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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 044 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 5 décembre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1100)  

[Traduction]

    Bonjour et bienvenue à la 44e séance du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 31 octobre, le Comité reprend son étude sur les femmes et les filles dans le sport.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule sous forme hybride, conformément à l'ordre de la Chambre du 23 juin 2022. Les membres participent ici même ou à distance par Zoom.
    J'aimerais faire quelques observations à l'intention des témoins et des membres du Comité.
    Veuillez attendre que je vous donne la parole en vous désignant par votre nom avant de parler.
    Pour les personnes qui participent par vidéoconférence, veuillez cliquer sur l'icône du microphone pour activer votre micro et veuillez le désactiver quand vous ne parlez pas.
    Pour l'interprétation sur Zoom, vous avez le choix, au bas de votre écran, entre « parquet », « anglais » et « français ». Les personnes présentes dans la salle peuvent utiliser leur oreillette et sélectionner le canal voulu.
    Je rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence.
    Si vous voulez prendre la parole, veuillez lever la main. Pour les personnes qui participent à distance, veuillez utiliser la fonction « Lever la main » de Zoom.
    La greffière et moi-même ferons de notre mieux pour gérer l'ordre des interventions. Nous vous remercions de votre patience.
    Conformément à notre motion de régie interne, j'informe le Comité que tous les témoins ont passé le test de connexion nécessaire avant la réunion.
    Un mot d'avertissement avant d'accueillir nos témoins. Ce sera une étude difficile. Nous discuterons d'expériences violentes. Cela pourrait faire réagir des gens qui nous regardent, des membres du Comité ou des membres du personnel qui ont eu des expériences semblables. Les personnes qui se sentent perturbées ou ont besoin d'aide peuvent s'adresser à la greffière.
    Je vais souhaiter la bienvenue à notre premier groupe de témoins d'aujourd'hui. Nous accueillons Geneviève Jeanson, conférencière et consultante, qui comparaît à titre personnel.
    Nous accueillons ensuite Mme Jennifer Fraser, autrice et conseillère pédagogique.
    Nous accueillons également Wendy Glover, enseignante au secondaire et consultante en développement des athlètes.
    Nous allons vous accorder cinq minutes chacune pour votre exposé préliminaire. Quand vous me verrez agiter la main, veuillez conclure, après quoi nous passerons aux questions.
    Vous avez les cinq premières minutes, madame Jeanson. Je vous en prie, allez‑y.
     Merci, madame la présidente et distinguées membres du Comité.
    J'étais cycliste professionnelle. J'ai représenté le Canada aux Jeux olympiques de 2000. J'ai remporté plusieurs championnats et coupes du monde tout au long de ma carrière.
    Je m'estime très privilégiée d'avoir été invitée ici aujourd'hui, parce que les membres de ce comité ont un rôle à jouer dans la protection des athlètes et que vous êtes en mesure d'influencer le développement des générations futures d'athlètes.
    Comprenez bien que je vais vous parler aujourd'hui de mes propres expériences. Tout ce que je dirai ici est mon opinion personnelle. Pour aller plus vite, je vais passer directement à la version non expurgée de mon histoire — d'où la brutalité des termes employés.
    Pour les besoins de la cause, on peut dire que mon histoire a commencé quand j'avais 14 ans. C'est l'âge que j'avais quand mon entraîneur, qui en avait 26 de plus que moi, m'a frappé à la tête pour la première fois au cours d'une séance d'entraînement. Il m'a dit que c'était pour faire de moi une athlète meilleure et plus forte. Il a comparé le monde de la compétition à la vie dans la jungle. Dans la jungle, seuls les plus forts survivent. On m'a appris à accepter les agressions et à croire que la violence physique faisait partie de l'entraînement normal et que c'était vraiment bon pour moi.
    Quand j'ai eu 15 ans, la violence verbale et physique s'est transformée en agression sexuelle et en viol, immédiatement suivis de menaces comme: « Je suis amoureux de toi. Si tu me quittes, je te tue et ensuite je me suicide. » Je n'ai jamais été la même après cette première agression sexuelle.
     Comme je vivais dans une violence constante, je croyais effectivement qu'il pourrait me tuer et se suicider. C'était tellement réel que je ne pouvais pas partir. Je ne voulais pas vivre le reste de ma vie en portant la responsabilité du suicide de quelqu'un. Dans mon cas, les mauvais traitements comprenaient aussi des drogues, que j'ai commencé à prendre à l'âge de 16 ans pour améliorer ma performance.
    Je gagnais beaucoup de courses chez les juniors, et même des championnats nationaux contre des filles plus âgées, et mon entraîneur a décidé de prendre de plus en plus de congés pour se consacrer à ma carrière et à mon développement athlétique. Il a fini par prendre un congé sans solde de son emploi de professeur d'éducation physique.
    L'année de mes 16 ans, on a découvert que j'étais anémique. Mais on m'a dit que je ne pouvais pas attendre que l'anémie se résorbe et que je recouvre naturellement la santé, parce que j'étais censée gagner, trouver des commanditaires et gagner de l'argent pour qu'il puisse vivre. Il m'a amenée chez un médecin, et ils ont décidé de me donner de l'OEB, une hormone qui améliore la performance, pour que je puisse continuer à m'entraîner et à performer malgré mon anémie. Ce qui devait être quelques injections pour traiter l'anémie s'est transformé en dopage tout au long de ma carrière.
     Dans notre société, quand quelqu'un se livre à des activités illégales, il est considéré comme un criminel, qu'il soit pris ou non. Pour établir un parallèle avec la société, en moins de deux ans, je suis devenue à la fois la victime de mauvais traitements, une tricheuse et, puisque le dopage est illégal dans le sport, une criminelle — tout cela à 16 ans.
    J'étais une adolescente sans porte de sortie, sans personne à qui parler et sans personne pour m'aider. Les séances d'entraînement se déroulaient rarement sans violence verbale, psychologique et physique. Mon entraîneur a pris le contrôle de tout — à qui je pouvais parler, quand je pouvais sortir, tout ce qui concernait mes finances, etc. J'essayais désespérément de trouver un moyen de me sortir du sport pour le quitter, lui. Je ne pouvais pas simplement m'arrêter, parce que je gagnais de l'argent pour qu'il vive. Il me le rappelait tout le temps: il avait tout quitté, y compris sa femme dont il était divorcé, pour s'occuper de ma carrière, et c'était moi qui étais responsable.
    À cause de ses menaces de suicide, je ne pouvais pas aller voir un autre entraîneur. Je ne pouvais pas raconter mon histoire à ma fédération nationale ou internationale, parce que, si je révélais tout, on m'aurait accusée d'avoir triché. J'aurais perdu toute ma carrière, ma vie et mon nom. J'en étais venue à penser que la seule solution était d'avoir un accident — pas un accident mortel, mais quelque chose d'assez grave pour que je puisse enfin tout arrêter.
    Au lieu d'avoir un accident, j'ai échoué à un test de dépistage de drogues. J'ai été frappée d'une interdiction de pratiquer tous les sports pendant 10 ans. Je vous jure que l'échec à ce test de dépistage a été la meilleure chose qui me soit jamais arrivée. J'ai été immédiatement soulagée, car cela signifiait que je pouvais enfin arrêter de faire du cyclisme et que je pouvais quitter mon entraîneur. Un résultat positif au dépistage de drogue n'était rien à côté de l'enfer dans lequel je vivais. Le fait que mon nom ait été terni à jamais a été un prix peu élevé à payer pour finalement me débarrasser de lui.
    Vous vous demandez peut-être pourquoi je ne suis pas partie, tout simplement. Eh bien, ce n'est jamais simple de fuir une relation de violence. Le moment de la fuite est de loin l'étape la plus dangereuse, parce que l'agresseur se bat pour reprendre le contrôle. C'est précisément au moment où la victime s'en va ou juste après que le danger est le plus mortel.
    Jusqu'en 2015, j'aimais mieux que mon nom et mon identité soient associés à des drogues améliorant la performance qu'aux mauvais traitements dont j'avais été victime. En 2015, j'étais en bonne voie de guérison et je me suis enfin sentie prête à parler de la violence que j'avais vécue et de la façon dont on m'avait forcée à prendre des drogues pour améliorer ma performance, mais je n'étais pas encore prête à parler des agressions sexuelles. Pour moi, c'était encore trop sale et trop honteux.

  (1105)  

     Ce n'est qu'en 2021, après avoir lu de nombreux témoignages d'athlètes, que j'ai décidé de raconter tout ce que j'avais vécu et que je viens de vous raconter aujourd'hui.
    Cela dit, ne me dites pas que vous regrettez ce qui s'est passé. Les regrets ne changent rien au passé. Regrettez plutôt que la culture du sport soit encore ce qu'elle est aujourd'hui et dénoncez plutôt le fait que la situation n'évolue pas assez vite pour protéger les athlètes.
    C'est parce que je crois que je peux faire partie de la solution et influer sur le changement de culture qu'il faut imposer dans le sport que je me suis engagée auprès de Sport'Aide. Et je suis extrêmement reconnaissante de pouvoir faire entendre ma voix aujourd'hui devant ce comité.
    Les ouvrages spécialisés le confirment: les athlètes féminines sont plus à risque de vivre des situations de violence sexuelle; les jeunes athlètes sont plus vulnérables; et les athlètes féminines sont particulièrement à risque de subir de la violence lorsqu'elles ont une faible confiance en elles, des troubles de l'alimentation et une très forte dépendance à l'égard de l'entraîneur. De plus, les athlètes d'élite sont plus à risque de subir de la violence psychologique et les jeunes athlètes de subir de la violence physique.
    Mon souhait est que vous nous aidiez à apporter les changements suivants. Voici mes recommandations.
    Premièrement, nous devons sensibiliser nos athlètes le plus tôt possible à ce qu'est un comportement acceptable ou non. Il faut outiller les jeunes athlètes pour qu'elles sachent comment réagir et vers quels services ou ressources se tourner et qu'elles comprennent qu'il n'y a pas de honte à demander de l'aide. Il ne faut pas partir du principe qu'un entraîneur gagnant est un bon entraîneur. Certains entraîneurs ne font que répéter les mauvais comportements dont ils ont été témoins et qu'ils ont subis comme athlètes. Il faut donc élargir le réseau d'éducation pour sensibiliser les entraîneurs, les représentants de fédérations et les parents. L'éducation à l'intégrité devrait être obligatoire.
    Deuxièmement, je voudrais qu'on crée un système d'accueil et de traitement des plaintes qui soit totalement indépendant des fédérations et qui ne soit pas réservé à nos athlètes d'élite. Vous devez savoir que la violence dans les sports transcende les âges, les genres et les niveaux de compétence. Cela se produit dans les sports récréatifs comme dans les sports de compétition.
    Enfin, je demande aussi au système sportif canadien de repenser le financement de nos fédérations afin qu'il accorde au moins la même importance au bien-être de nos athlètes qu'à leur performance. On ne peut pas continuer à donner de l'argent aux fédérations uniquement en fonction de la performance, parce que cette mentalité de « gagner à tout prix » autorise une culture de la violence.
    J'espère sincèrement que votre étude ne sera pas jetée aux oubliettes. Comme beaucoup d'autres témoins que vous avez entendues, je vais réclamer des changements. Vous avez un pouvoir décisionnel, et nous comptons sur vous pour nous donner le soutien que nous n'avions pas quand nous étions de jeunes athlètes.
    Merci encore de m'avoir invitée aujourd'hui.

  (1110)  

    Merci beaucoup, madame Jeanson.
    C'est au tour de Jennifer Fraser pour cinq minutes.
     Merci de consacrer du temps à cet enjeu d'une importance cruciale et urgente.
    Dans les années 1980, entre mes 13 et mes 17 ans, j'ai été agressée par des enseignants dans une école publique de Vancouver.
     En fait, de nos jours, le nombre d'agressions sexuelles par du personnel scolaire est en hausse. Pour moi, cela remonte à 40 ans, et je n'arrive pas à croire que rien n'a changé pour mieux protéger les enfants et tout le monde contre les mauvais traitements.
    Selon le Centre canadien de protection de l'enfance, au moins 750 écoliers ont été victimes d'agressions sexuelles par du personnel scolaire entre 2017 et 2021, et ce n'est que la pointe de l'iceberg.
    Il y a 40 ans, dans le cadre du programme Quest, nous avons été victimes de violence psychologique, physique et sexuelle de la part de trois enseignants juste en face des bureaux du directeur, du directeur adjoint et des conseillers scolaires. Les dommages causés par les agressions commises par des enseignants sont évidents, mais les neurosciences montrent aujourd'hui, grâce aux scintigraphies cérébrales, que les dommages physiques sont causés non seulement par les agressions commises par des enseignants, mais aussi par l'incapacité du personnel scolaire à y mettre fin.
    Je suis ici aujourd'hui pour parler de cette inaction et des systèmes qui nuisent à ceux qui dénoncent et à ceux qui prennent la parole.
    J'ai été une enseignante primée pendant 20 ans, mais, quand, en 2012, j'ai signalé au personnel scolaire et aux instances dirigeantes les témoignages directs d'élèves athlètes qui vivaient dans un contexte toxique fait de peur, de favoritisme et d'humiliation, ces élèves ont été de nouveau victimisés et j'ai été, quant à moi, exilée de la profession d'enseignant.
    Je suis la mère d'une des victimes et j'ai pu observer directement les effets dévastateurs sur mon fils, non seulement des mauvais traitements, mais aussi de l'« armée de complices », pour reprendre l'expression d'Amos Guiora. Même si les mauvais traitements infligés à mon fils étaient révoltants, pour lui, la complicité des organes de gouvernance et le camouflage dont ils se rendaient coupables étaient bien pires.
    J'ai démissionné pour protester contre cette école qui couvrait les cas de mauvais traitement, mais je me suis retrouvée dans une autre école qui en faisait autant. Cette fois, la violence était sexuelle. C'est une victime qui m'en a parlé directement. J'ai ensuite pu constater directement que l'école et les organes de gouvernance camouflaient la situation et faisaient publiquement l'éloge de l'agresseur devant sa victime. Ils n'ont pas révélé qu'il avait été congédié après une longue enquête policière.
    Le commissaire à la réglementation des enseignants a été de connivence enfaisant disparaître son certificat d'enseignement du registre des enseignants sanctionnés. Rien ne s'opposait alors à ce que l'agresseur cherche sa victime à l'université et la rencontre de nouveau, la traumatisant davantage. Elle s'est suicidée quelques mois plus tard. Elle avait 19 ans.
    Au lieu d'être soutenue pour avoir essayé de protéger une élève maltraitée, j'ai appris que la dénonciation m'exposait à de grands risques et que je n'avais aucune protection juridique. Le commissaire à la réglementation des enseignants n'a essayé de protéger ni la victime ni moi. Au lieu de cela, il m'a mise sous enquête pour avoir parlé publiquement de l'enseignant agresseur et du risque qu'il représentait pour d'autres élèves vulnérables.
    Que doit‑on faire?
    Une enquête judiciaire comme celle de Dubin en 1988 se fait attendre depuis 40 ans. Nous sommes au courant de la violence endémique faite aux enfants et des dommages qu'elle cause depuis les années 1980, et nous en avons eu la confirmation chaque décennie suivante.
    La question urgente est la suivante: quand allons-nous donc mettre fin à la violence? La question tout aussi urgente est de savoir comment. La réponse se trouve dans l'enquête Dubin.
    Voici un extrait du rapport Dubin:
Le fait que les organismes de réglementation des sports ne se sont pas penchés plus sérieusement sur le problème des drogues et n'ont pas pris de moyens plus efficaces pour en décourager 1'utilisation a également contribué dans une grande mesure à étendre 1'usage des drogues chez les athlètes.
    Cette analyse s'applique également à la violence.
    Le fait que les organismes de réglementation des sports ne se sont pas penchés plus sérieusement sur le problème de la violence et n'ont pas pris de moyens plus efficaces pour la décourager a contribué à son ampleur. Si les agresseurs pensent qu'ils peuvent s'en tirer impunément, ils s'en permettront plus encore.

