La Chambre reprend l'étude de la motion portant que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
:
Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec la députée de .
[Français]
Je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , qui propose des réformes du Code criminel afin de mieux protéger l'accès aux lieux religieux et culturels et de lutter contre la montée de la haine au Canada à un moment critique.
En 2014, la police a enregistré 1 295 crimes haineux. En 2024, ce nombre a fortement augmenté pour atteindre 4 882. Les crimes haineux motivés par la race ou l'origine ethnique ont connu une augmentation particulièrement marquée, passant de 611 cas en 2014 à 2 377 en 2024. De même, les crimes haineux fondés sur la religion ont considérablement augmenté, passant de 429 affaires en 2014 à 1 342 en 2024.
Depuis 2020, les Noirs forment la population la plus souvent ciblée en tant que victimes de crimes haineux motivés par la race ou l'origine ethnique, représentant 37 % de ces crimes haineux en 2024. En 2024, la plupart des crimes haineux ciblant la religion déclarés par la police visaient les juifs à 68 % et les musulmans à 17 %.
Ces chiffres et statistiques ne représentent qu'une partie de l'histoire. La triste réalité est qu'aucune communauté n'est à l'abri de la haine. Nous continuons d'entendre que les Canadiens et les Canadiennes ne se sentent plus en sécurité dans les lieux de culte, d'apprentissage, de rassemblement ou simplement de vie. Le gouvernement est profondément préoccupé par cette situation et il a été très clair sur le fait qu'il prendra des mesures successives pour améliorer la sécurité publique. Le projet de loi C‑9 est la prochaine étape à cet égard.
Je vais être très claire. Peu importe les origines d'un individu et peu importe qui il est, si le Canada est son pays de résidence, alors il mérite d'y vivre en paix et sans haine.
[Traduction]
Les médias attirent également l'attention sur le coût humain de la propagation de la haine dans les collectivités. J'aimerais pouvoir dire que les exemples sont rares. Or, au cours des deux dernières années, les signalements de menaces et d'attaques dans des lieux de culte, des centres communautaires et des écoles religieuses, ainsi que les crimes motivés par la haine en général ont continué de se multiplier.
Pour ne citer que quelques exemples, des reportages de Global News, de CBC et de la Gazette de Montréal pendant cette période ont fait état de fusillades et d'attaques contre des synagogues et des mosquées, d'évacuations d'écoles juives et de centres communautaires musulmans en raison d'alertes à la bombe et d'attaques contre des chauffeurs de taxi musulmans et des femmes portant le hidjab.
Bien que ces reportages portent sur des incidents antisémites et islamophobes, nous savons que des membres d'autres communautés au Canada font eux aussi l'objet de gestes haineux, notamment en raison de leur appartenance à une communauté autochtone, de la couleur de leur peau, de la religion qu'ils pratiquent ou de la personne qu'ils aiment. Je tiens à être claire: ces incidents sont odieux et ne reflètent pas les valeurs de la société canadienne.
Même si le Canada sera toujours un lieu où les gens unissent leurs forces et, parfois, sont en désaccord sur certaines questions, l'intimidation et la violence n'ont pas leur place dans nos foyers ou dans les lieux où les communautés se réunissent.
[Français]
Cette montée inquiétante de la haine au Canada, et même dans le monde, doit être combattue par une dénonciation forte et par l'unité.
À ce stade, je tiens à assurer à mes collègues et à tous les Canadiens et toutes les Canadiennes qu'il y aura toujours de la place pour avoir des conversations difficiles et pour exprimer notre mécontentement, y compris en exerçant la liberté d'expression et en la mettant en pratique par des manifestations légales.
Bien que ce projet de loi soit une réponse robuste aux comportements haineux, les réformes proposées ont été soigneusement conçues pour s'assurer que les libertés d'expression et la réunion pacifique ne sont pas restreintes de manière déraisonnable. Le présent projet de loi n'empêche personne de manifester ni d'exprimer des opinions ou des préoccupations sur une question.
J'aimerais prendre quelques minutes pour discuter des mesures proposées dans le projet de loi afin de démontrer comment elles soutiendront le système juridique à répondre à ces tendances inquiétantes, tout en respectant nos droits et nos valeurs communes.
Le projet de loi C‑9 propose d'édicter quatre nouvelles infractions au Code criminel qui fourniront des outils clairs, mais appropriés aux enquêteurs, aux procureurs de la Couronne et aux juges qui agiront dans ces affaires.
Pour répondre aux signalements d'intimidation, d'harcèlement, de menaces et de violence dans des établissements religieux et culturels avoisinants, le projet de loi C‑9 propose de créer une infraction d'intimidation spécifique qui interdit tout comportement visant à semer la peur chez une personne dans le but d'entraver l'accès à son lieu de culte ou à un lieu principalement utilisé par un groupe identifiable à certaines fins.
Le projet de loi propose également de créer une infraction interdisant à quiconque d'entraver intentionnellement l'accès à ces mêmes lieux.
Ces deux nouvelles infractions proposées aideront à faire en sorte que les policiers disposent d'outils clairs pour intervenir lorsque le comportement de certaines personnes franchit une ligne et devient une activité criminelle à l'égard de ces lieux.
Soyons clairs, rien dans les deux infractions proposées n'interdirait ou ne restreindrait le droit des individus de manifester à des endroits ou à proximité de ces derniers. Ces infractions s'appliquent aux comportements criminels. Les menaces de violence ne sont pas des formes d'expression ou de réunion pacifique protégées par la Charte canadienne des droits et libertés.
À titre d'exemple, si une seule personne tente de perturber une manifestation pacifique en ayant recours à la violence, la police peut réagir de manière appropriée aux actions de cette personne, sans porter atteinte aux droits des participants d'exprimer leur position sur un enjeu.
Par souci de clarté sur ce point, le projet de loi prévoit expressément un moyen de défense pour les personnes qui se trouvent dans un lieu ou à proximité d'un lieu dans le seul but d'obtenir ou de communiquer des renseignements. Ce moyen de défense existe déjà pour des infractions similaires, et son application est claire et reconnue dans le cadre des activités de manifestation ou de piquetage. Tant qu'il est fait de manière pacifique et qu'il n'a pas d'incidence majeure sur l'accès au lieu, ce comportement ne serait pas visé par la nouvelle infraction proposée.
Le projet de loi propose également l'édiction d'une nouvelle infraction de propagande haineuse visant l'affichage public de certains symboles haineux et terroristes. Je tiens à assurer à mes collègues qu'il ne s'agit pas d'une interdiction générale des symboles, mais plutôt d'une infraction de portée limitée et qui ne vise que l'affichage public d'un symbole lorsqu'il est utilisé dans le but délibéré de promouvoir la haine à l'égard d'un groupe identifiable. L'infraction est soigneusement conçue et ne s'appliquerait pas à l'affichage public de tels symboles à des fins légitimes, telles que des fins journalistiques, éducatives ou artistiques.
En plus de ces infractions particulières, le projet de loi C‑9 propose également la création d'une nouvelle infraction de crime haineux. Cette nouvelle infraction répond à la montée générale de la haine au Canada afin de dénoncer et de dissuader fermement tout acte criminel motivé par la haine. Il s'agit d'un nouvel outil important pour les policiers et les procureurs de la Couronne, partout au pays.
La nouvelle infraction de crime haineux érigerait en infraction criminelle le fait de commettre des actes illégaux motivés par la haine fondée sur des motifs tels que la race, l'origine ethnique, la religion ou le sexe. Elle s'appliquerait de façon générale à la perpétration d'une infraction du Code criminel ou à une loi fédérale et prévoirait des peines plus élevées selon la gravité de l'infraction sous-jacente.
[Traduction]
Le projet de loi renforce l'arsenal juridique du Canada contre la haine et envoie un signal clair que la haine n'a pas sa place dans les collectivités. Le gouvernement et moi-même espérons sincèrement que nous pourrons étudier ensemble ce projet de loi dans le but de faire du Canada un endroit plus sûr pour toutes les personnes qui y vivent.
[Français]
J'exhorte tous les députés à se joindre à moi pour appuyer ces mesures essentielles.
:
Uqaqtittiji, je me joins au débat sur le projet de loi , Loi visant à lutter contre la haine, en tant que représentante de la circonscription de Nunavut et députée néo-démocrate.
Le NPD estime que le gouvernement fédéral doit intervenir de manière globale pour lutter contre la montée de la haine au Canada. Près de 5 000 crimes haineux ont été déclarés en 2024. Depuis 2022, le nombre de crimes haineux motivés par la race ou l'origine ethnique déclarés par les autorités policières a augmenté de 19 %. Oui, nous devons combattre la haine, mais nous n'avons pas besoin de criminaliser les personnes qui s'expriment et nous n'avons certainement pas besoin de les garder en prison plus longtemps.
Je suis déçue que ce projet de loi ne fasse rien contre les agissements violents du mouvement nationaliste blanc qui prend de plus en plus d'ampleur. Cette omission des libéraux laisse les communautés racialisées, autochtones et 2ELGBTQIA+ dépourvues des outils nécessaires pour combattre le plus important motif de haine au Canada.
Nous vivons à une époque de division, pour bien des raisons. Les gens sont pour ou contre la Palestine. Ils sont pour ou contre Israël. D'ailleurs, notre système politique ne tient pratiquement plus qu'à deux partis: libéral et conservateur. Nous ne devrions pas avoir à craindre d'être criminalisés pour avoir tenu un discours public. Nos croyances religieuses ne devraient pas propager la haine. Ce projet de loi semble avoir davantage pour objectif de criminaliser les personnes qui s'expriment que de combattre le racisme croissant à l'endroit des personnes racialisées.
Il existe déjà des lois qui punissent la haine, ce qui remet en question le véritable but de ce projet de loi. La haine est déjà une circonstance aggravante dans la détermination de la peine. Le projet de loi augmenterait la peine maximale si une infraction est motivée par la haine. Jusqu'à combien d'années les peines s'élèveraient-elles alors? Elles seraient portées à 5, 10, 14 ans, voire à la perpétuité. Nous commençons à débattre d'un projet de loi qui faciliterait et prolongerait l'emprisonnement, alors que nous entendons en même temps parler d'un budget d'austérité à venir.
Il existe déjà des dispositions dans le Code criminel qui portent sur les crimes commis près d'un lieu de culte. J'attire l'attention des députés sur les parties suivantes du Code criminel: le paragraphe 176(2), « Troubler des offices religieux ou certaines réunions »; le paragraphe 430(4.1), « Méfait: biens religieux »; l'article 264, « Harcèlement criminel »; l'article 264.1, « Proférer des menaces »; et l'article 423, « Intimidation ».
Les néo-démocrates sont préoccupés par le libellé vague du projet de loi, parce qu'une fois que des définitions très larges entrent en vigueur, elles peuvent facilement être utilisées contre certains groupes. Par exemple, comment l'intimidation sera-t-elle interprétée par les policiers? Dans sa forme actuelle, le projet de loi pourrait criminaliser la dissidence légitime et transformer des manifestants pacifiques en criminels. Il pourrait donner un trop grand pouvoir discrétionnaire aux forces de l'ordre, leur permettant de faire preuve de subjectivité.
Nous savons que l'inscription de groupes sur la liste des entités terroristes est une décision hautement politique, qui se prend en fin de compte à la discrétion du Cabinet. Les néo-démocrates redoutent qu'à cause de la partie du projet de loi sur les symboles haineux, un futur gouvernement puisse présenter une nouvelle liste pour servir des intérêts politiques en amadouant certains groupes. Avec cette disposition, il y a un risque.
Je vais expliquer un peu plus en détail certaines de nos préoccupations. Pour ce qui est de l'application de la loi, le projet de loi donne trop de pouvoir discrétionnaire aux forces de l'ordre, ce qui laisse place à la subjectivité. Les accusations de crime haineux, même si elles finissent par être abandonnées, entraînent une stigmatisation qui suivra la personne toute sa vie.
Il y a le problème du flou. Qu'est-ce qu'un comportement intimidant? Comment sera-t-il défini ou interprété par les services de police? Une fois que des définitions larges sont inscrites dans la loi, elles peuvent facilement être instrumentalisées contre certains groupes. Comme je l'ai dit tout à l'heure, la haine est déjà un facteur aggravant dans le Code criminel du Canada. Une agression motivée par la haine entraîne déjà une peine plus lourde que dans les autres cas. Cette nouvelle infraction laisserait le soin à la police, plutôt qu'au juge, de subjectivement déterminer les conséquences de la haine.
Ensuite, nous subissons une influence américaine énorme. Les tenants de l'approche proposée veulent des outils pour cibler les groupes qui prônent ouvertement la haine et le racisme, pour criminaliser toute forme d'entraînement militant, par exemple les clubs d'arts martiaux mixtes, et pour s'attaquer à la composante commerciale qui permet à ces groupes de se constituer en société et donc de recueillir des fonds.
Passons à l'interdiction des symboles. À l'exception de la croix gammée et du symbole des SS, les symboles dépendraient de la liste des entités terroristes du Canada. Or, l'inscription de groupes sur la liste des entités terroristes est une décision hautement politique, qui se prend en fin de compte à la discrétion du Cabinet. Un futur gouvernement pourrait présenter une nouvelle liste pour servir des intérêts politiques en amadouant certains groupes. Avec cette disposition, il y a un risque.
La fomentation volontaire de la haine est déjà une infraction au Canada. L'utilisation de la croix gammée peut déjà être traitée au moyen d'infractions actuellement prévues dans la loi. La décision des libéraux d'ajouter au Code criminel la définition de « haine » de la Cour suprême du Canada ne pose pas problème. Les tribunaux utilisent déjà cette définition, alors cet ajout ne changerait rien. La peine croissante après chaque verdict successif de culpabilité pour la nouvelle infraction de crime haineux serait excessive et disproportionnée.
En ce qui concerne le nouveau seuil pour les comportements visant à provoquer la peur, le Canada dispose déjà d'un système qui reconnaît que la liberté d'expression peut aller trop loin et dépasser les bornes, notamment en cas d'incitation à la violence contre un groupe identifiable. Le projet de loi abaisserait ce seuil tout en ciblant des éléments sensibles à l'influence politique, comme les groupes dont on peut ou non parler en public, ce qui fait craindre le pire aux néo-démocrates et aux associations de défense des libertés civiles.
L'infraction criminelle en cause suppose l'intention de provoquer la peur avant d'aller à un endroit précis. Comment reconnaît-on facilement un tel endroit? La définition est trop large. Sa portée et son manque de clarté causeront des problèmes aux manifestants pacifiques. Les dispositions sont vagues, ce qui laisse place à l'arbitraire. Nous devons nous inquiéter de l'interprétation que la police ferait du projet de loi et éviter d'accroître l'arriéré dans le système de justice pénale, déjà surchargé.
En ce qui concerne la liberté de réunion, bien qu'elle soit protégée par la Charte, compte tenu de la définition large de « peur », on pourrait considérer qu'elle s'applique à n'importe quelle manifestation suffisamment bruyante ou perturbatrice.
Dans le contexte du prochain budget, en novembre, les mesures d'austérité dont le nous a prévenus auront des répercussions sur le système de justice et elles pourraient comprendre des compressions pour les bureaux des procureurs. Parallèlement, ce projet de loi retirerait certaines fonctions au procureur général. Les libéraux coupent dans les budgets et, en même temps, ils donnent davantage de pouvoir aux ministères.
Considérant tous les signaux alarmants que déclenche ce projet de loi, le NPD ne peut pas l'appuyer dans sa forme actuelle. Nous veillerons à soumettre des amendements...
:
Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député d'.
Notre société a changé ces dernières années. Une telle évolution peut être positive. Personne ne souhaite revenir à une époque où nous n'avions pas encore la réfrigération ni la médecine moderne, même si je suppose que beaucoup aimeraient revenir à une époque sans réseaux sociaux. Je peux tout à fait comprendre cela. Il semble que notre pays, notre peuple et notre espèce humaine soient aujourd'hui beaucoup plus divisés que par le passé, et que bon nombre de ces divisions soient alimentées par ce que nous lisons et entendons en ligne.
Je ne sais pas si les Canadiens sont aujourd'hui plus haineux que par le passé, mais il semble bien que davantage de colère et de haine soient exprimées à l'encontre de groupes précis de notre société. Il s'agit là d'un problème grave qui mérite d'être examiné sérieusement.
Je pense que tous les députés voudront s'exprimer sur ce projet de loi, et que certains voudront raconter leurs expériences personnelles concernant la haine dans notre société. Il n'y a probablement aucun membre d'une minorité ethnique, religieuse, raciale ou sexuelle qui n'ait jamais été confronté à des préjugés irrationnels susceptibles de dégénérer en haine ou en violence.
La question que nous devons nous poser à la Chambre, c'est quelle est la meilleure façon de réagir à la haine. Des mesures législatives comme celles du projet de loi , Loi visant à lutter contre la haine, peuvent inscrire un cadre dans le Code criminel, mais punir des gens pour leurs idées et leurs croyances va-t-il changer ces croyances?
Cependant, nous avons aussi la responsabilité de protéger les Canadiens, en particulier les Canadiens vulnérables, contre le harcèlement par des personnes motivées par la haine. Nous avons la responsabilité de trouver un équilibre entre la liberté d'expression et les droits individuels. Nous devons nous demander si ce projet de loi permettrait d'atteindre cet objectif.
