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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 27 avril 1998

• 1032

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Comme vous le savez, nous étudions le projet de loi C-36, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget de 1998 déposé au Parlement le 24 février 1998.

Les témoins de ce matin vont surtout nous parler des parties 1, 5 et 10 du projet de loi, et d'après la liste que j'ai sous les yeux, nous devrions entendre la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants, représentée par M. Brad Lavigne, le président, et Jennifer Story, la vice-présidente.

Bienvenue, madame Story et monsieur Lavigne.

Nous entendrons ensuite l'Alliance canadienne des associations étudiantes: son président, M. Hoops Harrison, et la directrice régionale pour le Québec, Mme Lisa Phipps.

Nous allons également entendre

[Français]

la Fédération étudiante universitaire du Québec, le vice-président, Pascal Bérubé

[Traduction]

et le vice-président sortant, Atïm Léon Germain.

Bienvenue à tous. Nous nous faisons un plaisir de pouvoir vous entendre. Comme vous le savez, vous avez environ dix minutes pour faire votre déclaration, après quoi il y aura la période des questions et réponses.

Nous passons d'abord la parole à M. Hoops Harrison et Mme Phipps.

[Français]

Mme Lisa Phipps (directrice régionale du Québec, Alliance canadienne des associations étudiantes): Merci, monsieur le président.

Je m'appelle Lisa Phipps et je suis directrice régionale du Québec de l'Alliance canadienne des associations étudiantes et vice-présidente des Affaires externes de l'Association étudiante de l'Université McGill.

Permettez-moi d'abord de vous présenter mon collègue, Hoops Harrison, qui est le directeur national de l'Alliance.

[Traduction]

M. Richard (Hoops) Harrison (directeur national, Alliance canadienne des associations étudiantes): Merci beaucoup, monsieur le président, mesdames et messieurs du comité, chers collègues témoins. Nous allons être brefs ce matin, pour pouvoir surtout participer ensuite au débat questions-réponses. Je pense que c'est surtout cela qui nous intéresse les uns et les autres aujourd'hui.

• 1035

Tout d'abord, nous remercions le gouvernement canadien pour son budget très favorable aux étudiantes. On peut toujours apporter quelques améliorations aux priorités du gouvernement, mais l'accent qui est mis cette année sur l'apprentissage et l'enseignement, et surtout sur la question étudiante, correspond au voeu de la plupart de nos membres.

En ce qui concerne ce qui nous intéresse plus particulièrement aujourd'hui, le projet de loi C-36, nous avons été heureux de constater que le comité et le gouvernement nous ont écoutés. Je ne sais pas si cela est l'oeuvre du Comité des finances, où nous avions comparu peu de temps avant que le budget ne soit annoncé, ou si c'est le fait de nos conversations avec certains ministères et certaines administrations, mais le fait que l'on réserve un poste d'administrateur à un étudiant à la fondation des bourses du millénaire est de bon augure.

À cet égard, nous voyons qu'il y a des dispositions du projet de loi C-36 qui font une place à la notion de besoin, ce qui était effectivement notre priorité à propos de cette fondation des bourses du millénaire. C'est-à-dire que les bourses doivent être attribuées surtout en fonction des besoins de l'étudiant plutôt qu'en fonction du critère du mérite.

Nous avons quelques recommandations à vous faire, qui seront brèves, puisque d'après votre greffier vous attendez quelque 90 témoins pour ce projet de loi, si bien que nous allons tout faire pour être concis.

Nos cinq recommandations portent de façon claire sur des questions de libellé, des ajouts ou amendements à certaines dispositions, mais pendant la période des questions et réponses nous pourrons nous attarder sur le détail de certaines questions.

Sans entrer dans le détail pour le moment, et je pense par exemple à la question de notre représentation aux conseils des gouverneurs des universités, ou même aux commissions du financement des universités au sein des gouvernements provinciaux, le mandat des représentants étudiants est souvent plus court que la normale, car ceux-ci sont souvent très peu de temps dans un département donné, et passent ensuite à une autre activité, ce qui fait que nous recommandons pour le mandat du représentant étudiant à la fondation des bourses du millénaire que celui-ci soit fixé à trois ans maximum.

Deuxièmement, nous avons plusieurs questions à poser sur la façon dont ce ou ces représentants vont être choisis, puisque l'on parle d'un minimum d'un étudiant. Cela nous préoccupe. Celui-ci devrait être aussi représentatif et qualifié que possible; voilà pourquoi nous voudrions ajouter quelques sous-alinéas à l'alinéa 8(2)b). Vous trouverez cela dans notre mémoire.

D'après le projet de loi C-36, par ailleurs, le conseil d'administration doit avoir une connaissance générale de l'enseignement supérieur et des questions d'apprentissage, mais également de tout ce qui entoure la question des finances étudiantes, puisque c'est bien pour cela que la fondation des bourses du millénaire a été créée. C'est bien la crise financière du monde étudiant ces dernières années qui est à l'origine de ce projet. Pour que la fondation puisse traiter des difficultés que nous connaissons, elle devra bien connaître le domaine.

Avant de passer la parole à Lisa, il y a une dernière chose que j'aimerais aborder, et qui concerne le plafond de 15 000 $ par étudiant en moyenne, soit 3 000 $ par an, et à ce sujet nous pensons qu'il est préférable que l'étudiant puisse avoir droit aux bourses du millénaire pendant cinq ans plutôt que quatre, non seulement parce que la moyenne de temps nécessaire aux étudiants pour obtenir leur diplôme est maintenant de cinq ans, mais également parce que cinq fois 3 000 $ font effectivement 15 000 $. D'une certaine manière cela tombe juste.

En effet, ceux qui ont le plus besoin d'aide financière sont également ceux qui font les études les plus longues, puisque du fait d'un travail à temps partiel ils choisissent un programme allégé; or ce sont précisément ces étudiants qui seront probablement les premiers bénéficiaires de ces bourses.

Mme Lisa Phipps: Enfin, l'alliance recommande que la fondation ait la possibilité, là où cela semble opportun, d'accorder des bourses de réduction de l'endettement de l'étudiant, et cela, même après sa sortie de l'université. Notre recommandation est la conséquence de l'article 28, selon lequel les bourses doivent être un complément des programmes provinciaux.

Dans le cas du Québec, par exemple, où il y a déjà un système bien rodé de bourses d'études, la fondation devrait remplir son mandat, tel qu'il est défini au paragraphe 5(1), en accordant après coup des bourses qui devraient permettre à l'étudiant de rembourser la dette contractée au cours des études, ce qui viendrait s'ajouter aux bourses d'études à proprement parler. Cela permettra effectivement d'ouvrir les portes de l'université à un plus grand nombre de candidats, la crainte d'un endettement trop lourd étant très souvent un facteur de dissuasion pour ceux qui voudraient faire des études suivies.

Un allégement de l'endettement après la fin des études est une incitation à aller jusqu'à l'obtention du diplôme, ou du certificat de fin de programme. Cette recommandation nous tient à coeur, puisqu'elle devrait normalement éviter les chevauchements; nous pensons particulièrement au cas du Québec.

M. Hoops Harrison: Merci beaucoup. Nous attendons vos questions avec intérêt.

Le président: Merci pour votre exposé intéressant.

Monsieur Lavigne.

• 1040

M. Brad Lavigne (président national, Fédération canadienne des étudiantes et étudiants): Merci.

Je remercie d'abord le comité de nous avoir invités à présenter nos commentaires sur les dispositions du budget.

Comme le savent les membres du comité, nous sommes intervenus au moment des consultations prébudgétaires de l'automne. À l'époque, nous avons insisté sur un certain nombre de points précis, et plus particulièrement sur les difficultés de nos membres découlant des budgets précédents.

À ce titre citons les frais d'inscription et de scolarité, qui atteignent des sommets astronomiques, le sous-financement des collèges et universités, les salles de classe surchargées, au point que certains étudiants ne trouvent pas de place assise, la fermeture de certains départements, l'endettement étudiant à la fin des études, et la performance déplorable du pays en matière de chômage des jeunes et des étudiants.

Aujourd'hui nous allons nous attarder sur un aspect plus particulier du projet de loi qui concerne la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire. Notre commentaire s'inscrit dans le cadre plus général d'une analyse globale de l'évolution des politiques fédérales en matière d'enseignement supérieur.

Ce budget n'est pas isolé. Il est important de se reporter aux budgets précédents, ainsi qu'à ce que nous attendons des budgets de demain, si l'on veut pouvoir garantir à tous les Canadiens un enseignement supérieur auquel ils puissent avoir accès.

Depuis 1993 environ, 2,9 milliards de dollars ont été retirés des transferts aux provinces pour l'enseignement supérieur. De plus, on a amputé de milliards de dollars les budgets des programmes de formation des collèges communautaires, pour les étudiants et les Canadiens qui veulent se recycler.

À la suite de ces décisions...

[Note de la rédaction: Difficultés techniques]... 50 p. 100 depuis 1993, et la moyenne de l'endettement à l'obtention du diplôme a doublé environ, passant de 13 000 $ environ à 25 000 $ cette année. Pendant toute cette période les infrastructures se sont détériorées, alors que par ailleurs les frais de scolarité augmentaient. Les universités et collèges, et les provinces, demandent alors aux étudiants de combler la différence, mais cela ne suffit pas. Des programmes entiers sont supprimés, et les programmes de formation professionnelle sont offerts sur une base de recouvrement des coûts, ou sont privatisés. Les bibliothèques sont de moins en moins à jour, et largement insuffisantes. Les salles de classe sont surchargées, les immeubles et édifices sont délabrés et les normes ne sont pas respectées.

Comme le gouvernement fédéral réduisait son intervention, les provinces et les établissements ont encore une fois fait appel à nous pour compenser leur manque à percevoir, de sorte que de plus en plus d'étudiants ont dû s'endetter davantage.

Je dirais que depuis un an ou deux, nos membres dans tout le Canada ont parfaitement réussi à mettre en exergue la difficulté qu'il y avait pour eux à faire de l'accessibilité et de l'endettement des étudiants des priorités de premier plan. C'est dans ce contexte d'ailleurs que nous regardons le fonds des bourses du millénaire et d'autres dispositions du projet de loi.

À nos yeux, ce budget est le parfait exemple d'une tendance qui a désormais cours dans les politiques de l'État concernant les études supérieures, en l'occurrence une importance moindre accordée au financement du système, les pouvoirs publics s'efforçant de faire l'appoint en réorientant les transferts financiers vers les particuliers. Il s'agit là d'une tendance très dangereuse, en ce sens que toute une série d'initiatives sont prises à l'emporte-pièce pour tenter précisément d'assurer la soudure dans le système tout entier.

C'est une tendance qui nous inquiète beaucoup, pour deux raisons surtout. D'abord, elle compromet l'universalité et l'accessibilité. En second lieu, dans le cadre du processus décisionnel à deux paliers, le palier fédéral et le palier provincial, il est relativement simple pour le deuxième ordre de gouvernement, les provinces, de gruger ou de réduire radicalement les prestations que le gouvernement fédéral verse aux particuliers par voie de transfert direct.

Les frais de scolarité étant très élevés, nous constatons en fait un véritable virage qui affecte tout le monde. Les frais de scolarité augmentent, et pourtant la réaction du palier fédéral est molle et morcelée, ciblant certaines catégories et certaines personnes. Ce qui appelle alors la question: pourquoi pas tout le monde?

C'est donc une tendance assez inquiétante, une tendance qui s'est d'ailleurs développée et bien ancrée, nous l'avons vu, aux États-Unis. C'est également quelque chose que nos membres rejettent catégoriquement.

S'agissant des détails du fonds des bourses du millénaire, les critères d'admissibilité et la participation des étudiants sont les deux éléments sur lesquels j'aimerais axer mon propos aujourd'hui dans le droit fil du projet de loi C-36.

Ce projet de loi dit en substance:

    5.(1) [...] la fondation a pour mission d'accorder des bourses d'études à des étudiants qui ont besoin d'aide financière et qui font la preuve de leur mérite.

Lors de nos comparutions et des rencontres individuelles que nous avons eues depuis quelques mois avec les fonctionnaires, nous avons toujours vigoureusement défendu la notion que c'est la condition des ressources qui doit être le critère exclusif ou déterminant pour l'obtention d'une bourse.

• 1045

Il n'existe actuellement au plan fédéral aucune infrastructure qui permettrait une évaluation vraiment adéquate du mérite, et j'oserais même dire que ces mécanismes sont extrêmement rares au plan provincial également. Il existe certes dans le cadre du régime fédéral et provincial de prêts aux étudiants un critère comme celui-là, de même qu'au plan provincial, lorsque cela existe, dans le cas des prêts-bourses, mais il n'existe en revanche aucune infrastructure permettant d'évaluer le mérite.

En second lieu, nous doutons du bien-fondé de la création d'un tel fonds sur le plan général. En effet, pourquoi instituer un programme par lequel une fondation serait financée au départ par des fonds publics, mais devrait réunir ensuite des capitaux privés? Qui va donc nous faire concurrence lorsqu'il s'agira d'aller chercher ces capitaux privés? Va-t-il y avoir un financement accru du secteur privé pour des bourses qui existent déjà? Nous ne pensons pas que la création du fonds des bourses du millénaire va ouvrir de nouvelles potentialités de la part du secteur privé.

Par ailleurs, à certains égards, lorsque nous pensons au conseil et à ces gens qui vont devoir prendre les décisions, nous percevons le ferment de quelque chose qui pourrait fort bien devenir un conflit d'intérêts. C'est en revanche quelque chose qui pourrait être rectifié dans le cadre du projet de loi. En effet, si les membres du conseil du fonds des bourses du millénaire se voient confier deux objectifs ou deux mandats, il est certain que le premier consiste à réunir des concours financiers extérieurs et le second est de redistribuer cet argent aux étudiants nécessiteux.

Si nous regardons à titre d'exemple ce qui se passe déjà en Ontario dans le cas du fonds étudiant—le mémoire expose cela de façon plus détaillée, mais je vais me contenter d'en dire quelques mots, après quoi je passerai au point suivant—nous constatons déjà l'apparition de certains conflits. En substance, ce fonds étudiant est ainsi fait que les établissements d'enseignement supérieur, collèges et universités, sollicitent le concours financier du secteur privé, sociétés et entreprises. Ce qui se produit, c'est que, même s'il repose sur un critère aussi vague que ce que nous trouvons dans le projet de loi dans le cas du fonds des bourses du millénaire, il commence à y avoir une certaine concurrence dans les milieux universitaires quant au choix du critère prédominant, en l'occurrence le mérite ou la situation financière.

En substance, l'argument repose surtout sur le fait que les entreprises aimeraient beaucoup que certaines bourses bien ciblées soient attribuées à certains endroits. Bien souvent, elles ne veulent pas nécessairement que l'argent aille forcément aux plus nécessiteux; elles préféreraient au contraire qu'il aille aux meilleurs. D'où la contradiction: devons-nous prendre les plus pauvres parmi les meilleurs ou les meilleurs parmi les pauvres? Je pense qu'il s'agit là d'une contradiction que nous pourrions résoudre avec le gouvernement afin de...

Pour terminer, s'agissant de la représentation minimum des étudiants au conseil, j'estime qu'il est fondamental que cette représentation, quelle qu'elle soit, soit supérieure à un quinzième. La population estudiantine est aussi diversifiée que le sont les besoins des étudiants, et le conseil de la fondation des bourses du millénaire devrait en être le reflet. La Fédération s'engage à travailler avec le gouvernement afin qu'un mécanisme puisse être créé de manière à respecter précisément cette diversité. Un représentant sur 15 est un niveau de représentation qui ne permettra pas d'atteindre cet objectif.

Je vous remercie, monsieur le président.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Lavigne et madame Story.

[Français]

Les prochains témoins seront M. Germain et M. Bérubé, qui représentent la Fédération étudiante universitaire du Québec. À vous la parole.

M. Atïm Léon Germain (vice-président sortant, Fédération étudiante universitaire du Québec): Merci, monsieur le président. Étant donné que nous avons peu de temps et que nous avons une longue présentation, je vais l'écourter et aller au principal.

J'aimerais cependant vous remercier, vous et vos collègues, de votre généreuse invitation et rappeler que la FEUQ est une organisation qui regroupe au Québec plus de 135 000 étudiants universitaires. Elle est établie depuis 1990 et elle a pour mandat de défendre essentiellement les droits et intérêts des étudiants auprès des intervenants du domaine de l'éducation ainsi que des gouvernements.

Après cette très courte présentation, je vais aller directement aux choses plus concrètes. Je signalerai à l'assemblée que nous allons faire une présentation en deux parties: une première sur la partie du projet de loi qui concerne la Fondation des bourses du millénaire et une deuxième sur la partie du projet de loi qui concerne la Loi sur la faillite et l'insolvabilité et qui modifie un article qui a trait particulièrement aux dettes d'études.

D'abord, par rapport au Fonds des bourses d'études du millénaire, la majorité des gens ici présents savent de quoi il s'agit; donc, je passerai directement à notre réaction.

Signalons d'abord qu'à la suite de l'annonce officielle de la création du fonds et même avant l'annonce officielle, le mouvement étudiant du Québec s'était prononcé contre cette initiative. Je vais expliquer en trois parties les raisons fondamentales qui nous avaient poussés, dès le départ, à nous opposer à cette initiative.

• 1050

Au plan des priorités financières, dans notre cas, ce qui est extrêmement important actuellement, non seulement au Québec mais aussi au Canada, c'est de réduire l'endettement des étudiants. Nous ne pensons pas que l'octroi de bourses, qu'elles soient basées sur le mérite ou sur le besoin, soit la meilleure façon de réduire l'endettement des étudiants.

Pour réduire l'endettement des étudiants, il y a deux sortes de mesures: il faut agir soit sur la capital de la dette, soit sur le remboursement de la dette. Nous avons nous-mêmes proposé quatre mesures susceptibles, du moins au Québec, de diminuer de façon significative l'endettement des étudiants. Nous avions proposé une diminution du plafond des prêts; une remise de dette à la suite de la diplômation; un crédit d'impôt remboursable sur les intérêts de la dette, ce qui a été annoncé récemment au gouvernement fédéral et qui l'a été aussi dans le dernier budget provincial, ce qui est fort heureux; et une amélioration du programme de remboursement différé, qui se lit en anglais interest relief, qui a également été amélioré dans le dernier budget.

