Passer au contenu
Début du contenu

NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain

STANDING COMMITTEE ON NATIONAL DEFENCE AND VETERANS AFFAIRS

COMITÉ PERMANENT DE LA DÉFENSE NATIONALE ET DES ANCIENS COMBATTANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le jeudi 18 mai 2000

• 0909

[Traduction]

Le vice-président (M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.

Nous recevons aujourd'hui des représentants des Forces canadiennes, le lieutenant-colonel Roch Lacroix, chef de la délégation. Il est le seul à porter un insigne d'identification. Lieutenant-colonel, pouvez-vous présenter votre délégation au comité pour que nous puissions commencer?

Lieutenant-colonel Roch Lacroix (officier responsable, opérations des Balkans et de l'OTAN, ministère de la Défense nationale): Certainement, monsieur.

Tout d'abord, je suis le lieutenant-colonel Roch Lacroix, comme l'a indiqué le président du comité. J'occupe le poste de J3 International 1 et je peux comprendre que cela ne veut absolument rien dire pour bien des gens. Je suis en fait responsable de la contribution des FC aux opérations de l'OTAN. Plus précisément, je suis l'officier responsable pour toute la région des Balkans, si bien que je m'occupe d'Aviano, du Kosovo et de la Bosnie.

• 0910

Pour ce qui est des opérations, nous faisons une analyse de mission; nous déterminons les options qui sont disponibles en matière de contributions des forces aux diverses opérations qui se déroulent; puis nous nous assurons de la formation et de l'équipement des troupes et ensuite, nous lançons l'opération.

Une fois l'opération lancée, je dispose de huit officiers d'état-major qui sont responsables de la surveillance des opérations et nous nous occupons de toute lacune, de toute demande de changement au théâtre qui s'impose. Nous réglons les questions de personnel, comme le rapatriement précoce des militaires au Canada, les changements dans la relation commandement et contrôle avec leur quartier général. Nous allons continuer dans ce sens jusqu'au moment de la fermeture de la mission—c'est-à-dire le moment où les troupes retourneront au Canada—ou en fonction du roulement qui se produit tous les six mois.

Je suis accompagné aujourd'hui par le colonel Yvan Houle qui sera votre officier accompagnateur lorsque vous partirez au début de la semaine prochaine. Il sera avec vous jusqu'au matin du 23, au moment de votre départ pour Zurich et ensuite pour Londres. Je suis également accompagné par le capitaine Dan Bell, l'un de mes officiers responsables qui est avant tout chargé du portefeuille du Kosovo. Si je me trouve dans une situation où il m'est impossible de répondre à vos questions, j'espère que Dan viendra à mon secours.

[Français]

Le but de la présentation d'aujourd'hui est de vous donner un compte rendu de la situation et de la disposition des troupes à Aviano et au Kosovo. Je suis en mesure de vous expliquer un peu ce qui se passe en Bosnie si cela vous intéresse.

Naturellement, vous comprenez très bien que la situation dans les Balkans est assez stable. En général, la situation est stable et sécuritaire, sauf pour des incidents isolés qui se produisent au Kosovo ou en Bosnie de temps à autre.

Je ferai ma présentation de la façon suivante: je ferai un bref historique pour vous ramener du passé vers le présent; je vous donnerai une description de ce qui se passe à Aviano sous le nom d'Operation Echo et je vous ferai un compte rendu de la situation au Kosovo, sous le nom d'Operation Kinetic.

L'historique.

Vous savez très bien qu'en 1998, la communauté internationale a appris qu'il y avait des allégations selon lesquelles des atrocités se produisaient au Kosovo. On a confirmé ces allégations et la communauté internationale a agi.

En février 1999, il y a eu l'entente à Rambouillet, en France, mais la République de Yougoslavie, à ce moment-là, n'a jamais accepté les termes de l'Accord de Rambouillet. Conséquemment, le 24 mars, afin de résoudre une crise humanitaire au Kosovo, les autorités internationales ont décidé d'entreprendre une intervention militaire. Des négociations ont eu lieu et le 9 juin, à la suite d'une entente sur les techniques militaires entre la République de Yougoslavie et les forces de l'OTAN, la compagne s'est terminée.

