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SENG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Sous-comité sur le prix du pétrole et du gaz et des autres produits énergétiques


NUMÉRO 002 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 27 août 2008

[Enregistrement électronique]

  (1300)  

[Traduction]

    Mesdames et messieurs les membres du comité, la séance de l'après-midi est ouverte.
    Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, notre sous-comité poursuit son étude sur le prix du pétrole, du gaz et des autres produits énergétiques. La séance du matin a été très intéressante. Celle de cet après-midi devrait l'être également.
    Deux de nos témoins comparaissent en personne, et nous entendrons un témoin par vidéoconférence et un autre par téléconférence.
    Nous accueillons tout d'abord Ellen Russell, professeure à l'École d'administration et de politique publique de l'Université Carleton, qui comparaît en personne. Nous recevons aussi M. Eric Sprott, premier dirigeant et gestionnaire de portefeuille de Sprott Asset Management. Soyez les bienvenus.
    Troisièmement, nous accueillons M. Roger Diwan, partenaire et analyste financier de PFC Energy, qui comparaît par vidéoconférence.
    Monsieur Diwan, m'entendez-vous?
    Oui, je vous entends très bien. Merci.
    Merci.
    Enfin, nous entendrons, par téléconférence, M. Michael Masters, président de Masters Capital Management.
    Monsieur Masters, m'entendez-vous? Je suis le président du comité, James Rajotte.
    Oui, je vous entends, James. Merci.
    Merci beaucoup.
    Nous vous avons attribué environ cinq minutes chacun pour que vous puissiez présenter une déclaration préliminaire, puis les membres du comité auront ce qui restera des deux heures pour poser leurs questions et faire des commentaires.
    Je crois que nous allons commencer avec Mme Russell, puis nous poursuivrons avec M. Sprott, M. Diwan et enfin M. Masters.
    Madame Russell, vous avez cinq minutes pour présenter une déclaration préliminaire.
    Je vais me pencher sur la question de savoir si le prix du pétrole est justifié par les facteurs économiques fondamentaux sous-jacents. Les facteurs de base que sont la demande et l'offre expliquent-ils le prix élevé du pétrole, ou est-ce qu'une autre chose vient fausser ces facteurs? Des pressions de nature spéculative viennent-elles contrecarrer les effets des facteurs fondamentaux sur le prix du pétrole?
    On peut aborder cette question sous plusieurs angles. Je ne peux pas le faire, puisque mon expertise ne s'étend pas à tous les domaines. Je vais me pencher sur la façon dont la déréglementation financière favorise la spéculation.
    On a vu récemment qu'il y avait beaucoup de fonds, ainsi que des sommes d'argent qui ont créé d'autres problèmes sur les marchés financiers après la débâcle des prêts hypothécaires à risque. L'argent vient des investisseurs institutionnels, des fonds souverains, des caisses de retraite et des fonds indiciels. Je crois que Michael Masters pourra certainement en parler. J'aborderai cet aspect en posant la question suivante: si cet argent pénètre les marchés de marchandises, en partie grâce aux changements de réglementation, les investisseurs institutionnels qui pénètrent ces marchés exacerbent-ils les pressions de nature spéculative?
    Depuis toujours, la spéculation sur les marchés de marchandises a été source de préoccupations pour ceux qui réglementent ces marchés. Aux États-Unis, par exemple, dans le sillage de la Crise de 1929, on soupçonnait que la manipulation des prix sur les marchés des marchandises avait fait grimper les prix, puis contribué à leur stagnation et à leur chute désastreuse. Pour éviter que ce type d'abus ne se reproduise, des lois ont été adoptées en 1936, puis on a tenté, par des règlements, d'empêcher ou du moins de décourager la spéculation sur les marchés de marchandises.
    De façon générale, cette réglementation visait à créer des obstacles pour limiter les effets de la spéculation. On a instauré, par exemple, des limites de position — limitation du nombre de titres détenus par un investisseur sur une marchandise donnée, et limites de position pour ceux qui se trouvaient sur le marché à des fins non commerciales, les entités qui n'achetaient ni ne vendaient de produits à des fins économiques sous-jacentes. Ce type de réglementation n'élimine pas la spéculation. En fait, personne ne croit qu'il soit vraiment possible d'éliminer complètement la spéculation, ou que ce soit même souhaitable. Toutefois, des obstacles de cette nature font en sorte qu'il soit plus difficile pour les spéculateurs de submerger les marchés de marchandises.
    Faisons un bond jusqu'aux années 90. À mesure que la déréglementation financière gagnait du terrain, bon nombre de ces obstacles ont été relâchés. L'un des instruments de la déréglementation a été la Commodity Futures Modernization Act of 2000 aux États-Unis. Par cette loi, le pétrole a été exclu du régime de réglementation normalement imposé par la Commodity Futures Trading Commission, l'organisme mis sur pied pour mettre ces obstacles en place. Grâce à cette déréglementation, deux types de marchés dérivés de l'énergie ont donc été exclus: les transactions entre deux parties conclues à l'extérieur d'un centre d'échange, et les échanges faits par voie électronique.
    L'idée d'établir un centre d'échange électronique qui pourrait fonctionner sans ces obstacles est devenu ce qu'on a appelé « l'échappatoire Enron », puisqu'il semblerait qu'Enron aurait exercé des pressions pour qu'il soit mis sur pied afin de faciliter son marché électronique de l'énergie. L'échappatoire Enron a fait en sorte que les limites de position d'un spéculateur ne s'appliquaient plus, si bien qu'on pouvait contourner les obstacles réglementaires qui devaient décourager la spéculation. À mon avis, l'échappatoire Enron et d'autres manoeuvres semblables visant à contourner les obstacles réglementaires ont eu un impact sur les marchés pétroliers. Il est difficile de quantifier cet impact. Je peux seulement m'en remettre pour l'instant aux perspectives économiques régionales du FMI de mai 2008, dans lesquelles on dit qu'il est difficile d'expliquer les prix actuels du pétrole en tenant compte uniquement des facteurs économiques fondamentaux; voici ce qu'on trouve en substance dans le rapport:
    Les producteurs et bon nombre d'analystes affirment que c'est la spéculation qui fait grimper les prix du pétrole. Les producteurs en particulier soutiennent que les facteurs fondamentaux établiraient le prix du pétrole à environ 80 $ le baril, tandis que le reste serait le résultat d'une activité spéculative.
    Alors pourquoi s'en faire si l'activité spéculative est responsable, du moins en partie, de la hausse du prix du pétrole? Il y a un certain nombre de raisons, et je suis certaine que vous en avez examiné un bon nombre, mais retenons celle-ci. Lorsque le prix du pétrole augmente, l'investissement dans les secteurs liés au pétrole est stimulé. Des projets d'investissements qui ne seraient pas rentables si le pétrole se vendait 80 $ le baril deviennent rentables lorsque le baril de pétrole se vend 100 $ ou plus.

  (1305)  

    Si le prix du pétrole est déterminé par des facteurs économiques fondamentaux sous-jacents, alors n'importe quel économiste dira qu'un investissement supplémentaire dans le pétrole est justifié. Toutefois, si, sous l'effet des pressions spéculatives, le prix du pétrole grimpe au-delà de ce que dicteraient les facteurs fondamentaux, alors l'investissement au Canada dans le secteur pétrolier peut être faussé par la spéculation dans ce secteur.
    C'est là un des grands problèmes que comportent les bulles spéculatives. Dans la bulle point-com, par exemple, bien des investissements ont été faits dans les projets liés à Internet, et lorsque la bulle a éclaté, on s'est rendu compte que les investissements étaient mal dirigés. Ce fut la même chose pour la bulle des hypothèques à risque.
    Si la spéculation joue un rôle aussi important dans le prix du pétrole que l'indique le rapport du FMI que je viens de citer, il est possible qu'il y ait une très mauvaise affectation de l'investissement au Canada. Il est possible que nous investissions trop dans le pétrole et pas assez dans les autres secteurs. Si nous connaissons ce type de distorsion injustifiée de l'investissement, parce que le prix du pétrole n'est pas un signal de prix fiable, des conséquences négatives pourraient se faire sentir pendant longtemps. Ce serait tragique, en effet, de laisser notre secteur manufacturier et d'autres s'effondrer et voir le secteur pétrolier se gonfler, pour réaliser ensuite que nous avons été guidés par des signaux de prix qui étaient faussés.
    Je vous remercie.
    Merci, madame Russell.
    Nous entendrons maintenant M. Sprott.
    Merci beaucoup. Je suis ravi de pouvoir faire connaître nos opinions au comité. Je crois que vous avez tous reçu une copie de notre exposé, que je vais présenter brièvement.
    Nous avons deux opinions sur ce sujet. Premièrement, nous croyons que la hausse du prix du pétrole s'explique essentiellement par la thèse de Hubbert sur le sommet de la production, dont je vais parler. Deuxièmement, nous avons une opinion sur ceux qui interviennent sur les marchés de marchandises, puisque mon boulot consiste à étudier ces marchés. Nous sommes actifs dans une certaine mesure sur quelques-uns de ces marchés, et j'aimerais en parler.
    J'aimerais parler de la théorie de Hubbert et ce, pour une raison. En 1956, M. King Hubbert avait prédit que la production de pétrole allait atteindre un sommet en 1970 dans les 48 États situés au sud de notre frontière. En 1970, la production a plafonné aux États-Unis et elle a régressé depuis ce temps. Les mêmes théoriciens que je suis—je ne suis pas géologue ni chimiste et je ne connais pas très bien le secteur pétrolier et gazier, mis à part le fait d'y faire des investissements—ont prédit que le plafond serait atteint au cours de cette décennie. En fait, selon les données que nous avons ici, si vous regardez la troisième page, vous pouvez voir que la production de pétrole brut classique—je ne parle pas des sables bitumineux, du méthanol et des biocarburants—a atteint un sommet en 2005.
    La page 4 montre la quantité de pétrole découverte par décennie. On peut voir très facilement que les découvertes sont rares aujourd'hui. En fait, je crois qu'il est généralement reconnu que sur six barils que nous consommons, un seul vient d'une source nouvellement découverte. Alors quiconque peut faire de simples calculs sait que nous allons être à court. Cela ne fait aucun doute.
    À la page 5, nous avons mis un autre tableau qui montre essentiellement que si vous prenez les réserves connues de pétrole dans le sol et leurs catégories, la plupart sont des catégories plus lourdes maintenant. Nous avons produit des catégories légères, qui donnent davantage de carburants de transport. Nous avons maintenant en réserve une catégorie plus lourde. Pour produire les mêmes carburants que nous avons aujourd'hui, la production doit passer de 85 millions de barils à 100,5 millions de barils par jour pour obtenir les mêmes carburants légers.
    Le message que j'essaie de transmettre ici est le suivant: la production mondiale de pétrole classique est en déclin. Pour dire vrai, je ne suis aucunement surpris que le prix du pétrole augmente constamment. Je vais parler également des spéculateurs sur le marché.
    Nous avons donné quelques exemples. On trouve à la page 6 l'exemple du pétrole classique au Canada. La plupart des gens seraient surpris de constater que cette production a diminué depuis 1971. Nous parlons ici de la production de pétrole brut classique. Nous avons connu une légère hausse récemment, sans doute avec l'entrée en scène de Terre-Neuve.
    Les diapositives suivantes montrent la production de pétrole dans la mer du Nord, celle en Norvège et celle du champ pétrolier de Cantarell au Mexique, qui est un exemple bien connu. En 2004, ce champ a produit 2,4 millions de barils. Au mois de juillet, sa production était de 971 000 barils. Il a perdu 1 million et demi de barils en quatre ans. Vous aurez peut-être une idée de la difficulté de produire 1,4 million de barils si je vous dis que pour produire 100 000 barils à partir des sables bitumineux, il faut 10 ans et 10 milliards de dollars. Ce champ a perdu 1,4 million de barils en quatre ans. Nous montrons aussi d'autres champs et nous indiquons que 60 des 98 pays producteurs du monde ont atteint leur sommet.
    Je crois donc que nous allons connaître une pénurie de pétrole. Cette pénurie entraîne une hausse de tous les produits du secteur énergétique: l'uranium est parti en flèche, le charbon a récemment pris son envolée et le gaz naturel a atteint les 15 p. 100.
    Y a-t-il de la spéculation sur les marchés de l'énergie? Absolument. Le Canada a ses propres exemples. Amaranth a perdu une énorme somme d'argent dans des contrats de gaz à long terme et a dû essentiellement liquider le fonds. Aussi, une importante banque canadienne a annoncé avoir perdu 680 millions de dollars dans des dérivés de gaz naturel. Si vous perdez 680 millions de dollars, combien avez-vous donc investi? Vous êtes une banque à charte. Faites-vous de la spéculation, ou bien est-ce là une chose logique?