La deuxième source de problèmes pour nous est les critères d'attribution des bourses. Je suis à la page 7. Il y a trois critères qui nous posaient un problème. Il y a d'abord la question du mérite, ensuite la question de l'attribution de bourses à des étudiants à temps partiel, ce qui ne tient pas compte, à notre avis, la réalité québécoise, et finalement la limitation des bourses à des étudiants de premier cycle universitaire, ce qui ne correspond pas aux objectifs d'accessibilité dont s'est doté le Québec et sur lesquels le mouvement étudiant a toujours été d'accord.

D'abord, en ce qui a trait au mérite, les critères qui seront utilisés ne figurent pas dans le projet de loi. Cependant, vous conviendrez avec moi que l'usage du terme «mérite» fait allusion soit à l'excellence académique, soit à la persévérance scolaire, ou à tout autre type d'effort scolaire particulier ou hors du commun.

Nous voulions vous faire remarquer qu'il y a déjà des organismes, publics ou privés, qui s'occupent de cette question de l'excellence. Nous avons calculé qu'il y a plus de 10 millions de dollars qui sont donnés annuellement en bourses d'excellence au Québec, particulièrement au premier cycle.

La deuxième chose que nous voulions vous faire remarquer, c'est que le système d'aide financière, tel qu'il est pensé aujourd'hui au Canada, sert d'abord à garantir un droit social et économique et non pas à récompenser l'effort scolaire. À ce sujet, je porterai à l'attention des députés ici présents la note de fin de page, à la page 8, où nous citons le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qui est en vigueur au Canada depuis le 19 août 1976. Je trouve extrêmement intéressante la clause c) qui se lit comme suit:

    c) L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité;

Il y a là de quoi nous faire réfléchir.

Donc, je disais tout à l'heure qu'il y a deux missions: celle de récompenser l'effort scolaire, et celle d'assurer et garantir un droit social et économique. Il nous semble que cette dernière doit primer sur la première.

Le deuxième critère sur lequel nous n'étions pas d'accord, c'est celui qui a trait aux étudiants à temps partiel. Nous voulions simplement vous rappeler que, dans le cas du Québec, les étudiants à temps partiel n'ont pas accès à l'aide financière. On dit aujourd'hui, dans le contexte québécois, que si les étudiants à temps partiel avaient accès à l'aide financière, ce devrait être sous forme de prêts et non pas de bourses. Donc, il y aurait là incompatibilité.

Le troisième critère sur lequel nous n'étions pas d'accord est celui qui concerne les étudiants de cycle supérieur, qui n'auraient pas accès aux bourses du millénaire. Nous voulions vous faire remarquer à ce sujet-là que le régime d'aide financière qui a été conçu au Québec est accessible à tous les paliers d'enseignement postsecondaire, à tous les ordres d'enseignement postsecondaire, et que ce principe-là, c'est-à-dire garantir l'accès à chaque ordre d'enseignement postsecondaire, nous semble extrêmement important. Nous ne pensons pas qu'il est pertinent de mettre l'accent sur le premier cycle universitaire uniquement.

Maintenant, la troisième question qui faisait problème et dont on a beaucoup entendu parler dans les médias, c'est celle de l'administration. Vous savez qu'il existe déjà au Québec un programme de bourses et un programme de prêts, et il est évident que, par sa création même, la Fondation du millénaire va créer des dédoublements scolaires.

• 1055

Nous avons ici un tableau qui concerne les articles de loi qu'il faudrait modifier, à notre avis. Nous faisons des commentaires sur l'article 5, aux paragraphes (1) et (2), et sur les articles 8, 20, 27, 28, 29, 33 et 34. C'est aux pages 9 et 10. Nous faisons un commentaire sur chacun des articles du projet de loi qui, selon nous, devraient être changés.

Pour terminer rapidement cette première partie, j'aimerais souligner qu'étant donné les compressions budgétaires qui se sont accumulées au cours de ces dernières années et qui ont durement frappé le système d'éducation postsecondaire québécois, nous pensons que les ressources destinées à la Fondation des bourses du millénaire seraient mieux utilisées à l'intérieur des structures et des budgets existants de l'enseignement postsecondaire québécois, particulièrement ceux du régime québécois d'aide financière aux études.

Je laisserai la parole à Pascal Bérubé pour ce qui est de la question des faillites étudiantes.

M. Pascal Bérubé (vice-président, Fédération étudiante universitaire du Québec): Merci, monsieur le président. Dans le projet de loi C-36, il y a également une modification de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité en ce qui a trait à la libération d'une dette découlant d'un prêt étudiant.

L'alinéa 178g) de cette loi avait déjà été modifié l'année dernière afin de rendre impossible pour un ex-étudiant la déclaration de faillite dans les deux années suivant la date de la fin des études. Maintenant, une nouvelle modification rend désormais impossible la libération pour cause de faillite d'une dette d'étude contractée en vertu d'un régime public fédéral ou provincial pendant les 10 années suivant la fin des études.

Nous jugeons discriminatoire cette modification de l'article 178. Pourquoi? Parce qu'il s'agit d'une exception discriminatoire en regard de l'article 10 de la Charte québécoise des droits et libertés, qui interdit toute discrimination basée sur la condition sociale d'une personne et qui régit ce type de contrat. Nous soutenons en effet que la condition étudiante est reconnue dans notre société comme étant une condition sociale. En effet, il y a jurisprudence à cet effet.

Par ailleurs, il est important de souligner que les ex-étudiants faisant faillite sont ceux dont le cheminement d'insertion sur le marché de l'emploi n'a pas réussi. Il serait donc pertinent de consulter la Commission des droits de la personne sur cette question.

Les dettes d'études résultent d'un investissement en capital humain. Cet investissement, celui de l'endettement, est fait en termes d'investissement humain, comme pourrait l'être le capital immobilier pour une entreprise. Le gouvernement voudrait ainsi faire une exception pour les personnes investissant dans leur propre éducation alors que toutes sortes de dettes sont effacées sans que l'on se pose la question même de savoir pour quelle raison elles ont été contractées.

Nous soutenons donc que les dettes découlant de prêts étudiants devraient être considérées comme des dettes découlant d'un véritable investissement en capital humain dont toute la collectivité bénéficie directement ou indirectement.

L'interdiction de libération n'est pas une solution véritable au problème. Ce constat nous amène nécessairement à la véritable question qui se cache derrière tout ce débat: la capacité des ex-étudiants de rembourser leurs dettes. Rappelons à ce sujet quelques chiffres québécois. J'en mentionne quelques-uns: le prêt moyen a augmenté de 70 p. 100 depuis 1987, soit 37 p. 100 de plus que l'inflation; la dette étudiante au Québec représente près de 3 milliards de dollars; la dette accapare de 20 à 50 p. 100 du revenu d'un ex-étudiant. Le véritable problème réside dans l'incapacité du gouvernement d'enrayer efficacement le problème de l'endettement excessif d'un nombre grandissant d'étudiants et de garantir aux diplômés une intégration plus efficace sur le marché de l'emploi.

Cette modification à l'article 178 ne tient pas compte de la situation au Québec, parce que l'interdiction pour une durée de 10 ans semble s'ajuster aux modifications apportées au Programme canadien des prêts et bourses dans ce même projet de loi. Par contre, la loi sur l'aide financière aux études du Québec échelonne l'accès à un programme de remboursement différé sur cinq années seulement. De ce point de vue-là, la modification de l'article 178 placerait les étudiants québécois en situation désavantageuse par rapport aux autres. Il est clair, à cet égard, que la modification de l'article 178 a été proposée sans considérer la situation prévalant au Québec.

Enfin, l'ensemble de ces constats nous amène à nous poser plusieurs questions.

D'abord, le gouvernement fédéral a-t-il consulté la Commission des droits de la personne avant de proposer de créer une exception pour le cas des dettes étudiantes dans la Loi sur la faillite et l'insolvabilité?

Que fait le gouvernement qui s'est fait élire sur une plateforme politique garantissant une diminution notoire du chômage pour enrayer le véritable problème se cachant derrière les faillites étudiantes, c'est-à-dire la difficulté de s'insérer sur le marché du travail?

Enfin, pourquoi la modification de l'article 178 ne tient-elle pas compte de la situation prévalant au Québec?

En terminant, la FEUQ juge qu'il est nécessaire de consulter la Commission des droits de la personne avant de créer une exception dans la Loi sur la faillite et l'insolvabilité.

• 1100

Merci.

[Traduction]

Le président: Nous revenons maintenant à la Fédération canadienne des étudiants. Vous avez cinq minutes, madame Story.

Mme Jennifer Story (vice-présidente, Fédération canadienne des étudiantes et étudiants): Je vais axer mon intervention sur trois éléments. D'abord, les changements au niveau du régime d'épargne- études. Le second concernera les modifications apportées aux critères d'admissibilité selon la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants. Le troisième élément, par lequel je vais commencer, concerne les propositions d'amendements à la Loi sur la faillite et l'insolvabilité, dont Pascal a déjà dit quelques mots.

En avril 1997, le projet de loi C-5 modifia la Loi sur la faillite et l'insolvabilité avec pour effet d'interdire à un étudiant de se libérer d'un prêt étudiant s'il déclare faillite dans les deux années qui suivent l'obtention de son diplôme. Le projet de loi dont nous sommes saisis ici recommande maintenant de porter ce délai à 10 ans. Par contre, le projet de loi précédent était passé par les trois lectures, qui avaient donné lieu à un processus d'examen relativement ouvert, ce qui est loin d'être le cas pour cette disposition-ci.

Plus important encore, pas plus que tout autre emprunteur commercial, un étudiant ne déclare pas faillite pour frauder le gouvernement ou soustraire au contribuable un peu d'argent durement gagné. C'est peut-être même beaucoup moins le cas. C'est ce que les statistiques nous révèlent. Un étudiant déclare faillite parce qu'il n'a pas d'autre recours. Ce n'est jamais une décision qu'on prend à la légère, qu'on soit jeune ou vieux. C'est une procédure qui coûte au minimum 1 500 $ et qui prend au minimum neuf mois. Les conséquences de cette procédure se font sentir pendant sept ans, et le stigmate qui y est associé est plus durable encore.

La Fédération canadienne des étudiants réclame donc l'élimination de cette disposition en ce qu'elle concerne les faillites et les prêts étudiants. Il ne fait pas de doute que le nombre de cas de ce genre est à la hausse. Il suffit de s'attaquer aux causes du phénomène de l'augmentation du nombre des faillites pour ralentir la tendance. Nous devons rechercher les causes systémiques qui sont à l'origine du problème.

Pourquoi le gouvernement s'en prend-il aux étudiants alors qu'il prête par ailleurs dans d'autres secteurs avec de moins bonnes chances de se faire rembourser? Pourquoi s'en prendre spécifiquement aux étudiants par opposition à tous les autres Canadiens et à toutes les entreprises qui reçoivent des prêts de l'État? Si le budget fédéral apportait vraiment autant de changements positifs au Programme canadien de prêts aux étudiants que le gouvernement le prétend, il ne faudrait pas simultanément imposer ce genre de conditions draconiennes aux cas de faillite.

Les membres du comité connaissent parfaitement les causes du problème. La réduction des paiements de transfert fédéraux a entraîné une augmentation de l'endettement étudiant. Par ailleurs, le chômage est en hausse chez les jeunes, ce qui fait que ceux-ci ont de plus en plus de difficulté à rembourser leur prêt. Cet état de choses ne saurait donc nous étonner.

Je voudrais encore dire un mot au sujet de quelque chose dont les gens n'ont peut-être pas conscience. Il s'agit du rôle des institutions financières et des taux d'intérêt qu'elles imposent et qui sont à l'origine du fait que tant d'étudiants sont incapables de rembourser leur prêt. Avant 1995, le taux d'intérêt porté par les prêts aux étudiants était calculé selon une formule basée sur le taux de rendement des obligations d'épargne du Canada. À partir de 1995, chaque institution financière a pu fixer son propre taux d'intérêt, et, actuellement, le taux d'intérêt le plus couramment pratiqué en cas de refinancement est le taux de base majoré de 5 p. 100.

Une différence de quelques points de pourcentage en intérêt peut avoir un effet dévastateur sur le remboursement d'un prêt étudiant. Il est injuste que l'établissement prêteur puisse imposer des frais de 5 p. 100 au-dessus du taux de base à un marché aussi vulnérable. Ces taux d'intérêt exorbitants contribuent pour beaucoup au fardeau du remboursement. Ces taux sont aussi un transfert direct de fonds publics au moment où les étudiants suivent leurs cours et que le gouvernement paie des intérêts—après le début des versements, ce sont les Canadiens à faible revenu et à revenu moyen qui paient—, de l'argent versé directement aux banques et à leurs actionnaires à revenu élevé.

Bref, le fardeau financier du remboursement d'une lourde dette au début de sa carrière professionnelle et pendant 10 à 15 ans nuit beaucoup à la capacité de l'emprunteur de contracter d'autres dettes pour financer l'achat d'une maison ou d'une voiture, ou même d'économiser en vue des études de ses enfants. Quinze ans après avoir reçu son diplôme, la valeur nette de l'étudiant qui n'a pas emprunté sera beaucoup plus élevée que celle de celui qui a dû allonger cette période de remboursement. La situation des étudiants qui empruntent des sommes exorbitantes est difficile au point qu'elle limitera leur capacité de déclarer faillite le jour où cela sera nécessaire et les stigmatisera davantage. Il faut étudier sérieusement les conséquences.

Voici un exemple. Depuis le début du programme, en 1964, jusqu'en 1996, 12,1 milliards de dollars de prêts ont été négociés par 2,7 millions d'étudiants à temps plein. Les chiffres de 1995- 1996 montrent que 10,7 milliards de dollars ont été remboursés. Cela signifie que 93 p. 100 des étudiants sont en train de rembourser leur emprunt, alors que ceux qui sont en défaillance ont un fardeau d'endettement plus élevé que la moyenne, ce qui ramène la valeur procentuelle à 12 p. 100.

• 1105

Voici un exemple de ce qui arrive après. Je parle du ratio des prêts non remboursés au début. En 1991, 29 000 étudiants étaient en défaillance, mais en 1995-1996, 10 000 de ces débiteurs défaillants avaient remboursé leur emprunt en entier, et 6 500 autres avaient recommencé à le rembourser. On ne peut donc pas se servir du ratio des prêts nom remboursés pour prédire les taux de faillite plus tard.

Je vais maintenant parler rapidement de la partie 10 du projet de loi C-36. Nous avons découvert récemment qu'elle pourrait limiter l'admissibilité des étudiants en fonction de leurs antécédents en matière de crédit. Ce qui suit est tiré du résumé législatif préparé par la Bibliothèque du Parlement. En vertu de la modification proposée à la Loi fédérale sur l'aide financière aux étudiants, le gouverneur en conseil pourrait prendre un règlement qui établirait les circonstances dans lesquelles un prêt ou un certificat d'admissibilité pourrait être refusé.

Jusqu'à ce jour, l'admissibilité des étudiants a été déterminée uniquement en fonction de leur revenu et de leurs biens ainsi que du revenu et des biens de leurs parents ou de leurs conjoints. Cette modification permettrait de rejeter une demande en fonction de l'ensemble des critères définis on ne sait où, mais en secret, craignons-nous.

La Fédération est très inquiète de ce changement et insiste sur le fait qu'il faut continuer de déterminer les besoins financiers et d'admissibilité d'un étudiant en fonction de sa situation économique immédiate. Les critères d'admissibilité devraient être portés à la connaissance des étudiants et de leurs familles, et ce ne devrait pas être à l'établissement prêteur de décider.

Enfin, je voudrais parler de la subvention canadienne pour l'épargne-études.

Les REÉR sont des subventions qui n'exigent pas une évaluation des besoins, par opposition aux subventions que constituent les prêts aux étudiants.

Les étudiants qui viennent de familles dans le besoin doivent répondre à des critères d'admissibilité, eux, alors que dans ce cas-ci il n'y a pas d'évaluation. Il n'y a pas de plafond dans le budget fédéral pour cette subvention.

Troisièmement, cette subvention n'est assortie d'aucun critère; elle ne peut donc pas être prévue au budget.

La subvention pour l'épargne-études consacre un système d'enseignement à deux vitesses, qui octroie plus de fonds publics à ceux qui en ont sans doute le moins besoin à ce moment-ci et moins à ceux qui ont le moins les moyens d'assumer les coûts actuels exorbitants des études.

Cinquièmement, les fonds publics accaparés par ces subventions réduisent les fonds qui pourraient servir aux paiements de transfert aux provinces en matière d'enseignement postsecondaire ou au financement de subventions axées sur les besoins, ou même les fonds destinés à soutenir l'actuelle série d'améliorations du programme des prêts en prévision de la pression à long terme de l'augmentation des frais de scolarité.

Sixièmement, cela donne de l'argent uniquement aux familles à revenu élevé. Tous ceux qui gagnent un revenu ont le droit de cotiser à un REÉR en fonction de leurs revenus, mais à peine 30 p. 100 de tous les contribuables font une cotisation. D'après Statistique Canada, 62 p. 100 de tous les détenteurs de REÉR avaient un revenu personnel de 40 000 $ en 1995. Les cotisations aux REÉR sont estimées à plus de 26 milliards de dollars—une augmentation de 74 p. 100. Pendant la même période, le nombre des cotisants a augmenté de 28 p. 100, passant de 4,7 millions à près de 6 millions.

Il est évident que ce sont ceux qui gagnent plus que la moyenne qui peuvent profiter d'un REÉR. Récompenser en majorité les familles à revenu élevé au moyen d'une subvention annuelle va désavantager encore plus les Canadiens à faible revenu ou à revenu moyen. La subvention canadienne pour l'épargne-études n'aidera en rien ceux qui n'ont pas accès à l'enseignement postsecondaire pour des raisons économiques.

Il y a un autre problème. Le ministère des Finances ne peut pas actuellement budgétiser les cotisations aux REÉR. Dans le document budgétaire de 1998, où il est demandé qui profitera des mesures relatives aux REÉR, le document ne donne ni chiffres ni estimations.

Pour conclure, en ce qui concerne le projet de loi C-36 et les étudiants, l'accent porte davantage sur l'endettement que sur la réduction de la dette. Le fardeau des dépenses associé à l'enseignement postsecondaire ne peut pas être allégé par des crédits d'impôt non remboursables et des subventions ponctuelles pour les familles fortunées. On ne peut pas faire disparaître le non-remboursement des prêts étudiants ou les faillites d'étudiants en pénalisant les étudiants dans le besoin.

