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STER Rapport du Comité

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CHAPITRE SIX :
LOI SUR LA PREUVE AU CANADA

CONTEXTE

L’article 43 de la Loi antiterroriste a remplacé par les articles 36.1 à 38.16 les articles 37 et 38 de la Loi sur la preuve au Canada, et l’article 44 a ajouté une annexe à la Loi, figurant à l’annexe 2 de la Loi antiterroriste.

Les articles 37 à 37.3 de la Loi sur la preuve au Canada autorisent le gouvernement du Canada à attester verbalement ou par écrit son opposition (pour des raisons d’intérêt public déterminées) à la divulgation de renseignements auprès d’un tribunal, d’un organisme ou d’une personne ayant le pouvoir de contraindre à leur production. La cour supérieure qui instruit l’opposition à la production de renseignements ou, dans d’autres cas, la Cour fédérale, détermine si l’opposition doit être retenue en tout, en partie ou pas du tout. Ces dispositions établissent les droits d’appel à une cour d’appel provinciale ou à la Cour d’appel fédérale, et à la Cour suprême du Canada.

Les articles 38 à 38.12 de la Loi disposent que tout participant qui, dans le cadre d’une instance, est tenu de divulguer ou prévoit divulguer ou faire divulguer des renseignements sensibles relatifs aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales, doit aviser le procureur général du Canada de la possibilité de divulgation. Le procureur général du Canada peut, en tout temps, autoriser la divulgation d’une partie ou de l’ensemble de ces renseignements. Il peut aussi en tout temps présenter une demande à la Cour fédérale relativement à la divulgation de renseignements pour lesquels un avis a été donné. Le juge de la Cour fédérale qui entend la demande peut autoriser la divulgation des renseignements, sauf s’il conclut que cela serait préjudiciable aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales. Il est prévu que des appels peuvent être interjetés à la Cour d’appel fédérale ou à la Cour suprême du Canada.

Le pouvoir du procureur général du Canada, de délivrer un certificat relativement à des renseignements sensibles, est prévu aux articles 38.13 à 38.131 de la Loi sur preuve au Canada. Lorsqu’une décision ou une ordonnance pouvant aboutir à la divulgation de renseignements sensibles relatifs à des relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales a été rendue, le procureur général du Canada peut délivrer un certificat interdisant une telle divulgation. Le certificat doit être publié dans la Gazette du Canada, reste en vigueur pendant quinze ans (sauf s’il est renouvelé) et peut être examiné par un juge de la Cour d’appel fédérale par suite d’une demande d’une partie à l’instance dans le cadre de laquelle il a été délivré. Le juge peut confirmer, modifier ou annuler le certificat, et sa décision est sans appel. À la connaissance du Sous-comité, aucun de ces certificats n’a été délivré.

En vertu de l’article 38.15 de la Loi, le procureur général du Canada peut délivrer un fiat et le faire signifier au poursuivant dans le cadre d’une poursuite engagée par le procureur général d’une province lorsque des renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables peuvent être divulgués. Le fiat a pour effet d’établir la compétence du procureur général du Canada à l’égard de la poursuite qui y est mentionnée et des procédures qui y sont liées. Aucune disposition ne traite du contrôle judiciaire ou de la publication d’un tel fiat. De même, il n’y a eu, à la connaissance du Sous-comité, aucun recours à cette disposition.

SUJETS DE PRÉOCCUPATION

Durée d’un certificat du procureur général

Les dispositions de la Loi sur la preuve au Canada qui, aux articles 38.13 et 38.131, traitent de la délivrance d’un certificat par le procureur général du Canada, suscitent des préoccupations particulières chez certains auteurs de mémoires examinés par le Sous-comité. Bon nombre des autres modifications à la Loi sur la preuve au Canada contenues dans la Loi antiterroriste avaient des précédents dans celle-ci ainsi que d’autres textes de loi, mais l’autorisation de délivrer des certificats semble sans précédent et constituer une nouveauté dans le droit canadien. Les certificats du procureur général du Canada semblent donner au gouvernement une carte maîtresse préemptive qu’il peut jouer s’il n’est pas satisfait du résultat d’un procédés judiciaires ou juridiques, ou même en l’absence ou à l’avance de tels procédés. Une utilisation possible et particulièrement remarquable de tels certificats a été portée à la connaissance du Sous-comité, dans les mémoires de la commissaire à la protection de la vie privée et du commissaire à l’information relativement aux enquêtes menées par leurs bureaux respectifs, à la suite de plaintes.

