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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 19 novembre 1998

• 0911

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Mesdames et messieurs, merci d'avoir été si patients. Nous avons passé les dernières minutes à tenter de nous organiser.

Je suis justement un de ceux qui vont se plaindre. Il faut absolument réorganiser le système de navettes qui transportent les députés d'un édifice à l'autre.

Nous étudions aujourd'hui le projet de loi C-247 déposé par Mme Pauline Picard, qui se trouve aussi être membre de notre comité. Nous avons accepté d'accorder à Mme Picard tout le temps dont elle a besoin.

[Français]

Mme Pauline Picard (députée de Drummond, BQ): Je n'en ai pas la version française.

Le président: Nous avons convenu d'accorder à Mme Picard tout le temps nécessaire pour présenter son projet de loi et nous faire un exposé assez approfondi

[Traduction]

afin que nous puissions tous...

Une voix: Dans l'une ou l'autre langue.

Le président: Oui, c'est vrai, car je ne comprends ni l'une ni l'autre. Vous avez raison.

Des voix: Oh, oh!

[Français]

Le président: Madame, vous êtes prête, n'est-ce pas?

[Traduction]

Si vous êtes prête et que votre micro est branché, nous pourrons commencer. Nous accordons généralement de cinq à 10 minutes...

[Français]

Madame, ça ne fonctionne pas?

Mme Pauline Picard: La version française...

[Traduction]

Le président: Comme on dit chez nous, madame Picard, ce doit être un syndicat différent.

Des voix: Oh, oh!

Le président: Nous devrons faire preuve de patience quelques minutes de plus, le temps de régler ce problème de langue.

Madame Picard, vous pourriez toujours nous parler dans la langue universelle. J'ai entendu dire ce matin que, semble-t-il, la langue universelle est la gesticulation des mains. On parle toujours avec les mains. Il est vrai...

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Moi-même, je parle toujours avec les mains.

[Français]

Le président: Même dans cette langue, il y a des individus qui ont un vocabulaire beaucoup plus étendu que d'autres.

• 0915

[Traduction]

Le président: Nous pourrions toujours parler pendant 10 minutes de choses sans importance, mais je préfère, madame Picard, suspendre officiellement la séance pendant que nous réglons les problèmes techniques.

• 0916




• 0920

[Français]

Le président: Madame Picard, à vous la parole.

Mme Pauline Picard: : Merci, monsieur le président. Je suis très heureuse d'avoir l'occasion de vous présenter ce matin le projet de loi C-247, qui vise à modifier les dispositions du Code criminel au sujet du clonage humain.

Je suis accompagnée de mon adjoint parlementaire, qui pourra me conseiller au besoin et m'aider à répondre à certaines questions qui pourraient s'avérer un petit peu plus difficiles. Il a abondamment travaillé sur ce dossier.

Mon exposé durera de 12 à 15 minutes, après quoi j'aurai le plaisir de répondre à vos questions.

La première enquête gouvernementale sur les nouvelles techniques de reproduction a été instaurée en 1989 avec la Commission Baird. Cette commission avait pour mandat:

    de faire enquête sur les progrès actuels et prévisibles de la science et de la médecine en matière de techniques nouvelles de reproduction, sur le plan de leurs répercussions pour la santé et la recherche et de leurs conséquences morales, sociales, économiques et juridiques ainsi que pour le grand public, et de recommander des politiques et mesures protectrices à adopter...

Après quatre années d'étude, l'audition de 40 000 témoins et une facture de 28 millions de dollars, la Commission Baird déposait son rapport en novembre 1993.

Ce n'est qu'en juillet 1995 que le gouvernement fédéral a finalement instauré un moratoire volontaire qui interdisait neuf techniques de reproduction.

Le gouvernement fédéral a annoncé, en janvier 1996, la création d'un comité consultatif provisoire, dont le mandat est de veiller à faire appliquer le moratoire, de suivre l'évolution des nouvelles techniques de reproduction et de conseiller le ministre. Le moratoire volontaire et le comité de surveillance sont les seules mesures actuelles concernant le clonage humain au Canada.

Le projet de loi C-47 a été déposé le 14 juin 1996 par le ministre fédéral de la Santé de l'époque, M. David Dingwall. Ce dernier a également déposé un exposé de principes qui annonçait la politique globale proposée par le gouvernement fédéral sur la gestion des MTR.

Lors des audiences du Comité permanent de la santé, les témoins ont émis plusieurs réserves quant au contenu du projet de loi C-47. On disait qu'il était trop restrictif, qu'il avait un ton négatif, qu'il freinait la recherche et qu'il enlevait à des couples infertiles la seule option qu'il leur restait pour avoir un enfant. La remarque la plus courante des témoins était qu'il n'était pas approprié de légiférer sur les activités de procréation assistée et les technologies génétiques dans un même cadre. Ce sont des domaines différents qui demandent des encadrements distincts.

Mais, malgré tous ces désaccords, il existait un consensus, à savoir la nécessité de prendre dans les plus brefs délais les mesures nécessaires pour interdire le clonage humain. Sur ce point particulier, tout le monde s'entend pour dire qu'il n'existe à ce jour aucune justification suffisante pour permettre qu'on clone des humains, peu importe le procédé utilisé.

En avril dernier, le déclenchement des élections fédérales a fait en sorte que le projet de loi C-47 est resté en plan au Feuilleton, alors qu'il était sur le point de revenir en Chambre pour la troisième et dernière lecture.

Dans son rapport final, la Commission royale sur les nouvelles techniques de reproduction concluait:

    Nous avons jugé que certaines activités sont tellement contraires aux valeurs chères à la population canadienne et à la Commission, et qu'elles peuvent nuire à un tet point aux intérêts des particuliers et de la société, qu'il est impérieux que le gouvernement fédéral prononce contre elles des interdictions assorties de peines au criminel. Au nombre de ces activités, mentionnons la recherche sur les zygotes ou embryons humains liée à l'ectogenèse, le clonage, les hybrides animaux et humains, le transfert de zygotes à d'autres espèces....

• 0925

Je vous rappelle que nous en sommes encore seulement à un moratoire volontaire.

Bien que les membres de la communauté internationale semblent unanimes dans leur opposition à toute forme de clonage humain, les inquiétudes quant à d'éventuelles tentatives de clonage sont légitimes. Personne n'a encore pu justifier qu'on s'adonne à cette pratique sans poser de graves problèmes d'éthique. La communauté scientifique et même les chercheurs qui ont réussi le clonage de Dolly, la brebis, ont affirmé n'avoir aucune intention de procéder à d'éventuelles tentatives de clonage humain.

Il est évident, peu importe la sévérité des lois qui régiront ces activités de recherche, que la problématique du clonage humain interpelle la communauté internationale. À ce titre, le président français, M. Jacques Chirac, affirmait récemment que le principal et véritable enjeu du clonage se situait sur le plan international, le problème essentiel étant de le faire interdire partout dans le monde.

À ce jour, l'UNESCO a adopté une déclaration universelle sur le génome humain et les droits de l'homme. J'ai ici des copies de cette déclaration.

L'Organisation mondiale de la santé demande instamment aux États membres de prendre les mesures appropriées sur le plan juridique pour interdire le clonage humain. Les pays européens ont fait leur devoir en signant le premier texte juridique international interdisant le clonage. Ce texte entrera en vigueur lorsqu'il sera ratifié par cinq pays. Une des personnes responsables de ce texte juridique m'a demandé pourquoi le Canada ne l'avait pas encore signé, ce texte étant ouvert à la signature de pays autres que les pays européens.

Aux États-Unis, le président Clinton s'est prononcé contre le clonage et a annoncé que le gouvernement ne financerait aucun projet touchant cette pratique. À l'heure actuelle, l'administration Clinton a déposé le projet de loi S-1602 en vue d'amender une résolution adoptée par le Congrès en février dernier, qui est actuellement à l'étude au Sénat.

Plusieurs autres pays d'Europe et d'Asie ont adopté des mesures visant l'interdiction du clonage humain ou sont en voie de le faire. Il est important que nous fassions notre part pour fermer la porte à ces pratiques en adoptant le projet de loi C-247.

