial.
    Concernant la question qui nous occupe aujourd'hui, si un travailleur étranger arrive au pays, il va atterrir à Toronto. S'il doit demeurer trois jours à Toronto en raison des nouvelles mesures, puis se rendre dans les provinces atlantiques, il devra respecter un autre 14 jours de quarantaine. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec une période de 17 jours pendant laquelle les travailleurs ne sont pas disponibles, ce qui représente aussi un fardeau pour eux aussi.

  (1615)  

[Français]

    Si je vous comprends bien, monsieur Lemaire, vous êtes en train de me dire que vous n'avez pas d'information et que vous ne savez pas si vous allez être obligés de mettre les travailleurs en quarantaine.
    Selon l'information dont je dispose — je ne dis pas du tout qu'elle est officielle —, il semblerait que les travailleurs essentiels seraient exemptés et qu'ils se rendraient directement aux exploitations agricoles, comme cela s'est fait l'an dernier. Personne ne vous a dit cela. Est-ce exact?

[Traduction]

    D'après les renseignements que nous avons reçus jusqu'ici, les travailleurs seraient exemptés, et il reste à peaufiner les détails, mais ces renseignements sont valables jusqu'au 14.
    C'est cela la bureaucratie. Il faut compter avec quatre ministères qui travaillent en vue d'amener des travailleurs étrangers temporaires jusqu'à une exploitation agricole ou une usine de transformation. Et à l'intérieur de ce système, il faut compter avec l'Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada, EDSC et ensuite, Agriculture Canada, qui travaillent de concert. C'est sans oublier Affaires mondiales Canada qui joue également un rôle en s'assurant que les pays fonctionnent bien et sont en mesure de déplacer...
    Compte tenu de toutes ces administrations et de l'harmonisation nécessaire, d'après les renseignements que nous avons reçus, les travailleurs seraient exemptés de la quarantaine pour le moment et pourraient entrer au pays. Par contre, nous ignorons ce qui va se passer à partir du 14 mars.

[Français]

    D'accord, je vous remercie.
    Au cours de votre présentation, vous avez parlé de concurrence étrangère. Vous disiez que les coûts d'intrants étaient moins élevés ailleurs et que les coûts de main-d’œuvre étaient peut-être moins élevés aussi.
    Quand vous devez traiter avec l'étranger, par exemple, pour exporter vos produits aux États-Unis, vous avez dit que c'était moins rentable pour vous. J'aimerais que vous nous en disiez davantage là-dessus.
    Quel outil vous manque-t-il pour améliorer la sécurité de vos exportations, entre autres?

[Traduction]

    Tout un ensemble de facteurs entrent en jeu, à partir du niveau de la production et de l'intervention d'un plus grand nombre d'intrants. Il pourrait s'agir par exemple de l'enregistrement d'un volume et d'un nombre plus élevé d'outils de production agricole qui permettraient à nos producteurs d'utiliser et d'exploiter de manière plus efficiente des intrants plus rentables dans leur production. Cela leur permettrait d'améliorer leur marge bénéficiaire. Les nouvelles technologies pourraient aussi les aider à accroître le rendement. Ça, c'est le premier facteur.
    Le deuxième facteur consiste à s'assurer de pouvoir compter sur une main-d’oeuvre. Ensuite, les autres éléments visent à s'assurer que, à mesure qu'elle se déplace à travers le système et s'approche de l'usine de transformation, cette dernière possède aussi des outils comparables. Ainsi, l'usine bénéficiera des opportunités et du bon modèle d'imposition des sociétés pour réussir à stimuler et déplacer ses produits à travers son système de transformation. Idéalement, ces produits seraient destinés à un marché où les salaires ne sont pas extrêmement bas, où les coûts d'intrants ne sont pas extrêmement faibles et où les coûts de production ne sont pas globalement faibles. Voici ce qui constitue en réalité le point de départ de tout le système dans les fruits et légumes.

[Français]

    Monsieur Lemaire, pour que l'industrie de la transformation existe, il faut d'abord que vous produisiez vos produits. Actuellement, je crois que vos clients ont d'importantes préoccupations quant à la situation économique.
    Craignez-vous l'annonce de faillites dans un proche avenir?
    Qu'est-ce que le gouvernement peut faire pour vous aider à cet égard?

[Traduction]

    C'est un point extrêmement important.
    Le gouvernement peut faire une chose essentielle pour l'industrie des fruits et des légumes qui n'est pas bien protégée dans un scénario de faillite au titre de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité. Il peut corriger la situation en créant une fiducie réputée qui protégerait les transformateurs de fruits et de légumes ainsi que les vendeurs de fruits et légumes frais dans l'éventualité d'une faillite. Le matériel et les outils existent.
    Je suis désolé, monsieur Lemaire. Merci. Nous n'avons plus le temps pour cette question.
    Nous allons maintenant céder la parole à M. MacGregor pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Et merci à tous nos témoins.
    Je vais commencer par M. Johnstone. Je voudrais vous parler de la fermeture récente de l'usine Olymel, à Red Deer. Un représentant d'Olymel est venu nous en parler un petit peu.
    Je tenais à connaître votre point de vue sur la question pour commencer. Comment vont les travailleurs de cette usine? Comment se débrouillent-ils dans cette nouvelle situation où ils se retrouvent plongés?
    Aussi, pourriez-vous élargir la conversation un peu et nous parler du point de vue des syndicats? Nous avons appris au cours de cette étude que les usines de transformation de la viande sont devenues tellement concentrées que lorsque l'une d'entre elles ferme ses portes, cela entraîne un énorme effet cascade sur toute la chaîne d'approvisionnement.
    D'après vous, comment devrions-nous procéder pour protéger les usines de transformation et, bien entendu, les employés qui y travaillent, de ces chocs futurs sur le système?

