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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 051 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le lundi 6 mars 2023

[Enregistrement électronique]

  (1835)  

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Chers collègues, je suis heureux de vous revoir. Quel bonheur que de s'adresser à une salle comble.
    Soyez les bienvenus à la 51e réunion du Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire de la Chambre des communes.
    Pour commencer, quelques petits rappels.
    La réunion emploie une formule hybride, et le compte rendu sera accessible sur le site Web de la Chambre des communes. Sachez que la webémission montre toujours la personne qui s'exprime plutôt que l'ensemble du Comité.
    Il est interdit de faire des captures d'écran ou de photographier l'écran de son ordinateur. D'après moi, cette consigne s'applique également aux personnes présentes sur place. S'il vous plaît, ne prenez pas de photos pendant notre réunion.
    Il y a foule ce soir. Nous vous présentons nos excuses s'il vous est impossible de mettre la main sur des écouteurs. Nous faisons de notre mieux pour vous accommoder. Ceux qui sont bien placés peuvent en prendre là‑bas et, au besoin, ce bon samaritain vous aidera.
    Chers collègues, conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par lui, le mercredi 5 octobre 2022, le Comité reprend son étude sur l'inflation du prix des aliments.
    Accueillons maintenant notre premier groupe de témoins, qui sera à notre disposition pendant une heure. Il s'agit:
    — des représentants de l'Association des transformateurs laitiers du Canada: son président et chef de direction qui comparaît en personne, M. Mathieu Frigon; le président du conseil d'administration, qui comparaît en visio, M. Philip Vanderpol;
    — du représentant d'Aliments et boissons Canada et président-directeur général de BC Food and Beverage, M. James Donaldson;
    — du représentant d'Aliments Maple Leaf inc., président-directeur du conseil d'administration et chef de la direction, M. Michael McCain.
    Merci à vous tous d'avoir pris le temps d'être ici. Nous avons hâte de vous entendre.
    Chaque organisation dispose de cinq minutes pour sa déclaration préliminaire, après quoi les membres du Comité vous questionneront.
     Entendons d'abord l'Association des transformateurs laitiers du Canada.
    Vous disposez de cinq minutes. Vous avez la parole.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonsoir.
    Merci de votre invitation à venir discuter des points de vues des transformateurs laitiers sur l'inflation du prix des aliments dans notre pays.
    Comme vous l'avez dit, je suis le président du conseil d'administration de l'Association des transformateurs laitiers du Canada ainsi que le président et le chef de la direction de Vitalus Nutrition. Je suis accompagné du président-directeur général de l'Association, M. Mathieu Frigon.
    L'Association représente plus de 90 % du lait transformé en produits laitiers au Canada.
    Nous aimerions discuter aujourd'hui de deux sujets clés, du point de vue de l'industrie de la transformation laitière canadienne: d'abord des facteurs inflationnistes qui frappent notre industrie; enfin de l'importance d'un code de conduite pour le secteur des produits d'épicerie, afin de promouvoir la certitude contractuelle et le commerce équitable tout au long de la chaîne d'approvisionnement de l'épicerie.
    Comme vous le savez, les causes de l'inflation sont multiples. Les pressions géopolitiques, les contrecoups de la météo et la pandémie ainsi que les mesures macroéconomiques associées, tout ça a joué un rôle.
    Dans la transformation laitière, entre 2020 et 2023, le coût du lait cru a augmenté de 10,6 %, celui de l'énergie a plus que doublé, les emballages et les matériaux ont augmenté de 24 %, tandis que le coût des machines et de la main-d'œuvre a augmenté de plus de 10 %. Les transformateurs laitiers s'efforcent de réaliser des gains d'efficacité et ils travaillent à atténuer les impacts pour les clients et les consommateurs, mais les augmentations de coûts de cette ampleur les ont évidemment obligés à les répercuter sur le reste de la chaîne d'approvisionnement.
    Les données de Statistique Canada montrent que les prix des produits laitiers vendus par les transformateurs canadiens ont augmenté de 9,5 % de 2020 à 2022, ce qui reste inférieur à la pression inflationniste des coûts qu'ont affrontée les transformateurs laitiers au cours de la même période. À titre de comparaison, la rentabilité moyenne des transformateurs laitiers du secteur est depuis de nombreuses années inférieure à celle de la moyenne des fabricants de biens de consommation préemballés au Canada.
    Les facteurs en action au Canada se sont également manifestés aux États-Unis. La comparaison de l'évolution du prix des produits laitiers au détail, au Canada et aux États-Unis, entre 2020 et 2022, révèle que, pour l'ensemble des produits laitiers, il a augmenté de 11,7 % au Canada contre 13,6 % aux États-Unis.
    Ces 10 dernières années, l'inflation des produits laitiers au Canada a été inférieure de moitié à celle des autres produits alimentaires vendus au détail. Le prix des aliments a augmenté de 27 %, celui des produits laitiers de 11 %. Les coûts, y compris du lait à la ferme, ont certainement augmenté de plus de 11 % dans le secteur laitier, de sorte que l'augmentation de 11 % des prix au détail des produits laitiers dans cette décennie reflète les gains d'efficacité obtenus dans la chaîne d'approvisionnement laitière pendant la période, notamment au niveau de la transformation laitière.
    Je cède la parole au président-directeur général Mathieu Frigon, qui parlera du code de conduite pour le secteur des produits d'épicerie.

  (1840)  

[Français]

     Avec d'autres associations de l'industrie qui ont comparu devant ce comité, notre association fait partie du comité directeur qui travaille à l'élaboration d'un code de conduite pour les produits d'épicerie. On ne peut trop insister sur l'importance d'un code de conduite au Canada afin d'améliorer l'efficience et la collaboration au sein de la chaîne d'approvisionnement.
    Le code visera à conférer de la transparence et une plus grande certitude contractuelle aux relations commerciales, grâce à des conditions et des accords clairs entre fournisseurs et détaillants. Le code garantira que les producteurs agricoles, les transformateurs, les grossistes, les grands et les petits détaillants respectent des normes d'éthique et garantissent des transactions équitables tout au long de la chaîne de valeur.
    Le code sera plus qu'un document écrit, parce qu'il va aussi viser à établir un processus de règlement des différends qui va permettre une résolution rapide et efficace des litiges commerciaux entre fournisseurs et détaillants, si ceux-ci ne peuvent résoudre ces litiges d'eux-mêmes.
    Il est important de noter que le code devra être convivial pour les entreprises, ce qui signifie qu'il devra être clair et simple, plutôt que d'inclure des règles trop rigides et des processus fastidieux. L'objectif est d'augmenter l'efficience en réduisant la bureaucratie, certainement pas l'inverse.
     Mon association est d'avis que le code devra être obligatoire et exécutoire afin qu'il améliore vraiment la possibilité d'atteindre une meilleure collaboration entre les fournisseurs et les détaillants.
    En conclusion, l'industrie de la transformation laitière a fortement contribué à l'économie canadienne au fil des ans, et nous croyons que les pressions inflationnistes auxquelles nous avons été confrontés ont été atténuées dans toute la mesure du possible grâce à des gains d'efficacité sur le plan de la transformation alimentaire. La mise en œuvre d'un code de conduite pour le secteur des produits d'épicerie contribuera à rendre le secteur plus efficace et résilient, et donc mieux équipé pour relever les défis qui se présenteront assurément dans l'avenir.
    Nous vous remercions encore de votre temps et de votre étude sur ce sujet très important. Nous serons heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie beaucoup, messieurs Frigon et Vanderpol, de vos témoignages.
    Je donne maintenant la parole à M. Donaldson pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci et bonne soirée. Mesdames et messieurs les membres du Comité, bonsoir. Je vous remercie de votre invitation.
    Je me nomme James Donaldson, président-directeur général de BC Food and Beverage, association industrielle appuyant le secteur des aliments et boissons de la Colombie-Britannique. Je suis également vice-président d'Aliments et boissons Canada, association industrielle nationale constituée des associations homologues des provinces du Canada. Elle représente plus d'un millier de fabricants d'aliments et de boissons.
     Au Canada, on dénombre près de 8 000 usines d'aliments et boissons, en majorité des PME, qui subviennent 300 000 emplois. Malgré la taille moyenne modeste des entreprises, ce secteur est également le plus gros de notre pays, et, en plus, il constitue un service essentiel. Ses transformateurs sont les premiers acheteurs de produits agricoles canadiens. Il s'ensuit que la réussite à long terme de ces secteurs les ont indissolublement liés.
    L'inflation a toujours été présente dans tous les aspects de la vie de tous les Canadiens. Manifestement, les aliments n'y font pas exception. L'augmentation du prix des aliments est un phénomène très visible, parce que, au moins une fois par semaine, au Canada, on fait son épicerie.
    L'autre problème est qu'on ne peut se passer de nourriture. Certains facteurs sont indépendants de notre volonté, par exemple la guerre en Ukraine, les sécheresses qui ont réduit de nombreuses récoltes en Amérique du Nord, la pandémie et les ruptures des chaînes logistiques mondiales. Il devient donc impératif pour le Canada de se focaliser sur les problèmes qu'il peut maîtriser pour assurer à l'industrie stabilité et pouvoir concurrentiel.
    Ces derniers mois, il a été beaucoup question, dans les médias, des pratiques des épiciers détaillants, question que j'aborderai sous peu. Mais les causes de l'inflation du prix des aliments sont bien plus larges. Il y a les difficultés touchant la main-d'œuvre, les frais de transport, le coût des ingrédients, des matériaux d'emballage, des palettes, des matières premières, des engrais et fumures. L'augmentation a été générale dans la chaîne d'approvisionnement.
    Dans notre recherche de solutions à ces problèmes, nous devons commencer par examiner l'ensemble de la filière alimentaire, laquelle est particulièrement déterminante dans un pays aussi étendu que le nôtre, mais peu peuplé. La filière alimentaire est comme un écosystème: à l'équilibre, elle va très bien. Actuellement elle est hors équilibre, ce qui met notre industrie en danger.
    Les transformateurs, contrairement à d'autres maillons de la chaîne d'approvisionnement, sont exposés à des difficultés qui leur sont propres. L'augmentation des coûts n'a épargné personne, y compris les détaillants et les distributeurs de services alimentaires, mais les joueurs de la chaîne d'approvisionnement peuvent refiler les coûts à leurs clients — ce que notre secteur ne peut se permettre. Les transformateurs ont dû absorber les augmentations de coûts des ingrédients, qui ont atteint 40 %, et du transport, qui ont atteint 400 %, particulièrement en Colombie-Britannique, pendant la crise alimentaire. Cette explosion s'explique par le déséquilibre entre les fournisseurs d'aliments et les principaux détaillants du Canada.
    Il est difficile, parfois impossible, de refiler les coûts en jouant sur les prix, en raison des périodes d'interdiction ou du refus absolu de certains détaillants. Cette situation, à laquelle s'ajoutent les amendes et les droits excessifs qu'administrent les détaillants, qui sont impossibles à refiler, et l'incapacité de même négocier avec les détaillants, tout ça diminue le pouvoir concurrentiel de notre industrie. Essentiellement, les transformateurs canadiens se font pressurer en amont et en aval, et ça ne peut durer. Les PME qui constituent la plus grande partie de l'industrie n'ont ni les ressources ni le comptant pour supporter continûment ces difficultés.
    D'après des témoignages antérieurs de détaillants, les marges des transformateurs seraient stables, et ils ont cité en exemple Pepsi, Procter & Gamble et Kraft. Ces exemples ne sont pas représentatifs de la plus grande partie du secteur au Canada.
    Nous les avons également vus essayer de détourner l'attention de leurs profits sans précédent vers leurs faibles marges. Malheureusement, je peux vous dire que, parmi les transformateurs à qui nous avons parlé, même ceux qui ont le bonheur de connaître une croissance de niveau supérieur ont dû se battre avec des marges qui s'amenuisaient. Le gros du peloton n'a pas le luxe de rejeter les majorations de prix de ses fournisseurs ni de leur imposer des amendes ou des prélèvements sans pièces justificatives ni préavis.
    Je voulais seulement faire observer que, d'abord, notre secteur ne bénéficie pas de grandes marges.
    Je soumets les recommandations suivantes à votre examen.
    Il faut d'abord se focaliser sur le pouvoir concurrentiel, la capacité et la résilience de l'industrie. Un travail notable et important a déjà été fait, ces dernières années, par exemple la Table sectorielle de stratégies économiques sur l'agroalimentaire et le groupe de travail sur la chaîne d'approvisionnement. Nous demandons de le relancer et de le mener à terme pour nous faire accéder à une position plus concurrentielle, localement et mondialement.
    Ensuite, collaborez avec l'industrie pour résoudre ses problèmes de main-d'œuvre. Continuez d'appuyer ces initiatives en la matière, par exemple la Stratégie nationale de la main-d'œuvre pour l'agriculture et la fabrication d'aliments et de boissons et le programme Achieving Our Workforce Destination. Créez une procédure accélérée et plus conviviale pour faire accéder les travailleurs étrangers à la résidence permanente.
    Enfin, appuyez un surcroît d'investissement et de financement pour les technologies et l'automatisation chez les transformateurs d'aliments et de boissons. D'après l'Institut canadien des politiques agroalimentaires, ces industriels bénéficient de moins d'investissements dans les procédés perfectionnés de transformation que les autres secteurs de fabrication et que leurs homologues d'autres pays. Nous nous laissons distancer. Il est indispensable d'investir dans l'automatisation et la modernisation des technologies pour que notre industrie maîtrise les coûts, neutralise les risques touchant la main-d'œuvre, passe à une échelle supérieure et croisse.
    La plupart des subventions à l'innovation et à la technologie octroyées par l'État ne s'appliquent pas à nos entreprises d'aliments et de boissons. Il faut élargir la définition d'« innovation » pour accorder à ce secteur un meilleur accès au financement par subventions et aux programmes spéciaux de financement qui lui seraient destinés.
    Merci.

