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FEWO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la condition féminine


NUMÉRO 045 
l
2e SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 5 février 2015

[Enregistrement électronique]

(1105)

[Français]

    Je vous souhaite la bienvenue à la 45e réunion du Comité permanent de la condition féminine.
     Aujourd'hui, nous reprenons notre étude sur les pratiques prometteuses pour prévenir la violence envers les femmes.
    Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Michèle Audette — qui sera ici un peu plus tard —, présidente de l'Association des femmes autochtones du Canada, et Mme Dumont-Smith, qui en est la directrice générale.
    Nous recevons également Mme Lana Wells, de la chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, à la Faculté de service social de l'Université de Calgary.

[Traduction]

     Depuis Halifax, par vidéoconférence, nous accueillons les représentantes de l'Immigration Services Association of Nova Scotia, Mmes Gerry Mills et Nanok Cha, visibles sur l'écran de gauche. Depuis Toronto, nous accueillons la représentante de la South Asian Legal Clinic of Ontario, Mme Deepa Mattoo, qui est avocate-conseil à l'interne.

[Français]

    Je souhaite la bienvenue à toutes.
    Les témoins disposent de 10 minutes pour faire leur présentation.
    Madame Wells, vous pouvez commencer.

[Traduction]

[Français]

    Madame Crockatt, souhaitez-vous dire quelque chose?

[Traduction]

    Serait-il possible de préciser l'identité des témoins, parce que, habituellement, les porte-nom sont...
    Les deux Néo-Écossaises sont Mmes Gerry Mills et Nanok Cha, tandis que la personne seule est Mme Deepa Mattoo.

[Français]

    Est-ce que cela vous convient, madame Crockatt?
    Oui, je vous remercie beaucoup.
    C'est très bien.
    Madame Wells, la parole est à vous. Vous disposez de 10 minutes.

[Traduction]

    Je vous remercie, madame la présidente et les membres du comité, de votre invitation.
    Comme je l'ai dit, j'occupe actuellement la chaire Brenda Strafford pour la prévention de la violence familiale, à la faculté de service social de l'Université de Calgary, où je dirige aussi une initiative appelée « Shift », qui vise à mettre fin à la violence familiale.
    Depuis quatre ans et demi, notre recherche porte principalement sur la détermination, la conception et l'application de stratégies de prévention primaire contre la violence, c'est-à-dire avant qu'elle ne commence. En me préparant pour aujourd'hui, j'ai visionné beaucoup de vos séances antérieures et j'ai été frappée par la quantité de travaux de recherche qui vous ont déjà été présentés sur la fréquence et les causes premières de la violence contre les femmes.
    Pour cela, je vais axer mon exposé sur 10 engagements que le gouvernement du Canada peut prendre et qui préviendront la violence contre les femmes.
    Premier engagement: le gouvernement du Canada doit élaborer, appliquer et évaluer un plan d'action national pour combattre la violence contre les femmes et les enfants, en partenariat avec les provinces et les territoires. Le plan doit se concentrer sur les stratégies de prévention primaire, au moyen d'une démarche axée sur la durée de vie et, surtout, il ne peut pas être créé de manière isolée. Il doit être élaboré conjointement avec les principaux centres de recherche, le secteur privé et la société civile. Il doit aussi être adapté aux facteurs particuliers de risque et de protection correspondant à différentes populations comme les Autochtones, les communautés d'immigrants et de réfugiés ainsi qu'aux LGBTA (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et allosexuels).
    Le deuxième engagement consiste à investir dans une stratégie nationale de protection de l'enfance, fondée sur les principes d'abordabilité, d'accessibilité et de soins de qualité. Cette stratégie subviendrait à la bonne santé des enfants pendant leur développement et améliorerait les choix des femmes qui souhaitent retourner sur le marché du travail ou sortir de relations malsaines ou de relations de violence.
    Le troisième engagement consiste à investir dans la prévention de la maltraitance des enfants. Les enfants maltraités deviennent souvent des agresseurs. Nous pouvons prévenir la violence physique, la violence émotionnelle et la négligence par les mesures suivantes: D'abord garantir aux familles à faible revenu avec enfants un supplément de revenu. Nous savons que l'augmentation du revenu du ménage réduit le risque de maltraitance des enfants. Ensuite, interdire les châtiments corporels, en abrogeant l'article 43 du Code criminel. La recherche montre qu'ils sont nuisibles pour les enfants et qu'ils engendrent plus tard des actes de violence. Puis prévenir les grossesses accidentelles et l'imposition, à des jeunes, des responsabilités familiales. Les jeunes parents et les parents d'enfants conçus accidentellement sont plus susceptibles de maltraiter leurs enfants. Et c'est pourquoi le gouvernement du Canada doit envisager l'accès universel à des cours de santé sexuelle dès la 4e année, à la contraception gratuite et à l'avortement. Santé Canada devrait approuver immédiatement le médicament abortif mifépristone. Enfin, un moyen efficace de prévention de la maltraitance des enfants consiste à investir dans une stratégie nationale qui donnera à tous les parents la capacité et les compétences voulues, y compris l'investissement dans des programmes visant les personnes à risque. Nommons par exemple le programme triple P, le programme de pratiques parentales positives; le programme de renforcement des familles, dont vous avez entendu parler; le programme « Les années incroyables »; et je sais que vous examinez déjà les partenariats infirmière-famille dans deux provinces. Ils devraient être accessibles partout au Canada.
    Le quatrième engagement consiste à investir dans une stratégie nationale de logement, pour que les femmes n'aient pas à choisir entre une relation de violence et le sans-abrisme. Je reprends ici à mon compte les recommandations de la YWCA of Canada, qui a témoigné ici sur la stratégie du logement d'abord et j'ajoute que l'augmentation des fonds consacrés au logement transitoire à court terme est essentielle à l'arrêt de la violence contre les femmes.
    Le cinquième engagement consiste à élaborer et à appliquer une stratégie exhaustive de mobilisation des hommes et garçons comme alliés, partenaires et interrupteurs de la violence contre les femmes. Depuis quelque temps, nous faisons de la recherche dans ce domaine et nous avons trouvé cinq moyens pour rendre cette action plus efficace. Il s'agit d'abord de favoriser la santé mentale et le bien-être émotif des hommes; ensuite, favoriser la pratique de sports et de loisirs et des ambiances de travail favorisant l'adoption de normes et de comportements sains, et je sais que le ministère de la Condition féminine a déjà commencé à examiner certaines initiatives prises un peu partout au pays; il s'agit encore d'appuyer des réseaux et des rapports sains d'égalité entre hommes; puis, il faut aider les hommes à guérir de traumatismes qu'ils ont subis; enfin, il s'agit de promouvoir et de favoriser un rôle paternel positif.
    Ce dernier point est d'autant plus important que les pères jouent un rôle plus important dans l'éducation des enfants. Des études montrent qu'ils sont aussi importants que les mères pour le développement des enfants. Nous apprenons maintenant quels sont les meilleurs types de programmes et de politiques pour aider les jeunes hommes et les pères à risque à devenir de bons pères. Le programme « caring dads », créé par Mme Katreena Scott, et le programme d'appui à la participation du père, des Drs Kyle Pruett et Marsha Pruett, sont deux pratiques prometteuses parmi beaucoup d'autres et, à Calgary, nous éprouvons actuellement deux programmes prometteurs avec des partenaires qui interviennent auprès des mères adolescentes. Bientôt, nous en saurons davantage sur les interventions efficaces auprès des jeunes pères à risque.
(1110)
    Le sixième engagement consiste à investir dans des soins qui tiennent compte des traumatismes, avec le concours de professionnels affiliés: enseignants, travailleurs sociaux, avocats, médecins. Des études ont montré qu'une expérience traumatisante pour l'enfant, par exemple une agression sexuelle, des violences familiales dont il est le témoin, de mauvais traitements et la pauvreté, peuvent conduire, chez l'adulte qu'il deviendra, à des risques graves sur le plan socio-économique ou pour sa santé. Pour neutraliser les traumatismes, le gouvernement du Canada peut investir dans la formation, dont bénéficieraient les facultés, les professionnels sur le terrain et leurs organisations pour mieux comprendre les répercussions répandues des traumatismes et les façons d'en guérir les victimes.
    Le septième engagement consiste à élaborer, à appliquer et à évaluer un plan d'égalité entre les sexes. Il doit comprendre: une stratégie exhaustive pour assurer aux femmes l'accès aux soins de santé en matière de procréation, y compris aux avortements; des politiques qui facilitent l'égalité des salaires et un salaire décent en vigueur partout au Canada; une politique de congés parentaux semblable à celle de la Suède, qui accorde aux familles jusqu'à 18 mois de congé parental et aux pères au moins six semaines obligatoires de congé parental; des lois plus efficaces contre la pornographie, comme celles qu'a adoptées David Cameron, pour empêcher, au moyen de filtres Internet, les enfants de visionner des images pornographiques; une augmentation notable du financement du ministère de la Condition féminine Canada, pour lui-même et pour les fonds destinés aux organismes communautaires.
    Il faut que nous réinvestissions dans les organisations féminines de partout au pays, pour mieux y appuyer le leadership, les stimuler, et les rendre capables de mettre en oeuvre les pratiques exemplaires et prometteuses. Enfin, nous avons besoin de politiques et de stratégies plus efficaces pour favoriser le leadership féminin dans tous les secteurs de la société. La recherche montre que les sociétés créées par des femmes sont plus susceptibles de réussir; les sociétés innovantes dont la direction compte plus de femmes sont plus susceptibles d'être rentables; et celles où la mixité est plus grande ont habituellement plus de revenus, plus de clients, plus de parts du marché et plus de profits. L'investissement dans le leadership des femmes dans tous les secteurs est indispensable à l'égalité des sexes.
    Le huitième engagement consiste à réduire la violence dans les fréquentations en intervenant particulièrement auprès des écoles et des réseaux scolaires. L'application des pratiques fondées sur les faits chez les élèves de la 7e à la 9e année se révèle réduire cette violence. La recherche longitudinale montre l'efficacité de programmes comme celui du « Quatrième R », déjà adopté dans 4 000 écoles du Canada — certaines étant financées par l'Agence de santé publique du Canada et Santé Canada — pour la réduction de la violence dans les fréquentations, ce qui peut conduire à la réduction de la violence dans les rapports avec autrui, plus tard dans la vie. Nos enseignants et nos réseaux scolaires ont besoin d'une formation améliorée et accrue pour aider les enfants et les jeunes à privilégier des rapports sains.
    Le neuvième engagement consiste à investir dans une stratégie exhaustive et importante de marketing social à long terme visant à changer les normes et les comportements qui, directement ou subtilement, engendrent la violence contre les femmes. Des faits survenus récemment sur des campus universitaires nous avertissent que, même après tous les progrès réalisés, ils restent très répandus dans notre société.
    Le dixième engagement consiste à accorder un financement durable qui privilégie les initiatives à long terme. Un financement unique, à court terme, ne permettra pas d'approfondir une question importante, tandis que le financement à long terme et l'investissement dans la recherche et l'évaluation favoriseront de meilleures solutions.
    Ç'a été pour moi un privilège et un honneur que de présenter ces idées au comité. Je vous remercie de m'avoir écoutée et de vous être engagés à mettre fin à la violence contre les femmes.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup, madame Wells.
    J'invite maintenant la représentante de l'Immigration Services Association of Nova Scotia à faire sa présentation.

[Traduction]

