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INAN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du Nord


NUMÉRO 046 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 12 décembre 2022

[Enregistrement électronique]

  (1105)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 46e réunion du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes.
    Nous soulignons que nous nous réunissons sur le territoire non cédé des Algonquins et des Anishinabes.

[Français]

    Aujourd'hui, nous commençons notre étude sur les langues autochtones.

[Traduction]

    Nous avons le plaisir d'accueillir Blaire Gould, directrice exécutive de Mi'kmaw Kina'matnewey, ainsi que Gerry Guillet, directeur de l'éducation à l'Athabasca Denesuline Education Authority. Bienvenue à vous deux.
    Avant de commencer, je vais faire les remarques liminaires habituelles.
    Veuillez attendre que je vous nomme avant de prendre la parole. Pour ceux qui participent par vidéoconférence, cliquez sur l'icône du microphone pour activer votre micro, et veuillez désactiver votre microphone lorsque vous n'êtes pas en train de parler.

[Français]

    En ce qui concerne l'interprétation, ceux qui utilisent l'application Zoom peuvent sélectionner le parquet, l'anglais ou le français. Il s'agit de l'icône ressemblant à un petit globe, dans le bas de l'écran. Ceux qui sont dans la salle peuvent utiliser l'écouteur et sélectionner le canal souhaité. Lorsque des questions seront posées en inuktitut, il faudra choisir la langue d'interprétation de son choix.

[Traduction]

    Je vous rappelle que tous les commentaires doivent être adressés à la présidence. Si vous voulez prendre la parole et que vous vous trouvez dans la salle, veuillez lever la main. Les députés qui participent par Zoom peuvent utiliser la fonction « lever la main ». La greffière et moi allons gérer l'ordre des interventions de notre mieux.
    Chaque témoin disposera de cinq minutes pour faire sa déclaration préliminaire. Nous allons commencer par Mme Blaire Gould.
    Madame Gould, si vous êtes prête, vous avez la parole pour les cinq prochaines minutes.
    [La témoin s'exprime en micmac et fournit le texte suivant:]
    Wela'lioq, ta'n tel pekitimioq.
     [La témoin fournit la traduction suivante:]
    Merci de m'avoir invitée ici aujourd'hui.
    [ Traduction]
    J'espérais vraiment être là en personne, mais peut-être la prochaine fois.
    La langue micmaque est en déclin depuis des décennies.
    D'après des études comparatives réalisées en 1999 et en 2013 par Mi'kmaw Kina'matnewey, les données linguistiques par tranche d'âge de la population ont révélé que, en général, les gens âgés de 40 ans et plus ne sont pas exposés à une menace immédiate pour ce qui est de leur compréhension du micmac et de leur capacité à le parler; cependant, chez les 30 ans et moins, il y a une diminution soudaine du nombre de locuteurs, mais, en général, il y a un bon éventail de personnes qui comprennent le micmac. Ils ne le parlent pas, mais ils le comprennent. Les personnes de moins de 20 ans — de 0 à 20 ans — sont dangereusement peu nombreuses tant sur le plan de la population de locuteurs que de celles qui comprennent le micmac. Nous avons projeté des données linéaires et exponentielles jusqu'à 13 ans plus tard par rapport à 2013, et nous prévoyons certainement une diminution plus importante de ces populations de locuteurs.
    Nous essayons de projeter nos données et nos discussions avec la collectivité sur les réalités de ces données et sur la situation actuelle par rapport à celle de 2013. J'ai dit aux collectivités que, si rien ne change, c'est le déclin prévu, et il est en grande partie critique. Une bonne proportion, surtout chez les 0 à 12 ans, est « dormante », ce qui signifie qu'il n'y a pas de locuteurs actifs dans ces tranches d'âge.
    Mi'kmaw Kina'matnewey et les collectivités ont mis en place des mesures rapides, comme le perfectionnement des enseignants, un programme d'étude en planification linguistique et l'élaboration de programmes, et ils continuent de le faire année après année.
    Je suis ici — virtuellement, bien sûr — comme dans le passé pour parler des avantages de la Loi sur les langues autochtones. Avec le chef Denny, j'ai contribué à façonner la loi. Nous avons été en mesure de recevoir des commentaires de la part de notre nation et d'entendre des discussions partout au Canada, dont nous vous faisons part aujourd'hui. Nous sommes en faveur de la loi. Nous sommes en faveur d'un financement durable de la mise en œuvre des mesures nécessaires pour soutenir et revitaliser les langues.
    Bien sûr, en tant que résidente de la région de l'Atlantique, et plus particulièrement de la Nouvelle-Écosse, je demande: qu'est‑ce que cette loi nous a apporté? Il y a un peu de temps qui s'est écoulé depuis 2019, année où la loi a été adoptée. Nous avons eu notre lot de difficultés communes au cours des dernières années. Cela ne nous a certainement pas dissuadés de faire notre travail. De façon très claire, qu'est‑ce que cela nous a apporté? Je peux vous expliquer ce que nous ressentons: que la Loi sur les langues autochtones a aidé la nation micmaque à progresser ici, en Nouvelle-Écosse. Nous avons bénéficié de la loi. Certaines dispositions de la loi incitent les provinces et les territoires à aider les nations à revitaliser et à se réapproprier leurs langues.
    Je suis très fière de vous dire aujourd'hui que nous avons élaboré conjointement une loi intitulée « Mi'kmaw Language Act » — « An Act to Recognize, Promote and Support the Revitalization and Reclamation of the Mi'kmaw Language » — ici, en Nouvelle-Écosse. Nous l'avons élaborée conjointement l'an dernier et l'avons soumis au système d'adoption des projets de loi en février 2022. En avril, le gouvernement l'a adoptée à l'unanimité en première, deuxième et troisième lectures. Comme vous le savez, nous avons un système de gouvernement véritablement unique.
    Actuellement, la Nouvelle-Écosse est dirigée par le Parti conservateur, mais nous collaborons vraiment avec tous les membres du gouvernement. Nous reconnaissons le travail que nous avons accompli par le passé avec le gouvernement libéral et le fait que nous avons commencé à faire avancer ce travail et l'avons conclu avec le gouvernement conservateur, ainsi qu'avec le gouvernement néo-démocrate. Il était tout à fait unique, en ce sens qu'il a reçu un appui unanime en avril 2022.
    Notre nation est autonome et nous reconnaissons que nous avons nos propres fonctions en matière de lois et nos propres processus d'adoption de lois, alors nous respectons certainement la façon dont la Nouvelle-Écosse a prévu d'appliquer et de proclamer sa loi. Nous l'avons fait conjointement en juillet 2022. La loi en tant que telle est entrée en vigueur le 1er octobre. C'est un jour important pour les Micmacs, puisqu'il s'agit de la Journée du traité des Micmacs, ici, en Nouvelle-Écosse.
    Qu'est‑ce que cette loi vise à faire pour nous et quel soutien nous apporte‑t‑elle? Pour nous, qui sommes très distincts ici, en Nouvelle-Écosse, nous ne sommes qu'une seule nation. Il n'y a que la nation micmaque ici, alors nous avons une seule langue en Nouvelle-Écosse, c'est‑à‑dire le micmac. La loi reconnaît notamment la langue micmaque comme étant la langue originale de ce territoire. En clair, elle vise l'élaboration d'une stratégie et d'un plan d'action pour revitaliser la langue. Nous nous sommes mis au travail, et c'est encore très nouveau, mais nous avons hâte de voir ce qui va en ressortir.
    Par ailleurs, la loi comporte un avantage financier. À l'heure actuelle, en vertu de la loi, Mi'kmaw Kina'matnewey est le séquestre-administrateur pour le volet des langues autochtones. À l'heure actuelle, nous n'avons pas conclu d'accord au titre de l'article 8 ou 9 avec le gouvernement fédéral, mais nous explorons des possibilités à cet égard. Nous gérons ce petit fonds pour le volet des langues autochtones. Cela nous permet vraiment de prendre les décisions collectivement pour le financement des projets.
    Ce que cela signifie sur le plan des investissements, c'est qu'avec le financement actuel, sans majoration, environ 500 000 $ vont à Mi'kmaw Kina'matnewey. Cela se traduit par environ un projet et demi pour lequel les collectivités présentent une demande et que nous gérons et appuyons, ce qui n'est pas viable.

  (1110)  

    Merci, madame Gould.
    Nous devons prévoir du temps pour les questions, alors veuillez conclure très rapidement, ou bien, si vous êtes prête, nous allons passer aux questions.
    Oui, j'ai presque terminé.
    MK reçoit ces 500 000 $ dans le cadre de l'investissement national actuel de 70 millions de dollars. Avec les majorations, cette somme est passée à 1,2 million de dollars. Encore une fois, cela représente environ 5 projets, et nous avons 13 collectivités, alors nous ne voyons toujours pas le financement durable que nous attendions dans le cadre de ce déploiement. Nous sommes ici pour parler en faveur de l'augmentation du financement pour appuyer les efforts des Micmacs ici, en Nouvelle-Écosse. Je voulais simplement mettre en perspective l'investissement national dans un contexte régional et provincial.
    Merci beaucoup.
    Merci, madame Gould.
    Nous passons maintenant à M. Gerry Guillet, directeur de l'éducation à l'Athabasca Denesuline Education Authority.
    Monsieur Guillet, vous avez cinq minutes.
    Bonjour, honorables députés. Je m'appelle Gerry Guillet et je suis directeur de l'éducation et directeur général de l'Athabasca Denesuline Education Authority du Nord de la Saskatchewan. Notre administration est très jeune. Nous nous sommes organisés et avons commencé à mener nos activités en août 2019. En établissant notre administration pour représenter les collectivités isolées du Grand Nord des Premières Nations de Fond du Lac, de Black Lake et de Hatchet Lake, nous offrons des programmes d'éducation pour les écoles. Nous avons 4 écoles de 1 300 élèves.
    Les programmes axés sur la langue, la culture et le territoire dénés constituent une partie importante de notre administration. C'est notre premier plan stratégique pour améliorer les compétences linguistiques de nos élèves. L'éloignement de nos collectivités crée de nombreux défis pour l'administration, et nous avons dû installer notre centre d'éducation à Prince Albert, en Saskatchewan. Nous pouvons seulement nous rendre dans nos collectivités par avion. L'une des collectivités a une route toutes saisons, et c'est un trajet de 14 heures vers le sud jusqu'à Prince Albert. Cela dit, nos programmes de culture et de langue axés sur le territoire sont la priorité du plan stratégique de notre administration.
    De nombreux aspects de nos programmes sont vitaux, y compris la littératie et la numératie. Cependant, étant donné la culture de faible utilisation de leur langue par nos élèves, il est certain que l'une des principales choses que nous tentons de faire est d'améliorer et de multiplier les possibilités sur le plan linguistique.
    Il est important de savoir que 75 % des membres du personnel des écoles de nos communautés sont de l'endroit et que seulement 60 % d'entre eux parlent la langue dénée. Nous planifions de mettre en place dans nos écoles des programmes d'immersion dénée, et nous aimerions pouvoir le faire. Nous devons relever de nombreux défis à cet égard, chose certaine, vu le manque de ressources en langue dénée. Les aînés de nos collectivités sont très forts dans leur langue, leur culture et leur dimension spirituelle.
    Nous sommes certainement d'avis que nous tiendrions compte de la Loi sur les langues autochtones du gouvernement pour ce qui est de la formulation de toutes nos stratégies, puisque nous voulons planifier des initiatives et des activités pour rétablir et maintenir la maîtrise de la langue dénée.
    Nos tentatives de création d'outils technologiques et de matériel pédagogique, y compris des enregistrements audio et vidéo, se sont butées à de nombreux défis. Notre nouvelle administration n'a pas pu accéder aux fonds nécessaires afin de réaliser ces visions, ces objectifs et ces aspects pour nos enfants et pour les membres de nos collectivités.
    Notre coordonnateur, qui parle couramment la langue dénée, a fait énormément de travail, au cours des trois années d'existence de notre administration, pour améliorer considérablement la capacité de nos enseignants et des programmes dans nos écoles de faire une place à la langue dénée dans tout le matériel pédagogique, autant que possible.
    Dans la vie quotidienne de nos élèves dans les salles de classe, la langue dénée est parlée presque autant que la langue anglaise, malgré le fait que nous suivons les programmes provinciaux, qui sont tout en anglais. Le déné est certainement une langue utilisée partout dans nos écoles et dans nos collectivités.
    Ce que nous demandons, à ce moment‑ci, c'est le financement dont notre administration a désespérément besoin pour revitaliser la langue des Dénés. Elle est en déclin rapide, et notre objectif est de revitaliser notre langue au sein de la culture des Dénés.