• 1110

L'allongement de la période de remboursement des prêts étudiants ne fait qu'augmenter le montant à rembourser. La solution à long terme pour réduire et éliminer le non-remboursement des prêts étudiants et les faillites d'étudiants est pour le gouvernement fédéral de collaborer avec les autorités provinciales et territoriales pour rétablir les paiements de transfert aux provinces et créer une nouvelle formule de fonds réservés à tous les secteurs visés, y compris l'enseignement postsecondaire, la santé et l'aide sociale.

Le gouvernement fédéral doit songer à créer des subventions initiales publiques en faveur d'un système d'enseignement postsecondaire ouvert et accessible.

Merci.

Le président: Merci, madame Story.

Nous passerons maintenant aux questions. D'abord, je tiens à remercier tous les témoins de leur exposé. Vous nous avez donné beaucoup de matière à réflexion.

Monsieur Harris.

M. Dick Harris (Prince George—Bulkley Valley, Réf.): Merci, monsieur le président, et merci à vous tous de vos exposés. Ils étaient tous excellents.

J'aimerais poser deux questions qui découlent de vos exposés, en particulier à propos du Fonds des bourses d'études du millénaire. M. Lavigne a dit que 2,9 milliards de dollars ont été supprimés des paiements de transfert pour l'éducation depuis 1993, et il a raison. Par hasard, le fonds de dotation des bourses d'études est exactement le même montant.

Ce qui m'agace dans ce fonds des bourses d'études, c'est l'origine des 3 milliards de dollars. Ces 3 milliards de dollars profitaient à tout le monde dans le régime d'enseignement postsecondaire, mais les 3 milliards de dollars ne vont profiter qu'à un petit pourcentage d'étudiants, entre 6 et 8 p. 100.

Pensez-vous que les 3 milliards de dollars prévus pour le Fonds des bourses d'études du millénaire pourraient être dépensés d'une façon plus large? Par exemple, on pourrait se servir des 3 milliards de dollars pour réduire l'intérêt des prêts étudiants, ce qui profiterait à tous ceux qui ont un prêt, ou réduire à la fois le principal et les intérêts. Il est certain qu'il est difficile pour les étudiants de rembourser les intérêts, puisqu'il leur est très difficile de gagner beaucoup d'argent à la sortie de l'université.

J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Pensez-vous que les 3 milliards de dollars du Fonds des bourses d'études du millénaire pourraient être mieux dépensés s'ils l'étaient plus largement, en particulier pour réduire l'intérêt des prêts étudiants?

M. Brad Lavigne: Avant de répondre, je dirai que même si les chiffres sont proches, les 2,9 milliards de dollars supprimés depuis l'année financière 1994, les 2,5 milliards de bourses doivent s'étaler sur dix ans, alors que ceux ceci ne s'est échelonné que sur quatre budgets, je crois.

Nous n'allons pas participer à un débat sur le chiffre arbitraire des 2,5 milliards de dollars du Fonds des bourses d'études du millénaire pour voir ce que l'on pourrait en faire. Ils pourraient être consacrés aux soins de santé ou à un programme de garderies, que nous attendons tous avec beaucoup d'impatience. Ce pourrait être consacré à bien des choses. Je dirai que l'idée de transférer des fonds à des particuliers est cruciale, mais on ne peut pas compter uniquement sur le transfert, que ce soit au moyen de la réduction des intérêts ou d'une subvention initiale, ce que nous réclamons vigoureusement. Le gouvernement fédéral ne peut pas se contenter d'accorder des fonds à des particuliers. Il faut les deux.

Dans un premier temps, même si ce serait très limité, il faudrait faire les deux; reconstituer le système pour que les frais de scolarité et l'endettement n'augmentent pas. On pourrait le faire en réglementant beaucoup mieux les taux d'intérêt des banques, sans que cela se fasse forcément aux frais du contribuable.

M. Dick Harris: Je suis du même avis que vous à propos du taux d'intérêt des banques. Le taux de base plus 5 p. 100, c'est ce qui est imposé à la petite entreprise qui présente les pires risques, et il est dommage que les étudiants se voient automatiquement accorder cette cote et aient à payer le taux de base plus 5 p. 100. Cela revient à dire tout de suite que vous présentez beaucoup de risques et que l'établissement ne s'attend pas à être remboursé.

• 1115

Y aurait-il d'autres façons de dépenser l'argent prévu pour le Fonds des bourses d'études du millénaire qui pourraient profiter à un plus grand nombre d'étudiants?

[Français]

M. Atïm Léon Germain: Je peux répondre pour le cas du Québec. Si on fait passer ces fonds-là par la structure existante, cela bénéficiera automatiquement à beaucoup plus d'étudiants. Le pourcentage de bénéficiaires au Québec, au niveau universitaire, se situe à environ 49 à 51 p. 100 des étudiants à temps plein. On parle donc de beaucoup plus de gens que seulement les étudiants visés par les bourses du millénaire.

Par ailleurs, comme je l'ai proposé ici, il y a plusieurs façons de dépenser cet argent-là, qui vont permettre de diminuer le capital de la dette ou de faciliter le remboursement.

[Traduction]

Le président: M. Harrison voudrait ajouter quelque chose.

M. Hoops Harrison: J'aimerais préciser une ou deux choses.

Le taux de base plus 5 p. 100, c'est un taux fixe. Après ses études, l'étudiant qui veut établir un taux fixe pour toute la période de remboursement peut accepter ce taux. S'il préfère un taux flottant, en fonction duquel les versements d'intérêts suivraient l'évolution du taux de base, il pourra obtenir le taux de base plus 2,5 p. 100. C'est l'information que je voulais donner au comité.

En ce qui concerne les bourses d'études du millénaire, et le fait que l'argent est versé à une élite plutôt qu'au grand nombre, l'Alliance canadienne des associations étudiantes s'intéresse en particulier à la réduction de la dette et de l'endettement. Même si les bourses d'études du millénaire vont profiter à un petit nombre, nous espérons qu'il s'agira des plus démunis, ceux qui sont le plus dans le besoin, et que cela ira directement à eux.

Quant à l'idée de transférer aux provinces les sommes du fonds du millénaire, il y a peu de chances que l'ACAE appuie cette idée tant que le gouvernement fédéral ne reviendra pas au financement ciblé pour l'enseignement ou ne s'entendra pas avec les ministres provinciaux de l'Éducation pour créer un accord pancanadien sur la qualité et l'accessibilité de l'enseignement. Sinon, dans certaines provinces, l'augmentation des paiements de transfert n'aboutira jamais à l'enseignement. C'est pourquoi nous insistons autant cette année pour que l'argent aille directement aux étudiants.

M. Dick Harris: Donc, si nous revenions au financement ciblé en matière d'éducation, du gouvernement fédéral aux provinces, vos associations seraient d'accord, mais ce serait aussi une façon d'aider un plus grand nombre d'étudiants, plutôt qu'un petit nombre.

Cela m'ennuie que ce soit un très petit nombre d'étudiants qui profitent des bourses d'études du millénaire. Je préférerais qu'un plus grand nombre d'étudiants profitent du programme spécial que crée le gouvernement fédéral.

Le président: Merci, monsieur Harris.

Qui veut répondre à la question?

[Français]

M. Atïm Léon Germain: Une de nos propositions, au Québec, est la remise de dettes à la fin des études. Une fois que l'étudiant est diplômé, on lui remet une partie de sa dette, soit 15, 20 ou 25 p. 100. C'est aussi un incitatif à la diplômation.

Le président: Merci, monsieur Germain.

[Traduction]

Merci, monsieur Harrison.

[Français]

Monsieur Crête.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci pour les présentations. Je pense que le mémoire de la FEUQ, entre autres, démontre assez bien que le projet de loi créant la fondation a été conçu dans l'ignorance presque totale de la loi québécoise et des choix du Québec en matière d'éducation postsecondaire. Je pense que vous en faites la démonstration de façon assez évidente.

Je suis aussi impressionné par le fait que Mme Phipps ait dit que la loi créerait des dédoublements importants.

• 1120

Il y a eu un débat au début, qui fait que le gouvernement fédéral considère l'aide financière étudiante comme ne faisant pas partie du domaine de l'éducation. J'aimerais que vous élaboriez là-dessus. Les exemples de M. Lavigne démontrent la même chose, mais dans le cas d'un gouvernement provincial qui a adopté un autre type de comportement. Pensez-vous que cette affirmation voulant que l'aide financière ne fasse pas partie du domaine de l'éducation est acceptable ou défendable?

M. Atïm Léon Germain: Dans notre présentation, on explique que dans le fond, l'aide financière est de compétence québécoise depuis 1964, depuis le gouvernement de M. Lesage. Il y avait eu une entente entre les deux gouvernements afin que le Québec s'occupe de gérer son propre programme d'aide financière aux étudiants. À plusieurs reprises depuis 1964, le gouvernement fédéral a proposé des modifications à cette entente. Il est allé de l'avant avec des initiatives qui essayaient de changer un peu cette situation.

À chaque reprise, et ce Fonds des bourses du millénaire est une autre de ces initiatives, il a fallu clarifier la situation et expliquer clairement que le régime d'aide financière du Québec était différent du régime d'aide financière fédéral et que le gouvernement fédéral se devait de respecter l'entente qu'il avait conclue avec le gouvernement du Québec à ce sujet-là. Aujourd'hui, beaucoup d'intervenants politiques qualifient d'astuce la création d'une fondation privée. Ce n'est pas un programme et il n'y a donc pas de droit de retrait pour le gouvernement du Québec. Par contre, on réussit à arriver à ses fins. On réussit à entrer dans un domaine de compétence provinciale, qui a été affirmé par tous les intervenants de l'éducation.

Donc, à nos yeux, il est évident que cela pose un problème sérieux, non seulement un problème de principe mais aussi un problème administratif.

M. Paul Crête: Je m'adresse maintenant aux associations pancanadiennes. Pour vous, le fait que le Québec ait pu obtenir un droit de retrait avec pleine compensation il y a quelque 30 ans, qu'il l'ait exercé et qu'il continuera à l'exercer dans le futur constitue-t-il un embêtement pour vous? Considérez-vous que le régime qui a été instauré au Québec est, de façon générale, plus généreux ou moins généreux pour les étudiants que les programmes qui existent dans le reste du Canada?

[Traduction]

M. Brad Lavigne: Le Québec a effectivement le régime de bourses provincial le plus généreux du Canada. De fait, le Québec et la Colombie-Britannique sont les seules provinces aujourd'hui où il y a un programme complet de bourses.

Nous donnons l'exemple du Québec, à la fois pour ses taux de participation plus élevés aux cégeps, là où il n'y a pas de ticket modérateur pour les deux premières années, ainsi que pour son système complet de bourses... l'endettement à la fin des études au Québec est très nettement moins grand qu'il ne l'est dans le reste du pays. Je pense que le finissant moyen qui a emprunté doit entre 8 000 $ et 9 000 $, tandis que la moyenne canadienne est d'environ 25 000 $, et le chiffre peut être beaucoup plus élevé dans d'autres provinces. Nous nous inspirons donc des politiques du Québec pour promouvoir l'accès et réduire l'endettement.

Qu'est-ce que nous proposerions comme mesure de réduction de l'endettement à la grandeur du pays? Nous proposons un système complet de bourses fondées sur les besoins qui serait lié au programme actuel de prêts. Une province qui voudrait sortir du programme canadien des prêts aux étudiants, comme le Québec et les Territoires du Nord-Ouest l'ont fait, pourrait aussi le faire.

Mais pour nous, ce qui compte, c'est qu'un programme comparable soit créé. Nous sommes convaincus que le programme québécois est nettement supérieur à l'actuel Programme canadien de prêts aux étudiants parce qu'il comporte des bourses. Nous accepterions que les fonds pour les provinces qui ne désirent pas participer au régime servent à enrichir et agrandir le système des bourses au Québec, dans les Territoires du Nord-Ouest ou dans toute autre province. C'est ce que nous réclamons, parce que nous jugeons absolument nécessaire que les mesures de réduction de la dette profitent à ceux qui en ont le plus besoin, c'est-à-dire à ceux qui se prévalent du Programme canadien de prêts aux étudiants, et non pas à ceux qui ont fait leurs études sans s'endetter.

• 1125

[Français]

M. Paul Crête: Et le système proposé pour la Fondation n'atteint pas cet objectif-là dans sa forme actuelle. Si je comprends bien ce que vous dites, le lien direct entre le mode de remboursement et la possibilité d'avoir des bourses, et le modèle proposé pour la fondation pour le reste du Canada n'est pas le modèle idéal, selon vous.

[Traduction]

M. Brad Lavigne: Non, ce n'est pas ce que nos membres réclament depuis la fin des années 50, un système national de bourses relié au programme actuel de prêts aux étudiants.

[Français]

Le président: Merci, monsieur Crête.

[Traduction]

Madame Phipps, voulez-vous répondre?

Mme Lisa Phipps: J'aimerais ajouter quelque chose d'autre. Je ne veux pas répéter ce que les autres ont dit, mais nous sommes effectivement convaincus que le Québec a un programme complet qui répond à quantité de problèmes, par rapport à ceux qui existent dans d'autres provinces. Nous estimons que la priorité du gouvernement fédéral devrait être de réduire les chevauchements le plus possible et d'aider le plus grand nombre d'étudiants possible. C'est pourquoi nous recommandons des bourses différées par rapport à des bourses initiales. C'est notre recommandation numéro 5.

Le président: Merci, madame Phipps.

Madame Gagnon.

[Français]

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Bonjour. Je suis heureuse de pouvoir vous poser quelques questions ce matin.

On a adopté en Chambre une motion sur la société distincte et nous, du Bloc québécois, disions qu'adopter une motion ne voulait rien dire parce que, dans les faits, ce n'était pas reconnaître la spécificité du Québec. Ce dossier-ci est un exemple flagrant de cela.

Le gouvernement veut nous forcer à adopter ce projet de loi, mais nous ne sommes pas d'accord sur cela parce que nous savons que selon le projet de loi—je pense que c'est à l'article 29—, on ne pourra pas transférer ces pouvoirs-là au Québec; la fondation ne pourra pas le faire en toute légitimité. On veut le faire adopter très rapidement, vers le mois de mai, alors qu'on sait très bien qu'il y a actuellement des négociations entre les deux premiers ministres, celui du Québec et celui du fédéral. Ici, on nous presse de l'adopter alors qu'on sait que les pouvoirs ne pourront pas être transférés au Québec. On sait que le Québec ne pourra obtenir le retrait avec compensation à moins qu'on modifie la loi par la suite.

Pourquoi nous presse-t-on autant d'adopter ce projet de loi alors qu'on ne pourra même pas arriver à respecter les volontés du Québec? Il y a même des associations de manufacturiers et d'exportateurs du Canada et du Québec qui sont venues demander au gouvernement de respecter les volontés du Québec à cause des dédoublements et aussi à cause de toute l'infrastructure qui est en place.

Je pense que le Québec a aussi un problème plus général. Le projet de loi n'aborde pas toute la problématique de l'endettement des étudiants. Nous, du Bloc québécois, ne voterons pas en faveur de cette partie du projet de loi qui concerne les bourses du millénaire.

Qu'est-ce que vous pensez de cette espèce de contradiction dans laquelle on est en train de nous mettre par ce projet de loi-là?

M. Atïm Léon Germain: La première chose que je voudrais dire pour que ce soit clair, c'est que nous croyons qu'il est nécessaire, au Canada, d'avoir des bourses d'études. Le Canada est un des rares pays de l'OCDE à ne pas avoir de bourses d'études. Donc, nous sommes loin de penser que le projet en soi est une initiative qui ne se justifie pas.

Par contre, dans le cas du Québec, il y a un dédoublement évident. On est face à un cas typique où il y a une spécificité dans une province, nommément le Québec, et le projet de loi fédéral devrait s'ajuster à cette spécificité au lieu d'essayer de passer par-dessus comme un rouleau compresseur et de dire qu'on est tous pareils et que ce sera la même chose partout au Canada.

Il y a au Québec une spécificité depuis 30 ans, et le projet de loi fédéral, s'il est adopté sans modifications, sans amendements, tel quel, ne tiendra pas compte de cette spécificité. Ce serait déplorable.

[Traduction]

Le président: Madame Phipps.

• 1130

Mme Lisa Phipps: Il est bien évident que le gouvernement fédéral veut mettre ce régime en place. C'est une idée qui leur rapporte. Cela a des liens avec la question de l'unité nationale, et le gouvernement fédéral s'en voit attribuer beaucoup de mérite. Pour ce qui est du chevauchement avec le Québec, c'est une question délicate, mais ce qui compte, c'est de le réduire le plus possible et de répartir les sommes de manière qu'elles profitent aux étudiants qui sont dans le besoin.

[Français]

Le président: Merci, madame Gagnon.

[Traduction]

Il faudra passer à la personne suivante.

Monsieur Brison.

M. Scott Brison (Kings—Hants, PC): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de vos exposés de ce matin, qui m'ont beaucoup appris.

J'aimerais parler de deux choses. D'abord, les frais de scolarité ont augmenté d'environ 50 p. 100 ces dernières années, et pendant la même période, l'endettement a augmenté de 100 p. 100. Le taux de chômage des étudiants est-il la cause première ou est-ce aussi attribuable à la baisse du revenu disponible des parents? Les revenus disponibles ont baissé de 6 p. 100. J'aimerais entendre votre réponse avant de poser la question suivante, parce que j'ai mon idée là-dessus.

Le président: Monsieur Lavigne.

M. Brad Lavigne: Je pense qu'il y a plusieurs raisons. L'une des plus importantes, c'est qu'en 1994 le gouvernement fédéral—le même parti mais le gouvernement précédent—, nous a écoutés lorsque nous lui avons dit que nous vivions grâce aux allocations hebdomadaires créées par les conservateurs en 1984. Il n'y avait pas eu d'augmentation jusqu'en 1994. Même si cette mesure nous a réjouis, il n'a pas adopté de mesures pour réduire la dette. Nous sommes passés d'environ 105 $ par semaine au maximum à environ 165 $, donc 60 $ par semaine pendant l'année entière. C'était une augmentation importante et de plus en plus d'étudiants ont contracté des emprunts au fur et à mesure que leurs dépenses augmentaient.

Le chômage chez les jeunes est aujourd'hui de 17 p. 100 et il est supérieur à 10 p. 100 depuis les années 80. La baisse du revenu réel, c'est un autre problème. Des choses comme offrir aux banques un rôle plus grand dans des secteurs plus lucratifs... La banque de Montréal a ses propres prêts d'étude, et de plus en plus d'étudiants se tournent vers elle pour combler le manque à gagner. Il y a quantité de raisons qui expliquent l'alourdissement de la dette. En général je dirais que le particulier a subi les contrecoups des compressions des dépenses publiques et cela s'est traduit par un plus grand endettement.

