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HEAL Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HEALTH

COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 11 mars 1999

• 0914

[Traduction]

Le président (M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.)): Mesdames et messieurs, la séance est ouverte.

Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude sur la situation des dons d'organes et de tissus au Canada.

Nous accueillons avec plaisir ce matin une collègue à nous, l'honorable Penny Priddy, ministre de la Santé de la Colombie-Britannique. Elle est accompagnée d'un autre de nos collègues au palier provincial, M. Ed Conroy, député à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, et de M. Bill Barrable, directeur général de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique.

• 0915

Nous n'avons malheureusement pas le nom du dernier invité.

L'hon. Penny Priddy (ministre de la Santé, province de la Colombie-Britannique): C'est moi qui vous le présenterai.

Le président: C'est donc Mme Priddy qui nous le présentera.

Nous avons l'habitude de laisser les témoins parler pendant cinq minutes environ, puis de passer à une période de questions. Comme je ne vois aucune pendule nulle part, je ferai montre de souplesse.

Madame Priddy, vous avez la parole. Vous voudrez sans doute nous présenter votre autre collègue.

Mme Penny Priddy: Certainement. Merci de nous avoir invités à comparaître ce matin pour vous parler de ce qui est un enjeu de grande importance pour le Canada, à savoir les dons d'organes et de tissus.

Je vais maintenant vous présenter la personne qui m'accompagne et que vous ne connaissez pas. Il s'agit du Dr Neil Fatin, du ministère de la Santé de la Colombie-Britannique, qui me seconde auprès de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique.

Il est rare que nous nous présentions à des comités permanents, mais j'ai choisi de venir vous rencontrer ici, car je sais que la Colombie-Britannique a quelque chose d'important à vous dire et qu'elle peut partager avec vous l'expérience qu'elle a vécue depuis la création de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique. C'est un modèle qui peut s'appliquer dans les autres provinces, d'après nous, et qui pourrait être aussi adopté par le gouvernement fédéral; nous vous encourageons donc à envisager cette possibilité.

J'ai l'intention d'aborder cinq grands sujets. J'ai à coeur de ne pas dépasser le temps que vous nous avez accordé, mais je suis également sensible à la souplesse dont vous avez promis de faire preuve. Je vais donc tenter de couvrir ces domaines le plus brièvement possible.

J'aborderai rapidement la question de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique, puisque Bill Barrable, qui en est le directeur général, vous en parlera plus en détail.

Je voudrais brièvement vous parler des répercussions qu'ont les greffes sur les familles, des coûts associés aux greffes, de la façon dont la période d'attente d'une greffe peut être réduite, et des activités de promotion et d'éducation qui sont nécessaires, à mon avis.

Je ne répéterai pas tous les chiffres que vous ont certainement donnés tous les autres témoins que vous avez déjà rencontrés. Toutefois, laissez-moi vous brosser un tableau de ce qui se passe dans ma province.

En Colombie-Britannique, quelque 450 personnes sont inscrites sur une liste d'attente en vue d'une greffe d'organe, et 12 de ces personnes sont des enfants: il s'agit de six petites filles et de six petits garçons. Ceux d'entre nous qui ont des enfants, ou même des petits-enfants, ce qui est mon cas, ou qui comptent des enfants dans leurs familles élargies, savent à quel point il peut être difficile de s'endormir le soir en sachant qu'il y a six petites filles et six petits garçons qui sont dans l'attente d'une greffe d'organe.

Nous sommes convaincus qu'une augmentation du taux de dons d'organes pourrait faire toute la différence: cela pourrait permettre de sauver des vies, de donner une meilleure qualité de vie à des patients et de réduire au fil des ans les coûts de santé au Canada. Or, voilà ce qui intéresse grandement tous les Canadiens, et particulièrement les ministres de la Santé, y compris le ministre fédéral de la Santé, qui ont tous d'énormes défis à relever sur le plan financier. Il est donc important de parvenir à réduire les coûts de santé.

Laissez-moi vous donner un exemple: en Colombie-Britannique, le traitement de dialyse rénale coûte 50 000 $ par année par personne environ. Or, la greffe rénale coûte 20 000 $ au moment de la chirurgie, à laquelle s'ajoutent un peu plus de 6 000 $ par année pour les médicaments antirejet. Au départ, la greffe représente une énorme économie. En second lieu, plus vite on peut faire une greffe, et moins la maladie progresse chez le patient. Ce patient est donc hospitalisé moins souvent et moins longtemps, ce qui représente à nouveau des économies substantielles.

Mais nous n'agirions pas ainsi uniquement par souci d'économie. Nous agirions ainsi par souci d'alléger le traumatisme que ressent le patient, même s'il faut reconnaître que les coûts en soins de santé sont faramineux. Je crois que nous perdons certains donneurs d'organes simplement parce qu'il n'existe pas au Canada de système national de dons d'organes qui soit clair, simple et sans ambiguïté. Or, c'est un système comme celui-là qu'il nous faut, et j'espère que c'est ce que vous ont dit tous les autres témoins.

En Colombie-Britannique, nous avons essayé de réagir à l'absence d'un système comme celui que je vous ai décrit. Nous avons créé la Société de transplantation de la Colombie-Britannique, dont vous entendrez parler plus tard, qui est le seul organisme de dons d'organes qui soit complètement intégré dans toute l'Amérique du Nord.

• 0920

Cette organisation-là, financée par le gouvernement provincial, gère tous les aspects du don d'organes. Elle administre le registre des donneurs; elle administre la liste d'attente. Elle rembourse tous les hôpitaux qui effectuent les chirurgies de transplantation; elle fait tout le suivi externe auprès des patients qui ont subi une greffe; et elle soutient les familles. Vous voyez que notre système intègre toutes les étapes et aide les patients dans leur parcours, par opposition au système morcelé qui fait appel ici à un hôpital, là à une clinique et encore ailleurs à un médecin. Le parcours est déjà suffisamment difficile pour ces patients. En Colombie-Britannique, nous avons donc décidé d'aider nos patients.

L'un de nos objectifs est de réduire les coûts dont je vous ai parlé, et l'autre objectif est de réduire les périodes d'attente. Si nous avions un registre national des donneurs et une banque de données nationale des patients en attente d'une greffe, les chances de trouver un organe compatible seraient bien meilleures. Certains vous diront que la solution ne passe pas par un registre national et que ce registre national n'est pas nécessairement la meilleure façon de trouver un donneur compatible; laissez-moi vous parler brièvement du petit Shane, qui a maintenant cinq ans.

Je l'ai vu mardi. Il a dû attendre 15 mois avant de subir une greffe du foie. Imaginez-vous en train de tenir dans vos bras un bébé de six mois qui attend d'être greffé! Si un registre national avait permis à ses parents de n'attendre que 14 mois, 13 mois, ou même 6 mois, au lieu des 15 mois durant lesquels ils ont attendu, grâce au simple fait que l'on aurait élargi la liste de donneurs compatibles, on aurait pu réduire grandement leurs souffrances.

Je n'ai jamais vécu cela personnellement et je ne voudrais pas me substituer aux parents de Shane, mais j'imagine que s'il s'était agi de mon bébé, chaque jour m'aurait semblé une semaine et chaque semaine, un mois. La mise sur pied d'un registre national peut réduire la période d'attente.

En troisième lieu, nous avons réussi dans notre province à lancer notre registre grâce à une campagne de diffusion, de promotion et d'éducation publique très vigoureuse. Après un an environ, nous avons inscrit 180 000 personnes sur la liste des donneurs potentiels de notre banque de données; mais cela n'est possible que si l'on instaure une politique de promotion très dynamique auprès des sociétés, écoles et institutions de la collectivité, dont plusieurs choisissent de s'associer à nous et de travailler en partenariat avec la Société de transplantation de la Colombie-Britannique.

Prenez le cas d'une de nos stations de radio, CKNW, dont l'indicatif est le 980. Cette station de radio a lancé une campagne dans le but d'obtenir 980 signatures de donneurs potentiels. Voilà le type de partenariat qu'il nous faut pour faire de la promotion et de l'éducation. On peut bien avoir au départ un registre de personnes en attente d'une greffe, mais il faut aussi travailler d'arrache-pied pour élargir l'assiette des donneurs potentiels, car ils constituent un élément clé du succès de cette entreprise. Nous allons d'ailleurs poursuivre notre travail de diffusion en ce sens.

J'ai parlé du temps d'attente, des coûts et de la promotion. L'autre aspect important, c'est la formation du personnel. Nous venons d'adopter une loi en Colombie-Britannique, qui entrera en vigueur le 1er avril, pour obliger tous les hôpitaux à avertir la société de transplantation en cas de décès ou de décès imminent, pour permettre l'accès à la banque de données de manière à ne pas ajouter au traumatisme d'une famille qui vit déjà des moments douloureux.

Nous avons des cartes de donneurs qui indiquent si une personne s'est inscrite pour être un donneur d'organe ou non. Même à 3 heures du matin, la personne à l'hôpital, qui de toute évidence aurait une cote sécuritaire, peut avoir accès à la banque de données de la société de transplantation et obtenir une copie par télécopieur qui indique les souhaits du membre de la famille. Nous perdons beaucoup de dons parce qu'il est très difficile de demander à une famille, à un moment aussi éprouvant, de prendre une telle décision. Nous perdons probablement la moitié des donneurs possibles de cette façon.

• 0925

C'est pourquoi nous avons rendu cela obligatoire et assurons également une formation au personnel. Comme vous pouvez l'imaginer, il est incroyablement difficile de faire des démarches de ce genre auprès d'une famille à un tel moment, et le personnel a besoin d'une formation pour pouvoir le faire. Il existe des protocoles très clairs à l'intention des professionnels de la santé qui demandent le consentement de donneurs appropriés.

Je tiens à souligner que cette loi n'empiète pas sur le droit d'un particulier ou d'une famille de refuser de faire un don d'organe. En fait, une personne qui refuse clairement d'être un donneur d'organe, comme l'indique la carte, a la possibilité de déclarer ses voeux auprès de nous également. Il n'y a donc pas ainsi de risque d'ambiguïté.

En conclusion, au nom de la Colombie-Britannique, j'encourage le gouvernement fédéral à coordonner sans tarder une stratégie nationale de donneurs d'organes en collaboration avec les provinces. Cela permettra de raccourcir les temps d'attente et de réduire les coûts. Cela nécessitera une promotion active et une formation du personnel. Mais l'aspect le plus important—parce que vous avez entendu toutes les statistiques—c'est le visage de ces enfants et de ces personnes qui attendent des transplantations et qui ratent des occasions parce que nous n'avons pas le système voulu. Donc, lorsque vous entendez citer tous ces chiffres d'un bout à l'autre du pays, essayez de mettre un visage sur chacun de ces chiffres, le visage de ceux qui attendent une transplantation d'organe.

Bill Barrable vous parlera de certaines des recommandations très précises concernant les normes, etc., pour les centres de transplantation. Je ne crois pas qu'il soit nécessaire que vous m'entendiez en parler.

Nous avons au Canada l'occasion de montrer la voie dans ce domaine. La Colombie-Britannique veut s'associer avec vous dans cette entreprise.

Je vous remercie du temps que vous m'avez accordé et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.

Le président: Nous y arriverons sous peu. Je tiens à vous remercier de votre exposé et d'avoir respecté le temps qui vous a été alloué.

Habituellement, nous entendons ensuite certains des autres témoins. Donc, si vous le permettez, nous les entendrons d'abord, après quoi nous passerons aux questions et réponses.

Mme Penny Priddy: Bien sûr.

Le président: Je crois, monsieur Conroy, que vous avez un bref exposé pour nous vous aussi. Vous avez la parole.

M. Ed Conroy (député de l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique, caucus du gouvernement néo-démocrate): Je tiens à vous remercier de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole devant vous. Je suis heureux de me joindre à notre ministre de la Santé, Penny Priddy, pour encourager le Comité permanent de la santé à recommander au gouvernement fédéral de travailler en collaboration avec les provinces pour mettre sur pied un système national de donneurs d'organes.

Je sais, pour l'avoir vécu moi-même, quel est le stress énorme que vivent ceux qui attendent un organe, et leurs familles. J'ai eu la grande chance de voir ma vie prolongée et ma santé rétablie grâce à des Britanno-Colombiens et à leurs familles qui ont consenti au don d'organes.

J'étais l'un de plusieurs centaines de Britanno-Colombiens inscrits sur une liste d'attente pour une opération de transplantation d'organe il y a 16 mois. J'ai eu deux transplantations de foie. J'en ai eu une au printemps 1996, que mon corps a rejetée, et une autre il y a environ 16 mois, à l'automne 1997. Je connais, pour les avoir vécues, les difficultés que traversent non seulement ceux qui attendent une transplantation, mais leurs familles dans de telles circonstances. Tel que vous me voyez ici, je pèse maintenant environ 220 livres. Mais il y a 16 mois, je pesais 160 livres et j'étais à trois jours de la mort. Puis, pour une raison miraculeuse, soudainement, on m'a trouvé un foie, et cette transplantation m'a sauvé la vie.

Inutile de dire que je me suis profondément engagé à ce que cette question soit réglée d'une façon quelconque. Je sais qu'à l'heure où je vous parle il y a des gens dans tout le Canada qui sont alités comme je l'étais, à quelques jours de la mort, qui ont des familles et des enfants—j'en ai quatre—qui attendent les dons d'organes qui leur sauveront la vie. Et beaucoup d'entre eux ne les recevront pas parce que nous n'avons tout simplement pas le système voulu dans notre pays permettant de maximiser la disponibilité des organes qui serviront à des transplantations. C'est pourquoi je suis fier du rôle de leadership qu'assume la Colombie-Britannique pour augmenter le taux de dons d'organes et diminuer les temps d'attente pour les opérations de transplantation d'organes.

• 0930

J'estime qu'un registre informatisé de donneurs d'organes est essentiel pour améliorer l'efficacité du système de donneurs d'organes. À titre de modèle, le registre de donneurs d'organes de la Colombie-Britannique présente certains avantages évidents. Tout d'abord, il établit le consentement légal en vertu de la loi sur le don de tissus humains de la Colombie-Britannique. Cela est accessible à l'ensemble des citoyens, et non pas simplement aux conducteurs, comme dans certains systèmes où le consentement est indiqué sur votre permis de conduire. La base de données est accessible à tout le personnel des soins intensifs des hôpitaux. Elle peut être mise à jour sans frais pour les personnes inscrites, et est appuyée par une campagne de promotion et de sensibilisation publique.

En étendant ce modèle à l'ensemble du pays, je crois que nous pouvons réellement combler les lacunes du système de transplantation au Canada. Nous pouvons nous assurer que tous les donneurs éventuels sont recensés de manière à réduire le temps d'attente pour de nombreux Canadiens de la Colombie-Britannique et des autres provinces qui ont besoin d'une opération de transplantation d'organe susceptible de leur sauver la vie.

J'applaudis les milliers de Canadiens de la Colombie-Britannique qui ont indiqué leur intention de faire don de leurs organes auprès du registre de donneurs d'organes de la Colombie-Britannique et les autres Canadiens qui ont fait connaître leur volonté de faire don d'organes par le biais des mécanismes en vigueur dans leurs provinces. Mais nous devons sensibiliser un plus grand nombre de Canadiens à l'urgence et à l'importance des dons d'organes et mettre au point un système de coordination des dons d'organes à l'échelle nationale afin de ne perdre aucune occasion d'effectuer des transplantations qui sauveront des vies.

Juste avant de subir ma deuxième transplantation, lorsque j'étais vraiment très malade, on m'a trouvé un foie. J'étais à l'hôpital à Vancouver, et on m'avait préparé pour l'opération. Je m'en souviens très bien parce qu'il faut prendre ce produit horrible qui est vraiment la pire partie de toute la procédure. Je l'avais fait, et le médecin est arrivé et a dit: «Je suis désolé, mais nous ne pouvons pas vous opérer aujourd'hui parce que la banque de sang n'a pas suffisamment de sang.» Ce n'est pas une critique du système de distribution des produits sanguins. Nous en avons déjà parlé. La situation était assez chaotique à l'époque.

Heureusement que la Colombie-Britannique et l'Alberta sont en communication, parce que lorsque je n'ai pas pu recevoir ce foie, il a été expédié à Edmonton, où il a été utilisé. Donc il a permis de sauver une vie. J'en étais très, très heureux. Cela me fait songer aux possibilités accrues que permettrait un système national de dons d'organes si nous avions encore plus de mécanismes en place.

En tant que transplanté qui s'est trouvé à deux doigts de la mort alors que j'attendais un organe idoine, je suis profondément conscient de la nécessité d'accroître les dons. En tant que membre du gouvernement, je suis déterminé à apporter ma contribution pour améliorer les chances des Canadiens de la Colombie-Britannique et d'ailleurs de recevoir ce don de vie.

Je suis venu de la Colombie-Britannique jusqu'ici hier pour ces quelques minutes, ce dont je vous suis très, très reconnaissant. La situation des dons d'organes comme mesure permettant de sauver des vies a énormément évolué au cours des dernières années. Il me semble que notre pays est à la traîne dans ce domaine. Je suis sûr que chacun d'entre vous connaît quelqu'un ou a entendu parler de quelqu'un qui a eu une transplantation d'organe. Je pense qu'il est essentiel que le Canada se dote dès maintenant d'un système de dons et de transplantations d'organes conforme à ce qui se fait à l'heure actuelle.

Pour terminer, je tiens simplement à vous remercier de m'avoir offert l'occasion de comparaître devant vous. Je souhaite bonne chance à tous les donneurs et transplantés. Je vous remercie.

Le président: Je vous remercie d'avoir partagé votre expérience avec nous.

Nous passerons maintenant à Bill Barrable, qui va nous donner une description plus détaillée du fonctionnement du système. Bill utilisera aussi le matériel audiovisuel.

• 0935

Mes collègues constateront d'après les documents qu'on leur a fait distribuer que nous n'en avons pas une copie traduite, mais nous avons l'accord des membres ici présents pour faire circuler ces documents de toute façon. Je tiens donc à remercier les députés du Bloc et les autres qui ont consenti à ce qu'on le fasse, même si nous n'avons pas pu faire traduire la documentation à temps.

