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FAIT Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON FOREIGN AFFAIRS AND INTERNATIONAL TRADE

COMITÉ PERMANENT DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES ET DU COMMERCE INTERNATIONAL

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 8 octobre 1998

• 0910

[Traduction]

Le président (M. Bill Graham (Toronto-Centre—Rosedale, Lib.)): La séance est ouverte. J'aimerais vous remercier de m'avoir réélu à la présidence. C'est beaucoup d'honneur. Je crois que nous aurons une année fructueuse.

J'aimerais dire bonjour à M. Patry et lui souhaiter bon retour au comité. J'aimerais aussi souhaiter la bienvenue à M. Pickard de même qu'à l'honorable Sheila Finestone. M. Stinson n'est pas ici, mais j'aimerais le saluer également. Je suis convaincu que nous travaillerons tous en étroite collaboration.

Cela dit, nous pouvons nous mettre à l'oeuvre à l'instant même. Le premier point à l'ordre du jour porte sur les résolutions, les avis de motion de M. Robinson suivis de la motion proposée par M. Turp.

Monsieur Robinson, je crois que vous aviez quelque chose à dire au sujet de votre deuxième motion. Voulez-vous nous parler des deux motions en même temps ou en traiter séparément?

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Peut-être pouvons-nous en traiter séparément. Je vais tout d'abord parler de la deuxième motion, si vous le permettez.

Après consultation avec le président et le greffier du comité, je propose un petit changement au libellé de la deuxième motion. La deuxième motion devrait se lire comme suit: Que le comité exhorte le gouvernement à fournir une aide juridique aux plaignants qui comparaissent devant la Commission des plaintes du public contre la GRC. Permettez-moi maintenant de faire quelques observations sur le fond de la motion.

Le président: Il aurait fallu que je déclare la motion irrecevable si vous l'aviez laissée dans sa forme initiale, mais on m'informe que le libellé est acceptable.

M. Svend Robinson: Merci, monsieur le président.

Je n'accaparerai pas trop longtemps le temps du comité. Je crois que les membres apprécieront l'importance fondamentale de cette question. À une réunion du comité la semaine dernière, nous avons décidé que nous n'étions pas prêts à nous pencher sur les questions qui se posent à la suite des événements qui se sont produits avant et pendant le sommet de l'APEC de novembre 1997, mais que nous allions plutôt demander à la Commission des plaintes contre le public de remplir son mandat et d'essayer de faire toute la lumière sur ce qui s'est vraiment produit.

En prenant cette décision ce comité a majoritairement déclaré que la Commission des plaintes contre le public joue un rôle tout à fait crucial. S'il en est ainsi, et j'abonde dans ce sens, il est de toute première importance que ceux qui y comparaissent puissent défendre leur cause le plus efficacement possible.

À l'heure actuelle au moins 10 avocats défendent la GRC et le gouvernement du Canada devant la Commission. Pas plus tard que cette semaine le gouvernement fédéral a embauché, aux frais de l'État bien sûr, David Scott, un avocat très éminent.

Les étudiants plaignants qui comparaissent devant cette commission n'ont reçu aucun montant d'argent pour leurs frais juridiques. Leurs avocats, Joe Arvay, c.r. et Cameron Ward, travaillent gratuitement et sans obligation pour eux parce qu'ils croient fermement en leur cause. Ils ne peuvent toutefois continuer ainsi. Ce n'est pas juste pour eux et il leur est pratiquement impossible de le faire.

J'ai parlé hier soir à Joe Arvay, qui représente Craig Jones. Il m'a confié qu'il devra se retirer de la cause à la fin de cette semaine si aucune aide juridique n'est fournie aux étudiants plaignants. Je suppose qu'il en serait de même pour Cameron Ward qui représente un certain nombre d'autres plaignants.

Cet été, la Cour fédérale du Canada a rendu un jugement. La juge Barbara Reed a statué que sans représentation par un avocat payé par le gouvernement, les plaignants ou les demandeurs se retrouveront dans une position fort désavantageuse. Ils ne pourront pas lutter à armes égales.

La Commission des plaintes du public, depuis hier matin, a de nouveau écrit au gouvernement. Elle l'avait déjà fait en juillet l'an passé. Cette lettre est signée par trois membres de la Commission et a été envoyée hier à Andy Scott, le solliciteur général. Elle s'adresse à M. Scott et porte sur le paiement des frais judiciaires des plaignants à l'audience sur le sommet de l'APEC. Je cite: «Le 31 juillet 1998, cette commission vous écrivait pour vous demander d'assumer les frais judiciaires des plaignants.»

• 0915

C'est la Commission qui dit qu'il faudrait aider financièrement les étudiants. Vous avez refusé, c'est ce que dit la lettre à tout le moins. La Commission poursuit en disant qu'elle fera tout son possible pour que les parties non représentées soient traitées avec dignité et équité.

Mais voici ce qu'elle ajoute ensuite dans la lettre d'hier adressée au ministre:

    Cependant, aux yeux du public, cette audience a pris une importance telle que la confiance du public en nos décisions et nos recommandations peut exiger une représentation par avocat distincte pour les plaignants. D'importantes questions fondamentales au sujet de ce que nous sommes en tant que Canadiens sont en jeu dans le cadre de cette audience. Nous vous exhortons à réexaminer la question du financement.

La Commission lance un appel au gouvernement et je m'adresse aux membres de ce comité. Cette semaine, lorsque j'ai soulevé cette question à la Chambre auprès du ministre, il m'a répondu qu'il n'avait pas encore reçu cette lettre, mais qu'il examinait la question.

Je crois qu'il est important que nous, en tant que comité, fassions savoir sans ambages à notre gouvernement que nous voulons que cette commission puisse travailler et qu'elle soit équitable. Elle ne sera équitable—et de toute évidence à l'heure actuelle il s'agit d'un processus accusatoire—que si les étudiants sont aussi représentés équitablement par des avocats.

J'ai des copies supplémentaires de cette lettre et je serai heureux de les mettre à la disposition des membres du comité.

[Français]

Malheureusement, la lettre a été rédigée en anglais seulement.

[Traduction]

Il ne s'agit pas d'une question partisane. Nous avons discuté sérieusement la semaine dernière du rôle de ce comité et de celui de la Commission mais, cela dit, nous croyons que celle-ci devrait faire son travail. Si la Commission elle-même et la Cour fédérale lancent un appel pour obtenir un financement adéquat pour permettre aux étudiants de comparaître devant le tribunal, et si, en tant que juge de la Cour fédérale du Canada, Barbara Reed a dit que sans ce financement la lutte ne se fait pas à armes égales, je supplie les membres de ce comité de dire sans ambages à notre gouvernement que nous voulons que toute la lumière soit faite. Une partie de tout cela touche de toute évidence des questions fondamentales relevant de la politique étrangère et il devrait y avoir une audience impartiale, ce qui signifie que les deux côtés devraient être représentés par des avocats.