Le président: Monsieur Harrison.

M. Scott Brison: Lorsque Sherry Cooper, de Nesbitt Burns, a parlé du Fonds des bourses d'étude du millénaire, a relié la question à l'exode des cerveaux. Elle a dit que ces bourses risquent d'accélérer l'exode de nos meilleurs éléments aux États- Unis. En conservant ici une fiscalité lourde et en ouvrant l'accès aux études supérieures, nous allons dans les faits instruire un plus grand nombre de jeunes Canadiens brillants qui vont aller enrichir l'économie américaine.

Je dirais que l'augmentation des impôts ces dernières années, ainsi que la réduction du revenu disponible expliquent la croissance disproportionnée de l'endettement étudiant. Que pensez- vous du financement actuel ou des bourses du millénaire et pensez- vous que cela risque d'aggraver l'exode des cerveaux?

[Français]

M. Atïm Léon Germain: Je pense que l'effet d'un programme comme celui des bourses du millénaire est marginal.

[Traduction]

Je pense que l'effet est marginal.

[Français]

quand vient le temps de prendre la décision de quitter un pays, qui est une grosse décision. Je pense que les salaires ont beaucoup plus à voir avec cela. Par exemple, un médecin, en sortant d'une université correcte aux États-Unis, peut espérer avoir un salaire entre 100 000 $ et 200 000 $ US, alors qu'au Canada, en particulier au Québec, on parle d'un salaire qui commence à 50 000 $ ou 60 000 $ CAN.

Je pense que cela est beaucoup plus important dans la décision de quitter un pays.

[Traduction]

M. Scott Brison: J'ai une dernière question.

Si je compare les chiffres avec ceux des États-Unis, c'est parce qu'il s'agit de notre plus grand partenaire commercial et qu'à l'aube du XXIe siècle—la technologie de l'information dans une économie fondée sur le savoir dans un environnement mondial— notre atout sera les cerveaux, et cela est relié de très près au financement des étudiants.

• 1135

D'après certaines renseignements qui m'ont été donnés récemment, l'endettement des étudiants américains après un programme de quatre ans dans une université d'État de qualité dans ce pays est aujourd'hui moins de 18 000 $ canadiens. Je pense que c'est sans précédent. L'endettement étudiant à la fin d'un programme de quatre ans est en fait plus lourd ici qu'aux États- Unis, l'écart étant d'environ 7 000 $ canadiens en moyenne. C'est bien cela?

Mme Jennifer Story: Oui.

M. Scott Brison: Quel effet cet endettement aura-t-il sur la compétitivité du Canada, vu que les États-Unis sont notre plus important partenaire commercial? Quel effet d'après vous cela aura- t-il sur notre compétitivité au XXIe siècle?

Mme Jennifer Story: Je pense qu'il faut examiner l'une des principales raisons pour lesquelles l'endettement là-bas est moins grave. En fait, les États-Unis investissent davantage dans les programmes nationaux de subventions—l'un des plus grands étant le programme de subventions Pell—que le Canada. Les gouvernements des États financent aussi mieux les subventions, même si le système est beaucoup plus privatisé et s'il y a d'autres façons de venir en aide aux étudiants.

Ces États et gouvernements investissent davantage, sachant qu'il est prioritaire d'instruire ou de garder instruits les citoyens, prêts pour le marché du travail. Je pense que c'est ce que nous voulons dire, quelles que soient nos préoccupations au sujet de la mise en oeuvre du Fonds des bourses d'études du millénaire... Pour bien traiter nos citoyens, il est crucial d'investir dans un système national de bourses.

Le président: Monsieur Harrison.

M. Hoops Harrison: D'abord, pour répondre à l'une de vos questions précédentes, je ne pense pas que le fonds du millénaire ait une incidence sur l'exode des cerveaux. À mon avis c'est un scénario différent. On se préoccupe de cet exode, mais je ne crois pas que le fonds du millénaire y soit directement relié.

Quant à ce que disait Jennifer au sujet des bourses Pell aux États-Unis, je suis allé récemment aux États-Unis et j'ai posé beaucoup de questions sur le fonctionnement de ce programme de bourses. Votre collègue a posé plus tôt une question semblable, en demandant si le fonds du millénaire ne pourrait pas être dépensé ailleurs de manière plus avantageuse. Je ne veux certes pas prendre les États-Unis comme modèle pour tout, mais il reste que dans ce cas-là, on cible ceux qui en ont le plus besoin. Si le fonds du millénaire est structuré de manière que l'argent est donné à ceux qui en ont le plus besoin, l'endettement va baisser. On aura un système plus semblable à celui des États-Unis, où l'endettement des étudiants est moins élevé parce que ce sont ceux qui en ont besoin qui reçoivent de l'aide.

Le président: Merci monsieur Brison.

Je donne la parole à Mme Davies.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci beaucoup.

Je m'appelle Libby Davies et je représente les néo-démocrates. Je suis le porte-parole pour l'éducation. Je vous remercie d'être venus. Vous aviez d'excellents mémoires.

On a beaucoup parlé du fonds du millénaire, depuis le budget. Vous avez tous parlé de thèmes sous-jacents dont on parle de plus en plus, et le fonds du millénaire permet de préciser notre pensée.

Il y a d'abord l'augmentation de la privatisation, le manque de transfert de fonds fédéraux aux provinces et au système d'éducation lui-même, le système public, et cette insistance sur les bourses d'études et les programmes en fonction du mérite, accordées à un nombre décroissant d'étudiants. Je pense que l'augmentation de la privatisation est une question clé dont on parle de plus en plus. Comme vous le disiez, on ne sait vraiment pas quels critères s'appliqueront à l'affectation des bourses du millénaire.

Deuxièmement, il y a aussi le resserrement des critères d'admissibilité des étudiants, résultant peut-être de cette privatisation. Aujourd'hui, la FCEE nous a parlé, au sujet de la partie X, du fait que l'admissibilité aux prêts ou aux certificats pouvait être refusée à cause d'une mauvaise cote de crédit. Je ne suis pas au courant de cas semblables. C'est quelque chose dont on parle peu. Ce n'est que maintenant qu'on en entend parler, comme pour les changements aux lois sur la faillite, où le délai passe de deux à 10 ans, ce qui nuit davantage aux étudiants.

Il y a deux tendances. Voudriez-vous nous parler davantage de l'aspect privatisation? Je sais que vous pouvez nous donner des renseignements sur le fonctionnement du Fonds fiduciaire d'initiative pour les étudiants et étudiantes de l'Ontario, sur le climat négatif et mauvais qu'il a créé, comme un exemple du résultat de la privatisation. Avez-vous d'autres renseignements à ce sujet?

• 1140

Deuxièmement, avez-vous des commentaires au sujet de l'incidence que cette restriction accrue aura pour les étudiants, en fonction de leur admissibilité, pour cette nouvelle section relevant de la partie X?

Le président: Monsieur Lavigne, voulez-vous commencer?

M. Brad Lavigne: Je vais d'abord parler de la privatisation, puis Jennifer pourra peut-être parler du resserrement des critères d'admissibilité.

Nous n'avons aucun doute sur l'effet négatif du retrait du fédéral et du provincial dans le financement de l'éducation postsecondaire, un effet négatif non seulement pour la qualité mais aussi pour l'accessibilité. Nous avons vu de grandes vagues de privatisation. Nous avons vu la privatisation de programmes complets.

À l'Université de Toronto, nous constatons que les banques veulent davantage d'espace, davantage de pouvoir sur les prêts aux étudiants canadiens. Quand nous voyons la CIBC se retirer des programmes de prêts étudiants en Nouvelle-Écosse et, plus récemment, au Manitoba, nous savons que les banques feront beaucoup de lobbying pour obtenir les changements qu'elles souhaitent pour protéger leurs intérêts, lorsqu'il s'agira de négocier le programme de prêts aux étudiants du Canada.

Ce qui se passe pour les prêts étudiants se produit aussi pour les prêts personnels, quand l'intérêt est prélevé mensuellement sur les comptes en banque. J'en ai moi-même été victime ayant dû contracter un prêt personnel parce que les prêts du provincial et du fédéral étaient insuffisants et ne suivaient pas l'augmentation des coûts réels.

Par ailleurs, pour ce qui est des décisions prises sur nos divers campus, si vous regardez les bureaux des gouverneurs de nombre de nos collèges et universités, vous verrez qu'il s'agit du gratin du monde canadien des affaires. Nous trouvons étrange que des PDG des banques fassent partie des décisionnaires qui augmentent nos frais de scolarité. On voit là beaucoup de conflits d'intérêts.

Ils ont aussi un contrôle grandissant sur les programmes d'études. Ils peuvent décider qui sera admis, ce qui lui sera enseigné et par qui et c'est un problème fondamental. À mesure que le gouvernement fédéral se dégage de son rôle traditionnel, les entreprises canadiennes vont de plus en plus s'immiscer dans notre système. Je pense que cela va préoccuper tous les Canadiens, parce que nous perdrons le contrôle. Je pense que c'est ce qui retiendra l'attention de nombreux Canadiens qui veulent qu'un système soit en place pour répondre à leurs besoins, que ce soit pour eux-mêmes, lorsqu'ils veulent se perfectionner ou pour leurs enfants, à l'avenir.

Jen peut peut-être parler du resserrement des critères d'admissibilité.

Mme Jennifer Story: Pour renchérir sur ce que disait Brad, au sujet de la privatisation accrue, il semble que l'on passe d'une méthode concernant la définition et l'extrapolation du financement et de la réglementation de nos programmes sociaux, d'une où nous pouvons décider d'agir pour répondre à ceux qui ont des besoins plus pressants à celle où nous nous demandons comment resserrer les contrôles pour éliminer les abus et les fuites du système tout en augmentant la mainmise du secteur privé sur le fonctionnement du système.

Dans notre régime de soins de santé, un débat furieux se déroule au Canada. Je pense que c'est très fascinant, parce que les soins de santé sont une question de vie ou de mort pour la plupart des Canadiens. C'est pourquoi le débat sur le sujet, relatif à la privatisation et à la catégorisation du système est cruciale pour chacun.

Pour l'éducation postsecondaire, c'est la même chose, mais d'une manière plus subtile. Comme ce système ne touche pas nécessairement chaque Canadien de manière directe, comme c'est plus une question de qualité de vie, le même phénomène de privatisation et de contrôle du marché se produit, mais on a moins conscience de ses ramifications à court et à long terme.

Cela se rapporte plus précisément aux critères d'admissibilité, aux changements dont vous avez parlé, notamment pour ce qui est des lois sur la faillite. Cela montre qu'on s'est écarté d'un système où nous décidions ce qui était préférable pour la majorité, de l'origine et de la solution systémique du problème: il y a une augmentation marquée de l'endettement étudiant, en parallèle avec l'augmentation des comptes en souffrance et des faillites.

Si nous cherchons à supprimer le problème de l'endettement étudiant, on verra une baisse des faillites et des comptes en souffrance. Il n'est pas nécessaire de considérer les critères d'admissibilité pour empêcher que des comptes tombent en souffrance.

Le président: Merci, madame Story.

[Français]

Monsieur Bérubé.

M. Pascal Bérubé: Dans votre intervention, vous avez fait allusion à la question des faillites. Il faut cependant voir l'objectif premier de cette mesure, qui est de réduire les abus. Si on regarde les statistiques, on voit qu'il n'y a au Québec que 3,15 p. 100 de non-recouvrement. Les chiffres d'Industrie Canada nous disent que, pour les petites entreprises, par exemple, le taux est de 6,38 p. 100.

Dans la loi actuelle, on permet de réduire les dettes pour des cartes de crédit, pour l'achat d'une voiture ou pour la consommation.

• 1145

Au contraire, quand il s'agit d'investir dans le capital lui-même, ce qui profiterait à toute la collectivité et qui permettrait de former des individus qui pourraient aller au niveau mondial—je fais allusion à l'intervention de M. Brison tout à l'heure—pour que le Canada soit compétitif, on fait une distinction. D'autre part, je trouve inadmissible que des étudiants soient victimes de discrimination selon leur condition sociale.

Je crois donc, et cela rejoint un peu vos objectifs, qu'il faut investir davantage dans le capital humain bien avant d'investir dans la consommation.

[Traduction]

Le président: Merci, madame Davies.

Nous donnons la parole à M. Szabo, puis à Mme Redman.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président

J'aimerais que vous m'aidiez, pour voir si nous nous entendons sur les chiffres. J'ai six questions. Les cinq premières portent sur des chiffres et la dernière, sur la politique.

Pour commencer, je crois savoir que le pourcentage du coût annuel de l'éducation postsecondaire payé par l'étudiant est de l'ordre de 30 p. 100 du total. Est-ce exact?

M. Brad Lavigne: Oui.

M. Paul Szabo: Bien. Au sujet du pourcentage de l'ensemble des étudiants qui ont un prêt, y a-t-il un consensus? Quel est-il?

M. Brad Lavigne: C'est 50 p. 100 de tous les étudiants universitaires à temps plein. C'est de là que vient le chiffre de 50 p. 100.

M. Paul Szabo: Quel est l'endettement moyen des étudiants qui ont un prêt?

Mme Jennifer Story: C'est environ 25 000 $.

M. Paul Szabo: C'est le chiffre que j'avais.

[Français]

M. Paul Crête: Monsieur Szabo, c'est très différent au Québec.

M. Paul Szabo: C'est ce que je pense aussi.

[Traduction]

Quel est le coût moyen d'une première voiture neuve?

Mme Jennifer Story: Nous ne pouvons nous permettre d'en acheter.

M. Brad Lavigne: Je vais continuer d'acheter des abonnements mensuels à l'autobus.

M. Paul Szabo: En fait, on peut s'acheter une Volskswagen toute neuve pour 23 000 $. Il serait plus juste de dire 25 000 $.

Le président: On peut toujours acheter une voiture d'occasion.

M. Paul Szabo: C'est vrai, vous pourriez acheter une voiture d'occasion.

Il semble donc que la dette moyenne des étudiants correspond environ au coût d'une première voiture neuve et peu nombreux sont les étudiants qui n'envisagent pas de s'acheter un jour une voiture. C'est une chose qu'ils espèrent posséder. Voilà une façon de relativiser l'endettement étudiant, par rapport à d'autres choses de la vie.

J'ai trouvé les statistiques de Jennifer sur le remboursement des dettes très intéressantes. Si j'ai bien compris, 93 p. 100 des étudiants remboursent leurs prêts, ce qui signifie que nous ne parlons que de 7 p. 100 des étudiants qui ont des problèmes—je ne me rappelle plus ce que cela signifie en dollars. Si l'on présume que la moitié des étudiants...

En fait, le doyen de l'Université de Toronto au Collège Erindale, à Mississauga, m'a dit que d'après ses chiffres, seulement 25 p. 100 des étudiants au postsecondaire avaient des dettes, mais je peux comprendre que ce chiffre ne soit pas accepté par tous. Mais même si seulement la moitié des étudiants étaient endettés, et que seulement 7 p. 100 d'entre eux ne remboursaient pas leur prêt cela signifierait que seulement 4 p. 100 de l'ensemble des étudiants ont un problème.

Voilà ce qui m'intéresse. Cela m'amène à ma véritable question. Vous avez parlé avec fougue de faillite et d'endettement massif, mais il ne s'agit que de 4 p. 100 de tous les étudiants. Ma question s'adresse à vous tous: Ne pensez-vous pas que le gouvernement fédéral devrait cibler ses interventions sur l'accessibilité des étudiants du secondaire au postsecondaire, plutôt que d'aider les étudiants actuels du postsecondaire à réduire leur endettement, quand on sait que le taux de chômage pour les diplômés n'est que de 4,5 p. 100 au Canada. Avez-vous compris? Pour les diplômés universitaires, au Canada, le taux de chômage est de 4,5 p. 100.

Qu'est-ce qui est plus important? Faut-il faire la part des choses entre l'accès au postsecondaire, d'une part, et en réduisant la réduction du fardeau de la dette de 4 p. 100 des étudiants?

• 1150

Le président: Monsieur Germain, vous avez levé la main en premier. Vous avez la parole.

M. Atïm Léon Germain: Je voulais simplement dire qu'habituellement quand on s'achète une voiture, c'est qu'on a un emploi.

[Français]

Mon intervention portera sur votre question fondamentale. Je pense que nous parlons ici—et il me semble que la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants serait d'accord avec nous là-dessus—d'une question de principe: pourquoi faire une exception pour les prêts étudiants? Le message que le gouvernement fédéral envoie est que nous allons payer pour les faillites des gens qui ont trois cartes de crédit, qui ont acheté une voiture, qui ont des dettes de consommation ou qui ont fait toutes sortes de choses, alors que nous ne paierons pas pour ceux qui se sont endettés pour leur éducation. Il me semble donc qu'il y a un problème dans notre façon d'envisager la faillite. Pourquoi le juge, lorsqu'il accepte la faillite, ne se penche-t-il jamais sur la raison qui est derrière le prêt, derrière la dette, derrière l'endettement? Quel est le motif qui fait utiliser une carte de crédit? Quel est le motif qui fait prendre un prêt étudiant? Et lequel des deux motifs est le plus raisonnable dans la perspective des objectifs que la société se donne, c'est-à-dire améliorer les conditions de vie, les conditions de participation démocratique, etc.?

Je pense que l'interdiction de faire faillite lorsque l'on a contracté un prêt étudiant pose une question fondamentale sur notre façon de voir l'éducation. Par contre, je reconnais qu'il peut y avoir des abus, même si, personnellement, je ne connais aucune étude sérieuse provenant du gouvernement ou ayant été faite d'une façon indépendante sur cette question au Québec.

J'aimerais revenir sur ce que mentionnait M. Bérubé tout à l'heure. Au Québec, il n'y a que 3,15 p. 100 des étudiants endettés qui font faillite. Pendant ce temps-là, le gouvernement fédéral donne des prêts aux petites entreprises, domaine dans lequel il y a 6,38 p. 100 de faillites, soit le double. Cela n'est jamais remis en question.

[Traduction]

Le président: Monsieur Lavigne?

