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HUMA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées


NUMÉRO 058 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 10 mars 2023

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    La séance est ouverte. Le greffier m'informe que nous pouvons commencer.
    Bienvenue à la 58e réunion du Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées de la Chambre des communes.
    La réunion d'aujourd'hui se déroule dans un format hybride, car certaines personnes participent à distance sur Zoom et d'autres sont présentes dans la salle.
    Afin d'assurer le bon déroulement de la réunion, veuillez adresser toute question ou intervention à la présidence, c'est‑à‑dire moi, et attendez que je vous reconnaisse par votre nom. Vous avez la possibilité de vous exprimer dans la langue officielle de votre choix. Les participants à distance ont accès à l'interprétation sur leur appareil Surface. Les personnes présentes dans la salle doivent utiliser les écouteurs pour l'interprétation. En cas d'interruption des services d'interprétation, veuillez attirer mon attention, et nous suspendons la séance jusqu'à ce que le problème soit résolu.
    J'aimerais rappeler aux membres du Comité qu'aucune capture d'écran ou prise de vue dans la salle n'est autorisée pendant les audiences du Comité.
    Conformément à l'article 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le Comité le vendredi 3 février 2023, le Comité poursuit son étude du projet de loi C‑35, Loi relative à l'apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada.
    Je ne crois pas que les essais techniques pour vérifier la connectivité des témoins sont terminés. J'aimerais donc informer tous les membres du Comité que les témoins qui comparaissent virtuellement aujourd'hui et les membres du Comité qui participent à distance doivent utiliser un casque d'écoute approuvé par la Chambre des communes. S'ils ne le font pas, ils ne pourront pas participer verbalement à la réunion, mais les membres du Comité dans cette situation auront quand même le droit de voter pendant la réunion.
    J'aimerais maintenant souhaiter la bienvenue à nos témoins. Aujourd'hui, nous accueillons Mme Gould, ministre de la Famille, des Enfants et du Développement social. Je vous souhaite à nouveau la bienvenue. Vous êtes une habituée de notre comité, madame la ministre.
    Du ministère de l'Emploi et du Développement social, nous accueillons Michelle Lattimore, directrice générale, Secrétariat fédéral, Cheri Reddin, directrice générale, Secrétariat de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants autochtones, Jill Henry, directrice, Division des politiques, Secrétariat de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants autochtones, Kelly Nares, directrice, Secrétariat fédéral et Christian Paradis, directeur, Secrétariat fédéral responsable de l’apprentissage et de la garde des jeunes enfants.
    Madame la ministre, vous avez la parole. Vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président et membres du Comité, de m'avoir invitée à prendre la parole au sujet du projet de loi C‑35. Comme vous l'avez mentionné, j'ai comparu devant votre comité assez souvent ces derniers temps, mais c'est toujours un plaisir d'être de retour et de passer du temps avec mes collègues.

[Français]

     Je suis heureuse d'être accompagnée aujourd'hui de la directrice générale du Secrétariat fédéral responsable de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants, Mme Michelle Lattimore, de la directrice générale du Secrétariat de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants autochtones, Mme Cheri Reddin, des directrices Jill Henry et Kelly Nares, ainsi que du directeur Christian Paradis.

[Traduction]

     En collaboration avec les provinces, les territoires et les partenaires autochtones, le gouvernement du Canada transforme la façon dont les services de garde d'enfants sont offerts.
    Comme on l'a dit à maintes reprises, la garde d'enfants n'est pas un luxe, mais une nécessité. Les parents devraient avoir la possibilité de fonder une famille tout en menant une carrière, et les enfants méritent le meilleur départ possible dans la vie.

[Français]

    Dans le budget de 2021, le gouvernement du Canada a annoncé un investissement transformateur, qui permettra justement d'offrir le meilleur départ possible aux enfants: jusqu'à 30 milliards de dollars seront accordés sur cinq ans pour bâtir un système pancanadien d'apprentissage et de garde des jeunes enfants.
    Depuis cette annonce, nous avons signé des accords avec chaque province et territoire afin de réduire les frais partout à l'extérieur du Québec, d'appuyer la création de places en garderie de grande qualité et de veiller à ce que les éducateurs et les éducatrices de la petite enfance soient mieux soutenus.

[Traduction]

     Le système pancanadien profite déjà à des dizaines de milliers de familles. Les coûts liés aux services de garde d'enfants réglementés ont été réduits dans toutes les provinces et tous les territoires, à l'exception du Québec et du Yukon, qui offraient déjà des systèmes de garde d'enfants abordables. Ce système est une étape essentielle vers la réalisation de notre objectif, qui est de mettre en place des services de garde d'enfants à 10 $ par jour en moyenne dans tout le Canada d'ici mars 2026.

[Français]

    Pour assurer le succès du système, nous travaillons d'arrache-pied avec les provinces et les territoires pour créer 250 000 nouvelles places à temps plein dans des garderies réglementées et principalement sans but lucratif d'ici la fin de mars 2026, ainsi que pour attirer, former et maintenir en poste les meilleurs éducateurs et éducatrices de la petite enfance.
    Nous avons soumis le projet de loi C‑35 à la Chambre pour nous assurer que les familles des générations qui suivront pourront profiter de ce système partout au Canada.
(0850)

[Traduction]

    Le projet de loi renforce l'engagement du gouvernement à soutenir les provinces, les territoires et les partenaires autochtones dans la mise en place d'un système pancanadien. Il garantit le maintien du financement fédéral, il promet la reddition de comptes et il souligne notre engagement à l'égard des conventions sur les droits de la personne, notamment la Convention relative aux droits de l'enfant et la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
    Le projet de loi C‑35 est le résultat d'une rétroaction exhaustive de la part de nos partenaires et des parties intéressées. Il est motivé par des intérêts communs, des partenariats étroits et la collaboration.
    Ce projet de loi respecte les compétences provinciales et territoriales, ainsi que la vision et les principes du Cadre multilatéral d'apprentissage et de garde des jeunes enfants de 2017, qui a été élaboré avec les provinces et territoires, et du Cadre d'apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones, qui a été élaboré conjointement avec les partenaires autochtones.

[Français]

     Le projet de loi C‑35 donne aux provinces, aux territoires et aux partenaires autochtones la certitude que le gouvernement fédéral continuera d'offrir une aide soutenue pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants.
    En inscrivant notre vision et nos principes communs dans la loi fédérale, nous pourrons voir à ce que la stabilité et la prévisibilité fassent partie intégrante du système de garde d'enfants.

[Traduction]