  (1115)  

    Au Canada, les organes de gouvernance ne sont pas enclins à protéger les victimes de violence. Cette attitude de négligence changera instantanément lorsque des parlementaires déterminés modifieront la loi pour les tenir criminellement responsables d'avoir été complices de ces mauvais traitements et d'avoir revictimisé les victimes.
    Les dispositions du Code criminel auraient un effet dissuasif sur les organes de gouvernance qui se montrent négligents, qui mènent des enquêtes bidon, qui camouflent les cas de mauvais traitements, qui protègent leurs auteurs et qui refusent de régler sérieusement les torts causés par toutes les formes de violence.
    Mieux encore, on aurait besoin d'un organisme parlementaire entièrement indépendant pour analyser toutes les formes de violence dans le sport, dans l'éducation et ailleurs, faire enquête et en dresser un portrait exhaustif. Il devrait être indépendant du sport, de l'éducation et de toutes les instances dirigeantes en conflit d'intérêts. Il devrait avoir le pouvoir d'agir à titre autonome et sans crainte. Il devrait pouvoir prendre des mesures correctives.
    Je répondrai volontiers à vos questions.
    Merci beaucoup, madame Fraser.
    C'est au tour de Wendy Glover pour cinq minutes.
    Madame Glover, vous avez la parole.
    Chers membres du Comité, je vous remercie de m'accueillir. J'ai observé et écouté et j'ai appris des membres du Comité et de divers témoins. C'est très important pour moi d'être ici, car ce sujet me préoccupe depuis de nombreuses années.
    Je suis enseignante certifiée en éducation physique et en santé, de la maternelle à la 12e année. J'ai eu l'occasion d'enseigner au niveau primaire pendant cinq ans et au niveau secondaire pendant 20 ans. J'ai progressivement assumé divers rôles dans les sports communautaires, comme entraîneure, parent, administratrice et membre du conseil d'administration. J'ai surtout œuvré dans les domaines du soccer et du hockey.
    Il y a deux ans, j'ai été invitée à contribuer à la communauté du hockey par l'entremise de la Ligue de hockey de l'Ontario comme conseillère en développement personnel et académique auprès des Knights de London, car on estimait que mon expérience antérieure de soutien au développement holistique d'élèves-athlètes serait utile aux joueurs. De plus, mes enfants ont grandi dans le système du hockey et sont maintenant au début de la vingtaine. Je connaissais donc le système du hockey junior, dont les joueurs de la LHO sont diplômés.
    J'ai également donné des conférences à l'échelle locale, provinciale, nationale et internationale sur l'athlétisme et le développement holistique des athlètes. J'ai élaboré des cours et des programmes d'études dans le système scolaire de l'Ontario. En même temps que j'enseignais et que j'entraînais des athlètes, je continuais à étudier le développement des enfants et des adolescents. J'étais déterminée à apporter au sport communautaire de l'information actuelle sur le développement sain et à long terme des athlètes. Je ne comprenais pas pourquoi, dans le sport communautaire, on ne suivait pas les lignes directrices de l'Organisation nationale du sport pour apporter aux enfants ce dont ils avaient besoin. Au fil des ans, j'ai pris connaissance des modèles de développement du sport de l'ONS et j'ai écouté les préoccupations des athlètes. J'ai étudié des principes comme les droits des enfants dans le sport et les modèles de développement des athlètes d'autres pays. Il y a beaucoup à apprendre, à partager, à adopter et à appliquer.
    Les athlètes ne sont pas tous heureux de leurs expériences sportives. Plus j'enseignais au secondaire, plus j'entendais parler des soucis des athlètes. J'ai progressivement compris que les adultes faisaient du mal aux enfants dans ce système. Les adolescents, eux, savaient. Ils voulaient faire quelque chose. Je les ai écoutés.
    Je me disais: Et si je sensibilisais les adolescents et donnais des moyens à ceux qui étaient prêts à faire quelque chose de positif dans le sport pour que, arrivés à l'âge adulte, ils puissent réellement changer les choses? Je savais que je devais faire quelque chose, mais je savais que je ne pouvais pas le faire seule.
    À l'époque, il y a une quinzaine d'années, j'ai élaboré un programme Athleadership pour que les athlètes adolescents puissent devenir des entraîneurs, des administrateurs des sports, se former en développement de l'enfant, en sécurité dans le sport, en communications, etc. Une fois formés, ils assumaient divers rôles dans la communauté sportive et appliquaient ce qu'ils avaient appris. Par la suite, ils avaient l'occasion de discuter, de réfléchir et d'obtenir des conseils sur ce qu'ils vivaient afin de mieux comprendre comment contribuer efficacement au sport.
    On compte plus de 500 diplômés du programme Athleadership, et j'ai partagé ce modèle avec d'autres écoles secondaires et communautés sportives. Elles l'ont adopté.
    L'un des principes du programme est le suivant: « Cessez de vous plaindre — comment régler le problème? » Il a fait ses preuves, et bon nombre de ces anciens élèves occupent maintenant des postes de direction dans le domaine du sport. L'effet domino est réel. J'ai testé cette idée et j'ai découvert que les gens qui ont reçu une éducation, une orientation et un mentorat valables peuvent avoir un effet positif dans le sport, et ce quel que soit leur âge, s'ils sont prêts à apprendre, à réfléchir et à être dirigés.
    Dans le sport communautaire, il peut être difficile de convaincre des adultes d'apprendre, de réfléchir et d'être dirigés. Je pensais que, si on sensibilisait les adultes comme le fait le programme Athleadership pour les adolescents, ils écouteraient enfin. J'ai essayé, mais non, ils n'écoutent pas. J'ai entendu plus de « Tout est sous contrôle » que de « Comment faire mieux pour les enfants ». Cela fait partie du problème.
    Les problèmes sont liés à la gouvernance. Les adultes du système profitent du statu quo. Même s'ils veulent apprendre, la communauté sportive ne permettra pas qu'ils appliquent ce qu'ils auront appris. Les gens qui s'occupent de sports junior n'ont pas suffisamment d'éducation, de soutien et de mentorat pour diriger, suivre ou appliquer les politiques de façon efficace. Souvent, ils ne savent pas ce qu'ils ne savent pas.
    Je ne les blâme pas; je blâme le système qui permet tout cela. Il est pratiquement impossible de déclencher un changement dans le système sportif actuel. J'ai essayé.
    Le système tel qu'il a été créé ne répond pas aux besoins des enfants. L'objectif était d'offrir des expériences sportives sécuritaires et adaptées à leur développement. Nous n'avons pas mesuré les bons exemples de programmes réussis. Comme le dit Martin Toms, chercheur en développement de l'enfant, « les enfants ne sont pas des adultes en miniature ». Nous avons permis que le manque de gouvernance dans le sport « adultise » les sports pratiqués par les jeunes et cause du tort à nos enfants.

  (1120)  

     Je me fais l'écho de ce que les témoins précédentes ont dit, à savoir qu'il faut une enquête judiciaire indépendante pour connaître l'ampleur des enjeux qui rendent possible une culture de la violence dans le sport, faute de quoi les préjudices continueront.
    Merci.
    Merci beaucoup à vous trois. C'était très intéressant.
    Nous allons commencer nos périodes de questions. La première série sera de six minutes à la fois.
    La parole est à Michelle Ferreri pour les six premières minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. C'est très percutant et émouvant pour tous ceux qui vous écoutent. Je suis touchée par votre franchise, votre honnêteté et votre vulnérabilité.
    Madame Jeanson, j'ai vraiment apprécié votre franchise et ce que vous appelez votre « brutalité », parce que je pense qu'il ne faut pas tourner autour du pot, et c'est vraiment ce que j'apprécie dans cette discussion.
     Je vais y aller sur la pointe des pieds, compte tenu du caractère sensible de tout cela. Je voudrais vous poser une question et j'espère que c'est correct. De quoi aviez-vous besoin à l'âge de 14 ans? Qu'auriez-vous pu dire à la jeune fille que vous étiez à 16 ans?
    Je vous remercie de cette question.
    J'aurais aimé savoir qu'une organisation était là pour moi. C'était à la fin des années 1990 et au début des années 2000, et, à l'époque, il n'y avait pas de mouvement #MoiAussi, qui a beaucoup aidé à sensibiliser les gens. J'aurais aimé qu'on me dise que, si un entraîneur vous frappe ou vous dit ce genre de choses, il a tort. Je n'avais pas d'autre soutien et je n'avais pas d'autres modèles, et j'aurais donc eu besoin de savoir, premièrement, ce qui était acceptable ou non et, deuxièmement, qu'il y avait un endroit clairement et facilement accessible auquel j'aurais pu m'adresser.
     Ces deux choses élémentaires auraient beaucoup changé la situation. Je ne suis pas sûre... Vous savez, avec toute cette violence qui a duré et qui a augmenté avec le temps, je ne suis pas sûre que j'aurais appelé, mais le simple fait de savoir que c'était là aurait probablement changé quelque chose — cela aurait changé mon avenir.

  (1125)  

    Merci.
    Je pense que Mme Glover l'a très bien dit. On ne sait pas ce qu'on ne sait pas, surtout quand on est jeune, n'est‑ce pas?
    Puis‑je vous poser une question sur le processus qui vous a fait décider de vous exprimer? Est‑ce que votre agresseur... Que s'est‑il passé? Est‑ce que vous voulez bien nous expliquer?
    J'ai décidé de m'exprimer et, bien sûr, je l'ai fait de façon très publique, dans des articles, des entrevues, etc. Ils ont essayé de le joindre. Il n'a jamais répondu. Il vit aux États-Unis. Il est Canadien, mais il vit aux États-Unis, et il est toujours violent, puisqu'il a été arrêté par la police en 2017 pour violence conjugale.
    Pour ma part, je n'avais qu'une énergie limitée, et j'ai choisi de l'utiliser pour me remettre sur pied et guérir de ce traumatisme, pour pouvoir avoir une vie normale et une relation normale avec quelqu'un qui m'aime et que j'aime, ou des enfants, etc. Je voulais aller mieux pour envisager un avenir, mais je regrette parfois de ne pas avoir eu recours aux lois pénales ou civiles pour le faire accuser. Mais, à bien y penser, qu'est‑ce qu'il récolterait — deux mois de prison ou même rien du tout? Je préfère consacrer mon énergie à moi-même, mais, en effet, il n'a rien répondu.
    Il ne sert à rien de regretter. C'est certain. C'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui: pour aller de l'avant. C'est pour cela que nous sommes ici.
    Madame Fraser, j'ai trouvé très intéressant le lien que vous avez fait avec les neurosciences et ce que vous avez dit sur ce que les traumatismes transforment dans le cerveau. Je pense que c'est très percutant en l'occurrence.
    Je vous demande, à vous aussi, si vous voulez bien nous expliquer le processus.
    Vous avez parlé d'une chose qui m'a frappée, à savoir qu'il n'y avait pas de protection juridique pour les dénonciateurs. Je pense qu'il est très utile pour le Comité de comprendre le processus de dénonciation et d'en cerner les lacunes pour pouvoir corriger le système. Je suis donc curieuse de connaître les lacunes les plus importantes que vous avez relevées dans ce processus compte tenu de votre expérience.
    Je me suis d'abord adressée à des administrateurs scolaires pour signaler la violence dont j'entendais parler directement. Ils m'ont demandé de prendre les témoignages des élèves, ce que j'ai fait. J'ai aidé les élèves à témoigner dans des entrevues avec eux, et puis tout a changé. Très rapidement, ces responsables qui semblaient vouloir soutenir les victimes se sont mis à essayer de couvrir l'affaire. Il se trouve qu'ils étaient au courant depuis un an et qu'ils auraient pu être accusés de négligence si la situation était avérée.
    Quand j'ai compris qu'ils n'allaient pas s'acquitter de leur obligation légale de rendre compte au commissaire à la réglementation des enseignants, j'ai dû intervenir et le faire moi-même, comme enseignante. J'ai dénoncé quatre enseignants, le directeur et l'aumônier pour dissimulation, et puis j'ai regardé tout le système se déployer. Il me faudrait beaucoup de temps pour vous parler de la corruption, mais j'ai beaucoup de documents qui montrent à quel point le système était corrompu.
    Et j'étais une convaincue. Mon père est avocat. Mon grand-père est juge. Mon oncle est avocat. Je croyais. Je croyais à l'école, je croyais au gouvernement, je croyais à l'éducation jusqu'à ce que tout cela arrive, et c'est pourquoi je me suis adressée au commissaire à la réglementation des enseignants. Ensuite, j'ai pris toute la documentation et je l'ai remise au bureau de l'ombudsman, parce que c'est évidemment là qu'il faut aller quand on est détruit par sa propre organisation professionnelle, qui est censée protéger les élèves. Elle est là pour protéger les élèves et elle est censée être transparente.
    Le dossier a atterri au bureau de l'ombudsman, et, trois ans plus tard, quand, dans l'affolement, je l'ai informé que mon étudiante avait des idées suicidaires et que le directeur de l'école la poursuivait encore, même si elle était à l'université, personne n'a bougé. Les choses ne faisaient que traîner en longueur.
    Je ne savais plus quoi faire. Je suis allée voir le représentant des enfants et des jeunes. Je suis allée au ministère de l'Éducation. J'essayais désespérément de la sauver. Je savais qu'elle souffrait d'une maladie mentale grave et je savais qu'il la poursuivait et qu'il l'avait rencontrée. J'ai appelé la police, et on m'a dit qu'on ne pouvait pas porter d'accusations contre lui. La policière spéciale chargée des victimes a démissionné par la suite. Elle n'en pouvait plus.
    J'ai pu constater que tous les organes de gouvernance auxquels j'ai eu affaire et qui ont la responsabilité de protéger les jeunes et les enfants, de protéger les dénonciateurs et de vous aider dans ce genre de situation alors que vous êtes manipulé, sont les premiers à faciliter cette violence.

