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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FINANCE

COMITÉ PERMANENT DES FINANCES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le lundi 28 septembre 1998

• 1105

[Traduction]

Le président (M. Maurizio Bevilacqua (Vaughan—King—Aurora, Lib.)): Je déclare la séance ouverte. Je veux souhaiter la bienvenue à tous ceux qui sont là ce matin.

Vous savez que, conformément au paragraphe 108(2) et à l'article 83.1 du Règlement, le comité reprend ses consultations prébudgétaires. Nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de l'Association canadienne des producteurs d'acier, de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques, de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie, et du Sierra Club du Canada.

Nous allons entendre d'abord Jean Van Loon, présidente de l'Association canadienne des producteurs d'acier. Bienvenue.

Mme Jean Van Loon (présidente, Association canadienne des producteurs d'acier): Merci beaucoup, monsieur le président.

L'Association apprécie énormément cette occasion de discuter du prochain budget avec vos collègues et vous. Je vais profiter de ces cinq minutes pour vous expliquer un peu pourquoi notre industrie attache autant d'importance à ces questions.

Nous sommes une grande industrie au Canada. En 1997, nous avons eu un chiffre d'affaires supérieur à 11 milliards de dollars, dont plus de trois milliards de dollars d'exportations. Nous avons des usines actives dans six provinces, qui emploient 33 400 personnes. À chacun de ces employés correspondent quatre autres travailleurs dans des industries dérivées, les industries de service, les services environnementaux, la technologie de l'information et les services d'ingénierie. Notre industrie est donc un employeur important.

Dans les années 90, notre industrie a traversé une période de transformation cruciale. En effet, elle devient de plus en plus une industrie de matière grise ayant pour moteur l'évolution technologique conjuguée à une concurrence féroce. La technologie évolue à un rythme toujours accéléré, ce qui se traduit dans notre industrie par une obligation d'investir constamment du capital. Rien que depuis 1990, notre industrie a investi plus de quatre milliards de dollars en capital au Canada.

Outre cette obligation d'investir continuellement à cause de la cadence de l'évolution technologique et du rythme auquel les technologies changent dans l'industrie, nous avons besoin d'employés de plus en plus spécialisés et de cadres astucieux et novateurs. Donc, si l'on songe à la concurrence dans l'avenir, on aura besoin d'investir constamment et d'avoir du personnel très doué.

Voilà qui nous amène à notre position sur le prochain budget. Nous sommes résolument en faveur d'adopter comme grande priorité la réduction de l'endettement du Canada. À notre avis, malgré les progrès réalisés qui nous ont certainement aidés au cours de la récente période d'instabilité, le niveau d'endettement demeure trop élevé. Le Canada reste à la merci des perturbations qui secouent l'étranger et qui pourraient entraîner une fluctuation à la hausse des taux d'intérêt, ce qui freinerait les investissements que notre industrie a besoin de faire.

L'autre aspect important pour nous, c'est le fait que les niveaux de l'impôt sur le revenu sont trop hauts, un problème auquel il faut s'attaquer. Dans notre industrie, bien des sociétés ont leur siège social au Canada mais des usines ici et aux États-Unis. Il est tout à fait logique que ces entreprises envisagent à l'occasion de faire venir au siège social un cadre des États-Unis pour y assumer des fonctions importantes au Canada. Or, c'est difficile parce que les taux d'imposition sont si hauts que ces cadres subiraient une diminution sensible de leur niveau de vie s'ils venaient ici.

Il est donc primordial de réduire l'impôt. Le pays n'a probablement pas les moyens d'accorder immédiatement les réductions d'impôt nécessaires, mais le gouvernement pourrait au moins montrer qu'il s'engage dans cette voie en établissant un échéancier.

Étant donné les perspectives économiques que font entrevoir les crises qui secouent les économies du monde entier, nous croyons préférable de ne pas augmenter les dépenses des programmes de l'État, de s'en tenir à la réduction de la dette et de tendre vers une réduction des impôts.

• 1110

En terminant, certaines des recommandations présentées dans le rapport Mintz au cours de l'année nous inquiètent. Selon nous, on y suggère d'accroître l'impôt des sociétés des secteurs minier et manufacturier, uniquement au profit des autres industries. Nous trouvons que c'est irréaliste et que ça aura des conséquences néfastes pour l'économie.

Je vous remercie, monsieur le président. C'est tout ce que j'avais à dire en déclaration liminaire.

Le président: Merci beaucoup, madame Van Loon.

Nous allons maintenant entendre les représentants de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques: M. David Goffin, vice-président, Affaires et économie, et M. John B. Arnold, fiscaliste en chef.

Bienvenue.

M. David W. Goffin (vice-président, Affaires et économie, Association canadienne des fabricants de produits chimiques): Merci, monsieur le président. Nous aussi, nous sommes ravis d'être là.

L'Association canadienne des fabricants de produits chimiques défend les intérêts de plus de 70 sociétés qui sont souvent considérées comme de grandes entreprises. En fait, nos membres sont établis sur l'ensemble du pays et comptent chacun entre 50 et 5 000 employés.

Dans plus de 160 usines au Canada, nous fabriquons des produits chimiques d'une valeur de 16 milliards de dollars. Tous nos membres font de l'exportation qui représente 57 p. 100 de notre production. Il est donc évident que notre secteur doit être compétitif à l'échelle internationale s'il veut prospérer.

Nous considérons le secteur de la fabrication de produits chimiques comme la clé de voûte d'une bonne partie de l'industrie canadienne. C'est lui qui fournit les composantes de base. Par exemple, nous fournissons les intrants directs à des industries comme la construction, le matériel de transport, le plastique et le caoutchouc, les textiles, etc. Dans l'industrie primaire, nos principaux clients sont les secteurs pétrolier et gazier, minier, forestier et agricole.

L'industrie chimique canadienne est la locomotive de l'amélioration des performances environnementales non seulement au Canada mais aussi dans le monde entier. Notre programme de gestion responsable est aujourd'hui repris dans plus de 40 pays, dont nombre de pays en développement.

La gestion responsable, qui est une condition d'adhésion à notre association, c'est un principe voulant que les produits chimiques soient gérés de façon responsable tout au long de leur cycle de vie, depuis leur développement en laboratoire jusqu'à leur mise au rebut dans la décharge.

Après cette introduction, permettez-moi d'aborder les quatre questions générales que vous avez posées aux témoins. Je vais vous parler un peu du rapport Mintz, le rapport du Comité technique de la fiscalité des entreprises, et j'espère qu'on y reviendra tout à l'heure dans la discussion. Jean Van Loon l'a commenté du point de vue de son secteur. Nous tenons à préciser que nos observations à nous sur ce rapport découlent de notre propre analyse et de l'effet des recommandations du rapport sur les fabricants de produits chimiques. M. Arnold, un membre de notre comité fiscal, m'accompagne expressément dans le but de répondre aux questions concernant le rapport Mintz.

Tout d'abord, au sujet des priorités à fixer pour le dividende budgétaire, nous félicitons le gouvernement d'avoir réussi à équilibrer son budget. Par le passé, votre comité a suggéré que le gouvernement se donne pour objectif de ramener la dette à entre 50 et 60 p. 100 du PIB. Nous, nous aimerions que le gouvernement vise au moins l'extrémité inférieure de cette fourchette. Dernièrement, on m'a rapporté que le ministre Martin aurait parlé d'un objectif de 40 p. 100 du PIB, sans toutefois préciser de délai. S'il est possible de fixer un objectif plus bas à plus long terme, nous y sommes favorables.

Ensuite, au sujet des changements et des nouveaux investissements stratégiques dans le système fiscal, nous savons que le gouvernement privilégie actuellement l'impôt sur le revenu des particuliers et nous approuvons cette priorité. L'impôt des particuliers doit être plus compétitif. Nous espérons toutefois que le rapport du comité technique ne restera pas lettre morte.

Pour les fabricants de produits chimiques—et je rappelle qu'on parle uniquement au nom de notre secteur à nous—le sens général du rapport qui suggère de baisser les taux d'imposition des sociétés tout en élargissant l'assiette fiscale, rendrait notre régime fiscal plus compétitif.

Nous ne sommes pas venus vous en parler en juin dernier parce qu'on voulait faire une évaluation quantitative en nous servant de notre modèle fiscal pour les usines. Voici les résultats que nous a donnés le modèle fiscal pour une usine de polyéthylène.

Pour aider les Canadiens à se préparer au XXIe siècle, à notre avis, les gouvernements sont dans la bonne voie de façon générale. Par exemple, les accords que le gouvernement fédéral a maintenant conclus avec la plupart des provinces sur les services de formation et d'emploi sont bien. Selon nous, la clé c'est de mettre l'accent sur le perfectionnement des compétences en génie et en commerce. Dans tout le pays, on s'efforce de faire plus de technologie à l'école et de repenser les cours en conséquence. Tout ça, c'est important pour un secteur de haute technologie comme celui des produits chimiques.

• 1115

Enfin, pour que la nouvelle économie—et nous estimons évidemment que le secteur des produits chimiques en fait partie—offre des possibilités d'emploi aux Canadiens, nous croyons que l'idéal pour notre secteur serait de se concentrer sur les éléments fondamentaux de la compétitivité au Canada. Nous nous demandons un peu si le gouvernement a toujours le développement économique comme point de mire et s'il a un projet dans ce sens.

Je me souviens qu'au début du premier mandat du gouvernement, Industrie Canada venait de sortir un livre orange qui semblait être le point de départ d'une perspective globale, mais on semble en avoir dévié. Sans cette vision claire, certaines orientations politiques ont eu tendance à miner notre compétitivité—par exemple, la Loi sur les transports au Canada et son effet sur l'accès concurrentiel des expéditeurs; le recouvrement des coûts; le projet de loi C-19 sur les relations de travail, qui a réglé certains des problèmes des expéditeurs de grains mais pas les nôtres ni ceux d'autres expéditeurs; et, dans le secteur de l'environnement, quand on est allé à Kyoto et qu'on y a pris des engagements sans comprendre parfaitement quelles en seraient les conséquences économiques sur nous.

Si l'on avait une stratégie de développement économique claire, qu'est-ce qui serait capital pour nous? Le régime fiscal auquel j'ai fait allusion en commentant le rapport du comité technique. La compétitivité des transports, donc investir dans l'infrastructure et réviser en l'an 2000 la Loi sur les transports au Canada. Conserver les crédits d'impôt pour la recherche scientifique et le développement expérimental qui sont très importants pour notre secteur. Dans le domaine des politiques et de la réglementation visant l'environnement, comme je l'ai dit tout à l'heure, il faut comprendre les conséquences économiques de nos engagements, mieux accepter les mesures volontaires comme la gestion responsable, et réévaluer le système canadien d'évaluation des nouvelles substances chimiques.