  (1845)  

    Merci beaucoup, monsieur Donaldson.
    La parole est maintenant à M. McCain.
    Permettez‑moi, monsieur, en ma qualité de seul député fédéral représentant la région du Canada atlantique à faire partie du Comité, de saluer votre travail et l'héritage que laisse votre famille dans cette région et, bien sûr, dans notre pays, sur le plan entrepreneurial comme celui des investissements effectués dans le domaine social. Je vous remercie d'avoir accepté notre invitation.
    Vous disposez de cinq minutes.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, bonsoir. Je suis Michael McCain, président-directeur général de Maple Leaf Foods.
    Maple Leaf est le premier transformateur d'aliments carnés et végétaux du Canada. L'entreprise emploie 14 000 personnes au Canada et aux États-Unis. Nous continuons d'être animés par la vision audacieuse de devenir le premier producteur mondial de protéines dont les opérations sont le plus soutenables. En 2019, nous sommes devenus le premier producteur alimentaire carboneutre à l'échelle mondiale — le premier.
    Voici les grandes lignes de ce que seront mes observations: d'abord, le défi que représente l'inflation du prix des aliments; ensuite, ses causes profondes; enfin, des idées, les nôtres, sur la stratégie à adopter désormais.
    Il se trouve que je suis assez âgé pour avoir vécu des périodes de forte inflation. Heureusement, depuis 30 ans, la plupart des pays industrialisés bénéficient d'une certaine stabilité sur le plan de l'inflation. En raison de facteurs macroéconomiques éveillés par la pandémie, le Canada doit maintenant affronter, comme vous le savez, des taux d'inflation de près de 7 %. Heureusement, il semble que l'inflation s'essouffle, même si elle ne disparaît pas encore. En raison d'autres facteurs « macro » qui s'ajoutent à une sensibilité extrême aux chaînes mondiales d'approvisionnement, l'inflation du prix des aliments dépasse les 10 %. Ailleurs, au Royaume‑Uni et dans l'Union européenne, elle a dépassé 16 %.
    Comme vous le savez, les Canadiens en subissent de forts contrecoups. La recherche effectuée par le Centre de Maple Leaf pour la sécurité alimentaire a révélé que le quart — proportion qui a doublé en deux ans — des Canadiens sont très inquiets pour leur capacité de s'alimenter. Soixante-deux pour cent des Canadiens redoutent principalement le prix croissant des produits essentiels.
    L'insécurité alimentaire était gravement préoccupante avant la pandémie. Désormais, d'après des rapports publiés par des banques alimentaires, le coût croissant de la vie oblige encore plus de personnes à recourir à l'aide alimentaire d'urgence. Ce problème grave réclame des solutions structurelles et non la charité alimentaire.
    Notre centre travaille en collaboration à réduire de moitié l'insécurité alimentaire d'ici 2030. Cet effort passe par des projets innovants de financement, la préconisation d'un filet social de sécurité plus résistant et le rassemblement des intervenants sur le terrain pour accélérer le changement.
    J'espère que l'examen, par votre comité, de l'accès aux aliments et de leur abordabilité stimulera une discussion et des actions élargies sur l'insécurité alimentaire. Toutes les opinions comptent.
    Beaucoup de témoins ont comparu devant vous pour discuter des causes profondes de l'inflation du prix des aliments. Commençons par cette observation de première importance: ce n'est pas un problème canadien, mais mondial, parce que, dans le reste du monde, les taux d'inflation sont égaux ou supérieurs aux nôtres.
    Les causes profondes prédominantes sont au nombre de trois: l'instabilité de la chaîne d'approvisionnement, y compris la pénurie de main-d'œuvre; la guerre en Ukraine; l'inflation générale.
    La production alimentaire s'appuie sur une chaîne mondiale d'approvisionnement. Cette chaîne réduit quotidiennement les coûts des aliments. Elle est délicate, opérationnellement sensible, et les coups d'une force sans précédent que l'économie d'après la Covid lui ont infligés ont laissé des traces profondes. Le coût des transports a explosé. L'approvisionnement a cessé d'être sûr. La main-d'œuvre s'est contractée. Même si elle s'améliore, la situation n'est pas encore complètement rétablie.
    Des graphiques complexes montrant, sur plusieurs années, l'évolution du prix des grains, lequel finit par gonfler le coût de presque tous les aliments, d'une façon ou de l'autre, montrent les augmentations rapides qu'ont connues ces marchés et qui ont été exacerbées par les restrictions des chaînes d'approvisionnement sous la menace ou les contraintes découlant de la guerre en Ukraine.
    Enfin, l'inflation générale s'est manifestée à tous les maillons de la chaîne, des fournitures aux coûts du transport par mer en passant par le coût du capital, du conditionnement et de tout le reste. Tout ça contribue aux conditions les plus turbulentes du marché que j'aie connues dans les 40 années et plus de ma carrière dans l'industrie alimentaire.
    Les marges de profit des acteurs de la chaîne de valeur du secteur alimentaire se comptent en petites unités de pourcentage. Dans notre cas, la spirale inflationniste et la volatilité des marchés ont constitué un vent contraire très puissant. Dans les trois premiers trimestres de 2022, nos bénéfices corrigés d'exploitation ont diminué de 60 à 70 % par rapport à 2021. Nos marges se sont appréciablement amenuisées alors que nous essayions de nous maintenir. Bien sûr, cette situation ne pouvait durer et nous n'avions d'autre choix que de refiler les coûts accrus des intrants, mais toujours dans le contexte de marchés très concurrentiels, aux échelles régionale, nationale et internationale, notre frontière étant ouverte aux importations alimentaires, y compris des transformateurs de viandes des États-Unis, qui ont plus de 10 fois notre taille.

  (1850)  

    L'industrie alimentaire contribue beaucoup à maintenir l'abordabilité des aliments. Nous nous acquittons de cette responsabilité par des opérations aussi efficaces que possible, en élargissant les choix offerts par les marchés aux consommateurs et en investissant dans les technologies et les moyens de faire des économies d'échelle pour maintenir notre productivité à un calibre international.
    L'inflation du prix des aliments et l'inflation générale sont, pour le dire simplement, des problèmes mondiaux. Dans l'assistance, personne ne peut grand-chose pour modifier ou maîtriser le phénomène. Les pouvoirs publics et leurs politiques peuvent cependant jouer un rôle pour s'attaquer aux conséquences de l'inflation alimentaire, en construisant une filière améliorée.
    Nos recommandations seraient notamment et d'abord de privilégier la maîtrise des dépenses pour entraver l'inflation globale; d'ensuite s'attaquer aux pénuries historiques de main-d'œuvre, notamment par la modernisation du régime d'immigration pour combler les lacunes en matière de compétences et corriger les problèmes de mobilité; puis de fixer un objectif pour réduire l'insécurité alimentaire de moitié d'ici 2030, tout comme notre centre l'a fait, et de mobiliser la société civile et le secteur privé; enfin, de se focaliser de plus en plus sur la productivité et la compétitivité dans notre économie, y compris la compétitivité sur le plan des règlements.
    Monsieur le président, je vous remercie de l'occasion que vous m'avez offerte et j'ai hâte de participer à la discussion.
    Merci beaucoup, monsieur McCain.
    Nous sommes arrivés à la période de questions.
    La parole va d'abord aux conservateurs, à M. Lehoux. Vous disposez de six minutes.

  (1855)  

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être avec nous ce soir.
    Ma première question s'adressera à l'Association des transformateurs laitiers du Canada.
    Dans le contexte actuel, quel lien faites-vous entre le code de conduite — vous en avez parlé au début de votre allocution — et de façon globale, l'inflation que subit votre industrie?
    Merci de votre question.
    La meilleure façon dont les gouvernements peuvent nous aider à faire face à l'inflation est d'augmenter l'efficience de la chaîne d'approvisionnement. Nous considérons que c'est précisément ce que ferait un code de conduite pour le secteur des produits d'épicerie, en améliorant la collaboration entre les différents maillons de la chaîne et la certitude contractuelle. Alors, le lien entre l'inflation et le code de conduite est probablement indirect, mais il existe quand même, dans la mesure où cela va améliorer l'efficience de la chaîne d'approvisionnement et l'aider à faire face aux pressions inflationnistes.
    Merci.
    Dans le même ordre d'idées, pourquoi jugez-vous que l'adhésion à ce code de conduite devrait être obligatoire et non volontaire?
    C'est justement pour atteindre les objectifs dont je viens de parler.
    Alors, si c'est fait sur une base volontaire, on ne les atteindra pas.
    Disons que ce serait plus difficile. Nous favorisons certainement un code obligatoire et exécutoire pour nous assurer que les objectifs du code seront atteints.
    Quels obstacles voyez-vous à l'application concrète de ce code?
    Nous travaillons bien, actuellement, avec les autres maillons de la chaîne. Un comité de l'industrie travaille présentement à un code, et des consultations seront lancées. La collaboration est très bonne et il y a eu de bonnes améliorations. Les prochains mois seront donc critiques.
    Dans votre allocution, vous avez mentionné la contribution économique très importante de tout le secteur. Pour faire de la transformation, cela prend de la production.
    Si on fait la répartition du prix d'un produit qui arrive sur les tablettes, le producteur, le transformateur et le détaillant reçoivent-ils chacun le tiers des revenus? Est-ce ainsi que vous voyez actuellement la répartition des revenus?
    Chaque cas est différent. Cela dépend des produits et de leur valeur ajoutée. Je vais parler du secteur laitier, car c'est celui que je connais. Pour le lait de consommation, il y a moins de valeur ajoutée. Il y a le processus de pasteurisation, entre autres. Probablement que la part du producteur agricole va être plus élevée dans ce cas-là. Si on prend des produits à plus forte valeur ajoutée, comme ceux qui sont davantage transformés, c'est différent.
     Alors, ce n'est pas uniquement une question de répartition...
     Ultimement, croyez-vous qu'il faudrait atteindre une répartition assez égale, tous produits confondus? S'il n'y a pas de producteurs, il n'y aura pas de distributeurs. En tout cas, ce serait géré très différemment.
    Comment voyez-vous cela? La transformation est importante, bien sûr, mais devrait-on accorder un peu plus d'importance aux producteurs et aux détaillants? La répartition des revenus devrait-elle être plus équitable?
    Oui, certainement. Je crois que le code de conduite favorisera cela également. Comme je le disais, il s'agit d'améliorer l'efficience et la collaboration entre les différents maillons de la chaîne. Ultimement, le consommateur va en bénéficier. Ce n'est pas moi qui le dis, des études menées au Royaume‑Uni l'ont démontré. C'est la raison pour laquelle le Royaume‑Uni a établi un code de conduite.
    Pour revenir à votre question, effectivement, il faut que tout le monde y trouve son compte, y compris les consommateurs.
     Parmi vos membres, il y a des petites, des moyennes et de grandes entreprises, j'imagine.
    Quelles sont les relations dans tout cela?
    On sait que, dans les grands marchés, les plus grandes bannières sont plus attrayantes, en fin de compte.
    La moyenne entreprise occupe-t-elle sa part de marché, dans le contexte actuel?
    La venue du code de conduite viendrait-elle tempérer tout cela?
    C'est difficile pour les entreprises de toute taille, particulièrement pour les PME, avec les pressions inflationnistes et ainsi de suite. Il y a également les relations qui ne sont vraiment pas aussi bonnes qu'elles pourraient l'être dans la chaîne d'approvisionnement. Je dirais que les PME font face à des problèmes particuliers.
    Ces problèmes sont donc davantage liés aux PME.
    Merci.
     D'entrée de jeu, vous avez mentionné que l'augmentation des prix des produits aux États-Unis était plus importante que celle au Canada. Quand on regarde cela de façon globale, le système établi au Canada dans le secteur laitier comporte des points positifs.

  (1900)  

    Comme le disait M. McCain, c'est un phénomène international. Les pressions inflationnistes ne sont pas un phénomène canadien. On a connu des augmentations de prix des produits laitiers au Canada, mais de moindre ampleur qu'aux États-Unis, comme vous l'avez dit.
    Monsieur Frigon, on nous dit parfois que certains systèmes que l'on a ici au Canada ne favorisent pas un prix intéressant pour le consommateur, mais, quand on regarde les chiffres que l'on nous donne, la situation est peut-être un peu différente.
    Sur le plan de l'inflation, au cours des deux dernières années, cela a assurément été très similaire.
    Merci beaucoup, monsieur Frigon.
    J'aimerais poser une question à M. McCain.
    Vous avez beaucoup parlé de l'importance de la main d'œuvre. Vous avez dit qu'il fallait réduire l'ampleur de la paperasse.
     Comment envisagez-vous l'aboutissement d'un système où nous pourrons avoir une main d'œuvre plus abondante qui arrivera de l'étranger, parce qu'elle est insuffisante au Canada?

[Traduction]

    Malheureusement, nous n'avons plus le temps, mais j'accorde 10 ou 15 secondes à M. McCain, s'il le veut, pour répondre brièvement.
    Si j'ai bien compris, vous demandez quel genre de changement il faudrait apporter aux règlements.
    Les obstacles bureaucratiques au programme des travailleurs étrangers, par exemple, nous ont causé des problèmes aigus. L'ouverture qui se dessine nous semble très utile.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Drouin, qui dispose de six minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie les témoins qui sont devant nous, aujourd'hui.
    Je ne cherche pas à pointer du doigt un secteur plus qu'un autre. Cependant, nous sommes ici parce que nos concitoyens nous posent des questions. Les gens sont préoccupés, et comme l'ont mentionné les gens du secteur, il y a de l'inflation dans le prix de la nourriture et plus de Canadiens dépendent des banques alimentaires.
    Ma première question s'adresse à monsieur Frigon.
    Selon vos discussions avec vos membres, comment qualifieriez-vous la relation qui existe entre les transformateurs et les supermarchés? Est-ce une bonne relation?
    Vos membres se disent-ils satisfaits des négociations qui ont lieu quand, par exemple, ils font face à une augmentation des prix?
     Ils doivent, évidemment, refiler ces augmentations aux détaillants. Les relations sont-elles bonnes? Avez-vous plutôt vraiment besoin du code de conduite que vous préconisez depuis le début?
    Il est certain que chaque cas est différent, mais, en général, ce n'est pas une bonne relation. C'est pour cette raison que, depuis plusieurs années, nous travaillons à un code pour les produits du secteur de l'épicerie, pour améliorer cette relation entre tous les maillons de la chaîne.
    Les producteurs agricoles sont également touchés par cela. Il ne s'agit pas seulement des producteurs qui livrent leurs produits directement aux détaillants, mais aussi des producteurs laitiers de qui nous achetons le lait parce que, ultimement, la pression que nous subissons se répercute sur les producteurs. Comme je le disais, nous travaillons à ce code depuis quand même quelques années, et c'est précisément parce que les relations pourraient être grandement améliorées.
    On l'a vu dans le secteur des croustilles avec Pepsico et Loblaws. À un moment donné, il y avait certains produits de marque qui n'étaient pas disponibles sur les tablettes.
    Certains de vos membres vivent-ils les mêmes conséquences?
    Parfois, c'est plus difficile, parce qu'il y en a qui sont plus spécialisés dans certains sous-secteurs, les fromagers, par exemple, ou d'autres qui travaillent dans des champs plus spécifiques.
    Vos membres vous relatent-ils des cas où des supermarchés refusent de mettre leurs produits sur les tablettes parce que ces commerces considèrent que la négociation entre eux est injuste?
     Oui, je dirais que la question est semblable. Évidemment, nous n'en discutons pas en groupe, mais, quand j'en discute avec mes membres individuellement, j'entends assurément des anecdotes. J'ai entendu parler de cas qui sont semblables à l'exemple auquel vous avez fait référence.
    Vous avez évidemment regardé ce qui s'est passé en Angleterre après l'adoption du code de conduite. Selon vous, ce code a-t-il entraîné une augmentation exorbitante des prix chez les détaillants ou a-t-il plutôt contribué à réduire les prix?
    Nous avons comparé l'inflation depuis la mise en place du code de conduite au Royaume‑Uni à l'inflation de 2012 à 2020, soit avant la pandémie, puisque cette dernière a changé bien des choses. L'inflation dans les pays qui ont un code de conduite a été passablement plus faible qu'au Canada. Cela montre qu'un code de conduite n'augmente pas les prix. Comme je le disais dans ma présentation, ce dernier améliore l'efficacité et le fonctionnement de la chaîne d'approvisionnement. La plus belle preuve de cela, c'est que les détaillants du Royaume‑Uni appuient le code de conduite.
    J'ai aussi fait référence plus tôt à une grande étude qu'avait menée le bureau de la concurrence au Royaume‑Uni en 2008, je crois. Le bureau avait recommandé d'agir en ce sens. Il avait indiqué que si on maintenait le statu quo, c'est le consommateur qui en paierait le prix au bout du compte. C'est grâce à cette étude que le Royaume‑Uni s'est doté d'un code de conduite.