Un article du projet de loi C-47, projet de loi qui est resté en plan au Feuilleton l'année passée, interdisait le clonage humain. C'est cet article qui a été repris dans le projet de loi C-247. Il a l'avantage de criminaliser le clonage humain sans pour autant interdire la recherche scientifique dans le domaine de la génétique, recherche qui peut être bénéfique, notamment pour une meilleure compréhension des maladies humaines et animales, si elle est bien encadrée.

L'article 286.1 que propose le projet de loi C-247 prévoit que:

    286.1(1) Nul ne peut sciemment:

      a) manipuler un ovule, un zygote ou un embryon en vue d'obtenir un zygote ou un embryon ayant un patrimoine génétique identique à celui d'un zygote, d'un embryon, d'un foetus ou d'un être humain—vivant ou non—, ou implanter un zygote ou un embryon ainsi obtenu dans le corps d'une femme;

      b) modifier la structure génétique d'un ovule, du sperme humain, d'un zygote ou d'un embryon, si cette structure modifiée est susceptible d'être transmise aux générations futures.

    (2) Il est interdit d'offrir d'accomplir tout acte visé au paragraphe (1).

    (3) Il est interdit d'offrir de rétribuer une personne pour qu'elle accomplisse tout acte visé au paragraphe (1).

• 0930

Puisque toutes les techniques connues et imaginables de clonage nécessiteront toujours du sperme, un ovule humain ou les deux, le fait d'interdire la modification de leur structure génétique et leur manipulation, toujours en vue de perpétuer des caractéristiques génétiques chez d'autres foetus ou embryons, ferme la porte dès le début au processus de manipulation menant au clonage humain.

L'an dernier, une équipe de chercheurs écossais réussissait pour la première fois le clonage d'une brebis adulte à partir d'une cellule unique. Moins d'un an plus tard, un scientifique américain annonçait publiquement son intention de cloner des humains pour les couples stériles. Aujourd'hui, une technique utilisant des cellules de foetus avortés pourrait changer la face de la médecine moderne. La science évolue à une vitesse impressionnante, souvent à l'avantage de la société, mais il y a aussi des cas où la société doit poser elle-même des balises au progrès de la science, et c'est le cas du clonage humain.

En conclusion, lors du débat en deuxième lecture, personne n'a questionné la pertinence d'interdire le clonage humain. Toutes les interventions, sans exception, faisaient état des progrès extrêmement rapides des techniques de reproduction médicalement assistée et de la nécessité d'en encadrer le développement et l'utilisation. Certains députés se sont dits inquiets de voir que parmi toutes les techniques connues et à venir, une seule, le clonage humain, est touchée par le projet de loi C-247. Ce n'est pas un oubli ou de la négligence. Je crois qu'il est sage d'admettre que le développement de ces techniques est beaucoup plus rapide que notre capacité de les comprendre et de nous adapter pour les encadrer correctement.

La criminalisation du clonage humain, par l'adoption du projet de loi C-247, est un premier pas. Nous en ferons d'autres, rapidement je l'espère, et avec le temps, nous en arriverons à un cadre juridique et réglementaire qui sera acceptable. Ça ne sera jamais parfait ni jamais assez complet, car il y aura toujours une découverte qui nous forcera à nous ajuster. Croire le contraire relèverait de l'illusion.

Certains ont aussi émis des réserves sur le fait que la modification se fait par le biais du Code criminel et non par un projet de loi émanant du ministère de la Santé. Nous croyons que les choses doivent être faites correctement, de la façon la plus claire et la plus simple possible. Le but de ce projet de loi est de criminaliser une pratique. L'outil pour cela est le Code criminel. Jamais on ne penserait criminaliser le trafic des stupéfiants par le biais du ministère de la Santé parce que la toxicomanie est un problème de santé publique.

Dans un domaine aussi vaste et aussi changeant, les choses doivent être faites clairement et correctement.

Hier, un article du Toronto Star faisait encore état des progrès rapides de la génétique et du manque d'outils pour un encadrement adéquat. À ce sujet, un professeur de bioéthique à l'Université de Pennsylvanie, M. Glenn McGee, tenait les propos suivants: «Quelles sont les limites? Jusqu'où cela ira-t-il? C'est de la biologie à l'état brut. On voit ce qui peut être fait et on le fait.»

Je crois que nous, législateurs, devons agir de la même façon: voir ce qui se fait, prendre acte des consensus et agir.

J'aimerais dire aux membres du comité que je ne m'attends pas à ce que mon projet de loi soit adopté par le comité au moment présent. Mais si, par ce projet de loi, je pouvais forcer le gouvernement ou le ministère de la Santé à faire un pas et à agir rapidement en ce qui concerne le clonage humain, j'aurais fait mon travail. Nous sommes tous interpellés par ce sujet-là. Toute la population est inquiète face à ce sujet. J'espère que je saurai faire avancer le gouvernement pour qu'il puisse enfin apporter un cadre à cette pratique.

Merci beaucoup.

Le président: Merci, madame.

• 0935

Je ne sais pas s'il est opportun de faire ce commentaire, mais j'aimerais dire qu'il ne faut jamais préjuger des décisions collectives du comité. Merci pour votre présentation. Je cède tout de suite la parole à M. Vellacott.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Madame Picard, vous affirmez que, à votre avis, la meilleure façon d'interdire les manipulations génétiques, c'est d'abord de modifier le Code criminel, puis de faire intervenir les provinces. Êtes-vous en train de nous dire que, si on devait laisser le tout entre les mains d'une agence fédérale, l'application de la loi pourrait ne pas être aussi stricte? Est-ce bien ce qui vous inquiète?

[Français]

Mme Pauline Picard: Seul le gouvernement fédéral a le pouvoir de criminaliser cette pratique; les provinces ne peuvent ni modifier ni mettre en application les dispositions du Code criminel, lequel relève du ministère de la Justice fédéral. Le clonage humain est une activité criminelle qui doit faire l'objet d'un cadre réglementaire très sévère afin qu'on évite toute confusion et que certains chercheurs qui se proposent d'y avoir recours n'aient pas à se demander s'ils peuvent ou non appliquer cette pratique-là. Selon moi, cette pratique doit être régie par le Code criminel. Je ne sais pas quel autre vocabulaire je pourrais utiliser pour vous expliquer cela. Partout dans le monde, on veut adopter un cadre réglementaire très sévère. Ici, ce cadre réglementaire sévère doit passer par le Code criminel.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: Bien. Autrement dit, si on faisait intervenir non pas le Code criminel, mais le ministère de la Santé, vous auriez l'impression que votre proposition pourrait être mise en oeuvre de façon moins rigoureuse, n'est-ce pas?

[Français]

Mme Pauline Picard: C'est exact. La responsabilité des soins de santé est celle des provinces. Si on leur confiait l'application des règles régissant le clonage humain, elles risqueraient peut-être d'appliquer un cadre différent, selon leur propre interprétation ou à la suite d'une modification. Il est très facile de jouer avec les règles qui régissent de telles activités et de faire prévaloir sa compréhension de ces genres de pratiques. Bien que je fasse confiance aux ministères de la Santé des provinces, je ne crois pas qu'ils soient aptes à mettre en oeuvre une telle réglementation. Selon moi, cette pratique doit être régie par le Code criminel, et c'est pourquoi je propose qu'on le modifie.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: Bien. Merci.

Le président: Madame Wasylycia-Leis.

[Français]

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci. D'abord, je voudrais remercier Pauline Picard pour son initiative et pour ce projet de loi qui représente, à mon avis, une contribution très importante aux yeux de nombreux citoyens et organisations qui sont préoccupés par cette question.

Je poserai maintenant mes questions en anglais parce que la terminologie est très complexe, même dans la langue anglaise.

Le président: Vous vous êtes très bien exprimée en français.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

Le président: Votre fils devrait s'enorgueillir de ce que sa mère peut parler aussi bien en français qu'en anglais.

[Traduction]

Avez-vous compris la blague? Mes excuses, madame Wasylycia-Leis. Allez-y.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis un peu inquiète de vous entendre me faire autant de civilités. C'est inusité.

