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CHPC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent du patrimoine canadien


NUMÉRO 051 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 1er novembre 2022

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Français]

     Je déclare la séance ouverte.
    Bonjour à tous. Je vous souhaite la bienvenue à la 51e réunion du Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes.
    Je tiens à souligner que cette réunion a lieu sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe.

[Traduction]

     Conformément à l'ordre de renvoi adopté par la Chambre le mardi 31 mai 2022, le Comité se réunit pour étudier le projet de loi C‑18, Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule selon une formule hybride, conformément à l'ordre de la Chambre des communes du jeudi 23 juin 2022. Certains membres sont présents en personne et d'autres assistent à la réunion virtuellement.
    J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité. Veuillez attendre que je vous nomme pour parler. Pour les personnes qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone au bas de votre écran pour l'activer.
    En ce qui concerne l'interprétation, vous verrez un globe au bas de votre écran. C'est l'icône sur laquelle vous cliquez pour obtenir votre interprétation en anglais ou en français, selon ce que vous souhaitez. Vous avez le choix entre l'anglais, le français et le parquet. Pour ceux qui sont dans la salle, vous pouvez utiliser l'oreillette et le canal désiré.
    N'oubliez pas que toutes les observations doivent être adressées à la présidence.
    J'ai un dernier commentaire à faire. Un accident très tragique s'est produit avec un interprète parce que les témoins n'utilisaient pas les micros requis. On m'a demandé de m'assurer que tout le monde utilise le casque d'écoute qui lui a été envoyé par la greffière. Il est très important de ne pas oublier cela, parce que nous ne voulons pas être la cause de blessures pour nos interprètes.
    Cela dit, je veux que le Comité sache que tous les témoins ont effectué des tests de connexion avant la réunion et qu'ils utilisent les casques d'écoute requis.
    Nous allons commencer.
    Nous recevons aujourd'hui trois témoins au sujet du projet de loi C‑18. Nous accueillons Sue Gardner, professeure de pratique McConnell, École de politiques publiques Max Bell, Université McGill, qui comparaît à titre personnel. Par vidéoconférence, nous accueillons Hal Singer, directeur général d'Econ One. Nous accueillons également par vidéoconférence Philip Palmer, président de la section canadienne d'Internet Society.
    Madame la greffière, je ne vois pas M. Palmer.
    Madame Fry, M. Palmer est dans la salle.
    Il est dans la salle? On m'avait indiqué qu'il comparaissait par vidéoconférence. Je suis désolée. Merci beaucoup.
    Chacun des trois témoins aura cinq minutes pour faire son exposé. Je vais vous prévenir 30 secondes avant la fin pour que vous sachiez que vous devez conclure. Ensuite, il y aura une période de questions et réponses. Nous y reviendrons un peu plus tard.
    Je vais commencer par Mme Gardner.
     Madame Gardner, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    J'ai été journaliste au Canada pendant 10 ans, et j'ai travaillé à la radio, à la télévision et en ligne. J'ai été responsable de cbc.ca. J'ai dirigé la Wikimedia Foundation, l'organisme sans but lucratif qui exploite Wikipédia. Cela fait de moi la seule Canadienne à avoir géré une propriété Internet parmi les 10 plus importantes au monde. L'an dernier, j'étais professeure de pratique McConnell à l'École de politiques publiques Max Bell de l'Université McGill.
    Je m'adresse à vous à titre personnel, en me fondant sur mes connaissances et mes expériences.
    Je pense que le projet de loi C‑18 est très mauvais pour trois raisons que je vais vous expliquer.
    Premièrement, le projet de loi C‑18 pose un mauvais diagnostic de la nature du problème. Le projet de loi C‑18 qualifie d'injustice le fait que Google et Facebook détiennent une si grande part du marché de la publicité numérique. Il s'agit d'une mauvaise interprétation ou d'un malentendu fondamental.
    Imaginez que nous sommes dans les années 1920. Je fabrique des fouets pour les conducteurs de carrioles et vous fabriquez des voitures. Le projet de loi C‑18 équivaut à ce que le gouvernement dise que vous devez me verser de l'argent indéfiniment parce que personne n'achète mes fouets.
    Le secteur du journalisme était rentable parce que l'achat de publicité dans les médias était la meilleure façon — ou du moins une très bonne façon — de rejoindre le public. C'est moins vrai aujourd'hui. Google et Facebook ont créé des outils publicitaires beaucoup plus efficaces que les anciens. C'est pourquoi les annonceurs les utilisent. Google et Facebook ont dépassé l'industrie de l'information en matière d'innovation commerciale. Ce n'est pas une question d'équité. Ce n'est pas une question morale. Cela ne fait pas d'eux des méchants.
    Selon ce que vous a dit Ben Scott, le gouvernement ne ferait qu'« arbitrer un concours entre les grandes sociétés technologiques et les grands diffuseurs ». Il a exhorté le Comité à se concentrer plutôt sur l'intérêt public. Mon message est le même.
    Deuxièmement, le projet de loi C‑18 ne favorisera pas un journalisme de qualité. Comme l'ancien président du CRTC, Konrad von Finckenstein, vous l'a dit vendredi, si vous voulez subventionner les diffuseurs de nouvelles, vous pouvez le faire de bien d'autres façons. Il a qualifié ce projet de loi d'inutilement compliqué. Je pense qu'il a raison.
    Si l'objectif du gouvernement est d'appuyer un journalisme de qualité, le Forum des politiques publiques a énoncé une très bonne approche pour y parvenir. En 2017, il a publié le rapport « Le miroir éclaté », qui portait sur la crise dans l'industrie de l'information. Il a recommandé que le gouvernement commence à percevoir la taxe de vente sur les ventes publicitaires des entreprises étrangères au Canada, et que cet argent serve à établir un fonds pour le journalisme, qui serait administré par un organisme indépendant du gouvernement. Cela favoriserait un journalisme de qualité.
    Le projet de loi C‑18 vise peut-être le même objectif, mais il le fait en essayant maladroitement de forcer Google et Facebook à financer directement le journalisme proprement dit, ce qui est vraiment difficile. Google et Facebook sont des mégaentreprises du secteur privé de la Silicon Valley. Leur travail consiste à promouvoir leurs propres intérêts commerciaux. Ils n'ont pas pour mission de servir la population du Canada. Nous ne les élisons pas et ils n'ont pas de comptes à nous rendre.
    Le gouvernement peut essayer de donner des directives très précises à Google et à Facebook et essayer de les forcer à faire ce qu'il veut, mais ce n'est pas simple. La façon la plus simple de procéder est de prendre leur argent et de créer un fonds.
    Mon troisième point, c'est que le projet de loi C‑18 aura des conséquences négatives imprévues importantes. Je veux surtout parler d'Internet et de ses utilisateurs.
    Le projet de loi C‑18 encouragera les pièges à clics et l'absurdité.
    Le projet de loi C‑18 incitera Google et Facebook à abandonner le secteur de l'information.
    Enfin, le projet de loi C‑18 inscrira dans des dispositions législatives l'idée que les liens Internet ordinaires « prennent de la valeur », ce qui nous place sur une pente glissante. Internet a été conçu pour être ouvert et pour croître de façon organique. L'ouverture d'Internet repose sur la capacité de créer des liens librement, et non seulement cela, mais aussi de la capacité de partager, de commenter et d'annoter les liens créés, ainsi que d'en tirer parti. Cela est bien compris.
    Avec le projet de loi C‑18, le gouvernement crée des frictions en matière de liens. Cela nous rapproche d'un Internet fondamentalement commercial, où ce que nous verrons en ligne sera déterminé par des transactions d'entreprise. Ce genre de changement se produit très lentement. Il est le résultat cumulatif de nombreuses décisions qui, lorsqu'elles ont été prises, ne semblaient pas vraiment porter à conséquence. Le projet de loi représente un pas de plus dans cette mauvaise direction.
    Merci beaucoup.
(1110)
    Merci beaucoup, madame Gardner.
    Nous allons maintenant passer au témoin suivant, M. Singer, d'Econ One.
    Vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
     Bonjour et merci de m'accueillir.
     C'est un privilège de m'adresser à un auditoire canadien, et j'aurais aimé pouvoir le faire en personne.
    J'ai beaucoup travaillé sur des dispositions législatives s'apparentant au projet de loi C‑18 aux États-Unis, soit la Journalism Competition and Preservation Act, ou JCPA, pour le compte de la News/Media Alliance, un regroupement d'éditeurs de presse, et je vais parler de ces efforts. Les aspects économiques sont les mêmes.
    Entre autres mesures de protection pour les éditeurs de presse, la JCPA leur accorderait une exemption au titre des lois antitrust, afin qu'ils puissent mieux coordonner leurs relations avec les géants de la technologie.
    Avant d'aller plus loin, je tiens à être clair. Les exemptions au titre des lois antitrust sont rares, et c'est une bonne chose. Les entités puissantes ne devraient pas être à l'abri des contrôles qui se font dans ce contexte. Dans certaines circonstances limitées, toutefois, la coordination entre les petits fournisseurs lorsqu'ils traitent avec un gros acheteur est nécessaire pour surmonter un déséquilibre de pouvoir, qui fait en sorte que les prix des intrants et l'emploi ne se situent plus à un niveau concurrentiel.
    Cette défaillance du marché est à la base des exemptions actuelles au titre des lois antitrust des États-Unis pour les coopératives agricoles en particulier et les travailleurs en général. L'élargissement de ces exemptions aux journaux dans leurs relations avec les plateformes Internet dominantes repose sur la même base.
    Le fait que le terme « préservation » figure dans la loi américaine n'est pas fortuit. Selon le Pew Research Center, l'industrie de l'information a subi des pertes de revenus publicitaires chaque année depuis 2006.
    La diminution des revenus publicitaires, en partie à cause du sous-paiement des plateformes dominantes, signifie une baisse des flux de trésorerie pour soutenir les journalistes et un effet clair sur l'emploi découlant du pouvoir de monopsone que détiennent les plateformes dominantes. Aux États-Unis, le nombre d'employés des journaux est passé de 71 000 en 2008 à 31 000 en 2020, selon Pew. En raison de la détérioration du paysage médiatique de l'information, des centaines de journaux locaux ont fait l'objet d'acquisitions ou ont déclaré faillite.
    Google et Facebook recadrent des articles de journaux dans de riches aperçus contenant des grands titres, des résumés et des photos. Les plateformes sélectionnent également du contenu des journaux en y insérant de la publicité. Ce recadrage et cette sélection réduisent la probabilité qu'un utilisateur clique sur un article donné, privant ainsi les éditeurs de journaux de clics tout en enrichissant les plateformes technologiques dominantes. Cette appropriation gratuite du contenu des journaux réduit également le nombre d'abonnements. Lorsque des clics sur le contenu des journaux émanent des sites Web des plateformes, les revenus publicitaires générés sont taxés par les plateformes à des taux excessifs.
    La meilleure façon de contrer le pouvoir de monopsone est que le gouvernement permette aux éditeurs de presse de coordonner leurs transactions avec les plateformes numériques en ce qui a trait aux modalités de paiement. Compte tenu de l'énorme déséquilibre des pouvoirs, la négociation collective en soi pourrait ne pas être suffisante pour obtenir des paiements concurrentiels, auquel cas une négociation structurée entre les parties, par exemple, un arbitrage obligatoire avec un mécanisme d'exécution, serait nécessaire comme filet de sécurité.
    Curieusement, certains groupes anti-monopole traditionnels ont manifesté leur réticence à accorder des pouvoirs de négociation compensatoires aux journaux qui traitent avec des plateformes dominantes. Dans une déclaration commune, l'American Antitrust Institute, Public Knowledge, Consumer Reports et la Consumer Federation of America ont soutenu qu'une nouvelle exemption au titre des lois antitrust aurait pour seul effet de nuire aux consommateurs, aux citoyens et aux entreprises qui ne participent pas aux négociations que cette exemption est censée faciliter. Il convient de noter que certains de ces groupes dépendent des plateformes dominantes pour leur financement.
    Pour remplacer la JCPA, ces mêmes détracteurs ont demandé une application plus rigoureuse des lois antitrust à Google ou Facebook, mais le comportement qui est dénoncé ici, le simple exercice du pouvoir de monopsone pour obtenir un tarif réduit pour le contenu des journaux, ne représente pas une restriction verticale reconnue en vertu des lois antitrust. L'extraction de contenu, le recadrage, la sélection et l'appropriation de valeur ne constituent pas des violations de l'article 2 de la loi Sherman des États-Unis. Contrairement à l'Europe, les États-Unis n'ont pas de norme sur l'abus de position dominante.
    De plus, même si l'on pouvait trouver quelque chose d'autre dans le comportement des plateformes s'apparentant à une restriction verticale, une poursuite antitrust réussie contre, disons, Google, n'aiderait en rien les éditeurs dans leurs transactions avec Facebook. Si une poursuite antitrust était intentée avec succès contre Google ou Facebook, il faudrait plusieurs années pour rendre une décision, et les appels pourraient ne pas être réglés avant près d'une décennie. Entretemps, le sort des journaux continuerait d'être précaire. Compte tenu de leur précarité financière, on ne sait pas combien d'entre eux pourraient survivre sans une intervention aujourd'hui.
    La JCPA a fait l'objet d'importantes modifications.
    La présidente: Il vous reste 30 secondes.
    M. Hal Singer: La version actuelle, qui prévoit judicieusement un arbitrage baseball ou arbitrage de la dernière offre, garantit que les éditeurs de tous horizons sont admissibles à participer aux négociations et impose une limite de taille — à tort, à mon avis — pour concentrer le soutien sur les petits joueurs et les organes de presse locaux.
(1115)
    En terminant, je voudrais mentionner qu'un amendement plus récent à la JCPA fait en sorte qu'une part importante des fonds — 65 % — recueillis serait attribuée aux éditeurs de presse en fonction de la part proportionnelle que représentent les journalistes dans les dépenses d'un journal. Autrement dit, les journaux qui se débarrassent de journalistes seraient punis par le mécanisme de répartition, car la part qu'ils obtiendraient serait réduite.
    Je vous remercie de votre attention et je serai heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup, monsieur Singer.
    Nous passons maintenant au troisième témoin. Il représente la section canadienne d'Internet Society.
    Monsieur Palmer, vous avez cinq minutes. Je vous en prie.
    Au nom de la section canadienne d'Internet Society, je tiens à remercier le Comité de me donner l'occasion d'aborder cet important sujet.
    Je voudrais tout d'abord dire qu'Internet Society appuie des initiatives visant à soutenir financièrement les agences de presse dans leur transition vers l'ère d'Internet. Nous croyons que des droits plus larges appliqués à toutes les plateformes de médias sociaux et à tous les moteurs de recherche, conjugués à la répartition du financement par un organisme véritablement indépendant, représenteraient une source de financement plus juste et plus fiable que le régime de négociation illusoire qui est au cœur du projet de loi C‑18.
    Ni le projet de loi C‑18, ni la loi australienne sur laquelle il est fondé, ne prévoient une négociation basée sur la valeur du contenu de l'information pour les intermédiaires de nouvelles. Le processus de négociation est artificiel, et apparent plutôt que réel. En retirant aux intermédiaires de nouvelles des protections juridiques, il est conçu pour les contraindre à accepter d'indemniser les entreprises de presse, sous peine de sanctions pécuniaires excessives. Il soustrait les intermédiaires de nouvelles numériques aux exceptions et aux limites de la Loi sur le droit d'auteur, tout en laissant ces mêmes droits en place pour leurs concurrents et pour les agences de presse proprement dites.
    Le gouvernement se sert de son pouvoir législatif pour forcer une poignée d'entreprises qui ont des modèles d'affaires réussis axés sur la publicité à indemniser une industrie dont les mêmes modèles d'affaires sont un échec.
    J'aimerais soulever rapidement quelques points précis.
