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ENVI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'environnement et du développement durable


NUMÉRO 015 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 6 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Il est 15 h 30, et ce groupe de témoins est le dernier à venir nous parler de la Loi sur les espèces en péril. Nous nous penchons là-dessus depuis 12 mois. Une fois l'audition des témoins terminée, nous pourrons commencer à nous concentrer sur notre rapport.
    Nous recevons aujourd'hui M. Michael d'Eça, conseiller juridique auprès du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, et M.Terry Quinney, directeur provincial du Service des pêches et de la faune de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario. Bienvenue.
    Nous recevons également par vidéoconférence, depuis St. Andrew's, au Nouveau-Brunswick, M. Frederick Whoriskey, vice-président de la recherche et de l'environnement auprès de la Fédération du saumon de l'Atlantique.
    Monsieur Whoriskey, est-ce que vous nous entendez?
    Parfait. Nous allons maintenant passer aux déclarations liminaires. Je demande à nos invités de respecter la limite de 10 minutes.
    Monsieur d'Eça, nous vous écoutons.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Je suis heureux de vous rencontrer aujourd'hui.
    Je représente le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, que j'appellerai le CGRFN, ou le conseil.
    Le CGRFN est une institution publique établie selon les dispositions de l'article 5 de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Le conseil est le principal instrument de la gestion de la faune, et le principal régulateur de l'accès à la faune dans le Nunavut, vaste étendue de la région polaire du Canada ayant environ la taille du continent européen. Formant la majeure partie du territoire et 23 p. 100 de la masse terrestre du Canada, le Nunavut englobe un territoire s'étendant sur plus de 2,1 millions de kilomètres carrés qui comprend les régions marines de l'archipel arctique et les eaux territoriales adjacentes au Nunavut. De plus, environ 43 p. 100 des rivages des océans du Canada se trouvent dans la région du Nunavut — 104 000 sur un total de 243 000 kilomètres.
    En vertu de sa compétence étendue sur la gestion de la faune, le CGRFN détient des pouvoirs exclusifs de prise de décision concernant l'imposition, la modification et le retrait des quotas et toutes les autres restrictions visant l'exploitation de la faune, y compris les espèces en péril, dans la région du Nunavut.
    Le conseil a aussi des pouvoirs décisionnels exclusifs dans les domaines suivants: approbation de la désignation des espèces rares, menacées et en voie de disparition — c'est-à-dire l'approbation de la liste légale de toutes les espèces en péril se trouvant au Nunavut; approbation des plans, dont les stratégies de rétablissement, de gestion et de protection d'espèces et d'habitats en particulier, y compris les espèces en péril et leurs habitats; et approbation de l'établissement d'aires de conservation, dont des habitats essentiels, liées à la gestion et la protection de la faune et de ses habitats.
    Le pouvoir décisionnel du CGRFN relève du ministre: seul ce dernier peut accepter, rejeter ou modifier une décision du conseil, en se conformant strictement aux modalités de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut.
    Le mémoire du CGRFN, que vous avez reçu, comprend quatre recommandations, ainsi que des justifications et des faits à l'appui. Le conseil espère que vous trouverez ces recommandations suffisamment crédibles et convaincantes pour vous persuader de les adopter en tant qu'améliorations valables à la LEP, soit la Loi sur les espèces en péril, et aux programmes fédéraux connexes.
    Voici un bref énoncé des recommandations en question. Premièrement, comme la LEP, dans sa forme actuelle, ne reconnaît pas pleinement les compétences décisionnelles du CGRFN et l'importance du processus de prise de décision défini dans l'article 5 de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut, il faudrait ajouter un nouveau paragraphe à l'article 27 de la loi, qui dispose que:
Le ministre et le gouverneur en conseil sont tenus de prendre en compte les dispositions applicables des traités et des accords sur les revendications territoriales dans l'exécution de leur mission.
    Cette directive s'applique déjà aux activités du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC, qui concernent l'évaluation et la liste des espèces. La disposition touchant le COSEPAC se trouve au paragraphe 15(3) de la loi.
    Deuxièmement, il faudrait préparer et appliquer un plan efficace pour aborder les conclusions et les recommandations de l'évaluation indépendante de 2006 des programmes fédéraux pour la protection des espèces en péril. Cette évaluation approfondie et professionnelle a été effectuée par Stratos, une société réputée d'experts-conseils en gestion de l'environnement, à la demande du gouvernement fédéral.
    Troisièmement, il faudrait supprimer la disposition de non-dérogation inopérante qui figure à l'article 3 de la LEP et la remplacer par une disposition opérante, mais dans la Loi d'interprétation fédérale. Il n'y a aucun Autochtone qui appuie l'article 3. Il existe un consensus, y compris au ministère de la Justice, selon lequel l'actuelle façon d'aborder les dispositions législatives de non-dérogation au cas par cas — une approche qui ne comporte pas de consultation avec les Autochtones — est insoutenable. Cette approche est celle qui a été utilisée pour la Loi sur les espèces en péril que vous examinez au nom du Parlement. Deux provinces, la Saskatchewan et le Manitoba, ont déjà adopté avec succès une disposition pertinente de la Loi d'interprétation, et cette pratique a été pleinement appuyée par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles.
(1535)
    Quatrièmement, il faudrait améliorer le libellé de la LEP pour inclure le savoir traditionnel autochtone, le STA, dans les mesures de gestion, de protection et de rétablissement prises conformément à la loi, et envisager de créer un institut du savoir traditionnel autochtone.
    Comme le temps est limité, je vais me concentrer sur la recommandation 4 pendant le reste de mon allocution. Toutefois, vous allez trouver, dans notre mémoire, les faits et justifications qui s'appliquent aux autres recommandations.
    Aux fins de l'exposé, l'expression « savoir traditionnel autochtone » désigne tous les renseignements portant sur l'environnement qui sont tirés de l'expérience et des traditions des peuples autochtones. L'utilisation du mot « traditionnel » vise à exprimer que le savoir désigné provient de l'expérience et des traditions de nombreuses générations, dont les générations actuelles. Ce mot ne signifie pas que le savoir en question est démodé, dépassé et immuable. Le STA, de par sa nature, est dynamique, évolutif et itératif. Il est alimenté par le passé et par le présent. Il comprend des éléments à la fois traditionnels et actuels. Il vise à offrir des informations et des explications pratiques, réalistes et éprouvées aux personnes qui dépendent grandement de la terre.
    Malgré les inquiétudes légitimes que soulèvent la pertinence du STA et le poids qu'on lui donnerait dans l'évaluation et la mise en liste des espèces en péril, la LEP exige, de manière précise, que l'on essaie à tout le moins de faire en sorte que les décisions s'appuient, entre autres, sur le meilleur STA possible.
    La loi est plus timide, cependant, au chapitre de l'élaboration et de la mise en oeuvre des mesures de gestion, de protection et de rétablissement des espèces en péril. Exception faite du préambule qui énonce que « les connaissances traditionnelles des peuples autochtones du Canada devraient être prises en compte...pour l'élaboration et la mise en oeuvre des mesures de rétablissement », la loi ne dit rien à propos de l'inclusion du STA dans les efforts de gestion, de protection et de rétablissement des espèces en péril.
    Bien que des consultations menées conformément à la loi puissent générer un STA utile, cette approche est loin d'être idéale. Elle équivaut, pour nous, à essayer d'obtenir de l'information scientifique valable en se fiant aux commentaires, s'il y en a, d'experts scientifiques, s'il en est, qui ont assisté par hasard à une assemblée publique. Il faut faire les démarches nécessaires pour réunir les éléments pertinents du STA, tout comme on le ferait pour obtenir des connaissances et des compétences scientifiques particulières.
    Autre point: il importe de se rappeler qu'en juin 2007 — il y a presque trois ans de cela —, 389 espèces faisaient partie de la liste des espèces « en péril » de la loi. Ce chiffre a continué d'augmenter: en 2009, il atteignait 425. Les stratégies de rétablissement auraient dû être terminées pour 228 de ces espèces à ce moment-là. En fait, des stratégies appropriées étaient en place pour seulement 55 espèces, ou 24 p. 100 d'entre elles. Seulement 16 habitats essentiels, ou 7 p. 100, avaient été cernés. Il est clair que, dans les années à venir, la LEP doit mettre l'accent sur l'adoption de mesures concrètes pour gérer, protéger et rétablir le nombre sans cesse grandissant d'espèces déclarées en péril et ce, par centaines, au Canada.
    Si nous voulons faire en sorte que les meilleures techniques de gestion, de protection et de rétablissement sont utilisées, nous devons nous assurer que la science et le STA, deux sources de connaissances fondamentales et complémentaires, sont prises en considération et appliquées.
    En ce qui concerne la mise en place d'un institut du savoir traditionnel autochtone, il est temps, selon le CGRFN, de prendre cette proposition au sérieux. L'institut pourrait, d'abord et avant tout, offrir une aide précieuse en participant à l'élaboration du nombre sans cesse croissant de stratégies de rétablissement, de plans d'action et de plans de gestion, et ce, en mettant à profit le STA. Il pourrait également servir de tribune pour les discussions et le travail de collaboration que doivent entreprendre les scientifiques et les détenteurs de ce savoir, par l'organisation et la tenue de réunions, d'ateliers, de colloques et de symposiums.
    Par ailleurs, il faut élaborer et adopter des pratiques exemplaires pour accéder au STA, l'évaluer et s'en inspirer. Ces pratiques ne remplaceraient pas celles qui existent déjà à l'échelle communautaire. Elles serviraient plutôt de renfort — un ensemble de normes qui s'appliqueraient en l'absence d'exigences locales.
    Enfin, monsieur le président, il est important de garder à l'esprit que le STA le plus précieux et le plus abondant vient des aînés de partout au pays. Malheureusement, nombre d'entre eux meurent, emportant avec eux leur vie riche d'expériences et leurs liens étroits avec les générations antérieures. Tous les efforts raisonnables doivent être déployés pour veiller à ce que leur STA soit préservé de façon authentique et respectueuse. La mise sur pied et le maintien d'une base de données audio et vidéo sur le STA pourrait représenter une composante importante du mandat d'un institut du STA.
(1540)
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Monsieur Quinney, nous vous écoutons.
    Bonjour à tous. Les 100 000 chasseurs et pêcheurs et les 670 clubs de chasse et de pêche membres de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario, la FPCO, figurent parmi les plus ardents promoteurs de la conservation de la faune terrestre et aquatique au Canada. Nous avons préparé un mémoire écrit. Je n'ai pas l'intention d'en faire la lecture. Toutefois, j'espère que vous allez prendre le temps de le lire. Si vous estimez avoir besoin de renseignements complémentaires, n'hésitez pas à communiquer avec nous.
    Le résultat de nos stratégies de conservation est perceptible: il suffit de voir les abondantes et vigoureuses populations de poisson et d'animaux sauvages qui sont aujourd'hui complètement rétablies après avoir frôlé l'extinction. Grâce à des efforts volontairement consentis et à des pressions exercées sur les gouvernements pour qu'ils adoptent et mettent en application des lois de conservation efficaces, de nombreuses espèces sur le point de disparaître sont redevenues florissantes: le dindon sauvage, l'orignal, le canard branchu, le castor, la bernache du Canada et le merlebleu de l'Est, pour ne nommer que celles-là. Il faut surtout comprendre que ces populations ont été rétablies sans loi provinciale ou fédérale sur les espèces en péril. Elles ont été restaurées parce qu'elles sont appréciées des pêcheurs, chasseurs, trappeurs et autres naturalistes qui ont tout intérêt à ce que les écosystèmes soient sains, et les habitats, protégés.
    Nos efforts de rétablissement du gibier et de la faune se poursuivent et font qu'aujourd'hui, les membres de la FPCO consacrent bénévolement leur temps et leur argent au rétablissement du wapiti, du saumon atlantique, du cygne trompette, de la tortue ponctuée et du faucon pèlerin, pour ne nommer que ces espèces.
    Nous cherchons, avant tout, à empêcher qu'une espèce soit mise en danger. Pour nous, la situation est claire. Pour que les habitats restent sains et que la biodiversité soit conservée, il faut une vigilance fédérale et provinciale et des mesures de soutien sur plusieurs fronts: protection des habitants naturels par le développement durable et l'aménagement judicieux du territoire; protection des écosystèmes canadiens contre la pollution et les invasions d'espèces exotiques nuisibles; soutien provincial et fédéral à la gestion privée du territoire; gestion scientifique des populations de poisson, de gibier et d'animaux à fourrure, conjuguée à une utilisation raisonnée des ressources; et, en dernier recours, mise en place de programmes légiférés de protection et de rétablissement des espèces menacées.
    La Loi sur les espèces en péril, la LEP, et le programme qui en découle ne doivent être que cela: le dernier recours pour la défense des écosystèmes et la protection de la biodiversité. La loi ne doit pas se substituer à des mesures de conservation et de gestion efficaces visant à empêcher que le poisson, la faune et leur habitat soient mis en danger.
    Voilà le message global et les craintes que la FPCO exprimait déjà en 2002 au sujet du projet de loi C-5, qui proposait de créer la Loi sur les espèces en péril. Nous avions alors averti le gouvernement que cette loi risquait un jour, d'une part, de créer une bureaucratie coûteuse et réactive, bien incapable de rétablir les espèces en péril et, d'autre part, de canaliser trop de ressources vers cette bureaucratie des espèces en péril, au détriment des programmes fédéraux existants de gestion et de conservation de la faune et du poisson qui ont, justement, pour fonction d'éviter que les espèces se retrouvent en situation de danger.
(1545)
    Huit ans plus tard, la FPCO ne trouve aucune consolation dans le fait de pouvoir affirmer: « On vous l'avait bien dit. » Il reste que, depuis 2002, la feuille de route de la loi est éloquente. Vous trouverez des exemples à ce sujet dans le mémoire.
    Nous constatons, en effet, que les programmes de gestion et de la protection de la faune et du poisson et les programmes de protection de l'habitat ont souffert, en raison de la hausse constante des ressources financières et humaines drainées par la bureaucratie associée à la loi.
    Trois ans après la mise en oeuvre de la LEP, le gouvernement fédéral a consenti 110 millions de dollars de plus à la mise en application de celle-ci. Il y a eu une réduction de 80 p. 100 du nombre d'agents fédéraux des pêches affectés à l'Ontario depuis 2006. Nous savons que les programmes du Service canadien de la faune pour l'évaluation, le suivi et la gestion des oiseaux migrateurs ont été réduits en raison de la réorientation des ressources vers les programmes de la Loi sur les espèces en péril. Nous déshabillons Pierre pour habiller Paul.
    Que des programmes concrets de suivi, de gestion et de conservation d'écosystèmes soient privés du peu de ressources et de personnel qu'ils avaient au profit des exercices sur papier d'une loi strictement réactive nous paraît alarmante. Il suffit d'examiner la longue feuille de route de la loi américaine sur la protection des espèces et du programme qui en découle pour voir à quel point les mesures réactives de protection d'une espèce sont inefficaces et coûteuses. Encore une fois, je vous invite à consulter notre site Web. Vous allez y trouver les éléments d'information qui figurent dans notre mémoire : ils démontrent clairement que le rétablissement des espèces s'est avéré coûteux et inefficace au cours des 33 années qui sont suivi l'adoption de la loi fédérale américain.
    Au Canada, un examen indépendant de la loi a été effectué en 2006 par Stratos. Nous avons examiné les résultats de la vérification et appuyé bon nombre des observations et recommandations présentées dans le rapport. Nous encourageons le comité à relire celui-ci.
    En fait, le rapport sert de base aux neuf recommandations que formule la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario. Commençons par la participation des collectivités locales. Le premier témoin que vous avez entendu cet après-midi a fait état de la nécessité d'intégrer et d'incorporer le savoir traditionnel autochtone. Or, le savoir que possède la collectivité qui a intérêt à ce que les espèces locales puissent être récoltées de manière durable et qui souhaite la bonne intendance de leur habitat doit être mise à contribution à l'étape des évaluations du COSEPAC, de l'analyse réglementaire des impacts socioéconomiques et de l'élaboration éventuelle d'un programme de rétablissement.
    Viennent ensuite l'évaluation et l'inscription d'une espèce sur la liste. Nous proposons à cet égard trois choses. Les critères d'évaluation du COSEPAC doivent être passés en revue et modifiés partout où il n'est pas dit clairement que s'il n'y a pas assez de données scientifiques pour se prononcer honnêtement sur le statut d'une espèce, cette espèce ne doit pas être classée menacée ou en péril, mais inscrite plutôt sous la rubrique « données insuffisantes ».
