Passer au contenu
Début du contenu

SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain
Passer à la navigation dans le document Passer au contenu du document






Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 017 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 5 avril 2022

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

     La séance est ouverte. Bienvenue à la 17e réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.
     Je commencerai par reconnaître que je participe à cette réunion à partir d'ici, sur le territoire du Traité no 1, au coeur de la nation métisse.
     La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride conformément à l'ordre de la Chambre du 25 novembre 2021. Certains membres sont présents dans la salle et d'autres participent à la réunion par la voie de l'application Zoom. Conformément à la directive du Bureau de régie interne du 10 mars 2022, toutes les personnes qui assistent à la réunion en personne doivent porter un masque, à l'exception des députés qui sont à leur place pendant les délibérations.
     Les députés et les témoins participant virtuellement peuvent s'exprimer dans la langue officielle de leur choix. Vous avez le choix, au bas de votre écran, entre le parquet, l'anglais ou le français.
     Pour ce qui concerne la liste des intervenants, le greffier du Comité fera de son mieux pour informer la présidence quand des mains sont levées, et nous tâcherons de respecter l'ordre dans lequel les membres ont demandé la parole, qu'ils participent à la réunion en personne ou de manière virtuelle.
     Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement de même qu'aux motions adoptées par le Comité le jeudi 3 mars 2022, le Comité entreprend son évaluation de la posture de sécurité du Canada par rapport à la Russie.
     Nous accueillons aujourd'hui par vidéoconférence, à titre personnel, M. James Fergusson, directeur adjoint du Centre d'études sur la défense et la sécurité de l'Université du Manitoba, M. Robert Huebert, professeur associé au département de sciences politiques de l'Université de Calgary et Mme Veronica Kitchen, professeure agrégée au département de sciences politiques de l'Université de Waterloo.
    Vous disposerez d'un maximum de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire, après quoi nous passerons aux questions.
     Bienvenue à vous tous.
     J'invite maintenant M. Fergusson à faire une déclaration préliminaire d'un maximum de cinq minutes.
     Monsieur, la parole est à vous.
     J'aimerais commencer mes brefs commentaires par un souci que j'ai. Il est très important, à mon avis, que le Comité et le gouvernement ne réagissent pas avec excès, voire panique, en ce qui concerne les vulnérabilités existantes, tant dans le cybermonde que dans le monde de la défense du Canada, face aux capacités russes.
     La guerre a certainement aiguisé l'attention, mais je soutiens que ces vulnérabilités existent depuis longtemps. Nous devons reconnaître, étant donné la relation antagoniste qui existe entre la Russie et le Canada, la Russie et l'Occident, qu'il ne s'agit pas d'une nouvelle guerre froide. Il y a d'autres problèmes et d'autres menaces qui doivent être pris en compte pour tenter de répondre à la partie russe de cette équation.
     En ce qui concerne le cybermonde, ce qui me préoccupe le plus, c'est la question de savoir si le gouvernement, et en particulier notre relation avec les États-Unis en tant que fonction de l'intégration économique et de l'intégration des infrastructures essentielles, est structuré correctement pour faire face aux vulnérabilités qui existent. Il n'y a pas d'organisme central comme dans le monde de la défense, en l'occurrence le NORAD, pour coordonner les réponses à d'éventuelles cyberattaques russes, que ce soit pour des motifs d'espionnage ou pour tenter de saper ou de saboter des infrastructures essentielles. Je crois que c'est une question importante. Pendant un certain temps, NORAD a cherché à être, ou a cru pouvoir être responsable du monde de la cybersécurité, de la cyberdéfense en Amérique du Nord. Je persiste à penser que c'est très problématique.
    Il doit y avoir une certaine restructuration, je crois, en particulier dans la relation avec les États-Unis, mais le cybermonde est un monde différent de celui de la défense, notamment parce que l'infrastructure essentielle est en grande partie entre les mains du secteur privé. Les problèmes du secteur privé, et bien sûr des entreprises, en ce qui concerne les menaces, ont une dynamique différente, les préoccupations du côté des entreprises étant différentes par rapport au gouvernement. Il ne s'agit pas seulement du gouvernement fédéral, mais aussi des gouvernements provinciaux.
     En ce qui concerne la désinformation, je ne suis pas de ceux qui croient que la désinformation russe, la désinformation chinoise ou les campagnes de désinformation de quiconque ont vraiment un effet. Je pense que c'est beaucoup monté en épingle et exagéré. L'espionnage existe et c'est une préoccupation, mais il s'agit de s'assurer que les cyberréseaux gouvernementaux et militaires sont fermés et sécurisés.
     Le Canada n'a aucune capacité, si ce n'est celle de refuser de son mieux l'accès à l'ensemble du spectre. Nous n'avons pas la capacité de riposter par cyberreprésailles, donc je pense que nous devons penser à ces choses en particulier.
     Dans le monde physique, le monde de la défense, je voudrais faire remarquer à au Comité que depuis longtemps, la doctrine stratégique russe est celle de l'utilisation en premier des armes nucléaires. Les Russes ont développé un nouvel ensemble de capacités au-delà de leurs missiles balistiques. Il s'agit de missiles de croisière de portée de plus en plus longue, de futurs missiles de croisière à propulsion nucléaire et d'engins hypersoniques, tous dotés d'une capacité nucléaire et conventionnelle. Il est difficile pour la défense, bien sûr, de savoir ce qui va venir, s'il en vient. Nous avons des lacunes et des vulnérabilités importantes qui existent depuis plus de dix ans en ce qui concerne la capacité du NORAD, et par conséquent du Canada, à détecter ces menaces, à les suivre, à les distinguer, puis à déclencher des capacités d'interception.
     Les intercepteurs sont un autre problème. Le F-35 est un pas en avant, mais il est largement nécessaire de repenser la façon dont le Canada, conjointement avec les États-Unis par l'intermédiaire du NORAD, entreprend et modernise la défense nord-américaine afin de réduire notre vulnérabilité et d'être en mesure de dissuader les menaces russes éventuelles. Cela aura une incidence sur la façon dont le Canada et les États-Unis — l'Amérique du Nord — répondent aux menaces qui viennent de l'étranger, comme nous le voyons aujourd'hui en Ukraine.
     Je vais m'arrêter là. Je répondrai avec plaisir à vos questions.

  (1110)  

    Merci beaucoup.
     J'invite maintenant M. Huebert à faire une déclaration préliminaire d'un maximum de cinq minutes.
     Monsieur, la parole est à vous.
    Merci beaucoup. C'est un honneur pour moi d'avoir été invité à contribuer à ce sujet très important.
     Dans les cinq minutes dont je dispose, j'ai cinq points à faire valoir.
     Le premier point est que la Russie est une menace existentielle pour le Canada et que cette menace s'accroît.
     Le deuxième point est que nous avons soit ignoré, soit apaisé la Russie depuis les signes du genre de menace auquel nous sommes confrontés, qui se développent depuis 2008. Nous ne parlons pas d'une menace qui s'est développée en février 2022. Nous ne parlons pas d'une menace qui s'est développée en mars 2014. Il s'agit d'une menace qui nous a clairement indiqué ce qu'elle signifie pour le Canada et ce qu'elle signifie en fin de compte pour la sécurité canadienne.
     Cette menace provient de Poutine et de son administration, qui considèrent que les activités et l'existence de l'OTAN menacent l'existence de son régime. L'OTAN, bien sûr, est l'alliance à laquelle le Canada participe, avec le NORAD, ce qui signifie que tout conflit qui implique l'OTAN impliquera le Canada.
     Maintenant, d'où vient cette menace? Il y a deux éléments majeurs qui déterminent la menace russe pour le Canada. Premièrement, nous avons vu Poutine, dès ses premiers jours en tant que président par intérim en 1999, prendre des mesures pour reconstituer l'empire russe. Qu'est-ce que je veux dire par là? L'une des toutes premières mesures qu'il a prises en tant que président par intérim a été d'intensifier la guerre en Tchétchénie, que les Russes avaient presque perdue en 1994. Ils ont ensuite réussi à mettre un terme aux mouvements de sécession. Nous assistons à une série de manoeuvres militaires visant à étendre le contrôle russe, en commençant par la Tchétchénie et la Géorgie, puis au début de la guerre en Ukraine, en 2014. Nous pouvons constater cet objectif.
    Deuxièmement, il y a la protection du régime. Là encore, nous avons eu tendance à ignorer cette menace, mais on peut voir comment le régime russe a agi contre toute opposition à l'intérieur du pays et même contre l'opposition qui se trouve physiquement à hors de la Russie.
     L'élément le plus important de cette menace que le Canada a en fait ignorée est peut-être le mode de guerre de la Russie et sa volonté d'utiliser ce mode de guerre pour atteindre ses objectifs politiques, ce qui la place sur une trajectoire de collision directe avec l'OTAN.
     Lorsque nous parlons de la Russie, il y a au moins trois niveaux dans ses processus de guerre multidomaines.
     Le premier, que M. Fergusson a également mentionné, est l'engagement russe à recourir à la guerre nucléaire tactique. Nous avons eu tendance à prétendre, après les initiations sous le régime de Gorbatchev d'importants mouvements de contrôle des armements, que cela était chose du passé. En réalité, dans la doctrine russe, la projection de force russe et l'application de force russe, nous voyons qu'elle modernise sa capacité tactique. Nous voyons la menace que Poutine brandit aujourd'hui d'utiliser des armes nucléaires. Ceci est illustré et amplifié par l'engagement de la Russie à apprendre également comment jeter de la poudre aux yeux aux pays de l'OTAN.
     Nous avons vu l'effet de démonstration lorsque les Russes ont montré comment ils pouvaient abattre l'un de leurs propres satellites avec leur capacité de missiles. En février de cette année, ils ont également montré comment ils pouvaient couper des câbles et, par conséquent, des communications. Tout cela démontre une tactique très concrète, de sorte que s'ils estiment effectivement nécessaire d'utiliser des armes nucléaires, nous serons touchés.
     Ils ont également démontré une très forte volonté de s'engager dans une guerre conventionnelle avec des moyens dont je crains que nous n'ayons pas une pleine compréhension. Certaines des évaluations qui sortent à ce stade de la crise ukrainienne illustrent le fait que nous n'avons pas prêté attention à la guerre de Géorgie, à la guerre de Tchétchénie et à la guerre de Syrie.
     M. Fergusson a déjà mentionné la cyberguerre. Je suis plus préoccupé par la militarisation des médias sociaux. Je crois en effet que les Russes posent un problème, à la lumière de certaines preuves apportées par nos alliés américains et britanniques.
     En définitive, nous sommes confrontés à une menace de la part de la Russie. Elle se développe et atteint le niveau d'une crise existentielle.
     Je vous remercie beaucoup.

  (1115)  

    Je vous remercie beaucoup.
     J'invite maintenant Mme Kitchen à prendre la parole et à faire une déclaration préliminaire de cinq minutes.
     La parole est à vous, madame Kitchen.
    Monsieur le président et membres du Comité, je vous remercie de m'avoir aimablement invitée à vous parler aujourd'hui de l'état de préparation du Canada aux menaces posées par la Russie.
     Mes remarques aujourd'hui s'appuient sur une carrière consacrée à l'étude de la sécurité canadienne dans un contexte mondial, et plus particulièrement sur le travail que j'ai effectué avec le Réseau canadien de recherche sur le terrorisme, la sécurité et la société et en tant que codirectrice de la sécurité nord-américaine au Defence and Security Foresight Group.
     La menace pour le Canada est exacerbée par le désespoir évident de la Russie. Des missiles au-dessus de l'Arctique canadien ou l'utilisation d'armes de destruction massive semblent plus probables qu'il y a quelques mois, même en tenant compte du fait que la Russie est clairement préoccupée par le fait que son invasion de l'Ukraine ne s'est pas déroulée comme elle l'avait prévu. Cela peut signifier que les perspectives d'élargissement de ses cibles pour inclure le Canada ou les alliés de l'OTAN peuvent être plus faibles à court terme, mais peut-être seulement à très court terme.
     Quelles sont les menaces les plus immédiates? Mes collègues ont déjà mentionné certaines des menaces militaires. Je veux me concentrer sur certaines des menaces immédiates mais plus indirectes à la sécurité publique canadienne.
     La campagne de désinformation de la Russie a été entravée par les sanctions qui ont écarté les médias russes de nos ondes, mais elle est toujours présente sur les médias sociaux et dans les forums fréquentés par les adeptes d'autres genres de complots populistes. L'arme qu'est la désinformation ne disparaît pas. L'une des leçons tirées de la recherche sur les sanctions est que celles-ci perdent de leur efficacité avec le temps, de sorte que nous devons nous attendre à ce que la Russie soit une menace permanente. Le Canada est une cible en tant que membre de l'OTAN, mais aussi en tant que partisan de longue date de l'Ukraine, incarné par la vice-première ministre, Chrystia Freeland.
     Les campagnes de désinformation russes relient l'invasion de l'Ukraine à QAnon et à d'autres théories de complot de l'État profond qui alimentent les crimes haineux et la méfiance à l'égard du gouvernement canadien. Un exemple concret est l'affirmation récente de QAnon selon laquelle le président Poutine a approuvé l'autorité souveraine de Romana Didulo, partisane de QAnon qui se prétend « reine du Canada ». L'attrait des théories du complot a été accru par la pandémie de COVID-19, et le sera encore plus par la désinformation russe, qu'elle vise directement le Canada ou non.
     Il est certain que les adeptes de ces théories du complot sont susceptibles de commettre des actes violents, mais l'action politique des partisans de l'extrémisme populiste peut aussi avoir des effets néfastes qui ne se transforment pas en menace pour la sécurité ou en crime. Nous en avons vu des exemples lors du récent convoi de camionneurs à Ottawa, où la congestion a empêché les ambulances de quitter le centre-ville et où les partisans du convoi ont inondé d'appels le système 911. Je ne dis pas, je tiens à le préciser, que le convoi de camionneurs était le produit de la désinformation russe, car je ne pense pas que nous le sachions, mais ce sont des exemples du genre d'effets qui menacent la sécurité humaine, exacerbé par la désinformation russe, et auxquels nous ne sommes pas habitués à faire face dans le contexte de la sécurité et du droit.
     La bonne nouvelle est que seul un petit nombre de Canadiens sera attiré par ces idées et influencé par la désinformation russe. La mauvaise nouvelle est que leurs effets sont facilement amplifiés par les robots, et que les solutions peuvent être à long terme. La connaissance des médias peut aider dans certains cas, mais dans de nombreux cas, la désinformation sera trop sophistiquée pour que nous puissions y échapper. Il est essentiel de travailler avec des entreprises privées, comme cela a déjà été mentionné, et avec nos alliés pour améliorer nos réponses technologiques à la désinformation. La création récente du groupe consultatif sur la haine en ligne est un pas dans la bonne voie, tout comme le groupe de travail sur les menaces en matière de sécurité et de renseignement qui visent les élections, dont certains ont suggéré qu'il devrait jouer un rôle [Difficultés techniques] dans ce domaine.
     Nous devons également trouver des moyens de faire baisser la température de la polarisation sociale causée en partie par l'insécurité humaine et exacerbée par la nécessité d'une action mondiale contre la Russie. L'augmentation du prix des carburants et des denrées alimentaires en est un exemple, mais le renforcement de la confiance dans les institutions par la transparence, la réforme et le changement culturel a également un rôle à jouer.
     Nous ne devrions pas sous-estimer la façon dont les actions de la Russie qui ont déstabilisé le monde ont nui à la sécurité du Canada. La Russie a porté atteinte aux Nations unies, commis des crimes de guerre, généré l'arrivée massive de réfugiés et menacé nos frontières et nos alliés. Le Canada est moins en sécurité dans un monde où le droit international n'est pas respecté.
    Il est facile de se laisser submerger par l'ampleur de la menace lorsque l'on contemple le tout, d'une attaque nucléaire éventuelle aux crimes haineux. La politique étrangère et la sécurité intérieure sont liées. Il est évidemment impératif de s'employer à protéger le Canada contre les menaces les plus directes — des missiles à la désinformation — et de contribuer à mettre fin à la guerre. Il est important d'accueillir les réfugiés et de veiller à ce que les services sociaux qui les soutiennent soient dotés de ressources suffisantes, mais il est tout aussi important de veiller à ce le traitement que l'on accorde aux réfugiés d'autres conflits soit perçu comme étant équitable, car ne pas le faire contribue à la méfiance envers le gouvernement.