Merci, monsieur le président.

L'honorable Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.): Est-ce que cette demande, comme vous l'avez expliqué, englobe toutes les personnes qui comparaissent ou s'applique-t-elle uniquement à Craig?

M. Svend Robinson: La demande d'aide juridique est en fait pour deux avocats. Il y a d'abord M. Cameron Ward qui comparaît au nom d'un certain nombre d'étudiants et Joe Arvay qui représente Craig Jones. C'est au nom des deux que la Commission des plaintes contre le public présente sa demande au gouvernement.

L'hon. Sheila Finestone: Y en a-t-il seulement deux?

M. Svend Robinson: Deux avocats, c'est exact.

Le président: La portée de cette motion est tellement plus grande. Il pourrait y avoir 25 ou 30 plaignants. Nous pourrions bien nous retrouver avec une facture de 20 millions de dollars. Êtes-vous conscients de cela? Je suppose que c'est là le sens de votre question, madame Finestone.

L'hon. Sheila Finestone: Oui, en effet.

Le président: Étant passé au travers de l'enquête sur le sang contaminé et...

L'hon. Sheila Finestone: Voilà où je voulais en venir. Quoique je comprenne les observations que vous avez faites, est-ce que cette demande se confine à ces deux groupes? Que se passe-t-il si d'autres groupes comparaissent? Doit-on s'attendre à ce qu'ils aient aussi droit à un avocat?

C'est une commission qui est censée être beaucoup moins officielle dans sa présentation et procéder différemment aux interrogatoires. J'aimerais vraiment comprendre ce que vous demandez au juste.

Le président: Puis-je faire une suggestion? Je pense que nous aurons ici tout un éventail d'observations et que vous voudrez répondre à chacune d'elles.

• 0920

M. Cannis et Mme Beaumier, du parti ministériel, souhaitent prendre la parole. MM. Turp et Mills aussi. Nous pourrions peut-être d'abord entendre M. Cannis et Mme Beaumier, procéder ensuite à un échange de vues, et revenir par après à MM. Turp et Mills.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, je suis d'accord avec vous. Toutefois, pour éviter qu'on perde trop de temps, je pourrais très bien modifier la motion et ajouter, après la «Commission des plaintes du public contre la GRC», les mots «tel que recommandé par celle-ci dans sa lettre du 6 octobre».

Cela montrerait clairement, monsieur le président, qu'il s'agit ici non pas d'une motion générale, mais d'une motion qui répond de façon précise à la demande de la Commission. Je suis prêt à appuyer tout amendement qui vise à clarifier la motion, si cela peut aider le comité.

Le président: En tant que président, je tiens à dire, monsieur Robinson, qu'il n'y a rien dans cette lettre qui indique qu'il n'y a que deux seuls plaignants ou avocats. La lettre parle de «plaignants». Cela me semble assez général.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Mais cet amendement ne réglerait-il pas le problème?

Le président: Non, parce que la motion renvoie à la lettre. Or, la lettre, si vous la lisez, me paraît assez générale. Vous semblez avoir l'impression qu'il n'y a que deux personnes qui sont visées. Vous êtes le seul à penser ainsi.

M. Charlie Penson (Peace River, Réf.): Monsieur le président, si je puis me permettre...

Le président: Oui.

M. Charlie Penson: ... il me semble que le solliciteur général comprendra bien le message. C'est à lui que la lettre a été adressée. Pourquoi ne pas lui demander de nous en fournir une copie?

Le président: De cette lettre-ci?

M. Charlie Penson: La lettre que lui a adressée la Commission afin de lui demander de l'aide juridique...

M. Bob Mills: Cette lettre est datée du 31 juillet.

M. Charlie Penson: ... du 31 juillet. Elle permettra de clarifier la situation, et nous saurons ainsi ce qui a été demandé.

Le président: Peut-être, mais ce serait bien si on arrivait à régler cette question ce matin.

M. Charlie Penson: Pourquoi n'appelle-t-on pas le bureau du ministre afin de voir si on ne peut pas avoir une copie de cette lettre?

M. Svend Robinson: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je ne cherche pas à créer des problèmes, mais uniquement à simplifier les choses pour le comité.

Le président: J'en suis conscient.

M. Svend Robinson: Nous pouvons tenir un débat sur la question. Je vais essayer de modifier la motion. En ce qui concerne la Commission et l'aide juridique offerte aux plaignants, il n'y a pas d'autres parties qui doivent comparaître devant le comité. Il n'y a pas d'autres plaignants qui vont demander de l'aide.

Une voix: Ce n'est pas ce que dit la motion.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Est-ce que la liste vient tout juste d'être établie?

M. Svend Robinson: La liste est établie, et les audiences ont débuté. Si d'autres plaignants devaient se manifester et réclamer une aide juridique, alors la Commission serait obligée de présenter une nouvelle demande. Cela n'a rien à voir avec cette demande-ci.

Néanmoins, monsieur le président, je vais essayer de reformuler le texte afin qu'il précise clairement qu'il est question ici d'une demande d'aide juridique pour les plaignants. Je peux peut-être dire, monsieur le président, qu'il s'agit ici des plaignants qui sont représentés actuellement par les avocats Cameron Ward et Joseph Arvay. On saurait alors qu'il est question ici des plaignants représentés actuellement par les avocats Cameron Ward et Joseph Arvay. Je vais essayer d'inclure cela dans la motion.

Le président: Pourquoi ne vous occupez-vous pas de cela? Nous allons entendre M. Cannis et Mme Beaumier.

M. John Cannis: J'ai une question très brève, monsieur le président. Je tiens à dire que je suis d'accord avec le contenu général de la motion.

Ma question s'adresse à mon collègue d'en face. Pourquoi Joseph Arvay a-t-il commencé à défendre les plaignants et ensuite exigé, peu de temps après, d'être payé? Vous dites dans votre exposé qu'il s'est engagé à défendre les plaignants gratuitement. Or, il a changé d'idée très rapidement.

M. Svend Robinson: Je tiens à dire, monsieur le président, que ce n'était pas peu de temps après. M. Arvay représente Craig Jones depuis de nombreux mois. C'est l'un des avocats les plus distingués de la Colombie-Britannique. Il représente les plaignants depuis le début des audiences. Il a beaucoup travaillé, longtemps avant le début des audiences, en vue de préparer la défense de M. Jones. Il a clairement dit, dès le début, qu'il ne serait pas en mesure, en tant qu'avocat principal, d'offrir ses services gratuitement pendant des mois.