  (1620)  

    Merci, monsieur MacGregor. C'est une très bonne question.
    Je peux vous dire que la situation à l'usine d'Olymel traduit la pire crainte pour ces travailleurs. Chaque matin au réveil, et chaque soir au coucher, ils se demandent quand la prochaine éclosion aura lieu. La plus récente s'est produite à l'usine d'Olymel.
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration liminaire, nos membres sont très inquiets d'aller au travail, et avec raison. On a apporté des changements dans l'usine. J'ai entendu parler de l'installation d'écrans en plexiglass. C'est probablement la même chose dans la majorité, si ce n'est la totalité, des grandes usines de transformation. La distanciation est respectée dans les coins repas et ainsi de suite. Vraiment, à partir du moment où la chaîne fonctionne à plein régime, on ne peut pas faire grand-chose au sujet de la densité sur le plancher. S'il se produit une éclosion, c'est un peu comme une bombe à retardement. C'est ce qui vient de se produire à l'usine de Red Deer.
    Je peux vous dire que lorsque cela arrive, en plus de la pression et du stress d'avoir à se rendre au travail, lorsque les travailleurs se retrouvent sans emploi, ils doivent en plus s'adapter à la nouvelle réalité. De nouveaux programmes ont été mis sur pied pendant toute la pandémie de COVID, bien entendu. La PCMRE est la plus récente incarnation de cette forme d'aide. Encore une fois, c'est aux employés qu'il incombe de présenter une demande pour la recevoir, contrairement à ce qui se fait dans d'autres administrations.
    Il semble que dans des pays comme le Danemark, où la transformation du porc représente une énorme portion de l'économie, les choses ne se passent pas ainsi. Dans de tels scénarios, les formalités administratives se règlent directement entre employeurs et gouvernement. Non seulement les employés se retrouvant dans un tel scénario reçoivent-ils leur plein salaire, mais aussi, sans avoir à faire quelque démarche administrative que ce soit. Les formalités sont réglées directement par l'employeur et l'entreprise.
    C'est une chose qui, à mon avis, pourrait s'avérer très utile pour nos membres qui souhaitent seulement se rendre au travail tous les jours. Actuellement, ce sont eux qui portent le fardeau de ces éclosions lorsqu'elles se déclenchent à bien des égards. Certainement, et très évidemment, il s'agit de leur propre santé, mais aussi, sur le plan pratique, il faut qu'ils réussissent à joindre les deux bouts. La situation est difficile dans les usines de transformation de la viande à bien des égards.
    Un commun dénominateur dans le cadre de la présente étude, et dans d'autres, est celui de la concentration des marchés, et plus particulièrement chez les transformateurs de viande. Pour ne pas les nommer, Cargill, JBS, Olymel. Ce sont des acteurs de premier plan, et on peut dire qu'ils contrôlent vraiment d'importantes parts de marché avec seulement une usine. Je pense qu'un représentant d'Olymel a déclaré que l'usine de Red Deer était responsable... d'environ 30 % de la transformation du porc au Canada. Donc, c'est énorme.
    Vous et moi avons déjà parlé de la situation de l'entreprise Ryding-Regency qui, je pense, est... Tru Harvest Meats. Avez-vous du nouveau à ce sujet?
    Si nous voulons nous doter d'une plus grande capacité de transformation, je pense qu'il faudrait savoir quelles usines ont été fermées et quelles sont les possibilités qu'elles ouvrent de nouveau leurs portes afin de pouvoir récupérer cette capacité.
    J'aurais aimé pouvoir vous répondre, ainsi qu'à votre autre point sur la concentration dans le domaine du conditionnement de la viande, par exemple. Il s'agit d'un excellent exemple pratique. En Ontario, on assiste à une crise réelle touchant les usines de conditionnement de petite et de moyenne envergure. Or il se trouve que Ryding-Regency faisait partie de cette catégorie. C'est une usine qui a été fermée en septembre 2019. Autrement dit, cette usine est pour ainsi dire inexploitée depuis un an et demi.
    Au total, 200 de nos membres y travaillaient. Ce sont des gens qui n'ont aucune idée de ce que sera leur avenir dans cette usine depuis deux ans. Mais pour couronner le tout, une bonne partie des travaux de votre comité au cours des dernières réunions a porté sur la crise que connaît la main-d’oeuvre qualifiée dans la transformation alimentaire. Il y a 200 bouchers industriels très qualifiés qui se trouvent actuellement dans une situation — j'ignore s'ils vont décider de se réorienter, et s'ils vont quitter le secteur. Ce n'est pas quelque chose qu'une industrie peut se permettre.
    Après de nombreuses tentatives auprès du ministère et de l'ACIA, je peux vous dire que nous n'avons reçu que très peu de renseignements sur l'état de cette usine. Nous savons qu'une demande a été présentée, mais c'est une situation qui perdure depuis presque un an. Je dois dire que la communication laisse à désirer sur cette question, en ce qui nous concerne, et en ce qui concerne nos membres également.

  (1625)  