  (1120)  

    Il vous reste 10 secondes.
    La nécessité de fournir une aide militaire ou de venir à la défense de nos alliés de l'OTAN en Europe met à rude épreuve nos forces militaires et nos choix quant à la façon de les utiliser.
     Le plus grand...
    Merci beaucoup. Je m'excuse encore une fois; c'est notre monde.
     Merci aux témoins pour ces exposés.
     Nous passons maintenant à la première série de questions des membres du Comité. Je commence par Mme Dancho.
     Vous avez six minutes. La parole est à vous, madame Dancho.
    Merci, monsieur le président.
     J'aimerais remercier nos témoins experts d'avoir partagé leur témoignage très crucial et important aujourd'hui.
     Ma première question s'adresse à M. Fergusson, un compatriote manitobain.
     Merci encore, monsieur, d'être ici.
     J'aimerais connaître votre point de vue. Au cours des derniers mois, nous avons beaucoup parlé de la modernisation du NORAD et du système d'alerte rapide dans le Nord. Pouvez-vous expliquer pourquoi il est important que nous modernisions ces systèmes et comment nous le faisons?
    La première réponse est que nous sommes vulnérables. Le système d'alerte du Nord est désuet et, en fait, il est trop limité pour faire face à l'environnement de menace qui entoure l'Amérique du Nord.
     Le gouvernement a tendance à parler de la modernisation du NORAD comme si c'était la même chose que la modernisation du système d'alerte du Nord. C'est beaucoup plus vaste que cela. Il s'agit de la modernisation de la défense de l'Amérique du Nord et de la mise en place d'un groupe de nouveaux ensembles de capteurs, terrestres, maritimes, aériens et spatiaux, ainsi que de la mise au point des capacités informatiques et du traitement des capacités analytiques afin de pouvoir intégrer une exigence en matière de défense dans tous les domaines. Le F-35 est un important pas en avant, mais ce n'est qu'une étape de la réflexion sur la nécessité d'une capacité de défense beaucoup plus compliquée, complexe et stratifiée, qui doit se déplacer plus au nord.
    Ce sont là des enjeux majeurs lorsqu'il s'agit de faire face aux vulnérabilités auxquelles le Canada est confronté, de concert avec notre proche allié, les États-Unis, et de veiller à ce que notre force de dissuasion, la force de dissuasion occidentale, la force de dissuasion dirigée par les États-Unis, la force de dissuasion mondiale, ne soit pas compromise en raison d'une vulnérabilité intérieure.
     Des adversaires potentiels comme la Russie peuvent prendre les populations canadiennes en otage, ce qui réduirait alors la volonté des gouvernements au Canada et ailleurs de réagir pour dissuader ces menaces à l'étranger.
     Ce sont les deux éléments clés à mes yeux.

  (1125)  

     Vous dites qu'une force de dissuasion dirigée par les États-Unis ne devrait pas être diminuée par une quelconque vulnérabilité au Canada.
     Je crois comprendre qu'à l'heure actuelle, avec la technologie d'armement avancée et les missiles hypersoniques de la Russie, nous ne serions même pas en mesure de détecter un missile entrant, étant donné notre système désuet. Est-ce exact? Est-ce là le type d'affaiblissement et de vulnérabilité que nous avons au Canada?
    Tout à fait. Le système d'alerte du Nord n'a pas la capacité de détecter un missile hypersonique survolant la région arctique et se dirigeant vers des cibles dans le Sud. Le système américain de détection précoce des missiles balistiques est optimisé pour les missiles balistiques à longue portée, pas pour les missiles hypersoniques, ce qui constitue une lacune importante.
     De plus, le système d'alerte du Nord peine. Il peut, potentiellement, détecter brièvement les missiles de croisière en vol, mais en raison de leur longue portée, ils seront lancés bien au-dessus de l'océan arctique, ce qui constitue une autre lacune importante en matière de détection. Si nous ne pouvons pas détecter, nous ne pouvons pas dissuader et nous ne pouvons pas défendre.
    Avons-nous un partage adéquat de l'information entre le ministère des Transports, les Forces armées canadiennes et les organismes nordiques? Avons-nous actuellement une coordination adéquate de l'Arctique entre les ministères, et voyez-vous cela comme un problème?
    Je pense que c'est une question importante. À l'heure actuelle, elle est plus ou moins ponctuelle, en fonction des questions précises qui se dégagent, en particulier dans l'Arctique.
     Si vous demandez qui est responsable de l'Arctique sur le plan bureaucratique, la réponse est tout le monde. Si tout le monde est responsable, personne ne l'est. Le gouvernement doit repenser la façon dont il va s'organiser pour veiller à ce que les divers organismes — et cela va du ministère de la Défense à Transports Canada, en passant par la Garde côtière, la Santé, l'Industrie, les Affaires étrangères, etc. — aient tous une part du gâteau, et cela doit être examiné sérieusement.
     Je comprends que le gouvernement n'aime pas faire une telle grande réorganisation, mais il faut se rappeler que nous sommes structurés pour un monde qui n'existe plus, avec l'Arctique comme fonction du changement climatique. Cette coordination et cette coopération doivent être établies rapidement.
     Essentiellement, vous recommandez qu'il y ait une agence centrale responsable de la défense de l'Arctique, et il n'y en a pas actuellement.
    C'est exact. Je l'appellerais un centre pour la sécurité de l'Arctique, dont la défense serait une composante.
    Bien. Merci beaucoup.
     Il me reste environ une minute et demie.
    Monsieur Huebert, si vous souhaitez compléter ce que le professeur Fergusson a dit, je vous offre avec plaisir ma minute et demie.
    Le seul domaine que M. Fergusson n'a pas eu le temps d'aborder est la dimension maritime des approches. Il a très bien parlé de l'hypersonique, mais nous savons que l'activité des sous-marins russes a augmenté. Leurs capacités de plongée profonde augmentent. Nous avons vu comment ils peuvent faire le câble, et le NORAD a le mandat de faire face à la menace sous-marine, mais c'est un domaine où nous sommes vraiment faibles.
     Les Russes ont même développé des véhicules sous-marins autonomes qui peuvent, soi-disant, parcourir 10 000 miles et transporter une ogive nucléaire. Encore une fois, ce sont tous des éléments du genre de guerre global que la Russie apporte maintenant à la table et que nous devons, en fin de compte, être en mesure de détecter et, comme l'a dit le M. Fergusson, d'y répondre complètement.
    Dans les 25 secondes qui me restent, avez-vous quelque chose à ajouter sur l'importance cruciale de renforcer nos défenses et sur les domaines dans lesquels nous devrions concentrer nos efforts, par exemple, dans le prochain budget?
    Tout d'abord, nous devons nous assurer que nous sommes conscients de ce domaine. C'est une menace qui s'exerce de tous les côtés actuellement. Cela signifie que l'entité entière du Canada est menacée par ces nouveaux systèmes d'armes.
     Si les Russes croient qu'ils ont un avantage que nous ne pouvons pas détecter ou auquel nous ne pouvons pas répondre, ils peuvent aller loin pour atteindre leurs objectifs, comme nous l'avons vu. Cela nous rend très vulnérables.
    Merci beaucoup.
     J'invite maintenant M. Chiang à commencer un bloc de six minutes.
     Monsieur Chiang, la parole est à vous. Allez-y, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
     J'aimerais remercier tous les témoins d'aujourd'hui d'avoir participé à l'étude importante que nous menons.
     Ma question s'adresse à M. Fergusson.
     Quels sont les avantages géographiques stratégiques dont jouit le Canada en matière de sécurité nationale? Comment pouvons-nous les utiliser à notre avantage?

  (1130)  

    La réponse comporte deux volets. Nous bénéficions de l'avantage stratégique de la géographie, qui limite les menaces militaires et de défense pour l'Amérique du Nord au domaine aérospatial. Elles peuvent être maritimes, en fonction des capacités de lancement maritime, mais en gros, nous pouvons concentrer notre attention sur ce domaine.
     Le deuxième grand avantage stratégique que nous avons en fonction de la géographie est que nous sommes situés à côté des États-Unis. Il s'agit d'une superpuissance mondiale qui possède les capacités nécessaires pour diriger la dissuasion mondiale à l'endroit de la Russie, mais aussi à l'endroit de toute autre menace importante pour le Canada. Nous bénéficions, bien sûr, dans notre relation avec les États-Unis, du soutien américain, de la fourniture de capacités américaines et du soutien financier américain pour la modernisation, à 60 %, des infrastructures au Canada.
     Tous ces éléments jouent en notre faveur tout en nous donnant accès à l'information et à la planification américaines, afin de garantir que l'intérêt canadien est pris en compte dans la construction du NORAD en tant que commandement binational.
    D'après vos observations, y a-t-il quelque chose que nous pourrions améliorer dans nos partenariats avec les Américains? Les Américains peuvent-ils améliorer le système NORAD, ou s'agit-il d'une entreprise conjointe?
    C'est une entreprise conjointe et, surtout, le NORAD est le moteur de la modernisation du NORAD, c'est-à-dire de la modernisation de la défense nord-américaine. C'est le centre de planification en ce moment, qui commencera à faire avancer les exigences, espérons-le, à court terme.
     En ce qui concerne le traitement de l'information, étant donné qu'il est centralisé au siège de NORAD à Colorado Springs, il est en grande partie américain. Il s'agit de ce que l'on appelle l'initiative Pathfinder, qui va essayer d'utiliser l'intelligence artificielle pour les quantités massives de données que le système de capteurs va déverser.
     C'est un aspect, mais l'élément clé pour moi est qu'en raison de la nature de l'environnement changeant de la menace — les origines et les plates-formes relatives aux missiles — il est temps que le Canada et les États-Unis s'assoient et commencent à penser sérieusement à un commandement de la défense nord-américaine fonctionnel et intégré. Nous avons une étroite coopération bilatérale en matière de défense avec les États-Unis dans les secteurs maritime et terrestre, mais en raison de la nature de l'environnement tous domaines, nous devons faire le pas que nous avons fait en 1957-1958 pour le monde aérien. Nous devons maintenant le transformer en un véritable commandement de défense nord-américain intégré.
    Merci beaucoup, monsieur Fergusson.
     Monsieur Huebert, pourriez-vous nous en dire plus sur certaines des menaces que la Russie représente pour le Canada en matière de cybersécurité et sur certaines des mesures nécessaires pour y faire face?
    Absolument. On a bien vu —  ce qu'ont confirmé certains rapports ouverts — que les Américains ont dû faire face à l'ingérence dans leur élection de 2016. Un comité de la Chambre des communes britannique a examiné ce qui s'est passé avec l'ingérence russe dans le Brexit, et il y a eu des études sur l'ingérence russe dans le mouvement indépendantiste castillan en Espagne.
     Ce que nous voyons, ou du moins ce qui semble se dégager — et c'est bien sûr quelque chose qui relève de la spécialité de Mme Kitchen —, c'est une concentration sur les domaines où la société peut être divisée. C'est ce à quoi les gens font référence quand ils parlent de l'armement des médias sociaux. Les Russes ont découvert... Et nous ne pouvons pas laisser les Chinois de côté, car ils sont également fortement impliqués, ou du moins c'est ce qui ressort des sources publiées. Ils essaient de diviser les sociétés en se concentrant sur les différentes voies existent. Ils espèrent ensuite que quelqu'un au sein de cette société reprendra cette cause et en deviendra le chef de file.
     C'est un peu le problème que mentionnait Lénine aux premiers jours du communisme. Les « idiots utiles » essayaient en fait de diviser la société. Aujourd'hui, l'effort consiste à trouver un moyen de séparer et de neutraliser tout soutien au genre d'actions collectives dont nous avons besoin.
     En ce qui concerne les autres cybermenaces, nous savons également que les Russes ont démontré une capacité croissante d'interférence dans divers systèmes électroniques et cybersystèmes d'autres États. Nous l'avons vu avec leur capacité d'influencer le système électrique ukrainien avant le début de la guerre en 2014. Nous le voyons dans d'autres endroits.
     Encore une fois, il est difficile de savoir exactement à quel point nous sommes bien défendus en étant capables de renforcer cet aspect de la cyberguerre. Il ne fait aucun doute que les Russes et les Chinois accordent de plus en plus d'attention à cette question, si les rapports des Américains et des Britanniques sont une indication de cette capacité.