    Premièrement, le projet de loi C‑18 impose des coûts importants pour rendre accessible au public le contenu des nouvelles par l'entremise d'hyperliens. Les hyperliens sont le moyen par excellence pour les particuliers et les entreprises de chercher et de trouver des nouvelles et toute autre information en ligne. En imposant un coût aux intermédiaires de nouvelles pour les liens vers le contenu des nouvelles, le projet de loi C‑18 menace l'efficacité de l'extraction de l'information sur Internet et la capacité des Canadiens d'accéder à ce contenu. Le projet de loi C‑18 fera augmenter le coût de l'accès au contenu des nouvelles au Canada, directement ou indirectement.
    Deuxièmement, la définition d'« intermédiaire de nouvelles numériques » au paragraphe 2(1) soulève des questions complexes de faits et de droit au niveau constitutionnel. Il est peu probable que Facebook et Google, par exemple, soient assujettis à l'autorité réglementaire fédérale.
    Troisièmement, les critères de l'article 6 selon lesquels un intermédiaire de nouvelles numériques doit s'identifier sont vagues et inappropriés. Ils sont empruntés à des concepts aussi différents les uns des autres que le droit de la concurrence et le droit du travail. Le projet de loi ne définit pas les marchés pertinents et ne précise pas non plus en quoi consiste le déséquilibre du pouvoir de négociation.
    Nous exhortons le gouvernement à envisager de suivre le modèle australien à cet égard, lequel prévoit la désignation par le ministre de l'intermédiaire, en fonction de critères plus clairs — pas parfaits — énoncés à l'article 52E de la loi australienne.
    Quatrièmement, l'article 27 comporte une définition double de l'expression « entreprise de nouvelles admissible ». L'alinéa 27(1)a) fait référence à « une organisation journalistique canadienne qualifiée », une définition aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu qui exige qu'une organisation réponde à des critères exigeants. Comme de nombreux intervenants l'ont souligné, l'alinéa 27(1)b) rend admissibles des organisations qui n'ont pas de normes journalistiques observables. Les fermes à clics et les agents étrangers ne devraient pas être des entreprises de nouvelles admissibles. Selon nous, l'article 52P de la loi australienne représente un meilleur modèle à cet égard.
    Cinquièmement, l'article 24 empêche les intermédiaires de nouvelles de s'appuyer sur les exceptions et les limites du droit d'auteur. Cet article devrait être supprimé. Il annule toute approche fondée sur le marché pour déterminer la valeur du contenu de nouvelles pour les intermédiaires de nouvelles numériques.
    La présidente: Il vous reste 30 secondes.
    M. Phillip Palmer: Enfin, l'article 51 intègre des aspects du droit des télécommunications, soit la notion de discrimination injuste et de préférence indue. Cela n'a rien à voir avec les fonctions des intermédiaires de nouvelles. Cette disposition devrait donc être supprimée. L'article 52D de la loi australienne semble aborder ces questions de façon beaucoup plus claire.
    Merci beaucoup. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1120)
     Merci beaucoup, monsieur Palmer.
    Nous allons maintenant passer aux questions.
    Nous avons six minutes pour la première série de questions. J'aimerais souligner que cela inclut les réponses. Pour pouvoir poser le plus grand nombre possible de questions, soyons aussi clairs et rapides que possible.
    La première personne à poser des questions sera Mme Rachael Thomas, du Parti conservateur.
    Madame Thomas, vous avez six minutes. Je vous en prie.
    Madame Gardner, je vous remercie de votre déclaration préliminaire et d'avoir pris le temps de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Ma première question vise simplement à préciser quelque chose. J'aimerais savoir si vous avez profité de commandites ou de contributions financières de l'une ou l'autre des plateformes.
    Non, je suis tout à fait indépendante. Jusqu'en 2007, je travaillais pour la CBC, mais depuis 2007, je n'ai pas reçu d'argent de qui que ce soit visé indirectement, potentiellement, absolument ou pas du tout par le projet de loi C‑18.
     Merci.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que le projet de loi C‑18 entraînerait une taxe sur les liens. Vous avez parlé de la façon dont l'attribution de valeur à certains liens par rapport à d'autres pourrait modifier le fonctionnement d'Internet dans son ensemble.
     Vous avez dit que cela favorise la commercialisation potentielle d'Internet et que cela se ferait de façon graduelle, mais inexorable.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
    Oui, certainement.
    À mon avis, dans les débats sur la question de savoir si le projet de loi C‑18 constitue littéralement une taxe sur les liens, on coupe les cheveux en quatre. Ces débats manquent un peu de pertinence.
    La notion selon laquelle le fait de rendre accessible du matériel ou d'en faciliter l'accès enlève de la valeur à ceux qui l'ont créé représente le fondement même du projet de loi, et cette notion va à l'encontre des principes d'Internet, celui‑ci étant fondé dans son ensemble sur un concept de liaison, ainsi que de partage, d'annotation, de commentaires et de mise en valeur concernant le travail des autres. C'est ce qui rend Internet fantastique, mais cela a des limites. Nous avons une loi sur le droit d'auteur, et il n'est pas nécessaire ni avantageux de dire que les liens ou l'accès à ceux‑ci enlèvent de la valeur, parce que ce n'est pas le cas.
    Je sais que les gens ont tendance à détester l'expression « casser Internet ». Je ne l'aime pas non plus, parce que cela ressemble toujours à une hyperbole. Je ne veux pas dire que si ce projet de loi est adopté, cela aura pour effet de casser immédiatement Internet ou de le rendre différent, mais cela va dans ce sens et représente un pas dans cette direction.
    J'exhorte le Comité à adopter une perspective à long terme à cet égard. Internet est encore assez jeune. Il est là pour de bon. Je pense que les mesures que nous prenons aujourd'hui, qui peuvent sembler anodines et sans grande conséquence, façonneront Internet et auront un effet sur son évolution que nous pourrions regretter.
(1125)
    Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet? Si une valeur est attribuée à des liens — des liens de nouvelles, dans ce cas‑ci —, cela ouvre la porte à l'attribution d'une valeur à d'autres liens, ce qui, oui, pourrait mener à la commercialisation d'Internet.
    À l'heure actuelle, à la télévision, nous avons des forfaits de câblodistribution, que les gens délaissent bien sûr parce qu'ils veulent plus de choix. Ils se tournent vers d'autres options. Si Internet s'engage dans cette voie et que de la valeur attribuée à certains liens, est‑ce que cela pourrait finir par nous entraîner sur une pente glissante et nous obliger essentiellement à payer pour un forfait comprenant certains liens, au détriment d'autres peut-être?
    Essentiellement, j'essaie de comprendre où cela nous mènera en ce qui concerne la commercialisation d'Internet et la valeur monétaire des liens.
    Vous avez raison, et je pense que cela crée des conditions dans lesquelles cela pourrait, comme vous le dites, s'appliquer à d'autres formes d'information, d'autres formes de connaissances. Je ne sais pas si cela irait aussi loin qu'une chaîne de câblodistribution offrant des forfaits aux consommateurs. Quand je pense à la commercialisation, ce à quoi je fais davantage référence, c'est à l'idée qu'Internet — ce qu'on vous montre, ce qu'on vous donne — est alimenté par des transactions commerciales et de l'argent qui change de mains, lors de décisions d'entreprise prises en coulisses dont vous n'êtes pas au courant, n'est‑ce pas?
     Ce que vous verriez serait motivé par des raisons commerciales — ce pourrait être pour le mieux, ce pourrait être pour le pire —, mais vous n'auriez aucun contrôle sur cela. À l'origine d'Internet, les choses n'étaient pas du tout motivées par des considérations commerciales, alors qu'aujourd'hui, nous sommes sur une voie où cela pourrait changer, et je pense que cela compromet beaucoup de choses qui étaient spéciales à propos d'Internet.
    L'une des choses que le ministre a dites au sujet de ce projet de loi, c'est qu'il est fondé sur des solutions axées sur le marché. Toutefois, le projet de loi ferait en sorte que le CRTC ou le gouvernement interviendrait de façon importante dans la sphère de l'information et dans le processus de négociation qui aurait lieu entre les intermédiaires.
    Je me demande si vous pouvez nous parler des conséquences de cette situation.
    À certains égards, j'ai l'impression que ce projet de loi représente le pire des deux mondes. Je pense que le ministre a dit qu'il ne voulait pas se retrouver au milieu, entre les médias et les plateformes, mais je pense que la vérité, c'est que si le gouvernement a des objectifs politiques, il est au milieu. Il ne peut pas échapper à cela. Comme je l'ai dit, il s'agit d'essayer de faire les choses d'une façon qui force les plateformes à assumer un rôle de bailleur de fonds et qui leur donne des critères et d'autres aspects à surveiller. Mais ce n'est pas un rôle qui devrait revenir à une entité du secteur privé. Si vous essayez d'élaborer des politiques, si vous essayez de faire...
    La présidente: Il vous reste 31 secondes.
    Mme Sue Gardner: ... du journalisme de qualité pour les Canadiens, il existe des façons plus simples d'y arriver que celle‑ci, en intervenant sur le marché, mais de façon indirecte.
    Je ne suis pas certaine que ce soit très clair. J'espère que cela vous aidera.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Thomas. Votre temps de parole est écoulé.
    Je vais maintenant donner la parole à Lisa Hepfner des libéraux.
    Madame Hepfner, vous avez six minutes. Je vous en prie.
    Merci, madame la présidente.
    Par votre entremise, j'aimerais adresser mes questions à M. Singer, en sa qualité d'économiste.
     J'espère que vous pourrez contribuer à notre débat. Vendredi, Facebook nous a dit que les nouvelles n'ajoutent pas de valeur à cette plateforme, au contraire, et que les éditeurs de presse devraient payer Facebook pour le privilège qui leur est offert de diffuser leurs nouvelles.
    Je me demande ce que vous pensez de cet argument dans votre perspective d'économiste.
    Je n'y ai pas beaucoup réfléchi. En fait, j'ai étudié la question au moyen de sondages, afin de déterminer dans quelle mesure les éditeurs de presse créent collectivement de la valeur pour les plateformes individuelles. La réponse se situe dans les milliards de dollars, du moins aux États-Unis. C'est probablement la même chose au Canada.
    Une certaine valeur est retournée en nature, mais n'oubliez pas que c'est seulement lorsque l'utilisateur clique sur des liens et les suit. Même à ce moment‑là, l'éditeur de presse sera assujetti à un taux supercompétitif ou à une taxe sur ces revenus.
    Ce que je veux dire, c'est que si nous en arrivons à un arbitrage, la société de gestion collective des éditeurs de presse sera en mesure de présenter une étude, peut-être des sondages, qui démontreront la valeur des éditeurs de presse que les plateformes s'approprient. Google et Facebook devront embaucher leur propre économiste et il ou elle va proposer une contre-étude. À ce moment‑là, l'arbitre devra décider quelle estimation de la valeur générée par les éditeurs de presse est la plus juste, la juste valeur marchande qui découlerait d'une négociation volontaire, en l'absence d'un déséquilibre des pouvoirs, n'est‑ce pas? C'est ce que nous essayons de faire ici. Les forces du marché font en sorte qu'il n'y a pas de droits d'accès. C'est ce que le marché a déterminé, et cela vient du fait que Google et Facebook sont tout simplement trop gros dans cette négociation. La question est de savoir quel serait le taux concurrentiel pour cet accès, ce qui ne pourra être déterminé qu'au moyen de ce processus d'arbitrage.
(1130)
     Nous avons vu Facebook jouer avec ses algorithmes de nouvelles au fil des ans. En 2020, pendant l'élection présidentielle aux États-Unis, Facebook a modifié ses algorithmes pour accorder la priorité aux nouvelles faisant autorité plutôt qu'à celles qui étaient moins crédibles. Quelques années plus tôt, en 2018, les algorithmes avaient été modifiés différemment, de façon à favoriser le contenu ayant une résonance émotionnelle, les opinions incendiaires et la désinformation plutôt que les nouvelles à proprement parler.
    Qu'en pensez-vous?
    Je pense que c'est un problème grave, mais cela ne fait peut-être pas partie du sujet dont nous parlons aujourd'hui, c'est‑à‑dire comment mettre en place une structure qui nous permettra de résoudre une défaillance du marché et de dédommager les éditeurs de presse pour la valeur qu'ils créent pour les plateformes. Je pense que la question que vous avez soulevée est importante, mais je crois qu'elle devrait être traitée dans le cadre d'une procédure distincte, avec tout le respect que je vous dois.
    Je pense que c'est important parce que Facebook change délibérément le comportement et la consommation de ses utilisateurs.
     Je comprends que vous ne soyez pas à l'aise de répondre à cette question, alors je vais passer à autre chose et revenir à la valeur que vous avez attribuée. Vous avez parlé de milliards de dollars. Je pense qu'au Royaume-Uni, les économistes ont également calculé la valeur des nouvelles sur ces plateformes, et il s'agit de 1,2 à 1,6 milliard de dollars canadiens pour Google et Facebook.
    Une grande proportion des activités de recherche sur ces plateformes est consacrée aux nouvelles. Qu'en pensez-vous?
     C'est exact, et c'est exactement la question que nous essayons de poser dans ces études d'évaluation: qu'est‑ce qui vous a amené là? Que cherchez-vous? S'agit‑il de nouvelles ou d'autre chose?
    Nous pouvons effectuer des sondages et utiliser d'autres outils pour essayer d'estimer, du mieux que nous le pouvons, la valeur de la contribution des éditeurs de presse aux moteurs de recherche ou aux sites de médias sociaux. C'est exactement ce que nous allons essayer de faire dans ce contexte. Il incombera à l'expert de fournir aux éditeurs de presse la meilleure estimation possible, mais Google et Facebook auront également l'occasion de faire de même. Il est concevable que, dans le cadre d'un arbitrage baseball, ils l'emporteraient, et le chiffre qui en découlerait serait faible.
    Personne ne devrait accepter cela comme une garantie que les journaux vont l'emporter à ce jeu, mais je pense que l'arbitrage baseball va amener les deux parties à faire la meilleure estimation possible. Après tout, si le résultat est une évaluation insensée ou extrême, si Google propose un chiffre de zéro pour qui est de la contribution des journaux, alors l'arbitre sera enclin à accepter l'offre des éditeurs de presse.
    Une autre chose que nous avons entendue de la part des représentants de Facebook vendredi, c'est qu'ils pourraient tout simplement devoir couper l'accès aux éditeurs de presse au Canada. Nous avons vu les mêmes tactiques musclées en Australie lorsque ce pays a adopté une loi semblable. En fait, selon les lanceurs d'alerte, Facebook a délibérément ratissé large, de façon à fermer non seulement les sites de fournisseurs de nouvelles australiens, mais aussi toute une série de sites Web gouvernementaux et caritatifs.
    Aux États-Unis, où vous envisagez des lois semblables, voyez-vous des tactiques similaires de la part des géants de la technologie?
    Oh, oui. Facebook a fait des menaces semblables aux éditeurs de presse d'ici.
    Vous savez, ce qui est ironique, c'est que nous soutenons qu'il y a un déséquilibre du pouvoir, que Facebook a un pouvoir de monopsone. Lorsqu'ils se comportent de cette façon avec ces tactiques d'intimidation, en menaçant essentiellement de fermer les sites de nouvelles, cela montre leur pouvoir. Qui pourrait parler ainsi à moins d'avoir le pouvoir de faire ces menaces? J'ai l'impression qu'ils s'enfoncent et qu'ils mettent en lumière la raison même de notre présence ici, à savoir l'exercice du pouvoir de monopsone, qui prive les éditeurs de presse de tout prix positif pour la valeur de leur contribution à ces plateformes dominantes.
(1135)
    Merci, monsieur Singer.
    Madame Hepfner, votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant au Bloc québécois et à Martin Champoux.
     Martin, vous avez six minutes. Je vous en prie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins qui sont parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Singer, vous vous êtes bien réchauffé. Permettez-moi de continuer avec vous.
    Dans le cadre de votre étude actuelle, du côté américain, est-il question de la qualité du contenu comme critère d'admissibilité des entreprises qui pourraient être soumises à cette réglementation?