  (1115)  

    À ce jour, nous n'avons pas concrétisé d'augmentation importante du financement pour pouvoir aller de l'avant avec la traduction dans la langue dénée de bon nombre des ressources accessibles en anglais, de sorte que nos programmes d'immersion disposent des ressources nécessaires pour que nos enseignants puissent enseigner la langue de façon significative.
    Je profite de l'occasion pour dire au Comité que notre organisation est un modèle. Bien qu'elle n'ait que trois ans, nous avons mis sur pied une organisation fondée sur l'idée que les enfants passent en premier. Notre conseil d'administration est très déterminé. Les administrateurs pensent d'abord et avant tout à leurs enfants, dans leur cœur et dans leurs délibérations.
    Tous nos programmes et toutes nos initiatives visent nos enfants. Surtout, notre langue est sacrée pour eux, et nous souhaitons désespérément la revitaliser. Nos enfants doivent connaître davantage leur langue, leur territoire et leur culture. Nous essayons de parvenir à ce but en revitalisant l'aspect linguistique au sein de nos communautés et en particulier dans nos écoles. Afin de lancer un quelconque programme d'immersion en déné, il nous manque beaucoup de ressources pour concrétiser cette vision.
     Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, j'ai l'intention de vous présenter aujourd'hui un défi que l'Athabasca Denesuline Education Authority doit relever pour revitaliser notre langue, en tout cas suivant le projet de loi C‑91, la Loi sur les langues autochtones. Nous aimerions vraiment avoir plus d'occasions, dans le cadre du régime de financement, d'aborder ces enjeux pour nos collectivités et pour nos gens.
    Je vous en remercie.

  (1120)  

    Merci, monsieur Guillet.
    Nous allons maintenant passer à une série de questions. Nous allons commencer par…
    Je suis désolée, monsieur le président.
    M. Denny s'est connecté.
    D'accord.
    Avant de passer aux questions, nous entendrons notre troisième témoin.
    Je souhaite la bienvenue au chef Leroy Denny de la Première Nation d'Eskasoni. Nous vous accordons cinq minutes pour faire une déclaration préliminaire, puis nous passerons aux questions.
    Si vous êtes prêt, chef Denny, vous avez la parole pour cinq minutes.
    Je suis le chef Leroy Denny, d'Eskasoni. Bienvenue à vous tous de la part de la Première Nation d'Eskasoni.
    Je sais que, dans la déclaration préliminaire faite au nom de Mi'kmaw Kina'matnewey, notre directrice exécutive a abordé quelques éléments concernant le financement continu dont il a été question. MK reçoit 500 000 $ par année. Nous gérons actuellement le financement par l'intermédiaire du volet des langues autochtones.
    L'investissement actuel provenant du financement au titre de ce volet fournit à la région un total de 1,2 million de dollars, et l'objectif de ce financement est de soutenir des projets communautaires qui contribuent au renforcement de notre identité culturelle, ainsi qu'à la préservation et à la revitalisation de la langue micmaque, que ma communauté réclame depuis longtemps, tout comme MK.
    L'école d'immersion complète que nous avons ici, à Eskasoni, est un exemple. Les membres de notre communauté que sont Tom et Carol Anne ont contribué aux ressources en réalisant des films et en traduisant des films et des dessins animés. Même en ce moment, ils sont à Paris pour le début de la Décennie internationale des langues autochtones. Je veux simplement mentionner ces projets qu'ils mènent et qui fonctionnent très bien.
    Pour mettre les choses en perspective, le financement que nous recevons ne nous permet de réaliser que quatre ou cinq projets environ. Cela veut dire que nous sommes vraiment obligés de faire le choix d'approuver certains projets et d'en refuser d'autres, et nous devons réduire le financement de tous pour en donner un peu à tout le monde. Ces projets arrivent, et les idées qui viennent de nos communautés linguistiques sont des projets extraordinaires.
    Nous essayons d'aider nos aînés, car bon nombre d'entre eux commencent à mourir. Chaque fois qu'un aîné décède, il emporte avec lui tout le savoir comme une bibliothèque, alors le temps presse. Il est vraiment important que nous obtenions du soutien et des fonds supplémentaires. Ce n'est tout simplement pas un investissement suffisant. Nous devons vraiment commencer à travailler pour agir plus rapidement et obtenir plus de fonds.
    Nous comptons 13 communautés micmaques dans notre province, et nous avons besoin de plus de financement pour appuyer pleinement les efforts de tout le monde. Nous commençons à envisager la production de musique et de vidéos, et nous tentons vraiment de trouver cette génération. Compte tenu de celle dans laquelle j'ai grandi, les choses sont différentes aujourd'hui. C'est une génération différente, et nous essayons de promouvoir et de revitaliser nos langues au moyen de la technologie et du cinéma, d'une certaine façon.
    Si le gouvernement est sérieux en ce qui concerne les objectifs énoncés dans la Loi sur les langues autochtones, le financement doit appuyer les objectifs. Nous vous avons décrit tous les objectifs. Encore une fois, ce qui nous préoccupe, c'est que le financement est limité. Il est certain que, compte tenu de cette loi, il nous faut davantage de latitude pour travailler avec nos collectivités et toutes les organisations qui soumettent des propositions, comme MK. Nous soumettons beaucoup de propositions afin que des gens comme Tom et Carol Anne et nos écoles... Nous sommes en train de construire un studio de langue micmaque afin de traduire des films et des dessins animés et de faire participer les jeunes à la création et à la production de films destinés à cette génération pour nos communautés.
    Encore une fois, le temps presse pour nous, car notre communauté de langue micmaque rapetisse, et nous commençons à perdre de plus en plus de nos gardiens du savoir et surtout de nos guerriers linguistiques. Encore une fois, j'espère que mon témoignage aidera à rendre cela possible, et il s'agit d'un plaidoyer en faveur d'un financement accru à cette fin et d'une plus grande marge de manœuvre.
    Wela'lioq.

  (1125)  

    Merci beaucoup, chef Denny.
    À titre d'information, j'avise les membres du Comité que nous n'aurons le temps de procéder qu'à une seule série de questions, mais je pense que nous pouvons augmenter le temps de parole de chacun des quatre intervenants en leur accordant sept minutes.
    Nous allons commencer par M. Vidal.
    Monsieur Vidal, vous avez sept minutes.
    Je tiens à remercier tous nos invités d'aujourd'hui de leur présence et de leurs témoignages.
    Je vais commencer par M. Guillet.
    Merci de votre présence, monsieur Guillet. Dans votre déclaration, vous avez parlé des priorités de votre administration en matière d'éducation, soit l'apprentissage axé sur la langue, la culture et le territoire. Je sais que, lors de conversations précédentes, nous avons parlé de la combinaison de cet apprentissage, de l'alphabétisation, des mathématiques et des taux de maintien de la fréquentation.
    Récemment, Patrimoine Canada vous a refusé une demande de financement destiné à des programmes linguistiques dans votre école. J'ai deux brèves questions à ce sujet. Vous a‑t‑on donné la raison du refus? Deuxièmement, qu'auriez-vous pu faire? Qu'auriez-vous pu faire grâce à ce financement, pour vos étudiants du Nord-Est de la Saskatchewan, si vous l'aviez reçu?
    Je vous remercie, monsieur Vidal.
    Les seules raisons qui nous ont été données... Notre demande a été présentée en novembre 2021. Le 2 décembre 2022, j'ai finalement reçu une lettre de Patrimoine canadien qui disait: « Dans un contexte de fonds limités, j'ai le regret de vous informer que, pour l'instant, le ministère n'est pas en mesure d'approuver une contribution financière pour votre projet. »
    Notre projet visait à revitaliser notre langue et à nous donner la capacité de fournir des ressources à nos enseignants. Si nous mettons en œuvre un programme d'immersion en déné dans nos écoles, les enseignants auront besoin de ressources pour enseigner, et celles qui sont disponibles en déné sont extrêmement limitées. Notre projet visait à fournir plus de ressources en traduisant dans notre langue dénée les documents actuellement en anglais et à fournir des vidéos et des enregistrements audio de nos aînés.
    Nous avions demandé une subvention de 300 000 $. Notre projet aurait coûté 450 000 $. Nous avons présenté une demande de 300 000 $, et elle a été refusée.
    Très bien. Je vous remercie de cette réponse.
    Pour poursuivre sur le sujet du financement, vous avez dit que, lorsque vous avez établi l'administration, en 2019, il s'agissait d'une organisation relativement nouvelle. La création de l'organisation a été approuvée, mais je crois qu'il a été convenu que les fonds de soutien seraient débloqués au fur et à mesure que vous étofferiez le projet. Pouvez-vous nous dire où vous en êtes dans ce processus et quels sont les succès que vous avez connus ou les défis auxquels vous faites face en 2022?

  (1130)  

    Oui. Merci.
    Lorsque nous avons présenté notre entente avec Services aux Autochtones Canada — SAC — et qu'elle a été officialisée en août 2019, nous avons inclus un budget complet. Les dirigeants de nos trois collectivités ont reconnu que l'administration serait responsable des programmes de la prématernelle à la 12e année dans leurs écoles. Elle assumerait l'entière responsabilité financière à l'égard des installations, de l'exécution des programmes et de tous les aspects de la prestation des services d'éducation… un peu comme, par exemple, une division scolaire provinciale, quoiqu'elle reste une administration indépendante et apolitique dans son contexte global.
    Le document que nous avons présenté à SAC contenait un budget pour la reconnaissance de l'emplacement géographique de nos collectivités. Elles se trouvent dans l'extrême nord, juste au sud de la frontière des Territoires du Nord-Ouest. Le facteur d'isolement nous pose certainement de nombreux défis pour ce qui est de servir nos écoles dans leur ensemble. Le financement qui a été présenté à SAC était entièrement fondé sur les besoins en ce qui a trait aux installations du programme et au fonctionnement d'une administration ou division scolaire dans un comté.
    À ce jour, après trois ans et demi passés à négocier et à finaliser le financement, c'est le seul élément de notre entente qui reste à régler. Nous n'avons pas encore pris d'engagement. Nous avons présenté de nombreux arguments pour parachever notre entente de financement en fonction des besoins, et, chaque année, les coûts ne cessent d'augmenter. Le financement que nous recevons actuellement est strictement celui que les bandes recevaient au moment de notre création. Au lieu d'être destinés aux bandes et aux dirigeants, tous les fonds sont maintenant versés expressément à l'administration afin qu'elle gère tous les aspects liés aux écoles et aux programmes, y compris le transport, les installations, le salaire des enseignants, et ainsi de suite.
    Ces fonds sont loin d'être suffisants, maintenant que SAC a adopté une formule provinciale. En Saskatchewan, cette formule ne répond pas aux besoins de nos écoles provinciales, encore moins à ceux de nos collectivités isolées. Aucune autre division ne présente le même facteur d'isolement que nous, avec les défis qui s'y rattachent. À lui seul, le vol qui emmène les membres de mon conseil d'administration à notre bureau de Prince Albert pour la tenue des réunions régulières — deux jours de réunions — coûte 45 000 $ à notre administration. C'est seulement pour permettre aux membres du conseil d'administration d'être présents pendant deux jours.
    Concernant notre financement, nous plaidons encore et encore pour que cet aspect de notre entente soit finalisé, mais, jusqu'à maintenant, nous n'avons toujours pas obtenu d'engagement. Nous avons également demandé à obtenir une audience avec le Conseil du Trésor afin que nous puissions présenter notre programme et le défendre grâce à notre connaissance de nos collectivités du point de vue de la géographie et des défis liés aux collectivités isolées. Nous n'avons pas encore reçu de réponse du cabinet du ministre, et nous savons très bien que d'autres ont pu présenter leur demande de financement au Conseil du Trésor.
    Tout ce que nous demandons, c'est l'équité et la même possibilité de défendre notre demande, qui est entièrement fondée sur les besoins associés aux programmes et sur ceux de nos élèves, qui suivent actuellement un programme strictement scolaire. J'ai 50 ans d'expérience en éducation. Ce n'est pas nouveau pour moi. Quand je vois nos enfants dans nos écoles suivre un programme strictement scolaire… qu'est-ce qui les incite à venir à l'école, à part la compagnie de leurs pairs?
    Merci beaucoup, monsieur Guillet.
    Nous devons passer au prochain intervenant.
    Monsieur Battiste, vous disposez de sept minutes.