Depuis des années, déterminer ce qui constitue de la haine est une question d'interprétation personnelle. La limite entre ce qui est acceptable et ce qui est inacceptable n'a pas été codifiée dans la loi, ce qui a peut-être rendu difficile l'application des dispositions législatives contre la haine. La haine a toujours été une question d'interprétation.
Au moins, nous avons maintenant cette définition du terme « haine »:
Sentiment plus fort que le dédain ou l'aversion et comportant de la détestation ou du dénigrement.
Je ne sais pas à quel point cette définition facilitera l'application de la loi.
Les députés ont probablement déjà entendu des gens dire: « Je ne suis pas un expert, mais je sais reconnaître une bonne œuvre d'art. » Ce n'est pas une façon de définir l'art, mais une affirmation subjective. Il me semble que c'est le même genre de problème qui touche la définition du terme « haine » fournie dans ce projet de loi. Qui décidera de ce qui constitue « de la détestation ou du dénigrement »?
Le projet de loi indique qui est protégé par cette mesure législative. La haine serait interdite pour les motifs suivants:
[...] la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, la couleur, la religion, le sexe, l'âge, la déficience mentale ou physique, l'orientation sexuelle ou l'identité de genre [...]
On ne peut changer la nature humaine par une loi. La haine irrationnelle, en raison de son caractère irrationnel, ne serait pas éliminée par l'adoption d'une loi contre les crimes haineux. Ériger un acte en infraction ne changerait pas les sentiments de ceux qui sont motivés par la haine. Cependant, en tant que parlementaires, nous pouvons prendre des mesures pour exprimer le mécontentement de la société lorsque ces gens passent à l'acte.
Une personne n'ira pas en prison pour avoir eu des pensées meurtrières à l'égard du conducteur qui lui a fait une queue de poisson durant son trajet matinal. Elle y ira seulement si elle assassine le conducteur. Le projet de loi s'attaque aux actes des particuliers, et non à leurs pensées intimes.
La ligne est mince entre le droit de manifester et l'ingérence dans les affaires d'autrui. Je m'attends à ce qu'il y ait beaucoup de débats au sujet de l'intimidation dont il est question dans ce projet de loi. En théorie, protéger les personnes qui fréquentent légalement une école, un lieu de culte ou tout autre lieu est une bonne chose. Cependant, on pourrait parfois considérer ces endroits comme des cibles de protestation légitimes. Si ce projet de loi est adopté, il sera difficile pour la police et les tribunaux d'équilibrer les droits de toutes les personnes concernées.
La haine demeure un problème persistant dans la société canadienne. Ce n'est pas quelque chose que le gouvernement peut éliminer, même si nous avons certainement essayé. Il y a eu des rapports du gouvernement sur l'aide aux victimes de crimes haineux. Nous avons des statistiques qui nous disent qui a été ciblé par la haine au Canada. Nous avons le Plan d'action canadien de lutte contre la haine. Nous avons la Stratégie canadienne de lutte contre le racisme. La GRC a le Groupe de travail national sur les crimes haineux. Pourtant, la haine est encore parmi nous.
En 2024, le Bureau de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels a publié un rapport spécial intitulé « Renforcer l'accès à la justice pour les victimes de crimes motivés par la haine au Canada ». Il a souligné bon nombre des problèmes auxquels nous sommes confrontés dans la lutte contre la haine dans notre pays. En 2023, le nombre de crimes haineux signalés à la police a augmenté de 32 % par rapport à l'année précédente. Ces chiffres sont en hausse.
Il ne s'agit pas d'un problème propre au Canada. Partout dans le monde, les sociétés sont de plus en plus polarisées. Les groupes minoritaires sont diabolisés à des fins politiques. La violence augmente. On exploite les médias sociaux pour attiser la haine. L'ombudsman a demandé au gouvernement fédéral de fournir une définition juridique du crime haineux et d'adopter une loi.
Ce projet de loi est la réponse à cette demande. À bien des égards, les définitions et les lois ne sont que des mots sur papier. Elles ne communiquent pas l'élément humain, la compréhension de ce que la haine fait à ceux qui sont la cible de crimes haineux. Ce sont ces personnes et ce qu'elles ont vécu qui nous amènent à cette discussion aujourd'hui.
La Loi visant à lutter contre la haine ne va pas changer la façon de penser de qui que ce soit. Elle ne va pas convaincre miraculeusement tous les Canadiens qu'ils devraient aimer leur prochain. Par conséquent, nous devons faire en sorte qu'aucun Canadien ne soit visé par de la haine simplement en raison de son identité ou de ses croyances. Nul Canadien ne devrait avoir à craindre pour sa vie ou son gagne-pain en raison de sa race ou de son genre.
Nul Canadien ne devrait être empêché d'accéder à un traitement médical ou à un service religieux parce que des gens qui crachent des paroles haineuses et qui brandissent des symboles haineux lui bloquent l'accès à un bâtiment. Oui, nous devons préserver la liberté d'expression, mais la Charte des droits et libertés garantit que nos droits et libertés « ne peuvent être restreints que par une règle de droit, dans des limites qui soient raisonnables et dont la justification puisse se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique ».
Il n'existe aucun droit constitutionnel permettant d'inciter à la haine. Les crimes haineux ne sont pas sans victimes. Ils peuvent causer de graves dommages psychologiques. Il arrive qu'ils causent des dommages physiques. Ils visent à semer la peur et à intimider. Quand nous permettons qu'un groupe soit pris pour cible, quand nous n'agissons pas, nous nous rendons complices du crime. Je suis sûr qu'aucun député ne souhaite que cela se produise.
La Loi visant à lutter contre la haine résout-elle le problème de la haine dans la société canadienne? Non, car les lois ne changent pas les cœurs et les attitudes. C'est quelque chose qui se fait mieux individuellement, et c'est une tâche qui incombe à chacun d'entre nous lorsque nous sommes confrontés à la haine.
À la Chambre, nous pouvons montrer notre désir d'un Canada meilleur, où les gens sont pleinement acceptés tels qu'ils sont, sans distinction de race, d'origine nationale ou ethnique, de couleur, de religion, de sexe, d'âge, de handicap mental ou physique, d'orientation sexuelle ou d'identité ou d'expression de genre.
Le projet de loi vise à montrer le mécontentement de la société à l'égard des actions de ceux qui encouragent délibérément la haine au Canada. Je ne suis pas convaincu que ce projet de loi sera aussi efficace que le gouvernement l'espère.
:
Madame la Présidente, c'est un privilège pour moi de prendre la parole au sujet du projet de loi , même si j'ai de sérieuses réserves, non pas quant à l'objectif, mais quant à la manière dont les libéraux tentent de l'atteindre.
D'abord, je tiens à dire que je suis reconnaissant aux libéraux d'avoir enfin reconnu qu'une vague de haine déferle sur notre pays. Je suis heureux qu'ils aient pris conscience de ce que la communauté juive, entre autres, réclame depuis des années, à savoir un gouvernement qui écoute ces préoccupations et comprend les menaces très réelles qui pèsent régulièrement sur elle. Cependant, tout comme ils l'ont fait avec le projet de loi et le dossier des armes à feu, les libéraux prennent une question légitime et proposent une solution qui porte atteinte aux droits des citoyens et élargit les pouvoirs de l'État, souvent sans les freins et contrepoids nécessaires.
Le projet de loi prévoit cinq choses: « abroger l'exigence de consentement préalable du procureur général » pour porter des accusations de haine, « ériger en infraction le fait de fomenter volontairement la haine contre un groupe identifiable par l'exposition dans un endroit public de certains symboles », « ériger en infraction comme crime haineux le fait de commettre une infraction [...] en étant motivé par de la haine », « ériger en infraction le fait d'intimider une personne en vue d'entraver son accès à certains lieux servant principalement au culte religieux » et « ériger en infraction le fait d'empêcher ou de gêner intentionnellement l'accès légitime par autrui à ces lieux ».
Parmi ces cinq infractions, trois sont déjà couvertes par les dispositions législatives actuelles, y compris le fait de fomenter volontairement la haine par l'exposition d'un symbole. En effet, le paragraphe 319(2) du Code criminel cible déjà le fait de fomenter volontairement la haine. Il vise l'incitation à la haine, et les tribunaux ont donné une interprétation très large des types de communications visés. Les symboles en font partie. Je peux donner l'exemple d'une personne de ma circonscription qui, dans les deux dernières semaines, à Central Elgin, en Ontario, a été accusée d'avoir fomenté la haine en vertu du paragraphe 319(2) après avoir tracé une croix gammée sur sa pelouse avec sa tondeuse. L'exposition de ce symbole haineux a mené à une accusation d'avoir fomenté la haine en vertu des dispositions législatives déjà en place.