    Vous disposez de 10 minutes.
    Bonjour. Je m'appelle Gerry Mills, et voici ma collègue Nanok Cha. Nous sommes de l'ISANS, l'Immigrant Services Association of Nova Scotia, le seul organisme multiservices d'aide à l'installation des immigrants en Nouvelle-Écosse et le plus gros de la région de l'Atlantique. Nous avons cinq bureaux en Nouvelle-Écosse et, cette année, nous célébrons 35 années de prestation de services aux immigrants.
    Examinons, avec l'oeil d'une immigrante, certains des éléments que Lana vient de soulever.
    D'abord, que savons-nous? Nous savons que les immigrantes sont généralement beaucoup moins susceptibles que les femmes non immigrantes d'être victimes d'une relation qui n'est pas matrimoniale ou familiale. Nous savons que beaucoup d'immigrantes...
(1115)
    Madame Mills, je suis désolée de vous interrompre. Veuillez ralentir un peu votre débit, pour permettre aux interprètes de suivre. Je sais que vous avez beaucoup de choses à dire, mais je vous demande de bien vouloir ralentir.
    Merci beaucoup.
    Je vous présente mes excuses. Quand les interprètes ne se trouvent pas dans la pièce, on les oublie facilement. Je vais ralentir.
    Alors nous savons aussi que, en général, les immigrantes veulent échapper aux agressions, pas à l'agresseur. À leur arrivée, elles sont très vulnérables. Elles ne connaissent personne en dehors de la famille immédiate, et cela présente des difficultés.
    Nous savons aussi que nos processus de parrainage pour les immigrants et les réfugiés placent souvent les partenaires à des niveaux différents. Il y en a d'importants exemples. La résidence permanente conditionnelle des conjoints parrainés est devenue, pour nous, un problème de taille dans le secteur de l'installation des immigrants. Cela expose les nouvelles arrivées à un risque considérablement accru de violence et de mauvais traitements. C'est une forme de violence à laquelle seules les immigrantes sont exposées: la menace d'être signalées aux autorités de l'immigration qui les déporteront ensuite. Cette politique a eu des conséquences extrêmement graves pour la vie de nombreuses femmes et qui ne cessent pas de se répéter. On nourrit ainsi la violence familiale.
    Nos pratiques exemplaires, ici, à l'ISANS, en matière d'éducation, nos ateliers, l'information en différentes langues, ne fonctionnent plus. Nous avions coutume de dire: « Ne vous inquiétez pas, rien n'arrivera », mais quelque chose risque d'arriver maintenant. Ce n'est pas vrai, mais de nombreuses femmes craignent beaucoup plus la déportation que la violence de leur conjoint. Il existe donc un besoin réel et extrême de réfléchir à nouveau à cette politique. Revoyez ses conséquences, examinez-la du point de vue de l'autre sexe, notamment pour déterminer comment elle met en péril la sécurité personnelle et économique des femmes.
    Quant à l'isolement, et Lana en a également parlé, les immigrantes sont extrêmement susceptibles de le connaître, particulièrement quand on les empêche, par exemple, de suivre des cours d'anglais ou de français ou de travailler. Ce peut être une forme d'aliénation par rapport à la communauté culturelle, quand on les accuse d'être de mauvaises femmes, de mauvaises mères, ou d'abandonner ou de trahir leur culture, ce qui leur fait perdre la face dans la communauté.
    La difficulté, ici, encore, est l'admissibilité aux services. Beaucoup de femmes dans nos communautés, par exemple les conjointes de travailleurs étrangers temporaires ou même les travailleurs étrangers temporaires eux-mêmes et, aussi, ceux qui revendiquent le statut de réfugié, sont inadmissibles à beaucoup de services que le secteur de l'installation des immigrants fournit.
    Je suis heureuse que Lana ait soulevé la question du logement, qui est importante pour toute femme en situation d'insécurité, particulièrement si elle cherche à s'en sortir et qu'elle a des enfants. On a donc désespérément besoin d'une stratégie du logement.
    La menace d'être coupée de ses enfants est un problème pour beaucoup de femmes dans cette situation, mais les immigrantes qui ne connaissent pas leurs droits y sont exposées. Sans autre contact ou appui, elles connaissent très peu les processus et les lois canadiens. Impossible d'en parler en faisant abstraction de la dimension culturelle et religieuse. La question est vraiment complexe.
    Alors, quelles pratiques exemplaires pouvons-nous appliquer? La réponse se trouve dans la sensibilisation, encore et encore. C'est l'orientation des familles. C'est des ateliers donnés en groupes. Les gens se sentent beaucoup plus à l'aise de parler de sujets tabous. Prévoir aussi des programmes destinés aux femmes seulement. D'autres aussi pour les hommes seulement. Mais, à l'ISANS, les programmes les plus efficaces sont ceux qui s'adressent aux femmes et aux hommes ensemble. Nous avons réussi à balayer beaucoup de suppositions sur les hommes immigrants, grâce à des programmes familiaux qui, en fait, attirent beaucoup plus d'hommes que de femmes.
    Notre position de départ n'est pas de parler de la nécessité de protéger les femmes ni de la violence contre elles, bien que nous saisissions la grande importance de cette question et la nécessité, parfois, d'en parler. Notre position de départ est que les parents veulent faire de leur mieux pour leurs familles. Nous ne commençons pas par la violence; nous commençons par dire: « Vous êtes un bon père, vous êtes une bonne mère. Vous aspirez à ce qu'il y a de mieux pour votre famille ». Nous envisageons la famille du point de vue holiste, pour trouver une façon pour que les immigrants vivent au Canada la plus belle partie de leur vie, grâce à tous nos programmes.
    Mais nous avons besoin de programmes accessibles, avec des animateurs formés et de l'information en différentes langues. Quelle que soit sa situation au Canada, on doit pouvoir accéder à ces services.
(1120)
    À l'ISANS, nous travaillons en partenariat avec des hôpitaux, des organisations féminines et un certain nombre de centres de ressources familiales.
    Enfin, les immigrantes victimes de violence peuvent se heurter aux préjugés lorsqu'elles demandent à la justice de les aider dans des affaires de violence familiale, de droit familial et de droit criminel. Ces préjugés les empêchent souvent d'obtenir des ordonnances efficaces de protection, la garde légale de leurs enfants, la pension alimentaire pour enfants et la collaboration dans les poursuites criminelles, parfois, contre leurs agresseurs. Nous avons besoin de donner de la formation pour améliorer la réaction de la justice aux problèmes des immigrantes victimes de violence.
    En plus, nous devons nous assurer que les médecins de famille, les autres professionnels de la santé, les services sociaux, la police, les organismes de protection de l'enfance et les autorités de l'immigration comprennent les complexités mais aussi la culture dans laquelle ces actions ont lieu ainsi que les garanties juridiques auxquelles les immigrantes victimes ont droit. Il circule tellement de fausses suppositions sur la culture, les droits et les normes en vigueur au Canada que l'uniformité et la clarté des conseils s'en ressentent.
    Les immigrantes dont nous parlons constituent l'un des groupes les plus vulnérables. Nous saluons certainement l'occasion qui nous a été donnée de parler au comité et nous avons hâte de voir les mesures et les missions qui en découleront.
    Merci.
    Je cède maintenant la parole à ma collègue, Mme Cha.
    Le projet pour le leadership des jeunes immigrantes est un projet de deux ans financé par Condition féminine Canada. Son objectif est d'aider les jeunes immigrantes à développer leurs compétences en leadership, à apporter des changements positifs dans la collectivité et à se créer un réseau de soutien dans la population.
    Les activités du projet ont été conçues pour développer l'estime de soi, renforcer les compétences en leadership, naviguer dans le système social et obtenir des ressources communautaires, enfin à traiter des enjeux sociaux en adoptant le point de vue des immigrantes. Les jeunes immigrantes sont parmi les populations les plus vulnérables et elles bénéficient d'un appui moindre de la collectivité pour s'attaquer aux problèmes sociaux importants comme la violence familiale, l'intimidation, le sexisme et le racisme dans la communauté.
    En travaillant avec les jeunes leaders immigrantes, le projet a permis de constater à quel point il était important pour elles de compter sur un endroit sûr pour s'appuyer mutuellement et faire connaître leurs luttes personnelles comme moyens sûrs pour prévenir la violence contre les femmes et se refaire une nouvelle vie, saine et dynamique, au Canada. Le projet a offert des possibilités de mentorat par les pairs, pour développer l'estime de soi et créer un espace social et politique où il serait possible de parler de problèmes tels que les conflits de générations, le sexisme dans les rôles et la prise de décisions dans la famille, la violence familiale et la discrimination, dans la communauté, les rues et les écoles, contre les jeunes immigrantes. Ces meneuses ont établi un climat sûr, qui leur permet de s'appuyer mutuellement. Cela devrait diminuer leur vulnérabilité à la violence et à l'isolement dans leur famille et dans la communauté.
    Grâce à des méthodes holistes, à leur leadership qui a permis d'établir un milieu plus sûr, elles ont pris l'initiative de modifications positives dans la communauté. Par exemple, le groupe a obtenu une subvention de Capital Health, de Nouvelle-Écosse, pour la santé et le mieux-être des jeunes immigrantes et il a créé des ateliers sur les enjeux propres aux femmes, notamment la violence dirigée contre elles, par exemple de la formation en autodéfense, des ateliers sur la santé sexuelle et l'établissement de relations saines, des cours de yoga. Elles créent aussi une brochure sur les ressources en santé communautaire pour les jeunes immigrantes, afin de réduire leur isolement et leur vulnérabilité, par la recherche de soutien dans la collectivité. Deux dirigeantes du groupe participent aussi au projet de l'YWCA touchant la cyberviolence.
    Bref, ces jeunes meneuses immigrantes et le projet de l'ISANS ont permis de renforcer les réseaux pour faire connaître leurs expériences et s'appuyer mutuellement. Ces femmes ont amélioré leurs capacités individuelles et collectives de chefs de file pour contester les inégalités et les relations de pouvoir et devenir résilientes contre la violence faite aux femmes. Ce précieux projet d'une durée de deux ans se termine à la fin de mars 2015. Nous espérons avoir la possibilité de travailler encore avec ces jeunes immigrantes prometteuses et exceptionnelles.
    Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé.
(1125)
    Merci beaucoup.

[Français]

     Nous allons maintenant passer à Mme Mattoo.
     Vous disposez de dix minutes, madame Mattoo.

[Traduction]

    Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, je tiens à vous remercier de votre invitation à comparaître devant vous.
    Je voudrais commencer en citant un travail de recherche auquel j'ai participé il y a quelques années — c'est-à-dire que la violence contre les femmes est un problème de citoyenneté qui touche fondamentalement l'intégrité corporelle et la personnalité des femmes; elle bafoue aussi leur droit à la dignité, à la sécurité et à la non-discrimination. Les deux personnes qui m'ont précédée en ont très éloquemment parlé. Plus simplement, j'essaie de dire que les programmes de sensibilisation, les programmes sociaux et les mesures prises au Canada pour prévenir la violence contre les femmes ont besoin d'être encadrés d'une manière qui englobe toutes les femmes, peu importe leur culture, leur religion, leurs antécédents, leur race ou leur orientation.
    Mon exposé sera axé sur trois grandes idées: des programmes de sensibilisation et des programmes sociaux durables et cohérents; des programmes axés sur les pairs et dirigés par des survivantes; la nécessité de mesures intersectorielles et d'une stratégie nationale. Les témoins qui m'ont précédée ont parlé de la plupart de ces sujets d'une façon ou d'une autre. Voilà pourquoi j'essaierai d'être la plus brève possible.
    En ce qui concerne la première idée, des programmes de sensibilisation et des programmes sociaux durables et cohérents, nous avons vu, au cours des 10 dernières années, beaucoup de programmes innovants lancés et exécutés dans le domaine de la violence contre les femmes. Ils sont utiles à la prévention de divers types de violence sexiste, qu'elle soit générale ou interpersonnelle. Par exemple, mentionnons le propre outil de la SALCO contre le mariage forcé; les ressources du Conseil canadien des femmes musulmanes pour, par exemple, les enseignants, des documents sur le droit familial, les contrats de mariage et beaucoup d'autres; le guide de l'organisme Éducation juridique communautaire Ontario ou CLEO, intitulé « Connaissez-vous une femme victime de violence? Manuel sur les droits que reconnaît la loi », qui est consulté des milliers de fois chaque année; les ressources de Barbra Schlifer sur la planification de la sécurité, l'évaluation des risques et un roman graphique créé par des survivantes; le programme d'éducation juridique du METRAC; et les documents de formation populaire du South Asian Women's Centre.
    La liste est longue, et le travail produit ainsi que les programmes innovants de certains de ces organismes et de beaucoup d'autres encore de partout au Canada sont brillants, mais la plus grande partie de ce travail dépend d'un financement irrégulier. Le secteur des programmes sociaux reste reconnaissant de ce financement, mais il continue de se débattre pour sa survie. Même quand ses programmes couronnés de réussite pourraient avoir des répercussions à long terme, il n'obtient même pas la chance d'effectuer une étude complète de faisabilité de leurs répercussions.
    Ma consoeur qui m'a précédée a parlé d'un brillant programme qu'elle dirige. Il correspond à ce que je voulais dire au sujet des programmes axés sur les pairs et animés par des survivantes. Beaucoup de ces programmes sont vraiment importants pour combattre la violence contre les femmes. Malheureusement, la responsabilité en est répartie entre beaucoup de ministères. Ils ne sont ni durables ni cohérents. Il s'agit davantage de solutions superficielles, qui ne s'attaquent pas aux causes. La pression constante qui s'exerce sur les organismes pour qu'ils élaborent des programmes innovants sans analyse digne de ce nom de certaines des ressources existantes traduit bien la méconnaissance commune de ces questions entre les ministères. Elle montre aussi qu'on ne donne pas à certains de ces programmes suffisamment la chance d'examiner les répercussions réelles qu'ils exercent dans les communautés.
    En ce qui concerne ma deuxième idée, les programmes axés sur les pairs et animés par des survivantes, mon expérience à la SALCO et l'expérience de cet organisme montrent que lorsque nous formons un partenariat avec les organismes dotés de ce genre de programmes ou lorsque nous dirigeons nos clientes qui ont survécu à la violence vers ces programmes, ils fonctionnent vraiment bien et ils ont des répercussions considérables et positives sur la vie des survivantes. Beaucoup d'organismes de partout au Canada — nous avons entendu parler de l'un d'eux, aujourd'hui — ont exécuté avec succès ce genre de programmes et continuent d'en exécuter. Nous avons fait fonctionner nous-mêmes ce genre de programmes de sensibilisation et de prévention.
    Il est très important que les femmes et les filles survivantes animent la discussion sur la prévention, la protection et l'autonomisation. Il importe de noter que les programmes animés par des survivantes donnent une dimension de plus à la prestation de services: ils leur permettent de développer leurs compétences, ce qui augmente leur employabilité et influe à son tour sur leur prise en main de leur propre destin. L'animation de la discussion sur soi en matière de prévention permet aussi de réfléchir véritablement aux suppositions qu'on se fait au sujet de leur culture, de leur communauté. Comme il s'agit d'histoires de résilience, dès qu'elles deviennent des leaders, cela permet indéniablement de hisser au premier rang un nouveau groupe de meneuses.
(1130)
    En ce qui concerne la nécessité d'une politique transsectorielle, d'une stratégie nationale qui n'oublie personne, il importe, pour la prévention de toutes les formes de violence contre les femmes, que les mesures créées soient transsectorielles et en accord avec toutes les sphères de la prestation de services, que ce soit dans les domaines du droit et de la justice, de la santé, de l'éducation, de l'immigration et de l'emploi.
    Ma consoeur, avant moi, a parlé de la condition de résidence permanente qu'a créée récemment le ministère de l'Immigration et des conséquences vraiment dures de cette politique pour les immigrantes. Rappelons que la violence contre les femmes n'est pas l'affaire de seulement un ministère, un programme politique. C'est un mal qui se propage partout, et les mesures doivent être uniformes pour être sensibles, tout en en étant conscientes, aux besoins des femmes des communautés marginalisées, comme les femmes autochtones, les musulmanes, les femmes sud-asiatiques et les immigrantes.
    Il importe vraiment de souligner quelques idées qui ont déjà été soulevées. L'une concerne des programmes qui s'adressent aux hommes. Bien qu'il s'agisse d'un changement évident, malheureusement tous les programmes ou tous les documents dont j'ai parlé ou tous les documents de sensibilisation proposés ont, jusqu'ici, visé presque exclusivement les femmes. Jusqu'ici, peu de financement est allé aux programmes de sensibilisation des hommes.
    Un autre point vraiment important, sur lequel je tiens à insister, concerne la sensibilisation des écoliers et la modification des programmes d'études dans les écoles de partout au Canada.
    La dernière idée consiste à ne pas considérer les immigrantes comme des personnes à sauver mais plutôt comme des alliées, des leaders et des personnes qui peuvent nous sensibiliser à la manière dont la prévention et la protection peuvent avoir de bons résultats.
    Pour conclure, je tiens seulement à dire que pour la prévention de la violence contre les femmes, il importe, désormais, que les services, les programmes et les mesures destinés aux survivantes cessent de leur imposer la responsabilité de devoir se protéger elles-mêmes et la responsabilité des crimes commis contre elles ainsi que la nécessité de soit partir, signaler ou décider. On devrait plutôt leur promettre de les appuyer parce que nous les croyons. Je pense que c'est le changement de culture dont nous avons besoin maintenant pour une stratégie nationale visant à mieux prévenir la violence contre les femmes.
    Merci.