    En cas d'incertitude scientifique au sujet d'une espèce, il est absolument essentiel, tant pour des questions d'imputabilité que pour des raisons socioéconomiques, que le ministre se réserve le droit d'accepter ou de refuser les recommandations d'inscription à la liste que lui fait le COSEPAC. La discrétion ministérielle demeure, à notre avis, importante. Le fait que le ministre ait accepté 449 des 551 recommandations — soit 81 p. 100 — du COSEPAC montre tout le respect qu'inspirent les évaluations de cet organisme.
(1550)
    Le COSEPAC doit être fortement découragé d'utiliser des critères d'évaluation et de désignation géographique de niveau inférieur à celui de l'espèce. À moins qu'il n'y ait des données génétiques indéniables montrant l'existence d'une sous-espèce locale, les désignations d'« écotypes » ou de « populations » ne devraient être ni proposées ni acceptées. Par ailleurs, nous reconnaissons la validité d'un retrait local de la liste et recommandons une telle politique.
    Pour ce qui est de stratégies de rétablissement des stocks en bonne et due forme, nous avons quelques recommandations à vous adresser. Dans le cas des espèces qui ont un impact sur les consommateurs des ressources, l'OFAH recommande fortement que les programmes de rétablissement intègrent à leurs équipes des représentants non gouvernementaux ayant de l'expérience dans la gestion durable, la récolte et le rétablissement de telles espèces ou de leur habitat.
    Nous recommandons également d'élaborer des politiques et critères pour la composition des équipes des programmes de rétablissement, la participation des intervenants locaux, l'évaluation des dangers et menaces et l'établissement des objectifs de population, afin que les programmes de rétablissement soient mieux élaborés et plus efficaces.
    L'OFAH recommande également l'élaboration de critères et d'un cadre d'évaluation efficace pour l'analyse de l'impact socioéconomique de l'inscription d'une espèce sur la liste ou de la mise en oeuvre d'un programme de rétablissement. Les énoncés réglementaires d'impact doivent comprendre une bonne analyse socioéconomique, notamment une évaluation des coûts pour les instances régulatrices et les parties réglementées et une évaluation des coûts et des avantages du programme de conservation pour l'espèce.
    Nous voulons également qu'il y ait un accroissement de l'efficacité de la loi, et non des coûts. Notre avant-dernière recommandation est la suivante: ne pas céder à l'appétit insatiable de la loi pour toujours plus de ressources financières et humaines. On réaliserait des économies et on parviendrait à plus d'efficacité si Environnement Canada cherchait réellement à mieux harmoniser les initiatives provinciales et fédérales visant les espèces en péril, lesquelles, en Ontario, sont souvent redondantes, incohérentes et sources de confusion tant pour les organismes gouvernementaux que pour le grand public.
    Merci beaucoup.
(1555)
    Merci, monsieur Quinney.
    Avant de passer à la période de questions, nous entendrons une dernière allocution de M. Whoriskey, de Saint Andrews.
    Vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Je suis chercheur scientifique, et je remplace le président de l'organisation qui ne pouvait être présent aujourd'hui.
    Notre témoignage portera fondamentalement sur notre expérience sous le régime de la Loi sur les espèces en péril. Une sous-population du saumon de l'Atlantique a été le premier groupe de poissons marins à figurer sur la liste des espèces visées par la LEP; c'est donc dans cet esprit que je vous présenterai mes réflexions aujourd'hui, au nom de la Fédération du saumon Atlantique, ou FSA.
    La FSA est une organisation internationale à but non lucratif dont le siège est à Saint Andrews, au Nouveau-Brunswick, et qui compte des bureaux au Québec, au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve-et-Labrador. Nous avons également des bureaux dans le Nord-Est des États-Unis.
    Nous nous consacrons à la préservation et à la reconstitution du saumon sauvage de l'Atlantique, et aux écosystèmes fluviaux et marins dont leur survie dépend.
    Nous collaborons étroitement avec nos sept conseils régionaux et avec 120 organisations bénévoles s'occupant des rivières dans l'Est du Canada et le Nord-Est des États-Unis. Ce réseau englobe le rayon d'action en eau douce du saumon sauvage de l'Atlantique en Amérique du Nord.
    La mise en oeuvre de nos programmes comporte des volets de recherche scientifique, de promotion et de sensibilisation.
    Comme je l'ai dit, je pense que le saumon de l'Atlantique a été la première espèce marine inscrite à la liste prévue par la LEP; il s'agissait des populations de saumon atlantique de l'intérieur de la Baie de Fundy. Nous sommes très inquiets du fait que, si des mesures d'urgence ne sont pas prises, les populations de saumon sauvage de l'Atlantique de 32 rivières de l'intérieur de la Baie de Fundy qui ont été désignées en vertu de la LEP comme en voie d'extinction pourraient disparaître.
    Le rayon d'action du saumon comprend toutes les rivières qui se jettent dans la baie de Fundy à partir de la rivière Mispec, au Nouveau-Brunswick — à l'est de la rivière Saint-Jean —, et le long de la baie jusqu'à la rivière Pereaux, située à l'est de la rivière Annapolis, en Nouvelle-Écosse. On estime que lorsque la population de poissons était en santé, plus de 40 000 saumons de l'Atlantique revenaient à ces rivières chaque année. Un recul marqué s'est amorcé à la fin des années 1980. En 1998, on a estimé que la population de saumon sauvage était inférieure à 500 et, depuis, la baisse s'est poursuivie. De nos jours, moins de 200 reviennent chaque année.
    Ces saumons demeurent en grande partie dans la baie de Fundy et dans l'eau adjacente du golfe du Maine pendant toute la durée de leur vie en mer. C'est inhabituel chez le saumon de l'Atlantique, qui parcourt habituellement de grandes distances dans l'Atlantique Nord. Beaucoup de saumons se rendent même jusqu'au Labrador ou au Groenland.
    Si des problèmes touchant l'eau douce, comme les pratiques d'exploitation forestière, le lessivage des terres cultivées, la construction de l'énorme obstacle aux marées de Petitcodiac — dont la province du Nouveau-Brunswick a récemment ouvert les vannes — et de plus petits barrages ont pu jouer un rôle, il semble que le grand problème crucial soit actuellement celui de la survie en mer. Les théories sur la mortalité en mer sont allées de la diminution des stocks de nourriture à la modification des conditions physiques, en passant par les répercussions de l'agriculture qui englobent la propagation de maladies; l'aggravation de l'infestation de poux du poisson; l'accroissement de la prédation de la part de phoques, de cormorans et d'autres prédateurs; et des modifications du comportement des saumons en raison de la diminution de leur nombre, ou une combinaison de ces facteurs.
    À l'époque où la population de saumon sauvage de l'Atlantique a commencé à décliner dans la baie de Fundy, le secteur de l'aquaculture connaissait une croissance rapide, car il y avait très peu de règlements et de mise en application de ceux-ci sur le terrain. On ne surveillait guère les effets des poux du poisson et d'autres facteurs touchant le saumoneau sauvage alors qu'il se rendait jusqu'à l'océan. Nous reconnaissons que des mesures ont été prises pour améliorer les pratiques de fonctionnement au sein du secteur aquacole, mais nous demeurons préoccupés par les effets nocifs de l'interaction entre les saumons sauvages et de culture de l'Atlantique. Le saumon de culture s'est montré de plus en plus résistant au traitement contre les poux, ces derniers mois. Il faut surveiller cette menace contre le saumon sauvage de l'Atlantique et agir dès maintenant.
    Le projet de document sur le rétablissement des stocks de saumon de l'intérieur de la baie de Fundy indique très clairement que les problèmes touchant les populations de saumon de cette région sont liés à l'environnement marin, et que c'est là le principal domaine où les connaissances font défaut, mais le document ne rend guère compte des travaux projetés dans ce domaine. Les auteurs du rapport affirment que la mortalité marine se produit en grande partie à l'étape post-saumoneau — c'est-à-dire peu de temps après que les saumons aient gagné la mer pour la première fois en tant que poissons juvéniles —, mais le document ne cite aucune recherche consacrée à cette phase du cycle de vie du saumon.
    On garde des saumons des rivières de l'intérieur de la baie de Fundy ou on les stocke à des fins génétiques à trois endroits, tous exploités par le MPO, afin de disposer de matériel génétique pour régénérer l'espèce. Cependant, il n'existe pas de financement annuel réservé exclusivement à ces opérations.
    Le COSEPAC a indiqué en 2001 que ces populations étaient menacées, et elles ont été recensées dans la LEP en 2003.
(1600)
    Il a fallu attendre décembre 2009 pour que Pêches et Océans Canada publie un projet de plan de rétablissement sur lequel la population a été invitée à donner son point de vue. Une fois que le plan de rétablissement aura été approuvé, le MPO prévoit qu'il faudra quatre années de plus pour élaborer des plans d'action et les mettre en forme finale. C'est un délai extrêmement long, et c'est inacceptable qu'on mette autant de temps à agir.
    La Fédération du saumon atlantique et ses conseils régionaux recommandent que le MPO accélère le processus d'élaboration des plans d'action nécessaires à l'atteinte des buts et objectifs de rétablissement précisés dans la stratégie de reconstitution des stocks. En outre, nous recommandons que le MPO réserve et octroie les fonds supplémentaires nécessaires à la mise en oeuvre de la stratégie de reconstitution, et qu'il confirme l'importance du programme de banque de gènes vivants pour le rétablissement des stocks en l'incluant dans son budget annuel des services votés.
    Nous recommandons que des travaux cruciaux sur l'habitat marin deviennent une priorité et que les ressources nécessaires leur soient affectées, particulièrement en ce qui concerne la phase post-saumoneau dans l'océan, afin que la reconstitution des stocks bénéficie des meilleures chances de succès.
    Merci beaucoup de m'avoir donné l'occasion de m'adresser à vous.
    Merci beaucoup. Nous allons entreprendre notre série de questions de sept minutes.
    Monsieur Scarpaleggia, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. Nous avons entendu là des témoignages fort intéressants.
    Monsieur Quinney, vos propos m'ont vraiment intrigué. Si j'ai bien compris, vous vous dites contre ce genre d'approche officielle pour la protection des espèces menacées établie au moyen d'une loi comme la LEP, et vous laissez entendre que votre groupe est mieux placé pour faire une bonne partie du travail prévu dans la LEP.
    Ai-je bien compris? Je ne suis pas certain d'avoir suivi le fil de votre argument.
    Quelle est la taille de votre organisme? Quel territoire couvre-t-il? De quelle manière contribue-t-il à protéger la faune, ce que vous dites faire très efficacement sans la bureaucratie qui découle de lois comme la LEP?
    Merci de votre question. Oui, vous avez bien compris notre position.
    Notre point de vue est fondamentalement qu'il y a 10 ans, le Canada a choisi de suivre le modèle américain en vigueur, lequel est un modèle litigieux et hautement bureaucratique. Nous étions d'avis, d'après le bilan des États-Unis à l'époque, que ce serait une erreur pour le Canada.
    Depuis lors, non seulement le bilan du gouvernement fédéral à l'égard de la loi nous aura-t-il donné raison, mais c'est également vrai pour la plus récente Loi sur les espèces en péril en Ontario qui, elle aussi, s'inspire essentiellement des modèles canadien et américain. Premièrement, ce genre de modèle constitue une énorme masse législative, disons, plutôt qu'une approche d'intendance coopérative; et deuxièmement, il crée une nouvelle et manifestement énorme bureaucratie institutionnalisée, dont le résultat final est rarement le rétablissement des espèces sur le terrain.
    On peut dire sans se tromper, je pense, qu'il existe des modèles de rechange, et pas seulement ceux de l'Ontario ni ceux dont mon organisme a fait la démonstration en collaboration avec d'autres organismes, dont les gouvernements fédéral et provincial.
    Le fait est qu'il faut privilégier la coopération, l'intendance et les partenariats, et pas un outil législatif répressif ni un appétit bureaucratique insatiable pour toujours plus de ressources, qui ne se traduit pas par un rétablissement efficace des espèces.
(1605)
    Votre exposé est excellent, mais il est également quelque peu abstrait pour quelqu'un comme moi, qui n'est pas expert en la matière. Donc, pourriez-vous me citer un cas où on a utilisé la masse législative fédérale, et me dire en quoi l'approche de votre organisme aurait été plus souple et aurait produit de meilleurs résultats? Ce qui m'interpelle dans votre message, c'est que par exemple, alors que la morue était menacée, les pêcheurs de Terre-Neuve se sont toujours plaints que les biologistes du MPO à Ottawa ignoraient ce qu'ils faisaient et géraient mal les stocks de poisson. Donc, pourriez-vous me donner un exemple d'une expérience où la masse législative fédérale a été utilisée de manière contre-productive? Et qu'auriez-vous fait de différent?
    Votre organisme... je repose ma question du début. Quel genre de territoire couvre-t-il? Y a-t-il d'autres organismes comme le vôtre qui couvriraient le reste du territoire canadien, pour ainsi dire? Je ne doute pas que vous faites de l'excellent travail, mais lorsqu'on a affaire à un territoire aussi grand que celui du Canada, il faut apporter un élément de rationalité à tout cela, surtout si l'on veut avoir une quelconque reddition de comptes au niveau du gouvernement. Votre approche semble être, dans une forte mesure, une approche de laissez-faire sur le terrain. Je ne dis pas que votre travail n'est pas efficace, mais il faut examiner la question de manière globale et rationnelle, sans quoi, il n'y aura pas de reddition de comptes au Parlement.
    Merci.
    Premièrement, d'un point de vue géographique, la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario compte des membres cotisants pour ainsi dire dans tous les coins de l'Ontario — autrement dit, d'un bout à l'autre de la province. J'ai parlé tout à l'heure de 100 000 membres, abonnés et sympathisants. Nous avons environ 85 000 membres cotisants.
    L'une de nos plus grandes forces, c'est qu'au-dessus de 600 clubs de conservation communautaires figurent parmi nos membres. Ces clubs de conservation communautaires continuent de consacrer du temps bénévole et des fonds personnels à la réalisation de projets de type « les pieds dans l'eau, les mains dans la terre » sur leur territoire, partout dans la province. Je pense qu'on peut dire que les gouvernements provincial et fédéral ont appris que ces clubs de bénévoles communautaires sont un atout considérable pour la protection des habitats et des espèces, de façon générale.
    Quant à des exemples précis, pour gagner du temps, je vais vous énumérer plusieurs...
    Un ou deux suffirait.
    ... mauvaises expériences que nous avons vécues en ce qui a trait à la Loi sur les espèces menacées, tant au niveau provincial que fédéral dans la province de l'Ontario, et qui concernent des espèces comme l'esturgeon jaune, le colin de Virginie, la tortue hargneuse et, malheureusement, l'anguille d'Amérique.
    Qu'est-il arrivé dans ces cas? Qu'est-ce que le gouvernement fédéral a fait pour nuire à vos intérêts?
    Il nous fait perdre du temps et des ressources, qui, nous le croyons, auraient pu servir à des solutions de rétablissement plus productives.
    Qu'est-ce que cela signifie?
    Il ne reste plus de temps. Merci, monsieur Quinney.
    Monsieur Bigras, vous avez sept minutes; allez-y, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins. Il s'agit d'une séance très intéressante.
    Mes questions porteront sur deux volets. La première question s'adresse à M. d'Eça. Par la suite, l'autre s'adressera au vice-président de la Fédération du saumon atlantique.
    Lorsque l'on regarde ce que nous ont dit les scientifiques hier ou avant-hier, il semble y avoir un problème sur le plan des espèces. Ce problème est associé à des aspects biologiques surtout. Les scientifiques qui ont témoigné ont été assez clairs à ce sujet.
     Pour ce qui est du Nunavut, on n'ira pas très loin dans le processus d'application de la loi. Car il semble y avoir un problème dès le départ, c'est-à-dire au moment de l'inscription — tout le processus décisionnel. Vous avez naturellement un Accord sur les revendications territoriales qui, à mon avis, est fort et même plus fort que n'importe quel autre protocole que vous avez signé il y a quelques années.
     Selon vous, il semble clair que l'Accord sur les revendications a préséance sur la loi et sur les processus de décision. Vous souhaitez que ce qui est inscrit dans l'Accord sur les revendications en matière décisionnelle et d'inscription des espèces doit prédominer sur n'importe quelle autre application qui reviendrait à des fonctionnaires. J'ai vu que vous aviez signé un protocole à la suite des travaux d'un groupe de travail. Cela ne semble pas avoir donné de résultats.
    Croyez-vous qu'en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales, la Loi sur les espèces en péril doit s'appliquer au terme de toutes ces discussions que vous avez eues au cours des dernières années? Car il semble que le protocole signé avec le gouvernement n'a pas donné de résultats. Qu'est-ce qui prime? La loi que vous pourriez mettre en place ou la loi qui a été adoptée par le Parlement canadien?
(1610)