[Traduction]

À l'heure actuelle, la KFOR à Aviano et Aviano où l'on surveille la situation générale... La KFOR est en train de désarmer et de démilitariser toutes les parties du Kosovo. Les choses progressent bien comme je l'ai indiqué plus tôt. La situation est raisonnablement stable et sûre. Il y a encore quelques incidents en matière d'ordre public qu'il faut régler et qui ne pourront l'être que lorsque la police militaire ou la police civile arrivera sur le terrain et qu'un système judiciaire sera en place.

• 0915

Je n'en dirais pas plus pour le contexte.

À Aviano, vous verrez beaucoup de CF-18 qui font énormément de bruit. Lorsque vous arriverez à Aviano, c'est probablement le lieutenant-colonel Whiteley qui vous accueillera; il est commandant de détachement à la base d'Aviano et il est responsable des CF-18, des pilotes et des troupes qui assurent l'appui des avions. À votre arrivée, on vous donnera des bouche-oreilles que vous pourrez porter régulièrement lors de votre séjour.

Pour vous situer un petit peu, nous entourons en fait la mer Adriatique; il y a l'Italie, Aviano se trouve à environ deux heures et demie de route au nord-est de la ville de Venise. Les opérations aériennes sont lancées à partir d'Aviano dans les régions de la Bosnie-Herzégovine. Au cours de la campagne aérienne, c'était dans la République fédérale de Yougoslavie. Vous allez au Kosovo et vous allez atterrir dans une ville de Macédoine appelée Skopje.

Au moment le plus intense de la campagne aérienne, nous avions près de 274 militaires à Aviano et 18 CF-18. Pendant la campagne aérienne, nos éléments aériens ont effectué plus de 678 sorties, soit plus que 2 500 heures de vol.

La diapositive suivante indique les sorties, les opérations air-sol et les divers types de patrouilles aériennes qui ont été faites. Cela se passait au moment le plus intense de la guerre des 78 jours.

Pour ce qui est de la situation actuelle, l'élément air appuie les troupes au sol en Bosnie et au Kosovo—je devrais citer les abréviations: la force opérationnelle Bosnie-Herzégovine et la force opérationnelle KFOR. Elles effectuent quatre sorties par jour, ce qui veut dire que chaque jour, quatre avions décollent pour effectuer une mission. Leur rôle essentiel est certainement un rôle de dissuasion—des avions survolent le terrain—et ces forces appuient les troupes au sol. C'est ce que j'appelle de la dissuasion.

Nous avons des missions d'entraînement, des vols d'entraînement pour nos pilotes. Il peut s'agir de simulations de combat aérien, de situations air-sol où les communications sont établies entre les contrôleurs aériens avancés—terre—et les pilotes, sans compter les vols d'entraînement général.

Pour ce qui est de la situation de guerre, la situation réelle, nos avions sont prêts à mener des opérations d'appui aérien rapproché à court préavis, ainsi que des opérations air-air, en cas de besoin, si les Serbes décident de survoler la zone de sécurité et de pénétrer dans des zones qui leur sont interdites.

[Français]

Je vais vous parler un peu de l'organisation et de la disposition des troupes au Kosovo. Ensuite, je vous ferai un bref exposé sur le nouvel équipement.

L'organisation.

En tant que militaire, je serais très négligent si je ne vous montrais pas au moins un organigramme démontrant la disposition des troupes. Le commandant du task force au Kosovo est le colonel Fenton. Vous le rencontrerez à Skopje, où nous avons un commandement national. Nous avons un groupe tactique 1 RCR.

[Traduction]

Le 1er Royal Canadian Regiment est le principal groupe tactique d'infanterie appuyé par un escadron d'ingénieurs- mécaniciens.

J'ai parlé du RCR. Il est fort peu probable que vous verrez des éléments du RCR sur place, puisque ce régiment est en train de se redéployer au Canada, dans le cadre du plan général de retrait du Kosovo. Le dernier vol arrivera au Canada le 25.

Vous allez voir les RCD et vous passerez quelque temps avec le commandant RCD. Le détachement d'hélicoptères embarqués sera également sur place. Nous avions huit hélicoptères sur place et il n'y en a maintenant plus que trois. Nous espérons que ces trois Griffons seront utilisables et que vous pourrez ainsi survoler la région du Kosovo.

• 0920

J'aimerais simplement indiquer que le détachement d'hélicoptères embarqués est en train de se redéployer au Canada et qu'il cessera ses opérations le 21 mai. L'escadron de reconnaissance RCD sera le dernier élément à quitter le Kosovo et cessera ses opérations le 1er juin si bien que tous les Canadiens seront de retour au Canada d'ici la fin juin.