Le Sous-comité admet que, dans des circonstances exceptionnelles, il peut s’avérer nécessaire de recourir au certificat afin de protéger des renseignements vraiment sensibles qui seraient plus préjudiciables s’ils étaient divulgués que s’ils ne l’étaient pas. Bien que le processus des certificats du procureur général semble sans précédent au Canada, le fait qu’il n’ait pas été utilisé depuis sa mise en place montre clairement qu’on fera preuve de retenue avant d’y avoir recours. Toutefois, il ne s’ensuit pas que le Sous-comité est entièrement satisfait du processus dans sa forme actuelle. On peut et on doit améliorer le degré de transparence et de responsabilisation relativement à ces certificats.

Comme il est mentionné plus haut dans le présent chapitre, le paragraphe 38.13(9) de la Loi sur la preuve au Canada énonce qu’un certificat expire à la fin d’une période de 15 ans à compter de la date de sa délivrance et peut être délivré de nouveau. Lors des travaux du prédécesseur du Sous-comité, la commissaire à la protection de la vie privée, dans son mémoire, et Alan Leadbeater, du Bureau du commissaire à l’information, dans son témoignage, ont exprimé leur point de vue sur cette question. Les deux ont proposé que le certificat en question expire cinq ans après sa délivrance.

Le Sous-comité souscrit aux arguments selon lesquels un délai de 15 ans est trop long pour le maintien en vigueur du certificat. Toutefois, il convient de noter que, dans la première version de lecture de la Loi antiterroriste, on ne fixait aucune limite à la période pendant laquelle ces certificats demeureraient en vigueur après leur délivrance. Le Sous-comité croit qu’une période de 15 ans est trop longue, mais il croit également qu’une période de cinq ans serait trop courte. Les renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables à l’égard desquels ces certificats doivent s’appliquer doivent, vraisemblablement, être protégés pendant une période plutôt longue que courte. Compte tenu de ce facteur, le Sous-comité conclut qu’une période de 10 ans est plus appropriée pour le maintien en vigueur d’un certificat après sa délivrance.

RECOMMANDATION 35

Le Sous-comité recommande que le paragraphe 38.13(9) de la Loi sur la preuve au Canada soit modifié de manière qu’un certificat expire 10 ans après sa délivrance.

Demande d’autorisation d’appel

L’article 38.131 de la Loi sur la preuve au Canada autorise une partie à une instance dans le cadre de laquelle un certificat a été délivré à demander à la Cour d’appel fédérale de rendre une ordonnance modifiant ou annulant le certificat en question. Un seul juge de ce tribunal étudie la demande. En vertu du paragraphe 38.131(11), la décision du juge de la Cour d’appel fédérale est définitive et non susceptible d’appel ni de révision judiciaire. Il convient de noter que la version initiale de la Loi antiterroriste ne prévoyait même pas cet examen limité d’un certificat délivré par le procureur général du Canada.

Cette question, entre autres, a été soulevée par la commissaire à la protection de la vie privée dans son mémoire. Elle a recommandé qu’on envisage d’autoriser un appel de l’examen judiciaire des certificats afin d’intégrer un plus grand nombre de freins et contrepoids dans le processus. Comme solution de rechange, elle a proposé que l’examen judiciaire lui-même soit effectué par un
comité formé de trois juges de la Cour d’appel fédérale. Le Sous-comité préfère la première de ces recommandations, soit d’autoriser un appel de l’examen judiciaire initial.

