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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 22 octobre 1997

• 0810

[Traduction]

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Les membres du Comité permanent des finances, qui s'étaient déjà réunis à Charlottetown au début de l'automne, sont heureux de siéger à nouveau dans l'Île-du-Prince-Édouard. C'est pour moi un privilège d'entendre les témoignages qui nous seront présentés aujourd'hui.

Le premier témoin est Brian Curley qui représente le groupe appelé Alert. Brian, bienvenue. Nous accueillons également Leo Broderick, de l'École secondaire Colonel Gray. Je dois vous avouer que lorsque j'ai vu votre nom sur la liste hier soir, j'ai pensé que vous étiez sans doute un élève; d'ailleurs, ce pourrait bien être le cas. Mary Boyd représente la Prince Edward Island Health Coalition et Anne Lie-Nielsen, le P.E.I. Council of the Disabled. Bienvenue.

Voici la façon dont nous allons procéder ce matin: vous disposerez d'environ cinq minutes pour faire un exposé. Au bout de quatre minutes, je lèverai simplement le doigt pour vous prévenir sans vous interrompre. Regardez-moi de temps en temps et vous saurez que si je lève le doigt, il vous reste une minute. Quand les cinq minutes se seront écoulées, je vous arrêterai.

Si vous nous avez transmis un mémoire, il n'est pas nécessaire que vous le lisiez mot à mot. Nous l'avons devant nous. Nous avons tous tendance, lorsque nous lisons un document, à aller très vite, ce qui rend fous les interprètes.

Lorsque vous aurez fini votre exposé, nous consacrerons cinq minutes aux questions des députés. Permettez-moi de vous les présenter, comme je l'ai fait lorsque nous avons siégé au Nouveau-Brunswick. Gerry Ritz est député de la Saskatchewan et représente le Parti réformiste; M. Perron, qui vient du Québec, est député du Bloc québécois, et Scott Brison, de la Nouvelle-Écosse, représente les conservateurs. M. Gallaway et moi-même sommes députés libéraux de l'Ontario, et M. Iftody, qui vient du Manitoba, appartient également au Parti libéral. Il n'est pas encore arrivé. Peut-être est-il toujours à l'heure du Manitoba ce qui voudrait dire qu'il a deux heures de retard. Telle est donc la composition du comité.

Monsieur Curley, je vous donne la parole. Vous avez cinq minutes pour faire votre exposé.

M. Brian Curley (membre de Alert P.E.I.): Permettez-moi tout d'abord de vous remercier de nous avoir invités à comparaître.

Je vais essayer de lire mon document lentement. Alert est une association qui regroupe des assistés sociaux et des gens qui soutiennent leur cause même s'ils ne bénéficient pas eux-mêmes de l'aide sociale. Nos principales préoccupations, en ce qui concerne le train de mesures prises par le gouvernement fédéral pour réduire la dette, sont les suivantes: la cible et les répercussions des coupures; le manque d'équité du régime fiscal; le fait que la banque centrale renonce à prendre ses responsabilités envers l'économie et le rythme des changements qui nous sont imposés.

En ce qui a trait à la cible des coupures, le déficit n'est pas dû à un dépassement des décaissements au titre des programmes sociaux, mais essentiellement à la baisse des recettes fiscales et aux taux d'intérêt élevés. Plusieurs spécialistes de l'analyse sociale qui jouissent d'une réputation confirmée ont établi que le Canada, par comparaison avec d'autres pays industrialisés, n'a ni multiplié ni surfinancé ses programmes sociaux. De fait, les chiffres publiés par Statistique Canada pour l'année 1991 démontrent que la moitié du déficit est attribuable aux mesures d'évitement fiscal prises par les gens riches et les sociétés, aux taux d'intérêt élevés, dans une proportion de 44 p. 100, et aux dépenses publiques générales, dans une proportion de 4 p. 100; les programmes sociaux n'entrent en ligne de compte que pour expliquer 2 p. 100 du déficit.

Ceux qui veulent réduire le déficit en coupant les programmes sociaux ne s'attaquent pas à sa cause la plus profonde. Le gouvernement fédéral a réduit le budget de la santé, de l'éducation et d'autres secteurs de services et a fait des coupes sombres qui ont affecté des programmes gouvernementaux et des emplois auxquels les Canadiens attachent beaucoup de valeur et qu'ils sont prêts à financer. Pour remettre l'économie sur les rails, nous devons rendre plus équitable le régime fiscal, contrôler les taux d'intérêt et créer des emplois.

• 0815

Nous recommandons de ne pas faire des programmes sociaux la cible de la réduction du déficit. Le gouvernement fédéral devrait réinstaurer et améliorer les programmes qu'il a éliminés.

Parmi les répercussions de ces coupures, on peut citer: le chômage dont sont victimes les Canadiens; des transferts sociaux réduits pour ceux qui ne peuvent pas travailler et ceux qui ne peuvent pas trouver d'emploi; la réduction des prestations d'assurance-chômage et la pauvreté qui frappe de plus en plus d'enfants. Si les enfants sont pauvres, c'est que leurs familles le sont aussi. Lorsque les familles sont frappées par le chômage ou le sous-emploi, elles tombent dans la pauvreté, dont une des pires formes est la pauvreté des enfants.

Les autorités ont remplacé le financement des programmes sociaux par des allocations réduites au titre du Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, ont éliminé le Régime d'assistance publique du Canada, modifié le Régime d'assurance-chômage et coupé les prestations. Ce sont les pauvres qui sont le plus touchés par l'élimination du RAPC et la réduction des paiements de transfert, des mesures qui ont les plus graves répercussions sur les gens qui sont au chômage et ceux qui ont des revenus peu élevés dans les provinces les plus pauvres du Canada.

Une étude effectuée par l'Association canadienne de santé publique en mars 1997 a démontré que la pauvreté est une des causes premières d'une mauvaise santé mentale et physique, et que c'est un phénomène qui fait grimper le coût des soins de santé au Canada. Nous estimons que le gouvernement devrait s'inspirer du proverbe selon lequel il vaut mieux prévenir que guérir.

Nous pensons que couper le financement des programmes impose un fardeau supplémentaire aux citoyens de notre pays dont le revenu est peu élevé et accentue la détresse et le stress auxquels ils doivent faire face. Ce gaspillage de l'argent des contribuables aura des répercussions à long terme. Plus important encore, on gaspille ainsi les forces vives de milliers de gens qui pourraient être plus heureux et contribuer à la société si les difficultés qu'ils rencontrent quotidiennement parce qu'ils vivent dans la pauvreté ne sapaient pas toutes leurs forces.

Les coupures qu'ont subies les provinces ont compromis l'accessibilité des soins de santé. Plus particulièrement, la pénurie de médecins, la fermeture de lits et d'hôpitaux et l'application du principe de l'utilisateur-payeur aux fournitures médicales ont été autant d'épreuves pour une bonne partie de la population, notamment les pauvres. Nous recommandons que le gouvernement fédéral augmente le financement qu'il consent aux provinces au titre des soins de santé.

En ce qui a trait aux coupures qui ont affecté l'assurance-chômage, à notre avis, les membres du gouvernement fédéral ne tiennent pas compte de la situation qui existe dans la région de l'Atlantique sur le plan de l'emploi. Notre économie est essentiellement saisonnière, et la plupart des gens n'ont que peu d'opportunités de trouver un emploi qu'ils peuvent occuper toute l'année. Les modifications injustifiées qui ont été apportées au Régime d'assurance-chômage, ou plutôt d'assurance-emploi, se révèlent discriminatoires à l'égard d'un bon nombre de gens qui, dans une économie saisonnière comme la nôtre, s'avèrent indispensables pour les employeurs mais qui, d'une année à l'autre, ne peuvent compter que sur un travail saisonnier pour assurer la subsistance de leur famille.

Nous jugeons inacceptable que le Canada vise un taux de chômage national de 9 p. 100. Des études effectuées par l'ONAP, l'Organisation nationale anti-pauvreté, démontrent qu'il existe un lien étroit entre l'alphabétisation et l'emploi et entre l'alphabétisation et la pauvreté. Ainsi, une alphabétisation de base et une formation reliée à l'emploi contribueraient à rendre les gens plus aptes à trouver du travail. Nous recommandons que les prestations d'assurance-emploi soient relevées au niveau où elles étaient précédemment, que l'on élimine les pénalités à l'endroit de ceux et celles qui sont forcés d'avoir recours à ces prestations année après année et que l'on vise un taux de chômage de 3 p. 100 et non de 9 p. 100.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Curley.

Malheureusement, votre temps de parole est écoulé, mais la période des questions nous donnera l'occasion de faire valoir certains des autres points que vous vouliez soulever.

La parole est maintenant à M. Broderick pour cinq minutes, s'il vous plaît.

M. Leo Broderick (témoignage à titre personnel): Merci beaucoup. J'aimerais dire au départ que même si je travaille à l'École secondaire Colonel Gray, je ne représente ni le personnel ni les élèves de cette école. Je suis ici à titre d'administrateur du Conseil des Canadiens et de membre de nombreux groupes de revendication créés dans cette province.

J'aimerais commencer...

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Comparaissez-vous à titre individuel ou à titre de représentant du Conseil des Canadiens?

M. Leo Broderick: Je parle en mon nom propre, mais j'exprime également les préoccupations du Conseil des Canadiens.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Très bien, merci.

• 0820

M. Leo Broderick: Mes observations vont porter sur des questions très précises qui suscitent de graves préoccupations dans notre pays. Il s'agit, d'une part, du Régime de pensions du Canada et des prestations pour les personnes âgées et, d'autre part, de la détérioration des conditions de vie des nombreux Canadiens qui n'arrivent plus à se nourrir décemment.

Vous nous avez demandé ce que nous pensions du processus qui a été adopté pour réduire le déficit; incontestablement, le processus suivi par le présent gouvernement au cours des quatre dernières années—et par le gouvernement précédent, mais particulièrement depuis 1993—s'est avéré beaucoup trop inhumain. Les autorités ont fait preuve de la plus grande indifférence envers des gens qui, dans ce pays, ont été abandonnés à leur sort et qui continueront de l'être. Il est absolument faux de dire que les dépenses publiques au titre des programmes sociaux sont la cause du déficit et de la dette. Ce sont des politiciens et de nombreux dirigeants de société qui ont fait courir cette idée.

Je comparais devant vous pour vous dire que des programmes comme le Régime d'assurance-chômage, l'aide sociale, les pensions de vieillesse, les mesures de protection des personnes et des biens... Même si un fort pourcentage de la dette est attribuable aux dépenses à ce titre—d'ailleurs, en ce qui a trait à l'armée et aux prisons, ces dépenses augmentent—les prestations familiales n'ont pas contribué au déficit ni à la dette. En réalité, les prestations familiales ont fait les frais de la réduction de la dette, ce qui est déplorable. Le gouvernement conservateur de Brian Mulroney et le gouvernement libéral actuellement au pouvoir ont tous deux réduit de plus en plus les prestations familiales. Ce ne sont pas les coupures qui ont été effectuées dans les secteurs de l'environnement et des soins de santé qui ont contribué à la dette et au déficit.

Le véritable prix que nous avons eu à payer a été le chômage, et le gouvernement a adopté comme objectif, non plus la création d'emplois—qui permettrait de remédier à nombre de problèmes que j'ai évoqués—, mais la lutte contre le déficit. Ce processus s'est avéré dévastateur pour de nombreux Canadiens et de nombreux habitants de l'Île-du-Prince-Édouard: de 30 à 64 p. 100 des familles de l'île, des familles nucléaires, ont un revenu de 30 000 $ ou moins.

Vous pouvez facilement imaginer quel a été l'impact des coupures qui ont affecté les secteurs de la santé et de l'éducation ainsi que l'assurance-chômage. La seule chose à laquelle nous pouvons nous attendre, étant donné l'orientation de la politique du gouvernement, c'est une multiplication des coupures au niveau provincial à cause de la réduction du financement que représente le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux. Nous sommes la province canadienne dont le gouvernement consacre le moins de fonds à l'éducation et en matière de soins de santé, nous ne sommes pas loin non plus d'être en queue de liste.

Je voudrais m'attarder sur les mesures gouvernementales qui visent les personnes âgées du Canada ainsi que ceux et celles qui cotisent au Régime de pensions du Canada, à la Sécurité de la vieillesse et à d'autres régimes dont bénéficient les personnes âgées. Le gouvernement et les dirigeants de sociétés de ce pays ont répandu de nombreuses idées fausses dans ce pays à propos du Régime de pensions du Canada. Ce régime n'est pas au bord de la faillite. Il n'a pas fait l'objet d'abus de la part des gouvernements provinciaux. Ce qui pêche dans les propositions concernant le Régime de pensions du Canada, c'est que l'on envisage de le privatiser et d'en confier la gestion à un conseil d'administration représentant le secteur privé.

Permettez-moi de vous rappeler ce qui est arrivé dans le comté d'Orange dans des circonstances semblables. La population du comté d'Orange a perdu tout l'argent qu'elle avait investi et qui représentait 7,4 p. 100 du budget lorsque le comté a fait faillite. Le gouvernement libéral propose de prendre des mesures similaires en ce qui concerne la gestion du Régime de pensions du Canada dont le fonds est évalué à 40 milliards de dollars; c'est une proposition qui ne devrait pas être envisagée car elle est beaucoup trop problématique.

• 0825

J'ajouterai—cela ne fait pas partie de mes notes—que ce sont les femmes et les handicapés qui vont le plus souffrir des coupures affectant les allocations perçues par les personnes âgées ainsi que les prestations de décès, et que l'on peut qualifier cela de criminel.

Le Parlement du Canada, de concert avec les provinces... et deux d'entre elles, la Colombie-Britannique et la Saskatchewan, ont rejeté les propositions et ont suggéré une solution tout à fait viable. Rien ne nous oblige à augmenter les cotisations versées par les travailleurs au Régime de pensions du Canada ni à réduire leurs prestations, et rien ne nous oblige à couper les allocations dont bénéficient les personnes âgées.

Parlons maintenant de la faim au Canada; dans cette province, les gens qui ont recours aux banques alimentaires sont plus nombreux que jamais, particulièrement les enfants. Dans l'ensemble, le taux de fréquentation de ces banques a augmenté de 60 p. 100, et cela est directement lié aux initiatives prises par le gouvernement fédéral pour réduire le déficit. Il y a là un lien direct de cause à effet, comme nous allons le voir dans quelques minutes.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Broderick.

Madame Boyd, s'il vous plaît, vous avez cinq minutes.

Mme Mary Boyd (présidente, Prince Edward Island Health Coalition): Merci, madame la présidente. J'essaierai d'être brève au cours du premier volet de ce débat et je me contenterai de dire que oui, les coupures qui ont été effectuées sont allées trop loin.

Je souscris aux déclarations de M. Curley et de M. Broderick. Lorsqu'on parle de l'assurance-chômage, on doit se rappeler que c'est l'un des facteurs déterminants de la santé et que le gouvernement fédéral a littéralement volé à la caisse d'assurance-chômage des milliards de dollars. Cela s'est soldé, pour la population, par d'énormes difficultés.

Permettez-moi maintenant de vous parler de la fermeture du Bureau de recherches sur les médicaments et des mesures qui ont pour objet l'élimination des laboratoires de recherches sur les aliments; en effet, cela prouve que nous avons raison de nous alarmer et que les coupures ne sont pas terminées, quoi qu'en dise M. Martin.

Le processus qui est actuellement en marche et qui devrait aboutir à la fermeture de tous les services dépendant de la Direction générale de la protection de la santé permettra de réaliser des économies se chiffrant seulement à deux millions de dollars par an, mais risque d'avoir des conséquences catastrophiques sur la santé des Canadiens. La fermeture des laboratoires de recherches sur les médicaments pourrait entraîner le décès prématuré de 10 000 à 300 000 Canadiens. Si l'on met fin aux recherches sur la salubrité des aliments, entre un et dix millions de Canadiens pourraient être victimes de maladies dont ces recherches les prémunissent actuellement. L'augmentation des coûts au titre des soins de santé dépassera de beaucoup toutes les économies qui pourront être faites. En outre, les coûts sociaux que devront assumer les gens et leurs familles, ainsi que les coûts économiques, seront énormes.

Le monde imaginé par Orwel ne semble pas si fantastique. Lorsqu'on en arrive à dire qu'il nous faut des laboratoires publics pour contrôler la salubrité de nos aliments, de notre eau et de nos médicaments et pour s'assurer que nos fruits de mer ne contiennent pas de bactéries.

Le gouvernement fédéral ne se décharge pas de ses obligations envers la population. Il est décidé à déréglementer.

La maladie de la vache folle qui a sévi en Angleterre devrait nous servir d'avertissement: si une crise semblable se déclenchait au Canada, le fait que nous n'ayons plus de laboratoires de recherches sur les aliments pourrait entraîner une épidémie, avant même que l'on ait pu mettre en place l'équipe de surveillance et les capacités de recherche nécessaires.

Le véritable programme qui se cache derrière les coupures est axé sur la privatisation, sur la volonté de confier toutes les responsabilités à des particuliers. Au moment même où le gouvernement parle de retombées positives dans le secteur de la santé, il démantèle Santé Canada ainsi que le système de soins de santé. Le fonds de transition de 150 millions qui doit financer sur trois ans des projets du secteur privé n'est rien d'autre que de la poudre aux yeux. Les coupures du gouvernement fédéral mettent tout le système en pièces et aboutissent à commercialiser les soins de santé. En réalité, la transition nous fera passer d'un système public de soins de santé à un système commercial.

Cela nous oblige à nous poser la question suivante: qui dirige notre gouvernement et qui sert-il, à part l'industrie qui fait la pluie et le beau temps. Qu'est-il arrivé à la notion d'intérêt général?

En ce qui a trait aux priorités, comment le gouvernement devrait-il établir les siennes?

On a privé les programmes sociaux d'un financement qui se chiffre en milliards de dollars. Il est maintenant temps de réinvestir dans ces programmes sociaux, dans la structure sociale du Canada. Nos gouvernants parlent beaucoup d'intégration sociale. Le temps n'est-il pas venu de payer pour que cette intégration se réalise? Il revient au gouvernement fédéral de garantir les facteurs déterminants de la santé. Il ne pourra y parvenir en versant des paiements de transfert de misère et en déstabilisant le régime d'assurance-maladie d'un océan à l'autre.

Si le déficit a été réduit, c'est principalement sur le dos des pauvres et des malades, de tous les Canadiens les plus vulnérables. Il faut que cette offensive cesse.

Lorsqu'on en arrive au point où les banques alimentaires envisagent utiliser des carcasses d'animaux trouvés au bord des routes pour nourrir ceux et celles qui sont dans le besoin, la seule chose que l'on puisse dire, c'est que le Canada est devenu un pays qui nous fait honte. Au plan du financement d'un système public de soins de santé, le Canada est maintenant tombé à la seizième place parmi les 24 pays de l'OCDE.

• 0830

L'on ne peut pas dire que nous n'ayons pas le choix. C'est ce qui a été souligné dans le Budget de substitution pendant trois années de suite. Tout un choix de priorités s'offre aux gouvernements. On trouve également dans le Budget de substitution une solution plausible au problème de la dette et des déficits qui permettrait en fait de consolider nos services publics au lieu de les démanteler et de placer la population dans une position difficile, comme l'ont fait ces dernières années les gouvernements de MM. Mulroney et Chrétien.

Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Boyd.

C'est Mme Lie-Nielsen qui va faire le dernier exposé de cinq minutes.

Mme Anne Lie-Nielsen (directrice générale, P.E.I. Council of the Disabled): Merci. Le P.E.I. Council of the Disabled est un organisme qui défend les droits des habitants de l'Île-du-Prince-Édouard souffrant d'un handicap quelconque, soit à peu près 20 p. 100 de la population.