Vous avez la parole. Nous allons écouter votre exposé attentivement.

Monsieur Barrable.

M. Bill Barrable (directeur général, Société de transplantation de la Colombie-Britannique): Je vous remercie, monsieur le président.

Je tiens à remercier les membres du comité d'avoir invité un représentant de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique. Notre ministre, Penny Priddy, et Ed Conroy ont tous deux décrit de façon très éloquente le registre de donneurs d'organes; donc je ne m'y attarderai pas. Le film vidéo vous en expliquera le fonctionnement.

Au Canada, il n'existe aucun système qui appuie les dons et les transplantations d'organes. Si vous examinez les États qui ont fait un très bon travail dans ce domaine, comme la Pennsylvanie et la Caroline du Nord, divers États américains, et l'Espagne, ils ont une chose en commun, c'est qu'ils ont mis un système sur pied et ont responsabilisé les hôpitaux en ce qui concerne les dons d'organes. Ce sont des aspects essentiels. On peut établir un registre de dons d'organes, et c'est un aspect très important d'un système plus vaste, mais la première étape la plus importante pour s'assurer que chaque famille bénéficie de l'option d'un don d'organe, c'est d'instaurer un système et un cadre de responsabilisation dans les hôpitaux pour faire en sorte que chaque donneur d'organe potentiel et chaque famille se voie offrir l'option du don d'organe, et qu'il ne s'agisse pas d'une décision arbitraire, mais bien d'une importante question de santé publique qui mérite d'être reconnue comme telle.

À l'heure actuelle, les dons d'organes dans les hôpitaux s'apparentent à plusieurs égards à une industrie artisanale. Le travail de ce comité et le fait même qu'il se réunisse et discute de cette question indiquent à mon avis qu'elle est en train de devenir l'importante question de santé publique qu'elle doit être. Je sais qu'il y a beaucoup de Canadiens, particulièrement ceux qui attendent des transplantations, qui espèrent que le comité montrera la voie et qui comptent réellement sur vous et les personnes clés du système pour faire bouger les choses. Nous trouvons très encourageant que vous teniez des séances sur cette question.

Comme la ministre l'a indiqué, la Colombie-Britannique a adopté de nouveaux règlements pour appuyer les dons d'organes. Ces règlements s'inspirent d'un système mis sur pied en Pennsylvanie en 1994. Depuis lors, c'est-à-dire depuis que la Pennsylvania Act 102 a été adoptée, le taux de dons et de transplantations d'organes en Pennsylvanie a augmenté de 50 p. 100. Cette loi permet de s'assurer que tous les décès sont rapportés au programme de collecte d'organes. Les règlements de la société de transplantation sont annexés à notre mémoire pour vous montrer comment nous les avons adaptés à la Colombie-Britannique.

Nous avons conservé les meilleurs aspects, à notre avis, du programme en vigueur en Pennsylvanie et ailleurs aux États-Unis, comme en Caroline du Nord, où les transplantations d'organes ont augmenté, et avons tâché de les adapter grâce au leadership de notre gouvernement sous forme de règlements, qui, nous l'espérons, seront adoptés d'ici à la fin du mois. Nous nous dépêcherons ensuite de mettre en oeuvre ce système afin d'avoir un processus complet, depuis l'identification des donneurs potentiels, le diagnostic de la mort cérébrale, le renvoi à une organisation de collecte d'organes, la Société de transplantation de la Colombie-Britannique, jusqu'à une requête auprès du registre de donneurs d'organes afin de déterminer si le donneur potentiel avait inscrit son consentement. S'il n'a pas inscrit son consentement, alors des personnes formées, des infirmières, des travailleurs sociaux, des membres du service de pastorale, feront des démarches auprès des plus proches parents dans l'espoir d'obtenir un consentement.

Nos travaux de recherche démontrent qu'en Colombie-Britannique, comme au Canada, quelque 50 p. 100 des donneurs d'organes potentiels ne sont pas connus des autorités hospitalières. Sans un système, donc, rien ne changera. Nous pouvons très bien prévoir un registre des donneurs d'organes, mais si nous ne commençons pas par le commencement, le registre n'aura pas une très grande incidence. Il faut les deux. Il faut donc qu'à l'hôpital le système soit instauré, il faut faire oeuvre éducative auprès du public et il faut un registre de donneurs d'organes pour mettre à contribution le public.

• 0940

Si nous lancions une campagne de promotion et d'information à propos du registre, nous pourrions en même temps faire passer le message clé de façon positive. Il faut bien souligner que les greffes et les dons d'organes perpétuent la vie et ne pas s'appesantir seulement sur l'aspect macabre. Je sais que vous avez entendu des témoins qui vous ont parlé de la mort cérébrale.

Si nous faisions oeuvre éducative auprès du public pour susciter son appui à l'égard d'un registre national, nous pourrions en profiter pour dissiper certains des mythes concernant la façon dont on traite les patients qui font don d'organes à l'hôpital. Je pense que cela offre beaucoup de possibilités. Ainsi, grâce au registre, nous aurons une tribune, un pied à l'étrier pour faire passer des messages essentiels dans le domaine public. En combinant une campagne d'information à propos du registre et des dispositions législatives ou des normes concernant le don d'organes à l'hôpital, le Canada se dotera d'un système.

Nous pouvons passer d'une des situations les plus déplorables dans le monde occidental à la meilleure. Nous pouvons passer au premier rang. Nous deviendrions alors un des premiers pays, voire le seul, à se doter à la fois d'un registre national et d'un programme national pour garantir que ce qui se passe à l'hôpital est tel que ce sont les familles qui décident, car elles ont toutes la possibilité de se prévaloir de cette option. Si on ne leur offre pas la possibilité de faire un don d'organe, alors on prend la décision à leur place, ce qui est à la fois contraire à l'éthique et contraire aux dispositions de la loi sur le don de tissus humains. Ainsi, instaurons un système pour garantir que cela ne se produira pas.

Je voudrais également vous parler de la troisième recommandation de notre groupe. Outre un registre national et des dispositions législatives provinciales qui, dans la loi sur le don de tissus humains, prévoiraient de l'obligation d'un préavis ou d'une référence, nous préconisons que l'on établisse un organisme national de réglementation des dons et des greffes. Il n'existe pas de normes approuvées pour les greffes au Canada. À la vérité, cela ne va pas, car nous pouvons faire beaucoup mieux.

Il existe des modèles qui pourraient nous inspirer lors de l'établissement éventuel d'un tel organisme—et je songe ici notamment au système canadien d'approvisionnement en sang—et son conseil d'administration indépendant aurait pour mandat national de veiller à énoncer des normes. Sans vouloir lui laisser tout le travail, nous avons quand même besoin d'une orientation. C'est tout à fait réalisable, et nous demandons au comité d'y songer.

En terminant, avant de passer à la bande vidéo, je voudrais me reporter à certaines annexes. Au Canada, il existe de nombreuses organisations, bénévoles, publiques et privées, qui ont exprimé le souhait d'appuyer un effort national en vue de l'établissement d'un registre national pour les dons d'organes. Il y a déjà pas mal d'argent amassé pour appuyer les dons d'organes. Hélas, ces efforts ne sont peut-être pas assez canalisés.

Tous les ans, les provinces dépensent des millions de dollars pour acheter des cornées et des tissus aux États-Unis et dans d'autres pays parce que nous ne disposons pas ici d'un système permettant l'approvisionnement. La quantité de donneurs d'organes sur laquelle on peut compter pour obtenir des tissus, des os et des cornées est énorme. Nous n'avons aucune raison d'acheter ces tissus aux États-Unis alors qu'il en coûterait la même somme pour organiser au Canada un système qui permettrait de se débarrasser des listes d'attente.

Lorsque la Pennsylvanie a promulgué une loi prévoyant la déclaration et le renvoi obligatoires, elle a réussi à éliminer la liste d'attende de cornées chez elle. Maintenant, ces cornées excédentaires sont vendues à d'autres programmes de transplantation aux États-Unis. Nous pouvons en faire autant. Nos gouvernements dépensent tous les ans des millions de dollars pour acheter ces tissus aux États-Unis. Dépensons cet argent au Canada, en installant notre propre système.

Je ne pense pas que nous ayons besoin de beaucoup d'argent supplémentaire pour résoudre ce problème. Il nous faut simplement nous organiser et réaffecter ces sommes. Dépensons-les au Canada.

Cela étant dit, je voudrais encore une fois remercier le comité de nous avoir invités. Je pense que nous pouvons passer maintenant à la bande vidéo, si vous le permettez, monsieur le président.

Le président: Absolument. Merci, monsieur Barrable.

• 0945

[Note de la rédaction: projection d'une bande magnétoscopique]

Le président: Très bien, merci beaucoup.

Nous passons immédiatement aux questions. Je sais que nos collègues attendent de poser des questions à la ministre et aux autres membres du groupe. Nous commençons par M. Reed Elley, du Parti réformiste.

M. Reed Elley (Nanaimo—Cowichan, Réf.): Je suis ravi de souhaiter la bienvenue au comité à des compatriotes de la Colombie-Britannique. Nous éprouvons un plaisir réel et sommes encouragés de voir une équipe venir nous présenter un train de mesures déjà adoptées. Cela ne me surprend pas de la Colombie-Britannique. Je pense qu'à bien des égards nous savons prendre les devants. Il est très agréable de vous recevoir et de vous voir présenter au reste du pays ce programme exemplaire. Je crois que ce sont des mesures qui pourraient fonctionner dans tout le Canada.

• 0950

Permettez-moi d'expliquer un petit peu ma situation personnelle. Je l'ai déjà fait devant d'autres personnes, mais je pense que cela nous ramène à une réalité plus concrète. Il est fort possible que ma fille soit le 13e enfant inscrit bientôt sur votre liste. Elle est née avec un seul rein, et ce rein est atteint. Nous savons ce qui se passe dans des cas de ce genre. Si l'insuffisance rénale se déclare, ce sera la dialyse, bien sûr, et nous devrons ensuite attendre qu'un rein soit disponible pour que l'on procède à une greffe.

Madame la ministre, j'espère que vous ne m'en voudrez pas de faire un peu la promotion du Cowichan District Hospital, mais j'éprouverais beaucoup de bonheur à voir le nouveau service de dialyse atteindre sa vitesse de croisière. Il ne fonctionne actuellement qu'au tiers de sa capacité. Ce n'est pas seulement le sort de ma propre fille qui me préoccupe, mais également celui des gens de ma circonscription qui doivent encore aller à Victoria. Il est superbe que ce service soit disponible à l'hôpital de Cowichan. J'espère seulement que, malgré les compressions budgétaires et les préoccupations qui règnent actuellement à l'endroit de notre système de soins de santé au Canada—en grande partie à cause des problèmes de paiements de transfert fédéraux, bien sûr—nous réussirons à régler ce type de problèmes, car il s'agit de questions de vie ou de mort.

Cela dit, je m'intéresse énormément aux greffes de reins et à la disponibilité de reins. Cela n'a de cesse de me torturer l'esprit. Vous avez dit dans votre rapport, madame la ministre, qu'il y a 449 Britanno-Colombiens en attente de greffes d'organes entiers, dont 420 qui attendent des greffes du rein. En matière de transplantation, c'est une situation qui, selon moi... il ne devrait pas y avoir 420 personnes qui attendent un rein. Ce n'est pas comme s'il fallait les prélever sur des cadavres. Les familles peuvent en faire don. Pourquoi y a-t-il un tel problème avec les greffes du rein en particulier? Comment régler ce problème si c'est l'un des plus importants du point de vue de l'attente? Madame la ministre, je vous adresse cette première question, mais les autres membres du groupe peuvent y répondre également.

Le président: Vous n'aurez pas beaucoup de temps pour poser une deuxième question.

Allez-y.

Mme Penny Priddy: Merci.

En fait, je céderai la parole à Bill dans un instant. Je veux toutefois répondre à votre question et à vos observations. Soit dit par parenthèse, je tiens à vous rassurer: le service de dialyse dispose de suffisamment de fonds pour fonctionner à 100 p. 100. En fait, le premier ministre de la province et moi-même étions là l'autre jour.

Les gens comprennent de mieux en mieux que l'on peut faire don d'un rein à l'intérieur de la famille. L'an dernier, en Colombie-Britannique, il y a eu 43 greffes du rein avec des reins provenant de membres de la famille. Comme je l'ai dit un peu plus tôt, la promotion du programme et l'éducation du public sont d'une importance capitale.

Je voudrais faire une observation sur votre question et élargir un peu la discussion, si vous le permettez. Si votre travail au sein de ce comité est d'une grande importance, c'est parce que, abstraction faite de la croissance démographique, il y a accroissement du besoin de recourir à des transplantations. Cela s'explique par trois raisons. Parlons d'abord des reins. Nous constatons ou nous savons que nous avons une incidence de diabète très élevée, notamment au sein des collectivités autochtones. Très souvent, c'est le diabète qui cause la nécessité de recourir à une greffe du rein. Nous voyons augmenter l'incidence de la maladie fibrokystique du rein. Il y a quarante ans, les personnes qui en étaient atteintes n'auraient pas vécu et n'auraient donc pas eu d'enfants. Par contre, maintenant, il y a survie, et nous constatons une augmentation du nombre de personnes atteintes. En outre, et j'ose à peine en parler, avec l'hépatite C nous allons également assister à une augmentation du besoin de greffes du rein en Colombie-Britannique.

Je voudrais également mentionner une autre maladie, et ce n'est peut-être pas la seule. Lorsque j'ai terminé mes études en soins infirmiers, il y a environ 35 ans, les enfants atteints de mucoviscidose qui vivaient jusqu'à l'âge de 16, 17 ou 18 ans détenaient pratiquement des records de survie. Bien sûr, aujourd'hui, les gens atteints de mucoviscidose atteignent non seulement le début de l'âge adulte, mais également la trentaine ou la quarantaine. Ce sont les gens qui ont le plus besoin de la greffe d'un poumon.

Donc, à bien des égards, les progrès de la médecine signifient qu'il y aura augmentation des besoins. Cela n'est pas uniquement lié à la démographie, mais aussi à l'évolution des maladies.

Bill, vous voulez peut-être faire quelques observations au sujet des greffes du rein.

Le président: Je lui donnerai l'occasion de prendre la parole un peu plus tard, madame Priddy. Je dois passer à la question suivante, mais vous trouverez peut-être l'occasion d'ajouter quelques mots en répondant à d'autres questions.

Madame Picard.

• 0955

[Français]

Mme Pauline Picard (Drummond, BQ): Madame la ministre, vous êtes la bienvenue. C'est tout un honneur pour nous de vous recevoir aujourd'hui avec vos collègues.

Vous avez parlé d'une stratégie coordonnée en partenariat avec les provinces et de l'importance de la création d'un registre national. Avez-vous un plan défini concernant ce registre national? Est-ce que vous voyez là un organisme indépendant? Le gouvernement fédéral pourrait-il en assurer le leadership ou est-ce que vous voyez la création d'un tel registre avec des normes semblables à celles de la stratégie actuelle sur la gestion du sang, par exemple?

[Traduction]

Mme Penny Priddy: Je crois que, dans ce cas-ci, je vais demander à Bill Barrable de répondre.

M. Bill Barrable: Merci. Je pense que le modèle utilisé pour la Société canadienne du sang pourrait servir dans le cas des transplantations. Il y a un conseil composé de bénévoles qui doit rendre des comptes aussi bien au public qu'au gouvernement. Ce mandat s'accompagne d'un pouvoir qui permet d'assurer que des normes minimales soient respectées et mises en oeuvre. Je pense que cela ne pourrait qu'être bénéfique pour les transplantations.

[Français]

Mme Pauline Picard: Avez-vous des résultats, à l'heure actuelle, du système mis en place pour sensibiliser la population au don d'organes? Êtes-vous obligés de tenir une campagne de sensibilisation durant une longue période de temps ou seulement pendant une courte période? La réponse de la population est-elle favorable? Pouvez-vous évaluer actuellement l'impact de cette campagne?

[Traduction]

Mme Penny Priddy: Je pense que la réaction du public est extrêmement favorable. Dans le passé, en Colombie-Britannique, et peut-être dans d'autres provinces, on se contentait d'ajouter un petit autocollant à son permis de conduire, et cela servait d'indication. Cela entraîne toutes sortes de complications, particulièrement au moment du décès, lorsqu'un membre de la famille déclare qu'il n'y avait pas consentement réel ou qu'il y a eu malentendu au moment du consentement, etc.

Le fait est qu'en un peu plus d'un an 180 000 personnes ont pris la peine d'obtenir le formulaire, de remplir la fiche, de la mettre dans une enveloppe et de la renvoyer, ce qui représente certainement un engagement plus marqué que de se contenter de coller une étiquette sur son permis de conduire. C'est plus efficace, et cela m'indique que nous connaissons un succès extraordinaire.

Toutefois, je tiens à dire qu'il faut un effort soutenu pour parvenir à ce résultat. On ne peut pas simplement faire une campagne de promotion et s'attendre qu'elle produise tous les résultats souhaités. Bill Barrable a fait un superbe travail, mais c'est pour cela que ces partenariats avec des entreprises et des organismes sont si importants. Nous avons un partenariat avec la Fondation David Foster.

Beaucoup d'entreprises acceptent de travailler en partenariat. Il faut que l'effort déployé pour atteindre les gens soit soutenu; nous devons nous assurer de la participation d'entreprises partenaires et de tous ceux qui peuvent nous aider à propager l'information.

[Français]

Mme Pauline Picard: Merci beaucoup.

Le président: Madame Caplan.

[Traduction]

Mme Elinor Caplan (Thornhill, Lib.): J'ai plusieurs questions à poser. J'espère que nous aurons assez de temps pour pouvoir participer à un deuxième tour.

Tout d'abord, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue et de vous féliciter de nous présenter une proposition très précise. Cela est très utile pour le comité.

Je vous ai entendu dire deux ou trois choses dont j'aimerais que vous parliez plus abondamment. Vous avez parlé du besoin d'imputabilité prévu par la réglementation et la loi que vous avez adoptée dans votre province. Ces mesures d'imputabilité entreront en vigueur le 1er avril. Quelles sont-elles? En outre, vous servez-vous également de l'accréditation au nombre des mécanismes d'imputabilité? Y a-t-il d'autres partenaires prévus par les dispositions relatives à l'imputabilité?