M. Brad Lavigne: J'ai quelques commentaires à formuler puis je vais essayer de répondre à la question.

On peut dire aujourd'hui, en 1998, au Comité des finances, qu'une nouvelle Volskwagen coûtera à peu près la même chose que l'éducation postsecondaire aura coûté aux diplômés, soit environ 25 000 $. Mais si nous étions venus ici il y a quelques années, pour l'étudiant moyen, on aurait parlé de 17 000 $, ce qui n'aurait pas suffi à acheter une voiture neuve. Nous aurions pu venir en 1990, alors que l'endettement moyen des étudiants était 8 700 $. Au début des années 80, ç'aurait été encore beaucoup moins. Dans les années 70, ç'aurait été encore moins. Si la tendance se maintient, dans deux ans, l'endettement moyen sera de 30 000 $, et la comparaison ne se fera plus avec la coccinelle neuve, mais avec une Cadillac neuve, sans toutes les options.

Mais nous ne pouvons faire de comparaison entre l'achat d'une voiture neuve et l'accès à l'éducation postsecondaire. L'accès à l'éducation postsecondaire devrait être un droit; c'est en revanche un luxe de s'intéresser à l'achat d'une voiture, et nous payons d'ailleurs des taxes pour cette raison. Nous n'acceptons pas que ce soit considéré de la même manière et il faut rejeter cette motion. En vertu de la stratégie actuelle—ou de son absence—, si nous avons déjà des dettes de 25 000 $ nous n'achèterons jamais la voiture neuve en question parce qu'on a déjà payé 25 000 $ pour obtenir un diplôme.

Il ne faut pas faire de comparaison avec la valeur concrète; il faut plutôt établir une comparaison entre l'endettement et le rythme auquel les gouvernements réduisent les budgets et laissent augmenter les frais de scolarité.

Nous ne pouvons pas non plus penser au 4 p. 100 ou au 4,5 p. 100 d'étudiants qui, avant l'an dernier, ont déclaré faillite, montant qui ne sera jamais récupéré. Ce n'est pas parce qu'on rembourse ces dettes qu'on n'a pas de problème financier. Il faut remettre à plus tard des achats et des activités de consommation, et rembourser pendant 15 ans son prêt étudiant. Et je le répète, 25 000 $, c'est une moyenne. Qu'allons-nous faire de ceux qui ont une dette de 60 000 $ ou de 40 000 $?

• 1155

Ne présumons pas que toute la politique relative au prêt étudiant pour l'éducation postsecondaire est destinée à ce 4 p. 100. La plupart de nos membres ont l'intention de rembourser leur prêt, même s'il leur faudra pour cela 10 ou 15 ans de grands sacrifices. Je pense que c'est une mauvaise idée, tant du point de vue économique que social.

L'accès à l'éducation postsecondaire ne peut être défini en fonction du nombre d'étudiants soit 4 p. 100 qui ont des problèmes. L'accès n'est pas le recrutement et l'accès n'est pas la statistique exceptionnelle, en bout de ligne. L'accès, c'est le nombre d'étudiants qui sont réellement admis et qui peuvent vivre cette expérience. Parle-t-on d'un système de soins de santé accessible, s'il faut vendre sa maison pour pouvoir subir une intervention chirurgicale essentielle à notre santé? Il y a longtemps, nous avons décidé en tant que pays que c'était inacceptable et nous avons créé l'assurance-santé universelle, et c'est tant mieux. Nous espérons voir un jour la même chose pour l'éducation postsecondaire.

Devrions-nous aujourd'hui nous concentrer sur l'accessibilité à l'éducation postsecondaire, plutôt que sur l'allégement du fardeau de l'endettement des étudiants? On devrait faire les deux. On peut réduire l'endettement étudiant en 98, dans le cadre du Budget fédéral—ou du Budget suivant—en accordant des transferts directs aux particuliers, sous forme de bourses. Mais si nous voulons assurer l'accès des étudiants du secondaire—et on constate actuellement qu'il y a de moins en moins d'étudiants de famille à revenu faible ou moyen qui choisissent de poursuivre leurs études— il faut financer le système d'une manière générale, par des paiements de transfert.

Il faudra aussi combler le trou qui a été creusé. D'ici l'an 2000, il manquera environ 5 milliards de dollars dans l'éducation postsecondaire et il faudra commencer à combler l'écart très bientôt, si l'on veut que les élèves de neuvième année, qui ne sont pas riches, aient accès au collège ou à l'université.

Le président: Merci, monsieur Lavigne.

Brièvement, monsieur Harrison.

M. Hoops Harrison: Je ne vais pas répéter certaines des excellentes observations qui ont été faites, mais monsieur Szabo, j'ai l'impression que vous ne voulez pas croire qu'il y vraiment un problème d'endettement chez les étudiants, et que vous pensez qu'on a truqué les chiffres ou que nous exagérons.

M. Paul Szabo: Si vous me permettez, monsieur le président, j'ai un fils qui vient de recevoir son diplôme de l'Université Western. J'ai une fille qui est deuxième année à Guelph, et un autre enfant, qui sera bientôt au postsecondaire. Je connais très bien les coûts et les sacrifices que nous devons faire. Ma voiture a 10 ans.

M. Hoops Harrison: Vos enfants ont bien de la chance que vous puissiez les aider à cet égard, mais il y a des Canadiens dont les parents n'ont pas les moyens de les aider, et c'est la raison de nos problèmes actuels.

Essayez de vous mettre à notre place. Quand j'étais aux études, j'ai vu une augmentation de 100 p. 100 de mes frais de scolarité—pendant mes études—et ce n'est pas une chose à laquelle on peut se préparer. Et quand vous n'avez même pas le soutien de vos parents... Dans certains cas, la plupart des étudiants ont des prêts. Les chiffres sont exacts. Environ 30 p. 100 du coût de la scolarité est assumé par l'étudiant et environ 50 p. 100, par des prêts gouvernementaux.

Il y a une chose dont on nÂa pas beaucoup fait état, et c'est qu'il y a des prêts personnels, et des prêts de membres de la famille, qu'il faut rembourser—sans intérêt, il est vrai, mais ce sont tout de même des dettes dont on parle peu. Une dette moyenne envers le gouvernement de 25 000 $, comme le disait M. Brison, est tout de même plus élevée que la dette moyenne aux États-Unis, où les frais de scolarité sont presque deux fois plus élevés qu'ici.

Au sujet du taux de chômage de 4,5 p. 100 chez les diplômés, dont vous avez parlé, c'est exact, mais il y a une question qui nous préoccupe fort, et c'est le sous-emploi. Les emplois décrochés par les diplômés ne leur permettent de faire que les remboursements minimaux sur leurs dettes, et c'est pourquoi nous nous intéressons à un allégement des intérêts à payer.

Dans votre dernière question, vous demandiez s'il ne faudrait pas faire quelque chose pour les étudiants du secondaire plutôt que de réduire le niveau d'endettement des étudiants actuels. Je vous répondrais que non, il faut dès maintenant réduire l'endettement étudiant, puisque c'est la raison de notre présence ici. C'est ce qui nous préoccupe. Je ne pense pas qu'on puisse simplement faire fi d'une génération d'étudiants qui ont subi des compressions gouvernementales et une escalade des frais de scolarité, en faveur de la génération suivante.

Le président: Merci. Madame Redman.

Mme Karen Redman (Kitchener-Centre, Lib.): Merci, monsieur le président.

Monsieur Harrison, revenons un moment aux statistiques. Avec une dette moyenne de 25 000 $, et le fait que le remboursement se fait sur 15 ans, d'après ce qu'on a dit ici, au taux fixe qu'on a donné, quel serait le versement mensuel?

M. Hoops Harrison: Tout dépend. Pour un prêt de 25 000 $, c'est environ 300 $ par mois.

Mme Karen Redman: C'est 300 $ par mois.

M. Hoops Harrison: Pour un prêt de 30 000 $, c'est 400 $ par mois.

• 1200

Mme Karen Redman: Je comprends qu'il ne s'agit là que d'une moyenne.

Dans votre exposé, dans votre deuxième recommandation, vous dites que le représentant des étudiants devrait présenter les intérêts et les préoccupations des étudiants. Avez-vous eu des discussions à ce sujet? Avez-vous réfléchi à la façon dont cela pourrait fonctionner?

M. Hoops Harrison: Oui. Pour représenter les étudiants universitaires, il faut un conseil composé de gens qui représentent suffisamment bien ces intérêts ou des personnes qui ont pour tâche de représenter ces intérêts, s'il y a peu de sièges. Il faudrait donc des personnes qui représentent ces intérêts.

Mais je ne veux pas proposer notre nomination, mais nous serions probablement les candidats les plus probables parce que c'est notre travail de savoir ce que pensent les gens. Nous craignons que s'il n'y a qu'un étudiant, par exemple au MBA à l'Université Western, il ne présentera le même point de vue que ceux à qui est destiné le fonds du millénaire.

Mme Karen Redman: Bien, merci.

Monsieur Germain, dans votre exposé—je n'ai entendu que l'interprétation—et je n'avais votre texte qu'en français—il m'a semblé que... J'ai certainement compris vos préoccupations relativement au chevauchement avec le programme québécois, mais vous vous êtes également prononcé contre les bourses pour les étudiants à temps partiel qui ne devraient être que des prêts et que c'était incompatible pour les étudiants du premier cycle.

Je me demandais comment vous en étiez arrivé à cette conclusion. Avez-vous fait un sondage auprès de vos membres, ou est-ce tout simplement parce que cela n'est pas conforme avec la situation au Québec que vous dites une telle chose?

[Français]

M. Atïm Léon Germain: En ce qui concerne la situation actuelle au Québec, nous avons un régime d'aide financière qui couvre les études postsecondaires jusqu'au doctorat. Cela concerne toutes les clientèles étudiantes, sauf ceux qui étudient à temps partiel, cela pour plusieurs raisons, dont une raison de priorité dans le financement.

Il y a eu, depuis 1994, plusieurs groupes de travail, entre autres le Comité MacDonald qui a remis un rapport très important: il a révisé toute la structure du régime d'aide financière québécois. Le Comité MacDonald était composé d'étudiants, de professeurs, d'administrateurs, de personnes du gouvernement, de personnes du ministère, etc. Ils ont conclu, étant donné nos priorités financières, que la meilleure façon de venir en aide aux étudiants à temps partiel était d'offrir d'abord des prêts et ensuite des bourses s'il y avait des cas prioritaires.

Personnellement, je vois ici une incompatibilité. Pourquoi déciderait-on tout d'un coup de donner des bourses à des étudiants à temps partiel alors qu'il faudrait d'abord octroyer des prêts comme beaucoup d'étudiants en ont? Sinon, on se retrouverait au Québec avec des étudiants à temps plein qui obtiendraient tous des prêts obligatoirement—pour ceux qui ont accès à l'aide financière—et des étudiants à temps partiel qui, eux, auraient juste des bourses. Je pense qu'il y aurait là un grand déséquilibre.

[Traduction]

Mme Karen Redman: Je comprends votre réponse, mais il n'y a pas vraiment de chevauchement puisqu'on ne répond pas à l'heure actuelle aux besoins des étudiants du Québec en matière d'aide financière qui voudraient poursuivre des études postsecondaires même si ce n'est qu'à temps partiel.

[Français]

M. Atïm Léon Germain: Je pense qu'il y a effectivement une question à se poser ici. On peut en effet le voir de cette façon-là. Mais j'aimerais que l'on comprenne d'abord et avant tout que les choix qui sont faits en matière d'éducation et d'aide financière sont d'abord et avant tout des choix budgétaires qui sont faits à l'Assemblée nationale du Québec. Nous ne sommes pas toujours d'accord sur tous ces choix, mais nous sommes cependant conscients—et la majorité des associations étudiantes au Québec le sont—qu'il y a des choix de priorités à faire. On ne peut pas donner des bourses à tout le monde. On ne peut pas faire ce qu'on veut avec ces programmes d'État. Il me semble que la première chose à voir, c'est qu'il faut que les choix soient compatibles avec les décisions qui sont prises au Québec.

En fait, vous créez une structure qui va être parachutée sur une autre structure déjà existante, ce qui va déséquilibrer les enjeux actuels au Québec, qui sont des enjeux budgétaires.

• 1205

Je voudrais vous répondre aussi sur la première question que vous avez posée. À la page 14 de mon document, il est dit que la dette étudiante accapare de 20 à 50 p. 100 du revenu des ex-étudiants, selon une étude très récente qui a été faite à l'Université de Montréal. La dette représente en moyenne de 20 à 50 p. 100 du revenu d'un ex-étudiant.

Le président: Merci, monsieur Germain.

[Traduction]

Merci, madame Redman.

J'aurais une question en ce qui concerne la déclaration de faillite. Sur le plan émotionnel, il doit être très difficile pour une personne de déclarer faillite. J'ai beaucoup de sympathie pour les étudiants qui doivent le faire, car cela doit être une expérience vraiment horrible.

Cependant, pouvez-vous me dire quand la plupart des étudiants déclarent faillite, combien de mois après avoir reçu leur diplôme, quand est-ce qu'ils abandonnent?

Mme Jennifer Story: Je crois que c'est au cours des deux premières années.

Le président: C'est là où j'ai un problème. S'ils déclarent faillite au cours des deux premières années, cela signifie qu'ils déclarent faillite au cours d'une période entre... Rappelez-vous l'amendement que nous avons apporté afin de prolonger de 18 à 30 mois la période au cours de laquelle ils pouvaient bénéficier d'un allégement des intérêts. Pour moi, cela signifie qu'ils ne se donnent même pas une chance. S'ils pouvaient tout à coup trouver un emploi qui est bien rémunéré, ils seraient en mesure de rembourser leur prêt.

Savez-vous pourquoi ils devraient le faire? Parce que c'est vraiment injuste à l'égard de ceux qui travaillent vraiment fort et qui respectent les règles du jeu et remboursent leur prêt.

Je veux que ce soit bien clair. Je comprends que les frais de scolarité aient augmenté. Je sais jusqu'à quel point c'est difficile. Vous avez raison. Je ne suis pas en désaccord avec vous là-dessus. Mais j'ai un problème avec les étudiants qui ne se prévalent pas de la disposition du programme canadien de prêts aux étudiants en ce qui a trait à l'allégement des intérêts et qui punissent ainsi ceux qui font de leur mieux pour rembourser.

Par ailleurs, j'aimerais beaucoup savoir—et cela n'est peut- être pas possible à cause de la Loi sur la protection des renseignements personnels—combien parmi ces étudiants déclarent faillite pour la simple et unique raison qu'ils doivent rembourser leur prêt étudiant. Si c'est leur seule dette... Je peux comprendre que si à la fin de ses études un étudiant doit 100 000 $ ou autre, quoi qu'il en soit, un montant qu'il a peur de ne pouvoir rembourser parce que cela semble être une tâche insurmontable... Mais êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il faut se poser des questions lorsqu'un étudiant déclare faillite avant le délai de 30 mois?

[Français]

Monsieur Germain.

M. Atïm Léon Germain: Je voudrais répondre très rapidement.

Effectivement, il y a un problème. Au Québec, 75 p. 100 des ex-étudiants qui déclarent faillite le font dans les deux années suivant la fin de leurs études, sans avoir eu recours au remboursement différé, au interest relief. Il y a donc un problème. Par contre, nous disons que l'interdiction qu'apportera cette modification de la Loi sur la faillite et l'insolvabilité n'est pas la solution, parce qu'avec cette interdiction, il y aura une discrimination. Nous en sommes convaincus et c'est pour cette raison que nous vous demandons de consulter la Commission des droits de la personne. Nous sommes convaincus qu'il y aura discrimination. Je ne pense pas que nous serons ici, à la Chambre des communes, prêts à aller de l'avant si cette modification crée une discrimination.

Deuxièmement, je pense qu'il y a des moyens de remédier à la situation sans avoir recours à une interdiction totale. Je suis sûr qu'il y a des façons d'y arriver. Nous n'avons pas parlé de ces moyens ici parce que nous voulions insister sur le principe de la discrimination, mais nous savons qu'il y a des moyens d'arriver à ces fins.

On peut par exemple dire à un étudiant qu'il sera interdit de libération sur son prêt étudiant s'il n'a pas eu recours au programme de remboursement différé. Il me semble que ce serait beaucoup logique de le présenter de cette façon.

• 1210

[Traduction]

Le président: Monsieur Harrison.

M. Hoops Harrison: Je serai tout à fait franc avec vous monsieur le président. Comme vous le dites—je suis parfaitement d'accord avec vous—avant qu'une personne puisse bénéficier d'une remise de dette, elle devrait tout au moins essayer de rembourser. C'est le compromis que nous sommes prêts à faire, car pour que nous puissions demander de l'aide au remboursement ou une remise de dette, nous devons éliminer la crainte du danger moral que nous allons tout simplement aller nous promener en Europe pendant quelques années sans faire le moindre effort pour rembourser. Nous pouvons comprendre que le gouvernement craigne que c'est ce que les étudiants pourraient faire.

Cependant, nous disons que si les étudiants déclarent faillite au cours des deux premières années et qu'il y a toujours une aide financière qui leur est offerte, alors ça ne devrait pas être le cas. Peut-être une fois qu'ils ne reçoivent plus d'aide et qu'ils ont toujours besoin de déclarer faillite devraient-ils alors pouvoir le faire.

Dans le projet de loi à l'étude, on dit que ce n'est qu'après 10 ans qu'ils pourront bénéficier d'une remise de dette mais qu'ils pourront recevoir une aide financière pendant une période maximale de 10 ans.

Le président: Mais il y a également une période de 30 mois, n'est-ce pas?

M. Hoops Harrison: Selon le budget, la période peut être prolongée jusqu'à 54 mois, ce qui représenterait cinq ans, mais ce n'est pas dix ans. Donc, même après avoir épuisé tout cela, il y a...

Le président: Si vous ne travaillez pas après 54 mois et que vous avez un diplôme universitaire ou que vous avez fréquenté...

M. Hoops Harrison: Mais ce ne sont même pas des étudiants d'université.

Le président: Peu importe, on parle d'études postsecondaires. Je pense qu'il y a quelque chose qui ne tourne vraiment pas rond. Vous n'allez pas...

Un témoin: C'est l'économie.

Le président: Non, je sais, et je comprends que c'est l'économie. Le fait est cependant, comme M. Szabo l'a souligné, que le taux de chômage chez les diplômés d'études postsecondaires, se situe à environ 4,5 p. 100, si votre chiffre est juste. C'est un pourcentage assez peu élevé. C'est presque le plein emploi de nos jours.

De toute façon, j'ai pris bonne note de ce que vous avez dit.

M. Hoops Harrison: Il y a des gens qui ont des emplois et qui déclarent faillite. C'est une question de dette, de revenu et de capacité de rembourser. Il pourrait s'agir de gens sous-employés.