  (1130)  

    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer en ligne. C'est au tour d'Emmanuella Lambropoulos, à distance, pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais commencer par remercier nos témoins d'être venues et de nous avoir fait part d'expériences qui, je crois, seront très utiles à notre étude. Je tiens à ce que vous sachiez que je suis reconnaissante à chacune d'entre vous d'être avec nous aujourd'hui.
    Plusieurs éléments des trois témoignages font largement écho à mes propres expériences ou à ce que je pense que ce processus devrait être. Et j'en remercie les témoins.
    J'étais enseignante au secondaire. J'ai commencé à enseigner à l'âge de 23 ans. En fait, j'étais moi-même dans une position assez dangereuse, et l'école a tout fait pour camoufler la situation, de sorte que je comprends tout à fait ce que vous voulez dire. Je sais que cela a beaucoup à voir avec la protection de la réputation de l'école. C'est de cela qu'ils se soucient vraiment et ce qu'ils veulent protéger.
    Malheureusement, je ne peux pas aller beaucoup plus loin aujourd'hui parce que nous sommes le gouvernement fédéral et qu'il n'y a pas grand-chose que nous puissions faire à l'échelle provinciale, mais ce que nous ont dit nos trois témoins concerne l'éducation et l'importance de sensibiliser les jeunes qui vont faire du sport, ainsi que les entraîneurs et tous les protagonistes qui participent à l'expérience sportive d'un enfant.
    Madame Fraser, vous avez parlé de l'enseignement aux enfants au sein du système d'éducation.
    Madame Jeanson, vous avez parlé de l'importance de s'assurer que les enfants savent ce qui est approprié et ce qui ne l'est pas. Y aurait‑il une procédure formelle? Auriez-vous une recommandation à nous faire sur la manière dont, selon vous, cette sensibilisation devrait se faire au sein de nos organisations sportives nationales?
    Par ailleurs, les autres témoins pourraient parler, à leur gré, des mesures que les organisations sportives nationales pourraient adopter, selon elles, pour mieux sensibiliser les jeunes qui pratiquent des sports professionnels.
    Je vais d'abord donner la parole à Wendy Glover, puis nous entendrons d'autres commentaires.
     Le programme que j'ai créé et que les élèves suivent représente deux crédits supplémentaires au secondaire. Ils sont intéressés. Comme vous l'avez dit, la création de programmes pour les enfants relève des administrations provinciales. Je pense qu'on pourrait aussi l'intégrer aux systèmes sportifs, mais il faudrait embaucher des gens.
    J'ai dit tout à l'heure qu'ils ne savent pas ce qu'ils ne savent pas. J'ai constaté que les gens qui sont formés comme entraîneurs ou administrateurs sont laissés à eux-mêmes pendant de nombreuses années après leur formation. Il y a très peu de recyclage professionnel ou de mises à jour régulières de l'information. Ils peuvent travailler un an comme entraîneurs et donner le même type d'entraînement pendant 20 ans par la suite. Il n'y a donc ni système d'amélioration ni mesures de contrôle.
    Pour superviser le système sportif, on a besoin de gens qui ont reçu une formation sur les systèmes sportifs, sur le développement à long terme des athlètes et sur le développement des enfants et des adolescents. Et il n'y en a tout simplement pas.
    Ces gens continuent d'occuper des postes élevés dans les sports d'élite, comme on vous l'a dit, et c'est toujours ainsi. Il est ahurissant de constater que ceux qui dirigent les jeunes d'aujourd'hui et les athlètes d'élite de demain n'ont pas suffisamment de connaissances ou ne disposent pas, il faut le dire, de systèmes qui leur permettraient de s'informer et de se mettre à jour.
    J'ajouterais que, à mon avis, tout cela relève du gouvernement fédéral, qu'il s'agisse d'éducation, de sport ou de quoi que ce soit d'autre, parce qu'il s'agit en fait de santé, de santé mentale, de toxicomanie et d'automutilation, suicide inclus. C'est beaucoup plus large. C'est vraiment une crise de santé publique et une crise de sécurité au plus haut niveau, dans tout le pays. Je ne pense pas que les provinces soient en mesure de gérer cela. Je considère que cela incombe aux plus hauts dirigeants du pays.
    Je dirais que les enfants, dès la maternelle... Au lieu de leur apprendre à obéir aux adultes, à tous les adultes, et à respecter tous les adultes, en particulier les enseignants et les entraîneurs, nous devons leur enseigner — le cerveau apprend grâce à la répétition à intervalles réguliers — la sécurité et leur propre sécurité holistique de l'âge de cinq ans à l'âge de 18 ans, en précisant à chaque étape, comme on le fait pour toutes les autres matières, comme on le fait pour apprendre à botter un ballon de soccer ou à résoudre un problème de mathématiques.

  (1135)  

    Je suis entièrement d'accord avec mes collègues.
    Pour ajouter une remarque rapide, les fédérations nationales... Dans le domaine du cyclisme, on arrive à l'équipe nationale quand on est beaucoup plus âgé — vers 16, 17 ou 18 ans —, mais, dans beaucoup de sports, comme la gymnastique ou la natation, on commence très jeune. Des athlètes très jeunes peuvent participer à des projets de l'équipe nationale.
    Il serait peut-être bon, du moins à l'échelle fédérale, de commencer par une sensibilisation obligatoire en matière d'intégrité dès que les athlètes font partie de l'équipe nationale. Ensuite, oui, cela relève des provinces, et les provinces ont leurs propres compétences, mais le leadership doit venir d'en haut. Ensuite, au niveau national — je parle des fédérations nationales —, on met ce programme en place et tout s'ensuit.
    Il vous reste 10 secondes.
    Merci, madame Lambropoulos.
    Merci beaucoup.
    Je remercie tout le monde d'être ici et d'ajouter à ce témoignage. Merci.
    Excellent.
    Nous allons maintenant passer à Andréanne Larouche.
    Madame Larouche, vous avez six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Madame Glover, je vous remercie de votre témoignage et de votre présence à notre comité aujourd'hui.
    Madame Fraser, j'ai de l'empathie pour vous, compte tenu du témoignage que vous nous avez livré.
    Madame Jeanson, dans vos remarques préliminaires, vous avez dit que vous vouliez faire partie du changement. Je vous le souhaite. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle vous êtes ici.
    J'aimerais revenir sur une lettre que vous avez envoyée à l'Union cycliste internationale. Dans cette lettre, vous parlez des lacunes dans le processus de dépôt des plaintes. Vous dites que, dans la société, l'agression sexuelle est un crime passible d'une peine d'emprisonnement, que les suspensions doivent correspondre à la gravité des actions et que le dépôt d'une plainte officielle pour agression, comme une agression physique ou une agression sexuelle, devrait entraîner une suspension provisoire immédiate pendant l'enquête. Vous faites également valoir que, si on trouve le temps de mesurer la longueur des bas des cyclistes et de dicter comment les coureurs peuvent manœuvrer ou non leur vélo, on peut certainement trouver le temps d'enquêter sur un courriel dénonçant un entraîneur trop capricieux ou qui accorde une attention indésirable et inappropriée à ses athlètes et de lui faire savoir que quelqu'un le surveille et mène une enquête à son sujet.
    Vos propos rejoignent en quelque sorte ceux de plusieurs athlètes qui se sont déjà exprimés sur le sujet et qui sont d'avis que le Centre de règlement des différends sportifs du Canada, le CRDSC, n'est pas un mécanisme qui protège convenablement et adéquatement les athlètes.
    Êtes-vous surprise d'apprendre que l'organisme mis en place par le gouvernement pour traiter les plaintes ne comprend pas ce que vous avez réclamé? Vous y avez fait allusion tout à l'heure en répondant à une question de ma collègue et lorsque vous vous êtes prononcée sur le cas des cyclistes victimes d'agression sexuelle de la part de Patrick Van Gansen.
    À la base, il faut avoir un comité indépendant qui sera en mesure de traiter les plaintes. Il faut que ce soit un lieu sûr pour tout le monde, en particulier pour les athlètes. Ceux-ci doivent avoir l'assurance que ce n'est pas un boys club qui a tout le temps un pied ou une main dans une autre fédération, qui cherche à protéger sa fédération, et ainsi de suite.
    Pour ma part, mon expérience est en cyclisme. Sur le plan international, ce qui m'a inspirée à écrire cette lettre, c'est que le cas avait été traité d'une façon complètement inadéquate. C'était hilarant tellement ce cas avait été mal traité.
    Le fédéral devrait créer un comité indépendant, mais il faudrait que ce soit constant dans tous les sports. Il devrait y avoir une instance à laquelle pourrait s'adresser tout athlète, que ce soit en soccer, en vélo ou en bobsleigh, par exemple. Il faudrait aussi que les conséquences et les sanctions soient les mêmes pour tous les sports.

  (1140)  

    Plusieurs intervenants et victimes du milieu sportif demandent que le gouvernement déclenche une commission d'enquête indépendante pour faire la lumière sur la situation actuelle, qui est toxique. Vous l'avez d'ailleurs mentionné, cette situation s'étend à tout le monde du sport, dans l'ensemble des sports au pays.
    Appuyez-vous l'appel des athlètes et d'autres organisations comme l'Association canadienne des entraîneurs et l'appel des femmes dans le sport pour qu'une enquête judiciaire indépendante et publique soit amorcée? Votre voix s'ajoute-t-elle à la leur?
    Oui, ma voix s'ajoute à la leur.
    On parle d'enquêtes indépendantes, mais il est aussi question parfois de l'indépendance des organes et des organismes. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire à ce sujet.
    Êtes-vous inquiète de constater que le CRDSC et le Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport ne s'assurent pas que les professionnels assignés aux enquêtes se récusent lorsqu'il y a apparence de conflit d'intérêts, par exemple lorsqu'ils représentent les intérêts d'un organisme national de sport qui est au cœur de la plainte?
    La question de l'apparence de conflit d'intérêts vous inquiète-t-elle?
    C'est certain que, dans des cas qui sont très délicats comme ceux-là, on veut être le plus indépendant possible. Est-ce inquiétant? Oui, d'une certaine façon, parce que ce sont toutes des situations qui sont individuelles et délicates.
    En répondant à une des questions de mes collègues, vous avez dit que le Québec et les provinces avaient aussi leur rôle à jouer. Vous avez mentionné brièvement Sport'Aide. J'aimerais dire un petit mot sur cet organisme, qui est une initiative du Québec. Dans toute cette enquête que l'on fait, on travaille en collaboration avec des organismes déjà en place, notamment au Québec. Par exemple, on travaille avec Sport'Aide, dont vous êtes maintenant porte-parole.
    Pouvez-vous répéter votre question?
    Vous avez dit tout à l'heure que les provinces et le Québec avaient un rôle à jouer. Quand on parle d'une enquête pour revoir ce qui se passe dans le sport, il y a aussi une collaboration à établir. Il y a certaines choses qui relèvent du gouvernement fédéral et que celui-ci peut faire, mais on doit aussi tenir compte de ce qui se fait déjà dans les provinces et au Québec.
    Vous êtes notamment porte-parole de Sport'Aide, un organisme qui relève du gouvernement du Québec.
    Il y a de très bonnes initiatives en ce moment dans toutes les provinces. Au Québec, nous en avons de très bons exemples.
    D'accord, merci.
    Madame Fraser et madame Glover, j'aimerais entendre vos commentaires au sujet de l'enquête indépendante.
    Si vous manquez de temps pour répondre à ma question, nous pourrons y revenir à mon prochain tour.
    Comment percevez-vous cette enquête indépendante?
    Puis-je répondre en anglais?
    Oui. Vous pouvez commencer à répondre à ma question, et nous y reviendrons à mon prochain tour de parole, s'il le faut.

[Traduction]

     J'ai vécu en Colombie-Britannique et j'ai fait des recherches dans tous les autres domaines. Et, en Colombie-Britannique en particulier, il y a une mentalité de club des vieux copains. Je suis sidérée du degré de corruption.
    Nous vous reviendrons, madame Glover, si vous voulez bien.
    Je vais maintenant donner la parole à Leah Gazan. Madame Gazan, vous avez six minutes.
    Merci. Je tiens à vous remercier toutes d'être venues aujourd'hui et d'avoir témoigné.
    Nous avons entendu des témoignages épouvantables, mais nous le savions depuis longtemps, évidemment. On en a parlé sur la place publique. Mais les gens refusent d'agir. Ce n'est pas nouveau. Je suis heureuse que nous fassions cette étude. Je rappelle qu'il y a des documentaires sur le sujet depuis des années. Les gens se contentent de détourner le regard et laissent faire.
    Je suis vraiment impressionnée par votre témoignage. Vous avez dit quelque chose, madame Fraser, sur la façon dont nous enseignons aux enfants à respecter les adultes, à écouter les adultes sans poser de questions, surtout dans les écoles — les adultes en position d'autorité. Je suis d'accord avec vous. Je pense que cela rend les enfants vulnérables, parce qu'ils n'ont même pas le droit de se demander comment ils se sentent dans telle ou telle situation. Pourriez-vous nous expliquer comment ce genre d'enseignement axé sur l'écoute des plus vieux — à tous égards — peut être dangereux, surtout sans sensibilisation?
    J'aimerais aussi en parler avec vous, madame Glover.