Des voix: Oh, oh!

Le président: C'est mon jour de congé. Que dire de plus?

• 0940

Mme Judy Wasylycia-Leis: Puisque Mme Picard suit cette question depuis longtemps et qu'elle faisait partie du comité lors de la dernière législature—ce qui n'est pas mon cas—à l'époque où le comité avait été saisi du premier projet de loi, j'aimerais qu'elle nous dise pourquoi il a fallu tant de temps pour que l'on se penche à nouveau sur la question.

Il y a eu énormément de percées dans les technologies de reproduction, le clonage étant la plus récente de ces percées. Il y a cinq ans à peine, personne n'aurait imaginé ces percées! Nombre de ceux à qui j'ai parlé s'inquiètent de constater que le gouvernement fédéral n'est pas prêt à faire face à ces nouvelles percées scientifiques et n'a aucune structure en place pour pouvoir réagir. Or, nous ratons le coche. Plus nous tirons de l'arrière, et plus il est difficile de nous rattraper.

J'ai une ou deux questions d'ordre général. Pourquoi le projet de loi C-47 est-il mort au Feuilleton, alors que toute la députation semblait s'entendre sur le besoin d'interdire le clonage humain? D'après vous, le gouvernement est-il près de déposer des mesures législatives qui viendraient remplacer le projet de loi C-47? Que fait-il des initiatives du marché privé qui touchent la capacité de reproduction des femmes?

Le président: Madame Wasylycia-Leis, vous aviez raison de croire que quelque chose de malsain flottait dans l'air, avec toutes ces civilités de mauvais aloi, mais je crains que votre question ne soit irrecevable.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Vraiment?

Le président: Mme Picard ne peut répondre aux questions que vous auriez au sujet du projet de loi C-47, car le seul projet de loi qu'elle puisse vous expliquer, c'est le sien, à savoir le C-247. Une réponse sur tout autre projet de loi ne pourrait être que conjecturale. Désolé.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Laissez-moi...

Le président: Mais vous vous êtes fait comprendre, de toute façon.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je n'avais pas de mauvaise intention. J'essayais simplement de comprendre. Étant donné que le projet de loi de Mme Picard touche le clonage humain, qui avait été abordé notamment dans le projet de loi C-47, j'aimerais savoir pourquoi le Canada tire de l'arrière par rapport aux autres pays et ne prend pas de mesures à cet égard. Que faut-il faire pour faire avancer les choses au Canada?

Le président: Nous ferons de notre mieux pour accepter cette question, n'est-ce pas? Madame Picard?

[Français]

Mme Pauline Picard: Je suis d'accord avec Judy pour dire que nous accusons un grave retard. Je me demande aussi comment il se fait que nous soyons encore pris avec un moratoire volontaire. Le projet de loi C-47 est resté en plan au Feuilleton, et c'est heureux, à mon avis. Cela a fait l'affaire du gouvernement puisqu'il aurait fallu modifier une foule de dispositions de ce projet de loi C-47. Plusieurs scientifiques sont venus nous dire que le projet de loi C-47 freinait la recherche médicale et qu'il était négatif et restrictif. Mais, heureusement, il y a eu le déclenchement des élections.

Je m'attendais toutefois à ce que tout de suite après l'élection générale, le gouvernement revienne en force et dépose un nouveau projet de loi parce que de nombreuses questions étaient restées en suspens.

Il y a un moratoire volontaire et on nous dit qu'il y a un comité de surveillance. Quelqu'un a-t-il déjà entendu parler de ce fameux comité de surveillance qui fait rapport au ministre? Au cours de mes recherches, que ce soit dans certains milieux scientifiques ou dans les laboratoires, on n'a jamais pu me dire qu'on avait vu ou entendu parler de ce comité de surveillance. Bien qu'on présume que 99 p. 100 des scientifiques sont de bonne foi, il n'en faut qu'un seul pour créer un scandale.

Je ne sais pas ce qu'on attend pour agir; je ne comprends pas que le gouvernement tarde à légiférer en cette matière.

Le président: Merci.

[Traduction]

Madame Minna.

Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): Madame Picard, j'ai du mal à comprendre la disposition dans laquelle on parle de recherche et de manipulation. J'ai une question à vous poser.

• 0945

Il n'y a pas si longtemps, j'entendais un rapport qui était diffusé sur les possibilités d'éradiquer les incapacités physiques—c'est-à-dire les handicaps—dans les embryons, c'est-à-dire avant même que les enfants ne naissent, handicaps tels que le syndrome de Down ou d'autres incapacités qui affligent bon nombre des personnes handicapées aujourd'hui. On signalait que ces incapacités pourraient disparaître demain et qu'on pourrait ne plus rencontrer de cas de handicaps de ce genre. Certaines de ces maladies sont génétiques: votre projet de loi nuirait-il à ce genre de recherche? Il faut reconnaître que la recherche génétique profite aux humains. La recherche pourrait permettre d'avoir un plus grand nombre de gens sains qui vivraient sans être handicapés. Quel effet pourrait avoir votre projet de loi sur les recherches et les travaux en génétique?

[Français]

Mme Pauline Picard: Le projet de loi C-247 ne vise pas à criminaliser toutes les techniques de reproduction, mais uniquement celles qui serviraient à cloner un être humain. C'est juste cela. Il faudra débattre des autres techniques de reproduction et donner un cadre différent à chacune afin de ne pas freiner les recherches dans le domaine médical.

La technique qui fait l'objet du projet de loi C-247 n'est pas utilisée en vue d'enrayer des maladies. C'est une technique qu'on veut criminaliser afin qu'un jour, vous et moi ne nous retrouvions pas clonées.

On retrouvait le libellé de l'article 1 du projet de loi C-247 dans le projet de loi qu'avait déposé le gouvernement l'année passée et où il proposait d'interdire la manipulation génétique au niveau du clonage humain.

[Traduction]

Le président: Cela vous va?

Mme Maria Minna: Cela me va.

Le président: Merci.

Madame Picard, Mme Wasylycia-Leis veut voir jusqu'où va ma tolérance.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai deux questions.

Le président: Allez-y.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Puisque, d'après ce que vous nous avez dit des séances du comité qui portaient sur le projet de loi C-47 au cours de la dernière législature, il semblait se dégager parmi les organismes ayant témoigné et la députation un consensus, peut-on en déduire qu'il y a dans la population canadienne une volonté d'interdire le clonage humain et d'inscrire cette interdiction dans le Code criminel?

Passons rapidement à ma deuxième question. Vous avez dit que l'Assemblée mondiale de la santé aurait émis une déclaration portant sur les considérations déontologiques entourant le clonage humain, mais que le Canada n'aurait pas signé cette déclaration. Vous ai-je bien comprise? Pouvez-vous nous expliquer ce qui retient le Canada d'adhérer à cette déclaration?

Le président: Je ne crois pas que Mme Picard puisse répondre, à moins d'avoir développé certains pouvoirs télépathiques. Voulez-vous quand même essayer de répondre, madame Picard?

[Français]

Mme Pauline Picard: Je ne saurais répondre à votre deuxième question. On m'a tout simplement demandé pourquoi le Canada, qui est avant-gardiste et qui prend ce genre d'initiatives au chapitre de la Déclaration des droits de l'homme et de la protection des droits de la personne, ne s'était pas avancé pour signer cette déclaration. Cette déclaration ne se limitait pas aux pays européens. C'est une question qu'on m'a posée.

Quant à votre première question, permettez-moi de préciser qu'il ne s'agissait pas de l'Organisation mondiale de la santé, mais plutôt du Conseil européen. J'ai cette déclaration en main et je pourrai vous en donner une copie.

La Commission Baird a entendu 40 000 témoins. Je vous invite à lire son rapport, qui est le fruit de quatre années d'étude. On y recommande la criminalisation du clonage humain et d'autres pratiques, dont celles visant les hybrides humains et animaux.