Le Sous-comité croit qu’en raison de l’impact extraordinaire de la délivrance d’un certificat, il est essentiel de concrétiser rapidement et efficacement le processus initial d’examen judiciaire. Bien qu’il soit inhabituel pour un seul juge de la Cour d’appel fédérale de présider à des instances de cet ordre (c’est normalement le fait d’un juge de la Cour fédérale qui siège seul), le Sous-comité ne croit pas qu’il s’agisse de l’élément à modifier pour assurer un contrôle plus étroit du processus des certificats. Au lieu de cela, on devrait permettre d’en appeler à la Cour suprême du Canada de la décision du juge de la Cour d’appel fédérale. Une disposition devrait permettre à une partie à l’examen judiciaire d’un certificat, qui n’est pas satisfaite du résultat obtenu, de demander l’autorisation d’en appeler à la Cour suprême du Canada quant au bien-fondé de la décision initiale. Parce qu’il est essentiel de donner suite rapidement à l’appel de la décision initiale, le Sous-comité croit qu’un tel appel d’une décision d’un juge de la Cour d’appel fédérale devrait être entendu par un banc réduit de trois juges de la Cour suprême du Canada. La Cour a déjà l’expérience de tels bancs de trois juges formés pour étudier les demandes d’autorisation d’en appeler de décisions de tribunaux inférieurs.

RECOMMENDATION 36

Le Sous-comité recommande que le paragraphe 38.131(11) de la Loi sur la preuve au Canada soit abrogé et qu’on établisse un droit de demander à la Cour suprême du Canada l’autorisation d’en appeler de la décision d’un juge de la Cour d’appel fédérale, qui a procédé à l’examen judiciaire d’un certificat délivré par le procureur général du Canada. L’appel en question devrait être étudié par un banc réduit de trois juges de la Cour suprême.

Rapports annuels sur l’utilisation des certificats et des fiats

En vertu du paragraphe 38.13(7) de la Loi sur la preuve au Canada, le procureur général du Canada doit faire publier un certificat dès sa délivrance dans la Gazette du Canada. Cette disposition ne faisait pas partie de la première version de lecture de la Loi antiterroriste. On ne trouve pas d’exigences semblables de publication en ce qui concerne les fiats, à l’article 38.15. Il est probable que les législateurs, ayant inséré cette disposition lorsque le texte était à l’étude au sein d’un comité de la Chambre des communes, aient envisagé la publication dans la Gazette du Canada comme moyen de rendre visible le
processus des certificats aux yeux des personnes n’y prenant pas part directement. Mais la réalité est que très peu de Canadiens lisent régulièrement la Gazette du Canada.

Il y a un meilleur moyen d’augmenter la visibilité du processus des certificats visible auprès des Canadiens. Dans son mémoire, la commissaire à la protection de la vie privée recommande qu’on assujettisse le processus aux mêmes dispositions, en matière de rapports et de temporarisation que celles applicables aux audiences d’investigation et à l’engagement assorti de conditions qu’on trouve dans la section du Code criminel traitant de l’activité terroriste.

Le Sous-comité n’est pas d’accord avec la partie de sa recommandation proposant la temporarisation du processus des certificats, autrement dit de l’assujettir à l’annulation après une certaine période. Toutefois, il est d’accord avec elle pour dire que le procureur général du Canada devrait être tenu de déposer au Parlement un rapport annuel faisant état des recours aux certificats et aux fiats, relativement aux poursuites dans lesquelles la divulgation éventuelle de renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables est source de préoccupation. Il est déjà nécessaire de déposer au Parlement des rapports annuels en ce qui concerne les audiences d’investigation, les engagements assortis de conditions (aussi appelés arrestations à titre préventif), les justifications d’actes ou d’omissions conformément à l’article 25.1 du Code criminel, et l’utilisation de la surveillance électronique pour l’application de la loi.

RECOMMANDATION 37

Le Sous-comité recommande que la Loi sur la preuve au Canada soit modifiée de manière à exiger que le procureur général du Canada dépose au Parlement un rapport annuel faisant état de l’utilisation des certificats prévus à l’article 38.13 et des fiats prévus à l’article 38.15.

Il y a dans la Loi sur la preuve au Canada deux dispositions qui autorisent la tenue des audiences à huis clos, où les parties doivent présenter des arguments en l’absence des parties adverses. Il s’agit de l’article 38.11 et du paragraphe 38.131(6) de la Loi relativement aux audiences de même qu’aux appels ou aux examens. Il existe une procédure semblable dans le contexte de l’inscription d’entités terroristes sur une liste en vertu du Code criminel, du processus de révocation du statut des organismes de bienfaisance, et des certificats de sécurité en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Il est question séparément de chacun de ces processus ailleurs dans le présent rapport.