[Traduction]

    Merci, monsieur Bigras.
    Tout d'abord, le protocole auquel vous faites allusion, je crois, est un protocole d'entente. Il a été signé il y a quelques années. En fait, tant le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut que le gouvernement pourraient vous dire qu'il a été très fructueux. Cela mène à votre autre question, à savoir si la revendication territoriale prévaut, et ce qu'il advient de la LEP.
    S'il y a un conflit entre un document protégé par la Constitution et une loi, un règlement ou une politique, la législation est claire: le document protégé par la Constitution doit prévaloir. Mais c'est seulement en cas d'incompatibilité. Il ne devrait pas y avoir de conflit entre l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut et la Loi sur les espèces en péril. Dans bien des cas, il n'y en a aucun. Nous avons mentionné un conflit aujourd'hui, mais nous avons une recommandation bien simple pour y remédier. Nous avons réglé ce conflit que nous avions au moyen du protocole d'entente. Comme je l'ai dit, il est utile de mélanger le processus d'établissement des listes aux termes de la LEP, le COSEPAC, le ministre, le gouverneur en conseil et le processus décisionnel en vertu de l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Cela a produit les résultats souhaités, mais ce n'est pas un document légal.

[Français]

    Je comprends. Toutefois, quand vous dites, à la page 5 de votre mémoire, qu'« il ne règle pas le problème sous-jacent, à savoir que la Loi sur les espèces en péril ne reconnaît pas adéquatement la compétence décisionnelle du conseil et l'importance du processus décisionnel en vertu de l'article 5 de l'Accord sur les revendications territoriales », je comprends qu'il y a eu des discussions, mais il semble continuer à y avoir un problème.
    Quand vous avez des discussions avec le gouvernement, est-ce que celles-ci se tiennent entre le gouvernement fédéral et le conseil? Sinon, est-ce que ce sont des discussions de gouvernement à gouvernement?

[Traduction]

    Tout d'abord, les discussions visant l'élaboration d'un protocole d'entente ont eu lieu entre le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, le ministère des Pêches et des Océans et Environnement Canada. Le gouvernement du Nunavut et le principal parti Inuit qui est partie à notre accord sur les revendications, le Nunavut Tunngavik, ont participé à nos discussions. Ces pourparlers réunissaient un certain nombre d'acteurs. Les signataires du protocole d'entente étaient le MPO et Environnement Canada, qui représentaient la Couronne, ainsi que le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut.
    Encore une fois, je tiens à souligner que le protocole d'entente fonctionne vraiment bien, mais il a ses limites. On dit dans le préambule qu'il ne s'agit pas d'un contrat et qu'il n'est pas juridiquement contraignant; c'est un protocole d'entente. Donc, les diverses parties ont bien travaillé avec cet outil, et nous ne nous en plaignons pas du tout. Ce que nous disons, c'est que la loi ne cadre toujours pas. Elle ne cadre pas convenablement à l'Accord sur les revendications territoriales.
    Nous avons là une occasion. C'est l'un des exemples qui illustrent pourquoi il faudrait un examen parlementaire. Après cinq ans, si l'on constate que la revendication territoriale et la loi ne concordent pas, on doit réviser la Loi sur les espèces en péril en conséquence.
(1615)

[Français]

    On a reçu ici, au comité, le Conseil autochtone national sur les espèces en péril, ce qu'on appelle le CANEP. On a semblé percevoir quelques difficultés à l'intérieur du conseil.
    Quand vous avez des recommandations à faire au gouvernement, passez-vous par le Conseil autochtone national, ou faites-vous affaires directement avec le ministre concerné? Comment voyez-vous vos relations avec le conseil?

[Traduction]

    En réalité, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut est un tribunal administratif. C'est un organisme de réglementation, tout comme l'Office national de l'énergie, le CRTC ou ces tribunaux administratifs que nous connaissons tous. Il ne s'agit donc pas d'une organisation autochtone, mais d'une entité établie en vertu d'un accord de revendications territoriales, et qui s'adresse essentiellement à un public autochtone: les Inuits. Par conséquent, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut joue le même rôle qu'un autre organisme administratif.
    Il s'agit d'un organisme sans lien de dépendance avec les Inuits, le Conseil autochtone national sur les espèces en péril, Environnement Canada ou d'autres. Il est régi par le droit administratif et l'entente sur les revendications territoriales, mais demeure indépendant et ne rend pas de comptes à un gouvernement.

[Français]

    J'ai une dernière question à poser, parce que je n'aurai bientôt plus beaucoup de temps. Elle s'adresse au vice-président de la Fédération du saumon atlantique.
    Monsieur Whoriskey, vous avez fait un constat assez pénible de la situation du saumon de l'Atlantique, des baisses de niveau d'individus depuis 1998. Vous avez bien identifié un certain nombre d'activités humaines reliées. Il y a des scientifiques qui nous ont proposé de séparer les plans de rétablissement et les plans d'action, de faire en sorte que les aspects scientifique et biologique soient plus fortement pris en considération à l'intérieur des évaluations, et que les aspects socioéconomiques, l'évaluation socioéconomique, viennent un peu plus tard.
     Cela aurait-il permis d'accélérer les délais interminables que vous avez mentionnés aujourd'hui?