  (1905)  

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur McCain, d'être ici.
    Vous avez formulé trois recommandations. Comme M. Lehoux, je vous questionnerai sur la modernisation du programme des travailleurs étrangers temporaires. Visiblement, vous cherchez à augmenter la capacité dans votre propre secteur de fabrication et de transformation. Envisagez-vous l'automatisation pour combler la pénurie de main-d'œuvre? Il n'y a pas que le Canada qui souffre de cette pénurie. Dans mes conversations avec des homologues des États-Unis, ils me disent que c'est un problème là‑bas et c'en est un dans le secteur de la transformation des aliments de la plus grande partie des pays développés.
    Comment attirer plus de talents dans ce secteur? L'automatisation peut-elle résoudre ce problème?
    Les rôles de première ligne dans notre industrie ne sont pas les plus attrayants à première vue. Les gens développent un intérêt et une affinité pour ces rôles une fois qu'ils font partie de l'industrie, mais d'entrée de jeu, les rôles ne sont pas nécessairement les plus attractifs. Nos programmes de rémunération sont très concurrentiels. Il faudrait simplement avoir accès à un bassin de main-d'œuvre pour pourvoir les postes devenus vacants au cours des deux dernières années. C'est vraiment au cours des deux dernières années que nos effectifs se sont décimés.
    Les difficultés que nous éprouvons ne découlent pas d'un manque de capacités. Nous avons énormément de capacités. En fait, les capacités de notre secteur au Canada sont sous-utilisées. Les difficultés sont liées à l'approvisionnement en matières premières, au bétail et à la disponibilité de la main-d'œuvre. À mon avis, il existe beaucoup de solutions qui pourraient accélérer les choses.
    Nous devons nous arrêter là.
    Merci, messieurs.
    Merci, monsieur McCain. Merci, monsieur Drouin.

[Français]

    Monsieur Perron, vous disposez maintenant de six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins d'être avec nous ce soir. Nous en sommes très heureux.
    Monsieur Frigon, j'aimerais que vous m'expliquiez une chose en lien avec vos échanges avec M. Drouin plus tôt au sujet des négociations et des relations avec les détaillants. Présentement, nous nous penchons surtout sur ces questions pour savoir s'il existe un problème.
    Comment fixez‑vous les prix quand vous négociez avec un détaillant?
    Tout d'abord, notre association ne participe pas du tout aux négociations avec les détaillants. Comme vous le savez, à la ferme, la fixation des prix est pleinement réglementée. Le transformateur laitier achète ses produits sur un marché qui est pleinement réglementé, puisque le prix est dicté par la Commission canadienne du lait. Par la suite, il vend ses produits sur un marché qui n'est pas du tout réglementé.
    La négociation se fait au cas par cas. Ce sont les transformateurs eux‑mêmes qui négocient avec les détaillants et les distributeurs.
    Le code de conduite viendrait donc combler cette lacune de réglementation.
     Quand vous avez une augmentation du prix de vos intrants et que vos membres veulent transmettre une portion minimale de cette inflation, sont-ils capables d'obtenir une augmentation de prix chez les détaillants?
    D'autres témoins nous ont expliqué qu'il y a parfois des retards. Les représentants des détaillants nous ont informés qu'ils gelaient les augmentations de prix pendant une certaine période. L'expérience de vos membres ressemble-t-elle à cela?

  (1910)  

    Oui. Une étude, à laquelle je n'ai pas participé, a été faite par notre firme d'avocats. Il y avait des ententes de confidentialité. Effectivement, on a noté que la difficulté de transmettre les augmentations de prix réglementées aux détaillants est assurément un grand problème.
    Par ailleurs, je dois dire que le code de conduite ne réglementera pas les prix comme tels. Par contre, la collaboration et l'influence entreront en ligne de compte quand viendra le temps de la certitude contractuelle. En effet, comme je le disais, le code de conduite vise à améliorer les relations et à réduire la bureaucratie, les frais et les pénalités arbitraires à la faveur d'une certitude contractuelle. C'est vraiment cela qui aidera la filière, plutôt que le fait de réglementer le prix de vente des transformateurs aux détaillants.
    Quand vous parlez de frais arbitraires, parlez-vous de frais pour des programmes de points, pour des produits non vendus ou des programmes de récompenses ou autres?
    Oui. C'est exact.
    Je ne sais pas si tout est vrai, mais, selon l'impression que nous pouvons parfois avoir, ces frais seraient probablement financés par les fournisseurs. Est-ce exact?
    C'est exactement cela.
    D'accord.
    Monsieur Frigon, vous me dites qu'on est incapable de transmettre les augmentations de prix. En même temps, les détaillants nous ont dit que l'inflation avait été causée par l'augmentation des intrants.
    Avez-vous des commentaires au sujet des témoignages que nous avons entendus selon lesquels on a blâmé l'inflation qu'il y a eu dans la chaîne d'approvisionnement?
    Je vais parler comme un économiste, car j'en suis un.
    Il faut séparer les périodes. Je dirais qu'il y a eu une période, probablement de 2012 à 2020, où il n'y a pas eu d'augmentation des prix des produits laitiers au détail, mais il y a quand même eu des augmentations du coût des intrants au cours de cette même période.
    Au cours des deux dernières années, avec la forte inflation, la situation a été différente. Il y a eu des augmentations et les données de Statistique Canada l'indiquent. Il y a eu aussi des augmentations du prix de gros. Statistique Canada collecte des données à ce sujet.
    En ce qui concerne les prix de vente que les transformateurs laitiers demandent à leurs clients, il y a eu des augmentations, mais elles reflètent la croissance des coûts qu'on a vue au cours des deux dernières années. Cependant, si on examine la période avant cela, je dirais que la situation a été très différente.
    D'accord.
    Des témoins nous ont recommandé de demander une enquête du Bureau de la concurrence sur le mécanisme de fixation des prix.
    Est-ce une bonne idée?
    À propos de quoi?
    On nous a recommandé de demander une enquête au Bureau de la concurrence sur les processus de fixation des prix.
    En ce moment, le Bureau de la concurrence effectue une consultation à laquelle nous participerons. C'est plus large, mais c'est quand même pour déterminer si la loi pourrait être modifiée et améliorée.
    Merci beaucoup.
    Monsieur McCain, de votre côté, vous représentez une grande entreprise. Comment cela fonctionne-t-il? Connaissez-vous le même genre de difficultés dont nous venons de discuter avec M. Frigon du côté des détaillants et des frais imposés, des difficultés à obtenir une augmentation de prix ou des choses dans le même ordre d'idée?

[Traduction]

     Je vends des produits au marché du commerce au détail depuis 1979 — depuis presque 45 ans — dans tous les grands marchés internationaux. J'ai commencé ma carrière comme vendeur dans le commerce au détail. Les défis des vendeurs dans les systèmes de distribution au détail, ou services de distribution alimentaire, sont les mêmes à Toronto, à New York, à Londres ou à Sydney, en Australie, que ce soit dans les domaines de la nourriture, des bijoux, des vêtements ou de tout autre produit dans un système de distribution. Les détaillants en demandent beaucoup pour le bien de leurs consommateurs et d'autres parties prenantes. Ils veulent aussi améliorer leur propre entreprise. C'est la réalité de notre secteur d'activités. Les gens aguerris savent comment naviguer là‑dedans. C'est leur travail. Ce sont les aléas de ce milieu.
    J'appelle cela la gravité économique. C'est inexorable. C'est comme cela depuis 50 ans et ce le sera probablement dans les 50 années à venir. Je suis tout à fait à l'aise avec cela. J'ai connu les deux côtés de la médaille. J'ai vendu des produits là où il y avait un code de conduite et là où il n'y en avait pas. Nous n'avons aucun parti pris à ce sujet.
    En vérité, je pense que le code de conduite n'aura aucune incidence sur les entreprises du secteur et d'autres secteurs ou sur la situation des consommateurs. Toutefois, si l'industrie souhaite en avoir un... Nous avons vendu une foule de produits au Royaume-Uni, où il avait un code de conduite, comme c'est le cas aux États-Unis et ici. Nous n'avons aucune préférence. Nous voguons avec le courant.

  (1915)  

    Nous allons nous arrêter ici.
    Merci, monsieur McCain. Merci, monsieur Perron.
    Je cède la parole à M. MacGregor pour six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'aimerais remercier également tous les témoins d'être venus comparaître devant le Comité aujourd'hui et de nous guider dans le cadre de notre étude importante.
    Comme cela a été mentionné dans les déclarations liminaires, cette question est très délicate. M. Drouin a d'ailleurs mentionné que les résidants de nos circonscriptions abordaient le sujet avec nous. Les aliments sont des produits de consommation essentiels que se procurent les familles toutes les semaines. Nous avons tous en commun le besoin de manger. Pour les gens de ma région de l'île de Vancouver, chaque visite à l'épicerie est éprouvante.
    Un des témoins entendus lors d'une séance précédente, M. Jim Stanford, a grandement aidé le Comité en fournissant un mémoire faisant état de la multiplication par deux des profits de la vente au détail des produits alimentaires par rapport à 2019, avant la pandémie. Les marges bénéficiaires des magasins d'alimentation au détail ont gonflé. Or, ces deux phénomènes surviennent au moment où les volumes de ventes des supermarchés enregistrent un déclin.
    Sur son fil Twitter, M. Stanford affirme que selon les données du quatrième trimestre de l'an dernier, qui viennent d'être publiées, les marges bénéficiaires des épiciers avaient encore augmenté.
    Monsieur Vanderpol, j'aimerais commencer avec vous et l'Association des transformateurs laitiers du Canada. Vous avez mentionné que pour les transformateurs, la profitabilité moyenne était plus faible que celle d'autres secteurs.
    Vu la concentration du secteur de la vente au détail de produits d'épicerie au Canada et le fait que trois sociétés — Empire, Loblaws et Metro — en contrôlent une très grande partie, nous avons entendu de multiples témoignages qui faisaient état du besoin d'établir un code de conduite pour les épiciers. Je voudrais avoir une meilleure idée de la réalité des petites et moyennes entreprises de votre secteur et des difficultés qu'elles connaissent lorsqu'elles essaient de négocier avec des sociétés capables de dominer le marché. À mon avis, le nœud du problème est la disparité qui existe entre les deux secteurs.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Comme vous le savez, les modèles d'affaires des transformateurs et des détaillants sont très différents. Notre secteur investit dans la machinerie, l'équipement et les plans de transformation des matières premières en produits finis prêts à la consommation. De leur côté, les détaillants investissent dans des espaces et des installations qui leur permettent de distribuer et de vendre aux consommateurs les produits qu'ils achètent.
    Beaucoup de chiffres sont lancés pour comparer les marges bénéficiaires. Il ne faut pas, toutefois, se limiter à ce seul instrument de mesure. Il y a aussi le profit par dollar du total de capital investi, mais même cet indicateur n'est peut-être pas parfait.
    Au lieu de regarder les marges bénéficiaires, il faudrait peut-être examiner le cycle de fonctionnement ou le flux de trésorerie disponible. Comme je l'ai dit plus tôt, c'est là où le bât blesse pour les transformateurs. En règle générale, nous ne fonctionnons pas à la même échelle que certains autres transformateurs, par exemple aux États-Unis. Les recettes qui vont dans le flux de trésorerie disponible sont minces. Par conséquent, il est difficile de faire des investissements supplémentaires pour, par exemple, réaliser des gains d'efficacité ou accroître l'automatisation. Voilà où sont nos pierres d'achoppement. Comme transformateurs, nous devons y arriver, mais c'est difficile d'obtenir les recettes nécessaires pour ces types d'investissements.
    Comme vous l'avez mentionné, monsieur Donaldson — j'en profite pour faire le lien avec vous —, vous êtes en quelque sorte coincé entre l'arbre et l'écorce. Les agriculteurs doivent assumer le coût des intrants qui leur permettent de cultiver un produit ou de produire un produit venant d'un animal donné. Ils vous vendent ce produit. Vous devez ensuite négocier avec un géant du détail, qui peut unilatéralement imposer un prix.
    Penchons-nous à présent sur la situation des petites et moyennes entreprises de votre secteur. Vous avez mentionné qu'il y en avait plus de 8 000 au Canada. C'est fantastique. Je souhaiterais qu'un plus grand nombre de ces entreprises percent le marché, mais j'aimerais également savoir, selon ce que vous disent vos membres, comment se passent les négociations avec les géants du commerce de détail des produits alimentaires, qui ont tant de pouvoir et de contrôle sur le marché de cette taille.