En terminant, le commerce est capital pour nous. À ce sujet, nous ne pouvons demander au gouvernement de faire plus que ce qu'il a fait jusqu'à présent pour favoriser la libéralisation du commerce sur plusieurs fronts.

Voilà qui termine ma déclaration liminaire, monsieur le président. Merci beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Goffin.

Nous passons maintenant aux représentants de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie représentée par MM. Stuart Smith et David McGuinty.

Bienvenue.

[Français]

M. Stuart Smith (président, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie): Je vais faire moi-même la présentation et je vais parler en anglais. Ensuite je vais me joindre à notre directeur, M. McGuinty, pour répondre aux questions en anglais ou en français.

[Traduction]

Nous sommes très heureux d'être ici. En guise d'introduction, je vais vous dire quelques mots sur la Table ronde. La Table ronde est une organisation unique qui est aujourd'hui copiée en quelque sorte dans le monde entier. Elle regroupe des représentants de divers groupes intéressés dont l'industrie, des mouvements écologistes, des universitaires, divers groupes autochtones, des syndicats et d'autres. Les membres sont nommés par le premier ministre. Nous travaillons dans la cordialité et le respect mutuel. Nous essayons d'arriver à un consensus, mais lorsque c'est impossible, nous essayons de préciser la nature des divergences.

Notre travail me permet de vous dire que nous nous réjouissons de l'attention accordée au concept de développement durable dans le monde des affaires autant que dans le secteur de l'environnement.

Je veux vous parler de certains de nos travaux. Je vous prie de ne pas oublier que notre force, c'est la faculté de réunir toutes ces personnes et d'arriver à trouver un certain équilibre. C'est notre seule raison d'être, mais c'est néanmoins une organisation unique en ce sens.

Je vais donc vous donner quelques exemples de nos récents travaux. Je vais vous parler des rapports coût-efficacité. Nous essayons d'établir des mesures normalisées que toute entreprise pourra utiliser pour déclarer la réduction de ses déchets, que ce soit un échec ou une réussite, et sa consommation d'énergie par unité de production. Les mesures seraient normalisées au point de pouvoir apparaître dans le rapport annuel de toutes les entreprises sans présenter aucune difficulté de vérification ni de compréhension. Comme il est impossible de gérer l'inquantifiable, si l'on veut que les gens gèrent toutes ces choses, il faut les aider à les mesurer.

Il y a aussi le changement climatique. Vous savez certainement que nous avons regroupé des membres de l'Ordre du Canada pour tenir une consultation probablement sans précédent dans l'histoire du Canada. Nous avons convoqué des gens de toutes les tendances. Au bout du compte, les membres du forum ont conclu qu'il y a une incertitude scientifique au sujet du changement climatique, mais que ce n'était pas une excuse pour ne rien faire.

• 1120

Au sujet de la négociation des droits d'émission, l'un des moyens que notre pays a l'intention d'utiliser pour respecter ses engagements de Kyoto, après en avoir discuté avec le ministre des Finances, nous avons convoqué les experts de presque tous les groupes intéressés du Canada. Nous sommes en train d'énoncer les possibilités en comprenant parfaitement ce que chacune peut signifier pour le Canada.

Je vais maintenant vous exposer quelques considérations générales concernant le budget, puisque c'est le sujet d'étude de votre comité. À notre avis, il est très important de réaliser que les engagements de Kyoto pourraient avoir d'énormes répercussions sur l'économie canadienne. Nous croyons que le grand public ne comprend pas vraiment de quoi il est question. Nous sommes convaincus que les gens ignorent, rigoureusement parlant, quel est le problème des gaz à effet de serre. Ils ne se rendent pas compte que ça a un rapport avec la réduction de notre consommation d'énergie. L'énergie joue un rôle fondamental dans notre économie et dans notre mode de vie et nous croyons qu'il est absolument essentiel que les Canadiens comprennent ce qu'on leur demande, parce que ce qu'on attend d'eux n'est pas insignifiant.

À long terme, ce pourrait être très bénéfique pour notre pays, mais à court terme ça les obligera à changer certaines choses. Les gens accueilleront mal les suggestions s'ils ne comprennent pas leurs raisons d'être.

Nous proposons qu'un certain montant soit mis de côté pour permettre la diffusion de la déclaration à laquelle leurs concitoyens membres de l'Ordre du Canada en sont arrivés. C'est une déclaration très équilibrée et sage, qui ressemble à ce que les Canadiens pourraient rédiger eux-mêmes si on les plongeait dans le sujet pendant sept jours comme ces personnes l'ont été. C'est une déclaration équilibrée qui ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais je la trouve typique des Canadiens par son fair play et son sens commun.

Nous croyons aussi que, pour réaliser notre engagement de Kyoto, il faut maintenant favoriser l'économie d'énergie et l'énergie renouvelable. Dans le passé, votre comité et le ministre ont pris d'excellentes initiatives pour mettre sur le même pied les combustibles fossiles, les économies d'énergie et l'énergie renouvelable, malheureusement, il faut maintenant en avantager certains. Autrement, on n'arrivera jamais à réaliser nos engagements de Kyoto.

Je vais maintenant vous exposer des recommandations très précises dont nous avons discuté avec des fonctionnaires du ministère des Finances. La première concerne les boisés privés, surtout dans le Canada atlantique. À la suite des consultations multilatérales que nous avons menées, il s'est passé des choses dans les provinces maritimes.

Pour ce qui est des boisés, où la proportion des arbres abattus dépasse largement le seuil de durabilité et qui seront ruinés si ça continue, nous avons recommandé que les propriétaires de ces boisés jouissent d'un meilleur traitement fiscal, qu'ils soient traités plutôt comme les agriculteurs. Bien que la période d'exploitation soit très longue, puisqu'elle peut atteindre 25 ans dans certains cas, il faudrait les traiter davantage comme des agriculteurs, à une exception près.

Dans le cas d'une exploitation agricole déficitaire, le manque à gagner ne peut servir à réduire qu'un autre revenu agricole. Or, les propriétaires de petits boisés ne peuvent pas en tirer d'autres revenus. Si, année après année, ils doivent dépenser de l'argent pour gérer leurs boisés, ils doivent pouvoir déduire ce montant de leurs autres revenus parce que, la plupart du temps, ces boisés appartiennent à des camionneurs ou à des gens qui ont un autre travail. Il est donc très important que le ministère du Revenu et celui des Finances s'entendent pour autoriser cette déduction.

L'autre question—que je vais me contenter d'effleurer—concerne les terrains urbains contaminés. Elle a suscité un vif intérêt personnel de la part du ministère des Finances quand j'en ai discuté avec lui. Il faut aménager ces terrains.

Vous savez, du côté des écologistes, on essaie souvent d'empêcher les gens de faire de l'aménagement. Dans ce cas-ci, nous essayons d'amener les gens à faire de l'aménagement, parce que ces terrains valent cher. Les gens veulent les aménager et ils devraient le faire. Le marché devrait s'en charger. Ce qui retient tout le monde, c'est que les bailleurs de fonds, les banques, refusent de prêter à cause du risque d'une responsabilité illimitée à long terme.

Ce que nous proposons, c'est qu'une fois le promoteur assuré pour 100 millions de dollars, les gouvernements fédéral et provincial agissent comme réassureurs ou renforts, en formant une sorte de compagnie prenante virtuelle afin que toute dépense dont le montant excéderait celui de l'assurance n'incombe pas au bailleur de fonds. Donc, le montant en sus de l'assurance serait payé par le gouvernement.

• 1125

On pourrait le faire cas par cas. D'ailleurs, il y a de très bons précédents au Québec qui a donné l'exemple.

Je trouve que c'est extrêmement important, surtout à Toronto, à Montréal, à Vancouver et, dans une moindre mesure, à Calgary, d'adopter une telle mesure si on veut que ces terrains soient aménagés. Ça ne coûtera rien au gouvernement tout en protégeant les bailleurs de fonds.

Voilà pour notre déclaration préliminaire. Je vous remercie beaucoup.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Smith.

Nous allons maintenant entendre le directeur, Énergie et atmosphère, du Sierra Club du Canada, M. John Bennett. Bienvenue.

M. John Bennett (directeur, Énergie et atmosphère, Sierra Club du Canada): Merci, monsieur le président, mesdames et messieurs les membres du comité.

Le Sierra Club vous remercie de lui donner l'occasion de présenter son point de vue sur le prochain budget. Aujourd'hui, je représente aussi le Climate Action Network canadien qui relie quelque 120 groupes écologistes de tout le pays. Je vais tenter de vous donner une idée de ce que nous pensons de l'accord de Kyoto et de l'occasion qu'il représente. On a déjà entendu dire ce matin que ça allait coûter terriblement cher mais nous croyons que c'est une occasion en or non seulement de créer de nouveaux emplois et de la nouvelle technologie au Canada, mais aussi d'éliminer certains coûts.

On estime que, rien qu'en Ontario, la pollution atmosphérique entraîne directement des dépenses d'un milliard de dollars par année pour des services médicaux. En réduisant les émissions pour lutter contre le changement climatique, on va lutter en même temps contre la pollution atmosphérique. On devrait donc s'éviter certaines dépenses par la même occasion. On voudrait que le gouvernement fédéral prenne l'initiative de la lutte contre le changement climatique en agissant au lieu de se contenter de parler.

En réponse à votre deuxième question, nous souhaitons qu'il y ait dégrèvement d'impôt stratégique pour stimuler la prise de mesures contre le changement climatique. C'est un point qu'a abordé M. Smith en parlant d'avantager certains éléments.

En ce moment, on subventionne déjà l'énergie nucléaire à coup de centaines de millions de dollars et on continue de le faire malgré son échec en Ontario. Chacun d'entre nous subventionne l'industrie des combustibles fossiles en l'autorisant à rejeter ses déchets dans l'atmosphère et à se servir de nos poumons comme d'une poubelle, d'où des frais médicaux extrêmement élevés. C'est une subvention dont on ne tient pas compte.

Par conséquent, il faudrait chercher à mettre sur un pied d'égalité les technologies énergétiques qui ne produisent pas ces effets secondaires néfastes. On souhaiterait des mesures fiscales très semblables à celles qu'a adoptées le gouvernement fédéral l'an dernier quand il a ciblé l'éducation et décidé d'accorder de nouvelles déductions à ceux qui retournaient aux études. Même si c'était les étudiants qui en bénéficiaient, cette mesure reconnaissait que l'ensemble du Canada irait mieux si la main-d'oeuvre était plus instruite et plus compétitive.

Nous voudrions que le même genre d'initiatives soient prises pour le changement climatique, en encourageant les gens à réduire leur consommation d'énergie et à opter pour l'énergie renouvelable si possible. Si une entreprise investissait dans l'efficacité énergétique et l'économie d'énergie, on devrait lui accorder le double de la déduction dont elle profite en ce moment. Si elle investissait dans une source d'énergie renouvelable, elle devrait recevoir une triple déduction.