[Traduction]

    Je ne crois pas. En vérité, les biologistes et les socioéconomistes qui se sont intéressés à ce dossier seraient d'accord pour dire qu'ils ont tous beaucoup souffert. Les espèces ont décliné extrêmement rapidement, tout comme les emplois reliés à la pêche sportive de ces espèces dans les secteurs concernés. Ils ont disparu en même temps. Il y a donc le souci, des deux côtés, de tenter quelque chose.
    Si je puis me permettre d'ajouter un commentaire aux observations de M. Quinney, je dirais que nous avons tendance à nous perdre en essayant de nous fixer comme objectif premier l'inscription d'une espèce sur la liste des espèces en péril, car ce n'est pas le propos. Ce que nous cherchons à faire, c'est rétablir les espèces menacées.
    Selon nous, la LEP contiendrait une lacune, en ce sens que beaucoup de temps et de ressources sont consacrés à l'inscription d'espèces sur la liste des espèces menacées — un exercice sur papier —, mais qu'une fois que ces espèces y figurent, on ne débloque pas les ressources pour entreprendre véritablement un effort de rétablissement et de rattrapage. C'est le type d'orientation que j'aimerais nous voir prendre, à l'avenir.
    Monsieur Donnelly, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos trois participants pour leurs témoignages. Ma question s'adresse à M. Whoriskey.
    Monsieur Whoriskey, vous avez indiqué, dans votre mémoire, que les stocks de saumons sauvages de l'Atlantique ont commencé à décliner à peu près en même temps que l'essor significatif de l'aquaculture dans la région Atlantique. Corrigez-moi si j'ai tort.
    C'est exact.
    Pourriez-vous m'expliquer le rôle que les exploitations salmonicoles dans la baie de Fundy ont joué dans la mortalité massive des saumons sauvages de l'Atlantique, et me dire si on aurait pu éviter pareille situation?
    Nous savons que les bassins d'élevage de saumons ont eu un impact sur les populations de saumons sauvages. Au début, les saumons s'échappaient en très grand nombre des enclos des exploitations salmonicoles, ce qui a entraîné des croisements génétiques avec les populations de saumons sauvages, de sorte que le patrimoine génétique du poisson à l'état sauvage a été remplacé, essentiellement, par le patrimoine génétique des saumons d'élevage, saumons qui sont incapables de survivre dans la nature. Ils ont été élevés pour vivre dans un environnement totalement différent de celui dans lequel évoluent les poissons sauvages.
    En même temps, nous avons également détecté la présence de maladies, qui avaient pris des proportions épidémiques dans les cages d'élevage, parmi les populations de poissons sauvages, même si nous ne sommes pas en mesure de vous dire exactement combien de poissons sauvages sont morts à cause de ces maladies engendrées probablement par les épidémies dans les fermes piscicoles.
    Il est clair que l'industrie de l'aquaculture et celle de la pêche de poissons sauvages veulent que leur secteur se porte bien, que les maladies soient contrôlées et que tous les poissons soient retenus dans les enclos. C'est dans cette optique que nous avons travaillé, en tentant de surveiller les impacts, de les documenter et de demander que soient apportés les correctifs nécessaires; et il y a eu de grands changements et d'importants correctifs au fil du temps.
(1620)
    Merci.
    Croyez-vous que si les exploitations piscicoles pratiquaient un confinement étroit, cela favoriserait le processus de rétablissement du saumon de l'Atlantique?
    Nous pensons qu'il y a probablement dans l'aquaculture et les exploitations salmonicoles actuelles une série d'événements qui affectent le saumon sauvage.
    On a repoussé les limites jusqu'à ce qu'une goutte fasse déborder le vase. J'ignore dans quelle mesure nous devrons intervenir pour régler le problème, mais plus nous en ferons, meilleures seront nos chances de réussite. Tout ce que nous pouvons faire pour assainir l'industrie de l'aquaculture ne peut être que bénéfique.
    Dans le même ordre d'idées, savez-vous si, dans la région atlantique, le pou de mer oppose une résistance croissante à des pesticides comme le Slice?
    Oui. Actuellement, nous sommes dans une situation critique; nous testons des produits chimiques de substitution au Slice, parce que ce pesticide n'est plus aussi efficace qu'auparavant. Il existe des preuves de résistance croissante dans cette région.
    Merci.
    Pour conclure, à votre avis, quelles mesures devrait prendre immédiatement le ministère des Pêches et des Océans pour prévenir l'extinction du saumon de l'Atlantique?
    La première mesure, que nous avons déjà prise, concerne ces banques génétiques. Une banque génétique contient le patrimoine génétique d'un certain nombre de saumons de rivière de l'intérieur de la baie de Fundy, que l'on a mis dans des écloseries de saumons et qui contribuent à maintenir les populations de poissons grâce à l'élevage. Cela permet de conserver la diversité génétique et de repeupler les rivières au fil du temps.
    Nous devons maintenir le cap sur une longue période. Actuellement, il n'existe pas de financement garantissant que ce sera possible. Le ministère des Pêches et des Océans s'est efforcé, année après année, de réunir les fonds en pigeant dans les budgets internes pour atteindre cet objectif.
    Notre problème, c'est que nous avons suivi le processus de la LEP, établi une liste des espèces menacées en vertu de cette loi, mais que nous arrivons maintenant au bout de ce qu'il est possible de faire. Nous en sommes à un point où il faut absolument prendre des mesures. Nous ne disposons pas des ressources garantissant que ces plans d'action pourront être mis en oeuvre.
    Je vous remercie pour vos réponses.
    Je laisse le temps de parole qui me reste à mon collègue.
    Bonjour, monsieur Quinney, je suis content de vous voir.
    M. Terry Quinney: Bonjour, monsieur Hyer.
    M. Bruce Hyer: Dans la partie concernant les programmes de rétablissement, sous le point 7, vous dites: « L'O.F.A.H. recommande l'élaboration de critères et d'un cadre d'évaluation efficace pour l'analyse de l'impact socioéconomique de l'inscription d'une espèce sur la liste ou de la mise en oeuvre d'un programme de rétablissement. » J'espère que je vous ai bien cité, mais j'aimerais avoir des précisions.
    Il semblerait y avoir consensus, chez les témoins que nous avons entendus mardi, sur la nécessité de se concentrer sur des données scientifiques objectives, sans faire d'analyse socioéconomique de l'inscription d'une espèce sur une liste, pour déterminer quels sont les habitats à risque et dans quel état sont les espèces. L'analyse de l'impact socioéconomique devrait se faire à l'étape de la planification du rétablissement. Autrement dit, d'un point de vue politique, on pourrait décider que le jeu n'en vaut pas la chandelle, financièrement parlant, ou trouver que ce n'est pas vraiment nécessaire ou trop cher — et que ce pourrait être sujet à controverse. Heureusement, les données scientifiques, même si elles sont imparfaites, ne suscitent pas tant de controverse.
    Pourriez-vous nous expliquer ce que vous vouliez dire?
    Oui, et merci pour la question.
    Je suis chercheur scientifique de formation. Ma spécialité est la biologie, mais je reconnais totalement la validité des sciences économiques et de la sociologie. Ce sont des sciences tout aussi légitimes que la biologie et l'écologie.
    Nous disons au comité que, sans perdre notre objectif de vue, qui est, dans ce cas-ci, le rétablissement de certaines espèces, il faut prendre en compte les données socioéconomiques dès le début du processus, et pas à la fin, parce qu'elles sont tout aussi pertinentes et importantes que les données écologiques.
(1625)
    Je regrette, mais je ne partage pas votre opinion; merci quand même d'avoir apporté ces précisions. Je n'ai jamais considéré l'économie comme une science, personnellement.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Hyer?
    Je n'ai pas d'autres questions.
    D'accord. Merci.
    Monsieur Calkins, c'est à vous que reviennent les sept dernières minutes de ce premier tour.
    Très bien, merci.
    J'ai beaucoup apprécié le témoignage d'aujourd'hui. Je l'ai trouvé très encourageant. Je crois que tous les Canadiens veulent que nous protégions l'intégrité écologique et la biodiversité de notre pays. Je pense que chacun des témoins que nous avons entendus sera d'accord là-dessus. Mais je crains que la Loi sur les espèces en péril... Quand on lit le titre « Loi sur les espèces en péril », ça sonne bien, mais quand on y regarde de plus près, on se rend compte, en fait, qu'il y a des espèces, des sous-espèces, des variétés et des populations géographiquement distinctes d'animaux. Selon moi, on finit par s'y perdre avec tous ces détails; mais je trouve, monsieur Quinney, que vous nous avez aidés à y voir plus clair à ce chapitre.
    Je vais vous donner un exemple. Lorsque j'étais technicien en pêches, en Alberta, nous nous occupions des populations de doré jaune. On pouvait dire que dans les différents lacs — parce que nos lacs ne sont pas reliés par des rivières autant que c'est le cas en Ontario —, les espèces de poissons ont été séparées les unes des autres pendant une période assez longue, de sorte qu'on pouvait affirmer, d'un point de vue scientifique, qu'il s'agit de populations génétiquement distinctes, en dépit du fait que biologiquement parlant, elles peuvent sans doute être croisées et produire une descendance fertile, ce qui est la définition biologique d'une espèce.
    La province de l'Alberta, avec l'héritage des pêches que lui a légué le gouvernement du Canada, était responsable de la gestion de ces populations de doré jaune, mission dont elle s'est acquittée. Lorsque la surpêche a été telle que ces populations ont été pratiquement décimées, nous avons introduit des pratiques de gestion interdisant la pêche ou exigeant la remise à l'eau de certaines espèces. Vous savez comment cela fonctionne.
    En même temps, comme vous l'avez justement souligné, quiconque lit attentivement la loi pourrait dire qu'une espèce de doré jaune, dans un lac isolé, qui est en dessous d'un niveau de population donné, peut être considérée comme une espèce en péril et ajoutée à la liste. Je crois que la question que vous posez est de savoir si cela vaut la peine de se fixer comme objectif premier de consacrer temps, efforts et ressources à la gestion et à la surveillance des populations au niveau provincial.
    Oui, monsieur, vous avez bien compris. Il faut être extrêmement prudent et veiller à ce que les rares ressources, qu'elles soient humaines ou financières, soient réservées pour les secteurs les plus importants. Si, par exemple, la province de l'Alberta dans son ensemble possède une population de doré jaune globalement saine, et qu'il y a des problèmes dans des régions données, je suis d'accord avec vous pour reconnaître que la LEP n'est pas l'instrument qui permettra de régler les problèmes en question. Qui plus est, s'il fallait utiliser un instrument quelconque, la LEP ne serait pas le bon.
    Enfin, nous voulons, une fois de plus, assurer non seulement nos membres... C'est vrai que tous les Canadiens veulent que nous protégions la nature, les poissons et la vie sauvage. Je crois que la LEP est un symbole pour les Canadiens, mais dans un certain sens, c'est un symbole de l'échec de notre société à protéger adéquatement les espèces et les habitats. C'est la raison pour laquelle j'ai insisté sur le fait, au nom de mon organisation, que nous devions maintenir les 95 p. 100 d'espèces restantes et leur habitat en bon état de conservation pour que dans 50 ans, nous n'ayons plus besoin d'une LEP. C'est ce que nous devrions viser.
    Je suis entièrement d'accord avec vous. Je trouve que c'est un objectif noble, c'est sûr. J'aimerais vous parler davantage parce que j'attache beaucoup d'importance aux organisations comme la vôtre, la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario. Je suis également ancien agent de conservation. J'ai travaillé en étroite collaboration avec différentes organisations de l'Alberta, d'où je suis originaire, comme Trout Unlimited et l'Alberta Fish and Game Association.
    Nous avons passé beaucoup de temps, sans vouloir manquer de respect à qui que ce soit, à parler de l'importance des connaissances traditionnelles autochtones en la matière, et c'est bien expliqué dans la loi. Ce qui n'est pas bien documenté, par contre, c'est le rôle extraordinaire que jouent, à mon avis, différentes organisations de conservation. Trout Unlimited, la Fondation du saumon du Pacifique, la Fédération du saumon Atlantique et la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario ne sont pas citées. On fait mention d'autres types d'organisations, davantage scientifiques et universitaires, mais pas autant d'organismes qui oeuvrent sur le terrain, comme le vôtre.
    Pourriez-vous nous recommander des changements, dans la loi ou la législation, qui forceraient le ministre à faire intervenir des organisations comme la vôtre dans le rétablissement des espèces ou dans l'évaluation de la liste?
(1630)
    J'aurais peur d'attendre un changement réglementaire ou législatif. Je pense que si le gouvernement en avait la volonté, les ministères concernés auraient pour politique d'appeler des organisations comme Trout Unlimited, la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario, Ducks Unlimited, ou je ne sais qui d'autre, en plus de représentants des populations autochtones vivant dans les régions visées. Selon nous, il faudrait que ces organisations et les peuples autochtones soient présents aux tables de discussions sur le rétablissement. La connaissance du milieu est extrêmement importante pour le rétablissement réussi des espèces.
    Je suis d'accord avec vous.
    Monsieur Whoriskey, je crois que vous avez tapé dans le mille, et vous avez éveillé ma curiosité. Je serais intéressé de savoir ce que certains autres témoins ici présents pensent de votre commentaire selon lequel il faut donner une orientation à cette loi. Le processus d'inscription d'une espèce sur la liste répond à des normes très strictes, mais on n'est pas aussi normatif et clair, dans la loi, quant aux mesures à prendre à l'étape du rétablissement. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.
    De mon point de vue, lorsque les Canadiens entendent « Loi sur les espèces en péril », ils pensent à des espèces comme la grue blanche, en Alberta, qui a bénéficié d'un plan de rétablissement très solide, avant même l'adoption de la Loi sur les espèces en péril. C'est un exemple probant des efforts qui peuvent être faits en l'absence d'une loi de ce genre. Toutefois, nous avons maintenant une mesure législative, et nous essayons de la bonifier. J'aimerais savoir si, globalement, vous pensez que nous consacrons trop de temps et d'efforts à l'établissement d'une liste d'espèces à protéger et pas assez à la prise de décisions socioéconomiques au début du processus, et que nous devrions passer moins de temps à l'établissement de la liste, de façon à pouvoir identifier les espèces dont les populations doivent être rétablies en priorité, et consacrer les ressources dévolues au processus d'établissement de la liste ou à d'autres aspects de cette mesure législative au rétablissement des espèces.
    Quelqu'un veut-il intervenir là-dessus?
    Désolé, je croyais que votre question s'adressait à M. Whoriskey.
    Je ne sais pas très bien à qui s'adresse la question.
    Je suis d'accord avec vous, et je voudrais savoir si d'autres témoins partagent votre point de vue.
    Absolument, désolé.
    D'accord, c'est bien.
    Nous allons maintenant entamer une série de questions et réponses de cinq minutes.
    Monsieur Trudeau, vous avez la parole.
    Je vous remercie beaucoup, monsieur le président.
    Pendant la dernière série d'exposés sur la LEP, nous avons entendu un groupe de scientifiques parler de l'importance d'examiner les différentes données scientifiques convergentes et divergentes, par rapport à l'analyse socioéconomique, et de rendre les consultations et les délais d'établissement des rapports plus clairs, transparents et ouverts.
    Je comprends la résistance de M. Quinney à l'égard d'un processus qui ne s'est pas révélé particulièrement fructueux jusqu'à présent. Les chiffres que vous avez avancés sont très éloquents. Mais nous avons entendu que cela fait maintenant cinq ans que nous travaillons là-dessus, que nous avons parcouru beaucoup de chemin et qu'il va y avoir une augmentation du nombre de plans d'action et de stratégies de rétablissement. Cela aura pris tout ce temps.
    Ma question est plus spécifique. Pourriez-vous me dire en quoi, en théorie, les efforts d'organisations comme la vôtre, constituées de personnes actives et engagées, qui s'intéressent beaucoup, pour des raisons personnelles ou à des fins récréatives, à la protection des espaces naturels et à l'habitat des espèces sauvages, entrent en contradiction avec un cadre réglementaire rigoureux et clair? Ou est-ce simplement une question d'application pratique? Parce que comme vous l'avez dit, si on ne va pas au devant des gens pour leur demander de s'investir, le processus ne sera pas efficace.
(1635)
    Merci.
    Je suis d'accord avec vous sur le dernier point. Lorsque les relations nécessaires ne sont pas bien établies, il en résulte de l'inefficacité et du gaspillage.
    En fin de compte, l'essentiel de notre propos est que, peu importe quel parti est au pouvoir, il faut que la préservation de la nature, des habitats et des espèces soit une priorité à longueur d'année, chaque année du millénaire. Autrement, nous sommes malheureusement condamnés à répéter nos erreurs, et la liste ne fera que s'allonger.
    Alors, voici ma prochaine question. J'aimerais que vous me donniez, au-delà de l'amélioration des consultations, des exemples concrets de mesures auxquelles la Fédération des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario serait heureuse de participer si la Loi sur les espèces en péril pouvait être davantage orientée vers l'action, si je puis dire.
    D'accord, merci. Voici un bref exemple concret. Si vous prenez connaissance de nos neuf recommandations, vous verrez parmi elles que nous voudrions être invités à faire partie des équipes des programmes de rétablissement, pourvu qu'il s'agisse d'une espèce et d'un emplacement géographique appropriés. Nous pensons que nous serions vraiment en mesure d'aider le gouvernement fédéral à atteindre l'objectif de redonner le plus vite possible de la vigueur aux populations d'animaux.
    Nous pouvons non seulement vous offrir la contribution de nos bénévoles dévoués et les ressources qu'ils apportent avec eux, mais également la contribution de notre personnel hautement compétent. Et ce n'est pas seulement la Fédération des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario qui serait en mesure de fournir ce genre d'aide.
    Mais si nous faisons appel à vous, pouvez-vous me donner un exemple de votre contribution éventuelle? Seriez-vous prêts à vous rendre sur place pour ensemencer des lacs et des cours d'eau si on vous le demandait? Mettriez-vous des écriteaux à certains endroits pour faire savoir à vos membres qu'ils ne doivent pas y chasser, par exemple? Quelle pourrait être concrètement votre contribution?
    Oui, monsieur, vous venez de mentionner des contributions que nous pourrions faire. Comme je l'ai dit en commençant, nous nous consacrerions à certaines espèces et à certains milieux. Je vous dirais bien franchement que ça dépendrait des exigences résultant du plan de rétablissement, dans sa forme définitive. Oui, nous voudrions contribuer aux efforts, par exemple comme vous venez de le dire.
    Il ne reste plus de temps.
    Monsieur Warawa.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être présents. Je pense que nous trouvons tous vos témoignages très intéressants.
    Je repense à l'époque où le projet de Loi sur les espèces en péril a été présenté et débattu. Monsieur Quinney, vous avez dit, dans votre exposé, que vous nous aviez prévenus du risque de créer une bureaucratie qui consommerait des ressources importantes et limitées.
    Lors du débat concernant le projet de Loi sur les espèces en péril, à l'époque, certains avaient dit craindre, entre autres, la création d'une telle bureaucratie. On avait fait valoir également la nécessité de verser des indemnités équitables aux agriculteurs. On s'inquiétait beaucoup au sujet des indemnités et de la nécessité de prouver l'intention coupable. Or, nous voici aujourd'hui à discuter des mêmes inquiétudes, qui subsistent.
    La plupart des gens disent toutefois que la Loi sur les espèces en péril ne devrait pas être abolie. Elle devrait être conservée et améliorée. Monsieur Quinney, vous nous remettez des recommandations. J'imagine que ces recommandations sont faites en tenant pour acquis que la Loi sur les espèces en péril sera maintenue. Est-ce que je me trompe?
(1640)
    Vous ne vous trompez pas, monsieur. Nos recommandations ne comprennent pas l'abolition de la loi. Il faut s'en servir.
    C'est bien.
    J'aimerais que nous parlions des facteurs socioéconomiques. Vous avez dit, si je vous ai bien compris, qu'il faudrait en tenir compte dès les premières étapes. Le ministère nous a expliqué que, pour déterminer qu'une espèce est en péril, le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada s'appuie sur les données fournies par la science, qui indiquent une baisse inquiétante de la population. Par la suite, le dossier est renvoyé au ministre.
    Au début, la démarche est strictement scientifique. Les données viennent des biologistes, qui ne tiennent pas du tout compte des facteurs socioéconomiques dans leur décision. Ils se bornent à déterminer qu'une espèce pourrait être en danger. Les facteurs socioéconomiques sont pris en compte lorsque le dossier est entre les mains du ministre et du Cabinet. Puis, à la dernière étape, lorsque vient le temps de délimiter l'habitat essentiel, les facteurs socioéconomiques ne sont pas considérés non plus.
    Pourriez-vous nous expliquer à quelles étapes, c'est-à-dire au début, au milieu ou à la fin, vous pensez qu'il faudrait en tenir au compte?
    Nous savons d'expérience que les gens qui sont susceptibles d'être touchés le plus directement, qu'il s'agisse des agriculteurs, des Autochtones ou des pêcheurs commerciaux, ont acquis chèrement une connaissance approfondie des habitudes, des comportements et des habitats des espèces concernées. Selon nous, leur point de vue pourrait être utile au comité sur la situation des espèces en péril au Canada, à l'étape où il s'agit de déterminer s'il faut mettre une espèce sur la liste.
    En fin de compte, nous faisons partie des écosystèmes. Qu'une espèce soit en péril ou non, les animaux doivent apprendre à vivre aux côtés des êtres humains s'ils veulent survivre. En fait, ils ont besoin de nous. C'est ainsi que je résumerais le plus brièvement possible notre argument pour l'inclusion, dès le départ, de toute l'information pertinente et de tous les acteurs concernés.
    Les scientifiques que nous avons entendus avant vous ne sont pas favorables à l'idée de tenir compte des facteurs socio-économiques, en particulier au début. Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de prendre connaissance des témoignages précédents, mais j'aimerais savoir pourquoi les scientifiques ne veulent pas inclure cette information au départ, selon vous.
    Je ne sais pas. Je ne voudrais pas me servir du bilan de l'application de la Loi sur les espèces en péril pour faire des conjectures. Toutefois, je sais que la science fonctionne à partir de données et que, dans de nombreux cas, l'expérience acquise avec cette loi nous montre qu'il faut beaucoup de temps pour produire les données qui suffiront à étayer la désignation d'une espèce ou sa non-désignation. Dans certains cas, le temps et les ressources nécessaires doivent être qualifiés d'excessifs. Que doit-on faire en attendant?
    Le président: Monsieur Ouellet.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Quinney, vous m'avez presque fait tomber de ma chaise, tout à l'heure, vous qui êtes un scientifique. Il faut dire que, d'après ce que j'entends de vous, en chauffant le froid et le chaud en même temps, il est un peu difficile de savoir exactement où vous vous situez par rapport à la loi.
    Vous avez dit que, d'ici 50 ans, on ne devrait plus avoir besoin d'une telle Loi sur les espèces en péril. Il me semble que cela ne fonctionne pas avec l'évolution sur la planète Terre actuellement, en raison de la pollution et de tous les changements climatiques. Il me semble qu'on en aura plus besoin dans 50 ans que moins. Il me semble que cette loi, au départ, devait être faite surtout pour la biodiversité. C'était en vue de faire beaucoup plus que de sauver une espèce de poisson rentable pour les pêcheurs.
    Vous vous fondez beaucoup sur le fait que des bénévoles peuvent être une aide extraordinaire. J'en conviens, mais ils peuvent être aussi pires que des scientifiques. J'ai vu quelque chose, il y a quelques années. Heureusement que la Loi sur les espèces en péril existait déjà, il y a trois ou quatre ans. Dans la baie Missisquoi, les tortues à carapace molle, uniques sur Terre, étaient menacées d'extinction, selon les scientifiques. Cependant, tous les pêcheurs voulaient s'en débarrasser, parce qu'elles mangeaient les oeufs de poisson. Si on avait laissé faire les bénévoles, il n'y aurait plus de tortues à carapace molle. Donc, cela serait une perte pour la biodiversité.
    J'ai vu aussi, dans le parc de La Vérendrye, des bénévoles enlever des carpes allemandes, qui étaient de superbes poissons, et les jeter sous prétexte qu'elles mangeaient les oeufs des dorés. Donc, peut-on se fier aux bénévoles qui ont des intérêts qui peuvent être, en plus, à la mode? La mode du doré existait alors, mais pas celle de la carpe. Aujourd'hui, on penserait peut-être que la carpe est meilleure, parce qu'elle nettoie mieux les lacs.
    Êtes-vous capable d'éclaircir votre position sur cette loi qui est controversée, mais qui, en même temps et à mon avis, est absolument nécessaire? Mettez en contexte qu'elle ne date que de cinq ans.
(1645)