  (1135)  

    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'aimerais demander au chef Leroy et à Mme Blaire Gould de nous parler un peu de certaines des pratiques exemplaires relatives à la langue micmaque. Je comprends tout à fait ce que vous dites à propos de la nécessité d'accroître le financement. Je pense que c'est quelque chose que nous devons examiner en tant que comité… militer en faveur de ce financement.
    Mais, disons que le financement n'était pas un obstacle. Quels sont certains des facteurs qui permettraient aux membres des communautés micmaques de s'exprimer couramment dans leur langue de nos jours? Je crois que votre organisation représente 12 des 13 communautés micmaques. Vous êtes responsable de l'éducation depuis les années 1990. Quelles sont certaines des choses que nous finançons et qui fonctionnent? De plus, quels sont les facteurs qui font qu'un enfant parle à nouveau couramment la langue?
    Madame Gould, vous voudrez peut-être commencer par répondre à cette question.
    Certainement.
    Nous avons souvent défendu nos intérêts et lancé de nombreux programmes et services. L'un des plus grands avantages pour nous, et l'un des facteurs liés à la maîtrise de la langue, c'est que les langues doivent évoluer, alors nous avons certainement adopté cette idée, que la langue micmaque doit évoluer. Nous nous assurons toujours qu'elle est accessible, qu'elle est à jour et qu'elle n'est pas désuète.
    Je pourrais vous montrer quelques exemples que j'ai obtenus aujourd'hui. Nous avons créé un programme de langue orale qui permet d'évaluer l'expression orale des enfants, quelle que soit la langue qu'ils parlent, mais surtout, leur exposition au micmac à la maison. Il faut donc vraiment relier le foyer à l'apprentissage, à l'école et à tout le reste pour que tout soit centré sur l'enfant.
    Nous avons élaboré beaucoup de contenu à l'appui de ce programme. Nous l'avons fait en mathématiques. Nous avons créé un outil de ressources de soutien non seulement pour les enseignants et les systèmes d'éducation, mais aussi pour chez eux. Nous comprenons et acceptons pleinement que les enfants apprennent aussi à la maison et que leurs parents jouent un rôle essentiel dans leur vie.
    Dans le même ordre d'idées, nous avons élaboré une quantité infinie de livres et de façons de soutenir l'apprentissage culturel et de l'intégrer…
    Tout ce matériel est en micmac, si j'ai bien compris.
    Bien sûr. Nous avons fait des agendas. Nous avons rédigé des livres portant principalement sur ce que signifie l'identité de personne visée par un traité — certainement pour nous —, mais un peu plus approfondis, pour faire comprendre au lecteur le rôle de la famille et la responsabilité et les rôles que nous jouons au sein de celle‑ci.
    À l'intention des enseignants, nous avons rédigé des scénarios et des livres sur la lecture et l'écriture du micmac. Nous avons organisé des jeux et des activités interactifs, pour nous assurer de garder les choses à jour et modernes.
    Pour ce qui est de l'aspect populaire, nous avons utilisé beaucoup de ressources pour leur donner une belle apparence. C'était certainement une priorité pour nous parce que les ressources en anglais sont certainement très belles et que, lorsque nous publions du contenu, nous voulons qu'il paraisse aussi bien. Nous avons établi notre programme d'apprentissage, notre programme de langue, que nous évaluons et surveillons relativement à l'apprentissage de la langue micmaque à l'intérieur des systèmes dans lesquels nous sommes.
    En outre, l'évaluation est un élément important. Nous sommes certes habitués à créer des choses. Nous l'avons déjà fait. Nous faisons très attention à la façon dont nous les mettons en œuvre, et nous le faisons avec beaucoup de bonnes intentions, d'esprit et de soutien. Lorsque nous lançons des programmes, il ne s'agit pas seulement du lancement du programme. Il s'agit de faire comprendre aux gens que nous continuerons d'être présents et d'offrir du soutien tout au long du processus de mise en œuvre, avant de prendre du recul. Nous sommes certainement dans cet état d'esprit.
    De plus — et je pense que le chef Denny pourrait vous en dire un peu plus à ce sujet —, nous offrons un programme d'immersion dans l'ensemble des nations micmaques. Nous n'en avons qu'un. Il connaît beaucoup de succès, mais, encore une fois, il n'existe que dans une seule communauté. Les autres souhaitent ardemment obtenir le même programme qu'Eskasoni, mais elles en sont incapables, que ce soit en raison du financement, des chiffres, du soutien...

  (1140)  

    Compte tenu du temps dont je dispose, madame Gould, je voudrais entendre l'avis du chef Leroy.
    Chef Leroy, votre communauté a réussi à obtenir une école d'immersion complète de la première à la quatrième année. Mon fils est diplômé de cette école. Que fait la communauté pour compléter le dur travail que font les enseignants dans les écoles d'immersion? Sur quoi les communautés mettent-elles vraiment l'accent, les pratiques culturelles? Je sais que le ministre du Patrimoine canadien va vouloir entendre parler des autres choses que nous faisons en plus de l'école.
    En tant que communauté, nous faisons de notre mieux pour... Cela commence par le leadership. Nous parlons notre langue à la table des dirigeants. Nous avons commencé à faire beaucoup de choses au studio de langue micmaque. Nous nous concentrons vraiment là‑dessus et sur la traduction des panneaux afin que les gens entendent et voient davantage de panneaux dans la collectivité. C'est une chose: voir et appuyer les initiatives que nous menons dans la collectivité. Si je parle, parfois, je le fais dans ma langue.
    C'est très difficile. Il y a beaucoup de réussites. Nous essayons tout. Nous travaillons avec MK. Nous collaborons avec nos partenaires pour faire fonctionner notre langue. Nous essayons des choses créatives, de la musique à la traduction de films, comme le font Tom et Carol Anne. Par ailleurs, ils font de la sensibilisation sur TikTok et demandent à des jeunes de les aider à cet égard. Nous tentons de rester à l'avant-garde.
    Je constate qu'il y a une chose qui fonctionne... C'est très difficile par rapport à l'époque où j'étais plus jeune, parce que tout le monde parlait. Tout le monde conversait. De nos jours, tout le monde se parle sur son téléphone, et nos gens n'ont pas beaucoup de conversations. Il faut élaborer des programmes à l'intention des jeunes. La COVID‑19 ne nous a vraiment pas aidés parce que nous ne nous rendions pas visite.
    Nous en revenons à notre culture. Nous nous parlons, nous avons des programmes comme celui du thé et du pain grillé, et nous rencontrons des aînés, ce genre de choses. De nos jours, il y a les balados. Il y a toute cette technologie que nous pouvons vraiment exploiter.
    Une chose m'a vraiment frappée au sujet de l'un de mes conseillers. Il s'appelle Joef Bernard, et il vit sur une terre. Il y est toujours avec son fils, qui a trois ans. Son fils parle couramment le micmac. Il lui a toujours appris à connaître le territoire, les médicaments. Il parle très couramment la langue. Une chose qui m'a vraiment frappée, c'est qu'il m'a raconté qu'il tente de le confondre lorsqu'ils regardent des dessins animés, parce que tout le monde en regarde. La plupart des enfants regardent les iPad et ce genre de choses. Il m'a dit qu'il faisait jouer un dessin animé qui n'était pas en anglais. Il était dans une autre langue, comme l'espagnol ou d'autres langues, simplement pour le mêler, parce que les enfants ne font que regarder le dessin animé, les couleurs et tout le reste. Il faisait cela. Il espérait qu'il y aurait plus de produits accessibles, des dessins animés traduits pour les tout-petits, parce qu'ils sont comme des éponges. Les enfants de trois, quatre et cinq ans sont comme des éponges. Ce qu'ils entendent et voient...
    C'est comme une tendance. À l'heure actuelle, tout le monde parle anglais. Les gens vont simplement... Compte tenu de tout le travail que nous faisons en immersion et de tout ce que font les familles pour vraiment aider leurs enfants à parler la langue, une fois qu'ils sortent dans le monde extérieur, ils suivent les tendances, qu'il s'agisse de parler l'anglais ou je ne sais quel jargon que nous entendons parfois dans certaines communautés.
    C'est à peu près tout. Je pense que la culture axée sur le territoire est aussi la clé, le fait d'apprendre à nos enfants à connaître le territoire et ses termes…
    Merci, chef Denny. Je m'excuse de vous interrompre. Nous devons nous en tenir à un certain temps de parole.

[Français]

    Madame Gill, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais remercier l'ensemble des témoins présents aujourd'hui de dispenser ainsi leurs enseignements. J'en profite pour leur souhaiter une bonne Décennie internationale des langues autochtones, qui a commencé cette année. J'espère que cette décennie sera salutaire pour les langues autochtones.
    J'ai le bonheur, comme députée, de représenter des locuteurs de langue innue. Cette langue est très vivante dans ma circonscription. Il y a un institut culturel qui est très riche et qui vise à assurer la pérennité et le renforcement de la langue. C'est d'ailleurs ce que nous souhaitons tous, et ce, pour toutes les langues autochtones.
    Mme Gould a parlé de la situation qui est critique pour les personnes de 0 à 12 ans, qui ne parlent pas activement la langue présentement.
    M. Denny a parlé du temps qui presse, alors que disparaissent malheureusement les aînés, qui sont de véritables bibliothèques vivantes.
    On a parlé un peu du financement de 1,2 million de dollars reçu pour des initiatives ponctuelles dans le cadre de certains programmes. J'aurais aimé entendre les témoins parler davantage de la question du financement. Oui, une loi a été adoptée en 2019 et sa mise en œuvre prend plusieurs années, mais il reste qu'il y a des besoins à combler entretemps. Il y a des budgets et on peut déjà réfléchir à ce qui va se passer quand cette loi sera complètement mise en vigueur.
    Quels budgets faudrait-il dans des communautés comme les vôtres pour revitaliser, maintenir et renforcer les langues autochtones?
    Comme le ministre le sait déjà, ce qu'on a demandé dans le cadre de cette loi, c'est d'accorder un financement adéquat, stable et à long terme, ce qui n'est pas le cas présentement. Je pense que M. Guillet l'a mentionné lorsqu'il a parlé de demandes que d'autres ont faites et qui ont été acceptées par le Conseil du Trésor, tandis que sa communauté dénée n'a pas pu recevoir les fonds.
    À tour de rôle, monsieur Guillet, monsieur Denny et madame Gould, pourriez-vous nous dire quels seraient les besoins pour vos propres communautés en matière de financement stable, adéquat et à long terme pour renforcer, revitaliser et maintenir les langues autochtones?

  (1145)  

    Merci beaucoup, madame Gill.
    C'est vraiment ce que nous cherchons, c'est-à-dire des fonds pour continuer à revitaliser la langue des Dénés du Nord de la Saskatchewan. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas reçu de fonds pour continuer ou développer nos projets en matière de langue et de culture. Nous souhaitons toujours implanter des programmes d'immersion pour que la langue soit accessible aux jeunes en particulier, mais les ressources ne sont pas là. C'est toujours un grand défi d'obtenir les ressources nécessaires pour offrir l'instruction dans notre langue.

[Traduction]

    Chef Denny, peut-être que vous pourriez être le prochain à prendre la parole, puis ce sera Mme Gould. Vous disposez de trois minutes, à répartir entre vous deux, pour répondre à la question de Mme Gill.
    Ce dont nous avons besoin pour réussir dans l'avenir de notre langue est une question très intéressante. C'est une évidence. C'est de plus d'argent pour cette ressource, comme je l'ai expliqué dans ma déclaration préliminaire. Je crois que, si on veut aider les familles et les collectivités, il faudra... ce n'est pas seulement l'école. Je sais que nous obtenons de l'aide pour les écoles, mais il faut aussi que le financement soit axé sur la collectivité. Il faudra travailler avec nos aînés, nos jeunes et nos familles pour obtenir ce soutien.
    J'ai parlé de mon collègue, mon collègue conseiller, qui aide ces familles et ces enfants à obtenir les ressources nécessaires, à répondre à leurs besoins et à leurs désirs — des choses comme des dessins animés — et à financer pleinement nos studios, qui sont très importants.
    Concernant la formation, c'est l'aspect technologique qui est difficile. Il faut beaucoup de travail et d'argent pour mettre l'accent sur les aspects technologiques de la vidéo et du son, et des investissements devront être effectués à cet égard.

[Français]

    Avant que Mme Gould ne réponde à la question, j'aimerais poser une question complémentaire à MM. Guillet et Denny.
    Bien que la Loi sur les langues autochtones ne soit pas complètement mise en œuvre présentement, le travail qui a été fait jusqu'à maintenant a-t-il commencé à se répercuter sur le financement? Avez-vous l'impression que vous recevez davantage de financement stable, à long terme et adéquat, comme cela avait été demandé, ou avez-vous plutôt l'impression qu'on n'est pas encore arrivé là et que les choses ne tendent pas non plus vers cela?
    Vous pouvez répondre en premier, monsieur Guillet.