Le président: Donc vous dites que ces gens n'ont tout simplement pas la capacité de rembourser.

M. Hoops Harrison: Oui, ils ont tout simplement trop de dettes.

Le président: Et ils ont prédéterminé cela, également.

Mme Jennifer Story: Écoutez, j'ai rencontré des étudiants qui ont leur doctorat et qui font de la recherche postdoctorale et qui sont en train d'examiner leurs options. Ils ont un revenu, ils travaillent dans leur domaine, mais ils n'ont toujours pas les moyens de rembourser leurs dettes. C'est cela le problème. Ce n'est pas uniquement une question d'emploi, de stabilité d'emploi, etc. Il faut tenir compte du rapport entre la dette et le revenu, tout d'abord.

Deuxièmement, il y a quelques éléments à considérer ici. C'est au cours des toutes premières années que les gens ont de la difficulté à trouver de l'emploi, n'est-ce pas? Ce n'est donc pas surprenant sÂil y a davantage de déclarations de faillite au cours des premières années. Je ne pense pas que nous puissions nécessairement présumer, comme certains d'entre nous le font... et j'ai cru comprendre d'après ce que vous avez dit que vous supposez que ces gens tentent tout simplement de radier leurs dettes et de prendre des vacances.

Le président: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

Mme Jennifer Story: Très bien.

Le président: Ce que j'ai dit, c'est que certains étudiants déclarent faillite avant d'avoir épuisé toutes les autres possibilités.

Mme Jennifer Story: C'est exact, et la raison...

Le président: Je pense que dans la vie il faut épuiser toutes les autres possibilités avant d'abandonner.

Mme Jennifer Story: Oui, mais je pense que si l'on applique des critères pour limiter la période qui suit l'obtention du diplôme, alors nous devrions appliquer des normes semblables à quiconque a la possibilité de demander la protection de la Loi sur les faillites. Pourquoi les étudiants devraient-ils faire exception dans ce cas-ci? Tous les emprunteurs devraient être traités de la même façon. Je ne crois pas qu'il soit juste de faire une exception dans le cas des étudiants.

Ce qui est encore plus important, à mon avis—et nous avons soulevé cette préoccupation auprès du Groupe consultatif national sur l'aide financière aux étudiants qui continue de se pencher sur la question—vous seriez étonné de voir combien d'étudiants ne sont pas au courant des dispositions dont ils peuvent se prévaloir.

Une autre option que nous pouvons examiner, qui serait plus positive que ce genre d'intervention, serait une sorte d'étape intermédiaire entre un étudiant qui a du mal à rembourser et un autre qui fait une demande de faillite—pour s'assurer qu'ils sont conscients des options dont ils peuvent se prévaloir et consacrer le temps et l'énergie nécessaires pour éduquer ces emprunteurs au sujet de leurs options. On ne le fait tout simplement pas aussi efficacement qu'on devrait le faire, et je pense que cela pourrait faire une différence énorme, surtout pendant les quelques années dont vous parlez, lorsque ces gens ont de graves problèmes de chômage ou de sous-emploi.

Le président: En tant qu'organisme qui représente combien de milliers d'étudiants...

M. Brad Lavigne: Quatre cents.

Le président: Allez-vous leur transmettre ce message?

• 1215

Mme Jennifer Story: Nous y travaillons à l'heure actuelle. Nous sommes membres du Comité des communications du Groupe consultatif national.

Le président: Je comprends cela, et nous avons une responsabilité, mais vous avez également la responsabilité de leur transmettre ce message.

M. Brad Lavigne: Certainement. Le Programme canadien de prêts aux étudiants... Nous n'avons pas décidé de former un organisme étudiant pour faire le travail du gouvernement...

Des voix: Oh, oh!

M. Brad Lavigne: ...mais je suis certain que nous pourrions trouver quelque chose—des programmes de subventions pendant l'été, ce genre de choses.

Le président: Eh bien, vous devez faire quelque chose pour les étudiants.

M. Brad Lavigne: Certainement. Nous leur faisons part de leurs options, mais avant tout, nous les aidons à ne pas s'endetter.

[Français]

Le président: Monsieur Germain.

M. Atïm Léon Germain: Juste un détail. Il y a une question à laquelle on n'a pas encore de réponse et c'est celle de savoir quel est le rôle joué par les syndics de faillite et les juges. Comment se fait-il que les syndics de faillite et les juges acceptent les faillites s'ils ont un motif raisonnable de croire que c'est abusif?

[Traduction]

Ce sont des questions qu'il faut soulever, car on se demande pourquoi les juges acceptent aussi facilement les faillites s'il y a de l'abus?

Le président: Très bien. Bon argument.

Au nom du comité, je tiens à vous remercier beaucoup. Ce fût une table ronde très intéressante et le débat que vous avez suscité en est certainement la preuve.

Je voudrais tout simplement conclure en faisant une dernière observation. Les membres de notre comité partent du principe que les gens sont honnêtes. Nous ne disons pas que les étudiants trichent et abusent du système. Nous voulons tout simplement nous assurer que les étudiants connaissent toutes les options possibles. Nous sommes tous franchement très sensibles au fait que les frais de scolarité ont beaucoup augmenté.

Merci beaucoup. Nous allons faire une pause de 15 minutes. Nous allons suspendre la séance et revenir à 12 h 30.

• 1217




• 1237

Le président: Je voudrais reprendre la séance et souhaiter la bienvenue à tous.

Cet après-midi nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de l'Association nationale des collèges carrières et de l'Université de Toronto. Pour représenter l'Association nationale des collèges carrières, nous avons avec nous Mme Addie Jason, présidente et M. Paul Kitchin; le professeur David Stager de la faculté des études économiques représentant l'Université de Toronto.

Je vous souhaite à tous la bienvenue. Comme vous le savez sans doute, vous avez environ 10 à 15 minutes pour présenter votre exposé qui sera suivi d'une période de questions et réponses. Bienvenue.

Nous allons d'abord entendre l'Association nationale des collèges carrières. Madame Jason.

Mme Addie Jason (présidente, Association nationale des collèges carrières): Merci, monsieur le président et membres du comité, de nous donner l'occasion de venir vous parler du projet de loi C-36.

Je m'appelle Addie Jason. Je suis propriétaire du Collège Hallcrest, un collège d'enseignement professionnel privé que je dirige à Winnipeg et je suis actuellement présidente de l'Association nationale des collèges carrières. Paul Kitchin qui m'accompagne aujourd'hui est directeur exécutif de notre association.

Nous sommes ici aujourd'hui pour présenter le point de vue et représenter les intérêts de notre groupe et de nos étudiants actuels et futurs. Je vais donner la parole à Paul qui va vous parler brièvement de notre association.

M. Paul Kitchin (directeur exécutif, Association nationale des collèges carrières): Merci.

J'aimerais pendant quelques minutes vous parler des institutions qui sont membres de l'Association nationale des collèges carrières et vous donner un peu le profil des étudiants qui fréquentent ces institutions.

Nous représentons les institutions privées d'enseignement postsecondaire qui sont réglementées et licenciées par des gouvernements provinciaux. Il y a des lois et des règlements qui régissent le fonctionnement de ces institutions dans chaque province. Ces institutions existent maintenant depuis 130 ans. En effet, c'est à Belleville en 1868, qu'a été établi le tout premier collège d'enseignement professionnel et cette institution existe toujours même aujourd'hui.

La croissance de cette industrie a été importante à tel point qu'il y a aujourd'hui 1 200 collèges d'enseignement professionnel au Canada que fréquentent environ 180 000 étudiants par an. Ce sont en général de très petites institutions qui offrent des programmes spécifiques de formation professionnelle. Elles s'adressent à un créneau de la population que je vais tenter de vous décrire.

• 1240

Près du tiers des étudiants ont plus de 35 ans. Souvent, ce sont des gens qui ont été victimes des restructurations et des rajustements que nous avons connus ces dernières années. Près de la moitié des étudiants ont des personnes à charge, et un étudiant sur cinq est parent seul soutien de famille.

Il est intéressant de noter qu'à l'occasion d'un sondage auprès de quelque 13 000 étudiants ces deux dernières années, nous avons observé que près de la moitié, soit 47 p. 100 nous ont signalé avoir suivi des cours dans l'un de nos collèges communautaires ou de nos universités. En fait, 15 p. 100 d'entre eux avaient obtenu un diplôme d'un collège communautaire et 5 p. 100 d'une université. Il s'agit donc d'une population étudiante qui à cette étape a choisi de s'inscrire dans un établissement privé.

Selon bon nombre d'étudiants, c'est la brièveté des programmes qui fonde leur choix, brièveté qui est liée à une formation très intensive. Les étudiants peuvent donc terminer leurs études en moins d'un an puis retourner dans la population active et devenir des membres productifs de la société.

Voilà donc un bref aperçu de notre situation pour vous donner une idée de l'identité de nos membres et de leurs étudiants. Je vais maintenant céder la parole à Addie qui abordera certains des questions que soulèvent la création du Fonds des bourses du millénaire et le projet de loi C-36.

Le président: Madame Jason.

Mme Addie Jason: L'Association nationale des collèges carrières qui représente les écoles professionnelles privées autorisées, s'enorgueillit d'une longue tradition de services auprès des Canadiens. Notre association s'intéresse très vivement à l'établissement du Fonds des bourses du millénaire. Nous aimerions donc faire certaines remarques au sujet de cette initiative.

La première question est l'admissibilité des établissements. Viennent ensuite les critères ouvrant droit aux bourses. En troisième lieu, mentionnons la méthode retenue pour choisir les administrateurs et les membres de la Fondation.

Je traiterai d'abord de l'admissibilité des établissements. Nous appuyons les efforts déployés par le gouvernement fédéral par le truchement de la Stratégie canadienne pour l'égalité des chances pour donner un meilleur accès à des programmes postsecondaires abordables à tous les étudiants dans les établissements de leur choix.

Or le secteur postsecondaire privé du Canada est extrêmement préoccupé par l'approche qu'il a adoptée pour mettre en oeuvre la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire. On semble avoir délibérément créé une situation de deux poids deux mesures dans le milieu postsecondaire.

Notre inquiétude tire sa source dans les définitions et le libellé du projet de loi C-36 qui illustre la position inacceptable figurant dans les documents budgétaires, voulant qu'aient droit à ces bourses:

    Des Canadiens et Canadiennes de tous âges, qui étudient à temps plein ou à temps partiel dans des universités, collèges communautaires, établissements professionnels et techniques et CÉGEPS. Les études dans des établissements d'enseignement privés pourront être incluses à la discrétion de la Fondation pourvu que l'établissement ait un bon dossier pour le programme dans lequel l'étudiant est inscrit.

On établit donc une nette distinction entre les établissements d'enseignement publics et les privés.

Nous aimerions donc savoir pourquoi les établissements d'enseignement privés doivent faire l'objet d'un examen discrétionnaire de la part de la Fondation. Cela crée deux poids deux mesures de telle sorte que les étudiants inscrits dans des établissements publics sont admissibles aux bourses même si l'établissement en question n'a pas un bon dossier pour le programme dans lequel ils sont inscrits.

Cette approche n'est manifestement pas raisonnable. Ce dont nous avons besoin au contraire c'est d'une approche uniforme en matière d'admissibilité, d'une seule norme pour tous, que l'établissement soit public ou privé.

La liste des bénéficiaires éventuels que je vous ai lue devrait préciser que les Canadiens de tous âges qui étudient à temps plein ou à temps partiel dans des établissements postsecondaires désignés sont admissibles aux bourses d'études canadiennes du millénaire. Cela inclurait les collèges carrières privés et serait conforme à une politique selon laquelle les étudiants inscrits dans tous les établissements désignés peuvent avoir accès à toutes les autres mesures prévues par la Stratégie canadienne de l'égalité des chances.

• 1245

Si le gouvernement s'inquiète que des étudiants puissent s'inscrire dans des programmes n'ayant pas de bons dossiers, l'Association nationale des collèges carrières serait favorable à ce qu'on renforce la méthode visant à désigner les personnes aux fins des prêts canadiens aux étudiants, et ce pour tous les programmes offerts dans tous les établissements. La pierre d'achoppement ici, c'est le critère utilisé pour établir qu'un établissement a effectivement un bon dossier. Il faut définir par ce qu'on entend par cela. L'Association nationale des collèges carrières préconise donc l'adoption d'un modèle de responsabilité financière pour tous les établissements, qui pourrait mesurer la satisfaction des étudiants, les résultats scolaires par rapport au nombre de diplômés ainsi que les taux de placement de ces derniers.

En fin de compte, peu importe que l'établissement soit public ou privé, pour ce qui est de la qualité des cours offerts. On aurait tort de classer les établissements en fonction de leur source de financement lorsqu'il s'agit de déterminer leur admissibilité à un programme. Il faut bien comprendre que les universités, les collèges et les établissements privés fonctionnent chacun à leur façon.

Une fois que seront fixés les critères du besoin et du mérite pour les bourses du millénaire, les étudiants de tous les établissements postsecondaires doivent être traités équitablement et avoir un accès égal à ces bourses payées par le contribuable. En refusant ou en limitant l'accès aux bourses du millénaire aux étudiants inscrits dans les établissements privés, on irait directement à l'encontre des objectifs de la fondation énoncés à l'article 5 de la partie I du projet de loi C-36.

Par conséquent, notre organisation vous présente une recommandation d'amendement au projet de loi C-36 qui clarifie la définition des établissements admissibles tout en la rendant plus juste et plus conforme aux objectifs de la fondation.

Au sujet des critères applicables aux candidats, les objectifs de la fondation sont «d'accorder des bourses d'études aux étudiants qui ont besoin d'aide financière et qui font la preuve de leur mérite». Nous estimons que la majorité des bourses du millénaire accordées devraient être destinées aux étudiants qui ont un besoin financier, qu'ils répondent ou non à des critères de mérite scolaire.

D'après les derniers chiffres que nous a fournis DRHC, environ 17 000 étudiants ayant obtenu des prêts au Canada en 1995-1996 étaient au maximum du prêt. On peut en déduire qu'un nombre important d'étudiants ont encore des besoins après avoir reçu leur prêt. Il doit y avoir aussi un nombre considérable de gens qui ont besoin de cours postsecondaires et de formation qui ne s'inscrivent jamais, parce que le programme de prêts étudiants ne peut combler leurs besoins.

En limitant l'octroi des bourses aux étudiants qui remplissent à la fois le critère du besoin et du mérite, on jouera un vilain tour à beaucoup de Canadiens qui travaillent fort qui pourraient ne jamais avoir accès à l'éducation ou à la formation dont ils ont besoin.

L'article 28 de la partie I du projet de loi porte que:

    28. La fondation doit [...] octroyer les bourses d'études de manière à compléter les programmes provinciaux d'aide financière aux étudiants [...]

En accordant les bourses du millénaire aux étudiants qui ont des besoins financiers, on se conformerait aux exigences de l'article 28 du projet de loi. Nous proposons un amendement au projet de loi qui permettrait de cibler ainsi les étudiants ayant des besoins financiers, et éliminant le critère du mérite.

Pour ce qui est du choix des administrateurs et des membres, le Canada a trois secteurs d'enseignement postsecondaire principaux. Le secteur universitaire, celui des collèges communautaires et celui des collèges professionnels. En consultant le milieu de l'enseignement postsecondaire, il est essentiel d'écouter le point de vue de ces trois secteurs. Cette pratique serait conforme à l'article du projet de loi C-36:

    14. Les membres viennent des diverses régions du Canada et

      a) sont en outre choisis de manière à ce que leur collectivité possède les connaissances nécessaires concernant le monde de l'éducation postsecondaire et les

      b) besoins de l'économie canadienne.

• 1250

Pourtant, avec le libellé actuel du projet de loi C-36, la consultation des trois secteurs postsecondaires n'est pas obligatoire. Le processus de consultation pour le choix des membres et administrateurs de la fondation est plutôt laissé à la discrétion des membres existants. L'alinéa 8(2)c) du projet de loi donne des précisions quant à la composition du conseil d'administration:

    neuf personnes nommées par les membres en conformité avec les règlements administratifs de la fondation, après que ces derniers eurent pris les mesures raisonnables pour consulter les ministres provinciaux de même que les représentants d'organisations de leur choix provenant du monde de l'éducation postsecondaire au Canada.

Le paragraphe 12(4) de la partie I du projet de loi dit que:

    Le plus tôt possible après leur nomination, les six membres en question nomment à la fondation neuf autres membres après avoir pris des mesures raisonnables pour consulter les ministres provinciaux de même que les représentants d'organisation de leur choix provenant du monde de l'éducation postsecondaire au Canada.

L'ANCC propose que le projet de loi C-36 soit modifié de façon à exiger que les membres consultent les trois secteurs postsecondaires au moment de choisir les membres et les administrateurs.

Compte tenu de ces remarques, l'ANCC recommande au Comité permanent des finances que le projet de loi C-36 soit modifié comme suit. Premièrement, la définition d'établissement admissible, à l'article des définitions du projet de loi C-36, devrait être remplacée par ce qui suit:

    «établissement admissible» établissement d'enseignement public ou privé au niveau postsecondaire, situé au Canada, qui est désigné comme tel aux fins des prêts canadiens aux étudiants et qui décerne des grades, des diplômes ou des certificats.

Deuxièmement, l'article 5 de la partie 1 du projet de loi C-36 devrait être modifié ainsi:

    Dans le but d'améliorer l'accès à l'éducation de niveau postsecondaire et de permettre ainsi aux Canadiens d'acquérir les connaissances et compétences nécessitées par une économie et une société en évolution, la Fondation a pour mission d'accorder des bourses d'études à des étudiants qui ont besoin d'aide financière.

Le paragraphe 5(2) devrait être modifié comme suit:

    La Fondation accorde les bourses d'études, de façon juste et équitable, à travers le Canada.

Troisièmement, voici le libellé que nous proposons pour l'alinéa 8(2)c):

    neuf personnes nommées par les membres en conformité avec les règlements administratifs de la fondation, après que ces derniers eurent repris les mesures raisonnables pour consulter les ministres provinciaux de même que les représentants d'organisations de leur choix provenant du secteur universitaire, du secteur des collèges communautaires et du secteur privé du monde de l'éducation postsecondaire au Canada.

Enfin, nous proposons que le paragraphe 12(4) soit libellé comme suit:

    Le plus tôt possible après leur nomination les six membres en question nomment à la Fondation neuf autres membres après avoir pris les mesures raisonnables pour consulter les ministres provinciaux de même que les représentants d'organisations du secteur universitaire, du secteur des collèges communautaires et du secteur privé provenant du monde de l'éducation postsecondaire au Canada.