Vous nous demandez de vous dire si les progrès qui ont été faits jusqu'ici ont été trop rapides ou trop lents; je ne peux pas vraiment répondre à cette question. Tout ce que je puis dire, c'est que les répercussions que cela a eues sur la vie des gens qui souffrent d'un handicap ont été désastreuses. Nous avons pu constater une augmentation marquée du nombre de gens qui ont lancé des actions revendicatrices à titre individuel, afin d'essayer de récupérer certaines prestations ou subventions sociales dont ils se trouvaient privés. Quant au nombre de pauvres au sein de notre collectivité, on l'a vu augmenter de façon spectaculaire. En général, les difficultés auxquelles les gens doivent faire face se sont multipliées. Toutefois, l'on n'a pas encore vu la fin de l'incidence des mesures prises par le gouvernement. Par exemple, le plein impact de la réduction des prestations d'assurance-emploi ne s'est pas encore fait sentir. Quand on en sera là, la situation sera encore pire qu'elle ne l'est actuellement.

Il semble qu'il y ait un courant d'opinion qui donne tort aux victimes, qui blâme les pauvres. Par exemple, en ce qui concerne le RPC, les médias se font souvent l'écho de l'idée selon laquelle il faut augmenter le niveau des cotisations. La raison pour laquelle le RPC coûte si cher est que le nombre de demandes de prestations d'invalidité du RPC est à la hausse. Je peux vous dire que ces demandes semblent être automatiquement refusées. Le nombre de personnes qui s'adressent à nous pour que nous les aidions à faire toutes les longues et tortueuses démarches requises pour faire appel des décisions augmente chaque jour.

En ce qui a trait à l'accès à l'emploi et à la formation, on crée beaucoup d'obstacles artificiels en imposant des règlements et en adoptant une approche qui met l'accent sur la nécessité de réduire au maximum le coût du système et non sur l'idée que ce système est un service dont la population peut se prévaloir. Les handicapés veulent participer pleinement et en toute égalité à la vie de la société et être en mesure de travailler et de contribuer. C'est le résultat net que nous recherchons. Les mesures de réduction du déficit qui ont touché l'infrastructure sociale de notre pays ont eu un impact dévastateur. Si l'on me demande de recommander certaines priorités, je dirai qu'il faut restaurer cette infrastructure sociale et réparer certains des dommages qu'a subis le secteur des services sociaux de notre pays.

Je ne sais pas ce que l'on vous dit ailleurs au Canada. Je suppose que jusqu'ici, vous n'avez pas entendu beaucoup de témoins. Toutefois, étant donné que le secteur des services a vu son financement fondre alors que la demande est à la hausse, nous en arrivons au moment critique où nous risquons de perdre cette infrastructure sociale dans le secteur des services, ce qui, à mon avis, serait très grave.

Il y a une série de mesures que nous jugeons particulièrement préoccupantes et qui ne concernent pas la réduction du déficit, mais plutôt la délégation aux provinces des responsabilités du gouvernement fédéral touchant certains programmes et certains services, dans le cadre des accords portant sur le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux et sur le marché du travail. Dans ce cas, ce sont les provinces qui fixent les priorités, et quiconque sait le mieux jouer des coudes parvient à attirer l'attention des autorités provinciales. Les organismes comme le nôtre, qui représentent d'autres associations regroupant des particuliers, sont souvent laissés pour compte.

Lorsque la responsabilité de certains programmes et services passe d'une autorité à une autre, il arrive aussi souvent que certains droits afférents se perdent en route. Par exemple, l'accès à l'emploi, les mesures d'appui ou le droit à la formation qui, auparavant, faisaient partie intégrante des programmes ont disparu. Cela nous préoccupe beaucoup.

Nous souhaitons également recommander que toute mesure envisagée soit examinée dans la perspective des handicapés et que l'on se demande quel impact cela va avoir sur leur vie quotidienne. La mesure en question va-t-elle améliorer leurs conditions de vie ou au contraire les rendre plus difficiles?

• 0835

Je soulèverai un autre point plus tard pendant la période des questions.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Mme Vautour vient de se joindre à nous et je lui souhaite la bienvenue. Comme j'ai fait les présentations plus tôt, je dirai simplement que Mme Vautour vient du Nouveau-Brunswick—elle a dû emprunter le nouveau pont pour venir ici—et qu'elle représente le Nouveau parti démocratique.

Monsieur Ritz, vous avez la parole. Pas plus de cinq minutes, s'il vous plaît.

Excusez-moi, j'ai omis de mentionner que si l'un des députés pose une question à un témoin et qu'une autre personne souhaite y répondre, elle n'a qu'à lever la main. Je ferai la liste des personnes qui veulent intervenir, mais nous allons essayer de faire en sorte que les discussions ne durent pas plus de cinq minutes.

M. Ritz se débrouille généralement très bien pour respecter la consigne.

M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Réf.): Vous me flattez.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Je voudrais simplement que vous montriez l'exemple.

M. Gerry Ritz: Mesdames, messieurs, je tiens à vous remercier d'être venus ce matin. J'ai écouté vos exposés avec beaucoup d'intérêt.

J'ai une ou deux questions à poser à M. Broderick sur deux ou trois points de son mémoire.

Je me demande simplement quelle est la source de vos statistiques ou plutôt comment vous en êtes arrivé à ces chiffres. À la page 1, vous parlez des intérêts créditeurs du fonds du RPC et vous dites que, dans l'ensemble, leur taux se situe à 11 p. 100 par an.

M. Leo Broderick: Ce chiffre m'a été communiqué par le personnel de recherche du Conseil des Canadiens. Vous savez que c'est vrai.

M. Gerry Ritz: Il va falloir que je vous croie sur parole. Absolument.

M. Leo Broderick: Pas de problème.

M. Gerry Ritz: Au verso de cette page, vous parlez de l'accord entre le gouvernement fédéral et les provinces dont le fonds du RPC fait l'objet. Reprenez-moi si je me trompe—vos recherchistes, j'en suis sûr, sont excellents—mais d'après ce que je comprends, les prêts qui ont été consentis et qui n'ont pas encore été remboursés se chiffrent à 32 milliards de dollars, et l'intérêt exigé des provinces est de l'ordre de 3 p. 100. J'aimerais que vous me donniez un peu plus d'informations à ce sujet.

M. Leo Broderick: Le taux d'intérêt correspond au taux moyen des intérêts créditeurs des obligations d'épargne du Canada. J'ai dit que, dans l'ensemble, ce taux d'intérêt se situait environ à 11 p. 100. À l'époque où les taux d'intérêt étaient extrêmement élevés, certaines provinces ont fait des emprunts et cela se reflète dans le taux moyen. Par contre, pour ce qui est des taux d'intérêt exigés de certaines d'entre elles, il se peut fort bien que vous ayez raison.

Ce que l'on dit à la population, c'est que les provinces qui ont emprunté à même le fonds ne se montrent pas responsable en ce qui concerne les remboursements. C'est ce que vous laissez entendre. Je pense que c'est faux. Oui, certains gouvernements provinciaux ont fait des emprunts et ils rembourseront. Il s'agit d'emprunts gouvernementaux. Les autorités provinciales sont responsables.

Ce que je veux dire, c'est que le secteur privé souhaite par-dessus tout avoir la main mise sur le prêt de cet argent aux conditions du marché, et que les gouvernements des provinces devront s'aligner sur ces conditions. Quels que soient les taux d'intérêt que commande le marché, c'est ce que les provinces...

Je parle de cela dans mon mémoire, mais tout découle de l'éventuelle mise en place—comme on l'envisage actuellement - d'un fonds d'investissement à même les sommes accumulées dans le Régime de pensions du Canada. Ce qui veut dire, si j'ai bien compris la proposition du gouvernement, que ce fonds passera sous la responsabilité de fonctionnaires qui, par définition, sont nommés et non élus et qui, à leur tour, en confieront la gestion au secteur privé, aux banques, à l'industrie des placements. D'après moi, cela multiplie les risques d'investissements aussi scabreux que ceux qui ont été faits dans la compagnie Bre-X.

Comme je le dis dans mon mémoire, pour Bay Street, c'est une véritable manne tombée du ciel et à long terme, c'est également une excellente aubaine pour le Parti libéral. Les cotisations suivront. Cela revient à confier au secteur privé la gestion d'un fonds de pension public, ce qui, à mon avis, est inacceptable. J'espère que la question fera au moins l'objet d'un débat au Parlement, parce que c'est tout à fait dans la ligne de ce qu'a évoqué Mary Boyd—la volonté de tout privatiser, de tout déréglementer et de faire jouer les règles du marché en toutes circonstances.

• 0840

M. Gerry Ritz: Il y a donc un lien direct entre... les régimes de pensions publics sont beaucoup plus stables que ceux qui sont gérés par le secteur privé.

M. Leo Broderick: Il y a un lien. Tout à fait. À l'heure actuelle, le financement du Régime de pensions du Canada est assuré au fur et à mesure. Le gouvernement existera toujours et sera toujours en mesure d'assurer les paiements. Mais si l'on confie la gestion du fonds au secteur privé, ce qui s'est passé dans le comté d'Orange ou à la Barings Bank pourrait bien arriver. On risque fort de perdre l'argent investi dans ce fonds public.

M. Gerry Ritz: Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Broderick, monsieur Ritz.

[Français]

Monsieur Perron, vous avez cinq minutes.

M. Gilles-A. Perron (Saint-Eustache—Sainte-Thérèse, BQ): Il a été dérobé près de 7 milliards de dollars à la caisse de l'assurance-emploi. Cet argent, comme on le sait, appartient aux employeurs et aux employés.

Pourquoi le gouvernement ne ferait-il pas une réforme entière et totale de la fiscalité? Depuis 1962, les choses n'ont pas changé et les entreprises et les individus payent pour que les revenus du gouvernement soient équilibrés.

J'aimerais avoir vos commentaires sur l'idée d'une réforme des taxes. Est-ce que c'est le moment de la faire? Comment devrait-on la faire?

On pourrait commencer par Mme Boyd puisque Mme Boyd a parlé de taxes dans son exposé.

[Traduction]

Mme Mary Boyd: Je vous remercie de me tendre ainsi la perche. En effet, dans le Budget de substitution, on a certainement insisté sur la nécessité de réformer la fiscalité canadienne. M. Curley a parlé du taux peu élevé de l'impôt sur les sociétés. Par ailleurs, de toute évidence, les économiquement faibles paient beaucoup trop d'impôts.

Nous ne voulons pas que, parmi les changements envisagés à l'heure actuelle, on se contente de prévoir une baisse générale des impôts. Nous voulons que l'argent des contribuables soit investi dans les programmes sociaux qui sont importants. De fait, dans cette région, ils sont d'une extrême importance.

Par ailleurs, si nous avons une dette à éponger, c'est, dans une large mesure, parce que certaines personnes ne paient pas leurs impôts, parce que notre régime fiscal est inéquitable et particulièrement, parce que les sociétés ne versent pas leur juste part d'impôts; et cela ne date pas d'hier. Le problème pourrait évidemment être réglé par une réforme fiscale. Il est certain que des changements devraient être faits. Par exemple, on devrait réduire le montant des subventions accordées par le biais du régime fiscal comme les déductions pour frais de repas, de réception et de lobbying dont bénéficient les riches. Le Fonds monétaire international, lorsqu'il a examiné cette disposition du régime fiscal, a jugé qu'elle était beaucoup trop généreuse et que le Canada accordait ainsi à certains contribuables d'énormes privilèges.

• 0845

Nous devons instaurer un impôt minimum sur les sociétés afin de les obliger à payer leur part, parce que l'un des problèmes auxquels nous faisons face, c'est qu'elles ne le font pas. Il convient d'imposer les superbénéfices comme ceux qui ont été réalisés par les six principales banques du Canada qui, en 1996, ont fait des bénéfices extraordinaires se chiffrant à 6 milliards de dollars. Il faut également se rappeler qu'étant donné la façon dont les autorités fédérales s'y prennent pour réduire la dette et le déficit, une très grande part des bénéfices réalisés par ces banques vient directement des coffres du gouvernement.

Il faut éliminer les exceptions qui permettent d'échapper à l'impôt sur les gains en capital, ainsi que le dégrèvement fiscal des revenus de dividendes dont de riches investisseurs peuvent tirer profit. Prenons exemple sur d'autres pays de l'OCDE en imposant ce genre de taxes ainsi qu'un mécanisme financier qui pourrait mettre un frein à la spéculation et qui nous permettrait d'accroître nos recettes fiscales.

Les réformes que l'on pourrait apporter au régime fiscal sont innombrables. Dans le passé, il existait plusieurs catégories et cela introduisait une mesure d'équité dans le système. À l'heure actuelle, il y a trois catégories: la part des sociétés a été réduite, celle des pauvres a augmenté de façon disproportionnée et la classe moyenne est durement touchée.

Il y a quelques années, alors que nous préparions notre comparution devant le comité des finances, nous avons fait des calculs pour déterminer combien l'on pourrait économiser en apportant des modifications aux dispositions fiscales dont je viens de parler. Une réforme de ce genre aurait, sans conteste, permis au gouvernement fédéral de régler d'un trait de plume le problème du déficit.

M. Brian Curley: Notre quatrième recommandation est d'introduire une mesure d'équité dans le régime fiscal en relevant le niveau d'imposition des cadres qui perçoivent des revenus élevés. Les dégrèvements fiscaux ne devraient être consentis qu'à ceux et celles qui vivent en dessous du seuil de la pauvreté et qui ont besoin de tous leurs revenus pour couvrir leurs dépenses courantes. Ils sont imposés de toutes parts, par le biais de la TPS, de la TVP et de la TVH, et ils paient probablement plus que leur part. Je trouve absurde que certaines familles où les parents travaillent tous les deux n'aient pas des revenus suffisants pour dépasser le seuil de la pauvreté mais soient toutefois tenues de payer des impôts sur le revenu. Je pense que les gens dont les revenus sont si peu élevés ne devraient payer aucun impôt.

À mon avis, le gouvernement devrait avoir pour objectif le degré zéro de pauvreté et non un déficit nul.

Mme Anne Lie-Nielsen: L'on devrait inclure dans toute réforme fiscale des mesures reconnaissant le fait que les handicapés ont des frais additionnels. Lorsqu'on souffre d'un handicap quelconque, cela entraîne des dépenses supplémentaires importantes qui, pour la plupart, ne sont pas prises en compte dans le régime fiscal.

Nous recommandons que le crédit d'impôt pour handicapés devienne un crédit d'impôt remboursable. Cela permettrait de reconnaître que plus de 80 p. 100 des personnes souffrant d'un handicap vivent avec un revenu de moins de 10 000 $ par an. Un crédit d'impôt remboursable leur serait utile.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Lie-Nielsen.

[Français]

Madame Vautour, cinq minutes.

[Traduction]

Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, NDP): Bonjour, je m'excuse d'être en retard. Je me suis perdue et je me suis rendue au mauvais hôtel.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): En fait, nous avons changé d'hôtel.

Mme Angela Vautour: Encore une fois, je vous prie de m'excuser. Je suis sûre que tous les exposés qui ont été présentés étaient excellents.

Je comprends votre point de vue car, moi aussi, j'ai été touchée par les coupures du gouvernement libéral. Vous prêchez donc une convertie.

• 0850

J'aimerais poser une question qui s'adresse à tous les témoins et ensuite faire une observation. On nous a dit qu'en effectuant de nombreuses coupures, on allait pouvoir résoudre un bon nombre des problèmes auxquels fait face notre pays. J'ai quitté le Nouveau-Brunswick et je me suis installée à Charlottetown en 1981 pour pouvoir travailler. J'aimerais avoir votre avis. Lorsque le ministère des Anciens combattants a déménagé à Charlottetown, pensez-vous que cela a plus stimulé l'économie que les coupes sombres dont sont actuellement l'objet tous les programmes. Il semble que certains groupes défendent l'idée que ce sont les coupures et les réductions d'impôt qui vont permettre de créer des emplois et je ne sais quoi d'autre. J'aimerais avoir votre avis là-dessus.

J'aimerais également savoir quelles mesures vous souhaiteriez intégrer au budget de 1997. Vous pourriez peut-être parler de l'excédent de 12,5 milliards de dollars et de ce que l'on devrait en faire.

M. Leo Broderick: On ne peut contester, je pense, que le déménagement du ministère des Anciens combattants à Charlottetown a eu des effets bénéfiques sur l'économie. Depuis quatre à huit ans, le gouvernement s'acharne à restreindre ses activités, à compresser la fonction publique et à réduire l'importance de ses institutions, et cela a certainement tourné au désavantage de tous les Canadiens. Ces mesures ne contribuent en rien à l'amélioration de la situation en ce qui a trait à la dette et au déficit. De fait, je pense que les recherches démontreront qu'une telle politique aggrave le problème auquel font encore face les provinces—tenues, elles aussi, d'éponger leur dette et leur déficit—et se révèle un facteur d'endettement.

Si l'on examine l'incidence des coupures majeures qui ont été effectuées, on se rend compte que l'endettement privé a augmenté. Cela est tout à fait dans la ligne de ce qui se passe à travers le monde et dans tout le Canada. Toutes les responsabilités sont rejetées sur les particuliers, sur le secteur privé. Le gouvernement et tous les élus se sentent de moins en moins responsables de s'assurer que nous bénéficions d'une large gamme de services publics.

Par exemple, il est impossible de retrancher des milliards de dollars des prestations versées au titre du Régime de pensions du Canada et de la Sécurité de la vieillesse sans réduire les avantages dont jouit la population. Ce n'est pas comme cela que les choses marchent. À l'heure actuelle, le gouvernement prétend qu'en coupant le Régime de pensions du Canada et la Sécurité de la vieillesse, il va redresser la situation dans laquelle se trouve le pays; peut-être, mais cela ne va certainement pas améliorer la situation de la majorité des Canadiens.

Je pense donc que l'on devrait faire valoir à quel point les institutions gouvernementales ainsi que la fonction publique sont utiles. On les a dévaluées au cours des huit dernières années. Non seulement cela, mais le rôle des fonctionnaires a été dévalué. Or, nous avons besoin de ces services. Nous devons pouvoir continuer à compter sur eux. En réduisant le secteur public à tous les niveaux, aussi bien fédéral que provincial, les autorités n'ont abouti qu'à une chose: déplacer l'endettement et faire assumer ce fardeau aux particuliers.

Mme Mary Boyd: J'aimerais dire que l'excédent devrait certainement être utilisé pour financer des programmes sociaux. Dans la région, ces programmes ont toujours été pour nous une bouée de sauvetage à cause de notre taux de chômage élevé. Les coupures dont le Régime d'assurance-emploi a été victime, par exemple, ont eu un effet dévastateur. Comme Anne l'a fait remarquer, nous n'avons pas encore toutes les données et il est difficile de savoir à quel point cette mesure s'est révélée néfaste.

Je connais quelqu'un, dans l'Île-du-Prince-Édouard, qui n'a pu accumuler assez d'heures de travail dans le délai requis de 26 semaines et qui reçoit maintenant en prestations d'assurance-chômage 33 $ toutes les deux semaines. C'est absolument incroyable. Ces coupures sont draconiennes et elles ont sur les gens des effets meurtriers. Il faut faire quelque chose pour redresser la situation. De nombreux employés à temps partiel ne peuvent même pas avoir droit aux prestations de l'assurance-emploi. Il est impossible, lorsque vous gagnez votre vie grâce à un petit contrat ici et un autre là, d'avoir droit à ces prestations. Ce qu'il y a de plus grave dans tout cela, c'est que les coupures ont un caractère idéologique. Comme je l'ai dit auparavant, ce sont les sociétés qui donnent le la, et on les écoute. C'est la raison pour laquelle le Budget de substitution est si important.