  (1150)  

    Merci, madame Gill.
    Des fonds, c'est certainement ce que nous cherchons. Nous avons besoin d'un budget nous permettant de réaliser notre vision et de revitaliser la langue dénée non seulement dans les écoles, mais dans toute la communauté. Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas reçu de fonds. Nous avons fait des demandes, mais elles ont été refusées. Je demande donc au moins que nous puissions avoir des fonds pour revitaliser notre langue dénée.
    Je ne sais pas si Mme Gould a quelques secondes pour répondre à la question.

[Traduction]

    Je vous remercie de votre question.
    Que faut‑il? Je pense que nous pouvons certainement donner des précisions à ce sujet, mais, si nous voulons simplement ramener la question à ce qu'est la situation actuelle par rapport à ce qu'elle serait pour tout le monde, il est important de séparer la prestation de services linguistiques dans les écoles et leur fonctionnement dans la collectivité, car ils brillent sur diverses tribunes et des choses de ce genre.
    Du point de vue des écoles, voyons ce qu'il en coûte actuellement pour exploiter une école d'immersion, c'est‑à‑dire un peu moins de 1 million de dollars. Si nous voulions offrir ce service jusque dans les établissements secondaires, il serait question d'un soutien financier intensif.
    L'argent que nous gérons à partir du volet des langues autochtones est une somme de 1,2 million de dollars, et, comme je l'ai mentionné, il est destiné à quatre projets. Donc, si on a rencontré quatre communautés et qu'on a réalisé un projet pour chacune de ces communautés, il reste tout de même neuf autres communautés qui ne reçoivent rien. Ce n'est pas équitable pour ces communautés. Si nous disions: « Nous devons rencontrer tout le monde », il serait question d'un minimum de 4 millions de dollars pour la réalisation d'un seul des projets destinés à ces communautés. Bien souvent, elles souhaitent obtenir de multiples projets, et ce n'est que le minimum.
    Ensuite, pour ce qui est de la communauté, le coût de l'approche axée sur la communauté dans son ensemble est très différent. Il est important de toujours faire la distinction et d'en tenir compte.
    Voilà ma réponse à votre question, madame Gill.
    Merci, madame Gould.

[Français]

    Merci, madame Gill.

[Traduction]

    Nous passons maintenant à notre dernière intervenante, Mme Idlout.
    Madame Idlout, vous avez sept minutes.
     [La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᐄ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᐋ, ᓯᕗᓪᓕᕐᒥᒃ ᐊᒃᑯᓱᐊᓗᒃ, ᐋ, ᐃᓘᓐᓇᓯ ᖁᔭᓕᒍᒪᕙᑦᓯ, ᐋ, ᑕᒪᒃᑯᐊ ᐅᖃᐅᓯ-ᕆᔭᒃᓯ, ᐋ, ᓱᓕᔪᓂᒃ ᖃᐅᔨᒪᓂᒃᑕᑦᑎᓐᓂᒃ, ᐋ, ᐅᖃᒃᑲᓐᓂᕋᑦᓯ, ᐋᒻ, ᑕᐃᒪᓐᖓᓂᒃ, ᐋ, ᑖᒃᑯᐊ ᑲᑎᒪᔨᐅᖃᑎᒋᓕᖅᑕᒃᑲ ᑐᓴᐅᒪᐃᓐ, ᑐᓴᐅᒪᑎᑕᐅ-ᖏᓐᓇᐅᔭᕋᑦᑕ, ᒐᕙᒪᑐᖃᒃᑯᑦ ᐱᓕᕆᐊᑦᓴᖃᒑᕌᒐᒥᒃ ᐊᒃᑐᐊᖓᓂᐊᖅᑐᓂᒃ ᓄᓇᖃᖅᑳᖅᓯᒪᔪᓂᒃ ᑲᔪᓯᑦ-ᑎᐊᖃᑦᑕᖏᓐᒪᑕ ᐃᑲᔪᑦᑎᐊᖃᑦᑕᖏᒻᒪᑕ ᐊᐃᑦᑖᖑ-ᒐᓗᐊᖅ, ᑖᓐᓇ ᐃᓱᒪᒋᓪᓗᒍ ᖃᐅᔨᒪᔪᐃᓐᓇᐅᓕᕋᑦᑕ ᓴᐃᒻᒪᖃᑎᒌᒋᐊᖃᕐᓂᖅ ᐱᒻᒪᕆᐅᑎᒡᓗᒍ, ᐋᒻ, ᖃᓄᖅ ᐊᔭᐅᖅᑐᐃᒐᔭᖅᐱᓯ ᑖᒃᑯᐊ ᓄᓇᖃᖅᑳᖅ-ᓯᒪᔪᖅᑎᒍᑦ ᐅᖃᐅᓯᖅᐳᑦ ᐊᓯᐅᔨᔾᔮᖏᒃᑯᑦᑎᒍ ᖃᓄᖅ ᐊᓯᔾᔩᒋᐊᖃᖅᐸᑕ ᒐᕙᒪᑐᖃᒃᑯᑦ. ᑖᒃᑯᐊ ᐱᖓᓲ-ᔪᐃᖅᑲᐃ ᑭᐅᔪᓐᓇᖅᐸᑕ ᐅᓇ, ᐋ, ᐅᕙᓂ ᐃᒃᓯᕙᐅᑕᖅ ᓯᕗᓪᓕᐅᕌᓪᓚᓚᐅᕐᓗᓂ ᓰᑉ ᑎᓂ ᐊᒻᒪᓗ ᐱᖓᔪᐊᑦ, ᐋᒻ.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Merci.
    Tout d'abord, je tiens à remercier toutes les personnes qui ont pris la parole aujourd'hui.
    Je suis au courant de ce que vous avez dit et des besoins que vous avez affirmé être les vôtres. Vous avez confirmé ces besoins. Je tiens à rappeler aux membres du Comité que nous sommes bien informés au sujet du gouvernement fédéral et que, lorsqu'il a des responsabilités qui ont une incidence sur les peuples autochtones, il y a très peu de volonté et très peu d'engagement. C'est dommage.
    En gardant cette situation à l'esprit, nous savons tous que, dans le cadre des objectifs de vérité et de réconciliation, nous devons être plus déterminés à faire en sorte que les langues autochtones ne soient pas perdues, qu'elles soient ravivées. Qu'est‑ce que le gouvernement fédéral peut faire pour nous aider à veiller à ce que nous ne les perdions pas, que nous continuions à les parler, et même pour améliorer la situation, car certaines sont menacées?
    Peut-être que les trois conférenciers invités pourraient nous donner des idées quant à ce que le gouvernement fédéral pourrait faire pour nous soutenir davantage et être plus engagé dans l'atteinte de nos objectifs... en commençant par le chef Denny.
[Traduction]

  (1155)  

    Chef Denny, avez-vous entendu l'interprétation? Êtes-vous prêt à répondre?
    Je suis désolé. Je n'ai pas entendu l'interprétation. Je la cherchais et mon écran a disparu.
    À titre d'information, c'est ce petit globe, en bas, qui s'appelle « interprétation ».
    Oui. Je sais où il se trouve. C'est simplement que mon écran a disparu. C'est un ordinateur Mac, et je ne le connais pas.
    D'accord.
    Sur ce, nous pourrions peut-être passer à Mme Gould.
    Je vous remercie de votre question.
    Il est difficile de ne pas toujours parler d'argent. C'est certainement la chose la plus importante que le gouvernement fédéral puisse faire, c'est‑à‑dire investir des fonds adéquats dans les entreprises des nations qui tentent de rétablir leur langue.
    Lors de mon premier témoignage, en 2018 ou 2019, on m'a demandé combien de langues je pensais que nous pourrions sauver. À ce moment‑là, j'ai dit « toutes », et je n'en ai oublié aucune. En ce qui concerne les investissements d'aujourd'hui, même s'ils sont bien mieux que par le passé, certaines langues sont laissées pour compte. Même avec l'investissement dont nous disposons en Nouvelle-Écosse et que je gère, je ne laisse peut-être pas de langue pour compte — puisque nous parlons une langue —, mais je laisse des communautés pour compte parce que je n'ai pas assez d'argent pour tout le monde. C'est une situation très difficile et injuste.
    Je souhaite que toutes les langues soient traitées avec la même dignité et le même respect: qu'elles comptent et qu'elles soient des langues importantes qui méritent et ont le droit de survivre. Cela correspond à un financement adéquat. C'est la première étape.
    Il y a aussi la propriété et la responsabilité que les nations peuvent assumer. Il s'agit de s'assurer qu'une planification est en place. Nous sommes très favorables à la planification en ce qui concerne les efforts de revitalisation des langues. Nous ne voulons pas reproduire les efforts des autres communautés lorsqu'il se passe des choses là‑bas, mais nous voulons aussi nous assurer que, lorsque l'argent — les rares fonds — arrive, il y a un plan d'action à mettre en œuvre immédiatement… que quelque chose doit être fait et que c'est réaliste et réalisable par les communautés. Nous offrons beaucoup de soutien à cet égard. C'est une responsabilité que les communautés et nous assumons pour nous assurer d'être bien préparés et d'avoir une planification saine et intelligente en place.
    En fin de compte, je pense que c'est ma réponse à votre question.
    Merci.
    M. Guillet voudrait‑il intervenir également?
    Merci beaucoup.
    Madame Idlout, j'apprécie beaucoup vos commentaires. Vous avez raison.
    Il s'agit d'un financement durable et prévisible qui nous permettra de réaliser nos visions. Il est certain que dans nos collectivités, en particulier; nos aînés sont déçus que la langue ne soit pas conservée par nos jeunes, qui utilisent des iPad ou je ne sais quoi. L'anglais domine. Nous insistons, dans le cadre de chacun de nos programmes scolaires, pour que le déné soit parlé afin qu'il puisse être revitalisé, mais il n'y a pas de ressources. Notre financement est absolument essentiel à cette réussite et à cette réalisation.
    Nos élèves dans les écoles de l'extrême-nord, dans les collectivités isolées, ont besoin des mêmes avantages et des mêmes possibilités d'éducation que ceux que les élèves du Sud, partout au pays, tiennent pour acquis. Nos élèves n'ont pas l'occasion de s'en rendre compte. On n'a pas de programmes commerciaux. Il n'existe pratiquement aucun programme technologique. On n'offre pas de cours facultatifs à nos élèves du secondaire. On n'a pas d'activités parascolaires. Les élèves ne peuvent pas compétitionner contre d'autres écoles. Ils ne peuvent pas avoir d'équipes scolaires. C'est l'essence même de la scolarisation. Nous ne pouvons pas le faire, parce que nous n'avons pas le financement nécessaire, mais notre langue est notre priorité absolue. Nous n'avons pas les fonds qu'il nous faut pour aller de l'avant.
    Nous avons établi tous nos programmes et nos résultats, mais comment pouvons-nous y arriver si nous n'avons pas les ressources nécessaires? Nous implorons et supplions pour que l'on nous donne une possibilité et un financement durable, prévisible et indexé, afin que nous puissions aller de l'avant. À l'heure actuelle, dans notre budget demandé, il nous manque 34 000 $ par élève pour offrir un programme d'éducation équitable comparable à celui de nos écoles du Sud. Pourquoi nos enfants fréquentent-ils une école du tiers monde? Ils ne peuvent pas obtenir des programmes qui leur permettront de réaliser leur avenir, quels que soient leurs rêves. C'est notre objectif. Toutes ces démarches sont pour les enfants.

  (1200)  

    Merci, monsieur Guillet.
    Sur ce, je voudrais remercier nos trois témoins de ce matin.
    Chef Denny, madame Gould et monsieur Guillet, je vous remercie de vos témoignages éloquents. Je pense qu'il ne fait aucun doute que tout le monde convient qu'il y a des thèmes communs entre les trois témoins de ce matin, sur la question que nous étudions.
    Vous êtes nos premiers témoins dans le cadre de notre étude sur les langues autochtones. Merci beaucoup de vous être présentés ce matin pour nous donner le coup d'envoi.
    Sur ce, nous allons suspendre brièvement la séance pour nous préparer à accueillir le prochain groupe de témoins.