Il faut maintenant parler de l'élément de soutien national qui essentiellement apporte un appui logistique aux forces au Kosovo. Le groupement tactique du Canada relève du contrôle opérationnel du Royaume-Uni, il s'agit d'un centre multinational de brigade. Les Canadiens se trouvent surtout dans la ville de Pristina. Le centre de la division multinationale est entouré par les Américains, les Français, les Allemands et les Hollandais.

Pour ce qui est de la contribution du Canada et de la disposition des troupes, le groupement tactique 1PPCLI avait des sous-éléments à Glogovac, Donja Koretica et Magura. L'élément de soutien national, comme je l'ai indiqué plus tôt, se trouve à Skopje, tandis que l'unité d'aviation se trouve à DK.

[Français]

La mission et les tâches sont énoncées sur la diapositive qui est devant vous. En résumé, il s'agit essentiellement de la présence sur le terrain d'un élément de sécurité pour créer une atmosphère sécuritaire dans les environs.

[Traduction]

Nos troupes mènent des opérations à l'extérieur de leur zone de responsabilité, dans le cadre d'un processus qui permet l'information, et ce sont nous qui décidons de ces opérations. Il s'agit essentiellement d'escorter des convois dans les régions, pour appuyer les forces alliées. Nous jouons essentiellement un rôle en matière de surveillance, de vérification, de maintien d'un genre d'ordre public dans des régions données, ainsi que de l'aide humanitaire dans les limites de nos capacités.

Pour ce qui est de l'équipement, j'espère que vous aurez la possibilité de voir le Coyote dont vous avez peut-être entendu parler. C'est un véhicule de pointe. Il est doté d'un incroyable système de surveillance que les commandants alliés considèrent extrêmement précieux pour ce qui est de la capacité de la collecte de renseignements. Il est également doté d'une capacité d'autodéfense assurée par un chain gun de 25 millimètres et par quelques autres systèmes de tir pour en assurer la survie.

Vous monterez à bord des hélicoptères Griffon. Le Griffon, ne peut avoir que quatre passagers à bord, compte tenu de tout le matériel transporté, à moins qu'il ne soit reconfiguré. J'imagine que tous les membres de la délégation pourront monter à bord d'un Griffon.

La diapositive suivante montre la situation que vous allez observer au Kosovo. La photo n'est pas mauvaise; il y a en effet toujours du brouillard au Kosovo à cause de la houille que l'on brûle pour les installations de chauffage. La situation n'est pas pire que celle d'une ville comme Hamilton, par exemple.

Les mesures sanitaires ne sont pas nécessairement idéales. Le bétail et les animaux morts sont normalement abandonnés ou jetés dans les rivières, les lacs, etc.

• 0925

Pour terminer, pour ce qui est du plan de retrait, le retrait généralisé du Kosovo

[Français]

est le résultat du plan de rationalisation des Balkans. Dans le plan de rationalisation des Balkans, on voit que le Canada a concentré ses efforts en Bosnie avec un déploiement maximum de 1 800 militaires de tous les grades. Au Kosovo, les opérations cesseront à la fin du mois de juin, ce qui va nous laisser un petit groupe d'officiers de l'état-major aux quartiers généraux des forces opérationnelles au Kosovo. Six ou sept officiers vont demeurer au Kosovo.

[Traduction]

Je pense que vous pouvez comprendre qu'au plan politique, il a été très difficile pour le Canada de se retirer du Kosovo. Aviano est devenu une pièce maîtresse. Pour Aviano, une demande de prolongation du contrat a été présentée au ministre. Nous pensons avoir une prolongation d'une année à Aviano. Par conséquent, notre contribution au Kosovo ne se résumera pas uniquement aux sept officiers d'état major dont j'ai parlé au départ, mais comprendra l'élément air à Aviano, qui appuiera les opérations au Kosovo.

Entre-temps, le reste des troupes va revenir au Canada et une partie du matériel va aller en Bosnie où nous aurons une force de 1 800 personnes et non de 1 300 personnes comme c'est le cas actuellement. Nous allons prendre le commandement, nous serons le pays responsable à la Division multinationale (sud-ouest) en Bosnie. Le commandement sera assuré par le major-général Rick Hillier à partir du 1er octobre 2000. Il sera affecté à cette mission pour toute l'année prochaine, d'octobre 2000 à septembre 2001. C'est une bonne chose pour nous tous et nous espérons que cela va se produire très rapidement.