La création d'une infraction liée à la haine est également redondante, car le fait que l'infraction soit motivée par la haine est déjà une circonstance aggravante selon l'article 718.2 du Code criminel, et les tribunaux en tiennent toujours compte.
Le fait d'intimider quelqu'un et d'entraver son accès à un lieu de culte est déjà érigé en infraction criminelle selon les articles 423, 431 et 434.1 du Code criminel, ainsi que les dispositions de l'article 264.1 à l'égard des menaces.
Lorsque nous supprimons ces trois éléments, qui sont déjà couverts par les lois existantes, il nous reste deux choses. Le projet de loi ferait deux choses. Premièrement, il éliminerait l'obligation d'obtenir le consentement du procureur général. À l'échelle du pays, les militants et les défenseurs des intérêts, peu importe qu'ils se revendiquent de la gauche ou de la droite, considèrent que cette disposition est une protection nécessaire contre les acteurs chargés de l'application de la loi ou les procureurs de la Couronne qui lancent des poursuites motivées par le zèle et la politique, parce qu'ils ne comprennent tout simplement pas cette disposition législative rarement appliquée.
Le deuxième élément est celui qui choque le plus et je vais y consacrer le reste de mon temps. Le gouvernement veut codifier une nouvelle définition de la haine. Dans le projet de loi , la haine est définie comme un « sentiment plus fort que le dédain ou l'aversion et comportant de la détestation ou du dénigrement ». Le gouvernement a dit que cette définition découle de la décision rendue par la Cour suprême dans l'affaire Keegstra, qui a marqué un tournant dans la liberté d'expression au Canada. Toutefois, le gouvernement a fait une modification très importante. Dans l'affaire Keegstra, la Cour suprême a souligné que la haine « désigne une émotion à la fois intense et extrême qui est clairement associée à la calomnie et à la détestation ». Plus tard, dans l'affaire Whatcott, la Cour suprême a déclaré que le terme « haine » ne s'entend que des « manifestations extrêmes de l'émotion à laquelle renvoient les termes “détestation” et “diffamation” ». Or, le mot « extrême » n'apparaît pas dans le projet de loi .
Le gouvernement est très fier de ce projet de loi. Les libéraux ont eu tout l'été pour y travailler. J'imagine qu'ils ont dû demander à je ne sais combien de parties prenantes, d'employés, de bureaucrates, de législateurs et d'avocats d'examiner chaque article à la loupe. Ce n'est pas un hasard s'ils ont omis un mot clé essentiel dans une partie très importante du projet de loi. Le gouvernement abaisse délibérément, pour employer un terme juridique, le seuil de la définition de la haine, et, par extension, accroît le pouvoir de l'État et restreint ce qu'on peut considérer comme de la liberté d'expression au Canada.
La raison pour laquelle cela revêt une telle importance pour moi et pour les Canadiens qui se sont exprimés sur le projet de loi jusqu'à présent, c'est que le gouvernement a été, et c'est tout à son honneur, très transparent quant à ses intentions en matière de liberté d'expression.
Au cours des deux dernières législatures, sous prétexte de s'attaquer aux prétendus préjudices en ligne, le gouvernement libéral a présenté des projets de loi de censure à grande échelle qui ont été décriés par des gens de gauche et de droite. Pas plus tard que la semaine dernière, les libéraux nous ont dit que ce projet de loi allait revenir. Le projet de loi sur les préjudices en ligne est toujours une question d'actualité, alors nous ne pouvons pas examiner le projet de loi en vase clos. Nous ne pouvons pas le départager de l'attitude du gouvernement libéral à l'égard de la liberté d'expression et, bien franchement, du mépris dont il fait preuve à l'égard de cette liberté d'expression et du débat ouvert.
Je vais citer une personne avec qui je crois que les libéraux ont une grande affinité, c'est-à-dire l'ancienne juge en chef de la Cour suprême du Canada, Beverley McLachlin.
Dans son opinion dissidente dans l'affaire R. c Keegstra, elle a écrit:
Si la garantie de libre expression doit avoir un sens, elle doit protéger l'expression qui conteste même les conceptions les plus fondamentales de notre société. Un engagement réel envers la liberté d'expression n'exige pas moins.
Il n'est pas nécessaire d'aller loin pour voir ce qui se passe lorsqu'on abaisse le seuil du discours haineux. Au Royaume‑Uni, il n'est pas rare que la police frappe aux portes et arrête des gens pour des gazouillis méchants, car le même désir que celui qui sous-tend certaines des impulsions négatives et inquiétantes du projet de loi criminalise la haine en considérant que les mots sont une forme de violence. Les censeurs justifient leurs restrictions à la liberté d'expression en élevant la parole au rang de violence. Il n'appartient pas à l'État de discerner la haine qui peut exister dans le cœur d'une personne, et encore moins de poursuivre cette personne en justice; la loi est là pour punir les actes, et les lois existantes le font déjà.
Je m'en voudrais de ne pas souligner que les libéraux ne sévissent contre la criminalité que lorsqu'il s'agit de criminels par la pensée. Ce sont les seules personnes que les libéraux veulent mettre derrière les barreaux.
Examinons quelques-uns des véritables crimes haineux commis au pays. Selon Juno News, quelque 130 églises ont été vandalisées ou incendiées depuis 2021. Des synagogues au Canada ont été incendiées et vandalisées. Des écoles juives ont été la cible de tirs. Si les libéraux prenaient au sérieux les crimes haineux, ils demanderaient des peines obligatoires de 10 ans de prison pour ces attaques odieuses contre des lieux de culte. Encore une fois, la loi devrait punir les mauvais comportements, et non les mauvais sentiments.
Pour être honnête, nous ne pouvons pas lutter contre la haine qui existe au Canada et dans la société canadienne sans reconnaître certaines de ses causes profondes. La crise de la haine est une conséquence directe de 10 années de la politique identitaire des libéraux, qui a semé la discorde, et du dérèglement du système d'immigration provoqué de manière irresponsable par le gouvernement libéral. Nous ne pouvons pas parler de haine sans parler du dérèglement du système d'immigration, qui a entraîné l'importation de conflits étrangers et, dans certains cas, d'idéologies très haineuses au Canada.
Une grande partie de cela s'est produit sous la surveillance du qui a présenté le projet de loi. Il était le ministre de l'Immigration qui, après avoir examiné les six premières années du gouvernement de Justin Trudeau et la façon dont l'immigration y avait été gérée, s'est dit: « Ne vous inquiétez pas, je peux faire pire », et c'est ce qu'il a fait. Ce n'est pas un hasard si les crimes haineux ont augmenté alors que le Canada est devenu moins vigilant et plus imprudent dans sa gestion du système d'immigration.
Il s'agit d'une crise créée par les libéraux. Je ne fais pas confiance à ceux qui ont causé le problème pour le résoudre. Je pense que toutes les personnes qui pourraient être d'accord avec les motivations derrière ce projet de loi devraient être très prudentes avant de confier un tel pouvoir aux libéraux, alors qu'ils ont déjà révélé leurs intentions. Ils ont déjà montré ce qu'ils veulent faire.
Je reviens sur une autre citation de l'ancienne juge en chef McLachlin.
Elle dit:
Cela ne veut pas dire qu'il est toujours illégitime de la part des gouvernements d'imposer des restrictions à l'expression, mais toute tentative de ce genre de la part d'un gouvernement doit [...] éveiller la suspicion.
Le gouvernement libéral ne mérite pas le bénéfice du doute en ce qui concerne la haine, la protection des libertés garanties par la Charte, ni pour aucun des problèmes qu'il a contribué à laisser s'aggraver ou, dans certains cas, à provoquer carrément.
Dans le projet de loi , le bien est déjà fait par d'autres lois. Ce qui est mal devrait servir d'avertissement. Les libéraux devraient avoir très honte d'essayer de faire adopter cette mesure en catimini en abaissant le seuil de la haine dans un pays qui doit protéger la liberté d'expression et redoubler d'efforts à cet égard.
:
Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole aujourd'hui avec la députée d'.
J'interviens au sujet du projet de loi , Loi visant à lutter contre la haine, en particulier au sujet des modifications au paragraphe 319(6) du Code criminel et de l'ajout proposé d'un paragraphe 319(7).
Je suis tout à fait pour la protection de la liberté religieuse et le fait que tous les Canadiens soient à l'abri de la haine et de la violence, mais le projet de loi ne permettrait pas d'atteindre cet objectif de manière efficace. J'ai trois sérieuses préoccupations au sujet du projet de loi C‑9. Premièrement, il omet de protéger les chrétiens, alors que plus de 100 églises ont été incendiées et vandalisées au Canada depuis 2021. Deuxièmement, il supprimerait la garantie du consentement du procureur général prévue à l'article 319. Cela risquerait de permettre à tout parti au pouvoir d'utiliser le discours haineux comme un outil politique en laissant le ministre décider qui sera poursuivi. Troisièmement, il édulcorerait la définition de la « haine » pour la rendre si vague et subjective que cela risquerait d'empiéter sur le droit énoncé à l'alinéa 2b) de la Charte des droits et libertés.