    Merci.
    Nous allons maintenant commencer le deuxième tour par M. Steinley pour cinq minutes.
    Merci aux témoins d'être parmi nous aujourd'hui.
    Tout au long de notre étude, des témoins sont venus nous dire que les marges ne cessent de rétrécir, et que la rentabilité des processus de transformation du secteur agricole va en diminuant.
    Ma question s'adresse à Myers Norris Penny, soit à M. Fraser ou à Mme Tait. Nous n'avons pas encore entendu cette dernière. Est-ce que MNP envisage de réaliser une analyse économique de l'incidence de la taxe sur le carbone sur le secteur agricole? Si la réponse est oui, seriez-vous prêt à en parler à notre comité? Et si la réponse est non, est-ce que vous avez prévu de le faire à un moment donné?
    Jusqu'ici, nous n'avons pas effectué d'analyse de cette question, mais nous sommes disposés à travailler avec notre client, ainsi qu'avec toutes les entités visées par cette taxe, en vue d'effectuer une analyse et de fournir des renseignements plus poussés à ce sujet.
    Monsieur Fraser, avez-vous quelque chose à ajouter?
    Non — je répondrais exactement la même chose que ma collègue.
    Parfait.
    Je m'intéresse aux modifications fiscales qui ont été effectuées à partir de 2017, 2018 et 2019. Aussi, pour accroître notre capacité de transformation au Canada, nous allons devoir apporter des modifications à notre structure fiscale.
    En tant que fiscalistes, auriez-vous des recommandations précises à faire à notre comité, des recommandations que nous pourrions mettre de l'avant et qui favoriseraient la croissance du secteur de la transformation et de sa capacité au Canada?
    Absolument. Je pense qu'il existe de nombreuses possibilités de fournir une aide financière à ces organisations afin qu'elles puissent continuer d'avoir accès à l'innovation, comme nous l'avons déjà mentionné. Certaines de ces possibilités, comme le crédit d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental, peuvent s'avérer exagérément complexes. Aussi, parfois, notre industrie a constaté des taux de réussite décevants après l'obtention d'une aide financière dans le cadre de ce programme compte tenu de sa complexité. Aussi, il suffirait de comprendre qu'un système un peu plus prévisible et plus convivial pour les producteurs qui seraient tentés d'y participer...
    Je trouve que c'est un point très pertinent. Lorsque nous avons produit le rapport sur les programmes de gestion des risques des entreprises, bon nombre de producteurs et de témoins du domaine de l'agriculture ont déploré la complexité du processus d'imposition.
    Brièvement, si c'est possible, comment pourrions-nous simplifier ce processus ainsi que la structure d'imposition des entreprises dans le secteur agricole? Je pense plus particulièrement aux incitatifs, comme vous l'avez mentionné, et aux crédits d'impôt afin d'accroître la capacité de transformation au Canada?
    Certainement. Je pense qu'il faut aussi se recentrer sur la définition de l'innovation et de la recherche et développement. Bien souvent, les producteurs utilisent de nouvelles techniques, nouvelles au Canada ou nouvelles dans l'industrie, et ils ne reçoivent pas tout le crédit qu'ils méritent dans le cadre de ces programmes.
    Comme l'a souligné M. Fraser, il n'est pas nécessaire qu'il s'agisse de technologies nouvelles et révolutionnaires. Il suffit qu'elles soient des technologies qui contribuent à préserver la marge bénéficiaire brute, le côté opérationnel, et qui comportent des avantages pour les producteurs.
    Je m'en voudrais de ne pas mentionner la supergrappe des industries des protéines, qui se situe en plein coeur de Regina, donc dans ma circonscription.
    Vous avez conclu un nouveau partenariat, ou un partenariat récent, avec Bioenterprise Corporation. Ce partenariat vise à donner plus d'ampleur au rôle des accélérateurs d'entreprises dans le secteur agricole.
    Avez-vous prévu un rôle dans le cadre de ce partenariat avec Bioenterprise Corporation pour aussi accroître la capacité de transformation? Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet, s'il vous plaît?
    Certainement.
    Évidemment, dans ce scénario aussi, nous prêterions notre concours à certaines des personnes qui sont issues de cet incubateur. Certains éléments dont nous avons parlé tout à l'heure, les crédits d'impôt pour la recherche et développement, joueraient un rôle énorme à cet égard.
    Aussi, l'accès aux capitaux pour certaines de ces nouvelles entreprises risque d'être difficile, et même pour les entreprises établies, en fin de compte. Par conséquent, s'il existait des offres d'aide financière gouvernementale facilement prévisibles et facilement accessibles, ce serait vraiment avantageux.

  (1630)  

    Merci beaucoup.
    En terminant, étant donné que la taxe sur le carbone va passer de 30 $ à 170 $ la tonne, pensez-vous que cela pourrait jouer un rôle dans le resserrement des possibilités de croissance de la capacité de transformation au Canada?
    Il est toujours important pour les producteurs de déterminer quelles seront leurs marges, et cela pourrait certainement constituer un facteur de la rentabilité pour nombre d'entre eux.
    Merci, madame Tait et monsieur Steinley.

[Français]

    Monsieur Drouin, vous avez maintenant la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci à tous les témoins.
    Monsieur Lemaire, c'est toujours un plaisir de vous recevoir à notre comité.
    Je reviendrai plus tard aux représentants de MNP, mais je vais vous prédire qu'à un moment donné, nous allons entendre le ministre des Finances implorer le secteur privé de faire plus d'investissements. Ce fut d'ailleurs le cas du regretté ministre Flaherty, il y a environ 10 ans, après la fin de la récession. Il avait demandé au secteur privé de faire plus d'investissements. Je sais, de manière générale, que le secteur manufacturier avait réclamé une déduction pour amortissement accéléré, ce qui fut fait dans l'Énoncé économique de l'automne 2018.
    Monsieur Lemaire, concernant ces mesures fiscales, est-ce que vos membres y ont recours, ou bien est-ce que ça ne fonctionne pas? Devrions-nous adopter d'autres mesures? Je sais que vous avez mentionné qu'il faudrait davantage d'incitatifs fiscaux. Je serais curieux de savoir à quoi pourraient ressembler ces incitatifs.
    Nous menons actuellement un sondage dans lequel nous posons ce genre de questions. Je suis désolé, mais je n'ai pas tous les détails concernant la gamme des solutions qui seraient préconisées.
    Très bien.
    Mme Tait et M. Fraser vous ont énuméré certaines de ces possibilités, et je pense que vous avez mis le doigt sur un élément important. En effet, pourquoi l'industrie ne mise-t-elle pas sur l'infrastructure et les outils existants qui sont mis à sa disposition? Est-ce en raison de leur complexité? Est-ce parce qu'ils ne correspondent pas aux outils de marché qui leur seraient vraiment profitables?
    Je pense que cela fait partie de l'analyse que nous devons faire. Il faut prendre le temps d'examiner la structure d'outils existante. C'est une chose que nous essayons de comprendre. Est-il nécessaire d'apporter simplement quelques légers ajustements plutôt que d'entreprendre une refonte totale, ou de concevoir une nouvelle structure?
    Ce sont là toutes les questions auxquelles nous espérons qu'en tant que comité, vous trouverez des réponses. Ainsi, vous pourrez formuler des recommandations claires au gouvernement fédéral concernant l'orientation à prendre.
    Oui. Il ne s'agit pas de montrer du doigt le secteur agroalimentaire. La situation est la même dans tout le secteur manufacturier actuellement. Nous avons entendu les doléances des Manufacturiers et exportateurs du Canada aussi concernant d'autres facteurs.
    Oui.
     Madame Tait, peut-être aimeriez-vous intervenir. Lorsque vous conseillez [Difficultés techniques] sur certains de ces programmes... [Difficultés techniques]
    Monsieur Drouin, il y a...
    J'ai entendu la même chose. Les manufacturiers du secteur privé n'investissent pas d'argent dans la modernisation de leurs usines de fabrication [Difficultés techniques] aussi rapidement que dans les autres pays, si je peux me permettre de dire cela.
    Toutes mes excuses. Je ne vous entendais plus, aussi je n'ai pas bien entendu la question. Pourriez-vous répéter s'il vous plaît?
    Certainement.
    Ma question porte sur ce que devrait faire le gouvernement du Canada pour inciter les fabricants à moderniser leur équipement, afin que l'on puisse bénéficier d'une automatisation plus poussée au Canada. Selon moi, cela ne devrait pas se faire au détriment des travailleurs. Cela devrait seulement créer de nouveaux genres d'emplois.
    Je suis député aujourd'hui, mais dans le passé j'ai travaillé dans une autre industrie. J'entends la même histoire depuis les 15 dernières années, comme quoi le Canada tire de l'arrière par rapport à d'autres pays pour ce qui est de la modernisation de nos usines de fabrication.
    Je me demande ce que vos clients vous disent à ce sujet.
    Surtout depuis quelques années, nos clients connaissent un resserrement des marges et éprouvent de la difficulté à avoir accès à des capitaux pour effectuer ces importants investissements. Des programmes qui leur permettraient d'avoir accès à une aide financière seraient très profitables.
    Des changements aux crédits d'impôt pour la recherche et développement pourraient se révéler eux aussi très avantageux. Plus le programme sera simple d'utilisation, plus il sera prévisible, et plus les taux de réussite seront élevés chez les utilisateurs.