[Français]

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Commençons la période de...

[Français]

     Pardonnez-moi, madame Dumont-Smith; je vais vous accorder 10 minutes également. Quand Mme Audette arrivera, elle pourra participer à la conversation en répondant aux questions des membres du comité.
    La parole est à vous.

[Traduction]

    Je m'appelle Claudette Dumont-Smith, Algonquine de Kitigan Zibi. Bienvenue en territoire algonquin.
    Le vol de notre présidente Michèle Audette a été retardé. Nous connaissons tous le caractère imprévisible de la météo au Canada. Elle partait de Québec. Elle pourrait arriver à tout moment.
    Je suis la directrice générale de l'Association des femmes autochtones du Canada, depuis 2010. Aujourd'hui, je devais être accompagnée de Gail Gallagher, qui est la gestionnaire principale de la division de la prévention de la violence de notre association, mais elle a été terrassée par la grippe. Je pense donc que, en étant ici, j'accomplis mon destin.
    Je vous remercie d'avoir invité l'Association des femmes autochtones du Canada à parler de la question des pratiques prometteuses de prévention de la violence contre les femmes. C'est un enjeu important pour nos membres, nos enfants, nos familles et nos communautés.
    L'Association des femmes autochtones du Canada, l'AFAC, est l'organisation politique nationale représentative des 12 associations provinciales et territoriales qui la composent. On trouve ces associations dans deux des territoires et dans toutes les provinces. Le Nunavut n'en a pas, puisqu'il possède sa propre organisation. Nous toutes, les associations membres et l'AFAC, bien sûr, nous sommes vouées au mieux-être social, économique, sanitaire et politique des femmes métisses et de celles des Premières Nations du Canada.
    L'AFAC est la voix nationale des femmes autochtones du Canada. Constituée en société en 1974, elle possède donc plus de 40 années d'expérience du travail auprès des femmes autochtones. Pendant ces 40 années, elle a entendu beaucoup de femmes, leurs histoires de violence, d'exploitation, de souffrance et de douleur, et ces histoires façonnent sa position, aujourd'hui, particulièrement sur le sujet dont nous traiterons.
    Nous avons pensé profiter de l'occasion pour vous parler d'un certain nombre de pratiques prometteuses contre la violence contre nos femmes et nos familles des Premières Nations et des Métis. Comme la plupart d'entre vous le savent, la recherche faite par l'association a révélé que les femmes et les filles autochtones sont plus vulnérables à la violence que n'importe qui d'autre au Canada. Je sais que ce n'est pas un concours, mais nous sommes les plus vulnérables. Nous sommes plus susceptibles d'être victimes et moins susceptibles de recevoir les mesures d'appui nécessaires pour répondre à cette victimisation, en raison de l'emplacement de beaucoup de nos communautés, de l'obstacle de la langue, de la culture, etc.
    Les femmes et les filles autochtones sont cinq fois plus susceptibles de subir la violence que tout autre groupe de la population canadienne. Souvent, cette violence n'est jamais signalée, notamment les agressions par les conjoints et d'autres formes de violence familiale. Les taux réels sont susceptibles d'être plus élevés que les taux officiels.
    La recherche de l'association a révélé que les femmes et les filles autochtones sont plus vulnérables à la violence en raison des conséquences de politiques antérieures et actuelles de l'État. Par exemple, la Loi sur les Indiens, la politique des pensionnats, la rafle des années 1960 et le système actuel de protection de l'enfance sont tous reliés à la pauvreté, au racisme et à la violence contre nos femmes. Pas plus tard qu'en mai dernier, la GRC a révélé que 1 181 femmes et filles autochtones du Canada étaient disparues ou avaient été assassinées au cours des deux dernières décennies. Beaucoup de ces affaires restent non résolues.
    Toute forme de violence est inacceptable et doit cesser. L'Assemblée des Premières Nations, l'Association des femmes autochtones du Canada, les Premières Nations, les organisations de femmes autochtones et les familles des femmes autochtones assassinées et disparues réclament depuis longtemps une enquête publique nationale sur la violence contre les femmes et les filles autochtones, y compris sur les circonstances de leurs meurtres et de leurs disparitions. Nous avons besoin d'une telle enquête, pas moins, pour examiner la question sous tous ses angles et trouver des solutions exhaustives.
    Pour les besoins de mon exposé, j'ai appliqué cette catégorie à la prestation de services. De plus, on peut subdiviser les programmes et services sur la violence contre les femmes autochtones en deux grands groupes: les refuges pour les femmes qui fuient la violence familiale et les refuges pour les femmes et les filles qui fuient la prostitution et la traite de personnes à des fins sexuelles. Nous parlerons d'abord des premiers refuges, puis de la sécurité qu'ils offrent aux femmes qui fuient la violence sexuelle ou aux filles qui fuient la violence familiale.
(1135)
    Pour les trop rares refuges pour les victimes de violence familiale, nous nous sommes fortement appuyées sur la recherche d'Anita Olsen Harper, qui a porté sur des refuges de plusieurs provinces — Ontario, Colombie-Britannique, Manitoba, Alberta, Québec, Saskatchewan, Terre-Neuve-et-Labrador et Nouvelle-Écosse —, l'objectif étant de s'inspirer de leurs pratiques exemplaires pour nous attaquer à la violence familiale dans les communautés autochtones.
    Sa recherche renferme une liste très détaillée de recommandations ainsi que de découvertes troublantes. Si je revoyais toutes ces recommandations, je sortirais du cadre de mon exposé. Cependant, nous voulons attirer votre attention sur ses principales constatations et sur certaines des recommandations qui reflètent les principes des pratiques exemplaires qui se sont dégagées des discussions que nous avons eues avec les professionnels du domaine de l'intervention et de la prévention de la violence dans les familles autochtones.
    Sur la sécurité, nos discussions avec le personnel des refuges de partout au Canada ont conduit à la liste suivante de pratiques exemplaires; il est sage d'investir dans des clôtures et d'autres mesures de sécurité telles que des alarmes de porte et de fenêtre ainsi que les caméras de sécurité; le besoin en est d'autant plus grand dans les petites communautés, que l'emplacement d'un refuge finit par y être connu de tous; les terrains de jeux des enfants doivent être clôturés et constamment surveillés; les responsables des refuges devraient envisager l'installation de serrures à codes pour les chambres des clientes: après leur départ, elles sont plus faciles à remplacer que les mécanismes traditionnels de verrouillage. Cette recommandation découle de la recherche de Mme Harper.
    Dans le cadre des pratiques administratives, elle a recommandé les pratiques opérationnelles suivantes: s'abstenir de porter des jugements sur autrui, ce qui favorise les sentiments d'égalité; formuler des règles claires de confidentialité; envisager d'afficher une liste abrégée de ces règles en divers endroits, dans le refuge, pour servir de rappel.
    Sur le plan de l'éducation, notre association a publié en 2011 un rapport du Forum national des femmes autochtones intitulé Ensemble, nous mettrons fin à la violence. Ce rapport renferme plusieurs recommandations relatives à la sensibilisation. On peut résumer comme suit le thème de ces recommandations: élaborer et lancer une campagne nationale qui livre principalement un message affirmant la tolérance zéro pour la violence familiale; pour les particuliers et organisations, prendre les mesures voulues pour sensibiliser les médias à la violence contre les femmes et les filles autochtones; encourager les médias à parler de façon responsable et respectueuse des peuples autochtones, de leur culture, de leur histoire, et, quand ils le font, le reconnaître et les honorer; se servir des médias sociaux et d'autres plateformes Web pour les campagnes de sensibilisation, d'information et de mise en commun des ressources axées sur les femmes et les jeunes; s'attaquer aux causes premières de la violence et ne pas oublier la prévention; s'inspirer, pour mettre fin à la violence, des méthodes traditionnelles et holistes.
    Byrne et Abbott ont dégagé une série de recommandations qui visaient à améliorer la réussite de l'éducation des femmes autochtones en diminuant leur vulnérabilité aux causes premières de la violence comme la pauvreté. Globalement, ils ont préconisé un accès amélioré et plus abordable à l'éducation et une augmentation des ressources financières. Cet effort s'appuierait notamment sur les deux objectifs suivants: permettre aux filles et aux jeunes femmes de donner libre cours à leurs aspirations en matière d'éducation et appuyer les jeunes mères pour qu'elles puissent terminer leurs études. En outre, le rapport de Byrne et Abbott contient des recommandations découlant d'une recherche documentaire principalement axée sur l'éducation et l'apprentissage.
    Les femmes autochtones ont besoin d'un accès plus facile et abordable à l'éducation ainsi que d'un appui financier. Les auteurs réclament une collaboration à grande échelle entre tous les gouvernements et les organisations autochtones pour mettre au point une stratégie d'éducation permanente qui favorisera la réussite des femmes et des filles autochtones dans leurs études. Cette stratégie devrait insister sur les domaines suivants: le développement dès la prime enfance; l'éducation primaire, secondaire et postsecondaire; le perfectionnement des compétences.
    Ensuite, les auteurs ont recommandé que cet apprentissage permanent comprenne les éléments suivants: financement de la recherche, conduite par des Autochtones, sur les cultures et l'histoire des Premières Nations, des Métis et des Inuits; programmes parascolaires visant les enfants de 6 à 12 ans; réécriture des livres d'histoire pour tenir compte du point de vue des Autochtones et de leur opinion sur la colonisation. Les auteurs ajoutent des recommandations selon lesquelles les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont besoin de revoir les systèmes scolaires pour évaluer la façon dont ils préparent les femmes autochtones à l'éducation permanente au niveau collégial et universitaire, de même qu'à l'emploi.
    Dans le cadre de ce réexamen des systèmes scolaires et du recadrage de la préparation des élèves, les auteurs soulignent vigoureusement trois éléments importants: insistance accrue sur les métiers, accès accru à l'apprentissage en ligne et à l'éducation à distance; étude et prise de mesures pour supprimer les obstacles qui empêchent les femmes autochtones de concilier emploi, études et soin de leurs enfants.
    Une mesure supplémentaire, pour le domaine de l'éducation, a été la recommandation faite à tous les gouvernements de collaborer avec les organisations autochtones à l'élaboration d'une stratégie permanente pour les principales étapes du développement des enfants; l'éducation primaire, secondaire et postsecondaire; le perfectionnement des compétences. Cette stratégie doit tenir compte des situations particulières dans lesquelles se trouvent les femmes autochtones.
(1140)
    Ils ont recommandé la mise de côté de fonds pour les Autochtones...
(1145)

[Français]

     Je vous demande pardon, madame Smith; pouvez-vous conclure brièvement, s'il vous plaît?

[Traduction]

    Les pratiques exemplaires qu'ils ont proposées pour améliorer la préparation des femmes autochtones sur le plan de l'éducation... Je pense qu'il s'est passé quelque chose ici. Mes pages sont mêlées. Je suis désolée.
    Enfin, les auteurs ont recommandé d'adopter une stratégie nationale pour améliorer les taux de diplomation des femmes autochtones jusqu'en 12e année, et de soutenir la poursuite d'études postsecondaires. Ils considéraient qu'il est tout aussi essentiel de favoriser la réussite scolaire chez les femmes et les filles autochtones victimes d'exploitation sexuelle.
    Les approches adoptées pour les programmes qui donnent de bons résultats au chapitre de la violence envers les femmes et les filles autochtones tiennent compte des causes fondamentales complexes du problème et du besoin de prendre des initiatives sérieuses et exhaustives pour favoriser le changement. Il y a notamment des programmes de prévention et d'intervention, qui ciblent la violence familiale et qui visent à aider les femmes et les filles autochtones victimes de violence ou d'exploitation sexuelle. La culture entre également en jeu...
    Merci beaucoup, madame Smith. Au cours de la conversation, vous pourrez probablement étoffer certains points que vous n'avez peut-être pas eu le temps d'approfondir. Il en va de même pour tous les témoins.
    Nous allons maintenant commencer à poser les questions.