C'est plutôt symbolique, mais c'est une façon de dégager l'économie pour lui permettre de lutter contre le changement climatique au lieu d'essayer de planifier jusque dans les moindres détails, ce qu'on est précisément en train de faire.

De plus, le gouvernement fédéral à des intérêts dans le secteur pétrolier. Tout en nous demandant de réduire nos émissions de CO2, il détient 8 p. 100 dans le projet pétrolifère Hibernia, une part qui vaut quelque un milliard de dollars. Cet argent a été investi il y a huit ou neuf ans dans le but d'empêcher le projet de tomber à l'eau. Eh bien, le projet va bien et il produit du pétrole. Dans l'industrie pétrolière, certains ont manifesté leur intérêt à acheter cette participation. Alors, il faudrait la vendre et réinvestir cet argent dans le changement climatique. Créons un fonds national pour l'atmosphère qui servirait à financer des projets dans la société pour promouvoir des moyens de lutte contre le changement climatique que l'économie elle-même n'arrivera pas nécessairement à financer.

L'un des meilleurs exemples, c'est l'initiative écocommunautaire selon laquelle des organisations écologistes, des municipalités, les sociétés gazières et services publics locaux forment une coopérative dans leurs localités pour aller encourager les gens à réduire leurs émissions de CO2. Il y a beaucoup de renseignements là-dessus dans notre mémoire.

Enfin, je tiens à préciser que tout ce que nous suggérons accentuera la prospérité économique et créera de l'emploi et que les emplois seront créés autrement que par les programmes gouvernementaux habituels. Dans le passé, le gouvernement a opté pour des mégaprojets qui créent un nombre considérable d'emplois à certains endroits en particulier, mais aucun ailleurs. Si l'on se dotait d'une société utilisant l'énergie renouvelable, on créerait des emplois un peu partout au pays. On créerait des emplois autant au Cap-Breton qu'à Toronto. On cherche donc le moyen de lutter contre le changement climatique tout en créant des emplois.

Je vous remercie beaucoup.

• 1130

Le président: Merci beaucoup, monsieur Bennett.

Nous allons passer maintenant à la période des questions en commençant par M. Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Pas de question.

Le président: D'accord. Monsieur Riis.

M. Nelson Riis (Kamloops, Thompson et Highland Valleys, NPD): Pas de question. Je m'excuse d'être arrivé en retard, monsieur.

Le président: Monsieur Pratt.

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Merci, monsieur le président.

En parcourant le mémoire de la Table ronde nationale, l'une des déclarations à la page 2 a retenu mon attention. Elle se lit comme suit:

    En outre, il est urgent que les pouvoirs fédéraux et provinciaux s'unissent pour aider les municipalités à améliorer et à répandre le transport public urbain.

Pourriez-vous préciser ce que vous aviez en tête comme moyen d'aider les municipalités?

Laissez-moi vous parler d'un des projets auxquels j'ai travaillé ces dernières années, quand j'étais conseiller régional d'Ottawa-Carleton et membre de la Commission d'OC Transpo. L'un des dossiers dont on s'est occupé localement et sur lequel j'ai travaillé l'an dernier, c'est la question de savoir si les laissez-passer d'autobus fournis par les employeurs pouvaient être considérés comme des avantages non imposables.

Est-ce le genre de mesure que vous recommandez ou songez-vous à un programme plus général visant l'infrastructure, qui verserait directement aux municipalités des subventions de la province et du fédéral pour les aider à financer l'acquisition d'immobilisations? Évidemment, depuis quelques années, les municipalités ont été très durement touchées par les compressions des gouvernements provinciaux.

Pouvez-vous donner des précisions?

M. Stuart Smith: Certainement, monsieur Pratt. Je vous remercie beaucoup. Peut-être mon collègue voudrait-il aussi ajouter quelque chose.

Il y a deux ans, nous avons effectivement écrit au ministre des Finances pour recommander que les laissez-passer d'autobus soient déductibles. À l'époque, il nous a fait savoir que ce serait injuste puisque les frais de stationnement ne sont pas non plus... Ça avantagerait le transport en commun au détriment des parcs de stationnement, puisque ceux qui vont travailler en voiture ne bénéficieraient pas de cette déduction.

À mon avis, tout d'abord, de nombreux employeurs offrent gratuitement une place de stationnement, mais de toute façon, il est temps d'avantager le transport en commun. Si l'on veut réaliser nos engagements de Kyoto, nous n'avons d'autre choix que d'accorder des avantages. Il me semble que tout ce qui peut favoriser le transport en commun est extrêmement important.

Les véhicules de transport en commun sont actuellement tellement vides qu'on en est au point où l'essence par passager coûte plus cher pour le transport en commun que pour une voiture. C'est une situation déplorable. Ça coûte plus cher par passager parce que les véhicules sont vides. Il faut repenser ces systèmes. On n'a pas le choix.

Toronto est maintenant obligée d'augmenter ses tarifs à nouveau. Ça va nuire encore plus au transport en commun. C'est un cercle vicieux.

Nous voulons simplement dire qu'il y a très peu de mesures nous permettant de respecter avec facilité nos engagements de Kyoto, mais l'une d'elles, c'est un programme d'infrastructure ciblant le transport en commun.

Donc, je vous réponds qu'il faut les deux—des laissez-passer déductibles et un programme d'infrastructure pour le transport en commun.

Avez-vous quelque chose à ajouter?

M. David McGuinty (directeur général et premier dirigeant, Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie): J'ajouterais seulement qu'il faut relativiser. Pour l'ensemble du pays, le transport représente entre 27 et 28 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre. Dans une allocution que j'ai prononcée la semaine dernière à l'assemblée générale annuelle du conseil d'administration de l'Association des transports du Canada, par exemple, j'ai dit que le Conseil n'avait pas encore vraiment pris conscience de la réalité ou du défi, de l'ampleur de ce défi. Il va falloir apporter de gros changements. La question, c'est de savoir comment procéder pour réduire les taux? Le plus important responsable des gaz ne se situe qu'à 27 ou 28 p. 100 de l'ensemble des émissions.

M. David Pratt: Dites-moi, pensez-vous consacrer plus de temps et d'énergie à l'affaire des laissez-passer? Parce que je sais qu'un groupe au sein du Syndicat uni du transport, le syndicat qui représente la plupart des travailleurs du transport en commun, fait très activement la promotion de cette idée. Il me semble que nous avons à peine entrevu le potentiel de cette mesure. Évidemment, les Américains peuvent déduire leurs laissez-passer d'autobus depuis 10 ou 15 ans déjà.

Pensez-vous que vous allez traiter de la question pendant quelque temps encore?

M. Stuart Smith: Oui. Nous allons faire paraître très bientôt un rapport de synthèse sur le transport urbain. Nous allons revenir sur cette question et sur maintes autres. C'est certain que nous allons revenir là-dessus.

• 1135

M. David Pratt: D'accord.

Le président: Merci. Monsieur Szabo.

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je veux remercier tous les intervenants. J'ai trouvé vos exposés très clairs. Un thème toutefois est revenu à quelques reprises et je voudrais connaître vos réflexions là-dessus parce que je trouve que c'est important pour envisager l'orientation à long terme du Canada.

Le monsieur du Sierra Club a parlé du problème d'avoir à choisir entre investir dans des mesures préventives pour protéger l'environnement ou régler les problèmes une fois qu'ils ont surgi. Ce que ça suggère à un gouvernement, c'est la question de savoir si l'on a atteint le juste milieu entre les investissements dans des stratégies préventives, quel que soit le secteur, et le règlement des problèmes après coup, c'est-à-dire opter pour réagir. Il y a aussi la question de savoir si l'on s'entend sur la productivité d'un dollar dépensé pour la prévention et sur la rentabilité de la prévention par opposition à la réaction ou aux frais de règlement des problèmes après coup.

Je voudrais que les témoins nous disent si, dans le passé, le gouvernement a réussi à mettre en équilibre mesures préventives et mesures correctrices relativement aux sujets qui nous intéressent ou si vous croyez qu'il y aurait lieu de modifier les proportions.

Le président: Monsieur Bennett.

M. John Bennett: Il faudrait certainement commencer à s'interroger sur les problèmes et leurs causes. On a le choix entre se demander combien d'argent il faut allouer aux hôpitaux pour soigner les maladies respiratoires ou se demander plutôt: «Combien d'argent faudrait-il dépenser pour prévenir les troubles respiratoires parmi la population?» L'affaire est bien documentée. L'Association médicale de l'Ontario, le chef de file dans la recherche sur la pollution atmosphérique en Ontario en ce moment, affirme qu'il faut réduire considérablement les émissions qui causent des maladies.

Donc, oui c'est faisable et il faut le faire.

Le président: Est-ce qu'un autre panéliste veut intervenir?

Madame Van Loon, nous vous écoutons.

Mme Jean Van Loon: À mon avis, il est primordial d'étudier toutes les questions d'une façon éclairée et en se basant sur les faits. De façon générale, notre association serait effectivement pour une telle formule. Mais il faut absolument bien examiner la question pour déterminer quels investissements rapporteront le plus. Pour trouver le juste milieu entre la prévention et la réparation, il faut évaluer les risques relatifs des différents problèmes et les avantages relatifs des investissements dans la prévention, dans différents secteurs.

M. David Goffin: Si vous permettez, j'ajouterais que je suis d'accord avec Mme Van Loon. Je pense que depuis quelques années, le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux diffusent un message de prévention très clair. C'est du moins le message que nos entreprises ont reçu et elles ont démontré comment la prévention pouvait leur rapporter dans certains domaines précis.

Notre association publie annuellement nos réductions d'émissions et nos prévisions pour les cinq prochaines années. Comme Jean l'a dit, il faut commencer par se demander quelle est la tendance des émissions et quel est le rapport risques-avantages de nouvelles mesures visant à réduire les niveaux d'émissions qu'on a déjà réussi à diminuer passablement.

Le président: Merci, monsieur Szabo.

Si vous permettez, je voudrais vous poser une question au sujet du rapport Mintz, chapitre 9, page 18. La recommandation se lit comme suit:

    Le comité recommande que le gouvernement fédéral, en coordination et en consultation avec les provinces, envisage de remplacer la taxe d'accise fédérale sur les carburants par des écotaxes de plus large application qui produisent des recettes équivalentes et soient conçues de manière à réduire les émissions polluantes ainsi que les activités nuisibles à l'environnement.

Je suis certain qu'on peut aborder cette question sous plusieurs angles, et je voudrais savoir ce que les panélistes pensent de cette recommandation en particulier.

Nous allons commencer par M. Bennett.