Ces audiences, d'après la Commission, pourraient durer de quatre à six mois.

M. John Cannis: Mais c'est un professionnel. Il savait sûrement que ces audiences n'allaient pas durer une semaine, un mois ou trois mois.

M. Svend Robinson: Bien entendu qu'il le savait, monsieur le président.

M. John Cannis: Je trouve bizarre qu'il assume la défense des plaignants et qu'il décide, tout à coup...

M. Svend Robinson: Non. Monsieur le président...

Le président: Je voudrais éviter ce genre de discussions. Autrement, nous ne sortirons jamais d'ici. Avez-vous terminé?

M. John Cannis: Oui, monsieur le président.

Le président: Merci, monsieur Cannis.

Madame Beaumier.

Mme Colleen Beaumier (Brampton-Ouest—Mississauga, Lib.): Je veux tout simplement répéter ce que Mme Finestone a dit. Vous parlez de «plaignants». Je crois comprendre qu'ils sont 120. Vont-ils tous...

M. Bob Mills: Cela comprend la police, tout le monde. Ce sont tous les témoins.

• 0925

Mme Colleen Beaumier: D'accord, mais je ne sais pas combien il y a de plaignants. Est-ce que chaque plaignant va vouloir être représenté par un avocat?

M. Svend Robinson: Je suis en train de reformuler l'amendement.

Le président: Nous allons voir si nous pouvons trouver une réponse à cette question. Entre-temps, j'aimerais donner la parole à M. Turp, et ensuite M. Mills et M. Reed.

Monsieur Turp.

[Français]

M. Daniel Turp (Beauharnois—Salaberry, BQ): Nous allons appuyer cette motion. Le débat gravite véritablement autour de la représentation et du droit des étudiants d'avoir un recours effectif et utile.

Hier, au Comité permanent de la justice où nous étions—Mme Finestone y était d'ailleurs présente—, la secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, la députée Bakopanos, nous rappelait que les droits des étudiants existent et que ce qui était au moins aussi important dans cette démocratie, que je comparais à la démocratie indonésienne où des étudiants avaient réussi à entraîner la chute de M. Suharto, c'est qu'il y avait des recours. Vous savez très bien que des recours sans aide judiciaire, sans avocats peuvent être sans effet, inutiles, illusoires.

Quand on lit la loi qui constitue la Commission des plaintes du public contre la GRC, on se rend compte que les parties ont toute latitude pour présenter des éléments de preuve, contre-interroger des témoins et faire des observations, mais on sait fort bien que ce travail et cette représentation ne pourront être faits efficacement et utilement que s'il y a un avocat qui connaît les normes de procédure applicables devant un tribunal administratif comme celui-là.

Donc, à mon avis, il est tout à fait justifié que le gouvernement soit invité par notre comité à donner suite aux demandes mêmes de la commission, donc à donner l'appui et l'aide juridique nécessaires aux étudiants. Pour de multiples raisons et pour celle-là entre autres, celle qu'avoue même la secrétaire parlementaire du ministre de la Justice, il serait très souhaitable que ces étudiants aient une aide judiciaire et que nous montrions jusqu'à quel point nous sommes préoccupés par la représentation qui se fait dans le cadre d'une affaire qui nous intéresse, parce qu'il s'agit du droit à la liberté d'expression dans le cas d'un événement international, où des objectifs de politique étrangère semblent avoir eu préséance sur les droits fondamentaux à la liberté d'expression et à l'association des étudiants.

Je pense qu'il vaudrait la peine que vous lisiez l'article de Ross Howard et de Jane Armstrong dans ce que le Globe and Mail appelle maintenant the APEC furor. La présidente de l'Université de la Colombie-Britannique s'est vu répondre que le gouvernement et le Bureau du premier ministre devaient avoir un mot à dire dans la façon dont les étudiants s'exprimaient, et un étudiant décrit comment il a été invité ou incité à retirer des affiches sur lesquelles on lisait: Free speech, democracy, human rights. Parce qu'il avait refusé de les retirer, on l'a arrêté. Il a été arrêté parce qu'il affichait des documents qui ne faisaient que mentionner les mots free speech, democracy, human rights. Ces étudiants méritent, parce qu'il s'agit de questions d'affaires étrangères, une représentation devant les tribunaux.

[Traduction]

Le président: Madame Finestone.

L'hon. Sheila Finestone: Excusez-moi, mais je voudrais formuler une objection. Ça, c'est une hypothèse, Daniel, pas une conclusion. Je n'aime pas du tout le fait que vous considériez cela comme une véritable analyse de ce qui s'est produit. Les choses se sont peut-être déroulées ainsi, mais cela fait partie de la décision qui doit être prise. Donc, à mon avis, cet argument ne tient pas. Vous ne savez pas, jusqu'à preuve du contraire, si les choses se sont déroulées de cette façon.

[Français]

M. Daniel Turp: Madame Finestone, c'est un fait qui avait été allégué...

[Traduction]

Le président: Il s'agit là d'une divergence de vues, pas d'une objection. L'argument est peut-être valable, et vous l'avez introduit de façon très habile.

[Français]

M. Daniel Turp: Monsieur le président, nous voulons soutenir la proposition de M. Robinson.

Le président: D'accord. Merci beaucoup.

• 0930

[Traduction]

Monsieur Mills.

M. Bob Mills: Merci, monsieur le président.

Je n'ai pas l'intention de discuter de l'affaire. Nous ne sommes pas ici pour débattre de la question de savoir qui a raison et qui a tort.

Nous sommes plutôt ici pour discuter de la perception qu'a le public de la situation. Et cette perception est la suivante: vous avez la GRC qui est représentée par des avocats payés par les contribuables, vous avez d'autres témoins représentés par des avocats payés par les contribuables de la province, et vous avez une dizaine d'étudiants qui n'ont pas d'aide juridique. Actuellement, les 125 ou 126 témoins qui vont être convoqués sont tous représentés par des avocats. Toutefois, les étudiants, eux, ne bénéficient d'aucune aide. Or voilà que les avocats qui représentent les étudiants disent, «ce processus va durer six mois et nous ne pouvons pas continuer.» Ils ont sans doute commis une erreur, comme l'a mentionné M. Cannis, et présumé que les étudiants obtiendraient de l'aide, je ne le sais pas.

La loi, si on veut qu'elle soit respectée, doit être perçue comme étant équitable envers tout le monde. Cette motion, pour moi, s'applique aux étudiants qui ont porté plainte. Je pense qu'il y en a une dizaine qui ont dit, «nous avons quelque chose à dire; nous voulons déposer des plaintes contre la GRC.» Ils n'ont pas d'argent. Qu'arrivera-t-il si l'avocat se retire et que les étudiants sont obligés de se défendre seuls? Que justice soit faite ou non, on aura l'impression que le processus n'est pas équitable.