• 1000

Mme Penny Priddy: Je vous remercie de la question. Étant donné que nous sommes venus en équipe, je vais demander à Bill de répondre.

M. Bill Barrable: Merci.

Pour ce qui est de l'imputabilité, vous pouvez voir le projet de réglementation dans les annexes. En ce qui concerne l'obligation des hôpitaux de rendre des comptes, tous les hôpitaux ayant la capacité d'offrir des services de ventilation—il y en a environ 40 ou 45 en Colombie-Britannique—devront souscrire aux dispositions de la loi sur le don de tissus humains, et il y a des amendes prévues pour les hôpitaux en cas de non-respect. Je ne me souviens pas du montant des amendes, mais il y a des amendes si un organisme ne se conforme pas à la loi. Il y a donc là une mesure d'imputabilité ou du moins une sanction au cas où l'hôpital ne respecte pas l'exigence de signaler tous les décès et de s'assurer qu'une personne adéquatement formée entre en contact avec la famille. Ce sont là certains des mécanismes d'imputabilité prévus.

Pour ce qui est des mesures d'agrément, il existe des normes nationales établies par le Conseil canadien d'agrément des services de santé. Je sais que certaines initiatives sont en cours pour assurer que l'organisme chargé d'accorder l'agrément établisse des normes qui assurent que les hôpitaux aient des protocoles ainsi qu'une politique qui soit favorable aux dons d'organes. Cela ne se produira pas nécessairement tout de suite, à moins que les hôpitaux n'y souscrivent volontairement. Il n'existe pas d'exigence externe les y contraignant, et c'est là la principale carence du système. Ce pourrait donc être un mécanisme complémentaire très efficace dont on pourrait se servir pour créer le cadre d'imputabilité.

Mme Elinor Caplan: Votre cadre d'imputabilité inclut-il l'inscription et la diffusion auprès du public des données sur le nombre de greffes, et sur les organes disponibles auprès des hôpitaux?

M. Bill Barrable: Oui. La réglementation même prévoit que l'hôpital doit tenir des dossiers qui peuvent être évalués périodiquement dans le cadre des responsabilités déléguées par le ministre de la Santé.

Mme Elinor Caplan: Lorsque vous demandez que soit créée une agence nationale, vous dites que le modèle de la Colombie-Britannique fonctionne bien. La bande vidéo montrait comment la fiche est saisie par une lecture machine et envoyée à l'hôpital; cela aide à entrer en contact avec la famille, à lui montrer une fiche signée par l'être aimé, afin qu'il n'y ait pas de doute quant au consentement.

Proposez-vous qu'il y ait un lien entre les systèmes compatibles des diverses provinces, de façon que vous puissiez continuer à gérer votre propre système? Une agence nationale n'aurait pas à vous imposer de changer de système. Si vous estimez que le vôtre fonctionne bien et si le Québec, par exemple, a recours à un système d'autocollant sur le permis de conduire, à condition qu'il y ait une base de données qui permette le lien entre les divers systèmes, les provinces pourraient garder leurs méthodes différentes tout en rendant l'information disponible. De cette façon, si un habitant de la Colombie-Britannique voyage au Québec et est malheureusement victime d'un accident grave, l'information pourrait être acheminée à l'hôpital du Québec, ou vice versa. Je pense à ces deux provinces parce que nous savons qu'elles ont chacune un mécanisme qui, selon elles, fonctionne bien.

Mme Penny Priddy: Je pense que cela est exact. Je ne crois pas que le gouvernement fédéral—nous pouvons bien nous demander même si cette question a déjà été débattue—imposerait un système de fonctionnement précis. Nous pensons que notre modèle est le meilleur, mais cela va de soi: nous sommes de la Colombie-Britannique. Je crois que nous ne proposerions pas que le gouvernement fédéral impose une méthode, mais nous reconnaissons certainement l'importance de normes fédérales nationales relatives à la réglementation et à la normalisation des protocoles et des normes de traitement.

À titre d'exemple, le premier ministre de ma province et moi étions au Children's Hospital, où l'on s'apprêtait à envoyer un nourrisson aux États-Unis pour y subir une greffe du foie. Le premier ministre a demandé pourquoi il fallait faire cela. On lui a répondu que nous ne faisons pas suffisamment de greffes de ce genre pour assurer la qualité du travail opératoire.

Il y a donc, d'une part, les normes nationales et, d'autre part, la base de données. Si chaque province dispose du système qu'elle juge approprié—et nous proposons le nôtre—et s'il y a une base nationale de données, on peut accroître le nombre de couplages des organes et des receveurs. C'est notre position.

• 1005

Par ailleurs, étant donné que, pour certaines provinces, d'après ce que vous auront dit certains témoins, cette question peut être porteuse de problèmes, je vous signale que lorsque nous avons effectué nos consultations sur la réglementation touchant les tissus humains, nous n'avons pas uniquement parlé à des professionnels de la santé. Nous avons également parlé à des dirigeants religieux et à des représentants de toutes sortes de milieux culturels où des problèmes pourraient surgir, pour nous assurer d'aplanir les difficultés autant que possible. Ces questions vont se poser dans toutes les provinces; il convient donc que, dans chacune d'elles, on consulte les personnes chez qui ce genre de programme suscite des préoccupations religieuses et culturelles ou les personnes qui ont certains desiderata.

Mme Elinor Caplan: Je voudrais apporter une correction, si vous le permettez.

[Français]

Je m'excuse, madame Picard. Dans la province de Québec, l'autocollant est sur la carte d'assurance-maladie,

[Traduction]

et non pas sur le permis de conduire.

Le président: Merci, madame Caplan.

Monsieur Robinson.

M. Svend J. Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Merci, monsieur le président. Je souhaite également la bienvenue aux témoins. Évidemment, en ma qualité de Britanno-Colombien et de néo-démocrate, je voudrais, si vous le permettez, dire combien je suis fier du leadership de notre gouvernement dans ce dossier, monsieur le président.

Le président: Oui, je vous le permets.

M. Svend Robinson: Si je suis ici aujourd'hui... Je tiens à préciser que je ne suis pas ordinairement membre de ce comité et que ma collègue, Judy Wasylycia-Leis, qui est membre du comité, appuie à fond l'idée d'un registre national. Je m'exprime non seulement en son nom, mais également au nom de tous mes collègues, lorsque je vous remercie de votre leadership et d'être venus nous parler de cela ici, aujourd'hui. Il est agréable de revoir de vieux amis, notamment Ed Conroy, qui est—la plupart des députés le savent—un confrère élu à l'Assemblée législative de la Colombie-Britannique.

On a déjà répondu à quelques-unes des questions que j'allais poser, et je n'en ai plus que deux, monsieur le président.

Je pose la première à la ministre. Le fait qu'il doit y avoir une coordination nationale semble éminemment raisonnable et logique. La question évidente est donc la suivante: selon vous, quels obstacles pourraient surgir pour empêcher que cela ne se fasse? Vous rencontrez présumément, autour d'une même table, les autres ministres de la Santé, ceux des provinces et des territoires, en supposant que ces derniers y soient également. Vous rencontrez Allan Rock, le ministre fédéral. Pouvez-vous dire au comité où, selon vous, les obstacles pourraient surgir? En effet, on peut supposer que ce comité, en présentant ses recommandations, tiendra à être au courant de tout sujet de préoccupation autour de la table.

Passons à ma deuxième question. Je vais les poser toutes les deux, monsieur le président, si vous le voulez bien. Il ne s'agit pas d'un sujet que, personnellement, je connais très bien. J'ai toujours apposé mon autocollant sur mon permis de conduire et envoyé ma fiche en Colombie-Britannique. Je me demande toutefois ce qui se produit dans les faits pour les personnes qui ont envoyé leur fiche et ont dit vouloir faire don de leurs organes si les circonstances s'y prêtent. Ces personnes envoient leur fiche; il est manifeste qu'elles ont donné leur consentement; ensuite, la famille intervient et dit: très bien, le donneur peut dire ce qu'il veut, mais nous éprouvons une certaine méfiance à l'endroit de ce processus. Qu'arrive-t-il dans ces circonstances? Avez-vous la capacité d'agir de façon à faire respecter la volonté du donneur, ou est-ce plutôt la famille qui a gain de cause dès lors qu'elle déclare: «Non, le donneur peut avoir dit ce qu'il voulait, mais nous ne sommes pas d'accord»?

Le président: Nous n'avons pas donné à nos témoins beaucoup de temps pour répondre. Madame Priddy.

Mme Penny Priddy: Je vais rapidement répondre à la première question et demander à M. Barrable de répondre à la deuxième, parce que je crois qu'il saura faire cela avec compétence.

Je ne suis pas sûre d'avoir entendu parler de grands obstacles. La difficulté a surtout été que l'on accorde à cette question suffisamment d'importance pour qu'elle suscite des activités concrètes dans tout le Canada. C'est peut-être parce que nous ne connaissons pas tous quelqu'un qui ait besoin d'un don d'organe qu'il n'y a pas beaucoup d'intervenants du système de soins de santé qui se préoccupent de cette question au premier chef. Je ne pense donc pas qu'il y ait des obstacles énormes. J'imagine que certaines provinces diraient qu'elles ne veulent pas d'une mesure qui leur serait imposée, mais nous disons cela à propos de tout. Ce serait donc peut-être un sujet de préoccupation.

L'autre obstacle tient au fait que les gens veulent s'assurer de la confidentialité des renseignements personnels. Il faudra donc que chaque province rassure sa population en lui certifiant que seules certaines personnes pourront, au moyen de codes d'accès, consulter les bases de données et les sources de renseignements. Mais je ne pense pas que ces obstacles soient insurmontables. Il faut simplement qu'il y ait une volonté politique d'accorder à ce dossier une plus grande importance parmi les dossiers des soins de santé.

Bill.

M. Bill Barrable: Pour ce qui est de votre deuxième question, elle est excellente. C'est une chose qui s'est déjà produite, à savoir qu'une famille renverse la décision d'un être aimé qui avait déclaré, sur son permis de conduire ou autrement, vouloir faire don de ses organes. Cela s'est produit. Notre recherche montre que cela s'est même produit à un certain nombre de reprises.

• 1010

Selon certains mythes qui ont cours dans le domaine des soins de santé, si les souhaits de la famille ne sont pas respectés, il pourrait y avoir poursuite. Toutefois, en réalité, du point de vue juridique, les diverses lois provinciales sur le don de tissus humains prévoient que les donneurs ont parfaitement le droit de voir exécuté le désir qu'ils ont exprimé. Une de nos préoccupations à l'endroit de l'ancien système du permis de conduire en Colombie-Britannique—et les systèmes varient d'une province à l'autre—c'était que l'on pouvait peut-être contester le fait qu'il y ait eu consentement dans les formes. Il y a donc eu des situations, dans le passé, où, d'après le permis de conduire, il y avait consentement, mais où l'on avait permis que la famille renverse la décision du donneur.

Si nous avons établi le nouveau registre, c'est, entre autres choses, pour répondre à toutes les exigences en matière de consentement légal, pour respecter les dispositions de la loi sur le don de tissus humains. Toutefois, à l'avenir, l'important sera non seulement d'éduquer le public, mais également d'éduquer les professionnels, afin que les soignants comprennent que le consentement donné a la même valeur qu'un testament euthanasique ou qu'une directive préalable et qu'il doit être respecté.

Si l'on en vient à organiser une campagne d'éducation du public portant sur un registre national ou un registre virtuel, il faut que ce message soit transmis au public et nous aide à assurer que la loi soit respectée, que les souhaits des donneurs soient respectés, tout en assurant que les familles endeuillées soient traitées avec la plus grande délicatesse. Les professionnels de la santé ont la responsabilité de s'occuper de cette famille endeuillée à un moment très difficile. Il est très important que ce message soit transmis afin que les familles le comprennent et qu'elles soient traitées avec beaucoup de sensibilité dans le milieu hospitalier.

Le président: Merci.

Avant de passer à la question suivante, madame Priddy, et comme vous avez soulevé la question de la confidentialité, je me demande si, lorsque vous avez établi votre système, en Colombie-Britannique, vous vous êtes assurés de l'appui du commissaire provincial à la protection des renseignements personnels.

Mme Penny Priddy: Oui, nous l'avons fait.

Le président: Merci.

Madame Ur.

Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.): Merci, monsieur le président.

Je vois pourquoi le registre a du succès en Colombie-Britannique et continuera d'en avoir, avec la ministre au gouvernail. Votre enthousiasme est communicatif ce matin.

J'ai quelques questions à poser.

Pouvez-vous dire au comité quel est le coût d'établissement de ce registre, de son entretien et de son évaluation?

Mme Penny Priddy: Oui, bien sûr. Je tiens toutefois à dire une chose auparavant. Nous avons des exemplaires de la brochure et de la fiche de consentement pour tous ceux qui voudraient en avoir un exemplaire. Cela étant dit, je laisse M. Barrable répondre à la question.

M. Bill Barrable: Pour ce qui est du coût, il a été partagé avec le gouvernement; la contribution initiale pour la technologie et les questions connexes a été versée par le gouvernement, pour lancer les travaux. Cela a représenté une somme qui s'inscrit entre 250 00 $ et 400 000 $. Mais ce sont les coûts d'éducation du public qui sont les plus importants: publicité, marketing, élaboration d'une stratégie. Le gouvernement a également contribué à cela, à l'instar du secteur privé. Nous avons reçu les contributions de divers organismes qui représentaient les médias et d'autres secteurs d'activité: des entreprises pharmaceutiques; des coopératives de crédit; London Drugs; le Régime d'assurance-automobile ICBC—autrement dit, la Société d'assurance de la Colombie-Britannique—; CKNW, la station de radio; BCTV; les journaux The Province et The Sun; et toute une gamme d'autres organismes. Au total, je crois que les contributions ont dépassé 1 million de dollars en contributions financières et non financières, ces dernières étant un peu plus difficiles à quantifier. Mais c'était au moins cela.

Je dois également ajouter que, dans les administrations où les registres ont connu un certain succès... Il existe beaucoup de registres dans le monde. Aucun n'est aussi évolué, selon nous, que celui de la Colombie-Britannique. Toutefois, il y en a un certain nombre qui ne connaissent pas beaucoup de succès. Si le nôtre connaît un tel succès jusqu'à présent, et nous croyons que dans l'avenir nous réussirons à aller encore plus loin, c'est parce que, entre autres choses, nous avons respecté certains facteurs de réussite qui avaient été identifiés dans le cas des registres aux États-Unis. L'un des registres qui connaissent le plus grand succès dans le monde, c'est celui de l'Illinois, où le gouvernement accorde une contribution de plus de 2 millions de dollars par année pour faire la promotion et la publicité du don d'organe. C'est un État qui s'est engagé à soutenir cette cause avec ardeur.

• 1015

Donc, si l'on veut réussir, il ne faut pas se contenter de demi-mesures. Il faut que la collectivité entière s'y attelle, et qu'il y ait des contributions du secteur privé, du gouvernement et du secteur bénévole; ce sont là d'ailleurs les éléments du succès que nous avons constaté en Colombie-Britannique.

Mme Rose-Marie Ur: Combien cela coûte-t-il à maintenir? Y a-t-il des coûts d'entretien?

M. Bill Barrable: Les coûts d'entretien sont inférieurs à 100 000 $ par année; il s'agit de dépenses en technologie et en personnel. Par contre, il faut envoyer beaucoup de courrier, et les coûts d'imprimerie et d'affranchissement postal dépassent cette somme.

Mme Rose-Marie Ur: Qu'en est-il de l'évaluation?

M. Bill Barrable: Nous avons prévu un programme qui nous permet de savoir si le registre de donneurs d'organes est adéquatement utilisé. Nous pouvons évidemment savoir combien de gens se sont inscrits et nous avons prévu des indicateurs de performance pour connaître le taux de consentement et le nombre de donneurs inscrits. L'objectif de faire inscrire les noms des gens dans ce système est un objectif à long terme. Nous ne nous attendons pas que le registre change, de façon concrète, le nombre de donneurs au cours des premières années. Toutefois, en conjugaison avec la réglementation qui contraint à l'identification et à l'avertissement... À court terme, cela aura une incidence. Il y aura le registre à long terme. Ensemble, la réglementation et le registre permettront, à long terme, de constater des améliorations marquées des dons d'organes dans notre province.

Mme Rose-Marie Ur: Me reste-t-il du temps?

Le président: Pour une très brève question.

Mme Rose-Marie Ur: Pensez-vous que le registre de la Colombie-Britannique pourrait être étendu de façon à devenir le registre national, puisqu'il fonctionne si bien? Qu'est-ce qui empêche que cela devienne la base d'un registre national?

Mme Penny Priddy: Je ne crois pas que quoi que ce soit empêche que ce registre devienne le registre national, sinon la position ou l'opinion que d'autres provinces pourraient avoir. Toutefois, de notre point de vue, rien n'empêche que cela se produise.

Mme Rose-Marie Ur: Après tout, on a déjà inventé la roue. Allons-y.

Mme Penny Priddy: C'est la raison pour laquelle nous sommes ici.

Le président: Monsieur Martin.

M. Keith Martin (Esquimalt—Juan de Fuca, Réf.): Je vous remercie tous d'être venus aujourd'hui. Je trouve votre intervention particulièrement intéressante.

Je suis allé chez London Drugs, et j'ai fait marquer mon permis de conduire et ma carte d'assurance-maladie. En fait, je n'ai pas eu l'occasion de donner un organe... mais je suis volontaire depuis très longtemps. Madame Priddy, vous avez dit qu'il fallait convaincre les gens de se donner la peine de devenir des donneurs: arrangeons-nous pour que ce soit tout à fait sans douleur. Si on pouvait donner cette possibilité aux gens à plusieurs reprises, vous auriez plus de volontaires, et peut-être qu'en leur mettant cette fiche sous les yeux chaque année, peut-être au moment de la déclaration de revenus, ce serait logique.

Deuxièmement, vous perdez la moitié de vos donneurs, et d'après les statistiques, si les gens informent leur famille de leur décision, ce chiffre saute à environ 92 p. 100. Sur votre fiche, est-ce qu'il y a une mention à cocher: «Avez-vous prévenu votre famille?»