Je vais commencer par ma première objection au projet de loi . Je trouve plutôt troublant que la haine envers les chrétiens ne soit même pas mentionnée dans le projet de loi. Ces dernières années, nous avons été témoins d'attaques préoccupantes motivées par la haine, y compris des églises incendiées et vandalisées partout au Canada. Pas plus tard que la semaine dernière, à Edmonton, une église ukrainienne orthodoxe centenaire a été rasée par les flammes. Les chrétiens constatent que le gouvernement demeure silencieux pendant qu'un nombre sans précédent de lieux sacrés sont détruits. Les congrégations vivent dans la peur et les croyants se sentent abandonnés parce que le gouvernement ne veille pas à ce que les lois existantes soient appliquées.
Dans ce contexte, il est ahurissant qu'un projet de loi visant à lutter contre la haine passe complètement sous silence la montée de la haine envers les chrétiens. Le communiqué de presse du gouvernement mentionne l'antisémitisme, l'islamophobie, l'homophobie et la transphobie, mais il ne mentionne pas la montée des crimes haineux contre les chrétiens. Le projet de loi n'ajouterait pas de nouvelles mesures de protection pour les pratiquants. Il élargirait plutôt les pouvoirs de l'État en supprimant des protections juridiques et en affaiblissant la définition de ce qui constitue un discours haineux. Il ouvrirait la voie aux restrictions à la liberté d'expression à des fins politiques. Il risquerait même de criminaliser la dissidence à l'égard de ce que certains appellent des crimes d'opinion.
Nous devons faire preuve de prudence. Une fois que de tels pouvoirs sont accordés au gouvernement, celui-ci peut s'en servir comme une arme contre ses détracteurs. Le Code criminel couvre déjà les infractions les plus graves. L'article 318 criminalise le fait de préconiser ou fomenter un génocide. L'article 319 criminalise l'incitation publique à la haine, la promotion délibérée de la haine et tout discours qui conduirait à une violation de la paix. Ces dispositions établissent déjà un équilibre délicat entre la protection des Canadiens contre la véritable haine et la protection de la liberté d'expression. Le projet de loi tente de redéfinir la haine d'une manière si vague qu'il risque d'englober les débats légitimes.
On a vu ce que cela a donné ailleurs dans le monde. Au Royaume‑Uni, un homme a été arrêté pour avoir tenu une affiche blanche parce que les autorités ont dit que cela pouvait être interprété comme offensant. En Australie, des parents ont fait l'objet d'une enquête pour discours haineux après avoir remis en question les politiques de leur école en matière de genre. En Nouvelle‑Zélande, des universitaires ont été menacés d'emprisonnement pour avoir cité des manifestes interdits. Le Canada n'est pas à l'abri.
En retirant le consentement et la surveillance du procureur général d'une province et en laissant les accusations entre les mains d'un ministre nommé par le , nous franchissons une ligne dangereuse. Le gouvernement libéral nous a donné des raisons de croire qu'il utiliserait les lois sur les discours haineux contre ses opposants politiques et à des fins politiques.
Le projet de loi apporterait un deuxième changement majeur en ajoutant une définition subjective et émotive de la haine qui abaisse le seuil fixé par la Cour suprême du Canada. Comme de nombreux députés le savent, c'est important parce que la haine n'est pas définie dans le Code criminel. Sa signification s'est plutôt développée au fil des décennies grâce à la jurisprudence, l'affaire la plus notable étant l'affaire Saskatchewan c Whatcott, entendue par la Cour suprême en 2013. Selon cette décision, le terme « haine » doit être interprété comme des manifestations extrêmes de l'émotion à laquelle renvoient les termes « détestation » et « diffamation » et ne doit pas inclure des représentations qui ne font que discréditer, offenser ou insulter.
Cette norme objective établie par la Cour suprême protège la liberté d'expression tout en ciblant les préjudices réels. Le gouvernement libéral cherche à invalider cette définition de la Cour suprême en modifiant le paragraphe 319(7) du Code criminel par l'entremise du projet de loi . Dans ce paragraphe modifié, les libéraux souhaitent redéfinir la haine comme étant un « [s]entiment plus fort que le dédain ou l'aversion et comportant de la détestation ou du dénigrement ». Le retrait du mot « extrêmes » abaisse le seuil que la Cour suprême a mis en place pour protéger la liberté d'expression.
En mettant l'accent sur les émotions plutôt que sur les manifestations extrêmes, la nouvelle définition du gouvernement déplace l'attention vers les sentiments plutôt que vers les préjudices réels. Avec le projet de loi libéral , les citoyens pourraient s'autocensurer, et les procureurs disposeraient également d'un large pouvoir discrétionnaire pour porter des affaires devant les tribunaux sur la base d'émotions perçues, et non de préjudices démontrables. On crée un risque réel que des individus soient sanctionnés pour avoir exprimé une forte dissidence, même sans intention d'inciter à la haine.
Pourquoi est-ce important? Il importe de comprendre que ces aspects néfastes du projet de loi pourraient nuire considérablement à la liberté d'expression. La suppression du consentement du procureur général et l'édulcoration de la définition de la « haine » menacent directement notre liberté d'expression fondamentale, qui est inscrite au paragraphe 2b) de la Charte. Une fois accusée de discours haineux, une personne peut voir sa vie ruinée bien avant le verdict; une telle accusation peut mettre fin à sa carrière, détruire sa réputation et briser sa famille. Le projet de loi équivaut à une culture de l'annulation imposée par le pouvoir gouvernemental.
Les mesures législatives qui protègent contre la haine envers les chrétiens, les juifs, les musulmans ou tout autre groupe confessionnel doivent être appliquées en fonction des dispositions existantes contenues dans les articles 318 et 319. Le projet de loi ne créerait pas de nouvelles protections; il créerait une loi bidon. Il prétend lutter contre la haine alors qu'il concentre en réalité le pouvoir à Ottawa. En supprimant la surveillance du procureur général et en insérant une nouvelle définition vague de la haine, ce projet de loi donnerait au gouvernement un outil pour harceler les dissidents et instrumentaliser la loi à des fins politiques.
La haine est bien réelle, et il faut toujours y faire face, mais on ne l'affronte pas en affaiblissant la démocratie, en supprimant les mesures de sauvegarde, en criminalisant les émotions et en centralisant le pouvoir à Ottawa. Le véritable test de notre démocratie n'est pas la façon dont nous traitons les discours avec lesquels nous sommes d'accord, mais la façon dont nous protégeons la liberté de ceux avec qui nous sommes profondément en désaccord. Le projet de loi ne répond pas à ce critère. Il risque de transformer l'appareil coercitif de l'État en arme de dissidence.
Je prends la parole non seulement en tant que députée pour les bonnes gens d'Haldimand—Norfolk ou en tant qu'avocate, mais aussi en tant que Canadienne et chrétienne qui croit que la liberté d'expression est sacrée. Nous avons déjà des lois pour punir la véritable haine. Nous devons maintenant nous prémunir contre un gouvernement qui utilise le langage de la protection comme prétexte pour exercer un contrôle.
:
Monsieur le Président, comme toujours, c'est un honneur de prendre la parole à la Chambre au nom des habitants d'Oshawa. Ils m'ont confié la tâche de les représenter ici, à Ottawa.
Je prends la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi , la loi proposée par le gouvernement pour lutter contre la haine. Tout d'abord, je crois que nous sommes tous d'accord pour dire que tous les députés rejettent la haine et l'extrémisme. Tous les députés devraient vouloir que les Canadiens se sentent en sécurité chez eux, à l'école, dans leur lieu de culte et dans leurs espaces communautaires. Les policiers et les procureurs doivent disposer des bons outils pour protéger les Canadiens contre les menaces réelles, mais la question dont nous sommes saisis n'est pas de savoir si nous nous opposons à la haine; la question est de savoir si le projet de loi est la loi sérieuse et efficace dont les Canadiens ont besoin ou s'il n'est qu'un geste bancal motivé par des considérations politiques.
Les Canadiens assistent à une montée de la haine depuis quelques années. Les communautés juives, musulmanes, sikhes, hindoues, autochtones et chrétiennes ont toutes fait l'objet de menaces, de vandalisme, de harcèlement et de violence. On a l'impression que le gouvernement ne prend pas vraiment au sérieux la lutte contre les crimes haineux, comme en témoigne le projet de loi dont nous sommes saisis, qui semble tomber à point nommé pour des raisons politiques. La triste réalité, c'est que j'ai l'impression que le projet de loi vise moins à protéger les Canadiens qu'à protéger la position politique des libéraux.