  (1200)  


  (1205)  

    Je souhaite la bienvenue aux témoins du deuxième groupe: Mme Alexina Kublu, professeure de langue inuktitute, et le grand chef Ron Tremblay du Grand conseil de Wolastoqey.
    Nous allons procéder de la façon suivante: vous disposerez de cinq minutes chacun pour faire une déclaration préliminaire, après quoi nous passerons à la première série de questions.
    Sur ce, si vous êtes prête, madame Kublu, vous avez la parole pour cinq minutes. Allez‑y, s'il vous plaît.
     [La témoin s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᒥᓯᐅᕐ ᒑᕐᓅ, ᐋᒻ, ᐃᒨ ᕼᐊᓘᖅᐸᒋᑦ, she’s our interpreter, ᐋ, ᐃᓛᒃ ᑖᓐᓇᑦᑕᐅᖅ ᐳᐃᓐᑕᓰᔅ ᐃᓱᒪᒋᓪᓗᒍ ᕿᓚᒥᒻᒪᕆᐊᓗᒃ ᐱᕕᑦᓴᖃᓇᓗᐊᓐᖏᒃᓱᓂ ᐱᕕᑦᓴᖅᓯᐅᕆᐊᖃᕐᓇᓚᐅᕐᒪᑦ ᑖᒃᑯᐊᓕ 5-ᒥᓂᑦᔅ 5 minutes ᕿᓚᒥᐅᓂᐊᖅᑐᖅ ᑭᓯᐊᓂ, ᐋ. ᓇᓗᓇᐃᕈᒪᓪᓗᖓ, ᐋ, ᐅᕙᓐᓂᒃ ᐅᖃᐅᓯᕆᓯᒪᒐᓗᐊᖅᓱᖓ, ᐋ, ᐃᓄᒃᑐᑦ ᐃᓕᓴᐃᔨᐅᔪᖓ ᑭᓯᐊᓂ, ᐋ, ᑕᐃᒃᓱᒪᓂ 2004, 2003, 2004ᖑᑎᒡᓗᒍ ᐃᓚᒋᔭᐅᓚᐅᖅᓯᒪᒐᒪ ᖃᓪᓗᓈᑎᑐᑦ ᐅᖃᕐᓂᐊᖅᑕᕋ ministerial task force on aboriginal language.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Merci, monsieur Garneau.
    Je pense que le préavis est très court et que cinq minutes, c'est très court. Compte tenu du temps de parole dont nous disposons, je tiens à vous informer que je vous ai remis ma biographie à l'avance.
    J'enseigne l'inuktitut.
[Traduction]
    À partir de 2003, j'ai participé aux travaux du groupe de travail ministériel sur les langues et les cultures autochtones. J'étais l'une des deux représentants inuits au sein de ce groupe de travail, et j'ai été commissaire aux langues pour le Nunavut, mais, de tout ce que j'ai fait dans ma vie, l'enseignement de l'inuktitut est ce que j'ai le plus fait. Je l'ai enseigné dans toutes les régions inuites du Canada. De plus, je suis allé le faire au Groenland, et j'ai enseigné l'inuktitut à des étudiants de l'Université de Washington, mais je suis de tout cœur avec les Inuits du Nunavut, et j'appuie leur lutte visant à préserver notre langue. Comme vous le savez tous, le Nunavut s'étend sur 4 millions de kilomètres carrés de terres divisées en 24 collectivités et 3 régions, toutes accessibles uniquement par voie aérienne.
    De plus, j'enseigne l'inuktitut aux adultes au collège, mais je siège également au conseil scolaire de district de la collectivité d'Iqaluit, où je vis actuellement. Par conséquent, je vois la langue du point de vue de l'enseignante que j'ai été au primaire et de celui des directeurs d'école qui me racontent comment les choses se passent en ce qui concerne la langue.
    Je suis actuellement professeure de langue inuktitute auprès d'enseignants potentiels au Nunavut. Nous avons deux volets de formation des enseignants. L'un est destiné aux étudiants compétents. L'autre est destiné aux nouveaux locuteurs, c'est‑à‑dire que ces étudiants essaient de perfectionner leurs propres compétences linguistiques personnelles afin de pouvoir un jour enseigner l'inuktitut dans les écoles. Les étudiants compétents maîtrisent déjà la langue. Cependant, comme je suis professeure depuis plus de 40 ans et aussi dans le cadre du programme de formation des enseignants, j'ai remarqué que, même si nos étudiants qui maîtrisent le volet conversation parlent couramment la langue, leur connaissance de celle‑ci n'est pas aussi approfondie que l'était celle des étudiants que nous avions il y a 30 ans.

  (1210)  

    Maintenant, comme je l'ai remarqué, au lieu de travailler auprès de gens qui savent que « c'est ainsi que fonctionne notre langue », j'ai dû expliquer de plus en plus notre langue, et, pourtant, c'est celle que les élèves parlent encore. C'est la langue à la maison et dans la collectivité, mais le niveau a diminué. La compétence des locuteurs de l'inuktitut au Nunavut varie. Il y a des communautés où les jeunes de moins de 30 ans ne connaissent pas un mot d'inuktitut, mais j'étais chez moi, à Igloolik, en août dernier, et les enfants qui jouaient dehors conversaient encore en inuktitut. C'est un très large éventail de compétences.
    J'ai examiné la Loi sur les langues autochtones, et j'aimerais en aborder certaines parties.
    Dans le préambule, au dixième paragraphe, je suis aussi d'avis « qu'il est urgent de soutenir les peuples autochtones dans leurs efforts visant à se réapproprier les langues autochtones et à les revitaliser, les maintenir et les renforcer ». À mes yeux, c'est primordial. Par ailleurs, au quatorzième paragraphe, je vois que le Canada s'est « engagé à octroyer un financement adéquat, stable et à long terme ». J'ai examiné le financement qui est octroyé partout au Canada pour la langue française. Je ne vous donnerai que deux exemples.
    À Terre-Neuve‑et‑Labrador, où il y a des locuteurs inuits — il y a des Inuits au Labrador —, il n'y a pas de financement pour la langue; pourtant, pour la langue française, le gouvernement fédéral verse 350 000 $ par année pour cinq ans, soit 1,75 million de dollars.
    Il y a aussi ce vieil exemple de la Colombie-Britannique: 700 000 $ par année pour le français. Je sais que, lorsque je faisais partie du groupe de travail, on dénombrait 60 langues des Premières Nations au Canada; la langue inuite est l'une de ces langues et, par conséquent, toutes les autres sont celles des Métis et des Premières Nations. De ce nombre, 50 langues sont parlées en Colombie-Britannique, et, même si une somme de 700 000 $ par année est versée pour la langue française, et chaque langue parlée en Colombie-Britannique est distincte, elles ne reçoivent pas ce genre de financement. Le quatorzième paragraphe du préambule est aussi très important à mes yeux.
    Je passe maintenant à la page 5…
    Merci, madame Kublu.
    Madame Kublu, nous devons malheureusement respecter notre horaire en raison des questions. Vous pourrez peut-être soulever certains de ces points lorsqu'on vous posera des questions à leur sujet. Je vous remercie pour votre déclaration préliminaire.
    Nous passons maintenant au grand chef Ron Tremblay.
    Vous disposez de cinq minutes pour faire votre déclaration préliminaire. Allez‑y, grand chef.

  (1215)  

    Qey, Woliwon, ntoliwis nil Wespasahtuwet Possesom Etolaqosit naka Kahkakuhsuwakutom naka Malsomuwakutom. Nuceyaw nil Wolastokuk.
    [Les propos en wolastoqey sont traduits ainsi:]
    Bonjour, merci, je m'appelle Morning Star Burning et je suis du clan de la Corneille et du clan du Loup. Je viens du territoire de Wolastoqey.
[Traduction]
    Salutations. Mon nom traditionnel est Morning Star Burning, et je représente, du côté de ma mère, le clan de la Corneille et, du côté de mon père, le clan du Loup. Je viens de la patrie que l'on appelle le Wolastoqey. Nous sommes le peuple de la belle et abondante rivière.
    Je reviens tout juste d'une cérémonie mite, tenue ici, à Winnipeg. Je suis arrivé par avion il y a un jour et demi. Le sénateur Murray Sinclair participe à nos belles cérémonies. Il a parlé hier, à la fin de notre séance, de l'importance de la langue pour tous les peuples autochtones et du fait qu'elle nous relie profondément à notre identité et à notre relation avec la terre, les eaux et toute la faune et la flore. De plus, il a dit qu'elle fait ressortir nos responsabilités, en tant que nation et peuple... en tant que citoyens de nos nations.
    J'ai eu 62 ans il y a une semaine. Je suis probablement l'un des plus jeunes qui parle couramment notre langue wolastoqey. Malheureusement, les gens moins âgés que moi peuvent peut-être comprendre ce que nous disons, mais les plus jeunes ne parlent pas notre langue. Ils ne maîtrisent pas du tout le wolastoqey.
    Quand je suis né, en 1960, on pouvait se promener dans ma communauté de Neqotkuk, qui s'appelle Tobique, et c'est tout ce qu'on entendait, notre belle langue wolastoqey. À cause du catholicisme et du système scolaire provincial, en deux décennies, notre langue a connu un déclin rapide. Il est dommage que notre langue soit au bord de l'extinction. Notre nation compte environ 10 000 citoyens, mais il ne reste plus que 100 locuteurs. J'ai cinq sœurs et quatre frères. Heureusement, nous avons grandi dans un foyer où nos parents et nos grands-parents parlaient couramment le wolastoqey, alors nous le parlons tous couramment, mais nous faisons partie des rares personnes qui peuvent encore parler notre langue. Nous sommes actuellement dans une situation très difficile.
    Sur une note positive, en septembre dernier, nous avons lancé un programme d'immersion à l'extérieur de la ville de Fredericton. Il a été lancé par Lisa Perley-Dutcher, une de mes cousines germaines. Nous avons six élèves qui y participent. J'y vais une fois par semaine pour aider et guider les enseignants dans notre langue, mais nous manquons de financement de la part des gouvernements provincial et fédéral. Nous avons présenté diverses propositions, mais très peu ont été approuvées. Nous sommes très chanceux que la mairesse et le conseil municipal de Fredericton nous aient fait don d'un immeuble où enseigner la langue. Nous menons un processus d'enseignement sur le territoire.
    Il y a environ quatre ans, j'ai eu la chance de rendre visite à nos frères et à nos sœurs maoris en Nouvelle-Zélande. J'ai été tellement étonnée et étonnée de constater qu'un programme d'immersion maorie était offert dans chacune de leurs communautés. Le gouvernement de la Nouvelle-Zélande leur accordait pleinement son soutien, parce qu'il y a plus de 35 ans, il ne restait plus que cinq locuteurs dans leur langue. Grâce au travail acharné de ces cinq grands-mères et au soutien du gouvernement de la Nouvelle-Zélande, les Maoris ont plus de... Je crois que 75 % d'entre eux parlent couramment leur belle langue maorie.

  (1220)  

    Nous sommes dans une situation désespérée sur la côte Est. Au Nouveau-Brunswick, la langue wolastoqey est en train de disparaître. Nous avons besoin de financement et de soutien, surtout au moyen des programmes d'immersion. Une aînée, Christine Saulis, a enseigné pendant plus de 40 ans au sein du système scolaire provincial dans le cadre d'un programme de base wolastoqey. À l'approche de sa mort, je me souviens d'avoir parlé à Christine. Elle était si belle, si gentille. Elle m'a dit: « Ronnie, pendant toutes les années où j'ai enseigné, je n'ai jamais produit un seul locuteur parlant couramment la langue, parce que ces petits programmes de langues de base, de 20 à 30 minutes par jour, ne fonctionnent pas. Nous avons besoin de programmes d'immersion. »
    Je propose que le gouvernement fédéral injecte de l'argent et des fonds pour soutenir les programmes d'immersion dans nos communautés, ainsi que dans toutes nos nations.
    Je termine là‑dessus. Merci.
    Merci, chef Tremblay.
    Nous allons maintenant passer à notre première série de questions, de six minutes.
    Je crois que la parole est à M. Vidal, encore une fois, mais corrigez-moi si je me trompe.
    Monsieur le président, elle est à M. Zimmer.
    Le président: Allez‑y, monsieur Zimmer.
    M. Bob Zimmer: Merci.
    Je vous remercie tous les deux de vos commentaires. Mes questions s'adresseront surtout à Mme Kublu.
    J'aime vraiment ce que vous venez de dire, monsieur Tremblay, au sujet des résultats, parce que c'est la base de la question que je vais poser à Mme Kublu.
    Je suis un ancien enseignant, et je pense que ce que nous considérons comme un succès, c'est lorsque nous avons des élèves qui réussissent à atteindre l'objectif d'apprentissage que nous avions fixé au début de l'année. Cela fait partie de la joie d'enseigner, mais c'est aussi en partie ce que le cours est censé faire.
    Monsieur Tremblay, ce qui me préoccupe, c'est que je vous ai entendu dire que, s'il ne s'agit pas d'une immersion complète, les taux de réussite sont peu élevés. Vous n'avez vu qu'un seul élève — et je ne veux pas vous faire dire ce que vous n'avez pas dit — qui a appris la langue ou qui a réussi.
    Je vais peut-être poser la question à Mme Kublu. Nous parlons de programmes comme celui‑là. Ce n'est pas qu'une question de finances. Ce n'est pas seulement une question d'argent. Il s'agit en fait de voir ces enfants et ces élèves... et ce ne sont pas seulement des enfants. Il peut s'agir d'adultes qui viennent de commencer à apprendre leur langue. C'est une grande joie.
    Madame Kublu, quelle serait la meilleure façon de réaliser notre rêve de permettre aux Autochtones et aux Inuits d'apprendre leur langue et de la transmettre? Que devons-nous faire pour que ce rêve se concrétise et que le taux de réussite soit le plus élevé possible?
    Madame Kublu, votre micro est en sourdine.
    Il est maintenant activé. Cela m'arrive aussi lorsque je donne des cours.
    Traditionnellement, chez les Inuits — et je pense que c'est aussi le cas chez d'autres peuples —, le savoir se transmet par la pratique. On apprend par l'observation et la pratique, et non en s'asseyant dans une salle de classe et en écoutant quelqu'un qui parle, parle et parle. Cela se déroule principalement pendant l'été, étant donné qu'il fait très froid en hiver ici. Les gens se déplacent sur le territoire, loin de la communauté, et ils se concentrent sur une compétence, qu'il s'agisse de la façon de fabriquer un qamutiik ou un harpon, ou de coudre et de travailler la peau de phoque. Il s'agit de revivre la culture inuite en utilisant l'inuktitut.
    Je sais qu'ici, les élèves du secondaire et aussi ceux du primaire vont parcourir le territoire en compagnie de chasseurs et de gens qui savent ce qu'ils font, ce qui leur permet de sortir de la salle de classe avec quelqu'un qui leur parle en inuktitut et d'assimiler la langue en même temps qu'ils l'expérimentent.
    Nous passons aussi du temps en classe. J'ai le regret de dire que nos salles de classe ne sont pas dotées de beau matériel didactique prêt à utiliser. J'ai été…