  (1920)  

    Les négociations sont évidemment très difficiles pour ces entreprises. En Colombie-Britannique, il n'y a pas vraiment de grandes sociétés. La province ne compte pas de multinationales. Comme je le dis toujours, même les grandes entreprises britanno-colombiennes sont relativement petites à l'échelle nationale.
    La situation est en effet très difficile. La semaine dernière, j'ai parlé à un membre qui a presque triplé la croissance de son chiffre d'affaires au cours des quatre dernières années, mais dont la marge bénéficiaire s'est réduite de 25 %. Les entreprises sont heureuses de profiter d'un réseau de distribution élargi et de prendre de l'expansion, pas seulement au Canada, mais aussi dans d'autres marchés, mais pour les petites entreprises, qui représentent le plus gros de nos membres, c'est presque impossible. Il y a des périodes prolongées de gel des prix. Les négociations sur l'augmentation des prix peuvent durer plusieurs mois. Les modalités de paiement ne sont pas respectées. Les petites entreprises qui ont une entente prévoyant un paiement dans 15 jours ne reçoivent en fait le paiement que dans 60 à 90 jours. Les grands détaillants peuvent attendre cet argent, car ils font des millions de dollars en intérêts, mais ces délais mettent à risque les petites entreprises.
     Comme je le dis souvent, dans le secteur de la transformation, ce ne sont pas une ou deux tuiles qui font tomber les entreprises. C'est plutôt le supplice de la goutte qui a raison d'elles. En fait, les petits transformateurs n'ont même pas le luxe de résister longtemps à cette torture. Les paiements qu'elles reçoivent en retard peuvent réellement compromettre leur viabilité et leur capacité à payer leurs employés. Il y a aussi les frais et les droits.
     La chose la plus frustrante que j'ai entendue de la bouche de nos membres est probablement le fait que les transformateurs assez gros pour exporter et aller aux États-Unis n'éprouvent pas ces difficultés. Avec les détaillants américains, il n'y a pas de soucis liés aux amendes, aux aliments pour animaux et aux dépenses de programme ou encore aux ajustements de paiements rétroactifs. Ici, les transformateurs qui sont censés recevoir un chèque peuvent très bien se voir enlever une somme de 50 000 $ ou de 60 000 $ pour un ajustement rétroactif qui remonte à deux ou trois ans.
    Il est impossible de tenir compte de tous ces éléments et de planifier en conséquence. Cela rend les choses encore plus difficiles. Les entreprises doivent vraiment rationaliser au maximum et avoir une excellente compréhension de leurs centres de coûts. Lorsque les règles du jeu changent constamment et que les entreprises ne savent pas à quel moment et dans combien de temps elles vont être payées et quel montant elles recevront, c'est très difficile de tenir le coup.
     Je n'ai pas eu assez de temps, plus tôt, pour prononcer toute ma déclaration. J'aurais quelques commentaires à formuler sur le code de conduite, mais ce n'est pas directement...
    Monsieur Donaldson, je suis désolé. Je vous ai donné, à vous et à M. MacGregor, pas mal de latitude. J'essaie de faire preuve de générosité, mais malheureusement, je ne peux pas vous donner plus de temps.
    Merci, monsieur MacGregor. Merci, monsieur Donaldson.
    Chers collègues, nous passons à la deuxième série de questions. Nous avons commencé la séance avec du retard. Il me reste 15 minutes, que je vais octroyer aux derniers témoins, mais je vais être très strict. Je vais limiter chaque intervention à cinq minutes sans possibilité de prolongation.
    Monsieur Steinley, je vous cède la parole pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être venus comparaître ce soir.
    Je vais poser quelques questions sur l'industrie laitière, car je suis un producteur laitier dans l'âme. J'ai grandi dans une ferme laitière dans le sud-ouest de la Saskatchewan.
    Monsieur McCain, vous avez soulevé quelques points que je voudrais approfondir. Tout d'abord, quelle est la différence entre les coûts de transport à vos usines aux États-Unis et les coûts de transports à vos usines au Canada?
    C'est très compliqué de comparer les coûts, car ils varient selon le produit et le client dans nos combinaisons de produits et de clients.
    Au Canada, par exemple, une grande partie de nos produits provenant du Manitoba sont exportés. La plupart sont conteneurisés et leur transport comprend des frais de fret maritime qui ne sont pas comparables aux coûts liés aux produits vendus à l'extérieur du Centre du Canada issus de notre segment de protéines végétales. Ce n'est pas comparable.
    Quels seraient vos coûts de transport de marchandises par camion? Comment se compareraient les coûts de camionnage?
    Les coûts sont comparables.
    D'accord.
    En 2019, Maple Leaf Foods a décidé d'ouvrir une usine, ou d'investir dans une usine, à Shelbyville, en Indiana, au lieu d'investir dans une usine au Canada.
     Pourriez-vous nous dire quels facteurs ont motivé cette décision? Quelles mesures fiscales ou quelles mesures incitatives vous ont poussé à investir à Shelbyville, en Indiana, au lieu d'investir dans une usine au Canada, surtout dans le domaine des légumineuses? J'aurais pensé qu'il était plus facile d'accéder au marché des légumineuses au Canada ou...
    Non. Quatre-vingt-quinze pour cent des activités sont aux États-Unis. Ce n'est pas un secteur d'activités canadien. Les activités sont menées à 95 % ou à 98 % aux États-Unis.
    La rentabilité de l'industrie des protéines végétales réside dans le transport de marchandises à l'étranger, et non pas au Canada. Pour le transport de marchandises à l'étranger, nous avons établi une usine en Indiana, car cet État se situe en plein milieu de notre marché. Le choix de cet emplacement était logique en raison de facteurs économiques liés au transport.

  (1925)  

    Parfait. Merci beaucoup de votre réponse.
    Vous avez dit que l'inflation est un phénomène mondial. En revanche, vos trois recommandations se rapportent essentiellement aux compétences fédérales. Vous parlez de discipline fiscale, de main-d'œuvre — dont vous avez parlé également en répondant à une question subséquente — et d'obstacles bureaucratiques.
    Certains ont dit que l'inflation était un phénomène canadien, et vos trois recommandations portent sur des questions que le gouvernement fédéral pourrait régler avec un peu de volonté politique. Dans votre déclaration liminaire, vous avez dit que l'inflation était plutôt un phénomène mondial. Pourquoi, alors, vos recommandations sont-elles formulées en fonction d'un contexte strictement canadien, particulièrement lorsque vous dites que l'inflation pourrait être réglée si nous avions une discipline fiscale?
     Mes recommandations sur les politiques publiques sont centrées sur des éléments que nous pouvons maîtriser, et non pas sur les autres. Les recommandations portent sur le peu d'éléments que nous pouvons contrôler.
    En ce qui concerne la discipline fiscale, je pense, bien sûr, qu'elle devrait s'appliquer à l'échelle des économies mondiales.
    À propos de la main-d'œuvre, j'estime que nous avons entièrement le contrôle de ce dossier. Nous pouvons aider à cet égard.
    La compétitivité réglementaire est une chose sur laquelle les gouvernements auraient dû davantage se pencher au cours des 20 dernières années, et sur laquelle ils devraient davantage se pencher dans les 20 années à venir.
    Merci beaucoup de votre réponse.
    Il me reste une minute et demie. J'ai deux autres questions.
    Quelles sont vos plus grandes préoccupations au sujet de la compétitivité au Canada? La main-d'œuvre en est une. Le système réglementaire fiscal serait‑il votre deuxième plus grande préoccupation?
    Non. Je n'ai jamais choisi l'emplacement géographique de mes investissements en fonction des régimes fiscaux. Les régimes se ressemblent trop pour faire une différence.
    Nous devrions nous concentrer d'abord sur la disponibilité de la main-d'œuvre et sur la compétitivité réglementaire générale.
    Vous avez mentionné à quelques reprises la compétitivité réglementaire générale. Pourriez-vous, en 30 secondes, décrire en quoi cela consiste? Selon vous, quel est le maillon faible de la compétitivité au Canada?
    L'énigme de la compétitivité réglementaire... J'utilise souvent la métaphore de la tonne de plumes. Nous avons analysé la chose sous pratiquement tous les angles de la chaîne de valeurs. Aucun élément ne pèse plus qu'une plume. Même si ce sont des plumes, il y en a tout de même une tonne. Il est presque futile d'examiner une seule plume. Par contre, l'ensemble est très révélateur. Nous pouvons le démontrer à plusieurs niveaux.
    Merci, monsieur McCain. Merci, monsieur Steinley.
    Nous passons maintenant à M. Turnbull pour cinq minutes.
    Je remercie nos témoins de leur présence ce soir.
    Je vais probablement me concentrer exclusivement sur vous, monsieur McCain.
    J'ai beaucoup aimé vos remarques liminaires ainsi que la vision audacieuse que vous avez créée pour les Aliments Maple Leaf, en particulier sur l'aspect de la durabilité. J'aimerais vous poser quelques questions à ce sujet et établir un lien avec l'inflation des prix des aliments.
    Diriez-vous qu'Aliments Maple Leaf a considérablement modifié sa stratégie d'entreprise au cours de la dernière décennie afin d'observer des normes plus élevées en matière de responsabilité sociale et environnementale?
    Oui.
    Pensez-vous que cela rend votre entreprise plus concurrentielle?
    Non.
    D'accord. Pourquoi dites-vous cela?
    Si vous définissez la compétitivité comme étant la compétitivité des coûts, la réponse est non. Cela ajoute des coûts à notre système dans plusieurs domaines. Nous l'avons accepté. Nous avons une croyance profonde dans l'éthique du multipartisme et de la création d'une valeur partagée. Nous embrassons la magie du mot « et » et rejetons la tyrannie du mot « ou », ce qui signifie, pour nous, que nous cherchons à satisfaire l'ensemble des intervenants et à répondre à leurs besoins. Nous récompensons nos actionnaires pour notre engagement à l'égard de ce virage social en rendant plus attrayant de commercer davantage avec nous, au même prix, ce qui est lucratif pour les actionnaires.
    Nous avons un bassin de clients qui veulent transiger davantage avec nous, parce que nous sommes qui nous sommes, même si nous ne facturons pas la plupart des choses. Nous devons augmenter nos prix dans certains de nos secteurs d'activité, notamment l'élevage d'animaux sans antibiotiques, qui représente une part importante de notre portefeuille. Nous devons transmettre ces coûts supplémentaires.

  (1930)  

    Dans ce cas, y a‑t‑il au moins des avantages sur le plan de la pérennité pour les Aliments Maple Leaf?
    Oui, il y en a. C'est le cas, actuellement, car à l'échelle de l'industrie nord-américaine, nous sommes assez petits pour être rebelles et assez grands pour commercialiser nos idées rebelles. En fin de compte, la réponse est oui. Cela attire plus de clientèle chez Aliments Maple Leaf.
    Je sais que votre entreprise a fait des efforts considérables pour réduire son empreinte carbone. Je suis certain que cela a eu une incidence, dans une certaine mesure, sur la réduction de vos coûts d'exploitation. Est‑ce exact?
    Oui, c'est exact. Pour cet exemple précis, la réponse est oui. Mon commentaire précédent n'était pas vrai à tous points de vue, mais dans l'ensemble, oui.
    Je comprends.
    Concernant la capacité de votre entreprise d'absorber une partie des pressions et des chocs inflationnistes qu'on observe, pensez-vous que la réduction des coûts d'exploitation vous a donné une souplesse accrue pour absorber ces chocs?
    Étant donné que notre rentabilité a baissé de 60 à 70 % jusqu'au troisième trimestre de l'année dernière, je peux répondre que non, mais peut-être à l'avenir.
    D'accord.
    Vous avez parlé d'une vision audacieuse. Vous avez aussi le Centre d'action de Maple Leaf pour la sécurité alimentaire, qui présente une vision plutôt audacieuse pour la réduction de l'insécurité alimentaire. Quels sont les compromis qui s'imposent?
    Vous avez parlé de marges bénéficiaires très faibles. Vous considérez avoir la responsabilité essentielle d'offrir des aliments à prix abordable et vous avez un engagement à réduire l'insécurité alimentaire de 50 % d'ici 2030. C'est un défi de taille.
    Quels sont les compromis nécessaires? Comment ces éléments interagissent-ils? Pouvez-vous me donner un aperçu?
    Je pense que le problème de l'insécurité alimentaire au Canada et à l'échelle mondiale est très complexe. Cela découle d'une série de causes profondes interdépendantes pour lesquelles nous devons trouver des réponses systémiques. Cela comprend divers éléments, notamment l'accès, la nutrition et la littératie financière, les maladies mentales et les handicaps. Plus de 50 % des personnes en situation d'insécurité alimentaire sont des personnes handicapées. Il existe une multitude de causes outre le revenu et la pauvreté.
    Je pense que les solutions à ce problème sont d'ordre systémique, le plus important étant probablement de renforcer le filet de sécurité sociale que nous avons au Canada comparativement à d'autres pays.
    Nous allons nous arrêter là. Je vous remercie, messieurs.

[Français]

     Nous passons maintenant à M. Perron.
    Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Donaldson, j'aimerais poursuivre sur ma lancée de tantôt.
    Si j'ai bien compris votre échange avec M. MacGregor, vous êtes affecté par les difficultés de négociation et de fixation de prix, les frais imposés pour des marchandises non vendues ainsi que le financement de programmes de points.
    J'aimerais que vous me donniez plus de détails à ce sujet.

[Traduction]

    Oui, certainement.
    Je ne veux pas répéter ce qui a été dit plus tôt, mais je veux apporter une précision. Le code de conduite a été mentionné à maintes reprises et figurait dans nos notes. Ce n'est pas, selon moi, une solution miracle au problème des prix des denrées alimentaires. Il s'agit plutôt d'établir un équilibre dans l'ensemble du système alimentaire. On compte actuellement un nombre restreint de grands détaillants et un très grand nombre de petits fournisseurs, ce qui crée un déséquilibre et complique considérablement les choses.
    Honnêtement, il est très difficile d'attirer l'attention d'une grande entreprise lorsqu'on n'a pas le même pouvoir de levier. C'est l'un de nos principaux problèmes. Le détaillant communique avec vous lorsqu'il a besoin de vous pour quelque chose. Toutefois, si c'est vous qui avez besoin de quelque chose ou si vous devez organiser une rencontre pour discuter des prix, des coûts ou des défis, vous n'aurez pas de réponse, en général. Cela s'est avéré très complexe, même lorsqu'on tente d'établir un dialogue collaboratif et de trouver une solution mutuellement acceptable à certains problèmes.

  (1935)  

[Français]

    Si je vous suis bien, monsieur Donaldson, vous êtes en train de me dire que les difficultés varient en fonction de la taille de l'entreprise. C'est peut-être un peu la raison pour laquelle M. McCain disait qu'il ne peut se soucier d'un code de conduite. Plus l'entreprise est petite, plus son pouvoir de négociation est faible. Par conséquent, elle se retrouve davantage à la merci du détaillant, qui peut parfois lui imposer des conditions injustes.
    Vous ai-je bien compris?

[Traduction]

    C'est exact.

[Français]

    Je pense que nous avons fait le tour en ce qui concerne le code de conduite.
    Monsieur Frigon, j'aimerais terminer avec vous. Avez-vous un commentaire à faire? Y a-t-il un élément de vos recommandations sur lequel vous voulez insister?
    Vous avez 10 secondes pour répondre.
    Merci.
    Dans la même veine de ce qu'a mentionné plus tôt M. Donaldson, je dirais que la réalité des usines qui peuvent vendre leurs produits uniquement au Canada est très différente de celles qui peuvent vendre les leurs sur plusieurs marchés, comme les marchés internationaux.
    Comme vous le savez, les usines du secteur laitier en général peuvent vendre uniquement au Canada en raison du système de gestion de l'offre, ce qui rend donc la réalité des divers secteurs agroalimentaires très différente.
    Je ne suis pas surpris d'entendre des opinions peut-être divergentes ou...
     Merci beaucoup, messieurs Frigon et Perron.