[Français]

    Madame Truppe, vous avez la parole. Vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Bienvenue et merci de témoigner dans le cadre de notre étude. Il est très important que nous connaissions les pratiques exemplaires, car notre étude vise à obtenir de l'information de votre part sur les démarches qui ont fonctionné par le passé pour que nous puissions peut-être en faire part à d'autres organisations.
    Je pense que je commencerai avec les services d'immigration. Il me semble que Nanok — j'espère que je prononce bien son nom — a indiqué qu'elle reçoit du financement de Condition féminine Canada, mais je n'ai pas pu entendre le nom du projet dont il était question. Je me demande si vous pourriez répéter le nom du programme de Condition féminine, le montant du financement que vous recevez et en quoi consiste ce projet.
    Il s'agit du projet de leadership à l'intention des jeunes immigrantes. C'est un projet de deux ans qui a pour objectif de renforcer le leadership des jeunes immigrantes et d'apporter des changements positifs dans la communauté. On a ensuite mis sur pied un projet communautaire pour apporter ces changements positifs. Ce projet permet également de renforcer le soutien chez les jeunes immigrantes au sein de la communauté.
    Pour ce qui est du financement, il s'élève à moins de 200 000 $. J'aimerais faire référence à ce qu'un autre témoin a dit. C'est comme de nombreux projets mis en oeuvre au pays par des ONG. Ce projet-ci durera deux ans, après quoi il sera terminé et ce sera la fin du projet. C'est ainsi que le financement fonctionne. Il est impossible de se prévaloir du même financement pour le même projet.
    Ce n'est donc pas viable.
    Désolée, en êtes-vous au début ou à la fin du projet?
    Non, il se termine.
    D'accord.
    La prochaine question s'adresserait probablement à vous alors, Gerry. Quel autre financement recevez-vous? Recevez-vous d'autre financement de ministères fédéraux ou de la province?
    Oui, nous en recevons.
    Nous recevons du financement de Citoyenneté et Immigration Canada et d'Emploi et Développement social Canada — c'est du financement fédéral —, et nous recevons du financement provincial également.
    Quel type de projet réalisez-vous avec le financement de Citoyenneté et Immigration? Quel était le projet pour ce financement?
    Nous avons un effectif d'environ 120 employés; la moitié de notre financement vient donc du gouvernement fédéral et l'autre moitié, du gouvernement provincial. Avec le financement fédéral, nous offrons des services aux réfugiés. Cela consiste littéralement à les accueillir à l'aéroport, à leur offrir un logement temporaire ou permanent, et à envoyer les enfants à l'école. Nous leur donnons aussi de l'orientation au sujet de l'installation, de la langue et de l'emploi. Il y a aussi les bénévoles et le renforcement de la capacité de la communauté.
    Merci.
    Je crois avoir lu quelque part que vous travaillez évidemment beaucoup en partenariat avec d'autres organisations. Je viens de la région de London, d'une circonscription qui compte un nombre assez important d'immigrants. Il s'y trouve de formidables organisations qui font beaucoup de partenariat et qui accomplissent de grandes choses elles aussi.
    Je me demandais si vous aviez des pratiques exemplaires dans le cadre des initiatives que vous faites en partenariat. Y a-t-il quelque chose que vous avez fait, un programme... Vous semblez posséder une expérience considérable. Est-ce qu'un programme que vous avez fait a, selon vous, fonctionné vraiment bien et pourrait peut-être aider quelqu'un d'autre?
(1150)
    Je peux parler du travail que nous avons accompli au sujet de la reconnaissance des titres de compétences étrangers. Nous avons, je pense, 11 ou 12 tables multilatérales. Je vous donnerai juste un exemple. Il existe une table multilatérale pour les pharmaciens formés à l'étranger, laquelle réunit l'établissement d'enseignement — donc l'université —, l'organisme de réglementation, l'association professionnelle, l'ISANS, le gouvernement provincial, le gouvernement fédéral et des pharmaciens formés à l'étranger. Ils détermineront avant tout quels sont les obstacles et la voie à suivre quand il s'agit de devenir pharmacien en Nouvelle-Écosse.
    Une fois que nous connaissons la voie et les obstacles, nous pouvons, avec toutes les parties prenantes présentes à la table, déterminer qui peut avoir une influence à cet égard. Quand nous déterminons qui est responsable, il faut beaucoup de temps pour établir la confiance. Quand nous avons commencé ces tables rondes, il y a probablement huit ou neuf ans, la confiance posait bien des problèmes, mais nous avons apporté d'importants changements systémiques au processus. En Nouvelle-Écosse, le taux de réussite pour les examens de pharmaciens est actuellement de 93 %, alors qu'il est d'environ 48 ou 49 % dans le reste du pays, et c'est parce que nous avons des processus en place et que toutes les parties prenantes sont à la table. Je comprends que c'est bien plus facile dans une province comme la Nouvelle-Écosse, car nous connaissons les parties prenantes et nous pouvons nous dire « Pouvons-nous nous rencontrer jeudi prochain? »
    Merci beaucoup.
    J'ai une question pour Claudette, de l'AFAC. Pouvez-vous me parler du financement que vous recevez de Condition féminine Canada? Je sais que vous avez fait du travail merveilleux avec bien des femmes. Pouvez-vous me dire combien de financement vous avez reçu et comment vous l'avez utilisé? Quel est le programme que vous préférez et qui a, selon vous, aidé les femmes et les filles?
    Quand je suis entrée à l'AFAC, on terminait le projet Soeur par l'esprit, qui a pris fin le 31 mars 2010. C'est à ce moment qu'on a mené la recherche secondaire sur le nombre de femmes autochtones disparues ou assassinées afin d'établir la base de données à ce sujet. Par la suite, les projets Du constat aux actes I et II ont été lancés avec le concours de Condition féminine, et des outils ont été mis au point pour aider des familles quand une personne est portée disparue. Il y a eu des programmes de sensibilisation et d'information. Des membres de la famille ont été conviés à des réunions pour expliquer leurs besoins à l'AFAC. Les projets Du constat aux actes ont donc en bonne partie consisté à accomplir ce travail. Récemment, nous avons obtenu du financement de Condition féminine, et nous travaillons au projet PEACE. Cette initiative, qui se déroulera sur deux ans et demie, portera davantage sur la prévention de la violence. Nous travaillerons avec les hommes, les garçons, les femmes et les filles. Ce projet a débuté il y a juste un mois.
    C'est excellent. Merci.
    Merci beaucoup, madame Truppe.

[Français]

    Madame Freeman, ou plutôt mademoiselle Freeman, vous avez la parole pour sept minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.

[Traduction]

    Merci à tous nos témoins de comparaître.
    Ma question s'adresse à Deepa Mattoo.
    Merci beaucoup d'être ici. J'ai examiné votre recherche et je suis vraiment impressionnée par ce travail; je suis donc enchantée d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui. J'aimerais commencer en vous demandant ce que le comité peut apprendre de votre travail avec les femmes afin de lutter contre la violence et de s'attaquer aux causes du problème. Que pouvons-nous apprendre de ces femmes?
    La South Asian Legal Clinic s'est surtout démarquée pour ses travaux sur le problème des mariages forcés et pour avoir fait connaître ce problème. Nous travaillons aussi avec de nombreuses femmes quand il est question de problèmes relatifs au droit de l'immigration et à la résidence permanente conditionnelle, et quand elles sont parfois considérées elles-mêmes comme étant en train de commettre une fraude alors qu'elles sont victimes de violence plutôt qu'une fraude sur le plan de l'immigration.
    Nos expériences nous ont appris que la violence envers les femmes n'est pas un phénomène propre à la communauté. C'est un point qui nous pose un problème, car nous savons qu'une bonne partie du discours entourant la violence envers les femmes et les femmes de couleur porte tout à coup beaucoup sur ce qu'elles sont plutôt que sur ce qu'elles vivent. Je pense que c'est ce que nous avons appris. Ce qui compte, ce ne sont pas leurs origines, leur religion ou leur culture, mais leur histoire personnelle. Malheureusement, quand nous tentons d'envisager une politique ou d'apporter une réforme du droit, nous nous heurtons au fait qu'elles sont musulmanes ou sud-asiatiques, alors que ce n'est pas le coeur du problème. Ce qui compte, c'est le vécu individuel de chacune et le manque de sensibilité dont on fait preuve dans le système quand il s'agit d'essayer de connaître ce vécu.
    Mes collègues de Nouvelle-Écosse ici présentes parlent de leur programme leadership, et je trouve ces programmes formidables. Quand on laisse les femmes qui ont survécu et qui ont vécu des expériences diriger l'éducation et les programmes, cela confère une dimension différente. Cela permet d'informer les gens de manière différente et de voir au-delà que la religion, les origines ou de la couleur.
(1155)
    Je pense que vous soulevez un point très important: la violence envers les femmes est un problème auquel sont confrontées toutes les femmes au Canada et dans le monde, sans égard au pays d'origine, au statut d'immigration ou à la religion. J'ai l'impression que c'est ce que vous nous dites, en d'autres mots.
    Oui, certainement.
    J'ai le rapport intitulé The Incidence of Forced Marriage in Ontario, auquel vous avez contribué. La neuvième et dernière recommandation indique qu'il ne faut pas criminaliser le mariage forcé en en faisant une infraction distincte dans le Code criminel. Pourriez-vous nous expliquer cela?
    Oui, volontiers.
    Quand nous avons commencé à nous occuper du problème des mariages forcés, nous avons reçu beaucoup d'informations de femmes soumises à cette forme de violence. Je préciserais que quand nous avons commencé à nous intéresser à la question, nous avons constaté clairement dès le départ, soit en 2005, que c'est un problème qui s'inscrit dans un cadre de violence envers les femmes et rien d'autre. Il faudrait résoudre ce problème dans ce même cadre. Nous n'avons jamais voulu qu'il en soit autrement.
    Ici encore, nous voulions que les systèmes soient attentifs et sensibilisés aux expériences distinctes des femmes victimes de cette forme de violence, mais nous souhaitions qu'on tienne compte du cadre de violence envers les femmes. Le problème a malheureusement été traité de manière... et nous savons en outre que le projet de loi S-7 fait actuellement l'objet d'un examen.
    On présumera que le système juridique actuel ne dispose pas des moyens pour résoudre ce problème, alors que nos clientes, les survivantes et les communautés nous indiquent très clairement que les systèmes et les structures existants suffisent pour répondre aux besoins des gens s'ils veulent se prévaloir du droit et de la justice de cette manière.
    Malheureusement, je pense que nous n'avons pas suffisamment appris de ce que nous voyons, et c'est que les femmes ne veulent pas nécessairement se manifester. Ma collègue du groupe de Nouvelle-Écosse a brièvement souligné que les femmes ne veulent pas nécessairement quitter leur famille ou leur... Je ne dis pas qu'elles le devraient ou ne le devraient pas, mais le fait est que la décision devrait leur appartenir. Ce sont elles qui devraient prendre la décision. Le système ne devrait pas s'attendre à ce qu'elles prennent la décision parce qu'il veut qu'elles le fassent, et c'est certainement à cela que mènerait la criminalisation, alors que nous tentons de leur faire assumer la responsabilité de se protéger elles-mêmes au lieu d'accepter qu'il nous incombe de prévenir toute forme de violence envers les femmes.
    Il n'est donc pas logique...
    Je suis désolée, suis-je claire?
    Oui, très claire. Il n'est pas logique de lutter contre la violence envers les femmes en modifiant la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, comme le fait le projet de loi S-7.
    Pour que ce soit clair pour le reste du comité, nous parlons de la Loi sur la tolérance zéro face aux pratiques culturelles barbares.
    Vous nous dites essentiellement que cela n'aide pas les femmes avec lesquelles vous travaillez.
    Oui, cela ne les aide pas. Je pense que nous en avons parlé éloquemment quand l'occasion s'est présentée.
    Je tiens à dire que cette recommandation s'appuie sur l'expérience que nous avons eue avec les personnes qui vivent le problème. Elle ne se fonde pas que sur des données, mais sur les entrevues et les renseignements que nous avons recueillis auprès de personnes qui ont subi cette forme de violence.
    À la huitième recommandation, vous proposez de mieux protéger les résidents permanents et les personnes sans statut.
    Pourriez-vous traiter brièvement de la question?
(1200)
    Mais certainement.
    Les femmes qui sont victimes de violence et qui ont un statut d'immigrant précaire, lequel ne leur permet parfois pas d'avoir une connexion substantielle avec le Canada, bénéficient assurément de moins de protection dans les systèmes. Leurs agresseurs les menacent parfois d'expulsion. En outre, le système est conçu d'une telle manière qu'elles peuvent être expulsées parce qu'elles sont victimes de violence. Qu'elles signalent ou non les abus, elles risquent d'être expulsées parce qu'elles ont été violées ou parce qu'elles ont choisi de signaler l'agression. C'est quelque chose que nous voyons dans diverses dispositions, qu'elles concernent la résidence permanente conditionnelle, les fausses déclarations ou une accusation de violence familiale contre le co-demandeur. Nous voyons tout cela se produire dans divers domaines régis par les dispositions relatives à l'immigration, et c'est quelque chose qu'il faut changer.
    Ici encore, il faut apporter un changement de culture dans les politiques relatives à l'immigration afin d'être plus sensibles à la violence que subissent les femmes alors qu'elles se trouvent en situation précaire. Malheureusement, c'est comme si ces politiques étaient autant de chaînes invisibles autour des femmes. Il faut faire disparaître ces chaînes. Pour l'instant, les changements que nous proposons au comité visent à faire en sorte que nos politiques ne confinent pas les femmes dans la violence, mais les en libèrent.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Je vous remercie, madame Freeman.
    Madame O'Neill Gordon, la parole est à vous.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Merci à vous tous de comparaître aujourd'hui. Vous continuez d'ajouter beaucoup d'informations à notre étude, que nous considérons importante.
    Ma première question s'adresse à Lana Wells. Je tiens à dire à quel point il était important d'entendre les 10 points que votre association met en place et qui nous donnent beaucoup de matière à réflexion dans le cadre de nos travaux.
    Je veux vous assurer que ces dernières semaines, nous avons entendu un message clé au cours de nos nombreuses séances, c'est-à-dire qu'il est extrêmement important de commencer en bas âge la lutte contre la violence envers les femmes. Ce n'est pas à 18 ans que nous devrions commencer à réunir les hommes et les femmes; il faut commencer bien plus jeune, au cours des 10 premières années de la vie, si possible.
    Selon vous, que pouvons-nous faire pour prévenir la violence envers les femmes en tout temps, et par où devrions-nous commencer?
    Merci d'avoir posé la question.
    À l'heure actuelle, le gouvernement fédéral investit dans le partenariat infirmière-famille, un programme de visites à domicile qui s'adresse aux femmes enceintes et qui se poursuit jusqu’au deuxième anniversaire de naissance de l’enfant. Il s'agit d'un programme qui repose sur des données probantes et qui fait l'objet d'études depuis des décennies. Le gouvernement fédéral finance donc, en partie, le programme en Colombie-Britannique et en Ontario. Les visites à domicile constituent un des moyens de prévention les plus importants. Non seulement ce programme réduit le risque de maltraitance des enfants et de violence familiale, mais il aide aussi les soutiens de famille à trouver un emploi.
    Si je devais faire une recommandation, ce serait de commencer par une approche globale et universelle. Dans l'état actuel des choses, le gouvernement fédéral accorde un financement à chaque province, et les provinces répartissent les fonds entre divers programmes, selon ce qu'elles jugent approprié. Or, ces programmes ne sont pas du tout fondés sur des données scientifiques. Ce que je veux que le comité retienne aujourd'hui, c'est qu'il existe une foule de programmes axés sur des données probantes.
    Lors d'une de vos séances précédentes, des fonctionnaires étaient venus présenter de l'information sur le portail des pratiques exemplaires, dans lequel on trouve environ 80 programmes et politiques. Nous en connaissons beaucoup. Quelqu'un a parlé du développement de la petite enfance et des recherches scientifiques sur la façon dont le cerveau réagit au stress toxique chez les enfants qui, dès un très jeune âge, vivent dans l'adversité et sur les conséquences qui en découlent plus tard, dans leur vie relationnelle. Nous sommes au courant de beaucoup de données.
    Je crois que le rôle du gouvernement fédéral est de garantir la présence de normes nationales, de s'assurer que les investissements sont suffisants et qu'ils servent aux fins prévues et d'exiger un niveau élevé de reddition de comptes au sujet des résultats et des moyens utilisés pour y arriver.
    Mes collègues en Nouvelle-Écosse et en Ontario ont parlé du manque actuel de financement à long terme. C'est l'autre problème. Le gouvernement publie des annonces ou des demandes de propositions par l'entremise de Condition féminine Canada. Les gens présentent une proposition, mais ils ont deux ans pour prouver... Il faut parfois entre 10 et 15 ans pour créer une pratique fondée sur des preuves, au prix de recherches et d'évaluations très poussées. Par exemple, j'ai des collègues au Centre scientifique de prévention du CTSM à l'Université Western Ontario qui se concentrent sur le Quatrième R: « R » pour « relation ». Lecture, écriture, arithmétique et relation — voilà donc les quatre éléments de base.
    Quel est le rôle du gouvernement fédéral dans l'éducation? Nous savons que l'éducation relève des provinces, mais le fédéral accorde des transferts. En fait, il faudrait un apprentissage socioaffectif. Les enseignants doivent acquérir les compétences nécessaires pour comprendre les traumatismes et ils doivent être en mesure de transmettre des habiletés aux enfants. Si la famille ne les inculque pas à l'enfant, l'école devient alors le meilleur lieu de prévention. Selon moi, nous ne misons pas assez sur les écoles ou sur le système scolaire.
(1205)
     Allez-vous dans certaines des écoles, et quel groupe d'âges ciblez-vous?
    Oui. On trouve actuellement, en Alberta, plusieurs programmes.
    En Alberta, dans le cas de notre projet précis, nous mettons l'accent sur la pratique exemplaire appelée le Quatrième R avec le CTSM, en partenariat avec l'Université Western Ontario et l'Université de Calgary. Jusqu'à présent, 17 000 jeunes Albertains ont suivi le programme, et nous visons un objectif de 50 000 participants sur cinq ans. Nous estimons que, d'ici 7 à 10 ans, nous réduirons la violence dans les fréquentations, ce qui devrait réduire la violence dans les relations intimes et, par la suite, la violence faite aux femmes.
    Nous avons une stratégie ciblée, dans le cadre de laquelle nous collaborons avec 14 commissions scolaires, qui y participent à titre de partenaires. Il ne s'agit pas d'un programme tout court; c'est une approche globale qui vise l'ensemble de l'école. Autrement dit, tout le monde reçoit une formation: les enseignants suivent la formation, et ce sont eux qui mettent en oeuvre le programme. Cela signifie aussi que les écoles sont des milieux sûrs et bienveillants, dans lesquels on s'assure que tous les élèves reçoivent les soins dont ils ont besoin.
    J'aimerais poser la même question à Mme Mills, de la Nouvelle-Écosse. D'après vous, dans quel contexte et à quel moment devrions-nous commencer une telle mobilisation. À partir de quel âge les garçons devraient-ils être sensibilisés à la prévention de la violence envers les femmes?
    Je suis tout à fait d'accord avec Lana. Je crois qu'il faut commencer très tôt.
    L'accès à un financement stable et permanent est un gros problème. Nous avons quelques projets formidables, mais ils prennent tous fin après un an ou deux. L'ISANS compte 120 employés, mais aucun d'eux n'a un contrat de plus d'un an. Nos contrats ne durent qu'un an. Cela signifie que nous ne pouvons pas poursuivre le travail; nous ne pouvons même pas examiner les résultats à court terme avant l'année prochaine et ensuite, ce n'est qu'un cycle qui se répète.
    Selon moi, il faut étudier la question de façon globale aussi. Je comprends tout à fait ce que mes collègues ont dit au sujet... la rhétorique sur la protection des femmes. Je crois que nous devons permettre aux femmes de devenir des meneuses. Nous devons faire passer leurs intérêts au premier rang. Par « femmes », j'entends aussi les filles; il faut donc commencer très tôt. Mais je pense qu'il faut aussi tenir compte des cellules familiales, parce que dans le cas des immigrantes, comme nous l'avons dit, la plupart d'entre elles ne veulent pas quitter leur famille et leur agresseur. Elles souhaitent seulement mettre fin à l'agression. D'aucuns pourraient estimer qu'il ne s'agit pas de la meilleure solution pour elles, mais comme vous l'avez si bien dit, c'est aux femmes de prendre la décision. À mon avis, il faut examiner toutes ces questions du point de vue des différentes cultures. Ce n'est peut-être pas la solution appropriée aux yeux d'autres personnes, mais cela pourrait être acceptable dans d'autres cultures.
    Ma prochaine question...
    Merci. Je suis désolée.