  (1310)  

    J'étudie le marché de l'or. Je vois des grandes banques intervenir constamment sur les marchés de l'or, ce qui a un impact négatif ou positif sur le prix. Je crois que les spéculateurs sont très présents sur les marchés des marchandises. Nous parlons à la blague du New York Comedy Market. C'est parfois ridicule de voir la volatilité des cours sur ces marchés.
    Je termine ici ma déclaration préliminaire. Je vous remercie.
    Merci, monsieur Sprott.
    Monsieur Diwan.
    Bonjour. Je vous remercie de me donner l'occasion d'être ici.
    J'aimerais vous parler de la formation des prix sur le marché pétrolier et de la façon dont nous sommes passés de 20 à 140 $ pour reculer à 120 $.
    Ce qu'il faut savoir, c'est que le marché pétrolier, entre 1985 et 2003, avait une très grande capacité de réserve, une capacité non utilisée. Nous avons fait des investissements excessifs dans les années 70 lorsque les cours du pétrole ont grimpé et la demande a chuté soudainement. Au cours de ces 20 années, l'OPEP a dû mettre fin à une importante partie de la production. Cette capacité de réserve, entre 1985 et 2003, s'est rétrécie un peu chaque année, mais a permis de garder les prix du pétrole à un niveau très bas, entre 18 et 20 $. À ces prix, nous avons sous-investi dans le secteur pendant une vingtaine d'années.
    Pensez-y. Cela signifie que pour chaque nouveau baril demandé, nous n'avions pas besoin de trouver du pétrole ou d'en produire. Il suffisait que quelques producteurs ouvrent le robinet. Au cours de cette vingtaine d'années, nous avons répondu à 60 p. 100 de la demande croissante en ouvrant le robinet. Cette opération n'a pas coûté très cher.
    En 2003, 2004 et 2005, il y a eu deux perturbations, l'une touchant l'offre et l'autre touchant la demande, qui ont essentiellement rasé la capacité de réserve. La perturbation de l'offre s'est produite en 2003 avec la grève au Venezuela, la situation au Nigeria, puis la guerre en Irak. Nous avons retiré beaucoup de barils du marché au moment où le monde commençait à connaître une perturbation sur le plan de la demande, non seulement en provenance de la Chine, mais aussi de certains endroits du Moyen-Orient et aux États-Unis. En 2004, la demande a été incroyable aux États-Unis. Ces deux perturbations qui se sont produites simultanément ont éliminé toute la capacité de réserve et, sans cette capacité, les marchés pétroliers fonctionnent de manière bien différente.
    Pensez-y. Avant cette période, les investisseurs et les spéculateurs n'étaient pas vraiment disposés à jouer sur ce marché, parce que toute décision prise par l'OPEP pouvait faire augmenter ou diminuer considérablement la production et changer complètement la structure de prix. Il y avait donc un risque politique, créé par l'OPEP, qui était inadmissible pour bon nombre d'acteurs financiers.
    À mesure que la capacité de réserve s'effritait est apparue la thèse de l'offre. Selon cette thèse, nous n'avons pas assez de pétrole, la production est à son sommet et la demande augmente.
    J'ai une opinion un peu différente, mais cette thèse est très présente chez les acteurs financiers, beaucoup moins chez les acteurs de l'industrie. Les compagnies pétrolières ne s'affolent pas autant de ce plafonnement, mais la thèse est importante parce qu'elle nous dit que nous entrons dans une ère de rareté, si bien que le moment est venu d'investir dans le pétrole. Ce mouvement et cette thèse de l'offre ont, d'une certaine façon, créé un autre phénomène, qu'il faut absolument saisir pour comprendre les prix du pétrole. C'est ce que j'appelle la financialisation des marchés pétroliers.
    Avant 2003 ou 2004, les marchés pétroliers étaient de petits marchés de marchandises où l'on trouvait peu d'acteurs, certains étant très imposants, qui pouvaient transiger beaucoup de barils en arbitrage. En 2003, une cinquantaine d'institutions financières étaient inscrites au NYMEX, alors qu'on en compte plus de 400 aujourd'hui. Alors, avec l'élimination de la capacité de réserve et l'apparition de la thèse de l'offre, qui met en lumière la rareté, le marché s'est retrouvé avec un grand nombre d'acteurs. Beaucoup d'entre eux ne connaissaient pas grand-chose du produit, mais ont vu là une trajectoire de prix qui leur a paru être une bonne façon de faire de l'argent et de miser.
    La financialisation du marché pétrolier est importante puisque, entre 2005 et 2008, les principaux indicateurs de prix du pétrole étaient différents de l'offre et de la demande. Je suis un fondamentaliste. Je fais ce métier depuis 15 ans. Je sais comment examiner l'offre et la demande et prévoir les prix du pétrole. Tout fonctionnait très bien jusqu'en 2002. Or, entre 2003 et 2005, l'indicateur principal qui sert à prévoir la fluctuation des prix pétroliers est devenu la somme d'argent injectée. C'était purement cette somme d'argent et par la suite, entre 2006 et 2007, c'était en grande partie la position des acteurs non commerciaux, la portée de leurs actions. Ces spéculateurs bien précis — je n'aime pas beaucoup cette expression, et je parlerais davantage d'investisseurs — dictaient l'ampleur, la forme et la trajectoire des prix du pétrole.

  (1315)  

    C'est très important. Tout à coup, ce n'est plus les acteurs physiques, mais les acteurs financiers qui, simplement de par leur poids et leur taille, donnent la direction que prennent les prix du pétrole.
    À mesure que ce marché a gagné en maturité, d'une certaine façon, et que ces acteurs sont devenus plus futés, un autre phénomène est apparu, et ce qui s'est produit au cours des 12 derniers mois est en fait très intrigant. Comme tous ces acteurs financiers pénètrent le marché, ils font soudainement de l'arbitrage: non seulement ils investissent de l'argent dans le pétrole, mais ils décident, s'ils investissent dans le pétrole, de prendre l'argent d'ailleurs. Ils font de l'arbitrage de portefeuille dans toutes les classes d'actif. Voilà comment je vois la chose. Le pétrole devient une classe d'actif en soi. Ils décident un jour d'investir dans le dollar; le jour suivant le dollar fléchit, alors ils investissent dans le pétrole, ou ils investissent dans le dollar canadien, peu importe. Ils font cet arbitrage parmi les actifs au portefeuille. Cette activité a évidemment amené plus d'argent, parce que de nouveaux acteurs sont arrivés, principalement des fonds de dotation universitaires et des caisses de retraite — ce qu'on appelle des placements plus passifs, en général.
    Cet arbitrage a en quelque sorte lié les prix du pétrole à d'autres facteurs fondamentaux, que j'appelle les « macro-macro-variables ». Tout à coup les prix du pétrole au cours des 12 derniers mois... Si vous voulez vraiment comprendre ce qui s'est produit, vous devez faire un lien entre les prix du pétrole et le dollar américain et les taux d'intérêt aux États-Unis. La crise des prêts hypothécaires aux États-Unis, qui a eu un effet sur la détente des taux d'intérêt et l'affaiblissement du dollar, a eu un impact important sur les prix du pétrole. Vous avez une très bonne corrélation ici.
    En fait, nous observons le phénomène inverse maintenant. Le dollar prend des forces, et le pétrole faiblit. Dans ce sens, le pétrole est devenu un actif financier, là où les facteurs fondamentaux ont de l'importance. Après tout, nous avons sous-investi pendant longtemps. Jusqu'à aujourd'hui, l'équilibre entre l'offre et la demande physiques a été passablement serré. Je crois que ce sera probablement l'inverse au cours de la prochaine année et demie, parce que les prix du pétrole ont commencé à supprimer la demande, mais ce que vous aviez d'une certaine façon, ce sont des macro-variables et les facteurs fondamentaux du pétrole qui, ensemble, sont devenus le principal élément moteur des prix du pétrole.
     Je vais m'arrêter ici. Je répondrai à vos questions tout à l'heure.

  (1320)  

    Merci beaucoup, monsieur Diwan.
    Nous entendrons maintenant M. Masters.
    Merci.
    Je suis ravi d'avoir l'occasion de m'entretenir avec vous aujourd'hui au sujet d'un phénomène récent et sans précédent qui touche les marchés à terme de marchandises. Depuis toujours, on trouve deux types de participants sur ces marchés: les opérateurs en couverture, qui sont les producteurs et les consommateurs de marchandises tangibles et réelles, et les spéculateurs qui échangent des contrats à terme sur marchandises pour faire un profit.
    Les marchés à terme de marchandises ont été mis sur pied par les opérateurs réels en couverture et ils existent afin de servir ces derniers. On autorise les spéculateurs traditionnels à y participer puisqu'ils fournissent des liquidités en procédant activement à des achats et à des ventes. Toutefois, au cours des cinq dernières années, les grands investisseurs institutionnels se sont mis à croire, à tort, que les contrats à terme de marchandises sont une classe d'actif dans laquelle ils peuvent faire un investissement passif, généralement diversifié et à long terme sous la forme d'indices de marchandises. J'ai donné à cette nouvelle espèce de spéculateur, plus nocive, le nom de « spéculateurs d'indices ». Wall Street les a encouragés à considérer une affectation au S&P Goldman Sachs Commodity Index ou au Dow Jones-AIG Commodity Index, les deux principaux indices des contrats à terme de marchandises, comme s'il s'agissait de l'indice boursier S&P 500. Le problème, c'est que les marchés à terme de marchandises ne sont pas des marchés financiers, et lorsque de riches investisseurs font des investissements passifs, à long terme dans les indices de marchandises, ils causent beaucoup de tort aux marchés à terme de marchandises et à l'ensemble de l'économie.
    Les investisseurs institutionnels ont injecté des centaines de milliards de dollars dans les marchés à terme de marchandises et les actifs liés aux investissements dans les indices de marchandises sont passés de 13 milliards de dollars en 2003 à environ 317 milliards de dollars au 1er juillet 2008.
    Comme le montre le premier graphique de mon mémoire, ce phénomène a fait grimper les prix des produits énergiques et alimentaires essentiels de plus de 200 %, en moyenne, depuis cinq ans et demi. En fait, les positions ouvertes des 25 plus importantes marchandises sur lesquelles les indices sont basés totalisaient 183 milliards de dollars en 2004. Du début de 2004 à aujourd'hui, les spéculateurs d'indices ont injecté 173 milliards de dollars dans ces 25 marchandises. C'est une énorme arrivée d'argent dans ce qui constitue un très petit marché.
    Le deuxième graphique de mon mémoire montre que cette situation a fait augmenter considérablement les prix des contrats à terme puisque les marchés à terme de marchandises ont été forcés de prendre de l'expansion pour absorber cette arrivée massive de nouveaux capitaux. Les spéculateurs d'indices ont acheté plus de contrats à terme de marchandises au cours des cinq dernières années que les opérateurs en couverture et les spéculateurs traditionnels réunis. Ils dominent aujourd'hui les marchés à terme de marchandises.
    En 1998, les opérateurs en couverture avaient, en moyenne, dépassé le nombre de spéculateurs dans une proportion de plus de trois pour un, selon la CFTC. Aujourd'hui, les spéculateurs en général sont plus nombreux que les opérateurs en couverture dans une proportion de plus de deux pour un. Il s'agit d'un virage monumental dans la balance du pouvoir. Les positions des opérateurs en couverture ont augmenté de plus de 90 % au cours des dix dernières années, tandis que celles des spéculateurs ont grimpé de plus de 1 300 % durant la même période.
    Ce qu'on déplore le plus au sujet des achats faits par les spéculateurs d'indices, c'est que cela n'a vraiment rien à voir avec les facteurs fondamentaux de l'offre et de la demande. Par exemple, lorsqu'un comité d'investissement d'une caisse de retraite de 10 milliards de dollars décide de placer 500 millions de dollars, ou 5 % du portefeuille, dans l'indice S&P GSCI, les 200 millions de dollars qui sont par conséquent injectés dans les contrats à terme du pétrole brut WTI n'ont absolument rien à voir avec l'offre et la demande du brut sur le marché. Chose encore plus dommageable, puisque les spéculateurs d'indices s'introduisent sur les marchés à terme de marchandises avec un montant fixe de dollars à investir, ils se soucient peu du prix du baril qu'ils payent pourvu qu'ils puissent faire fructifier leur argent. Ils achètent autant de barils qu'ils le peuvent, peu importe le prix à payer, jusqu'à ce que tout leur argent soit investi.
    Par conséquent, les prix des marchandises sont gonflés et amplifiés beaucoup plus que ce que dicte le jeu de l'offre et de la demande. Cela signifie que la fonction de détermination des prix des marchés à terme de marchandises est grandement affaiblie. En fait, puisque les prix des contrats à terme constituent la référence qui sert à établir les prix des marchandises dans le monde réel, cette situation fait augmenter les prix des aliments et de l'énergie dans le monde réel. Par conséquent, non seulement les actions peu judicieuses des spéculateurs d'indices faussent les marchés à terme de marchandises, mais elles nuisent aussi à l'économie mondiale puisque chaque participant du marché au comptant est contraint de payer davantage les produits alimentaires et énergétiques.

  (1325)  

    Le gouvernement américain doit prendre des mesures pour rétablir des limites raisonnables et rigides sur la spéculation et pour empêcher la pratique nuisible de la spéculation d'indices. Les économies mondiales ne peuvent être tenues en otage par les caprices des investisseurs de Wall Street.
    Voilà qui met fin à mon témoignage.
    Merci beaucoup, monsieur Masters. Nous apprécions vos commentaires.
    Nous allons maintenant passer aux questions des membres du comité.
    Monsieur Masters, il y a 12 membres du comité, alors nous allons demander à chacun de s'identifier à mesure qu'il posera des questions, spécialement pour vous et pour M. Diwan, qui comparaît par vidéoconférence.
    Pour le premier tour, chaque membre dispose de six minutes; pour les deuxième et troisième tours, cinq minutes sont accordées à chacun. C'est peu de temps pour les échanges, alors nous vous demandons d'être aussi brefs que possible dans vos réponses. Si une question est posée à un témoin et qu'un autre aimerait y répondre, je vous prie de me l'indiquer.
    Nous allons commencer les interventions de six minutes avec M. Dan McTeague, vice-président du comité.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Diwan, monsieur Masters, madame Russell et monsieur Sprott, merci d'être ici aujourd'hui.
    J'aimerais dire simplement que vos témoignages sont très importants. Il y a plusieurs mois, lorsque nous avons cherché à comprendre pourquoi les prix augmentaient instantanément sans qu'on ait d'explication, certainement pas de la part de l'industrie, c'était rafraîchissant d'entendre les commentaires que vous avez faits devant le sous-comité américain. C'est dommage que nous n'ayons pas pu tenir cette réunion plus tôt, mais notre comité travaille par consensus. Je suis heureux que l'amendement que j'ai proposé pour que cela soit dans le compte-rendu porte fruit aujourd'hui.
    Nous venons d'entendre des représentants du secteur aval de l'industrie pétrolière qui ont dit, en fait, que les prix sont établis en fonction du jeu de l'offre et la demande. Évidemment, je ne le crois pas, et les commentaires que vous venez de faire sont rafraîchissants.
    Je me demande si M. Diwan, M. Masters ou Mme Russell peut nous expliquer dans quelle mesure les caisses de retraite du Canada, les fonds souverains, les investisseurs d'indices et les investisseurs institutionnels, comme vous les appelez, pourraient profiter des échappatoires créés par la commission américaine du commerce à terme des marchandises.
    Je crois que la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario est parmi ceux qui participent aux stratégies de réplique de l'indice des contrats à terme de marchandises. Je ne suis pas au courant des autres. Il s'agit d'une classe d'actif assez populaire auprès d'un grand nombre de fonds de retraite aux États-Unis. J'imagine qu'il y a d'autres participants au Canada, à part la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario.