Cela va naturellement augmenter la contribution générale du Canada en Bosnie. En plus de notre quartier général, la participation sera considérablement accrue, puisque nous passerons d'environ 22 officiers d'état-major à près de 78.

Monsieur, c'est essentiellement notre

[Français]

tour d'horizon des deux opérations.

[Traduction]

Je suis prêt à répondre aux questions.

Le vice-président (M. David Pratt): Merci beaucoup, lieutenant-colonel Lacroix.

J'ai d'abord M. Clouthier et, ensuite, M. Wood.

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Lieutenant-colonel, j'ai peut-être manqué quelque chose, vu que l'on m'a engagé à une autre séance de comité. Peut-être avez- vous abordé cette question. J'ai deux points à préciser.

Tout d'abord, d'après vous, quelle est la plus grande difficulté que connaissent nos troupes au Kosovo?

Lcol Roch Lacroix: La plus grande difficulté?

M. Hec Clouthier: Oui.

Lcol Roch Lacroix: Que voulez-vous dire?

M. Hec Clouthier: De façon plus générale, quelle est la plus grande difficulté? Est-ce le rapatriement ou le fait d'avoir affaire aux Kosovars et aux Serbes?

Lcol Roch Lacroix: Monsieur, la situation générale est raisonnablement stable. Le plus grand problème au Kosovo à l'heure actuelle n'a pas été mis en lumière. Il n'y a pas de gros problèmes, puisque nous nous retirons.

Les questions de qualité de vie ont été réglées pratiquement à l'entière satisfaction de tous ceux qui se trouvent là-bas. La sécurité générale dans la région est bonne. Les militaires sont heureux car ils sont occupés. Nous sommes déployés dans divers autres secteurs opérationnels et sommes considérés comme des participants à part entière.

J'imagine que s'il y a des regrets, c'est sans doute dans les cas où certains militaires ont commencé des projets humanitaires et où ils risquent de ne pas pouvoir les terminer, même si à mon avis, ils font tout pour essayer d'y parvenir avant leur départ. Ils aimeraient sans doute bien finir de réparer une toiture ici ou autre chose là-bas. Ces projets vont être remis entre les mains de l'ACDI ou d'autres organismes du même genre. Par ailleurs, la population locale va également s'en occuper.

M. Hec Clouthier: Cela m'amène à la question suivante. Pour ce qui est de la population locale, quelle est la situation actuelle en ce qui concerne le système judiciaire, le système scolaire, l'aide humanitaire...? Vous avez parlé des soins de santé et des services bancaires...

Lcol Roch Lacroix: La force de police, le système judiciaire et le système scolaire ne sont toujours pas mis sur pied. Ils ne sont pas encore prêts. Au bout du compte éventuellement, peu importe le temps que cela va prendre, nous aurons un système judiciaire, ainsi qu'une force de police. C'est essentiel pour assurer le maintien de l'ordre public.

Je ne pense pas que l'on puisse s'attendre à ce que les militaires jouent le rôle de policiers sur le terrain pour une période indéfinie. La communauté internationale a une responsabilité—et je le dis de façon très générale—une force de police civile doit être prévue, formée, déployée et être jugée efficace.

• 0930

M. Hec Clouthier: C'est ma dernière question. Les troupes russes sont-elles toujours sur les lieux? Vous vous rappelez, initialement, chaque fois que l'on entrait dans une région, les Russes arrivaient et il semblait y avoir une certaine consternation entre eux et les forces de l'OTAN. Vous souriez, me semble-t-il. Les Russes sont-ils toujours là? Sont-ils toujours sur les lieux?

Lcol Roch Lacroix: Ils sont toujours sur les lieux dans des endroits précis, monsieur, alors qu'au départ, c'était à qui allait arriver le premier, dans les aéroports, etc. Je crois que c'est exactement ce qui se passait, tout le monde voulait se précipiter pour aider, un point c'est tout. Nous n'avons absolument aucun problème avec nos homologues russes.

M. Hec Clouthier: Ont-ils toujours le contrôle de certains des principaux sites, comme les aéroports?

Lcol Roch Lacroix: Non, monsieur. L'aéroport relève du commandant de la force opérationnelle Kosovo.

M. Hec Clouthier: C'est bon, j'ai terminé.

Le vice-président (M. David Pratt): Monsieur Wood.