[Traduction]

    Pour terminer, monsieur MacGregor, vous avez deux minutes et demie, mon ami.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur Donaldson, ma dernière question s'adresse à vous.
    Certains grands détaillants ont leurs propres produits de marque privée. Loblaws a bien sûr les produits Sans nom, dont le gel de prix n'a pas duré très longtemps, comme tout le monde le sait. Mon magasin d’alimentation local, Thrifty, qui appartient à Empire, a la marque Compliments.
    Comment les marques privées des détaillants... Quel est le rôle de votre entreprise dans la fabrication de ces marques et la fourniture des denrées alimentaires nécessaires à leur fabrication? Quelle incidence cela a‑t‑il sur vos relations avec les grandes chaînes d’alimentation?
    Je vous remercie de votre question. C'est une vaste question; je tâcherai donc d'être bref.
    Beaucoup de nos membres fournissent des produits de marque privée à différents détaillants. Cela représente une part importante de leurs activités et, dans certains cas, c'est simplement une entrée dans le commerce. Cela leur permet aussi de demeurer concurrentiels. Pour une entreprise qui a cette possibilité, c'est aussi un excellent moyen d'exploiter l'installation au maximum de sa capacité et d'amortir les frais généraux.
    Fait intéressant, nous avons observé un véritable changement chez les détaillants. On y trouve en effet de plus en plus de produits de marque privée sur les étagères de leurs magasins, et cette approche est en voie de devenir une priorité stratégique pour ces détaillants, ce qui réduit la place qu'occupent les produits de marque que nos membres représentent.
    D'une part, cela leur est utile; beaucoup de nos membres sont actifs dans ce créneau. D'autre part, nous sommes préoccupés par l'incidence à long terme sur les produits de marque qui seront sur les étagères. Beaucoup d'acteurs font la fabrication de marques privées. Nous savons que les détaillants ne vendront pas les produits de marque des fabricants et privilégieront leur marque privée. Il y a des choix difficiles à faire.
    Merci.
    Merci, monsieur MacGregor.
    Merci, monsieur Donaldson.
    Monsieur McCain, j'ai une question à vous poser au sujet de la compétitivité réglementaire.
    Vous avez parlé d'une tonne de plumes. La réponse réside‑t‑elle dans l'adoption d'un élément ou d'une optique de compétitivité avec nos agences de réglementation ou nos organismes fédéraux? Je comprends de votre réponse à M. Steinley qu'on pourrait examiner certains aspects et retirer quelques plumes, mais qu'on aurait toujours une tonne de plumes.
    Comment peut‑on atténuer cela? S'agit‑il simplement d'essayer de créer une optique dans de multiples organismes?
    Je pense que c'est vrai. Je pense que le fil conducteur, pour ainsi dire, par rapport à tous les cadres réglementaires avec lesquels nous avons dû composer au fil de nombreuses années, consiste simplement à demander qu'on applique une optique concurrentielle. On ne parle pas d'une décision concurrentielle, mais simplement de l'application d'une optique concurrentielle dans le processus de prise de décisions. Je pense que cela contribuerait énormément à régler un problème culturel et systémique dans l'ensemble des cadres réglementaires du pays.

  (1940)  

    Merci beaucoup.
    Chers collègues, je vous remercie de cette première discussion.
    Permettez-moi, en votre nom à tous, de remercier nos témoins. Nous avons accueilli M. Philip Vanderpol et M. Mathieu Frigon, de l'Association des transformateurs laitiers du Canada; M. James Donaldson, d'Aliments et boissons Canada, et M. Michael McCain, des Aliments Maple Leaf inc. Je vous remercie de vos témoignages. Merci pour votre travail dans le domaine de l'agriculture. Ce fut une discussion passionnante.
    Chers collègues, n'allez pas trop loin. Nous passerons à notre deuxième groupe de témoins dans deux ou trois minutes. Nous allons faire une brève pause pour les accueillir.

  (1940)  


  (1945)  

    Chers collègues, je vous remercie de votre patience pendant que nous tentions de réunir tout le monde.
    Nous allons commencer la deuxième partie de la séance. Nous avons quelques minutes de retard, mais nous ferons de notre mieux — moi compris — pour vous rattraper.
    Nous accueillons aujourd'hui les représentants de trois organismes différents. Représentant le Bureau de la concurrence du Canada, nous avons Mme Ann Salvatore, sous-commissaire à la Direction des cartels; M. Anthony Durocher, sous-commissaire à la Direction générale de la promotion de la concurrence; Mme Krista McWhinnie, sous-commissaire à la Direction des pratiques monopolistiques.
    Je vous souhaite la bienvenue à tous les trois, ici dans la salle.
    Nous entendrons également M. Mark Schaan, sous-ministre adjoint principal du Secteur des stratégies et politiques d'innovation au ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique.
    Représentant Statistique Canada, nous avons Mme Chris Li, directrice par intérim de la Division des prix à la consommation, et M. Matthew MacDonald, directeur adjoint de la Division des prix à la consommation, qui témoignent par vidéoconférence ce soir.
    Je vous souhaite la bienvenue en ligne, pour ainsi dire.
    Chaque organisme disposera de cinq minutes pour faire une déclaration liminaire. Je vais commencer par le Bureau de la concurrence.
    La parole est à vous.

[Français]

    Je vous remercie de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui. Comme l'a mentionné le président, je m'appelle Anthony Durocher et je suis sous-commissaire de la Direction générale de la promotion de la concurrence au Bureau de la concurrence. Je suis accompagné aujourd'hui de mes collègues Ann Salvatore, sous-commissaire de la Direction des cartels, et Krista McWhinnie, sous-commissaire de la Direction des pratiques monopolistiques.
    Le Bureau est un organisme indépendant d'application de la loi qui protège la concurrence et en fait la promotion au bénéfice des consommateurs et des entreprises du Canada. Nous le faisons parce que la concurrence favorise la baisse des prix et l'innovation tout en alimentant la croissance économique.
    Nous assurons et contrôlons l'application de la Loi sur la concurrence, ce qui signifie que nous enquêtons sur la conduite des affaires dans quatre domaines principaux: l'abus de puissance commerciale; les fusions anticoncurrentielles; la fixation des prix; et les pratiques commerciales trompeuses.
    Le Bureau fait également la promotion de règles et règlements gouvernementaux qui favorisent la concurrence.

[Traduction]

    Nous avons entendu les préoccupations des Canadiennes et des Canadiens au sujet du prix élevé des produits d'épicerie. Nous avons donc lancé, le 24 octobre dernier, une étude de marché sur la concurrence entre les magasins d'alimentation au Canada. Cette étude ne constitue pas une enquête sur des allégations précises d'irrégularités. Nous cherchons plutôt de manière proactive les moyens que peuvent employer les administrations gouvernementales pour améliorer la concurrence dans le secteur. En effet, une concurrence accrue signifie des prix plus bas, plus de choix et plus de commodité pour les consommateurs. Nous prévoyons publier nos conclusions et recommandations en juin.
    En plus de cette étude, nous continuerons à appliquer vigoureusement la Loi sur la concurrence dans l'intérêt de toute la population canadienne.
    Chaque fois que nous trouvons des preuves que quelqu'un fait quelque chose qui contrevient à la Loi, nous n'hésitons pas à faire enquête et à prendre les mesures qui s'imposent. Je tiens à souligner que des prix élevés et des bénéfices élevés ne constituent pas en soi une infraction à la Loi sur la concurrence, qui établit des critères précis que le Bureau doit respecter lorsqu'il examine un cas.
    Nous sommes également guidés par la jurisprudence du Tribunal de la concurrence et des tribunaux. Le Bureau mène des enquêtes approfondies et rigoureuses, au cours desquelles il suit les éléments de preuve et détermine la marche à suivre.
    Certaines personnes se demandent si le Bureau a suffisamment de « mordant » pour accomplir son travail. L'an dernier, le gouvernement a présenté d'importantes modifications à la Loi sur la concurrence et a également lancé une consultation approfondie sur les lois canadiennes sur la concurrence. Cette consultation est en cours et le Bureau continuera à promouvoir une réforme responsable. Nous devons nous assurer que la Loi sur la concurrence contient les dispositions voulues et que nous sommes dotés des outils voulus pour protéger et promouvoir la concurrence au sein de l'économie canadienne.
    Avant de répondre à vos questions, je tiens à préciser que la Loi exige que le Bureau conduise ses enquêtes en privé et que les renseignements qu'il obtient restent confidentiels. Cette obligation peut nous empêcher de discuter de certaines enquêtes passées ou en cours.
    Je vous remercie de cette occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Nous sommes impatients de répondre à vos questions.

  (1950)  

    Merci beaucoup, monsieur Durocher.
    Nous passons maintenant au ministère de l'Innovation, des Sciences et du Développement économique. Monsieur Schaan, la parole est à vous pour cinq minutes, tout au plus.

[Français]

    Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que tous les membres du Comité, de m'avoir invité à comparaître devant vous ce soir pour parler de l'inflation des prix alimentaires.
    Je m'appelle Mark Schaan et je suis sous-ministre adjoint principal du Secteur des stratégies et politiques d'innovation à Innovation, Sciences et Développement économique Canada.

[Traduction]

    Bien que les politiques du gouvernement fédéral en matière d'alimentation soient plus étroitement associées à mes collègues d'Agriculture et Agroalimentaire Canada, il ne fait aucun doute que l'alimentation a de nombreuses dimensions et est d'une importance cruciale qui transcende les ministères.
    En plus d'englober plusieurs industries et marchés distincts dans notre économie moderne et mondialisée, la production, le transport et la distribution de denrées alimentaires sont importants pour plusieurs raisons, notamment parce qu'ils fournissent un intrant fondamental pour tous les travailleurs, producteurs et consommateurs du Canada, en plus d'être une source d'emplois et d'investissements considérables pour notre économie.
    C'est là que mon ministère entre en scène: notre travail est axé sur les règles et les ressources qui permettent à notre économie de fonctionner et de prospérer, pour répondre aux besoins de la population canadienne.
    Il est bien connu à ce moment‑ci que les causes de l'inflation, au sein de l'industrie alimentaire et ailleurs, dépassent largement les frontières canadiennes. Je suis sûr que ce comité a beaucoup entendu parler de la guerre, des événements météorologiques et des effets de la pandémie de COVID‑19 sur les habitudes de consommation et la capacité d'expédition, et que vous n'avez pas besoin que je le répète.
    Compte tenu de la nature mondiale de ces phénomènes, les solutions devront être multifactorielles, reconnaissant que de nombreux acteurs devront faire leur part pour rendre la situation plus gérable pour la population canadienne.
    Les réponses macroéconomiques incombent à Finances Canada et à la Banque du Canada. Les questions d'emploi sont traitées par les ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux ayant ce portefeuille. Quant à nous, à ISDE, nous essayons de garantir des marchés innovants et compétitifs qui offrent les meilleurs résultats et avantages aux entreprises et aux consommateurs, y compris des prix abordables, quel que soit l'état général de l'inflation.

[Français]

     Tout d'abord, j'aimerais discuter de notre rôle dans le bon fonctionnement des chaînes d'approvisionnement. La division des pouvoirs, au Canada, empêche le gouvernement fédéral de simplement dicter des règles commerciales pour des industries spécifiques, à l'exception de quelques domaines attitrés par la Constitution.
    Cependant, nous nous sommes associés à Agriculture et Agroalimentaire Canada pour convoquer les participants de différentes étapes de la chaîne d'approvisionnement alimentaire afin d'élaborer un code de conduite régissant leur relation commerciale.

[Traduction]

    Les détails de ce projet sont encore en cours de finalisation, mais grâce au travail acharné d'un groupe directeur de l'industrie, ainsi que de plusieurs gouvernements provinciaux, un cadre a été mis en place pour promouvoir des pratiques commerciales équitables et la sécurité contractuelle. Cela contribuera à assurer une relation équitable et prospère entre les fabricants de produits alimentaires et les épiciers qui offrent leurs produits au public.
    Le code de conduite énoncera des principes et des définitions claires, sous réserve de divers mécanismes de règlement des différends et d'arbitrage. Cela aidera à atténuer certains des problèmes qui sont apparus entre les épiciers et leurs fournisseurs. Le code ne traite pas directement des prix à la consommation, pour être très clair, mais l'importance de chaînes d'approvisionnement stables et saines ne peut être sous-estimée pour fournir un marché alimentaire de détail compétitif où les clients ont le choix entre de nombreuses offres différentes au meilleur prix disponible.

  (1955)  

[Français]

    Mon ministère assure également l'intendance de la Loi sur la concurrence. Cette loi établit un cadre législatif pour lutter contre les pratiques commerciales qui nuisent à la concurrence, telles que la collusion entre concurrents, les fusions qui conduisent à une concentration indue ou les mesures prises par des entreprises dominantes pour saper le processus concurrentiel.

[Traduction]