Monsieur le Président, à la suite du massacre du 7 octobre en Israël, lorsque le Hamas a brutalement attaqué des civils innocents, les Canadiens d'origine juive ont immédiatement été confrontés, ici même au pays, à une vague d'antisémitisme sans précédent. Des synagogues ont été vandalisées. Des étudiants ont été harcelés simplement parce qu'ils allaient à l'école. Les communautés juives vivaient dans la peur. La réaction du gouvernement libéral a été d'attendre, puis de déposer le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui, afin de pouvoir dire aux Canadiens d'origine juive: « Voyez ce que nous avons fait pour vous ».
Presque au même moment, le gouvernement a décidé de reconnaître la Palestine, alors que le Hamas détient toujours des otages innocents et est responsable de la mort de plusieurs Canadiens. Cette décision envoie un message ambigu et préoccupant. Il donne l'impression que le gouvernement privilégie le symbolisme politique au détriment d'une action urgente et résolue contre la haine.
Lorsque mon amie Paula Kelly a entendu parler du projet de loi, elle m'a envoyé ce qu'elle a appelé « Ma diatribe ». Pour elle, cette mesure ne semblait viser qu'à rassurer les communautés minoritaires, notamment la communauté juive, la sienne, en leur disant: « Voyez ce que nous avons fait pour vous. Nous nous soucions de vous. » Or, peu après, le gouvernement a reconnu la Palestine, et ce, au pire moment. Elle m'a confié que cette décision l'a profondément choquée, au point de se demander si le gouvernement estime que la communauté juive est stupide. Elle a également rappelé que des lois existent déjà et qu'il suffit de les appliquer.
Ne négligeons pas non plus une autre réalité: la haine antichrétienne est en hausse au Canada. Pourtant, le gouvernement y prête peu attention. Depuis 2021, plus de 100 églises chrétiennes ont été incendiées ou vandalisées, la plupart dans des actes criminels confirmés. Il ne s'agissait pas seulement d'édifices, mais de lieux de culte, de centres communautaires et de points d'ancrage pour des familles, des personnes âgées et des assemblées entières de fidèles, qui ont été traumatisées.
Quand des synagogues ont été attaquées, quand des mosquées ont été menacées et quand des gurdwaras ont été profanés, les dirigeants ont, à juste titre, dénoncé ces crimes. Toutefois, quand des églises chrétiennes ont été incendiées, le silence du gouvernement libéral fédéral était assourdissant. Si on veut vraiment combattre la haine sous toutes ses formes, il faut la dénoncer systématiquement, quel que soit le groupe visé. La haine demeure de la haine. Toutes les communautés religieuses méritent la même reconnaissance, la même protection et le même respect.
Un des aspects les plus troublants du projet de loi , c'est la façon inconsidérée dont il déforme des symboles culturels et religieux. Il y a un symbole sacré de paix et de prospérité qui est associé depuis des milliers d'années aux croyances et aux traditions de millions de personnes dans le monde. Pourtant, le projet de loi fait un amalgame entre ce même symbole et des images haineuses, comme s'il était né de l'extrémisme.
Je tiens à clarifier qu'il n'y a pas que des préoccupations juridiques abstraites. Des habitants d'Oshawa et de toute la région de Durham m'ont personnellement confié être profondément troublés par la façon dont le projet de loi déforme leurs symboles sacrés. Ce que le gouvernement qualifie de haineux est pour eux un symbole de paix, de piété et de prospérité qui fait partie de leurs traditions culturelles et religieuses depuis des milliers d'années.
Ces résidants m'ont dit qu'ils craignent maintenant que leur patrimoine soit stigmatisé, voire criminalisé en raison du libellé vague et bâclé du projet de loi . Ils se sentent ignorés et injustement associés à une haine qui n'a rien à voir avec leur foi.
Il est de mon devoir de faire entendre leur voix à la Chambre. Si nous voulons vraiment lutter contre la haine, nous devons le faire avec précision et une compréhension culturelle. Mettre des traditions sacrées dans le même panier que des symboles extrémistes est non seulement insultant, mais cela mine aussi l'équité à laquelle les Canadiens s'attendent de la part de leurs législateurs.
Une autre préoccupation est que le Canada a déjà des lois contre la haine. Le Code criminel interdit déjà l'encouragement au génocide, la promotion de la haine et la perpétration de crimes motivés par la haine. Le projet de loi ne créerait pas de nouvelles protections: il érigerait simplement en une infraction distincte certains comportements motivés par la haine.
À quoi une telle mesure servirait-elle? Elle alourdirait la paperasse, augmenterait le nombre de chevauchements et le symbolisme, et permettrait peut-être même d'infliger des peines plus courtes. Les Canadiens n'ont pas besoin d'une mesure législative symbolique. Nous avons besoin de lois claires, applicables et efficaces.
Le projet de loi éliminerait également l'obligation d'obtenir le consentement du procureur général avant d'intenter des poursuites pour propagande haineuse. Cette mesure de sauvegarde garantit depuis longtemps que les poursuites sont intentées de façon responsable et cohérente. Elle a empêché les plaintes frivoles ou idéologiques d'engorger les tribunaux. Les policiers et les procureurs en reconnaissent la valeur. Son élimination risquerait d'entraîner des abus et une mauvaise utilisation, en particulier dans le cadre de poursuites privées.
Ensuite, bien sûr, il y a la définition de la haine, comme l'ont mentionné bon nombre de mes collègues avant moi. Le projet de loi codifierait la définition de la Cour suprême, mais supprimerait délibérément des mots importants. En abaissant le seuil, le gouvernement risquerait de viser des propos qui, bien qu'offensants, resteraient protégés dans une démocratie libre. Dans un pays comme le nôtre, les gens doivent pouvoir exprimer leurs opinions — même celles qui sont impopulaires — sans crainte de poursuites criminelles, tant qu'elles ne constituent pas une véritable manifestation de haine ou une incitation à la haine. Encore une fois, ces lois existent déjà.
Lorsqu'on élargit négligemment la portée du droit pénal, on risque une criminalisation excessive et une application inégale de la loi. On risque de se concentrer sur l'angle politique plutôt que sur les menaces réelles auxquelles les Canadiens sont confrontés, dans ce cas-ci, les extrémistes violents et les récidivistes.
Les Canadiens méritent mieux que des gestes symboliques et un libellé boiteux. Ils méritent des lois qui luttent directement, systématiquement et efficacement contre la haine tout en défendant les libertés qui nous définissent en tant que peuple. Nous devons protéger les synagogues, les mosquées, les églises, les gurdwaras, les écoles et les centres culturels contre les menaces et l'intimidation. Nous devons également protéger la liberté d'expression, les manifestations pacifiques et les libertés civiles.
Le projet de loi , tel qu'il est rédigé, ne permettrait pas d'atteindre un juste équilibre. Notre devoir à la Chambre n'est pas d'approuver aveuglément les projets de loi; notre devoir est de les examiner minutieusement, de les remettre en question et d'exiger qu'ils soient améliorés, afin que tous les Canadiens puissent vivre à l'abri de la haine et de la peur, tout en jouissant de la liberté d'expression, de religion et d'association. Les Canadiens s'attendent à ce que nous établissions cet équilibre et nous devons l'atteindre.
:
Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec le député de .
À mon avis, ce projet de loi est imparfait et redondant. Nous avons déjà des lois pour couvrir ce que couvrirait ce projet de loi. Je parlerai de l'application des lois pénales au pays, qui est, selon moi, le véritable problème, plutôt que l'absence de lois. Je veux aussi aborder ce dont nous devrions parler, à savoir le plan des conservateurs pour lutter contre la criminalité. Il y a de vrais crimes qui sont commis au Canada et de vrais problèmes auxquels les citoyens ordinaires sont confrontés, et nous devons agir. C'est de cela qu'il faut parler.
Je ne suis pas avocat, mais franchement, tout ce qui vise à endiguer la haine semble être une bonne chose. Lorsque j'ai examiné ce projet de loi pour la première fois, je me suis dit que j'aurais peut-être envie de l'appuyer. Cependant, lorsque j'ai commencé à parler aux gens, j'ai entendu beaucoup de personnes se déclarer en faveur de cette mesure législative et beaucoup d'autres s'y opposer. De nombreuses questions ont commencé à être soulevées, et je me suis rendu compte qu'il fallait peut-être examiner ce projet de loi un peu plus en profondeur.
Au lieu de lire au sujet du projet de loi, je l'ai lu pour savoir ce qu'il contenait et j'ai trouvé des choses intéressantes. La première chose que j'ai remarquée en le lisant, c'est qu'il créerait une nouvelle infraction pour intimidation. Il interdirait tout comportement visant à semer la peur en vue d'entraver l'accès aux lieux à vocation confessionnelle, culturelle, éducative ou communautaire. Autrement dit, le projet de loi fait référence à une situation où une personne qui souhaite se rendre à une église, à une mosquée ou à une synagogue se sent intimidée et insécurisée à cause d'une manifestation qui se déroule devant ce lieu. D'accord, mais le paragraphe 423(1) du Code criminel porte déjà sur le recours à l'intimidation pour empêcher des gens de faire quelque chose de licite. Ce n'est pas tant qu'il manque de lois pour protéger les lieux à vocation confessionnelle, culturelle, éducative ou communautaire: on a plutôt tendance à ne pas appliquer celles qui existent déjà.
J'ai poursuivi ma lecture du projet de loi et découvert qu'il créerait une deuxième infraction, soit le fait d'empêcher l’accès à un lieu. En effet, le projet de loi interdirait d'empêcher intentionnellement l'accès légitime d'autrui à tout lieu à vocation confessionnelle, culturelle, éducative ou communautaire. Lorsqu'une personne ne peut pas accéder à ce genre de lieu, on atteint un tout autre niveau d'intimidation. Encore une fois, nous avons déjà des mesures législatives qui traitent de cette question. Les paragraphes 176(2) et 176(3) du Code criminel traitent déjà du fait de gêner ou de troubler des offices religieux ou des réunions. Il s'agit déjà d'une infraction. Il y a également l'article 264, qui porte sur le harcèlement criminel, les menaces et le fait de suivre une personne de façon répétée. Ces infractions existent depuis longtemps et sont invoquées dans de nombreuses affaires différentes, mais il y a souvent un manque d'application de ces dispositions dans les circonstances qui se rapportent précisément aux églises et à d'autres établissements religieux.
Je constate aussi que le projet de loi créerait une troisième infraction criminelle, à savoir une nouvelle infraction de crime haineux. Toute infraction fédérale motivée par la haine serait considérée comme une infraction distincte assortie de peines plus sévères. Nous avons déjà des lois contre la haine. En fait, l'article 718.2 du Code criminel prévoit que la haine est un facteur aggravant lorsqu'une personne est reconnue coupable. Autrement dit, si une personne est reconnue coupable de voies de fait, de méfaits ou d'un autre crime plus grave et que ces gestes étaient motivés par la haine, un juge peut ajouter la haine comme une circonstance aggravante, ce qui rendrait la peine beaucoup plus longue. Ainsi, cette personne se retrouve accusée d'une infraction plus grave. Des dispositions sont déjà en vigueur pour de tels cas, mais, encore une fois, la loi n'est tout simplement pas appliquée adéquatement.
Ce projet de loi donnerait naissance à une quatrième infraction, une nouvelle infraction de propagande haineuse, qui interdirait l'exposition publique de certains symboles haineux ou terroristes dans l'intention de fomenter la haine contre un groupe identifiable. Un exemple malheureux de cela s'est produit il y a seulement une semaine à St. Thomas, où une famille qui venait d'emménager dans le quartier faisait la promotion de matériel et de chansons antisémites. Une croix gammée avait été tondue sur la pelouse. Devinez la suite. Deux personnes ont été arrêtées et accusées de harcèlement criminel, d'incitation publique à la haine et de méfaits. Cela vient d'arriver. Nous n'avons évidemment pas encore adopté ce projet de loi, mais la police avait les lois et les outils dont elle avait besoin pour inculper ces deux personnes. Heureusement, dans ce cas-ci, des accusations ont été portées.
Bien sûr, il y a beaucoup d'autres lois. Il y a une loi sur la propagande haineuse à l'article 318, même pour des choses comme l'encouragement au génocide. Il y a l'article 319, qui porte sur l'incitation publique susceptible d'entraîner une violation de la paix. Le paragraphe 319(2) porte sur la fomentation volontaire de la haine, et le paragraphe 319(2.1) porte sur la fomentation volontaire de l'antisémitisme. Bien sûr, il y a l'article 430, qui porte sur les méfaits motivés par la haine relativement aux biens. Il s'agit déjà d'un acte criminel passible d'une peine maximale de 10 ans. Il y a toutes sortes de lois en vigueur qui portent sur le sujet dont il est question dans ce projet de loi.
J'ai continué à lire parce qu'il y avait plus. J'ai trouvé deux ou trois autres choses. La première, c'est que la loi supprime l'obligation d'obtenir le consentement du procureur général pour intenter des poursuites pour crime haineux. Il y a des avantages et des inconvénients à cela. Certains diront que c'est un obstacle et que cela rend difficiles les poursuites pour crime haineux. D'autres diront que cela empêche également les accusations vexatoires. Cela permet de réfléchir à deux fois pour s'assurer que l'on atteint bien le seuil du crime haineux. Supprimer l'obligation concernant le procureur général n'est peut-être pas la meilleure idée.
L'autre élément que j'ai trouvé, le dernier, c'est que le projet de loi supprime le mot « extrême » de la définition de la haine. Au lieu d'un préjugé ou d'une haine extrême envers un groupe identifiable, on parle de préjugé ou de haine envers ce groupe.
Là encore, on abaisse un peu le seuil, ce qui faciliterait le dépôt d'accusations vexatoires. Je trouve cela préoccupant. Nous devons faire attention à ne pas donner trop de pouvoir à l'État en ce qui concerne le maintien de nos libertés. C'est un équilibre auquel il faut faire très attention. Si on considère tous ces éléments ensemble, on constate que le projet de loi ne fait pas grand-chose. Pour ce qui est des premiers points que j'ai soulevés, il existe déjà des lois qui punissent les actes en question. Le projet de loi ne change que les deux derniers éléments que j'ai évoqués, qui sont, à mon avis, relativement mineurs.
Il s'agit en réalité de tape-à-l'œil. Le projet de loi élude le véritable problème, que j'ai mentionné à plusieurs reprises, à savoir l'application adéquate de la loi. Pour être clair, je ne critique pas la police. En fait, quand on discute avec des policiers de n'importe quel type de crime au pays, ils disent qu'ils sont très frustrés. Ils veulent faire respecter les lois, mais ils sont confrontés à de nombreux problèmes et obstacles. Par exemple, ils savent que les criminels finiront par être libérés sous caution au lieu d'aller en prison, ce qui rend les arrestations très difficiles. Au niveau municipal, provincial et même fédéral, on constate que les procureurs sont peu enclins à intenter des poursuites pour les crimes de ce genre. La police n'est pas habilitée à porter des accusations, car les procureurs n'y donneront tout simplement pas suite.
Les conservateurs croient en la protection des communautés vulnérables. Ils croient également en la liberté d'expression, la liberté religieuse et le droit de manifester pacifiquement. Il faut établir un juste équilibre parmi ces éléments. Le projet de loi me préoccupe parce qu'il penche un peu trop en faveur d'une situation qui accorderait un grand pouvoir au gouvernement fédéral. Je m'inquiète pour la liberté d'expression.
Nous devons cibler les crimes haineux en appliquant véritablement la loi au lieu de cibler les Canadiens respectueux de celle-ci. Je tiens à souligner que la partie du projet de loi qui porte sur les symbole peut également être très délicate. Les symboles sont utilisés dans de nombreuses situations. Bien entendu, il y a l'exemple de la communauté hindoue, pour qui ce que nous appellerions la croix gammée est un symbole sacré depuis des lustres. Cette croix a une signification très positive pour eux, mais les nazis se sont approprié ce symbole, l'ont appelé le hakenkreuz, et en ont fait le symbole du nazisme. Par conséquent, nous devons faire très attention de ne pas interdire un symbole qui revêt une grande importance pour certains groupes. Nous devons être très prudents.
Je veux parler brièvement de ce sur quoi le gouvernement devrait se concentrer, à mon avis. Cela correspond à ce que préconisent les conservateurs, à savoir que nous devons nous concentrer sur les vrais problèmes de criminalité qui affligent le pays. Nous devons aider les Canadiens à se sentir en sécurité dans leur quartier, ce qui n'est pas le cas en ce moment. Nous devons aider les forces policières, les procureurs et les tribunaux à faire leur travail. Nous devons les aider à faire avancer les choses.
Il n'y a pas de suivi rapide. Des accusations sont retirées. Les peines sont légères. C'est notamment à cause des modifications législatives apportées par le gouvernement libéral. Avec les projets de loi et , le gouvernement a voulu apporter des réformes pour éliminer un grand nombre de peines minimales obligatoires, réduire la durée des peines, autoriser la détention à domicile et permettre aux criminels d'être mis en liberté sous caution plutôt que d'aller en prison. Voilà ce qui cause les problèmes dans nos villes et dans notre pays aujourd'hui. Voilà les problèmes dont parlent les gens de ma circonscription, et c'est sans doute la même chose pour ceux de toutes nos circonscriptions.
Voilà les problèmes dont nous devrions débattre et auxquels nous devrions apporter des solutions à la Chambre.