  (1135)  

    Merci beaucoup.
    J'invite maintenant Mme Michaud à commencer son bloc de six minutes de questions.

[Français]

    D'abord, je remercie les témoins de leur présence. Leur expertise est plus que bienvenue, étant donné ce qui se passe en Ukraine. Nous avons de bonnes raisons d'être inquiets.
    Madame Kitchen, je vais commencer par vous.
    Vous avez parlé de menaces directes, mais aussi de menaces indirectes, notamment la désinformation, l'utilisation des médias sociaux, les campagnes d'hameçonnage et l'utilisation de rançongiciels.
    Aluminerie Alouette, à Sept‑Îles, l'une des plus grandes alumineries en Amérique, a été victime d'un rançongiciel russe à la fin du mois de février. Le groupe russe a revendiqué cette attaque en disant avoir récolté jusqu'à 20 % des données de l'aluminerie. Il disait que c'était directement en lien avec les sanctions économiques de l'Occident envers la Russie. Nous ne sommes pas à l'abri de ce genre d'attaques, qui mettent en péril nos entreprises, nos concitoyens, nos infrastructures essentielles et nos institutions démocratiques.
    Comment fait-on pour se protéger de cela? Pensez-vous que le Canada est prêt à faire face à ce genre de menaces?

[Traduction]

     Je pense qu'il y a plusieurs échelons à cela. Il y a l'échelon où les particuliers doivent assumer leur propre responsabilité, en veillant à utiliser des choses comme l'authentification à deux facteurs pour protéger leurs propres systèmes, et évidemment, cela s'applique aussi à l'échelon des organisations.
     D'un point de vue gouvernemental, il s'agit vraiment, comme on l'a déjà dit, d'une question de coopération, à la fois au sein du secteur privé et entre les autorités publiques. Il s'agit également de coopérer au-delà des frontières, en reconnaissant que ces types de menaces ne sont pas faciles à contenir à l'intérieur des frontières nationales, en raison de la nature transnationale des entreprises et des groupes.
     Comme l'a mentionné M. Huebert, la désinformation vise à inciter les gens à agir, plutôt que d'agir directement, et c'est une des façons de voir ce passage du cybermonde au monde physique.
     Il est certainement très important de veiller à ce que les logiciels qui font fonctionner les grands systèmes, comme les raffineries, soient à jour et protégés de l'Internet.

[Français]

    Une entreprise a justement offert gratuitement un service de protection de surveillance de crédit aux employés qui avaient été touchés. J'ai l'impression qu'il s'agit d'un service que l'entreprise a offert d'elle-même, de bonne foi, à ses employés. Cela dit, c'est une façon d'agir après coup, et non une façon de faire de la prévention.
    J'aimerais revenir sur les mesures que le gouvernement peut prendre pour protéger les entreprises. Que peut-il faire en amont? Que peut-il faire par la suite?
    On demande assurément des rançons; la plupart du temps, ces groupes veulent de l'argent. D'ailleurs, un article de Radio-Canada expliquait comment ce genre de groupe pouvait demander une deuxième rançon.
    De quelle façon le gouvernement peut-il intervenir? À votre connaissance, ce genre de service de protection de surveillance est-il présentement offert aux entreprises québécoises et canadiennes?

[Traduction]

    Je ne suis certainement pas une experte des attaques de rançongiciel et des cyberattaques de cette nature. Malheureusement, je ne suis pas au courant des services précis qui pourraient être offerts, mais encore une fois, il faut certainement essayer d'éliminer les vulnérabilités avant qu'elles ne se produisent... et je pense que le gouvernement peut jouer un rôle en fournissant des renseignements sur les types de menaces éventuelles et, en ce qui concerne la désinformation, il pourrait être utile de diffuser des renseignements précis combattre la tendance à se laisser prendre par des choses comme les escroqueries par hameçonnage et les attaques de rançongiciels.

  (1140)  

[Français]

    Je vous remercie, madame Kitchen.
    Monsieur Fergusson, avez-vous quelque chose à ajouter à ce sujet? Je sais que vous êtes spécialisé en défense. À votre connaissance, le gouvernement peut-il offrir ce genre de service? Doit-il moderniser les services qu'il offre pour protéger les institutions et les entreprises de ce genre d'attaque?

[Traduction]

    Je ne peux pas répondre avec précision. Je suis comme Mme Kitchen pour ce qui est de ma capacité de répondre à ces détails. L'agence clé qui pourrait fournir des renseignements et diffuser des avertissements est probablement le Centre de la sécurité des télécommunications, le CST, mais je ne sais pas exactement dans quelle mesure il a évolué dans ce domaine, car ses activités ont toujours porté sur le monde électronique.
     L'un des dangers ici — et je suis d'accord avec Mme Kitchen pour dire qu'il s'agit d'information — d'exagérer en laissant le gouvernement essayer de réglementer et d'imposer aux entreprises privées certaines procédures ou certains systèmes. Vous pensez peut-être à un système central. Ce serait problématique en raison des questions liées au secteur privé, et il faut donc faire attention.

[Français]

    Il ne s'agit donc pas nécessairement de s'ingérer ou d'imposer ce service, mais bien de l'offrir et de compter sur la bonne foi des entreprises pour qu'elles-mêmes mettent des services en place afin de se protéger.
    Est-ce bien ce que vous dites, monsieur Fergusson?

[Traduction]

    Vous avez le dernier mot sur cette question, Mme Michaud.

[Français]

    Je vous remercie.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à M. MacGregor.
     Monsieur, vous avez un créneau de six minutes. Allez-y, quand vous voudrez.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je vais faire écho à mes collègues en remerciant les témoins d'avoir contribué à éclairer l'étude de notre comité sur ce sujet très important et très intéressant.
    Monsieur Fergusson, j'aimerais commencer par vous. Le mandat de notre comité consiste précisément à examiner les lois, les politiques et les programmes des ministères qui sont responsables de la sécurité publique et de la sécurité nationale. Je tiens à ce qu'il se concentre sur notre sécurité interne et nos efforts.
     Pendant votre déclaration préliminaire, je prenais des notes et vous avez mentionné le fait qu'il n'y a pas d'organisme central pour répondre aux cyberattaques et qu'une certaine restructuration pourrait s'imposer. Aux États-Unis, il existe une soupe alphabétique de différentes agences de sécurité et de renseignement qui, à des degrés divers, ont la capacité de faire enquête sur les cyberattaques. Au Canada, la GRC, le SCRS et le CST disposent également de ces capacités.
     J'aimerais vous inviter à développer davantage ces remarques. Parlez-vous d'une plus grande coopération américano-canadienne au sein d'une agence qui s'occuperait de la cybersécurité à l'échelle de l'Amérique du Nord?
    Je ne dis pas forcément qu'il nous faut une agence, mais il nous faut certainement une structure avec les États-Unis. N'oubliez pas que les États-Unis sont structurés différemment. Toutes ces agences dont vous parlez sont regroupées sous un seul et même toit, le département de la Sécurité intérieure. Ils ont un peu d'avance sur nous, alors que, dans notre cas, la GRC s'occupe d'activités criminelles, car beaucoup de rançongiciels sont liés à la criminalité, car les pirates informatiques cherchent à faire de l'argent. Ensuite, nous avons le CST du côté du renseignement, ainsi que le SCRS, tous deux relevant de Sécurité publique.
    Le ministère de la Sécurité publique possède-t-il les pouvoirs et quels sont ses liens avec le département de la Sécurité intérieure des États-Unis? Y a-t-il des réunions régulières? Existe-t-il un comité bilatéral? On peut penser à diverses formes, par exemple, dans le monde de l'alerte maritime où il y a ce genre de choses, non seulement avec les États-Unis, mais aussi avec les pays du Groupe des cinq.
    Il est important, à mon avis, d'examiner ces éléments en détail pour savoir, par exemple, si nous sommes bien structurés, notamment parce que dans le cybermonde de l'Internet, les frontières n'existent pas. L'information qui entre au Canada entre aux États-Unis. Elle circule selon des schémas que je ne connais pas ou que je ne comprends pas, vraiment. Nos infrastructures essentielles sont intégrées à celles des États-Unis, de sorte que nous avons un intérêt commun en raison de notre étroite relation d'intégration avec les États-Unis.

  (1145)  

    Merci beaucoup pour cela.
     Madame Kitchen, j'aimerais passer à vous.
     Je vous remercie de vos remarques visant à informer notre comité des campagnes de désinformation. Quelques récits concernant l'agression russe qui émanent de certains éléments du Parti républicain des États-Unis et même de certaines organisations d'information, comme Fox News, ont certainement fait lever quelques sourcils. Les élections de mi-mandat aux États-Unis sont imminentes. Il pourrait y avoir un changement dans la façon dont le Congrès des États-Unis est gouverné après ces élections de mi-mandat.
     Compte tenu du succès de certaines campagnes de désinformation aux États-Unis, devons-nous, en tant que pays, examiner de près les pièges potentiels de cette campagne de désinformation aux États-Unis?
     Certainement. Il y a plusieurs façons de considérer cela, notamment l'effet qu'elle pourrait avoir sur l'orientation d'une élection américaine, à la fois pour ce qui est d'une éventuelle ingérence russe et, plus généralement, en ce qui concerne l'orientation du vote du peuple américain. Il va sans dire que certaines administrations et certaines positions politiques seront plus faciles à gérer pour le Canada que d'autres.
     Il faut également s'inquiéter du fait que les personnes qui s'inspirent de ce genre de récits pour prendre des mesures politiques, qu'elles atteignent le stade d'activité criminelle ou d'activité de sécurité, pourraient se trouver des deux côtés de la frontière. Les paysages médiatiques du Canada et des États-Unis sont très étroitement intégrés. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de causes distinctes dans les deux pays, mais il y a des groupes qui s'inspirent mutuellement de part et d'autre de la frontière, et aussi des groupes qui existent simplement à l'échelle transnationale et qui pourraient agir.
     Le fait que le Canada maintienne et diversifie ses relations avec les États-Unis peut contribuer à faire en sorte que nos intérêts continuent d'être entendus, même si nous changeons de gouvernement.
    Merci.
     J'ai une dernière question pour M. Huebert. Y a-t-il une chose que nous devrions examiner en tant que comité ou au sujet de laquelle nous devrions présenter des recommandations au gouvernement canadien en ce qui concerne l'implication de la Russie dans les crimes financiers au Canada, le blanchiment d'argent, et ainsi de suite? Y a-t-il quelque chose que vous pourriez dire au Comité sur ce sujet particulier?
    Cela ne se limite pas à l'implication de la Russie. Il est question de criminalité internationale et nous soupçonnons aussi une implication de la Chine. Bien sûr, la transparence entre en jeu. L'une des difficultés que nous avons toujours rencontrées, lorsqu'il s'agit de déterminer précisément l'implication d'autres acteurs dans le système financier, c'est qu'il est très difficile de la retracer, que ce soit par rapport au régime réglementaire ou à toute intervention gouvernementale.
    Si j'ai une affirmation générale à faire à ce sujet, c'est qu'il faut augmenter la visibilité des transactions et mettre de côté la confidentialité qui protège souvent les actions de cette nature.
    Merci beaucoup.
    Chers collègues, ainsi se termine notre première série de questions. Un coup d'oeil rapide à l'horloge me dit que si je réduis de moitié le temps de chacun au deuxième tour, nous finirons plus ou moins à l'heure.
    Pour commencer, je demanderais à M. Lloyd de nous accorder deux minutes et demie.
    La parole est à vous, monsieur.
    Merci, monsieur le président.
    Ma première question s'adresse à M. Fergusson.
    Compte tenu de la campagne de désinformation, certaines personnes réclament la censure. Selon vous, y a-t-il un risque que cela se retourne contre nous si le gouvernement s'engageait dans la censure?
    Il est certain que cela se retournerait contre nous. Comme je l'ai dit, je ne suis pas d'accord avec le fait que les campagnes de désinformation — elles ne viennent pas toutes de la Russie; nos campagnes d'information posent aussi un problème — aient une incidence aussi importante en fait d'exploitation des différences sociales. Cependant, si vous...
    Merci.
    J'ai toujours pensé que la meilleure façon de combattre la désinformation consiste à lui opposer des informations véridiques et je vais donc poser la même question à Mme Kitchen.
    Pensez-vous qu'il serait plus efficace de combattre la désinformation par une campagne vigoureuse de diffusion d'information vraie? Pensez-vous que la censure serait efficace ou qu'elle se retournerait contre nous?
    Je pense bien sûr que la communication d'une information véridique est toujours une bonne stratégie, mais pour qu'une information véridique soit efficace, elle doit provenir d'institutions auxquelles les gens font confiance. Il est d'une importance vitale de maintenir cette confiance dans les institutions par la transparence, comme M. Huebert l'a dit.
    Pensez-vous que la censure minerait la confiance dans ces institutions?
    C'est fort possible.
    Merci. Il me reste une minute environ.
    Je suis simplement étonné que l'Amérique du Nord jouisse d'une telle supériorité en matière de technologie de l'information et il est évident que nous devons nous employer à l'améliorer. Sur le plan militaire, avec nos alliés — et ceci s'adresse à M. Fergusson — nous jouissons aussi d'une énorme supériorité. Je suis stupéfait de voir les images tournées en Ukraine où la technologie supérieure de la Russie est abattue par une technologie relativement bon marché comme les MANPADS et les Javelins.
    Je m'interroge cependant sur l'élément manquant, la sécurité économique. Il semble que nous ayons un trou béant alors que l'Europe est complètement dépendante du pétrole et du gaz de la Russie ainsi que du cuivre et du palladium.
    Selon vous, qu'est-ce que le gouvernement aurait pu mieux faire au cours des 20 dernières années dans ce pays — au fil des nombreux gouvernements — pour remédier à cette insécurité économique?