• 1140

M. John Bennett: Nous croyons qu'il est temps de cesser d'imposer ce qui est bien pour imposer ce qui est mal. On peut se servir du régime fiscal comme instrument pour changer la façon de produire les biens dans notre société. En structurant le régime fiscal de façon que la production de quelque chose de néfaste pour la société coûte plus cher et soit plus compliquée que la production de quelque chose de bien pour la société, on ne gêne pas les forces économiques de la société et on lui permet de continuer à travailler, on laisse les entreprises aller de l'avant, mais on commence à réduire les effets néfastes de certains types d'entreprises. On donne des encouragements.

Je ne crois pas qu'il faille procéder en menaçant les entreprises de fermer leurs portes si elles n'apportent pas les changements demandés. Je pense qu'il est préférable de les imposer et de donner aux entreprises et aux investisseurs la possibilité à long terme d'investir dans des catégories d'entreprises et dans des types de sources d'énergie qui ne produisent pas les effets néfastes pour lesquels la société doit payer.

Nous subventionnons des industries qui sont autorisées à polluer. Quand on parle des sables bitumineux ou d'autres grandes sources uniques, et qu'ensuite on examine les montants sans faire les rapprochements qui s'imposent, alors on attaque un peu plus chaque jour les poumons de tout un chacun. Ce sont des coûts réels. Personne n'a jamais fait d'évaluation environnementale de nos poumons pour décider qu'une certaine quantité de problèmes de santé était acceptable pour qu'une entreprise fasse des profits.

Le président: Une autre intervention? Monsieur Smith.

M. Stuart Smith: Si l'on veut réaliser nos engagements de Kyoto, il faudra certainement changer le signal de prix relativement au coût de l'énergie, mais il n'est pas nécessaire que ce soit un impôt. Le régime fiscal serait une des façons de procéder. Il faut cependant être très prudent dans un pays aussi régionalisé que le nôtre pour être certain qu'on ne pénalise pas une région aux dépens d'une autre.

Mais il faut effectivement changer le signal de prix. On pourrait notamment laisser le marché s'occuper de la question en échangeant des droits d'émission. Autrement dit, lorsqu'une entreprise a droit à une certaine quantité d'émissions, essentiellement du gaz carbonique, elle devra en payer une autre pour obtenir des droits d'émissions supplémentaires; le signal de prix est alors établi par le marché et ce n'est pas tout à fait un impôt. C'est une solution que nous étudions très attentivement.

Comme dernière observation, je dirais que même si je suis personnellement tout à fait convaincu qu'il faut modifier le signal de prix, on ne peut pas s'éloigner tellement des États-Unis. Nos économies sont si étroitement liées l'une à l'autre qu'il ne serait pas sage du tout de prendre des mesures radicales au Canada si les États-Unis n'avaient pas l'intention de prendre des mesures comparables. C'est une contrainte même si nous sommes un pays indépendant et ça ne me plaît sans doute pas plus à moi qu'à vous, mais c'est néanmoins la réalité.

Je le répète, la fiscalité est un moyen de faire lever le signal de prix. Il y a aussi les échanges de droits d'émissions.

Le président: Merci, monsieur Smith. Monsieur Goffin.

M. David Goffin: Je suis d'accord en tous points avec M. Smith en ce qui concerne la fiscalité et le changement climatique. Je trouve que la recommandation du comité technique a une portée un peu plus étendue puisqu'elle vise la taxation de certains types d'émissions. C'est une formule que nous sommes certes disposés à examiner. Comme l'a dit le représentant du Sierra Club, le régime fiscal peut être utilisé pour déplacer le fardeau fiscal relatif de ce qui est bien vers ce qui est mal. Ça peut aussi être un instrument assez grossier.

Il y a déjà quelque temps que nous étudions les écotaxes, en fait depuis l'étude de la Commission de l'équité fiscale de l'Ontario il y a quelques années. La Commission avait fait une étude assez importante sur le sujet. Au bout du compte, les organisations écologistes, le gouvernement ontarien et nous avons conclu de mettre à l'essai des taxes vertes sur certaines substances données pour évaluer leurs effets par rapport à ceux de la réglementation et pour déterminer ce qu'on peut réussir au moyen de mesures facultatives. Nous ne nous sommes jamais rendus jusque là malheureusement.

Il y a des risques, c'est indéniable. Il y a sept ou huit ans, avec l'appui des manufacturiers, le gouvernement suédois a décidé de tabler sur des écotaxes tout en baissant le taux d'imposition des sociétés. Bien entendu, quelques années plus tard, les émissions ayant diminué comme prévu, le gouvernement a accusé un manque à gagner. Ce fut alors un véritable dilemme pour les manufacturiers. Lors de mon dernier séjour là-bas, ils étaient retournés au parlement pour expliquer qu'ils ne pouvaient plus réduire davantage leurs émissions sans nuire à leur compétitivité.

Donc, à notre avis, il faut faire une analyse exhaustive et approfondie de cette formule avant de passer à l'étape du projet-pilote. Nous n'hésiterions pas à participer à un tel travail.

Le président: Merci, monsieur Goffin. Monsieur Mark.

• 1145

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

Nous sommes tous bien d'accord qu'il est nécessaire de prendre soin de l'environnement. Je reconnais que cela nous offre de nouveaux débouchés dans la création de nouvelles technologies.

J'ai travaillé dans le secteur municipal et je sais que nous sommes dans une situation lamentable en ce qui concerne les stations d'épuration d'eau et de traitement des eaux usées ainsi qu'en ce qui concerne le traitement des déchets solides.

J'aurais la question suivante à vous poser. Vous recommandez que le gouvernement fédéral consacre davantage d'argent à la préservation de l'environnement mais nous n'avons aucune garantie d'atteindre ce niveau.

Monsieur Bennett, pourriez-vous—je peux certainement lui poser la question—préciser où il faudrait investir la plupart de ces recettes fiscales?

M. John Bennett: Eh bien, vous devriez vous adresser à la fédération des municipalités. Elle a déjà des projets très avant-gardistes. Elle vous demanderait de consacrer une partie des recettes fiscales à des programmes bien précis. Pour l'instant, elle s'intéresse à l'amélioration du rendement énergétique dans les édifices municipaux. Pour la plupart des municipalités, des travaux de réfection visant à réduire les émissions sont rentables. Le gouvernement fédéral a même mis des subventions à leur disposition pour leur permettre de le faire. Il est en outre facile d'obtenir des capitaux privés, parce que c'est rentable.

Le problème auquel les municipalités sont actuellement confrontées est de trouver l'argent nécessaire pour faire des études de faisabilité prouvant qu'il est effectivement possible d'économiser par exemple 60 000 $ par an et que l'on peut emprunter un million de dollars pour payer les travaux. La fédération des municipalités essaie de trouver 600 000 $ par an pendant trois ans pour lancer ce programme. Voilà un exemple précis.

Elle cherche également des encouragements afin de récupérer le méthane qui s'échappe des vieilles décharges publiques dans l'atmosphère—alors que c'est un gaz à effet de serre qui a des incidences plusieurs centaines de fois supérieures à celles du CO2—pour produire de l'électricité et chauffer les habitations et bâtiments du quartier. N'importe quelle forme d'aide fédérale pourrait par conséquent les encourager à mettre ce projet à exécution.

Dans ce cas-ci également, il leur manque l'argent nécessaire pour effectuer les études de faisabilité et préparer le terrain après quoi, le secteur privé intervient généralement et fournit la plupart des capitaux nécessaires.

M. Inky Mark: Je parlerais même d'un problème plus fondamental. Comme vous le savez, depuis au moins cinq ans la présence du parasite lamblia dans l'eau potable affecte bien des Canadiens. L'évacuation des eaux usées et les déchets humains posent de gros problèmes étant donné que la plupart des installations construites dans les années 50 et 60 tombent toutes en décrépitude.

Les travaux de réfection qui seraient nécessaires pour protéger l'environnement coûteraient plusieurs milliards de dollars. Pour l'instant, bien que nous sachions que l'aide du gouvernement fédéral est indispensable, personne ne dit qu'il doit contribuer. Toutes les municipalités canadiennes sont dans une situation désespérée.

Par conséquent, si l'on ne prévoit pas des crédits budgétaires pour essayer de régler tous ces problèmes environnementaux, nous allons... Il ne suffit pas de dire que le gouvernement fédéral devrait investir davantage de fonds dans la protection de l'environnement, encore faut-il savoir comment il va dépenser ces fonds. C'est la question que je me pose. Comment allons-nous pouvoir faire en sorte qu'il les dépense de façon judicieuse?

M. John Bennett: Je crois qu'il existe un certain nombre de programmes bien précis, comme les deux que je viens de citer mais je pense que d'une façon générale, si l'on mobilise l'économie de façon à s'engager dans la bonne voie, il n'est pas nécessaire de prévoir tous les détails. Si l'on organise le régime fiscal de façon à encourager le bien et à décourager le mal, nous ferons d'énormes progrès dans cette voie.

En ce qui concerne plus particulièrement le traitement des eaux usées, parmi les groupes dont je vous ai parlé, il y a l'Initiative écocommunautaire qui encourage notamment les Canadiens à installer des cuvettes sanitaires à débit réduit. Dans bien des localités, le problème n'est pas dû à un mauvais fonctionnement mais plutôt à une surcharge du système d'égout. Il a été installé pour un certain nombre d'habitations et ce nombre a doublé. Le problème est dû principalement au volume d'eau qui passe dans le système d'évacuation ou au débordement par temps de pluie, qui entraîne un écoulement dans les cours d'eau.

En réduisant la quantité d'eau utilisée par la population, on réduirait considérablement les immobilisations supplémentaires nécessaires à la réfection de ces usines de traitement. Les représentants de l'Initiative écocommunautaire font du porte-à-porte et remettent aux occupants des dispositifs de réduction de débit, leur permettant ainsi de rendre leur maison plus efficace sur le plan de la consommation d'eau et d'énergie.

Les programmes d'aide directe de ce genre, qui permettent d'envoyer des experts à domicile pour expliquer aux occupants ce qu'ils peuvent faire et pourquoi c'est important, produisent d'excellents résultats. C'est le genre de projets que le gouvernement fédéral devrait financer.

Le président: Merci, monsieur Bennett. Monsieur Desrochers.

• 1150

[Français]

M. Odina Desrochers (Lotbinière, BQ): J'aimerais tout d'abord remercier les gens qui se sont déplacés aujourd'hui pour nous faire connaître leurs points de vue quant à l'utilisation des surplus budgétaires. Évidemment, en écoutant vos témoignages sur les ententes de Kyoto, on constate qu'il y a deux philosophies, celle de l'Association canadienne des fabricants de produits chimiques et celle de la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie.

Ma première question s'adresse à M. Stuart Smith. Vous avez dit plus tôt que la question de l'environnement et celle de l'effet de serre avaient été largement couvertes par les médias l'hiver dernier. Vous dites aussi que les populations canadienne et québécoise ne sont pas encore au fait du problème de l'environnement et des conséquences de l'effet de serre au cours des prochaines années. Quelles actions voudriez-vous que le gouvernement fédéral entreprenne pour corriger cette situation?

M. Stuart Smith: Il est bien clair, monsieur Desrochers, que la plupart des Canadiens et Canadiennes et même des Québécois et des Québécoises comprennent qu'il y a quelque chose qui se passe. Ce qu'ils ne comprennent pas actuellement, c'est que l'effet de serre est quelque chose qui a à voir avec l'utilisation de l'énergie. Actuellement, la plupart des gens pensent que cela a à voir avec le trou dans la couche d'ozone, par exemple, ou quelque chose de semblable. On sait qu'il y a un réchauffement du climat et que cela provoque des événements comme la pluie verglaçante, comme vous le savez très bien.

Il faut qu'ils comprennent que c'est notre utilisation de l'énergie qui est la vraie cause de cet effet de serre. S'ils ne le comprennent pas, ils ne seront sans doute pas prêts à accepter une augmentation du prix de l'essence ou d'autres formes d'énergie. C'est cela qu'il faut expliquer avant de procéder à des changements de prix et de taxes ou avant d'émettre des permis pour les émanations. D'une façon ou d'une autre, cela va augmenter les prix, et il faut comprendre le problème pour accepter cela. Il faut plus de discussions, plus de débats.

Il y a un autre problème. Il va faire plus froid cet hiver et, si on continue de dire que le climat est chaud, les gens dans la rue ne vont pas croire ce que les politiciens vont leur dire. Il faut accepter que c'est un sujet très complexe. Les scientifiques divergent d'opinion entre eux et il n'y a pas de certitude absolue que cela va se produire. Cependant, il faut commencer à faire quelque chose, et c'est un message qu'il faut transmettre à la population canadienne.

Nous avons une suggestion précise quant à la façon de le faire. Je pourrais peut-être demander à mon collègue M. McGuinty de dire quelques mots là-dessus, monsieur le président.

Le président: Oui.

M. David McGuinty: Merci, monsieur Smith. Prenons l'exemple d'un sondage qui a été fait au mois de février ou mars de cette année, tout de suite après la tempête de verglas et aussi, évidemment, après les négociations de Kyoto. Presque 60 p. 100 de la population canadienne n'avait aucune information, ne savait même pas que le gouvernement canadien était à Kyoto, et 2 p. 100 des gens, tout au plus, savaient que le gouvernement canadien était revenu du Japon avec des limites concrètes.

Également, à n'importe quel moment, au Canada, il y a plus de 300 processus de consultation en marche, mais les sondages démontrent que les Canadiens et les Canadiennes ne se sont jamais sentis aussi loin de leur gouvernement.

Nous proposons d'essayer de concilier trois choses: les experts dans le domaine, le public qui comprend très peu et la classe politique canadienne, qui est entre les deux et qui essaie de prendre des décisions très difficiles.

• 1155

Nous vous proposons donc d'organiser cinq ou six tables rondes régionales, dans les Maritimes, au Québec, en Ontario, dans l'Ouest, en Colombie-Britannique et dans le Grand Nord, au Nunavut et dans les Territoires du Nord-Ouest, pour choisir 25 ou 30 citoyens ou citoyennes ordinaires, les exposer à toutes les preuves, à tout ce qui se passe dans le domaine, et leur demander d'informer leurs concitoyens et concitoyennes de ce qui se passe vraiment dans le domaine du changement climatique, avant que les gouvernements national, provinciaux et municipaux répondent par des mesures concrètes.

M. Odina Desrochers: Quand cette tournée régionale aurait-elle lieu? Certains échéanciers sont-ils connus?

M. David McGuinty: Pas exactement. Nous verrons cela cette semaine ou la semaine prochaine. Nous nous proposons de le faire au début de l'année 1999, peut-être au début de l'année financière, le 1er avril 1999. Il s'agit de s'assurer que ce travail soit complémentaire à celui du Secrétariat du changement climatique et de trouver des partenaires au Québec, dans les Maritimes et un peu partout au pays.

M. Odina Desrochers: Merci beaucoup. J'aimerais connaître l'opinion de M. Goffin à ce sujet. Perçoit-il la même problématique? Les gens sont-ils déconnectés des problèmes de l'environnement, de l'effet de serre, du changement climatique, etc?

[Traduction]

M. David Goffin: Tout ce que je puis vous donner, c'est une opinion personnelle. Ce n'est pas un sujet sur lequel notre organisation a fait une enquête.

C'est effectivement ainsi que je le perçois et c'est ce que j'ai entendu dire. Le type de démarche recommandée par la Table ronde me paraît bonne pour sensibiliser la population, si nous voulons respecter les engagements que nous avons pris à Kyoto.

[Français]

M. Odina Desrochers: Seriez-vous prêts à devenir partenaires de cette table ronde et à en faire la promotion?

[Traduction]

M. David Goffin: Si nous avons un rôle à jouer dans cette Table ronde, nous envisagerons certainement d'y participer dans le cadre de notre programme de gestion responsable par le biais duquel nous tentons d'établir ce genre de lien avec la collectivité, surtout dans nos collectivités planifiées.

[Français]

M. Odina Desrochers: Avez-vous quelque chose à ajouter, madame?

[Traduction]

Mme Jean Van Loon: Merci, monsieur le président.

Tout ce que je voudrais dire, c'est que c'est un problème qui préoccupe beaucoup notre secteur. Nous avons fait des progrès considérables en matière de réduction des émissions de CO2 en mettant l'accent sur l'efficacité énergétique. Nous avons en fait réduit nos émissions de CO2 de 16 p. 100 entre 1990 et 1996 en améliorant le rendement énergétique, même si nos livraisons totales ont augmenté. Une des entreprises qui fait partie de notre association est en train de réaliser un projet-pilote portant sur l'utilisation du méthane dégagé par les décharges à des fins productives. Nous nous intéressons donc beaucoup à cette question.

Je voudrais faire deux mises en garde en ce qui concerne l'avenir. La première, c'est qu'il ne faut pas partir du principe que les émissions de gaz à effet de serre seront réduites automatiquement si l'on augmente les prix de l'énergie. Nous sommes en train d'essayer de trouver certaines solutions technologiques à long terme très radicales et jusqu'à présent, toutes celles que nous avons trouvées nécessitent l'accès à de grosses quantités d'électricité peu coûteuse.

La deuxième mise en garde que j'ai à faire est la suivante: si vous envisagez d'imposer des taxes écologiques, n'oubliez pas que nous devons rester concurrentiels, car si notre structure fiscale est trop différente de celle de nos concurrents, l'acier que nous continuerons de consommer sera fabriqué ailleurs, probablement par une entreprise dont les émissions seront nettement supérieures aux nôtres. L'environnement ne s'en portera pas mieux et ce sera pire pour les Canadiens.

Le président: Monsieur Bennett.

M. John Bennett: En mai, la firme Pollara a fait, pour Ressources nationales Canada et Environnement Canada, un sondage qui indique que les Canadiens ne sont pas très au courant des causes exactes et ne savent pas très bien en quoi cela les concerne, mais toutes les personnes questionnées ont dit qu'elles s'attendent à ce que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership et essaie de résoudre le problème. Voilà ce qu'elles attendent du gouvernement. À mon avis, vous ne devriez pas oublier l'importance du leadership comme outil éducatif.

• 1200

Si le prochain budget contenait des mesures fiscales constructives et des mesures incitatives indiquant que l'on va essayer de régler le problème du changement climatique d'une façon précise, en accordant par exemple des avantages fiscaux aux entreprises qui feraient les investissements nécessaires pour réduire leurs émissions, ce serait une initiative constructive, qui leur permettrait d'améliorer leur image de marque. Cela leur vaudrait en outre d'être perçues comme des entreprises sérieuses.

Après avoir milité comme simple citoyen pendant la majeure partie de ma vie, je ne me fais plus beaucoup d'illusions lorsque j'entends des ministres déclarer que l'on fait quelque chose au sujet du changement climatique, que l'on a entamé un processus de consultation qui se terminera dans 18 mois et que l'on soumettra ensuite un plan. En 1990, j'ai participé à un processus de consultation qui devait aboutir à l'élaboration d'un plan au bout d'un an; en 1994, j'ai participé à d'autres consultations qui étaient censées donner naissance à un plan après deux ans et en 1996 ont eu lieu également des consultations qui devraient aboutir à un plan. Ce n'est pas ce que j'appelle du leadership. Une telle désinvolture indique aux Canadiens que les politiciens ne prennent pas ce problème au sérieux.

Il faut par conséquent prendre l'affaire au sérieux vous-mêmes et l'intégrer au système politique pour que les Canadiens voient que ce n'est pas de la frime. Il faut que ce soit prévu dans le régime fiscal. Il ne suffit pas que les ministres en parlent et que les écologistes protestent.

Il faut prendre des initiatives constructives. Imaginez un propriétaire qui pourrait déduire le prix d'achat d'une chaudière au gaz à haut rendement. Il devrait payer deux ou trois mille dollars de plus pour obtenir le meilleur modèle mais il pourrait déduire le prix d'achat. Cela lui donnerait une bonne raison de penser au changement climatique et au rendement énergétique.

Voilà une bonne initiative, une bonne façon de sensibiliser les citoyens au problème.

Le président: Monsieur Riis.

M. Nelson Riis: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'estime que le dernier commentaire de M. Bennett est très révélateur. Il indique que si nous voulons sérieusement régler le problème, il est possible de prendre des initiatives qui prouveraient aux Canadiens que les parlementaires prennent ce problème au sérieux.

J'ai deux ou trois questions assez différentes à vous poser.

Madame Van Loon, pouvez-vous nous parler des maisons à structure d'acier? J'entends parler de plus en plus souvent d'utilisation de l'acier dans la construction individuelle et je voudrais savoir ce que vous avez à dire à ce sujet.

Monsieur Smith, vos commentaires sur l'inefficacité de nos réseaux de transport public sont plutôt alarmants et indiquent qu'il faudrait faire quelque chose dans ce domaine. Mon collègue, M. Pratt, a signalé une initiative d'allégement fiscal dont nous aurons probablement l'occasion de parler davantage plus tard.

En ce qui concerne la réhabilitation des édifices publics, le gouvernement fédéral pourrait immédiatement mettre en oeuvre un programme national d'amélioration du rendement énergétique de tous les édifices fédéraux susceptible d'inciter les autres organismes publics et les entreprises à l'imiter. Auriez-vous des commentaires à faire au sujet de la valeur concrète d'une telle initiative?

C'est tout pour l'instant.

Le président: Monsieur Bennett.

M. John Bennett: Je voudrais que le gouvernement installe des panneaux solaires et des éoliennes dans tous les édifices publics où cela s'avérerait utile, dans ceux qui sont les plus connus, pour indiquer de façon visible qu'il ne se contente pas de rénover l'intérieur mais qu'il est aussi décidé à produire l'électricité nécessaire. C'est une raison pour le faire. Il est très facile de repérer les éoliennes et de voir à quoi elles servent.