Donc, à mon avis, cette motion est recevable. Nous devrions modifier un peu le texte et préciser clairement qu'elle s'applique aux étudiants plaignants qui n'ont pas d'aide financière, que ces personnes devraient recevoir une aide des contribuables afin qu'elles puissent être représentées par des avocats. Le processus sera ainsi perçu comme étant totalement ouvert. Voilà ce dont il est question ici. C'est pour cette raison que nous appuyons la motion. Je crois que nous rendons service au processus, au gouvernement, en lui permettant de paraître comme étant totalement ouvert.

Le président: Avant d'aller plus loin, je voudrais faire une suggestion. M. Robinson a proposé de modifier sa résolution, et je présume que cela va permettre de clarifier les choses. Au lieu de soumettre les amendements à un vote formel, si tout le monde est d'accord, je vais proposer que l'on soumette cette motion à un débat. Toutefois, si quelqu'un est contre, nous allons procéder comme nous le faisons habituellement.

La résolution de M. Robinson se lit maintenant comme suit:

    Que le comité exhorte le gouvernement du Canada à fournir une aide juridique aux étudiants plaignants qui sont représentés actuellement par les avocats Joseph Arvay et Cameron Ward à la Commission des plaintes du public contre la GRC, tel que recommandé par celle-ci dans sa lettre du 6 octobre 1998 au solliciteur général du Canada.

Cette motion, à mon avis, s'applique clairement à deux avocats, et non pas à toute la batterie d'avocats qui pourraient intervenir dans le débat. C'est en tout cas l'objet de votre résolution.

M. Svend Robinson: Oui. Brièvement, l'amendement répond à la préoccupation qu'a formulée Mme Finestone, à savoir que la motion devrait être claire et précise. Je pense que Mme Beaumier a soulevé le même point. La motion s'applique aux étudiants plaignants actuellement représentés par les avocats Cameron Ward et Joseph Arvay. Autrement dit, elle ne s'applique pas aux nouveaux plaignants qui pourraient se manifester. Elle est beaucoup plus précise, monsieur le président, et j'espère qu'elle répond aux préoccupations qui ont été formulées.

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le président, si j'ai bien compris, la motion ne vise pas les autres demandes qui pourraient être soumises la semaine prochaine?

M. Svend Robinson: Oui, monsieur le président.

Le président: C'est ce que M. Robinson...

M. Sarkis Assadourian: Ce n'est pas ce qu'elle dit. Elle ne mentionne que deux avocats. Or, il se peut fort bien, la semaine prochaine, que...

Le président: Il est clair, d'après nos discussions et la résolution à l'étude, que cette motion s'applique uniquement aux deux avocats qui représentent deux groupes distincts de plaignants. S'il y a 40 nouveaux plaignants qui se manifestent la semaine prochaine, la motion ne s'appliquera pas à eux. Ils devront se défendre seuls.

Ne nous lançons pas dans un débat. Voilà ce dont il est question ici. Soit nous appuyons la recommandation, soit nous la rejetons.

• 0935

L'hon. Sheila Finestone: M. Mills n'a-t-il pas dit que la liste est maintenant complète? C'est ce que j'ai cru comprendre.

M. Bob Mills: La liste établie lors de la première réunion est complète, oui.

M. Sarkis Assadourian: Mais une demande peut être faite.

Une voix: Nous aurons établi un précédent.

M. Sarkis Assadourian: Mais est-il juste, monsieur le président, de dire oui maintenant, et non la semaine prochaine?

Le président: Monsieur Assadourian, cela peut ou non avoir une incidence sur la façon dont vous allez voter, mais ce n'est pas ce que dit la résolution. Le libellé est très clair. Seuls deux avocats sont visés.

Si vous croyez que cela risque de nous entraîner sur un terrain glissant, un argument que nous entendons souvent, alors vous devez logiquement voter d'une façon ou d'une autre. Toutefois, il s'agit là d'une divergence de vues, pas d'une objection.

J'aimerais donc revenir à la liste des intervenants et à M. Reed. Je m'excuse...

M. Charlie Penson: Nous avons une nouvelle motion, monsieur le président.

Le président: Oui.

M. Charlie Penson: Je pensais que vous aviez proposé qu'on voie si la nouvelle version reçoit l'appui du comité. Si c'est le cas, il ne sera peut-être pas nécessaire de poursuivre le débat.

Le président: Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je voulais savoir si la résolution pouvait être présentée telle quelle, sans qu'on soit obligé de soumettre les amendements à un vote.

M. Charlie Penson: Comment êtes-vous arrivé à cette conclusion?

Le président: Personne n'a formulé d'objection. Je présume que nous sommes en train de discuter de la nouvelle résolution et non de la motion originale soumise par M. Robinson. Nous comprenons l'objet visé par la résolution. Sa portée est beaucoup plus restreinte que l'autre.

Je vais donc retourner à la liste des intervenants et donner la parole à M. Reed, M. Pickard et ensuite M. Penson.

Monsieur Reed.

M. Julian Reed (Halton, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

J'ai déjà eu l'occasion de débattre de ce sujet quand j'étais député à l'Assemblée législative provinciale de l'Ontario. J'ai entendu les mêmes arguments. Le gouvernement de l'époque a choisi de payer les honoraires des avocats dans le dossier en question. Il était d'accord avec l'idée. Or, cette décision a eu pour effet d'ouvrir une boîte de Pandore et de créer toute une batterie d'avocats professionnels, de personnes spécialisées dans la préparation de mémoires, qui ont fort bien fait, financièrement, avec l'aide illimitée qui était offerte.

Si nous appuyons la motion à ce moment-ci, rien n'empêchera les avocats de dire qu'ils ont maintenant besoin de préparer des dossiers, et peut-être de prolonger aussi les audiences. Ceux qui se préoccupent de la situation financière du pays vont exiger des comptes dans un an, dans six mois. Ils vont vouloir savoir quand cette affaire va prendre fin. Nous avons ouvert les vannes et ça continue de couler.

Donc, comme je l'ai mentionné, et je me fie à mon expérience—rien n'empêchera une personne de se présenter devant le comité dans un autre cas et de dire, «vous l'avez fait dans le passé, et vous devez le faire maintenant». Autrement, ce ne serait pas juste.

Voilà pourquoi, monsieur le président, je m'oppose à cette motion.

Le président: Merci beaucoup.

Monsieur Pickard.