    Monsieur le président, notre système de garde d'enfants fonctionne partout au Canada, et de plus en plus de familles en profitent. Ce projet de loi a été conçu pour s'assurer que, s'il est adopté tel quel, les familles continueront à profiter de ces investissements pour les générations à venir.
    Nous serons maintenant heureux de répondre à vos questions.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie, madame la ministre.
    Nous passons maintenant aux questions. Nous entendrons d'abord Mme Ferreri. Elle a six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame la ministre, d'être ici aujourd'hui. Nous savons à quel point les services de garde d'enfants sont importants pour les parents de tout le pays, et nous savons en particulier à quel point l'accès aux services de garde d'enfants est important pour toutes les familles.
    La semaine dernière, Mme Michelle Lattimore nous a dit que ce « cadre établit les fondements d'une vision commune à long terme pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants, guidée par les principes convenus en matière de grande qualité, d'accès, de caractère abordable, de souplesse et d'inclusion ».
    Cependant, lorsque j'ai interrogé Mme Lattimore sur les listes d'attente au Canada, j'ai appris qu'aucune donnée n'avait été collectée pour déterminer ces chiffres. Il est étrange d'avoir un cadre pour résoudre un problème sans connaître les chiffres concernés.
    Par ailleurs, lorsque M. Falk a posé une question sur la consultation, Mme Lattimore a répondu que « [l]'objectif était d'obtenir des réactions au projet de loi, au guide de discussion énonçant le contenu du projet de loi tel que nous l'anticipions ». Elle a ajouté que « [l]es interventions précises quant aux défis que connaissent les familles des régions rurales ou éloignées pour l'accès à des services de garde n'ont pas précisément fait partie de ce processus de consultation ».
    Le rapport n'analyse pas les commentaires que nous avons entendus des fournisseurs de services à but lucratif ou sans but lucratif. Madame la ministre, si le gouvernement fédéral n'a aucune compétence en matière de permis et s'il reconnaît que tous les types de services de garde d'enfants ont leur place, c'est à chaque province d'en décider. Pourquoi y a‑t‑il un appel précis dans les principes directeurs, alors qu'il y a une contradiction dans le fait que vous ne vous concentrez que sur les fournisseurs publics et sans but lucratif? Si les objectifs sont la grande qualité, l'accès, la souplesse et l'inclusion, pourquoi laisser de côté un secteur qui, dans la vision des services de garde d'enfants, fournit des services à un si grand nombre d'enfants à l'échelle du pays?
     Je vous remercie, madame Ferreri.
    Je pense qu'il est important de préciser que tant qu'il s'agit de fournisseurs agréés, ils sont visés par l'accord sur les services de garde d'enfants qui a été signé avec les provinces et les territoires. Cet accord ne fait pas de distinction entre les fournisseurs à but lucratif et les fournisseurs sans but lucratif déjà établis. En fait, la catégorie des fournisseurs sans but lucratif comprend les soins à domicile, qui peuvent être fournis par un fournisseur privé ou un fournisseur sans but lucratif, de sorte que personne n'est exclu de ce système.
    En ce qui concerne les listes d'attente, la plupart des provinces et des territoires ne s'entendent pas. Le problème vient en partie du fait qu'il s'agit depuis longtemps de systèmes disparates. En effet, il faut inscrire son nom sur plusieurs listes d'attente et voir où on peut obtenir une place. C'est ce que j'ai fait moi-même, à titre de parent. J'ai entendu d'innombrables personnes d'un bout à l'autre du pays dire qu'elles ont fait la même chose. Les intervenants des services de garde d'enfants et des garderies disent qu'ils n'ont pas une idée précise de la situation, parce qu'il peut y avoir de 60 à 100 familles sur leur liste d'attente, mais la moitié de ces familles pourraient se trouver aussi sur d'autres listes d'attente.
    Nous savons qu'il existe une demande et des besoins à cet égard dans les collectivités urbaines, rurales et éloignées. Tout cela est pris en compte dans les cadres multilatéraux.
    En fait, j'étais en Saskatchewan pas plus tard que lundi dernier. Depuis la signature de l'accord, le gouvernement de la Saskatchewan a annoncé la création de 4 000 nouvelles places, et un grand nombre de ces places se trouvent dans des collectivités rurales et éloignées.
(0855)
    Je vous remercie, madame la ministre.
    Je comprends ce que vous dîtes, mais cela ne tient tout simplement pas la route. Si l'objectif est d'inclure tout le monde, pourquoi ne le dîtes-vous pas dans le libellé du projet de loi? Pourquoi dîtes-vous qu'il s'agit « principalement » des services sans but lucratif et des services publics? Pourquoi ne pas dire tout simplement « tous » les services de garde d'enfants? Pourquoi utiliser un libellé si exclusif?
    Je pense que vous entendrez M. Pierre Fortin après moi. Il a mené des recherches exceptionnelles sur les services de garde, en particulier au Québec et dans les CPE, c'est‑à‑dire les centres de la petite enfance. Il a obtenu des résultats assez extraordinaires qui démontrent à quel point l'écart en matière de qualité est important entre les fournisseurs à but lucratif et les fournisseurs sans but lucratif.
    Nous reconnaissons également que, comme cette initiative est financée par des fonds publics, il faut s'assurer que tout investissement effectué est directement réinvesti dans la prestation de services de garde d'enfants. De très nombreuses recherches révèlent que la qualité est généralement plus élevée dans les systèmes sans but lucratif. Cela ne signifie pas qu'il n'y a pas d'excellents fournisseurs de services à but lucratif, et c'est la raison pour laquelle nous avons prévu, dans l'accord, une clause de droit acquis pour toutes les places en garderies agréées déjà existantes.
    Bien entendu, il s'agit d'une décision d'adhésion dans chaque province ou territoire, mais nous avons obtenu un taux d'adhésion incroyable à l'échelle du pays — de 95 à 98 %, selon la province ou le territoire — de la part de tous les fournisseurs agréés, quel que soit le type de service de garde qu'ils offrent.
    Je vous remercie, madame la ministre.
    Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que l'accès aux services de garde d'enfants est une nécessité et vous avez dit que les gens ont le droit de fonder une famille.
     Ce que j'aimerais vous demander, après avoir entendu des centaines ou des milliers — car il y a des groupes Facebook de milliers de familles qui ne peuvent avoir accès à des services de garde d'enfants ce moment… Une femme m'a écrit qu'elle est sur une liste d'attente depuis qu'elle est enceinte de sept semaines. Son enfant a maintenant 14 mois et elle dit qu'il n'y a pas de droit d'accès pour les mères. Elle a donc renoncé à avoir d'autres enfants.
    Étant donné que vous avez dit dans votre déclaration préliminaire que les gens devraient avoir le droit de fonder une famille, que répondez-vous à des personnes comme Leanne, qui affirment que cet accord ne donne pas de choix aux parents? Elle dit que l'accord donne tout le contrôle aux fournisseurs de services et qu'elle a choisi de ne pas fonder une famille à cause de cet accord.
    Je dirais que c'est exactement la raison pour laquelle ces accords sont en place. Jusqu'à la signature de ces accords, il n'y avait souvent aucun choix, car c'était trop cher ou aucune place n'était libre.
    Comme je l'ai dit dans ma dernière réponse, nous savons que la création de places est très importante. C'est la raison pour laquelle nous avons envisagé de créer 250 000 places supplémentaires à l'échelle du pays. Nous voulons ainsi nous assurer que des personnes comme Leanne ou des familles qui souhaitent avoir des enfants, mais qui ne peuvent peut-être pas le faire pour des raisons financières ou parce qu'elles n'ont pas accès à des services de garde d'enfants fiables, puissent profiter de cette initiative.
    Cet accord modifie la nature de la prestation de services de garde d'enfants dans le pays d'une manière qui changera la donne pour les familles, les femmes et l'économie.
    Il n'est pas nécessaire de chercher bien loin. Nous pouvons nous inspirer de l'expérience du Québec qui, il y a 25 ans, a mis en place des services de garde d'enfants universels, abordables et accessibles.
    Que savez-vous de la liste d'attente actuelle pour l'accès aux services de garde au Québec?
    Madame Ferreri, votre temps est écoulé.
    La parole est à M. Coteau. Il a six minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, madame la ministre, d'être ici aujourd'hui.
    Je sais que depuis des décennies, les gouvernements, tant d'ordre provincial que fédéral, cherchent des moyens de renforcer les services de garde d'enfants, et de nombreux Canadiens rêvent d'un programme universel de services de garde d'enfants. Pour moi, le fait que nous en soyons là est tout simplement incroyable. Je sais que ce programme est très populaire dans ma collectivité, Don Valley East, et dans tout le corridor de Don Mills. Je suis donc heureux que nous en soyons là.
    Pouvez-vous nous parler des retombées économiques d'un tel programme, non seulement pour les familles, mais aussi pour les personnes qui œuvrent dans le secteur?
    Je serais heureuse de vous en parler.
    Les services de garde d'enfants représentent l'une de ces merveilleuses politiques qui sont judicieuses sur le plan social et économique. En fait, si vous prenez l'exemple de l'expérience du Québec, cette province a perçu plus de revenus supplémentaires de l'impôt sur le revenu qu'elle en a dépensé pour le programme, de sorte qu'il s'agit d'un rendement de l'investissement prodigieux pour l'ensemble de la société.
    Cela s'explique en partie par le fait que les parents de jeunes enfants, et principalement les femmes, peuvent rester sur le marché du travail ou le réintégrer. Le Québec a l'un des taux les plus élevés de femmes qui travaillent tout en ayant des enfants de moins de quatre ans. Cela entraîne des répercussions à long terme et des avantages financiers, tant pour la femme — qui jouit d'une autonomie financière et du contrôle de ses finances et qui n'est pas obligée de passer plusieurs années sans gagner un salaire, si c'est son choix — que pour la famille, qui peut profiter de revenus plus élevés à un moment où ses dépenses sont plus élevées, car elle a un enfant en bas âge.
    Pour chaque dollar investi dans les services de garde d'enfants, nous observons un rendement de 1,50 à 2,80 $ dans l'économie au sens large. Selon les estimations, lorsque ce programme de services de garde d'enfants sera pleinement mis en œuvre d'ici trois ou quatre ans, des milliards de dollars seront réinjectés dans l'économie, ce qui, je pense, représentera une augmentation de 2 % du PIB.
    C'est énorme. C'est réellement un investissement judicieux, car il a de nombreuses retombées positives non seulement sur le plan économique, mais aussi sur le plan social.
(0900)
    Je sais que le projet de loi prévoit la création d'un Conseil consultatif national. Il précise aussi que ce conseil sera composé de 10 à 18 membres et qu'on s'efforcera d'assurer une bonne diversité et un certain équilibre parmi ses membres.
    Pouvez-vous nous parler de la façon dont vous allez procéder? Quels travaux sont déjà en cours à cet égard et quand pouvons-nous nous attendre à ce que ce conseil soit pleinement opérationnel?
    Le Conseil est déjà pleinement opérationnel. Il a été annoncé en novembre dernier. Nous avons des membres de tout le Canada, donc de toutes les provinces et de presque tous les territoires, et un éventail de points de vue qui vont des universitaires aux chercheurs, en passant par des fournisseurs, des éducateurs et des parents.
    Nous nous sommes également efforcés d'inclure des membres de diverses régions qui possèdent des antécédents variés. Il y a donc des parents d'enfants ayant des besoins spéciaux et des représentants de communautés de langue officielle en situation minoritaire, en vue d'obtenir une bonne perspective de l'ensemble du pays. Bien entendu, lorsqu'un conseil compte de 12 à 18 membres, toutes les voix ne peuvent pas être représentées, mais je pense que nous avons assez bien réussi à nous assurer d'avoir une certaine diversité.
    J'ai eu l'occasion de les rencontrer à deux reprises, et je dois dire que c'est un groupe plutôt phénoménal de personnes qui ont vraiment à cœur la réussite des services de garde d'enfants au pays.
    Je sais qu'une partie importante de l'investissement va aux collectivités autochtones. Je pense qu'il s'agit d'un peu moins de 2 milliards de dollars sur cinq ans, si ma mémoire est bonne.
    L'un des objectifs du projet de loi C‑35 est de mettre en place une stratégie de financement à long terme. Pouvez-vous nous expliquer comment cela fonctionnerait? Si le projet de loi est adopté et qu'il est pleinement mis en œuvre, comment envisagez-vous la structure de ce financement à long terme?
    Le projet de loi C‑35 vient s'ajouter au cadre multilatéral et aux accords bilatéraux que nous avons conclus dans le cadre de l'initiative pancanadienne sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Nous avons signé 13 accords bilatéraux avec les provinces et les territoires. Celui qui a été conclu avec le Québec est asymétrique, car le Québec est beaucoup plus avancé dans ce domaine que le reste du pays. En fait, la province fait figure de pionnière au Canada dans ce domaine.
    Les accords de financement sont donc complémentaires. Nous avons signé des accords d'une durée de cinq ans, afin de nous assurer que nous fixons des objectifs auxquels les provinces et les territoires peuvent répondre par des plans d'action dans lesquels ils déterminent et illustrent la manière dont ils vont dépenser cet argent. Ensuite, le projet de loi C‑35 engage le gouvernement fédéral à agir à titre de partenaire financier à long terme.
    Je ne pense pas qu'il soit approprié de déterminer les montants en jeu dans le projet de loi C‑35, car je pense qu'il doit s'agir d'un processus en constante évolution. Je pense que ce qui est réellement important, c'est que le projet de loi indique que le gouvernement fédéral s'engage à financer les services de garde d'enfants et qu'il le fera à long terme.
    Cela s'ajoute à la décision prévue dans le Budget 2021, qui prévoit un financement continu au‑delà des accords quinquennaux pouvant aller jusqu'à 9 milliards de dollars par année, et ce, à perpétuité.
(0905)
     Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie, monsieur le président.
     Je vous remercie, monsieur Coteau.

[Français]

     Madame Bérubé, vous avez la parole pour six minutes.
    Je souhaite la bienvenue à la ministre et aux témoins ici présents.
    Madame la ministre, nous pouvons convenir que le projet de loi C‑303, qui avait été présenté en 2006 par le NPD, est l'ancêtre du projet de loi C‑35, à quelques différences près. Toutefois, une de ces différences m'inquiète: le projet de loi C‑35 ne fait aucune mention d'une exemption pour le Québec. Or, on sait très bien que le Québec est un précurseur et un chef de file dans le domaine de la petite enfance et des garderies, vous l'avez dit vous-même.
    Cela fait maintenant plus de 25 ans que l'État québécois s'est doté d'une politique familiale qui a permis de mettre en place un réseau de services éducatifs à la petite enfance à des coûts abordables, permettant de meilleures conditions de vie et une meilleure conciliation des responsabilités parentales et professionnelles pour des millions de familles. Compte tenu de cette réalité, croyez-vous qu'il serait utile d'inclure dans le projet de loi C‑35 un article permettant au Québec de se retirer de ce programme avec pleine compensation et sans condition, pour éviter des négociations et des chicanes entre le gouvernement fédéral et provincial tous les cinq ans?
    Merci, madame Bérubé. Je vous souhaite aussi la bienvenue au Comité.
     Ce n'est pas quelque chose que nous avons entendu du gouvernement du Québec. Il n'y a pas eu de chicane lors de la négociation de l'entente, et je ne pense pas qu'il y en aura dans l'avenir. Nous avons une excellente relation avec le gouvernement du Québec relativement à cette entente, qui est asymétrique comme vous le savez. Ce que le gouvernement du Québec et les gouvernements provinciaux et territoriaux aiment de ce projet de loi, c'est qu'il cible le rôle du gouvernement fédéral et n'empiète pas sur les champs de compétence des provinces et des territoires. C'est important de le noter. Nous ne pouvons pas légiférer dans leur domaine.
    La disposition la plus importante pour les provinces et les territoires est celle qui prévoit que le gouvernement fédéral s'engage à maintenir le financement à long terme des programmes et services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants.
    Qu'y a-t-il dans ce projet de loi qui permettrait d'éviter un autre conflit entre Québec et Ottawa à l'échéance de l'entente actuelle?
    Par ailleurs, pourquoi l'article 4 du projet de loi C‑303, qui prévoyait une exemption pour le Québec, n'a pas été retenu et inséré dans le projet de loi C‑35?
    Comme je l'ai mentionné, le projet de loi C‑35 cible le travail du gouvernement fédéral et garantit son engagement financier à long terme à l'égard des garderies, engagement qui n'existait pas avant le budget de 2021. Avant, nous avions des ententes avec les provinces et territoires. Par exemple, en 2017, mon collègue le ministre Duclos a négocié un cadre avec toutes les provinces et les territoires en la matière. Dans le cas du présent projet de loi, cependant, nous ciblons le travail du gouvernement fédéral.
    Lors de la dernière réunion, les fonctionnaires affirmaient que ce projet de loi touchait surtout le cadre fédéral et qu'il n'était donc pas nécessaire d'y inclure le droit du Québec de se retirer du programme avec pleine compensation.
     Or, l'entente actuelle du Québec est de cinq ans. Qu'est-ce qui garantit à Québec que, lors de la prochaine série de négociations, des normes et des obligations ne lui seront pas imposées par le fédéral?
    Le projet de loi C‑35 vise à guider le gouvernement fédéral de telle sorte que les prochains gouvernements, qu'ils soient libéraux — ce que j'espère — ou non, soient guidés par ces principes et objectifs quand ils négocieront avec les provinces et les territoires.
    Bien sûr, la province du Québec est déjà un chef de file en ce qui concerne ces principes et objectifs, comme vous le mentionnez. Finalement, ce que nous voulons faire, c'est rehausser les services de garde dans le reste du pays pour qu'ils soient au même niveau que ceux du Québec. Le Québec s'est aussi engagé à créer 30 000 nouvelles places en garderie dans le cadre de l'entente et nous allons maintenir une relation très positive avec le Québec.
    D'ailleurs, je dois dire que, lors des réunions fédérales-provinciales, il a été très bénéfique d'avoir accès à l'expérience du Québec par l'entremise de mon ancien homologue, qui a d'ailleurs été très généreux à cet égard. Cela a permis aux provinces et aux territoires d'apprendre de l'expérience du Québec.
(0910)
     Le Québec est un chef de file en matière de services de garde d'enfants, parce que les enfants sont la priorité. Compte tenu de cette réalité, la compensation que vous allez donner au Québec dans le cadre du projet de loi C‑35 va-t-elle être généreuse?
    Oui. C'est déterminé par une formule basée sur le nombre d'enfants de moins de 12 ans. C'est ainsi que nous avons réparti le financement pour chaque province et territoire, et c'est la même chose pour le Québec.
    Bien sûr, le Québec a pris cette initiative il y a 25 ans, alors que le fédéral n'avait pas encore de rôle dans ce domaine, et nous avons basé plusieurs de nos objectifs et principes sur l'expérience québécoise pour travailler avec les autres provinces et territoires.
    Merci, madame Bérubé.

[Traduction]

    La parole est maintenant à Mme Gazan. Elle a six minutes.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Je suis heureuse de vous voir, madame la ministre.
    Je sais que le ministère de la Justice travaille à l'élaboration conjointe d'un processus de consentement libre, préalable et éclairé et que le projet de loi C‑35 contient un engagement à promouvoir la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. C'est ce qu'a indiqué Mme Reddin lors de la dernière réunion, mais nous savons que cette réponse n'est pas adéquate, car nous savons qu'il ne peut y avoir une définition unique du « consentement libre, préalable et éclairé ». En fait, selon la loi, ce sont les circonstances qui en déterminent l'application. Il en irait de même pour le projet de loi C‑35.
    La ministre reconnaîtra‑t‑elle ces faits et prendra‑t‑elle les mesures appropriées pour enchâsser le droit des peuples autochtones de prendre des décisions sur les questions qui concernent leurs propres enfants?
    Je partage ce point de vue parce qu'il s'agit du fondement même de la réconciliation, en particulier à la lumière des conclusions de la Commission de vérité et réconciliation, qui se fondent sur les témoignages de survivants des pensionnats qui ont été arrachés à leur famille. Le gouvernement actuel tarde à enchâsser dans la loi le principe du consentement préalable, libre et éclairé. Nous approchons de la fin des deux ans prévus et il ne vous reste qu'un mois et demi. Cela fait partie de la loi. Vous aviez deux ans pour élaborer un plan, mais rien n'a encore été proposé. C'est inacceptable. C'est pourtant l'occasion d'arranger les choses.
    Je vous demande donc à nouveau, madame la ministre, si vous reconnaîtrez les faits et si vous prendrez les mesures appropriées pour enchâsser dans la loi le principe du consentement préalable, libre et éclairé et garantir le droit des peuples autochtones à donner leur consentement libre, préalable et éclairé sur les questions qui concernent leurs enfants.
    Madame Gazan, je vous remercie de votre présence et de votre intervention.
    Nous avons certainement le même objectif. Je pense qu'il est très important de considérer le projet de loi C‑35 comme un outil complémentaire au Cadre d'apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones, qui a été élaboré conjointement.
    Nous avons notamment veillé à ce que le projet de loi C‑35 ne dépasse pas les limites du Cadre d'apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones qui a été élaboré conjointement, annoncé en 2018 et approuvé à l'époque par l'Assemblée des Premières Nations, l'Inuit Tapiriit Katanami et le Ralliement national des Métis.
    Dans mes voyages au pays au cours de la dernière année, j'ai remarqué que les communautés et les dirigeants autochtones qui font la promotion du cadre ont adopté une approche fondée sur les distinctions, dirigée par des Autochtones et adaptée à leur culture qui comprend également l'apprentissage des langues. C'est une initiative autochtone, qui est... Nous sommes un partenaire de financement. Cela s'est fait en collaboration, mais nous devons considérer cela comme un partenariat...
    Je pense que tout cela est positif, pour revenir au projet de loi C‑15, mais toute mesure législative à venir devra être conforme à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Donc, je serais plutôt contre cela.
    Je vais passer aux salaires et aux conditions de travail.
    Comme tout le monde le sait, je pense, j'ai été éducatrice de la petite enfance. J'en suis très fière. Nous savons que le salaire moyen des éducatrices et éducateurs de la petite enfance est de 19,50 $ l'heure, ce qui n'est pas un salaire décent dans la plupart des endroits.
    Les syndicats qui représentent les travailleurs en garderie sont favorables à l'ajout, dans le projet de loi C‑35, d'un engagement explicite et clair à l'égard du travail décent. Nous savons que pour que cela fonctionne, il nous faut une main-d'œuvre solide. Nous savons aussi qu'étude après étude, on révèle que les piètres salaires et conditions de travail dissuadent les gens d'aller dans ce secteur. C'est exactement pour ces raisons que j'ai quitté mon emploi d'éducatrice de la petite enfance. Je ne voulais pas vivre avec le salaire négligeable qu'on nous offrait pour ce travail si important.
    Votre gouvernement est‑il réticent à l'ajout d'une disposition pour inclure l'offre de salaires décents et de conditions de travail plus équitables comme principes directeurs pour les investissements fédéraux? Je le mentionne parce que dans sa plateforme de 2021, votre parti a promis de faire pression pour l'instauration d'un salaire minimum de 25 $ pour les préposés aux services de soutien de la personne. Je suis favorable à cela; la prestation de soins est un travail essentiel.
    Êtes-vous prête à appuyer une telle mesure afin que les éducateurs de la petite enfance aient un salaire décent?
(0915)
    Je suis tout à fait favorable à un salaire décent pour les éducatrices et éducateurs de la petite enfance, et j'ai eu beaucoup de discussions à ce sujet avec mes homologues provinciaux et territoriaux.
    Comme je l'ai mentionné, cette mesure législative porte sur le rôle du gouvernement fédéral. L'établissement des salaires dans les services de garde relève des provinces et territoires. Cependant, les cadres multilatéraux et la mesure législative soulignent l'importance de la qualité. Il va sans dire qu'on ne peut assurer la prestation de services de qualité sans une main-d'œuvre talentueuse, bienveillante et bien rémunérée. Dans toutes ces ententes, on exige que les provinces et les territoires présentent des plans pour le recrutement et le maintien en poste d'éducateurs de la petite enfance.
    Dans la dernière année, nous avons constaté que beaucoup de provinces et territoires offrent des compléments de salaire. Souvent, ce n'est pas autant qu'ils en ont besoin, mais je peux dire que cet enjeu est la grande priorité de tous mes homologues provinciaux et territoriaux cette année. C'est également la première tâche à laquelle s'affaire le Conseil consultatif national.
    Je souligne que vous l'avez fait pour les préposés aux soins personnels à l'échelon fédéral. Quoi qu'il en soit, c'était simplement une remarque.
    Madame Gazan, veuillez poser une brève question.
    Nous savons que toutes les études démontrent que les services de garde d’enfants publics et à but non lucratif offrent des services de haute qualité. L'entente bilatérale que vous avez conclue avec l'Alberta prévoit la création de 42 500 places en garderie à but non lucratif. Je suis favorable à cela, mais le 31 janvier 2023, vous avez plutôt financé 22 500 places dans des établissements à but lucratif.
    Pourquoi votre gouvernement, après avoir déposé un projet de loi accordant la priorité aux places en services de garde publics et à but non lucratif, n'a‑t‑il pas plutôt financé 22 500 places dans ces établissements?
    C'est cumulatif. L'Alberta est toujours tenue de créer 42 500 places dans des garderies à but non lucratif. La province a créé environ 7 000 places jusqu'à maintenant. La création des 22 500 places dans le secteur privé a été retardée jusqu'à ce que l'Alberta présente un cadre de contrôle des coûts, car nous voulions nous assurer que tout financement public accordé à des fournisseurs à but lucratif serait utilisé à bon escient et bien géré. Il s'agit de fonds publics, en fin de compte. Cette approche est semblable à celle du Nouveau-Brunswick et de l'Île-du-Prince-Édouard, qui ont des mécanismes de surveillance publique très rigoureux dans lesquels on ne fait pas nécessairement la distinction entre les garderies à but lucratif et les garderies à but non lucratif.
    L'Alberta a dû fournir ce type de garantie au gouvernement fédéral afin de poursuivre dans cette voie.
    Madame Gray, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame la ministre, je vous remercie de votre présence au Comité aujourd'hui.
    Madame la ministre, vous avez évoqué la création de 250 000 nouvelles places. Combien de nouveaux travailleurs en garderie seront nécessaires pour y arriver?
    Nous aurons besoin de 40 000 travailleurs environ.
    Selon Statistique Canada, la majorité des enfants en garderie est d'âge préscolaire. Selon une moyenne de six enfants par éducateur en garderie, puisqu'il en faut moins pour les nourrissons et plus pour les enfants d'âge scolaire, cela donne 41 000 nouveaux travailleurs en garderie, comme vous l'avez indiqué.
    Poursuivons ce calcul en tenant compte de l'ensemble des places, avec une moyenne de 75 enfants par garderie, environ, ce qui est plutôt élevé. Cela signifie que la création de ces 250 000 nouvelles places dans le réseau nécessiterait la création de 3 338 nouvelles garderies, et ce, d'ici trois ans, comme indiqué dans le document que nous avons reçu de votre ministère. Quel est le plan pour ouvrir d'ici trois ans plus de 3 000 garderies accueillant chacune 75 enfants, ce qui est beaucoup?
(0920)
    Vous trouverez sur notre site Web le plan d'action présenté par chaque province et territoire. Ces renseignements sont publics. Il s'agit de plans détaillés sur l'ouverture de nouvelles places. Dans la dernière année, quelque 50 000 places ont été créées ou annoncées. Nous sommes donc en bonne posture. N'oubliez pas qu'il s'agit de la première année du programme. Nous cherchons à accélérer les choses. Par conséquent, les provinces et territoires font des efforts considérables en ce sens. Ils font un excellent travail, et ils ont des plans pour offrir des services de garde d'enfants dans les régions mal desservies.
    C'est encore tout frais à mon esprit, car j'étais à Regina, lundi. Le YMCA a réussi au cours des deux derniers mois à porter le nombre de places de 80 à 170 grâce à un partenariat avec une coopérative et le gouvernement de la Saskatchewan. Ils ont trouvé un nouvel emplacement. Beaucoup de bonnes initiatives sont en cours partout au pays.
    Une bonne partie des données concerne les garderies à but non lucratif et ne comprend pas les données sur les places en garderie à but lucratif. Lorsqu'on regarde les rapports de Statistique Canada, on constate que les données ne comprennent que le tiers des garderies à but lucratif, souvent des garderies en milieu familial, donc de très petites garderies.
    Elles sont incluses dans la catégorie des organismes à but non lucratif.
    Les garderies en milieu familial sont incluses dans la catégorie à but non lucratif. Il y a également beaucoup de possibilités de croissance dans les garderies en milieu familial.
    Lorsqu'on examine aussi l'effectif nécessaire de ce côté‑là, les études montrent que 60 % de l'effectif devra être remplacé au cours des 10 prochaines années. Examinons le nombre de nouveaux travailleurs requis. Vous avez parlé de 40 000 travailleurs, environ, auxquels s'ajoutent les travailleurs de remplacement pour les 10 prochaines années, ce qui donne 181 000 travailleurs à remplacer. Si l'on additionne les deux, cela donne plus de 200 000 travailleurs.
    Quel est le plan à cet égard?
    Nous sommes prêts à relever le défi.
    Cette initiative très emballante qui est menée à l'échelle du pays contribue à l'édification du pays. Les provinces et les territoires augmentent le nombre de places d'éducation à la petite enfance dans les collèges. À titre d'exemple, le Collège de l'Atlantique Nord, à Terre-Neuve, et la Saskatchewan Polytechnic sont en train d'élaborer des stratégies. Encore une fois, toutes ces informations sont publiques et se trouvent sur le site Web du gouvernement du Canada. Tout le monde peut consulter les plans d'action et les ententes bilatérales.
    Les provinces doivent aussi mettre en place des plans de maintien en poste. Le Manitoba a fait un excellent travail en proposant un régime d'avantages sociaux et de retraite. Il reste du travail à faire, mais elles y travaillent. La Colombie-Britannique a fait de l'excellent travail en mettant en place un nouveau programme d'études secondaires permettant aux étudiants d'obtenir un certificat en éducation de la petite enfance plutôt que d'avoir à suivre un programme d'études collégiales. Il y a beaucoup d'initiatives très intéressantes et novatrices à l'échelle du pays.
    La main-d'œuvre sera le principal sujet de discussion, que ce soit au Conseil consultatif national sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants ou dans le cadre de la prochaine rencontre fédérale-provinciale-territoriale, car elle est essentielle à la réussite du réseau.
    Des échéanciers ont été fixés pour bon nombre de ces stratégies. Que se passera‑t‑il s'ils ne sont pas respectés?
    On parle de trois ans pour construire des milliers de nouvelles installations. Nous savons évidemment que dans beaucoup de municipalités, il faut parfois plusieurs mois ou années pour obtenir un permis de construction. Il faut considérer que les gens procéderont dans le cadre des programmes.
    Les chiffres tiennent-ils vraiment la route? Correspondent-ils vraiment à la réalité?
    Oui. Oui, bien sûr. Nous y arriverons, n'est‑ce pas?
    Je dois dire que tous les intervenants concernés à l'échelon provincial et territorial sont pleinement mobilisés pour ce projet, peu importe leur allégeance politique. Ils sont enthousiastes et travaillent fort.
    Partout au pays, des fonctionnaires très compétents réfléchissent à ces défis, puis nous avons des fournisseurs de services de garderie et des éducatrices et éducateurs de la petite enfance extraordinaires qui sont très enthousiasmés par ce projet et qui réfléchissent aux façons d'étendre leurs services. Je dois dire que c'est un projet ambitieux, certes, ainsi qu'un défi de taille, sans aucun doute, mais beaucoup de gens sont mobilisés et travaillent sans relâche pour que cela se concrétise.
    Merci, madame Gray.
    Monsieur Long, vous avez la parole pour cinq minutes.
(0925)
    Merci, monsieur le président. Chers collègues, madame la ministre, mesdames et messieurs, bonjour. Je vous remercie de votre présence.
    Je vais vous raconter une petite histoire. Je me souviens très bien qu'il y a une centaine d'années, lorsque nos enfants étaient très jeunes, ma femme Denise et moi avons discuté pour décider si elle pouvait aller travailler ou si elle devait rester à la maison. Les coûts étaient très élevés, même à l'époque. Je me souviens que nous étions assis là, calculatrice en main. Nous avions deux enfants; donc, cela coûterait tant, on gagnait tant, mais il y avait aussi le kilométrage et tout le reste. Nous avons donc décidé en toute connaissance de cause que Denise resterait à la maison pendant de nombreuses années pour s'occuper des enfants, parce que nous n'avions pas les moyens de payer des services de garde.
    Évidemment, nous avons tous des électeurs qui nous racontent exactement la même chose. Actuellement, les coûts pour les familles sont de l'ordre de 15 000 $ à 30 000 $ par année. On parle de montants après impôts. C'est absolument exorbitant. Encore une fois, comme je l'ai dit lors de notre dernière séance, nous sommes tous ici pour faire de grandes choses pour nos électeurs et pour notre pays, mais ce programme est réellement transformateur.
    Dans un premier temps, pouvez-vous nous parler de l'importance de ce programme pour les familles, de l'occasion que représente, sur le plan économique, le retour sur le marché du travail de tant de parents, en particulier les femmes, et de l'incidence que cela aura sur notre économie?
    Oui. Ma foi, vous n'imaginez pas tous les témoignages absolument extraordinaires que j'ai entendus partout au pays. Cela change la vie de tant de personnes. Des gens sont venus me voir pour me dire qu'ils avaient décidé d'avoir un deuxième enfant grâce à cela. Que pourrait‑on dire de plus? Des gens m'ont dit que ce programme avait permis à la famille de garder sa maison. Ils avaient une hypothèque à taux variable; la réduction des frais de garderie a couvert la différence. En fait, ils devaient choisir entre les deux. Cela a changé leur vie. En Nouvelle-Écosse, une femme m'a raconté qu'en raison de la réduction des frais de garderie, elle n'a plus à se demander, lorsqu'elle va à l'épicerie, si elle a les moyens d'acheter du poulet ou non. C'est très important.
    Dans chaque province ou territoire où je suis allée, à chaque visite, je rencontre une mère — je suis certaine qu'il y a aussi des pères, mais je n'ai pas encore eu l'occasion de leur parler — qui me dit que cette mesure lui permettra de retourner au travail. Elle en a maintenant les moyens. Je sais que certains affirment que les femmes ne devraient pas avoir à faire ce choix, mais lorsqu'on n'a pas les moyens, ce n'est pas un choix. L'autonomisation et la capacité d'avoir accès à la sécurité financière sont d'une importance primordiale. Je dois dire que l'effet a été tout simplement incroyable.
    Si les femmes du reste du Canada réintègrent le marché du travail dans la même proportion que les Québécoises il y a 25 ans, cela représentera 240 000 personnes de plus dans la population active de notre pays.
    C'est un chiffre considérable.
    Dans cette veine, je me souviens du moment où cela a été annoncé. Je suis à Saint John—Rothesay, au Nouveau-Brunswick. Le gouvernement provincial est un gouvernement conservateur dirigé par le premier ministre Higgs. Je crois que c'est Dominic Cardy qui était ministre à ce moment‑là. Je me souviens d'avoir observé les réactions dans la province et dans tout le pays, et d'avoir dit que beaucoup de provinces n'y participeraient pas et que ce serait un défi. Rendons à César ce qui revient à César, soit à vous et à votre ministère: les provinces y ont adhéré l'une après l'autre — à contrecœur, je dirais —, mais elles savent qu'il s'agit d'un bon programme. Le premier ministre Kenney, le premier ministre Moe ou le premier ministre Higgs savaient tous que c'était un bon programme.
    Vous avez parcouru le pays et négocié ces ententes. Pouvez-vous nous parler de votre expérience? Vous avez probablement eu plus de difficultés dans certaines régions que dans d'autres, mais pouvez-vous nous raconter comment cela s'est passé partout au pays?
    Combien de temps nous reste‑t‑il? Il nous reste 30 secondes? D'accord; tout s'est bien passé.
    Il est devenu de plus en plus clair que les provinces et les territoires tireraient des avantages économiques incroyables, notamment par les revenus qui retourneraient dans les coffres du gouvernement en raison de l'augmentation des taxes et des dépenses, de l'incidence de la pandémie, de la « récession au féminin » et du retour d'un grand nombre de femmes sur le marché du travail après l'avoir quitté en raison de la pandémie. C'est très important.
    Nous connaissons une pénurie de main-d'œuvre et de logements au pays. Ce qui a convaincu quelques-uns des gouvernements, à mon avis, c'est que ces travailleurs sont déjà là et ont déjà un logement. De façon plus importante, les chiffres ne mentent pas. Il s'agit d'une très bonne politique économique et sociale, et il est difficile de remettre en question les faits.
(0930)
    Merci.

[Français]

     Madame Bérubé, vous avez la parole pour deux minutes et demie.
    Merci, monsieur le président.
    Madame la ministre, en quoi l'accord avec le Québec diffère-t-il des accords qui ont été conclus avec les autres provinces, territoires et communautés autochtones au titre du cadre multilatéral d'apprentissage de garde des jeunes enfants?
    Comme vous le savez, c'est un accord asymétrique, basé seulement sur le nombre d'enfants de moins de 12 ans. Cela représente environ 6 milliards de dollars sur 5 ans, qui seront simplement transférés à la province de Québec.
    Vous avez dit que le projet de loi C‑35 mentionne que les Premières Nations ont participé à l'élaboration du cadre d'apprentissage et de garde des jeunes enfants autochtones.
    Pouvez-vous nous dire quels groupes ont été consultés et à combien de reprises ils l'ont été?
    Voulez-vous parler des consultations sur le projet de loi ou sur le cadre d'apprentissage et de garde de jeunes enfants autochtones?
     Je parle des consultations concernant le projet de loi.
    Je vais céder la parole à Mme Reddin.

[Traduction]

    Nous voulions entendre les gouvernements, organisations et représentants autochtones au sujet du projet de loi C‑35. Nous avons communiqué avec plus de 50 d'entre eux au début de l'année dernière. On a fait de la promotion par l'entremise des partenariats déjà en place afin d'obtenir les rétroactions sur la mesure législative proposée, et de s'enquérir de l'intérêt des gens à ce sujet.

[Français]

    Comment avez-vous réparti le budget entre les communautés autochtones partout au Canada?
    Dans le cadre des communautés autochtones, le budget alloué aux garderies et à la petite enfance est réparti entre les groupes distincts, soit les Premières Nations, les Métis, les Inuits, et aussi les Premières Nations autogouvernées. La façon dont le budget est réparti est décidée de façon régionale pour chacune de ces organisations. Ce n'est pas réparti par le gouvernement fédéral. C'est transféré aux gouvernements régionaux, qui font la distribution eux-mêmes.
    Donc, vous allez distribuer 30 milliards de dollars sur cinq ans aux communautés autochtones.
    Les 30 milliards de dollars représentent le total qui sera distribué à tous.
    C'est ce qui sera distribué à l'ensemble des Premières Nations, aux Inuits et aux autres.
    Cela inclut aussi les provinces et les territoires.
    Comment les communautés réagissent-elles en ce qui concerne la distribution? Ce sont les provinces qui vont gouverner les budgets, mais avez-vous eu des suivis concernant les réactions des communautés autochtones?
    Il y a deux cadres: un avec les provinces et les territoires, l'autre avec les communautés autochtones. Les provinces et les territoires décident comment distribuer les fonds en se basant sur un plan d'action qu'ils nous envoient tous les deux ans. Avec les communautés autochtones, c'est plus autonome, mais il y a quand même des principes qui guident cette initiative et qui ont été développés avec les partenaires autochtones.
    Je peux parler de ma plus récente expérience, il y a deux semaines, avec la Fédération métisse du Manitoba. Elle a déjà ouvert 12 centres de la petite enfance et planifie en ouvrir quatre de plus, ce qui représente 200 places de plus au Manitoba. J'étais à St. Eustache, une communauté métisse, dont j'ai pu visiter le centre de la petite enfance. La moitié des quelque 40 places qu'il offre sont réservées aux enfants métis et l'autre moitié est ouverte aux autres communautés. Le personnel y fait vraiment un excellent travail, basé sur un apprentissage du langage et de la culture. La formation est réellement basée sur leurs traditions autochtones.
(0935)

[Traduction]

    Merci, madame Bérubé.
    Madame Gazan, vous disposez de deux minutes et demie.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    La Loi sur la réduction de la pauvreté établit un conseil consultatif national, comme celui présenté dans le projet de loi C‑35, mais en vertu de la Loi, ce conseil doit présenter un rapport au ministre sur les progrès réalisés en matière de réduction de la pauvreté. Le ministre doit présenter le rapport au Parlement.
    L'article 16 du projet de loi n'exige pas l'intégration d'indicateurs pour mesurer la qualité, l'accessibilité, l'abordabilité et l'inclusion dans le rapport du ministre. Le secteur a fait part de ses préoccupations relatives à la façon d'assurer la reddition de comptes du gouvernement.
    Quel est votre plan en matière de reddition de comptes? Êtes-vous prêts à modifier le projet de loi afin qu'il corresponde davantage à la Loi sur la réduction de la pauvreté?
    Dans la mesure législative, nous avons prévu que le ministre sera responsable de présenter un rapport annuel au Parlement. Bien sûr, les provinces et les territoires doivent faire rapport chaque année des progrès réalisés et des défis rencontrés. C'est ce qu'ils font.
    Le ministre présente un rapport. Le Conseil consultatif national sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants présente un rapport au ministre, qui à son tour présente un rapport au Parlement et à la population.
    Êtes-vous prête à modifier le projet de loi, afin qu'il réponde aux demandes du secteur relatives à des mesures de reddition de comptes?
    Je sais que c'est ce qui se trouve dans le projet de loi, mais ce n'est pas ce que demandent les intervenants du secteur, afin d'assurer la reddition de comptes. Êtes-vous prête à répondre à leur demande, pour une plus grande responsabilisation?
    Puis‑je demander pourquoi il serait préférable que le Conseil consultatif prépare le rapport, plutôt que le ministre?
    C'est exactement ce que demandent les intervenants du secteur, de façon similaire à ce qui se trouve dans la Loi sur la réduction de la pauvreté. C'est ce qui a été mis en oeuvre. Le secteur demande l'amendement du projet de loi afin qu'il corresponde davantage à la Loi.
    En tant que ministre, êtes-vous prête à examiner la question et à apporter des modifications pour accroître la reddition de comptes?
    La reddition de comptes est toujours importante; c'est pourquoi nous avons mis en place de nombreuses mesures, par l'entremise du cadre et de la loi.
    Je n'ai pas entendu une telle demande de la part du secteur. Si vous avez des observations écrites à ce sujet, j'aimerais les voir.
    Tout à fait, je vais vous les transmettre.
    Madame Ferreri, vous disposez de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame la ministre.
    Il ne fait aucun doute que le bien-être de l'enfant devrait être au cœur de notre conversation. Le meilleur investissement que l'on puisse faire, c'est dans nos enfants. Lorsque les enfants ont une bonne santé mentale — des enfants qui se sentent en sécurité sur le plan physique et psychologique —, ils deviennent des adultes en santé. C'est un sujet très important.
    Dans votre cadre national, vous parlez de qualité, d'accessibilité, d'abordabilité, d'inclusivité et de souplesse. Ce sont les piliers que vous défendez, et je suis du même avis que vous à ce sujet.
    Madame la ministre, seriez-vous prête à modifier l'alinéa 7(1)a) du projet de loi, afin d'y ajouter les mots « tous les ». Nous savons que ce sont les provinces et non le gouvernement fédéral qui établissent les normes en matière de garde d'enfants. Donc, on pourrait lire: « [...] faciliter l'accès à tous les programmes et services d'apprentissage et de garde des jeunes enfants [...] »
    Seriez-vous prête à apporter une telle modification, afin d'éviter d'exclure plus de la moitié des fournisseurs? Selon Statistique Canada, plus de la moitié des garderies au Canada ne sont pas accréditées, et sont en milieu familial.
    Accepteriez-vous cet amendement?
    Madame Ferreri, il est très important pour nous que cette disposition vise les garderies accréditées. Je présume...
    Comme je viens de le dire, madame la ministre, ce sont les provinces qui établissent les normes.
    Je crois que vous interprétez mal certaines questions.
    Donc vous n'êtes pas prête...
    Madame Ferreri, est‑ce que je peux vous expliquer la différence? Je crois que vous faites certains amalgames.
    Les provinces et les territoires financent uniquement les services de garde accrédités. Ils ne financent habituellement pas les garderies non accréditées.
    Les garderies en milieu familial, si elles sont accréditées, sont visées par le projet de loi. Comme je l'ai expliqué à Mme Gray plus tôt, elles sont considérées à titre d'organismes à but non lucratif.
    En fait, tous les services de garde accrédités, qu'il s'agisse de...
(0940)
    Madame la ministre, comme je n'ai que très peu de temps...
    Je le sais, mais je crois qu'il est très important pour vous de comprendre, parce qu'autrement...
    C'est aussi très important de reconnaître qu'il s'agit de mon temps de parole, madame la ministre, et je veux obtenir le plus grand nombre de réponses possible.
    C'est aussi important que vous compreniez la situation, afin de ne pas répandre de fausses informations.
    Il est aussi important que vous compreniez que toutes les garderies en milieu familial doivent être incluses, parce que vous ne dites pas... Vous faites le contraire. Vous parlez de qualité, d'accessibilité, d'abordabilité, d'inclusivité et de souplesse; pourquoi ne pas ajouter les mots « tous les »? Pourquoi n'êtes-vous pas ouverte à cette modification?
    Madame Ferreri, il est important de prendre un pas de recul pour s'assurer que tout le monde comprend de quoi l'on parle.
    On parle de services de garde accrédités; c'est important. Les provinces et les territoires déterminent les exigences en matière d'attestation. Il est important que tous...
    Bon nombre de garderies en milieu familial sont accréditées. Ce que je demande...
    Elles sont visées par le projet de loi. Je l'ai dit à quatre reprises déjà.
    Je l'ai dit sept fois.
    Le projet de loi énonce: « [...] notamment ceux offerts par des fournisseurs de services de garde d’enfants publics et à but non lucratif [...] »
    Vous ne comprenez pas.
    Vous ne comprenez pas non plus. Je représente les milliers d'électeurs qui m'écrivent, madame la ministre. Je veux qu'ils aient accès...
    Madame Ferreri, les garderies en milieu familial accréditées sont incluses.
    Pourquoi mentionne‑t‑on alors à répétition dans le projet de loi qu'il s'agit principalement des services de garde d’enfants publics et à but non lucratif, alors que l'on pourrait évoquer tous les services de garde accrédités? Pourquoi ne pas modifier la formulation du projet de loi?
    Madame Ferreri, je le répète: selon la définition des services de garde à but non lucratif présentée dans les cadres multilatéraux — et qui est compatible avec la mesure législative — les garderies en milieu familial accréditées font partie du groupe des services de garde à but non lucratif. Donc, ce que vous dites se retrouve déjà dans le projet de loi... les garderies en milieu familial non accréditées ne sont pas visées par le projet de loi, mais bon nombre de provinces et de territoires travaillent avec elles afin de les intégrer au système d'attestation.
    Si nous finançons les services de garde, nous voulons nous assurer que les fournisseurs répondent à des normes élevées en matière de qualité et de sécurité. En tant que mère, je suis certaine que vous comprenez. Vous avez d'abord parlé du bien-être des enfants. C'est très important.
    Oui, c'est très important.
    Nous allons passer à autre chose, parce que ce que vous dites ne correspond pas à ce que vous faites. Vous parlez d'inclusivité, mais la formulation du projet de loi dit le contraire. Nous allons devoir accepter notre désaccord...
    Mais ce n'est tout simplement pas vrai.
    ... et j'espère que nous y arriverons.
    Oui, c'est vrai.
    Non.
    Je vais passer à autre chose, madame la ministre.
    Nous pouvons vous transmettre des renseignements, pour que tout soit clair.
    Madame la ministre, vous avez dit dans votre témoignage qu'il était impossible de représenter toutes les voix à la table. Toutefois, il n'y a aucun représentant des garderies en milieu familial au sein du Conseil national. J'aimerais vous lire une lettre qui nous a été transmise, à vous et à moi, et j'aimerais savoir ce que vous avez à dire officiellement à son sujet...
    Madame Ferreri, vous n'avez plus de temps.
    Merci.
    Je vais permettre à la ministre de répondre, rapidement, si elle le souhaite. Nous allons ensuite entendre M. Collins.
    Merci, monsieur le président.
    Je crois que c'est très important, parce que ce que dit Mme Ferreri est inexact. Je serai heureuse de transmettre des documents au Comité pour que tout le monde comprenne bien la situation. Bien sûr, les garderies non accréditées ne sont pas visées, pour des raisons évidentes. Toutefois, les garderies en milieu familial accréditées font partie du groupe des services de garde sans but lucratif et sont visées par le projet de loi, et ce, depuis le début.
    Je crois qu'il est très important de se fonder sur des faits.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, madame Ferreri.
    Nous allons conclure avec M. Collins, qui dispose de cinq minutes. Allez‑y.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à vous féliciter, madame la ministre, pour la tâche herculéenne que vous avez dû accomplir — tout comme mes collègues présents et passés — en vue de la signature de ces accords au pays. Je fais de la politique depuis longtemps et je sais qu'il est rare que les partis de tous horizons appuient une mesure législative à l'unanimité. Vous avez obtenu cet appui partout au pays, mais pas ici, dans la salle. Nous connaissons l'opinion de l'opposition sur le sujet.
    Je suis d'accord avec Mme Ferreri au sujet des principes et de la qualité du projet de loi, contre lequel elle a voté, mais je crois que...
(0945)
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement. Je n'ai pas voté contre le projet de loi.
    Je suis désolé; j'avais mal compris.
    Je crois que lorsque les partis de l'ensemble du pays s'entendent sur une question, nous avons bien fait les choses. C'est le cas pour la prestation pour les personnes handicapées, notamment. Le Comité a eu l'occasion de parler aux Canadiens et de travailler avec la ministre à la rédaction d'une loi historique. Cela fait partie de la même catégorie, à mon avis.
    Toutefois, dans le secteur, les fournisseurs de services et les personnes qui profitent d'un tarif réduit craignent qu'un prochain gouvernement mette fin à ces accords.
    Pouvez-vous dire au Comité et aux gens qui nous regardent si la loi est protégée? Nous avons été témoins d'un théâtre politique par le passé. Nous l'avons vécu lors des dernières élections. Certains ont fait la promesse d'abolir ces accords. J'aimerais que vous nous aidiez à rassurer les Canadiens et à leur faire comprendre que ce programme est là pour de bon.
    Pour obtenir la meilleure garantie, il faut éviter d'élire un gouvernement conservateur. Nous avons vu Stephen Harper abolir les ententes relatives à la garde d'enfants en 2006; M. Poilievre les a qualifiées de « caisse noire » pour les parents. Donc, ce serait probablement la chose la plus sécuritaire à faire.
    On a tenté le plus possible de prévoir des mesures de protection dans la loi afin d'éviter qu'un gouvernement qui n'accorde pas d'importance à la garde des enfants — probablement un gouvernement conservateur — puisse abolir les accords. Je crois toutefois qu'une fois que ces accords seront en place, il sera difficile de les éliminer. Les provinces et les territoires vont miser sur le soutien du gouvernement fédéral. Cela fait partie des accords que nous avons signés alors que nous savions que nous voulions présenter le projet de loi. Je crois que les prochains gouvernements auraient des comptes à rendre aux Canadiens avant de pouvoir prendre des décisions. Ils devraient modifier la loi. Il faudrait qu'ils expliquent aux familles canadiennes que leurs frais de garde augmenteraient, parce qu'ils ne veulent plus les aider.
    Je crois que les familles canadiennes, les exploitants de garderies, les provinces et les territoires doivent veiller à ce que le présent gouvernement reste en place longtemps.
    Merci.
    Y a‑t‑il en place un processus d'examen pour assurer la fluidité du processus? Est‑ce qu'il y aura des points de contrôle? Est‑ce que les gouvernements provinciaux et un prochain gouvernement fédéral pourront savoir comment fonctionnent ces accords? Pouvez-vous nous en dire plus sur le processus permettant de les modifier?
    La loi est là pour longtemps. Elle mobilise le gouvernement fédéral à long terme. Elle énonce les principes, les facteurs déterminants et l'esprit de ces accords sur la garde d'enfants.
    Il y a aussi le cadre multilatéral complémentaire qui établit les accords sur une période de cinq ans. Je crois qu'il est important de prévoir une telle période de mise en oeuvre, puisque nous créons quelque chose de nouveau. Nous n'avons jamais pris une telle mesure au Canada. Il s'agit d'un nouveau partenariat avec les provinces et les territoires, et nous devons tenir un dialogue continu avec eux, de même qu'avec les partenaires autochtones, pour bien faire notre travail.
    C'est très encourageant. Nous ressentons l'enthousiasme partout au pays. Ces accords auront une incidence sur le quotidien de la population.
    Monsieur le président, j'invoque le Règlement.
    Allez‑y.
    Merci.
    Je tiens à apporter une correction, aux fins du compte rendu, parce qu'il y a eu confusion, je crois. Je tiens à dire officiellement à la ministre qu'elle avait raison. Je crois qu'il y a eu chevauchement et je tiens à dire que je n'ai pas voulu que l'on tienne compte des garderies non accréditées. Je demandais un amendement, et je crois qu'il y a eu quelques échanges sur le sujet.
    Je voulais corriger la situation aux fins du compte rendu. Elle avait raison, mais je demandais un amendement afin que l'on tienne compte des petites garderies accréditées. Je n'ai jamais voulu que l'on tienne compte des garderies non accréditées. Ce n'est pas ce que je tentais de dire, mais j'aimerais que nous puissions modifier le projet de loi afin que les petits exploitants accrédités...
    Merci, madame Ferreri.
    Votre intervention relève plutôt du débat, mais nous allons vous permettre de préciser vos propos.
    Monsieur Collins, il vous reste environ 20 seconds. Avez-vous terminé?
    Il ne me reste plus beaucoup de temps.
    J'aimerais vous remercier à nouveau, madame la ministre. Vous avez fait un excellent travail dans ce dossier. Nous vous en sommes reconnaissants. Je crois que les politiciens et les représentants élus de tous les horizons politiques au pays vous sont reconnaissants. Bravo pour votre travail.
    Merci, monsieur Collins.
    Merci, madame la ministre, pour votre témoignage et pour ces échanges parfois très dynamiques. Je remercie tous les témoins qui vous accompagnaient.
    Voilà qui met fin à la première partie de la réunion. Nous allons suspendre les travaux pendant quelques minutes pendant que nous accueillons les prochains témoins.
    Encore une fois, merci à la ministre et aux membres de son personnel.
    Nous reviendrons dans trois minutes.
(0950)

(0955)
    Nous reprenons les travaux.
    Nous poursuivons notre étude sur le projet de loi C‑35, Loi relative à l'apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada.
    Afin d'aider les interprètes à bien faire leur travail, je rappelle à tous les membres du Comité et aux témoins qu'ils doivent se nommer lorsqu'ils prennent la parole, et parler lentement, dans la langue officielle de leur choix. Veuillez m'aviser de toute interruption dans les services d'interprétation. Nous allons suspendre la séance afin de régler le problème, le cas échéant.
    Je vous rappelle également que vous devez adresser vos questions et réponses à la présidence, et attendre que je vous nomme avant de prendre la parole.
    Pour notre dernière heure, nous allons entendre trois témoins: Pierre Fortin, professeur émérite d'économie; Krystal Churcher, présidente de l'Association of Alberta Childcare Entrepreneurs; et Sophie Mathieu, spécialiste principale des programmes à l'Institut Vanier de la famille.
    Nous allons d'abord entendre M. Fortin.

[Français]

     Monsieur Fortin, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
    « Professeur émérite »... c'est une autre façon de dire que je suis vieux; ne vous encombrez pas de ce titre.
    Je suis très heureux d'avoir été invité à témoigner devant vous.
    Je vais d'abord m'exprimer en français, puis je passerai à l'anglais.

[Français]

    Ma présentation se concentrera sur l'expérience québécoise des 25 dernières années.
    Au moment où l'ensemble du pays s'engage dans un développement accéléré des services de garde, il est très important de comprendre les succès et les difficultés rencontrés par le Québec depuis 1997 afin d'éclairer le jugement de tous au cours des années à venir.

[Traduction]

    La Loi de 1996 sur les services de garde éducatifs à l'enfance du Québec fixe deux objectifs précis: d'abord, celui d'aider les familles à améliorer leur conciliation travail-vie personnelle; ensuite, celui de favoriser le développement de l'enfance, en insistant sur l'égalité des chances.
    Vingt-cinq ans après l'entrée en vigueur de la Loi, deux grands constats s'imposent. D'une part, d'énormes progrès ont été réalisés en matière d'équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle. D'autre part, on constate une amélioration sur le plan du développement de l'enfance et de l'égalité des chances, bien que le travail à cet égard ne soit pas terminé.
    Au départ, les parents québécois avaient accès à des places en garderie moyennant un modique tarif universel de 5 $ par jour. Ce tarif a été ajusté à la hausse au fil du temps pour atteindre 8,85 $ aujourd'hui. Dès 2009, le gouvernement provincial a rendu le secteur privé à but lucratif et à plein tarif plus concurrentiel par rapport au secteur à bas tarif fixe en accordant aux parents un généreux crédit d'impôt provincial remboursable sur les frais de garde.
    Je dégage huit principales leçons à retenir de cette expérience sur 25 ans.
    D'abord, le nombre de places en garderie est passé de 79 000 en 1997 à environ 300 000. Les garderies agréées restent immensément populaires depuis 1997, à plus de 90 %.
    Deuxièmement, les coûts du système sont bien maîtrisés. Le coût total en 2022 fut d'environ 3,1 milliards de dollars, soit un peu moins de la médiane des pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques, qui est de 0,6 % du produit intérieur brut, ou PIB.
    Troisièmement, au Québec, le taux de participation des femmes au marché du travail a atteint un sommet mondial, à égalité avec celui des Suédoises. En 2022, 88 % des Québécoises âgées de 25 à 54 ans faisaient partie de la population active, comparativement à 84 % dans les autres provinces et à 76 % aux États-Unis.
    Quatrièmement, la sécurité économique des femmes et le salaire moyen gagné au cours de leur carrière ont augmenté de façon substantielle. L'écart de salaire horaire moyen entre les hommes et les femmes au Québec a été réduit de moitié au cours des 20 dernières années, passant de 17 à 9 %. Les femmes peuvent désormais mener une carrière de façon continue, au lieu de subir des ruptures d'emploi et des retards dans les promotions et les salaires après chaque nouvelle naissance.
    Cinquièmement, selon les estimations, le PIB du Québec serait actuellement supérieur de 1,5 %, soit de 8 milliards de dollars, à ce qu'il serait sans le système de garderies.
    Sixièmement, l'accroissement de la population active et de l'activité économique fait en sorte que le programme de garderies s'autofinance amplement. Il n'a nécessité aucune augmentation d'impôts. Les excédents budgétaires peuvent être réinvestis ailleurs ou utilisés pour réduire les impôts. Il est possible de choisir.
    Septièmement, les recherches du secteur psychomédical concluent unanimement que la qualité des services est la plus élevée dans les établissements sans but lucratif et à tarif réduit — c'est‑à‑dire, les centres de la petite enfance, ou CPE — et qu'elle est la plus faible dans les garderies privées à but lucratif et à plein tarif.
    Il est indéniable que les marchés privés de la garde d'enfants présentent malheureusement des problèmes de qualité. Je dis « malheureusement » parce que j'ai défendu les solutions du marché privé pendant toute ma carrière, mais un fait reste un fait. Pour la plupart des intéressés, dont les représentants des fournisseurs privés à but lucratif, il est évident que la province doit maintenant s'efforcer par tous les moyens de relever les niveaux de qualité dans l'ensemble des établissements, afin qu'ils répondent aux normes imposées aux CPE.
(1000)
    Le dernier point, mais non le moindre, est que l'accès des enfants défavorisés à des services de garde de qualité laisse à désirer et devrait constituer une priorité stratégique absolue.
    En conclusion, le système québécois n'a pas adopté une approche ciblée de type « Robin des bois », mais bien le modèle scandinave d'universalité. Les nouveaux transferts fédéraux aux provinces au titre des services de garde reposent également sur la généralisation de l'approche scandinave à l'ensemble du Canada. Le bilan d'expérience du Québec en matière de services de garde porte à croire qu'il s'agit bien là de la voie à suivre.
    Il y a trois grandes conclusions à tirer de l'expérience québécoise.
    D'abord, le bien-être économique des femmes s'en est trouvé grandement amélioré.
    Ensuite, il n'a pas été nécessaire d'augmenter les impôts.
    Enfin, à l'heure actuelle, les principaux défis sont les suivants. Premièrement, il faut remédier à la pénurie de places qui subsiste. Deuxièmement, il faut rehausser la qualité des services pour que l'ensemble du système atteigne le niveau de qualité des CPE. Troisièmement, il faut attirer davantage d'enfants défavorisés vers le secteur des services de haute qualité.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur Fortin.
    Nous passons à Mme Churcher, pour cinq minutes.
    Bonjour. Merci de me donner l'occasion d'échanger avec le Comité aujourd'hui. Je m'appelle Krystal Churcher. J'exploite une garderie privée en Alberta. Je suis également la présidente de l'Alberta Association of Childcare Entrepreneurs, une association à but non lucratif qui représente les intérêts des exploitants de garderies privées en Alberta, qui constituent 70 % des services de garde offerts à l'heure actuelle.
    L'information qui circule au sujet du projet de loi C‑35 et du programme pancanadien sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants est très générale et témoigne de nobles intentions. Je veux parler de l'expérience concrète des exploitants et des familles sur le terrain.
    Ce programme et ce projet de loi établissent une optique à long terme et implantent la vision du gouvernement fédéral de l'apprentissage et de la garde des jeunes enfants. Il est essentiel que nous menions ce travail de concert dans le respect des droits des enfants d'obtenir un service de garde souple, de grande qualité et au choix des parents.
    L'objectif de ce projet de loi est de permettre à toutes les familles d'accéder à un service de garde de grande qualité, abordable et inclusif. Toutefois, sur le terrain, on constate le coût humain et l'incidence du déploiement de ce programme.
    Le projet de loi a été déposé sans consultation adéquate des parties prenantes du secteur et sans respecter l'évolution du secteur de la garde d'enfants dans les provinces et territoires du pays. En conséquence, le programme a créé une demande que l'infrastructure en place n'a pas les moyens de soutenir, ce qui crée des listes d'attente, un système à deux vitesses et un stress indu pour les familles et les exploitants. Des entrepreneuses risquent la faillite et la fermeture d'entreprises qui ont aujourd'hui perdu toute leur valeur. Le système, bien franchement, n'offre pas un accès équitable pour tous et ne respecte pas les promesses faites aux parents et aux familles. Les exploitants veulent savoir ce que coûte réellement l'atteinte de l'objectif du tarif à 10 $ par jour. Les parents n'ont plus le choix; la qualité des programmes est à risque; les éducatrices sont épuisées; et des femmes sont en train de perdre leurs entreprises.
    Le projet de loi C‑35 ne reconnaît pas suffisamment le fait que le système actuel de garde d'enfants au Canada dépend encore beaucoup de milliers d'exploitants privés, en dépit d'une préférence des décideurs pour le modèle à but non lucratif. Quand les subventions sont accordées aux places en garderie plutôt que directement aux parents, on fait face à une forme de coercition douce. On ne crée pas des options dans le respect des différences et des choix de chaque famille.
    Les frais réduits, qui ne sont là encore offerts que dans certains centres, ont en réalité pour effet d'enlever le choix aux parents et de forcer l'adoption d'un système normalisé. En limitant l'accès uniquement aux centres principalement à but non lucratif, le programme force les familles à renoncer à leur droit de choisir leur service de garde.
    Bien que le programme encourage les femmes à s'accomplir pleinement sur le plan économique, notre secteur, constitué en grande partie de femmes entrepreneuses comme moi, voit ses entreprises expropriées. Nous voulons tous que les femmes réussissent, mais qu'en est‑il des femmes qui investissent dans la création de places en garderie dans leur collectivité? En cherchant à offrir un service de garde abordable aux familles que nous servons et en participant au programme, nous avons vu l'expansion de nos entreprises privées freinée, nous avons perdu la capacité de contrôler nos frais de service et, pour finir, nos investissements ont perdu leur valeur.
    En vérité, les places en garderie qui ont été promises ne sont pas véritablement accessibles à toutes les familles. En Alberta, les listes d'attente dans les grandes villes comptent en moyenne de 75 à 150 familles et, dans les régions rurales comme Grande Prairie, plus de 600 familles par liste d'attente. Le projet de loi promet l'accès à un service de garde, quel que soit l'endroit, mais la vérité est tout autre. Les parents ont en fait moins accès au service, parce que le programme a créé une demande à laquelle on n'a pas les moyens de répondre, ce qui entraîne des listes d'attente.
    Le principe directeur est de donner la priorité aux places dans les centres à but non lucratif, ce qui a entraîné l'arrêt de l'expansion des services privés, malgré la demande croissante pour leurs programmes. Cette augmentation de la demande a forcé les garderies privées à élargir leur offre, même si ces nouvelles places ne permettent pas aux parents d'obtenir des subventions. En conséquence, les parents paient jusqu'à 50 $ par jour, voire plus, pour le même programme, dans le même établissement. En Alberta, nous avons vu émerger un système à deux vitesses.
    Nos services de garde sont-ils vraiment abordables s'ils ne sont pas accessibles? Le programme pancanadien sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants ne crée pas un accès équitable aux services de garde, particulièrement pour les parents à faible revenu auxquels on a promis de l'aide pour qu'ils puissent retourner sur le marché de l'emploi. Les parents comme les exploitants ne comprennent pas pourquoi le financement de ce programme, qui doit augmenter l'abordabilité, est offert à toutes les familles, quelle que soit leur fourchette de revenu, alors que les exploitants constatent que la majorité des familles sur les listes d'attente ont un faible revenu. Dans l'état actuel des choses, les familles ayant différents niveaux de revenus profitent du financement, et on ne donne pas nécessairement la priorité à celles qui ont le plus besoin de services abordables.
    En conclusion, je recommande vivement au Comité d'adopter une approche qui permettra d'atteindre l'objectif du gouvernement du Canada de rendre les services de garde plus abordables pour les familles.
(1005)
    Je vous propose cinq solutions: financer directement les familles; fonder le financement sur le revenu selon une échelle progressive de manière à répondre véritablement aux besoins en matière d'équité et d'accessibilité; centrer le projet de loi sur le concept de choix parental, quel que soit le modèle d'affaires, et associer le financement à l'enfant plutôt qu'à la place en garderie; permettre la pleine expansion des garderies privées pour répondre à la demande de services de garde; et respecter et permettre la libre concurrence de manière à garantir une programmation spécialisée, novatrice et de qualité qui répond aux besoins de tous les parents.
    Nous avons le devoir envers les familles et les enfants canadiens de nous assurer de créer un programme qui correspond véritablement à leurs besoins, qui protège la qualité des services aux enfants et qui offre une réelle accessibilité à toutes les familles. Nous ne pouvons pas continuer d'ignorer les problèmes constatés partout au pays ni de mettre en œuvre un programme bien intentionné, mais mal conçu.
    J'aimerais vous faire part du vécu de certains exploitants. Une exploitante a communiqué avec moi...
    Excusez-moi. Mon temps est‑il écoulé?
(1010)
    Madame Churcher, nous avons dépassé le temps alloué, mais, comme le premier témoin a aussi dépassé le temps alloué, je vous donne la possibilité de...
    Je vous donne un seul exemple.
    D'accord, ça ira. Allez‑y.
    Merci.
    Il s'agit d'une exploitante de garderie dans une région rurale et mal desservie de l'Alberta, qui dirige fièrement un centre de grande qualité depuis 17 ans. Elle a investi dans la création de 194 places en garderie pour sa collectivité. Quand, à l'annonce du nouveau programme pancanadien sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants, on lui a demandé ce qu'elle en pensait, elle a répondu qu'elle était heureuse pour les familles qui pourraient désormais accéder à des services plus abordables et croyait que ce serait un soulagement pour les familles actuellement sur les listes d'attente.
    Hier, elle a envoyé une lettre aux 194 familles qui fréquentent son centre — et aux 563 autres sur sa liste d'attente — pour les informer de la fermeture de son entreprise. Après 17 ans de succès, son entreprise n'est plus viable. En raison de la forte inflation, des limites de frais et des restrictions quant à l'expansion des centres privés, son centre est en mauvaise posture financière. Elle a dû prendre la décision crève-cœur de fermer l'entreprise qu'elle a bâtie, parce qu'elle ne peut prendre le risque financier de signer un nouveau bail ou d'investir davantage dans l'expansion de son centre, alors que plane la menace d'un cadre de contrôle des coûts encore inconnu. Elle craint que l'objectif des frais de 10 $ par jour soit atteint aux dépens de la qualité des soins offerts aux enfants.
    Voilà les décisions auxquelles font face les exploitants sur le terrain actuellement. Ils décident d'abandonner une entreprise qu'ils ont fièrement créée, parce qu'ils ne peuvent plus en porter le fardeau financier ou parce qu'ils ne peuvent tout simplement pas accepter de réduire la qualité des services afin de réduire les coûts.
    Merci infiniment pour votre temps et votre attention.
    Merci, madame Churcher.
    Nous passons à Mme Mathieu, pour cinq minutes.

[Français]

    Je m'appelle Sophie Mathieu. Je suis docteure en sociologie et je me spécialise dans l'étude de la politique familiale au Québec. Je travaille à l'Institut Vanier de la famille comme spécialiste principale des programmes et je suis membre du Conseil consultatif national sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Mes propos d'aujourd'hui ne reflètent toutefois pas la position du Conseil et vont faire écho à quelques observations de M. Fortin.
    Comme vous le savez, le Québec a mis en place un réseau de services de garde à faible coût au tournant du millénaire, et donc...

[Traduction]

    Madame Mathieu, nous avons un problème de qualité avec l'interprétation. Pourriez-vous ralentir, s'il vous plaît?

[Français]

     D'accord, je vais parler un peu plus lentement.
    Le Québec est riche de 25 années de leçons, de succès et de défis en lien avec son réseau de services de garde. Au Québec, la pertinence d'offrir des services de garde à faible coût est un débat qui est pratiquement clos. Le réseau est néanmoins confronté à d'autres défis qui sont bien documentés, comme le manque de places, la qualité des soins et les problèmes de recrutement et de rétention du personnel. Ces problèmes étant déjà très bien documentés, je souhaite aujourd'hui faire la lumière sur trois leçons qui sont moins connues de l'expérience québécoise en lien avec son réseau de services de garde à la petite enfance.
    La première leçon à retenir est que tous les services de garde ne sont pas des garderies.
    Dans l'Énoncé économique de l'automne de 2020, Chrystia Freeland a affirmé que « tout comme la Saskatchewan a pavé la voie au Canada en matière de santé […], le Québec peut montrer au Canada le chemin à suivre quant aux garderies ». La vice-première ministre a donc voulu s'inspirer du modèle québécois pour mettre en place un réseau national de services de garde. Or, le modèle québécois, dans sa forme originale, n'est pas celui d'une offre prépondérante de services dans des garderies, mais bien, comme M. Fortin l'a mentionné, dans les CPE, soit les centres de la petite enfance. Il est important de savoir que les termes « garderies » et « CPE » ne sont pas des synonymes, parce qu'ils ne font pas référence au même type de service de garde.
     Par définition, une garderie est une entreprise privée dont la finalité est de faire du profit. Les garderies ne sont donc pas au cœur du modèle québécois. J'ouvre une parenthèse brièvement ici pour mentionner qu'au Québec il existe deux types de garderies: celles qui offrent des places subventionnées au même prix que celles offertes dans les CPE, et celles non subventionnées qui offrent des places au prix courant, qui est bien au-delà de 10 $ par jour. En revanche, tous les CPE sont issus de l'économie sociale et ne sont pas à but lucratif. Un CPE, par définition, ne peut donc pas être une garderie.
    La différence entre un CPE et une garderie n'est pas uniquement sémantique, et elle n'est pas idéologique non plus. Comme l'a mentionné M. Fortin, les garderies au Québec offrent des services de qualité moindre comparativement aux CPE, même si, dans l'ensemble, le Québec ne peut se targuer d'offrir des services de garde de qualité à une majorité d'enfants. Au début des années 2000, une étude a montré que seulement 27 % des milieux de garde offraient un niveau de qualité allant de bon à excellent, une proportion qui grimpait à 35 % dans les CPE, mais qui chutait à 14 % dans les garderies.
    La deuxième leçon à retenir est que, même lorsque la majorité des places sont offertes à faible coût, les familles moins nanties ont un accès moindre à un service de garde de qualité.
    Encore là, je vais faire un peu écho à ce que M. Fortin a déjà mentionné. Au Québec, on sait que 36 % des enfants de moins de 4 ans n'ont pas accès à un service de garde régi. On sait pourtant très peu de choses sur ces enfants et sur les barrières systémiques, économiques et culturelles qui freinent l'accès des familles à un service de garde.
    Le Rapport du Vérificateur général du Québec à l'Assemblée nationale pour l'année 2020‑2021 offre néanmoins quelques éclairages sur les disparités dans l'accès à un service de garde de qualité pour les familles de Montréal. Par exemple, dans les quartiers Parc‑Extension et Saint‑Michel et dans l'arrondissement Montréal‑Nord, hautement défavorisés, le nombre de places offertes est beaucoup plus élevé dans des garderies que dans les CPE. En revanche, à Westmount, un quartier de Montréal particulièrement riche, plus de places sont offertes dans les CPE. En termes simples, les familles plus pauvres ont davantage accès à des garderies commerciales, qui offrent des services de moindre qualité, alors que les familles plus riches ont en ce moment un meilleur accès aux CPE.
    La troisième et dernière leçon à retenir est que l'effet positif des services de garde sur l'activité économique des mères au Québec doit être contextualisé.
    La mise en place d'un réseau de services de garde a été largement justifiée et, avec raison, par l'importance de soutenir la participation des femmes au marché du travail et par la nécessité d'atteindre l'égalité entre les genres.
(1015)
     Si l'effet des services de garde sur la participation des mères au marché du travail est indéniable — je suis moi-même la mère de trois enfants et je n'aurais pas pu poursuivre mes études doctorales et ma carrière si je n’avais pas pu compter sur des services de garde à faible coût —, il faut rappeler que le Québec dispose d'une politique familiale cohérente, qui dépasse celle de l'offre de services de garde à faible coût.
    Depuis 2006, le Québec dispose de son propre programme de prestations parentales, le Régime québécois d'assurance parentale, qui offre des prestations plus accessibles et plus généreuses que celles offertes partout ailleurs au Canada. La forte participation des mères au marché du travail résulte donc d'un contexte institutionnel qui va au-delà de la disponibilité des services de garde, même si ces derniers sont essentiels.
    Je vous remercie, madame Mathieu.

[Traduction]

    Je vous demande de bien vouloir compléter vos commentaires dans vos réponses aux questions.

[Français]

    Bien sûr. Je vais conclure ma présentation en disant que je peux répondre aux questions en français ou en anglais. Si vous désirez obtenir le texte intégral de mes propos, vous pouvez aller sur mon site Web, sophiemathieu.ca.

[Traduction]

    Merci, madame. Vous pouvez envoyer votre texte complet au Comité, qui le prendra en considération, et aborder tout autre point dans vos réponses aux questions qui vous seront assurément posées.
    Nous commençons par Mme Ferreri, pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins de leur présence. Vos excellents témoignages nous aideront à proposer les meilleures solutions possible pour le bien-être de nos enfants.
    Madame Churcher, j'aimerais aborder un sujet abordé par la ministre à plusieurs reprises. Pendant l'échange juste avant celui‑ci — si vous l'avez regardé —, j'ai vraiment insisté pour modifier le libellé du projet de loi afin d'y inclure les entreprises privées indépendantes et les garderies en milieu familial agréées. La ministre a affirmé que les services de garde privés et agréés sont inclus dans le projet de loi. Elle a été catégorique à ce propos.
    Que pensez-vous de cette déclaration? S'ils sont inclus, pourquoi y a‑t‑il tant de souffrance dans votre secteur, parmi ces femmes entrepreneures ayant une garderie privée en milieu familial?
(1020)
    Je pense qu'il existe une certaine confusion relativement à la terminologie. Selon ce que je comprends, les garderies en milieu familial, que nous appelons en Alberta « day homes », sont incluses en vertu de cette entente sous le modèle sans but lucratif. À mes yeux, c'est déroutant et trompeur, parce que ces entreprises correspondent tout à fait au modèle à but lucratif. Elles sont dirigées par des femmes qui sont pour la plupart au foyer. Il est permis d'avoir un certain nombre d'enfants chez soi. L'agrément est souhaitable. Je soutiens entièrement l'agrément et la réglementation de services de garde de qualité.
    Mais ce service est différent de celui qu'offre mon centre, par exemple. J'exploite une garderie privée. Je loue un espace commercial. Mes activités sont régies par les mêmes règles et les mêmes normes que celles qui s'appliquent au modèle sans but lucratif. Nous suivons les mêmes lignes directrices. Seul le modèle d'affaires est différent.
    Il faut faire la distinction. À mon avis, les garderies en milieu familial ont un modèle d'affaires à but lucratif. Le fait de les inclure dans une structure sans but lucratif est trompeur, selon moi. En vertu de cette entente, les garderies privées à but lucratif ne peuvent ni élargir leurs activités ni offrir un meilleur accès aux familles, comme peuvent le faire les services de garde sans but lucratif.
    Je suis convaincue que, si l'on est favorable à l'accessibilité des familles aux services de garde et que l'on veut réduire les listes d'attente et la demande qu'on constate partout, il faut inclure tous les fournisseurs de services de garde agréés.
    Merci pour vos commentaires. Je pense que cela remet les pendules à l'heure en ce qui concerne la modification de la formulation pour inclure le segment « toutes les personnes titulaires d'une accréditation ».
    Je reviendrai à vous si j'ai le temps, madame Churcher. J'aimerais maintenant m'adresser à Mme Mathieu.
    Comment aimeriez-vous que l'on s'adresse à vous? Mme Mathieu, ou Sophie?
    Sophie me convient.
    Merci.
    Quelles modifications souhaitez-vous voir apporter dans le projet de loi? Recommandez-vous des changements pour l'améliorer? Le Québec a établi une norme et nous disposons de données, ce qui est formidable. Nous pouvons nous projeter dans l'avenir et dire voilà ce qui s'est passé au Québec. Par ailleurs, cela nous donne une excellente occasion de nous ressaisir lorsque des conséquences involontaires ou des lacunes se produisent au sein du système d'accès à des services de garde accrédités de qualité.
    Y a‑t‑il des éléments que vous souhaiteriez voir formuler différemment dans le projet de loi dans le but de garantir davantage d'accessibilité et d'inclusion?
    Bien entendu, mais certains enjeux au Québec n'ont pas été résolus après 25 ans. Par exemple, l'accès à des services de garde n'est pas un droit, même au Québec. Il ne semble pas non plus que le projet de loi en fasse un droit. Si nous voulons vraiment faire un travail sérieux au sujet des services de garde, nous devons réfléchir au fait que nous ne dirions jamais à un parent que son enfant ne peut pas accéder à la première année du primaire en raison d'un manque de places dans son école. L'accès aux services de garde en tant que droit n'est pas encore une réalité au Québec ni dans les autres provinces. Ce n'est qu'en nous assurant d'en faire un droit que nous pourrons faire avancer l'inclusivité et les autres enjeux que vous avez cernés, notamment la qualité des services.
    Merci pour votre réponse. Les observations que vous avez faites sur le terrain sont bien intéressantes.
    Ma question complémentaire est la suivante: comment garantir l'accès à des services de garde si la demande excède l'offre? Mme Churcher nous a parlé de la nécessité de répondre à la demande massive. Les listes d'attente sont interminables. Comme je l'ai dit plus tôt lors de la discussion avec la ministre, des parents me téléphonent pour me dire qu'ils ne peuvent pas se permettre d'avoir d'autres enfants, car ils n'en ont pas les moyens et n'ont pas accès à des services de garde.
    En principe, je comprends l'objectif du projet de loi, mais j'ai l'impression qu'il n'est pas assez précis par rapport aux moyens qui doivent être pris. Voulez-vous formuler une recommandation spécifique, Sophie, sur la façon d'améliorer l'accès aux services de garde? Vous aviez parlé d'un droit aux services de garde. Y a‑t‑il d'autres éléments concrets que nous pourrions inclure au sein du projet de loi?
    C'est une question difficile.
    Il faudrait que je vous revienne là‑dessus. J'ai beaucoup réfléchi à ces enjeux. Peut-être que M. Fortin a d'autres idées, mais c'est quelque chose qui...
(1025)
    Je vois que M. Fortin souhaite intervenir, mais j'ignore combien de temps il nous reste.
    Monsieur Fortin, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Vous disposez de 20 secondes, monsieur Fortin.

[Français]

     Merci, monsieur le président.
    Il est très important de bien comprendre que dans notre système ici, au Québec, les garderies privées se font concurrence non pas sur la qualité, mais sur le prix. Pour garder le prix à 40 $ par jour par enfant, il faut laisser tomber beaucoup de choses et, en général, c'est la qualité qui baisse. Je ne vois pas de garderies qui offriraient aux parents de payer 50 $ plutôt que 40 $ pour avoir une meilleure qualité de services: les parents répondraient tant pis et choisiraient une autre garderie dont le prix va rester à 40 $.
    Le problème avec les services de garde, c'est qu'ils ne sont pas un bien tangible, comme les choux de Bruxelles congelés ou les automobiles. Les conséquences liées à la qualité des services se voient à beaucoup plus long terme chez les enfants. Par conséquent, c'est difficile. Il serait possible de conserver les garderies privées dans le système, à condition que les autorités imposent des critères de qualité stricts et surveillent leur respect de très près.

[Traduction]

    Je vous remercie.

[Français]

    Toutefois, la majorité des défenseurs des garderies favorisent les CPE.
    Je vous remercie, monsieur Fortin.

[Traduction]

    Je dois m'arrêter là. Nous avons largement dépassé le temps qui nous était imparti.
    Monsieur Van Bynen, vous avez la parole pour les six prochaines minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    J'ai grandi dans une famille de 15 enfants et je pense que l'accès à des services de garde aurait fait une énorme différence en ce qui a trait aux moyens de subsistance de notre famille. Je suis heureux de constater que nous allons de l'avant avec l'implantation d'importants programmes de soutien social qui aident les familles et permettent aux femmes d'accéder à davantage d'opportunités.
    J'aimerais revenir sur le contexte du Québec avec M. Fortin. L'alinéa 7(1)(a) du projet de loi énonce des principes directeurs pour les investissements fédéraux, avec pour objectif de « faciliter l'accès à des programmes de services d'apprentissage et de garde des jeunes enfants, notamment ceux offerts par des fournisseurs de services de garde d'enfants publics et à but non lucratif [...] », ce qui s'inscrit dans la continuité de la discussion que nous avons en ce moment.
    Vous avez mentionné tout à l'heure que l'une de vos préoccupations était la pénurie de places. Pensez-vous que le projet de loi représente une bonne approche? À votre avis, le fait de cibler principalement le soutien aux fournisseurs publics et à but non lucratif permettra‑t‑il de créer suffisamment de places en services de garde pour répondre à la demande actuelle et future?

[Français]

     Oui. À la fin des années 2000, il persistait une pénurie importante de places dans le système québécois. C'est pourquoi le gouvernement est intervenu pour élargir la concurrence avec ce que Mme Mathieu appelait tout à l'heure les « garderies privées ». Cela a très bien fonctionné et il s'est développé un grand nombre de garderies privées.
    Des chercheurs universitaires ont analysé la qualité de leurs services sur la base de toutes sortes de critères internationaux bien reconnus, et révélé que seulement une petite minorité de garderies privées pouvaient être considérées comme étant de bonne ou d'excellente qualité.
    C'est la raison pour laquelle on s'est rendu compte que les garderies privées étaient compétitives en matière de prix, mais qu'elles ne l'étaient pas en matière de qualité, et que, si on devait les conserver dans le système, il fallait leur imposer les normes de qualité reconnues dans les centres de la petite enfance, les CPE, et évidemment les surveiller. Or, il a été très difficile de le faire. Même les propriétaires de garderies privées sont maintenant nombreux à demander au gouvernement de les transformer en CPE, de manière à assurer la qualité aux parents.
(1030)

[Traduction]

     Merci.
    Je tiens à y revenir ultérieurement, mais j'aimerais aborder une autre question avec Mme Mathieu.
    Je vois que vous faites partie du conseil national. Ma question est la suivante: quelles ont été vos réussites et quels sont vos défis? Je note qu'en vertu de l'article 14, votre mandat est de fournir des conseils à la ministre et de mener des activités d'engagement.
    Un témoin a affirmé tout à l'heure qu'il n'y avait pas eu suffisamment de consultations. Pourriez-vous me parler de vos réussites en matière de consultations et d'engagement, et de certains des défis à venir?

[Français]

    Je ne peux pas parler aujourd'hui en tant que représentante du Conseil consultatif national sur l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Cela m'a été indiqué très clairement avant que je me présente devant le Comité.
    Je veux simplement dire que je ne suis pas tout à fait d'accord sur le commentaire qui a été fait. Il y a une très grande représentativité au sein du Conseil, qui regroupe des gens qui représentent le Québec, les communautés autochtones et les éducatrices, ainsi que beaucoup de gens qui font du travail de terrain.
    Je ne veux pas faire de commentaire en ce qui a trait aux travaux du Conseil. Cependant, pour ce qui est de sa composition, je pense qu'il est vraiment très représentatif et offre un haut niveau d'expertise provenant à la fois d'universitaires et de gens de terrain. On y trouve aussi une belle représentativité des communautés autochtones.

[Traduction]

    Merci.
    Je vais revenir à M. Fortin.
    Avec mon expérience dans le milieu bancaire, je dirais que nous devons fixer des objectifs réalistes et mesurables, et que nous devons élaborer un échéancier raisonnable.
    Selon votre expérience au Québec, quels seraient les objectifs raisonnables à fixer pour que le programme puisse être couronné de succès?

[Français]

    Mon expérience provient en partie du terrain, moi aussi, parce que j'ai passé 19 années avec ce qu'on appelait les « garderies » à l'époque, mais qui étaient des services de garde. Par ailleurs, mon épouse a fait démarrer un centre de la petite enfance à Radio‑Canada, où elle était la grande patronne à l'époque.
    Le succès du Québec vient justement du fait que nous avons développé un système de centres de la petite enfance, des CPE, qui impose un certain nombre de critères dans le processus et la structure de la garde d'enfants, et qui oblige les services de garde privés et les CPE à avoir à leur conseil d'administration des parents enracinés dans le milieu et qui peuvent donner de la rétroaction...

[Traduction]

    Désolé de devoir vous interrompre, monsieur Fortin. Je n'ai plus beaucoup de temps.
    Le temps est écoulé.
    Il ne nous reste qu'une série de questions. Je cède la parole à Mme Bérubé.

[Français]

     Vous avez la parole pour six minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie les témoins qui sont présents aujourd'hui.
    Monsieur Fortin, vous avez dit plus tôt qu'il y avait cinq leçons principales à tirer. Le Québec est un chef de file et un modèle en ce domaine. Quels sont les éléments qu'il serait essentiel d'ajouter au projet de loi C‑35?
    Je n'en vois pas vraiment. Il n'y a pas d'élément essentiel qui manquerait. Si on voulait faire un compromis en lien avec ce que Mme Ferreri recommande, il faudrait énoncer clairement qu'on pourrait admettre les garderies privées dans le système à condition que des normes de qualité nationales et internationales soient imposées et respectées, tout comme dans le secteur sans but lucratif. C'est l'élément qui pourrait être incorporé.
    J'aimerais ajouter une remarque. Le mot « autochtone » est mentionné 31 fois dans un projet de loi de 5 pages. Je pense qu'il est important d'aider ces communautés. J'ai des collègues de l'Université de la Colombie-Britannique et du ministère fédéral des Finances, Donna Feir et Jasmin Thomas, qui ont démontré que le système québécois faisait en sorte que le taux d'activité des femmes inuites dans le Nord du Québec est beaucoup plus important qu'il ne l'est dans les trois autres régions inuites ailleurs Canada. Cela fait partie du succès du système, et l'intégration du régime dans les communautés autochtones est très importante.
(1035)
    Madame Mathieu, je vous remercie des précisions que vous avez apportées concernant les distinctions entre les garderies et les CPE. Il est important de le mentionner au Comité.
    Sachant que les données publiques sur les enfants autochtones avec lesquelles le gouvernement travaille sont désuètes, comment peut-on s'assurer que le projet de loi C‑35 répond bien aux besoins des Premières Nations, des Inuits et des Métis?
    C'est une question vraiment costaude.
    Comme je ne fais pas partie de ces communautés, je ne suis absolument pas bien placée pour répondre. C'est à elles qu'il faudrait poser la question, plutôt qu'à une femme blanche qui n'a aucune racine autochtone. Je ne me considère pas habilitée à répondre à cette question.
    D'accord.
    Monsieur Fortin et madame Mathieu, qui, selon vous, devrait siéger au Conseil consultatif national sur l'apprentissage de la garde des jeunes enfants?
    Vous me demandez qui devrait siéger au sein du Conseil, mais ce dernier est déjà formé et est en activité. Je pense que les bonnes personnes ont été sélectionnées. Si vous voulez voir la liste des membres, elle est disponible en ligne.
     Je ne sais pas si je réponds bien à votre question.
    C'est parfait.
    Selon vous, le projet de loi C‑35 atteindrait-il ses cibles autant en milieu rural qu'en milieu urbain?
    Je ne sais pas.
    Monsieur Fortin, avez-vous un commentaire?
    Je ne connais pas beaucoup les différences entre le milieu rural et le milieu urbain. En milieu rural, il arrive parfois que la distance soit très importante entre l'endroit où la personne habite et le lieu du service de garde. Dans ces cas, il pourrait être avantageux d'utiliser des services de garde en milieu familial et dont le personnel a reçu une formation particulière.
    Il faudrait que ce personnel qui offre ces services de garde en milieu familial soit bien conscient de la qualité requise. Ainsi, on pourrait offrir ce service pour 8,85 $ par jour, comme chez nous, ou pour 10 $ par jour ailleurs, à condition que cette qualité de service soit offerte aux familles. Il est bien évident que la situation dans les milieux ruraux en Gaspésie, dans le Bas‑Saint‑Laurent ou sur la Côte‑Nord n'est pas du tout la même que dans une ville comme Québec ou Montréal.
     L’alinéa 7(1)a) du projet de loi établit un principe directeur pour les investissements fédéraux qui a pour but « de faciliter l’accès à des programmes et services d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, notamment ceux offerts par des fournisseurs de services de garde d’enfants publics et à but non lucratif, qui respectent les normes établies par les gouvernements provinciaux ou les corps dirigeants autochtones ».
     Croyez-vous qu’il s’agit de la bonne approche?
    Oui. Ce que j'aime dans cette formulation, c'est la partie disant que l'on veut assujettir les services de garde, de quelque nature qu'ils soient, aux normes provinciales, spécialement celles traitant de la qualité.
    On a effectivement démontré qu'avec plus de qualité, le développement des enfants était meilleur et plus durable à long terme que leur vulnérabilité. Les trois ou quatre premières années de la vie sont extrêmement importantes, puisque le développement cérébral n'est pas encore terminé à la naissance.
    Quand on n'a pas accès à cette fenêtre ouverte que sont les services de garde, la vulnérabilité de l'enfant demeure pour le reste de sa vie, et c'est très difficile et coûteux à corriger par la suite.
(1040)

[Traduction]

    Je vous remercie, madame Bérubé.
    Madame Gazan, vous disposez de six minutes pour clore la séance d'aujourd'hui.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Ma première question très brève s'adresse à Mme Churcher.
    Je sais que certaines préoccupations ont été soulevées en ce qui concerne le manque de soutien aux établissements à but lucratif. Comme vous le savez, le gouvernement fédéral a alloué 22 500 places aux établissements à but lucratif en Alberta.
    Avez-vous fait du lobbying auprès de ministres fédéraux, de membres de caucus gouvernementaux ou de députés de l'opposition avant que cette annonce ne soit faite? Si oui, auprès de qui?
    Tout à fait. Nous avons effectué du lobbying auprès de tous les ordres de gouvernement, tant provincial que fédéral. Nous nous sommes entretenus à plusieurs reprises avec Mme Ferreri sur cet enjeu. Nos membres et notre conseil d'administration ont envoyé des lettres directement à la ministre Gould. Je ne sais pas qui nous aurions pu oublier.
    L'accès à ces 22 500 places représente une victoire extraordinaire pour les fournisseurs privés en Alberta. Nous sommes très reconnaissants d'avoir gagné l'accès à toutes ces places, mais je rappelle qu'elles sont assorties d'une condition, celle d'opter pour un cadre de contrôle des coûts qui sera imposé aux entreprises privées...
    D'accord.
    Comme je dispose de très peu de temps, pourriez-vous transmettre au Comité le nom des personnes auprès desquelles vous avez fait du lobbying pour ces...
    Oui, tout à fait.
    Merci beaucoup.
    Ma prochaine question s'adresse à Mme Mathieu.
    Doit‑on prononcer votre nom Mathieu ou Matthew?

[Français]

    C'est le « Mathieu » français.

[Traduction]

    J'essaie de pratiquer mon français. Je suis ravie d'avoir réussi à bien prononcer votre nom.
    Nous savons que partout au Canada, de même qu'au sein du Comité, on se préoccupe beaucoup de la pénurie de main-d'œuvre dans ce secteur. La pénurie de main-d'œuvre constitue en effet l'un des principaux obstacles à l'expansion des services de garde pour répondre à la demande. Nous savons également que les salaires peu élevés, la précarité des postes et l'absence d'avantages sociaux dans ce secteur posent des difficultés quant au recrutement et à la rétention de personnel qualifié. Je dirais que la recherche met également en évidence les conditions de travail des employées. La recherche montre que les services de garde à but lucratif ont en général la réputation de ne pas offrir de salaires décents ni de bonnes conditions de travail à son personnel.
    Quels sont les exemples de programmes ou de politiques que le gouvernement fédéral pourrait mettre en place en partenariat avec les provinces pour résoudre certains de ces problèmes de pénurie de main-d'œuvre?
    Je vais m'appuyer sur l'expérience du Québec pour répondre à votre question.
    Des programmes de conciliation travail-études ont été récemment mis en place par le gouvernement du Québec. Une étudiante du CÉGEP, ou collège si vous préférez, a ainsi la possibilité de devenir éducatrice en garderie et d'être payée pendant ses études. Elle peut également recevoir une bourse après chaque semestre complété, et faire reconnaître officiellement son expérience de travail.
    Au Québec, le gouvernement avait mis en place un programme en 2020 visant à recruter 10 000 préposés aux bénéficiaires. Je suis désolée, je ne connais pas le terme en anglais. Ce programme avait pour objectif d'embaucher des travailleurs dans les établissements de soins de longue durée. Le programme a connu du succès, même si ce ne sont pas tous les employés qui ont conservé leur emploi une fois le programme terminé. Le gouvernement a ainsi pris l'initiative d'inciter un grand nombre de personnes à s'intéresser à cette profession.
    Ce sont là quelques-unes des initiatives qui ont été lancées. Il y a eu des programmes de conciliation travail-études, et c'est vraiment une question de volonté politique, je dirais.
(1045)
     Je suis d'accord avec vous. Le NPD a fait pression pour obtenir des salaires et des avantages sociaux décents pour les travailleurs. J'en parle souvent parce que je suis très fière d'être une ancienne éducatrice de la petite enfance. J'aurais pu rester dans ce domaine et ne pas poursuivre une carrière d'enseignante à l'université. J'aimais réellement ce métier, mais comme je n'étais pas prête à vivre en situation de pauvreté, j'ai quitté ce domaine quand j'étais jeune.
    Ma dernière question s'adresse à vous, monsieur Fortin. Je sais que vous avez fait un travail exceptionnel sur le terrain, et je tiens à vous féliciter pour l'ensemble de vos recherches et de vos efforts.
    Dans votre mémoire présenté au Comité, vous affirmez que la littérature scientifique a conclu de manière sans équivoque que la qualité des services était plus élevée au sein des CPE à but non lucratif que dans les établissements à but lucratif. Vous l'avez d'ailleurs mentionné à nouveau aujourd'hui. La qualité des services est particulièrement faible au sein des centres privés à but lucratif.
    Pourriez-vous brièvement nous en dire plus sur ce point? Pourriez-vous également suggérer des moyens d'améliorer le projet de loi afin de garantir la mise en place de services de garde abordables, accessibles, universels et de grande qualité?
    Merci, monsieur Fortin.
    Vous disposez de 40 secondes, monsieur Fortin.

[Français]

     Je vais commencer par ne pas répondre à votre question en suggérant que l'indicateur à suivre attentivement en ce qui a trait au salaire versé aux éducateurs et éducatrices en services de garde est le rapport entre les employés des services de garde et les professeurs du primaire et du secondaire que publie l'Enquête mensuelle sur l'emploi, la rémunération et les heures de travail de Statistique Canada.
    Le Québec fait un peu mieux que la moyenne canadienne, mais pas beaucoup. Quelle que soit la province, on a donc beaucoup de progrès à faire en matière de formation et de rémunération de ces personnes.

[Traduction]

    Je vous remercie, monsieur Fortin, ainsi que vous, madame Gazan. Notre temps est maintenant écoulé. Sur ce, plaît‑il au Comité de lever la séance?
    Des députés: D'accord.
    Le président: Avant de lever la séance, je tiens à remercier les témoins d'avoir comparu devant le Comité. Je vous ai donné beaucoup de latitude en ce qui concerne les délais, en particulier à M. Fortin et à Mme Churcher, car je jugeais important d'entendre les tenants des deux points de vue sur le sujet. Sur ce, je vous remercie de votre participation.
    La séance est levée.
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