• 0855

En ce qui concerne le Régime d'assurance-chômage, il faut que les gens aient à nouveau droit aux prestations. Il faut reconnaître que, dans les provinces où les travailleurs saisonniers sont très nombreux, l'assurance-chômage est un facteur déterminant de leurs moyens d'existence et de leur bien-être.

Par ailleurs, dans le Budget de substitution, il est souligné que nous devons créer des emplois et faire un effort délibéré en ce sens. Paul Martin, avec son livre violet, a fait s'évanouir tous les emplois que nous avait promis M. Chrétien. Nous avons fait remarquer que pour dépenser ou créer des emplois, au lieu de faire des coupures, chaque fois que le gouvernement consacre des fonds à la création d'emplois... Je ne pense pas avoir les chiffres sous la main; j'essaie de me rappeler. Je crois que si l'on fait des coupures pour créer des emplois, on arrive à en créer 14 000; mais si l'on investit un milliard de dollars dans les produits et les services, on en crée 28 000; et si l'on consacre un milliard de dollars au recrutement direct, on crée 56 000 emplois. C'est ce genre de mesure dont nous avons besoin.

Je suis d'accord avec Brian; il y a de l'argent dans la caisse d'assurance-chômage. Nous avons maintenant un excédent budgétaire que nous pouvons employer pour faire disparaître la pauvreté au Canada. Notre pays est le plus riche du monde, et absolument rien n'excuse notre dégringolade au bas de la liste des pays de l'OCDE qui est due aux mesures touchant les secteurs de la santé, de l'assurance-chômage et de l'assistance sociale. C'est une véritable gabegie. Au nom d'une idéologie, on fait passer les sociétés avant les gens. Le pays est dans une situation catastrophique. Trop de gens souffrent.

Nous vous conjurons de nous écouter, d'écouter M. et Mme Tout-le-Monde et d'admettre que de moins en moins de gens se partagent la richesse et qu'au contraire, le nombre des pauvres va croissant.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Boyd.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci beaucoup d'être des nôtres ce matin et de nous avoir présenté vos exposés.

Je suis député de la Nouvelle-Écosse et je sais que bien des coupures ont eu une incidence clairement négative dans les provinces de l'Atlantique. Toutefois, je fais également partie de la catégorie tant décriée des gens qui se sont lancés en politique après une carrière en affaires. Je suis responsable de la création de trois sociétés qui employaient presque 30 personnes, et c'est cette initiative du secteur privé qui a permis à ces gens-là et à d'autres d'améliorer leurs conditions de vie. De plus, j'ai payé beaucoup d'impôts pour aboutir à ce résultat. On compte donc, dans le monde des affaires, des gens qui, eux aussi, font leur part.

Les membres d'un parti d'opposition ont parfois à formuler des critiques constructives, mais sont aussi appelés à clarifier certains points. En ce qui concerne le fiasco du comté d'Orange, j'aimerais apporter quelques précisions. Essentiellement, le conseiller en placement, la personne qui a pris cette décision... D'après ce que je comprends, ce que l'on a critiqué dans l'affaire du comté d'Orange, c'est qu'il n'y avait qu'une personne qui décidait et elle traitait avec un seul courtier, Dean Witter. Ils ont investi l'argent dans des contrats à terme et des comptes d'option et ils l'ont perdu.

La diversification est ce qui caractérise les fonds communs de placement. Ordinairement, un fonds commun de placement comprend de 150 à 300 titres négociés à travers le monde. Lorsqu'il s'agit d'un fonds de pension, on recherche habituellement un placement sûr et ainsi, par exemple, à la Banque de Nouvelle-Écosse, on recherche les placements dans les banques, certaines ressources naturelles, des valeurs de croissance mais, ordinairement, on préfère des titres à long terme, et non des choses comme la Bre-X ou la Barings Bank exclusivement.

Donc, dans ce contexte, je crois que certaines de vos déclarations, monsieur Broderick, sont un peu alarmistes. Parmi mes électeurs, beaucoup préféreraient investir leur argent dans la Banque de Nouvelle-Écosse plutôt que de le confier au gouvernement qui le prêtera, à 3 p. 100, à la Nouvelle-Écosse, une province où le rapport dette-PIB est de 97 p. 100.

Je voulais simplement préciser que les stratégies de placement varient pour des choses comme...

M. Leo Broderick: Puis-je vous interrompre? Voulez-vous dire que, une fois que le Régime de pensions du Canada aura été confié par des fonctionnaires—des gens qui ont été nommés et non élus—à la communauté financière, il n'y a aucun risque que les fonds soient placés dans des produits dérivés, comme on dit, plus ou moins scabreux?

• 0900

M. Scott Brison: De fait, je n'ai absolument aucune hésitation à vous répondre non, je ne pense pas que cela soit possible. Lorsqu'on a confié à un groupe de conseillers en placement dont les compétences sont reconnues le mandat de garantir la sécurité des pensions à long terme, non, je ne pense pas que les produits dérivés puissent constituer une grande partie du...

M. Leo Broderick: Alors, pourquoi est-ce que les fonds de pension les plus sûrs du Canada avaient-ils tant investi dans une compagnie comme Bre-X?

M. Scott Brison: Ces mêmes fonds de pension...

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Madame Boyd.

Mme Mary Boyd: Je ne veux pas être alarmiste, mais on ne peut pas ignorer certaines choses. Récemment, c'était le 10e anniversaire de ce que l'on a appelé le lundi noir ou le mardi noir—je ne sais plus trop—, le gros crack boursier. Dans le Financial Post et ailleurs, on écrit que les circonstances présentes sont à peu près les mêmes et que les gens devraient faire preuve de prudence.

Si vous parlez à quelqu'un qui s'occupe de fonds communs de placement... Je l'ai fait récemment au nom de quelqu'un d'autre, et le courtier lui-même m'a dit: «Oui, c'est quelque chose d'assez risqué». Il y a toujours le risque d'un crack, les gens risquent toujours de perdre leur argent.

Les gouvernements ne font pas faillite de cette façon-là et par ailleurs, ils ont l'obligation de défendre le bien commun et d'agir dans l'intérêt général. C'est le message que nous essayons de transmettre: nous voulons que les gouvernements assument la responsabilité de l'intérêt général. Cette responsabilité n'appartient pas aux sociétés ni au secteur privé; c'est celle des gouvernements. Alors, que les gouvernements jouent leur rôle au nom de la population.

M. Scott Brison: Un gouvernement qui se montre responsable doit, entre autres, optimiser le rendement d'un fonds de pension et, parallèlement, garantir la sécurité des placements; cependant, cette sécurité ne peut être garantie si l'on n'obtient pas un certain rendement. Au Canada, il y a effectivement des fonds de pension qui, comme vous le disiez, ont investi dans la compagnie Bre-X. La plupart d'entre eux ont eu, en 1996—et ont encore jusqu'ici—un rendement positif plus élevé que celui que nous avons tiré du Régime de pensions du Canada en prêtant l'argent aux provinces.

Généralement, dans les fonds communs de placement, les actions sont équilibrées par des obligations garanties et des titres non participatifs; au cours des 20 dernières années, si vous aviez lancé une fléchette sur l'indice Dow Jones ou l'indice de la bourse de Toronto, quelle que soit l'action sur laquelle vous seriez tombés, vous auriez obtenu un rendement meilleur que celui que nous avons tiré du Régime de pensions du Canada. Je fais partie de l'opposition, mais voilà un sujet sur lequel, à mon avis, nous devrions être très clairs: un grand nombre de Canadiens veulent tirer un meilleur rendement de leur régime de pensions que celui qu'ils ont obtenu jusqu'ici.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Brison.

Monsieur Iftody.

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Merci.

Moi aussi, j'ai été frappé par certaines des observations qui ont été faites. Je voudrais souligner que, même si nous ne sommes pas d'accord avec toutes les opinions énoncées dans vos mémoires, nous respectons certainement l'esprit dans lequel elles sont exprimées ainsi que vos motifs, notamment ceux de Mme Boyd qui est venue lancer un appel à l'aide au nom des pauvres et de ceux qui souffrent. L'on nous a fort bien expliqué ce qui se passe, notamment dans les provinces de l'Atlantique. C'est bien entendu, et il est certain qu'en tant que gouvernement, nous avons l'obligation de faire quelque chose pour que ces gens-là vivent dans de meilleures conditions.

Je tiens à dire très clairement que je comprends votre message et vos motifs mais, en toute franchise, certaines observations qui ont été faites, non seulement par votre groupe, mais par d'autres, m'énervent quelque peu. On a parlé du Budget de substitution hier à Fredericton, et j'ai mentionné que je connaissais l'un de ses auteurs, John Loxley, qui en est le principal architecte, et que j'étais au courant des travaux qu'il a mené au Manitoba. J'ai étudié à l'université où il enseignait.

Je dois dire—et j'aimerais que cela soit porté au compte rendu—qu'à mon avis, plusieurs suppositions et hypothèses du fameux Budget de substitution sont assez extraordinaires. J'ai utilisé hier à Fredericton le mot «naïf». Même si ces hypothèses paraissent solides et permettraient, comme nous le voulons, vous et moi, de soulager bien des maux, je ne vois pas comment cela serait possible.

• 0905

En ce qui a trait aux observations de M. Broderick qui prétend que le Régime de pensions du Canada ne connaît pas de difficultés financières, je trouve cela tout à fait extraordinaire; en effet, nos obligations envers les Canadiens se chiffrent à 600 milliards de dollars, une somme que nous ne pouvons pas payer aux gens à qui nous la devons actuellement. Car nous leur devons effectivement de l'argent. Il n'est tout simplement pas réaliste de partir de là pour tenter de trouver des solutions aux véritables problèmes qui se posent.

Deuxièmement, madame Boyd, vous avez déclaré que le gouvernement fédéral avait volé—c'est le mot que vous avez utilisé—l'excédent de la caisse d'assurance-chômage. Est-ce qu'il s'ensuit que, entre 1989 et 1993, lorsque la caisse accusait un déficit de 20 milliards de dollars par an et que les taux de chômage atteignaient pratiquement 12 p. 100, le gouvernement fédéral a volé la population du Canada pour financer ce fonds? Voilà une ou deux questions que je vous pose.

En résumé, en ce qui a trait au Budget de substitution, je considère que les hypothèses sur lesquelles il s'appuie ne sont pas du tout démontrées. Il est certain que, lorsqu'on a essayé de l'appliquer au Manitoba dans les années 70, cela a eu des conséquences tragiques et cela a abouti à l'endettement.

Quant au Régime de pensions du Canada—c'est ce que je crois comprendre d'après les conclusions de l'actuaire—il fait face à une dette de 600 milliards de dollars, et nous devons de l'argent à bien des gens que nous ne pouvons payer. Troisièmement, en ce qui a trait à la caisse d'assurance-chômage, si elle accuse à nouveau un déficit et que les Canadiens soient obligés de la renflouer, qui, alors, devra quoi à qui? Examinons cela pour commencer.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Eh bien, voilà qui donne une idée nouvelle de ce que peut être une intervention de quatre minutes.

Je donne la parole à M. Broderick, ensuite à Mme Boyd et après, à quiconque voudra intervenir. Monsieur Broderick, c'est d'abord à vous.

M. Leo Broderick: Je pense que dans les deux cas, vous faites complètement fausse route. Tout d'abord, vous n'avez pas dit quelles étaient les hypothèses du Budget de substitution. Vous jugez ces hypothèses inacceptables et fausses. J'aimerais que, plus tard, vous soyez plus précis.

Quoi qu'il en soit, en ce qui concerne le Régime de pensions du Canada et l'étude de l'actuaire, ce dernier part du principe que toutes les sommes exigibles au titre du régime doivent être couvertes. Autrement dit, les obligations d'un régime de pensions public qui ne sont pas autofinancées ne sont pas comparables à celles du secteur privé. Si une entreprise ne dispose pas des ressources nécessaires pour faire face à ses obligations, elle peut faire faillite du jour au lendemain.

Revenons à ce qu'a dit l'actuaire. Si nous étions dans l'obligation de faire tous les versements requis, c'est-à-dire de payer tous ceux qui ont cotisé, il n'y aurait pas dans le fonds assez d'argent. Aucun régime de pensions ne fonctionne sur cette base. Mais les gouvernements, au moins dans certaines provinces, ont pris des mesures pour améliorer la situation en ce qui concerne les obligations qui ne sont pas autofinancées.

Quoi qu'il en soit, dans le cas d'un régime public, le principe qui est appliqué, et qui devrait continuer de l'être, est tout simplement celui du «financement au fur et à mesure». Tout repose sur une entente conclue entre le cotisant et l'employeur. Donc, il est faux de dire qu'il n'y a pas assez d'argent dans le fonds pour effectuer les versements requis. Les fonds nécessaires sont là.

Passons maintenant à la question du magot—les fonds de réserve atteignent, je pense, des milliards et des milliards de dollars—à mon avis, la communauté financière qui veut contrôler directement à la place du gouvernement cette énorme réserve de fonds publics considère cela comme une vraie manne tombée du ciel. Les investisseurs géreront ces fonds, peut-être de façon prudente, mais c'est un cadeau qu'on leur fait, qu'ils pourront utiliser à leur gré et qui leur rapportera énormément. C'est la communauté financière qui va être chargée de gérer les fonds publics.

Nous reprenons à notre compte les conclusions de l'actuaire lorsqu'il a déclaré qu'il n'était pas véritablement nécessaire d'augmenter si rapidement les cotisations. Or, ces cotisations vont être augmentées: elles vont doubler au cours des six à sept prochaines années. Individuellement, cela aura le même effet qu'une lourde taxe, une taxe qui frappera les pauvres parce qu'il faudra payer à partir de 3 500 $.

• 0910

Il n'était pas nécessaire de prendre aussi rapidement des mesures pour augmenter les cotisations. Si le maximum est fixé à 35 000 $, nous allons payer près de 1 700 $.

M. David Iftody: Puis-je répondre?

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): La parole est d'abord à Mme Boyd.

Mme Mary Boyd: J'aimerais que vous remontiez le temps. Rappelez-vous tout le battage que l'on a fait à propos de la dette et du déficit. On ne s'est pas privé d'avoir recours à une tactique alarmiste: nous étions endettés jusqu'au cou, on allait nous mettre au défi de nous en sortir, on allait baisser notre cote de solvabilité, il fallait faire des coupes sombres partout. Vous rappelez-vous de cela?

J'ai comparu à l'époque devant ce comité. J'avais parlé à M. Loxley avant de présenter mon mémoire, et il m'avait donné certains renseignements que j'ai utilisés dans mon exposé. J'ai dit notamment qu'en deux ans, et certainement d'ici l'an 2000, il était possible de régler le problème du déficit et même d'avoir des fonds pour commencer à rembourser la dette. Lorsque j'ai tenu ces propos il y a deux ans, j'ai distinctement entendu quelqu'un dire: «Quelle connerie». C'est bel et bien ce que j'ai entendu.

Il y a évidemment des gens qui sont sceptiques, mais permettez-moi de vous rappeler que 150 économistes—dont la crédibilité et l'esprit critique ne peuvent être mis en doute et qui sont parmi les meilleurs que l'on compte dans ce pays—ont donné leur aval au Budget de substitution. Ces économistes ne sont pas une bande d'ignorants. Nous avons fait une évaluation exacte de la situation en ce qui concerne la dette et le déficit et nous avons correctement prévu ce qui allait se passer.

Quant à dire ce qui se passe lorsque la caisse d'assurance-chômage est en déficit, soit c'est le gouvernement fédéral qui vole l'argent des contribuables, soit ce sont les contribuables qui volent le gouvernement fédéral, ou vice versa. Je pense qu'il faut également se rappeler que nous ne tirons profit, à l'heure actuelle, que de 75 p. 100 des impôts que nous payons. Ce n'est pas seulement la caisse d'assurance-chômage qui accuse un déficit. Qu'en est-il des 25 p. 100 qui pourraient maintenant s'avérer très utiles? Nous espérons que l'on va faire quelque chose à ce sujet.

Nous parlons de l'intérêt général et de prendre ses responsabilités; il est certain que, si des gens qui travaillent dur souffrent du déficit et du chômage—et très souvent, ce sont les politiques gouvernementales qui entraînent un taux de chômage élevé—alors, bien évidemment, les Canadiens qui sont en faveur des programmes sociaux, des services de santé et d'une utilisation équitable des fonds de la caisse d'assurance-chômage souhaiteraient que le gouvernement fédéral prenne des mesures encore plus généreuses pour que personne dans ce pays n'ait faim, ne vive dans la misère et n'ait pas un toit sur sa tête.

Je ne pense pas que, dans les années 70, on élaborait un budget de substitution. Ce n'est que ces trois dernières années que l'on en a préparé un—c'est tout—et chaque fois, ce budget est plus solide. Il faut également se rappeler que ce n'est pas John Loxley et deux ou trois autres personnes qui le préparent. C'est un budget qui s'inspire des multiples expériences de la population canadienne et qui énonce... Les principes qui le sous-tendent sont de la première importance. Le Comité des finances serait bien avisé de réexaminer ces principes et de les respecter.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci.

Et maintenant, à monsieur Iftody pour une très brève intervention.

M. David Iftody: J'aimerais faire remarquer que je connais John Loxley et j'ai beaucoup de respect pour lui en tant qu'homme.

Je trouve simplement qu'un grand nombre des choses qu'il propose sont tellement grandioses et impraticables qu'il serait très difficile de les mettre en oeuvre.

Je voudrais aussi faire une remarque à l'intention de M. Broderick. En 2014, il ne serait plus resté d'argent dans la caisse du Régime de pensions du Canada pour assurer le versement des prestations de retraite si nous n'avions pas procédé à ces changements. À ce moment-là, à cause de l'évolution démographique, un phénomène aujourd'hui reconnu et compris par tous les gouvernements, tous les Canadiens et tous les responsables de régimes de pensions, nous nous serions retrouvés sans aucunes réserves, sans argent à verser aux gens, si nous n'avions pas apporté ces changements au régime.

Qu'aurions-nous pu faire d'autre, à votre avis?

M. Leo Broderick: Nous savions naturellement qu'il aurait fallu augmenter les cotisations à un moment donné, mais il n'était pas nécessaire de prendre des mesures aussi draconiennes à court terme. Nous sommes d'accord là-dessus. L'on n'était pas forcé d'augmenter autant les cotisations, même s'il était prévu—car la question est réexaminée tous les cinq ans par voie législative au niveau fédéral—qu'elles soient plus élevées en l'an 2010...

M. David Iftody: Il nous aurait fallu les augmenter de 20 p. 100.

M. Leo Broderick: Mais la Colombie-Britannique et la Saskatchewan ont proposé que l'on augmente le taux des cotisations de ceux qui gagnent plus de 35 000 $; ainsi, ceux qui peuvent payer, ceux qui peuvent se permettre de le faire, paient plus, et non ceux qui gagnent le salaire minimum et qui ne toucheront maintenant probablement qu'une modeste pension, car un grand nombre des nouveaux emplois sont à temps partiel et, dans notre province, saisonniers. Plus on investit dans des terrains de golf en considérant cela comme des dépenses d'infrastructure, plus nous connaîtrons de pauvreté et plus restreint sera l'accès au Régime de pensions du Canada.

• 0915

Par conséquent, je ne suis pas totalement en désaccord avec vous. Vous avez déclaré que le fonds aurait été bloqué. Si l'on en croit l'étude de l'actuaire, cela aurait été le cas éventuellement, mais ni cette année, ni l'année prochaine, ni même l'année suivante. Toutefois, cette augmentation majeure et la réduction des prestations... Comment peut-on justifier la réduction des prestations d'invalidité, la réduction de 1 000 $ de la prestation de décès? Comment peut-on justifier cela? Comment peut-on réduire les prestations des personnes âgées qui vivent déjà dans la pauvreté au point où elles recevront 33c. par jour? Et cela est salué comme une grande réussite du gouvernement. C'est scandaleux.