Le gouvernement fédéral a un programme de réhabilitation et d'amélioration du rendement énergétique de ses édifices dont l'origine remonte aussi loin que mes souvenirs. C'est bien beau de proclamer que l'on va mettre de l'ordre dans ses affaires mais de telles déclarations ne sont pas très productives, parce qu'elles ne sont pas visibles. De tels projets n'ont pas suffisamment d'envergure pour que les Canadiens les remarquent et s'y associent. Ceux-ci ont besoin d'encouragements.

Par conséquent, je voudrais que l'on encourage davantage la population à y mettre du sien.

Le président: Merci, monsieur Bennett. Madame Van Loon.

Mme Jean Van Loon: La structure d'acier pour la construction de maisons est une méthode que l'industrie nord-américaine a mise au point depuis environ cinq ans. Il s'agit essentiellement de remplacer les 2x4 de bois traditionnels par des 2x4 d'acier galvanisé où les trous nécessaires à l'installation du câblage électrique et de la tuyauterie par exemple ont été forés d'avance.

Cette technique de construction présente de gros avantages liés à la rigidité et à la robustesse de la structure ainsi qu'à sa résistance élevée aux vents forts et aux incendies. On peut obtenir des tarifs d'assurance plus avantageux quand on a une maison à ossature d'acier, parce que la structure n'aggrave pas la situation en cas d'incendie.

Cette formule présente également un certain nombre d'avantages écologiques intéressants parce que l'on peut utiliser de l'acier recyclé pour construire une maison qui nécessiterait une quantité de bois équivalant à une vingtaine ou une trentaine d'arbres d'un pied de diamètre. Chacun de ces arbres consomme des milliers de tonnes de CO2 par année. Du fait que l'acier ne se tord pas ou ne se déforme pas, une maison à structure d'acier est très rigide. Une telle structure permet également une meilleure isolation, ce qui accroît le rendement énergétique de la maison. Par conséquent, c'est une technologie d'avenir.

• 1205

L'obstacle majeur à son implantation à l'échelle nationale est le morcellement de l'industrie du bâtiment et le manque d'uniformité des codes du bâtiment. Notre industrie et un certain nombre de fabricants essaient d'élaborer des codes ensemble et de les faire appliquer. Nous nous assurons en outre que les syndicats de la construction comprennent les outils minimums qui sont nécessaires.

Nous considérons que c'est une technique qui a de l'avenir. Elle permet en outre de réduire considérablement la quantité de déchets sur les chantiers.

M. Nelson Riis: Bien. Merci, madame Van Loon.

Le président: Monsieur Smith.

M. Stuart Smith: Les titulaires de l'Ordre du Canada qui ont participé au Forum national sur le changement climatique ont été très impressionnés par les initiatives qui ont été prises dans certaines municipalités et tout particulièrement à Toronto. Ils ont recommandé—comme l'a signalé mon collègue, M. Bennett—la création d'un fonds national pour la protection de l'atmosphère destiné à aider diverses municipalités à imiter Toronto. Ce sont elles qui savent quels édifices ont besoin de réhabilitation thermique.

Le gouvernement fédéral a déjà réhabilité certains édifices et il n'est par conséquent pas le pire exemple. Il a maintenant, comme vous le savez, un commissaire au développement durable, dont la tâche consiste à tirer les oreilles des ministères qui ne font aucun effort à cet égard. Nous estimons que c'est déjà un gros progrès.

Le problème, c'est que l'on ne peut faire que des changements qui se justifient sur le plan économique. Il faudrait modifier les prix pour que cela devienne rentable pour les Canadiens d'économiser l'énergie au lieu de la gaspiller, ou encore s'arranger pour qu'ils puissent se procurer à meilleur marché de l'équipement ou des dispositifs permettant cette économie.

Dans le contexte d'une économie de marché, si l'on ne change pas les données économiques, on va à l'encontre des intérêts du marché, ce qui n'est pas payant. Il vaut mieux collaborer avec le marché. Il suffit de s'arranger pour que celui-ci émette les bons signaux.

La négociation des droits d'émission est une solution. Les allégements fiscaux en sont une autre, tout comme les taxes énergétiques. Il faut décider quelle est la meilleure formule.

Les municipalités sont plus proches de l'action et un fonds national pour la protection de l'atmosphère ferait boule de neige. L'argent que le gouvernement fédéral y investirait aurait un effet de levier très prononcé en raison de tout le travail qui se ferait à l'échelon municipal, où l'on s'organiserait pour apporter les changements nécessaires.

Toronto a fait d'énormes progrès. La ville a réduit ses émissions de 15 à 20 p. 100.

Le président: Y a-t-il d'autres commentaires?

M. Nelson Riis: Puis-je poser une autre petite question?

Le président: Certainement, monsieur Riis.

M. Nelson Riis: Merci.

Monsieur Goffin, je ne sais pas si cette question vous concerne. Le béton relève-t-il de votre champ de compétence?

M. David Goffin: Non.

M. Nelson Riis: Bien. Dans ce cas, je m'adresse à vous tous.

Au cours d'un entretien que nous avons eu avec les producteurs de ciment, ceux-ci ont déclaré qu'ils étaient coupables de grosses infractions dans ce domaine mais que dans le cadre des travaux d'amélioration du réseau routier, l'utilisation des chaussées en béton est beaucoup plus efficace que l'asphalte sur le plan énergétique, du fait qu'un revêtement de béton ne bouge pas au passage des véhicules. Ce sera une des principales initiatives qu'ils essaieront de nous recommander, ainsi qu'à d'autres intervenants.

Avez-vous des observations à faire à ce sujet? Ce raisonnement est-il valable? Je remarque de plus en plus quand on emprunte des routes asphaltées que le passage de nombreux camions y fait apparaître de petits nids-de-poule, que je trouve très dangereux. Dans le cadre des efforts globaux que font les producteurs de ciment pour essayer de nous convaincre de remplacer les grandes routes asphaltées par des grandes routes de béton, j'estime que l'argument qu'ils invoquent, à savoir que le béton permet d'économiser de l'énergie, est intéressant.

Le président: Voudriez-vous faire des commentaires au sujet du béton?

M. John Bennett: Les recycleurs de pneus prétendraient à leur tour que l'on obtiendrait un meilleur rendement énergétique en utilisant du caoutchouc recyclé dans l'asphalte, ce qui prouve combien il est difficile pour un comité d'essayer d'atteindre un consensus après deux ou trois ans de délibérations. Ce qu'il faut, c'est mobiliser l'économie de façon à encourager les intervenants à prendre des décisions judicieuses. Comment pourriez-vous décider si c'est le béton ou l'asphalte qui est la formule la plus rentable sur le plan énergétique? Il faut laisser au marché le soin de prendre une telle décision.

Le président: Merci, monsieur Bennett. Monsieur Pratt, puis madame Bennett.

M. David Pratt: Puisqu'il a été question des municipalités, je me permets d'aborder un autre sujet important pour elles, surtout pour celles de la Fédération canadienne des municipalités, à savoir celui des réseaux de chauffage urbain.

• 1210

Je ne puis prétendre avoir lu votre document à fond, monsieur Bennett, mais je n'y trouve pas la moindre mention, ni dans celui de la Table ronde, concernant les réseaux de chauffage urbain que recommande la FCM.

Cela s'applique également dans une certaine mesure à l'industrie de l'acier. Elle recommande un système d'amortissement accéléré des biens d'équipement achetés pour accroître le rendement énergétique. Je sais que dans son cas, on se préoccupe notamment de l'énorme quantité de chaleur perdue qui réintègre l'environnement au cours du processus de refroidissement, qui ne s'applique pas exclusivement à la fabrication de l'acier mais que l'on retrouve également dans bien d'autres secteurs industriels.

Pour ceux qui ne connaissent pas bien le principe des réseaux de chauffage urbain, la Colline parlementaire en est un excellent exemple avec son installation de chauffage central. C'est précisément en cela que consiste un tel réseau, avec les conduites d'eau chaude et d'eau froide. Un tel système accroît le rendement énergétique parce que cette installation fournit le chauffage et la climatisation nécessaires à tout un secteur et remplace par conséquent un grand nombre de petites installations peu efficaces.

Avez-vous des commentaires à faire au sujet de l'importance de cette question et pourriez-vous me dire si vous êtes en faveur d'une telle formule?

Le président: Stuart Smith.

M. Stuart Smith: Une des recommandations faites dans le cadre des consultations que nous avons tenues sur l'efficacité énergétique et sur l'énergie renouvelable il y a un an et demi portait effectivement sur les réseaux de chauffage urbain.

Comme vous le savez très bien, monsieur Pratt, cela dépend de la densité du parc immobilier. Il faut que les habitations soient suffisamment proches pour que la distribution de la chaleur à partir d'une installation centrale se justifie. Comme vous l'avez dit, c'est possible dans certaines régions comme à Ottawa, par exemple. J'ai été président du conseil d'administration de l'Hôpital Général d'Ottawa. C'est un cas analogue, où l'on avait recours à la cogénération pour chauffer tous les édifices. On revendait ensuite de l'électricité à Ontario Hydro.

C'est une formule très intéressante partout où elle est applicable. La cogénération à partir de la chaleur dégagée par l'industrie, qui est un système connu dans le secteur de l'acier, est une bonne formule.

Le problème de ces réseaux de chauffage est qu'ils ne sont pas compatibles avec le développement suburbain qui caractérise le Canada, mais ils se justifieraient dans certains cas. Dans le centre-ville de Toronto par exemple, ce serait une excellente formule. Comme vous le savez, il est maintenant question de construire des installations de refroidissement utilisant les eaux du lac Ontario. C'est un excellent projet.

Ce sont des initiatives qui pourraient être encouragées à mon avis dans le cadre du programme d'infrastructure du gouvernement fédéral s'il était axé sur la conservation de l'énergie par exemple.

Le président: Madame Van Loon.

Mme Jean Van Loon: Merci, monsieur le président.

Nous reconnaissons effectivement que la construction d'une installation centrale de chauffage serait une des possibilités à envisager dans le secteur de l'acier. Les progrès réalisés par les entreprises de notre secteur ont permis de supprimer certaines étapes du processus de fabrication, ce qui réduit généralement la quantité de chaleur nécessaire. Par conséquent, elles ne peuvent plus utiliser la chaleur produite au cours des étapes antérieures du processus.

Nous pensons effectivement que cette chaleur inutilisée offre des possibilités que nous voudrions examiner de plus près.

Le président: Monsieur Goffin.

M. David Goffin: C'est la même chose dans notre secteur. Je crois que le partage des services entre plusieurs entreprises, c'est-à-dire la cogénération, est une formule qui retient de plus en plus notre attention à l'heure actuelle, face aux défis auxquels nous sommes confrontés.