Cela met fin à nos remarques, et je vous remercie de les avoir écoutées.

Le président: Merci, madame Jason et monsieur Kitchin.

Nous passons maintenant au témoin suivant. Je vous présente le professeur David Stager. Soit dit en passant, je remercie vos deux organisations de nous avoir remis des mémoires. Nous vous en savons gré.

Monsieur Stager.

M. David Stager (témoigne à titre personnel): Merci. Je tiens d'abord à préciser que je ne représente pas l'Université de Toronto. Notre président, Rob Prichard, a certainement appuyé bon nombre des positions que j'ai prises, mais j'ai la chance d'être un universitaire indépendant. Je suis donc ici pour vous faire part des résultats des recherches que je mène depuis 35 ans, sur l'économie de l'enseignement. C'est mon sujet de recherche et d'enseignement préféré, et je suis très flatté et reconnaissant d'avoir l'occasion d'en parler avec vous.

D'après la conversation téléphonique que j'ai eue avec le bureau de la greffière, il semble qu'on s'attend surtout à ce que je parle de la Fondation canadienne des bourses d'études du millénaire, car j'ai rédigé un article à ce sujet qui a paru dans le Globe and Mail peu de temps après le dépôt du Budget. Mais j'ai fait des recherches et rédigé des articles sur divers aspects de l'économie de l'enseignement, que j'enseigne aussi, et je m'intéresse plus particulièrement à l'enseignement postsecondaire. Je serais donc ravi de répondre à toutes autres questions ou remarques que vous pourriez avoir à ce sujet.

• 1255

Pour commencer, en ce qui concerne les bourses d'études du millénaire—et je comprends bien la réalité politique—nous avons réalisé de grands progrès dans ce domaine, mais j'estime, à titre de chercheur et de Canadien, que ce n'est pas le meilleur usage qu'on pourrait faire de ces fonds compte tenu de l'objectif qu'on veut atteindre.

Dans les documents que j'ai lus sur le discours du Budget, on dit que ces bourses ont été créées pour améliorer l'accès à l'éducation postsecondaire au Canada. Je prétends humblement que ce fonds ne permettra pas d'améliorer l'accès. Il n'aura que des effets négligeables si l'on veut accroître la probabilité qu'un étudiant poursuive des études postsecondaires.

Pourquoi? Spontanément, je prends d'abord note du fait que la somme prévue est relativement petite. Sans vouloir être méchant, elle ne représente qu'une faible portion des dépenses annuelles des étudiants si l'on tient compte du coût total des fournitures, du logement et des repas, des livres et des autres dépenses personnelles. Cela ne tient même pas compte des revenus perdus, un facteur important quand vient le temps pour les étudiants de prendre leur décision.

Toutefois, ce qui est le plus important, c'est l'accès—et je le dis après de longues et vastes recherche dans ce domaine. J'ai commencé à me pencher sur l'accès à l'éducation en 1969, dans le cadre d'un projet pour le gouvernement fédéral, d'ailleurs. Si par accès on entend la probabilité qu'un étudiant poursuive des études postsecondaires, l'accès dépend de bien des facteurs.

Le facteur le plus important est l'instruction qu'ont reçue les parents, l'influence qu'ils exerceront en raison de leur propre éducation, ainsi que le milieu de vie et le milieu scolaire. Ces facteurs sont très puissants. L'influence des parents se fait sentir dès les toutes premières années de la vie, et, en effet, bon nombre d'élèves ont déjà décidé de poursuivre leurs études après le secondaire alors qu'ils sont à la fin de l'élémentaire ou au début du secondaire. Ils changent parfois de domaine d'études en cours de route, bien sûr, mais ils ont déjà pris la décision de poursuivre leurs études.

Les bourses et les frais de scolarité—les deux côtés de la médaille des coûts—ont peu d'incidence sur l'accès parce que, pour les étudiants, l'éducation postsecondaire constitue surtout un investissement, un investissement pour la vie. Le gouvernement l'a lui-même reconnu dans son discours de Budget. Le premier ministre et le ministre des Finances parlent souvent d'investir dans l'avenir des Canadiens.

Les étudiants voient donc cela comme un investissement, et même s'ils ne calculent pas le taux de rendement comme nous le faisons pour le REÉR, ils ont aussi fait des calculs. Ces calculs sont assez impressionnants. Je suis le rendement de l'investissement dans l'éducation supérieure, autant à l'université qu'ailleurs, depuis 1960 à l'aide des données de recensement décennal, lorsque le recensement se faisait tous les 10 ans, et les données de recensement quinquennal. J'ai déjà demandé les données du recensement de 1996.

Les résultats sont constants au fil des ans et à l'échelle du pays. Au Canada, un diplômé universitaire peut s'attendre à un rendement de 12 à 15 p. 100. Lorsqu'on parle de rendement de l'investissement, c'est comme s'il s'agissait d'un investissement dans le capital physique ou dans des titres. Nous tenons compte de tous les coûts, y compris les revenus perdus de l'étudiant, et de tous les avantages que l'on calcul en faisant la différence entre le revenu d'un diplômé universitaire et celui d'un diplômé de l'école secondaire. On calcule ensuite la valeur actuelle.

Ce n'est en fait qu'un calcul minimal, parce qu'il ne tient pas compte des autres avantages dont jouissent les diplômés universitaires. J'ai dit que le rendement était de 12 à 15 p. 100, mais ça, c'est pour les hommes. Pour les femmes, c'est encore plus élevé, ce qui étonne toujours les gens. Le pourcentage est de deux ou trois points supérieurs en général et dans chacune des disciplines. Cela est attribuable au fait que, chez les diplômés de l'école secondaire, le revenu des femmes est inférieur à celui des hommes. Cela a un double effet. Le coût d'égalité des chances pour les diplômés de l'école secondaire de sexe féminin qui vont à l'université est moindre alors que le gain proportionnel est supérieur.

• 1300

J'ai déjà à maintes reprises fait remarquer que l'enseignement postsecondaire présente un intérêt économique particulier pour les étudiantes. Il n'est donc pas étonnant que l'on assiste à une augmentation rapide de la fréquentation des établissements postsecondaires par les femmes.

C'est une autre des raisons qui font que de petits changements aux frais de scolarité, aux bourses et aux prêts n'ont pratiquement pas d'effet: ils n'influent que très peu sur le coût.

Il y a quelques années, j'ai examiné le modèle du taux de rendement et j'ai fait quelques expériences avec ce modèle. J'ai d'abord supposé qu'on triplait les frais de scolarité. Il en est résulté une baisse du taux de rendement de seulement 1 à 2 p. 100; vous voyez donc le peu d'effet qu'a une augmentation de 3 000 $ par année des frais de scolarité.

La disponibilité des places dans les établissements postsecondaires contribue aussi à améliorer l'accès. Le taux de scolarisation en Ontario a augmenté alors même que les frais de scolarité connaissaient leur plus forte hausse, à la fin des années 60. Il y a alors eu une augmentation rapide du taux de fréquentation et une augmentation tout aussi rapide des frais de scolarité? Pourquoi? Il y a aussi eu une augmentation rapide du nombre de places à l'université. C'était un des effets de la pointe démographique de la fin des années 60 et du début des années 70 qui s'est fait sentir dans tout le pays. Au Royaume-Uni, aux États-Unis et ailleurs, cet effet démographique s'est aussi fait sentir.

Enfin, j'aborderai les informations dont ont besoin les étudiants pour avoir des attentes raisonnables et le changement de ces attentes.

Il est plus probable que les adolescents des familles mieux instruites et à revenu élevé poursuivent leurs études notamment parce qu'ils sont plus sensibles aux attentes qu'ils peuvent avoir en matière de qualité de vie, de revenu, etc. Par conséquent, il faut faire plus pour les élèves des familles moins instruites.

Ce sont des arguments intuitifs qui sont toutefois étayés par les résultats des recherches. Bon nombre d'études ont prouvé que les bourses constituent un moyen inefficace de modifier la scolarisation.

On peut dégager bien des chiffres de ces études, mais, en général, on constate qu'un étudiant sur cinq ou un étudiant sur 10 voit sa situation changer parce qu'il reçoit une bourse. Autrement dit, il faudrait donner une bourse à cinq ou 10 étudiants pour qu'un d'entre eux aille à l'université, ce qu'il n'aurait pas fait sans la bourse. C'est un chiffre approximatif. L'efficacité est donc d'environ 10 p. 100 à 20 p. 100.

Certains chercheurs dans ce domaine ont conclu qu'on ferait un meilleur usage des deniers publics en les ciblant mieux. Pendant mon année sabbatique, il y a trois ou quatre ans, j'ai passé du temps en Australie et en Nouvelle-Zélande, surtout en Australie, pour examiner le financement de l'éducation postsecondaire. Là-bas, le mot à la mode c'est le «ciblage», et c'est un concept qui gagne en popularité dans d'autres pays aussi. On parle beaucoup du concept du ciblage, du choix d'un groupe cible pour l'octroi de fonds, par opposition à une approche universelle.

Un peu partout dans le monde et certainement dans les pays de l'OCDE, on a tendance à remplacer les prêts par des bourses. Or, par suite de la recherche, d'un certain leadership et de la communication qui se fait à l'OCDE, les gouvernements reconnaissent de plus en plus qu'il est plus efficace de se servir des fonds prévus pour améliorer l'accès en accordant des prêts plutôt que des bourses.

Il est intéressant de noter que la scolarisation est à son niveau le plus élevé alors que le recours aux bourses est à son niveau le plus bas. Pourquoi? Si vous donnez des bourses substantielles, vous avez plus ou moins utilisé une somme fixe du budget prévu pour l'aide aux étudiants et l'enseignement supérieur. Vous avez consacré cette partie du budget à un nombre restreint d'étudiants. Si, avec cette même somme, vous aidiez davantage d'étudiants, l'incidence serait plus grande.

Le Royaume-Uni l'a enfin reconnu. Il y avait là-bas un programme de soutien très bien nanti pour une très petite partie de la population étudiante; le taux de scolarisation était resté peu élevé. On a alors changé du tout au tout et accordé la préférence aux prêts. Au Japon, on n'accorde pratiquement que des prêts, en Suède on a remplacé presque toutes les bourses par les prêts, et il en va de même dans d'autres pays de l'Union européenne.

• 1305

Cela m'amène à un des sujets auquel je travaille et auquel je m'intéresse depuis longtemps, à savoir les prêts remboursables en fonction du revenu.

J'ai eu l'occasion d'aller à Ottawa à différents moments dans ma carrière universitaire. Parfois cela a suscité énormément d'intérêt, mais c'est avec une grande tristesse que je dois le dire, à d'autres moments, ils ont tout simplement décidé de remettre à plus tard pendant un an ou deux.

Ce matin, au moment où il partait, j'ai parlé à Bob Best de l'AUCC, et je lui ai demandé où en étaient les choses. Il m'a dit qu'à son avis c'était une affaire tout à fait morte sur la Colline. Je lui ai dit qu'au fond, c'était la solution idéale à long terme. Par conséquent, sans vouloir abuser de votre temps, je dois attirer votre attention directement sur cette question, directement de moi à vous.

La notion d'un prêt étudiant dont le remboursement est fonction du revenu de l'étudiant signifie que celui-ci rembourse exactement selon ses moyens. Il y a beaucoup de problèmes dont vous avez entendu parler ce matin et qui ne sont pas nouveaux. En fait, il y a 15 ans je parlais déjà de ce genre de choses aux gens qui accordent des prêts étudiants au Canada: les problèmes des jeunes diplômés qui doivent rembourser leurs bourses, les problèmes posés par les allégements d'intérêts, les remises de prêts, les faillites, tout cela serait beaucoup plus facile avec un programme prévoyant que les étudiants remboursent selon leur revenu.

Les critiques du programme ont tendance à exagérer et à dire que les étudiants auront des dettes pendant toute leur vie, mais à mon avis, cela ne devrait pas dépasser 15 ans. Nous avons établi un modèle sur ordinateur, un modèle qui démontre que la grande majorité des diplômés réussiraient à rembourser en l'espace de 15 ans. Tous ceux qui ne pourraient le faire pour diverses raisons garderaient la responsabilité de la dette, mais avec les intérêts ils s'exposeraient à payer d'autant plus à la fin.

Quand je dis «payer à la fin», il s'agit de la notion d'une subvention différée. Au lieu d'une subvention au départ, sur la base des moyens financiers des parents de l'étudiant, la subvention interviendrait à la fin sous forme de remise de dettes. On déciderait que comme les choses n'ont pas été comme prévu pour 5 p. 100 des étudiants, comme on l'a dit ce matin, la dette serait remise grâce à une subvention différée. Cela vaudrait mieux que les inégalités qui se produisent actuellement lorsquÂun étudiant remplit les conditions d'admissibilité et aboutit dans un poste très bien rémunéré: de toute évidence, il a beaucoup bénéficié de la subvention qu'on lui a donnée au départ. Si c'était l'inverse, ces étudiants diplômés pourraient aider des étudiants moins fortunés qui, pour une raison ou pour une autre, et le plus souvent pour cause de tragédie personnelle inévitable, n'ont pas pu rembourser leur dette.

Le programme de prêts a été très mal compris, et très souvent, on l'a critiqué à tort sous prétexte qu'il s'agissait d'un système de prêts fondé sur le revenu. J'ai donné à votre greffière quelques notes que j'ai préparées à l'intention de divers comités. J'ai fait le même exposé devant le Sous-comité du Sénat sur l'éducation postsecondaire l'année dernière. Cela a été très mal compris. Il est certain que certaines questions sont assez confuses, comme le fardeau de la dette, la dette moyenne, etc., et si ma présence ici peut accomplir une seule chose, j'aimerais convaincre votre comité de demander à Statistique Canada de publier régulièrement des données sur le niveau de la dette étudiante. Cela nous donnerait des définitions claires et des données cruciales pour un domaine de la politique publique qui est particulièrement important, le genre de données qu'on trouve facilement sur la production d'oeufs, la de porcs, etc. En effet, nous avons besoin de données sur lesquelles nous pouvons tous nous mettre d'accord, et même si les résultats ne nous plaisent pas, des données que nous pouvons au moins comprendre.

C'est un élément important. En effet, nous n'avons pas de bonnes données sur l'endettement des étudiants car à l'heure actuelle il y a au moins trois sources de prêts différentes: les prêts fédéraux, les prêts provinciaux et les prêts privés, et cela comprend les banques, les parents, les membres de la famille, etc. Nous n'avons pas de moyens de mesurer cela avec une certaine exactitude, sinon l'Enquête nationale auprès des diplômés, qui se fait sur la base d'un échantillonnage en deux étapes: deux ans et cinq ans après que l'étudiant a obtenu son diplôme. Ce n'est pas si mal, et Statistique Canada fait un travail utile dans ce domaine, mais nous devons insister pour que cet organisme normalise les données dans ce secteur particulièrement important de politique publique.

• 1310

Comme je l'ai dit, le principe des prêts étudiants remboursés en fonction du revenu, c'est avant tout la faculté de remboursement.

Deuxièmement, le risque passe de l'étudiant à la société, et l'étudiant n'a plus besoin de renoncer à l'université de crainte de ne pouvoir rembourser le prêt. En effet, on l'assure que s'il ne peut rembourser après un certain nombre d'années, le prêt sera considéré comme une subvention après coup.

Troisièmement, cela augmente l'accès, car cela libère des fonds publics qui peuvent donc être distribués. J'ai fait certains calculs; si le temps le permet et si cela vous intéresse, je pourrais vous en parler. D'après ces calculs, avec les sommes prévues pour le Fonds du millénaire, nous pourrions offrir aux étudiants un plein accès à l'université et à toutes les formes d'éducation postsecondaire, et cela, sans qu'il en coûte plus cher au secteur fédéral public.

D'autre part, on n'aurait plus besoin de faire appel aux banques. J'ai été un peu troublé d'apprendre que DRHC s'était entendu avec les banques et que celles-ci prélevaient une prime de 5 p. 100 sur les prêts et qu'en échange, elles se chargeaient de la perception des créances. À mon avis, c'est l'inverse qu'il aurait fallu faire, et c'est le ministre qui aurait dû demander une prime de 5 p. 100 aux banques.

Avec ce système nous n'aurions pas besoin des banques. D'une façon générale, lorsqu'il s'agit de prêts, les banques font deux choses: elles évaluent le risque (le banquier avisé exige un plan d'affaires, une évaluation du risque) et elles perçoivent les créances. Nous n'avons pas besoin de nous inquiéter de l'évaluation du risque, de toute façon cela se fera sur la base des critères d'admissibilité, et c'est le gouvernement et les établissements d'enseignement qui s'en chargeront ensemble. Quant à la perception, c'est le système fédéral de perception des impôts qui s'en chargera. J'ai parlé aux gens de l'impôt, et ils m'ont dit que cela ne coûterait pratiquement rien de plus.

Je suis conscient de la réalité politique. Le projet du Fonds du millénaire est déjà bien avancé. J'ai de grosses réserves à son sujet. À mon avis, nous devons revenir en arrière et reconsidérer le travail effectué par DRHC en ce qui concerne le programme de prêts en fonction du revenu.

Au moins avec le Fonds du millénaire, je pense qu'il faudrait envisager quelques changements. S'il n'est pas possible de retourner en arrière, vous pouvez au moins faire deux choses. Vous pouvez mettre l'accent sur la portion non universitaire. Cela peut sembler hérétique pour un universitaire, mais c'est le résultat de certaines recherches qui ont démontré que les subventions sont souvent plus efficaces.

Deuxièmement, une portion du fonds devrait être réservée pour deux choses. Premièrement, pour faire périodiquement des recherches pour déterminer si le programme reste accessible. Il arrive trop souvent en matière de politique publique que nous élaborions des programmes grandioses sans jamais retourner en arrière pour voir s'ils sont efficaces. Ainsi, une partie du fonds serait réservée pour faire de la recherche sur l'accessibilité et autres questions, et ensuite, une autre partie serait réservée à un exercice qui permettrait de dresser un portrait type de l'étudiant à problèmes— ce n'est pas une bonne formule mais vous savez ce que je veux dire—pour identifier ces gens-là dans la vraie vie et rendre le fonds plus efficace.

En terminant, il y a un aspect de la politique publique dont on s'est très peu occupé, c'est-à-dire l'aspect distribution: qui gagne, qui profite, qui subventionne qui? Les gouvernements ont heureusement financé pas mal de recherche sur les aspects économiques de l'éducation, ce qui est très bien, mais malheureusement, ils se sont rarement demandé qui subventionne qui.