  (1225)  

    Madame Kublu, je suis désolé. Je dois vous interrompre. Je sais que nous n'avons pas beaucoup de temps, mais c'est à cela que j'allais en venir.
    Nous parlons de langues. Comment les mettre en œuvre pour qu'elles fonctionnent vraiment? Nous voulons tous que les Inuits conservent leur langue et leurs traditions. Cependant, d'un point de vue fédéral, est‑ce que la structure dont dispose le gouvernement actuel a donné de bons résultats à ce jour?
    Si vous aviez à lui donniez des conseils — et je suppose que vous en arrivez à la partie concernant les programmes d'études —, que feriez-vous pour en améliorer la structure, en tant qu'enseignante? Que feriez-vous pour en améliorer la structure, de façon à accroître le taux de réussite à l'issue du programme? Il s'agit non seulement d'injecter de l'argent ici et d'investir beaucoup d'argent là, mais aussi de mettre en place un programme que les étudiants mènent à bonne fin et qui leur procure une bonne connaissance de votre langue.
    Vous pourriez peut-être expliquer cela. Je suis certain que, en tant qu'enseignante, vous pourriez élaborer un plan qui permettrait de réaliser cela. Parlez-nous de cela.
    À l'heure actuelle, dans le cadre du programme de formation des enseignants, les formateurs doivent parler l'inuktitut aux élèves. Il ne s'agit pas seulement de l'entendre; nous enseignons en inuktitut.
    C'est comme une immersion.
    Il ne s'agit pas seulement d'avoir une matière. L'inuktitut ne doit pas seulement être une matière, comme c'est malheureusement le cas dans les écoles après la quatrième année. L'inuktitut n'est plus une langue d'enseignement, mais une matière, et toutes les autres matières sont enseignées en anglais.
    Dans le cadre du programme de formation des enseignants, nous essayons d'enseigner les matières en inuktitut.
    Merci.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Kublu.
    Nous passons maintenant à Mme Atwin, pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être des nôtres aujourd'hui.
    La plupart de mes questions s'adressent à M. Tremblay.
    Woli-nipayiw. Kulahsihkulpon. Bienvenue à la séance d'aujourd'hui.
    Je m'adresse à vous depuis le territoire non cédé et non abandonné des Wolastoqiyik, à Fredericton.
    Il est très important pour moi que vous soyez parmi nous aujourd'hui pour parler ouvertement et pour participer avec le gouvernement à bon nombre des conversations que nous avons autour de la table. Je sais à quel point l'immersion est importante, en particulier. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus au sujet de la nouvelle initiative en matière d'immersion qui a été lancée ici, dans notre région, et plus précisément du rôle que jouent les grands-mères et les grands-pères dans la transmission de la langue. De plus, quels sont les défis liés à la mobilisation des jeunes? Nous savons qu'il existe un fossé.
     Merci. Wela'lin.
    L'ensemble du processus de préparation de l'école de Kehkimin en septembre dernier a été une tâche énorme parce que beaucoup de gens qui ont participé à la mise sur pied de l'école n'ont jamais enseigné dans un contexte comme celui‑là. Il y avait un manque de préparation et d'information en ce qui concerne la formation des enseignants chargés d'enseigner la langue. Nous avons eu environ un mois pour préparer l'école et présenter le programme aux enseignants. Tout s'est déroulé très rapidement, et à l'arrivée des élèves de la prématernelle, les enseignants n'avaient pas eu la chance de recevoir une formation adéquate.
    Il n'y a pas suffisamment de financement pour la formation ni pour l'élaboration des programmes d'études. Nous avons travaillé pratiquement jour et nuit pour que le programme soit prêt pour les enseignants, et, même si nous avons créé beaucoup de ressources pour eux, ils ont manqué de temps avant l'arrivée des enfants.
    Nous avons connu une période d'apprentissage. Nous avons commencé en septembre, nous sommes maintenant en décembre et ce n'est qu'au cours des dernières semaines que les enseignants ont vraiment pu prendre le temps de passer en revue les ressources pédagogiques qui leur avaient été fournies.
    Et puis, le fait de trouver des aînés et des conférenciers pour les aider à examiner le programme a été une tâche difficile parce qu'il n'y a que quelques conférenciers dans la région qui peuvent faire cela.
    Nous essayons de mettre l'accent sur les enseignements liés au territoire. Comme nous sommes situés près d'une ville, nous aimerions beaucoup que la région dispose d'une école d'immersion dans les bois, près de l'eau. Le lac Killarney est tout près, mais il y a quand même beaucoup de trafic. Des gens viennent marcher dans le parc et autour du lac, donc ce n'est pas un lieu complètement à l'écart et isolé du public.
    Ce sont là les défis que nous devons relever: trouver du financement pour former adéquatement les enseignants et leur donner suffisamment de temps pour passer en revue tous les programmes que nous avons créés pour eux. Remarquez que cela est un succès jusqu'à maintenant. Nous espérons passer de la prématernelle à la maternelle l'an prochain, et progresser ainsi chaque année, idéalement jusqu'à la quatrième année, mais, là encore, les places seront limitées parce que nous avons besoin d'un plus grand bâtiment pour accueillir ces classes.
    Voilà les difficultés: le manque de financement et le manque d'espace. Une grande partie de l'argent, du financement et des subventions que nous recevons ne sert pas à financer l'infrastructure, les immeubles ou les rénovations. Cet argent sert surtout à payer les enseignants et quelques ressources, etc.
    Cela a été un défi, mais nous avons eu du succès avec ces magnifiques jeunes enfants. Lorsque j'entre dans l'école, je m'adresse à eux dans la langue et ils me répondent dans la langue en parlant du temps qu'il fait ou de ce qu'ils font ce jour‑là.
    Nous espérons obtenir une aide financière du gouvernement dans l'avenir.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à la question.

  (1230)  

    C'est très bien.
    Vous avez parlé de ressources, et je sais qu'au cours de votre longue carrière en éducation et en tant que défenseur de la langue, vous avez travaillé sur un certain nombre d'applications et de sites Web. Pouvez-vous nous parler de la technologie? Est‑ce que cela fonctionne? Est‑ce suffisant pour attirer l'attention des jeunes de la nouvelle génération? Y a‑t‑il des réussites? S'agit‑il d'une pratique exemplaire que nous devrions utiliser dans l'avenir?
    Eh bien, ayant assisté ici à la cérémonie mite, j'ai eu l'occasion d'entendre hier des conférenciers parler de la langue. Une grande préoccupation concernait le temps que nos jeunes consacrent à l'utilisation d'appareils mobiles, qu'il s'agisse de téléphones ou d'ordinateurs. Ce qui a été dit, c'est que, pour apprendre une langue, il faut aller sur la terre et se salir les mains. Il faut établir un lien avec nos terres et nos cours d'eau. Ce sont eux, nos enseignants. Notre langue est née de la terre, et non d'un ordinateur ou d'une salle de classe. Nous avons besoin d'un soutien technique ou d'un programme technique pour aider les enseignants, ou même les familles à la maison, de cette façon, mais je pense que les vrais enseignements proviennent de la terre.
    Pour ce qui est de nous renvoyer la responsabilité d'opérer ce retour à la terre, cet automne, nous sommes allés dépecer un chevreuil et tanner sa peau. Les petits ont raclé et se sont sali les mains. Ils ont adoré chaque instant du processus de tannage d'une peau de chevreuil en vue de fabriquer des vêtements ou des tambours. J'ai intégré la langue dans l'activité. Cela a été un extraordinaire événement de trois jours pour eux.

  (1235)  

    Merci beaucoup, chef et madame Atwin.

[Français]

    Je cède maintenant la parole à Mme Gill pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie Mme Kublu et le chef Tremblay de leur présence à cette réunion du Comité. J'ai trouvé intéressant ce qu'ils ont dit sur la question du territoire.
    D'abord, j'aurais dû commencer par vous souhaiter une bonne Décennie internationale des langues autochtones.
    Le but du Comité est bien sûr d'examiner de quelle façon le gouvernement peut soutenir la revitalisation des langues. Malgré l'adoption en 2019 du projet de loi C‑91 sur les langues autochtones, le temps continue de s'écouler. En à peine 30 ans, Mme Kublu a vu diminuer les connaissances de l'inuktitut, et même le nombre de locuteurs de cette langue. Théoriquement, la mise en œuvre du projet de loi doit se faire sur cinq ans, mais il faut aussi que des mesures soient prises. Même M. Tremblay a dit qu'il n'y avait presque plus personne de moins de 60 ans qui parlait sa langue, alors sa revitalisation doit passer par des initiatives de la communauté. On voit donc à quel point il est important, même si une loi a été adoptée en 2019, de prendre dès maintenant des mesures assez importantes. Mme Kublu et le chef Tremblay ont parlé de façon directe ou indirecte d'immersion.
    Je reviens sur la question du territoire. Chez moi, sur la Côte‑Nord, on retrouve la Première Nation des Innus, dont la langue est très vivante. J'ai lu le dictionnaire innu-français et j'ai pu constater que les termes sont grandement en lien avec le territoire et avec les pratiques sur le territoire. Je comprends donc très bien l'importance de la langue.
    J'ai maintenant deux questions à poser à chacun de vous. Vous pourrez préciser votre pensée comme vous le souhaitez.
    Pensez-vous que, depuis 2015, sinon depuis l'adoption de la Loi sur les langues autochtones en 2019, le gouvernement a donné un coup de barre afin de soutenir financièrement les langues autochtones?
    Commençons par cette première question. Je vous poserai par la suite ma deuxième question.
    Votre question s'adresse-t-elle à quelqu'un en particulier?
    J'aimerais que Mme Kublu y réponde, puis M. Tremblay, si c'est possible.

[Traduction]

    Madame Kublu, vous voulez peut-être répondre à cette première question. Nous passerons ensuite au chef Tremblay.
    Il y a des moments où nous avons l'impression que le gouvernement fédéral est très loin de nous. L'information ne nous parvient pas très rapidement. Nous n'avons pas vu beaucoup de changements pendant cette période, malheureusement.

  (1240)  

    Oui, je suis d'accord. En fait, quelque chose de triste s'est produit dans les quatre derniers mois: dans ma seule collectivité de Neqotkuk, nous avons perdu six locuteurs au cours de cette très courte période. Au fil des mois et des années, nous allons perdre de plus en plus de locuteurs et de gardiens du savoir de notre langue.
    Depuis 2015, je crois que le gouvernement fédéral a financé des programmes de base, comme je l'ai dit, au sein des écoles de bande ou des écoles provinciales. Cependant, nous savons tous que les programmes de base ne fonctionnent pas. Ils ne permettent pas d'acquérir une maîtrise de nos langues. C'est l'équivalent d'un pansement sur une plaie ouverte.