[Français]

    Nous allons maintenant passer à vous, madame Duncan. Vous avez sept minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    J'aimerais vous remercier de votre présence, de vos exposés et du travail que vous faites dans le but de changer des vies. Vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion. Je vais essayer de poser des questions à chacune d'entre vous.
    Madame Dumont-Smith, a-t-on officiellement consulté votre association, l'AFAC, au sujet du Plan d'action pour contrer la violence familiale?
    Vous parlez du plan qui a été lancé l'an dernier par Condition féminine Canada?
    Oui. A-t-on sollicité vos idées pour l'élaboration de ce plan?
    Si je me souviens bien, nous voulions participer pleinement à la recherche, du début à la fin, parce que c'était une étude semblable à celle que vous menez actuellement. On a invité notre association à faire un exposé de 15 minutes, comme ce que nous faisons aujourd'hui. On aurait dû nous faire participer davantage au processus dans son ensemble.
    Le tout s'est résumé à un exposé de 15 minutes?
(1210)
    Il n'y a pas eu de suivi? Le tour était joué. Merci.
    Je passe maintenant à la représentante de la South Asian Legal Clinic. Nous avons parlé un peu du projet de loi S-7. Si vous pouviez faire une recommandation au comité, quelle serait-elle?
     Voici ce que je recommande au comité — et je parle du projet de loi S-7 et de toute autre politique qui découle d'un processus où la consultation des collectivités et des survivantes fait parfois défaut. Quand j'utilise le mot « collectivité », je ne parle pas de la communauté sud-asiatique, mais des groupes d'étudiants, d'avocats ou de travailleurs spécialisés dans l'établissement des immigrants. Je ne parle pas d'une communauté ethnique particulière. Je crois qu'il est essentiel d'assurer une consultation et un dialogue en bonne et due forme, mais malheureusement, cela n'a pas été le cas avec le projet de loi S-7.
    Pour aller de l'avant, il est important de veiller à ce que toute politique ou toute modification proposée dans le cadre du comité tienne compte de la voix des survivantes; il faut les placer au coeur des discussions. Or, les survivantes ne parlent pas d'une voix monocorde, mais d'une voix aux résonnances multiples. Elles disent: « Nous n'avons pas besoin d'être sauvées par vous; nous pouvons y arriver par nous-mêmes. » Elles disent: « Nous ne tenons pas forcément à signaler des cas; nous voulons simplement nous sentir en sécurité. » Elles disent: « Je ne veux pas partir; je veux négocier la violence à laquelle je suis exposée, tout en faisant preuve de résilience dans la situation où je me trouve. Je suis une immigrante. Je n'ai pas besoin de vous entendre me qualifier de barbare. Je veux que l'on me respecte pour ce que je suis. Je ne suis pas un être humain au rabais. Je suis une citoyenne canadienne à part entière. »
    C'est donc la recommandation que je ferais: traitons les femmes à leur juste mesure, parce que si nous ne les acceptons pas telles qu'elles sont et si nous ne reconnaissons pas leurs qualités de meneuses, nous ne rendrons pas service à notre pays. Elles peuvent nous montrer comment y arriver. Elles le font déjà parce qu'elles mènent ce combat; elles peuvent nous enseigner des leçons et nous diriger.
    Je suis désolée... c'est très général, mais là où je veux en venir, c'est que nous devons entendre leurs voix.
    Je vous remercie de votre intervention.
    Ma question s'adresse encore une fois à Mme Dumont-Smith. On a perdu le financement de l'initiative Soeurs par l'esprit. Pouvez-vous nous dire pourquoi le financement a été interrompu et s'il reste du travail à faire?
    Lorsque l'initiative Soeurs par l'esprit a pris fin, l'AFAC a bien entendu demandé de continuer la tenue à jour des données. De nouveaux critères ont été fixés. On nous a dit qu'il n'y aurait plus d'activités de recherche ou de défense des droits. Donc, tout projet lié à la recherche ou à la défense des droits qui était financé par Soeurs par l'esprit après son élimination graduelle sur cinq ans ne serait plus financé.
    Aucune recherche n'a été réalisée dans le cadre des deux phases de l'initiative Du constat aux actes. Toutefois, nous avons des bénévoles qui aident l'AFAC dans ses travaux, et ils ont conservé une base de données distincte, pour ainsi dire. Nous savons que les chiffres augmentent sans cesse, ce qui a été confirmé lorsque la GRC a fait ses propres recherches et a rendu public le rapport en mai. Nous ne pouvions plus continuer les recherches cependant.
    Il n'y avait pas de financement pour les recherches?
    Mme Claudette Dumont-Smith: Non.
    Mme Kirsty Duncan: D'accord.
    Madame Wells...

[Français]

     Nous allons arrêter l'horloge, s'il vous plaît.
    Madame Crockatt, vous avez la parole.

[Traduction]

    Nous voulions avoir une vaste discussion. Nous laissons habituellement aux gens la liberté de poser les questions qu'ils veulent, mais je pense que la députée s'éloigne grandement du sujet des pratiques prometteuses pour prévenir la violence contre les femmes. Je l'encouragerais donc à revenir sur le sujet.
    Merci beaucoup, madame Crockatt.
    Je trouve les recherches, les éléments de preuve et certains des programmes qui sont et étaient financés très pertinents à notre étude. Je vais donc lui permettre de poser sa question.
    Merci, madame la présidente.
    Nous voulons toujours avoir des preuves.
(1215)
    Madame Duncan, je vous informe qu'il vous reste une minute et demie.
    Merci.
    Madame Wells, je voulais simplement revenir sur quelque chose que vous avez mentionné. Vous avez parlé d'une stratégie nationale sur le rôle parental et des châtiments corporels. Je me demande si vous aimeriez avoir l'occasion de vous prononcer sur ces deux points.
    Certainement. Je sais que de nombreuses études canadiennes ont été réalisées sur le sujet, mais aucune preuve ne démontre que les châtiments corporels sont une bonne chose pour les enfants. On a l'occasion d'abroger l'article 43 pour interdire les châtiments corporels au Canada. J'encouragerais le gouvernement fédéral à apporter cette modification à la loi et à appuyer une stratégie sur le rôle parental pour que les gens puissent comprendre la discipline positive et le rôle des parents. Ce n'est pas seulement pour abroger l'article; c'est également pour veiller à ce que du soutien soit en place pour les familles.
    Ce sont là deux recommandations.
    Absolument.
    Madame Dumont-Smith, pourriez-vous parler des besoins uniques des refuges pour les femmes autochtones?
    Je travaille avec nos collègues à Pauktuutit, par exemple, et il y a une grave pénurie de refuges dans le Nord. Je sais également qu'il y a une pénurie dans les collectivités des Premières Nations. Pour ce qui est des refuges à l'extérieur des réserves, bon nombre d'entre eux ne sont pas adaptés à la culture, et les femmes qui vivent dans les centres urbains — 52 % de la population vivent en dehors des collectivités — ne trouvent pas que les refuges réguliers répondent à leurs besoins.