Dans la circonscription de M. Gallaway par exemple, TransAlta est en train de faire d'importants investissements dans un système de cogénération dont un certain nombre d'entreprises faisant partie de notre association pourraient former la clientèle. Alors qu'autrefois le système de cogénération était utilisé par deux ou trois entreprises, un beaucoup plus grand nombre d'entreprises pourront désormais en bénéficier. Par conséquent, la région de Sarnia-Lambton est un terrain particulièrement propice à l'application de ce genre de formule.

Les pouvoirs publics peuvent prendre toutes sortes d'initiatives pour favoriser le recours à de telles méthodes, notamment en ce qui concerne la façon de traiter la cogénération et en ce qui concerne le réseau d'interconnexions.

Le président: Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Merci.

Nous avons affaire à un groupe d'experts qui est intéressant. Je voudrais que les deux représentants de l'industrie fassent des commentaires sur ce qu'ont dit les représentants des organisations écologiques en ce qui concerne la réforme fiscale. Vous ne l'avez pas indiqué dans votre mémoire. Quel genre de réforme fiscale voudriez-vous que l'on effectue pour vous encourager à faire le nécessaire pour contribuer à la protection de l'environnement?

M. David Goffin: Je me permets de prendre la parole le premier. Dans le contexte des efforts que nous déployons sur le plan du changement climatique, nous reparlerons peut-être de mesures d'encouragement à un certain moment mais je crois que d'une façon générale, l'industrie chimique préférerait disposer de délais suffisants pour procéder aux changements nécessaires et financer ces investissements elle-même, à des incitations fiscales ou autres types de mesures d'encouragement.

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Par contre, si l'on nous oblige à agir dans un délai très court et à apporter des changements radicaux, nous serons peut-être obligés de nous dissocier à regret de ce type d'initiative.

Afin de préserver notre compétitivité fiscale globale, nous préférerions la formule recommandée par le comité technique, à savoir une diminution des taux d'imposition doublée d'un élargissement de l'assiette fiscale. Cela nous permettrait d'être généralement plus concurrentiels et d'avoir davantage les moyens de faire les investissements nécessaires pour la préservation de l'environnement, en plus de toute une série d'autres investissements importants dans de nouvelles usines.

Mme Jean Van Loon: Je crois que la position des producteurs d'acier est très semblable. Si nous sommes parvenus à réduire nos émissions et à apporter toutes sortes d'améliorations, c'est en suivant le processus habituel, c'est-à-dire en investissant dans l'adoption de nouveaux procédés et de nouvelles technologies. Nous avons amélioré notre rendement et utilisons par conséquent moins d'intrants par tonne d'acier produite. Nous avons accru notre productivité. Comme je l'ai déjà signalé, c'est rentable sur toute la ligne et par conséquent il serait difficile de prétendre que telle ou telle mesure a été prise uniquement pour des raisons d'efficacité énergétique.

À notre avis, l'essentiel est de maintenir un contexte économique favorable, par le biais du budget, pour que l'industrie puisse continuer d'évaluer la situation et de faire le plus tôt possible les investissements nécessaires.

Le président: Voulez-vous faire des commentaires à ce sujet, monsieur Bennett?

M. John Bennett: J'estime que c'est un argument qui se défend mais il faut aller plus loin que cela. Il faut pousser le système plus loin. En ce qui concerne l'industrie de l'acier en particulier, je conçois qu'elle pourrait accroître sa production pour nous aider à atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés à Kyoto.

Une des réticences des municipalités à l'égard des systèmes centraux de chauffage est liée aux taxes sur la tuyauterie et à celles sur les centrales proprement dites. Je pense que la fédération vous dira notamment qu'elle voudrait que l'on applique un régime fiscal différent aux conduites.

Il y a beaucoup de mesures à prendre pour nous aider tous à réduire notre consommation d'énergie. C'est pourquoi j'ai demandé que le gouvernement fédéral fasse preuve dans ce domaine d'un certain leadership qui permettrait à tous les membres de la société d'être récompensés d'avoir pris les mesures nécessaires dans l'intérêt public.

L'industrie a déjà fait beaucoup. Dans les années 80, après la dernière crise de l'énergie, elle a réduit sa consommation d'énergie de 2 p. 100 par an, au cours d'une période de 15 ans. C'était un pas important et elle a fait de gros progrès. Elle a du même coup accru sa rentabilité.

Je me souviens d'avoir critiqué Inco dans les années 70 à propos de ses émissions d'anhydride sulfureux. Cette société s'entêtait à prétendre que c'était impossible, mais à partir du moment où elle a installé la technologie nécessaire, elle est devenue beaucoup plus rentable.

Le président: Merci, monsieur Bennett. Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Merci, monsieur le président.

Il paraît que pendant la crise énergétique des années 70, époque à laquelle on faisait dans notre pays un effort concerté pour réduire la consommation d'énergie, le meilleur résultat jamais obtenu au cours d'une année—la meilleure—était une réduction de 3 p. 100.

Je crois que pratiquement tous les témoins ont parlé des accords de Kyoto. Il paraît que, pour atteindre les objectifs de Kyoto, il faudrait une réduction générale des émissions de 4 p. 100 par an. Étant donné que dans les années 70, un des objectifs du gouvernement était d'octroyer de nombreuses subventions—nous nous souvenons par exemple que l'on s'est mis à améliorer l'isolation de toutes les maisons—, je voudrais que M. Goffin et Mme Van Loon me disent si les entreprises de leur secteur pourraient demeurer concurrentielles—compte tenu des différences qui existent entre les engagements pris par le Canada et ceux pris par les États-Unis à Kyoto—si elles étaient obligées de réduire leur consommation d'énergie de façon «substantielle», pour ne pas dire «radicale». Vous pouvez certainement répondre à ma question étant donné que vous avez des collègues américains et qu'il existe un équivalent de votre association aux États-Unis.

Mme Jean Van Loon: Il est indéniable que nous sommes dans une course quotidienne à la concurrence directe avec les producteurs américains. C'est un secteur où la concurrence est intense et où la sensibilité aux prix est très marquée.

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Si le gouvernement du Canada prend des mesures qui nous empêchent de rester concurrentiels vis-à-vis des producteurs américains et de ceux des autres régions du monde, nous perdrons notre clientèle. On continuera à produire de l'acier, mais ce ne sera plus ici et comme je l'ai déjà dit, ce ne sera pas intéressant pour l'économie. Ce ne sera pas intéressant pour elle ni pour l'environnement. Il faut par conséquent se serrer les coudes.

Je ne sais vraiment pas si l'on pourrait atteindre les objectifs qui ont été fixés à Kyoto. Nous faisons tout notre possible pour évaluer les possibilités. J'estime toutefois que l'on ne peut pas examiner la question séparément pour chaque secteur parce que, comme nous l'avons dit ce matin, certains des avantages proviendront des liens qui existent entre les divers secteurs de l'économie, entre les municipalités et l'industrie, entre les particuliers et l'économie en général.

Dans notre cas, par exemple, nous faisons partie d'un consortium mondial de producteurs d'acier qui essaient de trouver des moyens d'alléger les voitures en utilisant les aciers à haute résistance actuels. Nous avons déjà construit et montré un prototype de châssis de voiture, qui est 25 p. 100 plus léger que celui des voitures de type familial actuelles. Si l'on arrivait à alléger de 25 p. 100 le poids total des voitures et ce, pour toutes les voitures en circulation, on pourrait obtenir une réduction de la consommation d'énergie nettement supérieure à toutes les autres réductions possibles dans les procédés de production.

Le président: Merci, madame Van Loon.

Voudriez-vous faire des commentaires, monsieur Goffin?

M. David Goffin: Oui. J'essaierai de répondre à cette question.

L'objectif que nous nous sommes fixé est sans aucun doute très difficile à atteindre dans un secteur comme le nôtre. Comme vous l'avez dit, ce serait un défi de taille de vouloir apporter des améliorations du rendement énergétique analogues à celles qui ont été apportées dans les années 70. Bien que, dans l'industrie en général, les réductions ne soient pas restées au niveau de 3 p. 100, comme dans le cadre du Programme d'économie d'énergie dans l'industrie canadienne, celle-ci a trouvé que les mesures prises dans les années 70 étaient rentables et ont maintenu ce programme au cours des années 80, jusqu'à présent. Par conséquent, ce n'est pas aussi facile que cela.

Les usines de notre secteur sont à plus forte intensité carbonique que leurs concurrentes américaines. Le nombre d'entreprises pétrochimiques est particulièrement élevé dans votre circonscription. Au Canada, l'industrie a tendance à être davantage axée sur la fabrication des produits chimiques de base qu'aux États-Unis et par conséquent les difficultés sont plus grandes pour nous que pour nos concurrents américains, même si nos objectifs sont relativement identiques.

Comme l'a dit Mme Van Loon, tout ce que nous faisons ici... À l'instar des producteurs d'acier et autres types d'industries, notre secteur est disposé à faire sa part. Nous faisons tous partie des entreprises qui sont disposées à relever ce défi de leur plein gré et à prendre certaines mesures dès à présent, mais nous devons veiller en même temps à rester fondamentalement concurrentiels.

Le président: Monsieur Smith.

M. Stuart Smith: Il faut que vous compreniez que nous n'avons pas la moindre chance d'arriver à respecter les engagements de Kyoto grâce à de simples améliorations. C'est impossible. Nos industries actuelles ont englouti trop de fonds pour pouvoir procéder aux changements techniques nécessaires d'ici l'échéance prévue.

Le Canada arrivera en grande partie à respecter ses engagements en profitant de ce que l'on appelle le «mécanisme de développement propre» qui nous permettra de réaliser certains projets dans d'autres pays et d'en récolter les fruits ici. Il sera beaucoup moins coûteux de réduire la quantité de dioxyde de carbone à la tonne à l'étranger.

La fin de semaine dernière a eu lieu ici une réunion de divers ministres portant précisément sur ce sujet; il s'agissait d'une réunion préparatoire à l'assemblée de Buenos Aires. Si nous ne nous mettons pas dès à présent à apporter certains des changements très importants qui sont nécessaires, nous ne serons pas en mesure d'aller plus loin que les engagements de Kyoto, alors que ce sera indispensable si le problème du changement climatique est un tant soit peu aussi grave que ne le prétendent les scientifiques.

Les engagements de Kyoto ne contribueront pratiquement pas à régler ce problème. Ce n'est qu'un point de départ. En fin de compte, notre seul espoir est une technologie radicalement nouvelle qui nous permettrait de maintenir notre niveau de vie, sans utiliser une quantité aussi importante de combustibles fossiles qu'à l'heure actuelle, mais nous n'y arriverons pas si nous n'incitons pas la population à faire des efforts dans ce sens. Pour déclencher le mouvement, il faut lancer un signal par le biais des prix, il faut faire comprendre qu'une pénurie est imminente et que c'est d'une importance capitale pour l'avenir.