  (1145)  

     Je pense que le mot le plus juste est effectivement « dangereux ».
    C'est parce qu'on enseigne aux enfants à obéir aveuglément qu'on se retrouve dans cette situation, comme on l'a vu pour Mme Jeanson, qui a été physiquement et sexuellement brutalisée sans comprendre ce qui lui arrivait. J'ai vécu la même chose. Quand j'avais 13 ans, je n'avais jamais entendu le mot « leurre ». Je n'avais jamais entendu parler de « leurre d'enfant ». J'ignorais absolument que des hommes d'un certain âge pourraient vouloir avoir des relations sexuelles avec des adolescentes ou qu'ils y arriveraient très progressivement, en commençant quand vous avez 13 ans, en vous attirant lentement et en vous aliénant de vos amis, en vous parlant de l'idée d'un petit ami et en agissant avec tellement de délicatesse que vous en viendrez à leur faire de plus en plus confiance. Ils créent un lien de loyauté, et, quand ce lien est créé, il est très difficile de les dénoncer. C'est comme dénoncer un membre de la famille, outre le fait qu'on est très dépendante d'eux.
    Il faut enseigner aux enfants dès leur plus jeune âge. Je suis éducatrice et j'ai dû m'éduquer moi-même. Je me suis familiarisée avec les données scientifiques. J'ai cherché du côté de la psychiatrie et de la psychologie et je me suis intéressée aux scintigraphies cérébrales, parce que personne d'autre ne le faisait. Ce que j'ai constaté est absolument ahurissant. Je crois que tous les enfants... Nous avons 20 ans de recherches sur le fonctionnement du cerveau humain. Nous devons commencer à sensibiliser nos enfants dès l'âge de cinq ans et tout au long du parcours scolaire pour qu'ils connaissent parfaitement les stratégies des agresseurs qui manipulent leur cerveau vulnérable.
    J'aimerais vous poser une autre question.
    Vous avez parlé de l'importance de l'éducation. Je suis moi-même enseignante. J'étais enseignante, et il y avait un débat constant sur ce dont il convient de parler dans les écoles, par exemple de ce qu'est un attouchement sain ou malsain. J'étais éducatrice de la petite enfance, et nous utilisions des livres d'images pour montrer aux enfants ce qu'est un attouchement sain et un attouchement malsain de la part d'adultes. On peut prendre certaines mesures pour que les enfants connaissent leurs droits à un très jeune âge. Pourquoi ne le fait‑on pas, d'après votre expérience d'éducatrice?
    Je pense que c'est parce que chaque province décide de son propre système d'éducation, de sorte que certaines provinces ont des cours ou des exigences que d'autres n'ont pas.
    Comme Mme Fraser l'a dit tout à l'heure, c'est une question de santé et de santé mentale. C'est plus large que ce dont nous parlons, et le sport n'est qu'un volet. Beaucoup d'enfants ne font pas de sport: comment peuvent-ils obtenir cette éducation?
    Quand nous enseignons aux adolescents, nous essayons de leur montrer comment avoir des conversations appropriées avec les adultes et comment les remettre en cause quand c'est nécessaire, mais je ne pense pas qu'on puisse forcer les enfants et les parents à se défendre eux-mêmes. Il faut que ce soit systémique. On est en train de demander à des gens de faire quelque chose qui les rend mal à l'aise et qui les effraye pour toutes les raisons que les autres témoins ont soulignées.
    Comme toutes les témoins l'ont dit, cela doit venir d'en haut. Il faut du financement. Il faut créer des programmes.
    Cela m'amène à ma prochaine question.
    On peut effectivement expliquer ce qu'est un attouchement sain. Je pense que tout cela est très important et je ne veux pas minimiser l'importance de faire comprendre leurs droits aux enfants, c'est essentiel, mais il me semble, d'après les témoignages que nous avons entendus, que malgré toute cette sensibilisation, les gens qui dénoncent n'obtiennent aucune réponse.
    Madame Jeanson, comment pensez-vous que le système sportif lui-même a contribué à vous faire garder le silence, même si vous saviez tout cela? Nous venons de terminer une étude sur la violence sexiste. Vous étiez manifestement plongée dans un cycle de violence terrible.
    Quand j'ai raconté mon histoire et que, petit à petit, j'ai commencé à en parler avec des amis qui me connaissaient et avec des représentants et des gens du cyclisme, ils m'ont tous dit qu'ils savaient que quelque chose n'allait pas. Ils pouvaient le voir. Je n'étais plus la même personne. Ils savaient que quelque chose n'allait pas, mais je remportais des victoires, et ils avaient peur que, s'ils disaient quelque chose ou m'aidaient à m'éloigner de lui, je ne gagnerais plus. Ils ne voulaient pas être responsables de mes échecs. À mon avis, il y avait des gens très bien placés qui étaient au courant de ma situation, mais je remportais des victoires et j'apportais du financement au programme. Donc, ils ne voulaient rien dire, ils savaient, mais ils ont détourné le regard pour que je puisse continuer à gagner.

  (1150)  

     Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à la deuxième série de questions. Compte tenu des contraintes de temps, je vais réduire la durée à quatre minutes, quatre minutes, une minute et une minute.
    Commençons. C'est au tour de Dominique Vien, en ligne, pour quatre minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Mesdames, je vous remercie de votre présence. Vos témoignages sont très pertinents dans le cadre de notre étude.
    Madame Jeanson, je vais reprendre l'idée de Mme Gazan, puisque c'est exactement de cela que je voulais parler. Or, si vous n'êtes pas à l'aise, veuillez me le dire et je vais aborder un autre sujet.
    Ce que vous dites, finalement, c'est que les gens autour de vous, tant vos consœurs dans le sport que les membres du personnel, notamment les entraîneurs, et peut-être même votre famille, ont tous gardé le silence ou n'ont pas posé de questions, afin de ne pas vous causer plus de tort. C'est ce que j'ai compris de votre témoignage. Ce n'est pas la première fois que je vous entends parler de ce que vous avez vécu, puisque vous vous êtes également exprimée sur les grands réseaux. Vous avez été complètement abandonnée et isolée. C'est épouvantable d'entendre cela aujourd'hui.
    Ce que j'ai vécu ne doit pas se reproduire, c'est certain. Si je peux devenir l'exemple de ce qu'il ne faut pas faire, je pense que c'est aussi bon que d'être un exemple de ce qu'il faut faire.
    J'ai effectivement été abandonnée, et c'est vrai que plusieurs personnes autour de moi ne voulaient pas me créer plus de tort. Vous avez bien choisi les mots pour le dire. Cependant, ces personnes n'avaient aucune idée de ce qu'elles pouvaient faire, non plus. Elles n'avaient pas les compétences pour agir. En fait, même les dirigeants de la fédération ne savaient pas quoi faire.
    Qu'il s'agisse d'un système anonyme ou d'autre chose, il serait extrêmement important d'avoir une structure pour que les athlètes victimes de violence et les personnes qui en sont témoins puissent en faire rapport. Ainsi, les athlètes ne seraient pas laissés à eux-mêmes. Il faut assurément que les athlètes aient du soutien.
    Il faudrait qu'il y ait des sentinelles, c'est-à-dire des personnes qui gardent l'œil ouvert et qui suivent l'évolution des choses.
    Madame Jeanson, je vois mon temps de parole qui s'écoule rapidement et c'est très frustrant.
    On se rend compte que les choses ne vont pas bien dans le monde du sport. La semaine dernière, j'ai demandé à des témoins si ce n'était que la pointe de l'iceberg.
    Qu'en pensez-vous, madame Jeanson? Vous faites partie de ce milieu depuis tellement longtemps et vous avez subi des agressions dès votre adolescence. Selon vous, est-ce que les choses vont mal dans tous les sports? Est-ce pourri jusqu'à la moelle? D'autres personnes se sont-elles confiées à vous pour vous dire que ces choses-là se passaient aussi dans leur sport? Sommes-nous devant quelque chose qui est pas mal plus gros que ce que nous pourrions croire?
    Je pense que oui. Il y a effectivement des athlètes dans d'autres sports, même à l'international, qui sont venus me parler de leur expérience.
    Je ne pense pas qu'il y ait plus d'agressions maintenant qu'il y en avait dans le temps, il y a 20 ans, mais on en parle plus aujourd'hui. Plus on en parle et plus on sensibilise les gens, plus on va pouvoir avancer.
    Le problème est-il plus important qu'on le pense? Je dirais que c'est probablement le cas.
    Pouvez-vous me dire, en quelques mots clés, ce qu'est un bon entraîneur?
    Un bon entraîneur, c'est quelqu'un qui est capable de faire ressortir le meilleur de l'athlète et d'assurer sa croissance sur le plan humain. Il n'y a pas juste la médaille d'or ou l'accès au podium qui comptent; ce qui compte aussi, c'est de développer l'athlète pour en faire une excellente personne humaine.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    C'est au tour de Jenna Sudds. Vous avez quatre minutes, madame.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Je vous remercie toutes les trois d'être ici aujourd'hui et de nous aider dans notre étude.
    Ma première question s'adresse à vous, madame Jeanson. Elle est probablement facile, mais il me semble important que cela figure au compte rendu.
    Vous avez dit que vous croyez que les athlètes de tout âge, dès qu'ils s'engagent dans une organisation nationale, devraient recevoir une formation et une éducation sur leurs droits et sur ce à quoi ils doivent s'attendre. C'est un excellent début, à mon avis.
    Ma question est la suivante: croyez-vous que cela devrait s'appliquer non seulement aux athlètes, mais aussi aux entraîneurs, aux formateurs, aux nutritionnistes et à tous ceux qui font partie du système?

  (1155)  

     Je vous remercie de la question.
    Oui, tout à fait; il faut rejoindre tous ceux qui travaillent dans le milieu du sport et qui gravitent alentour. Cela dit, pourquoi est‑ce si important pour les athlètes? Parce que les athlètes sont extrêmement vulnérables. Leur estime de soi est le plus souvent fondée sur la performance. La relation qu'ils ont avec leur entraîneur n'est pas une relation normale. Ce n'est pas un parent. Ce n'est pas un enseignant. Ce n'est pas un ami. C'est vraiment quelque chose de très spécial. Nous comptons beaucoup sur notre entraîneur.
    Dans mon cas, je ne savais rien. Quand mon entraîneur m'a dit qu'il allait faire de moi l'athlète la plus forte et que j'allais gagner aux championnats mondiaux parce que j'étais très forte, je l'ai cru. Il est important d'éduquer les athlètes, oui, mais il faut absolument remonter aux échelons supérieurs et inclure les représentants de la fédération et tous les autres.
    Excellent. Merci beaucoup.
    Un autre élément de votre témoignage m'a frappée: votre recommandation de « repenser » le financement pour qu'il soit lié non seulement à la performance, mais aussi au bien-être de l'athlète. J'aimerais bien que vous me disiez à quoi cela pourrait ressembler selon vous. Cela me semble être une recommandation très judicieuse. J'aimerais approfondir un peu ce que nous pourrions faire à l'appui de cette idée.
    Selon moi, la performance est beaucoup plus qu'obtenir une médaille ou être parmi les cinq ou les trois premiers à la ligne d'arrivée. Si le financement national ne porte que sur la performance, « veut, veut pas », les gens choisiront un entraîneur gagnant. Cela ne veut pas dire que ce sont de bons entraîneurs, parce que nous avons encore... La mentalité était différente il y a 30 ou 40 ans. Ces entraîneurs sont encore là. Oui, ils vont produire des petites machines ou des petits guerriers qui vont gagner des médailles. Mais la destruction qui s'ensuit parfois aura des répercussions sur l'athlète ou sur toute l'équipe d'athlètes pendant très longtemps.
    Si le financement est la base de tout, certaines décisions ne seront pas nécessairement les bonnes pour le bien-être des athlètes. Je ne sais pas comment cela pourrait fonctionner, mais ce serait formidable d'avoir un financement fondé sur les meilleures performances possible. Ce pourrait être la 20e place. Quand on va à l'école et qu'on a une note de 80 ou 83 % à un examen, c'est vraiment bien. C'est la même chose dans le sport. Ce serait formidable de consacrer un peu plus de temps au développement de l'être humain.
    Donc, oui, l'athlète, mais l'être humain?
    Merci beaucoup.
    Madame Larouche, vous avez une minute.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame Glover, lors de votre témoignage, vous avez demandé qu'il y ait une enquête judiciaire indépendante.
    Madame Fraser, vous avez parlé de l'importance d'apporter des mesures correctives dans le monde du sport et vous avez fait des propositions à ce sujet.
    Madame Jeanson, vous nous avez parlé de votre expérience et vous proposez qu'il y ait un système de plainte complètement indépendant.
    Bref, mesdames, compte tenu de tout votre bagage et de tout ce que vous nous avez proposé aujourd'hui, j'aimerais savoir si vous avez été consultées par Sport Canada, qui révise actuellement la Politique canadienne du sport, qui doit être renouvelée en février 2023.
    Non.

[Traduction]

    Non.

[Français]

    Madame Glover, je vous ai vue lever la main. Si vous voulez ajouter quelque chose, je vous laisse les dernières secondes de mon temps de parole.

[Traduction]

    Concernant l'enseignement aux athlètes, nous avons déjà un programme national de certification de l'Association canadienne des entraîneurs. Il faut s'inscrire et suivre des cours. On a un numéro de casier. Les 500 enfants qui participent à notre programme le font tous. Cette semaine, ils ont terminé le volet « Le soutien par le sport: comprendre la violence dans les relations amoureuses entre adolescents ». Cela comprend un certain nombre de programmes d'éducation.
    Ce n'est qu'un point de départ. Les certifications existent, et la structure est en place, mais certains de ces cours coûtent de l'argent. Nous essayons de les donner gratuitement le plus possible et de limiter le montant que nous demandons aux parents.
    Quant à déterminer ce qui ne va pas dans tous les systèmes, c'est précisément pour cela qu'on a besoin d'un comité. On ne sait pas ce qui ne va pas dans tous les systèmes tant qu'on ne s'en mêle pas et qu'on n'enquête pas sur le hockey, le soccer, le cyclisme, la natation, la gymnastique, etc. Il n'y a pas que la violence épouvantable dont nous entendons parler. Par exemple, on ne respecte même pas la structure établie avec, disons, 45 jeux par an et 45 entraînements. On prépare les athlètes à 80 jeux, on leur fait faire 120 entraînements et on prend le contrôle de la vie d'enfants.
    C'est encore plus profond que ce dont nous discutons ici. Comme vous l'avez dit, c'est la pointe de l'iceberg. Je n'ai jamais compris comment ils peuvent même être assurés alors qu'ils enfreignent constamment les lignes directrices qui s'appliquent à eux. C'est la pointe de l'iceberg. Il reste encore beaucoup de travail à faire. Je ne peux pas aller à l'école le samedi simplement parce que j'ai besoin de plus d'argent.