    Je mentionne ce régime, car ses règles générales ont une incidence sur le comportement des entreprises et peuvent jouer un rôle important dans la promotion d’une dynamique concurrentielle. Plus précisément, le ministère ne possède pas à ce stade de preuve confirmant ou infirmant toute allégation d'activités anticoncurrentielles dans les secteurs alimentaires, ce qui serait de toute façon une question relevant de la compétence du Bureau de la concurrence et des tribunaux. Mais le secteur canadien de l'alimentation est relativement concentré, ce qui signifie qu'il est primordial de rester vigilant et prêt à réagir à toute menace à la concurrence, particulièrement dans un environnement inflationniste qui pourrait servir à couvrir des activités illégales.
    À cet égard, le gouvernement a pris et continue de prendre des mesures pour renforcer notre régime d'application de la loi en matière de concurrence. En 2022, la Loi sur la concurrence a été renforcée par une série de modifications visant à combler des lacunes et à aligner davantage le Canada sur ses partenaires internationaux. Par exemple, à la suite de préoccupations concernant une éventuelle coordination de la fixation des salaires dans l'industrie de l'alimentation au cours des premières étapes de la pandémie, la Loi a été modifiée pour garantir que les accords entre différents employeurs pour s'entendre sur les salaires ou les conditions de travail, nuisant ainsi à la concurrence pour la main-d'œuvre, soient traités de la même manière que les accords préjudiciables sur les prix.
    D'autres modifications ont mis à jour les sanctions maximales pour les rendre proportionnelles aux avantages tirés d'un comportement anticoncurrentiel ou trompeur, afin de s'assurer que les pénalités sont significatives et non simplement le coût de faire des affaires. La pratique de la tarification au goutte‑à‑goutte, visant à cacher des frais obligatoires pour rendre la comparaison de prix plus difficile, a été clairement reconnue comme une pratique trompeuse.
    De nombreuses autres mises à jour ciblées, mais importantes, ont ainsi été apportées à la Loi pour une amélioration à court terme.
    Aujourd'hui, une consultation approfondie est en cours sur des questions plus larges et plus ouvertes portant sur la façon dont la Loi sur la concurrence devrait servir l'économie moderne.
    Nous allons devoir en rester là, monsieur Schaan. Merci. Nous n'avons malheureusement plus de temps. Je vous ai même laissé quelques secondes de plus, mais je sais que mes collègues vous poseront de nombreuses questions et que vous aurez le temps de nous en dire plus dans vos réponses.
    Nous allons maintenant entendre Mme Li ou M. MacDonald, de Statistique Canada. Vous avez la parole.
    Monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du Comité, merci.
    Je vous remercie de m'avoir invité à témoigner devant vous ce soir.
    Je suis Matthew MacDonald, directeur adjoint de la Division des prix à la consommation. Je suis accompagné de Chris Li, directrice de la Division des prix à la consommation.
    Depuis le début de 2021, l'augmentation des prix de l'essence, du logement, des aliments et des biens de consommation durables, comme les automobiles, exerce une pression à la hausse sur l'inflation des prix à la consommation. Au cours de cette période, nous avons connu une pandémie mondiale, des perturbations de la chaîne d'approvisionnement, des phénomènes météorologiques extrêmes, des conflits géopolitiques, un faible taux de chômage, des pénuries de main-d'œuvre, des coûts d'importation et de transport plus élevés et une forte demande des ménages.
    Pendant que le rythme de croissance de l'inflation s'accélérait en 2022, les Canadiens ont déclaré être touchés le plus par la hausse des prix des aliments, puis par celle des prix des transports et du logement. À la mi‑2022, l'inflation des prix à la consommation avait augmenté pour atteindre son rythme le plus rapide enregistré en quatre décennies et enregistrer un sommet de 8,1 % en juin. Bien que le taux d'inflation global ait diminué à la fin de 2022 en raison de la baisse des prix de l'essence, les principales sources d'inflation, comme les aliments, ont montré peu de signes de ralentissement.
    En janvier 2023, les prix ont augmenté d'une année à l'autre dans toutes les catégories d'aliments, dont la viande, les légumes, les produits laitiers et les produits de boulangerie. Le prix des aliments a été influencé par des coûts de production déjà élevés, comme l'énergie et les engrais, ainsi que par des événements météorologiques imprévisibles, des contraintes d'approvisionnement liées à la grippe aviaire et une dépendance générale à l'égard des importations.
    Les Canadiens de partout au pays ont été touchés par l'inflation des prix, mais à des degrés divers, selon les habitudes de consommation et les défis liés à la chaîne d'approvisionnement.
    D'un point de vue international, tous les pays du G7 ont aussi été touchés. Comparativement aux autres pays, le taux d'inflation du Canada a été légèrement inférieur, y compris par rapport à celui des États-Unis. Les pressions à l'origine de l'inflation au Canada et dans d'autres pays du G7 se sont exercées simultanément et de façon plus prononcée, ce qui a entraîné une hausse généralisée des prix des aliments dans le monde entier.
    L'obtention de tous ces renseignements est rendue possible grâce à l'Indice des prix à la consommation, ou IPC, lequel est produit chaque mois par Statistique Canada et qui est conforme aux normes internationales. L'Indice des prix à la consommation suit l'évolution des prix à la consommation d'un panier fixe de biens et de services d'une quantité et d'une qualité constantes. Divers détails sur les produits et les régions sont publiés selon huit grandes catégories de produits, dont les trois plus importantes représentent plus de la moitié du panier des dépenses. Il s'agit du logement, des aliments et des transports, parce que, collectivement, nous dépensons la plus grande partie de notre argent pour nous loger, nourrir nos familles et nous déplacer.
    Statistique Canada s'est engagé à renforcer l'Indice des prix à la consommation et d'autres indicateurs économiques en tirant parti d'autres sources de données plus récentes et de meilleure qualité. En ce qui concerne les prix des aliments, nous nous servons beaucoup des données de lecteurs optiques, parfois appelées données sur les transactions aux points de vente, qui comprennent des millions de prix d'aliments reçus directement des chaînes d'alimentation partout au Canada. Cette approche est considérée comme la norme d'excellence par les organismes statistiques internationaux dans cette catégorie de dépenses.
    De plus, l'IPC est passé d'une mise à jour bisannuelle des paniers à une mise à jour annuelle, ce qui signifie que nous mettons à jour les habitudes de dépenses des consommateurs chaque année pour nous assurer que les fluctuations des prix reflètent fidèlement leurs préférences.
    Nous continuons également d'élaborer de nouveaux produits statistiques, comme notre portail en ligne de l'IPC et notre Calculateur de taux d'inflation personnel, qui permettent aux particuliers d'entrer leurs propres dépenses pour voir en quoi leur taux d'inflation personnel diffère des moyennes de l'IPC.
    Comme vous pouvez le constater, l'intérêt porté à nos données dans ce contexte de forte inflation n'a jamais été aussi grand. Nous travaillons continuellement avec les Canadiens pour leur offrir un meilleur accès à notre information et améliorer leur littératie des données et leur capacité à les interpréter.
    Plus précisément, en plus de l'IPC, l'organisme diffuse un produit statistique complémentaire appelé le tableau des prix moyens, qui contient des données qui semblent avoir été supprimées. Il s'agit des prix moyens qui s'appliquent à de nombreux produits alimentaires pour une unité de mesure standard et qui ont longtemps été disponibles et qui le sont encore aujourd'hui.
    Il y a un an, Statistique Canada a fusionné le tableau des prix de détail moyens nationaux et le tableau des prix de détail moyens mensuels pour certains produits afin de créer un produit plus représentatif et exhaustif. Cette fusion a permis d'intégrer des données de points de vente de meilleure qualité, dont la portée et le niveau de détail ont été améliorés. Le tableau précédent comportait 52 produits limités à l'échelle nationale, alors que le tableau actuel présente 110 produits offerts à l'échelle provinciale et nationale.
    Je vous remercie encore une fois de m'avoir donné l'occasion de vous rencontrer aujourd'hui.

  (2000)  

    Merci, monsieur MacDonald.
    Nous allons maintenant passer aux séries de questions.
    Chers collègues, nous disposons d'environ 36 minutes. Nous allons donc commencer par une première série de six minutes. La deuxième sera une série de quatre minutes pour les conservateurs et les libéraux, et de deux minutes pour le NPD et le Bloc. Nous avons eu de très bonnes discussions musclées, mais je crois qu'il s'agit de la meilleure façon de procéder.
    Madame Rood, vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de comparaître devant nous aujourd'hui.
    Cela fait des années que je sonne l'alarme et que je dis que 80 % du marché des épiceries au Canada est contrôlé par seulement cinq grandes chaînes de vente au détail. L'oligopole de l'industrie de l'épicerie maximise les profits tout en forçant les agriculteurs et les producteurs à vendre à perte, ce qui contribue directement à la disparition des fermes maraîchères au Canada.
    Bien que le Bureau de la concurrence connaisse bien la situation d'abus de position dominante, j'aimerais l'expliquer aux gens qui nous regardent à la maison: il s'agit d'une situation où une société occupe une position dominante sur le marché et pose des gestes anticoncurrentiels, ce qui entraîne des effets négatifs sur les entreprises concurrentes ou qui donne lieu à une diminution de la concurrence.
    Ma question à l'intention des représentants du Bureau est la suivante: étant donné les profits records des épiciers, les prix exorbitants que doivent payer les consommateurs et l'augmentation des frais exigés aux agriculteurs pour avoir le privilège de vendre leurs produits dans les magasins d'alimentation, est‑ce qu'il y aurait matière à enquête sur l'abus de position dominante dans l'industrie de l'épicerie?
    Comme je l'ai dit dans mon discours préliminaire, nous étudions actuellement la concurrence dans le secteur de l'épicerie dans le but de faire des recommandations au gouvernement sur la façon d'accroître la concurrence pour le bien des consommateurs et de l'économie dans son ensemble.
    En ce qui a trait à une enquête des organismes d'application de la loi sur l'abus de position dominante, nous misons sur les faits et les données probantes dont nous disposons, et nous allons certainement prendre les mesures nécessaires si nous trouvons des preuves d'actes répréhensibles, par l'entremise de cette étude ou par d'autres façons.
    Par le passé, nous avons pris des mesures dans le secteur de l'épicerie. Nous avons notamment réalisé une enquête approfondie sur les pratiques de Loblaw avec certains fournisseurs. L'enquête nous a permis d'apporter des précisions et d'orienter l'industrie, afin de tracer la ligne entre les comportements anticoncurrentiels — qui entraîneraient la prise de mesures par le Bureau — et des comportements acceptables. Nous sommes très vigilants à l'égard des comportements anticoncurrentiels.

  (2005)  

    Merci.
    J'ai une question au sujet de l'étude que vous réalisez. Il ne s'agit pas d'une enquête, mais bien d'une étude; est-elle transparente? Est‑ce que nous avons accès à ces renseignements maintenant, alors que vous effectuez le travail, ou est‑ce que nous devons attendre que l'étude soit terminée?
    Nous attendons la publication du rapport en juin. Nous avons lancé notre enquête en octobre. Nous avons un portail public qui présente certains renseignements sur notre étude, et nous avons obtenu les rétroactions de 500 Canadiens à son sujet. Ils se préoccupent du prix des aliments. Nous publierons nos résultats et nos recommandations en juin.
    Est‑ce que le Bureau de la concurrence enquête sur les pratiques des grands épiciers pour d'autres raisons que celles associées à cette étude?
    En règle générale, nos études et enquêtes sont personnelles et confidentielles en vertu de la loi. Nous avons au moins une enquête publique en cours.
    Nous avons beaucoup entendu parler du code de conduite des épiciers. Dans la première partie de la réunion, Michael McCain nous a dit que ce code n'aiderait en rien les consommateurs. Je me demande — et ma question ne s'adresse pas nécessairement au Bureau de la concurrence, mais plutôt au ministère — si vous pouviez nous expliquer les mesures que vous prendriez pour donner du mordant à un tel code de conduite, afin que les conséquences en cas de manquement soient importantes.
    Le code de conduite établira des principes et présentera des définitions claires; il prévoira divers mécanismes de règlement des différends et d'arbitrage. Le projet est en cours. Il compte la participation de nos collègues d'Agriculture et Agroalimentaire Canada et de l'industrie. D'autres intervenants de la chaîne d'approvisionnement nous ont fait valoir que les petits fournisseurs voulaient une certitude contractuelle et que des mécanismes soient en place pour l'industrie du détail. Ainsi, l'objectif du règlement exécutoire et de certains volets du règlement des différends est de permettre à ces industries de participer à la chaîne d'approvisionnement.
    J'ai une dernière question pour le Bureau de la concurrence. Il y a certains groupes d'épiciers indépendants qui réussissent à tirer leur épingle du jeu. C'est le cas d'une épicerie locale, Farm Boy, qui a vu le jour ici, à Ottawa. Souvent, les grands épiciers rachètent ces magasins. Dans ce cas‑ci, je crois que c'était Empire Foods. Il ne reste que très peu d'épiceries indépendantes au pays; je crois que c'est moins de 34 %.
    Ne croyez-vous pas que la situation est problématique pour les consommateurs canadiens, surtout lorsqu'on sait que les grands épiciers se sont déjà adonnés à des pratiques comme celles du scandale de la fixation du prix du pain?
    Dans le cadre de notre étude sur le marché de l'épicerie, nous tentons surtout de comprendre comment nous pouvons faire tomber les obstacles qui nuisent à l'entrée des détaillants sur le marché et à l'expansion de leurs commerces, afin de faciliter l'ouverture de nouveaux magasins dans tous les domaines.
    En ce qui a trait aux acquisitions et aux fusions dans l'industrie, nous avons pris des mesures par le passé pour préserver la concurrence. Je crois que dans le cadre des consultations actuelles sur la Loi sur la concurrence au Canada, la discussion se centre notamment sur nos lois en matière de fusion et les outils dont dispose le Bureau de la concurrence pour freiner les fusions qui peuvent nuire à l'économie canadienne.
    Merci, madame Rood et monsieur Durocher.
    Nous allons maintenant entendre Mme Taylor Roy, mais j'ai oublié de vous dire que M. Bains siégeait au Comité aujourd'hui en remplacement de Mme Valdez. Nous sommes heureux de vous voir, monsieur. Bienvenue au comité de l'agriculture. Comme vous pouvez le constater, il s'agit d'un comité vivant et formidable. Bienvenue.
    Madame Taylor Roy, vous disposez de six minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins de leur présence.
    La situation n'est pas unique au Canada. De nombreuses études ont été réalisées ailleurs dans le monde sur le sujet.
    J'ai examiné les questions abordées dans l'étude que vous réalisez présentement. Vous dites que la politique gouvernementale est au coeur de la concurrence. On n'entend pas souvent dire que les gouvernements peuvent être le moteur de la concurrence, mais dans les études qui ont été réalisées dans d'autres administrations ou dans d'autres pays, avez-vous dégagé des mesures qui ont pu accroître la concurrence dans ces marchés? Certaines de ces études ont été réalisées il y a plus de 10 ans.

  (2010)  

    Merci. Voilà une excellente question.
    De manière générale, les politiques gouvernementales peuvent tout à fait favoriser la concurrence. Dans tout secteur réglementé de l'économie, la réglementation gouvernementale joue un grand rôle pour favoriser le démarrage ou l'expansion des entreprises. Un témoin l'a mentionné relativement à la concurrence réglementaire au Canada. La concurrence est primordiale.
    Au sujet précis des études sur le secteur de l'alimentation au détail menées par nos pairs à l'international, il est évident que nous avons discuté avec eux dans le cadre de notre étude pour mieux comprendre les enjeux qu'ils ont examinés. Chaque marché est unique, bien qu'il y ait des similarités.
    Par exemple, nous nous penchons sur ce qu'on appelle les clauses restrictives, qui sont des restrictions sur l'utilisation possible de biens immobiliers dans un marché donné. Souvent, ces restrictions peuvent empêcher un nouveau magasin de s'établir et de reprendre des locaux abandonnés. Il s'agit d'un enjeu qu'ont examiné de nombreux pays, et nous le faisons aussi pour notre contexte.
    L'accès aux grossistes est un autre enjeu courant dans bien des marchés d'alimentation au détail. Il est essentiel pour les détaillants d'être en mesure de se procurer des produits alimentaires à des prix concurrentiels pour se tailler une place. Il s'agit certainement d'un enjeu actuel partiellement lié à la discussion autour du code de conduite, qui est un enjeu entièrement distinct du sujet de notre étude.
    Croyez-vous que le code de conduite pourra favoriser une plus grande concurrence?
    Nous espérons certainement qu'il sera conçu de manière à favoriser la concurrence le plus possible. Ce projet n'a pas de lien avec l'application de la loi sur la concurrence, mais dans la mesure où un code de conduite peut aider à promouvoir la transparence et la prévisibilité, ce qui peut aider à accroître la certitude quant aux décisions relatives aux investissements et à l'innovation, il s'agit d'un bon outil pour la concurrence.
    À nos yeux, il faut attendre de voir à quoi ressemblera le produit final.
    Alors, croyez-vous qu'il devrait être obligatoire d'y adhérer?
    Je ne crois pas que nous pouvons émettre un avis, parce que nous n'avons pas approfondi la question du code de conduite. Je répète que notre rôle consiste à appliquer la Loi sur la concurrence. Certes, nous connaissons les problèmes qui ont mené à la création du code de conduite, mais quant au débat à savoir si l'adhésion devrait être volontaire ou canalisée, nous ne nous sommes pas penchés sur cette question.
    Je reviens aux propos de certains témoins précédents, provenant de chaînes d'alimentation. Il est très ardu d'obtenir des données financières détaillées sur des secteurs précis, ou même de comparer le secteur de l'alimentation au détail et d'autres secteurs au sein des mêmes chaînes, alors il est difficile d'analyser ce qui se passe. J'ai remarqué que vous aviez aussi mentionné cette contrainte dans votre étude.
    À votre avis, comment peut‑on éliminer cette difficulté? D'après ce que je comprends, les données que vous examinez sont en grande partie confidentielles. Selon vous, avons-nous besoin d'outils plus contraignants, afin d'obtenir des données plus détaillées et de comprendre ce qui se passe?
    Merci pour la question.
    En effet, cette difficulté entrave la capacité du Bureau de la concurrence à mener des études de marché. Lorsque nous appliquons la loi et procédons à des enquêtes, nous sommes en mesure de recueillir les renseignements dont nous avons besoin pour prendre des décisions. Lorsque nous entreprenons une étude de marché pour tenter d'éclairer le gouvernement quant à ses politiques, nous n'avons pas la même capacité de recueillir ces données et renseignements. Nous travaillons à partir de renseignements d'ordre public ou de ceux qu'on nous fournit volontairement, ce qui limite manifestement la profondeur de nos analyses et la qualité de nos recommandations.
    La solution est la Loi sur la concurrence. Il s'agit d'un problème dont on discute depuis un bon moment. Je crois que l'enjeu est pertinent pour la consultation actuelle sur la Loi sur la concurrence. Quel type de pouvoir devrait avoir le Bureau pour accomplir ce travail? À notre avis, en tout respect, il est très important que nous soyons capables d'ordonner la production d'information pour mener ce type d'études convenablement et informer le gouvernement de nos conclusions.
    J'ai une dernière question.
    Au comité de l'environnement, on a beaucoup parlé de points chauds, des groupes vulnérables et des mesures à prendre pour répondre aux préoccupations environnementales. En ce qui concerne la concurrence dans le secteur de l'alimentation au détail en particulier, la clientèle captive et les groupes vulnérables sont-ils pris en compte?
    Je parle des aînés, des étudiants ou des personnes qui ne peuvent pas se déplacer dans d'autres secteurs. Est‑ce que l'on tient compte d'eux?