Il y a d'autres façons de s'attaquer au problème. Pour l'instant, on ne fait qu'empirer la situation. On va éventuellement aboutir à une privatisation complète des pensions dans notre pays, comme au Chili. Je sais que les libéraux se penchent sérieusement sur ce modèle. Les conservateurs l'avaient également envisagé.

Les régimes de pensions publics ont été institués au nom du peuple; dans l'intérêt général. Les propositions dont il est question vont paupériser la population et dans l'immédiat, ce sont peut-être les travailleurs qui vont l'être encore bien plus. C'est tout à fait inutile.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Broderick. Je vous rappelle qu'il y aura des audiences entièrement consacrées au Régime de pensions du Canada à partir du 28 octobre, au cas où vous souhaiteriez intervenir. Nous allons veiller à ce que vos commentaires d'aujourd'hui soient dûment enregistrés aux fins du compte rendu de ces audiences, et si vous souhaitez faire d'autres remarques ou si vous avez d'autres suggestions, n'hésitez pas à nous les communiquer.

La parole est à M. Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Merci.

J'ai écouté ce qui a été dit ce matin sur les diverses facettes de la situation, et ce que je retiens surtout, c'est qu'il existe des problèmes systémiques dans cette région du pays. Rien de très profond dans cette constatation, sans doute, mais vous dites que 64 p. 100 des familles de l'Île-du-Prince-Édouard disposent d'un revenu inférieur à 30 000 $, vous parlez d'une main-d'oeuvre saisonnière et vous mentionnez les problèmes liés aux mesures de protection sociale. Vous avez formulé beaucoup de commentaires et de critiques au sujet de ce que le gouvernement a fait ou n'a pas fait.

Permettez-moi donc de vous demander ce que vous proposez pour changer la nature de l'économie. Est-ce uniquement les programmes sociaux qui peuvent changer l'économie de cette province? Que fait-on pour changer l'approche globalement, pour faire en sorte que la main-d'oeuvre passe d'activités saisonnières à des activités à temps plein? Quelles sont les initiatives que prend la collectivité? Il existe manifestement dans l'Île un grand nombre de groupes communautaires. Que faites-vous en faveur de l'économie?

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Nous disposons de suffisamment de temps pour que chacun d'entre vous puisse intervenir brièvement sur la question. Monsieur Curley, voulez-vous prendre la parole le premier?

M. Brian Curley: Nous ne pouvons pas faire grand-chose pour remédier au problème de l'économie saisonnière dans l'immédiat. Des initiatives sont prises dans l'Île pour attirer plus d'industries. Il ne faut pas oublier que, depuis des années, depuis la guerre, tous les grands projets de développement industriel ont été financés par le gouvernement au Québec et en Ontario, et que les Maritimes ont été quelque peu distancées dans ce domaine.

Pour répondre à votre question sur l'influence des programmes sociaux sur l'économie, j'aimerais rappeler que chaque cent investi dans les programmes sociaux est directement réinjecté dans l'économie, et que cet argent ne se retrouve pas aux îles Cayman ou dans un autre endroit du genre. Il est en totalité directement réinjecté dans l'économie.

• 0920

Nous connaissons actuellement une reprise économique non créatrice d'emplois. On entend parler de la réticence des consommateurs à dépenser, mais si les gens qui vivent au-dessous du seuil de la pauvreté avaient plus d'argent à dépenser pour les produits de première nécessité, pas nécessairement pour le superflu ou les produits de luxe, mais simplement pour les produits de première nécessité—un réfrigérateur, par exemple... La seule chose qui puisse stimuler l'économie, ce sont les dépenses de consommation. Il faut avant tout favoriser ces dépenses. Les pauvres sont des consommateurs en puissance.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Curley. Je donne la parole à Mme Boyd. Je m'excuse—je vois que le chiffre de 64 p. 100 figure effectivement à côté de votre note.

Monsieur Broderick et ensuite, madame Boyd.

M. Leo Broderick: Bon, je serai très bref. L'ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick a déclaré l'autre jour, dans son message d'adieu, qu'il souhaitait que les Canadiens de l'Atlantique deviennent moins dépendants du gouvernement, mais il n'a pas précisé de quelle forme de dépendance il parlait.

Je sais que nous avons besoin d'un gouvernement fédéral fort, de gouvernements provinciaux forts et d'économies fortes. Les gouvernements continuent d'avoir un rôle à jouer dans le développement économique.

Il ne fait aucun doute que nous avons besoin d'une forme nouvelle de développement au Canada atlantique. Nous en avons besoin ici même, dans cette province. Même si notre économie nous fait dépendre principalement de l'agriculture, les pêches continuent de jouer un rôle dans cette province, bien que le tourisme ne soit pas loin d'occuper la première place.

Partout où le tourisme est un élément majeur de la croissance économique, on découvre que la pauvreté augmente. C'est la vérité. C'est un fait. Les ressources fédérales et provinciales sont orientées de plus en plus sur le développement touristique de la province.

Je ne vois ici aucun avenir pour les travailleurs qui pourraient occuper des emplois à l'année si l'on poursuit ce type de développement; mais il est parrainé par les pouvoirs publics. Le développement communautaire n'est pas encouragé dans cette partie du monde, alors qu'il devrait l'être. Il y a eu de nombreuses propositions, mais le financement manque pour les activités économiques axées sur le développement communautaire.

Si l'on continue de viser un développement économique de nature saisonnière, il faut prévoir des mesures de protection sociale pour secourir les gens pendant les mois où ils sont inactifs. Il existe des programmes fédéraux qui se résument, en vérité, à l'assurance-chômage. Nous en avons parlé. Mais on va continuer à la démanteler, à moins qu'il y ait une révolte de très très grande ampleur, ce qui est inévitable.

On est en train de détruire les régimes de pensions publics, alors qu'on devrait les conserver. Comme je l'ai déclaré au Premier ministre McKenna—et je le répéterai volontiers à tout autre homme politique du Canada—je préférerais dépendre du gouvernement que des grandes entreprises qui viennent s'installer ici et qui offrent des emplois à 5,10 $ ou à 5,40 $ de l'heure sans avantages sociaux. Qu'elles prennent leurs emplois et qu'elles aillent s'installer ailleurs. On ne peut pas qualifier cela de développement. Quant aux centres de travail temporaire sur appel, qui ont proliféré au Nouveau-Brunswick, et dans lesquels on a investi ici beaucoup d'argent—ce n'est pas le type de développement que nous souhaitons.

Certains diront que cela procure quand même du travail aux gens et que cela les soustrait à l'aide sociale. Nous devons garantir une certaine qualité de vie aux travailleurs. La syndicalisation—je pourrais en dire long à ce sujet, mais je m'abstiendrai.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Broderick.

La parole est à Mme Boyd.

Mme Mary Boyd: Il y a une chose qui, pour moi qui habite les provinces maritimes, est très importante, et qui devrait être signalée, je pense, aux gens qui ne sont pas de cette région.

Il fut un temps où la région était la plus riche et la plus avancée du Canada. Nous possédions un système ferroviaire adapté qui rendait les meilleurs services à la population. Nous avions, avant tout, un gouvernement responsable. Nous avons été les créateurs du système bancaire—la Banque de la Nouvelle-Écosse et plusieurs autres banques qui opèrent maintenant dans les provinces du Centre ont débuté ici. Nous avions en place, dans nos localités, des moyens flexibles pour accorder des prêts aux gens afin qu'ils puissent se lancer en affaires; c'était avant que tout ne soit si normalisé et standardisé que cela finit par paralyser ceux qui veulent prendre des initiatives. Nous avions des localités pleines de vie et nous savions comment les mettre au travail.

• 0925

Vers 1870, le Canada central a commencé à envier cette prospérité et a voulu s'en approprier une partie. Il y a eu une guerre économique et nous l'avons perdue. Ensuite, l'exode a commencé et nos provinces se sont dépeuplées. Notre base industrielle, qui constituait un fort pourcentage de la moyenne canadienne, est tombée à 3 et 4 p. 100. La stagnation s'installa, et nous sommes encore en train d'essayer d'y remédier. Nous avons été battus par plus grand et plus fort que nous. À un autre niveau, en tant que Canadiens, si nous ne faisons pas attention, nous allons connaître une autre défaite qui sera due à la façon dont nous tentons de nos adapter à la mondialisation. Nos politiciens ne semblent pas s'en rendre compte.

Je suis d'accord avec Leo au sujet du tourisme. Nous suivons ce dossier. Le salaire minimum, dans cette province, n'est que de 5,25 $ l'heure, ce qui est vraiment bas. Quant aux centres d'emploi temporaire sur appel, ils ne devraient même pas exister. C'est agaçant, quand on rentre chez soi en espérant être tranquille au moment du dîner, de recevoir tous ces appels téléphoniques, etc.

Nous devons nous mettre à l'écoute de la population. Les gens ont des idées, mais personne n'en tient compte. Personne n'aide les gens à approfondir les bonnes idées qui pourraient avoir des résultats concrets.

Par mon travail, j'ai essayé de temps à autre d'entreprendre certaines choses, et je peux vous dire que cela a été extrêmement difficile. Si je n'avais pas eu la foi et si, en tant que chrétienne je n'avais pas été convaincue que nous avons l'obligation d'aider nos frères et nos soeurs et de mettre en pratique l'amour des autres et la justice, j'aurais abandonné car les obstacles étaient vraiment énormes. Nous devons surmonter tout ça et prendre les mesures dont les gens ont besoin.

Ce programme d'assurance-emploi est dévastateur. Il procure de petites sommes à quelques groupes et à quelques consultants chargés de créer des emplois, mais les gens n'ont pas accès au financement, au savoir-faire ni à l'aide nécessaire pour que cela aboutisse à quelque chose. Nous perdons notre temps dans ce pays. Comme ils disent dans l'émission This Hour Has 22 Minutes, nous glandons. Et il faudrait que l'on passe à autre chose.

Il faudrait assurer un revenu minimum à chaque Canadien. Une fois que l'on aura reconnu que ce n'est que justice, on aura établi la base à partir de laquelle la créativité peut prendre son envol. Mais nous avons besoin de l'aide du gouvernement. On en a entendu plusieurs se vanter du fait que nous avions accueilli un million de touristes l'été dernier, que des millions de gens souhaitent emprunter le pont et que cela est une très bonne chose pour l'Île-du-Prince-Édouard. Je m'excuse, mais je n'y crois pas. Nous devrions, selon moi, examiner tout cela d'un oeil très critique.

Si l'on fait fi du soutien de la population et de sa sagesse, je ne pense pas que l'on ira bien loin dans le proche avenir. On trouve dans le Budget de substitution quelques idées sur le développement communautaire et la responsabilisation de la population.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, madame Boyd. La période des questions est maintenant terminée.

J'aimerais accorder à chacun des panélistes une minute pour conclure, je dis bien une minute. Au signal, ce sera mon tour.

N'hésitez pas à nous faire parvenir d'autres informations ni à discuter avec les députés après la séance. Vous pouvez aussi simplement envoyer un complément d'information à notre greffière, qui nous la transmettra. Quand vous en aurez fini avec vos conclusions d'une minute, nous clôturerons cette table ronde.

Monsieur Curley, vous avez la parole pendant la première minute.

M. Brian Curley: Le rôle financier du gouvernement du Canada ne représente qu'une petite partie de l'ensemble. Lors des prochaines délibérations, le gouvernement devra se souvenir des conséquences pour la population. Les coupures qui ont été effectuées ont touché des gens qui vivaient déjà dans la pauvreté, avec le minimum vital et dans ce contexte, elles étaient injustes et inconcevables.

J'espère qu'à l'avenir, dans le prochain budget ou autrement, on tiendra compte du fait que les pauvres ont droit à des conditions de vie minimales avant de prendre des décisions. Je souhaite profondément que les crédits accordés aux provinces au titre des services sociaux soient liés à certaines normes, telles que celles qui figuraient dans le défunt RAPC, et que l'on assure à tous les habitants du Canada un niveau de vie adéquat. Merci de votre attention.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Curley.

Monsieur Broderick, vous avez une minute.

M. Leo Broderick: Merci. Le Régime d'assistance publique du Canada, qui existait jusqu'en 1996, avait introduit des normes à la fois humaines et humanitaires dont pouvaient s'enorgueillir tous les Canadiens. Mais en abandonnant ce régime en 1996, le gouvernement a privé les gens de certains de leurs droits. Nous avons perdu dans ce pays les droits que nous détenions depuis plus de 30 ans lorsque nous étions au chômage. Nous n'aurons pas de revenu quand nous en avons besoin. Nous avons également perdu au Canada le droit de ne pas avoir à travailler pour bénéficier de la sécurité sociale.

• 0930

Parce que l'on a abandonné certaines normes nationales, de plus en plus de gens souffrent de la faim. Nous régressons vers un âge où les organismes de charité représentaient le meilleur et parfois le seul espoir, pour les chômeurs et les Canadiens à bas revenu, d'être nourris et soignés. C'est manifestement une erreur.

Nous devons remettre en place les services publics, et cela signifie les services offerts à la population. Il faut créer des emplois. Il faut augmenter les crédits pour les soins de santé, les services sociaux, l'éducation, car l'éducation est, sans conteste, un investissement dont bénéficieront nos enfants, nos familles et notre pays. Vous avez une tâche immense à accomplir; alors allez-y, mettez-vous au travail.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Broderick.

Mme Mary Boyd: Je voudrais me prononcer catégoriquement pour l'interruption des coupures et le rétablissement de la recherche sur les médicaments et les produits alimentaires. Rien n'existe dans le secteur privé.

J'aimerais également insister sur la nécessité de préserver notre régime d'assurance-maladie. Il est actuellement extrêmement vulnérable et fait l'objet de fortes pressions de la part d'entreprises privées américaines qui souhaitent l'accaparer.

Je considère que la dignité de la personne humaine n'a pas de prix, et que les gens qui sont malades ne devraient pas avoir à payer pour se soigner. Nous devons consacrer plus d'argent à la santé pour préserver les cinq principes de l'assurance-maladie.

Nous devons nous attacher, au Canada, à mettre en place un programme de création d'emplois qui générera des emplois permanents bien rémunérés, dans de bonnes conditions de travail.

Nous devons renverser la tendance et mettre fin aux coupures et aux fermetures de services, et il nous faut un régime d'assurance sociale qui aide les plus défavorisés à sortir de la pauvreté et qui leur garantisse un revenu. Par voie de conséquence, nous aurons à faire moins de coupures dans le domaine de la santé. Nous connaissons tous les statistiques: le plus riche on est, le mieux on se porte, le plus longtemps on vit. C'est plutôt injuste, n'est-ce pas?

Je voudrais ajouter que les gens sont saignés à blanc dans cette province parce qu'ils sont obligés de financer les soins de santé et autres services qui devraient être fournis par le gouvernement, et qu'ils n'ont plus rien pour le reste. C'est vraiment injuste.

À cet égard, l'APD, l'aide publique au développement, est actuellement scandaleusement basse. Quand j'écoute les informations, j'entends les Canadiens dire que la réputation du Canada à l'étranger est menacée. Ce n'est pas de la réputation du Canada qu'il s'agit. Ce n'est pas à ce titre que nous contribuons à l'APD; c'est par souci de justice, parce que nous nous préoccupons du sort de nos frères et de nos soeurs, ici, au Canada, et à l'étranger, et que nous avons les moyens de nous montrer plus généreux. Je vous demande donc de mettre en pratique votre sens de la justice.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Boyd.

Madame Lie-Nielsen, vous avez la parole pendant les minutes qui nous restent.

Mme Anne Lie-Nielsen: Merci. J'aimerais vous rappeler que vous représentez le gouvernement du Canada. Vous avez la responsabilité de nous montrer la voie à suivre. Vous avez la responsabilité d'assurer que les Canadiens d'est en ouest et du nord au sud ont la possibilité...

Ces dernières années, nous avons pu constater que vous abandonniez cette responsabilité en transférant les programmes aux provinces. Je considère qu'il est très important de rétablir des normes.

J'aimerais inverser la proposition que j'ai entendue ce matin: je pense qu'une société saine est garante d'une économie saine. Je pense que si des opportunités nous sont offertes, nous aurons la sécurité.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame Lie-Nielsen. Je n'ai pas vu le document que vous brandissiez. Était-ce la déclaration du ministre?

Mme Anne Lie-Nielsen: Il s'agit de...

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Parfait, je vous remercie.

Cela met fin à notre première table ronde dans l'Île-du-Prince-Édouard. Je tiens à remercier tous les participants d'avoir partagé avec nous leurs idées avec tant d'enthousiasme et de conviction. Nous avons été heureux de vous accueillir, et je puis vous assurer que nos oreilles étaient grandes ouvertes et que nous vous avons écoutés.

Je vais lever la séance pour quelques minutes pour que nous puissions nous dégourdir les jambes et laisser aux autres panélistes le temps d'arriver.

Je vous remercie à nouveau et je vous souhaite bonne continuation.

• 0935




• 0951

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): La séance est ouverte.

Nous sommes très heureux d'être parmi vous, dans l'Île-du-Prince-Édouard, pour la deuxième de nos tables rondes de la journée dans le cadre du processus de consultation prébudgétaire.

J'aimerais faire deux remarques avant que nous commencions. Chaque groupe ou chaque individu a cinq minutes pour s'exprimer. Au bout de quatre minutes, je lèverai le doigt pour vous signaler qu'il vous reste seulement une minute. Quand vos cinq minutes se seront écoulées, j'allumerai mon micro et je vous demanderai de vous interrompre, afin que nous puissions entendre le groupe suivant.

J'ai l'impression que la plupart d'entre vous nous avez transmis des mémoires. Si tel n'est pas le cas, ne vous formalisez pas; par ailleurs, il n'est pas nécessaire que vous lisiez tout le document, puisque nous l'avons devant nous. Si vous avez l'intention d'en lire des passages, je vous conseille de parler lentement, plus lentement que vous le faites ordinairement de manière à ce que nos interprètes puissent faire leur travail.

Après avoir entendu tous les intervenants, nous passerons à une période de questions de cinq minutes de la part de chaque député ici présent. Je vais vous les présenter, si vous me le permettez.

M. Ritz, de la Saskatchewan, représente le Parti réformiste; M. Perron, du Québec, représente le Bloc québécois; Mme Vautour, du Nouveau-Brunswick, représente le NPD; M. Brison, de la Nouvelle-Écosse, représente les conservateurs; M. Gallaway, de l'Ontario, représente les libéraux; et M. Iftody, du Manitoba, représente aussi les libéraux. Je m'appelle Paddy Torsney et je viens de l'Ontario.

À la fin, nous pourrons, je l'espère, vous donner une minute chacun pour conclure dans la mesure où les questions seront brèves et à propos. Si une question vous est adressée, vous allez sans doute y répondre. Mais vous pouvez aussi intervenir à tout moment pendant la période de question; faites-moi signe et j'ajouterai votre nom à la liste des intervenants. J'encourage à la fois ceux qui posent des questions et ceux qui y répondent à se montrer brefs, afin que nous puissions progresser dans nos travaux et entendre le plus grande nombre de personnes.

Monsieur Greene, vous occupez un siège privilégié. Vous serez le premier à faire usage des cinq minutes de temps de parole qui vous sont accordées.

M. John Eldon Green (président, Smith Greene Associates): Je suis venu quatre à quatre.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Prenez une grande respiration, et tout ira bien.

M. John Eldon Green: Madame la présidente, mesdames et messieurs, j'ai devant moi un document de trois pages à double interligne, mais je me contenterai de vous en communiquer brièvement l'essentiel.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Greene, je m'excuse, mais j'ai oublié de présenter nos panélistes.