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Par conséquent, Kyoto n'est qu'un moyen de nous mettre sur la piste. C'est comme quand on veut faire un coup roulé en direction d'un trou situé à une distance égale à celle qui nous sépare de l'extrémité de cette pièce; on vise un brin d'herbe pour avoir un bon alignement. Il faut commencer à se diriger vers le but.

Rien qu'au Canada, on n'arrivera pas à faire les changements radicaux nécessaires. On ne pourra en faire qu'une partie. Je suppose que les autres seront réalisés grâce au mécanisme du développement propre ou à ce que l'on appelle les activités entreprises de concert avec d'autres pays.

Par conséquent, il ne faut pas se laisser impressionner au point de renoncer à agir, car nous risquons d'être paralysés de crainte en prenant conscience de l'ampleur du problème.

Le président: Merci, monsieur Smith.

M. Roger Gallaway: Je n'ai qu'une toute petite question à poser à M. Bennett.

Votre association, le Sierra Club, et plusieurs autres organisations ont signalé que cette situation entraîne également des coûts supplémentaires pour le système de soins de santé. À supposer que nous arrivions à atteindre les objectifs proposés par le Sierra Club ou d'autres associations, en ce qui concerne la réduction de la quantité de certains hydrocarbures et agents polluants dans l'atmosphère, on omet en quelque sorte de tenir compte du transfert transfrontalier de matières polluantes.

À supposer que l'on suive les recommandations du Sierra Club et d'autres organismes, à quels résultats réalistes pourrait-on s'attendre compte tenu du fait que la plupart des Canadiens vivent à moins de 100 miles de la frontière canado-américaine et que bien des régions canadiennes sont situées juste à côté du centre industriel des États-Unis?

M. John Bennett: Il y a deux faits qu'il ne faut pas oublier. Après des années de discussion avec les Américains au sujet des pluies acides, ces derniers ont fini par commencer à réduire leurs émissions acides après le Canada. Le Canada a pris l'initiative de réduire ses émissions. L'Ontario lui a emboîté le pas et les États-Unis ont enfin suivi le mouvement longtemps après.

Par conséquent, il est important d'être conscients qu'il est préférable de montrer l'exemple avant de demander à un autre gouvernement de prendre des mesures.

Par ailleurs, dans l'édition d'aujourd'hui du Globe and Mail, j'ai vu un article qui indique que l'EPA a annoncé jeudi une réduction de 25 p. 100 des émissions de NOx dans tous les États-Unis. Ce ne sont pas des objectifs comparables à ceux de l'Ontario. Le programme ontarien de lutte contre le smog prévoit une réduction de 45 p. 100 des émissions de NOx. C'est l'objectif que l'on espère atteindre grâce à des consultations et à des discussions. L'EPA vient d'établir un règlement indiquant que les émissions de NOx doivent être réduites de 25 p. 100. La région des États-Unis où l'électricité est principalement produite par des centrales thermiques va devoir faire des investissements colossaux pour arriver à atteindre cet objectif.

Par conséquent, quand la grande puissance voisine se met à bouger, elle le fait beaucoup plus rapidement que nous, mais nous devons montrer l'exemple. Nous devons montrer que nous avons mis de l'ordre dans nos affaires pour pousser les Américains à l'action.

Le président: Merci, monsieur Bennett. Monsieur Mark, vous pouvez poser une dernière question.

M. Inky Mark: Merci, monsieur le président.

J'ai été très heureux d'entendre M. Smith dire que les municipalités sont des chefs de file en matière d'environnement et qu'elles font effectivement des efforts pour essayer de régler le problème. Les capitaux restent la force motrice parce que les municipalités n'arrivent manifestement pas à s'attaquer sérieusement au problème. Leur seul moyen d'accroître leurs recettes, c'est d'imposer des taxes aux contribuables.

Les programmes de recyclage en vigueur dans les municipalités de toutes les régions du pays sont un bel exemple. La plupart des Canadiens sont très conscients de l'environnement et y participent généralement. En réalité, il est courant que l'on atteigne des objectifs allant jusqu'à 80 p. 100 de recyclage des déchets solides sur une période de cinq ans. Par contre, le problème majeur est que les municipalités ne savent apparemment plus que faire de toutes les matières recyclables qu'elles ont accumulées, du fait que le recyclage dépend en grande partie de l'industrie.

Voici ma question: comment serait-il possible de modifier le régime fiscal de façon à rendre le recyclage plus facile ou plus attrayant à l'échelon municipal?

Le président: Qui voudrait répondre à cette question? Monsieur Smith.

• 1230

M. Stuart Smith: J'espère ne pas décevoir mon ami, avec lequel je partage manifestement bon nombre de valeurs intéressantes.

Je ne voudrais pas que l'on utilise le système fiscal de cette façon. Sachez que notre organisme n'est pas un organisme à vocation écologique. Il essaie d'atteindre un certain équilibre entre les considérations environnementales et les affaires. Nous essayons de maintenir l'activité économique tout en protégeant l'environnement. Nous estimons que, de tous les problèmes écologiques, la pollution de l'eau et la pollution de l'air sont des problèmes beaucoup plus graves que celui de l'élimination des déchets solides.

Quand nous voyons laver des bocaux à l'eau chaude et déverser du même coup dans le réseau d'égout des substances nutritives supplémentaires qui devront être épurées à l'usine de traitement, tout cela pour récupérer des bocaux qui, périodiquement, n'ont plus aucune valeur et que l'on ne sait où entreposer, on se demande bien si l'on n'a pas fait fausse route à un certain moment. Le recyclage des métaux est manifestement beaucoup plus intéressant. C'est là-dessus qu'il faut insister. On recycle des batteries qui contiennent du plomb, de l'acier et de l'aluminium; c'est dans ce secteur que le recyclage est lucratif. De temps en temps, le papier journal est intéressant, selon la conjoncture.

Je ne voudrais pas que l'on utilise l'argent des contribuables pour financer la collecte de matières qui n'ont aucune valeur. Je me rends compte que les politiciens municipaux détestent les décharges publiques parce qu'elles leur font perdre des voix mais si elles sont bien aménagées, elles ne sont pas très dangereuses. La récupération du verre pour éviter de devoir le déverser à la décharge est une bonne initiative si c'est rentable. Sinon, cela ne m'emballe pas particulièrement.

En ce qui concerne les matières plastiques, cela dépend évidemment de la quantité. On peut recycler toutes les matières plastiques mais le problème est qu'il faut les trier par catégorie. Si l'on n'a pas une quantité suffisante de chaque type de plastique, cela ne vaut pas la peine de les trier. C'est le problème.

Par conséquent, la récupération de certaines matières plastiques dans certaines villes est rentable alors qu'elle ne l'est pas dans d'autres. Si on les déverse dans une décharge, elles finissent par produire du méthane que l'on peut en réalité récupérer. Elles produisent toutefois aussi d'autres gaz qui ne sont pas aussi inoffensifs. Il faut se préoccuper de certains gaz. On peut toutefois les contenir et les détourner; il y a moyen de faire en sorte qu'ils ne soient pas toxiques pour les humains.

Par conséquent, nous sommes effectivement en faveur des programmes de collecte sélective. Est-ce que je serais disposé à investir beaucoup d'argent provenant des poches des contribuables dans de tels programmes? Si vous me demandiez si je préférerais l'investir dans ce genre de programme ou le consacrer à l'accroissement du rendement énergétique ou encore à l'amélioration des transports publics, je vous dirais que je donnerais la priorité à l'accroissement du rendement énergétique puis aux transports en commun.

C'est mon opinion personnelle.

Le président: Merci, monsieur Mark.

M. Inky Mark: Puis-je poser une toute dernière petite question?

Le président: Oui.

M. Inky Mark: Le problème est que la population croit que si elle fait du recyclage, elle sauve l'environnement. Vous nous dites que cela n'a aucun rapport et qu'il y a un ordre de priorités. Comment transmettre ce message aux Canadiens?

M. Stuart Smith: C'est intéressant comme outil éducatif—je sais que John a hâte d'intervenir. S'il est bien de demander aux enfants de ramasser les détritus de McDonald et autres types de rebuts en leur faisant sentir que c'est une bonne action, il ne faut pas pour autant leur laisser croire que cela suffit pour protéger l'environnement et leur donner ainsi l'occasion de dire: «J'ai fait ma part; j'ai recyclé; que voulez-vous de plus?»

Certaines personnes qui passent leur temps à recycler vont acheter du lait au magasin de quartier en 4x4 et se prennent pour des cowboys qui sont au milieu du Grand Canyon. C'est ridicule. Ces véhicules ont une consommation d'essence énorme qui nous cause toutes sortes de problèmes énergétiques et pourtant tout le monde vend des 4x4. Il faut avoir l'air d'un cowboy et mépriser les autres automobilistes pour se sentir important.

Ces personnes disent qu'elles recyclent, qu'elles ont une Boîte bleue et demandent ce que l'on veut de plus. À mon avis, il ne faut pas mélanger les priorités et je ne voudrais pas que l'on utilise l'argent des contribuables pour les détourner encore davantage des véritables priorités.

Il s'agit toutefois d'une opinion personnelle.

Le président: Monsieur Bennett.

M. John Bennett: J'ai une autre opinion personnelle à exprimer.

Le plus gros problème en ce qui concerne les déchets solides est lié à l'emballage. Si l'on fait des emballages ridicules parce que c'est moins coûteux pour l'entreprise, on finit par en arriver dans notre société capitaliste et individualiste à instaurer un système collectif, autrement dit communiste, de paiement des frais d'élimination des détritus.

Si je veux acheter une chaîne stéréo et qu'elle est complètement emballée dans du polystyrène expansé et dans toutes sortes de boîtes dont il faut se débarrasser, ne serait-il pas juste entre nous que ce soit moi ou la personne qui me l'a vendue qui soit responsable de l'élimination de tous ces emballages? Pourquoi suffisait-il que je les dépose au coin de la rue en obligeant la société en général à payer pour m'en débarrasser?

Je ne sais pas comment on peut imposer des taxes pour ce service. On pourrait peut-être songer à imposer des frais sur le type d'emballage pour que ce soit les bénéficiaires qui paient les frais et non la collectivité. Si je décide de ne pas acheter des produits sous emballage, j'aurais alors un avantage.

• 1235

Le président: Merci beaucoup.

Je remercie tous les participants. Vous avez été extrêmement convaincants. L'environnement est effectivement un problème social très important. Ce qui ressort de la présente discussion est évidemment l'équilibre qu'il faut essayer d'atteindre pour faire progresser les politiques publiques en la matière.

Nous ne manquerons pas de tenir compte de vos conseils dans les recommandations que nous ferons au ministre des Finances pour le budget de 1999. Merci encore.

La séance est levée.