Dans plusieurs mémoires que le Sous-comité a examinés, on propose la nomination d’un défenseur spécial, ou amicus curiae, pour chaque processus. Plutôt que de se pencher sur la question dans chacun de ces contextes, le Sous-comité aborde le sujet en bloc dans un chapitre distinct, plus loin dans le rapport.

AUTRES MODIFICATIONS RECOMMANDÉES

Demandes à la Cour fédérale

Comme il est mentionné plus haut, en vertu de la Loi sur la preuve au Canada, tout participant qui, dans le cadre d’une instance, croit que des renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables sont sur le point d’être divulgués, est tenu d’en aviser le procureur général du Canada et de ne pas les divulguer sauf s’il y est autorisé. Si le procureur général n’a pas notifié sa décision ou, sauf par un accord conclu avec la partie, s’il a autorisé la divulgation d’une partie des renseignements ou a assorti de conditions son autorisation de divulgation, le paragraphe 38.04(2) prévoit la présentation d’une demande à la Cour fédérale en vue d’une ordonnance concernant la divulgation des renseignements. Toutefois, c’est l’une ou l’autre des trois situations qui détermine le caractère obligatoire ou optionnel de la demande et la personne à qui revient la responsabilité de la présenter.

Si la personne qui a donné l’avis initial est un témoin, le procureur général doit présenter la demande s’il n’autorise pas la divulgation complète. Si la personne qui a donné l’avis n’est pas un témoin, et a l’obligation de divulguer les renseignements dans le cadre d’une instance, cette personne doit présenter la demande. Si la personne qui a donné l’avis n’a pas l’obligation de divulguer les renseignements, mais qu’elle veut le faire, elle a le choix de présenter une demande à la Cour fédérale si le procureur général n’autorise pas la divulgation complète. Une personne autre que le procureur général qui présente une demande doit en notifier ce dernier en vertu du paragraphe 38.04(3).

Le Sous-comité se demande pourquoi la Cour fédérale n’intervient pas d’emblée dans tous les cas où le procureur général, sauf par un accord conclu avec la partie, n’autorise la divulgation d’aucun renseignement ou d’une partie seulement des renseignements après avoir reçu un avis d’une partie à une instance. Nous croyons que lorsque le procureur général refuse d’autoriser la divulgation pleine et entière des renseignements, sauf par suite d’un accord, une instance devrait être introduite à la Cour fédérale. Nous croyons en outre que la responsabilité d’introduire une instance devrait toujours incomber au procureur général, car c’est sa décision qui met en branle le processus et qu’il est onéreux pour un simple citoyen, un employé du gouvernement ou un autre participant à une instance de présenter une demande. En conséquence, il faudrait, en plus de modifier le paragraphe 38.04(2), pour préciser que c’est dans tous les cas au procureur général qu’il revient de présenter une demande d’ordonnance sur la divulgation de renseignements, abroger le paragraphe (3), lequel porte sur la notification au procureur général des demandes déposées par quelqu’un d’autre.

RECOMMANDATION 38

Le Sous-comité recommande que l’article 38.04 de la Loi sur la preuve au Canada soit modifié de manière à exiger que le procureur général du Canada, en ce qui concerne les renseignements à l’égard desquels une partie à une instance a donné un avis conformément à l’un ou l’autre des paragraphes 38.01(1) à (4), soit tenu de présenter à la Cour fédérale une demande d’ordonnance relativement à la divulgation des renseignements, et ce, dans tous les cas où, sauf par suite d’un accord conclu avec la partie, le procureur général n’autorise pas leur divulgation complète et sans conditions.

Obligation des entités d’aviser le procureur général

Le paragraphe 38.02(1.1) de la Loi sur la preuve au Canada oblige les entités désignées qui rendent une décision ou une ordonnance qui entraînerait la divulgation de renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables à en aviser le procureur général du Canada. Elles ne peuvent alors faire divulguer les renseignements avant que se soit écoulé un délai de 10 jours, afin que le procureur général puisse examiner la possibilité d’interdire la divulgation. Bien que l’obligation ne s’applique que pour certaines questions ou à certaines fins, les entités désignées comprennent les juges de la Cour fédérale, les membres de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, un tribunal militaire ou un juge militaire en vertu de la Loi sur la défense nationale, la Commission des relations de travail dans la fonction publique, le Commissaire à l’information, le Commissaire à la protection de la vie privée, le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité et certaines commissions d’enquête.