  (1635)  

    Très bien.
    J'ai déjà posé la question à M. Lemaire à ce sujet. La déduction pour amortissement accéléré a été introduite dans l'Énoncé économique de l'automne 2018. Est-ce que vos clients s'en sont servis pour acheter du nouvel équipement, et pour avoir accès à certains de ces incitatifs?
    Certainement. Différents clients vont l'utiliser dans la mesure où le moment sera bien choisi pour procéder à un agrandissement prévu et si les paramètres correspondent à leurs critères.
    Concernant la décision d'effectuer ou non cet investissement, lorsque vous conseillez des clients, je suis convaincu que vous soulevez la question de la politique relative à l'offre de travailleurs. Il s'agit d'un enjeu majeur, et qui revient sans cesse dans la bouche de nos témoins. Vous avez parlé de la possibilité d'avoir accès au Fonds stratégique pour l'innovation. Existe-t-il d'autres mesures que nous devrions envisager?
    Je pense que si les trois éléments que nous avons mentionnés aujourd'hui étaient pris en compte d'une manière qui permettrait d'aller de l'avant, cela jouerait le rôle d'une véritable catapulte pour l'industrie et répondrait à une bonne partie des besoins.
    Merci.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
     Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Fraser ou madame Tait, le Fonds d'urgence pour la transformation, un programme du gouvernement, a aidé les entreprises à moderniser leur équipement et à protéger les travailleurs contre la COVID-19. Toutefois, le deuxième volet du programme n'a pas pu être mis en place, faute de fonds.
    Que pensez-vous de cette situation?
    Avez-vous beaucoup de clients qui n'ont pas pu faire les travaux nécessaires?
    Croyez-vous que nous pourrions injecter rapidement d'autres sommes dans ce programme?

[Traduction]

    Je pense que les fonds et leur disponibilité ont toujours été appréciés. La difficulté consiste à veiller à ce que les fonds soient disponibles au moment où on en a besoin — et à avoir accès à ces fonds, bien entendu.
    Assurément, l'un des...

[Français]

    Vous avez aussi parlé du manque de main-d’œuvre. Vous dites que vous avez besoin d'automatiser l'équipement, de former les employés, de leur fournir des choix de carrière et de leur donner de l'information. Néanmoins, nous savons qu'il manque quand même de main-d’œuvre.
    Vos clients font probablement appel à des travailleurs étrangers. On nous a demandé de faire passer le pourcentage de travailleurs étrangers autorisés de 10 à 20 %.
    Êtes-vous en faveur d'une telle hausse? Serait-elle suffisante?

[Traduction]

    Je pense qu'il est important aussi d'insister sur l'automatisation des industries. Lorsque nous serons en mesure d'envisager l'automatisation de certaines de ces industries, elles auront certainement la possibilité de maintenir en poste leurs travailleurs actuels, et il est à espérer que la pénurie de travailleurs qualifiés se résorbera. On aura aussi la possibilité de recycler certains travailleurs afin qu'ils puissent occuper des postes plus spécialisés dont ils pourront être fiers et qu'ils trouveront très stimulants.

[Français]

    Je vous remercie.
    Vous soulevez un très bon point, madame Tait. D'ailleurs, j'aimerais poser une question à M. Johnstone à ce sujet.
    Monsieur Johnstone, vous avez mentionné plus tôt qu'il y avait une relation inverse entre le recours à des travailleurs étrangers et l'investissement.
    J'aimerais que vous m'expliquiez cela.
    Est-ce que, pour vous, faire appel à des travailleurs étrangers pose des problèmes?
    Je vous ai laissé poser votre question, monsieur Perron, mais nous n'avons plus de temps pour la réponse. Je le regrette. M. Johnstone aura peut-être la chance d'y répondre plus tard.

[Traduction]

    Monsieur MacGregor, vous avez deux minutes et demie. Je vous en prie.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais me tourner vers M. Lemaire et l'ACDFL.
    L'un de nos précédents témoins représentait le Conseil de l'innovation agroalimentaire ou CIA. J'ai été interpellé par les observations que vous avez faites dans votre déclaration liminaire concernant l'énorme potentiel des produits à valeur ajoutée. Malgré les difficultés que vous avez énumérées, je sais qu'il y a eu quelques histoires de réussite. Il y a des entreprises qui réussissent au Canada dans les conditions actuelles. Et c'est ce qui m'intéresse vraiment.
    J'ai demandé au CIA s'il y avait des dénominateurs communs dans ces histoires de réussite. On m'a répondu que c'est notamment la présence d'un écosystème pouvant réunir des chercheurs, des entrepreneurs, des représentants de l'industrie, et des investisseurs pour encadrer les entrepreneurs.
    Pourriez-vous nous parler de certaines de ces histoires de réussite, concernant n'importe quel membre de l'ACDFL qui aurait connu le succès dans les conditions actuelles et dans le domaine des procédés innovateurs de transformation des aliments? Pourriez-vous aussi nous expliquer les facteurs de leur réussite?