  (1150)  

    Je ne sais pas si le gouvernement aurait pu faire grand-chose. N'oubliez pas que nous vivons dans un contexte de mondialisation. C'est le revers de la médaille de la mondialisation. Il ne s'agit pas seulement de ressources russes fournies aux Européens, mais de la façon dont le marché international est structuré et fonctionne.
    Nous aurions certainement pu être plus conscients de ce risque; je ne pense pas qu'on y a accordé beaucoup d'attention... Nous avons tendance à voir la mondialisation comme une bonne chose, du point de vue économique, mais nous n'avons pas prêté attention à la sécurité.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais inviter maintenant M. McKinnon à prendre la parole pendant deux minutes et demie.
    Allez-y, monsieur McKinnon.
    Merci, monsieur le président.
    Ma question s'adresse à M. Fergusson.
    Dans notre monde, bien sûr, nous sommes de plus en plus interconnectés électroniquement. Cela comprend les communications nationales et internationales. Pour aller de A à B, nos messages finissent par être acheminés un peu partout et entre les deux.
    Le cryptage est la fonctionnalité de base qui assure notre sécurité. L'un de ses aspects clés est qu'à un moment donné, un cryptage asymétrique entrera en jeu. Nous savons que le cryptage asymétrique comporte une partie publique et une partie secrète et que la partie secrète peut être obtenue par la force brute, si l'adversaire a suffisamment de temps et de volonté pour le faire.
    Des acteurs étatiques comme la Russie, la Chine, etc. possèdent des installations informatiques massives dotées d'un traitement parallèle massif. Je me demande ce que nous pouvons faire pour modifier notre infrastructure de communication de manière à protéger la sécurité de nos communications et notre cryptage.
    C'est une vaste question et vous avez une minute et demie.
    Je peux seulement faire des commentaires en ce qui concerne la défense ainsi que le maintien de systèmes cryptés fermés, hautement cryptés et les plus perfectionnés dans le monde du renseignement et de la défense.
    Encore une fois, le gouvernement ou la Défense ne vont pas nécessairement crier sur les toits qu'ils sont piratés et que leurs systèmes ont effectivement été violés. Toutefois, le processus est interactif, pas tellement pour le Canada, mais certainement pour nos autres alliés que les États-Unis, de sorte qu'il y a toujours la possibilité que nous ripostions. Ce n'est pas nouveau. C'est ce qu'on appelait autrefois la « guerre électronique et contre-électronique ». Elle a évolué. Elle est devenue plus sophistiquée et plus rapide en raison de la nature de l'élément technologique et des changements qui sont survenus.
    Il n'y a pas de garantie totale, mais le plus important est de nous assurer de savoir quand nous sommes piratés. Le plus grand danger n'est pas le piratage, mais l'implantation de virus, comme celui qui a été implanté dans le système nucléaire iranien il y a des années, et...
    Je vous remercie.
    J'aimerais maintenant inviter Mme Michaud à prendre la parole pour une minute et 15 secondes.

[Français]

     C'est généreux de votre part, monsieur le président. Je vous remercie beaucoup.

[Traduction]

    Tirez-en le meilleur parti.

[Français]

    Je vais me tourner vers M. Huebert.
    Comme vous le disiez, la cybercriminalité est un monde qui évolue tellement rapidement. Compte tenu de cela, et comme vous connaissez la préparation du Canada, croyez-vous que nous sommes en mesure de faire face au pire scénario possible, que la menace provienne de la Russie ou d'un autre pays?
    En matière de sécurité publique et de défense nationale, croyez-vous que nous soyons prêts?
    Si ce n'est pas le cas, quelle devrait être la priorité du gouvernement?

[Traduction]

    Nous ne savons jamais si nous sommes prêts.
    À l'Université de Calgary, nous avons été piratés par un rançongiciel, même si nous avons des informaticiens et des personnes qui font... Nous n'y étions pas préparés. En fait, tout notre système informatique a été arrêté.
    Une partie du problème tient au fait que tant que nous ne connaissons pas le niveau de l'intrusion… l'élément nécessaire, c'est une capacité très bien financée de contre-mesures fondées sur la guerre de l'information.
    Qu'il s'agisse du CST ou de qui que ce soit à qui vous confiez cette tâche, c'est ce sale boulot qu'il faut faire au quotidien... Il faut s'assurer d'avoir les meilleurs analystes informatiques capables d'examiner et de réévaluer constamment. C'est ennuyeux. Le travail ne peut pas être partagé, alors des gens comme moi, comme Mme Kitchen et M. Fergusson ne sauront pas à quel point il est bon ou faible, mais c'est quelque chose que le gouvernement doit maîtriser parfaitement.

  (1155)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur MacGregor, vous disposez de 75 précieuses secondes. Allez-y.
    Merci.
    Très brièvement, je m'adresse à Mme Kitchen au sujet de la désinformation.
    De nombreux parallèles ont été tracés entre cette étude et notre étude sur l'extrémisme violent à motivation idéologique et la façon dont les grandes sociétés, les entreprises de médias sociaux et les entreprises comme Amazon peuvent être exploitées en utilisant leurs algorithmes. Même dans certains cas comme Amazon, leurs plateformes servent à vendre de la propagande haineuse. Un acteur étatique déterminé pourrait tirer parti de cette situation.
    Si ce n'est pas par la censure — et je pense qu'il y a des arguments à faire valoir pour supprimer l'information fausse — de quelle manière le gouvernement canadien peut-il s'assurer concrètement que les entreprises de médias sociaux ne seront pas vulnérables à ce genre d'attaques?
    C'est là qu'une éventuelle réglementation devient utile pour nous permettre de nous débarrasser des bots, d'éléments qui agissent de façon automatique. Il est important de collaborer avec les entreprises ouvertes à l'idée d'essayer de freiner l'extrémisme, et elles sont nombreuses, sur leurs plateformes. Il est aussi important de reconnaître qu'il existe une série de plateformes secondaires où ce type de désinformation se propage, qui sont un peu plus clandestines et moins disposées à collaborer avec les gouvernements.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Shipley, je vous laisse la parole pour deux minutes et demie de questions, dès que vous êtes prêt.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins de leur présence.
    J'aimerais adresser ma première question à MM. Fergusson et Huebert.
    J'essayais frénétiquement de prendre des notes pendant que vous parliez tous les deux. Je vous ai trouvé très intéressants et instructifs. Nous n'avons pas le temps de tenir ici un long débat public. J'aimerais obtenir vos réponses à ces deux questions, si vous voulez bien.
    Monsieur Fergusson, vous avez déclaré que la désinformation est exagérée et ne constitue pas une menace réelle. C'est ce qui se rapproche le plus d'une citation que j'ai pu griffonner à ce moment.
    Monsieur Huebert, j'ai retenu de certaines de vos citations que vous êtes très préoccupé par les médias sociaux russes et leur militarisation.
    Je sens qu'il y a là une certaine divergence d'opinions. Je pourrais peut-être obtenir des précisions, d'abord de M. Fergusson, sur la menace qu'il perçoit, puis de M. Huebert, si vous voulez bien.
    Merci, monsieur le président.
    Ma réponse à cette question se résume simplement au manque de confiance du public. Il aura certainement de faibles proportions d'extrémistes qui peuvent être manipulés, comme Mme Kitchen l'a souligné, mais il y a déjà un terreau fertile pour la manipulation.
    Si vous prenez la plus grande partie de la population, qui est plus active que moi sur les réseaux sociaux, je pense que nous pouvons lui faire confiance. Je pense que les gens comprennent quand on les mène en bateau. Le problème de la radicalisation et de la violence d'une petite minorité existait probablement avant toute désinformation, quelle que soit la définition que vous en donnez. La désinformation d'une personne est la vérité d'une autre personne. C'est compliqué.
    Je pense que nous entretenons trop un sentiment d'épouvante, de panique, si vous voulez, autour du phénomène sans prendre de recul et dire… Pour parler franchement: Trump a remporté les élections de 2016 et ce n'est pas grâce aux Russes. C'est une excuse que l'on sort après coup pour expliquer cette anomalie que les élites ne pouvaient pas comprendre.
    Merci, monsieur Huebert.
    Là où je ne suis pas d'accord et où je pense que nous faisons preuve de complaisance, c'est lorsque nous regardons le type de conseil que nous voyons maintenant dans la société. Autrement dit, il ne fait aucun doute que cela a déjà été tenté. Nous l'avons appris au cours de la Guerre froide, mais maintenant, en raison des algorithmes et de l'efficacité de ces nouveaux systèmes, je pense que les divisions au sein de la société canadienne sur la question de la COVID illustrent à elles seules que ce n'est pas simplement une sorte de majorité silencieuse au milieu qui va toujours faire la part des choses. Nous voyons les divisions au sein des familles et entre amis et c'est directement une partie du problème.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Noormohamed, vous disposez de deux minutes et demie pour poser la dernière question. Allez-y.

  (1200)  

    Étant donné le peu de temps dont nous disposons et la portée limitée de notre étude, j'ai une question pour Mme Kitchen.
    Pouvez-vous prendre un peu de temps pour parler des préoccupations particulières liées à la désinformation et de la façon dont elle commence à avoir une incidence au Canada et, en particulier, la façon dont vous entrevoyez son incidence sur l'action au Canada? Y a-t-il des liens précis avec des acteurs internationaux, en particulier la Russie?
    J'aimerais entendre vos réflexions à ce sujet.
    M. Huebert a déjà donné des exemples internationaux. Nous savons aussi que SITE a décrit des tentatives d'influencer l'élection de 2019 de l'étranger. Nous avons vu des individus qui ont été inspirés par la propagande russe. Par exemple, il y a eu des menaces à l'encontre du premier ministre. J'ai un trou de mémoire sur la date, c'était plus tôt cette année.
    L'importance du phénomène tient à son interaction avec les tendances qui existent déjà dans la société canadienne, comme l'appel à la désinformation sur la COVID. Nous verrons la Russie et d'autres acteurs étrangers agir en essayant d'exacerber ces polarisations sociales.
    C'est un problème canadien exacerbé par l'ingérence étrangère.
    Merci, monsieur le président.
    Je pense que mon temps est écoulé.
    En fait, il vous en reste environ 45 secondes.
    Mme Kitchen, pourriez-vous poursuivre? Vous avez dit que la COVID était l'une des poches de désinformation.
    Où trouve-t-on certaines de ces autres poches qui commencent vraiment à se répandre, selon vos observations?
    Il y a certainement la violence que nous avons vue dans le contexte de la COVID contre des Canadiens d'origine asiatique et d'autres minorités canadiennes. Nous pourrions voir ce phénomène se reproduire, peut-être contre les Russes ou les Ukrainiens au Canada.
    Nous pourrions aussi voir différents autres cas où des personnes racisées sont ciblées en raison de l'attrait de la suprématie blanche qui est en partie promue par la vision du monde de Poutine, soit bien sûr que la Russie est le vrai chef de file de la civilisation occidentale. Cela contribue également à alimenter les extrémistes de droite.
    Merci beaucoup.
    Au nom des membres du Comité et, en fait, de tous les parlementaires, j'aimerais remercier les témoins. Collectivement, vous possédez littéralement des dizaines d'années d'expérience et une compréhension très profonde des complexités de ces questions. Nous vous sommes très reconnaissants de nous avoir transmis vos connaissances et vos réflexions ce matin.
    Chers collègues, nous allons faire une courte pause de cinq minutes pour accueillir un nouveau groupe de témoins, puis nous reprendrons la réunion.
    À ceux qui nous quittent maintenant, merci beaucoup d'avoir participé à cette réunion.
    Mesdames et messieurs, nous nous reverrons dans environ cinq minutes.

  (1200)  


  (1205)  

    Mesdames et messieurs, nous reprenons le débat. Je suppose que tout le monde est là où il est censé être.
    Nous accueillons maintenant par vidéoconférence M. Ahmed Al-Rawi, professeur adjoint à l'Université Simon Fraser. J'aimerais accueillir aussi M. Alexander Cooley, professeur de sciences politiques lauréat du prix Claire Tow au Barnard College et membre auxiliaire du corps professoral de Chatham House ainsi que M. David Perry, président de l'Institut canadien des affaires mondiales.
    Nos invités disposeront d'au plus cinq minutes pour leur déclaration liminaire après quoi nous aurons deux séries de questions. Je vais d'abord inviter M. Al-Rawi à faire une déclaration liminaire d'au plus cinq minutes.
    La parole est à vous, monsieur.