[Traduction]

    Je m'excuse. Je n'ai pas appuyé sur le bouton de l'interprétation avant la toute fin de la question, et je vois qu'elle s'adresse à moi.
    Est‑il possible de la répéter?

[Français]

    Certainement.

[Traduction]

    Nous allons faire une pause. Je pense que nous pouvons permettre à M. Singer d'entendre l'interprétation.
    Merci.

[Français]

    Madame la présidente, je pense que M. Singer voulait plutôt que je répète la question.

[Traduction]

    Oui. J'ai demandé une pause, monsieur Champoux, pour que vous puissiez le faire.

[Français]

    Dans le cadre de votre étude actuelle, du côté américain, tenez-vous compte de la qualité du contenu comme critère d'admissibilité des entreprises? Étudiez-vous cela également?

[Traduction]

    Eh bien, pour ce qui est de la qualité, voici ce que nous essayons de comprendre dans nos études. Nous demandons aux gens qui sont sur les diverses plateformes pourquoi ils s'y trouvent, ce qu'ils consomment et ce qui les a amenés là. Je pense que ces deux mesures différentes tiendront compte de la qualité à l'étape de la répartition.
    Au cours de la première phase, nous essayons de déterminer la valeur générée, au moyen d'approximations, c'est‑à‑dire combien de temps est consacré à la consommation de nouvelles et ce qui a amené les gens là. Dans la deuxième phase, nous essayons de répartir cette valeur en fonction de deux mesures. La première, du moins aux États-Unis, est la quantité de trafic que vous générez, votre part du trafic au prorata, qui représente en partie une mesure de la qualité. Deuxièmement, et c'est le plus important, notre Congrès a prévu que soient mis de côté 65 % de tous les produits de la vente pour les répartir en fonction de la part proportionnelle de journalistes employés par chaque agence de presse. C'est une mesure directe de la qualité, n'est‑ce pas? Plus il y a de journalistes à votre emploi, plus la part de revenu que vous allez recevoir est importante.
    J'ai l'impression que c'est une façon d'aborder la question de la qualité: s'assurer que la répartition se fait en fonction du nombre de journalistes. Après tout, au bout du compte, nous essayons de redonner vie au journalisme. Pour ce faire, nous incitons les éditeurs à embaucher des journalistes, comme ils l'ont fait en Australie et dans d'autres pays où ils ont reçu récemment de l'argent.

[Français]

     Je trouve cette réponse très intéressante, car nous discutons effectivement de la possibilité de renforcer un peu les critères d'admissibilité afin d'encourager le journalisme de qualité.
    Croyez-vous qu'il serait réaliste de rendre les entreprises numériques responsables de la qualité du contenu journalistique ou de l'absence de qualité, dans certains cas? Je pose cette question parce nous avons entendu certains arguments selon lesquels le projet de loi C‑18 favoriserait la propagation de fausses nouvelles, la désinformation et les contenus plus ou moins crédibles de toutes sortes.
    Est-il réaliste de penser que les entreprises en ligne pourraient ajouter une mise en garde ou attribuer une certification aux entreprises dont elles partagent le contenu?

[Traduction]

     Je ne pense pas qu'il devrait y avoir une certification émanant des plateformes. Je pense qu'il devrait y avoir des critères en vertu desquels le projet de loi interdirait à certains participants de profiter des revenus. Ce serait le premier filtre.
    Le deuxième filtre que je vais suggérer fortement, c'est que lorsque nous passons à la phase de répartition, il ne faut pas que celle‑ci soit uniquement basée sur des clics. Comme vous l'avez souligné, si cela était uniquement fondé sur les clics, cela aurait tendance à alimenter les sites Web qui n'emploient pas de journalistes, mais qui sont très efficaces pour générer du trafic.
    Il faut s'assurer qu'une bonne partie de la répartition profite aux vrais éditeurs qui emploient de vrais journalistes. Pour ce faire, il faut examiner ce qu'ils dépensent pour les journalistes. Cela devient le critère de répartition en aval.
(1140)

[Français]

    J'aimerais avoir votre avis en tant qu'expert en matière d'antitrust et économiste.
    Selon vous, le fait de réglementer des industries comme celle de l'information, dont les activités se déroulent inévitablement en ligne, viole-t-il le principe d'un Internet libre et ouvert? Si oui, est-il utopique de croire encore au concept selon lequel Internet ne doit faire l'objet d'aucune réglementation et doit être accessible à tous? Selon vous, est-il réaliste de croire à ce concept?

[Traduction]

    Cette mesure n'affecterait pas la gratuité d'Internet.
    Voici pourquoi: Google ne va pas soudainement commencer à facturer des frais de recherche aux consommateurs parce qu'il doit verser un paiement forfaitaire aux journaux une fois par année. Ce montant forfaitaire n'entrera pas dans leur calcul des prix. Cela détruirait complètement leur modèle d'affaires s'ils disaient qu'au lieu de faire de l'argent avec la publicité, ce qui est au cœur de leur entreprise et de ce qu'ils font depuis une décennie ou plus, ils commençaient à exiger des frais pour les recherches. Ils ne feront pas cela.
    C'est le même calcul pour Facebook. Si Facebook doit verser un montant forfaitaire une fois par année, qui ne varie pas en fonction du résultat et qui n'a pas d'incidence sur ses coûts marginaux... En tant que microéconomiste, je peux vous dire que cela ne changera rien à leur optimisation des prix et ne fera certainement pas en sorte que Facebook s'écartera de son modèle de média social gratuit en échange d'une monétisation de la publicité.
    J'espère que cela répond à votre question sous divers angles, y compris celui de la gratuité d'Internet. Cela n'aura aucune incidence sur les décisions des plateformes en matière de prix.
    Les recherches seront toujours gratuites. Les médias sociaux seront toujours gratuits, et un versement forfaitaire à la fin de l'année ne changera rien à cela.

[Français]

    Merci, monsieur Singer. C'était une conversation intéressante.
    Je n'ai plus de question à poser, madame la présidente.
    Merci beaucoup, monsieur Champoux.

[Traduction]