[Traduction]

    Merci beaucoup pour vos commentaires, monsieur.
    Je suis peut-être encore un idéaliste, mais d'un point de vue pragmatique, je suis d'accord avec vous pour dire que, peu importe le titre de la loi, il faut la faire respecter. Les mesures pour appliquer la loi sont une bonne chose. Je suis également d'accord avec vous pour dire que, parfois, les gens peuvent avoir des intentions honorables et vouloir faire de leur mieux pour protéger la nature dans leur cour, mais ce n'est pas toujours ce qu'ils font. Certains ne veulent même pas le faire. Voilà pourquoi il nous faut des mesures d'application de la loi, peu importe qu'elle s'appelle la Loi sur les espèces en péril ou qu'elle porte un autre nom.
    Votre question me donne l'occasion de réitérer ma demande à l'endroit du gouvernement fédéral pour qu'il rétablisse le financement. Il faut remédier par exemple aux compressions effectuées au ministère des Pêches et des Océans dans l'ensemble du bassin ontarien des Grands Lacs, de manière à privilégier une approche globale, grâce à laquelle on ne sera pas obligé de s'en remettre uniquement à la Loi sur les espèces en péril pour assurer la vigueur des espèces de poissons et d'animaux sauvages, au pays.

[Français]

    La Loi sur les espèces en péril, LEP, n'est-elle pas importante quand on vient pour protéger des espèces qui ne sont pas des espèces de pêche sportive ou des espèces rentables, comme l'ensemble des grenouilles, l'ensemble des petites mouches et bibittes, qui, dans la composition du système écologique, sont absolument nécessaires? Vous dites même dans votre texte que si l'on n'a pas assez de données scientifiques, on ne devrait pas le faire.
    Ne pourrait-on pas seulement se baser sur notre constat, à savoir que les petites grenouilles sont en péril, plutôt que d'attendre que tous les scientifiques nous mettent en garde contre l'extinction qui les menace?