  (1210)  

    La désinformation russe au Canada est un problème récurrent. Le gouvernement russe a un intérêt constant à s'ingérer dans la politique canadienne en utilisant une gamme d'opérations d'information, de propagande et de désinformation.
    À l'aide d'ensembles de données accessibles au public et publiées il y a quelques années par Facebook et Twitter, j'ai constaté que les trolls russes étaient les plus investis dans le ciblage du Canada, bien plus que les trolls iraniens et les autres trolls d'État de la Chine et de l'Arabie saoudite. Ces opérations d'information ont été menées à l'aide d'utilisateurs de médias sociaux soigneusement dissimulés, au moyen de faux sites Web ainsi que de chaînes d'information comme RT, Russia Today et Sputnik.
    Par exemple, l'Internet Research Agency, IRA, a créé de fausses pages Facebook et acheté des publicités ciblant souvent les Canadiens en 2016 et même avant. De faux sites Web comme peacedata.net qui semblaient légitimes ont aussi servi à diffuser des messages favorables à la Russie. J'ai également découvert en 2017 que des trolls russes ont même fait la promotion d'un rassemblement à Ottawa contre le gouvernement libéral.
    Dans mes recherches, l'analyse du contenu de messages sur les médias sociaux a clairement montré que la position idéologique du gouvernement russe s'harmonisait bien avec des groupes et des individus d'extrême droite au Canada.
    À mon avis, cette stratégie d'opération d'information vise principalement à semer la division, à créer des tensions et à confondre les gens sur le vrai ou le faux. Par exemple, les principales cibles des trolls russes étaient les libéraux, notamment en raison de leurs politiques d'immigration, en s'attaquant principalement à Justin Trudeau et Chrystia Freeland. La deuxième cible est liée aux musulmans canadiens, l'accent étant mis sur les députés issus de minorités visibles, suivis d'autres cibles dans des dossiers comme les réfugiés, la diversité et le multiculturalisme.
    Aujourd'hui et en raison de la pression croissante exercée sur les entreprises de médias sociaux conventionnelles, les activités publiques des trolls russes ont été relativement réduites, car il y a un certain examen et une prise de conscience générale. Cela vaut pour la façon dont les organes d'information de l'État russe comme RT ont été signalés comme des promoteurs de la désinformation et parfois interdits d'activité. Cependant, je pense personnellement que la décision du CRTC, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, d'interdire RT ne reste que symbolique et inefficace, car il est possible de regarder RT de plusieurs autres façons au Canada et ailleurs.
    Nous pouvons voir aujourd'hui une stratégie d'information différente qui utilise les missions diplomatiques du gouvernement russe comme principal vecteur de diffusion de la propagande. Par exemple, l'ambassade de Russie à Ottawa gère son propre compte Twitter ainsi que des canaux publics récents sur Telegram et VK. L'ambassade s'est employée à diffuser de la désinformation et à promouvoir le point de vue russe sur les événements qui se déroulent en Ukraine. Au lieu de s'appuyer fortement sur RT ou Sputnik, l'ambassade republie principalement des gazouillis du ministère des Affaires étrangères de la Russie et d'autres comptes et missions diplomatiques russes dans le monde entier ainsi que d'alliés étrangers de la Russie, comme la Chine.
    De plus, l'ambassade publie fréquemment des déclarations attaquant les responsables canadiens ainsi que les médias nationaux pour ce qu'elle considère comme des attitudes partiales à l'égard de la guerre en Ukraine. Tout reportage factuel sur la guerre est considéré comme un exemple de « fausses nouvelles » et le ministère des Affaires étrangères de la Russie instrumentalise l'expression elle-même pour servir les intérêts du régime de Poutine.
    L'une des caractéristiques les plus troublantes de cette campagne de désinformation menée par le gouvernement russe est liée à la militarisation des pratiques de vérification des faits. Dans un récent gazouillis, l'ambassade à Ottawa a annoncé le lancement d'un nouveau site Web appelé WarOnFakes.com, ou « la guerre contre les infox », qui tente de donner de la crédibilité à la propagande officielle russe. Le site Web fournit prétendument des services de vérification des faits concernant la guerre en Ukraine et est proposé en cinq langues: français, anglais, espagnol, arabe et chinois, ce qui montre bien que les principaux groupes ciblés sont les publics non russophones.
    Enfin, l'ambassade tente de créer avec le public canadien un lien direct que le CRTC ne peut bloquer. Par exemple, l'ambassade envoie souvent des messages directs à des Canadiens par l'entremise de son canal Telegram et de son compte Twitter. En fait, plus de 3 000 utilisateurs de Twitter qui ont republié des messages récents de l'ambassade se sont révélés être des utilisateurs canadiens ont contribué à leur propagation.
    Bien que l'attention officielle et publique se porte sur l'interdiction des chaînes d'information RT et Sputnik, le fait est que les ambassades russes créent leur propre écosystème d'information au moyen de faux sites de vérification des faits comme WarOnFakes.

  (1215)  

    La désinformation officielle russe a évolué pour s'appuyer fortement sur plusieurs sources, y compris les médias sociaux de ces missions diplomatiques...
    Merci beaucoup.
    J'aimerais inviter maintenant M. Cooley à faire une déclaration liminaire de cinq minutes.
    Monsieur, quand vous êtes prêt.
    J'aimerais concentrer mes remarques sur deux groupes distincts de réseaux mondiaux et transnationaux que la guerre a mis en évidence et qui, selon moi, trouvent des échos dans les sociétés occidentales, y compris le Canada. Ils posent également des défis stratégiques importants.
    Le premier dont vous avez certainement entendu parler et sur lequel vous avez délibéré est le groupe des oligarques. Nous avons vu les oligarques russes être visés par des sanctions de la part du Royaume-Uni, du Canada, de l'Union européenne et des États-Unis. Ici, nous avons reconnu d'une certaine manière que nous avons perdu un pari que nous avions fait il y a longtemps, à savoir l'idée que si les oligarques avaient accès aux marchés boursiers, aux conseils d'administration et aux cercles philanthropiques occidentaux, leur comportement serait modéré et ils pourraient, d'une manière ou d'une autre, inciter le Kremlin lui-même à la modération.
    Nous sommes confrontés à deux défis avec les oligarques. L'un consiste à nous attaquer à leurs avoirs et à les geler et l'autre concerne leur réputation. Dans ces deux domaines, nous devons également composer avec des professionnels des services qui travaillent ici en Occident, au Royaume-Uni, aux États-Unis et au Canada et qui facilitent ces deux processus. Ils prennent leur argent, le placent dans des biens immobiliers de luxe, achètent des sociétés-écrans et cachent l'argent dans des réseaux complexes de comptes bancaires. Il y a aussi les agences de relations publiques, les sociétés de gestion de la réputation et les lobbyistes qui tentent de les faire passer non pas pour des personnes politiquement exposées ayant des liens avec le Kremlin, mais pour des philanthropes mondiaux. C'est un défi pour toutes les sociétés occidentales.
    Comme le deuxième groupe est peut-être moins présent sur votre radar, je vais m'y attarder un peu plus. Il s'agit de cette communauté émergente de nouveaux exilés russes que la guerre a créés. Certes, nous avons vu un flux constant d'opposants et de journalistes qui vivaient en Russie sous le règne de plus en plus autoritaire de Vladimir Poutine, mais les bouleversements du mois dernier sont vraiment frappants. Je me concentrerai ici sur trois groupes distincts.
    Premièrement, des centaines de journalistes fuient la Russie. Ils créent leurs propres chaînes et réseaux. Nous avons déjà un certain nombre de médias indépendants russes distincts qui opèrent depuis l'étranger, depuis les pays baltes ou par l'entremise de chaînes Telegram. Je pense qu'il faut les soutenir et les encourager ouvertement, car ils sont la seule source d'information indépendante en langue russe.
    Le deuxième groupe est constitué de dizaines de milliers de travailleurs de l'informatique, dont 50 à 70 ce mois-ci et peut-être 70 autres le mois prochain, ont fui le pays. On les trouve dans des pays comme la Géorgie, l'Arménie ou l'Ouzbékistan. Comme le gouvernement russe a sanctionné les grandes entreprises technologiques et déclaré Facebook indésirable, nous assistons également à un exode de travailleurs qualifiés hors du pays.
    Le troisième groupe est constitué de centaines d'universitaires et d'analystes de groupes de réflexion qui ont quitté le pays eux aussi, car ils ne veulent pas subir les conséquences de 15 ans de prison pour avoir dénoncé cette guerre. Ils sont également exilés dans des endroits comme l'Europe de l'Est et Istanbul et ils cherchent eux aussi de nouveaux types d'affiliations et de ports d'attache universitaires.
    Je vous suggère de réfléchir à des stratégies pour améliorer et renforcer ces nouveaux réseaux d'exilés qui tentent de promouvoir une pensée indépendante et d'influer, dans la mesure où ils peuvent le faire depuis l'extérieur, sur la propagande de désinformation à l'intérieur du pays. Je vous suggère aussi de réfléchir aux types de politiques qui peuvent être adoptées pour faire de nous un multiplicateur de forces au moment où le Kremlin tente de se dissocier de l'Ouest, pour faire en sorte que ces voix indépendantes et critiques puissent être encouragées depuis l'extérieur du pays.

  (1220)  

    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant me tourner vers M. Perry.
    Monsieur, vous disposez de cinq minutes pour faire une déclaration liminaire. Dès que vous êtes prêt, la parole est à vous.
    Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs, de m'avoir invité à prendre la parole aujourd'hui.
     Les événements horribles que nous voyons se dérouler en Ukraine montrent que la Russie est prête à utiliser son armée modernisée sans provocation, d'une manière fondamentalement contraire aux intérêts et aux valeurs du Canada et que nous avons du mal à comprendre au Canada.
     En réaction, nous avons agi avec prudence et ingéniosité pour aider l'Ukraine à se défendre et à dissuader toute autre agression russe en Europe en renforçant les défenses de l'Europe de l'Est. Nous devrions agir avec la même urgence et la même ingéniosité pour garantir que le Canada et l'Amérique du Nord soient mieux défendus contre une éventuelle agression russe plus près de chez eux. La Russie défie les intérêts canadiens et occidentaux en de nombreux endroits du monde et avec de nombreux moyens différents, y compris les cyberattaques et la désinformation.
    Dans mes propos aujourd'hui, je me concentrerai sur l'effet de la modernisation militaire de la Russie au cours des deux dernières décennies et sur la menace accrue qu'elle représente pour le Canada, les États-Unis et l'Amérique du Nord. Les aéronefs, les navires et les sous-marins russes peuvent désormais transporter des missiles de croisière avancés capables d'atteindre avec précision des cibles en Amérique du Nord à grande distance, comme d'autres missiles russes à longue portée peuvent le faire, y compris des planeurs hypersoniques.
     À l'heure actuelle, nous ne pouvons pas détecter et suivre suffisamment bien ces menaces ni les empêcher d'endommager des cibles ici au Canada. Nous devons améliorer rapidement notre capacité à faire les deux. Par suite de la stratégie de défense « Le Canada d'abord » en 2008, et de « Protection, Sécurité, Engagement » en 2017, le Canada a progressivement amélioré sa capacité de défense, notamment par l'achat d'une flotte d'avions de chasse modernes, de ravitailleurs en vol, de plateformes de surveillance et d'une flotte navale moderne.
     Ces dernières semaines, j'ai été heureux d'apprendre que le gouvernement s'apprête à s'occuper davantage de la défense du continent en modernisant le NORAD et la défense continentale. Cela comportera vraisemblablement un nouveau cadre stratégique et une combinaison de nouveaux équipements, de personnel pour les faire fonctionner, d'infrastructures nouvelles ou améliorées, de formation et d'autres formes de soutien nécessaires pour transformer ces équipements et ce personnel en une capacité militaire utile.
     Permettez-moi de suggérer maintenant quelques mesures que nous pouvons prendre pour concrétiser cet engagement de longue date d'agir de concert avec nos alliés américains pour renforcer la défense continentale, en me concentrant sur l'acquisition des équipements nécessaires pour y parvenir. Je pense toutefois que certains de ces éléments sont applicables aux autres activités que nous pourrions envisager.
     Premièrement, la défense du Canada doit être une priorité du gouvernement. Les gouvernements successifs ont renforcé notre capacité à défendre le Canada au cours des dernières décennies et nous discutons de la modernisation de la défense continentale depuis des années, mais ces efforts n'ont pas progressé avec l'urgence requise.
     Par conséquent, le rythme de mise en oeuvre a été en deça des attentes. Des fonds n'ont pas été dépensés année après année et les projets d'équipement nécessaires ont été retardés. La guerre en Ukraine illustre l'importance de disposer d'une armée moderne compétente au moment où la Russie ou toute autre puissance militaire précipite une crise internationale, et non pas lorsque nous, au Canada, décidons de le faire.
     Nous devons poursuivre la mise en oeuvre de la stratégie « Protection, Sécurité, Engagement » et poursuivre la modernisation de la défense continentale avec une urgence que nous n'avons pas vue récemment. Pour ce faire, ce dossier devra devenir une priorité absolue du gouvernement, établie par le premier ministre et le Cabinet et clairement communiquée à l'ensemble du gouvernement du Canada et à tous ses ministères et organismes.
     Deuxièmement, nous avons besoin d'un budget de défense plus important dès maintenant. Les plans actuels de dépenses pour la défense du Canada sont insuffisants pour faire face aux menaces que la Russie et d'autres puissances comme la Chine représentent. Comme les forces armées du monde entier, nos forces armées doivent composer avec des pressions inflationnistes sans précédent qui sont exacerbées par les retards d'acquisition. Nous avons aussi des déficits persistants en matière de maintenance et d'infrastructure, ainsi que des pénuries de personnel.
     Pour l'avenir, la défense continentale est un passif non financé que le budget 2022 doit aborder. Au-delà de nos besoins immédiats en matière de dépenses, le montant que nous consacrons à la défense envoie un signal à nos alliés et à nos adversaires quant à notre engagement envers notre propre défense, ainsi qu'envers la paix et la sécurité dans le monde de manière plus générale. La cible de dépenses de 2 % du PIB fixée par l'OTAN est une mesure imparfaite des contributions des alliés à la défense collective, mais c'est une mesure que tous les alliés, y compris le Canada, ont convenu de respecter. Si nous ne sommes pas prêts à atteindre les cibles de dépenses de notre alliance, nous devrions être prêts à ce que nos alliés et nos adversaires remettent en question notre engagement envers la défense et envers la paix et la sécurité internationales.
    Troisièmement, et finalement, il faut plus d'argent, mais aussi plus de capacités pour l'utiliser réellement. Le Canada est au coeur du plus grand effort de recapitalisation de la défense depuis la guerre de Corée. Cela s'explique en grande partie par le fait que nous rattrapons le temps perdu pendant la quinzaine d'années qui a suivi la fin de la Guerre froide, lorsque nous n'avons pas suffisamment investi dans nos forces.
    De nombreuses flottes de combat clés que nous exploitons aujourd'hui, y compris les chasseurs et les frégates, ont été achetés dans les années 1980 — soit la dernière période où nous avons dépensé 2 % du PIB — et ces actifs auraient dû être remplacés depuis des années. Aujourd'hui, nous essayons de rattraper le temps perdu en sollicitant une main-d'oeuvre d'approvisionnement qui a été réduite de moitié dans les années 1990 et qui n'a jamais été entièrement reconstituée.
    Pour accélérer la modernisation de nos forces armées, nous devrons augmenter la capacité du système d'approvisionnement, car nous avons actuellement trop peu de personnes possédant les compétences requises pour gérer les projets déjà financés, sans parler de ce qui pourrait arriver jeudi avec les crédits budgétaires supplémentaires.
    Merci, monsieur le président.