[Français]

    Je vous remercie, madame Kublu et chef Tremblay.
    Je vous pose maintenant ma deuxième question.
    J'ai l'impression qu'il y a certainement des programmes qui demeurent intéressants pour des initiatives ciblées et à court terme. Cependant, ce qu'on avait demandé dans le cadre de la Loi, c'était qu'il y ait du financement prévisible, à long terme et adéquat.
    Selon ce que vous dites, cela prend vraiment quelque chose de massif. Comme l'a dit une témoin un peu plus tôt, il faut que quelque chose soit fait de façon intensive, c'est-à-dire rapide, et que cela réponde aux besoins.
    Êtes-vous d'accord sur cela? Pensez-vous que les communautés sont prêtes?
    Chef Tremblay, vous avez mentionné les Maoris. Je pense que c'est une belle leçon d'espoir qui montre que c'est possible d'y arriver.
    Je vous laisse conclure là-dessus. J'aimerais entendre d'abord votre réponse, madame Kublu, et ensuite la vôtre, chef Tremblay.

[Traduction]

    Qujannamiik.
    La place de la langue n'est pas uniquement dans les écoles ni uniquement sur la terre. Elle a sa place partout.
    Une personne de mon âge — j'ai presque 70 ans — a fait beaucoup de choses dans sa vie. J'ai notamment été juge de paix. Nous avons beaucoup de chance au Nunavut, car nos tribunaux fonctionnent en inuktitut. Le juge de paix s'exprime en inuktitut, directement ou par l'entremise d'un interprète. Malheureusement, je ne pense pas que ce soit le cas partout au Canada.
    De plus, le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest ont des langues officielles. Leurs lois sur les langues officielles reconnaissent la langue des premiers habitants de la région. Nous disposons non seulement de la Loi sur les langues officielles du Nunavut — qui englobe le français, l'anglais et l'inuktitut, en mettant l'accent sur les deux dialectes variés de l'inuktitut et de l'inuinnaqtun —, mais aussi de la Loi sur la protection de la langue inuite, parce que la Loi sur les langues officielles est axée sur le gouvernement, qu'il s'agisse d'une administration fédérale, territoriale ou administration municipale. Pour assurer la survie de la langue, le Nunavut dispose de la Loi sur la protection de la langue inuite, qui s'applique également au secteur privé.
    La protection de la langue doit aller au‑delà de ce qui se fait dans les écoles. Elle doit être intégrée à la vie quotidienne.

[Français]

    Merci, madame Gill.
    Je cède maintenant la parole à Mme Idlout pour six minutes.

[Traduction]

     [La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᐋ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᐃᒃᓯᕙᐅᑕᓖᒃ, ᐊᖕᒪᓗ, ᐋ, ᐃᓘᓐᓇᓯ ᖁᔭᓕᒻᒪᕆᒃᐸᒃᓯ, ᐋ, ᑐᓴᕐᓂᖅᑐᓂᒃ ᐅᖃᓪᓚᑦᑐᐃᓐ-ᓇᐅᓵᕋᑦᓯ, ᑕᒪᓐᓇ, ᐋ, ᓄᓇᖃᖅᑳᖅᓯᒪᔪᖅᑎᒍᑦ ᐅᖃᐅᓯᖅᐳᑦ ᐊᓐᓂᕐᓇᕐᒪᑦ ᐊᓐᓂᕐᓇᕐᓚᑦᑖᕐᒪᑕ, ᐋᒻ, ᐅᐃᕖᑎᑐᑦ, ᐃᓛᒃ ᓯᕗᓪᓕᕐᒥᖃᐃ, ᐅᐃᕖᑎᑐᑦ ᐅᖃᓪᓚᓲᓂᒃ ᐱᐅᒃᓴᖏᑦᑑᖏᑦᑐᖓ, ᐱᐅᒃᓴᖅᑕᐃ-ᓕᑎᑦᓯᒐᓱᓐᖏᑦᑐᖓ, ᑐᓱᒋᔭᒃᑲ ᒫᓐᓇᐅᔪᖅ, ᐋ, ᓲᖃᐃᒻᒪᑦ ᑲᓇᑕᓕᒫᕐᒥᒃ ᑖᒃᑯᐊ ᐅᖃᐅᓯᐅᒻᒪᑕ ᐅᐃᕖᑎᑐᑦ ᖃᓪᓗᓈᑎᑐᑦ, ᐃᓘᓐᓇᓯ ᐊᐱᕆᕙᑦᓯ ᐅᓇᓕᖃᐃ ᓄᓇᖃᖅᑳᖅᓯᒪᔪᖅᑎᒍᑦ ᑲᓇᑕᓕᒪᕐᒥ ᐅᖃᐅᓯᖅᐳᑦ ᑕᐃᒫᑎᒋ ᐃᓕᑕᕆᔭᐅᕆᐊᖃᕋᓗᐊᖅ-ᑐᒡᓕᖃᐃᑦ, ᐊᓕᒃᓰᓇ ᓯᕗᒡᓕᐅᓗᑎᑦ ᐱᖃᑖ ᑖᓐᓇ ᑭᐅᔪᓐᓇᖅᓱᓂ ᐊᒻᒪᓗ ᐋᓕᒃᓰᓈ ᐃᓄᒃᑎᑐᑦ ᑭᐅᔪᒪᒍᕕᑦ, ᐋ, ᖃᓪᓗᓈᑎᑑᓕᖅᑎᑕᐅᔪᓐᓇᕐᒥᒻᒪᑦ ᐃᓱᒪᖅᓱᖅᐳᑎᑦ.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Merci, monsieur le président.
    Tous ceux qui s'adressent à nous aujourd'hui ont confirmé beaucoup de nos préoccupations — mes propres préoccupations — au sujet des peuples autochtones et de notre langue. Elle est très précieuse à nos yeux, et nous ne voulons pas la perdre.
    Par exemple, pour ceux qui parlent français, je ne fais pas de discrimination. Je les envie, car leur langue est protégée et reconnue. C'est une langue officielle au Canada. Le français et l'anglais sont des langues officielles au Canada. Je vous envie.
    J'aimerais que chacun des intervenants présents nous dise si nos langues autochtones devraient être des langues officielles partout au Canada.
    Nous entendrons d'abord Mme Kublu, et ensuite l'autre intervenant. Vous avez le droit de parler l'inuktitut, vos propos seront traduits par un interprète.
[Traduction]

  (1245)  

    Madame Kublu, votre micro est en sourdine.
    Et voilà, encore une fois.
     [La témoin s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᒪᒥᐊᓇᖅ, ᐄ, ᐋᒻ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ ᓗᐊᕆ, ᑖᓐᓇ ᐅᖃᐅᓯᕆᓚᐅᖅᓯᒪᒐᑦᑎᒍᑦ ᒥᓂᔅᑎᐅᕆᐅᓪ ᑖᒃᔅᐳᐊᕐᒦᒃᓱᑕ ministerial task force ᐃᓕᓴᕆ-ᔭᐅᓯᒪᓪᓚᕆᒃᐸᑕ ᑭᓯᐊᓂ ᑕᒪᐃᓐᓇ ᐊᕕᑦᑐᖅᓯᒪᔪᓂ ᐃᑲᔪᖅᑕᐅᓂᖅᓴᐅᔪᓐᓇᕋᔭᖅᑐᒍᑦ ᑖᓐᓇ ᒪᓕᒐᕐᒦᑦᑐᖅ ᐊᑐᓃᖓᓪᓚᕆᓪᓗᓂᐅᔭᕆᐊᖃᕋᔭᖅᑐᖅ ᑕᒪᐃᓐᓂ ᐊᕕᑦᑐᖅᓯᒪᔪᓂᒃ ᐃᓛᒃᑯᑦ ᐅᖃᐅᓯᖃᕋᑦᑕ ᐊᕕᑦᑐᖅ-ᓯᒪᕕᒋᔭᑦᑎᓐᓂ, ᓲᕐᓗ ᐃᒪᐃᓕᖓᓇᔭᓐᖏᑦᑐᑦ ᐅᖃᐅᓰᑦ ᐃᓕᓴᕆᔭᐅᓯᒪᔪᑦ ᓄᓇᖃᖅᑳᖅᑐᑦ ᐊᓪᓚᖓᔪᑦ ᐃᓄᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᑎᒋᒎᖓᓂᐊᖅᐳᑦ, ᐃᒪᐃᓕᖓᓇᔭᖅᐳᖅ, ᓄᓇᕗᒻᒥ ᐃᓄᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ ᐃᓕᓴᕆᔭᐅᓯᒪᓂᐊᖅᐳᖅ, ᓄᓇᑦᓯᐊᕐᒥ ᐃᓄᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᑎᓃ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᓯᑏᕖ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᐃᓄᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᐃᓄᕕᐊᓗᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᐃᓄᐃᓐᓇᐃᑦ, ᑖᒃᑯᐊᓕᒫᑦ ᓇᓗᓇᐃᖅᑕᐅᓯᒪᓗᑎᑦ, ᓲᕐᓗ ᓛᐸᑐᐊᕐᒥ ᐃᓄᐃᑦ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᐃᓅ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᐃᓅᔫ ᐅᖃᐅᓯᖓᑦ, ᑕᒪᕐᒥᒃ ᐅᖃᐅᓯᖃᖅᑐᖅ ᑕᒡᕙᓂ ᐊᑐᓂ ᑎᑎᕋᖅᑕᐅᓯᒪᓗᑎᒃ ᐱᑕᖃᓪᒪᕆᓐᓂᐊᕐᒪᑕ ᑲᑎᓐᖓᔪᐊᓗᑐᐃᓐ-ᓇᐅᖏᑦᓱᑎᒃ ᐊᑐᓃᖓᓗᑎᒃ, ᑕᐃᒪᓐᓇ ᐃᓕᑕᕆᔭᐅ-ᓯᒪᓂᖃᖅᑕᖃᖅᐸᑦ ᐅᖅᐱᕐᓇᕋᔭᖅᑐᖅ ᐅᖃᐅᓯᖅ-ᓯᐅᓇ ᐃᓕᓴᕆᒍᒪᔭᕗᑦ ᐊᓐᓂᕐᓇᕐᓂᖓᓂᒃ ᑲᔪᓯᑎᓐᓇᓱᓐᓂᕆᔭᑦᑎᓐᓂᒃ.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Excusez-moi. Merci, Lori.
    Nous avons mentionné à maintes reprises au groupe de travail ministériel que, si vous prenez au sérieux la protection des langues autochtones, les provinces doivent aider les gens de leur territoire à protéger les langues. Je crois que les gouvernements provinciaux doivent assumer la responsabilité de soutenir et de protéger leurs gens et leurs langues.
    Toutes les langues autochtones au Canada devraient être reconnues comme langues officielles. La langue inuite est officiellement reconnue en inuinnaqtun, en déné et en inuvialuktun, de même qu'en gwich'in. Il s'agit de recenser les langues autochtones parlées dans chaque province et chaque territoire et de les reconnaître officiellement comme langues officielles pour qu'elles soient protégées. Il ne faut pas regrouper les langues autochtones et les reconnaître en bloc. Il y a des langues à protéger dans chaque territoire et chaque province.
    Vous devez réaffirmer que vous reconnaissez l'importance de la protection des langues autochtones, et que vous voulez veiller à les préserver et à continuer de les soutenir.
[Traduction]
    [La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᐊᓕᒃᓰᓈ, ᐅᓇ, ᐋ, ᐅᓂᒃᑳᕆᐊᖅᑐᖃᑕᐅᔪᖅ ᑭᐅᖃᑕᐅᔪᓐᓇᕈᓂ ᕌᓐ ᑐᕌᒻᐸᓚᐃ.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Merci, madame Kublu.
    J'aimerais que Ron Tremblay réponde également à la question.
[Traduction]
    Woliwon. Merci beaucoup.
    Oui, je crois vraiment qu'il est très important que toutes les langues autochtones soient des langues officielles. Chez nous, au Nouveau-Brunswick, nous nous démenons même pour le rétablissement des noms originaux de nos rivières. La rivière qui traverse notre territoire s'appelle « rivière Saint-Jean ». Je n'ai jamais rencontré ce monsieur, mais nous avons toujours connu cette rivière sous le nom de « rivière Wolastoq », qui définit clairement qui nous sommes. Nous sommes le peuple de cette belle et riche rivière, alors c'est notre responsabilité.
    Nous avons de la difficulté avec le gouvernement provincial actuel, qui nous met des bâtons dans les roues alors que nous ne faisons que nous réapproprier le nom de notre patrie. C'est vraiment décourageant de se heurter à des obstacles érigés par le gouvernement, qui ne respecte pas les appels à l'action lancés par la Commission de vérité et réconciliation en ce qui concerne la réappropriation de nos noms et le fait d'honorer nos langues.
    Nous devons mener une lutte de tous les instants, même pour faire quelque chose d'aussi simple que de redonner son beau nom à la rivière. Nos langues sont les premières langues des terres d'où nous venons, et lorsque nous faisons une cérémonie, nos terres, nos cours d'eau, les arbres et tous les animaux comprennent ce que nous disons.
    Merci.