Le Sous-comité s’interroge au sujet de la capacité des entités désignées de savoir si les renseignements en question sont sensibles ou potentiellement préjudiciables. En particulier dans les cas où l’entité ne s’occupe pas habituellement de questions liées à la sécurité nationale, il peut s’avérer difficile de jauger la nature d’un renseignement particulier et les conséquences d’une autorisation de sa divulgation. Les définitions légales de renseignements « potentiellement préjudiciables » et « sensibles » ne sont pas, en soi, très utiles. Le Sous-comité propose donc qu’on rédige des directives afin d’aider les juges, les arbitres administratifs et les responsables gouvernementaux à s’acquitter de leur responsabilité en vertu du paragraphe 38.02(1.1). Là où la situation le justifie, tout dépendant de l’expertise fondamentale de la personne qui rend la décision ou l’ordonnance de divulgation, il devrait également exister, au sein des entités, des mécanismes d’examen visant à assurer ou non la signification de l’avis au procureur général, selon ce qui est indiqué. Par exemple, les membres de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié et de la Commission des relations de travail dans la fonction publique devraient avoir accès à une personne en mesure de confirmer que les renseignements sont effectivement sensibles ou potentiellement préjudiciables, et qu’il ne faut pas les divulguer avant que le procureur général n’en ait été avisé.

RECOMMANDATION 39

Le Sous-comité recommande que le gouvernement élabore des directives écrites et mette en œuvre des mécanismes d’examen appropriés afin d’aider les entités désignées à s’acquitter de leur obligation d’empêcher la divulgation de renseignements sensibles ou potentiellement préjudiciables, et d’aviser le procureur général du Canada en vertu du paragraphe 38.02(1.1) de la Loi sur la preuve au Canada.

Suppression du pouvoir judiciaire discrétionnaire

Tout dépendant des conclusions du tribunal, certaines dispositions de la Loi sur la preuve au Canada créent un pouvoir discrétionnaire d’autoriser la divulgation de renseignements détenus par le gouvernement. Toutefois, le Sous-comité est d’avis que, si le tribunal arrive ou n’arrive pas aux conclusions spécifiées, selon le cas, il devrait être tenu d’autoriser la divulgation. La première de ces dispositions est le paragraphe 37(4.1) qui dispose que le tribunal « peut » autoriser la divulgation, sauf s’il conclut que celle-ci serait préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées. Le Sous-comité est d’avis qu’il convient de reformuler le libellé de façon que le tribunal doive autoriser la divulgation s’il conclut qu’elle ne serait pas préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées. Permettre que les renseignements demeurent non divulgués, malgré la conclusion que leur divulgation n’est pas préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées, contrairement à ce qu’avance le gouvernement, serait une négation du but de la demande de divulgation faite au tribunal.

Si le tribunal conclut que la divulgation est préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées, le paragraphe 37(5) de la Loi sur la preuve au Canada l’oblige à passer à une étape ultérieure de son examen. Si le tribunal conclut que les raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation l’emportent sur les raisons d’intérêt public déterminées, le paragraphe (5) dispose qu’il « peut », après avoir examiné d’autres facteurs comme la forme et les conditions de divulgation, autoriser cette dernière sous une forme quelconque. Encore une fois, le Sous-comité est d’avis que le tribunal devrait être tenu d’autoriser la divulgation après qu’il a conclu qu’elle serait dans l’intérêt public.

Les autres dispositions en vertu desquelles, tout dépendant de certaines conclusions, la divulgation devrait être obligatoire plutôt que simplement optionnelle sont les paragraphes 38.06(1) et (2) de la Loi sur la preuve au Canada. Ces paragraphes sont analogues aux deux qui viennent d’être examinés, sauf qu’ils traitent des renseignements non divulgués dans l’intérêt des relations internationales ou de la défense ou de la sécurité nationales plutôt que pour des raisons d’intérêt public déterminées. Premièrement, à moins que le juge n’arrive à la conclusion que la divulgation porterait préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales, le Sous-comité est d’avis qu’il devrait être tenu de rendre une ordonnance de divulgation en vertu du paragraphe 38.06(1). Deuxièmement, si le juge conclut que la divulgation des renseignements serait préjudiciable, mais que les raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation l’emportent sur les raisons d’intérêt public qui justifient la non-divulgation, le Sous-comité est d’avis qu’il devrait être tenu d’autoriser la divulgation sous l’une des formes indiquées au paragraphe 38.06(2).