  (1330)  

    Monsieur Diwan.
    Je ne connais pas très bien le marché canadien; je travaille surtout ici, aux États-Unis. Toutefois, j'imagine que les fonds de couverture et les fonds de pension ont reproduit ce que les fonds de pension des États-Unis, d'Europe, d'Asie et du Moyen-Orient ont fait. À moins que la loi au Canada n'interdise de le faire, j'imagine qu'ils ont fait ce que leurs homologues ont fait.
    Oui. Je viens de remarquer que IntercontinentalExchange a un de ses bureaux ici à Winnipeg, au Manitoba.
    Madame Russell.
    Eh bien, je crois que lorsqu'un groupe d'investisseurs institutionnels, disons aux États-Unis, est en mesure de faire une chose, tout le monde subit une pression pour faire de même. Alors même s'il y avait des restrictions réglementaires en place, ils s'efforceront de trouver une façon de faire ce que les autres membres du même secteur font. Beaucoup de pression est exercée dans ce sens.
    Permettez-moi de vous demander à tous si c'est acceptable.
    Je remarque que le ministère de l'Énergie vient de publier ses données, selon lesquelles la demande aux États-Unis, qui représente la moitié de la demande mondiale en carburant de transport, a maintenant chuté à des niveaux que nous n'avions pas vus depuis 1998; il s'agit du brut, de l'essence et du carburant aviation.
    Je trouve la chose plutôt intéressante — je regarde Bloomberg au moment où on se parle — à savoir que les prix de l'essence augmentent de 7,7 ¢ à 8 ¢ le gallon ce soir; le brut augmente de 2 $ le baril. Est-ce là un exemple du mal et du disfonctionnement qui caractérisent ce marché, qui a échappé aux représentants canadiens jusqu'à présent, monsieur Diwan?
    Eh bien, oui et non. Il y a des événements à court terme. Il y a une très grosse tempête dans les Caraïbes qui s'avance vers la Louisiane, et un long congé s'annonce ici — c'est fermé lundi — alors le marché se prépare à une éventuelle perturbation d'importance. Vous devez être prudents à propos de ces petits mouvements.
    J'aimerais faire un commentaire au sujet de l'essence, parce que c'est important. Si vous examinez l'offre et la demande en essence aux États-Unis, il y a eu un véritable relâchement et on soupçonne que l'essence est passablement survendue maintenant. Vous produisez plus d'essence que ce dont vous avez besoin ou vous importez un peu moins, et vous avez observé cela avec les prix de l'essence. Les prix de l'essence sont bas aux États-Unis. Ce qui est élevé, c'est la partie qui revient au brut, et non pas celle de l'essence. Les raffineurs ne se portent pas bien. Ils ne perdent pas d'argent, mais ils n'en font pas vraiment. Leurs marges sont très faibles, alors il faut être prudent lorsque nous parlons des prix de l'essence. Oui, le prix que les consommateurs payent est élevé parce que la partie du brut est élevée, mais pas la partie de l'essence.
    Monsieur Diwan, si je vous disais que les raffineurs canadiens demandent 30 ¢ le gallon de plus que l'essence sans plomb du NYMEX RBOB, diriez-vous qu'il s'agit d'une proposition plutôt profitable pour eux?
    Oui, c'est certainement rentable.
    Merci.
    Monsieur le président, combien de temps ai-je?
    Monsieur Sprott, vouliez-vous faire un commentaire?
    J'ai un commentaire concernant les deux questions.
    J'ai quelques réponses au sujet de la participation canadienne. J'ai déjà mentionné que Amaranth était très présent sur le marché du gaz naturel. J'ai mentionné qu'une importante banque canadienne s'occupait de dérivés de gaz naturel dans une très large mesure. Si une banque le fait, il y en a peut-être bien d'autres. Ce sont des transactions parfois à long terme, parfois à court terme, et à mon avis, c'est là une des choses que le comité devrait savoir puisque chaque fois qu'il y a une transaction à terme, il y a un acheteur et un vendeur.
    À ce sujet, monsieur Sprott, je pourrais poser la question suivante à M. Masters: concernant le niveau d'investisseurs institutionnels dont vous avez parlé qui s'introduisent sur les marchés à terme de marchandises, est-il supérieur à la demande de la Chine, du Brésil et de l'Inde, que l'on donne habituellement comme excuse pour augmenter ces prix?
    Je crois qu'à l'heure actuelle, la demande équivaut certainement à celle de la Chine, selon les données que nous avons vues.
    L'autre chose que j'aimerais préciser rapidement, si on revient à ce que M. Sprott a dit, à savoir qu'il y a un acheteur pour chaque vendeur, c'est exact, il y a effectivement un acheteur et un vendeur. Or, ce qu'il importe de retenir — et c'est là comment les marchés se répartissent dans le monde —, c'est à quel prix. Il y a toujours eu un acheteur ou un vendeur dans chaque transaction effectuée depuis le début de l'histoire, alors ce n'est certainement pas la seule question qui se pose au sujet de la fluctuation des prix. Il faut savoir quelle est la demande à un certain prix.
    Pour ma part, je crois qu'il y a des facteurs fondamentaux très positifs de l'offre et de la demande qui ont contribué quelque peu à la hausse du prix du brut et d'autres marchandises. Mais, chose tout aussi importante, ce qui est moins connu, c'est l'amplification, comme M. Diwan l'a dit, ou la financialisation des produits de base qui s'est produite. Je crois que cela a eu un effet très important sur le prix — de même que les facteurs fondamentaux habituels de l'offre et de la demande que les gens invoquent.

  (1335)  

    Merci.
    Merci, monsieur McTeague.
    Nous allons maintenant entendre le deuxième membre du comité, monsieur Bouchard.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous de venir témoigner cet après-midi.
    Je suis député du comté de Chicoutimi—Le Fjord dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui bénéficie d'un rabais de taxe. Le gouvernement du Québec impose à l'ensemble du Québec une taxe d'environ 15 ¢. Dans ma région, cette taxe est réduite à 10 ¢ le litre. Jusqu'en 2003, nous n'avons jamais pu bénéficier de cette réduction parce que les fluctuations du prix du pétrole faisaient en sorte que ce dernier était à peu près le même au Saguenay—Lac-Saint-Jean qu'ailleurs. Cependant, un mouvement s'est instauré dans notre région, qu'on appelait la coalition sur le prix du pétrole. On a boycotté les compagnies à tour de rôle, de sorte qu'on retrouve maintenant cette réduction de 5 ¢. Autrement dit, il y a 5 ¢ d'écart entre le prix du litre de pétrole au Saguenay—Lac-Saint-Jean et le prix du litre de pétrole à Montréal ou à Québec.
    Voici comment nous expliquons cet écart. Lorsque la population exerce des pressions sur une compagnie, ça peut faire bouger les choses. Ces pressions ont permis à notre région de gagner le rabais de 5 ¢ accordé en raison des frais de transport dans une région éloignée. Lorsque le consommateur exerce des pressions sur une compagnie et qu'il dénonce une augmentation de prix, cela porte fruit.
    Est-ce ainsi que vous le voyez également?

[Traduction]

    Qui aimerait répondre à cette question?
    Je vais essayer de répondre à la question au sujet de Chicoutimi.
    Alors que je me dirigeais vers la salle d'audience, je réfléchissais à l'époque où j'étais le dirigeant principal d'une entreprise qu'on appelait Canadian Turbo; c'était une entreprise de raffinage qui avait 300 stations-service dans l'Ouest canadien. Je croyais à l'époque que c'était la pire affaire du monde. Je le crois encore. J'ai remarqué que Conoco a annoncé aujourd'hui qu'elle fermait boutique et vendait 900 stations-service aux États-Unis.
    Je n'ai jamais vraiment cru que des compagnies pétrolières intégrées s'enrichissaient au niveau de la vente au détail. Nous savons qu'elles font beaucoup d'argent, mais je crois bien franchement qu'elles le font en amont.
    Je ne peux pas dire précisément si un groupe qui soulève des questions sur une chose peut avoir un impact naturel quelconque. Je ne crois pas que les marges au niveau du raffinage soient particulièrement élevées. Je sais qu'elles sont très basses aux États-Unis à l'heure actuelle.
    Monsieur Diwan.
    Je suis d'accord. Je crois que la situation des raffineurs a été terrible au cours des 25 dernières années, à l'exception des trois ou quatre dernières années. Vous aviez une capacité excédentaire, et le problème des opérations de raffinage, c'est qu'une fois l'installation construite, elle est là pour toujours. Elle ne se perd pas... comme c'est le cas en amont. Les compagnies pétrolières ont donc peu d'intérêt dans les opérations en aval, où les marges sont serrées. Toutefois, dans certaines régions, vous avez des positions de monopole et certaines entreprises font davantage de profits que d'autres, selon leur implantation régionale et la concurrence. Vous avez donc d'importantes différences de prix d'une région à l'autre. Cela dépend beaucoup de la concentration et des réseaux de distribution.
    Je ne connais pas la situation à Chicoutimi, mais aux États-Unis, on constate que les différents marchés ont des facteurs fondamentaux différents, des prix différents. En Californie, on paie un dollar de plus que dans le reste du pays. Dans le Midwest, il est difficile d'accéder à certaines régions par pipeline, alors certains raffineurs locaux font beaucoup plus d'argent.
    Nous devons faire en sorte — et c'est là le rôle des responsables de la réglementation — qu'il y ait une certaine concurrence, que la logistique soit accessible et que nous soyons en mesure de surveiller les prix pour les comparer aux prix principaux, ou aux prix d'échange, pour voir s'il y a de grosses différences et si certaines entreprises exagèrent un peu trop.

  (1340)  

    Madame Russell, voulez-vous répondre?
    Oui, j'aimerais répondre à cette question.
    Je ne sais pas ce qu'il en ait exactement dans votre circonscription, mais ce que je trouve intéressant, c'est qu'il semblerait, d'après ce que vous nous dites, que les gens se soient rassemblés et qu'ils aient commencé à se demander si le prix était raisonnable et s'ils pouvaient faire quelque chose à cet égard. Ils se sont dit que le prix n'était peut-être pas une catastrophe naturelle et qu'il pouvait y avoir lieu de le remettre en question.
    C'est peut-être le cas du prix à la pompe, mais à mon avis, la grande question porte sur les nombreuses étapes qui précèdent l'arrivée de l'essence à la pompe. Il y a des questions à poser. Collectivement, nous pourrions poser des questions pour savoir si les diverses étapes du processus sont menées correctement.

[Français]

    Monsieur Bouchard, vous pouvez poser une brève question.
    Au Canada, le Bureau de la concurrence possède-t-il les pouvoirs nécessaires pour vérifier si une concurrence véritable s'exerce à tous les paliers, que ce soit les producteurs de brut, les raffineurs ou les détaillants, afin que le prix du pétrole soit juste?

[Traduction]

    Qui voudrait répondre à cette question?
    Monsieur Sprott.
    Je ne suis pas un expert du Bureau de la concurrence. J'espère que vous ne croyez pas que je fais l'autruche, mais j'ai presque autant d'expérience que vous tous et j'entends toujours parler des comités aux États-Unis et au Canada qui, chaque année, se penchent sur le prix du pétrole. Chaque fois que le prix augmente, un comité étudie la chose et, à tout coup, il semble qu'il n'y ait aucune preuve. Or, pourquoi il n'y a aucune preuve? Je ne le sais pas.
    Je crois qu'on en a trop fait. Comme M. Diwan et moi-même l'avons dit, les gens qui oeuvrent dans le secteur du raffinage ou de la commercialisation font très peu d'argent. Ce n'est pas une très bonne affaire, malheureusement. Je crois que nous poursuivons cette piste constamment. Toutefois, je redis toujours que nous avons un problème fondamental au Canada et dans le monde. Le plus grand problème mondial, c'est le déclin des sources énergétiques, et l'Agence internationale de l'énergie va se pencher sur la question. Vous verrez qu'en novembre, elle va sortir une toute nouvelle étude sur l'approvisionnement mondial et elle va changer vos hypothèses. L'enjeu est énorme.
    Merci.
    Merci, monsieur Bouchard.
    Nous entendrons maintenant Bruce Stanton.
    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à nos témoins d'aujourd'hui. Il s'agit d'un sujet très important, qui préoccupe bien des gens dans nos circonscriptions et partout au pays.
    Madame Russell, je suis ravi de vous revoir. J'aimerais vous poser ma première question.
    En vue de la réunion d'aujourd'hui, nous avons lu pratiquement de long en large le rapport du groupe de travail interagence, une organisation basée aux États-Unis qui, si je comprends bien, s'est penchée sur la question de la spéculation au cours des cinq dernières années pour voir dans quelle mesure elle entraîne une hausse des prix du pétrole et quelles sont les relations de cause à effet.
    Dans le rapport provisoire, publié à la fin de juillet, les auteurs précisent qu'ils ne sont pas en mesure de trouver aucune preuve; lorsqu'ils appliquent ce qu'on appelle le test de causalité à la Granger à cette transaction, il s'avère que le prix du pétrole est établi après coup, et non l'inverse. Autrement dit, les positions prises par les soi-disant spéculateurs ou investisseurs le sont après les changements de prix. On pourrait en conclure que le prix change en fonction du jeu de l'offre et de la demande et que les positions d'investissement sont prises par la suite.
    C'est ce qui ressort de l'ensemble de leurs conclusions — et je ferai remarquer qu'il s'agit d'un rapport provisoire.
    Avez-vous des commentaires à ce sujet? C'est un tableau bien différent de celui que vous avez brossé tout à l'heure.