M. Jerry Pickard (Chatham—Kent Essex, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Je partage les inquiétudes de M. Reed, dont une en particulier. Si nous assumons les dépenses d'une personne qui conteste le gouvernement ou toute autorité au sein du gouvernement dans une poursuite, pourquoi alors ne pas payer les honoraires des meilleurs avocats du pays quand quelqu'un estime ne pas avoir été traité correctement?

• 0940

Nous avons, dans ce cas-ci, des gens qui estiment ne pas avoir été traités correctement, et je comprends très bien cela. Je sais également qu'ils ont retenu les services de deux grands avocats de la Colombie-Britannique. La question qu'il faut se poser est la suivante: allons-nous commencer à signer des chèques en blanc pour couvrir les frais juridiques de toute personne qui conteste les gestes posés par les policiers ou toute décision prise par un organisme quelconque du gouvernement?

J'ai l'impression que nous allons finir par nous trouver dans une situation où nous allons couvrir les dépenses des deux parties. Pourquoi devrait-on assumer les dépenses de la GRC, a-t-on demandé. Je continue de croire, franchement, que la GRC travaille pour le bien du pays. Elle défend les droits et assure le bien-être de tous les citoyens canadiens.

M. Bob Mills: Ce n'est pas ce que montraient les images à la télé.

M. Jerry Pickard: Les Canadiens ont intérêt à voir à ce que cette affaire soit traitée avec équité, il ne fait aucun doute là-dessus. Mais de là à payer les frais juridiques des deux parties, je ne suis pas d'accord.

Nous ne payons pas uniquement les frais des deux parties. Nous n'exerçons aucun contrôle sur le choix de l'avocat, ses honoraires. Quand j'embauche quelqu'un pour faire un travail, je sais ce que cela va me coûter. J'ai un mot à dire là-dessus. On nous a dit ce matin que les avocats aimeraient bien se faire payer pour les nombreux mois de travail qu'ils ont consacrés à ce dossier. Je ne sais pas ce que cela représente en frais juridiques, mais je présume que, d'après ce qu'ont dit les députés en face, les frais légaux seraient assez élevés.

Il est une autre question qui m'intéresse. N'y a-t-il pas un programme en Colombie-Britannique ou au Canada qui permet à une personne sans ressources d'avoir accès à des services juridiques?

M. Svend Robinson: Il s'agit ici d'une commission fédérale.

M. Jerry Pickard: Alors, pourquoi sommes-nous en train de débattre d'une question qui relève en fait de la responsabilité de quelqu'un d'autre?

Le président: Merci, monsieur Pickard.

Nous allons entendre M. Penson, suivi de MM. Strahl, Sauvageau et Mills, et enfin Mme Finestone. Nous allons ensuite tenir un vote parce que je pense que nous aurons entendu tout le monde.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'aimerais avoir la possibilité de répondre à la fin, si vous me le permettez.

M. Charlie Penson: Monsieur le président, il est question ici d'une question très fondamentale, à savoir les droits de la personne. Il est question ici d'étudiants qui n'ont tout simplement pas les moyens de payer les honoraires des avocats qui les représentent. On aurait intérêt à relire le premier paragraphe de la lettre de la Commission des plaintes du public contre la GRC. C'est une lettre lourde de conséquences, monsieur le président. Elle demande une aide financière pour les plaignants.

La Commission précise, dans la deuxième phrase, que toutes les parties non représentées seront traitées avec dignité et équité au cours du processus. Elle demande qu'on fournisse de l'aide financière aux plaignants. Il s'agit là, à mon avis, d'un argument de poids.

La Commission estime que les étudiants ne peuvent être traités équitablement du fait qu'ils n'ont pas d'argent pour retenir les services d'un avocat. Les députés d'en face ne sont peut-être pas d'accord, mais je crois qu'ils font erreur. Les étudiants méritent qu'on les aide à défendre un principe cher aux Canadiens, soit les libertés fondamentales.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Réf.): J'aimerais faire deux ou trois observations. D'abord, j'encourage les députés libéraux—et très peu d'entre eux écoutent—de tenir compte du fait que, pour être logique... le gouvernement libéral a rétabli le financement du programme de contestation judiciaire pour la même raison. Il arrive parfois qu'une personne sans ressources et incapable de se défendre ait besoin d'aide pour le faire. Je présume que c'est pour que cette raison que vous l'avez fait. C'est ce que vous avez fait. Vous avez rétabli le financement du programme de contestation judiciaire pour cette raison.

Ces gens se retrouvent dans la même situation. Ils ont besoin d'aide parce qu'ils sont étudiants. Ils n'ont rien, et bien qu'ils aient réussi à se débrouiller jusqu'ici, ils ne pourront pas tenir le coup à long terme.

Ensuite, en ce qui concerne les préoccupations qui ont été formulées au sujet des coûts, cette motion—et je n'ai pas la nouvelle version—exhorte le gouvernement du Canada à fournir une aide juridique, tout en imposant des limites. Le fait d'exhorter le gouvernement à fournir une aide juridique ne signifie pas que vous allez signer un chèque en blanc et payer tous les comptes que peuvent vous soumettre les avocats. Vous exhortez le gouvernement à faire quelque chose, et s'il est d'accord, alors bien entendu, il peut négocier une entente. Il n'est pas question ici de signer un chèque en blanc, de leur verser tant par jour, de les rémunérer à l'acte. Il y a des limites, bien sûr—il doit y en avoir—et elles s'appliquent même aux avocats du gouvernement.

• 0945

Donc, vous négociez une entente. Vous le faites après avoir obtenu l'accord du gouvernement, mais il n'y a rien qui dit que les dépenses autorisées seraient illimitées. Les dépenses seraient raisonnables, et celles-ci peuvent être négociées.

Enfin, hier, le solliciteur général a laissé entendre à la Chambre des communes qu'il avait augmenté le budget de la Commission et qu'il n'y avait aucune raison de s'inquiéter. Ce qu'il n'a pas dit, c'est que bien qu'on ait majoré le budget de la Commission, pas un sou n'a été versé aux plaignants. La Commission a reçu un montant additionnel de 600 000 $, mais pas un sou n'a été accordé aux personnes sans ressources. Pour être juste, on a majoré le budget de 600 000 $, mais sans verser un sou aux pauvres qui n'ont rien. L'argent a été versé à la Commission.

Compte tenu de l'importance de l'audience, et vu que la confiance du public est fonction de la façon dont il voit que justice est faite, je pense que le gouvernement aurait intérêt—et nous aurions intérêt à exhorter le gouvernement—à faire preuve de prudence. Si vous augmentez le budget de la Commission de 600 000 $ sans rien donner aux plaignants, vous envoyez un message négatif. C'est comme si on disait qu'on allait mettre toutes les ressources... nous en avons beaucoup pour une des deux parties, mais rien pour l'autre. C'est un message très négatif qu'on envoie là.