  (1640)  

    Oui, tout à fait. À titre d'exemple, je peux vous parler de Sliced, dans l'Ouest, qui fait partie du Star Group. Pour connaître la recette du succès de cette entreprise, on peut voir, pour commencer, qu'elle s'est assurée d'avoir le contrôle de sa base de production. Elle s'est dotée d'un écosystème intégré dans lequel elle gère toutes les étapes, du début à la fin. Elle a aussi investi considérablement dans l'automatisation et dans une chaîne de production innovatrice. Elle a eu recours à une technologie avancée dans ses opérations de production et de coupe de fruits et légumes afin que la transformation de ces produits frais s'effectue le plus efficacement possible.
    Ensuite, il faut prendre en compte les principales caractéristiques du conditionnement et la gestion des centres de coûts. Il faut continuellement surveiller l'ensemble des coûts et la structure, de la production jusqu'au conditionnement, et enfin, jusqu'au consommateur. Il faut être en mesure de tout gérer. En même temps, l'élément dont on tient de plus en plus compte aujourd'hui est celui de la durabilité qui commence à s'insérer dans cette proposition de pleine valeur.
    L'entreprise a examiné tous ces éléments et les a réunis. Même la manière dont elle s'est adaptée durant la pandémie de COVID, notamment en examinant comment elle pourrait redistribuer et gérer sa chaîne d'approvisionnement sur le marché, est fondamentale.
    Des histoires de réussite, il y en a d'un bout à l'autre du pays. Je suis fermement convaincu que l'occasion est là. Le modèle qui se dégage et vers lequel nous avons la possibilité de nous diriger est celui du modèle régional. Selon ce modèle, dans notre secteur, nous pouvons centraliser la production avec les producteurs afin qu'ils puissent s'unir et avoir accès au marché.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer au tour de cinq minutes.

[Français]

    Monsieur Lehoux, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins qui sont avec nous cet après-midi.
    Monsieur Fraser ou madame Tait, vous avez dit que le cadre Agri-relance devrait être élargi ou amélioré. J'aimerais que vous approfondissiez un peu cette question. Il arrive que l'on pense à différents programmes, mais réinventer la roue ne sert parfois à rien.
    Auriez-vous des suggestions à nous donner quant à des modifications à apporter à Agri-relance?

[Traduction]

    Bien souvent, nos clients ou les entreprises avec lesquelles nous faisons affaire sont en concurrence avec de très grandes entreprises pour obtenir du financement pour quelques projets d'envergure. Il nous faut un programme axé sur les aliments et les boissons qui privilégiera les petites et moyennes entreprises dans leurs opérations. Encore une fois, il n'est pas nécessaire que la technologie soit très sophistiquée. Il ne s'agit pas de réinventer la roue, puisqu'elle existe déjà.

[Français]

    Dans le même ordre d'idées, en ce qui concerne les politiques publiques, vous avez mentionné la valorisation ainsi que la formation et l'automatisation. Le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux devraient-ils se pencher davantage sur toute la question de la valorisation des professions dans le secteur agroalimentaire?

[Traduction]

    Nous avons l'occasion de valoriser ces professions et ces emplois auprès des Canadiens et de les inciter à suivre une formation. Il faut leur faire savoir que ces opportunités existent. L'automatisation et la compétence accrue de la main-d’oeuvre s'accompagnent d'une rémunération à l'avenant. Il est à espérer aussi que l'on procédera à des changements en matière de sécurité et que l'on obtiendra des commentaires plus satisfaisants concernant ces employés. Ce serait un objectif important pour les deux ordres de gouvernement que de trouver le moyen de faire passer le message auprès des jeunes Canadiens.

[Français]

    Je vous remercie.
    Devrait-il y avoir une meilleure concertation des gouvernements fédéraux et provinciaux pour mettre rapidement en place le fameux code de conduite?
    Êtes-vous d'accord que cela devrait se faire le plus rapidement possible?

  (1645)  

[Traduction]

    Le code de conduite pour les détaillants en alimentation est appelé à jouer un rôle très important pour l'industrie. Insister sur la transparence et la prévisibilité pour toutes les parties prenantes constituerait sûrement un gage de succès important. Oui, je suis favorable à ce que ce code soit adopté dès que possible.

[Français]

    Je vous remercie.
    Monsieur Johnstone et monsieur Lemaire, vous avez parlé de problèmes liés à la main-d'œuvre. Il manque toujours de 25 à 30 000 travailleurs dans l'ensemble de l'industrie.
    Monsieur Johnstone, que proposez-vous?
    Je comprends qu'il faille travailler sur la valorisation, mais comment peut-on inciter les gens à venir travailler dans le milieu agroalimentaire?
    Faudrait-il inclure cet aspect dans des programmes adaptés à la main-d'œuvre immigrante, par exemple?

[Traduction]

    C'est probablement une bonne idée. Concernant la main-d’oeuvre immigrante, il est évidemment important d'évaluer les compétences pour lesquelles nous recrutons lorsque nous permettons à de nouveaux arrivants d'entrer au Canada. C'est un élément clé.
    J'aimerais revenir sur le point que j'ai mentionné tout à l'heure. Je refuse l'idée que tous les Canadiens et résidents permanents sous-employés ou sans emploi et ceux qui se sont retirés du marché du travail connaissent les possibilités qui existent dans le secteur de la transformation alimentaire. Je n'y crois pas. Beaucoup de gens — et certainement des intervenants du milieu des travailleurs — sont probablement d'accord avec moi.
     Il serait irresponsable de notre part, en tant qu'industrie, d'accepter la situation — comme s'il s'agissait d'un fait accompli — c'est-à-dire que les Canadiens refusent de faire ce travail, que les Canadiens connaissent parfaitement ce travail, et qu'ils ne sont tout simplement pas intéressés. Je n'en ai pas la preuve, franchement, et il n'y a pas eu d'enquête nationale sur cette question. Je me fie à nos propres membres, car c'est une question que nous essayons de défendre à l'ACDFL. Bon nombre de nos membres sont sous-employés et ne travaillent qu'à temps partiel.
    Merci, monsieur Johnstone.

[Français]

    Je vous remercie.
    Je vous remercie, monsieur Lehoux.