  (1345)  

    Oui, nous devons jouer le jeu qui consiste à savoir quelle étude est la bonne.
    Pour dire vrai, c'est ce que nous finissons par faire.
    C'est le jeu que vous jouez tous, n'est-ce pas?
    Exactement.
    Ce n'est pas un jeu plaisant, parce que c'est très technique et le fait de décortiquer la méthodologie technique pour voir si vous pensez qu'une étude a été faite correctement avec les bonnes données, ou si quelque chose a changé depuis... C'est laborieux, pour ne pas mentionner les autres adjectifs qui s'appliquent au processus, d'essayer de voir si vous croyez ces études ou non. À mon avis, cela défit le bon sens de penser que tout cet argent puisse être injecté sur le marché sans avoir aucun effet, que tout cela arrive après coup — que des transactions soient faites sans affecter le prix sous-jacent de l'objet en question. Vous pourriez probablement mettre une pile d'études d'un côté et une autre pile d'études de l'autre côté et débattre de leurs valeurs techniques pendant longtemps et vous en arriveriez finalement à votre propre conclusion.
    Pour ma part, je crois qu'il y a un certain impact. Ce n'est pas tout ou rien, ce n'est pas seulement une affaire de spéculation, ce n'est pas seulement ces facteurs fondamentaux sous-jacents; c'est un ensemble.
    Monsieur Masters, voulez-vous faire un commentaire?
    Oui. J'allais dire que la CFTC a eu beaucoup de questions à ce sujet. L'agence a fait l'objet de bien des critiques.
    Lorsque j'ai témoigné au mois de mai, un des sénateurs, Carl Levin, a dit que la CFTC avait tendance à fermer les yeux, à ne pas voir parfois ce qui se passait. Il y a des questions au sujet de la dotation en personnel et ainsi de suite. Je n'ai rien contre la CFTC, mais je trouve intéressant de constater qu'avant les témoignages que moi et d'autres avons faits en mai, la CFTC avait nié qu'elle devait effectuer une étude ou autre chose.
    L'administration républicaine a des points de vue particuliers sur cette question, et comme le président de la CFTC et le trésor et ainsi de suite — le comité de travail — sont tous issus de la même administration, il est clair pour moi qu'il est peu probable qu'ils...
    Êtes-vous en train de dire que c'est à cause d'une influence politique?
    Oui. Récemment, un vice-président de la CFTC, Bart Chilton, a indiqué qu'il croyait que la conclusion de l'étude était prévisible. Fait plus important encore, la CFTC elle-même a, ces dernières semaines, reclassifié Vitol Corporation, une importante société de courtage. Je crois qu'il en a d'ailleurs été question dans le Washington Post. De commerciale, cette société a été reclassifiée comme...
    Monsieur Masters, je ne veux pas vous interrompre, mais je ne dispose que de six minutes. J'aurais une brève question dans la même veine que je poserai, si vous n'y voyez pas d'objection, à Mme Russell.
    Dans le présent contexte, nous sommes confrontés au même problème. Les rapports sont contradictoires sur ce phénomène, si on peut l'appeler ainsi. Du point de vue de la politique publique, il est de notre intérêt de nous assurer que les prix du pétrole découlent des effets de l'offre et de la demande. Si nous croyons qu'il existe des problèmes à cet égard, que peut-on faire, madame Russell, pour appliquer une politique publique efficace?

  (1350)  

    Mme Russell peut répondre en premier; M. Sprott prendra ensuite la parole.
    J'ai parlé pendant la période qui vous était impartie. Pourquoi ne répondriez-vous pas?
    Monsieur Stanton, je considère que les bourses des marchandises ne sont pas bien réglementées. Je ne me fierais pas à ce rapport. Les exemples de ce phénomène se multiplient. Nous avons tous pu observer les difficultés d'Amaranth, ainsi que la dégringolade récente de SemGroup, qui a perdu 3 milliards de dollars. Combien avait-on investi pour perdre autant: 12 milliards? Tous les organismes qui affirment réglementer le marché, particulièrement aux États-Unis, restent en fait les bras croisés. Certains prétendent réglementer le secteur bancaire. Or, ils n'ont aucune idée de ce qui s'y passe. Le marché des instruments dérivés est totalement hors de contrôle. Il existe un nombre incroyable d'instruments sans lien aucun avec la bourse des marchandises.
    Mais là où je veux en venir, c'est que ce marché est fictif. Ce n'est que du papier. Tous ceux qui en possèdent en quantité, que ce soit des banques ou des fonds de placement spéculatif, peuvent en échanger beaucoup. Mais savez-vous quoi? Ce ne sont pas eux qui reçoivent le pétrole. Il existe un marché du pétrole réel et un marché « papier ». Ce sont deux choses distinctes.
    Merci.
    Madame Nash.
    Je remercie les témoins qui comparaissent aujourd'hui.
    Madame Russell, j'aimerais commencer par vous. Je vous ai entendu affirmer qu'il existe peut-être certains facteurs, comme l'offre et la demande, qui ont contribué à la flambée des prix; cependant, la déréglementation du marché, particulièrement les lacunes mises au jour dans l'affaire Enron, a provoqué une augmentation spectaculaire des investissements spéculatifs, à laquelle nous n'aurions pas assisté autrement. Nous nous rappelons tous la bulle des titres .com et la crise des prêts hypothécaires à risque, qui ont fait mal à bien des petits investisseurs, ont permis à quelques-uns de s'enrichir et ont provoqué une véritable onde de choc par la suite. Vous nous avez indiqué que cela poussait les prix à la hausse et que cette mauvaise répartition des investissements pourrait avoir des répercussions pendant longtemps.
    À votre avis, quelles conséquences cette mauvaise répartition pourrait-elle avoir au Canada? Que pourrions-nous faire pour éviter cela?
    Lorsque le prix du pétrole est relativement élevé, cela encourage l'investissement. Dans le domaine pétrolier, l'investissement s'effectue à long terme. On ne peut soudainement renverser la vapeur en augmentant l'offre en pétrole. Il s'agit d'investissements considérables, réalisés à très long terme. À la suite des difficultés éprouvées sur le marché pétrolier au cours des années 1970, on a énormément investi pour augmenter l'offre, ce qui aura des conséquences néfastes pour encore un certain temps.
    Ce que je veux vous faire comprendre, c'est que nous risquons de stimuler excessivement l'investissement dans le domaine pétrolier en réaction à ces hausses de prix, qui découlent en partie de la spéculation. Une fois que nous aurons pris ces décisions en matière d'investissement, nous devrons construire des installations pour desservir le marché dans un avenir lointain — ce pétrole ne sera pas sur le marché aujourd'hui, mais bien demain — et les données économiques fondamentales sous-jacentes ne justifient peut-être pas la prise de pareille mesure. Ainsi, lorsque l'on considère le contexte économique dans son ensemble, il n'est peut-être pas avisé d'investir autant dans le domaine pétrolier au détriment d'autres secteurs où il pourrait être intéressant d'investir si le mécanisme d'établissement des prix n'était pas aussi faussé.
    Pour continuer dans la même veine, le principal comité de l'industrie a réalisé une étude sur les répercussions du dollar sur le secteur manufacturier, et il ne fait aucun doute que les manufacturiers, les exportateurs ou tous ceux qui sont vulnérables à l'évolution des prix s'inquiètent; je crois que c'est également le cas dans les secteurs du tourisme et de la culture. S'inquiète-t-on également du prix élevé du pétrole, surtout si ce prix est artificiellement élevé? Craint-on que ce prix puisse avoir des effets néfastes permanents sur les secteurs clés de l'économie canadienne, comme ceux du tourisme ou de la fabrication, lesquels pourraient avoir de la difficulté à se rétablir par la suite? Sommes-nous en train de mettre trop d'oeufs dans le même panier?

  (1355)  

    L'ennui, c'est que ces décisions auront certainement des répercussions à très long terme. Si, par exemple, on investit trop dans le domaine pétrolier aujourd'hui et pas suffisamment dans le secteur manufacturier, et que l'on poursuit ainsi aussi longtemps que la bulle pétrolière se maintient — et je n'ai pas la moindre idée de combien de temps cela pourrait durer — alors on ne peut corriger le tir instantanément si on a mal réparti nos investissements. Donc, si une usine de fabrication ferme ses portes en raison de ce problème, elle ne rouvrira pas du jour au lendemain lorsque les prix reviendront à la normale. La fermeture pourrait être permanente. C'est une occasion qui pourrait ne pas revenir, en raison de...
    Monsieur Masters, avons-nous affaire à une bulle pétrolière?
    J'ignore si je qualifierais le phénomène de bulle ou pas. Je crois que les investisseurs ont certainement provoqué une flambée des prix et causé une distorsion de l'offre et de la demande. On débat actuellement de l'ampleur de cet effet d'amplification.
    À mon avis, à l'échelle mondiale, tout investissement de 170 milliards de dollars faussera considérablement les prix, surtout dans des marchés financiers beaucoup plus petits que ceux où l'on investit habituellement. Je crois donc que les investissements ont eu un impact considérable sur le prix, et si c'est le cas, alors il faut s'interroger sur le niveau approprié d'investissement. Dans une certaine mesure, on risque de se retrouver aujourd'hui avec des investissements supérieurs à ce qu'ils seraient normalement, avec les frais initiaux que cela entraîne. Ce que l'on veut éviter pour véritablement assurer la sécurité dans le secteur énergétique, c'est une baisse soudaine de l'investissement advenant une chute des prix, et ce, parce que ces investissements étaient exagérés. Voilà le problème avec les bulles.
    Il suffit d'observer ce qui s'est passé avec les marchés de l'immobilier et d'Internet. Une bonne partie de l'offre anticipée ne s'est pas concrétisée et la demande prévue ne s'est pas vraiment matérialisée; or, on avait mis en oeuvre les plans et le financement, se retrouvant ainsi le bec à l'eau.
    Madame Nash, M. Sprott voulait aussi formuler un commentaire.
    Et je crois que vous vouliez également dire quelque chose, monsieur Diwan? D'accord.
    Monsieur Sprott.
    J'aimerais soulever deux points.
    Vous l'aurez compris, je crois qu'il y a un problème dans le domaine pétrolier à l'échelle mondiale. Cette situation est attribuable à un phénomène appelé l'épuisement. Lorsque l'on entame la production, les puits commencent automatiquement à s'épuiser parce que la pression diminue. La production baisse donc. Il y a ici un effet d'entraînement, qui fait qu'il faut dépenser beaucoup d'argent simplement pour maintenir la production. J'irais jusqu'à dire que l'industrie mondiale dépense 15 p. 100 de plus par année et n'obtient rien en retour. La production n'augmente pas. Nous avons donc un problème.
    Je crois qu'Exxon a dépensé environ 50 millions de dollars par jour — et j'aimerais connaître le chiffre exact —, et pourtant, ses réserves ont diminué l'an dernier. La prospection de pétrole et de gaz n'est pas chose facile. Les prix ne cessent d'augmenter. Voilà où je veux en venir.
    Allez-y brièvement, monsieur Diwan.
    J'irais dans le même sens.
    Nous avons constaté une augmentation spectaculaire des prix du pétrole, mais pas de l'offre. Nous ne sommes donc pas en train de faire totalement fausse route sur le plan de l'investissement. La flambée des prix a eu pour effet de réduire la demande, en plus de coûter cher aux consommateurs. Mais du point de vue de la politique publique, particulièrement aux États-Unis, c'est probablement une bonne chose.
    Il n'en demeure pas moins que l'augmentation des prix ne s'est pas traduite par une augmentation de l'offre, et ce, pour un certains nombres de raisons. Notamment, le secteur des services n'a pas la capacité d'augmenter la production. En outre, nous ne découvrons pas de nouvelles sources d'approvisionnement importantes. On en trouve de bonnes au Brésil, dans les eaux profondes du Golfe du Mexique et dans les sables bitumineux du Canada. Mais nous constatons un épuisement important des ressources dans le monde. Les nouveaux champs pétrolifères ne peuvent tout simplement pas remplacer les anciennes grandes exploitations, et l'offre stagne.
    Merci.
    Je vous remercie, madame Nash.
    Si vous le voulez bien, nous laisserons la parole à M. Alghabra.

  (1400)  

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Diwan, j'aimerais poursuivre sur le même sujet. Au début de votre témoignage, vous avez indiqué que vous n'acceptiez pas nécessairement la version de l'industrie pétrolière, selon laquelle les réserves ou la production de pétrole diminuent. Or, vous venez de dire que l'on avait de la difficulté à trouver du pétrole.
    Pourriez-vous réconcilier ces deux affirmations, je vous prie?
    Oui, rien de plus simple.
    On peut dire que le monde est divisé en deux. Il y a les pays membres de l'OPEP et ceux qui n'en font pas partie. C'est parmi ces derniers que la production n'a pas vraiment augmenté au cours des cinq dernières années — on a constaté une augmentation en Russie et une diminution pas mal partout ailleurs. Les pays non membres de l'OPEP, ceux qui ne font pas partie du cartel, représentent un peu moins de 15 p. 100 des réserves mondiales — et cela inclut la Russie. Le reste des réserves se trouve dans des régions où les sociétés pétrolières internationales ne peuvent investir ou faire de la prospection.
    Ainsi, 77 p. 100 des réserves mondiales sont exploitées par des pays ou des entreprises qui en interdisent l'accès aux tiers. On trouve certaines exceptions à la règle, comme les États-Unis, le Canada, l'Australie et la Grande-Bretagne. Mais en règle générale, les pays comme l'Arabie saoudite, l'Iran, l'Irak et le Mexique, ne sont pas ouverts et les investisseurs n'y ont pas accès.
    Dans les régions du monde ouvertes au commerce — et il n'y a que 6 p. 100 des réserves mondiales de pétrole qui sont accessibles, soit celles des États-Unis, du Canada, de l'Australie et de la Grande-Bretagne — on atteint des niveaux où l'on produit énormément, et il est très difficile de refaire ces réserves et de poursuivre la production à ces niveaux. Dans le reste du monde, où nous n'avons pas accès, le problème ne semble pas venir du pétrole souterrain ou des réserves de molécules, mais de l'accès et de la capacité de production.
    De ces pays, lesquels produisent quotidiennement environ 35 à 40 millions de barils, un seul investit réellement, et c'est l'Arabie saoudite. Les autres n'investissent pas.
    Merci, monsieur Diwan.
    Il semble donc qu'il existe une preuve scientifique probante démontrant que l'on spécule à outrance ou pousse le prix du pétrole à la hausse en faisant fi des données économiques fondamentales. On pourrait croire que sur un marché intelligent et cohérent, on ne tarderait pas à corriger la situation si on s'inquiétait de l'investissement; nous savons cependant que les investisseurs sont soumis à des facteurs émotifs et à la pression de leurs pairs; ils veulent réaliser des profits immédiats, prenant des risques et espérant que la bulle se maintiendra jusqu'à ce qu'ils récupèrent leur mise.
    Mais que peut faire notre gouvernement? Nous savons qu'aux États-Unis, il existe un mouvement qui demande, à juste titre, pourquoi les autorités n'ont pas pris de mesures pour protéger les consommateurs contre la crise des prêts hypothécaires à risque. En tant que législateurs, en tant que gouvernement, que pouvons-nous faire pour gérer cette crise avant qu'elle n'éclate?
    Nous retournons à M. Diwan.
    J'aimerais revenir à ce que Mme Russell a dit sur l'élimination des mesures de contrôle. Les États-Unis ont aboli ces mesures. La question — qui, aux États-Unis, a fait l'objet d'importants débats auxquels M. Masters et moi-même avons pris part activement — est de savoir comment on réinstaure ces mesures pour être certain de garder ces marchés à l'oeil et de comprendre ce qui s'y passe? On observe un mouvement dans ce domaine, et la CFTC doit examiner les faits beaucoup plus attentivement et les reclassifier; je crois qu'en septembre, nous assisterons à une reclassification des données beaucoup plus importante qui permettra de mieux comprendre la dynamique de ces marchés complexes. Cependant, en même temps, je crois qu'il y a une lutte politique où interviennent certains lobbys; et le secteur financier, qui ne se porte pas particulièrement bien, ne veut pas que cette lacune disparaisse, parce que c'est le seul moyen de réaliser des profits actuellement.
    Il y a donc divers intérêts qui entrent en jeu aux États-Unis; et, au bout du compte, c'est aux Américains qu'il revient de voir comment remettre en place les mesures de contrôle et réglementer le marché.
    Bien. Nous laissons la parole à M. Sprott.
    Je tiens à répéter qu'il existe des marchés « papier » et des marchés réels, et les bourses des marchandises appartiennent à la première catégorie.