Je vais le faire très rapidement: M. John Eldon Greene représente Smith Greene Associates...

M. John Eldon Green: Je connais les panélistes.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Non, ce n'est pas des députés que je parle.

Mme Crystal McDonald représente la Prince Edward Island Federation of Agriculture; nous entendrons ensuite M. Regis Duffy, qui représente Diagnostic Chemicals; Jimmie Gorman, qui parlera en son nom personnel; M. Robert O'Rourke, qui fait partie de la School of Business Administration et de Simscape Development Corporation; M. Francis Reid, qui représente la Construction Association of P.E.I.; M. Roger Perry et M. MacLauchlin de la P.E.I. Road Builders and Heavy Construction Association; et M. Moorehead, de M.F. Schurman Co. Ltd.

• 0955

Monsieur Green, le compte à rebours est commencé.

M. John Eldon Green: Cela n'a pas été soustrait de mon temps de parole, si je comprends bien.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Pas du tout.

M. John Eldon Green: Je serai très bref. Je vais d'ailleurs laisser mes notes de côté pour gagner du temps.

Je dirai pour commencer qu'il me paraîtrait présomptueux de ma part ou de la part de quiconque de suggérer des priorités à ce stade de la lutte contre le déficit, sans savoir qui a été le plus touché ou le plus durement affecté par la première phase du processus de réduction du déficit.

J'ai lu beaucoup d'articles et de nombreux éditoriaux dans lesquels on félicitait le gouvernement fédéral de son habileté en matière fiscale et de la sagesse de cette procédure. Ils étaient tous écrits par des gens qui ont été protégés des effets les plus néfastes de la lutte contre le déficit, comme ma femme et moi. Je vous avoue qu'à part la perte de la pension de la Sécurité de la vieillesse, nous sommes sortis indemnes de l'initiative de réduction du déficit. En fait, notre situation est un peu meilleure qu'elle ne l'était il y a trois ans. Par conséquent, loin de nous l'intention de demander quoi que ce soit.

Je crains que vous ne soyez amenés à entendre des gens qui le feront, qui en demanderont encore plus, qui souhaiteront que l'on administre à d'autres de nouveaux remèdes pour lutter contre le déficit, et que le comité en conclue que c'est l'opinion de tous les Canadiens et non les propos de gens bien placés et bien servis par la société.

Je trouve que le comité devrait accorder moins d'importance à ceux qui se sont inconditionnellement félicités de la révolution financière au sein du gouvernement tout en demandant que l'on en rajoute, y compris maintenant, selon le Globe and Mail, une réduction du salaire minimum. Le comité rendrait un service à la population canadienne en faisant rapport sur les conséquences en aval et les effets cumulatifs de l'initiative de réduction du déficit et des changements intervenus dans les programmes gouvernementaux à la suite de la révolution fiscale, car pour le moment, il semble que l'on avance à l'aveuglette. Le genre de conseils que chacun de nous vous donnera en cinq minutes ne seront pas totalement fondés, si l'on en juge par ce qui s'est passé au cours des cinq dernières années.

À mon avis, avant de fixer des priorités, il faudrait savoir quel tort ont subi, le cas échéant, les divers segments de la population à cause des changements profonds qui sont intervenus, et quelles en ont été les conséquences précises sur l'économie et la structure sociale du Canada atlantique, dans la mesure où nous restons une composante importante du pays.

J'ai mentionné dans mon mémoire que les compressions au MPO avaient eu des conséquences importantes sur la façon dont l'industrie prend en compte la nouvelle donne. Nous ignorons les effets des changements apportés aux programmes et aux politiques nationaux relatifs aux transports sur l'industrie agro-alimentaire. Nous ne le saurons pas avant quelque temps. Nous ignorons quelle sera la conséquence des changements affectant le régime de propriété et la politique concernant les ports de mer et les aéroports. Il se peut que d'autres préjudices apparaissent, et que vous soyez ici deux ans trop tôt pour que nous puissions vous dire si le gouvernement a oeuvré dans la bonne direction, et quelles devraient être vos priorités.

Et ce qui est plus important, nous ignorons l'impact—nous n'avons aucun chiffre—de la réforme de l'assurance-emploi. Nous ignorons quelle incidence cela a eu sur les marchés dans les industries saisonnières, qui sont le moteur de notre économie. Des gens de l'extérieur de la province nous disent que nous devrions chercher à évoluer vers une économie plus stable, mais cela ne peut pas se faire à court terme. En fait, on semble penser dans tout le pays: «Si l'on me donnait 40 acres, je changerais le cours des choses». Selon moi, cela prendra plus qu'un an ou deux, dans le cadre du programme de réduction du déficit.

Je crois que les exhortations et les recettes du Financial Post, du Globe and Mail, du C.D. Howe, du Fraser Institute, de la Federation of Independent Business, et même du Conseil économique des provinces de l'Atlantique me seraient personnellement profitables, et bénéficieraient à ma femme et à moi, aux gens qui sont dans la même situation que moi et à mon entreprise. Mais les choses vont bien pour nous, elles vont bien pour beaucoup d'entre nous, alors que ce n'est pas le cas pour un grand nombre de gens à cause de ce qui s'est passé. Je ne pense pas que nous sachions qui ils sont, et dans quelle mesure ils ont été floués.

Je ne suis pas venu ici dans l'intention de vous aider, car je ne suis pas en mesure de le faire, mais pour poser des questions auxquelles le gouvernement devrait maintenant pouvoir répondre: quelles ont été les conséquences en aval de plusieurs de ces changements? Qui a été le plus durement touché? Si vous souhaitez aborder la question des priorités, je pense que la priorité, en ce qui concerne les prochaines mesures, devrait être de secourir ceux qui ont payé le prix des premières, ceux qui se trouvent déjà tout au bas de l'échelle économique. Ça devrait être leur tour.

• 1000

La dernière chose que je demanderai au comité, c'est de transmettre au Parlement une vision plus juste de la société des provinces maritimes et des conditions qui y prévalent. Notre industrie traditionnelle est de nature saisonnière, et il n'y a rien que nous puissions y faire.

Les Américains semblent fiers de leurs petits États. Au Canada, on n'aime pas les petites provinces. On voudrait rassembler les quatre petites provinces pour en faire une grande, une province que l'on pourrait comparer aux autres. Les Américains nous laisseraient tels que nous sommes; j'aimerais que le Parlement adhère au même principe: accepter que nous sommes une petite province et que c'est très bien ainsi. Là n'est pas le problème. J'aimerais que vous repartiez avec une vision juste de la nature de notre économie et de notre société.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Green.

La parole est à Mme McDonald.

Mme Crystal McDonald (Prince Edward Island Federation of Agriculture): Merci. Je voudrais aussi remercier M. Green, qui a exprimé beaucoup de choses que nous répétons nous-mêmes depuis cet été au moins, pour ne pas dire depuis l'année dernière, depuis que les milieux agricoles ont commencé à ressentir les effets cumulatifs des mesures de recouvrement des coûts prises dans le précédent budget.

La P.E.I. Federation of Agriculture se félicite d'être le porte-parole de la communauté agricole de l'Île-du-Prince-Édouard sur les questions que nous jugeons préoccupantes, et celle-ci est sans aucun doute une de celles à laquelle nous avons consacré le plus de temps. Nous avons constaté qu'il y avait plusieurs problèmes majeurs et, comme l'a souligné M. Green, il y en a encore d'autres sur lesquels nous butons encore. Nous avons pensé que les chances étaient suffisamment graves pour justifier une étude et pour que l'on analyse les problèmes qui émergent. Pour cette raison, nous ne nous en tenons pas uniquement à l'Île-du-Prince-Édouard, mais nous examinons la situation dans la perspective de l'industrie canadienne de l'agriculture, dans son ensemble, et des effets cumulatifs des mesures de recouvrement des coûts qui ont été appliquées, des changements de politique et de l'abandon de l'AFA et de plusieurs autres programmes. Ces mesures ont toutes frappé l'industrie agricole au même moment.

Quand on examine les ventes agricoles et la production génératrice de valeur ajoutée, on s'aperçoit que prises ensemble, elles font de l'agriculture la première industrie du secteur privé dans l'Île-du-Prince-Édouard. Nous savons ce que se serrer la ceinture signifie. Nous savons ce que représentent les restrictions et comment arrondir les fins de mois et nous contenter de marges bénéficiaires relativement minces. De fait, il serait bon que vous notiez que l'Île-du-Prince-Édouard possède une des industries agricoles les moins subventionnées de tout le Canada. Nous soutenons pourtant que notre industrie est dramatiquement touchée par les mesures de recouvrement des coûts qui ont été prises, que ce soit par l'Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire et le Système canadien de l'inspection des aliments ou à n'importe quel autre niveau. Nous devons examiner plus sérieusement d'autres moyens qui permettraient à l'industrie de rendre les mêmes services à meilleur marché et aussi bien, voire mieux, alors que certains des services qui sont actuellement fournis n'ont tout simplement plus leur raison d'être, compte tenu de la nature de l'industrie.

Quant à la responsabilité du gouvernement fédéral, est-elle simplement de veiller à l'équilibre des comptes et au paiement des factures? Je ne crois pas que quiconque ici présent aujourd'hui pense que ce soit le cas. Nous devons assurer la stabilité et la salubrité de l'approvisionnement alimentaire des Canadiens.

La question qui se pose est la suivante: à qui cette charge incombera-t-elle? Est-ce que ce sont les agriculteurs qui devront assumer le coût total? Nous prétendons que non. Les Canadiens, quels qu'ils soient—mère célibataire, homme ou femme d'affaires, ou autre—ont tous la responsabilité de contribuer au coût des mesures nécessaires pour assurer la salubrité et la stabilité de l'approvisionnement alimentaire.

Les agriculteurs fonctionnent déjà avec des marges bénéficiaires minimes, quand bénéfices il y a. Un grand nombre de très petites exploitations agricoles familiales contribuent énormément au bien de la collectivité, mais ne reçoivent pas nécessairement autant en retour au plan commercial, et on leur demande de payer progressivement de plus en plus.

Quant à l'ARLA, elle envisage des mesures de recouvrement des coûts pour ses services et pour l'enregistrement des nouveaux produits. Il n'y a pas de mal à cela, disent les responsables, car cela touche les entreprises de produits chimiques. Mais attention, où pensez-vous que ces entreprises iront récupérer l'argent? Chez les exploitants agricoles; et nous n'avons pas, nous, la possibilité de répercuter ce coût sur qui que ce soit car le maillon suivant, ce sont des gens comme nous qui sommes réunis autour de cette table, c'est-à-dire les consommateurs.

Je suis donc d'accord avec M. Green; il faut examiner de très près quels ont été les effets cumulatifs du précédent budget. Depuis 1990 ou à peu près, nous nous interrogeons sérieusement sur l'évolution de la situation. Nous convenons que le déficit doit être réduit et que l'on avance dans la bonne direction, mais il reste que certaines choses nous inquiètent.

• 1005

Un des autres domaines qui nous préoccupe, nous l'avons déjà dit, c'est la disparition du financement du Plan vert. Les projets et les programmes environnementaux sont conformes aux directives écologiques du GATT mais n'en sont pas moins supprimés. Or, il s'agit d'un secteur dans lequel les agriculteurs pourraient bénéficier d'une aide du fait qu'ils s'efforcent de relever de nouveaux défis et de s'adapter à l'évolution de l'industrie. Pourtant, ces programmes disparaissent aussi du budget. Selon moi, c'est un des secteurs qui devrait être renforcé. Il y en a d'autres dont vous allez entendre parler dans les prochains mois, j'en suis sûre.

Comme l'a déclaré M. Green—c'est une tâche plutôt facile de parler après vous M. Green—nous devrions examiner tout cela très attentivement. On ne peut tout simplement pas se contenter de couper en pensant que tout le monde va subir les conséquences, sans distinction, car malheureusement ce sont habituellement les gens aux revenus les plus modestes qui finissent par payer. Quand un exploitant agricole vient vous voir à la fin de son année financière, qu'il a calculé son impôt sur le revenu et versé plus de 17 000 $ uniquement pour faire inspecter sa récolte, alors qu'il a du mal à joindre les deux bouts à cause des coûts élevés des intrants, il est très difficile de lui dire de ne pas s'en faire, que nous contribuons tous à la réduction du déficit budgétaire du Canada.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame McDonald.

Monsieur Duffy, s'il vous plaît, vous avez la parole pour cinq minutes.

M. Regis Duffy (directeur général, Diagnostic Chemicals Limited): Madame la présidente, mesdames et messieurs les membres du comité, je vous remercie de m'avoir invité à prendre la parole devant vous ce matin.

La réduction du déficit budgétaire du Canada, comme nous le savons tous, n'était pas une question de choix. Quand on sait que le gouvernement fédéral dépense 45 p. 100 du budget annuel total en frais d'intérêt, c'est qu'il n'a quasiment plus le choix. Si l'on tient compte des obligations statutaires du gouvernement à l'égard des provinces et de la population, à peu près 90 p. 100 du budget est déjà englouti. Nous n'avions pas le choix.

Toutefois, il ne faut pas oublier que les ménages canadiens ont fait les frais de ces mesures car les taux hypothécaires plus élevés au cours des 20 dernières années sont largement attribuables à la politique de déficit systématique du gouvernement et à la concurrence auquel il faisait face sur les marchés monétaires.

Le revenu moyen après impôt des ménages canadiens a baissé de 8 p. 100 depuis 1989, en partie à cause des fortes augmentations d'impôt. Il n'est donc pas surprenant que nous ne connaissions pas de reprise économique stimulée par les dépenses de consommation. Les universités, les collèges et les systèmes scolaires, tout comme le système des soins de santé, ont subi d'importantes et substantielles coupures. Les paiements de transfert aux provinces les plus pauvres, comme l'Île-du-Prince-Édouard, ont été la source de grandes difficultés.

Les explorations géologiques se sont concentrées sur les gisements de pétrole dans certains endroits seulement. Nous ne devrions pas prétendre être de meilleurs gestionnaires économiques simplement parce que nous sommes capables de pomper du pétrole et de le vendre à 20 $ américains le baril.

En ce qui concerne les priorités, on suggère de plus en plus que 50 p. 100 de l'excédent budgétaire soit affecté à la réduction du déficit, 25 p. 100 à la baisse des impôts et 25 p. 100 à l'augmentation des crédits dans le domaine de l'éducation et de la santé. C'est probablement une idée raisonnable. Toutefois, c'est un point de départ et ce modèle ne devrait certainement pas être coulé dans le marbre. Il devrait être réexaminé constamment et faire l'objet de nombreuses discussions publiques pour tenir compte de l'avis de la population.

En ce qui a trait aux leçons à tirer de l'histoire, il y a des questions que nous devrions nous poser. Pourquoi les Canadiens ont-ils permis à leurs politiciens de laisser la dette nationale passer à 585 milliards de dollars sur une période de 20 ans, sans que personne ne semble vraiment s'en formaliser? Qu'en serait-il si les taux d'intérêt n'avaient pas baissé et si le pays traversait une récession prolongée? Aurait-on touché un mur fiscal? Pourquoi les Canadiens sont-ils devenus sceptiques à l'égard des politiciens et d'un processus politique qui nous est à tous préjudiciable? La passivité des Canadiens au cours des deux dernières décennies face à l'augmentation sans précédent du déficit, à laquelle s'ajoutaient de nouveaux impôts substantiels, justifierait une étude.

Je terminerai par une recommandation personnelle. Je recommande qu'une loi fédérale soit adoptée pour obliger le gouvernement à équilibrer le budget tous les ans au cours de cycles de deux ou trois ans. On restaurerait ainsi l'intégrité fiscale et politique du système. Ce serait, pour chacun d'entre nous un jour à marquer d'une pierre blanche.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Duffy, notamment d'avoir été aussi succinct.

La parole est maintenant à M. Gorman pour cinq minutes, s'il vous plaît.

• 1010

M. Jimmie Gorman (témoignage à titre personnel): Je souhaite, pour commencer, vous souhaiter la bienvenue à Charlottetown, madame la présidente, ainsi qu'à votre comité. Nous sommes heureux de vous accueillir, et j'espère que vous repartirez de Charlottetown avec quelque chose qui vous servira plus tard pour mener à bien votre initiative.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Oui, du homard.

M. Jimmie Gorman: Je l'espère bien.

J'aimerais également féliciter le ministre des Finances pour sa déclaration à propos de la réduction du déficit budgétaire.

On demande, dans la documentation que nous avons reçue, nos commentaires sur deux ou trois choses: entre autres, si le processus nous paraît trop rapide ou trop lent. Je ne prétendrai pas que le processus est parfait uniquement parce que je sais que M. Martin souhaite dire à la télévision de Radio-Canada qu'il a parlé à tout le monde d'un bout à l'autre du Canada et que tout le monde a trouvé qu'il avait visé juste et qu'il avait fait exactement ce qu'il fallait faire.

Je dirai toutefois que c'était l'un des résultats que le ministère avait lui-même prévus. Quant à savoir si les choses sont allées trop vite ou trop lentement, je ne puis le dire. Le fait est que l'on voit le bout du tunnel.

Par ailleurs, on nous a demandé si les méthodes utilisées étaient appropriées. Je continue de penser qu'il y a beaucoup de gaspillage dans plusieurs ministères fédéraux à Ottawa. Je trouve que l'on devrait y remédier et que cet argent devrait être affecté à la réduction du déficit budgétaire ou aux programmes sociaux, peu importe. Foncièrement, le déficit a été réduit par l'augmentation de l'imposition des revenus, les droits d'utilisation et le transfert de responsabilité aux provinces.

Les paiements de transfert ont été réduits de 35 p. 100; en l'occurrence, cela touche nos programmes sociaux, l'éducation et la santé dans l'Île-du-Prince-Édouard.

Les coûts relatifs aux soins de santé vont augmenter au fur et à mesure que la population vieillit.

Les droits de scolarité augmentent chaque année et beaucoup d'étudiants ne peuvent pas trouver d'emploi après avoir obtenu leur diplôme. Faire cuire des hamburgers chez McDonald n'est pas vraiment un emploi intéressant pour un diplômé universitaire.

Je pense qu'il existe de meilleures façons de mettre en oeuvre les programmes relatifs à l'éducation et à la santé, et il faudrait que les gouvernements collaborent pour les trouver et les appliquer. Il faut, selon moi, réinjecter de l'argent dans les programmes. Nous ne voulons pas de nouveaux programmes comme l'assurance-médicaments avant que ne soient remis en selle ceux qui existent déjà. Financer de nouveaux programmes alors que l'on n'a pas l'argent nécessaire est ce qui a provoqué nos problèmes financiers.

D'autre part, les exploitants agricoles et les pêcheurs ont à payer des frais d'utilisation qui augmentent chaque année. Je trouve que le gouvernement provincial et le gouvernement fédéral devraient s'associer pour offrir ces services à moindre coût. Actuellement, je considère qu'on ponctionne des sommes exorbitantes, plus élevées que le prix de revient de la mise en oeuvre des programmes.

Il est beaucoup question ces derniers temps du dividende fiscal. En ce qui me concerne je n'en ai pas encore touché un. C'est à l'horizon, et j'espère qu'on saura l'utiliser sagement le moment venu.

Je pense aussi qu'il devrait y avoir une loi obligeant le gouvernement à équilibrer le budget tous les ans.

Une chose que le gouvernement fédéral pourrait faire immédiatement, c'est de faire passer l'exemption de base de 6 459 $ à 10 000 $. Tous les Canadiens en profiteront, mais ceux qui en bénéficieront le plus, ce sont les Canadiens dont les revenus sont faibles ou moyens. Ce sont eux qui en ont le plus besoin.