[Français]

     Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer à M. Barlow, pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci, madame la présidente.
    Ma première question s'adresse à Mme Mattoo. Je suis content que vous parliez de changer la perspective de manière à sauver les femmes victimes de violence et à en faire des leaders. C'est une excellente position à adopter et un bon message à véhiculer. Mais vous parlez du succès que vous avez eu avec des programmes axés sur les pairs et axés sur les survivants.
    J'aimerais savoir une chose. Les hommes participent-ils à certains de ces programmes en tant que pairs, ou même en tant que personnes ayant commis des actes de violence dans le passé?
    Malheureusement, je n'ai pris part à aucun des projets où les hommes ont participé en tant que mentors, qu'ils aient commis des actes de violence ou vécu de la violence dans leur famille. Je crois que nous pourrions être un bon modèle. Nous n'avons pas vu de tels programmes. C'est informel. Nous en sommes conscients.
    Dans les groupes de soutien aux hommes ou dans les programmes obligatoires — ceux où ils sont censés recevoir du counselling à long terme lorsqu'ils ont commis des actes de violence —, je sais qu'il nouent ces relations dans ces cadres. C'est de façon informelle, mais je n'ai encore jamais vu de programmes de la sorte jusqu'à présent.
    Vous avez parlé de leaders dans la collectivité qui font ce genre de choses, peut-être de façon informelle, en agissant comme mentors pour les néo-Canadiens ou les nouveaux immigrants au pays.
    Tout à fait, il y a beaucoup de programmes, qui sont dirigés par des collectivités ainsi que par des organismes adaptés aux cultures dans la région du Grand Toronto que je connais. Il y a notamment les services de santé communautaires punjabi. Le directeur général de l'agence, M. Baldev Mutta, dirige des programmes très avant-gardistes dans la collectivité pour éduquer les hommes.
    Comme mon collègue de la Nouvelle-Écosse le disait, ces programmes n'ont pas besoin d'avoir dans leur titre des expressions comme « lutte contre la violence faite aux femmes » ou « lutte contre la violence ». Ils portent parfois seulement sur la drogue, sur le jeu, sur les problèmes de comportement ou sur la gestion de la colère. Ils ne visent pas forcément la violence contre les femmes, mais le message et le mentorat sont clairs pour veiller à ce que les hommes comprennent les effets de la violence et qu'ils reçoivent de l'aide tout au long du processus.
    Je pense que c'est une bonne idée, même si c'est une structure informelle pour aider les nouveaux arrivants à comprendre la culture canadienne. Ils se sentent les bienvenus grâce à cette interaction avec d'autres.
    Madame Wells, merci d'avoir fait le trajet depuis Calgary. Je vous en suis reconnaissant. Désolé du temps qu'il fait.
(1220)
    Il fait froid ici.
    Je ne suis pas habitué à l'hiver de l'Est canadien.
    Il y a du sel partout.
    Oui. J'espère que vous avez apporté un par-dessus. Si j'avais su que vous alliez venir, je vous aurais demandé de m'apporter des pantalons de neige.
    Vous avez parlé de la stratégie nationale sur le rôle parental. J'ai trouvé l'idée intéressante, de même que l'importance de mettre l'accent sur un rôle paternel positif. L'un des messages que nous avons entendus dans le cadre de ce processus, c'est d'accorder plus d'attention aux hommes et au rôle qu'ils jouent.
    Vous avez parlé du programme Caring Dads. J'aimerais savoir s'il est efficace. Vous avez dit que c'est un programme assez fructueux. Pourriez-vous nous en dire un peu plus au sujet du programme?
    D'accord. C'est l'initiative de ma collègue, Mme Katreena Scott. Je ne suis pas certaine si vous l'avez convoquée à témoigner, mais je vous encouragerais à le faire car elle étudie ce dossier depuis un certain temps. C'est un programme de pratiques exemplaires offert en Alberta. Je travaille actuellement avec le gouvernement de l'Alberta à l'élaboration d'un cadre d'investissements et de politiques pour les pères et la paternité.
    Lorsqu'on regarde la majorité des programmes sur le rôle parental au Canada, ils sont surtout axés sur la mère. Nous pensons donc à la cellule familiale dont mes collègues ont parlé et à la nécessité de réfléchir au fait que certains programmes qui fonctionnent pour les femmes ne conviendront peut-être pas pour les hommes. Il y a des particularités et différents mécanismes de prestation auxquels il faut penser. D'excellentes recherches sont en cours. Je ne sais pas si vous connaissez l'initiative sur le bien-être familial en Alberta que la Fondation Norlien a fortement influencée en s'associant avec le gouvernement de l'Alberta et le Centre du développement de l'enfant de l'Université Harvard, où des travaux remarquables sont réalisés grâce à la collaboration des meilleurs neuroscientifiques, scientifiques spécialistes du comportement et travailleurs sociaux pour mettre au point des programmes de pratiques exemplaires à partir de la petite enfance et aux autres stades du développement. À l'heure actuelle, il y a trois organisations en Alberta qui mettent en oeuvre le programme de participation positive des pères, ce qui est une pratique exemplaire.
    Nous examinons actuellement comment mettre en oeuvre ces programmes à plus grande échelle. Je ne pense pas que la question est de savoir s'il existe d'excellents programmes de pratiques exemplaires. Il faut déterminer comment les appliquer. Comment peut-on les mettre en oeuvre dans des groupes de population différents? Il faut de l'argent pour la mise en oeuvre pour assurer la fidélité et veiller à ce que les gens qui mettent en oeuvre un programme possèdent les compétences et les capacités voulues pour l'exécuter tel que prévu.
    L'autre problème, c'est si un programme conçu en Californie est mis en oeuvre en Alberta, il faut s'assurer que le contexte est pris en compte. Il faut du temps pour peaufiner les détails. La Fondation Norlien a financé ce programme et la recherche fait partie du projet depuis les cinq dernières années, afin de continuer à faire évoluer le programme pour qu'il convienne le mieux possible aux parents, qu'ils soient en Alberta, en Ontario ou en Colombie-Britannique. Le contexte est très important.
    Merci.

[Français]

     Je vous remercie beaucoup tous les deux.
    Je cède maintenant la parole à Mme Freeman pour cinq minutes.

[Traduction]

    Je vais revenir là où j'en étais avec Mme Deepa Mattoo.
    Vous avez clairement dit que les politiques actuelles et les projets de loi comme le projet de loi S-7 servent à marginaliser encore plus les femmes. Est-ce bien ce que vous dites?
    Tout à fait. Je voulais dire que cela ne fait pas que marginaliser les femmes. Cela marginalise également leurs communautés d'origine, en plus de cibler encore plus certaines communautés. Je pense que cela nous éloigne du discours et de la réalité selon lesquels la violence faite aux femmes existe, peu importe les cultures et les antécédents historiques, et ce, encore plus quand il y a eu une colonisation et d'autres formes de marginalisation.
    Je trouve problématique que la violence faite aux femmes ne soit pas considérée comme étant un problème global et qu'on tienne le discours qui veut que la culture de certaines communautés soit barbare et que les nouveaux arrivants soient nécessairement plus violents que les gens qui vivent ici au Canada. Comme je l'ai déjà dit, les programmes et la prestation des services doivent tenir compte des besoins particuliers des gens et y être adaptés, mais cerner la question et homogénéiser des communautés en disant qu'elles en ont besoin parce qu'elles sont moins cultivées que nous qui vivons au Canada, c'est un discours problématique.
    Ce que vous venez de dire me fait penser à un article que j'ai lu ce matin. On entreprend à l'Université de Toronto une étude intitulée  «Gender equity in Canada's newly growing religious minorities », ce qui se traduit par « L'équité entre les sexes au sein des nouvelles minorités religieuses croissantes au Canada ». Cette étude se penche sur la présence des femmes musulmanes sur le marché du travail et sur la différence entre elles et les autres groupes — je pense qu'on mentionne en particulier les femmes hindoues et sikhes. On disait dans l'article que selon les perceptions, les femmes musulmanes sont plus réprimées et moins actives sur le marché du travail alors qu'en réalité, il n'y a pas de différences entre ces groupes et, ce qui est très révélateur, que les femmes de deuxième génération sont tout aussi actives sur le marché du travail.
    Est-ce qu'il y a un rapport avec le travail que vous faites? Est-ce que vous trouvez que c'est sensé?
(1225)
    Tout à fait. Je dirais que c'est l'hypothèse que nous cherchons principalement à démentir. Le problème est en partie attribuable au modèle de prestation de services. Compte tenu des services dont nous avons besoin, nous demandons constamment des services qui tiennent compte de nos particularités culturelles et linguistiques, mais cela ne signifie pas que nous disons que ces communautés ne sont pas assez civilisées. Nous ne disons pas que ces communautés n'ont pas de compétences ou de leadership. Je crois que c'est là où la séparation se fait, malheureusement, car nous demandons des services adaptés sur les plans culturel et linguistique.
    Donc, quand mes collègues de Nouvelle-Écosse ou de London travaillent avec les communautés musulmanes et parlent de la façon dont les services doivent être adaptés sur les plans culturel et linguistique, elles ne disent pas nécessairement que ces communautés ne sont pas capables et qu'elles ne forment pas des membres actifs dans le milieu du travail et en matière d'équité dans l'emploi. Je pense que c'est là que la séparation se fait, et il est très important que nous fassions le lien entre ces choses quand nous en discutons.
    D'accord.
    Je vais vous demander de décrire comment vous voyez un plan d'action national prescrit par le gouvernement fédéral dont le but serait de mettre fin à la violence faite aux femmes.
    Comme je l'ai dit précédemment, je pense que le plan doit être beaucoup plus inclusif quant à notre vision d'un Canada sans violence et d'un Canada qui protégerait davantage les femmes, de sorte que les femmes ne se sentent pas obligées de partir, de faire des signalements, ou de prendre des décisions immédiates. Il faut un plan d'action qui assure la pertinence culturelle dans les domaines de la santé et de l'emploi ainsi que dans d'autres structures d'éducation, et qui permet aux femmes de ne pas nécessairement opter pour le cadre culturel dominant quand il s'agit de se libérer de la violence.
    Il faut que le cadre soit inclusif et intersectoriel.
    Merci.
    Puis-je savoir combien de temps il me reste?
    Vous avez 30 secondes.
    Oh, dommage.
    Je vais rapidement m'adresser à l'Association des femmes autochtones du Canada.
    Je sens que je dois vous poser cette question. Si nous ne nous penchons pas sur l'héritage laissé par les pensionnats autochtones, sur l'histoire de la colonisation et sur l'oppression systémique qui se poursuit, et si nous ne changeons pas radicalement la façon dont nous faisons les choses afin de travailler dans le cadre d'une relation de nation à nation, pouvons-nous vraiment nous attaquer à la violence faite aux femmes, en particulier aux femmes autochtones de ce pays?
    C'est ce qui sous-tend notre réclamation d'une enquête publique nationale, laquelle nous permettrait de remonter à l'origine du problème. C'est vrai que bien des choses ont été mises en place au cours de ma vie, mais les taux ne diminuent pas; il y a encore des meurtres. Ils sont même en hausse dans certains contextes. Tant que nous ne le faisons pas, nous tournons en rond, encore.
    Merci de votre réponse très brève à cette question difficile.
    Nous poursuivons.

[Français]