Le président: Merci beaucoup, monsieur Strahl.

Monsieur Sauvageau.

[Français]

Mr. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le président, je pense que nos collègues libéraux font peut-être trop de chèques en blanc. Ils ne se posent même pas de questions sur leur propre opinion personnelle, sur leur propre vision de l'avenir. Ils disent: «Ah, le ministre nous a dit qu'il faut dire cela; donc, on va dire cela.»

S'ils respectent les lois et les règles canadiennes, nos collègues libéraux devraient au moins prendre le temps... Je sais que cela ne changera rien, mais en tout cas, s'ils veulent garder leur place au comité ou lors du prochain voyage, ils doivent voter comme on le leur dit. Quand même, la lettre qui a été écrite par la Commission des plaintes du public contre la GRC le dit clairement, et ce n'est pas le ministre qui la leur a envoyée. C'est un fait.

Deuxièmement, j'aimerais savoir s'ils peuvent nous dire combien le gouvernement fédéral a dépensé en frais d'avocats pour l'affaire Airbus et pour la Commission d'enquête sur la Somalie, et combien il va dépenser pour se défendre dans l'affaire du Peppergate. Combien a-t-il dépensé pour l'hépatite C attribuable au sang contaminé par la Croix-Rouge? Mais, lorsque les règles, la loi et la Commission des plaintes du public le demandent, on commence à s'insurger sous prétexte que cela va coûter trop cher.

Le gouvernement a dépensé des millions et des millions de dollars en frais d'avocats. Ce sont des chèques en blanc que vous avez signés à ces avocats parce que vous ne leur avez pas dit, au début des commissions, que le travail ne devait pas durer plus de trois mois ou plus de cinq mois. Non, on leur a dit: «Let's go, vous devez nous défendre et il faut gagner. Si jamais cela ne s'oriente pas correctement, on met un stop à la commission.»

Si on a le moindrement de conscience, on ne peut faire autrement que respecter la lettre de la Commission des plaintes du public et respecter le droit des Canadiens et des Canadiennes d'être défendus de façon convenable dans un pays où on commence déjà à brimer la liberté d'expression.

Je vous remercie, monsieur le président. Cela m'a fait plaisir.

Le président: Merci, monsieur Sauvageau.

Monsieur Turp, et ensuite Mme Finestone.

M. Daniel Turp: Monsieur le président, vous êtes comme moi un professeur de droit international et vous savez que nous avons des obligations internationales et que nous sommes partie à un certain nombre de déclarations des Nations unies et de conventions internationales. J'aimerais juste vous citer une disposition d'une déclaration dont on va célébrer le 50e anniversaire dans quelques semaines, la Déclaration universelle des droits de l'homme, dont on se vante d'avoir été les instigateurs, dont M. Humphrey, un de nos collègues, un de nos prédécesseurs, a été l'un des instigateurs principaux.

• 0950

J'aimerais qu'avant de voter contre cette motion, les gens se rappellent que la Déclaration universelle des droits de l'homme dit, dans son article 10:

    Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle.

Mais ce recours doit être effectif. Je cite une autre disposition, à l'article 8:

    Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux...

Les droits fondamentaux, ce sont ceux-là qui sont en cause ici. C'est le droit à la liberté d'expression des étudiants lors de cette manifestation. Donc, toute personne a droit à un recours effectif contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi, mais pour que leur recours soit effectif devant cette commission, ils doivent être représentés par avocat. Nous savons tous que c'est vraiment de l'ordre de l'évidence et de la nécessité qu'ils soient représentés par avocat pour qu'ils puissent faire un plaidoyer utile, pour que le recours soit effectif, parce que leurs droits fondamentaux ont été violés et parce qu'ils prétendent qu'ils l'ont été.

Donc, je demande à ceux qui croient en cette déclaration universelle, qui, le 10 décembre prochain vont faire des discours à la Chambre des communes, qui vont utiliser l'article 31 du Règlement de la Chambre pour parler de l'importance de cette déclaration, de l'appliquer aujourd'hui et de voter en faveur de cette motion qui ne vise qu'à demander au gouvernement du Canada d'offrir à ces étudiants ce qu'il s'offre à lui-même lorsqu'il permet à des avocats de le représenter et de représenter ses agences.

Le président: Madame Finestone.

L'hon. Sheila Finestone: J'ai écouté attentivement vos remarques, monsieur Turp, et vous avez raison. Vous parlez des lois

[Traduction]

... et je suis tout à fait d'accord avec le contenu de ces articles. Monsieur le président, j'ai beaucoup réfléchi à cette question, parce que je m'intéresse beaucoup aux droits des étudiants, au droit qu'ils ont de se défendre devant la Commission. Nos inquiétudes sont tout aussi valables que celles des députés d'en face. Ils ne sont pas plus sensibles que nous, en tant que députés du parti ministériel, à la cause des étudiants parce qu'ils sont membres de l'opposition. Cet argument n'est pas fondé.

Monsieur le président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention les interventions qui ont été faites et je me suis sentie gênée, jusqu'à ce que je me rende compte que la Commission a reçu une somme additionnelle de 600 000 $—je me trompe peut-être, mais je crois que c'est le montant qui a été mentionné—pour poursuivre ses travaux de manière efficace, dans l'intérêt des citoyens canadiens. D'après moi, la Commission a l'obligation de faire en sorte que les étudiants soient représentés. Je ne veux pas dénigrer la Commission ou laisser entendre qu'elle cherche à obtenir plus de fonds, parce que si c'est le cas, elle devra s'y prendre autrement. Je ne vois pas pourquoi elle ne peut pas fournir une aide aux étudiants avec les fonds que lui a versés le gouvernement. Si j'ai tort, monsieur le président, alors je crois qu'elle devrait être en mesure de faire une nouvelle demande.

Par ailleurs, j'ai dit au début que, à ma connaissance, les audiences que tient la Commission sont différentes de celles d'un tribunal. Nous devrions laisser le processus suivre son cours, et je vous conseille de tenir compte des remarques de M. Reed qui, à mon avis, sont bien fondées. Si vous établissez des précédents maintenant, vous pourriez avoir des problèmes plus tard.

Donc, monsieur le président, comme je suis une personne sensible, comme chacun de mes collègues, je crois, parce que je vois—je connais bien le langage du corps, monsieur le président, au cas où cela n'aurait pas été évident, et je pense que tous les députés de ce côté-ci se sont demandé... En ce qui me concerne, j'étais très préoccupée. J'ai écouté attentivement les interventions qui ont été faites et je suis arrivée à la conclusion que cette motion n'est pas nécessaire. Je vais certainement voter contre.