  (1250)  

    Merci, madame Idlout.
    Chers collègues, nous avons très peu de temps, mais nous pourrions faire un deuxième tour très court. J'entends par là une question de la part de chacun des quatre partis qui souhaite en poser une, sans long préambule. Si cela vous intéresse, je céderai d'abord la parole aux conservateurs.
    Monsieur Zimmer, allez‑y, si vous avez une question.
    Bien sûr. Je m'adresse de nouveau rapidement à Mme Kublu. Vous avez dit que vous avez parfois l'impression qu'Ottawa ou le gouvernement est loin de vous. Un article paru dans le Nunatsiaq News parlait des modifications apportées à la loi originale. Je traduis librement: « Le comité a tenté d'ajouter de nombreux amendements à la Loi sur les langues autochtones du gouvernement libéral, en grande partie à l'instigation de dirigeants inuits, mais le gouvernement fédéral a rejeté la plupart de ces amendements. » On a dit que cela avait été perçu comme un « geste symbolique » par NTI et d'autres.
    Cet article date de 2019. Vous avez déjà dit que la situation ne semblait pas s'être améliorée. Est‑ce qu'elle s'est améliorée? Que faut‑il faire pour l'améliorer?
     Il y a eu certains changements, mais surtout à l'échelon local. Nous avons maintenant une chaîne de télévision en langue inuite, mais c'est une initiative de Zach Kunuk, le cinéaste d'Atanarjuat, tourné entièrement en inuktitut. Nous avons aussi un ancien enseignant qui donne des cours sur le territoire et…
    Est‑ce Robert Watt?
    Non, c'est Leena Evic, au Nunavut.
    Ce que j'espère, madame Kublu, c'est que, pour assurer le succès du programme, on consulte des gens comme vous, plus particulièrement des enseignants et des Inuits, qui savent vraiment ce qui doit être fait. Vous avez parlé d'un programme d'immersion. Ma fille a suivi un programme d'immersion en français, et elle a assimilé cette langue. Elle peut la parler et la comprendre très bien grâce à cela. J'espère qu'on écoutera vraiment les gens qui, comme vous, sont sur le terrain, pour savoir comment faire fonctionner le programme. C'est bien beau de fournir des ressources au programme, mais je pense que l'essentiel, c'est de fournir des ressources à un programme qui fonctionnera, et j'espère que notre réunion et votre témoignage d'aujourd'hui feront en sorte que cela se produise.
    Merci, madame Kublu.
    Merci, monsieur Zimmer.
    Nous allons passer à Mme Atwin ou à M. McLeod. Je ne sais pas lequel des deux.
    Allez‑y, madame Atwin.
    Merci, monsieur le président.
    Nous parlons beaucoup des appels à l'action, de vérité et de réconciliation, ainsi que des répercussions intergénérationnelles des pensionnats et des externats. Grand chef Tremblay, je me demande si vous pourriez parler encore une fois des efforts coordonnés que nous devons déployer à ce moment‑ci pour rendre ce qui a été pris. Pourriez-vous nous en parler?
    Merci.
    Certainement. J'ai eu des discussions avec quelques-uns de mes frères et sœurs, qui ont tous été impliqués dans la conception de programmes d'études ou dans l'enseignement au fil des ans. Nous avons toujours parlé de cela. Ce dont nous avons besoin, c'est d'un comité de locuteurs qui nous aiderait à créer plus de programmes d'études, ainsi que d'idées sur ce qu'il faut faire pour préserver notre langue. Beaucoup d'argent a été gaspillé dans les programmes de base. Comme je l'ai déjà dit, nous savons que cela ne fonctionne pas.
    Ce qui est vraiment nécessaire, c'est qu'une partie de nos gens s'installent et parlent la langue, afin que nous puissions commencer à les enregistrer, peu importe qu'ils fabriquent des paniers ou qu'ils fassent de la sculpture, de la couture ou du perlage. Il faut documenter cela et utiliser ce matériel comme ressource parce que, comme je l'ai dit, nous avons perdu beaucoup de nos conférenciers au cours des derniers mois et des dernières années. Nous avions besoin de cela il y a des années.
    C'est un processus très lent. Je ne rejette pas la faute sur un parti fédéral ou provincial en particulier. Nous en parlons depuis des décennies et c'est un processus très lent. Il faut agir maintenant.

  (1255)  

    Merci, madame Atwin.

[Français]

    Madame Gill, si vous avez une question, je vous invite à prendre la parole.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai une question sur les actions auxquelles le gouvernement devrait accorder la priorité.
    On a vu qu'il y a, d'un côté, des programmes plutôt ponctuels et des initiatives qui ne règlent évidemment pas tout, mais qui participent à la revitalisation. Devrait-il exister, d'un autre côté, un programme qui fournirait une aide massive et rapide à des communautés dont la langue est vraiment plus en péril que d'autres langues autochtones?
    J'aimerais entendre d'abord la réponse de Mme Kublu et ensuite celle du chef Tremblay.

[Traduction]

    Qujannamiik.
    Oui, je pense qu'il doit y avoir divers niveaux de financement, parce qu'un seul niveau ne couvre pas tout. Ceux où… La revitalisation exige une certaine forme de présentation, tandis que le maintien en exige une autre. On ne peut pas traiter les deux comme une seule et même chose. Il s'agit de choses distinctes. Par conséquent, lorsque du financement est fourni, il doit y avoir diverses façons de gérer la transmission. Ce qui convient le mieux variera selon le cas. Optons pour les meilleures pratiques.
    Allez‑y, chef Tremblay.
    Quelle était la question? J'ai oublié. Je suis désolé.

[Français]

    Chef Tremblay, croyez-vous que le gouvernement devrait accorder la priorité à certaines langues qui risquent plus que d'autres de disparaître, étant donné l'urgence d'agir?
    Certes, il y a déjà des programmes existants et on veut quelque chose de massif et d'intensif. Souhaiteriez-vous aussi qu'il y ait des programmes ou des initiatives d'urgence pour les langues en péril?

[Traduction]

    Oui, assurément. D'abord et avant tout, je pense que nous devons créer un comité composé de personnes qui tiennent vraiment à préserver notre langue et à faire en sorte que les gens la parlent. De cette façon, nous pourrons commencer à produire quelque chose qui prendra davantage la forme d'une immersion sur la façon précise de préserver nos langues et de soutenir une école comme Kehkimin ou notre école d'immersion prématernelle à Fredericton.
    Il faudrait recevoir un financement énorme pour construire un bâtiment, former des enseignants et former un plus grand nombre d'enseignants pour l'avenir, ainsi que du financement pour la conception de programmes d'études et d'équipements centrés sur l'apprentissage axé sur la terre. Comme je l'ai déjà dit, notre langue vient de la terre. Nous devons ramener nos jeunes enfants à la terre.

  (1300)  

    Merci.

[Français]

    Merci, madame Gill.

[Traduction]

    Madame Idlout, si vous avez une question, allez‑y.
     [La députée s'exprime en inuktitut ainsi qu'il suit:]
    ᐋ, ᖁᔭᓐᓇᒦᒃ, ᐃᓘᓐᓇᓯ ᐊᑦᓱᐊᓗᒃ ᑐᓴᕐᓂᕋᑦᓯ, ᐋ, ᐃᑲᔪᖅᓯᕚᓪᓕᑐᒻᒪᕆᐊᓘᒐᑦᓯ ᖁᔭᓕᕙᒌᒍᒪᑐᐃᓐᓇᖅᑐᖓ, ᐋᒻ, ᒪᓕᒐᕐᒥᑦ ᐊᓯᔾᔩᒍᓐᓇᕐᓂᕈᕕᑦ ᐅᖃᐅᓯᓕᕆᓂᐅᑉ ᒥᒃᓵᓄᑦ ᖃᓄᖅ ᐊᓯᔾᔩᓇᔭᖅᐱᓯ, ᐊᓕᒃᓰᓇ ᐱᒋᐊᕈᒪᑐᐊᕈᕕᑦ.
    [Les propos en inuktitut sont interprétés en anglais puis traduits ainsi:]
    Merci.
    Vos exposés étaient fort utiles et intéressants. Ils nous ont permis de mieux comprendre le point de vue local et le point de vue des praticiens.
    Si vous pouviez modifier la Loi sur les langues autochtones, si vous aviez la capacité et le pouvoir de le faire, quels changements apporteriez-vous?
    Madame Kublu, vous pouvez peut-être commencer.
[Traduction]
    Je vais vous envoyer mes griffonnages. J'ai parcouru la loi et j'ai signalé les modifications que j'apporterais ici et là.
    L'une d'entre elles consiste à remplacer partout dans la loi le mot « peut » par le mot « doit ». « Peut », c'est du verbiage. « Doit » signifie que c'est obligatoire.
    Merci.
    Chef Tremblay, vouliez-vous faire un dernier commentaire?
    Bien sûr.
    Malheureusement, je ne connais pas la loi sur les langues, ou je n'ai pas eu l'occasion de la parcourir, mais je suis tout à fait d'accord avec l'intervenante précédente. La langue des colonisateurs est parfois très trompeuse, par exemple les mots comme « peut » ou « devrait », parce que dans nos langues autochtones, un énoncé renvoie à une chose qu'on fait ou qu'on ne fait pas.
    Je suis tout à fait favorable à ce que les langues originales du Canada soient reconnues comme des langues premières, et non comme des langues tierces ou secondes. Nos langues doivent être les langues officielles de nos territoires. Le français et l'anglais doivent être les deux langues secondaires.
    Je défends ardemment nos droits, surtout par l'entremise de nos cérémonies et de nos langues. Comme je l'ai dit au début, le sénateur Murray Sinclair a parlé de façon très éloquente hier soir. Il a dit que ce n'est que par l'entremise de nos langues que nous préserverons notre identité et notre raison d'être sur terre.
    Merci.
    Merci, chef Tremblay.
    Sur ce, je remercie infiniment nos deux témoins de ce matin, soit Mme Alexina Kublu, de la communauté inuite, et le grand chef Ron Tremblay, du Grand conseil de Wolastoqey.
    Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir pris le temps aujourd'hui de répondre à nos questions et de nous avoir présenté vos déclarations préliminaires. Cela nous aidera à déterminer où nous en sommes avec les langues autochtones. À coup sûr, vous-mêmes et les témoins qui vous ont précédés avez dit des choses qui se recoupent quant à ce qui doit être fait. Nous vous en sommes très reconnaissants.
    Sur ce…
    Monsieur le président, il y a un rappel au Règlement.
    Oui, un instant.
    Sur ce, je voulais simplement mettre fin à la séance.
    Qui invoque le Règlement?
    Monsieur Battiste.
    Avant de passer au rappel au Règlement, monsieur Battiste, vous pourriez peut-être m'accorder un instant.
    J'ai entendu beaucoup de choses au sujet du moment où le ministre du Patrimoine et le commissaire aux langues autochtones comparaîtront devant nous. Pour ceux qui se posent la question, ce sera à la fin de janvier. Ils n'ont pas pu venir cette semaine.
    En ce qui concerne cette semaine, comme c'est le cas chaque année, il y a de l'incertitude quant à savoir où nous en serons jeudi à l'approche de la fin de la session d'automne. Pour cette raison, nous avons décidé de ne pas convoquer de témoins. À ce moment-ci, nous n'avons que les travaux du comité, et tout ce que nous avons à cet égard, c'est le plan de travail. Je voulais simplement vous en informer au cas où vous auriez des suggestions à faire.
    Monsieur Battiste, avez-vous une suggestion?

  (1305)  

    Oui, monsieur le président. Il y a eu des discussions entre les partis, et les travaux du comité concernant le plan de travail ne sont pas vraiment urgents. Nous proposons qu'aucune réunion n'ait lieu jeudi, ce qui permettrait aux gens de rentrer à la maison auprès de leur famille pour le congé de Noël.
    Merci, monsieur Battiste.
    Y a-t-il consentement unanime à ce sujet?
    Oui, il y a consentement unanime.
    Je sens un certain enthousiasme.
    Merci beaucoup. Cette motion…

[Français]

    J'ai une question, monsieur le président.
    La parole est à vous, madame Gill.
    En fait, je voulais juste faire un commentaire. Il n'y a pas eu de discussion entre les partis, je n'ai pas été mise au courant, mais vous avez bien sûr mon consentement, monsieur le président.
    D'accord. On m'avait dit qu'il y avait consentement unanime.

[Traduction]

    Je suppose que ce n'était pas tout à fait unanime, mais ce l'est maintenant. Merci beaucoup.
    Nous nous réunirons de nouveau en janvier. En passant, les horaires pourraient changer. Il y aura une transition vers un nouvel horaire pour les comités à notre retour.
    Je vous souhaite à tous un joyeux Noël et une bonne année.
    La séance est levée.
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