    Les prochaines questions seront posées par Peter Julian, du Nouveau Parti démocratique.
    Monsieur Julian, vous avez six minutes. Je vous en prie.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci à nos témoins.
    J'aimerais revenir à vous, monsieur Singer.
    Nous avons entendu divers témoins au cours des dernières semaines. La grande majorité d'entre eux appuient fortement le projet de loi C‑18, y compris — et j'ai trouvé que c'était un point intéressant et un moment décisif — les journaux communautaires de l'Alberta et de la Saskatchewan. C'est là que se trouve la moitié du caucus conservateur. Les journaux communautaires de ces provinces sont de fervents défenseurs du projet de loi C‑18, même s'ils veulent qu'il soit amélioré.
    Dans la circonscription que je représente, New Westminster—Burnaby, nous avons constaté une hémorragie du contenu des nouvelles locales en raison de ce que beaucoup qualifieraient de concurrence déloyale.
    Je voudrais revenir à la Journalism Competition and Preservation Act des États-Unis. J'aimerais que vous nous parliez un peu de ce qui se passerait si elle n'était pas adoptée.
    Le modèle australien est scruté par beaucoup d'autres pays parce que les médias locaux ont été décimés dans ce pays.
    Que se passerait‑il sans la Journalism Competition and Preservation Act? Quelle serait l'évolution du journalisme aux États-Unis?
     Il est possible que les plus grands éditeurs puissent obtenir certains paiements unilatéralement, mais ce n'est pas l'objet du projet de loi. Ce n'est pas ce que nous essayons de faire.
    Ce que nous essayons de faire, c'est de donner vie au journalisme en général, y compris aux journaux communautaires que vous avez mentionnés. Dans le cadre d'une négociation bilatérale entre un journal communautaire et Google ou Facebook, il est impossible que le journal puisse obtenir un paiement pour l'accès à son contenu.
    Pensons à ce que ce collectif va créer, à ce que ce syndicat, pour ainsi dire, va faire des journaux. Cela va augmenter les pouvoirs des plus petits journaux de la coalition et va permettre de négocier collectivement, unis contre Google et Facebook. Ce sont eux les véritables bénéficiaires.
    Ce que j'ai contre ce que j'ai vu se produire à l'étranger, c'est que, même si leur cœur était au bon endroit et qu'ils faisaient un pas dans la bonne direction, l'objectif principal est de renforcer les pouvoirs des petits journaux, et si vous ne pouvez pas faire cela, la démarche ne vaut même pas la peine d'être entreprise, à mon avis.
(1145)
    Est‑ce que la JCPA permettrait cela? Vous avez l'impression que ce modèle aiderait à améliorer le journalisme local, qui a été la principale victime des grandes entreprises technologiques?
    C'est exact.
    Ils vont se joindre à la coalition. Ils vont se présenter comme un seul bloc uni à la table de négociation, à condition que nous n'arrivions pas à une négociation volontaire. Je doute fort que ce soit le cas. Il y a un temps pour la négociation volontaire.
    En cas d'échec, on passe à l'arbitrage exécutoire. À ce moment‑là, ils vont proposer un chiffre, qui correspondra à la valeur de la contribution de tous les journaux collectivement pour Google et Facebook. Google et Facebook auront l'occasion de contester cela et de proposer leurs propres contre-études et experts. L'arbitre décidera quelle valeur est la plus juste.
    Tout ça pour dire que les petits journaux vont en profiter. Nous allons veiller à ce que tous soient inclus. On ne pourra pas faire de discrimination en fonction du genre de contenu ou des positions adoptées. Tous seront concernés. À la fin, nous aurons une répartition qui sera principalement dictée par le nombre de journalistes employés.
    Parlons d'échéanciers.
    Vous avez soulevé la question des dispositions législatives antitrust et de la lutte contre les grandes entreprises technologiques. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit qu'il faudrait 10 ans pour venir à bout des appels interjetés par les grandes entreprises technologiques pour mettre fin à la législation antitrust. Grâce à leur pouvoir, elles peuvent interrompre les travaux pendant une décennie. Je pense que nous saisissons tous le pouvoir des grandes entreprises.
    En ce qui concerne les échéanciers relatifs à la JCPA et au projet de loi C‑18, nous discutons actuellement de seuils pour nous assurer que le projet de loi est adopté, que les négociations ont lieu, qu'il y a un arbitrage de la dernière offre et qu'il y a un mouvement clair. Selon vous, quels sont les échéanciers appropriés?
    Beaucoup ont dit qu'il devrait y avoir des délais plus courts de trois mois pour la négociation, l'arbitrage, puis l'arbitrage de la dernière offre. Tout cela se ferait dans un laps de temps relativement court, ce qui obligerait les grandes entreprises de technologie à travailler de bonne foi, plutôt que d'étirer les choses, comme elles le feraient certainement avec une loi antitrust.
    Dans quelle mesure est‑il important qu'il y ait des délais relativement courts pour la négociation, l'arbitrage et l'arbitrage de la dernière offre?
    Je pense que c'est très important. Cela s'explique par la situation désastreuse dans laquelle se trouvent les journaux.
    S'ils pouvaient tenir le coup encore deux ans, nous pourrions peut-être nous permettre de laisser le processus se dérouler pendant un an. Nous n'avons pas des années pour agir.
    Ce que je dirais, si vous me le permettez, c'est que chacune de ces échéances devrait être de quelques mois. Fixer une période de négociation volontaire, leur donner un mois pour essayer de trouver une solution, et passer à l'arbitrage exécutoire s'ils n'y arrivent pas.
    En arbitrage, il y a une communication préalable. Des rapports d'experts sont rédigés. Je suppose que Google va pouvoir faire appel à un expert avant que nous arrivions dans la salle d'audience. Ils doivent être informés de la façon dont la méthodologie d'évaluation va fonctionner. Cela pourrait prendre un certain temps. Je pense que cela devrait être une question de mois et certainement pas d'un an. Il aurait fallu régler cette question hier.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Julian, votre temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer au deuxième tour, qui est de cinq minutes.
    Nous allons commencer par Kevin Waugh, du Parti conservateur.
    Vous avez cinq minutes, je vous en prie.
    Merci, madame la présidente.
    J'ai le sourire aux lèvres parce que M. Singer n'a aucune idée de ce qu'est le projet de loi C‑18, qui se situe exactement à l'opposé de ce dont il parle.
    Radio-Canada, Rogers et Bell reçoivent la majeure partie de l'argent. Les journaux reçoivent des miettes. Notre situation n'est pas celle des États-Unis. Nous l'avons souligné à maintes reprises de ce côté‑ci. Les journaux de petite et de moyenne tailles ne reçoivent absolument rien.
    Je vais passer à vous, monsieur Palmer, parce que vous avez des recommandations.
    Les réponses de M. Singer me font rire parce qu'il n'a absolument aucune idée de ce que vise ce projet de loi. Il ne s'agit pas de l'industrie de la presse écrite au Canada. Je dis depuis des mois qu'elle reçoit des miettes. Je crois que CBC au niveau local, le radiodiffuseur public, devrait être exclu de ce projet de loi.
    Qu'en pensez-vous, monsieur Palmer?
     Ce n'est pas tant que j'ai une opinion sur la question de savoir si CBC devrait être exclu. Mes principales préoccupations concernent les circonstances extrêmement artificielles dans lesquelles les négociations proposées ont lieu.
    Le principal danger, c'est que les petits journaux ou les médias d'information locaux soient laissés à eux-mêmes à la suite des négociations qui auront lieu entre les grandes compagnies — Postmedia, The Globe and Mail, etc. — qui ont suffisamment de ressources pour être en mesure de payer le genre d'études d'experts dont il est question.
    Les acteurs de deuxième et de troisième niveau dans le domaine de l'information n'ont pas ce genre de capacité. C'est l'une des raisons pour lesquelles ce processus de négociation favorise les grandes organisations au détriment des petites. Je ne crois pas que le projet de loi, tel qu'il est rédigé, améliorera sensiblement la situation des journaux communautaires et régionaux.
(1150)
    Je crois que nous avons entendu cela de la part de Google, qui a déjà 150 ententes, mais aucune avec les petits et moyens journaux du pays, j'en suis sûr. Je pense que vous serez d'accord avec moi.
    Cela fait des mois que nous répétons de ce côté‑ci que non seulement les journaux de l'Alberta et de la Saskatchewan, mais aussi beaucoup de journaux en Ontario, au Québec, dans les Maritimes et même en Colombie-Britannique, d'où vient M. Julian, sont exclus.
    J'ai ici une note de CACTUS, l'Association canadienne des usagers et stations de la télévision communautaire, qui dit qu'elle sera pratiquement exclue de ce projet de loi.
    Il y a tellement d'exclusions dans ce projet de loi qu'il faudra des jours pour obtenir les amendements nécessaires pour qu'il soit même à moitié présentable.
    Qu'en pensez-vous?
    Je pense que c'est un grave problème. Je pense, par exemple, que l'approche dont parle M. Singer aux États-Unis, où tous les journaux et tous les éditeurs de presse sont en quelque sorte forcés de se regrouper pour assurer cette répartition, est beaucoup plus susceptible de donner des résultats positifs que le modèle compris dans C‑18, où les grandes organisations peuvent imposer une entente collective aux intermédiaires de nouvelles, sans inclure les petits intervenants qui doivent ensuite essayer de trouver des experts, des avocats, etc., pour appuyer un processus de négociation. Je pense que c'est très difficile.
    Madame Gardner, j'ai peu de temps, mais je m'inquiète vraiment du journalisme au Canada. Je regarde les écoles de journalisme, et j'ai vu que leurs inscriptions avaient diminué de moitié au cours des cinq dernières années, que ce soit en raison de la COVID ou simplement parce qu'il n'y a pas d'avenir dans le journalisme.
    Vous étiez journaliste. J'aimerais vous demander quelle est la situation du journalisme au Canada selon vous.
    Elle est épouvantable. Elle est terrible. Je pense que tout le monde est de cet avis.
    La situation du journalisme au Canada... J'ai vécu à l'extérieur du Canada pendant 11 ans, et je suis revenue il y a environ un an et demi. Le Globe and Mail a maintenant l'épaisseur d'une brochure. Les institutions qui existent encore ne sont qu'un pâle reflet de ce qu'elles étaient auparavant. Leur situation d'antan n'est qu'un souvenir.
    Sans parler des médias locaux, dont la situation est encore pire. Nous sommes maintenant dans un désert d'information.
    Merci beaucoup, monsieur Waugh. Votre temps de parole est écoulé.
    Je vais donner la parole aux libéraux et à Tim Louis pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente. Je vais poser toutes mes questions par votre entremise.
    Je remercie les témoins de leur présence, que ce soit en personne ou en ligne.
    Je vais commencer par M. Singer.
     La dernière série de questions portait sur le fait que certains croient que vous ne comprenez pas ce projet de loi. J'ai pensé qu'il était juste de vous donner l'occasion de répondre à cela.
     Eh bien, je suis ici à titre d'expert des dispositions législatives américaines, que j'ai aidé à rédiger. J'essaie de transmettre une certaine expérience et une certaine sagesse que j'ai acquises dans le processus qui a été mené aux États-Unis. Je ne me présente pas comme un expert de la législation canadienne. D'après ce que je comprends, il y a beaucoup de points communs entre les tactiques et les aspects des deux projets de loi.
    Je signale que nous avons inclus les radiodiffuseurs également, bien que les radiodiffuseurs aux États-Unis n'aient pas les mêmes protections que celles des journaux. Je dirais qu'un chiffre sera présenté par la coalition des journaux, et ce chiffre correspondra à la valeur de leur contribution à chaque plateforme, peu importe ce que les éditeurs proposent. Les éditeurs viseront donc un certain montant en fonction de la contribution qu'ils auront à la marge, les radiodiffuseurs viseront un autre montant, et les journaux, une autre encore.
    À mon avis, nous ne devrions pas essayer de déterminer quelle coalition va obtenir plus que les autres. Au lieu de cela, nous devrions trouver un moyen de mettre de l'argent entre les mains des éditeurs de presse et de le répartir équitablement en fonction de la qualité du journalisme qu'ils proposent.
(1155)
    Merci.
    Ici, en Ontario, nous avons eu des élections municipales la semaine dernière. C'était un exemple clair de l'importance du journalisme local. Pendant la période électorale, notre collectivité s'est tournée vers les journalistes pour obtenir de l'information sur les candidats locaux, les enjeux importants et les résultats des élections. Les Canadiens veulent prendre le pouls de leur situation à l'échelle locale. Nous ne défendons pas les journaux comme un tas de bouts de papier qu'on nous livre. Nous parlons de dispositions législatives qui appuient les médias locaux proprement dits.
    Monsieur Singer, certains ont affirmé qu'en s'attaquant à ce déséquilibre du marché, qui est évident, entre les géants de la technologie et les médias, on étoufferait l'innovation dans le secteur de l'information. Pouvez-vous nous parler de cette affirmation?
    Oui. Je pense que ce serait le contraire. Au moment où de l'argent sera injecté pour la première fois dans ces journaux locaux, où ces frais d'accès seront négociés, je pense que la toute première chose qu'ils feront sera d'investir dans les journalistes. C'est ce qui s'est produit en Australie.
    Deuxièmement, il y aura des incitatifs. Si la répartition est faite correctement, ils seront incités à créer des emplois dans le secteur de l'information, parce que cela signifie qu'ils obtiendront une plus grande part du gâteau au prochain cycle de répartition.
    Je pense donc qu'ils ont des incitatifs privés à vouloir accroître leur production et à faire du journalisme de qualité avec une injection de fonds. Si cet incitatif est approprié, il sera possible d'en faire un levier au moment de la répartition et de les rendre encore plus sensibles à ce devoir, à cette obligation sociale, d'aller embaucher des journalistes. C'est ce que nous voulons qu'ils fassent. Je pense qu'une répartition intelligente peut nous permettre d'y arriver.
    Je comprends cela.
    Je vais peut-être aborder le revers de la médaille. Lorsque vous avez témoigné aux États-Unis, vous avez dit que si cette loi n'était pas adoptée, il en résulterait un sous-emploi dans le journalisme, ce qui pourrait rendre les gouvernements locaux moins responsables et accroître la partisanerie, ainsi que la désinformation, entraîner une dégradation des économies locales et même une réduction de la diversité des points de vue.
    Pouvez-vous nous expliquer pourquoi il est important de procéder rapidement, parce qu'autrement il se produira ce qui s'est produit avec le journalisme local?
    Oui. Pour des articles plus longs que j'ai écrits, j'ai consulté d'énormes documents qui montrent ce qui se passe dans les collectivités après la perte de leur journal local. Vous avez mis le doigt sur tous les éléments importants. L'emploi est ce qui ressort, mais au‑delà de cela, ce que font les journaux locaux, c'est assurer la cohésion et les liens dans les communautés. Ils font des merveilles pour la démocratie. Lorsqu'une ville perd son journal local, il s'ensuit toute une série de problèmes sociaux.
    On devrait tout faire pour essayer de redonner vie aux journaux locaux. Mme Gardner a parlé d'une subvention. C'est une façon de le faire, mais à mon avis, si vous trouvez le coupable, si vous trouvez la personne qui accapare toute la valeur au détriment des journaux, il est tout simplement logique que cette personne verse une compensation pour la valeur qu'elle s'est appropriée. Pourquoi impliquer les contribuables? Lorsqu'il s'agit clairement d'un gros acheteur qui s'approprie la valeur d'un petit fournisseur, il n'est pas logique d'inclure les contribuables dans l'équation.
    Merci beaucoup, monsieur Louis. Votre temps de parole est écoulé.
    Je vais donner la parole à Martin Champoux.
    Monsieur Champoux, vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Madame la présidente, je pense que nous commençons le deuxième tour et que vous devez d'abord donner la parole aux conservateurs, si je ne m'abuse.

[Traduction]

     Non. Nous en sommes au deuxième tour. Après M. Louis, ce sera vous, puis M. Julian, puis les conservateurs et les libéraux.

[Français]

     Vous avez bien raison, c'est mon tour de deux minutes et demie. Je vais le prendre avec plaisir. Merci beaucoup. C'est moi qui étais mêlé, cette fois-ci.
    Monsieur Palmer, vous avez déposé un mémoire à ce comité, il y a quelques jours. Dans celui-ci, vous parlez de solutions de rechange au projet de loi C‑18. Vous parlez notamment de la création d'un fonds, que l'on prélèverait, j'imagine, directement à partir des revenus déclarés des entreprises. Cela permettrait de rétablir l'équilibre, selon les besoins du marché.
    Comment envisagez-vous la viabilité d'un tel fonds, compte tenu du fait qu'on a un gouvernement qui a plutôt tendance à encourager l'évitement fiscal et le recours aux paradis fiscaux par les grandes entreprises?
    Ne craignez-vous pas que les grandes entreprises en ligne ne déclarent pas réellement les revenus qu'elles génèrent au Canada?
    Cela ne pourrait-il pas ouvrir la porte à des litiges sans fin sur l'argent qui pourrait être mis à contribution dans ce fonds?
(1200)

[Traduction]

    Madame la présidente, il s'agit d'une question clé. Je pense qu'un fonds présente un certain nombre d'avantages réels par rapport à une approche réglementaire.
    Le premier, qui permettra d'éviter un nombre considérable de litiges, découle du fait que la perception de recettes est clairement un pouvoir fédéral. Il n'est pas du tout clair que le gouvernement fédéral a un pouvoir de réglementation sur Google et Facebook. En fait, je crois que c'est le contraire, alors je pense que vous êtes en terrain constitutionnel plus sûr. Cela permet d'éviter, disons, quatre ans de litige pour se rendre à la Cour suprême du Canada.
    Deuxièmement, cela signifie qu'on peut intégrer sans tarder tous les groupes qui le méritent. Vous n'êtes pas tributaire des grands journaux, par exemple, ou des médias d'information qui se regroupent et s'engagent dans le processus de négociation pour leur propre compte et laissent de côté tous les petits acteurs qui n'ont pas les ressources nécessaires pour être entièrement concurrentiels dans un processus de négociation.
    Je pense qu'une redevance ou un fonds quelconque est en fait une solution de rechange très attrayante à ce genre de processus.