[Traduction]

    Monsieur, je souscris à ce que vous venez de dire, c'est-à-dire qu'il faut protéger les écosystèmes en entier, y compris toute la chaîne alimentaire. La Loi sur les espèces en danger fait partie du dispositif de protection, mais c'est le dernier recours, selon nous. D'autres moyens doivent être employés avant la loi. Il faut s'assurer que les habitats des grenouilles sont adéquatement protégés. C'est l'essence même de la protection de la biodiversité. Les politiques fédérales et provinciales sont-elles adéquates, au pays, pour que l'on n'ait pas à recourir à la Loi sur les espèces en péril?

[Français]

    Est-ce qu'il me reste encore du temps?
(1650)

[Traduction]

    Il ne vous reste plus de temps.
    Nous continuons notre tour de table.
    Monsieur Woodworth.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins qui sont présents aujourd'hui. La démocratie est très bien servie lorsque des gens prennent le temps d'informer les législateurs.
    Au fil des témoignages, non seulement aujourd'hui, mais depuis que nous avons commencé l'étude de la Loi sur les espèces en péril, il y a quelques mois, je me rends compte que cette loi revient à essayer de faire la quadrature du cercle. Toute activité humaine est incompatible avec le maintien d'un environnement en parfait état, alors il faut plutôt essayer de trouver le juste équilibre. Il se trouve au pays 33 millions d'habitants qui coexistent sur le territoire avec diverses espèces. Nous devons trouver le juste équilibre.
    Je voudrais aborder un sujet dont il n'a pas été question aujourd'hui, mais qui m'intéresse parce que c'est l'une des plus grandes difficultés relatives à la Loi sur les espèces en péril et parce que le mémoire du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut en parle.
    Monsieur d'Eça, il est écrit, dans votre mémoire, que seulement 16 habitats essentiels, ou 17 p. 100, ont été définis. Premièrement, je voudrais connaître les paramètres. Je tiens pour acquis qu'il s'agit d'une statistique pour tout le Canada, et non uniquement pour le Nunavut. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact. Nous avons puisé cette information dans le Rapport Le Point du Commissaire à l'environnement et au développement durable de la Chambre des communes, publié en 2008.
    Bien.
    Je m'intéresse à cette statistique parce que, manifestement, si nous ne savons pas quel est l'habitat essentiel à une espèce, il nous est plutôt difficile de déterminer quelles mesures nous devons prendre pour la protéger. C'est une question plutôt scientifique, mais les témoins qui sont présents aujourd'hui ont tous acquis de l'expérience relative à l'application de la Loi sur les espèces en péril.
    Alors, deux questions se posent, mais je vais vous les poser une à la fois. Premièrement quelles sont les difficultés dont vous avez eu connaissance, relativement à la définition d'un habitat essentiel? Tenons-nous-en à cette question pour un instant, et s'il nous reste du temps, je vous demanderai quelles solutions vous voyez.
    Et puisque j'ai commencé avec M. d'Eça... Je sais que vous êtes un avocat, et non un scientifique, mais évidemment, les avocats en savent un peu sur un grand nombre de sujets. Auriez-vous quelques mots à nous dire sur les difficultés relatives à la définition des habitats essentiels?
    Oui, je peux vous en parler un peu.
    Premièrement, vous avez dit que c'était une question scientifique. C'est peut-être vrai, mais c'est une question qu'il faut soumettre aux Autochtones. Mon collègue dira, je crois bien, qu'il faut la soumettre à des organismes et des particuliers qui connaissent leur milieu.
    À propos des difficultés comme telles, la première est de trouver des interlocuteurs valables et de leur parler. Il faut bien sûr faire intervenir les scientifiques. Mais, par exemple, dans le cas du carcajou, c'est un animal que récoltent les Inuits et qu'ils côtoient dans leur écosystème, du moins au Nunavut, depuis des milliers d'années. Alors, les Inuits ont beaucoup de choses à dire sur l'emplacement de l'habitat essentiel, le type de protection qui devrait être offert, et ainsi de suite.
    Nous devons presque demander à nos témoins de s'exprimer de façon télégraphique à cause des limites de temps strictes, alors je passe à la question des consultations. Qui doit-on consulter? Comment élargir suffisamment les consultations?
    Voudriez-vous parler d'une autre difficulté? Préférez-vous que je passe à un autre témoin?
    Non. Vous pouvez passer à quelqu'un d'autre.
    D'accord.
    Monsieur Quinney, avez-vous quelque chose à dire sur cette question?
    Oui, je voudrais vous dire que les difficultés rencontrées par les scientifiques, quand vient le temps de définir un habitat essentiel, se résument au manque de données empiriques. Pour beaucoup d'animaux, parmi les 450 espèces désignées jusqu'à maintenant, aucune donnée n'a encore été recueillie. Il n'en est pas encore question dans l'univers scientifique.
    Donc, pour délimiter les habitats essentiels, il faut déterminer quel est le meilleur moyen d'obtenir les données empiriques, de telle sorte que les scientifiques puissent faire leur travail. C'est l'une des difficultés à surmonter.
(1655)
    Merci.
    Puisque je dispose de peu de temps et que vous m'avez donné chacun...
    Il ne vous reste plus de temps, monsieur Woodworth, alors je cède la parole à un autre avocat.
    Monsieur McGuinty.
    Je voudrais faciliter le travail de mes collègues. M. Trudeau pourrait continuer pour une ou deux minutes. Serait-ce possible, monsieur le président?
    D'accord, monsieur McGuinty.
    Monsieur Trudeau.
    Merci.
    Permettez-moi de m'adresser de nouveau à M. Quinney. Vous avez parlé tout à l'heure d'une question sur laquelle je voulais revenir au cours du premier tour de table. Vous dites que, lorsqu'on tient compte des facteurs socio-économiques, on peut en même temps obtenir de l'information en vue de protéger les espèces ou de faciliter leur rétablissement. Ce serait utile d'un point de vue scientifique.
    Je vois bien que l'économie et les populations humaines peuvent être mises à contribution pour aider les espèces à se rétablir, mais je ne suis pas certain qu'il faille mêler cette contribution à la collecte de données scientifiques. Il me semble qu'il faut avant tout disposer d'une solide base de connaissances purement scientifiques.
    Pourquoi ne pas essayer? Essayons, pour voir.
    Votre réponse me paraît futée...
    Des voix: Oh, oh!
    M. Justin Trudeau:... toutefois, je dois dire que je ne suis pas certain de bien voir comment on s'y prendrait.
    Ce n'est pas une réponse futée. Je suis désolé, mais je n'essaie pas du tout de faire le malin. Nous proposons une solution de rechange à ce qui s'est passé au cours des six dernières années.
    Faisons-nous actuellement du mieux que nous pouvons? Nous croyons que des améliorations pourraient être apportées et nous faisons des suggestions pour qu'on y arrive. Nous vous présentons les neuf recommandations concrètes que vous avez sous les yeux.
    Merci. Je parlais simplement d'un point précis. Je ne remets pas en question vos recommandations.
    N'importe qui peut poursuivre, n'est-ce pas?
    Il me semble qu'il est nécessaire d'obtenir des données scientifiques rigoureuses pour déterminer si une espèce doit être mise sur la liste précisément parce qu'il y a des intérêts économiques en jeu et peut-être même des différends entre le gouvernement fédéral et les provinces, qui risquent de vouloir chacun défendre leurs champs de compétences. Autrement dit, lorsque vient le temps d'établir un plan de rétablissement pour une espèce, nous devons vraiment nous assurer de disposer de données fiables qui nous permettront de répondre à la pluie de critiques en provenance des gens qui ont des intérêts économiques à faire valoir. Il me semble que, lorsqu'on regarde la question de près, on s'aperçoit que c'est un peu comme les règles comptables dans les grandes organisations. Il faut vraiment se protéger. Voilà pourquoi, il me semble, nous devons pouvoir nous appuyer sur des données scientifiques rigoureuses.
    Dans une optique créative, qui n'est pas celle du scientifique, ni de l'avocat, je me demande s'il serait possible d'établir un système prévoyant des mécanismes qui pourraient être assouplis lorsqu'il n'y aurait pas vraiment de forts intérêts économiques en jeu. La démarche scientifique pourrait être un peu moins rigoureuse dans les cas où on ne risque pas de voir des gens s'opposer au plan de rétablissement pour défendre leurs intérêts économiques. Quelqu'un aurait-il un mot à dire là-dessus?
    Deuxièmement, s'il reste du temps, je voudrais savoir si, malgré l'expertise et le souci pour les espèces vivantes que je reconnais aux pêcheurs sportifs et aux chasseurs, ils n'auraient pas tendance à mettre l'accent sur certaines espèces et à en négliger d'autres, comme les escargots, si on leur confiait entièrement la responsabilité de protéger les espèces? J'imagine que vous vous intéressez davantage à certaines espèces.
    Voilà mes deux questions. Je laisse aux témoins qui le veulent le loisir d'y répondre.
    Premièrement, je crois qu'il est nécessaire d'établir des priorités dans l'utilisation des ressources. Le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut oeuvre dans un contexte de revendications territoriales et a tendance à tenir compte des besoins sociaux, économiques et culturels des Inuits.
    Mais, quand vient le temps de déterminer si une espèce est en péril ou donne lieu à des inquiétudes, le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut met entièrement l'accent sur la protection. Nous nous fions aux données qui peuvent nous être présentées pour déterminer si une espèce est à risque.
    Bien entendu, nous tenons compte à la fois des données scientifiques et des importantes connaissances des Autochtones.
(1700)
    Monsieur, pour répondre à votre question au sujet des priorités de la Fédération des pêcheurs et des chasseurs de l'Ontario, je dirais qu'il est vrai que nos membres aiment chasser et pêcher. Ce sont toutefois des naturalistes de la pêche et de la chasse, car ils adorent que la nature se porte bien, y compris les escargots.
    Ils ont financé les mesures de rétablissement non seulement des animaux et des poissons qu'ils chassent et pêchent, mais aussi d'autres espèces ayant une valeur écosystémique, comme les tortues ou le faucon pèlerin, qu'ils ne chassent pas. Ils aiment aussi ces animaux.
    Monsieur Armstrong.
    Je crains presque de prendre la parole parce qu’après avoir parlé, on semble disparaître de ce côté.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Scott Armstrong: Je vais faire de mon mieux et je verrai si je m’en sors intact.
    Monsieur Whoriskey, d’après le soleil qui brille derrière vous, je comprends que c’est une autre journée resplendissante dans le Canada atlantique. Je serai de retour chez moi plus tard ce soir.
    En ce qui concerne le poisson, vous avez dit que le saumon atlantique frôlait le taux de mortalité dans les endroits qui troublent beaucoup cette espèce quand elle entre dans le climat marin. Vous avez parlé de certaines mesures qu’a déjà prises le ministère des Pêches et des Océans pour préserver le caractère génétique de cette faune.
    Vous avez parlé d’un financement annuel durable pour conserver les banques génétiques de poissons existantes. De combien d'argent aurions-nous besoin? Êtes-vous au courant?
    On parle probablement de quelques centaines de milliers de dollars par année pour conserver les banques de gènes vivants pour les 32 populations présentes dans ces zones. Par ailleurs, j’aimerais que nous commencions à nous attaquer à certains problèmes fondamentaux, dont la question de l'habitat. Les espèces disparaissent quelque part dans l'océan.
    Le Canada s’est déjà essayé en ce sens, quoiqu’un peu indirectement. Il est un chef de file mondial dans la technologie dite de télésurveillance sonique. Diverses entreprises au pays ont acquis la capacité de retracer les animaux jusque dans les océans. Grâce au Fonds de collaboration internationale de la Fondation canadienne pour l'innovation et au financement du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, un projet basé à l'Université Dalhousie et appelé « Ocean Tracking Network » est en train de relier les points critiques des océans du monde. Il serait en mesure de détecter les poissons marqués d’une étiquette. Une partie de la capacité de suivi de l’Ocean Tracking Network va être installée dans la baie de Fundy, dans le but précis d’examiner ce qu’il advient des saumons atlantiques en voie de disparition. Ce qu’il faut faire, c’est obtenir du financement supplémentaire pour retracer quelques poissons provenant de ces cours d'eau jusque dans ces zones. Il s’agit probablement de quelques autres centaines de milliers de dollars par année, seulement pour les technologies.