[Traduction]

    La parole est à vous, monsieur Blois. Vous disposez de cinq minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Merci aussi à nos témoins.
    Je vais commencer par m'adresser aux représentants de MNP. Nous connaissons la rhétorique sur l'accès aux capitaux. Nous en avons déjà entendu largement parler. Où vos membres, le millier d'entreprises distinctes dont vous avez parlé, se financent-elles maintenant le plus souvent lorsqu'elles ont besoin de capitaux pour se développer?
    Très généralement, elles vont s'adresser aux sources traditionnelles de financement, comme les banques pour obtenir des prêts, ou au gouvernement pour demander des subventions. Les programmes de subventions sont toujours intéressants, en particulier pour les nouveaux venus dans l'industrie. Beaucoup d'entrepreneurs vont aussi piger dans les revenus de leurs autres entreprises ou activités, ou encore à même leur épargne personnelle.
    Ils ne demandent pas la charité. Ils s'efforcent simplement de trouver des formes d'aide adaptées à leurs activités.
    Actuellement, les taux d'intérêt auprès des sources traditionnelles de financement, ou de celles s'alignant sur la Banque du Canada, sont d'environ 0,25 %. Lorsque vous conseillez vos entreprises membres, les incitez-vous à profiter de ces possibilités d'emprunts à long terme à faibles taux?
    C'est, bien évidemment, un facteur que nous prenons toujours en compte lorsque nous déterminons de quel terme l'entreprise aura besoin. Nous prenons aussi en compte les taux en vigueur et les autres possibilités d'accès à des capitaux.
    Sans surprise, vous avez évoqué les modes de financement des innovations stratégiques et certains des divers programmes agricoles disponibles. Je ne parle pas ici d'Agri-investissement. Je crois que c'est du Programme d'Agri-innover que vous avez parlé.
    Le gouvernement a très certainement un rôle à jouer dans l'aide aux entreprises du secteur privé. Toutefois, en ce qui concerne les crédits d'impôt, comme M. Drouin l'a rappelé, vaut-il mieux que le gouvernement adopte des mesures profitant à toutes les entreprises? Même avec de telles mesures, tout le monde n'y a pas nécessairement accès. Préféreriez-vous recommander l'adoption d'un éventail plus large de mesures afin que les entreprises puissent elles-mêmes décider de recourir à ces programmes, ou préféreriez-vous un peu des deux solutions?

  (1650)  

    Vous trouverez un peu des deux. Il est bien sûr important pour les producteurs de savoir qu'ils peuvent recourir à des programmes mettant des fonds à leur disposition pour garantir des approvisionnements alimentaires sûrs et réguliers. Il leur faut aussi pouvoir accéder à certains des programmes plus génériques qui ont été annoncés.
    Lors d'autres réunions, j'ai parfois entendu dire que, parfois, il y a tout juste une usine au pays. C'est-à-dire que nous avons des multinationales et certaines de leurs filiales qui sont implantées au Canada, mais cela ne signifie pas que l'activité visée est la principale pour elles. Avez-vous eu l'occasion de constater, dans le cadre des activités de MNP, que c'est parfois la raison pour laquelle le financement n'est pas toujours disponible. Il y a en effet des entreprises de dimension mondiale qui s'adonnent à des activités diverses partout dans le monde, et au Canada, et quand on procède à des comparaisons avec d'autres acteurs mondiaux, l'analyse de leurs demandes révèle, quelle qu'en soit la raison, qu'elles n'appartiennent pas au groupe visé par le programme en question.
    Monsieur Fraser, avez-vous quelque chose à dire à ce sujet?
    Oui.
    Nous ne représentons guère de très grosses entreprises multinationales de transformation d'aliments et de boissons. Nos clients sont essentiellement des entreprises qui ont été fondées au Canada et dont les activités y sont cantonnées. Comme Mme Tait l'a indiqué plus tôt, leur préoccupation est de parvenir à comprendre la nature des programmes. Il y a d'ailleurs lieu de s'interroger sur les modalités et le protocole à suivre pour présenter une demande, et sur la transparence de l'ensemble. Il arrive fréquemment que des dirigeants d'entreprise suivent tout le processus sans aucun résultat. Il faut le faire savoir.
    MNP est une entreprise importante. Bien évidemment, vous conseillez des entreprises qui ont des activités à l'étranger et qui relèvent de la législation d'autres pays. S'il y a, au Canada, d'autres programmes qui, à votre avis, sont très utiles dans votre domaine d'activité, je vous serais reconnaissant de les indiquer au Comité.
    Je vais maintenant m'adresser très rapidement à M. Lemaire.
    Vous nous avez parlé d'entreprises qui réussissent, qui contrôlent leur base de production et qui s'intéressent non seulement à un segment de l'industrie, mais à l'ensemble de celle-ci. Je crois que c'est là un point digne d'intérêt, que d'autres ont également soulevé. Voyez-vous là un rôle à jouer pour le gouvernement ou incombe-t-il uniquement aux entreprises du secteur privé d'être novatrices et d'établir les liens qui s'imposent au sein de leur secteur? Il nous faut délimiter quel est le rôle légitime du gouvernement, que je crois… Je ne veux pas que nous abdiquions nos responsabilités, mais est-ce réellement là le rôle des entreprises du secteur privé?
    C'est une question digne d'intérêt. Pour répondre simplement, je vous dirai que oui, c'est le rôle du gouvernement. Il s'agit pour lui d'instaurer le contexte économique adapté pour relier toutes ces entreprises. Je vais vous donner un exemple tiré du fouillis de l'application de la réglementation sur la façon dont les entreprises fonctionnent. Ce commentaire nous a été fait au sujet du rôle joué par l'Agence canadienne d'inspection des aliments et d'autres responsabilités qu'elle assume. Cela nous amène sur un sujet différent de celui qu'étudie ce comité actuellement, mais c'est un facteur qui exerce une influence.
    S'ajoute à cela, qu'il est essentiel de prendre en compte tout ce qu'on dit Mme Tait et M. Fraser sur les mesures incitatives, et qu'il faut analyser certains des outils nécessaires, en particulier dans les cas d'investissement de capitaux. Si une entreprise entend étudier comment tirer le meilleur parti possible de la situation, en particulier pendant la crise actuelle de la COVID, avec les risques qui lui sont propres, elle a le choix entre deux modèles. Quelle est la possibilité à court terme de relancer l'activité? On entend parler de « mieux reconstruire ». Oui, c'est parfait! Faisons-le. Cela n'empêche qu'il reste un point d'interrogation. Comment prédire ce que seront les gains à court terme et, ensuite, définir la stratégie nécessaire à long terme?
    Je vous remercie.
    Chers collègues, nous avons terminé relativement tôt cette série de questions et de réponses. Si nous passons maintenant à une seconde série complète de questions et de réponses, nous allons largement déborder notre horaire.
    C'est la raison pour laquelle je vous propose de nous en tenir à une question par parti.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Très bien. Je vais suivre l'ordre des intervenants inscrits sur ma liste.
    Monsieur Epp, nous vous écoutons et je vous invite à vous limiter à quelques minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Lemaire.
    J'ai retenu de vos commentaires préliminaires que vous êtes en faveur d'un éventuel code de conduite qui permettrait de s'attaquer au déséquilibre des pouvoirs entre les cinq grands détaillants et les fournisseurs-producteurs ou transformateurs. Comment conciliez-vous ce souhait avec les autres commentaires que vous avez faits sur le contexte réglementaire et la façon dont les producteurs de fruits et de légumes frais pourraient vendre leurs produits aux grands détaillants, en particulier en Ontario? Il se trouve que cela fait quelques années que je me bats sur ces questions.
    Oui.
    Comment conciliez-vous les deux? J'ai cru comprendre que vous ne fournissez pas nécessairement vos produits sous contrat et que vos livraisons ne génèrent pas pour vous un flux continu de revenus qui améliorerait votre capacité d'investissement. Comment vous paraît-il possible de résoudre ces deux approches qui, à moi au moins, paraissent irréconciliables?
    C'est qu'il s'agit là de deux sujets différents. L'un concerne la conjoncture du marché et la transparence dont nous avons entendu parler plutôt. L'autre nous ramène aux conditions du marché dans un contexte ouvert de production et d'échanges commerciaux.
    En réalité, cela peut se résumer à ceci. Si vous vendez vos produits dans le cadre d'un modèle réglementé et que vous appartenez à la communauté croissante qui contribue à ce modèle, vous vous trouvez à oeuvrer dans une base de production gage d'une bonne réussite. Au sein de l'autre partie du secteur de la production, celui des fruits et des légumes frais, dans laquelle vous cultivez à l'intention du secteur des produits frais, vous avez des produits qui pourraient se retrouver dans la chaîne de transformation qui contribue à l'apparition de cet écart de volume, dont Mme Rood a parlé. Tout d'un coup, vous vous retrouvez exclus et vous avez de la difficulté à trouver des canaux de distribution pour ce produit dans le secteur de la transformation, de là l'écart entre les débouchés. Il s'agit vraiment de déterminer comment améliorer ce canal de distribution pour soutenir les producteurs de légumes transformés afin qu'ils puissent tirer parti de l'industrie des produits frais qui disposent de produits excédentaires.