  (1200)  

     Excellent. Merci beaucoup.
    Pour le dernier tour, la parole est à Leah Gazan, pour une minute.
    Merci, madame la présidente.
    Madame Jeanson, vous avez parlé de l'importance d'une reddition des comptes indépendante. Au Manitoba, c'est le Bureau du protecteur des enfants qui supervise le soin global des enfants, que ce soit dans le système de justice ou dans le système de protection de l'enfance. C'est un protecteur des enfants indépendant, qui est financé par le gouvernement.
    Pensez-vous que ce genre de surveillance — complètement indépendante, financée, et extérieure aux organisations sportives — serait utile?
    Oui, je crois que oui.
    Merci.
    Y a‑t‑il d'autres commentaires? C'était succinct.
    J'ajouterais simplement que le gouvernement du Manitoba a déclaré dans son discours du Trône qu'il allait changer la façon dont les plaintes en matière d'éducation sont déposées au nom des enfants, parce que le système est trop lamentable et que les enfants ne sont pas du tout protégés à l'école. Il y a un certain parallèle ici.
    Je me suis dit aujourd'hui, en entendant « Comment régler le problème? », que nous devons nous rappeler que la grande majorité des entraîneurs, des enseignants et des membres des organes de gouvernance sont vraiment des gens merveilleux et dignes de confiance.
    Mais nous avons affaire à des gens extrêmement dangereux, extrêmement destructeurs. Ils forment une minorité, et tout est fait pour les protéger et ne jamais les tenir responsables. C'est là qu'il y a une rupture importante, à mon avis. Ils sont le Dr Jekyll devant nous tous, et, une fois les portes closes, ils sont M. Hyde. C'est un énorme problème.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vraiment remercier Mme Jeanson, Mme Fraser et Mme Glover d'être venues nous voir aujourd'hui. Merci beaucoup d'avoir témoigné de votre expérience et de nous avoir raconté votre histoire.
    Je vous rappelle simplement que, si vous avez besoin de quoi que ce soit, des ressources sont disponibles par l'entremise de la Chambre des communes. Veuillez communiquer avec la greffière ou avec moi si vous en avez besoin.
    Nous allons suspendre la séance pendant quelques secondes pour accueillir notre prochain groupe de témoins.
    La séance est suspendue pour environ une minute.

  (1200)  


  (1205)  

    Bienvenue à notre deuxième groupe de témoins et à la deuxième heure de notre séance d'aujourd'hui.
    Je vais accueillir nos prochains témoins. De ITP Sport & Recreation Inc., nous avons Allison Forsyth, cheffe de l'exploitation. Nous avons aussi Guylaine Demers, professeure au Département d'éducation physique de l'Université Laval, qui témoignera à titre personnel. Madame Demers, vous êtes en ligne.
    Enfin, du Centre de règlement des différends sportifs du Canada, nous accueillons Marie-Claude Asselin, cheffe de la direction. Madame Asselin, merci beaucoup d'être ici.
    Chacune d'entre vous aura cinq minutes pour présenter son exposé préliminaire. Quand vous me verrez agiter mon stylo... J'essaie de faire preuve de souplesse, surtout lorsqu'il s'agit de sujets très délicats, mais si vous me voyez faire cela, essayez de conclure.
    Commençons les cinq premières minutes.
    Madame Forsyth, vous avez la parole pour cinq minutes.
    J'ai participé deux fois aux Olympiques, je suis mère de trois jeunes joueurs de hockey et j'ai été victime d'agression sexuelle de manière flagrante dans le cadre de notre système sportif canadien.
    Je travaille également dans ce domaine. J'ai choisi de travailler aux premières lignes de cette crise, et ce depuis plus de quatre ans. J'ai travaillé aux côtés d'organisations sportives, d'athlètes et d'organismes gouvernementaux pour les aider à trouver des solutions et à fournir de l'éducation à tous les niveaux, à tous les âges et à tous les rôles au sein de ces organisations.
    Les répercussions de mon expérience de violence sexuelle ne se résument pas en quelques minutes. La manipulation extrême, les agressions sexuelles épouvantables, la coercition mentale et la violence psychologique sont quelques-unes des énormes séquelles physiques et mentales que je subis encore chaque jour.
    Je connais bien le traumatisme que représente la dénonciation et les effets d'être réduite au silence pendant 17 ans avant que mon agresseur ne se fasse prendre. Pendant des années, j'ai vécu colère, dépression, honte, autoaccusation et TSPT chronique.
    Oui, j'ai participé aux Jeux olympiques, et oui, j'ai été championne canadienne à huit reprises. Le succès n'est pas nécessairement synonyme de bonheur ou de santé. J'en ai une expérience directe. En fait, à bien des égards, lefait de privilégier absolument le succès est un bouclier pour les victimes. Je rendrais toutes mes médailles pour échapper à ce qui m'est arrivé.
    Je suis bien placée pour savoir pourquoi il est essentiel de sortir immédiatement l'agresseur de son environnement. Après avoir été emmenée dans les bois pendant six heures et contrainte par des menaces de suicide, je l'ai revu le lendemain, debout dans les bois en tenue de camouflage, me regarder faire la plus grande course de ma vie.
    Je sais ce que c'est que de raconter mon histoire des centaines de fois et d'être traumatisée à chaque fois, y compris aujourd'hui, et pendant deux ans et demi de procès criminel et d'enquête qui ont abouti à une peine d'emprisonnement de 12 ans. Je sais ce que c'est que d'avoir à témoigner en cour 36 heures après avoir donné naissance à mon bébé et l'avoir emmené avec moi pour pouvoir l'allaiter en prenant des pauses pendant le contre-interrogatoire. Je ne pourrai jamais récupérer la première semaine de vie de ma fille. C'est pourquoi j'ai un engagement sans précédent à créer un avenir sportif différent pour elle et ses deux frères aînés.
    Je sais aussi ce qu'il faut assumer pour que l'interdiction de publication soit levée sur mon nom pour que je puisse enfin l'associer à ce mouvement il y a plus de quatre ans et partager ouvertement mon histoire plusieurs fois par mois dans le but d'éduquer les gens et de changer le système. Chaque fois que je le fais, je revis ces souvenirs, ces expériences et ces traumatismes. Je fais tout cela parce que le changement se produit dans la vérité des échanges. Si les gens ne savent pas clairement ce qui m'est arrivé, comment peuvent-ils savoir ce qu'il faut faire pour aider les autres?
    Je me suis engagée dans ce travail et j'ai collaboré avec votre ancienne ministre des Sports, Kirsty Duncan, en 2018.
    J'aimerais vous parler de la double victimisation. Des gens insinuent ou même allèguent directement que, depuis que j'ai choisi de me mêler de cette crise et de m'adresser à des organisations pour les aider à trouver des solutions, à identifier les risques systémiques et à définir les enjeux du milieu, on pourrait m'accuser de les aider à couvrir les abus. À ceux‑là, je réponds qu'ils ne méritent pas mon énergie ou ma défense. Je vis dans ce milieu tous les jours. C'est le but de ma vie, et j'ai choisi de croire que, au final, nous voulons tous la même chose, c'est‑à‑dire un véritable progrès. C'est là‑dessus que je me concentre. J'ignore le bruit ambiant et je laisse le travail être ma priorité. Mon entreprise et moi-même le faisons mieux que quiconque dans ce domaine.
     J'ai l'air de pleurer sur moi-même aujourd'hui, mais je ne pleure pas sur mes enfants. D'abord et avant tout, et pour toujours, je défends les intérêts des athlètes et je suis l'une des premières à avoir dénoncé la situation au Canada. Je sais que beaucoup d'entre vous ont témoigné dans cette perspective. Permettez-moi de vous donner un aperçu éclairé de la sécurité du sport dans notre pays.
    La crise va bien au‑delà de la violence que les entraîneurs font subir aux athlètes. Comme moins de 5 % des cas sont de nature sexuelle, c'est beaucoup plus que de la violence sexuelle. Je discute de cette question plus que n'importe qui au pays avec des athlètes de première ligne. Je dis cela pour mettre en contexte mon expérience et mon point de vue. Il y a un préjudice intentionnel. C'est certain. Nous savons également avec certitude qu'il existe un conditionnement culturel profond et une normalisation des comportements dans le sport, et nous devons mettre fin à cette acceptation systémique de la maltraitance.
    Voici quelques exemples. Je sensibilise les entraîneurs de hockey aux dangers du sprint en patinage et les entraîneurs de soccer au traumatisme des courses suicides. Ces deux pratiques enracinées sont maintenant considérées comme des formes de punition, et de nombreux entraîneurs croient encore en leur validité.

  (1210)  

     Ce n’est pas une question de jugement. C’est une question d’éducation. Comme pour les commotions cérébrales: quand on en sait plus, on fait mieux.
     Ces entraîneurs me répondront presque toujours: « Comme j’ai fait de la planche à roulettes, ça devrait aller », ce à quoi je réponds: « Certes, mais il y a 25 ans, quand un athlète perdait conscience, on lui faisait respirer des sels et on le renvoyait sur la glace. »
    Nous devons changer. Je donne des formations à de jeunes athlètes ayant été sanctionnés pour pratiques de bizutage sur d'autres. Quand je leur demande comment ils peuvent penser que ce qu’ils ont fait n’est pas nuisible, ils répondent: « Parce que, cela m’est arrivé il y a quatre ans, Allison. »
    Je parle à des arbitres démissionnaires, à l'instar de 70 % de leurs pairs dans cette seule province parce qu'en plus des 900 plaintes qu’ils ont déposées pour discrimination au hockey seulement l’an dernier, en ont assez d’être poursuivis jusqu'à leur maison par des parents en colère. Assise sur le banc de hockey de l'équipe de mon propre fils, j'ai personnellement assisté à des pugilats entre parents dans les gradins et j'ai vu des parents crier des obscénités aux arbitres. Pas plus tard que la semaine dernière, alors qu’il venait d'être expulsé d’un match pour avoir agressé un arbitre, un parent a lancé devant des dizaines de jeunes athlètes de 11 ans: « Hé, l'arbitre, pourquoi ne te grilles‑tu pas la cervelle? »
    Oui, je parle à des athlètes qui sont effectivement tombés dans le piège de la mise en confiance ou du conditionnement. Je travaille avec eux pour les aider à comprendre ce que cela veut dire et pourquoi être le meilleur ami et le préféré de leur entraîneur n’est pas sain. Pourquoi faut‑il voir un signe évident de conditionnement quand l'athlète a l’impression que, s’il n'est pas le préféré de son entraîneur, il ne fera pas partie de l’équipe et pourquoi, s’il a l’impression de jouer par peur, c'est qu'il peut aussi être victime de violence psychologique.
    Nous mettons trop l’accent sur le problème ou, au mieux, nous en rabotons la surface, alors que nous devrions appliquer des solutions pourtant évidentes. Nous devons éliminer le culte — je dis bien, le culte — du sport. Cela exigera patience et courtoisie, tandis que les gens se rendront compte du système auquel ils sont habitués depuis tant d’années. Nous avons été amenés à penser que tout allait bien parce que nous connaissons ce système depuis notre plus tendre enfance, que nous avons vu des enfants dans des toilettes ou nus dans des autobus, des entraîneurs molestant des sportifs, des insultes raciales lancées comme si c'était normal, et des administrateurs qui font peu de cas des victimes et protègent plutôt la réputation de l’institution.
    Tout cela doit changer par l'application de tactiques proactives concertées visant à prévenir et à éduquer. Nous devons être éveillés aux techniques de conditionnement qui comportent quatre étapes: le favoritisme, l'établissement d'un rapport personnel, l'isolement et la complicité. J’ai appris ces étapes du conditionnement à l’âge de 30 ans quand je prenais la parole sur une scène. J'aurais tant voulu en savoir plus sur ces étapes du conditionnement quand j’étais jeune athlète.
    Enfin, et ce n’est pas le moins important, je nous mets tous au défi d’avancer et de ne pas reculer. Nous sommes un système, et le sport est en crise. Nous devons investir davantage dans nos organisations qui appuient le mouvement sportif et qui en financent l'évolution. Nous devons imposer des sanctions rapides et sévères aux délinquants, mais chaque fois que nous regardons dans le rétroviseur, nous retirons la pédale d’accélérateur sur laquelle nous devons appuyer.
    Au cours des quatre dernières années, j’ai constaté des progrès et des erreurs, y compris une très mauvaise mise en œuvre des changements obligatoires au niveau des ONS. Par‑dessus tout, je nous ai vus nous concentrer davantage sur ce qu’il faut faire une fois que nous attrapons quelqu’un plutôt que sur ce qu’il faut faire collectivement pour que la violence ne se produise pas au départ. Quand nous réussissons à sanctionner un délinquant et que nous ignorons le système en général, nous permettons qu'une autre personne soit victimisée.
    Je lance ce défi à chacun d’entre nous parce que je crois sincèrement que le sport peut encore être un endroit magnifique pour élever mes enfants. Je n’abandonnerai pas cette réalité, et je vous demande de faire de même.
    Merci.