  (1405)  

    C'est la même chose.
    Il est rare que l'on livre une marchandise. Ainsi, les puissances financières peuvent faire faire aux prix ce qu'elles veulent, et très souvent, le marché physique adopte le même prix, parce que c'est celui qui a cours sur le marché « papier ». Mais on échange rarement les marchandises.
    J'aimerais faire remarquer quelque chose qui échappe à bien des gens: c'est que la dernière société qui a éprouvé des difficultés sur la bourse des marchandises s'appelle SemGroup. D'après ce que l'on a appris du domaine public, il semble que la société ait manqué de pétrole et se soit retrouvée prise de court.
    Souvenez-vous, il y a des acheteurs et des vendeurs sur le marché, et chacun d'entre eux peut être mis hors jeu. Personne n'a fait remarquer que les positions à court terme sont prépondérantes, et je considère que M. Diwan a souligné quelque chose de très important que vous n'avez pas remarqué. Il a affirmé que la meilleure politique publique consiste à laisser les prix monter pour que les gens cessent d'utiliser le pétrole.
    Monsieur Sprott, vous venez de dire que le marché n'est pas vraiment réglementé, et nous avons constaté que la déréglementation a provoqué la crise des marchés hypothécaires à risque aux États-Unis. Êtes-vous en train de nous proposer de laisser le marché se rétablir de lui-même?
    Non. Je crois que les bourses des marchandises sont peut-être très mal réglementées. Il s'agit dans ce cas des marchés « papier ». Il y a ensuite le monde réel, où on produit, consomme et achète du pétrole.
    Vous proposez donc que nous réglementions le marché « papier ».
    Oui, et je l'ai déjà appelé la bourse factice. Je crois qu'il y a trop d'institutions qui s'efforcent d'influencer le prix.
    Merci.
    Je donne la parole à M. Carrie.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Apparemment, les opinions diffèrent énormément à ce sujet, et j'aimerais avoir un commentaire sur le point suivant.
    J'ai sous la main une citation de M. Manzoni, président-directeur général de Talisman Energy, qui affirme que le problème sur le marché pétrolier est structurel; ainsi, la flambée des prix serait attribuable au fait que la croissance de l'offre est inférieure à celle de la demande plutôt qu'à l'activité spéculative. Même si la spéculation et la fluctuation des devises entrent en jeu, ce ne sont pas ces facteurs qui font augmenter les prix du pétrole à long terme. Il a déclaré que les prix allaient demeurer structurellement élevés pour une année ou deux, certainement pas à 140 $ le baril, mais à plus de 90 $.
    Je me demande si M. Diwan, puis M. Masters, pourraient commenter.
    Bien sûr. Comme je l'ai dit au début de mon témoignage, il y a un problème sur le plan de l'offre et de la demande. Le marché est touché par des problèmes fondamentaux et a subi deux chocs. Rappelez-vous les 12 derniers mois, lorsque le prix du pétrole est passé de 70 à 150 $ le baril, pour redescendre à 110 $. De toute évidence, les facteurs fondamentaux n'ont pas changé à ce point pendant cette période. Les chiffres ont changé, mais n'ont quand même pas doublé. Le marché n'a pas autant évolué que nous l'avions prévu l'an dernier.
    De toute évidence, le flux des investissements sur le marché a provoqué une augmentation considérable de l'activité sur le marché. En un sens, M. Manzoni a raison, mais cela ne m'indique pas si le prix devrait être de 70, 90, 110 ou 130 $ le baril. Personne ne le sait; nous savons cependant qu'il est amplifié. Il n'y a qu'un seul prix dont je sois sûr, c'est celui de la production d'un baril de pétrole de plus à partir d'un champ pétrolifère nouvellement exploité. Il est probablement d'environ 80 ou 90 $ actuellement, en raison de la dépréciation du dollar. Donc, si on effectue un nouvel investissement aujourd'hui, nous savons que le prix marginal à long terme est d'approximativement 80 à 90 $. C'est la seule chose que je sache. Je ne sais pas exactement ce que devrait être le prix selon l'offre et la demande, parce que les indicateurs fluctuent énormément.
    Monsieur Sprott.
    Je crois que ce que M. Diwan a dit est extrêmement important, certainement pour nous en tant que Canadiens. Nous savons ce qu'il en coûte de produire du pétrole à partir des sables bitumineux. Ce n'est pas 80 $, mais bien davantage. À ce prix, on ne produira plus à partir des sables bitumineux et l'activité va cesser. Cela nous indique ce qu'il en coûte de produire un baril de pétrole marginal. Si l'on pense que même un baril de pétrole ordinaire pourrait coûter 80 $, quel serait le prix d'un baril obtenu d'une source non traditionnelle? Il n'est pas facile de trouver et de produire du pétrole.
    Monsieur Masters, voulez-vous intervenir?
    Il ne fait aucun doute que le prix est demeuré très supérieur au coût marginal de production pour la plus grande partie de l'année. Il est intéressant d'examiner le flux monétaire sur le marché à terme des marchandises. Les investissements ont augmenté substantiellement toute l'année, pour atteindre un sommet vers le 1er juillet. Par la suite, nous avons observé une baisse significative des investissements sur ce marché, et le prix a chuté. Donc, que le prix soit supérieur de 10 ou de 50 $ au coût marginal de production, nous croyons qu'il est en grande partie influencé par les investisseurs financiers. C'est notre position depuis le début: pendant combien de temps allons-nous devoir tolérer cette situation?
    Si les producteurs de pétrole jugent que le prix ne devait pas être de 130 $ parce qu'ils savent, en examinant leurs contrats, qu'il est gonflé artificiellement du fait de la spéculation, ils pourraient ne pas faire autant de prospection que nous le souhaiterions.

  (1410)  

    M. Carrie a une autre question.
    Je voulais aussi aborder brièvement la théorie du pic pétrolier. M. Diwan a parlé de la quantité de pétrole qui existe dans le monde, car en fait, nous ignorons ce qu'il en est. Un dénommé Nansen Saleri, ancien cadre de la société pétrolière Saudi Aramco, affirme qu'on n'a consommé, à l'échelle mondiale, que 1 billion d'un grand total de 12 à 16 billions de barils de pétrole. Il soutient, à l'instar d'Exxon Mobil et du ministère de l'Énergie américain, que les prix élevés poussent les sociétés à innover et à investir davantage, ce qui fera bondir l'offre et diminuer les prix.
    Croyez-vous que ce soit vrai? Monsieur Diwan, aimeriez-vous répondre en premier?
    Monsieur Diwan.
    Oui. La quantité de pétrole dans le sol change selon les prix. Il est important de comprendre qu'à 600 $, on a beaucoup plus de pétrole qu'à 20 $. La production de pétrole coûte cher, et lorsque les prix augmentent, il faut accéder à des réservoirs plus profonds, plus petits et plus difficiles d'accès. Il s'agit donc d'un bien économique. Nous n'atteignons pas de prix plafond, de limite physique, et c'est ce qui m'ennuie avec le pic pétrolier.
    À différents prix, on découvre plus de pétrole. Réfléchissez-y. Lorsque les sociétés pétrolières réservent une certaine quantité de pétrole, elles le font à différents prix.
    Je connais M. Saleri, et il sait de quoi il parle. Il s'est occupé de la gestion des réservoirs de Saudi Aramco, alors...
    Merci, monsieur Carrie.
    Nous laisserons maintenant la parole à M. Vincent.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Bienvenue à tous.
     Madame Russell, vous avez dit que les nombreuses spéculations font monter le prix du baril de pétrole brut. Comment pourrait-on réduire ces spéculations afin d'obtenir un juste prix? Ma question s'adresse à tout le monde.

[Traduction]

    Le problème, dans le cas qui nous occupe, c'est qu'en tant qu'élus canadiens, vous avez très peu à dire au sujet des politiques de réglementation en vigueur aux États-Unis, alors qu'elles ont une influence considérable dans ce dossier. Je vous encourage à inciter le gouvernement du Canada à faire savoir que toute cette spéculation sur les prix du pétrole a des conséquences qui vous irritent et que vous aimeriez que nos voisins du Sud réglementent davantage le marché pour freiner cette spéculation.
    En outre, ce ne sera pas une mince affaire de régler les points qu'ont déjà soulevés les participants. La spéculation profite à de nombreux intéressés, qui ne souhaitent pas le retour des mesures de contrôle.
    Si vous ne croyez pas que vous pourrez faire appliquer certaines de ces mesures, alors nous devrons prendre une décision. Voulons-nous que l'instabilité du prix sur les marchés internationaux ait des répercussions au Canada? Si la réponse est non, alors nous allons devoir prendre des mesures beaucoup plus interventionnistes afin de nous protéger de ces excès.

[Français]

    Monsieur Sprott, vous avez parlé du marché papier et du marché réel. Si on réduisait la spéculation, serait-il possible que les gens qui restent dans le marché réel forment un oligopole?

[Traduction]

    Je vous remercie d'avoir posé la question.
    Comme je l'ai indiqué, je considère qu'il existe un marché « papier » et un marché réel, et que ce dernier est plus authentique.
    C'est intéressant. Je crois que quelqu'un a dit que le prix du pétrole avait augmenté de 2 $ aujourd'hui sans qu'on sache pourquoi. C'est parce que nous en sommes à un point où l'équilibre entre l'offre et la demande est précaire. Par exemple, lorsque je pense au pétrole, je m'inquiète de la diminution de l'offre. Et je n'ai pas encore parlé de la hausse de la demande. Nous savons que cette dernière augmente. Je vous dit que l'offre diminue et que je prévois que cette tendance se maintiendra dans l'avenir.
    Très franchement, je ne me soucie guère des bourses des marchandises. Certains font des profits en spéculant sur ces marchés, et ils ne devraient pas, car ce sont les consommateurs qui en font les frais. Lorsque les investissements à court terme sont gagnants, ce sont les sociétés qui paient, alors que ce sont les consommateurs qui subissent les conséquences lorsque c'est le long terme qui est avantagé. On pousse les grandes institutions à investir dans ces marchés, et j'aimerais que cela ne se produise pas. Toutefois, je crois qu'à long terme, le vrai gros problème viendra de l'offre et de la demande en pétrole, et nous n'avons que des difficultés devant nous à cet égard.

  (1415)  

    Monsieur Vincent, M. Diwan souhaiterait intervenir.
    J'aimerais répondre rapidement à M. Sprott, qui considère qu'il y a un prix sur le marché physique et un sur le marché « papier ». Or, il n'y a qu'un seul prix, celui du marché « papier ». Le prix sur le marché physique découle essentiellement de celui qui a cours sur le marché « papier ». Le mécanisme d'établissement du prix se fonde sur les échanges; il ne dépend plus du marché physique. Les intervenants sur le marché physique ne s'appuient que sur les données du marché « papier » et appliquent un différentiel de prix si la qualité ou l'emplacement diffèrent.
    Ainsi, il n'y a pas deux marchés, dont l'un est bon et l'autre, mauvais. Il n'y en a qu'un seul. Le problème, c'est que les intervenants sur le marché physique avaient une influence considérable, alors qu'il n'en ont très peu actuellement. Ils ne représentent probablement que 5 ou 10 p. 100 du marché. La situation nous a donc échappée il y a longtemps, et il est très difficile de la reprendre en main.
    À ceux qui veulent savoir comment influencer Washington, je réponds que c'est très simple, car je réside là-bas. Il faut faire appel à un lobbyiste. C'est le seul moyen dont disposent les Canadiens pour avoir une influence quelconque sur cette réglementation: ils doivent faire comme tout le monde.

[Français]

    Monsieur Vincent, vous pouvez poser une dernière question.
    Mon collègue a parlé du Bureau de la concurrence.
    Monsieur Diwan, vous avez dit que la marge de profit des raffineurs était plus ou moins la même. Pourtant, cette marge de profit était de 28 ¢ en 2007 et de 14 ¢ en 2006. Elle est maintenant revenue à un taux normal de 9 ¢.
    Si un raffineur décide de fixer cette marge à 28 ¢, pourquoi les autres raffineurs la fixeraient-ils au même taux? Si on parle de concurrence, ce n'est pas tout le monde à la hausse, mais tout le monde à la baisse. Si le Bureau de la concurrence avait plus de pouvoirs, cela pourrait aider.
    Ma question s'adresse à vous, monsieur Sprott, parce que vous étiez aussi dans le domaine du raffinage.