  (1655)  

    Je vous remercie, messieurs Lemaire et Epp.
    Monsieur Ellis, c'est maintenant à vous de poser vos questions.
    J'ai pris rapidement quelques notes sur ce que vous avez dit. Je crois que le « vous » en question était M. Lemaire. Il faudrait, actuellement, combler environ 30 000 emplois et, d'ici 2025, ce chiffre aura doublé. Il y a donc un risque majeur de forte pénurie de main-d'oeuvre.
    C'est exact. Quand on examine les projections et les formes d'aide disponibles, ce qui renforce aussi le témoignage des représentants d'Aliments et boissons du Canada, je crois qu'on peut conclure que tout le monde travaille avec un plus petit bassin de main-d'œuvre. Je sais fort bien que travailler dans ces conditions ne favorise pas une efficacité optimale ni la poursuite de la croissance… Si nous visons un modèle de croissance, disposons-nous de la main-d'œuvre nécessaire pour parvenir à cette croissance? Si ce n'est pas le cas, on en revient à la solution de l'automatisation et du retour à la recherche de plus d'efficience, ce que tente de faire maintenant l'industrie. Il est malheureux qu'un secteur de l'industrie soit mis en péril par le manque de travailleurs, mais il y en a manifestement un autre, comme l'a rappelé M. Drouin, dans lequel le nombre d'emplois augmente.
    Notre objectif est alors de veiller à disposer de collèges communautaires et d'autres établissements pour former les gens afin qu'ils maîtrisent les bonnes technologies, sachent repérer les bonnes données et fassent l'acquisition d'une tout autre gamme de compétences pour mettre en place l'automatisation et l'innovation afin de combler le manque de main-d'œuvre, mais l'objectif à court terme est d'accroître le pourcentage de travailleurs étrangers temporaires dans ce secteur.
    Je vous remercie.
    J'ai une brève question à poser à M. Johnstone.
    C'est hier je crois que la ministre Qualtrough a annoncé un financement de 63 millions de dollars destinés aux projets découlant du Programme pour la formation et l'innovation en milieu syndical qui vient en aide aux gens de métiers certifiés pour améliorer la qualité des emplois et permettre de disposer d'une main-d'oeuvre productive et plus compétente.
    J'aimerais savoir ce que les mesures de ce genre adoptées par le gouvernement fédéral pour disposer d'une main-d'oeuvre compétente et plus nombreuse vous inspirent.
    Les ressources engagées par le gouvernement ne se limitent pas à ça. Il y a aussi l'argent investi par l'intermédiaire des centres des compétences. Il y a là de bons éléments, mais il est certain que, dans nos secteurs, il est tout aussi important de convaincre les employeurs de se présenter à la table des discussions. Pour en revenir à ce que j'ai déjà indiqué, il est essentiel que les intervenants, dont nous, aient cette discussion. Il n'y a pas actuellement de discussion structurée. L'argent c'est très bien, mais nous avons aussi besoin que le gouvernement s'implique en convoquant les intervenants à la discussion.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant écouter M. Perron.