• 0950

En fait, le moratoire volontaire déposé en juillet 1995 interdit neuf techniques de reproduction, dont le clonage humain. Mais il s'agit d'un moratoire volontaire qu'on a mis en place en attendant qu'on puisse adopter un cadre plus restrictif. Je ne sais pas ce que le gouvernement attend pour agir, alors que la plupart des autres pays ont déjà adopté des résolutions. L'Organisation mondiale de la santé, qui regroupe quelque 150 pays, a fait une déclaration à cet effet. Lors de la 51e assemblée mondiale de la santé, on a parlé des conséquences du clonage dans le domaine de la santé humaine au niveau de l'éthique scientifique et sociale. On recommande de légiférer le plus vite possible afin d'interdire le clonage en vue de la reproduction d'êtres humains.

[Traduction]

Le président: Merci, madame.

Monsieur Elley, voulez-vous jouer vous aussi?

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Cela m'a tout l'air d'être plutôt un match de lutte, n'est-ce pas?

Je remercie chaleureusement Mme Picard d'avoir eu le courage et la vision de déposer son projet de loi. Nous devons la féliciter pour cela.

Je voudrais comprendre une chose. Le projet de loi que vous nous présentez a été tiré de l'ancien projet de loi qu'était le C-47, n'est-ce pas?

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui, nous avons repris intégralement le libellé d'un article qui figurait au projet de loi C-47.

[Traduction]

M. Reed Elley: Oui, il provient directement du C-47.

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui, c'est le libellé exact qu'avait proposé le gouvernement.

[Traduction]

M. Reed Elley: Par conséquent, si les députés ministériels du comité le rejetaient, cela reviendrait pour eux à rejeter un projet de loi que leur propre gouvernement avait déposé, n'est-ce pas? C'est très clair en effet.

[Français]

Mme Pauline Picard: C'est cela.

[Traduction]

Le président: C'est un peu tiré par les cheveux, Reed.

Une voix: C'est assez simpliste.

M. Reed Elley: Je veux seulement avoir une clarification. Et c'est peut-être simpliste, mais je pense que c'est vrai. Cela ne me place pas dans un dilemme moral, mais c'est peut-être le cas pour certains députés ministériels.

Une voix: On verra.

M. Reed Elley: Alors votre projet de loi empêcherait-il le gouvernement de proposer une loi quelconque qui compléterait votre projet de loi? Y avez-vous songé?

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui, j'y ai songé, mais je me dis qu'il faut bien commencer quelque part. Pourquoi ne commencerait-on pas par prendre une décision sur cette question? Toutes les questions relatives à la manipulation génétique sont très complexes et il nous faudra les étudier de façon plus approfondie.

Dans le fond, il est heureux que le projet de loi C-47 soit resté en plan au Feuilleton. Il comportait de nombreuses lacunes. Le gouvernement et les membres du comité qui l'ont étudié ont convenu, après avoir pris connaissance de nombreux témoignages, qu'il fallait revoir ce projet de loi.

Mais je suis inquiète du fait qu'on n'ait rien sur la table par rapport à cela. C'est pourquoi je me suis dit qu'il fallait commencer par quelque chose qui est vraiment très clair. À mon avis, il est très clair pour tout le monde qu'il faut interdire cette pratique de clonage en vue de la reproduction humaine. Alors, on commence quelque part, après quoi le gouvernement voudra peut-être proposer un autre projet de loi pour encadrer les autres pratiques de manipulation génétique. Rien ne l'empêche de le faire. Ce n'est qu'un premier pas.

M. Reed Elley: Merci beaucoup.

[Traduction]

Le président: Madame Picard, je vous suis très reconnaissant d'avoir donné votre exposé et d'avoir permis aux députés de poser des questions sur les problèmes que soulève ce projet de loi. Je crois que le moment est maintenant venu pour vous de reprendre votre place habituelle à la table.

• 0955

Je vais profiter des quelques moments qu'il faudra à Mme Picard pour reprendre sa place habituelle à la table pour informer les membres du comité que nous recevons aujourd'hui des représentants des ministères de la Santé et de la Justice qui pourront répondre aux questions techniques que vous avez—et je souligne le mot «techniques». Je m'adresse ici à tous les députés ici présents. Vous aviez parfaitement raison de poser à Mme Picard des questions relatives aux décisions gouvernementales ou aux problèmes que soulève la politique gouvernementale, mais tenons-nous-en maintenant aux simples faits, si nous le pouvons, et si c'est le cas.

J'invite maintenant les représentants des ministères à s'avancer: M. Glenn Rivard, conseiller juridique principal du ministère de la Justice; Mme Phyllis Colvin, directrice, Politiques de santé, ministère de la Santé; et Mme Francine Manseau, analyste principale des politiques, Division des politiques de santé, ministère de la Santé.

Je ne sais pas si vous avez un petit exposé à nous faire. Je n'avais nullement l'intention de vous demander de faire un discours ou quoi que ce soit de ce genre. Nous vous avons invités pour répondre aux questions que nous pourrions avoir. Est-ce que ça vous va, ou voulez-vous dire quelque chose?

Mme Phyllis Colvin (directrice, Politiques de santé, ministère de la Santé): Nous avons seulement quelques petites observations à faire, pas d'exposé.

Étant donné que le libellé du projet de loi dont vous êtes saisis aujourd'hui est identique à certaines parties du projet de loi C-47, qui a été mentionné, une discussion, pour ainsi dire, sur le contenu de ce projet de loi et sur des comparaisons avec le projet de loi C-47 ne nous paraîtrait pas particulièrement utile, mais nous serons heureux de faire état de notre expérience et de vous communiquer nos informations relativement au contexte où sont nées les interdictions dans ce domaine et à l'approche qui a été prise.

Rappelons que le gouvernement fédéral se préoccupe depuis déjà un certain temps des questions relatives au clonage et à la manipulation génétique. En 1993, le rapport de la Commission royale recommandait l'interdiction des pratiques que je viens de mentionner, et le gouvernement y a donné suite en déclarant en 1995 un moratoire sur le clonage humain et la manipulation génétique ainsi que sur quelques autres pratiques aberrantes.

En 1996, le gouvernement a déposé le projet de loi C-47 afin d'interdire non seulement le clonage humain et la manipulation génétique, mais aussi d'autres technologies problématiques dans le domaine génésique et génétique, étant donné que ces technologies posaient de grandes menaces pour la santé et le bien-être des Canadiens qui en faisaient usage et pour les enfants nés de ces technologies.

Même si le projet de loi C-47 n'est pas allé jusqu'au bout du processus législatif avant le déclenchement des dernières élections fédérales, il exprimait néanmoins la position du gouvernement dans des domaines relatifs à la santé, la sécurité et l'éthique—et je pense qu'il est très important de souligner le mot «éthique»—pour ce qui est de la reproduction assistée et des technologies génétiques.

Et nous avons tiré quelques leçons du projet de loi C-47. Votre comité a entendu bien sûr des Canadiens qui ont fait valoir leurs vues sur l'ancien projet de loi C-47. Ils nous ont fait part des nombreux problèmes que posent les technologies génésiques et génétiques, ce qui oblige le gouvernement non seulement à prohiber certaines pratiques, mais aussi à entrevoir la création d'un régime réglementaire dans ce domaine, et non seulement pour ce qui concerne le clonage et la manipulation génétique, mais aussi en ce qui a trait aux autres technologies.

Voilà les quelques remarques que je voulais faire en guise d'introduction.

Le président: Monsieur Rivard, voulez-vous ajouter quelque chose? Madame Manseau?

Je sais que les députés ont des questions très précises à vous poser, et, comme je l'ai dit, je vous serais très reconnaissant de faire abstraction de toute considération relative à la politique ou à l'orientation gouvernementale dans vos questions, ce qui me dispensera de vous interrompre.

Y a-t-il des questions?

Madame Picard, allez-y.

[Français]

Mme Pauline Picard: J'aimerais savoir quel est votre rôle face au projet de loi C-47 que le gouvernement a déposé. Est-ce que vous deviez légiférer ou en faire une analyse?