[Français]

    En attendant, la...

[Traduction]

    Monsieur Champoux, vous avez 14 secondes.

[Français]

    Oh! Ce sont les 30 secondes les plus rapides de l'histoire. Merci, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci, monsieur Champoux.
    Je donne maintenant la parole à Peter Julian pour deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Monsieur Singer, j'ai trouvé les commentaires de M. Waugh quelque peu insultants et inappropriés, et j'aimerais m'excuser au nom du Comité. Il devrait comprendre, je crois, le rôle plus important que jouent les journaux communautaires, y compris dans sa collectivité, où les associations de journaux hebdomadaires de la Saskatchewan et de l'Alberta réclament une loi comme celle-ci.
    Monsieur Singer, je veux revenir sur ce que vous avez dit au sujet des nouvelles communautaires, parce que vous avez tout à fait raison de dire que l'une des raisons pour lesquelles nous assistons à une augmentation de la haine sous toutes ses formes toxiques — plus d'antisémitisme, plus de racisme, plus d'homophobie et de transphobie, plus d'islamophobie, plus de misogynie — c'est en partie parce que les liens que les journalistes communautaires et les journaux communautaires créent sont en train de disparaître alors que les grandes entreprises technologiques tentent de tirer profit de la haine.
    Comme vous le savez, aux États-Unis, Stop Hate for Profit est une campagne importante qui mobilise tout un éventail d'organisations luttant contre la haine. Pourriez-vous souligner de nouveau l'importance d'avoir un secteur journalistique communautaire qui aide à contrer la façon dont les géants technologiques exploitent sans vergogne la haine pour renforcer leurs profits, afin qu'il y ait un certain contrepoids et que nous puissions commencer à rétablir les liens communautaires partout en Amérique du Nord?
     Je blâme certainement les géants technologiques pour beaucoup de choses, mais je ne veux pas nécessairement les blâmer d'être directement à l'origine de ce phénomène.
    Permettez-moi de dire que l'effet pourrait être indirect. Autrement dit, leur modèle d'affaires nuit aux journaux communautaires locaux et, quand ces journaux communautaires disparaissent, la désinformation comble en quelque sorte le vide. Tous les liens que les journaux communautaires créaient autrefois sont maintenant flétris, les gens se sentent isolés et ils se déchaînent. Ils ne ressentent plus de lien avec leur communauté.
    Qu'il s'agisse ou non d'un stratagème... Je ne veux pas laisser entendre que les géants de la technologie complotent à cette fin et que c'était l'objectif. Je ne crois pas qu'ils soient malveillants, mais je pense qu'un mal s'est produit.
    Le plus important maintenant, je crois, serait simplement de trouver un moyen de remettre de l'argent dans les poches des journaux locaux, au lieu de critiquer ou de lancer des pierres.
     À mon avis, la façon la plus efficace de le faire est de mettre en place un mécanisme de conception dans le cadre duquel les deux plateformes peuvent émettre un chèque en fonction de la valeur qu'elles s'approprient. Un arbitre fixera ce montant. Ce montant devrait être réinvesti dans les journaux communautaires qui, avec un peu de chance, pourront rétablir tout ce qu'ils faisaient de très bien avant leur déclin.
(1205)
    Merci beaucoup, monsieur Singer.
    C'est tout, monsieur Julian.
    Nous allons revenir aux conservateurs. Martin Shields, vous avez cinq minutes.
    iciici Merci, madame la présidente.
     Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Si je me reporte aux hebdomadaires de la Saskatchewan et de l'Alberta en particulier, je sais qu'il y en a probablement une douzaine dans ma circonscription. Ils n'appartiennent pas à cette association et ne sont pas d'accord avec cette position parce qu'ils sont propriétaires-journalistes. Ils en ont peut-être une... et ils ne voient pas la valeur de cela. Ils sont très clairs. Lorsqu'on dit ici que toute l'Alberta et la Saskatchewan... Non, ils n'ont pas le même point de vue. Permettez-moi de vous le dire.
    Ils ont l'impression d'avoir été exclus de ce processus. Ils n'ont pas l'impression d'en faire partie. Ils ont l'impression que ce projet de loi va les tuer et qu'ils vont disparaître parce qu'il n'y a plus rien pour eux.
    Lorsque vous parlez de négociations, ils ne peuvent pas se permettre d'y prendre part. Ils ne font pas partie des négociations des organisations et, comme nous le savons, l'argent est presque épuisé.
    Madame Gardner, quelles sont les conséquences imprévues pour les petits journaux hebdomadaires avec un journaliste propriétaire? J'en ai un certain nombre.
    Oui, absolument.
     J'ajouterais à cela les éditeurs indépendants et les entreprises numériques en démarrage — toutes ces petites entreprises, qu'elles fonctionnent au niveau local ou non.
    Au départ, les entreprises indépendantes en démarrage s'opposaient au projet de loi C-18. Ensuite, lorsqu'il est devenu assez clair qu'il allait probablement être adopté — et je pense que cela s'est produit dans le cas de beaucoup d'entités — je crois qu'ils ont changé d'orientation pour essayer de le peaufiner et d'y apporter des amendements afin qu'ils soient moins désavantagés.
    Ils n'en veulent pas et il n'est pas surprenant que les services de nouvelles locales n'en veulent pas non plus, surtout ceux qui en sont explicitement exclus parce qu'ils ont moins de deux journalistes employés à temps plein.
    Les conséquences imprévues...
    Je suis désolé. Allez-y.
    Pour ce qui est des conséquences imprévues, je dirais, par exemple, qu'il s'agit de questions « d'intérêt général ». J'étais dans une boutique de journaux lorsqu'un journal autochtone a vu le jour dans les années 1960. C'était l'un des premiers. Est-ce une question d'intérêt général? Est-ce que les journaux autochtones, en raison de leur orientation, ne seraient pas visés par cette disposition?
    Exact. J'ai moi-même posé ces questions.
     Je pense qu'il est très important que ce genre de projet de loi soit envisagé dans le contexte de ce qui se passe réellement dans l'industrie de l'information, et pas seulement dans le contexte où l'industrie de l'information a besoin d'argent en raison de la fragmentation des auditoires.
     Je vais essayer d'être bréve, mais il fut un temps où nous regardions tous les mêmes nouvelles télévisées. Nous lisions tous à peu près les mêmes journaux. On nous offrait la même vision du monde. C'était bon pour la cohésion sociale, mais c'était aussi une mesure d'exclusion et de marginalisation pour beaucoup de gens différents. Ils ne se voyaient pas reflétés.
    Nous assistons aujourd'hui à l'épanouissement de nombreux services d'information hyperspécifiques et quelque peu spécifiques destinés aux peuples autochtones et aux personnes particulièrement préoccupées par les changements climatiques. Il y a des entreprises en démarrage qui visent, je crois, la diaspora asiatique en Amérique du Nord et les milléniaux.
    Plusieurs services différents existent aujourd'hui. Le projet de loi devrait tenir compte de cela et d'un certain nombre d'opinions différentes à ce sujet. Vous pourriez décider que des publications d'intérêt général sont importantes pour la cohésion sociale d'un pays dans son ensemble ou vous pourriez décider d'avoir un objectif de politique qui suit cette tendance et appuie de plus petits services d'information pour des groupes identitaires distincts et des ensembles d'intérêts distincts.
    Ce projet de loi ne prévoit pas ce genre de choses, mais cela devrait être pris en compte dans tout ce qui vise à soutenir un journalisme de qualité au Canada, parce que cela fait partie de la question de savoir ce qu'est un journalisme de qualité.
(1210)
    Enfin, l'arbitre de baseball, l'arbitrage sportif du dernier... Pensez-vous que le CRTC... ce qui est prévu dans ce projet de loi est comparable à un mécanisme d'arbitrage final pour les sports?
    Vous vous adressez à la mauvaise personne. Je suis désolé, mais je ne suis pas sportive. Je ne connais rien à l'arbitrage sportif.
    J'adresserai la question à M. Palmer.
    Il vous reste 38 secondes, monsieur Shields.
    Merci, madame la présidente.
    Non, ce n'est pas comme l'arbitrage sportif. L'arbitrage sportif se fait entre un athlète et son équipe. Nous parlons ici de ce qui est maintenant un groupe cloisonné, de divers groupes d'organismes de presse qui pourraient se regrouper ou non dans le cadre du processus de négociation. La négociation sera très différente de l'arbitrage des propositions finales au baseball. À mon avis, cela exclura les très petits joueurs qui ont le plus besoin d'un supplément, si vous voulez, à l'heure actuelle.
    Merci, monsieur Palmer.
    Je vais donner la parole aux libéraux pour cinq minutes.
    Nous avons Chris Bittle.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Singer, il semble que, aux États-Unis, toutes sortes de républicains conservateurs et de démocrates très libéraux appuient les efforts antitrust visant à freiner les géants de la technologie. Je vous serai reconnaissant de nous en parler un peu.
    C'est ce qu'ils font. Il y a une loi aux États-Unis, le projet de loi sur l'auto-préférence, par exemple, l'interdiction de l'auto-préférence qui a été adoptée par le comité judiciaire du Sénat — je crois que le vote a été de 16 contre six. Soit dit en passant, le comité judiciaire du Sénat a adopté la JCPA, la loi sur la concurrence et la préservation du journalisme. Cette mesure était très populaire. Je crois que le vote a été de 15 contre sept. Les républicains l'ont également appuyé.
    Je pense que le Congrès reconnaît que certains aspects du comportement de la plateforme échappent à l'examen antitrust. En particulier, quand on pense à ce que fait l'auto-préférence, il s'agit d'un comportement qui se produit à l'intérieur d'une entreprise. Il ne franchit pas une limite. Il n'y a pas de contrat disant qu'un fournisseur ou un client est exclusif... Par ailleurs, à court terme, cela n'a pas d'effet immédiat sur les prix. Lorsqu'Amazon fait une recherche sur ses propres marchandises dans son magasin, elle remplace habituellement un indépendant par quelque chose de moins cher, alors il n'y a pas d'effet sur les prix non plus. Il s'agirait d'horribles tendances factuelles à présenter devant un tribunal antitrust, où les juges examinent la jurisprudence quant à un comportement qui franchit une limite fixe et qui génère immédiatement un effet à court terme sur les prix.
     À mon avis, cela constituerait aussi un horrible ensemble de faits quant aux journaux. Aucun juge ne reconnaîtra le raclage, l'indexation, la conservation et l'appropriation, ce qui revient essentiellement à faire de votre muscle monopsone une infraction antitrust reconnue. Ce n'est certainement pas une violation de l'article 2 de la loi Sherman.
    Je pense que le Congrès reconnaît qu'il s'agit d'actes d'agression, d'actes anticoncurrentiels commis par les plateformes qui échappent à l'examen antitrust. Au lieu d'essayer de tout faire passer par un entonnoir antitrust, nous allons rédiger de nouvelles lois qui s'attaquent à ces agissements anticoncurrentiels en dehors des mesures antitrust, c'est-à-dire en utilisant des outils qui fonctionnent en dehors des lois antitrust, comme nous le faisons pour la JCPA.
    Politico a récemment fait des reportages sur le « lobbying louche » des géants de la technologie dans l'Union européenne « pendant les négociations sur deux lois historiques de l'UE sur la technologie ». Selon les reportages, des géants de la technologie comme Google et Meta « ont trompé les législateurs en faisant du lobbying auprès de petites organisations de façade, conduisant les législateurs de l'UE » à déposer huit plaintes auprès de leur organisme de lobbying. Quelqu'un au Canada a fait remarquer qu'il y avait tellement d'astroturfing à Ottawa qu'on pourrait croire que nous allons obtenir une équipe de baseball de la ligue majeure.
    Je me demandais si vous pouviez parler de certaines des tactiques employées par les géants technologiques dominants aux États-Unis.
    Oui, ce que je trouve malheureux, c'est qu'il ne s'agit pas seulement d'astroturfing au hasard, mais qu'on s'en prend à des organisations qui sont traditionnellement progressistes sur le plan du financement, et qu'on leur demande parfois de venir opposer ces projets de loi qui contrôleraient les plateformes technologiques, ou de garder le silence.
    C'est une chose — et je le dis avec tout l'amour que je porte aux libertaires — pour un front libertaire de dire qu'il n'y a pas d'échec du marché dans le cas présent et que nous n'avons pas besoin du gouvernement. C'est une autre chose quand une organisation progressiste — je ne nommerai pas de noms — vient dire que ce projet de loi est contre les consommateurs ou qu'il est insensé. Cela ouvrirait la porte à un déluge ou amènerait Google à facturer des frais de recherche. C'est ce qui se passe. Lorsque ces gens-là le disent, lorsque les progressistes le disent, ils sont essentiellement utilisés comme des traqueurs, c'est à ce moment-là que les plateformes peuvent vraiment maximiser leur activité politique et leur influence politique pour essayer d'obtenir des gains.
    Pour quelqu'un qui ne sait pas où va l'argent, cela peut être très déroutant, mais j'ai l'impression que beaucoup de journalistes, du moins aux États-Unis, ont compris d'où vient l'argent... et qui achète qui. Ils peuvent repérer ce genre de choses.
(1215)
    Merci beaucoup.
    Je ne...
    Merci.
    Il vous reste 44 secondes, monsieur Bittle. Vous pouvez les utiliser si vous le voulez.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Nous avons entendu l'un des témoins comparer les médias traditionnels aux fabricants de fouets de cocher. J'aimerais savoir ce que vous en pensez, monsieur Singer.
    Il vous reste 25 secondes.
    Je pense que la tactique adoptée ici par Google et Facebook consiste à chercher à imputer le tort qu'ils ont causé à la technologie dépassée des médias traditionnels, à leur sens des affaires tellement déficient qu'ils méritent presque de faire faillite. En fait, ce qu'ils font, c'est occulter leur appropriation de valeur. Comme ils en profitent, il est logique qu'ils fassent des analogies avec les fabricants de fouets de cocher.
    Merci beaucoup, monsieur Bittle.
    Merci beaucoup, monsieur Singer.
    Je constate que nous avons assez de temps pour un autre tour complet de questions.
    Nous entamons le prochain tour avec Mme Gladu, du Parti conservateur.
    Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur comparution aujourd'hui.
     Il est clair pour moi que le projet de loi C‑18 ne permettra pas d'atteindre l'objectif visé, qui est d'aider les petits journaux locaux, parce qu'il exclut ceux qui ont moins de deux journalistes à temps plein et que, manifestement, c'est Bell, Radio-Canada et Rogers qui vont recueillir la plus grande part de l'argent.
    Je vais m'en tenir aux modifications que nous pourrions apporter au projet de loi, puisque la coalition néo-démocrate-libérale va imposer son adoption et je veux réduire le plus possible les dommages qui en résulteront.
    Monsieur Palmer, vous avez dit que nous devrions supprimer la partie du projet de loi qui porte sur la préférence indue parce qu'elle pose problème, et que la disposition 52D de la loi australienne lui serait préférable.
    Vous avez également mentionné une autre partie du projet de loi qu'il faudrait supprimer, mais je n'ai pas bien saisi. Pourriez-vous me dire de quoi il s'agit?
    Madame la présidente, je crois que je parlais de l'article 24, qui prive les intermédiaires des nouvelles numériques de leur capacité d'invoquer des moyens de défense fondés sur le droit d'auteur. Cela ne fait que fausser le jeu et empêcher d'examiner vraiment la valeur de ce que M. Singer appelle « cette appropriation ». S'il y a effectivement appropriation, l'idée devrait être de la déterminer en fonction de la valeur de marché, avec tous les facteurs existants, y compris la common law, à tout le moins le droit d'auteur, et d'autres...
    Merci.
    Je vous remercie également de vos remarques sur la probabilité d'une contestation constitutionnelle de la définition actuelle d'« intermédiaire de nouvelles numériques ».
    De plus, vous avez mentionné que nous pourrions mieux définir une « organisation journalistique qualifiée », et je suis heureuse que vous recommandiez, pour les médias d'information, de reprendre les définitions de la Loi de l'impôt sur le revenu.
    Une autre idée que j'ai entendue est celle de M. Singer et elle portait sur la limite de taille des entreprises. Cette disposition a été introduite par voie de modification du texte original.
    Monsieur Palmer, avons-nous la possibilité de faire quelque chose pour mettre une limite à la taille des entreprises participantes, de façon à empêcher que Bell, Rogers et Radio-Canada obtiennent la part du lion et à acheminer l'aide là où nous le voulons, c'est‑à‑dire aux petits médias d'information locaux?
    Il n'y a actuellement rien dans le projet de loi qui le permettrait et il faudrait une modification pour le faire. Il est certain que le danger qui se profile en ce moment, c'est que les grandes entreprises recueilleront tout l'argent et qu'il ne restera rien pour les petits joueurs.
    En effet. Monsieur Singer, pourriez-vous nous dire quelle partie de la JCPA a été modifiée pour limiter la taille des entreprises admissible et quelle était la modification apportée?
(1220)
    Ce qui s'est produit avec la JCPA, malheureusement, c'est que les grands journaux, comme le New York Times, le Washington Post, peut-être le Wall Street Journal, ont été exclus de certains mécanismes de protection. La raison en est qu'ils étaient assez gros pour négocier leur propre indemnisation, merci beaucoup. Cependant, il s'avère que même eux, si gros soient-ils par rapport aux autres journaux, sont minuscules par rapport à Google et à Facebook. Donc, à mon avis, c'était une erreur d'avoir introduit cette disposition dans la JCPA.
    On ne veut pas exclure les gros joueurs de la négociation pour la même raison qu'on ne veut pas exclure, par exemple, LeBron James de l'association des joueurs. Il est possible que LeBron James n'en tire pas autant bénéfice que certaines recrues ou certains vétérans, mais le simple fait qu'il fasse partie de l'association renforce celle‑ci dans ses rapports avec les propriétaires individuels de la NBA. Je comprends l'aspect politique de la décision, mais je pense que si un économiste avait eu à en décider, les grands journaux n'auraient pas été exclus, et quand viendrait le temps de négocier...
    Je vous remercie. Mon temps est limité.
    J'ai une autre question pour M. Palmer.
    Vous avez dit qu'il serait préférable, pour déterminer quelle entreprise peut y recourir, que le ministre la désigne, comme le prévoit l'article 52E de la loi australienne. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Oui, la loi canadienne exige qu'une personne s'identifie en fonction de critères très lacunaires. Il faut qu'une personne se présente et dise: « Il y a un déséquilibre du pouvoir de négociation en ma faveur. Je domine le marché. » Or, il n'y a pas de définition de « marché ». Est‑ce le marché de la publicité? Celui de la consommation? De quoi s'agit‑il? Ce n'est pas du tout clair.
     Il me semble qu'il serait beaucoup mieux d'avoir des critères objectifs et qu'un responsable du gouvernement, un ministre, décide qui est [Difficultés techniques]. Libre à eux de contester s'ils le veulent, mais je pense que ce serait plus net. Ce serait beaucoup plus cohérent et cela permettrait d'obtenir des résultats plus rapidement.
    Merci.
    Je crois que mon temps est écoulé.
    C'est effectivement le cas.
    Merci, Mme Gladu.
    La parole est maintenant aux libéraux.
    Monsieur Housefather, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je m'adresse d'abord à M. Singer.
    J'ai eu le plaisir de passer au Congrès américain. Notre groupe de travail interparlementaire sur l'antisémitisme en ligne a tenu des audiences auxquelles Meta, Google, TikTok et Twitter ont comparu.
    J'ai eu l'occasion de parler à beaucoup de parlementaires, du moins à la Chambre des représentants, et j'ai constaté un véritable consensus parmi les démocrates et les républicains, des deux côtés, que ce soit au sujet de l'article 230 ou du monopole des plateformes. Il fallait en faire davantage pour contrer les pratiques et les techniques de ces géants du Web.
    Je sais que le sous-comité antitrust de la Chambre des représentants a récemment accusé des plateformes comme Amazon, Apple, Google et Facebook d'abuser de leur pouvoir monopolistique.
    Comment ces géants du Web réussissent-ils consolider leur position dominante sur le marché? Quelles pratiques et techniques utilisent-ils qui suscitent toutes ces préoccupations?
    C'est une question assez vaste. Vous êtes probablement au courant de tous les litiges antitrust.
    Je vous arrête un instant. Nous avons un problème de rétroaction acoustique.
    Je demande aux gens dans la salle de mettre leur micro en sourdine lorsqu'ils ont fini de parler. Ce serait très utile.
    Pouvons-nous recommencer? J'ai arrêté le chronomètre.
(1225)
    Pour ce qui est de trouver le dénominateur commun entre les divers genres de pratiques qui sont en litige, je dirais que la stratégie fondamentale appliquée par les plateformes est une variante de la restriction « anti-steering » ou de ce qu'on appelle la clause de la nation la plus favorisée.
    Cela empêche tout courtier ou négociant, disons un développeur d'applis ou un commerçant, sur le site d'Amazon de sortir de la plateforme pour vendre ses produits à un prix inférieur. C'est dire qu'il est interdit, à l'extérieur de la plateforme dominante, de vendre à un prix inférieur à celui pratiqué sur la plateforme.
    Google le fait avec des clauses « anti-steering », Amazon avec la clause de la nation la plus favorisée. Ils veillent ainsi à ce qu'aucune coalition, personne ou coalition de développeurs ou de commerçants ne puisse soutenir une plateforme rivale. Si ceux‑ci pouvaient réorienter les consommateurs en leur offrant des prix moindres à l'extérieur de la plateforme dominante, cela pourrait engendrer une certaine augmentation des emplacements et une certaine concurrence entre les plateformes, ce qui obligerait Google et Amazon à réduire les tarifs de participation imposés aux développeurs d'applis et aux commerçants, respectivement.
    Ils se sont rendu compte que, s'ils réussissaient à empêcher ce genre de comportement, cette réorientation, ils pourraient maintenir des tarifs de participation artificiellement élevés. Ces tarifs artificiellement élevés, du moins en ce qui concerne Amazon, ont augmenté au fil du temps. Ils se répercutent tous sur le prix de tout ce que les clients achètent.
    Il y a beaucoup de pratiques anticoncurrentielles en ce moment, mais je sais que je n'ai pas le temps de les aborder toutes. À mes yeux, c'est le point saillant, et il faut s'y attaquer. Je pense qu'elles sont carrément de nature antitrust. Nous devrions donner à ces poursuites antitrust une petite chance de faire sentir leurs effets dans ce domaine.
    Merci beaucoup. C'est très utile.
    J'ai une très brève question à vous poser.
    Quand les représentants de Facebook étaient ici vendredi, ils ont répété leur menace de désactiver le contenu de nouvelles téléchargé par des utilisateurs canadiens, comme ils l'ont fait en Australie.
    Ont-ils déjà brandi de telles menaces aux États-Unis ou est‑ce que seuls les petits pays comme le Canada ou l'Australie sont menacés de la sorte?
    Non, vous n'êtes pas les seuls. Ils menacent tout le monde. Ils ont aussi menacé de faire des choses répréhensibles aux États-Unis lorsque le projet de loi, devenue la JCPA, semblait être sur le point d'être mis aux voix au comité judiciaire du Sénat.
    Qu'ils l'admettent ou non, je pense que Facebook et Google savent que les journaux et le journalisme de qualité empêchent en fait leurs plateformes de se transformer en fosse d'aisance. Imaginez qu'ils enlèvent tout ce contenu, comme ils menacent de le faire, qu'ils suppriment la qualité et gardent seulement le contenu de mauvaise qualité ou la désinformation. Toute la plateforme deviendrait une fosse d'aisance. Cela incitera les annonceurs à les abandonner, tout comme les utilisateurs.
    Nous devrions prendre leurs menaces au sérieux, mais je ne pense pas qu'elles équivalent à grand-chose en bout de ligne. Ces plateformes ont besoin des journaux d'information, mais ils n'ont pas à les en ce moment parce que le déséquilibre du pouvoir joue tellement en leur faveur, n'est‑ce pas?
    Ce que nous demandons, c'est de créer une structure dans laquelle un arbitre peut décider quelle est la juste valeur marchande, et nous pourrions ensuite aller notre chemin. Une fois le paiement effectué, c'est fini. Sauf le respect que je dois à Mme Gardner qui en a parlé, il n'y a pas de taxe sur les liens. Il n'y a pas de frais supplémentaires à payer chaque fois que quelqu'un clique ou pour chaque lien affiché. Il y a un montant forfaitaire pour l'accès. Par la suite, chacun est libre de faire ce qu'il veut avec le contenu, sous réserve des droits d'auteur qui s'appliquent.
    J'imagine que mon temps est écoulé, madame la présidente.
    Oui. Il vous reste 18 secondes, monsieur Housefather. Merci.
    Je donne la parole à Martin Champoux.
    Vous avez deux minutes et demie, s'il vous plaît.