     Madame Perkins, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Je vous remercie de votre participation à notre séance. C'est un échange d'information incroyablement utile.
    Je trouve qu'il y a beaucoup à discuter à l'échelle du pays. Nous pouvons certainement comprendre qu'il y a des difficultés très particulières dans des domaines très particuliers.
    J'aimerais me concentrer sur Lana en particulier puisque nous cherchons à faire ressortir des pratiques prometteuses qui permettraient de réduire et de prévenir la violence envers les femmes et les enfants. Vous en parliez comme d'une approche fondée sur des données scientifiques et disiez qu'il faudrait des normes nationales et des cadres de responsabilité intégrés.
    Comment verriez-vous la mise en oeuvre de normes nationales tenant compte de toutes les variables mises de l'avant? Quel genre de cadre de responsabilité serait réalisable, d'après vous, étant donné que tous auront leurs propres programmes au bout du compte? Qui devrait être responsable, et comment cela pourrait-il être structuré pour que nous ayons une idée des réussites et des difficultés?
(1230)
    Excellent.
    Premièrement, je tiens à souligner moi aussi qu'il faut un plan d'action national. Je pense que c'est ce que vous avez entendu dans toutes les séances. Cependant, il ne peut être conçu en vase clos, et je ne pense pas qu'il incombe au gouvernement fédéral de résoudre ce problème. Je pense que l'aspect de l'inclusion, de l'adaptation en fonction de toutes les populations différentes du Canada, est évident.
    Je crois qu'il faut aussi un processus, pour que chacun puisse acquérir la capacité de comprendre les causes profondes, les risques et les facteurs de protection ainsi que les solutions. Comme mes collègues l'ont souligné, il se fait beaucoup d'excellent travail dans la communauté, et il est documenté de manière à être inclus dans les portails fondés sur les données scientifiques et tout cela. Je parle vraiment de l'utilisation de données scientifiques, car les choses changent au fil du temps.
    Je pense que l'inclusion, le processus, est aussi importante que le plan. Je surveille tous les plans gouvernementaux à l'échelle du monde. Nous en avons 80. Nous les analysons. Nous essayons de comprendre ce que notre gouvernement fait, pourquoi il le fait, les données sur lesquelles il s'appuie, et la responsabilité.
    Ce qui est intéressant, c'est que deux gouvernements à l'échelle mondiale font réellement le suivi et ont un cadre de responsabilité comportant des indicateurs et des mesures. Donc, souvent, nous avons de magnifiques plans que les gouvernements établissent, mais personne ne s'occupe de leur mise en oeuvre ou n'en est responsable, et personne ne s'occupe de l'évaluation du degré de conformité.
    Quels sont ces deux pays?
    Ce sont la Nouvelle-Zélande et la Suède. Je serai ravie de vous transmettre tous les résultats de nos analyses.
    De nombreux gouvernements parlent de résultats. Le gouvernement de l'Alberta a créé un ensemble de résultats. C'est le suivi, la mise en oeuvre et l'évaluation qui sont souvent oubliés. Je comprends les cycles politiques, mais il nous faut un plan durable qui fait l'objet d'engagements sur des dizaines d'années. C'est un problème qui va prendre des décennies à résoudre, et non deux ans, alors c'est ce que je recommande.
    Je sais que la version longue du questionnaire de recensement que nous avons perdue fait l'objet de débats politiques en ce moment; nous avons perdu beaucoup d'excellentes données et de données de surveillance, et nous en avons besoin. Nous devons pouvoir faire du suréchantillonnage dans les provinces, de manière à avoir de bonnes données dans les provinces aussi. Je pense que les données de surveillance sont essentielles.
    De quoi devrait avoir l'air le volet responsabilité, d'après vous?
    Je pense que le gouvernement du Canada, les gouvernements provinciaux et territoriaux et les groupes communautaires devraient se partager la responsabilité. Je pense que toutes les parties doivent assumer la responsabilité de tous les volets. Les ministères doivent être inclus dans le plan, et il ne faut pas se limiter à dire ce qui doit être fait, mais préciser les personnes qui vont le faire et les échéances, la façon dont ce sera réalisé et les mesures qui nous permettront de savoir si nous avons réussi.
    Je vous remercie beaucoup.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Nous passons maintenant à Mme Crockatt, qui dispose de cinq minutes.

[Traduction]

    Merci infiniment, et merci à tous nos témoins.
    L'une des choses qui m'ont frappée, dans les témoignages, et vous avez tous soulevé d'excellents points que j'ai frénétiquement pris en note, c'est que nous avons des centaines, voire des milliers de programmes dont le but est d'enrayer la violence faite aux femmes. Nous y travaillons, au Canada, depuis 1965, je crois, à l'époque où nous avons commencé à créer des refuges. Je pense que la plupart des personnes ici présentes ont participé à ces efforts d'une manière ou d'une autre, et que beaucoup de sang, de sueur et de larmes ont coulé. Ce que nous essayons de savoir, c'est où nous en sommes par rapport à l'avant-garde. Dans quelle direction allons-nous?
    J'ai trouvé que Lana avait soulevé d'excellents points au sujet des mesures requises et de la nécessité de déterminer ce qui fonctionne, car nous pourrions être assis à des tables de discussion et présents à des conférences pendant des années sans jamais savoir ce qui fonctionne.
    J'ai aimé quand vous avez dit, Claudette, qu'il est vrai que bien des choses ont été mises en place, mais que les taux ne s'abaissent pas. Nous devons manifestement trouver de nouvelles façons de résoudre certains des problèmes.
    Je pense que ce que j'ai entendu aujourd'hui, c'est que soutenir le leadership des femmes — Deepa l'a dit sans détour — et éduquer les hommes et les garçons sont, semble-t-il, des mesures avant-gardistes qui commencent à donner des résultats. Et il y a aussi l'éducation des personnes au sujet des aspects culturels, en particulier pour nos nouveaux arrivants. Il semble que vous dites que nos deux populations les plus vulnérables sont les femmes autochtones et les femmes immigrantes.
    C'est drôle, car je parlais justement à Jason Kenney hier du genre d'attentes que nous pouvons transmettre à nos nouveaux immigrants pour qu'ils comprennent qu'il n'est pas acceptable, au Canada, de battre sa femme ou de vendre sa fille, ou de la forcer à se marier avec quelqu'un.
    Je tiens à souligner en passant que la Calgary Immigrant Women's Association fait de l'excellent suivi. J'ai pensé que Gerry Mills, de la Nouvelle-Écosse, souhaiterait communiquer avec elle, car elle réussit très bien à obtenir le financement continu de ses programmes grâce à l'élément de suivi qu'elle intègre dans chaque programme pour pouvoir dire lesquels sont les plus efficaces.
    Lana, avez-vous de la recherche sur les programmes qui fonctionnent pour les femmes immigrantes en particulier?
    Toutes mes excuses pour la longueur de ma question.
(1235)
    Je laisserais mes collègues parler. Je pense qu'elles sont toutes les deux des spécialistes des pratiques prometteuses concernant les femmes immigrantes.
    Vous êtes la personne qui fait de la recherche.
    Je n'ai pas étudié les immigrantes. Mon domaine est principalement la prévention et l'étude des politiques et pratiques prometteuses qui aident les gens à ne pas s'engager dans des relations malsaines ou violentes. Je pense donc qu'il vaudrait mieux que mes collègues répondent à cette question.
    D'accord. Je vais demander à Nanok de répondre.
    Puis-je vous demander de répondre à ma question?
    Puis nous entendrons Deepa.
    Bien sûr.
    Mon projet n'est pas un projet de recherche, mais nous avons réalisé une évaluation des besoins des jeunes femmes immigrantes. En passant, la plupart ont été accueillies comme réfugiées. L'évaluation des besoins liés à leurs difficultés nous a permis de déceler bien des problèmes sociaux comme le manque de ressources communautaires et de perspectives de formation et d'emploi, les conflits intergénérationnels, de la violence familiale et le manque de soutien linguistique. Certains des problèmes étaient liés à des questions très générales d'établissement, mais en réalité, ce sont des problèmes qui influent sur la position des jeunes femmes immigrantes dans la société de Calgary.
    Je n'ai pas beaucoup de temps, alors je vais me permettre de vous demander ce qui fonctionne, en réalité. Quelle est d'après vous la chose qui fonctionne vraiment pour vous, en ce qui concerne les femmes immigrantes?
    La création d'un lieu sûr est la leçon la plus précieuse que nous ayons apprise. Quand elles sortent, elles sont jugées comme de jeunes femmes immigrantes qui sont venues en tant que réfugiées. Elles se font harceler, et elles finissent par s'isoler à cause de cela. Cependant, si elles ont cet espace, elles peuvent vraiment parler ouvertement de leurs problèmes sociaux, constater que ce n'est pas de leur faute et qu'elles ne sont pas les seules à vivre cela. En ayant l'occasion de parler, elles finissent par se voir comme des leaders capables de relever en groupe les défis que posent ces problèmes sociaux.
    Donc, établir un groupe de soutien solide et du mentorat par les pairs est efficace.
    Merci.
    Est-ce que Mme Mattoo pourrait répondre brièvement à la question de Mme Crockatt?
    Oui, bien sûr.
    Je pense que trois types de programmes fonctionnent vraiment bien, d'après notre expérience; les programmes axés sur les arts, les programmes axés sur les compétences parentales et les programmes de soutien par les pairs. Les trois types fonctionnent bien pour les femmes immigrantes.
    Quand vous pensez au succès de ces programmes, il est important de garder à l'esprit que les programmes leur permettent de parler de leurs connaissances et de leurs compétences... car elles ont effectivement beaucoup de connaissances et de compétences. Elles ont aussi vu de la violence faite aux femmes et elles connaissent des tactiques de survie que vous et moi ne connaissons parfois pas. Nous ne tirons pas profit de cette expérience; nous n'obtenons pas cette information d'elles, nous n'apprenons pas d'elles et nous ne les incluons pas dans ce leadership. Je pense donc que ces programmes réussissent à... [Note de la rédaction: inaudible] ... cette voix.
    Merci beaucoup.

[Français]

     Madame Duncan, vous avez la parole pour cinq minutes.

[Traduction]

    Je vais revenir à Mme Wells.
    Nous entendons à répétition qu'il faut du « financement durable », mais vous avez aussi parlé de l'augmentation importante du financement de Condition féminine. Pourriez-vous parler de cela, puis nous dire ce que serait un financement durable, par opposition au financement de projets?
(1240)
    Je crois que les mécanismes de financement font partie du problème. Je pense que nous devons repenser notre mode de financement. J'ai parlé du financement de projets à long terme, et de la nécessité de garder à l'esprit qu'il faut de 18 mois à 2 ans pour concevoir et même mettre à l'essai de nouveaux programmes novateurs. Puis il y a l'argent qu'il faut pour l'évaluation et la recherche, de sorte qu'on puisse recueillir les données du programme, le tester et peut-être même le soumettre à un essai contrôlé randomisé, etc.
    Il faut beaucoup d'argent à long terme et un financement garanti sur 5, 7 ou 10 ans. Mes collègues de Nouvelle-Écosse ont parlé de leurs employés qui ont un contrat d'un an. C'est d'une année à l'autre. Les gens du secteur des services sociaux n'ont pas la stabilité, la capacité de planifier ou le désir de rester dans le secteur, faute de sécurité d'emploi.
    Je pense que ce sont d'importants problèmes et que les gouvernements fédéral et provinciaux pourraient apporter de grands changements aux mécanismes et aux démarches de financement. Cela pourrait en soi changer bien des choses pour les groupes communautaires et agences qui s'occupent des femmes et des enfants.
    Merci.
    Madame Dumont-Smith, pouvez-vous nous dire ce qu'ont signifié les réductions du financement pour votre organisation? Sans ces réductions, qu'est-ce qui aurait pu être fait?
    Dans tous les secteurs?
    Oui.
    L'Association des femmes autochtones du Canada comptait différents départements.
    Celui de la santé, par exemple. En avril 2012, Santé Canada nous a informés que nous avions perdu tout notre financement. Nous ne pouvions rien faire dans le secteur de la santé pour les femmes autochtones. Huit de nos employées ont été licenciées, et nous n'avons jamais pu les réembaucher parce que nous n'avons pas réussi à obtenir de financement supplémentaire de la part de Santé Canada. Ce fut une compression importante.
    Les autres compressions ont, bien sûr, touché le financement de Condition féminine Canada. Pendant la vigile Soeurs d'esprit, l'Association des femmes autochtones du Canada recevait environ 1 million de dollars, information qui a été rendue publique. Le financement a baissé régulièrement depuis. Nous en recevons beaucoup moins qu'à l'époque et même que l'an dernier. Encore une fois, ces compressions ont des répercussions sur la dotation. Le nombre d'employés dans ce département a aussi baissé.
    Le financement de base de l'ensemble des OAN et des organismes autochtones régionaux a aussi baissé en général l'an dernier. Afin d'obtenir du soutien financier pour nos projets dans divers secteurs, nous avons dû présenter une demande à un fonds de 20 millions de dollars comme les quatre autres OAN et tous les organismes autochtones régionaux au Canada. C'était un processus très concurrentiel.
    Nous y avons participé et avons présenté nos 10 propositions le 20 février l'an dernier, je crois  — c'était la date limite de chaque proposition — et nous n'avons pas su avant octobre-novembre que nous avions obtenu du financement pour certains de nos projets. En ce moment, nous menons des travaux qui doivent être achevés le 31 mars au plus tard. Nous avons donc trois ou quatre mois pour abattre une année de travail avant cette date.
    C'est très difficile pour moi et mon personnel de travailler dans ces conditions. Bien sûr, comme ma collègue l'a mentionné, il n'est pas facile de garder un personnel dévoué qui veut travailler, qui veut être sur le marché du travail et qui aime son travail. Mais nous ne pouvons pas leur offrir de stabilité. Côté financement, c'est ma situation à moi ainsi qu'à tous les autres OAN et OR.

[Français]

     Je vous remercie, madame Duncan.
    Nous allons maintenant passer à Mme Bateman.
     La parole est à vous, vous disposez de sept minutes.
    Je vous remercie, madame la présidente.