Le président: Je sais qu'il va vouloir reprendre son souffle. Vous voulez répondre?

M. Keith Martin: En fait, j'ai deux questions très courtes.

Dites-moi oui ou non, madame Priddy: est-ce qu'il y a une mention à cocher sur les fiches: avez-vous prévenu votre famille de votre décision?

Mme Penny Priddy: Non, mais dans toute la documentation écrite qui existe on recommande aux gens de le faire.

M. Keith Martin: D'accord, merci.

J'aimerais attirer votre attention sur un problème crucial que nous avons dans notre province, un problème qui existe d'ailleurs dans tout le pays, et qui tient à la pénurie de personnel médical. Pour ne parler que des maladies du rein, la majeure partie des néphrologues ont plus de 50 ans. À l'heure actuelle, nous réussissons à former moitié moins de néphrologues que nous n'en perdons chaque année. Ajoutez à cela que la demande augmente: il va y avoir un problème très grave dans les services de néphrologie dans un proche avenir. À mon avis, nous devons investir dans la formation, non seulement de ces spécialistes, mais également d'infirmières et de techniciens, tous ces gens dont on a besoin pour offrir à la population de la Colombie-Britannique de bons services de santé.

Enfin, j'aimerais attirer votre attention sur la pénurie de fonds gouvernementaux dans les services de santé du Nord, à Prince George et dans toute cette région. On assiste actuellement à une crise, comme vous le savez, et les habitants de la Colombie-Britannique qui vivent là-haut en souffrent cruellement. Je voulais seulement vous le mentionner.

Merci.

Mme Penny Priddy: Nous pourrions un autre jour avoir une discussion sur les services de santé dans les régions rurales et isolées, mais comme nous discutons aujourd'hui des services de donneurs d'organes, je vais demander au Dr Fatin, un de nos experts médicaux, de commenter vos observations au sujet des spécialistes.

Dr Neil Fatin (expert médical, gouvernement de la Colombie-Britannique): C'est un problème que nous pouvons porter à l'attention des responsables de la formation médicale avancée en Colombie-Britannique. En effet, chaque année ils jonglent avec les programmes de formation en résidence pour faire face aux besoins futurs. Nous allons certainement le faire.

M. Keith Martin: D'accord. Ils n'ont pas d'argent, mais merci tout de même.

• 1020

J'ai une dernière observation à faire. Monsieur Barrable, la réalité démographique à Philadelphie est très comparable à ce que nous avons ici, au Canada. Là-bas, le nombre des donneurs a plus que doublé, et leur taux est plus élevé que celui de l'Espagne. Pouvez-vous nous dire pourquoi?

M. Bill Barrable: Cela est dû principalement au soutien d'un très haut palier de leur gouvernement. En effet, l'ancien gouverneur de la Pennsylvanie, Robert Casey, avait bénéficié lui-même d'une greffe du coeur et du foie. C'est lui qui a fait adopter une loi obligeant tous les hôpitaux à déclarer tous les décès. Cela a produit une augmentation du taux des dons de 50 p. 100. Aujourd'hui, c'est un exemple pour tous les autres États.

Je le répète, le dénominateur commun dans les pays qui obtiennent de bons résultats, c'est qu'ils ont mis en place un système et un cadre de responsabilité qui facilitent les choses dans les hôpitaux.

M. Keith Martin: Merci.

Le président: Monsieur Barrable, quelle est la proportion de donneurs par million d'habitants en Colombie-Britannique?

M. Bill Barrable: Le taux de donneurs enregistré l'année dernière pour le Registre canadien des insuffisances et des transplantations d'organes était d'environ 12 par million. Il reste donc beaucoup de chemin à parcourir.

Le président: Mais, de toute évidence, la base était loin d'atteindre les 180 000 personnes que vous avez maintenant dans votre registre.

M. Bill Barrable: Vous voulez dire ce qui figurait sur les permis de conduire?

Le président: Oui.

M. Bill Barrable: En fait, personne ne le savait. Nous n'avions pas un moyen de centraliser l'identité des donneurs. Nous ne savions pas non plus combien de personnes étaient inscrites à deux endroits, si bien que nous n'avions pas un nombre précis. Ainsi, nous ne pouvons malheureusement pas comparer.

Le président: Il va falloir attendre au moins un an pour pouvoir commencer à faire des comparaisons avec ce chiffre de base.

M. Bill Barrable: Je ne suis pas certain de bien comprendre votre question, mais je crois pouvoir dire qu'il n'était pas possible de déterminer précisément le succès de l'ancien système. Maintenant, nous sommes en train de le remplacer par un système qui est plus facile à contrôler et à évaluer.

Le président: Merci.

Madame Minna.

Mme Maria Minna (Beaches—East York, Lib.): J'ai deux questions à poser; je reviens sur cette comparaison entre la fiche et l'autocollant apposé au dos de la carte d'assurance-maladie, comme cela existe au Québec.

Il y a deux facteurs; d'une part, je sais bien que vous voulez vous assurer que les gens ont bien lu le texte, qu'ils se sont donné la peine d'aller se faire enregistrer, et que tout ce processus est un peu plus proactif.

D'autres représentants nous ont dit qu'à leur avis la famille ne devait prendre aucune part à la décision. Avec un enregistrement entériné par une loi, la famille n'aurait pas le droit de s'opposer à un don d'organe. Est-ce que vous avez étudié cela et décidé de ne pas le faire pour des raisons... Est-ce que vous seriez d'accord avec cette attitude?

Mme Penny Priddy: Je suis désolée, mais je n'ai pas compris.

Mme Maria Minna: Vous nous avez dit, je crois, que la famille n'avait pas le droit de refuser un don d'organe lorsqu'une personne s'était enregistrée.

Mme Penny Priddy: La famille a ce droit, ou du moins cela s'est produit avec l'autocollant sur le permis de conduire. Toutefois, quand on parle de cette fiche qui est signée par les gens, nous avons consulté notre expert, et il nous a dit que la fiche a la même valeur légale qu'une directive de santé anticipée.

Mme Maria Minna: D'accord. Donc, si la famille insiste, avez-vous une loi qui prévoit que ce n'est pas acceptable, que l'hôpital n'en tiendra pas compte et que les médecins suivront les directives données par le donneur lorsqu'il s'est servi d'une fiche ou d'un autocollant? À quel moment s'arrête-t-on?

M. Bill Barrable: En fait, il existe une loi qui prévoit que les désirs du donneur ont la prépondérance. Il s'agit de la loi sur le don de tissus humains. Il y a d'autres lois semblables en vigueur dans les autres provinces. Toutefois, la coutume permet encore à la famille de passer outre les désirs du donneur dans certaines situations. En fait, le public n'est pas d'accord avec cette attitude.

Nous avons fait un sondage d'opinion publique en Colombie-Britannique et constaté que 86 p. 100 des gens ne sont pas d'accord pour que leur famille puisse annuler une décision qu'ils ont prise. Autrement dit, la loi, les spécialistes des questions d'éthique et l'opinion publique sont unanimes: tu suivras les désirs du donneur. Et pourtant ce genre de chose continue à se produire. À mon avis, c'est un sujet dont il convient de discuter et où il est nécessaire d'éduquer les professionnels et le public.

Mme Maria Minna: D'accord. Encore une chose.

Dans votre exposé, vous parlez de deux organismes qui s'occupent de dons d'organes. J'aimerais savoir si la banque de tissus et la banque d'yeux font partie du même système de dons d'organes? S'agit-il du même organisme ou de plusieurs organismes différents?

• 1025

M. Bill Barrable: En fait, sur le plan de l'organisation, ce sont des entités distinctes. Par contre, lorsqu'il s'agit du registre, les gens peuvent donner leur consentement pour des dons de tissus et des dons de cornées, mais, sur le plan de l'organisation, en Colombie-Britannique la banque de tissus et la banque d'yeux sont distinctes de la Société de transplantation de la Colombie-Britannique.

Mme Maria Minna: Est-ce que le système fonctionne bien, ou bien préféreriez-vous... D'autres témoins nous ont dit qu'un seul organisme devrait s'occuper des organes, des tissus et des yeux, mais comme cela intéresse diverses spécialités, c'est peut-être plus facile à coordonner, car on traite avec un seul organisme, une seule personne, et non pas plusieurs.

M. Bill Barrable: Si vous le permettez, je vais répondre. Dans les États américains où les taux de dons d'organes sont élevés, c'est presque toujours un seul organisme qui s'occupe de recueillir les organes pour en utiliser les tissus, la cornée et les organes entiers, coeur, poumon, foie, etc. On a donc tendance à regrouper ces divers services, et je crois d'ailleurs que le groupe de travail fédéral-provincial de 1996 a recommandé la même chose. C'est donc une notion que nous approuvons.

Mme Maria Minna: Vous ne conseilleriez donc pas au gouvernement fédéral d'avoir des organismes distincts: ce que vous voulez, c'est une agence nationale coordonnée. J'imagine que vous envisagez la même chose dans votre propre province?

M. Bill Barrable: Oui.

Mme Maria Minna: Merci.

Le président: Merci, madame Minna.

Monsieur Grewal.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Merci, monsieur le président. Je m'associe à mes collègues pour souhaiter la bienvenue à tous les délégués et pour les remercier et les féliciter. En particulier, je souhaite la bienvenue à la ministre de la Santé, Penny Priddy, qui se trouve à représenter ma circonscription provinciale; c'est une des quatre députés de ma circonscription. Je vous souhaite la bienvenue à Ottawa.

J'ai deux questions très courtes à poser. Premièrement, la Société de transplantation de la Colombie-Britannique a été créée en 1986, c'est-à-dire il y a 13 ans. L'année dernière, son budget de fonctionnement était de 23 millions de dollars, et la totalité de ses fonds étaient fournis par le ministère de la Santé. J'ai appris que le taux de donneurs était de 12 par million, ce qui est très comparable au taux dans le reste du pays. Comment cela se fait-il? Pourquoi le nombre des donneurs n'a-t-il pas augmenté?

Deuxièmement, trois semaines avant l'expiration de l'année financière le gouvernement provincial a commencé à manquer d'argent, et les hôpitaux ont actuellement d'énormes déficits, en particulier l'hôpital Surrey Memorial, qui se trouve dans notre circonscription à la ministre et à moi. On a donc établi une liste des services prioritaires, et les gens qui sont au bas de la liste ne reçoivent aucun service dans cet hôpital. La ministre sait très bien que les médecins, les infirmières et les autres professionnels de la santé travaillent dans des conditions particulièrement stressantes. Tout récemment l'hôpital Surrey Memorial a dû annuler 60 opérations d'urgence faute d'avoir suffisamment de lits. J'aimerais demander très vite à la ministre si...

Le président: Je vous interromps un instant. Je vous ai écouté jusqu'ici parce que j'attendais de voir le rapport avec les dons d'organes et les transplantations. Je ne nie pas les mérites de votre question, mais j'aimerais que nous nous en tenions à notre sujet. J'attendais le reste de votre question pour voir quel était le rapport. Donc, en posant votre question, pourriez-vous ne pas oublier notre sujet?

M. Gurmant Grewal: C'est précisément ce que j'allais faire, monsieur le président. Si vous aviez écouté la question, vous n'auriez probablement pas eu à intervenir.

Comment la ministre ou son gouvernement peuvent-ils concilier la gestion des dons d'organes et des transplantations et les services aux patients dans les services d'urgence?

Mme Penny Priddy: En fait, je vais répondre en partie à la deuxième partie de votre question, après quoi, si vous le voulez bien, je demanderai à un autre de vous répondre.

En ce qui concerne les donneurs et les transplantations d'organes, rien n'indique que certaines transplantations n'ont pas lieu pour des raisons financières. Il s'agit d'interventions d'urgence, et comme dans tout cas d'urgence dans la province, ces soins de santé sont toujours dispensés. Nous ne disons donc jamais à un patient: nous ne pouvons pas vous greffer un foie parce que votre hôpital est en déficit ou parce qu'il n'a pas suffisamment de personnel. Lorsqu'il s'agit d'une situation d'urgence, l'opération a lieu.

Bill va répondre à la première partie de votre question.

M. Bill Barrable: En ce qui concerne le taux des donneurs d'organes, si la Colombie-Britannique, et le reste du Canada d'ailleurs, n'a pas un taux de dons d'organes plus élevé, c'est parce que nous n'avions pas de système. Ce sont les éléments de ce système que nous sommes en train de mettre en place. Notre conseil a été établi il y a trois ans. Avant cela, un certain nombre de représentants du personnel hospitalier et médical siégeaient au conseil, et on avait donc du mal à considérer que les décisions de nature politique prises par ce conseil étaient véritablement indépendantes des intérêts des différents établissements hospitaliers. Cette situation a maintenant changé, et c'est d'ailleurs un des principaux changements du système en Colombie-Britannique. Nous pensons que la situation va changer du tout au tout à cause de cela.

• 1030

J'aimerais mentionner également qu'après la réorganisation qui s'est produite en Colombie-Britannique à partir de 1995, la société de transplantation a commencé à financer des services de transplantation en milieu hospitalier. Une partie importante du budget dont vous parlez sert à financer des recherches cliniques effectuées par divers organismes de la province. Une très petite proportion de notre budget, moins de 20 p. 100, va au personnel de la société de transplantation; dans un hôpital, la proportion est inverse.

J'aimerais mentionner que la société verse à l'hôpital un forfait par patient. En effet, nous versons 20 000 $ aux hôpitaux pour chaque transplantation de rein et 100 000 $ pour chaque transplantation de poumon. De cette façon, l'établissement en question a toujours les ressources nécessaires pour effectuer une transplantation, et les lits sont toujours disponibles. Ainsi, cette situation dont on a parlé récemment, où des poumons n'ont pas été utilisés parce que «les ressources n'étaient pas disponibles pour les greffer», ce genre de choses ne se produisent pas en Colombie-Britannique. L'hôpital est responsable de l'exécution du service et dispose de l'argent nécessaire.

M. Gurmant Grewal: Merci.

Le président: Monsieur Grewal, avez-vous d'autres questions?

M. Gurmant Grewal: Je crois que c'est tout.

Le président: Merci.

Monsieur Myers, nous allons terminer avec vous.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Pour commencer, j'aimerais remercier nos témoins. J'ai trouvé ce que vous nous avez dit particulièrement utile et intéressant pour notre comité, et votre réputation vous a certainement précédés. En effet, nous savons que vous faites du bon travail et nous espérons pouvoir nous en inspirer.

Je m'adresse maintenant à l'honorable ministre de la Santé, qui, à la page 3 de ce que j'appellerais son rapport, nous propose d'adopter son modèle pour l'ensemble du pays. Comme vous le savez, à l'heure actuelle la liste d'attente nationale n'est pas très rigide. Vous pensez qu'il faudrait la rendre beaucoup plus rigide, beaucoup plus structurée, beaucoup plus révélatrice des besoins dans tout le pays.

Comment voyez-vous le partenariat entre les gouvernements provinciaux et fédéral? Comment voyez-vous leurs rôles respectifs? Dans ce nouveau système que vous aimeriez nous voir adopter, comment les divers gouvernements se partageraient-ils les responsabilités? J'aimerais que vous répondiez à ces questions, car nous sommes toujours très sensibles à la compétence des provinces...

Mme Penny Priddy: Je suis très heureuse de l'entendre.

Le président: Oui.

Mme Penny Priddy: Oui. Merci.

Je pense que le rôle de la province est à bien des égards ce que nous avons décrit comme équipe ici aujourd'hui, c'est-à-dire de gérer cela à l'intérieur de notre province, de le gérer sur le terrain, de veiller à ce que les ressources qui sont disponibles sont bien des ressources intégrées, comme nous l'avons dit, parce qu'avec celui-ci, tout vient de la société de transplantation, y compris le budget, qu'elle peut ensuite donner à l'hôpital. Je ne vois donc pas de changement de rôle pour nous.

Mais je pense que le rôle du gouvernement fédéral, et je dirais que dans bien des cas cela peut s'appliquer à d'autres questions de santé, c'est un rôle de leadership en termes de normes, en termes de qualité, en termes de certaines des normes sur le nombre de greffes qu'il faut faire pour maintenir le contrôle de la qualité de ce genre de normes et de protocoles qui s'appliquent sûrement dans toutes les provinces. C'est donc dire que le gouvernement fédéral ne vous dit pas comment mener les choses, mais il dit qu'il y a certaines normes et certains critères qui doivent être respectés pour avoir des programmes de qualité. Pour moi, comme politique en tout cas, c'est un mandat du gouvernement fédéral dont je m'accommoderais bien, ainsi que de travailler avec la province pour coordonner la base de données fédérale, parce que les provinces à elles seules ne peuvent pas s'en charger. Nous avons besoin d'aide et de leadership fédéral pour cela. Je pense donc que les rôles se divisent très bien.

M. Lynn Myers: Mais si c'est le cas, pourquoi est-ce que la liste d'attente nationale telle que nous la percevons maintenant ne marche pas, ou est même en train de disparaître? Pouvez-vous me répondre?

Mme Penny Priddy: Bill le peut.

M. Bill Barrable: Je pense que ces questions relatives à cela devraient être adressées au programme MORE de l'Ontario et à certains des autres intervenants qui, par le passé, ont fait fonctionner la liste d'attente nationale. Il est prioritaire d'en avoir une. En général, personne ne le contestera, je crois. Ce qui l'a empêchée de marcher, je crois, ce sont des questions de nature technique et autres propres au système. En Colombie-Britannique, nous sommes tout à fait en faveur d'avoir une liste d'attente nationale, et lorsque les diverses propositions ont été reçues, nous avons offert de verser notre part des frais du programme. Nous aimerions qu'il aille de l'avant, et j'espère que le comité pourra faire progresser le dossier.

• 1035

M. Lynn Myers: À votre avis, dans ce cas, le gouvernement fédéral a-t-il un rôle à jouer là-dedans?

M. Bill Barrable: Je pense qu'il a un rôle de leadership. De ce point de vue—je ne parle pas du point de vue des provinces—le rôle des provinces est de gérer et d'offrir les divers systèmes. Dans ce secteur précis, je pense qu'il y a un rôle de leadership à jouer par le gouvernement fédéral, qui doit veiller à ce que quelqu'un en assume la responsabilité, mais il n'est pas nécessaire que ce soit lui qui le fasse.