• 1000

[Traduction]

Mme Phyllis Colvin: À l'heure où nous nous parlons, le gouvernement tient évidemment compte des réactions qu'il a entendues dans le débat sur le projet de loi C-47. Ce n'était qu'un essai, de toute évidence, le gouvernement ayant proposé une loi qui contenait diverses interdictions dans ce domaine. Ces réactions ont été portées à la connaissance du public. Je pense que certaines d'entre elles sont assez bien connues. Entre autres, on a vu que les Canadiens à l'époque désiraient vivement ce qu'on appelle en langage commun une approche législative globale, et ils l'ont fait clairement savoir au comité qui étudiait ce projet de loi.

On avait également longuement discuté de la recherche embryologique. En particulier, on avait des réserves relativement au recours aux interdictions dans ce domaine. Le gouvernement a pris acte de ces réserves et réfléchi entre autres choses aux répercussions qu'il pourrait y avoir dans ce domaine.

[Français]

Mme Pauline Picard: Mais vous rendez-vous compte, madame, qu'on étudie ces questions depuis 1989? Le gouvernement de l'époque avait confié un mandat à la Commission Baird qui, quatre ans plus tard, déposait son rapport. Nous sommes à l'aube de 1999 et il n'y a encore rien sur la table. C'est toujours un moratoire qui prévaut.

[Traduction]

Le président: Madame Picard...

[Français]

Mme Pauline Picard: Je ne sais pas, mais...

[Traduction]

Le président: ... votre observation est valide, mais elle ne peut pas vraiment y répondre. La secrétaire parlementaire n'est pas ici, mais c'est peut-être elle qui est le mieux en mesure d'y répondre. Madame Picard...

[Français]

Mme Pauline Picard: Pourrions-nous savoir ce que le gouvernement envisage de faire et s'il entend agir bientôt?

[Traduction]

Le président: Madame Picard, soyons justes envers les fonctionnaires, il s'agit de décisions gouvernementales avec lesquelles ils n'ont rien à voir.

[Français]

Mme Pauline Picard: Quel genre de questions pouvons-nous leur poser? Je ne comprends pas quel est leur rôle.

Le président: Comme je l'avais indiqué, nous pouvons leur poser des questions techniques, mais non des questions relatives aux politiques du gouvernement.

Mme Pauline Picard: D'accord, je n'en poserai pas d'autres.

[Traduction]

Le président: Alors nous irons de ce côté.

[Français]

C'est une question qu'on devrait poser au secrétaire parlementaire. Monsieur Jackson.

[Traduction]

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président. De toute évidence, à mon avis, le genre de loi que le gouvernement adopte importe peu, parce qu'on ne vise habituellement que quelques individus. Ce n'est pas tout le monde qui dévalise des banques ou quoi que ce soit d'autre, mais j'imagine qu'il faut adopter des lois. Dans un pays moderne qui veut prospérer, l'exploration scientifique est tellement importante.

Les complications que pose le projet de loi procèdent de la question: «Jusqu'où la science ira-t-elle?», et aussi de la question de savoir dans quelle mesure ce projet de loi entravera la science, parce qu'encore là il s'agit d'exploration, et il se peut que la science dépasse certaines frontières. À mon avis, c'est probablement là que la complication se situe, et je me demande si vous vous êtes entendus sur ces frontières avec les scientifiques pour proposer une loi qui sera fonctionnelle, comme vous dites, qui sera complète, mais sans faire obstacle à la recherche scientifique. Ma question est-elle trop compliquée?

Le président: Monsieur Jackson, je vois où vous voulez en venir. Mais c'est une question qui n'a pas vraiment trait au projet de loi C-247. Si nous avons invité nos fonctionnaires aujourd'hui, c'est pour mieux comprendre le projet de loi C-247. Quant aux autres grandes questions, comme je l'ai déjà dit à Mme Picard... Et il m'est un peu difficile, en tant que membre du comité, et encore plus à titre de président, de m'éloigner de ces grandes questions, mais il ne s'agit pas de cela aujourd'hui. Je préfère qu'on s'en tienne au projet de loi C-247.

M. Ovid Jackson: Monsieur le président, j'aimerais entendre l'avis des fonctionnaires. S'ils estiment qu'ils ne peuvent répondre à ma question, d'accord; je ne veux pas leur faire la vie difficile, mais je...

Le président: Avez-vous une autre question à poser, monsieur Jackson?

M. Ovid Jackson: Non.

Le président: D'accord.

M. Ovid Jackson: Je ne crois pas que je vais poser beaucoup de questions aujourd'hui, parce que je ne suis pas d'accord avec vous sur ce point.

Le président: Ça va. Nous demeurons amis.

Madame Minna.

Mme Maria Minna: Je veux seulement reprendre la question que j'ai posée à Mme Picard plus tôt, et je veux savoir si ce projet de loi interdit ou va interdire les manipulations ou les changements possibles dans le cadre génétique lorsqu'il s'agit de handicaps ou de choses de cette nature, des difformités par exemple.

• 1005

Pouvez-vous répondre à cela? Ce projet de loi aurait-il en fait pour effet d'entraver également ce genre de travail? D'après la lecture que j'en fais, ce serait le cas. Je me demande comment vous séparez cela du clonage pur. D'après la lecture que j'en fais, ce serait le cas, mais ma lecture est peut-être erronée.

Mme Phyllis Colvin: Les deux dispositions concernant le clonage et la manipulation génétique sont bien sûr empruntées à l'ancien projet de loi C-47. Le libellé est plus qu'emprunté, il est même identique.

Pour ce qui concerne la manipulation génétique, c'est l'une des choses où l'on établit une interdiction. C'est ce qu'on appelle familièrement la «manipulation génétique germinale», et cela désigne dans les faits la manipulation génétique qui, pour ainsi dire, se manifeste entre les générations. L'une des questions dont on a discuté lors du débat sur le projet de loi C-47, c'était en fait la fine distinction qu'il y a entre les avantages qu'offre évidemment la recherche et la nécessité d'interdire les pratiques aberrantes.

La question du clonage et la question de la manipulation génétique germinale—et il ne s'agit pas ici de toutes les manipulations génétiques, mais seulement de la manipulation génétique germinale—ont été considérées d'un point de vue éthique, tant par le gouvernement que par d'autres commentateurs, comme étant des pratiques aberrantes, qui heurtent la société et posent un problème d'éthique, et c'est la raison pour laquelle elles ont été incluses dans les interdictions originales.

Cependant, les nouvelles technologies génésiques et génétiques offrent des avantages aux Canadiens, et c'est l'une des raisons pour lesquelles les Canadiens exigeaient une approche plus globale afin de...

Le président: Madame Colvin, tenons-nous-en à la question.

Mme Maria Minna: Sauf le respect que je vous dois, vous n'avez pas répondu à ma question. Je veux savoir si ce projet de loi interdirait la recherche qui profiterait...

Mme Phyllis Colvin: Non.

Mme Maria Minna: ... à un foetus qui a besoin...

Mme Phyllis Colvin: On interdit un aspect particulier de la manipulation génétique, à savoir la thérapie génétique germinale.

Le président: Monsieur Rivard.

M. Glenn Rivard (conseiller juridique principal, ministère de la Justice): Faisant suite à ce que Phyllis Colvin vient de dire, le projet de loi crée en fait deux infractions. La première disposition interdit le clonage. La seconde interdit un type particulier de thérapie, la thérapie génétique, c'est-à-dire la modification des gènes qui peuvent être transmis aux générations subséquentes. En bref...

Mme Maria Minna: Les handicaps congénitaux.

M. Glenn Rivard: ... lorsqu'on introduit une modification permanente dans le patrimoine génétique de la population. Ce sont donc les deux infractions que crée ce projet de loi.

Mme Maria Minna: Mais il y a certaines maladies qui sont congénitales. Est-ce que ce projet de loi nous interdirait d'intervenir dans ce genre de situation aussi? Est-ce qu'il y a quelque chose que je ne comprends pas ici?

M. Glenn Rivard: Oui, ce projet de loi interdit l'intervention dans ce genre de chose qui créerait une modification permanente de la structure génétique—si vous me passez l'expression—qui peut être transmise aux générations subséquentes.

Mme Maria Minna: Donc ce serait le cas.

M. Glenn Rivard: Oui.

Mme Maria Minna: Il nous a fallu du temps pour le savoir.