Où est le projet de loi libéral pour annuler les réformes de la mise en liberté sous caution que les libéraux ont apportées, afin que les criminels restent en prison au lieu d'être mis en liberté sous caution? Nous l'attendons toujours. On nous le promet depuis des mois, mais rien n'est fait. Tous le réclament, y compris les maires et les premiers ministres des provinces.
Il faut vraiment agir. Je tiens à répéter que, selon moi, le projet de loi comporte des lacunes. Nous devons nous concentrer sur les mesures à prendre pour corriger les lacunes dans les lois de notre pays afin que les Canadiens puissent se sentir en sécurité dans leurs quartiers, vivre dans la paix et l'harmonie et exercer leurs libertés.
:
Monsieur le Président, tout d'abord, il va sans dire que tous les partis à la Chambre s'entendent sur les valeurs qui devraient sous-tendre ce projet de loi. Nous tenons tous à ce que le Canada soit un pays sûr où chaque être humain est libre de vivre pleinement sa vie, indépendamment de sa race, de sa religion, de son origine ethnique, de sa langue, de ses handicaps physiques ou mentaux, et ainsi de suite. Aucun député ne veut que la haine ou les symboles de haine dont traite le projet de loi à l'étude soient exposés ou promus de quelque manière que ce soit dans notre pays ou dans tout autre pays. Je pense que, à la Chambre, nous condamnons unanimement la haine, les crimes haineux et la propagande haineuse.
Cependant, il existe une distinction subtile entre condamnation et criminalisation, et nous ne devons jamais l'oublier. Lorsque nous abordons le sujet de la criminalisation, nous devons le faire avec humilité. Si je pouvais agiter une baguette magique pour empêcher quiconque au pays de propager la haine ou de commettre un crime haineux, je jure que je le ferais, mais une telle magie ne fait pas partie des pouvoirs qui nous sont conférés en tant qu'élus. Nous ne pouvons que modifier le système de justice pénale et nous devons être conscients des conséquences imprévues que de telles modifications pourraient avoir.
Dans cet esprit, j'aimerais sincèrement faire part aux députés d'en face des préoccupations que suscite chez moi ce projet de loi. Premièrement, risque-t- il de pousser les organisations haineuses à entrer dans la clandestinité? On dit que la lumière du soleil est le meilleur désinfectant. Quand le a présenté ce projet de loi, j'ai immédiatement pensé au célèbre rassemblement nazi de Skokie, dans l'Illinois, en 1977, qui avait heureusement été annulé. C'est une affaire très célèbre, en partie parce que l'avocat de l'ACLU qui s'était battu pour le droit de ces personnes à manifester était David Goldberger, qui était très fier d'être un Juif. Chose ignoble, les manifestants avaient choisi Skokie, dans l'Illinois, parce qu'il y avait là-bas une forte proportion de survivants de l'Holocauste qu'ils cherchaient à terrifier. Le jour de la manifestation, 2 000 contre-manifestants ont accueilli 20 individus malveillants arborant des croix gammées en les huant. Il n'y a pas eu de violence, et ces nazis lâches et perfides sont rentrés chez eux sans tenir leur manifestation.
Selon un article récent d'ABC News, l'actuel maire de Skokie, en Illinois, a dit que, 40 ans plus tard, beaucoup de choses positives sont ressorties de cette journée. Il dit que, auparavant, les survivants de l'Holocauste à Skokie « formaient un groupe très discret » et ne parlaient pas de leurs expériences, mais que ces événements ont « suscité une passion en eux » et qu'ils ont fondé l'Illinois Holocaust Museum & Education Center dans les deux ans suivant ces événements. L'article d'ABC News souligne que Bill Clinton et Barack Obama ont tous deux reconnu le travail incroyable de ce musée.
À bien des égards, John Stuart Mill peut être considéré comme le fondateur de la tradition libérale qui donne son nom au Parti libéral. Voici ce qu'il avait à dire au sujet des opinions fausses et haineuses: « [...] bien que l'opinion réduite au silence soit une erreur [...], ce n'est que par la collision d'opinions contraires que le reste de la vérité a une chance d'être révélé. » Autrement dit, personne ne veut entendre ce que les gredins haineux ont à dire. Aucun député ne le souhaite, mais lorsque nous le faisons, nous devons considérer cela comme une occasion solennelle, non pas pour les faire changer d'avis, mais pour dénoncer haut et fort, avec des faits et des arguments, le poison que les gens qui les écoutent ont pu entendre.
En gardant à l'esprit les paroles de John Stuart Mill et les exemples des contre-manifestants de Skokie, je pose au la question suivante, qui est certes contre-intuitive: en orientant la haine vers les marécages fétides de Discord ou tout autre site Web qui a remplacé 4chan, prive-t-on nos collectivités de la possibilité de la dénoncer en personne et de montrer aux gens dans le monde réel que leurs opinions ne sont pas les bienvenues et que leur mouvement ne vaut rien parmi les 99,9 % de Canadiens qui valorisent les droits et libertés fondamentaux de l'autre? J'ai également une préoccupation secondaire: si on laisse la haine couver dans ces coins sombres d'Internet, lorsqu'elle finira par éclater, pourrait-elle le faire sous une forme pire qu'un drapeau ou un symbole? Je ne pose pas cette question à la légère, et cela m'amène à ma deuxième préoccupation concernant le projet de loi.
Dans certaines observations que j'ai faites à la suite d'un discours sur la justice pénale, j'ai exprimé des inquiétudes quant au fait que la leader adjointe du gouvernement à la Chambre semblait se préoccuper davantage de questions abstraites que d'événements concrets. De ce côté-ci de la Chambre, nous sommes fiers de nous soucier de ce qui se passe réellement. En tant que Canadien, je suis furieux, dégoûté et dépité que des juifs aient été victimes de psychopathes criminels parce qu'ils sont qui ils sont. Cet été, à Montréal, un homme a été battu devant ses enfants. Il y a quelques semaines, une femme a été poignardée dans la section des aliments cachères d'une épicerie d'Ottawa. Ce qu'on sait moins, c'est qu'au printemps 2024, une immigrante israélienne de 15 ans a été attaquée à l'école à cause de son pays d'origine. Dans ce cas, je crois qu'il a fallu deux semaines avant que la police daigne porter des accusations.
Dans mon propre cercle d'amis médecins, je suis désolé et honteux de dire que certains Juifs ont quitté le Canada de façon permanente à cause de l'absence de sécurité démontrée par ces événements concrets. Je veux profondément que mes amis juifs se sentent suffisamment protégés pour revenir au Canada.
Année après année, le nombre de crimes violents augmente au Canada. On observe une augmentation dans toutes les catégories de crimes violents. Malheureusement, ces augmentations ont commencé en 2015. Dans toutes les catégories de crimes violents, le gouvernement libéral n'a pas réussi à garder les méchants en prison.
Je crois comprendre que fomenter volontairement la haine, que ce soit avec un symbole, un drapeau, un discours ou un article de journal, est déjà illégal au Canada au titre du paragraphe 319(2) du Code criminel. De plus, je crois comprendre qu'intimider une personne qui souhaite entrer dans un lieu de culte ou tout autre lieu est déjà illégal au titre de l'article 423 du Code criminel. Cependant, des minorités religieuses ont été victimes de très nombreuses infractions à ces dispositions existantes. J'irais même jusqu'à dire que toutes les minorités religieuses sont victimes d'un plus grand nombre d'infractions à ces dispositions dans à peu près toutes les villes canadiennes. En fait, tous les Canadiens sont de plus en plus confrontés à toutes sortes de crimes. C'est pourquoi je crains que le présent projet de loi soit une abstraction et une distraction.
Il faut des mesures concrètes. Il faut que les personnes violentes et haineuses qui font ce genre de choses et qui enfreignent nos lois aillent en prison et y restent. Les conservateurs ont proposé des mesures pour mettre les malfaiteurs en prison. J'implore sincèrement les députés d'en face d'adopter nos propositions. Adoptons ces mesures concrètes.
Ce sont mes deux préoccupations. En supprimant l'exigence d'obtenir le consentement du procureur général et en affaiblissant la définition de ce qui constitue de la haine, les libéraux ne risqueraient-ils pas de ratisser plus large, de pousser les hurluberlus un peu timbrés dans la clandestinité, où ils pourraient devenir encore plus haineux et, Dieu nous en préserve, encore plus violents? Pourquoi voudraient-ils ratisser plus large, alors qu'ils refusent d'appliquer les mesures plus ciblées qui sont déjà à leur disposition? Pourquoi refusent-ils d'abroger leurs dispositions législatives irresponsables sur la mise en liberté sous caution qui permettent à des psychopathes violents d'être constamment remis en liberté? Je pose ces questions en toute bonne foi.