[Français]

     J'aurai également les 18 secondes de temps de parole que M. Housefather n'a pas utilisées.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur Palmer, je reviens au mémoire que vous avez remis au Comité la semaine dernière.
    Dans ce mémoire, vous parlez de la définition du contenu des nouvelles qui est trop large et imprécise. Selon vous, la Loi pourrait s'appliquer aux services de baladodiffusion, comme Apple et Spotify, et aux assistants vocaux, comme Alexa et Siri, et, potentiellement même, les boutiques d'applications. Or, dans votre mémoire, vous n'expliquez pas en quoi cela peut être le cas.
    Quand vous lisez le paragraphe 27(1) du projet de loi C‑18, qui précise les entreprises admissibles, comment pouvez-vous faire entrer ces entreprises dans ces critères?
    Pouvez-vous me donner des précisions à ce sujet?

[Traduction]

    Volontiers. Merci. Je suis heureux de donner cette explication.
    Tel qu'il est libellé, l'alinéa 27(1)b) est la disposition qui nous concerne. L'alinéa 27(1)a) est très précis. Il reprend les termes de la Loi de l'impôt sur le revenu. Il incorpore par renvoi la définition contenue dans la Loi de l'impôt sur le revenu.
    L'alinéa 27(1)b) est une tout autre paire de manches. Si vous aviez un balado, celui de Joe Rogan, par exemple, qui a probablement beaucoup plus que deux employés...

[Français]

    Je vous interromps parce que, dans votre mémoire, vous dites que les assistants vocaux et les boutiques d'applications pourraient être soumis à la réglementation. Je ne comprends pas comment cela pourrait devenir des entreprises de nouvelles.
(1230)

[Traduction]

    Vous allez devoir m'excuser...

[Français]

    Monsieur Palmer, vous pourrez nous fournir cette réponse par écrit ultérieurement. Il me reste à peu près 30 secondes de temps de parole. Je dispose de vraiment très peu de temps.
    Madame Gardner, mettons de côté nos opinions divergentes sur la pertinence du projet de loi C‑18.
    Je sais que vous avez l'intention de protéger le journalisme de qualité. Or je dois vous dire que je ne suis pas tout à fait en désaccord sur la remise en question de la règle de deux journalistes par média. Je ne pense pas que ce soit le cas des nouveaux modèles de journalisme qui définissent ce qui peut être un média de qualité. Je ne pense pas non plus que c'est ce qui va protéger les médias régionaux.
    Êtes-vous d'avis que nous devrions mettre davantage l'accent sur des critères de qualité journalistique et nous baser sur des normes journalistiques plutôt que sur un nombre de journalistes? Ce critère serait-il acceptable pour vous?
    Veuillez répondre en quelques secondes, parce qu'il me reste très peu de temps de parole.

[Traduction]

    Je suis désolée. Je tâcherai de répondre rapidement.
    Il est difficile de définir la qualité. Je pense que lors de réunions précédentes, les gens ont parlé de normes et de pratiques, et il y a diverses façons par lesquelles les entreprises journalistiques adoptent des normes et des pratiques. C'est peut-être une voie pour définir la qualité.
    Je pense que c'est une mauvaise idée d'exclure les très petites entreprises parce qu'elles sont parfois les seules sur un marché et qu'elles jouent parfois un rôle très important.

[Français]

     Je vous remercie de cette réponse brève et précise.
    Merci beaucoup, monsieur Champoux.

[Traduction]

    Je donne la parole à M. Julian pour deux minutes et demie.
    Merci.
    Monsieur Singer, j'aimerais revenir sur ce dont on parlait il y a quelques minutes, les propos haineux et la désinformation.
    Nous avons été témoins de la prise de contrôle de Twitter par Elon Musk et de la promotion délibérée qu'il a faite d'une désinformation consternante au sujet de l'attaque contre le mari de Nancy Pelosi, présidente de la Chambre des représentants. Les géants du Web ont été critiqués parce qu'ils refusaient d'agir rapidement pour contrer la désinformation. J'aimerais savoir si vous avez des observations à faire au sujet de cette désinformation croissante qu'on voit chez les géants du Web.
    Il y a aussi l'autre aspect, le journalisme responsable. Il y a l'extrémisme crapuleux de Fox News, auquel nous opposons l'intégrité journalistique du genre qu'on voit, par exemple, à la Société Radio-Canada, qui s'attire souvent d'ailleurs l'hostilité des extrémistes.
     Dans quelle mesure la JCPA s'applique‑t‑elle aux radiotélédiffuseurs publics, comme PBS, aux États-Unis? Quelle importance accordez-vous à ce que la radiotélévision publique soit régie dans un cadre, celui du projet de loi C‑18, par exemple, qui aide à contrebalancer cet extrémisme délirant que nous voyons de la part de Fox News et la désinformation délibérée transmise par Elon Musk sur Twitter et d'autres géants du Web qui semblent tirer profit de la mobilisation suscitée par cette désinformation?
    Je tiens à dire d'emblée que je suis un défenseur de la liberté des géants du Web d'exercer une modération sur le contenu, tout particulièrement lorsqu'il s'agit de contenir l'antisémitisme ou la violence inflammatoire... J'espère que nous pourrons nous entendre sur le fait que tout propos incitant à la violence devrait relever de la responsabilité de la plateforme et qu'elle devrait pouvoir librement restreindre son contenu et appliquer sa politique de modération dans ce domaine. Je ne crois pas que la JCPA nuise à cette capacité. Mais pour ce qui est de l'effet sur les entreprises de radiotélévision, je pense qu'il y a un déséquilibre de pouvoir similaire, qui fait qu'ils ne reçoivent pas une juste valeur marchande.
    Fait intéressant, je signale que, aux États-Unis, les radiotélédiffuseurs ne voulaient, pas dans le projet de loi, les mêmes protections que les journaux, et la loi américaine est donc rédigée de façon à leur accorder une légère protection, mais ils n'ont pas cet arbitrage exécutoire, un arbitrage comme on voit dans le monde du baseball dans lequel un arbitre peut contraindre les parties à la négociation et imposer un paiement définitif. Les radiotélédiffuseurs, du moins aux termes de la loi américaine, ne peuvent recourir à cette procédure.
    Merci beaucoup, monsieur Julian. Vous avez terminé juste à temps.
    Je donne la parole aux conservateurs pour cinq minutes.
    Madame Thomas, allez‑y, je vous prie.
    Madame la présidente, avant de commencer, j'aimerais poser une question au nom du Comité.
    Je regarde l'horloge et je me demande si vous accepteriez, après la présente série de questions, d'accorder encore deux minutes et demie à chaque parti pour poser d'autres questions.
    Je verrai après la présente série de questions. Merci.
    Allez‑y, madame Thomas.
    Merci.
    D'après ce que j'entends autour de la table de la part des députés libéraux et de M. Singer, les géants du Web sont dans leur tort et, par conséquent, c'est à eux de payer. Cela équivaudrait à une sorte de garantie de journalisme de qualité au Canada. C'est cette position qui est défendue à cette table.
    Madame Gardner, auriez-vous des observations à faire à ce sujet?
(1235)
    Je suis d'accord pour dire que beaucoup de choses ont été avancées aujourd'hui qui sont étrangères au projet de loi C‑18 et qui n'ont pas rapport avec les entreprises de presse et leur relation avec les plateformes de diffusion de l'information.
    Je pense, je suppose, que nous sommes tous d'accord pour dire qu'il y a de nombreuses raisons de critiquer les géants du Web, notamment l'amplification algorithmique de contenus incendiaires. Je crois que la Chambre a l'intention de s'attaquer à ce problème en légiférant sur les méfaits en ligne. C'est une question de grande importance.
    Je siège au conseil d'administration du Canadian Anti-Hate Network, qui a pour mission de dépister l'antisémitisme, les propos haineux de toutes sortes et le racisme au Canada, y compris sur les plateformes. C'est une question de taille, et je ne veux pas en minimiser l'importance ou en rire.
    Je pense que votre instinct est sûr. L'hostilité envers les géants du Web ne cesse de croître depuis, disons, cinq ans, et cela fait d'eux une cible facile. Je pense que ce sentiment se manifeste quelque peu ici aujourd'hui.
    Les géants du Web ont beaucoup d'argent. Je pense qu'il est tout à fait raisonnable de les imposer et, comme je l'ai dit, de se servir de ces recettes fiscales pour financer le journalisme, mais, pour ma part, je me passerais bien des jugements moraux qu'on entend et qui me paraissent peu appropriés.
    Madame Gardner, il me semble que si nous voulons un journalisme de qualité, nous devons permettre l'innovation dans le monde de l'information.
    Ce projet de loi favorise‑t‑il la créativité et l'innovation?
    Ce n'est pas l'avis des créateurs et des innovateurs actuels, et je pense, puisque ce sont eux qui font le travail, que leur opinion est probablement assez juste.
    À mon sens, ce projet de loi favorisera les entreprises qui ont la capacité de négocier des arrangements et qui emploient des avocats et des gens d'affaires, ainsi que celles qui ont un pouvoir de lobbying et une présence à Ottawa, ce que les petites entreprises n'ont certainement pas. Elles passent tout leur temps à tenter d'innover leur produit, à le peaufiner pour le rendre plus attrayant et amener les gens à payer un abonnement ou à s'inscrire à Patreon ou à une autre formule de participation qu'elles ont adoptée.
    Une chose que je peux vous dire, ayant moi-même dirigé des entreprises de presse, c'est que plus vous avez de modèles d'affaires, plus votre vie se complique, plus vous avez de maîtres à servir et plus vous avez de compétences à acquérir. Lorsque j'étais à la tête de la Fondation Wikimédia, nous avons mis à l'essai de multiples modèles d'affaires pendant deux ans, puis nous nous sommes rabattus sur celui qui fonctionnait, c'est‑à‑dire celui où les gens ordinaires faisaient des dons simplement parce qu'ils le voulaient.
    Ce n'est pas, je pense, une bonne idée d'essayer d'amener les entreprises en démarrage non seulement à chercher à plaire à leur public, mais aussi à tirer, on peut le supposer dans bien des cas, des revenus des utilisateurs, et encore à apprendre à bien négocier avec Google et Facebook et à coordonner leurs activités avec d'autres entités dans ce but, ainsi qu'à établir de bons rapports avec le gouvernement par l'entremise des fonds de journalisme local et de tout autre mécanisme que le gouvernement pourrait établir. Le gouvernement, c'est une autre partie prenante et une autre source de revenus.
    C'est d'une complexité écrasante pour une entreprise qui est très petite, où la personne qui s'occupe du développement des affaires est aussi celle qui rédige les nouvelles et qui est en charge du site Web.
    Je pense que le projet de loi nuira à l'innovation, qui est nécessaire au plus haut point. L'idéal que nous appelons de nos vœux, c'est un secteur journalistique viable et, pour cela, il faut innover.
    Merci, madame Gardner.
    Monsieur Palmer, M. Singer a parlé de... Il semble penser qu'il y a deux caisses, ce qui, encore une fois, montre qu'il comprend mal le projet de loi. Il a souligné le fait que les journaux pourront demander de l'argent, mais aussi que d'autres organes de presse pourront le faire. Ce n'est pas le cas. Dans ce projet de loi, il n'y a pas deux caisses. Il n'y en a qu'une seule et, en pratique, il y aura de petits journaux qui seront en concurrence avec de grandes entreprises comme Bell.
    Nous avons entendu deux personnes différentes qui ont comparu devant le Comité, l'une représentant les quotidiens de l'Alberta, l'autre représentant les hebdomadaires de la Saskatchewan. Le représentant albertain a dit que, dans sa province, 50 % des journaux ne seraient pas admissibles parce qu'ils n'avaient pas au moins deux journalistes à temps plein et celui de la Saskatchewan a dit que 80 % seraient inadmissibles pour la même raison.
     Si ce projet de loi a vraiment pour objet de protéger les journaux locaux, va‑t‑il l'atteindre?
(1240)
    Merci.
    Je ne pense pas que nous ayons le temps d'entendre la réponse, madame Thomas. Votre temps est écoulé.
    Je donne maintenant la parole aux libéraux, pour cinq minutes.
    Madame Hepfner, allez‑y, s'il vous plaît.
    Merci, madame la présidente.
     Monsieur Singer, poursuivons dans la même veine. Voyez-vous quoi que ce soit dans le projet de loi C‑18 ou dans votre équivalent américain, la JCPA, qui étoufferait l'innovation dans le secteur de l'information?
    Non, rien n'étoufferait l'innovation.
    Si vous pouvez trouver le moyen d'injecter de l'argent frais dans les salles de rédaction, il aura l'effet contraire. Le projet de loi devrait agir comme un stimulant de l'innovation et il aura cet effet en encourageant l'investissement dans le journalisme.
    Seriez-vous d'accord pour dire que, lorsqu'on encourage les entreprises à embaucher plus de journalistes et que les journalistes sont plus nombreux sur le terrain, dans les salles de nouvelles, dans les hôtels de ville, dans les salles d'audience et dans la rue pour parler aux gens et recueillir de l'information, on se retrouve avec plus de bons journalistes parce qu'ils seront plus nombreux à avoir bénéficié de cette expérience?
    Ou être qualifiés au départ.
    Madame la présidente, la députée d'en face m'interrompt. Peut-être pourrait-elle baisser la voix et chuchoter.
    Je suis désolée.
    Voulez-vous poursuivre, madame Hepfner? Je demanderais aux gens de ne parler qu'à voix basse et de se montrer respectueux des autres intervenants et témoins.
    Merci.
    Monsieur, êtes-vous d'accord pour dire qu'un plus grand nombre de journalistes et la création d'un environnement propice à la présence d'un plus grand nombre de journalistes mènent à un meilleur journalisme?
    Bien entendu. Cela se traduit par un journalisme plus poussé, un renforcement de la démocratie, une plus grande innovation. Tout cela est bon.
    Expliquez pourquoi une formule de financement ne serait pas la meilleure façon de s'attaquer au déséquilibre du marché et au risque pour la démocratie auquel nous sommes confrontés actuellement.
    Eh bien, je pense qu'une formule de financement est la meilleure solution. C'est la façon la plus efficace de procéder. Ce que je veux dire, c'est que je suis, respectueusement, en désaccord avec l'autre option, celle qu'il me semble que Mme Gardner proposait, c'est‑à‑dire demander aux contribuables d'intervenir pour régler le problème causé par les plateformes.
    Si vous êtes capable de calculer l'appropriation de valeur par les plateformes que les éditeurs de nouvelles font valoir à la table, il devrait incomber aux plateformes de les indemniser du montant qui serait payé sur un marché équitable, dans une transaction volontaire, sans déséquilibre de pouvoir. Je pense qu'une négociation structurée avec une seule source de financement pour les éditeurs de nouvelles... Quelqu'un a dit tout à l'heure que j'avais dit qu'il y aurait deux caisses. Je parlais d'une caisse différente pour les radiotélédiffuseurs. Donc, créer une seule caisse pour tous les éditeurs de nouvelles — tout le monde dans le même bateau — est la meilleure façon de s'attaquer à ce problème.
    Merci, monsieur. Il y a beaucoup de désordre de l'autre côté de la table.
    Vous avez...
    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    Encore une fois, Mme Thomas... Il y a des éclats dans la salle, ce qui est assez choquant parce qu'elle est la première à s'offusquer et à exiger du respect, mais elle est la dernière à en montrer à l'égard d'un autre membre du Comité. Vraiment, madame la présidente, c'est indécent jusqu'à l'absurde que cette députée continue de se tenir coude à coude avec Facebook et de se moquer de quiconque est d'une autre opinion qu'elle. C'est vraiment dégoûtant.
    Merci, monsieur Bittle.
    Je demanderais à tous les membres du Comité de se montrer respectueux de leurs collègues et des témoins qui ont la parole. Vous aurez votre tour, et quand ce sera votre tour de parler, vous pourrez dire ce que bon vous semble. Merci de votre collaboration.
    Veuillez poursuivre, madame Hepfner. Soit dit en passant, j'ai arrêté le chronomètre.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais revenir sur votre argument selon lequel la valeur des nouvelles appropriées est la valeur du contenu dans son état initial, donc avant qu'il soit épuré, indexé, affiché, agrégé et présenté. Pouvez-vous nous expliquer davantage ce concept?
    D'accord. La question consiste à déterminer ce qui serait payé aux éditeurs de nouvelles à la suite d'une négociation volontaire, sans déséquilibre du pouvoir, pour que Google et Facebook aient accès à leur contenu et puissent ensuite faire toutes les choses merveilleuses qu'ils en font de nos jours. Ce que nous pouvons faire pour répondre à cette question, c'est de voir quelle est la valeur créée sur la plateforme par les éditeurs de nouvelles et revenir en arrière pour déterminer ce que Google et Facebook auraient eu à payer à la suite d'une négociation volontaire, sans déséquilibre du pouvoir. Le montant qu'ils auront à payer sera à peu près égal à la valeur qui est créée. C'est là‑dessus que portera le différend en cas d'arbitrage. Il s'agira de savoir qui peut démontrer de façon crédible la valeur appropriée par les plateformes du contenu créé collectivement par tous les éditeurs de nouvelles.
(1245)
    Pour que ce soit bien clair pour le Comité, d'après ce que vous savez au sujet de la mise en œuvre d'une loi semblable en Australie, ce sont en fait les petits éditeurs qui ont obtenu comparativement les meilleurs résultats, qui ont embauché le plus de journalistes et qui en ont eu le plus pour leur argent. Les petits éditeurs, pas les grands conglomérats.
    Je n'ai pas fait de comparaison de l'embauche relative, mais ce que je sais, ce qui a été largement rapporté, c'est que l'argent qui a été recueilli par tous les journaux, petits et grands, en Australie, a été investi, réinvesti dans le journalisme. À mon avis, c'est ce qu'il faut retenir. Si quelqu'un doute que cela puisse se produire ici, il n'a qu'à regarder ce qui s'est passé en Australie. Si vous fixez correctement la répartition, vous allez créer un incitatif supplémentaire qui amènera les éditeurs de nouvelles à réinvestir dans leur personnel journalistique parce que cela fera augmenter leur allocation, leur part de l'allocation, la prochaine fois.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Votre temps est écoulé, madame Hepfner.
    Je vais demander à la greffière quelle est l'heure limite pour la fin de la réunion.
    Pouvons-nous la dépasser de deux ou trois minutes?
    En fait, on ne m'a pas envoyé d'information sur l'heure limite aujourd'hui, mais, dernièrement, c'est sur l'heure qu'il faut avoir terminé. Ce sera donc probablement à 13 heures. Je vois qu'il nous reste environ 14 minutes.
    C'est pourquoi j'ai posé la question. Si nous acceptons la proposition de deux minutes et demie pour chacun des six intervenants, nous atteindrons 15 minutes, une minute au‑delà du temps prévu. Je suis certaine que nous pouvons nous le permettre.
    Je vais donc commencer par les conservateurs, pour deux minutes et demie, s'il vous plaît.
    Puis‑je savoir qui parlera pour les conservateurs?
    Ce sera Marilyn Gladu. Merci, madame la présidente.
    Ma question s'adresse à M. Palmer.
     Pensez-vous que le projet de loi C‑18 bénéficiera aux petits médias?
    En fait, non, je ne le crois pas. Il est difficile de concevoir comment ces petites entreprises réussiront à se regrouper et à trouver les ressources pour participer au genre de processus de négociation envisagé dans le projet de loi  C‑18.
    Le principal problème avec le projet de loi C‑18, c'est qu'il prévoit un processus cloisonné. Les gros joueurs ont les moyens voulus pour participer au processus de négociation, engager des experts, des avocats, etc., afin soutenir leurs positions et aller en arbitrage. Ce n'est pas le cas des petits journaux communautaires indépendants et autres, et l'infrastructure nécessaire pour les soutenir n'est pas en place.
    Serait‑il préférable, dans ce cas, que le gouvernement impose des frais à Facebook et à Google pour leurs activités au Canada et qu'il canalise l'argent ainsi recueilli vers un fonds quelconque qui pour aider les petites entreprises médiatiques?
    Comme moyen de verser de l'argent aux plus petites entreprises de la communauté journalistique, c'est probablement une meilleure solution que le projet de loi C‑18. Je ne pense pas que le système prévu actuellement puisse assurer ce résultat.
    Merci beaucoup.
    Il vous reste une minute, neuf secondes.
    Je passerai donc à mon autre question. Vous me connaissez: jamais je ne cède de mon temps.
    D'accord. Allez‑y, madame Gladu.
    J'ai une question pour Mme Gardner, la même question que j'ai posée à M. Palmer.
     Pensez-vous que les petits médias vont bénéficier du projet de loi C‑18?
    Non, je ne le crois pas, pour les raisons que j'ai déjà mentionnées. Je pense qu'ils n'ont tout simplement pas un vrai pouvoir de négociation. Ils n'ont ni le temps ni l'énergie nécessaires. Ils ne sont pas assez gros pour répondre aux exigences de ce genre de négociation.
    Pour répondre à votre deuxième question, je suis évidemment d'avis, comme je l'ai déjà dit, qu'un fonds serait préférable. C'est plus simple.
     Si nous abandonnons le projet de loi C‑18 et établissons un fonds, ce serait mieux. Si nous retenons le projet de loi C‑18, quelles modifications aimeriez-vous qu'on y apporte?
    D'accord. Je ne sais pas si je peux vous les donner dans le temps qui vous reste, mais il y a un élément...
    Pourriez-vous faire parvenir par écrit vos propositions de modification au Comité?
    Oui, avec plaisir.
    Excellent.
    Merci, madame Gardner. Nous avons hâte de les recevoir.
    La parole est à M. Coteau.
    Vous avez deux minutes et demie.
(1250)
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    J'aimerais y aller d'une brève observation.
    Des témoins nous ont dit que près de 500 sociétés médiatiques se sont effondrées au cours de la dernière décennie sous l'effet de l'évolution de la structure de cette industrie au Canada. On nous a dit également, et je pense que les conservateurs en conviendront probablement, qu'aucune valeur n'est attribuée au contenu médiatique diffusé par les géants du numérique.
    Je m'étonne qu'on puisse supposer, en ouvrant Facebook, en cliquant sur un lien dans Twitter ou en navigant sur Google, que le contenu canadien n'a pas de valeur. Si nous convenons qu'elle a une valeur, il faut alors convenir que nous devrions déterminer ce qu'elle est, comme l'a suggéré M. Singer. C'est un processus très équitable. En fait, il s'agit de déterminer la valeur de tel contenu sur telle plateforme et le montant de sa monétisation, puis de payer l'éditeur en conséquence. C'est d'une grande simplicité.
    Monsieur Singer, auriez-vous des observations ou des réflexions à nous communiquer à ce sujet? Y a‑t‑il quelque chose que vous aimeriez dire avant la fin de la séance?
    Oui, j'aimerais revenir sur un point signalé par Mme Gardner il y a un instant, à savoir que les petites entreprises n'auront pas les ressources voulues pour engager un lobbyiste pour négocier.
    J'insiste respectueusement que la raison d'être d'une coalition est d'obtenir la participation de tous ceux concernés, de se faire représenter par un avocat et un spécialiste et d'assurer un financement collectif. Cette formule ne grèvera les ressources financières d'aucun petit éditeur. Personne n'aura à faire du lobbying ou à négocier. Il suffira de se joindre au collectif. Le collectif confiera le dossier à un avocat et à un économiste, qui se chargeront de négocier et de tenter d'obtenir la meilleure évaluation possible.
    Je tiens à dissiper l'idée que ce système est conçu de telle sorte qu'il compliquera la vie des petites entreprises. En fait, s'il est bien structuré, il devrait leur faciliter la vie. Tout ce qu'elles ont à faire, c'est de se joindre à la coalition, puis, à condition de gagner en arbitrage, de toucher leur part au prorata du trafic généré et de l'emploi créé. C'est ainsi que nous procédons, du moins aux États-Unis.
    Merci beaucoup, monsieur Coteau. Je crois qu'il ne vous reste qu'environ 10 secondes. Je donne donc la parole à M. Champoux.
    Vous avez deux minutes et demie.