M. Bob Wood (Nissiping, Lib.): De toute évidence, nous partons du Kosovo et vous avez abordé un peu la question de la Bosnie. Pourriez-vous préciser le rôle que nous allons jouer en Bosnie où vous dites que nous sommes le pays responsable? Quelle est la situation en Bosnie aujourd'hui? Dans quelle situation allons-nous nous retrouver? Vous allez amener 1 800 personnes en Bosnie, n'est- ce pas? Quelle est la situation qui les attend et quels sont les pays d'appui dont vous allez bénéficier?

Lcol Roch Lacroix: Pour ce qui est de la situation en Bosnie, comme je l'ai dit plus tôt, la situation générale dans les Balkans est assez stable et sûre, probablement la plus sûre que l'on n'ait jamais connu ces dix dernières années. La situation en Bosnie est relativement calme par rapport à celle du Kosovo, si l'on prend en compte les incidents isolés. Pour ce qui est de l'augmentation de notre contribution en Bosnie, nous allons essentiellement passer d'une force de 1 300 personnes actuellement déployée en Bosnie à une force maximale de 1 800 personnes. Nous allons probablement nous en tenir à 1 650 personnes. Nos troupes vont contrôler une grande partie de la zone de responsabilité. Notre zone de responsabilité est assez longue et large. Nous allons jouer un rôle de surveillance quant au retrait des forces serbes qui actuellement quittent la zone de responsabilité à destination d'une autre ville; nous voulons que les Serbes se retirent complètement de la région et pour l'instant, ils se rendent dans une ville, de leur plein gré. C'est probablement la situation la plus précaire ou la plus difficile que nous ayons actuellement en Bosnie.

Nous ne sommes pas en situation de guerre. Nous sommes véritablement dans une zone grise entre le maintien d'une présence militaire sur place à des fins de dissuasion et l'aide humanitaire que tout le monde attend, sans compter l'organisation de la police, des systèmes judiciaires, scolaires, de soins de santé, etc. Nous sommes en plein milieu de la zone grise, ce qui rend les choses un peu ambiguës—c'est le moins qu'on puisse dire—pour nos troupes sur le terrain. Nous essayons de faire en sorte qu'elles mettent l'accent sur le côté opérationnel et sur les questions de sécurité.

M. Bob Wood: En assumant le rôle d'État responsable, sur quels autres États le Canada peut-il compter là-bas? Y en aura-t-il d'autres ou est-ce...

Lcol Roch Lacroix: Dans la Division multinationale (sud- ouest), monsieur, c'est la 1re Division. C'est une zone divisionnaire. Elle s'étend d'un point tout juste au nord de Sarajevo jusqu'à la frontière croate au Nord et au-delà de la frontière croate, à l'Est. Nous sommes flanqués par trois autres divisions stationnées là-bas. Il y a la DMN (nord) représentée par les Américains. Il y a ensuite la DMN (est) composée des Hollandais ou des Français, je ne me souviens plus—je reviens tout juste de là-bas, et déjà je ne me souviens plus—, et les Tchèques dans le secteur nord-est. Un protocole d'entente a été rédigé, signé et accepté par toutes les parties visées. Il précise comment vont se dérouler les opérations de même que les contributions financières et les envois de troupes sur le théâtre pour toute la zone.

M. Bob Wood: Quand il y a une modification, est-ce que cela change aussi l'appui aérien? Vous avez mentionné que vous espériez que le protocole d'entente relatif à Aviano soit reconduit pour une autre année. Les troupes au sol s'étant retirées—peut-être le Colonel Houle peut-il répondre à cette question—, sommes-nous toujours liés par un accord visant à assurer l'appui aérien pour le Kosovo également? De toute évidence, nous le faisons en Bosnie, je suppose.

• 0935

Lcol Roch Lacroix: Oui, monsieur. Nous continuons de maintenir notre engagement à l'égard de l'OTAN et de la force opérationnelle. Nos troupes à Aviano continueront de faire leur contribution. Elles sont là pour appuyer les efforts de l'OTAN en Bosnie et au Kosovo.

M. Bob Wood: J'ai une dernière question. Vous avez mentionné la force policière, et mon collègue, M. Cloutier, en a lui aussi parlé. On est en train de la mettre sur pied, n'est-ce pas? La Sûreté de l'Ontario et la GRC ont envoyé des policiers là-bas. Ils sont là pour donner de la formation. À votre avis, s'il vous est possible d'être candide avec nous, comment cela fonctionnerait-il? La formation d'une force policière capable de faire face à diverses situations va-t-elle poser problème?

Lcol Roch Lacroix: Je ne crois pas que former et mettre en place une force policière locale posera problème. Le facteur déterminant sera le temps. Combien de temps faudra-t-il? Si j'en crois mon expérience en Haïti et au Timor-Oriental, où la police était inexistante quand nous y sommes allés, où il n'y avait aucune force de l'ordre ou d'exécution de la loi et qui est toujours en gestation, il faudra du temps pour mettre en place les piliers dont a besoin une société moderne normale.

Cela étant dit, si vous examinez la situation au Kosovo, elle est probablement comme celle des autres pays que je connais. La magistrature, la force policière locale, toutes ces personnes importantes ont fui le pays. Tôt ou tard, elles reviennent. En Bosnie, ils attendent le retour massif d'autres réfugiés. Le Kosovo sera aux prises avec la même situation. Remarquez que, dans son cas, la situation des réfugiés est légèrement différente, mais on n'a pas ces compétences sur le terrain.

Nous fournissons donc les compétences requises, mais il faudra du temps. La question que je me pose toujours est combien de temps il faudra. Plus ce sera long, plus longue sera la présence des militaires sur ces différents théâtres d'opération.

M. Bob Wood: Y a-t-il beaucoup de corruption également?

Lcol Roch Lacroix: C'est toujours à craindre.

M. Bob Wood: Oui.

Combien de temps cela a-t-il pris en Haïti et dans certains autres pays où vous êtes allés? Faut-il six mois, un an?

Lcol Roch Lacroix: On est encore en train d'y mettre en place la magistrature et la police.

M. Bob Wood: Ce n'est pas encore fini?

Lcol Roch Lacroix: Haïti continue de s'y consacrer, monsieur. Sa force policière n'existe pas encore et elle n'existera pas pour un bout de temps encore. Vous avez fait allusion à la corruption. Cette corruption est bien ancrée. Il sera donc très difficile d'y mettre fin.

Le Timor-Oriental ne fait que commencer. Je viens de quitter ce pays où nous avons achevé notre partie de la mission. Un groupe de juges, 25 environ, était à Darwin, en Australie, pour de la formation. Ils sont revenus au Timor-Oriental, mais ils ne sont pas encore prêts à assumer leurs fonctions. Il faudra bien du temps avant de pouvoir mettre sur pied une force policière locale. La force civile des Nations Unies qui est là-bas ne chômera pas.

Au Timor-Oriental, on avait prévu une force policière de 1 200 agents environ et, actuellement, il y en a approximativement 300 en place. On manque un peu de ressources, de sorte qu'il faudra un peu plus de temps.

M. Bob Wood: Quels sont les effectifs au Kosovo? Qu'envisage- t-on?

Lcol Roch Lacroix: Je ne pourrais pas vous le dire, monsieur. Je l'ignore, mais je puis vous obtenir la réponse.

M. Bob Wood: Je suis simplement curieux quant à la façon dont cela fonctionnerait. Il serait à mon avis fort difficile de former ces gens comme policiers. Comment faites-vous la sélection? Qui choisissez-vous? Comment faites-vous pour trouver autant de personnes honnêtes?

Lcol Roch Lacroix: À Haïti, nous avions procédé à un premier tri qui nous avait permis de recruter X Haïtiens. Ils avaient ensuite été soumis à un processus de sélection qui consistait à leur faire subir de simples examens.

On a ensuite sélectionner les agents, qui ont été envoyés dans une école de recrutement, une sorte de mini-camp d'entraînement. L'entraînement n'y était pas aussi poussé que ce que nous avions nous-mêmes eu. Toutefois, c'était un genre de camp d'entraînement où on leur enseignait des compétences de base. Nous leur avons donné des cours d'éthique et de droit, des renseignements généraux, nous leur avons montré comment tirer, comment s'habiller, comment se présenter, comment se comporter en public, et ainsi de suite.

• 0940

Ensuite, nous les avons graduellement affectés à diverses collectivités en présence de la Police civile de la Force des Nations Unies pour les former sur le tas avant de leur remettre pleins pouvoirs. Il était prévu que la Police civile de la Force des Nations Unies se retirerait graduellement et, en fin de compte, quitterait le pays. Cela a permis aux militaires de partir à cette étape-là, mais au tout début, il y avait trois lignes de défense: la police locale, la Police civile de la Force des Nations Unies et les militaires. Il a parfois été très difficile de dire qui prenait les responsabilités dans certaines situations.