  (1215)  

    Merci beaucoup, madame Forsyth.
    Nous allons maintenant aller en ligne avec Mme Demers.
    Vous avez la parole pour cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie de l'invitation à participer à votre étude.
    Vous m'excuserez de ne pas être au sommet de ma forme. Je suis grippée et clouée au lit depuis deux jours, mais, la cause étant plus grande que moi-même, je me suis botté le derrière pour être parmi vous.
    Madame Forsyth, merci de votre témoignage. Chaque fois, c'est bouleversant.
    Votre comité m'avait aussi invitée à témoigner sur le même sujet, en 2016, alors qu'il faisait une étude sur les femmes et les filles dans le sport. J'ai relu les 16 recommandations du rapport qui a découlé de cette étude et, franchement, je pense que plusieurs d'entre elles pourront être reprises intégralement dans le rapport qui sera produit cette année.
    Je suis d'accord avec Mme Forsyth et les intervenantes précédentes pour dire qu'il y a eu de l'avancement, et la présence de Mme Asselin en est une bonne preuve. Je reconnais tout le travail qu'elle fait. Cependant, à mon avis, il y a encore des problèmes à régler. J'avais insisté sur deux leviers importants, en 2016, sur lesquels j'aimerais revenir. Mme Forsyth parlait, entre autres, du changement de culture. Ce type de changement prend du temps, mais cela fait déjà six ans qu'un premier rapport a été déposé. Il y a quand même eu des actions à la suite de cela, et je remercie d'ailleurs l'ancienne ministre Duncan de ce qu'elle a fait. Toutefois, il y a ces deux problèmes qui persistent dans le sport au Canada.
    Premièrement, il y a un manque de reddition de comptes. Le financement n'est pas toujours associé à la reddition de comptes. Si de l'argent public est investi dans des organisations nationales de sport, celles-ci devraient rendre des comptes. C'est une condition nécessaire pour assurer la protection des athlètes et la progression des femmes. Certaines études démontrent qu'effectivement, lorsqu'il y a plus de femmes en position de leadership, on observe moins de violence dans ces organisations. Alors, la reddition de comptes est un levier important. Après tout, c'est de l'argent public.
    L'autre problème important, c'est que souvent, pour ne pas dire toujours, le financement est ponctuel. L'ancienne ministre avait annoncé 30 millions de dollars en 2018, et la ministre actuelle, Mme St-Onge, vient d'ajouter 26 millions de dollars, mais ce financement est souvent associé à des mesures ponctuelles. Au cours des dernières années, les fédérations nationales pouvaient demander de l'argent pour des projets liés à l'égalité et l'équité des genres, mais c'étaient des projets ponctuels. Une fois les projets mis en œuvre, il n'y avait plus d'argent et on ne pouvait plus proposer d'autres projets. Il est donc difficile d'avoir une vision et une planification à long terme.
    Je vais vous donner un exemple qui me fend le cœur. Grâce à un investissement de 1,65 million de dollars qui avait été annoncé par la ministre Duncan, un centre de recherche pour l'équité des genres dans le sport, nommé E‑Alliance, a été mis en place en 2020. C'était une première au Canada. C'était un projet de trois ans, mais, vous savez comment cela fonctionne, nous avons eu l'argent deux semaines avant la fin de la première année. Alors, en réalité, nous avons eu deux ans pour fonctionner. J'étais codirectrice de ce centre avec Gretchen Kerr et Ann Pegoraro. Je ne le suis plus, parce que j'ai maintenant la chance de diriger un laboratoire de recherche québécois pour l'équité des genres dans le sport. Le financement de ce centre canadien a pris fin en mars 2022 et, depuis ce temps, nous n'avons aucune nouvelle. C'est comme si on avait jeté 1,65 million de dollars par la fenêtre et que nous avions fait en vain tous ces efforts pendant deux ans afin de mettre en place cet important centre de recherche pour recueillir des données longitudinales, assurer le suivi et faire avancer les connaissances. Nous ne savons même pas ce qu'il adviendra de ce centre de recherche, alors que celui-ci faisait l'objet d'une recommandation déterminante dans le rapport de 2018 du Groupe de travail sur les femmes et les filles dans le sport.
    Il me reste 30 secondes. J'avais mis mon chronomètre devant moi. Je suis une fille de sports, alors j'ai l'habitude de respecter le temps.
    Bref, il y a deux choses à retenir. Premièrement, une reddition de comptes est obligatoire. Deuxièmement, il faut un financement à long terme pour permettre une meilleure planification et s'assurer que les initiatives ne tombent pas à l'eau après un an ou deux sans faire l'objet d'aucun suivi. Autrement, on fait du surplace et on gaspille beaucoup d'argent.

  (1220)  

[Traduction]

     Merci beaucoup.
    Nous allons céder la parole à Marie-Claude Asselin pour les cinq prochaines minutes. Madame Asselin, vous avez la parole.
     Madame la présidente, distingués membres du Comité, je vous remercie sincèrement de m’avoir invitée à parler d’un sujet aussi important.

[Français]

    Je m'appelle Marie‑Claude Asselin. Depuis près de 16 ans, je suis la cheffe de la direction du Centre de règlement des différends sportifs du Canada, le CRDSC, qui est le siège du nouveau Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport, le BCIS.
    De nombreux témoins avant moi ont parlé avec éloquence des problèmes qui nous préoccupent toutes et tous. Je pense particulièrement aux victimes et aux survivantes qui ont raconté des histoires profondément troublantes, mais qu'il était nécessaire d'entendre.
    Permettez-moi maintenant d'orienter la conversation vers des solutions.

[Traduction]

    En 2000, un groupe de travail auprès du Secrétaire d'État au sport amateur a conclu que « Faute de politiques justes et cohérentes ou à cause d’une mauvaise application des politiques, les athlètes et autres participants se font imposer des mesures disciplinaires, sont harcelés et se font refuser des possibilités sans avoir de recours appropriés ni de mécanisme d’appel. » Le CRDSC a été créé pour remédier à cette situation.
    Vous avez entendu des témoins citer la commission Dubin qui avait mis en lumière le fait qu'on ne pouvait pas faire confiance aux organismes de sport pour appliquer les règles antidopage à leurs propres membres. Ils ont affirmé que le Canada dispose maintenant d'un programme antidopage solide et indépendant. Je suis d'accord avec eux.
    Le 21 novembre en particulier, un témoin a fait l'éloge de ce système antidopage véritablement indépendant, mais il a omis de mentionner que le CRDSC est le tribunal antidopage du Canada. Pourtant, dans le même souffle, il a insisté sur le fait que le CRDSC n'est pas indépendant.
    Le CRDSC est neutre et indépendant par définition. Ses arbitres ont pour mission de s'assurer que les politiques des organismes nationaux de sport et les décisions rendues en vertu de ces politiques ne sont pas arbitraires, ni discriminatoires, ni illégales. Depuis sa création en 2004, le CRDSC a traité plus de 600 différends relatifs à la sélection d’équipes, au financement des athlètes, aux questions d'éligibilité, à la discipline, et ce pour contrer la discrimination, l'injustice, la tricherie, la corruption et la maltraitance.
    En offrant un accès à la justice adapté à la réalité du sport, le CRDSC sert d'alternative aux longues et coûteuses procédures judiciaires proposées par les tribunaux civils et les tribunaux des droits de la personne. Les retards rencontrés dans ces forums ne serviront pas les athlètes, dont la carrière ne peut être mise sur pause pendant deux, voire quatre ans alors qu'ils attendent leur date d’audience. Les affaires du CRDSC sont résolues, en moyenne, dans un délai de 54 jours pour les affaires de dopage et de 44 jours pour les autres différends liés au sport.
    Tous les témoins qui ont parlé devant vous de leur expérience négative suite au signalement d’abus, ont divulgué avant juin 2022, donc avant la création du Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport. Par conséquent, elles ont dû suivre les procédures de leur propre organisme de sport, qui de toute évidence étaient grossièrement inadéquates. Au CRDSC, les victimes et les survivants ont accès à des services en santé mentale et d'aide juridique avant même de déposer une plainte. Les règles spécialisées du Tribunal de protection établissent un équilibre très délicat entre le droit à l’équité procédurale et la nécessité d'offrir une protection aux parties et aux témoins vulnérables, comme aucun autre tribunal statutaire au Canada, et peut-être même dans le monde.
    Les médiateurs et arbitres du tribunal de protection du CRDSC et les enquêteurs du BCIS sont des experts, formés aux pratiques tenant compte des traumatismes, ayant de l'expérience dans le domaine des droits de la personne, de la protection de l'enfance et des jugements relatifs aux pensionnats autochtones. Leurs biographies sont publiées sur les sites Internet du CRDSC et du BCIS. Je peux également vous assurer que les voix des victimes et des survivants sont entendues au CRDSC, tant au niveau consultatif que décisionnel. Le fait qu'une victime ou un survivant n'affiche pas sa vie privée sur les médias sociaux ne fait pas d’elle ou de lui une moins bonne victime. Nous respectons ce choix, qui leur appartient à 100 %.
    Au CRDSC, nous sommes d'accord avec les victimes et les survivants qui affirment que le programme actuel a ses limites. Moins de six mois après son ouverture, il n'en est qu'à ses débuts. Mais il est injuste de ne pas lui donner sa chance. Il est construit sur des bases solides, et il bénéficierait certainement de plus de pouvoirs, comme: le pouvoir de citation à comparaître; le droit de tenir un registre public des sanctions; et l'immunité pour ses professionnels. Personne ne nie que des abus horribles ont été commis, et le sont encore.
    Si nous leur donnons les pouvoirs et les ressources nécessaires, madame la présidente, je vous assure que le CRDSC et le BCIS peuvent absolument remplir leur mandat pour un sport sécuritaire.

  (1225)  

    Merci de votre attention.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux questions. Notre première série de questions durera six minutes.
    Nous allons commencer par Anna Roberts, pour six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Mes questions s’adressent à Mme Asselin.
    Vous avez dit que vous travaillez avec le CRDSC depuis 16 ans. Excusez ma franchise, mais je ne crois pas que le CRDSC fonctionne pour nos enfants, il a échoué à tous les niveaux.
    Cet organisme de règlement des différends existe depuis 16 ans. Vous avez parlé des droits de la personne. Où sont les droits humains des enfants? Pourquoi permet‑on à ces agresseurs d’encadrer et d’agresser nos enfants, puis d'aller dans un autre club, dans une autre province ou un autre pays pour poursuivre leurs exactions?
    Êtes-vous d’accord avec moi pour dire qu’il faut éduquer? Avant vous, Mme Fraser a déclaré qu’elle ne fait pas confiance aux avocats. Elle croyait pouvoir faire confiance aux avocats et aux juges. Évidemment, il faut les sensibiliser à l’importance de protéger nos enfants. Je vais être très directe: je ne pense pas que nous faisons du bon travail. Pour améliorer les choses, les mots ne suffisent pas, il faut agir.
    Êtes-vous d’accord avec moi pour dire que nous devons veiller à ce que ces agresseurs sont accusés au criminel afin qu’ils cessent de maltraiter nos enfants?
    Premièrement, je suis d’accord avec vous pour dire que si le comportement est criminel, le système pénal devrait alors les aider. Le système pénal n’a pas aidé les enfants.
    Au CRDSC, nous travaillons sur ce dossier depuis de nombreuses années, et nous essayons d’obtenir un espace pour aider à lutter contre les abus et le harcèlement. Nous faisons cela depuis plusieurs années. Cependant, nous avons fait porter l’accent sur le choix des équipes, sur le financement des athlètes et sur d’autres questions. Avec l’aide de Mme Forsyth, nous avons poussé d’autres personnes et la ministre Duncan à confier au centre le mandat d'intervenir dans ces questions. Nous n’avions pas cela avant juin 2022. Nous n'évoluons sur ce plan que depuis six mois. C’est pourquoi vous ne nous avez pas encore vus en action.

  (1230)  

    Pendant 16 ans, nous avons entendu des plaintes, nos enfants ont été maltraités et nous avons entendu le même discours tout en nous attendant à un résultat différent. Je ne comprends pas. Je suis désolée. Je suis peut-être naïve, mais comment pouvons-nous protéger nos enfants si nous n’agissons pas? Les mots ne suffisent tout simplement pas. Nous ne devrions pas permettre à des personnes qui ont eu l’occasion de maltraiter nos enfants de continuer à le faire. La seule façon d’y mettre fin est de porter des accusations au criminel. De toute évidence, l’inscription ne fonctionne pas, parce que les coupables se font taper sur les doigts et qu'ils continuent ensuite.
    Nous devons sensibiliser nos juges et nos avocats au fait que nos enfants sont notre avenir. Si ce comportement se poursuit, nous n’aurons plus d’enfants.
     Je suis tout à fait d'accord avec vous.
     Je crois que notre compétence est limitée à l'heure actuelle. Si le gouvernement voulait en élargir la portée, nous accueillerions cela avec satisfaction. Ce qui se passe dans le sport scolaire et communautaire n'est pas de notre ressort à l'heure actuelle. Notre compétence est contractuelle. Il faut que les provinces et les territoires interviennent et fournissent un service semblable à celui que nous offrons actuellement dans toutes les administrations au Canada. S'ils veulent notre aide, nous serons là pour eux. Autrement, ils devront faire comme le Québec, peut-être, et avoir leur propre système pour s'occuper de cela.
    Comment pouvons-nous collaborer avec les provinces et les territoires pour éviter d'autres abus?
    Ce que vous dites, c'est que les compétences s'exercent différemment dans les provinces. Mais vous savez quoi? Il faut s'occuper des enfants. Pour moi, c'est une excuse. C'est assez. Nous devons nous assurer de la participation des provinces et des territoires, ainsi que des avocats, des éducateurs et des juges. Cela doit cesser, à tous les niveaux. Il faut que cette situation cesse.
    Qu'avez-vous l'intention de faire avec les provinces et les territoires pour mettre fin à ces abus?
    Nous sommes en discussion avec eux. Nous espérons pouvoir les aider à créer leurs propres systèmes, ou faire en sorte que certains d'entre eux soient prêts à signer une entente avec nous. Nous aurions alors compétence dans les sports à leur niveau, de même qu'à la base.
    Mais il subsiste un petit problème, à savoir que beaucoup de sports sont pratiqués dans les écoles, et que les écoles ne relèvent pas du ministère du Sport; elles relèvent du ministère de l'Éducation. Il y a beaucoup d'administrations qu'il faut faire intervenir si nous voulons être efficaces.
    Êtes-vous en train de me dire que le processus actuel ne fonctionne pas, mais que vous travaillez à un processus? Je suis désolée, mais je suis confuse.
    Notre processus fonctionne actuellement au niveau national.
    Les provinces ou les territoires ne participent donc pas.
    Nous discutons avec eux et nous progressons.
    Êtes-vous d'accord pour dire que nous devrions peut-être rendre cela obligatoire?
    Ce serait merveilleux.
    Si nous n'imposons pas cela et qu'un agresseur a un problème dans une province, il peut déménager dans une autre province et vous ne serez même pas au courant.
    Voyez-vous où je veux en venir? C'est grave. C'est comme si quelqu'un agressait un enfant aujourd'hui en Ontario, allait en Colombie-Britannique et faisait la même chose, mais que personne ne le savait.
    C'est pourquoi le registre ferait partie de la solution.
    À l'heure actuelle, avec le cadre législatif sur la protection des renseignements personnels au Canada, nous sommes très limités dans ce que nous pouvons faire avec un registre public. Nous avons tellement d'exemples d'entraîneurs qui passent d'une province ou d'un niveau à l'autre ou d'une équipe nationale à une école de sport. Les exemples sont nombreux. Cela devrait être le signe que nous avons besoin d'un registre public.
    C'est très bien. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant céder la parole à Sonia Sidhu.
    Madame Sidhu, vous avez six minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins de leur présence.
    Ma première question s'adresse à Mme Asselin.
    Nous avons entendu qu'il faut mettre davantage l'accent sur la collecte de données sur la participation, le leadership, les officiels et les entraîneurs, par exemple. Vous avez parlé d'un registre. Pouvez-vous nous en dire plus à ce sujet? Quel type de modèle pourrions-nous utiliser? Si un tel modèle existe dans d'autres pays, nous pourrions éduquer nos entraîneurs.
    N'importe laquelle des témoins peut répondre à cette question. Nous pouvons commencer par Mme Asselin.