[Français]

     Merci, madame la présidente.
    Monsieur Palmer, j'aimerais revenir avec vous sur la réglementation des entreprises qui font des affaires essentiellement par le truchement des plateformes en ligne. On parle beaucoup de Google et de Facebook, mais vous avez plutôt à cœur l'ensemble d'Internet. Vous tenez à ce que son accès soit facile pour tout le monde et à ce que tous aient la possibilité de profiter de ce qu'offre Internet.
    Êtes-vous d'avis qu'on ne doit pas réglementer le commerce qui se fait par les entreprises de façon générale ou est-ce que votre objection est essentiellement contre les projets de loi tels que les projets de loi C‑18 et C‑11?
    Est-ce que votre position là-dessus est générale? Pourriez-vous la définir?

[Traduction]

    Je vous remercie de me donner l'occasion de m'exprimer.
     Non, je pense qu'il y a beaucoup de travail à faire. Ce qui me préoccupe au sujet du projet de loi C‑11 et du projet de loi à l'étude, c'est qu'ils ne portent pas sur l'Internet dans son ensemble. Tout se fait pièce par pièce. Les éléments ne sont pas nécessairement imbriqués les uns dans les autres. Il n'y a pas de vision globale du côté du gouvernement qui propose ces diverses mesures.

[Français]

    Nous devons faire un pas en avant. Notre industrie journalistique se meurt et elle est en crise depuis des années.
    Ne croyez-vous pas que c'est un premier pas et qu'on pourra et qu'on devra, au fil des années, améliorer la loi avec les défauts qu'on y trouvera inévitablement en cours de route?
    Ne croyez-vous pas que c'est déjà un bon pas en avant?

[Traduction]

    Ce qui me dérange, c'est que j'ai l'impression d'un mauvais départ. Je pense que c'est un premier pas dans la mauvaise direction et qu'il sera fatal pour beaucoup d'entreprises journalistiques et d'entreprises de nouvelles. C'est ce qui me préoccupe.
     Le modèle américain qui est proposé consiste à regrouper au sein d'une coalition tous ceux qui travaillent dans le domaine de l'information. Ce n'est pas ce que fait le projet de loi C‑18. Il prévoit plutôt une partition entre les gros joueurs et les petits. Rien ne les force à se regrouper. À défaut d'un regroupement, il y aura beaucoup de perdants et très peu de gagnants.
(1255)

[Français]

    Cependant, cela pourrait être corrigé au moyen d'amendements à ce projet de loi ou au fil des prochaines années, non?

[Traduction]

    Oui, c'est possible, mais il faudrait des modifications en profondeur pour le faire. Je serais tout à fait en faveur de quelque chose qui imposerait en fait ce genre de coalition que les Américains envisagent. Je pense que ce serait une mesure très positive.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur Palmer.
    C'est tout, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur Champoux.
    Je donne maintenant la parole à M. Julian.
    Vous avez deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je reviens à vous, monsieur Singer. Je vous ai posé une question précise au sujet des radiotélédiffuseurs publics et de la mesure dans laquelle ils sont assujettis à la JCPA. Il va sans dire qu'il s'agit de PBS, les réseaux de radiotélévision aux États-Unis. Vous avez répondu que les radiotélédiffuseurs sont généralement exemptés de certaines dispositions de la loi. Accorde‑t‑on une attention particulière aux réseaux de PBS, tant pour la radiodiffusion que pour la télédiffusion?
    Je ne crois pas que le texte de loi accorde un traitement spécial à PBS. Ce qui s'est passé, je pense, c'est que les entreprises de radiotélévision ont demandé et obtenu l'assurance de négociations de bonne foi, mais cela s'arrête là. Je pense qu'ils ont un certain recours dans le cas où la partie opposée n'agit pas de bonne foi, mais il n'y a pas d'arbitrage contraignant en fin de parcours comme celui auquel la coalition des journaux peut recourir.
    Cela clarifie les choses. Merci beaucoup.
    Maintenant, pour revenir à cette question... et il va sans dire que nous envisageons des modifications, et je suis donc un peu perplexe devant la réaction de certains membres du Comité qui semblent penser que le projet de loi est à rejeter dans sa totalité parce qu'il y aurait des modifications à proposer. Il est évident que le projet de loi peut être amélioré. L'un des volets à examiner concerne les petits médias communautaires, les journaux propriétaires-exploitants ou les entités de radiodiffusion, telles que la radio communautaire, qu'on trouve souvent dans les petites collectivités.
     Pouvez-vous nous parler de l'importance de l'approche adoptée en Australie, où Country Press Australia, qui représente environ 150 petits journaux communautaires, a obtenu des moyens non négligeables de financement qui ont contribué à la revitalisation du secteur, ainsi que de l'importance d'assurer l'inclusion des petits journaux communautaires? Une telle approche exigerait que nous envisagions d'apporter des modifications au projet de loi C‑18.
    Je pense que les petites collectivités ont manifestement mieux réussi en tant que coalition que si elles avaient négocié individuellement. Elles ont obtenu de meilleurs résultats. En fait, elles se sont assuré un financement. Reste à voir maintenant ce qu'elles feront.
    Je m'en tiens à mon idée première. Elles auraient fait encore mieux si elles avaient pu négocier collectivement avec tous les journaux, y compris les grands. Je ne vois pas de bonne raison économique pour mettre à part les petits journaux et leur dire de négocier en tant que coalition. D'accord, c'est mieux que de négocier individuellement, mais si j'avais le choix de structurer le processus, je regrouperais tout le monde au sein d'une coalition d'éditeurs de nouvelles pour les négociations.
    Merci beaucoup.
    C'est tout le temps que vous avez, monsieur Julian.
    Nous ne disposons pas d'un supplément de temps ce matin. Il nous reste une minute.
    J'en profite pour remercier les témoins de leur comparution et de leurs réponses à questions souvent difficiles. J'estime que la réunion a été très utile.
    Je tiens également à vous remercier d'avoir donné de votre temps pour nous aider dans notre étude. Comme beaucoup de membres du Comité l'ont dit, des modifications du projet de loi pourraient être apportées, dans bien des cas en raison de vos témoignages.
    Je vous remercie tous.
    La séance est levée.
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