• 0955

Le président: Merci, madame Finestone.

Je vais donner la parole à M. Bachand avant de passer à M. Robinson. Je vais vous laisser le mot de la fin, monsieur Robinson.

[Français]

M. André Bachand (Richmond—Arthabaska, PC): Ce sera très court. Le gouvernement a accepté de verser 600 000 $ pour la commission, et c'est probablement une première tranche. En posant ce geste, on prolonge les délais et, bien sûr, le travail de la commission. Donc, les frais d'avocats liés à la partie gouvernementale risquent d'augmenter.

Mme Finestone disait que si jamais cela se rendait devant un tribunal, ce serait autre chose. Je vous rappelle que d'autres agences ou tribunaux administratifs du Canada ont, de par leur règlement, la possibilité d'offrir et offrent de l'aide financière à des groupes qui s'opposent à eux.

Le plus bel exemple que je puisse donner est celui de l'Office de l'énergie du Canada qui, lorsqu'il construit un pipeline, octroie de l'argent à la partie adverse, qui les conteste, pour faire en sorte que la preuve soit bien présentée. Et c'est normal, parce que c'est quand même un projet important. On veut s'assurer que toutes les parties soient bien entendues contre les grosses machines que sont l'appareil gouvernemental et les sociétés paragouvernementales.

Encore une fois, je suis pas d'accord quant à la boîte de Pandore dont M. Reed parle. Monsieur Reed, je n'ai malheureusement ou heureusement pas votre expérience, mais c'est la première fois que la lettre de la Commission des plaintes du public... Je suis nouveau en politique fédérale et pour moi, cela vaut énormément, pas nécessairement en termes d'argent, mais en termes de dignité et de processus. Juste pour cela, monsieur le président, on doit se pencher sur la demande.

C'est une demande de la commission. La commission, pour être sûre que toutes les parties soient entendues et comprises par la partie adverse, incluant la partie gouvernementale et la partie étudiante, demande qu'une aide financière juridique soit offerte. Je suis désolé, mais je rejoins mon confrère Daniel Turp et je dois vous dire honnêtement qu'on ne parle pas d'une manifestation contre un projet de loi X, Y ou Z sur la Colline. On parle de droits de base, de libre expression et de la possibilité de contester des choses d'une façon pacifique.

Donc, monsieur le président, je vais appuyer la résolution de M. Robinson. Chose certaine, les gens de Colombie-Britannique et, maintenant, d'un océan à l'autre pourront juger de l'attitude des libéraux en place devant la défense des libertés fondamentales dans ce pays.

Le président: Merci.

[Traduction]

Monsieur Robinson.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'aimerais faire quelques observations et répondre directement à Mme Finestone, qui a laissé entendre que, parce que la Commission avait reçu la somme additionnelle de 650 000 $, la question de la représentation des étudiants était réglée. La Commission elle-même a clairement dit qu'elle n'a pas le pouvoir, en tant que commission, de fournir une aide juridique aux plaignants. Si elle était en mesure de le faire, elle l'aurait fait depuis longtemps.

L'hon. Sheila Finestone: Cela fait partie de ses responsabilités. Vous le savez aussi bien que moi, Svend.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, la Commission n'a pas le pouvoir de payer les frais juridiques des plaignants. Elle l'a dit clairement. Le seul pouvoir qu'elle a—et ce pouvoir n'a été confirmé que par la Cour fédérale—c'est de demander au gouvernement qu'il fournisse une aide aux plaignants. Elle n'a pas le pouvoir de leur fournir une aide elle-même.

Les étudiants, les plaignants, se sont présentés à la Cour fédérale et le juge Barbara Reed a dit, et je cite:

    Les plaignants seront grandement désavantagés s'ils ne sont pas représentés par des avocats payés par l'État. Les règles du jeu ne seront pas équitables.

C'est ce que la Cour fédérale a dit. La Commission des plaintes du public, en réponse à cela, a envoyé une lettre au gouvernement le 31 juillet, lettre dans laquelle elle exhorte le gouvernement à fournir une aide juridique aux étudiants, puisqu'elle n'a pas le pouvoir de le faire elle-même. Le gouvernement a refusé.

• 1000

Le député de la circonscription où se trouve l'Université de la Colombie-Britannique, M. Ted McWhinney, député de Vancouver Quadra, a envoyé le 5 août une lettre—et j'en ai une copie—dans laquelle il affirme qu'une aide financière devrait être fournie aux étudiants. Le gouvernement n'a pas tenu compte de la demande du député de Vancouver Quadra. Bien entendu, il ne fait plus partie du comité. Le député de la circonscription a dit, s'il vous plaît, fournissez une aide aux étudiants. La Cour fédérale du Canada a dit qu'en l'absence de fonds, les règles du jeu ne seraient pas équitables. Hier, nous avons reçu une lettre de la Commission elle-même.

Si la Commission estimait avoir le pouvoir de fournir une aide aux étudiants à même les 650 000 $ qu'elle a reçus, elle l'aurait fait. Or, pas un sou ne peut être versé aux étudiants. Si Mme Finestone pense que, parce que la Commission peut puiser dans les 650 000 $ qu'elle a reçus, le problème est réglé, elle se trompe. Cet argent ne peut, en vertu de la loi, être versé aux étudiants.

Voilà le problème, et c'est pourquoi je demande aux membres du comité de faire preuve de bienveillance. Sans l'existence de règles du jeu équitables, les audiences risquent d'être une parodie de la justice. Ils n'arriveront pas à la vérité, et c'est le choix que doit faire le comité. C'est aussi simple et clair que cela.

La semaine dernière, le comité a dit qu'il fallait laisser la Commission faire son travail. La Commission a dit au gouvernement, «nous ne pouvons pas faire notre travail adéquatement; nous ne pouvons pas aller au fond de la vérité si les étudiants ne sont pas représentés par des avocats». Bon sang, le message n'est-il pas assez clair? Si la Commission pouvait se servir des 650 000 $ pour venir en aide aux étudiants, elle le ferait. Or, elle ne peut pas le faire. Les avocats vont se retirer si les étudiants ne peuvent se faire représenter.

L'hon. Sheila Finestone: Laissez faire les avocats. Ce n'est pas par eux qu'on arrive à la justice. Vous le savez aussi bien que moi.