M. Lynn Myers: Ma dernière question s'adressera à nouveau à la ministre de la Santé. Vous avez parlé de créer des incitatifs pour encourager chaque province à adopter un loi qui facilite l'introduction d'un système, etc. À quoi pensiez-vous comme incitatifs?

Mme Penny Priddy: Je vais répondre à une partie des questions et je vais laisser Bill répondre à l'autre.

Nous n'avons pas besoin de fouiller aux États-Unis pour trouver des modèles, mais comme il y en a qui ont beaucoup de succès en Pennsylvanie et en Illinois—les deux plus connus—le vice-président des États-Unis a en fait obligé les 50 États à tenir un registre. Ils examinent donc ce qu'ils doivent faire pour rallier tous les États.

En ce qui concerne les incitatifs, je vais laisser Bill vous répondre.

M. Bill Barrable: Volontiers. Depuis que la Maison-Blanche a imposé cela, il y a eu des problèmes de mise en oeuvre dans certains États qui n'ont pas suivi le processus de mise en oeuvre de la Pennsylvanie. Il y a donc des États qui ont réussi mieux que les autres à mettre en oeuvre l'idée.

Pour ce qui est des incitatifs, nous avons consulté les gens de la Pennsylvanie, et ils nous ont dit que ce sont des résultats qui font des convertis. Une fois le système en place, chacun a très bien pu voir combien cela avait été bien fait. Cela a eu un grand effet d'encouragement, et le peu de résistance qui restait a disparu.

Ils ont reçu un appui très vigoureux de l'association des hôpitaux de la Pennsylvanie, et je dirai que pour ce qui est de la réglementation que notre gouvernement est sur le point d'adopter, le B.C. College of Physicians and Surgeons, le BCMA, la Registered Nurses Association et la Health Association of B.C. sont tous en faveur.

Ce sont les éléments clés de la réussite. Les organisations qui ont fait preuve de leadership en matière de santé dans cet État doivent soutenir ces initiatives, sans quoi elles ne réussiront pas. L'idée est excellente, mais si elle n'est pas acceptée et si les organisations sont réfractaires, cela ne marchera pas. Pour la mise en oeuvre, c'est quelque chose que le gouvernement fédéral ne doit pas oublier.

M. Lynn Myers: Merci beaucoup.

Le président: Il vous reste environ 30 secondes, monsieur Myers. Je vais donner la parole à Mme Ur.

Mme Rose-Marie Ur: Ce n'est qu'un éclaircissement que je veux. Madame la ministre, vous avez dit que chaque province a ses techniques. Je ne comprends pas tout à fait. Un don d'organe, que l'on soit en Colombie-Britannique ou en Ontario, ce devrait être la même chose. En quoi la chose est-elle différente d'une province à l'autre? Je ne comprends pas comment une province peut concevoir les choses différemment d'une autre. Peut-être pourriez-vous éclairer ma lanterne.

Mme Penny Priddy: Bien sûr. Je vais essayer de ménager le rôle des provinces et celui du gouvernement fédéral dans la prestation des soins de santé. Je voulais seulement dire que quelqu'un voudra peut-être choisir un autre mode d'inscription. Le formulaire est peut-être différent. Tout n'est peut-être pas logé à la même enseigne. Nous estimons que notre modèle est le meilleur. Je pense que le gouvernement fédéral ne pourrait ou ne voudrait peut-être pas—je ne sais pas—dire qu'il faut que vous fassiez exactement comme la Colombie-Britannique, même si nous pensons que ce serait une bonne idée. La coordination ou la sensibilisation pourrait être faite différemment. Il ne veut peut-être pas disposer de tout le budget, qui est de 23 millions de dollars, comme l'a dit le député de Surrey. Peut-être en veut-il une partie. Peut-être veut-il une fraction du droit, du prix ou des frais à la charge de l'hôpital au lieu de la société de transplantation.

C'est le genre de distinctions auxquelles je songe. Je ne pense pas que nous voudrions des distinctions en ce qui concerne l'intégration des services, le contrôle de la qualité, la base de données, etc.

Le président: Merci beaucoup, madame Priddy, monsieur Conroy, monsieur Barrable et docteur Fatin. Merci beaucoup de vos interventions et de vos réponses.

Je vais suspendre la séance pour deux minutes, le temps que le groupe suivant s'installe. Je me joins à mes collègues des deux côtés de la table pour vous remercier d'une séance fort instructive.

• 1040




• 1048

Le président: Le groupe suivant compte trois témoins. Nous recevons Mme Prudence Taylor, chef d'équipe de projet de la «Health Strategies Division» du ministère de la Santé de l'Alberta. Bienvenue, madame Taylor. Nous recevons Kimberly Young, coordonnatrice du service d'information sur les greffes, Capital Health Authority, membre du programme H.O.P.E., également de l'Alberta; et M. Calvin Lee, chef de l'exploitation, «Gateway Information Facility for Transplant Services»; il n'habite plus l'Alberta, mais il en est originaire.

J'ai constaté que vous étiez tous dans la salle pendant la dernière séance. Vous connaissez donc plus ou moins notre façon de procéder. Je vais commencer par le commencement et je vais demander à Mme Taylor de faire son exposé.

Mme Prudence Taylor (chef d'équipe de projet, Health Strategies Division, ministère de la Santé de l'Alberta): Merci, M. Volpe, et merci au comité de l'invitation qui nous a été faite de venir vous rencontrer aujourd'hui.

Le but de mon exposé ce matin consiste à expliquer aux membres du Comité permanent de la santé certains des éléments importants des dons d'organes. Je sais qu'il en a déjà été question, et je suis convaincue qu'on a oublié certaines étapes essentielles, et je voudrais recommander certaines choses que le gouvernement peut faire pour améliorer le système de dons d'organes au Canada.

Il est essentiel, pour que votre comité puisse discuter et travailler, de bien comprendre la complexité des dons et des greffes d'organes. On vous a déjà décrit les étapes du processus de don du côté technique, mais il y a un autre aspect de la question qui est mal compris et mal articulé. Je veux parler du phénomène sociologique qui entoure les dons et les greffes d'organes dans notre société.

Contrairement à d'autres interventions médicales, mais pour être utile, le système de greffe d'organes nécessite la pleine collaboration de la société. Il faut donc bien comprendre l'ensemble complexe de convictions, de comportements, d'interactions et de rapports qui interviennent dans le processus de don d'organes si l'on veut établir des normes cliniques et élaborer des politiques d'État et des mesures législatives.

• 1050

D'abord, pour le côté technique, il existe un grand nombre d'étapes, qui comprennent chacune des tâches distinctes et qui nécessitent la participation d'un certain nombre de personnes dont aucune n'est chargée du processus du début à la fin. Un seul cas peut nécessiter la participation de plusieurs hôpitaux à l'intérieur d'une province, des services d'urgence ou d'ambulance et, à cause de la distribution des organes, la participation d'un grand nombre d'hôpitaux de tout le Canada.

[Note de la rédaction: Inaudible]

...est aussi un facteur, et cela en est généralement un. Cela peut mettre en cause les centres de tissus régionaux et internationaux.

La voie clinique des dons, et je vais vous en donner un bref aperçu, commence par la ressuscitation de la personne qui souffre d'un traumatisme cérébral sur le terrain, dans la salle d'urgence et, plus tard, dans l'unité de soins intensifs, et, soit dit en passant, les étapes à suivre peuvent être plus variées dans le cas de dons de tissus. On arrive ensuite à l'identification de la personne comme donneur en puissance, à la consultation d'un organisme de collecte d'organes, et à la déclaration de la mort cérébrale.

Les étapes dont je vais vous parler ont été, selon moi, négligées dans d'autres exposés.

Les discussions des événements menant au diagnostic du décès avec les membres de la famille représentent une étape distincte. Il faut d'abord évaluer les besoins de la famille, offrir aux membres de la famille la possibilité de faire un don d'organe et offrir appui et réconfort; ensuite, il faut le consentement de la famille et du médecin légiste et du coroner, ce qui est une condition posée par les provinces dans bon nombre de cas si le décès est visé par la loi sur les enquêtes médico-légales.

On oublie souvent l'interview d'évaluation des risques auprès des membres de la famille. Même si l'on a un processus de consentement qui ne nécessite pas de discussion avec les membres de la famille, cela ne change rien au fait que la famille doit passer par une entrevue pour évaluer les risques médico-sociaux. Au cours de l'entrevue, on pose des questions personnelles très détaillées au sujet des préférences et comportements sexuels. Il y a ensuite l'enquête d'évaluation clinique et le processus consultatif pour déterminer l'admissibilité des organes, leur distribution et le processus de recouvrement des tissus dont on doit discuter avec la famille pour évaluer le risque.

Les éléments de chacune de ces étapes sont clairement documentés, et chacun est essentiel pour en arriver au don et à la greffe d'organes. Les endroits où ces étapes se déroulent peuvent comprendre les salles d'urgence, les unités de soins intensifs, les salles d'opération, les salles de méditation, les chapelles, les laboratoires, les salles mortuaires et les bureaux. Ce sont souvent des endroits congestionnés qui manquent d'intimité.

Il faut reconnaître que les dons d'organes constituent un service essentiel dans le domaine des soins de santé qui nécessite une approche coordonnée globale. Les textes publiés à ce sujet montrent que le fait de s'occuper d'une étape du processus ne peut pas résoudre les problèmes qui existent maintenant au Canada. Parce que bien des gens s'occupent du processus de don d'organes, il faut définir les responsabilités de chacun pour s'assurer qu'on aura suffisamment d'imputabilité et de coordination. Il faut s'efforcer d'améliorer la qualité de l'ensemble du système si l'on veut réduire les risques liés aux dons d'organes et améliorer l'efficacité et l'efficience du processus de don.

Ces principes ont déjà été décrits par les autorités espagnoles, qui ont mis sur pied un modèle coordonné global qui a permis d'atteindre un niveau d'excellence soutenu dans ce domaine. La conception qu'a le grand public des dons d'organes est souvent reliée à la possibilité de faire volontairement le don de la vie, et il en est notamment question dans les lettres échangées entre les familles des donneurs et des receveurs, la religion organisée, et les lois comme la loi sur le don de tissus humains.

Des modèles d'études comportementales prouvent que le don se fait en fonction d'un ensemble complexe de convictions. Ces croyances, ces convictions, se fondent sur un certain nombre d'habitudes et de coutumes, de connaissances sociales et religieuses, ainsi que sur l'expérience personnelle. On connaît assez mal la question, un modèle théorique accepté par tous fait défaut, ce qui fait que les opinions relatives aux dons d'organes et à la façon dont ils devraient se faire varient beaucoup.

La théorie du don d'organe reste quelque chose de vague, ce qui dans une société multiculturelle se traduit par différentes conceptions et politiques publiques, comme celle par exemple qui se centre sur les notions de donner et recevoir. Pour être efficace, les efforts publics de sensibilisation et d'élaboration des politiques doivent être coordonnés en fonction d'un cercle de valeurs communes, et des programmes doivent être mis au point pour inciter les groupes minoritaires à se sentir concernés et à participer à l'effort commun.

Le marketing social est une autre forme de programme de santé publique qui joue un rôle important au sein des services de don. Le donneur peut être l'enfant qui vient de naître ou la personne très âgée qui meurt de diverses causes, qu'il s'agisse d'accident à la naissance, de noyade par accident, d'hémorragie cérébrale, de tumeur, d'accident, de blessure par arme à feu, de mauvais traitements pour les enfants, de suicide et d'homicide involontaire. Les familles de ces donneurs n'ont pas toutes les mêmes besoins ni les mêmes réactions au moment du deuil. Voilà pourquoi les personnes qui entrent en relation avec ces familles doivent faire preuve d'une compréhension toute particulière du problème du deuil, des besoins des familles en situation de crise, et de la façon de les réconforter et de leur apporter du soutien. Ces personnes doivent être capables de discuter avec les familles du don d'organes ou de tissus, et doivent parallèlement être en mesure d'obtenir des renseignements personnels et confidentiels concernant une toxicomanie potentielle ou un comportement sexuel à risque. La recherche prouve que ce genre de talents, qui peuvent être acquis grâce à une formation spéciale, permettent de créer un environnement où l'on tiendra compte des besoins des familles de donneurs potentiels, et, ce faisant, on accroîtra la possibilité d'un consentement. Savoir soutenir moralement des personnes qui souffrent d'une perte est un aspect crucial de la pratique du don.

• 1055

En résumé, les efforts que l'on doit déployer face à la crise du don d'organes au Canada doivent être coordonnés, globaux, suivis et surveillés. Dans cette perspective, je recommande que le gouvernement canadien offre sa collaboration en reconnaissant le don d'organes comme service de santé publique à caractère particulier, et qu'il mette au point un modèle global qui soit coordonné, transparent et surveillé, et cela en fonction d'un modèle commun. Ce modèle doit notamment prévoir l'existence d'un code de déontologie qui permettra de guider les décisions, ainsi qu'une loi sur laquelle la pratique se réglera.

À cet égard, je représente un groupe de personnes qui demandent que l'on prenne en compte les questions interculturelles, en même temps que tout l'aspect humanitaire que comporte le travail avec les familles. Ce que j'ai pu entendre jusqu'ici montre que c'est loin d'être aisé et que cela ajoute aux difficultés que pose l'ensemble de cette question. Ayant moi-même eu à traiter avec les familles, à leur apporter du soutien, je dirais que tout au long de ma carrière de clinicienne cela a été un des aspects de mon travail les plus gratifiants. Cela ne se présente pas sous la forme d'une tâche écrasante; c'est plutôt un privilège. Mais il faut que ce soit fait en fonction des besoins de la famille considérée.

Je vais vous donner un petit exemple, si vous me le permettez, de ce que peut être une démarche interculturelle.

Je viens de la Nouvelle-Zélande, et j'ai donc eu là-bas l'expérience d'une population multiculturelle. J'ai donc eu l'habitude de rester sensible aux croyances enracinées dans différentes cultures, ainsi qu'à la façon dont les cultures permettent de parvenir à certaines décisions.

Ici j'ai eu une fois affaire à une famille inuit. On craignait que cette famille ne soit radicalement fermée à l'idée du don d'organes, et la question se posait de savoir comment l'amener à donner un consentement informé. J'ai donc rencontré la famille, je lui ai expliqué ce qu'était le don d'organes, en lui assurant qu'on lui rendrait le corps de son enfant auquel, on aurait prélevé tel ou tel organe, si la famille décidait de donner son consentement, et j'étais moi-même extrêmement consciente de l'importance que ce genre de choses peuvent revêtir dans différentes cultures.

Au moment de m'adresser à cette famille—j'ajoute immédiatement que j'offre simplement aux familles la possibilité de faire un don; je ne demande pas la permission de prendre—je lui ai demandé ce que les Inuit pouvaient penser du don d'organes. Les membres de la famille se sont alors plongés dans une discussion qui a duré fort longtemps. La question a été posée dans le contexte de ce que le peuple inuit pensait de la mort, du trépas, et de l'assistance à autrui. J'ai d'ailleurs beaucoup appris sur les Inuit à ce moment-là, et sur ce qu'ils pensaient du respect que l'on doit à la vie, sur leur croyance dans les esprits et les dieux de la nature qui viennent les secourir au moment où ils meurent et sont séparés de ceux qu'ils aiment. Cela dit, ils m'ont expliqué de façon très claire qu'à leur avis leur peuple ne pouvait que soutenir ce genre de don, et que donc il était important que leur fils devienne donneur.

Je pense que ces connaissances interculturelles dans les démarches auprès des familles et dans les possibilités qu'on leur offre sont un élément très important de ce dont nous vous parlons ici.

Le président: Merci, madame Taylor.

Je vais donner la parole à Kimberly Young, qui est ici à deux titres; elle va donc nous présenter essentiellement deux exposés. Elle est au courant de notre horaire, et je vais donc lui demander de présenter un exposé maintenant, puis je donnerai la parole à Calvin Lee, et je lui donnerai de nouveau la parole. Cela vous convient-il?

Mme Kimberly Young (coordinatrice du service d'information sur les greffes, HOPE Program, Capital Health Authority; représentante, Association canadienne de transplantation): Oui. Avez-vous une préférence pour l'ordre des exposés?

Le président: À vous de décider.

Mme Kimberly Young: Bien.

Le président: Allez-vous faire cet exposé au nom de Capital Health Authority ou...

Mme Kimberly Young: Oui, je vais parler à titre de coordinatrice du service d'information sur les greffes auprès de Capital Health Authority.

Le président: Bien.

Mme Kimberly Young: Pour me présenter un peu, disons que depuis sept ans, je travaille aux premières lignes des programmes de greffes, et que mon rôle est celui de coordinatrice de dons d'organes.

• 1100

Ce mémoire a pour objectif de fournir aux membres du Comité permanent de la santé une explication des nouveaux projets en matière de santé d'une région de l'Alberta qui veut concevoir et mettre en oeuvre une procédure fondée sur des pratiques exemplaires pour les dons d'organes et de tissus.

Jusqu'ici, et actuellement, les dons sont tout à fait volontaires, sans normes de pratique. Cela a contribué à une fluctuation de l'offre des dons, d'une année à l'autre. À cause d'un manque d'uniformité, certaines familles de donneurs auprès desquelles on a fait des démarches pour des dons d'organes ou de tissus se sont dites mécontentes de la façon dont la question avait été traitée pendant l'hospitalisation de leur proche. Leur préoccupation portait notamment sur le manque d'information, sur des informations incorrectes au sujet de la procédure ou sur la confusion créée par des renseignements relatifs à la mort cérébrale.

Dans un système de soins de santé qui encourage les greffes d'organes et de tissus, de même que la compassion pour toutes les familles à l'occasion du décès d'un de leurs membres, Capital Health estime qu'il doit y avoir des lignes directrices plus explicites afin que l'on puisse offrir aux familles la possibilité de faire un don et que la communication se fasse d'une manière délicate et uniforme. La région Capital Health a décidé de systématiser les soins offerts aux familles dans les services d'urgence et de soins intensifs, particulièrement dans les cas de dons d'organes. L'objectif du projet est de détecter tous les donneurs potentiels admissibles et d'offrir des soins optimaux aux familles, avant et après l'entretien sur le don d'organes.