    Ma circonscription borde la baie de Fundy, et nous avons beaucoup de côtes. Parmi les récentes mesures que l’on a prises pour aider à protéger le saumon atlantique, on compte bien sûr l'ouverture des vannes de la rivière Petitcodiac. Cette question suscite également des préoccupations socioéconomiques, car même si la rivière Petitcodiac est au Nouveau-Brunswick, une partie des électeurs de ma circonscription craignent que ce que contient cette eau cause des dommages à l’environnement. Il y a une décharge le long de cette rivière et d’autres choses qui pourraient porter atteinte à divers mollusques et crustacés et aux poissons de fond de la baie. Mes électeurs aimeraient donc être indemnisés.
    Avez-vous des observations à faire quant aux répercussions que peut avoir l'ouverture des vannes de la rivière sur ce qui nous préoccupe le plus à l’égard de l’environnement dans la baie de Fundy?
    Le projet se déroule correctement. Le plan est d'entreprendre un essai de deux ans. Un programme de surveillance est en place pour tenter de résoudre certaines de ces préoccupations. Au lieu de spéculer et d’indemniser des gens pour un impact qui pourrait ne pas se manifester, nous allons d’abord déterminer s’il y a réellement des répercussions actuellement.
    Personnellement, je crois qu’une fois les ponts-jetées ouverts, nous allons observer des améliorations plutôt que des détériorations, notamment en ce qui concerne la pêche au homard, comme certains l’ont laissé entendre. À ce stade-ci, je préférerais ne pas dépenser l'argent des contribuables en versant un second salaire à quelqu'un qui gagne plus d’argent que jamais auparavant.
(1705)
    Merci pour vos observations.
    Ainsi, diriez-vous que certaines des mesures prévues dans le cadre de cette initiative constituent peut-être un usage très positif et légitime de la LEP?
    C'est une mesure très positive. Quelque 35 p. 100 des habitats disponibles pour le saumon de l’intérieur de la baie de Fundy se trouvaient dans la rivière Petitcodiac comme telle. Cette rivière clé est d'une importance capitale pour ce complexe de saumon en particulier. C'est donc très positif en ce qui a trait à cet avantage.
    Hier, au cours d’une rencontre, nous avons appris que déjà plus de 5 000 gaspareaux sont apparus dans les pièges à poissons de la rivière, où l’on effectue un suivi. Ils s’y rendent déjà. Une restauration de ce poisson anadrome en particulier va se produire naturellement. Il servira d'appât pour les pêcheurs de homard, ce qui est un avantage formidable pour la région. Cette mesure apporte donc déjà des effets positifs et elle va également avoir des avantages socioéconomiques.
    Ainsi, nous constatons déjà, après seulement deux courtes semaines d’essai, quelques retombées positives de l'application de cette loi.
    Tout à fait.
    Je vous remercie, monsieur Whoriskey.
    Monsieur d'Eça, merci pour votre exposé et votre mémoire. D’ailleurs, je vous remercie tous les trois de vos exposés.
    Je connais relativement bien les premières nations par expérience avec la nation Nisga'a sur la côte Ouest et, bien entendu, avec les Micmacs sur la côte Est. Traditionnellement, les connaissances sont transmises à l’oral de génération en génération. La tradition orale est fortement ancrée dans ces populations sur les deux côtes. Je n'ai pas d'expérience comme telle au Nunavut.
    Est-ce également le cas au sein des premières nations du Nunavut?
    Oui, c'est bien le cas au Nunavut. Il s'agit d'une tradition orale.
    En ce qui concerne cette tradition orale, vous avez dit que les personnes qui détiennent ces connaissances traditionnelles sont pour la plupart des aînés qui vont bien sûr nous quitter bientôt. Au Nunavut, les Autochtones ont-ils tenté de consigner ces connaissances traditionnelles, peut-être dans leur langue traditionnelle, pour préserver certaines d’entre elles?
    Oui. À Igloolik, sur l'île de Baffin, un centre de recherche recueille depuis de nombreuses années des connaissances traditionnelles. Les Inuits l’appellent Qaujimajatuqangit. Il y a beaucoup d'efforts individuels pour recueillir des connaissances traditionnelles partout au pays, et il en va de même pour le Nunavut. Rien n’est coordonné, mais l’organisation qui en recueille le plus serait le centre de recherche d'Igloolik, à mon avis.
    Merci. Votre temps est écoulé.
    Bienvenue, madame Boucher. Vous avez cinq minutes. Vous pouvez le partager avec quelqu’un d’autre si vous voulez.
    Je n’ai pas de questions.
    Scott, vous pouvez continuer.
    J'ai une question dans la même veine, monsieur d'Eça. Croyez-vous que ce serait pratique si, dans le cadre de notre examen de la LEP, nous recommandions une coordination quelconque entre tous les différents groupes qui consignent des connaissances traditionnelles autochtones au Canada? Ainsi, nous pourrions peut-être disposer d’un certain savoir-faire que nous pourrions consulter régulièrement au lieu de chercher quelqu'un aux quatre coins du pays. Selon vous, dans la nouvelle Loi sur les espèces en péril, serait-il bon d’inclure une recommandation quant à la coordination de tous ces éléments?
    Voilà qui reprend quelque peu notre recommandation quant à la création d’un institut du savoir traditionnel autochtone. Cependant, de nature, les connaissances traditionnelles sont souvent locales. Il faudrait donc que ce soit coordonné. Il faudrait assurément des normes pour la collecte des connaissances traditionnelles. À l'heure actuelle, c’est plutôt vaste, et un scientifique ou un adjoint doit souvent se rendre sur place pour recueillir les connaissances traditionnelles. Il existe des moyens très précis — et je pense qu'ils varient en fonction des différentes nations et de différents groupes autochtones — pour les recueillir le mieux possible. Nous devons donc traiter systématiquement la collecte du savoir traditionnel un peu comme nous le faisons pour la collecte des données scientifiques. Il ne s'agit pas simplement de visiter une collectivité et d’interroger le premier venu à propos des espèces qui lui viennent à l’esprit. L’exercice est beaucoup plus systématique et il tient davantage compte de la culture. Il faudrait donc assurément accorder plus d'attention à la collecte des connaissances traditionnelles.
    Nous avons un certain nombre de recommandations à vous présenter, et l'une d’entre elles vise la création d'un institut du savoir traditionnel autochtone.
    Plusieurs groupes de témoins ont soulevé la question des échéanciers et du besoin de procéder très rapidement et efficacement. Je crois que M. Quinney l’a également mentionné. Le processus dure une éternité et croule sous le poids énorme des étapes administratives. Cependant, en tant que parlementaires, nous devons trouver un équilibre, car il faut travailler le plus rapidement et efficacement possible, mais il faut aussi prendre le temps de mener des consultations. D’ailleurs, plusieurs groupes nous ont dit qu'il faut en mener davantage, en particulier auprès des premières nations.
    Monsieur d'Eça, avez-vous des observations quant aux recommandations à intégrer à la LEP pour qu’il y ait des consultations efficaces avec les premières nations?
(1710)
    Tout d'abord, je peux vous dire que le Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, un tribunal administratif dont le public est principalement constitué d'Autochtones, s’entend sur les mêmes préoccupations que vous soulevez relativement à la consultation et la capacité de réagir rapidement, notamment.
    La consultation est un problème sous-jacent, surtout au Nunavut, et il en est de même de la communication, de manière plus générale. Il n’y en a pas. On ne l'a pas mise en oeuvre correctement, ce qui a créé une méfiance à l'égard de la loi, alors qu’il ne devrait sans doute pas y en avoir. Il y a des malentendus.
    Ainsi, si le comité pouvait faire une seule chose, je dirais qu’il faudrait faire en sorte que la loi soit plus axée sur de bonnes communications et consultations.
    Merci.
    Monsieur Quinney, sur le même sujet, vous avez énormément parlé de la bureaucratie, du ralentissement du processus et d’une meilleure utilisation des ressources ailleurs. Vous avez également dit que votre organisation aimerait participer au processus, être davantage consultée et peut-être utiliser ses ressources à notre avantage. Je répète que par ailleurs, plus nous menons des consultations avec plus de groupes, plus les résultats se font attendre et plus il y a d’étapes administratives. Pourriez-vous nous expliquer comment équilibrer ces facteurs et comment débloquer le processus?
    Je suis désolé, mais je ne suis pas sûr de convenir de votre prémisse selon laquelle les choses ralentissent si l'on fait davantage de consultations. Il est extrêmement important que les bonnes personnes soient dûment consultées. Nous avons des exemples de très bonnes consultations, mais ce n’est pas le cas de la LEP.
    Je suis désolé, mais je rejette cette prémisse. Je crois que nous pouvons le faire.
    Pouvez-vous me donner un exemple d’une autre loi pour laquelle la consultation a été très efficace et dont nous pourrions nous inspirer?
    Je ne vais certainement pas parler de la Loi sur les espèces en voie de disparition de l’Ontario. Je ne vais pas mentionner ce sujet. Cependant, je vais parler de la Loi sur la protection du poisson et de la faune de l’Ontario et de la relation que des organisations comme la mienne ont avec les fonctionnaires du ministère des Richesses naturelles de la province, qui est chargé de superviser, de mettre en oeuvre et d'appliquer cette loi. C’est devenu une procédure d'exploitation standard pour le personnel, grâce à la bienveillance de leurs dirigeants et, en fin de compte, du gouvernement. Voilà un excellent exemple que je voudrais souligner
    Voilà qui met fin à notre deuxième série de questions. Nous avons le temps d’en faire une troisième. En fonction du temps qu’il reste, je propose que les interventions durent quatre minutes.
    Monsieur Trudeau, la parole est à vous.
    Merci.
    Monsieur Whoriskey, dans votre mémoire, vous dites être préoccupé par le prolongement de l'échéancier qu’a présenté le ministère des Pêches et des Océans et vous vous demandez combien de temps il faudra pour élaborer et finaliser les plans d'action. Selon vous, que manque-t-il? S’agit-il de ressources? Vous parlez d’affecter des ressources, probablement du financement et du personnel, à la partie de la LEP portant sur le plan d'action. Ou s’agit-il de la volonté politique, de la coordination, etc. qui va simplement prendre du temps pour bien faire les choses?
    J'aimerais connaître un peu plus votre avis quant aux moyens de répondre plus rapidement, tout en étant en mesure de protéger convenablement le saumon atlantique de ces rivières.
    Pour ce qui est du saumon atlantique de l’intérieur de la baie de Fundy, je crois que c’est vraiment une question de ressources. Nous savons que le problème est la survie en mer. Tout le monde en convient. Nous connaissons quelles sont les technologies capables d’attaquer le problème pour savoir où se trouve le lieu du crime, quand cela se produit et où s’en vont les saumons. Quand nous connaîtrons le lieu du crime, nous pourrons peut-être cerner les causes au moyen de corrélations entre les variables de l'environnement, les prédateurs de cette zone ou des facteurs semblables.
    À mon avis, ce que nous craignons, c'est qu'il n'y ait pas suffisamment de ressources au sein même du gouvernement pour y arriver. Que pouvons-nous faire avec cela?
(1715)
    Plus précisément, ces ressources serviraient à recruter des scientifiques pour mener des études et des recherches sur le terrain.
    Nous parlons de l'océan et d’un « lieu du crime », ce qui est évidemment plus une image qu'un terme concret, mais la situation finit tout de même par se produire. Y a-t-il des scientifiques qui sont disponibles pour cela, si le financement était accessible, ou faut-il simplement un bon scientifique et une poignée d'étudiants des cycles supérieurs?
    Je sais que je pose des questions très précises, mais j'essaie de comprendre certaines des préoccupations relativement à la mise en oeuvre des plans d'action et des stratégies de rétablissement.
    Il y a du personnel hautement qualifié qui est disponible. Il est sans doute possible de rassembler, au moyen de partenariats, l'équipement nécessaire. Ce qui manque, c'est le financement d’exploitation.
    Combien d’argent faudrait-il dans ce cas précis, simplement pour nous donner une idée?
    Nous parlons probablement de quelques centaines de milliers de dollars par année. Le processus devrait durer une dizaine d’années.
    Est-ce là la conclusion à laquelle vous vous attendez à la suite de quatre années de consultations? Est-ce ce genre de résultat que vous prévoyez après quatre ans à élaborer et à finaliser les plans d'action? Est-ce le genre de recommandation que vous pouvez voir venir dans quatre ans, c’est-à-dire d’y affecter quelques centaines de milliers de dollars pour les dix prochaines années?
    Honnêtement, je suis mystifié par les procédures de consultation, parce que lorsqu'on arrive à un point où tout le monde semble être d'accord sur ce qui doit être fait et sur la façon de le faire, les considérations gouvernementales engloutissent tout et plus rien n'en ressort, pour des raisons qui sont totalement inconnues. Je ne sais vraiment pas ce qui s'y passe.
    D'accord, merci beaucoup.
    Merci, monsieur Trudeau.