Le président: Oui. Merci.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai quelques questions.

Premièrement, monsieur Rivard, du point de vue de la légalité ou de la justice, y a-t-il des raisons pour lesquelles nous ne devrions pas adopter ce projet de loi? Se pose-t-il des difficultés relativement à l'exécution de la loi? Pourrait-on en contester la validité en vertu de la Charte? Quels sont les obstacles juridiques, si tel est le cas, à l'adoption de ce projet de loi?

M. Glenn Rivard: Je dirai simplement que ces dispositions, telles qu'elles figurent dans ce projet de loi, seront extrêmement difficiles, sinon impossibles, à faire respecter, parce que ce projet de loi ne prévoit en fait aucun mécanisme d'exécution qui convient à ce genre d'infractions.

Essentiellement, pour déterminer que quelqu'un se livre à des recherches sur le clonage ou la thérapie germinale, il vous faudra un enquêteur disposant de la formation scientifique voulue en matière génétique pour déterminer cela. Une infraction comme celle-ci, essentiellement, si elle figure dans le Code criminel, fera intervenir les services de police. Ce projet de loi ne prévoit aucun autre mécanisme, et l'on sait que l'on trouve rarement, sinon jamais, dans les services de police d'enquêteurs disposant d'une telle formation scientifique.

• 1010

Le président: Judy Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

Madame Colvin, pour ce qui est des avancées du clonage humain et de la thérapie génétique, que fait-on au Canada? Y a-t-il des instituts de recherche médicale, à but lucratif ou non, qui mènent des recherches dans ce domaine? Et toujours dans notre pays, approchons-nous d'une percée en matière de clonage humain ou d'autres avancées dans le domaine de la thérapie génétique?

Mme Phyllis Colvin: Nous avons un comité consultatif qui est actif dans ce domaine. Nous sondons le terrain.

Le clonage, comme l'a même dit Mme Picard, préoccupe le monde entier. Les secteurs où l'on a exprimé les préoccupations les plus vives, par exemple, en ce qui concerne l'exemple écossais qu'elle a mentionné ou certaines réserves qui ont été exprimées aux États-Unis face à des cas précis de clonage, n'ont heureusement trouvé aucun écho sur la scène canadienne.

Pour autant que nous le sachions, le clonage au Canada en est essentiellement au statu quo pour ce qui est de ce type particulier de technologie. Nous venons de procéder justement à certaines enquêtes relativement au degré d'activité de la recherche embryologique, et, à notre connaissance, ce type d'activité n'a pas cours au Canada.

Bien sûr, dans ce domaine il est vrai que nos sources d'information sont évidemment tributaires des indications que nous donne la communauté scientifique. Mais, à l'heure actuelle, tel est l'état des choses.

Le président: Monsieur Nault.

M. Robert D. Nault (Kenora—Rainy River, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je voulais poser une question à M. Rivard qui rejoint celle que Judy posait en ce qui concerne toute la question du système juridique et de la loi qu'on veut adopter. Je viens de lire l'un des documents que Mme Picard nous a communiqués au sujet de l'Europe et des 19 États qui ont signé ce protocole interdisant le clonage humain. D'après ce document, ce protocole porte que les États doivent prévoir dans leurs lois des sanctions pour ces infractions, par exemple des interdictions frappant les chercheurs, etc.

Peut-on dire qu'il y a des États qui ont adopté des lois très semblables ou identiques au projet de loi C-247? Je veux savoir si ce projet de loi est une création propre au Canada ou si c'est la loi de la communauté internationale, parce que ces dispositions étaient dans le projet de loi C-47, donc si c'est identique au projet de loi C-47, mais seulement dans un seul article, et que ce protocole est plus complet que le projet de loi C-47 pour ce qui est de l'ensemble du problème... Je veux savoir s'il y a d'autres États dans le monde qui ont déjà adopté une loi de ce genre.

M. Glenn Rivard: Je ne connais pas d'État qui ait utilisé son équivalent du Code criminel pour interdire cette pratique. Plusieurs États se sont penchés sur cette question, et il existe presque à l'échelle universelle une loi se situant dans le contexte plus général de la santé qui vise à réglementer plus généralement les technologies génésiques et génétiques. Donc, oui, il y a des États qui ont interdit le clonage, mais pas dans le contexte de ce qui constituerait leur équivalent de notre Code criminel.

M. Robert D. Nault: Vous pourriez donc m'expliquer à moi, le profane, comment ils font respecter cette loi?

M. Glenn Rivard: Je peux vous donner un exemple. Le Royaume-Uni a créé une autorité réglementaire pour les techniques génésiques et génétiques. Dans ce système, les enquêteurs scientifiques peuvent pénétrer sur les lieux, et ils ont le pouvoir de saisir tout ce qu'ils doivent saisir. Ils ont le savoir scientifique qu'il faut pour analyser la recherche qui est faite et pour déterminer si cette recherche contrevient ou non à une interdiction ou contrevient aux conditions de l'activité réglementée.

• 1015

C'est une approche beaucoup plus subtile, si vous voulez, qui permet l'application du savoir scientifique à ce qui constitue essentiellement des questions techniques et scientifiques très complexes.

M. Robert D. Nault: Donc, au Royaume-Uni, si l'on prend cet exemple, il n'existe pas de sanction si la loi n'est pas respectée; en fait, c'est une sorte de moratoire volontaire semblable au nôtre.

M. Glenn Rivard: Non. Il s'agit de processus qui sont réglementés, et dans certains cas prohibés, et il existe des sanctions pour les manquements aux interdictions ou aux règlements.

M. Robert Nault: Monsieur le président, j'ai vraiment du mal à m'y retrouver. S'il existe des interdictions et des sanctions, les sanctions doivent avoir un écho quelconque dans le Code criminel. S'il existe une sanction, que faites-vous? Est-ce que vous intentez des poursuites? Est-ce que vous fermez le laboratoire? Est-ce que vous mettez le chercheur en prison? Que fait-on au Royaume-Uni?

Si vous dites que ce projet de loi ne ressemble pas aux autres lois du même genre qui existent à votre connaissance à l'extérieur du Canada, alors le Canada agit très différemment des autres pays. Je cherche seulement à comprendre.

M. Glenn Rivard: Je pense que si vous posiez la question aux Britanniques, par exemple, ou aux Européens en général, vous verriez qu'ils considèrent très clairement ce problème sous l'angle de la santé, et leurs règlements se situent dans cette perspective. Ils se sont dotés de ressources qui disposent du savoir médical et scientifique voulu pour prendre des décisions d'intérêt public dans ce domaine et les faire respecter. Je serais surpris s'ils considéraient cette question sous l'angle pénal.

Une voix: L'essentiel est là.

Le président: Merci.

Monsieur Vellacott.

M. Maurice Vellacott: Robert a posé de bonnes questions. Moi aussi je cherche à m'y retrouver. Ma première question est celle-ci: êtes-vous en train de nous dire alors que le ministère de la Santé peut imposer une amende de 100 000 $, dollars ou quelque chose de ce genre à...? C'est ce que vous nous dites?

Mme Phyllis Colvin: À mon avis, ce qu'il faut savoir, c'est que le projet de loi C-47 et d'autres types de loi sur la santé prévoient évidemment des interdictions et des sanctions. L'utilisation des pouvoirs du droit criminel dans le domaine de la santé est très répandue. Le projet de loi C-47 et d'autres lois du même genre se sont modelés sur cette tradition du droit de la santé, et, en fait, les sanctions que prévoit le projet de loi C-247 sont identiques à celles que contenait le projet de loi C-47.

La question des interdictions et des sanctions en droit de la santé est importante. C'est un aspect primordial ici, parce que dans le projet de loi C-247 vous ne voyez pas de dispositions essentielles portant sur la création d'un corps d'inspecteurs de la santé. Ce sont là des questions très difficiles dont la maîtrise exige, pour ainsi dire, un certain savoir scientifique. Et l'une des bases du droit de la santé, pour ainsi dire, c'est la création de corps d'inspecteurs dans le domaine. Et cette disposition permet, pour ainsi dire, le respect voulu de la loi. Il est très difficile, par exemple, à la police de détecter et de contrer ces problèmes par ses propres moyens.