Le projet a quatre volets: des lignes directrices sur la communication avec les familles des donneurs potentiels d'organes et de tissus, un coordonnateur désigné pour le soutien aux familles, pour faciliter le respect des lignes directrices par l'équipe de soins, une formation approfondie pour le personnel de l'hôpital, et un système d'assurance de la qualité.

Un projet très ciblé a été mené par la région, par l'entremise d'un organisme externe. Il s'agissait du Partnership for Organ Donation, ou POD, de Boston, au Massachussetts, aux États-Unis, que vous recevrez la semaine prochaine, je crois.

Pour bien cerner le bassin des donneurs potentiels, un processus de diagnostic au moyen d'un outil de vérification des dossiers médicaux a été mis au point par le Partnership for Organ Donation et utilisé par notre projet. Les attitudes et les croyances du personnel ont aussi été évaluées par sondage anonyme. Munis de ces données de base, nous pouvions aller de l'avant et, au moyen de ces données particulières à notre secteur, trouver les améliorations qui pouvaient être faites. Le Partnership for Organ Donation a fourni au Capital Health Donation Committee que nous avons créé une aide pour s'organiser, du soutien et de l'aide technique, en plus d'élaborer un plan de projet.

Le programme recourait à un modèle semblable à celui qui a été décrit par l'Espagne et par certains programmes américains qui fonctionnent bien. On estimait que pour qu'un changement se produise il était essentiel d'avoir une approche holistique coordonnée, livrée par des professionnels de la santé responsables de l'identification des donneurs et de l'intervention auprès des familles, dans les secteurs offrant des soins de première ligne. C'est une approche différente. Nous parlons des gens qui s'occupent des soins de première ligne, plutôt que de ceux qui s'occupent des programmes de greffes et de dons d'organes.

Je vais maintenant vous présenter un aperçu du projet, y compris la structure du comité des dons, l'élaboration des lignes directrices, l'affectation des rôles et des responsabilités connexes, la mise en oeuvre du programme de formation des professionnels et les systèmes d'évaluation du rendement.

Le comité des dons était essentiel à la réussite de ce projet. Nous avions reçu l'engagement du président-directeur général du University of Alberta Hospital, du chef médical des neurosciences et du comité exécutif de l'hôpital. Les membres du comité provenaient de diverses disciplines et de secteurs de la région où étaient offerts des soins de première ligne, comme je le disais plus tôt. Il y avait des représentants des soins aux adultes, des soins aux enfants, de la neurologie et de l'urgence. Les programmes de greffes et de dons d'organes étaient représentés au comité, mais n'avaient pas de rôle prépondérant.

Nous avons donc créé le comité, dont la première mission était d'élaborer des lignes directrices pour la communication avec les familles. Cette initiative se concentrait sur l'évaluation des donneurs et la communication.

Pour concevoir et mettre en oeuvre un programme de dons amélioré, des lignes directrices ont été élaborées en intégrant les principes des pratiques exemplaires. Nous avons examiné les études déjà effectuées, nous avons tenu compte de l'expérience d'autres groupes. Nous avons suscité la participation des professionnels des soins intensifs pour déterminer quelles étaient les pratiques optimales et les mieux coordonnées pour ce processus, et qui pourraient fonctionner dans leur domaine.

Un consensus au sujet des pratiques était essentiel au succès de cette initiative, y compris pour le moment choisi pour l'intervention du programme de collecte d'organes. On s'est beaucoup interrogé sur le moment choisi pour cela. Nous ne voulions pas semer la confusion dans l'esprit des familles, en faisant venir trop tôt la famille d'un donneur d'organes, comme s'il n'y avait plus d'espoir. C'était une grave préoccupation pour ces travailleurs des premières lignes.

En outre, nous avons choisi un élément clinique qui déclencherait l'intervention du programme de soutien à la famille, de manière uniforme. Un diagnostic clinique mettrait en marche cette intervention, y compris le soutien à la famille, dont je vous parlerai maintenant, pour décrire les rôles et les responsabilités.

• 1105

Les familles de donneurs ont des besoins divers et des réactions particulières au deuil. Par conséquent, une évaluation des besoins des familles doit être faite immédiatement pour déterminer la meilleure façon de fournir l'information, le réconfort et le soutien continu. On s'est vite rendu compte de la nécessité absolue d'un professionnel qui aurait exclusivement pour rôle d'offrir ce soutien aux familles. Ce rôle devrait être distinct de celui du programme de dons. Il nous semblait essentiel, je le répète, de distinguer le soutien à la famille et l'intervention du programme de collecte d'organes. Avec une intervention précoce du coordonnateur des dons, la famille pourrait mal interpréter le diagnostic.

Les compétences nécessaires pour ce rôle font partie des disciplines des soins infirmiers, des services de pastorale et du travail social. Nous avons compris qu'il devait s'agir d'un nouveau poste plutôt que d'une responsabilité supplémentaire pour un poste existant, et qu'il devait être associé aux soins intensifs ou à la neurologie plutôt qu'à la transplantation. Il s'agissait d'une étape critique dans la professionnalisation des dons comme secteur particulier des soins de santé, et non pas comme partie du domaine des greffes.

Il fallait ensuite mettre sur pied un plan de formation. Des études faites sur les connaissances et les attitudes du personnel de divers hôpitaux canadiens au sujet des dons d'organes et de tissus ont démontré une méconnaissance des pratiques exemplaires dans ce domaine. Ces études ont été réalisées au début, à l'étape du diagnostic. Nous savions ce que connaissait le personnel. Les lacunes peuvent être attribuées à l'inexistence de programmes de formation professionnelle sur ce sujet et à un manque de clarté dans la définition des rôles et des responsabilités de ceux qui interviennent auprès des familles. Il était par conséquent essentiel de définir ces fonctions dans le cadre du programme de formation. Des séances spéciales de formation sont maintenant en préparation pour tous ceux qui ont un rôle à jouer dans le processus.

Enfin, au sujet de l'évaluation du rendement, l'outil de repérage des donneurs, l'examen des dossiers médicaux et l'outil d'évaluation des besoins des familles seront utilisés pour recueillir des données et déterminer ce qui doit être amélioré davantage. Le coordonnateur du soutien aux familles sera aussi responsable de l'évaluation des résultats régionaux et de l'évaluation continue des programmes. Nous pourrons ainsi mettre le doigt sur les problèmes et nous comparer au rendement des autres régions ou des autres programmes.

En conclusion, toutes les familles auraient intérêt, lorsqu'elles traversent des temps aussi difficiles, à ce que le système de dons d'organes soit plus coordonné, mieux conçu pour leur donner le soutien dont elles ont besoin. Les hôpitaux en profiteront également, car les rôles de chacun seront mieux déterminés et la performance sera établie sur la base de données. Enfin, on saura quels domaines ont besoin d'être perfectionnés, et en suivant de près les directives on pourra identifier tous les donneurs potentiels et les renvoyer au coordinateur du soutien aux familles.

Il est souhaitable et possible de mettre en place un système créé par des professionnels de la santé en collaboration avec les familles des donneurs et les services d'urgence. En effet, tous ces groupes ont des directives et des normes qu'ils sont tenus de respecter.

En terminant, quelques recommandations: Capital Health Authority recommande au Comité permanent de la santé d'effectuer un examen plus approfondi des avantages de cette initiative et d'adopter une démarche holistique, exhaustive, pour encourager l'adoption de nouvelles méthodes pour identifier les donneurs et assister leurs familles.

Le président: Merci, madame Young.

Monsieur Lee.

M. Calvin Lee (chef de l'exploitation, Gateway Information Facility for Transplant Services): Je vous remercie de m'avoir invité à participer à cet examen important.

J'aimerais seulement développer deux éléments de mon exposé écrit, un exposé que j'ai intitulé: Impact potentiel de l'enregistrement électronique des donneurs sur les dons d'organes et de tissus. En même temps, je vais probablement compléter ce que les gens du premier groupe de la Colombie-Britannique vous ont dit tout à l'heure.

Premièrement, pour mettre mes observations en contexte, je travaille pour Gateway File Systems, une compagnie de Victoria qui a développé et organisé un registre de donneurs d'organes pour la Colombie-Britannique. Nous collaborons également avec d'autres organismes de prélèvement d'organes et avec des hôpitaux aux États-Unis, et en particulier en Californie et à Washington, D.C. où l'on est en train d'adopter un système comparable. En fait, en écoutant les questions, je me disais qu'il était intéressant de voir à quel point les problèmes sont les mêmes là-bas.

Un de nos partenaires à Washington, D.C.—un des organismes sans but lucratif, le National Minority Organ/Tissue Transplant Education Program—nous a permis de prendre connaissance de beaucoup de problèmes culturels dont Prudence vient de vous parler.

En Californie, on considère que les dons d'organes sont tout à fait comparables à une directive préalable. En effet, c'est une décision parmi plusieurs autres que les gens prennent en ce qui concerne la fin de leur vie. Il y a donc un lien, en particulier du point de vue des hôpitaux, et on envisage de regrouper les autorisations des patients, les directives préalables et les dons d'organes. Ce n'est pas l'élément principal du programme, mais c'est une des choses qu'on va tenter de faire dans le cadre d'une organisation de soins de santé intégrés, et, de notre côté, nous avons déjà commencé à administrer le registre des directives préalables pour le compte d'un des groupes hospitaliers de Victoria.

• 1110

Comme on l'a dit tout à l'heure au comité, l'identification des donneurs est un facteur crucial, une fois que la mort cérébrale d'un patient a été déclarée, lorsqu'il s'agit de discuter avec sa famille de don d'organes ou de tissus potentiel. Il y a trois éléments dans l'administration de cette identification du donneur: premièrement, la décision de devenir un donneur; deuxièmement, l'enregistrement ou la consignation de cette décision, et, troisièmement, retrouver le consentement et l'utiliser au moment du décès. Je pourrais développer plus tard si vous le voulez, mais, pour l'instant, qu'il me suffise de vous dire que, pour autant que je sache, le seul programme qui traite ces trois éléments d'une façon intégrée, ou même coordonnée, se trouve en Colombie-Britannique.

Une chose est particulièrement intéressante, et on en a discuté tout à l'heure; il s'agit des systèmes qui utilisent des fiches de donneurs ou des données informatisées sur l'enregistrement des donneurs. Évidemment, le problème, c'est que l'information nécessaire peut ne pas faire surface au moment voulu. C'est un problème auquel se heurtent plusieurs programmes de registre.

Pour autant que nous le sachions, le programme d'identification de la Colombie-Britannique est le premier de ce type au monde. Il fait appel à la technologie dans trois domaines, et vous avez pu le constater sur l'écran dans une certaine mesure. Premièrement, la fiche peut être balayée pour avoir accès à une base de données. Dans le cas de la Colombie-Britannique, l'index est établi sur la base du numéro d'assurance-maladie. Deuxièmement, les données sont entreposées; elles sont entreposées électroniquement sur un serveur, et comme il s'agit d'une image, cela prend passablement d'espace. Troisièmement, soit par Internet, soit par téléphone, soit par un réseau spécialisé, comme HealthNet/BC, ces données sont transmises.

Voilà donc la façon dont fonctionne la technologie en Colombie-Britannique. Les fiches de décision des donneurs que vous avez vues tout à l'heure et les informations sur les donneurs d'organes sont distribuées grâce à diverses technologies. Comme je l'ai dit, on continue à faire appel aux services d'immatriculation des véhicules à moteur, aux services de santé, aux pharmacies, etc. Ces fiches enregistrent les décisions des donneurs—et j'insiste sur «les» décisions, car l'intéressé doit cocher plusieurs décisions.

En Californie, le système va être élargi. Ils ont décidé d'encourager l'intéressé non seulement à signer le formulaire, mais également à ajouter des commentaires écrits à la main, ce qui permettra de souligner encore qu'il s'agit d'une décision informée. Ces fiches enregistrent donc les décisions, comme vous pourrez le voir si vous les avez regardées. Les fiches signées sont ensuite envoyées par la poste à la Société de transplantation de la Colombie-Britannique.

Une fois intégré dans le système, le formulaire de consentement d'origine existe maintenant sous une forme électronique. Ces formulaires électroniques peuvent dorénavant être consultés par les responsables des transplantations, et cela de façons différentes. En Colombie-Britannique, jusqu'à présent, il s'agit d'une communication interactive orale—on prend le téléphone et on obtient les informations—et, comme on vous l'a montré, cela est suivi d'une télécopie qui vous revient. Mais en même temps, et ce système sera utilisé en Colombie-Britannique, entre autres, les responsables auront accès à ces informations par Internet ou par l'entremise d'un réseau. Dans ce cas-là, cela apparaît à l'écran sur une table d'orientation, et il suffit de pointer «imprimer» pour avoir un exemplaire du consentement original signé sur papier.

Évidemment, cette copie sur papier du consentement original signé peut être montrée à la famille. Cela sert donc à valider la décision d'origine; ce n'est pas une chose qui remplace le consentement signé à l'origine par le patient décédé.

• 1115

D'autres témoins ont insisté sur le fait qu'un programme de dons d'organes ne saurait réussir s'il ne tient pas compte du soutien, des initiatives et des actes posés par tous les gens qui prennent part à la décision au moment du décès. Dans ses observations, Kim a insisté sur l'importance du rôle jouée par ces gens-là. Évidemment, cela comprend les proches parents, les services de soins intensifs de l'hôpital, et également les personnes qui contactent la famille pour obtenir la permission. Pour tous ces gens-là, comme je l'ai expliqué dans mon exposé écrit, le système en place en Colombie-Britannique change beaucoup les choses.

Pour commencer, au moment où on les contacte, on peut assurer aux donneurs, un peu comme lorsqu'il s'agit d'une directive préalable, que leur décision informée de donner leurs organes sera enregistrée immédiatement et complètement, et également qu'elle sera respectée au moment de leur décès. Deuxièmement, les organismes de don et de collecte d'organes peuvent expliquer le processus qui sert à respecter les désirs du donneur dans toutes leurs activités d'éducation du public et de promotion. Troisièmement, les responsables en milieu hospitalier, par exemple les coordonnateurs des transplantations et le personnel médical et hospitalier, disposeront d'une copie sur papier du formulaire de consentement signé par le donneur, ce qui constituera une bonne base de discussion et également un moyen de prouver aux parents que le défunt souhaitait être un donneur.

En terminant, j'insiste sur le fait que nous ne considérons pas l'enregistrement des donneurs d'organes comme un programme proprement dit. Comme Bill Barrable vous l'a dit, aucun programme ne saurait réussir sans un programme d'éducation du public et de promotion, probablement sur une base permanente. Toutefois, tous ces éléments peuvent avoir un effet très positif. Le registre des donneurs d'organes est donc un outil seulement parmi d'autres pour encourager les dons d'organes. Il est conçu pour s'allier aux autres stratégies et programmes et pour les compléter, mais certainement pas pour les remplacer.

Encore une fois, je vous remercie de nous avoir invités et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions sur notre système d'enregistrement des donneurs et sur les études de cas que nous avons faites, à la fois au Canada et aux États-Unis, grâce à cette solution unique que nous avons mise en place. Si vous le voulez, je pourrais vous donner nos recommandations et vous donner des informations sur les différents exemples de politiques législatives que nous avons vus dans d'autres pays.

Le président: Merci beaucoup.

Maintenant, Kimberly Young, je vais vous demander d'être très brève, mais alors vraiment brève. D'accord, vous avez terminé.

Mme Kimberly Young: Je veux que vous me rendiez le ruban.

Je vais commencer et lire le plus vite possible, mais je tenais à développer un peu cet aspect non seulement pour vous parler d'une initiative de sensibilisation du public, mais aussi pour parler de l'éducation en général.

Je représente aujourd'hui l'Association canadienne de transplantation, et à ce titre j'aimerais examiner cet aspect particulièrement important. Ce mémoire doit donc expliquer aux membres du Comité permanent de la santé pourquoi il est si crucial de sensibiliser le public et les professionnels aux nécessités des dons et des transplantations d'organes et de tissus. En même temps, nous voulons recommander au gouvernement des mesures pour améliorer le système canadien de dons grâce à des initiatives d'éducation du public et des professionnels.

Je vais commencer par vous donner une idée de la disparité entre le nombre des organes et des tissus disponibles et les besoins des patients...

Le président: Ce n'est pas la première fois que je le fais, je suis incorrigible, mais quand je vous ai demandé d'être très brève, vous êtes passée en cinquième vitesse, mais maintenant vous êtes en formule un. C'est à nos interprètes que je pense.

Mme Kimberly Young: Je vais ralentir. C'est vous qui m'avez poussée dans le dos.

Le président: Et maintenant il faut ralentir.

Mme Kimberly Young: Bon; je vais ralentir. Très bien, où en étais-je?

La disparité qui existe entre le nombre des organes et des tissus disponibles et les besoins des patients qui ont besoin d'un organe ou d'un tissu, cette disparité continue à croître. Ce débat sur la crise des dons d'organes a débouché sur un grand nombre de solutions, mais de notre côté nous recommandons une solution globale, holistique, sur le plan de l'éducation du public et des professionnels. En effet, nous pensons qu'en sensibilisant le public et les professionnels on provoquera une augmentation des dons, ce qui devrait permettre de recueillir plus d'organes et d'effectuer plus de transplantations.

L'Association canadienne de transplantation a déjà comparu devant votre comité; il s'agit d'une association de professionnels de la santé qui sont déterminés à faciliter les transplantations. Un de ses principaux objectifs est d'éduquer les professionnels de la santé et le public pour tout ce qui a trait aux dons d'organes et de tissus.

Je vais commencer par la sensibilisation du public; je parlerai ensuite de l'éducation des professionnels.

Pour être efficace, un programme de sensibilisation du public doit être coordonné et des programmes doivent être élaborés pour permettre aux Canadiens de participer. D'après les sondages d'opinion publique, 90 p. 100 des Canadiens seraient en faveur des dons d'organes et de tissus. C'est un soutien qu'on constate aisément dans les hôpitaux lorsque les familles, en pleine tragédie, sont les premières à suggérer un don. Lorsque cela se produit, le système hospitalier doit être prêt à profiter de l'occasion.