RECOMMANDATION 40

Le Sous-comité recommande que, dans la Loi sur la preuve au Canada, les mots « peut rendre » aux paragraphes 37(4.1) et 38.06(1) soient remplacés par le mot « rend » et que, aux paragraphes 37(5) et 38.06(2), le mot « peut » soit remplacé par le mot « autorise » et le mot « autoriser, » soit remplacé par le mot « et ».

Prise d’effet de l’ordonnance de divulgation

Afin de permettre un appel, le paragraphe 37(7) de la Loi sur la preuve au Canada précise à quel moment prend effet une ordonnance autorisant la divulgation de renseignements non divulgués par le gouvernement pour des raisons d’intérêt public déterminées. Il énonce : « L’ordonnance de divulgation prend effet après l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler ou, en cas d’appel, après sa confirmation et l’épuisement des recours en appel. » Le Sous-comité considère que ce paragraphe est rédigé de manière maladroite et plutôt difficile à comprendre et qu’il devrait par conséquent être réécrit pour plus de clarté.

RECOMMANDATION 41

Le Sous-comité recommande que le paragraphe 37(7) de la Loi sur la preuve au Canada soit remplacé par ce qui suit :

« L’ordonnance de divulgation prend effet

a) après l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler;

b) en cas d’appel, après sa confirmation et l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler du jugement, et l’épuisement des recours en appel. »

Bien qu’une ordonnance de divulgation visant des renseignements non divulgués pour des raisons d’intérêt public déterminées ne prenne effet qu’au moment prévu au paragraphe 37(7) de la Loi, aucune disposition comparable n’empêche la divulgation en attendant un éventuel appel d’une ordonnance qui autorise, en vertu de l’article 38.06, la divulgation de renseignements détenus parce que leur divulgation porterait préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales. Comme il importe peut-être encore davantage que de tels renseignements ne soient pas divulgués jusqu’à l’épuisement de tous les recours en appel, le Sous-comité croit qu’on devrait adopter une disposition semblable au paragraphe 37(7) relativement aux ordonnances de divulgation rendues en vertu de l’article 38.06.

RECOMMANDATION 42

Le Sous-comité recommande que la Loi sur la preuve au Canada soit modifiée de manière qu’une ordonnance de divulgation rendue en vertu des paragraphes 38.06(1) ou (2) prenne effet a) après l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler, ou, b) en cas d’appel, après sa confirmation et l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler du jugement, et l’épuisement des recours en appel.

Audiences à huis clos

En vertu de l’article 38.11 de la Loi sur la preuve au Canada, les audiences au sujet de renseignements non divulgués par le gouvernement pour des raisons liées aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales, et l’audition de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance autorisant la divulgation ou confirmant l’interdiction de divulguer, ont lieu à huis clos. Au moment de l’adoption de la Loi antiterroriste, on a inclus à l’article 37.21 une disposition semblable relativement aux audiences et aux appels touchant les renseignements non divulgués pour des raisons d’intérêt public déterminées. Toutefois, on a abrogé l’article 37.21 en 2004. On le considérait comme inutile étant donné la compétence inhérente du tribunal de tenir une audience à huis clos.

Le Sous-comité considère comme incohérent le fait que l’article 37.21 ait été abrogé, mais non l’article 38.11. Nous reconnaissons que ces articles traitent de la non-divulgation de renseignements pour des raisons différentes, mais le Parlement devrait ou bien exiger des audiences à huis clos dans les deux cas, ou bien s’en remettre à la compétence inhérente du tribunal. Étant donné le caractère délicat des questions touchant aux relations internationales et à la défense et à la sécurité nationales, ainsi qu’aux raisons d’intérêt public déterminées, le Sous-comité préfère que la Loi prévoie des audiences à huis clos dans tous les cas.

RECOMMANDATION 43

Le Sous-comité recommande que l’article 37.21 de la Loi sur la preuve au Canada, abrogé en 2004, soit réadopté.