Tel est donc le contexte dans lequel on se sert des pouvoirs du droit criminel dans le secteur de la santé.

M. Maurice Vellacott: Vous ne répondez toujours pas aux questions de Robert ou aux miennes quand vous parlez de sanctions... Qu'est-ce qu'on veut dire ici? Est-ce qu'on dit que le chercheur ne peut pas entreprendre de recherche, autrement on l'obligera à fermer boutique, ou...? Qu'est-ce qu'on dit ici, expressément et concrètement? Est-ce qu'on vous confisque le vélo avec lequel vous vous rendez au travail? Qu'est-ce qu'on fait au juste?

M. Glenn Rivard: Les régimes de ces autres pays prévoient des amendes...

M. Maurice Vellacott: Des amendes?

M. Glenn Rivard: ... des amendes très substantielles, et il existe aussi toute une panoplie de mécanismes d'exécution de la loi: l'autorisation de pénétrer sur les lieux; la faculté de saisir le matériel et la documentation, etc.; et l'autorisation de faire toute analyse scientifique nécessaire pour déterminer si la recherche en question porte sur le clonage humain ou la thérapie germinale, quelle que soit l'interdiction qu'on invoque.

• 1020

M. Maurice Vellacott: Maintenant que j'ai une réponse partielle à ma question, l'essentiel de ma question principale est ceci: y a-t-il un problème dans le régime judiciaire actuel de notre pays? Je reconnais que mon service de police, dans ma campagne de la Saskatchewan, n'a peut-être pas le savoir voulu pour cerner la complexité de cette question. Est-ce qu'on peut faire intervenir des fonctionnaires du ministère de la Santé avant de porter une accusation? Y a-t-il quelque chose dans notre système de justice pénale qui empêche la police de faire appel au savoir des fonctionnaires du ministère de la Santé—ou d'ailleurs—, les accusations réglementaires étant portées par la GRC, le service de police municipale ou un autre? Est-ce qu'il y a quoi que ce soit qui empêche cela?

Le président: Dans ce projet de loi-ci?

M. Maurice Vellacott: Dans ce projet de loi-ci.

M. Glenn Rivard: Le pouvoir des agents de la santé publique dans un domaine qui en serait l'équivalent, si vous voulez, est défini par la loi. Par exemple, ils sont autorisés à mener ce genre d'inspections et d'activités d'exécution de la loi en vertu de la Loi sur les aliments et drogues, mais ils ne sont autorisés à intervenir que dans les cas régis par la Loi sur les aliments et drogues.

M. Maurice Vellacott: Donc, s'ils croient qu'une transgression a été commise, ils peuvent en fait en avertir le service de police local et dire qu'ils ont des raisons de croire qu'une transgression a été commise et que, par conséquent, il faudrait porter une accusation.

M. Glenn Rivard: Mais en vertu du projet de loi C-247 ils n'ont aucun pouvoir ou aucun mandat à cet égard. J'ignore comment ils sauraient qu'une transgression a été commise. Ils ne jouent aucun rôle dans le contexte de ce projet de loi.

M. Maurice Vellacott: Et c'est la question que je posais au sujet de ce projet de loi. Il n'y a rien ici qui leur interdit de servir de témoin expert avant ou après le dépôt des accusations, n'est-ce pas?

M. Glenn Rivard: Je dirais les choses différemment. Je dirais qu'ils n'ont aucun pouvoir pour agir. Leur pouvoir relativement à l'exécution de la loi se limite au pouvoir que leur donne la loi.

M. Maurice Vellacott: Mais si la police fait appel à eux, parce qu'elle a des soupçons ou s'imagine des choses, peu importe, ils peuvent intervenir, donner un témoignage d'expert, être sommés de témoigner ou prêter leur concours à la police pour qu'une accusation puisse être portée. Est-ce exact?

M. Glenn Rivard: À mon avis, ils n'ont aucun pouvoir pour ce faire.

Le président: Avez-vous épuisé votre question?

Voulez-vous poser une question, Reed?

M. Reed Elley: Je croyais avoir tout compris, mais après avoir entendu cela je n'en suis plus aussi sûr. Êtes-vous en train de dire que le clonage est différent de la manipulation génétique, par exemple, pour ce qui est de l'élimination des maladies? J'aimerais que Mme Colvin réponde.

Mme Phyllis Colvin: Oui, il y a deux types différents de technologie.

Le président: Dans ce projet de loi-ci.

Mme Phyllis Colvin: Oui. Dans ce projet de loi, il y a deux dispositions qui sont tirées du projet de loi précédent, et ce sont des dispositions distinctes. Autrement dit, pour revenir au début de tout cela, lorsque la Commission royale a mis de l'avant ces recommandations, pour ainsi dire, qui ont fini par former la base des interdictions, il y avait deux recommandations distinctes, l'une qui concernait le clonage et l'autre qui concernait la manipulation génétique intervenant entre deux générations.

M. Reed Elley: Ce sont donc deux choses différentes. Ce projet de loi porte sur le clonage.

Mme Phyllis Colvin: Ce projet de loi porte sur les deux.

M. Reed Elley: Qu'advient-il de l'autre? Vous pouvez me réexpliquer cela?

M. Glenn Rivard: Voyez l'alinéa 286.1(1)b)...

M. Reed Elley: Je peux voir qu'il y est question de clonage.

Le président: Puis-je vous interrompre un instant? Monsieur Rivard, vous attiriez l'attention du comité sur...?

M. Glenn Rivard: Voyez l'article 1 du projet de loi; vous allez voir que deux infractions sont créées par...

Le président: À quelle page?

M. Glenn Rivard: C'est au haut de la deuxième page.

Le projet de loi créerait deux infractions. L'alinéa 286.1(1)a) porte sur le clonage, et au haut de la deuxième page, l'alinéa 286.1(1)b) porte sur ce qu'on appelle communément la thérapie germinale. Les objectifs de ces deux pratiques sont différents, et, d'un point de vue technique, ce sont aussi des pratiques différentes.

• 1025

M. Reed Elley: Le gouvernement n'a pas vu ce problème lorsqu'il a proposé son dernier projet de loi?

Mme Phyllis Colvin: Ah, oui. Les libellés sont identiques.

Le président: Merci, madame Colvin. Désolé.

On dépasse un peu les bornes, Reed. En toute justice, je pense que Mme Picard nous a déjà donné une explication, qui était suffisante à mon avis pour l'opposition et le gouvernement. On a dit que le projet de loi présentait déjà des difficultés que des amendements allaient corriger. Mme Picard en a déjà parlé.

Je vois bien que vous êtes sur une bonne piste, mais je préfère que nous n'allions pas de ce côté-là. Tenons-nous-en à notre sujet, parce que j'estime que nous étions sur la bonne voie.

Une voix: De l'avis du président.

Des voix: Ah, ah!

Le président: De l'avis du président? Oui, vous avez raison.

M. Reed Elley: Je crois que c'est dans les gènes.

Des voix: Ah, ah!

Le président: C'est pourquoi je ne me gêne pas.

Monsieur Vellacott.

M. Maurice Vellacott: Phyllis, ma question s'adresse à vous encore une fois. Les deux éléments, le a) et le b), sont-ils, comme l'a signalé Glenn, si inséparables, si inextricablement liés qu'il serait impossible de garder un sans l'autre? Même si on supprimait le b), par exemple, est-ce qu'on atteindrait l'objectif d'interdire le clonage humain? Ou bien, est-ce que, sans le b), le a) serait tellement affaibli ou dilué qu'il ne serait sans doute même pas possible d'interdire le clonage humain?

Ma question est-elle assez claire?

Mme Phyllis Colvin: Je préfère ne pas me prononcer sur l'effet de dilution, mais il s'agit de deux technologies séparables où les questions ne sont pas les mêmes, si bien qu'elles font l'objet de dispositions distinctes et qu'elles ont été traitées séparément depuis la Commission royale jusqu'au projet de loi à l'étude.