  (1235)  

    Je vais parler un peu du registre, puis de l'éducation.
    Pour ce qui est du registre, le seul registre national que nous connaissons est celui des États-Unis. On peut le consulter en ligne. C'est un modèle que nous envisageons. Il y a d'autres pays qui doivent également composer avec leurs lois sur la protection de la vie privée, surtout en Europe à l'heure actuelle. Cela touche beaucoup de gens. Nous discutons avec de nombreux pays, comme l'Australie, la Nouvelle-Zélande et le Japon. Ils font tous face à des problèmes semblables avec leurs registres publics, alors ils tentent d'obtenir de l'aide à ce sujet.
    En ce qui concerne l'éducation, certains ont mentionné le Centre canadien de protection de l'enfance, qui offre une formation extraordinaire et qui dispose de ressources extraordinaires, qui sont adaptées à tous les âges. De la maternelle, et même de la garderie, jusqu'à l'âge adulte, des ressources sont disponibles. Je pense que nous devons exploiter les éléments positifs qui existent. Nous devons les intégrer au système du sport. Le Centre canadien de protection de l'enfance offre également des ressources aux parents et aux entraîneurs, et j'aurais recours à eux à ce chapitre.
    Merci.
    Madame Forsyth, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Oui. Je tiens à dire — et je le dis en tout respect, en tant que personne qui a créé de la formation en ligne pour notre pays — que c'est une formation de base et généralisée. Je tiens simplement à souligner que si nous pensons pouvoir prévenir les abus au moyen de ressources en ligne comme celle‑là, en suivant une formation en ligne — et je suis également coupable de cela, étant moi-même mère et ayant dû suivre beaucoup de formation bénévole —, nous devons respecter le fait qu'il faudra beaucoup, beaucoup plus.
    Ensuite, pour ce qui est de l'éducation adaptée à l'âge, j'ai un enfant de 11 ans, un de 8 ans et un de 5 ans, et personne ne les a jamais formés sur ce à quoi ressemble le conditionnement et sur les raisons pour lesquelles leur entraîneur ne peut pas être seul avec eux dans un vestiaire. Nous devons habiliter nos enfants. Du moins — croyez-moi —, je sais que mes propres enfants le voient sur TikTok de toute façon. Nous devons avoir confiance que l'âge n'est pas un obstacle. Nous devons offrir une véritable éducation à nos enfants, et cela ne se fera pas seulement en ligne.
    Merci.
    Je pense que nous avons clairement entendu qu'il faut accorder la priorité à la prévention, qu'il faut soutenir et écouter les victimes, et que les auteurs de ces agressions doivent être tenus responsables de leurs actes. Il devrait y avoir une tolérance zéro.
    Je sais que c'est une vaste question, mais que recommandez-vous pour que cela devienne réalité?
    J'aimerais vous demander, madame Guylaine Demers, si vous pouvez nous en dire plus à ce sujet.
     Merci.
    Je pense que Mme Asselin et Mme Forsyth ont souligné le fait qu'il s'agit d'un problème multifactoriel et que nous devons nous assurer que nous...
    Je pense que nous devons coordonner tous nos efforts à cet égard, parce que, comme l'a dit Mme Asselin, l'un de nos plus grands défis au Canada est l'aspect des secteurs de compétence. L'éducation relève des provinces; on peut faire quelque chose à l'échelle nationale, mais chaque province doit ensuite décider pour elle-même. Par exemple, au Québec, nous avons un organisme, Sport'Aide, avec qui Mme Asselin travaille en étroite collaboration, mais encore une fois, qui fait quoi? Au Québec, il y a encore des entraîneurs qui changent d'école et qui continuent d'être entraîneurs dans le même sport, même si... Encore une fois, l'organisation, le collège ou l'école ne veut pas ou ne peut pas dire pourquoi il congédie tel ou tel entraîneur, à cause de cette politique de protection de la vie privée, ce qui me rend malade. Je suis d'accord avec Mme Asselin pour dire que nous avons besoin d'un moyen d'inscrire ces entraîneurs sur une liste noire quelque part — ce registre —, afin qu'ils ne puissent pas poursuivre leurs activités d'entraînement.
    Je suppose que le défi est de savoir comment et qui. Peut-être que Mme Asselin a la réponse avec son organisation, mais nous avons besoin d'un leadership fort. Je pense qu'un organisme qui devrait participer à cela est notre CFPTS, ou comité fédéral-provincial-territorial du sport, qui essaie au moins de s'assurer que nous avons une certaine collaboration entre les paliers fédéral, provincial et territorial et que nous coordonnons nos efforts. Ce comité devrait peut-être s'intéresser davantage à cette question.
    Je le répète, pour ma part, l'une des plus grandes priorités serait certainement d'avoir ce registre, parce qu'à l'heure actuelle, nous voyons ces entraîneurs, nous connaissons ces entraîneurs et nous voyons qu'ils continuent à entraîner. Que pouvons-nous faire? Ce serait ma première priorité.
     Je suppose que Mme Asselin et son équipe sont probablement les mieux placées pour que cela se produise le plus tôt possible.

  (1240)  

    Merci.
    Je veux aussi vous demander quelle recommandation vous voulez faire au Comité pour que nous puissions nous assurer de l'efficacité du Bureau du Commissaire à l'intégrité dans le sport comme organisation avant d'aller de l'avant.
    N'importe qui peut...
    Oui, allez‑y.
    Je suis désolée. Je pensais que la question...
    Pouvez-vous répéter la question? Je suis désolée.
    Je peux ajouter quelque chose. Je vais vous dire une chose, madame Demers.
    En ce qui concerne le BCIS et la réalité du BCIS, je pense que nous devons prendre l'exemple du Center for SafeSport des États-Unis. Ce que je vais vous dire et ce que j'ai appris des gens qui travaillent là et qui ont essayé de déposer des plaintes, c'est qu'il sera essentiel pour le BCIS — et je crois que c'est tout à fait possible — d'avoir le financement nécessaire pour maintenir sa capacité.
    Je dis cela du point de vue des athlètes, parce que ce que je crains énormément, c'est que si jamais nous en arrivons à un point où ils essaient de déposer des plaintes d'abus et qu'on leur dit, comme certains athlètes de l'autre côté de la frontière l'ont entendu, « Eh bien, nous vous reviendrons dans environ deux ans », nous ferons face à un problème énorme. Je crois qu'il est dans la nature humaine que dès qu'on pense que quelque chose ne va pas fonctionner ou ne va pas être fait en temps opportun, on revient au point de départ, c'est‑à‑dire qu'on ne fait pas confiance au système et qu'on ne croit pas à la nécessité de déposer une plainte.
     Je crois que le BCIS est l'endroit idéal pour cela. Je pense qu'il aura suffisamment de pouvoirs. Je crois que nous devons le financer et lui fournir plus de ressources pour qu'il puisse recevoir, ce qui se produira malheureusement selon moi, un torrent de plaintes.
    Très bien. Merci.
    J'ai une brève question avant de terminer. Travaillez-vous avec le BCIS? Est‑ce que vous...? Non, donc...
    Nos activités s'alignent avec celles du BCIS.
    Vos activités s'alignent avec les leurs.
    Faites-vous des webinaires ou autre chose avec eux? Vos activités s'alignent simplement avec les leurs.
    Oui. Je fais des webinaires pour appuyer Sarah-Ève Pelletier à titre de soutien fonctionnel, mais non, je ne travaille pas du tout au sein du BCIS.
    D'accord. Je voulais que ce soit clair.
    Andréanne Larouche, vous avez la parole pour six minutes.

[Français]

    Merci, madame la présidente.
    Aujourd'hui, j'ai l'impression qu'on est tout aussi déconnecté de la réalité que l'étaient les représentants de Hockey Canada qui ont comparu devant le Comité permanent du patrimoine canadien, cet été, lors d'une séance à laquelle j'ai participé. On dirait que personne n'est responsable. Il n'y a aucune reddition de comptes. Comme Mme Demers le disait, il y a pourtant eu 16 recommandations, en 2016. Aujourd'hui, en 2022, on entend encore des histoires d'horreur.
    Madame Asselin, pouvez-vous nous apporter des clarifications au sujet du système actuel pour surveiller les cas d'agression dans le sport au Canada?
    Est-ce que le Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport relève de vous, qui êtes la cheffe du CRDSC?
    Oui, la commissaire relève de moi sur le plan opérationnel, puisque je m'assure qu'elle a les ressources, les employés et l'expertise nécessaires au sein de son bureau pour faire son travail. Sur le plan fonctionnel, cependant, elle est indépendante de moi. Je ne suis pas au courant, par exemple, des dossiers qu'elle et son personnel traitent. Elle le fait de façon indépendante de moi. Voilà en quoi consiste la structure administrative.
    Je pourrais aussi vous parler du conseil d'administration, car des gens en ont parlé. Selon la loi qui a créé le Centre de règlement des différends sportifs du Canada, c'est le ministre fédéral des Sports qui nomme les douze membres du conseil d'administration. Lors de la création du CRDSC, la communauté sportive a établi que trois postes au sein du conseil d'administration seraient réservés à des athlètes et qu'il y aurait également un entraîneur, un représentant d'un organisme national de sport et un représentant d'un organisme de jeux multisports. Les six autres membres viennent de la communauté juridique et du domaine du règlement des différends.
    C'est donc un comité qui a un rôle stratégique, soit celui d'adopter des politiques. Nous nous assurons que l'équipe a les ressources, l'expertise, le personnel et l'argent nécessaires pour remplir son mandat.

  (1245)  

    C'est parfait, madame Asselin. Excusez-moi de vous bousculer, mais le temps passe vite et j'ai d'autres questions à vous poser.
    Qui nomme les gens qui enquêtent sur les plaintes? Avez-vous établi un processus de diligence raisonnable qui doit être suivi, au sein du CRDSC, avant d'assigner un dossier de plainte à un professionnel, afin d'assurer aux victimes que les professionnels affectés à leur dossier n'ont pas de conflits d'intérêts, d'antécédents ou de liens avec les prédateurs ou les organismes nationaux de sport qui sont au cœur du litige?
    Oui. Autant les enquêteurs que les médiateurs et les arbitres doivent signer une déclaration d'indépendance après avoir pris connaissance du dossier. Ils ont tous un code de conduite très rigoureux à respecter. Ils sont également soumis à la politique sur les conflits d'intérêts du CRDSC.
    Y a-t-il également des arbitres sportifs du CRDSC qui sont formés ou utilisés pour enquêter sur des cas de maltraitance signalés?
    Non. Les arbitres et les enquêteurs sont deux groupes différents. Les enquêteurs font de la recherche d'information et des entrevues avec les victimes et les témoins, alors que les arbitres interviennent plus tard dans le processus, si les conclusions de l'enquête sont contestées par les participants.
    Le CRDSC a-t-il des enquêteurs, des médiateurs ou des arbitres qui remplissent de multiples rôles au sein des communautés sportives? Je pense, par exemple, au cas où un arbitre serait également embauché par des organismes nationaux de sport pour des travaux contractuels.
    Pour l'instant, dans le volet du sport sécuritaire, c'est-à-dire au sein du Tribunal de protection, il n'y en a aucun.
     Mme Pelletier, du BCIS, relève-t-elle de vous, qui êtes la cheffe de la direction du CRDSC?
     Comme je l'ai expliqué tout à l'heure, elle relève de moi uniquement sur le plan opérationnel, et non sur le plan fonctionnel.
    Dans ce cas, n'aurait-il pas été intéressant qu'elle vous accompagne aujourd'hui pour amener son point de vue aussi?
    Le CRDSC a été invité en tant qu'organisme et j'ai été désignée pour le représenter. On n'a pas fait de demande particulière pour avoir la commissaire.
    Je suis également préoccupée par la politique de confidentialité du CRDSC. Les survivants qui s'engagent dans le processus du BCIS sont soumis à un ordre de bâillon efficace et réduits au silence. Pourquoi avez-vous décidé de faire taire les athlètes lorsqu'ils se présentent au BCIS?
    Comme je l'ai dit tout à l'heure, je sens qu'on est déconnecté de la réalité. J'entends tout ce que vous dites depuis tantôt, mais, ce que je vois et ce que j'entends, c'est l'avis unanime des athlètes et des victimes: ces personnes n'ont pas confiance en votre bureau.
    Cette politique de confidentialité me préoccupe. Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet?
    Je peux en parler, absolument.
    Premièrement, les expériences personnelles des athlètes leur appartiennent, et ils et elles ont le droit d'en parler. Là où nous faisons attention à la confidentialité dans le cadre des procédures, c'est lorsque nous devons aussi protéger d'autres athlètes, des témoins ou des personnes vulnérables qui pourraient participer à l'enquête.
    Il y a donc effectivement des règles de confidentialité, mais l'athlète qui a vécu des expériences de maltraitance n'est absolument pas muselé et peut tout à fait en parler.
    Madame Asselin, comment se fait-il que si peu d'organismes de sport soient signataires du programme? J'en ai compté sept, parmi l'ensemble des fédérations sportives. Encore une fois, je sens qu'on est déconnecté de la réalité. En plus du manque de confiance que je perçois chez les victimes, ce manque de participation au programme est un autre élément significatif.
    Comme je le disais tout à l'heure, notre juridiction est contractuelle. Nous ne sommes pas un tribunal statutaire, alors nous n'avons pas une autorité universelle sur tout le monde qui fait du sport au Canada. Cette autorité, il faut aller la chercher par l'entremise d'ententes de service avec les fédérations.
    Même s'il y en a seulement six qui sont officiellement actives, chaque jour, chaque semaine, il y a des fédérations qui signent des ententes avec nous. Nous avons déjà 27 ententes, ou 28, je crois, depuis hier. Il faut comprendre que ces fédérations sont en période de transition, parce qu'elles ont beaucoup d'obligations à remplir en vertu de notre entente. Nous devons les accompagner pour nous assurer que les politiques sont adoptées correctement et pour établir un lien de consentement avec leurs membres, afin que nous puissions enquêter sur eux en cas de plainte.
    Il y a donc des étapes à franchir. C'est beaucoup de travail pour les fédérations, qui n'étaient pas nécessairement organisées pour nous accueillir. En ce moment, nous travaillons avec elles, et je sais que plusieurs d'entre elles sont encore en train de se préparer pour signer leur entente.