• 1120

Les transplantations dépendent de la façon dont elles sont acceptées par la société. Par conséquent, le gouvernement doit coordonner l'éducation du public et considérer que c'est un élément crucial du processus de don. Les programmes d'éducation devraient être sensibles aux particularités culturelles et, comme Prudence l'a dit, reconnaître que certaines croyances peuvent permettre aux gens de comprendre d'une façon positive le processus de don. Les matériels d'enseignement destinés aux familles doivent tenir compte des particularités culturelles. Il est également très utile de faire appel aux dirigeants spirituels et communautaires pour généraliser la tolérance et aider le public à accepter la valeur de cet acte d'humanité.

Je vais maintenant parler des campagnes nationales de sensibilisation aux dons d'organes et de tissus qui ont été organisées par notre groupe. L'ACT a en effet pris plusieurs initiatives de sensibilisation nationale en publiant des brochures, des affiches et des dépliants. Un concours pour trouver un thème national avec un message commun a également été lancé et nous a permis de trouver le slogan: «Vous tenez une vie entre vos mains; pensez à faire un don d'organes et de tissus.»

L'ACT CAT a ensuite demandé l'opinion de plusieurs experts des médias pour concevoir des messages de sensibilisation du public. À l'unanimité, ils ont suggéré que nous adoptions un thème unique et que nous le conservions pendant plusieurs années pour qu'il devienne reconnaissable et soit ainsi plus efficace. Comme à l'époque les gens portaient de plus en plus des rubans pour annoncer leur soutien à une cause donnée, comme les programmes de donneurs américains avaient déjà un ruban vert pour leur campagne, l'ACT a donc décidé de lancer le ruban vert dans une ville canadienne à titre d'essai. Ce projet pilote ayant connu un grand succès, nous l'avons étendu à l'ensemble du pays en 1998.

La campagne du ruban vert s'intègre dans un projet de sensibilisation pour montrer de façon visible que les gens sont en faveur des dons d'organes et de tissus. Le principal objectif était de trouver un symbole aisément reconnaissable, quelque chose qui favorise la discussion sur tout ce qui a trait au processus de don. En fin de compte, ces discussions peuvent aboutir à de nouveaux dons.

Beaucoup de programmes et d'organismes sans but lucratif utilisent des rubans pour sensibiliser le public et lui permettre de montrer son adhésion à une cause donnée. On pense au ruban rose du cancer du sein et au ruban rouge du sida. Depuis des années, les Américains portent le ruban vert pour montrer l'importance qu'ils attachent aux dons d'organes. Aujourd'hui, les Canadiens peuvent transmettre eux aussi ce message. Si on a choisi le vert, c'est parce qu'il symbolise la vie. De nos jours, dans notre culture, on porte un ruban pour manifester son soutien à une cause.

La couleur et la forme du ruban ne peuvent être brevetées, et au début on craignait que d'autres n'utilisent la même couleur. Toutefois, comme aucun groupe ne peut s'arroger la propriété d'une couleur, les gens peuvent porter le ruban avec fierté pour manifester leur soutien à notre cause. D'autres groupes pourraient très bien choisir le vert également, et nous n'y verrions pas d'inconvénient.

Au plus bas niveau, le ruban provoque déjà la curiosité et encourage la discussion; les gens parlent de ce que cela signifie. L'année dernière, au mois d'avril, à l'occasion de la Semaine des dons d'organes et de tissus on a distribué dans tout le Canada des épinglettes vertes, des rubans et des affiches. Cette campagne a remporté un tel succès que cette année nous avons doublé les fonds que nous y avions consacrés pour pouvoir distribuer beaucoup plus de matériels.

Maintenant, je vais vous parler rapidement de l'éducation des professionnels de la santé. Des études ont été entreprises dans plusieurs hôpitaux canadiens pour déterminer dans quelle mesure le personnel était au courant et pour savoir comment il réagissait. Ces études ont montré que c'était un sujet mal compris, et en particulier les gens connaissent mal le processus de don d'organes. Le problème tient à une absence d'éducation professionnelle dans ce domaine. Il est certain que les rôles et responsabilités des hôpitaux et des organismes de collecte d'organes ont besoin d'être précisés pour permettre des comparaisons et introduire une plus grande responsabilité. Des directives nationales pour identifier les donneurs potentiels et offrir à leurs familles la possibilité d'y réfléchir seraient très utiles aux hôpitaux et aux organismes de collecte d'organes. Pour ce faire, on pourrait utiliser des techniques de communication comme la dissociation.

Si les professionnels de la santé ont une connaissance limitée des meilleures pratiques, c'est parce que dans plusieurs domaines qui ont un rapport avec les dons d'organes les niveaux de formation sont très différents. L'ACT a produit un ensemble de directives qui pourraient servir de base à un modèle pratique. Jusqu'à présent, ces directives ont été adoptées dans une mesure très limitée. De plus, très peu d'organismes de collecte d'organes ont des programmes de formation normalisés. Des programmes ont été mis en place, mais on n'a pas encore adopté un système d'accréditation officielle. Il importe donc d'adopter un modèle d'amélioration de la qualité globale pour que tous les professionnels de la santé qui dispensent des soins critiques soient mieux à même de coordonner le processus.

En conclusion, ce qui distingue le système espagnol, c'est un organisme de coordination central qui dispose de suffisamment de pouvoir et de ressources pour imposer des pratiques et des performances uniformes dans tout le pays. Comme aucun programme de transplantation individuel ne saurait réglementer les pratiques dans d'autres provinces ou dans d'autres hôpitaux, il est évident que nous avons besoin de normes nationales pour l'éducation et pour la pratique, d'autant plus que les organes et les tissus sont partagés par tout le pays.

• 1125

L'ACT, après avoir déterminé que des directives étaient nécessaires, a adopté ces directives, mais elle n'a pas le pouvoir de les imposer, et, jusqu'à présent, personne n'a adhéré à des normes reconnues, sinon d'une façon très limitée. Un modèle canadien coordonné, un modèle comprenant un système d'éducation du public et des professionnels, doit être mis en place pour améliorer notre processus de don d'organes en s'inspirant de la situation espagnole.

Enfin, l'Association canadienne de transplantation recommande au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux de considérer que les gouvernements doivent jouer un rôle de marketing social pour mieux éduquer les Canadiens sur les dons d'organes et de tissus et sur les transplantations. Il importe au plus haut point que le public et les professionnels de la santé comprennent bien la question de façon exhaustive. Des campagnes de sensibilisation du public doivent être lancées et maintenues; ces campagnes doivent encourager les gens à changer leur comportement et doivent également être évaluées. Enfin, le processus de don doit devenir plus professionnel grâce à un programme national d'enseignement visant à uniformiser les pratiques de tous les professionnels de la santé en matière de don d'organes.

Merci.

Le président: Merci.

Nous venons de nous rencontrer, mais j'ai l'impression que vous pourriez être un membre permanent de ce comité. Comme tout le monde, vous n'avez tenu aucun compte de mes propositions.

Des voix: Ah, ah!

Le président: Monsieur Vellacott.

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): Je voudrais d'abord interroger mon invité de l'Alberta, puis j'aurais une autre question pour M. Lee.

Dans la lettre où le ministre albertain de la Santé dit regretter de ne pouvoir venir à cette séance, on lit:

    Je suis conscient de la complexité du processus de don d'organes et je suis favorable à un effort concerté entre les provinces et le gouvernement fédéral pour faire monter le taux des dons au Canada. J'attends votre rapport final et j'ai l'intention de collaborer avec le gouvernement fédéral sur cette question.

La Société de transplantation de la Colombie-Britannique—et je vous ai vus tout à l'heure; je sais donc que vous avez écouté et que vous avez dû voir leurs mémoires—a fait une proposition concernant les mesures incitatives, la formation et les mesures de ce genre qui pourraient être liées à l'accord sur l'union sociale ou sur les paiements de transfert provenant du gouvernement fédéral. Elle a annexé à son document l'ébauche de règlement de la Colombie-Britannique.

Je sais que vous ne parlez pas au nom du ministre et que vous n'êtes pas en mesure de le faire, mais que pouvez-vous nous dire de l'expérience albertaine? Que penseraient les Albertains de la possibilité de relier ces questions à l'union sociale et aux paiements de transfert? Je connais l'histoire de l'Alberta et je sais les problèmes qui s'y posent lorsque le gouvernement fédéral semble empiéter trop directement dans les domaines de compétence provinciale. Que pensez-vous de la proposition de la Colombie-Britannique concernant une éventuelle relation entre le domaine des greffes et l'union sociale ou les paiements de transfert?

Mme Prudence Taylor: Actuellement, l'Alberta étudie une initiative de son gouvernement. Elle vise à faire des dons d'organes un service de santé autonome qui ne serait lié à rien d'autre.

Au début, les dons d'organes reposaient sur la bonne volonté. Ils étaient liés aux greffes d'organes. Ce projet consiste à en faire un service de soins de santé, et je voudrais signaler au comité que l'Alberta a été la première, à l'échelle nationale, à s'orienter sur cette voie.

En 1995, le ministre provincial de la Santé en a fait part au Comité consultatif fédéral-provincial-territorial sur les services de santé. Comme la restructuration des services albertains avait fait chuter considérablement le taux des dons d'organes par rapport aux autres provinces canadiennes, et comme le bassin des donneurs au Canada est constitué au niveau national, le ministre a recommandé au comité qu'on aborde cette question de santé de façon globale. Comme les organes et les receveurs passent d'une province à l'autre, il doit y avoir une coordination logistique.

Tout le monde comprend que les systèmes de santé des provinces comportent des mécanismes et que le gouvernement fédéral... Les provinces doivent rendre compte de leur action, et, comme on l'a vu en Espagne, il existe un mécanisme qui permet d'assurer cette imputabilité au niveau de la province, voire même de la région. Mais peut-être faut-il également un organisme national de coordination qui définisse des normes.

M. Maurice Vellacott: Je prends note de cet esprit de coopération qui apparaît dans certains de vos propos. Voilà ce qu'on peut dire en tant qu'Albertain, et c'est pour cela que j'ai posé la question concernant les liens qu'on pourrait établir.

Kimberly, avez-vous une autre réponse?

Mme Kimberly Young: Je pense que Prudence a parfaitement répondu.

M. Maurice Vellacott: Pensez-vous que l'Alberta accepterait que les dons d'organes soient liés directement aux paiements de transfert? En tant qu'Albertain, vous connaissez les tendances de l'opinion publique. Alors, qu'en pensez-vous?

• 1130

Mme Kimberly Young: Je ne peux pas me prononcer. Je ne suis pas sûre.

M. Maurice Vellacott: Je voudrais poser une question à M. Lee. J'ai lu votre brochure intitulée Give Life, et je l'ai trouvée très bien agencée. Je remarque à la fin l'indication suivante: «Le don d'organes, c'est une affaire de famille. Une fois que vous avez décidé de devenir donneur d'organes, vous devez faire part de votre décision aux membres de votre famille.» On signale ensuite les dons d'organes qui sont perdus parce que les membres de la famille n'ont pas été informés des volontés du défunt. Je crois que c'est un élément constant dans l'ensemble des témoignages.

J'aimerais savoir ce que vous pensez de cette proposition. Si l'on insistait là-dessus dès le début... je sais comment les choses se passent dans le mariage, et mon point de vue n'est pas seulement théorique. Si je dis à ma femme: «J'ai pris ma décision et je veux que tu en sois informée», tout partira de là, pour ainsi dire.

En ce qui concerne la succession des événements—et je ne pense pas que l'individu vive en vase clos—ne pensez-vous pas qu'il y aurait lieu d'en parler plus tôt dans la suite des événements, voire même au tout début? On éviterait ainsi les problèmes qui peuvent se présenter plus tard, les pertes de dons d'organes qui se produisent parfois parce que la famille n'a pas été pleinement informée du processus.

M. Calvin Lee: Je suis tout à fait d'accord avec vous. Le formulaire que vous avez devant vous a été préparé par la Société de transplantation de la Colombie-Britannique, et je suis sûr qu'elle reconnaîtrait elle-même que si c'était à refaire, elle y apporterait certains changements.

Je peux simplement rappeler ce que j'ai déjà dit. Les décisions de cette nature sont prises en connaissance de cause. Autrefois, nous pouvions cocher la case appropriée en nous disant simplement: «Pourquoi pas?», mais il doit s'agir en réalité d'une décision bien informée, en particulier lorsqu'au moment du décès le personnel médical veut savoir à quoi s'en tenir.

Dans ce cas-là, l'indication d'une discussion avec l'entourage telle qu'elle apparaît sur un formulaire comme celui-ci peut avoir un effet décisif, au même titre que les directives préalables. Le formulaire de directives préalables que nous sommes en train de mettre au point en Californie intègre le don d'organes à la discussion. Évidemment, ceux d'entre vous qui ont déjà travaillé sur des directives préalables ont remarqué que dans certains cas la discussion peut se concrétiser par une procuration. Oui, je crois qu'il est essentiel de prendre cette orientation.

M. Maurice Vellacott: J'ai remarqué que les esprits sont ouverts, si bien que personne, en définitive, ne devrait se trouver acculé au pied du mur, mais je propose que le donneur indique sur le formulaire qu'il en a parlé à son entourage. Ainsi, on saurait à quoi s'en tenir.

M. Calvin Lee: En effet, c'est important.

[Français]

Le président: Madame Picard.

Mme Pauline Picard: Non, merci.

Le président: Merci, madame. Je donne la parole à Mme Ur.

[Traduction]

Mme Rose-Marie Ur: Madame Taylor, vous avez parlé brièvement de ce que vous avez fait auprès d'une famille inuit en matière de prélèvement d'organes, et je vois dans votre dossier que vous avez déjà été coordonnatrice du recrutement de donneurs. Je n'ai pas assisté à toutes les séances, mais je ne pense pas que nous ayons déjà accueilli une coordonnatrice comme vous. Pouvez-vous nous expliquer comment vous abordez la famille? Quelle méthode utilisez-vous? Je n'ai que cinq minutes pour poser ma question; je m'en tiendrai donc à l'essentiel, et vous pourrez utiliser le reste du temps. Comment procédez-vous dans une telle situation? Je crois que votre témoignage nous sera très utile.

Mme Prudence Taylor: Très bien; je vais vous exposer brièvement la procédure.

Je suis présentée à la famille par quelqu'un de l'équipe soignante, qui se trouve dans la salle avec moi, si possible, généralement l'infirmière qui s'occupe du patient ou le médecin. Il y a ensuite une période de transition, et je demande à la famille si elle comprend bien ce qui vient de se passer, c'est-à-dire la mort cérébrale. Ensuite, j'établis un dialogue pour me faire une idée de l'état d'esprit de la famille: y a-t-il quelqu'un que vous devez appeler? Y a-t-il des cérémonies d'ordre religieux ou culturel que vous envisagez d'organiser prochainement? Je propose donc un soutien à cette famille.

Ensuite je leur demande: «Comprenez-vous ce qui va se passer par la suite?» Il peut y avoir une intervention du bureau du médecin légiste, il faut penser aux obsèques, appeler certaines personnes; nous faisons ensemble le tour de toutes ces démarches.

• 1135

Lorsque j'ai l'impression que la famille a pu prendre ses décisions et penser au-delà de ce décès, je lui offre la possibilité... J'utilise toujours la formule suivante: «Notre hôpital offre à toutes les familles la possibilité d'envisager un don d'organe. C'est de cela que je voudrais maintenant vous parler.» Je n'ai jamais rencontré de famille qui soit contrariée, dégoûtée ou choquée lorsque les choses leur sont présentées de cette façon.

Mme Rose-Marie Ur: Vous a-t-on déjà opposé des refus?

Mme Prudence Taylor: Du temps où je faisais cela, j'ai rencontré une fois une famille qui n'était pas d'accord. L'un des problèmes soulevés à l'époque était celui du VIH dans le sang, et les enfants du défunt avaient eu des renseignements que les autres membres de la famille ne connaissaient pas et dont ils m'ont fait part par la suite. C'est le seul cas de refus qu'on m'ait opposé.

Mme Rose-Marie Ur: J'ai une autre question. Autrefois, j'ai été infirmière, et à ma connaissance il n'a encore jamais été question du facteur de l'âge du donneur par rapport à celui du receveur. De quels groupes d'âge parle-t-on ici? Disons pour un enfant de six ans, ou une personne plus âgée par rapport à un receveur plus jeune? Quelle peut être la différence d'âge maximale? Est-ce qu'il y a des statistiques à ce sujet?

Mme Prudence Taylor: Je n'ai pas ces statistiques devant moi, mais nous pourrons les faire parvenir au comité.

Un enfant nouveau-né peut être donneur. Au Canada, je crois que le donneur le plus âgé avait plus de 80 ans—c'était un don du foie.

Je crois qu'actuellement on tient davantage compte de l'état biologique, de l'état de santé général du donneur, que de son âge. Les gens sont en meilleure santé, malgré leur âge, et ils peuvent donc contribuer à un élargissement du bassin des donneurs.

Encore une fois, un nouveau-né peut être receveur, et il fut un temps où l'on fixait une limite supérieure, mais maintenant on se demande plutôt si la greffe va se traduire pour le receveur par une amélioration définitive de la qualité de vie.

Mme Rose-Marie Ur: Et si le donneur est un enfant de deux ans?

Mme Prudence Taylor: Ah! vous parlez du couplage.

Mme Rose-Marie Ur: Disons que l'enfant décédé a deux ans. Quel âge peut avoir le receveur avant qu'on s'inquiète davantage de son état de santé que de l'âge du donneur? Comprenez-vous? Disons que quelqu'un a besoin du coeur de cet enfant de deux ans. Est-ce qu'on pourrait le donner à un enfant de 10 ans? Voilà ce que je voudrais savoir.

Mme Prudence Taylor: Pour certains organes, il faut une compatibilité totale, et non pas uniquement une compatibilité biologique en ce qui concerne ce que nous appelons les antigènes; il faut aussi que la taille de l'organe et le groupe sanguin soient compatibles. Le coeur d'un enfant de deux ans ne peut être donné qu'à un enfant qui a à peu près la même taille, parce que ce coeur ne pourra pas assurer la circulation sanguine chez une personne de plus grande taille. On peut aussi le donner à quelqu'un de plus petite taille, mais l'écart ne doit pas être trop important, sinon on ne pourra pas loger le nouveau coeur dans la cavité cardiaque du receveur.