[Traduction]

    Je tiens vraiment à remercier tous nos témoins d'aujourd'hui. Il est tellement important pour nous de connaître vos vues. J'ai pris beaucoup de notes pendant vos interventions. Je vais essayer de poser des questions à chacune d'entre vous.
    J'aimerais commencer par un sujet qui me tient à coeur. Je n'y passerai pas sept minutes, par contre. Avant d'être députée, j'étais commissaire d'école. J'étais vraiment fière de ce poste, car il me permettait de faire des changements concrets.
    Un certain nombre d'entre vous avez parlé du besoin d'intervenir auprès des enfants lorsqu'ils sont jeunes et d'aider à les former... Sans modèle familial, l'école est la deuxième meilleure solution — je pense que c'est Mme Wells qui l'a dit. L'école est un outil précieux.
    Quelle est votre vision de cette intervention? Nous en avons certainement fait beaucoup lorsque j'étais commissaire.
(1245)
    Je pense que nombre d'écoles et d'administrations scolaires sont résolues à le faire.
    Encore une fois, je pense qu'il faut verser du financement aux provinces pour qu'elles appuient les ministères de l'Éducation.
    En fait, ma deuxième question porte là-dessus.
    Il se trouve que je suis comptable agréée. Madame Wells, vous avez constamment parlé de la structure de responsabilisation, de la reddition de comptes nécessaire pour obtenir des résultats positifs en ce qui touche les paiements de transfert.
    Comme vous le savez, depuis 2006, année où le gouvernement actuel a accédé au pouvoir, les paiements de transfert n'ont jamais augmenté à ce rythme. Cependant, vous dites que nous pourrions faire mieux côté reddition de comptes. J'aimerais entendre ce que vous avez à dire sur ces deux points.
    Oui, tout à fait, et je pense que c'est une question de cohérence des résultats et qu'il faut exiger que l'on rende des comptes lorsque l'on en fait rapport.
    Je crois que les systèmes scolaires occupent une place importante au plan des politiques et des pratiques. Les universités doivent former les enseignants à élaborer des programmes. Je pense qu'un article est paru aujourd'hui concernant la formation des avocats. Petite parenthèse: aujourd'hui, en Ontario, les avocats ne sont pas sensibilisés à la question de la violence conjugale. Les facultés qui forment des professionnels doivent offrir de la formation en ce qui touche, entre autres, les traumatismes, la violence familiale et la violence à l'égard des femmes.
    Je pense qu'il faut offrir de la formation au sein de ces facultés. Selon moi, les systèmes scolaires doivent tenir compte de l'intelligence sociale, de l'intelligence émotionnelle et de l'apprentissage. Nous savons que QI n'est pas synonyme de réussite.
    QI ne veut pas dire QE.
    C'est exact. Alors où sont les mesures à cet égard? Nous n'avons pas de bulletin au Canada pour mesurer ces types d'intelligence. Lorsque vous parlez des pratiques exemplaires prometteuses, je crois qu'il est primordial de consacrer énormément d'énergie à enseigner aux enfants en quoi consistent les relations saines, à atténuer les traumatismes et leur incidence, et à faire du système scolaire un endroit sécuritaire pour apprendre aux enfants comment entretenir des relations saines.
    Vous avez lu l'Acte de l'Amérique du Nord britannique et vous connaissez très bien notre Constitution. Comment devons-nous nous y prendre.
    Une voix: Ce n'est pas une question de compétence fédérale.
    Tel est le dilemme. Qui en est responsable et qui doit rendre des comptes? À qui revient la responsabilité?
    Je pense que les enseignants et les systèmes scolaires ont une part de responsabilité, mais que le gouvernement fédéral a un rôle à jouer en ce qui touche les normes et mesures universelles.
    Madame Wells, pendant vos remarques, vous n'avez cessé de dire que vous aimeriez que le gouvernement fédéral fasse preuve d'une meilleure responsabilisation lorsqu'il fait des transferts aux provinces et aux territoires. Comment? Donnez-nous un exemple.
    Oui, il nous faut des contrats.
    Si l'on pense aux contrats et à la façon de les négocier, si l'on pense au gouvernement de l'Alberta qui verse du financement à l'ensemble des systèmes scolaires — et, disons, aux universités qui en font partie —, pourquoi ne prévoit-on pas de politique concernant la violence sexuelle et ne s'assure-t-on pas que les victimes reçoivent du soutien et que des programmes relatifs à la violence dans les fréquentations soient offerts à l'université? Pourquoi ne pouvons-nous pas intégrer ces notions dans nos attentes contractuelles? Pour instaurer de véritables changements, il faut plus qu'un modèle de programmes pour régler des problèmes; il faut des politiques, des lois, des lignes directrices, des mesures et de la reddition de comptes, mais nous avons besoin de soutien et de personnes capables de mesurer ces éléments et de les recueillir.
    Vous m'avez donné matière à réflexion et j'espère que nous pourrons y revenir.

[Français]

     Madame Dumont-Smith, je vous remercie de votre commentaire.

[Traduction]

    Vous avez précisé que la question du logement était problématique. Honnêtement, ce dont je suis le plus fière dans le cadre du comité, c'est du projet de loi S-2. J'ai été incrédule lorsque j'ai appris que les femmes autochtones ne jouissaient pas de droits de propriété matrimoniaux. J'espère que le projet de loi réglera certaines des questions, du moins pour les femmes qui divorcent. J'en reviens à mon expérience comme commissaire scolaire à la ville de Winnipeg, où environ 25 % de nos étudiants étaient autochtones, et où bien des jeunes femmes avaient été chassées de chez elles lorsque leur mariage avait éclaté. Elles sont venues en ville avec un certain nombre d'enfants et se sont trouvées en situation très difficile. Je suis contente que nous ayons abordé la question dans le projet de loi S-2.
    Cependant, votre groupe représente les femmes. Je pense que c'était très courageux de la part de M. Bellegarde de prendre la parole — l'article a récemment fait la une du Globe and Mail — pour dire que chaque membre de sa collectivité avait un rôle à jouer dans cette situation. Il est clair qu'il s'adressait tant aux hommes qu'aux femmes.
    Quel conseil lui donneriez-vous pour faire en sorte que les hommes et les garçons de la collectivité contribuent à régler le problème de la violence à l'égard des femmes, car c'est une question primordiale?
(1250)
    Je ne pense pas avoir à prodiguer de conseils, car l'Association des femmes autochtones du Canada collabore étroitement avec toutes les autres OAN: l'APN, l'ITK, le Ralliement national des Métis et Pauktuutit. Nous travaillons ensemble à tenter de régler la question de la violence dans toutes nos populations puisque nous sommes conscients du fait que nous devons nous serrer les coudes et envisager des solutions globales. Le Congrès des peuples autochtones fait aussi partie de notre groupe.
    Nous sommes engagés auprès des provinces et des territoires à nous réunir avec le gouvernement fédéral pour discuter des façons de régler les problèmes. La situation ne s'améliore pas.
    Vous avez mentionné à plusieurs reprises que la situation ne s'améliore pas.
    Non, elle ne s'améliore pas.
    Je vais vous laisser terminer, madame Dumont-Smith, et ce sera tout.
    Je n'ai pas de conseils à donner à M. Bellegarde, car nous travaillons ensemble à améliorer...
    Ses commentaires ont été perçus comme radicaux et très différents de ce qui se dit généralement à ce sujet.

[Français]

    Madame Bateman, je vous remercie.

[Traduction]

    Non, nous travaillons tous ensemble.
    Je suis très heureuse de vous l'entendre dire. Merci beaucoup.
    C'est donc une collaboration au même niveau.

[Français]

    Je vous remercie, madame Bateman.

[Traduction]

    Merci, madame Smith.

[Français]

    Madame Freeman, vous avez la parole et vous disposez de sept minutes.

[Traduction]

    Je vais continuer avec Claudette Dumont-Smith.
    Vous avez parlé de la sensibilisation des Premières Nations comme d'un élément clé pour mettre fin à la violence à l'égard des femmes autochtones. Il existe un écart énorme entre le financement des écoles autochtones et celui des écoles régulières. Je crois que les écoles des Premières Nations reçoivent environ le tiers de ce que les autres reçoivent. Pouvez-vous expliquer la raison de cet écart? Quelle en est la cause?
    Mon doux...

[Français]

     S'il vous plaît, madame la présidente, il est très important que je puisse clarifier une chose.
    Oui, je vous écoute.
    C'est faux.

[Traduction]

    Nous n'évaluons pas un enfant. La communauté que je représentais comptait 25 % d'étudiants autochtones, 25 % de nouveaux Canadiens, et nous n'avons jamais pris de décisions de financement en fonction de l'origine d'un enfant, mais bien en fonction de ses besoins éducationnels. Je suis indignée par ces commentaires.
    Madame Bateman, je m'excuse, mais dans l'ensemble, les statistiques montrent que le gouvernement fédéral consacre à l'éducation des Premières Nations le tiers de ce que les écoles provinciales offrent à leurs enfants. Malheureusement, je n'ai pas des tonnes de rapports devant moi, mais il s'agit d'une statistique reconnue. J'ai bien peur que votre exemple précis ne s'applique pas à l'échelle nationale.
    Merci beaucoup pour cette clarification, madame Freeman.
    Pourriez-vous en revenir à votre question concernant les pratiques exemplaires, s'il vous plaît? Merci.
    Quelle est la cause de cet écart? Quelle en est l'origine?
    Je pense qu'il a commencé dans les années 1970 lorsque les peuples autochtones ont voulu avoir des écoles dans les réserves et gérer eux-mêmes leurs systèmes éducatifs. Je pense que l'on a accédé à leurs demandes, mais que le financement n'a jamais égalé le financement provincial.
    Vous avez raison, le financement des écoles dans les réserves est... Les écoles reçoivent beaucoup moins de financement. C'est un fait; c'est ainsi.
    Pour ce qui est de la violence à l'égard des femmes et de la violence conjugale, je connais le programme « Fourth R », car je faisais partie de ce groupe à l'époque. Nous ne l'avons pas dans les communautés des Premières Nations. Le système est différent; soit la communauté gère le système éducatif, soit Affaires indiennes le finance, mais pas au même niveau que les provinces, alors il y a beaucoup d'écarts entre les programmes autochtones et les autres. Il n'y a aucune équité.
(1255)
    Oui.
    Pouvez-vous parler de l'importance d'une politique fondée sur des preuves, de faire en sorte que nous disposons de données exhaustives qui sous-tendent les politiques que nous élaborons? D'après ce que vous avez vu, cela fait-il une très grande différence?
    Je pense que nous avons besoin de plus de preuves, car j'ignore qui mène les recherches dans les communautés autochtones. Nous recevons des données au coup par coup. Selon moi, nous avons besoin de plus de données fondées sur des preuves, de plus de recherches pour être à jour. Nous nous fions à des sources qui, à mon avis, ne sont pas exhaustives.
    Bref, oui, nous avons besoin de mener plus de recherches.
    Est-ce que des mesures législatives comme le projet de loi S-2 sont prises en compte lorsque l'on omet de verser le financement pour répondre aux besoins en matière de logement? Et sont-elles prises en compte lorsque les communautés n'ont pas pu régler leurs revendications territoriales et que, par conséquent, elles ne disposent pas de l'espace physique dont elles ont besoin?
    Est-ce qu'elles ont une incidence dans ce cas ou s'agit-il juste d'un élément parmi tant d'autres?
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement.
    Je comprends que Mme Freeman vient de se joindre au comité. Lorsqu'elle présente sous un faux jour une mesure législative comme le projet de loi S-2 et que ses propos sont consignés au compte rendu, je pense que nous devons clarifier le fait que ce projet de loi permet aux femmes dans des relations matrimoniales qui sont victimes de violence de rester dans leur maison. Il n'a rien à voir avec l'entente de financement dont elle...
    Pourriez-vous ne pas empiéter sur mon temps de parole, s'il vous plaît?
    Ce n'est pas un rappel au Règlement. C'est une interruption de mon intervention parce que vous n'êtes pas d'accord avec ma...
    Merci, madame Freeman.
    Mme Joan Crockatt: [Note de la rédaction: inaudible] ... présidente?
    La présidente: Madame Crockatt, s'il vous plaît.
    Mme Mylène Freeman: Non, c'est pour remettre en question l'exactitude de la question que je pose au témoin.
    La présidente: Silence, s'il vous plaît.
    Merci, madame Crockatt. Je vous prie de laisser terminer la députée avant d'entamer une discussion. C'est trop compliqué pour moi.
    On arrête le chronomètre lorsqu'il y a un rappel au Règlement, alors cela n'a aucune incidence sur votre temps de parole.
    Merci pour la clarification.
    Madame Freeman, aimeriez-vous poser votre question concernant la pratique exemplaire et la façon dont le logement pourrait être utile?
    Dans quelle mesure est-il important de prendre les communautés au sérieux et de fournir le financement nécessaire pour veiller à ce que la question de la violence à l'égard des femmes soit traitée?
    C'est très important et le logement est un problème de taille dans les communautés autochtones. C'est un problème qui a fait la manchette. Les gens sont entassés. Côté matrimonial... les communautés sont petites. Tout le monde se connaît.
    Si vous faites partir l'homme pour que la femme garde la maison, où ira-t-il? Tout le monde est confiné dans les petites collectivités. Il n'y a aucun refuge pour les femmes. Un problème en entraîne un autre.
    Voilà pourquoi l'Association des femmes autochtones du Canada demande une enquête publique nationale. Elle appelle tous les ordres de gouvernement et les OAN à se pencher ensemble sur ces problèmes, car nous ne faisons que nous renvoyer la balle et examiner les problèmes d'un seul point de vue. Ce n'est pas ce dont nous avons besoin.
    Tenir compte de mesures comme le projet de loi S-2 pourrait aider un peu ou pas du tout.
    La situation est plus complexe que cela.
    Les juges et les avocats ne connaissent pas bien la culture autochtone. C'est un autre problème. Y sont-ils sensibilisés?
    Voilà des petites suggestions qui sont faites de bonne foi, mais je ne crois pas qu'elles suffisent.
    Michèle Audette est-elle votre présidente par intérim?
    Michèle Audette est notre présidente et nous avons une première vice-présidente, Dawn Harvard.
    Malheureusement, elle n'a pas pu être des nôtres.
    Je crois comprendre qu'elle a eu sa nomination comme candidate libérale.
    L'Association des femmes autochtones du Canada défend les intérêts des femmes de façon remarquable. Vous préoccupez-vous de pouvoir continuer à faire votre travail en ayant l'apparence de prendre position pour un parti en particulier?
    Madame Freeman, j'aimerais formuler un commentaire.
    Vous n'avez pas à répondre à cette question. Elle ne se rapporte pas à notre étude.
    Merci beaucoup.
    Me reste-t-il du temps? J'ai encore des questions.
    Non, votre temps est écoulé, mais nous avons fait en sorte que le temps soit...
    Premièrement, je tiens vraiment à remercier toutes les personnes qui sont venues témoigner aujourd'hui. Merci d'avoir formulé de nombreuses recommandations. Nous en prendrons bonne note pendant notre étude.
    Merci à tous les membres du comité. Nous nous reverrons après avoir passé la semaine dans nos circonscriptions respectives.
    La séance est levée.
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