[Traduction]

    Monsieur Diwan.
    Eh bien, la concurrence est plus intense dans le domaine du raffinage. Comme je l'ai déjà souligné, ces 20 dernières années, les marges des raffineurs n'ont été bonnes que trois années, soit les trois dernières. La situation n'est guère reluisante cette année.
    La raison en est fort simple: l'offre et la demande ont eu une incidence sur le raffinage. Voici comment: au moment où les marges augmentaient parce que les stocks étaient très restreints pour ce qui est du diésel et de l'essence—mais pas du brut—, on a subitement accru la capacité de raffinage. De plus, cette capacité augment beaucoup en Chine, en Inde, dans le Moyen-Orient et aux États-Unis, alors que la demande décroît. Ainsi, les stocks des raffineurs, notamment dans le cas de l'essence, sont maintenant très défavorables, et leurs marges ont décru. Et je crois que cette tendance se maintiendra un certain temps.
    Ce qui cause vraiment la flambée des prix, c'est le brut, et non le raffinage. Le prix de l'essence à la pompe dépend du prix du brut et non les facteurs économiques fondamentaux.
    Merci.
    Monsieur Sprott, vous pouvez intervenir brièvement.
    De toute évidence, vous avez le pouvoir d'intervenir comme bon vous semble au pays. Vous créez le Bureau de la concurrence et avez le loisir de mettre en oeuvre ses recommandations ou non. Vous avez toutes les données en main. Les chiffres sur le raffinage et le marketing n'ont rien de bien sorcier. On paie un montant x; le prix à la pompe est de tant et la taxe, de tant. Nous pouvons certainement découvrir si nous nous faisons arnaquer ou pas. Le gouvernement a tout le pouvoir nécessaire pour éclaircir la situation. Donc, si vous voulez intervenir à nouveau, allez-y.
    Merci, monsieur Vincent.
    La parole est maintenant à M. Van Kesteren.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également nos témoins de comparaître de nouveau. La journée est particulièrement intéressante, et je crois que nous avons amplement matière à réflexion.
    J'aimerais continuer de discuter de la question qui a été, je crois, posée par M. Stanton. Nous parlions d'appliquer ce que notre analyste a, si je ne m'abuse, appelé l'analyse du lien de causalité à la Granger. Disposons-nous de preuves statistiques? Nous en sommes-nous servi pour déterminer s'il existe ou non une corrélation entre le prix au comptant et les contrats à terme dans le secteur du brut? Avons-nous appliqué cette analyse à cette fin?

  (1420)  

    Certainement.
    Vous pouvez répondre, monsieur Diwan. Peut-être M. Sprott pourrait-il répondre également par la suite.
    Oui, c'est ce que nous faisons. Nous avons le marché du pétrole constamment à l'oeil. C'est mon rôle.
    Il ne fait aucun doute que le marché à terme influe sur le marché au comptant. Si l'on observe les prix du pétrole des douze derniers mois — et nous tentons constamment de comprendre le mécanisme d'établissement du prix afin d'en prévoir l'évolution —, le seul lien sérieux pouvant expliquer pourquoi les prix du pétrole sont passés de 70 à 140 $ pour redescendre ensuite, c'est la valeur du dollar. Lorsque le dollar s'est déprécié, les prix du pétrole se sont envolés, et lorsque le dollar s'est rétabli, les prix du pétrole ont baissé. Cette corrélation, de l'ordre de 90 p. 100, est très fiable. Ce n'est pas le jeu de l'offre et de la demande des 12 derniers mois qui intervient, mais l'offre et la demande en dollars.
    Êtes-vous d'accord, monsieur Sprott?
    Je ne connais pas très bien l'équation du lien de causalité, si on peut l'appeler ainsi, et je ne dirais pas que seul le dollar américain entre en jeu. Selon moi, il faut tenir compte de plusieurs éléments. Par exemple, avec l'arrivée de la tempête tropicale Gustav dans le golfe, le dollar a, je crois, perdu de la valeur aujourd'hui, alors que les prix du pétrole ont augmenté de 2 $. L'équation ne s'applique donc pas aujourd'hui.
    Le dollar a maintenant repris de la vigueur.
    En effet, mais cette augmentation ne sera pas de 2 p. 100. En outre, l'analyse dépend du fait que l'on utilise le dollar américain ou le dollar canadien et de l'élément de comparaison.
    Monsieur Sprott, vous êtes convaincu que nous avons atteint un sommet et que nous avons amorcé une descente, ce qui pousse le prix du pétrole à la hausse. Vous avez toutefois également indiqué que le montant de 80 $ s'appliquait davantage aux nouveaux champs. Si je comprends bien, il est question ici des champs pétrolifères où l'on a qu'à creuser pour trouver du pétrole plutôt que de devoir forer dans les fonds marins jusqu'à sept milles de profondeur. Si cette théorie est exacte, cela ne pourra-t-il pas expliquer le fait que les prix soient si élevés, puisque la plupart de nos nouvelles exploitations se situent dans des régions comme la côte du golfe?
    J'aimerais poser cette question à M. Diwan en premier. Nous passerons ensuite à...
    Par « nouveau champ », on entend simplement un nouveau site qui entre en exploitation. Il ne s'agit pas nécessairement d'une exploitation côtière; il peut se situer au large. Et de toute évidence, le prix élevé, celui de 80 $, s'applique aux exploitations situées en mer où il a fallu creuser profondément et non aux champs qui se trouvent sur les côtes.
    Combien en coûterait-il de forer à une profondeur de sept milles dans le golfe du Mexique? Quelqu'un le sait-il?
    C'est environ 70 à 80 $.
    Je vais lire ici un extrait de Perspectives de l'économie mondiale, où on peut lire que, selon le FMI:
il ne semble guère possible d’affirmer que le regain d’intérêt des investisseurs pour le pétrole et les autres matières premières en tant que classes d’actifs ait influencé l’évolution des prix de ces produits, même si les facteurs purement financiers, notamment les changements d’humeur des marchés, peuvent influer à court terme sur les prix.
    Pourriez-vous commenter brièvement? Je commencerai par M. Sprott, pour continuer avec M. Diwan.
    Je suis entièrement d'accord avec cet énoncé. De toute évidence, à court terme, les marchés « papier » ont énormément d'influence et peuvent fixer le prix en fonction de certains points de données. Cependant, à long terme, c'est le jeu de l'offre et de la demande qui l'emportera.
    Il est toutefois certain qu'à court terme, c'est effectivement vrai, et la tendance peut se maintenir pour six à huit semaines.
    Monsieur Diwan?
    Oui, mais la tendance actuelle dure depuis plus longtemps, parce que les intervenants, de par leur taille même, ont mainmise sur le marché.
    Je reviens sur ce que M. Masters a indiqué plus tôt. Ces indices ont un impact énorme parce que l'on investit dans tous les biens et voit donc augmenter tous les chiffres simultanément.
    J'ai également posé cette question plus tôt, et j'aimerais l'avis de M. Sprott à ce sujet. Il me semble qu'une augmentation des prix au puits encourage de nouveaux développements; cela ne corrigerait pas le problème d'une certaine façon? Il me semble que deux éléments entrent en jeu ici: d'abord le point que je viens de soulever, puis le fait que les prix soient élevés nous encourage à nous tourner vers d'autres sources. Avons-nous raison de... ?
    Eh bien, oui, le fait que les prix soient élevés pousse les exploitants à déployer des efforts pour trouver davantage de pétrole. Malheureusement, de nos jours, si on veut obtenir des biens concrets, comme un morceau d'acier ou de cuivre — peu importe ce que c'est, tant que c'est réel —, on est confronté à une inflation exponentielle; ainsi, les coûts qu'il faut assumer pour trouver ces produits ont augmenté de façon effrénée. Le coût augmente probablement de 15 p. 100 par année, et ce, avant même que l'on ait creusé de nouveaux puits, en raison de l'inflation galopante. Même si nous aimons prétendre le contraire, l'inflation du coûts des biens réels est incroyable.
    On peut donc difficilement affirmer qu'à 80 ou 100 $, on peut trouver du pétrole en quantité. Je suis moi-même estomaqué qu'il en coûte, comme l'a affirmé M. Diwan, 80 $ sur un nouveau champ pétrolifère aujourd'hui. Il y a un an, ce prix était de 70 $. Aujourd'hui, il en coûte 80 $ pour trouver quoi que ce soit. Eh bien, nous savons qu'une partie du problème, c'est l'inflation. Les biens coûtent toujours plus cher. Ces développement ne sont pas donnés.
    C'est ce que j'ai à répondre à ce sujet.

  (1425)  

    Merci.
    M. Diwan, auriez-vous un dernier commentaire à formuler?
    Oui.
    Je crois que ce n'est qu'une partie du problème. Je crois que vous avez raison: nous assistons à une inflation des coûts, et la découverte de pétrole coûte très cher. Mais le problème principal est celui de l'accès. Les bassins des plus productifs du monde nous sont fermés. Les sociétés pétrolières ne sont pas autorisées à faire de prospection dans des pays comme le Mexique, la Russie, l'Arabie saoudite, l'Iran, l'Irak, le Koweït, les Émirats arabes unis, etc. Nous n'avons donc pas accès aux meilleurs bassins. On investit dans les quelques régions ouvertes, mais pas dans les bassins les plus prolifiques. Et c'est en raison de la concentration géographique des investissements que l'inflation augmente sur le plan des coûts.
    Merci.
    Merci, monsieur Van Kesteren.
    Madame Nash.
    Pour ce qui est du dollar, vous dites, monsieur Diwan, que le prix du pétrole a augmenté et que le dollar s'est déprécié. Ici, pourtant, notre dollar prend de la valeur, un phénomène qui semble nous diriger davantage vers une économie axée sur les biens que vers une économie à valeur ajoutée, ce qui en inquiète plus d'un.
    Monsieur Sprott, vous avez fait valoir que les prix sont élevés en raison de la faiblesse de l'offre. Le pétrole est une ressource non renouvelable. Les prix élevés profitent aux investisseurs privés, ce qui fausse la donne sur le plan de la production. On en vient à se tourner vers une exploitation extrêmement inefficace, notamment celle des sables bitumineux. Si les prix poursuivent leur escalade, il vaudrait mieux investir une partie des fonds dans des solutions plus durables. Selon moi, ce serait à l'avantage de la majorité.
    Madame Russell, j'aimerais revenir à votre argument sur les mesures de contrôle, que certains souhaiteraient appliquer pour freiner la spéculation sur le marché « papier ». J'aimerais savoir quel pouvoir nous avons, au Canada, de prendre des mesures contre la spéculation apparemment nuisible. En vertu de l'ALENA, dans quelle mesure pouvons-nous contrôler les prix? Quelle influence avons-nous à l'échelle internationale? Pouvons-nous mettre en place ces mesures ici, au Canada, ou sommes-nous à la merci d'autres pays lorsque vient le temps de réglementer l'investissement relatif aux biens qui nous sont indispensables?
    Tant que nous réglementons nos propres marchés financiers, nous avons la capacité d'imposer toutes les mesures de contrôle que nous voulons. L'ennui, c'est que les investisseurs demanderont pourquoi ils devraient continuer de faire des affaires au Canada s'ils peuvent aller ailleurs sans devoir se soumettre à la réglementation. Ils exerceront des pressions sur le gouvernement pour qu'il n'impose pas de mesures de contrôle et nous aurons de la difficulté à les appliquer.
    Si nous ne pouvons persuader d'autres pays qu'il est de notre intérêt collectif de réglementer nos divers marchés nationaux, nous avons un problème. Cela revient à dire que nous ne pouvons freiner les excès des spéculateurs. Nous serons donc obligés d'adopter une approche plus interventionniste pour endiguer les effets de la spéculation.
    Ma question s'adresse à tous les témoins: d'après vous, quelle politique publique notre comité devrait-il recommander, compte tenu des problèmes abordés cet après-midi? Si le temps le permet, j'aimerais entendre l'opinion de chacun d'entre vous.