  (1225)  

    Merci beaucoup.
     Chers collègues, nous allons maintenant passer à la première série de questions, un bloc de six minutes que M. Van Popta va amorcer.
    La parole est à vous, monsieur.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins d'être parmi nous et de nous transmettre leurs connaissances pour notre bénéfice et celui des Canadiens.
    Monsieur Perry, je vais commencer par vous. En 2018, vous aviez déclaré à une réunion du Comité des affaires étrangères que « la position officielle du Canada, c'est que l'Arctique canadien est une zone de paix et de coopération ». Vous avez ajouté que pour accroître les chances de concrétiser ce résultat souhaitable, il nous faudrait renforcer nos défenses en vue de mieux dissuader la Russie.
     C'était il y a trois ou quatre ans. Que diriez-vous aujourd'hui de la capacité de défense du Canada face à la présence navale et aérienne de la Russie dans le Nord?
    Je dirais que dans l'intervalle, nous n'avons pas assez fait pour combler l'écart dont je parlais à l'époque. Nous avons des programmes. Vous en avez mentionné quelques-uns. La semaine dernière, nous avons vu une annonce concernant l'acquisition de futurs avions de combat. Ces programmes sont eux aussi des travaux en cours et aucune action concrète n'a été entreprise pour combler cet écart, de sorte que la majeure partie de cet écart ou delta entre ce que nous pouvons faire et ce que nous devrions être en mesure de faire reste malheureusement non comblé aujourd'hui.
    Je regardais la lettre de mandat de la ministre de la Défense, la ministre Anand et elle dit, parmi bien d'autres choses, que nous maintiendrons une forte contribution à l'OTAN et que nous collaborerons avec les États-Unis pour moderniser le NORAD.
     Diriez-vous que notre contribution à l'OTAN est forte?
    Notre contribution opérationnelle à l'OTAN est forte. Notre engagement à fournir du personnel de qualité pour les activités de l'Alliance est fort, mais nous sommes loin de respecter nos engagements envers l'Alliance en matière de partage du fardeau, exprimé comme une part de notre économie consacrée aux dépenses militaires.
     Pendant des années, nous avons été bien en deçà de la cible de 2 % du PIB global consacré aux forces armées [Difficultés techniques]. Aujourd'hui, plus que jamais, nos alliés, ainsi que nos adversaires, prennent note de ces insuffisances.
    Si nous devions augmenter nos dépenses militaires à 2 %, comme nous avons convenu de le faire avec nos alliés de l'OTAN, à quoi cela ressemblerait-il pour la mise à niveau du système d'alerte du Nord? Je crois savoir que c'est encore une technologie des années 1980.
    Si nous devions atteindre ce seuil de dépenses, nous pourrions faire d'importants progrès dans la modernisation de la défense continentale, qui comporte un certain nombre d'éléments dans l'Arctique. Nous pourrions renforcer l'utilisation et l'utilité de l'infrastructure que nous y avons ainsi que les types de ressources que nous pouvons déployer dans notre propre Arctique et augmenter assez considérablement notre capacité à défendre le Canada en tant que partie de l'Amérique du Nord.
    Sous ce rapport, que devrions-nous rechercher explicitement dans le prochain budget fédéral en ce qui concerne les dépenses militaires?
    Je chercherais des détails sur la façon dont le gouvernement compte traduire la déclaration d'intention de haut niveau, signée dans une lettre en août dernier avec le secrétaire à la Défense des États-Unis, en mesures concrètes pour agir sur la défense continentale ainsi qu'un plan de financement pour y parvenir.
    Vous avez également déclaré que des fonds avaient été attribués, sans être dépensés. Avec l'annonce récente de l'achat par le Canada d'avions de combat F-35, est-ce un pas dans la bonne direction? Vous pourriez peut-être nous faire part de vos commentaires à ce sujet.
     Je pense que c'est un pas dans la bonne direction, sans équivoque. Au fil des ans, nous avons mis des fonds de côté pour acheter de nouveaux avions de chasse, mais en raison des retards dans ce projet, ces fonds sont restés inutiles dans l'immédiat parce que nous n'avions pas atteint le point où nous pouvions conclure un contrat. L'annonce la semaine dernière d'une nouvelle flotte de chasseurs était attendue depuis longtemps et constitue un engagement plus que nécessaire pour améliorer la défense du pays.
    J'ai entendu dire dans des conversations, et je l'ai lu également, que des gens dans notre communauté de décideurs disent que pour que les États-Unis puissent se défendre, ils doivent aussi défendre le Canada.
     Est-ce vrai que ces conversations ont eu lieu et que les États-Unis doivent se défendre?

  (1230)  

    Je pense que c'est vrai, et c'est un risque. C'est un risque qui est en fait un risque pour le Canada. Si les États-Unis se sentent dans cette position, il est tout aussi avantageux pour nous — non seulement pour notre propre sécurité, mais aussi pour notre position avec notre plus proche allié sur le continent que nous partageons —, d'être considéré comme un partenaire dans la défense nationale, et non comme un boulet.
    Comment décririez-vous notre niveau de partenariat avec les États-Unis en ce qui concerne le NORAD?
     Sommes-nous en bonne posture?
    Veuillez m'excuser, j'ai perdu le son.
    D'accord, je vais simplement répéter ma question.
    Monsieur Perry, nous entendez-vous?
    Puis-je poser une autre question à un autre témoin? Me reste-t-il du temps, monsieur le président?
    Il ne vous reste que quelques secondes, monsieur.
    D'accord, je vais rendre la parole à la présidence.
    Monsieur Noormohamed, c'est votre tour.
    Vous disposez d'un bloc de six minutes. Dès que vous êtes prêt, prenez la parole.
    Merci, monsieur le président. Encore une fois, j'aimerais me faire l'écho de mes collègues en vous remerciant tous de votre présence.
    Monsieur Al-Rawi, comme le contexte mondial ne nous permet pas nécessairement de réfléchir, ici au Comité SECU, aux dépenses de défense ou à l'approvisionnement en matière de défense, j'aimerais me concentrer sur certains domaines dans lesquels nous avons une certaine responsabilité.
     J'aimerais revenir brièvement sur ce que vous avez dit à propos des trolls russes. Vous avez parlé de leurs centres d'intérêt actuels autour de la guerre.
     Pouvez-vous nous parler d'autres domaines sur lesquels ils se penchent particulièrement ou qui semblent attiser particulièrement leur curiosité?
    Historiquement, les trolls russes ont été utilisés massivement pour soutenir l'extrême droite dans divers pays. C'est le cas au Canada, mais aussi aux États-Unis et dans des pays européens. L'objectif est très certainement d'alimenter les divisions.
    Ces trolls ont un effet agitateur doublé d'un souci de divertir. Par exemple, on utilise des mèmes drôles et des messages amusants qui sont néanmoins très militants, agressifs, et souvent racistes.
    Selon la tendance qui se dégage, les trolls russes s'inscrivent généralement dans des courants extrémistes, et parfois même d'extrême gauche.
    C'est la stratégie générale. Les cibles peuvent être des groupes minoritaires comme les réfugiés ou les immigrants dans différents pays. Les campagnes peuvent viser les Pays-Bas, les États-Unis ou un autre pays, mais l'enjeu reste le même.
    J'espère avoir répondu à votre question. Auriez-vous voulu que je parle plus précisément…
    Vous l'avez fait. Nous pourrions peut-être approfondir un peu ce que vous venez d'expliquer.
    Vous avez parlé des mouvements anti-musulmans, anti-immigrants et anti-réfugiés. Vous avez aussi mentionné les actions anti-libérales lors des dernières élections.
    Est-ce qu'il s'agit vraiment de mouvements d'opposition ou est-ce qu'ils font de la propagande pour d'autres causes? Est-ce qu'ils appuient des idées qui devraient nous préoccuper ici au Canada?
    De manière générale, ils soutiennent des groupes d'extrême droite. Leur animosité ne sera pas forcément dirigée vers les personnalités et les politiciens du Parti conservateur, mais elle sera très évidente à l'égard des personnalités du Parti libéral et du NPD. C'est leur stratégie. Comme je l'ai expliqué, ils prêchent des idées qui concordent avec leur vision du monde et qui servent leurs visées.
    C'est tout à fait dans la lignée des politiques de Poutine à l'intérieur et à l'extérieur de la Russie. C'est très logique. Par exemple, ils parlent des Casques blancs en Syrie comme d'un groupe terroriste parce que leur mission est de nuire à la campagne russe en documentant les violations des droits de la personne et ce genre de choses. Les Casques blancs agissent avec l'appui des alliés et des pays amis de la région et d'ailleurs.
    Merci, monsieur Al-Rawi.
    La question suivante s'adresse aussi à vous, mais j'aimerais que M. Cooley nous donne son point de vue quand vous aurez terminé.
    Nous avons eu une bonne idée des impacts de la désinformation russe avant le 6 janvier. Lors des événements du 6 janvier aux États-Unis, les liens et les appuis au mouvement QAnon étaient manifestes. Les tentatives des robots russes pour établir un lien entre les événements du 6 janvier et le mouvement Antifa ont été très efficaces. Il ressort clairement des rapports sur le soulèvement du 6 janvier que les robots russes ont alimenté le mouvement pro-Trump. Yochai Benkler, un professeur de la Faculté de droit de l'université Harvard, a affirmé que le grand objectif de la propagande russe est de créer un univers dans lequel rien n'est vrai et tout est possible.
    Je suis très intéressé de vous entendre au sujet des répercussions pour le Canada. Selon vous, le Canada doit-il s'inquiéter des tendances que nous avons observées lors du soulèvement du 6 janvier aux États-Unis?
    Je vais demander à M. Cooley d'intervenir après vous, monsieur Al-Rawi.

  (1235)  

    Oui, je crois que nous devons nous inquiéter puisque l'objectif est de semer la confusion et de brouiller notre vision de la réalité. Ils veulent empêcher les gens de discriminer le bien et le mal, ou la réalité et la fiction. C'est très inquiétant. Il existe un lien évident entre ce qui se passe en Ukraine, avec la pandémie de COVID-19 et tout cela.
    Je pourrais m'étendre beaucoup plus longtemps, mais je crois que M. Cooley a aussi des choses à dire à ce sujet.
    Je suis d'accord. Les Russes ont une vision du monde… Pour eux, il existe un monde extérieur, préférablement multipolaire et dans lequel l'Occident libéral n'a plus l'ascendant sur le système international, et les sphères d'influence... Le pendant interne à cela vise à rompre le consensus autour du libéralisme collectif, qu'il s'agisse de l'OTAN, de l'appui aux solutions transnationales de coopération ou du respect des droits de la personne et des valeurs libérales. Chaque fois qu'ils voient une occasion d'ébranler ces convictions, en exacerbant la partisanerie ou la polarisation politique, ou en ciblant des communautés vulnérables, ils tentent leur chance.
    Je tiens à insister là-dessus. L'intention n'est pas de redorer l'image de la Russie, mais plutôt de faire ressortir ce qui selon eux est contradictoire ou boiteux dans nos messages et nos débats sociaux, et de transformer en faiblesse ce qui est en fait une force de nos institutions nationales.
    Monsieur Cooley, pourriez-vous approfondir un peu…
    Il vous reste 10 secondes.
    D'accord. Je vais céder la parole.
    Je vous remercie infiniment de nous consacrer un peu de votre temps.
    Merci.
    C'est maintenant au tour de Mme Michaud, pour six minutes.
    Prenez la parole dès que vous êtes prête, madame Michaud.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Monsieur Al‑Rawi, je vais profiter de votre expertise en matière de médias sociaux, de communication et de désinformation pour vous poser quelques questions. J'aimerais savoir quelle est, selon vous, l'influence de la désinformation russe sur la population du Canada.
    On sait que plusieurs moyens sont utilisés, par exemple des affirmations trompeuses, des photos manipulées et des théories du complot. On sait que c'est très utilisé dans les médias sociaux et que cela a pu être exacerbé non seulement par la crise de la COVID‑19 et la montée des mouvements anti-vaccins ou antisystème, mais aussi par ce qui se passe en Ukraine.
    Quelle est l'influence de ce phénomène et quelles pourraient en être les conséquences?

[Traduction]

    Il est difficile de savoir quelle influence peut exercer la désinformation sur la population. Je ne crois pas qu'on ait quantifié cette influence ou qu'elle soit bien comprise. Cela dit, nous voyons bien que la désinformation a un impact au sein de la population canadienne. Par exemple, la diaspora ukrainienne a été la cible d'une forme de violence au Canada, ce qui montre que la désinformation russe — on pourrait aussi parler de propagande — donne les résultats escomptés dans certaines communautés.
    À l'extérieur du Canada, j'ai observé des signes très inquiétants de l'influence de la désinformation russe. Par exemple, j'ai examiné la désinformation en arabe qui est diffusée par le gouvernement russe dans les médias sociaux, et j'ai été vraiment… [Difficultés techniques]… très répandue et très démesurée à plusieurs endroits au Moyen-Orient.
    Notre problème est que nous nous préoccupons seulement de ce qui est diffusé en anglais et en français. Nous oublions que des millions de gens qui vivent au Canada parlent d'autres langues. C'est une lacune très importante dans notre compréhension de l'influence réelle de la désinformation russe sur les diasporas du Canada. Le lien est très direct, et beaucoup de choses nous échappent. Nous sommes très loin de comprendre ce qui se trame exactement, mais nous avons des indices patents que beaucoup de gens sont influencés.
    Nous devons aussi être conscients que d'autres personnes reprennent la même désinformation. Je pense notamment au site Web Global Research, qui se fait passer pour réseau de nouvelles, mais qui dans les faits diffuse la propagande de Poutine.