Les impôts doivent être réduits pour compenser l'augmentation des cotisations du Régime de pensions du Canada. Si l'on ne réduit pas parallèlement les impôts, on constatera qu'au fil des semaines, nos chèques de paie nous laisseront de moins en moins d'argent à dépenser.

L'agriculture, la pêche, le tourisme et la foresterie sont les quatre principales industries de l'Île-du-Prince-Édouard. Trois d'entre elles sont saisonnières, et il faut, par conséquent, que l'on conserve une main-d'oeuvre saisonnière. À cette fin, la règle de l'intensité et le programme de l'assurance-emploi, qui réduisent les prestations de 55 à 50 p. 100, doivent être supprimés. Si nous ne faisons rien pour garder ces travailleurs sur place, ils vont déménager. Les industries en souffriront, comme cela a déjà été le cas.

Il y a deux semaines, le premier ministre assistait à la Conférence pour une vision de l'Atlantique à Moncton. Il a déclaré que le Canada atlantique avait été la région la plus durement touchée au Canada, et il a raison, c'est vrai. Pat Binns, le Premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard, qui assistait lui aussi à la conférence, a déclaré que la baisse de la population au Canada atlantique était un problème majeur, et lui aussi disait vrai.

Comment peut-on retenir les gens et créer des emplois au Canada atlantique? À mon avis, le gouvernement fédéral devrait mettre en place un système de crédit d'impôt, en vertu duquel les entreprises actuelles ou nouvelles qui créent des emplois bénéficieraient d'un crédit d'impôt sur une période de cinq ans. Cela inciterait de nouvelles entreprises à s'implanter ici et les entreprises existantes à se développer et à créer de véritables emplois à long terme pour les Canadiens des provinces atlantiques.

Je vous remercie de votre attention et de m'avoir donné l'occasion de m'exprimer ce matin.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Gorman. Vous vous en êtes tenu exactement à cinq minutes.

Je donne maintenant la parole à M. O'Rourke, pour cinq minutes.

• 1015

M. Robert O'Rourke (président, Simscape Development Corporation): Merci, madame la présidente et messieurs les membres du comité. On m'a demandé de faire un exposé portant sur le processus de réduction du déficit budgétaire et sur les méthodes utilisées. J'aimerais faire quelques remarques à ce sujet avant de parler de la planification des priorités.

En ce qui concerne la réduction du déficit budgétaire, selon moi, il y a deux choses à examiner: le rythme du processus et les méthodes auxquelles on a recouru.

Je considère que les progrès accomplis pour réduire le déficit budgétaire sont satisfaisants. Je pense que les choses ont avancé à un rythme raisonnable, compte tenu des options dont disposait le gouvernement fédéral, lesquelles, pour parler franchement, n'étaient pas très enthousiasmantes.

Je suis d'avis que l'élimination du déficit budgétaire doit continuer d'être la priorité du gouvernement. Je ne crois pas que l'on puisse parler des dividendes qui peuvent découler de la sagesse fiscale dont le gouvernement a fait preuve tant que l'on ne sera pas parvenu au résultat recherché, à savoir un budget équilibré.

Je crois fermement à ce stade que la planification de la réduction de la dette devrait devenir une des priorités du gouvernement. On ne devrait pas, selon moi, attendre d'avoir éliminé le déficit avant d'entreprendre une planification sérieuse des mesures permettant de s'attaquer au problème de la dette.

Pour ce qui est des méthodes appliquées pour réduire le déficit budgétaire, je ferai un commentaire général. Ces dernières années, le moteur de la réduction du déficit budgétaire a été l'augmentation des recettes, et non la réduction des coûts. Cette augmentation des recettes a pris la forme d'impôts et elle est due à la récente hausse des dépenses de consommation.

Je trouve important de souligner que le déficit a pu être réduit en grande partie grâce à l'augmentation des recettes, car cela aura une incidence sur le type de planification que pourra envisager le gouvernement soit pour réduire le déficit budgétaire soit pour augmenter ses dépenses.

En ce qui concerne les dépenses de programme, le gouvernement devait manifestement se concentrer sur les plus importantes. Il n'y avait pas vraiment d'intérêt à remettre en cause des dépenses de programme mineures qui n'étaient pas susceptibles de rapporter beaucoup. Il fallait s'intéresser aux grosses dépenses, dans des secteurs comme la santé et l'éducation. C'est là que les dépenses devaient être réduites.

En ce qui concerne la planification des priorités, plutôt que de parler de programmes particuliers, je préférerais demander au comité d'envisager les choses d'un point de vue philosophique, si je peux m'exprimer ainsi, et de repartir à Ottawa, convaincu de la nécessité de mettre en place un programme de réduction de la dette, dans le cadre duquel le gouvernement fédéral pourra déterminer quelles ressources pourraient être utilisées à cette fin.

Cette dette est d'une ampleur tout à fait inacceptable, et équilibrer le budget n'améliorera aucunement la situation. Il faut, je pense, que nous mettions immédiatement en place un plan d'action. De fait, on devrait suggérer au ministre d'intégrer cela à la planification future des budgets.

Je considère que l'allégement des impôts est un objectif à long terme et que cela ne devrait pas constituer une part importante du pseudo dividende fiscal, tant et aussi longtemps que l'on n'aura pas commencé à mettre en oeuvre le programme de réduction de la dette. En outre, l'allégement des impôts va au-delà d'une simple réduction des niveaux d'imposition; cela soulève aussi la question de la réforme fiscale et celle de la comparabilité des charges fiscales assumées par les individus et les entreprises dans divers pays, de façon à établir le rôle des impôts en terme d'avantages ou de désavantages concurrentiels pour les entreprises. Selon moi, il faut envisager globalement le fardeau fiscal des particuliers et celui des entreprises.

• 1020

Enfin, je suis d'avis que l'augmentation des dépenses dont on entend de plus en plus parler doit être axée sur les priorités, et que les objectifs et les responsabilités soient clairement précisés. Nous ne voulons pas revenir au temps où le gouvernement investissait de l'argent dans certains programmes sans avoir une idée précise des avantages qui en découleraient. Permettez-moi de mentionner brièvement certains des programmes qui nous préoccupent particulièrement à cet égard.

Parmi eux figure le programme d'infrastructure.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Je regrette, monsieur O'Rourke, il va falloir que vous apportiez des précisions lorsqu'on passera à la période des questions. Vous avez utilisé vos cinq minutes. J'ai essayé de vous faire signe, mais vous ne me regardiez pas. Je n'ai donc pas pu vous prévenir qu'il ne vous restait qu'une minute. J'ai fait ce que j'ai pu.

Monsieur Reid, vous avez la parole pour cinq minutes.

M. Francis Reid (directeur général, Construction Association of Prince Edward Island): Je vous remercie, madame la présidente, et messieurs les membres du comité.

La Construction Association of Prince Edward Island, comme beaucoup de Canadiens, considère que pendant de nombreuses années, nous avons été très généreux, financièrement parlant, au Canada. Nous dépensions beaucoup plus d'argent que nous en percevions. Nous ne dépensions probablement pas très sagement et nous avons fini par être obligés de consacrer une part importante de l'argent des contribuables au paiement des intérêts sur nos dettes et notre déficit.

Il y a quelques années, un grand nombre d'entre nous nous sommes demandé si nous n'allions pas tomber dans le même piège que les Néo-Zélandais et si nous n'allions pas être obligés de recourir à des remèdes aussi draconiens.

Je pense que les Canadiens et leur gouvernement ont choisi la bonne voie pour s'attaquer au déficit budgétaire. Nous félicitons le gouvernement d'avoir réduit le déficit autant qu'il l'a fait. Il semble que les mesures qu'il a prises réussissent et nous espérons que cela se poursuivra.

Toutefois, nous avons le sentiment que la réduction des déficits budgétaires ou de la dette, aussi bénéfique soit-elle, n'est pas suffisante. Nous savons qu'il faut un remède draconien. J'ai été élevé dans un petit village et si l'on était un peu enrhumé ou si quelque chose n'allait pas, on vous faisait prendre un remède de cheval, mais qui faisait de l'effet. Je pense que c'est le genre de remède dont nous avons besoin. Il faut qu'il soit efficace. Nous ne devons pas nous contenter d'éliminer le déficit, il faut aussi réduire la dette.

Ce faisant, nous devons aussi, selon moi, prendre des mesures pour assainir l'économie. Je ne peux naturellement pas entrer dans tous les détails, mais parmi les secteurs que le gouvernement devrait prendre en considération pour construire une économie saine tout en réduisant la dette... Je considère que notre gouvernement a fait de gros efforts pour réduire le gaspillage et les dépenses inutiles. Mais il y a encore beaucoup à faire. J'encourage fortement le gouvernement à examiner les moyens de réduire le gaspillage et les dépenses inutiles.

Je n'entrerai pas dans les détails, mais si le gouvernement transfère les services d'un ministère dans une région qui n'est pas à plus d'une trentaine de milles, il ne me semble pas que cela ait beaucoup de sens, sinon peut-être pour faire plaisir à un député—qui peut en tirer profit—mais à mon avis, c'est là un des domaines où plus d'efforts se justifieraient.

L'Association canadienne de la construction, en tant qu'organisme de tutelle national, a recommandé que les travaux d'infrastructure qui ont été lancés soient examinés et améliorés, le cas échéant, afin que cela bénéficie à l'économie locale.

Le deuxième secteur qui nous intéresse, c'est le très mauvais état d'une grande partie de notre infrastructure. J'ignore les statistiques, mais il est probable qu'entre 25 et 30 p. 100 des ponts soient tellement délabrés que l'on devrait sans doute les condamner. Il faut les réparer si l'on veut une économie... pour pouvoir transporter les produits du marché aux points de vente.

Pour conclure, donc, je voudrais dire que nous ne devons pas nous contenter de réduire et d'éliminer notre déficit, mais que nous devons aussi réduire notre dette. Nous devons également nous abstenir d'introduire des allégements fiscaux tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas ramené la dette à un niveau acceptable.

Je vous remercie, madame la présidente.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Reid.

Monsieur Moorehead, vous avez la parole pour cinq minutes.

M. Terry Moorehead (trésorier, M.F. Schurman Co. Ltd.): Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité.

• 1025

Je viens du secteur des affaires. Je suis agent des finances chez M.F. Schurman Co. Ltd. et je suis aussi comptable agréé. Je vous dis cela pour vous mettre dans le contexte.

Je pense que le gouvernement devrait être géré de la même manière qu'un ménage ou une entreprise. Nous parlons de dividende budgétaire, mais nous n'en sommes même pas encore là. Nous devrions vraiment essayer de vivre selon nos moyens, de nous maintenir et de réduire le déficit.

Nous n'avons même pas encore balancé les livres pour l'exercice en cours et, pourtant, nous parlons du dividende budgétaire à partager. Je ne suis vraiment pas d'accord. Je pense que nous devons continuer à essayer de réduire le déficit.

Par exemple, j'ai un salaire et j'essaie de vivre selon mes moyens. Il m'arrive à l'occasion de ne pas le faire et je dépense parfois plus que je gagne en un mois. J'essaie d'économiser à la maison avec ma femme. Lorsque nous arrivons à nous rattraper, je ne me dis pas tant mieux, nous vivons selon nos moyens, nous allons pouvoir nous remettre à dépenser. Ce n'est pas comme cela que ça marche. Il faut essayer de faire ce qu'on peut avec le surplus pour payer ses dettes.

Les gens n'arrêtent pas de parler de déficit. Il a presque été ramené à zéro. Personne ne parle de notre dette de 600 milliards de dollars, et j'estime que nous devons sérieusement songer à la payer.

Aussi vrai que je suis assis ici, l'économie florissante des deux dernières années est l'une des raisons pour lesquelles le déficit a diminué aussi rapidement, et tout porte à croire que la tendance va se poursuivre pendant quelques années. Je pense vraiment que nous devrions mettre de l'argent de côté parce que je suis certain qu'il y aura une autre récession dans les années à venir, et nous savons tous ce qui s'est passé durant la dernière.

Nous avons traversé deux récessions depuis que je suis chez Schurman, et ce n'est pas très plaisant quand on pense aux compressions de personnel et aux mises à pied. Il y a encore bien des secteurs dans lesquels le gouvernement devrait songer à sabrer et je dirais même qu'il devrait mettre de l'ordre dans ses propres affaires.

Je peux vous donner comme exemple une situation que j'ai vécue il y a quelques années. J'ai voulu embaucher une jeune fille pour faire du travail de bureau pour notre entreprise et j'avais l'intention de lui verser un peu plus que le salaire minimum, ce que les entreprises privées ont tendance à faire. Elle m'a dit qu'elle pourrait travailler pendant dix ou douze semaines à ramasser les ordures sur la plage de Cavendish, qui est un employeur fédéral, après quoi elle pourrait prendre congé le reste de l'année et toucher des prestations d'assurance-chômage, ou d'assurance-emploi comme on les appelle maintenant, ce qui était mieux que ce que j'avais à lui offrir.

À mes yeux, il y a quelque chose qui cloche vraiment là-dedans. Notre salaire minimum est de 5,15 $ ou de 5,25 $. C'est ce qu'un étudiant pourrait s'attendre à gagner l'été. Si le même étudiant travaillait à temps partiel pour le gouvernement fédéral, il recevrait entre 11 $ et 16 $ l'heure. Il y a quelque chose qui cloche. Pourquoi, parce qu'on travaille pour le gouvernement, serait-on payé trois fois plus cher que dans le secteur privé?

Nous avions aussi une employée qui est allée travailler pour le bureau de la TPS à Summerside. Elle est partie en congé de maternité et, normalement, elle aurait eu droit à des prestations de maternité. J'ai entendu dire qu'elle a reçu en plus une partie de son salaire et touché ce qu'elle aurait eu si elle n'avait pas été en congé de maternité. Le secteur privé ne peut pas se permettre d'être aussi généreux et c'est pourquoi je dis que ça cloche.

Ce ne sont là que deux exemples.

Comme comptable, je dois vous dire quelques mots au sujet des taxes et des impôts. Je ne crois pas que nous devrions réduire les taux d'imposition et faire des remboursements fiscaux, mais je pense qu'il faudrait peut-être remettre les compressions en question. J'augmenterais considérablement les contributions aux régimes de pension. Au lieu de limiter les déductions aux REER, je pense qu'il faudrait songer sérieusement à augmenter le maximum déductible. Je trouve qu'il est beaucoup trop bas. Il devait être de 15 500 $ en 1995 et il demeure à 13 500 $ en 1997.

Comme quelqu'un l'a dit tout à l'heure, les déductions personnelles devraient être indexées. En 1985, elles ont été réduites et le gouvernement a dit qu'elles seraient indexées en fonction d'un taux d'inflation d'à peu près 3 p. 100. Il n'y a pas eu tellement d'inflation ces dernières années et, par conséquent, nos déductions personnelles sont demeurées très basses par comparaison à nos salaires. C'est une autre anomalie.

• 1030

La déduction accordée aux petites entreprises, qui les aide souvent à démarrer et à se maintenir à flot, est demeurée à 200 000 $ depuis 1971, année où la Loi de l'impôt sur le revenu a été adoptée sous sa nouvelle forme. Il serait temps de remédier à la situation pour vraiment aider les petites entreprises.

Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Moorehead.

Monsieur Perry, je crois savoir que vous vous ferez le porte-parole de l'association.

M. Roger Perry (secrétaire-directeur, P.E.I. Road Builders and Heavy Construction Association): Oui.

Bonjour, madame la présidente et mesdames et messieurs les membres du comité. Je suis Roger Perry, secrétaire-directeur de la Prince Edward Island Road Builders and Heavy Construction Association. Je suis accompagné de M. Blair MacLauchlan, président de l'Association.

Notre association représente des entrepreneurs qui travaillent à des projets de construction de routes et de construction lourde à l'Île-du-Prince-Édouard et dans d'autres régions des provinces de l'Atlantique. Nous représentons également des entreprises qui sont des fournisseurs de l'industrie de la construction routière, par exemple des entreprises pétrolières, des entreprises d'outillage, des fournisseurs de granulat pour la construction, des ingénieurs, des maisons d'experts-conseils, des banques, des cabinets d'experts-comptables et j'en passe, sans oublier les fournisseurs de tous les types de produits pétroliers, y compris l'asphalte coulé, le ciment Portland et d'autres produits liés à l'industrie de la construction de routes et de la construction lourde.

Je devrais avoir un titre ici: «La nécessité de maintenir l'équilibre entre la réduction de la dette et l'investissement dans des équipements d'infrastructure clés».

Il ne fait aucun mystère que l'économie du pays dépend de ses transports, ce qui veut dire, dans la plupart des cas, de l'excellence de son réseau routier. Je veux parler ici du transport des biens et des services ainsi que du grand public, soit des résidants ou des touristes qui utilisent les routes. Il est dommage que certains États fassent savoir aux camionneurs canadiens que leurs routes sont supérieures aux routes équivalentes au Canada.

C'est la même chose pour le tourisme. Des agences conseillent aux touristes et aux organisateurs de circuits en autocar d'éviter certaines provinces à cause de l'état de leurs routes. Cela nuit à de nombreux secteurs d'activité, d'où une perte de précieux dollars pour l'économie canadienne.

L'idée d'un programme routier national n'est pas nouvelle, et nous savons que de nombreux intervenants ont imploré le comité de repenser le financement de cette politique.

Le Canada est le seul pays moderne à ne pas avoir de programme routier national. La plupart des programmes de ce genre sont financés par des taxes reliées aux routes. La taxe sur les carburants est beaucoup plus élevée au Canada qu'aux États-Unis et dans d'autres pays qui, pourtant, en consacrent un pourcentage beaucoup plus élevé à l'amélioration de leurs réseaux routiers. Le gouvernement du Canada investit environ 4 p. 100 de cette taxe dans le réseau. Le reste sert au financement d'autres programmes.

Nous savons que le gouvernement n'aime pas l'idée de «consacrer» des fonds. Nous pensons qu'il devrait peut-être en «allouer» s'il préfère ce terme. Si la somme de 2 ¢ était prélevée sur la taxe de 13,5 ¢ sur les carburants pour le financement des routes, nous pourrions avoir un programme routier national durable. Un tel investissement créerait des emplois, augmenterait notre productivité et notre compétitivité, rendrait nos routes plus sûres et aiderait à unir notre pays.

Nous tenons à remercier le Comité permanent des finances de la Chambre des communes de nous avoir donné l'occasion d'exprimer nos vues sur ce que nous considérons comme des priorités.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Perry.

Nous aurons maintenant des périodes de questions de cinq minutes.

Il se pourrait que nous ayons un photographe au début de votre tour, monsieur Ritz. J'espère que cela ne vous dérange pas.

M. Gerry Ritz: Non.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Vous n'êtes pas obligé de poser si vous n'en avez pas envie.

Je vous présente mes excuses. Habituellement, nous ne laissons pas entrer les journalistes, mais je pense que la personne en question était pressée. Nous allons donc autoriser un photographe à venir rapidement prendre une photo, après quoi nous poursuivrons nos travaux.

Monsieur Ritz, j'espère que cela ne vous empêchera pas de vous concentrer. Vous avez cinq minutes.

M. Gerry Ritz: Merci, madame la présidente.

Je tiens à remercier tous ceux qui nous ont fait un exposé ce matin. Vous êtes tous très bien arrivés à vous faire comprendre.

La question qui m'est venue à l'esprit pendant que vous parliez est l'infrastructure. Monsieur O'Rourke, vous avez commencé à dire que vous n'étiez pas d'accord sur ce programme. M. Moorehead, le comptable, a peut-être un point de vue différent. Bien sûr, les gens de la construction voient les choses sous un jour différent. L'infrastructure cible a été mentionnée; j'approuve vraiment ce genre de programme.

J'aimerais avoir vos commentaires, messieurs, si vous le voulez bien.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur O'Rourke, je pense que la question s'adresse à vous, mais j'inviterais tous ceux qu'elle intéresse à y répondre.

M. Robert O'Rourke: Merci.

Tout d'abord, je ne m'oppose pas aux investissements dans l'infrastructure. Ils sont nécessaires. Je pense cependant qu'une définition plus claire des objectifs visés s'impose. Le gouvernement fédéral devrait prêcher l'exemple et insister pour que des normes soient adoptées en ce qui concerne les investissements dans l'infrastructure.

• 1035

Je pourrais peut-être vous donner un exemple de ce que j'essaie de vous dire. Parmi les investissements dans l'infrastructure qui ont été faits ces dernières années, il y a eu le financement de l'expansion des systèmes d'approvisionnement en eau, entre autres choses. Pourtant, le Canada a du retard sur de nombreux autres pays qui insistent sur l'importance des compteurs à eau, surtout si on s'intéresse à la conservation de l'eau. Il est impossible de conserver l'eau comme une ressource précieuse si en fait on ne la compte pas. Malheureusement, personne ne donne l'exemple ici en insistant pour que les investissements dans l'infrastructure dont les systèmes d'approvisionnement en eau et d'épuration des eaux usées, soient reliés à des objectifs à plus long terme comme la conservation, l'établissement de prix adéquats et ainsi de suite.

Je dirais que c'est la même chose pour d'autres investissements dans d'autres programmes, mais je vais laisser la parole aux autres.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Reid ou monsieur Perry, aviez-vous quelque chose à dire?

M. Francis Reid: Oui, j'aimerais faire une observation.

Je pense qu'en ce qui concerne l'industrie de la construction, et plus particulièrement l'Association de la construction, il ne fait aucun doute que les travaux d'infrastructure doivent avoir un but précis si nous voulons être sûrs d'en avoir pour notre argent. Par contre, si un pont ou une route est en train de se détériorer, il serait probablement—et certainement—beaucoup moins coûteux et plus efficace de faire des réparations sur-le-champ au lieu d'attendre qu'ils soient inutilisables. À ce moment-là, la réfection coûtera trois, quatre ou cinq fois plus cher que trois ou quatre années auparavant.

Il est logique, sur le plan économique, de dépenser maintenant pour réparer les ouvrages d'infrastructure, ce qui facilite le transport des biens, comme le disait M. Perry, vers les marchés de vente et profite non seulement à l'industrie, mais à tous ceux qui vendent et qui achètent. Je pense qu'il est très important que le gouvernement décide de ce qui doit être réparé, cherche à savoir quels seront les coûts et détermine comment tout cela va être payé.

M. Terry Moorehead: En bon comptable, je me demande si quelqu'un au gouvernement s'est déjà interrogé à ce sujet. Tout programme d'infrastructure comporte des coûts. Il comporte aussi certains avantages du fait qu'il crée de l'emploi pour des gens qui autrement auraient vraisemblablement touché des prestations d'assurance-chômage. Je me pose la question: Y a-t-il des avantages à tout cela ou faisons-nous tout simplement augmenter notre déficit? Je n'en sais trop rien.

M. Blair MacLauchlan (Président, P.E.I. Road Builders and Heavy Construction Association): J'aimerais d'abord dire quelques mots au sujet du programme d'infrastructure, si vous me le permettez, madame la présidente.

De bien des façons, le programme d'infrastructure a mis à profit la contribution fédérale mieux que tout ce que j'ai vu au cours des 20 ou 25 dernières années, en ce sens qu'il y a eu partage des coûts avec les provinces et les municipalités qui en ont chacune assumé un tiers. Dans bien des cas, il a fallu que la municipalité décide si elle pouvait réunir sa quote-part d'un tiers en imposant des frais d'utilisation et des taxes supplémentaires, ce qui a servi de filtre à la contribution des gouvernements fédéral et provincial. En fait, récemment, une collectivité a refusé la part du fédéral et de la province, parce qu'elle a jugé qu'à long terme le coût de l'entretien des installations qui auraient été fournies grâce au financement n'était pas un bon investissement.

Je pense que si cette approche avait été adoptée dès 1970, nous n'aurions pas eu autant de projets mal planifiés. Nous n'aurions pas gaspillé autant d'argent. Nous n'aurions pas aujourd'hui autant d'installations qui nous coûtent excessivement cher à entretenir sans vraiment rapporter. Je ne crois pas qu'il existe un meilleur programme pour analyser les coûts et les avantages, si je peux m'exprimer ainsi, des dépenses gouvernementales sans que des tierces parties comme les gouvernements fédéral et provinciaux aient à intervenir directement. De ce point de vue, je dirais que le programme a très bien fonctionné.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur MacLauchlan.

[Français]

Monsieur Perron, cinq minutes.

M. Gilles-A. Perron: J'aimerais m'adresser à vous en français.

• 1040

Il y a une seule manière de rester en affaires. C'est de faire des profits et surtout de ne pas perdre d'argent. Malheureusement, le gouvernement fait perdre de l'argent et il reste en affaires quand même. Je devrais même parler des gouvernements.

Donc, les deux seules manières de faire des profits en affaires et de rester en vie, c'est d'augmenter ses revenus et de couper ses dépenses. C'est une théorie simpliste que vous connaissez tous. Monsieur O'Rourke, j'aimerais faire une remarque sur votre rapport. Vous dites dans votre rapport

[Traduction]

qu'il n'y a pas tellement de moyens de venir à bout d'un déficit: le premier, augmenter les revenus; le deuxième, faire des compressions ou des gels dans les dépenses de programme. Je pense, mon ami, que vous en avez oublié un. Vous n'avez pas parlé d'une saine administration. Cela aussi fait partie des compressions.

M. Martin nous disait il y a quelques années qu'il réduirait de 19 p. 100 les dépenses du gouvernement. S'il les réduisait de 9 p. 100 seulement, il manquerait quelque chose—et il y a là beaucoup d'argent.

Dites-moi une chose, mon ami. Pensez-vous qu'il y a de la place pour réduire les dépenses?

[Français]

Y a-t-il de la place?

[Traduction]

Y a-t-il de la place pour donner plus de pouvoir au vérificateur général? Je vous pose la question parce qu'il vient nous dire chaque année qu'il n'y a rien à faire.

Une autre chose: Y a-t-il de la place dans ce gouvernement-ci, au gouvernement provincial et au palier municipal pour mettre en place des lois anti-déficit.

M. Robert O'Rourke: En réponse à cela, je dirais, si nous regardons vers l'avenir au lieu de regarder en arrière, du moins pour l'instant, que la planification devrait comporter à titre prioritaire un examen soigneux des avantages et des coûts associés au financement par le gouvernement fédéral d'un certain nombre de programmes, qu'il s'agisse de programmes d'infrastructure ou de transferts dans le domaine de l'éducation, de la santé et de l'aide sociale.

Ce que j'essaie de vous dire, c'est que ces choses doivent être administrées et doivent être planifiées. C'est essentiellement ce que je veux dire.

Je ne suis pas certain d'être en mesure de dire si oui ou non le gouvernement fédéral a fait ce qu'il devait faire de sorte que nous pouvons être assurés qu'il se situe là où il devrait se situer pour ce qui est de la gestion et de la prestation efficace des programmes, mais ce que je suggérerais, c'est qu'avant de commencer à parler d'augmenter les dépenses, nous définissions bien nos priorités concernant la planification. Sinon, ce que vous avez dit risque de se produire: que les nouveaux programmes ne seront pas mieux gérés que les anciens, d'où les déficits que nous avons connus.

Je ne sais pas si cela répond à votre question. Je m'intéresse davantage à ce qui va arriver au lieu de me demander si l'administration gouvernementale est aussi efficace qu'elle pourrait l'être. L'important pour moi, c'est que nous n'engagions pas de nouvelles dépenses sans avoir des buts et des objectifs clairs et définissables et sans avoir certaines mesures que nous pourrions utiliser pour déterminer si ces dollars sont dépensés à bon escient, s'ils sont utilisés de la manière qui convient le mieux.

M. Regis Duffy: Je pense que le gouvernement peut se payer le luxe d'attendre. Un des problèmes auxquels sont confrontés tous les gouvernements, c'est que jamais, de notre vivant, les gouvernements du Canada n'ont eu à réduire leurs effectifs. D'après mon expérience, c'est la première fois que des gouvernements doivent ainsi faire marche arrière. Aucun mécanisme n'a été prévu pour leur faciliter la tâche. Il y a la façon traditionnelle de faire, qui consiste à comprimer les dépenses mais il reste que le gouvernement peut se payer le luxe, même s'il doit réduire ses effectifs, de prendre dix ans pour examiner un programme de compression. Les gens du secteur privé ne peuvent pas se payer ce luxe. Ils doivent prendre une décision en six ou douze mois, ou pire, en trois mois. Le gouvernement, lui, peut prendre son temps. Cela devrait faciliter les compressions et il faudrait peut-être penser à un examen externe des ministères fédéraux qui ne fasse pas partie du processus politique, surtout parce que c'est une première pour nous tous.

• 1045

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Duffy.

Madame Vautour.

Mme Angela Vautour: Bonjour. Je vous remercie tous pour vos exposés. C'était très intéressant. Je tiens particulièrement à remercier M. Green pour son honnête présentation. C'est la première personne—de la classe moyenne je suppose ou de la classe moyenne de premier rang, et il est le premier...

M. John Eldon Green: Nous sommes bien représentés.

Mme Angela Vautour: Il est certainement le seul que j'ai entendu parler, ces deux dernières années soit comme activiste soit maintenant comme députée, des coupures et de leur impact réel. Il y en a qui ont été moins, ou qui n'ont pas été touchés du tout, par les coupures. Je suis très préoccupée par ce que j'entends, car, comme je l'ai dit hier, il y a une différence énorme entre le monde des affaires et ceux qui ont besoin de l'aide du gouvernement de la telle que vous la décrivez. La différence est énorme.

Je trouve très malheureux qu'aujourd'hui encore une fois—et je voudrais qu'on marque mes mots—sauf pour quelques personnes ici présentes, pour qui les choses paraissent différentes—que ce matin nous ayons presque uniquement des groupes sociaux, sauf que nous avons maintenant l'autre groupe. Je pense qu'il est très important de regrouper les deux pour voir ce qui se passe vraiment, parce que les préoccupations sont nombreuses.

J'ai appris avec consternation que le Globe and Mail avait parlé d'une baisse du salaire minimum. C'est ce que je dis depuis trois ans et demi. Mon mari travaille dans le secteur et je peux comprendre que ça fasse l'affaire du propriétaire d'une entreprise de construction ou d'une autre entreprise que le salaire minimum baisse.

Où se trouve exactement le juste équilibre ici? Est-ce que quelqu'un se préoccupe des gens qui n'ont aucun revenu du tout à cause de ces coupures?

Je crois que c'est M. Moorehead qui a dit qu'en période de crise dans une famille, on réduit les dépenses. J'ai été moi-même chef de famille monoparentale et, lorsque j'ai traversé une crise, j'ai essayé d'augmenter mes revenus. Je n'ai pas privé mon fils de déjeuner pour survivre. J'ai trouvé un moyen d'aller chercher plus d'argent. Je crois qu'il y a des façons de le faire, mais ce n'est pas ce que j'entends dire de ce côté-là. C'est ce que disent les groupes sociaux et M. Green ici. Est-ce que quelqu'un de votre côté peut me dire—et j'aimerais que M. Green me réponde s'il le veut—pourquoi nous ne choisissons pas d'augmenter nos revenus pour être certains que tout le monde dans ce pays survivra et que le salaire minimum ne baissera pas?

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): J'ai pris note de votre observation, madame Vautour, et nous avons des copies des exposés qui ont été présentés plus tôt ce matin, tout comme des copies de vos exposés seront mises à la disposition de tous nos auditeurs ou des groupes qui ont témoigné plus tôt. Nous pourrons poursuivre le dialogue et j'espère que vous prendrez une copie des quatre exposés de ce matin et de ceux de cet après-midi.

Monsieur Green.

• 1050

M. John Eldon Green: J'aurais un bref commentaire à faire à propos de la dette. Je ne suis pas un spécialiste. Je ne suis ni économiste ni comptable. Je ne crois pas la plupart d'entre eux, parce qu'ils ne sont jamais d'accord ensemble.

Pour ce qui est du déficit, je pense que nous nageons dedans. Il s'agit en partie d'une dette recyclée. Si les taux d'intérêt baissent, le déficit et la dette baisseront et les taux d'intérêt grimperont.

Il y a un livre très bien fait là-dessus, Shooting the Hippo, dans lequel Linda McQuaig explique bien des choses et raconte des histoires pas mal horribles qui proviennent des milieux financiers.

Tout ce que je veux dire, c'est qu'il nous faut arriver à mieux comprendre le déficit et la dette. Il y a très peu de gouvernements dans le monde qui n'ont ni déficit ni dette. Une partie du déficit est une dette recyclée, puisqu'il faut emprunter pour payer; il va diminuer à moins que nous augmentions les taux d'intérêt, ce qui va m'aider à avoir plus de travail.

M. Terry Moorehead: L'exemple d'une économie domestique que je vous ai donné est un exemple très naïf de la façon dont n'importe quel gouvernement, n'importe quelle entreprise ou n'importe quel ménage fonctionne. Vous parlez d'augmenter les revenus. La seule façon pour le gouvernement d'augmenter ses revenus est d'augmenter les impôts. Pour moi, ce serait la pire chose qu'il pourrait faire.

M. Blair MacLauchlan: D'après ce que j'ai vu, les Canadiens ne veulent pas que le gouvernement augmente ses revenus, du moins pas en augmentant les impôts et probablement pas en imposant trop d'autres frais d'utilisation. Par contre, nous arrivons à peine à atteindre l'objectif sur le plan du déficit, sans parler de la réduction de la dette.

Je pense que la réponse est claire: le gouvernement est trop présent. Nous nous attendons à ce qu'il gère une trop grande partie de notre économie. C'est le coût à payer pour cela. Nous devons nous demander à un moment donné si le moyen le plus efficace de fournir certains des services est vraiment de passer par un gouvernement fédéral.

J'ai participé de près aux travaux d'un comité provincial de la réforme gouvernementale il y a quelques années. Il est évident qu'il faut des fonctionnaires pour administrer et gérer une bonne partie des règlements et des lois qui existent, dans certains cas, depuis le début des temps. Je pense que nous devons examiner tout ce que le gouvernement fait et nous demander si nous en avons besoin, si c'est ce que nous voulons et si nous sommes prêts à payer en conséquence aujourd'hui, et que nous devons essayer aussi de planifier le système de manière à faire ressortir ce que nous voulons ou ce que nous ne voulons pas. Je crois que les gens ne savent pas toujours combien quelque chose coûte vraiment. En fait, même s'ils savent combien une chose coûte, ils ne pensent même pas qu'ils la payent de leur poche. Ils pensent que l'argent vient de la poche de quelqu'un d'autre.

Tant que nous n'aurons pas analysé chaque dépense et que nous ne nous serons pas demandé si elle est utile, nous n'aurons pas d'argent pour quoi que ce soit de nouveau ou pour quelque expansion que ce soit. Regardons la réalité en face; nous nous trouvons dans une situation difficile côté revenus et côté dépenses.

Merci.

Mme Crystal McDonald: J'essayais d'attirer votre attention sur le fait que c'est exactement ce que nous disons dans le secteur agricole. Si les usagers doivent payer des frais, ils doivent aussi avoir leur mot à dire. Nous devons nous demander si nous ne serions pas mieux servis, par exemple, par des laboratoires accrédités.

Les choses commencent à changer à l'Île-du-Prince-Édouard. On y a récemment entrepris un projet dans le cadre duquel on va envisager la privatisation de certains services d'inspection de la qualité des pommes de terre. C'est une chose qu'il faudra suivre de près.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame McDonald.

Madame Vautour, je tenais à vous préciser que je ne vous ai pas volé votre temps de parole avec mon intervention. La table ronde a duré huit minutes et j'en ai pris à peu près une.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Je vous remercie pour vos exposés réfléchis de ce matin. Je les ai trouvés très intéressants. Je suis un Canadien de l'Atlantique, de la Nouvelle-Écosse plus précisément. Je viens du secteur privé de sorte que je partage certaines de vos opinions.

J'ai trouvé que M. Moorehead avait pas mal raison quand il a parlé d'un système qui fait en réalité concurrence au secteur privé et qui favorise en fait la dépendance des travailleurs et les encourage à rejeter le secteur privé comme moyen d'améliorer leur condition. Au cours des 30 dernières années, les gouvernements fédéral et provinciaux ont collectivement puni l'initiative et récompensé la dépendance dans le Canada atlantique.

En punissant un type d'initiative et en en récompensant un autre, on finit par arriver à ses fins, c'est-à-dire que nous avons dans le Canada atlantique un cycle de dépendance qui nous a nuit plus qu'il nous a aidés.

• 1055

Monsieur Green, j'ai bien aimé vos observations à propos des 40 acres, parce que nous avons essayé en quatre ans de réparer une bonne partie des dommages causés sur une période de 30 ans, et je pense que nous sommes allés trop vite dans certains cas. Les coûts infligés dans les secteurs des soins de santé et de l'éducation, qui sont les outils dont les Canadiens de l'Atlantique ont besoin pour avoir accès à la libre entreprise, ont eu un effet dévastateur. En fait, nous allons en subir les conséquences pendant longtemps.

Monsieur Gorman, j'ai écouté attentivement vos commentaires à propos des primes d'assurance-emploi. On semble s'entendre à cette table pour dire que des réductions d'impôt à grande échelle ne sont pas nécessairement une bonne idée, mais on rejette aussi les augmentations de taxes. Ça fait plaisir à entendre.

Pour ce qui est des charges sociales, la plupart des économistes et des gens d'affaires semblent s'entendre à l'échelle internationale pour dire qu'elles tuent l'emploi. Plus élevées sont les charges sociales, plus il est difficile d'embaucher. Les rentrées d'argent sont limitées et il y a des limites à ce qu'un employeur peut payer. Résultat, il ne peut embaucher qu'un certain nombre d'employés. Les charges sociales nuisent à l'embauchage.

J'aimerais avoir vos idées là-dessus. M. Gorman a indiqué qu'il était en faveur d'une réduction des primes d'assurance-emploi, étant donné surtout l'augmentation de 11 milliards de dollars des primes versées au RPC, mais j'aimerais savoir ce que vous pensez d'une telle réduction. C'est une question très controversée à cause du surplus existant et de l'obstacle à l'emploi qu'elles constituent.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Monsieur Perry, je vous demanderais de répondre le premier.

Monsieur Brison, vous avez aussi mentionné M. Moorehead, M. Green et M. Gorman. Je ne sais pas s'ils ont des commentaires à faire.

M. Scott Brison: La question s'adresse à qui voudra faire des commentaires.

M. Roger Perry: Laissez-moi vous lire un extrait du résumé de la CCA. Elle s'oppose fortement à l'idée de laisser les surplus du compte d'assurance-emploi augmenter au point de dépasser de loin toute réserve raisonnable. Si la cotisation salariale qui est actuellement de 2,90 $ pour chaque tranche de 100 $ de paye passait à 2 $, cela réduirait grandement le fardeau fiscal et libérerait des capitaux qui pourraient être investis dans la création d'emplois.

D'après les estimations du gouvernement fédéral, le surplus cumulatif du fonds d'assurance-emploi atteindra 12,8 milliards de dollars à la fin de 1997 et 14 milliards de dollars en 1998. Malgré la réduction recommandée, il reste que des primes d'assurance-emploi excessivement élevées représentent une taxe sur les emplois et paralysent la croissance économique de même que la création d'emplois.

M. John Eldon Green: J'ai deux observations à faire. Il y a longtemps que j'entends dire que les charges salariales tuent l'emploi. Premièrement, les charges salariales sont les seules taxes que bien des entreprises payent. Deuxièmement, j'ai un assez grand nombre d'employeurs au comité de l'assurance-chômage et du travail saisonnier. Je leur ai demandé ce qui arriverait si la contribution à l'assurance-chômage diminuait et quel effet cela aurait sur leurs plans d'investissement, et ils m'ont répondu aucun.

Toute réduction des charges salariales vient s'ajouter directement aux bénéfices nets. Les coûts salariaux sont un facteur parmi tant d'autres qui entrent dans les décisions d'investissement et, au-dessus de tout cela, il y a la taxe d'assurance-chômage. Une réduction de cette taxe est une espèce de fiction pour les économistes. C'est comme dire «si tout cet argent pouvait être rassemblé, nous aurions des milliards de dollars à investir», mais, pour chacun, il s'ajouterait aux bénéfices nets, comme pour mon entreprise.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Green.

Monsieur Brison, vos cinq minutes sont écoulées.

Monsieur Gallaway, s'il vous plaît.

M. Roger Gallaway: Je tiens à vous dire à quel point la matinée a été intéressante pour nous. C'est le dernier arrêt de notre voyage d'étude à travers le pays.

Les mêmes thèmes reviennent souvent, et nombreux sont ceux qui sont revenus ce matin, mais vous devriez aussi savoir qu'il y a certaines différentes régionales, qui nous sont apparues ces derniers jours.

Je sais que vous n'étiez pas ici plus tôt ce matin.

M. Gorman a parlé de la nécessité de garder les travailleurs saisonniers et il a dit que l'économie est ici de nature à favoriser le travail saisonnier, le tourisme apparaissant à l'horizon comme un nouvel outil de la croissance économique. Mais plus tôt ce matin, des témoins nous ont dit que le tourisme n'était pas une bonne chose pour l'île, pour la province.

• 1100

En même temps, nous avons entendu des critiques à propos du surplus du fonds d'assurance-emploi. Je pense que les Canadiens s'entendent certainement pour dire que le surplus du fonds d'assurance-emploi a atteint une somme excessive alors que certains nous ont dit ce matin qu'il n'est pas juste que les travailleurs saisonniers n'aient pas accès au fonds d'assurance-emploi pendant une période aussi longue que par le passé.

Il m'est apparu évident ce matin que la nature de l'économie ici doit changer. Je ne sais pas au juste ce qui pourrait changer, mais voici la question que je pose à qui d'entre vous voudra répondre: que peut faire le gouvernement dans son budget—son prochain budget—pour modifier la nature de l'économie afin que les gens ne comptent plus uniquement sur les programmes sociaux ou les programmes d'assurance-emploi pour vivre? Comment fondamentalement changer la nature de l'économie ici pour qu'on dépende moins des programmes gouvernementaux et davantage de l'emploi? Comment changer la nature de l'emploi dans cette province-ci?

M. Jimmie Gorman: Je dois clarifier une chose ici. Lorsque j'ai parlé du programme d'assurance-emploi, je me suis rendu compte que j'avais utilisé le mot «surplus», et c'est un problème. C'est un problème tout en n'en étant pas un, mais il peut aussi causer du tort. Lorsque vous réduisez les paiements d'assurance-emploi—ce que je n'ai pas encore mentionné, soit dit en passant—pour les entreprises, vous les réduisez aussi pour les particuliers, qui se trouvent ainsi à avoir un peu plus d'argent dans leurs poches eux aussi. Je n'en ai pas parlé dans mon exposé de ce matin. Ce que j'ai dit, c'est que la disposition concernant l'intensité, qui réduit de 55 à 50 p. 100 le pourcentage pour les travailleurs saisonniers, devrait être éliminée.

L'autre partie de votre question consistait à savoir comment remettre les gens au travail. J'ai aussi mentionné dans mon exposé de ce matin—mais je ne sais pas si vous y étiez—que nous continuerons à avoir une saison touristique, une saison agricole, une saison de pêche et ainsi de suite. Cela doit continuer pour que la province survive, mais il y a ici de nombreuses entreprises... j'en dirige moi-même une qui emploie entre 6 et 20 personnes. Nous exportons de l'équipement partout dans le monde.

Cela dit, je pense qu'il y a de nouveaux secteurs d'emploi dans le Canada atlantique, notamment à l'Île-du-Prince-Édouard. Pour encourager les entreprises d'autres régions du Canada et d'ailleurs dans le monde à venir s'installer dans l'Atlantique, ou pour encourager de nouvelles entreprises à se lancer en affaires, il faut faire quelque chose du côté de l'imposition. En accordant des crédits d'impôt, on attire les entreprises rentables; en accordant des subventions, on risque parfois d'en attirer de moins rentables. Il arrive que les gens fassent quelque chose pour obtenir une subvention, mais s'il s'agit d'un crédit d'impôt, les entreprises intéressées se diront qu'elles vont faire des profits de sorte que ce sera une économie.

Je pense qu'il est ainsi possible d'inciter des gens à démarrer de nouvelles entreprises au Canada atlantique et d'atténuer la dépendance qui existe actuellement à l'égard d'Ottawa. Tout le monde au Canada atlantique et à Ottawa devrait avoir pour objectif d'atténuer cette dépendance pour que nous ne dépendions pas autant du gouvernement central. Ce n'est pas un objectif à court terme; c'est un objectif à long terme.

J'ai entendu certains des exposés de ce matin, y compris celui à propos des centres d'emploi. Nous avons aujourd'hui des centres d'emploi qui paient de très bons salaires. Je suis d'accord pour dire que ce n'est pas toujours le cas, mais les centres d'emploi technique, qui fournissent une expertise technique, offrent de bons salaires.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci de nous avoir précisé que vous étiez ici ce matin, parce que je pensais vous avoir vu. Monsieur MacLauchlan, vous avez le mot de la fin, après quoi chacun des participants aura le droit de faire une déclaration d'une minute.

M. Blair MacLauchlan: Je pense que les plus gros changements ces dernières années—et cela a encore une fois à voir avec l'infrastructure, surtout ici à l'Île-du-Prince-Édouard—ont été la construction du pont de la Confédération, le jumelage des routes du Nouveau-Brunswick et le jumelage des routes de la Nouvelle-Écosse. À mon avis, ces investissements dans l'infrastructure vont contribuer à l'établissement de règles du jeu plus équitables. Ils vont rapprocher notre région des grands centres de population, et j'espère qu'ils favoriseront la croissance à long terme, même si elle est lente à venir. Je pense que ce sont là les choses les plus importantes qui sont arrivées ces dernières années. C'est un investissement sain qui sera synonyme de croissance dans l'avenir.

• 1105

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, Monsieur MacLauchlan et monsieur Gallaway.

Cela termine notre ronde de questions et réponses. Chacun d'entre vous pourra prendre une minute—pas plus—pour faire une déclaration finale. Il peut s'agir d'informations supplémentaires, d'un plaidoyer ou d'un résumé de ce que vous avez déjà dit. Cette minute vous appartient, à vous de choisir.

Monsieur Green, la première minute est à vous.

M. John Eldon Green: J'aimerais tout simplement revenir sur le dernier commentaire que j'ai fait lorsque j'ai demandé au comité de présenter une vue améliorée du Canada atlantique. Je crois que la majorité des diplômés à la personnalité obsessionnelle se retrouvent à Ottawa où ils rédigent des politiques et des manuels de programmes destinés à être utilisés à l'échelle du pays. Tout le monde doit entrer dans le moule.

Il n'est pas nécessaire d'avoir un moule. Les pays sont différents, les provinces sont différentes, et les régions le sont elles aussi. Notre région est différente. Nous ne sommes pas des mendiants, comme le Fraser Institute aime bien nous décrire. Nous avons des industries très solides qui ont le malheur d'être saisonnières. Nous sommes aussi différents à notre façon que le Québec l'est à la sienne. J'aimerais qu'on en tienne compte dans les politiques et les programmes nationaux.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Green.

Madame McDonald.

Mme Crystal McDonald: Merci encore une fois de nous avoir invités. Je vous souhaite un bon voyage de retour et j'espère que l'expérience aura été utile pour vous.

J'aurais une critique à formuler et elle concerne le manque de temps. M. Green a parlé des 40 acres qu'il faut pour faire des changements, et nous n'avons droit qu'à cinq minutes plus une autre pour faire connaître nos vues. Il nous a fallu beaucoup de temps pour les mettre sur papier et nous devons essayer en si peu de temps de bien...

Il y a des préoccupations ici, et certaines bonnes choses sont survenues. Le fonds CARD a été établi. Pour ce qui est de l'agriculture, des progrès sont en cours, mais certains succès ont aussi été enregistrés. Nous aimerions qu'il continue à en être ainsi après le délai de 1999.

Je sais que les problèmes posés par l'assurance-emploi ne sont pas faciles à corriger. Certains changements ont été apportés, ce qui a tout de suite fait dire aux agriculteurs: «Vous ne pouvez pas faire ça, parce que personne ne voudra plus travailler pour nous.» Il faut donc tenir compte du fait que nous sommes une industrie saisonnière et que nous avons besoin de travailleurs saisonniers. Il doit bien y avoir des moyens d'inciter ces gens à continuer à travailler dans le secteur de l'agriculture. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, madame McDonald.

Monsieur Duffy.

M. Regis Duffy: Merci, madame la présidente. Pour répondre à la dernière question, je dirais que ce qui a changé à l'échelle du pays, et à l'échelle du monde, ce sont les outils d'information. Certains outils devraient nous permettre aujourd'hui de changer des choses au Canada atlantique.

Il aurait été illogique pour le bureau central de la Banque du Canada de s'installer au centre-ville de Charlottetown il y a 30 ans, mais aujourd'hui, peu importe qu'il soit situé au centre-ville de Charlottetown ou au centre-ville d'Ottawa. Étant donné la capacité de diffusion de l'information partout dans le monde de nos jours, les gens n'ont pas à être centralisés. Il y a là un message pour le gouvernement; vous pouvez vous décentraliser.

Le gouvernement devrait aussi encourager les banques et les compagnies d'assurance... il n'y a aucune raison aujourd'hui pour qu'elles soient toutes à Montréal et à Toronto. Nous avons peut-être besoin de stimulants; une sensibilisation s'impose peut-être pour que certaines de ces institutions déménagent dans une partie différente du pays. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur Duffy.

Monsieur Gorman.

M. Jimmie Gorman: Merci. Il y a du vrai dans ce que M. Duffy vient de dire. De la façon dont l'information circule, nous pouvons certainement gérer n'importe quelle entreprise à partir du Canada atlantique. Je pense que c'est le message qu'il faut diffuser, et il faudrait l'appuyer par les moyens que j'ai proposés, comme les crédits d'impôt.

Je crois également que nous devons réinvestir dans la santé et l'éducation. C'est la pierre angulaire de notre pays. Il faut s'occuper de ces secteurs. Je trouve alarmant que des gens proposent que nous relevions le plafond des REER alors même que nous ne pouvons pas donner une chance aux gens qui font 10 000 $ par année. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup monsieur Gorman.

Monsieur O'Rourke.

M. Robert O'Rourke: Merci, madame la présidente. J'ai seulement un bref commentaire à faire à propos de certaines choses que Mme Vautour et M. Gallaway ont dites, notamment au sujet de la santé et de l'aide sociale, et au sujet aussi des gagne-petit. Par la même occasion, comment s'attaquer aux disparités qui existent dans cette région, surtout en ce qui a trait aux différences au niveau des programmes?

• 1110

Je dirais que le problème concerne le traitement différent réservé aux entreprises et aux particuliers, et c'est peut-être là d'ailleurs qu'il faut aussi chercher la solution. Nous devrions adopter des programmes différents selon qu'ils s'adressent aux entreprises ou aux particuliers. Pour ce qui est du développement, tout est différent... Il n'y a pas de coordination, si je peux dire, entre les types de programmes d'aide et les transferts que nous avons et la notion de développement régional. Si nous parvenons à les coordonner, nous arriverons peut-être à rapprocher les gens et à améliorer leur sort, et cela s'applique aussi aux grosses entreprises, tout en mettant la région sur la voie du développement économique dont elle a besoin, je pense. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur O'Rourke.

Monsieur Reid.

M. Francis Reid: Merci, madame la présidente. Tout d'abord j'aimerais vous remercier ainsi que le comité de nous avoir donné l'occasion de vous faire un exposé. À mon avis, il est très important que le gouvernement vienne entendre ce que les gens ont à dire. Vous pouvez obtenir beaucoup plus d'information si vous vous rendez dans la cuisine du propriétaire d'une maison au lieu de l'inviter à venir vous rencontrer à Ottawa.

Cela dit, je voudrais juste faire un commentaire. Je suis persuadé que dans vos audiences un peu partout au pays vous avez entendu bien des points de vue différents, et je pense que c'est sain. Je me souviens d'une petite discussion et d'un gars qui demandait à l'autre pourquoi ils avaient un point de vue différent. L'autre lui a dit répondu que si on pensait tous de la même façon, on voudrait tous la même femme.

Des voix: Bravo.

M. Francis Reid: Donc, il est probablement sain d'avoir des points de vue différents.

Permettez-moi de résumer en disant que la Construction Association of Prince Edward Island proposerait au gouvernement d'éliminer le déficit et de réduire la dette pour qu'elle représente un pourcentage acceptable du PIB tout en bâtissant une économie forte pour les Canadiens.

Cela dit, madame la présidente, je vous remercie infiniment. J'ai été heureux de vous rencontrer.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Je ne suis pas sûre d'avoir bien compris. Nous invitez-vous à dîner chez vous?

M. Francis Reid: Oui, mais il y a une petite somme à débourser, des frais d'utilisation.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, nous avons tous reçu 5 $ pour dîner.

Monsieur Moorehead, vous avez une minute vous aussi.

M. Terry Moorehead: Rien n'est gratuit en ce bas monde.

Je vais me contenter de répéter ce que j'ai dit tout à l'heure. Je pense que le dividende budgétaire est un bénéfice net. Nous n'avons même pas encore équilibré le budget. Il est encore beaucoup trop tôt pour commencer à dépenser de nouveau. Nous devons nous rappeler que le déficit n'a rien à voir avec la dette. Nous devons tenir les politiciens en laisse. Ils ont hâte de se mettre à dépenser et de bien paraître. Nous devons les en empêcher.

Pour ce qui est du fonds d'assurance-emploi, je suis probablement d'accord pour dire que les travailleurs saisonniers, surtout de cette province-ci et du Nouveau-Brunswick, ont besoin de beaucoup d'aide, mais il doit y avoir un système autre que l'assurance-emploi pour leur venir en aide. Je pense que le système d'assurance-emploi tel qu'il existe aujourd'hui a besoin d'un bon ménage et qu'il faudra avoir le courage politique de le faire. Je pense que nous savons tous qu'il fait l'objet d'énormes abus. Merci.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Moorehead.

Monsieur Perry, et ce sera ensuite au tour de M. MacLauchlan.

M. Roger Perry: Je vais ajouter quelques mots à ce que Blair a dit au sujet de l'ouverture du pont de la Confédération. Le tourisme a augmenté de 30 p. 100 cette année, et je pense que cette augmentation est en bonne partie attribuable au pont. Nous sommes la seule province du Canada où il n'existe pas de routes à quatre voies et nous savons que chaque véhicule qui vient ici doit passer par la Nouvelle-Écosse ou le Nouveau-Brunswick pour se rendre à l'Île-du-Prince-Édouard. Ces deux provinces s'activent à jumeler leurs routes et nous espérons que si une politique routière nationale finit par être adoptée, elle nous aidera à financer le jumelage de la transcanadienne entre Charlottetown et le pont de la Confédération.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci, monsieur Perry.

Monsieur MacLauchlan.

M. Blair MacLauchlan: J'aimerais vous remercier, comme d'autres l'ont fait, d'être venus à l'Île-du-Prince-Édouard. Je pense qu'il est bon que vous sortiez d'Ottawa et de vos provinces respectives pour parcourir le pays et entendre ce que les gens ont à dire à l'échelle locale. J'espère que vos réunions ont été informatives et que votre temps a été bien utilisé. Nous allons vraisemblablement voir le fruit de vos efforts.

• 1115

J'ai l'impression que Paul Martin est un des seuls à s'acharner à réduire le déficit et à éliminer la dette. Le reste des libéraux—je ne connais pas autant l'opposition—ont l'air de se demander ce qu'ils vont faire de tout cet argent ou ce que nous allons faire maintenant que nous avons presque atteint l'objectif. Je dis cela parce que j'ai personnellement l'impression que nous allons un peu trop vite en affaires.

Je veux parler de ce que nous allons faire si nous éliminons le déficit un peu plus tôt. Je pense que nous devons continuer dans la même voie. Nous devons éliminer non seulement le déficit, mais aussi, graduellement, la dette.

Pour ce qui est de l'élimination de la dette, nous devons également envisager d'autres investissements productifs entre-temps. La dette engendre des coûts, mais les investissements comportent aussi des avantages. Il faudra arriver à trouver le juste milieu et nous n'aurons pas nécessairement à renoncer à tout nouvel investissement. Si de nouveaux investissements devaient comporter un taux de rendement qui excède le coût du remboursement de la dette, alors je pense que nous devrions investir. Mais si leur coût est égal ou supérieur au coût du remboursement de la dette, alors je pense que nous devrions réduire la dette.

C'est une décision de gestion. Nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir dans nos livres des sommes qui ne sont pas productives. Par contre, nous ne pouvons pas nous permettre de ne pas profiter d'investissements productifs dont le rendement serait supérieur au coût du remboursement de la dette.

La vice-présidente (Mme Paddy Torsney): Merci beaucoup, monsieur MacLauchlan.

Chers collègues et témoins, je vous remercie beaucoup pour une réunion aussi productive.

Assurez-vous d'avoir en main une copie de la déclaration du ministre à propos de nos priorités et du cadre de la consultation. Si vous n'en avez pas déjà une, servez-vous. Il y en a sur la table.

Je vous encourage aussi, si vous n'en avez pas eu la chance, de lire les propositions qui nous ont été remises ce matin si vous êtes intéressés à revenir cet après-midi pour nous entendre.

Le comité commencera probablement à rédiger son rapport le 7 novembre. Si vous avez des observations supplémentaires, vous pouvez nous les envoyer et nous veillerons à ce qu'elles fassent partie du document. Chacun des mémoires que vous nous avez remis sera examiné très soigneusement.

Pour en revenir à ce que vous avez dit, madame McDonald, à propos des délais, il y a bien des façons d'exposer les points plus en détail si quelque chose manque.

Si une idée vous a frappés ce matin, si vous lisez un article intéressant dans le journal ou si vous entendez parler de quelque chose et aimeriez faire connaître vos commentaires, je vous encourage à nous les envoyer. C'est certainement dans la diversité des vues que nous allons trouver la meilleure solution.

Aussi, pour tous ceux que les changements au RPC intéressent, le comité examinera le projet de loi dont la Chambre des communes a été saisie à partir du 28 octobre et je crois que notre rapport au ministre... Nous allons commencer à rédiger quelque chose autour du 17 novembre. Si vous pouviez nous faire parvenir vos mémoires d'ici là, ce serait formidable. N'oubliez pas, il ne vous en coûte rien pour écrire à votre député, ne manquez donc pas cette chance. Je suppose que quelqu'un doit bien payer quelque part, mais c'est encore gratuit pour les contribuables. J'espère que c'est un bon investissement.

Chers collègues, je tiens à vous rappeler que nous devons être de retour à 13 h pour entendre notre dernier groupe. Nous n'avons pas beaucoup de temps.

La séance est levée.