[Français]

    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Johnstone, je suis très content de pouvoir vous poser à nouveau ma question.
    Lors de votre présentation, vous avez mentionné avoir observé une relation inverse entre le recours à des travailleurs étrangers et l'investissement.
    Depuis le début des travaux du Comité, nous constatons que les deux problèmes existent. Il y a en effet un sous-investissement dans l'industrie au pays, mais le manque de main-d'œuvre est tellement grand qu'il est nécessaire de recourir aux travailleurs étrangers.
    Avez-vous vraiment dit cela? J'aimerais que vous nous en disiez davantage là-dessus.
    Comment fait-on pour concilier ces deux problèmes? Les travailleurs étrangers sont-ils couverts par les conventions en vigueur dans les usines où votre association est représentée?

[Traduction]

    Nous avons déjà négocié des conventions collectives et nous sommes très fiers de la façon dont nous les avons utilisées par le passé pour tirer parti le mieux possible du Programme des candidats des provinces afin de permettre aux employés régis par celles-ci de disposer de cheminements efficaces vers la citoyenneté, et nous n'en avons pas fait assez en la matière.
    Pour en revenir, monsieur Perron, au point que vous avez soulevé, des travailleurs étrangers temporaires sont effectivement devenus membres de notre organisation. Ça a été en particulier le cas dans les usines de transformation de la viande. Nous sommes très fiers de l'utilisation que nous avons faite de nos contrats pour tirer tout le parti possible du Programme des candidats des provinces afin de permettre à ces travailleurs migrants de vraiment disposer d'un accès efficace à la citoyenneté,
    C'est un aspect de ce que vous faites sur lequel vous n'avez probablement pas suffisamment insisté aujourd'hui en rappelant que le gouvernement fédéral a mis sur pied ce Programme des candidats des provinces qui permet à ces dernières de désigner des candidats, même si, par le passé, l'Ontario n'en a guère fait usage. Il faut que ce programme soit perçu comme l'un des piliers mis en place pour répondre aux besoins en main-d'oeuvre du secteur.
    Qu'un migrant, un travailleur étranger temporaire vienne au Canada et y passe 30 ans à tenter sans fin d'obtenir la citoyenneté n'est dans l'intérêt de personne. Si nous voulons que l'emploi dans notre secteur soit caractérisé par la sécurité, la stabilité et la longévité, il faut que nous permettions aux gens qui viennent chez nous de prendre racine ici et d'y construire leur vie. C'est essentiel.
    Au sujet de l'autre point que vous avez soulevé, soit la relation inverse entre les investissements dans la politique sur le marché du travail et l'expansion du Programme des travailleurs étrangers temporaires, nous ne faisons que citer les données de l'OCDE. Ceux-ci montrent clairement que, au cours des 20 dernières années, les investissements publics dans des mesures destinées à mettre au travail les personnes sous-employées et à offrir des débouchés aux personnes qui se sont retirées du marché du travail pour se perfectionner, ou le pourcentage du PIB représenté par ces investissements dans de tels programmes au Canada, ont connu des fluctuations de la même ampleur que le recours aux travailleurs étrangers temporaires, mais le premier a diminué alors que le second a augmenté.

  (1700)  

    Je vous remercie, monsieur Johnstone.
    Votre tour est venu, monsieur MacGregor. Nous vous écoutons.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Monsieur Johnstone, je vais vous garder sous les feux de la rampe.
    Je partage votre sentiment sur l'efficacité des programmes des candidats des provinces et sur l'identification de leurs lacunes. C'est la raison pour laquelle ma femme est venue au Canada. Elle a immigré ici, elle venait d'Australie, grâce au programme des candidats de la Colombie-Britannique qui avait relevé qu'elle avait des compétences dont on manquait sur l'île de Vancouver.
    Vous avez fait allusion au Programme pilote sur l'agroalimentaire qui est en vigueur. Si vous avez des commentaires à faire sur celui-ci, je serai ravi de les entendre. Veuillez également nous dire s'il y a une série de recommandations concrètes que vous aimeriez voir figurer dans notre rapport. C'est notre objectif ultime avec ce document. Nous tenons à faire ce genre de recommandations pour que le gouvernement fédéral y réponde.
    Si vous désirez ajouter autre chose pour impliquer davantage les intervenants, ou quoi que ce soit d'autre pour inciter nos universités à intéresser un plus grand nombre de Canadiens à ces emplois, sentez-vous libre de le faire.
    Je vous remercie.
    Le Programme pilote sur l'agroalimentaire est entré en vigueur l'an dernier. Je viens tout juste de demander une mise à jour des données sur sa performance, mais je ne les ai pas encore reçues. J'ignore donc quelle a été sa performance.
    L'engagement était de créer 2 700 nouvelles possibilités de résidence permanente pour les travailleurs du secteur agroalimentaire, en visant surtout ceux du secteur de la viande.
    Les critères sont encore très exigeants. Il faute entre autres obtenir un niveau de 4 en anglais. Nous savons que nombre de travailleurs étrangers temporaires qui viennent au Canada n'ont pas une telle maîtrise de la langue. À ce que j'en sais, le programme ne comporte aucune disposition permettant aux travailleurs d'améliorer leurs compétences linguistiques.
    En toute franchise, le nombre de travailleurs retenus est nettement insuffisant. Nous entendons parler de 30 000, voire de 65 000 personnes. Si 2 700 par année est un bon départ, c'est non négligeable, mais nous sommes encore très loin de répondre au second point que vous avez soulevé, monsieur MacGregor, soit que ce programme doit constituer un point d'appui efficace pour résoudre la crise à laquelle est confronté notre secteur, en tenant compte en même temps des investissements importants pour dynamiser et développer les marchés intérieurs de l'emploi qui suivent la trajectoire que nous observons avec le nombre de travailleurs étrangers temporaires.
    Messieurs Johnstone et MacGregor, je vous remercie.
    Nous sommes arrivés pour aujourd'hui au terme de la période des témoignages.
    Je tiens à remercier M. Lemaire de l'Association canadienne de la distribution de fruits et légumes qui s'est joint à nouveau à nous aujourd'hui, Mme Tait et M. Fraser de MNP, M. Johnstone des Travailleurs et travailleuses unies de l'alimentation et du commerce Canada qui nous ont tous fait part de leurs points de vue sur ces questions.
    Je souhaite à tous mes collègues une excellente fin de journée et un bon week-end, si nous n'avons pas l'occasion de nous revoir demain.
    Merci beaucoup à tous.
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