  (1240)  

[Français]

    Merci.
    J'essaie de comprendre comment le gouvernement peut intervenir pour protéger la population de cette désinformation. Le fait d'interdire les émissions de médias d'État russes comme RT ou Sputnik serait peut-être une bonne façon de protéger la population qui aurait tendance à s'associer à ce genre de mouvement de la rhétorique « poutinienne » très antisystème. Je sais que le Canada le fait dans le cas de RT, mais je ne sais pas s'il le fait dans celui de Sputnik. L'Union européenne, elle, est allée jusque-là.
    Pensez-vous que cela peut avoir un effet positif pour la population du Canada?

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Je dois expliquer pourquoi l'interdiction de RT, comme je l'ai dit en introduction, risque de ne pas être très efficace. Les émissions de RT peuvent être visionnées sur des applications pour la télévision, Internet et d'autres plateformes. Il existe toutes sortes de façons d'accès à RT, et c'est loin d'être la seule source pour ce genre d'information.
    Comme je l'ai mentionné dans mes remarques, le gouvernement russe utilise ses propres missions diplomatiques pour propager de la désinformation sur des sites contrefaits et ailleurs. Ils veulent créer une nouvelle source d'information. Depuis l'interdiction de RT, ils cherchent d'autres moyens de diffuser encore plus de désinformation.
    Je crois que la meilleure façon de protéger les Canadiens est de discréditer la désinformation et de vérifier les faits pour tout ce qui touche au Canada, aux Canadiens et à la guerre en Ukraine.
    Nous ne pouvons pas rivaliser avec le gouvernement russe et ses alliés sur ce terrain. C'est extrêmement difficile sauf, bien entendu, si le Canada et d'autres pays unissent leurs efforts. N'empêche, nous pouvons discréditer la désinformation qui nous concerne pour mieux protéger les Canadiens, surtout celle qui touche ce qui se passe sur notre territoire et à l'intérieur des communautés de diaspora.

[Français]

     Merci.
    Justement, dans cette mer d'information, il est très difficile pour les citoyens de démêler le vrai du faux. Comment fait-on pour analyser tout cela? Je sais que le Canada fait quand même de la prévention. Par exemple, le Centre de la sécurité des télécommunications fait des campagnes sur Twitter, où il conseille notamment aux gens de vérifier la source de l'information qu'ils consultent.
    Cependant, au-delà de cela, quel rôle le gouvernement peut-il jouer pour faire de la prévention et aider les citoyens à démêler le vrai du faux?

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Ma réponse pourra vous sembler intéressée, mais je crois que les universitaires ont besoin de financement supplémentaire pour mener des projets de recherche ou vérifier les faits, entre autres. Les mesures d'encouragement…
    Merci.
    Le prochain intervenant sera M. MacGregor.
    Vous disposez de six minutes. Nous vous écoutons.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je vais commencer avec M. Al-Rawi.
    Dans vos remarques liminaires, vous avez parlé du rôle des missions diplomatiques russes au Canada dans la dissémination de la désinformation. Nous marchons toujours sur des œufs quand nous traitons avec les missions diplomatiques des autres pays parce que, de toute évidence, nous devons éviter les représailles contre nos propres missions, notamment dans des pays comme la Russie.
    Selon vous, notre lutte contre les opérations de désinformation de l'ambassade russe est-elle efficace? Y a-t-il eu une prise de conscience concernant son rôle, ou notre comité pourrait-il recommander d'autres types de contre-mesures au gouvernement canadien?
    Je suis désolé, monsieur le président, mais la question porte-t-elle sur la mission russe?
    Les missions russes et le personnel diplomatique en poste au Canada, et leur rôle dans la dissémination de la désinformation.
    Nous tenons à la liberté d'expression et à la liberté de parole, mais cela ne nous empêche pas de dénoncer ces agissements et de parler ouvertement de ce que fait l'ambassade russe. J'ai écrit un article à ce sujet qui devrait paraître bientôt, du moins je l'espère, sur le site The Conversation.
    Nous ne pouvons pas leur interdire d'agir de la sorte, mais nous pouvons certainement dénoncer et discréditer leurs allégations, vérifier les faits et prévenir les Canadiens de ne pas se laisser leurrer ou convaincre par ce genre de propagande. C'est tout ce que nous pouvons faire, je crois.

  (1245)  

    Merci beaucoup.
    Monsieur Cooley, je vais maintenant m'adresser à vous. Dans vos remarques liminaires, vous avez parlé des Russes qui se sont exilés, des journalistes, des travailleurs des TI, des universitaires, et vous avez soulevé la question de savoir comment nous pourrions intervenir pour améliorer et renforcer leurs réseaux. Vous avez laissé cette question ouverte, et j'ai tout de suite pensé à l'adage voulant que l'attaque soit la meilleure défense. Que faisons-nous, le cas échéant, pour soutenir ces groupes et faire en sorte qu'ils nous en apprennent davantage sur le fonctionnement de la société russe et les structures de pouvoir qui soutiennent Poutine, et éventuellement qu'ils nous aident à lancer des contre-offensives?
    Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet? Je suis bien conscient que cinq minutes pour nous livrer vos remarques liminaires, c'est assez court.
    Merci beaucoup.
    La présence de journalistes russes exilés n'a rien de nouveau, mais ils sont beaucoup plus nombreux maintenant en raison de ce genre de conflits. Des journalistes d'enquête russes très compétents ont fait des reportages sur la corruption du régime Poutine, ils ont mené des enquêtes sur Evgueni Prigojine et ses agissements en Afrique. Dossier et Proekt, des médias d'investigation basés à l'étranger, ont mis au grand jour des secrets internes dévastateurs. Un journaliste du New York Times a écrit un article sur Prigojine qui contenait de l'information qui avait été dévoilée des mois auparavant par ces journalistes russes exilés.
    Tout d'abord, nous pouvons les soutenir financièrement. Des groupes comme Meduza ou Nexta — il ne faut surtout pas oublier le Bélarus — ont joué un rôle déterminant dans la mobilisation contre Loukachenko. TV Rain, qui poursuit ses activités à l'extérieur de la Russie parce qu'il y a été interdit, a aussi joué un rôle clé.
    Il faut anticiper que tôt ou tard, la Russie va réagir en durcissant la répression transnationale. Quand on parle de répression transnationale, on fait référence aux mesures systématiques contre ses ressortissants à l'étranger qui sont des opposants politiques ou qui sont liés aux milieux journalistiques et d'affaires, ou qui sont simplement membres de la société civile. La désinformation contre les diasporas constitue un des volets de cette répression, qui peut aussi prendre la forme de tentatives d'assassinats, d'extraditions, de mesures coercitives ou d'intimidation contre des membres de la famille.
    Les Russes vont se retrouver avec un gros problème quand ces communautés se mobiliseront en masse pour briser le mur de la désinformation, et on peut s'attendre à ce qu'ils les prennent pour cibles. Nous devons être mieux préparés à les protéger pas seulement en les appuyant, mais aussi en réalisant que ces exilés et ces diasporas représentent des communautés d'intérêt eu égard aux crimes commis.
    Merci, monsieur Cooley.
    Vous pouvez soumettre un mémoire au Comité si vous souhaitez approfondir certains points. Nous vous en serions reconnaissants.
    J'ai une dernière question pour M. David Perry.
    Le mandat du Comité porte pour une bonne partie sur la sécurité nationale et la sécurité publique en territoire canadien. Je ne vais pas m'étendre sur les considérations militaires, mais j'aimerais savoir si, pour ce qui concerne la cybersécurité et le rôle du CST, qui relève de la Défense nationale, ainsi que du SCRS et de la GRC, qui relèvent de Sécurité publique Canada, vous avez des recommandations à formuler relativement à une éventuelle réorganisation du fonctionnement de ces organismes?
    Avez-vous des recommandations pertinentes à ce sujet que le Comité pourrait soumettre au gouvernement du Canada?
    Merci.
    À mon avis, la collaboration entre le gouvernement et le secteur privé pourrait certainement être élargie. Il faut trouver des façons d'optimiser la véritable force nationale de notre secteur de la cybersécurité et de la haute technologie afin d'améliorer la synergie entre… Actuellement, l'approche est beaucoup trop cloisonnée. Une meilleure collaboration serait beaucoup plus profitable.
    Merci.
    Il vous reste 10 secondes.
    Je vous les redonne, monsieur le président.
    Merci.
    Nous allons sans attendre commencer la seconde série de questions, avec Mme Dancho en premier. Vous avez cinq minutes.
    Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de participer à notre réunion.
    J'ai des questions à poser à M. Perry concernant l'approvisionnement.
    Nous entendons beaucoup parler des difficultés liées au déblocage de fonds au ministère de la Défense nationale. Énormément de promesses ont été faites concernant l'achat de frégates, d'avions et d'autres moyens qui renforceront les capacités défensives du Canada contre les menaces de la Russie et d'autres acteurs étatiques.
    Dans quelle mesure est-il important d'améliorer les mécanismes d'approvisionnement, et quelles sont vos recommandations à cet égard?

  (1250)  

    Je crois que c'est essentiel parce que c'est ce qui nous permettra de renforcer notre capacité de défense, mais aussi d'intervenir dans beaucoup d'autres sphères de la sécurité nationale. Le capital humain est important, mais ces personnes ont besoin d'outils, et le système d'approvisionnement est ce qui nous permet de leur fournir des outils de travail, qu'il s'agisse d'avions, de navires ou de systèmes informatiques.
    Les problèmes liés au système d'approvisionnement sont très nombreux mais, comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, il faut avant tout déterminer l'importance que nous accordons à ce dossier. Est-ce que l'achat de ce type de matériel et l'acquisition de ce type de capacité, que ce soit pour la Défense ou d'autres organismes liés à la sécurité nationale, comme je l'ai déjà dit, comptent vraiment pour nous? Si c'est le cas, quelle importance leur accorde-t-on par rapport aux nombreuses autres priorités du gouvernement? C'est le premier aspect.
    Le second aspect tient à la nécessité de mieux proportionner notre utilisation de la main-d'œuvre et la charge de travail requise par rapport au capital humain à notre disposition. Nous avons besoin de ressources, tant financières qu'humaines, pour mener à bien ce travail. Or, nous cherchons le bon rapport depuis une quinzaine d'années. Tant que nous ne l'aurons pas trouvé, nous ne pouvons pas vraiment nous attendre à ce que les choses changent.
    Je dois dire que les gouvernements successifs ont augmenté progressivement les dépenses pour ce genre d'achats depuis 15 ans. Elles n'ont jamais été aussi élevées, d'après mes calculs, depuis la guerre de Corée, si on tient compte de l'inflation. Le problème est que nous n'avons rien fait depuis 15 ans, et que le rattrapage qu'il faudrait faire pour revenir au statu quo coûtera nettement plus que ce qu'il en aurait coûté si notre régime de dépenses avait été stable.
    C'est loin d'être l'unique problème concernant le système d'approvisionnement. Je pourrais parler des priorités divergentes du gouvernement, certaines structures institutionnelles, mais je vais m'arrêter ici.
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus au sujet de l'engagement à améliorer le processus d'approvisionnement? Nous en entendons beaucoup parler, et j'aimerais comprendre un peu mieux ce que cela signifie exactement pour les Canadiens. Est-ce que le gouvernement doit s'adresser au cabinet ou au public? Comment le premier ministre devrait-il parler de ces processus d'approvisionnement et du fait que leur amélioration est une priorité?
     Il existe deux manières de le faire. La première est de faire des déclarations officielles par écrit ou dans le cadre de discours, en prenant des engagements quant aux échéanciers. Il existe des exemples de cela. Je pense à la question autochtone. Le premier ministre a dit clairement que son gouvernement lui accordait une très grande importance. Ce n'est certainement pas un hasard si les dépenses en la matière ont doublé depuis quelques années. Elles ont beaucoup augmenté en très peu de temps. La lettre de mandat donnée en 2015 à tous les ministres indiquait clairement qu'ils devaient parler de la hausse phénoménale des engagements financiers dans ce dossier, et la même instruction a été reprise dans les dernières lettres de mandat.
    Pour obtenir des résultats de cet ordre pour ce qui concerne l'approvisionnement ou la défense et la sécurité nationale en général, le gouvernement devra s'engager à cibler des activités et des priorités importantes à l'égard desquelles il tient à faire des progrès. Autrement, les responsables de l'approvisionnement et d'autres dossiers, de même que d'autres organismes gouvernementaux concernés comprendront que ce n'est pas une priorité et ils jetteront leur dévolu ailleurs.
    Quelles mesures aimeriez-vous voir dans le prochain budget relativement à l'approvisionnement? Si j'entends bien ce que vous nous dites, il ne faudra pas investir seulement dans le matériel de défense du territoire canadien et de la population canadienne, mais également dans les ressources humaines affectées au dossier de l'approvisionnement. À votre avis, le prochain budget devrait-il contenir des mesures qui témoigneront de la volonté claire du gouvernement d'investir dans l'achat d'outils pour les ressources humaines?
    Peu importe le niveau des nouvelles dépenses de défense, dont une bonne partie sera probablement consacrée à l'approvisionnement étant donné les besoins établis pour la défense continentale et la modernisation du NORAD, si nous voulons que les fonds soient débloqués dans quelques années plutôt que dans quelques décennies, vous devez vous engager à augmenter et à fournir la capacité… C'est nécessaire pour garantir que ces fonds seront dépensés avant la fin de chaque exercice. Autrement, ils ne seront pas dépensés.
    Et un bon indicateur —selon ce que vous dites —, un très bon indicateur de cela serait que le premier ministre inscrive dans les lettres de mandat données à tous les ministres que l'approvisionnement est une priorité absolue, ou qu'ils en parlent dans le cadre de leurs communications générales. Est-ce exact?
    Oui, le gouvernement doit décider d'en faire une priorité. C'est essentiel.

  (1255)  

    Merci beaucoup.
    Madame Damoff, le prochain bloc de questions de cinq minutes vous appartient. Nous vous écoutons.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos trois témoins.
    Je vais poser ma première question à M. Al-Rawi. Nous avons parlé de la désinformation dans les médias sociaux, mais nous n'avons pas vraiment discuté des autres plateformes moins connues que Facebook, YouTube et Twitter. Je pense par exemple à Telegram ou Gab, qui véhiculent des discours extrémistes et marginaux.
    Pouvez-vous nous expliquer le rôle que jouent ces plateformes dans l'ingérence russe? Par ailleurs, auriez-vous des recommandations à soumettre au gouvernement relativement à ces plateformes moins connues?
    Merci, monsieur le président.
    Voilà quelques années, des… [Difficultés techniques]… aux États-Unis et ailleurs ont été exclus par des médias sociaux grand public comme Facebook et Twitter. En faisaient partie le président Trump et d'autres complotistes comme Alex Jones. Il s'en est suivi ce qu'on a appelé une « migration » vers d'autres tribunes nouvelles et alternatives, y compris celles que vous avez mentionnées, Telegram, Discord et quelques autres. Certaines sont même basées au Canada. Il existe actuellement une panoplie de plateformes où dominent les théories conspirationnistes et la désinformation.
    Dans notre étude sur le convoi pour la liberté, nous avons établi que sur Twitter, très peu de messages relayaient les théories conspirationnistes qui ont alimenté la manifestation, et que les théories et les discours dominants ont été véhiculés ailleurs, surtout sur Telegram.
    Le principal problème tient à ce que les principaux moteurs de recherche comme Google indexent les publications sur Telegram. Si je cherche un message publié par Alex Jones sur Telegram, je peux le trouver. Selon moi, c'est le principal problème. Je ne pense pas que ce soit une bonne idée d'essayer de contrôler ces petites plateformes, de les museler. Ce serait comme jouer à cache-cache, et quatre autres plateformes apparaîtraient de toute façon parce qu'il y a de très bonnes affaires à faire. Les profits se chiffrent non pas en millions, mais en milliards de dollars.
    Je ne crois pas qu'il soit possible d'éliminer complètement ces petites plateformes de médias sociaux. Il faut plutôt faire des pressions pour que les principaux moteurs de recherche indexent moins les publications sur ces sites et qu'il soit donc plus difficile de retracer un commentaire en particulier.
    Il faudrait aussi regarder du côté des algorithmes utilisés.
    Merci. Je suis désolée de vous interrompre, mais notre temps est limité ici.
    Monsieur Cooley, j'ai une question pour vous. Vous avez été cité dans un article publié récemment dans le Hill Times. Selon cet article, l'heure serait venue d'élargir les sanctions pour les imposer non seulement aux facilitateurs financiers de la Russie, mais également aux mandataires occidentaux des capitaux russes.
    Pouvez-vous nous expliquer l'influence que peuvent avoir les mandataires des Russes et les sociétés de gestion qui fournissent des services aux élites russes en matière de cybersécurité? Avez-vous des recommandations à faire au gouvernement sur les mesures à prendre pour contrer cette influence?
    Vous me demandez quelle influence ils peuvent avoir sur la cybersécurité?
    Vous avez affirmé qu'il faut leur imposer des sanctions. J'imagine que c'est plus une question de sécurité nationale.
    Est-ce que…
    Effectivement, c'est plutôt la sécurité nationale qui est en jeu. Merci de poser cette question.
    Avant la guerre, les enjeux étaient compartimentés en deux volets. Dans le premier volet, les enjeux de sécurité nationale étaient envisagés en fonction des objectifs et des politiques étrangères classiques. L'autre volet touchait les politiques nationales. Autrement dit, quand nous parlions de kleptocratie ou de contre-kleptocratie, nous y pensions comme à des questions de gouvernance distinctes, pour ainsi dire. Aujourd'hui, nous comprenons bien que les deux volets sont interreliés.
    Nous ne pouvons pas seulement nous jeter aux trousses des oligarques proches du Kremlin comme Abramovich, Usmanov, Sechin ou Deripaska. Nous devons aussi nous intéresser aux sociétés de professionnels qui sont ici, au Canada. Comment se fait-il que des sociétés de courtage immobilier, des cabinets d'avocats, des sociétés fictives et de gestion de la réputation peuvent, en toute légalité, fournir des services dont l'objectif est invariablement d'anonymiser la source de cette richesse et, d'une manière parfaitement légale, d'investir cet argent dans l'immobilier ou le capital social afin de rehausser l'image et le statut de ces oligarques?
    Ce n'est pas seulement un oligarque russe…

  (1300)  

    Merci beaucoup.
    J'invite maintenant Mme Michaud à prendre la parole, pour un bloc de deux minutes et demie.
    Nous vous écoutons.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Monsieur Cooley, d'après votre connaissance de la Russie, croyez-vous que le Canada est prêt à faire face à certaines stratégies d'intimidation ou d'ingérence de la part de ce pays? Selon le document « Évaluation des cybermenaces nationales 2020 » du Centre canadien pour la cybersécurité, il est très probable que des auteurs de cybermenaces parrainés par des États se prépositionnent secrètement dans les infrastructures essentielles canadiennes pour passer à l'attaque ou pour faire de l'intimidation.
    Compte tenu de la situation actuelle en Ukraine, quelle est la probabilité que la Russie cause volontairement ou involontairement des dommages à nos infrastructures essentielles?

[Traduction]

    Je dirais que la probabilité est élevée. Plus un pays ou une population compte de personnes exilées ou issues d'une diaspora qui sont considérées comme des dissidentes par le pays totalitaire d'origine, plus il est probable qu'il mène des opérations de surveillance et d'intimidation numériques, qui mènent à l'intimidation physique. Ce n'est pas l'apanage de la Russie. Nous savons d'expérience que des agents chinois font la même chose en sol canadien. C'est un phénomène plus large, qui s'explique par la capacité d'action extraterritoriale que les technologies confèrent aux régimes autoritaires.
    Je suis convaincu que ces diasporas, ces groupes particulièrement vulnérables, comprennent leur propre rôle ici et le genre de citoyenneté numérique… Il est très clair que la dimension transnationale deviendra un autre champ de bataille pour la Russie. C'est ce qui se passe depuis 10 ans.

[Français]

     C'est tout de même particulièrement inquiétant. Le Canada est-il prêt à faire face à cela et à protéger les infrastructures, les institutions, les entreprises et les citoyens? Tout cela évolue extrêmement rapidement. Notre système de protection est-il à jour?

[Traduction]

    Je crois que vous êtes en meilleure position que moi pour répondre à la question pour ce qui est du Canada. Je crois fermement qu'il est prioritaire que différents organismes se concertent et réalisent que c'est un enjeu de sécurité nationale. Cela comprend…
    Merci beaucoup.
    … les audiences d'asile.
    Merci.
    M. McGregor maintenant.
    Monsieur, vous avez deux minutes et demie. Vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Cooley, je voudrais poursuivre sur le thème des individus et des organismes occidentaux qui fournissent des services aux oligarques russes en toute légalité afin qu'ils puissent gérer leurs actifs ici sans être inquiétés. Les lois canadiennes leur ont permis de créer des sociétés fictives. Ils ont beaucoup investi dans l'immobilier. Je sais que le problème est beaucoup plus grave au Royaume-Uni, mais le Canada n'est pas à l'abri.
     Durant la dernière campagne électorale, on a promis de créer un organisme fédéral en matière de délits financiers. La lettre de mandat du ministre de la Sécurité publique l'enjoint à accélérer la création d'une unité d'enquête qui se spécialisera dans ce genre de délits. Pouvez-vous prendre une minute et demie pour nous en dire davantage sur l'aspect financier de la question à l'étude? Existe-t-il un lien quelconque avec la sécurité nationale du Canada? Le Comité devrait-il donner plus de place à cet aspect dans ses recommandations au gouvernement?
    Oui, je crois qu'il y a des répercussions sur la sécurité nationale, considérant notamment l'influence démesurée de ceux qu'on surnomme les oligarques, qui sont des individus extrêmement riches qui sont proches du pouvoir politique. Ils peuvent influencer certaines positions d'un parti politique, ou exercer une influence dans certaines campagnes nationales. Leurs relations dans les médias peuvent leur permettre d'imposer leurs visées personnelles. De toute évidence, ils peuvent aussi intimider les journalistes pour les empêcher de faire enquête sur les origines de leur richesse.
    La mise en place d'un registre fédéral de la propriété bénéficiaire est absolument essentielle sur le plan de la sécurité nationale. Il faut créer ce registre d'ici à 2025, ou même 2023. C'est urgent. Tous les pays doivent savoir qui sont ces sociétés fictives anonymes et qui se cache derrière pour acquérir des biens immobiliers de luxe et d'autres biens. Chaque fois qu'on cherche à faire passer le principe de la protection de la vie privée des clients avant celui de la transparence…

  (1305)  

    Merci.
    … on bascule dans le camp des perdants.
    Merci beaucoup.
    Je vais devoir réduire le temps de parole des deux derniers intervenants à deux minutes chacun, ce qui nous mènera en prolongation. Merci à notre greffier de nous avoir obtenu quelques minutes supplémentaires.
    Monsieur Lloyd, vous avez deux minutes. Allez-y.
    Merci, monsieur le président, pour ce temps supplémentaire imprévu.
    Monsieur Cooley, nous parlons beaucoup de désinformation. Que savez-vous de la campagne de désinformation bien documentée qui a sévi durant les élections fédérales de 2021? Avez-vous des observations à nous transmettre à ce sujet?
    Je suis désolé, mais de quelles élections parlez-vous?
    Des dernières élections fédérales de 2021.
    Ce n'est pas mon domaine d'expertise.
    Monsieur Al-Rawi, un réseau social… J'ai oublié lequel, WeChat peut-être… Devrions-nous nous inquiéter d'autres outils de propagation de la désinformation?
    Je vais reprendre ce que M. Cooley a dit au sujet des tentatives de certains États d'exercer leur influence sur des groupes d'immigrants ou diasporiques au Canada. C'est un problème qui ne date pas d'hier, et WeChat a été utilisé dans ce but. Nous avons des preuves incontestables et des indices que le gouvernement chinois a essayé et continue d'essayer d'exercer son influence sur la communauté chinoise de Vancouver et d'ailleurs au pays.
    D'autres États font la même chose. Le gouvernement iranien tente très activement d'influencer les communautés iraniennes qui vivent au Canada. C'est un problème permanent. Habituellement, ces États ciblent ou utilisent des outils très précis, comme…
    Merci.
    Pouvez-vous nous donner des exemples, selon ce que vous avez vous-même observé, de ce genre de tentatives durant les élections fédérales de 2021?
    Durant les élections de 2021, on pouvait voir très clairement ce type d'ingérence sur WeChat. Cela dit, il reste beaucoup de lacunes dans notre compréhension de ce phénomène.
    Il faut absolument regarder ce qui se passe dans les médias ethniques au Canada. C'est primordial. Par exemple…
    Merci beaucoup. C'est dommage que nous ayons aussi peu de temps.
    Monsieur Zuberi, vous avez deux minutes pour nous mener jusqu'à la fin de notre segment avec ce groupe de témoins.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins.
    Je vais commencer avec M. Al-Rawi. Vous avez mentionné les robots russes et la désinformation. Pouvez-vous nous dire si, en plus des opérations que vous avez mentionnées, ces robots ont agi de manière à ce que des personnes ou des idées soient mises en valeur ou discréditées?
    Merci, monsieur le président. Je présume que la question concerne ce qui se passe actuellement, la désinformation qui est diffusée actuellement.
    Oui, exactement.
    Merci beaucoup.
    Je n'ai pas de preuve scientifique qu'il s'agit de robots puisqu'il s'agit de comptes automatisés. J'ai seulement la preuve que des utilisateurs organiques ont été utilisés, c'est-à-dire des utilisateurs réels qui diffusent de la propagande. Dans la grande majorité des cas, la propagande que j'ai vue au sujet de la guerre en Ukraine visait à rallier des appuis à la position du gouvernement russe et à diffuser beaucoup de messages contradictoires et embrouillés dont le but est de semer la confusion.
    Selon ce que j'en sais, ils sont vraiment au sommet de leur art. Ils sont extrêmement rapides à créer et à propager ce type de désinformation. Malheureusement, nous sommes largués.
    Est-ce que cette désinformation est diffusée en anglais et en français, mais aussi dans d'autres langues?
    Pour ce qui concerne la mission diplomatique russe, la désinformation est diffusée en anglais surtout, mais il semble y en avoir aussi en français.
    Je n'ai jamais regardé la chaîne WarOnFakes.com du réseau Telegram. Cette chaîne très importante est devenue une des plus populaires en Russie. Les cibles seront aussi…

  (1310)  

    Dans les 45 secondes qui restent, j'aimerais vous entendre au sujet des répercussions de la désinformation. Vous avez parlé de diversité, d'inclusion, des réfugiés, des musulmans et d'autres groupes.
    Quelles sont les véritables répercussions sur ces communautés des campagnes de désinformation dont vous avez parlé?
    Il reste en fait 10 secondes.
    Ces campagnes ont pour but de nourrir la méfiance à l'égard de tout ce qui est légitime, y compris le multiculturalisme.
    Merci infiniment.
    C'est tout le temps que nous avions. Nous avons même débordé un peu.
    Au nom du Comité, je remercie les témoins de nous avoir fait vivre une heure passionnante et de nous avoir parlé de changements très importants. Nous avons abordé des questions et des sujets très complexes et d'une grande importance.
    Sur ce, je demande au Comité de me donner la permission de lever la séance.
    Des députés: D'accord.
    Le président: Je crois avoir votre permission.
    Messieurs, merci énormément pour votre temps et vos éclairages.
    Distingués collègues, je vous donne rendez-vous pour une autre réunion jeudi matin.
    La séance est levée.
Explorateur de la publication
Explorateur de la publication
ParlVU