  (2015)  

    Oui, exactement. Quand nous analysons, par exemple, la fusion d'épiciers au détail, il s'agit d'une analyse de marché local. Nous examinons la demande de façon détaillée. S'il y a des aspects précis d'un groupe de la population qui le rendent captif ou vulnérable, ils sont pris en compte pour proposer une solution de remplacement et des lieux où ces personnes peuvent aller pour faire l'épicerie.
    Merci, madame Taylor Roy. Merci, madame McWhinnie.
    Nous passons maintenant à M. Perron.

[Français]

     Monsieur Perron, vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence. Nous leur en sommes très reconnaissants.
    Je vais commencer par vous, monsieur Durocher. Quand vous analysez des secteurs en général, abstraction faite du secteur alimentaire, y a-t-il un taux de compétitivité ou de concurrence que le Bureau de la concurrence juge optimal pour assurer de bons prix? Y a-t-il des données? Cela dépend-il du secteur?
    Merci de votre question.
    Cela dépend du secteur; il n'y a pas de seuil magique.
    Nous avons des lignes directrices pour les fusions, par exemple. Un seuil de 35 % est un indicateur d'éventuels problèmes de concurrence. Ainsi, dans le cadre d'une fusion, si les parts de marché dépassaient 35 %, il y aurait un problème. Selon notre loi, on ne peut pas contester une fusion seulement en raison des seuils de concentration.
    Il faut vraiment s'y prendre secteur par secteur. Cela dépend des faits et des données. La concentration est un facteur important dans les analyses de concurrence.
    Si je vous suis bien, vous êtes en train de me dire que, si cinq joueurs contrôlent 80 % du marché dans le secteur alimentaire, disons, cela ne serait pas considéré comme hors-norme ou nuisible à la fixation des prix, selon vos critères.
    C'est sûr et certain qu'il s'agit d'un marché assez concentré. Dans ce type de marché, il faut être plus vigilant en ce qui concerne les agissements anticoncurrentiels, comme la concentration par le biais d'une fusion ou le complot potentiel. C'est sûr qu'il faut être plus vigilant dans ces secteurs.
    Merci.
     Lorsque vous évaluez la concurrence relativement aux cinq joueurs qui contrôlent 80 % du marché, par exemple, regardez-vous l'effet que cela peut avoir sur les relations que peuvent avoir les petits fournisseurs avec ces grands fournisseurs? On a parlé plus tôt de la pratique consistant à faire payer des frais pour les points de fidélité ou des pénalités pour de la marchandise qui ne serait pas vendue, entre autres.
    S'agit-il de choses qui vous préoccupent?
    Tout à fait.
    Dans presque tous les secteurs, on se penche autant sur le volet consommateur que sur le volet fournisseur, c'est-à-dire autant sur le marché en aval que sur le marché en amont. Selon le mot d'ordre dans l'industrie, c'est une question de monopsone. C'est le pouvoir d'achat que peut avoir un acheteur avec des fournisseurs. Nous pouvons prendre cet aspect en considération dans le contexte d'une fusion, par exemple.
    Dans le contexte où ces cinq grands acteurs achètent des fournisseurs indépendants, comme Mme Rood l'a mentionné tantôt, cette fusion vous préoccupe-t-elle? Pourrait-on bloquer une telle transaction même si ces acteurs avaient moins de 35 % de la part du marché?
     Avez-vous le pouvoir de bloquer ces fusions?
    J'ai l'impression — corrigez-moi si je me trompe — que vous faites des études, mais que vous n'avez pas beaucoup de pouvoirs réels.
    Les études de marché sont un peu séparées de notre travail de mise en application de la loi, pour lequel nous sommes habilités à recueillir l'information.
    En ce qui concerne les fusions, c'est le test juridique qui permet de déterminer si une fusion peut diminuer ou empêcher sensiblement la concurrence. Pour ce qui est de savoir si nous avons suffisamment de pouvoirs réels, c'est une question, je pense, que le gouvernement évalue présentement dans le cadre de son travail. Au Bureau, nous prévoyons déposer plusieurs recommandations traitant des façons d'améliorer notre régime pour être en mesure de bloquer les fusions pouvant nuire aux consommateurs ou à l'économie.
    J'aime bien cet échange et le fait que vous devanciez quelques questions.
    Le Bureau a récemment publié un avis d'étude de marché dans lequel on dit que vous avez moins de pouvoirs que les institutions américaines, notamment, pour recueillir de l'information. Des représentants de chaînes d'alimentation qui ont comparu devant nous ont dit que les états financiers étaient très opaques. On regroupe une foule de marges et on nous dit que le secteur pharmaceutique est celui qui a permis une hausse, mais que, dans le secteur alimentaire, on n'a pas fait énormément d'argent. Or il nous est impossible de vérifier cela. Il faudrait que vous puissiez le faire.
    Si vous n'aviez qu'une seule recommandation à faire au Comité pour améliorer cette situation, quelle serait-elle?

  (2020)  

    Dans ce contexte, je recommanderais que l'on se penche sur la concentration ainsi que sur les préoccupations des Canadiennes et des Canadiens. Je dirais qu'il y en a deux et qu'elles concernent la Loi sur la concurrence. Il faudrait examiner les pouvoirs dont nous disposons afin de recueillir de l'information pour les études de marché. Il est clair que nous sommes restreints à cet égard.
    Deuxièmement, il faudrait examiner notre régime, les lois traitant des fusions, pour garantir que nous disposions des moyens et des tests adéquats pour empêcher les fusions pouvant nuire à la concurrence, surtout dans les secteurs concentrés.
    Si je comprends bien — corrigez-moi si je me trompe —, l'enquête que vous menez actuellement ne porte pas vraiment sur les mécanismes de fixation des prix, mais sur la situation.
    Or des témoins nous ont dit qu'il serait important que le Bureau de la concurrence fasse une enquête sur les mécanismes de fixation des prix.
    J'aimerais entendre votre point de vue là-dessus.
    Je voudrais clarifier un point. Quand vous parlez de fixation des prix, vous ne parlez pas nécessairement de complot.
    Non, je parle de négociations déloyales, par exemple.
    Nous avons examiné cette question par le passé, particulièrement dans le cadre de notre enquête sur Loblaw et ses pratiques avec les fournisseurs.
    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Durocher, mais le temps de parole du député est écoulé.
    Par contre, monsieur Perron, vous disposerez plus tard de deux autres minutes pour revenir sur cette question.

[Traduction]

    Monsieur MacGregor, vous avez six minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président, et je remercie les témoins de comparaître aujourd'hui au Comité.
    J'aimerais démarrer ma série de questions avec le Bureau de la concurrence pour bien comprendre les différences entre une étude et une enquête.
    Votre publication affirmait que « contrairement à bon nombre de ses homologues étrangers, le Bureau n'a pas le pouvoir de contraindre les entreprises à fournir de telles informations pour cette étude. » Une liste de pays figure à l'annexe, y compris les États-Unis, le Mexique, la Nouvelle-Zélande et l'Union européenne.
    Certains des renseignements que vous pourriez glaner grâce à cet exercice pourraient potentiellement mener à une enquête. J'imagine qu'une entreprise, parce qu'elle n'est pas contrainte de fournir ces renseignements, pourrait refuser de fournir de l'information essentielle qui pourrait justifier que vous lanciez une enquête.
    En tant que décideurs politiques, comment pouvons-nous régler ce problème potentiel?
    Le fait de ne pas pouvoir contraindre certaines parties à nous fournir des renseignements a une incidence sur ce que nous pouvons découvrir et qui pourrait nourrir une enquête.
    Je me permets de revenir au principal problème: notre étude de marché n'est pas vraiment propice pour examiner des allégations d'actes répréhensibles. Nous ne cherchons pas nécessairement des actes pouvant être considérés comme des infractions en vertu de la Loi. Nous cherchons à émettre des recommandations au gouvernement sur la manière d'accroître la concurrence.
    Cela étant dit, si nous obtenons de l'information problématique, elle pourrait justifier que nous enquêtions davantage. Dans ces cas, nous aurions accès à plus de pouvoirs, comme celui d'assigner à comparaître, de perquisitionner et de saisir au motif de possibles infractions criminelles.
    Je pense que la principale solution consiste à revoir la Loi sur la concurrence. Les consultations actuelles du gouvernement se prêtent bien à discuter de la possibilité, au Canada — comme c'est le cas pour de nombreux pairs partout dans le monde —, de nous donner les moyens d'obtenir ces renseignements et de recueillir des données et de l'information pour nourrir nos études.
    Merci.
    Je comprends les recommandations que vous avez faites, alors je ne vais pas répéter la même question. Je pense avoir une idée de ce que vous voulez sur le plan législatif. Bien sûr, nous prenons acte des modifications récentes à la Loi sur la concurrence. J'aimerais orienter davantage ma question vers les ressources du Bureau de la concurrence. Je veux en savoir plus sur le scandale de la fixation du prix du pain.
    Loblaw a admis en 2015 au Bureau de la concurrence avoir comploté avec d'autres entreprises. Vous avez obtenu un mandat de perquisition auprès de la Cour supérieure de l'Ontario deux ans plus tard et l'avez exécuté. Beaucoup de temps est passé depuis, alors je veux simplement savoir où en est l'enquête. S'agit‑il là d'une étude de cas qu'il nous faut examiner pour évaluer si le Bureau de la concurrence a suffisamment de ressources?
    Je sais que vous avez la question à cœur et que vous œuvrez quotidiennement au service des Canadiens, mais vous faites face à des entreprises qui valent des milliards de dollars et qui ont une armée d'avocats à leur service. Je veux simplement avoir votre impression. Décrivez-nous ce à quoi vous vous confrontez dans cette affaire précise.

  (2025)  

    Je peux comprendre votre raisonnement par rapport à la longueur de cette enquête, mais je peux confirmer qu'elle est toujours très active. Nous continuons de faire enquête sur tous les aspects de cette affaire, qui est très complexe. Les parties prenantes sont nombreuses. La période de complot allégué est assez longue, et ce type d'enquête nécessite du temps.
    L'enquête est menée en vertu de dispositions pénales, alors nous devons être vigilants et rigoureux dans nos travaux. Espérons que nous conclurons rapidement notre enquête.
    Je souhaite insister sur le caractère très complexe de l'affaire.
    En tout respect, madame Salvatore, je comprends, mais nous sommes en 2023. Quelles sont vos normes internes dans le cas présent? Quels sont vos échéanciers internes pour parvenir à une conclusion?
    Je comprends que ce soit complexe, mais en même temps, nous voulons en arriver à une conclusion. La population attend une réponse. Si vous pouviez donner davantage de détails au Comité, je vous en serais reconnaissant.
    Je le répète: l'enquête est assez complexe. Il n'y a pas de durée déterminée que je peux vous donner quant à la longueur permise de ces enquêtes. Elles dépendent vraiment des faits. Elles dépendent du nombre de parties prenantes et de la durée du complot allégué. Dans cette affaire précise, nous avons exécuté 24 mandats de perquisition depuis le début. Nous avons recueilli une vaste preuve, qui doit être étudiée et analysée. Si la preuve est suffisante, nous l'enverrons au Service des poursuites pénales du Canada, qui décidera si des accusations doivent être portées.
    Merci, monsieur MacGregor. Merci, madame Salvatore.
    Nous passons à présent à M. Barlow, pour quatre minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci pour vos témoignages.
    Je reviens à la réponse de M. Durocher à la question de M. Perron.
    Vous avez affirmé qu'il vous était impossible, dans votre étude actuelle, de distinguer les profits du secteur de la pharmacie de ceux du secteur alimentaire, en raison de votre mandat et des outils dont vous disposez actuellement. Est‑ce exact?
    C'est exact. Nous devons nous fier aux renseignements publics ou à ceux qui nous sont fournis volontairement. Nous ne pouvons pas ordonner la production de ce type de données et de renseignements, qui ont évidemment une incidence importante dans notre évaluation du rôle de la concurrence dans le contexte actuel des prix élevés des aliments.
    Très bien.
    Peut-être ne pourrez-vous pas répondre à cette question, mais quelle sera la pertinence de votre étude et de vos recommandations si vous n'êtes pas habilités à examiner minutieusement toutes les données? Les données seront-elles suffisamment costaudes pour que vous puissiez émettre des recommandations prudentes en vous fondant sur les renseignements que vous êtes en mesure de recueillir?
    Nous avons confiance que notre étude produira des recommandations valables sur les moyens d'accroître la concurrence. Nous menons une étude approfondie. Nous échangeons avec de nombreuses parties, y compris des fournisseurs et des détaillants, petits et grands. Nous tentons d'examiner le rôle des concurrents régionaux. Pourquoi les détaillants internationaux, qui pourraient potentiellement revigorer le marché canadien, ne viennent-ils pas au pays? Nous sommes persuadés de produire un rapport aux recommandations valables.
    L'étude est-elle aussi rigoureuse et approfondie que nous le voudrions? Non, elle ne l'est pas.