M. Bob Wood: Je vous remercie.

Le vice-président (M. David Pratt): Merci, monsieur Wood.

C'est maintenant au tour de M. Earle, suivi de M. Peric, puis de M. O'Reilly.

M. Gordon Earle (Halifax-Ouest, NPD): Merci, monsieur le président.

Étant donné la diligence avec laquelle le parti ministériel a posé des questions, je crois que le sujet que je souhaitais creuser a déjà été abordé, mais j'aimerais en savoir un peu plus.

Vous avez mentionné que le retrait des Canadiens laisserait manifestement un vide pour ce qui est des tâches que vous exécutez actuellement. Vous avez indiqué, je crois, que certains groupes humanitaires prendraient la relève, pour certaines tâches. Toutes les tâches que vous faites actuellement seront-elles prises en charge par d'autres? Entre temps, s'il y a une période de formation de la relève, est-il possible qu'il y ait certains glissements par suite de cette transition, ce qui créerait peut-être de l'instabilité?

Lcol Roch Lacroix: Je vais vous répondre selon deux approches. L'une consiste à dire que, lorsque les Canadiens se retireront, les Finlandais et les Norvégiens prendront la relève dans ces domaines précis. Donc, il ne devrait pas y avoir de vide.

Par ailleurs, d'un point de vue opérationnel et stratégique, le SACEUR vient d'achever une étude de ce qu'ont été les besoins de troupes au Kosovo. Il a déjà réussi à trouver des troupes pour remplacer les troupes britanniques et canadiennes qui se retirent du Kosovo. Deux bataillons d'infanterie ont été identifiés. On a aussi besoin trois autres bataillons d'infanterie qui agiraient comme détachements à réaction rapide, au besoin. D'un point de vue militaire, je ne crois pas qu'il y aura un vide sur le théâtre.

Du point de vue de l'assistance humanitaire, je ne crois pas que le potentiel d'instabilité ou d'insurrection soit grand. Il ne serait pas dans l'intérêt de quiconque de le faire. Bien sûr, il y aura toujours des incidents isolés, et c'est compréhensible. Le niveau de frustration de certaines personnes est plutôt élevé, et elles s'en prendront au premier groupe qu'elles voient, je suppose.

En termes d'assistance humanitaire, les autres organismes non gouvernementaux, dont l'ACDI, sont pleinement engagés et font de leur mieux pour régler toutes ces questions, allant de la construction d'un toit au-dessus d'une école à la réélectrification et à la reconstruction des centrales d'électricité et ainsi de suite. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut du temps.

M. Gordon Earle: Je vous remercie.

Le vice-président (M. David Pratt): Monsieur Peric.

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Merci, monsieur le président.

Lieutenant-colonel, l'an dernier, j'ai passé une semaine avec notre force policière à Sarajevo. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec certains hauts fonctionnaires là-bas et j'ai entendu de nombreuses plaintes. D'accord, plus de 40 pays participaient à la force policière là-bas et seulement 15 d'entre eux environ y avaient dépêché des membres de leur élite professionnelle. Il est difficile de croire tout ce que j'ai entendu.

Certains pays ont envoyé des policiers qui gardaient les villages, et ces agents se trouvent en Bosnie aujourd'hui. J'ai entendu des récits d'après lesquels certains policiers avaient des contacts politiques et qu'ils payaient sous la table pour que leur nom figure sur la liste. Ils étaient envoyés en Bosnie pour neuf mois et, durant ces neuf mois, ils touchaient le triple de ce qu'ils auraient pu économiser durant toute leur vie. Quand on entend des récits comme ceux-là...

La semaine dernière, Wolfgang Petritsch était ici, et je lui ai demandé quelle recommandation il ferait à New York. Il a répondu qu'il faudrait adopter des normes internationales.

• 0945

Selon vous, des installations comme celles que nous avons ici, soit le centre de formation en maintien de la paix Pearson, aideraient-elles la communauté internationale à former les policiers avant qu'ils soient envoyés dans des régions particulières?

Ensuite, tout de suite après le sommet de Sarajevo, il semble que le contrôle ait été effectué par la force policière locale et simplement supervisée par une force policière internationale. Il n'y a pas eu d'accidents, d'incidents ou de plaintes. Cela me laisse un peu perplexe. Comment peut-on s'attendre que quelqu'un de—je ne peux pas préciser le pays—va former la force policière locale quand celle-ci a une bonne supervision et ainsi de suite?

Lcol Roch Lacroix: Je vais être honnête avec vous. J'ai entendu les mêmes histoires. Parfois, j'ai probablement même été témoin de quelques incidents qui portent à s'interroger sur les qualités et l'ensemble de compétences de certaines personnes. Toutefois, tout organisme a son lot d'incompétents.

Chaque pays fournit ce qu'il peut. À nous de faire de notre mieux avec les ressources dont nous disposons.

Le centre de formation en maintien de la paix Pearson a un mandat précis, monsieur, et j'ignore s'il est en mesure de le faire. C'est peut-être une question qu'il faudrait aborder avec Alex Morrison, le directeur du centre. Il serait plus en mesure de vous répondre.

M. Janko Peric: Toutefois, il y a beaucoup de frustration. Quand on s'entretient en privé avec nos agents de police, on se rend compte qu'ils sont vraiment frustrés parce qu'ils ont une formation poussée, qu'ils ont beaucoup de compétences et qu'ils sont obligés de travailler avec quelqu'un qui ne sait pas conduire, qui n'a pas de permis. Maintenant que les forces se retirent...

Le vice-président (M. David Pratt): Monsieur Peric, nous pourrions peut-être essayer de nous concentrer sur l'aspect militaire de notre engagement au Kosovo et en Bosnie. Il conviendrait peut-être davantage de poser certaines de ces questions aux personnes que nous rencontrerons sur le terrain au Kosovo.

M. Janko Peric: Monsieur le président, le lieutenant-colonel a mentionné que nous envoyons en Bosnie des personnes qui arrivent du Kosovo, et il a mentionné particulièrement la force policière civile. J'ai donc des préoccupations.

Lcol Roch Lacroix: Ce serait bien d'avoir des normes internationales. Est-ce possible? Peut-être, si l'on en a la volonté. Si l'on y met de la bonne volonté, je crois que ce serait efficace.

M. Janko Peric: Et si le besoin est là, n'est-ce pas?

Lcol Roch Lacroix: Oui. Si vous voulez mon opinion personnelle, ce besoin existe.

M. Janko Peric: Je vous remercie beaucoup.

Le vice-président (M. David Pratt): Monsieur O'Reilly.

M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Merci beaucoup, monsieur le président.

Lieutenant-colonel Lacroix, je vous remercie énormément d'avoir accepté notre invitation. Je crois que la plupart de mes questions ont déjà trouvé réponse.

Il y a une question toutefois que je pose toujours. Comme notre comité travaille au rapport sur la qualité de vie, il tient toujours à s'organiser pour rencontrer les gens sur le terrain en l'absence des supérieurs. J'espère que nous en aurons l'occasion à Aviano et au Kosovo. J'espère donc qu'on fera passer le mot que nous sommes là pour rencontrer les gens.

Je sais que, quel que soit l'endroit où nous allons, que ce soit à Colorado Springs ou ailleurs, nous essayons de tenir une assemblée de cuisine où les gens peuvent vraiment nous rencontrer et nous parler face à face. J'espère donc que nous ne serons pas isolés durant ce voyage et qu'on ne nous empêchera pas de rencontrer les troupes. Cela arrive parfois sur les théâtres d'opérations où il pourrait y avoir du danger, mais nous n'avons pas peur. Nous aimerions...

Lcol Roch Lacroix: Je crois que vous n'aurez pas à vous en plaindre. À Aviano, je suis sûr que vous aurez l'occasion de rencontrer les troupes. À Skopje, une soirée a été réservée, je crois, pour que vous puissiez prendre part aux activités sociales de l'ECN et rencontrer le personnel de l'ESN. Vous aurez la possibilité de vous entretenir avec les personnes que vous souhaitez rencontrer et de leur parler en privé. Le colonel Fenton en est averti, tout comme le colonel Boyer, à Aviano.

• 0950

M. John O'Reilly: D'accord. Je vous remercie beaucoup.

Le vice-président (M. David Pratt): Les membres du comité ont- ils d'autres questions?

Bon, comme il n'y en a pas, lieutenant-colonel Lacroix, colonel Houle, capitaine, je vous remercie beaucoup de votre exposé d'aujourd'hui. Il a été très utile. Je suis sûr que les membres vont profiter de l'information que vous leur avez fournie lorsqu'ils partiront ce week-end. Je vous remercie à nouveau.

Lcol Roch Lacroix: Bon voyage, et j'espère que votre visite sera agréable.

Le vice-président (M. David Pratt): La séance est levée.