  (1430)  

    Monsieur Masters.
    J'allais justement dire que même s'il semble qu'une partie du dossier ne relève pas de nous, car les mesures législatives d'autres pays entrent en jeu, il existe une arme qui s'est révélée efficace: la persuasion. Je crois que lorsque les politiciens démontrent de façon probante qu'un phénomène de spéculation amplifie les effets sur les marchés, ceux qui entendent ce message ont tendance à agir. D'après moi, si de nombreux citoyens connaissaient les agissements du fonds des enseignants de l'Ontario, ils ne manqueraient pas de poser des questions, même si ce fonds n'est qu'en partie responsable de l'escalade des prix de l'alimentation et de l'énergie au Canada.
    Merci.
    Monsieur Diwan.
    En fait, c'est une question d'action collective. On peut réglementer les activités des enseignants de l'Ontario si on le souhaite, mais cela n'aidera en rien les fonds de retraite de ces derniers, et ce sont les retraités qui seront pénalisés.
    Le problème ne peut vraiment se régler que par une action collective; les Américains affirment qu'ils ne devraient pas réglementer ces marchés parce que les Britanniques ne le font pas, alors que les Canadiens considèrent que ce n'est pas leur problème à cause des Américains. Il existe une tribune pour discuter de cette question, et c'est le G8. Le Canada et d'autres pays devraient tenir un débat sur la manière dont on peut réglementer de nouveau la bourse des marchandises, parce qu'il faut agir de concert. Il faut que les États-Unis, le Canada et la Russie s'entendent sur les mesures à prendre. Il existe une tribune pour cela. Il faut que l'on fasse preuve de leadership. Si l'on est chanceux et raisonnable, d'autres pays accepteront ce leadership.
    Merci.
    Monsieur Sprott, vous avez la parole.
    Eh bien, nous sommes impuissants.Nous ne pouvons rien faire au sujet du prix du pétrole dans le monde. Nous ne sommes qu'une infime partie de ce marché. C'est impossible, ce n'est pas au Canada que nous réglerons le problème.
    Je trouve extrêmement ironique que nous soyons le pays du monde qui profite le plus par habitant du prix élevé du pétrole. Le Canada ne compte que 35 millions d'habitants, alors que nous produirons 3,5 millions de barils de pétrole. C'est une corne d'abondance pour notre pays, et tout le monde en profite, que ce soit les gouvernements provinciaux et fédéral, par l'entremise des taxes, ou les entreprises qui découvrent le pétrole et planifient l'exploitation des sables bitumineux. C'est une chance incroyable pour notre pays, et non un problème.
    Je comprends que ce soit difficile pour le consommateur en raison de la hausse du prix de l'essence, mais ce prix augmenterait de toute façon. Si le gouvernement souhaite subventionner ce prix, à l'instar de nombreux autres pays, il est libre de le faire, mais il créera des inefficacités énormes sur le plan de la consommation.
    Nous sommes confrontés à un problème international. Oui, l'une des solutions consiste à nous tourner vers l'énergie durable. Cependant, le problème n'est pas national, mais bien mondial.
    Merci.
    Madame Russell, vous pouvez y aller très brièvement, s'il-vous-plaît.
    Il faut voir si l'on tire des leçons des bulles spéculatives du passé. Lorsque ces bulles s'amplifient, on prétend toujours que l'on ne peut rien faire pour contrôler le marché, que l'on ne peut mettre calmer cette folle d'activité. Une fois que la bulle a éclaté, tout le monde se désole et se demande pourquoi les responsables n'ont rien fait.
    On devra donc prendre une position peut-être impopulaire pour l'instant — à quelques exceptions près — en déclarant que l'on voit plus loin que la frénésie momentanée du marché et en prenant des mesures favorables à long terme plutôt que de simplement réagir aux vicissitudes des prix actuels.
    Merci.
    Passons maintenant à M. Eyking.
    Merci, monsieur le président.
    Cela a été une journée très instructive sur la façon dont nous produisons le pétrole dans le monde et ce qu'il nous en coûte.
    Ma question s'adresse à M. Sprott.
    Si l'on se fie à votre résumé, les deux tiers des pays producteurs de pétrole affichent une baisse de la production. Vous ne cessez de répéter que c'est la réalité, qu'il y aura de moins en moins de pétrole. On a également fait allusion au fait que la demande asiatique est loin de ralentir. Dans ces circonstances, la solution viable, pour toute personne ou tout pays qui dépend beaucoup du pétrole, ne serait-elle pas de commencer à réduire sa consommation?
    Ma question est la suivante: un gouvernement responsable ne devrait-il pas faire preuve de leadership et décourager la consommation de pétrole, en plus de récompenser ceux qui se tournent vers des sources d'énergie alternatives?

  (1435)  

    C'est exactement ce que je viens de proposer en réponse à la question de Mme Nash. Oui, il existe d'autres options durables que chaque gouvernement dans le monde devrait évidemment considérer. Et franchement, la situation n'est pas pire au Canada que dans la plupart des autres pays. Mais c'est vrai, j'encouragerais... Je ne suis pas un grand défenseur des biocarburants, mais de nos jours, nous devrions inciter les gens à se tourner vers l'énergie solaire ou géothermique, ou encore toute autre source d'énergie durable. Mais ce serait vraiment pour régler les problèmes du monde car, heureusement, je ne pense pas que la situation chez nous aujourd'hui soit critique.
    Mais nous pourrions montrer la voie à beaucoup de pays occidentaux.
    Absolument.
    Et le Danemark, entre autres pays européens, a déjà fait preuve de leadership à cet égard.
    C'est tout à fait exact. Beaucoup de pays se rendent compte du problème — particulièrement ceux qui n'ont jamais été producteurs de pétrole. Ils comprennent les enjeux mieux que quiconque. Ce n'est peut-être pas notre cas, parce que nous avons toujours pu répondre à la demande intérieure et nous sommes même sur-approvisionnés en pétrole.
    Mais c'est vrai que le problème est bien réel ailleurs et que tout ce que le gouvernement pourrait faire pour exploiter d'autres sources d'énergie — dans la mesure où celles-ci ne consomment pas plus qu'elles ne produisent — serait bienvenu.
    Ce serait un peu comme pour le virage vert. Cela irait dans le même sens.
    Une voix: La taxe sur le carbone.
    Oh, je vois, oui.
    Mais vous savez, il y a une chose que je proposerais. Par exemple, le gouvernement britannique a déclaré qu'il allait faire payer une taxe supplémentaire aux compagnies pétrolières, et tout ce que je pouvais dire c'était: « S'il vous plaît ». C'est simplement moins d'argent... Et ils ont un sérieux problème au Royaume-Uni actuellement; leur production est en chute libre. Très bien, vous voulez augmenter le fardeau fiscal des particuliers ou des compagnies pétrolières. Mais à cause de cela, ces gens-là auront moins d'argent à dépenser...
    Pour la production.
    Est-ce que les autres témoins souhaitent intervenir? C'est un fait que la production va diminuer dans le monde et que si nous voulons continuer à consommer beaucoup d'énergie, nous allons devoir trouver des sources d'énergie alternatives. Est-ce une certitude?
    Oui.
    Dan, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Oui, très brièvement.
    Vous avez deux minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci aussi à vous, monsieur Eyking.
    J'ai une petite question à vous poser. Vous avez tous parlé du marché à terme. Mais qu'arrive-t-il lorsque la demande des investisseurs dépasse celle des consommateurs?
    Est-ce que l'un d'entre vous peut me donner la raison véritable pour laquelle par le passé, le marché à terme des marchandises a empêché la venue de joueurs non commerciaux? Quelles étaient les véritables raisons pour lesquelles nous disions qu'il ne fallait pas de spéculateurs sur ce marché en particulier? Nous comprenons combien cela peut être nuisible, mais j'aimerais que l'un d'entre vous m'explique pourquoi il y a eu ces interdictions.
    Madame Russell, je peux commencer par vous, si vous le voulez bien.
    Bien sûr. C'est la situation aux États-Unis que je connais le mieux. Dans les années 30, on s'inquiétait... On a vu certaines personnes prendre des participations sur le marché du blé, entre autres, et l'on craignait que les prix ne deviennent incontrôlables. Ce n'est pas seulement que les prix avaient fortement augmenté, c'est la volatilité qui préoccupait, le fait que l'on pouvait exercer des pressions à la hausse et à la baisse sur les prix.
    Lorsque les prix chutaient, les producteurs de blé étaient mécontents, et ainsi de suite. Cela avait pour effet de créer une demande pour des limites de position chez des entités qui n'avaient aucune raison commerciale d'être sur le marché; c'est-à-dire qu'elles ne cultivaient pas du blé et qu'elles ne s'en servaient pas non plus pour faire d'autres produits. Par conséquent, il aurait dû y avoir des limites à leur participation sur le marché. Cela n'élimine pas la spéculation, mais cela permet de la contenir de manière raisonnable.
    M. Diwan ou M. Masters.
    La limite de position s'applique toujours, d'ailleurs.
    Le problème, comme l'a si bien décrit M. Masters, c'est que vous pouvez vous lancer sur le marché et avoir une limite de position, mais si vous empruntez des moyens détournés et prenez un fonds indiciel, vous n'avez plus de limite de position. Nous avons créé une échappatoire fiscale pour les entreprises. Nous fermons la porte, mais nous laissons la fenêtre ouverte. Cela fait quelque temps déjà que nous voulons que la fenêtre soit aussi fermée. Nous avons ouvert la fenêtre suite aux changements réglementaires survenus en 2000, qui ont permis à beaucoup de ces joueurs de faire exploser les limites de position qu'avaient fixé les organismes de réglementation. C'est un vrai problème.
    En outre, il faut se rappeler que les joueurs non commerciaux sont sur le marché pour une raison: ils créent des liquidités. Je me souviens du marché du pétrole au début et dans le milieu des années 90. Le marché des liquidités était très petit, mais il y avait de très gros joueurs commerciaux qui utilisaient les cargaisons et leur position pour agir sur les prix. On a souvent vu des manipulations du prix de la marque, ce que nous avions l'habitude d'appeler des « pressions sur la marque », etc. Ces joueurs ont permis de générer des liquidités, et la tenue des marchés de liquidités est bonne. Reste à savoir si elle ne l'est pas trop, parfois.

  (1440)  

    Merci.
    Monsieur Masters, brièvement.
    Je pense que toute la différence est là: on veut que la spéculation soit suffisante, mais pas illimitée. Il faut assez de spéculation pour huiler les mécanismes qui permettront la création de liquidités dont a parlé Roger, mais il ne faut pas trop de spéculation car sinon, on risque de détruire le processus de libre détermination des prix. Et si cela se produit, le marché des contrats à terme n'a aucune raison d'être.
    Je vous remercie.
    C'est maintenant au tour de M. Arthur.

[Français]

    Quelle journée absolument fascinante! On a appris quantité de choses et défini des concepts grâce à des invités qui se sont comportés ce matin et cet après-midi en excellents professeurs et en « coaches » remarquables.
    Ce qu'on vient d'entendre au sujet des spéculateurs pourrait être très efficace. Il y a quelque chose de moralement répugnant à l'idée que des spéculateurs puissent fixer le prix des denrées essentielles. On n'accepterait pas que des spéculateurs contrôlent ou influencent le prix des vaccins ou des antibiotiques. Ce sont des choses qui nous répugnent.
    Par contre, M. Sprott nous a jeté un concept au visage il y a quelques instants, quand il nous a dit que le Canada était plus riche grâce au prix du pétrole actuel, qui est soutenu par une certaine spéculation des marchés internationaux. Cela me fait réaliser qu'il y a deux bouts à la lorgnette. On peut regarder le problème du bout du consommateur, qui dit que les choses sont toujours trop chères, ou de celui du producteur, qui dit que les choses ne sont jamais assez chères.
    Si on croit que le Canada peut devenir un géant de l'énergie, il faut inclure le pétrole, mais également l'électricité. Au Québec, selon une mentalité qui est ancrée profondément, l'électricité doit coûter le moins cher possible afin que les citoyens en profitent au maximum. Le résultat est qu'il y en a de moins en moins à exporter parce qu'on en gaspille de plus en plus.
    Si on se dit que le pétrole est toujours trop cher pour nous, cela veut aussi dire que les provinces canadiennes qui ont du pétrole auront toujours de moins en moins de revenus parce qu'on empêchera le prix de monter et, fatalement, la richesse collective va en être affectée.

[Traduction]

    Madame Russell, vous nous avez dit que cette réglementation contre les petits spéculateurs avait été assouplie. Pourriez-vous nous préciser quel serait maintenant le prix du pétrole si la réglementation n'avait pas été modifiée?
    J'ai lu quelque part que ce serait entre 80 et 90 $, je pense.
    Très bien. Est-ce qu'on exploiterait les sables bitumineux à ce prix?
    Non.
    Non.
    Merci, monsieur le président.

[Français]

    C'est tout?
    C'est tout.

[Traduction]

    C'est encore à vous, monsieur McTeague.
    Monsieur Sprott, j'ai quelques questions à vous poser.
    Vous avez soulevé plusieurs points très intéressants. Je vois qu'à la page 11 de votre exposé vous dites que 60 des 98 pays producteurs ont atteint un sommet. Je remarque que cela n'inclut pas l'Arabie saoudite. Il me semble que c'est une omission de taille. J'imagine que vous me direz que vous ne pouviez pas faire autrement étant donné que ce pays ne donne pas d'informations.
    Je me demandais si vous aviez quelque chose à dire au comité sur le fait que le Canada en fait autant, en ce sens qu'il ne fournit des informations que de manière sporadique, chaque mois ou chaque année.
    Ce marché évolue d'un jour à l'autre. Je sais que vous le savez, parce que vous vous occupez de placer de l'argent pour vos clients. Comment se fait-il que vous déclariez que le Canada est un pays merveilleux, qui possède beaucoup de pétrole, alors que vous n'avez aucune idée de la quantité de pétrole que nous avons une journée donnée?
    Combien en avons-nous ou combien en produisons-nous?
    Combien nous produisons, combien nous avons, combien nous possédons en réserve, en stock, un jour donné ou...
    Je ne sais pas pour chaque jour, mais je suis pratiquement certain que nous savons exactement ce que produit le pays chaque mois, et ces données sont disponibles.
    Oui, mais ces données ne sont d'aucune utilité si les transactions se font sur une base quotidienne. En fait, au moment où on se parle, il y a probablement des transactions en cours, qui se font tout à fait librement, à Winnipeg, à Londres et partout ailleurs dans le monde. Je trouve assez fascinant que vous ayez déclaré — car c'est important de le mentionner —, que le Canada dispose en fait de réserves considérables de pétrole, et que nous devrions nous en féliciter.
    Dites-moi de quoi devraient se réjouir les consommateurs canadiens lorsque les prix du pétrole augmentent et que notre devise ne suit pas la même courbe ascendante, comme cela a été le cas il y a deux ans? Cela a pris du temps avant de bouger.