Les tailles doivent absolument être compatibles. On accepte souvent un écart de 10 p. 100, mais pour les adultes la tolérance est un peu plus grande.

Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.

Le président: Madame Caplan.

Mme Elinor Caplan: Merci beaucoup. Vos témoignages sont très utiles aux membres du comité.

Je voudrais vous demander de réfléchir au rôle du gouvernement fédéral. Lorsque je pose des questions à ce sujet, je parle du gouvernement fédéral. Lorsque j'emploie le mot national, je pense à un partenariat entre le gouvernement fédéral, les provinces et les territoires, qui concluent un accord pour procéder d'une certaine façon, que ce soit par la création d'un organisme national... et généralement, dans ce genre de modèle, il y a un partage des coûts entre les différents gouvernements, et chacun d'entre eux envoie des délégués dans un organisme qui va fixer les normes.

Certains préconisent un organisme national plutôt qu'un organisme fédéral. Si vous voulez nous aider à définir le rôle du fédéral au sein d'un tel organisme national, le gouvernement fédéral pourrait être chargé de veiller à la participation et à l'imputabilité dans l'élaboration des normes, etc. À votre avis, quel devrait être le rôle du gouvernement fédéral, compte tenu de ces objectifs?

Mme Prudence Taylor: Comme les dons et les greffes ne sont pas strictement de compétence provinciale, puisque les organes peuvent voyager dans tout le pays, je crois qu'il s'agit d'une question nationale.

• 1140

En ce qui concerne votre question sur le rôle du gouvernement fédéral, les ministres fédéral et provinciaux devraient évidemment en discuter, mais je peux vous parler de certains modèles à considérer.

Le premier, ce serait qu'un comité national se prononce sur la question, comme l'a fait le comité de l'assurance de la qualité, et qu'il fasse ensuite rapport au ministre de la Santé, qui assurerait la liaison avec les ministres provinciaux pour cerner les problèmes que pose le processus de don d'organes. Ce comité pourrait être un comité public concernant les questions nationales, qui ne s'arrêterait pas aux problèmes de chaque province en matière de dons et de greffes d'organes. Il pourrait s'intéresser aux principaux documents consensuels dont le Canada a besoin.

On peut donc envisager différentes formules. Ce comité pourrait préciser les mesures législatives que les provinces doivent mettre en place pour assurer le soutien nécessaire. Voilà le genre de fonctions qu'il pourrait assumer. Il pourrait faire aussi office de comité consultatif auprès des Canadiens, éventuellement par l'intermédiaire du ministre fédéral de la Santé.

Mme Elinor Caplan: Et que pensez-vous d'une liste d'attente nationale et d'une liste nationale de donneurs?

Mme Prudence Taylor: La liste d'attente nationale comporte une liste des candidats receveurs. Actuellement, les spécialistes des greffes attendent des accords de partage permettant d'assurer le partage des organes disponibles dans l'ensemble du Canada. Si une province dispose d'un organe, mais qu'elle n'a pas de receveur compatible, que doit-elle faire de cet organe? D'où l'importance de la liste d'attente. Plusieurs organismes pourraient l'accueillir. L'Institut canadien d'information sur la santé et le Registre canadien des insuffisances et des transplantations d'organes ont des données sur les transplantations. Il devrait s'agir d'un organisme central. La liste pourrait être administrée indirectement par ce comité, qui la donnerait en sous-traitance à l'ICIS.

En ce qui concerne les registres de donneurs, je crois que c'est une question différente. Le succès des dons d'organes ne passe pas nécessairement par un registre. C'est plutôt une question d'intégration et de coordination. Le registre peut donner de l'information, mais il faut utiliser cette information de façon humaine auprès des familles et des services médicaux concernés.

Quant à la nécessité d'un registre de donneurs, je pense qu'il est plus important pour le Canada d'avoir une idée de la population des donneurs potentiels. L'information ne peut venir que de l'examen des dossiers médicaux et des hôpitaux. Il s'agit ensuite de voir quelle est l'efficacité du système en fonction du nombre de donneurs et du nombre d'organes greffés. À mon avis, ce sont des registres importants, dont l'organisme national devrait s'occuper. Quant à l'autre registre, je ne suis pas certaine qu'il relève de notre responsabilité.

Mme Elinor Caplan: Pensez-vous qu'un registre national devrait diffuser dans le grand public ce genre de renseignements?

Le président: Madame Caplan, un instant, je vous prie.

Mme Prudence Taylor: Je pense que la transparence s'impose, et je pense...

Le président: Madame Taylor, un instant, je vous prie.

Monsieur Lee, je souhaiterais que vous répondiez avant que nous passions à l'intervenant suivant?

M. Calvin Lee: J'ai lu le compte rendu des séances précédentes, et je pense que certains éléments ont été soulignés et étoffés.

Je pense notamment au modèle espagnol. Si je ne m'abuse, ce modèle comporte certaines caractéristiques importantes: avant tout, l'accent est mis sur l'intervention de base; deuxièmement, le modèle reconnaît l'intervention de plusieurs paliers de gouvernement, les provinces et le gouvernement fédéral, et il semble que nous pourrions en profiter—étant donné que l'expression «union sociale» est d'actualité—pour compter sur une collaboration entre les ministres de la Santé, qui prendraient l'initiative, sous forme d'un comité national; ensuite, troisièmement, il faudrait passer à l'action. Nombre de témoins ont dit: «Nous étudions la question, nous faisons de la recherche, mais quand allons-nous passer à l'action?»

Je ne vois absolument pas pourquoi les ministres de la Santé ne pourraient pas donner des consignes à un organisme quelconque. Ainsi, on saurait quel rôle le ministre fédéral et les ministres provinciaux assument. Sans changer quoi que ce soit à leur rôle actuel, ils pourraient agir au sein de cet organisme.

Le président: Merci.

Monsieur Vellacott.

M. Maurice Vellacott: Il y a avant tout une question de logistique, et, Calvin, vous pouvez peut-être nous en parler, puisque vous habitez à une extrémité du pays. Quelqu'un m'a posé la question l'autre jour. S'il existait une liste nationale de donneurs, un organe, un coeur, qui deviendrait disponible en Colombie-Britannique pourrait-il être transporté d'un point de vue pratique et logistique jusqu'à l'Île-du-Prince-Édouard ou à Terre-Neuve? L'organe réfrigéré ou préservé d'une façon quelconque serait-il transporté par ambulance aérienne? Comment procède-t-on dans un tel cas? Est-ce faisable, ou doit-on se borner à offrir cet organe dans l'unité de soins tertiaires ou à l'hôpital où se trouve le receveur?

• 1145

M. Calvin Lee: Tout d'abord, je ne connais pas assez bien cet aspect-là pour en parler, mais je peux en tout cas rappeler encore une fois l'importance d'une coordination entre hôpitaux. Manifestement, il y a deux types d'hôpitaux. Il y a l'hôpital où se produit le décès, qui n'est sans doute pas un hôpital de transplantation, et l'hôpital de transplantation, qui peut faire le lien avec les receveurs potentiels. Comment procéder? Je ne peux rien affirmer. Je sais que Prudence et Kim...

M. Maurice Vellacott: Un autre témoin a peut-être la réponse. Je voudrais savoir comment on peut s'y prendre pour transporter un organe d'un bout à l'autre du pays. Les distances le permettent-elles?

Mme Prudence Taylor: Actuellement, s'il y a une haute priorité au pays, on procède par partage volontaire. Ce n'est pas obligatoire. C'est volontaire pour l'instant. Les gens qui sont dans les unités de soins intensifs et qui ont besoin d'une greffe risquent de mourir de façon imminente si on ne trouve pas de transplant. Si personne ne se trouve dans cette catégorie prioritaire, les organes disponibles sont offerts à l'échelle de la province. Si la province n'en a pas besoin, s'il n'y a pas de receveurs potentiels, on les offre à la région—dans l'Ouest par exemple—ou bien, s'il existait une liste nationale, on pourrait trouver la personne qui en a le plus grand besoin.

Si un hôpital accepte l'organe—et dans certains cas, pour diverses raisons il se peut qu'on ne l'accepte pas—l'échange de renseignements cliniques permet d'acheminer par ambulance aérienne privée les foies, les coeurs ou les poumons disponibles à l'échelle du pays. En Alberta, nous avons souvent eu recours aux Lignes aériennes Canadien et à Air Canada, qui avaient les moyens de transporter des foies. Toutefois, comme les horaires des lignes aériennes changent, dans bien des cas on s'est rabattu sur les ambulances aériennes.

M. Maurice Vellacott: Mais la distance est-elle un obstacle?

Mme Prudence Taylor: Pour bien des sortes d'organes, la distance est un obstacle, surtout pour les coeurs et les poumons. Les foies voyagent mieux. Le temps critique s'écoule entre le moment où l'organe est extrait et le moment où il atteint le centre de transplantation. Si le receveur meurt avant que l'organe ne lui parvienne, il faut alors réacheminer l'organe. La phase critique est ce que nous appelons la période d'ischémie, le temps qui s'écoule entre le moment où l'irrigation sanguine du donneur se termine et le moment où celle du receveur commence.

M. Maurice Vellacott: Une fois que cet organe est réfrigéré ou préservé, on ne dispose pas d'un temps illimité. Il y a des limites, n'est-ce pas?

Mme Prudence Taylor: C'est juste.

Le président: Madame Minna.

Mme Maria Minna: J'ai deux questions à poser. Il y en a une qui s'adresse à M. Lee.

La fiche qui est fournie en Colombie-Britannique est naturellement signée par le donneur, mais on demande que le sujet soit discuté avec les proches. Y aurait-il quelque chose de changé si au moment de la mort, le donneur ayant signé, on demandait aux proches leur avis sans qu'ils soient obligés de cosigner? Il s'agirait tout simplement d'une confirmation que ce sont là les voeux du donneur. Est-ce que cela suffirait pour vérifier que le donneur a discuté du sujet avec ses proches, qu'il s'agisse de son épouse, de son frère ou de sa mère, etc.?

Voici la question que j'adresse à Mme Taylor. De toute évidence, vous travaillez de très près avec les membres de la famille et vous leur parlez. J'ai entendu divers sons de cloche. Il y a des gens qui disent que même en présence d'une signature ou d'une expression de volonté de la part de la personne décédée, les membres de la famille ont quand même le dernier mot. D'autres disent que non, qu'on peut les renseigner, mais qu'on ne devrait pas passer outre aux droits de la personne décédée, et par conséquent la transplantation devrait se faire, quelle que soit l'attitude des membres de la famille. Où en êtes-vous à cet égard?

Mme Prudence Taylor: Je n'ai jamais rencontré de membres d'une famille ayant passé outre aux volontés d'une personne décédée. J'ai rencontré une famille qui savait que la personne décédée avait exprimé ce souhait, et qui m'a fait part de son désaccord. Encore une fois, il faut orienter la conversation et dire par exemple: «Dites-moi pourquoi vous pensez que c'était important pour cette personne.» De façon générale, les membres de la famille font eux-mêmes leur propre cheminement et concluent qu'il est important pour eux de respecter ce souhait.

• 1150

D'après mon expérience, jamais les membres d'une famille ne sont allés à l'encontre des souhaits de la personne décédée. Sachant que c'était la volonté de la personne décédée, et même s'ils n'étaient pas d'accord, ils ont compris l'importance de respecter cette volonté. Je le répète, il s'agit d'aider les membres de la famille à comprendre pourquoi la personne décédée a pris cette décision. Tout cela fait partie de la gestion du deuil.

M. Calvin Lee: Je ne peux pas savoir pourquoi la signature ne se trouve pas sur la fiche, mais il faut considérer les conséquences, surtout si cela constitue une directive préalable. Les signatures apposées sur les directives préalables sont d'ordinaire des procurations par écrit qui exigent la présence de témoins. L'hôpital peut exiger qu'on consulte les témoins, ou encore la personne qui a signé, se disant que cela peut être une procuration. Je suppute que cela pourrait avoir cet effet.

Le président: Madame Minna.

Mme Maria Minna: En conclusion, je constate que cela pourrait causer des difficultés. Je suppose que vous voulez dire que rien n'est clair d'un côté ou de l'autre et que si des dispositions législatives sont adoptées pour que la volonté de la personne décédée soit respectée, quels que soient les sentiments de la famille, en l'absence d'un protocole, en fin de compte, si quelqu'un comme vous n'intervient pas, c'est ce qui se trouve sur la fiche qui va prévaloir, et tant pis pour la famille. Vous dites que ce serait une erreur d'en arriver là, n'est-ce pas?

Mme Prudence Taylor: Je pense que dans la législation, on trouve des cas où le consentement putatif n'a pas abouti au résultat escompté. Les milieux juridiques et médicaux ont toujours hésité à contrecarrer les souhaits de la famille au moment de la mort d'un proche. Selon eux les conséquences négatives ultimes d'un don d'organe avec greffe seraient pires que de ne pas permettre aux membres d'une famille d'obtenir ce qu'ils souhaitaient.

Nous devons bien analyser les conséquences douloureuses qui résulteraient du manque de respect des souhaits de la famille, surtout dans notre société. Calvin a parlé de l'étude effectuée en Alberta qui démontre sans équivoque que les familles veulent participer à la démarche menant au consentement.

Mme Kimberly Young: Puis-je ajouter quelque chose, monsieur le président?

Le président: Volontiers.

Mme Kimberly Young: Je m'occupe de la coordination dans le cas des donneurs et je travaille également avec les familles. Il est une chose dont nous n'avons pas parlé encore aujourd'hui et c'est le fait que la connaissance de ce qui peut être la volonté du donneur n'est qu'un élément de la démarche menant au consentement. Il faut parler aux membres de la famille et s'assurer qu'ils acceptent le rôle que le coordinateur joue au nom du donneur. Si les membres de la famille signalent qu'ils doutent de la véracité de la carte, ou bien s'ils changent d'avis, il y a encore du travail à faire auprès d'eux pour que le don d'organe se matérialise.

Il nous faut poser des questions d'ordre médico-social pour que la greffe se fasse dans des conditions de sécurité, autant que faire se peut, et pour que la transplantation ait lieu. Le consentement suppose une initiative en coopération dans des conditions de compréhension et de sécurité, car ces renseignements sont nécessaires également par la suite. Si la famille refuse et que nous allons de l'avant, qui nous fournira ces renseignements?

M. Calvin Lee: On a examiné les diverses facettes de l'obligation ici autour de cette table à propos des implications d'un consentement putatif, d'un choix autorisé, etc. Selon moi, si nous mettons l'accent sur l'obligation, ce n'est pas très satisfaisant. Je pense que nous avons établi que nous ne pouvons pas nous en tenir au consentement putatif. Les praticiens de par le monde ont toujours écarté le consentement putatif.

Le Dr Martin a demandé à plusieurs reprises si l'on ne pourrait pas avoir recours aux déclarations d'impôt sur le revenu, par exemple, pour ce qu'on appelle un choix autorisé. Je pense qu'il est capital que les membres du comité envisage des solutions concrètes pour augmenter le nombre de dons d'organes.

Si l'on exige que ce soit obligatoire de faire un choix et de l'inscrire sur la déclaration d'impôt sur le revenu, cela pourrait avoir un effet contraire. Cela dit, je pense qu'il est important de faire figurer une telle question sur la déclaration d'impôt sur le revenu, sous forme de choix que le particulier est libre de faire. Les hôpitaux sont tenus de déclarer les décès, et je pense qu'il est important de considérer les avantages du point de vue des hôpitaux, pour faciliter le processus administratif dans ces situations-là plutôt que de donner un ordre: «Vous devez». Les hôpitaux et les praticiens disposent d'un pouvoir qu'ils peuvent exercer et qu'ils exerceront, quelles que soient les obligations qu'on leur impose.

• 1155

Le président: Merci beaucoup.

Avant de terminer, je voudrais poser une question qui a déjà été posée mais je tiens à obtenir les réponses de nos trois témoins de ce matin.

Je pense que Bill Barrable a cité à deux reprises les dispositions législatives régissant le don de tissus et d'organes et l'obligation de respecter la volonté de la personne décédée en ce qui concerne le don d'organes ou de tissus. Ce qui m'a frappé, c'est qu'il semble être assez convaincu de l'obligation législative qui prévaut au moment de la mort. En Alberta ou en Colombie-Britannique, monsieur Lee, donnez-vous la même interprétation à la loi provinciale qu'à la loi provinciale de la Colombie-Britannique?

M. Calvin Lee: Je pense avoir dit ce que je pensais. J'aurais tendance à préconiser que l'on travaille du côté de la persuasion.

Le président: Mais c'est votre opinion personnelle, et non pas...

M. Calvin Lee: Je pense que cela découle de ce que j'ai pu constater quant à la démarche législative et à ses effets dans certains pays, notamment aux États-Unis.

Le président: Madame Taylor.

Mme Prudence Taylor: Je pense qu'il faut reconnaître que la législation n'a pas eu le résultat escompté à l'échelle des États-Unis. En fait, à Washington, au Texas, et dans le cas de plusieurs autres programmes, la législation a entraîné un recul marqué du nombre d'organes et de tissus donnés. Je le répète, nous ne préconisons pas d'avoir recours à ce genre de législation. Nous comptons davantage sur l'intervention de l'hôpital sur le plan clinique plutôt que de demander au public...

Mme Kimberly Young: Voilà précisément ce que nous décrivons d'après notre expérience auprès de Capital Health. Cet organisme a choisi de demander aux intervenants de première ligne de prévoir une démarche plutôt que d'adopter la voie législative. La loi actuelle dispose qu'il faut en référer mais sans préciser à quel moment? La loi précise-t-elle les mesures à prendre avant la référence? Quand une ligne directrice vise un secteur précis, il faut que les intervenants de ce secteur l'assument et la respectent.

Le président: Cette séance a certainement été fort intéressante. Les membres du comité vous remercient de votre témoignage ce matin.

La séance est levée mais nous allons siéger maintenant à huis clos pour discuter de notre programme.

[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos]