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PRHA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON PROCEDURE AND HOUSE AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA PROCÉDURE ET DES AFFAIRES DE LA CHAMBRE

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 10 mars 1999

• 1543

[Traduction]

Le président (M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)): Chers collègues, j'ai un message de André Harvey, qui est le député du Parti progressiste-conservateur. Il ne peut être avec nous aujourd'hui.

Une voix: Est-il parti faire du porte-à-porte?

Le président: Je ne sais pas ce qu'il fait.

À l'ordre du jour, les ordres de renvoi de la Chambre des communes du mercredi 17 février 1999 et du mardi 18 février 1999 concernant M. Pankiw (Saskatoon—Humboldt) qui a été malmené, et concernant l'incident causé par les piquets de grève établis pour interdire l'accès à l'enceinte parlementaire.

Nous recevons aujourd'hui à nouveau M. Joseph Maingot.

Monsieur Maingot, nous vous savons gré d'être venu nous rencontrer à nouveau. Nous savons que le préavis était très court. Vous êtes bien bon et bien patient d'être revenu nous rencontrer.

Monsieur Maingot, avant de commencer, je vais donner la parole à Stéphane Bergeron.

[Français]

M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Monsieur le président, j'aimerais peut-être clarifier une petite chose avant que commence l'audition de M. Maingot. Veuillez m'en excuser, monsieur Maingot. Je vais faire cette petite vérification parce qu'un élément m'échappe actuellement par rapport aux travaux antérieurs du comité. J'ai tenté d'élucider le mystère avec notre diligente et très compétente greffière, mais le mystère demeure malheureusement entier pour moi. J'aurais peut-être besoin que vous m'éclairiez un peu, monsieur le président.

Sans vouloir trahir le secret qui doit entourer la réunion du comité des leaders à la Chambre, vous savez comme moi qu'assez étonnamment, la question du 22e rapport de ce comité est survenue hier. Elle est tombée sur le parquet et on nous a demandé d'autoriser l'adoption du 22e rapport. Mais la dernière référence que j'ai de ce rapport dans nos travaux, monsieur le président, c'est une résolution qui a été adoptée par ce même comité le 8 octobre dernier qui disait:

    Que le Comité revoie les changements proposés par le Comité du Règlement du Sénat au 22e rapport sur les règles régissant les comités mixtes afin de déterminer s'il y a des changements qui sont acceptables pour le Comité.

• 1545

Selon toute vraisemblance, monsieur le président, à moins que j'aie dormi pendant un certain temps, nous n'avons pas revu les propositions de changements qui avaient été apportées par le Sénat par rapport à notre 22e rapport. Conséquemment, je m'étonne qu'on soit intéressé à disposer de ce 22e rapport alors même que le comité n'a pas donné suite à une résolution qu'il a adoptée le 8 octobre dernier.

Je me demandais si vous pouviez m'éclairer, monsieur le président, parce que je suis actuellement dans la noirceur la plus complète. Cette affaire m'apparaît des plus obscures et nébuleuses.

[Traduction]

[Le député fredonne la chanson thème de Twilight Zone]

Des voix: Oh, oh!

Le président: Merci beaucoup, Stéphane.

J'ai encore une fois entendu parler de ce rapport hier, et je voulais me mettre à jour à ce sujet, malheureusement je ne l'ai pas encore fait. J'imagine, Stéphane, que c'est de la négligence de ma part.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Non, c'est impossible.

[Traduction]

Le président: Eh bien, c'est ce que j'imagine seulement, Stéphane. C'est très peu probable; vous avez raison.

M. Stéphane Bergeron: Ce n'est pas possible.

Le président: Mais, Stéphane, comme Joe Maingot est ici, je croyais que nous avions dit qu'il y avait des points de désaccord entre nous et le Sénat. On m'a demandé de parler à la sénatrice Maheu qui est présidente du comité sénatorial, et je l'ai fait à plusieurs reprises. Je lui ai parlé.

À une réunion du comité directeur, je me rappelle—et c'est peut-être là où il y eu négligence de ma part—que nous pensions qu'il n'y avait pas suffisamment d'intérêt de la part du comité en général pour réouvrir toute la question, bien que je sache que vous êtes personnellement très intéressé. Ces questions qui ont été laissées en suspens entre le Sénat et la Chambre des communes étaient des questions assez difficiles à résoudre et le comité directeur a pensé qu'il valait mieux laisser les leaders à la Chambre les régler.

À ce moment-là, Stéphane, pour être honnête avec vous, j'ai laissé la question de côté. Je n'ai pas suivi le dossier d'aussi près que j'aurais dû le faire.

Allez-y.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Monsieur le président, d'après les renseignements que j'ai pu glaner, je pense que vous n'êtes pas tout à fait dans l'erreur. Cependant, je me permets respectueusement de dire, quoique je ne veuille pas en faire un long débat puisque M. Maingot est avec nous, que la réunion du Sous-comité du programme et de la procédure aurait eu lieu le 6 octobre, donc deux jours avant la séance du comité. C'est à ce moment-là que nous aurions discuté de ce dont vous venez de nous parler.

Cependant, la question, comme il se doit, a été ramenée devant le grand comité et, au terme de la discussion, il a été convenu que le comité, comme je le disais tout à l'heure, revoie les changements proposés par le Comité du Règlement du Sénat au sujet du 22e rapport sur les règles régissant les comités mixtes afin de déterminer s'il y a des changements qui sont acceptables pour le comité.

L'idée, monsieur le président, n'était pas d'essayer de trouver des arrangements sur les points qui sont absolument irréconciliables, mais plutôt de voir simplement s'il y avait, parmi les propositions du Sénat, des éléments qui pourraient éventuellement nous amener à faire quelques concessions. On n'a jamais fait cela, de là ma surprise, mardi, lorsque j'ai vu le sujet revenir.

[Traduction]

Le président: Encore une fois, je pense que vous avez tout à fait raison. Si vous le voulez bien, je prendrai la question en délibéré. Je pense que vous avez raison; le comité devrait réexaminer la question. Comme vous le savez, nous sommes très occupés en ce moment. Comme vous le savez, le Sénat a déposé un rapport sur cette question, et ce serait peut-être le bon moment pour rouvrir la question.

Je sais, je le répète, que vous étiez tout particulièrement intéressé à tenter de résoudre ces problèmes, et je suis certain que lorsque nous aurons réouvert la question, le comité sera tout aussi enthousiaste que vous. Alors si cela vous convient, nous allons laisser cette question de côté. Je m'engage à la soulever à nouveau lors d'une séance future.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: On peut donc s'attendre à ce que la question ne revienne pas devant les leaders à la Chambre, du moins pas pour le moment.

[Traduction]

Le président: Si c'est ce que vous souhaitez—je suis certain que les collègues seront d'accord—nous allons examiner la question en comité avant de la renvoyer aux leaders à la Chambre. Est-ce que cela vous convient? Moi je suis d'accord avec cela.

[Français]

M. Stéphane Bergeron: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Le président: Monsieur Maingot, toutes nos excuses. Comme vous le savez, nous examinons aujourd'hui la question des piquets de grève et des deux ordres de renvoi, et nous vous saurions gré de bien vouloir nous dire ce que vous en pensez dans vos remarques liminaires.

M. J.P. Joseph Maingot (ancien légiste et conseiller parlementaire, Chambre des communes; auteur, Le privilège parlementaire au Canada): Monsieur le président, mesdames et messieurs, j'ai eu l'occasion de lire les débats du 17 et 18 février concernant cette question intéressante, et j'ai pensé vous présenter la question en tenant compte tout d'abord du concept général sur lequel il faut se pencher. En d'autres termes, s'agissait-il là d'un moyen irrégulier d'empêcher un député de s'acquitter de son travail parlementaire? Est-ce un moyen d'action qui constitue un outrage? En d'autres termes, est-ce un moyen irrégulier?

• 1550

La première question est celle de la déclaration de M. Pankiw, dans laquelle il dit qu'on a usé de violence physique et d'intimidation pour l'empêcher d'accéder à la Chambre. La déclaration semble très claire, mais M. Pankiw pourra vous le confirmer.

Selon d'autres allégations, on aurait dit à un autre député qu'il ne pourrait pas entrer dans son bureau. C'est un autre député qui a dit cela.

Puis, il y a une autre allégation selon laquelle on a empêché un député et les membres de son personnel d'entrer dans l'édifice. La question est de savoir si les membres du personnel sont des personnes qui doivent être protégées aux fins du privilège parlementaire? Il faut pour cela déterminer ce qui est essentiel au fonctionnement du Parlement. Les députés le sont certainement. Par le passé, on a jugé que les députés et les hauts fonctionnaires de la Chambre étaient essentiels à son fonctionnement. Il faudra donc décider si l'on veut élargir la notion de privilège. Jusqu'à maintenant, tant au Royaume-Uni qu'ici, les membres du personnel régulier d'un député ne sont pas considérés comme essentiels aux fins du privilège parlementaire. C'est là quelque chose qu'il vous faudra examiner.

Par ailleurs, qu'est-ce qui constitue l'enceinte parlementaire? Dans les ouvrages traditionnels, on trouve certaines définitions, mais en règle générale, l'enceinte parlementaire comprend généralement les édifices qui abritent la Chambre et les députés qui participent aux délibérations du Parlement.

Il vous faudra aussi examiner une autre question, puisqu'elle a été soulevée par M. Reynolds, celle du rôle qu'a joué le président de l'Alliance de la fonction publique du Canada? M. Reynolds a soulevé la question, si bien que vous devrez sans doute l'examiner. Le président de la Chambre avait sans doute cette situation à l'esprit quand il a rendu sa décision du 18.

La principale question est donc de déterminer si tout ce qui vous sera rapporté—et tout ce qui s'est passé devra vous être rapporté en séance de comité—constitue à votre avis une ingérence indue.

J'essaie de me rappeler un cas récent qui s'est produit à la Chambre.

En 1980, les députés se sont plaints qu'on les empêchait de faire leur travail parce que les membres de la fonction publique qui assurent l'interprétation ici participaient à une grève légale et qu'ils n'étaient donc pas toujours disponibles pour assurer l'interprétation. Le président a statué que, dans ce cas-là, la question de privilège ne se posait pas vraiment. La grève constituait un obstacle à leur travail, tout comme l'éditorial d'un journal peut nuire à votre travail, et tout comme les documents que vous recevez vous disant que vous ne vous acquittez pas bien de vos responsabilités peuvent faire obstacle à votre travail. Dans ce cas-là, cependant, l'ingérence n'était pas indue, parce qu'elle était légale. Ces fonctionnaires faisaient une grève légale. Telle était la position du président de la Chambre à l'époque.

De même, dans le cas qui nous occupe, les membres de l'Alliance de la fonction publique du Canada formaient un piquet de grève... Je ne sais pas s'il s'agissait d'une grève légale. C'est quelque chose que vous devrez examiner, et vous devrez décider si cela fait une différence.

Comme vous le savez, il y a constamment des allées et venues à l'extérieur de l'enceinte du Parlement et sur la Colline. Le président de la Chambre a toutefois statué par le passé que, quoi qu'il se produise à l'extérieur de la Chambre, il ne faut pas conclure aussitôt à l'outrage à la Chambre, parce que c'est à l'intérieur des édifices du Parlement que les députés sont protégés, en ce sens que la compétence de la Chambre s'étend à ces édifices, mais pas à l'extérieur de ceux-ci sur la colline du Parlement. À ce propos, ce n'est pas le personnel de la Chambre qui assure l'entretien des édifices, y compris cet édifice-ci et les autres qui abritent les députés, mais bien des membres de la fonction publique du Canada.

Ce sont-là certaines questions que je vous soumets et que vous devrez examiner. Vous serez mieux informés sur ces questions quand vous aurez entendu les témoins qui viendront relater devant vous ce qui s'est passé. Vous devrez décider ce qui constitue, à votre avis, une ingérence indue.

Le président: Nous vous sommes très reconnaissants pour ce petit exposé, monsieur Maingot. Merci encore. Nous avons tous lu votre livre. J'ai notamment lu la partie qui traite de l'enceinte du Parlement, et je suis heureux de constater que vous vous souvenez de ce qui s'y trouve.

Stéphane Bergeron, Gurmant Grewal, Marlene Catterall et Joe Fontana.

• 1555

[Français]

Monsieur Bergeron.

M. Stéphane Bergeron: Merci beaucoup, monsieur Maingot, d'être parmi nous encore une fois aujourd'hui. Il semble que vos conseils nous soient toujours aussi précieux puisque nous vous invitons, fois après fois, à venir témoigner devant notre comité.

Je m'étonne toujours, depuis le début de cette affaire, que toutes les personnes qui ont comparu et même les membres du comité, dans leurs discussions, cherchent à établir la distinction quant à la juridiction des différentes forces de sécurité sur les différents éléments de la colline du Parlement: les édifices eux-mêmes, les terrains de la Cité parlementaire qui sont au nord de la rue Wellington et les édifices qui sont au sud de la rue Wellington. D'ailleurs, j'ai posé cette semaine une question analogue à Mme Davidson, qui m'a donné une indication assez intéressante qui semblait confirmer un peu mes impressions premières. Mais encore une fois, vous avez soulevé la question de la distinction entre les juridictions des différentes forces de sécurité au niveau des différents éléments de la colline.

Ma question est très simple: est-ce que cela a quelque incidence lorsqu'il s'agit de déterminer si, oui ou non, il y a eu atteinte aux privilèges de la Chambre? En d'autres mots, si le principe du privilège veut qu'on ne puisse pas empêcher un parlementaire de se rendre à la Chambre pour exercer ses fonctions, que cet empêchement ait eu lieu sur les marches de l'édifice Wellington, sur le terrain adjacent à l'édifice du Centre ou à la porte de l'édifice du Centre lui-même, est-ce que cela a la moindre importance dans le cas qui nous intéresse?

M. Joseph Maingot: La loi qui régit le privilège parlementaire prévoit qu'on ne peut pas empêcher un député de faire son travail, peu importe où ce travail doit se faire. Cela pourrait être un outrage. Si on empêchait un député qui doit se rendre à la Chambre pour remplir ses fonctions et voter de monter à bord d'un avion à Toronto ou à Montréal, cela représenterait selon moi un outrage. Qu'on empêche un député d'entrer dans les édifices du Parlement ou de prendre place dans l'avion, il n'y a aucune différence.

Pour qu'il y ait outrage, il faut que l'empêchement ait un lien avec les proceedings of Parliament. Les comptes rendus de vos réunions des 17 et 18 février indiquent que la plupart des députés croyaient que les gens savaient que la personne était un député. On pourrait supposer qu'une personne ne savait pas qu'il était un député, mais j'aimerais vous lire un très vieux texte qui remonte au XVIIe siècle et qui est fascinant,

[Traduction]

Il s'agit de l'ouvrage de Sir Edward Code intitulé Institutes:

    Quiconque ignore qui sont les membres de l'une ou l'autre Chambre qui sont officiellement en fonction le fait à son péril.

[Français]

Dans ce cas-ci, c'est peut-être différent puisque le député voulait entrer au Parlement et se rendre à la Chambre de communes afin de s'acquitter de son devoir parlementaire. À mon avis, ce serait une obstruction inopportune que de l'arrêter. Ce ne serait pas le cas si on arrêtait un député qui nous devait de l'argent. Cependant, l'empêcher d'entrer à la Chambre des communes pour y exercer ses fonctions parlementaires constitue un outrage. C'est ce qui ressort de toutes les autorités que j'ai lues.

M. Stéphane Bergeron: Donc, quel que soit l'endroit où l'événement a lieu, il s'agit d'un outrage à la Chambre. Il n'est pas important qu'on sache quelle est l'autorité, en termes de sécurité, qui s'occupe de l'endroit où a lieu l'événement. Il n'est pas important qu'on sache si c'est sous l'autorité du Président de la Chambre lui-même et du service de sécurité, sous celle de la GRC, parce qu'il s'agit des terrains, ou sous celle de la police d'Ottawa parce que l'incident se produit devant l'édifice Wellington. Au fond, ça n'a aucune importance. Lorsqu'on s'interpose entre un député et son lieu de travail pour l'empêcher de s'y rendre, il s'agit d'un outrage à la Chambre.

• 1600

M. Joseph Maingot: On devrait peut-être faire une distinction. Lorsqu'un député est ici, à la Chambre des communes, ou dans son bureau parlementaire, on peut dire qu'il y est pour exercer ses fonctions parlementaires. C'est peu différent lorsqu'il est dans son bureau de circonscription.

M. Stéphane Bergeron: C'est cela.

M. Joseph Maingot: Peu importe où il est, cela fait partie des environs du Parlement, lesquels englobent les endroits où les députés sont appelés à faire leur travail parlementaire.

M. Stéphane Bergeron: Le président a souligné à juste titre qu'il y a en quelque sorte deux droits fondamentaux qui sont en cause actuellement: le droit pour les travailleurs de manifester librement lorsqu'ils sont en désaccord avec leur employeur, et le droit pour les parlementaires de vaquer à leurs occupations et de se rendre à leur travail. Ce sont deux droits fondamentaux reconnus par le Constitution, comme nous le faisait remarquer Mme Davidson.

Puisqu'il y a un élément de droit du travail ici, selon vous, est-ce que le fait que l'événement dont nous parlons met en cause trois éléments ou trois entités a une quelconque incidence? Ces trois parties sont le syndicat lui-même, son employeur, le gouvernement du Canada et, finalement, une tierce partie qui est la Chambre des communes. Cette dernière est prise à partie dans le conflit dans la mesure où la manifestation n'a pas eu lieu devant les bureaux du ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration ou du ministère des Affaires étrangères, mais devant les édifices d'une tierce partie, qui est la Chambre des communes. Est-ce que la manifestation, du point de vue du droit du travail, peut être jugée pertinente et légale dans une circonstance comme celle-là? Est-ce que le droit pour les piqueteurs de manifester peut être invoqué contre le privilège parlementaire, par exemple?

M. Joseph Maingot: Je pourrais vous répondre de façon très brève en disant oui. Il faut tenir compte du fait que des lois autres que celle sur le Parlement du Canada existent et que les travailleurs ont le droit de faire du piquetage devant toutes sortes d'édifices. Que ce soit sur le trottoir de la rue Wellington, cela n'a rien à voir avec les environs du Parlement. Puisqu'ils en ont le droit, il font du piquetage là où ils le veulent, y compris devant l'édifice principal du Parlement, ici même.

Je suis conscient que certains députés ne veulent pas traverser une ligne de piquetage. De plus, le Parlement a toujours déclaré qu'il fallait respecter la liberté de parole ainsi que la loi du Canada qui accorde des droit à ceux qui font du piquetage. Cela dépend aussi de la façon dont le piquetage est fait. Vous savez qu'il arrive souvent qu'un employeur se rende devant la cour pour s'objecter au piquetage devant son entreprise. Cela s'est d'ailleurs produit, il y a peut-être 10 ans, à Queen's Park à Toronto. On avait empêché des députés d'entrer dans un édifice; je ne me souviens plus trop bien si c'était un édifice de la législature provinciale ou du gouvernement provincial. Ils sont allés en cour et le juge leur a donné raison et convenu que les privilèges parlementaires sont tels que le député doit être capable d'entrer dans l'édifice pour effectuer ses travaux parlementaires. Il avait donc émis une injonction pour empêcher le piquetage.

Alors, c'est certain que le privilège parlementaire

[Traduction]

ne l'emporte pas sur

[Français]

toutes les autres lois. Il y a encore la loi du Canada qui existe. Le privilège parlementaire protège les députés dans leur travail parlementaire et non autrement. C'est une question d'équilibre dans les circonstances.

• 1605

[Traduction]

Le président: Gurmant Grewal, suivi de Marlene Catterall, de Joe Fontana et de John Harvard.

M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Réf.): Merci, monsieur le président.

Comme suite à la question de Stéphane, j'ai en fait trois questions à poser. Quand un député est agressé dans l'enceinte du Parlement, y a-t-il outrage au Parlement?

M. Joseph Maingot: Si la Chambre siège, et que l'agression a lieu dans l'enceinte du Parlement, la réponse est oui, quelle que soit la raison pour laquelle la personne a été agressée...

M. Gurmant Grewal: Si la Chambre siège, mais si cela se produit quand la Chambre ne siège pas, y a-t-il tout de même outrage au Parlement?

M. Joseph Maingot: Quand la Chambre siège, il y a certainement outrage. Quand elle ne siège pas... J'essaie de me souvenir de ce que j'ai dit tout à l'heure.

Le président: En l'occurrence, il s'agissait du matin où les groupes parlementaires se réunissent.

M. Joseph Maingot: Oui.

Le président: En ce matin donné, la Chambre siège-t-elle?

M. Joseph Maingot: Oui, la Chambre siège aujourd'hui.

Le président: Non, non...

M. Joseph Maingot: Elle ne siège pas, mais elle siège ce jour- là.

Le président: D'accord, vous avez raison. Je suis désolé.

M. Gurmant Grewal: Quelle est l'incidence sur ces questions de privilège dont nous discutons ici si une poursuite judiciaire ou une action en justice est intentée? Cela aurait-il un effet quelconque sur la discussion que nous avons ici aujourd'hui, sur le résultat de cette réunion?

M. Joseph Maingot: Excusez-moi, mais je ne vous suis pas très bien. De quelle poursuite judiciaire est-il question?

M. Gurmant Grewal: Dans un cas où on porte plainte contre quelqu'un et où l'affaire va devant les tribunaux.

M. Joseph Maingot: Ah, vous voulez parler de ce qui s'est produit...

M. Gurmant Grewal: Oui, faudrait-il que nous cessions de discuter du sujet à l'étude aujourd'hui?

M. Joseph Maingot: Non, vous n'êtes pas tenus de cesser d'en discuter, mais en règle générale, les deux discussions ne se poursuivent pas en tandem. On attend généralement de savoir ce que le tribunal...

M. Gurmant Grewal: Nous devrons alors suspendre notre discussion?

M. Joseph Maingot: Vous n'êtes pas tenus de le faire, mais il s'agit d'une question de déférence, normalement, on s'incline devant le tribunal. C'est à vous d'en décider, mais en règle générale, on s'abstient. J'essaie de me souvenir de ce que j'ai écrit.

M. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Nous devrions avoir un exemplaire de votre ouvrage.

Le président: Vous dites qu'en principe nous pourrions poursuivre la discussion, s'il s'agit de décider de la compétence d'une partie par rapport à celle de l'autre. En réalité, toutefois, nous ne poursuivrions sans doute pas notre discussion par déférence pour le système.

M. Joseph Maingot: Oui. En fait, vous ne l'avez pas fait dans l'affaire Bryce Mackasey, cette affaire intéressante qui remonte au début des années 80. Je crois que c'était au début des années 80. Je n'étais pas là à l'époque. M. Mackasey avait soulevé une question de privilège au sujet d'un reportage dans la Montreal Gazette concernant des liens douteux qu'il aurait eus. Ces liens douteux avaient donné lieu à des poursuites au criminel contre M. Mackasey, si je me souviens bien, et pendant que l'affaire était en instance, vous aviez interrompu votre discussion.

Le président: D'accord.

J'essayais de préciser ce que vous aviez dit, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.

M. Gurmant Grewal: Ça va.

Le président: Vous voudrez bien m'en excuser.

M. Gurmant Grewal: Merci.

Sur un autre point, dont il a été question tout à l'heure, ai- je raison de penser que les députés ont le droit d'accéder aux édifices du Parlement? Ont-ils ce droit d'accès?

M. Joseph Maingot: Oui, les députés ont ce droit d'accès, ainsi que les gens qui viennent ici pour participer à des délibérations à titre de témoins, et si on les empêche d'entrer, ils peuvent... Les députés ont certainement ce droit. Ils ont un devoir à accomplir. Le Règlement dit qu'ils doivent participer aux travaux.

M. Gurmant Grewal: D'accord, mais je vous ai entendu dire qu'au Royaume-Uni, dans le cas que vous avez évoqué, les membres du personnel ne sont pas considérés comme essentiels, si bien qu'ils n'ont pas le droit d'accès aux édifices du parlement au même titre que les députés. Cela vaut-il aussi pour le Canada?

M. Joseph Maingot: Effectivement. Dans mon livre, je parle uniquement des dirigeants de la Chambre—députés, hauts fonctionnaires et témoins. Effectivement, c'est également la position adoptée par le Royaume-Uni. Grosso modo, le privilège, c'est tout ce qui est nécessaire à l'exécution des fonctions de la Chambre. Ainsi, les membres du personnel ne sont pas essentiels, mais les dirigeants de la Chambre le sont parce qu'ils doivent gérer le tout.

M. Gurmant Grewal: Mais parfois les membres du personnel sont essentiels à l'exercice des fonctions d'un député. Par exemple, un député pourrait fort bien avoir peu de connaissances en informatique et devoir sur son ordinateur extraire des renseignements, assurer un suivi, entrer dans le détail, se brancher sur l'Internet, vérifier son courrier électronique ou quelque chose du genre. De nombreux députés ne savent pas comment vérifier s'ils ont reçu du courrier électronique.

• 1610

Il est donc essentiel que les membres du personnel fassent partie intégrante du système même si, en l'espèce, cela n'est pas lié directement à ce dont on discute. On pourrait faire valoir les deux points de vue. Le personnel pourrait être considéré comme étant essentiel dans la mesure où il aide les députés à exercer leurs fonctions. Je ne suis donc pas tout à fait d'accord avec vous lorsque vous dites qu'il ne l'est pas.

M. Joseph Maingot: Très bien. Selon la pensée traditionnelle, le Parlement, la Chambre des communes, est l'organisme laïque le plus important qui a besoin de ses députés et ce sont les députés qui font le travail et votent à la Chambre. Ainsi, si vous empêchez un député de venir au Parlement, cela pourrait être considéré comme un mépris de l'autorité du Parlement car pour exercer leurs fonctions, ils doivent pouvoir être là. Ils doivent être protégés et c'est la raison pour laquelle la Chambre dispose de pouvoirs disciplinaires car ce sont les députés qui exercent les fonctions et non le personnel. Vous avez besoin du personnel, mais le Parlement lui-même, la Chambre, n'en a pas besoin en ce qui concerne le privilège parlementaire.

M. Gurmant Grewal: Je vois ce que vous voulez dire, mais tout de même...

De toute façon, puisque les députés ont le droit d'accéder à leurs bureaux et aux édifices du Parlement, s'il y a une manifestation dehors ou toute autre activité qui empêche les députés d'entrer dans leurs bureaux ou d'y avoir accès—je ne parle pas du personnel, car c'est plutôt flou—qui est responsable? Disons, pour les besoins de la cause, qu'un député ne peut entrer dans son bureau ou dans un édifice du Parlement. Auprès de qui devrait-il demander protection? La GRC? La Police locale d'Ottawa- Carleton? Ou auprès des gardes de sécurité de la Chambre des communes? À qui le député devrait-il s'adresser pour obtenir de l'aide? Qui est responsable?

M. Joseph Maingot: Je crois qu'on a dit quelque part que le personnel de sécurité de la Chambre des communes ne pouvait pas intervenir à l'extérieur de l'enceinte de la Chambre. Je crois également qu'il est dit quelque part que lorsqu'un problème se produit juste en dehors de l'enceinte de Parlement, le sergent d'armes de la Chambre des communes doit se mettre en rapport avec les forces de police locales ou la GRC et demander leur aide.

Comme vous êtes député, vous pouvez évoquer ce problème en posant une question de privilège à la Chambre. Mais si on vous empêche physiquement d'entrer, si vous essayez d'entrer et que vous ne pouvez pas... À moins que vous ne vous fassiez agresser, les gardes de sécurité hésitent toujours à s'en mêler à l'extérieur de l'enceinte de la Chambre et, en raison de cet accord passé avec le sergent d'armes, il vous faudra attendre un peu. Mais vous avez le droit de soulever cette question à la Chambre, de lui demander de s'en occuper et il faut espérer que ce sera fait de telle façon que cela découragera les autres de faire la même chose.

M. Gurmant Grewal: Bien. Mais comment assurer un juste équilibre? Est-il question uniquement des édifices du Parlement ou également du lieu de résidence d'un député et son lieu de travail? Si je rentre chez moi le soir ou que j'arrive au bureau tôt le matin, cela s'appliquerait-il de mon lieu de résidence au Parlement? Ou cela ne concerne-t-il que l'enceinte de la Chambre?

M. Joseph Maingot: Disons que si quelqu'un s'approche de vous, qu'il sait que vous êtes le député de telle ou telle circonscription, qu'il n'aime pas ce que vous faites et qu'il vous barre le passage pour cette raison, vous devez être protégé par le privilège parlementaire; l'autorité du Parlement vous protège. Mais si l'on s'approche de vous pour d'autres raisons, si on vous barre le passage pour une raison personnelle, qui n'a rien à voir avec le Parlement et votre travail de député, le privilège parlementaire ne s'applique pas.

M. Gurmant Grewal: Merci.

Le président: John Fontana, suivi de John Harvard, puis moi et ensuite Stéphane Bergeron.

M. Joe Fontana: Merci, monsieur le président.

J'essaie de comprendre la définition de «l'enceinte» de la Chambre en suivant cette discussion. Si je comprends bien, l'enceinte parlementaire comprend tous les bureaux du Parlement, y compris les bureaux de députés—donc l'édifice Victoria, l'édifice Wellington, l'édifice de la Confédération et ainsi de suite? Donc lorsque vous parlez de l'enceinte parlementaire, faites-vous allusion à n'importe quel complexe ou édifice qui abrite les bureaux du Parlement? Et par conséquent, si un député ne peut y pénétrer pour quelque raison que ce soit, il s'agirait là d'une question de privilège parlementaire et de mépris de l'autorité du Parlement?

• 1615

M. Joseph Maingot: Non, pas pour n'importe quelle raison.

M. Joe Fontana: Pour la raison indiquée...

M. Joseph Maingot: Il faut que ce soit en rapport avec vos fonctions parlementaires.

M. Joe Fontana: Oui, bien sûr.

M. Joseph Maingot: Voici ce que j'ai écrit dans mon livre:

    Au sens purement parlementaire, l'enceinte parlementaire se compose des locaux que la Chambre des communes et le Sénat occupent de temps à autre pour mener à bien leurs activités. Elle comprend les locaux placés sous le contrôle de chaque Chambre, par l'intermédiaire de son président, pour permettre aux députés d'exercer leurs fonctions parlementaires sans obstruction ou sans ingérence.

Je cite ensuite les édifices du Parlement à Ottawa et vous savez tous quels sont ces édifices: l'édifice Victoria, l'édifice de la Promenade, et ainsi de suite.

M. Joe Fontana: Ces édifices font donc partie de l'enceinte parlementaire?

M. Joseph Maingot: Ce n'est pas facile à déterminer, monsieur Fontana, car, par exemple, l'édifice de la Promenade abrite, au deuxième étage, une cafétéria et le Citizen. Mais c'est en gros la définition que je donnerais.

M. Joe Fontana: À propos de l'enceinte parlementaire, je crois que vous aviez commencé à parler un peu des bureaux de circonscription, comme dit Gurmant. Ces bureaux sont-ils considérés comme faisant partie de l'enceinte parlementaire, même s'ils se trouvent en dehors de la capitale? Ils sont situés dans d'autres villes, mais on peut dire qu'ils existent pour nous permettre d'exercer nos fonctions parlementaires.

M. Joseph Maingot: Il est évident qu'un député n'exerce pas que ses fonctions parlementaires mais au Canada et ailleurs, la Chambre a toujours estimé que lorsqu'il est question de bureau de circonscription, il abrite le député exerçant ses autres fonctions. Il est là pour servir ses électeurs et non pas pour exercer ses fonctions parlementaires.

M. Joe Fontana: Mais ne peut-on pas dire que c'est aussi du travail parlementaire. Si quelqu'un vient me voir pour me parler de ses prestations d'assurance-chômage ou de la politique d'assurance-emploi, que je suis là pour le recevoir et qu'on m'empêche d'entrer dans mon bureau pour m'occuper de cette affaire, vous voulez dire que je n'aurais aucun recours?

M. Joseph Maingot: Deux éléments entrent en jeu.

M. Joe Fontana: Si je vous pose cette question, c'est parce que... Je crois que c'est Diane Davidson qui disait qu'il y avait là une occasion à saisir. Ça n'arrive pas tous les jours, mais si nous voulons nous tourner vers l'avenir, si nous voulons établir des lignes directrices ou même préciser ce qu'on entend par privilège parlementaire et par mépris de l'autorité du Parlement il faudrait dans ce cas savoir jusqu'où nous voulons aller.

Gurmant a parlé des membres du personnel. Je ne pourrais pas exercer mes fonctions parlementaires si je n'en avais pas. Bien sûr, je pourrais me rendre à la Chambre, siéger et voter, mais je ne pourrais pas faire grand-chose d'autre sans leur aide. Nous essayons de voir jusqu'où étendre ce privilège parlementaire, qu'il s'agisse de l'enceinte parlementaire, du personnel ou de quoi que ce soit d'autre.

Je suppose que si on m'empêchait d'entrer dans mon bureau de circonscription pour y exercer mes fonctions de député—car c'est de cela qu'il s'agit—je pourrais soulever la question de privilège à la Chambre et attendre que le président décide s'il y a eu atteinte au privilège. Ce serait une façon de procéder.

M. Joseph Maingot: Si vous me le permettez, monsieur Fontana, le député qui est dans sa circonscription—non seulement dans sa circonscription, mais ailleurs également—n'exerce pas uniquement ses fonctions de député. Il veut être réélu également.

M. Joe Fontana: Mais c'est du travail parlementaire.

M. Joseph Maingot: Il faut qu'il y ait un rapport avec des travaux parlementaires.

M. Joe Fontana: Qu'est-ce qu'on entend par travaux parlementaires alors?

M. Joseph Maingot: Eh bien, c'est ce qui se déroule ici.

M. Joe Fontana: Entendre des témoins et voter, est-ce à cela que se limite mon travail, à votre avis?

M. Joseph Maingot: Non. J'ai essayé d'aborder cette question dans mon livre également: qu'est-ce qu'on entend par travaux parlementaires?

M. Joe Fontana: C'est ce que j'aimerais savoir, car au bout du compte, on nous offre la possibilité de définir une atteinte au privilège et j'aimerais savoir jusqu'où on peut aller. Si on m'empêche d'entrer dans mon bureau de circonscription pour faire mon travail, c'est peut-être là quelque chose sur lequel ce comité devrait se pencher. Je voudrais aussi peut-être qu'on élargisse à mon personnel qui m'aide à exercer mes fonctions de parlementaire ou de membre de comité le privilège qui est le mien si les membres de mon personnel ne peuvent entrer dans mon bureau ou dans l'édifice.

M. Joseph Maingot: Je vois très bien où vous voulez en venir, monsieur Fontana. Vous allez devoir vous pencher sur ces questions. Jusqu'à présent, il n'a pas été considéré essentiel que le personnel de la Chambre des communes bénéficie du privilège parlementaire et des privilèges collectifs de la Chambre.

• 1620

M. Joe Fontana: Vous êtes expert en la matière; cela vaut-il la peine de se pencher là-dessus?

M. Joseph Maingot: Bien sûr, mais ce n'est pas tout. Les membres de votre personnel comprennent-ils les bénévoles ou le personnel rémunéré uniquement. Des tas de facteurs entrent en jeu.

Vous dites que tout le travail que vous effectuez dans votre bureau est de nature parlementaire. Je n'en doute pas un instant mais dans les bureaux de député, beaucoup d'activités exercées n'ont, en essence, rien à voir avec les travaux parlementaires. C'est le cas de la plupart d'entre elles, je suppose, mais pas de toutes.

Traditionnellement, en droit parlementaire pour que le privilège s'applique il faut qu'il y ait un rapport, un lien avec des travaux parlementaires. Comme les députés sont nécessaires pour exercer certaines fonctions—pour voter, etc.—à la Chambre, et parce qu'il faut des dirigeants, ils sont couverts. Mais jusqu'à présent, le personnel des députés ne l'était pas.

M. Joe Fontana: Mais pour remédier à cette situation, les députés, individuellement ou collectivement, peuvent soulever la question de privilège à la Chambre. Ou alors, si on me barre le passage, je peux appeler le sergent d'armes, si je me trouve dans un local placé sous le contrôle du président, pour qu'il m'amène à mon bureau de député ou à l'intérieur de l'enceinte parlementaire. Ce serait une solution.

Ou si je me trouvais en dehors de l'enceinte parlementaire, comme vous l'avez dit, si quelqu'un m'arrêtait, moi ou Gurmant, et disait: «Je n'aime pas la façon dont vous avez voté hier soir, si bien que vous ne pourrez pas aller à la Chambre des communes aujourd'hui, car je vais vous barrer la route», je suppose qu'en l'espèce je devrais demander l'intervention de la police d'Ottawa car la Chambre des communes ne peut pas assurer ma sécurité si je suis rue Sparks ou ailleurs; ai-je raison?

Autre chose: l'Assemblée législative de l'Ontario a demandé une injonction, si j'ai bien compris, pour que les piquets de grève restent au moins à x nombre de pieds du bâtiment de l'Assemblée législative. Par conséquent, en l'absence de piquets de grève, le personnel et n'importe qui d'autre pourrait entrer.

Je me demande de quels recours dispose le Parlement ou un député pour assurer l'accès aux édifices.

M. Joseph Maingot: Oui, c'est une question importante, car cela concerne beaucoup d'édifices ici en ville. Il y a deux édifices rue Sparks le long desquels tout le monde peut marcher et il pourrait effectivement y avoir des piquets de grève.

La Chambre vous donne des pouvoirs pour empêcher quelqu'un de le faire et en règle générale, les mesures prises ont pour effet d'empêcher les récidives; si ces personnes sont coupables d'outrage au Parlement, on peut les emprisonner. Vous n'avez jeté personne en prison depuis 1913.

M. Joe Fontana: Je ne pense pas que ce soit une bonne chose non plus.

M. Joseph Maingot: Mais on veut que rien de malencontreux ne se produise. Cela n'arrive pas souvent. Cela s'est produit en février dernier, et je ne me souviens pas de la dernière fois que cela s'était produit. Il faut vous soumettre aux caprices de la loi—du droit civil et du droit pénal—et aux événements qui se produisent dans le monde.

M. Joe Fontana: Ce sera ma dernière question.

Si nous ne donnions pas suite à ce renvoi, cela entravera-t-il nos débats futurs sur une question donnée? Autrement dit, si nous ne donnons pas suite à celle-ci, nos actions futures s'en trouveront-elles compromises du fait que nous n'aurons pas donner suite à celle-ci?

M. Joseph Maingot: Non, vous ne renoncez à rien.

M. Joe Fontana: Pensez-vous que nous devrions prendre des mesures pour assurer cet équilibre dont nous parlions, pour qu'à l'avenir, les gens savent à quoi s'en tenir?

M. Joseph Maingot: Si on a effectivement barré le passage au député, s'il a été intimidé et agressé en essayant d'entrer dans son bureau, ce n'est pas rien; c'est plutôt clair. Mais quelle sanction est imposée?

M. Joe Fontana: Mais cela ne doit pas nécessairement être une agression physique.

M. Joseph Maingot: Non, mais si je me rappelle bien ce que j'ai lu, il y a eu violence physique et intimidation. Non, vous n'avez pas besoin de toucher quelqu'un, il suffit de le menacer.

Le président: John Harvard, suivi de Marlene Catterall, de moi-même et ensuite Gurmant Grewal.

M. John Harvard (Charleswood St. James—Assiniboia, Lib.): Merci, monsieur Maingot. J'apprécie vos observations. Je ne suis pas membre permanent de ce comité si bien que je ne suis peut-être pas tout à fait au courant de l'incident qui s'est produit et qui a fait l'objet de ces deux motions présentées à la Chambre. Mais je voudrais faire deux observations puis vous poser une ou deux questions.

• 1625

D'après ce que je vous ai entendu dire et d'après ce que je sais de l'incident, il me semble que certains droits et privilèges se font concurrence. Il est manifeste que les fonctionnaires fédéraux et d'autres ont le droit d'exprimer leurs opinions, de faire part de leurs inquiétudes. Ils ont le droit de manifester—peut-être pas à l'intérieur du bureau du premier ministre, etc., mais ils ont le droit de protester. Et je suppose que, dans la plupart des cas, ils ont également le droit d'établir des piquets de grève.

Donc, il y a, d'un côté, leurs droits et privilèges, et de l'autre, nos propres droits et privilèges, surtout lorsque nous exerçons nos fonctions. Il me semble que la population, les gens ordinaires, ne peuvent pas s'imposer et nous empêcher de faire notre travail.

Je dirais que manifestement il faut imposer des lignes directrices et des contrôles quelconques et une certaine discipline parce qu'on ne peut pas tolérer des foules en furie. Comme M. Fontana l'a fait remarquer, il faudrait peut-être préciser toute cette situation et définir nos responsabilités et nos devoirs.

Monsieur Maingot, voici où je veux en venir. En ma qualité de député, ou en tant que membre du collectif parlementaire à la Chambre, je répugne à me servir de mon influence. C'est une chose que je ne ferais pas. Si nous prenons des mesures dans le cas qui nous occupe, il faudrait faire preuve d'une grande retenue, parce qu'après tout, les liens qui nous unissent à nos électeurs sont importants et il ne faudrait pas que nous ayons l'air de les compromettre. En d'autres termes nous ne pouvons pas trop officialiser la chose sans pour autant la passer sous silence.

Il est possible que dans ce cas il y ait eu des excès mais nous sommes témoins d'excès quotidiennement. Il se peut que je sois en train de conduire sur l'autoroute et que je fasse un excès de vitesse de cinq kilomètres voire de sept, dix ou douze, et que le policier le constate, et décide de ne pas en tenir compte. Au contraire, je pourrais dépasser la limite de vitesse d'un dixième de kilomètre seulement et le policier pourrait m'arrêter.

En l'occurrence, il faut faire preuve d'une grande prudence. Qu'est-ce que malmener quelqu'un? Je ne sais pas.

Le président: En fait, il s'agit en l'occurrence d'un terme plutôt technique, et non pas de l'acception générale du mot.

M. John Harvard: Et l'obstruction?

Le président: Je vous le rappelle tout simplement. Excusez- moi. Je ne voulais pas vous interrompre mais cela a été défini.

M. John Harvard: Mais qu'entend-on par obstruction? Qu'entend- on par ingérence? Cela m'amène à me poser une question ou deux. Quand empêche-t-on quelqu'un de s'acquitter de ses devoirs? Si sur la Colline parlementaire, quelqu'un me barre la route et que je sois retardé de cinq minutes, est-ce de l'obstruction? Si je rate dix minutes d'une réunion, est-ce de l'obstruction? Jusqu'où allons-nous...

M. Joe Fontana: Il y en a qui n'y verrait pas d'inconvénients.

Des voix: Oh, oh!

M. John Harvard: En effet. J'espère que si nous prenons des mesures, nous ferons preuve de retenue. Il faudrait appliquer les règles sans rigidité.

D'après votre expérience, d'après ce que vous savez d'une telle situation—et manifestement vous en savez beaucoup plus que moi—les parlementaires ont-ils, par le passé, d'ordinaire abordé ces questions avec la plus grande prudence?

M. Joseph Maingot: Les choses ont certainement changé depuis le XVIIIe siècle en Angleterre quand des gens étaient jetés en prison pour avoir pêché dans l'étang d'un député dans sa circonscription.

Des voix: Oh, oh!

Une voix: J'aimerais bien qu'on y revienne.

Une voix: Je ne pêche pas.

M. Joseph Maingot: Les temps ont considérablement changé et désormais nous prenons en compte le monde extérieur. Il faut faire preuve de circonspection.

• 1630

La règle générale exige que l'on fasse ce qui s'impose pour que la Chambre s'acquitte de ses fonctions. C'est tout. Il faut que les députés puissent être présents et si l'un d'entre eux en est empêché, il faut déterminer si, dans les circonstances, cette obstruction mérite que l'on applique des mesures—si la dignité de la Chambre sera atteinte à moins qu'on y remédie et il faut déterminer si l'acte commis est une atteinte à l'autorité de la Chambre.

M. John Harvard: Mais on nous traite de moins que rien, on nous lance les pires insultes tous les jours à l'émission On the line, notamment. Si quelqu'un fait de l'obstruction, pour utiliser ce terme, et si je rate la moitié d'une réunion ou toute la réunion, peut-on dire que c'est pire que les insultes que l'on adresse aux politiques quotidiennement à la radio et à la télévision? Vous n'avez qu'à écouter ce que disent les réformistes. Mon Dieu, au nom de la dignité de la Chambre, ils devraient tous être exclus à tout jamais.

M. Joseph Maingot: Comme je vous l'ai dit, il faut décider si l'ingérence était déplacée et bien entendu il appartient à la Chambre de déterminer si l'incident constitue une atteinte à son autorité. Voilà ce qu'il en est. Il vous appartient, en toute sagesse, de faire preuve ensemble de bon sens, pour décider quelles mesures s'imposent.

Une voix: C'est ce qu'on appelle le chaos.

Des voix: Oh, oh!

M. John Harvard: Est-ce que vous nous conseillez la prudence ou la retenue?

M. Joseph Maingot: Eh bien, il vous faut absolument faire preuve de circonspection, en effet.

M. John Harvard: Je vois.

M. Joseph Maingot: Il arrive toutes sortes de choses. Il est arrivé que des gens jettent des choses sur le parquet de la Chambre.

M. John Harvard: Du sang.

Des voix: Oh, oh!

M. Joseph Maingot: Je ne peux pas songer à quelque chose de plus vil que cela.

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Ou encore agresser quelqu'un.

Le président: Marlene Catterall, ensuite le président, puis Gurmant Grewal.

Mme Marlene Catterall: Cela introduit parfaitement ma question principale. Si le comité déterminait qu'en fait il y a eu ingérence et que cela constitue un outrage, mais s'il décidait de ne pas prendre de mesures, quelles seraient les conséquences? Autrement dit, qu'arriverait-il si le Parlement décidait de ne pas invoquer ses privilèges?

M. Joseph Maingot: Il est souvent arrivé par le passé que le Parlement, ici comme en Grande-Bretagne, ayant déterminé qu'un acte constituait un outrage, décide dans les circonstances de ne pas y donner suite. Par exemple, des gens ont fait certaines choses ici à la Chambre tout simplement pour s'attirer une certaine publicité. Ainsi, les propos étaient indéniablement un outrage—la dignité de la Chambre étant atteinte—mais dans les circonstances, on a décidé de ne pas sévir.

Mme Marlene Catterall: Je vois.

Je tiens à remercier Jamie, en passant, pour les excellentes notes d'information qu'il nous a préparées mais qui ne font que m'embrouiller, non pas parce qu'elles sont mauvaises, mais à cause de la nature ésotérique de certaines décisions, qui d'une certaine façon, dans certains cas, sont presque contradictoires.

Lorsque quelqu'un est malmené et qu'il y a voie de fait, jusqu'à quel point peut-on donner une interprétation large de ces voies de fait par exemple? Cela peut-il aller jusqu'à tenir des propos abusifs ou maltraiter psychologiquement un député?

M. Joseph Maingot: On peut être malmené de diverses façons—si par exemple on vous présente une assignation quelconque, si vous êtes mis en accusation en vertu des dispositions du Code de la route ou du Code criminel—mais l'incident doit être relié aux travaux du Parlement. Il vous appartient donc de déterminer cela tous ensemble dans votre sagesse.

Mme Marlene Catterall: Peut-il s'agit d'intimidation psychologique ou verbale tout autant que physique?

M. Joseph Maingot: Les députés et les juges sont souvent insultés dans des écrits. Peut-on dire qu'il s'agit là d'outrage au tribunal ou au Parlement? C'est toujours une question d'évaluation. Les tribunaux semblent moins hésiter à prendre des mesures mais parce que vous représentez les électeurs, vous êtes exposés aux imprévus du quotidien.

Mme Marlene Catterall: J'ai lu la note concernant l'accès des parlementaires britanniques à leurs édifices parlementaires, car là-bas, la Chambre adopte un ordre de la Chambre du début de chaque session, ordonnant à la police municipale de maintenir libres de toute entrave les rues qui mènent aux Chambres.

• 1635

M. Joseph Maingot: Oui, je sais, mais on ne pourrait pas donner cet ordre. Vous pourriez donner un ordre à la GRC, mais l'autre police relève peut-être d'une autre autorité.

Il faut donc prendre cela en compte. Il y a longtemps que je ne suis pas allé à Westminster je ne sais pas combien de policiers patrouillent là-bas. Il y a les bobbies qui en fait sont en faction à l'entrée. C'est une question d'ordre pratique, à vous de décider.

Des règlements ministériels s'appliquent à la circulation sur la Colline parlementaire et comme je l'ai dit, il y a encore une entente selon laquelle le sergent d'armes peut faire appel à une police externe. Il faut toutefois que le sergent d'armes en reçoive la consigne et des recommandations à cet effet, et il faudrait savoir si l'on est prêt à faire cela.

Mme Marlene Catterall: Je vois. Une dernière question, monsieur le président.

Excusez-moi d'avoir raté une partie de vos propos. Vous avez peut-être abordé de sujet. Je vais lire le compte rendu mais je voudrais savoir ce que vous avez à dire concernant notre aptitude à participer aux travaux de la Chambre.

La décision rendue en 1978 par notre président lors de l'appel d'un député devant le CRTC dit ceci:

    À moins qu'on ne me persuade incontestablement que la possibilité de participer aux travaux de la Chambre a été entravée, je ne vois pas là d'atteinte au privilège.

Je suppose que cela implique une participation qui ne se limite pas à voter ou à prendre part aux délibérations. Je suppose que cela inclut les travaux des comités permanents, n'est-ce pas?

M. Joseph Maingot: Cela inclut un grand nombre de choses.

Mme Marlene Catterall: Cela inclurait-il l'accès à ce dont vous avez besoin pour le travail des comités, par exemple?

M. Joseph Maingot: J'ai un résumé ici, qui fait quelques pages, et qui définit ce que sont les travaux du Parlement et il faut qu'il y ait un lien avant que cela ne constitue...

Quand vous participez aux travaux parlementaires, vous êtes protégé, dans tout ce que vous dites et tout ce que vous faites. Pour pouvoir invoquer un outrage à la Chambre, il faut que l'affaire soit liée aux travaux parlementaires.

C'est précisément ce dont vous êtes saisis actuellement: on allègue que les députés ont été empêchés de se rendre sur la Colline parlementaire, un jour où la Chambre siégeait. Les conditions sont réunies.

Maintenant, les avis de motion et les documents font-ils partie des travaux, me demandez-vous. De quoi s'agit-il? S'agit-il des faits précis, de l'allégation des faits?

Le président: Marlene, nous avons discuté de cela, du lien, en réponse à une question de Joe. Nous en avons parlé longuement.

Mme Marlene Catterall: D'accord, je me reporterai au compte rendu.

Le président: En effet, vous trouverez cela dans le compte rendu.

Mme Marlene Catterall: Merci.

Le président: Monsieur Maingot, il faut dire tout d'abord que nous traitons ici de deux grands droits ou principes de notre régime. D'une part il y a le privilège parlementaire et de l'autre le droit de manifester, de faire grève, de former des piquets de grève, etc. Ce que nous faisons est donc très important.

Je voudrais revenir sur quelques points concernant ce que vous avez dit à Gurmant. Disons que je sors de chez moi le matin à Peterborough et que quelqu'un s'approche de moi et me dit: «Peter, je vais vous empêcher de vous rendre à Ottawa pour voter aujourd'hui sur ce projet de loi» et qu'effectivement il m'en empêche. C'est un cas. Par ailleurs, disons que quelqu'un me dit au moment où je sors de chez moi: «Peter, je vais vous empêcher d'aller plus loin».

• 1640

Est-ce que j'ai bien compris que dans le premier cas cette personne m'empêche d'aller participer aux travaux...? Cette personne m'empêche délibérément de participer aux travaux du Parlement. Serait-ce le cas à Peterborough?

M. Joseph Maingot: Vous auriez sans doute une bonne cause dans ce cas-là car vous êtes député et vous allez participer à un vote, aux travaux parlementaires. Il y a donc le lien avec les travaux parlementaires et la personne vous barre la route pour cette raison précisément, et non pas pour une raison personnelle. D'après ce que je constate, nous sommes en présence des conditions qui constituent un outrage.

Le président: C'est intéressant. Merci.

J'ai trouvé les questions de Joe fort intéressantes. Dans votre livre, on trouve une définition de l'enceinte du Parlement et des tâches d'un député. Quand on se reporte au XVIIIe siècle ou plus tôt, on constate que les délibérations avaient lieu à l'époque dans une grande salle, que les députés s'y retrouvaient—un concierge ouvrait la porte—pour délibérer avant de rentrer chez eux. Ainsi, les travaux se déroulaient dans cette salle, et sans doute dans quelques salles adjacentes, où se réunissaient des comités comme le nôtre. Il s'agissait d'une salle, de l'espace avoisinant la Chambre.

Toutefois, selon moi, de nos jours—et nos locaux en sont un bon exemple—les locaux parlementaires ne sont plus les mêmes. Les Parlements ne cessent de s'étaler. Vous avez parlé de la rue Sparks. Je suppose que les compétences en matière d'ordre sont différentes du côté où notre immeuble se trouve sur la rue Sparks et de l'autre côté, une fois que l'on est sorti de l'immeuble. Je comprends bien que vous nous avez dit que quand nous sommes dans un immeuble parlementaire, nous sommes au Parlement.

C'est très compliqué. La situation de nos jours est plus compliquée qu'autrefois. Il semble que la définition de «locaux parlementaires» peut avoir changé. Voilà une chose.

Par ailleurs, sur le plan des travaux, au XVIIIe siècle, les députés se bornaient à se rendre au Parlement et à parler. Mais ce qu'a demandé Joe est intéressant, en ce sens que nous ne pouvons peut-être pas parler de nos jours à moins que quelqu'un puisse imprimer notre discours mis sur ordinateur.

Je vais vous donner un exemple—et, soit dit en passant, je comprends bien votre argument concernant les bénévoles et le personnel. Disons que j'arrive à l'immeuble parlementaire où se trouve mon bureau. Quelqu'un m'arrête mais je ne suis pas seul. On m'arrête, sachant que je suis député. Je proteste: «Je suis député, vous devez me laisser passer». On me répond: «Oui, vous pouvez certainement passer». Je dis: «Cette personne qui m'accompagne fait partie de mon personnel». Autrement dit, je déclare que cette personne fait partie de mon personnel et qu'elle est la seule au monde qui puisse tirer mon discours de l'ordinateur. Qu'arrive-t-il si l'on empêche cette personne de passer?

M. Joseph Maingot: C'est un élément nouveau. Je ne sais pas si cela a été invoqué ailleurs. Cela ne l'a pas été ici et c'est vous qui le faites. En fait, si l'on se pose la question, c'est à cause de ces questions de privilège dont nous débattons actuellement.

Il vous faut déterminer si le travail d'un membre du personnel d'un député à la Chambre des communes est nécessaire pour que la Chambre puisse s'acquitter de ses fonctions. C'est la règle de base. Voilà en quoi consiste le privilège: tout ce qui est nécessaire pour vous acquitter de vos fonctions. Voilà ce qu'il vous faut décider. Le rôle du député a changé de façon spectaculaire. Quand je suis arrivé ici, il n'y avait pas d'autres édifices que ceux où nous nous trouvons.

Le président: Voici essentiellement ce que je veux savoir: si quelqu'un m'agressait à Peterborough—si je ne savais pas qui il était et s'il m'agressait tout simplement...

M. John Harvard: Vous parlez de voies de fait?

Le président: Tout à fait, quelles que soient les circonstances. Cette personne serait traduite en justice, par moi ou par la police. La police traduirait cette personne en justice.

Dans ce cas—et vous en avez parlé dans votre exposé tout à l'heure—et bien sûr nous n'avons pas encore entendu les témoins, même si l'on n'a pas donné le nom des personnes en question, ni leur signalement. En fait, il s'agit d'une organisation, l'AFPC. En fait, les premiers témoins de cette partie-là que nous allons entendre sont des représentants de l'AFPC. L'Alliance peut envoyer qui bon lui semblera pour la représenter. Qu'en dites-vous?

• 1645

S'agit-il d'un outrage de la part de l'organisation ou des personnes qui—comme on l'allègue—ont barré la route à nos députés?

M. Joseph Maingot: Je suppose qu'il vous faut déterminer si ceux qui forment le piquet de grève le font à titre personnel ou en tant qu'adhérents à un syndicat. J'essaie de songer à ce que les tribunaux font quand ils rendent une décision ou imposent une injonction. D'habitude, l'injonction est imposée au syndicat et à ses adhérents. Je suppose, de façon similaire, que l'outrage dans ce cas-ci proviendrait des actes de ceux qui ont participé à l'incident, si l'on pouvait établir qu'ils adhèrent à ce syndicat en particulier. Maintenant, ce qu'il vous faut déterminer, c'est si vous pouvez tenir pour responsables les dirigeants du syndicat ou non.

Le président: C'est précisément ce que nous faisons. Nous avons demandé que des représentants du syndicat viennent témoigner.

Que faire s'ils disent: «Premièrement, nous ne savons pas qui est impliqué et deuxièmement, nous ne leur avons certainement pas dit de barrer la route aux députés»? Les choses s'arrêtent-elles là si nous ne pouvons rien prouver?

M. Joseph Maingot: À ce moment-là, les deux parties vont convoquer des témoins et il vous faudra déterminer ce qui s'est effectivement passé. Si vous appelez à témoigner le dirigeant du syndicat et qu'il vous dise certaines choses, vous pouvez les accepter ou pas.

Le président: D'accord.

Gurmant Grewal.

M. Gurmant Grewal: Merci, monsieur le président.

Dans la même veine d'une question que vous avez posée, monsieur le président, on établit une différence entre une manifestation et un piquet de grève. Si le piquet est légal, le droit du travail n'exige-t-il pas que les gens qui ne sont pas impliqués dans un différend de travail puissent se rendre à leur travail?

M. Joseph Maingot: C'est une question de droit du travail. Je ne prétends pas en connaître plus que quiconque sur le sujet.

M. Gurmant Grewal: Mon bon sens me dit que si quelqu'un n'est pas impliqué dans un différend de travail et que tout se déroule légalement... Les grévistes et les syndicats ont le droit de manifester et de former un piquet de grève, mais ce faisant, leur but est simplement de protéger les droits des employés qui adhèrent au syndicat. Tous les autres qui n'ont rien à voir avec ce différend légal devraient pouvoir... Le bon sens me dit qu'ils n'ont rien à voir avec le conflit. Je ne sais pas jusqu'à quel point je me trompe ou pas.

M. Joseph Maingot: Un piquet de grève vise à renseigner les gens. Il n'est pas censé empêcher qui que ce soit de passer.

M. Gurmant Grewal: Parfaitement. Un piquet de grève d'information et un piquet secondaire sont deux choses différentes et suivant qui vous êtes les conséquences sont différentes.

M. Joseph Maingot: Je ne suis pas sûr de suivre votre raisonnement, monsieur.

M. Gurmant Grewal: Voulez-vous que je vous donne des explications?

M. Joseph Maingot: Dans le monde civilisé, de nos jours, les piquets de grève courants. Ils servent à renseigner les gens. On conteste sans cesse afin de savoir s'ils servent à renseigner ou à barrer la route. Voilà pourquoi il y a des instances devant les tribunaux pour déterminer si une injonction est autorisée ou non, suivant qu'il s'agit d'un piquet de grève primaire ou secondaire.

M. Gurmant Grewal: À ce propos, la Chambre peut-elle obtenir une injonction pour maintenir les piquets de grève à une certaine distance de telle sorte que les députés et leur personnel puissent entrer dans l'immeuble? Peut-on fixer la distance? Peut-on obtenir une injonction perpétuelle—une injonction permanente?

M. Joseph Maingot: Il s'agit de savoir si l'on peut intenter des poursuites contre la Chambre. La Chambre peut intenter des poursuites dans le cas des contrats. Autrement, la Chambre des communes n'est qu'une entité qui fait partie du Parlement. Par le passé, il est arrivé que la Chambre soit poursuivie par ses hauts fonctionnaires. Il y a toutes sortes de litiges mettant en cause des hauts fonctionnaires.

• 1650

Il me faudra me renseigner sur ce qui a été écrit à ce propos. Je ne me suis pas attardé à cela car je n'y avais pas pensé avant de venir.

M. Gurmant Grewal: Pouvez-vous le faire et nous envoyer le résultat de vos recherches? Je voudrais savoir si la Chambre des communes a le pouvoir d'obtenir ce genre d'injonction. Je me demande si ce ne serait pas là la solution à tous problèmes éventuels. Cela pourrait empêcher que des difficultés surgissent.

M. Joseph Maingot: Je me demande si M. Robertson n'est pas plus à même de répondre à votre question dans ce cas-ci.

Le président: Jamie, voulez-vous dire quelque chose?

M. James R. Robertson (attaché de recherche du comité): Nous allons préparer un document là-dessus en temps utile.

M. Gurmant Grewal: D'accord, merci.

Le président: Marlene Catterall, très brièvement.

Mme Marlene Catterall: Jusqu'à présent, il a été question des députés et de leur personnel. Je ne pense pas que nous ayons fait la différence entre le personnel des députés et celui de la Chambre des communes, indispensable pour le fonctionnement de cette dernière. Y a-t-il une différence entre l'obstruction exercée à l'endroit des employés de ces deux groupes?

Le président: Marlene, nous avons fait cette distinction.

Mme Marlene Catterall: D'accord.

Le président: À moins que je me trompe—et vous pouvez faire un signe de tête—M. Maingot a dit qu'il n'y avait aucune différence entre le personnel indispensable au fonctionnement de la Chambre des communes et du Parlement.

M. Joseph Maingot: C'est le point de vue usuel adopté. Les hauts fonctionnaires sont protégés jusqu'à un certain point. Par exemple, dans la plupart des cas, les lois provinciales disposent que ce personnel est exempté du devoir judiciaire. Il arrive parfois qu'un membre du personnel de la Chambre soit appelé à siéger à un jury, et suivant les fonctions de cette personne, on signale au tribunal qu'elle est indispensable pour que la Chambre s'acquitte de ses fonctions.

Mme Marlene Catterall: Merci.

Le président: Monsieur Maingot, je vous remercie encore une fois de votre patience et de nous avoir fait part de votre savoir. Vous êtes très aimable. Vous pouvez constater qu'on s'intéresse vivement à ce que vous avez à dire. Merci beaucoup.

Chers collègues, nous allons nous réunir de nouveau demain—le 11 mars à 11 heures, l'heure habituelle. À l'ordre du jour, nous avons le budget principal pour 1999-2000. Nos témoins seront le Président de la Chambre, le greffier, et le major-général Cloutier.

Soit dit en passant, sur la question dont nous parlions aujourd'hui, nous nous rencontrerons mardi, et nos témoins seront nos collègues, les députés. Mercredi, nos entendrons les représentants de l'AFPC.

Merci beaucoup. La séance est levée.