M. Svend Robinson: Ils nous aident en tout cas à chercher la vérité. Donc, le choix est très clair.

Pour terminer, je tiens à répéter que nous avons entendu le point de vue du député libéral de cette circonscription, de la Cour fédérale, de la Commission elle-même. Nous sommes maintenant engagés dans un processus accusatoire. Ces étudiants ont le droit d'être représentés, si l'on veut que le processus soit juste et que la vérité soit connue. C'est tout ce que l'on demande. J'ai reformulé la motion afin d'indiquer clairement qu'il n'est pas question ici d'accorder un mandat illimité. La motion vise deux avocats et les étudiants qui sont actuellement représentés par ceux-ci.

Le choix est clair—et je vais terminer là-dessus. Soit on cache la vérité, soit on cherche à la connaître. Si nous ne pouvons pas établir des règles du jeu équitables, si les étudiants ne sont pas représentés adéquatement, nous ne connaîtrons pas la vérité.

Le président: Merci.

Mme Augustine souhaite avoir quelques précisions. Nous allons ensuite donner la parole à M. Cannis et ensuite à M. Speller.

Mme Jean Augustine (Etobicoke—Lakeshore, Lib.): La lettre de la Commission est datée du 6 octobre. Quand les 650 00 $...?

M. Svend Robinson: Il y a plusieurs semaines de cela.

Le président: La somme additionnelle de 650 000 $ a été versée avant que cette lettre ne soit rédigée. C'est ce que vous vouliez dire?

Mme Jean Augustine: Oui.

M. John Cannis: J'aimerais revenir à ce que M. Robinson a dit. La semaine dernière, quand nous avons soumis les motions présentées par l'opposition à un vote, nous avons dit qu'il fallait laisser la Commission faire son travail, et ils ont voté contre. Je tiens à mettre l'accent là-dessus. Aujourd'hui, les règles ne sont plus les mêmes. Je considère cela comme de l'opportunisme, et je trouve cela choquant. On cherche tout simplement à exploiter la situation, et je dis cela ouvertement parce que nous avons toujours soutenu qu'il fallait laisser la Commission faire son travail. Merci.

Le président: Monsieur Speller.

M. Bob Speller (Haldimand—Norfolk—Brant, Lib.): Dire que les étudiants ne sont pas représentés par des avocats est totalement faux. Il a communiqué avec l'avocat de la Commission, et c'est son rôle. Il a pour mandat de représenter les étudiants, et c'est ce qu'il fait. Il défend les intérêts du public, et donc, ceux des étudiants. C'est une question d'intérêt public. Dire qu'une batterie d'avocats rendra le système équitable est faux.

M. Bob Mills: Croyez-vous à la petite souris, Bob?

• 1005

M. Bob Speller: La Commission des plaintes du public est là pour défendre les intérêts du public et rétablir les faits. Laissons-la faire son travail au lieu d'amener toute une batterie d'avocats dans le processus.

M. Chuck Strahl: Vous n'avez pas besoin d'un plus grand nombre d'avocats, Bob, seulement d'un procureur.

M. Bob Speller: Mon épouse est avocate, elle aussi.

Le président: Je crois comprendre que les avocats affectés à la Commission des plaintes du public ne sont pas des avocats du gouvernement. C'est ce que M. Speller tente de dire.

L'hon. Sheila Finestone: J'aimerais apporter une précision, monsieur le président.

Le président: Vous avez discuté avec M. Robinson, et vous voulez maintenant clarifier ce que vous lui avez dit au fond de la pièce.

L'hon. Sheila Finestone: Je me suis entretenue avec les représentants du bureau du solliciteur général.

Cela fait 16 ans que M. Robinson et moi avons des divergences de vue, sauf que nous finissons toujours par arriver à la vérité, qui est généralement la mienne.

Des voix: Oh, oh!

Le président: C'est la précision que vous vouliez apporter, mais nous allons...

L'hon. Sheila Finestone: Non, sérieusement, Chris Considine est l'avocat de la Commission chargé de défendre les jeunes. Que signifient les deux dernières lignes?

M. Svend Robinson: Nous n'avons pas besoin de l'aide du solliciteur général pour savoir ce que nous devons faire.

Une voix: Vous n'avez pas besoin de rechercher la vérité.

L'hon. Sheila Finestone: Je tiens à préciser qu'il a pour mandat de défendre les intérêts des jeunes.

Le président: Nous sommes en train de nous lancer dans un débat totalement inutile.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, j'invoque le Règlement.

Le président: M. Turp voudrait savoir ce que Mme Finestone a dit. Il ne peut rien entendre avec tout ce bruit.

L'hon. Sheila Finestone: Chris Considine a pour mandat d'aider les étudiants à défendre leur cause. J'ai dit, dès le début, que cette commission est très différente des autres. Dans ce cas-ci, l'avocat a pour mandat de faire en sorte que les étudiants présentent leur cause avec efficience et efficacité. C'est ce qui compte.

M. Svend Robinson: Monsieur le président, le rôle de l'avocat de la Commission est bien défini. L'avocat de la Commission est un avocat indépendant, respecté de tous, qui agit au nom des commissaires. Les commissaires eux-mêmes ont dit que, le processus étant devenu beaucoup plus accusatoire, l'avocat ne peut prendre parti pour un côté ou pour l'autre. Comme il s'agit d'un processus accusatoire, il ne peut agir au nom des étudiants, du gouvernement ou de la GRC. Il doit agir au nom de la Commission. Monsieur le président, tel est le rôle de l'avocat de la Commission. Il n'est pas là au nom des étudiants.

Je ne sais pas, monsieur le président, quel rôle remplit le représentant du solliciteur général, Andy Scott, quand il conseille les membres du comité. Nous pourrions peut-être discuter de cela une autre fois.

Des voix: Oh, oh!

Une voix: Monsieur le président, tout cela est ridicule.

M. Julian Reed: Je soulève la question de privilège, monsieur le président. Je ne suis pas du tout d'accord. Aucun conseil n'a été donné au secrétaire parlementaire.

Le président: Je vais mettre la question aux voix, mais je tiens à préciser que les membres du comité ont le droit de consulter qui ils veulent. Monsieur Robinson, vous demandez conseil, ils demandent conseil, nous demandons tous conseil. Si je ne demandais pas conseil à Mme Hilchie, rien ici ne fonctionnerait, comme vous le savez fort bien.

Passons au vote. Je vais mettre la question aux voix. Il s'agit d'un vote par appel nominal.

(La motion est rejetée par 9 voix contre 8)

Le président: Nous avons deux autres résolutions.

• 1010

Chers collègues, nous pouvons maintenant, du moment que nous soyons dix, aller de l'avant avec la rédaction du rapport sur les armes nucléaires. Nous ne pouvons pas soumettre les résolutions à un vote si aucun représentant de l'opposition n'est présent. Je propose donc que nous nous réunissions à huis clos pour examiner le rapport en question.

Des voix: D'accord.

[Le comité se réunit à huis clos]