M. Maurice Vellacott: Ainsi, votre opinion réfléchie en tant qu'experte serait que, si nous laissions tomber le b), nous pourrions tout de même en arriver—si vous me permettez de m'exprimer en des termes profanes—à interdire le clonage humain.

Mme Phyllis Colvin: Dans la mesure où votre but serait uniquement d'interdire le clonage, vous pourriez effectivement réaliser cet objectif selon moi.

Le président: Merci.

Merci beaucoup, monsieur Rivard, madame Colvin et madame Manseau. Madame Manseau, vous n'avez rien dit, mais parfois le silence est d'or, comme dit le proverbe. Nous vous remercions beaucoup pour votre patience et pour l'effort consciencieux que vous avez fait pour bien répondre à nos questions.

Chers collègues, nous allons tout de suite entreprendre l'étude du projet de loi.

Monsieur Myers, vous voulez d'abord poser une question?

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Non. Je voudrais simplement faire quelques observations, si vous le permettez.

Le président: Uniquement à titre d'éclaircissement, bien sûr.

M. Lynn Myers: Je l'espère bien.

Le président: Très bien.

M. Lynn Myers: Je tiens tout d'abord, si vous voulez bien me le permettre, monsieur le président, à remercier Mme Picard pour ce projet de loi. Il témoigne de sa volonté, et, je crois, de la volonté des Canadiens, de régler cette question très importante.

Il est difficile, monsieur le président, de se tenir au courant de ce qui se passe à cet égard. J'ai eu l'occasion, il n'y a pas tellement longtemps—c'était au début du mois—de réfléchir sur ce qui se passe à l'Université du Wisconsin. Cela montre bien que nous devons tous veiller à nous doter d'une législation et d'une réglementation complètes relativement à cette question d'importance capitale.

Je sais que le gouvernement s'intéresse beaucoup à la question. Je sais qu'il s'est prononcé publiquement contre le clonage, et il est important d'en prendre note. Je crois, par ailleurs, qu'il est important de prendre note du fait que le ministre de la Santé a indiqué à plusieurs reprises que la législation régissant cette technologie très importante doit être aussi actuelle et aussi souple que possible.

J'ai toutefois écouté très attentivement ce que disait M. Rivard au sujet des dispositions visant l'application de la loi ainsi que de ce qui se produit à l'heure actuelle et de ce qui pourrait se produire aux termes du Code criminel, et j'estime qu'il y a là des lacunes. Je ne suis d'ailleurs pas persuadé que le mieux soit d'inclure des dispositions de ce genre dans le Code criminel.

Cela dit, nous pourrions peut-être permettre au projet de loi de passer à la troisième lecture et attendre de voir ce qui se produira. C'est à mon avis ce qu'il conviendrait de faire. Nous pourrions peut-être nous entendre là-dessus, et j'espère que le processus pourra ainsi être accéléré, monsieur le président.

Le président: Je ne suis que l'arbitre ici, monsieur Myers.

• 1030

Le président: Je ne suis que l'arbitre ici, monsieur Myers. Les membres du comité décideront ce qu'ils voudront, et, s'ils croient que le projet de loi mérite d'être étudié à la Chambre, ils peuvent le renvoyer. Par ailleurs, si les députés estiment qu'il y a lieu d'amender le projet de loi, l'étape de la troisième lecture et celle du rapport sont d'excellentes occasions de proposer des amendements afin de répondre à l'une ou l'autre des préoccupations qui ont été ou seront soulevées ici. Ce n'est toutefois pas mon affaire, mais l'affaire de la Chambre. Dois-je...

Monsieur Vellacott?

M. Maurice Vellacott: J'ai quelque chose à dire au sujet d'un point qui a été soulevé à plusieurs reprises ici. Il s'agit de la recherche médicale faite dans l'objectif louable de prévenir les handicaps et les maladies. Si je comprends bien, l'alinéa b) n'interdit qu'une très petite part de la multitude des recherches médicales en ce sens. Le type de recherche qui serait interdit par l'alinéa b) ne se fait même pas à l'heure actuelle; il s'agit de quelque chose qui pourrait éventuellement être possible dans l'avenir. La lecture que j'en fais m'amène à conclure que la grande majorité des recherches médicales qui se font dans le but de prévenir les handicaps et les maladies ne seraient pas visées par l'interdiction.

Le président: C'est peut-être la lecture que vous en faites, et, je le répète, il ne m'appartient pas de me prononcer là-dessus ni de porter un jugement quelconque, si ce n'est pour répéter ce que j'ai dit il y a un moment: s'il y a des députés comme vous et d'autres qui ont soulevé ces préoccupations et que vous voulez proposer des amendements pour les régler, vous pouvez le faire dès maintenant.

Si toutefois vous décidez, comme le proposait M. Myers, de renvoyer le projet de loi à la Chambre, où il serait possible d'y apporter des amendements, c'est là une décision que vous pouvez prendre. Tout ce que je peux faire, c'est demander que nous passions à l'étude article par article, et vous n'avez qu'à vous prononcer là-dessus. Ça va?

M. Reed Elley: J'invoque le Règlement, monsieur le président. Je ne sais pas trop si une motion pareille serait recevable, mais sommes-nous autorisés en comité à adopter une motion pour dire que nous voulons renvoyer le projet de loi à la Chambre pour qu'il y soit adopté en troisième lecture, sans que nous l'ayons étudié article par article, et ne pas nous donner tout ce mal, si c'est ce que veut le comité? Sommes-nous tenus d'étudier le projet de loi article par article.

Le président: Je crois qu'il faut l'étudier article par article, car je dois pouvoir faire rapport de quelque chose.

M. Reed Elley: D'accord.

(Article 1)

Le président: L'article 1 est-il adopté?

Non, pardon...

[Français]

Mme Pauline Picard: J'ai un amendement à proposer.

[Traduction]

Le président: ... avant que nous ne commencions, j'ai sous les yeux un amendement proposé par Mme Picard.

[Français]

Mme Pauline Picard: Je propose que le projet de loi C-247, à l'article 1, soit modifié par substitution, à la ligne 8, page 1, de ce qui suit:

      a) manipuler une cellule humaine, un zygote ou un

«Manipuler une cellule humaine» remplace «manipuler un ovule». Je vous explique.

Les progrès technologiques actuels font en sorte que l'utilisation d'un ovule n'est plus requise pour pratiquer le clonage. Une seule cellule suffit. Donc, je remplace «manipuler un ovule» par «manipuler une cellule humaine». De toute façon, dans le projet de loi C-47, on avait apporté un amendement à l'article pour remplacer «manipuler un ovule» par «manipuler une cellule humaine».

[Traduction]

Le président: Madame Picard, j'ai une question à vous poser.

[Français]

Mme Pauline Picard: Oui.

[Traduction]

Le président: Je comprends que la technologie a évolué, mais pourquoi ne pas simplement ajouter ce terme au lieu de le substituer à ce qui se trouve là? Par exemple,

[Français]

pourquoi ne pas dire «manipuler un ovule, une cellule humaine, un zygote» au lieu d'éliminer «un ovule» et de le remplacer par «une cellule humaine»?

Mme Pauline Picard: Je n'y vois pas d'objection. Je me suis aperçue de l'erreur en revoyant le projet de loi C-47. En étudiant le projet de loi, on s'est rendu compte qu'il y avait eu un amendement pour remplacer «ovule» par «cellule humaine», et c'est pour cela que j'ai voulu faire la modification. Aujourd'hui, on n'a plus besoin de l'ovule. Une seule cellule suffit. Donc, je n'y vois pas d'objection si vous pensez que c'est plus...

[Traduction]

Le président: Non.

Nous sommes saisis d'une motion visant à proposer un amendement.

(L'amendement est adopté)

• 1035

(L'article 1 amendé est adopté)

Le président: Le titre est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: Le projet de loi amendé est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le président: La présidence doit-elle faire rapport du projet de loi amendé à la Chambre, et ce, à titre de quatrième rapport du comité?

Des voix: D'accord.

Le président: Merci beaucoup, mesdames et messieurs. Il sera fait rapport du projet de loi à la Chambre conformément à votre souhait.

La séance est levée.