  (1445)  

    Il ne fait aucun doute que lorsque les prix augmentent — et personnellement, je pense que le prix est juste —, si on fait une analyse à l'échelle planétaire, on voit que tout le monde en souffre, y compris les consommateurs. Quant à savoir si, en tant que pays, nous en tirons avantage, je vous répondrai que oui, et plus que quiconque. Je le crois sincèrement. Les recettes gouvernementales augmentent, celles des provinces aussi. C'est une énorme source de revenus.
    J'essaie simplement de vous donner mon... Lorsque les prix montent, il y a toujours des gagnants et des perdants.
    Quelqu'un a dit qu'on avait atteint un sommet; j'ai entendu les différents points de vue au sujet de l'offre et de la disponibilité dans le monde, ainsi que des nouveaux endroits plus difficiles d'accès pour de nouvelles sources d'approvisionnement. J'ai aussi entendu dire qu'il ne suffisait pas de creuser un trou pour avoir du pétrole, et que nous avions toutes sortes de solutions de rechange.
    Mais il était intéressant de voir combien les représentants de l'industrie pétrolière américaine, lorsqu'ils ont comparu devant le Congrès, étaient clairs sur ce que devait être pour eux le niveau des prix. Dans leurs rêves les plus fous, je doute qu'ils aient pu imaginer un baril de pétrole à 117 ou 118 $, et encore moins à 147 $.
    Ce que nous essayons de savoir, c'est si vous croyez qu'au-delà de la question de la rareté, le marché se situe autour de 90 $ le baril ou plutôt autour de 115 ou 117 $. Et cette différence de 27 ou 28 ¢ le litre pour chaque consommateur a un effet dévastateur sur la rentabilité dans ce pays, sans parler des recettes gouvernementales; la TPS ajoutée au prix du carburant majoré a rapporté au gouvernement 1,7 milliard de dollars nets cette année seulement, grâce à l'essence et au diesel.
    D'accord. Eh bien, imaginons un instant que le baril coûte 80 $. Le gouvernement fédéral doit obtenir quelque chose, tout comme le gouvernement provincial — il y a des taxes et des redevances qui s'appliquent. Alors à quel prix allez-vous le vendre s'il en coûte réellement 80 $ pour le produire? Et je ne dis pas assurément... Je pense que le pétrole tiré des sables bitumineux coûte 80 $. Mais il y a toutes sortes de niveaux de taxation. Une fois que l'on en a terminé avec tout cela, combien en coûte-t-il pour le raffinage et l'approvisionnement des stations services?
    Peut-être puis-je vous poser cette question. Vous tous qui êtes ici, croyez-vous que nous passons trop de temps, nous les représentants de la population, et peut-être aussi les médias, à scruter le prix du brut et à ne pas tenir assez compte du cours sur les marchés d'une journée à l'autre?
    Je pense que Jane Savage, de la Canadian Independent Petroleum Marketers Association, a souligné le fait que nous ne parlions pas assez de l'autre marché — celui de l'essence sans plomb.
    Je sais, madame Russell, que vous vouliez intervenir là-dessus, et je ne veux pas vous interrompre. Mais ne sommes-nous pas en train de mettre trop l'emphase sur un bien, alors que le prix d'autres produits de base semble atteindre des sommets?
    Puis-je répondre à la question précédente?
    Oui, bien sûr.
    Je crois que vous avez posé une question au sujet de la distribution. Pour savoir qui en profite et qui est pénalisé, il ne suffit pas d'additionner de gros chiffres et de voir quel est le plus élevé. La société canadienne est composée de toutes sortes de groupes différents, incluant les consommateurs et les gens qui travaillent pour des entreprises tributaires du pétrole, comme c'est le cas de toutes sortes d'activités économiques qui peuvent être influencées par le niveau du dollar, lequel est lui aussi touché par l'évolution des prix du brut. Tous ces effets directs ou indirects affectent les gens de différentes manières; il serait donc simpliste de dire que les Canadiens gagnent ou perdent, sans avoir préalablement fait un travail de fond pour déterminer qui gagne et qui perd, et ce ne sont pas toujours les mêmes.
    Qui d'autre souhaite intervenir?
    Monsieur Sprott.
    J'aimerais beaucoup répondre à la question de M. McTeague qui est de savoir quoi faire.
    La première chose qui m'est venue à l'esprit, c'est la Loi Glass-Steagall. Cette loi a été adoptée dans les années 30, alors que les banquiers et les courtiers avaient l'habitude de travailler ensemble; puis ils se sont rendu compte qu'ils ne pouvaient pas continuer ainsi parce qu'ils allaient précipiter les gens vers la faillite. Cela a été abandonné il y a environ huit ans, et maintenant nous nous retrouvons dans la même situation, c'est-à-dire que les banques et les courtiers travaillent de concert, et ce sont les mêmes problèmes qui reviennent. Nous nous retrouvons avec ce morceau de papier qui ne vaut rien; nous n'avons pas appris de nos erreurs.
    Voilà donc ce que je répondrais à votre question.
    Monsieur Sprott, vous avez fait remarquer que tout cela ne se faisait que sur papier, et je me demande encore si nous parlons de réserves physiques? Lorsque vous achetez du brut sur le marché à terme, n'achetez-vous pas pour une date déterminée à partir de laquelle vous disposez de 23 jours pour prendre possession ou livraison de la marchandise?
    Je m'inquiète que des gens dans les banques et les fonds de pension — comme le Régime de retraite des enseignantes et des enseignants de l'Ontario — se mettent à transporter des barils de brut dans le coffre de leur BMW. Voilà le genre de parité à laquelle nous sommes arrivés. Mais la réalité, c'est que pour beaucoup, c'est un marché sérieux. C'est une question d'offre, de produit, et oui, les transactions se font sur papier, mais tôt ou tard, il faut bien que quelqu'un achète le produit d'une manière ou d'une autre.
    Et si MM. Masters et Diwan ont raison, tant qu'il y aura beaucoup de gens dans l'industrie financière qui chercheront un moyen de protéger leurs mises et de se refaire après avoir essuyé des pertes, comme dans le secteur des prêts hypothécaires à risque, ne risque-t-on pas de se retrouver avec cette éternelle prophétie auto-accomplie selon laquelle la hausse des prix continuera de miner l'économie et d'empêcher d'autres industries d'investir dans les nouvelles technologies?

  (1450)  

    Monsieur Sprott.
    C'est compliqué.
    Tout d'abord, 99,9 p. 100 de tous les contrats ne sont jamais exécutés. Ce ne sont que des écritures; il n'y a donc pas de livraison. Voilà pourquoi il y a un marché à terme et un marché réel.
    Et selon les périodes, il peut y avoir différentes forces en présence sur le marché à terme. J'ai déjà dit que plusieurs... Certains croient que le prix est monté à 140 $ parce que quelqu'un était en train de couvrir un découvert et il s'est fait prendre. C'est ce qu'on entend un peu partout ces temps-ci, que ce groupe a été pris de court et qu'il a laissé jouer la surenchère sur les prix.
    Mais selon vous, nous ne devrions pas discuter du prix du brut. Je crois que vous parlez vraiment du prix de l'essence, et c'est totalement différent.
    Merci.
    Je vous remercie, monsieur McTeague.
    En tant que président, c'est moi qui vais conclure.
    Nous avons commencé par le prix de l'essence, mais le déterminant premier du prix de l'essence, c'est le cours du brut. C'est intéressant. L'an dernier, on se concentrait exclusivement sur les marges de gros, mais celles-ci ont diminué sensiblement au cours de la dernière année; maintenant, on semble s'intéresser beaucoup plus aux cours du brut.
    Monsieur Sprott, vous avez décrit de manière fort éloquente la diminution de la production conventionnelle de pétrole brut dans le monde. Vous avez également expliqué combien il est difficile d'accéder aux réserves de pétrole que nous avons maintenant, comme les sables bitumineux. Il y a une baisse de l'offre conventionnelle, et l'exploitation des sables bitumineux et d'autres réserves représente tout un défi. Même les gisements que nous découvrons au Venezuela sont aussi difficiles à exploiter que les sables bitumineux, puisqu'il faut les séparer d'autres ressources naturelles puis procéder au raffinage. Les coûts de raffinage sont nettement plus élevés.
    Il y a aussi un accroissement de la demande. Nous avons des chiffres, pour des pays comme la Chine, qui remontent jusqu'aux années 80. À cette époque, les Chinois consommaient environ deux millions de barils quotidiennement, et maintenant ils dépassent les sept millions de barils par jour. Il y a donc clairement un problème d'offre et de demande. La question est de savoir, en tant que législateurs, comment faire la différence entre ce qui est dû à un croisement naturel de l'offre et de la demande et ce qui est attribuable à la spéculation.
    C'est un drôle de mot, pas vrai? M. Diwan dit que nous ne devrions pas utiliser le terme « spéculateurs », mais plutôt parler « d'investisseurs ».
    Mais dans quelles proportions les fluctuations de l'offre et de la demande sont-elles dues à des croisements naturels, et dans quelle mesure ces fluctuations sont-elles attribuables à l'arrivée de ce que nous devrions appeler « les nouveaux investisseurs », disons depuis l'an 2000? Est-ce que quelqu'un peut le dire avec certitude? Le prix est monté jusqu'à 137 $ puis est redescendu autour de 117 $. Faudrait-il qu'il soit de 100 $, de 98 ou de 70 $?
    J'aimerais bien pouvoir vous répondre là-dessus.
    Selon la thèse du pic pétrolier, qui n'est pas la mienne, mais celle défendue par les pétrophysiciens qui étudient ces choses, dans 20 ans, nous devrions produire 65 millions de barils dans le monde, pas 85 millions de barils.
    Eh bien, que croyez-vous que sera le prix? Ce ne sera pas 120 $ le baril. Ce que je veux dire, c'est que c'est une question très importante à laquelle il faut réfléchir. Si vous croyez dans la thèse du pic pétrolier, vous n'avez encore rien vu des problèmes qui se profilent. Et cela ne touchera pas uniquement les prix du pétrole, mais bouleversera notre mode de vie. Si vous n'avez pas de carburant, maintenant, comment irez-vous travailler?
    J'invite les gens à se pencher sur la question. Nous avons cette possibilité. Croyez-vous à cette théorie ou pas? Si oui, attendez-vous à faire face à un gros problème. Moi, j'y crois depuis plusieurs années, et chaque fois que le prix du pétrole monte, je suis la dernière personne au monde à s'en étonner.
    Monsieur Diwan, souhaitez-vous faire un commentaire?
    Bien sûr.
    Le baril était à 140 $, et la demande aux États-Unis avait baissé de 800 000 barils par jour pour les six premiers mois de l'année. Les gens réagissent. Évidemment, c'est douloureux, mais d'un autre côté, on devient plus efficace.
    L'idée selon laquelle nous consommons 85 millions de barils par jour dans le monde de manière efficace est une blague. Je vis aux États-Unis. Je ne suis pas Américain, mais je vois comment les gens fonctionnent, et le gaspillage est incroyable. Pourquoi a-t-on besoin d'un véhicule de 12 places, pesant cinq tonnes, quand on est seul à le prendre pour se rendre au travail? Il est possible d'être plus efficace. Ce n'est pas la créativité qui manque. La hausse des prix aura une incidence négative sur les cours du pétrole. C'est ce que nous entrevoyons. Il est évident que nous pouvons être plus efficaces. Après tout, lorsque vous allumez votre voiture, seulement 15 p. 100 de l'essence sert à faire fonctionner le moteur, le reste est utilisé pour le chauffage, la climatisation, le lecteur de CD ou de DVD et tous les autres gadgets que vous avez dans l'automobile. On peut donc beaucoup améliorer la technologie, mais il faut des signaux de prix. La hausse extrême des prix a déclenché des signaux et incite les gens à développer de nouvelles technologies, ce qui est une bonne chose.
    Quant à votre question de savoir quel devrait être le prix réel, je vous répondrais que si j'en avais la moindre idée, je serais un homme riche aujourd'hui. Je conseillerais tous mes clients et ils gagneraient beaucoup d'argent. C'est un puzzle d'un million de pièces. On ne peut pas enlever une pièce et se demander ce qui s'est passé. Tout bouge; nous sommes en présence d'un marché très dynamique.

  (1455)  

    À propos de ma dernière question, monsieur Diwan, vous avez dit un peu plus tôt que c'est une discussion qui devrait se tenir entre les membres du G8. J'aimerais avoir l'opinion de M. Masters là-dessus également.
    Dans l'article du Washington Post que notre collègue Dan McTeague a distribué, on dit que la réglementation applicable aux échanges de marchandises est en train de changer. En outre, on permet les transactions visant des produits énergétiques sur des plates-formes électroniques privées. Est-ce que c'est là-dessus que le G8, ou le Canada et les États-Unis, doivent se pencher? Y a-t-il d'autres questions précises que les États-Unis, le Canada et d'autres membres du G8 doivent examiner?
    Il y a toute la question entourant la réglementation applicable aux produits de base, mais vous avez raison, cela concerne ces échanges. Qui autorisez-vous, comment fixez-vous les limites de position, de quelle façon retracez-vous les transactions financières et les classez-vous? Combien d'investisseurs voulez-vous et quel niveau de spéculation êtes-vous prêt à accepter? Ces questions sont importantes et actuellement, nous avons un marché essentiellement déréglementé. Notre capacité à comprendre ces marchés est moindre parce qu'il y a moins de gens qui les surveillent. Nous disposons de moins de données. C'est très instable. Nous n'avons pas de données nous permettant de fournir des réponses claires. Nous blâmons toujours l'OPEP pour ne pas nous communiquer les informations nécessaires; du coup, nous ignorons ce qui se passe, alors que nous sommes sur le marché le plus sophistiqué qui soit, mais nous ne pouvons pas obtenir les données. Celles qui sont diffusées chaque semaine sont dérisoires.
    C'est donc un dossier dont doit se saisir le G8. Les États-Unis doivent en assumer le leadership et, jusqu'à présent, ils ont refusé de le faire. C'est vraiment une question sur laquelle il faut se pencher.
    Merci.
    Monsieur Masters, voulez-vous ajouter brièvement quelque chose?
    Je suis d'accord avec Roger. Par ailleurs, je pense qu'il faut rétablir des limites de position solides. Cela a bien fonctionné aux États-Unis pendant 70 ans. Il n'y a pas eu de conséquences imprévues. Les limites de position sont fortes quand la spéculation est excessive. Cela permet au marché de fonctionner de manière plus équilibrée face à la spéculation et aux producteurs et consommateurs de brut. Ça rend le marché meilleur. La détermination des prix se fait également mieux. Par conséquent, toute solution doit tenir compte des limites de position.
    Je tiens à vous remercier tous d'être venus aujourd'hui. Merci également à Mme Russell et à M. Sprott d'être avec nous en studio, comme ils disent.
    Monsieur Diwan, je vous remercie d'avoir été avec nous par vidéoconférence depuis New York.
    Monsieur Masters, je crois comprendre que vous êtes aux îles Vierges américaines. Merci aussi d'avoir assisté à cette séance par téléconférence.
    Vos témoignages ont été fort appréciés. Si vous avez quelque chose d'autre sur la question qui pourrait être utile au Comité, n'hésitez pas à nous en faire part. Quant aux documents que vous nous avez fournis non traduits, nous les ferons traduire pour les membres du Comité.
    Chers collègues, je vous remercie de votre présence et de vos excellentes questions.
    La séance est levée.