  (1250)  

[Traduction]

     Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    Je comprends, madame Asselin, mais je le répète: six, ce n'est pas encore suffisant.
    Par ailleurs, on révise actuellement la Politique canadienne du sport. Les témoins que nous avons entendus en comité disent non seulement qu'ils n'ont pas confiance dans le système, mais aussi qu'ils ne sont pas écoutés, en ce moment, au sujet de cette nouvelle politique que Sport Canada est censé adopter en février. À cela s'ajoute un manque de confiance en votre bureau. J'essaie de me faire une tête, mais j'ai vraiment l'impression qu'il y a une lacune flagrante dans le système actuel.
    Je répète que des recommandations sont en place depuis 2016, et c'est frappant d'en voir un si petit nombre être mises en œuvre.
    D'ailleurs, madame Demers, j'aimerais discuter avec vous, lors de mon prochain tour, pour savoir combien de ces recommandations sont mises en application.

[Traduction]

    Merci.
    Nous sommes très pressés, alors je vais donner six minutes à Mme Gazan, puis nous passerons au deuxième tour.
    Madame Gazan, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup.
    Mon temps est limité, mais je tiens à remercier tout le monde d'être venu aujourd'hui.
    Ma première question est une question à laquelle vous pouvez répondre par oui ou par non. Je m'excuse. Je n'aime pas faire cela, mais cela semble très clair pour vous deux, madame Forsyth et madame Asselin.
    Nous avons entendu beaucoup de témoins nous dire qu'ils souhaitaient la tenue d'une enquête judiciaire fédérale. Êtes-vous d'accord, oui ou non?
    Je vais commencer par vous, madame Forsyth. Oui ou non?
     Je ne peux pas vous répondre par oui ou par non, car tout dépend de la situation. Nous avons des fonds limités, et je veux qu'ils aillent d'abord et avant tout à la prévention.
    Vous êtes incertaine.
    Je suis incertaine pour l'instant. Je n'en sais pas assez à ce sujet.
    Je dirais que ma seule condition est... La commission va prendre plusieurs années, plusieurs mois — la commission Dubin a pris plus d'un an et demi — et entretemps, les victimes ont besoin d'un endroit où aller.
    Je vais vous dire pourquoi je suis préoccupée.
    Vous avez dit que votre organisme, le Centre de règlement des différends sportifs, offre un mode alternatif de règlement des différends, ce qui permet d'entendre rapidement les causes, sans être coincé devant les tribunaux, y compris ceux des droits de la personne, mais il est clair que cela ne fonctionne pas. Nous entendons sans cesse dire que les athlètes n'ont pas l'impression d'obtenir justice.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le système actuel est déficient?
    Je vous pose la question parce que vous vous trouvez aussi au milieu de toutes ces allégations, qui sont très graves. Votre organisation demande des pouvoirs et un financement plus larges. Cela ne fonctionne pas, mais vous voulez des pouvoirs et un financement plus étendus. Est‑ce clair?
    Je ne suis pas d'accord pour dire que cela ne fonctionne pas. Cela fait six mois seulement. Nous n'avons pas encore fait nos preuves. Il y a des lacunes dans la façon dont cela est conçu, et elles ont été soulignées ici. J'en ai parlé pendant mon exposé de cinq minutes. Nous avons besoin d'aide pour nous assurer...
    L'une des lacunes qui me saute aux yeux, et je le dis en tout respect... Nous sommes ici. Nous essayons de déterminer comment protéger les enfants et les athlètes contre les abus. Une chose qui ressort très clairement pour moi, c'est le manque de distance entre toutes les personnes qui participent à la prise de décisions finale.
    Madame Forsyth, j'ai une question pour vous sur des points qui ont été soulevés et dont j'aimerais vous donner l'occasion de parler. Je tiens à souligner que je reconnais votre expérience personnelle. J'essaie simplement de comprendre ce qui se passe.
    Votre organisation conseille‑t‑elle les organismes nationaux de sport au sujet de leur politique sur un environnement sportif sécuritaire?
     Oui. Notre organisation compte deux divisions distinctes. L'une s'occupe de la prévention, et l'autre, de la gestion des plaintes. Je travaille du côté de la prévention.
    D'accord, vous conseillez les organismes nationaux de sport. Faites-vous également enquête sur les signalements d'abus?
    Non. Nous ne faisons pas d'enquêtes.
    Vous ne faites aucune enquête.
    Mme Allison Forsyth: Non.
    Mme Leah Gazan: D'accord.
    Travaillez-vous à la fois avec les athlètes et les organismes?
    Oui.
    D'accord.
    Il y a un problème, donc? Ce que beaucoup d'athlètes disent, c'est qu'ils ont besoin de ressources indépendantes et d'un organisme indépendant. Ce que je remarque, c'est que beaucoup de gens qui participent à ce système, qui est clairement déficient, interviennent des deux côtés. Tout le monde travaille en quelque sorte ensemble. Il n'y a pas de séparation. Il n'y a pas suffisamment de distance.
     Je ne veux pas trop entrer dans les détails, et n'hésitez pas à m'interrompre si je le fais.
    Il y a la gestion des plaintes, puis il y a ce que je fais, c'est‑à‑dire la prévention et l'éducation. Oui, je collabore avec les organismes. Oui, je collabore avec Canada Soccer. Je travaille avec eux pour les rendre meilleurs et plus forts et cerner les risques structurels, environnementaux et comportementaux d'abus, mais nous...
    Vous travaillez aussi pour Sport Canada et vous les conseillez...

  (1255)  

    Non.
    ... et vous travaillez également avec...
    Je ne travaille pas pour Sport Canada.
    Mais vous collaborez avec...
    Je collabore avec les organismes nationaux de sport.
    Oui. Vous leur dites comment ils peuvent mieux faire les choses.
    Mieux faire les choses — oui.
    Je ne veux pas remettre en question votre intention. Je crois que vous avez une expérience concrète. Vous voulez un meilleur système, alors je veux être très claire.
    Vous collaborez avec Sport Canada et vous leur dites comment mieux faire les choses, mais en même temps...
    Eh bien, permettez-moi de clarifier...
    ... vous travaillez avec les victimes, ou alors vous ne travaillez pas du tout avec les victimes?
     Je ne travaille pas sur les plaintes. Je pense qu'il est très important de le savoir. La raison pour laquelle...
    Mais vous travaillez avec les victimes.
    Je travaille avec des victimes présumées, oui. J'assure le soutien des victimes...
    Je dirais que cela ressemble à un conflit d'intérêts.
    ... mais je ne travaille pas sur les plaintes.
    En tant qu'entreprise, nous nous sommes occupés des plaintes d'organismes nationaux de sport lorsque le BCIS n'existait pas.
    Mais vous travaillez avec Sport Canada...
    Je ne travaille pas avec Sport Canada.
    ... ou Canada Soccer...
    Je travaille avec les organisations qui souhaitent que je vienne les aider.
    Lorsque vous travaillez avec Canada Soccer, vous leur dites: « Voici comment vous devez mieux faire les choses »...
    Mme Allison Forsyth: Oui.
    Mme Leah Gazan: ... et vous travaillez en même temps avec les victimes. Il s'agit d'un conflit d'intérêts. C'est un conflit d'intérêts évident, non?
    Je ne comprends pas pourquoi. Il y a des victimes dans toutes les organisations. Je ne reçois pas les appels des victimes, parce que je ne travaille pas sur les plaintes. Je n'ai jamais téléphoné à une victime, je n'ai jamais pris d'appels téléphoniques ou obtenu de renseignements personnels de victimes qui ont quoi que ce soit à voir avec une plainte.
    Je me rends dans toutes les organisations qui le souhaitent et je travaille pour les améliorer. Cela comprend toujours des discussions avec les victimes, parce qu'il y a des victimes dans chaque organisation.
    D'accord. Merci de cette précision.
    Je vous en prie.
    Merci beaucoup.
    Le premier tour est terminé. Nous approchons de la ligne d'arrivée. Je vais donner une minute à Mme Ferreri, une minute à Mme Vandenbeld — désolée madame Vandenbeld — une minute à Mme Larouche et une minute à Mme Gazan.
    Faites de votre mieux avec le temps que vous avez.
    Madame Ferreri, vous avez une minute.
    Merci, madame la présidente.
    Je remercie les témoins d'être ici aujourd'hui. Leur présence est très importante.
    Vous savez quelle est la réponse à 99 questions sur 100? C'est l'argent.
    Madame Asselin, dans le site Web du Centre de règlement des différends sportifs du Canada, il est dit ceci:
... le CRDSC [...] offre des services de facilitation de règlement, de médiation, de médiation-arbitrage et d'arbitrage. La possibilité d'éviter une confrontation devant un tribunal judiciaire signifie que le différend sera réglé plus rapidement et à un moindre coût et, dans la plupart des cas, que les parties obtiendront un résultat satisfaisant.
Le CRDSC est constitué par une loi fédérale et est subventionné par le Gouvernement du Canada...
    D'innombrables victimes nous ont dit que ce processus ne fonctionne pas, qu'il est difficile de naviguer dans le système. Vous êtes un peu sur la clôture en demandant une enquête judiciaire nationale, alors que l'argent provient des gens qui paient votre salaire.
    Je ne comprends pas pourquoi vous ne voudriez pas d'une enquête nationale. Il me semble qu'il y a ici un très grand conflit d'intérêts, dans le sens que vous n'avez pas d'intérêt direct à aider les victimes et que vous voulez régler les différends hors cour.
    Tout ce dont vous parlez est financé par les contribuables, qu'il s'agisse d'une enquête, du Centre de règlement des différends sportifs du Canada ou des organismes nationaux de sport. Tout cela dépend du financement fédéral.
    Pour moi, le CRDSC pourrait être financé par Santé Canada. Il pourrait être financé par Justice Canada. Il est maintenant financé par Sport Canada. Ce sont tous des fonds fédéraux.
     Merci beaucoup.
    Je vais céder la parole à Mme Vandenbeld pour une minute.
     Merci. Une minute, c'est si court.
     Je veux d'abord commencer par vous, madame Forsyth, et vous dire que, compte tenu de tout ce que vous avez vécu, nous sommes tous heureux que vous vous serviez de votre traumatisme pour le transformer en solutions.
    J'ai une brève question pour vous deux. Nous avons constaté à maintes reprises qu'il s'agit d'un phénomène intergénérationnel. C'est quelque chose qui existe depuis très longtemps et qui est devenu normalisé. Ma question est la suivante: comment pouvons-nous briser le cycle?
     Étant donné que le BCIS n'existe que depuis six mois, croyez-vous qu'il fait partie de la solution? En 30 secondes, comment pourrait‑on l'améliorer? Vous pouvez également envoyer un mémoire au besoin.

  (1300)  

    Je suis convaincue que nous réussirons. Je fais confiance à la prochaine génération, comme Mme Bailey, qui était ici la semaine dernière. C'était tellement rafraîchissant et inspirant d'entendre parler de ce qu'elle fait. Cette génération ne tolérera pas les mauvais traitements, car les personnes n'hésitent plus à s'exprimer, grâce aux victimes et aux survivantes qui ont ouvert la voie.
    Je dois vous dire qu'il y a tellement de travail à faire dans ce domaine que le BCIS... Je dirais, au nom de ma propre entreprise, qu'il nous faut un organisme de réglementation. Faites ce qu'il faut ou vérifiez nos services, mais il s'agit d'un besoin dans notre pays qui ne sera pas réglé par une seule organisation.
     Je suis tout à fait d'accord avec la gestion indépendante des cas d'abus. Le mien a été caché pendant 17 ans, alors j'espère que vous savez que je suis tout à fait d'accord avec cela, mais j'ai besoin de centaines de personnes de plus en première ligne, pour être honnête, pour travailler avec moi à l'éducation et à la prévention.
    Merci beaucoup.
    Madame Larouche, vous avez une minute.

[Français]

    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Après avoir entendu votre témoignage, et après avoir entendu les demandes des athlètes, et surtout celles des victimes, je suis préoccupée. Comme vous le savez, les survivants de maltraitance mettent souvent plusieurs années avant de se manifester. Le CRDSC et le BCIS enquêteront-ils sur les récits antérieurs de maltraitance? Sinon, pourquoi pas?
    S'ils ne le font pas, qui le fera? Qui pourra identifier les agresseurs, qui travaillent peut-être encore dans le sport, et les tenir responsables des gestes portés à l'endroit des athlètes? Sans enquête indépendante, comment va-t-on réussir à faire toute la lumière là-dessus?
    Les cas antérieurs de maltraitance ne sont pas exclus du champ d'application du Bureau du commissaire à l'intégrité dans le sport. Il y aura donc une analyse et, s'il y a encore des risques pour les participants actuels dans le sport, c'est certain que les plaintes concernant des cas antérieurs vont être considérées.
    Madame Forsyth...

[Traduction]

    Merci, madame Larouche...

[Français]

    ... alors que les représentants de 15 disciplines sportives demandent une enquête indépendante, pourquoi n'en demandez-vous pas une? Vous aussi, vous avez parlé d'un problème de culture.

[Traduction]

    D'accord. C'est une question légitime, mais je dois aussi donner la parole à Mme Gazan.
    Madame Gazan, vous avez la parole.
    Pour faire suite à ce que Mme Larouche a mentionné, il faut souvent des années aux gens pour se manifester, et c'est difficile, n'est‑ce pas? L'une des choses que nous avons entendues et qui nous préoccupent, c'est la pratique selon laquelle les athlètes signent des ententes de non-divulgation. Votre organisation fait-elle signer des ententes de non-divulgation par des athlètes?
    D'accord. Il n'y a pas... Je veux bien comprendre. Lorsque vous avez parlé de confidentialité, il n'était pas question d'ententes de non-divulgation. Est‑ce exact?
    Non. La confidentialité vise à protéger les renseignements reçus dans le cadre du processus d'enquête, mais leur histoire leur appartient et ils ont le droit d'en parler.
    D'accord. Aucun athlète dans ce processus n'est obligé de signer une entente de non-divulgation.
    Mme Leah Gazan: D'accord. Merci.
    Merci beaucoup.
    J'aimerais vraiment remercier Mme Forsyth, Mme Asselin et Mme Demers d'avoir été parmi nous aujourd'hui.
    J'ai un rappel à l'intention des membres du Comité. Nous nous réunirons de nouveau jeudi après-midi. Nous avons une bonne somme de travaux du Comité devant nous, dont nous allons nous occuper de 15 h 30 à 17 h 30.
    La séance est levée.
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