  (2030)  

    J'ai eu l'occasion de faire une tournée chez certains producteurs maraîchers et de visiter leurs exploitations l'automne dernier. Ils ont fait ressortir pour moi certains soucis qu'ils ont avec les grands détaillants et les frais qu'on leur facture, ce qui dresse les producteurs les uns contre les autres en quelque sorte, mais ils hésitaient beaucoup à dénoncer ces détaillants parce qu'ils avaient peur de perdre leurs contrats.
    Vous avez déclaré avoir échangé avec 500 Canadiens dans le cadre de cette étude. Êtes-vous convaincu d'avoir eu des discussions franches et détaillées avec ces producteurs, qui ont été pour le moins hésitants à faire part de leur vécu sur le terrain? Avez-vous l'impression que vous obtenez ce niveau de détail?
    À mon avis, nous ciblons vraiment la concurrence au détail dans notre examen de ces questions. Nous essayons de discuter avec les parties prenantes principales à cet égard, y compris certains fournisseurs principaux ou associations sectorielles représentant des fournisseurs.
    Le rôle de la confidentialité est un des principes fondamentaux de la Loi sur la concurrence. Les gens peuvent nous fournir de l'information sachant que nous en assurerons la confidentialité. Je crois que nous avons un bon degré de confiance quant à la sincérité de nos interlocuteurs. Nous n'obtenons pas l'entière coopération que nous souhaiterions de la part de tous dans le cadre de cette étude — c'est le même du régime dans lequel nous évoluons —, mais je crois que ceux qui sont prêts à collaborer nous font part de leur point de vue en toute franchise. Cela nous est certainement utile.
    Je ne veux pas vous couper la parole, mais j'ai une question pour Statistique Canada.
    Monsieur MacDonald, plus tôt au cours de notre étude, nous avons reçu Sylvain Charlebois, qui a soulevé des inquiétudes au sujet de l'élimination, sur le site Web de Statistique Canada, de données sur l'inflation du prix des aliments s'échelonnant sur plusieurs années. Vous avez affirmé que ce n'était pas le cas. Des données ont-elles été retirées de la base de données de Statistique Canada, précisément sur le site Web, oui ou non? Si oui, je comprends de votre explication qu'elles sont en voie d'être rétablies.
    Non. Il n'y a pas de données sur les prix des aliments qui ont été retirées de notre site Web ni de plan pour les en retirer dans l'avenir. Les anciens tableaux des prix moyens auxquels vous faites référence demeurent en ligne et sont accessibles pour les utilisateurs. Les prix des aliments y figurent et les données remontent jusqu'à 1949. Toutefois, nous avons effectivement apporté des améliorations à nos données et en avons rehaussé l'exactitude et la pertinence en donnant davantage de détails, notamment sur les produits, pour exploiter les sources de données de plus grande qualité dont nous disposons aujourd'hui.
    Merci, monsieur MacDonald et monsieur Barlow.
    Monsieur Louis, vous avez un maximum de quatre minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie tous les témoins qui se joignent à nous en personne ou en ligne.
    Les Canadiens se sentent sans défense contre les prix des aliments. C'est la raison d'être de notre étude: nous voulons comprendre les prix élevés auxquels les gens font face quotidiennement. Nombreux sont ceux qui croient que les épiciers devraient se comporter de manière plus éthique, l'alimentation étant un besoin vital. Selon moi, c'est là le cœur de notre importante discussion.
    Comme vous l'avez dit, un petit nombre de fournisseurs dominent le marché. Je vais donc m'adresser d'abord aux représentants du Bureau de la concurrence. Plusieurs questions ont déjà été posées, mais elles méritent d'être approfondies.
    Vous dites que la concurrence favorise la baisse des prix et l'innovation, tout en alimentant la croissance économique. La fixation des prix préoccupe la population canadienne, à juste titre. On peut penser aux entreprises qui ont communiqué entre elles pour gonfler artificiellement les prix du pain emballé au moins 15 fois pendant environ 14 ans. Je comprends que vous ne puissiez pas parler d'une affaire particulière pour des raisons de confidentialité, comme vous l'avez dit, et parce qu'une enquête est en cours, mais je suis certain que vous comprenez les préoccupations des Canadiens.
    Vous avez déjà mené des enquêtes auprès du secteur de l'alimentation. Pouvez-vous nous donner d'autres exemples dont vous pouvez parler de manière générale et résumer vos conclusions? Quelles accusations ont été demandées et ont-elles été déposées?
    Je peux vous parler d'une vaste enquête que nous avons menée pour examiner certaines pratiques mises en place par Loblaw à l'égard de ses fournisseurs, pratiques qui étaient contraires aux dispositions législatives sur l'abus de position dominante. Pendant trois ans, nous avons scruté à la loupe les politiques de Loblaw afin d'en comprendre les intentions et les effets.
    Lorsque nous examinons une affaire dans le cadre des dispositions législatives canadiennes sur la concurrence et l'abus de position dominante, nous devons prouver trois choses: que l'entreprise est dominante, que son intention est anticoncurrentielle et que ses agissements ont empêché ou diminué sensiblement la concurrence. Durant notre enquête, Loblaw a mis un terme à la majorité de ses pratiques contestables. Néanmoins, nous trouvions important de poursuivre notre enquête pour nous assurer que l'entreprise avait cessé d'appliquer ces politiques sous toutes leurs formes, ainsi que pour bien comprendre son comportement et pour fournir des orientations.
    Nous avons produit un énoncé public assez détaillé au terme de notre enquête pour tenter d'expliquer où se situe la limite, dans les politiques des détaillants à l'égard des fournisseurs, entre la négociation serrée, qui n'est pas contraire à la Loi sur la concurrence, et les agissements d'un détaillant qui essaie d'éviter la concurrence avec d'autres détaillants.

  (2035)  

    Je vous remercie pour votre réponse.
    Pour ma prochaine question, je pense que je devrais me tourner vers M. Schaan. C'est difficile de se rappeler qui a parlé de quoi. Elle porte sur la fixation des salaires. Je pense que c'est à vous que je devrais la poser.
    La fixation des salaires est semblable à la fixation des prix. Vous avez mentionné que la fixation des salaires nuit à la concurrence. Vous avez donné un exemple que tous les Canadiens peuvent comprendre: vous avez dit qu'on avait demandé aux représentants des entreprises Loblaw, Metro et Empire pourquoi ils avaient tous pris la décision le même jour de réduire les salaires ou d'abandonner l'augmentation des salaires accordée aux employés d'épicerie de première ligne durant la pandémie.
    Comment expliquez-vous cette décision? Pouvez-vous nous donner d'autres exemples de pratiques de fixation des salaires qui seront visées par la Loi sur la concurrence?
    Vous disposez d'environ 30 secondes, monsieur Schaan.
    Sans parler d'affaires précises, car elles relèveraient des pouvoirs d'enquête du Bureau, j'attirerais votre attention sur les changements que nous avons apportés à la loi en 2022 pour faire en sorte qu'elle comprenne l'éventuelle coordination de la fixation des salaires. La loi a été modifiée pour garantir que les accords conclus entre différents employeurs pour fixer les salaires ou les conditions de travail par collusion, une pratique qui nuit à la concurrence pour la main-d'œuvre, soient traités exactement de la même manière que les accords préjudiciables de fixation des prix. C'est un coût d'intrant.
    Merci, messieurs Louis et Schaan.

[Français]

     Monsieur Perron, vous avez la parole pour deux minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Si je comprends bien, vous enquêtez sur des abus de position dominante. C'est un peu la question qu'on s'apprêtait à aborder, tantôt, monsieur Durocher. Quant à vous, monsieur Schaan, si je comprends bien, vous enquêtez sur des cas de collusion en matière de fixation de salaires. En tant que néophyte, il me semble qu'on observe ces deux phénomènes dans le monde de l'alimentation.
    Quelles ont été les conséquences de ces enquêtes?
    Je ne sais pas qui peut répondre à la question.
    Je peux commencer en parlant du changement à la Loi sur la concurrence. Celui-ci entrera en vigueur au mois de juin. Des modifications ont été apportées à la Loi, et les intervenants et le monde des affaires auront un an pour s'ajuster à ces changements, qui touchent les dispositions du domaine criminel de la Loi.
    En ce moment, nous nous préparons à donner plus d'information aux intervenants sur la manière dont nous allons appliquer cela. Nous sommes en train de préparer un guide à cet égard.
    Il n'y aura donc pas de sanctions liées aux enquêtes passées. Les gens auront un an pour se conformer aux nouvelles dispositions. C'est ce que je comprends.
    C'est exact. C'est en juin 2023 que ce changement important à la Loi entrera en vigueur.
    Pensez-vous que le code de conduite va venir adoucir ces irritants et limiter ces pratiques qui, de l'extérieur en tout cas, semblent déloyales?
    À notre avis, le code de conduite vise à corriger un certain déséquilibre en matière de pouvoir de négociation entre deux parties, soit les fournisseurs et les détaillants. Nous nous préoccupons des agissements anticoncurrentiels. C'est donc un peu différent. Cela dit, dans la mesure où un code de conduite pourrait améliorer la transparence dans l'industrie et augmenter la certitude sur le plan des pratiques, il est très possible que cela puisse stimuler l'innovation et les investissements dans le secteur.
    Merci, messieurs Durocher et Perron.
    Finalement, monsieur MacGregor, vous avez la parole pour deux minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je vais poser ma dernière question aux représentants de Statistique Canada.
    Durant une réunion précédente du Comité au même sujet, nous avons reçu M. Tyler McCann, de l'Institut canadien des politiques agroalimentaires. Il nous a informés que les chercheurs canadiens n'ont pas accès aux mêmes données sur les prix des secteurs de l'agriculture et de la vente au détail que leurs homologues américains. Je vous lis ce qu'il a dit:
Nous n'avons tout simplement pas d'analyse crédible et significative aussi poussée au Canada. Il serait intéressant pour l'étude du Comité qu'une organisation comme Agriculture Canada, Statistique Canada ou le Bureau de la concurrence produise à cet égard des données aussi détaillées. Le Comité devrait envisager de recommander que le gouvernement du Canada fasse le nécessaire pour recueillir des données et effectuer une analyse aussi poussée qu'aux États-Unis et pour rendre publics les résultats de cette analyse.
    Je pense qu'il parle ici précisément du Service de recherche économique du département de l'Agriculture des États-Unis.
    J'aimerais savoir ce que vous répondriez à M. McCann et ce qu'il faudrait faire pour que vous puissiez fournir de telles données aux décideurs afin qu'ils puissent prendre des mesures en conséquence.

  (2040)  

    Je vous remercie pour la question.
    La majorité des données que nous recueillons sont utilisées à des fins statistiques pour définir des indicateurs économiques qui permettent de mesurer la production économique ou d'établir des indicateurs macroéconomiques.
    Je pense que vous parlez d'un cadre réglementaire grâce auquel l'information financière pourrait être suivie tout le long de la chaîne d'approvisionnement pour permettre la communication entre les différents secteurs de l'économie, ce qui n'est pas vraiment une possibilité en ce moment. À l'heure actuelle, nous recueillons les données des différents secteurs, nous les compilons et nous les publions sous la forme de résultats globaux.
    Pour répondre à votre question, je pense qu'il faudrait un cadre réglementaire pour fournir ce type de données ou pour imposer l'obligation de les fournir.
    Dans les faits, les données que nous collectons sont protégées par la Loi sur la statistique, ce qui veut dire que nous recueillons des renseignements confidentiels sur les entreprises, mais que nous n'avons pas le droit de les divulguer. C'est pourquoi nous les publions seulement sous la forme de résultats globaux pour qu'ils servent d'indicateurs économiques.
    Merci, messieurs MacDonald et MacGregor.
    Monsieur Durocher, j'ai deux questions très brèves pour vous. Si j'ai bien compris, vous disposez des outils législatifs nécessaires pour exiger la communication de renseignements dans le cadre d'enquêtes, mais pas dans le cadre d'études. Vous avez exprimé très clairement qu'il vous serait utile d'avoir le même pouvoir pour mener vos études. Je vous vois hocher la tête; je le prends comme un signe d'acquiescement.
    Quel est le seuil requis pour lancer une enquête? Est‑il défini par la loi, ou est‑ce à la discrétion du Bureau? S'agit‑il des trois facteurs dont parlait Mme McWhinnie? Voilà ma première question.
    Ma deuxième question est la suivante: quand vous lancez une enquête, vous avez alors le pouvoir d'exiger la communication de renseignements; par la suite, vous est‑il interdit d'utiliser les renseignements ainsi recueillis dans le cadre d'une étude?
    Pour répondre à votre question sur le seuil, la Loi sur la concurrence définit le seuil requis pour lancer une enquête. Une fois l'enquête officielle ouverte, nous pouvons demander au tribunal de nous donner le pouvoir d'exiger la communication de renseignements ou de procéder à des fouilles et à des perquisitions en cas d'acte criminel. En un mot, il faut avoir une raison de croire qu'il y a eu infraction à la Loi sur la concurrence. Il faut absolument avoir des motifs; il ne suffit pas de suspecter que quelque chose ne tourne pas rond. Étant donné la concentration du secteur, nous devons être en mesure de justifier pourquoi nous avons besoin d'exiger la communication de renseignements. C'est un seuil important.
    En ce qui concerne l'utilisation des renseignements que nous obtenons, cela varie d'un cas à l'autre. Nous devons tenir compte de différents facteurs selon qu'il s'agit d'une affaire civile ou criminelle. Dans tous les cas, nous suivons les directives de nos conseillers juridiques du ministère de la Justice sur l'utilisation adéquate des renseignements que nous obtenons.
    Ainsi, il n'est pas nécessaire d'ajouter des dispositions à la loi pour préciser comment les renseignements peuvent être utilisés? Les principes généraux qui s'appliquent à la preuve dans le droit criminel et les affaires civiles, en plus des directives des conseillers juridiques, sont suffisants?
    Oui, c'est exact.
    Nous faisons respectueusement valoir qu'il y a beaucoup de questions à régler relativement à la Loi sur la concurrence et que le moment est venu d'avoir des discussions sur le pouvoir d'exiger la communication de renseignements pour les études de marché et pour les fusionnements en général. La possibilité pour le Bureau de se pencher sur tout fusionnement de concurrents est un enjeu essentiel du processus de consultation en cours.
    Je vous remercie pour votre indulgence, chers collègues.
    Je remercie également les témoins. Au nom de tous les membres du Comité, je remercie les gens du Bureau de la concurrence pour leur travail et leur présence ici aujourd'hui.
    Merci beaucoup aussi à M. Schaan, d'ISDE, et aux représentants de Statistique Canada qui sont en ligne.
    Bonsoir, chers collègues. On me dit de donner un coup de marteau pour signifier que la séance est levée.
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