[Français]

    Monsieur Bigras, vous avez quatre minutes.
    Merci, monsieur le président. J'aurais peut-être juste une question supplémentaire à poser à M. Quinney.
    Dans votre intervention aujourd'hui, j'ai compris que, pour vous, la Loi sur les espèces en péril est un peu une loi symbolique. C'est une loi qu'il faut se donner, mais, en même temps, vous croyez que son application laisse à désirer et qu'il y a beaucoup de bureaucratie.
    Cependant, avez-vous des membres, des clubs, dans le bassin des Grands Lacs?

[Traduction]

    Nous en avons certainement. Nous avons un grand nombre de membres autour des Grands Lacs.
    Si vous me permettez de saisir cette occasion, la loi prévoit des mesures qui sont supérieures à d'autres, mais qui sont sous-utilisées. Je parle des dispositions de la loi relatives à l'intendance qui, en fait, favorisent le type de bénévolat et de participation communautaire que je prône au nom de mon organisme.

[Français]

    Sauf erreur, vous favorisez davantage une approche d'éducation par rapport à la protection des habitats et des espèces. Au fond, pour vous, l'approche concernant les espèces en péril doit être une approche éducative plutôt que coercitive. Sauf qu'en même temps, il y a une réalité.
    Prenons le bassin des Grands Lacs. Je lisais aujourd'hui que les industries rejettent cinq millions de kilogrammes de polluants dans le bassin des Grands Lacs.
    Êtes-vous en train de nous dire que ce n'est pas nécessairement la Loi sur les espèces en péril qui va pouvoir nous garantir un écosystème sain? Y a-t-il d'autres loi, cependant? Je pense à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement.
    Croyez-vous qu'au fond, il faut renforcer d'autres lois? Je n'essaie que de comprendre votre approche. Croyez-vous qu'en matière de protection des espèces, on doit miser sur l'éducation? Il y a donc d'autres lois qui devraient être renforcées, en plus de la Loi sur les espèces en péril. Est-ce ce que je dois comprendre? J'essaie de comprendre votre approche générale.

[Traduction]

    Oui, monsieur, vous avez tout à fait raison. Je vais immédiatement vous donner un exemple concret récent. Ce qui est connu sous le nom d'Accord de 1972 relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, qui est un accord international entre les États-Unis d'Amérique et le Canada, est renégocié pour la première fois en plus de 25 ans. Le contrôle de la pollution a augmenté. Les Canadiens devraient être fiers des efforts déployés et des améliorations réalisées en matière d'assainissement de l'eau des Grands Lacs, y compris le fleuve Saint-Laurent qui, bien entendu, finit par recevoir toute cette eau. Nous ne pouvons en rester là. Nous pouvons faire mieux. Par exemple, la pollution n'est qu'une des composantes de l'Accord de 1972 relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs.
    Nous espérons certainement que cette fois, au moment de renégocier l'Accord de 1972 relatif à la qualité de l'eau dans les Grands Lacs, le gouvernement fédéral adoptera une approche écosystémique, en comparaison avec l'approche hydrochimique — plus restreinte — adoptée il y a 25 ans. Oui, voilà le genre de recommandations que nous vous ferions aussi, monsieur.
(1720)
    Merci.
    Monsieur Hyer.
    Merci beaucoup.
    Premièrement, monsieur Quinney, en dépit du commentaire laconique que j'ai fait plus tôt en ce qui concerne un point avec lequel je n'étais pas d'accord, je veux faire un commentaire. J'ai beaucoup de respect pour le document que vous avez apporté aujourd'hui, tout comme j'en ai pour votre réputation. Je n'ai reçu une copie de ce rapport qu'aujourd'hui, et je trouve que, même s'il est assez court, il est riche en renseignements. Pour être honnête, je n'avais pas la tête à le lire au complet aujourd'hui. J'aurai donc probablement des questions supplémentaires plus tard, au cours d'une autre réunion.
    Vous avez dit que les clubs de l'OFAH... Disons simplement que l'OFAH, les groupes autochtones et d'autres utilisateurs locaux et traditionnels devraient avoir une importante voix au chapitre, comme vous l'indiquez. Je suis très favorable à votre idée selon laquelle vous êtes plus engagé. Vous avez beaucoup de membres qui s'y connaissent. Ils n'ont pas seulement l'information et les connaissances qui leur permettent de renseigner les scientifiques, les bureaucrates, les politiciens, les décideurs et les gestionnaires; ils ont aussi l'occasion de reconnaître le bien-fondé du processus et d'avoir le sentiment que leur participation est importante. Je vais me battre avec acharnement, si je le peux, pour faire en sorte que cette occasion qui est fournie à vos membres et aux autres utilisateurs locaux et traditionnels soit améliorée, au moins maintenue et améliorée, si possible.
    Deux heures ne suffisent pas pour examiner la mine de renseignements que vous nous apportez aujourd'hui. Nous devons vous convoquer de nouveau à un autre moment pour que vous nous donniez une conférence, pas seulement pour deux heures. Donc, je ne vous poserai pas de question supplémentaire, bien que s'il reste du temps après la question que je suis sur le point de poser et que vous voulez commenter davantage, j'en serais ravi.
    J'ai une question précise pour M. d'Eça — trois, en fait. Plus tôt, le gouvernement a indiqué dans son témoignage que les consultations menées avant la prise d’une décision relative à l’inscription peuvent s’étaler sur plus de neuf mois, et nous avons entendu aujourd'hui plus de témoignages selon lesquels cela peut prendre beaucoup de temps. En outre, il a précisé que lorsqu'une espèce évaluée se trouve au Nunavut, il suit un processus spécial afin de faire participer le Conseil de gestion des ressources fauniques et de respecter le processus décisionnel relatif aux revendications territoriales, en soulignant que ce processus doit être terminé avant qu’une espèce soit inscrite sur la liste. Brièvement et dans un style télégraphique, pourriez-vous décrire le processus de consultation que le gouvernement suit avant d’inscrire sur la liste une espèce qui se trouve au Nunavut?
    Deuxièmement, combien de temps le gouvernement devrait-il raisonnablement consacrer à des consultations de ce type, à votre avis?
    La troisième question est la suivante: avez-vous des recommandations à formuler en vue de l’amélioration du processus de consultation, ou est-ce aussi régi par l’accord sur les revendications territoriales? Peut-on l'adapter et l'améliorer?
    Merci pour les questions.
    En ce qui concerne le processus de consultation du gouvernement, si vous n'avez pas une copie du protocole d'entente  — dont nous avons parlé aujourd'hui — conclu entre le CGRFN et le gouvernement, le comité devrait probablement en demander une copie, parce qu'en fait, pour ce qui est de la LEP, il s'agit d'une bonne nouvelle. Nous nous sommes entendus non pas sur le contenu des consultations, mais sur leur durée.
    Nous avons l'article 37 — Environnement Canada, Parcs Canada et Pêches et Océans Canada tiennent des consultations publiques appropriées au Nunavut, y compris avec les organismes inuits concernés, entre le mois de novembre et la mi-février. Donc, cela représente environ quatre mois et demi pour les consultations.
    Mais ce qui se passe réellement — ce qui est assez délicat, je pense — varie en fonction de l'espèce en cause. Actuellement, le conseil étudie l'inscription de l'ours polaire. C'est une question extrêmement importante, comme vous le savez sans doute, j'en suis certain. Dans ce cas précis, le gouvernement a fait un travail vraiment remarquable au cours des consultations. Il s'est rendu dans chaque localité du Nunavut et les consultations se sont faites verbalement, face à face — la meilleure forme de consultation qui soit. Il a fallu un certain nombre de mois. Mais dans le cas du poisson-loup, que l'on retrouve dans les eaux du Nunavut, il n'y a rien de ce genre en cours en raison du classement par ordre de priorité, etc. On tient compte des besoins et des intérêts de nature économique, sociale et culturelle des Inuits.
    Donc, cela varie vraiment en fonction de l'espèce. Mais la version de luxe serait ce qui a été fait récemment dans le cas de l'ours polaire. Le CGRFN a tenu des audiences publiques pendant trois jours. Il doit rendre sa décision au sujet de l'inscription de l'ours polaire en juin prochain, et faire rapport au ministre en juillet. Donc, je m'attends à ce qu'une décision définitive soit rendue à l'automne. Il s'agit donc, dans un délai raisonnable, d'étudier les espèces et de poursuivre à partir de là. Mais nous pensons certainement qu'en vertu du protocole d'entente, il est possible que vous soyez en mesure de compléter le tout en quatre mois et demi. Il est possible que cela prenne moins de temps. Vous allez être très occupés au cours de ces quatre mois et demi.
    En ce qui concerne les façons de l'améliorer, même après ce que je viens de dire, au cours des cinq ou six années d'existence de la LEP, les consultations et la communication avec la population du Nunavut, principalement avec les Inuits, n'ont pas été adéquates, et il y a des problèmes. Les gens doutent de la loi. Ils sont méfiants quand il y a des consultations. Nous devons redoubler d'ardeur pour communiquer avec la population du Nunavut et la consulter de façon convenable, tout comme nous devons le faire avec les Autochtones d'un bout à l'autre du pays, je suppose.
(1725)
    Merci. Votre temps est écoulé.
    De temps à autre, comme vous êtes nombreux à le savoir, j'aime utiliser des métaphores liées au sport telles que nettoyer les buts. Je vais donner le ballon à Scott pour qu'il le transporte, mais je ne vais pas dire que je vais lui faire une passe pour qu'il marque le panier décisif du match parce qu'il ne s'est pas présenté au match hier soir.
    Scott, vous avez la dernière question.
    C'est une bonne chose. Je serais probablement trop fatigué pour siéger au comité aujourd'hui.
    Monsieur Whoriskey, ma question portera sur une inscription. Lors de sa comparution, le Conseil canadien des pêches a suggéré que nous utilisions le cadre décisionnel du ministère des Pêches et des Océans au lieu des critères du COSEPAC pour déterminer si une espèce de poisson est en péril ou non. Actuellement, les évaluations du COSEPAC sont faites en fonction de critères internationaux et s'appliquent tant aux espèces terrestres que marines. Quel type de critère serait préférable, à votre avis?
    Je préfère les critères du COSEPAC parce qu'ils sont fondés sur des critères biologiques. Cela nous ramène à certaines des questions discutées précédemment au comité.
    Le processus du COSEPAC fait appel aux meilleures techniques scientifiques disponibles. Autrement dit, il est possible que vous n'ayez pas beaucoup de données sur certaines espèces, tandis que pour d'autres, vous avez un comptage presque complet de tous les animaux. Le processus du COSEPAC n'est pas bloqué par des données incomplètes sur certaines parties de ce qui est à l'étude. Le COSEPAC utilise les meilleures données dont il dispose. Si l'échantillonnage de quelques sites démontre un déclin inquiétant, ils sonnent l'alarme et tentent de s'occuper de la question plus rapidement. Je dirais donc qu'il s'agit d'une façon efficace et appropriée de s'attaquer à ces problèmes.
    Monsieur Quinney, je sais que vous n'avez peut-être pas de connaissances dans ce domaine particulier qu'est l'inscription, mais avez-vous des commentaires de la part de votre organisme au sujet du processus d'inscription actuel utilisé en vertu de la LEP? Pensez-vous qu'il est efficace?
    Nous en parlons brièvement dans la déclaration préliminaire, mais nous serions heureux de vous fournir des commentaires plus détaillés sur ce sujet en particulier, tout à fait.
    Certainement.
    Monsieur d'Eça, j'ai une dernière question pour vous. Je sais que je vous ai harcelé un peu plus tôt, je suppose.
    Le gouvernement appuie des initiatives telles que les revendications territoriales, les conseils de cogestion des ressources fauniques et les Fonds autochtones pour les espèces en péril. Ce programme en particulier a permis de financer 333 projets, pour un montant total de 10,2 millions de dollars au cours des quatre dernières années. Plus de 250 espèces en péril en ont profité.
    Pensez-vous que ces initiatives aident à bâtir une relation de collaboration entre le gouvernement et les peuples autochtones? L'utilisation de ce processus est-il une bonne chose que nous devrions maintenir dans la loi?
    Je n'ai pas compris à quel domaine cela s'applique, mais les statistiques que vous me donnez ne sont pas celles du Nunavut.
    Non. Les Fonds autochtones pour les espèces en péril sont des fonds spécifiquement alloués et appuyés par le gouvernement fédéral. Pensez-vous que c'est une bonne façon de collaborer, une bonne façon d'établir un partenariat avec les groupes autochtones pour appuyer la cause des espèces en péril?
    Je pense que oui. Je pense que vous devez faire en sorte que les peuples autochtones soient mieux informés. Vous aurez peut-être à songer à en augmenter le budget. Et je devrais aussi vous dire que de ce montant, l'Ouest, les territoires du Nord-Ouest et le Nunavut n'en reçoivent, somme toute, qu'environ 550 000 $ par année. Donc, seule une petite partie de cet argent se rend jusqu'au Nord.
    Cela dit, je ne pense pas que la communication ait été vraiment bonne. Cet argent n'a donc pas fait l'objet de beaucoup de demandes. Mais je pense que c'est un très bon programme et qu'il faudrait l'améliorer.
(1730)
    Donc, le concept même du programme est efficace. Cependant, l'affectation des fonds et la mise en oeuvre du processus doivent être peaufinés, tout comme la communication qui l'accompagne.
    C'est exact, oui.
    Merci.
    Merci.
    Comme les membres du comité le savent, ceci est notre dernière table ronde sur notre examen de la LEP. Et aujourd'hui, à minuit, c'est l'échéance pour les autres groupes intéressés à présenter un mémoire au comité. Donc, tout cela prend fin à minuit. Ensuite, nous pourrons commencer à travailler au rapport.
    Je veux remercier M. d'Eça, du Conseil de gestion des ressources fauniques du Nunavut, M. Quinney, de la Fédération des pêcheurs et chasseurs de l'Ontario et M. Whoriskey, de la Fédération du saumon de l'Atlantique, pour leurs mémoires et leurs commentaires, ainsi que pour les opinions différentes que nous avons reçues aujourd'hui par rapport à celles de certains des autres spécialistes que nous avons accueillis. Nous en sommes reconnaissants.
    Sur ce, je vais présenter une motion d'ajournement.
    Une voix: D'accord.
    Le président: Nous pouvons partir. Bonne fin de semaine.
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