D'après les données très limitées dont nous disposons, il semble que ce sont les gens à faible revenu qui subventionnent les classes moyennes et les classes supérieures, simplement parce que ce sont celles-ci qui font des études.

Il y a une autre question, celle de l'inter-financement parmi le groupe à faible revenu. À ce niveau-là, la participation est relativement faible car certaines familles participent, mais la majorité n'en profitent pas. Il y a donc un problème de distribution, et il convient d'analyser la politique publique dans cette optique, qui...

• 1315

Le président: Merci. Pourriez-vous conclure? Autrement, nous n'aurons pas le temps de poser des questions.

M. David Stager: Merci. Tout à fait.

Le président: Nous allons limiter cela à une question par personne.

Monsieur Harris, je vous prie de ne pas poser une question à trois ou quatre volets, ce que vous faites toujours lorsque je dis cela.

M. Dick Harris: Madame Jason, il s'agit là d'une seule question.

Vous avez dit que les collèges professionnels privés ont été écartés des critères du fonds du millénaire. Vous avez ajouté que les collèges professionnels permettaient à leurs étudiants d'accéder au monde du travail plus rapidement et qu'en raison de la formation plus intensive que vous offrez, ils deviennent des contribuables plus rapidement. À mon avis, le gouvernement fait une bonne affaire et, en toute franchise, j'estime qu'il est honteux que vous ayez été écartés.

Vos étudiants sont-ils admissibles aux prêts étudiants et, s'ils ne le sont pas, peuvent-ils déduire leurs frais de scolarité à un moment ou à un autre?

Mme Addie Jason: Les deux. Ils sont admissibles à des prêts étudiants et ils peuvent déduire leurs frais de scolarité.

M. Dick Harris: Donc, ils peuvent déduire leurs frais de scolarité.

Mme Addie Jason: Oui.

M. Dick Harris: D'accord. Ce n'est pas le cas des étudiants d'université.

Mme Addie Jason: Non, mais...

M. Dick Harris: D'après ce que j'ai compris.

Mme Addie Jason: ...parlez-vous d'un crédit d'impôt?

M. Dick Harris: Oui, d'un crédit d'impôt ou d'une déduction fiscale.

Mme Addie Jason: Je pense que les universités le peuvent.

M. Dick Harris: Les étudiants.

Mme Addie Jason: Les étudiants qui fréquentent l'université peuvent le faire.

M. Dick Harris: Ils le peuvent?

Mme Addie Jason: Bien sûr. Tout le monde bénéficie de cela.

M. Dick Harris: D'accord.

M. Paul Kitchin: J'aimerais apporter une précision lorsque nous disons qu'on nous a écartés. En fait, ce qui nous inquiète, c'est qu'il semble y avoir deux poids deux mesures. Un établissement public est automatiquement admissible, mais un établissement privé dépend d'une décision discrétionnaire des membres du conseil d'administration de la fondation. Et cela nous inquiète énormément.

M. Dick Harris: D'accord. Merci.

Je n'ai qu'une brève question à poser à M. Stager.

Pensez-vous que nous avons trop de places dans les universités à l'heure actuelle? Y a-t-il plus d'universités qu'on en a besoin?

M. David Stager: Pas au total, même s'il y a un certain problème de diversité. À mon avis, il y a trop de programmes axés sur les humanités et pas assez de programmes professionnels spécialisés. Et cela se reflète dans les listes d'attente, les contingents, etc.

Le président: Merci.

C'est tout, monsieur Harris? C'est très gentil.

Madame.

[Français]

Mme Christiane Gagnon: Ma question s'adresse à M. Stager. Je suis également assez sceptique concernant l'objectif poursuivi par l'attribution des bourses du millénaire, mais pas pour les mêmes raisons que vous.

Est-ce que vous avez consulté les étudiants et les associations étudiantes au sujet de votre proposition et de l'impact qu'il y aurait par rapport à l'endettement des étudiants? Est-ce que c'est une idée qui vient d'une association étudiante ou si c'est quelque chose que vous avez vous-même pensé et suggéré?

[Traduction]

M. David Stager: Si vous parlez précisément des prêts à remboursement fondé sur le revenu, j'en discute avec les étudiants depuis 35 ans. D'habitude, je discute avec les représentants d'organismes comme ceux que vous avez entendus ce matin. J'ai du mal à comprendre pourquoi ils y sont opposés. D'habitude, leur argument c'est qu'avec un meilleur régime de prêts, les gouvernements seraient plus enclins à augmenter les frais de scolarité.

En fait, premièrement, il y a eu une augmentation des frais de scolarité suivie d'une adaptation des régimes de prêts pour tenir compte de la hausse. Deuxièmement, même pour ce qui est des prêts conventionnels, comme les prêts étudiants du programme canadien, on a constamment relevé le maximum qui pouvait être prêté pour que le style du prêt ne modifie pas le fardeau global de l'endettement. Comme nous le reconnaissons tous, le principal problème est l'endettement de l'étudiant à faible revenu, particulièrement au cours des premières années une fois qu'il est diplômé, et c'est un problème qui pourrait être résolu par un régime dont le remboursement serait fonction du revenu.

Pour être franc, je n'ai jamais vu de critique analytique objective valable des programmes de prêts dont le remboursement est calculé selon le revenu.

[Français]

Mme Christiane Gagnon: Vous savez qu'au Québec, l'endettement des étudiants est presque deux fois moindre qu'ailleurs au Canada. C'est dû en bonne partie au fait que nous donnons des bourses aux étudiants. Donc, l'endettement y est moins évident qu'ailleurs au Canada.

• 1320

Je pense qu'avec la proposition que vous nous faites ce matin, vous agirez sur les prêts seulement. On sait que le Transfert social canadien est en train de subir des coupures. Comment les institutions vont-elles pouvoir maintenir les frais de scolarité à un niveau plus bas?

Je pense que votre proposition ferait en sorte que les institutions ne pourraient pas continuer à exiger des étudiants des frais de scolarité plus bas. J'ai l'impression qu'avec votre proposition, le fardeau serait plus lourd et la responsabilité de l'endettement beaucoup plus importante pour les étudiants, alors qu'un partage de responsabilités simplifierait l'investissement de l'argent dans les institutions et aiderait les étudiants avec des bourses et des prêts.

[Traduction]

M. David Stager: D'accord. Premièrement, je dirais—et encore là c'est une hérésie—que les étudiants n'empruntent pas assez. C'est un bon investissement. On ne s'inquiète pas des emprunts des petites entreprises, même minuscules, pourvu qu'elles soient dotées d'un bon plan d'affaires et qu'elles soient averties des risques possibles. Les gouvernements encouragent les petites entreprises à emprunter.

Les étudiants sont dans une situation analogue. Ils devraient emprunter davantage. Je m'inquiète au sujet de l'étudiant qui est dans l'impossibilité de fréquenter l'université en raison de manque de ressources financières.

Deuxièmement, pour ce qui est du Québec, cette province a encore et cela remonte à un certain temps—c'est-à-dire à 30 ans— des frais de scolarité inférieurs à ceux de bon nombre d'autres provinces, inférieurs à ceux pratiqués en Nouvelle-Écosse et en Ontario, en particulier. Par conséquent, les sommes empruntées seraient moindres. En outre, il y a au Québec un plus grand nombre d'étudiants à temps partiel qu'à temps plein. Il y a de nombreuses hypothèses quant aux raisons qui expliquent ce phénomène, et je ne me lancerai pas dans le sujet, mais je suis très au fait de la situation au Québec également. Ce sont là deux raisons importantes.

Un autre facteur explique le fait que l'endettement moyen soit plus élevé dans la province de l'Ontario. Le taux d'endettement est gonflé par l'emprunt des étudiants en médecine, en art dentaire, en droit, en hautes études commerciales—autrement dit par les étudiants des programmes professionnels. Lorsqu'ils ne sont plus admissibles... À l'époque où nous avions des subventions en Ontario, ces étudiants n'y avaient pas droit et devaient contracter des prêts. En outre, ils sont mieux placés que les autres pour rembourser. Ce sont d'ailleurs ceux qui remboursent le plus rapidement. Mais leur participation se traduit par une augmentation du fardeau d'endettement moyen des étudiants. Il est donc important de faire la distinction entre les étudiants professionnels qui empruntent et les étudiants du premier cycle inscrits en humanité et en sciences.

Votre question englobait plusieurs points, et j'espère avoir abordé les principaux.

Le président: Merci, madame Gagnon.

[Français]

Mme Christiane Gagnon: Merci.

[Traduction]

Le président: Monsieur Brison.

M. Scott Brison: Monsieur Stager, vous avez dit dans votre déclaration liminaire que toutes les provinces pourraient mettre en oeuvre leur propre régime de remboursement fondé sur le revenu. Il y a quelques années, l'Ontario a essayé d'instaurer un tel programme, mais le gouvernement fédéral, Revenu Canada, a refusé de l'administrer. Comment une province peut-elle mettre en oeuvre un programme si Ottawa refuse de l'administrer?

M. David Stager: Évidemment, si Ottawa refuse de recueillir l'argent, c'est une impossibilité.

Dans le cas de l'Ontario, il ne s'agissait pas vraiment de régime de prêts dont le remboursement était fondé sur le revenu. Le programme en question a été élaboré à la hâte et avait suscité énormément de critiques. Personnellement, j'y voyais énormément de failles. Ottawa a eu raison de ne pas vouloir participer.

M. Scott Brison: Étudiez-vous la politique en matière d'éducation au niveau primaire, secondaire et postsecondaire?

M. David Stager: J'ai très peu travaillé sur les niveaux élémentaire et secondaire surtout parce qu'il y a tant d'autres grands problèmes au niveau postsecondaire. C'est aussi ma préférence. J'ai effectué très peu de travaux au sujet des niveaux primaires et secondaires. La part du gâteau a été consacrée au niveau postsecondaire.

M. Scott Brison: Le fonds des bourses du millénaire ne profitera qu'à 7 p. 100 des étudiants qui poursuivent des études supérieures. Lorsqu'on parle d'investir au nom des Canadiens pour maximiser le rendement des contribuables canadiens, on s'aperçoit qu'on a très peu d'études sur l'incidence qu'aurait la restauration du financement aux provinces si cet investissement était consacré au niveau primaire et secondaire.

Êtes-vous au fait de certaines études sur le rendement de l'investissement de la société au niveau primaire, par rapport au niveau secondaire et au niveau postsecondaire? Qu'est-ce qui est le plus profitable pour la société à long terme?

M. David Stager: Je vous remercie de me poser cette question car c'est un domaine auquel j'entends porter une attention immédiate dans mes travaux de recherche.

Là où on en a le plus pour son argent, c'est au niveau préscolaire. L'automne dernier un professeur invité à l'Université de Toronto a fait une excellente synthèse de la recherche dans le domaine du capital humain. Tout comme moi, il a consacré sa carrière à ce sujet et en est arrivé à la conclusion qu'à l'échelle de l'OCDE, c'était à ce niveau que se trouvait le meilleur rendement et ce, pour de nombreuses raisons. On n'a pas besoin d'autant d'immobilisations. On peut aussi avoir une influence très forte sur les jeunes au cours de leur petite enfance—c'est-à-dire les enfants de deux, trois et quatre ans. Les avantages sont double en ce sens que les enfants en question sont plus susceptibles de faire des études plus poussées et que la société pour sa part y trouve son compte puisqu'elle n'a pas à faire face aux problèmes qui surviendraient autrement.

• 1325

Il ne fait absolument aucun doute dans l'esprit de quiconque a étudié le sujet que si nous ne disposons que de très peu d'argent, nous devrions l'investir dans les programmes préscolaires.

Le président: Merci.

Madame Davies.

Mme Libby Davies: Merci, monsieur Stager. J'étais d'accord avec une chose que vous avez dite dans votre déclaration liminaire, soit que...

M. David Stager: Une seulement?

Mme Libby Davies: Vous avez dit que le fonds du millénaire n'était pas le meilleur instrument de répartition des fonds.

Mais pour ce qui est de la suite... J'ai vraiment des réserves au sujet de votre hypothèse de base car il me semble qu'en préconisant cette idée d'un régime de prêt dont le remboursement serait fondé sur le revenu, vous réglez une crise après coup.

Tout d'abord, il me semble que ce genre de régime nuit aux étudiants à faible revenu. En effet, il permet le report de leur dette et non pas la réduction de leur dette. Si l'on ajoute à cela les taux d'intérêt et si les remboursements sont fondés sur le revenu, on suppose que l'étudiant paiera pendant plus longtemps. Et si les taux d'intérêt augmentent, il paiera davantage. À mon avis, ce genre de régime serait préjudiciable aux étudiants à faible revenu.

Mais il me semble que le véritable enjeu en l'occurrence est de réduire le coût de l'éducation. Si l'éducation coûte si cher, même si vous prétendez que c'est une affirmation exagérée— d'ailleurs, je pourrais vous faire part de cas dans ma circonscription qui sont tout à fait effarants—c'est parce que les frais de scolarité sont très élevés en raison du manque de financement public.

Ne convenez-vous pas, étant donné la quantité limitée des ressources publiques, qu'il nous faut restaurer la confiance dans le système public en le finançant de façon générale pour abaisser les frais de scolarité et le coût de l'éducation? Cela n'aurait-il pas une plus grande incidence sur l'accessibilité?

M. David Stager: Sans vouloir vous manquer de respect, j'ai essayé de trouver dans vos propos une affirmation avec laquelle je serais d'accord. Je crois en avoir trouvé une ou deux.

Non, nous ne voulons pas réduire le coût de l'éducation. En fait, c'est l'une de nos préoccupations. Nous avons besoin d'injecter davantage d'argent dans l'éducation, et particulièrement au niveau supérieur et ce, pour réussir à atteindre deux objectifs.

Nous devons améliorer la qualité. Nous avons au Canada au système universitaire plutôt homogène comparativement à celui des pays de l'Union européenne, des États-Unis et même de l'Australie, qui est un État-nation semblable au nôtre. Nous n'avons pas une gamme assez diversifiée de débouchés pour les étudiants et voilà pourquoi certains de nos plus brillants étudiants partent aux États-Unis. Nos programmes ne sont pas suffisamment diversifiés, comme je l'expliquais tout à l'heure à M. Harris et sur le plan de la qualité, nos programmes ne sont pas suffisamment attrayants pour intéresser nos étudiants les plus doués et leur permettre de se perfectionner. Nos établissements ont donné naissance à un programme homogène, de telle sorte que je ne suis pas d'accord pour qu'on réduise les ressources.

Deuxièmement, vous dites qu'une hausse des taux d'intérêt se traduirait par une hausse de l'endettement. À ce sujet, permettez-moi de vous dire que les facteurs économiques sont inter-reliés. En période de hausse des taux d'intérêt, les augmentations de revenu sont généralement plus élevées. Ce principe est facilement vérifiable pour la durée de la carrière d'un individu. Je pourrais vous donner d'autres raisons, mais ce n'est pas vraiment un problème.

Comme je l'ai déjà dit, il faut offrir à l'étudiant le financement dont il a besoin pour saisir cette occasion de poursuivre ses études. Cette occasion ne se présente littéralement qu'une fois dans la vie. L'occasion d'entreprendre des études supérieures à l'âge de 22 ans ne survient qu'une fois dans la vie de quelqu'un. Or, ce choix est assorti d'une vie active plus longue avec tous les avantages économiques et psychosociologiques que cela comporte.

Il faut faire en sorte d'offrir aux étudiants à la fois les meilleurs choix possibles et la possibilité de financer ces choix. Si nous avions instauré un régime de prêts à remboursement axé sur le revenu il y a 10 ou 15 ans, nous n'aurions aucun des problèmes que vous avez soulevés ce matin, ni d'ailleurs dans le budget.

Le président: Merci. Monsieur Valeri.

M. Tony Valeri (Stoney Creek, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vous remercie de vos exposés cet après-midi. Tout ce que je peux vous dire, monsieur Stager, c'est qu'il y a de nombreuses personnes assises derrière vous qui seraient ravies d'être à la table pour engager le débat sur ce que vous venez de dire.

Je vous rappelle que la Stratégie canadienne pour l'égalité des chances englobe plus que le fonds du millénaire et qu'il existe un crédit d'impôt pour l'intérêt sur les prêts étudiants.

M. David Stager: Bien sûr, et je suis d'accord avec bon nombre d'autres initiatives.

• 1330

M. Tony Valeri: Sans compter que les étudiants démunis peuvent aussi reporter l'intérêt pendant environ 54 mois maintenant.

Dans le deuxième paragraphe de votre mémoire, vous citez certains chiffres et vous posez une question. Vous dites ne pas savoir exactement comment on arrive à un ratio de 1 pour 5 à propos de ce chiffre de 100 000 étudiants.

En fait, ce calcul est fondé sur le fait qu'il y a un bassin de 500 000 étudiants qui reçoivent un prêt étudiant du gouvernement du Canada ou du gouvernement du Québec. Pour ce qui est des 100 000 étudiants, si le programme de bourses du millénaire mettait l'accent sur le besoin, comme cela a été fort bien expliqué par les témoins qui vous ont précédé, il y aurait un étudiant sur cinq dans le besoin qui recevraient l'aide que nous proposons par l'intermédiaire du fonds des bourses du millénaire. C'est ainsi qu'on est arrivé à ce ratio de 1 pour 5 et c'est pourquoi cela se retrouvait également dans les documents budgétaires.

C'était une simple précision.

Enfin, vous avez parlé des enfants d'âge préscolaire et de certaines recherches que vous souhaiteriez faire dans ce domaine. Selon vous, les ressources limitées du gouvernement devraient être consacrées à ces jeunes. C'est un sujet dont j'aimerais discuter énormément avec vous, comme sans doute bien des membres de notre comité. Nous aimerions au moins être mis au courant des résultats de vos recherches dans ce domaine. Nous serions fort intéressés à vous inviter de nouveau pour en discuter, peut-être dans le contexte des consultations prébudgétaires.

Merci.

Le président: Au nom du comité, je vous remercie tous de votre exposé. Jusqu'à maintenant, la matinée et l'après-midi ont été fructueux. Nous avons appris beaucoup et bon nombre de témoins nous ont offert des perspectives intéressantes sur ce projet de loi en particulier.

Nous reprendrons nos travaux cet après-midi de 15 h 30 à 17 heures, à la salle 269 de l'édifice de l'Ouest, c'est-à-dire la même salle.

La séance est levée.